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FAAE Rapport du Comité

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PREMIER VOLET D’UNE ÉTUDE SUR LES CONTRECOUPS DE LA PANDÉMIE DE LA COVID-19 — LE FARDEAU HUMANITAIRE : SOUTENIR UNE RÉPONSE MONDIALE POUR ATTEINDRE LES PLUS VULNÉRABLES

Introduction

À ce jour, plus de 112 millions de personnes à travers le monde ont été infectées par le virus de la COVID‑19 et près de 2,5 millions d’entre elles en seraient mortes[1]. Qualifiée de pandémie le 11 mars 2020 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS)[2], la COVID‑19 n’a épargné qu’une poignée de pays, notamment quelques États insulaires. Même si la pandémie a des effets dévastateurs dans tous les pays, les conséquences sont amplifiées dans les situations de conflit, de crise humanitaire et dans les États fragiles. C’est dans ce contexte que le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes (le Comité) a entamé une étude sur les vulnérabilités qui ont été créées et exacerbées par la pandémie de COVID‑19, particulièrement dans les situations de conflit, de crises et de fragilité. Cette étude – divisée en quatre segments – a pour but d’examiner les interventions du gouvernement canadien et de la communauté internationale dans ces contextes et d’envisager des mesures préventives pour le futur.

Le présent rapport intérimaire reflète les témoignages entendus et les documents reçus lors du premier volet de l’étude qui avait pour but d’examiner les interventions en réponse aux besoins humanitaires créés et exacerbés par la pandémie. Il présente d’abord la perspective des témoins concernant le fardeau humanitaire mondial exacerbé par la pandémie en analysant les effets directs et indirects de la pandémie en situation de conflit, de crises et de fragilité. Par la suite, le rapport présente les recommandations que le gouvernement du Canada pourrait prendre pour éviter que la crise humanitaire ne s’enracine davantage en 2021 et assurer un accès équitable et abordable aux vaccins contre la COVID‑19, y compris en situation humanitaire.

Le Comité prévoit poursuivre son étude sur les vulnérabilités créées et exacerbées par la pandémie au cours des prochains mois en examinant trois autres aspects dont :

  • les conséquences de la pandémie sur les enfants vivant en situation de conflit, de crises et/ou de déplacement;
  • les répercussions de la pandémie sur le respect des droits internationaux de la personne dans les situations de conflit, de crises et de fragilité;
  • le financement du développement et l’allègement de la dette dans le contexte de la pandémie.

Le fardeau humanitaire de la COVID-19

Les témoignages ont souligné que les vulnérabilités et la crise humanitaire déjà présentes avant le début de la pandémie se sont aggravées dans de nombreux pays et que les effets indirects de la pandémie – les contrecoups – auront probablement des conséquences plus importantes et à plus long terme que la pandémie elle-même. Les témoins ont indiqué que les défis planétaires, dont les conflits, les migrations, les événements météorologiques extrêmes et les changements climatiques, se superposent à la pandémie et qu’ensemble ils ont des conséquences dévastatrices pour les plus vulnérables.

Ainsi, David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial des Nations Unies, a dépeint un portrait sombre du fardeau humanitaire présent avant le début de la pandémie. À la fin de 2019, il prévenait déjà les dirigeants du monde entier qu’en 2020 le monde connaîtrait la pire crise humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale[3]. L’honorable Bob Rae, ambassadeur et représentant permanent du Canada auprès des Nations Unies à New York, a expliqué que cette crise a depuis été amplifiée par la pandémie. Il a souligné que la crise sanitaire provoquée par la pandémie a exacerbé la situation d’urgence humanitaire; dans certains pays, cette situation menace même de déclencher une crise économique et sociale[4].

Le Comité est inquiet de l’ampleur des vulnérabilités créées et exacerbées par la pandémie de COVID‑19, notamment pour les « deux milliards de personnes qui vivent dans des situations précaires et de conflit partout dans le monde[5] ». Peggy Hicks, directrice des activités thématiques, des procédures spéciales et du droit au développement, Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a expliqué que ces deux milliards de personnes n’ont souvent pas accès aux conditions de base requises pour empêcher la propagation de la COVID‑19, telles que l’accès à un logement permettant la distanciation physique et à de l’eau et du savon pour se laver les mains[6]. Elle a aussi souligné que certains groupes minoritaires ont pu avoir de la difficulté à accéder à des services ou à des renseignements concernant la pandémie, particulièrement lorsque ces personnes n’ont pas accès à Internet[7]. En effet, Mme Hicks a précisé que près de la moitié de la population mondiale n’a pas accès à Internet; le fossé numérique est plus profond en zone de conflit, de crises et de fragilité, particulièrement pour les femmes, les personnes âgées et les personnes vivant avec un handicap[8].

Effets directs : surmortalités liées à la COVID-19 en situation humanitaire

Au moment où le Comité a entendu les témoignages, la première vague de COVID‑19 ne semblait pas avoir touché aussi durement que prévu les pays en conflit, en crises ou en situation de fragilité; toutefois, la situation pourrait toujours changer, notamment avec l’apparition de nouveaux variants du virus. Thomas Bollyky, agrégé supérieur pour la santé mondiale, l’économie et le développement au Council on Foreign Relations, a expliqué au Comité qu’il est préférable d’utiliser les décès rapportés, une mesure plus fiable que le nombre de cas rapportés, pour comparer l’ampleur des infections de COVID‑19 entre les pays. La comparaison doit aussi tenir compte des différences dans la taille et la structure d'âge de la population ainsi que du moment où la pandémie est arrivée[9]. Selon François Audet, professeur, Université du Québec à Montréal et directeur de l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaire, « hormis pour les exceptions importantes […] que sont le Pérou, le Brésil, le Mexique et l’Équateur », la surmortalité dans plusieurs régions d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie du Sud-Est est plus faible que celle observée dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques[10]. M. Audet a ajouté que plusieurs facteurs pourraient expliquer la différence entre la façon dont la COVID‑19 a touché les différents pays dont :

  • un climat plus clément dans certaines régions du monde;
  • une certaine immunité naturelle ou acquise à la COVID‑19 pour des populations qui auraient été exposées à d’autres épidémies, reçues des traitements pour d’autres maladies, ou encore été vaccinées massivement;
  • la moyenne d’âge de la population qui serait plus basse dans certains pays;
  • le pourcentage de la population vivant en région rurale qui serait plus élevé notamment en Afrique[11].

Malgré le faible nombre de cas et de décès imputables à la COVID‑19 rapportés dans les pays en conflit ou fragiles, la pandémie y a quand même des conséquences non négligeables. Le Dr Anas Al‑Kassem, physicien, Union of Medical Care and Relief Organizations‑Canada (UOSSM Canada) a expliqué au Comité que dans le nord de la Syrie – où habitent 4 millions de personnes, dont 2,7 millions de réfugiés – la pandémie est devenue la priorité de plusieurs organisations humanitaires. Celles-ci veulent réduire au minimum les cas d’admission dans les hôpitaux en raison du manque de ressources et d’infrastructures médicales dont plusieurs ont été détruites pendant la guerre. Les organisations humanitaires s’assurent de continuer à distribuer de la nourriture, des équipements de protection individuelle et des produits désinfectants pour ralentir la propagation de la COVID‑19 dans cette région[12].

En revanche, Joe Belliveau, directeur général, Médecins Sans Frontières, a mentionné au Comité que dans les 70 pays où cette organisation fournit de l’aide humanitaire d’urgence, la COVID‑19 est rarement en haut de la liste des besoins médicaux. Cependant, M. Belliveau a ajouté que la réaffectation du personnel médical, des installations et les difficultés liées aux déplacements et à l’approvisionnement minent la capacité de Médecins Sans Frontières de procéder à d’autres types d’intervention d’urgence[13].

