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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 033 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 2 juin 2020

[Enregistrement électronique]

  (1500)  

[Traduction]

     Je déclare la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 33e réunion du Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Je souhaite également la bienvenue au premier groupe de témoins. Conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre des communes, nous nous réunissons pour étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
    Les députés le savent sans aucun doute, mais je précise aux témoins que la réunion d'aujourd'hui se tient par vidéoconférence et que les témoignages seront rendus publics sur le site Web de la Chambre des communes.
    Ce groupe de témoins est assez général. Nous entendrons pour commencer le président de l'Association des camps du Québec, M. Grenier.
    Je demanderais aux témoins d'essayer de s'en tenir à environ cinq minutes pour leurs déclarations préliminaires, puisqu'ils sont sept. Cela nous donnerait un peu plus de temps pour les questions.
    Allez-y, monsieur Grenier.

[Français]

    Je m'appelle Steven Grenier et je suis le président de l’Association des camps du Québec.
    C’est avec grand plaisir que je représenterai notre organisation devant le Comité cet après-midi.
    Fondée en 1961 à l’initiative de directeurs de camps de vacances, l’Association des camps du Québec compte 346 membres OBNL, organisations municipales et privées, qui exploitent 691 sites et qui accueillent plus de 300 000 campeurs chaque année. Ensemble, nos membres génèrent des revenus annuels de plus de 100 millions de dollars.
    Notre mission en tant qu’organisation est de « reconnaître et promouvoir la qualité et la valeur éducative de l’expérience CAMP au Québec », en regroupant les organismes offrant des programmes de camp de vacances, de camp de jour, de classe nature, de camp familial ou d'accueil de groupes, en vue de les soutenir, d’en faire la promotion et d’en assurer la qualité.
    Grâce à la certification Association des camps du Québec, ou ACQ, nos membres se démarquent par la qualité et la sécurité de leurs services, une considération d’autant plus importante dans le contexte actuel.
    En effet, le sceau « camp certifié » qui désigne l’ensemble de nos membres est gage de respect de plus de 70 normes établissant des exigences relatives à la sécurité, à l’encadrement, à la programmation, à l’environnement et à l’alimentation. Autrement dit, la certification ACQ est synonyme des plus hauts standards de qualité.
    Toutefois, comme vous le savez, depuis l’éclosion de la pandémie de la COVID-19, notre industrie doit faire face à des défis financiers importants en plus de devoir manœuvrer dans un contexte de forte incertitude. Bien que nous comprenions que la crise actuelle touche l’ensemble des secteurs de l’économie canadienne, force est de reconnaître que certaines particularités de notre industrie nous rendent plus vulnérables aux enjeux posés par la COVID-19.
    Je vous rappelle que les camps sont des entreprises saisonnières qui fonctionnent pour la plupart seulement durant les mois de juillet et d’août. Contrairement à la majorité des autres secteurs, les camps ne bénéficient que de huit semaines pour générer l’ensemble de leurs revenus pour l’année complète.
     Cela dit, pour plusieurs camps, ces huit semaines cruciales d’activités se retrouvent en péril en raison de la pandémie. Dans une optique encore plus importante, les camps sont des organisations qui offrent un service visant à assurer l’épanouissement et le bien-être des campeurs dans un environnement sécuritaire.
    Pour des raisons évidentes, la capacité des camps à offrir un tel service dans le contexte actuel est vraiment ébranlée. En effet, afin d’assurer la sécurité des enfants cet été et de respecter les consignes de santé publique, les camps devront mettre en place des mesures extraordinaires. Ces mesures engendreront inévitablement des frais de fonctionnement supplémentaires importants pour les gestionnaires de camps qui ont besoin de l’appui du gouvernement pour traverser la crise.
    Cette réalité, combinée à la réduction du nombre de campeurs cet été dans les camps de jour comme il est prescrit dans les mesures de santé publique, entraînera assurément un manque à gagner pour les camps au Québec, comme ailleurs au Canada. Ces enjeux, aussi préoccupants soient-ils pour les gestionnaires des camps de jour, pâlissent cependant en comparaison des défis auxquels les camps de vacances du Québec doivent faire face.
    En effet, n’ayant pas obtenu l’autorisation du gouvernement du Québec pour ouvrir leurs portes cet été par souci de sécurité, les camps de vacances seront privés de la quasi-totalité de leurs revenus pour l’année 2020. Or, ces entreprises continueront évidemment à devoir assumer une foule de frais fixes en dépit de la fermeture, par exemple, le loyer, l'électricité, l'entretien, les assurances, et bien plus. Cela les placera dans une situation financière intenable qui remettra en question leur capacité à ouvrir à l'été 2021. De plus, ces derniers devront trouver un moyen de rembourser les dépôts effectués par les parents pour inscrire leurs enfants, ce qui s'ajoutera au stress financier imposé aux camps de vacances.
    Pour toutes ces raisons, il ne fait nul doute que, faute d’un soutien gouvernemental, un grand nombre de camps de vacances seront appelés à disparaître de façon permanente. La réalisation d’un tel scénario serait à nos yeux des plus tragiques, compte tenu du fait que les camps des vacances sont des institutions faisant partie intégrante de la culture canadienne, et ce, depuis plus d’un siècle.

  (1505)  

    Beaucoup plus que de simples lieux de séjour, les camps de vacances sont de véritables lieux d'épanouissement et de croissance qui permettent à nos enfants de vivre des expériences enrichissantes qui les marqueront pour le reste de leur vie. À notre avis, l'importance des camps de vacances dans la vie des jeunes Canadiens ne doit pas être sous-estimée. Cette importance nous a d'ailleurs été rappelée à maintes reprises par des centaines de parents et d'enfants, qui nous ont exprimé leur immense déception depuis l'annonce de la fermeture des camps de vacances cet été.
    Donc, afin d'éviter que les camps de vacances ne deviennent une espèce en voie d'extinction au Canada et qu'une partie de nos patrimoines culturels ne disparaisse à jamais, nous réitérons notre pleine disposition à travailler en étroite collaboration avec le gouvernement pour trouver des solutions adaptées à la réalité des camps de vacances.
    Avec l'aide du gouvernement du Canada, nous demeurons optimistes que les camps de vacances du Canada pourront un jour recommencer à faire ce qu'ils font de mieux depuis des décennies, soit offrir des expériences inédites à la jeunesse canadienne.
    En mon nom et en celui de l'Association des camps du Québec, je vous remercie de cette occasion qui nous a été offerte de comparaître devant le Comité.
    Nous vous remercions de l'attention que vous prêterez à notre message.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Grenier.
    Nous entendrons maintenant Benoît Fontaine, président, ainsi que Michael Laliberté, directeur général des Producteurs de poulet du Canada.
    Monsieur Fontaine, la parole est à vous.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour, tout le monde.
    Je m'appelle Benoît Fontaine. Je suis un producteur de poulet de Stanbridge Station, au Québec, et je suis le président des Producteurs de poulet du Canada. M. Michael Laliberté, directeur général, est présent avec moi aujourd'hui.
    Notre secteur contribue à hauteur de 8 milliards de dollars au produit intérieur brut du Canada, soutient 101 900 emplois et verse 1,9 milliard de dollars en recettes fiscales. Les 2 877 producteurs de poulet canadiens sont fiers d'élever la protéine de viande numéro 1 au Canada, tant pendant les périodes favorables que pendant les périodes plus difficiles.
    Les Producteurs de poulet du Canada ont été enchantés de prendre connaissance de l'annonce du gouvernement en soutien au secteur agricole et agroalimentaire. Cependant, nous devons souligner que ces mesures ne vont pas assez loin pour soutenir les producteurs de poulet. Afin de continuer à assurer la sécurité alimentaire, nos producteurs doivent bénéficier d'un soutien pour pouvoir composer avec le stress et la pression sans précédent qui découlent de cette pandémie.
    Les conditions actuelles du marché sont sans précédent dans notre secteur. Les services alimentaires, qui représentent environ 40 % du marché, ont connu une baisse rapide des ventes presque du jour au lendemain. Quant au détail, bien que nous ayons observé une montée considérable des ventes causée par les achats de masse effectués par les consommateurs qui voulaient s'assurer des réserves, cette demande s'est stabilisée et la demande totale est maintenant inférieure aux volumes antérieurs.
    La baisse rapide dans les services alimentaires a entraîné des surplus de production pendant une courte période. Heureuseusement, la flexibilité que nous donne la gestion de l'offre a permis à notre conseil d'administration de réagir rapidement et d'ajuster la production, en espérant ainsi éviter le pire des scénarios, à savoir un dépeuplement, l'euthanasie.
    Le conseil d'administration a réduit l'allocation de 12,6 % pour la période de mai à juillet, et nous avons réajusté l'allocation pour la période de juillet à août en la réduisant de 9,75 %. Bien que nous ayons pu adapter la production, cet ajustement n'élimine pas entièrement le stress que nous, producteurs et transformateurs, vivons en ce moment. Les usines de transformation pourraient devoir réduire leurs volumes d'abattage en raison des exigences liées à l'éloignement physique, de l'absentéisme chez les employés ou de la fermeture complète d'usines.
    Les transformateurs travaillent en étroite collaboration entre eux et avec les producteurs afin de rediriger les oiseaux lorsque cela est nécessaire. Ainsi, cette réduction de la production et la possibilité de la fermeture de certaines usines entraînent pour les producteurs un risque élevé de devoir procéder à un dépeuplement de leurs troupeaux.
    Les producteurs ne prennent pas la question du dépeuplement à la légère. En plus d'avoir un effet sur l'approvisionnement alimentaire de la population canadienne, les dépeuplements entraînent la perte de troupeaux auxquels nous avons consacré temps, argent et énergie, ce qui amène aussi des pertes financières plus que considérables. Dans l'éventualité où les transformateurs ne disposent pas de la capacité nécessaire, les producteurs doivent travailler rapidement avec les transformateurs pour déterminer les prochaines étapes.
    Pour le moment, nous n'avons pas reçu l'assurance du gouvernement que la valeur marchande des poulets serait couverte. Nous comprenons que le programme Agri-relance couvrira jusqu'à 90 % des coûts de dépeuplement. Cependant, cela ne couvre pas la valeur des troupeaux euthanasiés, le fardeau administratif pour les producteurs et les demandes de soutien aux gouvernements provinciaux afin qu'ils fournissent leur portion du financement de la gestion des risques de l'entreprise.
    Pendant nos nombreuses conversations avec le gouvernement, nous avons rappelé qu'en vertu de la Loi sur la santé des animaux, le dépeuplement est couvert en cas de maladies. Nous sommes très conscients que la Loi a été précisément conçue pour ces cas, mais nous croyons que ce que nous vivons actuellement en ce qui a trait à la capacité de transformation, au dépeuplement et aux répercussions globales sur les exploitations cadre avec l'intention de la Loi et entraîne les mêmes répercussions pour les producteurs.
    Nous sommes déçus du fait que le gouvernement n'a pas envisagé ce modèle pour soutenir le secteur du poulet dans l'éventualité où un dépeuplement serait nécessaire. Bien que les programmes de gestion des risques de l'entreprise soient conçus pour affronter les fluctuations de revenu afin de soutenir les producteurs en temps de besoin, ils ne seront pas applicables aux producteurs de poulet dans l'éventualité où des dépeuplements seraient nécessaires.
    Les incertitudes découlant de la COVID-19 s'ajoutent au stress financier avec lequel les producteurs devaient déjà composer en raison de l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, ou PTPGP.

  (1510)  

    Comme vous le savez, nos producteurs ont perdu une portion considérable de leur marché intérieur et attendent depuis plus d'un an que le gouvernement annonce des programmes pour renforcer la durabilité et la compétitivité à long terme du secteur. Nous reconnaissons pleinement que le gouvernement a des priorités plus pressantes à l'heure actuelle. Toutefois, puisque le gouvernement n'a pas indiqué à quel moment le budget fédéral serait présenté, nos producteurs continuent d'attendre le soutien qui leur a été promis.
    J'espère que cette présentation aidera les membres du Comité à comprendre que les mesures annoncées à ce jour ne permettront pas de gérer les répercussions financières que subiront les producteurs de poulet dans l'éventualité où des dépeuplements seraient nécessaires. De plus, nous continuons d'attendre patiemment les mesures de soutien promises dans le contexte du PTPGP, des mesures qui nous apporteront un certain degré de certitude alors que nous devons faire face à beaucoup d'incertitude.
    Je vous remercie du soutien que vous continuez d'apporter à notre secteur, et j'espère que vous aborderez ces enjeux avec vos collègues du gouvernement. Les producteurs de poulet canadiens sont là pour les Canadiens et le seront toujours.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et membres du Comité.

  (1515)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Fontaine.
    Écoutons maintenant Joe Belliveau, directeur général de Médecins Sans Frontières, qui est accompagné de Jason Nickerson, conseiller aux affaires humanitaires.
    La parole est à vous, monsieur Belliveau.
    Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir d'être ici.
    Je remercie le Comité de nous fournir l'occasion de lui présenter notre point de vue aujourd'hui.
    Je suis directeur général de Médecins Sans Frontières, ou Doctors Without Borders, et je suis accompagné de mon collègue, le Dr Jason Nickerson, conseiller aux affaires humanitaires.
    Médecins Sans Frontières, ou MSF comme beaucoup nous connaissent, est une organisation humanitaire médicale internationale qui offre une aide médicale impartiale à la population de plus de 70 pays. Nous offrons des services de santé essentiels sur le terrain dans certains des environnements les plus complexes au monde, et les éclosions de maladies ne nous sont pas étrangères.
    Nous sommes aujourd'hui confrontés à une crise sans précédent, créée directement et indirectement par la pandémie de COVID-19, qui touche tous les pays où MSF est présent. Nous observons des cas de COVID-19 dans divers contextes d'urgence préexistants, ce qui crée une combinaison dangereuse de risques pour la santé publique. Dans le camp de réfugiés de Cox's Bazar, au Bangladesh, où s'entassent près d'un million de réfugiés rohingyas, les conditions insalubres se prêtent parfaitement à la propagation de la COVID-19, dans un endroit où il est pratiquement impossible pour les gens d'exercer la distanciation physique et où l'accès à l'eau potable est un défi constant.
    En République centrafricaine, des années de conflit ont provoqué le déplacement de millions de personnes qui dépendent de l'aide humanitaire. Les équipes de MSF sur le terrain sont parmi les seuls fournisseurs de soins de santé au pays, et le budget dont nous avons besoin pour fonctionner efficacement dépasse celui du ministère de la Santé de la RCA lui-même. Cela signifie qu'il y a bien peu de ressources pour fournir des soins médicaux pour les problèmes de santé quotidiens et qu'elles ne sont certainement pas suffisantes pour réagir à une pandémie.
    La COVID-19 met à rude épreuve notre propre capacité d'intervention. Il est essentiel, particulièrement au cœur de cette pandémie, que le gouvernement canadien continue à soutenir et à financer l'action humanitaire. Ce financement permet aux organisations humanitaires de poursuivre leur travail existant en plus de répondre aux nouvelles pressions créées par la pandémie. Au Canada, nous pouvons compter sur un système de santé solide et stable, tandis que dans d'autres pays, les systèmes de santé peinent à répondre aux besoins quotidiens de la population. Par exemple, pas plus tard qu'hier, la République démocratique du Congo a confirmé une deuxième épidémie d'Ebola, ce qui signifie que le pays réagit actuellement à deux épidémies d'Ebola, à la plus grande épidémie de rougeole au monde et à la COVID-19, le tout dans un pays touché par un conflit armé depuis des décennies.
    Pour répondre à la crise de la COVID-19 et aux besoins qu'elle crée au Bangladesh, au Congo et dans le monde entier, MSF a établi qu'il avait besoin d'un budget de 226 millions de dollars dans son fonds de crise pour la COVID-19. En outre, nous demandons au gouvernement canadien une contribution de 10 millions de dollars à ce fonds afin que nous puissions maintenir nos équipes sur le terrain pour répondre à cette crise sans précédent. La COVID-19 a déjà causé une intensification immédiate de nos activités mondiales, y compris dans des endroits où nous ne sommes normalement pas présents, comme au Canada même.
    Notre prestation de soins médicaux ne dépend pas que du financement. Nous dépendons également de l'accès abordable aux nouveaux médicaments, vaccins et tests de diagnostic et de l'innovation dans ce domaine. Ces avancées sont essentielles pour la santé et le bien-être d'innombrables personnes dans le monde, comme au Canada. Toutefois, le système mondial de recherche et de développement n'est pas conçu pour accorder la priorité à l'accès abordable, surtout en dehors des pays riches. L'accès aux médicaments essentiels pour sauver des vies n'est pas équitable, ce qui est inacceptable.
    À un moment où le Canada dépense plus d'un milliard de dollars de fonds publics pour concevoir des technologies afin de lutter contre la COVID-19 — un investissement très bienvenu —, il est essentiel qu'il exige un juste retour sur l'investissement en incluant des exigences particulières dans les accords de financement conclus avec des sociétés pharmaceutiques ou des universités, par exemple, qui reçoivent des fonds publics canadiens, afin que les technologies de santé qui en ressortiront soient accessibles et abordables dans le monde entier, y compris pour les Canadiens. Pour l'instant, à notre connaissance, les accords de financement ne contiennent rien de tel. Il serait tragique et contraire à l'éthique qu'un vaccin destiné à prévenir la COVID-19 ou un médicament pour la traiter soit mis au point grâce à des fonds publics canadiens, pour ensuite être vendu hors de prix. Nous risquons de priver des milliards de personnes de l'accès à ces produits d'innovation pouvant sauver des vies si nous n'intervenons pas à ce chapitre dès maintenant.
    J'exhorte le Comité à exiger que la contribution financière essentielle du Canada à la R-D sur la COVID-19 s'accompagne de garanties de sécurité, pour que les vaccins et les traitements contre la COVID-19 mis au point grâce aux fonds publics canadiens soient abordables et accessibles pour toute personne en ayant besoin. Le financement public doit générer le bien public.

  (1520)  

    La pandémie mondiale ne se terminera pas ici tant qu'elle ne sera pas finie partout. C'est le moment de faire preuve de solidarité mondiale et de choisir intelligemment nos investissements publics pour que tout le monde, partout, ait accès aux soins médicaux dont il a besoin.
    Nous avons hâte de répondre à vos questions. Le greffier du Comité a nos coordonnées aussi, et nous pourrons répondre à tous les députés qui communiqueront directement avec moi ou avec Jason Nickerson.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Belliveau.
    Nous entendrons maintenant M. Daniel Bernhard, directeur général des AMIS de la radiodiffusion.
    Je vous remercie infiniment d'avoir invité les AMIS de la radiodiffusion à comparaître aujourd'hui. Il y a beaucoup de raisons valables pour lesquelles nous voulons réclamer votre appui, et je suis ici pour vous parler de celles les plus liées aux événements qui mènent le Canada à porter attention aux difficultés que vivent ses diverses industries.
    La semaine dernière, des investisseurs rattachés au réseau Postmedia ont acquis Torstar, jadis un poids lourd hautement lucratif dans le domaine journalistique, pour la modique somme de 51 millions de dollars. Cette acquisition prépare le terrain pour la mise en place d’un duopole dans le milieu de la presse écrite canadienne.
    Mais aujourd’hui, j’aimerais vous parler d’un autre duopole, celui que forment Google et Facebook et qui est en train d’anéantir peu à peu le journalisme canadien. Devant la menace que représentent ces deux géants médiatiques, notre souci n’est pas de savoir s’il y aura suffisamment d’organes de presse canadiens, mais bien s’il y en aura tout court.
    En 2019, la publicité numérique représentait un marché de 7,7 milliards de dollars au Canada. Google et Facebook se sont emparés de près de 85 % de ce montant. Et le reste? La COVID-19 a amputé de plus de la moitié ce qui restait de la part canadienne. Depuis la mi-mars, plus de 2000 postes dans le secteur médiatique ont été supprimés, ce qui porte le total d’emplois perdus à près de 20 000 au cours de la dernière décennie. Plus de 300 organes de presse ont mis la clé sous la porte pour de bon. Des centaines d’autres ont dû réduire leurs effectifs et sabrer leurs services.
    Il n’y a rien de naturel ni d'inéluctable dans une telle dynamique de marché. Elle est la résultante de décisions politiques prises au cours des 15 dernières années.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Allez-y, M. Fragiskatos. Je pense que j'entends un retour de son moi aussi, tout comme vous.
    Exactement. Il y a un écho de mon côté. Je ne sais pas trop si c'est la même chose pour les autres.
    Peut-être pouvez-vous seulement ralentir un peu, monsieur Bernhard, et nous verrons ce qui arrive.
    Certainement. Est-ce que c'est mieux?
    C'est déjà bon.
    Il est possible que quelqu'un ait oublié d'éteindre son micro.
    Au cours des dernières années, le Parlement a chaudement débattu des manières convenables de soutenir le journalisme canadien. Plusieurs d’entre vous craignent, avec raison, que des subventions gouvernementales mettent en péril l’image d’impartialité qui doit caractériser les salles de rédaction. Mais il y a d’autres avenues. Aujourd’hui, j’aimerais vous en présenter une qui ne coûterait pas un sou.
    Selon Abacus Data, Facebook est la principale source d’actualités pour les Canadiens, et c’est d’ailleurs la raison première pour laquelle les Canadiens se tournent vers Facebook. Or Facebook ne produit pas d’informations. On ne compte aucun journaliste parmi ses salariés. Facebook parasite plutôt le travail et le talent qu’investissent les salles de rédaction canadiennes dans la production de leurs contenus en s’en emparant sans demander de permission ni offrir de compensation, et en les revendant à fort rabais. Certains diraient que c’est du vol. À tout le moins, il s’agit d’une pratique injuste qui perturbe irrémédiablement le marché.
    À votre connaissance, y a-t-il une autre industrie où une ou deux entreprises sont libres de piller la production de leurs concurrents, sans payer ni même demander la permission, puis la revendre à une fraction du prix? Moi, je n’en connais pas d’autres. Pourtant, c’est précisément ce que fait Facebook des millions de fois par jour.
    Aujourd’hui, les AMIS lancent une campagne publicitaire à l’échelle nationale, intitulée RECHERCHÉ, qui s'appuie sur l'affiche que vous voyez derrière moi. Notre objectif est de sensibiliser les Canadiens aux pratiques abusives de Facebook en matière d’appropriation d’actualités et de mobiliser leur appui à un encadrement réglementaire raisonnable qui exigerait que de telles plateformes rémunèrent les salles de rédaction canadiennes pour la réutilisation de leurs contenus, tout comme les stations de radio paient des redevances pour la musique qu’elles diffusent.
    Je vous invite à consulter les sites newsthief.ca ou ilnousvole.ca pour de plus amples renseignements.
    En avril dernier, l’Australie est devenue le dernier pays à mettre en place de telles mesures, et le Canada devrait en faire autant.
    Soyons clairs: les Canadiennes et les Canadiens reconnaissent la valeur des nouvelles nationales et en consomment copieusement. Si les profits ont chuté, le nombre de lecteurs est demeuré élevé, et croît maintenant de plus belle en raison de la COVID-19. Les Canadiens comprennent que le point de vue de mononcle Robert ne pourra jamais remplacer le journalisme rigoureux, tout comme les analyses à bâtons rompus de mononcle Robert ne peuvent pas se substituer à des délibérations parlementaires informées et réfléchies.
    Notre soif de nouvelles n’a pas disparu. Mais ce ne sont plus les mêmes qui en tirent profit. Autrefois, les gains revenaient à ceux qui créaient de la valeur. Aujourd’hui, les fruits de leur labeur sont saisis par des intermédiaires parasites qui ne créent rien. Si, comme moi, vous croyez au libre marché, cette situation devrait vous alarmer beaucoup.
    À mon sens, aucune entreprise ne mérite moins d’avantages concurrentiels aussi généreux et artificiels que Facebook. Un récent sondage Léger a démontré que 53 % des Canadiens adhèrent au moins à une théorie du complot fortement relayée sur Facebook et liée à la COVID-19. Il ne s’agit pas d’un hasard. Facebook a récemment été démasquée dans son soutien actif aux publicitaires qui souhaitaient cibler les adeptes de la pseudoscience afin que les personnes les plus vulnérables aux mensonges qui circulent au sujet de la COVID-19 y soient facilement exposées. Cette pratique est plus qu’immorale. Elle sape les efforts sans précédent — et plus dispendieux que jamais — que déploie actuellement le Canada en matière de santé publique. Récemment, la réaction de Facebook à la brutalité policière et aux manifestations contre cette brutalité a poussé des employés touchant 300 000 $ de salaire à claquer la porte de Facebook parce qu'ils ne peuvent plus digérer une telle attitude.
     Ce qui se déroule ici est important. Votre travail est important. La politique provinciale est importante. Les nouvelles locales sont importantes. C’est seulement grâce aux médias que nous parvenons à maintenir une identité nationale commune malgré les distances qui nous séparent. C’est seulement grâce à l’accès aux nouvelles que nous prenons part tous ensemble à une démocratie unifiée.
    L’approche australienne est digne d’une nation souveraine qui a confiance en elle-même. Le temps est venu pour le Canada de démontrer que nous sommes de cette trempe.
    Nous ne sortirons pas de la crise médiatique grâce à un geste unique, mais exiger que Google et Facebook paient pour les nouvelles dont ils se servent pour s’enrichir serait un pas dans la bonne direction. Ce pas, vous pouvez le franchir en acheminant des fonds vers les médias canadiens sans dépenser un sou. Je vous incite à adopter cette politique au plus vite, et je serai ravi de répondre à vos questions sur la meilleure démarche à entreprendre.
    Je vous remercie de votre attention.

