Passer au contenu
Début du contenu

FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 30 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Messieurs, je vous remercie de comparaître aujourd'hui devant notre comité pour faire des exposés et répondre aux questions de nos membres. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir nous voir. Je ne sais pas si vous avez déjà comparu devant ce comité mais le micro s'ouvre automatiquement? et nous avons un service d'interprétation simultanée. Je suis sûr qu'on vous a expliqué tout ça. Si vous avez des difficultés quelconques, n'hésitez pas à le dire, nous essaierons de les résoudre le mieux possible.
    Cela dit, je ne sais pas qui veut commencer. Monsieur Butler, voulez-vous commencer? Si vous êtes prêt, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, et merci de votre invitation à participer à votre étude de l'évolution des conditions océaniques ou d'autres facteurs au large de Terre-Neuve-et-Labrador qui ont eu une incidence sur la fluctuation des stocks de crevettes nordiques et d'autres espèces.
    Permettez-moi d'abord de dire quelques mots de l'association que je représente, après quoi j'aborderai le thème de la réunion. Si cela vous intéresse, je peux vous donner tout de suite la version raccourcie, qui se résume en quatre points.
     Le premier est qu'il y a des changements qui se produisent actuellement au large de nos côtes, et ils auront des conséquences. Le deuxième est qu'il y a déjà eu des changements dans le passé mais que nous restons bien incapables de prédire l'avenir. Le troisième est que nous avons besoin d'une solide structure industrielle pour pouvoir nous adapter aux changements. Le quatrième, et c'est peut-être une recommandation, c'est que nous avons besoin de renouveler nos efforts scientifiques pour essayer de comprendre exactement ce qui se passe, au mieux de nos capacités limitées.
    Permettez-moi de retourner une seconde à l’ASP. L'association est une société à but non lucratif, une association de l'industrie, qui a été fondée en 2004 pour défendre les intérêts de ses membres dans la province, de manière générale. En ce qui concerne la négociation collective des prix du poisson, nous négocions les prix avec FFAW-Unifor. Nous entretenons des relations avec les médias et le gouvernement, et nous dispensons des services comme à nos membres, comme sur le dossier MSC, sur lequel je reviendrai tout à l'heure.
    Comme toute association industrielle, nous représentons un large éventail d'entreprises, essentiellement familiales et toutes situées dans les régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador. Il n'y a pas d'usine de transformation du poisson à St. John’s. La gamme des entreprises va des très petites jusqu'à certaines des plus grandes sociétés de transformation du poisson de notre province, dont certaines sont également présentes dans d'autres provinces et ont des bureaux et font des ventes dans le monde entier. Nous avons aussi parmi nos membres une société sous propriété publique. Les autres sont essentiellement des entreprises sous propriété familiale, et nous avons aussi deux coopératives, ou associations appartenant à des pêcheurs.
     Nous produisons la majeure partie des produits de la mer de notre province, c'est-à-dire quelque 70 % ou 80 % du crabe des neiges, un peu plus de 90 % de la crevette nordique côtière — ce sont les deux espèces qui ont le plus de valeur pour nous — et des quantités variables d'une grande diversité de la quarantaine d'autres espèces commerciales dont nous disposons dans l'océan.
    Comme vous le savez, la grande majorité de nos produits de la mer est destinée à l'exportation. Ça m'amuse toujours d'entendre certaines personnes dire que nous devrions vendre plus chez nous car, même si nous réussissions à doubler notre consommation de produits de la mer et à ne consommer aucun produit importé, notamment du thon ou du saumon en boîte, ce qui représente environ le tiers de tous les produits de la mer consommés en Amérique du Nord, cela représenterait à peine 5 % de tout ce que nous produisons. Nous sommes un gros producteur de produits de la mer et nous sommes obligés d'exporter au moins 95 % de notre production.
     Nous aurions de toute façon au moins 95 % de notre production à vendre en dehors de notre province, sur certains des plus vastes marchés mondiaux: Union européenne, plus de 500 millions; États-Unis, plus de 300 millions; et Chine, plus d'un milliard d'habitants. C'est juste pour illustrer la situation. Nous ne pourrions pas consommer toute notre production issue de la mer même si notre seule protéine provenait de la mer.
    L'une des choses qu'on ne comprend pas toujours — et je conviens que ce secteur n'est pas fait pour les timorés, comme j'aime à le dire, mais nous n'en tirons aucune gloire —, c'est que mes membres emploient des milliers de personnes dans la province, encore une fois surtout dans les régions rurales. Nous gagnons des millions en salaires et nous achetons du poisson débarqué sur des centaines de quais, par des milliers de pêcheurs. Nous ne sommes donc pas simplement un intermédiaire regrettable entre le pêcheur et le marché, mais plutôt un lien vital, un rouage important. Chaque année, nous achetons pour près d'un demi-milliard de dollars de produits de la mer qui, quand ils sont passés dans nos usines de transformation, représentent une valeur totale et une contribution au PIB de la province de un milliard de dollars.
    Permettez-moi maintenant de retourner aux quatre sujets que j'ai mentionnés au début. Il se produit actuellement des changements au large de nos côtes, et ils auront des conséquences. Il y a déjà eu des changements dans le passé mais nous restons quand même très peu capables de prédire l'avenir. Nous n'aurions jamais pu prédire la croissance et l'abondance de nos stocks de crustacés. Nous avons besoin d'une structure industrielle souple et capable de s'adapter, ce qui était mon troisième point. Le quatrième est que nous avons besoin de renouveler nos efforts scientifiques pour essayer de comprendre précisément ce qui se passe, au mieux de nos capacités limitées.
     Je pense que le premier facteur est parfaitement accepté, mais peut-être pas bien compris. Il se produit des changements dans l'écosystème de nos eaux, ce qui produit un changement de régime d'une certaine nature et d'une certaine ampleur. Vous entendrez incontestablement des gens plus qualifiés que moi pour vous en parler de manière plus détaillée, mais je pense qu'il est clair qu'il y a des changements et qu'ils ne sont pas négligeables. C'est d'ailleurs pourquoi vous avez entrepris cette étude.
    Ma deuxième remarque est que nous avons déjà vu ça. Nous avons vu des changements dans le passé. Je veux parler bien sûr de l'effondrement des stocks de poisson de fond et des changements entourant le moratoire qui avait été décidé il y a une vingtaine d'années l'an dernier. En fait, cela avait commencé bien plus tôt, dans les années 1980, et avait nécessité une dépense importante de deniers publics, ou l'avait entraînée. Cinq milliards de dollars ont été dépensés au Québec et dans les provinces de l'Atlantique pour aider les gens à rationaliser, à revitaliser, à renouveler et à transformer l'industrie, puis à prendre leur retraite.

  (1540)  

    Je crois cependant que la seule chose que nous n'avons pas faite a été d'introduire un certain degré de résilience dans l'industrie, et que nous sommes maintenant à l'aube d'un autre changement profond. Il est juste de dire que notre industrie dépend de quelques espèces seulement, et produit des revenus inadéquats du point de vue de ce qui pourrait être nécessaire pour avoir un minimum de résilience face au changement annoncé.
    Il y a un gros point d’interrogation sur la question de savoir si l'industrie, telle qu'elle est structurée, sera capable de résister à un changement profond sans faire encore une fois appel au soutien financier des pouvoirs publics. Je pense que c'est regrettable car je crois qu'il y a dans le monde d'autres modèles montrant qu'on peut faire reposer plus l'industrie sur les dollars du secteur privé, les investissements du secteur privé, et la rendre plus résiliente face au changement, que celui-ci concerne l'abondance de la ressource ou les fluctuations de la monnaie et des marchés, et que nous pourrions contribuer plus au bien commun sur la manière dont une ressource commune est gérée dans l'intérêt du plus grand nombre par une exploitation adéquate du panier de poissons que Mère Nature met entre nos mains et qui assure le gagne-pain des participants de l'industrie.
    Dollar pour dollar, rien que pour illustrer la valeur économique de la pêche, voyez quelle est la situation en Islande ou en Norvège, deux de nos concurrents. Des revenus plus élevés, moins de participants par dollar, des collectivités rurales plus solides, une meilleure création de richesse et, je pense, une gestion plus durable de la pêche. Je n'ai pas le chiffre exact mais il y a en Norvège quelque 12 000 récoltants pour une valeur de 10 milliards de dollars environ. À Terre-Neuve, nous avons environ 9 000 récoltants dont la production vaut 1  milliard de dollars. Faites le calcul! Ce sont deux industries complètement différentes. Nous avons besoin d'un moins grand nombre de participants dans l'industrie, gagnant de meilleurs revenus et contribuant à de meilleurs niveaux de vie et à des collectivités rurales plus solides si nous voulons avoir la moindre chance de survivre dans ce secteur.
    Bien sûr, tout ça ne veut pas dire qu'il n'y a absolument pas d'argent privé dans le secteur, que ce soit dans la récolte ou dans la transformation. La majeure partie, voire la totalité, du rééquipement effectué pour tirer parti de l'abondance des crustacés s'est faite avec des capitaux privés, mais en ayant aussi comme point d'appui une solide dépendance envers le soutien salarial de l'assurance-emploi, autant dans la récolte que dans la transformation.
    Notre main-d'oeuvre vieillit. Avec des usines ne fonctionnant que quelques mois, des navires ne pêchant que quelques jours, 30 à 40 en moyenne selon le document de discussion Canada-Terre-Neuve-et-Labrador sur le renouvellement de l'industrie de la pêche publié en octobre 2006, il est difficile de rendre cela durable. Il est difficile d'attirer des jeunes et difficile de réunir le capital nécessaire pour moderniser, pour adapter, pour changer ou pour répondre aux exigences croissantes du marché, comme la traçabilité. Il est très difficile de résister aux vents du changement de l'écosystème que nous ressentons aujourd'hui, au déclin de la ressource, et même aux fluctuations de la monnaie ou du marché.
    Nous faisons face à plusieurs dilemmes. Comme vous, je les ai entendus de gens qui disent que ne pas réduire les quotas, agir dans la précipitation, être trop dramatique, placerait les gens en péril économique. Si l'on croit notre expérience du poisson de fond, qui remonte à plus de 20 ans en arrière, nous avons l'option de ne pas nous préoccuper du poisson, et celui-ci ne se préoccupera pas de nous.
    Je veux bien admettre, comme n'importe qui, qu'en l'absence de connaissances complètes nous devons être conscients de nos limites, des lacunes de notre savoir, et des conséquences de nos décisions. Mais nous devons aussi faire preuve de prudence à la lumière des inconnues et des incertitudes avant de continuer à faire ce que nous avons toujours fait, car je représente les conséquences qu’ont subies les gens dans cette situation.
    Ma troisième remarque, comme je l'ai dit, est que la structure est inadéquate pour répondre à nos besoins, si nous voulons dire par là que nous souhaitons une gestion de la ressource qui soit économiquement durable et qui soit consciente du risque. Tout cela est fort bien détaillé dans Les milliards engloutis, le rapport produit par l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture et la Banque mondiale il y a quelques années.
    Pour terminer, ma quatrième remarque est que nous avons besoin d'efforts scientifiques renouvelés pour comprendre ce qui se passe. Dans ce contexte, je veux parler de partenariats entre le public et le privé. Nous devons faire plus ensemble. Il doit bien y avoir des modèles à cet égard dans d'autres pays. Je n'ai pas la réponse mais je sais que nous avons des capacités sur lesquelles nous pouvons bâtir, que ce soit à Dalhousie, à l’UPEI ou à l'Université Memorial, pour ne donner que quelques exemples. En établissant des partenariats publics-privés avec des institutions de cette nature — avec le CFER du Marine Institute, avec l'industrie, les récoltants et les transformateurs travaillant tous ensemble —, je me dis qu'il doit bien y avoir quelque part un modèle qui nous permettrait de contribuer tous à l'approfondissement de nos connaissances de façon à comprendre le mieux possible les changements auxquels nous assistons, le poisson dont nous disposons, et l'écosystème dont nous dépendons tous.
    Permettez-moi de conclure sur une question que j'ai déjà soulevée.

