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FINA Rapport du Comité

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OPINION DISSIDENTE DU BLOC QUÉBÉCOIS

Une 43e législature en attente d’une vision du gouvernement

De prime abord, le Bloc Québécois tient à remercier tous les intervenants et toutes les intervenantes qui ont participé au processus intensif de consultations prébudgétaires 2020. Plusieurs intervenants nous ont fait part de leur volonté d’y participer ou d’amender leur mémoire : près de six mois séparent la limite du dépôt des mémoires, en août 2019, et les consultations en février, alors que la campagne électorale a amené des enjeux qui n’étaient pas sur le radar à ce moment. Nous réitérons notre volonté de collaborer avec la société civile et les organisations dans le but de défendre et représenter les intérêts du Québec. C’est l’enjeu qui transcende les actions du Bloc Québécois depuis sa création.

En date du 28 février, le conseil des ministres est constitué depuis 100 jours. 100 jours, c’est assez de temps pour que le gouvernement mette de l’avant ses priorités et ses politiques phares. Pour le moment, le gouvernement a fait part de beaucoup d’intentions, mais peu de réalisations. Depuis l’élection, l’approche du Bloc Québécois a été des plus claires sur ses attentes envers le gouvernement. Son travail n’est pas de s’opposer systématiquement, mais plutôt de réaliser ses engagements et défendre les intérêts du Québec et ses régions. Nous ne demandons donc qu’à être surpris de ce gouvernement. Avec le discours du Trône, il a démontré de l’ouverture dans certains dossiers prioritaires pour le Québec. Il est toutefois nécessaire que cette ouverture se traduise par des mesures budgétaires concrètes. Le Bloc Québécois ne s’attend à rien de moins.

Prendre acte du résultat des élections générales de 2019

Le Québec a été clair lors des dernières élections : il souhaite que le gouvernement fédéral écoute les revendications de l’Assemblée nationale et ce que le Bloc Québécois a à dire. Le gouvernement doit collaborer : non pas qu’en parole, mais en gestes concrets pour l’autonomie et les priorités du Québec. Le Bloc Québécois les résume ainsi :

  • La bonification de la pension de la sécurité de la vieillesse pour les aînés dès 65 ans;
  • La hausse des transferts en santé;
  • La garantie de versement des compensations aux producteurs sous gestion de l’offre;
  • L’approvisionnement en eau potable « au robinet » pour les communautés autochtones;
  • L’accès à 50 semaines de prestations d’assurance-emploi en cas de maladie grave;
  • Le déblocage des dossiers de logement social attendus par Québec et les villes.

Ces demandes ne sont ni frivoles ni utopiques :

  • Certaines auront un coût important sur le budget, mais répondent concrètement à des enjeux préoccupants pour nos citoyens.
  • D’autres peuvent se faire à l’intérieur des programmes déjà établis, en débloquant les sommes où en recadrant les programmes vers nos priorités.
  • D’autres rapporteront des sommes importantes au gouvernement et éviteront l’érosion de la capacité d’action causée par le flou autour de l’assiette fiscale.

Le gouvernement creuse le déficit d’année en année et n’a pas de plan pour revenir à l’équilibre budgétaire. Mais ce qui est encore plus préoccupant, c’est qu’il ne semble rien sortir de structurant pour l’économie québécoise de ces déficits. Et aucune vision ne semble encadrer ces investissements. Le gouvernement a réalloué, seulement avec les budgets supplémentaires des dépenses 2019-2020, 4,94 milliards $ (A) et 5,56 milliards $ (B) pour les projets proposés dans le budget 2019. 10,5 milliards $, c’est beaucoup d’argent. Mais ce n’est pas beaucoup pour insuffler une orientation, une vision à un gouvernement en manque de leadership. Il faut investir pour celles et ceux qui en ont besoin, pour réussir la transition énergétique, pour que nos médias et nos créateurs artistiques rivalisent à armes égales avec les géants du web. Et ça, nous n’avons pu constater une ligne directrice gouvernementale indiquant qu’ils veulent s’attaquer à ces enjeux. Ils remettent souvent des décisions à des consultations, à des études et à des consensus internationaux : sauf qu’en finalité, il faut que le gouvernement prenne une décision. Qu’il prouve que les libéraux veulent gouverner.

