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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 18 mai 1995

QUESTION DE PRIVILÈGE

COMITÉ PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

COMPTES PUBLICS

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

    Projet de loi C-92. Adoption des motions portant présentation et première lecture 12761

LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    Projet de loi C-328. Adoption des motions portant présentation et première lecture 12761

PÉTITIONS

LES PROGRAMMES SOCIAUX

L'INDUSTRIE MINIÈRE

LA JUSTICE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES RÉCLAMATIONS FINANCIÈRES DUQUÉBEC

    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 12762
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 12764
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 12768
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 12772
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 12775

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES RETRAITÉS DE GM

LA MARCHE DES FEMMES QUÉBÉCOISES

LA JUSTICE

L'ASSOCIATION SINO-CANADIENNE DES AFFAIRES PUBLIQUES

LE TERRORISME

LE REGRETTÉ HECTOR TOE BLAKE

LA TCHÉTCHÉNIE

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

CBEF 540

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES JETS DE WINNIPEG

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'ASSOCIATION DE L'AVIATION ROYALE DU CANADA

LE FESTIVAL DES TULIPES

LES ÉLECTIONS EN ONTARIO

LES IMPLANTS MAMMAIRES

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

QUESTIONS ORALES

LE PROGRAMME NATIONAL DES INFRASTRUCTURES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12791
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12792
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12792
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12792
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12793

LES AFFAIRES INDIENNES

LE CANADIEN NATIONAL

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURES

    M. Harper (Simcoe-Centre) 12794
    M. Harper (Simcoe-Centre) 12794

LE CANADIEN NATIONAL

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 12795
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 12795

LE PROGRAMME NATIONAL DES INFRASTRUCTURES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12796
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 12796

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

LA POLITIQUE CULTURELLE

LES LANGUES OFFICIELLES

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 12797
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 12797

LA PUBLICITÉ ÉLECTORALE

    M. Harper (Calgary-Ouest) 12797
    M. Harper (Calgary-Ouest) 12798

LE TOURISME

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

L'IMMIGRATION

LES JETS DE WINNIPEG

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES RÉCLAMATIONS FINANCIÈRES DUQUÉBEC

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 12808
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 12812
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 12812
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 12815

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE


12757


CHAMBRE DES COMMUNES

<>

CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 18 mai 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

QUESTION DE PRIVILÈGE

COMITÉ PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je soulève aujourd'hui la question de privilège, car j'estime qu'on a gravement porté atteinte à mes privilèges de député, hier soir, au cours des délibérations du comité.

Comme ne l'ignore pas la Chambre, le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées se livrait à l'étude article par article du projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi. Au cours du débat article par article, mon premier amendement a été jugé irrecevable par le président, le député de Winnipeg-Nord, parce qu'il était disponible en anglais seulement.

Comme vous le savez, monsieur le Président, le Règlement du Parlement prévoit qu'un député peut présenter un amendement dans la langue de son choix. Cela arrive tout le temps. Aucun avis n'est nécessaire, et c'est au président et au greffier du comité qu'il revient de fournir, au besoin, la traduction aux membres du comité.

Les députés de mon parti ont immédiatement contesté la décision de la présidence, mais le reste du comité l'a confirmée. En appuyant une décision sur une affaire dans laquelle il n'est tout simplement pas compétent, le comité a porté atteinte à mon droit en tant que député de présenter des amendements à l'égard d'un projet de loi très important.

(1015)

Je suis allé voir le président et le greffier pour qu'ils m'expliquent pourquoi on violait manifestement ainsi mon privilège. Dans une explication inconséquente et fort contestable de sa décision, le président a dit qu'il avait rejeté mes amendements parce que je n'étais pas «un membre en règle du comité», ce que le greffier a réfuté immédiatement. J'étais un membre en règle du comité.

Par la suite, la conduite de la présidence s'est révélée répréhensible. Des motions pourtant légitimes ont été tout de suite jugées antiréglementaires. Le débat a été coupé. L'interrogatoire des témoins a été restreint. Et la liste s'allonge encore et encore. Plus d'une fois, nous n'avons pas pu faire autrement que contester la décision de la présidence. Tout cela figure au compte rendu; il suffit de le consulter.

Le comité avait, par exemple, convenu de suspendre ses travaux à minuit. J'ai signalé à la présidence qu'il était passé minuit, mais le président est passé à la motion suivante. À la fin de l'étude de cette motion, qui a fait l'objet d'un vote et a été adoptée par les représentants du parti ministériel, j'ai à nouveau signalé qu'il était passé minuit et j'ai rappelé notre entente préalable. Ils ont alors adopté une motion sans procéder à un vote.

Je reconnais que les comités sont maîtres de leur destinée, mais la démocratie doit prévaloir. Voici un extrait d'une décision que le président Fraser a rendue en 1987:

Il est essentiel pour notre régime démocratique que les sujets controversés puissent faire l'objet d'un débat d'une durée raisonnable, que l'on dispose de toutes les occasions raisonnablement possibles d'entendre les arguments pour et contre les sujets en cause, et que des tactiques dilatoires raisonnables soient permises afin de donner aux adversaires d'une mesure la chance de convaincre le public d'appuyer leur point de vue.
Malgré cela, les membres du comité ont ensuite proposé l'attribution de temps de manière à limiter le débat à cinq minutes par article, cela, après que le comité eut étudié la mesure pendant deux heures. Au total, cinq minutes ont été accordés à tous les partis pour l'étude article par article.

C'est tout à fait inacceptable. Hier soir, lors de l'étude de certains articles, non seulement on m'a refusé le droit de présenter un amendement sur certains articles, mais je n'ai pas pu non plus prononcer un mot dans le cadre du débat. Je ne peux m'acquitter de mes fonctions de député si l'on m'empêche de présenter des amendements et d'en débattre ensuite. C'est absolument inacceptable. Je ne sais que faire. Je suis assez hors de moi.

Par sa conduite d'hier, le président du comité, le député de Winnipeg-Nord, a outrepassé ses pouvoirs.

Je demande, monsieur le Président, que vous rendiez une décision sur cette question très importante et que vous suspendiez l'étude article par article de la mesure d'ici à ce que vous soyez prêt à vous prononcer, car le comité siège actuellement. Je m'en remets à vous, car je ne sais que faire. Je ne puis ni parler ni présenter d'amendements. J'abandonne.

Une voix: Non, n'abandonnez pas.

M. Strahl: Non, je n'en ferai rien.


12758

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je sais qu'au moins un autre député veut se prononcer sur cette instance tendant à démontrer qu'il y a là matière à soulever la question de privilège.

Tout d'abord, je signale à la Chambre que le comité n'a pas déposé son rapport. Aux termes des conventions de la Chambre, tant qu'un comité n'a pas déposé son rapport, la Chambre n'est pas en mesure de décider si la question de privilège paraît fondée à première vue.

Cela dit, même si le comité avait communiqué son rapport à la Chambre, le comité resterait maître de la conduite de ses propres travaux dans les limites, bien sûr, des règles que la Chambre lui a imposées.

M. Strahl: Et vous appelez ça la démocratie?

M. Boudria: L'article 108 et d'autres articles du Règlement sont on ne peut plus clairs à ce sujet. Voilà pourquoi j'estime que la présidence ne devrait pas se prononcer sur cette question à ce moment précis. Toutefois, dans le cas fort improbable où la présidence déciderait de statuer maintenant, je tiens à porter à l'attention du Président l'essentiel des propos tenus pour invoquer la question de privilège.

D'abord, il a été allégué aujourd'hui que l'on avait en quelque sorte tenté d'empêcher le député de prendre la parole au sujet de ce projet de loi pour qu'il puisse en faire un examen approfondi. Or, cette mesure législative est à l'étude depuis cinq mois. Encore hier soir, le comité a siégé pendant plus de six heures et s'est ajourné à 24 h 05. Dans ces conditions, on peut difficilement parler de tentative pour étouffer la discussion.

(1020)

À ce moment-ci, il est important aussi d'ajouter qu'il est exact de dire que c'est un membre du comité qui a proposé de limiter la durée du débat sur chaque motion. Cette proposition ne venait pas du gouvernement, mais bien de l'opposition. Certes, on aurait tort d'accuser le gouvernement de vouloir bâillonner l'opposition. D'ailleurs, la motion, qui a été dûment exécutée, avait été proposée par un député de l'opposition et approuvée par le comité en entier.

Des amendements ont bel et bien été proposés hier. En fait, on me dit qu'une quarantaine d'amendements avaient été proposés avant que le comité ne siège hier. À cette séance, un député a, à lui seul, proposé une pile d'amendements dont la hauteur dépasse plusieurs fois celle du projet de loi.

Dès que les amendements ont été proposés, on a précisé que le député en question n'était pas un membre du comité dûment mandaté. Tous les amendements qu'il a proposés ont donc été jugés irrecevables, du fait que le député n'avait pas qualité pour agir au comité. Par la suite, le député a reçu le mandat de siéger au comité, conformément aux règles parlementaires. En d'autres termes, le whip de son parti l'a mandaté, de sorte que le député a pu proposer les amendements.

Venons-en maintenant aux amendements et à la question de la langue. Il est exact que la Chambre et ses comités pourront, comme ils l'ont fait dans le passé, permettre qu'un amendement soit présenté dans une seule des langues officielles. Nous l'avons déjà fait. Mais il est également exact que, en vertu non seulement du Règlement, mais aussi d'une courtoisie élémentaire, un document important de la Chambre doit être présenté dans les deux langues officielles. Il en est ainsi parce que, comme je l'ai dit, nos règles le prescrivent et, ensuite, simplement en raison du volume, parce qu'il faut permettre à tous les députés de participer au débat.

Quand un député propose une pile d'amendements plus haute que le projet de loi lui-même, cette règle doit aussi s'appliquer. Autrement dit, plusieurs centaines ou dizaines d'amendements devraient être traduits, encore une fois pour permettre à tous les députés d'en débattre. Dans ce cas-ci, un député ne peut pas se fier au système d'interprétation pour prendre connaissance d'un ou deux amendements de trois ou quatre mots chacun. Il est question de centaines et peut-être de milliers de mots d'un projet de loi que l'on veut modifier. La présidence du comité a estimé que cette courtoisie était essentielle au bon fonctionnement du comité et, en fin de compte, de la Chambre.

D'après ce qu'on m'a dit, la présidence a aussi jugé que certains amendements, pour ne pas dire un grand nombre d'entre eux, ne portaient pas sur le fond du projet de loi. Ils étaient purement dilatoires. On m'a expliqué, par exemple, que quelqu'un voulait soustraire les gens qui travaillent dans les restaurants à l'obligation d'embaucher des personnes d'origines ethniques différentes, et ainsi de suite. Monsieur le Président, vous avez déjà reconnu que cette question ne relève même pas de la compétence fédérale. Selon le comité, un amendement comme celui-là et plusieurs autres n'avaient guère d'autre but que de retarder les travaux du comité, après cinq mois de délibérations et six heures de séance ce jour-là. Ils n'avaient absolument pas pour but d'amender le projet de loi.

Enfin, il est vrai que le comité a suspendu ses travaux à minuit cinq. Le député a fait valoir cela quand il a allégué l'atteinte à son privilège. Or, la Chambre sait sûrement qu'il n'est pas tout à fait sans précédent de suspendre les travaux d'un comité cinq minutes après l'heure habituelle, pour lui permettre de terminer l'étude des questions dont il est saisi, quand la majorité de ses membres est d'accord.

(1025)

Après une discussion de trois heures sur un article du projet de loi, les membres du comité ont jugé qu'il était dans l'intérêt de ce dernier de limiter à cinq minutes le débat sur chaque article. Ils ont pris cette décision presque à l'unanimité, un ou deux membres s'y étant opposés. Les membres du comité ont pris cette décision en gardant à l'esprit les principes de la démocratie; ils ont eu la sagesse de le faire et ils en avaient le droit.


12759

Le comité n'a pas encore fait rapport à la Chambre. Quand il le fera, tout député qui n'était pas un membre du comité-comme c'est le cas de celui qui a proposé les amendements initialement-pourra à nouveau présenter des amendements à l'étape du rapport, si le Président et le personnel très compétent qui l'aide considèrent les amendements recevables.

À mon avis, il n'y a donc pas d'atteinte au privilège en l'occurrence. Même si les arguments évoqués par le député étaient fondés-et ils ne le sont pas, selon moi-, il n'y aurait pas atteinte au privilège actuellement, mais seulement ultérieurement.

Je crois que les membres du comité ont travaillé très fort. Je sais que le député d'Hochelaga-Maisonneuve et plusieurs autres députés ont travaillé d'arrache-pied. Ils ont travaillé très tard hier soir pour poursuivre leurs travaux après cinq mois de délibérations.

Certains s'opposent peut-être au projet de loi, mais ils ne gagneront rien à soulever à la Chambre des questions de privilège qui ne sont absolument pas fondées et qui, même si elles l'étaient, n'auraient pas été soulevées au moment opportun. Selon moi, la présidence du comité a pris la décision qui s'imposait, en s'appuyant sur les conseils de son greffier et de son personnel, et elle a permis au comité de progresser dans l'étude de la mesure législative dont il était saisi, comme il incombe à la présidence de le faire. Le président n'a rien fait d'autre que d'assumer les fonctions habituelles de la présidence. Je suis certain que, comme moi, la majorité des députés estiment qu'il assume la présidence de ce comité d'une manière exceptionnelle.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, vous me permettrez de faire deux mises au point, de crainte que l'intervention du collègue n'amène la Présidence à escamoter certains faits. Nous avons permis au député de Fraser Valley-Est d'introduire au cours des travaux, comme c'est d'usage courant de le faire, des amendements qui étaient dans une seule langue.

Vous devez savoir que dès le début de nos travaux, d'abord à plusieurs reprises le greffier du comité a sollicité les amendements de l'un ou l'autre des partis en présence, de manière à ce que nous puissions les obtenir dans les deux langues. Vous devez savoir que ce dont il est question, c'est qu'en début de délibérations, le collègue de Fraser Valley-Est a été tenté de déposer une trentaine d'amendements, peut-être même plus. Donc, on parle d'une liasse d'amendements et nous avons, comme opposition officielle, demandé à ce que ces amendements ne puissent être étudiés, ne puissent être retenus, parce que nous avions, à l'intérieur de nos règles, au sous-comité du programme et de la procédure, retenu un élément de principe qui est que tous les documents et les amendements qui sont déposés à l'intérieur de nos travaux doivent être disponibles dans les deux langues.

Je vous ferai remarquer qu'au sous-comité du programme et de la procédure, le Parti réformiste est représenté. Ils ont appuyé ces règles et je veux m'inquiéter du manque de courtoisie et de respect qu'a manifesté le député de Fraser Valley-Est à l'endroit des francophones. Je veux attirer votre attention sur le fait qu'en cours de travaux, j'ai moi-même pris la parole pour dire que nous acceptions, comme c'est d'usage courant de le faire encore une fois, que le député de Fraser Valley-Est puisse, de façon manuscrite, introduire des amendements disponibles dans une seule des langues officielles.

Je veux porter à votre attention qu'en toutes circonstances, nous avons tenté de collaborer et qu'il est pour le moins audacieux, de la part du député, de prétendre qu'il a été limité dans ses interventions, puisque le parcours du temps alloué vous permettrait de constater que le député de Fraser Valley-Est a monopolisé entre 80 et 90 p. 100 du temps disponible pour les débats. Et ce n'est qu'après deux heures d'obstruction systématique non pas sur le fond mais sur la forme, que nous avons senti le besoin d'obtenir un consentement, à l'intérieur de nos travaux comme comité, pour suggérer au président qu'une fois les cinq minutes de temps écoulées pour chacun des articles portés à notre attention, nous puissions appeler le vote.

(1030)

Comble de générosité, le président est revenu à la charge pour proposer qu'une période de 15 minutes soit allouée, et vous serez surpris de constater que c'est le collègue du Parti réformiste qui s'y est opposé.

Alors, je compte sur la Présidence pour rendre une décision qui sera respectueuse du droit des francophones de ce pays.

[Traduction]

Le Président: Le député de Fraser Valley-Est a la parole pour traiter de la même question de privilège. Je demande au député de bien vouloir être assez bref.

M. Strahl: Monsieur le Président, il importe de clarifier plusieurs faits, je crois, puisque la présidence n'a pas pu être présente, hier soir, à la séance du comité.

Le député ministériel qui est intervenu n'y était pas non plus, mais il se peut qu'on l'ait mal renseigné.

D'abord, je me suis assis à la table du comité et j'ai proposé une motion visant à convoquer d'autres témoins. Cela n'avait rien à voir avec l'étude article par article. On m'a alors signalé que je n'avais pas remis au greffier mon formulaire de membre du comité. J'ai tout de suite remis la feuille au greffier du comité et à la présidence afin de pouvoir participer à la mise aux voix article par article.

Après avoir donné le document pertinent au greffier-ce que la présidence vérifiera sûrement auprès du greffier-, j'ai proposé mes amendements. C'est alors qu'ils ont été jugés irrecevables et qu'on les a jetés. J'ai même demandé à les ravoir, mais en vain. Je n'ai même pas pu les ravoir. J'en avais toute une pile, et ils ont tous disparu dans un trou noir ou Dieu sait où.

Nous n'étions pas limités à cinq minutes par motion, ce qui aurait déjà été difficile, mais bien à cinq minutes par article.


12760

Même les députés ministériels avaient jusqu'à trois ou quatre amendements par article à proposer. Ils les ont lus et expliqués, et le débat s'est résumé à cela. C'était cinq minutes non pas par motion, par amendement, par sous-amendement, mais cinq minutes par article. Nous avons adopté des articles entiers, parfois toute une page du projet de loi sans aucun débat.

Cela ne peut continuer, monsieur le Président. C'est ce qui se produit à l'heure actuelle. On adopte des articles sans débat. On ne peut laisser continuer cela. J'ignore quoi faire. Je peux retourner là-bas et taper sur la table, mais le fait est qu'on adopte des articles sans en discuter. Il faut que cela cesse.

Enfin, il est intéressant que le député ait dit que le comité avait ajourné à 0 h 5 et reconnu ainsi qu'il avait dépassé l'heure d'ajournement, bien qu'on l'ait précisé à la présidence. En effet, je le lui ai signalé, dans le cadre de deux rappels au Règlement, que nous nous étions entendus pour arrêter à minuit. La présidence a déclaré qu'il fallait poursuivre. Le comité a alors adopté une autre modification. J'ai dit qu'on avait maintenant vraiment dépassé minuit, puisqu'il était minuit et cinq. J'ai ajouté que je ne pouvais concevoir que nous puissions poursuivre nos travaux. Le président a tapé sur la table avec son marteau et on a ainsi adopté la modification sans même tenir un vote.

Comment peut-on adopter des modifications sans un vote? On n'est pas censé le faire. Je suppose qu'on peut affirmer qu'on agit ainsi dans le but d'accélérer la procédure. Par contre, pour ce faire, il ne s'agit pas de fouler au pied les droits des députés qui veulent discuter des articles et ont le droit de présenter des amendements, dans les deux langues officielles. Il se peut que les ministériels pensent faire plaisir à certains groupes en faisant fi des droits des députés qui ont le privilège de faire part des préoccupations de leurs électeurs. C'est de l'hypocrisie, de la dictature et du despotisme. C'est tout à fait contraire au Règlement.

Le Président: À l'ordre! Chers collègues, j'ai écouté cette question de privilège. Je pense avoir suffisamment d'informations. Je commence à avoir un tableau complet de ce qui s'est passé.

De temps à autre, les députés sont exaspérés parce que les choses ne se passent pas comme ils le voudraient. C'est compréhensible. C'est ce à quoi on doit s'attendre dans cette enceinte. Les choses ne se déroulent pas toujours comme nous le souhaiterions. Je voulais signaler certaines similarités que les députés ont portées à l'attention de la présidence.

(1035)

Dans son introduction, le député de Fraser Valley-Est a déclaré qu'en fait, le comité était maître de son destin. Étant donné tous les comités permanents qui existent, si la Chambre doit connaître de tous les appels des décisions des comités, elle passerait la majeure partie de son temps à s'occuper de ces appels.

Dans une décision antérieure, le président Fraser a déclaré, en fait, qu'il y avait des exceptions à tout. D'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, il me semble que le comité, qui est maître de son destin, a décidé, de façon démocratique, de procéder d'une façon particulière. Si un, deux ou cinq députés ne sont pas d'accord, là encore, on en prend note.

Lorsqu'un député demande à la présidence de prendre une décision, la règle a pratiquement toujours consisté pour la présidence à attendre que le comité en cause présente un rapport à la Chambre. Dans ce rapport, si le comité en décide ainsi, on signalera les griefs soulevés.

Nous aurons alors tous la chance, dans cette enceinte, d'examiner la question et de rendre une décision en tant qu'institution, car la Chambre est maîtresse de son destin. Dans le passé, les présidents ont, la plupart du temps, donné une très grande marge de manoeuvre aux comités, du fait de la très grande importance du travail qu'ils accomplissent, et ils ont attendu qu'ils présentent leur rapport à la Chambre.

Or, à ce stade-ci, je n'ai pas de rapport du comité en main. Aussi, je ne veux pas rendre de décision tant que le comité n'aura pas soumis son rapport. Il se peut que le député ait des raisons de soulever la question de privilège à l'avenir. Je n'écarte pas cette possibilité, mais à ce stade-ci, je ne peux que décider que la question de privilège n'est pas fondée.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, à propos de la même question de privilège, mais dans un autre ordre d'idées. . .

Le président: À l'ordre. J'ai statué sur la question de privilège. Maintenant que ce point est réglé, si le député veut soulever la question de privilège sur un autre point, je suis prêt à l'écouter, mais s'il s'agit de la même question de privilège, je prie la Chambre de bien vouloir accepter la décision de la présidence.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais que vous m'éclairiez sur un point.

Je veux soulever une autre question très importante. Tout d'abord, si je cromprends bien le Règlement, nous devons soulever la question de privilège à la première occasion. Comment peut-on expliquer qu'il faut attendre qu'un rapport ait été déposé avant qu'un député puisse soulever la question de privilège, alors même que celle-ci doit être soulevée à la première occasion?

Mon collègue a légitimement soulevé la question de privilège à la première occasion. Je vous demande donc de m'éclairer sur ce point.

L'autre aspect que j'aimerais souligner, c'est que des changements ont été apportés au Règlement. C'est la première législature où ces changements ont été mis en oeuvre. Autrement dit, il y a


12761

peut-être lieu de créer un précédent et il est sans doute fort important que vous établissiez ce précédent dans les règles.

Quand des projets de loi sont renvoyés à un comité avant l'étape de la deuxième lecture, la Chambre renonce à tenir un débat à cette étape. Chaque parti dispose de 180 minutes de parole pour se prononcer sur une motion portant renvoi du projet de loi à un comité avant qu'il soit lu pour la deuxième fois. Il n'y a effectivement pas de débat à l'étape de la deuxième lecture. On procède au vote sur la deuxième lecture sans débat.

Il est donc très important de créer un précédent afin de prévoir un débat dans les règles à l'étape de la deuxième lecture. Le but de l'entente concernant les changements apportés au Règlement était d'accorder aux membres du comité suffisamment de temps pour présenter des amendements au moment de l'étude article par article.

(1040)

Par conséquent, monsieur le Président, je vous demanderais de réfléchir très sérieusement au précédent qui est créé ici, pour déterminer si les droits des députés sont protégés, en vertu des dispositions actuelles du Règlement, dans le cadre de cette nouvelle procédure. Je pense que c'est très important, car la situation pourrait se reproduire à de nombreuses reprises à la Chambre et aux comités. Je tiens simplement à dire que cela nous inquiète.

Le Président: J'accepte d'intervenir pour une clarification.

Le Président se conforme toujours aux règles établies par la Chambre. Si un député a un grief, il peut toujours demander des éclaircissements au Président, mais il dispose aussi d'autres moyens. Le député veut peut-être soumettre la question au comité du Règlement et des procédures.

Cependant, dans le cas présent, j'ai entendu toutes les interventions et j'estime qu'il n'y a pas matière à soulever la question de privilège. On pourrait soulever un point de privilège au comité. Mais qui suis-je pour dire aux députés comment mener leurs affaires?

Pour l'instant, je ne sais pas si ce point a été soulevé au comité dans le cadre de la question de privilège. Je l'ignore. Tout ce que je sais, c'est ce que les députés l'ont soulevé aujourd'hui à la Chambre. D'après ces propos, j'estime que la question de privilège n'est pas fondée.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

COMPTES PUBLICS

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter le dixième rapport du Comité permanent des comptes publics. Lors de la publication du rapport du vérificateur général, en février 1994, la question des trop-payés de pension estimés entre 120 et 200 millions de dollars par le vérificateur général a fait couler beaucoup d'encre.

Pour le comité, derrière ces chiffres se cachait une question plus importante, la capacité du ministère à gérer efficacement les programmes de pensions. Le comité a donc tenu deux réunions sur le sujet avec des hauts fonctionnaires du ministère du Développement des ressources humaines et du Bureau du vérificateur général du Canada.

Le Comité permanent des comptes publics formule dans ce rapport une série de recommandations dont la plupart comporte un échéancier pour leur mise en application. À ce rapport est annexée l'opinion dissidente des députés de Chicoutimi et de Joliette.

Conformément à l'article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale au présent rapport.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

L'hon. Alfonso Gagliano (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-92, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

(1045)

[Français]

LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ) demande à présenter le projet de loi C-328, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-chômage.

-Madame la Présidente, l'objectif de ce projet de loi est de transférer du ministère du Revenu national au ministère du Développement des ressources humaines la responsabilité d'évaluer l'assurabilité des emplois au programme d'assurance-chômage. Plusieurs avantages sont visés. On croit qu'il pourrait y avoir une diminution significative des délais de traitement à cause du nombre de points de service accrus qu'on retrouve au niveau du ministère du Développement des ressources humaines.

Il y a aussi une meilleure connaissance du dossier qui est traitée par la personne responsable; celle-ci traite des dossiers issus de sa région et peut mieux évaluer les situations particulières présentées. Cela va aider à développer une règle d'interprétation plus équitable, selon moi. C'est donc dans cet esprit-là que je dépose ce projet de loi.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)


12762

[Traduction]

PÉTITIONS

LES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Nelson Riis (Kamloops, N.P.D.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom d'un certain nombre d'habitants de Kamloops qui soulignent que les programmes sociaux du Canada forment le tissu même de notre pays et nous définissent en tant que pays civilisé et humain.

Les pétitionnaires soulignent que les efforts consentis pour bâtir le régime universel de soins de santé, le programme de sécurité de la vieillesse et d'autres excellents programmes constituent un aspect de notre patrimoine dont nous sommes très fiers. Par conséquent, ils demandent au gouvernement fédéral de maintenir et d'améliorer ces programmes sociaux qui reviennent de droit aux Canadiens et qui font partie de leur patrimoine.

L'INDUSTRIE MINIÈRE

M. Nelson Riis (Kamloops, N.P.D.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter une pétition très longue sur une autre question. Les pétitionnaires, de Logan Lake, en Colombie-Britannique, soulignent tous les avantages que l'industrie minière procure au Canada, surtout en ce qui concerne notre balance commerciale. Ils prient donc le Parlement de prendre des mesures qui permettront de multiplier les emplois dans ce secteur, de stimuler les activités d'exploration et de reconstituer les réserves minérales du Canada, afin de garantir l'existence de nos collectivités minières et de préserver notre industrie minière.

LA JUSTICE

M. Nelson Riis (Kamloops, N.P.D.): Madame la Présidente, je présente une pétition, au nom d'habitants de tout le centre de la Colombie-Britannique, qui font remarquer que les Canadiens, surtout les femmes et les enfants, ont de plus en plus peur de marcher dans nos rues et dans nos quartiers. À leur avis, de nombreux contrevenants violents et sexuels bénéficient prématurément d'une libération conditionnelle ou sont libérés sans avoir été traités ou réhabilités comme il le faudrait.

Les pétitionnaires font valoir diverses préoccupations et ils prient la Chambre des communes et le ministre de la Justice de prendre les mesures nécessaires pour modifier le Code criminel du Canada et le système de libération conditionnelle, afin de garantir la sécurité et la paix dans nos quartiers, au Canada.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je suggère que toutes les questions soient réservées.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.


12762

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1050)

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES RÉCLAMATIONS FINANCIÈRES DU QUÉBEC

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ) propose:

Que la Chambre dénonce le retard du fédéral à répondre aux réclamations du Québec relatives à l'éducation des jeunes autochtones du Nord québécois de 119 millions, à la compensation de 135 millions dans le cadre du programme de stabilisation pour 1991-1992 et à la réclamation de 79 millions en frais encourus lors des événements d'Oka à l'été 1990.
-Madame la Présidente, je vous remercie de m'accorder le privilège d'intervenir sur cette motion. Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais également remercier mon leader, le leader de l'opposition officielle, de m'avoir demandé de proposer cette motion en Chambre lors de la journée de l'opposition. Je considère que c'est important et c'est une marque de confiance que de me demander d'intervenir en premier sur cette motion qui est un exemple on ne peut plus éloquent du fonctionnement du système fédéral.

Au cours des quelque 20 minutes qui suivront, je voudrais expliquer pourquoi l'opposition officielle a déposé cette motion aujourd'hui en cette Chambre et ce qu'elle signifie exactement. Autrement dit, de quoi parlons-nous quand nous faisons référence aux trois dossiers dont vous avez fait mention, celui concernant les réclamations entourant les événements d'Oka, le remboursement des frais pour l'éducation des jeunes autochtones, particulièrement en territoire cri du nord du Québec, de même que les paiements de stabilisation.

En conclusion, je tenterai d'expliquer non seulement les coûts que représentent ces réclamations, que l'on évalue à plus de 330 millions de dollars, mais également les coûts reliés à toute cette opération. C'est pour cela que je disais, au début de mon allocution, que cette motion-et c'est là la raison pour laquelle nous la présentons aujourd'hui-illustre d'une façon on ne peut plus claire et évidente les vices mêmes du fonctionnement du système fédéral canadien.

On reproche souvent aux souverainistes de se lever en cette Chambre et de discourir simplement pour renvendiquer de plus en plus de nouveaux droits pour le Québec. On entend souvent cette argumentation de la bouche de nos amis libéraux de même que de la part de nos amis du Parti réformiste, soit que les députés du Bloc québécois ne cessent de réclamer toujours davantage pour le gouvernement du Québec. Même chose en parlant du gouvernement du Québec qui est formé actuellement par le Parti québécois, nos amis fédéralistes répètent continuellement que les souverainistes et les séparatistes exigent toujours davantage du gouvernement fédéral.

Eh bien, cette motion nous démontre à quel point, dans le fonctionnement-je ne sais pas si je peux utiliser l'expression «normal»-habituel du fédéraliste, ce système ne fonctionne pas. Je dirais même plus, il fonctionne au détriment des intérêts du Québec dans cet exemple précis.

M. Milliken: Oh! Oh!


12763

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Si le député de Kingston et les Îles veut bien m'accorder quelques secondes, je tenterai de le convaincre, si cela est possible, de la justesse de nos propos.

En fait, la réclamation de 330 millions de dollars du gouvernement du Québec a été présentée et renouvelée par la ministre québécoise des Affaires intergouvernementales, Mme Beaudoin, cette semaine, ici même à Ottawa, lorsqu'elle est venue rencontrer son homologue canadien pour réclamer ce dû qui, dans un cas en particulier, remonte à plus de dix ans.

Trois dossiers font l'objet de cette motion. Le premier concerne les frais relatifs à ce qu'il est convenu d'appeler l'affaire d'Oka, qui remonte à 1990. Tout le monde s'en souvient, particulièrement ces jours-ci, où ces événements risquent de se reproduire par l'intervention de certains autochtones d'Oka.

(1055)

En 1990, on se souviendra que le gouvernement du Québec a dû assumer, au niveau de la sécurité publique, du maintien de l'ordre dans la région d'Oka et de Kanesatake, des frais énormes dûs aux événements dont j'ai fait mention il y a quelques instants. Puisque l'on fait référence, naturellement, au maintien de la sécurité publique, puisque ces événements faisaient référence au dossier autochtone, qui relève de la compétence du gouvernement fédéral, il était tout à fait à propos que le gouvernement du Québec demande au gouvernement fédéral de payer pour les frais supplémentaires encourus par la présence nécessaire de la Sûreté du Québec pendant ces événements.

Il s'agit là d'une facture de 84 millions de dollars qui est réclamée. Un montant de 5,3 millions de dollars a déjà été remboursé par le gouvernement fédéral, ce qui laisse donc un solde d'environ 79 millions de dollars. On parle d'événements qui datent de 1990 et ce dossier, cette réclamation, est toujours en souffrance. Et qu'ont répondu les responsables politiques au cours des années où le Québec avait un gouvernement fédéraliste à la tête des affaires de l'État, c'est-à-dire le gouvernement libéral de M. Bourassa et de M. Johnson par la suite? Qu'ont répondu les responsables politiques fédéraux? Le ministre de la Défense du gouvernement précédent, en septembre 1993, répondait qu'il refusait de rembourser la somme totale exigée par le gouvernement du Québec concernant les événements d'Oka, puisque ces événements, disait-il, découlaient d'une situation qui touchait l'ordre public et non le bien-être public.

C'est complètement ridicule et je soumets que le gouvernement actuel, par l'entremise de ses porte-parole, maintient cette allégation. C'est complètement ridicule et j'invite le ministre responsable des Affaires intergouvernementales, le ministre de la Défense, le ministre de la Justice et tout le gouvernement à aller faire un tour et à discuter avec les gens de Kanesatake, les gens d'Oka, pour voir si leur bien-être public n'a pas été affecté pendant ces événements. Le simple fait d'utiliser un argument aussi ridicule devrait faire en sorte que le gouvernement soit gêné et prenne conscience du fait qu'on doit tout de suite régler ce dossier.

Un deuxième dossier est celui concernant l'éducation des jeunes autochtones du nord québécois. Il s'agit là d'une réclamation en vertu d'une entente fédérale-provinciale signée dans le cadre des accords de la Baie James et qui fait en sorte que le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral s'entendent pour assumer les frais entourant l'éducation des jeunes autochtones, plus particulièrement les jeunes Cris de la région du nord québécois.

Il y a là un compte en souffrance de l'ordre de 119 millions de dollars qui sont réclamés depuis près de dix ans maintenant par les gouvernements qui se sont succédé à Québec et, je le répète, des gouvernements d'allégeance fédéraliste.

(1100)

Quand on parle du gouvernement de M. Bourassa, je pense qu'il n'y aura personne de l'autre côté pour prétendre qu'il ne s'agissait pas là d'un gouvernement qui voulait absolument s'entendre à n'importe quel prix avec le gouvernement fédéral.

Si le ministre des Affaires intergouvernementales a quelque doute que ce soit concernant ce que je viens de dire, il n'a qu'à consulter sa collègue d'Outremont qui faisait partie de ce gouvernement et qui elle-même, à titre de ministre de l'Éducation du gouvernement du Québec, a procédé aux mêmes réclamations.

Il s'agit, je le répète, d'une entente fédérale-provinciale qui faisait en sorte que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial partagaient les frais d'éducation pour les jeunes Cris. Dû à l'augmentation de la population, le fait que plus de jeunes se sont inscrits dans les différents cours, ont décidé de parfaire leur éducation, leur formation, les coûts ont été plus élevés que prévus, et l'argument du gouvernement fédéral consiste à nous dire que ces réclamations ne sont pas justifiées, qu'il n'a pas été consulté et qu'il refuse donc de rembourser ce montant de 119 millions réclamé par le gouvernement du Québec.

Au moment où il y a en cette Chambre des débats qui concernent la volonté du gouvernement fédéral d'imposer des normes nationales dans les programmes à frais partagés tels l'enseignement postsecondaire et la santé, il est important de se questionner, de s'interroger. Quand on voit comment des ententes dûment signées par le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral ne sont pas respectées dans leur application quotidienne, est-ce à dire que lorsque le gouvernement fédéral imposera ses normes, dites nationales, chaque fois que le gouvernement du Québec demandera au gouvernement fédéral d'assumer ses responsabilités financières, il se verra servir une réponse du genre de celle qu'on reçoit actuellement disant que le gouvernement fédéral n'a pas été consulté à chaque dépense, qu'il n'a pas reçu toutes les factures et qu'il faut procéder à un examen très exhaustif du dossier avant que quelque remboursement que ce soit puisse être fait au gouvernement du Québec?

Je souligne que la réponse du ministre des Affaires intergouvernementales dans ce dossier a été de dire qu'il demanderait à ses fonctionnaires de rencontrer les fonctionnaires du gouvernement du Québec et d'étudier le dossier plus à fond. Cela fait déjà dix ans que cette question traîne. Cela prendra le temps qu'il faut, on n'est pas pressé. Le ministre l'a répété publiquement cette semaine: «Je ne voudrais pas créer d'illusion aux responsables politiques du gouvernement du Québec en laissant entendre que cela pourrait se régler facilement.» Non, non, il faut que cela


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prenne du temps, et pour s'en assurer, on va donc demander à nos fonctionnaires de se rencontrer, de discuter, de placoter, pour régler, je le répète, une entente signée il y plus de 15 ans.

La dernière réclamation concerne un remboursement de 137 millions exigé par le gouvernement du Québec, par les gouvernements précédents, je le mentionne encore une fois. J'insiste, ce ne sont pas des faits nouveaux qui ont été mis sur la place publique par l'actuel gouvernement du Québec, le gouvernement de M. Parizeau, ce sont des réclamations qui remontent à 10 ans, 5 ans, 3 ans et qui ont été faites par l'ancien gouvernement libéral, fédéraliste.

Les paiements de stabilisation est une formule très compliquée que je ne tenterai pas de vous expliquer parce que j'en perdrais mon latin, mais qui veut rétablir une espèce d'équité dans les dépenses encourues par les provinces pour des responsabilités qui sont les leurs. Le gouvernement fédéral s'engage à faire un examen des entrées fiscales, des entrées d'impôts et à compenser les provinces qui, pour des raisons économiques, à cause de la situation économique, ont eu moins d'entrées fiscales que prévu. Le gouvernement stabilise les revenus des provinces avec ce programme qu'il a lui-même initié.

(1105)

À deux reprises, le gouvernement du Québec a présenté des réclamations et à deux reprises, il a obtenu une fin de non-recevoir de la part des autorités fédérales. La dernière fois que cette réclamation a été renouvelée par l'actuel ministre des Finances du gouvernement du Québec, la réponse du ministre des Finances fédéral a été la suivante: «Si vous voulez obtenir compensation en vertu de ce programme de stabilisation pour les 137 millions que vous réclamez, il n'y a qu'une solution, on vous conseille d'aller devant les tribunaux.»

Après avoir pris conscience des faits et causes du fédéralisme évolutif, du statu quo évolutif, comme nos amis d'en face se plaisent à le dire, nous voici donc rendus au fédéralisme judiciaire. Autrement dit, quand on veut faire respecter des programmes mis de l'avant par le gouvernement fédéral, il faut aller devant les tribunaux pour obtenir justice. C'est la nouvelle façon de faire du ministre des Affaires intergouvernementales, du ministre des Finances, qui disent: «Allons devant les tribunaux.»

Je ne voudrais pas caricaturer, mais cela me rappelle presque les propos d'un humoriste québécois, le père Gédéon, pour ne pas le nommer, qui disait: «On va aller en cour perdants, et on va jusqu'en Cour suprême.» C'est un peu l'attitude du gouvernement libéral. On reconnaît qu'il y a un dû au gouvernement du Québec, mais pour faire en sorte que ça prenne du temps et que cela ne se règle qu'au bout de nombreuses années, on dit au gouvernement: «Allez devant les tribunaux.»

En conclusion, j'ai mentionné au début qu'il s'agissait là d'un bel exemple du fonctionnement du fédéralisme. J'ai dit également que je voulais souligner les coûts engendrés par un tel fonctionnement. On parle, bien sûr, d'une réclamation fondée, reconnue. Les porte-parole du gouvernement fédéral reconnaissent le fait que les montants mentionnés sont exacts.

A-t-on idée des coûts humains et des coûts financiers engendrés par toutes ces discussions entourant simplement ces trois dossiers?

M. Cauchon: C'est une campagne de peur.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Savons-nous combien de fonctionnaires, et le député d'Outremont devrait peut-être faire une recherche à ce sujet, autant au fédéral qu'au gouvernement québécois, se sont rencontrés, se sont téléphoné, se sont écrit, ont échangé des piles de documents? Tout cela s'ajoute, pour les contribuables, aux frais de la réclamation de 333 millions.

Si on avait ce montant, si les Québécois et les Québécoises pouvaient prendre conscience, pouvaient réaliser les coûts énormes de ce fonctionnement, il est sûr qu'ils opteraient sur-le-champ pour la souveraineté du Québec. Le jour où nous pourrons assumer nous-mêmes nos propres responsabilités, le jour où nous pourrons nous-mêmes prendre les décisions qui concernent notre avenir collectif, on n'aura pas besoin de se faire dire par le ministre des Affaires intergouvernementales fédéral: «Allez devant les tribunaux; réunissons nos fonctionnaires», on va pouvoir prendre des décisions. Et c'est là le sens de la motion qui a été déposée par l'opposition officielle.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté ce discours avec beaucoup d'attention. Malheureusement, je n'ai pas entendu le vrai côté humain du problème que vivent les autochtones au Québec, et même dans l'ensemble du Canada, il ne faut pas se le cacher.

On se sert d'un litige entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral qui dure déjà depuis une dizaine d'années, effectivement. Il ne faut pas oublier non plus que le gouvernement fédéral a quand même versé des sommes considérables.

Cependant, je vais laisser à mes collègues ministériels le soin de faire un exposé sûrement très brillant et instructif pour l'opposition.

(1110)

Sauf que ce que je trouve regrettable dans la présentation de l'opposition, c'est qu'on n'a pas parlé de la condition de ces gens, de la condition sociale, humaine, économique que vivent les autochtones au Québec. Je crois qu'il aurait été plus humble ou encore plus humain, du côté de l'opposition, si on avait pu en entendre davantage sur des moyens à trouver pour sortir ces gens de la misère. C'est un litige qui existe depuis déjà plusieurs années.

Je me souviens de 1981, sous le gouvernement péquiste, quand tout près de 1 000 policiers ont envahi, il faut bien le dire, la réserve de Restigouche. C'était malheureux, et je crois que c'est à partir de ce moment que les relations entre les autochtones et les Québécois se sont gâtées. Je crois qu'on devrait en faire encore davantage pour eux. Je crois qu'on devrait encourager le dialogue et non pas faire le dialogue de la peur, des menaces, de la séparation, de dire: «Nous, si on pouvait faire cela nous-mêmes, nous Québécois, on aurait pu régler cela il y a fort longtemps».


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Je demande à l'opposition de faire un examen correct de la situation et non pas de mêler les cartes avec la souveraineté et le débat référendaire qui s'engage. Je crois qu'on doit tenir compte, dans un premier temps, de la situation économique de ces gens, de la situation sociale et des problèmes que vivent les autochtones au Québec. Je crois que c'est là, le vrai débat. Ce n'est pas une question d'argent, c'est une question humaine que l'on doit régler entre nous.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Madame la Présidente, je remercie mon collègue de ses remarques, mais je me vois dans l'obligation de lui rappeler quelques faits. Sans vouloir faire un cours d'histoire, je pense que quand on fait référence aux événements de Restigouche, comparativement à l'objet de la discussion de ce matin, il n'y a aucun lien qui puisse tenir. Je permettrai à mon collègue de revoir un peu son histoire et je suis sûr qu'il conviendra qu'il n'y a pas de lien à faire entre les deux dossiers.

Par contre, lorsqu'il parle de la nécessité de s'occuper des vrais problèmes auxquels sont confrontées les populations autochtones, là-dessus je lui donne raison. Je dirai au député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine de convaincre ses collègues d'adopter une position semblable, parce que c'est précisément ce que les gouvernements du Québec, toutes obédiences constitutionnelles confondues, fédéraliste ou souverainiste, ont fait au cours des dernières années, en lien avec l'entente de la Baie James, précisément dans le dossier auquel nous sommes confrontés ce matin, la réclamation de 119 millions de dollars pour l'éducation des jeunes autochtones du Nord québécois.

C'est précisément ce que les gouvernements du Québec ont fait, se préoccuper d'assurer des services de qualité, d'abord de répondre aux besoins de ces populations autochtones, c'est-à-dire que lorsqu'il y a une augmentation de la clientèle, il doit nécessairement y avoir une augmentation des dépenses dans le domaine de la santé ou dans le domaine de l'éducation, comme c'est le cas dans ce dossier. C'est précisément ce que le gouvernement du Québec a fait au cours des dix dernières années et c'est le gouvernement fédéral qui s'est montré chiche, qui s'est montré gratte-sou. Si le gouvernement du Québec avait attendu que le gouvernement fédéral respecte ses engagements, les autochtones du Nord n'auraient jamais eu de services, n'auraient jamais eu le niveau de services qu'ils ont actuellement, grâce à l'intervention du gouvernement du Québec.

Je dis donc à mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine qu'il soulève là un point très intéressant. Je lui demande de convaincre son ministre des Affaires intergouvernementales, le ministre des Finances, de communiquer immédiatement avec la ministre des Affaires intergouvernementales du Québec pour régler le dossier. Nous sommes d'accord. Des services de qualité ont été donnés, et maintenant, il ne reste qu'à régler la facture. Malheureusement, le ministre des Affaires intergouvernementales va faire dans ce dossier comme il a fait dans le dossier du référendum de Charlottetown en 1992, il va d'abord perdre la face, se raviser et, finalement, convenir qu'il doit payer et rembourser les coûts au gouvernement du Québec.

(1115)

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, si on veut parler de chiffres, il ne faut pas oublier que le gouvernement fédéral a versé près de 450 millions de dollars pour les autochtones du Nord québécois.

Cependant, j'aurais une autre question. On parle de ce litige historique du Québec vis-à-vis le gouvernement fédéral ces dix dernières années. Nous n'étions pas au pouvoir pendant cette période, mais je sais qu'un certain chef de l'opposition, ici aujourd'hui, faisait partie de ce gouvernement.

Justement hier, on l'a su car on lui a posé la question, il n'a jamais eu connaissance à l'époque des demandes de la province de Québec. C'est malheureux qu'on se serve des plus démunis de la société pour faire de la propagande, pour faire un discours politique aussi insensé, pour faire la promotion de la souveraineté et de l'indépendance sur le dos des plus démunis.

J'aimerais demander au chef de l'opposition où il était ces dix dernières années et pourquoi il n'a pas fait avancer cette demande du gouvernement du Québec auprès de son propre gouvernement quand il était au pouvoir?

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Madame la Présidente, j'espère qu'on ne passera pas la journée à entendre des énormités de la sorte. Cela démontre le peu d'arguments que le gouvernement peut avancer pour contrer les demandes légitimes du gouvernement du Québec. Faire référence au gouvernement précédent, et nommément au chef de l'opposition officielle qui a été membre de ce gouvernement il y a plus de six ans-quand on parle d'Oka, c'est après le départ du chef de l'opposition du gouvernement-une réponse semblable, à mon sens, démontre à quel point les représentants du gouvernement libéral sont à court d'arguments.

J'espère que le ministre des Affaires intergouvernementales aura une argumentation plus sérieuse, lui qui est un habitué du fonctionnement du fédéralisme, sûrement qu'il pourra nous démontrer, avec force arguments, la justesse de ses propos plutôt que de tenir des propos comme ceux qu'on vient d'entendre.

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Madame la Présidente, il va de soi que je voterai contre la motion du député de Mégantic-Compton-Stanstead. Et la raison en est fort simple.

Le gouvernement fédéral n'accuse pas de retard dans les paiements auxquels se réfère le député, ni dans les réclamations du Québec relatives à l'éducation des jeunes autochtones dans le Nord québécois, ni dans la compensation dans le cadre du programme de stabilisation, ni dans la réclamation des frais encourus lors des événements d'Oka.

C'est peut-être même le député qui retirera sa motion après avoir entendu le point de vue du gouvernement. D'ailleurs, si les réclamations du Québec étaient à ce point fondées, et je ne voudrais surtout pas blesser le député de Mégantic-Compton-


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Stanstead, mais je crois que c'est son chef, le député de Lac-Saint-Jean, qui aurait déposé lui-même la motion.

J'ai eu l'occasion de discuter de ces dossiers avec Mme Louise Beaudoin, lundi de cette semaine. Ce fut une rencontre cordiale, au cours de laquelle nous avons revu chacun des dossiers dont il est question dans la motion de l'opposition. Nous avons discuté des mécanismes dont nous disposons dans le but de régler ces dossiers.