Les contrecoups de la COVID-19 sur les populations vulnérables

Alors que les effets directs de la crise sanitaire de la COVID‑19 en matière de décès ne semblent pas jusqu’à présent être aussi néfastes que prévu dans plusieurs pays en conflit, en situation de crises ou fragiles, il en va autrement pour les effets indirects sur les populations vulnérables. En citant un rapport de la Bill and Melinda Gates Foundation, Mark Lowcock, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence, Bureau des Nations Unies pour la Coordination de l’aide humanitaire, a informé le Comité que la pandémie menace d’effacer 25 années de progrès en matière de développement à l’échelle mondiale[14]. Il a résumé ainsi les contrecoups de la pandémie :

Cette année, pour la première fois depuis les années 1990, l’extrême pauvreté va augmenter; l’espérance de vie va diminuer; le taux de mortalité causée par le VIH, la tuberculose et la malaria va doubler; et le nombre de personnes au bord de la famine pourrait aussi doubler[15].

Les témoignages ont révélé certains effets indirects de la pandémie, notamment l’augmentation de la pauvreté, l’insécurité alimentaire et les difficultés d’accès aux soins de santé.

La pauvreté engendrée par le choc économique mondial

La récession mondiale causée par les mesures mises en place pour répondre aux vagues successives de la pandémie a touché de façon disproportionnée les pays recevant déjà de l’aide humanitaire[16]. Thomas Bollyky du Council on Foreign Relations a souligné que la Banque mondiale estime que 88 millions de personnes ont basculé dans la pauvreté extrême en 2020 en raison du choc économique causé par la pandémie. Alors que les taux de croissance économique plus élevés de certaines régions, comme l’Asie du Sud, « pourraient compenser une partie de cette pauvreté causée par le choc économique », M. Bollyky a ajouté que « la pauvreté dans les économies à croissance plus lente en Afrique et dans les États fragiles, comme le Venezuela, durera beaucoup plus longtemps[17] ».

Insécurité alimentaire

Selon David Beasley du Programme alimentaire mondial, alors que les mesures mises en place en 2020 ont permis d’éviter les famines, les effets indirects de la pandémie ont contribué à doubler le nombre de personnes au bord de la famine, passant de 135 à 270 millions de personnes[18]. Selon le Programme alimentaire mondial, les risques que la faim s’aggrave dans les prochains mois sont plus importants dans les pays où la pandémie coïncide avec les principaux facteurs responsables de la faim : les conflits et les événements météorologiques extrêmes. Le Comité a appris qu’au moins 20 pays, dont le Burkina Faso – dans la région du Sahel, le nord-est du Nigeria, le Soudan du Sud et le Yémen, sont susceptibles de faire face à de « l’insécurité alimentaire aigüe élevée » dans les prochains mois en raison d’une combinaison de facteurs dont l’intensification des conflits, des conditions météorologiques extrêmes causées par La Niña, et l’invasion de criquets pèlerins[19].

Paul Hagerman, directeur des politiques publiques, Banque canadienne de grains, a expliqué au Comité que la pandémie amène une « couche de stress supplémentaire » aux collectivités déjà aux prises avec de multiples difficultés, dont les conflits. Il a démontré comment la sécurité alimentaire a été compromise au cours des premiers mois de la pandémie dans certains pays africains où œuvre la Banque canadienne de grains. Ainsi, les restrictions de mouvements et les perturbations dans les chaînes d’approvisionnement se sont traduites par des pertes d’aliments périssables et de revenus pour des agriculteurs africains. Simultanément, les prix des denrées ont augmenté et plusieurs ménages avaient de la difficulté à se nourrir. M. Hagerman a ajouté qu’au début les programmes d’aide alimentaire des organisations partenaires de la Banque canadienne de grains ont été perturbés, mais que certains de ces problèmes initiaux se sont résorbés et que la distribution d’aide alimentaire s’est adaptée aux normes sanitaires requises par la pandémie[20].

Accès aux soins de santé

Dans de nombreux pays, une partie des ressources en santé a été détournée vers la réponse à la COVID‑19 au détriment d’autres soins. Thomas Bollyky a informé le Comité qu’une situation similaire s’est produite pendant l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest de 2014 à 2016. Il a souligné que lors de cette épidémie, il y aurait eu plus de décès attribuables au manque de soins médicaux régulier qu’au virus de l’Ebola[21]. Le Comité est inquiet qu’un scénario similaire puisse se produire à plus grande échelle pendant la pandémie de COVID‑19.

En effet, selon M. Bollyky, une enquête récente effectuée dans 18 pays membres de l’Union africaine a révélé que la moitié des personnes interrogées avaient retardé ou sauté une visite médicale dont elles avaient besoin; la même proportion de personnes dans cette enquête a indiqué avoir de la difficulté à se procurer les médicaments dont elles ont besoin[22].

Des témoins ont noté que l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive est un des domaines négligés dans certains pays en raison de la pandémie. À ce sujet, Joe Belliveau de Médecins Sans Frontières a noté que pendant l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, la principale menace à la vie des femmes n’était pas le virus, mais les restrictions à l’accès à des services de soins de santé courants, dont les services de soins de santé maternelle. M. Belliveau a enchaîné que la même situation se produit présentement, mais à plus grande échelle[23]. Barbara Grantham, présidente-directrice générale, CARE Canada, a ajouté qu’en Afghanistan, 73 % des femmes consultées par CARE affirment ne pas avoir accès à des services de planification familiale[24]. Pour sa part, Joe Belliveau a donné l’exemple de Mosul, en Irak; lorsque le principal hôpital public a été transformé pour recevoir les personnes atteintes de la COVID‑19, un nombre croissant de femmes se sont dirigées vers les installations de Médecins Sans Frontières pour des soins de santé maternelle[25].

Les témoins ont mis en évidence que d’autres services répondant à des besoins quotidiens en santé ont été interrompus ou modifiés pendant la pandémie, notamment des campagnes de vaccination, des traitements antiviraux pour les personnes atteintes du VIH et des moyens de lutte contre le paludisme. Joe Belliveau a informé le Comité qu’à la suite de l’interruption des épandages de lutte antivectorielle visant à réduire les populations de moustiques et à contrôler le paludisme au Soudan du Sud, 80% des patients de Médecins Sans Frontières dans cette région avaient le paludisme[26]. Thomas Bollyky a cité des articles de The Lancet et Nature démontrant qu’en raison de la réduction des activités de prévention du paludisme, la mortalité liée au paludisme pourrait doubler en 2020 par rapport à 2019 et fortement augmenter dans les années subséquentes. De plus, l’interruption de certains services de santé pourrait aussi avoir des effets importants sur la mortalité liée à d’autres maladies infectieuses en Afrique. À cet effet, M. Bollyky a porté à l’attention du Comité une étude du London School of Tropical Hygiene and Medicine selon laquelle les décès liés à d’autres maladies infectieuses pourraient surpasser les décès dus à la COVID‑19 en Afrique[27].

Vulnérabilités créées et exacerbées pour certains groupes de population

Comme indiqué plus haut, plusieurs témoins ont fait état de la façon dont la pandémie et les mesures mises en œuvre pour y répondre ont ajouté une autre « couche de vulnérabilité » pour certains segments de population dans les pays en conflit, en crise ou fragiles. Dans certains cas, des groupes marginalisés sont même triplement touchés par la pandémie. Peggy Hicks du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a expliqué au Comité que, d’abord, ces personnes sont davantage exposées au virus en raison de leur emploi et des conditions dans lesquelles elles vivent; ensuite, elles sont confrontées à des conséquences plus graves lorsqu’elles attrapent le virus; finalement, les mesures prises pour restreindre la pandémie ont des conséquences importantes sur leurs moyens de subsistance[28].

Les femmes et les filles

Plusieurs témoins ont souligné les effets indirects néfastes de la pandémie sur la situation des femmes et des filles dans de nombreux pays, mais particulièrement dans les situations de conflit, de crise et de fragilité. Plusieurs facteurs, dont les mesures de confinement et de distanciation physique, auraient contribué à une augmentation préoccupante de la violence contre les femmes et les filles que plusieurs surnomment la « pandémie de l’ombre ». Selon Barbara Grantham de CARE Canada, 15 millions de nouveaux cas de violence contre les femmes et les filles s’ajoutent à travers le monde pour chaque trois mois de mesures de confinement. Mme Grantham a souligné que les pays fragiles, comme le Venezuela, présentent les hausses de cas de violence les plus importantes[29]. À ce sujet, Alexis Gaiptman, directrice générale, Humanité & Inclusion Canada, a indiqué au Comité que les femmes en situation de handicap sont dix fois plus à risque de subir de la violence sexuelle que les femmes sans handicap[30].

