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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 010 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 30 novembre 2020

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Soyez tous les bienvenus à la 10e séance du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier la situation d'urgence à laquelle les Canadiens font face avec la deuxième vague de la pandémie de la COVID-19, en mettant l'accent sur les aspects liés à la santé mentale.
    Chers témoins, je vous remercie d'avoir accepté de comparaître aujourd'hui. Vous disposerez de sept minutes pour faire vos exposés.
    Pendant la première heure de la séance, nous accueillons la Dre Victoria Dawson, docteure en médecine, qui témoignera à titre personnel. Nous recevons également la Dre Nadia Fairbairn, clinicienne scientifique du British Columbia Centre on Substance Use; la Dre Ann Collins, présidente de l'Association médicale canadienne; et Karen Hetherington, présidente de la Division du Québec de l'Association canadienne pour la santé mentale.
    Pendant la deuxième heure de la séance, nous accueillerons le Dr David Edward-Ooi Poon, fondateur de l'organisme Faces of Advocacy; Mme Renée Ouimet, directrice, Mouvement Santé mentale Québec; et M. Peter Cornish, psychologue, Stepped Care Solutions. Nous recevrons également des représentantes du Women's Health Research Institute, notamment Mme Lori Brotto, directrice exécutive, et la Dre Gina Ogilvie, directrice associée.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride. Je vais commencer par vous fournir quelques renseignements découlant de la motion qui a été adoptée à la Chambre le mercredi 23 septembre 2020.
    Comme le Comité siège actuellement en mode hybride, ce qui signifie que les députés peuvent participer en personne ou par vidéoconférence, tous les membres, peu importe leur mode de participation, seront comptés pour le quorum. Le pouvoir du Comité de siéger est toutefois limité par l'utilisation prioritaire des ressources parlementaires, qui est déterminée par les whips. Toutes les questions font automatiquement l'objet d'un vote par appel nominal, à moins que le Comité ne consente, à l'unanimité ou avec dissidence, à ce qu'il en soit autrement. Enfin, le Comité peut délibérer à huis clos, pourvu qu'il tienne compte du risque potentiel que présentent de telles délibérations sur le plan de la confidentialité, étant donné que certains membres participent à distance.
    Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes et, comme vous le savez, c'est toujours la personne qui intervient qui apparaît sur le site Web, plutôt que l'ensemble des membres du Comité.
    Pour assurer le bon déroulement de la réunion, je vais énoncer quelques règles à suivre.
    Les gens qui participent virtuellement, qu'ils soient députés ou témoins, peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts dans le cadre de la réunion. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir entre le parquet, le canal anglais et le canal français. Avant de prendre la parole, veuillez cliquer sur l'icône du microphone afin d'activer le son. Une fois votre intervention terminée, veuillez mettre votre microphone en sourdine afin de réduire au minimum toute interférence.
    Je vous rappelle que les députés et les témoins doivent toujours adresser leurs commentaires à la présidence. Pour demander la parole en dehors du temps prévu pour les questions, les députés doivent activer leur microphone et déclarer qu'ils font un rappel au Règlement. Pour intervenir à la suite d'un rappel au Règlement soulevé par un collègue, les députés doivent utiliser la fonction « Lever la main » afin de prévenir la présidence et de s'inscrire sur la liste des intervenants. Pour ce faire, il faut cliquer sur « Participants » au bas de l'écran. Une fois la liste affichée, vous verrez au niveau de votre nom que vous pouvez cliquer sur l'option « Lever la main ».
    Veuillez parler lentement et clairement. À moins de circonstances exceptionnelles, il est obligatoire, pour les personnes qui participent à distance, d'utiliser des casques d'écoute dotés de microphone. Si vous éprouvez des difficultés techniques, veuillez en informer le président. Veuillez noter que, le cas échéant, nous devrons peut-être suspendre la séance pendant quelques minutes, car nous devons nous assurer que tous les députés sont en mesure de participer pleinement à la séance.
    Les gens qui participent en personne sont invités à faire ce qu'ils font habituellement quand tous les membres du Comité se réunissent en personne dans une même salle. Veuillez garder à l'esprit les directives du Bureau de régie interne concernant le port du masque et les protocoles sanitaires. Si vous voulez attirer mon attention, faites-moi signe de la main ou, à un moment opportun, prononcez mon nom. Si vous souhaitez invoquer le Règlement, attendez le moment opportun et indiquez clairement que vous souhaitez le faire.
    En ce qui concerne la liste des intervenants, le greffier du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre d'intervention de tous les députés, qu'ils participent à la séance en personne ou à distance.
    Nous allons maintenant passer à nos témoins.
    Soyez les bienvenus, chers témoins. Nous allons commencer par entendre la Dre Victoria Dawson.
    Vous avez la parole, docteure Dawson, pendant sept minutes.
     Honorables membres du Comité, je vous remercie infiniment de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui. Je tiens également à remercier l'ensemble des témoins.
    Je suis la Dre Victoria Dawson. Je travaille à Wasaga Beach et Collingwood, une région rurale de l'Ontario, où je suis propriétaire d'un cabinet de médecine familiale. Je suis ici aujourd'hui pour parler de l'incidence que la deuxième vague de la COVID a principalement sur nos aînés, puisqu'ils représentent la majorité de ma clientèle. J'ai estimé qu'il était important de prendre en compte l'aspect communautaire des événements. Je prodigue des soins dans des maisons de soins infirmiers, en plus d'exploiter une clinique.
    J'ai rencontré ma clientèle à de nombreuses reprises, et je constate qu'il y a beaucoup de préoccupations. L'aide aux personnes âgées est limitée. Je me rends compte qu'en ce qui concerne la santé mentale, bon nombre des soins sont prodigués de façon virtuelle. Malheureusement, les aînés que je soigne sont âgés de 80 et 90 ans, et ils ne sont pas en mesure d'avoir accès à des technologies comme les téléphones intelligents et Internet, ni même d'utiliser un ordinateur. Un grand nombre d'entre eux sont laissés à eux-mêmes dans leur maison de soins infirmiers parce qu'ils ont été isolés des autres résidants.
    Nos aînés sont atteints de multiples problèmes de santé, comme la démence. Ils sont incapables de reconnaître les personnes avec lesquelles ils communiquent par vidéoconférence. Cependant, ils s'en sortent mieux lorsqu'ils reçoivent des visites en personne. Certains patients qui souffrent de maladies pulmonaires obstructives chroniques sont essoufflés et ne peuvent pas nécessairement dialoguer par vidéoconférence ou émettre des sons suffisamment clairs pour être entendus. Il leur est donc très difficile de parler au téléphone ou de communiquer à l'aide de médias virtuels.
    La surdité est aussi un énorme problème. Je constate que, lorsque je pratique la télémédecine, mes patients ne peuvent pas m'entendre. Donc, lorsqu'ils essaient d'entrer en communication avec d'autres personnes âgées ou des membres de leur famille, ils ne peuvent rien entendre, ce qui est très problématique. C'est aussi un obstacle très difficile à surmonter. Il y a même des patients qui ont des troubles de la parole. Il est parfois très difficile d'être entendu, comme nous l'avons découvert avec mon microphone. Les patients atteints de troubles de la vue ne peuvent pas voir les membres de leur famille. De plus, ils peuvent avoir une lacune du champ visuel qui les empêche de voir les membres de leur famille.
    Ces personnes âgées m'ont fait savoir qu'elles se sentaient très seules. Bon nombre d'entre elles expriment des idées suicidaires. Elles veulent mourir parce qu'elles ne peuvent pas tolérer un ou deux mois de plus sans pouvoir voir les membres de leur famille ou communiquer avec eux.
    Différents membres de la collectivité tentent d'entrer en contact avec les personnes âgées et expriment également certaines inquiétudes. L'une de ces inquiétudes concerne les appareils intelligents. Les personnes âgées sont incapables d'avoir accès à des soins.
    La peur est l'autre problème qu'affrontent les aînés, car ils n'ont pas accès, comme vous et moi, à différentes ressources qui leur indiquent ce qui se passe dans la collectivité. Malheureusement, les médias sont à l'origine d'une grande partie de cette peur. Je constate que bon nombre de mes clients âgés ne viennent pas se faire examiner ou soigner parce qu'ils ont peur de se déplacer. Je connais une dame très gentille qui a souffert de douleurs abdominales pendant huit mois, puis nous avons appris qu'elle avait un cancer avancé. Malheureusement, il a été diagnostiqué aux urgences, parce qu'elle avait trop peur d'aller ailleurs pendant des mois.
    En ce qui concerne la COVID, il y a un manque général de personnel soignant dans les maisons de soins infirmiers qui permettrait de protéger ces patients contre la maladie. Ces patients sont complètement négligés. En tentant de les protéger, nous leur nuisons aussi.
    Je suis ici aujourd'hui afin de déterminer si nous pouvons faire quelque chose pour ces patients et essayer de trouver un juste équilibre, afin qu'ils soient capables de communiquer avec le monde extérieur. Nous devons créer des cercles sociaux à leur intention parce que leur capacité de parler à d'autres personnes leur permet de s'épanouir.
    Je suis ici aujourd'hui pour signaler que nous avons besoin d'offrir de meilleurs services de santé mentale à nos aînés. Une grande partie des services de santé mentale sont excellents, et j'ai orienté des gens vers des soins virtuels comme le volet ontarien du programme Retrouver son entrain. Cependant, les personnes âgées ne sont pas en mesure de communiquer au moyen de ces dispositifs, si bien qu'elles se retrouvent souvent sans personne à qui parler. Les maisons de soins infirmiers manquent de personnel. Un grand nombre de membres des familles des personnes âgées visitaient ces maisons, que ce soit pour leur préparer des repas ou les aider à s'habiller, mais maintenant on les laisse dans leur chambre, où ils sont incapables de communiquer ou d'obtenir l'aide supplémentaire dont ils ont besoin.
    Je suis ici aujourd'hui pour parler au nom de cette population oubliée. En protégeant les aînés, nous leur avons aussi fait du tort. Je pense qu'en notre qualité de membres du Comité, d'êtres humains et de fournisseurs de soins de santé, nous devons vraiment nous porter à la rencontre de cette communauté et nous assurer qu'elle est bien protégée.

  (1110)  

     Beaucoup d'aînés me disent qu'ils ont une ou deux bonnes années et qu'ils veulent les passer avec leur famille. Comment pouvons-nous exaucer leur souhait?
    Je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps, et je veux aussi parler des gens de la classe moyenne, de la classe ouvrière et des familles qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts. J'ai constaté une augmentation considérable de la toxicomanie et de l'alcoolisme parmi ce groupe. Les aînés n'en sont pas épargnés, et on oublie que c'est ainsi que certains d'entre eux essaient également de résoudre leurs problèmes. Je comprends pourquoi des entreprises ont dû fermer leurs portes, mais certains propriétaires y avaient consacré toute leur vie.
    Par ailleurs, nous observons des répercussions chez les enfants, car ils se trouvent dans des milieux turbulents. Ils sont incapables de faire face à cette situation. Nous constatons un taux élevé de dépression et d'anxiété chez les enfants d'à peine cinq ou six ans, lorsqu'ils prennent conscience de ce qui leur arrive. Ils ne comprennent pas nécessairement ce qui se passe à l'école. Ils comprennent ce qu'est un virus, mais ils n'arrivent pas à comprendre pourquoi maman et papa ne peuvent pas payer leurs factures ou pourquoi ils doivent se rendre à la banque alimentaire cette semaine, ne sachant pas d'où viendra le prochain chèque de paie.
    J'ai aussi vu des familles qui sont devenues des sans-abri pendant cette période, et elles n'ont droit à aucun soutien. Je travaille vraiment sans relâche dans ma collectivité et j'essaie de m'assurer que tout le monde est bien pris en charge, mais en toute franchise, je n'ai pas les ressources nécessaires pour ces patients. Je ne sais pas quoi faire. J'en ai parlé à d'autres membres de ma collectivité, et ils expriment les mêmes préoccupations. Le taux élevé d'idées suicidaires et les cas de problèmes de santé mentale... le nombre de gens qui se rendent aux urgences est quelque chose que nous ne pouvons même pas gérer.
    Dans les collectivités rurales, nous avons vraiment besoin d'aide. Les aînés constituent la priorité absolue. Ce sont eux qui souffrent le plus. Je veux simplement souligner ce à quoi nous faisons face, du point de vue de la médecine familiale, pour aider ces patients. Il faut peut-être une aide financière. Nous avons besoin de quelque chose.