  (1525)  

    Merci beaucoup, monsieur Bernhard.
    Écoutons maintenant Kevin Neveu, président-directeur général de la Precision Drilling Corporation.
    Merci, monsieur le président, de me permettre de m'adresser au comité des finances aujourd'hui.
    Je représente Precision Drilling, une fière entreprise canadienne de forage et d'entretien de puits de pétrole et de gaz.
    Je pense que l'industrie canadienne du forage pétrolier et gazier classique et in situ est une victime involontaire dela campagne internationale contre l'exploitation des sables bitumineux. Notre industrie est par conséquent confrontée à un ralentissement profond et lourd de conséquences, depuis des années, et nous risquons maintenant l'effondrement total étant donné les effets économiques de la COVID-19 qui accentuent ce ralentissement et la récente guerre des prix du pétrole.
    L'industrie du forage est une activité de service à forte intensité de main-d'œuvre qui crée des emplois pour des centaines de milliers de Canadiens dans toutes les provinces et tous les territoires du pays.
    Je suis né et j'ai grandi en Alberta, je fais partie de la troisième génération de travailleurs du secteur pétrolier et gazier et je suis l'un des centaines de milliers de travailleurs potentiels du secteur. Il ne doit faire aucun doute que le pétrole et le gaz classiques du Canada sont peut-être les plus propres, les plus efficaces et sans aucun doute, la source d'hydrocarbures la plus socialement responsable au monde.
    Le Canada est considéré comme un modèle d'excellence opérationnelle et environnementale. Par conséquent, les travailleurs canadiens du secteur sont recherchés dans le monde entier pour leurs compétences dans des rôles de direction, d'ingénierie, de réglementation et d'exploitation.
    Pendant mes 38 années de carrière, j'ai travaillé dans des champs pétroliers et gaziers partout dans le monde, en Arabie saoudite comme au Koweït, en Norvège, en Russie, en Colombie et bien sûr, aux États-Unis.
    L'excellence canadienne est attribuable en grande partie à une combinaison vraiment unique de cadres réglementaires fédéraux et provinciaux complets, à nos conditions hivernales rigoureuses, à l'esprit d'entreprise canadien et surtout, à notre profonde conscience sociale et environnementale.
    Le secteur pétrolier et gazier canadien se démarque dans le monde grâce à ses procédés de forage novateurs, à la réduction de son empreinte environnementale, à la réduction des émissions de GES, à une efficacité opérationnelle exceptionnelle qui va de pair avec des droits socialement très avancés pour les travailleurs et à la création de partenariats fructueux avec les Premières Nations, ce qui s'accompagne d'investissements sociaux dans les collectivités où nous sommes présents.
    Si les caractéristiques macroéconomiques de l'offre et de la demande déterminent les prix des matières premières et influencent fortement la capacité de notre industrie à fonctionner, plusieurs défis propres au Canada se sont manifestés au cours des dernières années et menacent la durabilité de notre industrie.
    Comme je l'ai mentionné au début, l'industrie canadienne du pétrole et du gaz classiques subit les dommages collatéraux d'une véritable guerre contre l'exploitation des sables bitumineux. La rhétorique anti-pipeline et anti-sables bitumineux, qui vise à limiter les investissements dans les sables bitumineux, a décimé l'industrie pétrolière et gazière classique. De plus, diverses ONG nationales et internationales, et même certains dirigeants politiques canadiens démonisent l'industrie pétrolière et gazière dans son ensemble. Ainsi, le gaz naturel, un excellent combustible à faibles émissions pour remplacer le charbon de manière propre, est devenu une cible. Les gazoducs et les exportations de gaz sont également devenus une cible, ce qui est incompréhensible.
    La grande répercussion en est la baisse rapide et importante des investissements étrangers dans le secteur des ressources naturelles canadiennes. En fait, beaucoup d'investisseurs considèrent désormais que le risque politique a beaucoup augmenté au Canada, ce qui les pousse à déplacer leurs capitaux vers d'autres pays. Un Canada où il n'est pas possible d'investir est un problème économique pour l'ensemble des Canadiens.
    Pour Precision, cela signifie que nous n'employons plus que moins de 800 Canadiens, alors qu'en 2014, nous en employions plus de 4 000. La majorité de nos 600 postes administratifs a migré vers Houston, et notre équipe de direction, dont je fais partie, est maintenant domiciliée à Houston, où les perspectives à long terme restent solides.
    En tant que Canadien, je ne pourrais être plus déçu de la destruction des possibilités d'une bonne exploitation responsable des ressources énergétiques du Canada et plus spécialement, des emplois. Les Canadiens ont reçu le don d'une excellente géologie, d'une conscience sociale et environnementale forte et noble et surtout, d'une main-d'œuvre dévouée et productive. Il est de notre devoir, en tant que dirigeants, de continuer de montrer au monde entier que le Canada est le modèle par excellence pour l'exploitation du pétrole et du gaz classiques.
    Récemment, les gens de la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors ont écrit au ministre des Finances, afin de demander au gouvernement fédéral d'appuyer notre industrie assiégée. Le programme de remise en état des puits orphelins, financé par le gouvernement fédéral, est un bon début, mais je crains que l'industrie n'ait besoin de beaucoup plus.
    Toujours récemment, la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors a soumis à la province de l'Alberta une idée de programme d'aide financière. Ce programme serait destiné à encourager les foreurs à accélérer leurs investissements dans la sécurité, le renouvellement de la certification et l'entretien de notre équipement de forage. Ces investissements créeraient immédiatement des emplois dans l'industrie en plus de placer les foreurs en position de réagir de manière sûre et efficace en vue d'une éventuelle reprise des activités. Tout comme le programme d'abandon des puits, il pourrait s'agir d'un programme conjoint fédéral-provincial, et je vous encourage à l'envisager.

  (1530)  

    J'ai la ferme conviction que le gouvernement fédéral doit encourager tous les types d'investissements dans l'exploitation classique du pétrole et du gaz naturel et ne doit pas tolérer que notre industrie soit ainsi détruite en étant la victime collatérale d'un mouvement d'opposition aux sables bitumineux qui s'appuie sur des informations erronées.
    Le Canada a besoin de son industrie pétrolière et gazière. Il a aussi besoin que cette industrie soit en santé alors que nous amorçons une reprise économique qui nous demandera beaucoup de résilience à la sortie de cette pandémie. Il est possible de trouver un juste équilibre entre la relance de notre économie et l'atteinte de nos objectifs environnementaux. Les entreprises de forage pétrolier et gazier du Canada sont en excellente posture pour apporter leur contribution à cette reprise en offrant des emplois de qualité, de grandes compétences techniques et une saine gérance de l'environnement. L'apport de notre industrie est tout ce qu'il y a de plus positif.
    Merci pour le temps que vous me consacrez aujourd'hui. Je serai ravi de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Neveu.
    Nous allons maintenant entendre le représentant d'Ottawa Special Events, M. Michael Wood, associé.
    Monsieur Wood, vous avez la parole.
    Bonjour et merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme vous venez de l'indiquer, je m'appelle Michael Wood et je suis associé au sein de l'entreprise Ottawa Special Events.
    Je tiens à remercier le Comité permanent des finances de me permettre de lui faire part de mes préoccupations et de mes recommandations au nom des petites entreprises de tout le Canada. Je veux aussi remercier M. Pierre Poilievre qui a proposé mon nom comme témoin, ce qui me permet de comparaître devant le Comité aujourd'hui, et M. Sean Fraser pour avoir tenu une table ronde réunissant les petites entreprises d'Ottawa il y a environ un mois. Merci à tous les deux.
    Je tiens par ailleurs à remercier le gouvernement du Canada pour les programmes qu'il a mis en place jusqu'à maintenant afin d'appuyer les petites entreprises. Il y a malheureusement des lacunes qui n'ont toujours pas été comblées.
    Ottawa Special Events est une petite entreprise qui loue de l'équipement pour les festivals, les conférences et à peu près toutes les formes de rassemblements publics pouvant être organisés par des particuliers ou n'importe quel ordre de gouvernement. Comme bien d'autres petites entreprises, nous avons été totalement dévastés par la crise de la COVID-19. Du jour au lendemain, nous sommes devenus une entreprise sans aucun revenu. Nos dépenses continuent pourtant de s'accumuler. Nous avons essayé de limiter nos coûts. Nous avons mis à pied une vingtaine d'employés, soit la totalité de notre effectif. Nous avons négocié avec nos fournisseurs pour tenter d'obtenir des dispenses et des reports de paiement. Malgré tous ces efforts, nos charges financières, aussi bien organisationnelles que personnelles, sont énormes et continuent de croître.
    Notre entreprise n'en est qu'une parmi des milliers d'autres qui se retrouvent au bord d'un gouffre financier en conséquence directe de la COVID-19. Il y a plusieurs situations critiques qui exigent une intervention de toute urgence de la part du gouvernement du Canada et des provinces.
    La première situation critique est liée aux garanties personnelles. De nombreuses entreprises risquent de devoir fermer leurs portes et déclarer faillite en raison des répercussions de la COVID-19. Les exploitants des petites entreprises ne sont nullement responsables de ces fermetures et de ces faillites, mais on leur impose pourtant d'en faire les frais. Les prêteurs vont demander le remboursement des prêts consentis avant la pandémie et exigeront que les garanties personnelles soient respectées. Il en résultera non seulement la faillite des entreprises, mais aussi celle de leurs propriétaires qui ont donné de telles garanties.
    Nous avons besoin d'un plan d'action pour faire en sorte que les propriétaires de petites entreprises ne perdent pas leur gagne-pain et parfois leurs biens personnels du même coup. Nous avons besoin de mesures réglementaires ou législatives empêchant les institutions prêteuses de recouvrer des sommes en faisant valoir les garanties personnelles données.
    En outre, le prêt de 40 000 $ avec une portion non remboursable de 10 000 $ est nettement insuffisant pour les petites entreprises. Nous avons besoin de nouvelles subventions. Il nous faut une aide financière directe. Le gouvernement fédéral doit nous donner un coup de pouce pour que nous puissions traverser cette crise. La solution ne réside pas dans des prêts additionnels. Je sais que vous avez déjà entendu des arguments en ce sens. Nous ne pouvons tout simplement pas nous endetter davantage. Un programme universel de la sorte ne peut pas convenir à tout le monde. Certaines entreprises peuvent survivre pendant des mois avec 40 000 $, alors que d'autres ne feront même pas trois semaines.
    Mes questions sont donc les suivantes. Faut-il s'attendre à un soutien financier supplémentaire? Pendant combien de temps pensiez-vous que nous pourrions survivre avec un prêt de 40 000 $? Était-ce un mois, trois mois ou six mois? Nous voulons simplement le savoir.
    Vous connaissez très bien la seconde situation critique dont je veux vous parler, car elle découle du programme d'aide pour le loyer commercial. De nombreux propriétaires de petites entreprises ne peuvent pas bénéficier de ce programme. Les propriétaires d'immeubles ne sont pas obligés d'y participer. C'est ce qu'a dit le premier ministre Trudeau. C'est ce qu'a dit également le premier ministre Ford. De fait, vous constaterez en discutant avec vos commettants que ce sont les grands propriétaires canadiens qui sont le moins susceptibles d'y participer. Les locataires qui devraient en bénéficier ne peuvent pas présenter une demande; ils sont totalement à la merci de leur propriétaire à ce chapitre.
    Le programme a suscité une grande animosité entre certains propriétaires et locataires, alors même qu'ils auraient dû consacrer leur énergie à la recherche d'une solution. Permettre aux locataires de présenter directement une demande en serait une. On pourrait sinon obliger les propriétaires à présenter une demande s'ils ont des locataires qui ont besoin d'aide pour payer leur loyer.
    Même si je sais que cela relève de la compétence des provinces, il faut également instaurer sans tarder des mesures interdisant l'éviction des locataires commerciaux.
    De plus, le programme d'aide pour le loyer commercial n'est en vigueur que jusqu'à la fin juin. Le processus de demande vient tout juste d'être lancé et aucune somme n'a encore été versée. Il est clair que ce programme doit être prolongé de plusieurs mois, soit jusqu'à ce que toutes les restrictions imposées aux entreprises soient levées.
    Voici maintenant la troisième situation critique dont je souhaite traiter. Qu'adviendra-t-il après notre quatrième demande pour obtenir la Prestation canadienne d'urgence si nos entreprises sont encore fermées en raison des directives gouvernementales? Il ne nous est pas possible de cotiser à l'assurance-emploi. Comment pensez-vous que nous allons pouvoir payer nos dépenses de base et subvenir aux besoins de nos familles?
    J'aimerais bien savoir si le gouvernement compte prolonger les paiements dans le cadre de la Prestation canadienne d'urgence?
    Enfin, la quatrième situation critique est celle de la domination des grandes chaînes. Comme vous le savez, les petites entreprises sont la pierre angulaire de l'économie canadienne depuis des années. Comment est-il possible que l'on permette à de grands magasins comme Walmart de demeurer entièrement ouverts pour vendre les mêmes produits qu'offrent habituellement les petites entreprises qui ont dû fermer boutique? Pourquoi n'a-t-on pas interdit l'accès aux sections autres que celles des produits alimentaires et pharmaceutiques? C'est totalement injuste.
    Bien que certaines entreprises ayant pignon sur rue puissent maintenant offrir un accès limité à leur clientèle, une telle iniquité est totalement inacceptable et ne devrait jamais plus être autorisée.

  (1535)  

    Je vais conclure ainsi mon exposé. Même si je comprends bien que tout incendie finit par s'éteindre de lui-même, je me demande comment nous sommes censés survivre jusque là.
    Merci beaucoup pour le temps que vous me consacrez aujourd'hui.
    Merci beaucoup, monsieur Wood.
    Avant de céder la parole à notre dernier témoin de ce groupe, je vais donner, pour la gouverne des membres du Comité, l'ordre pour le premier tour de questions.
    Ce sera donc dans l'ordre MM. Morantz, Fraser, Brunelle-Duceppe et Julian.
    Nous commencerons ainsi avec M. Morantz après l'exposé de notre prochain témoin.
    Je cède la parole à M. Alan Shepard, président et vice-chancelier de l'Université Western.
    Monsieur Shepard.
    Bonjour à tous et merci de me donner l'occasion de présenter mes observations quant aux effets de la pandémie sur l'Université Western et sur l'ensemble du milieu universitaire.
    Je tiens à remercier le gouvernement du Canada pour le leadership dont il a fait montre en réponse à la pandémie. Je veux aussi exprimer ma reconnaissance envers les membres de notre communauté pour les efforts extraordinaires qu'ils ont déployés.
    L'aide financière accordée aux étudiants de niveau postsecondaire n'a absolument rien à envier à ce qui s'est fait ailleurs dans le monde, et les nouveaux fonds octroyés aident les chercheurs canadiens à contribuer aux efforts consentis à l'échelle internationale. À l'Université Western, ce soutien a pu être bonifié grâce à notre propre fonds de secours pour les étudiants de 2,6 millions de dollars, cette somme provenant en partie de dons de nos anciens étudiants, de nos enseignants et de nos employés. Nous avons ainsi pu venir en aide à plus de 3 400 étudiants de notre université qui avaient besoin d'un soutien immédiat — un nombre qui n'est pas sans nous surprendre.
    Au début mars, les Instituts de recherche en santé du Canada ont investi de nouveaux fonds dans une intervention de recherche rapide contre la COVID-19. Deux des équipes pancanadiennes ainsi formées sont dirigées par des membres du corps professoral de l'Université Western. À la fin mars, des fonds fédéraux d'un million de dollars ont été octroyés à des chercheurs en vaccinologie de l'École de médecine et de dentisterie Schulich qui utilisent ainsi à très bon escient notre nouveau laboratoire de niveau 3 pour les risques biologiques.
    En avril, le gouvernement a lancé CanCOVID, un réseau de professionnels de la santé, de chercheurs universitaires et de décideurs qui conjuguent leurs efforts pour lutter contre la pandémie. Des membres du corps professoral de l'Université Western jouent un rôle de premier plan dans cet exercice. Notre université a investi par ailleurs un million de dollars pour appuyer différents projets interdisciplinaires de recherche liés à la COVID qui sont réalisés sur notre campus.
    Parallèlement à tous ces projets de recherche, l'Université Western a aussi fait don d'une quantité considérable d’équipements de protection individuelle aux hôpitaux locaux. Nous avons hébergé gratuitement des travailleurs de la santé de première ligne en plus de concevoir, fabriquer et donner des visières de protection pour le personnel hospitalier. Et je pourrais vous citer d'autres exemples.
    En prévision de septembre et des mois qui suivront, nous mettons les bouchées doubles pour veiller à ce que nos étudiants aient accès à l'environnement d'apprentissage de grande qualité, catalyseur de leur évolution, qui correspond à leurs attentes et à celles de leurs familles. Nous prenons différentes mesures en ce sens. Nous avons embauché de nouveaux concepteurs pédagogiques au niveau du doctorat qui vont nous aider à moduler notre offre de cours. Nous avons engagé 250 de nos étudiants les plus avancés qui vont contribuer à la transformation des cours en personne en expériences d'apprentissage virtuel. Nous avons créé des modules gratuits en ligne pour aider les étudiants de première année à rattraper leurs retards scolaires pendant l'été et à commencer ainsi à tisser leur réseau social. Il est aussi important de noter que nous avons augmenté de près de 45 % nos bourses pour les étudiants de premier cycle qui totalisent maintenant 44 millions de dollars. Notre soutien financier aux étudiants des cycles supérieurs sera pour sa part porté à 60 millions de dollars l'an prochain.
    Je dirais que nous n'avons pas été vraiment surpris de voir des coûts additionnels s'ajouter au budget de fonctionnement de l'université, mais la situation n'en est pas moins difficile du fait que ces coûts supplémentaires se calculent déjà en dizaines de millions de dollars et continuent de s'accumuler. Il y a bien évidemment les nouvelles sommes que nous devons engager par exemple pour offrir en ligne des milliers de cours à nos étudiants de premier cycle. Il y a toutefois d'autres pertes qui sont moins évidentes, comme un manque à gagner considérable au titre de nos revenus connexes et la diminution anticipée des partenariats de recherche avec le secteur privé du fait que celui-ci va s'occuper lui-même de ces projets. Il y a bien sûr aussi les coûts les plus importants, les coûts humains pour nous tous, que l'on ne peut pas vraiment chiffrer.
    Pour autant que les directives de la santé publique le permettent, nous comptons offrir pendant le trimestre d'automne entre 25 et 30 % de nos cours en personne. Les autres seront donnés presque entièrement en ligne. Si le gouvernement l'autorise, notre campus sera ouvert.
    Jusqu'à maintenant, les taux d'inscription se maintiennent, mais comme les effets de la pandémie continuent de se faire sentir, ce n'est qu'à l'automne que nous saurons vraiment à quoi nous en tenir quant au nombre d'étudiants inscrits. Toutes les universités canadiennes se retrouvent dans le même bateau. Il va de soi que l'incertitude est encore plus marquée pour ce qui est des étudiants étrangers. Ceux-ci comptent pour un peu moins de 15 % de la population étudiante à l'Université Western. Nous ne savons pas à quoi ressemblera notre monde après la pandémie, avec toutes les choses bizarres qui arrivent et la nouvelle conjoncture géopolitique qui se dessine, mais il est plausible d'imaginer que le Canada puisse devenir encore davantage un symbole d'espoir et de possibilités pour les talents internationaux.
    Parallèlement aux efforts déployés pour sortir de la pandémie, l'Université de Western compte bien s'attaquer aux autres défis planétaires ayant une incidence sur les Canadiens, celui des changements climatiques venant tout de suite à l'esprit. Nous serions ainsi vivement favorables à un programme national d'infrastructures visant à relever ces grands défis mondiaux en sachant que des investissements semblables contribueraient à stimuler l'économie ici même dans le sud-ouest ontarien. À titre d'exemple, le projet réalisé dans le cadre du Fonds d'investissement stratégique a remporté un succès retentissant. Il a permis la construction de deux installations de recherche et d'innovation reconnues à l'échelle nationale, ce qui consolide d'autant notre capacité en la matière.
    Nous sommes vraiment reconnaissants envers le gouvernement du Canada pour les investissements considérables qu'il a déjà consentis. Nous sommes aussi bien conscients que nos efforts pour mettre en valeur les missions académiques des grandes universités canadiennes entraîneront également des coûts supplémentaires importants. Nos missions sont établies sur des bases solides et sont essentielles au mieux-être des étudiants et des collectivités que nous servons, mais elles sont également cruciales pour la santé et l'avenir du Canada lui-même.
    Un grand merci de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant vous.

  (1540)  

    Merci beaucoup, et merci à tous nos témoins pour leurs exposés.
    Nous passons au premier tour de questions où chacun aura droit à six minutes. Je pense que nous aurons le temps aujourd'hui de faire tous les tours prévus.
    Monsieur Morantz, vous allez lancer le bal. À vous la parole.

  (1545)  

    J'aimerais d'abord m'adresser à M. Fontaine, le président des Producteurs de poulet du Canada. Je veux discuter avec vous de la situation actuelle de votre industrie. J'ai eu l'occasion de rencontrer certains de vos représentants au Manitoba avant la pandémie, et ils m'ont brossé un tableau plutôt alarmant de l'état des choses. Ils m'ont indiqué que l'effet combiné du PTPGP, de l'ACEUM et des obligations imposées par l'OMC s'est soldé par un accès au marché à hauteur d'environ 10,8 % pour les entreprises étrangères, ce qui a entraîné quelque 3 100 pertes d'emploi et une baisse de la contribution au PIB par votre industrie de l'ordre de 240 millions de dollars, alors que votre apport total se chiffre à environ 6,8 milliards de dollars.
    Compte tenu de cette situation qui prévalait avant même la crise de la COVID-19, pouvez-vous nous en dire plus long sur ce nouveau contexte dans lequel vous devez fonctionner et sur les répercussions pour votre industrie compte tenu de ces difficultés avec lesquelles elle devait déjà composer?

[Français]

    Effectivement, la ratification du PTPGP signifie que nous avons donné un accès au marché à hauteur de 26,7 millions de kilogrammes de poulet. Quant à l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, il signifie que nous avons donné, seulement aux Américains, un accès au marché à hauteur de 62,9 millions de kilogrammes de poulet. Par conséquent, dans le cadre de l'ALENA 2.0 seulement, nous offrirons 10,8 % de toute la production intérieure, ce qui est incroyable.
    Cela représente la situation qui précède la crise liée à la COVID-19. Nous n'avons pas eu, comme les producteurs laitiers, un forfait de compensation. Nous l'attendons depuis la ratification de ces deux traités, plus particulièrement depuis celle du PTPGP, alors que la question d'une production sur cinq assujettie au système de gestion de l'offre a déjà été réglée.
    Nous avons demandé non pas des paiements directs aux producteurs, mais bel et bien des crédits d'impôt pour l'investissement sur les fermes. Surtout, nous demandons des fonds pour promouvoir la production de poulet au Canada afin de conserver les 3 100 emplois qui vont disparaître sinon, tout comme les 240 millions de dollars en contribution au produit intérieur brut.
    Après la crise de la COVID-19, comme je l'ai dit dans mon exposé, cela se compliquera encore plus.

[Traduction]

    Avant la crise, l'apport fiscal de votre industrie se chiffrait à quelque 2,2 milliards de dollars et vous contribuiez au PIB canadien à hauteur de 6,8 milliards de dollars. Nous parlons donc d'une industrie vraiment importante qui a déjà été lésée par ces accords commerciaux. Pour tourner le fer dans la plaie, j'ajouterais que votre organisation exerce également des pressions afin d'obtenir par rapport à la taxe sur le carbone un allégement comme celui dont ont pu bénéficier par exemple les exploitants de serres commerciales. Vos revendications sont tombées dans l'oreille d'un sourd, et le gouvernement a haussé la taxe sur le carbone le 1er avril dernier, en plein milieu d'une pandémie. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

[Français]

    Effectivement, la taxe sur le carbone nuit à la production de poulet.
    Les Producteurs de poulet du Canada ne comprennent pas pourquoi les cultures en serre, les fleurs, les fruits et les légumes bénéficient d'allégements de toutes sortes alors que nous n'y avons pas accès. Nous produisons pourtant la protéine préférée des Canadiens. C'est une viande saine et dont le bilan écologique s'améliore d'année en année.
    Nous produisons de la nourriture que les Canadiens consomment. On taxe, en quelque sorte, la nourriture que nos compatriotes mangent. C'est un non-sens. Taxer des biens et des services est une chose, mais taxer de la nourriture en est une autre. Cela se répercute sur le panier d'épicerie des moins fortunés et augmente le coût du poulet.
    Vous avez raison. Nous n'avons pas été entendus.

[Traduction]

    Étant donné tous ces facteurs, les difficultés que vous connaissiez même avant la pandémie et la taxe sur le carbone dont nous venons de parler, à quoi les consommateurs canadiens peuvent-ils s'attendre du point de vue de la chaîne d'approvisionnement? Vont-ils retrouver des tablettes vides dans les épiceries? Est-ce que les prix vont augmenter? Comment les torts causés à votre industrie vont-ils se faire ressentir sur le marché pour les consommateurs canadiens?

  (1550)  

[Français]

    Effectivement, l'éloignement physique, la plus grande lenteur des chaînes de transformation et le plus grand nombre d'employés auront une incidence sur le prix du poulet. Cependant, ces frais supplémentaires viendront d'ailleurs que des coûts de production à la ferme, qui sont assujettis au système de gestion de l'offre.
    Un autre élément est la taxe sur le carbone, qui est effectivement appliquée aux poitrines, aux cuisses et aux ailes de poulet, contrairement aux légumes, aux fleurs et aux fruits. Nous ne comprenons toujours pas pourquoi l'on taxe la nourriture dont les gens ont besoin partout au pays.

[Traduction]

    Je suis tout à fait d'accord avec vos commentaires concernant la taxe sur le carbone.
    Si j'ai encore du temps pour une brève question, monsieur le président, cela concerne l'approvisionnement...
    D'accord, mais il faut que ce soit très bref.
    Au Manitoba, les restaurants sont en train de rouvrir à 50 % de leur capacité. Faut-il prévoir un certain décalage avant que les producteurs soient en mesure d'accélérer le rythme pour répondre à cette nouvelle demande ou est-ce que l'approvisionnement nécessaire est déjà en place?

[Français]

    C'est une excellente question.
    En raison de la chute rapide de la demande des services alimentaires — de l'ordre de 40 % — qui est survenue, il doit probablement rester beaucoup de produits pour répondre à la reprise de ces services. Je suis donc certain qu'on ne manquera de poulet nulle part au pays.
    De plus, compte tenu de la gestion de l'offre, nous établissons toutes les huit semaines l'allocation des produits de poulet à mettre en marché en fonction des chiffres des dix provinces, dont le Manitoba. Le mois dernier, nous avons prouvé à quel point nous pouvions rapidement rajuster notre production en fonction de la situation du moment. Je veux vous rassurer et vous dire qu'il ne manquera pas de ces produits.

[Traduction]

    Merci beaucoup pour ces réponses.
    Merci à tous les deux.
    Nous allons passer à M. Fraser qui sera suivi de M. Brunelle-Duceppe.
    À vous la parole, monsieur Fraser.
    Merci beaucoup.
    Je vais commencer par nos invités représentant Médecins Sans Frontières. Merci pour le travail que vous accomplissez durant cette pandémie ainsi que pour l'ensemble de votre oeuvre. Je vous en suis vraiment reconnaissant.
    J'ai travaillé dans le monde en développement pendant une très brève période et j'ai plusieurs amis qui le font maintenant. Je ne prétends pas être un expert, mais cette expérience m'a permis de comprendre un peu mieux ce qu'il en était lorsqu'au début de la pandémie, on présentait ce graphique dont vous vous souviendrez qui montrait qu'il fallait aplanir la courbe pour s'assurer de ne pas atteindre le niveau de capacité de notre système public de santé.
    C'est dans ce contexte que j'arrive mal à comprendre comment on s'intéresse si peu au fait que ce niveau de capacité est beaucoup plus bas dans de très nombreux pays du monde. Étant donné l'absence de mécanismes de soutien suffisants dans les pays en développement pour pouvoir composer avec une flambée ne serait-ce que minime du nombre de cas, il faut se demander si l'incapacité à contrôler cette pandémie à l'échelle planétaire pourrait en fait se traduire par un effondrement des systèmes publics de santé dans l'hémisphère sud et dans l'ensemble du monde en développement.
    Pouvez-vous nous indiquer quel rôle selon vous le Canada ou nos institutions internationales pourraient jouer afin d'appuyer les pays en développement de telle sorte qu'ils parviennent à gérer une augmentation des cas comme l'ont fait d'autres pays possédant la capacité requise?
    Vous avez mis le doigt sur la question qui nous hante essentiellement depuis que la COVID-19 est devenue réalité il y a trois mois et qu'elle est apparue dans notre ligne de mire.
    Il n'y a pas de bonne réponse à cette question. Comme vous l'avez dit, nous avons vu, dans le monde entier, des systèmes de soins de santé — en particulier dans les quelque 70 pays où Médecins Sans frontières mène ses activités — qui n'étaient pas en mesure de répondre à la demande avant la pandémie. Si vous ajoutez à cela la COVID-19, la situation pourrait devenir catastrophique.
    C'est seulement au cours des dernières semaines que nous avons commencé à observer des cas dans les camps de réfugiés rohingyas, à Cox's Bazar, par exemple. Nous observons une véritable augmentation des cas en République démocratique du Congo, en République centrafricaine, au Soudan du Sud et dans certains des contextes où les systèmes de soins de santé sont à leur point le plus faible.
    Notre organisme, en collaboration avec d'autres intervenants d'urgence, offre une sorte de trousse de soutien et de préparations d'urgence aux systèmes de santé. Par exemple, on explique au personnel comment prendre des mesures de prévention et de contrôle des infections, mettre en place l'infrastructure nécessaire et utiliser l'équipement de protection individuelle. Nous essayons vraiment de travailler en étroite collaboration avec les travailleurs et les intervenants des systèmes de santé pour mettre tout cela en œuvre.
    Nous ne savons pas à quel point ce problème va s'aggraver. Nous ne savons pas à quoi ressemblera la courbe que vous venez de décrire, et nous ne savons pas s'il y aura une augmentation subite des cas ou s'il faudra faire face à un défi à plus long terme à cet égard.
    Vous aimeriez savoir ce que le gouvernement peut faire à ce sujet. Pour simplifier les choses, ma réponse se divise en deux étapes. La première consiste à s'assurer qu'il y a, dès maintenant, un financement et un soutien pour la réponse d'urgence. Il faut faire les préparatifs nécessaires. Il faut envoyer l'équipement de protection individuelle aux endroits appropriés. Il faut former et soutenir les travailleurs des premières lignes, ici et maintenant. Deuxièmement, il faut suppléer et appuyer ce travail par les efforts durables et davantage axés sur le développement qui sont également déployés par le gouvernement canadien.