En ce qui concerne les vulnérabilités des filles et des jeunes femmes, des témoins ont informé le Comité qu’ils avaient recueilli des données sur le terrain qui confirmaient une augmentation des mariages précoces et des cas de mutilations génitales féminines depuis le début de la pandémie dans certains pays, y compris le Yémen[31]. De son côté, CARE Canada a indiqué que 13 millions de mariages précoces s’ajoutent pour chaque trois mois de mesures de confinement[32].

Les enfants

Selon plusieurs témoins, les garçons et les filles font aussi les frais des effets indirects de la pandémie. Michael Messenger, président et chef de la direction, Vision mondiale Canada, a révélé au Comité les résultats d’une consultation effectuée par Vision mondiale dans 50 pays qui indique que la violence contre les enfants au sein des familles, de la communauté et en ligne a augmenté dans la dernière année[33]. La Dre Tanjina Mirza, gestionnaire des programmes principale, Plan International Canada, a ajouté que pour les 13 millions d’enfants réfugiés et les 17 millions d’enfants déplacés à l’intérieur de leur pays et vivant dans un camp, la pandémie a aggravé des vulnérabilités déjà existantes notamment en matière d’accès aux infrastructures sanitaires et à l’éducation, et ce particulièrement pour les filles[34]. Le Comité étudiera plus en profondeur les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur les enfants dans le cadre du prochain volet de la présente étude.

Les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées

Gillian Triggs, Haut-Commissaire assistante chargée de la protection au Haut-Commissariat des Nations Unions pour les réfugiés, a décrit de quelles façons la pandémie a exacerbé la crise de protection des réfugiés[35]. Selon Mme Triggs, il y a présentement plus de 80 millions de demandeurs d’asile, de réfugiés et de personnes déplacées à l’interne sous la protection du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés; ce nombre est « sans précédent et augmente rapidement[36] ». Elle a ajouté que celles et ceux qui quittent leur domicile le font notamment pour fuir la violence et les persécutions dues aux conflits internationaux et intercommunautaires, la pauvreté, la discrimination sexuelle et la détérioration de l’environnement et les changements climatiques[37].

Mme Triggs a expliqué que les personnes réfugiées et déplacées, dont 80% sont accueillies par des pays pauvres ou en développement, sont vulnérables aux effets indirects de la pandémie. Étant dépendantes de l’économie informelle et sans statut juridique, ces personnes sont les premières à perdre leur emploi, à être expulsées et se retrouver sans abri. Depuis le début de la pandémie, une forte augmentation a été notée au sein des populations déplacées et réfugiées de la violence contre les femmes, de la traite de personnes, de l’exploitation sexuelle, des mariages d’enfants, de la xénophobie et de la stigmatisation des personnes réfugiées et déplacées[38]. De plus, plusieurs personnes sont restées coincées dans des camps ou près des frontières[39] lorsqu’au plus fort de la pandémie 90 pays ne faisaient aucune exception à la fermeture des frontières pour les demandeurs d’asile, ce qui pouvait augmenter le risque que ces personnes se retrouvent dans des conditions dangereuses pour elles[40].

Personnes en situation de handicap

Les effets indirects de la pandémie risquent d’exacerber les défis déjà existants pour les personnes en situation de handicap dans des situations de crises humanitaires; ces personnes représentent environ 15% de la population. Selon Alexis Gaiptman d’Humanité & Inclusion, les personnes vivant avec une déficience visuelle, auditive ou intellectuelle ont plus de difficultés à avoir accès aux messages de prévention concernant les mesures à prendre pour prévenir la COVID‑19. Elle a ajouté que les restrictions amenées par la COVID‑19 pourraient contribuer à augmenter les risques de protection pour les personnes en situation de handicap. Ces personnes sont notamment à risque d’être séparées de leur famille et leurs aidants naturels, de subir de la violence, d’être exploitées sexuellement et abusées. De plus, selon Humanité & Inclusion, ces personnes, vivant déjà plus souvent en situation de pauvreté et d’exclusion économique, pourraient subir des conséquences importantes en raison de la crise économique[41].

Répondre pour aujourd’hui et pour l’avenir

Comprendre l’importance d’un soutien à l’échelle mondiale

Les témoignages livrés au Comité font ressortir l’importance d’une solidarité mondiale soutenue dans la réponse face aux vulnérabilités humanitaires et aux reculs généraux en matière de développement causés par la pandémie de COVID‑19 et ses contrecoups. Les témoins ont en effet expliqué pourquoi il fallait adopter, pour la conception de notre réponse à la COVID‑19, une perspective mondiale, et non seulement nationaliste : on sait maintenant à quel point dépendance mutuelle et vulnérabilités sont interreliées.

Mark Lowcock, coordonnateur des secours d’urgence, Bureau des Nations Unies pour la Coordination de l’aide humanitaire, a exposé sans détour les risques que présentait l’inaction :

Malheureusement, ne pas venir en aide aux pays les plus pauvres, ce n’est pas seulement manquer de générosité ou d’empathie. Tout comme le virus, les problèmes engendrés par la profonde récession économique que nous vivons actuellement frapperont tout le monde. La pauvreté, la faim, la maladie et la souffrance sèmeront le désarroi et le désespoir partout dans le monde, ce qui pourrait amplifier les risques de conflit, l’instabilité, les mouvements de migration et l’afflux de réfugiés. Tout cela profitera aux groupes extrémistes et terroristes. Les conséquences se feront sentir sur une vaste échelle et à long terme[42].

David Beasley, du Programme alimentaire mondial, a fait écho à la gravité et à l’urgence de ces propos : « Si nous n’agissons pas maintenant en adoptant des mesures importantes, nous serons confrontés à des problèmes de famine, d’instabilité et de migrations de masse dans le monde entier[43]. » M. Beasley a affirmé que pour la communauté internationale, intervenir après de tels scénarios négatifs serait beaucoup plus coûteux qu’agir dès aujourd’hui à titre préventif[44]. Dans la même veine, Peggy Hicks, du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a fait observer qu’en raison du ralentissement économique dans le monde développé, il est certes plus difficile de s’engager à appuyer les pays en crise ou en conflit, mais que s’y soustraire « sera certainement le choix le plus coûteux, tant en vies humaines qu’en ressources[45] ».

Expliquant l’importance de déployer des efforts à l’échelle internationale, même si des gouvernements sont aux prises avec de graves difficultés stratégiques chez eux, M. Rae a rappelé au Comité une déclaration faite par le secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU), selon qui se montrer solidaire sert aussi nos propres intérêts[46]. Il est nécessaire de considérer ce message dans le contexte de l'accès aux vaccins et de la reprise économique. Néanmoins, M. Rae a insisté sur le fait que les ressources financières que les économies avancées ont dépensées pour elles-mêmes pendant la pandémie de COVID‑19 sont énormes par rapport aux ressources affectées dans les pays les moins développés. Il a décrit cette « iniquité » comme étant « le principal écart financier que nous devons absolument combler[47] ».

En ce qui concerne la réponse face à la COVID‑19, Valérie Percival, professeure agrégée à la Norman Paterson School of International Affairs, Université Carleton, a dit que le Canada et le monde avaient réagi « de deux manières ». Elle a qualifié de « source d’inspiration » la façon dont les réseaux d’acteurs, de chercheurs et d’organismes de défense des droits, dans les domaines de l’aide humanitaire et de la santé, ont cerné les besoins, y ont répondu et planifié la mise en œuvre de nouveaux tests de dépistage, de traitements et de vaccins. Elle a reconnu que le système humanitaire, déjà débordé, a « souvent échoué », mais qu’il « limite les souffrances humaines dans des circonstances difficiles ». En revanche, Mme Percival a qualifié de « désolante et déprimante » la réaction des dirigeants politiques du monde. Selon elle, les répercussions de l’absence d’orientation politique « se ressentent durement dans les régions touchées par des conflits ». Par exemple, a-t-elle affirmé, les États du monde « n’ont pas persuadé les gouvernements de protéger les droits des migrants et des personnes déplacées, et ils n’ont pas réagi aux mesures de répression opportunistes de régimes autoritaires[48] ».