  (1115)  

    Cela fait sept minutes, docteure. Pourriez-vous conclure rapidement?
    Oui, merci. J'ai terminé.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à la Dre Nadia Fairbairn, clinicienne scientifique au Centre de la Colombie-Britannique sur la consommation de substance.
    Nous vous écoutons, docteure Fairbairn. Vous avez sept minutes.
     Bonjour, monsieur le président, madame et monsieur les vice-présidents, et distingués membres du Comité permanent de la santé.
    Je suis la Dre Nadia Fairbairn, et j'occupe le poste de clinicienne scientifique et professeure adjointe au département de médecine de l'Université de la Colombie-Britannique. Je suis ici au nom du Centre de la Colombie-Britannique sur la consommation de substance, une organisation provinciale dont le mandat est d'élaborer, d'aider à mettre en œuvre et d'évaluer des approches fondées sur des données probantes en matière de consommation de substances et de toxicomanie tout au long du continuum de soins, de la prévention au traitement en passant par la réduction des méfaits et le rétablissement.
    J'ai été invitée à prendre la parole ici aujourd'hui au sujet des répercussions de la COVID-19 sur la santé mentale des Canadiens et la consommation de substances. Je m'attarderai sur la consommation de substances, tout en reconnaissant les effets intersectionnels de cette pandémie sur les niveaux de dépression, d'anxiété, de violence familiale et d'expériences négatives pendant l'enfance, entre autres.
    Examinons d'abord l'alcool, la substance la plus couramment consommée au Canada et qui, en 2018, était à l'origine de 15 milliards de dollars de coûts médicaux et sociaux au Canada. La consommation excessive d'alcool est liée à une augmentation de la mortalité, du risque de cancer et d'autres maladies chroniques, bien que de nombreux Canadiens et cliniciens ne connaissent pas les directives canadiennes en matière de consommation d'alcool à faible risque.
    Un récent sondage Nanos a révélé que la consommation d'alcool durant la pandémie est en train d'augmenter dans toutes les tranches d'âge au Canada. Selon une récente étude des IRSC, près d'un répondant sur quatre a déclaré avoir consommé plus d'alcool, tant en quantité qu'en fréquence, pendant la pandémie. Le problème est particulièrement prononcé chez les 18 à 34 ans, près de la moitié d'entre eux ayant déclaré une augmentation. Près d'un Canadien sur 10 qui boit de l'alcool déclare avoir eu du mal à contrôler sa capacité d'arrêter de boire depuis le début de la pandémie de COVID-19.
    Faute de temps, je ne serai pas en mesure de parler des autres drogues licites, comme le tabac ou le cannabis, mais ces substances ont également contribué à l'augmentation des coûts et des dommages pour la santé et la société pendant la pandémie de COVID-19. Nous savons avec certitude qu'une consommation accrue de substances est associée à un fardeau accru des préjudices sociaux, des méfaits pour la santé et de la dépendance.
    Pourquoi en est-il ainsi? La consommation de substances comme l'alcool est un moyen pour certaines personnes de gérer ou de contrôler leur stress, ainsi que les symptômes de dépression ou d'anxiété dans le contexte de la pandémie. De plus, reconnaissant la dépendance sociétale à l'égard de l'alcool et craignant les conséquences d'une restriction de l'accès à l'alcool en période de confinement imposé par les autorités de santé publique, la plupart des provinces, à l'exception de l'Île-du-Prince-Édouard, ont déclaré que la vente d'alcool au détail était un service essentiel. Cette décision était judicieuse, car, en l'absence de soins appropriés, le sevrage d'alcool peut entraîner la mort. Afin d'alléger le fardeau financier de l'industrie hôtelière, les municipalités ont également assoupli les restrictions d'accès à l'alcool en autorisant les restaurants à proposer de l'alcool avec les plats à emporter. Les prix de détail de l'alcool ont également été révisés à la baisse.
    Dans le cas des drogues illicites, la situation est désastreuse. La crise des surdoses continue d'avoir des répercussions importantes sur les collectivités et les familles canadiennes. Avec une moyenne de 11 décès et 13 hospitalisations par jour entre janvier 2016 et mars 2020, il s'agit de l'une des plus graves crises de santé publique de l'histoire du Canada.
    En période de pandémie de COVID-19, les surdoses mortelles et non mortelles surviennent partout au Canada aux taux les plus élevés jamais enregistrés. Le nombre de décès en Colombie-Britannique a atteint de nouveaux sommets au printemps; en juin, un record mensuel de 181 décès étaient attribuables à la toxicité de drogues illicites. Cinq ans après la déclaration de l'état d'urgence en santé publique à l'échelle provinciale, la Colombie-Britannique est maintenant sur le point de connaître le plus grand nombre de surdoses en un an. L'Alberta a révélé en septembre que 301 personnes étaient mortes au printemps à cause d'une surdose — un autre record. En Ontario, le nombre de décès par surdose a augmenté de près de 40 % au cours des premiers mois suivant l'arrivée de la COVID-19 dans la province, pour atteindre bientôt un total de 2 200 surdoses, soit le plus grand nombre jamais enregistré. Les surdoses ont fait bien plus de victimes que la COVID-19 dans ces trois provinces, qui sont les plus durement touchées par la crise des opioïdes, mais notre réponse a été plus modeste en comparaison. Plus encore qu'en matière de santé mentale, les besoins non comblés, qui sont déjà importants, ne cessent de croître.
    Sur une note plus personnelle, je dirais que c'est la période la plus difficile pour pratiquer la médecine spécialisée dans le traitement de la toxicomanie. J'ai dû faire plusieurs appels à des familles et à des proches après la mort de patients à cause d'une surdose pendant la pandémie, et je suis de tout cœur avec chacun d'entre eux dans leur souffrance et leur deuil. C'est chaque collectivité du Canada qui est touchée.
    De nombreuses raisons expliquent pourquoi le nombre de décès par surdose a augmenté en période de pandémie. Tout d'abord, la contamination de l'approvisionnement en drogues illicites par des produits synthétiques, comme le fentanyl et des substances analogues, ainsi que par d'autres substances toxiques, comme le très puissant benzodiazépine étizolam, est à l'origine de la crise des surdoses au Canada depuis 2016.

  (1120)  

    Au cours de la pandémie de COVID-19, les chaînes d'approvisionnement ont été perturbées par les restrictions de voyage et les mesures frontalières. Voilà pourquoi les changements dans l'approvisionnement en drogues illicites ont entraîné une contamination accrue des drogues au Canada. En même temps, les consommateurs de drogues ont eu moins accès à des mesures de soutien et à des services, et ils ont hésité à se faire soigner dans le cadre du système de soins de santé en raison des inquiétudes concernant les risques d'exposition à la COVID-19 dans les établissements de soins de santé.
    Cette situation a donné lieu à une diminution du recours aux services de réduction des méfaits, comme les centres de consommation supervisée, ainsi qu'à un accès réduit aux services de traitement, comme les lits de désintoxication et de rétablissement. La consommation de substances a augmenté, de même que les taux de rechute, car bien des gens ont du mal à gérer le stress en cette période difficile.
    Il existe un certain nombre de mesures qui peuvent atténuer les méfaits accrus que nous observons en raison de la consommation de substances pendant la deuxième vague de COVID-19 au Canada.
    Nous devons sensibiliser les gens aux méfaits potentiels de la consommation d'alcool et les encourager à suivre les recommandations pour une consommation modérée à faible risque.
    Nous devons comprendre et envisager la possibilité que la pandémie entraîne un risque accru de rechute chez les personnes qui se rétablissent de troubles liés à la consommation de substances. Nous devons améliorer le dépistage et le traitement des personnes qui risquent une rechute et améliorer l'accès à des traitements fondés sur des données probantes et à des services axés sur le rétablissement dans le cadre d'un système complet de soins pour la désintoxication.
    Il faut améliorer, de toute urgence, l'encadrement clinique fondé sur des données probantes et offrir une formation accrue aux professionnels de la santé afin de les doter des connaissances nécessaires pour fournir des soins aux personnes ayant des problèmes de consommation de substances et de toxicomanie, l'objectif étant de renforcer les capacités du système de santé. L'accès à des solutions de rechange pharmaceutiques est nécessaire pour prévenir les surdoses et autres graves méfaits causés par un approvisionnement en drogues illicites contaminées.
    Enfin, je suis d'accord avec l'administratrice en chef de la santé publique du Canada, l'Association canadienne des chefs de police et l'association Moms Stop The Harm, un réseau de familles canadiennes touchées par les méfaits et les décès liés à la consommation de substances; en effet, pour atténuer les méfaits pressants de la consommation de substances et être en mesure de traiter la toxicomanie comme une maladie, il est essentiel de décriminaliser les personnes qui consomment des drogues, comme l'a approuvé à l'unanimité le conseil municipal de Vancouver la semaine dernière.
    Je tiens à remercier Mme Cheyenne Johnson et le Dr Perry Kendall, du Centre de la Colombie-Britannique sur la consommation de substance, le ministre de la Santé de la Colombie-Britannique, Adrian Dix, et la directrice de la santé publique de la Colombie-Britannique, Bonnie Henry, d'avoir fait preuve de leadership en Colombie-Britannique en cette période de grands besoins.
    Merci beaucoup de votre attention.
    Merci, docteure Fairbairn.
    Nous allons maintenant entendre la Dre Ann Collins, présidente de l'Association médicale canadienne.
    À vous la parole, docteure Collins. Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    C'est un honneur pour moi de témoigner devant vous aujourd'hui. Je suis la Dre Ann Collins. Au cours de mes 30 ans de carrière, j'ai enseigné la médecine familiale, dirigé un cabinet à temps plein, servi dans les Forces armées canadiennes et travaillé dans des maisons de soins infirmiers. Aujourd'hui, en tant que présidente de l'Association médicale canadienne, je suis fière de représenter nos 80 000 membres, dont un grand nombre travaillent d'arrache-pied depuis plus de neuf mois.
    Nos systèmes de santé et les personnes qui y travaillent étaient stressés bien avant la pandémie. Aujourd'hui, nous avons atteint un tournant. Je suis profondément préoccupée par la santé mentale des Canadiens. Je suis très inquiète pour mes collègues médecins et les fournisseurs de soins de santé qui travaillent à leurs côtés. On prévoit que les traumatismes psychologiques constitueront les effets les plus durables chez les travailleurs de la santé après la pandémie. Ayant moi-même passé près d'un an en première ligne dans des circonstances intenables, je peux attester que l'épuisement professionnel est un grave sujet de préoccupation. Nous tirons la sonnette d'alarme.
    Lorsque les Canadiens ont frappé sur des poêles et des casseroles, ils ont exprimé haut et fort leur appui à ceux qui risquent leur vie sur les lignes de front. Les casseroles sont maintenant nichées dans les tiroirs de cuisine, mais la pandémie n'a pas cessé. Elle a empiré. Le risque pour les travailleurs de première ligne persiste.
    Au début de la pandémie, un manque de coordination des réserves de fournitures d'urgence entre les gouvernements fédéral et provinciaux a entraîné un déploiement inadéquat du matériel, comme les ventilateurs, et un manque généralisé d'équipement de protection individuelle en quantité suffisante pour les travailleurs de la santé de première ligne. Les médecins étaient aux prises avec un dilemme éthique, car ils n'étaient pas protégés au moment de traiter des patients, risquant ainsi de mettre en danger leur famille, en plus de devoir prendre des décisions sur l'attribution d'interventions vitales.
    L'anxiété explicite qui hante les médecins de première ligne est palpable. Ils courent un risque élevé de développer des symptômes d'épuisement professionnel, de dépression, de détresse psychologique et d'idées suicidaires. Horaires de travail exténuants, incertitude, crainte de risques personnels et familiaux, expériences mettant en cause des patients gravement malades et mourants — voilà autant de conditions qui créent une anxiété sans précédent.
    L'épuisement professionnel des médecins était un problème national bien avant l'arrivée de la pandémie de COVID-19. En 2018, 30 % des médecins ont signalé des niveaux élevés d'épuisement professionnel. Les conséquences des problèmes de ressources humaines en santé, les inefficacités du système et la surcharge de travail créent une culture d'épuisement professionnel durable. Aucune thérapie, aucun cours de yoga, ni aucune méditation de pleine conscience ne pourra la faire disparaître. Les conséquences vont beaucoup plus loin. Elles conduisent à de mauvais résultats pour les patients.
    Nous demandons à tous les ordres de gouvernement et aux autorités sanitaires de travailler ensemble pour protéger les Canadiens et les fournisseurs de soins de santé pendant la deuxième vague de COVID-19 grâce à une série de quatre investissements et mesures stratégiques.
    Premièrement, tous les gouvernements reconnaissent et soulignent la nécessité d'appuyer les fournisseurs de soins de santé dans le cadre de leurs messages de sensibilisation à la COVID-19. Rester muets sur le sujet n'a rien de bénin. La sécurité des patients dépend de la stabilité de la santé mentale des professionnels de la santé.
    Deuxièmement, le gouvernement fédéral devrait investir dans la création d'un groupe de travail sur la santé mentale liée à la COVID-19, qui mobilise des associations nationales de santé mentale et des professionnels en la matière pour répondre aux besoins en santé mentale des fournisseurs de soins pendant et après la résurgence de la COVID. De plus, le gouvernement devrait augmenter le financement destiné aux provinces et aux territoires afin d'améliorer l'accès des fournisseurs de soins de santé aux ressources spécialisées en matière de santé mentale, lesquelles sont limitées.
    Troisièmement, nos concitoyens vulnérables et les personnes vivant dans les régions rurales et éloignées sont touchés de manière disproportionnée. Le gouvernement fédéral doit financer et mettre en place des services de santé mentale et de mesures de soutien durables et fondés sur des données probantes pour répondre à la demande accrue de soins de santé mentale en raison de la COVID-19. Nous devons également intensifier l'accès aux services essentiels de soutien social et instaurer des soins virtuels. Nous accueillons favorablement l'engagement d'étendre l'accès à Internet haute vitesse dans tout le pays. C'est ce qui permettra d'assurer un accès équitable aux soins virtuels. Toutefois, le succès des soins de santé numériques dépend non seulement de l'expansion des services à large bande, mais aussi de la mise au point de programmes et de mesures d'information sur les soins de santé numériques afin de garantir l'égalité d'accès pour les groupes marginalisés.

  (1125)  

     Enfin, nous ne pouvons tout simplement pas faire abstraction du risque d'une interruption des soins de santé. Il est absolument essentiel d'éviter une telle situation. Il faut des mesures de santé publique, ainsi qu'un investissement fédéral. Ainsi, un fonds fédéral de soins de santé et d'innovation d'une valeur de 4 milliards de dollars permettrait de remédier à l'arriéré des services médicaux, d'élargir les équipes de soins primaires et de renforcer la capacité de la santé publique.
    Or, ces mesures n'existent pas en vase clos. C'est grâce à leur combinaison que nous pourrons assurer la sécurité sanitaire du Canada.
    Les Canadiens doivent avoir la certitude que leur système de soins de santé est là pour eux, que les médecins et les travailleurs de première ligne sont eux-mêmes en bonne santé. L'épuisement professionnel est en voie de devenir le plus grand défi pour le système de santé, ce qui signifie une éventuelle dégradation des soins pour nos patients.
    Chaque tournant doit être géré d'une main ferme. Le Canada fait ce qui s'impose. Toute grande victoire nécessite deux éléments: un ennemi commun et la solidarité. Nous avons un ennemi commun — c'est un virus —, mais sans solidarité, les dommages et les pertes ne feront qu'augmenter. Ce virus se moque de la politique. Il ne reconnaît pas les frontières fédérales, provinciales ou territoriales et ne se soucie pas d'un soi-disant intérêt. Ces cas ne sont pas des chiffres, mais bien des vies, et nous devons nous battre tous ensemble pour ces gens.
    Monsieur le président, permettez-moi de remercier le Comité de m'avoir invitée à lui faire part des convictions des médecins du Canada.
    Merci, docteure.
    Nous entendrons maintenant Mme Hetherington, présidente de l'Association canadienne pour la santé mentale.
    Je vous donne la parole pour sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie de l'invitation à venir témoigner aujourd'hui.
    Je vais parler en français alors j'espère que l'interprétation fonctionne.
    Je suis la présidente de l'Association canadienne pour la santé mentale. Je suis ici pour vous parler au nom de la division du Québec.
    Je ne perdrai pas mon temps à parler des statistiques puisque les Dres Fairbairn, Dawson et Collins ont très bien expliqué les effets. Je vais surtout parler de ce que nous pouvons faire. Je vais parler des solutions possibles à la crise que nous vivons.
    Tout le monde est touché par la question de la COVID-19, mais chacun est touché d'une différente façon. La question est de savoir comment on peut changer cette tendance afin d'avoir un effet global sur la population canadienne. En 2019, l'Association canadienne pour la santé mentale a publié un document intitulé « Cohésion, collaboration, collectivité : Faire progresser la promotion de la santé mentale au Canada ». Selon nous, la promotion de la santé mentale est la dernière frontière. C'est le dossier à explorer et à développer.
    La promotion diffère de la prévention. La prévention est centrée sur la réduction des symptômes. La promotion est centrée sur une santé mentale positive. Il faut cultiver une santé mentale individuelle et collective positive. Ces interventions doivent être faites tout au long de la vie. Cela inclut toutes les populations, y compris les jeunes et les personnes âgées aux différentes expériences de la vie. La promotion peut se faire dans des milieux différents, comme les écoles, les milieux locaux et les milieux de travail. La bonne nouvelle, c'est votre mandat. Le gouvernement fédéral a cette responsabilité. Il peut donc avoir un leadership ciblé dans la crise actuelle.
    La promotion de la santé mentale est inclusive. Elle touche les riches, les pauvres, les personnes déjà diagnostiquées avec une maladie mentale et les gens à risque. Elle permet de développer une campagne qui respecte ces différences et qui touche la question du changement perpétuel de cette crise.