  (1555)  

    C'est excellent. Je vous remercie.
    Mon temps est limité. J'aimerais beaucoup poser deux autres questions aux autres témoins. Je vous remercie du travail que vous effectuez. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    J'aimerais maintenant m'adresser à nos témoins des AMIS de la radiodiffusion. L'une des choses qui me préoccupent depuis quelques années, à mesure que nous observons une transition vers la consommation de nouvelles sur les plateformes numériques, ce n'est pas seulement la disparition du contenu canadien, mais aussi le fait que nous n'avons pas autant de journalistes dans les réunions des petits conseils municipaux, dans les réunions des conseils scolaires et dans certains autres pays pour couvrir les élections des juges locaux ou d'autres postes de ce type.
    En plus des suggestions que vous avez formulées dans votre exposé, pourriez-vous nous donner quelques indications sur ce que le gouvernement pourrait faire pour contribuer à garantir que la qualité de cette couverture locale continuera d'être appuyée et qu'elle pourra survivre à cette apparente prise de contrôle par les géants du secteur numérique?
    Nous pourrions en parler pendant des heures. Étant donné le temps imparti, je vais diviser ma réponse en deux volets, c'est-à-dire le public et le privé.
    Pour le privé, le gouvernement peut prendre des mesures pour veiller à ce que les personnes qui produisent le contenu soient rémunérées. C'est la nature de notre campagne « RECHERCHÉ », que j'ai annoncée plus tôt. Nous lançons cette campagne aujourd'hui. Elle attire l'attention sur le fait que les très grandes plateformes font des milliards de dollars, mais que les personnes qui produisent le contenu ne font pas un sou.
    Une personne qui n'est pas rémunérée pendant un certain temps finit par cesser ses activités, et comme vous l'avez dit, personne ne prendra sa place. En passant, cela ne se produit pas seulement dans les petites villes et les villages. Nous parlons, dans certains cas, d'assemblées législatives provinciales, et c'est donc un problème grave où toutes sortes de manigances peuvent passer inaperçues.
    Le deuxième volet est d'ordre public. Nous avons un radiodiffuseur public au Canada, c'est-à-dire un radiodiffuseur national. De plus, certaines provinces ont des radiodiffuseurs publics et des médias de service public en général. Si le marché s'écroule et que le gouvernement ne veut pas prendre de mesures pour uniformiser le milieu de la concurrence, il ne peut pas y avoir d'intervention publique. Tout comme nous pensons que les personnes qui ne peuvent pas se payer des soins de santé ne veulent pas être malades, la loi de l'offre et de la demande affirme que si une personne se casse la jambe et qu'elle ne peut pas payer les soins, cela signifie qu'elle ne veut pas guérir. Ce n'est évidemment pas le cas. Il en va de même pour les nouvelles. Les gens veulent être informés et ils doivent l'être. C'est un élément essentiel de notre démocratie.
    Le témoin précédent a indiqué que des réfugiés rohingyas commençaient à contracter la COVID-19. Un grand nombre d'entre eux ont été déplacés à cause d'activités incitées sur Facebook. Ce génocide a été encouragé sur Facebook. Cette situation a été signalée à de nombreuses reprises, et nous voyons maintenant les conséquences.
    Nous devons nous mobiliser pour défendre les vraies informations. Nous devons veiller à ce que les créateurs de contenu journalistique soient rémunérés. Cela fait partie de l'intervention sur le marché et en l'absence d'une telle intervention, l'aide du secteur public est nécessaire et précieuse.
    Nous allons vous donner un peu de temps, monsieur Fraser, tout comme nous l'avons fait pour M. Morantz.
    C'est formidable. Je vous remercie, monsieur le président. Je serai bref.
    Monsieur Wood, je suis heureux de vous revoir. Je vous remercie également des paroles gentilles que vous avez prononcées dans le cadre de votre exposé.
    J'ai trouvé la séance que nous avons menée avec le groupe de propriétaires d'entreprise d'Ottawa extrêmement utile. C'était l'une d'une série de réunions auxquelles je participe et auxquelles je continue de participer, afin d'éclairer la façon dont le gouvernement peut continuer d'adapter les politiques ou en proposer de nouvelles.
    Vous avez souligné qu'étant donné que le défi auquel fait face la santé publique pourrait se prolonger, vous voulez avoir la certitude que certaines prestations continueront d'être versées. Je ne suis pas curieux de connaître les politiques précises — vous aurez le temps de présenter une proposition écrite à cet égard plus tard —, mais en ce qui concerne le processus qui permet de continuer d'entendre des commentaires, quel est le format à adopter pour veiller à ce que des voix comme les vôtres et celles des entreprises soient entendues alors que nous cessons graduellement le versement de ces prestations d'urgence pour adopter une méthode plus permanente? Comment pouvons-nous continuer à faire entendre les voix des propriétaires d'entreprises qui se sont révélées si précieuses, et qui nous ont permis d'apporter des changements comme l'allocation d'un revenu de 1 000 $ pour la Prestation canadienne d'urgence, l'élargissement des critères d'admissibilité au Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes et l'augmentation de la subvention salariale de 10 à 75 % et son prolongement jusqu'au 29 août? Tous ces changements découlent des commentaires des membres de la communauté des affaires au sujet des difficultés avec lesquelles ils sont aux prises. Comment pouvons-nous poursuivre cet engagement pour veiller à profiter de l'expérience réelle et vécue des propriétaires d'entreprise?

  (1600)  

    Monsieur Wood, si votre réponse pouvait être plus brève que la question, nous vous en serions reconnaissants.
    Je peux certainement faire cela.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir posé cette question, monsieur Fraser, et je vous remercie de vos bonnes paroles.
    Honnêtement, je crois qu'il s'agit d'un travail d'équipe. C'est un travail d'équipe entre les petites entreprises et le gouvernement, que ce soit à l'échelon fédéral ou provincial. Il faut que des personnes qui occupent un poste semblable au vôtre continuent de nous écouter et d'écouter les membres de nos associations. Nous continuerons de présenter des suggestions, car nous sommes toujours au milieu d'une crise. Je vous suis reconnaissant de tout ce que vous avez fait, mais sachez que nous continuerons d'envoyer des lettres et d'indiquer ce qui doit être corrigé.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. Brunelle-Duceppe, qui sera suivi de M. Julian.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    D'abord et avant tout, j'aimerais remercier tous les témoins qui participent au Comité aujourd'hui. Leurs allocutions sont excellentes.
    Mes questions vont s'adresser à M. Grenier, de l'Association des camps du Québec.
    Monsieur Grenier, plusieurs annonces ont été faites par le gouvernement fédéral et il a fallu être vite sur le bouton, comme on dit par chez nous, pour dégager le plus de sommes d'argent possible pour aider le plus de gens possible. Cependant, présentement, nous recevons plusieurs témoignages d'entreprises ou de groupes qui n'ont pas accès à ces programmes.
    Je vais vous poser des questions assez précises.
    Est-ce que le programme d'aide au loyer commercial vous convient comme aide aux frais fixes, présentement?
    En fait, je suis convaincu que certains de mes membres, qui exploitent des camps privés et qui sont des locataires d'endroits, ont probablement accès à ce programme. Je n'ai pas l'information exacte. Cependant, plusieurs de nos organisations sont des organismes à but non lucratif qui fonctionnent dans des locaux qui leur appartiennent ou qui leur sont prêtés à l'occasion. Alors, je crois qu'une minorité de mes membres ont accès à ce soutien financier.
    Est-ce qu'une aide plus directe aux frais fixes ou un crédit d'impôt remboursable pourrait aider les camps à rouvrir en 2021?
    En fait, je doute que le crédit d'impôt pour les organismes à but non lucratif soit la meilleure solution. Par contre, pour les organisations privées, c'est fort probablement quelque chose qui pourrait leur convenir.
    Est-ce que l'aide du compte d'urgence, le fameux prêt sans intérêt de 40 000 $, est accessible aux camps, présentement?
    Est-ce que le prêt est suffisant pour venir en aide à vos membres?
    Le prêt de 40 000 $ est accessible à mes membres en ce moment, mais ce n'est pas suffisant puisque les montants sont répartis à l'avance pour notre clientèle que nous devrons rembourser et qui ne sera pas au rendez-vous cet été parce que nos camps ont été annulés. Nous devrons rembourser tous les acomptes qui ont été faits.
    Notre capacité d'emprunt est relativement limitée puisque nous fonctionnons deux mois par année. Il faudra remettre ces montants à un moment donné. Alors, cela nous met quand même à risque, en ce moment, de faire ces emprunts. Ce n'est pas sans conséquence.
    Vous me corrigerez au besoin, mais j'ai entendu qu'il y avait beaucoup de problèmes avec Emplois d'été Canada en ce qui concerne les camps.
    Pourriez-vous m'éclairer à cet égard?
    Il semble que la décision d'Emplois d'été Canada ait plutôt été une décision locale du député, je pense, comme cela se fait habituellement. Puisque l'annonce a été faite beaucoup plus tard que la date qui avait été déterminée pour présenter les demandes d'Emplois d'été Canada, nous n'avions pas de réponse, entre autres de la direction de la santé publique, à savoir si nous pourrions tenir nos activités ou pas. Les députés devaient prendre leur décision et la soumettre au gouvernement canadien. Alors, puisqu'ils n'avaient pas reçu de réponse, ils ont dû, à certaines occasions, ne pas courir de risque et retirer le financement à plusieurs organisations de camps au Québec.
    Selon vous, quel sera le taux d'occupation des camps cet été, si l'on tient compte du fait que certains d'entre eux ne rouvriront pas à cause des directives de santé publique?

  (1605)  

    Selon les chiffres que j'ai sous la main, la capacité d'accueil variera entre 30 % et 40 % de la clientèle que l'on reçoit habituellement. C'est très peu si l'on considère que les parents auront assurément besoin de ce service pendant l'été. Actuellement, 100 % des camps de vacances du Québec sont fermés, mis à part certains qui fonctionnent pour des clientèles à besoins particuliers et qui ont obtenu une autorisation. Le camp que je représente, même s'il dessert des clientèles qui ont des besoins particuliers, a décidé de fermer, parce que c'est invivable sur le plan financier.
    Où en êtes-vous dans vos démarches visant à avoir accès à la Subvention salariale d'urgence du Canada?
    Nous espérons toujours une bonne nouvelle et une confirmation. En ce moment, nous sommes en contact avec des hauts responsables de l'Agence du revenu du Canada.
     Le gouvernement semble avoir compris quels sont les enjeux et les spécificités du secteur des camps. Il nous a offert son entière collaboration et il semble qu'il va agir rapidement. Nous avons bien hâte de recevoir cette nouvelle, qui pourrait vraiment redonner du souffle aux camps de jour ou, à tout le moins, à ceux qui seront en activité cet été.
    Monsieur le président, me reste-t-il encore du temps de parole?

[Traduction]

    Oui, vous avez une minute.

[Français]

    D'accord.
    Si les groupes de camps de vacances ne sont pas de la partie cet été, quelles seront les possibilités l'année prochaine? Quel pourcentage de vos membres ont prévu une réouverture l'année prochaine?
    Actuellement, 100 % des camps de vacances sont fermés pour l'été 2020. Qui sera au rendez-vous en 2021? Je ne peux pas vous le dire. Cela va dépendre du soutien financier que nous recevrons dans les prochaines semaines. Un ou deux camps ont déjà annoncé qu'ils mettraient fin à leurs activités définitivement. Nous sommes extrêmement inquiets. C'est du soutien financier qui pourra nous aider, entre autres, pour les frais fixes des prochains mois, de l'été, de l'automne et de l'hiver prochain, jusqu'à la reprise espérée de 2021.
    J'ai une dernière question à poser. Les coûts d'exploitation doivent avoir augmenté énormément pour les prochains mois en raison de l'éloignement physique. J'imagine que vous avez besoin d'aide avec cela.
    Tout à fait. Les ratios ont doublé. Avant, il fallait compter un moniteur pour douze enfants. Maintenant, il faut deux moniteurs pour accueillir une douzaine d'enfants. Les ressources humaines et les frais de fonctionnement des camps ont doublé. L'achat d'équipement sanitaire constitue un nouvel achat. Ce sont toutes des facettes avec lesquelles nous devons composer en ce moment et qui sont certainement un frein financier important à la tenue de nos activités pour l'été 2020.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Grenier.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. Julian, qui sera suivi de M. Cumming.
    Monsieur Julian, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui. Nous espérons certainement que vos familles sont en sécurité et en bonne santé. Nous vous sommes reconnaissants des sages paroles et des conseils que vous nous offrez aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord m'adresser à M. Bernhard. Je vous remercie beaucoup d'être ici. Je vous remercie également d'avoir abordé un enjeu dont tous les députés sont conscients, selon moi, c'est-à-dire la dévastation complète des petites et moyennes entreprises médiatiques à l'échelle du pays. Nous venons d'observer ce phénomène dans ma collectivité, qui est passée de quatre journaux à un journal et demi.
    D'un bout à l'autre du pays, nous observons ce carnage pour deux raisons. Comme vous l'avez souligné, il y a les géants du Web qui peuvent voler du contenu en toute impunité. De plus, ces géants du Web sont subventionnés par les contribuables. Évidemment, la publicité faite sur les plateformes de ces géants est subventionnée et déductible d'impôt.
    Quels changements fondamentaux devons-nous apporter — bien au-delà de la simple question d'exiger qu'ils paient pour les informations qu'ils utilisent —, afin que les géants du Web, c'est-à-dire des sociétés étrangères qui souvent ne paient pas un sou au Canada, cessent de détruire nos sources d'information locales d'un bout à l'autre du pays?
    Je vous remercie de votre question.
    Avant de répondre, j'aimerais apporter un bref éclaircissement. Je ne voudrais pas qu'on interprète mes dernières réponses comme signifiant que les AMIS de la radiodiffusion appuieraient seulement l'augmentation du financement de CBC/Radio-Canada dans le cas où le marché privé ne serait pas réglementé, car ce n'est pas vrai. En effet, nous préconisons les deux.
    Pour répondre à votre question, monsieur Julian, vous avez parfaitement raison lorsque vous affirmez que les contribuables subventionnent ces entreprises, que ce soit par l'entremise de déductions d'impôt ou d'autres mesures. Actuellement — et les membres de votre comité des finances seront particulièrement sensibles à cette situation —, des milliers d'intervenants de l'industrie demandent de l'aide, car le gouvernement a été obligé de fermer l'économie pour des raisons de santé, ce qui a entraîné des conséquences désastreuses pour ces entreprises.
    Entretemps, deux entreprises gagnent presque 7 milliards de dollars au Canada et ne paient aucun impôt. Elles ne perçoivent pas non plus de taxes sur les ventes. Elles forcent leurs concurrents canadiens à fermer grâce à des avantages concurrentiels artificiels et injustes qui sont créés par l'inaction du gouvernement, tout simplement. De plus, nous permettons à des entreprises canadiennes de déduire ces dépenses de leurs impôts, ce qui contrevient à l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu, selon lequel les dépenses des médias étrangers ne seraient pas déductibles d'impôt.
    Sans trop m'enfoncer dans les détails, nous sommes dans une situation dans laquelle les gouvernements successifs ont décidé de ne pas prendre de mesure, et tout cela s'est fait de façon plutôt graduelle. D'abord et avant tout, nous voulons que le gouvernement déclare sincèrement qu'il a l'intention de faire quelque chose à ce sujet. Nous n'avons pas encore vu cela. Ce problème n'est pas techniquement difficile à résoudre; il faut juste de la volonté et du courage.
    Quand le gouvernement décidera-t-il que la situation a assez duré? Lorsqu'il le fera, nous pourrons parler des détails, car il y a plusieurs solutions. Obliger ces entreprises à payer pour les nouvelles qu'elles utilisent est un exemple de solution que le Canada peut mettre en oeuvre rapidement et sans engager de dépenses publiques directes ou de subventions publiques directes à l'égard de l’industrie des nouvelles. C'est la raison pour laquelle nous attirons l'attention sur cette situation, surtout en ce moment.

  (1610)  

    Je vous remercie.
    Vous allez plus loin, et je pense que la plupart des Canadiens sont du même avis, c'est-à-dire que les géants du Web devraient payer des impôts. Ils devraient être de bons citoyens de notre pays. Les nombreux chèques en blanc qu'ils ont reçus des gouvernements fédéraux successifs sans même devoir payer des impôts sur le revenu ont nui à nos médias locaux de deux façons. Premièrement, nous n'avons pas le financement nécessaire pour offrir des soutiens, sans compter que ces entreprises se servent de leur avantage concurrentiel pour éliminer les sources de médias locaux. Elles ont beau jeu. En effet, elles n'ont pas à payer d'impôts et les annonceurs qui achètent de la publicité auprès de ces entreprises peuvent déduire ces dépenses de leurs impôts. C'est la combinaison parfaite pour détruire la capacité des Canadiens de se parler entre eux.
    Vous avez parlé de la concentration des médias canadiens qui restent. Nous observons certainement un profond parti pris de droite. Il est ironique que les journaux National Post et Toronto Sun, des sources de droite de ce qu'ils appellent de l'information, soient aussi massivement subventionnés par les contribuables canadiens, car les annonceurs peuvent déduire de leurs impôts les dépenses liées à la publicité qu'ils font dans ces journaux.
    À votre avis, quelle est la meilleure façon de procéder pour stabiliser la situation et veiller à maintenir, à long terme, la diversité des voix dans les médias canadiens, et pas seulement les voix de droite? Il faut aussi éliminer la tendance à toujours refiler aux contribuables la responsabilité de payer pour ces sources de droite et cesser la pratique qui permet à ces publications d'éviter toute obligation journalistique à l'égard d'un juste équilibre.
    Selon vous, à quoi devraient ressembler les médias canadiens lorsqu'ils émergeront de cette pandémie?
    Je vais tenter d'adopter une approche pragmatique. Au début, vous avez mentionné que ces entreprises devraient agir comme de bons citoyens. Respectueusement, je...
    Je suis désolé de l'interruption, monsieur le président. Je déteste faire cela, mais nous avons un problème avec l'interprétation.
    Monsieur Bernhard, je ne sais pas si c'est à cause de votre microphone, mais la qualité du son n'est pas assez bonne pour que les interprètes puissent faire leur travail.
    Parlez lentement, monsieur Bernhard, comme nous l'avons fait au début.
    Essayez de parler directement dans votre microphone et assurez-vous qu'il ne frotte pas sur vos vêtements.
    Je vais essayer. J'espère que ce sera mieux.
    Respectueusement, monsieur Julian, vous avez indiqué que ces entreprises et ces plateformes, par exemple Facebook et d'autres, devraient se comporter comme de bons citoyens. Respectueusement, je pense que ce n'est peut-être pas le bon cadre à utiliser. En effet, leur point de vue importe peu. Le gouvernement du Canada devrait régir le déroulement des activités commerciales au Canada. Nous ne devrions pas dépendre de la bonne volonté de ces entreprises pour qu'elles paient des impôts ou pour qu'elles respectent les lois en matière de discours haineux, de libelle, de diffamation et d'autres types de contenu illégaux qui signifieraient l'emprisonnement pour n'importe qui d'autre.
    Je suis d'avis que si le gouvernement du Canada souhaite agir conformément à son titre, il devrait tenter de gouverner le Canada, et surtout cette industrie qui a une grande incidence politique et une grande influence et dans laquelle se trouvent un certain nombre d'intervenants à qui l'on permet non seulement de ne pas payer d'impôts, mais aussi d'éviter d'engager des dépenses pour acquérir des nouvelles, les vérifier, les réviser, les diffuser, etc.
    Nous entendons souvent dire que les gens hésitent à intervenir sur ce marché et d'après ce que je comprends, oncraint qu'il s'agisse de manipulation politique. Toutefois, le fait de veiller à ce que les entreprises reçoivent un prix équitable pour leurs produits semble représenter une première étape politiquement neutre et facile à mettre en œuvre, et c'est donc ce que je recommanderais de faire en premier.

  (1615)  

    Nous devons nous arrêter ici, car le temps imparti est écoulé depuis longtemps.
    La parole est maintenant à M. Cumming, qui sera suivi de M. Fragiskatos.
    Monsieur Cumming, vous avez la parole.
    Merci. Je remercie également les témoins d'être au rendez-vous.
    J'interrogerai M. Neveu, de la société Precision Drilling.
    Je ne peux imaginer à quoi ressemble, pour vous et votre équipe de direction, la nécessité d'affronter les séquelles de la COVID et de la guerre des prix qui s'est déclarée dans le secteur pétrolier et gazier, ainsi que les mises à pied auxquelles vous avez été contraints, et leurs conséquences chez les victimes.
    Les programmes fédéraux ont-ils été efficaces pour vous, à court terme, et votre équipe, ici? Comparativement, vu vos activités aux États-Unis également, quel a été le genre de réaction dans ce pays, pendant la crise?
    Parmi les programmes canadiens, celui des subventions salariales est utile. Il offre une solution temporaire. Malheureusement, les perspectives, non seulement au cours des semaines ou des mois à venir, mais au cours des prochains trimestres ou même d'ici deux ou trois ans s'annoncent décevantes. Le programme de subventions salariales a permis de retarder des mises à pied, mais il ne pourrait rien régler, structurellement, à long terme.
    Le programme de remise en état des puits avance, et il est très utile pour notre secteur de l'entretien des puits, lequel, ne l'oubliez pas, apparaît vers la fin de la vie des puits, qu'il répare et maintient en service avant de les abandonner. Le programme de remise en état et d'abandon sera donc utile à ce secteur.
    Mais le secteur du carottage a touché un plancher historique. L'industrie subit une saignée. On déménage les tours de forage aux États-Unis et dans d'autres marchés. Les dégâts sont structurels, durables. Nous cherchons de l'aide dans ce domaine. Le plan que nous avons proposé à la province pour stimuler des immobilisations pourrait être très utile. Nous voudrions vraiment que le comité fédéral des finances s'occupe du dossier et de l'Alberta et nous veillerons à ce que la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors présente également ce plan au gouvernement fédéral.
    Aux États-Unis, les programmes de subventions salariales fonctionnent comme les programmes canadiens, mais il faut préciser que les marchés de capitaux dans ce pays sont efficaces, et l'industrie n'est donc pas autant en manque de capitaux que celle du Canada. Malgré le ralentissement temporaire actuel pendant la pause, le retour à la normale devrait se faire plus rapidement qu'au Canada.
    Nous avons constaté un exode de capitaux, particulièrement dans le secteur des ressources, même avant la COVID. Qu'est-ce qui, dans la politique canadienne, fait vraiment tort à cette industrie et en entrave la capacité de croissance et celle de produire des revenus, dont notre pays a tellement besoin?
    C'est complexe. La production énergétique est complexe. Je ne crois pas que nous puissions désormais nous passer absolument des hydrocarbures. La transition sera longue.
    Au Canada, l'exploitation des sables pétrolifères a commencé rapidement et simultanément, sur plusieurs grands chantiers. Pendant ce temps, de longs travaux de construction d'oléoducs ont ralenti, et plusieurs se sont arrêtés. Une production intense a coïncidé avec des abandons ou des retards dans ces travaux. Prise entre cette surproduction et une capacité amoindrie de l'écouler, l'industrie pétrolière et gazière traditionnelle était vraiment coincée.
    L'écart entre le prix offert au Canada pour son pétrole, en raison de la capacité limitée des oléoducs, et celui, tellement supérieur, qu'on offre aux États-Unis pour son pétrole du bassin Permien fait que les capitaux destinés aux secteurs gazier et pétrolier sont bien plus attirés vers ce bassin qu'au Canada.

  (1620)  

    Si nous pouvions assurer à notre pétrole et à notre gaz naturel l'accès au marché, croyez-vous que le marché reviendrait au Canada?
    Le retour est des plus probables. L'investissement fédéral dans Trans Mountain a été important, puisqu'il a maintenu l'oléoduc en vie. Mais le message aux investisseurs a été dissuasif. Les investisseurs cherchent des motifs commerciaux pour investir au Canada. Pas l'intervention de l'État dans les investissements. Comprenez-moi bien. Je suis certainement reconnaissant de l'investissement dans Trans Mountain, mais, en même temps, nous devons trouver des façons d'encourager l'investissement privé direct, et non l'exode direct des investissements privés.
    Entrevoyez-vous, pour le long terme, une politique particulière? L'accès aux marchés me semble peut-être l'obstacle à la reprise de vos travaux de forage et à l'augmentation de la production. Est-ce une bonne analyse? Ça semble le plus grand enjeu.
    Je serais d'accord, mais j'ajouterais qu'une autre hantise vient nous troubler. On s'en fait beaucoup pour l'environnement à cause des sables pétrolifères, ce qui se répercute en partie sur la production gazière et pétrolière classique, mais il faut que le Canada soit perçu comme propice aux investissements dans le pétrole et le gaz classiques, surtout le gaz. Il pourra être très utile de nous donner une meilleure vision du rôle de notre pays comme fournisseur de gaz d'envergure mondiale. Quand ce sera acquis, les oléoducs et les gazoducs suivront, de même que la capacité de les exporter.
    Nous nous arrêtons ici. Désolé, monsieur Cumming, mais nous avons amplement dépassé le temps prévu.
    La parole est à M. Fragiskatos. Mme Vecchio suivra.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Shepard, merci beaucoup pour votre exposé et pour l'ascendant que vous exercez à l'université Western. Les temps sont difficiles, et il s'accomplit beaucoup de choses, actuellement, dans le domaine de la santé. Si le temps le permet, je vous questionnerai sur la recherche en cours sur la COVID-19, mais, avant, parlons d'infrastructures.
    Les travaux d'infrastructures et les dépenses qui y sont consacrées ont souvent, sinon toujours, servi de remèdes aux crises économiques. Alors que nous songeons à faire redémarrer l'économie dans les mois à venir, je me demande si vous pouvez vous prononcer sur l'utilité d'étudier des projets d'infrastructures et sur celle de l'appui fédéral à la réalisation de ces travaux sur les campus. Visiblement, vous et moi, nous avons à coeur votre université, mais même dans tout le pays, qui compte tellement de campus, je crois que c'est utile. Je voudrais connaître le point de vue du président d'une université.
    Je remercie votre comité de son invitation.
    Nous savons que, dans les campus universitaires de tout notre pays, les travaux d'infrastructures ne doivent jamais s'arrêter. On ne peut pas laisser les lieux tomber en ruine. Au cours de l'histoire du Canada, on fera des investissements extraordinaires dans les infrastructures, et c'est arrivé, avec d'excellents résultats, depuis que je vis au Canada, sous au moins deux gouvernements de couleurs politiques différentes. C'est vraiment un facteur d'unité chez les Canadiens.
    Nous devons entretenir nos installations et les rendre attrayantes pour le monde entier. Nous connaissons notre contribution importante au PIB. Ces investissements sont donc efficaces. Les universités ont des projets qui n'attendent que le signal du départ, parce que leurs stratèges sont toujours sur le qui-vive. Nous affrontons la concurrence du monde entier sur la scène planétaire. Nous jouons un rôle de premier plan dans la prospérité du Canada.
    Nous ne préparons pas seulement la prochaine génération de diplômés. Nous produisons aussi la recherche, l'innovation et, encore, les projets, les produits, les services et les idées entrepreneuriales qui peuvent trouver preneur dans le monde entier. D'après nous, ce sont toujours de bons investissement et ils pourvoient à l'emploi régional. Ils remettent les gens au travail, un travail très bien fait. Ils sont contrôlés, audités, vérifiés, etc. C'est des façons excellentes et efficaces pour le Canada d'investir dans l'avenir.
    Merci beaucoup.
    Pouvez-vous faire le point sur une partie de la recherche axée sur la COVID-19 dans votre université?
    Je ne peux m'empêcher d'y voir la promesse d'un prix Nobel pour l'équipe qui trouvera l'éventuel vaccin ou mélange de médicaments capable de neutraliser le virus.
    Il y a environ un an — mais pas tout à fait — notre université a inauguré un laboratoire de biorisques de niveau 3. Nous étions loin de nous douter que six mois seulement plus tard, nous en ferions un usage aussi intensif que maintenant pour la recherche sur le vaccin.
    Il est certain que certaines de nos équipes de chercheurs s'affairent au vaccin, mais d'autres s'attachent à élucider certains des effets sociaux de la pandémie. Le rôle de la science est capital, mais on mobilise tout un pan des sciences sociales et des humanités pour ramener les gens au travail, surmonter l'isolement, le désespoir, la dépression ou les maux économiques qui se manifestent dans tout le pays. Nous nous soucions beaucoup de ces problèmes. Nos chercheurs, ceux qui ne sont pas sur le campus, parce que nous les avons renvoyés chez eux travailler dans leurs salons et sur leurs tables de cuisine, veulent revenir, mais ils rongent leur frein. Nous continuons de garder le campus ouvert pour une partie de la recherche concernant directement la COVID.