[Traduction]

Madame la Présidente, Mme Beaudoin et moi nous sommes rencontrés, plus tôt cette semaine, pour discuter de ces questions. Au cours de cette rencontre, qui s'est révélée productive, nous nous sommes penchés sur l'essentiel de ces questions, que nous avons cherché à résoudre dans le meilleur intérêt des contribuables canadiens.

[Français]

Nous avons tous deux convenu de continuer les discussions sur ces dossiers à l'intérieur des processus en place. Nous avons tous deux convenu de mettre tous nos efforts pour trouver des solutions appropriées sans perdre de temps.

(1120)

Ce que je recherche dans ces trois dossiers, c'est d'en arriver à des conclusions qui soient équitables pour les deux parties, y compris les contribuables canadiens.

Je serai bref, mais je prendrai néanmoins le temps d'expliquer le point de vue du gouvernement pour chacune des réclamations qui font l'objet de la motion. Tout d'abord, examinons la réclamation en ce qui a trait aux frais encourus lors des événements à Oka. Le Québec a soumis une facture de 130 millions en vertu des accords d'aide financière en cas de catastrophe et avait évalué la contribution du fédéral à 84 millions de dollars.

Le gouvernement fédéral a déterminé que seulement 5,3 millions lui semblaient répondre aux critères du programme en question. Le reste de la demande québécoise ne nous apparaissait pas couvert par le programme. Nous n'étions pas certains qu'il revenait au gouvernement fédéral d'assumer le temps supplémentaire-et je le dis de façon très diplomatique-, les frais de logement, ou encore les frais de transport des agents de la Sûreté du Québec. Et à ce seul chapitre, le gouvernement du Québec réclamait 58 millions de dollars.

Il faut se rappeler que lors de ces événements le gouvernement fédéral avait, à la demande expresse du gouvernement du Québec, fourni les services des Forces armées canadiennes. D'ailleurs, les dépenses du gouvernement fédéral, au seul titre des forces canadiennes, reliées à la crise d'Oka, se sont élevées à 122 millions de dollars.

Les dépenses couvertes par un autre programme ne sont pas admissibles, d'où la nécessité pour le vérificateur général d'étudier les dépenses du Québec de très près. En d'autres termes, il y a une série de règlements qui déterminent quelles sont les dépenses admissibles et quelles sont celles qui ne le sont pas. Dans ce cas-ci, vu les réclamations additionnelles de la province de Québec qui ne nous apparaissaient pas justifiées, nous avons décidé de demander au vérificateur général, un tiers parti qui est crédible à tous les Canadiens, y compris à tous les Québécois, de vérifier les réclamations additionnelles du Québec.

Notre hésitation à payer les comptes soumis par le gouvernement du Québec, loin de relever de la mesquinerie, est basée sur notre souci d'administrer avec rigueur et équité les fonds publics. Mme Beaudoin a pu mentionner qu'il s'agissait là de fonds pour les Québécois qu'elle réclamait, sauf que nous, nous sommes également responsables pour les fonds des contribuables canadiens, y compris les contribuables québécois, et que nous devons nous assurer que les factures qui nous sont présentées sont justifiées.

Voilà pourquoi nous avons fait appel au vérificateur général, et nous espérons de lui un avis impartial. Le vérificateur général a indiqué que la teneur exacte de son examen ne sera sans doute pas connue avant juin ou juillet 1995. Entre temps, il a demandé au gouvernement fédéral et au gouvernement du Québec de lui faire parvenir une ventilation détaillée des frais engagés et des reçus pertinents, comme cela s'impose pour toute évaluation approfondie. De notre côté, nous avons fourni tous les renseignements demandés.

Le gouvernement fédéral attend donc les conclusions de l'enquête du vérificateur général, et c'est ce que j'ai dit à ma vis-à-vis québécoise, Mme Beaudoin, et c'est clairement le processus qui est le processus le plus équitable, auquel il faut laisser suivre son cours. Ce que tous les contribuables attendent des gouvernements, c'est qu'ils gèrent les fonds publics avec rigueur, et c'est ce que nous faisons.

Qu'en est-il maintenant des réclamations de 135 millions de dollars en vertu du programme de stabilisation fiscale? Ici encore, la position du gouvernement fédéral est très claire. Nous appliquerons à toute réclamation, que ce soit du Québec ou d'une autre province, les règles des programmes en question. Rien de plus et rien de moins.

Dans le cas qui nous intéresse ici, le programme de stabilisation fiscale a été mis sur pied pour venir en aide aux provinces qui connaissent une chute absolue de leurs revenus en raison d'un ralentissement de l'économie.

(1125)

La réclamation de 135 millions de dollars pour l'année 1991-1992 n'est, à notre avis, pas recevable parce que la baisse des revenus du gouvernement du Québec en cette année-là n'est pas liée à la conjoncture économique. Le ministre des Finances a donc déterminé que le Programme de stabilisation ne peut pas s'appliquer.

Par contre, le gouvernement fédéral a déjà versé un acompte provisoire de 125 millions de dollars, soit déjà plus de la moitié de la réclamation du Québec pour l'année 1992-1993 parce que, dans ce cas, nous croyons que les critères de la loi ont été rencontrés.

Comme je l'ai dit à Mme Beaudoin la semaine dernière, la loi ne prévoit pas de mécanisme d'arbitrage. La seule alternative, si le gouvernement du Québec ne partage pas notre point de vue sur l'application de la loi, c'est clairement d'en appeler de la décision en suivant la procédure juridique prévue à l'article 19 de la Loi sur la Cour fédérale pour régler les différends entre gouvernements. Des interprétations différentes de la loi sont clairement des matières à juger par les cours juridiques et non par les politiciens. J'ai même indiqué que, le cas échéant, notre gouvernement était prêt à aider le Québec dans cette démarche en lui fournissant toute l'information nécessaire.


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Avant de passer à la troisième réclamation, j'aimerais attirer l'attention du député de Mégantic-Compton-Stanstead sur le Programme de stabilisation fiscale dont je viens de parler.

Je suis un libéral, libéral avec un L majuscule, c'est-à-dire que je crois au principe de la solidarité et du partage des richesses, et je crois que l'État a un rôle à jouer dans ce sens. Un programme comme le Programme de stabilisation fiscale est un des programmes qui nous permet de concrétiser et de donner forme à la solidarité sociale au Canada.

Les citoyens comprennent par ailleurs qu'il est tout à fait normal que ces programmes aient des critères pour éviter les abus et pour s'assurer que les fonds publics sont gérés prudemment, en fonction de leurs intérêts. Et le critère de la chute des revenus due au ralentissement de l'économie m'apparaît fort valable.

Il reste maintenant la réclamation pour l'éducation des jeunes autochtones du Nord québécois. J'ai indiqué cette semaine à la ministre québécoise que le gouvernement fédéral ne se traînait pas les pieds et que nous voulions régler ce dossier rapidement. Je réitère aujourd'hui cette position et j'aimerais expliquer pourquoi ce dossier complexe a mis du temps à se résoudre.

Les deux gouvernements ont convenu, dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois, d'assumer les coûts en matière d'éducation pour les jeunes cris de la Commission scolaire crie sur une base 75-25, c'est-à-dire 75 p. 100 du coût pour Ottawa, 25 p. 100 du coût pour le Québec. Et l'une des raisons, c'est que la Commission scolaire crie a une population étudiante qui varie avec les années et qui inclut un certain nombre de non-autochtones pour lesquels la province de Québec est responsable en ce qui a trait aux frais d'éducation.

L'accord stipule donc que les budgets doivent être approuvés par les deux parties, puisque les montants à compenser dépendent des budgets de l'éducation, y compris des budgets d'immobilisation, des salaires des professeurs et des proportions d'autochtones et de non-autochtones dans la population étudiante.

Le gouvernement du Québec s'est toujours montré réticent à nous permettre de jouer un rôle dans l'approbation des budgets, et ce, malgré nos demandes répétées. Même sans avoir été associé à l'approbation de ces budgets, le gouvernement fédéral a déjà versé 464 millions de dollars au Québec. On ne peut donc pas nous accuser d'être mauvais payeur. On peut simplement nous indiquer que nous faisons respecter les intérêts des citoyens en ne donnant pas au Québec un chèque en blanc, alors qu'il ne nous a pas fourni l'informaiton nécessaire pour déterminer de façon ultime les montants à payer.

Comme le gouvernement fédéral n'a pas pris part à ces décisions relatives au budget d'enseignement, il est important que nous comprenions sur quelle base ces décisions ont été prises avant de décider s'il convient d'effectuer un paiement supplémentaire. Nous refusons de signer un chèque en blanc pour des montants qui ne sont peut-être pas dus.

(1130)

Cela dit, et c'est sur cela que je conclurai, le gouvernement fédéral s'est toujours acquitté de ses responsabilités envers les autochtones et de ses obligations en vertu de la Convention de la Baie James.

En conclusion, le gouvernement fédéral est un partenaire fiable qui cherche la collaboration, mais qui gère aussi avec rigueur l'argent des contribuables. J'en appelle au sens des responsabilités du député de Mégantic-Compton-Stanstead et à ses collègues de l'opposition officielle pour le comprendre. Je suis convaincu que c'est cela que les Canadiennes et les Canadiens, y compris les Québécois, attendent de nous.

En terminant, nous continuerons de nous attaquer aux vrais problèmes, ceux pour lesquels la population nous a élus, ceux auxquels on nous demande de trouver des solutions. Le gouvernement du Canada, notre gouvernement, est un gouvernement honnête, ouvert et fiable. C'est un gouvernement qui traite les gouvernements des provinces de façon équitable et qui aborde chaque dossier avec bonne foi.

Nous sommes toujours prêts à travailler avec les gouvernements des provinces et des territoires dans l'intérêt de tous les Canadiens. C'est pourquoi je voterai contre cette motion et j'invite les députés de l'opposition de bonne foi à faire de même, il en va de l'intérêt des Québécoises et des Québécois.

C'est ce que nous faisons, et c'est à quoi l'avenir nous convie.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, j'ai relevé quelques points dans le discours du ministre qui se faisait le champion et l'ardent défenseur du fédéralisme flexible il y a quelques mois. Aurait-il troqué ses belles notions de fédéralisme flexible pour se vouer dorénavant au fédéralisme judiciaire? C'est ce qu'on serait porté à croire suite à ses propos.

Le ministre nous dit qu'on ne lui a pas prouvé hors de tout doute, ou presque, que les sommes réclamées ont véritablement été investies auprès des jeunes autochtones en vertu de la Convention de la Baie James. Pourtant, son gouvernement n'avait pas les mêmes scrupules l'an passé lorsque la presse faisait état qu'il y avait 1,2 milliard de dollars versés annuellement aux autochtones canadiens, alors qu'on n'avait pas de données, et même pas de recensement pour en établir fidèlement le nombre.

Pourtant, son gouvernement a avancé quand même-je le comprends et je ne l'en blâme pas-des sommes, quitte à parfaire plus tard en rajoutant une soulte ou en moins prenant, mais le gouvernement a quand même agi. Dans le cas du Québec, je pense que c'est un braquage du ministre. Il se braque contre toute revendication légitime du Québec à l'endroit du gouvernement fédéral.

J'arrive d'une séance de comité. On y a appris qu'il y a 298 ports de mer publics au Canada, mais que le gouvernement fédéral actuel ne peut dire s'ils sont effectivement des ports publics ou des ports privés. Depuis nombre d'années, ils vont à l'aveuglette. Ils présument qu'ils sont publics et ils présument qu'ils ne le sont pas.

Le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine sait-il que dans son comté, à Chandler, il y a un port dont on ignore s'il est public ou privé, mais pourtant, on continue de le subventionner. On continue d'agir comme s'il était public et qu'il appartenait au fédéral. C'est drôle, les scrupules valent juste quand c'est Mme


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Beaudoin qui fait des réclamations au nom du Québec. Je trouve cela inadmissible de la part d'un homme qui se dit responsable.

Le ministre aurait pu, s'il est de si bonne foi, convenir, avec Mme Beaudoin, d'un montant approximatif. Même si on ne s'entend pas sur les chiffres définitifs, on sait quand même que tout n'est pas gratuit, y compris à la Baie James. Il aurait pu faire preuve de bonne foi et avancer un montant approximatif, qu'il est à peu près sûr de devoir, quitte à parfaire le reste en rajoutant, comme je le disais précédemment, une soulte ou bien en moins prenant, en plus prenant ou en retenant sur les soldes qu'il devra verser dans le futur en vertu de la même convention ou du même programme.

(1135)

Donc, là-dessus, que le ministre vote contre notre proposition ne me surprend pas, mais pour ce qui est du fait qu'il se proclame de la plus entière des bonnes fois, je lui demanderais de repasser.

M. Massé: Madame la Présidente, il me fait plaisir de voir que le député de l'opposition indique que son objectif premier est que le gouvernement fédéral administre les fonds des contribuables avec équité et avec probité. Je suis entièrement d'accord avec lui et c'est la raison pour laquelle, dans le cas de la réclamation d'Oka, où nous avons déjà payé 122 millions de dollars, où nous avons déjà payé suivant l'Acte sur l'aide dans les cas de catastrophes financières un montant au Québec. Lorsque nous avons conclu que nous ne devions plus payer, au lieu simplement de refuser en disant: «C'est fini, à notre avis, on ne vous doit plus un sou», nous avons même été à l'extrême de nommer une tierce partie pour vérifier les compte encore une fois et donner une autre chance à la province de Québec.

C'est aussi la raison pour laquelle nous avons demandé au vérificateur général, certainement une source crédible entre toutes quant à l'équité et à la bonne administration des fonds publics, de revérifier toutes les factures, pour essayer de déterminer s'il y avait encore un sou qui était dû au Québec. S'il y a des sommes qui sont dues au Québec en vertu du rapport, si nous devons de l'argent, nous le paierons.

Dans le cas de la stabilisation économique, j'ai mentionné que nous avons vérifié les critères de paiement et nous sommes arrivés à la conclusion que les montants n'étaient pas dus. Le Québec, d'ailleurs, n'est pas la seule province dans cette situation. La Saskatchewan s'est trouvée dans le même cas. Elle a fait des réclamations qui, à notre avis, n'étaient pas en conformité avec les critères de paiement, et les sommes n'ont pas été payées à la Saskatchewan non plus.

Dans ce cas-ci, l'opposition devra encore une fois nous féliciter pour avoir décidé de ne pas débourser des fonds qui n'étaient pas dus. Mais, par souci de perfection d'équité, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il nous fallait permettre au Québec, comme à toutes les provinces, de faire appel sur notre décision et notre interprétation des critères, et clairement. Il ne faut pas qu'ils fassent appel à nous, puisque nous en sommes venus à la conclusion qu'il n'y a pas un sou qui est dû au point de vue de la stabilisation économique, mais qu'ils fassent plutôt appel à une cour de justice, puisqu'il s'agit de l'interprétation d'une loi.

Dans le troisième cas, notre ami de l'opposition nous suggère de donner au moins un montant qui correspond à la masse des dépenses et de s'entendre à la marge plus tard. Mais, qu'est-ce que nous avons fait? En fait, nous avons, durant toutes ces années, donné 464 millions de dollars à la province de Québec pour l'éducation des autochtones. Mais, comme la province de Québec n'a pas mis en place les responsabilités qui lui sont données en vertu de l'entente de la Baie James, il nous a été impossible de vérifier s'il y avait d'autres montants à la marge qui seraient dus. Et ce que nous avons proposé, dans le but encore une fois d'avoir plus d'équité dans notre dossier, c'est qu'un groupe de fonctionnaires révisent les montants donnés, les budgets des commissions scolaires, les immobilisations, la composition de la population étudiante, pour voir s'il y avait d'autres montants qui étaient dus.

Encore une fois, si nous arrivons à la conclusion que les montants sont dus, nous paierons les montants. Je conclus en indiquant que non seulement nous sommes de bons payeurs, mais que nous avons fait les kilomètres d'extra qui sont nécessaires pour donner dans tous les cas à la province de Québec la possibilité d'avoir des recours ultérieurs et de faire revoir ses réclamations.

(1140)

Dans les cas présents, j'espère que les députés de l'opposition, s'ils y pensent avec bonne foi, s'ils essaient de voir quelle a été justement la bonne administration du gouvernement fédéral et quels sont les principes d'équité qui sont impliqués, je suis convaincu qu'ils voteront contre leur propre motion.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, je veux d'abord signaler au ministre que je trouve que ses propos à mon endroit sont quelque peu méprisants lorsqu'il prétend que je n'ai pas le prestige à ses yeux pour déposer devant cette Chambre une pareille motion. Le ministre des Affaires intergouvernementales suggère que c'est le chef de l'opposition officielle qui aurait dû la déposer. Je ne sais pas s'il fait le même raisonnement pour les porte-parole du gouvernement libéral, cela voudrait dire que seul le premier ministre pourrait intervenir en cette Chambre.

Sur le fond même de la motion, je voudrais dire au ministre que lorsqu'il se targue d'être un libéral avec un L majuscule et que justement le Programme de stabilisation a pour objectif d'aider les provinces qui sont le plus dans le besoin, au cours des dernières années, une province comme l'Alberta, en 1982-1983, a reçu 174 millions et l'Ontario, une province riche, selon les dires mêmes des porte-parole du gouvernement, a reçu 227 millions en 1990-1991 et 284 millions en 1991-1992, alors que, pendant ce temps-là, on refuse au gouvernement du Québec les mêmes conditions

M. Massé: Madame la Présidente, je pense que l'honorable député de l'opposition confond le programme sur les paiements de péréquation d'avec celui des paiements de stabilisation.

Les paiements de péréquation ont comme but de rétablir la possibilité pour les provinces qui sont moins bien nanties d'offrir des services publics de qualité à peu près égale à travers tout le pays, et c'est pourquoi les paiements de péréquation ne sont pas disponibles aux provinces plus riches mais le sont aux provinces moins bien nanties. Ce n'est pas le principe des paiments de stabilisation.


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Le principe des paiements de stabilisation, c'est de stabiliser les revenus. Si vos revenus, selon les critères, sont plus bas qu'avant, le gouvernement fédéral compense; s'ils ne sont pas plus bas ou s'ils le sont pour des causes qui dépendent du gouvernement provincial lui-même, à ce moment-là, il n'y a pas de compensation. C'est ce qui est arrivé.

[Traduction]

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Madame la Présidente, les députés réformistes partageront leur temps de parole.

Je suis heureux de pouvoir participer au débat sur la motion présentée par le Bloc Québécois en ce jour réservé à l'opposition. Cette motion porte sur des additions à la longue liste des réclamations du Québec qui sont de nouveau présentées à la Chambre et, en dernière analyse, aux contribuables canadiens. J'ai bien du mal à dénoncer le peu d'empressement du gouvernement fédéral à répondre à ces réclamations fallacieuses et incessantes. Il est encourageant de voir le gouvernement, et plus particulièrement le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, exercer une certaine circonspection avant de distribuer ses maigres ressources.

Je suppose que, forte du succès qu'elle avait remporté ici à Ottawa en 1994 lorsqu'elle avait réussi à arracher 37 millions de dollars au Trésor fédéral pour indemniser le Québec des dépenses effectuées lors du référendum sur l'Accord de Charlottetown, la ministre québécoise des Affaires intergouvernementales a dû penser qu'en revenant dans la capitale, elle réussirait à se faire payer immédiatement 333 millions de dollars.

Nous voyons aujourd'hui le Bloc Québécois se faire le complice de la ministre québécoise des Affaires intergouvernementales en proposant sa motion un jour réservé à l'opposition, et comme d'habitude uniquement dans l'intérêt du Québec. Contrairement à ce qui s'est passé en 1994, d'autres auront cette fois-ci l'occasion de participer au sweepstake Canada-Québec.

La motion invite la Chambre à dénoncer le gouvernement fédéral pour ne pas avoir payé un montant additionnel de 119 millions de dollars qui constitue, à en croire le gouvernement du Québec, la part fédérale non payée des dépenses relatives à l'éducation des jeunes Indiens et Inuit du Nord québécois depuis neuf ans. Les responsables fédéraux soutiennent qu'environ 450 millions de dollars ont été consacrés à cette enveloppe de dépenses, et que le gouvernement du Québec a contrevenu à certaines conditions établies dans le cadre de la Convention de la baie James et du Nord québécois en dépensant plus que prévu.

Qui a raison? Le gouvernement du Québec a-t-il sollicité l'approbation du gouvernement fédéral pour dépenser davantage? Qui sait? Je ne saurais cependant me satisfaire d'une motion du Bloc et de la visite d'une émissaire provinciale.

(1145)

Le budget des dépenses du ministère des Affaires indiennes pour l'exercice 1995-1996 prévoit des dépenses de plus de 825 millions de dollars au titre général de l'enseignement élémentaire, secondaire et postsecondaire pour les autochtones. À la rubrique de l'enseignement postsecondaire, on note une augmentation de 34 millions de dollars par rapport à 1994-1995. Le ministère avait dépensé 711 millions pour l'éducation au cours de l'exercice 1992-1993. Le budget de cette année montre donc que les dépenses à cet égard ont augmenté de 114 millions en trois ans, soit à peu près le montant que la province de Québec réclame en alléguant une contribution insuffisante du fédéral.

Personne ne refuse à quiconque l'accès à une éducation complète. Dans le cas de l'éducation des autochtones, il faut se conformer à certaines ententes de financement global ou à certains modes optionnels de financement. Ce n'est pas en recourant à des manoeuvres politiques ni en jouant sur les sensibilités politiques actuelles à l'aide de menaces implicites que l'on forcera mon parti à payer encore 119 millions de dollars, quel que soit le charme déployé par le messager.

Je voudrais maintenant passer à la deuxième réclamation de la motion, telle que présentée la semaine dernière par la ministre provinciale des Affaires intergouvernementales lors de sa visite à Ottawa. Dans ce cas, on demande à la Chambre de condamner le gouvernement fédéral pour ne pas avoir acquiescé à la demande du Québec que le gouvernement fédéral applique le programme de stabilisation fiscale fédéral et aide le Québec durant cette période d'austérité à hauteur de 135 millions de dollars.

Le Québec prétend avoir droit à ce programme d'aide en raison d'une très forte baisse de recettes. La ministre provinciale et le Bloc ont sûrement une très bonne mémoire parce que cette réclamation de 135 millions de dollars remonte à 1991. À combien s'est élevée la baisse des recettes au Québec en 1991? En quoi la situation était-elle urgente? Ce sont là des questions qui me semblent raisonnables. Comme le Bloc n'était pas au pouvoir en 1991, il est bon de voir qu'il vient réclamer cet argent à Ottawa au nom de Robert Bourassa.

Aux termes du programme de stabilisation fiscale, les provinces doivent répondre à certaines conditions pour être admissibles au financement. En 1991-1992 et durant cette récession, cinq provinces ont répondu aux conditions et ont reçu 418 millions de dollars au total. Le Québec et la Saskatchewan ne comptaient pas alors parmi ces cinq provinces. Cependant, en 1992-1993, le Québec a reçu 125 millions de dollars de ce fonds. Si le Bloc est si convaincu de son affaire, pourquoi n'accepte-t-il pas la suggestion du gouvernement fédéral, soit de faire appel aux tribunaux? Pourquoi demande-t-il au Parlement de faire droit à sa demande sans autre forme de procès?

Nous estimons que les dispositions de la loi sur le programme de stabilisation fiscale ont été respectées et qu'aucune province n'a été favorisée plus qu'une autre. Cependant, comme il s'agit d'une demande du Québec qui a été rejetée, faut-il considérer cela comme suspect et s'en remettre à l'arbitrage? Jamais de la vie.

La question est très simple. Tout le monde sait que la question se rattache à la stratégie séparatiste globale qui consiste à faire des impôts et du partage des impôts les vraies questions du débat référendaire. Dans son récent budget, le ministre des Finances du Québec a déjà menacé les Québécois en disant qu'un vote négatif aurait pour conséquence une augmentation de la taxe de vente provinciale afin de contrebalancer la réduction des transferts fédéraux. Le chef du PQ soutient qu'on fait porter au Québec seulement le fardeau de la dette fédérale et qu'il ne peut pas parler sérieusement d'un système fédéral efficace et souple.

Le Bloc suit le mouvement et continue le chantage avec sa motion. Il est intéressant de voir que ni l'un ni l'autre des deux


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chefs séparatistes n'accepte de discuter des projections budgétaires ou de donner des détails sur les conséquences d'un vote positif au référendum. Nous savons tous que cela signifierait une augmentation d'impôts pour les Québécois. Selon une récente étude du Fraser Institute, ces impôts feraient un bond de 25 p. 100. Qui le Bloc essaie-t-il de tromper? C'est du chantage d'amateur.

(1150)

Enfin, la motion demande à la Chambre de dénoncer le retard du gouvernement fédéral à répondre à la réclamation de 79 millions de dollars faite par le gouvernement du Québec pour les frais engagés par la Sûreté du Québec lors des événements d'Oka, en 1990. Il convient ici de replacer les choses dans leur contexte, aussi ferai-je l'historique de la débâcle provoquée par la SQ, c'est-à-dire le corps policier pour lequel on nous demande de cracher encore 79 millions de dollars.

Le gouvernement du Québec a pris quelques décisions très étranges à Oka. Le 11 juillet 1990, les policiers de la SQ donnaient l'assaut de la barricade mohawk à Kanesatake. Dans l'échange de coups de feu qui a suivi, un agent de police était tué, ce qui marquait le début d'une impasse qui devait durer 78 jours. Peu après les événements du 11 juillet, la police commençait à empêcher la livraison des vivres et des fournitures médicales destinés aux Mohawks de Kanesatake.

Face à la critique généralisée, ce blocus était levé le 26 juillet. Des négociations commençaient entre les parties et, le 8 août, le premier ministre nommait le juge en chef de la Cour supérieure du Québec, Alan Gold, à titre de médiateur. En même temps, le premier ministre déclarait qu'il mettrait l'armée canadienne à la disposition du Québec si la province en avait besoin.

Le 12 août, le juge Gold annonçait que les parties étaient parvenues à un accord. Deux jours plus tard, on annonçait que le gouvernement du Québec avait demandé l'intervention de l'armée canadienne. Une force de 2 500 soldats faisait son entrée. Le lendemain, on annonçait que l'armée allait remplacer la Sûreté aux barricades. Cela fut fait le 20 août. Les négociations n'aboutissaient pas et, le 28 août, le premier ministre demandait à l'armée de retirer les barricades.

Cette motion s'ajoute à la litanie de plaintes du Québec. Le Bloc n'agit pas vraiment comme l'opposition officielle. Il ferait mieux de se concentrer davantage sur les questions nationales et de moins monopoliser la scène au profit d'une seule province.

Je ne puis appuyer cette motion.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté le discours de mon collègue avec attention et je suis un peu étonné de son attitude paternaliste face aux revendications qui sont faites.

Les revendications faites par le gouvernement du Québec, à l'étape où elles en sont, deviennent une question d'ajustement et de correspondance à des critères, des choses comme cela. On n'est pas là pour remettre en question la façon dont les gouvernements ont posé ces gestes. Je crois qu'à ce sujet, l'attitude du député qui s'interroge si effectivement, c'était pertinent que le gouvernement fasse telle chose et que dans tel autre problème, il prenne telle position, je pense que c'est plus ou moins adéquat comme attitude.

Par contre, sur la question de la stabilisation fiscale, il me semble qu'il y a là une question de fond importante. On nous dit que le gouvernement du Québec n'a qu'à aller devant les tribunaux puisqu'il a reçu un non formel du ministre des Finances. Est-ce qu'on ne pourrait pas s'interroger sur la pertinence d'une entente sur une opération de stabilisation fiscale où le gouvernement fédéral est à la fois juge et partie? C'est lui qui aura à verser des sommes si on considère que la demande est justifiée, mais en même temps, par le ministre des Finances, il est la dernière autorité qui permet d'engager ces sommes.

Est-ce qu'on ne voit pas là une forme d'entente qui est vraiment du fédéralisme dominateur, fédéralisme où le père de famille décide de ce qui sera bon pour les enfants? Comme si les provinces étaient les petits du fédéral, étaient les enfants du fédéral. Est-ce qu'il n'y a pas là matière à se poser une question?

(1155)

Est-ce qu'on ne devrait pas avoir dans une telle entente, un corps indépendant qui pourrait juger de la pertinence des demandes lorsqu'il y a désaccord entre la province et le fédéral? De cette façon, on éviterait aux gouvernements de se lancer dans des batailles juridiques qui représentent des coûts inutiles et qui débouchent nécessairement sur des revendications politiques comme celles que le Québec fait présentement lorsqu'une des parties ne donne pas suite à la demande qui apparaît justifiée au gouvernement du Québec.

[Traduction]

M. Duncan: Madame la Présidente, la question de la stabilisation fiscale me pose beaucoup de problèmes d'ordre plus général. Nous avons en matière de péréquation un arrangement qui a été reconduit l'an dernier pour cinq ans par le Parlement. Cette reconduction s'est faite à l'issue d'un vote dans lequel le gouvernement a imposé la discipline de parti. En vertu de cet arrangement, la quatrième province la plus prospère du Canada, le Québec, reçoit quelque chose comme 40 p. 100 des paiements de péréquation, ce qui a provoqué pas mal de mécontentement dans d'autres parties du pays.

Pour ce qui est de la question de savoir si les décisions prises dans ce cadre devraient être confiées à un organisme indépendant, je suis d'accord, car cela éviterait les manoeuvres politiques pouvant venir d'une province ou du gouvernement fédéral.

C'est la raison pour laquelle on a décidé de faire intervenir les tribunaux dans ce processus. Peut-être existe-t-il toutefois un autre moyen n'exigeant pas le recours aux tribunaux.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Madame la Présidente, il est très stimulant pour moi d'intervenir aujourd'hui au sujet de cette motion du Bloc québécois, qui dénonce le retard du gouvernement fédéral à répondre aux réclamations du Québec concernant des paiements en souffrance dans trois domaines fondamentaux.

Que veut donc le gouvernement du Québec? Si nous examinons la demande, nous constatons tout d'abord que le Parti québécois, ou le gouvernement du Québec, déclare qu'on lui doit 79 millions de dollars pour des frais engagés lors des événements d'Oka à l'été de 1990. Cette facture représente surtout les som-


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mes versées aux policiers de la Sûreté du Québec pour les heures supplémentaires de travail. Le Québec prétend que les affaires indiennes sont de compétence fédérale et que le gouvernement possède un fonds d'urgence d'où il devrait tirer cette somme.

En apparence, cette demande semble raisonnable et assez bien justifiée. Dans la réalité toutefois, elle est discutable. Nous savons tous après tout que si, par le truchement de son procureur général, une province demande aux autorités civiles de venir en aide à un corps de police, il lui appartient de payer ce service.

Quoi qu'il en soit, Ottawa affirme qu'il a déjà versé 5,3 millions de dollars et il a demandé au vérificateur général fédéral d'examiner les prétentions des deux côtés et de proposer une répartition équitable des coûts. Cela me semble aussi une position raisonnable et nous devrions, à mon avis, donner une chance à cette formule.

La deuxième demande du Parti québécois, ou du gouvernement du Québec, porte sur une somme de 119 millions de dollars consacrée à l'éducation des jeunes autochtones de la région de la Baie James dans le nord du Québec. Il s'agit donc d'un objectif très louable. Il est très valable de consacrer 119 millions de dollars à l'éducation des jeunes autochtones.

Le PQ prétend que, selon certaines dispositions de la Convention de la Baie James de 1978, Ottawa doit payer une portion des coûts de l'éducation des autochtones, mais que le gouvernement central refuse de payer toute sa part depuis 1987. La réponse d'Ottawa, c'est que, au cours des dernières années, le gouvernement a déjà dépensé 450 millions de dollars, et que les dépenses additionnelles ont été faites par le gouvernement du Québec sans l'approbation du fédéral. Selon certains renseignements, Ottawa serait prêt à discuter de cette question en détail, mais le Québec n'est pas content de la façon dont les négociations se sont déroulées jusqu'à présent, sinon des négociations elles-mêmes.

(1200)

Je prétends que le processus de négociation devrait être encouragé, de sorte que l'on puisse parvenir à un accord juste et équitable sur cette importante question. Il semble que dans ce jeu entre le gouvernement et le PQ, et même le BQ, le Parti réformiste se soit toujours considéré comme un intermédiaire honnête.

La dernière réclamation du PQ est pour 135 millions de dollars en vertu des programmes de stabilisation pour 1991-1992. Selon le PQ, les provinces les plus riches, y compris l'Ontario et la Colombie-Britannique, ont obtenu de l'argent en vertu de ce programme destiné à compenser les provinces si elles perdaient des recettes en raison d'un ralentissement économique.

La réponse d'Ottawa, dans ce cas, c'est que le ministère des Finances a analysé la demande de Québec de la même façon que celle des autres provinces, notamment la Saskatchewan, qui ont demandé une compensation pour cette année-là et dont la demande a été refusée. Si c'est le cas, alors la réclamation de Québec n'est pas légitime.

Ayant regardé les demandes et la réponse d'Ottawa à ces demandes, je pense qu'il est également très important pour nous tous de regarder ce qui motive ces réclamations. Le Parti québécois est actuellement en campagne pour séparer le Québec du reste du Canada. Il appelle cela une campagne de souveraineté. En fait, c'est une campagne de séparation.

D'après les sondages, la campagne de séparation n'irait pas bien. Par conséquent, il faut se poser la question: Est-ce que le PQ et son allié le BQ cherchent un sujet qui leur permettrait de faire remonter la cote du séparatisme? Si on examine cette théorie, nous voyons qu'une telle tactique pourrait, de fait, apporter de l'eau à la cause du séparatisme.

Tout d'abord, si Ottawa refuse de payer, le PQ et le BQ pourront dire aux Québécois qu'Ottawa ne se préoccupe pas d'eux. Ils diront que c'est une preuve de plus que le Québec doit se séparer du Canada, puisque l'on ne peut pas faire confiance à Ottawa qui ne respecte pas ses engagements.

Si Ottawa accepte, et paie ce que le PQ prétend être son dû, alors les forces séparatistes pourront crier victoire contre un régime fédéral dominateur. D'une façon ou d'une autre, le PQ et le BQ peuvent marquer des points sur le plan politique. C'est ce qui m'inquiète au sujet des factures présentées par le PQ et de la motion présentée par le Bloc, ici, aujourd'hui. Elle semble motivée par de la politique crasse et non par un désir légitime d'améliorer la vie des Québécois.

Par ailleurs, je dois féliciter le Bloc de la farouche détermination dont il fait preuve lorsqu'il s'agit d'attirer l'attention de la Chambre sur des questions qui touchent ses électeurs, les Québécois. Il excelle dans ce domaine. Cependant, comme je l'ai mentionné, il est malheureux que cette détermination ne vise qu'à réaliser l'objectif politique bien arrêté du Bloc, la séparation.

Je dois également admonester le Bloc pour avoir négligé son rôle en tant qu'opposition officielle. S'il veut conserver son rôle d'opposition officielle, le Bloc doit, à mon avis, élargir sa vision et commencer à aborder les nombreux dossiers autrement plus importants qui touchent l'ensemble du Canada. Il faut faire en sorte qu'il ne puisse pas se contenter d'user de sa position pour faire avancer sa propre cause.

Consacrer le nombre restreint des jours désignés à des débats sur des motions comme celle dont nous sommes saisis aujourd'hui, c'est mettre en veilleuse les questions qui intéressent tout le pays, alors qu'il ne s'agit ici que de questions qui n'intéressent qu'un secteur restreint de notre société. Voilà en quoi consiste le problème. À mes yeux, c'est un abus du processus parlementaire et, dans une large mesure, un affront à la plupart des Canadiens, y compris les Canadiens du Québec qui en ont marre de n'être que des pions entre les mains des bloquistes et de leurs alliés péquistes à Québec.

(1205)

Si le Parti québécois et le Bloc québécois veulent la séparation du Québec, qu'ils tiennent leur référendum sans tarder, et le Parlement pourra ensuite reprendre son boulot qui consiste à diriger le Canada dans l'intérêt de tous les Canadiens. Il est grand temps que les parlementaires exigent du Bloc qu'il joue pleinement son rôle d'opposition officielle ou qu'il cède sa place à un


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parti qui est prêt à assumer cette fonction. On ne saurait tolérer plus longtemps que le Bloc retienne le Parlement en otage.

Le Parlement, en ce moment même, a le pouvoir de dépouiller le Bloc du manteau de l'opposition officielle et de le donner à un authentique parti d'opposition. Ça ne s'est pas encore produit parce que le premier ministre semble peu disposé à le faire.

J'exhorte donc les Canadiens d'un bout à l'autre du pays à écrire au premier ministre pour lui demander pourquoi il est complice de ces jeux bassement politiques et pour lui demander qu'il autorise la Chambre à procéder à un vote libre sur la question de savoir quel parti devrait être l'opposition officielle.

Il est grand temps que nous nous préoccupions tous des intérêts de tous les Canadiens. Le Bloc retarde ce processus en présentant des motions comme celle dont nous sommes saisis aujourd'hui. Les Canadiens en ont assez, j'en ai assez, nous avons tous assez de la motion dont la Chambre est saisie.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, je crois que les propos de mon collègue de Nanaïmo-Cowichan, j'ose espérer, dépassent sa pensée, car en général, j'ai beaucoup de respect pour ce qu'il dit en cette Chambre. Ce qu'il vient de nous livrer pendant les dix dernières minutes démontre à quel point nos amis du Parti réformiste sont incapables de porter quelque regard objectif que ce soit sur les demandes légitimes du gouvernement du Québec.

Je veux souligner deux points. Le député nous a dit, au cours des dix dernières minutes, que le fait que le Bloc québécois dépose en cette Chambre une motion qui exige que le gouvernement fédéral agisse correctement et respecte les ententes découlant de lois qui régissent nos institutions, est un problème local, simplement soulevé par des séparatistes, pour des fins purement partisanes.

Je suis convaincu que le député, mon collègue, ne peut, dans le fond de son âme, soutenir pareille aberration. Il sait très bien que les demandes que l'opposition fait ce matin, les demandes qui ont été remises sur la table par l'actuel gouvernement du Québec, sont faites depuis dix ans dans un cas, cinq ans dans un autre et trois ans dans le dernier. Ce sont des demandes qui datent de l'époque du gouvernement de M. Bourassa, gouvernement qui, je l'ai mentionné dans mon intervention, ne peuvent être taxées de visées séparatistes.

Deuxièmement, je suis étonné que de tels propos soient tenus par un collègue du Parti réformiste qui exige tous les jours que le gouvernement fédéral cesse d'intervenir, que le gouvernement fédéral laisse les provinces intervenir dans leur champ de juridiction, même plus que cela, il demande une décentralisation des pouvoirs du gouvernement, un plus petit gouvernement fédéral.

Alors, lorsque le Bloc québécois, l'opposition officielle, se lève en cette Chambre sur une motion qui dit essentiellement la même chose, la partisanerie politique aveugle mon collègue et rapetisse ce débat à un débat partisan; je trouve cela vraiment déplacé. J'espère que mon collègue profitera des quelques minutes qui sont à sa dispositiion pour mettre un peu d'ordre dans son discours.

(1210)

M. Ringma: Je dois dire, madame la Présidente, que je suis d'accord en partie avec les paroles de mon collègue. Il a vraiment raison quand il dit que le Parti réformiste est contre le grand gouvernement, contre trop de gouvernements, contre trop de contrôles par Ottawa envers les provinces.

Je suis d'accord, on aimerait avoir une décentralisation telle que mentionnée, vous avez raison. Mais en même temps, je répète ce que je viens de dire. Je vois dans la motion du Bloc aujourd'hui une affaire totalement politique en vue de faire entrer le sujet de la séparation dans le présent débat.

J'ai aussi entendu le Bloc mentionner qu'il y a un fédéralisme dominateur, je suis d'accord aussi. Entre-temps, il faut changer le gouvernement, il faut changer le système, il faut une décentralisation, mais on ne l'a pas encore. Il faut travailler pour l'atteindre.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Madame la Présidente, je trouve assez déplorable qu'on dise à peu près n'importe quoi pour se faire du capital politique en cette Chambre. Je comprends que le député serait peut-être très intéressé à former l'opposition officielle, mais on attendra une élection où le Bloc québécois ne sera plus ici.

Je voudrais dire au député que la crise d'Oka, c'est au Québec que ça s'est passé. C'est aussi le Québec qui a des problèmes avec le fédéral concernant les paiements pour l'éducation des autochtones, et c'est le Québec qui a des problèmes concernant la stabilisation. C'est pour cela que nous sommes ici, pour défendre les intérêts du Québec.

[Traduction]

M. Ringma: Madame la Présidente, il est vrai qu'il y a des problèmes au Québec. Il est vrai qu'ils doivent défendre leur cause, mais je voudrais revenir à ce que je disais.

C'est vrai que nous voulons former l'opposition officielle et que nous attendrons une élection partielle pour que cela se fasse dans les règles. Entre-temps, le Bloc ne fait rien de plus que défendre tout ce qui concerne le Québec et ne remplit pas le rôle d'opposition officielle qu'il doit assumer au nom de tous les Canadiens.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Madame la Présidente, il me fait extrêmement plaisir de prendre la parole à ce stade du débat, surtout après un discours du Parti réformiste, sur une motion très importante présentée par le Bloc québécois.

Je pense qu'il faut mettre cartes sur table et voir véritablement ce qui se passe. La motion est très claire, elle vise à dénoncer le retard du fédéral dans des paiements dus au Québec. Il y a 79


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millions de dollars dus suite à la crise d'Oka, 135 millions dus dans le domaine du Programme de stabilisation pour l'année 1991 et 1992, 119 millions dus par le fédéral au Québec pour des problèmes relatifs à l'éducation des jeunes autochtones du Nord québécois. Le ministre des Affaires indiennes et le gouvernement fédéral savent que ces sommes sont dues et ils ne font rien.

Il est normal que le Bloc québécois, les députés du Québec, élus par des Québécois, des Québécoises pour venir défendre les intérêts du Québec à Ottawa, déposent, à l'occasion d'une journée de l'opposition, une motion semblable, parce que c'est dans l'actualité. Cette semaine on a eu une représentante du Québec qui est venue rencontrer son homologue fédéral pour réclamer la petite somme rondelette de 333 millions de dollars. Et nous, ici, on ne dira rien? On va se faire les complaisants de ça? Non. On est ici avec un mandat clair et on le défend, et on défendra cette somme d'argent parce qu'elle est due au Québec. On travaillera pour l'obtenir.

(1215)

Encore une fois, je pense que ce dossier d'actualité nous donne l'occasion de vraiment démontrer que les Québécois ont fait un choix très clair aux dernières élections fédérales, parce que vous savez, madame la Présidente, ce dossier traîne depuis des années. Je ferai un bref historique de ce dossier. Ce n'est pas une invention du Bloc québécois. Ce n'est pas une invention des méchants séparatistes du Québec. Il y a un gouvernement qui s'appelait le gouvernement Bourassa, libéral, fédéraliste qui, lors du dernier budget libéral de la province de Québec, a émis comme étant une facture due par le fédéral la somme de 300 millions de dollars.

Est-ce que c'est une invention des méchants séparatistes? Non, madame la Présidente. Si les alliés de mes amis d'en face, ceux qui vont être sur les mêmes tribunes lors du référendum qui se tiendra cette année au Québec, main dans la main, si les libéraux ont émis cette facture de 300 millions dans le budget, et on sait comment ils sont liés d'amitié avec les amis d'en face, c'est parce que cette somme est véritablement due. Il restera à la payer.

J'avais un discours écrit, mais je pense que je vais le mettre de côté et je vais vous parler avec mon coeur, parce que c'est un sujet trop important. Je pense qu'on peut charrier, mais jusqu'à une limite. Il y a trois réclamations extrêmement importantes et on va en parler l'une après l'autre.

Premièrement, il y a la crise d'Oka. C'est quoi, cette crise d'Oka? Oka, c'est situé au Québec. C'est un territoire où il y a des indiens qui ont revendiqué une bande de terrain dans les années 1990 et cela a exigé l'intervention de la Sûreté du Québec et même, de l'aveu du ministre des Affaires intergouvernementales, de l'armée canadienne. Il dit avoir déboursé, dans le cadre de ces interventions, 122 millions de dollars. Par la suite, ils vont venir nous dire que cela n'entre pas dans le cadre d'une catastrophe? Ils vont venir nous dire par la suite que, pour réutiliser les termes précis, il faut faire une certaine distinction entre l'ordre public et le bien-être public?

Si c'était uniquement au niveau du bien-être public, qu'est-ce que l'armée faisait là? Pourquoi le gouvernement a-t-il dépensé 122 millions? Voulez-vous bien me le dire, madame la Présidente? Parce qu'il y avait une question d'ordre public qui entre directement dans l'entente fédérale-provinciale au niveau de la définition de catastrophe. Cela paraît peut-être drôle comme terme, catastrophe, mais c'était l'entente et on a même une série d'échanges de lettres entre les deux paliers de gouvernement qui disaient: «Oui, le fédéral reconnaît que c'est une catastrophe aux termes de l'entente.»

Il y a de la correspondance qui a été échangée entre le gouvernement libéral et le gouvernement conservateur de l'époque également qui stipulait que la crise d'Oka était couverte par cette entente. On a dépensé 139 millions de dollars au Québec pour cela. Qu'est-ce que le fédéral fait pour payer ses dettes? Il verse 5,3 millions de dollars. Par la suite, il dit: «Nous autres, on est de bonne foi. Nous autres, on paierait toute la facture, mais ce n'est pas une question d'ordre public, mais de bien-être public.» Ce sont des interprétations de gens de mauvaise foi. Quand on paie 122 millions de dollars parce qu'il y a un danger au niveau de l'ordre public, on paie la facture au complet ou bien, si on ne veut pas respecter nos ententes ou si on pense qu'on ne sera pas capables de respecter notre signature, on n'en fait pas d'ententes avec les provinces. C'est cela qui est déplorable.

Les gouvernements, parce qu'ils ne sont pas plus fins, conservateur ou libéral, c'est du pareil au même, ici. Même, je pourrais vous dire que conservateur, libéral ou réformiste, c'est la même chose quand vient le temps de défendre les intérêts du Québec. On se braque contre le Québec. C'est cela qui arrive et on en a un très bon exemple cette fois-ci, parce que c'est main dans la main, réformiste, libéral et conservateur. On connaît le nom, mais ils ne sont pas ici. Ils ont la même façon de réagir face à ce dossier. On se braque contre le Québec quand c'est le temps de défendre les intérêts du Québec.

(1220)

On le remet à sa place. C'est ça, l'objectif des fédéraux, remettre le Québec à sa place, comme il nous le fait depuis 30 ans. Après, il se demande pourquoi il y a un mouvement souverainiste au Québec.

On a une chronologie très précise des événements de la crise d'Oka. Tous les ministres compétents qui ont affaire à ce dossier ont cette correspondance. Ils savent que les 139,7 millions de dollars dépensés dans ce dossier par la province de Québec n'étaient pas une dépense futile, mais pour préserver l'ordre public. Cette crise était majeure. Il y a eu un mort lors de ces événements, et il fallait une intervention. C'est pour cette raison qu'on a dépensé cette somme d'argent, par l'intermédiaire de la Sûreté du Québec.

Il ne faudrait pas oublier qu'il y a une Sûreté du Québec au Québec. La province offre un service de policiers provinciaux. Hypothétiquement, que serait-il arrivé si une telle crise était survenue au Manitoba, une province où il n'y a pas de policiers provinciaux? Les événements auraient alors été supervisés par la GRC. Qui aurait payé? Le fédéral. Le fédéral aurait-il refilé la facture de 139,7 millions à la province du Manitoba? Permettez-moi d'en douter.


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Regardons ce qui se passe présentement avec les ententes fédérales-provinciales en ce qui a trait au service de l'ordre, au service policier entre cette province et le fédéral. Le fédéral fournit les policiers, il les paie et il n'est même pas capable de refiler la facture pour payer à 100 p. 100 les services offerts à cette province. Vous direz peut-être que le député de Berthier-Montcalm avance des chiffres sans le savoir, sans en être conscient, mais ce ne sont pas mes chiffres. C'est le solliciteur général du Canada qui a fait cette constatation. Le solliciteur général a dit, année après année: «Les services de la GRC que vous offrez, vous n'êtes même pas capables de récupérer à 100 p. 100, et vous devriez le faire.»

Et là, on vient de nous dire, pour une crise comme la crise d'Oka, qui aurait pu survenir n'importe où au Canada, qu'on aurait refilé 100 p. 100 de la facture à la province. Non, madame. C'est juste ici. C'est juste au Québec que cette histoire pouvait arriver. C'est juste au Québec qu'on se bat pour faire payer des dettes que le fédéral nous doit. Qu'on se souvienne du référendum de Charlottetown. Combien de batailles épiques avons-nous eues ici en cette Chambre pour nous faire payer 35 millions de dollars, une dette due par le fédéral? On avait payé deux fois ce référendum, un référendum qu'on nous avait enfoncé dans la gorge. Souvenez-vous, c'était dicté par le fédéral. En plus, il fallait payer deux fois cette facture.