  (1545)  

    Nous nous occupons aussi de dossiers d'intérêt commun, qui intéressent des organismes comme le MSC, et je suis heureux de voir ici Jay du Marine Stewardship Council.
    Vous ne le savez peut-être pas mais le MSC a été formé dans le sillage de l'effondrement du poisson de fond dans la région de l'Atlantique, quand WWF et Unilever se sont unis pour demander s'il y avait quelque chose qu'on pouvait faire. Serait-il possible de bâtir un mécanisme qui permettrait d'évaluer et de certifier la durabilité de la pêche, et d'apporter des changements à la conduite et à la gestion de la pêche pour la rendre plus pérenne, là où c'était nécessaire, afin de pouvoir donner cette assurance au consommateur?
    J'appelle ça la démocratie du marché et, même si elle n'est pas parfaite, je suis très fier de ce qu'ont fait mes membres. Ils ont pris des risques, ils ont oeuvré pour certifier la première pêcherie certifiée du MSC au Canada, la première pêcherie certifiée du MSC sur la côte est du continent, et la plus grande pêcherie de crevettes certifiée du MSC au monde. Nous sommes très reconnaissants au MPO de l'appui qu'il nous a accordé pour obtenir cela, et qu'il continue à nous accorder pour notre travail du MSC. Cela n'aurait littéralement pas été possible sans cet appui. Et c'est fort bien car, comme je l'ai déjà dit, et comme un pêcheur me l'a dit, si nous nous occupons bien du poisson, le poisson s'occupera bien de nous.
     Mon objectif en comparaissant aujourd'hui est d'encourager votre comité et le ministère des Pêches et des Océans, qui suit sans aucun doute attentivement vos délibérations, d'examiner toutes les solutions nécessaires et pratiques pour comprendre ce qui se passe, dans l'intérêt de la dernière protéine sauvage que nous consommons, dans l'intérêt du gagne-pain de tous ceux qui en dépendent, et dans l'intérêt d'une gestion durable de la pêche.
    En conclusion, je vous laisse sur un mot de C.S. Lewis qui disait que, si l'on a monté dans un train qui va dans le mauvais sens, la meilleure solution ne consiste pas à se lever et pour aller vers l'arrière du train. Ce n'est pas ça qui vous permettra d'aller où vous vouliez aller.
     Merci de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Butler.
    Monsieur Chapman, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président, membres du comité. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. Cela fait quelques années que je n'ai pas comparu devant le comité. J'ai participé plusieurs fois à ses travaux il y a longtemps. Je suis dans ce secteur depuis 1977. Au début, je travaillais dans le secteur de la transformation en Nouvelle-Écosse, puis je suis allé dans le secteur de la transformation à Terre-Neuve. Aujourd'hui, je représente le secteur des gros navires de pêche du Canada atlantique.
    Avant de faire quelques remarques simples sur la crevette — mon témoignage portera totalement sur la crevette —, je tiens à remercier mon collègue Derek qui vous a déjà communiqué plusieurs messages clés. Je ne reviendrai pas sur ses messages directement dans ma déclaration liminaire, mais ils découlent de tout ce concept de résilience et du fait qu'une industrie plus solide nous permettra d'avoir des emplois mieux assurés, des emplois à plus long terme, des emplois durables, ainsi que des entreprises durables dans le Canada atlantique, ce dont nous avons si désespérément besoin.
    Je suis en réalité ici pour appuyer les détenteurs de permis de la pêche traditionnelle de la crevette nordique. Les deux tiers de ces permis sont détenus par Terre-Neuve-et-Labrador et par les Inuits, ensemble, le tiers restant étant détenu par des intérêts du Québec, des intérêts du Nouveau-Brunswick et des intérêts de la Nouvelle-Écosse.
     Au cours des quatre dernières décennies, ces titulaires de permis ont investi environ 400 millions de dollars dans leur industrie, et la pêcherie de la crevette avec carapace par le secteur des gros navires représente environ 250 millions de dollars de ventes annuelles. Je m'exprime aussi au nom des 800 professionnels, hommes et femmes, essentiellement de Terre-Neuve-et-Labrador, qui gagnent de bons salaires en travaillant toute l'année dans ce secteur des grands crevettiers.
    Pour replacer les choses dans leur contexte, ces 800 années-personnes représentent à peu près le même nombre d'années-personnes que la pêche côtière à Terre-Neuve. Ils ont des emplois plus longs mais, comme l'a dit Derek, pour une très courte période. Donc, si vous traduisez cela en années-personnes, ça donne en gros le même nombre de personnes employées dans le secteur des grands navires, qui fonctionne toute l'année.
    Bien que les permis soient détenus par des gens de différentes provinces, tous ces navires sauf trois, je dois aussi le préciser, mouillent dans des ports de Terre-Neuve-et-Labrador. Même pour ces trois navires qui mouillent dans des ports de la Nouvelle-Écosse, bon nombre de leurs membres d'équipage viennent du Labrador. De fait, l'un de ces navires appartient pour moitié à la Labrador Fishermen's Union Shrimp Company, et les deux tiers de son équipage viennent du Labrador.
    Permettez-moi de prendre quelques minutes pour soumettre six remarques à votre attention. Je ne vous dis pas à l'avance de quoi il s'agit, je vais vous les présenter l'une après l'autre en espérant qu'il nous restera assez de temps pour une période de questions.
    Premièrement, vous avez posé des questions et avez reçu des informations sur l'interaction des facteurs complexes de l'océanographie et de l'écosystème, et sur les relations existant entre ces conditions et la productivité des crustacés et du poisson de fond, en particulier. À notre avis, cette interaction ne sera pas comprise de manière adéquate durant notre vie. Bien qu'il soit important que la science fasse des progrès pour nous permettre de la comprendre, cela n'a pas à être la préoccupation première de la société.
    Ce que je veux porter à votre attention aujourd'hui, au sujet de la crevette nordique, c'est qu'il n'y a que deux biologistes qui, avec un peu de personnel technique et de supervision, s'occupent directement de l'appui à la pêche de la crevette nordique, qui vaut 400 millions de dollars. Si vous additionnez la pêche côtière à la pêche hauturière, vous avez 400 millions de dollars de ventes. Nous avons deux biologistes qui essayent de comprendre ce qui se passe.
    Donc, d'abord et avant tout, nous recommandons fortement que le MPO réunisse des ressources scientifiques suffisantes. Il n’est pas nécessaire que ce soit des personnes totalement nouvelles. Le ministère n'a pas de nouveaux crédits mais nous pouvons certainement trouver l'argent quelque part, ou réaffecter de l'argent d'autres secteurs, pour nous aider à prendre de meilleures décisions de gestion, notamment en élaborant un solide modèle d'évaluation de la crevette qui nous permettra de positionner cette floraison de crevettes sur une période de 15 ans.

  (1550)  