  (1625)  

    Voilà de bonnes nouvelles.
    Monsieur le président, pour le temps qui me reste, j'ai une question pour M. Bernhard, des Amis de la Radiodiffusion.
    Monsieur Bernhard, je suis d'accord avec votre point de vue, mais je me ferai l'avocat du diable. J'ignore si mon ami Pierre Poilievre assiste à la séance, mais, avec d'autres, il s'est fait le porte-parole du libre-marché et de la liberté de choix. C'est que, effectivement, le paysage médiatique est en train de changer. Les consommateurs se tournent vers Facebook et Google, ce qui est, du moins c'est ce qu'ils prétendent, la tendance naturelle des choses. Vous devez reconnaître que l'évolution va de l'avant et qu'elle ne revient jamais en arrière.
    Que répondez-vous à ce genre d'arguments? Encore une fois, je comprends votre position, mais, si on s'en tient seulement aux premiers principes, je crois que c'est l'un des premiers arguments contraires que s'attire le genre d'arguments que vous avez avancés ici.
    Merci.
    Je suis pour la concurrence. Mais quand un joueur doit rémunérer des employés, des rédacteurs, des avocats et des imprimeurs, payer des taxes et prélever les taxes de vente, tandis que les autres n'ont pas à s'en soucier, qu'ils peuvent même resquiller son produit et le vendre en se faisant passer pour l'auteur, nous sommes sur un marché qui n'est ni libre, ni juste, ni souhaitable. S'il faut parler de pratiques concurrentielles, nous sommes prêts à le faire.
    En fait, si je propose l'adoption de la politique des nouvelles à péage — le gouvernement très conservateur de l'Australie est le dernier en date à l'avoir fait —, c'est qu'elle n'exige pas d'adjudication, par l'État, de l'admissibilité de tel ou tel diffuseur pour tel ou tel montant. Une personne de la trempe de M. Poilievre la trouverait satisfaisante. N'oublions pas que ce contenu se lit sur Facebook, ce qui signifie qu'on l'aime, et si le producteur de contenu engendrant la valeur économique n'est pas rémunéré, c'est que le marché fonctionne mal. C'est le b. a.-ba de l'économie.
    Nous nous arrêtons ici.
    Merci beaucoup.
    Au tour maintenant de Mme Vecchio. Mme Koutrakis suivra.
    Je voudrais commencer par les Producteurs de poulet du Canada.
    Le député Morantz a posé une question sur la pénurie et demandé s'il avait lieu de s'inquiéter. Pourriez-vous exposer aux membres de notre comité la chronologie du poulet, de l'éclosion à l'abattoir?
    J'ignore si M. Fontaine s'est libéré. D'ordinaire... Oh! vous voici!
    Voulez-vous répondre? En votre qualité de producteur, vous êtes mieux placé que moi pour le faire.
    N'importe qui de vous deux fera l'affaire.
    Monsieur Fontaine.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie aussi M. Laliberté d'avoir commencé à répondre à la question. Les échéanciers et tout le reste étant des questions de chiffres, je vais laisser la parole à M. Laliberté pour commencer, et je terminerai. Nous reviendrons ensuite à l'autre volet de la question.

[Traduction]

    D'ordinaire, entre la livraison au producteur et la mise sur le marché, il s'écoule 35 ou 36 jours. En matière de planification, selon la taille de l'oiseau à commercialiser, ça fait donc six à huit semaines. Il faudra un peu plus pour un poulet de chair lourd à rôtir et un peu moins pour un poulet léger.
    Excellent! Merci beaucoup.
    En discutant avec des éleveurs de dindes de ma région, j'ai entendu parler d'un motif de préoccupation. Vous est-il déjà arrivé que de la volaille envoyée à l'abattage y ait été refusée? Je sais que ç'a causé de l'inquiétude au début de la COVID.

  (1630)  

    C'est une autre excellente question. Dans l'industrie de la volaille, ça n'est pas encore arrivé. Comme notre président Benoît Fontaine l'a dit, le risque d'abattage intégral est élevé. Des usines ont dû fermer en Ontario et en Colombie-Britannique, particulièrement dans cette dernière province, où le risque a été élevé, faute d'une capacité suffisante de transformation. Dans l'industrie de la volaille, ce n'est pas comme si on pouvait garder longtemps les oiseaux dans les poulaillers. Il suffit de deux ou trois jours pour qu'ils ne répondent plus au cahier des charges, et ça devient un enjeu de bien-être animal. Faute de pouvoir les envoyer à l'abattoir, il faut les euthanasier.
    Heureusement, les producteurs et les transformateurs ont pu trouver un palliatif du non-abattage.
    Avant la pandémie de COVID, est-ce que la capacité de transformation était suffisante pour le poulet et d'autres volailles...?
    Tout à fait.
    Je crois que la capacité de transformation au Canada avant la pandémie était suffisante. Bien sûr, en raison de la pandémie, les usines de transformation ont réduit l'abattage, l'espace, la capacité, etc., ce qui a contribué à diminuer la capacité de transformation.
    Nous avons parlé un peu du Partenariat transpacifique, mais nous pouvons parler aussi de l'accord avec les États-Unis, l'ACEUM, et de l'incidence qu'aura cet accord sur les producteurs canadiens. Est-ce qu'un plafond a été fixé pour les importations de poulet, et a-t-on déjà atteint cette limite?
    Lorsque j'ai discuté avec des producteurs de dindons à la fin du mois d'avril, ils m'ont dit que davantage de dindons ont été importés des États-Unis que dans les années précédentes. Je me demande si la situation est la même en ce qui concerne le poulet.

[Français]

     C'est une très bonne question.
    Comme je l'ai dit plus tôt, en raison de l'accord de libre-échange, il y aura effectivement plus de poulet américain sur les tablettes, puisqu'on a réservé 62,9 millions de kilogrammes à ce partenaire financier sous la forme de contingents tarifaires. Je répète: au total, ce sont 129,6 millions de kilogrammes de poulet étranger qui vont entrer dans notre pays, ce qui représente 10,8 % de la production canadienne. Cela représente, pour ce secteur, 3 100 emplois perdus et 240 millions de dollars de moins en recettes. Les producteurs de dindon avaient donc raison quand ils vous ont dit cela.

[Traduction]

    Oui, en effet.
    C'est votre dernière question, madame Vecchio.
    Je vais m'adresser maintenant au représentant de l'Université Western. Je vous remercie beaucoup.
    Merci beaucoup pour votre présence. Je suis fière d'avoir fréquenté l'Université Western et de représenter London et les environs.
    J'ai une brève question à vous poser. Que comptez-vous faire?
    Vous avez dit que 50 % de vos étudiants sont des étudiants étrangers. Ils sont conscients de la contribution qu'ils apportent à cet établissement et de ce qu'ils ont à offrir.
    Que prévoyez-vous faire, particulièrement en septembre, au sujet de la capacité d'un grand nombre d'entre eux de revenir au Canada? Pourront-ils reprendre les cours? Si seulement 30 % des cours ont lieu en salle de classe, craignez-vous qu'ils ne reviennent pas au Canada? Quelles sont vos préoccupations?
    Je me suis peut-être mal exprimé, car nous comptons 15 % d'étudiants étrangers.
    Oui, c'est 15 %.
    Ce n'est pas 50 %.
    Nous avons prévu certaines choses. Premièrement, comme nous sommes conscients que ces étudiants ne seront peut-être pas en mesure d'être présents physiquement avant janvier, le gouvernement travaille avec toutes les universités sur la façon d'octroyer des permis d'études en septembre à ces étudiants qui se trouvent dans leur pays. Le fait que beaucoup d'ambassades et de consulats dans le monde soient fermés en ce moment complique beaucoup les choses.
    Oui, nous avons certaines préoccupations. Cette situation préoccupe toutes les universités au Canada, car les étudiants étrangers sont très importants sur le plan économique pour le Canada. Ils contribuent au PIB à hauteur de 8 milliards de dollars par année. C'est une somme considérable.
    Nous nous sommes également préparés à la possibilité de devoir les mettre en quarantaine lorsqu'ils arriveront. Nous disposons de certaines installations sur le campus où nous pourrions loger des gens pendant deux semaines. Nous allons les exhorter à arriver un peu plus tôt au Canada pour qu'ils puissent se mettre en quarantaine par mesure de sécurité avant d'intégrer notre communauté.
    C'est très bien.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie tous les deux.
    J'aimerais m'adresser à M. Fontaine ou à M. Laliberté au sujet d'une des questions que Mme Vecchio a posées.
    Les 129 millions de volailles qui seront importées des États-Unis représentent quel pourcentage du marché canadien? Les États-Unis détiendront quelle proportion du marché canadien?

  (1635)  

[Français]

    Premièrement, il s'agit de 129 millions de kilogrammes, et non de 129 millions de têtes. Il ne faut pas confondre les têtes et les kilogrammes.
    Deuxièmement, ce sont 62,9 millions de kilogrammes réservés sur un total de 129 millions. C'est donc 50 %, grosso modo, et cela représente 10,8 % du volume canadien. Chaque fois qu'une personne consomme 1 kilogramme de poulet, il y a 100,8 grammes qui proviennent d'ailleurs, dont la moitié provient assurément des Américains. Cela a donc créé une très grande brèche dans la gestion de l'offre et cela lui fait très mal. Celle-ci est d'ailleurs présente dans les 10 provinces canadiennes et elle est une solution à l'économie rurale canadienne.

[Traduction]

    Avez-vous dit que les États-Unis détiendront 18 % de l'ensemble du marché? Est-ce exact?

[Français]

    L'accès total, c'est 10,8 %.

[Traduction]

    Les États-Unis détiendront 10,8 % du marché. Merci.
    La parole est maintenant à Mme Koutrakis, et ensuite, ce sera au tour de M. Ste-Marie.
    Allez-y, madame Koutrakis.
    Merci, monsieur le président.
    Mes questions s'adressent aux représentants de Médecins Sans Frontières. Dans votre site Web, il y a un article dans lequel on mentionne que des initiatives lancées par les Nations unies, le G20 et l'OMS en vue d'améliorer l'accès à l'équipement de protection individuelle n'ont rien donné, car il n'existe aucun régime de réglementation qui s'applique aux États et aux fabricants.
    Pouvez-vous décrire davantage la réglementation que vous proposez? Comment contribuera-t-elle à assurer la distribution équitable de l'équipement de protection individuelle? Est-ce que cette réglementation aura une incidence sur la production et la distribution d'équipement de protection individuelle au Canada?
    Je vous remercie pour votre question.
    Je vais céder la parole à M. Nickerson.
    Notre organisation, comme toute autre organisation médicale dans le monde, essaie de se procurer diverses fournitures médicales et de l'équipement de protection individuelle, notamment des masques chirurgicaux, des masques N95, des respirateurs, des blouses, des gants, etc. Je crois que l'ensemble des pays dans le monde se sont rendu compte qu'il s'agit d'un marché mondial qui n'est pas du tout réglementé.
    Les particularités de la gestion de nos chaînes d'approvisionnement font en sorte que nous devons être en mesure de fonctionner de façon indépendante afin de pouvoir réagir rapidement et d'obtenir des fournitures médicales dans des endroits où, je dois dire honnêtement, il est très difficile de s'approvisionner en raison de lacunes sur le plan de la logistique, par exemple au Soudan du Sud, en République centrafricaine, etc. Le mécanisme en particulier qui doit être mis en place à l'échelle mondiale reste encore à être déterminé. Nous demandons effectivement une certaine réglementation de ce marché pour veiller à ce que ce ne soit pas seulement un petit groupe de pays riches qui ont les moyens de payer qui puissent se procurer les fournitures médicales, et à ce qu'il y ait plutôt une distribution et une répartition équitables parmi l'ensemble des pays, y compris ceux où nous travaillons. À l'instar du Canada, nous nous efforçons de comprendre le fonctionnement de ces chaînes d'approvisionnement mondiales, qui subissent énormément de pression.
    Monsieur Nickerson, que peut faire le gouvernement fédéral pour favoriser un commerce mondial réglementé de l'équipement de protection individuelle durant la pandémie? Est-ce que les institutions multinationales ont un rôle à jouer dans la réglementation de la distribution de l'équipement de protection individuelle?
    Oui, tout à fait. Le gouvernement canadien a pris des mesures en vue d'accroître la production locale de fournitures, comme des masques, des blouses, etc. Naturellement, c'est en raison de difficultés d'approvisionnement. Je crois qu'il est important d'éviter que de telles mesures se transforment en un nationalisme qui fait en sorte que chaque pays produit les fournitures dont il a besoin pour répondre à la demande intérieure.
     Comme M. Belliveau l'a mentionné, la pandémie ne se terminera pas ici tant qu'elle ne sera pas finie partout. Alors que le gouvernement canadien cherche à augmenter la capacité de production de ces fournitures qui se font rares sur la planète, je crois qu'il est extrêmement important qu'il veille à ce que les besoins soient comblés, au Canada certes, mais aussi à l'étranger, de sorte que nos équipes et nos professionnels de la santé partout dans le monde soient en mesure de se procurer ces fournitures.

  (1640)  

    Merci.
    Ma question s'adresse à M. Bernhard, qui représente les AMIS de la radiodiffusion. J'ai écouté avec intérêt vos commentaires et vos réponses aux questions de mes collègues, et j'aimerais que vous en disiez un peu plus long sur Facebook et Google. Quels changements structurels recommandez-vous en vue d'empêcher la domination de Facebook et Google sur le journalisme canadien?
    L'établissement de règles du jeu équitables est extrêmement important. Un certain nombre de mesures peuvent être adoptées. Obliger ces entreprises à payer pour le contenu dont elles se servent est certes une mesure clé qu'il serait facile de mettre en place dès maintenant. Emboîter le pas au Québec et à la Saskatchewan, qui obligent ces entreprises à percevoir les taxes de vente sur leurs produits, est également une chose simple qui peut être faite immédiatement. L'impôt sur le revenu des sociétés est un autre aspect.
    J'aimerais ajouter quelque chose. En prétendant qu'elle est une plateforme neutre, Facebook permet à toutes les formes de contenu illégal d'être diffusées. Il s'agit, par exemple, de centaines de milliers d'images d'exploitation sexuelle d'enfants qui sont diffusées tous les jours, et ce nombre ne représente que celles qui sont signalées. Cette situation est abondamment documentée. Il s'agit d'un contenu qui sonnerait le glas pour ses compétiteurs. Puisque nous sommes un pays régi par des lois, nous devrions nous employer à appliquer les lois. Si nous les appliquions, nous constaterions que les organismes de presse canadiens parviennent efficacement à s'assurer que le contenu qui est diffusé est sécuritaire et légal. Si Facebook, qui est un compétiteur dans l'industrie, devait respecter la même norme qui s'applique aux autres, je crois que le marché serait bien différent.
    La parole est maintenant à M. Ste-Marie, et ensuite, ce sera au tour de M. Julian. Vous disposez tous les deux de deux minutes et demie.
    Est-ce M. Ste-Marie ou M. Brunelle-Duceppe?

[Français]

    Ce sera moi, monsieur le président.

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Brunelle-Duceppe.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Fontaine.
    Quelles sont les répercussions de la fermeture des restaurants et des hôtels ainsi que de la suspension des croisières sur la chaîne d'approvisionnement de votre secteur?
    Les répercussions ont été extrêmement rapides. Quarante pour cent de notre marché a disparu du jour au lendemain — sans mauvais jeu de mots. Les consommateurs sont allés à l'épicerie pour acheter d'autres produits. Nous pourrions faire un sondage à l'écran: plusieurs d'entre nous n'avons pas ou avons très peu mangé d'ailes de poulet, par exemple, depuis un mois. Quand on se rend dans des endroits festifs, à des joutes de hockey ou à d'autres événements, on consomme beaucoup plus de poulet. C'est un aliment festif.
    La découpe d'ailes, par exemple, s'est retrouvée sans preneurs pendant deux semaines, alors qu'il y avait des preneurs pour des poulets entiers. Il y a eu une brisure incroyable, qui s'est faite très rapidement. Les stocks de certains morceaux montaient et d'autres disparaissaient, parce que les gens ne consommaient plus le même produit, au même endroit, pour la même raison.
    Je vous remercie de votre réponse. C'est vraiment intéressant.
    Il y a beaucoup d'incertitude relativement à la COVID-19, et cela s'ajoute au stress financier auquel les producteurs devaient déjà faire face après la ratification du PTPGP. Les producteurs ont perdu une part de marché importante à l'échelle nationale. Vous l'avez dit tantôt, et vous l'avez même chiffrée. Nous attendons depuis plus d'un an que le gouvernement annonce des programmes pour renforcer la durabilité et la compétitivité du secteur à long terme.
    Où en sont les négociations concernant les compensations pour les pertes et les négociations concernant les accords de commerce? Êtes-vous en mesure de nous le dire?
    Les négociations se poursuivent depuis plus d'un an. Nous avons participé à un groupe de travail. Nous avons participé de bonne foi, les quatre « plumes », les quatre denrées agricoles. Pour le secteur du lait, cela s'est fait par voie rapide: le paiement a été fait directement aux fermes.
    Dans le secteur de la volaille, afin de promouvoir le poulet canadien, nous avons demandé des programmes de crédits d'impôt, de soutien et de promotion pour les marques nationales, comme le logo de la petite poule rouge que tout le monde, ou presque, connaît. Nous attendons. Nous n'avons rien eu, et maintenant la COVID-19 s'ajoute à nos problèmes. Nous devons faire face à beaucoup de choses. Il y a aussi eu l'ALENA 2.0, qui donnera des compensations. Nous devrons en parler.
    C'est donc au point mort. Nous nous entendons là-dessus.
    Je dirais plutôt au point neutre.

[Traduction]

    Je vous remercie tous les deux.
    La parole est maintenant à M. Julian, et ensuite, ce sera au tour de M. Poilievre, s'il est en ligne. Par la suite, la parole sera à Mme Dzerowicz.
    Monsieur Julian, allez-y.

  (1645)  

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais continuer avec M. Fontaine sur cet aspect.
    Si nous comprenons bien, il y a eu des discussions, mais, jusqu'à maintenant, les producteurs de poulet du Canada n'ont pas eu de soutien ni de compensation. Ils n'ont rien eu. Pouvez-vous le confirmer?
    Je peux vraiment confirmer que les 2877 producteurs de poulet canadiens n'ont absolument rien reçu.
    Je trouve cela invraisemblable.
    Vous devez composer avec les conséquences de la pandémie, comme vous nous l'avez révélé, ainsi qu'avec les brèches dans la gestion de l'offre. Nous ne comprenons pas pourquoi vous n'avez rien reçu. Alors, si le gouvernement fédéral n'y donne pas suite rapidement, si rien n'est fait pour colmater la brèche dans la gestion de l'offre, s'il n'y a pas de compensation pour la mise en marché à l'intention des producteurs de poulet et s'il n'y a pas d'appui pendant cette pandémie, où cela nous mènera-t-il après la pandémie? Dans les prochaines années, dans quel état seront les producteurs de poulet du Canada et la gestion de l'offre concernant le secteur de la volaille au Canada?
    Nous attendons depuis plus d'un an, comme je vous l'ai dit. Certaines fermes pourraient être poussées à la faillite en raison d'un manque de soutien et de la brèche dans la gestion de l'offre. Il y a aussi l'éventuel accord de libre-échange avec les pays du Mercosur qui nous pend au bout du nez.
    Je crois que le directeur général, M. Laliberté, est en mesure de renchérir sur ce que je dis.
    Monsieur Laliberté, pouvez-vous poursuivre?

[Traduction]

    Monsieur Julian, c'est une très bonne question.
    Nous n'avons pas encore observé les répercussions du PTPGP sur les producteurs. Cela étant dit, nous en sommes déjà à la troisième année de cet accord commercial. Lorsque des produits arriveront sur le marché, nous nous attendons à ce que cela ait une incidence considérable sur notre industrie, car des millions de kilogrammes de poulet arriveront sur le marché et les producteurs ne bénéficieront pas de programmes d'investissement adéquats pour les aider à faire face à cette situation.
    D'accord, merci à tous.
    Est-ce que M. Poilievre est en ligne? Est-ce que M. Cumming ou M. Morantz souhaite prendre sa place?
    Je pense que je vais prendre sa place, monsieur Easter, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    D'accord, allez-y, monsieur Cumming.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais m'adresser à M. Wood.
    Je vous ai entendu parler des difficultés qu'éprouvent les petites entreprises, et j'en ai certes entendu parler amplement. Elles souhaitent que le gouvernement réagisse un peu plus rapidement. Je suis reconnaissant au gouvernement d'avoir apporté certains changements aux programmes.
    Ce qui a retenu mon attention dans vos propos, c'est l'arrêt complet des activités au sein de votre industrie, particulièrement la fermeture des petites entreprises. Lorsque survient une crise de la sorte, on pense toujours qu'il faudra en tirer des leçons. Pensez-vous qu'il aurait fallu procéder à un examen de chaque secteur pour déterminer ce qui devait et ne devait pas fermer? Vous avez parlé de Walmart, qui a continué ses activités... Beaucoup de petites entreprises se sentent pénalisées parce qu'elles ont dû fermer, alors qu'elles estiment qu'elles auraient pu maintenir leurs activités d'une façon sécuritaire.
    Pouvez-vous commenter cette situation?
    Oui. Je vous remercie de me poser cette question.
    Nous avons examiné différentes industries. Je sais que le gouvernement se penche sur l'industrie du transport aérien pour voir ce qu'il peut faire pour ce secteur. Le problème, c'est que 98 % des gens — un pourcentage énorme — travaillent dans des petites entreprises. Il n'y avait pas de manuel d'instructions. Je suis heureux de la façon dont nous avons réagi et de la rapidité avec laquelle le gouvernement est intervenu. Toutefois, je pense que nous... Nous ne pouvons même pas nous demander aujourd'hui si nous aurions dû faire ceci ou cela. Nous n'avons d'autre choix que d'aller de l'avant. Nous devons examiner la situation d'un point de vue sectoriel pour déterminer quels secteurs sont les plus durement touchés. En ce moment — et j'avoue que je manque un peu d'objectivité —, ce sont les secteurs du tourisme, des événements, du tourisme d'accueil et de la restauration. Les restaurants ne peuvent pas ouvrir à 50 % de leur capacité. Ce n'est pas possible. Ils ne peuvent pas non plus ouvrir à 75 % de leur capacité; cela ne fonctionnera pas. C'est ce que vous diront vos électeurs qui sont propriétaires de ce type d'entreprises.
    À l'heure actuelle, nous devons commencer à nous préoccuper très précisément des industries qui sont sur le point de s'effondrer totalement.

  (1650)  

    En ce qui a trait à ces industries, quelle serait la meilleure façon de leur fournir un certain soutien jusqu'à ce qu'elles puissent procéder à une réouverture complète? Je sais que bon nombre d'entreprises retardent leur réouverture, car elles ne peuvent pas fonctionner à 50 % de leur capacité, alors elles attendent de pouvoir fonctionner pleinement. Certaines d'entre elles ne s'en sortiront pas; d'ici un an, elles auront mis la clé sous la porte.
    C'est tout à fait exact, monsieur. Elles ne vont pas survivre. De nombreuses entreprises ne seront plus là dans un an à moins qu'elles n'obtiennent davantage de soutien, davantage de subventions de la part du gouvernement.
    Les prêts ne suffiront pas. Le gouvernement fédéral a versé des millions par l'entremise de la Banque de développement du Canada et d'Exportation et développement Canada, mais des garanties personnelles sont exigées. Je ne vois pas comment nous pouvons, en tant que propriétaires d'entreprises, nous exposer davantage que nous le faisons déjà quotidiennement.
    Nous devons examiner les particularités de l'industrie. Le gouvernement doit mettre en place un programme de subventions. Comme je l'ai dit durant mon exposé, pendant combien de temps étions-nous censés tenir le coup avec ces 40 000 $? C'est la question que je me pose. Certaines entreprises auraient pu utiliser cette somme pour continuer leurs activités pendant quatre mois. Il y a un gros restaurant ici à Ottawa, et je connais très bien son propriétaire. Ses coûts d'exploitation s'élèvent à 40 000 $ par mois, même s'il n'a plus d'employés à payer. Mes propres frais d'exploitation s'élèvent à 50 000 $ par mois, alors que toutes les activités ont cessé.
    Pendant combien de temps encore sommes-nous censés être en mesure de tenir le coup sans bénéficier d'un financement adéquat et de subventions raisonnables?
    Votre temps est écoulé, monsieur Cumming. Je vais limiter le temps de parole à quatre minutes durant le présent tour, car nous devons bientôt passer au prochain tour.
    Monsieur Wood, en ce qui concerne la Banque de développement du Canada, la BDC, je veux vous dire que nous allons accueillir la semaine prochaine des représentants de cette institution. Vous avez dit que la BDC offre des prêts, avec des garanties personnelles. Est-ce que c'était le cas avant que le gouvernement offre des liquidités à la BDC ou est-ce que c'est encore le cas même si le gouvernement fédéral lui a fourni des liquidités?
    C'est encore le cas actuellement, à ma connaissance.
    Si vous avez des renseignements à ce sujet, pourriez-vous nous les transmettre? Je pense que c'est une question que certains de nos membres voudront poser aux représentants de la BDC qui comparaîtront la semaine prochaine.
    Oui, tout à fait.
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Dzerowicz.
    Madame Dzerowicz, allez-y.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie tous pour vos excellents exposés. J'ai des questions à poser à chacun d'entre vous, mais le président est très chiche relativement au temps de parole. Je vais devoir faire très vite avec certains d'entre vous, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Belliveau, de Médecins Sans Frontières. Je vous remercie, vous et votre équipe, du fond du cœur pour le travail incroyable que vous accomplissez un peu partout dans le monde, particulièrement en ce moment. Notre gouvernement consacre environ 6 milliards de dollars à l'aide internationale. En juin 2019, nous avons annoncé un investissement de 1,4 milliard de dollars pour la santé des femmes et des services de santé génésique. Dans quelle mesure la COVID a-t-elle une incidence sur l'aide au développement fournie actuellement par le Canada — et peut-être également sur l'aide offerte par d'autres pays dans le monde — et est-ce que nous devrions modifier notre soutien?
    Vous disposez d'environ 45 secondes pour répondre avant que je passe à ma prochaine question. Vous pourriez peut-être nous donner une réponse rapide et votre avis.
    Je vous remercie beaucoup pour votre question et pour votre appui.
    Je ne crois pas qu'il existe une réponse simple et rapide à cette question. Brièvement, je dirais que, comme tous les organismes qui répondent à des besoins dans le monde, nous devons faire des choix très difficiles en ce moment sur le plan de nos priorités.
    Même si nous examinons la situation dans l'optique de l'approche féministe du gouvernement, nous devons reconnaître que certaines vulnérabilités en cachent d'autres. Dans bien des pays où oeuvre Médecins Sans Frontières, on observe différentes couches de vulnérabilités. Presque chaque fois qu'il y a une crise médicale grave, les femmes et les filles sont touchées de façon disproportionnée.
    Nous avons toujours cela en tête lorsque nous intervenons, et nous encourageons le gouvernement du Canada à continuer à faire de même.
    Je vous remercie.
    Je tiens à dire que nous avons très bien saisi votre demande de soutien supplémentaire en raison de la COVID. Aussi, nous devons veiller à ce que tout financement d'un vaccin soit accompagné de mesures de protection, de sorte qu'il soit accessible et abordable pour tout le monde ultérieurement. Sachez que nous avons très bien compris le message.

