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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 081 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 23 mars 2023

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à la 81e réunion du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mercredi 12 janvier 2022, le Comité se réunit pour discuter de l'inflation dans l'économie canadienne actuelle.
    La réunion d'aujourd'hui a lieu en format hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Certains membres participent ici en présentiel, et d'autres le font à distance avec l'application Zoom.
    Je vais présenter quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
    Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole en mentionnant votre nom. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez ensuite le mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
    Pour l'interprétation, ceux qui participent avec Zoom peuvent choisir, au bas de l'écran, entre le plancher, le français et l'anglais. Ceux qui sont en présentiel peuvent utiliser les écouteurs et sélectionner le canal désiré.
    Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Si vous voulez prendre la parole, veuillez lever la main. Les membres qui participent sur Zoom sont priés d'utiliser la fonction « Lever la main ». Le greffier et moi-même allons gérer l'ordre des interventions le mieux possible. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons aujourd'hui, de BMO Marchés des capitaux, M. Michael Gregory, directeur général, économiste en chef délégué et chef du Service des études économiques aux États-Unis.
    Du Mouvement Desjardins, nous accueillons M. Jimmy Jean, vice-président, économiste en chef et stratège.
    De la Banque Nationale du Canada, nous accueillons M. Stéfane Marion, économiste en chef et stratège.
    Je remercie les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Nous allons maintenant vous donner l'occasion de faire une déclaration préliminaire d'un maximum de cinq minutes. Nous commencerons par M. Gregory, de BMO Marchés des capitaux. Vous avez cinq minutes.
     Merci, monsieur le président et honorables députés, de m'avoir invité à comparaître devant vous dans le cadre de votre étude sur l'inflation.
    Je m'appelle Michael Gregory et je suis économiste en chef délégué à la Banque de Montréal. Mes observations préliminaires porteront sur l'économie canadienne et sur la situation de l'inflation aux États-Unis.
    Essentiellement, au Canada, l'inflation diminue après avoir atteint un sommet de 8,1 %...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Il est difficile pour nos membres de voir le témoin parler, parce que cet écran n'est pas allumé. Pourrions-nous faire une pause jusqu'à ce que le problème soit corrigé?
    Nous éprouvons des difficultés techniques avec cet appareil, alors nous allons faire une courte pause pour voir s'il peut fonctionner, puis nous reprendrons.
     Nous sommes de retour. Il semble que notre problème technique soit réglé.
    Monsieur Gregory, vous avez la parole.
     Merci, monsieur le président.
    L'inflation au Canada baisse après avoir atteint un sommet de 8,1 % en juin dernier, le taux le plus élevé depuis 1982. Les données publiées cette semaine indiquent que la variation annuelle de l'indice des prix à la consommation, l'IPC, s'est établie à 5,2 % en février, et nous prévoyons d'autres progrès. Cela est dû en partie aux effets de base. Dans la foulée de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le printemps dernier, les prix ont atteint leur plus forte hausse sur trois mois en 40 ans, avec un taux annualisé de 11,6 %. Cela ne se reproduira pas ce printemps. En effet, la plus récente tendance sur trois mois est inférieure à 2 % en taux annualisé.
    Toutefois, ces derniers chiffres ont été appuyés par la baisse des prix de l'énergie. Les variations annuelles de l'inflation sous-jacente, ou de base, que nous les mesurions par l'IPC médian, par l'IPC trimestriel ou par l'IPC sans les aliments et l'énergie, sont toutes légèrement inférieures à 5 %. Soulignons que les dernières variations annualisées sur trois mois se situent autour de 3 %. Elles sont beaucoup plus près de l'objectif de 2 %, mais il nous faudra encore plus de progrès.
    Fondamentalement, l'inflation se poursuit à un rythme supérieur à l'objectif. Elle s'est accélérée avant tout en raison d'un déséquilibre entre l'offre et la demande dans les économies nationale et mondiale.
    Après l'éclosion de la pandémie, la demande pour les produits de base et pour les prix des produits de base a d'abord baissé, mais elle s'est enfin redressée, dans certains cas de façon très marquée. Cette tendance a été exacerbée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Les conditions météorologiques extrêmes et les maladies ont eu des répercussions sur l'approvisionnement agricole mondial, ce qui n'a pas aidé.
    La demande de biens a explosé, en partie parce que les restrictions imposées ont bloqué les services. Cette forte demande a nui aux chaînes d'approvisionnement mondiales qui étaient encore ébranlées par la pandémie, entraînant des pénuries et des arriérés de distribution, ce qui a provoqué une flambée des prix de nombreux biens.
    Puis, avec la réouverture de l'économie canadienne, la demande de services a explosé. De nombreux fournisseurs de services ont fait face à une pénurie de main-d'œuvre, ce qui a fait grimper les prix de certains services. L'augmentation de la demande de travailleurs a exercé une pression à la hausse sur les salaires, alors que le taux de chômage était à son plus bas depuis un demi-siècle. Dans l'ensemble, la demande canadienne était si forte que les entreprises ont pu refiler à leurs clients la hausse de leurs coûts de main-d'œuvre et d'autres intrants.
    Face à ces pressions inflationnistes croissantes, la Banque du Canada a commencé à resserrer sa politique monétaire il y a un an pour freiner la demande dans l'économie afin que l'offre puisse rattraper son retard, et elle y parvient.
    Après huit hausses de taux consécutives et un resserrement cumulatif de 425 points de base, la Banque du Canada a marqué une pause au début du mois. La politique monétaire fonctionne, mais avec un décalage, et la banque est déterminée à ne pas affaiblir la demande plus que nécessaire afin de rétablir la stabilité des prix. Nous pensons que cette pause se poursuivra jusqu'à la fin de l'année.
    Néanmoins, il est fort probable que l'économie canadienne ralentira sous le poids du resserrement monétaire, compte tenu du niveau presque record de l'endettement des ménages. Cependant, nous estimons que tout ralentissement sera léger, grâce aux 350 milliards de dollars d'économies excédentaires accumulées par les ménages, à la demande refoulée persistante, en particulier pour les services, et à la solidité du marché du travail. Quant à l'inflation, nous prévoyons que les changements annuels seront de l'ordre de 3 % d'ici à la fin de l'année, ce qui marque une baisse par rapport aux 5 % actuels, et qu'ils seront en voie d'atteindre les 2 % prévus.
    Enfin, comme le président Biden est en visite à Ottawa aujourd'hui, il vaut la peine de mentionner comment se compare la lutte des États-Unis contre l'inflation. La variation annuelle de l'IPC américain était de 6 % en février, en baisse par rapport au sommet de 9,1 % qu'il avait atteint l'an dernier. L'inflation mesurée par l'indice de référence aux États-Unis était de 5,5 %, mais sa tendance sur trois mois s'avère plus tenace que celle du Canada et se situe encore autour de 5 %. Les différences de définition expliquent en partie cette situation, mais la demande au sud de la frontière s'avère plus résiliente face au resserrement de la Réserve fédérale. Par conséquent, hier, la Réserve fédérale américaine a relevé ses taux directeurs de 25 points de base, et nous prévoyons une nouvelle hausse des taux au printemps. Compte tenu du resserrement cumulatif de 500 points de base et des difficultés récentes du secteur bancaire, il est probable que l'économie américaine subira un léger ralentissement cette année, ce qui se reflétera sur les perspectives du Canada. Nous prévoyons également que l'inflation aux États-Unis atteindra environ 3 % d'ici à la fin de l'année, comme au Canada.
    Voilà qui conclut mes observations. Merci. Je me ferai un plaisir d'en discuter davantage pendant la période de questions.

  (1110)  

    Merci, monsieur Gregory.
    Nous passons maintenant au Mouvement Desjardins. Monsieur Jimmy Jean, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup. Je vous remercie à mon tour de cette invitation.
    Je commencerai par l'économie mondiale. Le début de 2023 avait pour thème la résilience. Nous nous attendions assurément à un ralentissement de cadence, mais les données que nous avons reçues, particulièrement pour les mois de janvier et de février, nous montrent que ce ralentissement est moins prononcé que nous l'appréhendions. Nous remarquons même des signes d'amélioration depuis le début de la nouvelle année, notamment dans le secteur des services. Les marchés du travail nous ont fortement surpris par leur vigueur, particulièrement en janvier et en février. Cela a été le cas aux États‑Unis et au Canada. Cela étant dit, nous continuons de prévoir cette année un ralentissement et le début d'une récession.
     Aux États‑Unis, le secteur de l'habitation a été très touché par les hausses de taux d'intérêt. Par exemple, par rapport au sommet, on constate une contraction de 58 % des nouvelles demandes en vue d'un achat. De plus, on commence à voir des signes de faiblesse dans la demande de travailleurs de la construction, particulièrement dans le domaine de la construction résidentielle. Cela indique qu'il risque d'y avoir bientôt des pertes d'emplois, qui s'ajouteront à celles que l'on recense actuellement dans les secteurs technologique et financier.
    Évidemment, la turbulence actuelle dans le monde bancaire causera, à tout le moins, des dommages permanents. Certaines institutions financières américaines étaient déjà en train de resserrer assez considérablement les conditions de crédit. Cette tendance va vraisemblablement aller en s'amplifiant. Il y a peu de doute que ces dynamiques vont freiner l'investissement et la création d'emplois. Il est encore trop tôt pour déterminer l'ampleur de ce ralentissement, mais nous pouvons dire avec un peu plus de certitude que le ralentissement en douceur que la Réserve fédérale américaine espérait orchestrer relèverait de plus en plus de l'exploit.
    Ici, au Canada, nous avons eu un peu moins de surprises positives. Ce n'est pas que nous n'en avons pas eu, mais le bilan a été plus nuancé. Si on exclut les circonstances favorables dans la création d'emplois, la croissance économique a surpris les économistes en stagnant au quatrième trimestre de 2022. L'inflation et le marché immobilier ont également évolué, généralement à la baisse. La consommation des ménages canadiens connaît des hauts et des bas. Par exemple, la province de l'Ontario a connu, au troisième trimestre de 2022, sa plus forte baisse de la consommation depuis 1992, si on exclut la pandémie.
    Il reste que les indicateurs plus récents montrent un certain regain du côté canadien, influencé, entre autres, par les livraisons d'automobiles, au gré des améliorations aux chaînes d'approvisionnement. Toutefois, cet effet devrait être temporaire, et plusieurs enquêtes confirment que l'appétit d'achats importants des Canadiens est à un niveau particulièrement bas.
    Au fur et à mesure que les emprunteurs hypothécaires renouvellent leur contrat à des taux d'intérêt plus élevés, la ponction additionnelle à leur revenu disponible va nécessiter qu'ils restreignent leur budget pour les dépenses et qu'ils puisent dans leurs épargnes, pour ceux qui jouissent d'une accumulation d'épargnes durant la pandémie, ce qui est loin d'être le cas de tous les ménages. D'autres désireront rembourser leurs dettes. Bref, la consommation discrétionnaire sera touchée.
    Ce sera aussi le cas des revenus de certains ménages. Par exemple, ceux qui ont des emplois dans des secteurs vulnérables à la correction immobilière et aux taux d'intérêt pourraient vivre des difficultés financières. La remontée des insolvabilités qu'on observe en ce moment, tant du côté des ménages que des entreprises, sera aussi appelée à se poursuivre.
    Les problèmes qui affectent les banques à l'extérieur du Canada pourraient être un facteur additionnel qui inciterait les institutions financières, y compris celles d'ici, à exercer une plus grande prudence, ce qui se refléterait évidemment dans la croissance du crédit, notamment le crédit aux entreprises, qui était assez résilient jusqu'à maintenant.
    Selon les informations que nous avons à l'heure actuelle, même si la Banque du Canada a vraisemblablement complété son cycle de hausse des taux d'intérêt, elle risque de maintenir les taux à un niveau élevé jusqu'à la fin de l'année. Cela, combiné au resserrement quantitatif, que nous estimons plus sévère ici, au Canada, qu'aux États‑Unis, met en place les conditions pour que le Canada entre en récession au cours des prochains trimestres et pour que le taux de chômage amorce une remontée.
     Nous nous attendons à ce que le taux de chômage canadien atteigne 6,9 % en fin d'année, et ce, alors qu'il était de 5 % en février. La pénurie de main-d'œuvre devrait permettre d'atténuer l'effet de la baisse de la demande agrégée sur l'emploi. C'est pourquoi nous nous attendons à ce que cette récession soit de faible ampleur, historiquement parlant. Cela dit, il faut reconnaître qu'actuellement, les événements financiers mondiaux mettent en lumière un équilibre des risques qui est orienté à la baisse.