  (1130)  

    Au début de la pandémie, partout au Canada, les gens ont affiché des arcs-en-ciel et on disait souvent « ça va bien aller ». C'était très réconfortant aux mois de mars, d'avril et de mai, mais, demain, nous serons en décembre. Est-ce aussi réconfortant?
    La promotion de la santé mentale est une chose complexe. Ce qui va me parler ne vous parlera peut-être pas et ne parlera peut-être pas à la population la plus vulnérable.
    À la division du Québec de l'Association canadienne pour la santé mentale, nous croyons qu'il faut une approche de santé mentale communautaire pour garantir que la campagne rejoindra les plus vulnérables de plusieurs façons différentes. Les organismes communautaires possèdent une connaissance intime de la vulnérabilité des individus, des familles et des communautés. Ils ont l'expérience de l'autre couche d'exclusion que ces groupes vivent actuellement. Les discours de tous les témoins qui m'ont précédé en sont la preuve. Les personnes les plus vulnérables de notre communauté connaissent une autre couche d'exclusion vraiment difficile.
    Que peut-on faire?
    Selon nous, le seul moyen réside dans les organismes communautaires. Nous avons déjà des modèles de campagnes. La Semaine de la santé mentale est mise en œuvre par l'Association canadienne de la santé mentale depuis maintenant 70 ans. Il y a cinq ans, il y a eu la campagne Get Loud. Cette année, en raison de la pandémie, nous estimons qu'il faut réellement en parler. Il faut des campagnes globales et des interventions très ciblées qui rejoignent les différents besoins de la population. La seule façon de le faire est par la promotion de la santé mentale et par les organismes communautaires pancanadiens.
     Au Québec, par exemple, il y a le programme Vieillir en bonne santé mentale. Les gens n'arrivent pas à rester connectés ou ils n'ont pas accès aux technologies. Il faut vraiment être novateur. Comme je l'ai dit, c'est une question complexe. Il faut mobiliser les organismes communautaires qui peuvent réagir. Tous les mouvements communautaires ont un avantage.

  (1135)  

[Traduction]

    Ils peuvent changer de cap en un tournemain, et comme le virus de la COVID nous fait vivre une perpétuelle incertitude, nous devons nous réinventer en un tournemain.

[Français]

    Mes recommandations sont très claires. Le gouvernement doit s'engager à promouvoir la santé mentale. Il ne faut pas que cela se limite à l'incidence. En effet, il est prouvé que cela aura un effet, non seulement sur l'incidence de la COVID-19, mais sur tout le système de santé et les besoins en soins de santé.
    Je recommande donc que le gouvernement fédéral appuie la santé mentale communautaire, partout au Canada, en ayant comme mandat précis d'élaborer des programmes de promotion de la santé mentale novateurs et adaptés au contexte actuel.
    Ces programmes devraient favoriser une santé mentale positive par le truchement de messages positifs livrés à nos diverses collectivités et promouvoir la connectivité des citoyens, que ce soit à la maison, à l'école, dans les collectivités en général ou au travail.
    Je vous remercie.
    Merci, madame.

[Traduction]

    Nous commencerons maintenant la période des questions, mais il n'y aura de temps que pour un tour avec ce groupe.
    Commençons avec Mme Rempel Garner.
    Je vous donne la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'avais préparé toute une série de questions, mais je dois dire que ce que je viens d'entendre, particulièrement de la Dre Fairbairn et de la Dre Dawson, porte vraiment à réfléchir. Voici ce que je retiens de ce que vous venez de nous dire, toutes les deux. Premièrement, je reconnais que la COVID-19 est grave et que nous devrons tous nous serrer les coudes pour la prévenir. Je ne pose aucune question en ce moment, mais l'application prolongée des mesures mises en place a des effets collatéraux importants sur la santé. J'ai tout entendu: les problèmes de santé mentale, le risque d'isolement et de suicide, les décès liés aux opioïdes, la prévalence accrue des toxicomanies et de la dépression, les retards dans les chirurgies, l'intensification de la violence conjugale. Cependant, je pense que la phrase qui m'a frappée le plus est celle-ci: « En tentant de les protéger, nous leur nuisons aussi. »
    C'est ce qui m'empêche de dormir la nuit, en tant que législatrice. Comment pouvons-nous protéger le public contre la COVID-19 tout en comprenant que nous pouvons ainsi causer du tort? Je ne sais pas trop comment en parler en tant que législatrice, parce que je ne voudrais pas minimiser la gravité de la COVID-19, mais en même temps, il y a un grave problème ici.
    J'aimerais séparer mon temps entre la Dre Fairbairn et à la Dre Dawson, parce que vous êtes vraiment en première ligne en ce moment.
    Chacune de vous pourrait-elle me donner trois recommandations à court terme? Je sais, à la lumière de ce que la Dre Collins et Mme Hetherington nous ont dit, que nous avons besoin de solutions à long terme pour réformer le système de santé au Canada. Je ne saurais être plus d'accord, mais docteure Fairbairn et docteure Dawson, si vous étiez à ma place en ce moment, quelles seraient les trois choses que vous feriez à court terme pour trouver l'équilibre entre la nécessité de protéger la population contre la COVID-19 et celle de prévenir les problèmes que vous soulevez?
    Je commencerai par vous, docteure Fairbairn. Je n'ai que quatre minutes, donc si vous pouvez me répondre très brièvement, ce serait apprécié.
    Je vous remercie infiniment de cette question.
    Il semble que la COVID-19 en ait rajouté une couche sur tout ce qui clochait déjà dans le système de traitement des dépendances. Les besoins les plus urgents au confluent de la COVID-19 et des dépendances seraient, premièrement, d'élargir rapidement l'accès à des services fondés sur des données probantes pour le traitement des dépendances. J'inclus là-dedans les services de réduction des méfaits, comme l'ouverture de sites de consommation supervisée et la prescription de naloxone. Nous avons aussi besoin de lits en désintoxication et rétablissement. J'ai beaucoup de clients qui voudraient faire une cure de désintoxication, qui ont rechuté pendant la pandémie de COVID-19, mais les services offerts ont diminué en raison des précautions à prendre pour prévenir la propagation de la COVID-19. La grande priorité serait donc de rétablir tous les services nécessaires pour le traitement des dépendances.
    Deuxièmement, il faut élargir l'accès aux solutions de rechange pharmaceutiques à la drogue. Le fentanyl n'est pas prêt de disparaître. La présence de drogues contaminées ne s'est qu'accentuée pendant la pandémie, et le problème ne se réglera pas miraculeusement de lui-même. Il faut vraiment pouvoir offrir ces médicaments en toute urgence à ceux qui souhaitent éviter la surdose et la mort pour eux-mêmes, et toutes les conséquences collatérales pour leur famille et leur entourage.
    Troisièmement...

  (1140)  

    Docteure Fairbairn, il ne me reste que deux minutes — mon temps file —, et j'aimerais permettre à la Dre Dawson de nous présenter aussi sa perspective sur le traitement dans les régions rurales et éloignées.
    Certainement.
    Je vous pose la même question qu'à la Dre Fairbairn: quels sont les besoins les plus urgents pour trouver l'équilibre entre les politiques de lutte contre la COVID actuellement en place et les effets secondaires de tout cela sur la santé? Qu'est-ce qui pourrait changer? Que pourrions-nous faire différemment, en ce moment, pour contrer les problèmes que vous observez?
    Je pense qu'il faut vraiment commencer à offrir des soins en santé mentale à nos personnes âgées et trouver le moyen de le faire de manière sécuritaire, grâce aux tests de dépistage rapide, pour que des professionnels puissent aller les rencontrer en personne. Ces personnes vivent pour leur famille. Nous devons rétablir le lien avec elles. Nous devons envoyer des psychologues et d'autres professionnels rencontrer ces patients en personne.
    Malheureusement, contrairement à nous tous qui sommes présents dans l'univers numérique et qui pouvons nous connecter les uns aux autres, les personnes âgées n'ont pas grandi dans cet univers. Elles y ont peut-être été initiées il y a une quinzaine d'années. Ce n'est pas assez. Elles doivent pouvoir entretenir des liens avec les gens, voir des gens, voir leurs expressions faciales, voir leurs petits-enfants et les autres membres de leur famille.
    Je pense qu'il faut vraiment miser sur l'accès aux tests rapides pour rendre cela possible, créer une bulle sécuritaire pour nos personnes âgées, pour qu'elles puissent de nouveau voir cinq ou six personnes en toute sécurité. Encore une fois, il suffit d'utiliser des outils comme les tests rapides. Pour ces personnes, ce n'est rien d'attendre 15 minutes, mais on ne peut pas attendre des jours, des semaines ou des mois pour obtenir un résultat.
    Je suis très inquiète de la quantité d'alcool que les personnes âgées consomment. Comme les jeunes, elles utilisent l'alcool pour faire face à la situation. Il y a des patients qui viennent me voir en pleurant et qui me disent: « Docteure Dawson, je n'en peux plus! » Il y a des patients qui me racontent avoir lu un article sur l'aide médicale à mourir et vouloir l'obtenir, parce que leur famille est toute leur vie. Ils lisent ce genre d'article et se disent qu'ils ne veulent plus vivre.
    Que fait-on de ces personnes âgées qui ne peuvent pas obtenir d'aide? Elles ne peuvent pas utiliser BounceBack, en Ontario, parce qu'elles n'ont pas d'ordinateur. Il faut vraiment créer un groupe pour ces personnes, des cafés-rencontres dans le respect de la distanciation sociale pour que les gens puissent venir parler ou entrer en contact avec des membres de leur famille, pour essayer d'arrêter le cycle de la peur.
    Bien des gens n'osent pas aller rendre visite à leur grand-père ou à leur grand-mère parce qu'ils ont peur qu'ils en meurent. Soyons réalistes, ils mourront probablement avant d'autres choses que la COVID, surtout si nous mettons en place toutes les mesures de précaution appropriées.
    Pouvez-vous conclure, s'il vous plaît?
    Merci.
    Je vous remercie toutes les deux.
    Merci, madame Rempel Garner.
    Écoutons maintenant M. Fisher.
    Monsieur Fisher, la parole est à vous pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie infiniment tous nos experts ici présents, aujourd'hui. Nous vous sommes très reconnaissants de vos témoignages et de vos allocutions.
    J'adresserai mes observations et mes questions à la Dre Collins, qui vient de la côte Est, comme moi.
    Je vous remercie, docteure Collins, de vos bons services au sein de l'armée canadienne.
    Il est on ne peut plus évident que les problèmes de santé mentale ont bondi pendant la pandémie de COVID-19. Je me demande, docteure Collins, si vous pourriez nous parler un peu des principales populations qui vous préoccupent et des moyens que le gouvernement peut prendre pour mieux les aider pendant la pandémie.
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    Premièrement, je représente aujourd'hui les 80 000 membres de l'Association médicale canadienne, qui sont au front sans relâche depuis neuf mois. Je tiens à les remercier et à les féliciter de leur dévouement et de leur engagement.
    Je veux aussi mettre en relief ce à quoi ils sont exposés actuellement. Ils affichaient déjà des taux élevés de surmenage, comme nous en avions fait état en 2018. Cependant, en ces temps de pandémie, ils dont dû en plus gérer toute l'incertitude entourant l'équipement de protection individuelle, et nous entendons qu'il y en a toujours dans certaines régions. Ils sont aussi inquiets pour leur famille et eux-mêmes. Ils s'occupent chaque jour de personnes atteintes de la COVID-19, mais aussi de personnes souffrant de tous les effets collatéraux de la COVID-19 dont les témoins avant moi vous ont parlé.
    En leur nom, nous sommons le gouvernement de créer un groupe de travail sur les soins virtuels offerts pendant la pandémie de COVID-19, pour en examiner les effets, et de s'engager fortement à diffuser des messages de sensibilisation publique à la nécessité d'appuyer les professionnels de la santé.
    Parmi les autres populations profondément touchées par la situation, il y a nos personnes âgées; les autres témoins vous l'ont dit avec beaucoup d'éloquence.
    Pour ma part, j'aimerais mettre l'accent sur les jeunes. Dans le cadre de mon travail, au cours des 30 dernières années, j'ai vu le niveau d'anxiété augmenter chez les adolescents et même, chez les préadolescents. Cette anxiété a une incidence sur leurs études, sur leurs relations avec les membres de leurs familles, sur leurs relations avec leurs amis. Leurs parents et moi avons du mal à trouver des ressources adéquates pour répondre à leurs besoins.
    Je ne peux qu'imaginer l'effet de la COVID-19 sur ce groupe d'âge, compte tenu de toutes les perturbations auxquelles ils sont confrontés dans leurs études, de la perte de contacts sociaux et de toutes les inquiétudes liées à la pandémie; ils doivent déterminer qui est dans leur bulle ou non, qui ils peuvent voir ou non.
    Encore une fois, nous réclamons plus de services et de mesures de soutien social coordonnés entre les divers ordres de gouvernement et les autorités de santé, pour répondre aux besoins de cette population, ainsi que des personnes âgées, des Autochtones et des personnes vivant dans les régions rurales et éloignées du Canada.