  (1655)  

    Merci.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Grenier, après quoi je parlerai à M. Wood. Peut-être que les deux témoins pourraient répondre.
    Lorsque nous avons initialement annoncé tous nos programmes — nous l'avons fait très rapidement —, nous voulions nous assurer d'être généreux, de garder les travailleurs à la maison et en sécurité, de maintenir le lien d'emploi entre les employés et leur employeur, et de fournir suffisamment de fonds et de soutien aux entreprises pour qu'elles se sortent de la phase d'urgence de la pandémie.
    Nous passons maintenant à l'étape de la réouverture de notre économie et du rétablissement. Vous provenez tous les deux de secteurs qui ont essentiellement frappé un mur. J'aimerais que vous me parliez tous les deux du principe que le gouvernement devrait respecter pour aider les entreprises dès maintenant. Êtes-vous en train de dire que si vous avez perdu 100 % des recettes, vous ne reviendrez même pas cet été? Pour toutes les entreprises qui sont dans une telle situation, le principe à appliquer devrait consister à verser un soutien correspondant à 50 % de l'argent gagné l'année dernière, et ce, pendant environ six mois — j'ignore à quoi cela devrait ressembler. Peut-être pourriez-vous nous conseiller sur un principe que nous devrions respecter, selon vous.
    Monsieur Grenier, nous allons commencer par vous.
    Veuillez si possible répondre avec concision.

[Français]

    Il est certain que si nous pouvions recevoir du soutien au cours des prochains mois, à tout le moins pour ce qui est des frais fixes, cela nous permettrait de survivre jusqu'à la prochaine année. Les prochaines rentrées de revenus sont prévues pour le mois de janvier.
    Nous pourrions peut-être aussi recevoir, comme M. Shepard le disait, du soutien financier pour ce qui est des infrastructures. Puisque nous sommes fermés, nous pourrions profiter de l'occasion pour rénover et mettre à jour nos installations, qui ont 50 ans, 75 ans ou même 100 ans. Je pense que cela serait une belle façon de nous soutenir pour la suite des choses en contexte de pandémie, pour que nous puissions bien fonctionner dans l'avenir.

[Traduction]

    Monsieur Wood.
    Je vous remercie infiniment de la question. Je vais répondre le plus brièvement possible.
    Nous sommes toujours ravis lorsque le gouvernement fait preuve de générosité — vraiment.
    Je considère que le gouvernement a fermé notre industrie, et à juste titre. Comprenez-moi bien: je saisis bien pourquoi les activités ont été interrompues. Mes propositions suivantes font suite à une réflexion: voici ce que nous avons gagné l'année dernière pour les six prochains mois, comme vous le dites, ou pour la prochaine année, et voici le montant dont nous avons besoin pour absorber les coûts, que ce soit 50 ou 75 % des recettes. Nous avons encore des coûts à assumer pour la suite des choses.
    L'autre chose que j'aimerais ajouter rapidement avant de me faire interrompre, c'est que nous sommes vraiment reconnaissants de ce que le gouvernement a fait. Nous sommes tout à fait ravis de la vitesse à laquelle les choses se sont passées. Par contre, il faut maintenant repenser ce qui peut être fait pour améliorer la situation et aider les autres par le fait même, par industrie. En premier lieu, nous vous remercions infiniment, mais nous devons en deuxième lieu nous pencher sur les garanties personnelles. Dans notre industrie du moins, le gouvernement doit garantir 75 % des recettes pendant un maximum de 18 mois après la pandémie.
    Je vous remercie de nous avoir accordé votre temps.
    Je vous remercie. J'ai une question à l'intention de M. Neveu.
    Permettez-moi de commencer par vous dire que j'ai beaucoup aimé vos remarques liminaires. Je trouve toutefois très inquiétant que nos innovateurs, nos groupes d'experts et l'expérience que nous avons acquise dans l'industrie pétrolière et gazière doivent s'en aller au sud du 49e parallèle, où ils profiteront à un pays concurrent plutôt qu'à nous, au Canada.
    En deuxième lieu, un débat fait rage entre l'environnement et l'industrie pétrolière et gazière au pays. Or, je crois sincèrement, et de plus en plus que tandis que les partisans des deux points de vue se crient par la tête, les deux côtés vont finir par perdre, et c'est le Canada qui sera le plus grand perdant.
    Comment pensez-vous que nous pouvons résoudre ce problème? Notre industrie pétrolière et gazière est menacée. Il est vrai que nous devons lutter contre les changements climatiques, mais nous avons en revanche une industrie pas mal du tout, surtout du côté de l'extraction classique de pétrole et de gaz, qui fait preuve d'une grande innovation. Nous jetons le bébé avec l'eau du bain.
    Avez-vous des solutions à nous proposer? Je suppose que c'est ma question. Je trouve la situation vraiment préoccupante.
    Tout dépend de l'endroit où le capital est versé.
    L'industrie est exigeante en investissements. Produire de l'énergie, qu'elle soit hydroélectrique, solaire, éolienne ou pétrolière et gazière, nécessite une forte intensité de capital. Les régimes financiers et les secteurs qui attirent le plus vigoureusement les capitaux obtiendront des fonds, et ces industries vont rayonner. L'Alberta a lancé une initiative majeure d'énergie éolienne dans le Sud de l'Alberta, puisque nous réussissons à attirer des capitaux.
    Je pense qu'il règne une confusion entre l'exploitation minière des sables bitumineux, ce segment de l'industrie, les grandes mines à ciel ouvert, et l'extraction classique de pétrole et de gaz. Voilà qui a vraiment teinté l'ensemble de l'industrie d'une perspective négative. Nous devons attirer des capitaux de nouveau. C'est la clé.

  (1700)  

    Je vous remercie de votre réponse. Je remercie tous les témoins qui ont comparu aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de vos critiques constructives et de vos suggestions quant à la direction à prendre et la manière dont nous devrions aider votre secteur et votre industrie.
    Nous allons maintenant suspendre la séance quelques minutes pendant que nous accueillons le prochain groupe de témoins.
    Je vous remercie encore.
    La séance est suspendue.

  (1700)  


  (1705)  

    Reprenons.
    Je souhaite la bienvenue au deuxième groupe de témoins à la 33e séance du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
    Nous nous réunissons conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre des communes afin de discuter de la réponse du gouvernement à la pandémie de la COVID-19.
    Je tiens à aviser les témoins que la séance d'aujourd'hui se déroule par vidéoconférence, et que les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à chacun de nos témoins.
    Je vous demande si possible de limiter votre déclaration liminaire à environ cinq minutes. Puisque nous n'avons pas autant de témoins dans ce groupe-ci, nous pourrions aller jusqu'à six minutes, si vous le voulez.
    Nous allons commencer par Katherine Scott, chercheuse principale au Centre canadien de politiques alternatives.
    Madame Scott.
    Je vous remercie infiniment de m'avoir invitée à comparaître. C'est formidable. Je n'ai jamais fait une présentation comme celle-ci devant un comité parlementaire. Je suis en territoire inconnu ici, tout comme le pays se trouve certainement en terrain inexploré.
    Je travaille au Centre canadien de politiques alternatives. Nous sommes un organisme de recherche qui a des bureaux dans tout le pays. Je suis pour ma part au bureau national situé ici, à Ottawa. Dernièrement, nous avons consacré beaucoup de temps et de ressources à essayer de comprendre l'ampleur de cette crise de santé publique, qui nous a manifestement plongés dans une crise économique.
    J'aimerais aujourd'hui vous parler de l'incidence de la crise économique sur les femmes et les filles au Canada plus particulièrement. Ne nous leurrons pas: la crise a un effet dévastateur et profond sur les collectivités d'un bout à l'autre du pays, et mon exposé s'attardera expressément à ses répercussions sur les femmes et les filles.
    J'ai pu vous faire parvenir à l'avance quelques diapositives de recherches, mais j'ignore si les membres du Comité les ont reçues. Je veux m'attarder à quelques messages clés tirés de notre analyse de l'Enquête sur la population active des derniers mois. Je vous dirai ce que cela laisse entendre pour un plan de relance féministe, je l'espère, ou pour le moment où nous changerons notre fusil d'épaule et commencerons à réfléchir à long terme. J'espère que nous pourrons discuter de certains de ces points dans les questions.
    Le premier message que j'aimerais transmettre aujourd'hui, c'est que les femmes sont décidément au premier plan de la présente crise économique. Plus de la moitié de toutes les travailleuses exercent actuellement des professions dans les cinq domaines suivants, qu'on appelle les « 5 C » pour caring, clerical, catering, cashiering et cleaning, en anglais: la prestation de soins, les emplois de bureau, les services de traiteur, les emplois de caissiers et le nettoyage. Ce sont justement ces types d'emplois qui contribuent directement à restreindre la propagation de la pandémie et à dispenser le soutien et les soins dont les personnes touchées ont besoin.
    J'ignore si vous avez le tableau, mais il illustre la surreprésentation des femmes dans beaucoup de ces catégories. Par exemple, 90 % des infirmières au Canada sont des femmes, 90 % des préposés aux services de soutien à la personne qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée sont des femmes, et deux tiers des personnes qui nettoient et désinfectent nos hôpitaux sont des femmes. Ce sont ces mêmes femmes qui rentrent chez elles dans leur famille pour commencer leur deuxième quart de travail, en craignant de ramener le virus à la maison. Bien sûr, d'autres femmes travaillent dans des secteurs tels que l'alimentation et l'hébergement, les services financiers et la vente au détail, qui ont tous été durement touchés par la fermeture des services imposée par le gouvernement.
     Comme le graphique le montre, bon nombre de ces mêmes professions comptent une forte proportion de travailleurs racialisés. Par exemple, on retrouve des travailleurs migrants et racialisés dans les établissements de soins de longue durée, ou encore du côté des personnes soignantes, des professions d'entretien, et ainsi de suite. Lorsque nous réfléchissons à l'incidence de la pandémie sur les travailleurs, il est d'une importance cruciale d'avoir conscience de la diversité, et certainement de la concentration des travailleurs racialisés.
     L'autre élément, ou le deuxième message sur lequel je voudrais insister est bien sûr que bon nombre des emplois présentent un risque élevé d'exposition à l'infection, comme nous l'avons dit. Ce sont d'ailleurs les mêmes emplois qui offrent généralement moins de protections telles que des congés de maladie payés ou d'autres régimes de santé. En réalité, d'après les recherches que nous avons menées au Centre canadien de politiques alternatives pour l'année dernière, soit 2019, il y avait seulement 19 % des travailleurs du secteur de l'hébergement et de la restauration qui avaient accès à des congés payés, et 30 % de ceux de la vente au détail.
    Comme je l'ai dit, ce sont des emplois à risque élevé, en particulier pour ceux qui ont un salaire inférieur. Selon nos recherches, 43 % de tous les travailleurs qui gagnent moins de 14 $ de l'heure occupaient des emplois à haut risque, contre seulement 11 % des travailleurs mieux rémunérés. La majorité des travailleuses occupent ces emplois à haut risque, soit un bon tiers d'entre elles. Les femmes sont aux premières lignes de la crise, tant dans le domaine des soins que dans leur travail rémunéré; ce sont elles qui vont chaque jour sur le marché du travail, où elles sont exposées à la pandémie.
     La crise économique frappe bien sûr les collectivités de partout au pays, et les femmes ont été durement touchées. La première Enquête sur la population active a révélé que 70 % de tous les emplois perdus au mois de mars étaient occupés par des femmes. Ces pertes sont attribuables à la fermeture des commerces de détail, du secteur de l'hébergement, et ainsi de suite. Nous nous attendons à recevoir la prochaine Enquête sur la population active ce vendredi, mais les chiffres du mois d'avril montraient qu'il y avait désormais trois millions de Canadiens sans emploi, et que deux millions et demi de plus avaient perdu la majorité de leurs heures de travail. Au total pour le mois d'avril, cela représentait 32 % des travailleuses et 29 % des travailleurs.
     Il est évident que notre génération n'a jamais assisté à un déclin aussi spectaculaire, et en aussi peu de temps. Le plus choquant dans ces chiffres, c'est toutefois que plus de la moitié des travailleurs qui gagnent 14 $ de l'heure ou moins ont été mis à pied ou ont perdu la majorité de leurs heures, contre seulement 1 % des emplois qui ont été perdus chez les 10 % de travailleurs les mieux nantis.

  (1710)  

    Il s'agit de toute évidence d'une pandémie et d'une urgence économique qui ont des répercussions sur ceux d'entre nous qui gagnent les salaires les plus bas, un groupe qui compte une majorité écrasante de femmes et de travailleurs racialisés. Dans le tableau que j'ai intégré à mon document, vous pouvez voir que plus de la moitié des femmes du décile le moins bien rémunéré ont perdu leur emploi. En effet, 58 % de toutes les femmes touchant moins de 14 $ de l'heure ont perdu leur emploi ou la majorité de leurs heures entre février et avril.
    Dans cette optique, un autre élément de la situation vient bien sûr s'ajouter à l'ampleur des pertes d'emplois: les données sur le chômage ne reflètent pas le nombre total de personnes qui quittent carrément le marché du travail. Nous savons maintenant que le nombre de femmes qui ont officiellement quitté la population active a augmenté de 34 %. Il s'agit de femmes qui ont laissé leur travail en raison de leurs responsabilités ou obligations — pour s'occuper de personnes malades, de membres de leur famille ou de leurs enfants, en raison de la fermeture des écoles et des garderies —, mais qui ne sont pas susceptibles de retourner immédiatement sur le marché du travail. C'est un chiffre très important qu'il faut surveiller. Nous constatons déjà une baisse du taux d'emploi. Nous voyons que le fossé se creuse entre les hommes et les femmes à cet égard. Le nombre de femmes qui sont exclues du marché du travail laisse présager un recul de la sécurité économique des femmes, et certainement de l'égalité des sexes pour les décennies à venir.
     Les mères d'enfants de moins de 12 ans en sont bien sûr un bon exemple. Un quart de ces mères ont perdu leur emploi ou la majorité de leurs heures de travail entre février et avril. C'est d'une importance vitale. Les autres trois quarts d'entre elles occupent toujours un emploi, mais elles sont à la maison avec leurs enfants, sans l'aide d'un service de garde, de sorte qu'elles s'occupent d'eux 24 heures par jour et 7 jours par semaine. Vous savez, il faut se demander ce qu'il advient des chefs de famille monoparentale. En avril, plus de 200 000 mères seules travaillaient encore — Dieu seul sait avec quel type d'aide ou d'arrangement pour la garde des enfants —, et 122 000 autres avaient été remerciées et se demandaient si elles pourraient un jour retourner travailler, la majorité des garderies et des écoles étant fermées.
    Chose certaine, nous sommes maintenant saisis de la question. Les femmes qui ont été mises à pied pourront-elles reprendre le travail ou augmenter leurs heures sans service de garde? Il s'agit vraiment d'un volet essentiel de la relance sur lequel je veux insister aujourd'hui. Il n'y a pas de relance sans service de garde. En termes simples, c'est mathématiquement impossible. Selon une enquête actuellement effectuée par des défenseurs des services de garde, seulement 60 % des centres qui ont répondu prévoient rouvrir leurs portes. Par ailleurs, ceux-ci offriront bien sûr moins de places afin de respecter la distanciation physique. Sans service de garde, les femmes pourront-elles revenir au travail? Qu'est-ce que cela signifie quant au recul du projet d'égalité des sexes? Tout cela aura des effets dévastateurs sur les revenus des ménages, et il ne faut pas se faire d’illusions. Si les femmes se retirent du marché du travail ou sont incapables d'y retourner, comme nous le constatons actuellement — ce qui représente en moyenne 40 % du revenu de tout ménage —, nous assisterons à une dégringolade des dépenses des ménages, ce qui ralentira par le fait même l'économie canadienne.
    En réalité, l'incidence et le positionnement des femmes dans cette situation de stress sont uniques. Ma collègue Armine Yalnizyan a parlé d'une récession au féminin et a dit que toute relance sera vouée à l'échec sans reprise féminine. C'est bel et bien un point important...
    Je vois que mon temps est écoulé. J'ai parlé des choses que nous pourrions faire dans un plan de relance, et nous aurons peut-être l'occasion d'en discuter à la période des questions.
    Je vous remercie infiniment.

  (1715)  

    Merci beaucoup, madame Scott. Nous aimerions nous aussi entendre parler de ce plan de relance.
    Nous allons maintenant écouter Nina Labun, présidente-directrice générale du Donwood Manor Personal Care Home.
    Madame Labun.
    Bonjour et merci, monsieur le président. C'est un privilège de parler au Comité.
    Je suis, de profession, infirmière autorisée titulaire d'une maîtrise et j'assume actuellement les fonctions de présidente-directrice générale d'un établissement confessionnel à but non lucratif qui prodigue des soins à 460 aînés à Winnipeg.
    On m'a invitée pour parler des répercussions de la COVID sur les femmes au Canada. En tant que présidente-directrice générale qui dirige une main-d'œuvre à prédominance féminine dans un des milieux de soins les plus risqués pendant la COVID, c'est pour moi un privilège de vous parler de mon expérience pendant la pandémie et de l'incidence disproportionnée qu'elle a sur les femmes, notamment celles qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée.
    Les femmes sont effectivement majoritaires dans le domaine des soins de longue durée, comme on l'a déjà dit. Elles représentent 96 % du personnel dans mon établissement, et 90 % du secteur d'un bout à l'autre du Canada.
    Avant de vous dire comment les femmes dans ce secteur ont été touchées par la COVID, j'aimerais brosser un portrait des défis auxquels elles faisaient face avant la pandémie.
    Mon personnel travaille le jour, le soir, la nuit et une fin de semaine sur deux. La plupart du temps, mes employées assument les principales responsabilités de leur ménage. Compte tenu de la nature du secteur, elles concilient habituellement plus d'un poste à temps partiel, ce qui revient à occuper plus d'un emploi à temps plein. Elles appartiennent souvent à un groupe minoritaire, ont immigré récemment et ont très peu d'occasions d'épargner en prévision des mauvais jours. La majorité de ces femmes très courageuses prodiguent également des soins dans des fonctions non réglementées, avec peu de formation pour les préparer efficacement à la complexité des soins de longue durée.
    À ces facteurs de stress s'ajoute le choix d'un parcours difficile où le travail qu'elles accomplissent pour les aînés à leur charge n'est pas respecté comme il se doit. Permettez-moi de prendre un instant pour vous expliquer ce que j'entends par « difficile ».
    Ce qui est difficile, c'est donner un bain dans une baignoire vieille de 18 ans, soit 8 ans de plus que sa vie utile. C'est offrir des soins les journées chaudes d'été lorsqu'on ne peut pas se fier à un climatiseur vieux de 40 ans et qu'il n'y a pas d'argent pour le remplacer. C'est placer un aîné dans une chambre partagée où il passera ses derniers jours avec un parfait inconnu. C'est essayer d'innover en matière de soins lorsqu'on tente encore d'obtenir du financement pour avoir un service WiFi de base.
    Mon personnel et l'équipe de direction continuent d'assumer personnellement les coûts non couverts par le système de santé actuel. Des membres de notre communauté et notre personnel soutiennent le système par la seule force de leur volonté afin de l'empêcher de s'effondrer. Je vais vous donner des exemples concrets. Les membres du personnel donnent régulièrement de l'argent afin de soutenir des activités de financement pour obtenir de l'équipement et des programmes. Ils font des heures supplémentaires, essentiellement à titre de bénévoles, car les besoins sont grands en matière de soins. Les dirigeants sont disponibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept, sans indemnisation, pour soutenir le personnel et le diriger, et les membres de notre communauté de soutien payent entièrement le salaire versé pour offrir une aide spirituelle à temps plein, un aspect essentiel du régime holistique de soins aux aînés qui n'est pas financé.
    La COVID a mené à un point de rupture cette main-d'œuvre remarquable dirigée par des femmes dans les établissements de soins de longue durée. Cette situation nuit à la famille, aux finances et à la santé des employés. Mon personnel, qui est composé de mères, doit maintenant attendre longtemps en ligne pour faire l'épicerie. Ces mères préparent les repas, coordonnent l'horaire de leur famille et dispensent maintenant à leurs enfants ayant l'âge de fréquenter l'école un enseignement à domicile. Sur le plan financier, ces femmes ont perdu une source de revenus et ne peuvent pas trouver de services de garde convenables lorsqu'elles travaillent par quarts. Sur le plan de la santé et de la sécurité, ces femmes sont également plus susceptibles d'être exposées à la COVID simplement parce qu'elles travaillent dans des établissements de soins de longue durée, où ont lieu, nous le savons, la majorité des décès au Canada. De plus, et c'est tragique, certaines de ces femmes qui sont victimes de violence familiale voient leur situation empirer.
    La COVID multiplie les défis sous-jacents dans mon secteur, qui, nous le savons, touchent les femmes de manière disproportionnée. Si le gouvernement du Canada veut afficher sa détermination à améliorer la vie des Canadiennes, y compris les aînées, il doit commencer par relever les défis fondamentaux dans les foyers de soins de longue durée et par résoudre la situation catastrophique que cette pandémie a fait ressortir. Les établissements de soins de longue durée ne peuvent plus se fier au soutien et au financement informels offerts par les fournisseurs de soins, les dirigeants et les bénévoles héroïques, majoritairement des femmes.
    Pour terminer, je tiens à dire que la prestation de soins est un travail honorable, mais nous ne pouvons plus avoir un système de soins aux aînés qui sous-estime la contribution des femmes et ne répond pas aux besoins réels en matière de dépenses de fonctionnement et d'immobilisation.
    Merci.

  (1720)  

    Merci beaucoup, madame Labun.
    Nous passons maintenant à Mme Megan Walker, directrice générale du London Abused Women's Centre.
    Allez-y, madame Walker.
    Bonsoir tout le monde. Je suis très heureuse de me joindre à vous ce soir.
     Le London Abused Women's Centre est un organisme féministe qui prend des mesures à portée systémique pour mettre fin à l'oppression des femmes et des filles tout en donnant un accès immédiat à des services d'un bout à l'autre du pays à celles qui ont plus de 12 ans et qui sont maltraitées par leur conjoint, victimes de la traite des personnes ou exploitées sexuellement. L'année dernière, l'agence a aidé 8 137 femmes et filles.
    La grave lacune que nous voyons dans la réponse du gouvernement à la COVID est l'absence d'analyse féministe. Aucune des mesures prises pour faire face à la COVID ne tient compte des différences fondamentales de pouvoir entre les femmes et les hommes. Une analyse féministe est essentielle à la réponse du gouvernement à ce virus mortel qui touche de manière disproportionnée les femmes, en particulier les femmes et les filles autochtones.
    La mesure de 50 millions de dollars pour aider à gérer ou à prévenir les éclosions dans les centres et les refuges d'aide aux victimes d'agression sexuelle, y compris dans les collectivités autochtones, est terriblement inadéquate. Selon le bureau du député libéral de ma circonscription, cette enveloppe fédérale exclut au moins 600 organismes d'un bout à l'autre du Canada, y compris le London Abused Women's Centre. Pendant la pandémie, alors que les femmes sont isolées chez elles avec leur agresseur et que leurs enfants sont régulièrement exposés à de la violence, aucun financement n'est prévu dans la réponse à la COVID pour permettre aux femmes d'avoir immédiatement accès à des services qui pourraient leur sauver la vie.
    Les femmes et les filles les plus vulnérables du Canada, celles qui sont victimes de la traite des personnes et celles qui tentent de laisser leur agresseur, n'ont pas droit à la Prestation canadienne d'urgence. Les femmes et les filles victimes de la traite des personnes et exploitées sexuellement ont besoin de financement pour quitter les passeurs, un financement qui leur permet de rentrer chez elles dans d'autres provinces et d'autres villes partout au pays, de revenir dans le système d'éducation, de suivre une formation professionnelle, de recourir à des services de lutte contre la toxicomanie, de se trouver un logement et même de se nourrir.
    La traite des personnes et l'exploitation sexuelle ne sont pas des emplois. C'est une forme de violence masculine contre les femmes. Les passeurs ne leur remettent pas de T4. Elles n'ont rien pour prouver qu'elles reçoivent de l'argent, car c'est rarement le cas. Ce sont les passeurs qui gardent l'argent. Il arrive que ces filles se fassent violer pour de l'argent jusqu'à 20 fois par jour pour que le passeur atteigne son quota.
    Il est extrêmement dangereux et difficile de laisser un passeur. C'est d'autant plus vrai pendant la COVID, mais la possibilité de partir et de recouvrer sa liberté est nettement meilleure lorsqu'il y a des mesures globales de soutien et de financement pour permettre aux victimes de recouvrer leur liberté.
    Qu'arrive-t-il aux femmes prises chez elles avec leur agresseur? Elles sont nombreuses à ne pas avoir d'expérience de travail à défaut de pouvoir sortir, avec ou sans COVID. Elles ne peuvent rien faire sans la permission de leur conjoint violent.
    Il n'y a dans le plan actuel de lutte contre la COVID aucun financement pour aider les femmes à quitter leur agresseur, et alors que les femmes maltraitées par leur conjoint ou victimes de la traite des personnes et exploitées ne reçoivent pas de fonds du gouvernement, leurs agresseurs en reçoivent malheureusement. Les propriétaires d'entreprises dans le commerce du sexe — des passeurs ou des membres du crime organisé — ont droit à un prêt sans intérêt, et jusqu'à 25 % du montant ne doit pas être remis si la différence est remboursée avant décembre 2020. Pendant que les victimes de la traite des personnes sont violées tous les jours, on prend soin de leurs agresseurs grâce au Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes.
    Nous sommes très préoccupés par la trahison du gouvernement à l'endroit des femmes et des filles canadiennes.
    Le gouvernement du Canada a annoncé un montant de 75 millions de dollars pour lutter contre la traite des personnes à des fins sexuelles, mais il a abandonné son financement d'au moins 11 organismes canadiens qui s'efforcent tous de redonner la liberté et de donner de l'espoir à des femmes et à des filles victimes de la traite des personnes et exploitées sexuellement. Selon la ministre des Femmes et de l'Égalité des genres et le ministre de la Justice, le gouvernement a plutôt décidé qu'une troisième année — une troisième année de suite — de consultations sur la question était nécessaire. Il est inutile d'avoir trois années de consultations. Nous connaissons les problèmes et nous avons les solutions. La tenue de consultations au pays pendant la COVID est coûteuse et une perte de temps.