  (1115)  

     Même si le système bancaire canadien repose sur des assises assez solides, la crise financière de 2008-2009 nous rappelle que le Canada n'est pas entièrement immunisé contre les répercussions économiques indirectes qui surviennent généralement dans ce genre d'épisode.
    Quant à elle, l'inflation devrait continuer de se modérer. Selon nous, elle n'atteindra pas la cible de 2 % avant l'an prochain, particulièrement en raison de la persistance dans les composantes liées au logement, dans les aliments et dans certains services. Il reste que la fourchette de l'inflation en fin d'année, que nous prévoyons être de 2 % à 2,5 %, devrait donner à la Banque du Canada un niveau de confort suffisant pour qu'elle commencer à assouplir graduellement sa politique monétaire, ce qui inclut de mettre fin au resserrement quantitatif.
    Dans notre scénario de base, cet assouplissement monétaire, auquel la Réserve fédérale américaine devrait également contribuer en 2024, et la composante qui commence à jeter les assises d'une reprise économique...
    Merci, monsieur Jean.

  (1120)  

[Traduction]

     Nous venons de dépasser un peu le temps alloué. Nous allons maintenant passer à la Banque Nationale du Canada avec M. Stéfane Marion. Avant que vous ne commenciez, monsieur Marion, j'aimerais demander à M. Michael Gregory d'augmenter un peu le volume de son micro.
    Pour ce qui est du rythme de vos interventions, messieurs, je vous prie de ne pas parler aussi vite, parce que nous avons des interprètes qui essaient de vous suivre. Leur travail est difficile, alors je vous prie de parler clairement et à un rythme raisonnable.
    Monsieur Marion, vous avez cinq minutes.
    Vous devrez peut-être débrancher et rebrancher votre casque d'écoute.
    Nous entendez-vous, monsieur Marion?
    [Difficultés techniques]
    Monsieur Marion, nous n'avons ici que quelques casques d'écoute approuvés pour le Parlement. Notre service technique va vous appeler.
    Chers collègues et témoins, nous allons commencer notre première série de questions. Si M. Marion nous revient, nous nous interromprons pour écouter ses observations, puis nous passerons aux questions.
    Nous allons commencer le premier tour. Nous avons d'abord le député conservateur Morantz, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Nous sommes très heureux d'accueillir nos estimés témoins aujourd'hui.
     Je vais commencer par ce que tout le monde essaie de passer sous silence, les événements qui se déroulent depuis un certain temps dans le secteur bancaire, surtout aux États-Unis, à cause de l'implosion de la Silicon Valley Bank.
    Comme cette séance est ouverte au public, je me demandais si vous pourriez rassurer nos auditeurs en leur expliquant que les banques canadiennes ne sont pas à risque et que le système bancaire canadien demeurera solide malgré ce qui se passe à l'étranger. Ma question s'adresse à n'importe lequel de nos témoins.
     Je vais commencer.
    En observant ces événements, je crois qu'il est important de comprendre qu'ils découlent du contexte et des facteurs très particuliers de certaines banques. Le système bancaire américain comprend 7 000 banques. Leur gestion est très différente de celle de notre système, qui ne compte que sept grandes banques, sept institutions financières.
    Bien évidemment, vu la hausse ultra rapide des taux d'intérêt et la gestion difficile de ces risques dans les bilans de certaines banques, la réglementation est insuffisante. De plus, comme nous l'avons découvert, la banque électronique fonctionne beaucoup plus rapidement que les longues listes d'attente. Je pense que tous ces facteurs se sont combinés pour produire la situation actuelle. Ensuite, l'érosion de la confiance crée des fragilités ailleurs.
    Le système canadien s'est toujours montré résilient. Même en 2008‑2009, alors que les problèmes de crédit et les actifs toxiques étaient beaucoup plus complexes, notre système financier a fait preuve d'une forte résilience. Les effets négatifs se sont reportés sur notre économie, mais nos banques sont demeurées solides. En fait, la réglementation très stricte qui en a découlé les a renforcées par la suite.
    Je ne crains pas qu'une telle situation ne se produise au Canada. Toutefois, ces événements vont certainement ralentir encore le crédit. Il ralentissait déjà aux États-Unis. Il va ralentir encore plus. Cela se produira peut-être aussi au Canada, car certaines institutions financières font preuve d'une certaine prudence, ce qui accroît la crainte d'une récession.

  (1125)  

    Merci.
    L'automne dernier, la revue The Economist a publié un article sur les risques qui menacent le secteur du logement. Les auteurs affirmaient que le Canada se situait au premier rang des risques liés au logement. Les Pays-Bas étaient au deuxième rang. Les États-Unis se trouvaient au septième rang, et l'Italie au dix-septième rang.
    Selon les auteurs de cet article, tous ces facteurs présagent une dégringolade dans le secteur du logement. Ils ajoutent que cette fois‑ci, la situation ne se manifesterait pas principalement aux États-Unis, mais au Canada, aux Pays-Bas, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Les économistes de la Banque Royale prévoient que le volume des ventes chutera de plus de 40 %, ce qui dépassera même la chute de 38 % observée en 2008‑2009. Cet article a été publié en octobre dernier.
    Pouvez-vous nous dire si vous êtes d’accord avec ces prévisions et si elles se sont concrétisées, six mois plus tard?
    Ma question s'adresse à n'importe lequel de nos témoins.
    Il ne fait aucun doute que le marché canadien du logement se redresse. Partout au pays, nous constatons des diminutions de plus de 10 % par rapport aux sommets atteints, mais j'y observe deux ou trois facteurs intéressants.
    Premièrement, même si la vente de maisons ralentit, ce qui donne à penser que la demande demaisons a diminué à la suite de la hausse des taux d'intérêt, la disponibilité des maisons diminue de façon proportionnelle. Il n'y a pas beaucoup de ventes forcées. Très peu de propriétaires vivent au‑dessus de leurs moyens. Je pense donc que nous ne nous retrouverons pas dans la même situation qu'en 2008‑2009. Les institutions financières canadiennes prêtent avec beaucoup de prudence. La majorité des ménages canadiens sont aussi des emprunteurs très prudents, ce qui n'était pas le cas aux États-Unis, comme vous le savez, pendant la grande récession et la crise financière mondiale qui l'a précédée.
    Je pense qu'en effet, le secteur se redresse. Cette situation freinera les activités économiques, mais je pense qu'il sera possible de gérer et de maîtriser la situation, alors je ne crains pas du tout qu'elle n'aggrave nos difficultés économiques.
     Merci.
    Merci, monsieur Morantz.
    J'aurais une petite chose à ajouter...
    Monsieur Jean, le temps de parole de M. Morantz est écoulé.
    Avant de passer à notre prochain intervenant, le député libéral Baker, nous allons essayer de nouveau de communiquer avec M. Marion, pour voir si ses problèmes techniques sont résolus.
    Oui, très bien. Vous avez cinq minutes pour nous présenter votre déclaration préliminaire.
    Je n'ai pas entendu ce que vous venez de dire.
     Haussez un peu le volume de votre micro. Vous avez cinq minutes.
     Je ne sais pas pourquoi vous ne nous entendez pas.
    Je vous entends. Il y a...

[Français]

     Monsieur le président, j'aimerais faire appel au Règlement.
    L'interprétation est impossible à cause de la qualité du son.

[Traduction]

    Vous avez maintenant cinq minutes, monsieur Marion.
    Pardonnez-moi.

[Français]

    J'espère que vous m'entendez bien.
    Je suis ici pour présenter des faits qui complètent les présentations de mes deux collègues.

[Traduction]

    Comme on le dit souvent, avec le recul on voit plus clair, et l'inflation est un indicateur à la traîne qui reflète une combinaison antérieure de politiques budgétaires et monétaires. Cela dit, loin de moi l'idée de faire la leçon sur la meilleure façon de composer avec un contexte de pandémie lorsque la chaîne d'approvisionnement mondiale est dysfonctionnelle et que le monde souffre d'un stress géopolitique aigu.
    Monsieur Marion, vous parlez peut-être trop vite...

[Français]

    Non, monsieur le président, l'interprète signale que la qualité du son est mauvaise.

[Traduction]

    L'interprète a encore de la peine à vous entendre.

  (1130)  

    Je pourrais juste rester en ligne pour répondre aux questions, si vous voulez.
    Une seconde. Je pense que les interprètes vous entendent mieux maintenant. Pourriez-vous éloigner un peu votre micro de votre bouche?
    Comme cela?
    Très bien. Nous vous demanderons aussi de parler un peu moins vite, ce qui aidera également les interprètes.
    Bien sûr.
    Essayons de nouveau. Nous verrons si cela va bien. Allez‑y.

[Français]

    Ainsi, la bonne nouvelle, c'est qu'à la suite des ajustements effectués par les autorités fiscales et monétaires au cours de l'année écoulée, l'inflation est en train de baisser. J'ai bon espoir qu'elle reviendra, dès cet été, dans la fourchette de 1 % à 3 % fixée par la Banque nationale du Canada.

[Traduction]

    À plus long terme, cependant, je demeure convaincu que le principal défi à relever pour maintenir l'inflation à un niveau acceptable sera de nous attaquer à la faible productivité dans notre économie.

[Français]

    Le Canada est tout simplement à la traîne en ce qui concerne la croissance et son stock de capital...
    Monsieur le président, j'aimerais faire appel au Règlement.
    Les interprètes soulignent, encore une fois, qu'ils ne peuvent pas faire leur travail.

[Traduction]

    Dites-lui de parler en français, parce que l'interprétation anglaise est bonne.
    Essayons cela, alors. Monsieur Marion, veuillez vous exprimer en français. Ce sera peut-être un peu plus facile pour les interprètes, et nous vous entendrons mieux.

[Français]

    Je vais parler des cinq graphiques que j'ai distribués, si vous les avez reçus.

[Traduction]

    Pouvez-vous confirmer que vous avez ces tableaux?
    Oui, nous avons tous reçu les diapositives.

[Français]

    D'abord, la situation de récession pendant la pandémie était inédite puisque les mesures de soutien aux ménages ont plus que compensé les pertes d'emploi encourues, de sorte que le revenu disponible a augmenté à une cadence effrénée tant au Canada qu'aux États‑Unis. Il s'agissait d'un environnement sans précédent, combiné avec une politique monétaire très souple.
    Nous avons assisté à un contexte où la capacité de production de l'économie était en hausse beaucoup plus forte que la capacité de l'offre de l'économie, de sorte que l'inflation s'est retrouvée à 8 %.

[Traduction]

    Vous m'entendez toujours bien?
    Je crois que tout va bien. Vous pouvez continuer.

[Français]

    L'inflation, après avoir atteint un sommet de 8 %, est maintenant en retrait et atteint présentement 5,2 %. Le Canada est l'un des rares pays où la politique monétaire peut influencer l'inflation parce que les hausses de taux hypothécaires se retrouvent dans l'inflation. Si l'on exclut l'augmentation des taux hypothécaires, l'inflation se trouve présentement à 4,8 %. J'ai bon espoir que celle-ci tombera à 3 % dès cet été.
    Je vais aborder tout de suite la question du prix des maisons. En réponse à la question posée tout à l'heure, le prix des maisons pendant la pandémie, aux États-Unis, a augmenté de 45 %, comparativement à 40 % au Canada. Compte tenu des hausses de taux qui ont été enregistrées au Canada au cours des derniers trimestres, la baisse du prix des maisons est maintenant observable...

[Traduction]

     Monsieur Marion, la qualité du son n'est toujours pas assez bonne pour que nous puissions continuer.
    D'accord. Je m'en excuse.
    Je serai ici pour répondre aux questions, si possible.

[Français]

     C'est d'accord. Merci.

[Traduction]

    Nous allons revenir aux tours de questions.
    Nous allons passer aux libéraux, à M. Baker, pour six minutes.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Je remercie tous les témoins.

[Traduction]

    Monsieur Gregory, j'aimerais commencer par vous demander ce que vous pensez de la résilience de notre secteur bancaire ici au Canada. Je crois qu’en entendant les reportages sur la volatilité des banques dans le monde et sur la situation du Credit Suisse et de la Silicon Valley Bank, de nombreux Canadiens, y compris de nombreux résidents de ma collectivité d’Etobicoke-Centre, s’inquiètent et se demandent si le système bancaire canadien est stable.
    Pourriez-vous nous parler de la résilience de nos banques et de nos institutions financières nationales?

