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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 033 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 21 novembre 2016

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Nous avons une chose à régler avant d'écouter les témoins. À la dernière séance, nous avons adopté une motion visant à ajouter une séance afin d'aborder les algorithmes. La liste des témoins proposés à cette fin a été envoyée, et je pense que Mme Harder a une motion à nous soumettre.
    Oui, j'ai dressé une liste de témoins pour faire avancer les choses. J'ai fait de mon mieux pour représenter tous les partis parmi la liste des témoins qui a été soumise. Voici donc ma motion:
Que, pour faire suite à la motion adoptée par le Comité de la condition féminine le 14 novembre 2016 concernant la réunion fixée au 30 novembre 2016, consacrée à l’examen des effets de la conservation de contenu basée sur un algorithme automatisé, dans le cadre de l’étude sur la violence envers les jeunes filles et les femmes au Canada, le Comité invite les témoins suivants à comparaître:

Diana Inkpen, Université d’Ottawa;

Colin McKay, chef des politiques publiques et des relations gouvernementales, Google Inc. (Canada);

Thierry Plante, spécialiste en éducation aux médias, HabiloMédias, le centre canadien d’éducation aux médias et de littératie numérique;

Sandra Robinson, Université Carleton;

Kelly Acton, directrice générale, Communications et Marketing, Innovation, Sciences et Développement économique Canada; et

Corinne Charette, sous-ministre adjointe principale, Spectre, technologies de l’information et télécommunications.
    Au total, les six témoins seront répartis en deux groupes de trois. Tous ces témoins ont des compétences en matière d'algorithmes. Il y a des représentants tant du privé que du public. Il y a bien sûr des groupes axés sur la recherche qui aborderont le volet théorique, mais le volet pratique sera aussi représenté. J'ai essayé de trouver un juste équilibre.
    Madame Damoff.
    Je ne comprends pas très bien. Je ne pensais pas que nous nous occupions des travaux du Comité en ce moment. Je croyais que nous avions soumis des listes de témoins vendredi pour ce volet de l'étude. Je suis arrivée en retard: ai-je manqué quelque chose?
    Rachael présente une motion visant à recommander quels témoins nous devons convoquer à partir de tous les témoins proposés. Si nous voulons qu'ils témoignent le 30 novembre, nous devons les aviser très bientôt.
     Bien. J'ai effectivement manqué quelque chose.
    Je suis désolée.
    C'est correct.
    La liste est basée sur les noms que tout le monde a proposés?
    Oui. Vous, Mme Nassif et bien d'autres membres du Comité ont soumis des noms, puis Rachael a proposé une série de témoins. Elle tente de former deux groupes pour qu'il y en ait un à la première heure, et un autre à la deuxième heure. Elle propose une liste de 6 témoins sur un total d'environ 12 propositions.
    D'accord.
    Y a-t-il des commentaires?
    (La motion est adoptée.)
    La présidente: Très bien. Nous allons maintenant passer aux témoins.
    Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui la représentante de Twitter. Patricia Cartes est chef de la Sécurité mondiale. Je vous souhaite la bienvenue. Nous avons hâte de vous entendre. Vous aurez 10 minutes pour prononcer votre exposé, après quoi nous commencerons la période de questions. Vous pouvez y aller.

[Français]

     Tout d'abord, je voudrais remercier le Comité de nous donner l'occasion de lui présenter les politiques de sécurité avec lesquelles nous travaillons, chez Twitter.

[Traduction]

    Je me lance.
    Comme vous l'avez dit, je m'appelle Patricia Cartes. J'ai le privilège de représenter les équipes de confiance et de sécurité de Twitter. Nous travaillons très fort dans les coulisses pour prévenir les abus et nous attaquer à tous les signalements que nous recevons sur la plateforme.
    Puisque je suis Espagnole, j'ai du mal à être concise. Je ferai donc de mon mieux pour respecter le style de Twitter et m'en tenir peut-être pas à 140 caractères, mais bien aux 10 minutes qui me sont allouées. Je parlerai un peu vite pour que nous ayons le temps de donner plus de détails à la période de questions et de réponses.
    Je veux d'abord expliquer en quoi la plateforme Twitter diffère des autres médias sociaux. Nous avons une plateforme publique, diffusée à large échelle et interactive. Lorsqu'il est question d'abus en ligne, on pense généralement à Twitter en raison de son caractère public. De même, les gens ont peut-être davantage accès au contenu de notre plateforme qu'à celui des autres plateformes, ou que dans leur vie privée.
    Cela signifie bien sûr que nous avons également une plus grande responsabilité. Nous devons protéger nos utilisateurs contre les abus commis sur la plateforme, de même que les internautes qui n'utilisent peut-être pas Twitter, mais qui en voient le contenu à l'extérieur de notre site.
    Nous avons 313 millions d'utilisateurs, ce qui ne semble peut-être pas énorme comparativement à nos sociétés sœurs. Par contre, la portée de Twitter est attribuable au nombre de gazouillis qui sont diffusés sur la plateforme, qui s'élèvent à un milliard en deux jours. Pour vous donner une idée, il a fallu à Twitter trois années, deux mois et un jour pour atteindre son milliardième gazouillis, alors qu'il y a aujourd'hui 500 millions de gazouillis par jour.
    Quelque 79 % de nos utilisateurs sont à l'extérieur des États-Unis, de sorte que nous sommes loin d'être une société exclusivement américaine même si Twitter a vu le jour à San Francisco. C'est pour cette raison que des gens comme moi, qui ne sont pas originaires des États-Unis, peuvent occuper de telles fonctions.
    Nous avons des bureaux à Singapour, à Dublin et à San Francisco pour offrir un soutien opérationnel aux utilisateurs. Ces endroits ont été choisis pour que nous puissions assurer une couverture planétaire 24 heures par jour et 7 jours par semaine. Quand Singapour va se coucher, Dublin prend le relais, puis lorsque ce bureau ferme, c'est au tour de San Francisco d'assurer le service.
    Nous cherchons aussi à fournir un soutien qui ne repose pas uniquement sur les compétences en matière d'abus. Comme vous pouvez l'imaginer, les abus prennent toutes sortes de formes, qu'il s'agisse de pourriels, d'exploitation sexuelle des enfants, de harcèlement fondé sur le sexe, d'autres types de discours haineux et d'extrémisme. Quoi qu'il en soit, nous nous attardons également aux particularités du marché. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous collaborons avec des organisations sur le terrain, qui sont spécialistes du domaine. Ces gens nous conseillent sur les tendances en matière d'abus, mais nous révèlent aussi les principales difficultés rencontrées sur les plateformes, aux dires des utilisateurs de ces marchés.
    Je tiens à attirer votre attention sur le travail que nous réalisons en collaboration avec HabiloMédias, High Resolves et Hollaback! Canada, des organisations qui ont vraiment joué un rôle déterminant dans certains changements que nous avons apportés pas plus tard que la semaine dernière.
    Aussi, 82 % de nos utilisateurs accèdent au site par la téléphonie mobile. Cette donnée est extrêmement importante. C'est justement parce que Twitter a vu le jour sur une plateforme mobile que nous imposons une limite de 140 caractères. Lorsque Jack Dorsey a créé la plateforme, l'envoi de gazouillis passait nécessairement par la messagerie texte qui, à l'époque, était limitée à 140 caractères. Voilà pourquoi il s'agit aujourd'hui encore d'une plateforme à 140 caractères.
    Cela signifie également qu'en présence d'abus continuels, nous ne pouvons pas employer les méthodes traditionnelles comme le blocage d'adresse de protocole Internet, ou IP, étant donné que la majorité de nos utilisateurs se servent d'adresses IP dynamiques, qui sont mobiles. Ainsi, il pourrait y avoir un utilisateur mal intentionné et un bon utilisateur à une même adresse IP. C'est pour cette raison que nous devons réfléchir aux modèles de comportement lorsqu'il est question d'automatiser le soutien et la détection des abus sur Twitter. Est-ce que des utilisateurs qui avaient été bannis reviennent sur la plateforme à l'aide d'adresses électroniques et de noms similaires, puis utilisent des mots-clics semblables et ciblent les mêmes comptes? Lorsque nous observons une combinaison de modèles semblables, il nous est plus facile d'automatiser les choses. Nous ne pouvons pas nous contenter de bloquer un mot ou une adresse IP, puis espérer mettre fin à l'abus. C'est impossible en raison de la nature mobile de notre plateforme.
    Nous avons aussi des règles. Je sais qu'on pense souvent que Twitter est une véritable jungle, mais c'est faux. Même si nous croyons à la liberté d'expression et à la vérité, cette philosophie sous-jacente ne veut pas dire grand-chose si les gens ont peur de s'exprimer. C'est pourquoi nous avons apporté des modifications importantes aux règles de Twitter ces dernières années, et surtout l'année dernière.

  (1535)  

     Je souhaite aujourd'hui vous expliquer quelques-unes de ces règles.
    Il est important de savoir que nos règles sont publiques. Nous voulons que nos utilisateurs en soient conscients, de sorte que, s'ils vont trop loin, nous puissions les tenir responsables et leur montrer non seulement quelles dispositions ils ont transgressées, mais aussi quels gazouillis précis étaient contraires aux règles.
    Je serai très claire. Nous ne permettons à nos utilisateurs ni de proférer des menaces de violence ni d'encourager le terrorisme ou la violence, surtout lorsque les propos ciblent des catégories protégées. Je fais référence ici à la Charte internationale des droits de l'homme de l'ONU: on parle ici de la race, de l'origine ethnique, du pays d'origine, de la religion, de l'orientation sexuelle, de l'identité de genre, de l'âge et de l'incapacité.
    Sur une plateforme telle que Twitter, il est permis de remettre en question une idée ou une notion, mais pas de s'attaquer à une personne qui adhère à cette notion ou à cette idée. Par exemple, je pourrais affirmer que « je déteste l'Espagne », mais pas que « je déteste les Espagnols, de sorte que j'encourage la violence à leur égard ». Voilà où nous devons tracer la ligne. Nous nous demandons toujours si le contenu de la plateforme pourrait causer du tort dans le monde réel. Dans l'affirmative, il est important pour nous d'intervenir et de prendre des mesures à ce chapitre.
    Dans le cas du harcèlement, nous indiquons clairement qu'il est interdit de s'adonner à des attaques, à des abus ou à du harcèlement contre autrui, ou d'inciter quelqu'un à le faire. Lorsque nous examinons des publications, n'oubliez pas qu'il nous manque souvent de contexte avec 140 caractères. C'est pourquoi nous devons vérifier l'intention du compte. Le compte a-t-il été créé dans le seul but de harceler une personne? Sinon, les gazouillis du compte étaient-ils constructifs avant que quelque chose n'incite l'utilisateur à publier des propos qui enfreignent nos règles? Vous serez peut-être surpris d'apprendre que c'est le cas de la majorité des infractions. Les violations ne proviennent pas de la pire catégorie de trolls, à savoir les trolls Gamergate. Ce que nous observons au quotidien, ce sont des utilisateurs qui commencent à publier des gazouillis non constructifs pour une raison quelconque.
    L'application des règles dépend de la gravité de l'infraction. Si nous découvrons que l'utilisateur a créé le compte dans le seul but de harceler une personne ou un groupe, nous allons suspendre le compte de façon permanente, après quoi nous surveillerons si de nouveaux comptes sont créés pour remplacer le premier, ce qui arrive souvent. En revanche, si nous constatons qu'un utilisateur dont les gazouillis étaient constructifs est provoqué par quelque chose, puis qu'il commence à envoyer des messages moins constructifs, nous essaierons de ramener l'utilisateur dans le droit chemin au moyen d'une approche pédagogique.
    Nous pensons que ces méthodes fonctionnent. Nous pouvons parfois intervenir en demandant à l'utilisateur de supprimer des gazouillis précis qui enfreignent nos règles. Nous pouvons aussi geler le compte pour une période donnée afin d'empêcher l'utilisateur d'interagir pendant le délai fixé. Nous pouvons également poser des questions à l'utilisateur afin de vérifier certains renseignements. Il est possible d'utiliser Twitter de façon anonyme, mais nous ne voulons pas que le couvert de l'anonymat soit employé à des fins abusives. Si nous constatons qu'un utilisateur essaie d'enfreindre nos règles sous le couvert de l'anonymat, nous lui demanderons un numéro de téléphone ou une adresse de courriel pour que nous ayons l'information.
    Vous ne serez probablement pas surpris d'apprendre que les trolls de la pire espèce, sachant qu'ils peuvent être tenus responsables, ne reviennent généralement pas sur le site lorsque nous leur demandons des informations supplémentaires, d'autant plus que les autorités chargées de l'application de la loi demandent à Twitter de leur fournir des données dans certaines affaires pénales.
    Il est important de se rappeler que nos mesures ne se limitent pas à la suspension de comptes. Nous pouvons prendre toutes sortes de mesures. Les cas d'abus ne sont pas noir ou blanc; il existe souvent une zone grise entre les deux pôles.
    Je veux également parler des outils. Nous voulons permettre à nos utilisateurs de personnaliser leur expérience sur Twitter. Nous avons donc lancé un certain nombre d'outils à cette fin.
    Pas plus tard que mardi dernier, nous avons annoncé que nous étendions la portée de la fonction « masquer ». Il est désormais possible de masquer un compte, ce qui évite de recevoir des notifications lorsque l'utilisateur en question publie un gazouillis pour aussi longtemps qu'on ne veut pas voir ce contenu, mais il est aussi possible de masquer des mots, des mots-clics, des conversations et des émoticônes. Disons par exemple que je ne souhaite plus voir de contenu qui se rapporte à Trump. Si je masque le mot-clic « trump », je ne verrai plus les publications afférentes dans mes notifications.
    Nous avons également prévu un outil permettant à un utilisateur d'en bloquer un autre. Nous recommandons de l'utiliser dans des situations plus lourdes, par exemple si vous tenez absolument à empêcher une personne d'interagir avec vous sur Twitter. Lorsque vous bloquez quelqu'un, cette personne ne peut ni interagir avec vous ni vous envoyer de gazouillis, et vous ne recevrez aucune notification si elle tente de vous envoyer un gazouillis.