C'est juste lorsque ce gouvernement que j'ai devant moi a analysé les faits du dossier, lorsqu'il a mis ses intérêts politiques et ses différends à caractère partisan de côté qu'il a fait un chèque de 35 millions à la province de Québec, parce que cette somme était due.

On a exactement la même chose devant nous dans le dossier de la crise d'Oka. Les 79 millions sont dus au Québec. Qui paie, maintenant?

Il me fait plaisir de parler de la deuxième réclamation, qui a trait à l'enseignement aux enfants autochtones, alors que le ministre est devant moi. Il va sûrement corroborer mes dires.

N'est-il pas drôle que, dans ce dossier, encore une fois, il y ait eu des ententes entre le gouvernement fédéral et la province de Québec en matière d'éducation des autochtones? Quand on parle d'autochtones, comprenons-nous nous bien dans cette Chambre, c'est de juridiction fédérale. On se plaint quand le fédéral ne respecte pas sa juridiction. Voilà une juridiction qui est la sienne à 100 p. 100. Qu'il respecte donc la Constitution canadienne, sa charmante constitution qu'il défend tant ici. Qu'il respecte donc sa signature parce que, dans cela aussi, il y a une signature, une entente entre le fédéral et la province de Québec, où le fédéral va payer 75 p. 100 des coûts et où la province de Québec va en payer 25 p. 100. Le ministre en a donné l'explication plus tôt, qui est très bonne. Il y a quelques Blancs sur la réserve, et comme leur éducation est de responsabilité provinciale, il est normal que la province de Québec paie pour les Blancs qui sont sur la réserve.

(1225)

C'est normal également que le fédéral paie pour les autochtones sur cette réserve-là ou sur les réserves du Nord québécois. Il y a une entente, une très bonne entente entre les parties, qui découle entre autres de l'entente de la Baie James, et là le fédéral s'est entendu avec la province de Québec pour faire la répartition de certains coûts.

De 1978 à 1987, ce mode de fonctionnement n'a causé aucune difficulté. Le fédéral s'est toujours acquitté de sa quote-part de financement sur réception d'une facture à cet effet du gouvernement du Québec. En 1987, ça ne marchait plus. Pourquoi? Parce que le fédéral trouvait que les montants étaient trop élevés, que les montants avaient trop augmenté. Pourquoi ces montants avaient-ils augmenté? Tout simplement parce qu'il y avait plus de jeunes sur la réserve, le taux de natalité avait augmenté. Tout simplement parce qu'il y avait plus d'autochtones qui étaient retournés à l'école, qui suivaient des cours. Tout simplement parce que le gouvernement du Québec donnait plus ou offrait plus de cours à ces peuples autochtones. Alors, le gouvernement fédéral a dit: «Ah bien non; la facture augmente beaucoup trop. Je ne paie plus.»

Aujourd'hui, on a le culot de dire, et cela sort de la bouche du ministre: «Écoutez, on est de bonne foi, on a donné 450 millions.» Eh bien oui, ils ont arrêté de payer en 1987. Ils ne paient plus. C'est cela, être de bonne foi? C'est cela, le fédéralisme flexible? C'est cela, le fédéralisme devant lequel on devrait être à plat ventre comme ceux d'en avant? Sans fédéralisme canadien, point de salut? Je ne pense pas.

Dans des cas semblables, on va nous reprocher de prendre la défense des intérêts du Québec, quand c'est évident qu'on nous doit ces sommes d'argent? Et encore là, ce ne sont pas des petits montants. C'est 119 millions de dollars. C'est 119 millions qu'on devrait gober, pour utiliser un bon terme québécois, sans rien dire. C'est épouvantable. C'est inacceptable.

Ce qui est encore plus inacceptable, c'est lorsque je vois des députés du Québec qui siègent de l'autre côté, se lever pour critiquer, parce qu'on défend les intérêts du Québec, se lever pour nous critiquer parce qu'on veut avoir notre dû. «On veut avoir notre butin», comme disait Duplessis. C'est de l'argent qui nous est dû.

Les députés du Québec vont encore se lever pour tenter de diluer, pour tenter de cacher la vérité, pour tenter de nous dire pourquoi on ne devrait pas payer. Alors que c'est clair dans le dossier, alors qu'il y a des ententes, alors qu'il y a eu des paroles données entre les différents paliers de gouvernement.

On a un exemple frappant que le système dans lequel nous vivons à l'heure actuelle est pourri. Le système dans lesquel nous vivons actuellement ne peut pas fonctionner. Il y a deux peuples dans ce peuple-là; il y a deux pays dans ce pays-là. On est vraiment à l'opposé. Comment voulez-vous qu'on s'entende lorsque des contrats sont signés et qu'ils sont incapables de les respecter. En plus, ils nous invitent à régler nos différends en cour. «On ne s'entend pas, allez devant les tribunaux.»

On peut faire ça avec les États-Unis. Un grand Canadien comme le ministre des Affaires intergouvernementales peut inviter ses voisins d'autres pays qui font affaire avec le Canada et leur dire: «Écoutez, si on ne s'entend pas, vous pouvez toujours aller devant les tribunaux; il y a des cours pour cela.» Mais, à ce que je sache, tant et aussi longtemps que le Québec n'aura pas dit


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oui à sa souveraineté, tant et aussi longtemps que le Québec n'aura pas son pays, on fait encore partie de ce système.

C'est cela le fédéralisme flexible. C'est cela que le disciple aveugle du fédéralisme flexible va nous proposer? C'est scandaleux! Je pense qu'il n'y a pas d'autre terme que de dire que c'est scandaleux.

La troisième réclamation, et non la moindre, porte sur un montant de 135 millions de dollars dans le cadre du programme de stabilisation pour l'année 1991-1992. Attendez que je me souvienne: en 1991-1992, ce n'était pas des méchants séparatistes qui étaient là. C'était un gouvernement libéral.

(1230)

Eh bien oui, c'était l'ineffable Robert Bourassa, un fédéraliste bien connu des amis d'en face, et pourtant il réclamait 135 millions de dollars. C'est peu dire. Si un homme comme M. Robert Bourassa a mis une somme de 135 millions dans ses livres comme étant une somme due par le fédéral au Québec, ne fouillez pas trop longtemps, c'est le minimum. Faites tous les calculs que vous voudrez, il avait tellement peur de déplaire à ses grands amis fédéraux, il était tellement à plat ventre devant le fédéral que s'il réclame 135 millions c'est parce que ces sommes sont dues au Québec par le fédéral. Il ne faut pas chercher longtemps. On peut faire tous les calculs savants, on peut faire dire ce qu'on veut à un bilan, je pense que tout le monde ici le sait.

Mais il y a une chose, si un fédéraliste comme Robert Bourassa, et comme les ministres qui l'entouraient, comme l'actuel ministre du Travail qui faisait partie de ce gouvernement libéral, si ces gens réclament cette somme, c'est sans doute qu'elle est due. J'aimerais bien entendre la ministre du Travail, elle qui a été élue dans son comté pour défendre les intérêts du Québec, elle qui connaît très bien les tenants et aboutissants de cette réclamation. J'aimerais entendre les commentaires qu'elle fait au ministre des Affaires intergouvernementales.

Lui dit-elle que cette somme est véridique comme elle le prétendait lorsqu'elle faisait partie du gouvernement Bourassa? Lui dit-elle que dans les réclamations comme celles pour la crise d'Oka, qu'elle a vécue parce qu'elle faisait partie du Cabinet de M. Bourassa, que ces sommes sont dues au Québec? Est-ce qu'elle dit au ministre des Affaires intergouvernementales que la somme due pour l'éducation des autochtones dans le Nord québécois est due? Elle a même été ministre de l'Éducation au Québec. Est-ce qu'elle le dit? Est-ce qu'elle se lève? J'ai hâte de la voir voter ce soir sur cette motion pour savoir si elle défendra les intérêts du Québec comme nous le faisons ici parce que nous avons été élus pour cela. J'ai hâte de la voir se lever.

Le fédéral a pris des engagements écrits et oraux face au Québec. Le fédéral a des responsabilités face au peuple québécois. Le fédéral a même été à l'origine de certains de ces problèmes devant nous aujourd'hui. Que le fédéral paie maintenant, qu'il rende le butin aux Québécois et aux Québécoises. Ayez de l'honneur, payez les factures que vous devez au Québec.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, dans un dossier aussi difficile, un dossier qui touche non seulement les Amérindiens, mais un dossier qui touche l'honneur du Québec, il ne faut pas oublier qu'en 1990, dans les médias internationaux, en Asie, en Europe, on pointait du doigt la façon dont on s'est occupé de ce dossier. La façon dont on a réglé ce litige avec nos amis amérindiens n'a pas fait honneur à la province.

Quand j'entends que nous, les députés du gouvernement, ne défendons pas les intérêts du Québec, j'aimerais que l'opposition me dise pourquoi ils ont décidé de prendre un virage sur la question référendaire? On veut désormais s'associer avec le gouvernement canadien, et on prétend que c'est un gouvernement qui n'honore pas ses paiements. Comme tout le monde sait, c'est tout à fait faux.

Je serais curieux de savoir ce que pensent les petites municipalités de la province qui ont reçu des projets d'infrastructure grâce à leur appui, grâce à la collaboration de la province, grâce au voeu du gouvernement canadien de remettre les Canadiens et les Québécois au travail.

Quand j'entends que le gouvernement canadien n'a pas répondu à l'appel du gouvernement du Québec, c'est tout à fait faux. C'est le gouvernement du Québec qui a fait appel aux Forces armées canadiennes. C'est le gouvernement fédéral qui a dépensé 122 millions de dollars, cela il ne faut pas l'oublier. Vous savez, madame la Présidente, ce n'est pas une facture qui sera payée par le gouvernement du Québec. C'est grâce au fédéralisme qui existe à l'heure actuelle que nous partageons nos ressources. C'est ce qui fait la force du pays et, bien entendu, c'est ce qui est un des gains majeurs de la province de Québec, soit de faire partie de cette grande famille canadienne.

(1235)

Évidemment, on a effleuré le sujet de ces 450 millions de dollars qui ont été versés par le gouvernement fédéral pour l'enseignement aux autochtones dans le Grand-Nord québécois. Il est certain que je pourrais continuer davantage sur tous les programmes qui ont favorisé le Québec, mais dire que ces gens parlent pour le Québec, c'est tout à fait faux. Je suis un Québécois, un Gaspésien, je suis très fier de l'être, mais jamais je ne vais me faire dire par un parti de l'opposition qui ne représente même pas la majorité du Québec en termes de vote populaire. . .

Des voix: C'est faux!

M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine): Madame la Présidente, je vous rappelle qu'ils ont obtenu 48 p. 100 du vote populaire et qu'ils n'ont obtenu que 44 p. 100 au niveau provincial lors de l'élection du Parti québécois. Si demain matin, ils avaient l'honneur, l'audace et l'honnêteté intellectuelle de nous dire: «Nous allons tenir un référendum et la question sera:


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Voulez-vous qu'on se sépare du Canada, oui ou non?», je peux vous assurer qu'à peine 30 à 35 p. 100 des Québécois appuieraient cette proposition.

Alors, je demande à l'opposition, pourquoi ils ont décidé de prendre ce virage avec un soi-disant mauvais payeur de factures? Pourquoi veulent-ils toujours demeurer associés avec un Canada si, selon eux évidemment, cela ne vaut plus la peine de faire partie de la fédération canadienne?

M. Bellehumeur: Madame la Présidente, c'est déplorable de voir que le député d'en face mélange les pommes et les oranges. Je comprends que ce sont deux fruits, mais il ne faut pas les mettre dans le même panier. Bien que ce ne soit pas dans la motion, je considère cela trop important pour ne pas répondre au député. Il demandait pourquoi nous avions proposé une association avec le Canada.

Entre autres parties, ce n'est pas une association économique avec le gouvernement fédéral, c'est une association économique avec les autres provinces, avec les Canadiens. C'est une association économique de peuple à peuple, pas de gouvernement à gouvernement. C'est le gouvernement qui est mauvais payeur, ce n'est pas le peuple canadien. C'est le gouvernement qui est de mauvaise foi, ce n'est pas le peuple canadien. C'est le gouvernement qui fait de la petite politique, ce n'est pas le peuple canadien.

Si on pose une telle question, c'est qu'on n'a vraiment rien compris au débat référendaire au Québec. J'invite le député à suivre plus attentivement le débat référendaire qui va bel et bien avoir lieu en 1995.

M. Gagnon: Je le souhaite.

M. Bellehumeur: Je souhaite de tout coeur que le grand défenseur de ce grand pays, nul autre que le premier ministre du Canada, s'associe, main dans la main, la main sur le coeur, au député conservateur de cette Chambre, le chef conservateur, sur les mêmes estrades, sur les mêmes forums, et également avec les réformistes, parce que je vois qu'ils sont tous du même acabit. Ils viendront défendre le grand fédéralisme flexible devant les Québécois et Québécoises.

Nous aussi, on sera là pour défendre notre thèse. Nous aussi, on expliquera que le fédéral dit toujours non au Québec à la première occasion. Le député, comme il en a le droit, a commenté mon discours, mais il est drôle qu'il n'ait pas vraiment parlé du fond de mon discours. Est-ce que oui ou non, l'argent a bel et bien été dépensé dans la crise d'Oka? Est-ce que oui ou non, cela n'était pas considéré par le gouvernement fédéral comme étant une catastrophe? Est-ce que oui ou non le fédéral a envoyé l'armée, parce qu'il considérait que c'était une catastrophe au sens de l'entente? Pourquoi le fédéral a-t-il dépensé 122 millions de dollars, comme le député le dit, s'il n'avait pas affaire au Québec, si c'était une question purement provinciale?

Parce que le Québec l'a demandé? Certes, mais la réponse répond justement à la question de savoir si c'est une catastrophe ou pas. C'est drôle, le député n'en a pas parlé. Dans un autre ordre d'idées, oui, le fédéral a payé 450 millions de dollars pour l'éducation jusqu'en 1987. Je rappellerai au député, cependant, que pour cette même période, le Québec a payé sa part, soit 25 p. 100, qui se situe aux alentours de 115 millions.

La somme que l'on réclame, c'est la somme que le fédéral ne veut pas payer après 1987 pour la même entente, pour laquelle le fédéral avait déjà commencé à payer. On ne demande rien d'autre que notre dû. Au niveau des paiements de stabilisation, c'est la même chose.

(1240)

C'est drôle que le député ne soit pas entré dans les détails, qu'il n'ait pas dit pourquoi on ne devrait pas réclamer ces sommes. Eh bien non, on mélange les pommes et les oranges en parlant de souveraineté, en parlant de virage qui n'en est pas un. Si on a écouté le discours du Bloc québécois depuis qu'on est ici, on n'a pas «reviré», on a seulement mis sur la place publique les éléments qu'on a toujours dits ici. On a simplement synthétisé notre pensée.

Les députés d'en face peuvent rire, peuvent dire que c'est un revirement. Pour nous, c'est la suite logique de la pleine souveraineté du Québec.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, vous savez que c'était très dur pour le Québec, surtout pour tous les Canadiens de voir une confrontation si vive, une confrontation visualisée par des millions et des millions de gens de par le monde, de voir une confrontation avec les Premières nations autochtones. J'ai trouvé cela très difficile.

Je crois que c'est une opinion, une constatation partagée par des milliers, je dirais même des millions de Québécois. C'était vraiment une situation difficile pour nous tous de voir qu'on ne s'entendait pas avec les premiers arrivants au pays.

C'est dans le passé. Selon l'opposition, il est temps de payer la note. À la demande de Québec, selon le Programme d'aide financière en cas de désastre, le PAFD, on a versé tout près de 210 millions depuis 1970. Et selon la note qui nous a été envoyée, cela représenterait tout près de 40 p. 100 du budget de ce programme depuis près de 25 ans.

Il est certain que c'est une note plutôt salée; il faut un certain temps, mais comme nous l'a si bien exposé le ministre des Affaires intergouvernementales, le fédéral paie toujours sa part des choses. On est prêts à négocier, on est prêts à revoir. Sauf, attention, je ne pense pas que ce soit un dossier qui mérite d'être politisé comme il l'est par l'opposition, parce qu'on fait affaire avec les Premières nations du Canada, ceux qui sont arrivés bien avant nous. Et je crois qu'on leur doit un certain minimum. C'est pour cela que je demande à l'opposition de reconnaître que 40 p. 100 du programme fédéral sera sûrement versé à la province de Québec.

M. Bellehumeur: Madame la Présidente, ce n'est pas 40 p. 100 qu'on demande, c'est 75 p. 100; c'est l'entente. Ça c'est une chose.


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Je pense que c'est le député qui mélange tout. On n'est pas contre les Premières nations. La preuve, c'est que vous n'avez qu'à regarder ce qui se passe au Québec et dans toutes les provinces canadiennes. C'est au Québec où les peuples autochtones sont les mieux traités. Je pense que pour un député du Québec, il doit au moins admettre cela ici, en cette Chambre, qu'on traite très bien les autochtones. Je pense qu'eux-mêmes, les peuples autochtones, le disent.

Deuxièmement, quand je vois un député se lever en Chambre pour dire: «C'est vrai qu'il y a un programme au niveau des catastrophes, mais sur X millions on trouve que la note de la province de Québec est trop exagérée ou trop salée parce qu'on n'aura plus d'argent pour autre chose», est-ce qu'on peut légiférer les catastrophes? Est-ce qu'on peut prévoir qu'on n'aura pas plus de trois catastrophes? La quatrième ne sera pas indemnisée?

Je pense qu'il va de soi que lorsqu'on fait un programme, lorsqu'on intervient, on s'attend à payer. J'invite encore une fois le fédéral à payer ses dettes, parce que ce sont des sommes qui sont dues au Québec. Payez maintenant et arrêtez d'argumenter.

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet de cette motion. Des questions importantes ont été soulevées.

Le ministre des Affaires intergouvernementales a expliqué clairement pourquoi le gouvernement votera contre la motion. Par ailleurs, la question doit être comprise dans la perspective plus vaste de ce que fait le gouvernement dans le domaine des affaires autochtones au Québec et ailleurs au Canada.

Le gouvernement a reçu de la population canadienne qui l'a élu le mandat d'examiner toutes les questions qui préoccupent les communautés autochtones. C'est ce que nous avons promis de faire dans le livre rouge aux élections de 1993. Nous avons dit clairement ce que ferait un gouvernement libéral et nous respectons maintenant nos engagements.

(1245)

Le livre rouge, qui fait référence en plusieurs endroits aux autochtones, consacre un de ses huit chapitres aux politiques autochtones. Jamais au cours d'élections canadiennes n'avait-on accordé autant d'importance aux affaires autochtones. L'opposition devrait se souvenir qu'après avoir porté les questions autochtones, entres autres, sur la place publique, nous avons reçu un mandat clair de la population.

Nous affirmons dans le livre rouge que les autochtones veulent deux choses: premièrement, créer avec le gouvernement une nouvelle association fondée sur la confiance, le respect mutuel et leur participation aux prises de décisions. Deuxièmement, un renforcement des communautés autochtones. Dans le livre rouge, nous avons déclaré avoir à coeur de faire du Canada un pays où les autochtones auront un style de vie, une qualité de vie et des chances d'épanouissement comparables à ce que connaissent l'ensemble des Canadiens. Nous voulions un Canada où les premières nations, les Inuit et les Métis pourraient vivre de façon autonome, sûrs de leur propre identité, et où tous les Canadiens s'enrichiraient au contact des cultures autochtones. Nous voulions aussi que les peuples autochtones soient désireux de contribuer pleinement aux progrès de notre nation.

Ce qui est peut-être plus important encore, c'est que le livre rouge nous donne pour objectif un Canada où les enfants autochtones grandiraient dans de bonnes familles, au sein de collectivités saines, et où ils auraient la chance de prendre toute la place qui leur revient. C'est ainsi que nous envisageons l'avenir, et je suppose que c'est la même chose pour nous tous à la Chambre. Étape par étape, nous avançons dans cette direction. En un an et demi, c'est-à-dire depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons fait des progrès considérables au Canada et au Québec. Je ne dis pas que nous sommes arrivés à nos fins, mais nous avons fait des progrès que je crois importants. Il nous reste tout de même encore beaucoup à faire.

Au cours des 18 premiers mois de mon mandat, j'ai visité, à titre de ministre, des collectivités indiennes et inuit des quatre coins du Québec. J'ai rencontré la plupart des chefs du Québec et quelques chefs inuit. J'ai discuté avec Ghislain Picard, de l'Assemblée des premières nations; j'ai discuté avec Max Gros-Louis, des Hurons; j'ai aussi discuté avec Matthew Coon-Come, des Cris; Jean-Guy Whiteduck; Brenda Gideon Miller; Joe Norton, Denis Ross, Jerry Peltier, des Mohawks; Marcel Boivin; Bernard Jerome; l'Inuit Simeonie Nalukturuk; l'Inuit Zebedee Nungak et Remy Kurtness. On trouve peut-être que je parle trop. Toutes ces personnes m'ont fait part des réalisations en cours et de ce qui reste à faire, et elles ont discuté de la meilleure façon de s'y prendre pour collaborer plus efficacement.

On oublie. On ne sait à peu près rien des autochtones, même si nous traitons avec eux. Je parcourais les notes qu'a prises Joseph-Elzéar Bernier, l'explorateur de l'île de Baffin, lorsqu'il a fait la rencontre des Inuit. Voici un extrait de son journal: «Après avoir tiré 19 coups, j'ai demandé à un Esquimau de tirer le 20e, lui disant qu'il était maintenant Canadien.» C'est ainsi que nos relations ont commencé là-bas.

Nous oublions qu'il y a au Québec 10 premières nations, plus de 40 collectivités et des Inuit dans le Nord. Ces collectivités sont dispersées un peu partout: dans une banlieue de Montréal, le long du Saint-Laurent, dans l'intérieur et dans le Grand Nord. Nous oublions que, lorsque Cartier a débarqué pour la première fois, il a perdu la moitié de ses gens au cours du premier hiver. N'eût été des Indiens qui lui ont enseigné à mélanger ensemble de l'écorce, des aiguilles de cèdre et de l'eau, ils seraient tous morts du scorbut. Les Indiens ne demandaient rien, et c'est ainsi que leur histoire a commencé.

Nous sommes arrivés ici avec une certaine dose d'avarice dans le coeur, et nous leur avons dit: «Vous gardez ces terres pour nous depuis 5 000 ans. En réalité, elles nous appartiennent et nous les avons découvertes.» Nous oublions qu'ils ont une histoire dont ils sont fiers. Ils étaient ici avant nous. Ils étaient des nations, ils sont des nations et resteront des nations.


12778

Il y a une vingtaine d'années, le Québec et le Canada ont solidifié des relations importantes avec les premières nations, lorsque les premières revendications globales au Canada, caractérisées par la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois, ont suscité, avec raison d'ailleurs, un sentiment de fierté partout au Québec. Je dois rappeler aux députés du Bloc que c'est l'ancien premier ministre Trudeau qui était à nos côtés lorsque cette convention a été élaborée, mise au point et signée. C'est le premier ministre actuel qui occupait alors mes fonctions et qui a participé à la réalisation de cette convention. Les Cri ont un beau patrimoine-qui est aussi celui de tout le Canada-dont la Convention de la Baie James fait partie et auquel le Parti libéral a beaucoup contribué.

(1250)

Ces traités modernes ont marqué un tournant dans nos relations avec les peuples autochtones, pas seulement au Québec, mais partout au Canada. Les accords ont déjà permis de nombreuses réalisations, mais comme ils ont une portée et une complexité extraordinaires, il ne faut pas s'étonner qu'il reste tant à faire encore.

Quand j'ai visité les communautés cries, en décembre dernier, j'ai continué à discuter, avec le grand chef Matthew Coon-Come et les chefs cris, de la mise en oeuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. En conséquence, des travaux ont été entrepris en vue de poursuivre le dialogue sur plusieurs sujets de préoccupation.

Je suis heureux de signaler que, en vertu de la première loi adoptée au Canada concernant l'autonomie gouvernementale, soit la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec de 1984, nous avons franchi un grand pas dans les pourparlers bilatéraux visant un accord sur le financement d'un budget quinquennal de fonctionnement et d'entretien pour les gouvernements régionaux et locaux.

Dernièrement, nous avons aussi conclu un accord avec le chef Billy Diamond des Cris de Waskaganish, concernant l'eau douce et l'épuration des eaux usées. Je rappelle avec plaisir que l'établissement de la collectivité d'Ouje-Bougougmou a fait l'objet d'un article du National Geographic et de divers articles parus partout dans le monde qui ont qualifié l'initiative de modèle à imiter. À mon avis, tous les parlementaires devraient se rendre à Ouje-Bougougmou pour constater l'excellent travail qui peut résulter de la collaboration.

Nous avons pu compter sur la collaboration du chef Abel Bosom dès le début. C'est magnifique. Le projet visait des gens qui vivaient dans des cabanes dans huit ou neuf collectivités éloignées. Les rencontres avaient lieu dans une petite maison sur une colline. Les gens venaient le soir rencontrer un architecte à qui ils exposaient leurs propositions. Ils ne se sont pas contentés de regarder des plans. Ils y ont tous mis la main. Ils ont nommé chaque rue selon leurs lignes de piégeage. Si nous pouvions refaire tout cela avec les 605 premières nations d'un bout à l'autre du Canada, tous nos problèmes seraient résolus.

Je tiens à signaler aux députés ce que Billy Diamond a fait pour le Grand Conseil des Cris, dès 1974. Billy Diamond a sacrifié sa santé et sa famille. Le 28 juin 1971, il avait dit ce qui suit: «C'est notre pays. Personne n'a obtenu que nous le cédions. Nous ne l'avons pas perdu par suite d'un conflit. Nous n'avons jamais signé de traité. Personne ne l'a conquis. Le créateur ne laissera jamais personne nous l'enlever.» C'est comme cela que tout a commencé. Les Cris n'ont eu que trois leaders: Billy Diamond, Ted Moses et Matthew Coon-Come.

Si les gouvernements du Québec et du Canada travaillent de concert, nous pouvons rassembler plutôt que diviser et nous pouvons réaliser d'autres Ouje-Bougougmou. C'est ce que nous avons aujourd'hui. Il est facile de semer la division, mais difficile de garder les gens unis.

Dans le domaine des services de police, le ministère du Solliciteur général a conclu un accord tripartite en matière de sécurité publique pour toutes les localités cries. Cela révèle chez les Cris un objectif commun de se gouverner eux-mêmes en prenant en mains l'administration, la gestion et la supervision de leurs propres forces de police.

Nous trouvons également encourageant de voir qu'on a fait des progrès considérables pour en arriver à un accord en vue de créer un gouvernement du Nunavik. Même s'il s'agissait à l'origine d'une négociation entre les Inuit et le Québec, le Canada a été invité par les deux parties à se faire représenter à ces négociations, et nous avons fourni des fonds au comité constitutionnel du Nunavik pour mener à bien ces négociations historiques.

Le Canada participe à d'autres initiatives avec des groupes autochtones dans le Nord québécois. Nous avons organisé le forum Inuit et nous participons avec la société Makavik à des réunions tenues sur une base régulière pour examiner les progrès réalisés et coordonner l'application de l'accord de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois en ce qui concerne les obligations fédérales. Le Canada a signé en 1990 avec les Inuit un accord de mise en oeuvre de la CBJNQ qui prévoit des dépenses de 22,1 millions de dollars et divers autres engagements.

Les Naskapis font preuve eux aussi d'innovation dans la mise au point de partenariats. Nous avons signé récemment un accord quinquennal en matière de logement et d'infrastructure et nous examinons de concert avec d'autres ministères fédéraux une stratégie de création d'emplois.

Quand je suis sur le terrain avec les autochtones du Québec, 90 p. 100 du temps, ils ne parlent pas d'autonomie gouvernementale, ni de référendum ni de séparation. Ils parlent d'éducation, d'infrastructure, de réseaux d'aqueduc, de logement et de leurs aspirations. Voilà de quoi ils parlent.

(1255)

Or, ici, nous parlons de séparation. Les dilettantes intellectuels sont toujours en train de parler de séparation. Les autochtones, eux, parlent de sujets qui sont importants pour eux et pour leurs enfants: du pain sur la table, des emplois et la sécurité. Nous avons été élus pour assurer ces choses à la population. Nous avons été élus pour créer des emplois, assurer la responsabilité budgétaire et faire entrer le pays dans l'avenir, et c'est pourquoi nous ne nous écartons pas de notre programme.


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À la suite de la conclusion en 1990 de notre accord de mise en oeuvre de la Convention avec les Naskapis, je suis heureux d'apprendre que le Québec est engagé dans des discussions et espère résoudre bientôt divers problèmes liés à l'application de l'accord de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Les initiatives fédérales ne se limitent pas au Nord québécois. Comme je l'ai déjà dit, ont trouve des autochtones partout au Québec. Par exemple, toutes les revendications territoriales des 12 collectivités attikamègues et montagnaises sont extrêmement importantes pour tout le nord-est du Québec. Je compte que des négociations renouvelées et ravivées vont aboutir à un règlement juste et équitable des revendications territoriales complexes qui restent à résoudre.

Il est étrange que le Bloc ait aujourd'hui passé sous silence le fait que David Cliche, que j'aime bien en dépit de nos différences idéologiques-il est séparatiste et je suis fédéraliste-est allé offrir 400 millions de dollars aux Attikamègues et aux Montagnais; et ce n'est pas de l'histoire ancienne, puisque cela remonte à quelques mois seulement. On n'en a pas touché mot. Il a présupposé que 300 de ces 400 millions de dollars venaient du gouvernement fédéral. Pendant que le Québec recevait tous les remerciements-le député bloquiste sourit, mais c'est vrai-, que David Cliche recevait toutes les courbettes, et que le premier ministre Parizeau rayonnait, nous fournissions 300 des 400 millions de dollars.

Un député bloquiste a déjà dit qu'il était ici pour défendre les intérêts des contribuables canadiens, et que c'est bien pour cela que ses collègues et lui ont été élus. Ils ne sont pas ici pour scinder le pays-ils l'ont eux-mêmes dit-, mais pour accomplir leur travail. À ma connaissance, aucun député bloquiste ne s'est jamais demandé ici si c'était trop d'argent. C'est la première fois, je crois, que l'on mentionne que 300 des 400 millions de dollars sont sortis des coffres fédéraux. Heureusement en quelque sorte, l'accord a été rejeté.

Des événements importants concernent aussi la première nation huronne Wendat regroupée près de la ville de Québec. Il y a cela d'intéressant à propos des Hurons. Ils furent jadis la plus grande des six nations et ils ont joué un rôle important dans notre histoire. Par suite de maladies, de guerres et de ce que nous avons fait, ils n'occupent plus qu'une seule réserve, à Loretteville, près de Québec. C'est fort triste. Les livres d'histoire parlent tellement d'eux. Ils ont encore quelques réserves aux États-Unis, mais seulement une au Canada.

J'ai rencontré le Chef Max Gros-Louis en novembre 1994. Une entente était intervenue entre les négociateurs fédéraux, provinciaux et hurons Wendat pour qu'on recommande l'accord-cadre en vue de très importantes négociations sur l'application du Traité Murray.

J'ai plusieurs pages sur les Mohawks dont nous entendons parler tous les jours. Je vais sauter par-dessus, car le temps me manque. Je dirai simplement que cela marche. La table ronde mohawk n'est pas la fin des fins, mais elle donne des résultats. Nous parlons maintenant aux Mohawks. Le juge Réjean Paul est là et Michel Robert est là. Cela fonctionne. Depuis que nous formons le gouvernement, il n'y a plus de crises d'Oka. Nous avons parlé, négocié et traité équitablement avec les Mohawks du Canada.

Nous collaborons avec les Inuit, les Cris, les Naskapis, les Montagnais, les Algonquins, les Attikamègues, les Hurons, les Malécites, les Micmacs et les Mohawks du Québec. Si je ne m'abuse, jamais auparavant dans l'histoire de notre pays un gouvernement n'a pu dire qu'il faisait des progrès avec tous ces gens-là. Voilà ce qui compte, et non que le Bloc vienne nous dire ici aujourd'hui au nom du gouvernement du Québec que des sommes sont dues.

(1300)

Ce qui est important pour nous, c'est de travailler ensemble, lorsqu'il s'agit des autochtones, pour faire du bon travail. Au train où vont les choses, le pays ne va pas se diviser, de sorte qu'il vaut mieux commencer à penser à l'avenir. Il vaudrait mieux ne pas avoir de telles blessures profondes qui ne puissent se cicatriser. Cela pourrait arriver même ici. Nous pourrions causer des blessures si profondes qu'elles seraient impossibles à guérir. Nous devons décider ce qui est important pour nous collectivement.

Le député bloquiste de Saint-Jean est sur le terrain. Il est sans doute un des députés de l'opposition les plus compétents en matière autochtone. Il soulève à la Chambre la question des produits alimentaires livrés par la poste. Il communique les préoccupations des autochtones du pays. Il a fait une erreur en faisant du porte à porte dans un village mohawk où il a failli être kidnappé par des Mohawks parce que ceux-ci ne savaient pas qu'il était un député. Mais ce sont des choses qui arrivent.

Nous devons déterminer ce qui est important pour nous et quelles sont nos valeurs en tant que peuple. Je pense que, si nous le faisons, notre pays survivra et nous ferons du bon travail pour les peuples autochtones.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Madame la Présidente, pendant que le ministre parlait, je me suis permis de prendre quelques notes. Je dois dire qu'il nous a donné un cours extraordinaire sur la culture amériendienne, et ainsi on n'a pas vraiment complètement perdu notre temps puisque c'est une culture à n'en point douter qui nous enseigne bien des choses.

Voyez-vous, on était ici aujourd'hui, pas pour parler de la culture amériendienne, qui a ses mérites, mais pour parler d'un compte que le gouvernement fédéral doit au gouvernement du Québec. Mais c'est de l'argent et ce n'est pas important. C'est juste de l'argent. Cela fait quand même quelques petits problèmes. C'est facile de dire: Ah, il y a eu une crise à Oka et c'est sur le territoire du Québec, alors ce n'est pas très grave, que le Québec assume ses frais ou vienne en cour pour en discuter. Qui avait la responsabilité de transiger avec ces autochtones? C'était le gouvernement fédéral. Et si j'ai bien compris le ministre, puisque la culture autochtone a toutes ces vertus, si les Amérin-


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diens, à un moment donné, se sont fâchés, c'est parce que le gouvernement fédéral n'a pas fait sa «job». S'il n'a pas fait sa «job», qu'il en assume les conséquences.

Voyez-vous, c'est simple, ce cher ministre nous dit que c'est l'argent du fédéral qui servirait à rembourser au gouvernement du Québec des sommes d'argent que celui-ci a déboursées. Oui, mais il y a un problème là-dedans, il y a une erreur de logique fondamentale. Ce n'est pas l'argent du fédéral, c'est l'argent du contribuable. Parce que, voyez-vous, ces gens-là, peut-être qu'ils sont rouges, mais ce n'est pas le Père Noël. Ils n'inventent pas l'argent. L'argent, ils viennent le prendre dans les poches du contribuable. Et, essayer d'expliquer au ministre du Revenu d'attendre deux, trois ou quatre ans pour qu'on lui verse ses impôts, essayer de lui dire: «Écoutez, vous viendrez en cour et puis cela se réglera comme cela», cela créerait de petits problèmes aux contribuables qui oseraient s'essayer.

Non, ce n'est pas l'argent du fédéral, c'est l'argent du contribuable. Et là où le bât blesse, c'est que le contribuable québécois se trouve à payer deux fois: une première fois parce qu'il paie son écot au gouvernement fédéral et, une deuxième fois, parce qu'il paie au gouvernement provincial. Qui doit défrayer les coûts qui reviennent au fédéral? Ma sainte foi, la logique est simple. C'est une logique de probité, c'est une logique d'honnêteté, c'est une logique de «j'ai dépensé pour vous des sommes d'argent à l'intérieur d'une convention, je vous envoie la facture, vous aviez convenu de rembourser, eh bien, remboursez». Qu'est-ce qu'on se fait répondre? On se fait répondre: Ah, il faudra aller en cour. Il faudrait que vous sortiez tout le détail de ces factures. Ma sainte foi, je ne peux pas appeler cela de la bonne foi.

Je serais tenté de suggérer au ministre du Revenu du Québec de garder en garantie, à partir de la TPS qu'il perçoit, un montant égal à ce que le fédéral refuse de verser. Et lorsque le fédéral paiera ses comptes, le ministre du Revenu dégagera l'argent. Si c'est cela le langage qu'il faut parler, eh bien, ce sera cela le langage qu'on devra parler: 300 millions sur 400 millions.

(1305)

Le ministre dit: «M. Cliche, au Québec, a offert aux autochtones 400 millions». Il a oublié de dire qu'il y avait 300 millions d'argent fédéral, 300 millions d'argent des contribuables, pas de l'argent fédéral, de l'argent qui vient des poches des contribuables. Si le fédéral est tellement fauché qu'il faut qu'il arrache aux contribuables l'argent des taxes et des impôts et qu'il n'a plus les moyens de le remettre au Québec, il devrait se séparer du Québec et le Québec, lui, sera en mesure d'assumer ses 300 millions, sur les 400, parce que le Québec épargnerait la jolie somme de 30 milliards de dollars.

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'autorise le député de Nanaïmo-Cowichan à répondre brièvement, s'il vous plaît.

M. le ministre a été bien gentil, M. le ministre a été fort aimable dans ses propos, mais, malheureusement, M. le ministre n'a pas traité du sujet pour lequel on était ici. En conclusion, je demande au ministre de me répondre. Dès le début de son discours, il a dit qu'ils allaient voter contre la motion du Bloc. Alors, que fait-on ici toute la journée? On parle pour ne rien dire. Ces gens-là, d'office, ont déclaré qu'ils allaient se boucher les oreilles et voter contre. On est en train de perdre notre temps? Non, nous ne perdons pas notre temps, parce que la population qui nous écoute à la télévision saura la vérité et aura une autre excellente raison de régler le problème dès l'automne et d'accorder la souveraineté au Québec et d'avoir un Québec gagnant.

[Traduction]

M. Irwin: Madame la Présidente, je tiens à rappeler au député que nous dépensons 351 millions de dollars par année pour les autochtones de la région de Québec. Nous avons dépensé 980 millions de dollars pour les Cris, 552 millions pour les Inuit et 69 millions pour les Naskapis, pour un total de 1,6 milliard de dollars.

[Français]

Nous avons déjà donné au Québec 450 millions de dollars pour l'éducation.

[Traduction]

Je ne devrais peut-être pas le mentionner, mais le gouvernement fédéral a versé au Québec 450 millions de dollars au titre de l'éducation.

Le ministre des Affaires intergouvernementales a exprimé nos réserves. Le Québec dit que le gouvernement du Canada doit payer 50 p. 100 de la note, mais nous n'avons pas notre mot à dire sur le montant dépensé. Nous n'avons pas notre mot à dire sur l'éducation au Québec. C'est la province qui mène la barque. Il ne s'agit pas d'un partenariat. La province agit d'une certaine façon, nous envoie la note et nous dit qu'il ne nous reste plus qu'à payer.

Dans une lettre que je lui ai envoyée en avril, j'ai dit à Mme Beaudoin que je chargerais mes hauts fonctionnaires de tenter de trouver un terrain d'entente. Nous évaluerons les sommes dues et nous essaierons de trouver une solution juste. Le ministre des Affaires intergouvernementales a fait de même. Il est toutefois allé plus loin et a rencontré la ministre. Nous essayons de procéder logiquement.

Je partage l'opinion des réformistes sur un point. On joue à beaucoup de jeux ici aujourd'hui. La question, ce n'est pas la somme due au Québec, mais la séparation. Qu'on le veuille ou non, c'est de cela dont il est question.

Ce n'est pas à notre gouvernement qu'il appartient de prouver pourquoi la séparation est préférable. Le Bloc a de la difficulté à comprendre cela. Il a du mal à expliquer aux Québécois en quoi ils seront davantage souverains si le Québec se sépare.

En réalité, avec le GATT, l'ALENA et les mesures que nous prenons à l'égard des autochtones et des membres des communautés ethniques, les Québécois sont davantage souverains dans le cadre du fédéralisme. Ils le sont davantage et ils commencent à le réaliser. Les arguments du Bloc laissent à désirer. C'est à ses députés qu'il incombe de faire valoir leurs arguments et de convaincre les Québécois, pas à nous.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, le ministre vient de nous dire qu'ils ont donné 450 millions à l'éducation des autochtones du Québec. Cela fait trois ou quatre fois qu'on reprend cet argument du côté ministériel. Si la facture est de 600 millions, il faut la payer au complet.


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Quand je me suis acheté une voiture et que le vendeur m'a dit que c'était 30 000 $, je n'ai pas arrêté de payer après 20 000 $ en disant que cela était suffisant, que c'était trop. Il a fallu que je la paie, que je respecte mon engagement.

Tantôt, le ministre des Affaires intergouvernementales nous parlait des principes d'équité, de saine gestion-il en a mis beaucoup là-dessus-je le comprends, ce n'est pas de l'onguent. Mais, tout de même, ces beaux principes de gestion, l'an passé à peu près à pareille date, quand on discutait du cas de l'aéroport Pearson et qu'à plat ventre, on demandait une commission royale d'enquête pour faire valoir ces principes de saine gestion, de saine administration des fonds publics, on a reçu comme réponse qu'on ne pouvait pas, parce que cela pressait. Il fallait régler cela au plus tôt pour que l'économie roule, pour que le pays fonctionne.

(1310)

Qu'en est-il, madame la Présidente, un an après? On ne sait pas trop. Le projet de loi C-22 se promène dans les airs, il flotte un peu partout. Ce qui devait nous coûter, de l'aveu même du ministre des Transports, 25 millions de dollars s'est vu grossir à la faramineuse somme de 450 millions de dollars. Pourquoi dans ce cas-ci, aujourd'hui, parce que le Québec ou les Québécois demandent leur dû que, soudainement, on applique des principes qu'on a refusé d'appliquer l'année passée dans le dossier Pearson avec, pourtant, une enquête libérale qui recommandait d'intenter des poursuites.

Je voudrais que l'on m'explique cela. Comment a-t-il pu changer dans l'espace d'un an pour devenir à ce point méconnaissable?

[Traduction]

M. Irwin: Madame la Présidente, la Convention de la Baie James et du Nord québécois prévoit le partage de certains frais, par exemple pour l'infrastructure, les aqueducs et les égouts, et nous avons payé notre part. Nous tenons des comptes à ce sujet. Nous aurions tout aussi tort de présenter une note au Québec en lui demandant de payer sans poser de questions, que Mme Beaudoin de dire: «Voici la note, ne laissez pas les hauts fonctionnaires mettre la main dessus, le ministre des Affaires intergouvernementales et moi allons nous en occuper. Nous rendrons une décision politique».

Lorsque nous parlons de grosses sommes, je ne pense pas que nous puissions agir ainsi. Il faut qu'il y ait une comptabilité adéquate. Il faut que des fonctionnaires compétents fassent les calculs. Tout est là: c'est de la comptabilité. Nous l'admettons. Ce que nous n'admettons pas, c'est que le Bloc québécois fasse de ce dossier une affaire politique. Pour nous, il n'y a là qu'une question de comptabilité qui fait partie de nos rapports normaux avec le Québec ou toute autre province du Canada, de la Colombie-Britannique à Terre-Neuve.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, en tant que critique des affaires indiennes, je vais plutôt m'attarder sur deux des réclamations qui sont devant nous aujourd'hui. J'aurais pu sauter dans le vif du sujet immédiatement, mais je me suis dit qu'il serait peut-être utile de voir ce que les Québécois et les Québecoises, entre autres, peuvent faire avec 300 millions de dollars, parce que c'est à peu près la réclamation dont nous discutons en cette Chambre présentement, une réclamation qui est faite au gouvernement fédéral.

Avec 300 millions de dollars, il y a énormément de choses qui peuvent être faites au Québec avec ce montant. La première chose qui me vient à l'idée, c'est probablement ce que le ministre Paillé a fait mettre de l'avant au Québec, c'est-à-dire un fonds d'investissement un peu plus risqué, où on permet, entre autres, à des jeunes entreprises, qui ont des idées originales, de se lancer en affaires, et où on pense créer de 50 000 à 100 000 emplois avec un fonds à peu près similaire de 300 millions de dollars.

On peut voir que nous sommes affectés d'un chômage assez chronique au Québec-d'ailleurs, le taux de chômage au Québec a toujours été supérieur au taux de chômage canadien-, à cause des décisions qui sont prises ici, dans cette Chambre, d'envoyer souvent l'industrie lourde, tous les créneaux d'activités de création majeure d'emplois souvent ailleurs qu'au Québec. Et nous, on est pris avec une Caisse d'assurance-chômage, et on nous dit: «Vous être chanceux, on vous donne plus d'argent que vous nous en donnez. On vous retourne plus d'argent en chômage, en transfert d'assistance sociale et en éducation.» Écoutez, on ne bâtit pas une société avec des chômeurs et des assistés sociaux. Ces gens-là sont mal pris actuellement. Il faut les remettre au travail.

Je trouve tout à fait légitime qu'aujourd'hui on pose une question au gouvernement, qu'on interpelle le gouvernement avec une motion qui est devant eux, et qui dit: Écoutez, mesdames et messieurs, honorez vos factures. Vous nous devez 300 millions de dollars.

Je voudrais parler de la question d'Oka. Originalement, la facture se chiffrait à 84 millions de dollars. Le gouvernement libéral a réglé finalement un compte de 5,3 millions de dollars en 1992. En 1992, le gouvernement a regardé la réclamation qu'on lui avait adressée, et il nous a dit: «On paie 5,3 millions de dollars. Pour ce qui est du reste, c'est non admissible.» Pourquoi est-ce non admissible? Il n'y a presque pas de raison. À l'époque, je vous rappelle que c'était un gouvernement libéral, fédéraliste, qui était au pouvoir au Québec. Je veux parler, entre autres, de notre ineffable ministre de la Sécurité publique de l'époque, M. Ryan, que tout le monde connaît d'ailleurs, et qui a dansé le tango avec le fédéral.

(1315)

Il a dansé le tango de façon très synchronisée. M. Ryan ne cessait de se plaindre, et le fédéral n'a cessé de lui envoyer des lettres lui disant: Écoutez, vous exagérez, on ne paiera pas tant que ça, on va vous donner 5,3 millions, mais pour ce qui est des 79 millions, le reste, oubliez cela.

M. Ryan continuait sa danse avec le fédéral, il a continué ses échanges de correspondance avec le fédéral, il a continué à pleurer des larmes de sang dans les officines gouvernementales fédérales ici à Ottawa. Il a continué d'écrire aux ministres des discours larmoyants disant: Il faut que vous régliez cela pour nous.

Jamais cependant on ne l'a vu sur la place publique et exiger du fédéral, comme le gouvernement actuel le fait, après autant de tergiversations, exiger que le compte soit payé maintenant. On connaît l'esprit fédéraliste de M. Ryan, l'ineffable, comme je l'ai


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dit, ministre de la Sécurité publique de l'époque au Québec, et on comprend qu'il se soit uniquement contenté de danser le tango en privé avec le fédéral et qu'il n'ait jamais osé aller sur la place publique. Alors ça se fait aujourd'hui.

Pourquoi les dépenses ne sont pas admissibles? On ne le sait pas, sauf qu'avec l'arrivée du Parti québécois au pouvoir en 1994, déjà en décembre 1994 le ministre de la Sécurité publique de l'époque demandait le remboursement à son homologue. Ce qui s'est passé, c'est exactement ce dans quoi le ministre veut nous entraîner aujourd'hui. «On va faire ça avec les vérificateurs et on va faire ça avec les hauts fonctionnaires. Je suggère que nous nous rencontrions.»

Depuis cinq ans ça n'a été que cela, des rencontres. Depuis cinq ans qu'on nous dit qu'on va mettre des fonctionnaires ensemble pour tenter de régler la situation, qu'on va demander aussi au vérificateur général ce qui est admissible, ce qui peut être payé.

C'est bel et bien une catastrophe qu'on a eue en 1990 au Québec, une catastrophe qui a d'ailleurs eu non seulement une portée québécoise, non seulement une portée canadienne, mais internationale. Plusieurs cours, plusieurs forums internationaux ont été saisis de la question des événements d'Oka. Je pense que le Québec se qualifiait, selon des dispositions d'ententes signées entre le fédéral et le provincial, en cas de catastrophe du genre.