  (1135)  

    Il ne fait aucun doute que ce qui se passe au sud de la frontière cause beaucoup d'incertitude. Les médias ne parlent pas seulement de ces deux institutions qui se sont effondrées il y a quelques semaines. Cette situation a eu des répercussions sur tout le segment des banques de taille moyenne. Les petites banques et les banques régionales manquent de liquidité et souffrent du retrait des dépôts. Cela nuira à l'offre de crédit de ce segment particulier de l'économie américaine. Pour bien comprendre le contexte, soulignons qu'aux États-Unis, plus des deux tiers du crédit accordé à l'immobilier commercial proviennent de petites banques et non des 25 grandes banques. Il faut donc s'attendre à ce que la perturbation économique s'aggrave.
    N'oublions surtout pas que les organisations comme le Forum économique mondial considèrent les banques canadiennes comme étant parmi les plus sûres et les plus solides au monde. Les banques canadiennes bénéficient d'une bonne capitalisation. Elles respectent et même dépassent les normes nationales ou internationales requises. Elles sont bien réglementées et surtout bien dirigées.
    Il est vrai que globalement parlant, tout le monde en sera touché. Cependant, comme nous l'avons vu lors de la crise financière mondiale, le crédit a continué de circuler dans l'économie canadienne. Je pense que cela témoigne fortement de la résilience du secteur bancaire canadien.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Jean, je me demandais si vous vouliez ajouter quelque chose à ce sujet.
    Plusieurs de mes concitoyens posent des questions sur la résilience de notre système bancaire, compte tenu, entre autres, des rapports qu'on a vus sur ce qui s'est passé au Credit Suisse Group AG et à la Silicon Valley Bank, aux États‑Unis.
    Que diriez-vous de la résilience et de la stabilité du système financier des banques, ici, au Canada?
    Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous n'avons pas le même écosystème bancaire qu'aux États‑Unis. Nous avons une réglementation rigoureuse, qui a été renforcée après 2008 et 2009. Il ne faut pas oublier que, aux États‑Unis, il y a eu des mesures sous l'ancienne administration américaine pour alléger la réglementation. Cela fait aussi partie de l'équation. Nous n'avons pas une structure d'institutions financières qui se concentrent autant sur certains marchés, plus particulièrement sur le marché technologique en l'occurrence. L'aspect de la diversification des dépôts et de l'appariement, on ne les voit pas au Canada. À la base, c'est un problème d'appariement. Évidemment, derrière tout cela, c'est la capitalisation qui est importante.
    Effectivement, au Canada, la dette est élevée dans l'industrie et dans le secteur de l'habitation, mais, en contrepartie, nous avons un système bancaire plus solide qu'ailleurs. Nous ne nous inquiétons pas de ce qui se passe et nous ne craignons pas que le même genre de scénario se reproduise au Canada. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'incidences économiques comme cela a été le cas en 2008 et en 2009. Nos banques avaient résisté, mais nous avions quand même ressenti les effets, surtout indirects, de ce qui s'était passé partout au monde.
    Pour ce qui est de la solidité des banques canadiennes et des institutions financières en général, y compris le Mouvement des caisses Desjardins, nous ne nous inquiétons aucunement.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Gregory, dans votre exposé, vous avez parlé de ce qui a contribué à l'inflation au Canada et dans le monde, mais surtout au Canada et aux États-Unis. Pourriez-vous nous résumer certains de ces facteurs? En particulier, qu'est‑ce qui a causé la montée en flèche de l'inflation?
    Il me reste environ une minute et demie, alors si j'ai le temps, j'aurai une question complémentaire à vous poser.
     Bien sûr. De toute évidence, il y avait un déséquilibre entre la demande et l'offre. Depuis des centaines d'années, les résultats d'études économiques et les théories soulignent que lorsque la demande est supérieure à l'offre, elle suscite une pression qui fait hausser les prix. C'est ce qui s'est produit dans le cas des produits de base. Lorsque nous nous sommes remis de l'éclosion de la pandémie, nous avons fait face à l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Cette partie du monde est un important producteur de presque tous nos produits de base, ce qui a aggravé le problème.
    Pendant la pandémie, les dépenses en services étaient limitées. Les gens ont beaucoup dépensé pour des biens. Ils achetaient des choses pour leur maison au lieu de partir en vacances. Cela a aggravé la perturbation des chaînes d'approvisionnement mondiales. Enfin, quand notre économie a pu reprendre, les gens se sont précipités dans les restaurants, vers des lieux de villégiature et dans les salons de coiffure. Cela a produit soudainement une pression énorme. En même temps, de nombreux fournisseurs de services ont eu de la peine à trouver du personnel. Je suis sorti tout de suite après la réouverture de ces entreprises. Les restaurants devaient fermer leurs portes plusieurs jours par semaine parce qu'il n'avaient pas assez de personnel pour rester ouverts tous les jours.
    Tout cela a contribué à l'escalade des prix. Heureusement, bon nombre de ces pressions commencent maintenant à s'inverser, de sorte que les perspectives d'inflation sont plutôt favorables.

  (1140)  

    Merci beaucoup.
    Merci.
    Chers collègues, avant de passer la parole à M. Savard-Tremblay du Bloc, nous allons essayer une fois de plus d'entendre M. Marion. Il a fermé son écran, et...
    Il n'est pas présent pour le moment. Bon, alors nous n'essaierons pas d'entendre M. Marion. Je suppose qu'un malheur ne survient jamais seul.
    M. Marion pourra envoyer ses observations préliminaires aux membres du Comité et aux analystes en vue de notre rapport. Les membres du Comité pourront aussi lui envoyer leurs questions, s'ils le souhaitent, et obtenir ses réponses par écrit. Ils pourront les remettre aux analystes pour le rapport.
    Madame Chatel, c'est à ce sujet? Allez‑y.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Il serait pertinent que M. Marion réponde à toutes les questions que nous avons posées à MM. Gregory et Jean. Je suggère donc que M. Marion réponde par écrit aux questions que les membres du Comité ont posées aujourd'hui.

[Traduction]

    Quand il sera de retour, oui, nous lui demanderons s'il peut faire cela pour nous.
    Monsieur le greffier, pourrons-nous lui envoyer les questions qui ont été posées?
    D'accord, alors nous ferons cela.
    Oui, monsieur Fast.
    J'ai une préoccupation semblable. Je suis ici pour poser des questions à M. Marion. J'aimerais que nos analystes ou les personnes responsables de connecter M. Marion à la séance continuent d'essayer. Nous avons deux heures en tout. Je voudrais vraiment qu'il revienne en ligne. J'avais préparé des questions spécialement pour lui.
    Oui, monsieur Fast. Merci. Nous avons essayé.
    Nous avons demandé à M. Marion de fermer son flux vidéo. Nous pensions que cela contribuerait à purifier le son pour que les interprètes puissent faire leur travail. Malheureusement, il n'est pas à l'écran en ce moment.
    Je suppose que nous allons continuer d'essayer, monsieur le greffier, et de voir ce que nous pourrons faire.
    Nous avons arrêté la minuterie pendant cette conversation. Nous allons maintenant passer la parole à M. Savard-Tremblay du Bloc pour six minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je salue tout le monde. Je suis heureux d'être ici, en remplacement de mon collègue de Joliette.
    Monsieur le président, je vous demande de dire à M. Marion qu'il n'y avait rien de personnel et que je n'avais pas l'intention de le chasser de la réunion, loin de là. Saluez-le aussi de ma part.
    Monsieur Jean, comme vous n'avez pas eu le temps de terminer votre présentation, j'ai envie de vous donner la chance de le faire maintenant.
    J'avais presque terminé mon allocution.
    Je concluais en disant que les baisses de taux auxquelles nous nous attendons en 2024 vont jeter les assises de la reprise économique à laquelle nous nous attendons.
     Ce ne sera pas une reprise nécessairement très robuste, parce que nous nous attendons à ce que les banques centrales fassent preuve de prudence et n'abaissent pas les taux très rapidement et, surtout, qu'elles ne les abaissent pas à des niveaux plancher, comme nous avons eu tendance à le voir durant le dernier cycle. Ce sera une normalisation des taux d'intérêt au gré de l'inflation qui revient vers les cibles. Cela devrait permettre de relancer l'économie et le marché immobilier.
     Nous sommes à quelques jours du prochain budget fédéral. D'ailleurs, la plupart des partis politiques font connaître leurs attentes, en ce moment.
    Vous avez abordé divers sujets, mais avez-vous des exemples de politiques publiques qu'Ottawa pourrait insérer dans le budget et qui seraient bénéfiques dans le contexte actuel difficile, sans nécessairement augmenter l'inflation?
    Ce qui rend la situation délicate, en ce moment, c'est que le taux d'inflation est encore très élevé. Il va dans le bon sens maintenant, mais il demeure beaucoup plus élevé que ce qu'on souhaite. Il faut donc être très prudent dans le choix des politiques pour éviter de mettre la Banque du Canada dans une position très difficile.
    En ce qui a trait aux mesures de soutien pour les ménages les plus vulnérables, ce qui a été fait, particulièrement en 2022, était la chose à faire. Les provinces ont emboîté le pas au fédéral, d'ailleurs. C'était important pour les gens qui ont le plus de difficulté à mettre de la nourriture sur la table et à payer leur loyer. Étant donné que c'est un contexte indépendant de la volonté de la population, il est important que le gouvernement lui redonne, en quelque sorte, le fruit de l'inflation. On sait que cela a gonflé particulièrement le PIB nominal, par exemple. Alors, l'idée de redonner cela aux gens pour leur permettre de respirer était une bonne chose.
    Or il y a une raison pour laquelle ces mesures étaient ponctuelles: elles coûtent cher et cela se reflète sur le solde budgétaire. Celui-ci devrait être beaucoup moins favorisé sur le plan des revenus au cours de la prochaine année, étant donné la récession que nous anticipons et la baisse de l'inflation. Il faut jouer de prudence de ce côté-là. Nous n'encourageons pas le gouvernement à faire une habitude de ce genre de mesures. Elles doivent rester ponctuelles, pour assurer une certaine crédibilité.
    Cela étant dit, pour ce qui est de toutes les mesures visant à répondre à la question urgente de la pénurie de logements, avec la forte immigration et le rehaussement des cibles, nous estimons qu'il faudrait une augmentation de 50 % des mises en chantier, par rapport à notre scénario de base, pour empêcher que cette immigration finisse par avoir un impact négatif sur l'abordabilité. Or on est très loin du compte, en ce moment. En fait, ce que nous prévoyons dans notre scénario de base, c'est un recul des mises en chantier, qui est d'ailleurs déjà assez avancé. Il est donc urgent d'adopter des politiques pour finalement faire bouger les choses en matière de création de logements, particulièrement de logements abordables.
    Par ailleurs, il est aussi important de réagir à l'Inflation Reduction Act of 2022 des États‑Unis. Ce sera d'une importance majeure, parce que celle-ci est comme un aimant qui va attirer les investissements dans tout ce qui est lié à la transition climatique. Or nous avons des intérêts à protéger à cet égard. Nous avons des filières en développement qui ont un grand potentiel, mais dont l'avenir pourrait être incertain à cause de l'Inflation Reduction Act. Ce sont des choses à faire valoir dans une perspective à long terme.

  (1145)  

    Je suis député de Saint‑Hyacinthe—Bagot, et Saint‑Hyacinthe a souvent le triste record du taux d'inoccupation le plus faible du Québec. Alors, lorsque vous avez parlé de logement, cela m'a doublement interpellé.
    En temps normal, je siège au Comité permanent du commerce international, où nous avons étudié l'Inflation Reduction Act, qui présente effectivement de très grands dangers. Nous pourrions faire beaucoup de représentations diplomatiques pour au moins étendre certaines dispositions plus protectionnistes à l'ensemble de l'Amérique du Nord.
    Cela dit, du côté du président Biden, on parle notamment de crédits d'impôt à l'investissement et on mise beaucoup sur la transition vers les énergies propres en guise de lutte contre l'inflation. Devrions-nous imiter cela, ici?
    Je ne dirais pas qu'il faut nécessairement imiter chaque mesure. Il faut quand même garder à l'esprit que l'économie américaine et celle du Canada n'ont aucune mesure commune, surtout en ce qui a trait à leur potentiel de production. Il peut y avoir des situations, aux États‑Unis, où certaines grappes atteignent une masse critique, ce qui génère des économies d'échelle et des économies d'efficience. Dans ce contexte-là, il est très difficile d'être concurrentiel en essayant de calquer ce qui est mis en place aux États‑Unis.
     Je pense qu'il faut plutôt miser sur les domaines où le Canada a des avantages comparatifs, et il en a. Je pense à la qualité et à l'expertise de notre main-d'œuvre, aux minéraux critiques et stratégiques, ainsi qu'aux filières de la production de batteries électriques et de leur recyclage. La demande des batteries électriques va largement excéder l'offre...
     Merci, monsieur Jean.
    Merci, monsieur Savard‑Tremblay.

[Traduction]

     Chers collègues, avant de donner la parole à M. Blaikie, je tiens à vous dire que nous ne pourrons pas entendre M. Marion aujourd'hui. Nous allons lui demander de nous envoyer sa déclaration préliminaire. Nous lui enverrons aussi vos questions pour qu'il y réponde.
    Monsieur Blaikie, vous avez six minutes.