Habituellement, lors de crises d’ordre planétaire, les institutions multilatérales jouent un rôle prépondérant dans la mise au point d’une réponse collective. Or l’efficacité de ces institutions dépend du contexte géopolitique général dans lequel elles œuvrent. M. Bollyky, du Council on Foreign Relations, a donné comme exemple la rivalité stratégique entre la Chine et les États-Unis, qui selon lui « compromet une action potentielle au G7, au G20 et au Conseil de sécurité des Nations Unies ». De l’avis de M. Bollyky, la leçon qu’il faut en tirer, c’est que « les institutions multilatérales n’entrent pas en action comme par magie pendant des crises ». Le succès de ces institutions dépend plutôt de la volonté politique de leurs États membres[49].

Compte tenu des vulnérabilités que la COVID‑19 a engendrées et exacerbées dans les environnements où sévissent des crises et des conflits, le Comité estime que le Canada doit assumer un rôle important de chef de file pour ce qui est de susciter et d’alimenter la volonté politique internationale qu’il faut pour intervenir de manière concertée, avec rapidité et générosité dans ces environnements fragilisés par les contrecoups de la pandémie.

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada joue un rôle de chef de file dans la réponse internationale à la pandémie de COVID‑19 afin que l’on réponde aux vulnérabilités créées et exacerbées par la pandémie dans les régions touchées par des crises et des conflits de manière coordonnée, rapide et en fonction des besoins.

Maintenir l’aide humanitaire et atteindre les plus vulnérables

Comme nous l’indiquons plus haut, les témoignages donnent à entendre que les répercussions secondaires de la pandémie de COVID‑19 rendent les situations de vulnérabilité encore plus précaires et désavantagent encore plus les populations déjà vulnérables. On se demande si l’on pourra continuer d’offrir les mêmes services de santé qu’avant la pandémie, pour lesquels les besoins n’ont pas diminué, et dans quelle mesure les fonds atteignent certains secteurs et certaines populations à haut risque.

Joe Belliveau, de Médecins Sans Frontières, rappelle à juste titre que les besoins quotidiens en santé, comme les soins obstétriques d’urgence, les campagnes d’immunisation pour des maladies infantiles graves et évitables, comme la rougeole et la polio, ainsi que la prévention et le traitement du paludisme ne disparaissent pas en temps de pandémie. Néanmoins, selon lui, « c’est pourtant exactement la prestation de ces services sanitaires qui est interrompue ». Voilà pourquoi, selon M. Belliveau, il est d’autant plus important pendant la pandémie que le Canada « continue de défendre les interventions humanitaires dans des situations d’urgence à l’échelle de la planète en continuant de financer l’aide internationale, non seulement pour faire face à la COVID, mais aussi pour maintenir la prestation de soins de santé d’urgence et essentiels de manière générale[50] ».

Qui plus est, et malgré l’appel des Nations Unies à un cessez-le-feu planétaire, l’une des principales causes des besoins humanitaires, bon an mal an – l’insécurité –, ne s’est pas volatilisée. La région du Sahel, en Afrique occidentale, en est un exemple. Le Comité international de la Croix-Rouge a affirmé que la région « subit l’impact simultané des crises sécuritaires et humanitaires, du changement climatique et de la pandémie de COVID‑19[51] ». Plus d’un million de personnes ont été déplacées dans des contextes de violence armée, de pénuries alimentaires, de crise économique et d’interruption des services de base[52].

En ce qui concerne les secteurs manquant de ressources, Rachel Logel Carmichael, chef des affaires humanitaires chez Aide à l’enfance Canada, estime que la protection des enfants, la lutte et l’éducation en matière de violence faite aux femmes sont des « secteurs d’intervention négligés ». Ces secteurs couvrent « la santé mentale et le soutien psychosocial, les services de santé sexuelle et génésique, et de l’information pour les enfants rescapés de la violence[53] ». Selon le mémoire soumis par Aide à l’enfance Canada, de 2010 à 2018, 0,53 % de l’aide humanitaire globale aurait été consacrée en moyenne à la protection de l’enfance, et 0,06 % à la lutte contre la violence faite aux femmes[54]. Pour sa part, CARE Canada a souligné que les besoins et les services relatifs à la violence sexuelle et fondée sur le sexe ainsi que les services en matière de santé sexuelle et reproductive étaient « sous-représentés » dans les plans de réponse humanitaire mondiaux, mais qu’ils « constituent les fondements de la politique humanitaire du Canada[55] ».

Depuis février 2020, le gouvernement du Canada a annoncé des investissements de près de 1,6 milliard de dollars dans la réponse mondiale à la COVID‑19[56]. Sur les 400 millions de dollars annoncés en septembre 2020[57], M. Rae a précisé qu’une somme d’environ 200 millions « sera réservée aux efforts humanitaires en cours[58]. Le Canada a également annoncé des fonds pour soutenir les appels à l’aide humanitaire d’avril 2020, qui ciblent en particulier les agences de l’ONU, la Croix-Rouge internationale et le Croissant‑Rouge[59]. Selon l’ambassadeur, « ce soutien s’ajoute aux contributions considérables que le Canada verse chaque année dans l’aide internationale et humanitaire. Ces contributions ont été redirigées en grande partie avec souplesse pour répondre aux besoins les plus pressants provoqués par la pandémie[60]. »

Néanmoins, après avoir mis au jour les lacunes de financement dans le Plan mondial de réponse humanitaire à la COVID‑19 de l’ONU[61], CARE Canada a souligné qu’il était « déjà clair que cela est non seulement insuffisant pour financer la réponse immédiate à la COVID dans les situations d’urgence complexes qui existent déjà, et qu’il faudra beaucoup plus pour se remettre des chocs socio-économiques à long terme de la COVID‑19 au niveau mondial[62] ». Après avoir noté que l’ONU cherche à obtenir 35 milliards de dollars américains pour 2021 afin de venir en aide à quelque 160 millions de personnes touchées par les conflits, les violations de la protection, la famine et la COVID‑19, Mme Logel Carmichael a souligné « des signes inquiétants de lassitude chez les donateurs[63] ». Taryn Russell, chef des politiques et de la défense des droits chez Aide à l’enfance Canada, a ajouté que des organisations de la société civile font pression pour que le Canada consacre à la lutte mondiale au moins 1 % de ses dépenses nationales liées à la COVID‑19[64].

Le Comité est convaincu que le Canada devrait contribuer généreusement à l’aide humanitaire internationale visant à soulager la souffrance et à sauver des vies dans les régions touchées par des conflits armés et des catastrophes, tout en appuyant la réponse humanitaire mondiale à la pandémie de COVID‑19, sans le faire aux dépens de l’une ou de l’autre. Le Comité tient compte des mises en garde énoncées plus haut, à savoir qu’il faut agir dès aujourd’hui si l’on veut éviter la famine, la déstabilisation et la perte d’années de progrès. Il reconnaît aussi les écarts qui persistent entre les besoins recensés par le système humanitaire et les fonds consentis par les donateurs à la plupart des appels, dont le Plan mondial de réponse humanitaire à la COVID‑19 de l’ONU. En outre, le Comité est d’accord avec les témoins qui exhortent le Canada de faire en sorte que son soutien se rende aux populations les plus vulnérables et aux secteurs les plus négligés, conformément aux principes d’action humanitaire.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada, en affectant de nouveaux fonds, augmente ses contributions aux appels à l’aide humanitaire internationale en fonction des pressions accrues que subit le système humanitaire, en veillant à ce que l’aide se rende jusqu’aux populations les plus vulnérables en fonction des besoins, notamment en ce qui concerne la sécurité alimentaire, la protection de l’enfance, l’éducation et les soins de santé en situation d’urgence, le soutien psychosocial ainsi que les mesures de prévention et d’intervention liées à la violence fondée sur le sexe.

