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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 1er mai 1995

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 11 h 06 11965

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 12 heures 11965

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

CODE D'ÉTHIQUE

    M. Chrétien (Frontenac) 11977

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CLUB LIONS DE BALA ET SA RÉGION

L'IMMIGRATION

L'INJUSTICE FISCALE

LES ÉLECTIONS EN ONTARIO

LES BÉNÉVOLES

LA RIVIÈRE GRAND

    Mme Stewart (Brant) 11982

LES DROITS DES TRAVAILLEURS

    M. Leroux (Shefford) 11982

LES PÊCHES DE LA CÔTE OUEST

L'INFRASTRUCTURE

LA PHYSIOTHÉRAPIE

LES POMPIERS

LES DROITS DE L'ENFANT

LES RELATIONS OUVRIÈRES

LE DON D'ORGANES

LE CONGRÈS BIENNAL LIBÉRAL

L'UNITÉ NATIONALE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11984

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'AIDE SOCIALE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11985
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11985
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11985

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

    M. Gauthier (Roberval) 11986
    M. Gauthier (Roberval) 11986
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11986
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11986
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11987

LE RÉGIME DE RETRAITE DES DÉPUTÉS

LA COMPAGNIE SEAGRAM

HARBOURFRONT

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11989

LES JETS DE WINNIPEG

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11989
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11989

LA BOSNIE

LES PÊCHES

LA BOSNIE ET LA CROATIE

    M. Mills (Red Deer) 11990
    M. Mills (Red Deer) 11990

LES RELATIONS OUVRIÈRES

LE RÉSEAU ROUTIER

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 11991
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 11991

LES LANGUES OFFICIELLES

LE BÉNÉVOLAT

    Mme Gagnon (Québec) 11992

L'IMMIGRATION

LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES

LA DÉFENSE NATIONALE

QUESTIONS ORALES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE TRAITÉ SUR LA NON-PROLIFÉRATION DES ARMES NUCLÉAIRES

    M. Mills (Red Deer) 11994

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LOI DE MISE EN OEUVRE DE LA CONVENTION SUR LES ARMES CHIMIQUES

    Projet de loi C-87. Adoption des motions de présentation et de première lecture 11995

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

    Projet de loi C-88. Adoption des motions portant présentation et première lecture 11995

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

    Projet de loi C-323. Adoption des motions de présentation et de première lecture 11995

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'adoption du 74e rapport 11996
    Adoption de la motion 11996

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA DÉFENSE DE L'INTOXICATION

LA JUSTICE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11996

L'AGRICULTURE

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11996

LA FAMILLE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11997

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11997

LE PROJET DE LOI C-41

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11997

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'EUTHANASIE

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA JUSTICE

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS AU FEUILLETON

AFFAIRES COURANTES

LE CODE D'ÉTHIQUE

    Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 11998
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 12009
    Report du vote sur l'amendement 12015

LA LOI SUR L'ENREGISTREMENT DES LOBBYISTES

    Projet de loi C-43. Reprise de l'étude de la motion de troisième lecture 12015

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA CRÉATION D'EMPLOIS


11965


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 1er mai 1995

La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

Le Président: Le député d'Ontario n'est pas à la Chambre pour présenter l'article inscrit au Feuilleton d'aujourd'hui. La motion retombe donc au bas de la liste de priorité des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton, conformément au paragraphe 42(2) du Règlement.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour suspendre la séance jusqu'à midi. La Chambre pourra alors reprendre ses travaux à l'étape de l'étude des initiatives ministérielles.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime? Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

M. Silye: La Chambre serait-elle d'accord à l'unanimité pour que les députés présents à la Chambre débattent plutôt la question des pensions des députés pendant cette heure?

Des voix: Non.

(La séance est suspendue à 11 h 6.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 12 heures.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE D'ÉTHIQUE

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.) propose:

Qu'un Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes soit formé et chargé d'élaborer un code d'éthique destiné à aider les sénateurs et les députés à concilier leurs responsabilités officielles et leurs intérêts personnels, y compris leurs relations avec les lobbyistes;
Que le comité soit composé de sept sénateurs et 14 députés et que les membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes soient nommés pour agir au nom de la Chambre à titre de membres dudit comité;
Que les modifications apportées à la représentation de la Chambre des communes au sein du comité entrent en vigueur immédiatement après qu'un avis signé par le député occupant le poste de whip en chef de tout parti reconnu ait été déposé auprès du greffier du comité;
Qu'il soit ordonné au comité de mener de vastes consultations et d'examiner les démarches adoptées à l'égard de ces questions au Canada et dans les régimes gouvernementaux comparables;
Que le comité ait le pouvoir de siéger durant les travaux de la Chambre et au cours des périodes d'ajournement;
Que le comité ait le pouvoir de faire rapport de temps à autre, de convoquer des témoins, de demander le dépôt de documents et de dossiers et de faire imprimer des documents et des témoignages;
Que le comité ait le pouvoir de recourir aux services d'experts, de professionnels, de techniciens et d'employés de bureau;
Que le quorum du comité soit établi à 11 membres lorsqu'il y a prise d'un vote, d'une résolution ou d'une décision, à la condition que les deux Chambres soient représentées, et que les coprésidents soient autorisés à tenir réunion, à entendre des témoignages et à autoriser leur impression, à la condition que six membres du Comité soient présents et que les deux Chambres soient représentées;
Que le comité soit habilité à mettre sur pied, en se servant de ses propres membres, tous les sous-comités qu'il jugera utiles, et à déléguer à ces sous-comités tous ses pouvoirs, sauf celui de faire rapport au Sénat et à la Chambre des communes;
Que le comité ait le pouvoir d'autoriser la télédiffusion et la radiodiffusion de tous ses travaux;
Que le comité dépose son rapport final au plus tard le 31 octobre 1995;
Que, sans égard aux pratiques habituelles, si le Sénat ne siège pas lorsque le rapport final du comité est terminé, le rapport peut être déposé auprès du greffier du Sénat et qu'il soit considéré comme ayant été présenté à cette Chambre; et
Qu'un message soit envoyé au Sénat le priant de se joindre à la Chambre pour les fins susmentionnées et de choisir, s'il le juge opportun, des sénateurs pour le représenter audit Comité mixte spécial.
-Monsieur le Président, en présentant cette motion, le gouvernement continue de remplir son engagement à renforcer la confiance des Canadiens dans les institutions publiques.

Plus tôt au cours de la présente législature, nous avons révisé et renforcé le code régissant les conflits d'intérêts à l'intention des titulaires de charge publique et nous avons étayé le nouveau code avec la nomination d'un conseiller en éthique pour les ministres et les hauts fonctionnaires nommés par décret du conseil. Nous avons également proposé des modifications à la


11966

Loi sur l'enregistrement des lobbyistes visant à sortir les activités de lobbyisme de l'ombre et des coulisses pour les soumettre à la lumière de l'examen public.

[Français]

Ces mesures étant maintenant prises, nous nous concentrons sur l'adoption d'un code d'éthique pour les députés et les sénateurs. Nous espérons que le processus déclenché par cette motion se caractérisera par le consensus et la coopération, car c'est une question qui touche tous les parlementaires, qu'ils soient à la Chambre des communes ou au Sénat, et quelle que soit leur appartenance politique. C'est la raison pour laquelle le gouvernement propose que cette importante tâche soit confiée à des sénateurs et à des députés plutôt qu'au gouvernement lui-même. C'est là une nouvelle preuve que ce dernier a vraiment à coeur de renforcer le rôle et l'efficacité du Parlement.

[Traduction]

Nous sommes impatients de voir le comité entreprendre ses travaux et nous espérons que, dans le cadre de ses délibérations, toutes les parties collaborent à préserver l'intégrité du Parlement. Nous avons tous un rôle à jouer, le devoir de veiller à ce que le Parlement, l'instrument le plus fondamental de notre démocratie, demeure une expression des valeurs collectives de tous les Canadiens et une institution dont ils puissent être fiers à juste titre.

Les Canadiens ont fait clairement comprendre qu'ils voulaient que les parlementaires instituent des règles claires régissant leur conduite et dont l'application soit cohérente.

[Français]

Au fil des années, les attentes et les valeurs politiques de la population ont changé énormément.

[Traduction]

Dans les années 50, par exemple, on ne se préoccupait pas beaucoup des conflits entre les affaires privées et les responsabilités publiques des représentants élus. Je crois savoir qu'à cette époque, de nombreux ministres possédaient directement des valeurs mobilières et des actions de toutes sortes sans se soucier de les confier à des fiducies sans droit de regard, par exemple, et qu'ils siégeaient même au conseil d'administration de grandes sociétés sans que cela ne cause la moindre inquiétude dans le public. De nos jours, ce serait hors de question.

Au fil des années, le public a acquis des attentes beaucoup plus grandes. À mesure que l'art de gouverner devenait de plus en plus complexe et que les intermédiaires, avocats et lobbyistes de diverses tendances, se faisaient de plus en plus présents, les gouvernements successifs, aux niveaux fédéral, provincial et même municipal, ont adopté des mesures de plus en plus rigoureuses afin de répondre aux nouvelles attentes en matière d'intégrité.

Les citoyens canadiens, selon la province où ils habitent, ont été les témoins de diverses mesures allant de la publication de lignes directrices sans caractère officiel jusqu'à l'adoption de codes d'éthique en bonne et due forme à l'intention des représentants élus et d'autres titulaires de charges publiques. D'innombrables comités ou commissions d'éthique ont surgi, dont le degré d'impartialité, d'indépendance et l'importance des pouvoirs d'enquête ont beaucoup varié. Ils ont vu les politiques soumis à de nouvelles exigences en matière de divulgation et de dessaisissement de leurs biens. Ils ont également vu apparaître de nombreux régimes d'accès à l'information visant à garantir la transparence nécessaire pour que les citoyens puissent mieux examiner les activités des responsables de la chose publique.

Alors que, dans ces mesures, l'accent a été mis plutôt sur les règles de conduite acceptables pour le pouvoir exécutif, les tendances récentes traduisent un intérêt croissant pour étendre l'application de ces mesures à tous les titulaires de charge publique, y compris aux parlementaires qui ne sont pas ministres.

(1205)

Au niveau national, à la seule Chambre des communes, pas moins de quatre projets de loi sur les conflits d'intérêts des députés et des sénateurs ont été présentés au cours des huit dernières années et sont restés en plan au Feuilleton. Il est révélateur qu'ils aient connu ce sort. Cela montre à quel point il est difficile de bien concilier le droit des parlementaires et de leur famille au respect de leur vie privée et le droit du public d'exiger les normes de conduite les plus élevées de la part de leurs représentants élus. Il n'est pas facile de trouver le juste milieu.

Aujourd'hui, nous proposons de charger un comité mixte spécial d'étudier un code d'éthique à l'intention des parlementaires, selon la formule extrêmement fructueuse des comités mixtes spéciaux qui ont examiné la politique étrangère et la politique de défense du Canada. Nous proposons donc que le comité soit composé de 14 députés et de sept sénateurs. De plus, nous proposons que les membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes soient nommés pour agir au nom de la Chambre à titre de membres de ce comité.

Le comité mixte spécial aura un défi de taille à relever: il devra élaborer un code d'éthique destiné à aider les sénateurs et les députés à concilier leurs responsabilités officielles et leurs intérêts personnels, y compris leurs relations avec les lobbyistes. Le comité mixte spécial sera tenu de mener de vastes consultations et d'examiner les démarches adoptées à l'égard de ces questions au Canada et dans les régimes gouvernementaux comparables.

J'ai fait allusion un peu plus tôt aux quatre tentatives effectuées auparavant pour élaborer un code d'éthique de ce genre. Ces projets de loi ne sont pas morts au Feuilleton parce qu'on questionnait la nécessité d'agir dans ce domaine. Ils sont plutôt restés en plan parce qu'on ne s'entendait vraiment pas sur les mesures précises à prendre.

En tant que parlementaires, nous savons tous à quel point la vie publique peut être difficile. Les activités des ministres, en particulier, font l'objet d'une surveillance de tous les instants, ce que la plupart des Canadiens ne toléreraient pas. Voilà un aspect de la question dont les membres du nouveau comité mixte spécial devront tenir compte tout au long de leurs délibérations. Je le signale, parce que si notre démocratie doit s'épanouir, nous devons veiller à attirer leurs meilleurs candidats possibles à la


11967

vie publique. Il faut prendre cela en considération au moment de l'élaboration d'un bon code d'éthique.

Par exemple, en tant que titulaires d'une charge publique, tous les députés peuvent faire l'objet d'allégations selon lesquelles, tout en s'acquittant de leurs responsabilités publiques, ils favorisent leurs intérêts personnels. Tous les parlementaires, et non seulement les ministres, sont obligés de faire face à cela compte tenu des changements que nous avons apportés récemment pour renforcer le rôle tant des comités permanents que des simples députés.

Tant que les parlementaires auront des intérêts personnels et auront la responsabilité d'examiner, d'analyser ou de proposer des projets de loi pouvant favoriser éventuellement ces intérêts, nous devrons affronter cette réalité. Les défis que devra relever le nouveau comité mixte spécial promettent donc d'être impressionnants.

Songez seulement au principe de la transparence, par exemple. Rares sont ceux qui contesteront que la responsabilité sans la transparence ne vaut pas grand chose. Il n'est donc pas étonnant que la divulgation soit l'un des traits communs aux quatre tentatives qui ont déjà été faites pour définir un code de conduite et que le désaccord entourant le degré de divulgation nécessaire ait contribué à leur échec.

Est-ce que les dispositions relatives à la divulgation prévues dans le code régissant les conflits d'intérêts que le gouvernement actuel a mis à jour en juin 1994 constituent un bon modèle pour tous les députés et les sénateurs, y compris pour ceux qui ne sont pas ministres? Les responsabilités ne sont pas les mêmes.

(1210)

Cela ne devrait-il pas se refléter dans les lignes directrices? À quel point les critères de divulgation à l'intention des députés et des sénateurs qui ne sont pas ministres devraient-ils être rigoureux? Devraient-ils s'appliquer seulement à eux ou également à leur conjoint ou conjointe et aux membres de leur famille immédiate? Et à qui les divulgations devraient-elles être faites et quand? À partir de quel moment la divulgation devient-elle abusive? Bref, où se situe l'équilibre?

De la même façon, un code révisé traitant des conflits d'intérêts et destiné aux ministres précise les actifs que ces derniers peuvent posséder ou non. Il prévoit des règles claires sur le dessaisissement, que ce soit par des ventes sans lien de dépendance ou par l'établissement de fiducies sans droit de regard. Des règles sont aussi prévues lorsque les actifs ne sont pas échangeables, lorsqu'il est question de la possession d'une entreprise privée, par exemple.

Ces règles devraient-elles aussi s'appliquer entièrement ou partiellement aux députés et aux sénateurs qui ne sont pas ministres? Devraient-elles s'appliquer rétroactivement ou prévoir une protection en raison de droits acquis? Encore une fois, il faut en arriver à un juste équilibre.

Tous les députés s'entendront certainement pour dire que les principes, aussi enthousiasmants ou inspirants soient-ils, doivent s'appuyer sur des exigences concrètes et s'appliquer clairement aux activités quotidiennes pour avoir un sens et être efficaces.

Si le comité finit par recommander à l'intention des parlementaires une série de principes sur les risques de conflits d'intérêts qui ressemblent à ceux qui sont prévus dans le code établi à l'intention des ministres, plusieurs questions se poseront alors. Le régime devrait-il être fondé sur une autoévaluation, prévoir un examen par ses pairs ou prévoir un examen par une tierce partie indépendante? Dans quelle mesure peut-on ou devrait-on étendre le pouvoir d'enquête? Devrait-on désigner un conseiller en éthique qui jouerait un rôle semblable à celui du conseiller prévu pour les ministres? Comment le régime devrait-il cadrer avec le Code criminel et la Loi sur le Parlement du Canada? Devrait-on prévoir des sanctions dans un nouveau code à l'intention des parlementaires? Le cas échéant, qui serait chargé de leur application? En fait, quelle valeur juridique, s'il en est, ces sanctions devraient-elles avoir?

Finalement, en raison du processus électoral ou des élections, les élus ont des comptes à rendre à la population. Mais qu'arrive-t-il à ceux qui abusent du système ou qui portent préjudice à sa crédibilité entre les élections? Qu'en est-il des sénateurs qui ne sont pas assujettis à la discipline des boîtes de scrutin? Comment s'assurer qu'ils assument leur obligation de rendre compte en tout temps?

Encore une fois, tout est une question d'équilibre.

[Français]

En bout de ligne, le comité devra examiner et évaluer l'étendue des droits du public à être informé des affaires privées de ses élus et de ceux nommés au Sénat. Ces questions ne seront pas des plus faciles à résoudre.

[Traduction]

Je dis à tous les Canadiens qu'en adoptant cette motion, les députés montreront leur détermination à établir des règles de conduite sans pareille à l'intention des parlementaires canadiens, des règles dont tous les Canadiens pourront être fiers.

Je demande donc à la Chambre d'appuyer sans tarder et inconditionnellement cette motion.

[Français]

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, la motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre concernant un code d'éthique des parlementaires canadiens n'est pas un fait nouveau dans les annales du parlementarisme et même je dirais dans l'exercice démocratique occidental. Ainsi, la volonté du gouvernement actuel de former un Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes chargé d'élaborer un code d'éthique correspond au comportement traditionnel des libéraux qui se donnent toujours bonne conscience face aux citoyens tout en poursuivant leurs magouilles en coulisse.

(1215)

Avant d'entreprendre la démonstration de ce qu'est, en réalité, le code d'éthique libéral, j'aimerais attirer l'attention de la


11968

Chambre sur des points précis de la motion gouvernementale déposée par le leader du gouvernement à la Chambre. Cette motion stipule que le comité soit composé de huit sénateurs et 14 députés, en plus des membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Cela m'apparaît aberrant.

Nous, du Bloc québécois, proposons de réduire la composition de ce comité à trois députés du Bloc québécois, deux du Parti réformiste et sept députés libéraux. Ces douze élus seront suffisamment nombreux pour juger de l'éthique professionnelle des députés de cette Chambre.

M. Boudria: Les sénateurs?

M. Bélisle: On y reviendra un peu plus loin, si le député veut me laisser poursuivre. En ce qui concerne les sénateurs, ils sont la preuve que, historiquement, la volonté des libéraux et des conservateurs d'établir un code d'éthique qui soit respecté n'est finalement qu'un voeu pieux. Nous proposons que les sénateurs ne fassent pas partie de ce comité, mais qu'ils forment leur propre comité, chargé d'élaborer un code d'éthique propre aux sénateurs eux-mêmes.

Un deuxième point concerne le quorum du comité. Nous n'acceptons pas d'établir un quorum dans ce comité sans que ne soit présente l'opposition officielle, ce qui n'est pas stipulé dans l'avis de motion. Ainsi, la formulation actuelle de la motion gouvernementale ne respecte pas ce principe. Il y est écrit que le quorum du comité soit établi à douze membres. Cette formulation, à notre avis, doit être modifiée.

À plusieurs reprises, depuis les trente dernières années, les différents gouvernements ont voulu, à travers une multitude de rapports de commissions et de projets de loi morts au Feuilleton, réglementer la conduite des parlementaires, afin d'éviter les conflits d'intérêts entre fortunes personnelles et responsabilités démocratiques. La question des conflits d'intérêts est l'un des éléments, et le plus important, qui touchent à l'éthique parlementaire. Je veux donc m'attarder sur ce dernier élément et démontrer qu'il n'y a pas de volonté politique derrière la motion gouvernementale.

En principe, l'objectif visé par un code d'éthique régissant la conduite des élus du peuple est d'une importance fondamentale. La société s'attend à ce que chaque individu soit aussi libre que possible d'orienter ses intérêts économiques. Elle s'attend cependant à ce que les titulaires de charges publiques ne s'occupent pas, dans l'exercice de leurs fonctions, d'affaires dans lesquelles ils possèdent un intérêt économique personnel. Il est clair que les principes de l'impartialité et de l'intégrité sous-tendent les règles sur les conflits d'intérêts.

Ainsi, un décideur ne peut être jugé impartial et intègre s'il tire ou peut tirer un avantage personnel d'une décision. Les règles régissant les conflits d'intérêts chez les parlementaires sont, pour la plupart, incorporées dans trois lois du Parlement, et je les cite: le Code criminel, la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi électorale du Canada. Par exemple, la Loi sur le Parlement du Canada interdit à un parlementaire de recevoir une rémunération de l'extérieur pour des services rendus concernant toute question à l'étude devant la Chambre, le Sénat ou les comités de la Chambre ou du Sénat.

Cette même loi prévoit aussi qu'une personne ne peut être élue à la Chambre des communes si elle détient, directement ou indirectement, un contrat ou un marché du gouvernemnt mettant en cause des deniers publics. Si un parlementaire ne touche pas de deniers publics mais reçoit un avantage sous une autre forme en application du contrat, il ne tombe probablement pas sous le coût de cette disposition, mais cela est loin d'être clair.

De plus, si un parlementaire est actionnaire d'une société qui a obtenu un contrat du gouvernement, l'interdiction ne s'applique que dans le cas où ce contrat porte sur l'exécution des travaux publics. Cela pourrait permettre à un parlementaire de placer ses intérêts dans une société et de se soustraire ainsi à l'interdiction, ce qui constitue une échappatoire de taille, vous en conviendrez.

Il n'y a pas d'obligation, évidemment, de divulguer ses intérêts financiers. Cependant, l'article 21 du Règlement de la Chambre des communes prévoit que nul député n'a le droit de voter sur une question dans laquelle il a un intérêt pécuniaire et que le vote de tout député ainsi intéressé doit être rejeté.

(1220)

Si je rappelle à cette Chambre ces quelques règles qui régissent la conduite des parlementaires canadiens, c'est que les événements des dernières années, et plus particulièrement ceux touchant à la conduite de ce gouvernement, laissent planer un doute sérieux sur la volonté politique du gouvernement libéral d'établir un code d'éthique qui permettrait une transparence à toute épreuve dans la conduite des affaires publiques.

La question est cruciale; rien dans les tergiversations concernant la mise en place d'une loi efficace régissant les comportements des élus des deux partis au pouvoir en cette Chambre, depuis les 30 dernières années, ne dénote l'existence d'une véritable volonté politique.

Ainsi, en 1973, le gouvernement fédéral a publié un livre vert intitulé «Les membres du Parlement et les conflits d'intérêts». Faisons ici un bref historique qui montre finalement qu'au cours des 30 dernières années les deux partis qui ont été au pouvoir, les libéraux et les conservateurs, n'ont jamais eu cette volonté politique-là d'établir vraiment un code d'éthique touchant les élus.

Dans le document intitulé «Les membres du Parlement et les conflits d'intérêts», auquel je faisais allusion, il proposait de regrouper et d'étendre les règles en vigueur. Ce livre vert a été étudié par un comité de la Chambre des communes et par un comité du Sénat qui ont tous deux formulé de nombreuses recommandations. Le 10 juin 1975, le Comité permanent des privilèges et des élections de la Chambre des communes dépose son rapport sur le livre vert. Il en approuve en général les dispositions et recommande quelques modifications.

Deux ans plus tard, soit le 26 juin 1978, le projet de loi C-62, Loi concernant l'indépendance du Parlement, est présenté à la Chambre des communes avec le texte de nouveaux règlements de la Chambre et du Sénat. Ce projet de loi reste en plan lorsque la session prend fin le 10 octobre 1978.


11969

Cependant, le 16 octobre 1978, la Loi concernant l'indépendance du Parlement est présentée de nouveau avec quelques modifications sous la forme du projet de loi C-6. Les règlements de la Chambre et du Sénat sont déposés aux Communes le 30 octobre 1978. Le projet de loi est renvoyé à un comité le 8 mars 1979, mais aucune disposition n'est prise et il reste en plan le 26 mars 1979 lors de la dissolution du Parlement.

À la fin du mandat libéral, le 7 juillet 1983, on assiste à l'établissement d'un groupe de travail fédéral sur les conflits d'intérêts chargé d'étudier les principes et les règles touchant les conflits d'intérêts ainsi que leur évolution, et de déterminer s'il y a lieu d'adopter de nouvelles façons d'aborder le problème. C'est en mai 1984 seulement que l'on publie le rapport de ce groupe de travail sur les conflits d'intérêts intitulé «L'éthique dans le secteur public», le rapport Starr-Sharp.

Autre gouvernement, mêmes moeurs politiques. Le 25 novembre 1985, le gouvernement conservateur invite le Comité permanent de la gestion et des services aux députés à étudier l'opportunité d'établir un registre des intérêts des députés. Dans le cadre de ses travaux, le comité devait déterminer s'il y a lieu de divulguer la rémunération que touche un député pour siéger au conseil d'administration d'une entreprise publique ou privée, ou pour occuper d'autres fonctions ou postes dans diverses organisations.

Après avoir consulté les députés de tous les partis, le comité a conclu qu'il n'y avait pas lieu d'instaurer un tel registre des intérêts et que la législation actuelle applicable aux conflits d'intérêts des députés était satisfaisante. Et la saga continue. En février 1988, on assiste à la première lecture du projet de loi C-114, Loi sur les conflits d'intérêts chez les parlementaires.

En septembre 1988, le Comité législatif sur le projet de loi C-114 tient trois séances de travail mais est incapable de terminer l'étude du projet de loi avant la dissolution du Parlement, le 1er octobre 1988.

En novembre 1989, le scénario se répète et c'est une première lecture du projet de loi C-46, Loi sur les conflits d'intérêts chez les parlementaires. Ce projet de loi est essentiellement identique au projet de loi C-114, à part quelques légères modifications.

Le projet de loi meurt au Feuilleton lorsque le Parlement est abrogé le 12 mai 1991. En novembre 1991, première lecture du projet de loi C-43, Loi sur les conflits d'intérêts chez les parlementaires. Ce projet de loi est presque identique aux projets de loi déjà mentionnés, projet de loi C-114 et projet de loi C-46.

(1225)

Toujours la même histoire qui se répète, le projet de loi est immédiatement renvoyé à un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes.

En mars 1993, première lecture du projet de loi C-116, Loi sur les conflits d'intérêts, lequel comprend des modifications sur la Loi sur le Parlement du Canada. Enfin, en juin 1993, un rapport du comité mixte spécial de la Chambre des communes et du Sénat recommande que le projet de loi C-116 soit mis de côté. Un rapport similaire est déposé au Sénat le même jour. Les projets de loi C-43 et C-116 meurent au Feuilleton au moment de la dissolution de la 34e Législature le 8 septembre 1993.

Voilà l'historique d'une mascarade politique qui résume la problématique d'un code de déontologie pour les parlementaires canadiens. Nous sommes dans l'imaginaire nécessaire à la bonne conscience des libéraux et à la démocratie fédéraliste canadienne.

Tout au long de la campagne électorale de l'automne 1993, le Parti libéral du Canada affirmait que l'éthique devait être un aspect important de son mandat. Dans le discours du Trône de janvier 1994, le gouvernement a déclaré attacher la plus grande importance à l'intégrité et vouloir jouir de la confiance de la population. Il nommera donc un conseiller chargé de l'éthique qui sera le symbole, du moins on l'espère, de l'intégrité gouvernementale et de la garantie de la confiance populaire.

Cependant, en ce qui concerne les conflits d'intérêts, l'aspect le plus important d'un code de déontologie, le conseiller en éthique nommé par le gouvernement libéral continue de relever du Conseil privé et n'a aucun pouvoir d'enquête indépendante et continue de faire rapport au premier ministre lui-même.

Le livre rouge du Parti libéral soulignait, et je cite: «L'intégrité du gouvernement est mise en cause chaque fois que la population a le sentiment que les lobbies déterminent les politiques de l'État en exerçant une influence démesurée dans les coulisses.»

Les événements récents démontrent que toute la stratégie libérale en matière de code d'éthique du parlementaire, confirmée par la motion gouvernementale dont il est question aujourd'hui en cette Chambre, n'est finalement que jeter de la poudre aux yeux à la population.

Ainsi la lettre et la Loi sur la radiodiffusion qui relèvent du ministre du Patrimoine ne pèsent pas lourd devant le puissant lobby de Power DirecTv dirigé par André Desmarais, gendre du premier ministre. Le gouvernement libéral en vient même à défendre des idées chères aux conservateurs de Brian Mulroney et devient le chantre de la concurrence à l'échelle nord-américaine.

À lire les décrets émanant du ministre du Patrimoine, on ne peut que s'incliner devant la puissance du lobby de Power et faire son deuil de la démocratie fédérale où le capital est toujours roi. Il faut s'inquiéter de l'étroitesse de nos institutions et de nos représentants politiques dans ce dossier. Non seulement le gouvernement fait fi de sa propre loi et renie le CRTC chargé de l'appliquer, mais il prend des mesures rétroactives en empêchant Expressvu de lancer son service en septembre prochain. Tout cela au nom de la concurrence. Et pendant ce temps, le conseiller en éthique du livre rouge dort dans l'antichambre du premier ministre.


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Et que dire du récent voyage de ce même ministre du Patrimoine à Los Angeles pour rencontrer les grands de l'industrie cinématographique américaine. Au même moment, le consortium Seagram faisait l'acquisition de la firme MCA. L'imbroglio origine de ce que MCA possédait une filiale canadienne, Cineplex Odeon. Investissement Canada qui relève du ministre de l'Industrie devra déterminer la nationalité de Seagram. S'il s'avérait que celle-ci n'est pas canadienne, le ministère du Patrimoine devrait alors fournir un avis de validité de l'acquisition. Il devient, dès lors, évident que le voyage du ministre du Patrimoine à Los Angeles avait comme véritable objectif d'aller rassurer des amis libéraux, c'est-à-dire Seagram, de la bienveillance d'Ottawa.

Pendant que le leader du gouvernement en Chambre présente une motion réclamant la mise en place du comité spécial chargé d'élaborer un code d'éthique du parlementaire, en coulisse, ce même gouvernement se moque des règles démocratiques les plus fondamentales en favorisant les amis du Parti libéral et en gouvernant au nom de l'establishment financier et du grand capital canadien.

(1230)

Avant de conclure, j'aimerais reprendre en cette Chambre quelques éléments du rapport dissident du Bloc québécois sur le projet de loi C-43 qui traite d'une réglementation affectant l'enregistrement des lobbyistes.

Je l'ai dit, les conflits d'intérêts et l'intervention des lobbies sont les éléments les plus importants qui déterminent l'établissement d'un code de déontologie régissant l'activité parlementaire de nos démocraties contemporaines.

En Occident, les institutions démocratiques font actuellement face à une crise de confiance dans la population, vous en conviendrez; comme exemple, on peut citer le taux de participation de la population américaine à l'élection présidentielle. Il est clair qu'il est désormais nécessaire de rétablir un lien de confiance entre les gouvernements et la population. Pour ce faire, les politiques publiques doivent être discutées, débattues, influencées, modifiées et, par-dessus tout, décidées au vu et au su de toute la population. Une telle préoccupation est au coeur du projet de société que nous voulons construire au Québec. Entre autres, nous voulons quitter la scène politique fédérale parce qu'elle est dominée depuis trop longtemps par le magouillage politique des libéraux.

Une fois au pouvoir, nous l'avons vu, ce gouvernement a considérablement dilué les engagements qu'il avait pris dans son livre rouge au cours de la campagne électorale de l'automne 1993. Pareille volte-face soulève, dans l'esprit de la population, un questionnement légitime sur le réel désir du gouvernement libéral de légiférer en matière d'éthique parlementaire. Entre les engagements électoraux et la concrétisation législative, force nous est de constater que les lobbyistes ont sans aucun doute dicté la version finale du projet de loi C-43.

Le Bloc québécois est d'avis que, pour établir l'intégrité de nos institutions démocratiques, il faut d'abord que cessent les engagements stériles de ces 30 dernières années, qui leurrent les électeurs. Il faut également que l'administration des affaires de l'État soit la plus transparente possible, de manière à éliminer les zones grises et assurer la population que les décisions en matière de politique publique reflètent les intérêts généraux de la population et non ceux de lobbies puissants.

Après seulement 17 mois de pouvoir, le dossier de ce gouvernement en matière de transparence est déjà chargé. Outre les exemples déjà cités et l'historique accablant en matière de législation concernant un code d'éthique parlementaire, on se rappellera que, le 26 septembre 1994, la Presse canadienne faisait état de documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information qui démontraient que les lobbyistes avaient multiplié les rencontres dans les mois qui ont précédé la présentation de l'actuel projet de loi C-43 et que d'autres avaient promis d'intenter des poursuites judiciaires si la loi les contraignait à divulguer leurs relations politiques. Il faut le faire, monsieur le Président.

Dans ce cas comme dans plusieurs autres, le manque de transparence a empêché la population de connaître l'étendue et la nature de la démarche des lobbies relativement au projet de loi C-43. Drôle de situation, les lobbyistes ont réussi à influencer la loi qui devait limiter leur influence propre. Il faut le dire, le projet de loi C-43, dans sa forme actuelle, n'est pas susceptible de prévenir des événements troublants comme ceux entourant la privatisation de l'aéroport Pearson ou encore l'affaire concernant le ministre du Patrimoine lui-même.

Pire, de l'aveu même de M. Mitchell Sharp, conseiller principal auprès du premier ministre sur les questions reliées à l'éthique, même si la loi découlant du projet de loi C-43 avait été en vigueur au moment des pourparlers sur la privatisation des terminaux 1 et 2 de l'aéroport Pearson, le public n'aura rien appris de plus. Le rapport majoritaire des députés ministériels concernant le projet de loi C-43 fait preuve de timidité dans sa volonté d'encadrer les activités des lobbyistes et d'assurer une plus grande transparence possible dans la gestion des affaires de l'État.

L'attitude gouvernementale dans ce cas démontre encore une fois que le discours libéral en matière d'éthique n'a aucun fondement. On cherche à se donner bonne conscience et à bien paraître devant l'électorat.

L'affaire de la lettre d'appui à une demande de permis que le ministre du Patrimoine canadien a fait parvenir au CRTC, un organisme supposément indépendant et placé sous sa responsabilité, a mis en lumière les lacunes du projet de loi C-43 relativement au conseiller en éthique lui-même. On se rappelle que le premier ministre avait attendu plus de trois semaines pour demander l'avis du conseiller relativement à cet épineux dossier.

(1235)

D'une part, en tardant autant et en ne le consultant qu'à la dernière minute, une fois sa décision prise, le premier ministre a démontré le peu d'importance qu'il accorde à ce conseiller en éthique. Le chef du gouvernement libéral a tout simplement voulu se doter d'un conseiller supplémentaire rattaché à son


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bureau. La nomination, et de ce fait, la promesse électorale libérale d'un conseiller en éthique n'est qu'un leurre destiné à donner l'impression à la population que le gouvernement bouge et prend des mesures concrètes et réelles pour instaurer l'intégrité de nos institutions canadiennes. Or, pour le Bloc québécois, l'éthique, la transparence et la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques et dans la gestion des affaires de l'État ne sont pas des questions qui appartiennent à un parti politique, à un gouvernement ou à un premier ministre, mais bien aux institutions démocratiques.

Ainsi le Bloc québécois recommandait-il dans son rapport de dissidence que le conseiller en éthique soit nommé par le Parlement, qu'il le soit pour sept ans et qu'il ne puisse être révoqué par le gouverneur en conseil.

Enfin, le scandale de l'aéroport Pearson de Toronto a amplement démontré le laxisme des règles actuelles de divulgation des tractations et des activités des lobbyistes. Le Bloc québécois insistait dans son rapport pour que les lobbyistes divulguent leurs interventions auprès de l'État fédéral relativement à l'élaboration de propositions législatives. En somme, le Bloc québécois recommandait que tous les lobbyistes soient tenus de divulguer les contrats pour l'obtention desquels ils tentent d'influencer l'administration fédérale.

Le Bloc québécois a présenté plus d'une vingtaine d'amendements en commission concernant le projet de loi C-43 qui tous ont été rejetés par les députés ministériels, qui n'ont pas assisté aux témoignages, dans plusieurs cas, ni pris part aux discussions des derniers mois. Nous étions confiants que les nouvelles règles ou, enfin, l'orientation et les engagements pris par le Parti libéral du Canada permettraient des débats de fond sur cette question si importante en régime démocratique. La motion présentée par le gouvernement libéral qui préconise la formation d'un Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes chargé d'élaborer un code d'éthique n'est qu'une mesure parmi tant d'autres qui n'ont jamais démontré qu'elles pouvaient transformer les moeurs politiques de ce pays.

Les intentions des libéraux, ceux de la famille des Seagram et des Power Corporation en matière de code d'éthique ne sont que des mesures destinées à lancer de la poudre aux yeux à la population tout en se gargarisant de mots pour se donner une bonne conscience politique.

En terminant cette intervention, j'aimerais présenter un amendement à la motion du gouvernement concernant la formation d'un comité sur l'éthique. Je propose, appuyé par mon collègue de Bellechasse:

Qu'on modifie la motion:
a) par suppression, au premier paragraphe, des mots «mixte spécial du Sénat et» et «les sénateurs et»;
b) par suppression, au deuxième paragraphe, des mots «sept sénateurs et»;
c) par substitution, au huitième paragraphe,
(i) du chiffre «11» par ce qui suit: «8»;
(ii) aux deux instances, le mot «chambres» par ce qui suit: «partis d'opposition»;

(iii) les mots «les coprésidents soient autorisés» par ce qui suit: «le président soit autorisé»;

d) par suppression, au neuvième paragraphe, des mots «au Sénat et»;
e) par suppression du douzième paragraphe;
f) par suppression du treizième paragraphe.
Le vice-président: La Présidence va examiner la recevabilité de cet amendement et donnera une opinion plus tard. Le débat se poursuit avec l'honorable député de Elk Island.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole ce matin sur la motion dont nous sommes saisis. La question de l'éthique, de la conduite des députés et des sénateurs revêt une grande importance pour les Canadiens.

Je déplore que tout de suite après les élections les gens aient commencé à m'attribuer des caractéristiques que je ne possède pas. Ils m'ont dit tout de suite: «Maintenant que vous êtes en politique, vous êtes comme ci, vous êtes comme ça.» Ils ont porté toutes sortes d'allégations et d'accusations qui ne sont tout simplement pas fondées. J'aimerais croire que le fait de devenir député n'a pas eu d'effets néfastes sur ma moralité. Notre réaction par rapport à la perception des Canadiens en matière d'éthique est d'une grande importance.

(1240)

Je félicite le gouvernement d'avoir au moins eu le courage d'amorcer le débat. Je crains aussi que ce débat, comme d'autres, comporte plus de simulacre, plus de symbolisme que de substance. Nous devons avoir un mécanisme qui calmera les anxiétés des Canadiens qui estiment que les politiques ne se comportent pas correctement.

Il est précisé dans le Feuilleton que le comité chargé de rédiger le code d'éthique est composé de huit sénateurs et de 14 députés. Or, le solliciteur général a dit ce matin que le nombre de sénateurs serait de sept. Je suppose que sept est le nombre exact et que le Feuilleton a dû être changé. Nous pourrions peut-être obtenir une clarification à cet égard plus tard. Pour l'heure, que le nombre de sénateurs soit de sept ou de huit ne change rien à mon intervention dans le débat, de sorte que je n'ai pas besoin de cette réponse maintenant. Il faudra clarifier la question plus tard.

Avant d'être député, j'ai été professeur de mathématiques dans une école secondaire pendant quatre ans, puis dans une école technique pendant 27 ans. Je me souviens qu'au tout début de ma carrière d'enseignant, c'était à l'école secondaire il y a une trentaine d'années, j'ai tenu un débat avec mes élèves. La question était: Pourquoi devraient-ils me respecter?

Je me souviens encore de l'essence de ce débat. Ce dernier m'a aidé à renforcer un principe que j'ai gardé toute ma vie jusqu'à présent. J'ai lancé un appel à mes élèves en disant: «D'abord, je suis quelqu'un qui mérite votre respect et non quelqu'un qui ne le mérite pas.»


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Je leur ai dit ensuite: «Mais ce n'est pas tout. À mesure que vous me connaîtrez mieux et que vous suivrez mes cours, j'espère que je pourrai gagner votre respect. Vous constaterez que je connais ma matière, que je la connais très bien, que je suis capable de la communiquer et que j'attribue des notes justes.» J'ai fait toutes les choses de la vie d'un enseignant qui font qu'il gagne le respect de ses élèves.

La volonté du gouvernement de former un comité mixte pour élaborer un code d'éthique est louable, mais au départ, c'est à nous, les représentants élus, qu'il appartient de gagner le respect de nos électeurs. Il en a toujours été ainsi et cela ne changera pas. Dans une large mesure, il faut faire un effort individuel.

Mais même en ayant un code d'éthique très détaillé, il y en aura toujours qui ne seront pas à la hauteur et qui perdront le respect des électeurs de leur circonscription et peut-être même de tout le pays. À l'opposé, il y en a d'autres qui adopteront un comportement généralement irréprochable, qu'il y ait un code d'éthique ou non. J'aime croire que la majorité d'entre nous faisons partie de cette dernière catégorie.