  (1145)  

    Merci, docteure.
    L'une des premières choses que notre gouvernement a faites, pendant la renégociation de l'accord sur la santé, a été d'investir 5 milliards de dollars de plus sur 10 ans expressément pour répondre aux besoins en santé mentale.
    Voyez-vous déjà les résultats de cet investissement dans les systèmes de santé des provinces et des territoires?
    Nous sommes heureux des investissements effectués en santé mentale jusqu'ici, ainsi que des investissements faits pour répondre aux besoins actuels pendant la pandémie, depuis mars.
    Or, peu importe ce qui a été fait dans le passé, nous devons maintenant mettre l'accent sur ce qui se passe maintenant, être très conscients de ce que vivent nos professionnels de la santé, les membres des communautés vulnérables et l'ensemble des Canadiens en général. Nous devons trouver des façons, collectivement et en collaboration, d'améliorer la prestation de services, l'accès aux services et le nombre de professionnels qui offrent ces services.
    Premièrement, nous devons évaluer l'état actuel de la situation, en partie pour répondre aux besoins en santé mentale, mais aussi — il ne faut pas l'oublier — pour limiter la transmission du virus. Il faut déterminer quels seront les besoins associés à tout cela à court et à long terme.
    Docteure Collins, les éclosions et les décès dans les centres de soins de longue durée, au Canada, constituent l'une des plus grandes tragédies de la pandémie et probablement l'une des plus grandes tragédies de nos vies.
    Les effets qui en découlent sur la santé mentale dans les centres de soins de longue durée doivent être profonds. Comment pouvons-nous aider non seulement ceux qui vivent dans ces résidences, mais aussi ceux qui y travaillent?
    C'est un élément essentiel pour les professionnels de la santé et tous ceux qui travaillent à leurs côtés.
    Encore une fois, il faut élargir l'accès aux services dans les provinces, dans ce domaine, bien cibler les formes d'aide dont ils ont besoin. Nous avons besoin que ces personnes se portent bien; nous avons besoin qu'elles tiennent le coup. Pour leur part, elles ont besoin de se sentir soutenues, nous devons leur montrer qu'elles sont soutenues en étant présents sur leur terrain et en leur donnant accès aux soins dont elles ont besoin.
    Merci, monsieur Fisher.

[Français]

     Monsieur Thériault, vous avez la parole pour six minutes, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, je ne vous ai pas bien entendu. Comme j'entendais l'interprétation quand vous êtes passé au français et que votre voix était trop basse, je ne vous ai pas compris.
    Je suppose que c'est à mon tour de parler.

  (1150)  

    Oui, c'est à votre tour, monsieur Thériault.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais tous vous remercier.
    Nous avons une idée générale de ce qui se passe dans le domaine de la santé mentale. Il y a des gens autour de nous qui sont en dépression ou qui sont anxieux. Nous sortons un peu, quand même, et nous recevons des appels téléphoniques dans nos bureaux de circonscription. Ce matin, j'ai trouvé que la réalité cognait dur.
    Lors de la première vague, des témoins nous ont dit que la pandémie mettait en évidence ce que nous n'avons pas fait correctement, à savoir travailler en fonction du premier déterminant de la santé: la prévention. Nos manquements nous sautent maintenant à la figure.
    Si nous voulons faire de la promotion positive, nous avons l'occasion de nous reprendre et de rectifier le tir. Nous sommes en pleine deuxième vague et il faudrait avoir un signal clair.
    Tout ce dont vous avez besoin, ce sont des ressources; ce n'est pas seulement une question de coordination. Au cours des 25 dernières années, le financement des réseaux de santé s'est vraiment détérioré. Là où il y avait toujours des compressions, c'était en prévention de la santé mentale. La santé mentale a toujours été l'enfant pauvre des systèmes de santé.
    J'imagine que vous allez réclamer haut et fort du gouvernement fédéral qu'il donne un signal clair dès maintenant pour rétablir les réseaux de soins et augmenter rapidement les transferts en santé. Il doit y avoir du rattrapage à cet égard.
    Je vous prie de ne pas vous gêner pour le dire. Ce n'est pas faire de la politique. Dans notre cadre constitutionnel, les gens qui donnent des soins sont dans les territoires, dans les provinces, au Québec. Il faut que ces gens puissent planifier les choses.
    Madame Hetherington, vous avez de belles idées, mais il faut de l'argent pour les réaliser. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le gouvernement devrait annoncer aujourd'hui même, dans sa mise à jour économique, qu'il va augmenter les transferts en santé de façon considérable? Cela n'a plus aucun sens.
    Qui veut réagir à mes propos?
     Vous n'avez pas posé de question.
    Il faut avoir plus de ressources. Comme je l'ai dit, ce sont les programmes de prévention et de promotion qui permettront d'améliorer notre système de santé.
    Notre système de santé est dépassé par la situation. Il faut investir dans la prévention et dans la promotion, avant que la santé mentale des travailleurs ne se détériore complètement. C'est clair, net et précis: les provinces ont besoin de plus d'argent pour donner des services à la population. Tous les programmes de prévention relèvent des provinces, et celles-ci devraient avoir l'argent nécessaire pour les offrir. La promotion relève du provincial, mais également du fédéral.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous, monsieur Thériault. Il faut transférer plus d'argent aux provinces pour qu'elles aient plus de ressources. Cette fois-ci, il faut que ce soit clair: il faut investir dans la prévention et dans la promotion.
     Nous parlons de transferts, et des gens pourraient dire que beaucoup d'argent est dépensé pour la COVID-19, mais nous avons besoin d'investissements durables et structurants qui vont permettre à nos réseaux de se remettre sur pied et de corriger les erreurs qui ont été commises. Nous avons l'occasion de repartir à zéro, de repartir du bon pied.
    Madame Hetherington, dans le document que nous avons reçu ce matin, vers 10 heures, vous dites qu'une personne sur cinq sera atteinte d'un problème de santé mentale ou d'une maladie mentale. Votre organisme dit ceci:

D’après la Commission de la santé mentale du Canada, les coûts directs attribuables aux problèmes de santé mentale et aux maladies mentales (soins, services sociaux, soutien du revenu) s’élèvent au moins à 42 milliards de dollars par année. À titre de comparaison, on estime que les coûts directs liés aux soins contre le cancer, y compris les soins hospitaliers, étaient de 7,5 milliards de dollars en 2012, et que ceux liés à l’insuffisance cardiaque sont de 2,8 milliards de dollars par année. Ces coûts sont similaires à ceux enregistrés dans des pays présentant des conditions comparables, par exemple en Angleterre, ainsi qu’à l’échelle mondiale : selon l’Organisation mondiale de la Santé [...]
    Ce n'est vraiment pas négligeable.

  (1155)  

    Monsieur Thériault, il vous reste 30 secondes.
    On dit aux étudiants en médecine que la prévention est le premier facteur déterminant de la santé. Or, voici des chiffres qui démontrent qu'on ferait de très importantes économies et des gains d'efficacité si, une fois pour toutes, on renversait la vapeur en investissant carrément dans la prévention et, pour ce faire, en augmentant les transferts.
    Je suis absolument d'accord avec vous. C'est une occasion dont on peut profiter. La situation qui entoure la COVID-19 est très difficile, mais elle est aussi une occasion de changement. Elle nous offre la possibilité de rediriger les tendances et de se centrer sur la prévention et la promotion. On n'investit pas assez là-dedans; c'est clair, net et précis. C'est le temps de changer cela. Oui, il est temps de le faire.
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant M. Davies.
    Monsieur Davies, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie l'ensemble des témoins de leur présence ici aujourd'hui et de leurs témoignages captivants, qui portent beaucoup à réflexion.
    Docteure Fairbairn, je m'adresserai d'abord à vous. On dit très souvent ces derniers temps qu'il n'y a pas qu'une pandémie au Canada, mais deux. Bien sûr, il y a la pandémie de COVID, mais il y a aussi la crise des surdoses d'opioïdes qui a coûté la vie à plus de 15 000 personnes au cours des quatre dernières années seulement au Canada. Loin de moi l'idée de faire des comparaisons, mais nous avons perdu encore plus de vies de surdoses que nous n'en avons perdues jusqu'ici de la COVID.
    Le 28 octobre, docteure Fairbairn, vous avez cosigné un éditorial publié dans le Journal de l'Association médicale canadienne, dans lequel vous écrivez ce qui suit:
Il est crucial, si le Canada veut réussir à limiter la crise de la COVID-19, de prendre des mesures rapides et décisives. Nous avons actuellement besoin d'une réponse aussi énergique à la crise des surdoses.
    Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous décrire à quoi pourrait ressembler une réponse énergique à la crise des surdoses au Canada?
    Je suis totalement d'accord. C'est la stigmatisation associée aux dépendances et la non-acceptation du fait qu'il s'agit d'un problème médical qui explique le sous-investissement chronique dans les services offerts aux personnes souffrant de dépendances. Partout au Canada, nous perdons des personnes très jeunes par surdose.
    Il faut investir dans le système de santé et notamment établir, pour la première fois, un système complet de soins pour le traitement des dépendances décloisonné, dans lequel on assurerait la coordination des mesures de prévention, de traitement, de réduction des méfaits et de rétablissement pour que les gens aient accès à des services plutôt que de se heurter constamment aux portes fermées du système.
    Il faut élargir l'accès aux solutions de rechange pharmaceutiques, parce que ce sont des sources de drogue empoisonnées. Il faut avoir une conversation franche et réfléchir réellement à la décriminalisation des drogues. Il faut arriver à dissocier complètement la consommation de substances du système de justice pénale et traiter la chose comme un problème médical, puisque c'en est un.
    Les modifications à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ont leur importance. Il y a des modifications très importantes qui ont été apportées au début de la pandémie pour faciliter l'accès aux médicaments, pour le traitement par agonistes opioïdes, par exemple, donc c'est une mesure qui a été prise très rapidement au début de la pandémie. Il y a d'autres façons dont nous pourrions modifier cette loi pour mieux venir en aide aux personnes présentant un risque élevé de mort imminente par surdose, et c'est fondamental si nous voulons arriver à créer un système de traitement des dépendances dont les gens bénéficieront vraiment.
    Je vous remercie.
    Avez-vous remarqué une augmentation du nombre de personnes cherchant à obtenir un traitement pendant la pandémie de COVID?
    Oui. Nous avons remarqué une augmentation du taux de rechute. Je dois souligner que cela touche aussi les personnes âgées, la population gériatrique. Cela touche des personnes de tous âges. Nous observons des taux de rechute accrus à cause du stress et de l'isolement attribuables à la COVID, tandis que les services offerts ont diminué. Cette combinaison est telle que les gens se butent de plus en plus à des portes closes dans le système et ne peuvent recevoir aucun service. Je pense notamment aux services de traitement et de rétablissement, y compris aux services de réduction des méfaits si essentiels pour prévenir les surdoses chaque jour.

  (1200)  

    Je pense qu'il est relativement admis de nos jours que la dépendance a cette caractéristique unique que quand une personne demande de l'aide pour s'en sortir, il y a une fenêtre assez limitée à saisir pour que la personne se rétablisse effectivement. Je pense qu'il est communément admis qu'il faut offrir des traitements à la demande pour combattre ce problème. Pouvez-vous nous donner une petite idée de l'aptitude du Canada à offrir des traitements à la demande?
    Malheureusement, le traitement à la demande demeure l'exception à la règle dans les services offerts pour traiter les toxicomanies. La plupart du temps, quand quelqu'un veut suivre une cure de désintoxication ou obtenir des services de rétablissement, il y a une période d'attente considérable. Cette attente peut être très nuisible, et des gens mourront pendant cette période, parce qu'il est fondamental que les gens aient accès à des services au moment même où ils essaient d'y avoir accès.
    Je vous dirais que de manière générale, l'accès à des traitements à la demande est très inégal au pays. Le temps d'attente a empiré depuis l'apparition de la COVID-19. Les gens ne peuvent même plus s'inscrire à des listes d'attente, par exemple, parce que les services sont surchargés et qu'ils ne peuvent plus être offerts à autant de clients qu'avant la pandémie. Les traitements à la demande demeurent extrêmement limités. J'entends par là des traitements fondés sur des données probantes au moyen d'agents pharmacologiques pouvant vraiment sauver la vie des gens, comme la méthadone, la buprénorphine et des préparations à base de morphine.
    Merci.
    Comme vous le savez peut-être, le Nouveau Parti démocratique a depuis longtemps déjà comme politique officielle de prôner la décriminalisation des drogues. En juillet dernier, la porte-parole adjointe du NPD en matière de santé, Mme Jenny Kwan, et moi-même avons écrit à la ministre fédérale de la Santé pour lui demander l'application d'une exemption pancanadienne à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances afin de décriminaliser la possession de substances illicites pour usage personnel à titre de mesure provisoire d'urgence en matière de santé. Je crois que vous avez mentionné que le conseil municipal de Vancouver vient de formuler une demande d'exemption similaire pour la ville.
    À votre avis, à quel point est-il urgent...
    Vous en êtes déjà à six minutes. Pouvez-vous conclure?
    ... que le Canada adopte une politique officielle de décriminalisation afin que nous puissions traiter comme un problème de santé la consommation de drogue et les troubles qui en découlent? Le gouvernement fédéral semble être réticent à le faire.
    Je crois que c'est urgent. J'estime que dans le cadre des mesures d'urgence à prendre pour répondre à la deuxième vague de la pandémie, il convient d'envisager une décriminalisation à ce titre pour s'attaquer au problème de l'approvisionnement en drogues contaminées qui empoisonnent des Canadiens.
    Merci beaucoup, monsieur Davies.
    Cela met fin à la période consacrée aux questions.
    Merci à nos témoins pour le temps que vous nous avez consacré et l'expertise dont vous nous avez fait profiter. Merci pour vos excellentes réponses.
    Sur ce, nous allons nous interrompre quelques instants, le temps qu'on établisse la connexion avec les témoins suivants.
    Merci beaucoup.