  (1725)  

    Il faut débourser environ 1,5 million de dollars par année pour maintenir ouverts 11 organismes d'un bout à l'autre du pays. Le refus de financer ces organismes d'ici à ce que de plus amples consultations aient été menées ne s'appuie pas sur une analyse féministe ni sur la logique. C'est dommageable et potentiellement mortel pour des femmes et des filles qui ont besoin de services. Cela empêche mon équipe de dormir la nuit et cela devrait être la même chose pour vous.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Walker.
    Nous allons passer à Mme Vicki Saunders, fondatrice de SheEO.
    Vous avez la parole, madame Saunders.
    Merci beaucoup de l'invitation à comparaître.
    Wow, c'était très éloquent. Merci beaucoup, madame Walker.
    Je suis une entrepreneure d'expérience. J'ai été entrepreneure toute ma vie. Je suis inemployable. Il est étonnant que je prenne part à un appel avec le gouvernement, mais me voici.
    Il y a une phrase que je dis depuis longtemps: « Rien ne fonctionne. Quel moment idéal pour être en vie. » C'est en quelque sorte l'esprit d'entreprise, et c'est malheureusement ce que nous vivons actuellement à grande échelle.
    Les 9 et 10 mars, SheEO a organisé un grand sommet mondial à Toronto, pour célébrer le rassemblement de 2 500 femmes canadiennes qui ont chacune donné 1 100 $ par année depuis cinq ans pour financer des entreprises dirigées par des femmes qui se penchent sur ce que la planète doit faire: les objectifs en matière de développement durable des Nations unies. Ces entreprises mettent toutes l'accent sur ces objectifs. Nous prêtons de l'argent donné par des femmes canadiennes à 0 % d'intérêt, et ces entrepreneures remboursent ces prêts sur cinq ans.
    Chacune d'elles obtient non seulement un prêt d'environ 100 000 $, mais aussi un accès à nous toutes: des milliers de femmes qui entretiennent des liens et qui ont plein de ressources. Nous offrons nos réseaux, notre expertise, notre pouvoir d'achat en tant que consommatrices ainsi que notre influence pour les aider à faire croître leur entreprise.
    Cet écosystème de soutien extrêmement riche fait en sorte que toutes nos entreprises surpassent considérablement leurs pairs en ce qui a trait aux revenus, aux exportations, aux répercussions sociales et — c'est peut-être le plus important — à la création d'emplois durables sur le plan social et environnemental.
    Après cinq années d'activités au Canada, nous avons annoncé à notre sommet mondial — le premier ministre était présent à cette dernière grande activité avant la pandémie — que nous avons atteint le statut de fonds permanent au Canada. Ces prêts de cinq ans sont tous entièrement remboursés. Même si personne ne contribuait de nouveau au capital, nous continuerions de financer indéfiniment des femmes entrepreneures au Canada grâce à ce fonds renouvelable. C'est une façon complètement différente d'utiliser sans cesse le capital.
    Nous avons repris ce modèle dans cinq pays, et notre objectif est d'avoir un million de femmes et un fonds de 1 milliard de dollars pour financer indéfiniment 10 000 femmes entrepreneuses chaque année, et de laisser cet argent en héritage.
    Nous déployons ces efforts étant donné que seulement 4 % du capital de risque est remis aux femmes entrepreneures. C'est ainsi depuis des dizaines d'années, à l'échelle mondiale. Cela n'a pas du tout changé, même si nous multiplions les analyses de rentabilisation, les travaux de recherches qui montrent l'effet des entreprises dirigées par des femmes sur l'économie et à quel point elles sont performantes.
    Le système est tout simplement trop partial, ce qui fait en sorte que 51 % de la population reçoit 4 % du capital. Ce serait statistiquement impossible si les systèmes n'étaient pas profondément partiaux. Nous savons que la plupart des structures et des systèmes dans lesquels nous vivons ne sont pas conçus par nous ou pour nous. À cela s'ajoute la pandémie.
    C'est intéressant, car je me heurte à ces barrières systémiques depuis de nombreuses années. Je suis vraiment une passionnée du changement des systèmes, des comportements, et j'ai tenté de repenser... Si nous repartions à zéro, de quelle façon repenserions-nous le système? SheEO est ma réponse à cette question.
    Voici ce qui se produit dans notre communauté, et c'est plutôt incroyable. Le 16 mars, nous avons réuni 68 entreprises que nous avons financées ensemble pour faire très rapidement un tri et demander où elles en étaient par rapport à la situation actuelle, par exemple dans le rouge, le jaune ou le vert, ou à risque.
    L'une de ces entreprises avait perdu 95 % de ses revenus à midi le premier jour. Elle a un modèle de recrutement social très innovateur grâce auquel elle embauche des gens qui risquent de devenir sans-abri afin de leur faire faire la lessive pour des restaurants, et tous les restaurants ont fermé à Calgary. La propriétaire prenait part à l'appel. Elle était extrêmement mécontente et se demandait comment elle allait mettre à pied ces personnes qui risquaient déjà de se retrouver dans la rue. Comme elle avait de la difficulté... Je pleure facilement; tout va bien. C'est normal pour moi.
    Elle a parlé de sa situation et a dit: « Que puis-je faire? » L'une des entrepreneures de notre communauté lui a demandé de quoi elle avait besoin pour continuer d'employer ces personnes au cours du prochain mois, d'ici à ce que nous trouvions une solution, pour réorienter son entreprise. Après avoir pris connaissance du montant, elle lui a répondu qu'il serait dans son compte de banque d'ici la fin de l'appel.
    C'est le moment où on a commencé à relever la barre dans notre communauté. Plutôt que d'aider les gens à déterminer comment congédier des employés, comment obtenir des subventions du gouvernement ou comment faire faillite, notre communauté a décidé que nous n'allions pas perdre d'emplois et qu'aucune de nos entreprises n'allait fermer. Nous avons un groupe extraordinaire de personnes qui s'entraident, et nous avons tissé des liens très serrés au cours des cinq dernières années pour y parvenir.

  (1730)  

    Nous donnons un exemple de ce qui est possible lorsqu'on repense un système pour soutenir... Ce n'est pas juste une question d'argent —« voici le montant; vous pouvez partir » —; il y a aussi la gentillesse. Nous appelons cela une « générosité radicale », pour nous entraider.
    Les femmes sont déjà grandement sous-capitalisées, et nous avons été frappées très durement par la pandémie. Nous avons donc moins de marge de manœuvre, moins de soutien.
    Honnêtement, pour reprendre ce que quelqu'un d'autre a déjà dit aujourd'hui, s'il y a un obstacle considérable qui est vraiment facile à éliminer et qui changerait fondamentalement la donne, c'est le manque de services de garde. Nous avons actuellement une subvention salariale pour les entreprises qui ne peut pas servir à payer des services de garde. Nous avons dans notre communauté une agricultrice innovatrice qui peut couvrir 75 % de son salaire si elle emploie une nouvelle personne pour faire le travail, mais elle veut le faire elle-même. Elle ne veut pas embaucher quelqu'un; elle veut se servir d'une partie de la subvention pour payer des services de garde d'enfants.
    Le fait que nous en parlions encore me fâche beaucoup. La prestation de services de garde est carrément la mesure politique la plus simple que nous pourrions prendre qui aurait la plus grande incidence sur l'économie. Lorsque nous avons fait le système... Les femmes n'étaient pas à la table. Nous y sommes maintenant. Changeons-le. Même si c'est la seule mesure prise dans la foulée de la pandémie, ce serait énorme.
    L'autre chose importante que je veux dire, c'est que la COVID nous donne vraiment l'occasion de mettre à l'avant-plan ce que nous chérissons. Lorsque nous voyons tous les jours la partialité qui fait partie intégrante de nos systèmes et les conséquences que nous subissons lorsque nous accordons plus d'importance aux emplois et à la croissance qu'aux humains et au développement... Nous devons repenser à ce que nous chérissons et à ce qui est important pour nous, et construire une société qui fonctionne pour tout le monde.
    À l'issue de cette pandémie, j'espère vraiment que les deniers publics ne seront utilisés que dans l'intérêt de toute la population. Les investissements que nous faisons actuellement dans l'intelligence artificielle et dans notre obsession des solutions technologiques creusent l'écart. Ils augmentent les inégalités au pays, et nous ne semblons pas avoir de stratégies d'investissement pour corriger la situation.
    Nous avons une définition très étroite de l'innovation. Nous avons une définition très étroite du succès: il faut voir grand ou rentrer chez soi. Cependant, les PME représentent 98 % de notre économie. Seules 1 200 entreprises au pays ont plus de 500 employés, et la moitié d'entre elles ont leurs bureaux à l'étranger. Je me demande avec qui vous discutez régulièrement lorsque vous adoptez ce genre de politiques. Nous aimerions que vous discutiez davantage avec des petites entreprises, car c'est vraiment une énorme occasion pour nous tous de repenser ce que nous avons.
    Enfin, j'aimerais juste dire qu'à SheEO, nous accordons beaucoup d'importance à la diversité. Nous finançons des femmes cisgenres et transgenres, des femmes non binaires, des femmes au genre fluide, des personnes non conformistes de toutes les cultures. Nous entretenons des liens étroits avec la communauté autochtone. Tous les dimanches, nous faisons des appels avec 140 femmes entrepreneuses autochtones, pour qu'elles tissent des liens dans notre communauté, pour qu'elles puissent prospérer et entraîner toute la nouvelle génération avec elles. Nous construisons un nouveau modèle économique qui s'appuie sur la générosité radicale et l'inclusion, un modèle centré sur les priorités essentielles de notre époque dans l'intérêt de tout le monde.
    Nous sommes honorées de participer aux délibérations du Comité. Je suis impatiente d'entendre le reste de la discussion.
    Je tiens à prendre un moment pour tous vous remercier beaucoup. Je sais que votre travail au service de la population est extrêmement ingrat. Je vous suis reconnaissante de ce qui a probablement été de nombreuses nuits sans sommeil à essayer de démêler toutes ces questions pendant cette période sans précédent. Merci.

  (1735)  

    Merci beaucoup, madame Saunders.
    Je ne peux pas m'empêcher de dire qu'il nous a fallu beaucoup de temps pour en arriver là dans les services de garde d'enfants. J'étais dirigeant agricole dans les années 1980, et je me souviens de m'être battu contre le gouvernement fédéral en 1988 pour obtenir des services de garde ruraux, ce qui n'a rien à voir avec les services urbains. Nous n'y sommes pas tout à fait parvenus.
    Avant de donner la parole à la dernière témoin, je vais donner l'ordre des interventions pour la première série de questions. Nous allons commencer par Mme Vecchio, qui sera suivie de Mme Dzerowicz, de M. Brunelle-Duceppe et de Mme Mathyssen. C'est ainsi que nous allons commencer les questions.
    Passons maintenant à Mme Kamateros, de Bouclier d'Athéna - Services familiaux.
    Allez-y.

[Français]

    Bonjour, membres du Comité permanent des finances et autres invités.
    Je m'appelle Melpa Kamateros.
    Je vous remercie du très grand honneur que vous me faites de pouvoir vous présenter quelques réflexions sur les besoins des femmes victimes de violence conjugale pendant cette pandémie de la COVID-19.

  (1740)  

[Traduction]

    Si je peux me permettre de vous interrompre un moment, madame Kamateros.
    Les techniciens devront peut-être se pencher là-dessus, mais si vous regardez votre bouton dans Zoom, vous verrez le cercle pour la langue. À droite de « Participants », il y a un symbole pour la langue. Si vous cliquez dessus, il devrait indiquer « Anglais » ou « Français », et la langue que vous utilisez devrait être sélectionnée.
    Si vous parlez français, il devrait être à « français ». Essayez au bas de l'écran.
    Je vais passer du français à l'anglais, mais je pense que je vais m'en tenir à l'anglais pour l'exposé. C'est bien.
    Vous pouvez utiliser la langue de votre choix, pourvu que le canal « Français » soit sélectionné quand vous parlez français, et que le canal « Anglais »... C'est vraiment très problématique pour les interprètes. À défaut d'utiliser la même langue, nous entendons les interprètes au même volume que vous, et il est difficile de s'y retrouver.
    Peu importe votre préférence, allez-y.
    Bien. Pour que ce soit simple, je suis passée au canal « Anglais ».
    Bien.
    Je suis très heureuse de la présence de ma collègue de London, qui a parlé du problème de la violence conjugale et de l'incidence de la COVID sur les femmes.
    Le Bouclier d'Athéna a vu le jour en 1991. Nous avons un réseau de services qui comprend deux centres de jour et un refuge d'urgence, et nous planifions une ressource de deuxième étape. Nous avons, plus ou moins, un système intégré pour offrir des services à des femmes et à leurs enfants. Nous travaillons auprès d'une clientèle vulnérable et nous offrons actuellement des services, y compris de sensibilisation, dans 17 langues. Nous voyons beaucoup de personnes vulnérables, en particulier des femmes issues de communautés d'immigrants, notamment des femmes qui se heurtent à de graves barrières linguistiques.
    Le confinement et la quarantaine forcés pendant la pandémie peuvent aggraver le problème et augmenter les risques et les conséquences pour les femmes victimes de violence conjugale. Tout d'abord, elles ne peuvent pas avoir accès à un téléphone pour demander des services. Elles n'ont pas accès à l'information. Elles ne peuvent pas s'adresser à qui que ce soit pour les aider à établir un scénario de protection pour elles et leurs enfants. La pandémie limite les mesures qu'elles peuvent prendre et les isole encore davantage.
    Une clientèle doublement vulnérable comme celle auprès de laquelle nous travaillons — des femmes qui se heurtent à de graves barrières linguistiques, qui ne connaissent pas notre système, leurs droits et les lois; des femmes qui ont beaucoup d'enfants ou qui ont des enfants ayant des besoins particuliers, comme des enfants autistes; des femmes qui vivent dans des régions éloignées où il y a peu de services — est également mise en danger lorsque leur accès à l'information et aux ressources est encore plus limité.
    Pendant la pandémie de la COVID, un facteur clé pour nous — quelque chose d'une importance capitale — est le fait que les femmes qui ne parlent pas la langue ont de la difficulté à avoir accès aux services.
    La situation est aggravée par la difficulté que les femmes ont à obtenir une place dans les refuges au Québec. Je ne sais pas quelles sont les solutions utilisées dans d'autres provinces, mais au Québec, nous avons mis les femmes en quarantaine avant de les aiguiller vers le réseau de refuges. Cela signifie qu'elles doivent attendre 14 jours de plus avant d'être filtrées et d'entrer dans un refuge. Je dois dire qu'elles sont nombreuses à ne pas avoir fini leur quarantaine. Elles sont nombreuses à être retournées dans leur relation de violence.
    Un facteur vient compliquer la situation des femmes victimes de violence conjugale, qui sont doublement vulnérables en tant qu'immigrantes. Il s'agit de leur dépendance économique. De nombreuses femmes qui occupent un emploi se font prendre leur argent. De nombreuses femmes isolées n'ont jamais été autorisées à travailler, ce qui les rend totalement tributaires de leur agresseur. C'est un point qui a déjà été soulevé. Nous avons vu cette situation. C'est d'autant plus courant pendant la pandémie.
    Notre rôle en tant que travailleurs consiste à rendre ces femmes autonomes et indépendantes sur le plan financier. J'ai entendu les autres témoins parler d'essayer de créer des possibilités d'emplois, mais une grande partie des femmes avec qui nous travaillons ne peuvent même pas bien parler leur langue. Dans les meilleures des circonstances, il leur est très difficile de tenter d'avoir accès aux programmes d'employabilité et d'entrer dans le système. Dans le contexte d'une pandémie, vous pouvez imaginer ce qu'il en est.
    Elles sont nombreuses à toucher de l'aide sociale. La première chose que les travailleurs sociaux font lorsqu'elles arrivent aux refuges, c'est les inscrire au programme, mais jusqu'où peut-on aller avec 600 $?
    On peut mentionner les prestations pour enfants, mais dans une relation de violence et lorsque les femmes ne parlent pas la langue et ne comprennent pas les problèmes, il est possible que ces prestations ne leur soient pas accordées. Il est possible qu'elles doivent céder les prestations lorsqu'elles ont un compte conjoint. Lorsque le conjoint violent a la garde à temps plein, c'est lui qui obtient les prestations.
    Que pouvons-nous faire pour rectifier cette horrible dépendance financière des femmes victimes de violence conjugale, qui existe normalement à cause des raisons susmentionnées?
    Je crois qu'il devrait y avoir une allocation financière, une allocation conçue précisément pour les femmes victimes de violence conjugale.

  (1745)  

    Plus tôt, quelqu'un a parlé des problèmes auxquels font face les mères seules. Je peux vous dire que les enfants sont pauvres, mais si leur mère, qui est seule, est pauvre, ils le sont encore beaucoup plus. Nous devons soutenir les femmes. Lorsqu'elles sont victimes de violence conjugale, elles ont alors d'autant plus besoin de cette allocation.
    Je veux soulever un dernier point. Les problèmes sous-jacents qui étaient si graves avant pour les victimes de violence conjugale, comme le manque de logements sociaux, sont encore pires maintenant. C'est sans parler des ressources de deuxième étape. Il y en a très peu au Québec. Des milliers de femmes entrent et sortent du réseau de refuges, et il y a peut-être 19 secondes pour obtenir des ressources. N'en parlons même pas. Qu'en est-il des logements sociaux?
    Nous avons des clientes qui attendent jusqu'à quatre années pour obtenir un logement social. La pandémie a de graves répercussions sur les femmes. Nous estimons qu'il faut une allocation, une pension ou un fond expressément pour les femmes victimes de violence conjugale, tant pour les femmes seules que pour les mères seules ayant la garde de leurs enfants.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, et je remercie certainement toutes les témoins de leur exposé.
    Nous allons commencer par une série de questions de six minutes, par Mme Vecchio et ensuite Mme Dzerowicz.
    Madame Vecchio, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur Easter.
    J'aimerais commencer par la représentante de SheCO. Vous avez parlé de votre modèle d'entreprise. Je vis à Elgin—Middlesex—London et je parle avec beaucoup d'entrepreneurs de ma communauté. Ce que j'ai entre autres remarqué, c'est qu'ils n'ont pas droit à un grand nombre des mesures de soutien aux entreprises du gouvernement fédéral, y compris le Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes et la subvention salariale.
    Avez-vous fait le même constat? En discutant avec des organisations féminines, avez-vous constaté la même chose?
    Oui, et c'est SheEO.
    Merci. Je suis désolée.
    Je vous en prie: CEO, soit PDG en anglais, SheEO.
    Oui, c'est un véritable problème. Je comprends qu'il est très difficile de siéger là et d'établir les règles, d'essayer de les faire fonctionner pour tout le monde. Je comprends le défi, mais beaucoup de nos entreprises n'ont pas droit aux mesures. Il y avait un petit créneau. Les revenus devaient diminuer dans une certaine mesure pendant une certaine période de temps, et on pouvait alors profiter d'une partie du financement. Cela s'est révélé être un véritable problème pour beaucoup d'entre elles. Certaines entreprises en croissance qui pouvaient engager plus de monde n'ont pas pu obtenir le soutien offert.
    C'était un problème, mais le plus grand problème se rapporte vraiment à la réduction des loyers et aux problèmes connexes. Ce n'est pas attribuable à l'intention du gouvernement fédéral ni aux résultats qu'il souhaitait obtenir par l'entremise des provinces. C'est là que nous verrons un énorme effet d'entraînement. Nous verrons au moins 50 % de nos petites entreprises fermer leurs portes et être incapables de reprendre leurs activités pour cette raison.
    Malheureusement, je suis parfaitement d'accord avec vous. C'est une chose qui... Il est formidable de voir tout le monde au comité des finances aujourd'hui, mais j'entends notamment parler de la façon dont l'argent est attribué, de la façon de le remettre directement aux locataires. J'ai entendu beaucoup d'entrepreneurs. Merci beaucoup.
    Je vais passer à Mme Megan Walker. Je suis évidemment au courant de l'excellent travail que vous accomplissez. Je veux plus précisément me pencher sur la réponse à la COVID-19 et sur l'argent remis aux refuges.
    Madame Kamateros, vous pourriez également répondre.
    Madame Walker, je sais que lorsque le montant de 50 millions de dollars a été versé, votre organisme figurait parmi ceux qui n'en ont pas bénéficié pour les refuges, même si vous offrez des places en refuge. Pouvez-vous me donner une raison pour laquelle vous n'avez pas eu droit au soutien et nous expliquer un peu comment vous gérez la situation pendant la pandémie?

  (1750)  

    C'est une excellente question, et j'aimerais avoir une réponse pour vous. Nous essayons d'obtenir cette information depuis des mois.
    Nous ne sommes pas un refuge. Nous offrons du counselling et du soutien à long terme à des femmes et à des filles et nous défendons leurs droits.
    Cependant, pendant la COVID, il n'y avait pas de places en refuge. Nous entretenons une excellente relation avec notre service de police à London, et nous savions que si la police répondait à un appel au 911 et qu'une femme devait quitter son domicile sur-le-champ, l'agent avait besoin d'un endroit où la mener. À la ville de London, nous avons négocié avec divers établissements, afin que les femmes et leurs enfants puissent se rendre immédiatement à un endroit sécuritaire où elles peuvent rester et recevoir du counselling et du soutien jusqu'à ce qu'un autre endroit soit trouvé.
    Ce n'est pas financé par le gouvernement à défaut d'être considéré comme une place en refuge.
    En ce qui a trait aux agressions sexuelles, de toute évidence, nous offrons des services de soutien à beaucoup de femmes. Notre nom ne mentionne pas les agressions sexuelles. Je crois que le gouvernement ne comprend pas assez bien notre travail pour comprendre le lien entre les agressions sexuelles et la traite des personnes, par exemple, les cas d'agressions sexuelles d'enfants parmi les femmes qui viennent vers nous, et aussi le chevauchement entre tous les aspects de la violence des hommes contre les femmes, de la violence attribuable aux agresseurs à la maison qui agressent sexuellement nos clientes ou leurs enfants, ou des agressions sexuelles commises par un étranger ou lors d'un rendez-vous galant.
    Je ne sais pas pourquoi nous n'avons pas reçu d'argent. Nous avons d'abord pensé que c'était à cause de notre caractère un peu distinct. Nous sommes probablement l'un des seuls organismes qui offrent un tel degré de défense des droits. J'ai toutefois appris plus tard, grâce à l'étude menée par le bureau de M. Fragiskatos, qu'on avait déterminé qu'au moins 600 autres organismes n'avaient également pas reçu de fonds.
    Merci beaucoup de ces explications. J'ai parlé au responsable d'un centre d'aide aux victimes d'agression sexuelle de Vancouver où 500 autres centres du réseau n'avaient également pas reçu de fonds.
    Madame Kamateros, avez-vous été en mesure de recevoir des fonds du gouvernement fédéral pour les refuges, ou une autre forme de soutien à cette fin?
    Je dois dire — et ma collègue, Mme Walker, l'a dit — que c'est la confusion qui existe en ce moment au gouvernement. Nous avons un réseau de services qui englobe deux centres et un refuge. Notre refuge a reçu le financement d'urgence, mais pas nos centres. C'est, d'après moi, une vieille question qui est liée aux types de services qui peuvent être efficaces pour les victimes de violence.
    Nous traitons avec une clientèle différente au refuge. Les deux services sont absolument nécessaires, et ils ciblent des populations différentes. Par exemple, dans les refuges, ce sont essentiellement des femmes en situation de crise, et dans les centres, ce sont en majorité des femmes qui ont été aiguillées par les services sociaux. L'année dernière, 71 % des clientes de nos centres avaient été aiguillées directement vers nous. C'est précisément à cause des facteurs linguistiques. Nous offrons des interventions dans diverses langues. C'est donc le problème.
    Même si le refuge a obtenu l'argent, les gens devraient repenser les types de services qui sont bénéfiques pour les victimes et percevoir ces services comme étant intégrés.
    Mme Karen Vecchio: Un soutien complet...
    Mme Melpa Kamateros: Oui. Merci.
    Ce sera votre dernière question, madame Vecchio.
    Je vais concentrer mon attention sur la traite de personnes et revenir à Mme Walker à ce sujet.
    Plus particulièrement, nous savons que nous nous attendions à ce que l'argent commence à être versé. Quelles sont d'après vous les prochaines étapes nécessaires pour veiller à ce que nous puissions déployer les efforts pour que le gouvernement fédéral…? Je sais que tous les députés de la région de London écoutent. Je sais que cela nous touche tous, parce que nous reconnaissons l'excellent travail que vous faites. Comment pouvons-nous continuer à vous encourager dans vos efforts pour contrer la traite de personnes? Pour toutes les organisations à l'échelle du Canada, comment pouvons-nous transmettre au gouvernement le message selon lequel il faut que l'argent sorte maintenant?

  (1755)  

    Je sais gré à tous les députés de London qui ont collaboré à la recherche d'une solution. Nous sommes très reconnaissants, à London, parce que nous avons une collectivité très solidaire et généreuse qui nous a fourni à ce jour l'équivalent de trois mois pour le paiement des services offerts à cette population très marginalisée et vulnérable.
    En gros, je crois que des personnes en position de pouvoir ne comprennent pas cet enjeu, et ne comprennent pas que l'univers horrible de la traite de personnes à des fins sexuelles pourrait engouffrer la fille de n'importe qui, de n'importe lequel des participants à la réunion d'aujourd'hui, y compris les députés. Une fois que votre fille a disparu...
    Ils viennent en avion de partout au Canada, à London, pour nous demander de les aider à trouver leur fille. Pouvez-vous imaginer cela? Ils regardent des vidéos sur des sites de publicité pour savoir si leur fille est encore en vie. C'est la réalité. Ce que nous savons, c'est que ce problème ne se limite pas à une ville. Les femmes qui viennent au London Abused Women's Centre vont ultérieurement utiliser des services en Nouvelle-Écosse. Il y en a à Edmonton, à Montréal.
    Ce que nous devons faire, c'est veiller à ce que chaque femme dans cette situation ait accès à des services. Il n'y a pas de mauvaise porte. Cependant, en ce moment, le gouvernement ferme les portes. Nous ne pouvons même pas les aider à trouver la bonne porte.
    Nous allons devoir nous arrêter là. Nous avons nettement dépassé le temps alloué.
    C'est maintenant au tour de Mme Dzerowicz, qui sera suivie par M. Brunelle-Duceppe.
    C'est à vous, madame Dzerowicz.
    Merci infiniment.
    Je tiens à vous remercier du leadership dont chacune de vous fait preuve, ainsi que de votre travail incroyable. Je suis vraiment ravie de votre participation aujourd'hui.
    J'aurais trois questions différentes à poser, et je n'ai pas beaucoup de temps. Je vais commencer par une question sur la garde d'enfants que je vais adresser à Mme Scott, du Centre canadien de politiques alternatives.
    Comme tous les témoins, je crois, vous avez beaucoup parlé des répercussions de la COVID sur les femmes. Je crois que vous avez mentionné le fait que la grande majorité des personnes qui se trouvent en première ligne et qui occupent des emplois essentiels sont des femmes. Je crois que vous savez, madame Scott, qu'en 2005-2006, le gouvernement libéral de l'époque a signé diverses ententes bilatérales avec les provinces. Nous avons essayé de mettre en place un programme national de garde d'enfants, à l'époque. Malheureusement, le NPD n'a pas appuyé notre gouvernement minoritaire de l'époque, ce qui fait que nous avons été défaits et que nous avons abouti avec un gouvernement conservateur qui n'a pas donné suite au programme national de garde d'enfants.
    Voilà où nous en sommes aujourd'hui, et je peux vous assurer qu'il n'y a pas une seule députée, en ce moment, qui ne souhaite pas l'adoption immédiate d'un programme national de garde d'enfants.
    Quel modèle proposez-vous? L'une des grandes questions est le mécanisme de prestation, à savoir s'il faut que la prestation soit assurée par les provinces, étant donné que l'éducation et les services de garde relèvent de leurs compétences. Quel modèle proposeriez-vous?
    Les services de garde sont essentiels à toute reprise. C'est nécessaire. Sans eux, les femmes ne pourront pas reprendre leur place dans la population active. Le secteur de la garde d'enfants se mobilise dans diverses provinces et crée des plans, non seulement à l'échelle provinciale, mais à l'échelle fédérale aussi. En ce moment, si je comprends bien, ce qu'on demande au gouvernement fédéral, c'est de couvrir jusqu'à concurrence de 75 % des frais de fonctionnement des services de garde autorisés, avec comme condition que les provinces couvrent les 25 % restants.
    En ce moment, ce qui est préoccupant, c'est que l'argent est requis immédiatement pour stabiliser l'offre de services de garde. Un grand nombre de municipalités, d'organismes sans but lucratif et de centres du secteur privé ne reçoivent plus depuis quelques mois les frais normalement payés par les parents. Leur situation financière est précaire, et de nombreux centres ne seront pas en mesure de rouvrir, comme l'indiquent les statistiques. Ils ont besoin d'une infusion immédiate d'argent pour maintenir leurs entreprises à flot et pour se préparer à ce qui les attend, c'est-à-dire la modification de leur modèle de fonctionnement pour la distanciation physique qui sera requise pendant encore une année ou deux dans la prestation des services de soutien social et communautaire. Combien de centres de garde d'enfants qui n'ont pas accès à ces types de ressources vont le faire?
    Naturellement, le milieu des services de garde d'enfants s'attend à ce que le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership. Dans le passé, il a versé de l'argent pour les services de garde d'enfants, par exemple les fonds destinés à l'éducation de la petite enfance, au début des années 2000. Vous avez mentionné cela. Sous le gouvernement Chrétien, il y a eu des transferts destinés à cela.
    On se préoccupe de la façon de cibler cela, du point de vue de l'offre en particulier. Nous ne demandons pas plus d'argent pour les subventions aux parents. Ce qui est crucial, c'est d'avoir une offre stable. Les centres ont besoin de ces ressources pour prendre de l'expansion. Je crois qu'il est vraiment important de soumettre l'aide à des exigences liées aux ratios de dotation et à la qualité des soins.
    C'est le moment d'établir les assises d'une réponse pancanadienne — pour le modèle des services de garde pour tous qui nous sera nécessaire.