  (1540)  

    Le plus important, c'est de se rappeler que nous ne voulons pas créer de faux sentiments de sécurité en tant que plateforme publique. Si vous ne voulez vraiment pas qu'une personne voie vos gazouillis, nous vous recommandons aussi de les protéger. Vous pouvez bloquer une personne, mais pour éviter qu'elle ne voie votre contenu lorsqu'elle est déconnectée ou qu'elle utilise un moteur de recherche, vous pouvez aussi protéger vos gazouillis.
    Merci beaucoup. Votre temps est écoulé.
    Nous allons commencer le premier tour. Mme Ludwig, ma collègue, sera la première intervenante.
    Pouvons-nous d'abord prendre une photo et la gazouiller?
    Patricia, buenas tardes. Me llamo Karen Ludwig. Yo soy en Cuba por siete años.
    Je pense que je me suis bien exprimée, n'est-ce pas? J'ai travaillé à Cuba pendant sept années.
    Oui.
    Je suis très heureuse de votre exposé, et surtout d'entendre parler du travail réalisé du côté de Twitter.
    Nous avons récemment entendu un message de celle qui sera bientôt la première dame des États-Unis. Voici ce qu'elle a dit à propos de la cyberintimidation:
    
Il n'est jamais acceptable qu'une fillette ou un garçon de 12 ans fasse l'objet de moqueries, d'intimidation ou d'attaques. C'est terrible quand une telle situation survient au terrain de jeu, et c'est pire encore lorsque l'auteur est une personne anonyme sur le Web.
     Lorsque des célébrités ou des personnalités connues abordent des questions telles que la cyberintimidation, quelle en est l'incidence sur les changements apportés au fonctionnement des organisations et sur la sensibilisation du grand public?
    Gracias.
    C'est une excellente question.
    Je pense que l'effet est le même que celui qu'obtiendrait en faisant ce genre de déclarations un de nos partenaires en matière de sécurité ou un des gouvernements avec qui nous travaillons.
    Pour ce qui est de cette déclaration précise, j'aimerais rappeler non seulement à la prochaine première dame, mais aussi à tout le monde que nous ne permettons pas aux enfants de moins de 13 ans d'utiliser notre plateforme. Nous espérons donc qu'aucun enfant de moins de 13 ans ne se fait intimider sur notre plateforme, car il ne devrait pas l'utiliser dans un premier temps, en vertu de la COPPA, la Children's Online Privacy Protection Act. Cela dit, je suis toujours sensible aux préoccupations exprimées, que ce soit par des célébrités, des politiciens ou, comme je l'ai dit, des organismes sans but lucratif qui travaillent dans ce domaine.
    Je pense que la société doit être consciente qu'il s'agit d'un problème. Lorsque des gens subissent de mauvais traitements en ligne, c'est rarement juste en ligne. En effet, les mauvais traitements infligés en ligne ont tendance à refléter ce qui se passe hors ligne. Ce qui est plutôt intéressant à propos de l'incitation à la haine sur Twitter, c'est que bien que nous ferons évidemment tout ce qui est en notre pouvoir pour la combattre sur notre plateforme, nous devons nous rappeler que ces idées circulent dans notre société.
    Nous devrions nous ouvrir les yeux sur ce que le monde est, pas sur ce que nous voulons qu'il soit. Nous pensons qu'une plateforme comme Twitter peut permettre la diffusion de contre-discours.
    Je me réjouis de ces déclarations. Nous sommes impatients de travailler avec la nouvelle administration pour poursuivre la mise en oeuvre de ces changements, mais cela ne change pas le travail que nous faisons déjà. Plus précisément, nous nous adressons à des experts. Je me suis déjà adressée à MediaSmarts. Il y a également le Amanda Todd Legacy Fund, avec qui nous travaillons régulièrement. Je pense qu'ils ont les bonnes connaissances, et nous espérons que toutes les administrations du monde entier les consulteront pour obtenir l'éclairage nécessaire.

  (1545)  

    Bien, merci.
    Il n'y a probablement pas de réponse facile à ma question. Comme on dispose de 140 caractères pour écrire un message et que beaucoup de personnes essaient d'obtenir des mentions « j'aime », le partage de leurs gazouillis et un plus grand nombre d'abonnés, est-il possible que cela mène à des messages plus sensationnalistes?
    Vous avez raison de dire qu'il n'y a pas de réponse facile à la question.
    C'est possible. Sur Twitter, on peut également ajouter des images et des liens. C'est intéressant, car lorsque nous avons commencé nos activités, on ne pouvait pas faire ce genre de choses, et parce que ce n'était pas possible, certaines violations de nos règles n'avaient même pas eu lieu. Au commencement de nos activités, nous n'avons pas vu autant de violations de la vie privée que maintenant, alors qu'on peut partager des images, des liens et ainsi de suite.
    Il arrive parfois que les gens tentent de combiner différentes plateformes. Ils téléchargent un lien sur une autre plateforme et le partage ensuite au moyen de Twitter pour joindre le plus de gens possible. C'est une chose à laquelle nous continuons de travailler avec nos sociétés soeurs. Quand nous voyons qu'une de nos plateformes sert à infliger de mauvais traitements, comment pouvons-nous travailler avec nos sociétés soeurs pour prévenir ces mauvais traitements sur d'autres plateformes?
    Je pense que nous avons pas mal de succès dans le cadre de nos différents groupes de travail, mais vous avez raison de dire que le manque d'espace, pour ainsi dire, pourrait faire en sorte que certaines personnes se servent de la plateforme à mauvais escient. Nous en sommes conscients, et nous essayons de continuer de combattre cette utilisation abusive, surtout en la signalant, non seulement sur notre centre de santé, mais aussi à même le gazouillis. Lorsqu'une personne a l'impression que quelqu'un tente d'utiliser abusivement la plateforme, justement parce qu'il y a peu d'espace, elle peut cliquer sur un de nos trois boutons pour nous le signaler.
    À ce sujet, madame Cartes, vous avez dit que vous travaillez avec vos sociétés soeurs.
    Du point de vue de la recherche, je me demande comment les données sont recueillies, comment on en fait rapport et peut-être comment elles sont partagées. Sur le plan de la recherche, il s'agit sans aucun doute d'un thème central, comme le manque de signalements, que le Comité a abordé au sujet d'autres formes de violence. Financez-vous des organisations ou des programmes universitaires pour mener des travaux de recherche de ce genre?
    C'est une autre excellente question, car, compte tenu des lois sur la protection des renseignements personnels, la quantité d'information que nous pouvons communiquer à nos sociétés soeurs est limitée.
    Disons que nous voyons sur Twitter un cas de mauvais traitement qui a des ramifications sur la plateforme ASKfm. Je peux prévenir mon homologue à ASKfm, mais je ne peux pas lui communiquer toute l'information sur l'utilisateur. Cela n'a pas vraiment nui à notre collaboration étant donné que Twitter est une plateforme publique et que nous pouvons donc partager le gazouillis, qui contient suffisamment d'information pour que les autres plateformes prennent des mesures.
    C'est un peu plus compliqué dans la situation inverse. Facebook peut nous prévenir au sujet d'un certain profil. Nous allons évidemment examiner les cas de maltraitance signalés au moyen de notre plateforme ou le contenu abusif d'un compte donné. Au-delà de cette approche au cas par cas, nous avons constaté que les groupes de travail dont j'ai parlé sont extrêmement utiles. Nous en avons un qui porte sur l'automutilation et le suicide. Nous voyons des adolescents qui tentent d'utiliser ces plateformes pour encourager l'automutilation et le suicide. Ils utilisent des termes qui ne sont pas clairs, que nous ne connaissons pas bien. Nous pouvons apprendre beaucoup des discussions que nous avons avec des organisations comme Lifeline et nos sociétés soeurs pour voir quelle forme cela prend sur ces plateformes. Ces échanges sont extrêmement utiles.
    Un autre excellent exemple est celui de la nudité non consensuelle. Nous avons un groupe de travail auquel participe la procureure générale de la Californie. Nous n'aimons pas parler de porno-vengeance, car ce n'est pas tout simplement un autre type de pornographie commerciale. Ce contenu détruit des vies et des réputations. Nous exerçons des pressions pour que le terme employé à l'avenir dans la législation soit plutôt « nudité non consensuelle ». Il a été extrêmement utile de tout simplement entendre de leur part quelle forme prend ces mauvais traitements sur leur plateforme et sur la nôtre.
    Des groupes et des gens avec qui nous avons collaboré examinent d'autres plateformes: le Dangerous Speech Project — Susan Benesch du centre Berkman Klein serait une excellente chercheuse —; Danielle Citron, qui vient aussi de la faculté de droit de l'Université du Maryland. Je serais heureuse de donner le nom d'autres experts concernant ces données.

  (1550)  

    Votre temps est écoulé. Nous allons maintenant passer à Mme Harder, pour sept minutes.
    Merci d'avoir pris le temps de venir comparaître.
    J'ai quelques questions pour vous, dont la plupart portent sur l'idée des algorithmes utilisés pour diriger la circulation en ligne. De quelle façon Twitter s'y prend-il pour utiliser des algorithmes dans le but d'attirer des gens sur le site et de faciliter l'utilisation de la plateforme?
    De toute évidence, nous ne nous y prenons pas très bien, car notre croissance est plutôt faible.
    Blague à part, nous ne nous servons pas vraiment d'algorithmes pour attirer des gens sur la plateforme. Il arrive parfois que nous en utilisions pour détecter des comportements abusifs, ce qui est ce à quoi je faisais allusion. Nous avons déjà utilisé certains outils qui ont vraiment aidé à signaler certains modèles de comportement, à nous mettre au courant lorsqu'un compte est peut-être utilisé à mauvais escient. Nous ne nous servons pas vraiment d'algorithmes pour attirer des gens.
    Vous avez peut-être vu comment nous présentons le contenu aux utilisateurs existants. Nous utilisions auparavant un modèle chronologique, selon lequel aucune modification du microblogue n'était faite avant de présenter les gazouillis; c'était tout simplement chronologique. Nous nous servons maintenant d'algorithmes pour déterminer ce qui intéresse le plus les gens, en fonction de leurs interactions. Si j'interagis régulièrement avec mon collègue Will, lorsque j'ouvre une session, je vais peut-être voir la mention « pendant votre absence » pour faire ressortir ses gazouillis, en fonction de mes interactions avec lui.
    Nous avons recours dans une certaine mesure à l'intelligence artificielle, mais c'est surtout pour que les utilisateurs actuels puissent naviguer plus facilement. Ce n'est pas exactement comme le fil de nouvelles de Facebook, mais l'idée est similaire. Ce n'est pas seulement chronologique; cela s'appuie davantage sur ce que nous considérons comme leurs intérêts.
    Pourriez-vous décrire brièvement ce qu'est un algorithme pour les gens présents?
    Il s'agirait par exemple d'un programme qui tient compte d'un certain nombre de facteurs, et lorsque ces facteurs coïncident, l'algorithme nous prévient. Par exemple, pour combattre l'exploitation sexuelle, nous pourrions programmer l'algorithme de manière à détecter tous les utilisateurs qui contactent un mineur qui nous a donné son âge et qui utilisent certains mots clés dans une période donnée. Si ces comportements se répètent beaucoup au même moment, nous serons prévenus.
    Les algorithmes sont un moyen intelligent de demander au système de nous prévenir de certaines situations qui nous échapperaient à moins que quelqu'un les signale.
    Bien.
    Est-il possible que les algorithmes facilitent involontairement l'exploitation ou la violence par Internet plutôt que d'être utiles? Je comprends que ce ne serait probablement pas intentionnel, mais est-il possible qu'ils aient d'une certaine façon cette conséquence involontaire?
    Je travaille dans le secteur de la technologie depuis 10 ans. Je travaillais avant pour Google et Facebook, dans le même domaine, et j'ai toujours été très sceptique à propos de la seule utilisation des algorithmes. Ils ne mèneront pas nécessairement à plus d'exploitation ou à plus de violence sur les plateformes, mais s'ils représentent le seul moyen de soutenir les utilisateurs, ils peuvent causer beaucoup de dommages collatéraux. Un algorithme peut signaler certains comptes ou certaines activités non associés à des comportements abusifs, et il faut alors les examiner manuellement.
    Je vais vous donner un exemple parfait. Nous avions commencé à observer un usage abusif de mots-clics sur Twitter — un mot-clic est un mécanisme servant à avoir une conversation sur la plateforme à propos d'un sujet précis —, par exemple le mot-clic #stopIslam. Nous avons immédiatement pensé qu'il devait s'agir d'un discours haineux. Lorsque nous avons commencé à examiner les données — en passant, le Dangerous Speech Project nous a aidés, et le Washington Post a publié un excellent article à ce sujet —, nous avons constaté que la majorité des gazouillis étaient en fait positifs. Les gens disaient par exemple que le gazouillis était atroce, qu'il ne fallait jamais dire cela. Il y a aussi le mot anglais « bitch ». Lorsque nous avons commencé à automatiser nos processus, nous avons constaté qu'un groupe démographique utilisait le mot « bitch » — excusez-moi de l'employer — pour se saluer. La majorité de nos systèmes ont presque cessé de fonctionner parce qu'il s'agissait d'un contenu non injurieux.
    Le gouvernement et les entreprises concernées doivent se demander si ces mesures sont proportionnelles. Si on se fiait uniquement à des algorithmes, serait-il proportionnel de regarder le compte d'utilisateurs sans que des comportements abusifs aient été signalés? C'est pourquoi je préconise toujours de ne pas se contenter d'un algorithme et de faire aussi une vérification manuelle pour automatiser le soutien.