  (1200)  


  (1205)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Bienvenue à tous.
    Pour cette seconde heure de séance, nous accueillons le Dr David Edward-Ooi Poon, fondateur de l'organisme Faces of Advocacy; Mme Renée Ouimet, directrice du Mouvement Santé mentale Québec; M. Peter Cornish, psychologue représentant Stepped Care Solutions; ainsi que Mme Lori Brotto et la Dre Gina Ogilvie, respectivement directrice générale et directrice associée du Women’s Health Research Institute.
    Nous allons maintenant entendre les déclarations de nos témoins. Chaque groupe a droit à sept minutes.
    À vous la parole, docteur Poon.
    Monsieur le président, je suis le Dr David Edward-Ooi Poon et je suis fondateur de Faces of Advocacy. Nous sommes une organisation citoyenne regroupant plus de 9 500 membres qui a été établie afin d'assurer la réunification des familles au Canada en toute innocuité pendant l'application des restrictions de voyage attribuables à la COVID-19. Tout indique que nous sommes directement responsables des exemptions pour la famille élargie annoncées le 2 octobre 2020 au titre des restrictions de voyage.
    Alors que les Canadiens se préparent à affronter une deuxième vague de COVID-19, les politiques gouvernementales doivent faire en sorte que les familles soient réunies et maintenues ensemble pour diminuer les risques qu'une crise de santé mentale s'immisce à l'ombre de la pandémie actuelle.
    Voici quelques commentaires de nos membres qui ont souffert d'une séparation familiale en raison de la COVID-19:
    « La vie ne vaut plus la peine d'être vécue... Les solutions sont hors de mon contrôle. Je ne sais pas pendant combien de temps encore je pourrai continuer ainsi. »
    « Bien que je n'aie jamais éprouvé de problèmes de santé mentale auparavant, après 225 jours de séparation, j'ai eu ma plus récente crise de panique pas plus tard qu'hier soir. »
    « Dans mon rôle de professionnel de la santé, je n'ai jamais parfaitement compris les toxicomanes avant cette séparation d'avec mon conjoint. Des sentiments incessants de désespoir, de détresse, de tristesse et d'anxiété (depuis le mois de mars) m'ont servi une leçon dont j'aurais bien pu me passer. »
    « Je pleure. Mon fils pleure. Il croit que c'est de sa faute. »
    « 2020 est une année difficile pour tout le monde. Imaginez lorsque vous devez la traverser sans votre famille. »
    Pour établir notre indicateur de la santé mentale, nous avons mené un sondage auprès de plus de 1 200 de nos membres en nous servant d'outils cliniques validés. Notre sondage a révélé des idées de suicide et d'automutilation presque deux fois plus fréquentes à l'issue d'une séparation familiale attribuable à la pandémie. Entre 60 % et 70 % des répondants présentaient des symptômes d'anxiété, de dépression ou de stress post-traumatique qui allaient de modérés à graves, alors qu'ils étaient 49 % à n'avoir jamais reçu un diagnostic de maladie mentale avant la séparation familiale. Seulement 34 % estimaient avoir accès à des mesures de soutien en santé mentale adéquates pendant la pandémie, et 84 % ont indiqué voir leur santé mentale se détériorer au fur et à mesure que cette séparation perdurait.
    Il faut absolument mettre en place une stratégie fédérale coordonnée au bénéfice de tous les Canadiens, y compris les résidents permanents et temporaires. Notre mémoire comporte six recommandations. Je vais vous parler de quatre d'entre elles.
    La recommandation numéro un est la règle de Donna. Mme Donna McCall était une infirmière canadienne. Ses enfants qui vivent aux États-Unis n'ont pas pu venir la visiter au Canada alors qu'elle était mourante. Elle a dû leur faire ses adieux via FaceTime. Les séquelles d'une telle situation sur la santé mentale d'une personne peuvent se faire ressentir pendant toute sa vie. La réunification des familles doit être priorisée afin de protéger la santé mentale des Canadiens. Il faut pour ce faire que différents ministères, dont ceux de la Santé, de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté et de la Sécurité publique, conjuguent leurs efforts afin de mettre en place une solution raisonnable de telle sorte que les membres d'une même famille puissent être réunis en cette période de crise.
    Notre deuxième recommandation vise l'adoption d'un protocole pour les derniers adieux. Il doit y avoir des lignes directrices fédérales pour faire en sorte que des accommodements raisonnables...

  (1210)  

    Je vous prie de m'excuser, docteur Poon. Puis-je vous demander de ralentir un peu de manière à ce que nos interprètes puissent mieux vous suivre?
    Toutes mes excuses.
    Pour le protocole des derniers adieux, il faut mettre en place des lignes directrices fédérales prévoyant des accommodements raisonnables pour que les familles canadiennes puissent assurer une présence convenable au chevet de leurs proches. Même lorsqu'une famille est réunie dans une même ville, les hôpitaux n'ont pas toujours les mêmes règles quant à la présence au chevet, surtout en fin de vie.
    Dans notre mémoire, vous trouverez le témoignage bien concret d'une infirmière aux soins intensifs décrivant toute l'ampleur du désarroi ressenti par les familles en raison de ce manque de clarté quant au protocole de fin de vie. Pour autant que des ressources suffisantes soient disponibles, notamment pour ce qui est des équipements de protection individuelle, les hôpitaux doivent permettre une présence sécuritaire et adaptée à la culture de certains proches au chevet des patients qui sont en phase critique.
    Depuis le début de la pandémie, il est en effet arrivé que des patients ne puissent faire leurs adieux à des membres de leur famille alors même que ceux-ci se trouvaient dans l'hôpital. Nous avons maintenant suffisamment d'équipements de protection individuelle. Nous pouvons communiquer à chacun les consignes de sécurité à suivre. Une personne qui ne peut pas être présente pour les rites funèbres en dernier hommage à un proche peut en ressentir les répercussions pendant très longtemps. C'est donc une problématique à laquelle il faut s'attaquer pour le mieux-être mental des Canadiens devant composer avec la pandémie.
    J'en arrive à notre troisième recommandation. La Loi canadienne sur la santé devrait prévoir un mandat fédéral en matière de santé virtuelle. Il s'agit de permettre la facturation des consultations en mode virtuel et par téléphone pour les médecins de première ligne et les spécialistes de la santé mentale de telle sorte que les Canadiens puissent bénéficier de soins en santé mentale accessibles, complets et transférables. À l'intérieur de ce mandat, il faut considérer que des médecins autorisés à travailler au Canada susceptibles d'être déplacés pendant la pandémie doivent pouvoir continuer à offrir des traitements virtuels.
    À titre d'exemple, un médecin de la Saskatchewan qui doit aller travailler en Ontario pendant la pandémie devrait demeurer apte à appeler ses patients en Saskatchewan pour leur offrir des soins. La Loi canadienne sur la santé permettrait ainsi d'assurer la continuité et l'uniformité des traitements. À l'heure actuelle, la Saskatchewan le permet, mais pas l'Ontario. C'est la raison pour laquelle il faut un mandat fédéral.
    Notre recommandation numéro 6 porte sur la stratégie à adopter en matière de santé pour la sortie de crise. Nous avons besoin d'un programme national de vaccination contre la COVID-19 administré par le gouvernement fédéral. Si la distribution du vaccin est confiée aux provinces, il pourrait y avoir des iniquités touchant les populations les plus vulnérables, une situation qui pourrait avoir des effets vraiment néfastes sur la santé mentale des nombreux Canadiens qui en seraient témoins. Nous avons déjà constaté à quel point la santé mentale des Canadiens peut se détériorer lorsqu'ils voient certains de leurs concitoyens bafouer les directives en matière de santé publique ou refuser de porter un masque. Je vous laisse imaginer comment les choses risquent de se passer en l'absence d'un processus de distribution transparent et équitable dans le cadre d'un programme national de vaccination contre la COVID-19.
    Les vaccins contre la COVID-19, lorsqu'ils deviendront disponibles, devront être distribués gratuitement et de façon équitable, notamment au bénéfice des personnes âgées et immunodéficientes. Cette campagne doit s'accompagner du déploiement partout au pays d'un système de surveillance de pointe permettant de bien mesurer les taux de réponse et d'atteinte, la portée de l'inoculation et l'ampleur des éclosions. Il faut que cela se fasse à l'échelle fédérale, plutôt qu'au niveau des provinces, afin d'assurer la mise en oeuvre de l'ensemble du programme en toute transparence et avec un maximum de cohérence.
    Notre stratégie pour la sortie de crise comporte un autre volet. Une fois qu'il aura été établi que les tests de dépistage de la COVID-19 produisent des résultats raisonnablement précis, il faudra envisager la tenue d'une enquête fédérale à ce sujet pour voir s'il est possible de renoncer à la période d'isolement de 14 jours. Celle-ci est pour l'instant l'un des principaux obstacles à la réunification des familles, car il est impossible pour certains de s'absenter pendant deux semaines complètes pour être auprès d'un proche. Il est donc nécessaire de procéder à une enquête fédérale sur l'efficacité et l'utilité des tests.
    La famille est essentielle dans la vie comme dans la mort. La pandémie nous expose à des problèmes de santé mentale dans les deux cas. Notre mémoire recommande des stratégies pour réunifier les familles en toute sécurité et offrir des accommodements raisonnables pour l'accompagnement convenable d'un proche en fin de vie, tout en prenant des mesures pour la promotion et la protection de la santé mentale.
    Merci, monsieur le président.

  (1215)  

    Merci, docteur Poon.
    La parole est maintenant à la représentante du Mouvement Santé mentale Québec.

[Français]

     Madame Ouimet, vous avez la parole pour sept minutes.
    Je vous remercie de nous avoir invités.
    Je vous amène dans le domaine de la promotion et de la prévention en santé mentale.
    Nous sommes un regroupement d'organismes communautaires voué à la promotion et à la prévention. Nous avons des groupes membres dans tout le Québec et existons depuis 1955.
    Notre mandat est de créer, de développer et de renforcer la santé mentale, c'est-à-dire d'agir pour essayer de maintenir en tout temps une population en bonne santé mentale, que ce soit dans la population comme telle, dans les milieux de travail, ou d'autres.
    Je n'ai pas entendu les témoins plus tôt, mais il y a une chose que j'aimerais que vous gardiez en tête en sortant de cette séance. La santé mentale est quelque chose de bon, de positif; il ne s'agit pas de maladie mentale. Quand on parle de santé mentale, on parle d'une richesse individuelle et collective. L'Organisation mondiale de la santé nous dit que, sans santé mentale, il n'y a pas de santé. C'est important de se le rappeler.
    La santé mentale est un équilibre dynamique entre les différentes sphères de notre vie. Manifestement, ces temps-ci, ce n'est pas un équilibre facile à maintenir. Cependant, promouvoir la santé mentale, c'est véritablement travailler à accroître le bien-être collectif, quotidiennement, et aider la population à développer ses facteurs de robustesse en santé mentale. Cela s'inscrit tout le temps, partout, pendant tout le parcours de la vie, de l'enfance jusqu'à la vieillesse.
    La pandémie nous a révélé qu'il y avait déjà bien des gens qui n'allaient pas bien. Il y avait bien des jeunes qui allaient à l'école en étant dans la détresse et en vivant de l'anxiété de manière intense, bien des enseignants qui manquaient de ressources, et bien des gens dans le système de santé qui étaient à bout de souffle. La pandémie nous a permis — peut-être que cela s'avérera positif — de regarder la situation à la loupe et de découvrir que bien des choses allaient moins bien dans notre société. Il y a des personnes qui rebondissent très bien dans cette situation, mais il y en a d'autres pour qui c'est beaucoup plus difficile.
    Bien des gens qui disent que nous sommes dans le même bateau; or, ce n'est pas le cas. Nous sommes tous sur le même océan, mais il y a des personnes qui ont des tout petits bateaux en carton, et il y en a d'autres qui sont sur des paquebots. Même dans la pandémie, nous ne sommes pas tous égaux, dans la même situation. Il est important de se le rappeler.
    J'espère que l'on tirera des leçons de cette pandémie. Dans le domaine de la promotion, il y a deux secteurs où il est important d'agir. D'abord, il y a lieu d'agir sur les déterminants sociaux de la santé. Actuellement, on sait que les personnes les plus démunies et les plus fragilisées ont plus de problèmes de santé mentale. Il faut s'attaquer à la lutte contre la pauvreté et l'accès à l'éducation. Il y a aussi lieu de porter une attention aux interventions politiques pour qu'elles soient toujours universelles et de concevoir des politiques publiques qui intègrent la santé mentale. Comme je le disais au début, sans santé mentale, il n'y a pas de santé tout court.
    Au Mouvement Santé mentale Québec, nous avons mis au point sept astuces. Nous avons décrit, en mots simples, ce qu'on appelle les facteurs de robustesse en santé mentale. Vous les trouverez sur notre site Web, en français et en anglais. Un chercheur américain a fait une recherche auprès de soldats américains qui avaient été emprisonnés pendant huit ans et qui sont sortis de prison sans choc post-traumatique. Il voulait découvrir que ce qui leur avait permis, après avoir souffert et été emprisonnés, d'éviter d'avoir un choc post-traumatique. Ce qui en ressort, ce sont ces facteurs de protection, qui consistent à agir et à créer des liens importants, qui sont fondamentaux, comme l'a mentionné M. Edward-Ooi Poon plus tôt, à se ressourcer, à découvrir, et ainsi de suite. Je vous invite à aller voir notre site pour connaître tous ces facteurs de protection qu'il faut intégrer dans nos vies, dans nos politiques, dans nos écoles, auprès des aînés, en tout temps.
    J'ai lu plusieurs recherches sur la promotion de la santé mentale dans le cadre de la pandémie. Parmi les éléments que j'ai relevés, dont vous avez déjà sûrement entendu parler, il y en a un qui ressort et qui protège beaucoup la santé mentale, c'est le fait d'avoir confiance en nos autorités.