Recommandation 3

Que le Canada dirige et coordonne, de concert avec des pays aux vues similaires, l’élargissement d’un programme féministe, en abordant plus particulièrement la violence familiale et la violence sexiste pendant les confinements attribuables à la COVID‑19, qu’il garantisse la protection des personnes à risque et veille à ce qu’elles aient un logement provisoire sûr, et qu’il améliore l’accès de base aux soins de santé pour les femmes et les filles, surtout l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive et les droits en la matière, ainsi qu’aux soins de santé avant, pendant et après la naissance, et que ces plans d’action tiennent compte de la diversité en ce qui concerne le statut socioéconomique, l’âge, l’ethnicité, la race, la situation de handicap et l’identité LGBTQ2+.

Tirer profit des capacités de tous les acteurs

La taille générale du budget canadien en matière d’aide au développement officielle était estimée à 0,27 % du revenu national brut en 2019, ce qui était bien en deçà de la cible internationale de 0,7 % et était inférieur à la moyenne des États pairs du Canada et inférieur aux seuils obtenus par le Canada au cours des années passées (voir les figures 1, 2 et 3)[65]. Les témoins ont préconisé l’instauration de mécanismes de financement rapides, souples et accessibles aux organisations de toutes tailles ainsi qu’aux organisations locales, nationales et internationales. Ils ont énuméré trois aspects à améliorer. Le premier concerne la portion relativement modeste de l’aide humanitaire passant directement des donateurs aux organisations dans les régions en crise. Le deuxième reflète l’importance de la capacité des institutions locales à faire face aux crises et aux chocs récurrents. Le troisième illustre la difficulté qu’auraient les organisations non gouvernementales (ONG) canadiennes à obtenir le financement annoncé par le gouvernement du Canada.

Figure 1 — Total de l’aide publique au développement par membre du Comité d’aide au développement de l’OCDE (équivalent-subvention  en dollars américains), 2019

La figure 1 montre les dépenses d’aide publique au développement en dollars américains en 2019 des membres du Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques. 
Pays : États-Unis, $34,6 milliards, Allemagne, $23,8 milliards, Royaume-Uni, $19,4 milliards, Japon, $15,5 milliards, France, $12,2 milliards, Suède, $5,4 milliards, Les Pays-Bas, $5,3 milliards, Italie, $4,9 milliards, Canada, $4,7 milliards, Norvège, $4,3 milliards, Suisse, $3,1 milliards, Australie, $2,9 milliards, Espagne, $2,9 milliards, Danemark, $2,5 milliards, Corée du Sud, $2,5 milliards, Belgique, $2,2 milliards, Autriche, $1,2 milliard, Finlande, $1,1 milliard, Irlande, $0,9 milliard, Pologne, $0,7 milliard, Nouvelle-Zélande, $0,6 milliard, Luxembourg, $0,5 milliard, Portugal, $0,4 milliard, Hongrie, $0,3 milliard, Grèce, $0,3 milliard, Tchéquie, $0,3 milliard, Slovaquie, $0,1 milliard, Slovénie, $0,1 milliard, Islande, $0,1 milliard.

Notes :   Les données de 2019 sont préliminaires et arrondies. Les données comprennent l’information des pays donateurs; les institutions de l’Union européenne ne sont pas incluses.

Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’équivalent‑subvention de l’aide publique au développement (APD) est une mesure de l’effort des donateurs. Les subventions, les prêts et les autres apports utilisés pour le calcul de cette mesure sont appelés « apports d’APD ». Les « apports d’APD » sont des apports destinés aux pays et territoires qui figurent sur la liste des bénéficiaires de l’APD du Comité d’aide au développement de l’OCDE, ainsi qu’aux institutions multilatérales de développement, qui sont :

  • fournis par des organismes officiels, y compris les gouvernements des États et locaux, ou par leurs organismes de direction;
  • et chaque opération de ce qui précède qui :
    • est administrée dans le but principal de promouvoir le développement économique et le bien-être des pays en développement;
    • est de nature concessionnelle.

Pour en savoir plus sur cette définition, voir OCDE, Aide publique au développement : définition et champ couvert.

Source : Figure produite par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de l’OCDE, « Tableau 1 : Equivalent-don de l’Aide Publique au Développement des Membres du CAD en 2019 », Augmentation de l’aide consentie par les membres du CAD en 2019, dont une plus forte proportion est dirigée vers les pays les plus pauvres, 16 avril 2020.

Figure 2 — Aide publique au développement par membre du Comité d’aide au développement de l’OCDE en proportion du revenu national brut (%), 2019

La figure 2 montre les dépenses d’aide publique au développement en 2019, en pourcentage du revenu national brut, des pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques. L’objectif de dépenses fixé par les Nations unies, soit 0,7 % du revenu national brut, est également indiqué.  
Pays : Luxembourg, 1,05%, Norvège, 1,02%, Suède, 0,99%, Danemark, 0,71%, Royaume-Uni, 0,7%, Allemagne, 0,6%, Pays-Bas, 0,59%, Suisse, 0,44%, France, 0,44%, Finlande, 0,42%, Belgique, 0,42%, Irlande, 0,31%, Japon, 0,29%, Nouvelle-Zélande, 0,28%, Islande, 0,27%, Canada, 0,27%, Autriche, 0,27%, Italie, 0,24%, Hongrie, 0,24%, Australie, 0,22%, Espagne, 0,21%, États-Unis, 0,16%, Slovénie, 0,16%, Portugal, 0,16%, Corée du Sud, 0,15%, Grèce, 0,14%, Tchéquie, 0,13%, Slovaquie, 0,12%, Pologne, 0,12%, Total CAD, 0,3%.

Notes :   « CAD » fait référence au Comité d’aide au développement de l’OCDE. Le « revenu national brut » est le produit intérieur brut plus les revenus nets reçus de l’étranger pour la rémunération des salariés, la propriété et les impôts et subventions nets sur la production. Voir OCDE, Revenu national brut (RNB).

Source : Figure produite par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de l’OCDE, « Tableau 1 : Equivalent-don de l’Aide Publique au Développement des Membres du CAD en 2019 », Augmentation de l’aide consentie par les membres du CAD en 2019, dont une plus forte proportion est dirigée vers les pays les plus pauvres, 16 avril 2020.

Figure 3 — Dépenses d’aide publique au développement du Canada en pourcentage du revenu national brut (%), 1970–2019

La figure 3 montre les dépenses annuelles du Canada en matière d’aide publique au développement, en pourcentage du revenu national brut, de 1970 à 2019. La figure met l’accent sur le moment où les dépenses ont atteint le point le plus haut - 0,54 % en 1975 - et le moment où elles ont atteint le point le plus bas - 0,22 % en 2001. Les dépenses pour 2019 - 0,27 % - sont également soulignées.  En outre, la figure indique les dépenses d’aide publique au développement du Canada par rapport à l’objectif de 0,7 % du revenu national brut fixé par les Nations unies.

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à l'aide de données de l’OCDE, DAC Statistics, Compare your Country: Official Development Assistance 2019- Preliminary Data, base de donnée, consultée le 3 février 2021.

Pour ce qui est du premier aspect à améliorer, les témoins ont parlé de ce qu’on appelle « l’agenda de la localisation ». Cette approche vise à autonomiser les acteurs locaux et à acheminer l’aide le plus rapidement, le plus directement et le plus près possible des intervenants de première ligne. M. Audet a rappelé au Comité que le Canada participe à l’agenda de la localisation, puisqu’il est partie au « Grand Bargain », la « grande entente » conclue lors du Sommet mondial de 2016 sur l’action humanitaire. Il a déclaré : « Il a été très bien démontré que cette décentralisation est centrale aux réponses humanitaires durables[66]. » Néanmoins, même si l’un des engagements de la grande entente consiste à acheminer au moins 25 % des fonds humanitaires – aussi directement que possible – aux intervenants locaux[67], Barbara Grantham, de CARE Canada, a souligné qu’à peine 1,5 % des fonds versés par les donateurs à la réponse humanitaire mondiale à la COVID‑19 a été acheminé aux ONG locales et nationales. Voilà une tendance que l’on doit renverser, comme l’a affirmé Mme Grantham « avant que la crise empire et avant que ces organismes locaux qui peuvent faire le travail disparaissent[68] ».