  (1555)  

    Vous avez soulevé un excellent point en disant que les algorithmes ne suffisent probablement pas à eux seuls. Je vous suis reconnaissante de l'avoir mentionné. C'est sans aucun doute un bon point.
    À propos de faire également une surveillance manuelle, vous avez utilisé l'exemple du mot-clic « bitch ». Le terme est injurieux selon l'algorithme, mais vous avez ensuite jeté un coup d'oeil manuellement pour vous rendre compte qu'il n'est pas toujours employé de manière injurieuse. C'est parfois approprié. Comme réagissez-vous alors? Gardez-vous l'algorithme original en place afin de chercher le terme et le signaler pour ensuite faire un examen manuel, ou assouplissez-vous l'algorithme pour qu'il soit plus permissif? Que faites-vous dans ce genre de situation?
    C'est la dernière option. On modifie l'algorithme.
    Dans ces cas-là, l'algorithme n'a pas l'information nécessaire pour être fiable, et on regarde donc le taux d'intervention obtenu. En passant, une grande partie de ces algorithmes sont comme des robots. On active des robots dans la plateforme à l'aide d'algorithmes. Si je crée un robot qui me donne un taux d'intervention de 10 %, cela signifie que parmi tout le contenu qui m'est signalé, je dois seulement intervenir dans 10 % des cas. Cela signifie que l'algorithme n'est certainement pas assez fiable, mais je peux lui donner plus de renseignements.
    J'ai parlé plus tôt de modèles de comportement. Je pourrais demander qu'on me signale seulement les comptes créés pendant une période donnée au moyen d'une adresse IP précise, les utilisateurs qui essaient d'utiliser un certain mot-clic, qui essaient d'envoyer des gazouillis à certaines personnes. Plus on circonscrit la recherche, plus c'est précis. Nous avons vu que pour certains types de comportements abusifs — les pourriels en sont un excellent exemple —, nous avons été en mesure d'éliminer la majorité du soutien offert, grâce à des algorithmes très fiables. Cependant, c'est loin de se faire du jour au lendemain. Il a fallu attendre des mois, voire des années pour atteindre la quantité adéquate de renseignements afin que les algorithmes soient déployés correctement sur le site.
    Très bien.
    Nous allons maintenant passer à Mme Malcolmson, pour sept minutes.
    Dans le cadre de l'étude que mène actuellement le Comité, une témoin nous a dit plus tôt que lorsqu'elle a voulu obtenir le soutien de la police pour mettre fin à la cyberintimidation dont elle était victime, elle a dû expliquer elle-même en profondeur ce qu'est un mot-clic. Les forces de l'ordre ne sont aucunement versées en matière de cyberlangage. Cela semble être un fardeau particulièrement injuste pour les victimes, qui veulent tout simplement de l'aide pour mettre fin à la violence et à l'intimidation.
    Pouvez-vous parler de votre perception du rôle de la police, et dire quels partenariats ou mesures éducatives Twitter pourrait offrir pour combler cette lacune?
    C’est un point très valable et les victimes et groupes de défense des droits nous le répètent. Il y a une énorme rupture entre la technologie et l’éducation au sein des services de police et des autorités judiciaires. Nous le remarquons au quotidien. D’ailleurs, mon collègue, Will, ici présent, et les autres membres de mon équipe et moi allons partout dans le monde pour former les services de police. Lorsque je me rends dans la ville de Mexico, j’ai tendance à passer mes journées à discuter avec la police fédérale pour vérifier si les agents comprennent les processus. C’est un problème très courant. Nous devons leur faciliter la tâche.
    Nous avons créé des lignes directrices à l’intention des services de police — d’ailleurs, je n’ai même pas eu le temps de vous en parler. Sur notre centre d’aide, il y a un lien qui mène à toute l’information nécessaire aux services de police. Je vous recommande d’y jeter un coup d’œil. On y trouve des informations très utiles, par exemple la période de temps que Twitter conserve les informations; le genre d’information que nous conservons; à quoi ressemble un processus judiciaire valable; ce qui se passe dans les cas d’urgence où il n’y a pas suffisamment de temps pour obtenir une citation à comparaître valable ou une ordonnance judiciaire, car la vie de quelqu’un est menacée.
    Notre travail consiste à collaborer avec les services de police. Il existe un modèle qui, selon moi, fonctionne très bien. Le Royaume-Uni a ce que l’on appelle un système PAU, c’est-à-dire, un point d’accès unique. Tous les organismes d’application de la loi au Royaume-Uni ont à leur disposition un point d’accès unique. Donc, un agent dans un poste de police de London Ouest qui reçoit la plainte d’une victime n’a pas besoin de chercher comment présenter une demande d’information auprès d’une société de technologie. Il n’a qu’à communiquer avec un PAU et quelqu’un l’aidera. Il s’agit d’un système très utile que nous recommandons constamment. Nous continuerons d’en faire plus, mais il y a certainement une chose que nous pouvons faire: faciliter la tâche des victimes pour qu’elles aient toutes les informations dont elles ont besoin lorsqu’elles déposent leur plainte.
    À cet égard, l’an dernier, nous avons mis en place un mécanisme qui permet aux gens de télécharger un rapport pour déposer une plainte de violence. Ce rapport contient le gazouillis concerné — donc, le texte du gazouillis —, l’adresse URL du gazouillis, l’heure d’envoi, l’adresse URL de l’utilisateur qui a partagé le gazouillis et le nom qui figure sur le compte, ainsi que le lien vers les lignes directrices à l’intention des services de police. La victime peut alors tout imprimer et apporter les documents au poste de police local.
    Nous continuerons d’investir dans la formation des services de police. J’aimerais faire une recommandation aux membres du Comité: si vous connaissez des services de police qui éprouvent des difficultés avec cette question, dites-le-nous; il est de notre devoir de discuter avec eux et de les former au mieux de nos connaissances. Nous continuerons d’investir dans l’amélioration de ces processus.
    Je tiens également à souligner que, parfois, ces mécanismes sont utilisés de manière abusive. Des gens tentent de se faire passer pour des agents de police pour recueillir des informations. C’est la raison pour laquelle si les gens utilisent le formulaire de déclaration pour les services de police, ils verront qu’il est impossible de soumettre un rapport sans une adresse courriel officielle. Nous demandons également une pièce d’identité légale pour nous assurer que le processus judiciaire valable est respecté.

  (1600)  

    Il serait avantageux pour notre comité de consulter ces lignes directrices à l’intention des services de police et les autres modèles que vous nous recommandez. Si vous pouviez faire parvenir l’information à la greffière du Comité, nous pourrions tenir compte de cette information dans notre rapport.
    Plusieurs témoins nous ont dit avoir constaté une baisse de la stigmatisation entourant les déclarations, de la cyberintimidation et de la violence sexuelle. Toutefois, les organisations de première ligne qui travaillent parfois avec vous pour venir en aide aux victimes sont de plus en plus sous-financées, alors que leur charge de travail ne cesse d’augmenter. La pire chose à faire serait d’encourager les jeunes femmes et filles à demander de l’aide et de ne pas pouvoir les aider par la suite.
    Pourriez-vous nous parler de votre expérience quant à la capacité de ces groupes? Selon vous, s’ils avaient accès à des fonds d’exploitation plus stables, seraient-ils en mesure de satisfaire à la demande?
    Vous avez tout à fait raison.
    Nous constatons que ces organisations ont besoin de plus en plus de ressources. Lorsque nous créons de tels partenariats avec des organisations, nous faisons deux choses. D’abord, nous leur offrons un soutien opérationnel, car nous sommes conscients que, parfois, les victimes ne viennent pas vers nous. Elles ne font pas confiance aux plateformes de médias sociaux. Elles ignorent ce qui se produit après le dépôt d’une plainte, et c’est une chose à laquelle nous travaillons. Nous nous efforçons à accroître la transparence en ce qui a trait aux déclarations.
    Entretemps, nous savons déjà que les victimes se sentent plus à l’aise à communiquer avec les organisations reconnues pour les aider dans leur pays. Nous voulons continuer à accorder la priorité aux déclarations que ces organisations recueillent et nous envoient. Nous avons des mécanismes de déclaration spécifique pour ces organisations. Donc, si Hollaback! recueille une déclaration pour abus, celle-ci serait placée dans une file d’attente à laquelle notre équipe a accès, et non dans une fille d’attente générale. Comme vous le soulignez, il y a probablement de plus en plus de gens qui se tournent vers ces organisations pour demander de l’aide.
    Nous les aidons également en matière de sensibilisation. Notre équipe dirige aussi le programme #FoodforGood, le programme caritatif de la société. Nous travaillons, parfois, avec ces organisations grâce à des subventions publicitaires et à notre propre plateforme, les blogues Twitter et les comptes corporatifs Twitter pour accroître leur sensibilisation.
    Nous les appuyons aussi lorsqu’elles présentent des demandes de financement auquel elles pourraient être admissibles auprès de gouvernements et de différents programmes. Nous leur fournissons parfois des documents qui expliquent notre collaboration. Twitter n’est pas en mesure de fournir un appui financier, car la société n’est pas rentable. Vous auriez dû voir les services aériens que j’ai utilisés hier pour venir ici. C’est remarquable.
    Nous continuerons à les épauler. Un bon exemple, à cet égard, serait le réseau Insafe, en Europe, un réseau financé grâce au programme Internet plus sûr de la Commission européenne. Nous leur fournissons une lettre d’appui presque chaque année. Nous avons beaucoup de documents sur notre collaboration avec ces groupes, le nombre de déclarations qu’ils nous ont envoyées, combien de ces cas ont connu un dénouement positif, et nos recommandations en matière de financement.
    Lorsque notre situation financière le permet, nous tentons de les aider autant que possible. Elles sont essentielles à la création d’un environnement sécuritaire.

  (1605)  