Lorsque toute la classe politique est accusée de malhonnêteté, je crois que c'est parce qu'on généralise les défauts de quelques-uns. En un sens, c'est des plus regrettables, mais cela devrait nous convaincre de prendre des mesures pour corriger cette mauvaise perception et changer les comportements fautifs.

(1245)

Le comité aura pour mandat de produire un code d'éthique devant guider les sénateurs et les députés pour qu'ils puissent faire la part des choses entre leurs responsabilités officielles et leur intérêt personnel, y compris dans leurs échanges avec des lobbyistes. La motion découle du projet de loi C-43, Loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Les deux sont liés.

J'ai une question de fond à poser. Comment en sommes-nous venus à nous occuper de ce sujet? La plupart des lobbyistes ne perdent pas trop de temps avec les députés. Ils vont directement à la source du pouvoir. Ils s'adresseront directement aux sous-ministres et aux ministres. Ils essaieront d'influencer le premier ministre. Ils essaieront probablement d'influencer quiconque a le pouvoir de prendre des décisions.

Nous avons donc besoin d'un code d'éthique pour préciser quel genre de relation ou de dialogue est moralement acceptable entre un lobbyiste et une personne qui est dans une position d'autorité.

Notre démocratie a pris un mauvais tournant. Si tout allait bien, chaque député représenterait loyalement et consciencieusement les intérêts de ses électeurs. Il y aurait un débat libre ici et aux comités. Les députés ne seraient pas tenus de respecter la ligne du parti et seraient libres d'exprimer, tant durant le débat qu'au moment des votes, les désirs et les aspirations de leurs électeurs.

Le fait que nous ayons des lobbyistes qui essaient d'influencer la politique gouvernementale est vraiment un échec de notre processus démocratique. Même si je reconnais que le lobbyisme est nécessaire étant donné la façon dont les choses fonctionnent ici, je crois vraiment qu'il ne devrait pas avoir sa place dans notre société parce que nous ne pouvons pas permettre que les groupes d'intérêts et les groupes de lobbyistes déterminent à eux seuls la politique gouvernementale.

Nous avons aussi la question des marchés publics, qui vient probablement au premier plan. Le gouvernement est le plus grand consommateur de biens et services dans le pays. Souvent, pour réussir, une entreprise doit faire des affaires avec le gouvernement. Dans certains cas, les personnes qui réussissent à obtenir des contrats gouvernementaux n'ont plus de tracas financiers pour le reste de leur vie. Pour l'adjudication des marchés publics, nous avons le scénario des lobbyistes qui essaient d'influencer les décideurs.

D'après ce que je peux voir, il y a deux niveaux de lobbying, mais je me trompe peut-être. Je suis relativement nouveau ici, mais j'ai étudié la question et je suis resté très attentif à ce qui se passe autour de moi. Il me semble y avoir deux extrêmes. À une extrémité, il y a la représentation tout à fait légitime: «Voici ce que mon entreprise peut faire pour vous. Voici notre feuille de route. Voici la qualité de notre produit ou de notre service.» Il s'agit là de renseignements neutres. Si l'adjudication des marchés se faisait correctement au gouvernement, ces renseignements seraient inclus dans les conditions de ces marchés, et je crois qu'ils le sont. Ces renseignements sont publics étant donné qu'ils font partie des éléments dont il est tenu compte dans l'adjudication d'un contrat.

(1250)

L'autre type de lobbying est celui auquel nous devons nous attaquer. C'est celui contre lequel les gens s'élèvent à juste titre, celui où les pressions et l'influence exercées sont tellement subtiles qu'elles ne sont probablement pas assez évidentes pour justifier une enquête judiciaire. «Comme tu es mon ami (ou l'ami d'un ami), nous voulons que tu nous accordes une attention spéciale».

Je ne pense pas que cela se produise très souvent, mais il faut croire que cela arrive encore trop souvent à en juger par la réaction des Canadiens lorsque nous leur parlons de ces questions. Je ne puis m'empêcher de penser à certains exemples précis dans le secteur pour lequel je suis porte-parole. Il est très mauvais que l'on fasse des allégations.

Je sais qu'on nous dit toujours qu'il s'agit d'un malentendu, que nous ne connaissons pas les faits et qu'il s'agit de fausses allégations. Pourtant, nous n'avons pas-et je regrette de le dire, nous ne sommes pas, avec les changements apportés au projet de loi C-43 et avec cette motion, prêts d'avoir-un mécanisme assez authentique pour pouvoir répondre aux questions que se posent les Canadiens.

Comme je l'ai dit dans mon intervention sur le projet de loi C-43, il y a deux sortes de problèmes. L'un est celui où les allégations selon lesquelles il y aurait eu malversation sont


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exactes. Nous avons besoin d'un mécanisme qui nous permette de vérifier ces allégations et d'obliger les personnes responsables à rendre des comptes. Je doute que le projet de loi C-43, c'est-à-dire la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes actuelle, la motion ou les travaux du comité réussissent à régler ce problème. À mon avis, je ne le devrais pas. Que la Chambre me pardonne mon scepticisme.

L'autre problème, à mon avis tout aussi important, concerne les principes fondamentaux du droit. J'ai eu des tas d'occasions de discuter de ces questions avec le gouvernement et de problèmes connexes avec des étudiants, surtout en ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous nous trouvons souvent face à des réactions excessives quant à ce que devrait être la loi.

Au sortir d'une discussion que j'ai eue avec des étudiants il n'y a pas longtemps, nous sommes arrivés à la conclusion que la loi avait en fait deux fonctions bien précises: la première, celle de déclarer innocente la personne qui l'est réellement. Il est inacceptable que, dans notre système judiciaire, nous déclarions coupable une personne en vérité innocente. Nous devons déclarer innocentes les personnes qui le sont. C'est ce qui arrive dans la plupart des cas et, à mon avis, c'est un aspect qui n'est pas prévu dans la motion. En cas d'allégation non fondée, nous n'avons aucun mécanisme pour convaincre les gens que tout est régulier. C'est ça l'élément manquant.

J'ai déjà dit que si des accusations étaient portées et qu'elles étaient fondées, la personne qui était coupable devait être déclarée coupable par voie légale, que ce soit par un tribunal ou selon ce processus. Toutefois, ce qui m'inquiète beaucoup plus, c'est lorsqu'une personne innocente est accusée.

Ces dernières semaines, à chaque fois que nous avons émis des doutes, le gouvernement a prétendu qu'il ne se passait rien de mal, qu'il n'y avait eu aucune irrégularité. Mais comment le croire? Le conseiller en éthique n'est pas indépendant, il est trop proche du gouvernement pour qu'on puisse avoir confiance en lui.

(1255)

J'aimerais faire une parenthèse. Le week-end dernier, en bavardant avec certains de mes électeurs dans ma circonscription, je me suis aperçu que leurs préoccupations allaient bien au-delà des questions que j'ai soulevées jusqu'à maintenant. Le solliciteur général a d'ailleurs mentionné une de ces préoccupations lors de son intervention. Il voulait modifier la perception selon laquelle les détenteurs de charge publique profitent de la situation.

Plusieurs de mes électeurs se sont dits très préoccupés par la question du régime de pensions des parlementaires. C'était probablement l'exemple le plus frappant de la façon dont le comportement des ministériels était guidé par leurs intérêts privés. En effet, dans le cas présent, chacun d'entre eux tire profit de son poste. En tant que députés, ils sont en mesure de se voter un régime de pensions d'une générosité choquante par rapport au secteur privé, d'une générosité qui dépasse même ce qu'autorise la Loi de l'impôt sur le revenu pour les simples citoyens. Si ce n'est pas ce qu'on appelle un conflit d'intérêts, je me demande bien ce que c'est. Et malgré tout, il n'existe aucun mécanisme pour faire face à une telle situation. Ce n'était qu'une petite parenthèse à mon propos d'aujourd'hui.

Ce comité m'inspire d'autres réserves. En effet, il est composé d'un nombre important de membres et a comme mandat d'entreprendre de vastes consultations, d'examiner les approches suivies en la matière au Canada et par d'autres pays ayant un régime gouvernemental similaire.

Mon parti va me demander de faire partie de ce comité. Très franchement, je crains que la vingtaine de membres du comité, plus le personnel, ne soient appelés à se rendre dans le monde entier. Ce comité voudra probablement se rendre en Australie pour voir quelles sont les procédures là-bas. Il voudra aussi, pour la même raison, se rendre à Singapour, en Thaïlande, en Angleterre, en Allemagne, en France, en Espagne, en Italie et ailleurs. Bien entendu, nous devrons visiter un certain nombre d'États américains pour faire de vastes enquêtes et consultations.

Je préjuge de la situation, mais il est arrivé tellement souvent que la création d'un comité entraîne une augmentation fulgurante des dépenses et des déplacements. Je ne crois pas que les contribuables canadiens soient prêts à payer une facture de 20 ou 30 millions de dollars pour une étude qui porte sur une chose tellement évidente qu'une telle étude devrait être inutile. Toutefois, nous le faisons et nous accordons des droits ou fixons des engagements très vastes à ce comité pour qu'il ait tous ces pouvoirs.

Avant que nous soyons appelés à nous prononcer à ce sujet, je demande donc au gouvernement de prendre position, de déclarer qu'il limitera les dépenses de ce comité et d'indiquer un chiffre précis. Pourquoi les comités de ce genre ne sont-ils pas tenus de respecter un budget? C'est une lacune dans le présent cas.

J'aimerais aussi commenter certains des autres éléments administratifs, mais le temps me manque. Toutefois, je veux parler au moins des témoins que nous entendrons. Je crains que ce comité ne reçoive surtout les députés, autrement dit, que nous nous écoutions nous-mêmes. Le loup viendra encore une fois affirmer qu'il n'a pas mangé le poulet. Nous devons nous assurer que les témoins représentent divers secteurs de la société et que ce ne soient pas uniquement des députés et des sénateurs, c'est-à-dire les premiers visés par les règles et le code qui seront produits.

(1300)

Nous devons écouter la population canadienne, les contribuables, les salariés. J'ai parlé, ce week-end, à un jeune couple prestataire de l'assurance-chômage. Les deux conjoints ont peu d'espoir de trouver du travail. Ils payent les factures. Voilà les gens que nous devrions entendre à ce sujet, pour voir quelles sont leurs attentes à l'égard des titulaires de charges publiques.

Il est essentiel que nous obtenions l'avis des Canadiens ordinaires sur des questions comme celle-ci car ils sont toujours écartés des décisions de la sorte. On leur demande toujours, sans


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leur laisser le choix, de payer la facture. On les oblige à le faire, par le truchement de l'impôt.

Je suis donc fermement convaincu que si ce comité fait bien son travail, et si un conseiller en éthique indépendant fait respecter les résultats de ce travail, ce sera bénéfique pour tous. Je recommande donc que le comité fasse un travail en profondeur. C'est d'autant plus important qu'il n'y a pas de conseiller en éthique indépendant.

Il est vital que le comité soit efficace et produise un code d'éthique très clair et bien défini. J'aimerais qu'il examine aussi certaines questions éthiques. Le respect porté au gouvernement se dégrade lorsque les députés et les sénateurs violent de plus en plus souvent certaines dispositions du Code criminel. Cette question n'est pas soulevée ici et nous devons absolument l'examiner très attentivement.

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais également dire quelques mots en faveur de la motion présentée par mon collègue et ami, le leader à la Chambre du gouvernement, le solliciteur général. C'est une excellente initiative de la part du gouvernement. Je voudrais répondre brièvement à nos deux collègues qui m'ont précédé, le député d'Elk Island et le député de La Prairie.

Mon collègue d'Elk Island qui, comme moi, a été professeur au secondaire, a parlé de l'idée stéréotypée que le public se fait des politiciens. Je suis tout à fait d'accord avec lui. Comme lui j'en suis sûr, je m'étais fait une certaine réputation dans le domaine de l'éducation avant de venir en politique. Le lendemain de mon élection, les gens qui, auparavant, me demandaient mon avis, avaient perdu tout intérêt pour mon point de vue, même dans le domaine de l'éducation.

Comme il l'a dit, c'était conforme au stéréotype. Il indiquait qu'il avait acquis certaines caractéristiques nouvelles du simple fait qu'il était maintenant étiqueté comme politicien élu. Je sais par expérience ce qu'il entend par là.

Je lui dirais cependant qu'il ne devrait pas tomber dans son propre piège. Il ne devrait pas faire ce qu'il reprochait aux autres dans la phrase d'avant. Je suis d'accord avec lui que les stéréotypes sont regrettables. Dans sa phrase suivante, il disait: «J'espère que ce gouvernement ne fera pas ce qu'ont fait tous les autres gouvernements.»

En tant que politicien nouvellement élu, il voulait que la population lui accorde un certain temps avant de passer un jugement. Nous lui demandons la même chose. Notre gouvernement est nouvellement élu. Il a été élu le même jour que lui. Je pense qu'il comprend ce que je veux dire.

Je suis d'accord également avec lui quant aux observations qu'il a faites sur le code. Un code ne peut pas être rédigé de façon telle qu'il puisse couvrir tous les détails de toutes les situations. On en revient toujours au fait que le respect est une chose que l'on doit gagner. J'y reviendrai plus tard.

(1305)

[Français]

Monsieur le Président, mon ami le député de La Prairie a exprimé quelques préoccupations en ce qui concerne le quorum du comité mixte spécial. Je suis certain que le député sait bien que ce qu'il suggère pour le comité n'existe même pas pour cette Chambre et pour de bonnes raisons.

[Traduction]

Mon collègue de La Prairie disait que le comité proposé devrait avoir dans son mandat une disposition prévoyant qu'il ne pourrait siéger que s'il y a suffisamment de députés de l'opposition présents. Il devrait réfléchir à cela un moment. Il a certainement de bonnes intentions, mais il devrait y réfléchir un peu parce qu'il demande que ce comité ait une autorité qu'aucun autre comité de la Chambre n'a et cela pour une très bonne raison. Pensons-y un peu.

Essayons d'appliquer cela à la Chambre. Si nous avions comme exigence que la Chambre ne puisse siéger à moins qu'il y ait un membre de l'opposition présent, nous donnerions alors à la minorité le droit de boycotter le travail et par conséquent d'empêcher que les délibérations se déroulent normalement.

Aussi les rédacteurs des dispositions qui assurent le fonctionnement de la Chambre ici, tout comme à Westminster et ailleurs, ont-ils perçu le piège que dissimule ce genre de proposition. Voilà pourquoi, dans cette enceinte, en principe, nous pouvons poursuivre les travaux lorsque seul le parti au pouvoir est présent, à condition qu'il y ait suffisamment de personnes à la Chambre, qu'il y ait quorum en somme. Voilà comment les choses devraient être. En principe, les choses pourraient se passer de cette façon. Toutefois, il en est rarement ainsi.

Et puis, comme mon collègue d'Elk Island y a fait allusion il y a quelques instants, les comités sont maîtres de leurs propres règles. Dans la résolution dont nous sommes actuellement saisis, rien n'empêche le comité d'établir certaines règles fondamentales concernant son fonctionnement, les personnes qui doivent être présentes afin de recueillir des témoignages, le nombre minimum de membres qui doivent être présents pour la prise des décisions, etc. Dans ce contexte, le comité peut résoudre lui-même la question que mon collègue de La Prairie a soulevée.

Je lance un appel aux députés de la Chambre pour que prenne fin le mythe très répandu selon lequel ce que les gens voient aux actualités télévisées tous les soirs et ce qu'ils entendent aux bulletins d'informations est le reflet fidèle de ce qui se passe à la Chambre. Ce mythe n'a rien à voir avec la réalité.

Pour bien me faire comprendre des gens qui ne siègent pas dans cette enceinte, je leur demanderais, qu'ils soient ménagère, menuisier ou enseignant, de s'imaginer un instant qu'une caméra les suit pendant les huit ou 10 heures qu'ils travaillent. Donc, qu'ils s'imaginent qu'une caméra épie leurs moindres gestes toute la journée. Vont-ils rester sérieux pendant la totalité de ces huit heures? Leur arrivera-t-il par moments d'être moins concentrés sur leurs objectifs immédiats? N'y aurait-il pas des


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moments où ils risqueraient de laisser paraître un petit peu de fatigue ou de mécontentement si l'on braquait une caméra sur eux pendant toute leur journée de travail? C'est ce qui se passe à la Chambre.

(1310)

Un autre phénomène s'ajoute à celui-là. Les médias ne sont pas là pour rapporter des choses tout à fait banales. S'ils constatent à la Chambre un événement qu'ils jugent banal, même s'il s'agit d'une chose extrêmement efficace et productive, étant donné que, pour eux, tout cela est parfaitement ordinaire dans le cadre du déroulement des travaux à la Chambre, ils n'en feront tout simplement pas mention.

Ce sont les événements extraordinaires, qui ne sont pas représentatifs de ce qui se passe à la Chambre, qui font les nouvelles du soir. Pour les gens de l'extérieur, je reconnais que nos travaux sont, en général, plutôt ennuyeux et d'une certaine banalité. S'ils passaient cela aux nouvelles, les médias électroniques pourraient bien voir leur cote d'écoute baisser. Je comprends pourquoi certaines nouvelles passent au bulletin du soir et je n'ai rien contre. Il ne faut pas croire au mythe selon lequel ce que nous voyons aux nouvelles du soir représente ce qui se passe ici. Tous les députés savent qu'il n'en est rien.

En outre, arrêtons-nous sur le mythe selon lequel il est tout à fait répréhensible d'adopter une attitude théâtrale dans la conduite des affaires publiques. Monsieur le Président, vous et moi, au sein de notre famille, de la société et de notre Église le faisons parfois. Cela fait partie de ce que nous sommes. La vie serait bien banale si nous jugions tous nécessaire de parler d'un ton monotone, tout le temps.

L'idée selon laquelle pour défendre un point de vue dans cette enceinte, on ne devrait pas, tout d'abord, attirer l'attention du collègue visé, va tout à fait à l'encontre de la façon dont nous fonctionnons lorsque nous allons acheter une automobile ou je ne sais quoi d'autre ou nous plaindre auprès de notre voisin au sujet de l'emplacement de sa clôture. Nous adoptons alors une attitude théâtrale. Cela fait partie de notre nature. Ne me demandez pas d'oublier ce que je suis fondamentalement lorsque je viens dans cette enceinte.

Les 90 000 personnes de Burin-Saint-Georges qui m'ont élu l'ont fait pour un certain nombre de raisons. Je parle de mon cas, mais cela pourrait s'appliquer à n'importe quel député ici. Je suppose qu'ils m'ont choisi pour ce que je suis, avec mes défauts et mes qualités. Ils avaient peut-être le sentiment que j'avais ainsi la capacité, avec ces défauts mêmes, de bien les représenter à la Chambre. Ils ne m'ont pas demandé de devenir un robot, une machine à voter. Ils ont plutôt voulu que je fasse preuve du courage qui est le mien et que je fasse partager à la Chambre mes sentiments au sujet des régions rurales de Terre-Neuve. C'est là l'aspect théâtral qui consiste à exprimer ses émotions. Vous pouvez supprimer cet aspect du Parlement et rédiger tous les codes de déontologie que vous voudrez, mais vous n'aurez pas un Parlement très efficace.

L'obligation de rendre compte constitue un élément essentiel du rôle du Parlement et je précise, à l'intention du député d'Elk Island au cas où il ne m'aurait pas bien compris, qu'il s'agit ici de l'obligation de rendre compte à la population canadienne.

M. Epp: Pourquoi?

M. Simmons: Je dirai à mon collègue d'Elk Island, pour être juste envers lui, qu'il y a deux façons de faire. Nous pouvons procéder par questions et réponses ou encore faire comme j'ai fait avec lui en écoutant ce qu'il avait à dire. S'il désire ensuite poser des questions, il pourra me demander tout ce qu'il voudra pendant la période des questions de 10 minutes qui suivra. Je n'ai rien contre l'autre méthode car j'aime bien les échanges spontanés. J'essaie de me concentrer sur une idée et je voudrais poursuivre pendant au moins une minute. Mon attention n'est pas très soutenue et elle l'est encore moins lorsque des individus aussi intelligents que le député d'Elk Island s'en prennent à moi.

(1315)

L'obligation de rendre compte à la population constitue une des responsabilités fondamentales du Parlement. La suppression de l'aspect théâtral au Parlement amoindrirait les chances de reddition de comptes. Un premier ministre ou un ministre, quelle que soit leur allégeance politique, peuvent toujours donner une réponse bien préparée pour protéger leurs arrières si on leur en laisse le temps. Par contre, l'élément de surprise et l'aspect théâtral peuvent parfois les obliger à présenter la vérité toute simple. La période des questions permet justement d'obtenir une reddition de comptes toute simple, où rien n'est préparé d'avance.

Les députés se demandent peut-être ce que cela a à voir avec la motion qui propose qu'un comité soit chargé d'examiner un code de déontologie. Je crois que c'est tout à fait pertinent. J'ai une crainte au sujet de ce comité. J'appuie la motion sans réserve et je crois qu'il s'agit d'une bonne idée, mais je crains qu'une fois au travail, ce comité ne prenne son mandat trop au sérieux, qu'il l'interprète mal et en excède les limites.

Le comité devra se rappeler qu'il n'a pas affaire à des anges, et ce ne doit pas être le cas. Il a affaire à des gens qui représentent une partie de la population. Or, malgré leurs qualités, les Canadiens ne sont pas des anges dans l'ensemble. Il ne faut pas rédiger un code de déontologie pour les anges.

Comme mon collègue d'Elk Island le disait en d'autres termes, un peu plus tôt aujourd'hui, le bon fonctionnement de notre institution est déterminé, comme il se doit, par l'intégrité de ceux qui ont été élus pour y représenter la population. Ceux qui abusent de la confiance de leurs électeurs doivent en répondre non pas devant un comité, non pas en vertu d'un code de déontologie, mais devant leurs électeurs, comme il se doit.

D'un autre côté, le code de déontologie proposé est nécessaire et il doit être musclé. Je m'explique au moyen d'un exemple. Je n'ai pas besoin que ce comité vienne me dire avec des grands mots quel est mon rôle en tant que député. J'ai une assez bonne idée de ce que nous avons à faire. Je préférerais que des dispositions me permettent de savoir si je fais ce qu'il faut faire et que des mesures seront prises contre moi si je m'écarte des limites étroites du droit chemin.

L'immunité parlementaire est un usage dont nous avons besoin. Nous voulons assurer la liberté d'expression à la Chambre. Je veux pouvoir dire tout ce que j'ai à dire au nom de ceux qui m'ont envoyé ici sans crainte d'être traîné devant les tribunaux. C'est pour cela que nous avons l'immunité parlementaire. Le


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revers de la médaille, c'est que les irresponsables peuvent profiter de cette protection pour agir de façon irresponsable. Cela s'est déjà produit.

(1320)

Voici ce que je propose à l'égard de ce code de déontologie. C'est juste un exemple. Je propose que ce code prévoie une disposition selon laquelle un député qui prend la parole à la Chambre pour faire des allégations qui se révéleraient non fondées par la suite doit faire l'objet de mesures disciplinaires, sauf s'il peut être prouvé qu'il l'a fait sans le vouloir, car alors c'est autre chose.

On pourrait trouver de très nombreux exemples. J'ai vu dans cette Chambre, et à l'autre Chambre où j'ai eu le privilège de siéger, à Terre-Neuve, des députés qui ont fait une déclaration, formulé des allégations, diffamé des gens et porté atteinte à leur réputation en utilisant de l'information dont ils savaient pertinemment qu'elle n'était pas exacte. Ils ont exploité les avantages des différents systèmes. Ils ne pouvaient pas être traînés en cour et sommés de prouver ce qu'ils avaient dit parce qu'ils avaient fait ces déclarations à la Chambre, mais comme un journaliste à la tribune avait rapporté leurs propos, ils avaient atteint leur but de nuire à ces gens.

Par conséquent, je demande au comité de s'assurer que le code de déontologie qu'on établira prévoie des dispositions très strictes pour ce qui est de son application.

Je suis très heureux d'avoir pu manifester mon appui à cette motion, non pas parce qu'on m'a dit de le faire, comme le laissait entendre mon ami d'Elk Island, mais parce que j'ai une grande confiance dans l'utilité d'un tel système et que je suis convaincu que c'est la voie à suivre.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, comme d'habitude, l'intervention du député de Burin-Saint-Georges m'a beaucoup plu. Il s'exprime avec éloquence et humour, ce qui est une excellente combinaison.

Le député a dit qu'on avance parfois des allégations dénuées de fondement. C'est l'aspect que nous négligeons d'examiner. Lorsqu'un fonctionnaire est accusé d'un méfait, à tort ou à raison, c'est l'appareil gouvernemental qui se porte à sa défense. Or, le conseiller en éthique doit avoir la même indépendance que le vérificateur général pour être considéré comme entièrement libre de toute influence et pour mener une enquête dans l'esprit qui convient. C'est ce qui fait défaut. À mon avis, c'est là le point faible du projet de loi C-43 et de cette motion.

Je demande au député de développer ses observations au sujet de la responsabilité envers la population canadienne. Comme je sais ce qu'il dira probablement, je vais anticiper et poser la deuxième question.

Il dira probablement que, chaque fois qu'il y a des élections, les gens de sa circonscription ont le droit de le déloger en faveur d'un autre député ou d'un autre parti. C'est habituellement la réponse toute faite que nous obtenons. Cependant, comment l'électeur canadien peut-il voter sur des questions qui n'étaient pas des enjeux de la campagne électorale? Il ne peut pas contribuer au processus.

Je constate qu'il y a une grande discipline de parti et que les députés ne votent pas réellement comme leurs électeurs leur disent de le faire, mais plutôt comme leur parti leur dit de le faire. Cela me semble évident, et je demande si ce l'est aussi pour le député.

M. Simmons: Monsieur le Président, je remercie le député d'Elk Island.

Je n'ai pas l'intention de dire au comité ce qu'il doit faire, mais j'espère qu'il envisagera sérieusement la nomination d'un conseiller en éthique indépendant. Ce doit être un conseiller en éthique dont le rôle n'aura rien à voir avec celui qui conseille le gouvernement. Je fais allusion à deux postes distincts. Tenter de les combiner mettrait inévitablement cette personne dans une situation de conflit d'intérêts. Je souhaiterais que le mandat du comité comprenne aussi la possibilité de nommer un conseiller en éthique indépendant.

(1325)

Le député risque de tourner en rond en parlant de consulter les électeurs. J'ai consulté les électeurs aux élections d'octobre 1993. Il se trouve simplement que nous n'étions pas saisis à ce moment-là des 1 017 questions que nous avons maintenant à régler. Je ne demanderais certes pas à mes électeurs de voter 1 017 fois pour connaître leur verdict. Heureusement, ce n'est pas comme cela que le Parlement fonctionne.

Les électeurs ne m'ont pas envoyé à Ottawa pour que je me prononce pour ou contre le contrôle des armes à feu, par exemple. Ils m'ont élu parce qu'ils avaient confiance en mon jugement et parce qu'ils pensaient que je serais accessible pour écouter ce qu'ils avaient à dire et m'imprégner de leurs opinions. Il faut donc que je sois accessible.

J'étais dans ma circonscription de Terre-Neuve le week-end dernier et celui qui a précédé et j'y serai encore dans quatre jours. Il m'est impossible de faire plus, à moins d'être là-bas tout le temps. Je ne peux parler qu'en mon nom propre. Je me tiens beaucoup à la disposition des gens que je représente. Je suis au courant de leurs opinions et je peux les transmettre fidèlement.

Si nous poussons l'idée à l'extrême, nous n'aurons pas besoin de députés et nous pourrons simplement offrir aux Canadiens d'installer 27 millions de boutons à côté de leur ouvre-boîte ou de leur four à micro-ondes. En appuyant sur son bouton, chaque Canadien pourra communiquer avec le Parlement et se prononcer notamment sur les impôts ou sur le pavage des routes. Ce système pourrait fonctionner, mais celui que nous avons actuellement donne aussi de bons résultats. Je recommande donc que nous le


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gardions, plutôt que de demander à chaque Canadien d'appuyer sur un bouton installé à côté de son four à micro-ondes.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt mon collègue de Terre-Neuve, de la circonscription de Burin-Saint-Georges. Cependant, j'aimerais lui rappeler que lorsque j'ai pris la décision de me lancer en politique active au niveau fédéral, les plus grandes réticences auxquelles j'ai eu à faire face provenaient des membres de ma famille immédiate, notamment mon grand garçon qui est arrivé avec une copie du Journal de Montréal où on révélait les résultats d'un sondage.

Voyez-vous, on prenait différentes professions et on demandait à plusieurs personnes en qui elles avaient le plus confiance par ordre décroissant et, malheureusement pour moi et malheureusement pour vous tous ici présents, on arrive au 27e rang sur 28, le 28e étant les vendeurs d'automobiles, mais attention, les vendeurs d'automobiles d'occasion! Alors, mon fils me disait: «Papa, si tu te lances en politique et si jamais tu es élu, je crains que tu deviennes. . .», et je vous laisse deviner le mot que mon fils de 22 ans a utilisé.

Je me rappelle très bien que le député de Burin-Saint-Georges a voté à ce moment-là contre la motion proposée par mon collègue de Richelieu, si ma mémoire est fidèle-en tout cas il pourra me corriger si je me trompe. Parce que vous savez, le problème majeur qui assaille les politiciens, c'est la piastre, les dollars. On n'a qu'à se rappeler, notamment, ce qui est arrivé à l'aéroport Pearson à Toronto. Le Bloc québécois a fait de cet enjeu des débats majeurs en cette Chambre et ce n'est pas encore terminé, c'est bloqué au niveau du Sénat.

Là où il y a de l'argent, il y a souvent des tromperies. Le Bloc québécois, par l'intermédiaire ici de mon collègue de Richelieu, avait présenté une motion en cette Chambre, à l'effet qu'on se dote, un peu comme à l'image du Parlement québécois, d'une façon très démocratique de collecter des fonds pour nos caisses électorales, où seuls les électeurs pourraient souscrire aux partis politiques. Donc, «Power bras», «Power steering», Seagram, les banques, ne seraient même pas autorisés à verser un cent aux partis politiques. Et pour ridiculiser le bien-fondé de mon collègue de Richelieu, un député libéral d'arrière-ban proposait, lui, pour noyer le poisson, que chaque électeur ne pourrait verser plus d'un dollar. Et on a voté en faveur de cela, du côté ministériel.

(1330)

Alors lorsque le député de Burin-Saint-Georges disait qu'il fallait conserver l'immunité parlementaire, que ses électeurs avaient voté pour lui parce qu'il avait de belles qualités-il avait des défauts, bien sûr, mais d'une façon moindre-en aucun temps il a parlé d'une caisse électorale propre. Il me semble qu'il est agréable d'aller voir ses électeurs et leur demander une relation d'aide financière pour continuer notre travail. Par la suite, lorsqu'ils nous donnent une tape dans le dos en nous disant: «Chrétien, tu fais un bon travail, continue, je te donne 25 $», cela nous encourage. J'aime pas mal mieux recevoir 25 $ d'un de mes électeurs que de recevoir 25 000 $ de la Banque royale du Canada, à qui je devrai ma chemises et mes culottes.

Je suis en cette Chambre un homme libre, et lorsque j'ai le goût de dénoncer quelque chose, je ne me gêne pas, je me lève et je le fais.

Alors j'invite mon collègue de Burin-Saint-Georges à me donner sa vision d'une caisse électorale propre qu'il pourrait proposer à ses collègues lors d'un bon caucus. Vous savez, lorsqu'on est au pouvoir, on mijote de bien bonnes idées, comme le Parti conservateur a fait, mais souvent on les glisse très loin sous le tapis.

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, je m'identifie aux commentaires de mon ami, le député de Frontenac, en ce qui concerne le sondage qui décrit le niveau de confiance envers les politiciens. Mais en même temps, je pense que ce sont les politiciens eux-mêmes qui ont créé ces impressions. Ce matin, par exemple, en cette Chambre, nous avons entendu des commentaires, des allégations concernant la réputation des politiciens.

[Traduction]

Si nous, les dirigeants politiques, passons tout notre temps à dire à la population à quel point nous sommes exécrables, il ne faut pas nous surprendre lorsque le public commence à nous croire. Pour changer l'opinion des gens, il faut d'aborder changer notre propre attitude.

Au cours de la dernière campagne électorale, la plus grande contribution que j'ai reçue s'élevait à 1 000 $. Au fil des ans, j'ai refusé de plus grandes sommes que j'aurais pu utiliser dans le cadre de congrès de direction. Une fois, j'ai refusé un don de 15 000 $ en vue d'un congrès de direction et j'ai même documenté le tout, si cela peut intéresser certains députés.

Tout comme le député, je crois que les particuliers ou les sociétés qui font d'énormes dons aux députés ne le font pas parce qu'ils les aiment bien, mais parce qu'ils aimeraient bien les acheter. Je pense que nous ne devrions pas manger de ce pain-là.

[Français]

Le vice-président: Avant de continuer, je dois informer la Chambre que la motion de l'honorable député de La Prairie est recevable.

Nous poursuivons maintenant le débat sur l'amendement à la motion avec l'honorable député de Chicoutimi.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir reçu la motion de mon collègue de La Prairie. Le Bloc québécois appuiera cette motion.

Depuis que les députés d'en face sont au pouvoir, la population, tant canadienne que québécoise, assiste en spectateur impuissant, semaine après semaine, mois après mois, à une cascade de scandales politiques où les conflits d'intérêts pullulent, et ce, au vu et au su de tout le monde, sans toutefois que le gouvernement, qui s'assoit actuellement sur sa majorité, n'en fasse un cas de conscience.


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Le premier ministre, en déclarant en fin de semaine à Trois-Rivières qu'il avait réussi à restaurer l'honnêteté et l'intégrité à Ottawa après seulement 18 mois de pouvoir, ne fait que mettre de l'huile sur le feu. N'a-t-il pas été obligé de se défendre lui-même, la semaine dernière? N'a-t-il pas pris la défense de son ministre du Patrimoine qui, pour la deuxième fois en quelques mois, se retrouve en situation de conflit d'intérêts en assistant à un dîner offert par un géant du cinéma américain? Intégrité et honnêteté frisent ici le scandale.

(1335)

J'aimerais, si vous me le permettez, me référer au livre rouge, livre que les libéraux n'ont cessé de brandir durant la dernière campagne électorale, mais, soit dit en passant, dont on entend parler de moins en moins depuis que ce gouvernement ne peut livrer la marchandise, c'est-à-dire la création d'emplois. Ce gouvernement mérite bien son titre de gouvernement du chômage et de la pauvreté. D'ailleurs, dans le livre rouge, au chapitre 6, à la page 86, on soulignait, au niveau de l'intégrité, que:

Le capital de confiance des élus auprès des citoyens et citoyennes est de toute première importance. Pour que le gouvernement joue le rôle constructif qui est le sien, tout en étant comptable de ses actions, il faut restaurer l'intégrité de nos institutions. . .
Un peu plus loin, à la page 87, on pouvait encore y lire:

Pour que le gouvernement joue le rôle constructif qui est le sien, il faut restaurer l'intégrité de nos institutions politiques.
Encore une fois, ce sont de bons voeux pieux. Ces voeux ne suffisent plus actuellement.

Soyons un peu réalistes, les conflits d'intérêts ne sont pas nouveaux, ils ont toujours existé. Cependant, au cours des dernières années, les conflits d'intérêts chez les titulaires de charge publique ont suscité beaucoup d'inquiétude au sein de la population. Pas surprenant que les politiciens aient la pire cote de satisfaction face à la population.

Il est évident que même une apparence de conflit d'intérêts a pour effet de saper la confiance de la population dans l'intégrité des titulaires de charge publique. Ai-je besoin de préciser que dû au comportement cavalier et scandaleux de certains ministres ainsi que de leur entourage immédiat, souvent des membres de leur propre famille, le besoin d'un code d'éthique ne s'est jamais autant fait sentir qu'en ce moment.

Le code d'éthique que nous exigeons devra faire une distinction entre les députés et les membres du Cabinet et leur personnel. Le Bloc québécois, quant à lui, s'oppose à la création d'un comité mixte, c'est-à-dire composé de sénateurs et de députés. Pour nous, seuls les élus devraient débattre de cette question. Les membres de l'autre Chambre ne sont pas représentatifs de la population. Ils ne peuvent être partie prenante de décisions qui relèvent uniquement de personnes qui doivent rendre des comptes à la population. D'ailleurs, leur réputation a été terriblement tachée dernièrement, soit par des actions, soit par des comportements, soit par des paroles ou encore des déplacements et voyages à l'étranger trop coûteux de certains membres de l'autre Chambre. Je vous ferai grâce de nommer ces cas-là. En réalité, le sujet qui nous intéresse, c'est l'éthique parlementaire, donc allons directement à ces explications-là.

Selon le juge Parker qui a présidé l'enquête menée sur les allégations de conflits d'intérêts concernant l'honorable Sinclair Stevens, il y a quelques années, il décrivait qu'il existait plusieurs sortes de conflits d'intérêts, entre autres, le conflit d'intérêts réel qui se décrit comme étant une situation dans laquelle un ministre a connaissance d'un intérêt pécuniaire privé suffisant pour influencer sur l'exercice de ses fonctions et responsabilités officielles. Donc, définition à retenir.

Par ailleurs, il y a toujours, selon M. Parker, conflit d'intérêts potentiel, cette fois-là, lorsqu'un ministre se trouve dans une situation où l'existence d'un intérêt pécuniaire privé pourrait influencer sur l'exercice de ses fonctions et responsabilités officielles pourvu qu'il n'ait pas encore exercé lesdites fonctions ou responsabilités. Il y a une nuance ici qui est apportée. Le conflit d'intérêts potentiel devient réel lorsque le ministre ne se départit pas des éléments d'actifs pertinents ou n'abandonne pas les fonctions ou responsabilités officielles qui sont siennes. Voilà les questions sur lesquelles le comité devra se pencher.

Le juge Parker a également mentionné qu'il y avait apparence de conflit d'intérêts lorsqu'il y a de la part d'une personne raisonnablement bien informée une crainte raisonnable de conflit d'intérêts. On peut le constater presque chaque jour dans cette Chambre.

(1340)

Les principes de l'impartialité et de l'intégrité sous-tendent les règles sur les conflits d'intérêts. Un décideur ne peut être jugé impartial et intègre s'il tire, ou peut tirer, un avantage personnel d'une décision. Les gens d'en face en savent quelque chose.

Les actions du gouvernement au cours des 18 derniers mois ont sérieusement ébranlé la confiance du public dans les institutions du gouvernement. Le code d'éthique doit rétablir cette confiance et redorer l'image du gouvernement, particulièrement parce qu'il y a certains types de conflits d'intérêts qui sont inévitables. On peut penser ici à un conflit d'intérêts inhérent, c'est-à-dire qui découle de la situation des parlementaires à titre des membres de la société, soit comme propriétaire, soit comme parent ou soit comme consommateur.

Il y a également des sources inévitables de conflits qui viennent de l'intérêt de représentation par le fait même que les parlementaires partagent avec leurs électeurs certains intérêts personnels, par exemple en matière d'agriculture, de pêche ou encore de mise en valeur des ressources naturelles.

Les entreprises familiales, quant à elles, posent un problème particulier puisque cette catégorie englobe généralement toute une gamme de biens, de dettes et d'intérêts financiers. Ce sont généralement ces intérêts que vise la législation sur les conflits d'intérêts puisqu'ils peuvent avoir des répercussions notables sur l'indépendance d'un législateur.

Les intérêts plus communs qui peuvent placer les législateurs dans une situation de conflit sont donc les suivants. D'abord, les investissements; ensuite, des dettes qui peuvent être source de conflit; comme administrateur également, ils doivent agir au


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mieux des intérêts de leur société tandis qu'en tant que membre du Parlement, il y a une obligation envers le public; les postes occupés dans des sociétés peuvent être source de conflit.

Une autre source de conflit, les autres emplois et activités professionnelles. Ici, permettez-moi de vous donner une définition. Dans quelle mesure les parlementaires devraient-ils être autorisés à poursuivre la pratique du droit, leurs activités d'expert-conseil ou tout autre emploi? Un législateur pourrait peut-être attirer plus de clients si ceux-ci le croyaient en mesure d'augmenter leur influence auprès du gouvernement fédéral.

Il y a également le lobbying. C'est tout à fait normal pour un législateur de traiter avec des hauts fonctionnaires de gouvernement au nom de ses électeurs, mais que faut-il penser d'un parlementaire qui profiterait de ses fonctions pour promouvoir ses propres intérêts ou qui serait rémunéré pour agir au nom d'un tiers. Les marchés et activités du gouvernement sont source, également, de conflit d'intérêts. Alors dans quelle mesure les parlementaires devraient-il détenir des actions de sociétés qui obtiennent des marchés du gouvernement?

