Les comités / Travaux des comités

Conduite du président : levée de la séance en raison d’un quorum insuffisant et reprise du débat sur une motion

Débats, p. 26495–26496

Contexte

Le 28 février 2019, Michelle Rempel (Calgary Nose Hill) fait un rappel au Règlement concernant les délibérations du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration pendant sa réunion du 25 février 2019. Au cours de cette réunion, lorsque le débat sur une motion a été interrompu par des votes à la Chambre, le président du comité a indiqué que la réunion reprendrait après le vote. Toutefois, après le vote, les députés ne sont pas revenus en nombre suffisant pour atteindre le quorum, et le président a quitté la salle sans avoir repris la séance ou y avoir mis fin. En réponse à un rappel au Règlement soulevé au cours de la réunion suivante, le 27 février 2019, le président du Comité, Robert Oliphant (Don Valley West), confirme que, conformément à un précédent de 2013, la réunion a été considérée comme étant levée en raison d’un quorum insuffisant et cette décision a été maintenue en appel. Mme Rempel accuse le président d’avoir levé la réunion de façon unilatérale, outrepassant ainsi les pouvoirs conférés aux comités par la Chambre et l’article 116(2) du Règlement. Le Président prend l’affaire en délibéré[1].

Résolution

Le 1er avril 2019, le Président rend sa décision. Il explique que l’article 116(2) du Règlement empêche d’interrompre les débats du comité de façon permanente avant leur conclusion naturelle. Après avoir examiné les événements survenus les 25 et 27 février, le Président décide que le fait de lever la séance en raison de l’absence de quorum est conforme à la procédure et que l’étude de la motion en cours à ce moment-là pourrait reprendre ultérieurement. En conséquence, le Président décide que l’article 116(2) du Règlement ne s’applique pas. Soulignant que les comités sont maîtres de leurs propres délibérations et que les Présidents résistent toute intervention dans les affaires des comités en l’absence d’un rapport de comité, le Président conclut que les éléments de preuve présentés dans ce cas n’ont pas démontré de circonstances suffisamment exceptionnelles pour justifier une intervention.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à me prononcer sur le rappel au Règlement soulevé le 28 février 2019 par l’honorable députée de Calgary Nose Hill concernant des événements survenus aux réunions du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration tenues les 25 et 27 février 2019.

Je remercie la députée de Calgary Nose Hill d’avoir soulevé la question, ainsi que le député de Don Valley-Ouest de ses commentaires.

Dans son intervention, la députée de Calgary Nose Hill a expliqué les circonstances à l’origine de son rappel au Règlement, soit qu’à la réunion du 25 février, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration débattait une motion lorsque le président du Comité a suspendu les travaux pour permettre aux membres d’aller voter à la Chambre. Le président a alors indiqué que la réunion reprendrait après le vote. Toutefois, comme la députée l’a indiqué, lorsque les membres sont revenus, ils ont « attendu pendant un certain temps pour atteindre le quorum, ce qui ne s’est jamais produit » et le président a ensuite quitté la pièce sans avoir repris la séance ou y avoir mis fin. Par conséquent, en réponse au rappel au Règlement soulevé à la réunion suivante, le président a confirmé que la réunion précédente avait bel et bien été levée, décision qui a été maintenue en appel.

Affirmant que la décision du président de lever la séance était unilatérale et interdite, la députée de Calgary Nose Hill a précisé clairement que ces objections étaient fondées sur deux points : les comités ne peuvent outrepasser les pouvoirs que leur confère la Chambre, et ne peuvent surtout pas outrepasser l’article 116(2) du Règlement, et ce, même indirectement.

Afin de répondre à ces arguments et de déterminer le pouvoir du Président dans cette affaire, il est important de bien comprendre le libellé de l’article 116(2) du Règlement, ainsi que sa portée et son application, car c’est la première fois qu’il est invoqué.