Au fédéral, le gouvernement a une réelle marge de manœuvre. Le Directeur parlementaire du budget nous le rappelle régulièrement : « La politique budgétaire fédérale actuelle est viable à long terme. Le DPB estime que le gouvernement fédéral pourrait augmenter les dépenses ou réduire les impôts et les taxes de manière permanente dans une proportion correspondant à 1,8 % du PIB (41 milliards de dollars courants) tout en maintenant à long terme la dette nette au niveau actuel (2018), qui correspond à 28,5 % du PIB.[1] »

D’un autre côté, l’absence d’un sujet est notable dans les consultations de cette année : la crise des médias. Bien que la taxation des géants du web soit abordée, le problème est beaucoup plus vaste que ce seul enjeu. Le soutien aux médias et au journalisme doit être amélioré. Les médias locaux et régionaux doivent être soutenus convenablement. Il est à noter qu’un seul groupe est intervenu sur cet enjeu.

Un autre sujet d’importance, sur lequel la partisannerie ne devrait pas s’étendre, est la protection de l’environnement et la garantie, aux générations futures, que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour conserver leur niveau de vie et un milieu de vie sain. Ainsi, nous avons proposé la péréquation verte pour parvenir à ces deux objectifs : augmenter la création de richesse dans le secteur des technologies vertes tout en favorisant la transition vers un développement économique moins polluant.

Recommandations supplémentaires du Bloc Québécois

Nous aurions voulu que ce comité recommande au gouvernement fédéral qu’il :

  • Rehausse la somme octroyée par le biais du Supplément de revenu garanti;
  • Permette aux caisses de retraite des travailleurs et travailleuses d’être créancières prioritaires en cas de faillite de l’entreprise;
  • Bonifie la pension de la sécurité de la vieillesse pour les aînés, dès 65 ans, à 15% du salaire industriel moyen;
  • Hausser les transferts canadiens sur la santé tel que demandé par les provinces et le Québec à la hauteur de 5,2 % par année;
  • Transfère, entièrement et sans condition, les sommes prévues pour la Stratégie nationale sur le logement du fédéral vers les programmes québécois;
  • Convertisse les crédits d’impôt pour les proches aidants en crédits d’impôts remboursables;
  • Instaure un crédit d’impôt similaire au crédit d’impôt pour l’investissement dans la région de l’Atlantique pour la Côte-Nord;
  • Compense les artisans fromagers et les transformateurs pour les impacts de l’AECG;
  • Travaille à la mise en place d’une stratégie de l’aérospatiale;
  • Crée un fonds d’investissement pour les secteurs de pointe tels que le multimédia et le jeu vidéo, les technologies vertes, l’aluminium, le transport avancé, les nouveaux matériaux, l’aérospatiale et le pharmaceutique.
  • Exonère l’achat de livres de l’application de la TPS;
  • Hausse le financement de la recherche dans les établissements postsecondaires;
  • Augmente le budget de Téléfilm Canada afin de permettre la création de séries lourdes en ligne;
  • Maintienne, puis indexe, le budget du Conseil des arts, en incluant une aide à la promotion internationale.
  • Que les programmes Fonds du Canada pour la présentation des arts et Développement des communautés via arts et patrimoine profitent d’une annonce pérennisant leur financement pour les prochaines années;
  • Garantisse les montants et les modalités pour le versement des compensations aux producteurs sous gestion de l’offre pour les pertes occasionnées par l’AECG, le PTPGP et l’ACEUM;
  • Instaure un crédit d’impôt à la modernisation de la production pour nos entreprises;
  • S’engage à réduire l’enjeu de la rareté de la main-d’œuvre;
  • Élabore une stratégie pour améliorer la productivité de nos entreprises;
  • Rende permanent le programme de part à imposition différée (PID) pour les coopératives agricoles.
  • Assure la continuité du programme pour l’achat de véhicules zéro émission et bonifie le programme incitatif en :
    • Offrant des rabais supplémentaires pour les ménages à plus faibles revenus
    • Offrant des rabais supplémentaires lorsque l’achat d’un véhicule écologique retire de nos routes un véhicule particulièrement polluant;
    • Offrant des incitatifs à l’achat et pour la recherche dans les véhicules lourds et commerciaux;
    • Remplaçant la flotte de véhicules fédéraux pour des véhicules verts;
    • Exemptant l’achat de véhicules électriques, neufs et usagés, ainsi que l’équipement de recharge de véhicules électriques, de la TPS;
    • Exonérant les véhicules neufs et d’occasion de la taxe d’accise;
  • Contribue à réduire les émissions en fournissant un fonds incitatif pour favoriser l’adoption d’autobus sans émissions pour les transports en commun
  • Cesse les subventions aux énergies fossiles;
  • Se dote de contraintes légales pour atteindre ses cibles environnementales prises dans le cadre des accords de Paris;
  • Impose les profits que les entreprises, en particulier les banques, rapatrient des paradis fiscaux;
  • Examine tous les accords fiscaux conclus par le Canada avec les paradis fiscaux;
  • Impose la TPS sur les services et la publicité en ligne, peu importe la plateforme;
  • Crée un Fonds des médias écrits, à partir des revenus des taxes récoltées sur les publicités.
  • Impose les géants du Web à hauteur de 3 % de leur activité sur le territoire canadien.