  (1220)  

     Pendant la première vague, il y a eu moins de détresse au Canada et au Québec qu'aux États-Unis ou dans d'autres pays parce que les gens faisaient confiance aux autorités. Il est important de maintenir cette confiance.
    Il faut toujours avoir accès à une information juste. Selon une recherche, le fait d'avoir un fort sentiment de cohérence protège notre santé mentale. Un fort sentiment de cohérence, c'est quand nous pouvons comprendre ce qui nous arrive, avoir l'information pour y faire face et y donner un sens, et trouver les mesures à prendre.
    Il est important de rappeler que nous pouvons tous favoriser un sentiment de cohérence chez les gens en leur donnant une information juste et des exemples de ce qui donne du sens, et en les aidant à trouver des solutions quand ils n'y arrivent pas par eux-mêmes.
    On a souvent parlé des émotions. Récemment, j'entendais une chercheuse parler de l'importance d'accueillir nos émotions, quelles qu'elles soient, avant qu'elles nous éclatent en plein visage. C'est un facteur de protection de la santé mentale. Il faut aussi écouter les émotions des autres, parce que c'est un baromètre. Les émotions reflètent un besoin, et il faut y répondre. Il y a parfois de la colère sociale et nous intervenons. Cela a un effet positif sur la santé mentale de la population. Il y a plein d'autres émotions.
    Pendant la pandémie, il est important de nourrir les émotions positives et de parler des gens qui vont bien. Il y a des entreprises qui se démarquent et qui trouvent des solutions innovantes et extraordinaires. On met en place des politiques vraiment intéressantes et il est important de les nommer, de demander...
    Madame Ouimet, votre temps est écoulé.
    Je vais finir en soulignant l'importance d'avoir des milieux de travail bienveillants qui protègent notre santé mentale. On sait qu'il y a 24 % moins de détresse psychologique dans ces milieux. Un autre facteur de protection très important est de briser l'isolement social.
    Je vous remercie.
    Merci, madame.

[Traduction]

    Nous allons maintenant entendre le représentant de Stepped Care Solutions.
    Monsieur Cornish, vous avez sept minutes.
    Je vais vous parler des programmes de promotion de la santé mentale qui sont offerts, en mettant plus particulièrement l'accent sur l'Espace mieux-être Canada, un portail financé par le gouvernement fédéral qui a été lancé par Stepped Care Solutions en partenariat avec Jeunesse J'écoute et Homewood Santé.
    En ma qualité de chercheur, je vais également vous entretenir du rôle que peut jouer la télésanté pour accroître l'accès aux soins pendant la pandémie. Mon travail auprès des trois ordres de gouvernement me permettra de traiter aussi du soutien que le fédéral pourrait apporter aux provinces et aux territoires.
    Mon entreprise à but non lucratif, Stepped Care Solutions, est le principal partenaire administratif du portail Espace mieux-être Canada. Notre équipe diversifiée comprend des psychologues, des travailleurs sociaux, des experts en informatique et, peut-être le plus important, des personnes qui ont vécu l'expérience de la maladie mentale.
    Nous avons d'abord mis au point le modèle 2.0 de notre programme à Terre-Neuve-et-Labrador avant de le déployer dans l'ensemble de la province aussi bien pour les mesures pour la santé de la population que pour les soins cliniques. Nous nous employons maintenant à mettre en oeuvre la même approche dans les Territoires du Nord-Ouest. C'est ce modèle qui a guidé la mise en place de l'Espace mieux-être Canada, un exercice mené au mois d'avril en 10 jours à peine. C'est une période vraiment très courte pour la mise en service d'un portail virtuel. Nous nous efforçons maintenant d'améliorer l'expérience utilisateur en nous inspirant du modèle de Stepped Care. Il faut dire que la structure de départ a été mise sur pied très rapidement, car nous voulions d'abord et avant tout rendre accessibles aux Canadiens les outils et le counselling dont ils avaient besoin.
    Nous sommes tout de même conscients de l'importance de la qualité de l'expérience pour les utilisateurs d'un portail en mode virtuel. L'apparence et la convivialité d'un portail correspondent en fait à ce que nous appelons en santé mentale les facteurs communs qui contribuent grandement à produire de bons résultats, une considération liée de près à la relation à établir avec le patient et à l'empathie qui doit s'en dégager. Nous cherchons en fait à reproduire la vision romanesque du médecin de campagne qui, par son caractère même et sa personnalité, permet au patient d'avoir l'impression que tout va bien aller et qu'il est entre bonnes mains.
    N'importe quel Canadien qui visite le portail de l'Espace mieux-être aura le choix entre 11 programmes indépendants fondés sur des données probantes qui sont accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine. On peut y trouver notamment un soutien immédiat par message texte en cas de crise, des outils d'autoévaluation et de suivi du bien-être mental, des outils autoguidés basés sur la thérapie cognitivo-comportementale, du soutien entre pairs, du mentorat et des cours en ligne, et du counselling individuel.
    Jusqu'à maintenant, près de 700 000 personnes ont utilisé le portail. De ce nombre, quelque 60 000 se sont inscrites pour obtenir des soins continus. Lors d'un sondage mené il y a quelques mois auprès d'un échantillon aléatoire de nos utilisateurs, 78 % ont indiqué qu'ils recommanderaient le portail à un ami, ce qui témoigne de leur satisfaction.
    Certains sondages réalisés à l'échelle nationale révèlent que les gens ont des préoccupations relatives à la protection de leur vie privée et craignent devoir payer pour les programmes offerts sur le portail. Ce n'est bien sûr pas le cas — tout est gratuit —, mais nous sommes conscients que de telles perceptions existent. Pour ce qui est de la protection de la vie privée, nous avons découvert que certains ajustements assez simples étaient possibles lorsque nous avons demandé aux gens comment nous pourrions améliorer leur expérience de visite et le portail dans son ensemble. Nous apportons maintenant les aménagements nécessaires pour donner suite aux préoccupations ainsi exprimées.
    J'aimerais traiter du rôle de la télésanté d'une manière générale et pour ce qui est plus particulièrement d'un meilleur accès aux soins pendant la pandémie. Des sondages récents au sujet des expériences de soins cliniques virtuels, y compris des sondages sur le portail Espace mieux-être Canada, indiquent que les patients apprécient la télésanté mentale beaucoup plus que nous l'aurions cru au départ. Les cliniciens, mes collègues psychologues, les travailleurs sociaux, les psychiatres et les médecins ne partagent pas cet enthousiasme au sujet de la télésanté. Je crois qu'il nous faudra investir dans la formation et les mesures de soutien pour que les professionnels de la santé en viennent à affectionner davantage cette formule qui plaît à la population.
    Je tiens aussi à souligner que la pandémie nous a appris que la télésanté ne se limite pas à la téléthérapie et offre bien d'autres possibilités qui n'ont pas encore été exploitées.

  (1225)  

    La téléthérapie consiste à utiliser des plateformes comme Zoom pour faire ce que nous faisons normalement, c'est-à-dire offrir des soins en psychiatrie ou en psychothérapie. Nous constatons que cette façon de faire est tout aussi efficace, mais le monde numérique nous offre bien d'autres possibilités si l'on parvient à accélérer un processus d'innovation dont le système de santé a besoin depuis longtemps. Nous pouvons ainsi notamment continuer à investir dans le déploiement de portails comme l'Espace mieux-être Canada, de programmes pour la santé de la population et de mesures de tutorat collectif comme un webinaire accessible à des milliers de personnes en même temps.
    Il y a aussi des possibilités pour un suivi continu du mieux-être — ce que nous ne faisons pas beaucoup pour l'instant — et l'accès aux données pour les usagers de notre système de santé. Le tout pourrait être déployé à l'échelle nationale en milieu clinique de même que via une plateforme comme l'Espace mieux-être Canada.
    On pourrait en outre permettre un accès plus rapide aux soins. Grâce à Stepped Care 2.0, les gens peuvent avoir accès sur-le-champ à une variété de soins. Sur le portail, ils peuvent bénéficier immédiatement des services d'un conseiller ou de nos programmes autoguidés.
    Certains sondages semblent indiquer que la télésanté favorise un accès plus équitable aux soins. Nous constatons que la clientèle est plus uniformément répartie entre hommes et femmes sur le portail Espace mieux-être Canada par rapport à ce que nous pouvons observer en milieu clinique. La répartition raciale des utilisateurs est également plus représentative de notre population.
    Je veux vous exposer en terminant certains domaines pour lesquels je préconiserais un rôle permanent pour le gouvernement fédéral. Il faudrait qu'il investisse dans l'infrastructure technologique. Nous savons que dans le nord du Canada et la plupart des régions rurales, l'accès à large bande est difficile, si bien que les services sont souvent offerts via satellite. Il faut que cela change, car on ne peut pas accepter que l'accès aux programmes offerts sur l'Espace mieux-être Canada soit plus difficile dans les régions rurales et éloignées du Canada.
    Il faut poursuivre le déploiement des programmes pour la santé des populations et concevoir un plus grand nombre de programmes autoguidés de meilleure qualité. Les gens apprécient vraiment ces programmes. Ce sont ceux vers lesquels ils se tournent le plus.

  (1230)  

    Vous en êtes à sept minutes, monsieur Cornish. Je vous prierais de conclure.
    Je voudrais dire en guise de conclusion que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer en intégrant les paliers municipal, provincial et national afin de combler le vide qui existe dans l'offre de services en santé mentale. Il y a en effet un manque au chapitre des soins à offrir de toute urgence à ceux qui en ont le plus besoin, y compris les sans-abri et les toxicomanes. Un tel soutien pourrait être fourni en rendant accessibles à grande échelle notre modèle et notre portail.
    Merci, monsieur Cornish.
    Nous allons maintenant passer aux représentantes du Women's Health Research Institute.
    Madame Brotto ou docteure Ogilvie, vous avez sept minutes.
    Merci de nous avoir invitées à discuter avec vous aujourd'hui.
    Je tiens à souligner que les locaux du Women's Health Research Institute sont situés sur le territoire ancestral traditionnel non cédé des peuples salish du littoral qui comprennent les nations de Musqueam, des Squamish et des Tsleil-Waututh.
    Pour ce qui est de la COVID-19, les données subdivisées en fonction du sexe indiquent un taux de mortalité clinique plus élevé pour les hommes. Il y a toutefois des exceptions dans certains pays, comme l'Inde, où ce taux est plus élevé chez les femmes. Les auteurs d'un article publié récemment dans la revue The Lancet Global Health se demandaient si ces taux plus élevés pour les femmes pouvaient être attribuables à des facteurs liés à leur sexe. Nous savons déjà qu'il peut y avoir dans un contexte de pandémie des degrés d'exposition et des effets différents pour les femmes, les filles, les membres des minorités sexuelles et de genre, les pourvoyeurs de soins et les autres travailleurs essentiels dans les occupations où les femmes prédominent.
    Notre institut a mis au point une étude en deux volets combinant un sondage et une analyse des anticorps provenant d'un échantillon de sang séché. Les observations que nous allons vous présenter aujourd'hui visent uniquement à vous donner un aperçu des résultats en matière de santé mentale.
    Je veux souligner le travail de toute notre équipe du Women's Health Research Institute, de nos collègues du BC Children's Hospital Research Institute ainsi que de tous les étudiants et stagiaires, de même que le financement obtenu de notre BC Women's Health Foundation.
    L'un des points forts de notre projet, c'est qu'il s'appuie sur sept cohortes qui sont représentatives des femmes en Colombie-Britannique. Plus de 40 000 personnes ont accepté qu'on communique avec elles dans le cadre de recherches. Ces personnes ont reçu une invitation par courriel qui décrivait les objectifs de l'étude et ont obtenu un consentement électronique.
    Le lien les menait ensuite au sondage, qui comprenait un module principal axé sur une enquête épidémiologique exhaustive sur les symptômes et les risques liés à la COVID-19, les données sociodémographiques, les antécédents médicaux et l'attitude vis-à-vis des vaccins. Il y avait ensuite quatre modules axés sur la consommation de substances psychoactives, les résultats psychosociaux et la violence sexiste, les comorbidités sous-jacentes, dont le VIH, ainsi que les conséquences économiques et les perturbations dans les soins de santé. Nous avons utilisé des échelles cliniques validées, le cas échéant, comme pour les résultats psychosociaux.
    À la fin des modules du sondage, les personnes ont été invitées à envoyer le lien du sondage à un autre membre de leur ménage qui s'identifiait comme étant d'un autre sexe ou d'un autre genre. Elles ont également été invitées à fournir leur adresse pour recevoir une trousse pour l'analyse de sang séché afin que soit mesurée la réponse anticorps. Ces trousses sont en cours de préparation.
    Les gens ont été stratifiés en neuf tranches d'âge de cinq ans, de 25 à 69 ans, avec un objectif de recrutement d'environ 750 personnes pour chacune de ces strates, pour un total de 6 750 participants. Les données dont nous allons parler aujourd'hui sont basées sur les réponses d'environ 5 300 personnes, sur un total d'environ 15 000 invitations, ce qui nous a donné un taux de réponse d'environ 30 %.
    Je veux seulement préciser que bien que nous ayons effectué le sondage à un moment précis dans le temps, pour certaines des questions, nous avons demandé aux gens de réfléchir à ce qu'elles ont vécu pendant trois périodes spécifiques: les trois mois qui ont précédé la pandémie, ou la phase prépandémique; la phase 1 de la pandémie, soit de la mi-mars à la mi-mai; et la phase 2, qui a commencé après la mi-mai. Nous continuerons à recueillir des données longitudinales.
    Je voudrais vous fournir une partie de nos résultats.
     L'âge moyen des participants était de 51 ans, et la plupart des répondants, soit 87 %, ont indiqué être de sexe féminin. En ce qui concerne le genre, 59 personnes ont indiqué être trans ou non binaires; 31 % étaient des travailleurs essentiels et plus de la moitié ont déclaré souffrir de maladies chroniques.
    Dans cet exposé, nous ferons état des taux de dépression, de dépression modérée et grave, d'anxiété, de solitude, de détresse, de violence conjugale et de consommation d'alcool et de cannabis dans les trois phases définies de la pandémie.
    Nous prévoyons faire rapport sur ces analyses selon le sexe, la culture et l'ethnicité, y compris l'identité autochtone et la race, ainsi que d'autres variables sociodémographiques, une fois que la taille de notre échantillon cible sera atteinte.