Ruby Dagher, professeure adjointe à l’École de développement international et mondialisation, de l’Université d’Ottawa, a fait valoir que la tendance à se fier aux grandes organisations multilatérales pour distribuer le gros des fonds canadiens destinés à l’aide internationale s’explique par deux raisons : le manque de préparation et l’aversion au risque. Au sujet de l’explosion survenue en août 2020 dans le port de Beyrouth, Mme Dagher a expliqué qu’il s’était écoulé beaucoup de temps avant que les fonds canadiens soient transférés et, qu’en cours de route, des montants avaient été prélevés « pour les coûts administratifs entre les organisations internationales et les organismes locaux, ce qui signifie que le financement n’est pas entièrement parvenu au Liban[69] ». Au sujet du financement humanitaire pour la COVID‑19 en particulier, Mme Percival a fait mention d’une connaissance qui en était « au neuvième mois de négociation pour une subvention liée à la COVID » et plaidé pour qu’on fasse « les choses plus rapidement[70] ».

Mme Dagher reconnaît qu’il est difficile d’œuvrer dans des environnements politiques complexes où les sources de pouvoir et de légitimité sont parfois concurrentes. Elle estime néanmoins que nous avons la capacité, au sein de l’appareil gouvernemental canadien, de déterminer quelles organisations locales sont fiables, mais qu’il faut pour cela s’investir en cherchant de l’information et en surveillant la situation sur le terrain. À défaut de connaître les organisations locales, quand une urgence se présente et qu’il faut acheminer de l’argent rapidement, « nous avons tendance à nous en remettre à ces grands organismes[71] », a-t-elle dit.

À l’agenda de la localisation s’arrime le concept de résilience. La COVID‑19 est loin d’être la première et ne sera pas la dernière crise ou pandémie à mettre à mal le système humanitaire mondial. Conrad Sauvé, président et chef de la direction de la Croix-Rouge canadienne, a expliqué que nous devions « renforcer la capacité des organismes locaux qui sont fiables, qui ont un accès et qui vont rester là pour intervenir[72] ». Il estime qu’au lieu de « n’être que des pompiers dans ces situations », nous devrions plutôt « construire des casernes[73] ». Il semble cependant y avoir des obstacles à cet objectif. M. Sauvé a en effet indiqué que le désir d’aider une autre organisation humanitaire, comme la Croix-Rouge locale, à renforcer sa capacité institutionnelle peut passer entre les mailles du filet des mécanismes de financement : ceux-ci sont plutôt axés sur l’aide d’urgence ou les programmes de développement[74].

Zaid Al‑Rawni, président-directeur général d’Islamic Relief Canada, a rappelé au Comité que les organismes caritatifs canadiens devaient se conformer aux règles du Canada en démontrant qu’ils « dirigent et contrôlent » l’utilisation de leurs ressources[75], ce qui peut influer sur la façon dont une ONG canadienne s’investit dans le renforcement des capacités auprès d’une organisation partenaire dans un autre pays[76]. Barbara Grantham a soutenu qu’il y aurait lieu d’adapter les mécanismes de financement ainsi que les dispositions sur la direction et le contrôle des ressources « pour pouvoir offrir un financement plus prévisible, plus transparent et plus souple par l’entremise d’ONG et d’intervenants locaux ». Ainsi, selon elle, on « débloquerait des millions de dollars qui sont actuellement coincés dans l’administration des programmes[77] ».

Dans l’ensemble, les représentants des organisations de l’ONU qui ont témoigné devant le Comité accueillent favorablement le soutien et les fonds du gouvernement du Canada visant l’action humanitaire. Toutefois, des témoins de certaines ONG ont affirmé au Comité qu’ils n’avaient toujours pas reçu aucun des nouveaux financements annoncés pour la réponse globale à la COVID‑19. On se demande donc où en est la distribution des fonds annoncés jusqu’ici par le Canada et quelles seront les modalités pour en demander[78].

Mme Logel Carmichael, d’Aide à l’enfance Canada, a proposé un mode de financement « qui permettrait aux différents membres de l’écosystème humanitaire […] d’avoir accès à des fonds permettant de répondre à ces besoins vitaux[79] ». Paul Hagerman, de la Banque canadienne de grains, a expliqué l’importance d’investir dans les ONG canadiennes. Il a par exemple fait valoir les avantages de leurs partenariats à long terme sur le terrain et des appuis solides dont elles disposent au Canada, ce qui contribue à sensibiliser la population canadienne aux questions de développement international. Il reconnaît certes l’efficacité des organisations de l’ONU et des accords d’aide entre gouvernements, mais estime, en ce qui concerne les canaux de distribution, qu’il « faut viser l’équilibre »[80]. Rahul Singh, directeur exécutif de GlobalMedic, a insisté pour que l’on tienne davantage compte du rôle que peuvent jouer les organisations de petite taille. Étant donné les frais administratifs qu’implique la distribution de fonds aux partenaires de mise en œuvre par l’entremise des organisations onusiennes, M. Singh a affirmé que « le Canada peut éliminer les intermédiaires et faire plus avec moins[81] ».

Le Comité reconnaît l’importance de l’agenda de la localisation et de renforcer la résilience du système humanitaire. Compte tenu des avantages comparatifs que les différents acteurs de ce système font valoir, le Comité exhorte le gouvernement du Canada à adopter une approche pouvant mettre à profit la gamme complète de leurs capacités.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada réitère son soutien à l’égard de la grande entente conclue lors du Sommet mondial sur l’action humanitaire et augmente régulièrement le montant de l’aide humanitaire que le Canada achemine, le plus directement possible, aux intervenants humanitaires nationaux et locaux dans les régions touchées.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada trouve des façons d’utiliser ses mécanismes de financement, actuels ou nouveaux, pour renforcer la capacité institutionnelle des organisations humanitaires locales.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada prenne des mesures immédiates pour qu’une grande diversité d’organisations de la société civile canadienne, y compris les petites et les moyennes organisations ainsi que les partenaires nouveaux et de longue date, puissent demander et recevoir des fonds fédéraux destinés à l’aide internationale dans le cadre de la réponse mondiale à la COVID‑19 et des appels à l’aide humanitaire s’y rapportant, et pour que les mécanismes de demande et d’approbation des fonds respectent les principes de prévisibilité, de souplesse, de partenariat, d’efficacité, de rentabilité, d’innovation et de responsabilisation.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada prenne des mesures immédiates pour régler les graves problèmes des règles actuelles de direction et de contrôle en matière de développement international, en reconnaissant que ces règles entravent un important travail de développement international et perpétuent les structures coloniales de contrôle des donateurs.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada indique s’il a l’intention d’augmenter les dépenses d’APD en pourcentage du RNB, en fonction de leurs faibles niveaux actuels.

Garantir l’accès à un vaccin abordable

Le 9 novembre 2020, la multinationale pharmaceutique Pfizer et son partenaire allemand, BioNTech, ont annoncé que leur candidat-vaccin contre la COVID‑19 présentait un taux d’efficacité supérieur à 90 % dès sept jours après la deuxième dose[82]. Une semaine plus tard, le 16 novembre 2020, Moderna a annoncé que son vaccin affichait un taux d’efficacité de 94,5 %[83]. Puis, le 8 décembre 2020, une femme de 90 ans d’Irlande du Nord a été la première personne au monde à recevoir le vaccin de Pfizer‑BioNTech en dehors d’un essai clinique[84].

Malgré les progrès réalisés, des témoins ont dit craindre que les vaccins contre la COVID‑19 n’atteignent pas les populations les plus vulnérables du monde. Sur une note plus positive, M. Rae a souligné que le gouvernement du Canada s’était engagé à donner un accès équitable aux vaccins, en annonçant par exemple, en septembre 2020, un investissement de 220 millions de dollars par l’intermédiaire du système de garantie de marché du COVAX, coordonné par l’OMS, la Coalition for Epidemic Preparedness Innovations et Gavi, L’Alliance du Vaccin, pour l’approvisionnement de vaccins financés par des donateurs dans les pays en développement[85]. COVAX continue de négocier des ententes avec les fabricants de nombreux candidats-vaccins dans le but de livrer au moins 2 milliards de doses aux pays participants d’ici la fin de l’année 2021, dont au moins 1,3 milliard de doses pour les 92 pays à revenu faible et intermédiaire prenant part au système de garantie de marché du COVAX[86].