Un autre point, celui des cadeaux et des honoraires. Un parlementaire devrait-il être autorisé à accepter des voyages et vacances gratuits ou d'autres cadeaux de la part de connaissances ou de gouvernements étrangers? Peut-on considérer les honoraires comme étant des cadeaux déguisés?

On peut se servir également d'un renseignement obtenu dans le cadre d'une fonctions officielle pour être en conflit d'intérêts. Doit-on prévoir des mesures de contrôle pour empêcher le législateur d'utiliser, à des fins personnelles, des renseignements obtenus dans le cadre de leurs fonctions officielles?

Finalement, les conjoints et les enfants. Dans quelle mesure les intérêts dont nous avons fait mention précédemment devraient-ils être contrôlés s'ils sont détenus par des personnes ayant des liens de parenté avec le parlementaire? C'est toute une question. Ce dernier sera peut-être influencé autant par les intérêts de sa famille que par les siens propres. Il me serait trop facile d'élaborer sur ce dernier point; par souci de délicatesse, je m'en abstiendrai donc.

Comme vous le savez, nous sommes tous ici régis par certaines règles statutaires et parlementaires. Cependant, la législation renferme des contradictions car elle ne permet pas à certains titulaires de charge publique de poser leur candidature aux élections, mais elle n'empêche pas les parlementaires d'accepter les charges en cause après leur élection.

(1345)

Un autre exemple vient du fait que la Loi sur le Parlement du Canada prévoit qu'une personne ne peut être élue à la Chambre des communes si elle détient un contrat ou un marché du gouvernement mettant en cause des deniers publics. Si un parlementaire ne touche pas de deniers publics mais reçoit un avantage sous une autre forme en application du contrat, il ne tombe probablement pas sous le coup de cette disposition, mais cela est loin d'être clair, et c'est cette partie-là qui fait le plus mal. C'est loin d'être clair.

Enfin, si un parlementaire est actionnaire d'une société qui a obtenu un contrat du gouvernement, l'interdiction ne s'applique que dans le cas où ce contrat porte sur l'exécution des travaux, ce qui semble permettre à un parlementaire de placer ses intérêts dans une société et de se soustraire ainsi à l'interdiction, ce qui constitue, vous l'admettrez bien, une échappatoire de taille.

En 1973, le gouvernement fédéral a publié un livre vert intitulé: Les membres du Parlement et les conflits d'intérêts. En 1978, encore une fois, le gouvernement a présenté le projet de loi concernant l'indépendance du Parlement, qui aurait élargi les mesures proposées dans ce livre vert. En 1979, le projet de loi, après avoir franchi l'étape de la deuxième lecture, est mort au Feuilleton. En novembre 1985, le Comité permanent de la gestion et des services aux députés de la Chambre a été chargé d'étudier l'opportunité d'établir un registre des intérêts des députés. Quatre projets de loi visant à régir les conflits d'intérêts chez les législateurs fédéraux ont été déposés au cours des 33e et 34e législatures.

En 1991, cela continue. Le gouvernement a déposé son troisième projet de loi sur les conflits d'intérêts, le C-43. En 1992, le Comité mixte spécial relatif aux conflits a déposé son rapport. L'opinion des membres du comité différait à bien des égards des orientations reflétées dans le projet de loi C-43. En mars 1993, le gouvernement a déposé son quatrième projet de loi sur le même sujet, le C-116, et encore, en juin 1993, le Président de la Chambre des communes a fait rapport à la Chambre recommandant que le projet de loi C-116 soit mis de côté. Et en 1993, encore une fois, le gouvernement libéral a affirmé que l'éthique était un aspect important de son mandat. Il n'a toujours rien fait.

Donc, c'est là que c'est important, depuis les 20 dernières années, des millions et des millions de dollars ont littéralement été engloutis pour l'étude de projets de loi, pour des commissions parlementaires ou encore pour des comités mixtes relativement aux conflits d'intérêts et pour des codes d'éthique destinés aux parlementaires. Oui, des millions et des millions de dollars pris à même les poches des contribuables canadiens et québécois. Il est temps que cela cesse. Je demande, une fois pour toutes, que ce gouvernement agisse. Que l'on cesse une fois pour toutes d'endormir la population et que l'on passe aux actes.

Les chefs de gouvernements doivent tout mettre en oeuvre pour refaire l'image des parlementaires. Qu'ils cessent de protéger, de patiner pour camoufler, qu'ils admettent qu'un des leurs s'est placé en conflit d'intérêts. On dit souvent, et avec justesse, que l'exemple vient d'en haut. Donc, j'appuierai l'amendement de mon collègue de La Prairie.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je viens d'entendre le discours d'un député d'en face qui m'a énormément déçu, je dois vous le dire. Des affirmations gratuites, sans aucune preuve, et des renseignements qui sont, comment dirais-je, assez loin de ce qu'on pourrait qualifier comme étant la vérité, pour être poli et parlementaire.

(1350)

On a entendu un député dire que les projets de loi qui ont été déposés devant la Chambre avaient coûté des millions et des millions aux contribuables. Prendre le projet de loi et le réimprimer dans une session subséquente, on n'a pas besoin d'être un expert en procédure parlementaire pour comprendre que changer le numéro sur le projet de loi et le présenter de nouveau, cela indiquait peut-être une faiblesse de la part du gouvernement


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précédent. Je ne nierai pas cela parce qu'on sait que ces gens-là n'étaient pas convaincus du besoin d'avoir une loi semblable.

Je regarde certains des députés d'en face qui sont eux-mêmes d'anciens conservateurs, et je pense supporters d'un ancien premier ministre, voire même des membres de l'exécutif de l'association de comté d'un ancien premier ministre dans certains cas. Dans leur cas, on peut voir qu'ils doivent sans doute être insultés de ces remarques à l'endroit de leur ancien chef et mentor, Brian Mulroney.

M. Sauvageau: Il n'était pas menteur.

M. Boudria: Ah, je n'ai pas dit cela.

Nous avons devant nous aujourd'hui un projet de loi proposé par le gouvernement, une très bonne initiative, pour remplir, encore une fois, un autre engagement du livre rouge. Ce sera une des nombreuses réalisations du livre rouge, comme bien d'autres. Vendredi dernier, on débatait en cette Chambre, et le débat ne s'est malheureusement pas terminé, du projet de loi C-43 portant sur l'enregistrement des lobbyistes. Encore une fois, un engagement du gouvernement libéral, comme bien d'autres, et aujourd'hui, nous allons continuer de faire ce que nous avons promis, et bien sûr cette fois-ci c'est d'établir un comité parlementaire pour produire un code d'éthique pour les collègues de cette Chambre et de l'autre endroit.

[Traduction]

Je voudrais prendre quelques instants pour discuter de la nécessité d'adopter un code d'éthique s'appliquant aux deux Chambres et non seulement à l'une d'elles.

Ma foi, j'ai bien du mal à comprendre l'amendement dont nous sommes saisis, l'amendement selon lequel les sénateurs ne seraient pas assujettis au code régissant les conflits d'intérêts qui s'appliquerait aux députés. Pourquoi pas? Pourquoi certains députés d'en face ne veulent-ils pas que les sénateurs respectent les mêmes règles concernant les conflits d'intérêts que nous? Quel est l'objet de cet amendement?

[Français]

Le raisonnement qu'a présenté celui qui a proposé la motion aujourd'hui est à peu près le suivant: seuls les députés sont élus, donc seuls les députés devraient être assujettis à ces règles. Il y a une chose qui fait défaut dans cette logique, si les députés qui sont élus et qui sont eux-mêmes assujettis aux pressions des électeurs pour les garder intègres, pressions qu'on a tous sur nous et on en a tous besoin, c'est la démocratie. Et si même avec ces pressions démocratiques, on a besoin d'un code de conflit d'intérêts, il me semble qu'une Chambre qui n'a pas ces pressions démocratiques en a besoin au moins encore autant et peut-être davantage. Or, les députés du Bloc veulent faire en sorte que les sénateurs ne soient pas assujettis à la Loi sur les conflits d'intérêts.

M. Chrétien (Frontenac): Ils sont honnêtes!

M. Boudria: Je dois vous demander, monsieur le Président, comment expliquer ce raisonnement-là. Le député d'en face vient de dire qu'eux sont honnêtes. Je crois que les parlementaires des deux Chambres sont tous foncièrement honnêtes et que nous avons tous, ceux et celles qui ont été envoyés ici par le peuple canadien, l'intérêt de faire ce qui est mieux pour les électeurs.

[Traduction]

L'orateur qui m'a précédé a porté certaines accusations lorsqu'il a parlé des autorités à la tête du pays et de leur famille. Même si le député n'a pas eu le courage de le nommer, il est évident qu'il parlait du premier ministre. Ce qu'il voulait faire, et ce qu'il a fait de façon détournée puisqu'il n'avait pas le courage de le faire directement, c'est de porter des accusations contre le premier ministre.

Je voudrais signaler aux députés un éditorial paru aujourd'hui dans le Toronto Star. Le Toronto Star titre ceci: «Faux scandale au sujet de la télévision par satellite». Tel est le point que le député voulait faire valoir.

(1355)

À Ottawa, les partis d'opposition se vantent presque d'avoir enfin trouvé l'affaire qui entachera la réputation en téflon du premier ministre. Il ne s'agit pas du contrôle des armes à feu, du déficit, de la réduction des dépenses sociales ni de la question du Québec, mais bien de la radiodiffusion directe à domicile par satellite.

Les libéraux ont renversé la décision prise l'été dernier par le CRTC d'accorder à la seule société Expressvu le monopole réel de la radiodiffusion directe à domicile par satellite. La décision que le conseil avait prise sans tenir d'audiences publiques a été mal accueillie non seulement par la société concurrente, soit Power DirecTv, qui est une filiale de Power Corp., mais encore par les consommateurs et les éditorialistes.

Les libéraux ont donc chargé un comité composé de trois personnes aux références impeccables, toutes trois d'anciens sous-ministres, d'examiner la décision du CRTC. Ce comité en est venu à la conclusion que le CRTC avait erré et a demandé que la radiodiffusion directe à domicile par satellite soit ouverte à la concurrence, ce que le Cabinet a accepté.

L'opposition n'en a pas contre la décision du gouvernement, mais plutôt contre le fait que le président de Power Corporation, André Desmarais, est le gendre du premier ministre.

Comme nous approchons de la période des questions, je vais citer la fin de l'éditorial. Voici: «Le pouvoir du Cabinet de renverser des décisions du CRTC dans des cas comme celui-ci était spécifiquement prévu dans ce projet de loi qu'a présenté le gouvernement conservateur dont le chef de l'opposition officielle faisait partie. Quant au premier ministre, il a invoqué le conflit d'intérêts pour ne pas participer à la décision. L'affaire est classée.»

Il y a eu pas moins de quatre éditoriaux de ce genre. Les députés d'en face l'ont-ils signalé? Non. Ils continuent aujourd'hui à présenter des observations que je qualifierais de peu honnêtes, mettant en doute l'intégrité du premier ministre.

11981

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.

_____________________________________________


11981

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE CLUB LIONS DE BALA ET SA RÉGION

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole à la Chambre pour souligner une initiative particulière qui a été prise dans ma circonscription, Parry Sound-Muskoka.

La localité de Bala, bien connue pour son festival annuel de la canneberge, prouve une fois de plus que ses citoyens savent lancer des projets communautaires valables.

C'est, cette année, le 50e anniversaire du Club Lions de Bala et sa région, un organisme qui a maintes fois contribué au développement de cette collectivité dont les membres sont unis par des liens étroits.

Pour souligner l'événement, le Club Lions veut construire à Bala, dans le parc Jaspen, un pavillon communautaire à parois latérales ouvertes pour les familles et les groupes qui viennent passer d'agréables moments dans ce parc. La campagne de souscription est bel et bien amorcée, et l'historien et artiste local, Lorne Jewitt, a préparé un plan du projet.

Je félicite le Club Lions de Bala et sa région de cette initiative généreuse et fort louable. Je remercie les membres du Club Lions de l'esprit de fraternité dont ils font preuve en prenant cette initiative. C'est là le genre de gestes qui définissent vraiment nos collectivités.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, après une semaine d'attente, la cinéaste algérienne, Hafsa Zinaï Koudil est finalement arrivée à Montréal. Mme Koudil pourra donc présenter, au festival Vues d'Afrique, son film Le démon au féminin qui dénonce avec courage l'intolérance et les abus de l'intégrisme en Algérie.

Le ministre de l'Immigration lui avait d'abord refusé le visa d'entrée au Canada, alors que, une semaine plus tôt, il avait accordé un visa spécial au bénéfice d'un leader américain d'extrême droite. Après l'intervention énergique des organismes culturels et des groupes de femmes, soutenus par l'opposition officielle, le ministre a enfin accordé le visa requis.

Madame Koudil, si des politiciens ont pu faire preuve d'une insensibilité déplorable, sachez que vous bénéficiez ici d'un immense capital de sympathie dans le combat que vous menez.

[Traduction]

L'INJUSTICE FISCALE

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, cette déclaration s'inspire d'une plainte passionnée et tout à fait justifiée formulée par Bruno Epp, de Calgary.

Bruno, à l'instar de milliers d'autres Albertains, en a assez de l'iniquité fiscale qui a eu cours pendant des décennies à l'échelle fédérale et qui est à l'origine de l'injustice suivante. De 1961 à 1992, les Albertains ont versé au gouvernement fédéral, par habitant et annuellement, 2 000 $ d'impôt de plus que la valeur des services qu'ils ont reçus de lui. L'Ontario est la seule autre province dont les citoyens ont obtenu moins que ce qu'ils ont versé.

Cette tendance n'ira qu'en s'accentuant maintenant que le ministre des Finances a décidé, dans son dernier budget, de punir exagérément l'Alberta d'avoir su se montrer responsable sur le plan budgétaire. Il y a, en l'occurrence, une injustice fondamentale qui ne passe pas inaperçue en Alberta.

Pourquoi les citoyens d'une province devraient-ils payer pendant trois décennies des milliards de dollars de plus que ce qu'ils reçoivent? Le pays a tenu l'Alberta pour acquis. Bruno Epp et des milliers d'autres Albertains veulent faire savoir à Ottawa qu'ils en ont assez.

* * *

LES ÉLECTIONS EN ONTARIO

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour souhaiter la meilleure des chances à tous les candidats aux prochaines élections provinciales. Leur province et leur pays ont besoin d'eux.

Un gouvernement libéral dirigé par Lyn McLeod à Queen's Park aidera l'Ontario à se remettre sur les rails. En raison, notamment, de la position obstructionniste et non coopérative du gouvernement néo-démocrate en matière de relations fédérales-provinciales, ce dernier a perdu la maîtrise des dépenses publiques, la dette augmente, l'économie stagne et un Ontarien sur neuf doit s'en remettre à l'aide sociale. Il est clair qu'un changement de gouvernement est maintenant nécessaire.

Je souhaite bonne chance aux candidats libéraux de Norfolk et d'Elgin, MM. Rudy Stikl et Barry Fitzgerald. Leurs comtés et toute la province d'Ontario ont besoin de leur contribution à Queen's Park. Bonne chance à tous les candidats libéraux ontariens.

* * *

LES BÉNÉVOLES

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, pendant la semaine du 23 au 29 avril, qui était consacrée à l'action bénévole en Nouvelle-Écosse et dans ma circonscription, nombre de réceptions ont été tenues pour honorer ces gens généreux qui font du bénévolat dans nos collectivités.


11982

On ne peut attacher de prix à l'engagement de milliers de bénévoles qui consacrent sans compter leur temps et leurs efforts pour améliorer la qualité de vie dans nos collectivités.

Nombre de groupes de personnes âgées de toute la circonscription de Cumberland-Colchester m'ont demandé de remercier publiquement la ministre de la Santé d'avoir parrainé le programme Nouveaux Horizons, qui aide des bénévoles de bien des collectivités à soutenir des projets destinés aux personnes âgées.

Le bénévolat est bien vivant. Je tiens à remercier les milliers de bénévoles de Cumberland-Colchester qui servent leurs collectivités et font du Canada le premier pays du monde pour la qualité de vie.

* * *

LA RIVIÈRE GRAND

Mme Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, la magnifique rivière Grand coule au centre de ma circonscription. Sur les rives de cette rivière du patrimoine, on trouve une flore associée à un écosystème rare et exotique de forêt décidue.

Soucieuse de nous aider à mieux comprendre cet écosystème et de le protéger, la Grand Valley Trails Association a présenté une demande de fonds au programme Partenaires de l'environnement du gouvernement fédéral pour planter une végétation régénératrice et aménager des sentiers le long de la rivière.

Le projet d'éducation sur l'environnement de Brantford a été approuvé, ce qui a permis l'instauration d'un remarquable partenariat. La Brant Waterways Foundation, la Grand River Conservation Authority et la ville de Brantford se sont unies pour gérer ce projet spectaculaire.

Jeudi dernier, nous avons pu assister à l'inauguration officielle des sentiers. Ils sont vraiment magnifiques. Je félicite les cinq partenaires dans ce projet et j'invite tout le monde à venir à Brantford pour profiter de notre écosystème qui longe la rivière Grand.

* * *

[Français]

LES DROITS DES TRAVAILLEURS

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, hier, à Granby, j'assistais à une fête qui soulignait la Journée internationale des travailleurs et des travailleuses. À cette occasion, le représentant des ex-travailleurs de l'usine Simonds m'a rappelé notre responsabilité collective dans la défense des droits des travailleurs.

L'ex-compagnie d'outils Simonds de Granby s'était approprié le régime de retraite de ses employés. Depuis 1988, les ex-travailleurs de cette entreprise se battent devant les tribunaux pour obtenir les surplus de leur régime de retraite. La semaine dernière, la compagnie a décidé de contester la décision de la Cour d'appel, qui attribue à l'unanimité ces surplus aux travailleurs.

Le temps est venu de dénoncer ce genre de pratique frauduleuse. Il est de notre devoir de faire savoir aux entreprises qu'elles doivent assumer leurs responsabilités morales et juridiques envers les travailleurs.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES DE LA CÔTE OUEST

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches et des Océans a été acclamé comme un héros sur la côte est. Cependant, à l'autre bout du pays, les pêcheries de la Colombie-Britannique subissent de durs coups, selon le ministre des pêches de cette province, et 1995 sera comme les autres années.

Sur la rivière Quesnel, la montaison du saumon quinnat en 1994 avait diminué de 75 p. 100. L'écloserie de la rivière Quesnel a relâché 200 000 poissons pour remédier à cette baisse, mais elle est menacée de fermeture.

Son dernier ensemencement prévu pour ce mois-ci sera de 200 000 alevins d'un gramme qui n'ont qu'une chance sur mille de survivre étant donné leur âge et leur poids. Ces alevins sont mis à l'eau un an trop tôt. Contrairement à ce que le ministre disait du flétan à New York, ces poissons ne crient pas «venez nous sauver, quelqu'un», car ils ne sont même pas assez vieux pour parler.

(1405)

Il est temps que le ministre s'occupe vraiment de conservation, comme il le prétend. Il est temps de prouver qu'il tient sincèrement à sauver le saumon quinnat. Sauvez le saumon pour nos enfants et nos petits-enfants en gardant l'écloserie ouverte.

* * *

L'INFRASTRUCTURE

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, la Commission de la capitale nationale a proposé un plan pour l'aménagement d'un parc de haute technologie dans la ceinture de verdure, à Nepean. Il existe déjà à Kanata un district de haute technologie qui est sous-utilisé et prêt à accueillir d'autres entreprises.

Est-il nécessaire d'entreprendre de tels travaux lorsque l'infrastructure existe déjà? Est-il nécessaire de détruire des espaces verts lorsque d'autres secteurs sont déjà aménagés et attendent désespérément que des entreprises viennent s'y installer? Ne créerait-on pas des emplois stables plus rapidement si l'on utilisait l'infrastructure existante?

Par ailleurs, les habitants du secteur s'opposent énergiquement au plan de la CCN. La plupart des habitants de Crystal Bay ont signé des lettres pour protester contre la proposition. Lors d'une assemblée publique tenue en mars, ils ont dit clairement qu'ils voulaient que la ceinture de verdure soit verte et non pavée.

Le gouvernement a promis maintes et maintes fois qu'il dépenserait l'argent des contribuables de façon judicieuse et res-


11983

ponsable. Les libéraux disent qu'ils sont déterminés à réduire la dette publique et à stimuler la croissance du secteur privé dans les domaines de la haute technologie et de l'emploi.

Ne conviendrait-il donc pas à ce moment-ci de mettre de côté le plan de la CCN pour l'aménagement d'un parc de haute technologie?

* * *

LA PHYSIOTHÉRAPIE

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, nous avons célébré la semaine dernière la Semaine nationale de la physiothérapie. Cette année marque aussi le soixante-quinzième anniversaire de l'Association canadienne de physiothérapie.

La Semaine nationale de la physiothérapie est une campagne annuelle parrainée par l'Association canadienne de physiothérapie. Le thème de cette année était «Physiothérapie: fière de son passé mais tournée vers l'avenir», faisant allusion à l'évolution du rôle des physiothérapeutes dans le système de soins de santé au Canada.

[Français]

Il y a maintenant plus de 75 ans que les physiothérapeutes aident les Canadiens a atteindre une forme physique maximale. En plus de ce rôle important, leurs activités incluent maintenant de plus en plus la promotion de la bonne santé.

[Traduction]

Je me joins aux 12 000 physiothérapeutes du Canada pour rappeler aux Canadiens le rôle que jouent les physiothérapeutes en tant que membres de notre important système de soins de santé.

* * *

LES POMPIERS

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, les gens du monde entier ont été profondément touchés par les images du terrible attentat à la bombe perpétré récemment contre un immeuble fédéral à Oklahoma.

L'une des images les plus dures et les plus cauchemardesques que nous ayons pu voir sur la couverture de nos journaux et de nos magazines est celle d'un pompier d'Oklahoma portant dans ses bras un jeune enfant.

Au Canada, comme aux États-Unis, les gens sont fiers des pompiers. Qu'ils soient des travailleurs à temps plein ou des bénévoles, ils risquent leur vie chaque fois qu'ils se rendent sur les lieux d'un incendie. Le métier de pompier est l'un des plus dangereux. Les femmes et les hommes qui le choisissent le font pour rendre service à tous les Canadiens. Ce sont aussi les pompiers qui prodiguent aux Canadiens victimes d'accidents la plus grande partie des soins médicaux d'urgence assurés sur le terrain.

Cette semaine, l'Association internationale des pompiers tient sa quatrième conférence annuelle ici-même, à Ottawa.

Je demande donc à mes collègues de souhaiter avec moi la bienvenue dans la capitale nationale aux pompiers venus de toutes les régions du Canada. Je voudrais que nous les félicitions de leur courage, leur bravoure et leur altruisme qu'ils mettent au service de nos familles et de nos voisins. Je voudrais que nous leur disions merci pour leurs efforts.

* * *

[Français]

LES DROITS DE L'ENFANT

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été attristé d'apprendre récemment la mort d'un jeune garçon, Iqbal Masib, qui s'est prononcé contre l'emploi d'enfants dans les usines de tapis au Pakistan. Sa protestation a causé la fermeture de plusieurs usines, mais lui a aussi réservé la mort aux mains d'assassins.

Les enfants sont recrutés pour travailler dans les usines de plusieurs pays, grâce à la petitesse de leurs doigts et également, parce qu'ils ne se plaignent pas des abus et qu'ils constituent un effectif peu cher pour les employeurs. C'est très, très malheureux.

[Traduction]

Le Canada doit dénoncer avec force la main-d'oeuvre enfantine. Nous devons convaincre les gouvernements qui ont des lois de les faire appliquer pour supprimer l'esclavage des enfants employés aux travaux agricoles. Nous devons identifier et dénoncer les gouvernements qui n'ont pas de lois. L'exploitation des enfants est inacceptable. C'est un acte barbare qui ne doit pas être toléré.

Il faut donner une chance aux enfants du monde entier. Le Canada a la responsabilité de les aider.

* * *

[Français]

LES RELATIONS OUVRIÈRES

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, les travailleurs n'ont sûrement pas le goût de fêter aujourd'hui, 1er mai, avec les membres du gouvernement fédéral. Le gouvernement étudie en effet depuis maintenant un an et demi la possibilité d'introduire des dispositions antibriseurs de grève. Rien n'est fait pourtant et on apprend qu'il ne s'agit même plus d'une priorité de la ministre du Travail. Pendant ce temps, les 116 travailleurs de la minoterie Ogilvie, en grève depuis 11 mois, voient chaque jour des scabs traverser les lignes de piquetage.

(1410)

En deux mois, deux lois spéciales de retour au travail ont été adoptées à toute vapeur, bafouant le droit des travailleurs à la négociation et encourageant l'intransigeance des entreprises.

On ne peut, d'une part, être au service de Power Corporation et du CN et, d'autre part, se soucier des préoccupations et des besoins des travailleurs. Entre les deux, ce gouvernement a fait un choix et il n'a pas choisi les travailleurs.


11984

[Traduction]

LE DON D'ORGANES

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, les donneurs et les receveurs d'organes ont tenu une réunion officieuse, à Ottawa, la semaine dernière, sous l'égide du vice-président. Ils étaient particulièrement satisfaits que le Président de la Chambre ait pris le temps de s'adresser personnellement à eux.

Ces hommes et ces femmes représentent ce que l'on fait de mieux sur le plan de la vie humaine. Le don d'organes est souvent envisagé dans une moment de grande tristesse, lorsque l'on se rend compte que quelqu'un d'autre pourra bénéficier d'une vie meilleure.

J'encourage tous les députés à ouvrir leur permis de conduire et à signer la carte de donneur universel. Par ce geste altruiste, nous, politiciens, pouvons montrer l'exemple et faire preuve de compassion. Oui, le don d'organes peut rendre l'espoir à quelqu'un qui se meurt lentement.

* * *

[Français]

LE CONGRÈS BIENNAL LIBÉRAL

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le congrès biennal du Parti libéral fédéral du Québec se tenait en fin de semaine dernière à Trois-Rivières. Ce congrès a permis aux troupes fédéralistes de faire le point sur diverses questions d'importance nationale et de mettre en branle les derniers préparatifs avant le référendum de cet automne.

Les congressistes ont pu participer à des ateliers très intéressants et les discussions n'ont pas manqué de susciter l'intérêt. Le congrès a été une réussite sur toute la ligne.

C'est pourquoi j'aimerais féliciter tous les organisateurs du congrès biennal libéral qui ont participé de près ou de loin à la réussite de cet événement. De plus, l'accueil que nous avons reçu de la population de Trois-Rivières n'est sûrement pas étranger à ce succès.

Je suis convaincu que tous ceux qui ont participé à ce congrès biennal ont quitté la région de Trois-Rivières avec le sentiment du devoir accompli. Nous sommmes prêts plus que jamais à faire face aux forces séparatistes lors de la campagne référendaire.

* * *

L'UNITÉ NATIONALE

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, les membres de ma circonscription de London-Middlesex sont très inquiets de la possibilité que le Québec se sépare du Canada. Comme la plupart des Canadiennes et Canadiens, ils comprennent que le Québec est un membre très important de la famille canadienne.

Ils croient que le bon sens prévaudra au Québec et que lorsque les Québécoises et Québécois auront à choisir, ils opteront pour un Canada uni. Malgré quelques difficultés de temps, en temps le Québec et le Canada ont toujours fait bon partenariat.

Toute personne de bonne foi devrait travailler à la préservation de notre unité nationale.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, cette fin de semaine, j'ai assisté à une réunion des propriétaires d'armes à feu de ma circonscription. Cette réunion avait été organisée par le Parti réformiste. Les deux orateurs invités étaient le député de Crowfoot et moi-même. Vous ne serez pas surpris d'apprendre que je me suis trouvé sur la défensive, étant donné mon appui au projet de loi du gouvernement sur le contrôle des armes à feu.

Toutefois, le plus intéressant a été d'entendre le député du Parti réformiste dire qu'il considérait que c'était un droit et non un privilège de posséder une arme à feu et que toute personne devait avoir le droit d'utiliser la menace de mort pour protéger ses biens personnels, par exemple son téléviseur ou son magnétoscope.

Il a dit aux gens que, si quelqu'un les volait ou menaçait de les voler, ils devaient pouvoir utiliser leurs armes. Ce n'est pas l'opinion de la plupart des Canadiens ni de la plupart des propriétaires d'armes à feu. C'est l'opinion de quelques-uns, une minorité seulement. Le Parti réformiste a besoin de sonder sa conscience et d'écouter la majorité des Canadiens sur ce chapitre.

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, l'aéroport Pearson, le centre névralgique du système de transport au Canada, voit ses concurrents contrecarrer son ambition d'être la porte du monde en ce qui concerne l'Amérique du Nord. Le sectarisme politique embrouille l'enjeu. L'aéroport Pearson doit se préparer à aborder le XXIe siècle et à accroître sa capacité.

Quatre-vingt-dix-sept députés libéraux représentent l'Ontario au sein du gouvernement. Il y a 97 députés dont les électeurs auraient avantage à ce que l'aéroport Pearson occupe le rang qui lui revient sur la scène internationale. Pourtant, on n'entrevoit pas de solution pour sortir de cette impasse.

(1415)

Pourquoi le gouvernement refuse-t-il toujours de se rendre à l'évidence? Il faut fixer un délai pour la tenue d'une enquête judiciaire sur le processus d'adjudication du contrat. S'il est prouvé qu'il y a eu faute, qu'on punisse les coupables. Sinon, qu'on renouvelle le contrat, qu'on le renégocie ou qu'on refasse un appel d'offres.

Ça ne prend pas une tête à Papineau, mais tout le monde sait que le nombre ne fait pas la force quand il s'agit de représenter l'Ontario à Ottawa.

11985


11985

QUESTIONS ORALES

[Français]

L'AIDE SOCIALE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, dans son discours devant les militants libéraux à Trois-Rivières, le premier ministre a accusé hier le gouvernement du Québec de ne pas se préoccuper de la pauvreté en soulignant que c'est au Québec que l'on retrouve le plus grand nombre de personnes pauvres au Canada.

Ma question s'adresse à celui qui remplace le premier ministre; j'imagine qu'il s'agit du ministre du Développement des ressources humaines.

Est-ce que le ministre admettra qu'il faut avoir du front tout le tour de la tête pour faire la leçon au gouvernement du Québec et l'accuser de négliger les personnes pauvres après s'être attaqué, comme son gouvernement vient de le faire dans ses deux premiers Budgets, aux pauvres et aux démunis du Québec et du Canada, refoulant lui-même des milliers de personnes vers l'aide sociale?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je partage certes les soucis de tous concernant la pauvreté, spécialement les problèmes avec les enfants.

Mais notre gouvernement a entrepris plusieurs mesures pour répondre à ces problèmes sérieux. Par exemple, nous avons créé des milliers d'emplois, partout au Canada, spécialement au Québec, où on a créé 110 000 emplois permanents, dont 73 000 à Montréal seulement pendant la dernière année.

La meilleure solution au problème de pauvreté est l'obtention d'un emploi. Le bilan de ce gouvernement en ce qui a trait à la création d'emplois pendant la dernière année est assurément le meilleur de tous les gouvernements occidentaux.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, 40 p. 100 des nouveaux assistés sociaux au Québec sont des chômeurs qui n'ont plus accès à l'assurance-chômage. De qui est-ce la faute? C'est la faute de celui qui a fait des sermons en fin de semaine.

Comment le gouvernement fédéral peut-il accuser le gouvernement du Québec d'indifférence envers la pauvreté, alors que, par les coupures de la loi C-17 à l'assurance-chômage et par la réduction des transferts fédéraux à l'aide sociale, le fédéral pose des gestes qui vont aggraver, dans les faits, la situation de milliers de personnes qui, au Québec, vivent déjà sous le seuil de la pauvreté?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, il faut rappeler deux chiffres très importants. Au cours de l'année écoulée, 86 000 personnes de moins ont demandé des prestations d'assurance-chômage, conséquence directe de la création d'emplois, de la stimulation de l'emploi. En d'autres termes, le nombre des demandes de prestations a radicalement diminué et celui des chômeurs qui ont épuisé leurs prestations a baissé de près de 25 p. 100.

Dans sa déclaration d'hier, le chef de l'opposition a attribué le problème au fait que les chômeurs ont épuisé leurs prestations. Les faits ne confirment tout simplement pas cette thèse.

Nous comprenons les problèmes de chômage à long terme et nous en sommes tous gravement préoccupés. Tous les pays du monde sont aux prises avec ces problèmes. De profondes transformations sont en train de s'opérer dans le monde du travail. C'est pourquoi nous voulons réformer nos programmes sociaux ainsi que nos programmes de formation et de perfectionnement. Mais le député attribue le problème à une cause particulière, et les faits ne confirment pas son point de vue.

(1420)

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, la création d'emplois constitue la meilleure façon de lutter contre la pauvreté.

Dans cette perspective, comment le gouvernement fédéral peut-il avoir le culot de faire des remontrances au Québec alors que ce même gouvernement fédéral refuse de s'impliquer dans la reconversion de l'industrie militaire québécoise, refuse d'aider le chantier maritime MIL Davie, a supprimé l'aide au développement régional et a trouvé le moyen de couper 200 millions de dollars au programme d'infrastructures, la seule mesure concrète de création d'emplois annoncée par ce gouvernement depuis son arrivée au pouvoir?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà discuté de la MIL Davie. Mon collègue, le ministre de l'Industrie, en a parlé à maintes reprises et il a fait remarquer que le gouvernement du Québec est le principal actionnaire de cette société. Si ce gouvernement se préoccupe vraiment de création d'emplois, il a l'occasion d'agir.

J'ai autre chose à ajouter à l'intention du chef de l'opposition. Par ses efforts, le gouvernement a non seulement instauré dans tout le pays un climat nouveau qui a permis la création de 430 000 emplois, mais il en a aussi créé, par ses initiatives directes, plus de 120 000 autres. Le programme d'infrastructure, de nouveaux programmes de stages, des innovations dans les programmes d'apprentissage et diverses initiatives directes se sont traduits par la création de 120 000 autres emplois.

Cela prouve, il me semble, que nous prenons nos responsabilités très au sérieux. Nous faisons ce que nous pouvons pour résoudre les problèmes. Nous demandons simplement que d'autres gouvernements prennent eux aussi leurs responsabilités.


11986

[Français]

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, vendredi en cette Chambre, le ministre de l'Industrie a déclaré avoir informé le principal conseiller du premier ministre, M. Goldenberg, dans toutes les étapes du dossier de Power DirecTv, dossier qui implique les intérêts de la grande famille libérale, dont ceux du gendre du premier ministre.

Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Comment peut-il prétendre que le premier ministre s'est abstenu d'intervenir dans le dossier de Power DirecTv impliquant les intérêts de son gendre alors que son principal conseiller, celui du premier ministre, a été informé et est intervenu à toutes les étapes du dossier, toutes les étapes qui ont conduit à l'adoption d'un décret taillé sur mesure pour Power DirecTv?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai expliqué jeudi et vendredi en détail, je crois, cette question de radiodiffusion par satellite a été réglée de manière transparente et a été acceptée par tous les intérêts indépendants. Je n'ai pas encore entendu le Bloc québécois dire comment il voudrait régler cette question de radiodiffusion par satellite parce que peut-être qu'ils n'ont pas de politique. Ce que nous avons fait a été de soumettre à la Chambre des communes une direction tel que prévu par la Loi sur la radiodiffusion, projet de loi qui a été présenté à la Chambre quand le chef du Bloc québécois était membre du Cabinet Mulroney.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il faut le faire! Quand le ministre parle de transparence, la seule chose qui est claire dans ce dossier c'est que par une mesure extraordinaire, ce qui ne s'est jamais vu, quelque chose d'exceptionnel, le gendre du premier ministre s'est retrouvé avec le morceau. C'est cela qui est clair!

Des voix: Bravo!

Une voix: Cela, c'est clair! Cela, c'est transparent!

Une voix: C'est familial!

M. Gauthier: Comment le ministre de l'Industrie peut-il prétendre sérieusement que M. Goldenberg ne se soit pas impliqué dans le dossier de Power DirecTv alors que dans les jours qui ont suivi la rencontre du principal conseiller du premier ministre avec le président de Power DirecTv, le Cabinet lui faisait un premier cadeau, en décidant de réviser l'ordonnance du CRTC et de créer un groupe de travail présidé par l'ex-associé de M. Goldenberg?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le rapport du comité va de soi. Le comité a agi avec transparence. Il a reçu des mémoires de partout au Canada et les a mis à la disposition du public. Ni la logique ni le fond du rapport n'ont fait l'objet de critiques de la part d'un seul député, y compris celui qui a posé la question.

Le gouvernement n'aurait aucune raison de ne pas prendre ses responsabilités pour défendre les intérêts des consommateurs et assurer l'existence d'une structure concurrentielle dans l'industrie de la radiodiffusion par satellite au Canada.

(1425)

Si le député a des raisons de croire que le gouvernement devrait s'abstenir d'agir, et même refuser de le faire, dans les intérêts des Canadiens, j'aimerais qu'il nous les explique. L'examen de la direction à la Chambre des communes lui en donne la chance.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans le cadre du débat sur la radiodiffusion directe par satellite, le gouvernement a essayé d'échapper aux critiques en affirmant que le Parti réformiste s'opposait à la concurrence, alors que rien ne pouvait être plus loin de la vérité.

Le gouvernement a également dit que nous ne pouvions critiquer le processus. C'est faux, là encore. Aucune partie de ce processus biaisé n'était dans les règles. En effet, Expressvu peut compter sur beaucoup de gens qui ont leurs entrées au CRTC et la société Power Direc Tv a des liens libéraux plus forts que Mackenzie King lui-même.

La seule chose qui soit claire dans tout ceci, c'est que les Canadiens paient la note pour l'incapacité du gouvernement d'adopter une politique culturelle cohérente qui favorise une véritable concurrence.

Ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. Si le gouvernement souhaite vraiment la concurrence, pourquoi ne respecte-t-il pas l'engagement qu'il a pris d'adopter une politique culturelle globale?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Nous décidons de la politique et c'est ce qui semble irriter l'opposition. Il est important d'adopter une politique sur l'autoroute de l'information, surtout pour protéger le contenu canadien, c'est-à-dire la production d'émissions canadiennes. C'est ce que nous faisons.

Nous soumettons cette politique à la Chambre par l'entremise de la direction. Les députés des deux partis d'opposition auront l'occasion d'exprimer leur point de vue. C'est aussi pour cette raison que je consacre du temps à l'industrie du film afin de garantir un contenu canadien.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je n'ai pas obtenu de réponse à ma question au sujet de la concurrence. Il est vrai qu'une politique s'impose, mais il ne s'agit pas d'adopter une politique qui change constamment au gré des circonstances.

Un jour, le gouvernement restreint les choix et la concurrence dans le secteur de la musique country et, le lendemain, il ouvre les portes à ses amis libéraux de Power Corporation, ainsi qu'à


11987

ses amis américains, pour établir leur réseau de radiodiffusion par satellite dans tout le pays. Pas surprenant que le ministre du Patrimoine canadien ne sache pas où il s'en va.

Ma question complémentaire est celle-ci: Quelle est vraiment la position du gouvernement au sujet de la concurrence dans le secteur culturel? Est-il en faveur ou contre?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'il est très important de comprendre une chose. Dans le cadre de ses efforts pour faire avancer le dossier de la radiodiffusion par satellite, le gouvernement a signalé, à plusieurs reprises, qu'il souhaitait favoriser la concurrence.

Je ne comprends pas. Jeudi dernier, comme il se devait de le faire, M. Rick Anderson a précisé sur le réseau national de télévision qu'il avait des intérêts dans la société Expressvu. Je pense que les Canadiens ont le droit de savoir si le principal conseiller politique du chef du Parti réformiste a joué un rôle dans l'établissement de la stratégie que ce parti entend suivre dans ce dossier, car tout porte à croire que les réformistes sont opposés à toute concurrence et ne veulent pas défendre les intérêts des consommateurs, si l'on se fie à leur façon d'agir.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je n'ai jamais entendu personne à la Chambre des communes détourner une question de façon aussi ridicule.

Ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. Le gouvernement ne peut continuer d'aborder la concurrence dans le secteur culturel de façon improvisée. Les libéraux devront bien finir par se ranger d'un côté ou de l'autre. La Société Radio-Canada est dans une situation catastrophique à cause de l'absence d'une politique culturelle. Il en va de même du Conseil des arts du Canada. Nous avançons péniblement comme un escargot sur l'autoroute de l'information à cause de cette absence de politique culturelle.

Qu'est-ce qui fait traîner les choses? Le gouvernement attend-il l'approbation de M. Goldenberg, M. Desmarais ou M. Bronfman?

Encore une fois, quand le gouvernement va-t-il publier sa politique culturelle qu'on attend depuis si longtemps? Cela fait 18 mois qu'on aurait dû nous la soumettre.

(1430)

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, avant de poser des questions sur la politique culturelle du Canada, notre collègue devrait connaître cette culture.