    Madame Damoff, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation et de nous faire part de vos efforts. Puisque nous sommes tous sur Twitter, je suis convaincue que nous avons tous été victimes d’une forme de harcèlement ou d’une autre, certaines pires que d’autres. Je vous suis très reconnaissante d’être ici.
    J’ai discuté avec des représentants de Facebook sur leurs activités relatives aux médias sociaux. Twitter permet la création de faux comptes et de comptes anonymes. Avez-vous songé à durcir les règles relativement à l’identification des détenteurs de comptes? C’est l’une des choses qu’exige Facebook sur sa plateforme.
    Il est vrai que nous permettons les comptes anonymes, mais pas la création de faux comptes. Il y a une grande différence entre les deux et je tiens à le préciser.
    Nous avons des comptes prioritaires — beaucoup, d’ailleurs. Ils apportent une certaine légèreté à la plateforme et c’est l’un des premiers types de comptes que nous avons offert. Certains personnifient d’autres personnes à des fins abusives. C’est une chose que nous ne tolérons pas.
    Si j’envoyais des gazouillis en me faisant passer pour vous, en utilisant votre photo et votre prénom, et que je me moquais de vous, je contreviendrais aux règles de la société et celle-ci prendrait les mesures qui s’imposent. Nous permettons également à des tiers de signaler au nom des victimes les cas de personnification. On ne peut pas dire que le fait que le nom réel des détenteurs de comptes soit public rendrait la plateforme plus sécuritaire.
    Non, non…
    Je sais que vous ne dites pas… Selon mon expérience, le fait que le nom réel des détenteurs figure sur leur compte comporte des avantages, mais aussi des inconvénients, car cela empêche les dénonciateurs et militants de s’exprimer en toute sécurité. Nous voulons également répondre à leurs besoins.
    Twitter a d’abord été créé pour permettre aux gens de dire la vérité aux autorités et pour fournir aux gens une plateforme de communication sans précédent pour communiquer aux autorités. Nous voulons continuer d’encourager cette utilisation, mais, comme vous le dites, il est extrêmement important que nous prenions des mesures plus rigoureuses contre les faux comptes et la personnification et pour éviter que la personnification ne soit utilisée à des fins abusives.
    Je voulais justement vous poser une question sur les juridictions.
    Avez-vous de la difficulté à faire respecter vos conditions d’utilisation dans d’autres pays? Évidemment, Twitter est accessible partout et il y a des limites aux exigences que peuvent imposer les gouvernements. Avez-vous de la difficulté à faire respecter vos propres conditions d’utilisation?
    Nous souhaitons que nos conditions d’utilisation soient aussi exhaustives que possible. Comme vous le soulignez, puisque nous sommes présents un peu partout dans le monde, nous voulons nous assurer que nos conditions d’utilisation et nos règles sont aussi équitables que possible, qu’elles permettent la liberté d’expression et qu’elles limitent les abus.
    Certains pays interdisent certains types de discours. Par exemple, en Turquie, il est interdit de critiquer Atatürk, le fondateur de la république, sinon, vous contrevenez à la loi turque. Nous devons parfois réagir à une violation de nos règles. Lorsqu’on nous fait part d’un contenu critiqué, nous l’examinons pour déterminer s’il y a violation de nos règles. Le cas échéant, nous prenons les mesures qui s’imposent. S’il n’y a eu aucune violation de nos règles, mais que c’est un service de police ou une autorité judiciaire qui nous indique qu’il s’agit d’une violation d’une loi locale, nous examinons la possibilité de bloquer le contenu en question dans le pays concerné. C’est un service que nous offrons.
    Un autre bon exemple serait le déni de l’holocauste, en Allemagne. Un tel déni est illégal en Allemagne, tout comme en France et en Espagne. Nous avons déjà bloqué des gazouillis dans cette région, même s’ils ne violaient pas nos propres règles. Le défi consiste à éviter l’escalade et, comme nous l’avons souligné, à nous assurer que les services de police et autorités judiciaires savent comment nous informer de ces situations.
    Certaines organisations sans but lucratif ont également un mandat gouvernemental qui les oblige à nous informer de tout discours haineux. C’est le cas, notamment, de Jugendschutz, en Allemagne, des centres de la diversité, en Belgique, et du Movimiento contra la Intolerencia, en Espagne. Nous travaillons également avec ces organisations.
    Auriez-vous des recommandations à faire au gouvernement fédéral sur la façon de vous aider, vous et d’autres plateformes de média sociaux, à lutter contre le harcèlement en ligne? Que pourrions-nous recommander au gouvernement, dans le cadre de notre étude, qui vous aiderait dans vos efforts ou qui vous aiderait à aller plus loin?

  (1610)  

    L’une des meilleures choses à faire serait d’habiliter les organisations canadiennes expertes en la matière. Je le répète, le niveau de connaissance au Canada est incroyable et sans précédent. À lui seul, le centre MediaSmarts fait figure de proue au pays en matière de citoyenneté numérique. Il a créé la Semaine éducation médias 12 ans avant les États-Unis.
    Vous disposez d’organisations très compétentes, mais qui, en raison d’un manque de ressources, ne sont peut-être pas bien outillées pour lutter contre les abus. Je recommande toujours de travailler avec elles, car le public tend à faire davantage confiance à ces organisations qu’aux plateformes ou au gouvernement. C’est la réalité. Le fait de travailler avec elles, de les aider financièrement, au besoin, ou de leur fournir les mécanismes dont elles ont besoin nous aide également. De façon similaire, si vous êtes au courant de situations abusives au pays, des situations dont nous n’avons pas été informés, il serait très utile de nous faire parvenir les déclarations relatives, que ce soit par l’entremise de la GRC ou d’un numéro d’urgence administré par le gouvernement, afin que nous soyons informés de ces situations et que nous puissions agir en conséquence.
    Je trouve bien dommage que les gouvernements et les médias pensent que nous ne nous soucions pas des cas d’abus, car c’est faux. C’est juste que le monde est grand et que nous sommes une petite société. Google Irlande compte plus d’employés que Twitter à l’échelle mondiale. Donc, nous n’avons pas toujours la capacité d’intervenir, mais la plupart du temps, nous ne sommes tout simplement pas au courant des situations. Nous travaillons avec un expert qui nous fournit régulièrement de la rétroaction.
    Il ne reste qu’environ une minute à mon intervention. J’aurais donc une brève question à vous poser. Vous avez parlé de l’ajout de nouvelles caractéristiques permettant de bloquer certains mots. Cette option m’empêche de voir les mots en question, mais elle n’empêche pas la publication de ces mots.
    Par exemple, une des témoins que nous avons accueillie a déposé une plainte contre son harceleur et a perdu sa cause. Cela ne veut pas dire que le matériel concerné n’a pas été publié. Je vous donne un autre exemple. Quelqu’un pourrait me harceler et simplement en mettant un point devant mon nom, ses propos seraient publics. Il peut compter 10 000 abonnés. Que faites-vous pour lutter contre ce genre de harcèlement?
    Les outils que nous avons renforcés la semaine dernière ne sont qu’un moyen que nous utilisons pour habiliter les utilisateurs, mais vous avez raison: nous ne voulons pas faire porter le fardeau à l’utilisateur. Nous voulons que les utilisateurs normaux puissent gérer leur expérience, mais nous avons également modifié considérablement notre façon de faire appliquer nos règles relatives aux discours haineux et de cibler tant les groupes que les particuliers. Les deux vont de pair lorsque nous devons intervenir dans des cas d’abus. L’utilisateur devrait être habilité à utiliser ces outils pour ne plus avoir à intervenir dans la situation et voir le contenu en question, mais nous avons la responsabilité d’agir en ce qui concerne le contenu.
    Merci.
    Excellent.
    Madame Vecchio, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vais simplement poursuivre sur cette lancée avec Pam. Les femmes nous font souvent savoir que la mauvaise chose à dire aux victimes est de cesser d'aller en ligne. Par ailleurs, la solution ne devrait pas être de créer un compte privé, car on nous a dit également qu'on ne devrait pas accepter ces comportements. C'est un peu différent avec Twitter, car ce n'est pas un compte privé que l'on peut comparer à Facebook.
    Quelle est la solution pour les femmes qui font sans cesse l'objet de harcèlement, mais qui veulent continuer d'utiliser votre service? Quelles sont quelques-unes des techniques qu'elles pourraient utiliser?
    Je sais que je répète que les questions sont excellentes, mais ce sont vraiment toutes d'excellentes questions.
    Vous avez raison. L'idée de cesser d'aller en ligne ou d'utiliser la tribune ne fonctionne pas et, soit dit en passant, j'en parle rarement publiquement, mais j'ai été victime de harcèlement. Le cas a été très médiatisé en Irlande, et la première chose qu'un Garda Síochána, qui est un policier irlandais, m'a dite a été, « Eh bien, vous devez cesser d'aller sur ces tribunes ». Je lui ai répondu: « Je travaille sur cette tribune, alors je ne peux pas tout simplement cesser d'y aller. »
    Oui.
    Je sais à quel point on peut se sentir mal lorsque c'est le seul conseil qu'on nous donne, surtout parce que l'on nous fait sentir comme si nous avions mal agi, et nous ne devrions en aucun cas changer la façon dont nous interagissons avec les autres. C'est ce que des gens comme les membres de ma famille diraient. Ils diraient: « Eh bien, n'affiche pas des gazouillis publiquement. » Il ne devrait pas en être ainsi.
    Nous venons de publier un guide conjointement avec le National Network to End Domestic Violence, le NNEDV, que j'ai remis également à la greffière du Comité, qui présente toutes les options. Vous pouvez protéger vos gazouillis pour ne pas qu'ils soient affichés publiquement, mais vous pouvez également prendre d'autres mesures telles que ne pas communiquer votre emplacement géographique si vous craignez qu'une personne suit vos déplacements. En fait, sur Twitter, les données de géolocalisation sont enregistrées à partir des images que vous affichez. Donc, à moins de changer les paramètres, si vous affichez une image à l'instant, vos données de géolocalisation seront consignées, et c'est une mesure que nous prenons précisément pour protéger les renseignements personnels des utilisateurs, mais aussi pour protéger les victimes qui ont dit à maintes reprises que leur emplacement avait été divulgué inutilement par l'entremise d'images affichées.
    Nous recommandons également de faire appel à votre communauté pour vous aider. C'est pourquoi nous avons lancé un système de signalements par des observateurs. Je sais à quel point il peut être difficile de devoir parcourir chacun de ces gazouillis offensants et de les signaler soi-même manuellement, et c'est pourquoi nous permettons maintenant aux membres de la communauté de signaler ces abus au nom de la personne victime de violence. Dans la fonction « Bloquer » que j'ai mentionnée précédemment, vous n'avez pas à bloquer manuellement la personne qui vous harcèle ou qui vous met mal à l'aise. Vous pouvez aussi demander à d'autres de bloquer cette personne et vous pouvez maintenant exporter la liste des personnes bloquées. Nous avons conçu cette fonctionnalité en gardant à l'esprit les communautés qui sont ciblées sur une base régulière. Dans mon cas, j'ai demandé à mes soeurs de parcourir tous les comptes, de les bloquer, puis elles ont exporté à liste que j'ai pu importer de mon compte. C'est quelque chose que vous pouvez faire à partir des paramètres de votre compte dans la fonction « Bloquer ».

  (1615)  

    Formidable.
    Nous continuerons d'examiner des fonctions comme celle-ci et la façon de signaler les menaces violentes à l'endroit des forces de l'ordre de manière à ce que tous les renseignements soient imprimés avant de s'adresser à la police. Il n'y a que quelques ajustements mineurs à apporter aux fonctions qui, à notre avis, faciliteraient la vie à la victime.
    Excellent.
    Je pense que le plus important, c'est de continuer de travailler avec des groupes comme le NNEDV et de discuter avec les victimes pour entendre les expériences qu'elles ont vécues, d'examiner le matériel éducatif que nous pouvons élaborer, mais également d'étudier comment nous pouvons modifier les fonctions pour que les victimes puissent se sentir en sécurité à la maison lorsqu'elles utilisent cette technologie.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Je sais que j'ai utilisé ces tribunes, probablement une semaine après avoir été élue, alors nous les connaissons.
    D'après vous, quel rôle le gouvernement doit-il jouer en ce qui concerne les médias sociaux, les algorithmes et une foule d'éléments comme ceux-là? Puisque votre organisation oeuvre sur la scène mondiale, avez-vous vu quelques pratiques exemplaires? J'adore le point de contact unique, qui est exceptionnel, mais y a-t-il des pratiques que d'autres pays adoptent que nous devrions adopter pour améliorer le sort des femmes et des jeunes filles au Canada?
    De nombreux pays ont subi ces pressions et ont peut-être été tentés de légiférer pour lutter contre la cyberintimidation et les abus en ligne. Je pense que c'est très difficile à légiférer car ce n'est pas toujours noir ou blanc. On ne sait pas toujours qui a tort et qui a raison, surtout si les deux parties se livrent à une guerre en ligne.
    Un pays qui, à mon avis, adopte la bonne approche est l'Australie. En 2014, le pays a discuté de la criminalisation de la cyberintimidation et, à la suite de discussions à la Chambre du Parlement, un poste de commissaire à la sécurité électronique a été créé. Le bureau du commissaire à la sécurité électronique devait initialement examiner les signalements d'abus et imposer un délai précis aux entreprises pour intervenir. Je pense qu'il s'est rapidement rendu compte qu'il pourrait être vraiment submergé par le nombre de signalements, ce que nous vivons au jour le jour.
    Le bureau offre désormais un service d'assistance téléphonique. On peut signaler les abus, puis le bureau travaillera avec la tribune. Nous avons un mécanisme précis pour le commissaire à la sécurité électronique en Australie afin que les abus soient portés à notre attention. Nous intervenons en cas d'abus, mais nous nous penchons régulièrement sur la création d'une documentation pour éduquer les gens, à partir des problèmes auxquels la société australienne est confrontée. Si nous constatons des abus à l'encontre des collectivités autochtones, une hausse des propos haineux, nous cherchons à trouver des moyens de lutter contre ces abus par l'entremise de l'éducation.
    Formidable.
    Excellent.
    Nous allons maintenant entendre M. Fraser pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je vais céder la parole quelques instants à M. Serré avant de commencer.
    Merci beaucoup de votre présence parmi nous.
    Vous avez mentionné la liberté d'expression. Vous avez mentionné le manque de personnel. Nous avons entendu le témoignage de victimes — de mères, d'adolescents, de jeunes — qui nous ont dit avoir subi de nouveaux abus et avoir été victimisées à nouveau sur Twitter. Je sais que vous avez fait du travail ici au cours de la dernière semaine. Vous avez annoncé le blocage et le mutisme. Ce sont de bons progrès pour aller de l'avant. C'est la première fois que vous avez apporté d'importants changements. Mais il y a encore du travail à faire.
    Je me posais la question suivante: prévoyez-vous faire plus? Car il n'est pas juste de dire, « Ah, c'est la liberté d'expression » ou « Ah, je manque de personnel ». Vous avez une tribune. Elle est publique. Elle est utilisée pour victimiser de jeunes enfants, encore et encore. Vous avez une responsabilité.
    Nous avons aussi une responsabilité en tant que législateurs. Je pense que la loi peut être importante si une entreprise privée ne fait pas une partie du travail.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