  (1235)  

    Merci, docteure Ogilvie.
    En ce qui concerne la dépression, tout d'abord... En comparant les hommes et les femmes, et conformément à ce que nous aurions prédit sur la base des pandémies antérieures, nous avons observé une augmentation considérable des symptômes de dépression, qui étaient beaucoup plus importants chez les femmes que chez les hommes, à mesure que nous passions de la phase prépandémique à la phase 1. Nous avons constaté que lorsqu'on a commencé à assouplir les mesures liées à la pandémie, il y a eu une diminution.
    Lorsque nous avons séparé les données selon l'âge plutôt que le sexe, nos données ont montré que c'est le groupe d'âge le plus jeune — celui des 25 à 30 ans — qui était le plus durement touché et que dans notre échantillon de personnes trans et non binaires, les résultats étaient nettement plus élevés que ceux des femmes.
     Nous sommes ensuite passés au taux de dépression grave. Chez les femmes, il s'est multiplié par quatre entre la phase prépandémique et la phase 1. Il était beaucoup plus élevé chez les femmes que chez les hommes. En ce qui concerne le groupe de personnes trans et non binaires, le taux de dépression grave a doublé entre la phase prépandémique et la phase 1.
    L'anxiété peut être définie comme la peur de l'inconnu combinée à une perte de contrôle. En utilisant une mesure validée de l'anxiété concernant les inquiétudes et l'angoisse, nous avons constaté que les caractéristiques étaient très similaires à celles liées à la dépression: des taux nettement plus élevés chez les femmes et une augmentation nettement plus importante entre la phase prépandémique et la phase 1, le groupe d'âge le plus jeune, celui des 25 à 30 ans, étant le plus durement plus touché. Nous avons constaté la même chose lorsque nous nous sommes concentrés spécifiquement sur l'anxiété cliniquement significative: près de 20 % des femmes présentaient une anxiété cliniquement significative.
    L'une des caractéristiques de la dépression est la solitude, qui était le sujet d'une question distincte. Là encore, les résultats par sexe se sont répétés, et les personnes de 25 à 30 ans étaient les plus touchées.
    En ce qui concerne la violence conjugale, les données émergentes montrent que, depuis le début de la pandémie de COVID-19, le nombre de signalements de violence conjugale a augmenté partout dans le monde en raison des mesures de confinement obligatoire. Nous avons posé des questions sur une liste de comportements, tels que le fait d'être frappé, jeté, frappé à coups de pied, battu, etc. Nos données étaient basées uniquement sur la population féminine en couple.
    Excusez-moi, madame Brotto, mais vous en êtes à sept minutes. Pourriez-vous conclure?
    Merci.
    Les taux de violence conjugale ont presque doublé entre la phase prépandémique et la phase 1.
     Enfin, parmi les groupes de gens qui consomment de l'alcool et du cannabis, un tiers des participants ont signalé que leur consommation d'alcool avait augmenté, et 40 % du groupe d'âge le plus jeune ont signalé que leur consommation de cannabis avait augmenté.
    En résumé, nos données montrent les effets significatifs liés au sexe. Les femmes étant touchées de façon disproportionnée lorsqu'on parle de dépression, d'anxiété, de solitude, de détresse générale et de l'augmentation significative de la violence conjugale. Nous recommandons d'adapter les ressources en santé mentale en fonction du sexe et de l'âge sur la base de ces données.
    Merci beaucoup.

  (1240)  

    Merci.
    Nous allons commencer notre série de questions. Nous n'avons du temps que pour un seul tour, et nous dépasserons quelque peu l'heure.
    C'est Mme Rempel Garner qui commence. Vous disposez de six minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Docteur Poon, à votre avis, combien de vos membres peuvent se permettre de se placer en quarantaine pendant deux semaines pour retrouver leurs proches?
    Nous remercions le gouvernement du Canada d'avoir permis la réunification des familles, bien que beaucoup plus tard que ce à quoi nous nous attendions. Une question se pose cependant. Combien d'entre eux peuvent se permettre de se placer en quarantaine pendant deux semaines une fois arrivés au Canada, puis pendant deux autres semaines lorsqu'ils rentrent dans leur pays d'origine?
    Il ne s'agit pas d'être désobligeant et d'adopter une attitude désinvolte à l'égard de la santé et de la sécurité des Canadiens. Il doit y avoir un moyen sûr de le faire. C'est pourquoi, dans nos recommandations, nous pensons qu'il faut mener une enquête sur les solutions de rechange à la quarantaine de 14 jours...
    Docteur Poon, les six minutes dont je dispose s'écouleront très vite, alors je me demande seulement...
    C'est bon.
    Pensez-vous qu'une bonne partie de vos membres peuvent se permettre cette quarantaine de deux semaines ?
    Écoutez, c'est probablement la première fois que je fais cela depuis que je suis au Parlement, mais je vais parler de ma vie personnelle un instant.
    Je ne m'attendais pas à ce qu'un beau grand Américain entre dans ma vie. J'en suis heureuse. Cependant, malgré ma situation privilégiée, j'ai été séparée de mon mari pendant plus de cinq mois cette année, et ce n'est que grâce au projet pilote de l'Alberta que nous avons pu nous voir. C'est vraiment difficile. Je ne peux pas voir mes enfants. Je ne peux pas voir ma belle-mère, qui est atteinte d'un cancer du sein de stade 4. C'est difficile.
    Il s'agit de moi, une législatrice qui siège à ce comité en ce moment. Tous les membres du Comité savent que j'ai la couenne dure — je sais comment les libéraux m'appellent —, mais chaque soir, quand je rentre à la maison et que je suis seule, c'est difficile, et il s'agit de moi.
    Je me demande s'il existe des solutions de rechange à la quarantaine qui donneraient de meilleurs résultats sur le plan de la santé publique. Par exemple, dans les aéroports, nous pourrions soumettre tous les gens à des tests de dépistage, au lieu de laisser entrer, sans qu'elles subissent de test, quatre millions de personnes qui respecteront ou non la quarantaine. Je sais que des exemptions de quarantaine ont été émises pour un certain nombre de personnes au cours des derniers mois.
     Je me demande simplement, étant donné que vous êtes un clinicien, docteur Poon, si une partie de votre recommandation consiste à étendre l'utilisation de systèmes, comme celui qui a été mis en place en Alberta, à d'autres aéroports et à d'autres postes frontaliers du pays afin de favoriser la réunification des familles.
     Le système qui a été mis en place en Alberta et les projets pilotes menés en Colombie-Britannique et en Ontario pour la réalisation de tests dans les aéroports offriront de merveilleux moyens d'augmenter le nombre de familles pouvant se réunir, en particulier si nous appliquons aux frontières terrestres ce qui est appliqué dans les aéroports, ce qui devrait être utile.
    Encore une fois, nous ne demandons pas l'ouverture des frontières. Nous demandons simplement de pouvoir être ensemble, et ce, de façon sécuritaire.
    Oui, c'est vrai.
    Je voulais examiner plus en profondeur vos recommandations sur la réunification des familles pour motifs d'ordre humanitaire. J'ai été particulièrement touchée récemment par une situation au Manitoba. Après des mois de demande, une personne a obtenu une exemption pour venir au Canada afin de voir un membre de sa famille qui était hospitalisé, mais elle n'a pas pu le voir avant son décès parce qu'elle était obligée de se placer en quarantaine, même si elle avait subi un test.
    Y a-t-il d'autres pays dans le monde qui font cela et vers lesquels nous devrions nous tourner pour connaître les pratiques exemplaires?
    De nombreux pays n'ont pas les normes ou les restrictions frontalières particulières qu'impose le Canada. Les exemptions pour motifs d'ordre humanitaire ont été appliquées dans différentes situations de réunification familiale, au cas par cas, dans d'autres pays. Aux États-Unis, par exemple, on peut prendre l'avion pour aller voir un proche qui est en train de mourir.
     La règle de Donna, que je propose, doit constituer un mandat du gouvernement fédéral visant à donner la priorité à la réunification des familles en temps de crise. Personne ne devrait dire adieu à sa mère par FaceTime. Il faut établir une règle de Donna pour donner la priorité à la réunification des familles en temps de crise.
    Je pense que les histoires personnelles sont importantes en ce moment.
    Vous êtes un clinicien. Pouvez-vous résumer, au nom de tous les membres de votre groupe, et d'après votre expérience, ce que signifie le fait d'être séparé d'un être cher pendant plus de six mois ou pendant plusieurs mois à la fois?

  (1245)  

    Je demande aux membres du Comité de se demander quelles personnes ils veulent avoir à leurs côtés durant une pandémie mondiale. La réponse est, de façon uniforme, les membres de leur famille.
    Imaginez tous les moments perdus. Combien de femmes ont vécu une fausse couche seules? Combien de gens sont décédés seuls? Combien de gens ont vécu des tragédies sans le soutien de leurs proches?
     Nous comprenons que ce niveau de douleur devait être compris, mais maintenant que nous sommes ici et que nous nous préparons à la deuxième vague, nous ne devons pas permettre que les erreurs commises plus tôt dans l'année créent de nouvelles séparations familiales à l'approche de la deuxième vague.
    Dans quelle mesure les tests de dépistage rapide et leur disponibilité généralisée jouent-ils un rôle crucial à cet égard?
    Les tests de dépistage rapide et l'accès rapide aux tests ne sont que des outils supplémentaires pour favoriser la réunification des familles, qu'il s'agisse ou non d'une combinaison de mise en quarantaine et de tests pratiqués à la frontière ou au point de service. Tout ce que nous pouvons faire pour réunir les familles au cas par cas à l'aide de vastes exemptions est primordial pendant la deuxième vague de COVID.
    Je vous remercie pour tout ce que vous avez fait. Je suis de tout cœur avec tous les membres de votre groupe.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Rempel Garner.
    C'est maintenant au tour de M. Kelloway. Allez-y, s'il vous plaît. Vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vais céder une partie de mon temps au député Van Bynen.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Lorsque nous parlons de la santé mentale, nous le faisons habituellement comme s'il s'agissait d'un sujet général qui touche tout le monde de la même manière.
     Comme mes collègues le savent, je représente la merveilleuse population de Cape Breton—Canso. Cette circonscription englobe l'île du Cap-Breton et la partie nord-est de la Nouvelle-Écosse, et elle est essentiellement rurale. Je sais que de nombreux Canadiens qui vivent en milieu rural sont confrontés à des défis uniques sur le plan de la santé mentale. D'autres groupes sont également touchés de manière différente, comme les personnes âgées, les femmes, les groupes autochtones, les Canadiens racialisés, les enfants, etc.
    Ma question s'adresse à M. Cornish. Que pouvons-nous faire pour garantir que le soutien en santé mentale au Canada se base sur une approche intersectionnelle pour mieux soutenir tous les Canadiens, en particulier ceux qui ont des besoins et des défis hors du commun?
    Je vous remercie de cette question. Elle est excellente.
    Notre système actuel impose une approche unique. Vous pouvez vous adresser à un médecin, à un psychologue ou à un psychiatre. Ce que nous apprenons en offrant la variété d'options, c'est que cela reflète beaucoup plus la réalité de notre société, qui compte des personnes de toutes sortes d'identités différentes et il y a des recoupements concernant le sexe et la race. Ce que nous constatons, c'est que l'accès aux soins est souvent bloqué par des protocoles qui consistent à faire un tri ou à tenter d'établir un diagnostic en amont et à procéder à une évaluation approfondie, de sorte que, lors d'un premier contact, que ce soit par téléphone ou dans une salle de consultation, la personne ne reçoit aucun soin parce qu'elle est occupée à répondre à des questions.
    Je vais vous raconter une histoire personnelle. Quand elle était adolescente et qu'elle étudiait à l'université, ma fille a essayé à deux reprises d'avoir accès à des soins. Elle est sortie du centre de counselling en disant que tout ce qu'on avait fait, c'est lui poser des questions. On ne lui a jamais vraiment demandé ce qu'elle voulait. Puis elle s'est tournée vers le secteur privé en pensant qu'elle obtiendrait de meilleurs soins. Là encore, le thérapeute lui posait des questions. Il se croyait plus avisé et pensait qu'il devait tout demander, prendre toutes les mesures possibles et poser chaque question pour découvrir tout ce qui n'allait pas chez ma fille avant de pouvoir l'aider.
    Les médecins ne font pas cela. Quand je vais chez mon médecin, il ne me pose pas de questions sur tout ce qui ne va pas chez moi. Il me demande pourquoi je suis là et ce que je veux, et il s'assure que je reparte avec quelque chose d'utile,
    Nous n'avons jamais fait cela en santé mentale. Nous partons du principe que les spécialistes savent quelles questions poser, ce qui ne convient pas, étant donné que l'orientation sexuelle et l'origine culturelle varient d'une personne à l'autre. Nous ne devrions pas faire d'hypothèses sur ce dont ils ont besoin. Nous devrions commencer par demander aux personnes ce que nous pouvons faire pour les aider ce jour-là et partir du principe selon lequel, dans la plupart des cas, les gens peuvent mieux répondre à cette question que nous ne le pourrions en tant que professionnels.
    C'est ce que nous faisons avec le modèle 2.0 de notre programme. C'est ce que nous faisons avec l'Espace mieux-être Canada. Nous redonnons la santé mentale aux personnes qui cherchent de l'aide, plutôt que de la confier à un professionnel secret en quelque sorte qui présume de ce qui fonctionnera pour quelqu'un.
    Je vous remercie, docteur Cornish. Nous vous sommes très reconnaissants de tout le travail que vous faites.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Van Bynen, qui posera ses questions.