Elle semble avoir lutté pour importer la culture américaine au Canada en supportant les intérêts américains dans le Country Music Network, plutôt que d'appuyer des intérêts canadiens. Il n'est pas surprenant que, à la suite de beaucoup d'accusations qui n'ont rien à voir avec notre politique, elle ait eu droit à une belle citation dans le Globe and Mail, citation que je suis heureux de vous lire. Dans son éditorial de samedi, le Globe and Mail disait que le public avait le nez fin pour reconnaître quelque chose de louche et que, cette fois-ci, cela n'était pas attribuable à un député ministériel.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, vendredi dernier, le ministre de l'Industrie a admis que le principal conseiller du premier ministre, Eddie Goldenberg, lui a transmis deux messages, et je cite: «Premièrement, que le premier ministre ne voulait rien à voir avec ce dossier et, deuxièment, que la même chose valait pour lui.» Or, un peu plus tôt, le ministre de l'Industrie déclarait qu'il avait informé M. Goldenberg de tous les développements dans le dossier de Power DirecTv.

Comment le premier ministre peut-il expliquer que le ministre de l'Industrie ait informé régulièrement le principal conseiller du premier ministre, Eddie Goldenberg, des décisions prises dans le dossier de Power DirecTv, après que celui-ci ait indiqué qu'il ne voulait rien savoir du dossier?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je m'étonne que les députés de l'opposition semblent penser que quelque chose va de travers, parce qu'ils ne peuvent trouver à redire au sujet du rapport ou de sa mise en oeuvre.

Je répète donc ce que j'ai déjà dit: bien sûr, il est normal que le cabinet du premier ministre soit tenu au courant de l'évolution de dossiers importants. Toutefois, j'insiste aussi en redisant, comme je l'ai fait maintes fois, que, dans ce dossier, les décisions ont été prises par le ministre du Patrimoine canadien et moi-même. Nous n'avons pas reçu la moindre directive ou demande, ni du premier ministre ni de son secrétaire principal, concernant un traitement particulier à accorder à ce dossier. Nous sommes totalement responsables des décisions qui ont été prises. Personnellement, je n'ai pas encore entendu une critique sérieuse sur cette affaire.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, compte tenu de l'implication directe du gendre du premier ministre, compte tenu des millions de dollars qui sont en jeu et compte tenu aussi du sérieux des allégations quant au rôle du bureau du premier ministre dans le dossier de Power DirecTv, le premier ministre peut-il s'engager à déposer en cette Chambre la note de service par laquelle il exigeait ne pas être impliqué dans ce dossier, pour éviter tout conflit d'intérêts, étant donné les intérêts de son gendre dans Power DirecTv?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, on a posé la même question vendredi. Nous n'avons pas l'intention de déposer quoi que ce soit. Dans l'unique commentaire qu'il a fait sur ce dossier-à ma connaissance-, le premier ministre a dit clairement qu'il avait insisté pour rester à l'écart. Quand le cabinet a été saisi de cette question, il s'est absenté. Le dossier ne contient rien qui puisse susciter des interrogations de la part du député.

Il importe davantage de se demander pourquoi tout ce bruit. À mon avis, cela traduit l'absence de politique des deux partis d'opposition, qui n'ont pas la moindre idée de ce qu'il faudrait faire concernant la politique de radiodiffusion par satellite au Canada.


11988

LE RÉGIME DE RETRAITE DES DÉPUTÉS

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement semble particulièrement sournois. Il a commencé par dire aux contribuables canadiens que la réforme du régime de retraite des députés allait leur faire économiser plus de trois millions de dollars. Il a cependant omis de leur dire qu'ils devront quand même regarnir la caisse au rythme de sept millions de dollars par année.

Le gouvernement a dit aux réformistes qu'ils pourraient choisir de s'en retirer s'ils trouvaient le régime de retraite trop riche à leur goût. Il a cependant omis de dire que les futurs députés seront forcés de souscrire à ce régime de retraite obscène.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Pourquoi le gouvernement a-t-il limité l'option de retrait aux députés actuels? À quel point le gouvernement actuel est-il résolu à réformer vraiment le régime de retraite?

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le président du Conseil du Trésor a dévoilé le plan de réforme du régime de retraite des députés le 22 février. Nous avons également distribué ce jour-là un document d'information énonçant très clairement les conditions dans lesquelles se présenterait le projet de loi. Il donne l'occasion de souscrire au régime de retraite une fois que la Chambre sera saisie du projet de loi. Tout le monde sera traité sur un pied d'égalité.

(1435)

Je pourrais ajouter que le député de Calgary-Ouest et le chef du Parti réformiste assistaient à la séance d'information. Je ne vois pas ce qu'on peut y trouver d'étonnant. Si des députés ont des suggestions à faire, ils pourront les formuler à la Chambre quand nous y discuterons du projet de loi. Ils pourront également les proposer au comité.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je trouve étonnant que le gouvernement ait l'audace de présenter son projet de loi sans faire la moindre déclaration.

Rien n'a vraiment changé. Le régime de retraite des députés est encore excessivement généreux. Nous continuerons de bénéficier de prestations deux fois plus élevées que la limite nationale, et elles resteront indexées au taux d'inflation. Par ailleurs, les pensions des ministres ne font l'objet d'aucun plafonnement.

Les députés nouvellement élus en 1988 et les autres qui décideront de m'imiter en se retirant du régime de retraite pourraient peut-être changer les choses de l'intérieur. Le projet de loi qu'on nous a présenté est inacceptable.

Pourquoi le gouvernement a-t-il refusé de remplacer entièrement le régime de retraite des députés par un régime plus réaliste comme celui dont bénéficient les autres Canadiens, où les contributions se font à parts égales?

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, cette question illustre bien le souci d'opportunisme du Parti réformiste. Le livre rouge a promis deux choses: l'âge d'admissibilité sera haussé, et nous l'avons fait; il n'y aura plus de cumul de pension et de traitement, et nous l'avons interdit.

Le gouvernement a cependant décidé d'aller plus loin. Il a décidé de réduire du tiers sa contribution au régime de retraite des députés. Il a en outre décidé que les députés n'étaient pas obligés d'y participer. Il a également décidé de réduire de 20 p. 100 le taux d'accumulation des prestations de retraite. Il est allé au-delà de ce qu'il avait promis. Le Parti réformiste cherche simplement à exploiter cette question à son avantage.

* * *

[Français]

LA COMPAGNIE SEAGRAM

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Patrimoine prétend qu'il n'aurait appris l'acquisition de MCA par Seagram qu'à sa descente de l'avion à Los Angeles, la qualifiant même de hautement secrète, alors que les médias rapportaient depuis plusieurs semaines l'imminence d'une prise de contrôle de MCA par Seagram.

Comment le ministre du Patrimoine peut-il expliquer qu'il se soit rendu incognito à Los Angeles, accompagné seulement de son chef de cabinet, sans aucun fonctionnaire de son ministère et sans avoir eu un briefing préparatoire, comme cela se fait toujours à la veille d'une visite d'un ministre à l'étranger?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ces visites, et cette visite en particulier, étaient soigneusement préparées. J'ai eu l'occasion de dire en cette Chambre que j'avais pris le temps de consulter de nombreux représentants de l'industrie du film au Canada. Cela est de la préparation.

Deuxièmement, je ne m'entoure pas d'un entourage de fonctionnaires pour augmenter les coûts des visites à l'extérieur quand je n'en ai pas besoin. Qu'on me prouve le contraire! Je peux faire remarquer également à nos collègues de l'opposition que j'étais accompagné par le consul général du Canada à Los Angeles dans toutes les réunions que j'ai eues là-bas. Donc, les allégations que nous entendons depuis quelques jours sont fausses les unes après les autres.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre nous affirme que cette visite était très soigneusement préparée. Alors j'aimerais, à ce moment-là, qu'il nous explique comment il peut continuer de prétendre sérieusement qu'il ignorait tout de cette transaction jusqu'à sa descente de l'avion à Los Angeles, alors que tous les grands quotidiens du Canada faisaient état de l'imminence de cette transaction, ce qui a été confirmé par M. Bronfman lui-même, la veille de l'arrivée du ministre incognito à Los Angeles?

(1440)

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, notre collègue n'écoute pas ce que je dis, ce qui ne me surprend pas. Il est bien sûr que les rumeurs circulaient depuis quelques jours, et c'est ce que j'ai dit le 28 avril, et que l'on trouvera dans ce hansard, que j'ai entendu une rumeur deux jours à l'avance de l'acquisition.


11989

Donc, son histoire prouve non seulement qu'il ne m'écoute pas, mais qu'il ne lit pas le hansard. Aurait été bien malin celui qui aurait pu prédire exactement quand la transaction allait se faire. Si je l'avais su, c'est que j'aurais été informé de ce qui se passait. Je ne l'ai pas su le jour où la transaction allait se faire tout simplement parce que, comme je me dépense à le dire, personne ne m'a tenu au courant de toute cette histoire.

* * *

[Traduction]

HARBOURFRONT

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Lorsque le ministre des Finances a présenté son budget, en février, il a dit que tous les Canadiens et toutes les régions du pays devaient faire les mêmes sacrifices. Toutes les régions sauf le Grand Toronto, apparemment. Les Canadiens ont appris avec stupéfaction que, par suite de pressions exercées par des députés libéraux, le gouvernement fédéral a décidé de rétablir les quatre millions de dollars de financement de l'organisme Harbourfront.

Comment le premier ministre peut-il justifier d'accorder quatre millions de dollars à Harbourfront au moment même où les Canadiens sont priés de se serrer encore davantage la ceinture?

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis que le Parti réformiste soulève la question. Cela montre à quel point il appuie les activités culturelles au Canada.

Je suis plutôt surpris qu'il désapprouve qu'on accorde des fonds à Harbourfront pour que cet organisme poursuive ses activités et contribue considérablement au tourisme en Ontario.

Par ailleurs, le député devrait savoir que les fonds alloués à Harbourfront ne constituent pas de l'argent nouveau. Ils viennent d'une réaffectation des fonds au sein du ministère qui va beaucoup contribuer à créer des emplois dont la ville de Toronto a tellement besoin.

* * *

LES JETS DE WINNIPEG

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, il n'existe manifestement pas de plan d'ensemble.

Et encore s'il n'y avait que le financement de Harbourfront! Nous apprenons maintenant que le ministre du Développement des ressources humaines va s'entretenir aujourd'hui avec le premier ministre au sujet d'un prêt de 16 millions de dollars à l'intention des Jets de Winnipeg. Si le ministre croit que les contribuables vont appuyer une dépense de ce genre, il se met le doigt dans l'oeil jusqu'au coude.

Le premier ministre va-t-il assurer à la Chambre qu'on ne se servira pas des deniers publics pour renflouer les Jets de Winnipeg?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député fait encore une fois la preuve que le Parti réformiste a tort de se fier à la piètre source que constituent parfois les médias.

Tout ce que nous pouvons dire aux députés, c'est que toute initiative concernant les Jets et le centre sportif de Winnipeg sera le fait du secteur privé de cette ville. À l'instar de plusieurs autres villes, Winnipeg a présenté une demande de subvention dans le cadre du programme de modernisation des infrastructures. C'est le genre de proposition qui serait envisagée sur demande.

* * *

[Français]

LA BOSNIE

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Aujourd'hui, le 1er mai, la trêve expire officiellement en Bosnie. L'envoyé spécial des Nations Unies en ex-Yougoslavie, M. Akashi, a échoué hier dans son ultime tentative de prolonger la trêve en raison du refus des belligérants serbes bosniaques.

Le ministre des Affaires étrangères peut-il faire le point sur la situation qui prévaut en Bosnie au moment de l'expiration de cette trêve, et reconnaît-il qu'il faut craindre une intensification des combats dans les prochains jours et ce, en regard de la sécurité des Casques bleus canadiens?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier l'honorable député de sa question qui me permet de dire, au nom du gouvernement du Canada, que nous appuyons les efforts du représentant des Nations Unies, M. Akashi.

Il est certain que les événements des dernières heures nous permettent de penser que, malgré le fait que cette trêve ne soit pas reconduite, la recrudescence des combats ne prendra pas. Nous avons fait des représentations, bien sûr, aux parties impliquées dans ce conflit pour qu'elles usent de la retenue la plus élémentaire possible afin que le conflit ne s'aggrave pas.

(1445)

La position des forces de paix des Nations Unies est telle que les citoyens qui sont affectés par le conflit sont dans une situation où les Nations Unies peuvent sauver des vies. C'est pourquoi le Canada continue à soutenir les efforts de paix des Nations Unies.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères peut-il nous indiquer si l'ONU a entrepris de nouvelles démarches auprès du gouvernement bosniaque et des Serbes bosniaques afin d'assurer,


11990

premièrement, le prolongement de la trêve, deuxièmement, lemaintien de l'aide humanitaire et ensuite la poursuite des négociations entre les belligérants? Y a-t-il de nouvelles ententes?

[Traduction]

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je réponds par l'affirmative aux trois questions.

Je sais que certains députés réformistes n'étaient pas très heureux que j'essaie de donner une réponse aussi détaillée que possible sur la situation très grave qui sévit dans l'ex-Yougoslavie. Ils croient peut-être que nous ne devrions pas participer aux activités visant à maintenir la paix et à garantir la sécurité en Europe. Il est, au contraire, très important que nous le fassions, et je félicite le député d'avoir soulevé une question aussi pertinente à la Chambre des communes.

* * *

LES PÊCHES

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Comme tous les Canadiens le savent, et je suis très fière de pouvoir le dire, le Canada a réussi à négocier avec l'Union européenne un accord au sujet du différend récent concernant le flétan noir. Cet accord assurera la conservation des stocks de poisson dont l'état est précaire et l'application rigoureuse des règlements de pêche de l'OPANO.

Le ministre des Pêches et des Océans peut-il expliquer à la Chambre ce que fait actuellement le gouvernement pour assurer la mise en oeuvre des dispositions de cet accord?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de St. John's-Ouest de sa question.

J'ai le plaisir d'annoncer à tous les députés, et notamment à mes collègues réformistes qui sont suspendus à mes lèvres, l'arrivée de 35 observateurs de l'Union européenne à St. John's, Terre-Neuve, aujourd'hui et demain. Les observateurs de l'UE monteront à bord de bateaux de soutien et seront déployés, d'ici vendredi, sur tous les bateaux espagnols et portugais qui pêchent dans la zone de réglementation de l'OPANO.

* * *

LA BOSNIE ET LA CROATIE

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à assurer à la Chambre que nous nous intéressons de très près à la situation dans l'ancienne Yougoslavie. Au moment où nous déployons nos troupes en Bosnie et en Croatie, les troupes des Nations Unies sont bloquées dans leurs barricades et leurs positions sont minées.

En Croatie, une nouvelle offensive militaire a commencé et plusieurs soldats de l'ONU ont été blessés.

Étant donné que la situation se détériore, comme le Parti réformiste l'avait prévu, quand le gouvernement se rendra-t-il compte que nous devons retirer nos troupes de la Bosnie et de la Croatie?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous savons que la situation dans l'ancienne Yougoslavie est très dangereuse. Les soldats canadiens font des efforts héroïques pour accomplir leur mission.

En ce qui concerne la question du mandat, nous en avons déjà débattu à la Chambre il y a quelques semaines. Nous nous sommes engagés pour six mois encore et rien n'est arrivé pour forcer le gouvernement du Canada à changer d'idée maintenant.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous savons tous que le gouvernement retirerait nos troupes de la Bosnie et de la Croatie si tout le contingent des Nations Unies était retiré.

Existe-t-il des conditions pour lesquelles nous pourrions décider unilatéralement de retirer nos troupes? Si oui, quelles sont-elles?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a dit à maintes reprises, à l'instar de tous les députés ministériels, que, si l'embargo sur les armes était levé, le Canada retirerait immédiatement ses troupes de l'ancienne Yougoslavie.

En principe, nous ne sommes pas favorables à l'idée de le faire unilatéralement. Nous travaillons avec nos alliés sur le terrain et nous ferons des efforts concertés pour régler les problèmes là-bas. Si jamais nous retirions nos forces, nous le ferions en collaboration avec ceux avec qui nous servons.

* * *

(1450)

[Français]

LES RELATIONS OUVRIÈRES

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Lors du congrès libéral à Trois-Rivières en fin de semaine, la ministre du Travail a déclaré que l'adoption de dispositions antibriseurs de grève dans le Code canadien du travail n'était plus une priorité pour le gouvernement désormais. Manifestement, la ministre a choisi de se consacrer à 100 p. 100 au référendum au Québec, délaissant ainsi ses responsabilités de ministre fédérale du Travail.

Comment le ministre justifie-t-il la volte-face de sa collègue du Travail, qui refuse maintenant de déposer un projet de loi amendant le Code canadien du travail pour y inclure des dispositions antibriseurs de grève après s'y être engagée, dès son entrée en fonction?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, il y a actuellement des consultations en cours entre la ministre du Travail, les syndicats et les employeurs sur cette question. Aujourd'hui et demain, à la


11991

demande de la ministre, le directeur général du Service fédéral de médiation et de conciliation rencontre les parties. C'est une question à laquelle il n'y a pas encore de réponse. Celle-ci sera donnée aussitôt que nous l'aurons.

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ): Comment le ministre peut-il justifier que sa collègue du Travail, qui était pourtant si empressée à matraquer les travailleurs du rail dès son entrée en fonction, ne trouve plus le temps maintenant pour inclure dans le Code canadien du travail des dispositions antibriseurs de grève?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, tout comme pour les grèves de chemins de fer, nous avons pris les mesures qui étaient nécessaires pour l'intérêt national. Nous considérons également qu'il faut maintenant prendre le temps nécessaire pour consulter avec les parties et pour essayer d'en arriver à un compromis.

Je sais que l'opposition, elle, procéderait immédiatement, sans prendre les mesures nécessaires et sans analyser la situation, mais dans le cas du gouvernement au pouvoir, nous désirons servir la population canadienne et québécoise correctement et par conséquent, faire tous les efforts nécessaires.

* * *

[Traduction]

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, lundi dernier, à la Chambre, nous avons appris que la Nouvelle-Écosse, et non le gouvernement fédéral, avait décidé de réaffecter à un projet dans la circonscription du ministre des Travaux publics, au Cap-Breton, 26 millions de dollars qui étaient destinés à la rocade de Wentworth, en Nouvelle-Écosse.

Richie Mann, député provincial du Cap-Breton dont la circonscription bénéficierait également de cette réaffectation de fonds, a déclaré: «Quel a été le rôle de M. Dingwall dans cette affaire? Ils nous a parlé de ce projet et nous lui en avons parlé également et nous avons tous convenu que c'était un projet valable.»

Ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Pourquoi le ministre s'est-il mis en situation de conflit d'intérêts lorsqu'il a parlé à M. Mann d'utiliser ces 26 millions de dollars pour construire une route touristique dans sa circonscription au lieu d'améliorer une route qui a coûté la vie à plus de 40 personnes entre 1986 et 1992 et qui devra maintenant être une route à péage?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il est rare-et je le sais d'autant plus que j'ai déjà siégé à l'assemblée législative du Nouveau-Brunswick-que les politiciens qui se rencontrent ne parlent pas de routes, particulièrement au Canada atlantique.

Je puis assurer au député que les discussions concernant l'affectation des fonds destinés aux routes en Nouvelle-Écosse se déroulent avec le ministre des Transports de cette province. Nous avons des discussions à ce sujet avec la Nouvelle-Écosse et avec d'autres provinces.

Je suis certain que le député reconnaîtra que, lorsque les députés de la Chambre des communes ont l'occasion de discuter avec leurs homologues provinciaux de questions d'intérêt commun, ce n'est certainement pas une situation de conflit d'intérêts. Ils font simplement leur travail, ce que le député ne semble manifestement pas comprendre d'après le nombre de fois où il a soulevé cette question au cours des dernières semaines.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, c'est la quatrième fois que je prends la parole à la Chambre pour poser ma question au ministre des Travaux publics, mais c'est toujours ce type qui me répond.

Les députés des deux côtés de la Chambre disent qu'il y a eu détournement de fonds publics. C'est un exemple classique de conflit d'intérêts, et le vérificateur général de la Nouvelle-Écosse dit que c'est une affaire grave.

Le premier ministre demandera-t-il au conseiller en éthique de faire enquête sur cette affaire? Si c'est possible, j'aimerais que le premier ministre me réponde ou encore le type qui ne veut pas prendre la parole.

(1455)

Le Président: Habituellement, mais pas toujours, la question devrait être adressée à un ministre plutôt qu'à un «type» parce que cela peut parfois embrouiller la présidence. Le ministre des Transports a la parole.

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il est très malheureux que le député ne comprenne pas que, lorsqu'il y a des ententes avec les provinces, il y a toujours un processus de consultation.

Les dépenses qui seront faites en Nouvelle-Écosse, comme c'est le cas pour toutes les dépenses faites au nom des contribuables canadiens, sont certainement soumises à un examen très minutieux de la part du vérificateur général du Canada et de notre propre ministère.

Je tiens à dire au député, parce que je sais qu'il est un nouveau venu à la Chambre et que c'est vrai qu'il a déjà posé cette question trois ou quatre fois, qu'il ne devrait pas employer des expressions comme détournement de fonds. Il devrait comprendre qu'un détournement de fonds va beaucoup plus loin que la simple renégociation des fonds affectés à la construction des routes dans une province.

Par conséquent, je demande au député de réfléchir avant de faire ce genre d'insinuation.

* * *

LES LANGUES OFFICIELLES

M. John Harvard (Winnipeg St. James, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor.


11992

Mon collègue a certainement pris connaissance des derniers rapports du commissaire aux langues officielles. Ces rapports font état des difficultés que certains Canadiens éprouvent lorsqu'ils veulent obtenir des services fédéraux dans les deux langues officielles.

Le secrétaire parlementaire peut-il dire à la Chambre ce que fait le gouvernement pour régler les problèmes et pour que les Canadiens puissent recevoir les services fédéraux dans l'une ou l'autre langue officielle là où ils y ont droit?

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, nous demeurons déterminés à continuer de fournir des services de qualité, aux termes de la Loi sur les langues officielles, dans les immeubles fédéraux.

Le secrétaire du Conseil du Trésor demandera un plan d'action aux ministères fautifs et à ceux qui n'ont pas fait l'objet d'enquêtes. Ces plans devront être produits avant la fin de septembre. Ils seront regroupés et présentés au comité parlementaire des langues officielles afin que celui-ci en discute. Il y aura un suivi sur la mise en oeuvre des plans en mars 1996 et tous les six mois par la suite.

Enfin, une liste de tous les immeubles où les services doivent être fournis dans les deux langues officielles a été mise à jour et diffusée. Dans le but d'améliorer les services, il y a eu plus de 700 consultations dans les régions.

* * *

[Français]

LE BÉNÉVOLAT

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine.

Le ministre du Patrimoine a publié récemment une brochure pour souligner la Semaine nationale à l'action bénévole. La brochure fait état de l'importance du bénévolat dans nos sociétés et rend hommage aux 13 millions de personnes du Québec et du Canada qui donnent de leur temps pour les gens démunis, les personnes en détresse, les délaissés.

Comment le ministre peut-il souligner les mérites et la nécessité de l'action bénévole alors que le budget accordé aux organismes volontaires est passé de 1 066 000 $ en 1993-1994, à 65 000 $ en 1995-1996, soit une coupure de 94 p. 100?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas encore annoncé les chiffres de financement aux bénévoles, à toute l'action volontaire. Je soutiens cette action parce qu'elle est éminemment louable et qu'elle contribue au développement de la société canadienne.

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, les conclusions d'une étude publiée récemment sur l'économie de l'immigration indiquent que le Parti réformiste avait raison sur toute la ligne. Cette étude conclut, entre autres, que le niveau de compétence et de langue ainsi que la capacité des immigrants de s'intégrer ont diminué par suite des politiques myopes de ce gouvernement en ce qui concerne la réunion des familles et les réfugiés.

Compte tenu de cette étude, le ministre de l'Immigration va-t-il immédiatement réexaminer son plan d'immigration pour 1995-1996, un plan d'inaction qui n'apporte aucun changement notable aux politiques de la dernière décennie?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le document sur les niveaux d'immigration que nous avons présenté à la Chambre des communes n'est pas seulement le fruit du travail de ce caucus et de ce gouvernement, mais aussi-pour la première fois-le résultat de consultations que nous avons eues avec plus de 10 000 Canadiens afin de déterminer le genre de politique d'immigration que ce pays voulait pour lui-même et compte tenu de sa position au sein de la communauté internationale. Non, nous ne réexaminerons pas notre politique.

* * *

(1500)

LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Récemment, le gouvernement a annoncé l'élimination totale des subventions aux groupes et mouvements de jeunesse oeuvrant dans le domaine de l'éducation internationale, depuis la Queen Charlotte Islands Global Link Society en Colombie-Britannique jusqu'au bureau de l'Oxfam à St. John's (Terre-Neuve), ainsi que l'élimination totale de la subvention de huit millions de dollars à la Fédération internationale pour le planning familial.

Je voudrais demander au ministre si, compte tenu des promesses qu'il a faites antérieurement dans son énoncé de la politique étrangère et au Caire de renforcer ces programmes, le gouvernement va revoir sa décision. Le ministre pourrait-il aussi expliquer pourquoi il est revenu sur les promesses qu'il avait faites aux gens de ce pays et aux femmes pauvres dans le monde?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, que le député soit rassuré, nous ne revenons pas sur nos promesses. Nous allons les tenir, mais d'une autre façon. Nous accordons la préférence aux relations bilatérales avec les organisations non gouvernementales qui ont des programmes dans les pays où le besoin se fait le plus sentir.

11993

Comme il est dit dans le livre rouge et dans nos énoncés de politique, nous sommes déterminés à jouer un rôle actif à cet égard.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale. Comme le ministre le sait, les efforts du Bureau de la concurrence en vue d'accroître la concurrence dans le domaine du déménagement des articles de ménage ont été contrecarrés par le comité interministériel chargé de cette question.

Les deux premiers nouveaux fournisseurs en 20 ans ont été éliminés dans les 30 premiers jours du contrat. L'intervention du Comité interministériel sur les services de déménagement des articles de ménage a forcé les seuls fournisseurs entièrement canadiens à se retirer.

Le ministre peut-il expliquer à la Chambre comment on en est arrivé là et décrire les mesures que le gouvernement se propose de prendre dans ce dossier?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je sais que cette question intéresse mon collègue au plus haut degré et je l'en félicite. Il se rappellera que le Bureau de la concurrence a fait une étude approfondie de ce dossier. Le comité interministériel s'est penché sur les procédures contractuelles et a conclu qu'elles étaient toutes conformes en tout point à la Loi sur la concurrence.

On a fait un certain nombre de recommandations visant à accroître la concurrence et à encourager de nouvelles entreprises à répondre aux appels d'offres. Plusieurs mesures ont été mises en place au cours des 12 derniers mois et, à la suite de ces changements, quatre nouvelles entreprises ont participé au processus d'adjudication. Il s'avère maintenant que deux des entreprises gagnantes sont gérées par la même personne. Pour des raisons qu'on ignore, elles ont retiré leur candidature.

Nous aurons de plus amples renseignements à ce sujet dans quelque temps. Je tiens à assurer au député que nous avons tenu compte de ses suggestions lors de la formulation de notre nouvelle politique.

_____________________________________________


11993

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à pas moins de 90 pétitions.

LE TRAITÉ SUR LA NON-PROLIFÉRATION DES ARMES NUCLÉAIRES

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, dans quelques jours, les représentants de 175 pays, y compris ceux du Canada, se réuniront à New York pour décider du sort du plus important traité international sur le contrôle des armements, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Peu d'ententes ont autant d'importance pour la sécurité du Canada.

Je voudrais aujourd'hui expliquer brièvement les raisons pour lesquelles le Canada appuie une prorogation indéfinie et sans condition du TNP et les raisons pour lesquelles nous encouragerons tous les autres signataires à faire de même lors de cette importante conférence.

(1505)

Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires est entré en vigueur en 1970 et le Canada fut l'un des premiers signataires. Le TNP est important pour le Canada pour trois raisons principales. D'abord, l'objectif premier du TNP est d'empêcher la prolifération des armes nucléaires. À cet égard, le TNP est une réussite éclatante. En limitant la prolifération des armes nucléaires, il fait du Canada et du monde entier des endroits plus sûrs.

Deuxièmement, le traité crée un cadre pour l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire en établissant un régime international efficace de mesures de contrôle et de vérification. Ce régime, mis en application par l'Agence internationale de l'énergie atomique, permet de veiller à ce que les matières nucléaires ne soient pas détournées vers des programmes d'armement. Le Canada ne vend pas et ne vendra pas de technologie nucléaire à un pays qui n'a pas signé un accord de vérification et de contrôle avec l'AIEA et qui n'a pas adhéré au TNP ou à un équivalent régional. Nos exportations de technologie nucléaire faites sous l'égide de tels accords créent 20 000 emplois directs et 10 000 emplois indirects au Canada.

Troisièmement, le traité engage tous les États sur la voie du désarmement, y compris le désarmement nucléaire. Cet instrument légal unique engage tous les signataires et notamment les États qui possèdent des armes nucléaires et il confirme ainsi notre engagement à long terme, soit l'élimination des armes nucléaires.

La décision que les signataires du TNP doivent prendre est de proroger le traité indéfiniment ou pour une période limitée. Notre position est très claire. Nous croyons que les Canadiens, ainsi que tous les habitants du monde, méritent de la part de leurs gouvernements un engagement solennel à l'égard de la prévention de toute prolifération des armes nucléaires et à l'égard du désarmement.

Ceux qui contestent cette position laissent entrevoir la possibilité que le TNP disparaisse un jour. Ceci n'est dans l'intérêt de personne. Nous devons, une fois pour toutes, empêcher un tel scénario de se produire.

La fin de la guerre froide a entraîné la fin de la course aux armements nucléaires. Cette course a pris fin grâce à une plus grande confiance, une plus grande ouverture et une plus grande


11994

coopération entre la Russie et l'Ouest. La sécurité accrue est la voie qui mène au désarmement. Le TNP est essentiel à une plus grande sécurité et à une meilleure coopération entre les nations.

Nous ne pouvons oublier que 1995 marque aussi le tragique 50e anniversaire du lâcher de bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki. Le grand homme d'État américain Adlai Stevenson a déjà dit que le mal ne se trouvait pas dans l'atome, mais dans l'âme des hommes. Avons-nous besoin d'une meilleure raison pour coopérer davantage et établir et défendre des lois internationales qui visent à contrecarrer la folie de ceux qui voudraient compromettre la paix et la sécurité internationales?

Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires a bien servi le Canada au cours des 25 dernières années. Le temps est maintenant venu de conserver à jamais ces acquis pour les générations à venir.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, au nom du Bloc québécois, il me fait plaisir de prendre la parole sur le Traité de non-prolifération nucléaire, dont le sort se joue actuellement à New York. Il s'agit du plus important traité international sur le contrôle des armements.

Le Bloc québécois a eu l'occasion de faire connaître sa position sur la question du désarmement nucléaire, dans le cadre des travaux du comité mixte sur la révision de la politique de défense du Canada, l'automne dernier. À notre avis, l'émergence de nouvelles puissances nuclaires confirmées et non confirmées complique plus que jamais la question du désarmement nucléaire.

C'est pourquoi le Bloc québécois appuie très fortement la prorogation indéfinie et inconditionnelle du Traité de non-prolifération nucléaire. Nous souhaitons que sa base universelle soit élargie encore davantage. Même si actuellement plus de 160 pays l'ont ratifié, il n'en demeure pas moins que les pays qui risquent de parvenir à la maîtrise de ces armes de destruction massive refusent d'entériner le Traité, ce qui n'est pas sans menacer les fondements actuels de la paix internationale. Selon nous, il importe d'assurer la pérennité du traité et de la bonifier afin de la rendre plus efficace.

(1510)

Il est effet possible d'amener des pays à renoncer à l'acquisition de l'arme nucléaire. Au moins quatre pays, soit le Canada, l'Afrique du Sud, le Brésil et l'Argentine ont agi en ce sens dans le passé. Ne serait-il pas plus efficace et beaucoup plus mobilisateur pour l'humanité de travailler à la signature d'un accord multilatéral sur l'élimination de ces armes, comme on l'a fait récemment dans le cas des armes chimiques?

Pendant que j'entendais le secrétaire d'État (Asie-Pacifique) nous vanter les mérites du TNP et ceux du Canada, qui fut l'un des deux premiers signataires de ce traité, je n'ai pu m'empêcher de penser à l'incohérence de ce gouvernement dans la conduite de ses affaires étrangères.

C'est maintenant bien connu, le gouvernement canadien ne se préoccupe plus que de ses seuls intérêts commerciaux, et ce au détriment non seulement de toute la question du respect des droits de la personne et de la démocratie, mais aussi des questions de sécurité internationale.

Comment expliquer, par exemple, que le gouvernement s'apprête à permettre et à financer, au montant de deux milliards de dollars, la vente de réacteurs nucléaires CANDU à la Chine? De l'avis du Bloc québécois, le gouvernement devrait au moins exiger que la Chine se conforme au Traité de non-prolifération plutôt que de défier le moratoire sur les essais que s'étaient imposées les autres nations détentrices d'armes nucléaires.

La vente de ces réacteurs pourrait saper les efforts de la communauté internationale visant à mettre un terme à la prolifération de la capacité nucléaire.

Le comportement du gouvernement canadien n'est pas plus reluisant ni cohérent en ce qui a trait à la vente de ses chasseurs-bombardiers CF-5 à la Turquie. On sait que la Turquie poursuit une offensive militaire dans le nord de l'Irak contre les populations kurdes. Nous avons demandé à plusieurs reprises au gouvernement, sans succès, que celui-ci suspende ses négociations avec la Turquie à cet égard.

Nous en conviendrons tous, ce n'est pas la cohérence qui caractérise la conduite des affaires étrangères de ce gouvernement.

Que le gouvernement supporte aujourd'hui la prorogation indéfinie et sans condition du Traité de non-prolifération nucléaire nous amène à un peu d'espoir. Il ne nous reste plus qu'à l'encourager à faire preuve de cohérence. Par exemple, le Canada pourrait se doter d'une politique beaucoup plus sévère sur les questions de coopération dans le domaine nucléaire. Actuellement, telle que libellée, la politique de non-prolifération permet les exportations nucléaires vers des pays non signataires du traité, à condition que ceux-ci prennent l'engagement de ne pas utiliser les matériaux pour fabriquer des armes nucléaires. Une politique plus sévère doit être poursuivie dans ce domaine si le Canada veut être cohérent avec la conception qu'il se fait de la menace nucléaire et de l'explosion des conflits militaires un peu partout dans le monde.

Le Canada pourrait également innover en proposant des stratégies qui soient cohérentes avec ses intérêts dans le domaine de la paix internationale. Sur ce plan, des gestes concrets pourraient, par exemple, être posés, premièrement, dans le domaine de l'exportation des matières fissiles où le Canada a son mot à dire en raison, notamment, de ses ressources en matériaux radioactifs et en raison de son expertise dans le domaine de la technologie nucléaire.

Deuxièmement, le Canada devrait soumettre à la Cour internationale une analyse juridique démontrant l'illégalité des armes nucléaires.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, cette année marque le 50e anniversaire de l'invention de la bombe atomique et de sa première utilisation sur les villes d'Hiroshima et de Nagasaki.

Les armes nucléaires ont créé une nouvelle horreur pour l'humanité, d'une ampleur jamais connue auparavant. En regardant l'explosion de la première bombe nucléaire expérimentale, Robert Openheimer, le directeur du projet Manhattan, abasourdi et


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stupéfait par la dévastation ainsi provoquée, a cité un ancien texte sacré hindou disant: «Je suis devenu la Mort, le destructeur des mondes.»

Il était devenu possible, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, de détruire la terre. . . et rien n'a plus jamais été pareil. Non seulement la bombe atomique amplifie l'horreur de la guerre, mais elle la change complètement.

Pendant des siècles, les populations civiles ont été largement exclues des champs de bataille. Tout au moins, conquérants et pillards devaient se frayer un chemin à travers les défenses du pays avant de pouvoir faire un tort quelconque aux civils. En d'autres mots, il y avait toujours une défense et un espoir.

Avec la naissance des armes nucléaires deux choses ont changé. Tout d'abord les civils ne sont plus des victimes fortuites, mais la cible première et ils peuvent être incinérés par millions. Deuxièmement, quelle que soit la force des défenses d'un pays ou la valeur de son armée, il est totalement vulnérable à la destruction par les armes nucléaires.

(1515)

Pour répondre à la menace de prolifération des armes nucléaires, un traité a été négocié en 1970, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, et depuis cette époque il a reçu un appui sans réserve de la part du Canada.

Comme le ministre des Affaires étrangères a déjà exposé ses caractéristiques principales et ses avantages, je n'y reviendrai pas. Toutefois, je dirai que le Parti réformiste appuie à 100 p. 100 le gouvernement dans ses efforts pour négocier une extension indéfinie et inconditionnelle du traité de non-prolifération.

Pour la sécurité future de nos concitoyens et de la population du monde entier, le Canada doit faire tout son possible, à l'ONU, pour obtenir l'élimination totale des armes nucléaires. Rien de bon ne peut venir de ces armes de destruction massive et l'on devrait négocier avec tous les gouvernements, en toute bonne foi, l'interdiction d'en posséder.

Le Parti réformiste espère sincèrement que le traité de non-prolifération sera renouvelé indéfiniment; toutefois, si certains pays se retirent ou refusent de signer, nous estimons que le gouvernement devrait prendre cela en considération et promouvoir des actions bilatérales contre ces pays.

Le moment est venu pour le monde de faire un pas important vers la suppression des armes nucléaires. La fin de la guerre froide rend la chose possible et le renouvellement inconditionnel et indéfini du traité de non-prolifération est une nouvelle étape logique. Pour notre sécurité future, nous ne devons pas échouer dans cette tentative.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 74e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres associés des comités permanents.

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 74e rapport plus tard aujourd'hui.

* * *

[Traduction]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE LA CONVENTION SUR LES ARMES CHIMIQUES

L'hon. Roy MacLaren (au nom du ministre des Affaires étrangères) demande à présenter le projet de loi C-87, Loi de mise en oeuvre de la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

L'hon. Douglas Young (au nom du ministre de l'Industrie, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-88, intitulé Loi portant mise en oeuvre de l'accord sur le commerce intérieur.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-323, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (ordonnance de libération).

-Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je présente aujourd'hui ce projet de loi d'initiative parlementaire. Je profite de l'occasion pour remercier mon collègue qui a appuyé les motions de présentation et de première lecture.

Il y a quelques mois, un avocat de la région de Vancouver m'a parlé d'un aspect qui le préoccupait dans la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. C'est qu'un contrevenant peut échapper au paiement des dommages-intérêts résultant de voies de fait, comme un tribunal l'avait ordonné dans une action civile, s'il vient à se déclarer en faillite.

(1520)

Il y a tout lieu d'accorder plus d'importance à la situation de la victime qu'aux droits du contrevenant. Les victimes de ce pays ont déjà assez souffert sans qu'on leur porte de nouveau un dur coup en ne les dédommageant pas à cause d'une lacune tout à fait inacceptable qu'on trouve dans la Loi sur la faillite.

Bien des gens ont été victimes de violences sans être ultérieurement dédommagés comme les tribunaux l'avaient ordonné à cause d'une lacune dans la loi fédérale. Les amendes, les pensions alimentaires et les dettes résultant d'une fraude ne sont pas exemptées. Il n'y aurait pas lieu non plus d'exempter les domma-


11996

ges-intérêts résultant de voies de fait. Il faut agir pour que soit modifiée cette loi qui laisse à désirer et il faut agir maintenant.

Le projet de loi que je présente consiste en un ajout à la liste que l'on trouve à l'article 178. L'ajout porterait sur les dommages-intérêts résultant de voies de fait ou de coups et blessures. Cette mesure accorderait plus de droits à la victime. Tous les députés savent bien que le victime doit être mieux traitée que le condamné.

C'est un honneur pour un simple député de pouvoir présenter un projet de loi. Mais je tiens à ce que le gouvernement examine attentivement la mesure. Je sais que cette question concerne le ministre de l'Industrie ainsi que le ministre de la Justice. J'encourage le gouvernement à prendre la chose au sérieux.

Les Canadiens souhaitent que le Parlement soit doté d'un processus d'élaboration des politiques efficace. Il s'agit pour cela d'appuyer toute mesure législative qui profite au pays tout entier.

Vu que les victimes de crimes n'ont rien à voir avec les partis, j'invite tous les députés de la Chambre à souscrire à ce projet de loi dans un bel esprit dénué de sectarisme.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose que le 74e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, déposé aujourd'hui à la Chambre, soit adopté.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, les pétitions que je désire présenter portent sur deux sujets.

Dans la première pétition, les signataires font valoir à la Chambre que le fait d'inclure l'orientation sexuelle dans le projet de loi C-41 aura pour effet d'accorder des droits et privilèges particuliers aux personnes qui pratiquent l'homosexualité.