  (1150)  

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Gregory, j'aimerais revenir sur votre commentaire de tout à l'heure. Vous avez dit que la plupart des Canadiens titulaires de prêts hypothécaires n'ont pas eu de peine à faire leurs versements. J'aimerais comparer cette affirmation à des rapports que certaines des grandes banques ont publiés récemment au sujet de leur portefeuille de prêts hypothécaires.
    Nous savons que les prêts à taux variable représentent un pourcentage important des prêts hypothécaires détenus au Canada. Environ les trois quarts d'entre eux exigent des paiements mensuels fixes. La majorité d'entre eux ont maintenant atteint le point critique où aucune part du paiement mensuel n'est versée dans le principal; tout va aux intérêts. En fait, dans certains cas, l'amortissement est négatif, ce qui en prolonge la période en ajoutant au capital le montant des intérêts qui ne sont pas couverts par le paiement mensuel.
    J’y vois là un grave facteur de stress dans le système hypothécaire. Il ne s’est pas encore manifesté, parce que les modalités de paiement mensuel ne changent qu’à la fin de la durée du prêt, si elle s'étend sur cinq ans. Cela me préoccupe beaucoup. J'ai quelques questions à ce sujet.
    Premièrement, je voudrais vous demander si vous êtes sûr que les banques canadiennes agissent conformément à leur autorité réglementaire en se livrant à cette pratique d'amortissement négatif. Dans quelle mesure cette solution est-elle novatrice pour les banques? Pas plus tard que l'an dernier, très peu de ces prêts hypothécaires avaient atteint leur point critique. S'agit‑il d'une pratique établie qui s'accroît à cause des conditions économiques actuelles?
    Deuxièmement, pensez-vous qu’il faudrait établir de nouvelles politiques ou prendre des mesures dans le secteur bancaire? Pensez-vous que certaines mesures de politique publique contribueraient à contrer cette préoccupation croissante sur le marché hypothécaire canadien?
    Enfin, je serais curieux de savoir comment vous analysez la situation de ces cinq prochaines années et ce que prévoient les banques. S’attendent-elles à ce que ces propriétaires se trouvent en défaut de paiement lorsqu’elles renouvelleront leur prêt hypothécaire à taux variable? Que devrions-nous changer d'ici là pour que les banques ne se contentent pas de retarder les défauts de paiement en se livrant à cette pratique plutôt que de les arrêter complètement?
     J'ai quelques observations à faire à ce sujet.
    Tout d'abord, pour ce qui est de ma première référence au fait que les ménages ne sont pas poussés au‑delà de leur capacité, c'était en comparaison avec, disons, les ménages américains pendant la crise financière mondiale liée à la grande récession que nous avons connue.
    Il ne fait aucun doute qu'à mesure que ces prêts hypothécaires seront renouvelés, d'autres obstacles pourraient s'ajouter dans l'économie. En fait, c'est probablement l'une des principales raisons pour lesquelles la Banque du Canada a suspendu ses hausses de taux, sachant qu'il y aura une période au cours de laquelle de nombreux ménages canadiens devront faire face à des paiements d'intérêts hypothécaires plus élevés, à mesure que leurs hypothèques seront renouvelées ou que leurs taux seront réinitialisés. Ils devront s'ajuster en conséquence pour ce qui est de leurs habitudes de dépenses.
    Ce qu'il ne faut pas oublier non plus, c'est que depuis de nombreuses années, les systèmes financiers d'octroi de prêts hypothécaires... Les organismes gouvernementaux les ont assurés selon le principe qu'il existait un test de résistance, assez onéreux dans certains cas. Il ne fait aucun doute que bon nombre de ces ménages devront maintenant payer des intérêts hypothécaires plus élevés.
    En fait, ce scénario a déjà été répété: ont-ils les ressources financières nécessaires pour s'en sortir? Devront-ils faire des ajustements? Est‑ce que les Canadiens vont commencer à manger un peu moins à l'extérieur, ou à aller peut-être moins au théâtre, ou à faire toute autre activité? La réponse est oui. Encore une fois, c'est précisément le mécanisme qui est en jeu ici. Pour ce qui est de ralentir l'économie, de réduire la demande de façon générale, c'est ce qu'il faut faire.
    Comme mon collègue M. Jean l'a mentionné, l'outil des taux d'intérêt fonctionne très efficacement pour ralentir l'économie canadienne dans ce contexte particulier.

  (1155)  

     Pour que nous ayons une réponse claire à ce sujet, êtes-vous convaincu que les banques agissent dans le cadre de leur pouvoir réglementaire actuel lorsqu'elles pratiquent l'amortissement négatif pour que ces détenteurs de prêts hypothécaires puissent demeurer dans leur maison?
    Ce n'est pas vraiment mon domaine d'expertise. Je ne peux pas vraiment me prononcer là‑dessus, malheureusement.

[Français]

     Monsieur Jean, il me reste une trentaine de secondes. Voulez-vous nous donner votre opinion à ce sujet?
    Peut-on vraiment corriger ce qui a été fait? Cela va être difficile.
    Si les États‑Unis sont moins exposés à ce qu'on vit en ce moment du côté des renouvellements, c'est parce que, là-bas, il est possible d'avoir des hypothèques à long terme. On n'a pas cela ici, les hypothèques étant généralement de cinq ans.
    On doit donc faire des efforts pour générer des conditions de marché qui permettraient d'avoir des hypothèques de 10, 15 ou même 30 ans. Cela a fait l'objet de discussions par le passé, mais on voit maintenant les effets de ne pas avoir un marché assez développé en matière de maturité hypothécaire.
    Cela aurait pu prévenir plusieurs problèmes qu'on voit en ce moment.
    Merci, monsieur Blaikie.

[Traduction]

    Chers collègues et témoins, nous allons passer à notre deuxième série de questions.
    Nous allons commencer par les conservateurs.
    Bienvenue à notre comité, madame Gray. Vous avez la parole pour cinq minutes, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Mes premières questions s'adressent à M. Gregory, de BMO.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du « niveau presque record de l'endettement des ménages ». Nous savons que la CIBC a déclaré que pour un prêt hypothécaire sur cinq dans son portefeuille, le paiement mensuel de l'emprunteur n'est même pas assez élevé pour couvrir la portion des intérêts de son prêt. Savez-vous si les chiffres sont semblables chez BMO?
    Je ne suis pas au courant de ces chiffres dans les autres institutions ni dans la mienne, bien franchement.
     Merci.
    Vous avez aussi parlé de l'augmentation des taux d'intérêt et vous avez mentionné que cela ralentit l'économie de façon efficace dans les faits. Vous avez parlé de la façon dont les ménages pourraient prendre des décisions d'achat différentes et des options qui s'offrent à eux.
    En même temps, vous savez que cela vient du fait qu'à mesure que les gens renouvellent leur prêt hypothécaire, ils ont des paiements hypothécaires plus élevés. N'est‑il pas vrai que les banques elles-mêmes sont les bénéficiaires de l'augmentation des revenus découlant de l'augmentation des taux d'intérêt?
    Encore une fois, la façon dont les banques génèrent leurs revenus n'est pas mon domaine d'expertise. De toute évidence, les ménages canadiens subiront un certain stress lorsqu'ils feront ces choix, mais je tiens à répéter que nous disposons d'un outil à cet effet. C'est à cela que sert le test de résistance. C'est pour cette raison que nous avons l'un des systèmes financiers les plus sûrs et les plus solides au monde. Cela vient de ce que nous tenons compte des problèmes potentiels occasionnés par les taux d'intérêt actuellement plus élevés.
    Je pense que pour la plupart des hypothèques, il faudra apporter certains ajustements, mais ces ajustements sont tous faisables. C'est ce qui est important.
    Merci.
    En tant qu'économiste principal chez BMO, conseillez-vous l'équipe de la haute direction et le conseil d'administration sur les questions économiques? Les conseillez-vous et leur donnez-vous votre avis sur les façons dont BMO comme institution financière pourrait vouloir examiner l'atténuation des risques, et les aidez-vous à orienter les décisions qu'ils prennent?
    Pas moi, personnellement. Il est possible que l'économiste en chef, M. Douglas Porter, soit plus actif à ce niveau, mais nous fournissons de l'information par l'entremise des rapports que nous publions, qui sont accessibles au public. Je rencontre régulièrement diverses personnes dans notre établissement, ainsi que nos clients, pour leur faire part de nos opinions et de nos idées et, espérons‑le, les amener à prendre de meilleures décisions.
    D'accord.
    Craignez-vous que le nombre de défauts de paiement augmente?

  (1200)  

    Je suis toujours inquiet lorsque l'économie semble se diriger vers un ralentissement. Vous savez, il y a toujours des retombées. Il survient toujours une phase de déclin. La bonne nouvelle, c'est que le déclin sera modéré si l'on se fie à l'histoire.
    Pour mettre les choses en contexte, nous prévoyons officiellement une croissance négative au deuxième et au troisième trimestre de cette année, mais un creux d'environ deux ou trois dixièmes en ce qui a trait à la baisse nette du PIB. Cela peine à répondre à la définition technique d'une récession et cela ne va pas générer le genre de pression sur la solvabilité que les ralentissements habituels ont tendance à produire.
     D'accord. Merci.
    Quand vous avez parlé de retombées, est‑ce que cela signifie que des gens vont perdre leur maison? Est‑ce cela que vous entendez par retombées? Croyez-vous que plus de gens risquent de perdre leur maison?
    Non. Par retombées, j'entends les répercussions sur la détérioration du crédit et la solvabilité — sur l'ensemble des emprunteurs de l'économie canadienne, tant les consommateurs que les entreprises.
    Est‑ce que cela comprend aussi les saisies?
    Vous dites que les dossiers de crédit des gens pourraient en souffrir. Vous ne dites pas que vous vous attendez à une augmentation des cas d'insolvabilité. Est‑ce que je vous ai bien compris quand vous dites que cela ne toucherait que leurs dossiers de crédit?
    Ce que je dis, c'est que nous allons assister à une sorte de faiblesse dans l'économie qui devrait avoir un impact minimal, parce que ce ne sera pas une récession typique; ce sera une récession très légère. L'épargne excédentaire accumulée par les ménages s'élève à 350 milliards de dollars. Les consommateurs américains ont commencé à en profiter, mais pas les consommateurs canadiens. Nous sommes plus conservateurs, je suppose, ce qui fait en sorte que nous mettons de l'argent de côté, peut-être pour les mauvais jours, alors je pense que...
    Merci, monsieur Gregory, et merci, madame Gray.
    Nous passons maintenant aux libéraux pour cinq minutes.
    Madame Chatel, vous avez la parole. Je vous en prie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    D'abord, je remercie tous les témoins d'être avec nous.
    Monsieur Jean, vous avez mentionné tout à l'heure l'Inflation Reduction Act des États‑Unis. J'ai bien aimé vos commentaires sur l'occasion opportune qui se présente au Canada d'investir dans la transition vers une économie propre. À mon avis, on ne peut pas risquer de manquer ce virage économique, étant donné l'importance de notre commerce avec les États‑Unis. C'est une grande occasion pour les entreprises canadiennes.
    Vous avez vraiment éveillé ma curiosité en disant que nous ne pouvons pas imiter les États‑Unis et que nous devons plutôt reconnaître les forces du Canada et miser sur elles. À cet égard, vous avez mentionné les minéraux critiques et l'expertise de notre main-d'œuvre, qui est l'une des plus éduquées de tous les pays du G20.
    Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet, monsieur Jean?
    Bien sûr.
    Au regard de la transition énergétique, nous avons des avantages relativement à notre production d'énergie. Prenons l'exemple de l'hydro-électricité au Québec, dont les coûts sont relativement bas. Cela nous confère déjà un avantage naturel qui nous donne un rôle d'acteur crédible en matière d'énergies propres. Toutefois, nous ne pouvons pas nous asseoir sur nos lauriers, car la diminution rapide des coûts de l'énergie solaire et de l'énergie éolienne fait qu'il sera de plus en plus difficile, pour le secteur hydro-électrique, de demeurer concurrentiel. Il faut augmenter très activement notre production d'énergie propre, notamment les énergies éolienne et solaire, non seulement au Québec, mais partout au Canada. C'est un exemple.
    Il y a aussi toute une chaîne d'approvisionnement liée aux biens de production d'énergies solaire et éolienne qui va servir la transition énergétique et le développement du réseau électrique.
    À ce même titre, les États‑Unis sont une société historiquement beaucoup plus productive, capable de générer des gains de productivité et des économies même sans aide gouvernementale. À cela, on ajoute une aide du gouvernement extrêmement musclée en matière de crédits d'impôt. Il sera très difficile pour le Canada d'y faire concurrence si le gouvernement ne répond pas, et si nous ne ciblons pas les secteurs où nous avons des avantages comparatifs.
    L'un de ces avantages se trouve dans le domaine du recyclage des batteries électriques. La demande de batteries électriques va largement dépasser la capacité de production. Cela va créer une grande demande de batteries électriques recyclées, ce qui pourrait devenir un avantage pour le Canada s'il se met déjà en position de devenir une plateforme centrale en la matière. Ce serait peut-être une façon intelligente de répondre aux défis présentés par l'Inflation Reduction Act et, aussi, un moyen de s'inscrire dans les chaînes de valeur de l'Amérique du Nord qui seront générées.

  (1205)  

     Merci beaucoup.
    Je pense que les annonces récentes de notre gouvernement au sujet des investissements importants de Volkswagen ici, au Canada, ainsi qu'à Bécancour pour ce qui est des batteries électriques, font que nous sommes effectivement sur la bonne voie.
    Monsieur Jean, vous parliez tout à l'heure d'une possible récession. Cela inquiète évidemment beaucoup les Canadiens. Cependant, si nous mettons en place les bonnes politiques, le Canada se place sur la bonne voie pour être un leader dans l'économie de demain.
    Pourriez-vous nous transporter un peu plus loin que 2023 et nous faire part de vos prédictions sur le plan économique? Allons-nous nous en sortir?
    Nous parlions de résilience, tout à l'heure.
    Merci, madame Chatel.