  (1620)  

    Je ne pense pas que le jour viendra où nous dirons que nous avons réglé la question de la sécurité, que nous sommes une tribune sécuritaire maintenant dont tout le monde peut profiter.
    J'ai mentionné précédemment que lorsque nous avons lancé la tribune pour la première fois, nous ne pouvions pas télécharger des images. Par conséquent, nous ne pouvions pas voir les atteintes à la vie privée que nous pouvons voir de nos jours.
    Je pense que Twitter, en tant qu'entreprise, est peut-être surprise par la portée de sa tribune. Elle a pris de l'expansion plus rapidement que l'entreprise elle-même. Notre conception n'était peut-être pas sécuritaire depuis le début. J'ai l'impression d'être une rabat-joie dans les réunions avec les concepteurs parfois car, s'ils disent que nous allons autoriser le partage d'images dans les messages en direct, je suis celle qui lève la main et qui dit, « Qu'en est-il de l'exploitation sexuelle des enfants? ».
    Je pense qu'il y a eu un important changement au sein de l'entreprise où nous pensons désormais à la sécurité en premier. C'est pour n'importe quelle fonction dont j'ai discuté au cours de la dernière année, et je ne parle pas seulement de sécurité, mais de n'importe quelle fonction mise en oeuvre sur place. Lorsque nous avons déployé la fonction du partage des moments sur Twitter, nous nous sommes demandé comment la fonction pourrait faire l'objet d'abus. Comment pouvons-nous faire en sorte d'éviter les abus? Comment concevons-nous un mécanisme de signalement des abus dans la fonction de partage des moments sur Twitter? Ce changement a eu lieu, et je pense que c'est normal.
    J'ai mentionné avoir travaillé avec Google et Facebook dans le passé. Lorsque je me suis jointe à Facebook, j'étais la deuxième personne en Europe. Il n'y avait aucune règle. Il n'y avait aucun mécanisme de signalement des abus. Je pense que c'est l'une des tribunes les plus sécuritaires qui existent à l'heure actuelle. Je pense que c'est la progression régulière d'une tribune. Je suis tout à fait d'accord pour dire que nous avons une responsabilité non seulement envers nos utilisateurs mais également envers les personnes qui consultent notre contenu. Ma grand-mère n'a pas de compte Twitter, mais elle suit les mots-clics ici et là, et elle m'envoie les propos haineux qu'elle voit dans ces mots-clics.
    Nous devons donner aux utilisateurs de meilleurs mécanismes de contrôle, mais nous devons prendre des mesures plus rigoureuses lorsqu'il y a des violations.
    J'ai commencé à discuter des règles en expliquant que lorsque nous encourageons les gens à raconter la vérité aux autorités, cela ne veut rien dire s'ils ont peur. On peut s'attendre à voir plus de changements au cours des six prochains mois. C'est une révision importante de la façon dont nous avons traité les signalements d'abus dans le passé. J'ai mentionné le travail effectué pour améliorer la transparence des signalements. Nous voulons nous assurer que les utilisateurs savent ce qui se passe lorsqu'ils cliquent sur le bouton « Bloquer », qu'ils connaissent les mesures que nous prenons pour qu'ils puissent interjeter appel des décisions. Le processus ne peut que s'améliorer.
    Je pense que nous avons demandé au monde entier d'être trop patient. Cela dure depuis trop longtemps. C'est inacceptable. Nous ne voulions pas que notre tribune devienne une tribune d'abus. Je peux vous assurer que chaque fois que je suis de retour à San Francisco et que je discute avec les membres de l'équipe chargée des abus, je leur montre du contenu, et cela leur brise le coeur. Ces gens travaillent 24 heures sur 24, sept jours sur sept pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'abus en ligne sur la tribune et faire en sorte que leur famille ne voit pas ces abus.
    Je m'excuse pour les personnes qui ont été victimisées à nouveau ou qui ont été victimes d'abus sur la tribune. Je pense qu'une collaboration constructive avec la société civile et le gouvernement permettra de créer une tribune plus sécuritaire et, plus important encore, une société plus sécuritaire car certains de ces préjudices existent malheureusement hors ligne. Il est très difficile de les éradiquer.
    Très brièvement, il nous reste moins d'une minute.
    Vous avez mentionné qu'on a connu un certain succès avec Habilomédias et Hollaback! Pourriez-vous brièvement décrire quelques-uns des meilleurs partenariats que vous avez eus avec des organismes communautaires et fournir par écrit des renseignements complémentaires plus tard?
    Absolument.
    Nous venons de publier un billet de blogue aujourd'hui sur la position de force. C'est notre initiative d'autonomisation des femmes et de sécurité que nous avons mise en oeuvre à Toronto le mois dernier. Nous avons hâte de faire de même à Ottawa et de poursuivre le mouvement ailleurs au Canada. Vous serez en mesure d'en apprendre davantage sur cette initiative en cliquant sur le lien que nous vous fournirons.
    Conjointement avec Habilomédias, nous avons beaucoup travaillé sur la littératie des médias. Nous travaillons maintenant à la création de guides. Nous avons un certain nombre de notes d'information d'une page que nous avons été en mesure de distribuer au Canada en français et en anglais, grâce à l'aide d'Habilomédias.
    J'ai mentionné que le programme est vraiment un chef de file en matière de citoyenneté numérique qui apprend aux jeunes à enseigner aux autres comment utiliser la technologie de façon sécuritaire, ce qui sera très important.
    Il y a également un organisme à but non lucratif que vous devriez tous connaître, High Resolves. Il a vu le jour en Australie. Il envisage de véhiculer des contre-messages avec les jeunes. Nous examinons comment éviter des incidents précis de propos haineux avec les jeunes en utilisant ou en mettant à profit le pouvoir de Twitter.
    Merci.
    Excellent. Merci beaucoup. Nous vous sommes très reconnaissants de votre témoignage et du travail que vous faites pour rendre cette tribune plus sécuritaire et pour régler les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Je voulais faire savoir au Comité que nous avons entendu le témoignage d'Hollaback! Nous entendrons celui d'Habilomédias, alors vous aurez l'occasion de poser d'autres questions.
    Avons-nous entendu leur témoignage?

  (1625)  

    Je croyais qu'ils venaient comparaître pour discuter des algorithmes.
    Non, c'est Habilomédias qui discutera des algorithmes.
    Merci beaucoup. Nous allons maintenant suspendre la réunion pendant que nous accueillons le prochain groupe de témoins.

  (1625)  


  (1625)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Cet après-midi, nous sommes ravis d'accueillir un certain nombre de témoins parmi nous. Nous recevons, du Conseil canadien pour les réfugiés, Loly Rico, présidente, qui comparaîtra par vidéoconférence aujourd'hui. De l'Association des femmes autochtones du Canada, nous accueillons Lynne Groulx, Marilee Nowgesic et Francyne Joe, présidente. De Babely Shades, nous avons parmi nous Awar Obob.
    Nous accorderons à chaque groupe sept minutes pour faire leur déclaration et nous commencerons avec le Conseil canadien pour les réfugiés.

  (1630)  

    Je m'appelle Loly Rico et je suis présidente du Conseil canadien pour les réfugiés. Le Conseil est un organisme national qui comprend 180 membres. Nos activités sont principalement liées à la défense des droits des immigrants et des réfugiés.
    Merci de l'invitation. Aujourd'hui, nous nous concentrerons sur les politiques et les pratiques en matière d'immigration. J'aimerais aborder divers points, dont le statut de résident permanent conditionnel. Nous sommes heureux de voir que le gouvernement a prévu de l'abolir l'an prochain, mais entretemps, on constate notamment qu'on procède tout de même à la mise en oeuvre de la réglementation. Comme vous le savez, il y a même des rapports qui indiquent que cette mise en oeuvre a pour effet d'accroître la vulnérabilité des femmes et des enfants.
    Le CCR demande au gouvernement de s'engager publiquement à mettre un terme à la mise en oeuvre de cette mesure et à éliminer cette condition, même si elle doit l'être l'an prochain. Il pourrait y mettre un terme maintenant.
    L'autre enjeu que nous tenons à soulever est la question du parrainage conjugal, à laquelle j'aimerais m'attarder davantage, car les délais de traitement au Canada sont trop longs. Certains de nos membres ont indiqué qu'il arrive parfois que des femmes demeurent dans des relations abusives simplement parce qu'elles n'ont aucun recours pour en sortir tout en évitant l'expulsion.
    Nous voulons également parler de la situation de la traite de personnes, notamment en ce qui concerne les jeunes, les jeunes femmes qui en sont victimes, en particulier les affaires d'envergure internationale. Le gouvernement a un formulaire de protection temporaire, le permis de séjour temporaire, mais il n'offre aucune solution pour l'accès à la résidence permanente. Cela a pour effet de limiter les recours et d'accroître la vulnérabilité des femmes, les forçant ainsi à demeurer dans cette situation. Nous aimerions que le gouvernement adopte une mesure législative pour accroître l'accès à la résidence permanente.
    J'aimerais aborder la question du regroupement familial, dans une perspective à long terme. Je tiens à souligner que lorsque la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés a été adoptée en 2002, la politique comprenait une analyse comparative entre les sexes, et il y avait une participation de la communauté. Dans le passé, le Conseil canadien pour les réfugiés était consulté, car Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada avait une unité de l'analyse comparative entre les sexes et avait entrepris des discussions concernant divers règlements. Actuellement, cette unité n'existe plus; le ministère n'a plus cette possibilité et ne fait plus ce genre d'analyse. Je vous ai parlé des exemples du parrainage conjugal et de la résidence permanente conditionnelle. Nous recommandons au Comité et au gouvernement de faire marche arrière, de rétablir l'unité de l'analyse comparative entre les sexes du ministère de l'Immigration et de consulter la communauté.
    L'autre point que nous tenons à soulever est lié à l'application de la loi, que nous examinons avec l'Agence des services frontaliers du Canada. Prenons par exemple le cas d'une femme sans statut entrée au pays dans le cadre du parrainage conjugal. C'est ainsi que commence la relation abusive. Lorsque l'intervention de la police est requise, la personne fait immédiatement l'objet d'un signalement à l'Agence des services frontaliers du Canada, car elle n'a pas de statut. Souvent, la femme n'a aucune protection, puis elle est expulsée.
    Nous demandons que l'Agence des services frontaliers du Canada ait une politique en matière de violence faite aux femmes. Nous vous demandons d'inclure dans votre étude la possibilité d'exiger que l'Agence des services frontaliers du Canada et le ministère de l'Immigration aient une politique en matière de violence faite aux femmes.
    Voilà notre position. Merci encore une fois de l'invitation à comparaître.