Compte tenu que ces droits et privilèges spéciaux seront fondés uniquement sur le comportement sexuel et que leur reconnaissance empiétera sur des droits historiques des Canadiens, notamment la liberté de religion, de conscience et d'expression, les pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute modification du Code criminel visant à y inclure les mots «orientation sexuelle».

LA DÉFENSE DE L'INTOXICATION

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, la seconde pétition que je présente au nom de mes électeurs porte sur un autre sujet.

La Cour suprême ayant autorisé la défense d'intoxication extrême dans un cas d'agression sexuelle et cette décision ayant été récemment invoquée dans un cas de violence conjugale, les pétitionnaires font valoir à la Chambre que cette jurisprudence fait reculer les droits des femmes et donne par conséquent aux hommes un prétexte supplémentaire pour utiliser la violence contre les femmes et leurs enfants.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de renverser la décision de la Cour suprême du Canada d'autoriser l'utilisation de la défense d'intoxication extrême dans les cas d'agression sexuelle ou physique.

LA JUSTICE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter une autre pétition dans le cadre des initiatives de mes électeurs qui souhaitent empêcher la libération anticipée de Robert Paul Thompson.

(1525)

Les pétitionnaires que je représente veulent améliorer la sécurité dans nos rues. Ils s'opposent à la pratique actuelle de libérer des criminels violents avant qu'ils aient fini de purger la totalité de leur peine.

Les pétitionnaires demandent qu'on protège la sécurité des citoyens respectueux de la loi et des familles des victimes des meurtriers condamnés.

L'AGRICULTURE

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je dépose une pétition signée par 63 Canadiens, dont neuf habitent dans ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de refuser d'adopter une loi légalisant l'usage de la somatotrophine bovine ou d'une hormone de croissance bovine recombinante au Canada. Ils demandent en outre que tout produit laitier d'importation provenant de vaches traitées avec ces substances doive être ainsi identifié en vertu de la loi.

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter quatre pétitions.

La première porte sur la politique des langues officielles. Les pétitionnaires affirment que la majorité des Canadiens s'opposent à cette politique et réclament un référendum sur la question de savoir si oui ou non le Canada devrait la conserver.


11997

LA FAMILLE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur la famille. Les pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute loi qui modifierait directement ou indirectement la définition de la famille, notamment en conférant des avantages familiaux à des gens qui ne sont pas unis par les liens du sang, du mariage ou de l'adoption, le mariage étant défini comme l'union légale d'un homme et d'une femme.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition porte sur l'expression non définie «orientation sexuelle».

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant cette expression, car ils craignent que les couples homosexuels ne bénéficient ainsi des mêmes avantages et des mêmes privilèges que les personnes mariées.

LE PROJET DE LOI C-41

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la dernière pétition concerne l'article 718.2 du projet de loi C-41.

Les pétitionnaires craignent que la désignation de groupes précis dans le projet de loi n'empêche de protéger d'autres groupes et que la peine fondée sur la notion de haine ne soit très subjective et ne mine notre système de justice.

Je suis favorable à ces pétitions.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions qui traitent du même sujet et qui sont signées par plus de 200 Canadiens.

Ces personnes sont favorables à l'utilisation légale et responsable d'armes à feu et de munitions. Elles disent que de nombreux citoyens s'opposent à des lois qui visent à imposer davantage de restrictions ou d'interdictions à la propriété licite d'armes à feu, au lieu de sévir contre ceux qui recourent à des armes à feu pour commettre des crimes violents.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de ne pas adopter d'autres lois, règlements ou décrets sur le contrôle des armes à feu.

L'EUTHANASIE

M. Ron Fewchuk (Selkirk-Red River, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions au nom d'électeurs de ma circonscription de Selkirk-Red River.

Les pétitionnaires prient le Parlement de maintenir son opposition à l'euthanasie et à l'aide médicale au suicide au Canada.

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour présenter quatre pétitions venant de ma circonscription d'Annapolis Valley-Hants.

Dans les deux premières, les pétitionnaires prient le Parlement de veiller à ce que les dispositions du Code criminel du Canada qui interdisent l'aide au suicide soient rigoureusement appliquées. Ils demandent également au Parlement de modifier les dispositions législatives qui permettraient l'aide ou l'encouragement au suicide ou l'euthanasie.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition a pour objet de demander au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte canadienne des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

La dernière pétition vise à demander au Parlement de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne afin de protéger les Canadiens contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui de présenter trois pétitions. La première porte la signature de quelque 500 électeurs de ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer seulement les mesures législatives sur les armes à feu qui punissent sévèrement tout criminel violent qui utilise une arme, et non pas seulement une arme à feu, qui préservent les droits et libertés de ceux qui utilisent des armes à feu à des fins sportives et qui sont respectueux des lois, de manière qu'ils puissent posséder et utiliser des armes à feu de façon responsable, et qui abrogent les lois sur le contrôle des armes à feu dont le libellé tortueux en fait les pires exemples d'une mauvaise rédaction.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte 36 signatures.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de mettre un terme au traitement discriminatoire dont font l'objet les gais et les lesbiennes et leur situation de famille au Canada, en modifiant la loi fédérale qui permet actuellement un traitement inégal, en apportant notamment à la Loi canadienne sur les droits de la personne une modification interdisant la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

(1530)

LA JUSTICE

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition porte plus de 150 signatures.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier le Code criminel du Canada et toutes les autres lois pertinentes de façon qu'on ne puisse pas invoquer l'intoxication extrême comme moyen de défense dans une affaire criminelle.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter aujourd'hui une pétition en conformité avec l'article 36 du Règlement. La pétition a été signée par des gens de la Colombie-Britannique, dont la majorité habitent dans la circonscription de New Westminster-Burnaby.

11998

Les pétitionnaires, à commencer par Peggy MacDonald, de New Westminster, demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 171.

[Texte]

Question no 171-M. Harper (Calgary-Ouest):

Concernant la fermeture de la Base des Forces canadiennes Calgary, a) combien en coûtera-t-il pour nettoyer la base (y compris les casernes, les terrains d'exercice, etc.) et remettre le terrain en état pour qu'il puisse être revendu ou rendu au bailleur, et comment ces coûts seront-ils répartis, b) quels autres travaux de nettoyage a-t-on entrepris, et à combien s'élevaient les coûts, c) quelles rénovations et améliorations ont été apportées à la BFC Calgary au cours de la dernière année, et à combien s'élevaient les coûts, d) combien en coûtera-t-il pour transférer le matériel et le personnel de la BFC Calgary à Edmonton, e) quels travaux d'aménagement devra-t-on effectuer à la BFC Edmonton pour qu'elle puisse accueillir le personnel et le matériel de la BFC Calgary, et à combien s'élèveront les coûts, et f) quelles dépenses de réfection/d'entretien additionnelles prévoit-on engager à la BFC Edmonton au cours des 10 prochaines années?
M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Le tableau suivant répond aux questions posées:





[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant que nous ne passions à l'ordre du jour, je tiens à informer la Chambre que, conformément au paragraphe 33(2) du Règlement, la période consacrée aux initiatives ministérielles sera prolongée de 13 minutes en raison de la déclaration ministérielle.

_____________________________________________


11998

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LE CODE D'ÉTHIQUE

La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.

Le président suppléant (M. Kilger): Reprise du débat, l'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell à qui il reste environ 12 minutes.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais conclure les remarques que j'ai entamées un peu plus tôt aujourd'hui concernant tout le dossier de la moralité publique. Il faut admettre quand même dans ce débat que tout ce dossier a été laissé à traîner pendant quelques années du régime antécédent. Bien sûr, comme le dit le vieil adage, ce qui traîne se salit, et c'est vrai.

Je dois admettre qu'un projet de loi a été présenté en 1987, le projet de loi C-114. Celui-ci a été réimprimé sous C-46, pour être réimprimé par la suite sous C-43, pour ensuite faire l'objet-et à ce moment-là, nous sommes en 1991-d'une étude par un comité parlementaire. Ce comité parlementaire a lui aussi produit, dans son rapport daté de juin 1992, une ébauche de projet de loi. Le gouvernement s'est ensuite inspiré de ce projet de loi et de nos recommandations pour présenter le projet de loi C-116. Ce projet de loi présenté à la Chambre par le gouvernement faisait défaut, était défectueux, et le ministre de l'époque, l'honorable Harvie Andre, avait refusé d'amender le projet de loi pour le rendre acceptable et tout cela a été abandonné. Donc,


11999

inutile de dire que certaines personnes auraient raison de penser qu'à un moment donné, les législateurs se sont traînés les pieds dans le dossier, et c'est vrai.

Je ne suis pas ici pour le nier, c'est vrai. J'ai participé moi-même au débat et au comité parlementaire qui a étudié le projet de loi C-116 et j'ai bien reconnu qu'il s'était écoulé tellement de temps que certains des dossiers commencaient à être déjà vieux à l'époque. Le rapport de la Commission Parker, par exemple, sur les activités de Sinclair et Noreen Stevens était à peu près oublié et les recommandations n'étaient plus fraîches dans nos mémoires. Il a été difficile de travailler sur tout ce dossier.

Il n'en demeure pas moins que le dossier est encore important aujourd'hui et qu'on doit en parler. C'est pourquoi je félicite le leader parlementaire en Chambre qui a bien voulu présenter cette motion aujourd'hui. Vous vous souviendrez que dans le livre rouge, on avait annoncé clairement qu'on discuterait de ce dossier et de celui des lobbyistes.

On a premièrement débattu de celui des lobbyistes. Je dois féliciter tous les députés qui ont travaillé sur ce dossier. Il y a du bon boulot qui a été fait. Le projet de loi est maintenant rendu à la troisième lecture, ici même à la Chambre. Je suis sûr que les députés l'adopteront d'ici quelques jours. Maintenant, on est prêt à tourner la page et à s'occuper du dossier suivant, qui est bien sûr celui du code d'éthique et des conflits d'intérêts pour les parlementaires, les députés de cette Chambre et de l'autre endroit.

(1535)

Il est important de le faire tout de suite après la conclusion du travail du comité sur les lobbyistes, parce que dans une certaine mesure, les deux dossiers peuvent se rejoindre et c'est là, d'une part, une bonne raison. D'autre part, il est important de le faire tout de suite pour que le gouvernement puisse indiquer à la population qu'il a pleinement l'intention de s'occuper de ces dossiers et de ne pas laisser traîner tout cela, comme cela a été le cas sous certains autres régimes.

Alors, on voit qu'il y a, d'une part, une bonne intention du gouvernement en proposant tout ça. Comme l'a indiqué le leader parlementaire en Chambre il y a quelque temps, il y aura bien sûr toutes sortes de questions à se poser. Je me souviens du projet de loi C-116 et des erreurs qu'il contenait. Il était tellement mal rédigé qu'il faisait en sorte qu'on avait des gens qui étaient régis sous un système et qui se rapportaient afin d'être jugés sous un autre, et vice versa.

Il faut se souvenir que dans le dossier des conflits d'intérêts, il y a, en fait, trois groupes dont il faut s'occuper. D'une part, il y a les députés et les sénateurs, disons les parlementaires soi-disant ordinaires. Il y a ensuite les parlementaires qui sont à la fois parlementaires et titulaires de charge publique, en d'autres termes les ministres et les secrétaires parlementaires. Dans un troisième temps, il y a ceux et celles qui détiennent des postes soit par arrêté en conseil ou autrement et qui sont la haute gomme, si vous voulez, de la fonction publique.

Alors, il y a ces trois groupes, et là où il y a un territoire qui est assez intéressant, c'est celui des parlementaires qui sont également titulaires de charge publique, parce que dans notre système parlementaire de Westminster, que nous avons au Canada et dans plusieurs autres pays, les membres de l'exécutif siègent dans cette enceinte. Ils et elles sont donc à la fois des ministres et des parlementaires. Donc, il s'agit de décider, dans de tels cas, sous quel régime ils seront jugés. Est-ce qu'ils seront jugés sous le régime des fonctionnaires et des autres titulaires de charge publique ou sous le régime pour les parlementaires? C'était une question intéressante qui a été examinée par le comité étudiant le projet de loi C-43 et ensuite C-116.

Nous avions conclu, ou plutôt le gouvernement à l'époque avait conclu, parce que nos recommandations avaient été un peu différentes, que le système régissant les fonctionnaires devait en même temps s'occuper des ministres et des autres titulaires de charge publique qui sont aussi parlementaires, et que pour les autres députés soi-disant ordinaires ou parlementaires ordinaires, il devait y avoir un système à part. La raison pour laquelle il est nécessaire d'avoir une distinction comme celle-là est bien sûr pour le fait suivant, c'est parce qu'un régime administré par le gouvernement ne peut pas lier les députés de la Chambre.

J'ai de la difficulté à m'imaginer que l'honorable député de Bellechasse, par exemple, accepterait, lui, d'être jugé par un appareil qui se rapporterait au premier ministre. D'ailleurs, je ne le blâmerais de refuser un système semblable. Je ne l'accepterais pas moi non plus si j'étais député siégeant du côté de l'opposition. Donc, cela prend un appareil sous l'autorité de la Chambre pour administrer les conflits d'intérêts ou un cas de conflit d'intérêts pour les parlementaires.

Mais, bien sûr, en même temps, on doit établir un système par lequel le député de Bellechasse ou un autre député peut questionner le premier ministre à propos de l'éthique des ministres, des membres du Cabinet, disant au premier ministre: «Monsieur le premier ministre, c'est vous qui êtes le patron, donc comment pouvez-vous endurer telle ou telle chose qu'a faite un de vos collègues et quelles mesures allez-vous prendre?»

(1540)

Bien sûr, là, on ne s'attendrait pas à ce que le premier ministre dise: «Non, ce n'est pas moi qui traite ce genre de dossier, qui relève plutôt de la compétence d'un fonctionnaire de la Chambre.» Là, bien sûr, le premier ministre doit avoir, dans un cas comme celui-là, l'autorité de prendre les mesures disciplinaires nécessaires, et il doit également être responsable pour être capable de répondre aux questions de tous ceux et celles qui veulent rendre ce Parlement imputable, comme c'est leur rôle.

Ce sont là des dossiers que nous aurons à étudier en comité parlementaire. On sait que, du côté de la Chambre, ce sera le comité chargé de la procédure, dont mon collègue assis devant moi, le député de Bellechasse, est membre. En tant que professeur de droit, je sais qu'il aura une immense contribution à offrir à ce dossier, tout comme d'ailleurs plusieurs autres parlementaires. Tous pourront nous aider à faire en sorte qu'on ait un code de conflit d'intérêts à la fois acceptable, pour ne pas dissuader les gens d'être candidat à des postes publics à l'avenir, et, dans un deuxième temps, suffisamment strict pour contribuer à la bonne éthique et à la moralité publique.

Il n'est pas toujours facile de trancher dans ce dossier, je l'accepte. J'ai travaillé pendant plusieurs années dans ce genre de dossier alors que j'étais critique de l'opposition ou porte-parole en matière d'administration gouvernementale. J'ai bien hâte de participer à ce comité.

Là où je dois être en désaccord avec certains députés d'en face, c'est lorsqu'ils veulent soustraire de leur participation les membres de l'autre endroit à ce comité.


12000

Je dois vous dire que le code de conflit d'intérêts doit s'appliquer non seulement aux députés mais aux sénateurs également. Je l'ai dit au début de mon allocution et je le répète, j'invite les députés qui proposent que les sénateurs ne fassent pas partie de cet exercice à reconsidérer leur position, parce qu'on parlera peut-être d'amender le Code criminel, les règlements de la Chambre, les règlements du Sénat et la Loi sur le Parlement canadien. Ces lois et certaines de ces règles, les parlementaires des deux Chambres doivent contribuer à les modifier. Les députés d'en face le savent, et le député de Bellechasse, j'en suis sûr.

Donc, on doit tous travailler ensemble pour être capables d'apporter les modifications nécessaires aux règles dans cet endroit et dans l'autre endroit. D'ailleurs, pourquoi voudrait-on adopter des règles d'éthique concernant les conflits d'intérêts pour les parlementaires de cette Chambre et exempter ceux de l'autre? Je dois vous dire que je n'y comprends rien, si les gens veulent faire des choses du genre. D'ailleurs, on a vu récemment certains députés d'en face poser des questions à propos d'un membre de l'autre endroit, alléguant qu'il avait été dans une position de conflit d'intérêts ou quelque chose du genre. On sait que ce n'était pas vrai à l'époque, que c'était une allégation des médias et que le journaliste en question a dû se rétracter, mais il n'en demeure pas moins qu'on a posé des questions de ce genre.

C'est preuve à l'appui qu'on doit travailler ensemble, les deux chambres de ce Parlement, afin qu'on ait de meilleures règles. En tout cas, c'est ce que j'ai l'intention de faire à titre de parlementaire intéressé à ce genre de dossier.

J'invite donc l'opposition officielle à retirer la motion exemptant le Sénat des règles qu'on veut adopter pour les parlementaires.

[Traduction]

J'espère que nous allons tous collaborer à la rédaction d'un bon code d'éthique à l'intention des parlementaires des deux chambres. Ce faisant, je souhaite que nous contribuions pour une part-car le problème ne se résume pas à cela-à mieux faire accepter et comprendre aux Canadiens ce que nous essayons de faire pour gouverner honnêtement et de la manière qui convient, ce que veulent tous les parlementaires des deux chambres, j'en suis sûr.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, il est extrêmement important de définir des règles claires pour guider les parlementaires dans leurs contacts avec les lobbyistes. Il importe que le Sénat le fasse lui aussi, mais il n'appartient peut-être pas aux Communes d'établir des règles pour un Sénat non élu. Les sénateurs doivent mettre de l'ordre dans leurs propres affaires et se doter ensuite de leurs propres règles.

(1545)

Depuis longtemps, le lobbying est une réalité un peu trouble, car, si le principe en est accepté, la pratique suscite parfois des réserves, selon l'origine des démarches. Si les pompiers ont des lobbyistes chargés de faire comprendre au Parlement les problèmes de leur profession, cela semble parfaitement acceptable. Si des entreprises font du lobbying pour obtenir des avantages particuliers, la situation devient moins nette. Il semble généralement plus acceptable que les entreprises confient ces démarches à des membres de leur propre personnel, plutôt que de se faire représenter par des spécialistes du lobbying.

Il y a quelque chose d'hypocrite dans cette attitude. Le lobbyisme serait soit bon soit mauvais. Nous ne devrions pas porter de jugements simplement en fonction de l'identité des lobbyistes. Voilà la première de toute une série de questions que l'on devrait aborder dans le cadre de l'étude de la motion no 23.

La motion no 23 devrait également nous permettre d'examiner un autre aspect du lobbyisme, soit la définition du lobbyisme extrême. Si le lobbyisme est une activité légale et s'il n'existe aucune définition concernant l'identité des lobbyistes et l'étendue de leurs activités, comment peut-on juger de la position extrême de leurs activités dans le contexte non réglementé actuel?

L'absence de lignes directrices précises à l'intention des élus et des lobbyistes eux-mêmes a posé de nombreux problèmes tant aux uns qu'aux autres. Il convient de prendre quelques instants pour examiner l'un de ces problèmes.

Au cours des élections de 1993, les libéraux se sont attaqués à l'accord intervenu avec la Pearson Development Corporation en vue de la modernisation des aérogares 1 et 2 à l'aéroport international Pearson. Leurs principales récriminations portaient sur le lobbyisme excessif qui aurait été, à leur avis, à l'origine d'un accord qui était essentiellement fondé sur le favoritisme et qu'il fallait annuler.

Ce contrat illustre-t-il ce qu'on entend par lobbyisme excessif? Le lobbyisme a-t-il mené à des faveurs politiques? Pour répondre à ces questions, il faut reprendre depuis le début.

L'aérogare 3 avait déjà été privatisée et cela n'avait soulevé aucune controverse. En septembre 1989, le groupe Matthews présente une soumission spontanée dans l'espoir que les aérogares 1 et 2 soient privatisées. La soumission est rejetée. Deux ans et demi plus tard, en mars 1992, le gouvernement fait une demande de propositions en vue de privatiser les aérogares 1 et 2.

À l'époque, les libéraux ont prétendu entre autres que la soumission originale était une forme de lobbyisme qui donnait aux soumissionnaires originaux un avantage injuste en 1992. Si la demande de propositions avait été faite immédiatement après la soumission spontanée, cette allégation aurait pu être justifiée.

Deux ans et demi après coup, une telle prétention n'est absolument pas valable. Même si aucune ligne directrice ne régissait à l'époque ni ne régit aujourd'hui le lobbying, les libéraux ont insisté pour prétendre qu'il y avait eu un lobbying excessif dans l'affaire de l'aéroport Pearson. Cela me ramène à la question que je posais tout à l'heure, à savoir: Comment le lobbying peut-il être considéré comme excessif au point de justifier l'annulation d'un contrat s'il n'existe aucune ligne directrice pour l'évaluer?

Par une journée de beau temps, une voiture roule à la vitesse permise lorsqu'une autre voiture vient lui couper le chemin, occasionnant un accident. À l'enquête, on établit que la première


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voiture roulait trop vite, compte tenu de la piètre visibilité dont jouissent les automobilistes entrant dans la rue à cet endroit.

La commission d'enquête recommande que la vitesse soit réduite. Il n'en résulte pas pour autant que le premier automobiliste est coupable d'avoir excédé la vitesse permise. On ne peut pas réduire rétroactivement la vitesse permise. Et pourtant, c'est exactement ce que les libéraux ont essayé de faire en ce qui concerne le lobbying dans l'affaire Pearson.

Il n'existe aucune définition d'un lobbying excessif et rien ne prouve qu'on s'est livré à un lobbying exagéré pour décrocher le contrat. Les libéraux, qui formaient désormais le gouvernement, ont annulé le contrat en invoquant un lobbying excessif donnant lieu à du népotisme.

Aux dernières élections, le contrat Pearson était très controversé. Les allégations de lobbying excessif et de népotisme pleuvaient. Les principales raisons de ces accusations ne découlaient pas directement du contrat, mais venaient plutôt du gouvernement Mulroney qui était alors considéré comme peu scrupuleux et peut-être même corrompu.

Le contrat de l'aéroport Pearson est une victime des promesses électorales auxquelles je me suis moi aussi laissé prendre. J'ai été un de ceux qui ont demandé si les bénéficiaires du contrat auraient droit à une indemnité, à supposer que les accusations lancées contre eux soient fondées.

Le chef libéral a dit que si son parti était porté au pouvoir, il examinerait le processus ayant mené à la conclusion du contrat et qu'il annulerait ce dernier si des irrégularités étaient découvertes. Jusque-là, il n'y avait rien à redire, selon moi.

Comme il l'avait promis, le nouveau premier ministre a pris des dispositions pour faire examiner le contrat et, à cette fin, il a désigné Robert Nixon comme l'unique responsable de cette étude d'une durée de 30 jours. M. Nixon appuyait le Parti libéral de longue date; il est le père d'un de nos collègues libéraux, et on l'a remercié d'avoir produit son rapport de 80 000 $ en le nommant président de la Commission de l'énergie atomique, une initiative qui n'est pas de très bon augure pour un parti dénonçant le favoritisme ayant entouré la signature du contrat de l'aéroport Pearson. Dans le cadre de son examen, M. Nixon n'a interrogé personne sous serment; il ne s'est entretenu qu'avec certains, excluant quelques-uns des principaux intéressés, et il n'a permis la réfutation d'aucun témoignage.

(1550)

Dans son rapport, il a conclu que l'accord était mauvais et qu'il devrait être annulé, mais il n'a fourni aucune preuve pour étayer cette affirmation. Rappelons qu'une allégation générale de lobbying excessif était l'une des principales justifications.

S'appuyant sur le rapport Nixon, les libéraux ont présenté le projet de loi C-22, qui non seulement annulait le contrat, mais qui permettait aussi au gouvernement de déterminer lui-même qui devait être indemnisé et dans quelle mesure. Il lui permettait également d'insinuer que l'accord était malhonnête à cause de tactiques, de lobbying, notamment, auxquelles certains auraient eu recours, mais sans jamais permettre aux accusés de blanchir leur nom et leur réputation devant les tribunaux.

C'est une stratégie très intéressante pour les libéraux, et elle aurait fonctionné si des preuves contraires n'avaient pas commencé à faire surface. À ce moment-là, les libéraux ont tenté de laisser entendre qu'il ne s'agissait pas d'un accord financièrement avantageux, mais encore une fois, aucune preuve n'est venue étayer leur dire.

Le projet de loi a fait l'objet d'un débat à la Chambre des communes. Au moment de l'étude en comité, j'ai commencé à réaliser que ce n'était peut-être pas l'adjudication du contrat qui avait laissé à désirer, mais plutôt la façon dont celui-ci avait été annulé. Bon nombre des témoins que le représentant du Bloc ou moi-même avons demandé à entendre n'ont pas comparu, et le comité à majorité libérale a refusé d'exercer des pressions sur ces personnes pour qu'elles témoignent.

Robert Nixon était le témoin le plus important que nous souhaitions entendre et qui n'a pas comparu devant le comité. S'il ne s'est pas présenté, c'est toutefois parce que la majorité des membres du comité ont refusé de l'inviter. Ils nous ont répondu que nous avions son rapport et qu'ils ne voyaient pas l'utilité de l'inviter.

Un témoin digne de mention qui a comparu est Sandy Morrison d'Air Canada, qui était le principal locataire clé dans le contrat. Air Canada s'est prononcée fermement en faveur du contrat et a demandé qu'il soit mis en oeuvre le plus vite possible.

À ce moment-là, le gouvernement a décidé de nommer un autre partisan libéral de longue date et ancien partenaire du premier ministre dans une étude juridique, Robert Wright, pour examiner la demande d'indemnisation et faire rapport au ministre. Le ministre était censé se fonder sur ce rapport pour déterminer qui a été payé et à combien ont droit les intéressés. L'indemnisation devait se limiter aux dépenses, sans considération pour toute autre demande liée aux frais de lobbying et aux réclamations des tiers à l'encontre de la Pearson Development Corporation.

Le rapport et la décision seraient confidentiels et à l'abri de la Loi sur l'accès à l'information grâce à l'émission d'un document du Cabinet protégé pour 20 ans. J'ai demandé pourquoi on avait recours à ce procédé qui court-circuitait le Comité des transports et se faisait dans le secret. Je n'ai pas reçu de réponse satisfaisante.

J'estime qu'il convient d'examiner les résultats de la fausse vendetta des libéraux contre le groupe Pearson afin de comprendre pleinement l'importance des lignes directrices du lobbying et ce qui se produit en cas d'inexistence de pareilles lignes directrices.

Comme je l'ai dit plus tôt, lorsqu'il a semblé que l'accusation de lobbying excessif ne suffisait peut-être pas à elle seule pour justifier l'annulation du contrat, les libéraux ont ensuite tenté de nous faire croire que ce contrat n'était pas une bonne affaire du point de vue financier afin de détourner notre attention de la vraie raison pour l'annulation du contrat, soit un gain politique. Comme les preuves l'ont montré plus tard, les libéraux savaient


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dès le départ que ce n'était pas une mauvaise affaire, mais ils s'étaient piégés eux-mêmes et ne savaient pas comment s'en sortir.

Grâce à la Loi sur l'accès à l'information, j'ai mis la main sur un document gouvernemental secret, daté du 29 octobre 1993, qui a été fourni à Robert Nixon pour son enquête sur le contrat de l'aéroport Pearson. Ce document a été remis à William Rowat, sous-ministre adjoint du ministre des Transports. Dans ce document, il est clairement dit que le taux de rendement du contrat était beaucoup plus avantageux pour le gouvernement que ne l'était la propre option du gouvernement et qu'il était considéré comme raisonnable à la fois par le ministre des Finances et un expert-conseil indépendant engagé par le gouvernement.

Un deuxième document gouvernemental, daté du 4 novembre 1993 et rendu public plus tard par ordre du tribunal, confirme la faisabilité financière du projet. M. Nixon s'est également fondé sur ce document pour produire son rapport. Dans ce document, on souligne qu'un taux de croissance de 10 p. 100 par année serait nécessaire pour que l'option de construction du gouvernement produise des recettes équivalentes à celles que donnerait le projet du secteur privé jusqu'au recouvrement total des coûts.

Historiquement, la croissance des recettes du gouvernement a été égale ou inférieure au niveau projeté de l'inflation aux fins de l'analyse, soit 3 p. 100 par année. Si l'on suppose un taux de croissance réel plus réaliste de 3,5 p. 100, l'option de construction du gouvernement aurait produit 250 millions de dollars de recettes de moins pour la durée du contrat que la méthode de la privatisation.

(1555)

Dans le deuxième document du gouvernement aussi il est question des coûts possibles de l'annulation du contrat. Les options présentées y sont la négociation et l'expropriation, ce qui laisserait au gouvernement une note estimée entre 500 millions et deux milliards de dollars en dommages-intérêts, ou la législation, ce qui limiterait la responsabilité du gouvernement, mais serait susceptible de déboucher sur beaucoup d'autres problèmes dont de graves problèmes de congestion, des hausses de coûts et une atteinte à la réputation des processus gouvernementaux de location et d'attribution des contrats si cela était perçu comme un précédent.

Le document aborde aussi la possibilité de renégocier le contrat, mais il y est dit clairement que ce n'était pas là une option souhaitable. Nulle part dans le document il n'est dit que Nixon devrait chercher à savoir si l'entente était régulière et, si oui, en recommander le maintien. La conclusion évidente à tirer de cela, c'est que Nixon devait, dès le départ, arriver à des résultats précis.

Je n'ai jamais contesté le droit du gouvernement d'annuler le contrat de l'aéroport Pearson. Compte tenu de tous les renseignements dont nous disposons, je pourrais contester qu'il ait été bien sage d'annuler ce contrat, mais non le droit de le faire. À ce droit s'ajoute l'obligation de voir à ce que justice soit rendue, ce qui ne semble pas être le cas en l'occurrence.

Nous devons tout cela au gouvernement libéral qui cherchait une promesse électorale à faire et dont le choix est tombé sur l'aéroport Pearson. Il a invoqué l'absence de toute ligne directrice sur le lobbying pour essayer de justifier sa décision. Quelles en ont été les conséquences? Un examen complet et bien documenté des répercussions sur l'aéroport Pearson nous le dirait.

Je ne m'étendrai pas là-dessus parce que je manquerais de temps. Il y a beaucoup de documents sur ce contrat, mais je dois passer à autre chose.

Je veux mentionner un autre aspect du processus qui explique que le fait que l'aéroport Pearson soit en cause est une pure coïncidence. Il s'agit de la règle de droit.

En vertu du projet de loi C-22, le gouvernement peut annuler un contrat signé et décider lui-même qui obtiendra quelle indemnisation. Le projet de loi permet aussi au gouvernement de laisser entendre que l'accord et les personnes en cause étaient véreux sans laisser aux accusés la possibilité de blanchir leur nom et leur réputation devant un tribunal.

Le gouvernement a décidé qu'un groupe de Canadiens étaient coupables tant qu'ils ne prouveraient pas leur innocence, puis il leur a enlevé le droit de prouver cette innocence. Cette façon de faire tient beaucoup plus de la dictature que de la démocratie.

Tout cela a commencé lorsque les libéraux ont vu qu'ils pouvaient se faire du capital politique en se servant du fait qu'il n'existait pas de lignes directrices régissant les activités de lobbying.

Non seulement la motion no 23 permettra à tous les députés d'avoir des lignes directrices claires, comme il devrait y en avoir depuis longtemps, pour leurs échanges avec les lobbyistes, mais elle protégera la population des décisions peu scrupuleuses de partis politiques et elle pourrait même protéger les libéraux eux-mêmes de leur tendance à faire des promesses électorales exagérées.

[Français]

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la motion que nous étudions aujourd'hui vise à former un Comité mixte spécial de la Chambre et du Sénat pour étudier le large dossier de l'éthique parlementaire.

Nous comptons sur ce comité pour définir un code d'éthique pratique et réaliste qui nous aidera à concilier les responsabilités officielles et les intérêts personnels des députés et sénateurs. Évidemment, il s'agit là d'une question qui touche personnellement chaque député de cette Chambre. Toutefois, elle a une portée plus large, tout à fait fondamentale. Elle touche aussi chaque Canadien et chaque Canadienne. En effet, c'est notre comportement individuel et collectif qui définit le niveau de confiance que les citoyens entretiennent envers leurs parlementaires. C'est dans l'exercice quotidien de nos responsabilités parlementaires que nous modelons l'image de notre institution. C'est par notre comportement de tous les jours que nous méritons


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ou détruisons la confiance de nos concitoyens qui nous ont choisi pour les représenter dans cette noble enceinte.

La grande question de la confiance, de la crédibilité et de l'éthique est au coeur du programme que nous avons présenté aux Canadiens lors de la dernière campagne électorale.

En effet, tout un chapitre de notre livre rouge a été consacré à l'intégrité parlementaire. Nous avons énoncé clairement les principes suivant lesquels, et je cite: «le capital de confiance des élus auprès des citoyens et citoyennes est de toute première importance.» Nous avons aussi reconnu que le gouvernement canadien ne peut plus jouer le rôle constructif qui est le sien, sans d'abord et avant tout restaurer l'intégrité de nos institutions politiques.

(1600)

Depuis nos élections il y a 18 mois, nous avons fait des progrès considérables en ce sens. Nous avons renforcé le code d'éthique pour les membres du Cabinet et de la haute fonction publique. Nous avons aussi nommé un conseiller en éthique afin d'aider nos officiers à appliquer correctement ces règles de comportement. Nous avons réduit radicalement l'éventail des nominations politiques.

Mon collègue, le président du Conseil privé, a analysé le rôle et le fonctionnement de 120 agences, commissions, conseils ou comités consultatifs. Au terme de cet exercice, il a annoncé, le 16 février dernier, l'abolition de 665 postes comblés par des nominations du Cabinet. Il a ordonné la fermeture de 73 agences et la restructuration de 47 autres.

À elle seule, cette initiative permet au gouvernement d'économiser pas moins de 10 millions de dollars par année. Mais ce n'est pas seulement une question d'économie et d'efficacité, c'est aussi le signal que le gouvernement n'a pas l'intention de se servir du système de nominations politiques dans le simple but de récompenser ses partisans.

Nous avons aussi réformé le régime de pensions des députés qui pendant trop longtemps a été un sujet de controverse sur la place publique. La semaine dernière, nous avons débattu, ici, dans cette même Chambre, d'un projet de loi qui encadrera les activités des lobbyistes, et aujourd'hui, nous formons ce comité chargé d'élaborer un code d'éthique pour les députés et les sénateurs.

C'est cette approche systématique, méthodique et ordonnée des différents volets touchant les questions d'éthique qui contribue actuellement à ramener cette confiance de la population canadienne envers nos institutions politiques.

Dans un magistral discours qu'il a prononcé hier devant les militants libéraux réunis en congrès à Trois-Rivières, notre premier ministre a énoncé une fois de plus l'importance de l'intégrité et de l'éthique. Il a signalé qu'après 18 mois de gouvernement, aucun membre du Cabinet n'a démissionné ou a été limogé pour une question d'éthique. Pendant la même période, le gouvernement précédent avait connu une bonne demi-douzaine de démissions ministérielles.

Je ne veux pas dire ici que nous sommes parfaits, l'erreur est humaine et les fautes de jugement aussi. Mais, toutefois, c'est en appliquant une grande prudence et des règles limpides que nous arriverons, individuellement et collectivement, à regagner la confiance de nos citoyens et citoyennes.

Il ne fait pas de doute que le rôle des parlementaires est difficile et souvent complexe. La société s'attend à ce que chaque individu soit aussi libre que possible d'orienter ses intérêts économiques. Elle s'attend également à ce que les titulaires de charge publique ne s'occupent pas, dans l'exercice de leurs fonctions, d'affaires dans lesquelles ils possèdent un intérêt économique personnel. Certains estiment que le Parlement devrait promulguer des lois plus sévères; d'autres craignent que l'option de la règle plus stricte ne dissuade les personnes compétentes à se consacrer aux affaires publiques.

Ce que nous recherchons, c'est l'équilibre. Nous voulons que les règles soient assez sévères pour prévenir les pratiques contraires à l'éthique et pour maintenir la réputation du Parlement et des parlementaires auprès du public. Néanmoins, ces règles ne doivent pas décourager les personnes compétentes d'entrer dans la vie publique et de servir leurs concitoyens. Il faut trouver l'équilibre qui nous permettra d'attirer au Parlement les personnes les mieux préparées, les plus capables de diriger le pays, tout en les soumettant à des règles qui les maintiendront au-dessus de tout soupçon.

Les conflits d'intérêts ne sont pas nouveaux, ils ont toujours existé. Ce sont les attitudes, les niveaux de tolérance du public, des contribuables, qui ont changé.

(1605)

Nous disposons d'un code d'éthique précis et utile qui touche les membres du Cabinet et leur personnel, les secrétaires parlementaires et les hauts fonctionnaires, mais rien pour les députés et les sénateurs. Traditionnellement, le public considérait que les députés et sénateurs, individuellement, ont peu d'importance sur le processus décisionnel. Je me permets de ne pas être d'accord.

Les députés ont de plus en plus d'influence sur le processus de décision. Leur rôle dans les différents comités parlementaires devient de plus en plus important. Leur influence au sein de leur caucus respectif prend de l'ampleur et leur vote sur les projets de loi présentés en cette Chambre est toujours décisionnel.

Sur chaque question, dans chaque débat, le parlementaire doit toujours s'interroger, analyser l'influence qu'aura sa décision sur la vie de ses électeurs et décider de son approche personnel. Il a toute la liberté de défendre son point de vue dans le cadre du processus législatif. Il peut proposer des ajustements ou des amendements, il peut influencer ses collègues dans leur propre cheminement. Ce processus d'analyse et de choix se répète des centaines de fois pendant le mandat d'un député. C'est pour cela que nous avons un Parlement, c'est pour cela que les députés sont élus.

Toutefois, pendant cette période, nous demeurons tous des citoyens à part entière. Nous sommes tous des contribuables et des consommateurs. La plupart d'entre nous sommes des parents et plusieurs possèdent une propriété. En ce sens, nous sommes fort semblables à l'ensemble des citoyens et citoyennes de ce pays. Nous pouvons donc présumer que ces caractéristiques très


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peu distinctives ont très peu d'influence sur notre comportement de législateurs. Certains critères sont plus régionaux ou particuliers.

Certains parlementaires partagent les intérêts de leurs électeurs, par exemple dans des secteurs comme l'agriculture, les pêcheries ou les richesses naturelles. Les entreprises familiales posent un problème particulier, car elles englobent toute une gamme de biens, de gains ou de dettes et d'intérêts financiers. Ce sont généralement ces intérêts que visent habituellement les législations sur les conflits d'intérêt.

Il faudrait peut-être s'entendre d'abord sur ce que nous appelons un conflit d'intérêts, et il existe plusieurs définitions. Le juge Parker a défini les conflits d'intérêts réels comme, et je cite: «Une situation dans laquelle un ministre»-on pourrait aussi dire un député ou un sénateur-«a connaissance d'un intérêt pécuniaire privé suffisant pour influencer sur l'exercice de ses fonctions et responsabilités officielles.»

Il faut donc définir des règles qui empêchent les intérêts pécuniaires d'un parlementaire d'influer sur les décisions qu'il prend dans l'exercice de ses fonctions. Plusieurs moyens de contrôle ont été mis à l'épreuve au fil des ans et certains ont prouvé leur efficacité. Le premier est la divulgation. Il consiste à déclarer ses biens à une personne désignée. Ces informations peuvent ensuite être consignées pour fins de référence ou encore rendues publiques. Ainsi, lorsque les intérêts privés sont connus, les titulaires d'une charge publique sont moins tentés d'agir à des fins personnelles.

La prévention oblige un parlementaire à se départir des intérêts ou des liens qui pourraient fausser son jugement, soit en les vendant à un tiers avec lequel il n'a aucun lien de dépendance, soit en les plaçant dans une fiducie gérée par un administrateur indépendant. Enfin, le désistement empêche un parlementaire d'intervenir dans une affaire dans laquelle il a un intérêt personnel.

Tous les codes d'éthique englobent un certain nombre de ces moyens de contrôle. Il reviendra donc aux membres du comité mixte spécial d'étudier ces mécanismes et de décider s'ils doivent s'appliquer aux députés et sénateurs, ou s'il est préférable de se tourner vers d'autres moyens de contrôle. Le comité a toute la marge de manoeuvre nécessaire pour consulter les experts, de même que ceux qui seront régis par ce code d'éthique, de manière à nous proposer un code ferme, limpide et réaliste. Le comité devra tenir compte du fait que les parlementaires ont des activités parallèles à leur travail législatif.

(1610)

Les députés de tous les partis politiques gèrent des budgets substantiels, notre budget de député. Ils doivent utiliser ces fonds avec sagesse et prudence. Les députés représentent les citoyens et citoyennes de leurs comtés. C'est une tâche importante dans l'exercice de leur mandat. Ils doivent le faire avec assiduité et y consacrer tout le temps nécessaire. Enfin, les députés sont souvent appelés à représenter le Parlement et le Canada à l'extérieur du pays.