[Traduction]

     Votre temps est écoulé.

[Français]

    Est-ce que je peux répondre à la question?

[Traduction]

    Je sais que les choses vont très vite, mais peut-être qu'à la prochaine occasion...
    Nous allons passer au Bloc et à M. Savard-Tremblay pour deux minutes et demie. Je vous en prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Jean, en ce qui concerne l'immobilier, vous avez parlé de l'importance de l'augmentation des mises en chantier. J'aimerais que vous nous en disiez davantage en lien avec l'inflation.
    Bien sûr.
    Nous estimons, comme je le mentionnais tout à l'heure, qu'il faudrait augmenter de 50 % les mises en chantier, et ce, immédiatement. Il faudrait entre 300 000 et 350 000 mises en chantier à rythme annualisé afin de pouvoir combler les besoins associés à la demande démographique.
    Comme cela a été souligné tout à l'heure, nous avons un marché de l'habitation qui est très serré. Il n'y a donc pas d'excès de l'offre en ce moment. Au contraire, il y a une pénurie.
    Partout, dans toutes les grandes villes, il y a un manque criant de logements. L'essor démographique dû à l'immigration et la formation de ménages liée à cela en rajoutent. La nécessité de construire plus de logements est donc non seulement présente, mais criante.
    Au bout du compte, s'il n'y a pas suffisamment d'efforts effectués en ce sens, le problème de l'abordabilité, que nous ne verrions pas dans des économies un peu plus dynamiques à moyen terme, risque de perdurer, ce qui aura comme effet de diminuer notre pouvoir d'attraction des talents dont nous avons besoin. Il s'agit d'une question de coût de la vie, finalement.
    C'est pour cela que, selon nous, il s'agit d'une préoccupation urgente, particulièrement en ce qui concerne les logements abordables. Je pense aussi que le moment est venu de réfléchir à notre attachement à la propriété. Il existe, dans le monde, plusieurs modèles où les gens sont locataires sans que cela vienne nécessairement entacher leur capacité d'épargner pour l'avenir. C'est évidemment culturel, mais il arrive un point où, dans le processus de maturation d'une société, il devient important de faire ces choix et où il faut vraiment aller au-delà des modèles traditionnels.
    On m'indique qu'il me reste 10 secondes. Je vais donc les utiliser pour vous remercier. Nous poursuivrons notre discussion lors du prochain tour.

  (1210)  

    Merci, monsieur Savard‑Tremblay.

[Traduction]

    Nous passons maintenant au NPD et à M. Blaikie, pour deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Quand nous parlons de logements abordables, il est important que nous sachions que, durant les 30 années précédant 1995, le Canada a construit, avec les provinces, entre 15 000 et 20 000 unités de logement abordable par année. Cependant, au cours des 30 dernières années, le gouvernement fédéral n'a presque rien construit.
    Nous aurions besoin d'environ 500 000 unités de logement abordable. Si on en construit 15 000 à 20 000 par an pendant 30 ans, cela nous donnera à peu près 500 000 unités de logement abordable.
    Étant donné que c'est le marché qui a été utilisé pour construire des logements au cours des 30 dernières années, je me demande s'il sera possible de s'attaquer à la pénurie de logements abordables avec seulement les solutions du marché.
    Croyez-vous au contraire que nous avons besoin d'un programme d'investissement public pour construire des logements abordables en dehors du marché traditionnel?
    Je crois qu'il devra y avoir de plus en plus de partenariats entre les différents paliers de gouvernement et avec le secteur privé. Si nous nous attendons à ce que le secteur privé construise tout seul autant de logements, cela risque d'être difficile.
     C'est sur le plan des arrangements de financement que nous constatons des difficultés, particulièrement au Québec. Selon nous, il y a des efforts à faire pour développer plus d'unités d'habitation en modèle coopératif, par exemple. C'est encore très rare. Ce modèle, qu'on voit très peu ici, mais qu'on voit ailleurs, offre tout de même des solutions plus abordables. Il faut davantage de logements pour les étudiants et les personnes âgées, mais également des modèles intergénérationnels, bref tout ce que la démographie actuelle demande.
    Je pense que, au-delà de tout cela, on ne peut pas discuter de cela sans aborder la question de la main-d'œuvre. L'industrie de la construction est une industrie très intensive sur le plan de la main-d'œuvre. Environ 20 % des travailleurs de la construction sont âgés de 55 ans et plus. Il s'agit d'un domaine physiquement très exigeant.
     En ce moment, il faut que nous nous demandions s'il y a vraiment une stratégie très claire pour nous assurer que les compétences des immigrants que nous accueillons sont arrimées aux besoins que nous avons, en particulier dans le domaine de la construction.
    Merci, monsieur Jean.

[Traduction]

     Merci, monsieur Blaikie.
    Nous passons maintenant aux conservateurs, pour cinq minutes. Je vous en prie.
    Monsieur McLean, bienvenue à nouveau au sein de notre comité.
    Merci.
    Merci à tout le monde.
    Monsieur Marion, je suis désolé que vous n'ayez pas pu... J'ai toujours trouvé vos commentaires très judicieux, alors je suis désolé que nous n'ayons pas pu vous entendre aujourd'hui.
    Je vais tout de suite poser une question à M. Gregory, pour faire suite aux questions de mes collègues.
    Monsieur Gregory, les taux d'intérêt augmentent. Les prix des maisons ont baissé en moyenne de 14 %. Cela représente une arme à double tranchant pour les propriétaires de maison canadiens. Lorsque vous parlez d'épargne excédentaire de 350 milliards de dollars, pouvez-vous nous dire dans quelle mesure cette épargne est liée à la propriété?
    On ne sait pas exactement où se trouve la majeure partie de ces fonds. Je soupçonne qu'au fur et à mesure de l'accumulation de cette épargne excédentaire, celle‑ci finit par devenir une épargne permanente, c'est-à-dire qu'elle n'est pas disponible pour être dépensée dans l'immédiat, soit parce qu'elle est investie sur les marchés financiers ou dans le logement. Cependant, on ne sait pas exactement dans quelle proportion elle est...
    Vous avez raison. Une bonne partie de cette épargne est liée à la propriété. Vos 350 milliards de dollars... D'où vient ce chiffre dans le temps? Est‑ce avant ou après la dévaluation de 14 % du marché de l'habitation au Canada?
    Ce montant de 350 milliards de dollars est calculé en tenant compte du fait qu'avant la pandémie, les Canadiens économisaient environ 2,5 % de leur revenu. Dès le début de la pandémie, le taux d'épargne est passé bien au‑dessus de cela.

  (1215)  

    Monsieur Gregory, je vous pose une question directe. Votre chiffre de 350 milliards de dollars a‑t‑il été calculé avant ou après la baisse de 14 % du marché du logement?
    Il s'agit du chiffre du quatrième trimestre de 2022.
    Le calcul des 350 millions de dollars remonte donc au quatrième trimestre de 2022. Merci.
    Monsieur Gregory, en Alberta, contrairement à la plupart des autres provinces, les gens ont des hypothèques inconditionnelles. Si cette option était disponible dans toutes les autres provinces du Canada... Dans quelle mesure le bilan des banques serait‑il touché par le ralentissement du marché de l'habitation, si les Canadiens abandonnaient les hypothèques qu'ils sont incapables de rembourser?
    Je ne connais pas très bien cet aspect particulier du marché hypothécaire. Je ne peux donc pas vraiment me prononcer là‑dessus.
    D'accord, permettez-moi de vous poser une autre question.
    Vous avez parlé d'un taux d'inflation de 2 % au dernier trimestre au Canada par rapport à 5 % aux États-Unis. S'agit‑il d'un angle mort ou d'une prétention pour dire que l'inflation est beaucoup plus élevée aux États-Unis qu'au Canada?
    Les 2 % concernaient l'inflation globale au cours des trois derniers mois. Si vous voulez vraiment comparer des pommes avec des pommes, le taux d'inflation de base est d'environ 3 % au Canada, comparativement à environ 5 % aux États-Unis.
    L'inflation est certainement mieux installée aux États-Unis. Cela reflète...
    Merci. C'est exactement la question que je posais. S'agit‑il d'une différence de calcul ou d'une différence dans les effets ressentis par les citoyens de chaque pays?
     Il s'agit en partie d'une question de définition. Cependant, l'inflation des salaires est plus rapide aux États-Unis, et les ménages américains ont commencé à puiser dans leur épargne excédentaire accumulée. Ils continuent de dépenser malgré la hausse de l'inflation, ce qui n'est pas le cas des ménages canadiens. Par conséquent, notre inflation semble ralentir plus rapidement.
    Est‑ce que l'Inflation Reduction Act — ou plutôt la « loi sur l'exacerbation de l'inflation » — de 360 milliards de dollars américains aura un effet sur l'inflation aux États-Unis, et pouvons-nous nous attendre à la même chose si nous avons un autre budget déficitaire de 50 milliards de dollars la semaine prochaine au Canada?
    L'Inflation Reduction Act — et, pour revenir à ce que vous disiez, son titre porte un peu à confusion — contribue au fil du temps à la réduction du déficit et, de ce point de vue, elle pourrait être désinflationniste. Une partie de l'Inflation Reduction Act vise à garder les soins de santé abordables, ce qui, bien sûr, aide à contenir l'inflation, en particulier celle qui touche les coûts de ces soins. L'autre aspect, bien sûr, c'est le soutien à la transition vers l'énergie propre...
    Excusez-moi, monsieur Gregory. Je pose une question directe: pouvons-nous nous attendre à la même inflation au Canada si nous nous engageons à dépenser des dizaines de milliards de dollars dans le budget qui sera présenté la semaine prochaine?
     C'est une question hypothétique sur laquelle je ne peux pas vraiment me prononcer.
    Eh bien, c'est lié au fait même que, si le gouvernement dépense de l'argent, nous allons devoir augmenter les taux d'intérêt pour maintenir l'inflation à un bas niveau. Êtes-vous d'accord?
    Tout dépend de ce à quoi l'argent est consacré. Tout l'argent qui est dépensé pour améliorer le stock de capital et la productivité aide en fait la dynamique de l'inflation à long terme. Comme l'a dit mon collègue, M. Jean, cela dépend des politiques qui sont appliquées actuellement.
    Merci.
    Merci, monsieur McLean.
    Nous passons maintenant aux libéraux.
    Monsieur MacDonald, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos invités d'aujourd'hui.
    Je vais revenir à la question des taux d'intérêt et m'adresser peut-être à M. Gregory.
    Pendant cette pause, nous savons que les propriétaires de maison ressentent les effets de la situation, mais nous ne sommes pas témoins d'un grand nombre d'emprunteurs hypothécaires qui accusent des retards de paiement. Comment décririez-vous la stabilité du marché de l'habitation?
    De toute évidence, le marché s'affaiblit. Les prix sont à la baisse. L'activité est à la baisse, et cela va probablement continuer. Cependant, encore une fois, nous ne voyons pas beaucoup de pancartes « À vendre ». Le nombre d'inscriptions diminue parallèlement à une baisse de la demande de logements. Il s'agit presque d'une situation d'équilibre, alors que nous nous dirigeons vers des prix plus bas et plus abordables.
    Monsieur Gregory, diriez-vous que les dépenses ciblées par le gouvernement fédéral pendant la pandémie de COVID‑19 et par la suite jouent un rôle précis dans notre capacité de nous rétablir plus rapidement que la plupart des autres pays du G7?