David Morley, président et chef de la direction d’UNICEF Canada, a aussi salué « la contribution et la participation active » du Canada au dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID‑19 (Accélérateur ACT), qui comprend le Mécanisme COVAX. Ce dispositif vise à garantir un accès équitable aux tests de dépistage et aux traitements ainsi qu’aux vaccins. M. Morley a précisé que le Canada devait hausser ses contributions « pour vaincre la pandémie dans les mois à venir[87] ».

Néanmoins, Joe Belliveau, de Médecins Sans Frontières, a déclaré que « des questions importantes demeurent sans réponse en ce qui concerne le moment où le vaccin contre la COVID‑19 sera administré et la façon de l’administrer dans les zones de conflit, les camps de réfugiés et les endroits où l’accès humanitaire est difficile[88] ». Thomas Bollyky a résumé dans son mémoire les conséquences du moindre retard :

Un vaccin sûr et efficace peut modifier de manière considérable la trajectoire de la pandémie et en atténuer les conséquences humanitaires, mais sa réussite dépend de sa distribution aux populations vulnérables qui peuvent en bénéficier le plus. Si l’on adopte une approche contraire, de type « mon pays d’abord » pour la répartition des vaccins, on peut s’attendre à de lourdes conséquences à grande échelle pour la coopération géopolitique à venir[89].

Comme c’est le cas pour tous les aspects de l’action humanitaire et du travail de développement, le plus difficile dans l’effort mondial de vaccination sera d’atteindre les plus vulnérables. Le Comité international de la Croix-Rouge « estime que 66 millions de personnes vivent actuellement dans des zones contrôlées par des groupes armés non étatiques, en dehors des structures de gouvernance adéquates qui pourraient fournir efficacement des vaccins[90] ». En ce qui concerne l’aspect abordable des vaccins dans le contexte humanitaire pour les populations se trouvant à l’écart des systèmes de santé typiques, Jason Nickerson, conseiller aux affaires humanitaires pour Médecins Sans Frontières, a parlé des lacunes du seul autre mécanisme de garantie de marché, créé pour le vaccin conjugué contre le pneumocoque. Il a expliqué qu’on n’avait pas conçu de mécanisme clair pour que les organisations humanitaires aient accès au vaccin à un prix abordable, ce qui les a obligées, dans certains cas, à payer des prix exorbitants. M. Nickerson a donné l’exemple de la Grèce :

Le prix local le plus bas était de 3,10 $ par dose. Il faut trois doses pour immuniser une personne. Comme il n’y avait pas de mécanisme particulier permettant aux organismes humanitaires d’y avoir accès alors que nous voulions vacciner 5 000 enfants réfugiés en Grèce, on nous a facturé un prix de 68,10 $ par dose. Voilà la différence[91].

S’il a qualifié le financement de COVAX d’« absolument essentiel », M. Nickerson s’est aussi dit convaincu qu’il faudra « discuter de la manière dont les organisations humanitaires pourront y accéder[92] ».

Qui plus est, M. Bollyky a fait valoir que l’initiative COVAX manquait cruellement de fonds, particulièrement en ce qui concerne l’infrastructure et la distribution. Il a déploré le fait qu’elle était « également sous-financée en ce qui concerne les ressources nécessaires pour acheter des doses à l’avance[93] ».

M. Audet a indiqué que le gouvernement du Canada s’était engagé à « acheter un nombre de vaccins extrêmement important ». Il a dit espérer « qu’il y aura rapidement une saturation et une immunité collectives au Canada, et que le surplus, qui ne sera pas entreposé au Canada, mais qui aura été acheté auprès de compagnies, pourra être ensuite redistribué dans les régions du monde qui n’y auront pas accès[94] ». Plus tard, dans une entrevue accordée en décembre 2020, le premier ministre, M. Trudeau, s’est engagé à partager les vaccins excédentaires avec le monde[95], mais M. Bollyky a dit au Comité qu’on ne savait pas dans quels délais les pays pourraient faire profiter aux autres de leurs doses excédentaires, une fois leurs propres besoins satisfaits, et que cela dépendrait aussi du type de vaccins approuvés[96] ».

Enfin, Idee Inyangudor, vice-président des partenariats internationaux chez Wellington Advocacy, a soulevé une autre inquiétude : la confiance. Il a fait observer que « si nous ne pouvons pas vacciner tout le monde, si les gens perdent la foi dans les vaccins, la pandémie pourrait durer passablement plus longtemps que nous le croyons[97] ». Le Comité international de la Croix-Rouge abonde dans le même sens pour ce qui est des régions touchées par les conflits. Dans un mémoire remis au Comité, l’organisation a écrit : « La désinformation et les réactions d’exclusion peuvent également alimenter les troubles et l’instabilité » et que « La distribution inéquitable d’un vaccin contre la COVID‑19 pourrait déstabiliser les communautés et déclencher de violentes flambées[98]. »

Le Comité reconnaît les contributions importantes du gouvernement du Canada à l’Accélérateur ACT et à COVAX, son pilier vaccins[99], mais constate avec inquiétude que ces initiatives sont sous-financées dans l’ensemble si l’on tient compte de la demande mondiale et des difficultés de distribution qu’il faudra surmonter. Le Comité souligne aussi les préoccupations concernant l’accès à prix abordable des organisations humanitaires à des vaccins contre la COVID‑19. Enfin, le Comité est conscient que l’accès de nombreux pays aux vaccins dépend de COVAX et reconnaît que la pandémie et ses contrecoups économiques ne cesseront pas tant que la vaccination ne sera pas généralisée à l’échelle mondiale. Le Comité insiste sur le principe fondamental de l’accès équitable aux vaccins, tel qu’établi par COVAX, et demande au Canada et à ses partenaires d’œuvrer à l’atteinte de cet objectif, notamment en donnant leur plein appui au mécanisme de garantie de marché COVAX.

Recommandation 9

Que le gouvernement du Canada envisage d’augmenter ses contributions à COVAX, le pilier vaccins de l’Accélérateur ACT, tout en travaillant de concert avec des pays et des organisations partenaires pour que les organisations humanitaires aient accès à des vaccins contre la COVID‑19 aux plus faibles prix possibles, en tenant compte des infrastructures nécessaires à leur conservation.

Recommandation 10

Que, au moment approprié, le gouvernement du Canada redistribue ses vaccins excédentaires contre la COVID‑19, le cas échant, afin de contribuer à l’effort de vaccination dans les pays en développement, en veillant en particulier à atteindre les populations les plus vulnérables, et qu’il fasse rapport de cet effort au Parlement.

Conclusion

En tant que mesure d’intervention d’urgence, l’aide humanitaire – l’objet des recommandations du présent rapport provisoire – a pour but de sauver et de maintenir des vies. Elle est fondée sur l’évaluation des besoins de base. Néanmoins, en prenant du recul et en tenant compte des perturbations qu’entraîne la COVID‑19 en matière de sécurité humaine, de développement et de prospérité, on constate que l’aide humanitaire n’est qu’une pièce d’un casse-tête beaucoup plus grand. Pour Idee Inyangudor, qui a parlé de la situation en Afrique subsaharienne, où la crise aurait selon lui fait reculer les économies de plusieurs décennies, ce qu’il faut se demander, c’est qu’elle sera « la suite des choses[100] ». Il faudra à son avis non seulement des vaccins, mais aussi quantité de capitaux. Comme les Objectifs de développement durable que la communauté internationale s’était fixés pour 2030 sont peut-être compromis, c’est sur les questions plus générales de dignité humaine et de développement que le Comité se penchera maintenant.


[1]              Johns Hopkins University & Medecine, « Global Map », Coronavirus Resource Center, base de données, consultée le 25 février 2021.

[2]              Organisation mondiale de la santé, Chronologie de l’action de l’OMS face à la COVID‑19, déclaration, 9 septembre 2020.

[3]              Chambre des Communes, Comité permanent des affaires étrangères et du développement international (FAAE), Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[4]              FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[5]              FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020 (Barbara Grantham, présidente-directrice générale, CARE Canada).

[6]              FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[7]              FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[8]              FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[9]              Thomas Bollyky, Réponse écrite aux questions, reçue le 18 janvier 2021.

[10]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1 décembre 2020.

[11]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1 décembre 2020.

