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HUMA Rapport du Comité

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CHAPITRE 1 : CONTEXTE

A. Le Programme des travailleurs étrangers temporaires

À la suite des réformes apportées en juin 2014, le PTET ne comprend désormais que les volets de permis de travail en vertu desquels des travailleurs étrangers temporaires peuvent entrer au Canada à la demande d’un employeur qui a subi avec succès un examen du marché du travail connu sous le nom d’étude d’impact sur le marché du travail (EIMT). Le PTET est, à cet égard, différent du Programme de mobilité internationale, qui, contrairement au PTET, ne requiert pas une EIMT et a pour objet de favoriser les intérêts économiques et culturels du Canada, plutôt que de simplement pallier des pénuries sur le marché du travail. Emploi et Développement social Canada (EDSC) est le ministère responsable du PTET, tandis qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) est responsable du Programme de mobilité internationale[3].

Le PTET comporte quatre volets auxquels les employeurs peuvent s’inscrire : le volet des salaires élevés, le volet des bas salaires, le volet de l’agriculture primaire et le volet à l’appui de la résidence permanente. Chaque volet comporte des exigences que les employeurs doivent satisfaire.

Le volet des salaires élevés vise les postes dont le salaire offert est égal ou supérieur au salaire horaire médian de la province ou du territoire[4], tandis que le volet des bas salaires vise les postes dont le salaire offert est inférieur au salaire horaire médian de la province ou du territoire.

Le volet de l’agriculture primaire permet aux employeurs d’embaucher des travailleurs migrants de n’importe quel pays pour occuper des postes dans le domaine de l’agriculture primaire sur la ferme pendant au plus 24 mois. Ce volet inclut le Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS), par lequel les employeurs peuvent embaucher de la main-d’œuvre en provenance du Mexique et de différents pays des Antilles visés par des ententes bilatérales internationales. Les travailleurs migrants ne peuvent, dans le cadre du PTAS, travailler au Canada qu’un maximum de huit mois, de janvier à la mi‑décembre.

Enfin, dans le volet à l’appui de la résidence permanente, les employeurs peuvent s’inscrire au PTET pour obtenir une EIMT afin d’appuyer une demande de résidence permanente, ou comme moyen de permettre à un ressortissant étranger de travailler au Canada pendant qu’il demande la résidence permanente.

Depuis décembre 2014, le Programme des aides familiaux résidants ne constitue plus un volet distinct. À l’heure actuelle, les demandes d’EIMT pour les aides familiaux sont évaluées dans le cadre des volets des salaires élevés ou des bas salaires, et les aides familiaux ne sont plus tenus de demeurer dans la résidence de leur employeur. En vertu du PTET, les familles ont la possibilité d’embaucher un aide familial étranger pour offrir des soins, dans une résidence privée, à des enfants, des personnes âgées ou des personnes ayant des besoins médicaux certifiés, lorsque des travailleurs canadiens ou des travailleurs résidents permanents ne sont pas disponibles[5].

B. Réformes récentes du programme

Les paramètres actuels du PTET ont été établis au terme d’une série de réformes récentes, les plus importantes étant celles qui ont été annoncées le 20 juin 2014. Ces réformes visaient à limiter la dépendance des employeurs aux travailleurs étrangers temporaires et à renforcer les mécanismes de conformité afin de garantir que les employeurs répondent aux exigences du programme[6].

Lors de leur comparution devant le Comité, les représentants d’EDSC ont indiqué que le programme ne doit être utilisé par les employeurs « qu’en dernier recours, et seulement afin de pallier une grave pénurie de main-d’œuvre de manière temporaire[7] », et ce, dans trois buts :

pour pourvoir des emplois temporaires jusqu’à ce que les employeurs soient en mesure de recruter et de former de la main-d’œuvre canadienne, ou de faire venir un travailleur par l’entremise du processus d’immigration;
pour pourvoir des postes à court terme ponctuels ou saisonniers, dans les cas où l’emploi n’existe plus une fois que le travailleur étranger a quitté le pays;
ou, pour faciliter la mobilité des talents internationaux en permettant aux employeurs d’embaucher des travailleurs hautement qualifiés et spécialisés qui ont des compétences et des connaissances uniques qui peuvent être transférées aux travailleurs canadiens ou qui peuvent aider à créer des emplois pour les travailleurs canadiens[8].

Afin de garantir que ces buts soient respectés, les employeurs doivent démontrer à EDSC, au moyen d’une demande d’EIMT, qu’aucun Canadien, ni aucun résident permanent, n’est disponible pour occuper le poste. L’EIMT est un nouveau processus de vérification du marché du travail qui a été instauré dans le cadre des réformes de juin 2014. L’EIMT est utilisée pour établir les répercussions que pourrait avoir l’emploi d’un travailleur étranger sur le marché du travail canadien, et est délivrée par EDSC/Service Canada. L’exigence relative à l’EIMT est particulièrement importante puisque, pour qu’un travailleur étranger temporaire puisse demander un permis de travail à IRCC, l’employeur doit d’abord obtenir une EIMT positive[9].