  (1220)  

    Si l'on regarde la situation mondiale et la mesure dans laquelle les gouvernements du monde entier ont soutenu leurs économies, le Canada et les États-Unis, par exemple, se situaient presque au sommet au chapitre du soutien, ce qui, je crois, a contribué à la rapidité de la reprise. Bien sûr, les restrictions au Canada ont duré un peu plus longtemps que dans beaucoup d'autres pays, alors nous n'avons peut-être pas encore vu les répercussions sur les chiffres.
    Merci.
    Maintenant que le secteur du logement commence à se redresser, nous commençons à voir des investisseurs délaisser les investissements dans le marché du logement, comme le logement locatif. Si tel est le cas, quelles sont les répercussions sur les économies locales ou sur l'aspect résidentiel du logement?
    L'une des raisons pour lesquelles nous nous sommes retrouvés avec un marché de l'habitation aussi volatile, c'est en raison du rôle croissant joué par les investisseurs — non pas des gens qui achetaient des propriétés pour les occuper, mais des gens qui le faisaient à titre d'investissement, soit pour les vendre plus tard, soit pour les louer, ou quoi que ce soit d'autre. Habituellement, le calcul qui sous-tend cette décision dépend du coût de l'emprunt et des possibilités de gains en capital. Comme nous le savons, le prix des maisons est en baisse, alors cet aspect particulier va dans la mauvaise direction. De plus, bien sûr, les coûts d'emprunt ont augmenté considérablement.
    Je pense que le marché de l'habitation s'est calmé en grande partie, ou du moins en partie, en raison du ralentissement de la demande des investisseurs, ce qui n'est pas surprenant.
     Les grandes entreprises reportent les paiements et les rachats ou limitent les retraits du côté du marché, ce qui, comme vous venez de l'indiquer, pourrait avoir une forte incidence sur nos économies locales et peut-être aider notre marché de l'habitation au niveau résidentiel.
    Dans ce scénario, avez-vous l'impression que plus de gens commencent maintenant à investir dans la décarbonisation, dans des entreprises qui envisagent de le faire?
    Honnêtement, lorsque les gens feront leurs investissements et chercheront des débouchés pour l'avenir, il est clair que tout ce qui, selon moi, permettra de tirer parti de cette transition vers la carboneutralité sera... Une grande partie de l'activité... une grande partie des ressources de l'économie seront consacrées à cela au fil du temps.
    Il suffit de regarder ce qui se passe dans le secteur des fonds communs de placement ou des fonds négociés en bourse, où les fonds sont négociés [difficultés techniques] où les investisseurs peuvent en profiter, ce qu'ils font.
    Rapidement, les obligations vertes émises... Jusqu'à présent, la majorité l'a été par des sociétés, mais, de façon cumulative, par des sociétés financières. Il semble y avoir une certaine confusion au sujet des projets verts qui sont évalués par les investisseurs à cause de ce scénario.
    Je me demande si les banques peuvent faire quelque chose pour corriger cela, parce que, dans une certaine mesure, les investisseurs ne savent pas nécessairement quels sont les projets verts. Les banques se situent au deuxième plan, mais jouent un rôle de chefs de file dans le financement d'ensemble.
    Monsieur MacDonald, le temps est écoulé. Il faudra peut-être revenir à cette question et y répondre plus tard.
    Nous entamons le troisième tour. M. Fast a la parole pour cinq minutes.
    Bon retour, monsieur Fast.
    Merci. Je suis heureux d'être de retour au Comité.
    Je suis très heureux de constater que M. Marion est à nouveau en ligne. Mes questions s'adresseront à lui.
    Je suis très heureux, monsieur Marion...
    Avant que vous ne commenciez, monsieur Fast, M. Marion nous écoute, mais il n'en demeure pas moins qu'avec les problèmes de son pour les interprètes, il ne peut pas intervenir.
    L'hon. Ed Fast: Vraiment?
    Le président: Cependant, vous pouvez lui poser des questions, et il pourra ensuite envoyer les réponses par écrit au Comité, comme nous l'avons demandé.
    Nous nous excusons, monsieur Marion. Nous faisons face à d'importants problèmes techniques, et cela ne fonctionne tout simplement pas avec l'interprétation.
    Monsieur Fast, allez‑y..
     D'accord, donc vous ne pouvez pas m'entendre.
    Le président: C'est bien ça.
    Monsieur Fast, allez‑y.
    Est‑il certain que M. Marion ne peut pas nous parler? Il a un casque d'écoute.

  (1225)  

    Non.
    M. Stéfane Marion: Je peux parler.
    Le président: Le son n'est pas clair pour les interprètes. C'est ce que je crois comprendre. Pour une raison ou une autre, les interprètes n'entendent pas bien.
    Je l'entends pourtant bien.
    Il s'agit des interprètes, monsieur Fast... pas des députés. Le son n'est pas clair pour les interprètes, et ils ne peuvent pas faire leur travail, alors nous ne pouvons pas continuer avec M. Marion.
    Nous nous excusons des difficultés techniques. Monsieur Marion, nous aimerions que vous nous fassiez parvenir votre déclaration préliminaire et que le greffier vous envoie toutes les questions qui ont été posées. Vous aurez donc la possibilité de fournir des réponses pour notre rapport, pour les analystes, afin qu'ils puissent faire leur travail.
    Monsieur Fast, je vous en prie.
    Je vais adresser ma question à M. Marion, parce que j'ai été très heureux de constater qu'après avoir discuté des divers éléments qui ont un effet sur l'inflation au Canada, comme la guerre en Ukraine... Nous avons parlé des contraintes de la chaîne d'approvisionnement. Nous avons parlé d'économies excédentaires, de l'Inflation Reduction Act.
    Monsieur le président, j'ai été heureux d'entendre M. Marion aller au cœur de la question, une chose sur laquelle nous avons un contrôle au Canada, c'est-à-dire notre productivité.
    Je vais poser la question suivante à M. Gregory: quelle incidence notre faible productivité au Canada a‑t‑elle sur notre capacité de faire face à l'inflation du côté de l'offre?
    Si vous regardez notre piètre rendement en matière de productivité, il est en quelque sorte lié à l'inflation des salaires que nous observons. Au bout du compte, ce qui est à la base du processus d'inflation, ce n'est pas le rythme particulier de l'inflation des salaires, mais la mesure dans cette dernière est supérieure au rythme de la productivité. C'est ce que les économistes appellent le coût unitaire de main-d'œuvre. Dans la mesure où notre productivité est faible, cela contribue en quelque sorte davantage à une dynamique inflationniste en ce qui concerne les gains salariaux.
    Un autre aspect est la compétitivité. Plus notre société est productive... Non seulement cela aide à atténuer les pressions inflationnistes au fil du temps, mais cela nous rend aussi plus [difficultés techniques].
     Nous avons perdu M. Gregory, monsieur le président.
    Monsieur Gregory, êtes-vous là? Pouvez-vous nous entendre?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Des difficultés techniques nuisent à la capacité du Comité de faire son travail aujourd'hui.
    Je crois comprendre que nous sommes censés faire des tests avec tous les témoins avant la réunion pour nous assurer qu'ils sont en mesure de répondre aux questions. Je me demande donc comment il est possible que M. Marion ne puisse pas participer à cette réunion. Qui est responsable d'avoir laissé cela se produire?
    C'est une excellente question.
    Nous avons fait un test avec M. Marion. Nous avions des problèmes jusqu'au début de la réunion. Nous espérions pouvoir les corriger. Comme on peut le constater, ce n'est pas arrivé. Les interprètes nous ont dit qu'ils n'entendent pas suffisamment bien pour faire leur travail de façon sécuritaire et pour interpréter efficacement. Il a donc été décidé, comme le veut notre protocole, de ne pas entendre M. Marion.
    Nous nous excusons des difficultés techniques. Cependant, nous faisons des tests à l'avance, monsieur Morantz, et nous avons fait notre possible avec le témoin. Parfois, c'est Internet; parfois, ce ne sont que les ordinateurs.
    Je crois comprendre — et je vais simplement en informer les membres du Comité — qu'une mise à jour se faisait sur l'ordinateur de M. Marion. Juste avant la réunion, une mise à jour a commencé. Ce sont des choses qui arrivent. C'est déjà arrivé à certains des députés ici présents d'ailleurs.
    Nous n'avons pas le plein contrôle de la technologie, qui nous laisse parfois tomber. Cependant, je dois dire — j'ai arrêté le chronomètre — que dans bon nombre des réunions que nous avons eues ici, dans tous les comités et à la Chambre des communes, grâce à l'utilisation d'Internet et à la technologie dont nous disposons, nous avons pu entendre des témoins extraordinaires de partout au pays et du monde entier. Lors de notre dernière réunion, nous avons eu des témoins de Paris, en France, et de Stockholm.
    Voilà où nous en sommes, monsieur Morantz. Je vais revenir à M. Fast.
    J'ai arrêté le chronomètre. Il vous reste donc encore plus de deux minutes.
    J'invoque le Règlement. Je veux simplement dire que j'ai beaucoup d'empathie pour le travail extraordinaire de nos interprètes, mais aussi pour M. Marion, qui est venu témoigner devant notre comité et qui avait de grandes choses à nous dire. Le Comité entreprend une étude très difficile sur l'inflation, une question qui préoccupe grandement les Canadiens.
    Je comprends les deux côtés, et je suis de tout cœur avec les personnes concernées.
    Monsieur Marion, au nom du Comité, j'aimerais vous dire à quel point nous sommes tous désolés de ne pas pouvoir vous entendre. Soyez assuré que vos commentaires écrits feront partie de notre rapport. S'il y a autre chose que nous pouvons faire pour faire revenir M. Marion...
    Merci.

  (1230)  

    Au sujet du même rappel au Règlement, je pense que ce que Mme Chatel a proposé implicitement, c'est que M. Marion revienne. J'ai passé un certain temps à examiner les commentaires de chacun de nos témoins sur l'économie et l'inflation, et je voulais concentrer mes questions... les adresser à M. Marion, qui n'est pas en mesure d'y répondre.
    Je serais vraiment reconnaissant que le Comité puisse le convoquer à nouveau, que ce soit en personne ou à distance, avec la certitude que l'interprétation fonctionnera.
    Monsieur Fast, madame Chatel et monsieur Morantz, je vous remercie.
    Je pense que vous dites ce que pensent tous les députés ici. Nous aimerions beaucoup entendre M. Marion virtuellement, mais ce qui serait encore mieux, si nous en avons l'occasion et si l'emploi du temps de M. Marion le permet, ce serait de l'inviter à venir témoigner en personne lors d'une prochaine réunion sur l'inflation. C'est une possibilité, mais en attendant, nous allons lui donner la possibilité de répondre par écrit à bon nombre des questions qui ont été posées au cours de la réunion aujourd'hui.
    Je pense que tous les députés ont réagi positivement. Comme je l'ai dit, nous voulons que tout se passe le mieux possible pour les témoins, les membres du Comité et tous les autres — les techniciens, les interprètes, le greffier et les analystes.
    Monsieur Fast, vous en êtes à trois minutes. Il vous reste donc deux minutes de plus pour poser des questions. Je vous en prie.
    Je suis désolé, monsieur le président, j'invoque à nouveau le Règlement.
    Je pense que M. Gregory n'est plus là. Ai‑je raison?
    Je ne le vois pas à l'écran en ce moment. Le chronomètre est arrêté.
    Est‑ce qu'on essaie de rétablir le contact avec lui? Quelqu'un a‑t‑il communiqué avec lui pour savoir ce qui s'est passé?
    Nous allons vérifier immédiatement.
    Nous avons appelé et nous voyons que sa connexion Internet est en panne, monsieur Morantz.
    Comme je l'ai dit, nous avons beaucoup de problèmes techniques aujourd'hui. J'ignore ce qui se passe, mais la connexion Internet de M. Gregory ne fonctionne pas.
    Nous avons M. Jimmy Jean parmi nous et il reste encore deux minutes à M. Fast avant que nous passions au prochain intervenant.
    Monsieur Fast, veuillez poursuivre.
    Très bien. Je consacre ces deux minutes à Jimmy Jean.
    Monsieur Jean, êtes-vous d'accord pour dire que la productivité du Canada est au ralenti?
    Certainement. Pour avoir consacré une grande partie de ma carrière à ce sujet, je pense que notre productivité accuse un retard par rapport à celle des États-Unis pour bon nombre de raisons. La principale, c'est notre manque de dynamisme en matière d'innovation et notre piètre performance à commercialiser nos innovations récentes et à les transformer en entreprises viables. À ce chapitre, les États-Unis ont fait un bien meilleur travail que nous. Évidemment, les Américains ont un système de capital de risque plus audacieux et des universités très dynamiques, tout comme nous d'ailleurs. C'est le principal problème.
    J'aimerais beaucoup avoir votre opinion concernant l'impact qu'une baisse des investissements privés pourrait avoir sur notre productivité et notre compétitivité.
    D'accord. C'est en fait le deuxième point que je voulais aborder au sujet des investissements d'entreprise.
    Depuis de nombreuses années, nos investissements d'entreprise reposent largement des investissements dans le secteur des produits de base. Cette approche nous a bien servis pour générer de la croissance, mais nous constatons que les investissements dans les technologies de l'information et des communications ont été insuffisants.
    Quand lapandémie a frappé, la réaction des Américains a été assez étonnante. Du jour au lendemain, les gens ont été obligés de travailler de la maison. Les entreprises ont dû investir massivement dans leurs capacités de télétravail et nous avons constaté une reprise de l'investissement dans les technologies de l'information et des communications. Cette reprise n'a pas été aussi forte ici au Canada.
    De plus, en raison du vieillissement de la population, nous sommes évidemment dans une période où les entreprises doivent renforcer leur résilience face à ce changement démographique. L'automatisation est l'une des solutions. Au Canada, nous ne constatons pas le même dynamisme que chez nos voisins du Sud. C'est pourtant un facteur essentiel qui permettra aux entreprises canadiennes non seulement de survivre, mais de soutenir la concurrence parce que les entreprises américaines qui sont totalement automatisées et qui arrivent à produire plus à moindre coût, vont accaparer notre part du marché. Cette possibilité n'a pas suscité beaucoup d'intérêt au Canada et cela nous préoccupe.