  (1800)  

    Merci beaucoup. Ce que j'entends, c'est qu'il faut un modèle de financement 75 %-25 %, puis les normes nationales.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Saunders.
    Bonjour, madame Saunders. Je suis vraiment heureuse de vous voir. Merci infiniment d'être là. Je vais aller directement à la question sur les loyers, parce que c'est inquiétant. Je crois que vous êtes au courant du modèle que nous avons adopté. Nous avons essayé de mettre en place nos programmes le plus rapidement possible, puis d'y apporter des ajustements au besoin.
    Est-ce parce que les propriétaires bailleurs ne sont tout simplement pas désireux d'offrir leur soutien, ou est-ce parce qu'il est trop difficile de faire une demande? Avez-vous une solution à suggérer?
    J'aurai une autre question, avant de poser ma dernière question.
    Je crois que c'est une combinaison des deux.
    Encore une fois, comme pour tout le reste, c'est qu'il ne se passe pas qu'une seule chose, par exemple si tous les propriétaires-bailleurs faisaient telle chose, ou qu'ils faisaient tous telle autre chose. Je crois que pour diverses raisons, de nombreux propriétaires-bailleurs n'en font pas la demande ou ne l'utilisent pas. Ils obtiennent déjà une prestation. Nous avons le même problème avec notre propre propriétaire-bailleur. Nous ne bénéficions d'aucune réduction, quelle qu'elle soit, même s'ils n'ont pas à payer leurs impôts en ce moment et qu'ils obtiennent une réduction de 25 %.
    Quelle est la solution?
    Encore une fois, l'aide aurait pu aller directement aux personnes. Je crois que cela aurait été plus facile, plutôt que d'avoir à faire une demande faisant intervenir le propriétaire-bailleur.
    Maintenant que nous amorçons l'étape de la reconstruction, vous avez mentionné que 51 % de la population obtient 4 % du financement par capital de risque. Qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire? Vous savez que nous avons déjà consacré 2 milliards de dollars à la Stratégie pour les femmes en entrepreneuriat. D'après vous, qu'est-ce que nous devons faire de plus pour continuer à aider les femmes entrepreneures à obtenir beaucoup plus que la part actuelle de 4 %?
    Je crois que le défi principal de cela est que nous avons une définition très étroite de l'innovation. Elle est très axée sur la technologie et sur l'idée de voir grand. Il existe des tonnes d'autres types d'innovations. Il y a toutes sortes d'innovations sociales que cet élément exclut.
    La BDC a des règles incroyables, avec la garantie personnalisée et les taux d'intérêt élevés, et la majorité de l'argent est allée… Je comprends que vous devez faire passer l'argent par des institutions qui sont en mesure de l'acheminer, et vous avez besoin de quelqu'un pour le faire, mais les règles d'engagement ne sont pas adéquates pour les femmes entrepreneures en général. C'est en partie à cause de nos définitions visant l'innovation, de ce que nous soutenons et de ce que nous appelons l'innovation au Canada.
    Cela nous aide…
    Je vais vous laisser poser une question rapide, madame Dzerowicz.
    Merci.
    Madame Labun, je vous remercie de votre exposé très passionné.
    Un supplément a été négocié entre le gouvernement fédéral et les provinces. Est-ce que cela a aidé de quelque façon que ce soit les travailleuses de votre foyer?
    Oui, et je vous remercie de cette question. La province du Manitoba vient d'annoncer aujourd'hui le déploiement de ce supplément financier. Je suis convaincue que cela aidera beaucoup le personnel qui offre les soins directs. Certains des paramètres comportent manifestement des critères d'exclusion — le calcul se fait selon le revenu —, mais il est à espérer… C'est assurément quelque chose que les membres de mon personnel souhaitent et attendent avec impatience.
    Merci à vous toutes.
    Nous avons maintenant M. Ste-Marie, qui sera suivi par Mme Mathyssen.
    C'est à vous, monsieur Ste-Marie.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Premièrement, mesdames, je tiens à vous remercier de vos présentations. Celles-ci font certainement partie des plus poignants et des plus touchants témoignages que nous avons entendus depuis le début de la COVID-19. Cela a aussi été très instructif.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Kamateros.
    Pour ce qui a trait à la violence conjugale pendant la COVID-19, pouvez-vous nous en dire davantage sur ce que vous observez sur le terrain? Entre autres, constatez-vous davantage de signalements, ou craignez-vous qu'il y ait plus d'actes de violence conjugale non déclarés?

[Traduction]

    Selon les statistiques canadiennes, seulement 30 % des cas de violence conjugale sont déclarés. La majorité des cas, 70 %, ne le sont jamais, et ce, pour de nombreuses raisons: la honte, le secret, le silence et la peur qui entourent toujours ce sujet même aujourd'hui au XXIe siècle.
    Avec les femmes qui ne peuvent pas parler la langue… Je reviens toujours à cela, parce que cette clientèle est considérée comme étant doublement vulnérable. Si je parle anglais et que vous parlez français et que quelqu'un d'autre parle le swahili, le kiroundi ou une autre langue, il n'y a alors pas d'égalité d'accès. Il n'y a pas de choix d'interventions.
    Ici au Canada, malheureusement, même si nous sommes au XXIe siècle, des femmes victimes de violences conjugales n'ont toujours pas cet accès égal, ce choix d'interventions que j'ai ou que quelqu'un d'autre aura, parce que nous parlons anglais ou français. C'est ce que j'ai constaté sur le terrain.
    Nous supposons également que l'accès est immédiat parce que nous avons des services formidables au Québec et au Canada — nous avons d'ailleurs très souvent présenté des exposés à l'étranger sur les services que nous avons ici. Ce n'est pas le cas. Il y a un large pan de la population qui n'est pas au courant et qui ne peut pas avoir accès aux services. Cette inégalité est réelle. C'est ce que j'ai vu sur le terrain.

  (1805)  

[Français]

    Je vous remercie.
    Vous avez parlé du manque de logements pour les femmes violentées, du manque de refuges et de centres d'hébergement. Vous avez aussi parlé de l'importance de l'entente sur le logement social. Au cours des dernières années, il y a eu des montants importants annoncés, mais malheureusement l'entente n'est toujours pas signée entre Ottawa et Québec. Nous espérons que cela se fera sous peu et qu'un peu d'argent sera débloqué.
    Vous avez dit qu'il manquait de logements avant la pandémie de la COVID-19 et que, depuis la crise actuelle, c'est encore pire. Quelles sont les conséquences des consignes liées à l'éloignement physique pendant la pandémie pour ce qui est de l'hébergement?
    Ma collègue Andréanne Larouche, députée de Shefford, avait suggéré que, comme les hôtels sont sous-utilisés actuellement, l'État pourrait jouer un rôle de facilitateur pour que des chambres d'hôtel servent d'hébergement d'urgence pour les femmes et leurs familles qui sont violentées. Qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, les problèmes sous-jacents qui existaient avant la COVID existent toujours. L'un de ces problèmes urgents est le logement social. Au Québec, ils ont établi ce que nous appelons des solutions de logement de rechange, ce qui comprend des chambres d'hôtel.
    Cependant, entre autres problèmes importants, c'est que quand vous avez les chambres, vous n'avez pas les services. Il y a aussi un autre problème important concernant le logement social: si vous donnez de l'argent pour qu'on augmente le logement social et les places en refuges — et le taux d'occupation était de 105 % l'année passée, dans nos refuges et autres formes de logement —, vous devez également donner de l'argent pour la prestation des services nécessaires. Un des problèmes importants, avec les hôtels qu'ils ont organisés à Québec, c'est l'absence de services. Par exemple, si une femme est aiguillée vers l'hôtel et s'y trouve en quarantaine, elle doit y demeurer pendant 14 jours. C'est trop long. Si personne n'est là pour parler avec elle, elle va partir. La moitié des personnes qui y sont allées sont parties, en fait. C'est problématique.
    Dans l'ensemble, je dirais que le financement est le problème — le financement du logement social et le financement des services.

[Français]

    Je vous remercie, c'est très instructif.
    Que peut faire le gouvernement fédéral pour vous soutenir et aider à réduire la violence conjugale? Vous avez parlé de fonds pour les services que vous venez de citer et pour obtenir davantage de logements. Vous avez aussi parlé d'une allocation qui irait directement aux victimes de violence conjugale. Cela aussi est très intéressant.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce que le gouvernement peut faire?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit dans mon exposé, le financement du logement social et des services est insuffisant. Cela arrive dans le contexte d'une pandémie, et nous devons nous démener pour faire bouger les choses. Ce qu'il nous faut vraiment aussi, cependant, ce sont des fonds supplémentaires pour les victimes elles-mêmes. Une personne qui subit de la violence conjugale vit une situation d'urgence. La situation nuit au bien-être, aux droits de la personne et aux droits civils d'une personne qui vit au Canada.
    Selon notre expérience, les femmes qui sont financièrement dépendantes et qui viennent se prévaloir de nos services alors qu'elles n'ont rien ont besoin de fonds pour pouvoir s'occuper d'elles-mêmes et de leurs enfants. Nous croyons fermement que le gouvernement fédéral devrait verser une forme d'allocation ou de contribution financière aux victimes, car elles en ont besoin. Elles ont besoin de cela.
    Compte tenu de l'expérience de la centaine de refuges au Québec ou des refuges qui se trouvent partout au Canada, je crois que tous diraient la même chose: s'il vous plaît, offrez un soutien financier à toutes les victimes de violence conjugale.

  (1810)  

    Merci.

[Français]

    Je vous remercie.
    Monsieur le président, j'aimerais vous informer que c'est encore moi qui vais parler comme représentant du Bloc québécois au deuxième tour.

[Traduction]

    Merci, monsieur Ste-Marie.
    C'est maintenant au tour de Mme Mathyssen, qui sera suivie de Mme Harder.
    C'est à vous, madame Mathyssen.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous toutes d'être avec nous aujourd'hui pour présenter vos témoignages. Il est très évident que cette pandémie a des répercussions sexospécifiques de longue durée, et votre secteur est essentiel, compte tenu de tout ce que vous faites pour aider les femmes.
    Madame Scott, selon les chiffres que vous nous avez montrés aujourd'hui, de nombreuses femmes occupent manifestement des emplois précaires faiblement rémunérés. Elles n'ont pas les mêmes avantages que les personnes qui occupent des postes mieux rémunérés. Elles n'ont pas les congés de maladie. Vous avez mentionné le congé de maladie rémunéré universel, et en tant que néo-démocrate, je suis vraiment ravie d'entendre cela.
    Comment recommanderiez-vous de mettre en place ce congé payé de manière à ce qu'il soit plus avantageux pour les femmes? Votre organisation a-t-elle parcouru la recherche qui a été réalisée et s'est-elle penchée sur la meilleure façon de mettre cela en place au Canada?
    Merci beaucoup de cette question.
    Non, toute la question des congés de maladie payés est évidemment passée au premier plan des considérations. Nous étudions actuellement différents modèles pour savoir comment vous pourriez mettre cela en œuvre. C'est certainement une question qui nous préoccupe. Mon collègue en Colombie-Britannique examine différents modèles, ainsi que ceux de l'Ontario. Nous n'avons pas de modèle particulier que nous proposerions maintenant. Cela demeure un grave problème.
    Le Canada, comparativement, accuse beaucoup de retard pour ce qui est des congés payés qui sont habituellement disponibles aux travailleurs canadiens. Le problème ici, bien entendu, c'est qu'un très grand nombre de travailleurs n'y ont pas accès non plus. Ils pourraient avoir accès au système d'assurance-emploi, mais de nombreux travailleurs ne sont pas admissibles à l'assurance-emploi. On estime que seulement 40 % des travailleurs y sont admissibles.
    Les congés payés ne sont pas largement répandus. Les lois et les règlements sur le travail et l'emploi à l'échelle provinciale n'offrent pas les congés nécessaires également, en particulier pour les travailleurs qui occupent un emploi précaire, les travailleurs marginalisés ou migrants, qui constituent un autre groupe essentiel de travailleurs qui sont grandement vulnérables à l'heure actuelle et affligés par la maladie.
    Oui, nous examinons différents modèles. Nous espérons que ce sera l'un des effets durables du modèle. Nous devons revoir tous nos systèmes de soutien à la sécurité au revenu. Cela a permis de mettre en évidence les lacunes et l'incapacité de notre filet de sécurité sociale pour protéger plus d'un tiers de notre main-d’œuvre qui travaille à temps partiel, dans des conditions précaires ou dans des emplois temporaires à contrat.
    C'est vraiment quelque chose à laquelle nous devons prêter attention à l'avenir, alors que nous commençons à suivre la polarisation entre les travailleurs: ceux d'entre nous qui peuvent rester à la maison et faire leur travail et profiter de ce privilège, par opposition aux nombreux travailleurs au Canada qui ne peuvent tout simplement pas le faire. La réforme de la législation du travail et de la sécurité du revenu doit faire partie de nos actions.
    Oui, absolument. Ce fossé entre ceux qui ont et ceux qui n'ont pas était certainement évident auparavant, mais il se creuse.
    Très rapidement, et qui le souhaite peut répondre à cette question. On a beaucoup parlé de la garde des enfants. Je trouve intéressant qu'il y ait eu un certain succès, si l'on considère qu'il y a eu 13 ans de gouvernements majoritaires libéraux qui ont choisi de ne pas fournir des services de garde d'enfants, et quatre autres années de gouvernement majoritaire tout récemment où des choix auraient pu être faits. Ce leadership fédéral est extrêmement nécessaire.
    Je pense que nous avons constaté un certain transfert de ce manque de leadership, qu'on essaie de faire porter par les provinces. Est-ce que Mme Scott ou quelqu'un d'autre aimerait discuter plus précisément de la création d'un réseau et d'un système pancanadien de garde d'enfants, afin que les provinces ne soient pas inégales? Ce réseau veillerait à ce que nous retenions les travailleurs hautement qualifiés qui ne sont pas rémunérés de façon décente afin de garantir que des fonds soient versés pour augmenter le nombre de places disponibles.

  (1815)  

    Je peux en parler brièvement puisque j'y ai déjà fait allusion. Je vais céder la parole à quelqu'un d'autre.
    De toute évidence, les services de garde d'enfants sont essentiels. Nous avons un modèle au Canada qui n'est certainement pas digne d'être imité. Il est largement axé sur les frais privés, les frais payés par les parents et autres. C'est extrêmement coûteux. Les recherches que nous menons chaque année, dans le cadre desquelles nous interrogeons plus de 10 000 garderies et autres, pour produire le rapport sur les frais de garde d'enfants, témoignent de ce niveau très élevé. Après le logement, c'est certainement l'une des dépenses les plus élevées pour les familles.
    Dans l'optique de stabiliser ces fonds, nous devons vraiment cibler l'argent. Le gouvernement fédéral a un rôle essentiel à jouer pour canaliser ces fonds vers les centres pour les stabiliser, afin qu'ils ne dépendent pas directement des frais payés par les parents. Nous devons vraiment nous pencher sur les services de garde d'enfants et comprendre qu'il s'agit d'un service public essentiel et commencer à le financer de cette manière.
    Quelqu'un d'autre veut répondre à cette question?
    Madame Mathyssen, voulez-vous intervenir à nouveau? Vous avez une question rapide.
    Absolument.
    Un grand nombre de femmes qui travaillent dans des organismes à qui j'ai parlé ont constamment du mal à comprendre le financement de projets. Je sais, madame Walker, que c'était un bon exemple des difficultés auxquelles votre organisme est confronté en raison de la fin du programme et des fonds connexes. De toute évidence, les services que vous offrez à la collectivité devaient continuer.
    J'ai souvent entendu dire que le financement des projets est insuffisant. Ce n'était pas suffisant avant et ce n'est certainement pas suffisant maintenant, alors que nous vivons dans ce monde de pandémie où vous êtes confrontés à des urgences, à des crises et à des situations auxquelles vous n'aviez jamais pensé. Vous ne pouvez pas allouer du financement de base que vous auriez pu avoir ou auriez dû avoir auparavant à certains des services dont vous avez besoin.
    Êtes-vous favorable à l'idée de convertir des subventions pour le Fonds de renforcement des capacités en une allocation de fonds de base plus importante? Comment cela pourrait-il aider votre organisation?
    Là encore, peut-être que d'autres personnes veulent aborder cette question, et pas seulement la représentante du London Abused Women's Centre.
    Madame Mathyssen, je vais dire quelque chose très rapidement, à savoir que si c'est la priorité du gouvernement [Difficultés techniques] sous toutes ses formes, alors le gouvernement devrait avoir la responsibilité de garantir un accès continu à du financement, parce que si vous mettez fin à un programme, c'est très coûteux lorsque vous voulez le relancer. Par ailleurs, cela laisse les femmes et les filles dans la misère, sans endroit où aller. Dans le cas de la traite des personnes, les victimes retournent à leur trafiquant. Dans les cas de violence contre un partenaire intime, les femmes retournent à leur agresseur.
    J'ai entendu le gouvernement libéral dire à maintes reprises que mettre fin à la violence contre les femmes et libérer les femmes de l'oppression est une priorité. On ne peut pas juste en parler. Il faut du financement.
    Nous allons maintenant passer à une série d'interventions de cinq minutes.
    Nous allons commencer avec Mme Harder, suivie de M. McLeod.
    On vous écoute, madame Harder.
    Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui.
    L'une des dernières questions que le Comité de la condition féminine a examinées il y a environ un an et sur laquelle il a produit un rapport était les refuges et le manque de financement et de politiques du gouvernement pour venir en aide aux femmes vulnérables qui font appel à ces centres.
    Par ailleurs, nous avons encore vu une réduction, au beau milieu de cette pandémie où, madame Walker, vous avez dit que votre centre ne reçoit pas de financement. Nous savons qu'il existe environ plus de 600 centres au pays qui ne reçoivent pas de financement. Cela semble aller à l'encontre du rapport et de ce qu'il réclamait au printemps dernier. Le moment est plutôt mal choisi pour réduire ce financement lorsque nous sommes au beau milieu d'une pandémie et que nous enregistrons une hausse marquée de la violence conjugale contre les femmes et les filles.
    Par ailleurs, le financement a également été réduit pour ce qui est de traquer les individus qui victimisent les femmes et les filles par l'entremise de la traite des personnes. Madame Walker, vous avez parlé brièvement de ce problème et de ses répercussions sur votre organisation, ainsi que du fait que le manque de financement a fait stagner ou a menacé de faire stagner une partie de l'excellent travail que vous faites à London, en Ontario.
    Madame Walker, pour commencer, je me demande si vous pourriez corriger cette fausse perception où l'on pense que la traite des personnes survient dans d'autres pays et peut-être aborder l'idée selon laquelle la traite des personnes se produit dans des pays développés, mais certainement pas au Canada. Nous savons que ce n'est pas le cas, mais je pense qu'il est très difficile pour bien des gens de comprendre à quoi ressemble la traite des personnes dans notre propre pays. CTV News a rendu public un rapport l'hiver dernier. Il faisait état que 93 % des victimes de la traite des personnes au pays sont en fait des citoyens canadiens.
    Je me demande si vous pouvez faire la lumière sur l'expérience d'une victime de la traite des personnes au Canada. Concrètement, comment cela fonctionne-t-il?

  (1820)  

    C'est très facile. En fait, depuis le début de la crise de la COVID, nous voyons beaucoup d'enfants à la maison parce qu'ils ne sont plus à l'école et que leurs parents travaillent à la maison, et ils sont souvent sur Internet.
    Nous avons en fait reçu six appels de parents qui, depuis le début de la crise de la COVID, ont vu leurs enfants, leurs filles mineures, être attirés en ligne par un homme qui prétend être un jeune garçon intéressé et qui leur demande de s'adonner à des actes sexuels et de retirer leurs vêtements. Il utilise ensuite les images contre la jeune fille, lui disant que si elle ne lui en donne pas plus, il appellera ses parents et leur racontera tout ou, souvent, il a vu d'autres membres de la famille dans les vidéos et attirera sa sœur plus jeune. Cela se produit tous les jours, toute la journée.
    London est une plaque tournante de la traite des personnes; je suis donc bien au courant de la situation. C'est en partie parce que nous avons un collège et une université et aussi parce que nous avons un accès facile à l'autoroute 401 et à un certain nombre de points d'entrée. Cela se produit partout au pays. Autrefois, les trafiquants faisaient le trafic d'armes ou de drogues, mais ils devaient toujours retourner acheter plus de drogues ou d'armes pour en faire le trafic. Aujourd'hui, ils peuvent attirer des femmes et des filles sans payer un centime pour elles, les trafiquer et gagner leur vie. Ils gagnent environ 300 000 $ par année par femme et par fille.
    Wow.
    Madame Walker, le fonds qui a été mis en place pour soutenir la lutte contre la traite des personnes en 2009 s'élevait à 57,22 millions de dollars, ce qui représente une somme importante. Ce financement pourrait certainement être plus élevé, mais à l'heure actuelle, il n'y a plus du tout de fonds en raison de la compression du gouvernement.
    Vous avez soulevé quelques façons dont les femmes et les filles peuvent être victimes de la traite des femmes. Par ailleurs, je crois savoir que les femmes et les filles peuvent également être victimes de la traite des personnes dans leurs écoles et dans les centres commerciaux. Vous avez mentionné les collèges, les universités, les sites Internet et les salons de massage. Tous ces lieux sont des lieux propices à la traite des femmes et des filles.
    Vous avez mentionné plus tôt dans votre témoignage qu'elles ne sont pas payées; c'est l'individu qui se livre à la traite de ces femmes qui est payé. Ces femmes et ces filles ne touchent malheureusement rien.
    Ce que je trouve intéressant, c'est que le gouvernement actuel accorde une subvention salariale à un grand nombre de ces organisations qui sont responsables de la traite de ces femmes et de ces filles, mais n'offre aucune aide aux femmes et aux filles.
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Eh bien, nous disons toujours que toutes les filles et les femmes sont des victimes potentielles de violence pour aucune autre raison que le sexe avec lequel elles sont nées. Les trafiquants cherchent des filles dans tout le pays pour les vendre et les violer. Plus la fille est jeune, plus la somme d'argent que le trafiquant reçoit est élevée, et si elle est mineure et vierge, il touche le gros lot.
    C'est la réalité du travail que nous faisons chaque jour. Lorsque les femmes et les filles qui ont été victimes de la traite des personnes viennent à notre bureau, c'est généralement parce qu'elles ont été aiguillées par des policiers. Elles ne veulent pas rester; elles veulent rentrer à la maison. Leur mère et leur père leur manquent. Elles ne veulent plus être utilisées de cette manière.
    C'est un problème très grave, et s'il n'y a aucun financement pour le résoudre, comme je l'ai dit plus tôt, ces filles retournent à leur trafiquant. La traite des personnes est un problème très complexe, et j'aimerais avoir des heures pour pouvoir l'expliquer.
    Les trafiquants savent qu'il est illégal de recruter d'autres filles, alors ils utilisent d'autres femmes dans ce qu'ils appellent leur « écurie » — comme des animaux, leur écurie de femmes — pour faire le recrutement. Souvent, vous lirez dans les journaux que ce sont des jeunes femmes qui sont arrêtées et accusées d'activités de recrutement, et c'est parce qu'on les appelle les « salopes du bas » et qu'elles font précisément ce travail.
    C'est une crise. Nous faisons face à une crise. Nous perdons des filles et des femmes. Nous travaillons dans des centres de détention des jeunes où les trafiquants envoient des filles pour en recruter d'autres à leur sortie. C'est un problème très grave.

  (1825)  

    Merci à vous deux.
    Monsieur McLeod.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'aujourd'hui. C'est certainement une discussion très intéressante.
    Je suis le député pour les Territoires du Nord-Ouest. Je représente une population autochtone importante; plus de la moitié de mes concitoyens sont autochtones. Lorsqu'on a commencé à entendre parler de la pandémie, nous étions très préoccupés. L'historique des épidémies et des pandémies montre que les Autochtones sont toujours les plus touchés. Bien souvent — presque tout le temps —, nous sommes laissés à nous-mêmes, avec très peu de soutien du gouvernement.
    Nous sommes très heureux de voir que le gouvernement fait des investissements. Ce sont des investissements très importants. C'est en fait historique. Plus de 500 refuges et centres d'aide aux victimes d'agressions sexuelles ont été financés. L'argent afflue vers le Nord. De nombreuses personnes sont au chômage, et nous avons vu des investissements très importants et nouveaux dans le Nord. Nous avons vu ces investissements dans tout le pays, d'ailleurs.
    En ce qui concerne le soutien aux collectivités autochtones, nous avons vu de l'argent pour les programmes des terres, ce qui nous a beaucoup aidés. Nos centres d'amitié ont reçu du soutien. Cette aide nous a vraiment aidés. C'est la première fois que nous voyons ce type de soutien. Cette aide permet de rassembler les collectivités. Par ailleurs, il y a plus de gens que jamais auparavant qui s'aventurent dans la nature sauvage et qui reviennent sur la terre. Cela fait très, très longtemps. Cette aide a permis à nos collectivités de faire des choses différentes. Elle a permis à nos collectivités de restreindre la vente d'alcool. Elle a permis à nos collectivités de renforcer la sécurité sur nos routes. Elle a permis d'arrêter un grand nombre de contrebandiers et de trafiquants de drogue. Bien sûr, nous sommes capables de faire cela parce que nous sommes assez isolés. Nous avons également pu mettre en place des camps de counselling sur les terres, où les personnes traumatisées, celles qui vivent des moments difficiles, peuvent aller parler aux aînés et à certains des gardiens du savoir. Cela fonctionne très bien pour nous.
    Je ne pense pas que ce soit la même chose dans le Sud. Les problèmes sont différents, selon qu'il s'agit de personnes vivant dans des centres urbains ou dans des régions rurales. Je sais qu'il y a des différences dans la manière dont les femmes autochtones font face à la pandémie par rapport aux femmes non autochtones.
    Selon SheEO, y a-t-il des renseignements qui mettent en évidence que les femmes autochtones et les femmes non autochtones sont touchées différemment par la pandémie?
    Tout à fait. Je pense que c'est en partie une question d'accès aux marchés et de relations avec les clients.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec Indigenous LIFT Collective et Teara Fraser. Elle est l'une des activistes de notre réseau. Nous avons commencé à faire des appels quelques mois avant la pandémie: comment créer les conditions pour que les femmes d'affaires autochtones puissent prospérer? Teara est une personne dont vous avez peut-être déjà entendu parler dans les journaux. C'est la première femme à avoir lancé une compagnie aérienne appartenant à des femmes autochtones en Colombie-Britannique. Imaginez de démarrer une compagnie aérienne juste avant cette crise. C'est un véritable cauchemar. Les femmes de nos collectivités au pays ont maintenu son entreprise en vie et ont collectivement financé ses vols pour que les ressources soient acheminées dans d'autres régions.
    Cette histoire a incité plus de femmes autochtones à se joindre à nos appels tous les dimanches pendant quelques heures. Aujourd'hui, nous avons jusqu'à 140 femmes qui participent à ces appels. Toutes sont des femmes d'affaires autochtones de partout au pays. Elles commencent maintenant à participer à ces appels réguliers que nous organisons une fois par semaine, où nous nous posons les questions suivantes: de quoi avez-vous besoin et comment pouvons-nous vous aider? Nous sommes littéralement à un pas de pouvoir vous fournir ce dont vous avez besoin, chaque fois que nous travaillons collectivement.
    Ce type d'établissement de relations profondes et de création de confiance entre les colons, les femmes blanches, les femmes de couleur et les femmes autochtones ne sont pas des tâches faciles. Il s'agit d'établir des relations. Nous avons généré une incidence et une croissance importantes dans ces entreprises autochtones, et nous espérons vraiment en élargir la portée. C'est ce que nous faisons dans d'autres pays où nous sommes également présents, et nous commençons maintenant à nous stimuler les uns les autres entre entrepreneures autochtones.
    Il y a tellement de pratiques commerciales dans la culture autochtone auxquelles nous devons prêter attention...