Selon les représentants d’EDSC, l’EIMT est un mécanisme de sélection « plus complet et rigoureux » que l’ancien avis relatif au marché du travail. L’EIMT exige que les employeurs indiquent dans leur demande le nombre de Canadiens qui ont posé leur candidature et qui ont obtenu une entrevue pour le poste disponible, de même que les raisons pour lesquelles la candidature de ces Canadiens n’a pas été retenue. Les employeurs doivent également confirmer qu’ils connaissent la règle selon laquelle ils ne peuvent pas mettre à pied des Canadiens ou réduire le nombre d’heures de travail de ces derniers dans les lieux de travail où l’on a embauché des travailleurs étrangers temporaires[10].

À ces conditions s’ajoute le fait que les employeurs doivent également répondre à des exigences précises instituées en juillet 2013 en matière de publicité. Ils doivent notamment annoncer les postes à combler au Canada pendant au moins quatre semaines par des moyens qui vont au-delà du simple fait d’afficher les postes sur des sites d’emploi et, dans le cas des postes à bas salaire, démontrer qu’ils ont fait des efforts pour embaucher des Canadiens faisant partie de groupes sous-représentés. EDSC/Service Canada refusera de traiter la demande d’EIMT s’ils craignent que des travailleurs étrangers temporaires n’aient un impact négatif important sur le marché du travail canadien[11].

Afin de couvrir l’augmentation du coût de prestation du PTET selon ces nouvelles modalités, les frais liés à l’EIMT sont passés de 275 à 1 000 $ en 2014 pour chaque poste de travailleur étranger temporaire demandé par un employeur. De 1973, année de création du programme, jusqu’à 2013, aucun frais n’était exigé pour une demande[12].

Les réformes de juin 2014 ont également apporté des modifications particulières aux volets du programme en vertu desquels les employeurs peuvent demander une EIMT, et notamment les volets des salaires élevés et des bas salaires, dans le but de garantir que les employeurs ne deviennent pas dépendants de la main-d’œuvre étrangère temporaire. Les employeurs désireux de pallier une pénurie de main‑d’œuvre dans le volet des salaires élevés, par exemple, doivent soumettre, avec leur demande d’EIMT, un plan de transition dans lequel ils doivent faire état des activités de recrutement et de formation mises en place pour réduire leur dépendance à la main-d’œuvre étrangère temporaire pour les postes à salaires élevés et ainsi faire la transition vers une main-d’œuvre canadienne. Un plan de transition doit être fourni pour chaque poste pour lequel l’employeur demande une EIMT. Les employeurs doivent également rendre compte du succès de leur plan de transition s’ils veulent présenter une nouvelle demande d’embauche de travailleurs étrangers temporaires ou s’ils font l’objet d’une inspection[13].

Pour ce qui est du volet des emplois à bas salaire, les employeurs ayant 10 employés ou plus qui demandent une nouvelle EIMT sont assujettis à une limite de 10 % de travailleurs étrangers temporaires à bas salaire en proportion à leur nombre total d’employés. L’entrée en vigueur de cette limite s’effectue progressivement sur trois ans pour les employeurs qui dépassent cette limite et il est prévu qu’elle sera appliquée à tous les employeurs à compter du 1er juillet 2016. Sont exempts de cette limite les postes agricoles primaires sur la ferme et d’aides familiaux, ainsi que, pour les demandes reçues en 2016, les secteurs saisonniers embauchant des travailleurs étrangers temporaires pour des postes à bas salaire dont la durée ne dépasse pas 180 jours civils[14].

En plus d’instaurer une limite sur la proportion de main‑d’œuvre composée de travailleurs étrangers à bas salaire, les réformes de juin 2014 ont réduit de deux à un an la durée de validité des permis de travail établie dans l’EIMT pour les postes du volet des bas salaires. Cette modification oblige les employeurs à soumettre chaque année une demande d’EIMT afin de prendre en compte les changements des conditions du marché du travail qui auraient pu se produire au cours de l’année. Enfin, depuis juin 2014, les demandes d’EIMT pour certains postes à bas salaire des secteurs de l’hébergement, des services de restauration et du commerce de détail ne sont plus traitées dans les régions économiques ayant un taux de chômage de 6 % ou plus, ce qui signifie que les employeurs de ces régions ne peuvent plus chercher à embaucher des ressortissants étrangers pour certains postes à bas salaire[15].  

Depuis avril 2013, et quel que soit le volet, les employeurs voulant embaucher des travailleurs étrangers temporaires se doivent de les payer à un salaire égal ou supérieur au salaire offert pour ce même genre de postes dans la région. Cette exigence salariale a été instaurée afin de limiter les possibilités d’exercer des pressions à la baisse sur les salaires[16]. De plus, depuis 2011, les travailleurs migrants ne peuvent travailler au Canada plus de quatre années cumulatives. Cette limite se fonde sur la règle du « maximum cumulatif », qui exige également que les travailleurs étrangers temporaires passent les quatre années suivantes soit hors du Canada, soit au Canada, mais sans travailler pour être de nouveau admissibles à un permis de travail[17].