Est-ce que c'était une catastrophe? Je pense que je pourrais parler là-dessus pendant quelques heures certainement pour avoir vécu les événements, pour les avoir constatés, pour avoir constaté l'incurie du gouvernement fédéral à l'égard de la crise d'Oka. Quant à nous, il est évident qu'il y avait une crise majeure à Oka, une crise pas seulement pour les autochtones mais aussi pour les Québécois.

On peut se rendre compte que dans la belle région d'Oka où je me rends régulièrement, près du lac des Deux-Montagnes, l'aspect touristique a été complètement effacé de la carte. Cette région est tombée dans les bas-fonds, sur le plan touristique. Il n'y a plus personne qui va à Oka. Il y a encore les événements, aujourd'hui, à Oka, qui font en sorte qu'on démontre encore l'incurie de ce gouvernement. Ce gouvernement se croise les bras et attend que les choses tournent mal. Pendant ce temps que se passe-t-il? L'économie de cette région et celle des régions avoisinantes en souffrent.

Le compte qui est devant nous, il y a des gens de la Sûreté du Québec, à cette époque, qui ont passé des semaines à Oka, éloignés de leurs familles. La facture, qui la paie actuellement? C'est le gouvernement du Québec. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a des ententes à l'effet qu'en cas de catastrophe on doit faire un certain partage. Dans ce partage, c'est uniquement le Québec qui paie la facture, à l'exception d'un minime 5,3 millions qui était donné.

Je dis aussi incurie de la part du gouvernement, et on le voit encore aujourd'hui, on l'a vu la semaine passée, avec la nomination de leur grand ami, Me Michel Robert, qui a été nommé à la Cour d'appel du Québec. Le grand ami de nos amis libéraux, l'avocat rouge par excellence, l'homme qui était sur tous les comités stratégiques de cette Chambre, y compris au Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité.

C'est un homme qui se trouvait au milieu des négociations à Kanesatake. Et quand je dis incurie c'est que je connais aussi la philosophie autochtone. La philosophie autochtone: on n'arrive pas là du jour au lendemain en disant qu'on va négocier, qu'on se donne un échéancier et qu'on va régler cela en trois jours. Ça ne fonctionne pas comme cela du tout. Il faut du temps pour créer un climat de confiance avec eux. Me Robert, je lui reconnais un mérite, c'est qu'il est un très bon négociateur d'une grande compétence.

(1320)

Cependant, après sept ou huit mois, alors qu'on commençait à voir la lumière au bout du tunnel, qu'est-ce que ce gouvernement a fait? Il a nommé Me Robert à la Cour d'appel et on a dû recommencer à zéro. Ce que je prétends, à l'heure actuelle, c'est que le gouvernement fédéral, tout comme il l'a fait en 1990, joue avec la pression à Oka. On monte ou on descend la pression, et c'est souvent à cause du contexte politique dans lequel on vit. Alors aujourd'hui, on réclame une facture de 79 millions, en sachant que ce gouvernement, depuis 1990, à Oka, ne lève pas le petit doigt pour régler le problème. Il me semble que c'est tout à fait légitime dans le contexte actuel. Comme je le disais, c'est un autre exemple de l'incurie du gouvernement.

Qu'est-ce qu'on devait faire à Oka? Le gros de la facture, le gros de la réclamation est certainement dû aux officiers de police qui étaient là. Qu'est-ce que cela va prendre pour convaincre ce gouvernement? Un vidéo, peut-être? Je pense que les vidéos sont bien à la mode. Le gouvernement de l'autre Chambre n'a bougé, ces derniers temps, que lorsqu'il a vu des vidéos.

Je me rappelle des événements d'Oka où la force de la Sûreté du Québec était systématiquement prise en sandwich entre les opposants aux autochtones et les autochtones eux-mêmes. J'ai vu les officiers de police se faire mettre en morceaux et en charpie. J'en ai vu, sur des vidéos, accompagnés de leurs amis, sortir sur des civières, parce qu'ils étaient en train de s'interposer entre deux camps qui voulaient s'égorger, ou presque.

Aujourd'hui, on nous dit: «Arrangez-vous avec cela. C'est vous autres la sécurité publique. C'est vous autres, le Québec, qui vous chargez de la sécurité publique.» Et notre lien fiduciaire avec les autochtones, le fait qu'on les paie et qu'on accorde une certaine somme d'argent, annuellement, au conseil de bande d'Oka, de cela, on ne s'en mêle pas. On continue de payer, nous. Mais vous, vous allez continuer de payer la facture quand ça tourne mal, et quand décidons que ça tourne mal en plus.

Il me semble que c'est tout à fait légitime que 79 millions de dollars soient remboursés au Québec pour cela. Je trouve que le gouvernement du Québec s'est bien comporté, à l'époque, dans cette crise en faisant interposer la Sûreté du Québec entre deux factions qui voulaient s'en prendre l'une à l'autre.

On dit continuellement: «Le vérificateur général va contrôler. Assoyons-nous entre hauts fonctionnaires, on va contrôler.» Je pense que le problème est dans le camp fédéral. On devrait nommer un vérificateur général au-dessus de tout le monde qui vienne vérifier le comportement de ce ministère qui, non seulement, ajuste les pressions à la hausse ou à la baisse, mais qui en plus, perpétue, de façon dilatoire, l'affrontement financier entre


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le Québec et le Canada. C'est cela le problème. On ne veut pas régler le problème du côté fédéral.

Alors, il est tout à fait normal, lorsqu'on arrive avec une facture, qu'on dise: «Assoyons-nous et regardons cela ensemble avec les fonctionnaires.» C'est un règlement politique que Mme Beaudoin voulait avoir. Elle voulait rencontrer le ministre des Affaires intergouvernementales et régler cette facture une fois pour toutes. Mais la solution du ministre, comme toujours, c'est de perpétuer le problème. On va retarder, on va réunir des fonctionnaires, mes hauts fonctionnaires, mes fidèles serviteurs vont vous rencontrer, mais moi, je ne règle pas le problème. Le gouvernement fédéral ne règle pas le problème. Alors, on est toujours dans un perpétuel affrontement du côté financier avec le gouvernement et cela risque de se perpétuer si on n'adopte pas ce type de motion sur laquelle on tient un débat large aujourd'hui pour essayer de convaincre les gens d'en face qu'ils doivent honorer leurs factures et leurs comptes.

Je passe maintenant au sujet de la Baie James. On connaît aussi l'esprit d'ouverture. Le ministre nous a fait un très bon exposé culturel de ce qui se passe au Québec. Je pourrais en faire un aussi, mais je veux plus répondre aux questions des Québécoises et des Québécois qui sont actuellement en attente de recevoir un compte qui leur est dû de 300 millions de dollars du fédéral. Je pourrais parler des Naskapis, des Cris, des Inuit pendant des heures, mais ce n'est pas le débat d'aujourd'hui.

Ce n'est pas le fait non plus que le gouvernement fédéral, par l'entremise des contribuables naturellement, et tantôt mon confrère l'a souligné, ce n'est pas la question non plus qu'on doive attendre tout le temps des sommes d'argent du fédéral. La question porte aussi sur le fait qu'on ne peut pas nier que le fédéral n'a pas donné d'argent. C'est sûr qu'ils doivent en donner. D'ailleurs, le lien fiduciaire qui les lie avec les autochtones du Canada fait en sorte qu'il doit assurer un certain niveau de vie minimum aux autochtones. Je ne nie pas que le gouvernement fédéral ait donné ces sommes d'argent. Mais le gouvernement du Québec aussi.

(1325)

Je vais vous donner des statistiques qui démontrent que, du côté de l'éducation, le gouvernement du Québec n'a pas attendu le gouvernement fédéral. Si cela avait été le cas, je pense que les Cris de la Baie James seraient en très mauvaise posture aujourd'hui.

Comment ça se passe à la Baie James? Du côté de l'éducation, il y a trois commissions scolaires, une pour les Cris, une autre pour les Inuit et une autre pour les Naskapis. Le partage financier s'est conclu par un «gentlemen's agreement», comme on dit en anglais. Je ne sais trop comment le dire en français, peut-être un accord entre gentilshommes.

À l'époque, on se disait: Voici de quelle façon on va répartir les coûts. J'ai le tableau ici devant moi: Pour les Cris-Naskapis, le Québec devait assumer 25 p. 100 des coûts et le fédéral 75 p. 100; pour les Inuit, c'était l'inverse: 75 p. 100 des coûts revenaient au Québec et 25 p. 100 revenaient au fédéral. L'éducation autochtone pour nous, au Québec, c'est important. Je ne peux pas vous donner les chiffres exacts, mais je peux vous donner les conclusions de ces statistiques.

Au niveau de la rétention du langage du côté des Cris, des Inuit et des Naskapis, on a une moyenne supérieure au reste du Canada. Quand je dis rétention de langage, ce n'est pas qu'ils puissent parler français ou anglais, c'est qu'ils puissent parler leur langue maternelle, c'est-à-dire le cri. C'est définitiment supérieur au reste du Canada, et c'est dû, entre autres, grâce à l'intervention du Québec et du rôle de la Convention de la Baie James, qui est un modèle au Canada et qui a été repris par un ensemble de nations autochtones comme base de négociations avec le gouvernement fédéral. J'ajoute que le gouvernement fédéral s'est souvent référé à cette Convention parce que, comme je vous le disais plus tôt, c'est un modèle.

Du côté du taux de scolarité, il est supérieur aux autres autochtones du Canada. Du côté de la santé, parce que ces gens-là sont plus éduqués-il est important de tenir compte de cet élément-du côté de la morbidité infantile, les autochtones se situent sous la moyenne canadienne. Concernant l'espérance de vie, elle est supérieure à celle du reste des autochtones du Canada. Donc, le gouvernement du Québec vis-à-vis les Cris, les Inuit et les Naskapis a pris ses responsabilités.

Le gouvernement n'a jamais voulu signer de protocole. C'est un accord entre gentilshommes, et cela a bien fonctionné jusqu'en 1987. Mais à partir de 1987, on a utilisé une toute autre façon pour faire le calcul. On disait: Écoutez, on va juste indexer. On ne tenait pas compte non plus du taux de natalité qui, soit dit en passant, est le double du reste du Canada. On assiste donc à des pressions terribles au niveau budgétaire du côté des autochtones actuellement. Ce n'est pas compliqué à expliquer. La population autochtone croît deux fois plus vite que celle du Canada.

Concernant le développement de l'éducation aux adultes, on s'est rendu compte qu'on avait toute une génération derrière nous, et cela s'applique partout au Canada. Cela s'est passé avec les lieux de résidence à l'époque où on prenait des enfants dans les familles et on les amenait loin des leurs pour essayer de leur faire oublier leur culture et leur langue. Il y a toute une génération, celle qui nous a précédés du côté autochtone, qui a complètement manqué le bateau du côté de leur culture, de leur langue, de leur reconnaissance en tant que peuple et, forcément, de leur éducation.

Donc, il y a des dispositions dans le Grand-Nord québécois qui font en sorte que dans l'éducation aux adultes, il y a du rattrapage à faire, et ces gens-là le font. Il y a également des demandes de services accrues du côté des garderies, etc. Ces gens, les autochtones du Grand-Nord, sont à la fine pointe, ce qui leur permet d'avoir des conditions d'éducation très valables par rapport au reste du Canada.

Quelle est la réaction du gouvernement fédéral? Ils disent qu'ils vont rembourser, mais selon un critère d'indexation, plutôt que de respecter les termes de la Convention de l'époque. Ce gouvernement n'entend pas non plus payer sa part pour cette année.

Dans le Budget du ministre des Finances, on n'a pas prévu de sommes d'argent pour rembourser la part du fédéral selon les ententes de la Baie James. J'entendais le ministre dire tantôt: «Écoutez, on a donné 450 millions.» Je vais le reprendre, c'est une erreur mineure, c'est 465 millions. Il a donc donné plus que ce qu'il dit. Le problème, c'est que si on avait continué avec les


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ententes telles qu'on les avait établies au départ, c'est 584 millions de dollars que le gouvernement fédéral aurait dû nous donner, d'où le fameux manque à gagner de 119 millions que nous réclamons aujourd'hui.

Je voudrais parler d'un autre ministre de l'époque du gouvernement du Parti libéral du Québec qui est aujourd'hui rendu de l'autre côté de la Chambre, et c'est la ministre Travail.

(1330)

Il me reste trois minutes, alors j'ai juste le temps d'expliquer ce que la ministre de l'Éducation du Parti libéral du Québec faisait à l'époque. Elle aussi dansait le tango avec le gouvernement fédéral, comme son collègue. Elle prenait la relève du collègue de la Sécurité publique, M. Ryan, et elle envoyait ses sous-ministres dire: «Écoutez, ça n'a pas de bon sens, du côté de l'éducation. Il faut que vous nous remboursiez.» Il y a eu ici une série de rencontres et, naturellement, rien n'a été fait de ce côté.

Alors, je conclus en me demandant: Que pouvait faire le Québec? Qu'est-ce que le gouvernement du Québec pouvait faire devant l'incurie du gouvernement, devant ce croisement de bras général du côté du gouvernement fédéral? Est-ce qu'on devait faire comme les autochtones que j'ai visités dans le centre du Canada, faire comme la bande Blood et la nation Blackfoot et dire à des jeunes: «Cette année, c'est désolant, mais on n'a pas d'argent. On ne peut pas vous envoyer à l'école.» Nous, on n'a pas fait cela. Même si le gouvernement fédéral ne payait pas sa part, nous, les Québécois, avons pris sur nous de faire en sorte de respecter les peuples autochtones du Québec et on leur a permis d'aller à l'école.

Il n'y a pas un seul enfant dans le Nord du Québec qui ne va pas à l'école faute de fonds. C'est parce que le gouvernement du Québec a pris la relève. Que devait-on faire à Oka? Aurions-nous dû retirer les forces constabulaires, les forces de la Sûreté du Québec et laisser les gens s'entre-déchirer? On a été plus responsables que cela et la Sûreté du Québec s'est comportée de façon assez exemplaire pendant ces événements, en empêchant les gens de s'entre-déchirer. Maintenant que tout cela est dit, je demanderais au gouvernement fédéral de respecter l'accord entre gentilshommes. Je pense que les gentilshommes, jusqu'à maintenant, ont été de ce côté-ci de la Chambre. J'espère que les gentilshommes de l'autre côté de la Chambre vont maintenant respecter leur parole de l'époque et qu'ils vont honorer leurs comptes à l'égard des gens du Québec.

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner ces quelques minutes pour répliquer, sinon pour poser une question à mon collègue de l'opposition. Quand j'écoute non seulement ce représentant de l'opposition officielle, mais aussi l'ensemble des représentants de l'opposition officielle aujourd'hui, je me demande si on vit dans le même monde et parfois, je vous avoue bien sincèrement que je crois rêver.

Ces gens-là, aujourd'hui, parlent carrément contre les intérêts de la province de Québec. On crie haut et fort qu'on veut protéger les intérêts de la province de Québec. C'est de tenter de leurrer la population québécoise, qui est une population très mûre et qui n'embarquera pas dans cette espèce de piège purement partisan du Bloc québécois.

Ce qu'on demande au gouvernement fédéral, du côté de l'opposition officielle, c'est d'agir de façon irresponsable. Mais c'est sérieux, au niveau politique. Le ministre des Affaires intergouvernementales l'a exposé devant cette Chambre ce matin. Le ministre est appelé à gérer des fonds publics, à gérer des fonds qui comprennent, pour une bonne partie, des fonds qui proviennent des contribuables de la province de Québec. Donc, moi-même, en tant que Québécois, je suis en droit de m'attendre à ce que mes gouvernements gèrent sérieusement ces fonds publics et maximisent également les retombées et les gèrent dans l'intérêt du public.

C'est ce que fait présentement le ministre des Affaires intergouvernementales. Il gère les fonds publics d'une façon saine, responsable, dans l'intérêt de la population canadienne et, il va sans dire, dans l'intérêt du Québec. Le ministre a expliqué ce matin qu'il a fait le maximum. Tout le bout de chemin qu'il a pu faire en remettant des fonds en avance au Québec, il l'a fait. Donc, ce que je vais demander essentiellement au représentant de l'opposition officielle, c'est ceci: Est-ce qu'il voudrait plutôt voir le gouvernement fédéral, et c'est ce que je crois comprendre de leur motion, agir de façon irresponsable en dilapidant les fonds publics aux quatre vents, sans mesure de précaution? Je pense que ce n'est pas là l'intérêt du Québec.

(1335)

Je pense que quand vous grattez un peu cette motion des représentants du Bloc québécois, vous y trouvez, encore une fois, d'une façon on ne peut plus claire, une tache qui démontre qu'ils n'agissent pas en fonction des intérêts de l'ensemble de la population québécoise, mais qu'ils agissent-j'aurai l'occasion d'y revenir cet après-midi-qu'ils agissent purement en fonction de leurs intérêts partisans, de leurs intérêts visant la séparation du Québec.

Je pense que la situation ou la problématique est claire: gouvernement responsable versus des gens qui visent une incurie nette. Je pense que quand on regarde cela, quand on regarde le tableau, je suis québécois et pour moi la réponse est claire, il est évident que j'abonde dans le même sens que le ministre des Affaires intergouvernementales qui vise d'abord et avant tout une saine gestion de nos deniers.

M. Bachand: Madame la Présidente, je dirais à mon collègue d'Outremont qu'il rêve probablement, il l'a dit lui-même. Et personnellement, je pense qu'il rêve en couleurs. Quant à nous, nous faisons un cauchemar à entendre de tels propos d'un député qui vient du Québec. Je lui demanderais de retourner dans son comté demander à ses électeurs s'ils sont d'accord que le Québec, où les gens paient un certain impôt, et à Ottawa, où les gens paient un certain impôt, que le litige devant nous soit payé uniquement avec les impôts du Québec.

Est-ce que ses électeurs et les miens peuvent dire qu'ils paieront 300 millions de dollars de moins à Ottawa pour régler cette facture? Ils ne peuvent pas le faire dans le contexte actuel. Donc, c'est le Québec qui paie et encore on a un manque à gagner. On a un manque à gagner et je trouve que c'est désolant que de telles remarques viennent d'un député du Québec.


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Le ministre des Affaires intergouvernementales gère dans l'intérêt du public, vraiment dans l'intérêt du public. Je pense qu'il gère dans l'intérêt d'Ottawa et que lui-même, le ministre des Affaires intergouvernementales, originaire du Québec, oublie que quand on paie des taxes et des impôts à Ottawa on devrait obtenir des services qui nous sont retournés et qui nous sont payés. C'est cela le débat d'aujourd'hui.

On prétend, avec un dossier solide, que le gentlemen's agreement, l'accord entre gentilshommes, on était prêts à le respecter et le gouvernement fédéral ne l'a pas respecté. Il doit 300 millions de dollars au Québec et c'est ça l'intérêt public du Canada, c'est d'honorer ses factures. Cela fait cinq ans dans un cas, huit ans dans l'autre, que toutes les vérifications ont été faites, maintenant c'est le temps de payer. Et on demande au gouvernement fédéral de payer sa part.

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Madame la Présidente, le débat d'aujourd'hui couvre un large éventail d'activités du gouvernement fédéral, et cette interpellation montre à quel point le Bloc québécois cherche désespérément à faire flèche de tout bois pour accréditer la thèse rejetée par l'ensemble des citoyens du Québec.

Le but recherché par le Bloc est évidememment de jeter le discrédit sur le gouvernement fédéral, mais en vain puisque l'effet boomerang est, encore une fois, à l'oeuvre aujourd'hui. Si bien que ce débat n'est ni plus ni moins qu'une occasion d'apprécier l'étendue des prérogatives et responsabilités qui incombent à l'administration fédérale du Canada.

L'une de ces responsabilités est prise en charge par le programme de stabilisation fiscale, créé sous l'égide de la Loi sur les accords fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et sur les contributions fédérales en matière d'enseignement postsecondaire et de santé. Le programme de stabilisation a pour but de fournir une protection aux provinces dans l'éventualité de baisses extraordinaires de l'activité économique.

Plus précisément, les provinces dont les recettes, d'une année à l'autre, accusent une baisse imputable à un ralentissement de l'économie, telle la dernière récession, ont accès à une aide financière assujettie à des règles précises énoncées dans la loi.

[Traduction]

La compensation prévue dans le programme de stabilisation est fondée sur la réduction, en termes absolus, des recettes admissibles d'une province d'une année à l'autre. Trois restrictions s'appliquent. Tout d'abord, les modifications apportées par la province au taux ou à la structure de ses impôts doivent entrer en ligne de compte dans le calcul de la diminution des recettes. Les compensations prévues dans le programme visent les baisses de recettes attribuables au cycle économique et non pas aux décisions de réduire les impôts prises arbitrairement par les provinces.

(1340)

Deuxièmement, le réduction des recettes tirées du secteur des ressources n'entre en ligne de compte dans le programme de stabilisation que dans la mesure où la réduction annuelle dépasse les 50 p. 100. Troisièmement, depuis 1987-1988, le maximum des sommes payables à une province est fixé à 60 $ par habitant. Toute aide dépassant cette limite est laissée à la discrétion du ministre des Finances et prend la forme d'un prêt sans intérêt. Le critère déterminant de l'admissibilité au programme de stabilisation est la diminution des recettes attribuable à la situation économique, que cette diminution concerne le présent ou le passé.

La législation et les règlements en matière de stabilisation contiennent des règles très détaillées sur la façon d'estimer les recettes provinciales et de tenir compte des changements d'imposition. Ce sont les règles mêmes que nous avons toujours appliquées, ainsi que la loi l'exige, aux demandes présentées par les provinces.

Le programme de stabilisation a pour but de venir en aide aux provinces qui traversent des périodes exceptionnellement difficiles, ce qui explique pourquoi seules trois provinces avaient reçu des paiements de stabilisation jusqu'en 1990: la Colombie-Britannique, qui a reçu 174 millions de dollars pour l'exercice 1982-1983; l'Alberta, qui a reçu 419 millions de dollars pour l'exercice 1986-1987; et l'Ontario, qui a reçu 227 millions de dollars pour 1990-1991.

Pour avoir droit aux paiements de stabilisation, la province doit faire une demande au ministre fédéral des Finances, au plus tard 18 mois après la fin de l'exercice visé.

[Français]

Le ministre des Finances, M. Paul Martin, annonçait, le 7 décembre dernier, le versement de paiements totalisant 782,4 millions de dollars en réponse aux demandes faites par les provinces dans le cadre du programme de stabilisation, dont 418 millions de dollars au titre de l'exercice financier 1991-1992.

Ces paiements représentent le règlement final des demandes de sept provinces pour l'exercice 1991-1992 ainsi qu'un versement provisoire au titre de cinq demandes pour l'exercice 1992-1993.

Envers et contre toutes les insinuations pernicieuses et non fondées du Bloc québécois, ces demandes ont été réglées conformément à l'esprit et à la lettre de la loi régissant le programme de stabilisation fiscale. Et toutes les provinces ont été traitées sur un même pied d'égalité.

Le Bloc québécois laisse entendre que le gouverrnement fédéral a fait preuve de moyens dilatoires dans le règlement de réclamations du Québec.

J'exhorte l'honorable député qui est à l'origine de cette interpellation en Chambre aujourd'hui à consulter son propre chef sur le sens de l'expression «dilatoire», car personne ne s'y connaît mieux que lui pour retarder des échéances.

[Traduction]

En ce qui concerne l'exercice 1991-1992, le ministre des Finances a effectué un paiement final à cinq provinces: Terre-Neuve, 3,1 millions de dollars; la Nouvelle-Écosse, 55 millions; l'Île-du-Prince-Édouard, 5 millions; l'Ontario, 284,4 millions; le Manitoba, 42,9 millions.

Les demandes adressées par deux autres provinces, la Saskatchewan et le Québec, ont été jugées irrecevables en vertu de la règle établie par la loi.


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[Français]

La demande du Québec pour l'exercice 1991-1992 a été jugée irrecevable parce qu'il a été démontré, en vertu des règles établies dans la loi, qu'il n'y a pas eu de baisse de recettes attribuable à la conjoncture. Donc, il ne peut y avoir compensation. Un point c'est tout.

Il n'y a dans cette situation ni traitement défavorable, ni intrigue, ni politicaillerie.

Le ministre des Finances est en outre habilité, en vertu de la loi, à effectuer des paiements intérimaires à une province dans le cas où les données actuelles disponibles appuient les demandes.

À preuve, le ministre Martin annonçait, le 7 décembre 1994, le versement des paiements provisoires à cinq provinces au titre de l'exercice 1992-1993, dont 125 millions de dollars au Québec. Dans ce cas, la demande du Québec était fondée et le gouvernement fédéral a payé.

(1345)

Je défie le Bloc québécois de faire un battage aussi important sur le paiement effectué au gouvernement du Québec pour l'exercice 1992-1993 qu'il l'a fait pour jeter insidieusement le discrédit sur le gouvernement fédéral à l'égard des paiements effectués pour l'exercice 1991-1992.

Pour conclure, les décisions prises par le ministre des Finances du Canada sur toutes les demandes de stabilisation provinciales sont conformes à la loi et aux règlements régissant le programme. De plus, elles traitent toutes les provinces de façon cohérente et équitable. Ces décisions sont finales.

La Loi sur la stabilisation ne prévoit aucun mécanisme d'arbitrage. Si le Québec veut contester le bien-fondé juridique de la décision fédérale, il existe un recours: celui d'en appeler devant les tribunaux.

Ceux qui parlent de fédéralisme judiciaire parlent à travers leur chapeau. Le gouvernement canadien, cette année, verse quelque 11,7 milliards de dollars en transferts fédéraux à la province de Québec. C'est ce que j'appelle le fédéralisme constructif, le fédéralisme positif.

Je voterai contre la motion du Bloc québécois car elle nie la réalité et n'ajoute absolument rien de constructif à ce débat.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, nous parlons aujourd'hui de la motion qui a été présentée au nom de l'opposition par le député de Mégantic-Compton-Stanstead et qui porte sur les réclamations financières du Québec. Nous ne devrions pas être surpris, surtout ceux parmi nous qui viennent de l'Alberta, de la Colombie-Britannique ou de l'Ontario et qui sont habitués depuis longtemps aux exigences financières du Québec, de devoir discuter d'une motion de subsides qui provient du Bloc québécois et qui porte sur les réclamations financières du Québec.

Cette motion touche un point qui est au coeur de toutes les discussions sur la raison de la présence du Bloc au Parlement canadien. Il s'agit d'une bien triste situation. La grande majorité des Canadiens considèrent le Canada comme une nation et une fédération de dix provinces réunies parce que nous sommes tous des Canadiens. Les motifs pour lesquels nous sommes Canadiens ne se résument pas à une ligne de résultats sur un bilan financier. Nous ne nous demandons pas constamment: «Qu'avons-nous à y gagner?»

Pendant les débats en comité, il arrive fréquemment que les députés du Bloc québécois-je dois reconnaître en toute justice qu'ils font exactement ce qu'ils avaient promis de faire en arrivant au Parlement- analysent les politiques ou les projets de loi sur le seul plan de leurs conséquences directes pour le Québec. Leurs questions sont toujours les mêmes: Comment pouvons-nous protéger ce que nous avons déjà tout en obtenant un peu plus et comment pouvons-nous parvenir à l'indépendance totale tout en conservant l'appui dont nous avons toujours profité et que nous pourrions encore désirer plus tard?

(1350)

Il n'est donc pas très surprenant de voir que la Chambre consacre une journée de débat à cette motion. Le Parti réformiste a voulu faire partie de ce Parlement essentiellement pour défendre un objectif absolument prioritaire à ses yeux. Sa priorité était de redresser la situation financière du pays. C'est ce que demandaient beaucoup de ceux qui ont appuyé le Parti réformiste de même que, je suppose, beaucoup de ceux qui ont appuyé le parti d'en face qui forme le gouvernement, le Parti libéral, et également le Bloc québécois. La première priorité de notre pays doit être de remettre de l'ordre dans les finances publiques.

Elle doit être la priorité numéro un de cette législature. Elle doit être aussi la priorité numéro un de nos collègues du Bloc.

Quand je dis dans nos finances publiques, je vise tout le monde au Canada, y compris les Québécois. À moins que nous ne mettions de l'ordre dans nos finances publiques, que nous restera-t-il? À quoi servirait-il d'avoir un Québec indépendant, mais en faillite? Ce serait totalement inutile. De penser à diviser le pays et de s'attendre à ce que les nantis aient la même masse critique et à ce que nous ayons autant de succès que lorsque nous étions unis, c'est stupide.

Il y a des régions de notre pays qui en profiteraient immédiatement, par exemple les régions qui, du fait de la péréquation, versent des milliards de dollars à l'est, dont une bonne partie au Québec, depuis de nombreuses années. Nous ne parlons pas de souveraineté-association, nous ne parlons pas de divorcer, mais de conserver des privilèges quant au partage de la chambre, nous parlons d'une nouvelle maison, d'une nouvelle rue, de la grosse affaire. Est-ce que la population du Québec s'imagine que les paiements de péréquation ou les paiements de transfert du reste du pays continueraient d'être faits au Québec? Bien sûr que non.

Inversement, tous les avantages que le Québec apporte à notre pays disparaîtraient également. C'est en cela que nous serions durement éprouvés par cette notion de nos collègues et amis du Bloc, qui souhaitent que le Québec se sépare du Canada.

J'ai parlé des incidences financières car la motion du Bloc porte essentiellement sur les incidences financières de la présence du Québec au sein du Canada. En effet, le but recherché par cette motion, l'objectif du Bloc, c'est d'obtenir le plus d'avantages possible, sans rien perdre, même en cas de séparation.

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Dépassons la question du bilan proprement dit et parlons de ce qu'il adviendra de notre pays si le Québec part à l'aventure. Les enjeux ne sont pas que financiers, c'est le moins qu'on puisse dire. Nous perdrons une très grande partie de la confiance que nous avons en nous-mêmes. Le prix à payer pour rester canadien, pour conserver la culture qui nous est commune sera énorme. La présence du fait français, telle une île dans la mer de près de 300 millions d'habitants qu'est l'Amérique du Nord, l'existence en notre sein de cette culture québécoise et française dynamique, solide, couronnée de succès et passionnante, tout cela serait chose du passé.

Un Québec séparé aurait tôt fait d'exprimer des préoccupations beaucoup plus terre-à-terre et d'être beaucoup plus enclin à parler la langue de quiconque s'y présenterait avec un peu d'argent à dépenser.

(1355)

Depuis que je vis une partie du temps à Ottawa, j'ai essayé de passer aussi souvent que possible mes vacances et mes week-ends au Québec, surtout à Montréal. J'en suis venu à adorer les séjours que j'y fais. Il y a une quinzaine de jours, un de mes fils, qui vit à Vancouver, m'a rendu visite. J'essaie de le persuader d'aller à l'Université à Montréal. Je veux qu'il comprenne mieux le caractère de notre pays. Le Québec et le fait français, ainsi que les Québécois, sont un élément si essentiel de notre collectivité et de notre nation, que j'ai le sentiment qu'il manquerait quelque chose dans sa vie s'il ne pouvait connaître cela.

Il vit à Vancouver. Nous sommes allés à Montréal et il était inquiet, car même s'il a suivi des cours de français à l'école pendant neuf ans environ, il ne peut parler un traître mot de français. On ne peut apprendre une langue sans la pratiquer. Il s'inquiétait vivement de savoir comment il serait reçu en tant que Canadien anglophone. Il a 17 ans et il était un petit peu nerveux à ce sujet. Or, toutes les expériences que nous avons vécues là ont été entièrement positives. Les gens se sont mis en quatre pour nous aider et ils se sont montrés très aimables et très généreux.

Ce week-end au Québec l'a fait changer d'idée complètement. Je voudrais savoir combien de francophones unilingues du Québec, qui se sont rendus dans d'autres régions du pays, ont été traités avec la même compassion, la même compréhension et la même politesse. Je me demande si nous pourrions amener davantage de gens à ne pas analyser la valeur de notre citoyenneté d'un point de vue strictement comptable et à prendre conscience de la valeur que représente pour nous l'alliance du Canada anglais et du Québec.

J'invite les députés du Bloc à réfléchir à ce que je viens de dire dans le cadre de ce grand débat.

[Français]

Le Président: Monsieur le député d'Edmonton-Sud-Ouest, je vous accorderai la parole aussitôt que nous reprendrons l'étude des travaux des subsides après la période des questions.

[Traduction]

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre va maintenant passer aux déclarations de députés.


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES RETRAITÉS DE GM

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'accueillir à Ottawa plusieurs retraités de la société GM et leurs conjoints. Ils sont venus de Niagara pour visiter la Chambre des communes et le Musée canadien des civilisations, à Hull, ainsi que pour jouir de l'hospitalité de notre capitale nationale.

Mes anciens collègues et amis, dont certains sont des anciens combattants, sont venus à Ottawa pour participer aux célébrations du 50e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale et profiter du merveilleux festival des tulipes.

Aujourd'hui, je voudrais rendre hommage à ces retraités de la société GM et à leurs conjoints, ainsi que leur souhaiter tout ce qu'il y a de mieux dans le cadre de leur visite à Ottawa.

* * *

[Français]

LA MARCHE DES FEMMES QUÉBÉCOISES

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, les Québécoises entreprendront, le 26 mai prochain, une longue marche qui les mènera à Québec. Des centaines de femmes de tous les milieux et de toutes les régions du Québec reprendront ensemble l'opération effectuée par les ouvrières américaines au début du siècle.

Leur slogan était «Du pain et des roses». Ce slogan, les Québécoises le reprennent cette année. Le pain représente le besoin de travail; les roses, la qualité de vie. Les femmes rappelleront à la population québécoise ces deux besoins essentiels.

Pour atteindre l'équité économique, les femmes réclament un programme d'infrastructures sociales, de l'emploi, des logements sociaux et un accès réel aux programmes de formation générale et professionnelle.

Le Bloc québécois félicite les marcheuses québécoises de leur initiative et leur souhaite bonne route.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice fait traîner depuis maintenant un an et demi la demande de révision du cas de Patrick Kelly.

Cet ancien agent de la GRC est en prison pour avoir prétendument tué sa femme, mais maintenant, le principal témoin reconnaît qu'elle a menti au tribunal. Le réexamen du cas de cet agent traîne en longueur et maintenant le ministre de la Justice veut,


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avant qu'on ne rende publics les documents essentiels dans l'affaire Kelly, que l'avocat de M. Kelly, Clayton Ruby, s'engage à ne rien divulguer.

Le ministre de la Justice a dit:

On va rendre publics tous les documents touchant les questions soulevées dans la demande.
Le ministre limite maintenant la marge de manoeuvre de l'avocat de M. Kelly.

Pourquoi tout ce secret? C'est un organisme public qui a recueilli, aux frais du contribuable, pour le compte de la poursuite, les renseignements qu'on refuse de dévoiler à M. Kelly. Qu'est-ce que les libéraux essaient de cacher et que craignent-ils qu'on découvre dans ces documents?

Pourquoi ne rend-on pas justice à M. Kelly?

* * *

L'ASSOCIATION SINO-CANADIENNE DES AFFAIRES PUBLIQUES

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, nous avons le plaisir d'accueillir à Ottawa l'honorable Darlene Marzari, ministre des Affaires municipales de la Colombie-Britannique, M. George Ford, sous-ministre, M. Greg Halsey-Brandt, maire de Richmond et président du district régional du Grand Vancouver, Mme Beth Johnson, maire de Delta, M. Hew McConnell, directeur du district régional du Grand Vancouver, ainsi que quinze jeunes ambassadeurs du Canada.

Chaque année, l'Association sino-canadienne des affaires publiques envoie un certain nombre d'étudiants d'origine chinoise passer, à Ottawa, une semaine pendant laquelle ils rencontrent des parlementaires et des dirigeants des partis représentés à la Chambre.

[Français]

Hier, j'ai eu le plaisir de recevoir les jeunes hommes et femmes dans mon bureau. Ils étaient accompagnés par les organisateurs. J'ai encouragé les jeunes étudiants et étudiantes canadiens à participer régulièrement au processus politique.

[Traduction]

Je voudrais remercier l'Association sino-canadienne des affaires publiques d'offrir à de jeunes Canadiens une expérience aussi formidable.

* * *

LE TERRORISME

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, à chaque chose malheur est bon.

Au cours des dernières semaines, nous avons été confrontés aux réalités du terrorisme. La tragédie d'Oklahoma City nous a forcés à prendre conscience du fait que le terrorisme pouvait frapper partout, même en Amérique du Nord.

Je suis heureux de dire que deux femmes de ma circonscription ne sont pas restées inactives, face à cet attentat à la bombe. Janice Koekebakker et Linda Mathews, deux infirmières de Woodstock, en Ontario, sont allées à Oklahoma City et, pendant une semaine, ont donné des premiers soins et du réconfort aux secouristes. Il faudrait également remercier la ville et le club Rotary de Woodstock qui ont aidé à indemniser de leurs frais ces infirmières au grand coeur.

Le London Free Press rendait récemment hommage à ces deux infirmières dans un éditorial où on pouvait lire ceci: «Nous pouvons tous faire certaines choses, si nous le voulons.» Ces femmes ont vu qu'elles pouvaient faire quelque chose et qu'elles pouvaient rendre un service important en cette période difficile.

Au nom de tous les députés, je tiens à leur dire merci.

* * *

LE REGRETTÉ HECTOR TOE BLAKE

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, je rends hommage à M. Hector Toe Blake, qui est décédé hier à Montréal. Toe a été le plus grand des entraîneurs dans l'histoire de la Ligue nationale de hockey. Il a été aussi un excellent ailier gauche.

En tant qu'entraîneur, Toe Blake a remporté huit coupes Stanley en treize ans. Comme joueur, il a été pendant quinze ans membre de l'équipe des Maroons de Montréal puis des Canadiens. Il a gagné trois fois la coupe Stanley, une fois avec les Maroons et deux fois avec les Canadiens.

Il a été champion compteur et récipiendaire du trophée Hart en 1938-1939, et a obtenu le trophée Lady Bing en 1945-1946. Toe Blake a joué comme ailier gauche avec Rocket Richard et Elmer Lach dans la Punch Line, qui a été l'une des lignes les plus colorées et les plus prolifiques de l'histoire du hockey.

Admis au Temple de la renommée en 1966, M. Blake a fait partie de la première équipe d'étoiles à trois reprises et de la deuxième équipe à deux reprises, avant de devenir l'entraîneur de l'équipe d'étoiles en neuf occasions.

Toe Blake nous manquera et il laissera un souvenir durable à Montréal. Je suis sûr que tous les Canadiens lui rendent hommage en ce triste jour.

* * *

[Français]

LA TCHÉTCHÉNIE

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, depuis l'entretien du premier ministre avec le président Eltsine, l'armée russe pilonne intensivement les positions tchétchènes et continue de bombarder les populations civiles.

Afin d'en finir avec les Tchétchènes, l'armée russe s'apprêterait à lancer ses unités d'élite dans un ultime assaut contre la Tchétchénie. On comprend mal comment le premier ministre a pu se dire rassuré par le président Eltsine à l'effet que l'armée était déjà remplacée par des forces policières normales en Tchétchénie.


12789

Le premier ministre prétend avoir fait pression sur son homologue russe, mais a répété en même temps que sa priorité était les échanges commerciaux. On voit aujourd'hui les résultats concrets. En plus de miner la crédibilité du Canada, ce double langage du gouvernement ne mène nulle part.

* * *

(1405)

[Traduction]

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, les choses se sont détériorées à un point tel dans l'ex-Yougoslavie que le moment est certainement venu pour le Canada de prendre les mesures qu'exige la situation.

Le premier ministre dit que les Canadiens ne fuient pas lorsque la situation devient difficile. Les réformistes partagent cette opinion. Les troupes canadiennes en ont fait la preuve à de nombreuses reprises dans le passé lorsqu'elles se sont portées à la défense de causes valables.

Le moment n'est-il pas venu de se demander si la cause est valable en Bosnie et en Croatie? Les trois belligérants qui s'affrontent là-bas ne manifestent aucune volonté d'en venir à une solution pacifique de leurs différends. Au lieu d'exercer une influence positive, les Nations Unies ont agi comme un tigre de papier et ont peut-être même contribué au problème.

Certains pays ont sans doute des forces armées plus nombreuses que les nôtres dans cette région du monde, mais le Canada a néanmoins su jouer un rôle utile et a démontré sa compétence et sa fiabilité. Au lieu de se comporter comme un mouton en suivant les béliers français et britannique, le Canada ne devrait-il pas maintenant prendre l'initiative et déclarer que, si la cause de la paix ne fait pas des progrès immédiats, clairs et tangibles, les forces canadiennes vont amorcer leur retrait de la région?

* * *

[Français]

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, les Chambres de commerce du Québec et du Canada ont publié hier une étude dans laquelle on apprend que le Québec tire un avantage important du commerce interprovincial au Canada. On constate dans cette étude que 470 000 emplois dépendent directement du commerce interprovincial au Québec. Devant de tels faits, il est inquiétant de voir que le Bloc québécois et le PQ s'obstinent toujours à vouloir provoquer la séparation du Québec, sans tenir compte des immenses répercussions économiques qui pourraient en découler.

Le Canada est rentable pour le Québec, comme pour toutes les provinces d'ailleurs. La signature récente d'une entente sur le commerce interprovincial par les dix premiers ministres provinciaux ouvre de nouvelles perspectives pour cet important secteur de l'économie québécoise. L'union économique canadienne existe déjà et s'avère fort rentable pour le Québec. Point n'est besoin de mettre tout en péril pour assouvir l'obsession souverainiste du Bloc et du PQ.

* * *

[Traduction]

CBEF 540

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, le 18 mai 1970, à 5 heures, des francophones de tous les coins du sud-ouest de l'Ontario ont syntonisé 540 à la radio pour entendre: «Bonjour Windsor, bonjour Tilbury, bonjour Pointes-aux-Roches, bonjour Belle River.» Ce sont les premiers mots de français qu'on a pu entendre sur la fréquence la plus chargée des ondes radio en Amérique du Nord.

CBEF 540 dessert plus de 50 000 francophones de Windsor, Tecumseh, Sarnia, London, Pain Court et d'autres localités dynamiques de l'Ontario. Depuis 25 ans, CBEF assure un lien vital entre les francophones du sud-ouest de l'Ontario et ceux du reste du Canada et même, bien sûr, du reste du monde.

L'hon. Paul Martin, père, a aidé un groupe de francophones de la région dans leurs efforts continus pour obtenir ce poste de radio.

[Français]

Je tiens à les féliciter à l'occasion de leur 25e anniversaire.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois a finalement cédé aux puissants groupes de pression en faveur des armes à feu. Hier, la députée de Saint-Hubert et porte-parole du Bloc pour les questions de justice a déclaré:

[Français]

«Dès qu'on parle d'armes à feu, les mâles s'excitent et s'énervent, malheureusement. . . Et, comme au Bloc les femmes ne sont pas majoritaires, on a eu beaucoup de pressions de la part des membres masculins du caucus.»

Pourtant, est-il besoin de rappeler que le Bloc québécois s'était déjà commis en faveur du projet de loi, comme le déclarait, le 6 mai dernier, la députée bloquiste de Saint-Hubert, et je cite: «C'est un bon projet de loi qui demande l'enregistrement et le contrôle des armes à feu.» Les femmes du Québec seront sûrement très déçues d'apprendre que le Bloc ne tient pas compte de leurs opinions qui sont majoritairement en faveur du projet de loi C-68.

* * *

LES JETS DE WINNIPEG

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral fait volte-face dans le dossier de la construction d'un nouvel amphithéâtre sportif à Winnipeg. Alors qu'il y a deux semaines, Ottawa n'avait pas d'argent pour aider les Jets, le ministre du Développement des ressources


12790

humaines aurait soudainement découvert la manne dans plusieurs programmes fédéraux.

Nul doute que le prétexte du programme des infrastructures ne sert que de paravent à une réalité incontournable: Ottawa s'apprête à consentir plusieurs millions de dollars aux Jets de Winnipeg, à même l'argent des contribuables, et n'a jamais pensé lever le petit doigt pour aider les Nordiques de Québec. Plus que jamais, c'est deux poids deux mesures. On voit bien que tout ce qu'il y a de flexible dans le fédéralisme canadien, c'est l'équité.

* * *

(1410)

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, imaginez un endroit où des députés élus démocratiquement n'ont pas le droit de proposer des modifications à une loi. Imaginez maintenant qu'ils n'ont pas le droit de commenter les propositions des autres et que, s'ils osent protester, la majorité leur coupe radicalement la parole. Imaginez une assemblée législative qui prendrait des décisions sans rien mettre aux voix, faisant fi des règles de procédure traditionnelles, pour éviter que les groupes minoritaires puissent se faire entendre. Imaginez qu'un membre d'un groupe minoritaire ose contester ce genre d'administration autocratique, mais que tout ce qu'il obtienne en retour soit une violation encore plus grave de ses droits, puisqu'à partir de là, on lui refuse même le droit de poser des questions.

On trouve des gouvernements de ce genre dans le monde. Nous savons que des gouvernements tyranniques de la sorte utilisent parfois les voies de la démocratie pour étouffer le débat, tout en débitant des beaux discours sur la démocratie et la bonne volonté.

Tous les députés dénonceraient ce genre de situation. Je voudrais bien pouvoir dire que je décris un pays du tiers monde, mais je parle malheureusement du comité permanent des droits de la personne et de ce qu'il a fait hier soir.

* * *

L'ASSOCIATION DE L'AVIATION ROYALE DU CANADA

M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'impression que tous les habitants d'Oshawa sont en visite dans la capitale nationale. J'ai tendance à me demander qui garde le fort.

J'ai l'honneur de souligner la présence à Ottawa aujourd'hui de membres de la 420e Escadre de l'Association de l'aviation royale du Canada, à Oshawa, organisation à laquelle je suis fier d'appartenir.

Certains de ces membres rentrent au Canada après avoir assisté aux cérémonies du 25e anniversaire du Jour de la victoire en Europe. En passant ils me disent que notre premier ministre a eu un grand succès au cours des cérémonies qui ont eu lieu en Hollande et qu'il a littéralement arraché des larmes à tout le monde. En combattant, les Canadiens et les Canadiennes ont manifesté leur sens du devoir, leur dévouement et leur attachement envers leur pays, et ils ont permis la victoire.

À mon avis, tous les députés à la Chambre auraient avantage à manifester le patriotisme et la loyauté envers notre pays qui ont animé mes amis et mes camarades dans leur jeunesse et jusqu'à aujourd'hui.

En terminant, je rappelle à tous les députés la recommandation qu'une mère inquiète a faite à son fils aviateur: «Mon fils, vole à basse altitude et à basse vitesse.»

* * *

LE FESTIVAL DES TULIPES

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine, à Ottawa, nous célébrons le Festival canadien des tulipes. Nous avons ainsi l'occasion de rappeler l'amitié qui existe entre le Canada et les Pays-Bas, ainsi que le rôle important que les Canadiens ont joué au cours des années sombres de la Seconde Guerre mondiale.

Ce mois-ci, des milliers de Canadiens se sont rendus en Hollande pour participer aux célébrations commémorant la libération de la Hollande, en 1945. Ils ont été accueillis dans des foyers, des villages et des villes par des familles reconnaissantes.

Les Canadiens tiennent la liberté pour acquise, alors que les Hollandais l'apprécient sincèrement. Les anciens combattants qui sont retournés là-bas ont été reçus en libérateurs, parce qu'ils ont rendu la liberté à une population qui avait été assujettie, pendant cinq longues années, au régime nazi.

Des anciens combattants canadiens, en compagnie du secrétaire d'État chargé des Anciens combattants, ont visité des cimetières militaires canadiens et rendu hommage au grand nombre de jeunes Canadiens qui ont versé leur sang dans ce conflit. Seuls ceux qui ont participé aux cérémonies en Hollande ont pu se faire vraiment une idée du sentiment considérable de respect et de gratitude que la population hollandaise éprouve à l'égard de ses libérateurs canadiens.

* * *

LES ÉLECTIONS EN ONTARIO

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, les Ontariens ont souffert pendant les années 90. Ils ont été frappés de plein fouet par la récession, et leurs ennuis ont été aggravés par un gouvernement provincial inexpérimenté, inepte et dépensier.

Les députés savent-ils que le gouvernement néo-démocrate de l'Ontario a continué d'essayer de sortir de la récession en dépensant les fonds publics durant deux années de plus que n'importe quel autre gouvernement? Les néo-démocrates ont doublé la dette provinciale à tel point que 20 p. 100 des impôts des Ontariens servent maintenant à payer des intérêts. Or, le NPD tente maintenant de rejeter la faute de leurs problèmes sur le gouvernement fédéral. Nous avons pourtant maintenu le niveau des transferts provinciaux au cours de nos deux premières années au pouvoir. Nous avons prévenu tous les gouvernements provinciaux suffisamment à l'avance des changements que nous voulions apporter.