    Il n'est pas nécessaire que nous comprenions en totalité la contraction que nous avons constatée ces dernières années, et qui va continuer, mais nous pourrions au moins la placer dans le contexte de l'écosystème. Cela nous permettra ensuite de faire certaines projections fiables sur la quantité de crevettes qui sera disponible dans l'écosystème du futur pour en assurer une bonne gestion et en faire bénéficier tous les participants.
     Cela est absolument nécessaire. C'est une chose que nous n'avons pas actuellement. Il n'existe pas de modèle d'évaluation de la crevette nordique. Nous conduisons cet autobus sur la base d'informations provenant d'enquêtes d'index, mais sans véritable carte routière. Nous n'avons absolument aucun moyen de savoir ce que seront les prévisions pour l'an prochain, ou l'année suivante, ou l'année suivante.
    Ma deuxième remarque est reliée à la première. Je ne sais pas si d'autres vous en parleront aussi. Elle vient d'autre sources. Quoi qu'il en soit, il est dans l'intérêt de certaines personnes de donner de la crevette nordique l'image d'une population unique, qui devrait donc être gérée comme population unique. Je tiens à profiter de cette occasion pour vous informer que c'est une proposition que nous n'acceptons pas. Je pense que le MPO était ici il y a quelques jours et qu'il vous a sans doute dit où se trouvent les principales zones de pêche à la crevette, peut-être même en vous montrant une carte.
    Essayez d'imaginer les îles de la Polynésie dans le Pacifique Sud. Toutes ces îles contiennent des groupes distincts de population dispersés sur des milliers de kilomètres d'océan. Il y aura des similitudes génétiques entre les populations de certaines de ces îles mais, en termes biologiques, ces populations individuelles peuvent augmenter ou diminuer tout à fait indépendamment les unes des autres.
    C'est très similaire à ce qui se passe avec les stocks de crevettes nordiques. Il y en a un certain nombre de groupes différents dans l'océan. On me dit qu'il il y a une similitude génétique entre ces populations, mais les scientifiques disent que ce genre de similitude génétique peut se produire à partir d'aussi peu que 250 larves de crevettes individuelles qui sont emportées par le courant et s'établissent dans diverses régions du sud. Cela n'affecte pas en soi les regroupements adultes dans ces régions mais c'est suffisant pour leur donner une similitude génétique.
    C'est toutefois sur cette base que le MPO a mis sur pied les diverses unités de gestion de ces regroupements. En termes d'exploitation humaine prédatrice sous forme de pêche, nous pouvons surpêcher ou surexploiter n'importe lequel de ces regroupements et nous devons donc nous assurer de suivre le TAC, le total autorisé de capture, et les quotas établis pour chaque groupe séparément.
    Troisièmement, dans votre analyse des changements des écosystèmes, nous pensons qu'il est important que vous ayez un système d'ajustement pour que l'industrie de la pêche puisse réagir correctement à l'abondance changeante de la ressource. Derek parlait plus généralement du modèle économique, de la nécessité d'avoir un système résilient. L'un des éléments clés du modèle économique dans le secteur de la pêche, puisqu'il s'agit d'une ressource publique, est qu'il faut avoir une politique d'allocation stable, à défaut de quoi c'est le chaos organisé et le désordre. Il est impossible de bâtir un modèle économique sur cette base.
    Ce système, une politique d'attribution des quotas de crevettes, existe pour cette pêche depuis 1997, et reprend en grande mesure la même démarche que celle qui existait pour la morue du Nord. Dans ce contexte, quand de nouveaux entrants sont arrivés dans ce secteur dans les années 1970 et 1980 et que le TAC a baissé, ces nouveaux entrants ont dû quitter le secteur avant qu'on décide de réduire les quotas des participants traditionnels qui, dans ce cas, étaient les petits pêcheurs.

  (1555)  

    En 1997, le ministre Mifflin a annoncé la nouvelle politique d'attribution des quotas pour la crevette nordique, qui a eu l'effet totalement contraire, c'est-à-dire que les nouveaux entrants étaient essentiellement les pêcheurs de morue qui avait été chassés du secteur après l'effondrement des stocks. Ces nouveaux entrants devaient recevoir la majeure partie des augmentations du total autorisé de capture résultant de l'accroissement de la ressource, mais à la condition qu'ils rendent ces augmentations dans les mêmes proportions une fois que le stock de crevettes dans chacune de ces régions commencerait à baisser et à retrouver des niveaux plus normaux.
    Cette politique d'attribution des quotas avait été annoncée sans que quiconque dans le secteur de la pêche ne soulève la moindre objection. Elle a ensuite été endossée et mise en oeuvre par plusieurs gouvernements successifs, aussi bien libéraux que conservateurs.
    Ma quatrième remarque est que le déclin des quotas de crevettes nordiques s'accompagnera de pertes financières et de pertes d'emplois. Nous appuyons de tout coeur la nécessité d'effectuer des réductions de quotas proactives et vigoureuses, même si cela doit pénaliser nos pêcheurs. Il n'y a tout simplement pas d'autre solution.
    Dans la zone 6 de pêche à la crevette, qui est la plus vaste de toutes ces unités de gestion, les nouveaux entrants ont reçu 93 % des augmentations de quotas entre 1997 et la crête du total autorisé de capture en 2008. Il y a donc eu une augmentation totale de 74 000 ou 75 000 tonnes dans cette zone.

  (1600)  

    C'était la zone 6?
    Oui, c'était la zone 6. Ainsi, en 1996, l'année précédant l'arrivée des nouveaux entrants, il y a eu un total autorisé de capture de 10 000 tonnes qui a été pêché par les pêcheurs traditionnels. Cela a commencé à augmenter en 1997. Le quota a augmenté de 74 000 tonnes jusqu'en 2008, et 93 % de l'augmentation ont été attribués aux nouveaux entrants.
     Il ressort tout à fait clairement de la politique d'attribution des quotas que ce sont les bénéficiaires de ces augmentations qui doivent maintenant assumer le fardeau, ou la majeure partie du fardeau, des diminutions, afin de protéger les intérêts des pêcheurs traditionnels qui oeuvraient dans ce secteur avant l'arrivée des nouveaux entrants et qui n'ont reçu quasiment aucune part des augmentations de quotas à l'époque.
    Il est tout à fait regrettable que nous ayons cette année des prix très fermes pour les crustacés à Terre-Neuve-et-Labrador, ce qui compensera au moins dans une certaine mesure l'effet de cette réduction des quotas de crevettes sur les récoltants, mais exigera un ajustement considérable. Nous ne savons pas quelle sera la structure de prix à l'avenir.
    À ce sujet, la baisse des quotas a été la plus prononcée dans les zones du Sud, y compris la zone 6. Toutefois, les études menées par le navire de recherche scientifique indiquent que le stock de crevettes juste au nord, dans la zone 5, et on a même certaines indications de la même chose dans la zone 4, encore plus au nord, est en déclin. Dans ces zones, ce sont les gros navires traditionnels de pêche à la crevette qui vont subir la majeure partie du contrecoup.
    Cinquièmement, nonobstant le fait que les nouveaux entrants ont reçu 93 % des quotas, je me dois de signaler que la solution du syndicat de Terre-Neuve à cette situation est de faire fi des millions de dollars, des centaines de millions de dollars qui ont été investis sur la base de la politique existante d'attribution des quotas, et aussi de reprendre les quotas de crevettes qui appuient les emplois bien rémunérés et annuels qui sont occupés essentiellement par des Terre-Neuviens et des Labradoriens qui travaillent sur ces grands navires.
     En ce qui concerne l'avenir de ce secteur, nous voulons poser des questions au comité permanent et au comité multipartite de Terre-Neuve. Lesquelles de ces entreprises travaillant toute l'année, et lesquels de ces pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador, devraient perdre leur investissement et perdre leur emploi en faveur d'emplois saisonniers peu rémunérés dans la même province? Deuxièmement, comment la reconstruction de l'industrie de la pêche à la morue du Nord, qui commence à se rétablir, pourra-t-elle être payée par les investisseurs et être financée par les banquiers si ceux-ci ne peuvent pas compter sur une politique stable d'attribution des quotas?
    Ma dernière remarque, la sixième, est que nous appuyons l'idée que nos dirigeants élus et nos représentants élus devraient promouvoir la stabilité plutôt que l'incertitude dans la politique canadienne de la pêche, et devraient donc respecter la politique d'attribution des quotas conçue par le ministre Mifflin en 1997, exactement et précisément pour faire face à la même situation qu'aujourd'hui.
    J'ajoute qu'il est plus cohérent pour les représentants élus d'adopter un programme pour aider les gens à s'adapter à la nouvelle réalité, à sortir volontairement du secteur, si nécessaire et, dans certains cas, faciliter la transition vers un rétablissement plus ferme et plus viable de la pêche à la morue à Terre-Neuve.
    Voilà, c'est tout. Merci de votre attention, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Chapman.
    Monsieur Lugar.
    Je m'appelle Jay Lugar.
    Je remercie les membres du comité de me donner l'occasion de témoigner au nom du Marine Stewardship Council. Je vais parler un peu du thème de votre étude, l'évolution des conditions environnementales de la pêche à la crevette nordique au large de Terre-Neuve-et-Labrador, mais je tiens à vous donner d'abord un bref aperçu du Marine Stewardship Council avant de dire pourquoi c'est un programme important dans le contexte de votre étude.
    Le Marine Stewardship Council mène un programme international de certification et d'étiquetage écologique des pêcheries fondé sur un référentiel scientifiquement rigoureux pour déterminer si les pêches de capture sont écologiquement durables et bien gérées. Les produits du poisson issu des pêcheries conformes au référentiel MSC peuvent utiliser l'écolabel bleu du MSC ou affirmer autrement qu'ils sont certifiés par le MSC.
    Le MSC est un organisme indépendant sans but lucratif ayant son siège en Angleterre et un personnel d'environ 140 personnes réparties dans 19 pays. À l'heure actuelle, plus de 22 000 produits portant l'écolabel MSC sont vendus dans une centaine de pays. Les principes et les critères du MSC pour une pêche durable ont été établis dans le cadre d'un processus triennal d'intervenants multiples dirigé par Unilever et le Fonds mondial pour la nature, comme l'a dit mon collègue de Terre-Neuve-et-Labrador.
    En 1999, le MSC est devenu un organisme indépendant et il est actuellement dirigé par un conseil d'administration, et conseillé par un comité consultatif technique et un conseil de parties prenantes. Dans l'ensemble, les organes directeurs du MSC regroupent des représentants de 20 pays situés sur six continents. L'une des coprésidentes du conseil des parties prenantes, et membre à ce titre de notre conseil d'administration, est une Canadienne: Christine Penny, de Clearwater Seafoods.
    L'engagement des pêcheries canadiennes à l'égard du programme du MSC, dont les débuts remontent à 2008 et à la pêcherie visée par les délibérations d'aujourd'hui, celle de la crevette nordique, a été considérable. À l'heure actuelle, 33 pêcheries canadiennes sont conformes au référentiel MSC, y compris tous les stocks majeurs des côtes Est et Ouest, ainsi que huit autres pêcheries en cours d'évaluation, dont un grand volume de homard et des poissons d'eau douce du Manitoba et de l'Ontario.
    Quoique je prétende que ce bilan soit tout à l'honneur du MSC, l'histoire du MSC au Canada dépend et témoigne en réalité du travail acharné et du dévouement porté à la gestion des pêches et à l'excellence scientifique par l'industrie canadienne des produits de la mer et le gouvernement du Canada, c'est-à-dire par les milliers de Canadiens et Canadiennes impliqués, dont les organismes de pêche représentés ici aujourd'hui et les entreprises de la chaîne d'approvisionnement des produits de la mer, comme Loblaw. Comme vous le savez bien, la gestion des pêcheries au Canada est une responsabilité partagée. Les efforts déployés pour obtenir la certification du MSC ne font pas exception à la règle. Nous sommes fiers d'être associés aux pêcheries les mieux gérées au Canada.
     Le référentiel MSC pour des pêcheries durables et bien gérées est fondé sur le Code de conduite pour une pêche responsable, de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, et est conforme à ses directives en matière d'étiquetage écologique. Les pêcheries s'inscrivent au programme MSC de leur plein gré en embauchant un organisme de certification accrédité indépendant pour mener un processus d'évaluation ouvert et transparent conformément aux exigences de certification du MSC. L'organisme de certification évalue la performance de la pêcherie en fonction de trois principes, notamment la pérennité des stocks ciblés; les répercussions de la pêcherie sur l'écosystème, surtout sa capacité à ne pas nuire aux espèces accessoires, aux espèces protégées par la Loi sur les espèces en péril et au fonctionnement de l'habitat du fond marin; et l'efficacité du système de gestion en ce qui concerne le respect des principes 1 et 2.
    Notée selon 31 indicateurs de performance, la pêcherie doit atteindre un score qui équivaut à la pratique minimum acceptable pour chacun des indicateurs. De plus, pour chacun des trois principes, elle doit obtenir un score moyen qui équivaut aux meilleures pratiques internationales. Pour les indicateurs qui se trouvent entre ces deux niveaux, l'organisme de certification indépendant émet une condition que la pêcherie doit remplir avant la fin du cycle de certification quinquennal du MSC.
    Voilà en quelques mots qui nous sommes et comment fonctionne le processus.
    Les considérations environnementales font certainement partie des exigences de certification du MSC, ce qui est tout à fait naturel pour un référentiel axé sur la gestion des pêcheries. Cependant, l'évolution des conditions environnementales ne fait l'objet d'aucun des indicateurs de performance en particulier. Le MSC s'attend à ce que le système de gestion examine exhaustivement les changements environnementaux, qu'il tienne compte de ces changements et de leur nature incertaine dans ses pratiques normales d'évaluation des stocks, et qu'il établisse des mesures de contrôle des prises en conséquence.