Enfin, le PTET est désormais assujetti à ce que les représentants d’EDSC ont appelé un « renforcement » des mesures coercitives et un « alourdissement » des peines afin de garantir un plus grand respect des exigences du programme par les employeurs. Ces modifications incluent une augmentation du nombre d’inspections et un élargissement de leur portée, ainsi que des pouvoirs accrus pour les inspecteurs et le lancement d’une ligne d’information confidentielle pour signaler les abus au programme. Selon les représentants d’EDSC, on dénombre, depuis avril 2014, d’environ 3 800 signalements reçus. Ces signalements ont donné lieu à 640 inspections par des représentants d’EDSC, dont 220 ont été renvoyées à d’autres organismes d’application de la loi. Un éventail plus large de sanctions et d’amendes a également été mis en place pour les employeurs qui commettent des infractions au PTET. Ces sanctions peuvent aller de l’interdiction de participer, en passant par la publication des noms des employeurs dont l’EIMT a été suspendue ou révoquée sur un site Web public, jusqu’à une amende pouvant atteindre 100 000 $ par infraction[18].

C. Données statistiques

Les représentants d’EDSC ont souligné, dans leur analyse du PTET, une importante tendance à la baisse dans les demandes de travailleurs étrangers temporaires depuis l’entrée en vigueur des réformes majeures du programme en 2014. Selon leurs estimations, le nombre de postes de travailleur étranger temporaire approuvés dans les EIMT a chuté de 163 035 en 2013 à 90 211 en 2015 – une baisse de 45 %. De plus, le nombre de postes de travailleur étranger temporaire approuvés en 2015 représente moins de 0,5 % des 19,4 millions de Canadiens sur le marché du travail[19]. Le diagramme ci‑dessous illustre cette tendance à la baisse pour les différents volets du programme.

Le diagramme ci‑dessous illustre cette tendance à la
    baisse pour les différents volets du programme.


[3]              Emploi et Développement social Canada [EDSC], Réforme globale du Programme des travailleurs étrangers temporaires, pp.1 et 29–32.

[4]              Le salaire horaire médian de la province ou du territoire est le salaire qui se trouve au milieu de la distribution des salaires horaires de la région ou du territoire. Si, par exemple, le salaire horaire médian est de 25 $ l’heure, cela signifie que la moitié des salaires observés dans la région ou le territoire sont supérieurs ou égaux à 25 $, tandis que l’autre moitié des salaires observés sont égaux ou inférieurs à ce montant.

[5]              Document de référence présenté par EDSC, Aperçu du Programme des travailleurs étrangers temporaires, mai 2016, pp. 5–6. Voir aussi Gouvernement du Canada, Embaucher un travailleur temporaire dans un poste agricole, Embaucher un travailleur temporaire dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles saisonniers – Aperçu, et Embaucher un travailleur temporaire dans un poste de fournisseur de soins à domicile – Aperçu.

[7]              HUMA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 11 mai 2016, 1615 (Paul Thompson, sous-ministre adjoint principal, Direction générale des compétences et de l’emploi, EDSC).

[8]              Paul Thompson, Notes d’allocution : Examen du Programme des travailleurs étrangers temporaires, Ottawa, 11 mai 2016, p. 2.

[9]              Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Faits et chiffres : Aperçu de l’immigration – Résidents temporaires, 2014, p. 49.

[11]           Ibid., pp. 34–35.

[12]           Ibid., p. 27.

[13]           Ibid., pp. 14–15.

[14]           Ibid., pp. 10–11, ainsi que 29. Voir aussi Gouvernement du Canada, Embaucher un travailleur étranger temporaire dans un poste à bas salaire – Exigences.

[15]           EDSC, Réforme globale du Programme des travailleurs étrangers temporaires, pp. 13–14.

                Les postes visés sont : serveurs/serveuses au comptoir, aides de cuisine et personnel assimilé, préposés à l’entretien ménager et au nettoyage – travaux légers, caissiers/caissières, commis d’épicerie et autres garnisseurs/garnisseuses de tablettes – commerce, aides de soutien des métiers et manœuvres en construction, manœuvres en aménagement paysager et en entretien des terrains, autres préposés/préposées en hébergement et en voyage, concierges et concierges d’immeubles, nettoyeurs spécialisés/nettoyeuses spécialisées et gardiens/gardiennes de sécurité et personnel assimilé.

[16]           Ibid., p. 34.

[18]           EDSC, Réforme globale du Programme des travailleurs étrangers temporaires, pp. 18–27. Voir aussi HUMA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 30 mai 2016 (Paul Thompson).

[19]           Document de référence présenté par EDSC, Aperçu du Programme des travailleurs étrangers temporaires, mai 2016, pp. 7 et 12.