  (1635)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Lynne et Marilee, vous avez sept minutes.
    En fait, c'est Francyne, notre présidente, qui fera l'exposé.
    Très bien.
    Francyne.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, distingués témoins et invités, bonjour. Je m’appelle Francyne Joe et je suis présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada.
    Je suis fière d’être membre de la Nation Nlaka'pamux, de la Colombie-Britannique. Bien que je travaille pour l’Agence des services frontaliers du Canada depuis plus de cinq ans, j’ai de l’expérience dans les secteurs de la gestion des ressources humaines, du développement économique, de l’entrepreneuriat et des assurances. Mon but est d’éduquer les Autochtones et de les encourager à réaliser leurs aspirations.
    Aujourd’hui, je suis accompagnée de Lynne Groulx, directrice de l’AFAC — qui détient en particulier deux diplômes en droit —, et de Marilee Nowgesic, qui est notre conseillère spéciale à la liaison.
    Premièrement, je tiens à reconnaître la nation algonquine sur le territoire de laquelle nous tenons cette réunion aujourd’hui.
    Je vous remercie de l’occasion de témoigner au Comité aujourd’hui. Au nom de mes ancêtres, je parlerai des préoccupations des femmes autochtones de toutes les régions du Canada, et des espoirs qu’entretiennent nos chefs de demain, à savoir nos jeunes.
    L’Association des femmes autochtones du Canada est la seule organisation autochtone nationale du Canada qui défend les intérêts et exprime les nombreuses préoccupations des femmes autochtones. Fondée en 1974, l’AFAC est composée de 12 associations provinciales et territoriales membres réparties dans l’ensemble du pays. Notre réseau de femmes des Premières Nations et de femmes métisses s’étend à toutes les collectivités, du nord au sud et d’est en ouest, qu’elles soient en milieu urbain, en milieu rural, à l’intérieur ou à l’extérieur des réserves.
    Aujourd’hui, je viens vous présenter trois messages clés.
    Premièrement, la violence faite aux femmes et aux filles autochtones n’est pas un phénomène nouveau. Il est convenu depuis longtemps qu’il existe un lien indissociable entre les femmes autochtones et les effets néfastes de la colonisation, les problèmes systémiques, et les politiques et les lois qui ont nui à la stabilité de notre environnement, à la pratique de notre spiritualité et à l’expression de notre droit inhérent à l’autodétermination.
    La violence se présente sous diverses formes; elle peut être de nature physique, sexuelle, émotionnelle, psychologique, spirituelle, culturelle et financière. La violence entraîne souvent vulnérabilité et autodestruction, notamment la dépression, l’alcoolisme, la toxicomanie et le suicide. Les femmes autochtones sont huit fois plus susceptibles d’être victimes d’homicide que les femmes non autochtones. Les taux de violence conjugale sont trois fois plus élevés; le conjoint n’est pas nécessairement un Autochtone.
    En tant que femmes autochtones, nous avons été témoins de l’incidence de la pauvreté, d’un taux de réussite scolaire inférieur et de la surreprésentation de nos enfants dans le réseau de protection de l’enfance, une représentation plus élevée que chez ceux qui se sont retrouvés dans les pensionnats indiens. Ce n’est que grâce aux travaux de la CVR que le Canada a pris connaissance des répercussions. Selon la liste des populations vulnérables publiée par Santé Canada, les femmes et les enfants autochtones se retrouvent dans la plupart sinon tous les segments de la population canadienne les plus gravement touchés par les changements climatiques.
    L’AFAC a continué de combler le manque de connaissance sur les femmes autochtones en dépassant le cadre de la recherche universitaire, en recueillant des preuves exhaustives et en révélant la façon dont les systèmes policiers et judiciaires interviennent auprès des femmes.
    Le deuxième message, c’est la nécessité de tenir compte des perspectives autochtones et sexospécifiques dans l’élaboration des politiques, des lois, des mesures de sécurité publique, des stratégies de prévention et des campagnes sociales afin qu’elles correspondent aux tendances actuelles de la population.
    En 2005, l’AFAC a entrepris des efforts pour accroître la sensibilisation à l’égard de la violence faite aux femmes autochtones. Malheureusement, les voix des familles et des collectivités dans le besoin ont été ignorées. De 2005 à 2010, l’AFAC a commencé à documenter tous les cas connus de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées. Nous avons découvert 582 cas supplémentaires, qui s’ajoutent aux cas actuellement répertoriés par les organismes d’application de la loi. En 2014, la GRC a publié un rapport dans lequel sont documentés plus de 1 000 cas de femmes autochtones disparues ou assassinées. De ce nombre, on compte 164 personnes disparues et 1 017 victimes d’homicide. Il y en a probablement plus, mais certains cas n’ont pas été répertoriés, étant donné que l’ascendance et les origines de ces personnes n’étaient pas connues.
    L’AFAC a la seule base de données nationale répertoriant le nombre de femmes et de filles autochtones disparues ou assassinées au Canada, et les circonstances dans lesquelles cela s’est produit. Selon nos données, on compte 225 affaires non résolues de femmes et de filles autochtones assassinées et disparues; 105 cas de femmes disparues depuis plus de 30 jours, en date du 4 novembre 2013, disparitions qui avaient alors été placées dans les catégories « causes inconnues » et « soupçons d’actes suspects »; 120 homicides commis entre 1980 et 2012.
    Il est essentiel que les femmes autochtones soient considérées comme un partenaire important des discussions sur la prévention et la sécurité au Canada. L’AFAC est le seul organisme pouvant fournir l’expertise nécessaire du point de vue autochtone et sexospécifique.

  (1640)  

    Le troisième message que nous voulons faire valoir est le suivant: la consultation exhaustive auprès des femmes autochtones doit se faire conformément aux principes énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, dans un premier temps, à l’article 18 et au paragraphe 21(2) de de la DNUDPA, relativement aux droits des Autochtones de participer au processus décisionnel et à l’obligation de l’État de tenir compte des droits particuliers des femmes autochtones. Les politiques liées à la mesure législative doivent s’appuyer sur des preuves et sur les observations des personnes visées. La loi doit être révisée afin de renforcer la justice et d'accroître les sentences en cas de déclaration de culpabilité pour violence, y compris, mais sans s’y limiter, les récents incidents de Val-d’Or. En outre, il convient d’accroître la sensibilisation du public à l’égard de la situation critique des droits de la personne découlant des lacunes quant à la sécurité et à la protection des femmes autochtones.
    Il faut examiner les investissements consacrés aux femmes autochtones au Canada. On parle notamment de programmes axés sur les compétences et le perfectionnement, l’emploi et l’éducation, et les possibilités de participer à l’économie. Les femmes autochtones consacrent 90 % de leurs revenus à leurs familles et à leurs collectivités.
    Bien que nous travaillions actuellement à l’élaboration des procédures et des processus de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, nous demeurons le principal organisme vers lequel les femmes autochtones peuvent se tourner pour soulever des problèmes et des préoccupations et pour se faire entendre afin de lutter efficacement contre la crise de la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones. Cela se fera par une sensibilisation accrue du public visant à modifier les attitudes qui dévalorisent les femmes et les filles autochtones et à mettre en valeur les contributions des peuples autochtones comme agents d’éducation en prévention de la violence.
    Kukshem. Merci beaucoup de votre temps.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Awar Obob, de Babely Shades. Vous avez sept minutes.
    Bonjour. Je vous remercie de m’avoir invitée et d’avoir invité le groupe que je représente.
    Je m’appelle Awar Obob. Je suis écrivaine, militante et organisatrice d’événements au sein du regroupement Babely Shades, qui est formé de gens de groupes sexospécifiques marginalisés et de minorités visibles. Nous faisons beaucoup d’activités artistiques et positives dans la région d’Ottawa.
    Je ne savais pas trop à quoi m’attendre en venant ici. Je n’avais rien préparé, mais les choses vont assez bien. Jusqu’à maintenant, j’aime cela.
    L’un des principaux sujets dont j’aimerais discuter est le traitement réservé aux jeunes LGBTA au Canada, les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et allosexuels, ainsi qu’au traitement que subissent actuellement les personnes de couleur en raison de la violence qu’on observe aux États-Unis, par rapport à l’élection présidentielle, et les conséquences que cela a entraînées au pays.
    Même si le racisme au Canada n’est pas un phénomène très nouveau — il n’a rien de nouveau, car il est en quelque sorte le fondement du pays —, on assiste récemment à une nouvelle vague très ciblée et très présente contre toutes les personnes de couleur, en particulier les personnes d’ascendance moyen-orientale et sud-asiatique. On observe au Canada une recrudescence de la violence antisémite et de la violence à l’égard des Autochtones et des Noirs, violence qui découle de ce qui vient de se produire aux États-Unis. On aime penser que nous n’y sommes pas liés, mais cela a un effet considérable, une incidence sur ce qu’on observe au pays.
    Il convient de reconnaître la douleur qu’éprouve une majorité des communautés minoritaires du pays et de régler les problèmes qui en sont la source. Il faut les régler, point. L’indignation ne doit pas seulement venir des gens de la classe ouvrière qui en sont les principales victimes. Elle doit également venir d’en haut, du gouvernement, des hauts dirigeants, de façon à démontrer leur désapprobation, à affirmer que c’est contraire aux valeurs canadiennes et que ce n’est pas représentatif du peuple canadien. Il s’agit à mon avis d’un problème majeur qui doit être réglé.
    Il y a également un rapprochement à faire avec le traitement réservé aux jeunes LGBTA. Hier, on a célébré la Journée internationale du souvenir trans. J’aimerais me souvenir de toutes les personnes que nous avons perdues, tout en ayant une pensée pour celles qui sont toujours avec nous et qui méritent d’être aimées, ce qu’elles n’ont pas actuellement en raison des nombreux crimes haineux. Cette année est l’une des plus meurtrières pour les femmes trans depuis longtemps.
    La négativité règne et beaucoup de choses se préparent. Cela a des répercussions sur les jeunes, en particulier les jeunes d’aujourd’hui, les néo-Canadiens de première et de deuxième génération qui sont arrivés au pays depuis un certain temps déjà. Cela a une incidence sur leurs enfants et leurs petits-enfants. Tous les gens que je connais doivent non seulement composer avec les traumatismes intergénérationnels en raison des souffrances vécues par leurs proches et leurs ancêtres, mais doivent aussi affronter les traumatismes liés à ce qu’ils vivent actuellement, au quotidien.

  (1645)  

    Personne ne devrait avoir à vivre de telles choses; ces gens ne demandent qu’à vivre leur vie. Je n’ai pas l’impression qu’on s’attaque adéquatement à ces problèmes au Canada. On considère qu’il s’agit davantage d’un problème américain, même si le problème est tout aussi criant et répandu au Canada qu’ailleurs.
    Merci.
    C’était un excellent exposé.
    Nous allons entreprendre notre série de questions. Nous commençons par mon ami, M. Serré, qui dispose de sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Fraser.
    Merci beaucoup aux témoins de leurs exposés et de leur engagement.
    Madame Joe, je vous remercie d’avoir mentionné qu’il faut en faire plus pour inclure les femmes et les filles autochtones dans la discussion.
    Plus tôt, on nous a parlé du projet de loi 132, de la province de l’Ontario. D’autres provinces, comme le Manitoba et la Nouvelle-Écosse, cherchent à inclure une partie du volet éducation à l’échelle provinciale.
    Vos organismes ont-ils été approchés par certaines provinces? Vous avez une expertise et des connaissances considérables. Travaillez-vous avec l’une ou l’autre des provinces pour veiller à ce que le programme d’éducation reflète les besoins des femmes et les filles autochtones?
    Je vous prie de m’excuser. Je suis revenue du Maroc en fin de semaine, et j’essaie de prendre connaissance des changements.
    Ces provinces n’ont pas encore communiqué officiellement avec nous. Cela dit, vous avez raison. Nous avons en effet beaucoup de ressources que nous sommes tout à fait disposés à mettre en commun.
    En ce qui concerne la recherche et les données dont on ne tient pas compte dans certaines discussions — et je vous demanderais de fournir ces recherches à la greffière — avez-vous actuellement des données sur les femmes et les filles? Beaucoup de témoins ont parlé du monde numérique. Nous avons accueilli les représentants de Twitter et d’autres médias sociaux. Quelle est l’incidence lorsqu’on cible les femmes et les filles autochtones en particulier sur les médias sociaux?

  (1650)  

    Nous comptons parmi notre effectif une personne spécialisée sur ces questions, mais les recherches ne font que commencer. Donc, nous n’avons pas beaucoup progressé à cet égard. C’est avec plaisir que nous vous fournirons ce que nous avons actuellement. Marilee, avez-vous d’autres informations?
    Au fil des années, nous avons travaillé avec les associations membres provinciales et territoriales, de même qu'avec leurs intervenants externes pour aborder cette question et rendre l'Internet et la navigation publique sécuritaires. Nous montrons aux jeunes comment protéger leurs caméras Web à la maison et comment mieux maîtriser l'Internet. Nous songeons à des campagnes qui permettraient d'aborder ce sujet à l'école sans faire peur aux jeunes ou aux professeurs, pour les aider à prendre des décisions éclairées à propos du Web et à connaître les mécanismes de sécurité, et pour aider les parents à bien les encadrer.
    Madame Rico, tout à l'heure, vous avez parlé des longs délais pour le traitement des demandes de parrainage de conjoint. Le gouvernement tente de réduire ces temps d'attente. D'après votre expérience, pouvez-vous nous dire quels sont les effets de ces délais sur le programme de réunification des époux?
    À l'heure actuelle, il faut 26 mois pour obtenir la résidence permanente par l'entremise du parrainage de conjoint. Dans la majorité des cas, la personne a un visa de visiteur ou est sans statut. Dans ce cas, en plus du rapport de force dans la relation, une dynamique de pouvoir s'installe parce que l'agresseur utilise la situation pour contrôler la relation. Si le processus est long ou si le parrainage cesse, la personne n'a pas d'autre moyen de continuer le processus d'immigration au Canada.
    La mère d'un bébé canadien peut être menacée d'expulsion parce que le parrainage de conjoint a pris fin. Il y a un autre processus, fondé sur des motifs d'ordre humanitaire, mais il n'empêche pas l'expulsion.
    C'est pourquoi nous disons que le processus est trop long. Lorsqu'il a été mis en oeuvre dans les années 1990 — lorsque Paul Martin était premier ministre —, le délai de traitement était de huit mois. Aujourd'hui, il est de 26 mois. Pour nous, c'est un long processus.
    Merci.
    Allez-y, monsieur Fraser.
    Madame Joe, vous avez évoqué une statistique économique intéressante, soit qu'environ 90 % de l'argent dépensé par les femmes autochtones revenait à la collectivité.
    Est-ce qu'on a évalué le coût de la violence contre les femmes pour les collectivités autochtones du Canada?
    Oui, monsieur Fraser.
    Toutefois, on n'y a pas accordé beaucoup de crédibilité, parce que les chiffres recueillis par les organismes d'application de la loi, par Statistique Canada et par nos ressources de l'Association des femmes autochtones n'étaient pas les mêmes.
    Ce qui est difficile, c'est que certaines choses sont déclarées — l'argent supplémentaire que font les femmes avec la cuisine, l'artisanat, les services de garde, ce genre de choses — et d'autres ne le sont pas. Nous avons parlé de 90 %, ce qui correspond aux données regroupées de certaines de ces sources.
    Je crois que c'est juste. Cela ne devrait en aucun cas être un enjeu économique. Je crois que c'est la bonne chose à faire. Toutefois, pour une raison quelconque, l'argent peut parfois faire changer les choses en politique et je veux utiliser tous les outils qui sont à ma disposition.
    Il ne me reste que 30 secondes environ. Je me demande si vous connaissez des initiatives qui aident les hommes à choisir la non-violence dans les collectivités autochtones.