Ces différents volets du mandat des députés nous amènent à nous poser un certain nombre de questions que le comité sans doute voudra analyser en profondeur. Premièrement, le comité voudra sûrement définir des règles pour éviter les conflits d'intérêts. Il voudra sûrement s'interroger sur la pertinence de permettre aux députés et sénateurs de poursuivre d'autres activités professionnelles pendant l'exercice de leur mandat. Il voudra aussi analyser les conditions qui entourent les visites officielles ou privées de nos parlementaires à l'étranger. Nous voulons nous assurer que ces activités sont entièrement compatibles avec les objectifs de transparence et d'intégrité du Parlement.

Le comité voudra certainement analyser toutes les règles qui nous régissent actuellement. Il faut évaluer si elles sont assez claires, assez rigoureuses et assez pratiques pour que chaque parlementaire puisse les suivre. Enfin, le comité a reçu le mandat précis d'étudier les relations entre les parlementaires et les lobbyistes. Je crois que tous les députés souhaitent que les activités des lobbyistes soient clairement définies et qu'ils seront tous heureux d'appliquer les règles que le comité voudra bien établir.

La tâche du comité n'est pas simple. Déjà plusieurs tentatives de doter le Parlement d'un code d'éthique se sont perdues au fil des procédures. La différence, cette fois, c'est que le gouvernement a la volonté politique d'agir. La différence, cette fois, c'est que le gouvernement a fait de cette question d'éthique une question centrale de son administration. La différence, cette fois, c'est que tous les députés de tous les partis politiques ont à coeur de rétablir la confiance de la population dans notre Parlement. Nous avons tous choisi de servir la population. Nous voulons le faire honnêtement, librement et ouvertement. Si elles sont parfois contraignantes, les règles d'éthique auxquelles plusieurs d'entre nous sommes présentement soumis sont aussi des outils précieux qui nous permettent de remplir notre mandat avec transparence et efficacité.

Il nous arrive aussi souvent de nous interroger sur la pertinence d'un geste, sur la nécessité d'une intervention ou sur l'à-propos d'une initiative. C'est dans ces circonstances de doute ou d'interrogation que les règles d'éthique nous procurent le support et l'éclairage nécessaires pour prendre les bonnes décisions.

Je fais donc appel à tous les députés de cette Chambre afin qu'ils apportent tout le soutien et l'appui requis à ceux et celles qui sont chargés de définir ce nouveau code d'éthique. Le fruit de leur travail et de leur sagesse profitera non seulement à chacun d'entre nous en institution parlementaire, mais aussi à l'ensemble de la population canadienne.

Je sais que le Bloc québécois, l'opposition officielle, a proposé un amendement afin que le Sénat ne participe pas à cet exercice. Je sais très bien que la position du Bloc est de ne pas reconnaître le Sénat, mais ce n'est pas le problème actuel. Le Sénat fait partie d'une institution parlementaire, fait un tout de ce Parlement. Si nous voulons instaurer un code d'éthique afin que tous les citoyens québécois et les Canadiens puissent regarder leurs politiciens dans l'éventail de toutes leurs activités et que ce soit selon les règles, pourquoi éliminer l'autre Chambre du Parlement? Nous avons un Parlement à deux Chambres et, jusqu'à ce qu'il y ait des changements, je pense que nous ne pouvons pas nous donner des règles ici et permettre à l'autre endroit de ne pas en avoir, si nous voulons vraiment régler cette question. D'ailleurs, depuis une dizaine d'années, je pense qu'à chaque Parlement nous avons étudié cette question difficile mais importante.


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(1615)

Comme je le disais tantôt, je crois que, cette fois-ci, le gouvernement et tous les autres partis politiques, tous les députés ont la volonté de, vraiment, se donner un code d'éthique. Donc, il ne faudrait pas seulement faire le travail à moitié, mais le faire au complet et appuyer la motion du leader du gouvernement à la Chambre afin que ce comité spécial conjoint des députés et sénateurs puisse entreprendre, le plus vite possible, son travail pour revenir à cette Chambre, au Sénat, avec des recommandations et pouvoir donner un outil très important à tous les députés et à tous les sénateurs afin que nous puissions continuer à représenter la population avec dignité, avec fierté. C'est pour cela que nous sommes venus ici.

[Traduction]

J'espère qu'en bout de ligne ou quand ce débat sera terminé, la Chambre pourra, avec l'appui de tous les partis, de tous les députés et du Sénat, confier au comité mixte spécial un mandat précis qui lui permettra, après tant d'années, d'accomplir ses travaux et de présenter aux deux Chambres un rapport complet assorti de recommandations.

Avant de préparer mon intervention, j'ai essayé de remonter aussi loin que possible pour voir combien de rapports il y avait eu. Il y en a eu beaucoup. Je sais que le gouvernement précédent a essayé en vain de faire adopter quatre projets de loi.

Je crois que, cette fois, le gouvernement, les partis d'opposition et tous les députés veulent vraiment régler ce problème et définir un code d'éthique net et précis. Nos efforts peuvent être couronnés de succès, mais, pour cela, nous devons faire preuve d'unité et confier un mandat précis au comité. Lorsque la question sera mise aux voix, j'espère que tous les députés se prononceront en faveur de la création de ce comité mixte spécial le plus tôt possible.

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, j'aurais quelques questions à poser au député qui vient de faire son discours. Il a bien voulu nous faire la morale du livre rouge en nous indiquant qu'à l'intérieur du livre rouge, en campagne électorale, les libéraux avaient prêché par la transparence, également en se dotant d'un conseiller en éthique rattaché au bureau du premier ministre, et aujourd'hui avec un projet de loi qui pourrait permettre à la Chambre d'avoir un code d'éthique.

Voici la question que je pose au député qui vient de faire son discours: Est-ce qu'un code d'éthique aurait été plus fort que le conseiller en éthique du premier ministre dans le dossier qui met en cause le gendre du premier ministre versus la décision prise par le CRTC?

Est-ce que le conseiller en éthique aurait été plus fort, ou mieux outillé, avec un code d'éthique pour ramener à l'ordre le ministre du Patrimoine canadien dans la lettre qu'il a fait parvenir au CRTC afin de favoriser un dossier? Il a lui-même envoyé une lettre au CRTC.

Est-ce le conseiller en éthique, avec un code d'éthique, permettrait au gouvernement, lorsqu'il va en soumissions, d'accepter les soumissions conformes qui sont les plus basses?

Également, que serait-il arrivé dans le dossier de l'aéroport Pearson avec un code d'éthique et un conseiller en éthique? Est-ce que le conseiller en éthique, avec un code d'éthique, empêcherait le gouvernement libéral d'organiser des brunchs à 1 000 $ le couvert, ce qui permet aux lobbyistes, le lendemain du brunch, de frapper aux portes des députés libéraux?

Je dois également dire que ce que reflète le livre rouge comparativement à ce qu'on voit aujourd'hui à la Chambre, c'est que les libéraux disent et font le contraire de ce qu'ils prêchaient lorsqu'ils étaient dans l'opposition, pendant que les conservateurs étaient au pouvoir.

Qu'est-il arrivé, ou que va-t-il arriver avec le conseiller en éthique, avec un code d'éthique, concernant le dossier des armes à feu, pour les 30 libéraux qui sont restés dans leur bureau parce qu'ils étaient contre le projet du ministre de la Justice sur les armes à feu? Et que va-t-il arriver des trois libéraux qui ont voté contre leur propre gouvernement et qui ont été démis de leurs fonctions au sein des comités et de leurs commissions?

(1620)

Les questions principales: où sont la transparence et la crédibilité du gouvernement libéral en ce qui a trait au code d'éthique? Et le code d'éthique va-t-il empêcher les députés du Bloc québécois de parler de souveraineté?

M. Gagliano: Monsieur le Président, je commencerai en reprenant les mots du député, la transparence. Je pense que, dans tous les cas qu'il a cités et auxquels je vais essayer de répondre un par un, il y a de la transparence.

Prenons le cas de la décision du CRTC qui a attiré l'intérêt à la période de questions ces derniers jours. Le gouvernement a formé un comité qui a étudié cette question et qui a demandé à tous les intéressés de faire des représentations. Le travail du comité a été rendu public. La décision a été rendue publique afin qu'on puisse en débattre, ici, en cette Chambre.

Deuxièmement, le premier ministre l'a dit, il n'a pas participé aux discussions et à la prise de décision du Conseil des ministres. J'aborde ce sujet dans mon discours parce que ce problème touche les membres de notre famille. Parce que je suis élu, que je suis député ou ministre, cela signifie-t-il que mon fils ne pourra pas exercer sa profession de comptable?

Donc, la transparence est importante, c'est-à-dire que l'on puisse divulguer. Et la même chose quand on se réfère à la fameuse lettre du ministre du Patrimoine adressée au CRTC. Immédiatement, le premier ministre a été saisi du problème. Il a rendu la lettre publique en cette Chambre même. Tout le dossier a été rendu public.

Je l'ai déjà dit, on est tous des humains et le code d'éthique ou le commissaire en éthique ne pourront jamais régler tous les problèmes à 100 p. 100, mais c'est la volonté de s'assurer que


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l'on fait les choses avec transparence et propreté qui est importante.

C'est ce que ce gouvernement a promis dans son livre rouge et c'est ce qu'il a fait depuis le 23 octobre 1993, date des élections, ou le 4 novembre, date où le gouvernement a été formé.

La divulgation de renseignements sur nos politiciens sera très importante, afin qu'on ne cache rien et qu'on fasse preuve de transparence. On évitera ainsi d'être mal jugés et on prendra des décisions en conséquence de cette divulgation et de cette transparence.

Ce n'est pas facile. Nous accomplissons aujourd'hui une tâche très difficile. On doit prendre des décisions et rendre un jugement. Les gens vont nous regarder et rendre également un jugement, donc c'est à nous de s'assurer que nos gestes soient logiques et transparents.

Je peux donc répondre au député que je suis fier des 18 mois du gouvernement libéral de Jean Chrétien au Canada. D'ailleurs, malgré toute la liste qu'a faite le député, le gouvernement jouit d'un appui de la population qui n'a jamais été reçu depuis que les sondages existent au Canada.

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, encore une fois, le gouvernement se réfugie derrière une motion. Mon Dieu qu'on aime faire des procédures dilatoires dans cette Chambre. Une motion pour créer un comité pour étudier à nouveau. Cela fait déjà au-delà de 20 ans, pratiquement 25 ans que diverses tentatives des gouvernements qui se sont succédé se sont butés à des échecs répétitifs.

Si le gouvernement avait la moindre volonté politique de trouver une solution à la question des conflits d'intérêts, il ne se serait pas contenté d'une vague motion créant un comité, mais il aurait déposé un projet de loi d'initiatives ministérielles, reprenant en mieux les projets de loi qui ont échoué devant cette Chambre.

(1625)

L'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell faisait mention tout à l'heure du projet de loi C-116, qui a finalement échoué, lors de la 34e législature, lors du Parlement précédent. Il aurait probablement été possible de reprendre le projet de loi C-116 et de le reformuler, de le peaufiner avec la politique gouvernementale, tout en tenant compte des avis de l'opposition. Mais, non. On nous propose aujourd'hui une motion, une motion de création d'un comité et d'un comité mixte, formé de huit sénateurs et de 14 députés.

Heureusement, l'amendement proposé par l'honorable député de La Prairie vise à ce que le comité ne soit plus un comité mixte, mais un comité de cette Chambre, c'est-à-dire uniquement composé de députés. L'honorable député de La Prairie va même jusqu'à modeler la composition, c'est-à-dire 12 personnes, 12 députés, sept libéraux, trois de l'opposition officielle et deux du deuxième parti de l'opposition, ce qui paraît, à première vue, juste et raisonnable.

Nous n'avons pas besoin d'un comité mixte. Cette Chambre formée d'élus a ses règles et a sa propre vision des choses, alors que le Sénat, formé de personnes non élues, personnes qui sont en fonction jusqu'à l'âge de 75 ans, a aussi sa façon de voir les choses, une façon différente et avec laquelle nous ne sommes pas toujours très à l'aise de travailler. La meilleure façon, si le gouvernement avait voulu impliquer les deux Chambres dans la création d'un code d'éthique aurait été de déposer un projet de loi. Il aurait fallu, forcément, que le projet de loi franchisse les trois étapes en cette Chambre et le Sénat, avant d'être soumis à la sanction royale.

Mais, non, le gouvernement a décidé de créer un comité d'étude, encore un comité. Si on veut créer un comité d'étude, laissons donc aux élus seuls la possibilité d'étudier ce qu'est un conflit d'intérêts pour eux et elles qui, à tous les cinq ans au maximum, doivent se représenter devant leurs électeurs, doivent rendre des comptes, doivent expliquer pourquoi ils ont pris telle ou telle décision politique. Qu'on leur donne cette capacité, alors que nos collègues du Sénat n'ont pas cette opération délicate à faire. Il suffit de la signature du gouverneur général pour être en fonction jusqu'à l'âge respectable de 75 ans.

Peut-être qu'un point de vue peut être intéressant, de la part de l'autre chambre, mais sûrement pas à l'intérieur d'un comité mixte, d'autant plus que c'est encore nous ressusciter probablement cinq sénateurs conservateurs, un parti que la population canadienne, lors de l'élection d'octobre 1993, a littéralement éliminé de cette Chambre, un parti qui n'a plus le statut de parti reconnu en cette Chambre. Alors, on va encore redonner des haut-parleurs à des gens qui se cherchent des micros, ces temps-ci. En fin de semaine dernière, c'était à Hull, et là, ce serait à l'intérieur d'un comité mixte composé de députés et de sénateurs.

Le simple respect de la volonté populaire voudrait que l'on mette de côté la création d'un comité mixte. La population, on l'a vu lors du référendum de Charlottetown en particulier, a rejeté les réformes qui touchaient le Sénat, particulièrement au Québec, alors qu'on ne voulait sûrement pas d'un Sénat triple E, c'est-à-dire égal, élu et efficace. Donc, on nous proposait six sénateurs par province, peu importe la taille de la province, et les gens ont dit non à cela.

À l'heure actuelle, le parti ministériel est en faveur d'un Sénat élu et le Parti réformiste est en faveur d'un Sénat triple E. Il y a donc une divergence sur le nombre de E qu'il faut inclure. Nous, nous sommes en faveur d'un Sénat triple A, c'est-à-dire aboli, aboli et aboli. Il n'y a pas d'institution au monde qui soit plus décriée actuellement que l'autre Chambre que nous possédons au Canada. Une Chambre non élue n'a plus de sens en 1995. Peut-être qu'en 1867, on pouvait attribuer une certaine valeur à cela, bien qu'avant 1867, les deux Chambres que nous possédions dans le Canada uni étaient deux Chambres élues. Notre Assemblée législative du Canada-Uni était une assemblée élue et, depuis 1854, le Conseil législatif qui, autrefois, était nommé depuis 1840, a été une assemblée élue. Donc, jusqu'en 1867, on avait deux Chambres élues. Qu'est-ce qui s'est passé en 1867 pour qu'on arrive avec deux Chambres dont l'une est élue, la Chambre des communes, et une Chambre qui n'est pas élue, le Sénat canadien?


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(1630)

Le préambule de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, le BNA Act, peut nous éclairer à ce sujet. En 1867, dans le préambule, on indique que le dominion du Canada veut avoir des institutions semblables à celles qui existent au Royaume-Uni. Quelles étaient en 1867 et quelles sont encore ces institutions du Royaume-Uni? Une Chambre des communes comme au Canada et la Chambre des Lords, formée des pairs du royaume. Comme au Canada on n'avait pas et qu'on n'a toujours pas d'aristocratie, on s'est créé nos petits lords à nous et on les appelait des sénateurs, on les a nommés, au tout début, dans une Chambre où ils gardaient leur poste à vie. En 1965, la Constitution canadienne a été amendée pour que le rôle des sénateurs cesse à l'âge de 75 ans, tout en protégeant les droits acquis de ceux qui n'avaient pas encore atteint l'âge de 75 ans mais qui étaient déjà au Sénat lors de la passation de cet amendement constitutionnel.

Depuis ce temps, on le voit très bien, le rôle de l'autre Chambre est devenu un rôle secondaire, une Chambre qui siège une quarantaine de jours par année, une Chambre où les projets de loi d'ordre financier ne peuvent pas prendre naissance à cause de l'article 53 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, une Chambre de révision, bien sûr, une Chambre qui fait traîner les choses, comme on l'a vu dans le projet de loi sur la redistribution électorale, comme on l'a vu lors de la précédente législature, dans le projet de loi sur la TPS, et comme on pourra le voir relativement à d'autres projets de loi où on a annoncé qu'un certain filibuster pourrait être fait dans l'autre Chambre. Au prix que cela coûte à la société canadienne, je pense qu'on pourrait s'en passer.

Si on demande aux Canadiens et aux Canadiennes: êtes-vous d'accord avec l'abolition du Sénat? On a un très haut degré de réponses positives. Le problème, c'est de le remplacer par quoi et est-ce que cela se fera? Les réponses varient. Il est difficile de trouver un consensus sur le remplacement.

C'est, bien sûr, avec beaucoup d'empressement que j'appuie l'amendement qui a été déposé par l'honorable député de La Prairie pour que le comité soit uniquement un comité de la Chambre des communes. Si le Sénat veut créer son comité, il le créera.

L'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell mentionnait un peu plus tôt cet après-midi que nous avions des institutions fondées sur celle de Westminster et que nous avions donc un Parlement qui fonctionnait sur le modèle de Westminster. Et l'honorable député de Saint-Léonard a repris tout à l'heure certains éléments qui vont dans le même sens.

J'entendais un peu plus tôt aujourd'hui notre collègue, l'honorable député d'Elk Island mentionner, je crois, que nous étions en 36e place dans l'estime de la population, juste avant les vendeurs d'autos usagées. C'est probablement que nous avons à défendre un système qui est usagé et qui aurait probablement besoin d'être remis à neuf, un système qui a vu dans les 50 dernières années une mainmise à peu près totale du pouvoir exécutif sur le législatif. Ce qui n'avait pas été le cas auparavant. Il faut se rappeler un peu l'histoire. Lorsque nos ancêtres, du moins dans le parlementarisme, ont fait des luttes pour que le pouvoir royal soit abandonné ou diminué à leur profit, les parlementaires de l'époque voulaient que ce soit la Chambre des communes qui détienne ce pouvoir.

(1635)

Or, ce qui s'est passé avec le temps c'est que le pouvoir royal est parti du palais pour s'en aller, non pas à la Chambre des communes, mais est parti du palais pour s'en aller au bureau du premier ministre. C'est l'endroit où cela compte. C'est l'endroit où les décisions se prennent, le bureau du premier ministre.

Nous vivons dans un système où le pouvoir législatif, une des branches de notre système constitutionnel, avec le judiciaire et l'exécutif, eh bien cettre branche, la branche législative est à toutes fins utiles sous le contrôle de l'exécutif, l'exécutif qui est lui-même sous le contrôle du bureau du premier ministre.

Nous avons l'avantage, et parfois l'inconvénient, de vivre à côté d'un voisin qui nous a inspiré certaines réformes. Il y a une réforme à nos institutions qu'on est allé chercher chez nos voisins américains et qui n'est peut-être pas nécessairement la meilleure que nous ayons prise. Dans un tout autre système, où l'exécutif est élu et redevable à la population et non pas au congrès américain, un système où les députés, membres de la Chambre des représentants et du Sénat, sont élus et non responsables devant l'exécutif, on a une situation bien différente.

Aux États-Unis, qu'a-t-on choisi de faire dans les partis politiques? De choisir le chef du parti, le candidat à l'élection présidentielle, de le choisir lors d'un congrès qui regroupe tous les membres. Nous avons amené cela au Canada, de telle sorte que, chez nous, les chefs des partis politiques sont élus par un congrès général des membres, soit des délégations ou même certains partis, par un suffrage universel de tous les membres.

Sur le plan des principes, cela est fort louable. Quand on vient pour intégrer cela à nos institutions parlementaires, on a un gros problème. C'est que lorsque le chef du parti est en même temps le premier ministre, le chef du parti jouit d'un pouvoir presque sans limite puisqu'il peut dire à tous et chacun de ses collègues, d'abord du Cabinet: «Écoutez si vous êtes au Cabinet, c'est moi qui vous ai nommés.» Et il peut dire également aux gens du caucus: «Je n'ai pas tellement de comptes à vous rendre, ce n'est pas vous qui m'avez élu chef du parti. Je suis redevable aux militants et aux militantes qui m'ont élu.» Le problème c'est qu'il n'y a pas de contrôle du parti au pouvoir par les militants et militantes.

Bien sûr, il y a des congrès, comme on a vu à Trois-Rivières, d'autro-congratulation par les membres, mais de véritables débats sur les politiques du parti, on n'en voit vraiment pas. Si on avait gardé l'esprit de la Constitution de 1867, des institutions semblables à celle du Royaume-Uni, en Grande-Bretagne, le premier ministre est élu par ses pairs. C'est-à-dire que c'est le caucus qui élit le chef du parti, un primus inter pares comme disaient les Latins. C'était une façon beaucoup plus subtile de gouverner, une façon beaucoup plus équitable puisque le premier ministre était d'abord et avant tout, et en Grande-Bretagne c'est encore le cas, responsable devant ses collègues.

Le rôle du député s'en trouve d'autant plus valorisé parce que le député est en droit de demander à son chef, il est en droit d'obtenir les réponses dont il a besoin pour continuer à l'appuyer. La situation du premier ministre est sans doute plus précaire. C'est sans doute plus un siège chaud, un hot seat pour le premier ministre dans le système britannique que dans le nôtre où on peut jouer au Ponce Pilate en disant: «Vous du caucus, ce


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n'est pas vous qui m'avez élu.» Et à la limite, le premier ministre, en vertu de notre loi électorale, peut même désigner des candidats, en passant outre aux conventions, dans les divers circonscriptions.

Imaginez le pouvoir concentré dans les mains d'un seul homme. Un seul homme qui nomme les membres du Cabinet, qui va décider ultimement de la nomination des fonctionnaires supérieurs de l'État, qui va décider des nominations de juges et qui va aussi décider des candidats qui pourront se présenter ou ne pas se présenter sous la bannière de son parti. C'est énorme dans les mains d'une seule personne.

Je pense que le temps est venu de faire un grand ménage. Je ne sais pas si l'honorable député de Saint-Léonard voulait faire un peu d'ironie en mentionnant toute la valeur des parlementaires tout à l'heure. Faut-il se rappeler que le Parlement n'a jamais été autant contrôlé par l'exécutif qu'il l'est actuellement?

(1640)

Lorsque nous avons eu à voter sur le projet de loi C-68, trois députés libéraux ont voté contre ce projet de loi, se dissociant ainsi de leurs collègues ministériels. Les trois ont perdu le poste qu'ils détenaient à des commissions parlementaires. Et le député de Saint-Léonard de venir nous dire qu'il fallait respecter l'institution parlementaire. Est-ce qu'on l'a vraiment respectée à ce moment-là? Il faut se poser des questions.

Le véritable contrôle n'est pas tellement celui des députés. Si on veut donner du contrôle aux députés, il faut premièrement qu'on sorte l'exécutif de la Chambre. On n'a pas besoin d'exécutif dans la Chambre, qu'il aille siéger à Rideau Hall ou sur Sussex Drive s'il y a de la place. On peut très bien changer le système pour faire en sorte que le but ultime d'un député, que l'ambition, la plus grande ambition d'une ou d'un député, soit d'être la ou le meilleur député possible; pas d'être secrétaire parlementaire, pas d'être ministre un de ces jours. Il faudrait que tous ceux et celles qui sont dans cette Chambre n'aient d'autre ambition que de pouvoir dire: J'ai été la ou le meilleur député de ma circonscription, sans autre forme de promesse quant à des promotions futures.

Ceux et celles qui veulent servir au niveau exécutif, eh bien qu'ils servent au niveau exécutif, mais ne mêlons pas les deux et surtout pas dans la même Chambre. Je pense que nous connaissons à l'heure actuelle tous les effets pervers du système amenés par la confusion du législatif avec l'exécutif. Il est grand temps que nous prenions nos distances en nous rapprochant d'un type congressional de décision, bien sûr en l'adaptant à nos mentalités, en l'adaptant à nos moeurs, en l'adaptant à nos traditions, en réglementant ce que font les lobbyistes, les démarcheurs pour pouvoir l'encadrer.

La véritable question ne se pose pas tellement relativement au pouvoir des députés ou au conflit d'intérêts des députés. Nous avons déjà l'article 21 de nos règlements, et vous me permettrez de le citer:

Aucun député n'a le droit de voter sur une question dans laquelle il a un intérêt pécuniaire direct, et le vote de tout député ainsi intéressé doit être rejeté.
Le critère est là, il est fondamental. Si les problèmes s'élèvent, nous avions dans le passé le Comité des privilèges et élections qui s'est maintenant transformé en Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, comité qui est habilité à entendre toute question qui pourrait être soulevée quant à la qualité d'un député, quant au conflit d'intérêts d'un député.

Ce comité n'a qu'à exercer ses pouvoirs. Rien ne l'interdit. Si des problèmes sont portés à la connaissance de collègues de la Chambre, ils peuvent être soulevés et le Président peut juger que prima facie il y a là matière à ce que ce soit référé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Nous avons déjà les mécanismes en place. Pourquoi vouloir en créer d'autres? Il suffirait probablement d'avoir quelque chose de plus souple au niveau du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour que nous l'ayons notre comité sur les règles d'éthique et pour voir au meilleur fonctionnement. Il serait bien plus sage et bien plus avisé de contrôler ce qui se passe au niveau du bureau du premier ministre.

Actuellement, le gouvernement se comporte comme Néron le faisait. On disait que Néron jouait de la lyre pendant que Rome brûlait. Eh bien, pendant que le gouvernement ne suit pas, justement, lui-même, ses propres politiques en matière d'éthique, pendant que le premier ministre lui-même nous informe qu'il n'a pas consulté son conseiller en éthique avant de prendre certaines décisions, pendant ce temps-là on nous dit qu'il faut surveiller les parlementaires.

Mais pas de diversion. La diversion peut être très utile dans une partie de hockey pour essayer de ne pas faire compter un but par l'adversaire dans les dernières minutes de la troisième période. En politique, pas trop de diversion. Je pense qu'on est allé un peu trop loin. Des cas comme DirecTv, dernièrement, nous indiquent que ce ne sont pas les simples parlementaires qui sont intervenus, que ce sont des gens qui ne sont pas dans cette Chambre qui sont manifestement intervenus, soit auprès du Bureau du premier ministre, soit auprès du ministre du Patrimoine pour faire changer les décisions.

Commençons donc par véritablement mettre en vigueur la politique d'éthique au niveau gouvernemental, donc au niveau ministériel, au niveau exécutif, et après il sera sans doute temps de se pencher sur l'éthique des députés, donc de la branche législative de notre Constitution.

(1645)

[Traduction]

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les commentaires du député de Bellechasse.

J'ai du mal à comprendre pourquoi son parti refuse que la Chambre haute participe à ce débat. Cela m'inquiète, car je crois que cette question touche toute la population canadienne. Les gens réfléchissent énormément à ce qui se passe au Sénat et se demandent si l'argent des contribuables est bien dépensé.

Le Sénat, les sénateurs et leur personnel représentent un secteur de dépenses. J'ai peut-être des doutes au sujet du Sénat. Il


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me semble que, à cette époque de notre histoire, nous ne parviendrons pas à régénérer cette assemblée. Pour le moment, cette motion nous permet d'examiner toute la question de la présence des sénateurs et du déroulement de leurs travaux.

La proposition que le gouvernement nous présente aujourd'hui nous donne cette possibilité. Le député pourrait-il réfléchir au fait qu'il serait peut-être très valable d'inclure aussi les sénateurs dans ce processus?

[Français]

M. Langlois: Monsieur le Président, en réponse à l'intervention de l'honorable député de Durham, je lui rappellerai ce que j'ai dit tout à l'heure. Si le gouvernement lui-même avait voulu que les sénateurs soient impliqués dans la question, il aurait déposé un projet de loi qui, forcément, aurait été étudié dans cette Chambre et qui, ensuite, aurait été étudié par le Sénat. C'était la meilleure façon d'impliquer les deux Chambres.

À partir du moment où le gouvernement ne veut pas d'un projet de loi mais veut tout simplement créer un autre groupe d'étude, un autre de trop, c'est à ce moment-là que je dis: Créons un comité de députés de cette Chambre, un comité d'élus. Ne mêlons pas les élus avec les non-élus, des gens qui doivent rendre compte à tous les quatre ou cinq ans à leurs électeurs alors que d'autres n'ont jamais aucun compte à rendre. Je dis que dans une démocratie, monsieur le Président, et je le dis à l'honorable député de Durham par votre intermédiaire, dans un système comme nous connaissons, une Chambre non élue où personne n'est imputable à qui que ce soit, sauf aux dispositions du Code criminel, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. C'est le message que j'ai tenté de passer lors de mon intervention tout à l'heure.

Je comprends que l'honorable député de Durham a posé sa question sous forme interrogative. Il a dit: Peut-être est-ce que je n'ai pas bien compris? Peut-être que je ne saisis pas? J'espère qu'avec mon complément d'explications, je pourrai lui faire saisir qu'il ne faut pas mêler les choses, mêler des élus avec des non-élus. Je ne dis pas que le Sénat ne doit pas étudier la question s'il veut bien l'étudier, mais le Sénat a sa propre règle de fonctionnement. Lui aussi a son Bureau de régie interne qui fonctionne différemment du nôtre, et pourtant il a un budget à gérer, mais il a des règles différentes. Et nous nous imposons, par le biais de notre Bureau de régie interne, des règles de fonctionnement beaucoup plus strictes que le Sénat s'impose par le biais de son propre Bureau de régie interne.

Alors nous nous mettons constamment la tête sur le billot. Chaque jour, nous sommes imputables de notre travail devant nos électeurs et nos électrices. Ce serait une recette bien amère que d'avoir à mélanger les raves avec les choux et de faire une espèce de ragoût à la sauce 1995 entre des députés libéraux, bloquistes et réformistes, et joindre à cela un soupçon de sénateurs conservateurs.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Mercier-La création d'emplois.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui au sujet de la motion no 23 qui propose de confier à un comité parlementaire le mandat de rédiger un code d'éthique à l'intention des députés et des lobbyistes. Je veux également appuyer l'amendement proposé par le Bloc.

(1650)

L'intention de la motion, qui est de concilier les responsabilités officielles et les intérêts personnels, y compris toutes relations avec des lobbyistes, ne s'applique qu'aux députés. Les sénateurs, qui ne sont pas élus mais nommés, devraient rédiger leur propre code d'éthique en fonction des liens qu'ils entretiennent avec les lobbyistes.

Ce n'est pas trop tôt. Le gouvernement a fait campagne en proclamant, entre autres, ce qui suit: «Le capital de confiance des gouvernements auprès des gouvernés est de toute première importance. Pour que le gouvernement joue le rôle constructif qui est le sien, il faut restaurer l'intégrité de nos institutions politiques.» Cette citation vient tout droit du livre rouge.

Depuis les élections de 1993, les ministres et les ministères ont agi de façon incohérente, indécise et confuse, ce qui a donné lieu à de graves volte-face. Pour qu'une culture s'épanouisse, elle doit respecter les principes et les procédures qui lui servent de fondement. L'éthique en action assurera qu'il en soit ainsi.

Je voudrais insister particulièrement sur les faits et gestes du ministre du Patrimoine canadien depuis mars 1994. Si je l'ai choisi, c'est qu'à quatre reprises différentes, il a fait preuve d'un manque de jugement, ce qui l'a conduit à intervenir de façon inappropriée. Il est fort probable que s'il avait reçu des directives sur la conduite à suivre, il n'aurait pas commis les graves erreurs de jugement qui ont suscité tant d'inquiétude. Avant d'aller plus loin, j'aimerais passer en revue certaines considérations dont doit tenir compte tout code d'éthique.

Les titulaires d'une charge publique doivent agir avec honnêteté et se conduire conformément aux normes d'éthique les plus strictes afin que le public puisse avoir confiance dans l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité du gouvernement. De même, quiconque est titulaire d'une charge publique ne devrait pas s'écarter de son rôle officiel pour aider des personnes ou des organisations privées à traiter avec le gouvernement, s'il peut en résulter un traitement priviligié pour ces personnes.

La question ici n'est pas de savoir si des lignes directrices en matière d'éthique doivent être obligatoires ou de se demander si les représentants fédéraux élus ont même encore un choix sur ce chapitre, car les Canadiens attendent de leurs politiciens le sens de l'honnêteté, de l'intégrité et de la responsabilité.

De toute évidence, la question est de concevoir des grandes lignes directrices durables et morales, à partir de situations politiques réelles et complexes, qui soient à la fois imaginatives, significatives et légalement défendables.


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Quiconque désire se comporter avec éthique fait face à la difficulté de savoir où se situent ses normes. Les gens ont tendance à se considérer comme moraux. Ils ont tendance à surestimer leur comportement, même quand ils font des choses qu'ils désapprouveraient chez les autres. Il y a souvent un écart important entre les normes que les gens invoquent verbalement et celles qu'ils utilisent lorsqu'ils prennent leurs décisions. Cet écart nous en apprend beaucoup sur l'éthique de la personne même.

Faut-il faire une distinction entre les mots et les gestes? C'est la question que tous les Canadiens devraient se poser chaque fois que le gouvernement prend une décision. Même le premier ministre a dit que les ministres devaient rester au-dessus de tout reproche dans toutes leurs activités, mais c'est valable aussi pour les députés et les citoyens. C'est le prix à payer lorsqu'on est titulaire d'une charge publique et quelque chose que nous devrions tous accepter de bon coeur.

Je vais me tourner maintenant vers les gestes discutables du ministre du Patrimoine canadien pour donner, une fois encore, un exemple de cette question des lignes directrices et des normes de comportement éthique. Comme je l'ai mentionné, il y a maintenant quatre incidents qui hantent le ministre et qui mettent en cause non seulement son intégrité, mais aussi celle du gouvernement.

En mars 1994, la vente de la société Ginn Publishing Inc. à des intérêts américains a soulevé un tollé de ce côté-ci de la Chambre. Il s'agissait du test décisif en ce qui concerne l'importance que le gouvernement attachait à la réforme parlementaire et à un processus parlementaire transparent. On aurait dû faire enquête sur cette vente, mais on n'en a rien fait. Un comité permanent aurait dû se pencher là-dessus, mais cela n'a pas été le cas. De plus, il n'y avait pas de lignes directrices en matière d'éthique à ce moment-là pour résoudre ce problème.

(1655)

J'ai envoyé une lettre au premier ministre pour lui poser cinq questions. On n'y a jamais donné suite. Ainsi, j'en conclus que personne ne savait comment y répondre ou alors, qu'on n'avait absolument pas l'intention de dévoiler tous les faits.

Quoi qu'il en soit, la seule façon d'obtenir des réponses claires résidait dans la tenue d'une enquête publique, car il n'y avait pas de lignes directrices en matière d'éthique. Grâce à cette enquête, on aurait pu répondre aux questions précédentes et aux cinq que j'ai soumises au premier ministre. Je veux les répéter à nouveau, car c'est important dans le cadre de ce débat concernant l'établissement d'un code d'éthique clair.

Tout d'abord, comment le gouvernement peut-il expliquer les contradictions évidentes entre cette vente et la politique exposée dans le livre rouge sur la protection des arts et de la culture au Canada? C'est une question simple, mais on n'y a pas répondu.

Ensuite, comment le gouvernement explique-t-il que plusieurs entreprises canadiennes aient offert d'acheter Ginn de 1989 à 1994?

Mon autre question est celle-ci: Qu'adviendra-t-il de notre secteur de l'édition après le 15 février 1999, lorsque l'accord d'investissement avec Paramount ne sera plus en vigueur? Ce sont des questions importantes au sujet des lignes directrices que nous allons établir, je l'espère, grâce à ce comité permanent.

De plus, pourquoi le communiqué de presse du 18 février 1994 ne précisait pas le nombre d'emplois qu'on allait ainsi supprimer? C'est également important en ce qui concerne les considérations qui entreront en ligne de compte plus tard et pour les Canadiens qui se posent encore des questions au sujet de l'affaire Ginn, car on n'a pas encore donné de réponses claires.

Enfin, comment le gouvernement peut-il faire abstraction des dispositions de la Loi sur Investissement Canada et conclure une entente privée qui empêche la vente d'une entreprise canadienne à une société étrangère, si ce n'est dans des circonstances extraordinaires?

Ces dernières semaines, la Loi sur Investissement Canada vient ajouter à nos problèmes à la Chambre des communes en l'absence d'un code d'éthique clair. Comment allons-nous régler ces questions.

Le Parti réformiste était en faveur d'une enquête qui aurait favorisé une plus grande concurrence dans le secteur culturel au Canada. Il ne s'agissait pas de protéger la culture canadienne de l'intérieur, ni d'empêcher qu'elle ne soit soumise à des influences culturelles étrangères. Il s'agissait plutôt de prévoir une procédure tout à fait éthique laissant au marché la possibilité de fonctionner librement sans réglementation gouvernementale indue ni protection inutile et même nuisible des entreprises canadiennes. Le gouvernement aurait dû vérifier s'il s'agissait de belles paroles ou d'un engagement véritable.

Le débat qui s'ensuivit aurait dû être l'occasion d'apporter des précisions sur la participation du ministre, mais ça n'a pas été le cas. Au lieu de cela, le gouvernement a imposé la clôture, ce qui a eu pour effet de laisser planer un doute sur le jugement du ministre. Sur quels critères éthiques a-t-il fondé ses décisions?

En octobre 1994, une affaire d'influence indue a été soulevée à propos de l'intervention du ministre dans un dossier relatif à une demande de permis au CRTC. Même le premier ministre a admis alors s'être trompé et avoir commis une erreur de jugement. Voilà un autre cas où l'existence de lignes directices en matière d'éthique nous aurait épargné bien des tracas.

Ses gestes compromettent l'intégrité du gouvernement, de même que celle du processus décisionnel du CRTC. Organisme quasi judiciaire, le CRTC doit rester indépendant du gouvernement. Le 31 octobre 1994, le premier ministre a dit ceci: «Quand une requête est envoyée au CRTC, c'est un document public.»

De septembre 1993 à octobre 1994, le CRTC a tenu 18 audiences publiques. Il a reçu 15 422 lettres favorables aux demandeurs de permis. Soixante-douze provenaient de parlementaires, tous partis confondus. Des démarches ont été faites par des députés libéraux, y compris des ministres, des députés du Bloc québécois, des réformistes, des néo-démocrates, des conservateurs et un indépendant. Je soulève la question ici parce que personne ne disposait de lignes directrices. Face aux 15 422


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lettres favorables aux demandeurs de permis, la Chambre ne disposait pas de lignes directrices qui lui auraient permis de trancher la question.

Le premier ministre a dit encore: «De toute évidence, ce n'était pas aussi grave que de téléphoner à un juge. Le problème qui se pose, c'est celui des ministres qui doivent en plus remplir leurs fonctions de parlementaires élus pour représenter leurs électeurs. C'est ainsi que les relations avec les tribunaux administratifs sont beaucoup plus complexes que celles touchant les tribunaux ordinaires.» Le premier ministre a également dit: «J'ai aussi appris une leçon. Mon gouvernement a beaucoup fait pour donner aux ministres des directives claires sur la manière de faire leur travail et d'éviter les conflits d'intérêts. Il a notamment proposé, en juin dernier, un projet historique de règles d'éthique, mais il m'apparaît maintenant évident que les directives concernant les tribunaux administratifs n'étaient pas suffisamment claires ou complètes.»

(1700)

Le premier ministre reconnaissait déjà la nécessité d'avoir des lignes directrices sur l'éthique à la suite des actes douteux du ministre du Patrimoine canadien.

Bien qu'un conseiller en éthique aide le premier ministre, rien ne suggère vraiment que de véritables directives dictent une ligne de conduite précise au ministre du Patrimoine canadien ou même aux autres ministres.

Le ministre du Patrimoine canadien a enfreint les principes de justice de façon évidente et flagrante. Le ministre a continué de ternir sa réputation. Là encore, sur quels critères éthiques a-t-il fondé sa décision?

Le troisième fiasco dans lequel ce ministre a été impliqué a entraîné la démission du président de la Société Radio-Canada. Incapable d'accepter plus longtemps que toute l'information sur l'avenir de Radio-Canada ne soit pas divulguée, M. Tony Manera a quitté son poste. Une rencontre secrète entre des représentants de la société d'État et le ministère du Patrimoine canadien a donné lieu à l'échange d'information financière qui ne figurait pas dans le budget ou dans les prévisions budgétaires que le gouvernement venait de rendre publiques. Le ministre a répondu de façon hargneuse aux questions qui lui étaient posées à la Chambre et il s'est embourbé dans des attaques personnelles et des insinuations malveillantes.