  (1235)  

    Je vous remercie, monsieur Fast.
    C'est maintenant au tour des libéraux. Monsieur Sorbara, vous avez cinq minutes, je vous en prie.
    Je crois comprendre que le problème est du côté de M. Gregory. C'est le pare-feu de son ordinateur qui a bloqué la connexion avec lui.
    Je suis désolé. Je pense que le son est revenu de mon côté.
    Oui, monsieur Marion.
    Monsieur Sorbara, vous avez cinq minutes. Allez‑y.
    Une petite précision, monsieur le président. Peut‑on poser des questions à M. Marion maintenant?
    Non, parce qu'il n'y a pas d'interprétation.
    Merci pour cette précision, monsieur le président.
    Je vais donc poser ma question autrement. Monsieur Marion, pouvez-vous seulement répondre oui ou non par un signe du pouce, d'accord?
    Voici ma première question. Concernant les récents événements dans le secteur bancaire aux États-Unis et le fait que la Réserve fédérale sert encore de filet de sécurité aux banques, y a‑t‑il lieu de s'inquiéter du volume des approbations de crédit — qui alimentent une grande partie de l'économie, comme nous le savons — qui a été touché?
    Veuillez répondre simplement par oui ou non.

[Français]

     Oui.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Ma prochaine question est pour M. Jean.

[Français]

    Excusez-moi, je ne parle pas bien français.

[Traduction]

    En ce qui a trait à l'inflation ici au Canada, nous faisons généralement une distinction entre la hausse des prix des biens et la hausse dans les services. Assistons-nous à une décélération de l'inflation, tant du côté des biens que des services?
    Nous la voyons surtout du côté des biens, en particulier du côté de l'énergie. À ce jour, l'énergie est le principal facteur de la désinflation. En ce qui concerne les produits alimentaires, il y a évidemment une certaine rigidité. Si nous prenons une mesure de l'inflation tendancielle, qui exclut les produits alimentaires et l'énergie, il y a eu peu de mouvement. L'inflation a cessé d'accélérer depuis l'été dernier, sans toutefois diminuer vraiment.
    La réponse est donc oui, c'est du côté des produits de base. Cela est lié à l'assouplissement des chaînes d'approvisionnement. En particulier, les banques centrales se concentreront sur les services, à l'exclusion du logement dont les prix, comme l'a mentionné M. Gregory, sont touchés par la hausse des coûts d'intérêt hypothécaire. Nous nous attendons à ce que cela continue. La contribution du logement sera très rigide et certainement plus élevée qu'avant la pandémie.
    Cela signifie que la Banque du Canada devra attendre un ralentissement important des coûts des services avant de ramener le taux d'inflation à 2 %. Ce sera probablement la partie la plus difficile. D'ici la fin de l'année, nous prévoyons un taux de 2 à 2,5 %. Ce sera la partie facile. Un retour direct à 2 % sera plus difficile en raison de ces facteurs de rigidité.
    Une dernière question, de nature plus philosophique. M. Gregory en a parlé, je pense, au sujet du coût de l'argent.
    C'est une certitude pour moi. Depuis 2008‑2009 et la grave récession ou crise financière que le monde a traversée, serait‑il juste de dire — il y a eu un excellent documentaire à ce sujet dimanche dernier sur PBS — que l'ère de l'argent facile est maintenant révolue?
    Monsieur Marion, pouvez-vous répondre par oui ou non par un signe du pouce?
    Vous avez levé le pouce. Monsieur Marion, merci de vous être prêté à l'exercice.
    Monsieur Jean, êtes-vous également d'accord pour dire que l'ère de l'argent facile est maintenant révolue?

  (1240)  

    Oui, je suis d'accord. C'est justement pourquoi certaines banques en arrachent. Nous évoluons dans un vaste écosystème, un écosystème mondial des marchés financiers, y compris ici au Canada, qui a été structuré autour de l'idée que les taux d'intérêt demeureront toujours faibles. Ce paradigme est en train de changer et nous en voyons les ramifications.
    Compte tenu de la peur de l'inflation et de la pression à long terme qu'exerceront diverses sources structurelles sur l'inflation, il sera très difficile pour les banques centrales de ramener les conditions de financement au niveau où elles étaient.
    Permettez-moi d'ajouter que nous n'entendons plus jamais parler de la théorie monétaire moderne. J'ai un diplôme d'études supérieures en économie et j'ai étudié la théorie monétaire. Nous n'entendons plus parler de la TMM...
    Une voix: Heureusement.
    M. Francesco Sorbara: Heureusement, comme vous dites, parce que cette théorie a vu le jour parce que les taux et l'argent étaient maintenus à des niveaux trop bas pendant une trop longue période. Maintenant que l'ère de l'argent facile... Comme le dirait Warren Buffett, c'est quand la marée se retire que nous voyons ceux qui nageaient sans maillot, si je peux m'exprimer ainsi.
    Je remercie les économistes d'avoir exprimé leur accord là‑dessus.
    Il vous reste une minute.
    M. Yvan Baker: Avec votre permission, monsieur le président, je vais prendre le reste du temps.
    Le président: D'accord.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Jean, je reviens à vous.
    Je veux revenir sur un sujet dont nous avons discuté plus tôt.
    Bien que le PIB du Canada démontre que l'activité économique a ralenti vers la fin de 2022, le marché du travail continue de faire preuve de résilience, et les dépenses des Canadiens restent élevées.
    Quelle incidence ce ralentissement a-t-il sur notre économie?
    Il faut aussi tenir compte des effets passés. En ce qui concerne ce que vous avez dit au sujet des consommateurs, le Canada a connu une contraction de la demande intérieure au troisième trimestre.
    Comme je l'ai mentionné, l'Ontario a enregistré sa plus forte baisse de la consommation réelle depuis 1992, si on exclut la période de la pandémie. Le ralentissement de l'activité économique a donc une incidence.
    Nous savons aussi que la politique monétaire a des délais longs et variables. Cela veut donc dire que nous ne ressentons même pas encore l'effet maximal de la première hausse des taux d'intérêt, qui a été décrétée en mars 2022.
    On le sentira davantage durant la deuxième moitié de l'année, à plus forte raison dans le cas des hausses de 75 à 100 points de base qui ont été décrétés plus tard.
    Les effets du ralentissement continueront de se faire sentir. Je ne pense pas que la résilience du marché du travail ou la baisse de la consommation que nous avons observées nous renseignent sur quoi que ce soit d'utile en ce moment.
    Au Québec, le paiement moyen sur un prêt hypothécaire pour l'achat d'une première propriété est passé de 1 350 $ à 2 550 $ en raison de la hausse des taux d'intérêt. Ce prix devient donc extrêmement prohibitif.
    Certaines personnes exercent des métiers qui sont sensibles au ralentissement; elles vont en ressentir les effets, non seulement sur leurs paiements d'intérêts, mais sur leurs revenus et leurs perspectives d'emploi.
     Merci, messieurs Jean et Baker.

[Traduction]

    Avant de passer au Bloc et à M. Savard-Tremblay, j'aurais une autre précision à apporter. Le réseau de BMO Marchés des capitaux éprouve un problème généralisé de pare-feu et tout le service est en panne. Je veux simplement vous mettre au courant.
    Je veux aussi souligner l'excellent travail accompli par le greffier et son équipe pour inviter les témoins que nous leur avons proposés. Cela dit, quand nous avons invité ces témoins, nous leur avons donné le choix de comparaître virtuellement. Avec la permission des membres du Comité, je peux demander au greffier d'insister pour qu'ils viennent témoigner en personne. Nous allons faire tout notre possible pour les faire venir ici en personne.
    Nous remercions les témoins qui ont comparu à distance aujourd'hui. Quand des problèmes techniques se produisent, nous voyons que les députés veulent vraiment entendre les témoignages pour les intégrer à notre rapport.
    C'est ce que nous ferons à l'avenir. Nous allons insister pour que les témoins viennent en personne. Il n'y a rien de mieux que de les avoir sur place. Je pense que mes collègues sont d'accord avec moi.
    D'accord. C'est excellent.
    Nous passons maintenant au Bloc. Monsieur Savard-Tremblay, vous avez deux minutes et demie.
    Allez‑y, je vous en prie.

  (1245)  

[Français]

    Monsieur Jean, répondez-moi par un clin d'œil pour dire oui et par deux clins d'œil pour dire non. C'est une blague; répondez-moi par des mots, et non à l'aide de signes.
    Vous avez dit tout à l'heure que vous anticipiez une récession modérée. Vous avez parlé du Canada, mais, dans le cas précis du Québec, quelles sont vos prévisions? Que voyez-vous dans votre boule de cristal? Quels seraient les secteurs les plus à risque?
    En fait, selon notre prévision de base et les dernières prévisions publiées, nous prévoyons une récession légère et passagère. Effectivement, ce qui se passe dans le domaine bancaire, particulièrement aux États‑Unis, et les ramifications sur l'économie amènent le risque que ce soit plutôt une récession de type modéré, c'est-à-dire une récession typique.
    Pour répondre spécifiquement à votre question, au Québec, il y a une croissance négative de 0,2 %, donc une contraction de 0,2 %, de la croissance du PIB réel. Pour le Canada dans son ensemble, l'augmentation est de 0,6 %. Le Québec n'est donc pas moins exposé aux risques actuels. On a vu une forte correction pour ce qui est du marché immobilier, entre autres, en ce qui concerne les mises en chantier, et nous nous attendons à ce que cela se poursuive.
    Les consommateurs font preuve d'énormément de prudence. On voit aussi que non seulement les intentions d'effectuer des achats importants sont à la baisse, mais elles sont à un niveau record de faiblesse. Le moral des ménages n'est donc pas au rendez-vous actuellement.
    Ce qui tient vraiment l'économie au Québec, c'est le marché de l'emploi. C'est ce qui évite d'observer une catastrophe, pour le moment. Or, encore une fois, certains effets de retard finissent aussi par avoir une incidence sur la résilience du marché de l'emploi.
    La bonne nouvelle, c'est qu'il y a une pénurie de main-d'œuvre. Plusieurs entreprises sont donc peut-être mieux positionnées pour retenir des travailleurs ou pour en profiter pour aller chercher du talent. Cela devrait mitiger l'augmentation du taux de chômage à laquelle nous nous attendons. C'est pourquoi nous nous attendons à ce que ce soit léger et passager, mais nous ne pensons pas que ce sera évitable, ni au Québec ni ailleurs.
    Merci, monsieur Jean.
    Merci, messieurs.

[Traduction]

    Pour le NPD, nous entendrons M. Blaikie. Vous avez deux minutes et demie.
    Merci.
    Monsieur Jean, pour poursuivre dans la même veine, dans quelle mesure, selon vous, le Canada est‑il prêt à faire face à une récession?
    Nous savons que les stabilisateurs automatiques peuvent être très utiles en cas de récession, surtout lorsque le taux de chômage commence à augmenter. Nous savons que le gouvernement a récemment porté un dur coup au régime d'assurance-emploi en mettant fin aux mesures temporaires liées à la pandémie en septembre dernier, sans les remplacer par une proposition de modernisation des régimes d'assurance-emploi. Nous entendons dire qu'une récession s'en vient. Nous savons que le régime d'assurance-emploi n'est pas prêt à y faire face. Nous ne savons pas du tout quand le gouvernement va le remplacer.
    En ce qui concerne l'assurance-emploi ou d'autres mesures susceptibles, selon vous, d'atténuer les conséquences néfastes d'une récession, dans quelle mesure le Canada est‑il prêt à faire face à une récession? Quelles mesures le gouvernement fédéral devrait‑il mettre en place afin de préparer le pays à une récession?
    Vous voulez parler des mesures d'atténuation. Voulons-nous vraiment atténuer ou prévenir une récession? Je pense que c'est là une bonne question à poser.
    Je crois pertinemment qu'une récession est nécessaire pour rééquilibrer l'économie. Comme M. Gregory l'a signalé, le principal problème, c'est le déséquilibre entre l'offre et la demande. Une récession est habituellement la seule solution que nous savons efficace pour équilibrer ces paramètres.
    Évidemment, nous n'aimons pas l'idée que...
    Je suis désolé, mais j'aimerais intervenir brièvement.
    Cela est facile à dire pour bon nombre d'entre nous ici présents, mais pour les gens qui vont en subir les conséquences, notamment ceux qui s'inquiéteront pour les finances de leur ménage ou pour l'avenir de leurs enfants, je me sens obligé, en tant que décideur à Ottawa, d'essayer de comprendre comment nous pourrions atténuer ces conséquences très réelles et néfastes pour les ménages canadiens. Même si nous traversons une récession et que cela peut nous aider à mieux harmoniser l'offre et la demande, nous voulons le faire de manière à maximiser le nombre de ménages canadiens qui demeureront solvables et prêts à saisir les possibilités qui s'offriront à eux après la récession. À votre avis, que pouvons-nous faire pour favoriser ce résultat?