  (1605)  

    Les attentes du programme MSC en matière de science et de gestion entrent en jeu dans la pêcherie canadienne de la crevette nordique. Cette dernière a initialement obtenu sa certification par l'intermédiaire d'Intertek Fisheries Certification en 2008, comme l'a dit Derek Butler, au nom de la Association of Seafood Producers. Elle a été recertifiée en 2011, lorsque la pêcherie hauturière a obtenu sa propre certification pour ces zones et d'autres. En 2012, nous nous sommes réjouis que tous les membres du groupe-client se soient regroupés pour être certifiés à titre de pêcherie unique.
     La pêcherie de crevettes nordiques a obtenu de bons résultats lors des audits de surveillance annuels, qui sont eux aussi menés par un organisme de certification indépendant. Ces audits examinent tout changement important intervenu dans la pêche et le système de gestion qui pourrait faire varier les scores initiaux de façon importante et permettre d'évaluer les progrès réalisés par la pêcherie relativement aux conditions émises. Notons que la pêcherie de crevettes nordiques n'a aucune condition à remplir pour le principe de la pérennité des stocks ciblés, le principe 1, qui est le principal volet où l'on examine l'évolution des conditions environnementales.
    J'aimerais expliquer que le statut actuel de la pêcherie pourrait être remis en cause par le changement qui s'opère actuellement dans le régime de productivité. Les indicateurs de performance particuliers du MSC pour lesquels l'organisme de certification examinera de nouvelles informations sont les suivants.
     Le premier indicateur traite de l'état des stocks. La pêcherie doit se situer au-dessus du point où il y aurait atteinte à la capacité de reproduction des stocks et doit fluctuer autour d'un point de référence cible. Lors de l'évaluation initiale, il a été déterminé avec un degré de certitude élevé que la pêcherie de crevettes nordiques remplissait ces deux critères.
     Lors du prochain audit de surveillance annuel, les nouvelles informations au sujet de la dégradation de l'état des stocks de l'unité de certification ZPC 4-6 seront examinées. L'organisme de certification déterminera si la biomasse demeure en état de fluctuation autour du point de référence cible. Plusieurs résultats sont possibles pour la pêcherie, dont un score inchangé, un nouveau score qui n'entraînerait aucun changement important du statut de certification, ou un nouveau score entraînant possiblement une nouvelle condition à remplir. Une condition relative à ces indicateurs de l'état des stocks exigerait l'élaboration d'un plan de rétablissement des stocks pouvant produire des résultats dans un délai raisonnable. Bien sûr, un point de référence cible qui tient compte des mesures de productivité actuelles de l'écosystème serait une condition importante pour tout nouveau plan de rétablissement, le cas échéant.
    Un deuxième indicateur traite des points de référence utilisés par le système de gestion et exige que ces points cibles et limites soient appropriés pour les stocks visés. L'organisme de certification vérifie si ces points de référence concordent avec la productivité variable de l'écosystème.
    Selon la clause CB 2.3.10 du document décrivant les exigences de certification du MSC:
Comme la productivité d'un écosystème peut changer en parallèle avec l'évolution naturelle des milieux marins, par exemple dans des conditions de changement de régime, l'équipe [de certification] doit vérifier que les points de référence sont conformes à la productivité de l'écosystème.
    C'est un peu prémonitoire, à certains égards, mais c'est évidemment un facteur clé.
    Vous pouvez constater que les points de référence n'ont pas besoin d'être statiques dans le système MSC. L'organisme de certification examinerait donc les pratiques et les motifs de modification des points de référence cibles adoptés par le système de gestion pour des situations comme celle qui se produit vraisemblablement dans les Grands Bancs et le plateau continental du Labrador.
     Troisièmement, deux des indicateurs associés au principe 1 traitent de la stratégie d'établissement des taux d'exploitation de la pêcherie et des mesures de contrôle des prises incluses dans cette stratégie. La stratégie d'exploitation doit pouvoir s'adapter à l'état des stocks afin de permettre l'atteinte des objectifs qui se retrouvent dans les points de référence. Les mesures de contrôle précises, comme établissement d'un TAC, doivent concorder avec la stratégie et assurer une diminution de l'exploitation si les stocks tendent vers un point de référence limite.
    Le PGIP, adopté conjointement par le MPO et la pêcherie de crevettes, comprend une méthode d'établissement des taux d'exploitation fondée sur l'évaluation de la fluctuation des stocks. Ce PGIP a permis à l'organisme de certification indépendant d'attribuer une note de passage pour ces indicateurs en 2011 et de maintenir ce score lors des deux premiers audits de surveillance. Lors du prochain audit de surveillance, la conformité entre le plan et la pratique du système de gestion est une information que l'organisme examinera au moment d'évaluer les changements qui se sont opérés dans la pêcherie l'année précédente.

  (1610)  

    Lors de l'examen mené par l'organisme de certification et de l'attribution possible d'un nouveau score pour un ou plusieurs indicateurs si de nouvelles conditions sont imposées ou, dans un cas extrême, si le nouveau score place la pêcherie dans une position où elle ne satisfait plus au référentiel MSC, nous accordons à la pêcherie certifiée le temps nécessaire pour élaborer des plans et des mesures visant à redresser la situation.
    Permettez-moi d'être tout à fait clair: il ne faudrait pas conclure, d'après mes déclarations ici aujourd'hui, que l'un des résultats est plus probable qu'un autre en ce qui concerne la situation des ZPC 4 à 6. Toutes les décisions de certification du programme MSC sont prises par des organismes de certification indépendants qui examinent en profondeur toutes les informations disponibles lors des évaluations et des audits de surveillance. Ces organismes font appel à des experts hautement qualifiés qui ont des titres de compétences scientifiques et qui connaissent bien le système du MSC. Parmi ceux-ci, mentionnons Jake Rice, Howard Powles, J-J Maguire et Jean-Claude Brêthes, tous titulaires de doctorats.
     Les exigences de certification du MSC se veulent un examen rigoureux de tous les aspects importants de la gestion d'une pêcherie. La rigueur et l'indépendance intégrées au processus de certification, la réputation scientifique des membres de l'équipe de certification, ainsi que la politique et la structure de gouvernance inclusives et transparentes que nous suivons, ont toutes contribué à la grande crédibilité du programme MSC. Nous nous efforçons de tenir compte des meilleures pratiques internationales en gestion des pêches dans notre programme afin d'encourager une performance conforme à ce niveau.
    La situation actuelle de la pêcherie de crevettes nordiques mettra à l'épreuve les pratiques de gestion utilisées au Canada, mais je suis convaincu que cette dernière saura relever le défi, comme il sied à une industrie de la pêche qui a déjà obtenu un franc succès dans le cadre du programme MSC.
    Membres du comité permanent, je suis reconnaissant d'avoir eu l'occasion de discuter avec vous de l'évolution des conditions environnementales et du programme MSC, et je répondrai avec plaisir à vos questions. Merci.