Pendant la période des questions du 1er mars 1995, j'ai déclaré ce qui suit: «Le ministre a des plans secrets pour l'avenir de la SRC qu'il s'est bien gardé de dévoiler. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas communiqué cette information aux Canadiens?» La réponse du ministre: «Monsieur le Président, notre collègue manque de chance. Son adjoint n'est pas meilleur comme attaché de recherche qu'il ne l'était comme candidat dans Ottawa-Vanier.»

Sous l'effet de la pression qu'il subissait, le ministre a eu recours à une tactique qui va à l'encontre de l'esprit d'ouverture et de franchise promis dans le livre rouge pour rendre aux Canadiens leur confiance dans le système parlementaire et les politiciens. Bassesses et absence de directives claires pour aider ce ministre. Il s'est embourbé de façon odieuse.

C'est ce qui nous amène aux déboires actuels du ministre. On sait que le Cabinet a tenté de renverser la décision du CRTC d'exempter les entreprises de distribution par satellite au Canada qui utilisent un satellite canadien de l'obligation d'obtenir un permis. On croit aussi que le ministre a exercé une influence indue et s'est rendu coupable d'ingérence dans la décision d'Investissement Canada, en ce qui concerne l'achat de MCA par les Bronfman, qui possèdent la société Seagram.

Le fait d'avoir mangé en compagnie des intéressés à Los Angeles est une autre grave erreur de jugement de ce ministre. Personne ne viendra me dire que cette invitation dans les bureaux de la direction de MCA n'est pas le résultat d'un effort considérable plutôt qu'un simple moment de détente pour le ministre, durant le congé de Pâques, comme on l'a dit.

Ce qui est encore plus grave, c'est que le gouvernement fait de l'ingérence et pratique en fait du favoritisme à l'endroit de certaines entreprises, sous le couvert de la concurrence. En prenant une décision en faveur de Power Corp., le Cabinet ne semblait pas se rendre compte que cela déclencherait des hostilités entre cette société et le consortium canadien de radiodiffusion directe Expressvu Inc., qui entretient justement des relations étroites avec le CRTC.

Ce que j'essaie de démontrer, c'est qu'il nous faut absolument des lignes directrices en matière d'éthique, qui s'appliquent à nous tous à la Chambre, pour que nous soyons en mesure de remplir nos fonctions de représentants des Canadiens selon des principes professionnels, éthiques et moraux bien établis.

La réputation et la crédibilité du ministre du Patrimoine canadien sont en lambeaux. Il est évident que le contenu du livre rouge des libéraux n'est plus que du bavardage vide de sens.

Aux dernières élections, les Canadiens ont montré qu'ils en avaient assez du comportement des politiciens qui forment les gouvernements. Ils se sont débarrassés de ceux qui ne les consultaient pas, qui ne tenaient pas compte de leurs points de vue et qui essayaient de régler à huis clos des éléments majeurs de la politique gouvernementale.

Tâchons de nous assurer que ce comité permanent tiendra compte, dans ses délibérations, du point de vue des Canadiens ordinaires. Nous devons créer un gouvernement vraiment représentatif où la sagesse de la population sera respectée et protégée. Nous n'avons rien à gagner à ne pas écouter ceux que nous représentons. Nous risquons tous de perdre encore un peu du respect du public.

(1705)

Les principes éthiques que nous appliquons dépendent de l'idée que nous avons de nous-mêmes. Si le gouvernement commence à s'organiser activement et à réaliser nos grands objectifs, les politiciens acquerront la réputation d'un groupe qui fait des promesses et prend des engagements qu'il a à coeur de tenir par la suite. C'est ce que les Canadiens attendent de nous.

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser à la députée. Dans son discours, elle a dit qu'elle appuyait la modification présentée par


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le Bloc qui supprimerait toute référence au Sénat dans la motion. Elle semble considérer les sénateurs comme des non-parlementaires, puisqu'elle dit que seuls les membres du Parlement élus ont le droit de participer à ce processus et qu'eux seuls devraient être assujettis aux lignes directrices.

Laisse-t-elle entendre que les membres de l'autre endroit ne devraient pas avoir de lignes directrices si la Chambre des communes en adopte? Par conséquent, estime-t-elle équitable que les membres de cette Chambre soient assujettis à certaines lignes directrices, alors que ceux de l'autre endroit seraient libres d'exercer des activités commerciales ou de faire tout ce qui leur plaît? Est-ce là la position de son parti?

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je crois avoir nuancé cette observation au tout début de mon exposé, lorsque j'ai dit que les sénateurs sont des représentants nommés. Comme ils ne sont pas élus, ils devraient élaborer leur propre code d'éthique.

Nous avons fait campagne en préconisant un changement radical dans le Sénat. Nous croyons à un Sénat égal, efficace, mais élu. N'étant pas élus et en tant que représentants nommés, les sénateurs doivent élaborer leur propre code d'éthique, car leurs contacts avec les lobbyistes sont différents de ceux des parlementaires. Il est à espérer que c'est du moins ce qui se produira à la suite de l'adoption de ces nouvelles lignes directrices.

La question du député est presque hors de propos lorsqu'on compare les parlementaires, qui sont élus par la population canadienne, et les sénateurs, dont la plupart sont nommés par favoritisme et ont des liens très puissants avec le gouvernement de l'heure.

M. Milliken: Monsieur le Président, en faisant ses observations, la députée a mentionné qu'il n'existait pas de lignes directrices. Sait-elle qu'il en existe toute une série sur les conflits d'intérêts et qu'elles ont été rédigées à l'intention des ministres d'État et des secrétaires parlementaires de cette Chambre? A-t-elle vu ce document? Sinon, je me ferais un plaisir de lui en remettre un exemplaire.

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je serais ravie de recevoir le document, mais, d'après les mesures qu'il a prises jusqu'à maintenant, il est évident que même le gouvernement ne l'a pas lu.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement le discours de la députée de Calgary-Sud-Est.

J'aurais cru que le parti de la députée, en raison du vif intérêt qu'il porte au financement et aux coûts du gouvernement, aurait demandé à examiner le rendement des sénateurs et à se demander si les Canadiens en ont pour leur argent à ce chapitre. Je ne comprends pas du tout la position que la députée a défendue.

La députée a ensuite abordé la question du code d'éthique. Une aura vient de ce côté-là de la Chambre. La députée a-t-elle jugé conforme à l'éthique de discuter cette motion no 24, qui traite d'un aspect très précis de l'éthique et de la conduite des députés et des sénateurs, tout en consacrant presque tout son temps à l'élaboration d'un discours politique visant à réprimander le gouvernement? Je suis d'avis qu'elle n'a apporté aucun argument positif au débat.

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois au député, je dirai qu'il a mal entendu mon discours, s'il croit que je n'ai aucun argument positif à apporter au débat. C'est la base d'un code d'éthique que j'ai tenté d'élaborer.

Quatre éléments viennent à l'esprit lorsqu'on examine une question touchant à l'éthique. Quand on s'apprête à prendre une décision pour régler un problème, on sait que les autres ont des solutions à proposer. Ils savent qu'il y a des gens qui font les choses comme ils ont dit qu'ils les feraient. En fait, quand vient le moment, il arrive parfois que les gens ne font pas vraiment ce qu'ils avaient dit qu'ils feraient. Il arrive souvent qu'on veuille faire quelque chose, mais qu'on ne le fasse pas ou qu'on ne puisse pas le faire pour une raison ou pour une autre. Tels sont les éléments que j'ai tenté de faire valoir.

(1710)

En ce qui concerne la question du Sénat, j'ai déjà dit que le Sénat est une chambre du népotisme. En ce qui a trait plus spécifiquement aux lobbyistes, c'est une chambre qui se comporte différemment de la Chambre des communes. Comme les sénateurs ne sont pas des élus, j'estime qu'ils devraient se débrouiller pour mettre au point leur propre code d'éthique. Ce sont de grands garçons et de grandes filles qui devraient être capables de juger eux-mêmes leurs activités sans avoir besoin qu'on leur dise quoi faire.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de participer au débat sur cette motion. Je tiens à féliciter le gouvernement de prendre des mesures pour faire adopter un code d'éthique à l'intention des parlementaires. Si l'histoire nous a appris quelque chose, c'est que la Chambre doit reconnaître la nécessité d'adopter un code d'éthique et qu'elle doit savoir que les Canadiens attendent de nous un comportement conforme à celui-ci. J'espère que pareil code sera élaboré et qu'il sera efficace. J'espère qu'il sera assorti de pouvoirs, contrairement au conseiller en éthique nommé par le premier ministre, et qu'il ne se résumera pas à une liste de suggestions diluées constituant un simple exercice de relations publiques sur les mesures que le gouvernement est censé prendre au sujet de l'éthique.

Je suis inquiet parce que le gouvernement actuel n'a respecté aucun de ses engagements du livre rouge ayant trait à une administration publique plus transparente et respectueuse d'un code d'éthique. L'idée d'un code d'éthique destiné à aider les parlementaires dans leurs relations avec les lobbyistes est excellente, mais je doute sérieusement de la volonté du gouvernement d'y donner suite en proposant des lignes directrices efficaces.

Prenons l'exemple du conseiller en éthique. Au lieu de désigner un conseiller indépendant ayant des comptes à rendre au Parlement, comme le promettait le livre rouge, le premier ministre a décidé que l'éthique resterait une question interne, examinée derrière des portes closes. En faisant rapport seulement au premier ministre, le conseiller en éthique a perdu l'indépendance et l'objectivité qu'il semblait avoir. Cette lacune est ressortie


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lors du scandale qui a entouré l'intervention du ministre du Patrimoine canadien auprès du CRTC.

Il y a des précédents voulant que les titulaires de postes comme celui du conseiller en éthique relèvent de la Chambre des communes. Le commissaire aux droits de la personne, le directeur général des élections, le vérificateur général et le commissaire à la protection de la vie privée ont tous des comptes à rendre à la Chambre, non au gouvernement. Ils ne sont pas comptables au Cabinet ni au premier ministre, mais bien à la Chambre. Voilà qui est important.

Dans tous les cas, il est clair que ces responsables doivent maintenir une certaine indépendance à l'égard du gouvernement s'ils veulent s'acquitter de leurs fonctions correctement et en toute objectivité. On peut en dire autant du conseiller en éthique et de tout genre de code d'éthique à l'usage des parlementaires.

Ce qui me préoccupe, c'est que le gouvernement voulait donner une apparence d'éthique sans vraiment rien changer au fond. C'est la seule explication que je voie à la décision de ne pas faire du conseiller en éthique un haut fonctionnaire du Parlement. Les parlementaires forment un groupe très sélect. Tout n'est pas parfait, loin de là. En étant un haut fonctionnaire indépendant, le conseiller en éthique serait en mesure d'assurer la bonne conduite des parlementaires et cesserait d'être, comme c'est le cas en ce moment, le chien de salon du premier ministre.

Malgré tous les beaux discours sur la transparence du gouvernement et sur l'indépendance accrue des députés de l'arrière-ban, le gouvernement perpétue la tradition du secret et de la discipline de parti. J'ai vu plusieurs ministériels souscrire à certaines idées formulées par des députés de ce côté-ci, puis se rétracter et serrer les rangs au moment du vote, lorsqu'il s'agissait de voter à la Chambre ou au sein d'un comité, lorsqu'il s'agissait d'approuver des rapports de comités. Ce n'est pas ce qu'on peut appeler une démocratie active, authentique, on est loin d'une démocratie représentative.

Nos débats à la Chambre à propos du contrôle des armes à feu sont un bon exemple de la transparence politique aux yeux du gouvernement. Lorsque certains ministériels ont préféré, en leur âme et conscience, représenter les vues de leurs électeurs que de faire ce que leur demandait la hiérarchie du parti, on les a réprimandés. Hé oui! On les a réprimandés pour avoir osé faire ce que leur demandaient les électeurs qui les ont envoyés ici, qui paient les factures, qui paient nos salaires et qui paient même nos pensions.

(1715)

Voilà pourquoi je tiens à ce que le code d'éthique soit conçu minutieusement et correctement. Le gouvernement ne s'est pas montré proactif en matière d'éthique. Si nous rédigeons un bon code d'éthique, cela conférera peut-être un caractère plus légitime au poste de conseiller en éthique.

On n'insistera jamais assez sur l'importance de ce code d'éthique. De toute évidence, le gouvernement a besoin de lignes directrices pour traiter avec les lobbyistes. Le scandale de l'aéroport Pearson est peut-être l'exemple parfait d'une activité secrète contraire à l'éthique. Le gouvernement conservateur précédent avait commencé à conclure des accords en cachette et le gouvernement actuel l'a imité.

Il y a aussi toute la question des accords entre José Perez, le sénateur De Bané et la Société canadienne des postes. En traitant avec le CRTC, le ministre du Patrimoine canadien a déjà donné lieu à la controverse et il le fait encore ces jours-ci.

La nécessité d'adopter un code d'éthique est évidente. J'espère simplement que les libéraux ont assez de courage politique pour mettre de côté leur intérêt et celui de leurs amis et de leurs proches, et pour rédiger un code efficace et complet.

Même si le fait de confier la rédaction du code à un comité constitue une amélioration par rapport à l'habitude du Cabinet de procéder à huis clos, la composition de ce comité m'inquiète. D'après moi, les sénateurs devraient en être exclus. Je vais prendre quelques minutes pour expliquer pourquoi cela m'inquiète.

Demander aux sénateurs de participer à la rédaction d'un code d'éthique régissant les conflits d'intérêts, c'est un peu comme charger des aliénés de gérer l'asile, ou encore comme nommer des criminels violents à la commission des libérations conditionnelles. Cela n'a tout simplement pas de bon sens. Je ne comprends pas que le gouvernement libéral préconise une telle sottise.

Je n'entends faire aucune proposition sans fournir de faits à l'appui. Il n'y a pas si longtemps, un premier ministre du nom de Mulroney a bourré le Sénat en nommant huit sénateurs. Pourquoi a-t-il fait cela? C'est ce qui lui a permis de faire adopter la TPS.

Que se passerait-il si certains des sénateurs qui ont accepté les postes ajoutés aux 104 prévus se retrouvaient membres du comité? Cela m'inquiète un peu. Que se passerait-il si l'un de ces sénateurs, l'honorable Eric Berntson de la Saskatchewan, faisait partie du comité? C'est lui qui a dit: «Jamais, je n'accepterai une nomination du gouvernement. Je refuse ce genre de nomination.» Une ou deux semaines plus tard, Brian Mulroney lui a demandé: «Accepteriez-vous d'occuper un siège au Sénat pour m'aider à faire adopter la TPS?» Il a répondu: «Bien sûr, puisque cela m'assure le confort pour le reste de mes jours. J'accepte de vous rendre ce service.» Le gouvernement libéral se porte à la défense de telles mesures. Je suis scandalisé.

Je voudrais mentionner un autre membre de ce groupe de sénateurs spécialement sélectionnés. Il a fallu ajouter des chaises au Sénat pour les accueillir. Il s'agit de l'honorable John Buchanan. Il avait la réputation d'être le meilleur collecteur de fonds de toute la région de l'Atlantique. Est-ce là le genre de personne que nous voulons voir siéger à un comité pour discuter d'un code d'éthique, un code régissant les conflits d'intérêts? Je trouve stupéfiant de voir que les libéraux suggèrent et préconisent une telle idée.

Je mentionnerais encore deux autres membres de l'autre endroit: les honorables Guy Charbonneau et Michel Cogger. Je me rappelle avoir vu leur nom figurer longtemps dans les actualités et je me rappelle avoir lu quelque chose à leur sujet dans presque


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tous les chapitres de l'ouvrage de Stevie Cameron intitulé: On the Take.

Est-ce là le genre de personnes que le député de Kingston et les Îles souhaite voir siéger à un comité chargé d'élaborer un code d'éthique à l'intention des parlementaires? Je comprendrais plutôt qu'ils fassent l'objet d'une enquête, et non qu'ils soient chargés d'élaborer le code d'éthique. Or, les libéraux présentent à la Chambre une motion qui leur permettrait de siéger à ce comité. Cela me paraît stupéfiant. C'est pourquoi je leur demande de retirer leur motion, de revenir au bon sens et de se rendre compte de ce qu'ils font.

Il y a une autre candidate éventuelle pour ce comité. Il s'agit de Marjory LeBreton. Elle était chargée du service de favoritisme politique des conservateurs. C'est elle qui décidait quels étaient les conservateurs qui méritaient d'être nommés à tel ou tel poste. Elle a peut-être même contribué à établir la liste des personnes que Brian Mulroney allait nommer au Sénat. Elle a peut-être contribué à choisir les six sénateurs spécialement sélectionnés pour occuper les six sièges supplémentaires, une décision que le ministre des Transports avait dénoncée à juste titre. Le ministre des Transports serait-il d'accord pour voir Marjory LeBreton siéger à un comité chargé d'examiner le code d'éthique? C'est ce que cette motion permettrait de faire. Je trouve cela stupéfiant.

Il y a un autre sénateur que je voudrais mentionner, l'honorable Pierre-Claude Nolin. C'était le copain de Mulroney au Québec. Il était son principal conseiller dans la province de Québec. Il a accepté sa nomination à la toute fin de l'ère Mulroney, lorsque tout le pays était en colère contre Brian Mulroney et son gouvernement et voulait les éjecter.

(1720)

Une voix: Qui était-ce?

M. Hermanson: L'honorable Pierre Claude Nolin. Je crois qu'il a accepté sa nomination en juin 1993.

Voulons-nous qu'un ami d'un gouvernement que les Canadiens vilipendaient à l'époque fasse partie du comité chargé d'étudier le code d'éthique, qu'il contribue à élaborer le code d'éthique auquel nous devrons nous conformer? Je suis outré. J'ai du mal à y croire.

Il est un autre parlementaire, un libéral cette fois, qui pourrait faire partie du comité: l'honorable Allan J. MacEachen. Il est considéré comme le parrain des libéraux de l'Atlantique. Il jouit d'une réputation qu'un membre du gouvernement tente d'acquérir lui aussi.

Un article de Maclean's dit ceci: «Vient ensuite le ministre des Travaux publics, une vraie vedette. Le débit incantatoire et le souffle d'Allan J. MacEachen, représentant du Cap-Breton qui a longtemps été ministre libéral, au niveau fédéral, et qui siège maintenant au Sénat. «Fermez les yeux», dit un observateur qui connaît les deux hommes, «et vous jurerez qu'Allan J. est là.» Il n'existe qu'un seul Allan J., explique le ministre avec un ricanement agaçant.

L'article ajoute que l'honorable Allan J. MacEachen était le parrain des libéraux dans l'Atlantique et trempait sûrement dans le favoritisme. Chose certaine, nous ne voudrions pas de lui au comité chargé d'étudier et de rédiger un code d'éthique à l'intention des parlementaires. Les libéraux entendent pourtant le nommer.

Ce comité pose un autre problème. En ce moment, le Sénat est contrôlé par les conservateurs. Je crois savoir que le premier ministre ne ménage pas ses efforts pour mettre en place ses propres amis. Le ministre des Transports sait que le Sénat est contrôlé par les conservateurs, car il a du mal à régler l'affaire de l'aéroport Pearson.

Les conservateurs s'inquiètent eux aussi. Quelques centaines d'entre eux se sont réunis de l'autre côté de la rivière le week-end dernier pour préparer leur stratégie. Leur stratégie? «Comment remettre la main sur l'assiette au beurre? Nous n'avons plus beaucoup de nominations au Sénat. Ça nous manque.» Ils préparent leur stratégie pour reconquérir le pouvoir, s'emparer de l'assiette au beurre et faire nommer leurs amis au Sénat.

Trop de gens dans l'entourage de Mulroney convoitaient un siège rouge au Sénat. Et ce sont à ces gens-là qu'on confierait la rédaction d'un code d'éthique pour nous, les élus à la Chambre des communes? Jamais de la vie. On se retrouverait avec tout un code d'éthique.

Les conservateurs qui se sont réunis à Hull en fin de semaine n'ont pas présenté d'excuses aux Canadiens pour les mesures déplorables qu'ils ont prises lorsqu'ils étaient au pouvoir. Ils auraient dû le faire. Ils ne se sont pas excusés d'avoir fait grimper notre dette d'environ 200 milliards de dollars à plus de 400 milliards de dollars? Et les libéraux veulent nommer ces gens-là au comité d'éthique? Jamais de la vie.

Les conservateurs ont dû paqueter le Sénat pour imposer la TPS aux Canadiens contre leur gré. Et ce serait ces gens-là qu'on nommerait au comité d'éthique?

De concert avec les libéraux, les conservateurs ont rédigé l'Accord de Charlottetown, ce fameux Accord qui a eu d'horribles répercussions. L'accord de Charlottetown prévoyait notamment la double majorité des voix au Sénat sur toute question relative aux langues et à la culture. Autrement dit, toute question portant sur les langues ou la culture devait être approuvée non seulement par la majorité des sénateurs, mais également par la majorité des sénateurs francophones. Ce n'est pas démocratique.

Le fait que les sénateurs ne sont pas élus n'est pas démocratique. Ensuite, qu'ils obtiennent une double majorité pour des considérations linguistiques et ethniques, c'est révoltant. Pourtant, les députés d'en face veulent que ces gens-là siègent au comité d'éthique. Je suis abasourdi. Je n'arrive pas à le croire.


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Selon l'Accord de Charlottetown, le nouveau Sénat aurait été élu, comme nous le rappellent nos vis-à-vis. Nous savions que le Sénat serait élu. Mais qui voudrait de ce genre de Sénat élu? Quelle personne convenable se porterait candidate pour siéger à ce genre de Sénat? Vous trouveriez très peu de bons candidats qui accepteraient de siéger à une chambre où il faudrait une double majorité sur toute question relative aux langues et à la culture. C'est révoltant. Ce n'est pas canadien et ce n'est pas vraiment démocratique. Pourtant, les libéraux veulent que ces gens-là siègent au comité chargé d'élaborer un code d'éthique à l'intention des parlementaires.

(1725)

Les conservateurs ne se sont jamais excusés d'avoir fait cela. Les libéraux ne se sont pas excusés pour leur rôle dans l'Accord de Charlottetown, même s'ils étaient deux ou trois à voir clair et à se prononcer contre l'accord. Comme d'habitude, toutefois, la majorité s'est laissé mener comme des moutons à l'abattoir et l'Accord de Charlottetown a échoué.

Les Canadiens ne sont pas aussi étourdis que beaucoup de députés d'en face semblent le croire. Ils voient clair et ont été renversés par l'Accord de Charlottetown. Ils ont été renversés par l'ampleur de la dette accumulée par les conservateurs. Ils ont dit que c'était immoral, que c'était mal. À cause de cela, ils n'ont élu que deux conservateurs aux dernières élections. Ils ont aussi contesté la TPS. Lorsque deux ou trois conservateurs ont dit qu'ils voteraient contre la TPS, ils ont été punis de la même façon que les libéraux qui ont voté contre la mesure sur le contrôle des armes à feu. Il n'y a aucune différence entre les libéraux et les conservateurs. Ils défendent tous les mêmes principes. Ai-je dit «principes»? Je ne crois pas qu'ils défendent quelque principe que ce soit. C'est révoltant.

Et ce sont ces gens-là qui prétendent rédiger un code de conduite, un code d'éthique à l'intention des parlementaires! Je n'y crois pas.

Le Sénat a certes besoin d'un code de conduite. Le député de Kingston et les Îles nous accuse de ne pas vouloir que les sénateurs soient assujettis à un code d'éthique, qu'ils soient obligés de rendre des comptes. Ce qui importe, c'est qu'ils rendent des comptes au peuple canadien. Et cela n'arrivera pas tant que nous ne modifierons pas la Constitution. Au lieu de supprimer le Sénat, on devrait peut-être faire que les sénateurs cessent d'être nommés. Ce serait peut-être un pas dans la bonne direction.

J'ai parlé assez longuement de cette question et je veux conclure avant que mon temps ne soit écoulé. Je tiens à dire clairement à la Chambre que, oui, nous avons besoin d'un code d'éthique. Nous devons savoir quel genre de rapports entretenir avec les lobbyistes. C'est important. Ce qui est sûr, cependant, c'est que nous ne voulons pas de conseils de l'ancienne bande conservatrice. Ce serait un désastre. Les Canadiens peuvent s'attendre à beaucoup plus de cet endroit. Nous ne devons pas appuyer la création d'un comité mixte chargé d'examiner l'éthique et le code à cet égard.

Les libéraux ont peut-être vu leur erreur. Je sais qu'ils ont fait beaucoup de vacarme en face parce qu'on leur a dit qu'ils devaient appuyer cette motion. Comme il s'agit d'une ligne de conduite proposée par le parti ministériel, ils n'ont pas le choix. Ils devraient toutefois prendre du recul pour un instant et réfléchir logiquement à ce qu'ils font. Ils appuient les anciennes façons de faire des conservateurs et agissent comme eux.

Il y a, en face, plusieurs nouveaux députés dont la réputation n'a pas été entachée par les anciens gouvernements conservateurs et libéraux. Le moment est peut-être venu pour eux de se prononcer, au moment du vote, contre une mesure qui n'est pas souhaitable. Pour une fois, qu'ils fassent quelque chose de bien, quelque chose qui ne soit pas motivé simplement par leur intérêt personnel ou par celui du Parti libéral ou de la Chambre des communes, mais bien par l'intérêt des Canadiens.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à demain, à 17 h 30. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

(1730)

LA LOI SUR L'ENREGISTREMENT DES LOBBYISTES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 28 avril, de la motion: Que le projet de loi C-43, Loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.


12016

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour m'opposer à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.

Lorsque Calvin Coolidge était gouverneur du Massachusetts avant de devenir président des États-Unis, la communauté polonaise locale voulait qu'il nomme l'un des leurs à un poste de juge. Une femme, une lobbyiste, est venue voir le futur président de façon régulière. Elle l'a harcelé pour qu'il fasse cette nomination. Elle est venue régulièrement à son bureau, mais jamais elle n'a réussi à lui arracher la nomination. Enfin, une délégation de notables au grand complet est venue le voir à son bureau pour tenter de le persuader de faire la nomination en cause.

Quand les notables sont entrés dans son bureau, M. Coolidge s'est assis et s'est mis à fixer le plancher. Après un interminable silence, il a dit: «Nouvelle moquette», et toute la délégation a déclaré avec empressement que c'était en effet une merveilleuse nouvelle moquette et qu'il en avait eu pour son argent. Après un certain temps, il a dit: «Elle a coûté très cher.» La délégation l'a de nouveau assuré que c'était une très belle moquette et qu'il en avait eu pour son argent. Enfin, il a levé la tête et a dit: «Une femme a usé l'ancienne en essayant d'obtenir la nomination de votre juge.» Les notables sont partis.

Le même Calvin Coolidge a écrit dans ses mémoires que lorsqu'on est en politique, neuf personnes sur 10 qui viennent nous voir pour obtenir quelque chose ne devraient pas l'avoir. «Si vous les ignorez, dit-il, après trois ou quatre minutes, ils n'auront plus rien à dire et s'en iront.»

Si M. Coolidge était toujours en poste, nous n'aurions peut-être pas besoin d'une loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Nous n'aurions peut-être pas besoin d'une telle loi. Si M. Coolidge était en poste, nous n'aurions peut-être pas besoin d'un conseiller en éthique. Il était son propre conseiller en éthique, et il savait sûrement comment régler le cas des lobbyistes.

Calvin Coolidge ne croyait pas que c'était l'affaire du gouvernement de saisir les biens du commun des citoyens pour les redistribuer à ceux qui crient le plus fort. Malheureusement-je le dis d'une manière judicieuse-nous avons fait beaucoup de progrès depuis. Nos gouvernements dépensent d'énormes sommes d'argent. Notre gouvernement fédéral dépense 160 milliards de dollars par année, ce qui veut dire que quiconque réussit à convaincre le gouvernement de lui faire des faveurs, aussi petites soient-elles, peut devenir très riche.

On peut obtenir beaucoup du gouvernement si l'on sait comment s'y prendre. Nos gouvernements réglementent constamment l'économie. Si l'on peut obtenir du gouvernement qu'il modifie la réglementation en sa faveur, cela peut être plus avantageux que d'embaucher un meilleur employé ou de trouver une meilleure façon d'accomplir une tâche. Nous avons vu cela récemment avec les changements apportés à la réglementation dans le domaine de la radiodiffusion. Même lorsque le changement de politique est bon, nous devons nous préoccuper de la façon dont les choses ont été faites. Le gouvernement a simplement trop de faveurs à sa disposition.

Lorsque les gens font du lobbying auprès du gouvernement, ils veulent presque toujours quelque chose qu'ils pourraient obtenir en s'adressant aux Canadiens. Ils peuvent venir chez moi et me demander des dons pour les diverses entreprises qu'ils cherchent à financer. Ils peuvent s'adresser à d'autres Canadiens, mais la plupart d'entre eux leur fermeraient probablement la porte au nez. Que font-ils alors? Ils viennent à Ottawa pour faire du lobbying auprès du gouvernement afin d'obtenir les fonds dont ils ont besoin.

L'attrait du gouvernement, c'est sa force. Nous pouvons voir comment le gouvernement peut donner à ces gens ce qu'ils veulent parce que le gouvernement a les moyens et le pouvoir de forcer les Canadiens à lui verser une partie de leur revenu sous forme d'impôts et de prendre ensuite cet argent pour le redistribuer aux gens qui viennent faire du lobbying à Ottawa.

Il y a une armée de lobbyistes qui essaient d'influencer le gouvernement. Cela veut dire que nous avons besoin de lois pour les réglementer. Malheureusement, cette mesure législative n'est pas ce qu'il nous faut. Elle ne définit pas le lobbying de façon assez stricte et permet aux gens de faire du lobbying pour à peu près n'importe quoi.

C'est encore pire lorsqu'il est question d'un conseiller en éthique. C'est honteux que nous ayons besoin d'un tel conseiller. J'aimerais beaucoup mieux que nous ayons des politiciens qui savent la différence entre le bien et le mal. Je pleure le jour où nous sommes passés de la morale à l'éthique. Les choses n'ont cessé de se détériorer depuis ce temps.

(1735)

Si nous devons avoir un conseiller en éthique, ayons-en un qui soit indépendant. Ayons le conseiller en éthique dont il est question dans le livre rouge, celui qui rend compte directement au Parlement. Ayons un conseiller en éthique qui peut dire au premier ministre qu'il se trompe sans craindre d'être congédié. Essayons de chasser les vautours qui tournent autour de la colline du Parlement en espérant pouvoir s'envoler avec une bouchée de notre budget gonflé.

N'oublions pas que, s'il y a tant de gens qui cherchent à obtenir des faveurs du gouvernement de toutes sortes de façons, c'est que le gouvernement est devenu trop gros. N'oublions pas que le gouvernement a le pouvoir de récompenser ses amis et ceux qui l'implorent, quelque chose qu'il ne devrait tout simplement pas faire. Travaillons pour remettre le gouvernement à sa place.

N'oublions pas que, si les hommes étaient des démons, il serait impossible d'avoir un gouvernement, mais que, s'ils étaient des anges, il serait inutile d'avoir un gouvernement. N'oublions pas que, du point de vue de la philosophie politique, la grande question n'est pas de déterminer qui aura le plus gros morceau, mais bien comment le gouvernement peut être assez fort pour protéger la vie, les libertés et les biens de ses citoyens sans être assez fort pour les menacer. Nous n'aurions pas alors à nous préoccuper de savoir qui le Cabinet rencontre aujourd'hui, qui a un lien de parenté avec le premier ministre, et ainsi de suite. Ce serait là une vraie réforme en matière d'éthique et de lobbying.

Rejetons le projet de loi C-43 et entreprenons cette vraie réforme.


12017

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'apporter mon appui au projet de loi C-43 tel que modifié.

La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes est une nouvelle initiative du gouvernement qui garantira l'honnêteté et l'intégrité au sein du gouvernement. C'était d'ailleurs là un des piliers de la plate-forme libérale qui était présentée dans notre livre rouge. Je suis heureux de constater que mes vis-à-vis se sont enfin rendu compte que ce livre constituait une bonne référence.

Je tiens, en passant, à féliciter les membres du Comité permanent de l'industrie, présidé de façon très compétente par le député de Fundy-Royal, pour son excellent rapport intitulé fort à propos Rebâtir la confiance.

J'ai eu le privilège d'apporter ma modeste contribution aux travaux de ce comité. Il était évident, pendant ces travaux-et mon impression a été renforcée depuis-que le comité, composé de membres de tous les partis politiques, ne négligerait rien pour renvoyer à la Chambre des communes un projet de loi garantissant que les gouvernements, l'actuel et les futurs, resteront honnêtes, ouverts et responsables. Les citoyens n'en demandent pas moins.

J'ai dit que le titre du rapport, Rebâtir la confiance, était fort à propos. Jusqu'aux dernières élections fédérales, nos institutions nationales et notre processus politique, voire le Parlement lui-même, suscitaient un niveau de cynisme encore jamais atteint. Les citoyens voyaient que leur système s'érodait et ne les servait plus eux, mais servait justement ceux qui devaient être les serviteurs. C'est pourquoi l'intégrité du gouvernement a été un élément important de la campagne libérale en 1993.

Tenant sa promesse, le premier ministre a réitéré sa position en déclarant, lorsqu'il a ouvert le débat sur le projet de loi C-43, que sa plus haute priorité consistait à restaurer la confiance des Canadiens dans leurs institutions. Il a déclaré que le cynisme finissait par miner le fonctionnement du Canada, qu'il érodait la détermination de la nation à travailler pour faire un pays meilleur. Le premier ministre reconnaissait ainsi toute l'importance que revêt la confiance publique pour la réussite d'un gouvernement. Et nous sommes tous d'accord avec lui.

Les Canadiens se souviendront que peu après le début du mandat du gouvernement, le contrat d'acquisition des hélicoptères EH a été annulé, comme il avait été promis. Un programme national d'infrastructure d'une valeur de six milliards de dollars a immédiatement été mis sur pied en collaboration avec les provinces et les municipalités, comme promis. La surpêche par les flottes étrangères, qui menaçait nos stocks de poisson déjà mal en point, a été arrêtée, comme promis.

(1740)

Un dernier point et non le moindre, le nouveau programme «Transfert social canadien» régissant les futurs transferts entre le fédéral et les provinces a été annoncé afin de préserver et de renforcer le régime d'assurance-maladie, comme promis.

Nous avons montré aux Canadiens que l'intégrité ne peut être préservée seulement par des mots. Elle doit revêtir une forme d'action claire et décisive. Elle doit devenir le fondement de la fonction publique, une habitude qui tienne à coeur à tout gouvernement. Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement libéral a bien fait comprendre que l'intégrité des institutions de notre pays n'était pas à vendre.

Le gouvernement et le Parlement se sont engagés à servir tous les Canadiens. Le projet de loi C-43 est une preuve incontestable de plus de la détermination du gouvernement.

De quelle façon le projet de loi C-43 va-t-il restaurer et consolider la confiance du public dans l'intégrité de nos institutions nationales? De plusieurs façons: en nommant un conseiller en éthique, en habilitant ce conseiller à mettre au point un code de déontologie à l'intention des lobbyistes et en veillant à ce que les lobbyistes soient obligés par la loi de se conformer à ce code.

En insistant afin que le code de déontologie soit examiné par un comité parlementaire avant de prendre pleinement effet, nous nous assurons qu'il est tenu compte dans le code de tous les points de vue politiques. En exigeant que le conseiller enquête sur les infractions au code et présente au Parlement un rapport détaillé sur chaque affaire, nous nous assurons qu'il n'y a aucun camouflage. En obligeant le conseiller à présenter un rapport au Parlement tous les ans, nous l'obligeons à faire preuve de diligence en permanence.

Certains députés de l'autre côté ont avancé que le code de déontologie proposé n'était pas un texte réglementaire et n'était pas exécutoire devant la loi. C'est un document de loin plus important que la loi. Les codes de déontologie de diverses associations professionnelles et de certaines professions se sont révélés des outils efficaces pour garantir une conduite exemplaire de la part des membres de ces associations ou de ces professions. Je suis sûr que les représentants élus relèveront le défi que posera ce nouveau code de déontologie.

Certains députés de l'autre côté ont aussi avancé que la nomination du conseiller en éthique par décret n'était pas un processus tellement indépendant. Je rapelle aux députés d'en face que je crois beaucoup plus que cela à l'intégrité de nos citoyens et à celle des gens nommés, de ceux qui occupent une fonction grâce au processus de nomination. Un exemple classique est celui de notre système judiciaire. Notre Cour suprême en est un autre.

Le processus d'entrée en fonction est bien moins important que l'intégrité des titulaires. Il ne faut donc pas préjuger de l'intégrité de notre conseiller en éthique.

D'autres collègues du côté du gouvernement ont déjà parlé des nombreux aspects positifs du projet de loi C-43, y compris l'obligation de déclaration. Les honoraires et le financement du


12018

gouvernement, dans le cas des associations, devront être déclarés.

Je voudrais rappeler une fois de plus à mes collègues d'en face et à tous les collègues de la Chambre, que, depuis 1993, nous avons regagné une bonne partie de la confiance du public. Depuis 1993, l'humeur des Canadiens est passée du cynisme à l'optimisme.

La population canadienne a fait confiance au gouvernement libéral. Je suis fier d'appartenir au gouvernement. Il a non seulement revivifié notre économie, il a aussi réduit le déficit fédéral, créé des emplois, rétabli les institutions et les infrastructures publiques et restauré l'intégrité du gouvernement.

L'intégrité règne à nouveau dans la fonction publique et nous avons tous profité de ce changement. Le Parlement est le plus haut tribunal du pays, une tribune où tous les Canadiens, riches ou pauvres, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, peuvent se faire entendre avec une égale force.

(1745)

On dit que les parlementaires devraient refléter les craintes et les espoirs de leurs électeurs d'aujourd'hui et de demain. Je suis d'accord, nous sommes tous d'accord. J'ajoute que nous devons refléter les espoirs de nos électeurs d'hier, dont les valeurs traditionnelles incluaient l'intégrité qui guide encore nos décisions de nos jours.

Je suis donc très heureux d'appuyer le projet de loi C-43. Il marque le début d'une nouvelle ère en politique canadienne. Il signale le rétablissement de l'intégrité au sein du gouvernement et, par conséquent, de la noblesse de notre profession dans cette institution qu'est la Chambre.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, mon intervention va sans doute être davantage une observation qu'une question, bien que je suppose que le député voudra y répondre.

Il disait que nous avons parlé du manque d'indépendance du conseiller et ajoutait qu'il avait plus de confiance que cela en cette personne. Nous aussi. C'est pourquoi je pense que tout le processus, tel qu'il est défini, est plutôt regrettable.

La personne qui occupe ce poste actuellement est honorable. Je n'ai pas essayé très fort de lui chercher des torts, car ce n'est certainement pas mon but. Ce n'est pas mon objectif, et je n'ai rien trouvé à son sujet. Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit de nature sérieuse ou même quoi que ce soit du tout.

C'est un homme intègre, un homme en qui on peut avoir confiance. Malheureusement, parce qu'il a été nommé par le premier ministre, parce qu'il est responsable devant le premier ministre et parce qu'il n'y a pas d'indépendance dans ce rôle particulier, cette personne peut être aussi honnête et aussi propre que le jour est long, elle ne sera pas en mesure d'en convaincre vraiment la population canadienne. Il peut essayer autant qu'il veut, en raison de cette étroite relation, il y aura toujours des gens qui n'auront pas oublié le gouvernement précédent. Même en partant de l'hypothèse que ce gouvernement n'a rien fait de répréhensible-ce que je ne crois pas soit dit en passant, car n'importe qui a des problèmes de temps à autre.

Lorsque l'on formera le gouvernement, la prochaine fois, je suis sûr qu'il y aura des moments où l'on pourra faire des allégations à notre sujet. C'est dans ces cas-là que je veux que le conseiller en éthique soit indépendant. Lorsque l'on fait de fausses allégations, la personne qui doit enquêter à leur sujet et faire un rapport doit être indépendante, si l'on veut que les gens lui accordent leur confiance. Lorsqu'il dira qu'il n'y a rien de répréhensible, ce sera alors pris comme une déclaration véridique et non pas comme quelque chose qui tient de la manipulation. C'est l'essence même du travail. C'est exactement pour ça que nous disons que le conseiller en éthique devrait être totalement indépendant du Cabinet et du premier ministre.

L'autre problème du projet de loi C-43, c'est que le conseiller en éthique et le directeur font rapport par l'intermédiaire du ministre. Là encore nous avons eu des commentaires à ce sujet: «Qu'y a-t-il de mal à cela? Ne faites-vous pas confiance aux ministres?» Oui, bien sûr que nous leur faisons confiance. Toutefois, s'il y a une allégation, qu'elle soit vraie ou fausse, contre le ministre, particulièrement le ministre dont dépend le directeur général, la situation est rendue critiquable par le fait que c'est lui qui devra présenter le rapport le concernant. Personne ne le croira, même si tout est parfaitement vrai. Et ça, c'est regrettable.