  (1655)  

    Nous en avons quelques-uns en Ontario, mais ils sont surtout offerts dans le centre du Canada. En Ontario, je connais le programme « men in hide », qui apprend aux hommes à aborder la violence familiale et la violence conjugale.
    Certains organismes traditionnels abordent aussi d'autres sujets qui touchent les hommes. Par exemple, la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada a appris à travailler avec les lignes directrices sur la violence conjugale et la violence familiale chez les Autochtones afin de favoriser des relations saines.
    Excellent.
    La parole est maintenant à Mme Vecchio. Vous avez sept minutes. Allez-y, madame.
    Bonjour et merci beaucoup.
    Je m'adresse d'abord à la représentante du Conseil canadien des réfugiés.
    Vous avez parlé de résidence permanente et de certains changements que vous revendiquez, et dont a parlé le gouvernement. J'ai travaillé à Citoyenneté et Immigration pendant 11 ans. J'ai reconnu le besoin d'établir certaines politiques.
    Croyez-vous qu'on pourrait mettre en oeuvre une politique efficace, de sorte qu'aucune femme ne soit menacée d'expulsion, par exemple? J'ai été témoin de nombreux cas où les hommes quittaient leur femme dès leur arrivée au Canada. C'était des cas de parrainage à l'extérieur du pays. Il y a évidemment deux types de parrainage.
    Y a-t-il un moyen de cocher les deux cases, afin de veiller à ce qu'il n'y ait pas de fraude, à faire preuve de prudence et à ce que les victimes soient protégées?
    Une chose est sûre, la politique ne devrait pas être axée sur la fraude. Vous voyez, même en ce qui a trait au pourcentage de signalements...
    Nous demandons des statistiques à IRCC. Dans la majorité des cas de signalement de fraude, lorsqu'une lettre est envoyée, on peut faire une exception pour les cas de violence familiale si l'agresseur a été dénoncé à la police et si la victime est dans un refuge. À ce moment-là, elle répond aux critères d'exception. Le pourcentage de fraude serait de 1 %.
    La politique doit être rédigée de manière à atteindre un équilibre et surtout viser la protection des personnes les plus vulnérables. Dans certains cas — et je ne dis pas cela parce que je travaille directement avec les femmes —, c'est l'homme que l'on fait venir au Canada et qui quitte sa femme. C'est déjà arrivé.
    Excellent.
    Je m'adresse maintenant à la représentante de l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Récemment, nous avons reçu diverses organisations — notamment les Lions de la Colombie-Britannique, que nous avons reçus la semaine dernière — qui nous ont parlé de l'importance pour les hommes de ne pas être de simples spectateurs, mais de faire partie de la solution. Est-ce que l'Association des femmes autochtones du Canada a pris des mesures pour encourager les hommes à faire partie de la solution et est-ce qu'on finance certains programmes à cette fin?
    Nous allons participer à la campagne Moose Hide, organisée par Paul Lacerte, le premier directeur général des centres d'amitié autochtones de la Colombie-Britannique.
    Nous avons eu l'occasion de travailler avec la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants par le passé. Certaines questions ont été mises de côté en raison des études de la Fédération  — qui sont importantes —, mais aussi en raison d'autres enjeux qui étaient beaucoup plus urgents.
    La Fédération accorde toujours de l'attention à cette question, qu'elle juge importante. Elle réalise notamment des campagnes sur la reproduction ou l'éducation sexuelle.
    Oui, c'est formidable.
    Je voulais poser quelques questions à la représentante de Babely Shades. Je suis peut-être tout simplement ignorante, je l'avoue. Je viens d'une petite collectivité rurale et mon fils vient tout juste de déménager à Toronto. C'est un autre mode de vie.
    Croyez-vous que le fossé entre les générations fait partie du problème? Est-ce que la violence et le harcèlement sont plus fréquents parmi certains groupes d'âge? Est-ce que ce sont des gens moins informés qui, comme moi, ont peut-être grandi sans comprendre ces enjeux?
    On a fait beaucoup de progrès en ce qui a trait à l'égalité entre les sexes. Je crois que les jeunes en ont fait beaucoup plus que nous pour les gais, les lesbiennes, les transgenres, etc.
    Croyez-vous qu'il y a des problèmes en matière d'éducation? Est-ce que ce sont les mêmes groupes d'âge qui sont responsables du harcèlement et de la violence? Avez-vous des données démographiques à cet égard?

  (1700)  

    Je crois que la violence et le harcèlement touchent tous les groupes d'âge. J'en ai été témoin et j'ai aussi beaucoup lu à ce sujet. La violence commence à la maison. Elle s'apprend des parents et de la société, peu importe la taille de la ville. Je viens aussi d'une petite ville, Lower Sackville, en Nouvelle-Écosse.
    Oh, c'est très bien.
    Elle est très petite.
    J'ai vu la violence de mes yeux, et elle n'avait pas d'âge.
    Je demande cela parce que je pense à ma génération. Je suis dans la quarantaine. Nous avons été témoins de certains changements sociaux. Le racisme était un grand enjeu à l'époque. Aujourd'hui, c'est bien, parce que lorsque je parle à mes enfants, je me rends compte que le racisme ou le sexisme ne fait aucunement partie d'eux. Remarquez, j'ai peut-être des enfants exceptionnels. Ils sont très réceptifs. Il faudrait tous être comme eux.
    Croyez-vous qu'on puisse y arriver? C'est peut-être juste dans ma famille. J'ai l'impression que la nouvelle génération est beaucoup plus forte et beaucoup plus au fait des enjeux sociaux, et de l'importance d'en tenir compte. Est-ce qu'on pourrait en faire plus? Quelles sont les techniques qu'on pourrait utiliser pour les générations précédentes?
    Je crois que la nouvelle génération est beaucoup plus positive. Elle s'organise pour lutter contre les injustices auxquelles elle est confrontée et nous sommes confrontés. Une bonne façon de sensibiliser les gens qui ne vivent pas ces expériences consiste à les aider à reconnaître leurs propres microagressions contre les gens qui ne sont pas comme eux.
    Merci.
    J'ai une dernière question, pour la représentante de l'Association des femmes autochtones. Est-ce que la violence contre les femmes autochtones est plus importante dans les réserves ou en dehors des réserves? Avez-vous ces statistiques?
    La réponse courte, c'est non. Lorsqu'une femme passe par un organisme d'application de la loi ou l'unité de triage d'un hôpital ou d'une clinique, les questions sur l'ascendance ou les origines sont rares. On pose surtout des questions sur la consommation de drogues ou de médicaments et on demande le nom d'une personne à contacter.
    Ces questions viennent après, lorsque l'administration de l'hôpital ou de la clinique tente de trouver la personne pour se faire payer. C'est la seule occasion où l'on pose des questions sur l'ascendance et les origines.
    Merci beaucoup.
    Très bien. Nous passons maintenant à Mme Malcolmson. Vous avez sept minutes, madame.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins. Je vais surtout faire référence au témoignage du Conseil canadien des réfugiés et de Babely Shades dans mes recommandations finales. Je vais aussi me concentrer sur le travail de l'Association des femmes autochtones du Canada. Je vous remercie beaucoup de votre travail. Vous travaillez si fort depuis 10 ans. Vous changez notre pays. Je vous remercie de tous ces efforts.
    Je vais vous demander de répondre rapidement à mes questions, de sorte que je puisse maximiser mon temps de parole.
    Est-ce que le financement opérationnel est suffisant pour le travail qu'on vous demande de faire?
    Non.
    Je remarque que dans le contexte de la discussion relative à la construction de nouveaux refuges pour les victimes de violence familiale, on reconnaît que le taux de violence est beaucoup plus élevé chez les femmes autochtones. Selon certaines sources, 70 % des collectivités inuites n'ont pas accès à un refuge sécuritaire. Il n'y a que 15 refuges pour les 53 collectivités inuites du pays, et on ne propose aucun nouveau refuge pour elles dans le budget.
    Vous dites aussi qu'il n'y a que 41 refuges dans les réserves. La nouvelle proposition du gouvernement vise à construire cinq nouveaux refuges au cours des cinq prochaines années.
    Est-ce suffisant pour répondre à la demande?

  (1705)  

    Voulez-vous répondre à cette question?
    Bien sûr.
    Je ne peux pas parler au nom des organisations inuites partenaires. Toutefois, je suis au fait de ces statistiques et je reconnais les efforts louables, si je puis dire, qui sont déployés pour aborder la situation. C'est mieux que rien.
    Toutefois, si l'on construit cinq refuges en cinq ans, ce sera encore une solution de fortune. Ce ne sera pas suffisant, et on ne réglera pas le problème. Il faut se demander ce qui se passe ici. On met les femmes dans une pièce et on leur dit de souffrir en silence, mais on ne parle pas des programmes ou services qui sont offerts lorsqu'elles sortent de là. On veut une solution rapide et faire taire les victimes.
    A-t-on proposé un financement supplémentaire pour aider les refuges à répondre aux besoins des femmes autochtones hors réserve?
    Nous venons de parler avec certains partenaires externes qui souhaitent établir des programmes urbains et ruraux. Les refuges ne servent pas seulement à héberger les victimes de violence, mais aussi les femmes qui se font mettre à la porte à cause de problèmes de consommation de drogue, d'alcool ou d'autres substances, ou parce qu'elles ont des problèmes financiers. Elles ont peut-être dépensé tout leur chèque d'aide sociale et se font battre parce qu'il n'y a pas assez de nourriture ou d'autre chose.
    Nous faisons de notre mieux pour travailler en étroite collaboration avec tous nos partenaires à l'échelle nationale, avec le peu de ressources que nous avons. Nos ressources sont très limitées; il vaut mieux nous concentrer sur une chose et bien la faire plutôt que de donner de faux espoirs à trop de gens.
    Il ne me reste qu'une question. Vous pouvez y répondre plus longuement si vous le voulez.
    D'accord.
    Vendredi dernier, le Comité des Nations unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a publié un rapport, son rapport quinquennal sur le Canada. C'est donc un examen très précis de ce que réussit à faire notre pays.
    Je remarque que sa recommandation 27.b) porte précisément sur les efforts du Canada. Elle se lit comme suit:
Que tous les cas de femmes autochtones disparues ou assassinées fassent l'objet d'une enquête et de poursuites en bonne et due forme.
    Sa recommandation 27.c) est que le gouvernement:
complète le mandat de l'enquête nationale pour:

(i) assurer l'adoption d'une approche axée sur les droits de la personne;

(ii) fasse que le mandat de l'enquête englobe visiblement l'examen du rôle de la Gendarmerie royale du Canada, des polices des provinces, des polices municipales et des commissions chargées d'entendre les plaintes du public aux échelons fédéral, provincial et municipal;

(iii) crée un mécanisme permettant l'examen indépendant des cas faisant l'objet d'allégations d'enquêtes policières bâclées ou partielles.
    Est-ce que ces recommandations coïncident avec les souhaits que vous ont exprimés les familles et les femmes autochtones ayant survécu à la violence?
    Oui, elles coïncident absolument et c'est particulièrement vrai de la recommandation 27.c)(iii) sur l'examen indépendant.
    Au cours des derniers jours, l'affaire de Val-d'Or et l'examen dit indépendant ont fait parler d'eux. Nous avons entendu dire que l'examen avait été bâclé et que, essentiellement, il n'était pas indépendant. Une organisation policière faisait enquête sur une autre. Ça ne répond pas aux besoins.
    Nous sommes d'accord de tout notre coeur avec ces recommandations et nous espérons qu'on y donnera suite, parce que les familles expriment leur mécontentement à nos bureaux.
    L'AFAC a formulé des recommandations semblables ou qui correspondaient aux recommandations originelles, quand le mandat a été établi.
    Oui.
    Le mandat ne reprend pas explicitement ou suffisamment à son compte ces recommandations. Est-ce que vous continuez à exercer des pressions pour corriger le mandat, pour, en fin de compte, obtenir les meilleurs résultats?
    L'AFAC a fait un exposé, à Genève, devant le comité, et nous le referons à Washington, début décembre, devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme pour discuter l'affaire des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées et les propositions que nous voudrions formuler, notamment les 38 recommandations du comité de l'ONU dont une seule a été jointe au mandat de l'enquête sur ces filles et ces femmes jusqu'ici.

  (1710)  

    Merci beaucoup. Mon temps est écoulé. Je vous remercie sincèrement de votre travail.
    Passons à Mme Nassif.

[Français]

     Vous disposez de sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leurs présentations.
     Je crois que Mme Obob a besoin des écouteurs pour entendre l'interprétation simultanée.

[Traduction]

    Si vous avez besoin de la traduction, vous pouvez brancher vos écouteurs.