L’article 116(2) prévoit ce qui suit :

a) Sauf si une limite à la durée d’un débat a été adoptée par le comité ou par la Chambre, le président d’un comité permanent, spécial ou législatif ne peut mettre fin à un débat alors que des membres présents souhaitent encore y participer. Une décision du président à cet égard ne peut faire l’objet d’un appel au comité.
b) Une infraction de l’alinéa a) du présent paragraphe peut être portée à l’attention du Président de la Chambre par un député et le Président peut décider de la question. Si, de l’avis du Président, une telle infraction est survenue, le Président peut ordonner que toutes les délibérations ultérieures en relation avec ladite infraction soient annulées.

Bien que les termes employés dans cet article ne soient pas ambigus, le président doit, comme toujours, examiner avec attention la signification des mots et même l’intention visée par l’article. Autrement dit, quelle était la raison pour laquelle cet article a été ajouté à notre Règlement ou quels sont les nouvelles attentes et le nouveau cadre créés par celui-ci? Essentiellement, le président estime que ce nouvel article vise à protéger les débats en comité contre « une manœuvre procédurale » qui mettrait définitivement fin au débat sur une motion.

Avant l’adoption de cette disposition, les députés auraient pu, par exemple, forcer la tenue d’un vote sur une motion pouvant faire l’objet d’un débat en proposant la question préalable, ce que la procédure interdit en comité, obligeant ainsi les présidents de comité à la déclarer irrecevable. La contestation d’une telle décision aurait pu donner lieu à son annulation, obligeant donc le président à mettre fin au débat et empêchant les députés de débattre davantage de la question.

L’essence même de ce nouvel article est de permettre aux membres du comité de participer pleinement aux délibérations sans qu’elles soient interrompues indûment avant leur conclusion naturelle. On souhaitait ardemment pallier ce problème et, à cette fin, un recours a été établi et un pouvoir additionnel a été accordé au Président pour les cas de violations claires.

Toutefois, cet article ne s’applique pas à tous les débats qui prennent fin en comité. Par exemple, lorsque la séance d’un comité est levée avant la fin des délibérations ou que le comité adopte une motion d’ajournement du débat, on ne peut conclure que le débat a pris fin de manière définitive au sens de l’article 116(2); il est en effet encore possible de débattre de la question et celle-ci peut de nouveau être soumise au comité aux fins de débat à une date ultérieure déterminée soit par le président ou le comité.

Afin de déterminer si la question dont la Chambre est saisie est visée par l’article 116(2), en tant que Président, j’ai examiné attentivement les Procès-verbaux et les Témoignages des réunions des 25 et 27 février du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration.

Je suis d’avis que la levée de la réunion du 25 février était conforme à la procédure vu qu’elle était fondée sur l’absence de quorum, fait non contesté par la députée de Calgary Nose Hill. Il s’agit d’un facteur déterminant puisque le débat sur la motion n’a donc pas pris fin de manière définitive. En fait, la motion faisant l’objet de débat à ce moment par le Comité n’est pas réglée et pourrait être soulevée à une date ultérieure. Par conséquent, l’article 116(2) ne s’applique pas en l’espèce et, à titre de Président, il m’est impossible d’intervenir de la façon prévue au titre de ce nouvel article.

L’autre question à trancher est celle de savoir si le Comité a outrepassé les pouvoirs conférés par la Chambre et qui ne peuvent être conférés que par celle-ci. L’article 116(2) n’a pas d’incidence sur le fait que les comités sont généralement maîtres de leurs délibérations. Par conséquent, à moins d’un rapport de comité, la présidence n’intervient habituellement pas dans les affaires d’un comité. Selon les éléments de preuve présentés en l’espèce, la présidence ne peut conclure que les circonstances sont si exceptionnelles qu’elles justifient une intervention sans que la Chambre ait été saisie de l’affaire au moyen d’un rapport de comité, comme le veut la pratique établie.

Je remercie les honorables députés de leur attention.

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[1] Débats, 28 février 2019, p. 25932–25933.