M. Pagtakhan: Monsieur le Président, je conclus des remarques du député que, à son avis, tout ce qui se fait par nomination est mauvais en soi, alors qu'il n'y a que du bon dans le processus électoral. Autrement, il n'aurait pas tenu de tels propos.

Aussi triste que cela puisse être, il est arrivé que même des députés élus soient corrompus. Le processus électoral n'est pas une garantie. Ce qu'il nous faut, ce sont des citoyens au-dessus de tout reproche qui soient prêts à servir leur pays avec intégrité.

(1750)

Les juges de la Cour suprême, bien que nommés, conservent leur indépendance. L'indépendance d'un fonctionnaire n'a rien à voir avec le processus; elle est dictée par son âme et sa conscience. Je parie que, si le député était un jour nommé à un poste quelconque par le gouvernement, il suivrait sa conscience, comme n'importe qui d'autre.

Par conséquent, ce n'est pas parce qu'une personne est nommée qu'elle est moins indépendante. J'ai entièrement confiance dans mes concitoyens.

Ce projet de loi prévoit également que la plus haute instance du pays, à savoir cette Chambre, étudiera les allégations concernant tout manque d'indépendance. Les députés seront dans l'obligation de mettre leurs concitoyens au courant d'un tel état de choses.

Le processus de nomination ne me fait pas peur. J'aimerais que mes collègues aient davantage confiance dans nos fonctionnaires. Les nominations, en tant que processus, ne constituent pas la seule solution. Ce qu'il nous faut, ce sont des fonctionnaires d'une intégrité hors pair. Je suis convaincu que ce projet de


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loi et la détermination du gouvernement à tenir ses promesses sont pour les Canadiens la preuve que l'intégrité n'est pas un vain mot aux yeux du gouvernement. J'aimerais que mon collègue nous fasse confiance.

M. Epp: Monsieur le Président, mon collègue d'en face n'a rien compris. Ce n'est pas que je n'aie pas confiance. Ceux d'entre nous qui sont dans cette enceinte accordent une grande confiance à leurs collègues des autres partis. Moi, le premier. Je jette un regard sur les députés libéraux et je ne vois aucun motif de les accuser en bloc de chercher à tromper la population. Je ne perçois pas cette volonté. Il arrive de temps à autre que des allégations soient portées. Ce n'est pas moi qui dois avoir confiance, c'est le peuple canadien.

Pourquoi cette disposition a-t-elle été inscrite dans le livre rouge, sinon qu'il fallait réagir au manque de confiance que les Canadiens manifestent ces dernières années? Je suis sûr qu'ils auraient préféré que nous disions les neuf années qui ont précédé les dernières élections. Or, il ne fait aucun doute que, dans l'ensemble, les Canadiens ont commencé à avoir beaucoup moins confiance dans les ministériels à cause de ce tout qui s'est passé, des scandales qui ont éclaté au grand jour, des irrégularités commises.

Ce qu'il nous faut, c'est un conseiller en éthique qui soit indépendant et qui paraisse tel aux yeux de la population afin qu'elle le croie vraiment lorsqu'il dit qu'il n'y a pas d'irrégularité. De plus, il devrait posséder toute la liberté voulue et ne pas donner ne serait-ce que l'impression qu'il subit l'influence du premier ministre ou d'un ministre quelconque lorsqu'il procède à une enquête afin qu'on ajoute foi à ses résultats, quels qu'ils soient.

M. Pagtakhan: Monsieur le Président, comment le député peut-il dire qu'il a confiance dans le conseiller en éthique alors qu'il affirme que celui-ci pourrait être manipulé et qu'on pourrait ne pas ajouter foi à son rapport parce qu'il a été nommé à ce poste? Comment peut-on croire que le député a vraiment confiance dans la personne quand il dit, du même souffle, que celle-ci peut être manipulée?

(1755)

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, à son habitude, le gouvernement libéral, avec le projet de loi C-43, passe encore une fois à côté des véritables problèmes.

En effet, avec ce projet de loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et d'autres lois en conséquence, le gouvernement ne règle absolument rien. Ce n'est pas d'une loi de plus dont ce Parlement a besoin, mais bien et surtout d'un code d'éthique qui aurait pour but de régir des groupes de pression qui possèdent d'ailleurs une puissance extrême dans ce pays.

De là à dire que ce sont les lobbyistes qui mènent le pays, il n'y a pas un grand pas à franchir, c'est vrai. Nous savons que le lobbying a toujours fait partie intégrante du paysage politique canadien. Et avec les années, ce travail est devenu une composante importante du processus politique. Entre 1969 et 1985 d'ailleurs, une vingtaine de projets de loi d'initiatives parlementaires traitant de cette question ont été déposés à la Chambre des communes.

Tous ces projets de loi étaient motivés par la même raison, par le même besoin et par le même désir, celui d'avoir un gouvernement plus démocratique et plus ouvert. Comme on nous demande encore aujourd'hui de nous prononcer sur ce sujet, cela signifie que le chemin parcouru n'a pas été celui que l'on recherchait.

En lisant ce projet de loi, j'ai été en mesure de constater que, entre les engagements électoraux et les concrétisations législatives, les lobbyistes ont sans aucun doute dicté la version finale du projet de loi C-43 et le brusque changement d'opinion des libéraux qui en a résulté. Je mets ici le gouvernement actuel en garde de ne pas se dissocier de ces groupes, car on se souviendra que les actions des lobbyistes ont vraiment commencé à influencer le gouvernement canadien dès 1969, à l'époque du gouvernement Trudeau. Le premier ministre actuel était d'ailleurs un membre actif de ce gouvernement.

Rappelons-nous le rôle qu'ont tenu les lobbyistes lors de la conception des initiatives de libre-échange et de la taxe sur les produits et services. Rappelons-nous le rôle tenu par le Conseil canadien des chefs d'entreprise qui est le lobby le plus puissant et le plus actif de ce pays. D'ailleurs, pour en être membre, il faut être président de l'une des 150 plus grosses entreprises du pays. Ensemble, les membres de ce cercle gèrent 975 milliards de dollars et emploient plus de 1,5 million de Canadiens, c'est-à-dire 12 p. 100 de la main-d'oeuvre du pays. On peut donc parler ici de position d'emprise de ce groupe et de rapport de force vis-à-vis du gouvernement.

On sait également que les membres de cet organisme alimentent largement les caisses électorales, qu'elles soient conservatrices ou libérales. Dois-je rappeler également l'influence que ce groupe a eue sur le gouvernement Mulroney lors des ententes du lac Meech de 1990? Tous se souviendront que le gouvernement Mulroney avait engagé M. Ronald Watts afin que ce dernier agisse comme tête à penser de la stratégie constitutionnelle. Mais est-ce que tout le monde ici sait que monsieur Watts était alors l'expert du Conseil canadien des chefs d'entreprise? Pensons un peu à l'influence qu'il a eue et qu'il a pu exercer sur le gouvernement.

J'irai encore plus loin. Le lobbyisme pratiqué au Canada mène, j'en suis certain, à la déshumanisation du pays.

(1800)

Dans ses mémoires, notre ancien premier ministre du Québec, M. René Lévesque, rappelle une rencontre qu'il a eue en 1982, avec un dirigeant de la Banque centrale du Canada obsédé par la lutte à l'inflation, mais très peu préoccupé par celle contre le taux de chômage.


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Comme on peut le voir, les dirigeants de cette institution changent, mais pas leur obsession. Pourquoi? Tout simplement à cause des lobbyistes dont les compagnies préfèrent garder des taux de chômage élevés afin de pouvoir engager de la main-d'oeuvre à bon marché.

Quand le parti au pouvoir dit qu'il veut remettre la population au travail, on se doit de prendre cette affirmation avec circonspection puisqu'il a les mains liées devant les puissances que sont les lobbies.

On comprendra alors pourquoi une campagne référendaire ne déplaît pas tant que cela à nos collègues d'en face puisqu'ils se cachent derrière cette campagne pour éviter de faire face aux véritables problèmes, aux problèmes qu'ils sont impuissants à régler telle la création d'emplois.

Vous savez, je ne fais que demander au gouvernement de respecter son propre engagement, formulé en juin dernier, alors que le premier ministre déclarait que les mesures relatives à la transparence, incluant le projet de loi C-43, visent: «à donner à l'administration fédérale une transparence sans précédent». Regardons les événements des 15 derniers jours, pour savoir à quel endroit se situe cette transparence.

Comment peut-on douter de la force de ceux qui font du lobbyisme quand on pouvait lire, en décembre 1992, dans un journal de Londres, qu'il y avait au Canada 149 hommes et femmes riches. Ce sont ces personnes-là qui mènent le Canada. On fait naturellement référence ici, lorsqu'on parle de ces hommes et de ces femmes riches, au Conseil canadien des chefs d'entreprise, groupe qui, je le répète, engraisse les caisses électorales des conservateurs et des libéraux.

Le Parlement du Canada voit sa crédibilité minée par de pareils titres dans les journaux. Il est temps d'agir et c'est pourquoi le Bloc québécois demande que les lobbyistes soient tous soumis aux mêmes règles de divulgation de renseignements.

Je ne surprendrai personne dans cette Chambre, si je vous dis que comme d'habitude, le gouvernement, contrairement aux engagements du livre rouge, refuse même que tous les lobbyistes professionnels, c'est-à-dire ceux qui influencent le gouvernement pour des objectifs essentiellement économiques soient tous soumis aux mêmes règles de divulgation. Pourquoi? Quels sont donc leurs intérêts? Qui cherchent-ils à protéger? À qui le gouvernement cherche-t-il à plaire? Voilà des questions auxquelles on espère avoir des réponses.

Il est évident que les dispositions relatives au conseiller en éthique doivent être passées au peigne fin. L'une des principales responsabilités de ce conseiller devrait consister à élaborer d'abord un code de déontologie des lobbyistes. S'il était bien conçu, ce code pourrait sensibiliser davantage la population au lobbying et ainsi pouvoir réduire les écarts de conduite de la part des lobbyistes. De fait, un tel code pourrait être plus important pour leur conduite que la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes proprement dite.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté les propos du député d'en face. Il a dit vers la fin de son discours qu'il aurait préféré que les lobbyistes soient tous soumis aux mêmes règles.

(1805)

Je comprends par cela qu'il voudrait donc que, par exemple, la Fédération canadienne de l'agriculture, l'UPA, la Croix-Rouge soient assujetties aux mêmes règles, aussi onéreuses que des groupes, par exemple, telles les grandes maisons de lobbying qui sont ici, à Ottawa.

J'ignore si le député était présent au comité parlementaire lorsqu'on a discuté du projet de loi, mais les groupes que je viens d'énumérer, entre autres, les représentants de l'Association canadienne des producteurs de lait sont venus témoigner à l'effet que les règles ne devraient pas être pareilles aux règles auxquelles sont assujetties les grandes sociétés canadiennes de lobbyisme.

J'aimerais demander au député d'en face pourquoi il est en désaccord avec la proposition présentée devant le comité parlementaire et que le gouvernement a respecté, proposition présentée par la Fédération canadienne des producteurs laitiers.

M. Fillion: Monsieur le Président, il me fait plaisir de répondre à cette question. Tout d'abord, nous devons diviser en deux catégories le lobbying qui peut se faire au niveau d'un gouvernement. D'abord, vous avez celui où l'on discute de problèmes fondamentaux concernant de grands principes, que ce soit des principes moraux, que ce soit des principes de travail et ainsi de suite. Mais par contre, il y a l'autre catégorie, les lobbies économiques, et c'est à ceux-là que je m'adresse actuellement. On n'a qu'à prendre comme exemple les événements des dernières semaines. Que l'on pense à Power Corporation, que l'on pense également à Power DirecTv, je crois que nous avons assez d'exemples avec ces deux points-là pour clouer le bec des gens d'en face.

Je dois rajouter que l'intégrité et la transparence que nous voulons avoir dans ce domaine, c'est justement une intégrité et une transparence financières. Vous vous organisez de grands soupers à 1 000 $ du couvert. Quel citoyen ou citoyenne de la base est capable de s'offrir un souper de ce prix? C'est Power Corporation qui fera l'achat de 10, 15, 20 ou 25 billets à 1 000 $ et les distribuera à ses amis. C'est cela, votre transparence.

Le Bloc québécois dit simplement merci, merci à ce domaine. Nous, ce que nous voulons, c'est nous occuper de choses qui vont relever l'intégrité des parlementaires.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de redonner la parole à l'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell pour une question supplémentaire, je tiens à vous rappeler, chers collègues, que toutes les interventions se doivent d'être faites par l'intermédiaire de la Présidence.

M. Boudria: Monsieur le Président, je pense que le député a mal compris la question, si j'en juge par la réponse. Il a dit dans son discours que les lobbyistes-et je l'ai noté-devaient tous être soumis aux mêmes règles.

Dans la réponse qu'il a tenté de nous donner, il a admis lui-même que les lobbyistes n'étaient pas sur le même pied d'égalité, et que des gens qui traitaient de certains dossiers, par la force des chose, devraient avoir des règles plus sévères, si j'ai bien compris.

Alors je répète ce que j'ai demandé tantôt. Dans le projet de loi, des organismes telles les fédérations d'agriculture et des groupes semblables seront assujetties à des règles moins sévères. Pourquoi le député veut-il, lui, avoir des règles aussi sévères pour les fédérations agricoles, l'Association canadienne des


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producteurs laitiers qui a témoigné devant le comité et qui a demandé des règles moins sévères pour ses membres? Pourquoi est-il contre la position de ces organismes? J'essaie d'être plus clair que je ne l'ai été la dernière fois.

M. Fillion: Monsieur le Président, je pense que la réponse que j'ai formulée tantôt a été très bien comprise par mon collègue d'en face. Elle a été très bien comprise, ma réponse, sauf que lui, il l'interprète à sa façon. Et son interprétation, je ne l'accepte pas. Je ne l'accepte pas parce que je dis et je répète que les règles doivent être les mêmes pour les lobbyistes qui s'occupent du domaine financier.

(1810)

Je comprends sa question, il voudrait en même temps étouffer les mouvements de pression, alors que ce n'est pas cela. On n'empêchera pas le lobbying sur des questions d'assurance-chômage, sur les prêts à être consentis ou non aux étudiants, sur l'éducation postsecondaire. On n'empêchera pas le lobbying dans ces domaines, sauf en ce qui a trait aux lobbyistes financiers, quand il s'agira d'adopter des lois strictes permettant à ces vieux partis politiques, les libéraux et les conservateurs, de faire preuve d'un peu plus d'intégrité à l'intérieur de leur structure et de plus de transparence.

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, j'écoutais mon collègue exposer son point de vue sur le lobby et je suis conscient que le lobby est une activité légitime. Les gens qui ont des intérêts ont le droit de les faire valoir. Là où cela ne va plus, c'est quand ces représentations se font en cachette, en catimini, lorsque l'intérêt public ne peut plus être servi d'une façon correcte.

Mon collègue, dans son discours, mentionnait que le législateur, la Chambre des communes avait un rôle à jouer. Et moi, en tant que député-je pense qu'on doit le dire-j'ai souvent le sentiment que des influences extérieures, particulièrement en provenance de la haute finance, forcent la direction dans laquelle les décisions se prennent, et ce, sans qu'on ne puisse jamais obtenir la vérité ou tout au moins une information qui nous permettrait d'apercevoir qui se cache derrière les masques, qui se cache derrière les gestes.

Depuis deux semaines en cette Chambre, on pose un certain nombre de questions pour savoir qui assume la responsabilité dans le dossier de la diffusion directe par satellite, et l'ensemble de ce dossier est extrêmement embrouillé.

Alors, il ne s'agit pas d'interdire le lobby, mais de le rendre transparent pour ques les intérêts publics soient réellement protégés par cette Chambre.

J'aimerais que mon honorable collègue réagisse aux commentaires que je viens de faire.

M. Fillion: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses commentaires qui me permettent de rappeler à mon collègue d'en face qu'il n'a pas su écouter, qu'il a pris seulement deux ou trois mots de mon discours pour en faire tout un charabia qu'il ne comprend même pas lui-même.

Je vais vous citer exactement ce que j'ai dit dans mon discours «Je ne surprendrai personne dans cette Chambre si je vous dis que, comme d'habitude, le gouvernement-il s'agit de vous-contrairement aux engagements du livre rouge. . .»

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. J'ai déjà pris quelques instants plus tôt et je vais le faire encore une fois. Je me dois de vous rappeler, dans la plus grande mesure possible, que toute intervention doit être faite par l'entremise de la Présidence.

M. Fillion: Monsieur le Président, je continue la citation de mon discours: «Le gouvernement, contrairement aux engagements du livre rouge», je sais que c'est choquant, «refuse que tous les lobbyistes professionnels, c'est-à-dire ceux qui influencent le gouvernement pour des objectifs essentiellement économiques, soient tous soumis aux mêmes règles de divulgation.» C'est ce que j'ai dit. Je faisais référence aux lobbyistes qui s'occupent simplement d'objectifs essentiellement économiques. Je fais la distinction entre les deux catégories. Donc, pour ce qui est des lobbyistes qui s'occupent essentiellement d'objectifs économiques, que tous leurs intérêts et leurs règles soient divulgués, qu'on publie leur nom, de la même manière que nous, du Bloc québécois, n'avons pas peur de publier la liste des contribuables qui fournissent à notre caisse électorale, puisque nous n'acceptons pas les dons de compagnies.

(1815)

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour parler du projet de loi C-43, la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, et pour exprimer quelques craintes et une certaine exaspération face à l'utilisation continuelle de sophismes par les libéraux. Ils se servent d'arguments brillants, mais trompeurs, pour convaincre les Canadiens qu'ils agissent dans leur intérêt.

À long terme, en fin de compte, à la fin de leur mandat, lorsqu'on constatera le résultat des efforts futiles de ce parti, on s'apercevra que tout ce que le Parti réformiste dit et une bonne partie de ce que le Bloc québécois affirme au sujet du gouvernement est vrai. Nous prendrons connaissance des faits et nous saurons que tous ces sophismes ne servent qu'à soutenir la cote de popularité du premier ministre.

Durant la prochaine campagne électorale, je sais que de remarquables députés libéraux s'enorgueilliront d'initiatives comme ce projet de loi et la création d'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat chargé d'élaborer un code d'éthique. Ils diront que le gouvernement a rétabli l'intégrité du système parlementaire canadien. Ils affirmeront que les libéraux ont tenu toutes les promesses contenues dans le livre rouge, même si le Parti réformiste a déjà signalé une vingtaine de promesses violées.

Les l
ibéraux sont contre la révocation des députés. Les ministériels ne veulent pas d'un député. Ils l'ont exclu de leur caucus, lui qui représente plus de 100 000 personnes et siège maintenant à la Chambre comme indépendant. Cela devrait être embarrassant pour eux, cependant, ils affirment que la meilleure façon de révoquer des députés consiste à ne pas les réélire, et cette position pourrait bien leur coûter cher au moment des élections. Le premier ministre a déclaré que c'est au moment des élections que


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les gens pouvaient le flanquer à la porte et lui demander des comptes. Je suis ici pour rappeler aux députés libéraux qu'ils devront en rendre. Les Ontariens qui ont mis le gouvernement précédent à la porte pourraient bien agir à nouveau ainsi en 1997.

Les libéraux parlent de réformer les pensions, d'établir une discipline de parti moins rigide, ainsi que de constituer un gouvernement transparent et honnête. Dans le livre rouge, il est question de rétablir l'intégrité de la classe politique. Nous savons que les politiques ont mauvaise réputation et que c'est probablement attribuable à ce dernier gouvernement. Quoi qu'il en soit, le gouvernement actuel commence à avoir la même arrogance et ses membres ont le sentiment qu'ils peuvent faire n'importe quoi, quand et comment ils le veulent, derrière des portes closes.

Ainsi, prenons l'incident dont on discute à la Chambre maintenant au sujet du service de radiodiffusion par satellite et voyons comment le ministre du Patrimoine canadien s'en est sorti jusqu'à maintenant. Comme nous le savons tous, nous avons remis en question son jugement et sa compétence après qu'il eut écrit au CRTC, un organisme indépendant qui est censé lui faire rapport, pour lui suggérer d'agréer la demande d'un de ses électeurs concernant une station radio. En agissant ainsi le ministre a enfreint son serment d'office mais il ne s'est rien passé. La question a été soumise au conseiller en éthique qui, comme le premier ministre l'avait promis dans le livre rouge, devait faire rapport au Parlement.

Je reviendrai à cette question dans un instant parce que le porte-parole réformiste a, à très juste titre, soulevé des questions sur lesquelles il souhaitait que nous revenions.

Le projet de loi mentionne des choses comme l'intégrité et l'éthique. Quand on parle de choses semblables, il faut montrer de la transparence, faire preuve de logique et tenir les promesses faites.

Comme un décret pris cette semaine a dit que nous croyons dans la concurrence loyale et libre, que les Canadiens sont en faveur de la concurrence et que nous oeuvrons dans leurs meilleurs intérêts, le gouvernement a estimé que la société Power Corp. devait être autorisée à faire concurrence pour l'obtention des services de télédiffusion à domicile par satellite. Soit. Si le gouvernement était fidèle à ses principes et un tant soit peu intègre, il devrait être conséquent. Pour cela, il doit revoir la décision du CRTC, qui jusqu'à ce stade a pris des décisions logiques puisqu'il voulait protéger la culture canadienne. Ces deux décisions ont été prises dans l'intérêt de la culture canadienne. L'une de ces décisions a été révoquée par décret, ce qui constitue une utilisation sans précédent des pouvoirs du gouvernement. C'est prendre un canon pour tuer des mouches.

(1820)

Qu'a fait le gouvernement au sujet de cette autre décision concernant l'octroi d'un monopole au câblodistributeur Rogers, qui ne devait plus retransmettre que des radiodiffuseurs canadiens, et les nouvelles chaînes autorisées? Le gouvernement a interdit la diffusion par câble de la chaîne américaine de musique country.

Si le gouvernement est vraiment intègre, s'il a un peu de sens moral, il restera logique avec le décret qu'il a pris relativement à la radiodiffusion directe à domicile et prendra un autre décret ordonnant au CRTC de renverser sa décision au sujet de Rogers pour permettre à CMT de faire concurrence aux Canadiens.

Après tout, la Ligue canadienne de football doit maintenant concurrencer le football américain. Nous avons le libre-échange. Nous avons ouvert nos frontières. Si nous devons faire face à la concurrence, faisons-le. Tâchons de ne pas exclure les concurrents de l'extérieur.

C'est ce qui est mauvais dans ce projet de loi. C'est justement de cela que nous parlons cette semaine, de la transparence des opérations gouvernementales quand le gouvernement fait de l'ingérence dans les affaires des sociétés. Power Corporation et tous ceux qui représentent les services de diffusion par satellite sont en affaires. Ils font du profit. Ils veulent avoir l'aide du gouvernement. Ils avaient besoin de son aide pour être en mesure de concurrencer Expressvu, qui a dépensé 200 millions de dollars à cette fin. Ces gens utilisaient les services canadiens, les satellites canadiens. Le CRTC a été logique avec lui-même, mais le gouvernement prend un décret.

Nous avons le droit de nous demander si Power Corporation a fait des pressions, si cette société a eu recours à des lobbyistes et s'il était nécessaire qu'elle le fasse. Quelqu'un vient de dire que le Parti libéral est un lobby. Cette expression me plaît.

Blague à part, si l'intervention de lobbyistes était nécessaire, comment le projet de loi C-43, qui modifie la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, pourrait-il contribuer à ce processus et le garder transparent pour que les Canadiens ne mettent pas en doute l'intégrité et l'éthique des politiciens fédéraux?

Je veux tenir en haute estime mon premier ministre et son Cabinet. Je veux critiquer les orientations malavisées. Je ne veux jamais être obligé de mettre en doute leur éthique, leur morale ou leur dessein. Cela ne devrait pas être la raison pour laquelle nous sommes ici.

La façon dont cela s'est passé, un décret-pourquoi? Sur la foi d'un comité composé de trois personnes? À ce comité siégeaient un ancien associé du premier ministre dans un cabinet d'avocats, une personne qui dirige une société appartenant à Bronfman et une autre personne qui avait été nommée sous-ministre par l'ancien premier ministre libéral, M. Trudeau. J'ai entendu quelqu'un, le whip du gouvernement, je crois, dire aujourd'hui qu'ils étaient tous sous-ministres. Ils travaillaient tous dans l'administration publique. Ils ont fait l'objet de représentations. On nous a dit à la période des questions qu'ils avaient reçu une centaine de lettres. Qu'on rende ces lettres publiques. Qu'on


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sache ce que ces personnes ont dit avant de faire leur recommandation. Nous ne pouvons pas faire la lumière là-dessus.

Ce projet de loi est important. Les lobbyistes devraient être tenus de s'enregistrer, comme on l'a dit dans le livre rouge. Les libéraux brisent une autre promesse. Où est l'éthique et l'intégrité lorsqu'on brise une autre promesse?

Les éléments positifs du projet de loi sont qu'il renforce les exigences de divulgation des lobbyistes, surtout ceux de deuxième catégorie, soit les lobbyistes salariés. Un autre aspect positif, c'est que tout lobbyiste dont les clients sont des coalitions devra divulguer le nom des membres de ces coalitions pour que nous sachions exactement quelle est la taille du groupe en question. On ajoute également aux exigences de divulgation les fonds accordés par le gouvernement et l'objet de la proposition de lobbying. On permet en outre la communication des déclarations par moyen électronique. On augmente le délai de prescription des enquêtes pour le porter de six mois à deux ans. Voilà pour l'aspect positif.

Pour ce qui est de l'aspect négatif, notons que le projet de loi définit les lobbyistes, non pas selon leurs activités, mais bien selon ceux qui les engagent. Ils devraient être définis selon leurs activités, et non selon leurs employeurs. Tous les lobbyistes professionnels devraient être traités pareillement. Dans leur livre rouge, les libéraux ont aussi promis que leur gouvernement mettrait en oeuvre les recommandations du rapport unanime Holtmann de 1992. L'élimination des catégories était une recommandation explicite du rapport Holtmann.

Un lobbyiste est défini comme celui dont les fonctions consistent en grande partie à faire du lobbyisme. John Turner, qui s'adonne probablement à cette activité deux ou trois fois par année, peut se défendre de ne pas être un lobbyiste important et soutenir qu'il n'a pas à s'enregistrer. Il serait préférable de définir le lobbyiste comme quelqu'un que l'on paye pour tenter d'influencer le gouvernement.

Le lobbyisme n'a rien de répréhensible. Garantissons toutefois son ouverture et sa transparence.

(1825)

Le projet de loi ne remédie pas au problème des gens qui profitent de leurs relations politiques passées et actuelles pour avoir accès aux décideurs et chercher à les influencer. Il faudrait déclarer les postes politiques occupés antérieurement et les contributions versées aux partis politiques. Les honoraires payés aux lobbyistes ne font pas partie de la liste des éléments d'information qu'ils sont tenus de déclarer, même si le libéraux avaient insisté sur ce point lorsqu'ils siégeaient dans l'opposition, et même si le whip en chef du gouvernement avait lui-même rédigé un rapport réclamant qu'on déclare cet élément d'information.

Cela contribuerait à révéler les cas où il y a eu une campagne intensive de lobbying pour ou contre une mesure, comme dans le cas de l'Accord de Charlottetown. D'après le projet de loi, le lobbyiste est tenu de s'inscrire, mais il n'est pas obligé de révéler le nom du haut fonctionnaire auprès de qui il fait du lobbying.

Dans le cas du contrat de l'aéroport Pearson, nous saurions uniquement que le ministère des Transports a fait l'objet de lobbying, mais non les noms des personnes contactées. Cela donne à entendre que les lobbyistes doivent rendre des comptes, mais pas les titulaires de charge publique.

Qui, au sein du ministère des Transports, a fait l'objet de lobbying? Voilà ce qu'il nous faut savoir. Le projet de loi comporte ainsi une échappatoire grâce à laquelle il n'est pas nécessaire de rendre compte des rencontres tenues à l'instigation d'un titulaire de charge publique. Il s'agit manifestement d'une grave lacune, car, comme l'a écrit Jean Chénier, du Lobby Monitor: « Un lobbyiste qui ne peut pas obtenir d'invitation d'un fonctionnaire ne mérite pas ses honoraires. »

Le projet de loi ne prévoit absolument aucune règle anti-évitement. Or, on avait élaboré de ces règles dans la loi relativement peu complexe qui avait précédé ce projet de loi. Il est donc regrettable qu'on ne se préoccupe pas de telles règles, car c'est une autre recommandation du rapport Holtmann dont on ne tient pas compte.

Nous recommandons également que le registraire chargé d'appliquer la loi ait le pouvoir d'effectuer des vérifications au hasard pour mieux s'assurer que les lobbyistes respectent bien les dispositions de la loi. Voilà une recommandation bien solide et concrète du Parti réformiste.

Le projet de loi prévoit également la création d'un poste de conseiller en éthique. La plus grande supercherie dont la Chambre ait été victime se trouve dans le livre rouge. On y lit très clairement, à la page 91, qu'il « fera rapport au Parlement ».

Le conseiller en éthique a été désigné. Nous connaissons son nom. Nous ne mettons pas en doute sa compétence, nous contestons simplement à qui il doit rendre des comptes, c'est-à-dire au premier ministre. Il fait en effet rapport directement au premier ministre.

Il n'est pas un chien de garde, ce que le conseiller en éthique devrait être au nom de tout le Parlement pour restaurer l'intégrité de l'institution, pour rétablir le sens moral élevé qui devrait inspirer les politiciens et qui était autrefois respecté. Non, ce n'est pas un chien de garde, mais plutôt un chien de salon.

Si le premier ministre a quelque chose à voir dans une situation où jouent des liens familiaux étroits-et nous ne portons absolument aucune accusation d'inconduite en l'occurrence-nous voulons que le processus soit transparent et que le conseiller en éthique puisse affirmer à la Chambre qu'il l'est effectivement. Le fait que ce monsieur soit le gendre du premier ministre n'influence en rien la décision du Cabinet et le décret est dans les règles. Tout est dans l'intérêt supérieur de tous les Canadiens, sans plus.

Nous voulons pouvoir accepter avec confiance et sans équivoque la décision du conseiller en éthique. Cela n'est pas possible maintenant parce que ce conseiller rend des comptes directement au premier ministre et non au Parlement. Cela va carrément à l'encontre d'une autre promesse libérale figurant dans le livre rouge.

Mme Augustine: C'est absurde.

M. Silye: Ce n'est pas absurde. N'est-il pas vrai, monsieur le Président, qu'il est dit à la page 91 du livre rouge que le conseiller en éthique est censé faire rapport au Parlement ou au premier ministre. Comme vous ne pouvez pas me faire signe que oui, je ne vous demande pas de répondre.

Le conseiller en éthique doit enquêter chaque fois qu'il a des raisons de croire que les lobbyistes ont violé leur code d'éthique et il doit faire rapport de ses conclusions. Il doit aussi déposer chaque année un rapport sur les activités de son bureau. C'est là un bon point.

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Des voix: Ce n'est pas vrai.

M. Silye: Je le répète, car j'entends protester les députés d'en face. Je ne dirais pas ici, à la Chambre, que la promesse libérale n'est pas dans le livre rouge. Je ne ferais pas cela. Les auteurs du livre rouge ont promis qu'un conseiller en éthique ferait rapport au Parlement. Le conseiller en éthique ne fait pas rapport au Parlement et tous les génies qui marmottent en face devraient se renseigner. Cela va carrément à l'encontre d'une promesse libérale.

À l'instar du gouvernement, nous voulons rétablir l'intégrité des politiciens. Et il reste beaucoup de chemin à parcourir. Ce livre, On the Take, a jeté le discrédit sur toute la classe politique.

(1830)

Je suis un politique débutant. Je suis maintenant un politique professionnel parce que je suis payé pour le faire, mais dans mon âme et mon esprit, je suis toujours un homme d'affaires. Je sais à quoi je pensais il y a deux ans quand j'observais de l'extérieur ce que les politiques faisaient. Ce que je voyais ne me plaisait pas. En fait, j'étais tellement en colère que j'ai décidé de me présenter.

Maintenant que je suis député et que je suis en mesure d'exprimer mon point de vue, j'espère être capable de dire que je veux rétablir l'intégrité des politiques. Les députés ministériels devraient écouter plutôt que de parler. Je sais que certains d'entre eux sont très talentueux et qu'ils peuvent parler et écouter en même temps, mais rares sont les gens qui peuvent le faire.

Quand j'accuse le gouvernement de faire usage de sophismes, ce qui n'est autre chose que de recourir à des arguments astucieux, mais trompeurs, menant à une fausse conclusion-tour de passe-passe est une autre façon de le dire-le problème, c'est qu'ils parlent de toutes les merveilleuses choses qu'ils font pour le pays alors qu'en réalité elles ne le sont pas. Ce sont eux qui laissent tomber les Canadiens.

Ils présentent des projets de loi comme la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et cette motion d'aujourd'hui sur la création d'un comité mixte chargé de la rédaction d'un code d'éthique, un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes chargé de la rédaction d'un projet de loi qui établirait un code d'éthique. Pourquoi a-t-on besoin de tout cela?

Il y a deux mois, le premier ministre a dit à la Chambre que nous avons déjà toutes ces choses-là. Les ministres doivent prêter des serments de toutes sortes. Les députés doivent prêter serment. Nous avons toutes sortes de règles prévoyant ce que nous pouvons faire et ne pouvons pas faire. Nous avons environ six paliers de contrôles uniquement pour rétablir l'intégrité des parlementaires.

Nous voulons savoir ce qui se passe avec la bureaucratie. Nous voulons savoir qui est aux commandes. La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes prévoit bien l'établissement d'un registre des lobbyistes au sein des ministères. Voient-ils le sous-ministre? Voient-ils M. Dodge? Le public devrait le savoir. Le public devrait savoir qu'après une rencontre des lobbyistes avec M. Dodge, ce dernier a changé d'idée sur une question donnée ou qu'il a changé de recommandation. Il n'y a rien de mal à cela. C'est un point positif et non un point négatif. Pourtant, le gouvernement n'inclura pas cela.

Nous avons, au sujet de ce projet de loi, trois ou quatre excellentes recommandations que nous continuerons de mettre de l'avant dans l'intérêt de tous les parlementaires et de certains lobbyistes. Certains politiques qui se sont retirés de la vie publique pourraient peut-être revenir à titre de lobbyistes après quelques années. Ils feraient d'excellents lobbyistes et pourraient contribuer à améliorer la réputation des politiques, en mettant à profit l'expérience qu'ils ont acquises au sein du gouvernement de manière à aider les autres Canadiens. Grâce à des critères de divulgation et à des règles s'appliquant dans les deux sens, ce projet de loi pourrait, à mon avis, aider bien des personnes au sein du gouvernement.

Ce projet de loi est un autre exemple de mesure que le gouvernement présente pour se donner bonne conscience, lui qui se plaît à nous dire que tout ce qu'il fait est merveilleux et ne peut être amélioré. Je suis désolé d'entendre cela. J'espère qu'à la suite de mon intervention aujourd'hui, une ou deux de mes suggestions seront retenues, mais j'en doute fort.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de passer aux questions et commentaires, je veux souligner que le député de Calgary-Centre a vraiment piqué ma curiosité lorsqu'il a utilisé le mot «sophistry», mais il a en a donné une définition. Cependant, j'ai dû consulter le Webster's New Dictionary of Synonyms et le Concise Oxford Dictionary pour trouver le sens de ce mot.

De plus, à un certain moment, le député a demandé à la présidence de participer d'une certaine façon au débat en hochant la tête. Je peux vous dire, mes chers collègues, que la dernière fois que j'ai hoché la tête, j'étais à la ferme d'un ami et je me suis retrouvé avec quelque chose que je ne voulais pas et dont je ne me suis jamais servi.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, vous avez rendu une très sage décision. Je tenterai de m'en souvenir la prochaine fois que je serai à un encan dans une ferme.

(1835)

J'ai une question à poser au député. Il a dit qu'il préconisait l'élimination des niveaux dans les différentes catégories de lobbyistes aux fins de l'enregistrement. Ce sujet a été abordé quelques minutes avant que le député commence son intervention et je dois lui répéter la question que j'ai déjà posée à un autre député.

La Fédération canadienne des producteurs de lait et d'autres groupes entendus par le comité ont dit qu'il serait injuste de les soumettre aux mêmes règles que tous les lobbyistes et je peux concevoir qu'il soit injuste d'appliquer à la Fédération canadienne du lait, à la Fédération canadienne de l'agriculture et à la Croix-Rouge les mêmes règles qu'à Earnscliffe ou S.A. Murray Consulting ou à n'importe quelle société de lobbyistes. Pourtant, c'est ce que préconise le député.

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N'est-il pas prêt à admettre que pour les groupes comme ceux que j'ai mentionnés, les règles devraient être différentes? S'il est d'accord avec moi, pourquoi formule-t-il une telle critique?

M. Silye: Monsieur le Président, je suis reconnaissant au député pour sa question et sa remarque. C'est une très bonne observation. Je ne suis pas d'accord avec lui. Si l'on demande simplement à ces groupes de comparaître devant le comité permanent ou si ces groupes viennent à la Chambre et vont voir les députés à leur bureau juste pour leur donner certains renseignements, ça va. Il s'agit exclusivement de fournir certains renseignements. Par contre, certains viennent pour essayer d'influencer les députés, pour faire pression sur eux. Un tas de gens se présentent à mon bureau pour essayer d'organiser un rendez-vous afin de me parler de leurs problèmes, de me dire la solution et de me suggérer, peut-être, ce que je devrais faire, de me dire que je devrais voter d'une certaine façon sur un projet de loi donné.

Dès que les gens font allusion à la façon dont je devrais voter ou dont je devrais examiner un problème, c'est essentiellement du trafic d'influence.

M. Boudria: C'est une infraction criminelle.

M. Silye: Je ne devrais pas dire que c'est du trafic d'influence. Quelqu'un a dit que faire du trafic d'influence était une infraction criminelle. Je retire ce que j'ai dit. Comme vous le savez, je suis un novice dans cette enceinte. Je ne connais pas toute la terminologie.

Mais quand les gens viennent ici pour, essentiellement, essayer d'influencer le ministère des Transports, le ministère de la Santé dans le cas d'un lobbyiste défendant les intérêts des groupes pharmaceutiques, ou le ministère de l'Agriculture, si c'est pour fournir des renseignements, ça va. Mais si c'est pour influencer un ministère, ou si c'est pour influer sur une décision du gouvernement, ils devraient se faire enregistrer. Qu'y a-t-il de mal à se faire enregistrer? Je ne vois pas pourquoi ils y verraient une objection.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, je sais moi aussi ce qu'est un sophisme. Il s'agit de l'art d'utiliser des mots qui ne signifient pratiquement rien.

Cependant, dans ce cas-ci, alors que nous parlons de lobbying, c'est une question extrêmement grave, même si la mesure à l'étude, le projet de loi C-43, manque de portée. Je voudrais demander au député ce qu'il pense du népotisme. Depuis deux semaines, nous examinons le fait que le premier ministre est prêt à favoriser une entreprise que possède son neveu. C'est un cas flagrant de favoritisme. Personne ne peut et ne devrait en douter. Il n'y a pas simplement apparence de favoritisme, mais il est difficile de prétendre le contraire, étant donné qu'on retrouve partout des gens étroitement liés à Power Corporation ou encore des gens très près du premier ministre qui ont agi de façon exceptionnelle en renversant une décision du CRTC. C'est la première fois que cela se produit. Il faut vraiment avoir beaucoup de pouvoir. Il n'est pas question de la firme de lobbying moyenne. Il s'agit plutôt de corruption en haut lieu. Il s'agit d'un premier ministre qui favorise l'entreprise de son neveu.

Bien qu'il soit tout à fait évident que c'est là un cas très grave de népotisme et de corruption, le gouvernement libéral trouve moyen de s'en amuser. C'est un exemple flagrant d'abus de pouvoir ou de mauvais usage du pouvoir.

Le député pourrait-il. . .

M. Fontana: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis persuadé que l'utilisation de termes comme «corruption» est non parlementaire. Je pense que le député devrait présenter maintenant des excuses. S'il n'a pas le cran de le faire, il devrait alors sortir de la Chambre et reprendre ses paroles. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Permettez-moi de reprendre les choses dans l'ordre inverse. Je tiens à dire au député qui vient d'intervenir, le secrétaire parlementaire, que le mot qu'il a utilisé n'était pas antiparlementaire, mais qu'on pourrait le remplacer par un autre terme comme «courage».

En ce qui concerne son appel initial au sujet du caractère parlementaire ou non d'un terme, je n'ai pas entendu de mots qui n'étaient pas parlementaires et j'ai écouté pourtant avec beaucoup d'attention.

Cependant, la période réservée au débat est maintenant expirée. J'ai tenu compte des 13 minutes consacrées à la déclaration du ministre.

Comme il est 18 h 43, nous passons maintenant à la motion d'ajournement.

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