  (1615)  

    Merci beaucoup, monsieur Lugar.
    Nous entamons un tour de 10 minutes avec M. Chisholm.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'avoir pris le temps de venir témoigner devant le comité.
    Je comprends que vous aviez beaucoup à dire, et j'ai pour ma part beaucoup plus de questions à vous poser que le temps ne me le permettra, sans parler de le partager avec mes collègues. Nous débutons notre étude et nous allons donc essayer de rassembler toutes ces informations dans l'espoir de parvenir à une conclusion constructive.
    Voici donc ce par quoi je veux commencer. J'appuie certainement toute décision nous aidant à préserver notre pêcherie, que ce soit de la crevette nordique ou d'une autre espèce. La question est de savoir comment faire, et comment nous assurer que nous aidons les collectivités concernées, qui dépendent de cette pêche et dont c'est l'activité économique, à Terre-Neuve-et-Labrador.
    Comme beaucoup d'autres collectivités et beaucoup de pêcheurs, nous avons été très préoccupés par l'impact de ces réductions dans la pêche côtière. Dans les ZPC 4 à 7, la réduction a été de l'ordre de 26 %, ce qui est beaucoup. Ça représente beaucoup de poisson, ça représente beaucoup d'argent, et nous entendons de plus en plus d'histoires sur la capitalisation de certaines de ces petites entreprises, à la fois les pêcheurs et les usines et collectivités qui dépendent de leurs activités. Un élément clé de cette discussion semble être non pas de savoir s'il est nécessaire de réduire le quota… bien que nous examinions cela et que nous voulions examiner les données scientifiques et parvenir à une conclusion cohérente. La ressource semble être assez stressée, et aller dans cette direction semble donc être une décision de bon sens. La question est de savoir comment faire et comment les participants du secteur doivent partager cette réduction.
    Nous avons eu cette politique, que M. Chapman a mentionnée, comme beaucoup d'autres, du dernier entré, premier sorti, qui m'a d'ailleurs semblé beaucoup plus claire quand vous l'avez expliquée, monsieur Chapman, que quand d'autres ont tenté de le faire. Nous avons accueilli l'autre jour un témoin de Torngat qui ne pensait pas que c'était aussi clair que cela. Quoi qu'il en soit, c'est un coup brutal qui est porté au coeur même du secteur côtier, à bien des égards. Je pense que ce qu'il faut faire, c'est aller au fond de cette politique du dernier entré, premier sorti, tout d'abord, pour voir si c'est aussi clair que vous le dites et, deuxièmement, déterminer si nous allons recommander au gouvernement qu'il l'appuie et qu'il permette au secteur côtier de continuer à assumer le plus gros fardeau de ces réductions.
    Nous parlons ici de quelque 3 000 employés, pas seulement des pêcheurs et des équipages, mais aussi des usines. Je me trouvais l'an dernier sur la côte sud du Labrador et j'ai rencontré des travailleurs des usines de poisson qui n'auraient plus de travail si les bateaux ne pouvaient plus leur amener de poisson, c'est-à-dire de crevettes dans le cas présent. Ils seraient obligés de s'en aller, les uns après les autres, et cette collectivité s'étiolerait petit à petit et finirait par disparaître. Est-ce ça la réponse? Je ne le crois pas.

  (1620)  

    Voici donc la question que je vous pose. Considérant l'historique de la pêcherie et considérant que ces pêcheurs, comme les pêcheurs de toute la province de Terre-Neuve-et-Labrador, dans bien des cas, pratiquent cette pêche depuis des générations — et le principe d'adjacence était l'un de ces principes en 1997 puis en 2003 —, ne pensez-vous pas qu'on devrait assurer une certaine équité dans la réduction des quotas? Ne le pensez-vous pas, si le but est de s'assurer qu'on exerce un certain contrôle sur une réduction de la ressource, si c'est de ça qu'il s'agit, afin que ces entreprises, petites et grandes, puissent s'adapter de manière opportune au lieu d'être brutalement frappées par une réduction automatique de 30 % pendant un an? Pouvez-vous répondre à cette question, s'il vous plaît?
    En réponse, je vous dirai cinq choses, le plus rapidement possible.
    Premièrement, il y a eu une augmentation incroyablement élevée, une floraison. La pêcherie de crevettes nordiques a existé à des niveaux plus bas pendant des décennies avant que cette floraison apparaisse. Nous avons eu cette augmentation très élevée, et nous retournons maintenant à une situation normale. Ce n'est pas la même chose avec la morue du Nord, où nous avons eu un problème environnemental. Nous l'avons collectivement surpêchée et nous avons réduit les stocks à cause de certains changements environnementaux. Ce n'est pas du tout la même situation aujourd'hui. Ce n'est pas la faute du gouvernement du Canada, ni d'aucun scientifique ou gestionnaire de pêcherie. Ce n'est pas la faute de l'industrie de la pêche. C'est cette floraison qui s'est produite et qui a aujourd'hui disparu, si je peux replacer les choses dans ce contexte.
     Deuxièmement, je dirais que la perte d'emplois est inévitable. Elle est absolument inévitable. Je pense que vous avez mis clairement le doigt sur le problème. Il ne s'agit pas de savoir comment ça va se faire, ni si ça doit se faire. Je constate qu'au sujet du principe d'adjacence que vous avez mentionné, j'ai essayé de dire dans ma déclaration liminaire que nous sommes adjacents à cette ressource. La quasi-totalité des navires mouillent à Terre-Neuve. La plupart des équipages, et de loin, sont de Terre-Neuve-et-Labrador, ce qui veut dire…
    Est-ce que les propriétaires sont aussi de Terre-Neuve-et-Labrador ou…
    La plupart des propriétaires sont des Terre-Neuviens et des Labradoriens, mais pas tous. Toutefois, même pour les navires qui appartiennent à des entités de l'extérieur, du Québec rural, du nord du Québec, par exemple, ils ne sont pas précisément adjacents à cette ressource mais leurs navires et leurs quotas sont gérés à partir de Terre-Neuve-et-Labrador, et sont pêchés par des Terre-Neuviens et des Labradoriens, ce qui…
    Permettez-moi de passer à la question suivante — et je suis désolé de vous interrompre mais je n'ai pas beaucoup de temps — sur cette question d'adjacence. Pour les compagnies hauturières, la crevette qui est pêchée est transformée en mer avant d'être vendue. Quelles sont les collectivités qui vivent de cette activité?
    Eh bien, ce sont les 800 personnes qui sont employées et qui sont dispersées essentiellement dans le Labrador, dans le nord du Labrador. Si vous examinez la situation de certaines des usines du Labrador, notamment une usine côtière de transformation de la crevette au Labrador, mais aussi des usines de transformation du poisson de fond, vous verrez qu'elles dépendent directement de l'argent produit par cette pêche hauturière. Si cette pêche hauturière disparaissait, ces usines terrestres seraient en très grand péril, et vous pouvez demander aux propriétaires…
    Je croyais que la transformation se faisait à bord.
    En effet, mais l'argent que génère cette pêcherie — le modèle économique est un modèle rentable — retourne à l'union des pêcheurs de crevettes du Labrador et sert à payer leur infrastructure, par exemple.
    C'est un seul exemple.
    Il y a aussi la coopérative de Torngat. L'argent est renvoyé à leur regroupement et sert à payer leur infrastructure. La ville de Harbour Grace survit grâce à cette pêche hauturière, tout comme la ville de Bay Roberts.
    Mon argument, monsieur Chapman, est que… Je n'essaye pas de dire que c’est ou-ou.
    Je comprends
    Je n’essaie pas de dire que la pêche hauturière est mauvaise, et la pêche côtière, bonne, ou vice versa.
    D'accord.
    Je parle plutôt d'une question d'équité et de justice…

  (1625)  

    Dans ce cas, laissez-moi…
    … pour que ces collectivités ne se retrouvent pas…
    Je vais essayer de vous répondre très rapidement aussi.
    Je pense qu'une des remarques de Derek était qu’il s'agit là clairement d'une population vieillissante. L'âge moyen dans beaucoup de ces usines est largement la cinquantaine ou la soixantaine. Ces usines n'arrivent plus à attirer de jeunes parce que ce n'est pas un secteur dans lequel ceux-ci veulent travailler. Les jeunes n'ont pas envie de travailler seulement 60 jours ou 30 jours par an. Dans certaines de ses usines, on est aujourd'hui obligé d'attirer des travailleurs étrangers pour ne pas mettre la clé sous la porte. Vous ne le saviez peut-être pas mais c'est comme ça que certaines réussissent à survivre.
    C'est une question compliquée du point de vue de l'offre de produits, du nombre de semaines de travail, etc., et des salaires qui sont payés.
    Pour ce qui est de l'équité, le fait est que nous avons vu les nouveaux entrants obtenir la quasi-totalité de l'augmentation et qu'il n'y a eu virtuellement aucune augmentation pour la flotte traditionnelle. Je pense que la question est de savoir si vous voulez commencer à éliminer ces emplois annuels de la flotte traditionnelle, qui n'a eu aucune augmentation durant cette période, afin de sauver les emplois saisonniers de gens qui ont bénéficié de ces 15 ou 20 années de bonnes augmentations. Je ne pense pas que ce serait équitable.
    En ce qui concerne la répartition des quotas, je ne comprends pas. Votre quota a augmenté…
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Chisholm.
    Diable, que le temps passe vite.
    Vous devez poser vos questions plus rapidement.
    Monsieur Sopuck, vous avez la parole.
    Monsieur Butler, vous dites qu'il faut renouveler les efforts scientifiques. Pourriez-vous nous donner des exemples de ce que vous voulez dire?
    Bruce pourrait probablement vous en parler mieux que moi. J'ai toujours dit qu'il y a une courte liste de personnes absolument brillantes dans le secteur de la pêche et, comme je le dis toujours, Bruce en fait partie. Bruce comprend mieux le modèle d'évaluation de la crevette, par exemple. Nous pourrions faire beaucoup mieux dans nos recherches scientifiques pour comprendre exactement ce qu'a été cette floraison, sa durée, et ce que sont les perspectives d'avenir. Comme il l'a dit, nous avons deux scientifiques de pointe qui étudient cette ressource, mais nous pourrions faire mieux.
    En outre, je pense qu'on pourrait travailler dans un contexte de partenariat public-privé. L'un des exemples auxquels j'ai fait allusion est le CFER, le Centre for Fisheries Ecosystems Research, de Terre-Neuve-et-Labrador, au Marine Institute de Memorial. Nous collaborons actuellement avec lui pour aider à satisfaire à certaines de nos conditions. Nous passons des contrats avec lui pour des recherches scientifiques.
    Par exemple, nous travaillons avec lui pour préparer un modèle de population du crabe des neiges. Actuellement, notre pêcherie du crabe des neiges est basée sur des modèles et des indices. Nous n'avons pas de véritable estimation de la biomasse. Nous ne savons pas vraiment ce que nous avons comme biomasse de crabe des neiges que nous pourrions exploiter en termes de quotas. Ce que nous faisons, c'est que nous construisons un index et, quand cet index change, nous changeons les quotas de pêche en conséquence. Nous sommes très fiers d'avoir récemment certifié cette pêcherie au titre du MSC.
    L'une des choses que nous devons absolument mieux faire serait de comprendre exactement ce qu'est la population de crabe des neiges. Nous pourrions travailler avec des gens comme ceux du CFER, par exemple, pour faire ce travail. Le MPO nous donne de l'aide mais ses ressources sont limitées. C'est pourquoi nous avons dû aller à l'extérieur. Nous avons aussi fait appel au centre de Gaspé pour qu'il fasse des études scientifiques à notre intention, afin que nous puissions satisfaire aux conditions.
    Monsieur Butler, en tant que personne qui a déjà eu une vie dans le monde de la pêche, l'une des choses que je peux vous garantir, c'est que vous n'obtiendrez jamais une estimation exacte de la biomasse. Ça n'arrivera pas, mais c'est une autre histoire.
    On fait cependant des choses intéressantes à ce sujet mais, vous avez raison, ce n'est pas facile.
    Je le croirai quand je le verrai. Quoi qu'il en soit, c'est un objectif qu'il vaut la peine de se fixer, mais je pense que les difficultés sont foncièrement insurmontables.
    Monsieur Chapman, vous avez été assez… je ne dirais pas critique, mais vous avez remis en question les études scientifiques du passé, en termes d'effort. Je sais que vous n'avez pas contesté la compétence des gens du ministère qui ont fait le travail. Pourtant, le ministère et les scientifiques ont détecté cette floraison de la crevette, et ils ont détecté ensuite son déclin. Vous avez formulé une certaine critique de la méthode d'échantillonnage de l'index. Cette méthode d'échantillonnage des populations de poisson et de faune est l'une des plus efficaces pour cerner les tendances, et c'est de cela que nous parlons ici, de tendances. Qu'il s'agisse de déterminer le nombre de caribous, de chevreuils ou de quoi que ce soit d'autre, dans toute la biologie des poissons et de la faune, on procède par échantillonnage, et on l'a fait notamment pour la gestion du poisson.
    Pourquoi donc pensez-vous, monsieur Chapman, que la méthode de l'index pour cerner les tendances dans les stocks de poissons est tellement inadéquate?
    Il est évident que je vous ai laissé mal comprendre ce que j'essayais de dire. L'index est le reflet de ce qui s'est passé l'an dernier, et nous pouvons mesurer sa variation à la hausse ou sa variation à la baisse, ce que nous avons fait. Le ministère le fait. Et il le fait assez bien. Je n'ai rien à reprocher à l'index tel qu’il existe.
    Ce qui m'embête, c'est qu'il ne nous dit pas ce que nous devrions faire à partir de maintenant. Voilà pourquoi je pense que nous devrions avoir un modèle. Il n'y a pas assez de ressources en place dans le ministère pour élaborer un modèle. Si l'on avait un modèle de la population, comme on en a parlé un peu au sujet du crabe, et même si ce n'est pas un modèle absolu mais seulement un modèle de production, on aurait au moins une certaine idée de ce que serait la réponse à l'effort de pêche à un moment donné. Nous n'avons pas ça pour la crevette.