  (1830)  

    Je voulais seulement demander...
    Très brièvement, monsieur McLeod.
    Oui.
    Lorsque j'ai été élu en 2015, j'ai rencontré de nombreuses organisations de femmes, l'Association des femmes autochtones et bien d'autres dans ma circonscription, et il n'y avait pratiquement pas d'argent. Je sais qu'il y a eu de plus en plus d'investissements dans les budgets successifs. En 2019, il y avait un montant de 160 millions de dollars sur cinq ans pour les programmes destinés aux femmes, mais en même temps, avec cette pandémie de COVID-19, ce que j'entends de nos aînés et de certains membres de nos communautés, c'est qu'il semble régner une certaine anxiété. Il semble y avoir un certain stress.
    Par exemple, dans ma petite communauté, nous avons eu trois enterrements ces 10 derniers jours — sans rapport avec la COVID —, ce qui est inhabituel pour nous. Il y a quelque chose qui se passe. Je me demande quels facteurs liés à la COVID-19 pourraient contribuer à l'augmentation de certains problèmes sociaux, notamment la violence fondée sur le genre et la violence conjugale.
    Quelqu'un souhaite répondre à la question?
    Je vais répondre rapidement.
    Concernant la traite des personnes, par exemple, nous savons que 50 % des filles et des femmes victimes de la traite de personnes sont des Autochtones. Nous travaillons en étroite collaboration avec les nations autochtones des environs de London, car nous sommes très déterminés à favoriser la réconciliation et à apprendre des aînés des Premières Nations. Ces aînés témoignent continuellement du traumatisme des expériences vécues par les Autochtones, dont les effets sont omniprésents dans leur vie.
    Je pense que la colonisation a causé beaucoup de préjudices dans les collectivités partout au Canada. Il est très difficile d'entendre les membres de nos Premières Nations nous dire qu'ils n'ont pas d'eau potable et qu'ils n'ont toujours pas eu le financement nécessaire pour avoir accès à l'eau potable, ce droit très fondamental.
     Ce sont des problèmes très graves pour les collectivités autochtones du pays et il faut les régler.
    Merci à tous.
    Madame Dancho.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux incroyables témoins que nous avons au Comité des finances aujourd'hui. Vos exposés préliminaires étaient très percutants. Je vous remercie beaucoup.
     Mes questions s'adressent à Mme Nina Labun, la présidente-directrice générale du Donwood Manor Personal Care Home situé ici, dans le nord-est de Winnipeg.
    Madame Labun, je vous remercie beaucoup, vous et le personnel du centre Donwood pour les soins extraordinaires que vous avez prodigués aux résidents pendant cette pandémie et au cours des 50 dernières années. Comme nous le savons, l'établissement fête son 50e anniversaire cette année.
    Pouvez-vous dire au Comité quelle a été l'expérience de votre personnel? Quelles ont été les répercussions de la pandémie sur votre personnel? Nous savons, comme vous l'avez mentionné dans votre exposé, que votre personnel est majoritairement composé de femmes, infirmières et personnel de soutien. Quel a été l'impact sur elles?
     Le député précédent y a fait allusion, en fait. Il est difficile d'avoir un portrait précis, mais cela a entraîné un stress et une anxiété sous-jacents très considérables. Concrètement, cela se reflète dans les tentatives de concilier la garde d'enfants, l'augmentation du nombre de congés de maladie et les heures supplémentaires. Je pense vraiment que la pandémie a, encore une fois, mis en lumière ce que nous savons depuis très longtemps sur les soins de longue durée. Le système fonctionne grâce à la débrouillardise du personnel du réseau, et nous avons maintenant dépassé ce stade.

  (1835)  

    Merci.
    Selon vous, quelle a été l'incidence sur les résidents? À cet égard, y a-t-il une différence entre les femmes et les hommes?
    C'est certain. Dans notre établissement, les femmes représentent 85 % de la population résidente. Dans un site, l'âge moyen est de 91 ans; c'est donc une population de personnes âgées très vulnérables. Malheureusement, nous avons aussi constaté une augmentation des décès au cours des 12 dernières semaines. Ces décès ne sont pas liés à la COVID, mais la solitude a un effet sur la santé. La situation a été extrêmement difficile pour nos aînées, mais aussi pour leurs soignantes et les aidants naturels qui ne peuvent pas entrer dans l'établissement. Tous ces effets non mesurés sont vraiment difficiles.
    Oui, cela correspond aux témoignages qu'on entend, dans Kildonan-St. Paul, de la part de gens des établissements de soins de longue durée qui comptent parmi leurs résidents des personnes très âgées et même des proches. Leur solitude est palpable, et c'est très difficile.
    La prise en compte des recommandations de santé publique, comme la distanciation physique, l'EPI, les exigences sanitaires supplémentaires et, peut-être, le manque de personnel, a-t-elle eu des répercussions financières accrues sur le centre Donwood?
    Oui; l'impact est très important.
    Nous en sommes à la douzième semaine ici, au Manitoba. Nos coûts jusqu'à maintenant s'élèvent à quelque 120 000 $. J'ai une convention d'achat, un accord de service avec notre gouvernement, qui exige que nous ne déclarions pas de déficit à la fin de l'exercice financier. Dans ces circonstances, qui sont hors de notre contrôle, ce ne sera vraiment pas possible.
    Je suis convaincue qu'il faut examiner un financement concret pour combler ces lacunes. Je ne suis pas la seule. Tous les établissements viennent de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les personnes âgées dont ils ont la charge. C'est à cela qu'ils ont accordé la priorité, et non aux questions d'argent.
    Merci.
    Avez-vous eu du mal à obtenir de l'EPI pour votre personnel et vos résidents?
    Non, étonnamment, et c'est grâce à l'incroyable leadership de nos infirmières et de notre ingéniosité pour faire des choses simples. Les gens ne le savent peut-être pas, mais le désinfectant pour les mains ne fonctionne que dans certains distributeurs. Il faut donc faire preuve d'une grande créativité pour veiller à ce que notre personnel ait la protection dont il a besoin.
    Je suis très heureuse de l'entendre. Je sais que tous les établissements de soins personnels n'ont pas eu cette même expérience positive. C'est un soulagement.
    Nous savons que les foyers de soins personnels ont été touchés de manière disproportionnée pendant la pandémie de COVID-19; on y recense la moitié des décès au Canada.
    Selon vous, quel rôle le gouvernement pourrait-il jouer à l'égard des établissements de soins pour personnes âgées, à l'avenir?
    Je suis tout à fait convaincue que la qualité de la vie professionnelle a une incidence sur la qualité des soins offerts dans les centres de soins de longue durée. Même si ces soins ne sont pas actuellement financés par le fédéral, il pourrait être pertinent d'examiner un aspect clé, soit la réglementation relative à la prestation des soins dans les établissements de soins de longue durée, en particulier la réglementation applicable aux fournisseurs de soins non réglementés. Partout au pays, les travailleurs sociaux et les préposés aux bénéficiaires ont une formation très minimale, et ce sont pourtant eux qui assurent les soins dans nos établissements. Ils constituent la plus grande partie de notre effectif.
    Nous savons tous que [Note de la rédaction: difficultés techniques] soin des personnes âgées. On ne leur donne pas les compétences, la formation et les ressources nécessaires pour bien les préparer aux rôles que nous leur confions.
    Merci, madame Labun.
    Madame Labun, je crois que vous avez mentionné, au début, le nombre de personnes qui occupent deux emplois, principalement des femmes. Nous avons vu que c'est très fréquent dans les établissements au Québec et ailleurs au pays. Pourquoi?
    J'ai toujours supposé que les gens doivent avoir deux emplois parce que les entreprises ne veulent pas offrir d'avantages sociaux. Dans le contexte de votre présentation, quelle est la raison sous-jacente? Pourquoi les personnes qui travaillent dans ces établissements ne peuvent-elles pas travailler dans un seul établissement et avoir un salaire décent, avec des avantages sociaux? Actuellement, elles travaillent à deux endroits pour survivre, ce qui augmente le risque de transmission de maladies.
    Les questions de ressources humaines et de conventions collectives sont très complexes. Nous devons nous adapter aux types de postes que nous avons et que nous pouvons créer. La plupart des membres de mon personnel occupent plusieurs emplois — un 0,4 ETP, un 0,6 ETP et un 0,8 ETP, par exemple — et cumulent des emplois dans divers établissements.
    Il y a quelques semaines, le Manitoba a imposé la règle de l'employeur unique pour les soins de longue durée. En guise de compromis pour éviter que les femmes subissent une baisse de salaire les femmes peuvent désormais occuper un poste à 1,3 ETP dans un établissement. C'est une question de rémunération: le salaire est insuffisant pour subvenir aux besoins d'une famille.

  (1840)  

    Je vous remercie de la réponse.
    Nous passons maintenant à Mme Koutrakis. Vu l'heure, nous aurons ensuite environ quatre interventions de deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins d'aujourd'hui de leurs convaincants témoignages.
    Je suis une nouvelle députée. Il s'agit de mon premier mandat et c'est la première fois que je siège à un comité aussi important que le Comité des finances. Je dois dire que certains commentaires que j'ai entendus ici aujourd'hui m'ont laissée quelque peu perplexe, parce que je fais partie d'un gouvernement qui, je pense, a fourni un financement sans précédent. Je manquerais à mon devoir si je ne soulignais pas, aux fins du compte rendu, certaines mesures de financement que nous avons déjà offertes. Nous n'avons pas réduit le financement. Depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons créé plus de 7 000 places dans des refuges, alors que l'objectif initial était d'y parvenir d'ici 2027. Nous avons déjà atteint cet objectif.
    Un tiers des investissements de la Stratégie nationale sur le logement ont été consacrés aux femmes. Nous avons financé plus de 420 refuges et 90 centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle, et nous avons prévu 10 millions de dollars pour appuyer les organisations de femmes qui ne font pas partie de ces catégories. Nous avons fourni de nouveaux fonds en réponse à la COVID-19. Le 22 avril dernier, nous avons versé 6,46 millions de dollars au Québec seulement. De ce montant, 4,25 millions de dollars sont allés à 118 refuges et 790 000 $ sont allés à 49 centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle. Toutefois, comme il s'agit d'une compétence provinciale et que toutes les provinces sont très sensibles à cet aspect, le Québec a insisté pour que tout ce financement soit administré par la province. Dans le budget de 2019, nous avions prévu 160 millions de dollars sur cinq ans pour les programmes destinés aux femmes.
    Pouvons-nous faire plus? Pouvons-nous faire mieux? Sans aucun doute. Tous les gouvernements peuvent faire plus et faire mieux, mais je pense que ce gouvernement s'est montré à la hauteur, a fourni de l'aide, a entendu et a écouté. Nos programmes sont souples. Je suis désolée si je m'exprime avec tant de passion, mais je crois tellement en nos actions que je me devais de rétablir les faits.
    Ma question s'adresse à Mme Kamateros. Je vous remercie beaucoup de vos commentaires convaincants et du travail que vous faites, avec votre équipe, à Bouclier d'Athéna. Je connais votre organisme depuis de nombreuses années et je vous félicite de tout votre excellent travail. Je félicite aussi tous ceux qui sont ici de leur travail acharné et excellent.
     Vous avez évoqué à plusieurs reprises un financement précis pour une allocation. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Quel serait un montant adéquat ou un calendrier de versements? Votre organisme — ou un organisme que vous connaissez — a-t-il réalisé une étude qui pourrait nous donner un ordre de grandeur correct?
    Mes commentaires sont fondés sur notre expérience lorsque nous avons accueilli des femmes au refuge ou dans les centres. Beaucoup de femmes ont un emploi. Toutefois, pour celles qui n'ont pas d'emploi et qui sont habituellement dépendantes financièrement, nous commençons par les inscrire à l'aide sociale. L'aide sociale est de 600 $, mais pour une femme qui doit payer un loyer de 500 $ par mois en raison du manque de logements sociaux abordables, c'est un problème, et il est plus grave encore si elle a des enfants.
    Je dirais que toute étude éventuelle devrait porter sur une échelle mobile des besoins, parce que nous ne voulons pas non plus qu'on profite du système. Ce n'est pas ce que nous préconisons. Il faut favoriser l'autonomie des femmes. C'est également un aspect fondamental de la perspective féministe: comment une femme peut-elle devenir autonome et éviter de se retrouver de nouveau dans une situation de violence? Je suis certaine qu'une étude pourrait être faite, mais 600 $ d'aide sociale, c'est insuffisant.
    De l'autre côté du spectre, que devons-nous faire lorsque des femmes viennent nous voir pour obtenir plus d'argent? Devons-nous les conseiller des façons d'obtenir de l'argent comptant et de ne pas déclarer l'argent qu'elles reçoivent? Il faut un jour parvenir à briser le cycle de la pauvreté qui touche beaucoup de femmes qui sont aussi victimes de violence conjugale. Encore une fois, la violence conjugale n'est pas un problème propre aux femmes pauvres; c'est simplement qu'elles sont beaucoup plus touchées.
    Que pouvons-nous faire? Nous avons reçu de l'aide pour les refuges, et nous en remercions le gouvernement, car tous les refuges du Québec ont reçu quelque 50 000 $ pour la situation liée à la pandémie dans le cadre de ce programme de financement. Regardons toutefois ce que nous pouvons faire pour la femme, pour la victime elle-même. Pouvons-nous lui offrir une aide financière quelconque pour l'appuyer dans sa démarche vers l'autonomie? C'est tellement important. Et c'est particulièrement important pour les femmes qui n'ont pas le choix, comme j'essayais de le dire plus tôt.
    Non, je n'ai pas d'avis sur ce que cela pourrait être, mais je suis certaine que si nous créions un comité, nous pourrions trouver une solution sensée. Toutefois, il est urgent d'offrir aux femmes victimes de violence conjugale une telle allocation ou prestation. Je ne sais pas trop comment appeler cela.

  (1845)  

    Merci à toutes les deux. Madame Koutrakis, je suis désolé; nous devons arrêter ici. Nous avons beaucoup dépassé le temps imparti.
    Nous aurons cinq interventions de deux minutes.
    J'ai M. Ste-Marie, Mme Mathyssen, Mme Sahota, M. Fragiskatos et Mme May.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais commencer par réagir à ce qu'a dit ma collègue, Mme Koutrakis. À mon point de vue, le problème, c'est que le fédéral s'est énormément désengagé de son rôle en matière de santé et de services sociaux, essentiellement au milieu des années 1990, pour régler le déficit. Il ne s'est plus occupé du logement social. Il ne s'est plus occupé du financement de la santé et des services sociaux et, depuis ce temps, il y a un problème. Le gouvernement libéral a fait des annonces de réinvestissement, mais ce n'est rien en comparaison des suppressions qu'il a faites quelques décennies plus tôt.
    Il y a un excellent livre à ce sujet, qui s'intitule Combating poverty. Ce livre montre que, après cela, le niveau de pauvreté a explosé, particulièrement chez les femmes seules, et encore plus chez celles qui sont chefs de famille. En revanche, le Québec a fait exception. Avec les moyens du bord, le gouvernement a notamment mis en place une politique familiale, qui est très efficace, puisqu'elle permet aux femmes de rester actives sur le marché du travail. Ma question, en lien avec cela, s'adresse à Mme Scott.
    Madame Scott, dans votre présentation, il y avait plein d'éléments très intéressants, mais, à cet égard, vous avez montré que, en raison de la présente pandémie de la COVID-19, il y a un nombre important de femmes qui risquent de quitter définitivement le marché du travail. Nous connaissons la solution à long terme, et c'est le modèle québécois, la politique familiale globale. À court terme, qu'est-ce qui peut être fait?
    Je vous pose tout de suite une deuxième question. Selon vous, le fait que le fédéral ait injecté 500 millions de dollars dans les systèmes de santé est-il suffisant ou est-ce que le fédéral devrait en faire davantage?

[Traduction]

    Madame Scott.
    Oui, le modèle du Québec sort du lot. Sa politique familiale, mise en oeuvre il y a 20 ans, a permis de mobiliser les femmes et de favoriser leur participation au marché du travail. D'importantes recherches démontrent une baisse du taux de pauvreté, par exemple.
    La clé réside dans les garderies à 7 $ par jour, en grande partie. Le modèle a quelque peu changé depuis et on a instauré un nouveau système de crédits, mais le Québec est vraiment dans une classe à part au Canada, puisqu'il a mis sur pied une politique exhaustive sur les services de garde, qui a favorisé l'emploi. Les statistiques récentes le montrent. Le Québec a fait un très bon travail à cet égard au cours des 10 dernières années.
    Je crois qu'il faut injecter plus de ressources à cette fin dans le cadre du plan de rétablissement: les services de garde et la sécurité du revenu pour aider les familles. Nous nous préoccupons des femmes et de leur capacité de revenir au travail. Sans une solide initiative de santé publique associée notamment à des tests de dépistage, les travailleurs ne seront pas à l'aise de retourner au travail. Je crois qu'il s'agit d'un élément important.
    Il faut aussi se demander si les emplois seront toujours là pour les femmes. Enfin, il faut songer à l'économie des soins et à l'infrastructure en place pour faciliter la participation des femmes.
    C'est l'occasion de prendre de l'avance au Canada.

  (1850)  

    Merci à vous deux. Nous allons devoir resserrer les interventions pour que tous aient la chance de s'exprimer.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole.
    J'aimerais revenir à Mme Scott. Elle n'a pas pu répondre à la question sur les femmes et les organisations de femmes, et les obstacles systémiques auxquels elles doivent faire face, de même que sur la transition des subventions pour le renforcement de la capacité vers un financement plus stable et plus fiable du gouvernement fédéral.
    Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
    Je réitère le commentaire précédent au sujet des fonds supplémentaires qui ont été octroyés aux organismes qui aident les femmes et au mouvement pour les femmes au cours des dernières années. Il s'agit d'un financement pour les projets à court terme.
    En ce qui a trait au renforcement de la capacité, le financement de base représente un élément essentiel. C'est vrai pour le secteur sans but lucratif de façon générale. Nous sommes en situation de crise; le financement est instable dans ce secteur d'une grande importance et ce n'est pas viable. Le financement de base peut faire changer les choses. La transformation des subventions pour le renforcement des capacités, à titre de proposition, est un pas dans la bonne direction.
    Madame Mathyssen, vous avez le temps pour une courte question.
    Madame Labun, nous avons évoqué l'idée d'établir des normes nationales sur les soins de longue durée, associées à la Loi canadienne sur la santé. Sur le plan de l'égalité des soins et de l'équité, ces normes permettraient de garantir un accès de grande qualité aux aînés qui bénéficient des soins de longue durée, de rassurer les familles et d'aider les travailleurs.
    Selon vous, de quelle façon ces normes pourraient-elles être intégrées aux réformes prévues? Est-ce qu'elles permettraient de répondre à vos besoins?
    Je vous remercie pour vos commentaires et vos observations. Je crois qu'elles sont essentielles. À la base, l'investissement de capitaux est tout aussi essentiel. Je vous ai donné quelques exemples dans mon exposé, et je pourrais vous en donner bien d'autres. Encore une fois, je crois que les femmes sont très débrouillardes et arrivent à offrir des soins dans un milieu qui a été grandement négligé.
    Je vous remercie pour vos commentaires.
    Pour ceux d'entre vous qui ont présenté des déclarations écrites, nous allons les transmettre aux membres du Comité lorsqu'elles auront été traduites.
    Allez-y, madame Sahota.
    J'aimerais d'abord remercier tous les témoins. Je vous remercie pour votre temps, votre point de vue, votre passion et votre dévouement. J'ai beaucoup aimé entendre vos témoignages et vos déclarations préliminaires.
    Nous savons que la COVID-19 a affecté tout le monde de manière importante. Les électeurs de ma circonscription m'en parlent. Le parti de l'opposition — le Parti conservateur — a réussi à obtenir certaines concessions relatives à certains programmes, et à faire reculer le gouvernement en ce qui a trait à certaines politiques ratées, à la PCU et à la SSUC. Or, le gouvernement ignore le fait que certaines ressources ne sont pas financées, comme les garderies. Le gouvernement choisit de ne pas modifier ses programmes ou ses politiques pour donner plus d'argent aux travailleurs de première ligne. Que pensez-vous de cela?
    Madame Walker, voulez-vous répondre en premier?
    Ce qui est très important, entre autres, c'est de veiller à ce que tous les enjeux soient abordés de façon non partisane. Récemment, nous avons travaillé avec les conservateurs, les libéraux, le Parti vert, le Bloc et le NPD sur cet enjeu. Nous obtenons toujours les meilleurs résultats en travaillant ensemble. À mon avis, ce n'est pas qu'on refuse de faire la bonne chose, mais plutôt qu'on ne sait pas quelle est la bonne chose à faire. Plus il y aura de participants à une discussion, plus nous serons susceptibles de trouver une solution dans le meilleur intérêt des femmes et des filles, dans notre cas.

  (1855)  

    Madame Kamateros, avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?
    La violence contre les femmes touche tout le monde, pas seulement les femmes. C'est une question de société et je crois que nous devons travailler ensemble pour veiller à y mettre un terme, à améliorer la situation et à réduire les risques de violence contre les femmes.
    Comment pouvons-nous y arriver? Je ne le sais pas, parce qu'après 30 années à travailler dans le domaine, j'ai vu plusieurs gouvernements passer. J'ai vu un intérêt pour la lutte contre la violence faite aux femmes, mais je crois qu'il faudrait une stratégie plus cohérente en la matière.
    Est-ce qu'il faut aussi une loi fédérale? Je ne le sais pas. Est-ce que cela aiderait les choses? Je ne le sais pas. Est-ce que le financement serait accru en conséquence? Je ne le sais pas, mais il serait peut-être bon d'étudier la question.
    Merci, nous devons mettre fin à cette série de questions. Nous allons entendre M. Fragiskatos, puis Mme May pourra conclure.
    Allez-y, monsieur Fragiskatos.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Walker, nous vous remercions pour votre travail. J'espère que nous arriverons à trouver des solutions aux nombreux enjeux que vous avez soulevés aujourd'hui et que nous pourrons aider votre organisation.
    Madame Scott, vous avez soulevé un point, tout comme Armine Yalnizyan, dont vous avez parlé dans votre témoignage: les femmes sont nombreuses à travailler dans le secteur des services, qui a été touché de façon particulièrement négative pendant cette crise économique. Avez-vous des conseils sur la façon dont le gouvernement fédéral devrait aborder la question de l'aide pour le secteur des services, alors que nous songeons à une relance économique?
    Je crois que c'est très important. À titre de réponse courte, je vous dirais que les anciennes mesures de stimulation ne sont plus efficaces, ou du moins ne sont pas suffisantes. Je sais qu'on dit qu'il faut chercher ailleurs. Je crois que nous avons l'occasion de changer de cap et d'examiner l'infrastructure sociale du Canada, étant donné l'ampleur des pertes d'emplois et leur persistance dans le secteur des services.
    Nous avons parlé de la garde d'enfants et des soins de longue durée. Je crois qu'il nous appartient de voir la situation comme une occasion d'injecter des fonds dans ces secteurs, non seulement pour appuyer la main-d'œuvre, mais aussi pour améliorer la qualité des emplois, augmenter les salaires, créer des possibilités et améliorer la qualité des emplois occupés par des femmes. Puisqu'une majorité de femmes — plus de 50 % — continuent d'être représentées, je crois que ce sera essentiel pour l'avenir. De façon tout aussi importante que les emplois pour les infrastructures physiques, il est temps de tenir compte des services universels offerts au sein des infrastructures sociales à titre de thème important de cette relance, et de passer à une économie décarbonée.
    Merci à vous deux.
    Madame May, vous pouvez poser la dernière question.
    Je vais continuer avec vous, madame Scott. J'aime beaucoup le travail du CCPA.
    Je dois aussi dire que nous avons un groupe de témoins extraordinaire. J'aurais aimé avoir plus de temps, mais le président vous dira que ce n'est pas possible. Vos exposés étaient tous très intéressants.
    C'est très bon de vous revoir, madame Walker. Cela faisait longtemps.
    Ma question est la suivante: étant donné votre expérience à titre d'économiste principale au CCPA, pourriez-vous répondre à la question que le président a posée à notre merveilleuse témoin, Mme Labun, de Winnipeg?
    Pourquoi les femmes qui occupent un emploi précaire — et ces emplois sont principalement occupés par des femmes, alors je crois que cela relève de votre domaine — travaillent-elles dans plusieurs maisons de santé? Quels instruments de politique devrions-nous mettre en place pour veiller à ce que cela ne se reproduise plus après la pandémie?
    C'est ce qui se passe pour les soins de longue durée. Ne me lancez pas sur ce sujet... le système est déficient, à la base. Ce qui s'est passé dans le secteur des soins est une tragédie pour tout le pays, et c'est une honte parce que nous l'avons négligé.
    Bien sûr, l'intervention et l'organisation des soins de longue durée relèvent des provinces et des territoires. L'appel à l'intégration des soins de longue durée à la Loi canadienne sur la santé est très important. Nous avons désespérément besoin d'établir des normes nationales pour assurer la qualité des soins offerts.
    Il est essentiel de réévaluer tous les facteurs, que ce soient les rations en matière de dotation ou l'interdiction d'avoir recours à la sous-traitance et l'imposition de stratégies de gestion du secteur privé qui placent le profit avant les gens. Nous devons absolument examiner les conditions de travail et comprendre pourquoi le personnel est si mal payé, et doit cumuler les revenus pour réussir à avoir un salaire viable. Nous devons songer à la façon dont cela est intégré à notre système d'immigration, alors que nous faisons venir au pays des femmes de couleur pour faire ce travail mal rémunéré et les exploiter ici.
    Je crois qu'il faut faire preuve de leadership. La Colombie-Britannique est un exemple à suivre. Il faut que les provinces rehaussent leurs normes en matière de travail.
    Ce n'est pas sorcier: nous ne pouvons pas laisser les sociétés privées continuer de proliférer et d'acheter ces biens immobiliers pour ensuite profiter des personnes les plus vulnérables.
    Je ne le répéterai jamais assez souvent: nous avons l'occasion de nous tenir debout en tant que pays et de réparer ce système, pour le bien de tous. Il faut en faire une priorité nationale.

  (1900)  

    Merci.
    Madame Scott, vous nous avez donné une réponse passionnée au sujet des soins de longue durée. Dans les faits, près de 80 % des décès attribuables à la COVID-19 ont eu lieu dans les établissements de soins de longue durée. Il y a certainement un message à faire passer à tous les élus du pays, tant à l'échelon provincial qu'à l'échelon fédéral, à cet égard.
    Si vous avez déjà écrit à ce sujet ou que vous souhaitez nous transmettre des documents, n'hésitez pas à les faire parvenir au Comité; nous les distribuerons à ses membres.
    Avec plaisir, oui.
    Nous avons légèrement dépassé le temps prévu pour la réunion.
    Je tiens à remercier tous les témoins pour cette discussion très émouvante et pour les points fort intéressants que vous avez soulevés. Je vous remercie tout un chacun pour vos exposés, qui seront pris en compte par les divers ordres du gouvernement fédéral et par les membres du Comité, sans aucun doute.
    J'allais parler aux députés de notre comité de direction, mais certains des membres ne sont pas en ligne. Nous allons donc le faire à la prochaine réunion, parce que nous devons décider de ce qui s'en vient pour les prochaines semaines.
    Sur ce, je remercie les témoins de leur temps et les membres du Comité pour cette discussion animée.
    La séance est levée.
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