  (1250)  

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Tout d'abord, permettez-moi de remercier Mme Michelle Rempel Garner de nous avoir raconté son expérience personnelle. Je suis membre du caucus multipartite sur la santé mentale, et chacune de ces personnes a eu le courage de nous raconter son expérience personnelle. Je dois dire que c'est déchirant, et que cela renforce mon engagement et souligne l'importance de la discussion que nous avons actuellement.
    Ma question s'adresse à M. Cornish. De nombreuses personnes qui ne souffrent habituellement pas de troubles de santé mentale déclarent maintenant souffrir de tels problèmes, en raison des répercussions de la pandémie de COVID-19. Toutefois, il se peut que certaines personnes ne soient pas à l'aise de demander de l'aide en ces temps difficiles. Comment pouvons-nous éliminer une partie de la stigmatisation associée aux troubles de santé mentale et encourager ces personnes à demander de l'aide?
    Encore une fois, je pense qu'il faut abandonner l'approche universelle. Nous observons souvent que la culture au sein des effectifs des anciens combattants, des premiers intervenants et des travailleurs de première ligne est telle qu'ils ne doivent pas demander de l'aide ou que leur emploi peut être à risque s'ils révèlent une vulnérabilité.
    Cependant, le soutien par les pairs et les communautés de soutien fonctionnent très bien au sein de ces populations. Je pense donc que le gouvernement fédéral pourrait mettre en place l'infrastructure nécessaire à cet égard. Le soutien par les pairs fonctionne avec l'appui de la technologie, car elle permet d'offrir du soutien à plus grande échelle et de le faire de manière anonyme. En effet, les gens qui tentent d'obtenir des soins sont notamment préoccupés par la possibilité de devoir faire affaire avec une personne qu'ils connaissent dans les environs ou dans une région rurale, en particulier dans le cas du soutien par les pairs. Toutefois, grâce à la technologie, on peut offrir ce service de manière anonyme. On peut également s'arranger pour qu'il y ait suffisamment de personnes prêtes à fournir le soutien nécessaire et prêter une oreille attentive.
    Nous avons toutefois observé un roulement du personnel élevé dans les programmes de soutien par les pairs qui fonctionnent avec des bénévoles. Ce n'est pas un problème, car lorsqu'on forme une main-d'œuvre de soutien par les pairs, ces gens ne travailleront peut-être pas pendant une longue période, mais ils se trouvent toujours au sein de notre population et ils sont donc en mesure de fournir un soutien informel grâce à la formation qu'ils ont reçue sur la manière d'aider les autres.
    Puisque le taux de roulement du personnel est élevé dans ces programmes, il est bon d'offrir le soutien à plus grande échelle, car cela permet de mettre en place une infrastructure qui se réapprovisionne en intervenants et qui enseigne en permanence les premiers soins de santé mentale aux intervenants dans le domaine du soutien par les pairs.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Cornish et M. Van Bynen.

[Français]

     Monsieur Thériault, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier l'ensemble des témoins de leur précieuse collaboration et leurs témoignages éclairants. Cela dit, nous avons reçu peu de mémoires et de notes d'allocution. Je les invite à les déposer, étant donné que cela va nous être très utile.
    Madame Ouimet, vous avez indiqué d'entrée de jeu que votre organisme s'employait à créer, développer et renforcer la santé mentale, notamment dans les milieux de travail. Or, je suis préoccupé par une nouvelle réalité qui touche les milieux de travail en raison de la pandémie. Je parle ici du télétravail.
     Une étude a été réalisée à l'Université Laval par Caroline Biron et des collaborateurs. Elle se base sur un échantillon de 1 259 personnes qui étaient en emploi au Québec pendant le confinement du printemps dernier. Cette étude a permis de découvrir que 55 % des travailleuses et 41 % des travailleurs souffraient de détresse psychologique. Évidemment, pouvoir travailler est préférable à être sans emploi. Je ne parle pas ici du domaine de la santé et des médecins, mais plusieurs compagnies font l'éloge du télétravail. Or, on s'aperçoit que le télétravail a imposé un isolement et l'a amplifié.
    J'aimerais que vous nous parliez de cette situation.
    Je voudrais préciser que la recherche de Mme Biron ne portait pas seulement sur le télétravail. Cela dit, le télétravail isole beaucoup les travailleuses et les travailleurs. Ils reçoivent moins de soutien social et de soutien technique. Il faudrait donc établir de nouvelles façons de faire.
     Les travailleurs et les travailleuses ne peuvent plus échanger avec leurs collègues sur les difficultés auxquelles ils font face ou sur une foule d'autres situations. Ils se retrouvent plus isolés. Il n'y a plus de pauses ensemble, plus de moments d'échange, à part les assemblées générales. En outre, il y a beaucoup moins de soutien technique. Il faut donc créer de nouvelles structures, prévoir des temps d'échange entre les collègues et déterminer de quel soutien ils ont besoin. Ils doivent pouvoir échanger sur ce qu'ils vivent, et pas seulement sur les aspects techniques. Il faut vérifier de quel soutien technique ils ont besoin.
    On se doit de créer de nouveaux rituels de rencontre entre les travailleuses, les travailleurs et les gestionnaires. On sait aussi que, même pour les personnes qui se présentent au travail, la réalité est plus difficile en raison de la distanciation et de toutes les exigences que cela impose.

  (1255)  

    Le pourcentage est de 55 % chez les femmes et de 41 % chez les hommes. Cet écart est-il une constante? S'agit-il d'une variable qui est toujours présente?
    Avez-vous des réponses à ce sujet?
    J'ai discuté avec Mme Biron. Elle a dit qu'il n'y avait pas eu de recherche précise là-dessus. On sait par contre que les femmes, encore aujourd'hui, assument une charge plus importante à la maison. La conciliation travail-famille est plus lourde pour elles. Il y a une responsabilisation importante. Cela affecte en effet la santé mentale des femmes.
    Est-ce ce qu'on appelle la « charge mentale »?
    Oui.
     On parle donc du milieu de travail qui est aussi le milieu de vie, de la charge mentale, de l'isolement et d'un manque d'outils pour exprimer la pression vécue. La personne est isolée, mais doit fournir le rendement requis.
    Oui. En outre, les femmes travaillent plus souvent dans des milieux d'aide, de service, et cela a un effet sur leur santé mentale.
    Dans un contexte où il y a des pénuries de ressources, cela accroît la tension.
    Il y a aussi des inquiétudes liées à la pandémie. Quand on offre des soins ou quand on travaille dans les services publics, comme les épiceries, on est dans des milieux où on y est confronté quotidiennement.
    J'aimerais m'entretenir avec vous sur la santé mentale des jeunes.
     Selon une analyse publiée en octobre, 46 % des Montréalais âgés de 18 à 24 ans affirment ressentir des symptômes s'apparentant aux troubles d'anxiété généralisée ou à la dépression majeure. Ailleurs au Québec, ce taux est de 31 %. Près d'un adulte montréalais sur quatre, ce qui représente 23 % des adultes, rapporte que son foyer a subi des pertes financières majeures en lien avec la pandémie.
    Monsieur Thériault, il vous reste 30 secondes.
    D'accord.
    Qu'avez-vous à me dire là-dessus en quelques secondes?
    En effet, c'est l'âge où les jeunes arrivent sur le marché du travail et où ils se structurent en tant qu'adultes.
     Il y avait déjà beaucoup de détresse dans les milieux d'études tels que les universités et les cégeps, et cela a augmenté. Il y a eu plus d'isolement et moins de rencontres sociales avec les amis et les proches.
    Que peut-on faire?
    L'emploi demeure important.
     Il faut trouver des stratégies pour permettre les rencontres sociales, ce qui ne veut pas dire des rencontres en personne. Toutefois, la solidarité doit continuer à exister. Être à l'écoute de nos jeunes et de nos proches est essentiel. Il faut leur faire connaître toutes les ressources qui existent, puisqu'elles sont peu connues, malheureusement. Nous recevons plusieurs appels de gens qui ne savent pas où appeler pour avoir de l'aide.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    J'aimerais apporter une précision au sujet des documents. En effet, tous les documents que nous recevons seront distribués aux membres du Comité lorsqu'ils seront traduits.
    La parole est maintenant à M. Davies.
    Monsieur Davies, vous avez la parole. Vous avez six minutes.
    J'aimerais encore une fois remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Brotto, j'ai eu l'impression que vous en aviez plus à dire lorsque vous avez résumé les conclusions. J'aimerais donc vous donner l'occasion de terminer vos réflexions sur certaines des principales conclusions de votre étude sur l'impact de la COVID-19 sur les femmes et les Canadiens de diverses identités de genre.

  (1300)  

    Je vous remercie de me donner l'occasion de souligner l'importance, lorsque nous menons des recherches sur la santé mentale des Canadiens, d'adopter à la fois une approche fondée sur le sexe — le sexe étant défini comme le mâle par rapport à la femelle ou le sexe assigné à la naissance —, ainsi que sur le genre, un autre élément important. Le genre est l'idée que vous vous faites de vous-même en tant que femme, homme, personne non binaire, transsexuelle, bispirituelle, etc. Parfois, lorsqu'on interroge une personne sur son expérience en matière de santé mentale en fonction de son genre, la réponse peut être différente de celle que nous avions présumée en fonction du sexe attribué. La première conclusion très importante est donc que nous devons tenir compte à la fois du sexe et du genre.
    Je crois qu'une conclusion majeure qui découle de nos données, c'est que lorsque nous considérons le fardeau de la dépression, de l'anxiété, du stress et de la solitude, nous observons des taux amplifiés, c'est-à-dire des taux parfois trois à quatre fois plus élevés, des résultats psychosociaux chez les femmes comparativement aux hommes. C'est probablement attribuable à une combinaison de facteurs biologiques, par exemple une plus grande prédisposition à l'anxiété, et à des facteurs liés au genre, car les femmes sont plus susceptibles d'être des travailleuses de première ligne dans le domaine de la santé, de travailler dans des secteurs qui continuent à fonctionner tout au long de la pandémie, tels que les services, de travailler comme concierge et d'assumer une plus grande partie des tâches liées à la garde d'enfants et à l'entretien ménager à domicile.
    Cela nous permet de conclure que nous devrions d'abord tenir compte du sexe et du genre dans les décisions liées aux ressources en matière de santé mentale.
    Deuxièmement — et ce point a été soulevé dans la question précédente —, nous avons observé un effet très important de l'âge. Comme l'a illustré Mme Ouimet, le fardeau le plus lourd est porté par notre cohorte d'âge la plus jeune, c'est-à-dire les 25 à 30 ans. En effet, ces jeunes ont signalé des taux de solitude très élevés.
    Nous n'avons pas eu le temps d'aborder ces données, mais dans les diapositives, vous constatez, je l'espère, que nous avons également adopté une approche très intersectionnelle. Nous savons que tous ces fardeaux sont amplifiés chez les personnes qui vivent dans les collectivités rurales, les femmes autochtones, les femmes handicapées et les femmes s'identifiant comme des minorités sexuelles et de genre.
    Je vous remercie.
    Le 24 novembre, il y a quelques jours, la Women's Health Foundation a publié une nouvelle série de rapports sur les inégalités entre les sexes intitulée Unmasking Gender Inequity. Vos données ont-elles servi à éclairer ce rapport?
    Je vous remercie de votre question.
    Oui, la Women's Health Foundation de la Colombie-Britannique, un organisme avec lequel nous avons un étroit partenariat, a mené une enquête distincte qui visait à examiner l'expérience des femmes dans la province et les répercussions de la COVID-19 sur leur santé et leur bien-être et sur leur recherche de services d'aide.
    Même si ce rapport ne s'est pas inspiré de nos données de recherche, nous avons travaillé étroitement avec les intervenants de la fondation pour échanger des conclusions, établir des priorités et veiller à ce qu'une perspective axée sur l'égalité entre les sexes soit appliquée à toutes nos questions sur la santé des femmes.
    Ma prochaine question se divise en deux volets. L'un des impacts les plus graves et les plus troublants de la pandémie de COVID-19 a été révélé lorsque vous avez parlé de l'impact sur la violence fondée sur le sexe. C'est ce qu'on a appelé la pandémie de l'ombre.
    Avez-vous des recommandations sur les mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour traiter cet aspect de la pandémie? Je vais m'arrêter ici et poser cette question en premier lieu.
    En effet, chez les femmes, les incidents autodéclarés de violence entre partenaires intimes ont presque doublé entre la phase prépandémique et la phase 1, où les contrôles liés à la pandémie étaient les plus stricts. Ce n'est pas surprenant. Les pandémies précédentes ont révélé la même chose, et les premières données en provenance de la Chine ont révélé un taux trois fois plus élevé de violence entre partenaires intimes. Le véritable problème, c'est que les femmes sont souvent prises au piège et isolées avec les responsables de ces actes, de sorte que même si elles voulaient demander de l'aide, elles ne le peuvent tout simplement pas.
    Il faut adopter une approche à plusieurs volets. Tout d'abord, nous devons sensibiliser les gens au fait que les taux de violence entre partenaires intimes sont inacceptables et qu'ils augmentent directement en réaction au stress.
    Deuxièmement, nous devons veiller à ce que les prestataires de soins de santé et les prestataires de soins de santé de première ligne sachent comment poser ces questions délicates aux femmes de manière sûre lors de leurs visites pour évaluer le bien-être général. Si je comprends bien, ces visites se font en grande partie par l'entremise de moyens virtuels.
    Troisièmement, nous avons absolument besoin de plus de ressources, de sorte que lorsque des femmes demandent de l'aide — et j'insiste sur le fait que seule une petite minorité de femmes demandent de l'aide lorsqu'elles sont dans une situation de violence entre partenaires intimes —, des ressources existent pour elles. Nous devrions réfléchir à la manière dont les ressources peuvent être offertes en ligne, pour revenir sur les points très importants soulevés par M. Cornish au sujet des soins virtuels. Et nous devons réfléchir à la manière de garantir que ces ressources seront accessibles aux femmes.
    Enfin, la dernière chose que je dirai à propos de la violence entre partenaires intimes, c'est que nous savons qu'elle est subie de manière disproportionnée par les femmes autochtones, les femmes qui vivent dans les collectivités rurales et les femmes de différentes identités sexuelles et de genre. Nous devons nous assurer que lorsque nous disposons de ressources, elles sont parfaitement adaptées aux groupes qui sont les plus susceptibles d'être victimes de ce type de violence.

  (1305)  

    Je vous remercie, monsieur Davies.
    J'aimerais remercier tout le monde. C'est ce qui termine nos séries de questions avec ce groupe de témoins.
    J'aimerais sincèrement remercier tous les témoins de nous avoir accordé leur temps et de nous avoir communiqué leur expertise aujourd'hui. Cela nous sera très utile.
    Avant d'ajourner la réunion, j'aimerais parler un peu de nos interprètes. Les interprètes, jour après jour, minute après minute, travaillent sans relâche en coulisse pour faire en sorte que tout fonctionne bien pour nous. Je crois comprendre qu'ils ont eu une journée assez chaotique aujourd'hui, et je tiens donc simplement à les remercier tout particulièrement — pour aujourd'hui et tous les autres jours.
    Je vous remercie.
    Je remercie également les membres du Comité et les témoins.
    La séance est levée.
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