  (1630)  

    Mais si notre index nous montre que la biomasse de la population diminue, et si nous appliquons le principe de précaution, comme je pense que nous le faisons, nous devrions nous retrouver avec une pêcherie durable, mais peut-être à un niveau moins élevé. Qu'en pensez-vous?
    Cette floraison de la population a été le résultat de la nature. La contraction ne s'est pas produite à cause de la pêche.
    Je comprends.
    À l'avenir, toutefois, la vigueur de notre effort de pêche fera une différence. À cet égard, vous avez besoin de la relation entre la vigueur avec laquelle vous pêchez et la trajectoire future. C'est pour cela que nous avons besoin d'un modèle.
    Est-ce que les données ou les informations nous indiquent que cette population de crevettes va se stabiliser? On sait bien que les espèces de poissons et de la faune ont l'habitude de se multiplier très rapidement, puis de décliner, et enfin de se stabiliser. D'après vous, que peut-on envisager pour l'avenir proche? Y aura-t-il une stabilisation ou une continuation du déclin?
    Vous me demandez de spéculer…
    Je sais.
    … et je dirais que nous allons revenir plus vers la situation qui prévalait avant la période précédant la floraison. Quant à savoir si ce sera stable, nous n'en savons rien car notre index du navire de recherche actuel n'a commencé qu'au milieu des années 1990. Nous n'avons pas d'index pour les années 1980 ou 1970, lorsqu'il y avait de la pêche, mais de faible niveau. Nous ne savons pas où se situe le point d'équilibre.
    Quelle était la taille de la pêcherie de crevettes avant la floraison, en pourcentage de ce qu'elle est aujourd'hui, ou quel a été son point culminant?
    La plus grande zone de pêche de toutes, qui a amené ce comité à se pencher sur la question, avait atteint 85 000 tonnes dans la zone 6. C'est actuellement 48 000 tonnes, je crois. Dans la période précédant la floraison, elle avait commencé à environ 10 000 tonnes.
    Très bien. Nous allons donc d'une pêcherie dont la taille était huit fois celle d'avant la floraison, ce qui veut dire que nous parlons de perturbations potentiellement profondes.
    Oui mais, même à 10 000 tonnes, ça resterait la plus grosse zone de pêche à la crevette du Canada. Elle est passée de grosse à extrêmement grosse, et elle retombe maintenant à un niveau où elle sera quand même encore plus grosse que la plupart des autres.
    Il est donc possible que le niveau de pêche actuel a eu peu à voir avec le déclin du stock de crevettes.
    Les scientifiques n'ont pu détecter aucun impact de la pêche sur l'augmentation. Ils n'ont tout simplement pas pu le détecter dans le bruit, les niveaux étant tellement bas. Ils n’en sont pas aussi sûrs avec le déclin, mais ils ne sont de toute façon pas encore capables de mesurer ce que pourrait être l'impact.
    Nous fixons encore le total autorisé de capture en fonction des règles de contrôle de la pêche accréditées par MSC, que nous approuvons. Même si nous ne sommes pas certains que cela changera beaucoup les choses, nous n'avons pas le choix. Nous devons croire que ça fera une différence.
    En tant que Canadien élu qui représente une région de ressources rurales, je dois vous dire, monsieur Lugar, que j'ai une aversion innée à l'égard de la certification de pratiques de gestion des ressources naturelles canadiennes, tout simplement parce que ce sont les élus qui devraient être les responsables ultimes, pas des organisations établies dans des pays étrangers. Le Canada a trop souvent été victimisé par ce genre d'efforts. Le vôtre n'est probablement pas dans cette catégorie, car le professionnalisme de votre groupe est évident. Quoi qu'il en soit, je suis extrêmement sceptique à l'égard de ce genre d'efforts, et je m'interroge quand des industries achètent ce genre de service sur une base régulière.
    Cela dit, monsieur Lugar, y a-t-il déjà eu, selon votre expérience, un cas où une population de crevettes s'est rétablie après un déclin comme celui-ci, lorsque des limites draconiennes ont été imposées aux quantités pouvant être pêchées?

  (1635)  

    C'est une question intéressante. Honnêtement, je n'ai pas les connaissances qui me permettraient de vous répondre. Les populations de crevettes varient par juridiction, pas seulement ici au Canada, dans le cas de la crevette nordique, mais aussi dans la mer de Barents et ailleurs, et je ne peux donc pas répondre à votre question. Je n'en sais pas assez.
    Si vous me permettez de répondre brièvement à votre première intervention…
    Hélas, je n'ai pas beaucoup de temps et j'ai encore une brève question à vous poser.
    Que se passera-t-il s'il ne peut pas y avoir de plan de rétablissement? Que se passera-t-il si ce déclin du stock de crevettes a une origine naturelle et n'a pas été causé par la surpêche? Dans votre documentation, le seul outil dont vous parlez est une réduction de l'effort de pêche pour permettre aux stocks de se reconstituer. Mais que fait-on si ce n'est tout simplement pas possible?
    Ce que notre programme permettra d'analyser, c'est avec quelle efficacité le régime de gestion répond à la situation à laquelle nous sommes confrontés. Vous pourriez avoir une pêcherie extrêmement bien gérée à 10 % des niveaux actuels de la biomasse de crevette nordique. Tout dépend simplement de la manière dont le système de gestion applique les principes qui ont été acceptés.
    J'ai indiqué dans ma déclaration liminaire que les points de référence qui ont été établis au milieu des années 2000 et qui sont actuellement utilisés sont le reflet du régime de productivité qui était en place à l'époque. Quand ce régime change du fait de l'approche scientifique, à cause du MPO et de l'industrie, collectivement, je suis sûr qu'on pourra trouver de nouveaux points de référence et gérer en conséquence. Notre système permettra d'évaluer ça.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Sopuck.
    C'est maintenant au tour de M. MacAulay.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
    Monsieur Butler, c'est un plaisir de vous revoir. Pour une fois, nous sommes sur la même page.
    Des voix: Oh, oh!
    Ou dans la même image…
    Vous parlez de la différence entre la rentabilité de la pêche en Islande et en Norvège par rapport à Terre-Neuve. Ai-je raison de supposer que leurs navires hauturiers sont beaucoup plus efficients? Si tel est le cas, que se passe-t-il avec les usines de transformation à l'intérieur? Si c'est le cas, il n'y aura pas de transformation.
    Après avoir entendu les représentants du MPO il y a quelques jours, j'ai cru comprendre que le déclin n'est pas terminé. En outre, l'eau se réchauffe, ce qui veut dire que la reproduction ne sera pas aussi rapide non plus, si j'ai bien compris. Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez?
    Merci de cette question.
    Pourriez-vous aussi indiquer, monsieur Butler… J'ai un peu voyagé et je vous ai entendu parler de la Chine. Je pense que c'est une population massive et je me demande pourquoi nous ne sommes pas… Par exemple, pourquoi ce homard australien, qui est d'une tellement moins bonne qualité que le nôtre, coûte tellement plus cher en Chine que le nôtre, si on peut le trouver là-bas?
    Je vais répondre à vos questions dans le sens inverse. Je ne connais pas bien la pêche du homard. Nous avons une pêcherie de 25 millions de dollars à Terre-Neuve-et-Labrador. Je ne négocie pas les prix du homard. C'est une autre association, plus petite, qui s'en occupe. Je ne connais donc pas très bien la situation et je ne peux donc pas vous parler de la différence qu'il y a entre nos valeurs et les valeurs du homard australien.
    Je peux donner d'autres exemples, car il me semble qu'il y a toute une différence entre les deux, et la Chine est un si vaste marché. Je soupçonne que c'est la même chose pour beaucoup d'autres espèces aussi.
    Vous voulez dire qu'ils payent plus cher les produits d'autres pays que les nôtres?
    Oui. Est-ce exact ou non?
    Ce que je peux vous dire, c'est que je n'en sais rien.
    Bien.
    En règle générale, je ne crois pas que l'Asie paie moins pour notre produit qu'elle paierait pour du crabe des neiges de l'Alaska, par exemple.
    D'accord.
    Dollar pour dollar, spécification pour spécification, nous en sommes à la même valeur sur le marché pour le même crabe des neiges.
    D'accord. Laissons donc cette question de côté.
    J'aimerais beaucoup connaître votre réponse à mon autre question, c'est-à-dire que vous me disiez ce qui va arriver, d'après vous, à la pêche côtière, si l'on considère que les scientifiques du MPO ont raison et que le déclin n'est pas terminé.
    Pour ce qui est du déclin, si vous prenez la crevette côtière, nous étions à 177 millions de livres en 2008 et 2009. Nous n'avons pas tout pêché en 2009, car il y avait un litige sur les prix, et les valeurs de la crevette étaient tombées trop bas. Aujourd'hui, nous sommes juste en dessous de 90 millions de livres cette année. Dans l'intervalle, nous avons perdu trois ou quatre usines de transformation de la crevette. Si la trajectoire actuelle de la crevette côtière se maintient, l'industrie sera disparue dans quelques années.
     En ce qui concerne l'efficience de la pêche hauturière par rapport à la pêche côtière, tout dépend de votre définition de l'efficience. Je représente le secteur côtier. Mes membres ont un avis partagé sur la question des quotas de crevette nordique. J'ai des membres qui estiment qu'il faut maintenir les politiques actuelles du MPO, et d'autres qui ont un avis contraire. Voilà pourquoi je n'ai pas parlé des détails de la politique du DEPS, mais si…
    Je ne veux pas vous interrompre mais si vous pouviez préciser… Vous parlez de quotas, et nous parlons du dernier entré, premier sorti, mais le principe d'adjacence du produit fait également partie de la politique. Estimez-vous que la pêche côtière est plus proche du produit que la pêche hauturière? J'aimerais vous entendre là-dessus.