[12]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020.

[13]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[14]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[15]            Ibid.

[16]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020 (Mark Lowcock, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence, Bureau des Nations Unies pour la Coordination de l’aide humanitaire).

[17]            Thomas Bollyky, mémoire, publié le 4 décembre 2020.

[18]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[19]            Programme alimentaire mondial, mémoire, publié le 16 décembre 2020.

[20]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[21]            Thomas Bollyky, mémoire, publié le 4 décembre 2020.

[22]            Ibid.

[23]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[24]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[25]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[26]            Ibid.

[27]            Thomas Bollyky, Réponse écrite aux questions, reçue le 18 janvier 2021.

[28]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[29]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[30]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020.

[31]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020 (Zaid Al‑Rawni, président-directeur général, Islamic Relief Canada).

[32]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[33]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[34]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[35]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[36]            Ibid.

[37]            Ibid.

[38]            Ibid.

[39]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020 (Joe Belliveau, directeur général, Médecins Sans Frontières).

[40]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020 (Gillian Triggs, Haut-Commissaire assistante chargée de la protection, Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés).

[41]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020.

[42]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[43]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[44]            Ibid.

[45]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[47]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[48]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[49]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[50]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[51]            Comité international de la Croix-Rouge, mémoire, publié le 16 décembre 2020.

[52]            Ibid.

[53]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020.

[54]            Aide à l’enfance Canada, mémoire, publié le 4 décembre 2020.

[55]            CARE Canada, mémoire, publié le 8 décembre 2020.

[56]            Affaires mondiales Canada, Investissements du Canada en appui à l’accès équitable aux tests de dépistage, aux traitements et aux vaccins contre la COVID‑19, document d’information, 14 décembre 2020.

[58]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020. Dans une mise à jour fournie par Affaires mondiales Canada, le ministère a indiqué que 365 millions de dollars sur les 1,6 milliards annoncés sont consacrés à l'aide humanitaire. Voir la réponse écrite d’Affaires mondiales Canada, janvier 2021.

[59]            Affaires mondiales Canada, Document d’information – Le Canada octroie des fonds pour contenir la pandémie de COVID‑19, document d’information, 5 avril 2020.

[60]            FAAE, Témoignages, 2session, 43législature, 19 novembre 2020.

[61]            Au 17 décembre 2020, le Canada avait déclaré un financement de plus de 82 millions de dollars aux Services de surveillance financière du Bureau des affaires humanitaires des Nations unies pour la réponse humanitaire globale à la COVID‑19, dont 60 millions de dollars pour le Plan mondial de réponse humanitaire à la COVID‑19 de l'ONU. À cette date, le plan de réponse était financé à hauteur de 40,3 % de ses besoins et le Canada avait fourni 1,6 % du financement.

[62]            CARE Canada, mémoire, publié le 8 décembre 2020.

[63]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020.

[64]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020.

[65]            En 2019, les dépenses en matière d’aide publique au développement (APD) représentaient 0,30 % du revenu national brut (RNB) combiné de tous les pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Cette année-là, l’effort moyen des pays était de 0,38 %. Les dépenses canadiennes d’APD en pourcentage du RNB ont atteint un sommet de 0,54 % en 1975. Voir OCDE, Augmentation de l’aide consentie par les membres du CAD en 2019, dont une plus forte proportion est dirigée vers les pays les plus pauvres, 16 avril 2020, p. 6; et OCDE, Statistiques pour les pays membres du CAD, « Compare your Country: Official Development Assistance 2019 – Preliminary Data, », base de données, consulter le 1er février 2021.

[66]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[67]            Voir Comité permanent interorganisations, More support and funding tools for local and national responders.

[68]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020. Selon les informations fournies par Affaires mondiales Canada, environ 78 % des fonds de la réserve de crise du gouvernement du Canada sont alloués à des agences multilatérales, 9,6 % à des ONG basées au Canada et 9,4 % à des ONG nationales ou locales. La ventilation spécifique des contributions au Plan mondial de réponse humanitaire à la COVID‑19 de l’ONU n'a pas été fournie. Voir la réponse écrite d’Affaires mondiales Canada, janvier 2021.

[69]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[70]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[71]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[72]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[73]            Ibid.

[74]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[75]            Voir gouvernement du Canada, Les organismes de bienfaisance canadiens enregistrés qui mènent des activités à l’extérieur du Canada, lignes directrices, numéro de référence CG‑002, révisé le 27 novembre 2020.

[76]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020.

[77]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[78]            Par exemple, concernant les 400 millions de dollars annoncé par le gouvernement du Canada en septembre 2020, Taryn Russell, chef, politiques et défense des droits, Aide à l’enfance Canada, a indiqué que « nous n’avons pas encore eu d’indications sur la destination de cet argent ». Voir FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020. En ce qui concerne le financement global d’un milliard de dollars qui a été annoncé, Zaid Al‑Rawni, président-directeur général, Islamic Relief Canada, a déclaré : « Nous n’avons pas reçu de fonds, parce que nous n’avons encore rien demandé au titre de ce fonds. Le mécanisme n’est toujours pas clair – du moins pour nous – quant à la façon dont cet argent sera dépensé ». Voir FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020.

[79]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020.

[80]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 26 novembre 2020.

[81]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 8 décembre 2020.

[84]            Kate Holton, « ‘Go for it,’ says grandmother who got world’s first Pfizer COVID vaccine in Britain », Reuters, 8 décembre 2020.

[85]            FAAE, Témoignages, 19 novembre 2020 (L’hon. Bob Rae, ambassadeur et représentant permanent du Canada auprès des Nations unies à New York). Voir aussi Justin Trudeau, premier ministre du Canada, De nouveaux accords pour obtenir des candidats-vaccins supplémentaires contre la COVID‑19, communiqué, 25 septembre 2020. La Facilité COVAX est le mécanisme mondial d’approvisionnement de COVAX, qui comprend aussi un volet en recherche et développement. La Facilité COVAX regroupe le pouvoir d’achat des pays participants et donne des garanties de volume aux fabricants d’un portefeuille de candidats-vaccins afin que les pays participants aient un accès juste et équitable aux vaccins, en fonction d’un cadre d’attribution élaboré par l’Organisation mondiale de la santé. Le système de garantie de marché [AMC en anglais] du COVAX est un instrument de financement distinct conçu pour soutenir l’accès de 92 pays à revenu faible ou intermédiaire à des doses de vaccins sûrs et efficaces financés par des donateurs. L’initiative COVAX comprend le pilier vaccins de l’Accélérateur d’accès aux outils COVID-19 (Accélérateur ACT), qui vise aussi à favoriser la collaboration internationale pour le dépistage et le traitement. Pour de plus amples renseignements, voir Gavi, COVAX; et Gavi, COVAX AMC. Pour la liste des 92 pays admissibles au système de garantie de marché, voir COVAX, « AMC-Eligible economies » Speed, Scale, Access, 15 décembre 2020 [disponible en anglais seulement].

[87]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 3 décembre 2020. Le gouvernement du Canada a investi plus de 865 millions de dollars pour les diverses initiatives relevant de l’Accélérateur ACT. Voir Affaires mondiales Canada, Investissements du Canada en appui à l’accès équitable aux tests de dépistage, aux traitements et aux vaccins contre la COVID‑19, document d’information, 14 décembre 2020.

[88]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[89]            Thomas Bollyky, mémoire, publié le 4 décembre 2020.

[90]            Comité international de la Croix-Rouge, mémoire, publié le 16 décembre 2020.

[91]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 19 novembre 2020.

[92]            Ibid.

[93]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[94]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[95]            Rachel Aiello, « If Canada has excess COVID‑19 vaccines, they ‘absolutely’ will be shared: PM », CTV, 17 décembre 2020.

[96]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[97]            FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.

[98]            Comité international de la Croix-Rouge, mémoire, publié le 16 décembre 2020.

[99]            L’Accélérateur ACT a quatre piliers ou axes de travail : les outils de diagnostic, les traitements, les vaccins et les systèmes de santé. Voir Organisation mondiale de la santé, Accélérateur ACT – Foire Aux Questions.

[100]          FAAE, Témoignages, 2e session, 43e législature, 1er décembre 2020.