  (1250)  

    Pouvez-vous répondre très brièvement, s'il vous plaît?
    Premièrement, il serait certes indiqué d'apporter des améliorations au système d'assurance-emploi conformément aux idées mises de l'avant durant la pandémie. Le marché du travail a changé. Par exemple, le nombre de travailleurs à la demande est en hausse et nous devons nous assurer qu'ils seront pris en compte.
    Par ailleurs, nous devons aussi composer avec la réalité post-pandémique, en ce qui concerne notre dette et nos déficits. Il ne faut pas oublier cela. Nous avons vu ce qui s'est passé au Royaume-Uni. Nous ne voulons pas que cela se produise ici.
    Je le répète, les conditions structurelles nous permettent d'éviter une très mauvaise récession, en raison, surtout, du resserrement du marché du travail et du vieillissement de la population.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Blaikie.
    Monsieur Morantz, c'est à vous. Vous avez cinq minutes.
    Allez‑y.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux m'adresser à M. Marion.
    Êtes-vous toujours là, monsieur Marion? Je ne vous vois pas à l'écran.
    Vous pouvez poser des questions à M. Marion.
    Vous voilà. Merci.
    Cette situation a ceci de bon, c'est qu'elle me permet de prendre la parole, ce qui en fait n'a jamais été un problème pour moi, en tant que politicien. Je vais seulement vous poser mes questions. Je suis désolé, encore une fois, de vous demander de bien vouloir y répondre par écrit et faire parvenir votre réponse au greffier du Comité. Répondez-moi simplement par un signe du pouce, si vous le voulez bien, monsieur Marion.
    Très bien. Premièrement, je veux parler du lien entre la politique fiscale et monétaire et les taux d'intérêt, parce qu'il s'agit d'un continuum, à mon avis. Il existe de nombreux exemples historiques, mais je pense à ce qui s'est passé après la Première Guerre mondiale dans la République du Myanmar qui a été frappée par l'hyperinflation causée essentiellement par les politiques monétaires laxistes.
    Ici, la Banque du Canada a mis en œuvre un programme historique d'assouplissement quantitatif et d'acquisition d'obligations dans le but de maintenir les taux d'intérêt à un bas niveau. Le gouvernement canadien a enregistré un déficit de plus de 500 milliards de dollars en deux ans. Il y a quelques mois, j'ai eu l'occasion d'interroger Tiff Macklem au Comité et il a confirmé que si les dépenses du gouvernement avaient été moins élevées, l'inflation aurait été moins forte.
    Cela est d'autant plus important parce que lorsque l'inflation s'installe, les banques centrales n'ont pas vraiment beaucoup d'options pour maîtriser la situation. Elles peuvent augmenter les taux d'intérêt et essayer de vendre certaines des obligations qu'elles ont acquises — ce qu'elles appellent le resserrement quantitatif — dans le but de réduire la masse monétaire qu'elles ont accumulée grâce à leur programme d'assouplissement. Pourriez-vous nous dire, par écrit, si vous être d'accord avec cette analyse? C'était là ma première question.
    Voici maintenant ma deuxième question. Lorsqu'il y a un écart entre les taux de financement à un jour américains et canadiens, quel en est l'impact sur le dollar canadien? Si j'ai bien compris, lorsque le taux de financement à un jour est plus élevé aux États-Unis, le rendement des obligations est plus élevé. Nous assisterons alors à une migration des capitaux vers le pays où le rendement est le meilleur, ce qui signifie que cela réduirait la demande pour le dollar canadien et, du coup, l'affaiblirait probablement.
    Actuellement, il n'y a qu'un quart de point d'écart, mais je crains que si M. Powell décide de continuer à relever les taux d'intérêt aux États-Unis — et nous avons entendu dire que, comme la demande est un peu plus tenace là‑bas qu'ici, il n'a pas renoncé à cette idée et nous sommes actuellement en attente —, à partir de quel écart entre les deux taux de financement à un jour les capitaux migreraient-ils du dollar canadien vers le dollar américain? Voilà pour ma deuxième question.
    Ma troisième question porte sur les saisies, parce que nous n'avons pas réussi à obtenir une réponse claire à ce sujet et qu'une tempête parfaite nous menace. Nous avons des amortissements négatifs. Je n'avais encore jamais entendu cette expression. Les gens font leurs paiements, mais le montant qu'ils doivent verser chaque mois ne cesse d'augmenter. Les prix des logements ont grimpé en flèche avant de chuter brutalement. Tout indique qu'une récession est imminente. Certains pensent qu'elle sera faible, mais un ralentissement économique semble inévitable. À votre avis, est‑ce que cela risque d'entraîner une hausse des saisies, si jamais un nombre croissant de Canadiens perdaient leur maison, et quelles en seraient les répercussions sur leurs finances personnelles?
    Ai‑je épuisé mes cinq minutes?
    Vous en êtes à 3 minutes et 37 secondes.
    Seulement 3 minutes 37 secondes. Bien, ce sont mes trois questions. Je n'en ai plus d'autres.
    Monsieur Marion, acceptez-vous, encore une fois, de répondre à ces trois questions par écrit?

  (1255)  

    Je le ferai volontiers.
    D'accord, merci beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur Marion.
    Nous avons un témoin ici, M. Jimmy Jean.
    Oh, je suis désolé, monsieur Jean. Il me reste à peu près une minute. Pouvez-vous répondre à ces trois questions en 60 secondes?
    Des députés: Oh, oh!
    M. Marty Morantz: Choisissez‑en une.
    Je peux vous parler des taux d'intérêt canadiens par rapport aux taux américains.
    Premièrement, ce n'est pas une situation inhabituelle ni surprenante, parce que les marchés sont bien positionnés pour cela. Le dollar canadien s'est affaibli, ce qui n'est pas directement attribuable à la différence de nos politiques respectives. Je le répète, ce n'est pas inhabituel. Cela se produit dans chaque cycle économique. À la fin du cycle, les taux d'intérêt sont plus élevés aux États-Unis qu'au Canada. Actuellement, le dollar canadien est faible, pendant que le dollar américain prend de la force en raison de l'aversion au risque. Nous avons vu cela durant la pandémie.
    Deuxièmement, au Canada, le contexte de l'endettement des ménages est différent de celui qui prévaut aux États-Unis, comme nous l'avons déjà dit. Pour cette raison, la Banque du Canada ne peut pas... Chaque hausse de 25 points de base fait plus mal au Canada qu'aux États-Unis.
    Ma troisième observation est la suivante. Concernant le resserrement quantitatif amorcé par la Banque du Canada, nos analyses démontrent que cette année, il est plus mordant au Canada qu'aux États-Unis pour des raisons techniques liées au plafond de la dette. Autrement dit, même si les taux sont constants, le resserrement quantitatif est un moyen utilisé par la Banque du Canada pour appliquer une politique monétaire restrictive. Cela n'a pas cessé.
    Pour toutes ces raisons, le resserrement que nous observons actuellement au Canada est justifié, selon moi. La Banque du Canada n'a pas à s'inquiéter outre mesure du comportement du dollar dans l'immédiat.
    Monsieur Jean et monsieur Morantz, je vous remercie. Vous avez très bien utilisé cette dernière minute.
    Pour les libéraux, c'est maintenant à votre tour, madame Chatel. Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Encore une fois, je remercie M. Jean de sa présence. Nous sommes très chanceux qu'il soit ici malgré toutes les difficultés techniques.
    Monsieur Jean, je suis vraiment impressionnée par votre témoignage jusqu'à maintenant. Je veux reprendre là où nous nous étions laissés tout à l'heure. Vous avez mentionné que la récession devrait être légère et passagère, ce qui est rassurant.
    Qu'est-ce qui nous attend en 2024, lors de la reprise économique anticipée?
    Au Canada, la reprise devrait être à 0,9 % au Canada et à 1,4 % aux États‑Unis. Cette année, au Canada, la reprise est à 0,6 %. Il y aura donc une augmentation de la reprise économique.
    Ces chiffres permettent de constater que la situation n'est pas la même que celle qu'on a vécue par le passé, alors que les rebonds se situaient à 3 ou 4 %, voire plus. La raison pour laquelle c'est ainsi, c'est que les taux d'intérêt sont élevés. Dans le scénario actuel, l'environnement de taux d'intérêt n'est pas accommodant.
    Étant donné que les banques centrales ont été échaudées par ce qu'elles ont vécu et qu'il va y avoir beaucoup de volatilité et d'incertitude par rapport à l'inflation, nous pensons que les taux d'intérêt vont converger vers le point de neutralité. Cela arrêtera de faire mal à l'économie, mais cela ne permettra pas de la stimuler. C'est la raison pour laquelle la reprise est quand même assez lente. L'inflation, qui est à la cible, ne converge pas en dessous de la cible, ce qui pourrait justifier des baisses de taux plus importantes. On ne voit pas cela dans notre scénario, pour les raisons qu'on a mentionnées tout à l'heure.
    La bonne nouvelle pour le marché du travail, c'est qu'on connaît un plafonnement du taux de chômage à 6,9 %. À partir de là, on s'attend à voir une baisse graduelle du taux de chômage et une amélioration des revenus. Cela devrait permettre aux ménages de vivre un répit.
    Lorsque l'inflation est plus faible, cela signifie que les taux réels vont finalement croître. On va finalement être dans une situation positive, après deux ans de taux réels négatifs. Cela va favoriser un essor sur le plan des dépenses et une augmentation de l'activité immobilière.
    Merci, monsieur Jean.
    Tout à l'heure, M. Gregory a répondu à mon collègue conservateur que des dépenses stratégiques dans le potentiel de croissance du Canada constituent une mesure qui va combattre l'inflation à long terme et qui va nous permettre de stimuler l'économie ainsi que de faire croître les revenus et le PIB.
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, monsieur Jean?

  (1300)  

     Il faisait état d'investissements. On parle beaucoup d'infrastructures, par exemple, notamment d'infrastructures de transport. Il a été démontré que ce genre de mesures a entraîné des répercussions et une élasticité positives sur la production et sur le potentiel économique. On a aussi constaté des gains sur le plan de l'efficience des investissements dans des technologies de l'information et des communications. Comme je le mentionnais tout à l'heure, on investit de plus en plus, dans le contexte actuel, dans des technologies d'automatisation, dans le rapatriement de productions étrangères pour devenir plus résilient par rapport aux politiques régionales. Tout cela fait partie de l'équation qui rend notre économie plus productive. On ajoute aussi à cela l'investissement lié à la transition climatique, sans dire pour autant que cela renforce énormément la productivité. En effet, par rapport à un scénario contre-factuel où on ne fait rien, l'économie sera plus stable si on subit moins de chocs climatiques dans l'avenir.
    Sur le plan de la productivité, tous ces éléments comptent. Toutefois, je suis du même avis que M. Gregory quand il dit que le genre de politiques qu'il faut mettre en place à l'heure actuelle a changé. On n'en est plus vraiment à la distribution de chèques et au soutien au revenu, parce qu'on en voit les effets. Ce ne sont pas les seuls effets sur l'inflation, mais cela en fait partie. Maintenant, on mise beaucoup sur le capital et les investissements. Ce sera un cycle économique fondé sur un accroissement des investissements et sur une concurrence internationale pour des investissements, notamment dans le secteur technologique.
    C'est là-dessus qu'il faut miser pour, à la fois, accroître notre productivité et favoriser une économie plus résiliente.
    Merci beaucoup.
    Tous ces points sont fascinants. Pourriez-vous nous les transmettre par écrit? En effet, il est primordial de faire des investissements stratégiques pour bien positionner l'économie canadienne afin qu'elle soit vraiment concurrentielle dans le marché mondial au moment de la reprise économique.
    Merci, monsieur Jean.
    Merci, madame Chatel.

[Traduction]

    C'est tout le temps que nous avons. Nous remercions nos témoins.
    Monsieur Jean, nous vous remercions tout particulièrement d'avoir fait le gros du travail. Je sais que vous n'avez pas chômé aujourd'hui et nous vous remercions d'avoir une connexion Internet aussi efficace.
    Monsieur Marion, nous...
    J'ai eu tellement de difficulté à m'assurer que tout allait fonctionner durant les tests préalables, donc...
    Il y a des choses qui échappent à notre contrôle.
    Monsieur Marion, merci beaucoup d'être resté avec nous pour écouter nos nombreuses questions et de nous faire parvenir vos observations.
    Nous avons perdu M. Gregory à cause d'un problème de connexion Internet et de pare-feu à la banque. Le réseau Internet est en panne. Un malheur n'arrive jamais seul, dit‑on.
    Nous vous remercions pour vos témoignages et votre participation à notre étude sur l'inflation dans l'économie canadienne actuelle.
    Je tiens également à remercier notre greffier qui communique avec tout le monde, ainsi qu'avec les techniciens et les analystes. Je peux vous assurer qu'ils font un travail extraordinaire et ne ménagent aucun effort pour s'assurer que les témoins viennent témoigner en personne. Nous aimons avoir les témoins sur place. Aujourd'hui, certains ont comparu virtuellement, mais nous essaierons de les réinviter à l'une de nos prochaines réunions.
    Merci beaucoup à tous.
    La séance est levée.
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