L'Ontario a besoin d'un nouveau gouvernement, bienveillant et compétent. L'Ontario n'a pas les moyens de prendre à l'essai

12791

un autre parti inexpérimenté. Nous n'avons pas les moyens de garder le NPD. Nous devons avoir un gouvernement libéral en Ontario à l'issue des prochaines élections.

* * *

LES IMPLANTS MAMMAIRES

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, la multinationale Dow Corning a demandé lundi la protection de la loi sur les faillites, ce qui a eu pour effet de priver d'un autre recours les Canadiennes qui cherchent à obtenir un dédommagement pour les implants mammaires de silicone défectueux.

Malgré le préjudice causé aux Canadiens et les coûts pour les contribuables, le gouvernement fédéral n'a jamais intenté de poursuites contre les fabricants de ces instruments et continue de permettre l'implant de prothèses mammaires faites de solution saline, soit un autre désastre en puissance.

Le gouvernement fédéral doit agir dès maintenant et répondre aux groupes de soutien des femmes ayant des problèmes d'implant mammaire qui ont exhorté la ministre à leur fournir un financement de base pour les aider à s'organiser, à diffuser l'information, à veiller à ce que les médecins soient tenus d'informer les femmes à propos des risques que présentent ces prothèses et à élaborer un protocole national pour l'enlèvement des implants défectueux.

(1415)

Les Canadiennes veulent qu'on prenne des mesures et elles le méritent. Le gouvernement doit répondre maintenant. Il ne doit plus tolérer ce grave danger pour la santé des femmes.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice a souvent prétendu que les policiers de première ligne appuyaient son projet de loi sur le contrôle des armes à feu.

Je signale au ministre que les temps ont changé. Il doit vivre à une autre époque que la nôtre. Non seulement les Canadiens n'appuient pas ses mesures, mais les policiers de première ligne dont il parle si souvent s'opposent énergiquement au projet de loi.

Les policiers de première ligne en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta rejettent le projet de loi. Nous savons tous que les autorités du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest s'y opposent aussi. L'association des policiers s'inquiète de nombreux éléments de cette mesure, et l'Association du Barreau canadien et les autochtones soutiennent qu'elle est inconstitutionnelle. Aujourd'hui, le Nouveau-Brunswick est entré dans la ronde.

On nous a dit maintes fois que beaucoup de députés du parti ministériel s'opposaient au projet de loi. Pour éviter de l'appuyer, ils ne se sont pas présentés au dernier vote. Maintenant que la vérité est connue, j'espère qu'on ne nous dira plus que le projet de loi C-68 recueille un appui total.


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QUESTIONS ORALES

[Français]

LE PROGRAMME NATIONAL DES INFRASTRUCTURES

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral s'apprête à investir 20 millions de dollars de fonds publics pour doter Winnipeg d'un nouvel amphithéâtre dans le seul but de garder la concession des Jets à Winnipeg. Hélas, Ottawa n'a jamais manifesté le même intérêt ou le moindre souci à intervenir pour permettre le maintien des Nordiques à Québec. On se retrouve encore une fois devant une politique de deux poids, deux mesures.

Comment le premier ministre peut-il invoquer le Programme des infrastructures pour justifier un versement de 20 millions de dollars aux Jets de Winnipeg alors que, selon nos informations, plus de 90 p. 100 de l'argent serait dépensé ou engagé et qu'il ne resterait dans la caisse que 6 millions de dollars?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons un programme d'infrastructures, et les décisions prises à l'intérieur de ce Programme d'infra-structures sont déterminées conjointement par les municipalités impliquées et par le gouvernement provincial.

Lorsque nous avons mis le premier Programme d'infrastructures de l'avant, la priorité du gouvernement du Québec et de la ville de Québec était de bâtir un centre des congrès à Québec, et le gouvernement fédéral a investi 26 millions de dollars. À l'époque, même, on a dit qu'il y aurait peut-être des besoins pour un amphithéâtre. Le maire de Québec, comme il est rapporté dans la presse de ce matin, a dit que, non, la priorité de la ville de Québec était d'avoir un centre des congrès.

Dans le cas de la ville de Winnipeg et du gouvernement du Manitoba, une somme de 15 millions de dollars n'a pas encore été allouée, et ils nous ont demandé de les allouer pour bâtir une infrastructure à Winnipeg pour un amphithéâtre.

Il y a des précédents à cet effet: la ville Calgary. Le gouvernement de l'Alberta a choisi d'investir 5 millions dans l'amphithéâtre d'Edmonton et 4 millions dans celui de Calgary, de l'argent du fédéral.

Alors nous respectons les compétences provinciales et nous mettons à la disposition des gouvernements l'argent alloué. Une somme de 15 millions vient du Programme d'infrastructures. Comme tout le monde le sait maintenant, les Jeux panaméricains se tiendront à Winnipeg dans quelques années, et ils ont besoin de certaines installations, donc ils veulent combiner les installations des Jeux panaméricains avec la possibilité de la construction d'un amphithéâtre. Alors si les autorités de la ville et de la province veulent avoir une nouvelle infrastructure, ils peuvent prendre l'argent qui est disponible. Il n'y a aucun nouvel argent pour ce programme. Ce n'est que de l'argent alloué au Manitoba et qui n'a pas encore été distribué.

(1420)

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre confirmera-t-il que l'aide directe de 20 millions de dollars qui sera apportée par Ottawa aux Jets de Winnipeg déborde nettement le programme d'infrastructures,


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fera appel, comme il l'a lui même mentionné, au budget alloué pour les Jeux panaméricains, alors qu'aucune discipline, lors de ces jeux, ne nécessite un colisée, une aréna du genre de celle qui sera construite, et que l'argent sera également pris dans le Bureau de diversification de l'économie de l'Ouest canadien, géré par son ministre, le député de Winnipeg?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je viens de dire clairement que le montant de 15 millions provient de l'argent alloué à la province du Manitoba. Cette province décide, comme l'ont fait la province de Québec et l'Ontario. L'Ontario a bâti un centre des congrès très nouveau, de même qu'un centre culturel à Mississauga. La ville de Vancouver a pris tout l'argent alloué aux travaux d'infrastructures pour se donner un nouveau système d'épuration des eaux. Les décisions, dans divers domaines, ont été prises par les gouvernements provinciaux.

Pour ce qui est du Manitoba, la province a décidé d'utiliser les fonds disponibles pour se donner une infrastructure nouvelle qui serait un amphithéâtre neuf, comme Edmonton et Calgary ont décidé d'investir des sommes très considérables pour améliorer les amphithéâtres d'Edmonton et de Calgary respectivement.

Il n'y a donc pas deux poids, deux mesures, il n'y a qu'un seul poids et une seule mesure, c'est que nous prenons l'argent alloué dans le Budget et nous respectons la volonté des gouvernements provinciaux. Pour ce qui est de la ville de Québec, le maire L'Allier l'a dit clairement, il n'avait aucun intérêt dans un amphithéâtre. Ils voulaient avoir un centre des congrès et ils auront leur centre des congrès.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, on se souviendra comment le ministre de l'Industrie réclamait à hauts cris un plan d'affaires quand c'était le moment d'investir de l'argent dans le chantier de la MIL Davie à Québec. On s'en souviendra à quel point il le réclamait.

Je voudrais demander au premier ministre, avant d'injecter plus de 20 millions de dollars de fonds publics d'un gouvernement qui est cassé de toute façon, avant d'investir plus de 20 millions dans les Jets de Winnipeg, peut-il nous dire s'il a exigé, si son gouvernement a exigé, pour ne pas jeter cet argent dans le feu, que les Jets de Winnipeg déposent un plan d'affaires, comme c'est si souvent réclamé, et que les Jets de Winnipeg donnent des garanties qu'ils ne seront pas, de toute façon, partis dans moins de trois ans?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous investissons avec le gouvernement provincial et le gouvernement municipal dans une infrastructure qui est un amphithéâtre. Nous n'investissons aucune somme d'argent dans l'équipe de hockey sous aucune considération, c'est très clair.

C'est le secteur privé de Winnipeg qui a décidé d'amasser des fonds pour acheter l'équipe de hockey. On ne sait pas s'ils ont réussi à l'acheter. De toute façon, le premier ministre du Manitoba et le maire de Winnipeg ont décidé que l'allocation de l'argent pour la ville de Winnipeg et pour la province du Manitoba allait servir à se donner une nouvelle infrastructure, soit un amphithéâtre.

À Québec, ils ont choisi un centre des congrès; à Vancouver on a décidé de l'investir dans l'épuration des eaux. Nous respectons la volonté des gouvernements provinciaux, mais nous savons très bien que s'il y a de la construction, l'argent qu'on aura mis là doit employer des gens. C'est pourquoi nous avions mis de l'avant ce programme d'infrastructures qui, en passant, a connu un très grand succès au Canada.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, si cet argent n'est pas investi pour les Jets de Winnipeg, mais seulement pour une aréna, le premier ministre ne va quand même pas nous dire que c'est pour le patinage libre le samedi soir.

Le gouvernement fédéral a décidé d'octroyer une subvention directe de 20 millions de dollars pour la construction de cet amphithéâtre dans le seul but de permettre à la ville de conserver la concession des Jets. Or, cette annonce suit immédiatement le refus des Nordiques de Québec de donner suite à la proposition du gouvernement du Québec.

Comment le ministre explique-t-il l'empressement soudain du gouvernement fédéral à aider les Jets de Winnipeg, et ce, au lendemain du rejet de la proposition du gouvernement du Québec par les propriétaires des Nordiques, et alors qu'Ottawa n'a jamais manifesté son intention de venir en aide aux Nordiques, et que de plus, ils prennent l'argent même à l'extérieur des budgets consacrés aux infrastructures.

(1425)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que dans le projet du gouvernement du Québec vis-à-vis les Nordiques, nous n'avons reçu aucune demande pour investir dans un amphithéâtre comme nous le faisons à Winnipeg. Même qu'au mois de janvier, soit le premier projet, le Parti réformiste nous reprochait d'avoir agi trop rapidement pour la ville de Québec. Le premier projet que nous avons accepté était un centre des congrès pour la ville de Québec dans lequel nous avons investi 26 millions de dollars.

Le maire L'Allier dit, dans la presse de ce matin, que la priorité de la ville de Québec n'est pas un amphithéâtre, c'est un centre des congrès. Nous avons respecté la volonté du maire séparatiste de Québec. Je me demande pourquoi les gens du Parti Québécois et du Bloc québécois s'objectent à ce qu'on respecte les volontés du maire séparatiste de Québec.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il y a cinq millions de pris dans les Jeux panaméricains, alors que Winnipeg disait avoir toutes les infrastructures nécessaires à la tenue de ces jeux. Semble-t-il que cela vient de changer tout récemment. Le premier ministre vient de nous en donner la raison: les séparatistes. Cela fait toujours bondir le premier ministre.

J'aimerais que le premier ministre puisse admettre franchement que l'aide de 20 millions de dollars aux Jets était prévue depuis un bon moment et que son gouvernement a attendu le rejet de la proposition du gouvernement du Québec par les propriétaires des Nordiques pour l'annoncer publiquement, afin de ne pas avoir à verser une aide similaire aux Nordiques.


12793

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas reçu une seule lettre ni un seul appel téléphonique de Québec au sujet des Nordiques. Rien. Nous n'avons pas choisi de moment particulier pour cette annonce.

Les habitants et les gens d'affaires de Winnipeg achèteront peut-être l'équipe de hockey, mais pas nécessairement. La ville de Winnipeg et le premier ministre du Manitoba ont décidé que l'argent prévu pour les infrastructures au Manitoba servirait à construire une infrastructure qu'on appelle un stade. Edmonton et Calgary ont fait exactement le même choix. Vancouver a préféré utiliser cet argent pour construire une station d'épuration des eaux usées. Toronto construit un centre de conférence et Mississauga, un centre des arts.

Nous respectons la volonté des citoyens. Qu'est-ce qu'il y a de mal? Nous sommes assez souples pour écouter tous les premiers ministres provinciaux.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, dans le livre rouge, les libéraux promettaient que leur gouvernement agirait rapidement pour régler le dossier de l'autonomie administrative des autochtones et les revendications territoriales en souffrance. Comme prévu, cela a suscité des attentes irréalistes chez les bandes indiennes, particulièrement en Colombie-Britannique.

En ce moment, une très grande partie du territoire de la masse continentale de la province est revendiquée par les autochtones, mais le gouvernement provincial déclare qu'il n'est prêt à négocier que sur 5 p. 100 de ce territoire et que l'autonomie administrative n'ira pas plus loin que les pouvoirs dévolus aux municipalités.

Le ministre des Affaires indiennes admet-il que son incapacité de fixer des paramètres réalistes aux négociations sur les revendications territoriales et l'autonomie administrative a nourri les attentes exagérées et irréalistes des autochtones et qu'il est grand temps de rétablir la situation?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Non. monsieur le Président.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre prend la question à la légère, mais il est en train de mener tout droit au désastre les relations avec les autochtones en Colombie-Britannique.

Ses propres fonctionnaires reconnaissent que le gouvernement fédéral a gonflé hors de proportion les attentes des bandes indiennes tout en gardant le reste des habitants de la Colombie-Britannique dans le brouillard. En dépit de notes de service du sous-ministre et d'appels de l'Assemblée des premières nations, le ministre refuse obstinément de donner aux groupes autochtones et aux Canadiens une indication de la position limite du gouvernement fédéral sur les revendications territoriales et l'autonomie administrative.

Encore une fois, le ministre donnera-t-il des directives réalistes pour les négociations sur les revendications territoriales et l'autonomie administrative, au moins pour la Colombie-Britannique?

(1430)

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je réfute le préambule du député. La question de savoir quelle étendue de territoire nous allons céder aux premières nations, puisque c'est de ça dont nous parlons, doit être tranchée par la province étant donné que la majeure partie des terres disponibles lui appartiennent.

L'offre faite par la Colombie-Britannique, d'après des fuites, car je n'ai rien vu moi-même, porterait sur la superficie du territoire. Lorsque les autochtones de la province auront reçu l'offre, ils y répondront et nous y répondrons à notre tour. Pour l'instant, nous fournissons l'argent, et les provinces fournissent les terres, ce qui est leur responsabilité.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, dans son document sur la négociation des revendications territoriales, le gouvernement de la Colombie-Britannique va plus loin que les terres. Il affirme que les terres privées ne seront pas visées par les ententes. Il soutient que l'autonomie administrative des autochtones sera limitée aux pouvoirs des municipalités. Il déclare aussi que les Indiens inscrits devraient perdre leurs exonérations des impôts fédéral et provincial une fois leurs revendications territoriales réglées.

Le ministre souscrit-il aux positions énoncées par le gouvernement de la Colombie-Britannique dans ce document? Sinon, quelle est la position du gouvernement fédéral?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous avons adopté la même position partout au Canada sur les terres privées et nous nous efforçons d'offrir des indemnités dans ces cas.

Quant à la question des impôts, je trouve étrange qu'une province fasse une offre dans un domaine qui relève nettement du gouvernement fédéral. J'ai dit clairement à la province que la question des impôts devait être réglée au niveau national par le ministre des Finances, le ministre du Revenu national et le Parlement.

Pour ce qui est du statut, c'est une question qui fait toujours l'objet de négociations. Le chef du Parti réformiste doit se rendre compte que, pour des raisons très légitimes, le statut revêt une grande importance pour les peuples autochtones.

* * *

[Français]

LE CANADIEN NATIONAL

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Afin de réduire la dette du Canadien National pour faciliter sa privatisation, le gouvernement s'apprêterait à acheter des actifs


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immobiliers de cette société dont la célèbre tour du CN à Toronto. Ces acquisitions s'effectueraient à un prix supérieur à la véritable valeur du marché dans le but d'aider le CN à réduire sa dette de deux milliards et demi à un milliard et demi de dollars.

Comment le ministre des Transports peut-il justifier la décision de son gouvernement d'investir des fonds publics considérables pour acheter des actifs immobiliers que les contribuables canadiens ont déjà payés?

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le préambule à la question du député est absolument faux. Le gouvernement n'a pas l'intention de verser un cent pour les biens immobiliers du CN qui ne seront pas transférés le moment venu. Ce que nous avons dit, c'est que, avec le ministère des Finances, nous allons négocier un accord afin que la valeur marchande de tout bien immobilier résiduel soit créditée au CN.

Le député saura que le gouvernement a pour objectif de transférer les Chemins de fer nationaux au secteur privé dans un état qui leur permettra de concurrencer le Canadien Pacifique. Il faudra faire quelque chose pour réduire la dette de 2 milliards et demi de dollars. Je tiens à assurer au député que tout ce que le gouvernement fera à l'égard de la vente du CN, il le fera dans l'intérêt supérieur des contribuables canadiens présents et futurs.

[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Transports confirme-t-il aussi l'intention du gouvernement non seulement d'acheter avec des fonds publics des actifs déjà payés par les contribuables, mais en plus de procéder à cette acquisition pour une somme supérieure à leur valeur marchande actuelle?

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit au député, mais je crois comprendre qu'il avait rédigé sa question complémentaire avant d'entendre la réponse à sa première question, le gouvernement n'a aucunement l'intention d'accorder au CN plus que la valeur marchande établie.

La vente du CN n'est pas une mince affaire. Nous croyons comprendre que l'opposition l'approuve en principe. Nous espérons pouvoir montrer que cette transaction sera conclue dans l'intérêt supérieur des contribuables canadiens. Toute évaluation des biens, immobiliers ou autres, se fera comme il se doit en affaires et en fonction de la pratique commerciale habituelle.

* * *

(1435)

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURES

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, comme bien d'autres Canadiens, je suis un amateur de hockey, notre sport national, mais je ne suis pas un amateur des sports professionnels subventionnés par les contribuables.

Les difficultés qu'éprouvent les équipes de Winnipeg et de Québec pourraient et devraient être réglées par la LNH, pas par les contribuables canadiens. La location de luxueuses loges privées et les salaires des joueurs de hockey qui gagnent des millions de dollars ne devraient pas être subventionnés par les Canadiens surtaxés.

Comment le premier ministre peut-il justifier la réaffectation de fonds du programme d'infrastructures à cette fin, alors que des hôpitaux ferment et que des Canadiens risquent leur vie sur des routes dangereuses?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, comme le premier ministre l'a expliqué, je pense, le programme d'infrastructures est axé sur les besoins et les priorités des localités et il vise à créer des emplois et à renforcer les infrastructures de nos collectivités, de manière à ce que nous puissions attirer de nouveaux investissements pour créer plus d'emplois.

Il y a, dans la circonscription du député, un centre sportif également utile à des joueurs de hockey. Le député a appuyé les projets d'infrastructure dans sa province.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, votre humble serviteur n'a jamais appuyé le projet de stade de Barrie, et le ministre le sait pertinemment. Les stades de Barrie, d'Edmonton ou de Winnipeg n'ont jamais fait partie des projets d'infrastructure.

Le ministre de l'Industrie a dit à la Chambre que le gouvernement fédéral ne subventionnera plus l'entreprise, mais son collègue de l'Ouest, le ministre du Développement des ressources humaines, tente pourtant de renflouer une autre entreprise, celle des Jets de Winnipeg.

Le premier ministre peut-il expliquer la politique de son gouvernement? S'agit-il du statu quo, de la politique de l'assiette au beurre du ministre de l'Ouest? S'agit-il de la politique du ministre de l'Industrie, celle qui consiste à laisser les entreprises se débrouiller seules? Le gouvernement ne peut jouer sur tous les tableaux. De quelle politique s'agit-il?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, puisqu'il est question de jouer sur tous les tableaux, qui a dit ceci: «Par la présente, je réitère fermement mon appui au projet, en raison des emplois importants qu'il crée»?

Le projet à Winnipeg créera des milliers d'emplois pour les citoyens de cette ville. Il créera une importante activité économique. C'est une priorité pour la ville et pour le gouvernement provincial, et les règles du programme d'infrastructures ont été respectées.


12795

[Français]

LE CANADIEN NATIONAL

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, à voir l'attitude des libéraux, on se croirait vraiment à l'aréna de Winnipeg!

Ma question s'adresse au ministre des Transports. Le ministre des Transports s'apprête à privatiser une des plus importantes sociétés d'État fédérales sans en restreindre la propriété étrangère. Le Canadien National, bâti à coups de milliards de dollars de fonds publics, est un actif vital pour le Canada et le Québec et qui, s'il était sous contrôle étranger, pourrait ne pas servir pleinement les intérêts des Canadiens.

Le ministre admettra-t-il que le crédit qu'il donnera pour les actifs du CN à fort prix, afin d'augmenter la valeur marchande de l'entreprise, constitue une subvention déguisée à des acheteurs étrangers à même l'argent des contribuables canadiens?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je suis vraiment touché de l'émotion soulevée par mon honorable collègue, qui se préoccupe de l'avenir du CN en tant qu'entreprise canadienne, de Halifax à Vancouver. J'avais cru, à un moment donné, que mon collègue avait pensé que j'avais pris la décision, avec le gouvernement, de ne pas restreindre les investissements des étrangers, justement afin de permettre à des gens comme lui, qui songent à un pays indépendant, de pouvoir y participer.

(1440)

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, je rappelle au ministre des Transports que les Québécois et les Québécoises ont payé 25 p. 100 des actifs du Canadien National. Ce n'est pas un cadeau qu'il nous fait.

Des voix: Bravo!

Une voix: C'est vrai, ça; qu'il mette ça dans sa pipe!

M. Guimond: Dans un autre ordre d'idées, et j'espère que le ministre va me répondre de façon intelligente, ne convient-il pas qu'il est possible pour un groupe d'entreprises étrangères, contrôlées par un même actionnaire, d'acheter une majorité d'actions du CN et qu'il lui sera impossible de s'assurer que le CN demeure sous contrôle canadien?

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, l'expérience du Canadien Pacifique, qui est une société par actions créée au cours du siècle dernier, est telle qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter de la propriété étrangère.

Ce qui nous inquiète davantage, et tous les spécialistes sont d'accord là-dessus tant au Canada qu'à l'étranger, c'est que cette émission d'actions est trop grosse pour être absorbée uniquement par les investisseurs canadiens. Nous estimons que la protection de l'avenir du CN est bien plus importante et qu'il suffit de restreindre à 15 p. 100 le pourcentage d'actions qu'un actionnaire peut détenir.

Il importe de garder à l'esprit que cette émission d'actions sera la plus importante transaction du genre dans toute l'histoire du Canada. Nos échanges commerciaux se font à l'échelle mondiale. Ce chemin de fer doit soutenir la concurrence dans l'économie mondiale. Nous estimons qu'en restreignant la propriété étrangère, nous n'enverrions pas le message qui est important à notre avis, c'est-à-dire que les Canadiens veulent faire des affaires avec n'importe qui dans le monde. Nous sommes persuadés que, comme dans le cas du CP, le CN restera majoritairement entre les mains de Canadiens.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, la résiliation du bail signé entre la SRC et Cadillac Fairview risque de coûter à la SRC et aux contribuables jusqu'à 250 millions de dollars. On ne connaît pas la somme exacte car tant la SRC que le cabinet du ministre refusent de rendre publics les détails de la résiliation.

Le ministre du Patrimoine canadien pourrait-il s'engager, s'il n'y a rien à cacher, à rendre publics les détails de cet entente secrète?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu bien sûr intervention des tribunaux. Il faudrait que j'examine soigneusement ce qui a été décidé. La transaction devra ultimement être confirmée par un décret. À ce moment-là, je serai heureux de répondre à la question.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ce n'est pas tout. Le centre de radiodiffusion de la SRC a dépassé son budget de 138 millions de dollars. Il était censé recevoir de l'argent de Bramalea et de Cadillac Fairview. Or, ces deux compagnies sont à présent en faillite. Le montant total de la location de l'immeuble s'élève à plus de 1,7 milliard de dollars. C'est maintenant au gouvernement de payer pour ce fiasco qui va coûter 250 millions de dollars.

Le centre de radiodiffusion a été un désastre financier dès le départ. Le ministre va-t-il donner instruction au vérificateur général d'enquêter sur le financement de ce centre de radiodiffusion inutile et de faire rapport au Parlement?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je prends note des allégations de la députée. Je lui fais la même réponse que tout à l'heure. Je verrai ce qu'il en est, puis je répondrai à ses questions.


12796

[Français]

LE PROGRAMME NATIONAL DES INFRASTRUCTURES

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adressse au premier ministre.

Le premier ministre vient de nous indiquer que 15 des 20 millions de dollars promis pour les Jets de Winnipeg seront puisés à même le programme d'infrastructures du Manitoba. Or, les informations prises dans les documents officiels du Conseil du Trésor sont bien différentes.

Comment le premier ministre peut-il expliquer qu'au 24 janvier, dans le cahier 3 du Budget des dépenses du Conseil du Trésor, il ne restait que 6 millions de dollars pour le programme d'infrastructures du Manitoba et que le premier ministre parle aujourd'hui de 15 millions de dollars? Où a-t-il pris ces nouveaux 9 millions de dollars?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, dans les allocations pour le Manitoba, il y a eu des projets qui n'ont pas été avancés et 12 millions de dollars sont disponibles à ce moment-ci.

M. Gauthier: Ah, c'est 12. Ça change!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Douze millions de dollars sont disponibles à ce moment-ci, selon le président du Conseil du Trésor. Le gouvernement du Manitoba a décidé de réaménager certains projets acceptés, de les annuler et de les remplacer de façon à ce qu'on ait trois millions de dollars de plus, pour un total de 15 millions de dollars.

(1445)

Comme je l'ai dit tantôt, les autres cinq millions de dollars proviendra de l'argent alloué à la préparation des infrastructures nécessaires aux Jeux panaméricains. Voici la somme de 20 millions de dollars telle qu'approuvée par le gouvernement. Cela n'a rien à voir avec l'équipe de hockey. Il s'agit de donner à la ville de Winnipeg et au gouvernement du Manitoba le choix de leurs propres priorités.

Comme la ville de Calgary, comme la ville d'Edmonton et comme la ville du député était d'avoir des amphithéâtres, c'est la même chose pour la ville de Winnipeg. Alors que la ville de Québec, votre propre ville, votre propre maire, à Québec, a décidé clairement, avec le premier projet accepté, de mettre tout l'argent de la ville de Québec et de la région de Québec dans un centre des congrès déjà très largement construit. C'était la priorité des autorités locales, et nous l'avons acceptée avec plaisir.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, compte tenu de ces derniers changements très subits, comment le premier ministre peut-il accepter qu'on détourne cinq millions de dollars des Jeux panaméricains pour financer les Jets de Winnipeg?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je comprends très bien que lorsqu'on reçoit les Jeux panaméricains, il faut avoir les équipements nécessaires. La ville de Winnipeg et le gouvernement provincial ont décidé de profiter de l'occasion pour se doter d'une facilité qui pourra rencontrer les deux exigences. C'est très bien s'ils peuvent ainsi faire des économies.

* * *

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

On se rappellera les allégations de certaines personnes lors de la fermeture du Collège militaire royal de Saint-Jean, allégations à l'effet que ceci aurait pour effet de diminuer la représentation des francophones au sein des forces canadiennes. On sait qu'il y a eu le Budget et le Livre blanc sur la défense nationale.

J'aimerais que le ministre de la Défense nationale fasse rapport à cette Chambre sur la situation des francophones, plus particulièrement quant à la situation du recrutement des francophones dans les Forces armées canadiennes.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je dois remercier l'honorable député de sa question. J'ai le plaisir d'annoncer que, contrairement à certaines allégations à l'effet que la fermeture du Collège militaire royal de Saint-Jean affecterait la réalisation des objectifs de recrutement des francophones dans les forces canadiennes, l'objectif de recrutement, pour les élèves officiers, a été atteint, y compris 30 p. 100 de francophones.

Ceci démontre clairement que les francophones valorisent, encore et toujours, les carrières dans les forces canadiennes.

* * *

[Traduction]

LA POLITIQUE CULTURELLE

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement américain dresse actuellement la liste des sociétés canadiennes du domaine des commu-nications et du spectacle dont pourrait se servir pour user de représailles en raison de la politique d'isolationnisme culturel du Canada, une politique qui a déjà privé des artistes canadiens de musique country d'un public mondial en supprimant la chaîne de télévision américaine de musique country. Maintenant, Much Music et Teleglobe sont parmi les sociétés qui pourraient être sacrifiées à cause de cette politique isolationniste.

Ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. Est-ce que le ministre peut nier que les politiques culturelles anticoncurrentielles de son gouvernement coûteront des emplois aux Canadiens et un auditoire mondial aux artistes canadiens de musique country?

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je peux confirmer au député que j'ai effectivement reçu une lettre du représentant au commerce américain qui me fait savoir qu'il a l'intention d'invoquer l'article 301 contre le Canada si, à brève échéance, il n'est pas possible de parvenir à un accord sur les questions que soulève le député.


12797

(1450)

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous allons essayer de nouveau, peut-être avec le ministre du Patrimoine canadien ou le ministre de l'Industrie.

Les Canadiens ont dit clairement qu'ils étaient en faveur du choix et de la concurrence. Ce sont les principes qui devraient guider notre politique culturelle. Au lieu de cela, il semblerait que les libéraux soient en faveur de la concurrence, surtout lorsqu'elle profite à la famille libérale.

Pourquoi le ministre sacrifie-t-il des artistes canadiens, des emplois canadiens et le choix des consommateurs sur l'autel de l'isolationnisme culturel canadien?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, la décision de supprimer la chaîne CMT a été prise par le CRTC, conformément à une politique en vigueur depuis très longtemps. Lorsque la chaîne CMT est entrée sur le marché canadien, elle connaissait la politique du CRTC et elle savait qu'elle risquait de perdre ses droits si un service canadien concurrentiel le demandait. C'est la règle du jeu.

La suite est naturellement entre les mains des autorités américaines intéressées. Elles nous ont menacés de représailles. Le ministre du Commerce international a précisé qu'il répondrait en temps et lieu à la lettre qu'il a reçue du secrétaire d'État, M. Cantor. Toutefois, la politique est claire.

* * *

[Français]

LES LANGUES OFFICIELLES

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor. Après vérification, l'opposition officielle a identifié au moins dix institutions du gouvernement fédéral qui offrent des informations uniquement en anglais sur le réseau de communications d'information Internet. Parmi ces institutions, notons le ministère de la Défense nationale, le Collège militaire royal de Kingston, le ministère de l'Industrie et celui des Ressources naturelles du Canada.

Le président du Conseil du Trésor, responsable de l'application de la Loi sur les langues officielles, entend-il intervenir immédiatement auprès des institutions et organismes fédéraux, afin que soient rendues disponibles à court terme et dans les deux langues officielles les informations fédérales publiées sur Internet?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, come je l'ai déjà déclaré à la Chambre, nous avons la ferme intention de faire respecter la Loi sur les langues officielles et son règlement d'application. Les Canadiens devraient pouvoir obtenir des services dans la langue officielle de leur choix.

Je crois comprendre qu'Internet fonctionne surtout en anglais. Ce qu'il faut faire pour que les services gouvernementaux soient offerts dans les langues officielles, c'est prendre les mesures nécessaires à la réalisation de cet objectif.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je pense que les informations doivent être rendues publiques dans les deux langues officielles en même temps, pas juste en anglais, et en français quand on aura le temps. On doit être traités comme les autres. Les changements qu'il a faits, c'est qu'il a mis la page frontispice en français et derrière, c'est en anglais. C'est une autoroute «one-way».

Des voix: Bravo!

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): À quelques heures du dépôt des recommandations du CRTC au sujet du contenu canadien sur l'autoroute de l'information, le président du Conseil du Trésor n'est-il pas gêné à l'égard des francophones, alors que des informations fédérales sur Internet ne sont diffusées qu'en anglais?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné, la technologie est en pleine évolution. Le gouvernement entend prendre le plus rapidement possible les mesures nécessaires pour que la population puisse avoir droit à des services gouvernementaux dans la langue officielle de son choix. Il a déjà fait énormément de progrès en ce sens.

J'ai déjà parlé à la Chambre des nouvelles publications conçues pour aider nos ministères dans cette tâche, pour faire connaître aux gens les services où ils peuvent obtenir une réponse dans la langue officielle de leur choix et pour publier ce renseignement dans des journaux de langue minoritaire. Et je pourrais en parler encore longtemps.

(1455)

Mon gouvernement a l'intention de faire respecter la Loi sur les langues officielles et son règlement d'application, afin que les Canadiens aient droit à des services dans la langue officielle de leur choix.

* * *

LA PUBLICITÉ ÉLECTORALE

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, vous savez sûrement que le gouvernement conteste la décision de la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta qui a déclaré inconstitutionnelle la loi qui interdit la publicité par des tiers durant la campagne électorale et brime ainsi la liberté d'expression.

Selon ce qu'en ont dit les médias récemment, on se moque de l'appel du gouvernement, en Alberta, à l'extérieur du tribunal. Le solliciteur général va-t-il épargner d'autres dépenses aux contribuables et retirer cet appel au sujet de la loi du bâillon antidémocratique?


12798

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai plaidé pendant très longtemps dans les salles d'audience et je sais qu'il est très difficile de prédire le résultat d'une affaire d'après ce qu'en disent les médias.

J'invite mon collègue à être patient. Nous avons présenté nos instances et, par respect pour le tribunal, je pense que nous devrons attendre qu'il rende sa décision avant de formuler d'autres observations.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a, dans le passé, subi deux défaites à cet égard devant les tribunaux.

Le ministre va-t-il reconnaître que, si son gouvernement essaie de maintenir cette loi, à l'instar du gouvernement précédent, c'est parce qu'il craint que des organismes et des citoyens ne soulèvent un débat au cours des prochaines élections fédérales au sujet du régime de pensions des députés, qui est tout à fait indécent?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est devant les tribunaux, comme il se doit, que nous avons défendu la position du gouvernement fédéral. Le tribunal ne s'est pas encore prononcé, et je n'entends pas livrer mes observations à ce sujet tant qu'il n'aura pas eu l'occasion d'exprimer son opinion.

Cependant, je peux dire à mon collègue que, la prochaine fois que notre gouvernement se présentera devant l'électorat, il le fera en étant très fier d'avoir respecté les engagements qu'il avait pris dans le livre rouge en ce qui concerne les pensions et toutes les autres questions.

* * *

LE TOURISME

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national.

Le tourisme est une importante industrie qui rapporte des milliards de dollars à l'économie canadienne. Dimanche, le ministre a annoncé l'ouverture, à l'aéroport international de Vancouver, d'une nouvelle installation à l'intention des voyageurs étrangers. Le ministre pourrait-il dire à la Chambre en quoi cette nouvelle installation va favoriser l'économie et venir en aide aux milliers de passagers des navires de croisière qui transitent par Vancouver?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je le ferai avec plaisir.

Environ 700 000 visiteurs prennent place à bord de navires de croisière qui transitent par Vancouver. Ces personnes injectent des millions et des millions de dollars dans l'économie de Vancouver. Pourtant, j'ai appris à ma grande surprise, lorsque je suis devenu ministre, qu'elles attendaient jusqu'à trois heures à l'aéroport de Vancouver avant d'aller aux terminaux maritimes.

Nous avons mis en place une nouvelle installation temporaire en attendant que le nouvel immeuble sera construit l'an prochain. Au lieu de perdre leur temps à l'aéroport, les passagers des navires de croisière auront maintenant la possibilité de se rendre au centre-ville de Vancouver et de faire quelques achats.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.

Dans un geste controversé, certains Mohawks de Kanesatake s'apprêtent à enterrer deux des leurs dans la pinède d'Oka sur un terrain appartenant actuellement à la municipalité d'Oka. Entre-temps, les négociations sont suspendues avec la nomination de leur ami, Me Michel Robert, à titre de juge.

Le ministre confirme-t-il que des terrains ont été offerts par la municiplité d'Oka depuis plusieurs années au gouvernement fédéral-mais celui-ci ne s'en est toujours pas porté acquéreur-pour mettre fin aux tensions entre la municipalité d'Oka et la communauté mohawk de Kanesatake?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit d'une situation très explosive et, comme je connais le député, je suis sûr qu'il ne cherchera pas à l'exploiter.

La situation est la suivante. Deux Mohawks se sont noyés. Les Mohawks, prétextant un manque de terrain pour les enterrer, ont dégagé un petit lopin de terre qui fait, je crois, 20 pieds sur 20. Le maire d'Oka dit que ce terrain lui appartient. Le juge Réjean Paul s'est rendu sur place. Je pense que le ministre de la Sécurité publique du Québec a été saisi de la question. Nous ne voulons pas trop en parler, et je pense qu'il serait vraiment déplacé, de ma part, de faire des commentaires à ce sujet. L'affaire a été confiée au juge Réjean Paul, qui saura le mieux s'en occuper en privé et avec calme.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, l'Association de l'immigration a publié un nouveau sondage qui confirme que le gouvernement, qui a manqué à toutes les promesses en matière d'immigration qu'il avait faites aux Canadiens, ne tient toujours pas compte de la réalité.

(1500)

Soixante-six pour cent des gens estiment qu'il faudrait refouler les faux réfugiés à la frontière, sans appel, et une majorité reconnaissent, comme le Parti réformiste, que ce sont des fonctionnaires et non des amis du ministre, nommés par favoritisme, qui devraient trancher les demandes de statut de réfugié.

12799

Le ministre va-t-il enfin écouter les Canadiens, faire passer leurs intérêts en premier et supprimer la Commission de l'immigration et du statut de réfugié?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, faut-il s'étonner d'une telle question après que le député se fut rendu à Washington, où lui et son parti ont autorisé Newt Gingrich, Pat Buchanan et ce grand visionnaire qu'est Sonny Bono à décider de la politique d'immigration? Ces trois personnes veulent ramener les États-Unis d'Amérique à l'âge des ténèbres, et ce député voudrait accrocher le wagon des Canadiens à leur locomotive. Nous lui disons: «Non, merci.»

* * *

LES JETS DE WINNIPEG

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre, qui a beaucoup patiné autour de la question des Jets de Winnipeg.

Quel que soit le nom qu'il donne à son geste, le gouvernement va dépenser 20 millions de dollars pour venir au secours des Jets de Winnipeg. Si le gouvernement est prêt à apporter son aide, va-t-il au moins envisager d'acquérir une participation financière dans l'équipe de hockey pour faire de sa contribution un investissement, au lieu de simplement donner de l'argent pour la construction d'une aréna, ce qui équivaut à jeter son argent dans un puits sans fonds?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, notre rôle n'est pas d'investir dans des équipes de hockey, mais dans des installations. Ce projet est admissible au programme d'infrastructure parce que la ville de Winnipeg veut y donner suite.

Le programme d'infrastructure a permis de créer jusqu'à maintenant quelque 100 000 emplois, et il s'agit précisément de créer des emplois dans les communautés, de renforcer l'infrastructure. C'est là que nous investissons.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à la tribune de l'honorable Darlene Marzari, ministre des Affaires municipales de la Colombie-Britannique.

Des voix: Bravo!

Le Président: Cela met un terme à la période des questions.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais demander au secrétaire d'État aux Affaires parlementaires s'il pourrait nous donner l'ordre des travaux de la Chambre pour la semaine à venir.

[Traduction]

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, demain, nous allons entreprendre l'étude du projet de loi C-82 sur la monnaie royale, à l'étape de la deuxième lecture. Nous poursuivrons avec le projet de loi C-91 sur la Banque de développement du Canada, le projet de loi C-88 concernant le commerce intérieur, le projet de loi C-92 sur la Commission canadienne du blé, le projet de loi C-54 sur l'administration des pensions, le projet de loi C-75 portant sur les prêts à des fins agricoles, le projet de loi C-70 modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et le projet de loi C-65 relatif à la réorganisation de certains organismes.

Nous poursuivrons avec la reprise du débat sur la motion de création d'un comité mixte spécial pour l'élaboration d'un code d'éthique parlementaire.

Le lundi 29 mai, si nous n'avons pas terminé, nous reprendrons au point où nous aurons interrompu nos travaux vendredi.

Les mardi 30 mai et jeudi 1er juin seront des journées d'opposition.

Mme Wayne: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. À la suite de la déclaration du jeudi, je veux demander au leader du gouvernement à la Chambre si son gouvernement a l'intention de reprendre l'étude du projet de loi S-7, un projet de loi d'initiative parlementaire portant sur la conversion de la flotte de véhicules du gouvernement à des carburants de remplacement. A-t-il l'intention de remettre ce projet de loi à l'étude de la Chambre pour que nous puissions le mettre aux voix avant le début des vacances d'été, le 23 juin?

M. Gagliano: Monsieur le Président, le projet de loi S-7 est actuellement à l'étude du comité. Dès que le comité aura terminé ses travaux et remis son rapport à la Chambre, nous serons certainement heureux d'examiner ce projet de loi.

_____________________________________________


12799

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1505)

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES RÉCLAMATIONS FINANCIÈRES DU QUÉBEC

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, les députés se rappelleront que, avant la période des questions, j'ai dit quelques mots au sujet de la motion de l'opposition concernant les réclamations financières du Québec, un sujet qui n'est pas nouveau pour la Chambre. Depuis un an et demi que je siège ici, les réclamations financières du Québec sont toujours à l'avant-scène.

Il est étrange que le Bloc fasse de cette question une motion de l'opposition, alors que le Québec bénéficie depuis des années de


12800

ce qu'il fait partie de notre magnifique pays. Il est extrêmement étrange, en fait, qu'il veuille s'en séparer.

Il est également tragique de constater que la plupart des députés du Bloc semblent croire que les liens entre le Québec et le reste du Canada ne sont que d'ordre financier. Pour la vaste majorité des Canadiens, les liens entre le Québec et le reste du Canada sont beaucoup plus qu'un simple accord financier. Il existe une relation spirituelle, des relations comme il y en a entre amis, frères, parents, membres d'une même famille.

Récemment, j'ai fait visiter le Québec à mon fils et j'ai invité les Québécois, en particulier les députés bloquistes, à aller voir par eux-mêmes dans l'Ouest et dans l'Est que les Canadiens sont bien accueillis dans tous les coins de notre pays. Les Québécois sont les bienvenus dans le reste du Canada et les habitants du reste du Canada sont les bienvenus au Québec.

Que les députés aient ou non aimé l'ancien président Reagan, ils reconnaîtront que celui-ci était réputé pour l'utilisation magistrale qu'il faisait des médias et pour sa capacité à exprimer des idées compliquées dans le langage simple de tous les jours. Il était un maître manipulateur des médias. Il faut bien l'admettre.

Il était donc extrêmement curieux qu'il ait fait suspendre un portrait de Calvin Coolidge dans la salle du Cabinet. Calvin Coolidge était considéré comme le président à l'esprit le plus caustique. Il ne disait jamais en trois mots ce qui pouvait s'exprimer en un seul et il était généralement perçu comme un homme très peu loquace.

Le président Reagan a fait suspendre un portrait de Calvin Coolidge dans la salle du Cabinet parce que celui-ci avait la capacité d'exprimer très succinctement des remarques pleines de mordant. Je voudrais parler plus particulièrement de ce que Calvin Coolidge avait à dire au sujet des gens, des responsabilités, des liens qui unissent les membres d'une société et du rôle de l'État.

Calvin Coolidge a dit ceci: «Les gens ne peuvent généralement compter sur les lois pour réussir; l'application, la prévoyance et la détermination ne sont pas conférées par les lois ni par les résolutions. L'État ne peut nous soustraire au travail. Il ne peut offrir de substitut à la satisfaction qu'on éprouve en rendant service. Il peut évidemment s'occuper de ceux qui sont dans le besoin et reconnaître les mérites exceptionnels. Les citoyens ordinaires doivent toutefois subvenir à leurs besoins. L'autonomie gouvernementale est synonyme d'indépendance financière.»

(1510)

Si nous nous inspirions de cela, que nous aspirions à l'autonomie et à l'indépendance financière, notre pays en bénéficierait grandement. Toutes les provinces et les régions, au lieu de se tourner vers le gouvernement fédéral et de lui demander ce qu'il peut faire pour elles, devraient plutôt se demander ce qu'elles peuvent faire pour le bien de l'ensemble du pays après avoir assumé leurs propres responsabilités.

À moins de ne pouvoir d'abord s'occuper de soi, comment peut-on envisager de s'occuper de ses voisins? Si l'on ne peut tout d'abord s'occuper de sa propre province, comment peut-on penser s'occuper des autres? Il nous faut être autonomes en tant qu'individus, en tant que collectivités et en tant que provinces. Inévitablement, cela rendra notre pays autonome et plus fort dans l'avenir, un pays qui, comme dans mes rêves les plus chers, sera uni et dont le Québec sera, bien entendu, une partie intégrante.

[Français]

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai entendu le commencement du débat ce matin, et l'honorable député de Mégantic-Compton-Stanstead, comme toujours, a prononcé un très bon et très intéressant discours, mais ce n'était pas un discours qui portait sur la motion devant la Chambre, c'était un discours sur le séparatisme.

Maintenant, l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest a pour sa part et comme toujours prononcé un bon discours et très intéressant, et pour le Parti réformiste, c'était un très bon discours. Il a soulevé un problème avec la motion proposée ce matin par l'honorable député de Mégantic-Compton-Stanstead. Le problème a trait à la motion qui se lit ainsi: Que la Chambre dénonce le retard du fédéral à répondre aux réclamations du Québec relatives à certaines choses.

Est-ce que l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest est d'accord avec moi que la seule raison de cette motion n'est pas de se plaindre de ce retard, mais d'avancer la notion de séparatisme et simplement pour créer un malentendu entre les électeurs du Québec et les électeurs du reste du Canada? C'est l'idée de l'honorable député de Mégantic-Compton-Stanstead et des autres députés du Bloc québécois.

[Traduction]

M. McClelland: Monsieur le Président, je remercie le député d'en face de sa question. Oui, je suis d'avis que le but implicite de cette motion était de fournir un prétexte pour promouvoir la cause du séparatisme à la Chambre.

Il doit être très frustrant pour les députés du Bloc de se présenter à la Chambre avec la ferme détermination de tout faire pour en sortir un jour. Or, plus leur séjour ici se prolonge, plus il devient tout à fait évident qu'ils y sont à l'aise, qu'ils s'y plaisent. Plus le Bloc prolonge son séjour dans cette enceinte, plus les députés qui représentent les Canadiens au Québec passent du temps à la Chambre, plus il devient manifeste que notre pays fait très bon accueil à tout le monde.

J'ai beaucoup d'affinités avec les députés du Bloc. En arrivant ici, les députés du Parti réformiste étaient tout aussi mal vus que les députés du Bloc. Les représentants des médias du Canada central, les gens du Canada central s'attendaient à voir des nihilistes monolithiques, des descendants directs des hommes de Cro-Magnon.

(1515)

Tout le monde s'attendait à ce que les députés du Bloc et ceux du Parti réformiste en viennent aux mains dans le hall. À leur grand étonnement, les gens ont constaté que nous avons probablement plus de points communs que de différences. Les députés du Bloc, en arrivant ici, se sont mis à la tâche, frustrés qu'ils étaient de voir la façon dont notre pays était dirigé, se sentant isolés de la conduite des affaires du pays et constatant que rien ne changeait.


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Et c'est précisément la raison pour laquelle je suis moi-même ici aujourd'hui. Étant maintenant ici depuis un an et demi, nous avons appris à nous connaître davantage. Nous allons pouvoir poser la grande question qui pointe à l'horizon, celle que l'on va poser au Québec.

Je souhaite, désire et espère que, quelle que soit la question qui leur sera posée, les Québécois décideront de demeurer au sein du Canada. Les députés oublieront alors le passé pour se tourner vers l'avenir. Tel est mon désir, mon souhait, et je mettrai tout en oeuvre pour qu'il se réalise.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, je suis toujours surpris d'entendre le Parti réformiste ou le Parti libéral nous traiter un peu de quêteux, comme si on était des quêteux, comme si ce qu'on demandait à l'heure actuelle était quelque chose qu'on quêtait.

On ne veut rien quêter au gouvernement fédéral, loin de là; on veut tout simplement avoir notre part du gâteau qu'on a déjà envoyée à Ottawa. Par nos impôts et nos taxes, on a payé des sommes extraordinaires à Ottawa; tout ce qu'on veut, c'est notre dû. Et on veut également que le gouvernement fédéral respecte ses engagements.

Le gouvernement fédéral ne respecte pas ses engagements, comme il l'a fait dans le domaine des soins de santé. Quand on a mis en place le système des soins de santé au Québec, le gouvernement fédéral a voulu s'y ingérer et a dit: «Je veux imposer mes normes.» Et pour que le Québec accepte que le fédéral impose ses normes, le gouvernement fédéral a ajouté: «Je vais payer 50 p. 100 de la facture des services de soins de santé au Québec.»

À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral n'en paie que 30 p. 100, et nous sommes obligés d'en payer 70 p. 100. Il faut comprendre que toutes les normes et structures mises en place étaient en conséquence que le fédéral en paie 50 p. 100, alors qu'il n'en paie que 30 p. 100. Vous imaginez-vous tout le désordre que cela crée au Québec dans la gestion?

Tout ce qu'on demande au fédéral, c'est de prendre ses responsabilités. On ne quête pas d'argent au fédéral, on ne demande pas des dons du fédéral, loin de là; on lui dit simplement: «Retournez-nous au moins l'argent qu'on vous envoie.» On demande simplement la justice. On demande seulement au fédéral de respecter ses engagements.

Pour ces raisons, depuis des années, on dit: «Puisque vous ne voulez pas respecter vos engagements, nous allons percevoir la totalité des impôts et des taxes et nous donnerons également à notre guise ce qu'on pense équitable au gouvernement fédéral.» C'est un peu dans ce sens que le fédéral nous traite. C'est pour cette raison que nous voulons la souveraineté. On ne veut pas être des quêteux, on veut que le gouvernement fédéral respecte ses engagements; il ne le fait pas.

C'est ce que je voulais dire au député du Parti réformiste qui ne semble pas connaître son histoire. Il essaie de faire accroire au peuple canadien que les Québécois ne sont que des quêteux. On n'est pas des quêteux, on veut notre dû et on veut qu'on nous respecte.

[Traduction]

M. McClelland: Monsieur le Président, si j'ai donné l'impression au député que je pensais que les Québécois et les bloquistes étaient ici en tant que quêteux, ce n'était certes pas mon intention. Je ne pense pas que ce soit le cas.

Les députés du Bloc sont de durs négociateurs. Les Québécois ont très bien réussi à utiliser la balance du pouvoir qu'ils détiennent et leur puissance électorale au Canada depuis de nombreuses années pour retirer plus que leur juste part de leur association avec le Canada.

Leur association avec le Canada a été extrêmement profitable. Le député a parlé d'un partage égal des coûts des soins de santé. Parlons de l'assistance publique. Le gouvernement fédéral finance 70 p. 100 des coûts de l'assistance sociale au Québec. En Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique, la proportion n'est que de 50 p. 100.

Pouvez-vous me dire comment il se fait que le Québec est considéré comme une province défavorisée, alors qu'on ne fait pas entrer en ligne de compte ses merveilleuses ressources hydroélectriques. Pourtant, les ressources pétrochimiques de l'Alberta entrent dans les calculs. L'année dernière, le Québec a touché 3,5 milliards de dollars en paiements de péréquation. Au cours des 40 dernières années, l'Alberta a versé quelque 100 milliards de dollars au titre de la péréquation, et le Québec a reçu à peu près le même montant à ce chapitre.

(1520)

Ainsi, lorsqu'un député du Bloc ou un autre député du Québec ou d'ailleurs affirme que le Québec sort perdant de son association avec le reste du Canada, il ne fait que nier la réalité.

Si le Québec décidait, dans sa sagesse, de quitter la fédération, il serait durement frappé, car il ne pourrait plus du tout compter sur l'argent qu'il reçoit pour subventionner et protéger son industrie ou qu'il touche sous forme de transferts de fonds directs. Les Québécois doivent le comprendre. Il faut les regarder droit dans les yeux et leur dire que, s'ils décident de se séparer, ils ne pourront plus recevoir un seul sou de nous.

[Français]

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la motion qui nous est présentée aujourd'hui fait référence à trois dossiers entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec. En effet, la ministre déléguée aux Affaires intergouvernementales canadiennes du Québec les a soulevés plus tôt cette semaine avec mon honorable collègue, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes à Ottawa.

Cette motion suggère que le gouvernement du Canada utilise des moyens dilatoires dans ses relations avec le gouvernement du Québec, tel n'est pas le cas. En réalité, ce qui se passe ici est tout à fait dans l'ordre des choses. C'est là un processus normal et


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constructif de relations entre deux ordres de gouvernement, et le cas du Québec n'est pas différent d'un autre.

Depuis son entrée en fonction comme ministre des Affaires intergouvernementales, depuis 18 mois, mon collègue a rencontré ses homologues provinciaux plus d'une vingtaine de fois. Dix-huit mois au gouvernement, plus de 20 rencontres. Il a rencontré ses homologues tant de l'Ouest canadien que des territoires, de l'Atlantique, de l'Ontario et du Québec.

Dans le cadre de ces rencontres, il est tout à fait normal que les ministres provinciaux soulèvent des dossiers à régler avec le gouvernement du Canada. Selon son habitude, le gouvernement du Canada prend d'abord connaissance des dossiers puis, en collaboration avec les provinces concernées, entreprend des démarches pour trouver des solutions de façon à satisfaire les deux parties.

De même, il arrive au gouvernement du Canada d'identifier des dossiers qu'il juge importants de son point de vue. Il entame alors, avec les gouvernements provinciaux, des consultations et ensemble ils conviennent des démarches pour en arriver, une fois de plus, à des ententes justes et équitables.

Cette façon de faire n'est pas particulière au ministère des Affaires intergouvernementales. Dans la fédération canadienne, cette approche connaît du succès parce que tous les premiers ministres, les ministres et les fonctionnaires travaillent étroitement pour arriver à des résultats concrets et pratiques.

Notre fédéralisme pragmatique est fondé sur un ensemble de mécanismes, de rencontres intergouvernementales qui permettent à nos gouvernements de se concerter régulièrement et d'aplanir leurs difficultés. Ces mécanismes prennent diverses facettes: les rencontres fédérales-provinciales des premiers ministres, celles des ministres sectoriels, les rencontres interprovinciales ainsi que tout une gamme de rencontres sous-ministérielles. C'est en cela que nous reconnaissons la flexibilité de notre fédération.

(1525)

Grâce à ces divers mécanismes et à la nature flexible de notre fédération, c'est dans cet esprit de collaboration avec les gouvernements des provinces et territoires que nous avons conclu les réalisations suivantes: la signature d'ententes avec toutes les provinces dans le cadre du programme des infrastructures; la mise sur pied d'un accord visant la réduction des barrières interprovinciales au commerce et la libre circulation des personnes, dans le but de renforcer l'union économique; la signature de plans d'action visant la réduction des chevauchements et du double emploi avec huit provinces et les deux territoires; et la mise sur pied d'Équipe Canada, dirigée par le premier ministre du Canada, dans le but de renforcer notre position dans de nouveaux marchés prometteurs.

Le programme national sur les infrastructures avait pour but d'accélérer la reprise économique en créant des emplois à court et à long terme par le biais d'investissements locaux, tout en répondant à la nécessité manifeste de renouveler et de rehausser l'infrastructure du Canada à l'échelle locale.

Il s'agit d'un programme souple qui a permis aux municipalités, aux provinces et aux territoires de tenir compte de leurs propres priorités. Les travaux exécutés ont répondu en grande partie aux priorités établies par les administrations locales, en fonction d'objectifs et de critères d'ordre national et provincial, conformément aux ententes fédérales-provinciales régissant le programme.

De son côté, l'accord de commerce intérieur prévoit des changements concrets, des calendriers d'exécution et un processus complet qui contribueront à faire du Canada une vraie union économique, caractérisée par une plus grande liberté de circulation des citoyens, des capitaux, des biens et des services.

Avec l'accord sur la réduction des chevauchements et du double emploi, nous visons à rationaliser les opérations dans toute une gamme de domaines allant de l'environnement à la perception des impôts, en passant par l'aide à la petite entreprise; avec comme résultat final, un gouvernement allégé, moins de règlements et de bureaucratie et des services plus efficaces fournis directement et à moindre coût.

Quant à la mission d'Équipe Canada, elle a fourni un excellent exemple de ce que le fédéralisme moderne peut accomplir. Elle a montré que nous pouvons collaborer de façon très efficace en tant que pays pour créer des emplois ici et ouvrir des horizons à tous les Canadiens. Équipe Canada a eu tout un effet dans les pays que nous avons visités.

Ils ont été impressionnés par la collaboration entre les secteurs privé et public et par la façon dont les différents niveaux de gouvernement travaillent ensemble pour favoriser l'intérêt national.

Ces résultats sont une autre illustration de notre engagement à créer des emplois et à favoriser la croissance économique du pays, à bâtir ensemble une fédération capable de faire face à la concurrence internationale. Voilà en quoi consiste un bon gouvernement.

Mais de tels résultats ne sont possibles que si les gouvernements négocient de façon transparente et de bonne foi. Cela ne veut pas dire, cependant, que le fédéralisme exclut les conflits, nous le savons bien.

Au Canada, nous devons continuellement équilibrer les intérêts régionaux et provinciaux, culturels et linguistiques, avec l'intérêt national, dans ce qu'on peut appeler un état de tension constructive. Je la qualifie de constructive parce qu'elle force les parties à chercher constamment à répondre aux besoins locaux tout en tenant compte des priorités de l'ensemble du pays.

Le gouvernement du Canada ne favorise aucune région ni aucun secteur de la société au détriment de l'autre. Qu'une région soit frappée durement, soit par la désertification, une crise de la pêche ou une conjoncture économique défavorable, la fédération peut venir à la rescousse grâce à la richesse collective.

La règle du jeu est l'interdépendance, et le fédéralisme se prête aux accommodements nécessaires entre groupes et régions.

(1530)

Comme l'a fait remarquer M. Alain Gagnon, spécialiste en sciences politiques de l'université McGill, le fédéralisme est considéré comme l'expression de pratiques démocratiques favorables à l'innovation dans les orientations et les choix politiques


12803

décidés au niveau territorial. Face à l'avenir, le Canada a un net avantage d'être une fédération.

Nous savons que les Québécois, comme tous les autres Canadiens, souhaitent de tout coeur que leurs gouvernements travaillent à la résolution des problèmes pressants auxquels nous sommes confrontés. Il est maintenant temps que nous tournions la page et que nous laissions de côté nos différends politiques pour mettre enfin toutes nos énergies au service d'une cause commune: bâtir un pays fort et uni pour les citoyens d'aujourd'hui et pour les générations futures.

C'est dans cet esprit que le gouvernement du Canada négocie avec le gouvernement du Québec. Nous aimerions que nos collègues de l'opposition comprennent bien que le gouvernement du Canada a tout autant à coeur les intérêts des Québécoises et des Québécois que le gouvernement du Québec. Dans les trois dossiers mentionnés dans la motion du député de Mégantic-Compton-Stanstead, le gouvernement du Canada a agi de bonne foi. Les processus utilisés dans chacun de ces dossiers ont été corrects et conformes au processus normal des relations entre gouvernements au sein d'une fédération comme la nôtre.

Il est donc clair que je voterai contre la motion débattue aujourd'hui, car elle va à l'encontre des principes qui sous-tendent la bonne conduite des relations fédérales-provinciales du Canada. Je sais que mes collègues, depuis l'élection de 1993, chaque jour, à chaque question pendant la période des questions, à chaque discours en Chambre, à chaque question dans les débats, reviennent toujours sur la question de la séparation.

Mais, après 18 mois, après avoir écouté les députés du Bloc, les Québécois n'ont pas changé d'avis. Au contraire. Si on regarde et qu'on fait l'analyse sur une période de temps échelonnée, nous voyons que les Québécois ont compris qu'ils sont mieux s'ils restent à l'intérieur de la fédération canadienne. Tout à l'heure, mon collègue de Longueuil a posé une question au député réformiste au sujet des soins de santé. Il parlait des différents engagements originaux et ce qu'on paie actuellement.

Je suis sûr que le député n'a pas fait exprès, mais il a oublié de mentionner qu'on n'est pas renseignés qu'à part l'argent que le gouvernement fédéral a payé dans les ententes antérieures, qui ont toujours été négociées et acceptées par les différents gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral a transféré une partie des points d'impôt qu'il recevait et les a donnés aux provinces, en partie pour l'argent. Donc, notre responsabilité est toujours la responsabilité originale.

Il oublie que quand cette fédération est entrée en vigueur, en 1867, 60 p. 100 des impôts relevaient de l'autorité fédérale. Si on regarde aujourd'hui, c'est l'inverse. Donc, voilà un fédéralisme, comme je le disais dans mon discours, qui est toujours en évolution selon la situation. D'ailleurs, tous les pays du monde reconnaissent que le fédéralisme est un des systèmes de gouvernement les plus flexibles qu'on a pu inventer jusqu'à maintenant et expérimenter. D'ailleurs, l'Europe essaie depuis 1950 de le copier et elle est encore pas mal loin de réussir à avoir ce que nous avons déjà. Il est sûr qu'il y a place à l'amélioration, mais ce n'est pas quelque chose à jeter, à détruire.

Je pense que les années passées l'ont prouvé, il y a toujours de l'amélioration et il y en aura toujours. Je suis convaincu que malgré tous les efforts que mes collègues de l'opposition officielle, du Bloc québécois, pourront faire chaque jour, chaque minute dans cette Chambre pour répéter aux Québécois que le Canada ne fonctionne pas, les Québécois vont rester au Canada parce que ce pays leur appartient et c'est vrai. Je suis d'accord sur une chose avec mon collègue, à savoir que le Canada appartient aux Québécois, comme le Québec appartient au Canada. C'est quelque chose que l'on a bâti ensemble. Il ne faudrait pas le détruire et nous allons y travailler.

(1535)

On entend dire que ça va mal, que l'équipe fédérale ne paient pas ses comptes, et que c'est de la mauvaise foi. Ce sont des dossiers entre deux gouvernements. Même dans le secteur privé, avant qu'on paye, il y a certaines justifications à faire, il faut répondre à certaines questions et c'est normal.

D'ailleurs, comme mon collègue, le ministre des Affaires intergouvernementales l'a dit ce matin, dans un des dossiers, nous avons payé une partie. On a dit: «Écoutez, on n'est pas d'accord, on donne cela au vérificateur général. C'est lui qui va faire la vérification du dossier et on acceptera son rapport.» Mais on l'attend toujours. Nous espérons le recevoir bientôt, et à ce moment-là, nous respecterons sa décision.

Dans toute la question du dossier de l'éducation pour le Nord québécois, on a déjà payé 450 millions de dollars. Mais quand on demande au gouvernement du Québec, puisqu'ils en veulent plus et que nous n'en avons plus à payer, comment il se fait qu'on ait dépensé tant d'argent? Là, on n'a pas de réponse.

Ces relations-là sont normales. Mais on vient ici présenter une motion, lors d'une journée de l'opposition, au lieu d'essayer de se parler et voir comment on pourrait travailler ensemble pour créer des emplois. Ils viennent nous dire comment on peut encore se chicaner, se déchirer pour faire comprendre et démontrer aux Québécois que voilà, ça ne marche plus, on ne nous paie pas nos comptes, et comme le député de Longueuil disait: «La seule chose qui nous reste, c'est de nous séparer.» Non, monsieur le Président, je pense que l'expérience de près de 128 ans est un modèle pour le monde entier.

Il y a des milliers et des milliers de citoyens dans le monde qui sont prêts à donner tout ce qu'ils possèdent pour devenir des citoyens canadiens, pour venir vivre avec nous malgré les misères que nos collègues veulent faire croire. C'est une expérience valable. Nous sommes un exemple dans le monde et nous allons continuer à l'être parce que les Québécois et les Canadiens ont confiance, ont foi au système que nous avons construit ensemble et nous allons le garder.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, je viens d'entendre un très beau discours bien préparé de mon collègue qui dit que le Canada est un pays que tout le monde envie.


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Cette façon de parler commence à me répugner un peu. Quand on regarde la dette de presque 600 milliards de dollars que le Canada a à supporter, quand on pense aussi que le Canada est dans le club des 60 pays en voie de développement, qu'on est au bord du précipice, qu'on continue à s'entêter et à dire que c'est un beau pays. Oui, c'est un beau pays, du moins, c'était un beau pays. Mais c'est un pays qui au bord du précipice, qui est à la veille de culbuter. Pourquoi? C'est à cause de cet entêtement du gouvernement fédéral de vouloir tout mener à partir d'en haut, cet entêtement de vouloir centraliser à Ottawa toutes les responsabilités.

Nous savons très bien qu'il y a des dédoublements qui coûtent de 2 à 3 milliards de dollars environ. Mais il y a plus que cela. Il y a cette ambition du gouvernement de vouloir tellement dépenser. Il a tellemement dépensé que, durant les années 1970 à 1989, il a été la cause même de l'inflation au Canada. L'inflation a grimpé de 10, 12 p. 100 par année. Je m'en souviens très bien.

Qu'a fait le gouvernement même s'il était la cause de cette inflation? Dans les années 1980, le gouvernement a été obligé d'augmenter les taux d'intérêt jusqu'à 21 p. 100. Il a tué l'économie et il a créé une récession épouvantable. Il y a une foule de petites et moyennes entreprises au Québec qui ont fait faillite. C'est triste ça.

(1540)

Il y a des gens qui ont perdu leur emploi, qui ont eu beaucoup de difficultés. J'ai une foule d'amis qui étaient en affaires, qui travaillaient très fort et qui ont fait faillite en 1981-1982. Pourquoi? Parce que c'est le gouvernement fédéral, lui-même, qui avait créé l'inflation et c'est le gouvernement fédéral, lui-même, qui a dû augmenter tellement les taux d'intérêt qu'il a tué l'économie.

Le gouvernement fédéral a été la cause de l'inflation et il fut la cause de la récession. Les raisons pour lesquelles il a fait cela était à cause de son pouvoir de dépenser. Le gouvernement fédéral voulait tellement montrer qu'il était indispensable, qu'il donnait des cadeaux à gauche et à droite, au niveau du développement économique, du tourisme, dans tous les secteurs, qu'il a créé l'inflation lui-même.

La même chose est arrivée entre les années 1984 et 1990. Encore une fois, le gouvernement a été la cause de l'inflation. Il a été la cause aussi de la récession en 1990. De 1990 à 1994, le gouvernement a augmenté les taux d'intérêt et a créé une récession. Encore une fois, on a fait mal à beaucoup d'entrepreneurs, à beaucoup de petites entreprises du Québec. On a des Québécois qui travaillent très dur, 15 heures par jour, pour bâtir des entreprises, et le fédéral est la cause de cette récession et la cause de tous ces maux.

C'est pour cela que nous voulons une stabilité. La stabilité, ce n'est pas l'ambition de dire qu'on veut tout contrôler à Ottawa, qu'on dépense pour prouver qu'on est indispensable. C'est ce que le gouvernement fédéral fait.

Le problème que nous vivons, la dette de 500 à 600 millions de dollars que nous avons actuellement, c'est que les gens ne veulent plus investir dans ce pays. Ils ne veulent plus investir parce que les taux d'intérêt varient à tous les dix ans de 10 p. 100 et que le dollar varie de 70c. à 90c. Comment voulez-vous qu'un investisseur qui veut exporter aux États-Unis s'installe ici pour construire des choses, quand les taux d'intérêt varient de 10 p. 100 dans l'espace de cinq ou six ans, quand le taux de change varie de 10 à 20 p. 100?

On voit les compagnies de papier qui font faillite tout à coup, et tout à coup elles font de l'argent. Pourquoi? Parce que le dollar varie. Pourquoi il varie? Parce que le fédéral ne sait pas gérer ses choses, parce que le fédéral dépense trop dans le but de prouver, aux Québécois particulièrement, qu'il est indispensable.

Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes devenus des gens qui veulent se prendre en main. On veut se prendre en main parce qu'on ne veut pas tomber dans le même précipice avec ce genre de fédération qui ne comprend pas la nécessité de la décentralisation qui nous donnera l'efficacité de réussir. C'est pour cela qu'on veut être souverains, parce qu'on ne veut pas tomber dans le même précipice de la fédération.

Le député de Saint-Léonard était très intéressant. Il avait un beau discours préparé d'avance par ses amis. C'est probablement le premier ministre, lui-même, qui lui a dit quoi dire. Je suis convaincu qu'il ne croit pas ce qu'il a dit parce que lui-même est un comptable. Il comprend très bien ce que je viens de dire et je suis convaincu qu'il est d'accord avec mes propos.

M. Gagliano: Monsieur le Président, j'aimerais remercier mon collègue, le député de Longueuil. Dans ses remarques, il a fait la preuve de ce que j'ai dit. Il a dit que tout est la faute du fédéral.

Est-ce la faute du fédéral si le Canada, dans les années 1980, malgré tous les problèmes-taux élevés d'inflation et d'intérêt-est devenu membre du G-7, membre des sept pays les plus industrialisés? Est-ce la faute du fédéral, si pendant deux années consécutives, l'Organisation des États américains a dit que le Canada est le meilleur pays pour vivre au monde? Est-ce la faute du fédéral si les gens ne veulent pas investir? Est-ce que l'instabilité politique du Canada est la faute seulement du fédéral? Ça fait 30 ans qu'on parle de séparation. Est-ce que c'est la faute du fédéral?

On a réalisé l'année passée la plus forte croissance économique des pays industrialisés. Est-ce cela un pays en faillite? Est-ce que le député vit complètement à l'extérieur de la mondialisation et de ce qui arrive dans les autres pays? Est-ce qu'il compare? Partout, toutes les statistiques, tous les rapports internationaux indiquent clairement que nous sommes un très bon pays. On a un problème d'instabilité politique causé justement par leurs idées.

(1545)

Aussitôt qu'ils en auront le courage, au lieu de faire des virages et d'attraper des torticolis, ils pourraient poser la question d'une façon claire et nette à savoir si les Québécois ont le goût de se séparer. Là, on pourrait vraiment enlever cet albatros qu'on a au cou à cause des séparatistes et, bien sûr, encore améliorer la situation.

Lorsqu'il a dit que le Canada est en faillite, il n'a pas réalisé et il ne s'est pas rendu compte des postes prestigieux que nous avons dans la communauté internationale à tous les niveaux.


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J'invite mon collègue à peut-être regarder cela un peu. Je sais qu'il est arrivé ici en même temps que moi il y aura bientôt 11 ans. Comme il a eu l'occasion de voyager un peu à travers le monde, je suis sûr que s'il essayait de se souvenir de ceux qu'il a rencontrés et de ce qu'il a pu entendre lors de ses voyages parlementaires, il serait d'accord avec moi.

Le président suppléant (M. Kilger): Il reste à peine deux minutes pour des questions ou commentaires.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, les derniers commentaires du député m'amènent à lui poser une question.

Justement, c'est lors de voyages à travers le monde qu'on se fait dire souvent: «Avec tous les moyens que vous avez, les Québécois, avec toutes les capacités que vous avez, qu'est-ce qui fait que vous ne vous êtes pas encore décidés à sortir de ce système afin d'être plus autonomes, comme nous on peut l'être au Danemark, en Norvège ou en Suède?» Ces pays ont le contrôle sur leur développement; ils savent, quand ils paient des impôts à un endroit, qu'ils n'en paient pas à l'autre, où les électeurs sont capables de comprendre pourquoi ils élisent des gens.

Je voudrais terminer mon commentaire en lui disant que nous autres, comme eux, avons été élus par les citoyens du Québec. Et lorsqu'on dit qu'on n'a rien fait, je pense que, sur deux années consécutives, il y a eu l'élection du Bloc comme signe très évident que quelque chose ne marchait pas dans la fédération canadienne et il y a eu l'élection d'un gouvernement souverainiste à Québec. Si le Parlement fédéral n'est pas capable de se rendre compte du message donné par les Québécois là-dessus, ce doit être une preuve de plus qu'il n'est pas réformable.

M. Gagliano: Monsieur le Président, encore une fois-et le député vient même de le dire-je suis fier et content d'être Québécois parce que le Québec est une société moderne, une société qui a toutes les capacités, une société qui est bien reconnue dans le monde entier.

Sachant que le Québec a été capable de s'épanouir, de se réaliser à l'intérieur d'une fédération canadienne, pourquoi voulez-vous donc la briser? Si le Québec reste à l'intérieur du Canada, et il va rester, il sera encore capable de s'épanouir et de se faire reconnaître pour toutes ses capacités. Donc si ça va si bien, pourquoi voulez-vous briser cette expérience, cette expérience valable que tout le monde nous envie, que tout le monde aimerait partager?

Monsieur le Président, les députés de l'opposition donnent eux-mêmes les raisons valables pour lesquelles le Québec doit rester à l'intérieur du Canada. Et s'il pouvait poser la question, je suis sûr qu'il obtiendrait justement la réponse que le Québec va rester à l'intérieur du Canada.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté bien attentivement les propos de mon distingué collègue de Saint-Léonard, dans l'est de Montréal, et cela m'émerveille toujours quand je l'entends dire qu'il a bâti ce beau grand pays et qu'il en est presque lui-même le père ou l'auteur.

On a dit plus tôt aujourd'hui que cela ne donnait pas grand-chose aux Québécois ici aujourd'hui de revendiquer ce que la motion propose. L'archarnement partisan de nos amis d'en face a tôt fait de nous faire admettre qu'il n'y avait rien à faire, que leur idée était fixée d'avance et qu'on avait beau parlementer ici, cela ne donnerait rien.

Donc tant qu'à perdre mon temps, je vais tâcher de répondre aux balivernes qu'a soulevées le député de Saint-Léonard. Je vais lui faire un bref rappel historique quand même. Le député d'Edmonton-Sud-Ouest pourrait peut-être écouter également, cela ne lui ferait pas de tort à lui non plus, parce qu'il n'a pas l'air de bien connaître son histoire du Canada.

Pendant que deux millions de Québécois, à la fin du siècle dernier, étaient obligés de s'expatrier, de partir et d'aller travailler dans les manufactures de coton de la Nouvelle-Angleterre parce que la famine les chassait littéralement, à la même époque, le gouvernement canadien faisait venir des pays de l'Est européen des colonisateurs pour l'Ouest canadien. Il leur donnait un territoire, des bêtes de somme, des chevaux, des poules, le droit de couper le bois pour se bâtir une maison, leur donnait beaucoup de facilités qui étaient payées par 50 p. 100 de la population du Canada à ce moment-là, donc la moitié par le Québec. C'est cela le fédéralisme rentable. Il a été rentable pendant un bon bout de temps, mais il l'avait été encore plus que cela en 1840 avec l'Acte d'Union, alors que le Québec était majoritaire dans cette fameuse union.

(1550)

Nos ancêtres, pas tellement instruits à l'époque, qui avaient, moins de 100 ans avant, mangé une bonne claque, une bonne mornifle de la part de l'envahisseur qui était venu le dépouiller de tous ses biens, avaient développé la philosophie du bas de laine. Ils économisaient, ils ne s'endettaient pas. Les villages n'étaient pas endettés. Le Québec n'était pas endetté alors que l'Ontario, qui était en pleine ébullition à ce moment-là et qui s'endettait pour jeter les bases des infrastructures de ses villages à l'époque, était étouffé par les dettes. On a fait un beau melting-pot de tout cela. On a confondu les deux dettes ensemble et on a fait payer plus de la moitié de la dette de l'Ontario, qui profitait exclusivement à l'Ontario, par la population du Québec. Encore une autre preuve d'un fédéralisme rentable, à leur manière.

Je dirais au député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine que la Gaspésie, dont je suis aussi originaire, s'est vidée à peu près à ce moment-là. Il doit comme moi avoir un ancêtre ou plusieurs peut-être qui ont été obligés de s'expatrier aux États-Unis parce qu'ils n'ont pas trouver leur compte dans ce fameux beau grand pays. Aussi, de me faire dire par des gars qui sont ici depuis à peu près 20 ans qu'ils ont collaboré à la fondation de ce pays, je veux bien leur reconnaître des qualités, des apports, oui, mais il y en a qui ont beaucoup plus ramassé le beurre à la poignée que ce qu'ont pu faire nos ancêtres il y a 250 et 300 ans passés.


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Donc, on a des droits dans ce pays et je réclame qu'on les respecte, tout simplement.

Il s'en est passé des choses ici. Je viens de me faire dire par un député réformiste que, finalement, il découvre, après 18 mois, qu'on se ressemble, lui et moi. Franchement, c'est quasiment une insulte, je ne le prends pas. Un réformiste, c'est pour la peine de mort, la pendaison le plus vite possible avec la corde la plus courte. C'est cela la philosophie des réformistes: que ça ne branle pas au bout de la corde trop longtemps. Remplir nos prisons d'à peu près n'importe qui qui aurait osé lever le nez sur à peu près n'importe qui aussi. C'est ça la politique de droite des réformistes.

J'ai même entendu un réformiste dire ici: «Moi, mes enfants ne sont pas instruits, je leur interdis de se faire instruire. C'est ma croyance et je la respecte.» Si le Canada a besoin d'un ambassadeur demain matin, monsieur se sentirait frustré que l'on ne prenne pas son fils qu'il n'avait pas voulu faire instruire. C'est la philosophie réformiste. Cela a l'air de marcher dans ce coin-là parce qu'ils sont plusieurs ici. J'ai entendu cela ici.

Donc, tout cela pour vous dire qu'au Québec, on réclame aujourd'hui du gouvernement fédéral, pour les Amérindiens du secteur de la baie James, une certaine somme. C'est le temps de péter de la broue, comme ils ont toujours fait. Quand il s'agissait d'accorder 279 millions pour faire une commission scolaire à une ethnie particulière dans l'Ouest canadien pour montrer la grandeur du Canada et le multiculturalisme, ils n'ont pas lésiné sur les moyens. Ils l'ont fait. Ils l'ont déboursé et quand on voyait cela, à Toronto, la même ethnie disait: Si vous l'avez donné à Vancouver, donnez-le donc chez nous aussi. Et on le faisait à cette époque-là à coups de 250 ou 300 millions. Les Québécois ne se sont pas plaints dans ce temps-là. Au contraire, ils étaient 74 sur 75 dans cette «gang», pour acheter la paix, je pense bien, mais ils votaient pour cela.

De fil en aiguille, on s'est retrouvé avec 550 milliards de dette. Je me demande si le Canada ne fera pas comme la compagnie Dow Corning, les implants mammaires, s'ils ne se mettront pas sous la protection de la Loi sur la faillite sous peu. On réclame des services qu'on a offerts aux personnes dont ils ont la charge, les Amérindiens, en vertu des compétences législatives canadiennes. On leur a donné un service d'éducation qu'on donne aux petits Québécois qui étaient dans l'entourage aussi. Un bon service, je présume.

(1555)

Et puis, quand vient le temps de payer la note, ils se conduisent comme de véritables pique-assiette et ils se sauvent de la facture. C'est un peu comme le gars qui va manger à l'hôtel et qui fait semblant d'aller aux toilettes sur la fin du repas et qui prend la porte du dehors et se sauve. C'est ce qu'ils font, là. Cela ressemble à cela.

Pourquoi ne pas faire face à une situation qui est là, qui mérite d'être entendue et pas parce qu'elle vient nécessairement du Québec, mais parce que c'est la justice qui l'exige. Il y a eu une entente. Le ministre des Affaires intergouvernementales veut nous renvoyer, à ce sujet, à des comités et à des études de fonctionnaires, tout ça pour 333 millions de dollars réclamés au total. Pourtant, ça leur a pris 20 minutes pour débloquer 20 millions de dollars pour la fameuse aréna de Winnipeg. Alors là, ça va vite en mautadit, ces affaires-là.

Une voix: Pas pour les Jets, là. L'aréna.

M. Lebel: Pour les Power Jets de Winnipeg.

Une voix: Le jet set.

M. Lebel: Oui. Le power jet set. Alors là, ils ont trouvé ces 20 millions en un tournemain. C'est donc facile de trouver 20 millions de dollars. Quand on leur demande depuis cinq ans, six ans ou sept ans de régler le problème du Québec, les revendications légitimes du Québec, on renvoie toujours à des formules de politesse et à des fonctionnaires interposés. Finalement, même un jésuite-et pourtant les jésuites sont réputés tout savoir-s'y perdrait dans ce dédale et ces méandres de négociations et d'incompréhension.

J'écoutais le député de Saint-Léonard nous faire l'éloge de ce grand pays, où les libertés des citoyens, les droits civils sont reconnus et sont à toute épreuve. Je lui rappellerais simplement la Loi sur les mesures de guerre en 1970; le rapatriement de la Constitution en 1982; l'espionnage des partis politiques, qu'on pensait pourtant arrêté en 1970 et on vient de découvrir que ça existe encore vis-à-vis les gens du Parti réformiste et probablement vis-à-vis nous autres aussi.

C'est cela, les libertés du député de Saint-Léonard. On a aussi parlé de transparence. Pour celle-là, j'ai failli en avaler ma gomme. La transparence! Comme si l'affaire Pearson était transparente! Il y avait un nommé Nixon, ce n'est pourtant pas nous qui l'avions choisi, qui avait fait une étude là-dessus, dans le fameux épisode Pearson. Il avait conclu qu'il s'agissait de quelque chose de nauséabond, qui sentait mauvais. Il avait recommandé au premier ministre qu'on fasse une enquête là-dessus, qu'on tâche de fouiller.

Je me souviens que le ministre des Transports assis en cette enceinte, à la réponse d'une de mes interventions, disait: «Voyons donc! Passons à autre chose. C'est sûr qu'on sait qu'il y a des gens qui ont tenté de profiter.» Il ne pouvait pas le nier, le rapport Nixon le disait, mais il disait: «Passons à autre chose, faisons vite. Réglons cette affaire-là. Quand cela nous aura coûté 25 millions de dollars, ce sera le maximum.»

On voit à quelle hauteur est rendue la pile de factures dans ce dossier. On parle de tout près de 450 millions de dollars de réclamations de toutes sortes pour bris de contrat et, attention, il va en venir d'autres. Pourtant, on leur réclamait, on leur demandait de faire enquête, d'y voir. Mais non, c'était urgent de passer vite et de régler cela, peu importe le coût. Quelle transparence! Des cas de transparence comme celui-là, ça pleut! Notre ministre du Patrimoine n'était pas tout à fait assez transparent, parce qu'on l'a vu en train de manger dans une salle à côté d'où se déroulait probablement le sort de l'industrie cinématographique canadienne.

Il avait manqué de transparence cette fois-là encore. Une autre belle preuve de transparence. C'est la première fois que le CRTC se fait réviser par une décision du Cabinet et cela impli-


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que, comme par un drôle d'hasard-qui je sais fait bien les choses, généralement-la famille proche du premier ministre, qui en est la principale bénéficiaire. Tout cela dans le grand pays que nous dépeignait le député de Saint-Léonard et des beaux principes que sous-tend le fédéralisme. Ce sont ses mots, ça, les principes.

(1600)

Je pourrais peut-être en parler des principes que sous-tend le fédéralisme. Il n'y a rien à se péter les bretelles là-dessus et pour écrire à sa grand-mère non plus. Les beaux principes!

Je me souviens avoir lu, il n'y pas tellement longtemps, que lorsqu'on s'est joint à ce pays en 1867, on était à peu près 50 p. 100 de francophones dans les quatre provinces de l'époque versus 50 p. 100 d'anglophones. On a payé 300 000 livres anglaises à l'époque pour acheter les Territoires du Nord-Ouest, la terre de Rupert, ce qui est aujourd'hui le Manitoba, la Saskatchewan, l'Alberta jusqu'aux Rocheuses. On a acheté cela de la Compagnie de la baie d'Hudson: 300 000 livres sterling de l'époque. Ne me demandez pas ce que cela ferait aujourd'hui, probablement autant que la dette nationale actuellement.

Mais cela, il y a 50 p. 100 des Québécois qui l'ont payé et qui l'ont donné en cadeau à ceux qui ont développé l'Ouest canadien. Et ils viennent nous dire aujourd'hui qu'on est des «chiâleux», qu'on braille et qu'on demande toutes sortes d'affaires auxquelles on n'a pas droit. C'est encore nous qui leur avons payé l'Ouest canadien, n'en déplaise au député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.

S'il veut faire des cadeaux, qu'il les fasse à même son pécule, mais pas avec celui des autres.

Il disait: «On donnerait tout ce qu'on possède pour venir vivre dans ce beau pays.» Pourtant, le ministre de l'Immigration a imposé une taxe de 900 $ à ceux qui revendiquent le statut d'immigrant. Et cela a créé un tollé. Ils ne veulent même pas donner ce montant pour venir ici. Ils trouvent que cela commence à coûter cher. On dit bien des choses dans des discours qui n'ont pas une portée véritable sur la réalité. Il finissait presque en nous disant qu'on était donc chanceux d'être membres du G-7. Pour nous autres, c'est aussi pire que d'être dans les Jets de Winnipeg, être membre du G-7.

Ross Perot disait, aux États-Unis, qu'on était des quêteux montés à cheval, qu'on n'avait pas d'affaires du tout au G-7, compte tenu de notre structure, de notre richesse, de notre activité économique, on ne devait pas être là du tout, sauf que les Américains avaient besoin d'un «voteur» pour les appuyer, pour appuyer leurs proprositions. C'est ainsi qu'ils ont mis de la pression pour nous embarquer dans cette «game». Mais on fait partie du G-7. Quand on se compare avec les données du G-7, on arrive toujours dans le 7 nous autres, on est vraiment le septième. Ross Perot disait que c'était une charité qu'ils nous avaient faite.

Il y en a qui n'ont pas assez de jugement pour réaliser que c'était vrai, en effet, que c'était une charité et ils prennent cela comme un honneur. Il disait, enfin, comme si c'était lui qui l'avait fait, que le Canada, c'est beau. J'ose encore croire que c'est le Créateur qui a fait le Canada et non le Parti libéral du Canada.

Je pourrais dire qu'il y a beaucoup plus de choses qui ne sont pas belles faites par les libéraux qu'il y en a de belles qui ont été faites par eux. Qu'ils n'essaient pas d'usurper au Créateur les belles réalisations qu'il a pu faire.

Tout cela pour dire que les revendications du Québec sont justifiées et qu'il se doit de les poursuivre. Et oui, nous autres ici, on va toujours insister là-dessus pour que soit rendu à César ce qui lui appartient. L'argent qui vient de la perception des impôts de tous les Canadiens et des Québécois aussi se retrouve dans les coffres du gouvernement fédéral. C'est rendu qu'il y a 37c. sur chaque dollar de perçu qui vont au paiement de la dette.

Une voix: Les intérêts.

M. Lebel: Les intérêts de la dette seulement, je m'explique. Donc, ce n'est pas beaucoup qui revient sous toutes ses formes. Mais ce n'est pas grave, quand il n'y en a pas assez à retourner, on en emprunte. Cela marche encore. Mais, l'année suivante, il y en a plus qui va sur le paiement des intérêts de la dette par exemple. Et on se promène partout dans le monde, surtout dans l'autobus du G-7 et on dit: «Ça marche bien, ce Canada-là, et puis c'est beau.»

(1605)

Si ça marche si bien, pourquoi ne pas respecter ses populations. Les autochtones, dans le cas de l'éducation dans le secteur de la baie James, ont reçu une éducation ni meilleure ni pire que les petits Québécois vivant dans le même secteur. Les professeurs ont dispensé aux deux groupes, souvent ensemble, dans la même classe, le même enseignement.

Pourquoi le fédéral dirait-il aujourd'hui n'être pas certain qu'on leur ait enseigné exactement ce qu'il aurait voulu qu'ils apprennent? Pourquoi le fédéral dirait-il qu'il ne s'est pas prononcé sur la qualité de l'enseignement, sur l'état des locaux, sur l'état du transport scolaire et qu'il aurait dû voir tout cela avant de payer?

À la vitesse du gouvernement fédéral, les petits Amérindiens seraient d'âge postuniversitaire et ils n'auraient pas encore commencé leurs études. Le gouvernement pour étudier est capable d'étudier longtemps et plus cela coûte cher, plus il étudie. Quelle serait notre dette si le gouvernement du Québec n'avait pas décidé d'agir et arrêté d'attendre aussi longtemps après le gouvernement fédéral?

Il y avait aussi la crise amérindienne d'Oka en 1990. À ce moment, il n'y avait rien de trop beau. Le Québec envoyait ses policiers provinciaux, ils faisaient des heures supplémentaires, travaillaient sept jour sur sept. Il fallait tout mettre en oeuvre pour éteindre les feux. Là ça pressait, surtout que le gouvernement fédéral qui était pas mal mêlé là-dedans parce c'est à cause de lui que les Amérindiens se révoltaient concernant une question territoriale.

Depuis presque 130 ans, il n'avait rien fait pour les comprendre et les satisfaire. Encore une fois, quand le temps est venu de payer la note, il a dit qu'on aurait dû lui montrer le menu qu'on


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donnait aux policiers quand ils faisaient des heures supplémentaires, qu'il aurait peut-être changé la pomme pour une orange ou pour un bout de carotte. Ce sont des faux-fuyants, des moyens dilatoires, comme disait si bien le député de Saint-Léonard, pour se sauver par la porte d'en arrière.

Je termine en disant qu'on n'a pas de grandes leçons à recevoir de ces gens. Ils se sont plutôt fait un honneur de ne pas honorer leurs obligations. Les quelques fois où ils les ont honorées c'est quand leurs candidats ont été défaits et que la fois suivante ils leur ont donné un comté sûr. C'est à peu près les seules fois où le Parti libéral a vraiment honoré ses obligations.

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été vraiment estomaqué d'entendre le député de Chambly se référer au député de Saint-Léonard comme quelqu'un qui était arrivé au pays il y a une vingtaine d'années, comme si je n'avais pas le droit de parler ou de défendre les valeurs canadiennes.

Je connais le député et je suis surpris non seulement qu'il emploie ces mots, mais qu'il puisse même les penser. Malgré le fait que je ne sois pas né au Québec, je croyais être quand même un Québécois à part entière, un Canadien à part entière. J'espère qu'il prendra le temps de réfléchir et qu'il retirera ses mots et sa pensée. J'espère qu'il s'est emporté dans son art oratoire parce que ce qu'il vient de dire est grave, c'est-à-dire qu'au Québec il y a deux classes de citoyens: ceux qui sont nés au Québec et ceux qui ne sont pas nés au Québec.

Si c'est comme ça, j'espère que le député aura le courage de le dire et si ce n'est pas cela qu'il clarifie ses paroles et qu'il retire ce qu'il a dit. C'est grave et ce n'est pas la première fois que cela arrive du côté de ce parti. J'espère, une fois pour toutes, qu'au nom de tous les Québécois, je suis sûr, que les Québécois ont toujours été généreux, ils ont toujours reçu les gens venant des autres pays et ils les ont traités comme des égaux.

Comme je l'ai dit au début, je connais très bien le député et j'espère qu'il s'est seulement emporté dans son discours et que ce n'est pas ce qu'il pensait.

(1610)

M. Lebel: Monsieur le Président, je connais aussi le député de Saint-Léonard.

Je me souviens, il n'y a pas tellement longtemps, ici, lors d'une journée de l'opposition comme celle-là, lorsqu'on a débattu de la question référendaire, du projet référendaire au Québec, je me souviens que la députée de Madawaska-Victoria était là, et m'avait dit: «Comme ça, moi qui suis francophone, mais qui n'habite pas le Québec, j'ai pas le droit de participer à ce débat.» Je lui avais répondu non. J'avais dit: Le député de Saint-Léonard a le droit parce que lui, c'est un Québécois.

S'il est l'homme honnête qu'il prétend, il va admettre que j'ai dit cela ici même dans cette Chambre, et on pourra se référer au hansard. Non, ce n'est pas ce que je vise. Ce que je veux dire, c'est que des gens aujourd'hui se permettent de venir nous faire la morale ici et nous dire qu'ils ont fait ce pays-là, eux-c'est de cette manière que je l'ai pris-, puis que nous autres, les Québécois, on est une gang de «bums». C'est ce que le député du Parti réformiste nous a dit en termes à peine voilés, qu'on voulait de l'argent, qu'on voulait des choses, qu'on s'incrustait ici pour avoir des fonds. C'est cela que j'ai voulu dire. J'ai voulu dire qu'on était ici, les francophones, au Québec, depuis 450 ans maintenant, et qu'on avait aussi contribué à ce pays-là, et que notre contribution n'avait rien à envier à la contribution des gens qui sont venus ici, au Canada, dans des temps plus modernes, et qu'ils avaient pu apporter eux-mêmes. C'est dans cet esprit que je l'ai dit, et le député de Saint-Léonard le sait très bien.

J'admets qu'il n'y a pas plus sourd que quelqu'un qui ne veut pas entendre. Surtout dans ces débats-là, il arrive souvent que les gens détournent les intentions des autres. Je dis que les Québécois qui sont ici, en Amérique du Nord, depuis au-delà de 400 à 450 ans, ont aussi le droit de dire leur mot, ont aussi le droit de décider s'ils ont été floués dans le passé ou pas, s'ils ont payé plus que leur quote-part ou pas, et ils ont aussi le droit d'exiger que cela ne se reproduise plus. C'est ce que le député de Saint-Léonard aurait dû comprendre, et je sais que malgré son accent méditerranéen, il comprend très bien le français qui se parle ici. C'est tout en son honneur et je le féclite.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais où commencer suite aux propos tenus par le député de l'opposition.

Je trouve ça tout à fait regrettable qu'on ose, encore une fois, qualifier qui est Canadien et qui ne l'est pas, qui peut faire partie du Québec et qui ne peut pas en faire partie.

On ose dire que l'on ne fait allusion qu'aux premiers arrivants, ceux qui sont arrivés il y a tout près de 350, 400 ans passés. Je trouve cela odieux que le député de l'opposition ose dire que les nouveaux arrivants au Canada, surtout au Québec, n'ont pas réussi ou n'ont pas contribué à l'essor économique de ma province.

Je crois, monsieur le Président, que l'on doit reconnaître une chose. Nous sommes un pays formé d'immigrants. Les premiers arrivants, justement, si on se réfère à la motion, sont les autochtones. Eux sont les vrais, les premiers arrivants. Après on y retrouve, bien entendu, les Canadiens français, les gens d'origine française, les Bretons, les Écossais, les Irlandais, les Anglais, les Loyalistes. Par la suite, il y a eu d'autres nationalités qui sont venues au Canada et au Québec, en apportant leur contribution.

D'ailleurs, j'inviterais le député de l'opposition à regarder qui siège du côté de son parti, et il verrait qu'il y a des gens d'origine non québécoise qui font partie de sa formation, qu'il y a des gens qui sont des nouveaux arrivants, des Néo-Québécois qui font partie, non seulement du Bloc québécois mais également du gouvernement au pouvoir à Québec. Ne sont-ils pas des vrais Québécois? Je lui pose la question.


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Je crois que tout ce qu'on demande du député de l'opposition, c'est de s'excuser formellement ici, devant cette Chambre, et de retirer ses paroles. Je crois que c'est un homme honorable et je crois qu'il doit quand même reconnaître que le député de Saint-Léonard, que les autres députés d'origine néo-canadienne, si l'on veut, les gens qui ont quitté des pays pour venir au Canada ont fait une contribution remarquable à notre pays.

(1615)

Moi, j'ai beaucoup de respect pour tout nouvel arrivant qui s'est fait accueillir au Canada, mais qui a décidé que le Canada est sa patrie, son chez-lui. Il veut y contribuer. Il a eu la qualité, le courage même de se présenter devant ses pairs. Il est devenu député à part entière de cette Chambre des communes. Ce monsieur est même devenu ministre. C'est pour cela que je suis fier d'être Canadien, c'est que je vois et je le constate, nous retrouvons des gens de toutes origines qui font la grandeur et l'honneur de ce pays.

Alors, je ne demande pas moins que le député d'en face retire ses paroles vis-à-vis des nouveaux arrivants canadiens.

M. Lebel: Monsieur le Président, j'ai l'impression que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine danse le cha-cha-cha dans des portes battantes. Premièrement, je n'ai jamais dit cela. Je ne me suis jamais permis-et je ne le ferai jamais d'ailleurs-de déterminer qui est Canadien et qui ne l'est pas. Je peux dire que moi je ne le suis pas, par exemple.

Je n'ai jamais décidé qui était Québécois et qui ne l'était pas. Je veux juste reprendre le fait que René Lévesque-qui est un homme que j'ai bien apprécié, qui était Gaspésien d'ailleurs qui venait de tout près de chez monsieur le député qui vient de parler-avait dit, et j'ai toujours fait mien ce dicton, que les Québécois étaient ceux qui vivaient en sol québécois, peu importe leur origine, le lieu où ils sont nés. Ce sont ceux qui veulent vivre au Québec, c'est cela les Québécois et moi, pour ma part, je n'ai jamais, ni de près ni de loin, voulu insinuer quoi que ce soit qui serait au sens contraire.

Alors, que le député veuille sauter là-dessus pour essayer de faire 10 ou 15 minutes de politique, libre à lui. Je n'ai d'excuses à faire à personne, parce que je n'ai insulté personne. Par souci de rectitude, j'ai quand même voulu préciser au député de Saint-Léonard qu'il avait toute mon admiration et mon estime et qu'il savait très bien que ce n'était pas lui que je visais. Je pense qu'il a très bien compris. Je lui réitère cette admiration que j'ai pour lui et pour sa famille. Là-dessus, je ne m'excuse pas davantage. Le député de Saint-Léonard a toute ma considération.

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, vous comprendrez qu'avant de m'attaquer au vif du sujet, j'aimerais joindre mes efforts à ceux de mon collègue de Saint-Léonard et également à ceux de mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine pour décrier et pour expliquer également ma consternation-et je dois dire que le mot est faible-face aux propos qui ont été tenus par le député de l'opposition officielle. Ce sont des propos qui ne reflètent pas du tout les valeurs que nous avons développées dans ce pays, les valeurs que nous partageons et les valeurs que nous avons au Québec. La transcription sera là pour en faire foi.

Je dois dire qu'en plus d'avoir attaqué personnellement mon collègue, le député de l'opposition s'en est même pris aux autochtones en disant que s'ils étudiaient, c'est parce que l'éducation était gratuite. Il y a là quelque chose de fondamentalement méprisant et il y a là quelque chose qui témoigne d'une vérité profonde, une vérité qui reflète grandement l'état d'âme de ces gens de l'autre côté de la Chambre, un état de mépris, un état qui vise à ne pas respecter la population et encore moins les valeurs que cette population partage.

En ce sens, vous comprendrez que je joins mes efforts à ceux de mes deux collègues et je demande également, en tant que Québécois, au député de l'opposition officielle de bien vouloir retirer ses paroles que je vais qualifier de pour le moins malheureuses. Cela étant dit, je vais maintenant m'attaquer à la question de la motion présentée par l'opposition officielle.

(1620)

Les gens qui prennent la peine de regarder cette motion, et même pas le fond de la motion, la forme de la motion seulement, voient une fois de plus que ce qu'on essaie de faire de l'autre côté de la Chambre, essentiellement, c'est de leurrer. Mais ce n'est pas peu dire, c'est de leurrer la population québécoise. Et vous retrouvez cette attitude partout dans leur politique. Vous la retrouvez du côté du Bloc québécois, mais évidemment, vous la retrouvez d'une façon on ne peut plus éloquente du côté de la maison mère.

Quand on parle de ne pas être capable de s'élever au-delà de la saine partisanerie politique, vous avez des exemples qui sont, en d'autres termes, des bijoux qui nous proviennent, non pas de l'autre côté de la Chambre, mais du gouvernement québécois, un gouvernement qui, pourtant, devrait être là pour servir d'abord et avant tout l'intérêt de la population. C'est sérieux, ce dont on parle. L'intérêt de la population, l'intérêt des gens qui leur ont fait confiance en pensant qu'ils élisaient un gouvernement qui travaillerait pour bâtir et construire une société meilleure.

Quand je dis qu'il y a des exemples éloquents de cette partisanerie dont ils ne peuvent se détacher, regardons le Budget du ministre des Finances. C'est une perle. Quand on en est rendu à utiliser un élément aussi important, aussi fondamental pour une société que le Budget du ministre des Finances pour faire de la propagande purement et bassement politique, je dois dire que quelque chose ne tourne pas rond.

Quand M. Campeau laisse tomber, comme cela, à la légère, devant les journalistes: «Si vous votez de notre côté au référendum, peut-être que, après coup, ce sera le nirvana et que, subitement, il n'y aura plus de hausse d'impôts. En fait, ce sera une forme de paradis terrestre.» Ces allégations sont quand même sérieuses, et elles proviennent du ministre des Finances du Québec, celui qui est le grand argentier, celui qui, au lieu de s'occuper de partisanerie politique, au lieu de discuter référendum, au lieu de vouloir séparer le Québec, devrait travailler main dans la main avec le ministre des Finances fédéral d'une façon responsable pour bâtir une société meilleure, bâtir la société de demain, une société dont nos enfants seront fiers, si on réussit à s'attaquer aux vrais problèmes, les problèmes pour lesquels les gens nous ont élus.

Prenons les dossiers qui sont concernés dans la motion. Ces dossiers sont sérieux. Et quand je dis que ces dossiers sont sérieux, j'entends des commentaires qui me viennent des députés de l'opposition officielle qui ont un grand sourire parce que,


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dans le fond, ils s'en contrefoutent de ce litige pourtant fondamental. C'est important quand on parle de la réclamation d'une province. C'est important pour nous, le gouvernement fédéral, également de bien traiter cette réclamation, de la traiter comme il se doit sur une base équitable et de la traiter, comme le disait le ministre des Affaires intergouvernementales, d'une façon responsable.

Je dois dire que j'ai énormément de difficulté à comprendre l'animosité ou l'acharnement de l'opposition officielle dans ces trois dossiers, qui sont des dossiers sérieux, puisque nous, de notre côté-et je me joins aux propos du ministre des Affaires intergouvernementales-on met tous les efforts pour que, justement, des décisions soient prises dans un avenir le plus rapproché possible et en toute équité pour le Québec et pour l'ensemble du Canada.

Quand je dis que je ne comprends pas, est-ce que l'opposition officielle voudrait qu'on paie sans regarder les factures, qu'on paie sans regarder s'il est de notre devoir comme gouvernement fédéral de payer? Je pense sincèrement, monsieur le Président et collègues de la Chambre, que ce n'est pas ce que les populations de chacune des provinces veulent qu'un gouvernement fédéral fasse. Ce qu'on veut voir d'un gouvernement fédéral, c'est un gouvernement responsable qui ne dilapide pas les fonds publics et qui gère minutieusement les cordons de la bourse, et c'est ce que nous faisons.

(1625)

En fait, derrière la motion se cache encore l'idée à peine voilée d'une stratégie politique préréférendaire. On espère faire un écran de fumée. On espère que la population du Québec va mordre à l'hameçon. Je pense que ces gens-et je pèse mes mots-sont foncièrement méprisants.

Quand on dit que ce sont trois dossiers, trois motions qui concernent des problèmes sérieux et qu'on les utilise à des fins partisanes, à des fins référendaires, je dois vous dire que je ne marche plus, je dois vous dire que je ne comprends plus rien. On essaie de soulever un écran de fumée, tout cela, évidemment, de façon prématurée. Prématurée, parce que, comme nous le savons tous et toutes, il n'y a pas de décision qui a encore été rendue par le présent gouvernement. Bien au contraire, le présent gouvernement est en train de mettre en application une procédure qui verra à juger à son mérite chacune des réclamations. Bien au contraire, plutôt que d'attendre que le processus soit terminé, on essaie de tourner ce dossier pourtant fondamental pour la population du Québec en dossier purement politique.

Cela prouve que ces gens n'ont pas à coeur l'intérêt des Québécois et des Québécoises mais qu'ils ont à coeur uniquement leurs fins politiques, qui, au risque de me répéter, visent essentiellement la question de la séparation.

Je crois que ces gens devraient sincèrement écouter la population. Je le dis souvent devant cette Chambre, nous avons été élus de façon démocratique. Nous avons été élus en faisant des promesses à la population canadienne. Il va sans dire que ces gens de l'autre côté ne respectent pas leurs engagements. Le gouvernement du Québec présentement n'écoute pas la population. Les gens nous ont élus pour leur redonner confiance en l'appareil gouvernemental, leur redonner un gouvernement intègre. Les gens nous ont élus pour qu'on fasse nos devoirs, pour qu'on s'attaque aux vrais problèmes. Les gens nous ont élus pour qu'on soit foncièrement un gouvernement responsable. Les gens nous ont élus pour qu'on ne jette pas nos dollars par les fenêtres. Et je dois dire que la population du Québec souhaite exactement la même chose.

Je dois dire également que ce n'est pas parce qu'aujourd'hui l'opposition officielle essaie de soulever un écran de fumée que nous allons réagir de façon intempestive ou précipitée. Bien au contraire! Au nom de l'intérêt supérieur de la population, au nom de l'intérêt supérieur des Québécois et des Québécoises, nous allons suivre un processus intègre pour faire en sorte que l'argent des contribuables du Québec et de partout au Canada, des contribuables qui gagnent durement leurs dollars, que cet argent soit bien administré, bien géré. En fait, nous ne tomberons certainement pas dans le piège que nous tend présentement l'opposition officielle.

Parlant de bon gouvernement, parlant de ce qu'attend la population des gouvernements provinciaux et du fédéral, évidemment, je m'en voudrais de ne pas mentionner la question de la coopération intergouvernementale. Les gens nous ont élus pour nous attaquer à la dette et au déficit, pour créer des emplois, pour relever l'économie, pour faire en sorte que le Canada puisse s'insérer dans le nouveau marché international, la globalisation des marchés, pour faire en sorte qu'on puisse travailler à développer une main-d'oeuvre qui fera la fierté de notre pays, une main-d'oeuvre qui attirera des entreprises, une main-d'oeuvre qui fera que nous serons compétitifs non seulement au niveau national, mais au niveau international, donc une coopération qui est pourtant fondamentale.

(1630)

Comment voulez-vous réussir cette coopération, quand vous avez devant vous, de l'autre côté de la Chambre, et au Québec-et je le dis, c'est bien malheureux-un gouvernement qui essentiellement ne veut pas que le système fonctionne? Il n'est pas nécessaire d'aller très loin pour avoir des exemples on ne peut plus éloquents.

Regardez, par exemple, le dernier voyage de la ministre du Québec qui est venue à Ottawa pour rencontre le ministre des Affaires intergouvernementales. Il y a lieu de se demander, en tant que Québécois et Québécoises, si la ministre est venue à Ottawa pour régler, solutionner des problèmes ou si elle y est venue pour créer des problèmes?

Quand on regarde l'attitude des gens de l'autre côté et l'attitude du gouvernement du Québec et de la ministre qui vient de rencontrer notre ami, le ministre des Affaires intergouvernementales, je pense que la réponse est très évidente. Mais la réponse est également malheureuse parce que les faits et gestes du gouvernement du Québec sont loin d'être constructifs. Il est évident également que ces faits et gestes sont hautement dommageables non seulement pour le Québec et le Canada actuel, mais également pour les générations à venir.

J'ai beaucoup visité le Québec ces derniers mois, j'ai rencontré les gens du Québec et je peux vous dire qu'ils sont profondément tannés des débats stériles. Ils sont profondément tannés de voir un gouvernement, au Québec, qui met l'épaule à la roue mais dans la mauvaise direction. Les gens veulent une plus grande coopération, ils veulent un partenariat constructif, ils veulent qu'on assainisse nos finances publiques. Voilà autant de raisons pour s'asseoir tous et toutes ensemble et faire en sorte de pouvoir


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solutionner ces problèmes d'une façon hâtive et de s'attaquer à bâtir l'économie et à créer des emplois.

Quand je parle de leurrer la population du Québec, quand je parle de berner les gens, je songe à il y a huit mois. Il y a huit mois, les Québécois et Québécoises ont fait confiance à un gouvernement, à un parti politique à Québec, un parti politique qui parlait, vous vous rappellerez, de l'autre façon de gouverner. Cela me rappelle un autre parti politique qui, au niveau fédéral, parlait du vrai pouvoir. L'autre façon de gouverner, si on en croit les propos des gens que j'ai rencontrés, c'était un gouvernement responsable qu'ils voulaient, un gouvernement qui crée des emplois, un gouvernement qui s'intéresse et qui écoute la population.

Eh bien, regardons l'autre façon de gouverner dont nous avons hérité au Québec. Cette autre façon de gouverner est simple, elles consiste à gouverner les yeux fermés, les oreilles bouchées, comme on dit, avec une seule idée en tête: en venir à ses propres fins. Et cette idée, on le sait tous, c'est d'en venir à la question de la séparation du Québec. Je pense qu'il y a là quelque chose d'incroyable. Il y a là un manque de respect fondamental face à la population. Il y a là également un manque de loyauté, à mon avis, face au mandat qui leur a été confié.

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On essaie de faire croire au Québec qu'il y a des problèmes qui sont énormes dans le système fédéral actuel, qu'il y a des problèmes qui ne peuvent être solutionnés dans le système fédéral actuel. Je tiens à vous dire que c'est bien évident que lorsque vous prêchez ce que ces gens de l'autre côté prêchent, il n'y a jamais rien que l'on puisse réaliser dans le système fédéral actuel. Mais quand, par contre, vous voulez travailler dans le système en toute bonne foi, il y a bien des choses que l'on peut réaliser.

Si, pour deux secondes, les gouvernements s'unissaient, il y a des choses extraordinaires qu'on pourrait faire avec le Canada actuel pour lui permettre d'entrer dans la nouvelle ère de libre-échange, pour lui permettre de continuer à prendre sa place au niveau international. Je reviens sur des exemples éloquents. Quand on parle des vrais problèmes, on entend les gens de l'autre côté de la Chambre crier, parce que cela les fatigue d'entendre la vérité. Cela les fatigue également que l'on puisse dire à la population du Québec que ces gens-là ne servent pas leurs intérêts.

C'est pour cela que vous les entendez crier comme cela régulièrement quand nous, les libéraux du Québec, qui avons été élus également, prenons la parole. Évidemment, ils ne semblent pas nous considérer comme des Québécois, parce qu'on ne pense pas comme eux. Mais on a été élus au Québec et je suis un fier Québécois et je crois que si nous travaillons honnêtement, on pourra développer un Québec et un Canada meilleurs et formidables.

Il y a des exemples éloquents, comme l'accord sur l'immigration, l'accord interprovincial au niveau du commerce ou les accords sur la Francophonie. En conclusion, il y a encore beaucoup de choses que l'on peut réaliser, mais ce n'est certainement pas en s'attardant sur des motions comme celle d'aujourd'hui qu'on va pouvoir réaliser des choses dans l'intérêt des Québécois et Québécoises et dans l'intérêt du Canada.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais bien ramener à l'ordre le député d'Outremont, quand il accusait le député de Chambly de paroles qu'il n'a pas dites. J'aimerais aussi ramener à l'ordre le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine qui a fait les mêmes allusions.

Quand on dit qu'on fait de la politique ou de la politicaillerie, je pense qu'on a un bon exemple de la façon dont eux font de la politicaillerie, en essayant d'accuser nos collègues du Bloc québécois de choses qu'ils n'ont pas dites. Je voulais simplement le dire pour ramener les choses dans l'ordre. Ce qu'ils ont dit à propos de mon collègue de Chambly est absolument faux.

Il a dit aussi que le gouvernement du Québec ne remplissait pas ses obligations. Je pense qu'il fait un peu d'ingérence dans quelque chose qui ne l'intéresse pas du tout. On sait que les députés libéraux du Québec à Ottawa ne sont pas du tout, mais alors là pas du tout intéressés au gouvernement du Québec. Ils sont beaucoup plus intéressés à faire en sorte que le gouvernement d'Ottawa contrôle tout, gère tout, centralise tout. C'est cela, leur point de vue. Alors, ils se fouent carrément de ce qui se passe à Québec à l'heure actuelle. De toute façon, ils n'ont jamais cru aux gouvernements des provinces. Pour eux, le seul gouvernement, la seule puissance au Canada, c'est le gouvernement canadien.

Alors, ils considèrent les provinces comme une espèce de gérant. On l'a vu d'ailleurs, lors de l'accord de Charlottetown, quand ils ont proposé le projet de Charlottetown, ils disaient: «Tous les pouvoirs à Ottawa et la gérance aux provinces.» C'est pour cela qu'on a refusé carrément ce projet. On disait: «On décentralise, on donne aux provinces des occasions de gérer des choses.» Ce n'est pas ce qu'on veut, au Québec. On veut avoir des pouvoirs aussi. On ne veut pas avoir simplement la gérance. Ce n'est pas moi qui le dis, ce ne sont pas les gens du Bloc québécois qui le disent, c'est la Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec, la Commission Bélanger-Campeau.

(1640)

Cette Commission Bélanger-Campeau a fait un exercice, un des meilleurs, le plus grand exercice jamais fait depuis la Confédération. On a déposé 600 mémoires, entendu 205 témoins, et 55 spécialistes ont étudié cela en parallèle. Ils sont arrivés à la conclusion que le Québec, pour s'épanouir, il lui fallait au moins une vingtaine de pouvoirs réels, c'est-à-dire l'éducation, le tourisme, le développement économique, etc.

Et le gouvernement fédéral d'alors, appuyé par les libéraux, en est venu à un projet disant qu'il avait réussi à répondre aux aspirations des Québécois. Quelle hypocrisie!

Dans Charlottetown, on proposait encore plus de pouvoirs à Ottawa et de la gérance au Québec. On considérait le Québec une province comme les autres, sans statut particulier, rien du tout. Et on vient se mêler de dire que le ministre des Finances du Québec, M. Campeau, un éminent personnage du Québec qui a été coprésident de la Commission Bélanger-Campeau, fait mal son travail. Probablement que cela vient d'un de ses électeurs d'Outremont qui a voté contre lui et avec raison.

Alors, quand on dit que le Québec fait de la politique quand il dit qu'il va payer plus d'impôt s'il ne vote pas pour la souveraineté, ils ont absolument raison. Le ministre des Finances fédéral a décidé de retarder le fardeau fiscal au Québec. C'est l'an prochain seulement que le Québec va l'obtenir. Là, c'est dû, là, c'est de l'argent qu'il paie à Ottawa, et le fédéral va envoyer au moins


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un bon milliard de moins qu'il devrait envoyer par rapport aux impôts et aux taxes qu'on a payés à Ottawa. Et c'est bien évident que le gouvernement du Québec va être, encore une fois, un petit peu coincé parce que le fédéral ne prend pas ses responsabilités de répondre, justement, aux sommes qu'on envoie à Ottawa, comme cela, par nos taxes et nos impôts, qu'on nous retourne moins d'argent qu'on leur donne. Et on avait promis de continuer à payer. On avait promis ces engagements-là. On ne les respecte pas, ces engagements.

Alors forcément, le ministre des Finances du Québec sera probablement obligé d'augmenter les taxes parce que le gouvernement fédéral ne prend pas ses responsabilités, purement et simplement.

On parlait d'emplois tantôt. Quand on parle d'emplois, on sait très bien que le problème d'emplois au Québec, c'est le problème du fédéral. Je l'ai mentionné tantôt dans mon exposé, le fédéral parle d'incertitude politique, mais ce n'est pas l'incertitude politique qui nuit aux emplois, c'est l'incertitude économique. Les grands experts américains, les économistes, les gens d'affaires américains le disent, ils se foutent carrément de l'aspect politique quand ils veulent investir au Canada. Ils disent: «Le problème pour lequel on n'investit pas au Canada, c'est à cause de l'instabilité politique.» Et cette instabilité politique dépend du fédéral, tout le monde le sait. Le rapport de la Commission Bélanger-Campeau l'a dit, on l'a approuvé.

Alors, ce beau discours du député d'Outremont me paraît complètement désuet. Il n'a pas compris. Il n'a vraiment pas compris ce qui se passe au Québec. Je ne sais pas d'où il vient, mais, en tout cas, il ne vient pas de la même place que nous, les vrais Québécois.

Non, ce que je veux dire, c'est que les vrais Québécois sont ceux qui comprennent les Québécois et les Québécoises. C'est ce que je voulais dire.

M. Cauchon: Monsieur le Président, il ne faut pas travailler très fort pour réussir à avoir un peu le dessus du pavé avec nos collègues aujourd'hui. On vient de me traiter de faux Québécois. Franchement! Un peu de respect pour ce que nous sommes, pour la société que nous représentons et également pour les valeurs qu'on partage.

On vient de me donner gain de cause sur ce que je disais tout à l'heure, quand je disais qu'ils ne me considèrent pas comme un vrai Québécois parce que je ne pense pas comme eux. On vient de me le dire; c'est aussi simple que cela.

Pour en revenir à ses propos, je vais être gentil en vous disant que des propos qui frôlent la démagogie, comme ceux qu'on vient d'exposer en cette Chambre, ne méritent tout simplement pas une réplique.

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Je veux quand même dire que lorsqu'on parle de commissions, on a parlé de la Commission Bélanger-Campeau, pensons aux commissions régionales du Parti québécois à Québec, c'est un exemple où la démocratie a été tronquée d'une façon incroyable. On lance une commission pour évidemment en venir à obtenir des conclusions qu'eux veulent obtenir, c'est-à-dire qu'il faut la séparation du Québec mais, en bout de ligne, on se rend compte que ce que les gens ont dit, ce n'est pas cela. Les gens leur ont rappelé ce que vraiment ils voulaient que le gouvernement fasse, c'est-à-dire s'attaquer à repenser le rôle du gouvernement, s'attaquer à l'économie, créer des emplois. Mais, nonobstant cette réalité qu'on perçoit partout au Québec et au Canada, il s'avère que les conclusions des commissions nationales du PQ sont arrivées à des recommandations qui n'ont pourtant rien à voir avec la réalité des témoignages qui ont été déposés devant la Commission.

Quand on parle de commissions, je pense que la Commission nationale du Parti québécois est un exemple encore éloquent d'un gouvernement qui ne veut pas écouter la population, d'un gouvernement qui veut gérer, qui veut diriger, qui veut gouverner en fonction d'une seule et unique idée. Et nous connaissons tous et toutes cette doctrine, cette idée.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de répliquer à mon collègue d'Outremont, et je sais que vous ne me permettrez pas d'affirmer que les trois quarts de ce que le député d'Outremont a dit constituent un tissu de mensonge, car je sais que je ne peux pas dire un telle chose, mais je dirai que le quart de ce que le député d'Outremont a dit a un certain lien avec la vérité et la réalité.

Je voudrais répliquer sur un point. Il a pris je ne sais pas combien de temps de son intervention tantôt pour décrier le gouvernement du Parti québécois en disant que c'est parce qu'on a un gouvernement séparatiste à Québec que les dossiers qu'on a devant nous, les dossiers auxquels on se réfère dans la motion, ne trouvent pas de solution. C'est ce que le député d'Outremont nous a dit pendant une bonne partie de son intervention.

Le gouvernement du Parti québécois est au pouvoir depuis six mois maintenant. Les libéraux, à Ottawa, le sont depuis un an et demi. Comment se fait-il qu'ils n'ont pas réglé ces dossiers lorsqu'ils avaient en face d'eux des fédéralistes à genoux, qui étaient prêts à n'importe quelle concession pour en venir à des ententes avec le gouvernement fédéral? Ils avaient un an pour régler les dossiers qui traînent depuis 10 ans. Ils n'ont rien fait. On voit bien que ce que le député d'Outremont essaie de nous faire avaler, c'est une couleuvre. Il prend effectivement les Québécois pour des poissons. Il essaie de nous emplir. Le député d'Outremont n'a plus aucune crédibilité, quant à moi. Il aurait dû plutôt faire face à la réalité et répondre de façon précise à la motion, et exiger de son gouvernement qu'il trouve des solutions à des problèmes qui traînent depuis 10 ans. Je le répète.

M. Cauchon: Monsieur le Président, j'ai expliqué dans le cadre de mon petit laïus tout à l'heure, de long en large, ce que faisait le gouvernement fédéral avec les réclamations. La population comprend très bien que nous agissons en gouvernement responsable. Donc, vous comprendrez que je ne répliquerai pas à des propos qui m'ont l'air de propos d'une personne qui n'était pas dans cette enceinte lorsque j'ai prononcé mon discours.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je me suis toujours demandé ce que pouvait bien avoir l'air Ponce Pilate au prétoire. Je pense qu'on l'a vu cet après-midi. Je n'en dis pas plus.

On a entendu un député qui nous a fait un procès d'intention alors qu'il devrait se lever pour défendre le Québec. Nous som-


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mes des hommes et des femmes politiques dans cette enceinte, et ce que nous faisons est politique. On n'a pas à avoir honte de faire de la politique, nous sommes payés à temps plein pour faire cela. Il se vante d'avoir un gouvernement intègre. On est intègre, non pas uniquement parce qu'on dit qu'on est intègre, mais par ce que l'on fait.

(1650)

Bien sûr que la population a élu des libéraux. Bien souvent, c'est parce qu'elle se trouvait devant un vide politique. Quand la population a eu vraiment le choix, au Québec, ils ont élu des gens du Bloc québécois.

M. Gagnon: Pas partout.

Mme Tremblay: Non, mais quand ils ont eu le choix. Des fois, le choix, ils ne l'avaient pas, alors ils ont élu des libéraux.

Ce qui est important de regarder, c'est que c'est un gouvernement qui est vide, qui n'a rien fait depuis qu'il est pouvoir. C'est pour cela d'ailleurs qu'il est populaire. Quand on ne fait rien, personne ne nous critique.

Ce gouvernement, ce qu'il a fait, c'est ce qu'il a trouvé dans les cartons que les conservateurs avaient laissés. Depuis qu'ils ont déposé en Chambre les lois que les conservateurs avaient dans leurs cartons, eh bien, ils n'ont plus rien.

Une chose devrait être importante pour eux. Ils ont une nouvelle collègue qui arrive du Québec, et comme mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead le rappelait, les fédéralistes avaient une année complète pour régler le problème avec des fédéralistes qui se trouvaient à Québec. Maintenant, la population a été induite en erreur par les propos du député d'Outremont, parce qu'il a à peine mentionner de quoi il était question. Je voudrais informer objectivement la population du dossier que nous avons devant nous.

Tout d'abord la motion. Comment se lit-elle la motion que mon collègue a déposée ce matin. Elle se lit comme suit: «Que la Chambre dénonce le retard du fédéral à répondre aux réclamations du Québec relatives à l'éducation des jeunes autochtones du Nord québécois de 119 millions, à la compensation de 135 millions dans le cadre du programme de stabilisation pour 1991-1992 et à la réclamation de 79 millions en frais encourus lors des événements d'Oka à l'été 1990.»

C'est donc dire que le gouvernement fédéral doit au Québec 333 millions de dollars.

Une voix: Ce n'est pas des «pinottes.»

Mme Tremblay: Et ce que l'on constate, c'est que le gouvernement fédéral actuel, qui prétend bien gérer les fonds publics, est un très mauvais payeur. Il se vante de réduire son déficit, mais il le fait en pelletant ses problèmes dans la cour des provinces.

Nous l'avions déjà constaté lors du dernier Budget fédéral, au moment même où le gouvernement annonçait la réduction des transferts en matière de santé et d'éducation. Maintenant, le gouvernement décide de ne plus payer les 333 millions de dollars qu'il doit au Québec. Pourtant, d'autres provinces ont, à ce jour, vu leur requête accueillie favorablement par le gouvernement, et ils ont même été remboursées pour leur dû. Le Québec, lui, doit encore une fois attendre, et on lui a même laissé entendre qu'il ne devait pas espérer grand-chose.

Quand les Québécois se posent la question: Qui, à Ottawa, défend les intérêts du Québec? Les Québécois et les Québécoises ne peuvent surtout pas répondre le gouvernement de Jean Chrétien.

Puisqu'on ne peut pas compter sur les députés du Québec dans ce gouvernement pour défendre vraiment les intérêts de la population québécoise, je vais exposer simplement les griefs du Québec quant au paiement d'une valeur totale de 333 millions de dollars qui nous est dû et que le fédéral refuse de nous verser.

Comme on l'a déjà mentionné dans le texte même de la motion, il y a trois montants en jeu. Je vais donc expliquer les 79 millions de dollars de frais occasionnés par la crise amérindienne de l'été 1990 qui auraient dû être remboursés au Québec dans le cadre des accords d'aide financière en cas de catastrophe.

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Personne ne pourra nier que l'été 1990 au Québec a été un été catastrophique quand on pense à ce qui s'est passé à Oka, et surtout à Ottawa qui a jugé bon de nous envoyer l'armée, puisqu'il s'agissait d'une situation catastrophique. Alors ces 79 millions ont été depensés par le ministère de la Sécurité publique du Québec et par la Sûreté du Québec afin d'assurer l'ordre public et protéger les populations menacées par ce conflit.

L'origine de ce conflit est tout simplement la revendication d'une population autochtone sur des terres qui avoisinent son territoire. Or, le gouvernement fédéral a la compétence en ce qui concerne les autochtones, et c'est à ce titre que l'armée canadienne est venue intervenir dans la crise d'Oka.

Le ministre de la Défense nationale de l'époque, M. Bill McKnight, indiquait dans une lettre qu'il adressait au ministre Claude Ryan, le 24 janvier 1991, soit six mois après le règlement du conflit, et je cite: «Le gouvernement fédéral a des responsabilités particulières à l'égard des Amérindiens». Dans cette même lettre, il prenait un engagement ferme envers le gouvernement québécois en affirmant, et je cite de nouveau: «En plus des dépenses que nous avons déjà assumées, le gouvernement fédéral assistera financièrement la province, conformément aux lignes directrices gouvernant l'administration des accords d'aide en cas de catastrophes».

Cette lettre du ministre de la Défense au ministre de la Sécurité publique du Québec est on ne peut plus claire. Le gouvernement dit avoir un programme d'aide en cas de catastrophe et qu'il pourra donc assumer et rembourser les dépenses que le Québec a engagées.

En 1992, le gouvernement a voulu se montrer bon joueur, il a admis devoir 84 millions au Québec et qu'il lui en donnerait cinq, ce qui à notre avis constitue un geste par lequel le gouvernement fédéral a bel et bien reconnu sa responsabilité dans ce dossier. Il nous doit toujours 79 millions. Pourquoi le gouvernement fédé-


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ral s'est-il ravisé par la suite et refuse maintenant de reconnaître ses responsabilités?

Le gouvernement a invoqué toutes sortes d'arguments fallacieux pour ne pas payer. Regardons-en trois. Premièrement, il a prétendu faire une distinction entre l'ordre public qui aurait été troublé et le bien-être public qui ne l'aurait pas été. Voilà les nuances qu'est capable de nous faire le gouvernement. Outre le fait que cette distinction n'apparaît nulle part dans les accords d'aide financière en cas de catastrophe, il est bien évident que le bien-être public fut probablement pertubé par cette crise qui a touché tous les Québécois et Québécoises.

Deuxièmement, il y a eu une ingérence politique dans ce dossier. En effet, la décision de ne pas rembourser les dépenses effectuées par la Sûreté du Québec aurait été prise en 1992 par le Conseil du Trésor du Canada malgré un avis des fonctionnaires-experts de ce Conseil et de Vérification Canada qui reconnaissaient l'éligibilité d'au moins une partie des dépenses de la Sûreté du Québec.

Alors comment prétendre, comme le faisait le ministre l'autre jour, qu'on a refusé d'ouvrir les livres? Si au niveau de Vérification Canada on a déjà reconnu qu'au moins une partie de ces dépenses étaient remboursables, c'est bien qu'à un moment donné, quelqu'un a dû voir les livres.

Troisièmement, le fédéral a invoqué l'importance des sommes en jeu comme critère de refus. Le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine utilisait cet argument ce matin même. Pourtant, le programme a pour objectif d'aider les provinces ou territoires à faire face à une catastrophe dont les coûts représenteraient un fardeau excessif pour la province concernée. Accepter les prétentions du fédéral, c'est pervertir non seulement l'esprit du programme d'assistance financière, mais c'est aussi créer un dangereux précédent.

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Si l'on suivait le même raisonnement, le gouvernement fédéral pourrait décider de ne plus payer les pensions de vieillesse ou les prestations d'assurance-chômage aux citoyens du Québec, tout simplement parce que cette année, ça coûterait trop cher. En retour, les citoyens et citoyennes ne paieraient pas leur impôt fédéral, car ils l'estimeraient trop élevé. Vous voyez bien qu'avec de tels arguments fallacieux, cela nous mène directement à la catastrophe.

Soyons raisonnables un instant. Des lois et règlements existent qui prévoient le paiement de certaines sommes au Québec selon des modalités précises. Les citoyens et citoyennes du Québec paient leurs impôts à Ottawa et ils ont le droit d'en récupérer une partie. Le fait que le gouvernement libéral aime ou n'aime pas le gouvernement légitime du Québec, aime ou n'aime pas l'opposition officielle ne devrait pas être des arguments qui jouent dans la balance. Notre réclamation de 79 millions de dollars n'est qu'une question d'équité et de justice.

Je vais passer maintenant à la question des 119 millions de dollars que nous doit le gouvernement fédéral relativement à l'enseignement donné aux autochtones. Cet argent, il nous le doit en vertu de la Convention de la Baie James. Dans ce cas, le gouvernement fédéral semble montrer plus d'ouverture, car il ne nie pas avoir des responsabilités dans ce domaine. Cependant, il refuse de payer, car ces sommes ont été dépensées sans qu'il y ait eu d'accord préalable entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial.

Bien sûr, le gouvernement fédéral ne montre aucun empressement à parvenir à un accord. Il aurait alors eu à payer sa part. Dans ce dossier, le gouvernement québécois a agi de manière tout à fait responsable, en très bon père de famille, comme on dit souvent. Au lieu d'abandonner les autochtones à leur sort, au lieu de les laisser sans ressources, victimes de cette querelle entre niveaux de gouvernement, au lieu de fermer les écoles pendant un an, deux ans, trois ans, c'est-à-dire le temps nécessaire pour que ce gouvernement en vienne à une entente, le gouvernement du Québec a pris ses responsabilités, a maintenu les écoles ouvertes et a maintenu les autochtones dans les écoles, assumant ainsi sa part de responsabilité et celle du gouvernement fédéral.

Le gouvernement du Québec a attendu, et il attend toujours, mais depuis 1986, le gouvernement du Québec attend que le fédéral lui rembourse ce qu'il lui doit pour avoir assumé la part conjointe du fédéral et du Québec. Et si le Québec avait fermé les écoles, vous auriez vu le gouvernement nous amener jusqu'à la Cour suprême et les autochtones monter jusqu'aux Nations Unies pour chialer contre le Québec. Nous avons assumé nos responsabilités et maintenant, nous devons payer la note.

Pourtant, ce qui m'étonne, c'est qu'on a eu des gouvernements successifs, celui de M. Bourassa, celui de M. Johnson, qui étaient pourtant des fédéralistes. C'est quand même étonnant qu'entre fédéralistes, vous n'ayez pas réussi à vous entendre et qu'il faille aujourd'hui que des souverainistes se lèvent en Chambre pour défendre les intérêts du Québec.

Je finirai par la somme considérable de 135 millions de dollars que doit le gouvernement fédéral au Québec dans le cadre du programme de paiements de stabilisation fiscale pour l'année 1991-1992. Cette somme était déjà réclamée par les fédéralistes libéraux provinciaux du Québec lorsqu'ils formaient le gouvernement. La ministre du Travail pourrait très bien informer le premier ministre et le ministre des Affaires intergouvernementales sur ce dossier.

Le ministre des Finances canadien, pour sa part, refuse catégoriquement tout paiement, alors qu'encore une fois, on surprend le gouvernement en flagrant délit de deux poids, deux mesures, puisque des provinces beaucoup mieux nanties que le Québec-et pour ne pas les nommer, l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique-ont déjà obtenu des paiements en vertu du même programme. Dans ce cas comme dans les deux autres, l'évaluation des sommes à payer devait être basée sur des critères objectifs. Pourtant, le ministre des Finances du Canada refuse de régler le litige en arbitrage, sans faire de politique. Le ministre a plutôt suggéré au gouvernement québécois de poursuivre le gouvernement fédéral en Cour fédérale pour éventuellement se retrouver en Cour suprême. Voilà les brillantes idées de ce gouvernement! Vous nous devez l'argent et vous nous dites: Prenez l'argent des contribuables, nous allons faire de même et nous allons continuer à payer des avocats pour défendre une cause


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devant une cour, alors que nous savons très bien qu'en vertu des règlements et accords ces sommes nous sont dues. Est-ce là la vision que le ministre fédéral des Finances a du fédéralisme flexible, des ententes administratives à l'amiable? Il faut en déduire qu'avec des amis comme lui, le Québec n'a plus besoin de se chercher d'ennemis.

(1705)

Je crois que je commence à comprendre ce que veulent dire les membres du gouvernement et les députés fédéralistes par le terme «fédéralisme flexible». C'est la vision d'un Canada où le Québec doit toujours plier l'échine devant Ottawa et le Canada anglais. Nous vous disons tout simplement que le Bloc ne leur fera jamais plier l'échine. Le peuple du Québec est un peuple fier, qui veut choisir lui-même son destin et qui se donnera bientôt un pays lors du prochain référendum avec ou sans les 333 millions.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos tenus par la députée de Rimouski-Témiscouata et je l'ai entendu pourfendre le fédéralisme, le gouvernement canadien. J'aimerais bien l'entendre s'exprimer de la même façon à propos des menaces du gouvernement du Québec et de son ministre de l'Éducation, M. Garon, qui ne veulent que nuire à sa propre université à Rimouski.

Malheureusement, quand on ose dire que nous, les députés libéraux, que moi en tant que député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, député du Québec profond, me faire dire que je ne défends pas les intérêts du Québec et de ma région, je trouve que c'est tout à fait inacceptable.

Dans mon comté, dans la vaste majorité des comtés ruraux du Québec, on se préoccupe d'économie avant tout. On s'occupe d'emplois. On s'occupe de notre avenir mais on sait fort bien que le gouvernement fédéral, que le gouvernement du Canada est un digne partenaire. Je crois que le gouvernement fédéral a démontré ces dernières semaines, ces derniers mois, enfin depuis les 18 mois que nous sommes au pouvoir, que nous avons voulu remettre les Canadiens et les Québécois au travail. On a mis en place un programme d'infrastructures. Justement, l'actuel gouvernement du Québec s'en sert. Ils sont très fiers de voir qu'ils sont capables de remettre des gens au travail dans les petites localités du Québec profond.

Quand on parle, encore une fois, des autochtones, je n'ai pas entendu la députée dire un mot sur les conditions dans lesquelles vivent ces autochtones au Québec et ailleurs au Canada, soit dit en passant. On ne nous a même pas brossé un tableau de la consternation internationale que cet épisode malheureux au Québec a causée pour la réputation du Québec et du Canada. C'est vrai, je n'étais pas au pays à l'époque, j'étais au Japon, et j'ai passé un certain temps en France lors de ces événements. Mais croyez-moi, tous mes amis, tous mes associés, toutes mes connaissances me cassaient les oreilles avec cette histoire des autochtones au Canada. Et, malheureusement, cela me peinait de savoir qu'on n'ait pas su régler cela à l'amiable. Sauf que le gouvernement du Québec a fait appel au gouvernement du Canada. Le Québec a le droit, le premier ministre du Québec a le droit d'exercer une demande, de faire appel à l'armée canadienne dans une situation fort difficile.

C'est cela qui est arrivé. Québec a fait appel à l'armée, ce n'est pas le gouvernement du Canada. Le gouvernement fédéral a déboursé 133 millions de dollars auprès de son armée et la présence de la GRC.

(1710)

Le gouvernement du Canada dépense des millions chaque année pour maintenir la paix ailleurs et pour s'assurer que les autres pays suivront l'exemple du Canada. Je ne veux pas m'éloigner du sujet. À propos des autochtones, c'est le gouvernement fédéral qui s'occupe de créer une économie saine au niveau local pour les Amérindiens. On s'occupe de construire des maisons, des maisonnettes même. On fait tout pour venir en aide aux autochtones.

Tout ce qu'on demande au gouvernement du Québec, c'est de cesser de faire de la politique sur le dos des plus démunis. Tout le monde ici reconnaît que les autochtones ne sont pas les plus choyés au pays. Malgré ce qu'on entend de l'opposition, et même de certains députés de ce Parlement, que les autochtones sont traités d'une certaine façon. Il est faux de prétendre qu'ils sont mieux traités que la majorité des Canadiens. Le taux de suicide, le taux d'alcoolisme, tous les maux qu'on ne peut pas imaginer, on les retrouve dans les communautés autochtones.

J'ai grandi à un kilomètre d'une réserve indienne. Croyez-moi, je l'ai vu de mes propres yeux, la façon dont on traitait ces pauvres autochtones. Il n'a pas toujours été facile de leur donner un emploi, de les accueillir dans nos équipes de hockey, dans nos écoles catholiques et françaises. Malheureusement, je crois qu'il faut faire un examen de conscience.

Aujourd'hui, dans ce débat, on a vu un scénario probable d'une négociation entre un Québec souverain et le Canada. On s'est arrêté sur de petits détails: 333 millions de dollars. On nous doit 79 millions, on nous doit 125 millions, le Québec s'est faire avoir depuis les 125 dernières années. Comment allons-nous négocier? Je demande cela aux téléspectateurs, comment imaginez-vous la façon dont on pourra mener à bien une séparation si, aujourd'hui, tout ce qu'on a entendu était des calomnies, une condamnation du fédéral et ils veulent partager la dette, la monnaie, le passeport? Ils veulent se servir du prestige du Canada.

Il faut inviter l'opposition à refaire ses devoirs. Ce virage qu'on propose aux Québécois est tout à fait inacceptable. Qu'ils posent la question une fois pour toutes: «Voulez-vous demeurer au Canada, oui ou non?»

Mme Tremblay: Monsieur le Président, ce qu'il y a d'étonnant avec ces parlementaires libéraux que nous avons en face de nous, c'est qu'ils essaient de détourner l'attention de la population et de parler de n'importe quoi. J'ai parlé de trois choses précises: les dettes que le gouvernement fédéral avait à l'égard du Québec qui totalisent 333 millions. Ce ne sont pas des «pinottes» 333 millions, c'est beaucoup d'argent pour un peuple qui a besoin de tous ses sous pour se développer et s'apanouir.

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Quand les libéraux nous disent que ces 333 millions, ce sont des «pinottes», c'est parce qu'ils sont habitués à nager dans le fric avec les Bronfman, Power Corporation et qu'il y a des ministres millionnaires, assis au Cabinet, qui mettent leur bateau sous pavillon panaméen pour ne pas payer d'impôts au Canada.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable secrétaire parlementaire invoque le Règlement.

M. Gagnon: Monsieur le Président, la députée dit que j'avais référé aux 333 millions de dollars comme étant des «pinottes». J'aimerais qu'on parle des 2,5 milliards qu'on envoie au Québec à tous les ans.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Avec tout le respect que je dois à mes collègues de deux côtés de la Chambre, ce n'est pas un rappel au Règlement, c'est un sujet de débat.

Mme Tremblay: Monsieur le Président, en 1985, le gouvernement de M. Lévesque a été le premier gouvernement à signer une entente avec les nations autochtones. C'est le gouvernement qui est allé le plus loin, qui en a reconnu le plus aux nations autochtones en 1985.

En 1990, la crise d'octobre est venue malheureusement assombrir les relations entre les autochtones et le peuple québécois et la perception a changé.

(1715)

Et nous sommes arrivés à cette crise, encore une fois, à cause de l'indécision du gouvernement du temps, un gouvernement libéral et fédéraliste encore une fois entre les mains de M. Bourassa. Les deux fois où l'armée est venue au Québec, c'étaient des libéraux fédéralistes qui étaient au gouvernement.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 15, il est de mon devoir, conformément à l'article 81 du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés.

Le Président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le Président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'au lundi 29 mai, à l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.

J'accorde la parole au whip en chef du gouvernement sur un rappel au Règlement.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'aimerais demander le consentement unanime pour différer à nouveau le vote au mardi 30 mai, à 17 h 30.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Pour que cela soit bien compris, je répète que le whip du gouvernement demande de différer à nouveau le vote, qui est reporté au mardi 30 mai, à 17 h 30. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

M. Boudria: Monsieur le Président, si vous le demandez, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour passer maintenant à l'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires, autrement dit, pour considérer qu'il est 17 h 30 et faire la même chose à la fin de l'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires, de telle sorte que la séance se termine dix minutes avant l'heure prévue.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime pour que nous passions à l'heure réservée à l'étude ses initiatives parlementaires?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 20, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


12816

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager le recours aux moyens suivants pour éliminer l'économie souterraine:
a) un programme élargi d'information publique afin de sensibiliser les Canadiens à la question et de les encourager à prendre part à la solution;
b) une amnistie restreinte, pour les intérêts et les pénalités qu'il doit, au contribuable qui déclare de son propre chef du revenu auparavant non déclaré;
c) un crédit d'impôt pour les contribuables qui effectuent des travaux de rénovation ou d'amélioration domiciliaire afin d'encourager la production des documents de base et de faciliter la communication de l'information.
-Monsieur le Président, l'économie souterraine mine la vie de tous les Canadiens et cause littéralement la perte de milliards de dollars de recettes pour le Canada. C'est pourquoi je demande à la Chambre de prendre en considération la motion no 382 que je propose.

Bien que l'existence de l'économie souterraine soit indéniable, les estimations quant à son importance varient considérable-


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ment selon la méthode de mesure utilisée. Par exemple, sa valeur varierait de 2,5 à 3 p. 100 du PIB jusqu'à plus de 20 p. 100 du PIB ou, en termes de dollars, de 20 à 140 milliards de dollars.

Même selon les estimations les plus faibles, la perte de recettes justifie que l'on prenne d'autres initiatives pour contrer cette économie et contribuer ainsi à rétablir la santé financière du Canada.

Il existe de bonnes raisons pour agir maintenant. Comme le ministre des Finances l'a dit, tout est sur la table. Il faut absolument qu'une attaque vigoureuse l'économie souterraine fasse partie de la stratégie globale que nous poursuivons pour atteindre nos objectifs. Comme notre économie est en croissance, nous devons encourager le plus grand nombre de Canadiens à réintégrer l'économie légitime du Canada.

Le gouvernement dispose actuellement de meilleurs outils pour lutter contre l'évasion fiscale, mais les fraudeurs se perfectionnent eux aussi. Compte tenu de cette réalité, la prudence nous recommande notamment de tirer avantage des nouvelles initiatives provinciales sur la mise en commun de l'information, pendant que c'est encore possible.

Je voudrais m'arrêter sur certaines idées qui circulent concernant l'économie souterraine. Tout d'abord, on dit qu'une fois dans la clandestinité, il est très difficile d'en sortir, même en y mettant de la bonne volonté. Et cela, surtout parce que les gens qui font du travail au noir offrent d'excellentes conditions à leurs clients, leur demandant considérablement moins que le prix du marché. Et les clients finissent par compter là-dessus.

De plus, une fois qu'un contribuable s'est livré à de l'évasion fiscale, ne déclarant pas un revenu pour lequel il devrait payer des impôts, les intérêts et peut-être même les amendes qui s'accumulent avec le temps peuvent atteindre une somme tellement prohibitive que le contribuable en question ne peut pas la payer.

La plupart de l'économie parallèle est très difficile à détecter parce qu'il n'y a rien d'écrit, aucune facture pour prouver une telle activité. C'est un des aspects que j'espère régler avec la motion no 382.

Au nombre des arguments à invoquer contre l'économie souterraine, il y a le fait que, si tous les Canadiens payaient leur juste part d'impôts, la part de chacun serait moins grande. Nous devons tous faire notre part et assumer nos responsabilités afin de contribuer à la solution du problème.

La récession a manifestement créé de nouveaux adeptes de l'économie parallèle et ce sont ces personnes qu'il faut récupérer avant que leur dépendance ne devienne irrévocable. Je crois que des efforts prenant certains segments pour cible donneront les meilleurs résultats, mais une initiative générale serait quand même couronnée de succès, car les premiers résultats viendront de ce qu'on aura rappelé aux Canadiens leurs obligations légales et morales.

L'ampleur de l'économie souterraine est difficile à évaluer, mais les Canadiens jugent qu'elle assez importante pour qu'on fasse quelque chose. Un certain nombre de raisons poussent les gens à participer à l'économie parallèle.

La première et la plus importante est l'avarice pure et simple, les gens se payant des choses aux dépens des autres. La deuxième, c'est qu'on croit à tort que tout le monde le fait impunément. Certains trouvent qu'on peut s'en tirer facilement parce que notre fiscalité repose sur l'honneur de chacun à déclarer ses revenus. On a aussi l'impression qu'aucun effort véritable n'est fait pour remédier à ce problème. Certains disent que le régime d'impôt sur le revenu est trop compliqué et qu'il est trop laborieux de s'y conformer. Enfin, le respect qu'inspirent le gouvernement et les élus intervient également. C'est un problème de notre société.

(1725)

Dans l'ensemble, les objectifs de la stratégie visant à éliminer l'économie souterraine consistent à récupérer des recettes qui sont légalement dues aux Canadiens, à encourager l'application volontaire et à protéger les intérêts des honnêtes contribuables.

Il est extrêmement important de renseigner les Canadiens sur la gravité du problème de l'économie souterraine et sur les façons d'aider à l'enrayer. Nous devons montrer aux Canadiens que le gouvernement s'acquitte comme il se doit de ses responsabilités en adoptant des mesures sévères mais justes pour appliquer la loi. Nous voulons enrayer une activité illégale qui est préjudiciable à l'économie de notre pays et, partant, à tous les Canadiens.

L'évasion fiscale compromet la capacité de notre gouvernement de fournir des programmes sociaux et économiques essentiels. Elle cause une concurrence déloyale pour les entreprises honnêtes et impose aux honnêtes contribuables un fardeau injuste.

Je me reporte au rapport que le vérificateur général a publié en 1994 et à ses observations sur le régime fiscal: «Le bon fonctionnement du régime fiscal dépend en fin de compte de la volonté du public de s'acquitter de ses obligations fiscales en observant volontairement la loi. Le gouvernement favorise cette volonté lorsqu'il fait preuve de respect envers le contribuable et qu'il gagne sa confiance en créant un juste équilibre entre les efforts de facilitation et les efforts d'exécution de la loi.» Je présente aujourd'hui cette motion, et les propositions qu'elle contient tiennent compte, en partie, de ces deux aspects.

En vertu de la loi de l'impôt, celui qui omet de déclarer des revenus ou de produire une déclaration d'impôt s'expose à certaines conséquences. Je vais les décrire brièvement. Le contribuable qui ne produit pas de déclaration d'impôt s'expose à une amende représentant 5 p. 100 de l'impôt impayé. En outre, des intérêts de 1 p. 100 par mois, jusqu'à concurrence de 12 p. 100, sont prévus. Celui qui ne déclare pas un revenu est passible d'une amende représentant 10 p. 100 du revenu, s'il est démontré qu'il n'a pas déclaré ce revenu les trois années précédentes. Évidemment, dans tous ces cas, l'intérêt s'accumule quotidiennement.

Enfin, pour ce qui est de la fraude fiscale délibérée, l'amende prescrite atteint jusqu'à 50 p. 100 du montant de l'impôt dû. Si la personne est accusée de fraude fiscale, elle est passible d'une amende supplémentaire allant de 50 à 200 p. 100 de l'impôt dû, plus une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans.


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Inutile de dire que ces sanctions sont très sévères et reflètent la gravité de toute infraction à la Loi de l'impôt sur le revenu.

Je ne dis pas que le gouvernement ne veut pas prendre ou ne prend pas les mesures appropriées pour mettre fin à l'économie souterraine. Je crois, bien au contraire, que cette motion vient compléter les efforts du gouvernement sur ce plan.

Comme nous le savons, le gouvernement a conclu avec les provinces un certain nombre d'accords en vue de l'échange d'informations à des fins de détection, y compris des covérifications, une stratégie, des techniques et une formation communes. De plus en plus d'enquêtes et de vérifications sont effectuées, en particulier dans les secteurs où les infractions sont nombreuses, comme la réparation et la rénovation des maisons, la construction, la vente de voitures, la restauration et la bijouterie, ainsi que dans d'autres secteurs de services.

Le gouvernement a également mis en place un programme visant à mieux informer le public des poursuites judiciaires. Il a constaté que, par suite de ce programme, le nombre de divulgations volontaires avait doublé. Chaque année, Revenu Canada fait enquête sur 15 000 cas détectés grâce à la vérification. Il travaille en étroite collaboration avec les principaux protagonistes, les entreprises, les professionnels et les provinces à mettre fin à la fraude fiscale, à l'économie souterraine et à la contrebande.

Pour vous donner une idée de l'étendue de cette coopération, je vous dirai que Revenu Canada a tenu des consultations avec plus de 240 groupes représentant une vaste gamme de secteurs industriels, y compris l'Institut canadien des comptables agréés, l'Association canadienne des constructeurs d'habitations, l'Association de ventes à domicile, l'Association canadienne des bijoutiers, l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, les associations touristiques et les chambres de commerce.

Ces initiatives nous ont permis de peaufiner nos stratégies, d'identifier les secteurs dans lesquels il y avait fraude et d'étudier de nouveaux moyens de mieux faire respecter la loi. Je pense que la motion no 382 vient s'ajouter à ces initiatives en insistant sur le rôle particulier du public.

(1730)

J'aimerais proposer quelques méthodes générales que nous pourrions envisager pour résoudre cette question de l'économie souterraine. Il est certain que des accords de partage de l'information avec les provinces conduiraient à améliorer les résultats des vérifications traditionnelles. On pourrait, par à une campagne d'éducation et d'information, convaincre le public que les agents chargés de faire appliquer la loi recevraient l'appui nécessaire et deviendraient plus efficaces. En fait, en 1994-1995, les activités d'application de la loi de Revenu Canada et ses initiatives contre l'économie souterraine devraient ajouter 3,8 milliards de dollars aux recettes fiscales. Il faudrait se concentrer sur les secteurs qui emploient beaucoup de main d'oeuvre et ceux où la probabilité d'activités souterraines est forte, et j'en ai déjà mentionné quelques-uns.

En lançant une campagne d'information pour contrer le mythe qui veut que tout le monde le fasse, nous entamerions singulièrement l'économie souterraine. La plupart des Canadiens y penseraient à deux fois s'ils savaient qu'il y a un risque élevé d'être pris et que les conséquences que j'ai mentionnées pourraient être graves.

L'évasion fiscale est un délit. Et ce n'est pas un délit sans victimes, comme on le prétend parfois. Tous les Canadiens en sont victimes, parce que l'évasion fiscale conduit, entre autres choses, à la perte d'emplois et à une augmentation du déficit. Les contribuables honnêtes supportent une plus grande partie du fardeau fiscal. Les entreprises légitimes fonctionnent dans un milieu où une concurrence déloyale risque de les conduire à la faillite. Il faut rappeler que ceux qui ne paient pas leurs impôts volent en fait les contribuables honnêtes, ce qui comprend les pauvres, les nécessiteux et les défavorisés.

Il faut rendre public le nombre d'enquêtes, faire savoir que chaque année Revenu Canada reçoit des tuyaux et des dénonciations de Canadiens qui connaissent des fraudeurs et s'inquiètent de l'importance de la fraude au sein de notre société. Beaucoup plus de Canadiens s'adresseraient à Revenu Canada s'ils savaient que l'on donnerait suite aux renseignements qu'ils communiquent. Il faut encourager et promouvoir le respect volontaire, ainsi qu'obtenir l'appui de tous les Canadiens. Il faut leur demander de rejeter les fraudeurs fiscaux.

La méthode préférée pour s'attaquer au refus de payer l'impôt est la divulgation volontaire et le respect volontaire. C'est pourquoi ma motion insiste sur l'éducation du public et sur les incitations au respect de la loi, plutôt que sur les mesures plus rigoureuses que d'autres proposent. Le contribuable doit, en fin de compte, être traité loyalement et avec respect.

L'économie parallèle s'infiltre dans la société canadienne au profit de certaines personnes, mais au détriment d'autres. Il faut que les Canadiens sachent que l'économie parallèle nuit à tous. Des entreprises honnêtes font face à une concurrence déloyale. Des emplois disparaissent, parce que bon nombre de ces entreprises font faillite. En raison de la diminution des recettes, il faut réduire les services de santé, l'enseignement ainsi que d'autres services sociaux et économiques essentiels. Les honnêtes contribuables doivent payer plus afin de compenser pour ceux qui ne paient pas.

La plupart des Canadiens se sont vu offrir la possibilité de payer certains services comptant, à meilleur prix. Ce dont nous ne sommes pas conscients, c'est qu'en acceptant de fonctionner ainsi avec un fournisseur de service peu recommandable, non seulement nous fermons les yeux sur un acte criminel, mais aussi nous encourageons la fraude fiscale. Quand une personne offre un meilleur prix pour un service payé au comptant, sans donner de facture, nous perdons des recettes et le consommateur renonce à une protection dont il a besoin.

Je sais, par expérience, que l'on obtient ce pour quoi l'on paye. Quand on fait affaire avec un fournisseur de service qui travaille au noir, en particulier quand on accepte des services fournis au noir, on peut s'attendre à avoir du travail de moins bonne qualité et des matériaux de moins bonne qualité parce que ces entreprises n'ont pas à respecter et ne vont pas respecter les normes de l'industrie. De même, et c'est encore plus important, les consommateurs n'obtiennent pas la protection et la garantie qu'ils obtiendraient s'ils avaient une facture ou un bon de com-


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mande en bonne et due forme. De plus, quand le consommateur fait appel à un fournisseur de services qui travaille au noir, il n'a ni recours, ni protection.

Cette motion demande à la Chambre d'examiner deux ou trois initiatives bien précises.

(1735)

Les députés doivent savoir que, aux États-Unis, 25 États ont tenté, à un moment ou à un autre, d'instaurer ou de faire instaurer une forme quelconque d'amnistie quand la fraude fiscale devenait problématique.

Je propose une amnistie restreinte. Ma proposition n'est pas très précise en ce sens qu'elle ne renferme pas tous les détails, mais il pourrait s'agir d'une amnistie restreinte prévoyant une période d'environ deux ou trois mois pour les intérêts ou les pénalités qui devraient normalement être payés lorsqu'un contribuable divulgue volontairement des revenus non déclarés antérieurement. Je répète que l'amnistie porterait sur les intérêts et les pénalités, et pas sur les impôts devant normalement être payés.

Dans un deuxième temps, l'amnistie consisterait en un effort accru de répression qui se traduirait par l'embauche d'un plus grand nombre d'enquêteurs, peut-être à contrat ou à commission. Cet effort se poursuivrait jusqu'à ce que les recouvrements se soient sensiblement améliorés.

Pendant ce temps, nous informerions régulièrement la population sur les progrès accomplis et nous pourrions songer à prolonger la durée de cette étape, comme ça a été le cas pour les amnisties sur les armes à feu, par exemple. Notre analyse des contribuables ayant fait des divulgations volontaires sera également utile au gouvernement qui pourra ainsi mieux concentrer ses interventions à venir de façon à décupler les résultats.

Pour ce qui est de l'amnistie restreinte proprement dite, c'est une proposition dont la pertinence, soit dit en toute objectivité, reste à déterminer. Néanmoins, c'est le genre de proposition sur laquelle, je l'espère, la Chambre voudra bien se pencher dans le cadre d'une étude en comité.

La deuxième idée nouvelle que je propose dans cette motion, c'est un crédit d'impôt sur intrants. Nous devons faire savoir aux gens que, lorsqu'ils acceptent de payer un fournisseur en espèces sans exiger de facture, ils acceptent la fraude fiscale. En refusant de faire affaire avec ceux qui ne facturent pas, ils participent, au contraire, à la solution.

J'ai travaillé quelque peu au sein du comité des finances, notamment dans le cadre des audiences sur la TPS, et ce qui est ressorti, entre autres de la consultation publique, c'est la forte présence, admise par un bon nombre, de l'économie souterraine dans certains secteurs. C'était facile à prévoir parce que les entreprises honnêtes représentées par ces associations en souffraient. Elles faisaient faillite. Des emplois étaient perdus.

Dans l'industrie de la construction, notamment le secteur de la rénovation et de l'amélioration domiciliaires, on estimait, d'après les renseignements fournis par ces associations, que de 25 à 40 p. 100 des activités étaient réalisées dans le cadre de l'économie souterraine. Cela représente un montant pouvant varier entre 1,5 et 2,4 milliards de dollars, soit une forte perte de recettes pour le gouvernement et, tout cela, parce que ces entreprises n'avaient pas déclaré ces activités.

Selon la motion, pour encourager les Canadiens à faire partie de la solution, nous devrions accorder un crédit d'impôt, par exemple, pour compenser la TPS acquittée relativement à des travaux de rénovation ou d'amélioration domiciliaire. Le contribuable serait tenu de fournir l'original de la facture, ou d'en conserver au moins une copie à des fins de vérification, et d'inclure le montant dans sa déclaration de revenus ou de le déclarer séparément.

Comme la plupart des Canadiens l'auront deviné, l'objectif visé consiste à avoir un document à vérifier pour éviter les abus. La récompense, c'est le crédit d'impôt. Même si ce crédit d'impôt réduirait les recettes qui devraient revenir au gouvernement, nous récupérerions ainsi des revenus déclarés sur lesquels des impôts fédéraux, provinciaux, de sociétés ou d'entreprises auraient été payés et qui entraîneraient une redistribution de retenues à la source et autres, ainsi que de charges sociales dans le système, de manière à générer encore plus de recettes.

Cette mesure serait un excellent moyen d'informer la population sur le problème et de décourager les activités économiques clandestines. Enfin, l'initiative vise surtout à appuyer les entrepreneurs honnêtes qui sont disposés à fournir des factures.

Prenons l'exemple de l'entrepreneur qui travaille au noir depuis quelque temps et qui discute avec un éventuel client. Si ce dernier exige une facture, l'entrepreneur refusera vraisemblablement d'effectuer les travaux, simplement parce qu'il lui faudrait établir un document pouvant servir de piste de vérification.

(1740)

De telles initiatives peuvent nous aider à lutter contre l'économie souterraine.

J'en ai discuté avec des députés de tous les partis. J'ai constaté que la question soulevait un vif intérêt, parce qu'elle était très importante pour tous les Canadiens.

Les détails du mécanisme ne me préoccupent guère. Je voudrais que la motion soit adoptée par la Chambre pour qu'on puisse avoir un moyen de dégager l'importance que présente pour tous les Canadiens toute cette clandestinité. Si la question est renvoyée à un comité, nous pourrons ensemble explorer diverses méthodes pour lutter contre un des problèmes les plus graves qui assaille le Canada, soit l'économie souterraine.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur la motion no 382 présentée par mon collègue de Mississauga-Sud. Lorsque j'ai pris connaissance de cette motion de mon collègue de Mississauga-Sud et des documents annexés à cette motion, j'ai été agréablement surpris par l'analyse lucide dont mon collègue de Mississauga-Sud a fait preuve dans sa courte mais intéressante analyse. Je vous dirais qu'il a mis le doigt sur un


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problème fondamental de la fiscalité canadienne, c'est-à-dire le bris d'un contrat social entre les contribuables, les particuliers et même les entreprises et les différents paliers de gouvernement.

Je vous dirais que le bris du contrat social est tellement grave et tellement généralisé, tellement ancré profondément parmi la population, que même récemment, le premier ministre du Québec, M. Jacques Parizeau, qui faisait l'acquisition de meubles pour sa résidence, s'est fait demander ce qu'il fallait faire avec la taxe, par le vendeur de meubles. Quand vous en êtes rendus à cette situation où même le premier ministre se fait demander si oui ou non on lui facture la taxe, c'est que le problème est fondamental, est profond et qu'il mérite une attention non pas particulière, mais une attention pleine et entière dans toute solution qu'on doit arrêter pour résoudre le problème de l'économie au noir et, par extension, les problèmes de la fiscalité canadienne, québécoise et de toutes les provinces canadiennes aussi.

Je vous dirais qu'il y a des idées fort intéressantes dans le document de mon collègue et nous, de l'opposition officielle, on n'a pas l'habitude d'encenser les membres du Parti libéral du Canada gratuitement, et je pense, monsieur le Président, que vous êtes bien placé pour le savoir. Mais quand il y a des choses valables qui nous sont présentées, quand il y a des raisonnements et des analyses intelligentes qui nous sont présentées, nous sommes ouverts à la discussion, nous sommes ouverts à une exploration des meilleurs moyens pour améliorer la situation et, en particulier, la situation des finances publiques.

Je regarde les trois créneaux que mon collègue de Mississauga-Sud a élaborés dans sa motion. On parle d'informer la population. Plusieurs contribuables ne connaissent pas l'impact des décisions ou ne se rendent peut-être pas compte globalement de l'impact des décisions de consommation qu'ils prennent jour après jour. Voici un exemple. Avant que le dollar ne soit à 73c., quand le dollar était à 81c., 84c., on entendait les contribuables nous dire, et c'était courant: «La fin de semaine dernière, je suis allé aux États-Unis. J'ai consommé aux États-Unis, c'était moins cher.» Cela restait à prouver, mais c'est ce qu'on disait. Et ces mêmes personnes décriaient, dénonçaient de façon virulente l'absence de création d'emplois, au Québec comme au Canada.

Le lien entre l'acte de consommation et la critique au niveau de la croissance économique et de l'emploi n'est pas toujours évident, dans la tête des gens. Je vous dirais qu'une bonne campagne d'information concernant l'économie au noir et la portée de chacun des gestes de désobéissance civile, parce que c'est comme cela qu'on doit l'appeler aujourd'hui, pourrait amener une situation améliorée dans l'avenir, pourrait créer un cas de conscience chez les contribuables face à leur obligation de contribuer aux finances publiques par le paiement de taxes et d'impôts.

La deuxième idée lancée par mon collègue de Mississauga-Sud attire aussi notre appui.

(1745)

Lorsqu'il parle d'une amnistie restreinte pour les déclarations de revenu passées, et non pas futures, il ne faudrait pas inciter l'augmentation de la propension de la fraude fiscale. Mais quand il parle d'une amnistie restreinte quant aux paiements des intérêts et aux pénalités sur des revenus qui n'auraient pas été déclarés, ni au fisc canadien, ni au fisc des provinces canadiennes, cela pourrait peut-être inciter des gens qui doivent, à l'occasion, se dire qu'ils sont un peu mal à l'aise, même si maintenant, la pratique est quasiment institutionnalisée, à payer leurs dettes. Les gens peuvent se dire qu'ils sont un peu mal à l'aise de ne pas faire leur devoir de citoyen ou de citoyenne en ne contribuant pas à l'assiette fiscale à laquelle ils devraient normalement contribuer.

La troisième voie proposée est aussi fort intéressante. Tout le monde sait, tout le monde le dit, même s'il n'y a pas de données exhaustives à cet égard, tout le monde sait que lorsqu'on parle de rénovations, de construction, c'est un secteur où l'économie souterraine est fort florissante. Alors parler d'un crédit d'impôt pour les contribuables qui effectuent des travaux de rénovation pourrait être un domaine à explorer.

Bref, les trois mesures proposées et la lucidité de l'analyse nous amènent, comme opposition officielle, à appuyer la démarche de notre collègue de Mississauga-Sud, une démarche intelligente, une démarche articulée et qui vaut la peine d'être étudiée en profondeur au Comité permanent des finances. Je l'invite-et il aura mon appui en tant que membre du Comité des finances-à présenter son analyse et à présenter aussi des voies d'exploration au comité, tel qu'il l'a fait lors de la présentation de sa motion.

Je le félicite aussi pour la lucidité dont il a fait preuve à la page 1 de son document, lorsqu'il reconnaît, et je le cite: «Dans l'éventualité-lorsqu'on parle du contexte actuel-de réductions dans les programmes sociaux et d'un budget difficile-en parlant probablement du dernier Budget et même du premier, les deux ont été difficiles pour les contribuables et surtout pour les plus démunis-on reprochera au gouvernement de ne pas avoir agi dans certains domaines».

Je le félicite d'avoir eu le courage de reconnaître que le contexte est fort difficile, étant donné les mesures budgétaires prises par le ministre des Finances qui s'attaque aux transferts aux provinces, à l'aide sociale, à l'enseignement postsecondaire et à la santé et qui s'attaque aussi au fonds d'assurance-chômage en allant y puiser dès cette année 2,5 milliards.

Mon collègue de Mississauga-Sud a la lucidité de reconnaître que le gouvernement pose ces gestes et qu'il pourrait être critiqué parce qu'il n'agit pas dans les domaines où il devrait. Là, il rejoint nos propres analyses.

Depuis 15 mois, vous en avez eu connaissance, on semble se répéter, mais on répétera tant et aussi longtemps que cela ne sera pas fait, on reproche à ce gouvernement de ne pas avoir agi dans certains domaines.

Ces domaines sont premièrement, lorsque vous enlevez des ressources à Revenu Canada, des ressources essentielles pour récupérer les impôts impayés, accumulés, qui, de l'avis même du vérificateur général, représentent 6,6 milliards et dont on pourrait récupérer, avec des ressources suffisantes, 75 p. 100, de l'avis du vérificateur général, là, je suis d'accord avec mon collègue de Mississauga-Sud, on peut reprocher au gouvernement de ne pas avoir agi et de ne pas agir à l'heure actuelle afin de donner à Revenu Canada les ressources nécessaires pour récupérer les montants dus, des sommes qui ne sont même pas contes-


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tées. On ne parle pas de taxes impayées, d'économie souterraine, on parle de taxes et d'impôts impayés, faute de ressources suffisantes, à Revenu Canada, pour pouvoir les récupérer. Cela, on peut le reprocher au gouvernement.

Mon collègue de Mississauga-Sud parlait, avec justesse, du fait qu'on regarde aller le gouvernement et qu'on manque de confiance. À tous les jours, on découvre-et le vérificateur général en découvre à toutes les années aussi-on découvre des gaspillages, des dépenses somptuaires. On découvre aussi qu'à certains égards, le gouvernement n'agit pas dans les domaines où il devrait agir en colmatant les brèches de la fiscalité. Là aussi, je suis d'accord avec mon collègue qui a eu le courage de dire que son propre gouvernement n'agissait pas là où il devait agir.

Il faut prêcher par l'exemple. Lorsqu'on voit qu'il existe encore des dépenses somptuaires au sein du gouvernement, lorsqu'on voit qu'il y a encore des gaspillages, que les Forces armées canadiennes vont aux États-Unis pour des concours de lance-roquettes, que le corps diplomatique se fait payer ses vacances à partir de nos taxes et de nos impôts et qu'on questionne le gouvernement et qu'il reste insensible à ces questions, là aussi, je pense qu'il faut dire que le gouvernement n'agit pas alors qu'il devrait agir.

(1750)

Quand on regarde le respect des lois fiscales à l'heure actuelle, le bulletin de nouvelles en fait mention depuis deux semaines, il y a une résurgence des kiosques de contrebande de cigarettes un peu partout. C'est comme une pratique courante. C'est visible, et le gouvernement ne met pas les ressources nécessaires pour faire respecter les lois fiscales.

Là aussi, je suis d'accord avec mon collègue de Mississauga-Sud, le gouvernement peut-être accusé de ne pas agir là où il doit agir. C'est tout cela qu'il faut rétablir dans le système fiscal à l'heure actuelle.

Je ne parle pas uniquement du gouvernement fédéral mais de l'ensemble des gouvernements. Rétablir la confiance, publiciser les impacts des décisions de ne pas contribuer de façon adéquate à l'assiette fiscale, et prêcher par l'exemple, je pense que ce sont là les ingrédients essentiels pour rétablir le contrat social et faire en sorte d'améliorer les finances publiques.

Je félicite encore une fois mon collègue de Mississauga-Sud, et l'opposition officielle appuiera sa motion.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole ce soir au sujet de la motion M-382, qui invite le gouvernement à prendre des mesures afin de faire sortir les gens de l'économie souterraine et de leur faire réintégrer l'économie légitime de notre pays.

Le député de Mississauga-Sud semble convaincu qu'une campagne élargie d'information publique, une amnistie restreinte et un crédit d'impôt pour travaux de rénovation suffiront à atteindre cet objectif. Nous voyons là un autre politicien libéral à Ottawa préconiser, en réaction à un problème, des mesures législatives qui ne s'attaquent pas à la question fondamentale de savoir pourquoi les gens passent à l'économie souterraine. C'est pour des raisons tenant aux impôts élevés, à des régimes fiscaux déroutants, complexes et compliqués, à l'administration de la TPS, aux coûts de comptabilité, et ainsi de suite.

Pour donner le ton de mon intervention, je voudrais citer les paroles d'Alex Doulis, un Canadien de la troisième génération, très heureux en affaires, qui, comme beaucoup d'autres, a tout simplement plié bagage et quitté le pays. Il dit: «J'ai quitté le Canada en 1989 parce que je commençais à me sentir impuissant. Je ne pouvais plus diriger le cours de ma vie, qui reposait de plus en plus entre les mains du gouvernement du Canada, et le gouvernement était sourd. L'ennui avec le Canada, c'est qu'il a une forme de gouvernement responsable. Je payais au gouvernement des sommes énormes en impôts et en taxes, mais il s'en servait pour perpétuer son pouvoir, de sorte qu'il n'avait pas besoin de m'écouter. Il était responsable de moi, mais il n'avait pas à me représenter.»

Le régime fiscal actuel au Canada est désuet et trop complexe. Il accable les contribuables canadiens. Beaucoup de Canadiens ont perdu tout respect pour ce régime, car ils sont incapables de le comprendre. Comme ils ne le considèrent pas équitable, ils cherchent discrètement à payer de moins en moins d'impôts par des moyens aussi bien légaux qu'illégaux.

On établit la valeur de l'économie souterraine à quelque part entre 10 et 100 milliards de dollars. Les impôts élevés étouffent la croissance économique dans tous les secteurs de notre société, en faisant diminuer la productivité du secteur privé, en faisant augmenter le chômage et, par dessus tout, en incitant les gouvernements à continuer de maintenir leurs dépenses aux niveaux intenables actuels.

Voilà pourquoi tant de Canadiens sont en colère contre les politiciens et contre ce que la politique et le gouvernement en sont venus à représenter pour eux. Pour ma part, la rhétorique, la réglementation, le gaspillage et l'arrogance sont des mots qui me viennent à l'esprit quand je pense au gouvernement libéral actuel et à l'occasion qu'il avait d'effectuer de véritables changements.

La réalité à l'extérieur de notre aquarium, c'est que certains font contre mauvaise fortune bon coeur et paient la TVP, la TPS, l'impôt sur le revenu et les taxes sur l'alcool et le tabac, tandis que d'autres choisissent de passer à l'économie souterraine pour accroître leur pouvoir d'achat. Pour se justifier de violer la loi, ces derniers n'ont qu'à lire dans le journal un des nombreux articles décrivant le gaspillage des fonds publics servant à subventionner une étude sur la confiture de bleuet, par exemple, ou à payer les voyages des parlementaires, les pensions à vie des parlementaires et ainsi de suite. C'est ce genre de renforcement négatif qui incite beaucoup d'honnêtes citoyens à acheter comptant, à négocier certaines transactions ou à troquer leurs services, évitant ainsi de payer des impôts excessifs à des gouvernements prodigues.

Ce n'est pas là une simple opinion personnelle. On la retrouve aussi dans un des premiers discours que le ministre des Finances a prononcés en 1994. Il a déclaré: «L'économie souterraine prend de l'expansion lorsque la population ne croit plus qu'elle évolue dans un sens bénéfique pour tous. L'économie souterraine ne se


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résume pas à la contrebande. C'est aussi ces centaines de milliers de personnes honnêtes par ailleurs qui retirent leur consentement à être gouvernés. Ils ont perdu confiance en leur gouvernement.»

(1755)

Le ministre est conscient du problème. Que fait-il pour le régler? Rien. Le gouvernement dépense encore 40 milliards de plus qu'il ne touche de recettes dans l'année. Malheureusement, les libéraux montrent, par la motion no 382, qu'ils n'ont rien fait pour rétablir la confiance, l'égalité et l'équité de notre régime fiscal.

Non seulement ces contribuables évitent-ils de payer des taxes, mais beaucoup choisissent d'investir leur argent à l'étranger. En 1993, selon la Banque de Nouvelle-Écosse, sept milliards de dollars auraient discrètement quitté le Canada. L'estimation, pour les années antérieures, a toujours été d'environ 700 millions. Il est passé en quelques années seulement de 700 millions de dollars à sept milliards de dollars.

Dans un ouvrage de Diane Francis intitulé Underground Nation, l'ancien procureur général des Bermudes met les choses en perspective, et je cite: «C'est en très grand nombre que les gens cachent de l'argent à l'étranger parce qu'ils se sentent tellement accablés d'impôts et si injustement traités qu'ils ne voient pas pourquoi ils bloqueraient leur argent dans leur pays. Ce qui arrive, c'est que, au Canada comme ailleurs, des impôts élevés poussent des gens d'affaires honnêtes et travailleurs à faire de l'évasion fiscale. J'ai l'impression que certains établissements de l'île reçoivent des Canadiens beaucoup d'argent qui ne se trouve pas ici légalement.»

Qu'attend le gouvernement pour faire quelque chose? La meilleure façon de régler le problème de l'économie parallèle, c'est de veiller à ce que cela ne donne rien de tricher, comme on l'a fait avec le projet de loi sur la contrebande. Si on prive les contrebandiers de leur profit en supprimant la taxe, la contrebande prend fin. La solution, c'est de réduire les impôts.

Lorsque les gens voient que les gouvernements comme celui-ci gaspillent l'argent durement gagné de leurs impôts, il est futile pour le gouvernement de sévir. La motion no 382 prévoit des mesures d'observation volontaire visant à ramener les gens à l'économie officielle. Ces mesures n'auront aucune incidence sur les gens qui sont persuadés que le gouvernement les a traités injustement. Telle est la nature humaine.

Je n'excuse pas les personnes qui violent sciemment la loi, mais il reste que, si les gouvernements ne respectent pas les règles du jeu, pourquoi leurs administrés le feraient-ils? Pourquoi y a-t-il deux poids deux mesures qui font que les politiciens bénéficient d'un régime de retraite trois ou quatre fois plus intéressant que ceux du secteur privé? «Faites ce que nous disons, pas ce que nous faisons» est en train de devenir rapidement le slogan des libéraux, à la place de «Des emplois, des emplois et encore des emplois».

Les libéraux ont axé leur campagne sur l'intégrité et sur une nouvelle façon de gouverner, mais comme de nombreux Canadiens, j'ai l'impression d'assister à la même pièce, dans le même théâtre, avec des comédiens différents qui interprètent les mêmes rôles. Les noms sont changés, mais c'est toujours le même vieux scénario.

Ainsi, en présentant la motion no 382, un député du parti ministériel propose de dépenser d'autres deniers publics pour mener une campagne de publicité devant renseigner le public sur l'importance de payer ses impôts et sur les incitatifs et obligations à cet égard. Qu'en est-il des dispositions encourageant et obligeant le gouvernement à justifier ses dépenses et à éliminer le gaspillage à ce chapitre? Pourquoi n'en est-il pas question dans cette motion?

Si le gouvernement doit offrir des incitatifs pour encourager les gens à respecter ses politiques, c'est que celles-ci laissent à désirer. À l'instar des conservateurs, les libéraux ne l'ont toutefois pas compris. Le peuple canadien dénonce le régime fiscal de notre pays, mais le gouvernement ne tient pas compte de ses protestations. L'ampleur appréhendée de l'économie souterraine et la révolte des contribuables à l'échelle nationale auraient certainement dû éveiller les soupçons au sein du caucus libéral. Cela ne semble pas avoir été le cas. La motion no 382, par exemple, prévoit une amnistie encourageant les gens à tout avouer et à rembourser les impôts qu'ils n'ont pas payés, sans crainte de représailles gouvernementales. En quoi cette proposition est-elle logique? Une amnistie permettra simplement aux gens de rembourser des impôts qu'ils ont refusé de payer au premier chef. En quoi est-ce un incitatif?

Le moment est venu pour les libéraux de cesser de proposer des solutions de pacotille aux problèmes que pose notre régime fiscal et d'amorcer un processus de réforme et d'allégement fiscal qui se fait attendre depuis longtemps. Il est temps qu'ils s'attaquent au mal, et non pas simplement aux symptômes. Le Parti réformiste saisit la différence entre les deux. C'est pourquoi nous préconisons des réductions des dépenses et la réforme de la fiscalité, y compris l'établissement d'un impôt uniforme, simple et visible au Canada. La principale caractéristique de pareil impôt, c'est qu'il serait équitable et qu'il en convaincrait plus d'un de ne plus alimenter l'économie souterraine.

Il est intéressant de constater que la motion no 382 vise le non-paiement de la TPS, ce qui montre que les libéraux sont vraiment revenus sur leur promesse de supprimer cette taxe.

Tout le processus de réforme et d'allégements fiscaux serait lié aux réductions des dépenses et aux mesures d'austérité. Un gouvernement réformiste adopterait une loi sur les budgets équilibrés. Nous protégerions l'argent des contribuables en réduisant la taille du Parlement fédéral, et non en portant le nombre de députés à 301, comme le parti au pouvoir prévoit de le faire.

(1800)

Nous déléguerions plus de pouvoirs aux provinces ainsi qu'aux particuliers. Le temps est venu de remettre les ressources financières à ceux qui connaissent mieux les problèmes des Canadiens et qui, partant, sont les plus aptes à les régler.


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En guise de conclusion, un gouvernement réformiste serait un gouvernement efficace et transparent qui n'aurait aucun secret. Nous présenterions des projets de loi proactifs afin de faire le ménage dans le gâchis des finances publiques qui accable notre pays, un gâchis que nombre de Canadiens tentent d'éviter dans la gestion de leurs propres affaires.

Les libéraux vont continuer de proposer des solutions de rafistolage comme celles que renferme la motion no 382. Le message que je veux adresser à tous les contribuables canadiens en colère, c'est que, une fois rendus au bout du rouleau, ils ne perdent pas patience, car le jour n'est pas loin où il y aura un gouvernement réformiste.

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, il est toujours agréable de prendre la parole après un représentant du parti du pessimisme.

Je suis heureux d'intervenir dans le débat sur la motion no 382, présentée par le député de Mississauga-Sud. En gros, le député demande au gouvernement d'envisager l'adoption de mesures pour lutter contre l'importante économie souterraine qui existe au Canada.

Cette question me préoccupe et elle devrait préoccuper tous les Canadiens. J'ai déjà eu l'occasion de l'aborder auparavant. Ainsi, lorsque j'étais vice-président du Comité permanent des comptes publics, j'ai pu poser des questions à un témoin, sous-ministre à Revenu Canada, sur l'économie souterraine au Canada. Il a dit que les élus pouvaient s'occuper de beaucoup des facteurs qui contribuent à cette économie. C'est ce que nous faisons aujourd'hui. Mon collègue de Mississauga-Sud propose des moyens de résoudre le problème précis dont je parlais en comité.

L'économie souterraine est florissante au Canada. L'importance exacte des recettes perdues est inconnue, mais les estimations varient de 20 milliards à 140 milliards de dollars par année. Cependant, ce que l'on sait, c'est que chaque fois que quelqu'un participe à l'économie souterraine, nous perdons à jamais de l'argent qui devrait servir à payer nos services de santé, notre système d'enseignement et le reste.

On ne se trompe pas en disant que ceux qui participent à l'économie souterraine s'enlèvent de l'argent à eux-mêmes. Nous devons nous demander ce qui alimente cette économie que le ministre des Finances préférerait ne pas voir croître. Peut-être est-ce la menace des impôts? Peut-être y a-t-il des problèmes au ministère du Revenu? Peut-être les gens ont-ils l'impression que le système est paralysé par un excès de tracasseries administratives? Beaucoup de facteurs peuvent jouer. Est-ce la haine de la TPS? Peu importe les raisons, l'économie souterraine est bien réelle et elle se porte très bien.

Dans ma circonscription de Victoria-Haliburton, j'ai entendu toutes sortes d'histoires. On m'a parlé d'un atelier de soudure qui a fait faillite, mais qui est réapparu dans un camion. Les paiements s'y font en argent liquide seulement. J'ai entendu parler d'ateliers de débosselage qui ne se font payer qu'en argent comptant, qui achètent leur matériel comptant et qui paient leurs employés en argent comptant. Il y aurait aussi des restaurants qui paieraient des étudiants en argent comptant en leur disant de garder le secret. Des gens m'ont parlé d'entrepreneurs qui donnent systématiquement deux estimations pour leurs travaux, une si le client paie comptant et une autre si le client veut rester dans la légalité. Il y aurait même des gens qui se feraient rayer du bottin pour pouvoir se faire payer en argent comptant.

Je connais beaucoup de gens qui n'ont jamais fraudé le fisc de leur vie, mais qui sont contraints de fonctionner de la sorte ou qui se sentent obligés de continuer de le faire parce qu'ils le font depuis si longtemps que les pénalités seraient trop lourdes s'ils cessaient et décidaient de travailler honnêtement.

Un élément de la motion vise justement les personnes dans cette situation. La deuxième partie de la motion a pour but de réduire ou de supprimer une partie des intérêts et des amendes dont est redevable un contribuable qui déclare de son propre chef un revenu qu'il n'avait pas déclaré auparavant.

Le message de cette motion, c'est soyez honnête, vous ne serez pas puni. Une autre partie de la motion propose de sensibiliser le public à la question et de l'encourager à prendre part aux efforts faits en vue de régler le problème.

Notre système fiscal ne peut fonctionner que si les contribuables déclarent leur revenu et paient leurs impôts de leur propre chef. C'est probablement pour le gouvernement fédéral la façon la moins coûteuse de percevoir les impôts. Mais certaines personnes ne paient pas leurs impôts, et cela donne à certaines entreprises un avantage déloyal. À long terme, si tous les Canadiens payaient leur juste part d'impôts, nous nous en porterions nettement mieux. Et, ce qui est plus important, cette part serait nettement plus équitable.

Rien n'est plus frustrant pour les petites entreprises qui soumissionnent pour la réalisation d'un projet que de se voir refuser un contrat parce qu'un concurrent fait une offre officielle plus basse, et une autre offre sous la table.

(1805)

Un autre aspect de la campagne d'information vise à s'assurer que les gens ont bien conscience du fait que le gouvernement fédéral, en particulier le ministère du Revenu national, s'attaque au problème de l'économie souterraine. À l'avenir, de plus en plus de gens contribuant à l'économie souterraine se feront prendre. Une fois attrapés, ils auront à subir de graves conséquences. En outre, la campagne d'information doit faire ressortir le fait que l'économie souterraine entraîne la perte d'emplois.

Le Canada doit commencer à se rendre compte que faire les choses honnêtement est dans l'intérêt de tous. En même temps, cette partie de la motion demande au gouvernement d'aider à instaurer un climat d'honnêteté. Il y a d'autres moyens pour encourager les gens à faire les choses ouvertement, et la troisième partie de la motion y fait allusion.

La troisième et dernière partie de la motion traite des crédits d'impôt pour les contribuables qui effectuent des travaux de rénovation ou d'amélioration domiciliaires. L'idée est de s'attaquer au système des deux devis qui existe déjà. Il s'agit aussi de permettre la production de documents qui seraient le véhicule principal de la campagne d'information que j'ai mentionnée plus tôt.

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En tant que gouvernement, nous devons montrer que, dans notre société, nous ne sommes pas punis pour avoir été honnêtes. Nous devons créer une économie dans laquelle le travail et le dévouement sont récompensés. Nous ne voulons pas laisser croire qu'il est normal de participer à l'économie souterraine, parce que c'est ce que tout le monde fait.

Une de nos priorités, lorsque nous avons été élus, était de s'attaquer à la création d'emplois et à la croissance. Cette motion nous aide à réaffirmer ce message, et j'invite tous les députés à appuyer l'idée du député de Mississauga-Sud.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais parler des deux facettes de la motion du député de Mississauga-Sud.

Un des aspects positifs de cette motion, c'est que le député cherche des solutions à un problème. Je suis entièrement d'accord. J'encourage les députés à faire de telles démarches. L'autre aspect positif, c'est que la motion reflète la pensée d'un grand nombre d'électeurs. Bien des électeurs nous disent que la situation actuelle est injuste pour les entreprises légitimes. Par contre, d'autres électeurs pensent que nous parviendrons à remédier à cette situation.

J'aimerais vous faire part du contenu d'une lettre que Gary Chandler, un de mes électeurs, m'a apportée à mon bureau de Nanaïmo il y a quelques semaines. Dans sa lettre, il suggère au gouvernement d'accorder à chaque contribuable une nouvelle déduction d'impôt, pouvant atteindre de 5 à 10 p. 100 de son revenu imposable, pour l'amélioration de sa résidence principale. Il y a plus d'économies par habitant au Canada que dans la plupart des autres pays. Une telle mesure ferait dépenser une part de ces économies suffisamment importante pour faire baisser le chômage. Elle réduirait aussi l'économie souterraine puisqu'il faudrait fournir des reçus authentiques.

Quand j'ai lu la lettre et discuté avec M. Chandler, j'ai pensé qu'il s'agissait d'une idée très intéressante, d'une façon valable de lutter contre l'économie souterraine en pleine expansion. Je ne suis pas un expert en la matière, et j'ai décidé de demander l'avis de mes collègues du caucus réformiste. J'ai donc transmis cette lettre au caucus, et les membres du comité des finances du caucus ont discuté de la question. Ils ont étudié l'idée à fond et décidé en définitive qu'ils ne pouvaient pas l'appuyer, pour les raisons suivantes.

D'abord, il faudrait renoncer à des montants importants d'impôts; cette exonération fiscale serait donc très coûteuse. Ensuite, il serait nécessaire d'accorder la même exemption à d'autres activités, par exemple la réparation des automobiles, des petits appareils et des électroménagers. Toutes sortes d'autres secteurs exigeraient le même privilège et, avant même de nous en apercevoir, nous aurions toute une série d'exemptions qui modifieraient notre façon de faire des affaires.

(1810)

La troisième raison invoquée, c'est que, en tant que parti, nous nous détournerions ainsi de notre proposition d'établir un impôt uniforme. Beaucoup de Canadiens se plaignent du régime fiscal. Il faut le rendre plus simple et plus facile à comprendre. Les déclarations doivent être simplifiées et que sais-je encore. Ce genre d'exemption nous écarterait de cette direction.

La dernière raison pour laquelle le comité refusait d'y souscrire était directement liée à l'économie souterraine. C'est la raison principale. Ce qui fait que nous avons actuellement une économie souterraine trouve son explication dans l'argumentation que mon collègue a fait valoir tout à l'heure. Le niveau des dépenses gouvernementales est trop élevé. Il s'ensuit que les taux d'imposition sont trop élevés. Nous ne cessons de le répéter. Tout le monde le sait, notre dette atteint 550 milliards de dollars et continue d'augmenter. Nous devons agir.

Le gouvernement accomplit des petits pas vers la réduction du déficit et des dépenses. Nous estimons que ça ne suffit pas et que c'est là la principale cause de l'économie souterraine. Tant que nous ne nous serons pas attaqués à cela, nous ne parviendrons pas à résoudre les autres problèmes de taille.

Je félicite le député de Mississauga-Sud d'avoir présenté pareille initiative pour tâcher de résoudre un problème particulier. Bien que la motion reflète l'opinion de certains électeurs qui, un peu partout au pays, s'interrogent sur les moyens de résoudre ces problèmes, il s'agit d'abord de s'attaquer aux problèmes essentiels que j'ai mentionnés, soit les dépenses faramineuses et les taux d'imposition trop élevés que pratique le gouvernement.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Mississauga-Sud d'avoir soulevé cette très importante question à la Chambre. Il est évident que notre ministre du Revenu national et les députés des deux côtés s'inquiètent vraiment de l'importance que prend l'économie souterraine. Cette question retient l'attention de tous les Canadiens et ils y attachent beaucoup d'importance.

En effet, plus l'économie souterraine prend de l'ampleur, moins les recettes gouvernementales sont élevées. L'économie souterraine constitue une concurrence injuste pour les entreprises honnêtes. Elle entraîne la suppression d'emplois et les contribuables honnêtes doivent payer davantage d'impôts, dans le cadre d'un régime inéquitable, lorsque l'économie parallèle est florissante.

Pour beaucoup de particuliers et d'entreprises, l'économie souterraine est devenue une façon facile d'éviter de payer des impôts, de verser leur juste part. Lorsque ces gens cachent leurs transactions financières, ils n'apportent pas leur contribution pour financer les programmes socio-économiques du Canada. Ces gens ne paient pas pour les services qu'ils utilisent. Les autres Canadiens sont forcés de verser davantage pour compenser.

J'ai été très surpris d'entendre le député de Calgary-Centre dire qu'il acceptait pratiquement l'économie souterraine. Il a essayé de la justifier. Il est important pour tous les Canadiens que personne ne tolère cette pratique. Elle est certes immorale et injuste envers les Canadiens.

Il se peut que les gens qui participent à l'économie parallèle aient le sentiment que leur situation financière justifie leurs actions. Ils n'ont peut-être pas eu d'augmentation depuis plusieurs années. Il se peut qu'ils trouvent les impôts trop difficiles à comprendre ou qu'ils soient tout simplement poussés par la cupidité. Ils y voient une façon de tromper le fisc. Ce n'est pas aussi simple que cela. Ces gens ne trichent pas un ministère anonyme sans faire de victime. Ils volent leurs amis, leurs voisins, les entrepreneurs dans leur collectivité ainsi que tous les Canadiens, et ils les forcent à payer davantage d'impôts dans le cadre d'un régime injuste.

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(1815)

Je demande aux députés, ainsi qu'à tous les Canadiens, de songer au véritable coût de l'économie souterraine. Il est énorme. Il entraîne une réduction des services essentiels, une augmentation des impôts, une concurrence injuste et une baisse du niveau de vie des contribuables honnêtes.

En quoi l'économie souterraine touche-t-elle le chef d'entreprise légitime qui essaie d'être compétitif? L'Association canadienne des constructeurs d'habitations est inquiète. Les spécialistes de la rénovation qui ne paient pas d'impôts ont un avantage injuste sur les autres entrepreneurs dans le secteur de l'habitation. Dès le départ, des entreprises honnêtes se trouvent défavorisées, sur le plan de la concurrence, parce qu'elles ne peuvent pas offrir au consommateur le même prix que la personne qui ne fait pas payer les taxes. En fin de compte, elles font face à une concurrence déloyale, et on assiste à la disparition d'emplois.

Il ne faut pas oublier le consommateur malhonnête. Le consommateur malhonnête, qui accepte un prix plus bas et paie comptant, fraude le fisc. Il devient complice de fraude fiscale. Ce même consommateur profite de toute une variété de services gouvernementaux, sans payer sa juste part. En agissant ainsi, il met en danger les services de santé et d'enseignement ainsi que les autres services essentiels de notre pays. Ce n'est tout simplement pas correct, et c'est vraiment manquer de vision.

La motion dont nous sommes saisis demande au gouvernement de sensibiliser les Canadiens au problème de l'économie souterraine et de les encourager à prendre part à la solution. Je reconnais qu'il faut que les Canadiens sachent à quel point le problème de l'économie souterraine est grave et à quel point il leur nuit. Je sais aussi que les gouvernements ne peuvent pas trouver la solution à eux seuls. Nous devons tous y prendre part et nous acquitter de nos responsabilités à cet égard.

Le gouvernement a reconnu que l'on ne pouvait pas régler le problème au moyen de mesures prises isolément. Nous devons comprendre le problème et ses conséquences. C'est pour cette raison précise qu'en novembre 1993, le ministre du Revenu national a fait de la sensibilisation des Canadiens un élément fondamental de la solution au problème de l'économie souterraine.

Depuis un an, des fonctionnaires de Revenu Canada consultent activement des particuliers et des associations de tout le pays. Revenu Canada cherche à obtenir l'appui de groupes et de particuliers dans tout le pays. Dans le cas de l'Institut canadien des comptables agréés, par exemple, le ministère a mis sur pied un comité de travail ayant pour mandat d'enquêter sur les causes de l'économie souterraine, d'examiner les techniques de vérification et de déterminer quel type de formation permettrait d'aider les responsables à détecter les revenus non déclarés ou déclarés de façon incomplète. Le comité est aussi chargé de trouver des moyens de réduire les dépenses administratives engendrées par la procédure de déclaration de revenus applicable aux entreprises et aux particuliers.

Ces groupes avisent leurs membres des risques qu'ils courent à ne pas déclarer leurs revenus. Tous les citoyens et toutes les entreprises ont un rôle à jouer dans l'élimination de l'économie souterraine. Les particuliers peuvent commencer par refuser de traiter avec des entrepreneurs et des commerçants qui demandent à être payés comptant. Les entreprises peuvent faire leur part en refusant de faire du travail non déclaré et en vérifiant que ce n'est pas le cas.

Pour être sûr que toute la population sait que le gouvernement est sérieux dans son intention de poursuivre quiconque tenterait délibérément de frauder le système, le ministre du Revenu national annonce publiquement les condamnations pour évasion fiscale. Cette publicité accrue a un effet dissuasif. L'an dernier, deux fois plus de contribuables ont déclaré volontairement certains revenus parce qu'ils désiraient rectifier leur situation fiscale. En outre, un certain nombre de situations cachant peut-être une fraude sont rapportées chaque année par des contribuables, et ce nombre a grimpé à environ 19 000, cette année.

Je suis sûr que nous sommes sur la bonne voie dans notre entreprise de contrer l'économie souterraine. J'espère que tous les Canadiens et tous les députés applaudiront les efforts du député de Mississauga-Sud pour raviver ce débat aujourd'hui à la Chambre.

J'exhorte les députés à transmettre le message à leurs électeurs. J'invite également les députés à continuer à chercher des solutions à l'économie souterraine, afin que toutes les entreprises du Canada puissent poursuivre leurs activités dans une société meilleure et plus juste.

Le président suppléant (M. Kilger): L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

Comme il est 18 h 20, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 20.)