[Français]

    Quelles sont les causes de la violence envers les jeunes femmes et les filles? D'après vous, les causes de la violence faite aux femmes et aux filles provenant des minorités, y compris les femmes de couleur et membres des communautés LGBT, sont-elles différentes des causes de la violence exercée sur les femmes en général? Si oui, quelles sont ces différences?

[Traduction]

    Elles peuvent différer dans le temps. Elles dépendent vraiment de la nature de la manifestation de violence qui se produit.
    Bien sûr, elles jouent toutes, collectivement, un rôle. Elles sont toutes très liées, parce que la violence est habituellement exercée par des personnes qui viennent de communautés intolérantes, qui ont des antécédents d'intolérance. Ce n'est pas nécessairement une violence imputable à des connaissances. Parfois oui, mais pas souvent.

[Français]

    Selon vous, l'utilisation d'Internet et des technologies de communication a-t-elle intensifié l'ampleur, la nature et les conséquences de la violence faite aux femmes et aux filles? Si oui, dans quelle mesure?

[Traduction]

    J'ai l'impression qu'il en a augmenté la portée et qu'il l'a rendue plus visible. Il a fait voir plus généralement ce qui se passe dans les vies des jeunes femmes et des jeunes de couleur. Ce n'est plus seulement à son école ou à son lieu de travail, mais, dorénavant, c'est partout au pays et dans toutes les collectivités, comme la sienne, ce qui fait connaître plus d'exemples de ce qu'il faut et ne faut pas faire. Je pense que c'est un pas très important vers la fin de la violence.

[Français]

    Quelles initiatives le gouvernement fédéral pourrait-il, le cas échéant, mettre en place? Si vous suggérez des initiatives et des interventions du gouvernement, quelles devraient-elles être?

[Traduction]

    Je commencerais par le respect des lois par la police et le travail de ceux qui sont dans le domaine de la santé mentale, les hôpitaux psychiatriques et les hôpitaux en général et je leur donnerais une formation qui ne porte pas seulement sur la santé de l'homme blanc cis d'âge moyen. La santé concerne aussi l'organisme des trans et des personnes de couleur. Je sais qu'une foule d'études médicales montrent la tolérance plus faible de la douleur ou sa moins bonne gestion par les personnes de couleur, mais c'est absolument de la mythologie, et beaucoup de recherches sur ce sujet doivent être actualisées.
    De même, la police a besoin d'être formée pour s'occuper des malades mentaux, pour apprendre à s'occuper d'elles et des personnes de couleur au lieu d'être réactionnaire. Les policiers ont besoin d'apprendre à être proactifs plutôt que réactifs, de recevoir plus de formation et de faire appel à de meilleurs formateurs pour faciliter cette formation.

  (1715)  

[Français]

     Merci.
    Il vous reste deux minutes.
    J'ai encore du temps de parole, c'est bien.
    Ma question s'adresse maintenant à nos témoins de l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Selon un rapport publié par votre organisme en 2015, les femmes autochtones sont plus à risque que les femmes non autochtones d'être victimes de traite de personnes ou d'exploitation sexuelle. Vous avez déjà mentionné que le risque d'être tuées est huit fois plus élevé pour les femmes autochtones. Pouvez-vous, s'il vous plaît, dire au Comité quels sont les facteurs qui expliquent cette vulnérabilité des femmes autochtones selon vous?

[Traduction]

    L'histoire des femmes autochtones montre qu'elles ont presque toujours joui de l'égalité avec nos hommes. La colonisation a entraîné leur abaissement, qui s'est poursuivi avec les pensionnats autochtones. J'ai grandi chez mes grands-parents, dans une réserve. L'atmosphère familiale changeait quand ma propre mère et mes oncles venaient à la maison. On traitait différemment les femmes en société. Au fil des années, le respect des femmes a diminué, elles ont été moins tenues de rendre des comptes aux conseils de femmes des différentes réserves et nations, et nous avons constaté les conséquences sur nos jeunes femmes d'aujourd'hui. Si nos hommes ne peuvent pas avoir d'estime pour leurs propres soeurs, leurs propres tantes, leurs propres femmes et leurs propres filles, parfois, ces femmes, alors, plongent dans la dépression et le désespoir et elles se laissent traiter sans le respect qui est entièrement dû à toutes les femmes autochtones et à toutes les autres femmes de partout dans notre pays.
    Il y a des hommes et des femmes qui sont là et qui profiteront de ces jeunes femmes autochtones. Elles se croient traitées avec respect par eux, mais c'est une illusion pour profiter d'elles.
    Merci.
    Passons à ma collègue Harder, qui dispose de cinq minutes.
    Madame Rico, le sujet actuel de la discussion est en fait double. Nous parlons de cyberviolence et de la violence sur les campus. Je me demande si vous avez des observations à faire sur les deux. Est-ce qu'elles existent dans nos collectivités d'immigrants et, si oui, dans quelle mesure?
    Je n'ai pas de statistiques sur le phénomène, mais l'une des constatations possibles sur la cyberviolence est qu'elle découle davantage de la traite de personnes. Sur les campus, nous pouvons notamment dire qu'elle est l'un des écueils qui menace les étudiantes étrangères. Le recrutement sur Internet pour la traite de personnes, particulièrement, vise le travail forcé ou même l'exploitation sexuelle. Les frais de conservation sont si élevés pour les passeports d'étudiants étrangers, et on leur permet de travailler si peu d'heures que, parfois, elles se retrouvent dans une position très vulnérable, qui favorise leur exploitation sur les campus. Par exemple, arrivant de l'étranger, elles font des rencontres et peuvent devenir victimes de la traite de personnes ou d'exploitation sexuelle, étant dans la nécessité de survivre pour poursuivre leurs études. On leur autorise seulement 20 heures de travail par semaine, tandis que vous, vous pouvez occuper un emploi à temps plein.
    Merci beaucoup. C'est très utile.
    Je pose la même question à Mme Joe. Qu'avez-vous à dire sur la cyberviolence et la violence sur les campus par rapport aux femmes autochtones?

  (1720)  

    Francyne voudrait que je réponde.
    Contre la cyberviolence, encore une fois, nous essayons d'informer les foyers où Internet est accessible, reconnaissant que les familles qui peuvent se l'offrir sont assez à l'aise. C'est un luxe. Mais les parents ou les écoles doivent être informés pour neutraliser les dangers d'Internet et d'appliquer des mesures ou régler des paramètres pour soustraire les enfants à la surveillance des prédateurs qui y rôdent. Il faut apprendre à couvrir l'objectif de la webcam d'une bande adhésive et à fermer le réseau wi-fi à la maison pour que les enfants l'éteignent et aillent se coucher au lieu de texter jusqu'à 2 heures ou les faire sortir de leurs chambres, ce genre de choses.
    Sur les campus, nous examinons comment se fait la sensibilisation à la traite des personnes et à l'exploitation sexuelle. Mais, en plus, nous collaborons avec la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants et avec les associations d'étudiants autochtones dans les universités et les collèges et nous y allons. Les associations provinciales de conseillers en éducation s'occupent de faciliter la transition des études secondaires, en milieu local, aux études collégiales et universitaires, en ville, où les jeunes, pour la première fois, verront des autobus, des rues éclairées, des foules en mouvement, des portes coulissantes et des escaliers mobiles, et ainsi de suite. Ils doivent en plus songer à leur sécurité, s'orienter vers leur dortoir, le campus, leur chambre.
    Merci.
    Ma dernière question est pour Awar. Que pourriez-vous dire sur l'ampleur de la cyberviolence et de la violence sur les campus pour les LGBTA?
    Il y a loin de la coupe aux lèvres. Être LGBTA peut exiger un effort acharné et imposer des difficultés au quotidien. La violence est quotidienne, même si ce n'est qu'une micro-agression ou une conversation ponctuée d'une insulte homophobe, par exemple. On peut aussi se faire pourchasser ou dénigrer ou, en ligne, subir la divulgation de renseignements personnels sur son compte. C'est arrivé à quelques membres de mon collectif. C'est le désarroi, parce qu'on se sent complètement exposé. La violence en ligne et sur les campus est très intersectionnelle.
    Très bien. Votre temps est écoulé.
    Nous commençons la dernière intervention d'une durée de cinq minutes, avec Mme Vandenbeld.
    Je tiens à vous remercier toutes d'être ici.
    Nous avons beaucoup parlé de violence contre les jeunes femmes et les filles, mais, bien sûr, son intersectionnalité rend plus vulnérables certaines femmes et filles. Je pense que vous en avez toutes fait la révélation aujourd'hui.
    Ma question s'adresse aux Babely Shades et à Awar Obob. Je suis députée d'Ottawa. Comme nous le savons toutes, notre ville a connu une semaine difficile, sous des attaques de graffitis racistes. Je voulais prendre note de ce que vous aviez dit, qui est que les hauts fonctionnaires doivent aussi clamer leur indignation. Hier, j'ai participé à la marche de solidarité, et je sais que beaucoup de figures publiques ont assisté à des réunions de solidarité pendant la fin de semaine, et nous sommes avec vous. Je tiens à ce que vous le sachiez.
    Merci.
    Vous avez prononcé à quelques reprises le mot microagression. Nous savons que la violence est multiforme, mais j'entendais ce mot pour la première fois. Que signifie-t-il?
    Une microagression est une très petite agression, habituellement à connotation raciale ou même sexuelle ou touchant la sexualité. Par exemple, on dit à quelqu'un dont le vécu est différent qu'il s'exprime très bien ou que son accent est très léger. Cette façon de le distinguer est une microagression. Demander à toucher les cheveux d'un noir, par exemple, l'est aussi. Les exemples sont très nombreux.

  (1725)  

    Merci. Je vous en suis reconnaissante.
    C'est essentiellement une façon de rabaisser quelqu'un, mais d'une manière qui n'est pas nécessairement évidente.
    Oui.
    Un dernier éclaircissement avant de céder la parole à ma collègue Damoff.
    Madame Rico, vous avez dit dans votre déclaration que le ministère de l'Immigration pratiquait une analyse comparative entre les sexes et que la section qui en était responsable n'existait plus. Nous venons de terminer une étude de cette analyse comparative qui a révélé que l'Immigration était un exemple de réussite. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous avez voulu entendre?
    En 2002, une unité chargée de l'analyse comparative entre les sexes avait tissé des liens avec des ONG comme le Conseil canadien pour les réfugiés et aussi avec des organisations qui travaillent avec les femmes. À l'époque, nous avions comparu devant un comité. Si vous vous rappelez la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, une étude présentait une analyse comparative entre les sexes relativement à ce projet de loi.
    Au fil du temps, l'unité a fondu et, ces dernières années, elle a été réduite à l'insignifiance. Nous savions qu'il y restait une personne, mais il n'y a plus personne maintenant. Les mesures de résidence permanente conditionnelle appliquées par le gouvernement n'ont fait l'objet d'aucune analyse comparative. De même, un article de règlement sur la réunification des familles porte que si, pour une raison quelconque, le candidat n'inscrit pas le nom d'un enfant, cet enfant ne peut pas venir au Canada. C'est l'article 117.
    L'analyse comparative entre les sexes nous amène à nous interroger sur cette exclusion. Elle pourrait découler de renseignements inexacts, mais aussi, particulièrement dans le cas du parrainage d'un conjoint, la faute pourrait être imputé au mari qui a rempli les formulaires. Parfois, il omet de mentionner les enfants, parce qu'il faut gagner un certain revenu lorsque des enfants sont dans le portrait. Pour le conjoint, il suffit de prouver qu'on a un revenu.
    Je peux multiplier les exemples de l'absence d'analyse comparative entre les sexes. Par exemple, dans la réforme concernant les réfugiés, en raison des courts délais actuellement en vigueur, quand l'audience avec le réfugié aura lieu dans deux mois, il est clair qu'on n'a pas tenu compte des candidats les plus vulnérables, particulièrement la femme qui arrive avec son mari, qui est auteur de violences. Après l'audience, on n'entend que le témoignage du principal demandeur, l'homme. Rien n'est prévu pour faire témoigner la femme sur la violence ou les agressions, et, parfois, les réfugiés sont expulsés vers leur pays d'origine où les agressions se poursuivent.
    De plus, il y a l'interdiction qui frappe l'examen des risques avant renvoi et les motifs d'ordre humanitaire, pendant un an. C'est aussi l'aboutissement d'une absence d'analyse comparative entre les sexes, parce que, parfois, lorsque la personne reçoit le résultat de l'examen des risques avant renvoi, la femme peut parler et soulever le problème de violence, parce qu'elle vivait ici, au Canada. Parfois, elle a cherché des appuis. Auprès de la police, de l'église ou de la collectivité, un appui qu'elle n'avait pas dans sa communauté, et elle peut maintenant dénoncer les faits. Et c'est pourquoi je dis que les dernières modifications apportées ne comportaient pas d'analyse comparative entre les sexes, qu'il faut réintégrer.
    Excellent.
    Malheureusement, c'est tout pour aujourd'hui, mais je tiens à remercier tous les témoins de leur excellent travail.
    Vous avez entendu les questions. Si vous voulez nous communiquer des réponses, je vous invite à faire parvenir vos observations à notre greffière, et nous en tiendrons certainement compte. Merci encore pour votre temps et pour tout votre travail.
    La séance est levée.
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