  (1640)  

    Oui, je laisserai mes membres traiter des questions de quotas, de DEPS et de toutes ces politiques du MPO car, comme je l'ai dit, j'ai des membres comprenant par exemple, comme Bruce l'a mentionné, la Labrador shrimp fishermen's union company, qui est au Labrador et qui aurait un point de vue sur la question que n'ont pas d'autres membres de l'association.
    Je vais répondre à une remarque qui nous ramène à ce que disait M. Chisholm et qui, je pense, me permettra de répondre à votre question. Il faut essayer de dissiper un peu le brouillard, ici. Si vous examinez la valeur des crevettes déchargées à Terre-Neuve-et-Labrador par la pêche côtière — et ce sont mes usines qui seront le plus durement touchées par les réductions, tout comme mes membres — et si vous examinez la valeur du crabe des neiges cette année, si vous prenez le panier global du poisson qui sera déchargé en 2014 à Terre-Neuve-et-Labrador, et les valeurs qui nous sont retournées par le marché sur la base des prix de la matière première et des prix du marché que nous obtenons, le rendement global de l'industrie des produits de la mer de Terre-Neuve-et-Labrador devrait être plus élevé cette année. Cela s'explique par le fait que le prix à la livre du crabe des neiges a tellement augmenté, et que le prix à la livre de la crevette a aussi augmenté.
    Mais il y aura des impacts. Tous les pêcheurs n'ont pas accès au crabe, par exemple, et ceux qui pêchent essentiellement dans la zone 4R, qui est exclusivement la pêche côtière au large de la côte ouest de Terre-Neuve-et-Labrador, cette pêcherie a baissé de 12 %, et ils iront donc pêcher à nouveau dans la zone 6, principalement. Les pêcheurs de la côte ouest de la zone 4R auront accès à la zone 4R et à la zone 6. Donc, s'ils pêchent seulement la crevette, il y aura des conséquences, mais il y aura aussi des augmentations de prix à cause des rendements accrus du marché. Nous devons espérer qu'il aura une augmentation de prix de la protéine, ce qui est peut-être fort regrettable pour le consommateur mais, en dernière analyse, c'est ce qui aidera l'industrie à devenir plus rentable à long terme, même si nous avons un panier de poisson qui rétrécit.
    La demande de protéine et de poisson sera immense pendant les 30 prochaines années, si j'ai bien compris.
    Elle est déjà immense et, comme je l'ai dit, c'est la chasse au dernier bison. C'est la dernière protéine sauvage que nous pouvons manger, et nous devrions tous en manger beaucoup plus, incontestablement. C'est ce qui va faire monter les prix. Nous le voyons en Chine. La Chine fait monter les prix parce qu'il y a là-bas une classe moyenne en pleine expansion qui a maintenant les moyens de consommer plus de produits de la mer. Donc, ça va nous aider.
    Permettez-moi d'ajouter un mot, monsieur MacAulay.
    En 2010, avant qu'on commence à réduire les quotas de crevettes, il y avait un groupe de travail sur le secteur côtier à Terre-Neuve-et-Labrador qui avait conclu qu'il y avait 50 % de surcapacité dans les usines de poisson. Il fallait une réduction de 50 % pour qu'elles soient viables. C'était avant qu'on commence à réduire les quotas de crevettes. Vous aviez donc une infrastructure côtière obèse, qui était totalement hors de proportion pour être productive par rapport à l'offre disponible, même avant qu'on commence à effectuer ces coupures.
    Cela va certainement pas mal régler ce problème-là, monsieur Chapman, je pense.
    Eh bien, je pense qu'il aura malheureusement des pertes d'emplois à Terre-Neuve-et-Labrador. Quelle que soit la suite des événements, c'est inévitable.
    J'aimerais vous demander quelques précisions sur ce Marine Stewardship Council. Il est basé à Londres, n'est-ce pas?
    Nous sommes une organisation mondiale, monsieur MacAulay. Notre siège mondial se trouve à Londres et nous avons des bureaux dans 16 pays.
    J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec moi ou non: pensez-vous qu'il arrivera un moment où, si vous n'avez pas la certification, vous ne pourrez pas vendre votre produit? Je pense que vous aviez Loblaw ou quelque autre très grande société — je l'avais noté ici mais je ne trouve plus mon bout de papier — et certains très gros détaillants dans ce conseil.
    Nous avons un certain nombre de partenaires qui vendent des produits certifiés MSC.
    Évidemment, le secteur que je comprends le mieux, s'il y en a un que je comprends, c'est celui du homard. Au sud de l'Île-du-Prince-Édouard, on a très peu pris de homard ces quatre ou cinq dernières années. Ma crainte est que — et vous me corrigerez si je me trompe —, si le Marine Stewardship Council voyait ce qui s'est passé là-bas pendant les trois ou quatre dernières années, avec des gens qui rentraient avec 30 ou 40 livres au lieu de 800 livres de l'autre côté de l'île, il y aurait un certain changement dans la certification de ce produit.
     Serait-il donc juste de dire que, quel que soit le parti au pouvoir — libéral, conservateur ou autre —, votre organisation est en train de s'emparer du pouvoir des gouvernements et de le remettre dans les mains des conglomérats? Est-ce une mauvaise analyse?
    Je sais bien que nous avons des scientifiques — en tout cas, je l'espère — qui sont des gens très compétents. Mon problème est de savoir ce qui se passera — juste en prenant le petit exemple de l'Île-du-Prince-Édouard — s'ils décident qu'ils peuvent vendre quand même le poisson? Vous ne pourrez pas vendre ce poisson dans cinq ans, si chaque ménagère recherche l'estampille du Marine Stewardship Council.
     Mais je crois aussi que nous ne sommes même pas dans la partie, et j'adorerais le reprocher au gouvernement mais je ne le peux pas. C'est un phénomène qui se passe à l'échelle mondiale, c'est-à-dire que le pouvoir s'échappe des mains des gouvernements pour s'en aller dans les mains de gens comme vous. Je ne vous en fais pas le reproche mais c'est tout simplement ce qui se passe.

  (1645)  