Le respect des champs de compétences

Malgré le fait que certaines recommandations de ce rapport peuvent se traduire en gains pour le Québec, nous nous retrouvons encore avec un engagement pour plus d’ingérence dans les champs de compétence du Québec et des provinces. Le Bloc Québécois est d’avis que, pour tout programme fédéral dans un champ de compétence du Québec et des provinces, le gouvernement devrait leur offrir un droit de retrait avec pleine compensation et sans condition.

Sans cette garantie et avec les intrusions dans les champs de compétences de Québec, il est dangereux que nous rejouions dans le même scénario que lors de la renégociation des transferts canadiens en santé en 2016 : le ministre de la santé québécois affirmait que le gouvernement Trudeau pratiquait un « fédéralisme prédateur ». Si le droit de retrait avec compensation n’est pas accordé, voici trois exemples d’ingérences fédérales de ce rapport :

  • [Que le gouvernement fédéral] mette en place un programme national, universel et public d’assurance-médicaments;
  • Investisse dans des soins à domicile complets pour les personnes qui ne peuvent pas demeurer à la maison [sans ces soins];
  • Instaure un fonds spécial pour aider les municipalités souhaitant électrifier leurs parcs de véhicules de transport en commun en partenariat avec le gouvernement fédéral [...]

La Chambre des Communes a reconnu le Québec comme nation en 2005. Cette reconnaissance ne vaut pas grand-chose s’il n’y a pas d’actions concrètes pour la soutenir. Les Québécoises et les Québécois savent ce qui est bon pour eux. Leurs représentants, au sein de l’Assemblée nationale, devraient avoir le dernier mot en ce qui concerne les investissements sur le territoire québécois et dans leurs prérogatives constitutionnelles.

Nous croyons que la meilleure façon, pour le Québec, d’assumer pleinement son autonomie et son développement, en concordance avec ses valeurs, se retrouve dans son indépendance nationale. D’ici à ce que la nation québécoise décide d’y accéder, nos revendications, exprimées dans cette opinion dissidente, nous semblent les meilleures pistes de réflexion pour préserver l’État québécois.


[1] Directeur parlementaire du budget, 2020, Rapport sur la viabilité financière de 2020, page 2.