    Je ne me sens pas accusé, monsieur MacAulay, et je vous remercie de cette question.
    En réalité, et malgré tout le respect que je vous dois, vous êtes à 100 % dans l'erreur quand vous dites que le pouvoir s'échappe des mains du gouvernement et de l'industrie. En fait, vous le leur donnez. Essentiellement, tout ce que fait la certification, c'est qu'elle vous demande si vous avez mis un plan en place et si vous le respectez pour assurer la pérennité de votre pêche. C'est tout.
     En ce qui concerne les zones du homard au sud de l’île, dans le détroit de Northumberland, c'est en réalité en cours d'évaluation par rapport au référentiel MSC. La situation a été portée à l'attention du MSC et elle est en train d'être évaluée par un agent de certification indépendant, par un groupe comprenant des représentants de PEIFA, de la communauté mi'kmaq, et de PEISPA, l'association des transformateurs de produits de la mer. Cet effort a permis d'amener le reste du secteur du homard de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick dans le champ de l'évaluation. Je ne peux parler de l'évaluation pour le moment mais elle permettra essentiellement de voir si le gouvernement fait bien pour s'assurer que ces jours sombres dans la zone 25 ne se produiront pas, afin que nous puissions préserver la ressource pour les gens qui pourront ensuite commercialiser leurs produits à ces consommateurs qui désirent voir l'écolabel MSC, et ce n'est certainement pas tout le monde.
    Je ne voulais absolument pas vous manquer de respect, monsieur.
    Je comprends. Il n'y a pas de problème. J'accepte ça.
    Merci, monsieur MacAulay.
    Monsieur Butler.
    Je pense que c'est une question légitime. M. Sopuck avait demandé un peu la même chose.
    Au nom du secteur, je dirais que, oui, nous avons nos mises en garde. Le modèle westphalien de l'État souverain tient encore debout, et ça compte évidemment pour quelque chose.
    [Inaudible.]
    C'est un programme volontaire auquel nous avons invité le MSC à participer, et le MPO a proposé de travailler avec nous comme industrie. Ce n'est pas très différent des cas où nous disons qu'aucun animal n'a souffert pendant la production de ce produit, ou lorsque nous envisageons d'acheter des tapis ou des vêtements de certains pays d'Asie en nous assurant qu'aucun enfant n'a participé à leur fabrication.
    Nous pouvons bien avoir des États souverains, et c'est légitime mais, à un certain moment, si vous êtes un marché d'exportation, les gens à qui vous vendez vont vouloir obtenir certaines assurances. S'il suffit de dire, du point de vue de l'État souverain ou du gestionnaire de la pêcherie, que celle-ci est durable, tant mieux. Si nous pouvons inviter les autres à collaborer avec nous, volontairement, pour nous en assurer, je pense que ce serait parfait. Il y a des risques. Je comprends les risques que vous soulevez.
    Mais, si vous ne suivez pas les règles, on vous met dehors.
    Merci, monsieur MacAulay.
    Vous pouvez continuer à vendre votre poisson, mais vous êtes en dehors du programme.
    Merci, monsieur MacAulay. C'est tout pour vous.
    Monsieur Kamp.
    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie d'être venus, messieurs. C'est un sujet très intéressant et je pense que vous avez déjà bien éclairé notre lanterne.
     Monsieur Chapman, vous avez parlé d'une sorte d'explosion des stocks en 1997. C'est l'année, je suppose, où le ministre Mifflin avait annoncé une augmentation de 57 % du total autorisé de capture de la crevette nordique. À l'époque, il l’avait annoncé dans un communiqué de presse et avait énoncé les quatre principes. J'aimerais bien comprendre votre position sur ces principes, car je pense qu'on pourrait fort bien dire qu'ils sont contradictoires.
    Le premier était que la conservation est primordiale, ce qui est évidemment une question de bon sens. Le deuxième était que la viabilité des entreprises existantes ne serait pas mise en péril par cette nouvelle augmentation des quotas, et qu'elles conserveraient dans tous les cas leur allocation de 1996 et ne tomberait jamais en dessous. Le troisième était qu'il n'y aurait pas d'augmentation permanente de la capacité de récolte, et que la participation des nouveaux entrants serait temporaire. On avait employé ces mots. Le quatrième, cependant, est celui qui m'intéresse, car je pense qu'on y a fait référence aujourd'hui: c'est qu'on respecterait l’adjacence.
     Dites-moi donc comment tout cela pouvait se faire en même temps. Pourrait-on dire que la manière de résoudre ça, c'était en fait la manière dont je pense que ça a été résolu, et la manière dont je pense que les parties prenantes l'avaient compris, à savoir qu'on utiliserait le principe d'adjacence quand les allocations augmenteraient, afin que la majeure partie de l'augmentation des allocations aille, dans ce cas, à la flotte côtière à cause de ce principe d'adjacence, et qu'on suivrait en fait la même trajectoire en redescendant? Est-il raisonnable de penser que c'était comme ça qu'on avait l'intention de se faire comprendre et d'agir?

  (1650)  

    Tout à fait. De fait, dans le communiqué de presse, on fait référence à l’adjacence dans le contexte de la répartition de l'augmentation. Autrement dit, on accorderait la priorité aux Autochtones et aux détenteurs de permis de bateaux de moins de 65 pieds qui étaient adjacents à la ressource. Donc, même les navires hauturiers qui étaient adjacents à la ressource ne faisaient pas partie du groupe prioritaire. Ils étaient couverts par l'autre disposition disant qu'ils seraient protégés du point de vue de leur statut existant, mais qu'ils n'obtiendraient pas une partie importante de l'augmentation, et peut-être même aucune.
    Donc, l’adjacence n'était pas contradictoire du point de vue de la viabilité existant à l'époque. Elle était formulée en termes d'accès à l'augmentation. Les augmentations n'allaient pas être attribuées à des Canadiens de la Colombie-Britannique ou à des Canadiens du Québec. Elles allaient l'être à ceux qui étaient adjacents à la ressource, c'est-à-dire les Autochtones et les détenteurs de permis de bateaux de moins de 65 pieds.
    Corrigez-moi si je me trompe mais il me semble que l'expression qu'on a utilisée ensuite, « dernier entré, premier sorti », ne l'avait pas été en 1997. Ça ne faisait pas partie du communiqué de presse. Est-ce comme ça que vous avez compris la chose aussi? En fait, est-ce comme cela que la FFAW a interprété la chose, ou est-ce qu'il y a eu un quelconque malentendu, d'après vous?
    Il y a eu en 2012 un rapport de Ernst and Young, concernant une analyse indépendante commandée un an auparavant par le ministre Ashfield, qui contenait un très bon historique à ce sujet. On y trouvait une page et demie consacrée à cette question.
     Tout le monde savait fort bien, même si l'on n'avait pas employé l'expression « DEPS », que l'annonce du ministre Mifflin serait qu'on accorderait la priorité aux nouveaux entrants à la hausse, mais qu'ils devraient assumer la responsabilité à la baisse. De fait, nous avons une correspondance des ministres de cette période qui le confirme. On dit dans le rapport de Ernst and Young que la question a été discutée pour la première fois au comité consultatif de la crevette nordique, en 2000, et qu'elle est apparue pour la première fois dans le plan de gestion de 2003.
    J'ai aussi avec moi la copie d'une lettre de FFAW, la Fish, Food and Allied Workers union, adressée au gouvernement du Canada le 10 octobre 1997, dans laquelle on entérine précisément la méthode du DEPS, sans employer l'expression mais en en exprimant le sens. C'était donc connu de tout le monde et personne n'avait soulevé d'objection. À l'époque, ce fut une manne pour les nouveaux entrants, à juste titre parce qu'ils avaient subi l'effondrement des stocks de morue, mais cela avait été envisagé comme une situation temporaire.
    Que devons-nous penser de l'initiative du ministre Hearn — j'ai travaillé aussi avec lui à l'époque — consistant à changer en 2007 les permis temporaires de la flotte côtière en permis réguliers?
    Si j'avais un instant, je pourrais retrouver la citation, mais le ministre Hearn avait explicitement annoncé que l'objectif… Disons d'abord que c'est le syndicat des pêcheurs qui avait demandé que le mot « temporaire » soit régularisé en permis réguliers. Le ministre Hearn avait annoncé que l'objectif était de faciliter la rationalisation, de permettre le regroupement de permis, et de faire face à la surcapacité qui était déjà apparue dans le secteur de la crevette côtière. Le ministre a ensuite poursuivi en annonçant que cela n'avait aucunement modifié la politique d'attribution annoncée par le ministre précédent et reproduite dans le plan.
    En fait, cette mesure consistant à rendre l'expression DEPS très strictement sujette seulement aux ententes sur les revendications foncières est apparue en 2007. C'était sous l'égide du ministre Hearn, et il avait fait cela à cause de la confusion créée par la transformation de la désignation temporaire en permis réguliers.
    Je pense que cette information est utile.
     Je suppose que votre organisation avait adressé un mémoire à Ernst and Young.

  (1655)  

    Oui.
    Je l'ai vu aussi et je pense qu'il serait utile que le comité en prenne connaissance.
    J'aimerais vous poser maintenant une question accessoire. Nous entendons constamment parler de la flotte hauturière, des pêcheurs traditionnels et de la flotte côtière, mais nous avons aussi entendu parler de « détenteurs d'allocations spéciales ».
     Qui sont-ils et quelle est leur place dans la politique du dernier entré, premier sorti?
    Je vais essayer de vous répondre mais je dois d'abord vous dire qu'en 1997, quand cette décision a été prise et que cet arrangement a été discuté dans le secteur, je représentais les transformateurs côtiers de Terre-Neuve-et-Labrador. Je défendais la cause des nouveaux entrants.
    Le gouvernement de l'époque, qui oeuvrait pour les nouveaux entrants, m'avait indiqué de manière parfaitement claire, ainsi qu'à d'autres, que ce serait temporaire. Ça prendrait peut-être deux ans, cinq ans ou dix ans, mais personne ne devait se faire d'illusions sur ce qui allait arriver à terme. Je ne le conteste pas.
    Il y a eu un certain nombre d'allocations spéciales. Avec les augmentations, divers ministres ont décidé de ne pas donner de quotas au secteur côtier ni au secteur hauturier mais de les donner aux collectivités pour lever de l'argent. Les collectivités comprenaient, par exemple, la coopérative de Fogo. Elles ont reçu une allocation disant que le secteur hauturier pêcherait en leur nom, et celui-ci leur a donné de l'argent pour avoir le droit d'exploiter leur allocation.
    C'est arrivé aussi avec la collectivité mi'kmaq de la côte sud de Terre-Neuve. C'est arrivé pour une partie de la zone de développement de St. Anthony, dont une organisation reçoit des allocations spéciales. Et il y en a eu d'autres. Elles sont tenues de vivre avec le système du DEPS, ce qui veut dire qu'elles ont eu leur part à la hausse et ont reçu les bénéfices sous forme d'argent liquide en revendant leurs quotas aux pêcheurs, mais qu'elles devraient la perdre à la baisse.
    Cela a suscité beaucoup d'intérêt car cela avait une grande valeur économique et a produit une injection de fonds dans ces groupes communautaires. L'élément positif de ces allocations est qu'il n'y a pas eu d'augmentation permanente de la capacité de pêche parce qu'on devait passer un contrat soit avec le secteur côtier, soit avec le secteur hauturier.
    Puis-je faire une dernière remarque?
     Je regrette de ne pas pouvoir en parler mais il se trouve que j'ai vu, monsieur Chapman — et j'adorerais vous interroger à ce sujet aussi —, une série de diapositives que vous avez présentées, je pense, au comité multipartite de Terre-Neuve-et-Labrador et que j'ai trouvé très utiles pour résumer ces informations. Je pense que le comité aurait tout intérêt à en prendre connaissance. Je suggère au président d'en faire la demande.
    Nous pouvons l'envoyer au comité.
    Merci beaucoup. Merci, monsieur Kamp.
    Monsieur Chapman, nous vous serions très reconnaissants de bien vouloir envoyer ce document au greffier du comité.
    Messieurs, au nom de tous les membres du comité, je vous remercie beaucoup de votre participation à nos travaux. Je vous remercie de vos exposés et d'avoir bien voulu répondre à nos questions.
    La séance est levée, et le sous-comité se réunira dans un instant.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU