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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 22 septembre 1994

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

    Projet de loi C-51. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6001

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

    Projet de loi C-52. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6001

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-272. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6001
    M. Hill (Prince George-Peace River) 6001

PÉTITIONS

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

L'AVORTEMENT

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES JEUNES CONTREVENANTS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES AUTOBUS SCOLAIRES

LES MINES

LOI SUR L'INTÉRÊT

    Projet de loi C-273. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6002

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-44. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture et de l'amendement 6004
    Rejet de l'amendement par 194 voix contre 46 6005
    M. Leroux (Shefford) 6005

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 6008

LOI SUR L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-44. Reprise de l'étude de la motion 6008
    M. White (North Vancouver) 6018
    Report du vote sur la motion 6027

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 6028

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

SUCCESS NOVA SCOTIA 2000

LE CONSEIL POUR L'UNITÉ CANADIENNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'ÉDUCATION

REPRENONS LA NUIT

LA SOCIÉTÉ INTERNATIONAL NICKEL COMPANY OF CANADA

LA NOMINATION DE MME SHARON CARSTAIRS AU SÉNAT

    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 6031

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Harper (Simcoe-Centre) 6032

SUSAN AGLUKARK

LES CENTRES CULTURELS

LE DÉCÈS DE MARCEL TOURANGEAU

LA DÉPUTÉE DE CENTRAL NOVA

L'UNITÉ NATIONALE

MME JO WELLS

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

QUESTIONS ORALES

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6034
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6034
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6034
    M. Gauthier (Roberval) 6034
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6035
    M. Gauthier (Roberval) 6035
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6035

L'IMMIGRATION

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LE SANG CONTAMINÉ

L'IMMIGRATION

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 6039
    M. Martin (LaSalle-Émard) 6039

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 6039
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 6040

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

QUESTION DE PRIVILÈGE

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

    M. Gauthier (Roberval) 6040

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    M. Gauthier (Roberval) 6041

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture. 6041
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6048
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6056

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE FINANCEMENT DES PARTIS POLITIQUES

    Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 6061
    M. White (North Vancouver) 6061
    Report du vote sur la motion 6068

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 18 h 18 6068

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 18 h 25 6068

MOTION D'AJOURNEMENT

LES TRANSPORTS


6001


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 22 septembre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) demande à présenter le projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et concernant certains règlements pris en vertu de celle-ci.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

L'hon. Herb Gray (au nom du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique) demande à présenter le projet de loi C-52, Loi constituant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et modifiant ou abrogeant certaines lois.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LE CODE CRIMINEL

M. Jay Hill (Prince George-Peace River) demande à présenter le projet de loi C-272, Loi modifiant le Code criminel (contrôle des armes à feu).

-Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui le plaisir de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire visant à modifier certaines des dispositions les plus contestées du Code criminel au sujet du contrôle des armes à feu.

Ce projet de loi a pour objet de décriminaliser les infractions au règlement touchant l'entreposage, l'exposition, la manutention et le transport des armes à feu. Il simplifie le processus de renouvellement des autorisations d'acquisition d'armes à feu et permet aux propriétaires d'armes respectueux des lois dans le passé d'obtenir une autorisation de ce genre sans avoir à suivre le cours prévu et passer le test exigé.

Il donne également le droit aux propriétaires d'armes de léguer des armes à usage restreint bénéficiant d'une clause de droits acquis. Il clarifie l'obligation juridique qu'a le gouvernement d'indemniser les intéressés pour les armes à feu confisquées. Il fait en sorte que tous les règlements actuels et futurs soient soumis à l'examen de la Chambre des communes.

(1005)

Les Canadiens exigent qu'on contrôle le crime et non les armes à feu. Il est temps que le gouvernement adopte une position très ferme à l'égard des criminels, plutôt que d'imposer d'autres tracasseries administratives aux propriétaires d'armes à feu respectueux des lois.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais, ce matin, présenter trois pétitions. La première, qui est signée par des habitants de l'agglomération urbaine de Toronto, porte sur la Loi sur les jeunes contrevenants.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de prévoir des peines plus sévères pour les personnes trouvées coupables de crimes violents et de verser plus de fonds aux services de police. Je voudrais rappeler à ces pétitionnaires que le projet de loi C-37, que la Chambre examine actuellement, réglera certaines de ces préoccupations.

L'AVORTEMENT

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 52 habitants de ma circonscription, Scarborough-Ouest.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier le Code criminel pour étendre immédiatement la protection aux foetus, afin qu'ils jouissent de la même protection que les autres êtres humains.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, ma troisième pétition est signée par un grand nombre d'honnêtes citoyens de Belleville, en Ontario.

Les pétitionnaires m'ont prié de présenter au Parlement une pétition lui demandant de ne pas modifier la Loi sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés de manière à sous-entendre que la société approuve les relations entre personnes du même sexe et de ne pas utiliser l'expression «orientation sexuelle», qui n'est pas définie, dans quelque mesure législative que ce soit.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux présenter une pétition signée par 74 habitants des régions d'Osoyoos, Oliver, Okanagan Falls, Penticton, dans la circonscription d'Okanagan-Similkameen-Merritt.


6002

De l'avis de ces pétitionnaires, la majorité des Canadiens estiment que les privilèges accordés par la société aux couples hétérosexuels ne devraient pas s'étendre aux relations entre personnes de même sexe.

Ils exhortent donc le Parlement à ne pas modifier le Code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Réginald Bélair (Cochrane-Supérieur): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter ce matin une pétition au nom de la Ligue des femmes catholiques de Kapuskasing.

Les membres de la ligue demandent au Parlement d'examiner nos lois concernant les jeunes délinquants et de les modifier de façon à autoriser les tribunaux à poursuivre et à punir les jeunes contrevenants qui terrorisent notre société en publiant leurs noms et en abaissant la limite d'âge pour que les sanctions correspondent à la gravité du crime dont ils se sont rendus coupables.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, je me sens tenu de présenter toutes les pétitions signées par mes électeurs, chaque fois qu'elles sont conformes à l'article 36 du Règlement, sans égard à mes opinions personnelles.

Je veux donc présenter une pétition où il est demandé que le Parlement maintienne le statu quo en ce qui concerne la Charte des droits et libertés et la Loi canadienne des droits de la personne afin d'éviter de donner l'impression que la société approuve les relations entre personnes de même sexe.

La pétition, qui parle à tort d'un code canadien des droits de la personne, ressemble aux nombreuses pétitions qui sont présentées au Parlement ces derniers mois. J'ai le sentiment qu'elles s'inscrivent toutes dans le cadre d'une campagne organisée visant à priver un groupe important de Canadiens de certains droits.

À mon avis, les parlementaires n'ont pas le pouvoir d'étendre ou de restreindre les droits d'une personne en se fondant sur les convictions ou les croyances personnelles de certains pétitionnaires. Nous avons la lourde responsabilité de veiller à ce que tous les Canadiens jouissent des mêmes droits. Faute de quoi, aucun d'entre nous n'aurait de véritable garantie.

LES AUTOBUS SCOLAIRES

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par de nombreux habitants de Kingston et de la région avoisinante.

Les pétitionnaires sont préoccupés par les blessures subies par les jeunes enfants dans les autobus scolaires. Ils demandent au Parlement d'adopter une mesure législative exigeant que les autobus utilisés pour assurer le transport des enfants soient équipés de ceintures de sécurité individuelles, une pour chaque enfant, comme le veut la norme pour les autres véhicules.

(1010)

LES MINES

M. Charles Hubbard (Miramichi): Monsieur le Président, je voudrais présenter une pétition signée par plus de trois cents employés des compagnies minières Heath Steel Mines et Brunswick Mines, au Nouveau-Brunswick.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que le climat de l'investissement au Canada est en train d'obliger l'industrie minière à chercher de nouveaux débouchés ailleurs. La Fédération canadienne de l'industrie minière a préparé un plan d'action en dix points à l'intention de l'industrie minière et du gouvernement du Canada afin que des mesures soient prises pour garder l'exploitation minière au Canada.

Ils demandent au Parlement de prendre des mesures pour accroître l'emploi dans le secteur minier, pour promouvoir la prospection, pour reconstituer les réserves minières et pour aider et garder l'exploitation minière au Canada.

[Français]

Le vice-président: Je crois qu'il y a un député de l'opposition officielle qui veut présenter un projet de loi au nom d'un autre député. Comme on a oublié de reconnaître le député tout à l'heure, je demande donc le consentement unanime de la Chambre afin qu'il puisse avoir l'occasion de présenter ce projet de loi maintenant.

Y a-t-il consentement unanime pour le faire?

Des voix: D'accord.

* * *

LA LOI SUR L'INTÉRÊT

M. Ghislain Lebel (Chambly) demande à présenter le projet de loi C-273, tendant à modifier la Loi sur l'intérêt.

-Monsieur le Président, il me fait plaisir de soumettre à cette Chambre un projet de loi émanant d'un député, tendant à faire réduire les charges ou pénalités imposées lors de la renégociation d'un prêt hypothécaire pour les prêts de moins de cinq ans. Ceci avait fait l'objet de nombreux débats en 1983, au lendemain de la fameuse crise de ces années-là. Donc, je vous soumets respectueusement le dépôt de ce projet de loi.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Traduction]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, nous répondrons aujourd'hui à la question no 62.

[Texte]

Question no 62-M. de Savoye:

Le gouvernement a-t-il prévu un montant d'argent à l'intérieur du budget des dépenses du ministère de la Santé pour la Stratégie canadienne anti-drogue et, dans l'affirmative, a) quel en est le montant, b) quelle proportion de cette somme est affectée aux problèmes de l'alcoolisme, c) quelle proportion de cette somme est affectée aux problèmes des drogues, autres que le tabac et l'alcool?


6003

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): a) 21,5 millions de dollars. b) et c) Le rôle que joue Santé Canada dans le cadre de la Stratégie canadienne anti-drogue (SCA) se situe au niveau de la prévention et du contrôle. Pendant nombre d'années, les activités de prévention étaient axées sur la lutte contre l'alcoolisme, alors que les études démontrent depuis 10 ou 15 ans que les Canadiens sont des consommateurs de drogues multiples. C'est pourquoi les programmes de prévention de Santé Canada sont orientés vers les facteurs associés au comportement toxicomanique comme l'alcool, la benzodiazépine, le cannabis, la cocaïne, etc. De plus, les programmes tendent à s'adresser à des groupes cibles particuliers lorsque les différents usages de drogues touchent les femmes, les personnes âgées, les jeunes et les autochtones différemment.

Ci-dessous se trouve une liste détaillée des programmes de Santé Canada qui sont financés par la SCA.







[Traduction]

Le vice-président: Réponse a été donnée à la question mentionnée par le secrétaire parlementaire.

M. Peter Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


6003

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

La Chambre reprend l'étude, interrompue le lundi 19 septembre, de la motion: Que le projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

M. Silye: Votons-nous sur l'ensemble du projet de loi ou seulement sur l'amendement?

Le vice-président: Sur l'amendement.

Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

(L'amendement, mis aux voix, est rejeté)

(Vote no 82)

POUR

Députés
Abbott
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Chatters
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Kerpan
Manning
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Ringma
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Solberg
Speaker
Stinson
Strahl
Thompson
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams-46

CONTRE

Députés
Adams
Allmand
Althouse
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Asselin
Augustine
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Beauce)
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Cannis
Canuel
Caron
Catterall


6005

Cauchon
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Chrétien (Saint-Maurice)
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Crête
Culbert
Dalphond-Guiral
Daviault
de Savoye
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Discepola
Dromisky
Dubé
Duceppe
Duhamel
Dumas
Dupuy
English
Fewchuk
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Guimond
Harvard
Hubbard
Ianno
Jackson
Jacob
Jordan
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lalonde
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap Breton Highlands-Canso)
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Lincoln
Loubier
MacDonald
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Manley
Marchand
Marchi
Marleau
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Pomerleau
Regan
Richardson
Rideout
Riis
Robichaud
Robinson
Rocheleau
Rock
Rompkey
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Solomon
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Terrana
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Walker
Wappel
Wayne
Whelan
Wood
Young
Zed-194

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Députés
Debien
Gagnon (Québec)
Harper (Churchill)
MacAulay
Martin (LaSalle-Émard)
Paré
Plamondon
Ringuette-Maltais

(1100)

Le vice-président: Je déclare l'amendement rejeté. Le prochain vote porte sur la motion principale.

[Français]

Des voix: Débat.

M. Jean H. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui dans le cadre de la discussion que nous menons en deuxième lecture sur le projet de loi C-44, lequel modifie la Loi sur l'immigration, la Loi sur la citoyenneté et la Loi sur les douanes.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je me permettrai quelques observations et commentaires qui devraient nous inspirer ou, à tout le moins, nous faire réfléchir sur la portée des décisions que nous serons appelés à prendre en ce qui a trait au projet de loi C-44.

Dans la Partie I de la Politique canadienne d'immigration et quant à ses grands objectifs, il est clairement stipulé aux alinéas i) et j) de l'article 3 la nécessité, et je cite:

i) de maintenir et de garantir la santé, la sécurité et l'ordre public au Canada;
j) de promouvoir l'ordre et la justice sur le plan international en n'acceptant pas sur le territoire canadien des personnes susceptibles de se livrer à des activités criminelles.
Il va sans dire que le parti que je représente est entièrement d'accord avec cela. Il s'agit de principes et d'objectifs sur lequels nous sommes d'accord, puisqu'ils reflètent les grands consensus sur lesquels repose notre société dite de droit et de justice.

Il y a aussi des préoccupations qui sont directement liées au projet de loi C-44 et qui demeurent également essentielles à la compréhension du débat.

Lors des consultations sur l'immigration que tenait récemment le ministre, quelqu'un a dit que «l'intolérance est l'industrie qui connaît la croissance la plus rapide au Canada». L'hystérie, le racisme, la peur sont fils de l'intolérance et conduisent généralement à confondre la réalité et les perceptions, c'est-à-dire la représentation d'un objet faite par le moyen d'une impression. C'est ce qui fait que depuis quelque temps on cède au Canada à l'impression que les immigrants criminels abondent dans notre société. De là à penser que la criminalité est le lot des immigrants, il n'y a qu'un pas.

(1105)

Il faut donc s'opposer fermement à la diffusion de renseignements dénaturés et erronés au sujet de l'immigration et qui empêchent que s'installe la relation de confiance qui doit exister entre la société d'accueil et les immigrants.

L'an dernier, une étude interne du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration rappelait qu'il n'existe pas de liens entre l'origine ethnique et la propension au crime. Contrairement à ce que pourrait laisser présager un certain courant populaire, M. Derek Thomas, recherchiste senior au ministère, confirme que les personnes nées à l'étranger et habitant maintenant au Canada sont sous-représentées dans nos prisons.

Bien qu'il y ait 20,2 p. 100 de la population canadienne qui soit composée de nouveaux arrivants, ces mêmes gens ne représentent que 11,9 p. 100 des personnes incarcérées ou en liberté conditionnelle, donc c'est la moitié. Les minorités visibles


6006

contrairement, encore une fois, à certains clichés populaires n'étaient pas sur-représentées dans les statistiques sur la criminalité.

À cause des nombreuses questions que se pose la population et à la suite des appréhensions qu'elle manifeste, il est utile de rappeler que le taux de criminalité au pays a baissé de 5 p. 100 en 1993. Selon le Centre canadien de la statistique juridique, et je cite: «Pour la deuxième année consécutive, le taux de criminalité déclaré par les services de police a diminué en 1993. La baisse de 5 p. 100 aura été la plus importante d'une année à l'autre depuis que l'on a commencé à recueillir, en 1962, des statistiques sur la criminalité.» Voilà les faits.

Cela confirme l'énoncé que je faisais tout à l'heure concernant la réalité et les perceptions. Bien que la population perçoive une augmentation du taux de criminalité en général, cela ne correspond pas à la réalité. Il en va de même pour le lien que l'on tente d'établir entre l'immigration et la criminalité. Loin de moi l'idée de vouloir banaliser les activités criminelles, elles existent. Elles existent dans notre société et partout au Canada.

Je sais que la population éprouve des craintes quant à sa sécurité. Les sondages le disent. Toutefois, il faut rétablir les faits. Cette Chambre a le devoir de se fier aux faits et d'agir selon les faits. Il y a lieu aussi de s'interroger et de dénoncer l'origine de ces erreurs et de ces perceptions dans la population. Cette Chambre ne doit pas être le reflet d'un journal tel que Allô Police ni du sensationnalisme médiatique qui surexposent des cas individuels et qui donnent l'impression qu'ils sont devenus la norme au Canada.

C'est impensable qu'après les jeunes à qui on a également tenté d'imputer tous les maux de la terre, ce soit maintenant les immigrants que l'on cible comme le fléau de la criminalité. Ne devrait-on pas penser que ce sont les conditions socio-économiques qui constituent le décor de la criminalité et non l'immigration; que les difficultés économiques, d'adaption, de formation et d'emploi que vivent les familles d'immigrants et les jeunes en particulier correspondent davantage aux véritables causes de la criminalité plutôt que l'immigration elle-même?

(1110)

Je reviens donc au libellé du projet de loi C-44, que le gouvernement déposait le 17 juin dernier en cette Chambre. Il a pour objectif de resserrer les dispositions de la Loi sur l'immigration et de la Loi sur la citoyenneté afin de diminuer les possibilités légales pour les immigrants et les revendicateurs du statut de réfugié reconnus criminels de rester au Canada.

Je tiens à souligner, dans un premier temps, que le gouvernement a le droit et le devoir de protéger les citoyens contre les criminels. En ce sens, l'opposition officielle n'est pas contre le fait de s'assurer que des criminels dangereux ne puissent venir s'établir ou prolonger leur séjour au Québec ou au Canada. Nous appuyons donc les principes sous-jacents au projet de loi C-44, mais nous nous interrogeons sérieusement sur la nature de certaines mesures qui sont mises de l'avant.

Tout d'abord, la première question que nous nous posons a trait à la raison d'être d'un tel projet de loi. Avons-nous un besoin spécifique de resserrer la loi en matière de criminalité, particulièrement chez les immigrants et les réfugiés? Qu'est-ce qui justifie la montée de l'opinion publique canadienne anglaise à l'endroit des immigrants criminels? Serait-ce une vague de campagne de désinformation qui a influencé les Canadiens anglais, surtout à adopter des attitudes frileuses et quasi xénophobes?

Monsieur le Président, au-delà des appréhensions qui demeurent dans nos esprits, il y a des dispositions particulières du projet de loi C-44 au regard desquelles nous avons des réserves. La plus importante de ces dispositions est la volonté clairement exprimée de faire disparaître le droit d'appel pour les immigrants et les réfugiés accusés d'un crime passible de dix ans de prison ou plus. Cela semble aller à l'encontre des principes fondamentaux qui doivent exister dans une société dite «juste», et on se souvient de qui a fait la promotion de cela. C'était l'ancien premier ministre. . . une société «juste». Ce que nous vous demandons aujourd'hui, c'est une société aussi juste que dans le temps où on prônait une société «juste». La Charte des droits et libertés doit s'appliquer à tous quant à une procédure équitable et impartiale.

Un autre élément du projet de loi au sujet duquel nous avons des réserves concerne la détermination de la peine. Le projet de loi C-44 ne tient compte que de l'acte nominal, c'est-à-dire la condamnation maximale pour le type de crime commis sans tenir compte de la sentence rendue par le juge. En effet, même si l'acte criminel est passible selon le Code criminel d'une peine d'emprisonnement de dix ans, ce sont les principes de détermination de la peine qui sont utilisés par les tribunaux pour fixer la sentence.

À titre d'exemple: une entrée par effraction dans une résidence privée est passible d'une sentence à vie; des actes, telle la complicité pour l'émission de cartes de crédit frauduleuses, pourraient justifier le renvoi de l'accusé dans son pays d'origine.

Les accusés reçoivent généralement des sentences de beaucoup inférieures aux peines maximales, comme on le sait. Dans certains cas, il se peut que cette peine ne soit même pas un emprisonnement ou une amende, mais simplement une sentence suspendue ou une mise en liberté surveillée. Un individu pourrait donc n'avoir été condamné qu'à une peine très légère et il se verrait forcé de quitter le pays.

Cette disposition du projet de loi C-44 pourrait constituer une violation de la Convention de Genève. Il est précisé dans le manuel du Haut Commissariat pour les réfugiés, et je cite: «Pour évaluer la nature du crime qui est présumé avoir été commis, il faut tenir compte de tous les facteurs pertinents, y compris les circonstances atténuantes éventuelles.»

(1115)

Le projet de loi C-44 devrait, quant à lui, prendre en considération ces remarques-là.

Un autre aspect dont il n'est pas tenu compte dans le projet de loi C-44, c'est celui de la distinction entre un crime politique et un crime de droit commun. Il nous apparaît inquiétant de renvoyer quelqu'un, pour des raisons politiques, par exemple, san-


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stenir compte des risques que celui-ci court s'il retourne dans son pays. Ce genre de règle manque nettement de souplesse et d'humanité. Ne faudrait-il pas regarder davantage quels sont les risques encourus par rapport aux actes commis?

D'autres questions importantes me viennent à l'esprit. Qu'arrivera-t-il aux résidents permanents qui habitent le Canada depuis de nombreuses années? Dans certains cas, ils sont arrivés au pays alors qu'ils étaient enfants. Aujourd'hui adultes, ils travaillent ici, ont une famille ici et n'ont que de lointains souvenirs de leur pays d'origine. Ils n'ont plus de famille et d'amis là-bas. Voilà la réalité. Ces ges sont des Québécois ou des Canadiens de fait. Les retourner dans leur pays d'origine, est-ce là une bonne solution, la bonne solution?

D'autres éléments du projet de loi méritent également notre attention. Le projet de loi que le ministre a présenté propose d'octroyer aux agents d'immigration le pouvoir de saisir et d'ouvrir tous les colis et documents soupçonnés de servir à des fins frauduleuses. Est-ce que l'on ne contrevient pas ainsi à la Charte canadienne des droits et libertés? Je pense que oui. Notre système judiciaire présume d'abord de l'innocence de l'accusé. Ce droit-là doit être pour tous.

Ces dispositions de saisie de courrier renversent le fardeau de la preuve. Sur quelle base se fera la saisie et comment pourra-t-on identifier la nature des colis? Ces questions sont très lourdes de sens.

Le projet de loi prévoit également que certaines décisions qui appartenaient à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, la CISR, seront dorénavant prises par le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et ses fonctionnaires. D'une part on accorde au ministre de nouveaux pouvoirs d'appel des décisions rendues par un arbitre lors d'une enquête, d'autre part on prive la commission du pouvoir de révision des cas pour motifs humanitaires. S'agit-il là d'une politisation du processus administratif? Est-ce une attaque à l'indépendance du comité CISR? Ne vaudrait-il pas mieux plutôt favoriser un meilleur fonctionnement de la Commission? Je pense que oui.

Je pourrais continuer à soulever d'autres interrogations au sujet de ce projet de loi. Nous aurons l'occasion d'en débattre au comité permanent traitant de la question. Une étude du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, rendue publique cet été, nous apprenait que 1 888 criminels étrangers susceptibles d'être déportés du Canada demeuraient toujours introuvables. Y a-t-il moyen de retrouver ces personnes et de tenter d'empêcher que d'autres puissent faire la même chose à l'avenir sans pour autant ériger de plus grandes barrières à l'entrée et risquer de se retrouver dans des situations aussi embarrassantes que celles décrites ci-haut?

Le problème des criminels étrangers introuvables est-il spécifique? C'est-à-dire y a-t-il plus d'étrangers introuvables que de Canadiens et de Québécois de souche? Combien de Canadiens et de Québécois font actuellement l'objet de recherches infructueuses de la part de la police? Cela représente-t-il une proportion de citoyens significativement plus petite que le pourcentage d'immigrants faisant l'objet du même type de recherches?

Le gouvernement élu, ce gouvernement libéral, devrait, afin de mieux informer la population et la rassurer quant à la situation des criminels étrangers, fournir toute l'information factuelle à ce sujet.

(1120)

On éviterait ainsi la poursuite de la chasse aux sorcières à l'endroit des immigrants et des revendicateurs du statut de réfugié. Je tiens à dire que le Bloc québécois est conscient du problème posé par les criminels étrangers qui se trouvent actuellement au Canada. Nous savons aussi que les activités criminelles provoquent des remous et de l'effroi dans les communautés locales.

Nous appuierons le gouvernement dans ses tentatives de résoudre ce problème de façon durable et équitable. Nous sommes entièrement d'accord sur le fait que les immigrants et les revendicateurs du statut de réfugié ne puissent pas utiliser la Loi de l'immigration ou la réputation du Canada ou du Québec pour fuir leur pays d'origine où ils ont commis des crimes graves. Nous sommes parfaitement d'accord là-dessus.

Cependant, nous ne nous laisserons pas distraire par des observations non fondées qui, comme nous l'avons souligné, risquent de ne pas représenter la réalité. Le gouvernement canadien semble actuellement radicaliser son discours pour plaire à une certaine clientèle. On n'a qu'à penser au projet de loi adopté la session dernière, concernant les jeunes contrevenants. Pensons également aux réticences de plus en plus vives dans le caucus libéral concernant le contrôle des armes à feu ou encore à la motion M-157 déposée par le député libéral de Scarborough-Rouge River, qui vise à réduire les niveaux d'immigration aux périodes de récession économique.

Et puisque nous en parlons, j'aimerais également rappeler que le projet de loi C-44, comme cela a été le cas pour de nombreuses autres initiatives gouvernementales, ne correspond pas à la réalité québécoise. L'opinion publique au Québec réagit fort différemment de celle de nos voisins canadiens en matière de perception du lien à établir entre la criminalité et l'immigration.

Comme le rappelait très justement le journal The Globe and Mail, la semaine dernière, les Québécois ne se sont pas laissés influencer dans leur attitude et leur comportement envers l'immigration par les quelques récents cas sordides que l'on a connus au Canada et que nous déplorons. C'est peut-être un autre aspect de la spécificité québécoise, n'est-ce pas? Les immigrants représentent un apport fondamental et une richesse collective indéniable pour la société canadienne et québécoise. Il ne faudrait pas qu'une loi qui vise à empêcher les criminels de bénéficier du droit d'entrée et d'asile au Canada agisse en porte-à-faux.

Entre les objectifs à poursuivre et les mesures mises de l'avant pour les atteindre, il existe parfois des distortions. Le projet de loi C-44, tel que présenté en deuxième lecture, nous semble souffrir de ce mal. À la lumière des questions et des commentaires soulevés par les membres de cette Chambre, nous souhaitons que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration bonifie cette législation et, par le fait même, rende à la population canadienne et québécoise la confiance en ses institutions.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, je me dois de remercier le député de ses explications. Je crois que son intervention présentait toutefois quelques lacunes, compte tenu que l'accord en vigueur entre le gouvernement fédéral et le Québec sur les questions d'immigration est passablement différent de ce qu'on trouve dans le reste du pays. Le député doit en être conscient.


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Il doit le savoir, du moins jusqu'à un certain point. Il a mentionné que l'attitude des Québécois est différente de celle des autres Canadiens au sujet de l'immigration. Sait-il que dans le cadre de l'accord Québec-Canada, seulement 16 p. 100 des immigrants qui entrent au Canada vont au Québec? Ce chiffre peut être inexact. D'après ce que j'ai compris, un nombre important d'entre eux quittent le Québec chaque année. Le chiffre réel des immigrants qui s'installent au Québec doit donc être plus près de 8 ou 10 p. 100 de l'ensemble des immigrants du Canada.

(1125)

Je crois qu'il est très réaliste d'accepter une telle proportion du total des immigrants dans une région particulière. Selon moi, le reste du Canada devrait en faire autant.

Le député ne comprend-il pas que la différence dans l'attitude des Québécois serait peut-être attribuable au fait que, étant donné le nombre moins élevé d'immigrants au Québec, les problèmes engendrés par l'immigration sont moins grands? Le député accepte-t-il cette explication?

[Français]

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Calgary-Nord-Est pour ses remarques. Comme je le disais dans ma présentation devant cette Chambre, il y a eu une diminution constante au Canada en 1992-1993 du taux de criminalité.

Je suis conscient que la loi du Québec sur l'immigration est différente de celle du reste du Canada, mais elle n'est pas si différente que cela. Comme je le disais, je pense qu'il faut faire attention. Nous ici, en tant que députés, avons le devoir et la responsabilité de ne pas uniquement nous fier à ce qui est écrit dans les journaux, au sensationnalisme que certains journalistes pourraient faire de cette chose-là. Les faits sont là, il y a eu une diminution de 5 p. 100 du taux de criminalité.

C'est vrai qu'aujourd'hui, il peut y avoir certains journalistes qui soient tentés d'en écrire plus que moins sur le cas. Lorsque par malheur dans une société, dans une petite ville, il se produit un crime crapuleux, on a probablement tendance à exagérer, parce qu'à ce moment-là, c'est l'émotion qui joue. Mais je pense qu'en tant que députés, nous devons être au-dessus de la mêlée. Il faut être compatissants, oui, mais lorsque nous prenons des décisions au nom de toute la collectivité canadienne, je pense qu'il faut regarder les faits d'abord. Comme je le disais, les faits démontrent qu'il y a une baisse du taux de criminalité.

* * *

[Traduction]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je veux demander le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion suivante:

Que, nonobstant tout ordre de la Chambre, tout vote par appel nominal qui doit être pris aujourd'hui sur la motion M-150 soit différé jusqu'au mardi 27 septembre 1994, à 15h00.
(La motion est adoptée.)

[Français]

LOI SUR L'IMMIGRATION

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, ce projet de loi que le gouvernement présente sur l'Immigration me concerne particulièrement, car dans mon comté de Québec-Est, il y a le cas de M. Chouaiby qui est arrivé au Canada en 1988 du Maroc. En 1989, il a commis un vol qualifié au cours duquel il a blessé très grièvement un gardien de sécurité et en 1990, il a étranglé une jeune fille de 19 ans.

(1130)

Il a été condamné à la prison; il a passé trois ans en prison. En 1993, il en est sorti et a été accepté au Canada par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. On l'a accepté. On lui a accordé de demeurer au Canada six ans de plus, sept ans en fait, jusqu'à l'an 2000, sous prétexte qu'il pouvait être réhabilité.

Pourtant, je trouvais cela tout à fait inacceptable parce que la mère de la fille qui a été étranglée l'a rencontré sur la rue parce qu'il est revenu dans le même quartier. Elle l'a revu à plusieurs reprises. Quel choc de voir le tueur de sa fille dans son quartier. Elle a dû déménager. Cette mère, troublée depuis, a perdu son emploi parce que, psychologiquement, cela a été un grand choc. Elle a dû déménager par la suite. Elle ne travaille plus et elle a toujours peur de revoir ce type dans son quartier.

J'ai approché le ministre de l'Immigration pour voir s'il était possible d'expulser ce jeune homme qui est encore violent, qui est même considéré par les psychologues et les psychiatres comme étant très violent. La Loi sur l'immigration, telle qu'elle existe en ce moment et malgré ce projet de loi-remarquez bien qu'en principe, on approuve ce projet de loi-contient beaucoup de lacunes. En voilà, une lacune. C'est-à-dire que le nouveau projet de loi n'aborde pas ce genre de cas, qui sont nombreux au Canada. Je pense qu'il y a à peu près 150 cas semblables au Canada.

On est incapable d'expulser ce jeune homme du Canada, au moins jusqu'à l'an 2000, sauf s'il commet un autre meurtre ou un autre crime grave. C'est ridicule! C'est comme si le Canada, les citoyens et surtout la mère de la victime étaient pris en otage, littéralement pris en otage, par un immigrant violent qui est peut-être sur le point de commettre un autre acte de violence. Totalement absurde, totalement inacceptable! Cette personne aurait dû être expulsée le lendemain de sa sortie de prison. Voilà un exemple de la très mauvaise administration du ministère de l'Immigration du Canada. Il s'agit justement d'un cas qu'on aurait pu présenter pour resserrer cette loi.

Donc, il est bien sûr que nous, du Bloc québécois, sommes tout à fait d'accord sur le principe de cette loi, mais elle contient des trous immenses, malheureusement. Le ministre devrait revoir


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saloi et la resserrer pour qu'elle règle les vrais problèmes. C'est le commentaire que je voulais faire.

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Québec-Est de son intervention à ce stade-ci. Je pense que des cas comme celui qu'il vient de nous décrire se produisent fréquemment.

Vous savez la question des réfugiés est de compétence fédérale. Quant à nous, le Québec, nous avons toujours été ouverts aux étrangers. Il est sûr qu'il peut y arriver des cas, comme je l'ai dit tout à l'heure. Ce n'est pas parce qu'il y a des cas isolés, mais la loi doit être appliquée. Il faut bonifier la loi, l'améliorer, mais il ne faut pas faire un cas lorsqu'il s'agit d'un immigrant qui est accusé. La loi doit être claire, mais il ne faut pas faire des cas d'exception. Je pense que c'est dangereux de faire des cas d'exception. C'est la raison pour laquelle nous allons appuyer le projet de loi en deuxième lecture; cependant, nous allons présenter des amendements pour l'améliorer en troisième lecture.

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, j'ai le plaisir et l'honneur de participer au débat sur le projet de loi C-44.

[Français]

Je pense qu'il est possible que le député de Québec-Est parle à travers son chapeau.

[Traduction]

De vigoureux débats ont eu lieu tant à la Chambre qu'à l'extérieur sur les sujets importants que constituent l'immigration et l'exécution dans ce domaine ainsi que l'élimination d'un élément criminel, petit mais dangereux, qui a réussi infiltrer notre système.

(1135)

J'utilise le terme dangereux à bon escient. Le danger est double. Bien sûr, certains auteurs de crimes graves qui ont réussi à se glisser au travers du processus de sélection représentent un danger pour nos concitoyens, mais ils compromettent également l'intégrité de toute notre politique concernant l'immigration et le statut de réfugié.

Pendant des années, nos politiques ont fait l'envie du monde entier. La fierté bien justifiée des Canadiens à l'égard de leur système a favorisé la croissance de notre pays et fait naître une lueur d'espoir dans un monde assailli par la souffrance.

Dernièrement, on a signalé des cas d'abus. Bien que ces cas ne soient pas très répandus, ils réussissent à inquiéter. L'inquiétude est parfois signe de santé. Quand nous nous inquiétons de cas d'abus ou de crimes, nous pensons naturellement à examiner tout le système. À mon avis, il est sain de réévaluer périodiquement tout processus.

Le danger qui nous guette maintenant, c'est que l'on continue à parler de méfaits, à publier des articles dans les journaux sur des criminels qui se servent de tracasseries administratives ou de règlements bizarres pour éviter de quitter le pays, à téléviser desreportages sur des crimes insensés impliquant des gens qui auraient peut-être dû être expulsés il y a belle lurette. Ces gens mettent la bonne volonté et la charité à dure épreuve. Tout cela nous amène à mettre en doute la valeur de tout le système. Il ne le faut pas. Quelques criminels ne devraient pas ébranler notre confiance dans un système qui s'est avéré honnête et efficace, et qui a été cité en exemple partout dans le monde. Voilà pourquoi ce projet de loi est tellement important. J'espère que le député de Québec-Est le comprendra et en viendra à appuyer la mesure.

L'autre jour à peine, j'ai vu une carte du monde reproduite dans un journal sous le titre «La progression de la souffrance humaine». Presque tous les coins de la terre étaient couverts, des maisons de torture des Balkans jusqu'aux champs de la mort de l'Afrique en passant par tous les autres endroits où l'horreur règne.

Nous voyons des frontières s'effacer et des légions d'êtres humains forcés de prendre la route, les migrations de populations atteignant un niveau encore jamais vu dans l'histoire de l'humanité. Nous vivons dans l'une des nations les plus sûres, les plus saines et les plus riches du globe et nous laissons le doute et l'incertitude planer sur des programmes qui nous ont aidés à faire de notre nation ce qu'elle est, qui ont redonné espoir à des millions de gens, qui ont mis fin à leurs souffrances et, j'ajouterai, qui nous ont permis à nous tous, ici présents, ou à presque tous, ou encore à nos parents, à nos grands-parents ou à d'autres ancêtres de faire notre vie au Canada.

Nous avons à notre disposition les moyens de restaurer la confiance dans un processus qui a contribué à former notre nation. Les modifications proposées dans ces quelques pages nous aideront à éliminer des refuges qui profitent aux criminels. Je ne parle pas de cachettes où peuvent se terrer les criminels comme dans les films, mais plutôt des échappatoires et des lacunes de nos lois.

Ces modifications, conjuguées à d'autres éléments de la stratégie à plusieurs volets exposée par le ministre pour réduire les abus contre nos lois de l'immigration, contribueront dans une large mesure à restaurer la confiance dans un système qui a bien besoin d'être consolidé. Je veux mentionner quelques échappatoires et quelques lacunes que je vois dans nos lois.

Le projet de loi élimine la possibilité pour une personne de présenter plus d'une demande de statut de réfugié à la fois. Il nous permet d'écarter les auteurs de crimes graves du processus d'examen du statut de réfugié. Nous n'aurons plus à nous rendre dans des pénitenciers écouter des personnes reconnues coupables de meurtre parce qu'elles prétendent être des réfugiées.

Jusqu'à maintenant, nos fonctionnaires ne pouvaient rien faire pour interrompre le processus d'accession à la citoyenneté même lorsqu'une personne faisait l'objet d'une enquête de l'immigration et, bien sûr, nous ne pouvons pas expulser un citoyen canadien. Avec les modifications proposées, ce processus pourra être interrompu tant que toutes les audiences et tous les examens relatifs à l'immigration ne seront pas terminés.

Rien dans le projet de loi ne devrait inquiéter sérieusement les vrais réfugiés et la plupart des immigrants comme ceux que le Canada accueille depuis toujours. Les personnes qui affirment que les modifications frappent les vrais réfugiés et les immi-


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grantshonnêtes devraient réfléchir sérieusement. Elles devraient penser à tout le temps et à toutes les énergies perdus dans la chasse aux personnes qui se moquent des lois. Les modifications ne frappent pas les innocents, mais elles rehausseront l'image de justice et d'équité que doit projeter notre système d'immigration et d'examen du statut de réfugié.

Les modifications éliminent certaines échappatoires dont ont profité un très petit groupe de criminels et elles rendent le système plus juste. Ce sont de telles mesures qui nous permettront de rétablir la confiance de la population qui, nous le savons, a pu être ébranlée au cours des derniers mois et des dernières années.

(1140)

Avant de terminer, je voudrais dire un mot d'une disposition qui a donné lieu à quelques critiques. Il s'agit de celle qui retire à la Section d'appel pour la confier au ministre la décision d'autoriser pour des raisons humanitaires des personnes qui ont commis des crimes graves à rester au Canada.

Ce n'est pas un complot pour priver la Section d'appel de ses pouvoirs. Le but est simplement de rendre le système plus responsable. La Section d'appel peut toujours revoir ces cas sur les points de droit et de fait. Dans la situation actuelle, le ministre doit répondre des conséquences, si un criminel grave reste au Canada, mais il n'a pas son mot à dire dans la décision qui est à l'origine de ces conséquences.

Si le projet de loi est adopté, le gouvernement ne prévoit pas et ne prédit pas qu'un moins grand nombre d'ordres d'expulsion seront suspendus. Nous disons que notre objectif est de protéger les Canadiens qui pourraient être menacés, mais de reconnaître que, pour des motifs humanitaires, il y a lieu de garder chez nous des personnes qui ont commis des crimes graves.

Ce projet de loi nous donne la chance de rétablir la confiance dans le système. Soyons francs, les gouvernements n'ont pas droit à beaucoup de chances. Si nous échouons ici, nous n'aurons peut-être pas d'autre chance. C'est pourquoi nous prenons la chose tellement au sérieux, et c'est pourquoi nous ne tolérons absolument pas ce type de comportement.

Disons les choses carrément. Si les Canadiens rejettent nos politiques sur les réfugiés et l'immigration, notre monde sera bien plus sombre et bien plus triste. Ce dossier ne se prête pas aux manipulations politiques; on constate, en jetant un coup d'oeil sur le monde autour de nous, que c'est une question de vie ou de mort pour bien des gens.

J'exhorte tous les députés à adopter cette mesure législative sans tarder.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, j'ai une question à l'intention de la secrétaire parlementaire. Y a-t-il une disposition du projet de loi qui répond aux préoccupations du député de Québec-Est, lequel se demande si on peut expulser les auteurs de crimes de violence qui ne sont pas citoyens canadiens. Y a-t-il quelque chose à ce sujet dans le projet de loi?

Mme Clancy: Monsieur le Président, je suis ravie de voir le député de Calgary-Nord-Ouest parler pour le député de Québec-Est, qui trouvera sans doute aussi le moyen de parler pour lui-même.

Quoi qu'il en soit, le député de Calgary-Nord-Ouest devrait lire le projet de loi et il y trouvera la disposition qui l'intéresse. Si le député a du mal avec l'interprétation, il pourrait vérifier auprès de sa collègue, dont j'oublie malheureusement le nom de la circonscription, mais une de ses collègues qui, je le sais, est membre du Barreau et qui pourrait lui venir en aide, ou s'adresser peut-être au porte-parole de son parti en matière de justice.

Quoi qu'il en soit, le projet de loi contient vraiment une disposition à ce sujet, et si le député se donne la peine de le lire attentivement, il la trouvera sûrement.

Le vice-président: Je vous ferai remarquer en toute déférence, honorables collègues, que les députés devraient se traiter les uns les autres avec un peu plus de respect que ce ne fut le cas dans cette réponse. La secrétaire parlementaire a-t-elle quelque chose à dire à cet égard?

Mme Clancy: Non, monsieur le Président, la secrétaire parlementaire n'a rien à dire à cet égard, sauf que vos propos la rendent perplexe. Je ne comprends pas. Peut-être pourriez-vous m'expliquer. Je suis désolée.

Le vice-président: Revenons-en aux questions ou observations. La parole est au député de Bourassa.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours de la secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Elle est très experte, très compétente en la matière. Elle a fait un travail formidable quand elle était dans l'opposition, mais j'avoue que je ne la suis pas dans son discours d'aujourd'hui. D'un côté, elle a un discours très humaniste, elle l'a toujours eu, mais d'un autre côté, comment peut-elle justifier ce projet de loi C-44 qui va à l'encontre, je pense, de plusieurs principes de la Convention de Genève?

Par exemple, on ne fait pas la différence entre un crime de nature politique et un crime de droit commun. Comment justifier qu'une partie importante du mandat de la CISR soit transférée au ministère et au ministre? Comment justifier, par exemple, que des résidents permanents qui sont ici depuis une dizaine, une vingtaine ou une trentaine d'années, ne pourront plus avoir le droit d'appel auprès de la division d'appel de la CISR?

(1145)

Elle va les expulser, ces gens, parce qu'ils ont commis un crime punissable de dix ans ou plus de pénitencier, mais qui, en fait, ont reçu une amende ou ont vu leur sentence suspendue ou ont été mis en liberté surveillée. Pourquoi la secrétaire parlementaire n'a-t-elle pas reconnu que le taux de criminalité, comme notre député l'a dit tout à l'heure, a diminué, au Canada, au cours des dernières années, de 5 p. 100 en 1993?

Pourquoi ne reconnaît-elle pas que le taux de criminalité des immigrants est inférieur au taux de criminalité des Canadiens nés ici et qu'en général, les immigrants sont plus respectueux des


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lois que les Canadiens nés ici? Je ne la suis pas.Enfin, je reconnais qu'elle est très compétente, qu'elle connaît bien la matière et qu'elle a toujours eu un discours très humaniste à cet égard.

[Traduction]

Mme Clancy: Monsieur le Président, je tiens à rassurer le porte-parole du Bloc québécois en matière de justice, le député de Bourassa, nous n'expulserons pas les gens qui respectent la loi.

Nous sommes tout à fait d'accord avec lui quand il dit que le taux de criminalité pour les immigrants et les réfugiés dans notre pays est effectivement inférieur à la moyenne nationale; cela ne fait absolument aucun doute. On n'a qu'à vérifier les chiffres, comme il l'a sûrement fait.

Je voudrais faire deux mises au point. Il y a peut-être eu un problème de traduction mais en ce qui a trait aux infractions, il s'agit d'un acte criminel aux termes de la loi et de deux infractions sommaires.

Je n'ai peut-être pas bien compris la question sur ce point. Si le député veut la reformuler ou me la poser de nouveau, je vais tâcher de bien saisir. C'est une affaire bien simple. S'il y a un problème, je serai heureuse de tâcher de le résoudre.

Quant au droit d'appel, le droit d'appel auprès de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié subsiste toujours pour des questions de droit et de fait. Il existe maintenant un droit d'appel auprès du ministre pour des motifs d'ordre humanitaire. Comme je l'ai dit dans mon intervention, cela s'explique parce que le ministre doit faire face aux conséquences. C'est une question de responsabilité, comme le député le sait bien. En tant que députés, nous avons des comptes à rendre à nos électeurs dans quatre ou cinq ans.

Par conséquent, comme le ministre est responsable par-devers la Chambre tandis que la CISR est, comme il se doit, indépendante du ministre pour les questions de fait et de droit, il est maintenant loisible au ministre de prendre des décisions fondées sur des motifs d'ordre humanitaire.

Comme je l'ai dit également dans mon intervention, nous ne prévoyons pas que le nombre des appels exaucés augmentera énormément, mais il s'agit là d'une autre garantie touchant les motifs d'ordre humanitaire qui est enracinée dans la responsabilité politique.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'aimerais, afin de racheter la députée d'Halifax, lui poser à nouveau essentiellement la question que mon collègue du Parti réformiste lui a posée tout à l'heure et à laquelle elle n'a pas répondu. Est-ce qu'elle aurait l'obligeance de me répondre de quelle façon ce projet de loi répondra à un cas comme celui que j'ai mentionné auparavant?

[Traduction]

Mme Clancy: Monsieur le Président, c'est avec un peu d'appréhension que j'aborde à nouveau cette question. Le député a parlé d'un cas particulier dans son intervention. Je suis désolée, mais je n'ai pas entendu tous les détails concernant ce cas.

Comme vous en conviendrez sûrement avec moi, monsieur le Président, je crois aussi qu'il serait imprudent de faire des observations sur les détails d'un cas. Aussi, comme je le fais souvent avec d'autres députés, je me ferai un plaisir d'examiner le dossier dont parle le député, si celui-ci veut bien me voir dans mon bureau ou dans le couloir. Je serai alors heureuse de me pencher sur cette question. Il serait toutefois inopportun de parler des détails dans le cadre du débat général.

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le débat entre le député de Québec-Est, qui vient de donner des exemples d'abus du système, et la secrétaire parlementaire, qui a prétendu que les réponses à certaines de ces préoccupations se trouvent dans le projet. Ce que je vais dire démontrera peut-être qu'elles ne s'y trouvent pas.

(1150)

Je suis heureuse de parler aujourd'hui à la Chambre des modifications à la Loi sur l'immigration qui sont proposées dans le projet de loi C-44, en ce qui a trait aux expulsions et au renforcement de l'application de la loi en vue de régler le problème du danger que présente l'entrée de criminels au Canada. Une refonte sérieuse s'imposait depuis longtemps dans ce domaine. Mon parti a d'ailleurs porté ces questions à l'attention de la Chambre et du ministre à maintes occasions. Les députés réformistes ont vivement réclamé des modifications sérieuses et solides dans le domaine de l'immigration.

Je me réjouis que le gouvernement reconnaisse enfin le bien-fondé de nos demandes, mais ce projet de loi n'est encore qu'un modeste progrès. À mon avis, le projet de loi C-44 pourrait nous faire plus de mal que de bien en nous donnant, à tort, l'impression que nous sommes en sécurité.

On dira aux Canadiens que les dispositions sur l'immigration ont été modifiées et que les criminels ne pourront plus entrer dans notre pays; ce n'est toutefois pas le cas actuellement, et cela ne changera pas dans l'avenir. Il faut que les Canadiens connaissent les faits. Il ne faut pas leur laisser croire que le problème n'existe plus parce que le gouvernement prétend que ses palliatifs régleront quelque chose.

Le projet de loi visant à modifier la Loi sur l'immigration n'atteint pas l'objectif souhaité parce que le système n'a pas été remanié pour permettre ces changements. C'est le système qui est fautif. Comme en témoignent d'innombrables exemples législatifs passés et présents, il ne servira à rien de remanier les dispositions législatives si l'on n'est pas disposé à apporter des modifications fondamentales au système. Il ne faut pas simplement donner l'impression qu'on veut résoudre le problème de la criminalité dans notre processus d'immigration, mais on doit aussi montrer sa ferme détermination à obtenir des résultats qui font défaut au système actuellement.

Le projet de loi C-44 est un pas dans la bonne direction, en ce sens qu'il aidera à s'assurer que les criminels soient exclus du système d'immigration une fois qu'ils auront été identifiés. Les criminels, une fois identifiés, verront en effet leurs appels limités.

Cependant, le projet de loi est impuissant en ce sens qu'une personne ayant des antécédents criminels graves peut venir au Canada, y vivre librement et se déplacer sans la moindre contrainte. Toute personne qui entre au Canada ne fera l'objet d'une vérification de sécurité que tout juste avant une audience


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sur le statut de réfugié ou lorsqu'elle remplira une demande derésidence permanente. Des mesures immédiates seront alors prises pour l'expulsion des criminels, comme il se doit, mais c'est comme essayer de faire sortir le renard du poulailler après que le renard eut tué des poules. Le but n'est pas d'élaborer une stratégie pour faire sortir le renard du poulailler. C'est plutôt de concevoir un système pour prévenir qu'il n'y entre.

Nous avons des gens aux avant-postes qui sont là pour questionner au point d'entrée ceux qui font une demande de statut de réfugié. Pourquoi n'habilitons-nous pas ces gens-là à faire des enquêtes pour déterminer si le demandeur est un criminel recherché ou une personne ayant des antécédents criminels graves? Nous ne leur fournissons même pas les outils nécessaires pour procéder à de telles enquêtes. Nous laissons même la porte du poulailler ouverte et affichons le message suivant: «Si on découvre que vous êtes un renard, il se peut qu'on vous demande de partir.»

Cet été, j'ai eu l'honneur de rencontrer un groupe de policiers du peloton B de la 12e division à Westside, à Toronto, les amis et collègues de travail de Todd Baylis. Cet agent de 25 ans a été brutalement assassiné le 16 juin 1994 dans l'exécution de ses fonctions par une personne sous le coup d'un ordre d'expulsion.

Ce que j'ai vu et ressenti lorsque je les ai rencontrés, c'est la douleur d'hommes et de femmes se sentant trahis par le système qu'ils essaient de faire respecter. Ils ont parlé du harcèlement, du manque d'informations, du manque d'application des règles de l'immigration, du manque de personnel et de formation en ce domaine, du danger imminent constant et du moral qui tombe à zéro dans leur travail où ils sont confrontés à la vie et à la mort, aux drogues et à la violence dans leur collectivité qui était plus calme avant.

J'ai lu ce projet de loi et j'ai réfléchi. J'ai pensé, d'une part, à la douleur et à la colère de ces agents et, d'autre part, à la réaction du gouvernement. Les nouvelles règles ne feront rien pour prévenir que la même chose se répète.

J'étais consternée, comme tous les Canadiens devraient l'être, qu'après ce meurtre insensé, une enquête qui, soit dit en passant, n'a blâmé personne et la rédaction de ce projet de loi qui a suivi, Todd Baylis courrait aujourd'hui le même danger que celui qui lui fut fatal ce soir-là. Ceux qui ont conçu cette supposée solution devraient avoir honte. Il est simplement trop tard pour dire que cette tragédie n'aurait jamais dû se produire, mais pour les amis de Todd Baylis, c'est une réalité.

Il est donc impératif qu'en tant que législateurs nous prenions au sérieux l'obligation de renforcer le système, qui a besoin d'une refonte pour que la mémoire de l'agent Baylis serve de catalyseur garantissant que pareilles erreurs ne se reproduisent jamais.

(1155)

Le ministre a dit que le système d'immigration n'était pas le seul à blâmer dans ce cas-ci et que le meurtre était tout autant le produit de notre société que le fait que l'auteur n'ait pas été expulsé à titre d'immigrant. Malheureusement, il y a peut-être du vrai dans ces propos. Le profil de criminalité de ce jeunehomme a été établi il y a déjà bien des années, et une bonne partie de ce profil le faisait relever de la Loi sur les jeunes contrevenants, un autre système gouvernemental de règles et d'excuses qui bafoue le sens des responsabilités et engendre un manque de respect à l'égard des lois de notre pays.

Les petites retouches que l'actuel gouvernement s'apprête à apporter à la Loi sur l'immigration et à la Loi sur les jeunes contrevenants ne correspondent pas aux attentes des Canadiens ni aux besoins réels de sécurité dans nos rues et nos foyers.

Les fonctionnaires et les politiciens doivent se réveiller et se mettre à l'écoute des Canadiens. J'ai rencontré des propriétaires de boutiques le long de la rue Queen, à Toronto, qui voient chaque jour une centaine de transactions de crack se dérouler devant leurs commerces vides. Je me suis entretenue avec des immigrants qui sont propriétaires de restaurants et qui risquent de perdre leur gagne-pain à cause de la montée de la criminalité dans leur voisinage. Ils sont nombreux au sein de cette communauté à réclamer des changements à la limite d'âge et à l'administration des dossiers concernant les jeunes délinquants. Si le gouvernement tient à ce que nos rues et nos maisons soient sûres, il lui faut mettre ces changements en place, et ce, le plus tôt possible.

Cette mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui laisse un certain nombre de questions graves sans réponse et qui commandent une solution d'urgence. Il y a d'abord les importantes questions d'ordre administratif. Le budget consacré au traitement des renvois s'établissait à 13 millions de dollars en 1991-1992. Il a augmenté de 23 millions de dollars au cours de l'exercice suivant. Cette augmentation de 77 p. 100 nous amène à nous poser une première question: De quelle façon ces sommes d'argent ont-elles été dépensées puisque l'exécution des ordonnances d'expulsion et leur suivi restent toujours un véritable cauchemar administratif?

Voici la deuxième question: Qu'est-il arrivé aux milliers de dossiers inactifs qui, selon ce que nous a révélé l'enquête, sont restés dans des boîtes parce que les bureaux de l'immigration sont à court d'agents et de personnel de soutien administratif? Ces dossiers ont-ils été traités depuis?

Qu'en est-il de la demande d'une base de données que partageraient la police et les agents d'immigration et qui aiderait à mettre la main au collet de ceux qui ont réussi à échapper à l'expulsion? A-t-on mis à jour les systèmes informatiques du ministère pour déterminer le nombre exact de réfugiés et d'immigrants qui font l'objet d'une ordonnance d'expulsion? A-t-on mis en place un meilleur système pour retrouver ceux d'entre eux qui étaient censés être prêts à quitter volontairement le pays?

Je ne saurais trop insister sur l'importance d'obtenir des réponses à ces questions. Cet été, il y avait environ 26 000 ordonnances d'expulsion inexécutées. De ce nombre, environ 11 000 ordonnances se trouvaient dans le système de données du Centre d'information de la police canadienne, qui informe les policiers de tout le pays du nom des personnes passibles d'arrestation pour des raisons d'immigration.

Il y a donc un écart considérable entre ces chiffres. Le problème fondamental est la piètre administration de ce secteur cru-


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cial.Il arrive souvent que les policiers ne sachent pas s'ils ont affaire à quelqu'un qui fait l'objet d'une ordonnance d'expulsion. Les responsables du système ne savent pas eux-mêmes combien d'ordonnances d'expulsion sont des dossiers actifs, étant donné les trop nombreuses inconnues inhérentes au système.

Par exemple, à l'heure actuelle, il est impossible de déterminer si une personne a quitté le pays ou si on lui a demandé de le faire, à moins qu'elle n'ait été escortée par un agent d'immigration ou qu'elle n'ait avisé les autorités de son départ. Cette situation doit changer. Le système actuel d'expulsion est gravement lacunaire dans la mesure où il met beaucoup trop l'accent sur le principe que les gens vont observer l'ordonnance de renvoi.

En réponse à une demande du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, M. Hallam Johnston du ministère a accepté de fournir aux membres de ce comité une liste des empêchements aux renvois. Il a déclaré essentiellement ceci:

Le premier empêchement est le fait que les gens refusent de partir du Canada. Par exemple, ils ne se conforment pas délibérément aux ordonnances d'expulsion, ils ne se présentent pas lorsqu'ils sont convoqués pour discuter de leur renvoi (environ 40 p. 100 font défaut) et ils ne sont pas au point d'entrée pour exécuter le renvoi, une fois les dispositions prises à cet égard (environ 10 p. 100 ne se présentent pas dans ce cas).
L'absence de documents de voyage est un autre empêchement aux renvois. Les gouvernements étrangers exigent que les citoyens qui retournent dans leur pays soient en possession d'un passeport valide ou d'un autre document de rentrée. Il est difficile de trouver les documents et de prouver au gouvernement étranger que la personne renvoyée est vraiment un citoyen du pays en cause.
La modification proposée ne renferme rien qui pourrait nous laisser croire qu'on va régler le problème du contrôle de l'expulsion de ceux qui doivent quitter le Canada. Il est ridicule de continuer de cette façon. Il est tout à fait incroyable que le ministère même reconnaisse que la plus grande difficulté que pose l'expulsion des gens réside dans le fait que ces derniers ne partent pas d'eux-mêmes. Comment les Canadiens peuvent-ils avoir confiance dans le gouvernement, lorsqu'ils entendent des choses de ce genre? Comment les Canadiens peuvent-ils être rassurés et être certains que les criminels seront expulsés, lorsque le gouvernement se fie à ces individus pour sortir eux-mêmes du pays?

(1200)

Nous ne devrions pas être surpris d'apprendre que les gouvernements étrangers hésitent à reprendre leurs citoyens, lorsqu'ils sont expulsés pour des motifs d'activités criminelles.

L'ironie de l'expulsion des criminels professionnels a été signalée ce week-end dans un reportage national. On a appris alors que le Canada avait expulsé 227 personnes vers la Jamaïque de janvier à juillet de cette année, ce qui représentait un quart de toutes les personnes renvoyées du pays. On a également précisé que certains pays considéraient que les pays riches comme le Canada se déchargeaient de leurs problèmes sur eux.

Le gouvernement a-t-il un plan pour garantir aux Canadiens qu'on va pouvoir compter sur la délivrance de tous les documents voulus pour expulser les gens renvoyés, malgré la résistance ou le manque de coopération des pays destinataires?

Une fois que ces criminels sont expulsés, le gouvernement peut-il nous assurer que, grâce à l'intégrité de notre propre système, ils ne pourront pas rentrer à nouveau au Canada?

Dans la plupart des cas, on aurait dû éviter les problèmes en refusant au départ l'accès au Canada à des criminels. On pourrait y parvenir en établissant les liaisons informatiques voulues entre les systèmes du CIPC et d'Interpol, ce qui permettrait de vérifier le casier judiciaire des personnes qui demandent le statut de réfugié à un point d'entrée. Ce doit être une priorité.

Un autre problème se pose du fait qu'il y a trop peu d'enquêteurs, qu'ils sont mal formés et qu'ils ne peuvent compter sur le soutien et la protection nécessaires. Est-il surprenant qu'un grand nombre d'expulsions effectuées chaque année visent des gens accusés d'être restés au Canada plus longtemps que leur visa de visiteur ne le prévoyait? Ce sont des grands-parents qui rendent visite à leurs enfants et non de dangereux criminels. Pourquoi faut-il remédier à cette situation? A-t-on reconnu la nécessité d'engager plus d'enquêteurs, ainsi que de prévoir un meilleur soutien administratif et les systèmes informatiques voulus? Les policiers, comme Todd Baylis, auparavant, qui patrouillent nos rues sont-ils mieux informés maintenant qu'ils ne l'étaient en juin?

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a déclaré que sa stratégie au chapitre des renvois poursuivait trois principaux objectifs: faire sortir les criminels étrangers du Canada, s'assurer qu'on respecte les ordonnances de renvoi et veiller à ce que les revendicateurs du statut de réfugié dont la demande est rejetée soient bien renvoyés dans leur pays.

Le 7 juillet, le ministre a affirmé que le gouvernement avait adopté des priorités claires sur la question des renvois. Il a ajouté qu'il s'agissait de renvoyer chez eux les criminels qui présentaient un danger pour la société canadienne, qu'on allait clairement identifier ceux qui abusaient volontairement du système d'immigration et prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'ils soient expulsés. Il a conclu en disant que la loi et d'autres mesures qu'il avait présentées relativement à la lutte contre la criminalité allaient permettre aux agents d'immigration de prendre rapidement des mesures énergiques dans ces cas-là.

Il s'agit là d'une position très ferme. Le ministre doit avoir une grande confiance dans son système actuel pour croire qu'il peut atteindre ces objectifs sans procéder à une réforme en profondeur, réforme dont on n'a vu aucun signe jusqu'à maintenant.

Le ministre est-il disposé à mettre son poste en jeu s'il ne peut pas honorer cet engagement? Démissionnera-t-il de son poste de ministre si son nouveau groupe de travail et son plan d'expulsion ne réussissent pas à éviter d'autres tragédies comme celles dont nous avons entendu parler ce matin et qui se sont produites encore cette année?

L'engagement qu'a pris le ministre n'est pas nouveau; d'autres gouvernements ont pris le même par le passé. Mais leminis-


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tre a promis des mesures immédiates. Comment sa promesse s'est-elle concrétisée? Cette semaine, un reportage paru dans le Globe and Mail laisse entendre que les autorités et les installations de l'aéroport international Pearson étaient incapables de contrôler l'afflux des nouveaux arrivants. Des criminels passaient quand même par les bureaux d'immigration désespérément débordés et entraient librement dans nos collectivités.

Comment le ministre peut-il croire que les Canadiens auront confiance dans des groupes de travail et des plans d'expulsion, alors que le système qu'il prétend être efficace continue de susciter parmi eux, et avec raison, de vives craintes au sujet d'un système d'immigration qui ne fonctionne pas?

Depuis que le groupe de travail de l'Immigration et de la GRC a été créé en juillet dernier, il a découvert que 1 888 criminels devaient être expulsés du Canada. Peut-on dire que les mesures rapides et décisives du ministre ont été efficaces?

Sur tous les cas recensés, seulement 14 criminels ont effectivement été expulsés, ce qui représente moins de 0,7 p. 100 du nombre total. En fait, le groupe de travail a découvert que 14 autres personnes recherchées étaient décédées. Cette statistique montre que le groupe de travail est au moins constant dans ses efforts.

(1205)

Il faut également se rappeler qu'un groupe de travail constitue une mesure temporaire et non permanente. Comment le projet de loi C-44 pourra-t-il être appliqué convenablement lorsque le groupe de travail ne sera plus chargé de ces cas? Sur qui comptera-t-on alors? Qui délivrera les avis d'expulsion? Qui surveillera l'exécution des mesures d'expulsion et s'assurera que ceux qui doivent quitter le Canada le font réellement? Quelles mesures permanentes prend-on pour combler les lacunes du système et le besoin urgent de mettre en oeuvre les changements proposés?

Quand on regarde les chiffres publiés par le groupe de travail en août, on constate que 414 de ces cas sont actuellement traités dans le système judiciaire. Sept cent soixante-dix-neuf autres personnes, qui ont demandé un réexamen de leur cas, attendent actuellement une réponse. Cinq cent trente-deux autres personnes font actuellement l'objet d'une enquête. Faut-il en déduire que l'on s'occupe d'elles?

Une importante lacune de cette mesure législative, c'est qu'elle suppose qu'une personne qui a des antécédents criminels graves viendra au Canada et elle sollicitera, aux fins de la détermination du statut de réfugié, une audience dans le cadre de laquelle on fera une vérification de sécurité. Elle suppose que les criminels attendront d'être découverts au lieu d'aller se cacher pour éviter d'être expulsés automatiquement. Rien, dans le système ou dans les modifications, ne les empêche d'agir ainsi.

Finalement, nous devons nous demander si ces mesures règlent vraiment le problème ou si elles ne sont qu'une réaction à une crise. Par exemple, nous ne savons pas encore comment le système traitera les personnes qui ont des antécédents criminels, qui ont commis une série d'infractions, dont des voies de faitpour lesquelles on ne peut imposer une peine maximale de dix ans. Ces personnes sont un peu comme des barils de poudre sur le point d'exploser et pourtant, le système d'immigration ne prendra aucune mesure contre elles tant qu'elles n'auront pas commis un autre acte criminel. Cette modification particulière, tout comme la Loi sur les jeunes contrevenants, ne tient aucunement compte des actes criminels commis à répétition, pour le plus grand danger des Canadiens.

Les habitants de ma circonscription, Port Moody-Coquitlam, reconnaissent que nous avons besoin de mesures législatives plus sévères à ce sujet. Il suffit de mentionner le nom de Michael Drake pour voir leur colère monter, car ils savent que le système n'a pas encore réussi à expulser ce pédophile reconnu aux États-Unis. Drake a non seulement réussi à faire reporter ses ordonnances d'expulsion à maintes reprises, mais il a aussi réussi à rester en liberté jusqu'à la tenue de son audience.

Il est de notre devoir de veiller à ce que des lois soient adoptées pour mettre fin à de telles situations. Le projet de loi C-44 comme tel n'apportera pas les changements nécessaires pour corriger les torts causés par un système qui a été trop négligé. Cependant, en tant que législateurs, nous devons faire en sorte que les changements que nous proposons d'apporter au système aillent, en fait, au coeur du problème et ne répondent pas simplement aux besoins du moment.

Nous devons équiper les gens non seulement d'un livre de règlements, mais aussi des outils nécessaires pour faire leur travail. Nous devons faire en sorte que les commerçants, les gens d'affaires, les parents, les policiers, qu'ils soient Canadiens de naissance ou par choix, n'aient pas à craindre le système qui devrait les protéger.

Le projet de loi C-44, qui vise à modifier la Loi sur l'immigration, est un pas dans la bonne direction. Cependant, cette mesure législative ne peut, à elle seule, garantir le succès du système. Le gouvernement doit faire plus pour montrer son engagement à assurer la sécurité de tous les Canadiens, dans leur foyer et dans la rue.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je remercie la députée de Port Moody-Coquitlam pour son exposé qui était très clair. Je rappelle à la députée ce qu'a dit le ministre lors de la présentation de ce projet de loi, à savoir qu'au fil des ans, les immigrants avaient contribué à l'édification de notre pays, que la contribution des immigrants récemment arrivés était aussi généralement reconnue, mais que les Canadiens ne tolèrent pas et qu'il ne tolérera pas que l'on abuse de la générosité de notre pays et que l'on enfreigne ses lois. Le but de ce projet de loi est de renvoyer tout immigrant ou réfugié qui viole les lois de notre pays.

Le Parti réformiste nous a dit que nous devions réduire notre déficit annuel et la dette publique. Je suis d'accord avec lui sur ce point. Cependant, pour faire ce que nous demande le Parti réformiste dans le domaine de l'immigration, il va falloir des ressources supplémentaires-humaines et financières.


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(1210)

La députée de Port Moody-Coquitlam pourrait-elle nous dire où son parti suggère que nous prenions les fonds supplémentaires nécessaires pour mettre en oeuvre les mesures que le Parti réformiste aimerait voir figurer dans le projet de loi C-44?

Mme Hayes: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses commentaires. J'aimerais faire une remarque à propos de ce qu'il a dit, sa question mise à part.

Je m'efforce, dans mes commentaires, de tenir compte des besoins de tous les Canadiens, de naissance ou par choix. Tous les immigrants ne sont pas des criminels. En fait, très peu le sont. La même chose va pour les Canadiens. Très peu exercent des activités criminelles. Les immigrants, comme les Canadiens, pâtissent de l'abus qui est fait de notre système. Je tiens à bien le préciser. C'est mon but. Les gens que j'ai rencontrés à Toronto étaient eux-mêmes des immigrants. Ils ont été eux-mêmes les victimes de l'abus de notre système. Je parle tant en leur nom qu'en celui de tous les Canadiens.

Ce que le député a dit est vrai. Les mesures actuelles ne sont pas satisfaisantes. Elles nuisent à l'intégrité du système, aux immigrants et aux Canadiens. Elles ne permettent pas de s'attaquer à l'élément criminel. Elles ne permettent pas de faciliter l'accueil que fait la société canadienne aux immigrants.

Nous avons besoin de gens qui viennent ici en pouvant compter sur un emploi. Nous avons besoin d'assurer un meilleur avenir aux gens qui viennent chez nous.

Certes, nous devons mettre de l'ordre dans nos finances et voir au fonctionnement de notre économie. Cependant, nous devons aussi assurer des débouchés aux personnes qui viennent s'établir ici. Nous devons sélectionner les gens de façon à ce qu'ils trouvent des débouchés quand ils arrivent. Amener ici des gens qui n'ont aucun avenir n'est juste ni pour eux, ni pour les Canadiens.

Oui, il faut revoir les chiffres de l'immigration de sorte à avoir un mixage économique qui soit satisfaisant pour tous les Canadiens, nouveaux et anciens. Nous serons, ce faisant, plus que capables de répondre aux besoins puisque le système fonctionnera pour tous les Canadiens.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, j'éprouve le plus grand respect pour ma collègue de Port Moody-Coquitlam. Nous siégeons au même comité et elle est bien connue pour le caractère réfléchi de ses interventions sur tous les sujets.

J'ai trouvé surprenant de l'entendre dire dans son discours que le projet de loi ne contient pas de garanties suffisantes pour empêcher des criminels expulsés de revenir au Canada. Ses propos m'ont étonné car, étant elle-même originaire d'une province de l'Ouest, ma collègue sait que le Canada a l'une des plus longues frontières non défendues au monde et qu'il a toujours été impossible d'empêcher les entrées illégales de toutes sortes le long de notre frontière.

Je fais remarquer à ma collègue que les dispositions du projet de loi concernant la saisie des faux documents tiennent compte de cette situation. Nos services de sécurité peuvent dépister les fraudeurs, criminels ou autres, parce que tôt ou tard on finit toujours par scruter leurs documents et donner l'alerte aux autorités compétentes.

Je parle ici des criminels qui utilisent des passeports, permis de conduire, cartes d'assurance-maladie, certificats de naissance et autres documents falsifiés afin de revenir au Canada et d'y rester.

J'aimerais entendre le point de vue de ma collègue à ce sujet. Elle reconnaîtra certainement que le projet de loi propose une façon efficace et progressiste de supprimer l'échappatoire des faux documents et, partant, d'expulser les fraudeurs.

Mme Hayes: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses observations et questions. Je reconnais que le projet de loi élimine l'échappatoire concernant l'entrée de faux documents au Canada et je suis stupéfaite que cela ait été possible jusqu'à maintenant. Il est tout à fait indiqué que la loi empêche ce genre de pratique.

Je ne suis pas sûre cependant d'avoir répondu à la question du député.

(1215)

Le projet de loi vise les colis de documents illégaux qui peuvent entrer illégalement au Canada par voie postale pour être ensuite utilisés ici. Le député faisait cependant référence aux personnes qui traversent notre frontière en possession de documents illégaux. Cette partie du projet de loi ne vise aucunement des personnes qui se présenteraient à nos frontières en possession de documents illégaux ou falsifiés. Il ne régit pas ce genre de situation.

À cet égard, le système actuel ne comporte aucun moyen de contrôle. Nous acceptons la parole de ceux qui viennent au Canada. Ces personnes ne sont soumises à aucun système de sécurité tant qu'elles ne se présentent pas à une audition en vue d'obtenir le statut de réfugié ou à un autre genre d'audition.

J'en reviens donc à ce que je disais plus tôt. Nous laissons les renards entrer dans le poulailler et nous nous attendons à ce qu'ils viennent se soumettre aux procédures de vérification. Voilà le problème, auquel le projet de loi n'apporte pas de solution.

[Français]

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Monsieur le Président, honorables collègues de cette Chambre, je suis fière de prendre la parole aujourd'hui en faveur du projet de loi C-44, Loi visant à modifier la Loi sur l'immigration.

[Traduction]

Le Canada est un grand et généreux pays. Ses portes ont toujours été ouvertes à ceux qui rêvaient d'un avenir meilleur, à ceux qui sont venus ici parce qu'il n'y avait ni guerre civile ni conflit, pour élever une famille dans un des meilleurs pays


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dumonde. D'ailleurs l'ONU a bien voulu nous honorer deux fois du titre suprême.

Ces immigrants, des gens comme mes parents, sont devenus citoyens canadiens et participent activement à la vie de notre société. L'histoire du Canada est pleine d'histoires d'immigrants qui, grâce à leur travail acharné et à leur persévérance, ont aidé à faire de ce pays ce qu'il est aujourd'hui.

[Français]

Au cours de notre histoire, à toute époque, les immigrants sont venus. Sont venus aussi certains individus reconnus coupables d'infractions graves à la loi. Pour empêcher que cela ne continue et pour régler les problèmes qui subsistent à l'heure actuelle, certains passages de la Loi sur l'immigration, des modifications s'imposent. C'est ce dont je veux vous entretenir aujourd'hui, car les Canadiens et Canadiennes comptent sur nous pour assurer leur sécurité et celle de leurs enfants. Ils comptent sur le ministère de l'Immigration et sur les forces policières canadiennes à tous les niveaux, municipal, provincial, territorial et national. Mais avant tout, ils comptent sur le gouvernement pour adopter des lois qui protègent leurs intérêts.

Il a été démontré que la Loi sur l'immigration, dans sa forme actuelle, renferme des dispositions complexes et comporte des lacunes permettant aux criminels d'abuser de notre système.

Chaque jour, vous côtoyez des personnes qui ne sont pas nées au Canada. Elles sont venues ici avec plus ou moins de facilité, avec plus ou moins d'argent et se sont intégrées à la société. J'en suis moi-même un exemple.

Demandez à ces personnes ce qu'elles pensent des criminels et des individus qui abusent du système. Comme nous tous, elles se sentent frustrées, révoltées et pleines de mépris à l'égard de ces gens. D'autant plus qu'on risque de coller la même étiquette à tous les immigrants.

Je crois que le projet de loi C-44 est fondamental si nous voulons répondre aux attentes de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes. Il apporte des solutions à des problèmes précis. Il faut renvoyer ceux qui sont indignes de nos institutions et qui veulent uniquement profiter de notre générosité tout en portant atteinte aux immigrants de bonne réputation et aux réfugiés authentiques.

[Traduction]

La politique d'immigration joue un rôle clé pour notre avenir. Nous croyons sincèrement que le Canada doit maintenir sa politique et les changements que nous proposons aujourd'hui ne feront que réduire les abus et résoudre les problèmes actuels.

[Français]

Comme l'a déclaré le ministre de l'Immigration le 24 août dernier, à l'occasion de la conférence annuelle de l'Association canadienne des chefs de police, et je cite: «Je ne tolérerai pas ceux qui abusent de notre générosité et qui enfreignent nos lois. Aucun Canadien, aucune Canadienne ne devrait accepter un tel affront. Une bonne politique d'immigration est une politique qui assure un équilibre entre équité et tolérance d'une part et respect de la loi d'autre part.

(1220)

Je ne veux pas avoir à courir après ces gens; je les veux dehors.»

N'oublions pas que le Canada a un programme d'immigration qui fait l'envie du monde entier. Il ne faut pas laisser une poignée d'individus le discréditer et je dirais même se moquer de nous. Ce programme est bon, mais a besoin d'être modifié, et cela, rapidement.

Les problèmes, à ce chapitre, datent de longtemps. Il est inutile de chercher leur source. Ce qu'il faut, c'est agir maintenant et prendre les mesures nécessaires.

En juin dernier, le ministre de l'Immigration a présenté une stratégie en quatre points dont j'aimerais vous parler. Permettez-moi donc de prendre quelques minutes pour vous la présenter.

Premièrement, il s'agit de modifier la Loi sur l'immigration pour lutter contre les fraudes et améliorer les mesures de contrôle d'application de la loi afin que les criminels n'abusent pas de notre système.

Deuxièmement, il faut apporter des changements à la gestion même de la section d'appel de l'immigration de la CISR et parfaire le processus de prise de décision.

Ensuite, il faut échanger des renseignements avec le Service correctionnel du Canada sur les libérations conditionnelles au nom des contrevenants pour les renvoyer, s'il y a lieu.

Finalement, des lignes directrices sont en cours d'élaboration pour que les fonctionnaires de l'immigration soient mieux en mesure d'intervenir devant la Commission, dans le cas de criminels de guerre ou des personnes qui utilisent systématiquement une fausse identité.

Parlons donc des modifications à la loi. À l'heure actuelle, la section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié peut autoriser des personnes reconnues coupables de crimes graves à entrer au Canada ou à y rester pour des raisons humanitaires. La section d'appel de l'immigration perdra ce pouvoir, et c'est le ministre qui pourra autoriser un résident permanent, au Canada depuis son enfance, par exemple, à rester au Canada pour des raisons d'ordre humanitaire ou qui décidera de le renvoyer.

[Traduction]

Nous devons empêcher que les personnes condamnées pour des infractions graves, punissables par une peine de 10 ans ou plus, puissent demander le statut de réfugié. Cela doit s'appliquer même si l'infraction a été commise à l'extérieur du Canada.

Les criminels dangereux ne pourront plus demander le statut de réfugié pour retarder leur expulsion. Il est nécessaire de s'assurer que les criminels ne puissent pas demander le statut de réfugié.

Il faut aussi régler le problème des demandes multiples. L'an dernier, plus de 800 personnes ont fait plus d'une demande de statut de réfugié. En vertu de la mesure législative proposée, seule la première demande sera étudiée par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.


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Nous devons enrayer le flot des documents falsifiés joints aux demandes. C'est pour cela que nous proposons de donner aux agents d'immigration le pouvoir de saisir, dans le courrier international, les pièces d'identité qui pourraient être utilisée par des imposteurs à des fins frauduleuses ou illégitimes.

[Français]

Le ministre, plutôt que le Cabinet, aura le pouvoir de trancher tous les cas de réadaptation d'anciens criminels. Lorsque la Cour fédérale déterminera qu'une attestation de sécurité est raisonnable ou non, il n'y aura plus moyen d'en appeler ensuite à la section d'appel de l'immigration de la CISR. Prenons ces mesures au sérieux. N'est-il pas évident qu'il faut avoir en main toute l'information nécessaire avant d'accorder la citoyenneté canadienne? C'est exactement ce que propose une autre des modifications à la loi.

Ces nouvelles dispositions sont raisonnables et équitables. De plus, contrairement à ce qui a été dit de l'autre côté de la Chambre, elles sont conformes aux dispositions de la Convention de Genève relative au statut de réfugié en ce qui concerne les questions de criminalité. C'est une question de justice, une question de démocratie.

C'est pourquoi le gouvernement s'est engagé à maintenir une politique d'immigration vraiment efficace, à empêcher l'immigration illégale et à assurer un contrôle efficace de nos frontières.

(1225)

Oui, pour y arriver, il est en outre essentiel d'établir une étroite collaboration entre les différents organismes du pays qui doivent intervenir dans les cas de fraudes et de crimes, par exemple, entre les agents de l'immigration, les agents de la GRC et les différents corps policiers.

Nous avons besoin de tous les hommes et de toutes les femmes des forces de police locales, régionales et provinciales pour mieux faire appliquer la loi. Grâce à leur collaboration, nous ferons un pas de plus vers l'élimination des personnes indésirables. C'est ainsi que nous avons établi un partenariat avec le Service correctionnel du Canada, pour que les délinquants étrangers ne puissent pas rester ici après avoir purgé leur peine.

[Traduction]

En outre, le ministre de l'Immigration travaillera en étroite collaboration ave le solliciteur général et le ministre de la Justice. Lorsqu'il s'agit de garantir la sécurité et la prospérité de notre pays et de préserver notre qualité de vie, nous sommes tous solidaires. Les mesures que nous présentons assureront l'intégrité du système d'accueil des réfugiés et des immigrants.

[Français]

Je le répète, il ne faut pas croire que tous les immigrants sont des criminels. Les immigrants ont contribué à l'édification de ce pays tout au cours de notre histoire. Aujourd'hui, dans ce mondeen mouvement, les populations se déplacent constamment et le grand nombre de demandes d'immigration posent des problèmes importants.

Vous seriez surpris d'apprendre que nos agents ont interviewé plus de trois millions de personnes, l'an dernier. En clarifiant la loi, nous les aiderons à faire un travail bien plus efficace. Nous savons tous que parmi le nombre d'immigrants qui viennent s'installer chez nous, plusieurs mettent sur pied des petites et moyennes entreprises et participent à la création d'emplois. Il ne faut pas croire qu'ils viennent ici prendre nos emplois. Cela, ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les statistiques. L'immigration est bénéfique pour le Canada et elle doit continuer à l'être.

[Traduction]

Notre intention en proposant ce projet de loi est d'éliminer le petit pourcentage de ceux qui abusent du système et profitent des échappatoires que leur offre la loi. On ne devrait pas faire payer à tous les immigrants les abus de quelques-uns qui exploitent notre générosité. Malheureusement, c'est justement ce petit nombre d'immigrants-là qui attire l'attention des médias et, bien entendu, de l'opposition qui «sensationnalise» leur cas et inquiète les Canadiens à tel point que ces derniers en viennent à douter de l'intégrité de nos programmes.

Mes 15 ans d'expérience auprès des immigrants m'ont appris que, dans la grande majorité, ils viennent au Canada pour vivre en paix et de façon productive. Il n'y a qu'à voir combien de députés en cette enceinte sont d'origine ethnique. Bon nombre de ce côté-ci de la Chambre sont des enfants d'immigrants, y compris le ministre de l'Immigration lui-même, qui rendent au pays ce qu'il leur a donné.

[Français]

Le projet de loi C-44 que nous présentons aujourd'hui répond à nos besoins. Sans pénaliser ceux qui souhaitaient se faire ici une vie en toute honnêteté, il vise à empêcher ceux qui auraient l'intention d'abuser de notre système de le faire. Il ne touche en rien les personnes qui présentent de bonne foi des demandes à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Comme je l'ai dit au début de mon discours, le Canada est un pays généreux. Aidez-nous à conserver cette image de générosité, à conserver cette réputation aux yeux du monde et évitez qu'on l'exploite.

Je compte donc sur vous, les partis de l'opposition, le Bloc québécois et le Parti réformiste, pour nous appuyer. Monsieur le Président, mesdames et messieurs, je suis convaincue que vous accorderez votre appui en grand nombre à cet important projet de loi.

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, vous pouvez compter sur le Bloc québécois sur le plan des principes. Le Canada doit se protéger contre les immigrants criminels, mais pas par le moyen de ce projet de loi, pas par un projet de loi exagéré et excessif, pour répondre à un problème qui est réel. Je pense que plusieurs de vos électeurs vont être étonnés.


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(1230)

Dans Saint-Denis, il y a beaucoup d'immigrants, beaucoup de Latino-Américains que je connais personnellement et qui seront étonnés de vos paroles aujourd'hui, qui n'aident pas la cause des immigrants ni des réfugiés. Vous dites que le Canada est généreux, mais il l'est de moins en moins malheureusement comme tous les pays industriels, d'ailleurs, et j'ai été étonné l'autre jour parce que le ministre de l'Immigration a dit qu'on allait privilégier les immigrants venant d'Europe.

Il y a beaucoup de gens qui ne viennent pas d'Europe. Ces gens se sentent un peu offensés, un peu blessés par les paroles du ministre. L'autre jour, je l'ai dit: il y a beaucoup de problèmes socio-économiques et c'est souvent la cause de la criminalité parmi les Canadiens et la cause de la criminalité parmi un certain nombre d'immigrants, les problèmes énormes qu'il y a dans la société canadienne au niveau d'une crise économique qui n'en finit plus, du chômage, des problèms des jeunes. Je pense que le projet de loi ne résout pas ces problèmes.

Vous dites que le projet de loi ne va pas à l'encontre des dispositions de la Convention de Genève relative aux réfugiés. J'ai ici un document que le Conseil canadien pour les réfugiés vient de publier et il affirme tout le contraire de ce que vous dites. C'est un conseil, un organisme respectable au Canada et j'aimerais que vous fassiez quelques commentaires à cet égard.

Mme Bakopanos: Monsieur le Président, c'est vrai que je viens d'une circonscription qui a un pourcentage d'électeurs qui sont de communautés culturelles et justement c'est ces gens-là qui m'ont élue et je veux les en remercier encore.

C'est avec ces gens-là que j'ai eu l'occasion depuis 15 ans de travailler et, comme le député de Bourassa le sait, ça fait 15 ans que je travaille avec les immigrants. C'est justement ces mêmes électeurs qui sont d'accord pour qu'on fasse quelque chose contre les abus qui existent dans le système.

Je répéterai ce que le ministre a dit, c'est-à-dire qu'on ne cherche pas à pénaliser les immigrants qui n'ont pas commis de crimes graves, on cherche seulement à éliminer les abus qui existent dans le système et à nous assurer que les criminels soient expulsés de ce pays.

Vous avez dit quelque chose de fort intéressant. Vous avez dit qu'on favorise les immigrants européens. Je ne crois pas que le ministre de l'Immigration ait jamais dit que ce gouvernement favorise seulement les immigrants européens, ce n'est pas la politique de ce gouvernement et à ma connaissance cela ne devrait pas être la politique de ce gouvernement.

Je répète ce que j'ai dit dans mon discours: nous sommes une société généreuse et nous voulons continuer de l'être. Les vrais immigrants qui ne sont pas des criminels le savent. Il va continuer d'avoir des portes ouvertes au Canada.

[Traduction]

Ce que nous voulons faire, c'est éliminer les échappatoires qui existent dans la loi actuelle.

J'ajouterai que je trouve bizarre que l'un des partis d'opposition pense que nous allons trop loin alors que l'autre estime quenous n'allons pas assez loin. À mon avis, cela veut dire que nous avons visé juste.

M. Ted White (North Vancouver): Monsieur le Président, la députée affirme que la grande majorité des immigrants sont respectueux de la loi et qu'ils apportent une contribution valable à la société canadienne. C'est tout à fait vrai, bien sûr. Je suis moi-même immigrant, et j'apporte une contribution valable.

Quand ma femme et moi avons immigré au Canada, en 1979, nous avons dû franchir un processus assez difficile. Nous avons dû présenter trois fois notre demande de l'extérieur du pays, même si nous avions des emplois qui nous attendaient ici, et de l'argent pour acheter une maison. À notre arrivée, nous avons dû renoncer officiellement, pour une période de cinq ans, au droit à l'assurance-chômage ou à l'aide sociale. Nous n'avons pas considéré cela comme une difficulté majeure. Nous étions fiers d'avoir été acceptés ici. Personnellement, je ne vois rien de mal à ce qu'on fixe des critères d'acceptation élevés.

La députée accuse le Parti réformiste de faire du sensationnalisme au sujet des problèmes absolument terrifiants qu'engendre le système d'immigration. Or, nous n'aurions pas besoin d'en faire si ce système prévoyait une certaine forme de contrôle sévère, comme c'était le cas au moment où je suis arrivé, en 1979.

Qu'est-ce que la députée a à répondre à cela? Peut-elle aussi nous dire ce qu'il y aurait de mal à rétablir certains critères raisonnables?

Mme Bakopanos: Monsieur le Président, je crois que c'est exactement ce que nous essayons de faire. Nous essayons de mettre au point un système de mesures raisonnables qui permettraient d'empêcher l'entrée des quelques immigrants qui posent des problèmes. Je ne le répéterai jamais assez, parce que le parti d'opposition tend à donner au public l'impression que ces quelques personnes entrent en grand nombre au pays.

(1235)

Je ne veux pas dire que tous les réformistes prennent la parole pour dénigrer les immigrants. Je ne veux surtout pas qu'on interprète mes propos en ce sens. Tout ce que je veux dire, c'est que les médias et quelques députés d'opposition ont exagéré certaines affaires citées en exemple. Malheureusement, ce sont ces exemples que retiendront les Canadiens qui n'ont pas souvent l'occasion de rencontrer des représentants de nos différentes communautés culturelles, ces images déformées mettant en vedette des gens qui ont abusé des failles de notre système.

J'appuie le projet de loi C-44 parce qu'il vise à en éliminer les échappatoires qui entraînent des abus, ainsi qu'à nous débarrasser des criminels qui profitent des largesses de notre système.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, je suis certainement d'accord sur certaines observations que vient de faire la députée. Toutefois, les Canadiens s'inquiètent de plus en plus à mesure qu'ils apprennent que notre politique d'immigration comporte des faiblesses.

Notamment, il y a la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qui dépense chaque année plus de un milliard de dollars venant des contribuables, et un système qui filtre mal les


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immigrants. Je fais encore allusion au processus accéléré de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qui laisse entrer des immigrants ayant des antécédents fort douteux et à un système de parrainage dans lequel des immigrants s'autosélectionnent. Je sais qu'on est en train de le resserrer, mais il existe depuis quelque temps déjà et les Canadiens le remettent vraiment en question. L'intégrité du programme gouvernemental soulève aussi des interrogations. Il ne semble pas à la hauteur.

La députée pourrait peut-être traiter de ces questions. Les Canadiens sont à l'écoute. Les contribuables paient la note et ils ont le droit de savoir, n'est-ce pas?

Mme Bakopanos: Monsieur le Président, mes collègues s'inquiètent autant que le député des coûts du système. Le ministre a déclaré publiquement que tout le système faisait actuellement l'objet d'un examen. Nous envisageons des mesures pour éviter que le système accapare trop de deniers publics.

Évidemment, aucun système n'est parfait. Il y a toujours des gens qui font des abus, quel que soit le système. C'est précisément pourquoi le projet de loi C-44 est important. Nous faisons tout notre possible au gouvernement pour tenter d'éliminer les échappatoires. Cependant, aucune loi n'est parfaite et il y aura toujours des gens pour s'y soustraire. Nous faisons néanmoins de notre mieux au gouvernement pour qu'il y ait moins de façons de contourner la loi.

Quant à la question du parrainage, le député y a répondu lui-même en disant que le ministre avait resserré les règles et qu'il continuerait de le faire.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, ce projet de loi comporte de très graves lacunes. Il peut sembler ironique qu'après avoir soulevé le problème de la criminalité et de l'immigration, après avoir sensibilisé le public à cette question, et après avoir contraint le ministre-qui, au début de son mandat, disait qu'il n'y avait aucun problème-à déposer une mesure législative, le Parti réformiste s'oppose maintenant à ce projet de loi.

Je tiens à dire à la Chambre et à tous les Canadiens que les réformistes ne s'opposent pas à ce que l'on adopte la ligne dure vis-à-vis de ceux qui viennent au Canada et qui violent nos lois. Nous ne nous opposons pas à beaucoup de mesures précises que renferme ce projet de loi. Toutefois, nous nous opposons à ce que le ministre essaie de nous faire croire que cet ensemble de modifications mineures corrigera véritablement le problème des immigrants indésirables au Canada. Nous nous opposons à la prétention selon laquelle cette mesure législative réglera ne serait-ce qu'un seul des graves problèmes liés à l'immigration au Canada.

Il suffit de jeter un coup d'oeil à quelques cas récents rapportés dans les médias pour voir quelle serait l'utilité de cette mesure. La vérité, c'est que le projet de loi C-44 n'aurait absolument pas permis de prévenir ces tragédies.

(1240)

Prenons le cas bien connu de Clinton Gayle, soupçonné d'avoir tué le constable Todd Baylis. M. Gayle est entré au Canada

légalement et a par la suite fait l'objet d'une mesure de renvoi. Il a pu se soustraire à cette mesure d'expulsion non pas en s'enfuyant ou en paralysant le système au moyen d'appels répétés, mais bien parce que son dossier a été perdu. Cette personne a pu éviter d'être capturée et renvoyée parce que le système était surchargé et que les priorités en matière de renvoi n'étaient pas claires. Nous ne le saurons jamais, mais cette situation était fort probablement le résultat d'une gaffe commise par quelqu'un.

Or, le projet de loi C-44 ne modifie en rien les priorités en matière d'exécution dans le secteur de l'immigration. Il ne prévoit aucune mesure afin d'éviter que le système ne soit pas plus surchargé qu'il ne l'est déjà. Le projet de loi ne traite pas de ce problème, qui est tout aussi fondamental et préoccupant que la prise des mesures de renvoi, c'est-à-dire la capture et l'expulsion des personnes visées.

L'autre cas qui révolte les Canadiens et qui montre bien les lacunes qui existent tant dans la politique de l'immigration que dans les priorités du gouvernement est celui de M. Forbes. Celui-ci est actuellement recherché pour avoir tiré de manière insensée sur plusieurs personnes le week-end dernier à Toronto.

Il est tragique que deux personnes aient été tuées par cet individu. M. Forbes, qui est aussi de la Jamaïque, est arrivé au Canada comme tant d'autres immigrants illégaux, soit en se servant d'un visa de visiteur. Il est resté ici après l'expiration de son visa et a par conséquent fait l'objet d'une mesure d'expulsion. Cet individu a effectivement été renvoyé du Canada, ce qui est plutôt surprenant.

C'est surprenant parce que, parmi ceux qui demeurent au Canada après l'expiration de leur visa, très peu sont expulsés. Le personnel surmené du service d'exécution de la Loi sur l'immigration n'a pas tendance à accorder la priorité à ce genre de cas qui sont pourtant importants.

Il ne faut toutefois pas oublier que ce renvoi a eu lieu au milieu des années 1980 et qu'il y a avait à l'époque trois fois moins de demandes d'immigration au Canada qu'aujourd'hui. Lorsque le nombre de demandes est raisonnable, le ministère de l'Immigration suffit à la tâche.

Néanmoins, M. Forbes est revenu au Canada. On a de nouveau ordonné son expulsion et il a quitté le pays une deuxième fois. Toutefois, personne n'a été surpris d'apprendre qu'il était revenu au Canada une autre fois, avec les tristes conséquences que vous connaissez.

Je voudrais profiter de l'occasion pour offrir, au nom de tous les Canadiens, mes sincères condoléances aux familles des deux personnes abattues par cet homme fou. Tous les députés se joindront sûrement à moi pour souhaiter un prompt rétablissement aux autres victimes de la fusillade.

Trop souvent, dans le feu d'un débat politique, nous oublions les victimes et ne pensons qu'au contrevenant. Les victimes dans cette affaire montrent à quel point il est urgent de trouver des solutions aux problèmes que posent les aspirants à la citoyenneté canadienne qui ont un comportement violent.


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L'affaire Forbes illustre plusieurs points. Premièrement, elle illustre l'importance que revêt l'exécution de la Loi sur l'immigration. Nous pouvons prendre des mesures de renvoi à volonté. Nous pouvons éliminer les abus. Nous pouvons décider de n'offrir qu'une seule chance aux immigrants et aux visiteurs qui enfreignent les lois canadiennes.

À quoi rime tout cela s'il n'y a pas d'agents pour exécuter ces mesures de renvoi. Je ferais remarquer aux députés que, dans la région de Toronto où vivent la grande majorité des contrevenants passibles d'expulsion, il n'y a que 30 investigateurs et agents chargés d'exécuter la loi. Il y en avait 36 auparavant. Le ministre a décidé de réduire ces effectifs, comme il l'a fait dans la région de Vancouver. Il n'y a tout simplement pas assez d'agents pour trouver les personnes passibles d'expulsion.

À l'heure actuelle, le retard dans le traitement des dossiers d'expulsion est tel qu'on évalue à 40 000 le nombre de dossiers accumulés. Le projet de loi C-44 ne contribuera en rien à l'expulsion rapide de ces gens. Le projet de loi C-44 ne fera probablement qu'ajouter au retard accumulé.

(1245)

Deuxièmement, le projet de loi C-44 démontre avec quelle largesse les visas et les permis d'immigration sont accordés.

Si j'ai bien compris, la dernière fois, M. Forbes a pu entrer au Canada en étant parrainé par sa femme, même s'il avait déjà été expulsé à deux reprises. Hier, j'ai demandé au ministre, sans obtenir de réponse, pourquoi une personne frappée à deux reprises d'une ordonnance d'expulsion, peu importe pour quelle raison, était autorisée à entrer à nouveau au Canada. Le porte-parole du ministère aurait déclaré que M. Forbes avait été expulsé pour des raisons qui n'étaient pas liées à la criminalité.

M. Forbes avait délibérément violé la loi canadienne en restant plus longtemps que son visa l'y autorisait. Il avait intentionnellement violé les lois de l'immigration du Canada. Ces violations ne sont pas passibles d'une peine d'emprisonnement de plus de dix ans. Par conséquent, aux termes du projet de loi C-44, M. Forbes ne serait pas dans une situation justifiant son expulsion permanente du Canada. Cela n'a tout simplement aucun sens.

D'autres problèmes très graves, qui ne sont pas abordés dans le projet de loi, portent sérieusement atteinte à l'intégrité du programme d'immigration canadien.

Au cours de l'été, j'ai diffusé un document du ministère de l'Immigration qui contient des lignes directrices pour le traitement rapide des demandes de statut de réfugié de différentes catégories de personnes qui, de l'avis de quelques bureaucrates haut placés et de quelques avocats de l'immigration, sont de toute évidence des réfugiés. Parmi ces catégories, il y a des participants à des insurrections armées, d'anciens guérilleros, des guérilleros encore actifs, d'anciens membres ou des membres actifs de régimes antidémocratiques et même de régimes coupables de génocides comme le régime Mangitsu et l'ancien gouvernementcommuniste d'Afghanistan. On voit que ce sont là des candidats de choix pour la société canadienne.

Je le répète, non seulement on permet à ces gens de présenter une demande de statut de réfugié, mais, en plus, on accélère le traitement de leur demande après qu'ils ont admis avoir appartenu à de tels régimes.

Je sais que ces gens sont peut-être persécutés dans leur pays d'origine et que, pour certaines personnes qui appartiennent à l'industrie canadienne de l'immigration, cela constitue une raison suffisante pour les inviter ici. Comme le disait un membre du Conseil canadien pour les réfugiés, il importe peu que des gens soient des tortionnaires ou des terroristes, s'ils risquent la persécution, ils méritent le statut de réfugié au Canada. Ce sont là les paroles mêmes de ce représentant.

Je suis prêt à parier que la plupart de mes concitoyens verraient là une logique tordue et ne seraient pas d'accord pour donner à de telles personnes la priorité parmi les candidats au statut de réfugié, mais c'est ainsi actuellement.

En dépit de ce que certaines personnes mal informées ont déclaré, il n'y a aucune vérification visant à dépister les auteurs de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité à l'étape des audiences des candidats au statut de réfugié. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié a dit tout récemment à ses agents d'audience qu'ils ne sont même pas autorisés à effectuer des vérifications judiciaires par le truchement d'Interpol ou d'autres sources reconnues de ce genre. On ne peut donc effectuer de vérification des antécédents d'un demandeur du statut de réfugié qu'une fois qu'il a été accepté comme réfugié, ou après qu'il est entré dans le système et demande le statut de résident permanent, et c'est souvent à ce moment-là qu'on obtient les renseignements à son sujet.

Le projet de loi C-44 permettra effectivement de mettre fin à l'étude de la demande du statut de réfugié quand on découvre un casier judiciaire, mais le projet de loi ne donne pas suffisamment de pouvoir aux agents d'audience pour entreprendre une vérification approfondie des antécédents de tous les demandeurs du statut de réfugié. Il n'annule pas les ordres de la CISR de s'abstenir d'effectuer des recherches sur les antécédents.

Comme pour l'application de la loi et comme pour l'octroi de la résidence permanente, le projet de loi se révèle dans la bonne voie. Il affiche même de bonnes intentions, mais ses dispositions ne sont pas assez rigoureuses.

Si le projet de loi C-44 est mis en application, je peux faire certaines prédictions. Il n'aura pas pour effet d'augmenter le nombre des expulsions. Il n'aura pas pour effet non plus de désengorger le système d'appel et de faire disparaître les revendications bidon du statut de réfugié. Il n'augmentera pas significativement la charge pour les demandeurs du statut de réfugié de prouver qu'ils ont de bons antécédents avant d'être acceptés au Canada.

(1250)

En tant qu'ancien policier, je sais que les lois constituent un bon premier pas, mais elles ne donnent de bons résultats que lorsque ceux qui sont chargés de les faire respecter en ont les-


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moyens et le pouvoir. J'ai démontré avec deux cas seulement de grands criminels immigrants que le projet de loi C-44 ne permettrait pas d'expulser les gens dont nous avons le plus besoin de nous débarrasser.

J'ai en outre démontré que le projet de loi C-44 ne s'attaque pas au problème fondamental attribuable au fait que la CISR est composée de membres venant de l'industrie de l'immigration ou nommés par favoritisme politique, qui ne travaillent pas dans les meilleurs intérêts des Canadiens et qui ont, semble-t-il, pour mandat d'accepter autant de réfugiés que possible sans poser de question.

Le projet de loi C-44 n'est pas à la hauteur. Si le ministre avait annoncé un projet de loi qui ne porte que sur un aspect de la Loi sur l'immigration, mettons les réfugiés criminels, et revoit le fonctionnement de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, je l'appuierais sans réserve. Mais le ministre a préféré une approche expéditive et s'est attaqué à un certain nombre de domaines qui posent tous des problèmes, mais en laissant subsister d'énormes lacunes dans notre système, et il n'a appuyé aucun des changements qu'il propose en prévoyant un personnel doté de pouvoirs réels pour que ces mesures soient efficaces.

Je félicite le ministre d'avoir écouté le point de vue des citoyens et du Parti réformiste. J'aurais préféré qu'il ne tarde pas tant. J'aurais aimé qu'il n'ait pas besoin que des drames se produisent avant de cesser d'écouter ceux qui prétendent qu'il ne peut jamais y avoir de problèmes en immigration.

En outre, je félicite le ministre d'avoir pris l'initiative d'agir et de déposer un projet de loi qui, au moins, essaie de rendre le système plus rigoureux. Je le félicite d'avoir enlevé à la Section d'appel le pouvoir de renverser pour des motifs humanitaires des mesures d'expulsion. Mais j'aurais préféré qu'il ne se contente pas de demi-mesures. Le ministre sait qu'une bonne façon de rendre le système plus rigoureux serait de ramener le nombre d'immigrants à un niveau plus conforme aux possibilités de notre ministère de l'Immigration. Ce serait un bon début. Il faut aussi revoir la structure de la commission, enlever des pouvoirs à des membres nommés qui ne sont pas responsables et n'ont pas de comptes à rendre, permettre aux agents d'audience de faire une vérification complète et approfondie avant que la décision ne soit prise sur le statut de réfugié.

Il y a tant de mesures-pas simples, mais évidentes-qui auraient pu trouver place dans ce projet de loi si seulement il y avait eu une volonté politique. Mais non. Je ne veux pas parler ici de détails techniques. Le Parti réformiste ne s'opposerait pas au projet de loi si les problèmes étaient mineurs, mais cette mesure a des lacunes tellement béantes que nous ne pouvons l'appuyer. Il ne change rien aux plus graves problèmes. Nous ne pouvons tolérer qu'on endorme les Canadiens en leur donnant une fausse impression de sécurité.

Le groupe de travail du ministre était un petit pas en avant, mais il en a fait l'annonce comme si les problèmes d'application de la loi avaient été réglés. Il n'en est rien, cependant. Le succès ou le peu de succès du groupe de travail en dit long sur le peu d'importance de la mesure.

Avec le projet de loi C-44, le ministre essaie de dire à la population canadienne que notre pays serre la vis à ceux qui enfreignent nos lois et qui abusent de notre système. Ce n'est toutefois pas le cas tant qu'on ne règle pas les véritables problèmes. Nous ne pouvons pas appuyer un projet de loi sur l'immigration qui prétend être la fin des fins d'une stratégie visant à régler les problèmes relatifs à l'immigration de criminels.

J'exhorte tous les députés à envoyer un message clair au ministre. Je les invite à rejeter ce projet de loi, non pas parce qu'ils s'opposent à certaines de ses dispositions ou à son objectif général, mais parce qu'ils veulent que de véritables modifications soient apportées aux lois sur l'immigration, parce qu'ils veulent répondre d'une manière responsable aux attentes de leurs électeurs qui ont demandé des modifications draconiennes, parce qu'ils veulent que l'immigration fonctionne à nouveau et qu'elle soit une bénédiction pour notre pays plutôt qu'une source d'ennuis.

J'exhorte les députés à envoyer au ministre un message lui indiquant la nécessité d'apporter de véritables changements. Ce que propose ce projet de loi ne suffit tout simplement pas.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Je tiens à ce que vous sachiez, monsieur le Président, que j'ai attendu patiemment toute la matinée pour entendre le discours du député de Calgary, mon vis-à-vis, qui est réputé pour s'y connaître en matière d'immigration. J'ai un respect presque aveugle pour ses points de vue sur ce sujet.

(1255)

J'ai été déçu que, dans son discours, il ait évoqué nombre d'exemples d'échecs passés de la politique relative à l'immigration et aux réfugiés, mais qu'il n'ait pas fait-et je pense que le hansard le montrera-la moindre critique constructive à l'égard du projet de loi C-44.

Je reconnais qu'il y a eu des abus dans le passé. En fait, certaines des histoires d'horreur dont il a parlé trouveront leur solution dans d'autres lois ou ont trait à d'autres lois. Mais j'avoue que j'attendais des critiques précises.

Pour lui venir en aide à cet égard, je voudrais lui proposer de nous donner son point de vue en tant qu'ancien policier sur la question de l'identité, de l'utilisation d'une fausse identité, de faux papiers, comme moyens utilisés par les criminels pour tromper le système d'immigration et entrer au Canada.

Ne convient-il pas que grâce au projet de loi C-44 nous faisons un pas de géant dans la prévention en empêchant ces indésirables d'entrer au Canada? Ne convient-il pas, en sa qualité d'ancien policier, que ce projet de loi représente un réel progrès, qu'il est excellent?

M. Hanger: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je voudrais faire une observation au sujet du préambule à la question du député. En ce qui concerne le projet de loi en tant que tel, le Parti réformiste est d'avis qu'il ne va pas assez loin.

Il ne répond toujours pas à la préoccupation de nombre de Canadiens en ce qui touche l'expulsion comme telle des person-


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nesune fois que la mesure d'expulsion a été prise. Il y a maintenant 40 000 personnes qui sont sous le coup d'une mesure d'expulsion. Pourquoi ces personnes ne sont-elles pas expulsées? À cause de problèmes liés à la police, à la loi; elles ne sont pas expulsées parce qu'il n'y a pas assez d'employés désignés pour cette tâche particulière.

Le ministère de l'Immigration est, à bien des égards, surchargé de travail et manque de personnel dans nombre de secteurs. La question des finances est soulevée quand on se penche sur les problèmes de dotation en personnel, comme l'augmentation du personnel pour répondre à la demande.

Il n'y a pas assez de ressources pour faire respecter la loi alors qu'il y en a trop pour s'occuper des aspects administratifs de l'immigration; cela entraîne des coûts supplémentaires pour les contribuables parce qu'on doit charger des employés de réparer les pots cassés après par l'entremise des tribunaux, qui poursuivent des gens ayant violé nos lois.

Ce sont des problèmes qu'éprouve le ministère de l'Immigration. Ces problèmes vont bien au-delà de ce que prévoit ce projet de loi. En ce qui concerne les documents, je ne conteste sûrement pas que le projet de loi réglera une partie des problèmes. Selon un de mes collègues, il ne réglera rien. Le projet de loi ne touche que les documents qui pourraient être dans le courrier.

Un grave problème se pose aux points d'entrée quand il faut évaluer les documents ou même questionner les gens qui s'y trouvent. Il n'y a pas de personnel de première ligne qui questionne ceux qui passent par les points d'entrée.

Les agents d'immigration sont repoussés dans le fond des bureaux. Quand l'agent des douanes s'adresse à une personne qui demande à entrer au Canada, il peut le renvoyer à l'agent d'immigration s'il a une raison de le faire. Il n'y a vraiment pas de protection de première ligne dans l'immigration. Il faut que cela change.

La frontière n'est pas sûre. Je pourrais souligner plusieurs autres domaines aussi. En ce qui concerne la question du député sur les documents, c'est vrai que c'est un début, mais cela ne règle pas le problème complètement.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, nous avons deux vécus différents. Vous êtes ancien officier de police, moi un ancien réfugié. Nous ne partageons pas les mêmes expériences et les mêmes situations. Vous voulez avoir des mesures plus draconiennes. Moi, je trouve que le projet de loi ne réglera pas les problèmes réels. Il y a déjà trois groupes de travail: composés de la GRC, les officiers d'immigration et la police locale, à Toronto, à Montréal et à Vancouver. Croyez-vous que c'est suffisant?

(1300)

Vous savez aussi qu'il y a des criminels canadiens à l'étranger. Dans plusieurs pays, il y a des Canadiens en prison. J'ai reçuplusieurs appels parce qu'il faut aussi leur offrir notre protection. Les consulats canadiens sont là pour offrir une certaine protection. Ce sont surtout des Canadiens condamnés pour le trafic de drogues. Qu'allez-vous faire? Allez-vous demander à ces pays de les expulser vers le Canada?

[Traduction]

M. Hanger: Monsieur le Président, je vais d'abord répondre à la deuxième question du député.

Quant à moi, si quelqu'un entre dans un autre pays et viole ses lois, il devrait en payer le prix. S'il n'est pas un citoyen de ce pays, qu'on l'expulse immédiatement. Je suis persuadé que la plupart des gens partagent cette position, y compris le député d'en face qui a posé la question.

Le problème, c'est que les choses ne se passent pas ainsi chez nous. D'abord, il est rare que les auteurs d'un crime aient à en payer le prix. Puis, il est à se demander qui va les expulser et pourquoi ils ne le sont pas. Voilà le problème et le projet de loi C-44 ne s'y attaque pas.

Avons-nous suffisamment d'organismes de maintien de l'ordre, d'organismes d'exécution pour faire appliquer la Loi sur l'immigration et le Code criminel? Je serais porté à répondre que non. Je ne propose pas des mesures draconiennes. Tout ce que nous voulons, c'est de veiller au mieux-être de la population canadienne et de la protéger le plus possible. Un élément indésirable s'est infiltré dans notre pays. Cela ne fait aucun doute qu'il faut expulser cet élément indésirable. Le projet de loi C-44 ne va pas assez loin pour assurer l'expulsion des éléments indésirables.

Tout ce que je propose, c'est le rejet de ce projet de loi et un examen complet de notre politique d'immigration. Ils sont de plus en plus nombreux les Canadiens qui réclament un moratoire. Pas nous, mais certains sont de cet avis. Je propose que l'on commence par faire le ménage avant que ce mouvement ne prenne trop d'ampleur.

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député et faire une observation.

Le projet de loi C-44 s'intéresse aux victimes de notre société. Malgré ce qu'en dit le député, notre gouvernement se préoccupe des plus faibles et c'est pourquoi nous voulons faire adopter ce projet de loi.

Je voudrais aussi faire remarquer au député que le ministre a déclaré qu'il collaborerait avec le solliciteur général et le ministre de la Justice pour s'assurer que la loi est rigoureusement exécutée.

Si j'ai bien compris, le député a dit qu'aucune expulsion n'avait été effectuée l'année dernière. Il pourra peut-être me corriger si je me trompe. Sait-il combien de mesures d'expulsion ont été prises l'année dernière et combien de personnes ont effectivement été expulsées du pays?

M. Hanger: Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question.


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Oui, je sais que 8 200 mesures d'expulsion ont été exécutées et que, parmi les personnes visées, 1 200 étaient des criminels. Je sais aussi qu'au moins 3 000 autres mesures d'expulsion ont été prises à l'égard de criminels qui se trouvent encore ici et que l'on n'arrive pas à retracer.

(1305 )

Lorsque la députée parle de la collaboration entre le ministre de la Justice et le ministre de l'Immigration au sujet des renvois, je souscris entièrement à l'idée qu'une telle collaboration doit exister. Or, les modalités du projet de loi C-44 ne permettent pas de croire qu'on pourra accélérer le processus de renvoi.

Comme le ministre le reconnaît au quatrième paragraphe de la page 5794 du hansard, le processus sera laborieux et long et le problème qu'a soulevé un des députés de l'opposition officielle demeurera entier.

Le vice-président: La période des questions et des observations est terminée. En fait, les cinq premières heures de débat ont pris fin à 12 h 38. Nous en sommes donc aux discours de 10 minutes pour tous les députés et il n'y aura pas de période pour les questions.

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir au sujet du projet de loi C-44 dont la Chambre est maintenant saisie.

Ce projet de loi marque un progrès dans la façon dont le gouvernement entend appliquer la Loi sur l'immigration. C'est également un pas en avant en ce qui concerne notre respect pour les gens du monde entier qui entrent au Canada et la façon dont nous voyons le rôle de notre pays, en tant que protecteur des réfugiés qui fuient l'oppression.

Le Canada a été et continue d'être bâti grâce aux efforts et à l'ingéniosité des immigrants. Ils sont venus ici et, après avoir vu les débouchés qui s'offraient à eux, ils ont décidé de s'établir chez nous. Les néo-Canadiens ont connu une deuxième génération, une troisième ou une dixième même. À un moment donné, ils ont fini par ne plus être des néo-Canadiens et sont devenus simplement des Canadiens.

Monsieur le Président, notre Chambre compte 295 députés. Sur ce nombre, je prétends que 293 sont des néo-Canadiens. Certains sont arrivés au Canada après moi et d'autres avant. Cependant, tous les néo-Canadiens profitent de la prospérité et du bonheur que notre pays a à offrir à tous.

De nos jours, à tous les points d'entrée, à toutes les ambassades et à tous les consulats du Canada dans le monde entier, des gens demandent à devenir le prochain groupe de néo-Canadiens. Ils espèrent se joindre aux autres Canadiens dans le pays bien spécial que nous constituons. Ils veulent réaliser pleinement leur potentiel, grâce aux débouchés que leur offre le Canada et dont profitent les Canadiens.

Je crois que la plupart des gens qui demandent à devenir Canadiens souhaitent partager le même sentiment de fierté que beaucoup de nos ancêtres ont ressenti lorsqu'un juge ou un agentd'immigration ou même un facteur leur a appris qu'ils avaient obtenu leur nouvelle citoyenneté. Ils veulent chanter notre hymne national, que ce soit pour la première fois ou la millième. Ils désirent faire partie intégrante de notre pays, contribuer à son essor et assurer leur avenir ici.

À ce stade-ci, je voudrais rappeler à la Chambre que, chaque année, du 17 au 24 avril, on célèbre la Semaine nationale de la citoyenneté. Cette année, pour la première fois, les députés, les sénateurs et le personnel du Parlement se sont réunis dans le hall d'honneur pour réaffirmer leur citoyenneté. Lorsqu'on a entonné l'hymne national, j'ai été surpris et heureux de voir des larmes dans les yeux de nombreux chanteurs, notamment certains députés nés ici. Ils ont vraiment apprécié l'atmosphère qui régnait et ils étaient très émus. C'est la façon dont le Canada veut être et demeurer.

Être Canadiens, c'est avoir un esprit ouvert et un grand coeur. Les Canadiens acceptent les différences de chacun et les célèbrent, plutôt que de les condamner. La citoyenneté canadienne est synonyme de partage. Le Canada a tant à offrir à ceux qui viennent ici. Il donne aux intéressés des possibilités d'épanouissement qu'on retrouve dans peu d'autres pays du monde. C'est cet esprit de tolérance, cette générosité et ces débouchés qui unissent les Canadiens et attirent de nouveaux venus sur nos côtes. C'est également ce qui a amené nos ancêtres à venir s'établir ici, il y a de nombreux siècles.

Pour obtenir la citoyenneté canadienne, il faut d'abord et avant tout, bien entendu, devenir un immigrant reçu ou être considéré comme un réfugié au sens de la Convention. Si nous ne protégeons pas notre système d'immigration et de détermination du statut de réfugié contre les abus, nous mettons en danger le système de la citoyenneté, et cela ne peut que nuire au concept de la citoyenneté canadienne.

(1310)

Le projet de loi C-44 montre bien l'engagement de notre gouvernement qui consiste à protéger les nouveaux, les anciens et les futurs Canadiens des bandits qui chercheraient à obtenir la citoyenneté canadienne sous de faux prétextes. Un passeport canadien est un bien très précieux. Voici d'ailleurs ce qu'on peut lire au dos de la couverture de tout passeport canadien:

Le Secrétaire d'État aux Affaires extérieures du Canada, au nom de Sa Majesté la Reine, prie les Autorités intéressées de bien vouloir accorder libre passage au titulaire de ce passeport, de même que les facilités et la protection dont il aurait besoin.
Et au bas de la page, il est écrit que «le titulaire de ce passeport est citoyen canadien». Bien entendu, il y a des gens pour qui ces mots ne signifient rien. La promesse et la protection qu'ils offrent ne veulent rien dire pour eux. Ils semblent uniquement venir dans notre pays pour faire des affaires, et ils frauderaient le système s'ils en avaient l'occasion.

Heureusement, on rencontre très peu de personnes de ce genre-là. La majorité des nouveaux arrivants, au Canada, voient en ces mots une source de protection, de fierté et d'espoir. Ces mots représentent, pour eux, la chance d'améliorer leur sort dans un pays prêt à les accueillir en tant que nouveaux Canadiens. Pou-


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reux, ces mots laissent entrevoir la liberté, tant au Canada qu'à l'étranger.

Cependant, notre pays a des lois pour le petit groupe de personnes qui ne partagent pas cette vision des choses et qui seraient tentées d'abuser de leur statut d'immigrants. Nous voulons empêcher que des criminels graves et dangereux deviennent des Canadiens ou puissent rester ici. Nous voulons donner aux agents chargés d'exécuter la loi le pouvoir de confisquer des documents du courrier international qui pourraient être utilisés par des personnes qui ne méritent pas d'obtenir la citoyenneté canadienne.

Nous voulons changer certaines des responsabilités de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. S'il doit y avoir des exceptions à la règle, nous voulons que ce soit le ministre qui décide de ces exceptions et qui en réponde devant la Chambre. Nous voulons corriger toutes les lacunes qui ont été exploitées par les personnes qui cherchent à contourner le processus pour devenir citoyen canadien.

Le projet de loi C-44 nous donne les outils dont nous avons besoin pour faire cela. C'est aussi simple que cela. En laissant des truands et des voyous entrer dans notre pays, nous ternirons l'image du Canada. Nous ne devons jamais accepter que cela se produise.

Les Canadiens ne toléreront pas qu'on abuse de leur générosité. Comme le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration l'a dit aux chefs de police du Canada le mois dernier: «Aucun Canadien ne devrait être obligé d'accepter une telle gifle.» Même quelques abus, et ils sont très rares, détruisent la confiance des Canadiens dans notre système d'immigration. Les abus minent leur acceptation d'une politique d'immigration progressiste.

J'exhorte tous les députés à agir selon les désirs des Canadiens, à appliquer les lois conformément à leur volonté et à poursuivre la longue tradition canadienne, soit une politique d'immigration tolérante, généreuse, progressive et éclairée. Je demande que nous agissions rapidement pour protéger l'intégrité du passeport canadien et pour donner un sens aux paroles qu'il renferme.

À cette fin, je demande à tous les députés d'appuyer le projet de loi C-44. Nous le devons aux Canadiens qui ont placé leur confiance en nous, en tant que dirigeants et législateurs. Nous le devons à nos voisins, à notre famille et à nos amis.

Il nous incombe aujourd'hui de faire en sorte que le Canada soit un pays plus sûr à l'avenir.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je prends la parole cet après-midi au sujet du projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi de l'immigration. Les députés ont entendu mon collègue, le député de Calgary Nord-Est, dire que le projet de loi comporte quelques mesures modestes, mais qu'il ne va pas suffisamment loin pour mériter notre appui.

(1315)

Le gouvernement semble envoyer des messages ambigus. On me permettra de citer un extrait du discours à la page 5792 duhansard du 19 septembre 1994, que l'honorable Sergio Marchi a prononcé à l'occasion du dépôt du projet de loi:

Les agissements d'un petit groupe poussent les Canadiens à remettre en question les mérites mêmes d'un programme qui a été si important pour l'édification de notre nation. Les actions de quelques-uns ont terni la réputation d'un grand nombre.
À la page suivante, le ministre déclare:

Les abus commis par quelques-uns ont sonné l'alarme. Bien que le nombre des individus qui créent des problèmes soit infime, les préjudices qu'ils causent sont considérables.
Nous avons lu les journaux, entendu des récits, vu des images et peut-être même avons-nous assisté à des funérailles. Une poignée de criminels tirent indûment parti de notre programme d'immigration. Il faut du temps pour appliquer la loi et certains d'entre nous ont pu constater, avec toujours plus de frustrations, comment les procédures d'appel de l'immigration et du système judiciaire étaient utilisées pour retarder des renvois.
Le ministre se dit préoccupé par les agissements de criminels qui ont terni l'image de notre politique concernant les immigrants et les réfugiés.

Plus tôt ce matin, le Parti réformiste a présenté une motion visant à modifier le projet de loi déposé par le ministre. La motion visait à modifier la loi et à faire en sorte que la Chambre refuse de donner deuxième lecture du projet de loi C-44, «modifiant la loi en conséquence, parce qu'il ne prévoit pas l'exclusion, avant l'audition d'une demande de statut de réfugié et la présentation d'une demande de résidence permanente, des personnes déclarées coupables d'un crime entraînant une peine de dix ans ou plus au Canada ainsi que des particuliers qui font partie de la catégorie des personnes énumérées aux paragraphes 19(1) et (2) de la Loi sur l'immigration».

La motion a été défaite par le Parti libéral, auquel le Bloc québécois s'est évidemment joint afin d'empêcher toute tentative du Parti réformiste de donner du mordant au projet de loi du ministre. C'est pourquoi je dis que nous recevons des messages ambigus du gouvernement lorsqu'il durcit le ton. Quand le Parti réformiste se dit prêt à durcir le ton, le gouvernement recule et ne fait rien.

En définitive, la politique canadienne concernant les réfugiés doit être modifiée. À l'heure actuelle, nous appliquons le principe selon lequel un réfugié peut rester au Canada à moins que nous ne prouvions ultérieurement qu'il est entré illégalement, les auditions d'expulsion ne pouvant commencer qu'à partir de ce moment.

Nous devons adopter le principe inverse en faisant en sorte qu'on ne pourrait venir au Canada à moins d'avoir de bonnes raisons d'y être autorisé. J'endosse une politique d'ouverture aux millions de réfugiés, aux centaines de milliers de réfugiés qui ont demandé et obtenu l'asile au Canada. Sur les millions de réfugiés dans le monde, il y en a quelques-uns qui sont suffisamment braves, chanceux et entreprenants pour atteindre nos rivages. Il est cependant arrivé trop souvent que ces derniers soient les auteurs mêmes des persécutions commises.

Lorsqu'une personne demande le statut de réfugié, nous devons d'abord nous rappeler qu'elle n'est pas nécessairement victime de persécution, malheureuse et sans défense. Les réfugiés ne devraient pas être acceptés automatiquement au Canada et avoir totale liberté de mouvement tant que trois vérifications n'ont pas été faites.


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Premièrement, nous devrions nous assurer que ce sont vraiment d'innocentes victimes de persécution, infortunées et démunies, et non les artisans d'un régime de persécution. Comme les députés le savent bien, au cours des dernières années, il nous est arrivé d'apprendre par les journaux que des demandeurs du statut de réfugié n'étaient pas des réfugiés, mais plutôt les responsables des problèmes qui engendraient la fuite de leurs compatriotes.

Deuxièmement, nous devons vérifier que ce ne sont pas des criminels ayant commis des crimes avec violence dans le pays d'où ils viennent.

(1320)

Troisièmement, nous devons vérifier que nous ne leur avons pas déjà refusé l'entrée au Canada en vertu des deux premiers critères ou pour avoir profité de leur présence au Canada pour exercer des activités criminelles. Autrement dit, si nous les avons déjà expulsés, pourquoi recommencer tout le processus, ou même seulement penser à nous donner tout ce mal? Tenons-nous en là.

Ce n'est que lorsqu'on a fait ces trois vérifications qu'on devrait leur ouvrir les portes et leur offrir un havre de paix au Canada.

Ce projet de loi comporte certains aspects positifs, comme celui de dépouiller la Commission de l'immigration et du statut de réfugié de sa capacité d'annuler les mesures d'expulsion. Il était grand temps, surtout dans les cas où la cause est allée en appel à plusieurs reprises et qu'il est absolument évident que nous n'aurions même pas dû étudier la demande. Le ministre lui-même a dit combien il était gênant pour la commission d'appel d'avoir à se rendre à Kingston pour entendre les témoignages de personnes reconnues coupables de meurtre, afin de déterminer si on leur accordera ou non le statut de réfugié.

Le processus bureaucratique suit son cours et entraîne des dépenses, alors que tout le monde sait bien que la seule conclusion possible, c'est qu'il faut les renvoyer chez elles, et le plus tôt possible.

Le projet de loi garantit également qu'une mesure d'expulsion serait prise contre toute personne reconnue coupable d'avoir commis, au Canada, un acte criminel entraînant une peine maximale de dix ans de prison ou plus, et qu'un appel de cette décision ne peut être présenté qu'au ministre lui-même. C'est l'un des éléments les plus intéressants de cette mesure. Cependant, comme je le disais, nous croyons que ce n'est pas suffisant.

Le projet de loi, et cela nous inquiète, ne permet pas d'identifier les criminels parmi les demandeurs du statut de réfugié, avant qu'ils soient admis au Canada. On ne vérifie nullement les antécédents criminels des demandeurs avant de leur accorder le statut de réfugié. La logique de ce système me laisse perplexe.

Les Canadiens ordinaires me disent que c'est mettre la charrue avant les boeufs. Pourquoi laisser entrer un réfugié, d'où qu'il vienne, pour s'apercevoir ensuite, après lui avoir accordé le statut de réfugié, qu'il a été reconnu coupable de crimes graves et qu'il ne méritait pas ce statut? Il faut alors faire demi-tour et prendre les mesures nécessaires pour le renvoyer chez lui alorsqu'on aurait pu l'empêcher d'entrer bien avant. À mon avis, cela ressemble à une manigance de la part des gens du milieu de l'immigration pour alimenter le système et s'assurer qu'ils auront toujours du travail.

Selon nous, les vérifications judiciaires devraient être au coeur du processus d'examen au lieu de se faire après avoir pris une décision. Par ailleurs, il me semble que sur le plan des mesures d'expulsion, ce projet de loi ne vaut même pas le papier sur lequel il est écrit. Il y a une énorme différence entre une mesure d'expulsion et l'expulsion elle-même. L'an dernier, on a ordonné la prise de 25 000 mesures d'expulsion, mais il n'y a eu que 8 200 expulsions. Nous avons une loi qui est ridiculisée, bafouée et violée par ceux-là mêmes que nous trouvons indésirables et que nous ne voulons pas chez nous.

Les Canadiens auxquels j'ai parlé veulent être sûrs qu'une fois qu'un individu a été expulsé, on ne le laissera pas revenir. Ça ne devrait pas être très difficile. Une fois qu'une personne a été expulsée, les agents d'immigration devraient pouvoir la refouler à la frontière bien avant qu'elle ne mette le pieds sur le sol canadien. Lorsqu'on a déjà expulsé quelqu'un, pourquoi même songer à recommencer? On dépense des millions de dollars pour parvenir à une décision qui s'imposait d'elle-même. Une fois qu'une personne est expulsée, ça devrait être pour de bon, sans espoir de retour.

Je pense qu'on doit féliciter le ministre d'avoir fait volte-face. Il a parcouru beaucoup de chemin depuis le printemps. Lorsque la législature a débuté, il était, à bien des égards, très satisfait du travail du ministère et du nombre d'immigrants que le Canada acceptait.

Ce projet de loi est la preuve que depuis, il a écouté les réformistes et les autres députés ainsi que le reste des Canadiens; il a découvert qu'en ce qui concerne la politique d'immigration, beaucoup plus de Canadiens pensaient comme les réformistes que comme les libéraux. Il est toutefois malheureux qu'il n'ait pas écouté plus attentivement et fait le reste du chemin, cela lui aurait permis de corriger certaines lacunes qui sont encore présentes dans ce projet de loi.

(1325)

Il est également regrettable qu'il n'ait pas agi davantage à la manière d'un Canadien ordinaire. Toutes les personnes auxquelles j'ai parlé trouvent logique-il est vrai que je n'ai pas parlé au ministre-qu'avant d'admettre une personne dans notre pays, nous devrions nous assurer qu'elle n'a pas d'antécédents criminels. Le ministre ne semble pas arriver à comprendre une chose aussi simple que cela.

Pour conclure, ce projet de loi constitue un premier progrès, mais un progrès tellement insignifiant que nous ne pouvons l'appuyer. Le ministre devrait prêter une oreille plus attentive aux souhaits des Canadiens et aux députés réformistes de la Chambre.

Le projet de loi s'attaque à certaines questions, mais non aux problèmes fondamentaux que représente l'admission de criminels au Canada. Il n'apporte aucune solution au processus qui permet à des réfugiés de rester des années dans le vague à bâtir, afin de pouvoir demeurer au Canada, un cas social qui n'a rien à


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voir avec les motifs qui les ont poussés à quitter leur pays au départ.

Si le ministre veut mon appui, il va falloir qu'il fasse complètement machine arrière et un sérieux effort pour régler les problèmes graves et manifestes du Canada sur le plan de l'immigration.

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler du projet de loi C-44 actuellement à l'étude. Il contient des modifications qui vont clarifier et codifier certains aspects de la Loi sur l'immigration.

Les Canadiens ne toléreront plus que l'on abuse de leur générosité. Même quelques rares abus suffisent a détruire la confiance des Canadiens en l'équité et la tolérance de leur politique d'immigration. Par ailleurs, de tels abus peuvent amener les Canadiens à rejeter une politique d'immigration progressiste.

Le projet de loi C-44 confirme la volonté du gouvernement de contrôler l'immigration illégale et d'assurer la sécurité des frontières. C'est aussi une preuve supplémentaire que nous prenons au sérieux la confiance de la population canadienne.

Le projet de loi C-44 améliorera la Loi sur l'immigration dans quatre domaines principaux.

D'abord, il aidera les personnes qui sont en première ligne à intervenir dans des situations où un individu essaie d'utiliser le système à son avantage. Par exemple, si les gens peuvent présenter plus d'une revendication à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, celle-ci se trouvera rapidement paralysée par des revendications qui se recoupent ou se répètent. La CISR passe trop de temps à réenquêter sur des cas qui ont déjà fait l'objet d'enquêtes, et à réévaluer des cas qui l'on déjà été. En vertu du projet de loi C-44, seule la première revendication sera valide. Toutes les autres seront annulées.

Le projet de loi empêchera que les criminels entrent dans le système de détermination du statut de réfugié. Si un agent principal de l'immigration découvre qu'un revendicateur a un casier judiciaire en raison de crimes sérieux commis au Canada ou ailleurs il pourra, à n'importe quel moment, suspendre et arrêter le processus avant que la commission ne prenne une décision définitive.

Les revendications du statut de réfugié peuvent être rejetées pour diverses raisons. Les modifications contenues dans le projet de loi C-44 empêcheront qu'une personne condamnée pour un crime grave ne revendique le statut de réfugié.

En vertu de la Convention de Genève sur les réfugiés, la criminalité est une raison valable de rejet de toute demande de statut de réfugié. Le projet de loi C-44 facilitera cela de même que l'exclusion des criminels de guerre. De même, la section d'appel ne pourra plus autoriser les auteurs de crimes graves à rester au Canada pour des motifs humanitaires. Il reviendra au ministre de déterminer les exceptions pour fins humanitaires. Bien sûr, la Section d'appel aura toujours le pouvoir d'accorderdes sursis à l'exécution de mesures de renvoi pour des raisons de droit ou de fait, ou les deux à la fois.

Enfin, les agents d'immigration auront le pouvoir de saisir des papiers d'identité dans le courier international. On s'inquiète d'une tendance à distribuer des visas, des passeports, des cartes d'assurance-maladie et des papiers originaux ou contrefaits pour tenter de faire entrer illégalement des immigrants au Canada.

À cette fin, les agents des douanes pourront examiner les colis internationaux pour y rechercher des documents de ce genre. Les documents suspects seront remis aux agents d'immigration qui détermineront si ces papiers correspondent à des tentatives pour contourner la politique d'immigration.

(1330)

Le projet de loi C-44 contient d'autres modifications à cet égard. Les détails se trouvent dans les documents connexes que vous avez devant vous, monsieur le Président. Quant à moi, je fais des observations sur l'ensemble des modifications proposées dans la mesure que nous étudions. Les Canadiens demandent qu'on applique les lois de façon uniforme et équitable. C'est dans leur intérêt que nous prenons des mesures à l'endroit de ceux qui ont enfreint la loi, qui ont mal interprété leur demande de statut de réfugié ou qui tentent de manipuler le système ou l'esprit de la Loi sur l'immigration.

S'il faut procéder à une expulsion, nous le ferons. S'il faut condamner quelqu'un qui a commis une fraude et lui infliger une peine d'emprisonnement, nous le ferons. Par ailleurs, cela signifie aussi que nous allons appliquer les lois de façon raisonnable, équitable et uniforme. Le système sera modifié pour le mieux grâce à ce projet de loi.

Je demande à tous députés d'agir comme les Canadiens nous le demandent: appliquons les lois comme les Canadiens le veulent et poursuivons la politique d'immigration équitable, progressiste et éclairée à laquelle les Canadiens sont habitués. J'invite tous les députés à appuyer le projet de loi C-44.

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, je suis très heureuse de prendre la parole à l'égard du projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence.

Le projet de loi C-44 répond dans une large mesure aux préoccupations de beaucoup de Canadiens en fournissant les outils et les pouvoirs nécessaires pour préserver l'intégrité de la politique visant les immigrants et les réfugiés. Permettez-moi de mentionner un certain nombre de points saillants qui méritent d'être soulignés.

En vertu de cette mesure législative, les agents d'immigration jouiront de pouvoirs élargis pour saisir des documents suspects, aux fins d'inspection. Ils auront le pouvoir d'interdire l'expédition de documents pouvant servir à contourner la réglementation liée à la Loi sur l'immigration. Je fais allusion ici aux documents utilisés pour créer de fausses identités et permettre à des personnes de venir au Canada illégalement.


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L'an dernier, au cours d'une période de cinq mois, plus de 120 colis renfermant de tels documents d'identité ont été trouvés à chaque semaine dans des grandes villes canadiennes. Or, ces colis ont dû être retournés aux services postaux parce que les autorités n'avaient pas le pouvoir de les saisir.

En vertu des dispositions du projet de loi C-44, les auteurs de crimes graves ne pourront revendiquer le statut de réfugié pour retarder leur expulsion du Canada. Il convient de noter que cette mesure ne constitue pas une violation des droits de ces personnes. En effet, la Convention des Nations Unies sur le statut de réfugié reconnaît que certaines personnes ne méritent pas une telle protection parce qu'elles ont commis des crimes graves.

Le projet de loi prévoit aussi que le pouvoir de refuser d'autoriser des résidents permanents trouvés coupables de crimes graves à demeurer au pays pour des motifs humanitaires, qui était auparavant exercé par la section d'appel, sera dorénavant confié au ministre de l'Immigration.

Comme bien des députés le savent, les membres de la Section d'appel de l'immigration ont récemment rendu un certain nombre de décisions controversées. Ils ont en effet suspendu le renvoi de certaines personnes qui avaient commis des infractions. Le projet de loi vise à confier cette tâche importante et controversée directement au ministre, ce qui rend, à mon avis, les responsables du système plus comptables envers le Parlement.

Néanmoins, la Section d'appel de l'immigration gardera le pouvoir de suspendre le renvoi de résidents permanents reconnus coupables d'infractions mineures pour des motifs d'ordre humanitaire.

Le projet de loi C-44 renferme d'autres dispositions importantes qui auront, je crois, des répercussions positives sur le système d'immigration et de statut de réfugié. Par exemple, une personne ayant fait de multiples revendications ne pourra choisir celle qu'elle veut défendre lorsque la situation éclatera au grand jour. La première demande aura la priorité et la Commission de l'immigration et du statut de réfugié sera avisé de la situation et devra annuler les autres revendications.

Outre les pouvoirs qu'ils peuvent actuellement exercer aux points d'entrée et à l'intérieur du territoire canadien, les agents principaux d'immigration pourront émettre des ordonnances de renvoi. En outre, tous les résidents permanents dont on ordonne l'expulsion perdent leur statut de résident permanent.

(1335)

Comme les électeurs de ma circonscription, Nepean, je m'inquiète beaucoup des abus commis contre notre système d'immigration et de la présence au Canada d'immigrants et de réfugiés criminels. Pendant l'été, j'ai organisé une table ronde dans ma circonscription pour connaître le point de vue et les idées des électeurs sur la politique canadienne d'immigration.

Pendant la soirée, plusieurs sujets et un large éventail d'opinions ont été examinés. Il est clairement ressorti des discussions que les gens s'inquiètent de voir de nouveaux arrivants porter atteinte à l'intégrité de notre système.

Les électeurs de Nepean reconnaissent que la criminalité au Canada ne saurait être attribuée à un groupe ethno-culturel particulier d'immigrants ou de réfugiés. Cependant, ils pensent que nous devons prendre des mesures pour empêcher les criminels d'entrer au Canada, expulser ceux qui commettent des crimes et faire échec à ceux qui ont réussi à abuser du système et tentent d'entrer au Canada par fourberie.

Le rapport complet des points de vue exprimés par les participants à la table ronde a été communiqué au ministre de l'Immigration.

Je suis convaincue que le projet de loi C-44 permettra une meilleure application de la loi et aidera à restaurer la confiance que les électeurs de ma circonscription et ceux de tout le Canada ont dans notre système d'immigration.

Je ne doute pas que les députés verront les qualités du projet de loi C-44 et que, comme moi, ils l'appuieront. Pour tous les Canadiens, qu'ils soient nés ici ou qu'ils y aient émigré, nous devons faire en sorte que la paix, la prospérité et la sécurité règnent au Canada.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq député s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le vice-président: Conformément aux dispositions de l'article 45(5)a) du Règlement, le whip du gouvernement m'a demandé de reporter le vote sur la motion à plus tard.

En conséquence, conformément à l'article 45(6) du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'à lundi, à l'heure de l'ajournement quotidien, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus quinze minutes.


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(1340)

[Traduction]

M. Boudria: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Nonobstant toute décision antérieure de la Chambre, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour reporter le vote prévu pour lundi 15 heures à mardi 15 heures, en même temps que l'autre vote déjà annoncé aujourd'hui.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

* * *

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 20 septembre, de la motion: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat du projet de loi concernant la réforme de la détermination de la peine. Les nouvelles dispositions proposées viennent remplir un engagement que le Parti libéral avait pris dans son livre rouge.

Les députés d'en face devraient constater que nous tenons parole. Le projet de loi a pour principaux objectifs de favoriser la réinsertion sociale des délinquants pour en faire des citoyens respectueux des lois, d'isoler au besoin les délinquants du reste de la société et de susciter chez les délinquants la conscience de leur responsabilité en les amenant à reconnaître le tort qu'ils ont causé et en les obligeant à dédommager leur victime.

Pour atteindre ces objectifs, le projet de loi énonce un certain nombre de principes fondamentaux servant à guider les tribunaux. Premièrement, la peine doit être proportionnée à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Deuxièmement, les tribunaux doivent tenir compte des circonstances aggravantes ou atténuantes. Troisièmement, des infractions semblables doivent encourir des peines semblables. Quatrièmement, le principe de la détermination de la peine comme un tout est maintenu. Cinquièmement, on ne doit pas incarcérer le délinquant lorsque d'autres solutions sont appropriées. Sixièmement, on doit prendre en considération toutes les sanctions de rechange raisonnables. J'insiste spécialement sur ce dernier aspect en ce qui concerne les délinquants autochtones.

Il y a certains éléments du projet de loi que je voudrais aborder plus spécialement. Le recours à des mesures de rechange pour les délinquants autochtones en constitue un principe très important. Dans ma province, en Saskatchewan, les autochtones représentent l'élément de la population dont la croissance démographique est la plus rapide. Ils représentent aussi un pourcentage disproportionné des délinquants incarcérés.

Les tribunaux de la Saskatchewan ont mis à l'essai des groupes de détermination de la peine. Ces groupes réunissent des anciens de la communauté de même que des membres de lacommunauté non autochtone et des professionnels, comme des avocats et des policiers.

L'accent est mis non pas sur le châtiment mais sur le rétablissement de l'harmonie, telle que l'entendent les autochtones, au sein de la communauté.

Récemment, à Saskatoon, une peine a été prononcée contre un accusé, un Métis de Saskatoon. Le groupe a été convoqué après que cet homme eut cambriolé une station-service chez moi. Le groupe s'est donc réuni et a décidé que cette personne devait accomplir certaines tâches, en guise de sanction, pour rétablir l'harmonie dans la collectivité. Il a reçu l'ordre de faire un certain nombre d'heures ou de jours de travail pour la station-service qu'il avait volée, de travailler comme bénévole à la société des Métis et d'admettre sa faute publiquement. Il a de plus été condamné à une peine d'emprisonnement.

Le propriétaire de la station-service hésitait au départ, mais il a admis ouvertement que la cause de la justice avait été bien servie par cette approche. C'est là un élément important de la justice pénale: il faut que le grand public soit convaincu que justice a été faite.

Nous devons résister à la tentation d'emprisonner tous ceux qui commettent des délits. Il en coûte plus cher pour garder un homme en prison pendant un an que pour envoyer un élève à l'école.

Autre aspect important du projet de loi, celui-ci prévoit la possibilité pour la victime de faire une déclaration aux audiences de libération conditionnelle anticipée prévues à l'article 745 du Code criminel.

Cet article permet de revoir les peines d'emprisonnement de 25 ans fermes pour décider si le détenu peut avoir droit à une libération conditionnelle après 15 ans.

(1345)

J'ai des idées bien arrêtées sur la question. L'agent Brian King de la GRC, tué à Saskatoon, était un ami. Il a été tué sans pitié en 1978 pendant son service. L'an dernier, le meurtrier a demandé une libération conditionnelle anticipée aux termes de l'article 745.

Imaginez un instant l'indignation et le sentiment d'impuissance des membres de sa famille, qui ont dû prendre place dans la salle du tribunal à Saskatoon et entendre les déclarations de tous les témoins, mais sans pouvoir eux-mêmes dire un mot. Ils n'ont pas pu faire valoir le point de vue de la victime devant le coupable.

Étant donné les dispositions actuelles, la mort n'a pas seulement réduit Brian King au silence, mais elle a aussi fait taire les souvenirs de sa famille devant nos tribunaux. Est-ce bien de la justice?

Enfin, je voudrais dire quelques mots des dispositions du projet de loi sur le dédommagement. Lorsqu'un criminel est envoyé en prison, le propriétaire du magasin qui s'est fait voler se sent-il mieux? Peut-être. La peine imposée au criminel aide-t-elle le propriétaire à joindre les deux bouts? Ces dispositions donnent la possibilité d'amener les criminels à payer pour leurs crimes.


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Il y a dans le projet des dispositions pour les personnes qui achètent, à leur insu, des biens volés. À l'heure actuelle, si on achète des biens volés et s'ils sont confisqués par la police, on perd son argent. Les tribunaux peuvent maintenant ordonner le dédommagement, et les innocentes victimes seront indemnisées.

Le projet de loi montre que le gouvernement est déterminé à faire comprendre aux criminels que le crime ne paie pas.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours du député, et j'ai une question à lui poser. Est-il favorable à l'idée d'appliquer le concept autochtone de détermination de la peine aux non-autochtones?

M. Bodnar: Monsieur le Président, la contribution des autochtones dans le domaine de la détermination de la peine et des groupes de détermination de la peine au reste de la société est très importante. Nous devrions étudier nombre de solutions mises au point par les autochtones, dont le concept de groupe de détermination de la peine.

Ce mode de détermination de la peine pourrait bien être plus bénéfique qu'une foule de dispositions actuelles de notre système de justice criminelle. Ma réponse est oui.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai assisté à Hamilton à une conférence parrainée par les Canadiens contre la violence partout recommandant sa révocation, groupe aussi connu sous le nom de CAVEAT.

Cette conférence a réuni 185 délégués représentant les Canadiens de toutes conditions sociales, y compris des victimes, des policiers, des éducateurs, des membres du Barreau, des politiciens, des collègues d'en face et bien d'autres participants.

À l'issue de la conférence, de nombreuses recommandations seront présentées au gouvernement, des recommandations que j'appuie entièrement-qui doivent faire peur à certains députés d'en face- et qui pourraient, à mon avis, instaurer un climat qui fera de notre pays un endroit où les Canadiens seront en sécurité.

En comparaison, j'examine diverses mesures proposées par le gouvernement, par le ministère de la Justice, des mesures comme les projets de loi C-41, C-42, C-44, C-45 et C-37. Certes, elles sont toutes de petits pas-je dis bien petits-dans la bonne direction, mais elles sont loin de correspondre à ce que les Canadiens réclament et à ce que préconiseront ces recommandations.

(1350)

En dernière analyse, je crois que ces propositions législatives, y compris le projet de loi C-41, ne nous donneront pas les moyens de réduire, d'une manière significative, les crimes violents au Canada. J'ai entendu des députés libéraux dire que ces projets de loi ne sont rien de plus que de petits pas dans la bonne direction. Je sais aussi que des pétitionnaires ont demandé à la Chambre d'apporter des modifications importantes au Code criminel du Canada, des modifications à la Loi sur la réforme du cautionnement de 1972 et à la Loi sur la libération conditionnelle; il s'agitde pétitionnaires de toutes les régions du Canada qui ont réuni plus de deux millions de signatures.

Avec les modifications qu'il propose, le gouvernement essaie seulement de convaincre les Canadiens de toutes les régions de notre pays qu'il a respecté un autre engagement énoncé dans le livre rouge, alors qu'en réalité, ces propositions n'amélioreront guère, sinon pas du tout, la sécurité des Canadiens par rapport aux crimes violents.

Le moment est maintenant venu pour le gouvernement de présenter des mesures législatives annonçant un niveau de tolérance zéro pour tous les actes de violence. Ce projet de loi est bien loin de cela actuellement. Qu'y a-t-il de mal à adopter un niveau de tolérance zéro? Pourquoi vouloir continuer de vivre dans un pays où nous avons peur pour nos enfants et nos petits-enfants? À quoi bon? Continuons de déployer de sérieux efforts dans le domaine de la prévention, mais pour l'amour du ciel, établissons des limites et signalons dès maintenant aux auteurs de crimes violents que tous ceux qui ne respecteront pas ces limites s'exposeront à des peines sévères et significatives et qu'ils le regretteront.

Le ministre de la Justice attend avec impatience le moment où il présentera de nouvelles lois sur le contrôle des armes à feu, afin de faire du Canada un pays plus sécuritaire. Pourquoi aucun de ces projets de loi ne renferme des dispositions prévoyant que l'utilisation d'une arme pour commettre n'importe quel crime entraînera immédiatement une peine d'emprisonnement qui devrait être purgée consécutivement à toute autre peine imposée pour un autre crime? Le ministre de la Justice va-t-il plutôt, dans le cadre du contrôle des armes à feu, présenter une mesure législative qui créera un fardeau pour les citoyens respectueux des lois? C'est exactement ce qu'on va faire en adoptant des mesures comme celles-là, alors que les éléments criminels dans la société se moqueront de ce projet de loi et continueront de profiter pleinement de la vie.

Qu'y a-t-il de mal à adopter un projet de loi qui dirait qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité, c'est bien pour la vie et qui viserait à supprimer des dispositions comme l'article 745 du Code criminel? Pensez aux victimes. Vous semblez les oublier. Rappelez-vous que les victimes de tous les crimes violents sont marquées pour la vie. On peut se demander alors pourquoi les criminels ne seraient pas punis pour la vie eux aussi.

Je suis d'accord avec le ministre de la Justice lorsqu'il affirme qu'il faut réduire la population carcérale. Il existe de meilleures façons de traiter les délinquants non violents. Cependant, le fait de prétendre que des délinquants violents condamnés à une peine d'emprisonnement à perpétuité devraient être admissibles à une libération après 15 ans est tout à fait ridicule. Je tremble à l'idée de voir un jour un Clifford Olson ou des gens de son espèce en liberté.

C'est pourquoi nous devons nous assurer que les lignes directrices sur la détermination de la peine sont claires et conformes aux sentiments des Canadiens que reflète la Charte canadienne des droits et libertés. À l'article 15 du préambule de la Charte, on dit que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous. On ajoute que tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimi-

6030

nation.Cependant, au paragraphe 718.2(1) du projet de loi C-41, on peut lire ce qui suit: «Le tribunal détermine la peine à infliger compte tenu également des principes suivants: [. . .]l'infraction est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle [une nouvelle notion qu'on veut ajouter] de la victime.»

Je n'arrive pas à comprendre la différence qui existe entre l'assassinat d'un homme blanc, d'un homme noir, d'un hétérosexuel ou d'un homosexuel. La violence sera toujours la violence. Pourquoi voulons-nous être plus stricts parce que ces personnes ont des croyances différentes des nôtres? Il n'y a aucune raison au monde pour que l'inclusion de l'orientation sexuelle, par exemple, dans ce projet de loi fasse la moindre différence dans la sévérité de la peine infligée au criminel en cause.

Je crois, pour ma part, que cet article va à l'encontre de l'article 15 de la Charte. Rien ne justifie d'imposer une sentence plus lourde du fait que le crime est motivé par la violence ou la haine. La violence sera toujours la violence et il en va de même de la haine. Il ne devrait y avoir aucune exclusion lorsqu'il s'agit d'établir une peine. La peine imposée tend à protéger la victime et à punir les criminels proportionnellement à la gravité du crime.

(1355)

En résumé, je voudrais dire ceci. Tout le pays est aux aguets et les Canadiens sont inquiets. Si on pense qu'on peut faire fi de 2,5 millions de signatures, eh bien on se trompe royalement. Or, je peux dire, à partir des recommandations formulées par les pétitionnaires en question, que c'est exactement ce que fait le gouvernement. Il ne tient pas compte de leurs recommandations. Il ferait mieux d'ouvrir les yeux, de lire ces pétitions lorsqu'il les reçoit et d'y donner suite, s'il ne veut pas le regretter amèrement un jour.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, on a soulevé la question des peines obligatoires dans les cas où une arme à feu est utilisée pour perpétrer une infraction.

En examinant de près les dispositions du Code criminel, on constate que cette mesure existe déjà. Une peine d'emprisonnement est obligatoirement infligée à toute personne qui utilise une arme à feu pour perpétrer une infraction et la durée minimale de cette peine est d'un an. Le problème n'est donc pas d'ordre législatif. Il réside dans l'application du Code criminel par le procureur général de chacune des provinces.

On a aussi parlé de la tolérance zéro. Par rapport à quoi? Les policiers portent des accusations dans tous les cas d'infraction. J'aimerais bien que le député nous dise ce qu'il entend par la tolérance zéro par rapport aux accusations.

M. Thompson: Monsieur le Président, la difficulté est toujours la même avec ces gens. Si vous vous cachez la tête dans le sable, vous ne voyez plus rien, vous n'entendez plus rien et vous ne pouvez plus voir la réalité autour de vous. Lorsque vous recevez une pétition de 2,5 millions de signatures et que vous ne comprenez toujours pas, c'est que vous avez vraiment la tête dans le sable.

Je n'ai pas à défendre la notion de tolérance zéro. Les Canadiens le feront à ma place.

Le Président: Chers collègues, comme vous l'avez vu, je viens tout juste de prendre le fauteuil. Le député semblait regarder dans cette direction lorsqu'il a dit «vous». Je tiens donc pour acquis que ses commentaires s'adressaient à la présidence.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


6030

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

SUCCESS NOVA SCOTIA 2000

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants): Monsieur le Président, le vendredi 16 septembre dernier, notre gouvernement, de concert avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, a annoncé le projet Success Nova Scotia 2000.

Ce projet quinquennal, qui se déroule dans le cadre du programme d'initiatives stratégiques, aidera 3 000 jeunes de la Nouvelle-Écosse à acquérir une expérience de travail valable dans des industries de pointe. Le but visé est de créer des débouchés en préconisant l'organisation de stages pratiques comme partie intégrante de notre culture de formation. Le projet Success Nova Scotia 2000 montre bien l'engagement que le gouvernement a pris de trouver de meilleurs moyens pour aider les jeunes à obtenir des emplois dans le secteur qu'ils ont choisi.

Je suis certain que les habitants d'Annapolis Valley-Hants sauront saisir cette occasion et faire de ce programme un succès pour nos jeunes.

En offrant à nos jeunes des possibilités d'emploi dans des industries de pointe, nous contribuerons à faire de la Nouvelle-Écosse un leader économique dans les années à venir.

* * *

[Français]

LE CONSEIL POUR L'UNITÉ CANADIENNE

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau): Monsieur le Président, hier, à Montréal, le président du Conseil pour l'unité canadienne s'est lancé dans la campagne référendaire. Il s'est déclaré entièrement satisfait du fait qu'il n'y aura pas de nouvelles offres fédérales.

Aux yeux du Conseil, l'unité passe donc par le statu quo. Il n'est plus question de renouveler la fédération canadienne.

Après 30 ans d'échecs lamentables, cette nouvelle franchise du Conseil fait tomber les masques.

Le Conseil pour l'unité canadienne, subventionné, rappelons-le, par Ottawa, confirme que tout ce que les Québécois peuvent attendre d'Ottawa, c'est encore des dédoublements, encore des chevauchements, encore du gaspillage de leurs impôts. Bref, more of the same.


6031

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, le ministre de la Justice devrait savoir que ce ne sont pas seulement les habitants des régions rurales de l'Ouest qui sont mécontents des mesures concernant le contrôle des armes à feu.

Au cours des dernières semaines, j'ai reçu plus de cent lettres de résidents de villes de l'Ontario qui sont en colère et qui ne prisent guère la façon dont le ministre juge la compétence et l'intégrité des Canadiens, dont son opinion selon laquelle les propriétaires d'armes à feu doivent être protégés contre eux-mêmes.

J'ai dit à ces gens qu'ils n'avaient pas à s'en prendre à moi et qu'ils devaient plutôt diriger leur colère contre celui qui la mérite, c'est-à-dire le ministre.

Les auteurs de certaines de ces lettres sont probablement parmi les nombreux manifestants qui sont aujourd'hui massés sur les parterres du Parlement. Ils nous envoient un message clair qui dénonce l'étatisme. J'espère que le ministre est à l'écoute et qu'il révisera ses préjugés élitistes.

Des mesures sévères de contrôle des armes à feu se sont révélées inefficaces dans bon nombre de villes et de pays, notamment à New York, en Illinois et au Royaume-Uni. Pourquoi devons-nous continuer. . .

Le Président: Le député de Guelph-Wellington.

* * *

L'ÉDUCATION

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington): Monsieur le Président, tous les jours, des Canadiens assument leurs responsabilités avec enthousiasme et sérieux, ce qui ne manque pas d'exercer peu à peu une influence bénéfique sur leur entourage.

Terry Lynch, directeur de l'éducation au conseil scolaire du comté de Wellington, est l'un d'entre eux. C'est un être brillant, étonnamment énergique, plein de bon sens et déterminé. Il travaille sans relâche pour que son conseil scolaire soit le meilleur de l'Ontario. Je suis fière de pouvoir dire que Terry est un ami.

En rentrant à l'école après les vacances d'été, les enfants du comté de Wellington devraient remercier les pédagogues comme Terry qui, dans les coulisses, font preuve d'une énergie inépuisable pour faire en sorte que l'éducation soit une expérience des plus enrichissantes et que leurs élèves aient tout ce qu'il faut pour réussir dans la vie.

* * *

REPRENONS LA NUIT

M. Pat O'Brien (London-Middlesex): Monsieur le Président, la peur de la violence et la violence elle-même constituent un grand obstacle à l'égalité des droits chez les femmes. C'est le triste tableau que nous offre la société: les femmes et les enfants risquent leur vie dans bien des cas, ne serait-ce que lorsqu'ils se promènent dans l'obscurité.

Le gouvernement fédéral s'engage à s'attaquer au problème très répandu de la violence faite aux femmes en collaborant avec les collectivités en vue de trouver des solutions. J'exprime mon appui au groupe de London, à d'autres groupes comme «Women for Action», «Accountability and Against Violence Everywhere», ainsi qu'à toutes les femmes qui, cette semaine, partout au pays, participeront à des défilés du type «Reprenons la nuit» pour mettre fin à la violence.

J'encourage les Canadiens à manifester et à promouvoir le droit des femmes à emprunter sans danger les rues de nos quartiers.

* * *

LA SOCIÉTÉ INTERNATIONAL NICKEL COMPANY OF CANADA

M. John Finlay (Oxford): Monsieur le Président, cet été, le Parliamentary, Business and Labour Trust a organisé une visite à l'International Nickel Company of Canada. J'ai visité le centre de recherche, à Mississauga, ainsi que la mine, la fonderie et les raffineries, à Sudbury. J'ai également rencontré le président-directeur général, le vice-président, les directeurs, des mineurs et des dirigeants syndicaux.

Deux choses m'ont le plus impressionné: tout d'abord, la détermination de tous les membres de la société que nous avons rencontrés à exercer une concurrence au niveau international, grâce à la recherche, aux nouvelles techniques, à une gestion éclairée et à la rationalisation et, ensuite, l'engagement indéfectible qu'a pris la société d'améliorer les collectivités où elle possède des installations et de préserver l'écosystème en réduisant la pollution.

Sudbury et la région avoisinante n'ont plus l'aspect d'un paysage lunaire. L'air n'a plus l'odeur de soufre. Grâce aux politiques environnementales viables et tournées vers le progrès qu'a adoptées INCO et grâce à sa collaboration avec les municipalités, cette région est redevenue verdoyante.

* * *

[Français]

LA NOMINATION DE Mme SHARON CARSTAIRS AU SÉNAT

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, le premier ministre vient encore une fois de démontrer son manque de compréhension et de respect envers le Québec. La nomination de Mme Sharon Carstairs au Sénat renforce l'idée que le gouvernement fédéral sait gratifier ceux et celles qui attaquent ouvertement le Québec.

(1405)

Ne cachant pas ses sentiments antiquébécois, Mme Carstairs a travaillé avec acharnement à l'échec de l'Accord du Lac Meech. Elle a voulu remettre le Québec à sa place, ce qui lui a valu d'être récompensée en obtenant un siège au Sénat canadien. Elle qui fut d'abord farouchement en faveur d'une réforme du Sénat le considère aujourd'hui, et je cite ses propos, «nécessaire parce que composé de personnes mieux éduquées que les membres de la Chambre des communes».


6032

Le Président: Chers collègues, j'aimerais vous demander de considérer le fait que, lorsque nous attaquons nos collègues de l'autre endroit, nous portons parfois insulte à l'institution du Sénat. J'espère que cela sera pris en considération à l'avenir.

Des voix: Recours au Règlement!

Le Président: À l'ordre! Après la période des questions.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, le gouvernement libéral pense que, s'il est incapable d'équilibrer son budget, c'est à cause d'un manque de recettes, alors que, en réalité, le problème, ce sont ses dépenses exagérées. C'est le même raisonnement confus qui fait qu'il met l'accent sur un plus grand contrôle des armes à feu au lieu de punir sévèrement les criminels.

Plus tôt, la décision du gouvernement de céder devant les contrebandiers de produits du tabac n'a fait que déplacer le problème vers la contrebande d'armes et d'alcool. Lorsqu'il s'agit d'arrêter les contrebandiers d'armes à feu, nos frontières sont de véritables passoires.

La police provinciale de l'Ontario a découvert, pendant son projet de surveillance des contrebandiers, que 94 p. 100 des armes en circulation sur le marché noir provenaient des États-Unis.

Le contrôle des armes à feu, si rigoureux soit-il, ne réussira pas à régler le problème. Nous avons besoin d'un gouvernement qui soit disposé à commencer à appliquer les lois existantes, au lieu d'en rajouter, si nous voulons enrayer les crimes de violence.

* * *

SUSAN AGLUKARK

M. Jack Iyerak Anawak (Nunatsiaq):

[Note de l'éditeur: Le député parle en inuktitut.]

[Traduction]

Lundi était le jour de la remise des prix de musique country canadienne de 1994. Susan Aglukark, une jeune chanteuse et compositrice inuit d'Arviat, dans ma circonscription, faisait partie des lauréats.

En 1990, la bande vidéo de Susan, «Searching», avait remporté le premier prix de cinématographie décerné par MuchMusic. Son premier enregistrement, intitulé «Dreams for you», a été suivi en 1992 par un disque compact «Arctic Rose» qui a été acclamé par la critique.

Lundi, Susan, âgée de 27 ans, a reçu le prix Étoile montante.

Susan est spéciale, de même que sa musique. Elle chante dans sa langue maternelle, l'inuktitut, et en anglais. Elle chante la vie, ses problèmes et ses joies. Sa musique célèbre la langue et la culture inuit mais transcende les frontières culturelles.

Félicitations, Susan, nous sommes tous fiers de toi.

LES CENTRES CULTURELS

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui à la Chambre pour féliciter la paroisse de St. Maximillian Kolbe, de Mississauga, dont ma famille et moi faisons partie, pour l'inauguration du centre culturel polonais, le Centre Jean-Paul II.

Ce centre a été construit par les paroissiens qui ont fait appel aux services d'ingénieurs, de concepteurs et de contremaîtres bénévoles, et ce, entièrement avec les fonds recueillis ces huit dernières années. Il a coûté un peu plus de 2 millions de dollars et fait l'objet d'une petite hypothèque. Pas un palier de gouvernement n'a versé un sou pour sa construction.

Le centre, qui sera ouvert à toute la population de Mississauga, servira plus de 8 000 familles d'origine polonaise. C'est un parfait exemple du multiculturalisme pour les années 90: un groupe ethnique autonome qui tend la main aux membres de la communauté canado-polonaise tout en faisant partager ses installations aux gens du voisinage.

Encore une fois, mes sincères félicitations aux fondateurs: le président, Lottie Misek, le Père Stanley Bak, le Père Ted Novak et les 8 000 familles qui ont travaillé si dur pour voir leur rêve se réaliser.

* * *

[Français]

LE DÉCÈS DE MARCEL TOURANGEAU

Mme Shirley Maheu (Saint-Laurent-Cartierville): Monsieur le Président, j'aimerais offrir mes plus sincères condoléances à Mme Gabrielle Tourangeau et à ses enfants à l'occasion du décès de son mari Marcel.

(1410)

Marcel était bien connu dans Saint-Laurent pour la qualité de son bénévolat et son implication sans relâche, particulièrement auprès des aînés de Montpellier. Fondateur et président du groupe des aînés, on pouvait, entre autres activités, les voir jouer à la pétanque tous les jours de l'année, quelle que soit la température; l'été dehors, l'hiver à l'intérieur.

Marcel sera manqué par tous et particulièrement par sa famille et ses nombreux amis. Nous avons perdu un grand Canadien.

* * *

LA DÉPUTÉE DE CENTRAL NOVA

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, mardi le 20 septembre, la députée de Central Nova a tenu des propos haineux à l'endroit de la communauté homosexuelle, en associant l'homosexualité à la bestialité et à la pédophilie. La députée libérale fait preuve de sectarisme et d'un manque flagrant de discernement en s'opposant à ce qu'une infraction motivée par la haine, fondée sur l'orientation sexuelle. . .


6033

[Traduction]

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Ces derniers jours les députés sont allés un peu loin dans leurs observations et les critiques prennent peut-être un caractère plus personnel que ne le permettent les règles de la Chambre dans nos échanges courants.

J'invite tous les députés à se rappeler que ces critiques personnelles ne servent pas les meilleurs intérêts de la Chambre. Je leur demanderais de vérifier le contenu des déclarations qu'ils entendent faire afin d'éviter le genre d'échanges qui ont eu lieu jusqu'à maintenant.

* * *

L'UNITÉ NATIONALE

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, hier le premier ministre a donné l'impression que le Parti réformiste exploitait la question de l'unité nationale en utilisant une ligne d'appel 1-900. Je voudrais donner l'heure juste à ce sujet.

Du 26 septembre au 3 octobre, nous effectuerons par téléphone un référendum national sur l'avenir du Canada. C'est la compagnie de téléphone, et non pas le Parti réformiste, qui impose un tarif d'un dollar la minute. Le premier ministre a paru choqué et a répondu qu'il trouvait cela incroyable.

L'incroyable, c'est la dette nationale, qui augmente de 88 410 $ par minute. Les citoyens canadiens ordinaires devraient avoir leur mot à dire car l'avenir du Canada est trop important pour qu'on le laisse entre les mains de l'élite politique.

J'invite les Canadiens d'expression anglaise à faire connaître leur opinion en composant le numéro 1-900-451-4841. Et pour mes amis français, le 1-900-451-4032. C'est la valeur la plus sûre sur la Colline.

* * *

Mme JO WELLS

Mme Paddy Torsney (Burlington): Monsieur le Président, j'ai le grand plaisir de féliciter Mme Jo Wells, une de mes électrices de Burlington, qui fut cet été la première Canadienne à traverser le Canada d'un bout à l'autre en courant.

Jo a entamé son formidable périple en mai, quittant St. John's Terre-Neuve, pour arriver à Victoria, Colombie-Britannique, 111 jours plus tard. Le long de son parcours de 7 295 kilomètres, Jo a reçu les salutations, applaudissements et encouragements de nombreux Canadiens de toutes les régions et de nombreux députés.

Son but était tout simplement de montrer que la chose pouvait se faire et que toute personne qui se fixe un objectif, ambitieux ou modeste, peut l'atteindre. Jo a couru tout spécialement pour montrer ce que les femmes peuvent faire et pour prouver que leurs capacités sont sans limite.

La détermination et l'enthousiasme extraordinaires de Jo peuvent nous servir d'inspiration à tous. Je demande aux députés de se joindre à moi pour féliciter cette femme extraordinaire, cette formidable Canadienne.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, je veux signaler au ministre de la Justice que j'appuie son projet de présenter une mesure législative sur le contrôle des armes à feu. Le ministre fait tout ce qu'il peut pour parvenir à établir un juste équilibre. Il a dit à la Chambre que ce projet de loi porterait essentiellement sur trois éléments: l'élimination des armes illégales, le durcissement de la justice pénale pour les crimes impliquant des armes à feu et l'amélioration de la réglementation sur les armes à feu, dans le but d'augmenter la sécurité de la population.

Le ministre a aussi assuré à la Chambre qu'il était tout à fait conscient que nous avions une longue tradition de chasse au Canada et que cette activité était importante pour plusieurs régions du Canada. Ses propositions visent à assurer une plus grande sécurité aux Canadiens et à donner plus de poigne au système de justice pénale, mais elles respecteront également les intérêts légitimes des chasseurs, des agriculteurs et de ceux qui utilisent des armes à feu pour assurer leur subsistance.

(1415)

Les Canadiens ont besoin d'une telle perspective équilibrée sur le contrôle des armes à feu et ils méritent de l'avoir. J'encourage le ministre à respecter le calendrier prévu et à déposer son projet de loi en novembre.

* * *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, aujourd'hui, sur la colline du Parlement, des milliers de personnes manifestent contre le projet de loi sur le contrôle des armes à feu envisagé par le gouvernement.

D'un côté, le gouvernement parle d'imposer une loi pour limiter les armes à feu, et de l'autre, il réduit les ressources qui permettent de faire respecter les lois déjà en vigueur.

Par exemple, depuis 1992, la GRC a vu son budget réduit de 33,4 millions de dollars. Cela entraîne une réduction des services de prévention, des services communautaires et des services de surveillance. J'exhorte donc le gouvernement à redonner à la GRC un budget qui lui permette de prévenir les crimes et de faire respecter la loi. Ce doit être à la base de toute politique globale visant à améliorer la sécurité de nos villes.

Le Président: Avant que nous passions à la période des questions, je veux demander la collaboration de tous les députés. Je sais que nous ne sommes de retour que depuis trois ou quatre jours. Serait-il possible de poser vos questions un peu plus rapidement, surtout les questions complémentaires? Serait-il possible d'abréger le préambule ou même de l'éliminer presque complètement? Par ailleurs, je demande à tous les députés qui répondent à une question d'en venir aux faits un peu plus vite, afin de laisser la chance à un plus grand nombre de nos collègues de profiter de la période des questions.

[Français]

Ceci étant dit, nous commençons la période des questions orales avec l'honorable chef de l'opposition.

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6034

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, le gouvernement s'est engagé à rembourser au Québec les frais encourus pour le référendum sur l'Entente de Charlottetown. Mardi, le ministre des Affaires intergouvernementales déclarait que son gouvernement n'était pas lié par cet engagement et qu'en conséquence Ottawa ne rembourserait pas le Québec. Je rappelle que l'engagement en question a été contracté par un premier ministre envers un autre premier ministre.

Je pose ma question au premier ministre. Que vaut l'engagement d'un premier ministre du Canada à l'endroit du premier ministre du Québec, s'il est loisible à son successeur de le renier aussi impunément et aussi effrontément?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, j'ai demandé aux hauts fonctionnaires du Conseil privé de vérifier s'il y avait eu des engagements. J'en ai même discuté à un certain moment avec les hauts fonctionnaires, les nouveaux et les anciens, et nous n'avons pu retracer aucun engagement pris par le précédent gouvernement en la matière. Alors, étant donné les circonstances, il devait être entendu entre les personnes impliquées à l'époque qu'il ne devait pas y avoir de compensation.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je déposerai si on le veut un extrait des comptes publics du gouvernement du Québec qui indique un compte en souffrance de 47 millions de dollars à ce titre par le gouvernement fédéral. De plus, le sénateur Jean-Claude Rivest, sénateur libéral, qui était à l'époque conseiller principal de M. Bourassa, a affirmé hier qu'il y avait eu un tel engagement contracté entre le premier ministre Mulroney et M. Bourassa. Je rappellerai au premier ministre qu'il est moins scrupuleux que son ministre du Patrimoine qui, lui, sur la foi d'une simple rumeur, a honoré un engagement d'on ne sait qui pour permettre une transaction inacceptable dans le cas de la Ginn Publishing.

Est-ce que le premier ministre sait que son refus de rembourser obligerait les Québécois à payer deux fois les frais du référendum? Se rend-il compte que l'injustice est d'autant plus criante que le référendum de Charlottetown portait sur une question formulée et posée par les instances fédérales?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, nous allons respecter les engagements qui ont été pris par le gouvernement. Si quelqu'un peut clairement établir qu'il y a eu un engagement pris par le gouvernement du Canada, nous allons respecter cet engagement. Nous n'étions pas là, nous ne faisions pas partie de la discussion et j'ai demandé aux hauts fonctionnaires de vérifier s'il y avait eu des engagements entre les deux niveaux de gouvernement.

(1420)

On n'a trouvé aucune trace d'un engagement quelconque. Étant donné les circonstances, je crois comprendre que nous n'avons pas d'obligations et que le gouvernement du Québec d'alors savait très bien que s'il tenait un référendum en vertu de la loi provinciale, c'était, à ce moment-là, suivant cette même loi que les dépenses devaient être encourues.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, dans le cas de la Ginn Publishing également, il s'agissait d'un engagement verbal, anonyme; on n'a jamais su la source de l'engagement contracté sous un gouvernement antérieur et on a prétendu l'honorer.

Et en plus, le premier ministre semble faire l'étrange distinction entre le premier ministre, le chef du gouvernement fédéral et le gouvernement, comme s'il n'était pas dans les attributs du premier ministre d'engager son gouvernement quand il donne une parole d'honneur à un autre premier ministre. L'honneur doit exister aussi entre premiers ministres.

Est-ce que le premier ministre n'a pas honte de punir ainsi les Québécois d'avoir rejeté l'entente de Charlottetown?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je suis bien surpris que le chef du Bloc québécois me demande de tenir un engagement pris par une autre personne, quand la semaine dernière, il demandait au chef du Parti québécois au Québec de ne pas respecter sa parole de tenir un référendum dans les huit à dix prochains mois.

Si l'honorable chef de l'opposition peut nous donner un document établissant qu'il y a eu un engagement passé entre le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada, nous allons honorer les engagements du gouvernement. Toutefois, j'ai été incapable de trouver un quelconque engagement de cette nature. Il n'y a aucune mention à cet effet dans les procès-verbaux du Cabinet ou dans des documents quelconques.

Messieurs, donnez-moi la preuve que mon prédécesseur et le gouvernement antérieur se sont engagés et nous allons payer avec plaisir.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, au lieu de s'occuper du référendum du gouvernement du Québec qui ne le regarde pas, le premier ministre devrait peut-être commencer par payer ses comptes, ce qu'il doit au Québec.

Le 28 janvier dernier, le ministre des Affaires intergouvernementales répondait en Chambre qu'il étudiait la requête du gouvernement du Québec. Le 4 mai dernier, le ministre déclarait que le gouvernement n'avait pas encore pris sa décision finale. Et hier, tout à fait par hasard, il nous dit qu'il ne paiera pas et c'est confirmé par le premier ministre.

Doit-on comprendre du premier ministre que l'élection d'un gouvernement souverainiste au Québec aurait motivé le refus du gouvernement fédéral de verser les 26 millions de dollars,


6035

confirmant ainsi les paroles de la vice-première ministre, qui disait mardi: «C'est cela, le coût de la séparation»?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le député prétend qu'on n'a pas à se mêler des affaires de la province de Québec. Qu'est-ce que lui et son chef faisaient aux élection provinciales, lorsqu'ils sont allés faire leur tour? Ce sont des députés fédéraux, et les députés fédéraux doivent se mêler des affaires fédérales seulement. Mais, il est allé faire son tour et c'est pour cela qu'il a eu l'air d'un Don Quichotte: il se battait contre les moulins à vent.

On a respecté les juridictions. Cependant, l'avenir du Canada, ça regarde le premier ministre du Canada.

(1425)

Je suis un citoyen du Québec et la séparation du Québec, ça me regarde! Je vais prendre tous les moyens nécessaires pour garder ce pays uni.

Des voix: Bravo!

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, si le premier ministre du Canada veut savoir ce qu'on faisait à une élection fédérale, on se faisait élire! Il ne s'en est pas encore aperçu.

Doit-on comprendre de l'attitude du premier ministre, qui prive sciemment et sans raison le Québec des 26 millions de dollars qui lui appartiennent, que c'est là la belle collaboration qu'il entend offrir dorénavant au nouveau gouvernement du Québec? Et dorénavant, devra-t-on dire, en parlant du premier ministre du Canada: «Au diable les ententes, c'est moi qui mène»?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je n'ai pas à répéter ce que j'ai dit. Si le Bloc québécois peut établir qu'il y a eu un engagement, nous allons le respecter; je ne peux pas être plus clair que cela. Nous avons fouillé, nous avons travaillé là-dessus pour trouver la preuve que cela existait, mais cela n'existe pas.

Le premier ministre de l'époque aurait facilement pu demander au premier ministre d'écrire une lettre, mais on n'a retrouvé aucune indication d'engagement nulle part.

Aujourd'hui, la meilleure preuve, c'est que vous dites: «On se faisait élire», mais vous vous êtes fait élire sous de fausses représentations.

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Eh bien, oui! Monsieur le Président, ils ont dit: «Nous allons être le vrai pouvoir à Ottawa», mais ils sont tous dans l'opposition, et pour pas plus de quatre ans, car il n'y en aura plus, après.

* * *

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais simplement faire remarquer que pendant

que le premier ministre et le Bloc discutaient du coût du référendum et de la facture qu'a dû payer le Québec, la dette nationale a augmenté d'un million de dollars.

Le ministre de l'Immigration a parlé fort et proposé à la Chambre des mesures qui sont censées fermer les échappatoires qui permettent à des immigrants criminels de demeurer au Canada. Parallèlement, son ministère a communiqué à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié des directives qui accélèrent le traitement des revendications d'individus douteux comme des agents doubles algériens, des membres de l'ancienne dictature éthiopienne et des guérilleros d'Amérique latine.

Le ministre donne l'impression de fermer la porte aux éléments indésirables, pendant qu'il permet à la CISR de l'ouvrir toute grande aussitôt après.

Comment le ministre entend-il résoudre cette flagrante contradiction dans la mise en oeuvre de la politique d'immigration?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, la vérité, c'est qu'il n'y a pas de contradiction. Tous les éditoriaux du pays, après que votre critique eut parlé de cela, ont mentionné que ses propos étaient de la pure fabrication. Donc, sans aucun doute. . .

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je demanderais au ministre d'adresser ses paroles à la présidence.

M. Marchi: Monsieur le Président, comme je le disais, je pense que cela règle la question.

(1430)

Conformément au rapport Hathaway, nous avons dit clairement à nos agents chargés de présenter les cas qu'ils avaient le devoir de rechercher assidûment tous les documents qui tendraient à prouver que des revendicateurs ont un casier judiciaire, soit dans leur pays d'origine soit au Canada. Deuxièmement, j'ai dit que ces agents avaient le devoir de faire connaître ces documents.

La seule question qui soit au coeur de ces directives est que mes représentants et les agents indépendants de la commission ne devraient pas participer à la décision, mais ont l'obligation de faire connaître les renseignements en leur possession. Si ces renseignements ne sont pas infirmés, ils seront intégrés au dossier du cas à l'étude.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, le fait est que le système ne fonctionne pas. Avant de critiquer notre porte-parole, le député de Calgary-Nord-Est, le ministre devrait se rappeler qu'il a travaillé pendant 20 ans au service de police de Calgary et que ses collègues et lui ont dû subir pendant des années les méthodes insuffisantes du ministère.

Le ministre ne devrait pas s'intéresser à la question du point de vue du théoricien ou du groupe d'intérêts, mais bien de celui du grand public.


6036

Son ministère s'occupait autrefois de tous les aspects de l'immigration, y compris la détermination du statut des réfugiés. Depuis que la quasi-judiciaire Commission de l'immigration et du statut de réfugié a été créée et pourvue de membres de l'industrie de l'immigration, le ministre décline toute responsabilité quant aux lacunes de. . .

Des voix: Règlement!

Le Président: À l'ordre. Je demanderai respectueusement au député de bien vouloir poser sa question.

M. Manning: Voici, monsieur le Président. Le ministre de l'Immigration va-t-il assumer l'entière responsabilité de la politique de l'immigration?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, il est bien évident que le chef réformiste est complètement dépassé en la matière et qu'il ne sait pas de quoi il parle.

Sachez d'abord que mon gouvernement ou moi-même n'avons jamais abandonné la responsabilité de la politique de l'immigration à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Pour votre information, monsieur, il y a une différence entre. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je demande à mes collègues de bien vouloir adresser leurs observations à la présidence.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Le ministre est peut-être complètement dépassé en matière de procédure parlementaire, monsieur le Président.

Puisqu'il s'agit de comprendre, monsieur le Président, le ministre n'ignore pas que la vraie raison pour laquelle il est difficile de tenir les immigrants illégaux et les criminels étrangers hors du Canada, c'est que les tribunaux canadiens ont jugé, il y a quelque temps déjà, que la Charte des droits et des libertés s'applique à toute personne qui se trouve au Canada, peu importe qu'elle y soit entrée illégalement ou qu'elle présente des tendances criminelles.

L'intention du Parlement canadien et des assemblées législatives provinciales n'était certes pas que la Charte empêche le Canada de préserver l'intégrité de ses frontières.

Il y a deux façons de corriger la situation.

Des voix: Règlement!

Le Président: Quelle journée! Bon retour au Parlement! Le député aurait-il l'obligeance de poser sa question?

M. Manning: Le ministre a-t-il quelque chose à proposer pour régler la cause même du problème?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je dirai par votre entremise au député que son discours est aussi compliqué que la politique de son parti à cet égard. Il passe de la Charte des droits à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié à la politique de l'immigration. On ne le suit plus.

Le ministre que je suis n'a pas abandonné la politique à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Mon gouvernement et moi-même n'allons pas nous mêler des affaires de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié quand bien même les critiques du Parti réformiste nous exposeraient en

détail les tenants et les aboutissants de chacun des cas que la commission a à juger. Notre responsabilité concerne le cadre politique général dans lequel fonctionne la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

(1435)

Ensuite, vous voulez un moyen concret de faire disparaître la cause du problème.

* * *

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

La pression des lobbies de propriétaires et fabricants d'armes à feu s'intensifie sur le gouvernement afin qu'il renie son engagement électoral sur le contrôle des armes à feu. Aujourd'hui même, on assiste sur la Colline à une importante manifestation de ces lobbies pour ébranler le ministre de la Justice.

Le ministre va-t-il respecter l'engagement pris dans le livre rouge et résister aux pressions des propriétaires et des fabricants d'armes à feu et s'engage-t-il clairement à ne pas diluer la promesse de son parti à resserrer le contrôle sur la circulation des armes de poing et des semi-automatiques?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, au mois de mai dernier, le premier ministre m'a demandé de préparer des propositions pour l'automne afin de resserrer la Loi régissant les armes à feu, et je le ferai.

J'ai passé presque tout l'été en consultations avec les Canadiens et les Canadiennes aux quatre coins du pays et je les ai écoutés. Nous étudions actuellement une gamme complète de possibilités et je déposerai un projet de loi en Chambre dans quelques mois, probablement en novembre. Dans toutes les étapes que nous franchirons, notre but principal sera d'offrir plus de sécurité aux Canadiens. Nous sommes, je pense, à un moment où nous devons décider du type de pays que nous désirons.

[Traduction]

Dans les mois à venir, nous allons apporter des modifications importantes au système de contrôle des armes à feu. Qu'on ne s'y trompe pas! Dans les propositions que nous ferons, nous tiendrons compte des préoccupations légitimes des détenteurs d'armes à feu. Je me suis adressé cet après-midi à la foule qui s'était rassemblée devant la colline et j'ai souligné. . .

Des voix: Bravo!

M. Rock: . . .que le projet de réforme auquel je travaillais, à la demande du premier ministre, tiendrait compte de leurs préoccupations légitimes ainsi que des intérêts de l'ensemble de la population désireuse de se sentir en sécurité.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, si le ministre de la Justice reconnaît toujours la nécessité de resserrer le contrôle sur la circulation et la possession des armes à feu, pourquoi ne nous dit-il pas aujourd'hui, dès maintenant, comment


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il compte le faire au lieu de nous faire attendre, de nousfaire penser à autre chose et de nous faire croire qu'il est en train de faiblir?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le processus dans lequel je me suis engagé m'a conduit d'un bout à l'autre du pays pour m'entretenir avec des personnes que le sujet intéresse. J'ai consulté mes collègues du caucus libéral qui représentent toutes les provinces ainsi que les territoires.

Au lieu d'annoncer aujourd'hui à la Chambre ce que nous allons faire, je me contenterai de dire que nous sommes en train d'élaborer des propositions compte tenu de ces consultations et des préoccupations légitimes des détenteurs d'armes à feu.

Comme chaque fois qu'on m'en donne l'occasion, je répète, à l'intention de la députée, que notre objectif fondamental est d'accroître la sécurité de la société, que nous allons faire la chasse aux armes à feu illégales, que nous allons accroître les peines dont seront passibles les infractions commises avec des armes à feu, que nous allons réglementer la possession légale des armes à feu d'une façon qui soit compatible avec la sécurité de la société.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, ce dernier échange indique clairement que les propriétaires québécois d'armes à feu qui sont respectueux des lois n'ont pas le moindre représentant bloquiste à la Chambre.

(1440)

Le Président: La période des questions couvre décidément bien du terrain aujourd'hui. Le député va certainement poser sa question sans plus de détours.

M. Ramsay: Monsieur le Président, ma question s'adresse aussi au ministre de la Justice. Dans son rapport de 1993, le vérificateur général a mentionné que le projet de loi C-17, déposé par le gouvernement précédent, n'était pas fondé sur des bases statistiques solides et n'était qu'une mesure présentée pour la forme par le gouvernement.

Voici ma question au ministre de la Justice: Les modifications qu'il va proposer aux textes législatifs sur le contrôle des armes à feu reposeront-elles sur des données statistiques qui montrent nettement si les contrôles actuels correspondent à leur objectif, soit celui de réduire l'utilisation des armes à feu à des fins criminelles? Est-ce que, encore une fois, nous aurons affaire à une mesure présentée pour la forme?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le ministère a effectivement ordonné des études. Il en a obtenu des données concrètes sur la situation des armes à feu au Canada.

Nous avons lu avec intérêt les résultats de recherches que la police de Toronto a rendus publics hier sur l'utilisation d'armes de poing pour commettre des crimes dans cette ville. Nous avons lu dernièrement le rapport sur les faiblesses de l'actuel système d'enregistrement des armes à autorisation restreinte et sur la nécessité d'apporter des améliorations.

Nous avons lu des rapports d'études sur la nécessité de modifier le droit pénal pour bien faire comprendre que, lorsqu'un individu se sert d'une arme à feu pour commettre une infraction, il devra faire face à une réaction très sévère du système judiciaire.

Nos propositions seront fondées sur des faits, sur des rapports de recherches, mais elles seront surtout fondées sur la politique de notre gouvernement qui vise à adopter des mesures qui garantissent la sécurité de la société canadienne.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je remercie le ministre pour sa réponse. Je suis certain qu'il présentera les rapports en question aux membres du Comité permanent de la justice.

J'ai une question complémentaire. Pour qualifier les textes législatifs actuellement en vigueur au Canada sur le contrôle des armes à feu, nos tribunaux ont utilisé les termes suivants: vague, imprécis, nul, incompatible avec la Charte, tortueux, fictif et à mille lieux de la réalité.

Voici ma question au ministre: Est-il disposé à mettre de côté tout projet de loi et à entreprendre sur-le-champ une réévaluation complète des textes législatifs pour qu'ils soient clairs et compatibles, et qu'ils touchent directement l'élément criminel dans notre société, afin que cette dernière ait la protection dont elle a besoin?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, c'est précisément dans cette voie que nous sommes engagés.

* * *

[Français]

LE SANG CONTAMINÉ

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

Alors que les Canadiens se posent légitimement de sérieuses questions sur le système d'approvisionnement sanguin, la ministre déclarait à la presse canadienne que si les normes canadiennes pour les dons de sang ne sont pas aussi sévères que celles en vigueur aux États-Unis, c'est que les donneurs ici sont des volontaires.

Comment la ministre peut-elle tenir des propos aussi irresponsables alors que le scandale du sang contaminé au début des années 1980 est précisément survenu sous le régime des donneurs volontaires?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je suis toujours heureuse d'apporter des précisions à la question de l'honorable députée, afin d'informer également tous les Canadiens et Canadiennes que notre système de réglementation est différent. La raison pour laquelle il est différent, c'est qu'il est basé sur une philosophie différente, c'est-à-dire que nous avons un système de donneurs volontaires et non un système de donneurs payés.

(1445)

Cela ne veut pas dire qu'un système est supérieur à l'autre. En effet, nous travaillons à harmoniser les deux systèmes afin de rencontrer les normes que les centres de collecte de sang doiventrencontrer.


6038

Nous allons prendre ce qu'il y a de meilleur dans chacun, et nous allons ajuster notre système pour cela. Nous n'allons pas abaisser nos normes pour rencontrer celles du système américain.

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, cela n'a plus de bon sens.

Des voix: Oh, oh!

Mme Picard: En effet, je constate que nous sommes vraiment différents. Je pose une nouvelle question et j'entends, aujourd'hui, encore une fois, pour une deuxième fois parce que je l'ai demandé hier, je voudrais avoir une réponse claire et précise.

Comment la ministre peut-elle sérieusement prétendre que les gens sont pleinement informés des dangers des transfusions sanguines alors qu'on apprend que la directrice générale du centre de Montréal a dû exiger des directives, s'il vous plaît, en français, concernant les opérations et les procédures et qu'elle les attend toujours?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je vais répondre très clairement.

Des voix: Bravo!

Mme Marleau: Nous avons un système d'approvisionnement de sang qui est parmi les meilleurs au monde. On cherche toujours des façons de l'améliorer. Chaque jour, chaque heure, dans chaque hôpital au pays, on sauve des vies avec notre système de sang. Il faut continuer d'encourager nos donneurs volontaires à participer à notre système de collecte de sang.

* * *

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, cet été les résultats d'un sondage très révélateur sur l'immigration ont été publiés: 60 p. 100 des Canadiens estiment que les niveaux d'immigration devraient être réduits, 69 p. 100 sont d'avis que le parrainage devrait se limiter aux personnes à charge faisant partie de la famille immédiate et 96 p. 100 s'opposent à ce que l'on accepte des personnes ayant commis des actes terroristes ou antidémocratiques.

Le ministre de l'Immigration reconnaît-il que les niveaux élevés d'immigration, la politique de réunification de la famille étendue, ainsi que les lignes directrices publiées récemment pour accélérer la procédure dans le cas des demandeurs ayant commis des actes terroristes ou antidémocratiques vont tout à fait à l'encontre des voeux de la très grande majorité des Canadiens?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, le député a oublié de mentionner que son parti jouit de l'appui de seulement 10 p. 100 des Canadiens et qu'il est en perte de vitesse.

Ce que j'essayais d'expliquer au chef du Parti réformiste c'est que les propos du député sur la procédure accélérée sont aussi erronés que ceux qu'il a formulés hier au sujet d'un cas précis. Je répète au député que ce qu'il a dit relativement à la procédure accélérée est tout à fait inexact.

Par ailleurs, je sais, comme le gouvernement et tous les députés, qu'aucun Canadien ne souhaite accueillir des terroristes ou des criminels. Personne dans cette Chambre ou au Canada ne veut accueillir de tels individus.

C'est pourquoi le projet de loi C-44 se fonde sur le bon sens, qu'il vise à corriger les lacunes du processus de renvoi ainsi qu'à resserrer la procédure de revendication du statut de réfugié. Pourquoi ce parti essaie-t-il de se faire du capital politique au lieu d'appuyer cette mesure?

(1450)

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, les fonctionnaires du ministre veulent que l'on réduise le nombre d'immigrants. Ils veulent une rationalisation du programme de réunification des familles, de même qu'un resserrement de la politique de détermination du statut de réfugié. Le ministère du ministre, la grande majorité des Canadiens et même un nombre important de membres du gouvernement souhaitent la mise en oeuvre de la politique prônée par les réformistes.

Quand le ministre cessera-t-il de faire cavalier seul et de céder aux pressions de groupes d'intérêts, pour plutôt faire ce que tous attendent de lui, c'est-à-dire mettre en oeuvre la politique d'immigration prônée par le Parti réformiste?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, au cours des huit derniers mois notre parti a tenu un exercice de consultation sans précédent auprès des Canadiens, mesure qui, selon ce que laisse entendre le député, n'aurait pas été prise.

Pourtant, lors de la conférence de deux jours qui s'est tenue, celui-ci a dit aux fonctionnaires du ministère combien il était impressionné par l'ampleur de la consultation. Je le mets au défi de nier cela.

Le but de l'exercice est de réunir des personnes ayant des points de vue différents. À quand remonte la dernière invitation lancée par un ministre ou un gouvernement à l'Association canadienne de l'immigration, non pas pour simplement être présents mais pour se faire entendre, afin que le gouvernement sache ce que les Canadiens pensent?

Le gouvernement fera connaître les nouveaux niveaux d'immigration d'ici le 1er novembre. Je peux vous dire que ces niveaux seront établis dans l'intérêt des Canadiens et non des réformistes.

* * *

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, en juin dernier, plusieurs provinces ont refusé de se plier à la proposition de remplacement de la TPS par une autre TPS suggérée par les députés libéraux, membres du Comité des finances. Constatant un refus catégorique, le premier ministre et le ministre des Finances ont renié en moins de 24 heures le rapport de leurs députés, semant en même temps la plus totale des confusions sur leurs intentions.

Le ministre des Finances confirme-t-il que devant cette impasse, il propose actuellement deux hypothèses aux provinces, soit de remplacer la TPS par une autre TPS canadienne de 11 p.


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100 s'appliquant auxaliments, aux soins de santé et aux médicaments, ou encore de remplacer la TPS par une hausse des impôts des particuliers déjà étranglés par le fisc?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, tout d'abord, nous avons accepté la conclusion principale du Comité des finances, c'est-à-dire la nécessité d'harmoniser les taxes de vente aux niveaux fédéral et provincial pour mieux servir les consommateurs, la petite et moyenne entreprise et vraiment pour économiser beaucoup d'argent, des chevauchements, des dédoublements.

Ceci étant dit, nous avons eu des discussions avec les provinces et nous sommes encore en train de discuter. D'ailleurs, lors de la prochaine réunion des ministres des Finances, nous avons encore l'intention d'examiner le travail qui a été fait par les fonctionnaires cet été.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, le ministre des Finances nous dit qu'il a réglé les choses avec cette proposition. On n'a rien réglé puisqu'on a mis cette proposition-là dans la poubelle dès réception. Alors, on n'a rien réglé.

Quand le ministre va-t-il reconnaître que justement la façon de régler le problème, la seule façon, ce serait d'éliminer le fouillis, d'éliminer les chevauchements, de respecter l'autonomie fiscale des provinces, et en particulier du Québec? Ce serait d'abolir la TPS, un autre engagement qui n'est d'ailleurs pas respecté par le premier ministre, et de transférer intégralement ce champ de taxation aux provinces. C'est la seule solution, et on a déjà renié cet engagement d'abolir la TPS chez les libéraux.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, si le député veut tellement qu'on abolisse la TPS, je pense qu'en même temps il va certainement nous suggérer où nous allons prendre l'argent qui manque. Nous avons attendu pendant des semaines et des semaines afin que le député, le critique de l'autre côté, nous fasse des suggestions constructives, ce qu'il a refusé de faire.

(1455)

La fiscalité de notre pays est trop importante pour simplement écouter des discours en Chambre. Le député a eu sa chance et d'ailleurs, si le député veut s'asseoir et nous faire des suggestions constructives, on est certainement prêts à l'écouter.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Aujourd'hui, une foule de manifestants a dénoncé le contrôle des armes à feu. Dans ses déclarations, le ministre a reconnu que les armes à feu étaient utiles en milieu rural. Le ministre s'engagera-t-il à prendre les mesures qui s'imposent pour garantir la sécurité de la populationdans les villes et les régions urbaines où les crimes commis avec une arme à feu sont devenus un grave problème?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, j'espère que vous aurez compris, à la lumière des réponses que j'ai fournies aujourd'hui, que les mesures que nous prenons viseront à régler la question que soulève le député. Nous voulons éliminer les armes à feu illégales au Canada de façon globale et efficace et veiller à ce que le système de justice pénale du Canada impose un traitement plus sévère aux criminels qui commettent des infractions avec une arme à feu.

Cependant, je ne suis pas de ceux qui croient que la question est d'ordre rural ou urbain. Comme bien d'autres, je crois que les Canadiens qui vivent en milieu rural s'inquiètent tout autant de leur sécurité que les citadins. Les statistiques montrent que, sur une période de dix ans où 5 000 décès ont été examinés, le taux d'homicide commis avec une arme à feu par habitant était supérieur dans les régions rurales que dans les agglomérations urbaines. Par conséquent, il faut penser à la situation tant dans les localités rurales que dans les régions urbaines. L'essentiel, pour le gouvernement, c'est de veiller à la sécurité de la population canadienne.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, le ministère de l'Immigration m'a remis une liste des réfugiés acceptés au Canada. Selon certains renseignements, une des personnes dont le nom figure sur cette liste, et qui, croit-on, vit à Toronto, serait un trafiquant d'armes.

Le ministre de la Justice a-t-il pensé, comme mesure de contrôle des armes à feu, discuter avec le ministre de l'Immigration de la possibilité d'expulser de tels individus plutôt que d'axer ses efforts sur les citoyens respectueux des lois?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je serai heureux de parler de ce cas avec le ministre, mais je suis certain qu'il en est déjà informé.

Cependant, je ne crois pas que nous devions penser même un seul instant que la question du contrôle des armes à feu touche uniquement les commerçants de munitions, ceux qui commettent des vols à main armée dans des dépanneurs ou les chasseurs qui peuvent, de temps à autre, faire preuve d'imprudence dans le maniement de leurs fusils. Cela touche tout le monde et nous avons adopté une vue d'ensemble de la question.

Je n'ai jamais dit ou laissé entendre que ce sujet était de portée limitée. Nous parlons ici d'un vaste sujet qui englobe la présence d'armes illégales au Canada et l'utilisation d'armes à feu par des criminels. Nous devons absolument prendre des mesures. Il ne faut pas oublier que, chaque année, 1 400 personnes meurent par armes à feu au Canada. Dans 1 100 cas, il s'agit de suicides, dont un tiers des victimes sont âgées de 15 à 22 ans et agissent peut-être impulsivement, en réaction à un seul événement.

Donc, il faut envisager toute la question dans son ensemble. J'aborderai la question avec mon collègue et je travaillerai sans relâche aux propositions de solutions globales.


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M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je suis très déçu. Le ministre de la Justice affirme qu'il sera heureux d'en parler avec le ministre de l'Immigration. Cela vient un peu tard. Il aurait déjà dû aborder ce sujet.

Selon les services de renseignement de l'immigration-pour peu qu'il y en ait-il y a un autre individu du même genre sur la liste. Il vendrait des armes sur les marchés noirs internationaux. Je voudrais savoir si le ministre de l'Immigration comprend les liens qui existent entre les réfugiés criminels qui se livrent au trafic d'armes, le crime et le contrôle des armes à feu ou si ces liens restent nébuleux dans sa tête?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, nous comprenons très bien ces liens. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-44.

Puisque le député s'inquiète tant de la situation et se préoccupe des questions de criminalité et de justice au Canada, tant celles qui se rapportent à l'immigration que les autres, j'espère qu'il réfléchira à sa position et qu'il appuiera le projet de loi C-44 mardi prochain.

Le Président: Il est 15 heures, honorables collègues. Je voudrais simplement vous signaler que ce fut une période des questions plutôt inhabituelle. Nous n'avons pas eu autant de questions et de réponses que nous aurions pu espérer. J'espère bien que nous pourrons en avoir davantage demain.

* * *

[Français]

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, un peu plus tôt cet après-midi, vous m'avez demandé de retenir mes propos concernant une déclaration que je voulais faire, rapportant des propos qui avaient été tenus par ma collègue, la députée de Nova Scotia.

J'aurais à cet égard deux directives à vous demander. Les propos que je voulais tenir s'inspiraient directement de propos qui avaient été fidèlement tenus par ma collègue. La question que j'en suis venu à me poser, c'est: Doit-on comprendre par le geste de la Présidence qu'il y aurait dans cette Chambre deux types de parlementaires et comment se fait-il que la présidence ait accepté pareils propos?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Chers collègues, vous savez, dans un débat, de temps en temps, lorsque nous faisons des discours, il y a des mots que nous utilisons qui sont pas mal forts. J'aimerais lire à l'honorable député ce que nous disons ici dans le Règlement annoté: «Ce qui est acceptable ou inacceptable dépend largement des circonstances, mais les attaques personnelles, les insultes, les propos obscènes ou les remarques tendancieuses sur l'intégrité, l'honnêteté ou la réputation d'un député ou d'un sénateur ne sont pas de mise. Afin de limiter le plus possible les allusions personnelles, il a été convenu de désigner les députés par leur titre, leur poste, ou le nom de leur circonscription. De même, on utilise ordinairement les expressions «l'autre endroit» et «les membres de l'autre endroit» pourdésigner le Sénat et les sénateurs. Mais en règle générale, on décourage toute allusion aux débats du Sénat et aux sénateurs. En outre, il est de rigueur, depuis longtemps à la Chambre, de défendre le pouvoir judiciaire des attaques irrespectueuses ou offensantes.»

C'est pour cela que j'ai mis fin à son discours.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, vous avez fait certaines remarques, suite à la déclaration de mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead, dans le cadre des déclarations de députés en vertu de l'article 31.

Or, j'aimerais comprendre le sens de vos remarques relatives aux propos de mon collègue qui, lui, citait, et je dois répéter et citer les propos de la sénatrice Carstairs qui déclarait, et je cite: «Le Sénat est nécessaire parce que composé. . .»

Le Président: Encore une fois, j'aimerais donner à mon honorable collègue que je respecte beaucoup, la même raison. Je suis intervenu, parce que j'ai cru qu'il y avait des insultes contre et l'institution et le sénateur. C'est pour cette raison que j'ai pris cette décision.

Ce n'est pas un débat. J'ai compris que quand le député parlait, c'était cette règle qu'il transgressait. Alors, je voulais qu'on en reste là. Il y a un autre rappel au Règlement?

M. Duceppe: Monsieur le Président, mon collègue a répété des propos tenus par la sénatrice. Ce n'est certes pas lui qui offensait quiconque, mais bien plutôt la sénatrice qui offensait cette Chambre.

Le Président: Chers collègues, peut-être ai-je mal entendu. Je vais revoir ce que le député a dit et si c'est nécessaire, je vais revoir le Règlement.

* * *

(1505)

QUESTION DE PRIVILÈGE

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, je voudrais soulever une question de privilège au nom de mes 53 collègues du Bloc québécois.

En m'appuyant sur la jurisprudence dont vous venez de faire état, je suis certain que vous comprendrez que nous ne pouvons faire autrement que d'exiger des excuses pour une accusation inacceptable, à mon avis, et antiparlementaire qui a été utilisée par le premier ministre lors de la période des questions précédente, alors qu'il a accusé les députés du Bloc québécois de s'être fait élire sous de fausses représentations.

C'est non seulement l'insulte la plus grave qu'on puisse faire à un député dans cette Chambre, mais c'est également une attaque au processus même de la démocratie et de l'élection qui nous a permis de siéger ici. Les députés du Bloc se sont fait élire avec un programme très clair, avec un objectif bien identifié, le tout

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encadré dans une démarche tout à fait structurée et maintes fois répétée aux électeurs du Québec.

En ces circonstances, par respect pour les 53 élus du Bloc, par respect pour les millions d'électeurs qui ont voté pour nous au Québec et pour tous ceux et celles qui, au Québec, partagent notre projet de société, je demande donc au premier ministre de s'excuser et de retirer ses paroles.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, à la lecture que vous ferez sans doute d'ici peu du hansard de la Chambre des communes, je pense que vous verrez que la citation qu'on vient de porter à votre attention est sélective. En d'autres termes, on n'a cité qu'une partie de la phrase. Vous verrez clairement et les députés d'en face le verront aussi, et vous nous le direz demain, qu'en fait le premier ministre a cité toute une phrase et que prendre des mots au centre d'une phrase ne donne pas la portée du tout. À la lumière de cela, le sens sera totalement différent.

Le Président: Chers collègues, je vais certainement réviser ce qui a été dit aujourd'hui, je vais juger dans le contexte les mots qui ont été dits et s'il est nécessaire, je reviendrai à la Chambre.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, je m'en voudrais de priver mon collègue, le leader du gouvernement, de pouvoir nous répondre en ce qui concerne les travaux de la Chambre pour les prochaines semaines. Alors, je lui demanderais donc, comme c'est l'usage, de nous transmettre ses priorités pour les prochains jours.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Pendant quelques instants, monsieur le Président, j'ai cru que j'allais créer un précédent dans l'histoire parlementaire en m'invitant moi-même à faire la déclaration hebdomadaire concernant les travaux de la Chambre. Je remercie mon collègue, le leader de l'opposition à la Chambre, de m'avoir permis de respecter la tradition depuis longtemps établie à la Chambre, c'est-à-dire de ne faire cette déclaration qu'après en avoir été prié par le leader de l'opposition à la Chambre.

Voici donc l'énoncé hebdomadaire du programme des travaux de la Chambre: Aujourd'hui, nous poursuivrons l'étude en deuxième lecture du projet de loi C-41 concernant la détermination de la peine. Demain, nous mettrons en discussion, à l'étape du rapport et de la troisième lecture, le projet de loi C-25 visant à modifier la Loi fédérale sur les hydrocarbures concernant le champ pétrolifère de Norman Wells, suivie de l'étude en deuxième lecture du projet de loi C-49 portant sur la réorganisation du ministère de l'Agriculture.

Lundi, nous aurons au programme la deuxième lecture de deux autres projets de loi de réorganisation de ministères, le C-46 concernant le ministère de l'Industrie, et le C-48 concernant le ministère des Ressources naturelles.

Mardi, le premier article à l'ordre du jour sera la deuxième lecture du projet de loi C-50 concernant la Commission canadienne du blé, suivie par la reprise des débats entrepris mais non terminés sur les projets de lois que j'ai mentionnés.

(1510)

Mercredi, la Chambre entreprendra l'étude des amendements proposés par le Sénat au projet de loi C-22 concernant l'aéroport Pearson.

Enfin, le jeudi 29 septembre sera un jour désigné. Je crois que ce jour sera réservé à l'opposition officielle.

Voilà qui complète ma déclaration concernant le programme des travaux pour la semaine à venir.

_____________________________________________


6041

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, nous étudions actuellement le projet de loi C-41, qui vise à modifier les dispositions du Code criminel relatives à la détermination de la peine.

Ce projet de loi comporte plusieurs dispositions excellentes, mais d'autres aussi qui me préoccupent. Il est évidement difficile de bien étudier les dispositions du Code criminel qui ont trait à la détermination de la peine sans aussi prendre en considération les dispositions de fond du Code, ou même, d'étudier la détermination de la peine indépendamment du système carcéral ou du système de libération conditionnelle.

Autrement dit, si nous décidons de modifier les modalités ou la politique de détermination de la peine, nous devons nous demander en quoi ces modifications auront des répercussions sur nos populations carcérales et sur les programmes de traitement que nous offrons aux détenus et nous devons nous interroger sur leurs rapports avec notre système de libération conditionnelle.

Si elles prévoient de prolonger les peines, les dispositions sur la détermination de la peine entraîneront une augmentation de la population carcérale, ce qui aura évidemment des répercussions sur les détenus. S'il y a des répercussions qui se traduisent par une augmentation de la population carcérale, il y aura aussi des répercussions sur les programmes de traitement offerts aux détenus, sur la quantité de ressources qui y sont affectées, les locaux disponibles à cette fin, le nombre d'éducateurs, de conseillers, de psychiatres, etc.

Voici ce qui me préoccupe: si nous décidons de prolonger les peines tout en resserrant les conditions d'admissibilité à la libération conditionnelle-je renvoie les députés à certaines dispositions du projet de loi C-45 dont nous étions saisis hier-et si, en même temps, nous mettons moins de ressources à la disposition-


6042

de nos systèmes correctionnels et carcéraux en raison de notre campagne pour réduire le déficit, il y aura plus de détenus dans les établissements carcéraux, ceux-ci purgeront des peines plus longues et ils resteront incarcérés plus longtemps parce qu'il leur sera plus difficile de bénéficier d'une libération conditionnelle, mais moins de ressources seront affectées aux installations et aux programmes prévus pour ces détenus.

Il y a actuellement une très grave surpopulation carcérale. Cet été, j'ai eu l'occasion de visiter des établissements carcéraux de la région de Kingston. Certains qui avaient été construits pour accueillir 450 détenus en abritent maintenant plus de 650. Les détenus vivent à deux et même à trois dans des cellules plus étroites que la largeur de mes bras, et je dois dire que je ne suis pas costaud. Il y a maintenant double occupation dans de minuscules cellules.

Les programmes éducatifs et récréatifs offerts aux détenus ont par ailleurs fait l'objet de compressions. C'est le gouvernement précédent qui est à l'origine de cette situation, lui qui a constamment pratiqué des compressions au cours des neuf dernières années. Je soulève ce problème maintenant. Nous avons récemment formé le gouvernement, mais je soulève cette question très importante qui doit être prise en considération quand on étudie la détermination de la peine et la libération conditionnelle.

(1515)

Nous devons nous demander ce qu'il en résultera si nous maintenons cette politique où les détenus purgeant de longues peines et n'ayant pas le même accès aux libérations conditionnelles ne sont pas préparés à une libération conditionnelle et ne disposent pas de programmes pour les occuper et les aider en prison parce que nous nous inquiétons trop du déficit et que nous réduisons les dépenses un peu partout.

Pensons à des périodes précédentes quand il est arrivé des situations semblables. Il y a eu des prises d'otages, des émeutes, et les taux de récidive étaient plus élevés.

Il ne faut pas oublier que la vaste majorité des détenus purgent des peines de courte durée. Ils ne purgent pas des peines d'emprisonnement à vie. Ils sont en prison pour vol à main armée, voies de fait, fraude ou cambriolage, entre autres, et doivent purger des peines de cinq, sept ou dix ans. Tôt ou tard, ils doivent être remis en liberté. Si nous nous préoccupons vraiment de la sécurité publique, nous devons faire en sorte de réhabiliter les détenus pour qu'ils constituent un moins grand danger pour la société au moment de leur libération qu'au moment de leur incarcération.

Si nous continuons sur la voie qu'on propose dans certains milieux de la société et dont le Parti réformiste se fait le principal défenseur à la Chambre, je me demande s'il ne faut pas simplement imposer des peines plus dures et plus longues, resserrer le régime de libération conditionnelle et diminuer le budget des prisons. Mais quel serait le résultat de pareille politique pour la protection de la société quand la vaste majorité de ces détenus seront libérés?

Je suis d'avis que la situation s'en trouvera beaucoup plus dangereuse pour la population. Une fois libérés, les détenus seretrouveront à la rue sans éducation, sans formation, sans traitement pour ceux qui ont expérimenté les tensions, la violence et ainsi de suite. Nous n'avons qu'à examiner la situation aux États-Unis où on a adopté semblables politiques. Regardez ce qui se passe dans certains États du sud, comme la Floride, la Louisiane, le Texas, la Georgie, où on a mis en place ces politiques. Les peines y sont plus sévères et plus longues. L'obtention d'une libération conditionnelle y est plus difficile et on a sabré les ressources.

J'ai lu un article récemment où il était question d'un juge qui n'arrivait pas à caser un détenu faute de place. En effet, la prison était tellement bondée, il y avait si peu de gens qui en sortaient et tellement qui y entraient, qu'il n'y avait plus de place pour ce délinquant parce que les législateurs n'avaient pas songé à modifier les dispositions concernant la détermination de la peine et la libération conditionnelle et à fournir les ressources nécessaires.

Nous devrons peut-être construire d'autres prisons si nous continuons de prolonger les peines et de restreindre la libération conditionnelle. Cela nous coûtera peut-être beaucoup plus cher que si nous avions traité les détenus différemment.

Aux États-Unis, où on a adopté ces politiques, la population n'est pas mieux protégée. Le nombre des crimes avec violence y est beaucoup plus élevé que chez nous. Dans les États, comme la Floride, où on a rétabli la peine de mort, on exécute quelqu'un le matin et l'après-midi un autre tue un citoyen innocent uniquement pour s'emparer de sa voiture. Un jour, un Montréalais a pris un avion pour la Floride. À l'aéroport, il a loué une voiture et il a été assassiné précisément pour son véhicule, alors qu'il y avait eu une exécution le matin même. D'autres gens vous raconteront des histoires semblables.

Penchons-nous sérieusement sur nos politiques en la matière et sur les liens qui existent entre la détermination de la peine, notre système correctionnel et notre régime de libération conditionnelle.

Ce projet de loi comporte certaines modifications apportées à l'article 745 du Code criminel. Cet article, j'en suis en partie responsable parce qu'il traite de l'examen de la demande de libération conditionnelle présentée par les meurtriers qui ont été condamnés à 15 ans de prison. Ce projet de loi autorise la production de certains renseignement fournis par la victime au moment de déterminer si le délai d'admissibilité à la libération conditionnelle devrait passer de 25 à 15 ans.

(1520)

Je suis certainement d'accord pour dire que nous devons accroître le nombre de programmes d'aide aux victimes et tenir davantage compte de ces dernières dans notre système de justice pénale, mais je me demande si ce projet de loi est le bon endroit où prévoir des déclarations de victime.

En effet, l'article 745 stipule que, sur réception de la demande prévue aux termes de cet article, le juge en chef compétent charge un juge de constituer un jury pour l'entendre et pour décider s'il y a lieu de réduire le délai préalable à la libération conditionnelle du requérant, compte tenu de son caractère, de sa conduite-c'est-à-dire de la conduite du détenu durant l'exécu-


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tionde sa peine-, de la nature de l'infraction et de tout ce que le juge estime utile.

Je me demande si les renseignements fournis par la famille de la victime-dans ce cas-ci, les parents, l'épouse ou le mari de la personne qui a été assassinée-porteraient sur le caractère du requérant, car le juge doit effectivement examiner le caractère du requérant, sa conduite pendant l'exécution de sa peine et la nature de l'infraction. Je me demande donc comment, après 15 ans, la famille de la victime pourrait se prononcer sur le caractère ou la conduite du détenu qui présente une demande de libération conditionnelle anticipée.

Quoi qu'il en soit, je présume que les déclarations de la victime sur les répercussions du crime devraient se rapporter à la cause entendue par le tribunal et non à des questions n'ayant aucun rapport avec la cause.

Permettez-moi d'expliquer l'origine de ces dispositions. Avant 1976, les personnes condamnées de meurtre non puni de la peine de mort ou dont la peine a été commuée et qui avaient commis un meurtre puni de la peine de mort étaient admissibles à une libération conditionnelle au terme de 10 ans d'emprisonnement. Je souligne qu'il n'y a pas eu d'exécutions depuis 1962 au Canada. Jusqu'en 1976, les détenus étaient admissibles à une libération conditionnelle au terme de 10 ans, et très peu d'erreurs ont été commises. Je crois que, lorsque nous avons adopté cette mesure législative en 1976, seulement quatre personnes qui avaient été libérées sous condition avaient commis d'autres meurtres. L'admissibilité à une libération conditionnelle au terme de 10 ans n'avait donc pas été une expérience désastreuse dans le pays.

Lorsque la peine capitale a été abolie en 1976, nous avons prévu pour les meurtres au premier et au deuxième degrés une peine d'emprisonnement à perpétuité et l'admissibilité à une libération conditionnelle au terme de 10 ans pour les meurtres au deuxième degré, avec la possibilité pour le juge et le jury de porter ce délai à 25 ans au moment du procès ou du jugement. Pour les meurtres au premier degré, le délai d'admissibilité à une libération conditionnelle a été fixé à 25 ans, mais au terme de 15 ans, le détenu pouvait demander que le délai préalable à sa libération conditionnelle soit réduit de 25 à 15 ans.

Certains commentateurs et certains députés de la Chambre ont dit que cette disposition de 15 ans constituait une échappatoire. Ce n'est pas le cas, puisqu'elle figurait dans la mesure législative. Cela a été débattu à la Chambre. Cela figure clairement dans la mesure législative. Des dispositions ont été prévues à cette fin. Ce n'est pas quelque chose que le gouvernement ou les autorités ont trouvé comme ça. Ce n'est pas là par hasard. La loi prévoit bel et bien qu'une personne qui a purgé 15 ans de sa peine peut demander que son délai d'admissibilité à la libération conditionnelle soit réduit pour passer de 25 à 15 ans. Même si le tribunal réduit le délai d'admissibilité à la libération conditionnelle d'une personne de, disons, 25 ans à 16 ou 17 ans, celle-ci doit s'adresser à la Commission des libérations conditionnelles et plaider en sa faveur.

Nul ne peut être mis en liberté conditionnelle, à moins de n'avoir prouvé à la Commission des libérations conditionnelles qu'il est complètement réhabilité et qu'il ne présente plus de danger pour la société. La commission ou les tribunaux n'accordent pas automatiquement la libération conditionnelle au détenu qui, après avoir purgé 15 ans de sa peine, demande que l'onexamine son cas en vue d'une libération conditionnelle. En fait, la plupart des personnes qui demandent un examen de leur cas, après avoir purgé 15 ans de leur peine, voient leur demande rejetée. Même lorsque des détenus comparaissent devant la Commission des libérations conditionnelles, leur demande est très souvent rejetée. On ne leur accorde pas la libération conditionnelle parce qu'ils ne sont pas en mesure de prouver qu'ils sont complètement réhabilités et qu'ils ne constituent plus un danger pour la société.

(1525)

J'ai proposé que l'on élimine l'examen après 15 ans et que l'on fixe à 15 ans le délai d'admissibilité à la libération conditionnelle. Certaines personnes ont mal interprété cette proposition et ont dit que je voulais que l'on impose aux meurtriers une peine de 15 ans. C'est totalement faux. Les meurtriers ont toujours été condamnés à l'emprisonnement à perpétuité, et cela ne devrait pas changer.

Il ne faut pas oublier que lorsqu'une personne purge une peine d'emprisonnement à perpétuité, la peine se poursuit, même si cette personne est en liberté conditionnelle. Une personne peut purger sa peine à l'extérieur de l'établissement, de la prison. Mais la peine d'emprisonnement à perpétuité est toujours là et toute personne qui enfreint les conditions de sa libération conditionnelle-pas besoin, pour cela, de commettre un crime-peut être renvoyée en prison pour continuer d'y purger sa peine. Ou encore si vous commettez un délit mineur, comme une négligence criminelle, un vol ou une autre infraction du genre, on peut vous incarcérer à nouveau, non seulement à cause du délit mineur, mais pour la suite de votre peine d'emprisonnement à perpétuité pour meurtre.

Il n'est pas question de changer la peine liée au meurtre. C'est l'emprisonnement à vie, et je ne propose pas qu'il en soit autrement. Je parle ici du délai préalable à la libération conditionnelle, que ce soit 15 ou 25 ans. On ne veut pas modifier la peine. Toutefois, en vertu de notre système de justice pénale, il est possible de purger une peine dans un établissement à sécurité maximale, moyenne ou minimale ou encore à l'extérieur de tout établissement, mais sous surveillance, au sein de la collectivité. C'est ce qu'on appelle la libération conditionnelle.

Il existe donc diverses façons de purger une peine, mais le coupable demeure toujours sous le coup de cette peine. En cas de meurtre, il s'agit de l'emprisonnement à perpétuité et personne n'a proposé de modifier cela.

Je veux simplement dire que je suis heureux que le ministre n'ait pas aboli la révision après 15 ans dans le cas des personnes coupables de meurtre. Je me demande toutefois comment les dispositions de ce projet de loi s'appliqueront et quel sera leur impact sur la décision à prendre au moment de cette révision. J'aurais préféré qu'on abolisse entièrement la révision après 15 ans pour permettre la libération conditionnelle au bout de cette période. Les condamnés n'auraient pas automatiquement droit à la libération; ils devraient prouver qu'ils ne constituent plus un danger pour la société et qu'ils sont entièrement réhabilités. Par conséquent, les criminels dangereux ne seraient pas libérés, mais demeureraient en prison. Cependant, ceux qui, après avoir purgé 15 ou 16 ans de leur peine, pourraient prouver qu'ils sont entièrement réhabilités, prêts à travailler, à subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles et à s'intégrer à la société, tout en demeu-


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rantsous la surveillance des autorités, obtiendraient le droit de purger leur peine à l'extérieur, soit au sein de leur collectivité.

Je tiens à répéter que la protection du public doit être le principal objectif de toute politique sur la détermination de la peine. Le droit criminel a pour objet de protéger la population contre un comportement que nous jugeons être criminel. Si c'est là l'objectif visé, bien entendu, une fois que des gens sont incarcérés, nous devons avoir pour but de favoriser leur réinsertion sociale et de corriger leur comportement, car la grande majorité d'entre eux seront assujettis à des peines limitées et réintégreront la société. Dans ce cas-là, je le répète, le système doit veiller à favoriser leur réinsertion sociale.

Nous ne pouvons nous attendre à ce que le Code criminel, le système de justice pénale ou notre politique de détermination de la peine constituent le principal moyen de prévenir les crimes et de réduire la criminalité. Ces dispositions ne peuvent s'appliquer aux individus qu'une fois le crime commis et le dommage causé.

Si nous voulons vraiment faire de la prévention et réduire la criminalité, il faut alors nous attaquer aux causes profondes de ces crimes, qu'elles soient sociales, économiques ou psychologiques. Nous devons nous demander pour quelles raisons ces individus, jeunes ou adultes, commettent ces crimes. Que pouvons-nous faire pour les prévenir?

Il est peut-être possible d'exercer un meilleur contrôle sur les armes à feu. Je suis tout à fait favorable à un tel contrôle et j'appuierai le ministre lorsqu'il présentera son projet de loi, car moins il y aura d'armes en circulation, moins il y aura de crimes commis à l'aide d'armes à feu.

Il se peut que nous devions prendre des mesures au sujet des enfants qui sont abandonnés ou maltraités. Leurs parents alcooliques ou drogués les abandonnent et ces enfants grandissent alors complètement laissés à l'abandon, sans appartenir à une famille ou à un groupe, et deviennent ainsi très antisociaux.

Ce que je veux dire, c'est que les gens qui pensent que nous pouvons simplement apporter des modifications au Code criminel relativement à la détermination de la peine ou à l'essence même des infractions criminelles pour résoudre le problème et qui donnent à la population l'impression qu'on parviendra ainsi à une société plus sûre induisent complètement les gens en erreur. Ils ne sont pas honnêtes envers les Canadiens.

(1530)

Nous pourrions modifier tous les articles du Code criminel et rendre celui-ci le plus strict possible, cela ne résoudrait pas le problème. On peut le constater, je le répète, dans certains États américains.

Si nous voulons vraiment protéger les gens contre les crimes, si nous voulons réduire le taux de criminalité et faire de la prévention, nous devons alors nous attaquer aux causes, ce qui signifie la participation non seulement du ministère de la Justice ou du solliciteur général, mais également des services de Santé nationale et Bien-être social, du Développement des ressources humaines et d'Emploi et Immigration, ainsi que des gouvernements provinciaux, des conseils scolaires et des gouvernementsmunicipaux. Nous devons tous jouer notre rôle pour nous attaquer aux causes profondes de la criminalité dans la société.

Je vais conclure mes observations. Je le répète, le projet de loi renferme d'excellentes dispositions et de bonnes solutions de rechange pour la détermination de la peine. Il établit une charte ou un objectif relativement à la politique de détermination de la peine. Cependant, il y a quelques dispositions qui m'inquiètent, et je serai heureux, si le Comité de la justice examine ce projet de loi, de voir s'il ne serait pas possible d'y apporter certaines améliorations.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt la présentation de mon collègue d'en face. Je dois dire que je partage certaines de ses réserves à l'égard de la mesure législative et à l'égard de l'ensemble de la question de la lutte contre la criminalité dans le pays. Nous avons appris récemment que le taux de criminalité, au Canada, est à la baisse. Si c'est vrai, je pense que nous devrions nous en réjouir.

J'ai des réserves au sujet de la question de la libération conditionnelle et d'autres éléments de l'article 745. Il me semble que ceux qui entrent dans le système pénal sont ceux qui ont déjà démontré qu'ils n'étaient pas de bons citoyens ou ceux qui ont fauté. Il me semble qu'il faut mettre en branle quelque autre engrenage de l'administration de la justice dans ce cas, de sorte qu'ils apprennent la dure leçon qu'ils n'avaient pas apprise jusque-là.

J'aimerais bien avoir les commentaires du député. Il disait qu'il aimerait voir une libération conditionnelle automatique après 15 années d'emprisonnement, au lieu du simple droit de la demander, indépendamment du crime. Je m'inquiète beaucoup du fait qu'une personne ait automatiquement le droit de dire: «Ma peine est terminée, même si j'ai tué quelqu'un.» Cela est répréhensible et grave. Nous devrions renforcer cet aspect plutôt que de l'affaiblir.

J'aimerais bien qu'il justifie sa position, s'il le peut.

M. Allmand: Monsieur le Président, je me demande parfois si nous parlons tous la même langue, même quand nous parlons anglais. Je crois avoir dit et j'ai effectivement dit à de nombreuses reprises que je suis opposé à la libération conditionnelle automatique. Il n'existe pas de libération conditionnelle automatique au Canada et je n'ai jamais, de toute ma vie, proposé que cette mesure s'applique à qui que ce soit.

J'ai dit et j'affirme toujours qu'à partir d'une certaine date un détenu devrait pouvoir se présenter devant la Commission des libérations conditionnelles pour faire valoir sa cause. Il incomberait au détenu de démontrer qu'il est tout à fait réadapté et qu'il ne présente plus de danger pour la société. S'il ne peut en faire la preuve, la libération conditionnelle doit lui être refusée. La dernière chose que je recommanderais serait d'accorder une libération conditionnelle automatique à un détenu simplement parce qu'il a purgé une certaine partie de sa peine.

Il en va différemment dans le cas d'un détenu qui arrive à la fin de sa peine. J'y reviendrai dans un moment. Je n'ai jamais recommandé la libération conditionnelle automatique des meurtriers. Je ne l'ai jamais fait et ne le ferai jamais. J'en donne l'assurance au député. Il a peut-être lu des choses en ce sens mais je ne l'ai jamais recommandé.


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J'ai plutôt recommandé qu'un meurtrier ait le droit de demander une libération conditionnelle après 15 ans, tout comme un autre détenu peut demander une libération conditionnelle après avoir purgé le tiers de sa peine. Par exemple, un détenu qui purge une peine d'emprisonnement de six ans peut demander une libération conditionnelle après deux ans. Il ne l'obtiendra pas nécessairement. La Commission des libérations conditionnelles va entendre la cause du détenu, mais elle peut rejeter sa demande.

Il y a eu des cas où des détenus se sont présentés devant la Commission des libérations conditionnelles à six reprises et ont vu leur demande refusée six fois à cause de leur comportement. Tous les témoignages recueillis par la commission montraient que le détenu n'était pas prêt pour une libération conditionnelle. J'appuie cette façon de faire. Je ne crois pas en la libération conditionnelle automatique, je tiens à en donner l'assurance.

(1535)

Le député a également soulevé un argument valable lorsqu'il a dit que certaines personnes font la preuve, lorsqu'elles commettent des crimes, qu'elles sont de mauvaises personnes et qu'il faut les incarcérer. Je suis d'accord.

Les individus violents qui commettent des actes de violence doivent être gardés en prison, mais ils doivent également être soumis à un traitement ou à un système correctionnel qui fasse en sorte que, lorsqu'ils recouvrent leur liberté, ils représentent un moindre risque et soient moins susceptibles de répéter les actes pour lesquels ils ont été condamnés.

Il y a des précautions à prendre. On constate, par exemple, que le taux d'analphabétisme en prison est très élevé. Les détenus affichent un très faible niveau de scolarité. Ils n'ont pas de métier. Si nous pouvons les aider pendant leur détention à apprendre des métiers, à apprendre à travailler, à vivre comme des gens normaux qui se lèvent le matin, vont au travail, font des économies, bref à acquérir les mêmes aptitudes que les gens ordinaires, nous aurons beaucoup fait.

Si le système était ainsi fait qu'un libéré conditionnel puisse compter, dès son retour en société, sur un agent de libération conditionnelle qui l'aiderait à trouver du travail, à s'établir, à reprendre sa place dans sa famille, etc., ses chances de retomber dans la criminalité seraient moindres.

Je crois en l'utilité de la prison, mais les détenus doivent avoir accès à un programme qui les aide à mieux se débrouiller après leur libération.

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, je sais que le député de Notre-Dame-de-Grâce a beaucoup d'expérience en la matière, puisqu'il a déjà été solliciteur général du Canada.

Il nous décrit le système américain que la plupart d'entre nous considérons comme un modèle plutôt inquiétant. Ce n'est certainement pas une solution intelligente que de construire plus de prisons et d'imposer des peines plus longues. Cela semble être une industrie infernale aux États-Unis. On y crée la criminalité, puis on crée les justiciers, puis on crée l'incarcération et cela n'a plus de fin.

Le député nous a fait une brillante description des problèmes qui se posent en Floride, où l'on exécute des criminels le matin et où d'autres tuent des innocents dans l'après-midi. Je comprends ce qu'il veut dire au sujet de l'effet de dissuasion insuffisant.

Il y a aussi le problème des Canadiens qui essaient désespérément de comprendre ce que nous pouvons faire. À notre époque, les quartiers du centre-ville posent un problème grave. Dans ma propre circonscription, Rosedale, le centre-ville de Toronto me pose de graves problèmes. Il y a 15 ans, des balles n'allaient pas ricocher sur les édifices au centre-ville, mais maintenant des femmes et des enfants ont peur de se promener le soir dans certaines parties du centre-ville de Toronto. Cela ne sert à rien de dire que nous allons confisquer toutes les armes à feu. Il faut bien admettre que ce serait un début, mais rien qu'un début. Il y aura toujours des armes à feu en circulation.

Le député a-t-il trouvé un autre modèle, connaît-il un endroit ou un exemple qu'il puisse nous citer avec toute la force de son expérience et dont nous pourrions nous inspirer, quelque chose de concret sur quoi les Canadiens pourraient se fonder pour régler ce problème considérable, sans réagir à l'américaine, mais plutôt en nous attaquant fermement au problème de la violence, qui se répand dans nos villes?

M. Allmand: Monsieur le Président, je remercie le député de Rosedale. Comme je l'ai dit, il n'y a pas de solution miracle à la hausse de la criminalité. Si nous voulons faire croire aux Canadiens qu'il y en a une, nous méritons leur blâme.

Ce n'est pas très bien servir le public que de vouloir lui faire croire que nous pouvons régler le problème de la criminalité à Toronto, Montréal ou Vancouver, simplement en modifiant les dispositions du Code criminel ou en portant la peine à vingt ans au lieu de dix, comme l'ont fait certains États américains. Ce n'est pas très bien le servir que de vouloir lui faire croire que c'est la solution et que cinq mois plus tard, la criminalité redouble.

À mon avis, la Chambre doit faire preuve de leadership dans ce domaine et s'attaquer aux causes de la criminalité. Nous devons veiller à mettre en place des lois pour la protection de l'enfant, qui s'appliquent dès l'enfance, à huit ou neuf ans, lorsque les enfants sont maltraités ou commencent à prendre le mauvais chemin. Il existe une loi de ce genre au Québec, la Loi sur la protection de la jeunesse. Je suis sûr qu'il en existe également une en Ontario, qui s'applique aux enfants de moins de douze ans, soit aux enfants en-dessous de l'âge auquel s'applique la Loi sur les jeunes contrevenants.

Qu'il s'agisse d'enfants renvoyés de famille d'accueil en famille d'accueil, abandonnés par leur famille, aux prises avec des problèmes de drogue, ou autres, nous devons intervenir rapidement et essayer d'empêcher cela. Nous devons aussi veiller à avoir notamment des systèmes d'éducation et des politiques d'emploi qui soient bien adaptés et qui incitent les gens à s'orienter vers une vie productive plutôt que vers la criminalité. Voilà ce que, à mon avis, nous devons faire. Ce n'est pas une solution miracle. Cela veut dire qu'il va falloir dépenser de l'argent, mais


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c'est un investissement. C'est de l'argent qui va rapporter, car il va permettre de renforcer la sécurité.

(1540)

Il est possible que des crimes terribles aient été commis à Toronto ces dernières années. Cependant, j'ai consulté les statistiques. Toronto a enregistré entre 50 et 60 meurtres l'an dernier. Nous parlons d'une ville de plus de trois millions d'habitants! Si on compare ces chiffres à ceux de Detroit, de Cleveland ou de la Nouvelle-Orléans, où l'on enregistre plus de 500 ou 500 meurtres par an, Toronto est une ville sûre.

Je ne veux pas dire que l'on doive tolérer les terribles crimes commis à Toronto, Montréal, Vancouver ou ailleurs. Ce que je veux dire, c'est que le taux de criminalité est nettement plus faible ici qu'aux États-Unis. Peut-être est-ce parce que nous avons toujours adopté une approche qui n'était pas simplement fondée sur la justice pénale.

Nous avons un plus grand nombre de programmes sociaux et de meilleurs programmes d'éducation. Aux États-Unis, la loi pénale relève de l'État alors qu'ici, elle relève du fédéral. Certains États américains ont de meilleurs systèmes et programmes que d'autres. Je parle de ceux où l'approche est davantage axée sur l'action punitive que sur la prévention ou la réadaptation. Dans les États où l'approche est davantage axée en ce sens, les résultats sont nettement meilleurs.

Prenez les États comme le Minnesota ou certains États de la Nouvelle-Angleterre, le taux de criminalité pour 100 000 habitants y est nettement inférieur que dans les États du Sud, où les politiques sont très dures et les peines très longues.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Surrey-White Rock-South Langley. Les autres députés de notre caucus parleront 20 minutes.

C'est avec grand plaisir que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour commenter le projet de loi C-41 qui porte sur notre système de justice pénale et plus précisément sur la détermination de la peine. Il faut féliciter le ministre de la Justice d'avoir déposé ce projet de loi, de même que pour ses autres initiatives concernant les jeunes contrevenants et le contrôle des armes à feu.

Bien que de ce côté-ci de la Chambre nous n'approuvions pas toutes les propositions du ministre, il ne fait aucun doute qu'il nous donne matière à réfléchir. Je ne peux m'empêcher de penser que si seulement le ministre des Finances faisait autant d'efforts pour améliorer le sort des Canadiens, il aurait déjà épongé le déficit.

Quoi qu'il en soit, nous sommes ici pour parler du projet de loi C-41. J'aimerais parler aujourd'hui d'abord des aspects positifs de ce dernier puis de ses lacunes-du moins ce que je pense être des lacunes-qui, espérons-le, seront corrigées lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité.

Comme l'ont dit mes collègues, l'un des éléments positifs les plus importants est le fait que, pour la première fois, un texte législatif contient un énoncé de l'objectif des peines et des principes devant guider le prononcé de ces dernières.

Il n'y a rien de nouveau dans cet énoncé; toutefois, il codifie la loi actuelle et guidera de façon explicite les juges au criminel quant aux principes à suivre dans chaque cas. C'est un aspect positif du projet de loi C-41 qui présente toutefois un certain nombre de lacunes qui, je l'espère, seront éliminées en comité.

Lorsque je discute du système de justice pénale avec mes électeurs, ce qui revient le plus souvent, c'est le manque d'uniformité des peines. Cette imprévisibilité existe tant en raison des différentes peines imposées à l'égard de crimes de même nature, que de la courte période passée derrière les barreaux par certains criminels.

Les gens estiment que des crimes identiques devraient être assortis de peines identiques. Autrement dit, si un col blanc est coupable d'un vol par abus de confiance, il devrait se voir imposer la même peine que n'importe quel autre individu qui commet aussi un vol. Je sais que, dans certains cas, les cols blancs se voient imposer des peines plus sévères que d'autres criminels; toutefois, étant donné la façon dont notre système fonctionne, la plus grande partie de ces peines est purgée en liberté et non en prison.

Les cols blancs devraient purger leur peine en prison. C'est le fait d'être tenu responsable de nos actes qui est dissuasif. Notre système de justice pénale doit envoyer un message clair à tous ceux qui envisagent de commettre un crime. Si vous commettez un crime, vous devez purger votre peine en prison. Les coupables doivent être incarcérés et ne pas bénéficier d'un traitement spécial.

Le deuxième aspect soulevé par mes électeurs a trait à la durée de la période passée derrière les barreaux. Nous sommes tous au courant de cas où des personnes condamnées à de longues peines d'emprisonnement ont pu rapidement recouvrer leur liberté. Notre système semble offrir toutes sortes de possibilités de manipulation aux criminels, de sorte que ceux-ci sont loin de passer autant de temps en prison que ne le croyaient à l'origine le juge ou les victimes.

Je sais que le projet de loi C-41 traite de cet aspect en permettant aux victimes de se faire entendre lors des audiences visant à déterminer s'il y a lieu d'accorder une libération conditionnelle anticipée.

(1545)

Pourquoi imposer ce traumatisme aux victimes? En fait, pourquoi devrait-on tenir des audiences en vue d'une libération conditionnelle anticipée? Quand un individu est condamné à une peine d'emprisonnement de dix ans, qu'y a-t-il de mal à ce qu'il fasse au moins sept ou huit ans de prison avant qu'il ne soit question d'une libération conditionnelle ou d'un autre moyen pour le remettre dans la rue?

Cette question conduit à la suivante: Ceux qui ont commis des crimes avec violence devraient-ils être libérés? Leurs peines


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devraient-elles être réduites? Aujourd'hui plus que jamais, nous savons que les Canadiens sont irrités lorsque des criminels violents bénéficient d'une semi-liberté, d'une libération conditionnelle anticipée ou d'une peine réduite. Un crime avec violence suit. Une mort due à un délinquant violent qui ne devrait pas être en liberté au Canada avant la fin de sa peine, c'est trop.

Les Canadiens veulent que leur système leur donne des certitudes et ce n'est pas ce projet de loi qui le leur en donnera.

Je m'oppose aussi au facteur aggravant de haine lié à la détermination de la peine pour certains crimes. Selon le Parti réformiste, nous avons tous été créés égaux. Aucun groupe ne devrait donc avoir plus de droits que les autres. Il m'apparaît insensé de déterminer la rigueur du châtiment selon que la victime appartient ou non à une classe privilégiée. Est-ce pire de tuer ou de blesser une personne appartenant à une classe privilégiée? Je ne le crois pas. Quand un crime est commis, il doit y avoir un châtiment et la population devrait savoir que celui qui commet tel crime recevra tel châtiment. Ce raisonnement est peut-être simpliste dans notre société apparemment si complexe, mais c'est celui que nous, les réformistes, adoptons.

J'ai entendu à la Chambre mardi que, si un crime motivé par la haine était commis, le châtiment devrait être plus rigoureux, plus dur. Si j'ai bien compris, on a alors cité l'exemple d'un membre de la communauté gay qui avait été brutalement battu et en était mort.

J'ai demandé à la Chambre de considérer le cas tragique d'un homme de 31 ans, de Coquitlam-un certain M. Niven, je crois-qui, tout récemment, a été brutalement attaqué et battu à mort en allant au dépanneur. Ce crime est-il moins sauvage que l'autre? Peut-on vraiment affirmer que l'un est pire que l'autre?

Y en a-t-il un qui mérite d'être plus sévèrement puni que l'autre? Ne s'agit-il pas dans les deux cas d'un homme brutalement battu à mort? Une vie vaut-elle moins qu'une autre? J'espère bien que non. Toute vie n'est-elle pas également précieuse? Je l'espère bien.

Ce qui nous préoccupe aussi, c'est que ce projet de loi permet aux provinces d'établir des programmes de mesures de rechange. Cette disposition a beau viser des buts louables en théorie, elle risque elle aussi d'être un gage d'inégalité. Des crimes similaires risquent d'être traités différemment selon les provinces. Il y a déjà bien assez d'incertitude dans le système sans en rajouter.

Une lacune flagrante du projet de loi, c'est qu'il ne prévoit pas que les crimes commis avec une arme à feu entraînent automatiquement des peines plus sévères. Le ministre de la Justice en a parlé au sujet du contrôle des armes à feu, tout comme d'ailleurs le lobby des partisans d'un contrôle plus strict des armes à feu.

Je veux maintenant citer le rapport d'enquête que le Service correctionnel du Canada a publié, le 25 août dernier, sur les évasions qui se sont produites au pénitencier à sécurité minimale de Ferndale, dans ma circonscription. Deux détenus, TimothyDenis Cronin et Michael Kelly Roberts, se sont évadés de cet établissement le 3 mai.

Ils ont été repris peu de temps après à Salem, en Oregon, mais avaient profité de leur bref moment de liberté pour assassiner un Américain. Ces deux hommes avaient été reconnus coupables de crimes violents qu'ils avaient commis en se servant d'armes à feu. Pourquoi ces deux contrevenants étaient-il incarcérés dans un établissement à sécurité minimale?

En 1979, l'un des psychologues de Roberts avait conclu que Roberts devait rester emprisonné dans un établissement à sécurité maximale.

Voici les résultats de l'enquête. «La commission conclut que, nonobstant l'avis du personnel ainsi que des psychologues et psychiatres dans les cas de Roberts et Cronin, leur incarcération dans un établissement à sécurité minimale était une décision inopportune et, dans un des cas, fondée partiellement sur un outil d'évaluation mal utilisé.»

Je suis heureux qu'on ait reconnu l'erreur et fait des recommandations pour prévenir ce genre de situations. Comme le disent les auteurs du rapport dans leur huitième recommandation: «Le Service correctionnel du Canada devrait avoir comme politique de surveiller étroitement les nouveaux détenus et contrevenants à risque élevé envoyés dans un établissement à sécurité minimale et leur offrir des services cliniques.»

Cela est prévu dans le plan d'action, qui dit: «Aucun contrevenant généralement à risque élevé devrait être incarcéré dans un établissement à sécurité minimale.» Malheureusement, le plan d'action ne s'arrête pas là. On poursuit en disant: «Cependant, il faut reconnaître que certains contrevenants aptes à être incarcérés dans un établissement à sécurité minimale exigent plus de surveillance que d'autres.»

(1550)

Cette question m'inquiète. J'ai examiné le pourcentage et le genre de crimes commis par les détenus de l'établissement Ferndale et j'ai découvert que 43,8 p. 100 des détenus de Ferndale sont des contrevenants violents. Comme les meurtres et les décès violents constituent plus de 29 p. 100 de ces infractions, je présume que ces infractions ont été commises au moyen d'une arme et, plus souvent qu'autrement, une arme à feu.

Qui sera le prochain contrevenant à risque élevé à s'évader de Ferndale? Quand commencerons-nous à accorder plus d'importance aux droits des citoyens respectueux de la loi qu'à ceux des contrevenants? Je le répète, si un autre détenu à risque élevé s'évade de la prison à sécurité minimale Ferndale, située à Mission, comme cela lui est très facile de le faire, et tue une autre victime innocente, ce sera payer un prix trop élevé.

Il aurait été si simple d'insérer dans le projet de loi des dispositions prévoyant des peines plus sévères pour les auteurs de crimes commis avec une arme à feu. C'est probablement la seule restriction concernant l'utilisation des armes à feu qui touche directement ceux qui utilisent le plus les armes à feu, c'est-à-dire les criminels. Il est plus que temps d'aborder cet


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aspect du contrôle des armes à feu. J'espère que le gouvernement resserrera les mesures prévues à cette fin dans son projet de loi.

En terminant, je crois qu'il est temps d'avoir une loi exhaustive sur la détermination de la peine, et ce projet de loi est un premier pas dans la bonne direction. Dans les mois à venir, j'espère que le ministre de la Justice nous fera part d'autres initiatives, en ce qui concerne par exemple la nomination des juges et la réduction du coût énorme de notre système de justice. Ce débat devra toutefois attendre.

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River): Monsieur le Président, la députée a déclaré que les gens qui se livrent à la criminalité en col blanc devraient purger leurs peines. Plus tôt aujourd'hui, son collègue de Wild Rose a déclaré qu'il existait peut-être d'autres moyens que l'incarcération pour punir les auteurs de crimes non violents.

Comment la députée explique-t-elle cette contradiction apparue aujourd'hui dans la position de son parti?

Mme Jennings: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Oui, j'ai fait cette déclaration. Je crois que tous les gens qui commettent des crimes doivent payer pour leurs actes et doivent être incarcérés. Cependant, s'il arrivait, et je dis bien «s'il arrivait» que nos établissements carcéraux soient surpeuplés, il ne serait que logique de rechercher des solutions à cette surpopulation. Il serait alors tout naturel de trouver d'autres moyens de faire purger leur peine aux auteurs de crimes non violents et le travail communautaire constituerait un excellent moyen, mais seulement s'il n'y avait plus de place pour eux dans les pénitenciers.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général): Monsieur le Président, les propos de la députée m'intéressent au plus haut point. Nous apprenons que notre système carcéral a moins de ressources pour garder les gens en prison. Nous savons qu'il en coûte environ 50 000 $ par année et par détenu.

Nos prisons sont bondées et nous entrevoyons la possibilité d'une augmentation de 30 p. 100 de la population carcérale au cours des prochaines années. Nous savons aussi que les États-Unis accordent moins de libérations conditionnelles, mais que les résultats ne sont pas très satisfaisants, en ce sens que, même si on laisse les détenus en prison, le taux de criminalité ne diminue pas.

Je voudrais bien savoir aussi comment le Parti réformiste peut penser que l'absence de réglementation sur les armes à feu fera diminuer la criminalité. Il me semble très étrange que nous nous préoccupions plus de l'établissement des peines que du contrôle de l'utilisation des armes à feu dans la société. Si nous pouvions faire enregistrer les armes à feu, nous exercerions un meilleur contrôle, mais nous insistons plutôt sur les peines à imposer à ceux qui ont déjà commis un crime. C'est ce qui me semble illogique dans l'argumentation de la députée.

(1555)

Comment peut-on dire qu'il ne faut pas réglementer les armes, comme le propose le ministre, et prétendre qu'il serait préférable de dépenser davantage en alourdissant les peines et en jetant des gens en prison, alors que nous pourrions simplement réduire le nombre de meurtres, résultat que permettrait d'obtenir une projet de loi sérieux et complet sur la réglementation des armes à feu? Je voudrais connaître les réactions de la députée.

Mme Jennings: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Vous avez dit deux ou trois choses. Tout d'abord, je suis très inquiète chaque fois que vous parlez de contrôler les armes à feu. Ce que vous dites en fait, c'est que nous empêchons des citoyens respectueux des lois. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je rappelle aux députés des deux côtés de la Chambre qu'ils doivent s'adresser à la présidence.

Mme Jennings: Je vous prie de m'excuser, monsieur le Président. Je présente aussi mes excuses au député d'en face.

Je trouve l'ensemble de la situation préoccupante. J'éprouve du respect pour tous les députés à la Chambre et j'essaie de me convaincre que, tout comme moi, vous dites ce que vous pensez sincèrement. Ce que je veux dire, c'est que nous avons des propriétaires d'armes à feu qui sont sincères. Chaque fois que nous légiférons sur le contrôle des armes à feu, ce sont eux qui écopent. C'est inacceptable. Nous devons trouver un autre moyen. On ne peut pas justifier l'adoption de lois qui vont retirer des droits à des citoyens respectueux des lois. Dans une société juste, c'est injustifiable.

Quant au problème des prisons bondées, la solution est-elle d'ouvrir les portes et de relâcher les détenus? N'est-ce pas ce qu'on a fait en Russie en 1917? Y en a-t-il parmi vous qui savent ce qui est alors arrivé aux innocentes gens des petits villages de la steppe russe? Pensez-y un seul instant.

Non, nous ne devons pas ouvrir les portes. Ce qu'il faut faire, c'est convaincre même les jeunes qui, étant mineurs, peuvent commettre des crimes parce qu'ils ne peuvent être tenus responsables. Il ne faut pas qu'ils puissent tirer la conclusion qu'ils peuvent commettre des crimes et s'en tirer à bon compte. Nous devons nous en tenir à ce que nous avons et apporter des améliorations. Nous devons montrer que les gens doivent agir de façon responsable. Il n'y a qu'un moyen, faire purger les peines. Pour ceux qui ne sont pas coupables de crimes avec violence, il est possible d'envisager d'autres solutions. Nous pouvons le faire, mais cela exigera un travail sérieux de notre part.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'aimerais bien être aussi généreuse que ma collègue qui félicite le gouvernement de son projet de loi C-41, mais je trouve qu'il ressemble à beaucoup d'autres mesures législatives. Il s'agit tout bonnement de poudre aux yeux. C'est donner l'impression qu'on change vraiment un système qui a besoin de changement.


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J'estime en effet que le projet de loi C-41 n'apportera pas ces changements substantiels que les Canadiens attendent du gouvernement actuel. Le projet de loi C-41 prouvera cependant sa véritable valeur s'il contribue à rendre les rues plus sûres pour les Canadiens. J'en doute.

Je voudrais consacrer l'essentiel de mon intervention de cet après-midi à un aspect en particulier de la mesure à l'étude, à savoir les dispositions touchant la criminalité motivée par des partis pris, des préjugés ou de la haine. Je reconnais avec tout le monde que nous devons condamner ce genre de criminalité, mais nous ne devrions pas créer, ce faisant, une hiérarchie de victimes.

Le paragraphe 15(2) de la Charte des droits stipule que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous et que tous ont droit à la même protection de la loi. Je pense que le projet de loi C-41 y changera quelque chose. Il amènera à penser en effet que certains crimes contre certaines catégories de victimes sont pires que les mêmes crimes contre d'autres catégories de victimes. Je soutiens que cela va à l'encontre des principes fondamentaux de la Charte des droits, à savoir que tous les Canadiens ont tous également droit à la protection des lois canadiennes.

(1600)

Un exemple de la façon dont cela pourrait s'appliquer se voit plus souvent que je le souhaiterais. Je veux parler des cas de vol avec violation de domicile qui se produisent dans la région de Vancouver. Des individus, seuls ou en bande, entrent par effraction dans des maisons dont ils terrorisent les occupants. Ils n'attendent pas que ces derniers quittent la maison. Ils y pénètrent quand les propriétaires s'y trouvent et ils les terrorisent pour se faire remettre tous les objets de valeur. Beaucoup de ces vols avec violation de domicile sont le fait de bandes de jeunes asiatiques qui prennent pour cibles des membres de la communauté asiatique. Il s'agit là de parti pris et de sélection de victimes. Ce fait serait considéré comme une circonstance aggravante aux termes du projet de loi C-41.

Par contre, si les membres d'un gang commettent des vols avec violation de domicile chez des victimes qu'ils ont choisies au hasard mais qu'ils harcèlent et qu'ils dépouillent de leurs objets de valeur, il n'y a pas de circonstance aggravante. Ce crime est pourtant tout aussi grave et préjudiciable pour les victimes.

Les deux crimes sont tout aussi déplorables, mais les membres d'un des gangs se verront infliger des peines plus sévères pour avoir été plus sélectifs dans le choix de leur crime.

Il faut juger l'acte. Il faut juger l'activité criminelle, pas la motivation. En jugeant la motivation, on s'engage dans une proposition risquée qui n'est pas sans rappeler la police de la pensée de George Orwell. Je crois qu'on s'aventure sur un terrain très glissant quand on commence à s'ingérer dans ce que l'on croit être la pensée des gens.

J'aimerais savoir si l'on a inclus ces dispositions pour le bénéfice des avocats, des pseudo-psychologues et des psychiatres qui deviendront bientôt des spécialistes juridiques en la matière. Pourquoi une agression insensée serait-elle considéréemoins grave qu'une autre qui est motivée par des préjugés ou de la haine?

Je conçois plus facilement que l'on considère comme une circonstance aggravante le fait qu'un criminel ait abusé de la confiance de sa victime. Le ministre de la Justice a utilisé les exemples d'adultes et d'enfants ainsi que de médecins et de patients. Il devrait aussi songer à inclure parmi les exemples d'abus de confiance qui devraient être considérés comme des circonstances aggravantes les situations où des avocats abusent de la confiance de leurs clients et où des politiciens abusent de celle de leurs électeurs.

Je m'inquiète non seulement de ce que certaines catégories de victimes soient mentionnées, mais aussi du traitement particulier réservé aux contrevenants autochtones. Cela me semble aussi enfreindre les dispositions de la Charte qui ont trait à l'égalité. Je ne dis pas qu'il y a une surreprésentation de la population autochtone dans nos milieux carcéraux, mais je ne crois pas que ce soit là la solution au problème.

J'ai passé 15 ans dans le nord de l'Alberta parmi les autochtones; je connais donc mieux que la plupart des gens les inégalités et les injustices qui sont le lot des autochtones. Ils seraient les premiers à dire que le problème ne se réglera pas à coups de lois, mais par l'administration de la justice.

Je voudrais vous donner un autre exemple. Si deux individus ayant le même dossier criminel participent à parts égales à la commission d'un crime, l'un étant autochtone et l'autre pas, est-ce que ce projet de loi aurait pour effet que le délinquant autochtone recevrait une peine moins lourde même s'il a joué le même rôle dans la commission du crime? Qu'en est-il d'un autochtone qui commet un crime fondé sur la haine? Les circonstances atténuantes découlant du fait qu'il est autochtone annulent-elles les circonstances aggravantes dues à la commission d'un crime motivé par la haine?

Je pense qu'il ne faudrait même pas se poser ces questions-là. Je ne pense pas que nous ayons à nous demander quel est le motif du crime. Nous devrions nous contenter de porter un jugement uniquement sur l'acte lui-même et de veiller à ce que tous les Canadiens soient traités sur un pied d'égalité par la loi. La loi ne devrait pas tenir compte de la race, de la couleur de la peau ou du sexe des délinquants.

(1605)

De façon générale, je suis d'accord pour dire que l'incarcération est une solution de dernier recours et je suis tout à fait consciente du risque de surpeuplement de nos prisons et des dangers que cela comporte. Mais je pense que le fait de dire qu'il ne doit y avoir que des criminels violents dans les prisons ne règle qu'une partie du problème.

Ce projet de loi ne traite absolument pas de la criminalité en col blanc, où les peines pécuniaires pourraient être insuffisantes en elles-mêmes pour dissuader les sociétés ou les gens qui devraient savoir qu'ils commettent un crime. Ces gens-là peuvent payer une amende sans problème et ils ont besoin de moyens de dissuasion beaucoup plus convaincants que le simple paiement d'une amende pour ne pas commettre ce genre de crime.

Je m'attendais à plus de ce projet de loi dans le domaine de la détermination de la peine. Je m'attendais à une plus grande reconnaissance de la préoccupation des Canadiens suivant la-


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quelleil faut contrôler davantage les criminels violents, prendre un certain nombre de mesures de dissuasion et traiter tous les Canadiens sur un pied d'égalité.

J'estime que l'objectif premier de la détermination de la peine consiste non seulement à imposer une peine pour un crime, mais encore à fournir un moyen de dissuasion. Je suis d'avis que nous ne pouvons pas omettre ce dernier élément dans notre législation sur la détermination de la peine.

Les peines, comme la probation, et même les peines d'emprisonnement sont efficace à court terme, mais elles doivent faire l'objet d'un suivi à long terme. Ce que je veux dire par là, c'est que si une personne reçoit une peine d'emprisonnement de deux ans parce que c'est la peine qui convient pour avoir commis un crime, elle devrait purger ces deux années-là en entier. Il faudrait ajouter à cela une peine de surveillance communautaire.

Cela ressemblerait quelque peu à la libération conditionnelle actuelle, mais les Canadiens accepteraient et comprendraient mieux le système s'ils savaient que les tribunaux ont décidé d'imposer une peine donnée pour un certain crime et ont jugé ensuite bon de prévoir une période de surveillance où on aiderait ce criminel à réintégrer la collectivité. Selon moi, si cela se produisait, les gens accepteraient beaucoup mieux certaines des sentences rendues.

Les délinquants violents coupables d'un crime grave devraient être placés sous surveillance toute leur vie. Selon moi, les délinquants qui ont agressé brutalement d'autres personnes ou commis un meurtre devraient effectivement être placés sous surveillance toute leur vie, en plus de la sentence prononcée contre eux. Si les Canadiens étaient assurés d'une surveillance à long terme de ces individus, ils seraient un peu plus disposés à permettre aux délinquants de réintégrer la société.

Ainsi, même si le projet de loi C-41 donne certaines orientations, il ne va certes pas assez loin. Je souhaiterais que le gouvernement ait un peu plus de courage pour prendre les décisions difficiles qui s'imposent.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, je me sens obligée de faire quelques commentaires à propos du dernier discours, car, selon moi, les arguments formulés renferment des erreurs fondamentales.

D'abord, lorsqu'on parle de libération conditionnelle, de la possibilité que quelqu'un soit libéré ou non, il est très important de bien comprendre que la libération conditionnelle est, en fait, une peine qui se poursuit, mais au sein de la collectivité. Toute personne qui commet un meurtre au premier ou au deuxième degré est condamnée à l'emprisonnement à perpétuité. Si elle profite par la suite d'une libération conditionnelle, elle continue de purger sa peine au sein de la collectivité, sous la surveillance d'agents de liberté conditionnelle.

Il est donc faux de laisser entendre que ceux qui profitent d'une libération conditionnelle après 15 ans sont soudainement absous et libres. Ils doivent respecter certaines contraintes stipulées dans les conditions de libération et ils demeurent sous surveillance. Ils ne peuvent plus habiter n'importe où et choisirqui ils veulent comme collègues ou amis. Ils doivent rendre visite à leurs surveillants à intervalles réguliers.

Cette partie du système a peut-être grevé nos ressources. On pourrait peut-être renforcer ou améliorer autrement ce système. Toute personne reconnue coupable de meurtre est condamnée à l'emprisonnement et à la surveillance à perpétuité. Il est trompeur de dire qu'une autre structure quelconque absout en quelque sorte le coupable, une fois la période d'emprisonnement terminée.

(1610)

Je voudrais aussi préciser que l'exemple cité en rapport avec les modifications concernant les crimes haineux n'était pas exact. Le député a prix le cas de violation de domicile perpétrée contre les membres d'un groupe ethnique. Dans un tel cas, la peine ne serait pas automatiquement plus sévère et la race de la victime ne constituerait pas un élément pertinent, à moins que le poursuivant ne puisse prouver au tribunal, hors de tout doute raisonnable, que le crime même avait été motivé par la haine visant un membre de ce groupe ethnique. Il se peut que la violation du domicile d'une personne appartenant à un groupe ethnique ne soit pas motivée par la haine et que l'infraction ait lieu simplement parce que la maison en cause est la plus facile d'accès.

Le gouvernement a entièrement raison de reconnaître que les crimes commis dans notre société pour des raisons de discrimination raciale, sexiste ou autre sont particulièrement odieux.

Mme Meredith: Monsieur le Président, ça m'inquiète un peu d'apprendre que le gouvernement laisse entendre que le même crime peut être jugé plus odieux s'il s'accompagne de préjugés ou de haine. J'aime à croire que le crime est odieux en soi, peu importe la motivation et la victime.

Je voudrais souligner le fait que je sais pertinemment qu'il y a des gens qui ont tué. Ils n'ont peut-être pas été condamnés pour meurtre au premier ou au deuxième degré. Ils ont peut-être réussi à se faire condamner pour homicide involontaire, moyennement arrangement avec les tribunaux ou pour toute autre raison. Le fait est que des tueurs sont condamnés à cinq ou six ans de prison. Grâce au régime de liberté surveillée et de libération d'office, ils seront libérés au bout de deux ans.

Les Canadiens ne sont pas d'accord avec cela. Certes, ils souhaitent une forme de protection. Peut-être que le tueur a tué sans faire exprès. Mais, Grand Dieu, il devrait être possible de le surveiller afin que cela ne se reproduise plus.

Les Canadiens s'inquiètent de voir qu'on libère des délinquants au bout d'un certain temps, sans aucune surveillance. Je citerai le cas de M. Larry Fisher qui erre à nouveau dans nos rues, libre comme l'air, précisément parce que la loi interdit de le surveiller. Voici plutôt ce que les Canadiens souhaitent à propos de cette mesure législative: qu'elle rende leurs rues plus sûres en les protégeant des invidus comme lui.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, le projet de loi C-41 est une des promesses réalisées qui avaient été annoncées dans le livre rouge. Il s'inscrit dans la politique de notre gouvernement en matière


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desécurité dans les rues et les foyers canadiens. Cette politique, parallèlement à nos plans et à nos mesures concrètes qui visent à favoriser la création d'emplois et à notre respect fondamental des droits de la personne-tiens, je vois le député à qui je m'adressais quitter les lieux-assure aux Canadiens une meilleure qualité. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Je m'excuse, mais je n'étais peut-être pas aussi attentif que je le suis normalement. Cependant, en ce qui concerne la présence ou l'absence des députés à la Chambre, puisque nous savons tous combien de temps nous demandent nos responsabilités à la Chambre, au sein des comités et ailleurs, je pense que nous devrions faire preuve de respect les uns envers les autres pour ce qui est des allées et venues et de la présence ou de l'absence des députés à la Chambre. Je demanderais à tous d'en tenir compte.

Mme Cohen: Monsieur le Président, ces politiques vont plutôt bien ensemble. Je demanderais que l'on donne aux Canadiens une meilleure qualité de vie dans notre pays.

(1615)

Les Canadiens savent que le premier ministre et le gouvernement vont donner suite à leurs promesses. Notre présence et notre force, en tant que gouvernement, le prouvent. En fait, nous avons publié ces promesses dans le livre rouge et les Canadiens peuvent littéralement les cocher les unes après les autres, à mesure que nous les remplissons.

Partout au pays, ils peuvent voir que nous respectons nos programmes de création d'emplois, grâce aux travaux d'infrastructure qui sont terminés ou qui sont en cours. Comme le premier ministre l'a promis, le pays commence à reprendre confiance. Cela se remarque particulièrement à Windsor, en Ontario, où le chômage, les demandes d'aide sociale et la criminalité sont à la baisse.

La création d'emplois signifie la prospérité et la prospérité réduit le stress dans notre société. Cependant, il est parfois nécessaire, comme c'est le cas aujourd'hui, de présenter des mesures législatives qui permettent aux Canadiens de se sentir plus en sécurité et de corriger les lacunes qui pourraient exister dans le système. C'est la raison d'être du projet de loi C-41.

Les Canadiens ont besoin d'être rassurés. Ils ont besoin d'être réconfortés. Ils ne veulent pas, cependant, que cette sécurité et ce réconfort leur soient donnés au détriment des droits de la personne. Le gouvernement a consulté tous les Canadiens et a constaté que certains aspects de notre système de justice pénale les inquiétaient. Les Canadiens ne sont pas hystériques. Ils ne sont pas bornés. Ils estiment qu'il y a certaines injustices dans notre système. Ils croient, par exemple, que l'on impose trop souvent des peines inadéquates aux autochtones.

Les Canadiens trouvent que le système ou les tribunaux sont parfois plus durs à l'égard des pauvres qu'à l'égard des bien nantis. Les Canadiens estiment que, dans certaines circonstances, nous devrions chercher des solutions de rechange à la détention. Nous savons également que les Canadiens ne veulent pas unmême traitement pour tous les crimes. Ils reconnaissent qu'il n'y a tout simplement pas de solution miracle.

Ils reconnaissent que les crimes ont divers degrés de gravité et ils font souvent cette distinction en se fondant sur la présence ou l'absence de violence dans la perpétration d'un acte criminel. Ils savent qu'il existe fréquemment des raisons incontournables de privilégier la réinsertion sociale des délinquants plutôt qu'un châtiment. En même temps, ils veulent que les peines soient cohérentes et que le processus soit rationalisé.

Ce projet de loi répond à ces opinions de la population en apportant des modifications au Code criminel. D'abord et avant tout, ces modifications prévoient une déclaration générale des principes et de l'objectif de la détermination de la peine. Cet objectif porte sur la réinsertion sociale et, lorsqu'il y a lieu, l'isolement de certains délinquants du reste de la société. Il porte sur la restitution, cherche à susciter la conscience de la responsabilité de ses actes chez le criminel condamné et dénonce le comportement illégal, tout en dissuadant le délinquant et d'autres personnes. Il reconnaît également certains principes fondamentaux que les Canadiens nous ont dit vouloir maintenir.

La peine doit correspondre à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Elle doit être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes. Elle doit au moins examiner des solutions de rechange, plus particulièrement en ce qui concerne les délinquants autochtones. En outre, lorsqu'un crime est motivé par de la haine fondée sur la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle, les Canadiens veulent que la peine soit adaptée en conséquence.

Le ministre de la Justice a étudié tous ces facteurs et présenté un projet de loi qui respecte les désirs des Canadiens et la règle du droit. Il n'y a pas de solution miracle. Les députés d'en face voudraient bien que nous pensions qu'il en existe une, et que la rigidité est la meilleure solution. Mais il y a toujours des circonstances où la souplesse est de rigueur. Il y a toujours des circonstances qui nous obligent à substituer la réadaptation à la punition.

(1620)

Je recommande aux députés d'en face de tenir compte de l'aspect financier et de comparer ce que nous coûterait à long terme la réadaptation d'un individu comparativement à son incarcération pour une période indéfinie, sans accès à aucun programme ou sans possibilité de réadaptation.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce a parlé éloquemment, plus tôt cet après-midi, de la nécessité de combattre non seulement les résultats de la criminalité, mais aussi ses causes. Nous n'entendons aucun discours semblable de la part des députés d'en face.

Tout semble si simple pour eux. Il suffit de mettre quelqu'un en cellule et de jeter la clé. Cette conception me paraît simpliste et, franchement, irréfléchie. Le plus drôle est que ce choix n'est pas celui des Canadiens.


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Le député de Notre-Dame-de-Grâce a visé juste lorsqu'il a dit que la criminalité ne met pas en cause que la justice mais aussi la santé, le perfectionnement des ressources humaines et les droits de la personne.

Malheureusement, certains groupes au Canada ne jouissent pas des mêmes avantages que d'autres, que ce soit à cause de leur classe sociale, de la couleur de leur peau ou pour diverses autres raisons. Pourtant, le Canada est une société bien meilleure et beaucoup plus libre que d'autres, du moins pour la plupart des autres Canadiens, mais nous devons reconnaître que tous ne jouissent pas des mêmes avantages.

Les Canadiens l'ont reconnu et les libéraux aussi. C'est pourquoi nous ne proposons pas ces modifications dans le vide. Nous devons étudier le projet de loi C-41 à la lumière des mesures que nous prenons pour rationaliser la politique nationale des soins de santé et de la réforme en profondeur du filet de sécurité sociale à laquelle nous procéderons sous peu. Cette réforme vise à assurer une meilleure sécurité sociale aux Canadiens. Le reste du pays pourra alors suivre l'exemple du Grand Windsor, qui affiche une baisse du taux de chômage, des prestations d'aide sociale, du nombre de prestataires et du taux de criminalité.

La tâche n'est pas aussi aisée que le prétendent les députés d'en face. Nous ne pouvons pas nous contenter de solutions faciles en faisant de belles déclarations ou en citant des propos dans le vide. Nous devons faire preuve de polyvalence et de souplesse. C'est exactement ce que le ministre de la Justice vient de faire, et cela est conforme à l'action des libéraux et à l'action passée et future du gouvernement.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, je voudrais préciser un point en ce qui concerne les allégations faites à propos des vues du Parti réformiste à ce sujet.

Je ne crois pas que l'un de nous ait jamais dit, voire laissé entendre que c'est chose simple, qu'il n'y a qu'à les mettre en prison et jeter la clé, comme vient de le déclarer la députée. Ce n'est ni le sentiment, ni la conviction des membres de notre parti.

Je défie la députée d'en face de réfléchir comme nous essayons de le faire aux réels problèmes qui sont en jeu. Comment régler le problème de la criminalité? Nous avons manqué à nos obligations envers les jeunes qui ont grandi et, à un moment donné, sont devenus des criminels. L'une de nos erreurs les plus fondamentales est de ne plus inculquer aux jeunes, par l'exemple et la parole, ce qui est bien et ce qui est mal. Même à présent, nous laissons entendre que nous allons mettre en place des mesures législatives afin d'empêcher les parents de donner la fessée à leurs enfants.

Non que je sois en faveur de la violence faite aux enfants, mais j'estime qu'avec avec un peu d'amour et de fermeté, on peut apprendre aux enfants à obéir et à respecter l'autorité.

(1625)

C'est ainsi qu'on m'a éduqué et c'est très important. C'est à ce niveau que nous devons faire des efforts si nous voulons vider lesprisons. Nous devons faire en sorte d'avoir des familles solides et unies. J'aimerais que le gouvernement insiste vraiment là-dessus. Peut-être la députée a-t-elle des commentaires?

Mme Cohen: Monsieur le Président, il y a un moyen de faire en sorte que les Canadiens développent des liens affectifs puissants au sein de la famille, c'est de leur assurer un foyer sûr et prospère. Il y a un problème qui revient sans cesse dans notre société: des problèmes surgissent au sein des familles quand la prospérité diminue, quand leurs membres subissent des difficultés économiques et d'autres tensions, quand elles n'ont plus à manger, quand elles ne peuvent plus se chauffer, quand elles n'ont pas un logement convenable, quand elles n'ont pas l'essentiel, les éléments de base qui leur permettent de s'épanouir.

Les parents deviennent trop occupés à travailler plus fort ou à chercher des moyens de rapporter de quoi manger à la maison, de trouver de l'argent pour élever leurs enfants. Ils ont moins de temps à consacrer aux enfants. Il importe de bien comprendre que l'enjeu n'est pas ici la criminalité ou ses conséquences.

L'enjeu, c'est de parvenir à éliminer ces conditions défavorables, c'est de créer une société meilleure, afin que nous n'ayons plus à composer avec le problème. Si nous pouvons y parvenir en réformant nos programmes sociaux, en créant de l'emploi et en permettant le développement d'un pays dont les habitants sont plus à l'aise économiquement et socialement, en reconnaissant par exemple que certains crimes sont motivés par la haine et en tâchant d'enrayer ce genre de problème, nous aurons enfin une société meilleure-un pays meilleur, une société meilleure et des familles plus fortes.

M. Epp: Monsieur le Président, je ne savais pas si je pouvais me lever deux fois, donc merci de la leçon.

Je me demandais si l'une des pressions sur lesquelles on peut influer, je veux dire le gouvernement du Canada, n'est pas la pression financière. Il y a beaucoup de parents qui sont forcés de travailler, en particulier à cause de l'importance des charges fiscales.

Peut-être qu'à la base de tout cela, tout en bas, se trouve la façon dont nous gérons nos affaires. Si nous réduisions les charges fiscales, nous réduirions peut-être le stress de ces familles. Peut-être que les parents qui le désirent pourraient rester à la maison, avec leurs enfants, pour leur assurer un milieu sûr, solide et psychologiquement agréable durant leur croissance.

Mme Cohen: Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député sur le fait que nous devrions avoir moins d'impôts. Je ne pense pas que quiconque ici n'aimerait pas baisser les impôts immédiatement.

Je suis également d'accord que, actuellement, certaines familles sont obligées d'avoir deux revenus pour avoir le même niveau de vie qu'avaient nos parents avec un seul. Il n'y a pas de doute là-dessus. N'allons pas plus loin que cela. Mais ne supposons pas que dans toutes les familles les deux parents travaillent parce que c'est indispensable.


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Il y a beaucoup de familles, aujourd'hui, où les deux parents travaillent parce qu'ils le veulent, parce qu'ils poursuivent une carrière. Cela résulte de l'évolution de la société. Je vois que beaucoup approuvent, ce qui me réjouit.

Je dois faire remarquer que, sans le filet social, nous ne pouvons pas fournir un milieu dans lequel ces parents peuvent travailler. C'est pour cela que nous devons avoir-c'est l'occasion d'un bel enchaînement-une forme de normes nationales en ce qui concerne les garderies, pour que les familles où les deux parents veulent poursuivre une carrière puissent avoir l'aide nécessaire pour leurs enfants. Alors ils sauront qu'ils sont en sécurité et dans un milieu sain, alors ils sauront qu'ils peuvent poursuivre tous leurs objectifs en tant que famille.

(1630)

M. Epp: Monsieur le Président, je suis resté assis suffisamment longtemps pour donner une chance à tout le monde. Je ne peux pas laisser passer ça; il est indéniable qui si nous allions de l'avant avec un système national de garderies, rien ne contribuerait autant à faire augmenter les impôts et à exercer des pressions sur les familles. Nous irions à l'encontre de nos objectifs et je m'y oppose catégoriquement.

Il ne fait aucun doute que certaines familles-je pense en particulier aux familles monoparentales si nombreuses dans notre société-n'ont pas le choix. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les aider.

Je ne souscris toutefois pas à l'idée que la seule façon de procéder est de dépouiller les contribuables pour offrir un tel service. Il y a sûrement d'autres moyens de régler ces problèmes.

Pour en revenir au projet de loi en question, j'aimerais dire également qu'on ne peut pas garder les criminels en prison à perpétuité et qu'il faut bien les libérer un jour.

Je conviens qu'il faut faire quelque chose pour les préparer à réintégrer la société. À ce propos, j'ai une solution peu chère à proposer. Je suggère que les contrevenants reconnus coupables de crimes non violents soient confiés à la garde de familles exemplaires. C'est indispensable. Ce serait leur peine et ils devraient y purger leur peine au lieu d'aller en prison. Ils apprendraient ainsi comment se comporter dans la vie.

Sur ce, je m'arrête, je le promets.

Le président suppléant (M. Kilger): Ne faites pas trop de promesses. J'ai comme l'impression que si le débat se poursuivait entre les deux députés qui viennent de se succéder, ils n'arriveraient pas à s'entendre.

Mme Cohen: Monsieur le Président, j'ai l'impression de me retrouver à une soirée dansante. Je remercie le député d'en face de me donner l'occasion de participer à cet échange de vues, même s'il se déroule dans un cadre très rigide.

Je dois dire que rares sont les personnes, parmi mes amis et connaissances, qui seraient prêtes à accueillir dans l'intimité de leur foyer les gens dont parle mon ami d'en face. Il n'y a quand même pas lieu de rejeter l'idée.

C'est le genre d'idée créatrice que j'aimerais voir ce projet de loi envisager. Les amendements proposés donneraient une grande souplesse au processus de détermination de la peine.

Chez nous, à Windsor-tout le monde doit savoir depuis le temps que c'est de là que je viens-nous avons d'excellents juges tant à la cour provinciale qu'à la division générale de la Cour fédérale; ils ne manquent pas de créativité. Certains se sont donné beaucoup de mal pour inventer des peines plus appropriées tout en restant dans les limites imposées par la législation actuelle.

C'est ainsi que nombre de solutions à caractère communautaire ont été mises en oeuvre par ces juges et par des travailleurs sociaux de notre localité ainsi que dans le cadre de programmes locaux. Cela nous a permis de nous pencher, à l'échelle communautaire, sur des solutions de rechange à l'incarcération.

Cette expérience a ouvert les yeux à la criminaliste que je suis, qui a été tantôt procureur à charge, tantôt avocat de la défense. Ce genre de programme s'est révélé très fructueux. À mon avis, l'idée qu'avance mon ami d'en face mérite d'être étudiée.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, d'après un document publié en mai 1993 à Ottawa en pleine campagne électorale, le premier ministre disait que la sécurité au foyer et dans la rue devrait être un droit fondamental de chaque Canadien. À propos de la hausse de 40 p. 100 du taux de crimes violents au Canada, il faisait remarquer: «Depuis 1984, le gouvernement conservateur n'a presque rien fait pour combattre la hausse du taux de criminalité, se contentant de demi-mesures et de discours macho.»

Le premier ministre sert le Canada en cette Chambre depuis plus de 20 ans. Il se peut que les demi-mesures proposées par les conservateurs aient influencé le premier ministre et son Cabinet.

Le projet de loi C-41 a, en principe, bien des aspects positifs. Comme en témoignent beaucoup d'autres projets de loi dont la Chambre est actuellement saisie, les libéraux semblent avoir de la suite dans les idées. Ils ne restent pas inactifs. À mon avis, c'est parce que les députés réformistes écoutent leurs électeurs et disent des choses qui n'avaient jamais été dites à la Chambre. Les voix des Canadiens que le Parti réformiste fait entendre à la Chambre incitent le gouvernement à prendre des mesures, même si ce sont seulement des demi-mesures.

(1635)

Il convient toutefois de réfléchir à ce que mon chef, le député de Calgary-Sud-Ouest, a déclaré en 1992 à Belleville, en Ontario, au sujet de la réforme du système de justice pénale. Il avait alors proposé les deux options suivantes:


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Premièrement, les réformistes croient qu'il devrait y avoir un meilleur équilibre entre les fonds publics affectés à l'arrestation, le soin et la protection des criminels et les ressources consacrées à l'aide aux victimes. Les prisons coûtent un total d'environ 2 milliards de dollars par an aux gouvernements fédéral et provinciaux. À lui seul, le gouvernement fédéral dépense 1,7 milliard de dollars pour les services policiers. Les tribunaux coûtent plusieurs centaines de millions de dollars chaque année, tandis que les sommes dépensées pour aider les victimes du crime ou les indemniser restent minimes.

Deuxièmement, il a dit qu'il faudrait réformer la procédure de détermination de la peine et de libération conditionnelle. Il a déclaré: «Nous avons proposé d'éliminer totalement les libérations conditionnelles automatiques, de limiter à 25 p. 100 la réduction de peine pour bonne conduite, et d'améliorer les lignes directrices relatives à la détermination de la peine pour les juges et les jurés afin que les peines soient plus prévisibles et plus uniformes.»

Ces propositions sont conformes aux recommandations faites par la Commission canadienne sur la détermination de la peine en 1987 dont le gouvernement fédéral ne tient pas compte pour la plupart.

Je crois que les déclarations faites par mon chef à ce sujet en 1993 reflétaient les valeurs et les opinions des Canadiens, tout comme elles reflètent ces mêmes valeurs aujourd'hui, dans une plus grande mesure que le projet de loi dont la Chambre est saisie et qui est une demi-mesure, à mon avis.

Pour ce qui est de la première question que mon chef a soulevée, soit un meilleur équilibre entre les dépenses faites pour les criminels et les sommes affectées à leurs victimes, je voudrais présenter quelques idées. D'abord, je pense très honnêtement que les médias présentent un problème dans notre merveilleuse société libre et démocratique; ils poursuivent leurs propres objectifs et veulent vendre des journaux ou du temps d'antenne aux annonceurs.

Malheureusement, il y a des articles. . . Par exemple, dans l'Ottawa Sun du 12 mars 1994, on trouve un article de deux pages sur la correspondance d'une personne complexe qui s'attend à sortir de prison comme si son passé et ses crimes seront tous pardonnés. On y trouve en effet plusieurs lettres écrites par Karla Homolka. Dans celles-ci, on voit énormément de. . . Par exemple, elle écrit: «Cette carte va très bien avec mes affiches Mickey Mouse. Hé, je vais recevoir des serviettes et des draps Sesame Street vendredi prochain. Ma cellule sera la plus enfantine de toute la prison, mais je l'aime comme ça.» Dans une autre lettre, elle dit qu'elle essaie de se laisser pousser une frange.

À mon avis, ce genre de sensationnalisme auquel s'adonnent les médias fait un grand tort à toute cette question. Je crois que notre société est basée sur les principes de la liberté de parole et de l'accès à l'information. Mais je reproche aux médias la façondont ils faussent l'information, la déforment et la dramatisent, dans le but de vendre plus de journaux. À mon avis, cela ne se pardonne pas.

Cependant, certains journalistes sont responsables et je cite à ce propos un article paru dans le Toronto Star du 26 juin 1994, où on lit:

Rick Sauve, qui purge une peine d'emprisonnement à vie pour meurtre, est le premier condamné à vie au Canada à obtenir un diplôme universitaire en prison.
M. Friedman, un professeur qui lui a enseigné et qui donnait des cours aux prisonniers, a dit:

La plus grande récompense, c'est quand un étudiant est ravi de recevoir une note de 65 p. 100 pour son devoir. Il se rend compte qu'il est aussi bon que les autres. J'en ai les larmes aux yeux.
Claire Culhane, membre du groupe de défense des droits des prisonniers, à Vancouver, croit fermement que le public doit appuyer les détenus qui désirent poursuivre des études postsecondaires. Notre politique consiste à les «entreposer». Celui qui est condamné à 10 ou 20 ans de prison, doit-il se croiser les bras et attendre? Pour éviter les tensions dans les prisons, on doit occuper tous les détenus.

(1640)

Dans la seconde partie de l'article, on lit que, dès le mois de mai, Sauve avait reçu le droit de demander une libération conditionnelle. Une audience à cette fin aura lieu plus tard cette année.

Il y a deux problèmes fondamentaux ici. Je n'ai pas d'observation à faire sur la possibilité qu'a ce détenu de demander les ressources nécessaires pour aller chercher un diplôme universitaire, mais il est difficile d'imaginer que les proches de la victime de Rick Sauve auraient eu la possibilité d'étudier pour obtenir un diplôme universitaire aux frais du gouvernement parce qu'ils avaient perdu une personne chère. Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour prendre soin d'eux de la même façon dont il s'occupe actuellement du délinquant?

Mon but n'est pas de voir si Rick Sauve aurait dû travailler pour étudier en vue d'un diplôme universitaire. La question que je pose dans ce cas, comme dans d'autres cas du même genre, est la suivante: Combien de temps et d'argent, combien de ressources le gouvernement met-il à la disposition des victimes en comparaison de l'argent et des ressources qu'il met à la disposition de ceux qui commettent des crimes?

Mon autre question se rapporte aux propos que mon collège de Fraser Valley-Ouest a prononcés mardi. Il a été très éloquent. Une vie, c'est une vie, ou au moins cela devrait être comme cela. Pourtant, nous constatons, d'après cet article, que Rick Sauve a reçu le droit de demander une libération conditionnelle. Selon une disposition de ce projet de loi, la victime peut présenter une déclaration aux audiences prévues à l'article 745.

Même s'il s'agit d'une amélioration, l'article 745 devrait être complètement abrogé. Au procès avec juge seul ou avec jury, le juge devrait être en mesure de déterminer la peine. Cette peine


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nedevrait pas être modifiée par la suite par des personnes qui n'étaient pas parties à l'affaire initialement.

Cela m'amène au deuxième problème que mon chef a soulevé. Il doit certes y avoir une protection pour les membres de la société qui sont respectueux des lois.

Dans un document publié par le Mackenzie Institute intitulé Streets of Fear, the Failure of the Criminal Justice System, l'auteur, Brode, cite certains problèmes très intéressants concernant les méthodes de détermination de la peine au Canada.

Récemment, en Nouvelle-Écosse, deux affaires ont fait ressortir l'indulgence des tribunaux à l'égard de ceux qui s'attaquent aux femmes. Dans l'affaire La Reine c. Swinamer, un homme avait forcé son ex-femme à monter dans sa camionnette et l'avait menacée de mort. Elle avait réussi à s'enfuir. Accusé de séquestration, l'homme a été libéré à la condition de n'avoir aucun contact avec son ex-femme. Il l'a de nouveau enlevée, emmenée dans un endroit retiré et violée.

Au moment de déterminer la peine, le tribunal a tenu compte de la situation du contrevenant, du fait qu'il avait déjà passé cinq mois en prison et qu'il était un bon travailleur. La peine: trois mois d'emprisonnement et 19 mois de probation.

Dans l'affaire Regina c. Desmond, le mari avait infligé de graves blessures à sa femme et l'avait jetée dehors. La victime avait subi une fracture de l'épaule ainsi qu'un pneumothorax.

Là encore, c'est la situation du contrevenant qui importait, puisque le juge de première instance a tenu compte du fait que c'était la première infraction du genre par l'intéressé et que ce dernier risquait de perdre son emploi s'il allait en prison. La peine: quatre-vingt-dix jours de prison, à purger les week-ends, et deux années de probation. N'eût été de l'intervention divine, cet homme aurait tué sa femme. Or, le juge lui a imposé une peine de 90 jours assortie de deux années de probation.

Le week-end dernier, des citoyens préoccupés par la violence familiale ont organisé une marche dans ma ville de Cranbrook. Ces personnes veulent que des changements soient apportés au système de justice pénale parce qu'elles constatent que tant les cas d'agression sexuelle que de violence conjugale font l'objet de peines inadéquates.

Lors d'une conférence sur la sécurité des femmes, qui s'est tenue à Ottawa il y quelques années, le chef Brian Ford avait dit qu'un homme qui battait sa femme pour la première fois recevait habituellement une condamnation avec sursis. Les peines imposées à ceux qui conduisent en état d'ébriété sont plus sévères. Cette situation est injustifiable.

Ce qui fait défaut au gouvernement actuel, c'est le discernement dont faisait preuve le regretté juge Les Bewley, qui a dit: «Le contrôle ou la régression de la criminalité repose sur trois éléments fondamentaux: la certitude, pour le contrevenant, qu'il se fera prendre, la rapidité du procès et la certitude qu'une peine sera imposée.» Le juge avait ajouté: «Ces trois éléments étaient tous présents et tenus pour acquis il y a 30 ou 40 ans.» Ce n'est plus le cas aujourd'hui.

(1645)

J'aimerais expliquer aux députés la notion de justice rétributive, parce que les libéraux ont tout à fait dénaturé celle-ci.

Prenons par exemple un incident survenu en 1989-1990, à Perth, en Ontario. Kenneth McLean, l'assassin reconnu de Ruth Moore, avait à l'origine été trouvé coupable de meurtre au deuxième degré et condamné à l'emprisonnement à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 13 ans. McLean avait dit à des amis: «Si je ne peux l'avoir, personne d'autre ne l'aura.» Il avait étranglé Ruth et l'avait poignardée 24 fois.

La Cour d'appel de l'Ontario a ordonné la tenue d'un nouveau procès à cause d'erreurs techniques commises par le juge. À son deuxième procès, McLean a plaidé coupable à une accusation moindre d'homicide involontaire coupable. Il devenait donc admissible à la libération conditionnelle au bout de 18 mois et au régime de liberté surveillée au bout de trois ans. Dans les faits, il allait faire six ans et demi de prison pour le meurtre de Ruth Moore.

La famille de la victime était outrée de la peine prononcée et des batailles ont failli éclater dans la salle de tribunal à l'annonce de la sentence. Le juge qui présidait l'audience, Dan Chilcott, a déclaré qu'il compatissait à la douleur des membres de la famille et comprenait leur indignation. Il a ajouté: «À mon avis, la justice rétributive n'a cependant pas sa place dans notre système.»

À ce sujet, le Mackenzie Institute écrit: «La justice rétributive est ce qui incite la société à punir ceux qui ont gravement enfreint les normes de conduite établies. La justice rétributive diffère de la vengeance. La vengeance est arbitraire et égoïste. La justice rétributive est un châtiment pondéré imposé après un jugement en bonne et due forme et proportionnel à la gravité de l'infraction commise. Son but n'est pas de satisfaire les victimes, mais de faire régner l'ordre juridique et d'illustrer l'horreur que suscite la violence dans notre société. En imposant des peines légères, on laisse entendre que la violence est acceptable et ne sera pas réellement punie.»

Ma ville natale, Cranbrook, a été le théâtre d'un incident violent. Un homme discutait avec son ex-petite amie. Elle a décidé d'aller prendre un bain. À la suite d'une querelle, il lui a immergé le visage dans l'eau. Elle est morte, suffoquée dans son bain. L'homme a avoué son crime, c'est vrai. Le procureur de la Couronne et l'avocat de la défense avaient tous deux demandé une peine d'emprisonnement de cinq ans pour ce meurtre, mais, dans sa grande sagesse, le juge a dit que ce n'était pas assez et il a imposé une peine d'emprisonnement de sept ans. Qu'est-ce que cela signifie? Quelle est la valeur d'une vie?

Si nous ne croyons plus que la peine doit être adaptée au crime, nous avons perdu un élément essentiel de notre système judiciaire. Tous les juges devraient comprendre qu'ils sont là pour rendre la justice et que le rôle des tribunaux n'est pas de sympathiser avec les criminels, mais de châtier correctement ce qui est mal.

Le meilleur agent de dissuasion de la criminalité ne réside pas nécessairement dans la sévérité du châtiment, mais dans son caractère inéluctable. Le système de libération conditionnelle et de remise automatique des peines qui existe à l'heure actuelle a rendu le châtiment incertain, sinon improbable dans bien des cas. Les criminels ne craignent tout simplement plus de devoir purger


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la peine prescrite dans leur cas, car ils savent que le système de libération conditionnelle les en sauvera et cela, même s'ils sont condamnés au prétendu emprisonnement à perpétuité. Le système de la justice pénale est donc trompeur puisqu'il laisse croire à la population que les criminels sont punis alors qu'il permet à ceux-ci de ne pas purger toute leur peine.

Je veux dire quelques mots pour finir de la principale raison pour laquelle j'entends voter contre ce projet de loi, à savoir le fait qu'il établit que lorsque la haine est le mobile d'un crime, cela constitue un facteur aggravant. Si la Chambre s'éloigne un seul instant du principe fondamental voulant que tous les Canadiens sont égaux, quels que soient leur race, leur langue, leurs croyances, leur couleur, leur sexe ou leur religion, elle ouvrira la boîte de Pandore de l'inégalité.

(1650)

Permettez-moi de vous donner un exemple cité dans le numéro du 12 septembre dernier de la revue B.C. Report. George Mammolitti, 32 ans, député néo-démocrate de Toronto à l'Assemblée législative de l'Ontario, qui a vivement contesté le projet de loi ontarien visant à offrir les mêmes avantages aux conjoints de même sexe qu'à ceux de sexe différent, a été la cible de harcèlement, d'injures et de menaces.

Cette revue rapporte que, après le rejet du projet de loi, M. Mammolitti aurait reçu quelque 300 appels d'injures et de menaces, souvent au beau milieu de la nuit. Dans bien des cas, on l'accablait d'injures racistes et on lui disait de retourner en Italie. Il a même reçu une note manuscrite dans laquelle on le menaçait de le tuer devant ses enfants. Les services de police ont pu déterminer que la note avait été postée dans les environs de l'Assemblée législative, mais pas qui en était l'auteur.

Cependant, M. Mammolitti a un téléphone muni d'un afficheur dans son bureau. Cela a permis d'établir que Greg Smith, adjoint de la vice-ministre de la Culture, Shirley Coppen, était l'auteur d'au moins quelques-uns des appels de harcèlement reçus par M. Mamolitti. Lorsqu'il a été interrogé, M. Smith a admis avoir fait les appels. Il a été suspendu avec rémunération pendant trois jours et aucune accusation criminelle n'a été portée contre lui.

La disposition sur la motivation haineuse nous fait entrer sur un territoire très dangereux. Elle dresse les membres des prétendues majorités contre les citoyens de minorités désignées. Une victime est une victime, un criminel est un criminel. J'aimerais que les députés réfléchissent à la situation si elle s'était présentée autrement. Si M. Mammolitti, membre de la majorité, avait harcelé M. Smith, membre d'une minorité, il se serait retrouvé dans une situation extrêmement grave. Actuellement, les choses ne fonctionnent pas de la même manière.

Comment pouvons-nous en arriver à faire de telles lois? Lorsque quelqu'un reçoit un coup de pied en plein visage, il reçoit un pied au visage. Une forme assez répugnante de mauvais traitement, appelé le curbing, nous est arrivée, je suppose, des bas quartiers de New York ou du coeur d'autres grandes villes américaines. La victime est étendue sur le sol, l'arrière de la tête appuyée sur le bord du trottoir, puis quelqu'un lui applique unebotte sur le front avec beaucoup de force. Quelque chose doit céder. Il y a moins de trois mois, un meurtre a été commis à Coquitlam au moyen de cette technique.

Je pose la question suivante: Quelle serait au juste l'utilité du projet de loi si les personnes responsables de ce crime étaient condamnées après un procès légitime? De quelle utilité ce projet de loi est-il pour notre société? Sert-il les parents de la victime? Les coupables y trouvent-ils leur compte si la peine qui leur est imposée est fondée sur l'appartenance de la victime à un groupe minoritaire précis? Il est évident que les meurtriers ont été motivés par la haine. La victime était-elle un gars ordinaire et les meurtriers une bande d'idiots excités? Si c'est le cas, j'imagine que nous pouvons réduire la sévérité de la peine. Il reste qu'une personne est morte.

La disposition du projet de loi nous fait pénétrer sur un territoire très dangereux. Je comprends pourquoi cette disposition a été rédigée. Je le comprends très bien, mais, comme mon père le disait «on ne peut pas légiférer en matière de moralité».

En conclusion, je dirai que nous sommes devant un train de demi-mesures dangereuses parce qu'il crée des attentes chez les citoyens et que si ces attentes ne sont pas comblées, les gens perdront espoir et en viendront à moins se fier à la loi et à l'ordre.

Si je peux avoir l'attention de mes vis-à-vis, je suis prêt à leur faire une proposition. Je fournirai des Q-tips aux membres du Cabinet s'ils s'engagent à s'en servir pour pouvoir entendre ce que les citoyens ordinaires ont à dire. Les Canadiens ne veulent plus de demi-mesures comme ce projet de loi.

(1655)

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de passer à la période réservée aux questions et observations à l'intention du député de Kootenay-Est, je dois, conformément à l'article 38, faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: l'honorable députée du Yukon-les transports.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général): Monsieur le Président, j'ai écouté les propos plutôt à sensation qu'a tenus le député en décrivant les divers incidents qui se sont produits dans sa circonscription ou ailleurs au Canada.

Ce que je retiens de son exposé, c'est qu'on ne comprend pas bien à quel genre de gens nous avons affaire. Nous avons souvent affaire à des analphabètes. Nous avons souvent affaire à des gens qui n'ont jamais eu de chance dans la vie. On ne cherche pas vraiment de solutions. Les seules solutions qu'envisage réellement le Parti réformiste à l'égard des délinquants consistent au fond à jeter la clé et à les laisser pourrir en prison pour le reste de leur vie.

L'un des meilleurs moyens de lutter contre la criminalité dans notre société, c'est de répandre l'éducation. Le député connaît-il le taux d'analphabétisme qu'on trouve chez les détenus ici au Canada?

M. Williams: Et que faites-vous?

M. Gagnon: Je lui pose la question, monsieur le Président. Peut-il nous dire pourquoi on trouve un nombre disproportionnéd'autochto-


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nes dans nos prisons? Dans bien des cas, ces derniers ont été traités comme des citoyens de deuxième ordre. Dans beaucoup de communautés autochtones, plus de la moitié de la population est âgée de moins de 18 ans et on a donné à ces gens très peu de chances. Beaucoup de jeunes, malheureusement, se tournent vers les activités criminelles.

Mais il n'y a pas que les autochtones. Les réformistes s'en prennent aux immigrants, aux nouveaux-venus au Canada, à des gens qui n'ont vraiment eu aucune chance. Il est dommage que le député n'examine pas plus en détail les moyens de prévenir la criminalité. Le projet de loi a pour objectif fondamental de réorienter les jeunes Canadiens, ou leurs aînés quant à ça, pour tâcher de les remettre dans le droit chemin, de les rendre meilleurs et d'en faire des citoyens plus productifs.

Il est évident que je ne vais pas entendre la voix de la raison et de la compassion de ce côté-là de la Chambre, mais j'essaie de savoir si le député reconnaît que ceux qui sont incarcérés au Canada aujourd'hui sont souvent ceux qui n'ont pas eu la chance d'étudier, qui n'ont pas trouvé de travail et qui ont dû recourir au crime pour vivre. C'est ce qui est regrettable.

Le gouvernement essaie de remettre la société sur pied. Nous savons très bien que le taux d'incarcération au Canada est au deuxième rang, derrière celui des États-Unis, et que les taux sont beaucoup plus bas en Europe. Il faut s'interroger là-dessus. Nous devons nous intéresser à ce qui se passe en Europe au lieu de rappeler la Russie de 1917 comme une de ses collègues réformistes l'a fait plus tôt. Nous devons voir ce qui se passe ailleurs, ce que nous pouvons faire et comment nous pouvons améliorer le système.

Comme nous sommes une société compatissante, nous comprenons ce que vivent les victimes. Je suis sûr que c'est l'enfer pour un grand nombre d'entre elles. Nous ne pouvons pas nous contenter, pour toute solution, de laisser les détenus en prison pour de bon. Il y a une question d'éducation. Il faut encourager les Canadiens à trouver d'autres moyens de gagner leur vie.

C'est ce que nous devons faire, comme législateurs, comme membres de ce fier Parlement. Nous devons trouver le moyen de remettre sur le droit chemin nombre de ces personnes qui se sont tournées vers le crime.

Le député pourrait-il donner quelques réponses, par exemple sur le pourcentage d'analphabètes, sur le pourcentage de gens qui viennent de différentes classes, de différents milieux. Le député a-t-il des chiffres?

M. Abbott: Monsieur le Président, presque chaque fois qu'il y a un débat comme celui-ci à propos de la réforme de la justice pénale, on entend sans cesse dire que le Parti réformiste ne parle que de cas faisant sensation. Je trouve cela très intéressant.

Nous n'avons aucun mal à reconnaître que certains ont eu des difficultés scolaires, économiques et familiales qui ont desré

percussions sur eux. Cependant, tous ceux qui sont désavantagés au Canada ont la possibilité de progresser et d'aller de l'avant.

(1700)

Tous ne sont pas perdus à jamais. Quant à la question du député, je ne peux évidemment pas y répondre sur-le-champ. Sauf le respect que je lui dois, le député qui vient d'entrer à la Chambre, comme je l'ai fait moi aussi aujourd'hui, n'a probablement pas ces chiffres en main lui non plus.

Si le Parlement veut vraiment insister sur la raison et la compassion, le gouvernement pourrait-il, pour une fois, faire entendre la voix de la raison et de la compassion au profit des victimes? Pour une fois, le Parlement pourrait-il envisager de mettre les mêmes ressources à leur disposition?

J'ai dit très clairement que je n'avais rien contre le fait que ce criminel ait fini par obtenir un diplôme universitaire pendant sa détention. Je n'ai rien contre cela. Je me suis simplement demandé quelles ressources ont été mises à la disposition des victimes de ce terrible crime. Je dirais qu'il n'y en a pas eu beaucoup.

La dernière fois que j'ai abordé cette question, c'était, sauf erreur, dans le cadre du débat concernant la Loi sur les jeunes contrevenants. C'était un jeudi. Certains députés libéraux se souviendront peut-être que c'était tout juste avant le congrès qu'ils ont tenu ici, à Ottawa.

Celui-ci s'est d'ailleurs avéré très instructif. Les députés répétaient sans cesse que nous évoquions des cas à sensation, que je me méprenais complètement, que les seuls endroits où la Loi sur les jeunes contrevenants constituait un problème, c'était dans les circonscriptions des députés réformistes, et enfin, que j'étais parfaitement timbré. C'est exactement ce que les députés d'en face ont dit durant toute la journée.

Il est toutefois fort intéressant de constater qu'à l'issue de leur rencontre à Ottawa, le premier ministre a pris la parole et a dit que, à la lumière des commentaires faits par les députés libéraux, il réalisait que la criminalité constituait un problème et qu'il allait donc prendre des mesures pour le résoudre.

Ainsi donc, le problème ne se limitait peut-être pas aux 52 circonscriptions représentées par des députés réformistes. Peut-être s'agit-il d'un problème d'équilibre des circonscriptions justifiant l'utilisation des cotons-tiges que j'ai déjà offerts?

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, le député de Kootenay-Est a dit dans ses observations que la justice rétributive n'était pas synonyme de vengeance. Or, selon le Concise Oxford Dictionary, justice rétributive et vengeance sont synonymes.

Il a dit qu'un de nos députés s'aventurait en terrain dangereux. Quand le député propose de fonder notre le système de justice pénale sur le châtiment plutôt que sur la suprématie du droit, il s'aventure en terrain très dangereux.


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Je voudrais souligner un autre point, soit son argument relatif aux crimes motivés par la haine. À l'instar d'autres députés du Parti réformiste, il a soutenu que nous ne devrions pas faire de distinction s'il s'agit de crimes motivés par la haine.

Nous devrions tous nous rappeler que ce grand pays qui est le nôtre est multiculturel. Il est peuplé de gens qui viennent de partout dans le monde, et c'est ce qui fait sa force et sa grandeur. Il peut compter sur les meilleurs éléments des peuples du monde entier.

Nous devons dire à tous ces gens qui viennent de partout dans le monde qu'ils sont égaux, qu'ils ne feront pas l'objet d'actes motivés par le mépris, la haine ou les préjugés, que si nous sommes témoins de pareils actes envers eux nous allons montrer notre désaccord et notre rejet d'une façon très ferme.

Il y a différents genres de violence et de crimes. Le député de Kootenay-Est ne croit sûrement pas que la violence provoquée par une querelle d'ivrognes n'est ni pire ni meilleure que celle qui est motivée par la haine.

Il me semble que la société doit condamner et combattre vigoureusement les actes de violence commis contre les femmes, les membres d'une communauté religieuse ou d'un groupe dit ethnique en raison seulement de leur appartenance à un groupe donné. C'est pourquoi je suis en désaccord avec le député du Parti réformiste.

(1705)

M. Abbott: Monsieur le Président, je comprends la motivation du député et de celui qui est à l'origine de ce projet de loi. Il s'agit, si je ne m'abuse, de combattre la discrimination et de protéger les membres des minorités visibles de notre société. Je saisis très bien.

Les Canadiens veulent la sécurité dans leurs rues. Celui qui est battu, qui se fait briser les côtes ou casser les dents à coups de barre de fer est une victime, voilà tout. Je le répète, dès l'instant où la Chambre s'éloigne du principe fondamental établissant que tous les Canadiens sont égaux, peu importe leur race, leur langue, leurs croyances, leur couleur, leur religion ou leur sexe et dès l'instant où elle privilégie certaines victimes, elle adopte une position injustifiable.

Le président suppléant (M. Kilger): La période des cinq premières heures de deuxième lecture de ce projet de loi est maintenant terminée. Nous passons donc à l'étape suivante du débat, c'est-à-dire les interventions de 10 minutes, sans questions ni observations.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, le projet de loi C-41, avec tous ses remaniements, anciens et proposés, est l'illustration d'objectifs, de directives, de buts et même d'espérances et de souhaits formulés au cours d'un exigeant processus de résolution de problèmes, un processus qui, par sa nature même, peut être qualifié de démocratique, l'information provenant d'une multitude de sources-publications, études, recherches, rapports, expériences individuelles et collectives,participation de toutes les composantes de la société,chacun étant régi et influencé par ses ambitions, ses croyances et son système de valeurs-un processus extrêmement complexe qui s'est traduit par une déclaration d'intentions, un but ou une orientation, autrement dit, une mesure, une règle, un texte législatif, une loi.

Le gouvernement a eu recours à ce processus démocratique complexe pour aboutir aux réformes constructives qu'on trouve dans le projet de loi C-41.

Nous avons entendu les députés des partis de l'opposition exprimer leurs vues très personnelles avec la conviction qu'ils possédaient la recette de la loi parfaite. Or, aucune loi humaine n'est parfaite. Aucune loi n'échappe aux forces du changement dans une société dynamique. Chaque changement apporté de façon démocratique nous rapproche de la solution la plus parfaite possible.

Le ministère de la Justice a prêté l'oreille à toutes les voix qui ont bien voulu se faire entendre de par notre grand pays. Résultat: un Code criminel plus équilibré, plus équitable et plus sensé que jamais.

L'article du projet de loi C-41 qui est l'apothéose du Code criminel est celui qui énonce l'objectif et les principes de la détermination de la peine. C'est effectivement la première fois qu'on explique aux tribunaux le but fondamental de la détermination de la peine, qui est de contribuer au maintien d'une société juste, paisible et sûre.

La vengeance n'est plus le principal objectif de la détermination de la peine pour quiconque a commis un acte illégal. Même si certains diront que c'est vrai, une sentence reflétera toujours la gravité du crime commis.

Pour faire taire les critiques au sujet des peines injustes qui sont imposées, les tribunaux de tout le pays doivent imposer des sentences semblables aux délinquants qui ont commis des actes criminels semblables. Une loi juste est celle que l'on dit équitable dans tous les tribunaux du pays.

Ce qui est important dans ce projet de loi, c'est l'énoncé de principes établissant que, lorsqu'une infraction est motivée par de la haine fondée sur la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle de la victime, il faut considérer qu'il s'agit là d'une infraction plus grave que par le passé, ce qui exige une sentence plus sévère.

(1710)

Ce projet de loi donne aux tribunaux plus de latitude pour faire une distinction entre les délinquants coupables de crimes graves et violents qui doivent être incarcérés et ceux qui ont commis des crimes non violents et moins graves et dont on peut mieux s'occuper dans la collectivité.

C'est dans ce domaine qu'il est possible, selon moi, d'adopter les stratégies les plus constructives pour faciliter la réinsertion sociale des auteurs d'infractions mineures. Les solutions de type service communautaire qui sont nées de la collaboration entre des représentants du système judiciaire, des dirigeants de la


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communauté et des porte-parole des divers milieux donneront sans aucun doute les meilleurs résultats.

Les programmes de réinsertion sociale qui coupent les délinquants de tout semblant de structures sociétales normales, qui les séparent ou les isolent, autrement dit, donnent rarement de bons résultats à long terme. L'isolement donne à ces individus un sentiment d'infériorité. Ils se sentent comme des citoyens de deuxième ordre. Les modifications proposées dans ce projet de loi permettront de réinsérer les petits délinquants dans la vie communautaire normale.

Trop souvent, les pauvres sont les victimes de règles et de règlements bien intentionnés. La loi datant du XVIIIe siècle et qui prévoyait l'emprisonnement des délinquants incapables de payer leurs amendes, peu importe le mondant, fait enfin l'objet d'un réexamen et de modifications. Dans le cas de ces délinquants, on pourra avoir recours à d'autres solutions, comme le service communautaire ou la probation. Cela permettra de réduire la population carcérale et les coûts, par le fait même, ainsi que de rendre les prisons plus sûres. En outre, on débloquera ainsi davantage de ressources humaines et financières pour s'occuper des délinquants plus dangereux.

Beaucoup de mes collègues ont exprimé leur opinion au sujet de l'article 745 du Code criminel. Dans le cas présent, on donne aux victimes de crimes violents la chance de fournir des données qui pourraient influencer les décisions prises en matière de libération conditionnelle relativement à un délinquant. C'est là une initiative extrêmement louable qui a également l'appui du chef de police, Karl Ratz, dans ma circonscription, Thunder Bay-Atikokan, ainsi que de nombreux autres représentants des corps policiers.

Il y a beaucoup de choses à dire au sujet des modifications proposées au Code criminel et de leur lien avec une société plus sûre et plus juste. Plusieurs hypothèses peuvent être et sont échafaudées au sujet des divers articles du Code criminel, sans établir de rapport avec les autres forces qui s'exercent dans la société.

Un criminel n'est pas simplement quelqu'un qui viole la loi. Le comportement criminel est lié à tout un éventail de causes et de maux sociaux. Les gens désespérés ont souvent recours à des moyens désespérés pour survivre ou protéger l'unité familiale. Nous devons voir l'incidence de la pauvreté, du racisme, de la violence familiale, de la dépression, ainsi que de nombreux autres facteurs sur le comportement criminel.

Nous pourrions ajouter un million d'autres lois au Code criminel et entretenir l'illusion que plus nous aurons de règles, mieux nous serons et plus nous nous rapprocherons de la société utopique d'où sera absent tout crime. Ce n'est qu'une illusion!

La société doit jouer un rôle proactif très dynamique pour prévenir le crime et diminuer ainsi la nécessité de mesures impulsives et instinctives. Nous devons cesser de nager dans la fiction. Il faut arrêter d'appliquer les solutions des années 30 aux problèmes du XXIe siècle. Ce projet de loi nous permet de beaucoup nous rapprocher d'une société plus sûre.

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, moi aussi je suis très heureuse de prendre la parole au sujet du projet de loi C-41, qui modifie le Code criminel en ce qui concerne la détermination de la peine des auteurs d'actes criminels.

Depuis l'ouverture de la 35e législature, le 17 janvier 1994, le gouvernement a mis en branle un certain nombre d'initiatives pour réformer et renforcer le système de justice du Canada.

(1715)

Des modifications ont été déposées à la Chambre pour revoir la Loi sur les jeunes contrevenants et sévir contre les jeunes délinquants violents. Une mesure législative a été présentée pour réformer le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, afin d'améliorer la façon dont nous traitons les délinquants sexuels, notamment ceux qui agressent des enfants.

Aujourd'hui, nous discutons de l'initiative qu'a annoncée le ministre de la Justice pour réformer le processus de détermination de la peine prévu dans le Code criminel. Le projet de loi C-41 est une mesure législative bien équilibrée et d'une vaste portée qui non seulement réorganise, mais rationalise le processus de détermination de la peine au Canada. Ces réformes prévoient un certain nombre d'options qui répondent aux préoccupations de la population en matière de sécurité et aux exigences des victimes en ce qui concerne la restitution. En outre, elles renferment un principe important selon lequel les auteurs de crimes graves devraient être traités différemment des petits délinquants ou de ceux qui commettent un crime pour la première fois.

À l'heure actuelle, le rôle du Parlement dans la détermination de la peine se limite à établir des peines maximales pour des infractions précises. Dans chaque province, les systèmes judiciaires sont chargés d'établir les objectifs et les principes de la détermination de la peine. Ainsi, les valeurs des systèmes de détermination de la peine varient d'une province à l'autre.

Il est proposé d'ajouter au Code criminel un énoncé de principes et d'objectifs qui guiderait tous les juges du pays dans la détermination de la peine. Les sanctions imposées auraient pour but: d'aider à réhabiliter les délinquants pour qu'ils deviennent des citoyens respectueux des lois; d'isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société; d'assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité; de susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu'ils ont causé aux victimes et à la collectivité; de dénoncer le comportement illégal; et, enfin, de dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions.

Cette disposition permettrait au gouvernement de jouer un rôle prépondérant pour renseigner les tribunaux sur l'objectif fondamental de la détermination de la peine, qui est de contribuer au maintien d'une société juste, paisible et sûre.

De plus, en vertu de l'énoncé de principes proposé, on demanderait aux tribunaux de prononcer des sentences qui soient proportionnelles à la gravité du crime. L'énoncé de principes proposé répondrait aux préoccupations concernant les crimes motivés par la haine et les crimes commis par des personnes en position d'autorité oude confiance dans la société. Il serait alors question


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de circonstances aggravantes dont il faudrait tenir compte au moment de la détermination de la peine.

Le projet de loi C-41 prévoit également des modifications au Code criminel qui amélioreraient à la fois l'efficacité et l'efficience du système de détermination de la peine. Premièrement, il faut modifier les dispositions du Code criminel concernant la probation. Le projet de loi recommande que l'on transmette des renseignements importants aux tribunaux au cours des audiences de détermination de la peine.

On modifierait le Code criminel pour préciser les renseignements de base qui doivent figurer dans le rapport pré-sentenciel, dont le dossier des infractions de l'adolescent, son casier judiciaire, des renseignements sur les emplois qu'il a occupés et ses antécédents sociaux, ainsi que les mesures prises pour sa réhabilitation.

De plus, le projet de loi cherche à renforcer les peines prévues en cas de manquement aux conditions de la probation. Une disposition prévoyant des délais rigoureusement établis pour se présenter à l'agent de probation sera ajoutée au Code criminel. Les sanctions en cas de manquement à ces conditions seront aussi renforcées pour ajouter à la crédibilité du système de probation.

Deuxièmement, s'il est adopté par la Chambre, ce projet de loi contribuera dans une large mesure à réduire la charge de travail des tribunaux canadiens, qui sont déjà débordés. Comme la plupart des Canadiens, je frissonne quand j'entends dire qu'un non-lieu a été prononcé à cause des retards provoqués par un rôle surchargé.

Ce projet de loi prévoit des mesures de rechange en remplacement de la procédure judiciaire, des mesures qui empêcheraient un comportement plus criminel et réduiraient le tort qui peut parfois être fait quand on a recours aux tribunaux dans le cas de délinquants mineurs. En outre, d'autres mesures de rechange feraient appel à la collectivité et insisteraient davantage sur les efforts de réconciliation de la victime et du délinquant lors de la procédure judiciaire.

Enfin, ce projet de loi s'attaque à l'impact sur les victimes. Je suis heureuse de constater que le ministre de la Justice a été attentif aux besoins et aux préoccupations de ces dernières. Lorsqu'elles ont affaire au système de justice pénale, les victimes se sentent frustrées et perdues. Elles veulent se faire entendre. Elles veulent notamment participer au processus et que leurs intérêts soient pris en considération durant les audiences de détermination de la peine. Le projet de loi C-41 en tient compte.

(1720)

Ces dernières années, notre système judiciaire a assisté à la mise en place et à l'usage limité de la déclaration de la victime. Ce projet de loi obligerait les juges qui président aux audiences de détermination de la peine à prendre en considération la déclaration de la victime lorsqu'ils rendent la sentence. La victime serait ainsi assurée d'avoir la possibilité de dire tout le mal que lui a fait le délinquant et l'on serait ainsi sûr qu'il est effectivement tenu compte de l'expérience de la victime au moment de décider si la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle devrait être réduite.

Nous savons tous que la criminalité coûte cher, non seulement en raison des frais de justice, mais aussi à cause des pertes subies par les victimes. Souvent, des objets précieux ou des biens familiaux ou personnels de grande valeur sentimentale sont volés, perdus ou endommagés lors de la perpétration du crime. Actuellement, si une victime veut obtenir réparation d'un préjudice sur sa personne ou ses biens, elle doit en faire la demande aux tribunaux et avoir recours à une procédure civile coûteuse.

Sans interdire aux victimes de demander réparation par le biais de procédures civiles, le projet de loi autorise les juges, de leur propre initiative, à envisager la réparation d'un préjudice sur la personne ou sur les biens de la victime.

Nous pouvons être fiers de ces propositions. Elles montrent que notre gouvernement reconnaît les droits des victimes.

Je voudrais féliciter la Victim Crisis Branch des services de police de Nepean du travail qu'elle a fait pour les victimes depuis sa création en 1983. Administrée principalement par un fort contingent de bénévoles de la ville de Nepean, ayant suivi une formation à cette fin, le service fournit une évaluation directe de l'intervention nécessaire en cas de crise, offre des services de conseils à court terme et assure l'orientation vers les ressources communautaires adéquates aux particuliers et aux familles traumatisés par un crime.

Le mandat du service est de travailler dans l'intérêt des personnes qui s'adressent à lui, et il est conforme au mandat défini par le ministère du Solliciteur général du Canada.

Je suis heureuse de pouvoir affirmer aujourd'hui que j'appuie le projet de loi C-41. J'aimerais féliciter le ministre de la Justice d'avoir eu le coeur et le courage d'écouter les Canadiens et de donner suite aux promesses que nous avons faites pendant la campagne électorale. Je suis convaincue que tous ceux qui examineront les dispositions de ce projet de loi reconnaîtront qu'il est dans l'intérêt du Canada et qu'il aidera à restaurer la foi des Canadiens dans la sécurité de leurs foyers et de leurs rues.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je prends la parole au sujet du projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine).

Comme je l'ai dit plus tôt lors d'une autre intervention, il me semble que le Parti libéral a écouté les réformistes, mais seulement d'une oreille. J'ai dit seulement d'une oreille car les libéraux ont fait du chemin, mais ils ne sont pas allés jusqu'au bout. S'ils s'étaient servis de leurs deux oreilles, ils auraient peut-être fait une volte-face complète et la question serait réglée une fois pour toutes. De ce côté-ci de la Chambre, les réformistes estiment que ce projet de loi ne règle pas la question.

Il aurait été si simple de mettre un point final à cette question et de passer à d'autres choses tout aussi importantes telles que le chômage et la réduction du déficit. Mais non, tout ce qu'on nous propose, c'est un changement mineur au Code criminel. Si je devais féliciter les libéraux pour les efforts qu'ils ont faits en présentant ce projet de loi, mes paroles seraient noyées par le bruit qui nous vient parfois d'en face.

Nous les réformistes, nous sommes déterminés à ce que le Code criminel soit profondément modifié de façon à ce que les criminels soient punis et que leurs victimes reçoivent le réconfort qui leur est dû. C'est une déclaration de principe assezsimple. À notre avis, ce projet de loi se livre à des jeux de

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devinettes puisqu'il faudrait déterminer dans quel état d'esprit était le criminel au moment du crime.

J'aimerais que le parrain de ce projet de loi et le gouvernement qui l'a déposé nous expliquent quelle est la différence pour la victime entre, par exemple, quelqu'un qui a été tué par haine et un spectateur innocent qui se trouvait sur les lieux au moment du cambriolage d'une banque et qui est abattu d'une balle perdue? Dans les deux cas, la victime est morte. L'analogie n'est peut-être pas très valable parce que les deux victimes sont mortes et qu'il nous serait par conséquent difficile de connaître leur opinion. Il faut cependant se rappeler qu'une victime demeure une victime.

(1725)

Comme le disait ma collègue il y a quelques minutes, si nous commençons à différencier les motifs du criminel aux fins de la détermination de la peine-selon ce qui se passait dans son esprit-nous oublions complètement que le but premier de la justice pénale est de protéger la victime et la société. C'est là le but fondamental de la justice pénale. Les Canadiens sont égaux à tous égards devant la loi. Si nous commençons à établir des catégories de citoyens, le Canada aura, comme le disait mon collègue de Kootenay-Est, perdu la bataille.

Je m'explique. Peu importe qu'un acte criminel soit motivé par la haine ou par autre chose, la victime souffre. La raison d'être des lois pénales canadiennes est de protéger la société et chaque citoyen.

Toute tentative visant à modifier la détermination de la peine en fonction de l'état d'esprit du criminel aura non seulement les effets dont je viens de parler mais elle engendrera de nouvelles possibilités d'appel pour le criminel, des dépenses accrues de la profession juridique et, bien sûr, une révision à n'en plus finir de l'affaire, pendant que la victime innocente restera sans recours et oubliée.

Le ministre de la Justice va nous dire qu'il propose d'ajouter les déclarations des victimes, mais ce n'est là qu'une façon bien modeste de reconnaître que les victimes ont des droits. Je suis heureux de voir qu'on propose d'utiliser les déclarations des victimes, car c'est à toutes fins utiles la première fois qu'on leur reconnaît ce droit. La politique du Parti réformiste prévoit qu'en cas de conflit entre les droits d'un criminel et ceux de sa victime, les droits de la victime doivent prévaloir.

Le projet de loi reconnaît, pour la première fois quoique modestement, que la victime doit être entendue. Nous devons tenir compte de ce qui lui est arrivé. On peut régler le cas du criminel en le mettant en prison. Nous ne proposons pas de l'y laisser indéfiniment. Nous prônons plutôt la réadaptation, les sanctions et la nécessité de protéger la société. Ces mesures font partie intégrante de notre conception, mais rappelons-nous qu'il faut d'abord protéger la victime.

En ce qui a trait à l'examen du cas après 15 ans, cette disposition qui laisse un vague espoir, le gouvernement veut permettre l'utilisation de la déclaration de la victime lorsque le criminel demande une audience de libération conditionnelle après 15 ans de détention, s'il a été condamné à une peine plus lourde. Encore une fois, je crois qu'il commence alors à être un peu tard pour s'intéresser au sort de la victime.

Comme je le disais, finissons-en une fois pour toutes, afin que nous puissions passer à d'autres choses tout aussi importantes. Nous pensons qu'on devrait plutôt discuter de la dette et du déficit. La criminalité, c'est important, mais la dette l'est tout autant. Si nous pouvions régler le cas maintenant, nous améliorerions grandement l'efficacité de la Chambre.

Il y a une autre question que je veux aborder, c'est le fait que les tribunaux ne seront plus qu'une annexe du bureau de crédit. Si votre crédit n'est pas bon, vous n'avez pas à vous en faire pour les amendes. Le paragraphe 734(2) du projet de loi dit ceci au sujet des amendes: «Le tribunal ne peut infliger l'amende prévue au présent article que s'il est convaincu que le délinquant a la capacité de la payer ou de s'en acquitter en application de l'article 736.»

Voilà qu'on va imposer des amendes à ceux qui ont les moyens de payer. Les riches en prendront plein la figure et les pauvres s'en tireront pour rien. Est-ce bien là ce que nous voulons? Cela veut-il dire que les criminels qui sont dans la dèche s'en tireront pour rien, qu'ils pourront en toute impunité commettre des petits larcins, des petits vols, collectionner les contraventions de stationnement et que sais-je encore? Ils n'auront qu'à dire qu'ils n'ont pas d'argent et ils ne seront pas tenus de payer. C'est ce que dit cet article.

Qui va croire la personne qui déclarera, dans le box des accusés: «Votre honneur, je n'ai pas d'argent»? Les tribunaux décideront-ils alors de suspendre le procès en attendant qu'une enquête soit faite sur les réserves de cette personne à la banque et sur ses dettes de crédit?

Soyons raisonnables. La loi s'applique à tout le monde, peu importe notre condition sociale. Pourtant, nous en sommes là. Non seulement nous parlons de créer différentes catégories de personnes selon leur façon de penser, mais nous voulons aussi créer différentes catégories selon leur portefeuille. Plus on a d'argent, plus on a de recours, et l'on connaît la suite.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LE FINANCEMENT DES PARTIS POLITIQUES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 6 mai 1994, de la motion et de l'amendement.

M. Ted White (North Vancouver): Monsieur le Président, la plupart de gens ont entendu la maxime suivante: Si ce n'est pas


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brisé, il ne faut pas essayer de réparer. C'est la phrase qui me venait à l'esprit en lisant le libellé de la motion dont nous sommes saisis et au cours du débat que nous avons eu à cet égard le 18 mars 1994.

Si nous devions réserver uniquement aux individus le droit de verser des dons à une cause politique à l'échelle fédérale, nous le ferions certainement pour une raison excellente et logique. Franchement, je ne vois pas cette raison.

Il existe amplement de preuves établissant qu'un financement important est en soi la garantie d'une victoire électorale ou même de la réussite d'une activité politique. Il n'est absolument pas nécessaire de restreindre le montant des dons à des fins politiques.

Les partis traditionnels à la Chambre ont autorisé l'affectation de sommes mirobolantes au clan du «oui» au référendum sur l'Accord de Charlottetown, mais c'est le clan du «non», qui disposait pourtant de seulement une fraction des ressources, mais qui avait la logique, qui l'a emporté.

Compte tenu de l'argent dépensé par le clan du «oui», on peut conclure que la victoire ne s'achète pas. Il y a aussi l'exemple du Parti national, qui a été formé avant la dernière élection fédérale. Le parti n'a reçu qu'un don considérable venant d'un individu. Le montant était de l'ordre de 4 à 5 millions de dollars.

Je me souviens fort bien des panneaux publicitaires qui sont apparus partout dans la région de Vancouver plusieurs mois avant l'élection. Il était très évident que le Parti national jouissait d'un bon financement et que les candidats ne manquaient pas de fonds pour mener leur campagne.

Malgré ce financement généreux, au cours de la semaine dernière, le Parti national a plié bagages sans avoir réussi à faire élire un seul député. Par contre, les renseignements fournis par Élections Canada montrent que le Parti réformiste a dépensé beaucoup moins par député élu que tout autre parti au cours de la dernière campagne électorale.

Le Parti réformiste a été financé presque entièrement grâce à de faibles dons de particuliers. Dans ma circonscription, nous avons réuni entre 40 000 et 50 000 $ et, si ma mémoire est bonne, un seul don dépassait 200 $. Plus de 90 p. 100 des dons étaient de moins de 90 $.

À mon avis, il n'est absolument pas nécessaire de restreindre la liberté des gens de donner le montant qu'ils veulent à des partis politiques. Je répète qu'il a été maintes fois prouvé que l'argent seul n'avait pas d'effet sur le résultat d'une élection.

Les noms de ceux qui contribuent au financement des campagnes électorales font déjà l'objet d'une divulgation complète, et c'est tout ce dont ont besoin les électeurs intéressés pour retracer la provenance des fonds. Les sociétés et les organisations telles que la Fédération des travailleurs, qui font parfois des dons à plusieurs partis politiques, ne sont après tout que des groupes de personnes. Il est relativement facile de déterminer qui sont ceux qui ont fait des dons.

Le système actuel fonctionne plutôt bien, mais supposons un instant qu'une mesure législative soit déposée afin de faire ce qui est proposé dans la motion M-150, c'est-à-dire limiter aux seuls individus le droit de contribuer au financement d'un parti politique.

Une telle loi pourrait facilement être contournée par une société qui, comme les députés le savent, n'est qu'un groupe de personnes. Tout ce qui se produirait, c'est que les membres d'un conseil d'administration feraient des dons à titre individuel. Au sein d'organisations autres que les sociétés, par exemple les syndicats, la nouvelle loi pourrait être contournée en demandant tout simplement aux membres de faire les dons.

(1735)

Comment ces stratagèmes pourraient-ils être découverts? Il est absolument inutile d'adopter une loi qui pourrait être aussi facilement contournée, sans compter qu'une telle mesure porterait atteinte à notre droit individuel d'appuyer les groupes d'intérêts de notre choix.

Le gouvernement précédent avait tenté, avec l'appui total des vieux partis d'opposition, de museler des groupes tels que la National Citizens' Coalition avec des mesures semblables à celle qui est proposée dans la motion. Dieu merci, les tribunaux ont bloqué ces tentatives de la part des vieux partis.

Les députés apprécient la liberté de parole dont ils jouissent, mais certains d'entre eux donnent parfois l'impression qu'ils préféreraient que cette liberté ne soit pas accordée aux groupes tels que la National Citizens' Coalition. Pourquoi? Les députés d'en face craignent tout simplement de se retrouver dans l'embarras lorsque cet organisme révélera le gaspillage que la Chambre pourrait facilement éliminer si elle le voulait vraiment.

À ceux qui partagent cet avis, je dis: tant pis pour vous. La vérité blesse peut-être, mais il est moralement injuste d'adopter des lois pour tenter de retirer le droit à la libre expression à des groupes comme le National Citizens' Coalition. Il est moralement injuste de tenter de contrôler les élections et les référendums en limitant les dons que les gens peuvent faire à un parti ou à une cause.

Évidemment, ceux qui appuient la motion vous diront que les sociétés ou les personnes qui font des dons importants attendent quelque chose en retour. Ils insinuent ainsi que les personnes ou les gouvernements élus octroieront des contrats en guise de récompense à ceux qui ont appuyé leur campagne et fait des dons importants. En vérité, la plupart des gens font des dons aux partis et aux candidats dont les politiques et les promesses rejoignent leurs propres convictions.

Il est évident qu'ils s'attendent à certaines choses en retour, mais pas nécessairement à des faveurs abjectes ou immorales. Par exemple, ceux qui contribuent à la caisse du Parti réformiste veulent que les réformistes forment le gouvernement. En guise de récompense, ils s'attendent aux avantages que leur procurera le contrôle des dépenses du gouvernement, soit la création d'emplois, la réduction des taxes et des impôts et l'augmentation du revenu disponible.


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Pour leurs enfants, ils veulent une dette fédérale acceptable plutôt qu'une dette incontrôlable. Ils veulent revenir à des niveaux d'immigration raisonnables et trouver des solutions aux problèmes que posent les réfugiés et la criminalité. Ils veulent la démocratie directe que leur procurera le droit des citoyens de tenir des référendums et de révoquer les députés qui ne les représentent pas de façon adéquate. Ces causes méritent-elles d'être appuyées?

Je ne suis guère surpris de voir que les gens veulent contribuer financièrement à un parti qui leur procurera tous ces avantages. Jamais je ne voterai pour réduire la capacité des Canadiens d'appuyer ainsi les partis politiques de leur choix. Je veux bien laisser le marché décider de ce qui vaut d'être appuyé en théorie et de l'appui qui convient.

J'ai bien l'intention de défendre le droit qu'ont mes électeurs d'appuyer financièrement le parti et le candidat de leur choix dans la mesure qu'ils estiment juste.

Enfin, la modification proposée m'inspire les observations suivantes. Si la modification était adoptée, les contribuables pourraient être tenus de contribuer un dollar chacun par candidat en lice dans leur circonscription. Quelle vache à lait cela représenterait! Des candidats et des partis surgiraient de partout à chaque élection pour recevoir 80 000 $ en cadeau. Le pire, c'est qu'ils n'auraient même pas à gagner l'appui financier des électeurs. Ce serait le pire cas de subvention publique jamais vu!

Appuyer ce projet de loi, cela reviendrait à encourager le gouvernement à continuer de gaspiller les recettes fiscales. Comme c'est facile de donner l'argent des autres! Je me demande si les partisans de cette modification seraient disposés à payer de leur poche pour l'appuyer.

Je voterai contre la modification et la motion.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, le député du Parti réformiste qui vient d'intervenir parle en quelque sorte en faveur de l'amendement. Mais dans notre esprit, cet amendement vient en contradiction avec la motion présentée par mon collègue de Richelieu. Il est bon de rappeler le texte de cette motion qui dit que le gouvernement devrait légiférer afin de limiter aux seuls individus-c'est un mot clé-le droit de contribuer au financement d'un parti politique fédéral, et restreindre cette contribution-et ce deuxième élément de la motion est très important-à 5 000 $ annuellement.

(1740)

Je veux tout d'abord féliciter le député de Richelieu d'avoir présenté cette motion à la Chambre car, à mon avis, elle vise deux objectifs, le premier étant d'améliorer la démocratie. Je pense que les représentants des différents partis, j'en doute nullement, souhaitent que la démocratie soit maintenue, mais aussi améliorée.Or, le but visé par mon collègue, le député de Richelieu, est d'améliorer la démocratie.

Deuxièmement, il y a la transparence. Cela permet de s'assurer, en ce qui concerne ceux qui contribuent aux partis politiques, de savoir qui ils sont et dans quelle proportion ils y contribuent, parce que de plus en plus de personnes expriment l'opinion qu'elles ont l'impression d'être éloignées du pouvoir, éloignées du gouvernement, éloignées des centres de décision.

Dernièrement, une émission francophone de Radio-Canada, Enjeux, illustrait très bien cela. Cela donnait l'impression que les députés, pourtant élus par leurs commettants, avaient de moins en moins la possibilité d'influencer le gouvernement, qu'ils soient dans l'opposition ou pas. C'est l'impression qu'on y retrouvait.

Les gens qui s'expriment ont l'impression que ce sont plutôt les lobbyistes qui sont engagés par de grandes compagnies qui influencent les gouvernements. Il y a aussi un autre facteur; beaucoup de gens disent qu'une fois qu'on est au gouvernement, les députés sont peut-être influencés ou se rappellent les contributions qu'ils ont reçues dans leur comté ou que leur parti a reçues.

Or, que nous révèle l'examen du rapport du directeur des élections? On voit maintenant apparaître le nom des contributeurs, incluant ceux des compagnies et on sait d'où cela vient. Mais je ne suis pas sûr que la population en général connaisse les principales données de ce rapport.

Si on se fie au dernier rapport du directeur général des élections, on constate que pour les deux partis, le Parti libéral qui est maintenant au pouvoir et le Parti conservateur, d'après les statistiques, les individus ont contribué pour moins de 50 p. 100 à la caisse électorale de ces partis qui ont tour à tour géré, qui ont gouverné. Or, sachant cela, les gens se demandent qui influence. On se demande si la contribution influence la représentation.

Au Québec, c'est un débat qui a eu lieu il y a une vingtaine d'années et qui a finalement abouti à une loi, la Loi 2 sur le financement des partis politiques. Depuis qu'elle est en vigueur, cette loi a permis, selon plusieurs observateurs, d'améliorer la confiance des gens envers leur gouvernement. Je m'adresse à mes collègues de tous les partis politiques, car on reçoit tous des électeurs dans nos bureaux de comté.

(1745)

J'imagine que lorsqu'on reçoit une demande de rendez-vous de quelqu'un qui a donné une forte contribution, c'est sûrement plus gênant de lui refuser, parce que ces gens-là doivent sans doute se dire ce qu'on disait à ce moment-là au Québec: Écoutez, j'ai aidé à votre élection, au financement de votre parti politique, vous pouvez bien me recevoir. S'il y a une profession aujourd'hui, qui est critiquée, à tort peut-être plus qu'à raison, c'est bien la politique. C'est souvent dans la tête des gens, donc ce sont des impressions, des perceptions. Ce n'est peut-être pas toujours le cas, je ne veux pas entacher la réputation des députés-


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de toutes les formations, mais simplement constater un fait, à savoir que cela doit influencer le travail des députés ou des ministres ou des gouvernements lorsqu'ils ont des décisions à prendre. C'est du moins ce que pensent les électeurs.

Si vous me permettez, monsieur le Président, je vais me servir du dernier rapport disponible du directeur des élections. Par exemple, en 1992, le Parti progressiste-conservateur n'était financé par des individus que dans une proportion de 41,1 p. 100; le reste venait d'entreprises. Le Parti libéral du Canada, aujourd'hui au pouvoir n'était financé par les individus que dans une proportion de 53,4 p. 100. Ensuite, le Nouveau Parti démocratique n'était financé par des individus que dans une proportion de 41,1 p. 100, parce que le Nouveau Parti démocratique compte tenu de ses orientations de gauche, si je peux les qualifier ainsi, a été davantage financé par les centrales syndicales. Des montants importants, de l'ordre de 300 000 $ ont été accordés par une grande centrale, plus des petits syndicats. Pas loin de 1 000 syndicats différents ont financé le Nouveau Parti démocratique. Alors, cela a sûrement contribué à influencer le Nouveau Parti démocratique dans son fonctionnement, dans ses orientations.

J'étais un peu étonné d'entendre les remarques de mon collègue du Parti réformiste tout à l'heure qui s'objectait à l'esprit de la motion de mon collègue, le député de Richelieu, parce qu'en 1992, on constate que le Parti réformiste était, il faut le signaler, financé à 90 p. 100 par les individus.

Une voix: Ils sont d'accord.

M. Dubé: Non, je parle ici du collègue qui se prononçait. . .

Une voix: Il était contre l'amendement.

M. Dubé: Ah, contre l'amendement. J'ai dû mal saisir.

Je m'excuse, monsieur le Président, j'ai été un peu distrait par les bruits qui m'entouraient.

Alors, je rappelle ces chiffres. C'est très important, car ce sont des sommes considérables. Vous me permettrez de prendre en premier le parti qui est actuellement au pouvoir. Et encore une fois, je cite le rapport du directeur des élections de 1992 pour voir l'ampleur de ces contributions. La SNC: 68 477 $; Canadien Pacifique: 63 000 $; M. John F. Bankes: 48 454 $; Imasco: 47 000 $. Je vais aller plus rapidement: la Banque royale du Canada: 45 000 $; la Banque de la Nouvelle-Écosse: 42 000 $; CIBC: 42 258 $; Toronto Dominion Bank: 40 872 $. Je pourrais citer d'autres banques, mais quand ont dit les banques, elles ont intérêt à influencer un gouvernement, à cause des taux hypothécaires, etc.

Je vais maintenant passer aux contributions au Parti conservateur. Il y avait Bombardier: 70 480 $; Canadien Pacifique-encore une fois des deux bords: 64 233 $; la Banque de Montréal: 48 833 $; la Banque de Nouvelle-Écosse: 42 000 $; Brascan Limitée: 30 000 $; Baton Broadcasting: 28 833 $; la BCE Inc.: 25 000 $; la Banque nationale: 25 000 $. Je pourrais en citer d'autres.

(1750)

Du côté du Parti réformiste, il y a aussi plusieurs contributions, mais moins importantes, qui dépassent 5 000 $. Je vais vous citer un autre exemple, celui du Bloc québécois qui, même s'il n'était pas obligé de le faire, a décidé d'adopter l'esprit de la loi québécoise et en 1993, a recueilli 3 500 000 $ provenant de 70 000 individus différents, pour une moyenne de 50 $ par don.

Nous, quand on allait en campagne électorale, quand on parlait de vrai pouvoir, c'est ce que l'on voulait dire, c'est-à-dire qu'on voulait représenter d'abord ceux qui votent, et à ce que je sache, les grandes compagnies ne votent pas.

[Traduction]

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, j'appuie l'amendement visant à limiter les contributions personnelles à des partis politiques à 1 $. Cela paraît extrême dans le contexte politique actuel, et j'imagine que ça l'est, mais je ne suis pas naïf au point de croire que je verrai quelque chose du genre se produire au Canada de mon vivant. Cependant, le débat de cet après-midi me permet d'énoncer quelques principes qui, à mon sens, devraient s'appliquer aux campagnes de souscription à des fins politiques.

Un député réformiste a déclaré il y a quelques minutes qu'il ne croyait pas que le système était si mauvais que cela et qu'il n'était pas nécessaire de le modifier. Il a dit ne pas craindre que l'argent puisse servir à «acheter» des élections ou un référendum. Il a donné l'exemple du référendum sur l'accord de Charlottetown. Nous savons tous que le camp du oui a dépensé plus d'argent que le camp du non, mais qu'il a quand même perdu.

Toute personne douée d'un minimum d'intelligence sait que l'argent n'est pas une garantie de succès dans une élection. Nous le savons tous. Cependant, je crois que toute personne douée d'une once de jugement sait que l'argent peut aider et peut faire une grosse différence dans bien des cas. C'est pourquoi les partis politiques et les politiciens sont constamment à la recherche d'argent. Ils savent que cela peut aider.

Je pose une question à mon vis-à-vis réformiste. Combien de candidats se sont présentés aux dernières élections présidentielles américaines? Nous connaissons tous les trois principaux candidats: MM. Clinton, Bush et Perot. Ils s'en sont tous plutôt bien tirés. M. Clinton a gagné, mais il y avait environ 40 autres candidats. Comment se fait-il que nous n'ayons jamais entendu parler des 40 autres personnes qui ont posé leur candidature au poste le plus élevé des États-Unis? Ils n'avaient pas d'argent pour se faire une image.

La seule personne qui a pu franchir cet obstacle, c'est M. Perot et c'est parce qu'il est milliardaire. Il a été en mesure d'acheter bel et bien une campagne électorale réussie, c'est-à-dire réussie pour un candidat d'un tiers parti. Il n'a pas réussi à vaincre les candidats bien établis des partis républicain et démocrate, mais il a pu faire belle figure parce qu'il disposait d'énormes ressources financières. L'argent peut faire toute la différence, même dans des causes perdues comme le cas de M. Perot.

J'appuie cet amendement à la motion à l'étude, car je crois que les campagnes politiques sont une affaire publique, et que les


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affaires publiques devraient être financées par le public, c'est-à-dire par l'État, non par le secteur privé.

Je crois que la démocratie fonctionne le mieux quand elle fait participer le plus grand nombre de Canadiens possible, et cela inclut le financement des campagnes électorales. Comme nous sommes des démocrates et que nous croyons en la démocratie, quand des élections sont déclenchées, nous ne devrions pas confier cet engagement, si je puis m'exprimer ainsi, à des partis ou à des donateurs du secteur privé.

(1755)

Quand la General Motors procède à des affaires privées, quand elle cherche, disons, à se doter d'un nouveau conseil d'administration, elle ne vient pas dire au public: « Nous tenons notre propre petite campagne électorale pour nous doter d'un nouveau conseil d'administration et nous aimerions que vous nous donniez un coup de main. » Elle ne fait pas ça. Elle se débrouille toute seule. Elle s'attend à ce que cet engagement privé soit financé en privé par les actionnaires de la société. Nous devrions appliquer exactement la même logique quand il s'agit de campagnes politiques et nous ne devrions pas nous tourner vers les donateurs du secteur privé pour financer les campagnes électorales. C'est pourtant ce que nous faisons.

Je ne veux absolument pas dire que le système est tout corrompu, tout brisé. J'estime cependant qu'en tant que politiques, nous devrions nous efforcer constamment de faire mieux, d'améliorer nos institutions, y compris l'institution la plus importante et dont l'influence se fait sentir partout, l'institution démocratique.

De nos jours, nous entendons souvent parler de «règles du jeu équitables». Nous voulons donc des règles du jeu équitables quand il s'agit de politique et plus particulièrement de campagnes électorales. Mais quand nous recevons des contributions privées, ceux qui ont de l'argent ont un avantage.

Pour parler comme on parle d'habitude, quand il s'agit de lécher des timbres, de remplir des enveloppes et de faire du porte à porte, les pauvres, les gens modestes, les Canadiens moyens sont sur un pied d'égalité avec les riches. C'est vrai. Ils peuvent marcher, frapper aux portes et lécher des timbres aussi bien que n'importe qui avec un gros compte en banque. La différence, c'est que les riches ont de l'argent et peuvent faire jouer leur influence. Avec de l'argent, ils peuvent exercer leur influence, ce qui n'est pas possible pour la plupart d'entre nous, parce que, relativement, nous ne sommes pas riches. Il faut donc toujours veiller à ce que les règles du jeu soient les mêmes pour tous.

Il y a aussi toute la question des apparences. On a l'impression que l'argent a beaucoup d'influence sur les décisions politiques, dans notre régime et dans notre gouvernement. Je ne crois pas que ce soit aussi grave que certains le pensent. En tout cas, on a l'impression que, lorsqu'on a de l'argent, qu'on est bien placé et qu'on a du pouvoir, on peut approcher les politiques et les décideurs de plus près et exercer une influence que n'ont pas les autres citoyens. C'est ce que nous devrions éviter.

Les politiques et leurs collaborateurs ne devraient pas consacrer beaucoup de temps aux campagnes de financement. Nous devrions nous occuper de gouverner, d'élaborer des politiques, de travailler sur les mesures législatives. La situation n'est pas aussi grave chez nous qu'aux États-Unis.

Chez nos voisins, c'est inouï, le temps que les politiques peuvent passer à ramasser de l'argent. Les Américains élisent-ils les représentants et les sénateurs pour qu'ils passent la moitié de leur temps à chercher de l'argent? Je ne crois pas qu'on fait de la politique pour cela. Pourtant, beaucoup de politiques américains doivent le faire.

Je conclurai en disant que l'adoption d'un régime qui serait plus largement financé par les fonds publics nous donnerait une démocratie de meilleure qualité, plus forte et représentative.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je prends la parole pour discuter de l'amendement à la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. Cet amendement, proposé par les libéraux, ramènerait le montant de 5 000 $ à 1 $. J'ai pensé que j'aurais le privilège de partager l'avis du député de St. James, mais malheureusement, comme d'habitude, les députés d'en face adoptent une position diamétralement opposée à la nôtre.

(1800)

Je me demande d'ailleurs si le député a vraiment compris la motion principale à l'étude, car il n'est pas question ici du financement des partis politiques par le gouvernement fédéral. Si vous me le permettez, je vais lire la motion principale. Celle-ci propose: «Que [. . .]le gouvernement devrait légiférer afin de limiter aux seuls individus le droit de contribuer au financement d'un parti politique fédéral, et restreindre cette contribution à 5 000 $ annuellement.»

Les libéraux ont proposé un amendement qui ramène cette somme à 1 $. Il n'est pas question, en l'occurrence, de fonds que le gouvernement fédéral verse aux partis politiques. Il est question du droit des Canadiens de verser une contribution à un parti politique de leur choix, droit qui serait presque entièrement nié par l'amendement des libéraux, sauf pour ce qui est d'un dollar.

Ils ont peut-être de la difficulté à amasser des fonds. J'ai examiné des données sur les contributions versées durant la dernière campagne électorale et sur leur provenance. Dans certaines circonscriptions, 300 ou 400 contributions de sources différentes ont été versées. Si on multiplie cela par le montant que les donateurs peuvent verser, il est évident que les libéraux ont pu financer leur campagne, mais en vertu de cet amendement, le montant total à répartir entre les différents partis au sein d'une circonscription représenterait 300 $, 400 $ ou peut-être 500 $ au total.

Si le député qui vient de prendre la parole pense qu'avec seulement 500 $ répartis entre deux ou trois partis, on peut rejoindre l'électorat, publier des brochures et acheter de la publicité à la télévision, il sait sûrement quelque chose que j'ignore.

Il a parlé de la difficulté de recueillir des fonds. Or, je sais qu'aux dernières élections, le Parti réformiste a pu recueillir,


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auprès des petits donateurs, près de 10 ou 12 millions de dollars. L'orateur précédent pourrait donc se présenter sous la bannière réformiste pour avoir moins de difficulté à recueillir des fonds.

En tant que réformistes, nous croyons que le gouvernement fédéral ne devrait pas s'occuper du financement des partis politiques, ce qui va à l'encontre de ce qu'a dit l'orateur précédent.

Nous estimons que les partis politiques et les groupes de lobbyistes devraient s'autofinancer, recueillir leurs propres fonds et être autonomes. Le niveau du soutien financier dépendra évidemment entièrement de la générosité des partisans du parti ou du groupe.

Il y a eu une manifestation cet après-midi sur la colline. Quelques milliers de gens sont venus pour défendre leur cause et je suis convaincu que leur groupe n'aura pas de difficulté à recueillir des fonds pour leur cause parce que les gens appuient celle-ci.

C'est ça la politique. Les gens disent quelles politiques ils veulent, ils donnent de l'argent pour appuyer leur cause et demandent à leurs représentants de mettre en oeuvre ces politiques.

Nous nous opposons au crédit d'impôt qui fait que les dons aux partis politiques sont subventionnés par le gouvernement fédéral. On entend si souvent à la Chambre qu'il faut aider les pauvres et les défavorisés, mais quand il s'agit de dons aux partis politiques, les choses s'inversent et les subventions vont aux plus riches et au parti qui dépense le plus d'argent et qui, le plus souvent, est au pouvoir.

M. Silye: Ils dépensent trop.

M. Williams: Oui, ils dépensent toujours trop. Ils dépensent trop dans le budget. Ils dépensent trop dans tous les ministères et maintenant ils dépensent trop dans les campagnes électorales.

Nous devons cesser de subventionner les partis politiques. S'ils peuvent obtenir l'appui des électeurs, notre démocratie sera vraiment représentative, car les gens seront prêts à confirmer leurs dires par des gestes concrets. Voilà le coeur de la question!

En 1991, selon le Budget des dépenses principal, les partis politiques ont coûté 11 503 800 $ aux contribuables canadiens, peu importe s'ils croyaient ou non à la politique. Et ce n'était même pas une année d'élections.

Nous ne connaissons pas les chiffres pour les élections de 1993, mais je peux vous assurer que le coût total sera bien supérieur à 11 503 800 $ pour les contribuables, quelle que soit leur opinion à notre sujet.

(1805)

Je crois que les parrains de la motion principale et de l'amendement devraient s'entendre et proposer une politique qui amorcera vraiment une réforme pour que le gouvernement n'ait plus à subventionner les partis politiques.

Passons à l'action au lieu de parler et proposons de véritables projets de loi qui produiront les effets voulus.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu): Monsieur le Président, il me fait plaisir de conclure le débat sur cette motion qui demande que les partis politiques ne soient financés que par les personnes ayant le droit de vote, excluant les unions, c'est-à-dire les syndicats, excluant les associations à but lucratif ou à but non lucratif, excluant les corporations, que seulement ceux qui ont le droit de vote aient le droit de financer les partis politiques.

Cela va dans la suite, je pense, des mesures prises depuis vingt ans. On se rappellera qu'il y a vingt ans, il n'y avait que les corporations qui finançaient les partis politiques, dans 95 p. 100 des cas.

Avec certains amendements à la Loi électorale, par exemple, comme le droit de donner des crédits d'impôt, on a amélioré et fait en sorte que maintenant environ 40 p. 100 du financement vienne des individus. Il faudrait, je pense, faire un pas de plus vers la démocratie et ce sont du moins les intentions manifestées durant la campagne électorale de la part de tous les partis représentés ici à la Chambre des communes d'aller vers un assainissement des finances publiques. Un des moyens, me semble-t-il, est le financement des partis politiques exclusivement par les personnes ayant le droit de vote.

Actuellement, la Loi électorale fédérale ne vise que le plafonnement des dépenses électorales. La mesure que nous proposons, le financement populaire, viendrait compléter la réglementation en vigueur en ce sens qu'elle s'appliquerait avant, pendant et après les élections.

Cette motion s'inscrit également dans l'esprit du projet de loi. On se rappellera le projet de loi sur les lobbyistes, le projet de loi C-43, dans un souci de transparence et d'intégrité du gouvernement. Je rappelle d'ailleurs au gouvernement que le livre rouge fait en effet largement état de l'importance, et je cite: «de restaurer la confiance des électeurs et électrices, de promouvoir l'intégrité dans les institutions politiques, de limiter les conflits d'intérêts et les jeux d'influence.» Ne serait-ce pas là, pour atteindre les fins du livre rouge que vous avez promené pendant toute la campagne électorale, vous les députés d'en face, ne serait-ce pas là un bon moyen -le financement populaire- de prendre des mesures concrètes qui iraient dans le sens des principes énoncés dans votre livre rouge?

Certains députés au pouvoir pendant les trois heures de débat ont fait référence souvent au Rapport Lortie. On se rappellera que le Rapport Lortie vient d'une commission qui a été mise sur pied par le gouvernement conservateur. M. Mulroney, avant l'élection de 1988, avait promis d'instituer, et c'était en première page du journal La Presse, d'instituer le financement populaire au niveau fédéral, comme cela se passe au Québec. Après l'élection, il a décidé de mettre sur pied la Commission Lortie pour se défaire un peu de son engagement et cette commission a présenté son rapport en 1991; elle avait été mise sur pied le 15 novembre 1989 et était présidée par Pierre Lortie. Dans son rapport, il disait: «Je rappellerai que le rapport lui-même souligne que certains dons peuvent être faits dans l'espoir d'un avantage matériel direct et qui donne lieu à un tel avantage.»


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À la page 448, le Rapport Lortie mentionne cela, et on a oublié de le citer lorsqu'on disait que le rapport Lortie ne parlait pas du financement populaire.

Je vous rappelle également que le financement populaire amènerait bien souvent des gens qui sont en conflit d'intérêts à ne pas l'être. Dans le Code criminel il est bien écrit à l'article 121 que faire un don avec l'idée d'obtenir un privilège d'un gouvernement est quelque chose de criminel.

Il y a donc un danger lorsque quelqu'un verse 50 000 $ à un parti politique qu'il s'attende à se faire renvoyer l'ascenseur. Le Rapport Lortie en parle très clairement.

Aussi, souligne-t-on dans ce rapport, et je cite encore le rapport: «La limitation des dons destinés aux candidats et candidates aurait peu d'incidence sur le financement des campagnes, mais elle constituerait une sorte de «police d'assurance» contre toute velléité d'abus d'influence.» C'est encore le Rapport Lortie qui dit cela.

En outre, souligne le rapport, «d'après les recherches sur le financement des candidats de 1988, les députés sortants, notamment les ministres, reçoivent un plus grand nombre de contributions importantes que les autres candidats.» Pourquoi les compagnies donnent-elles plus à des ministres qu'à d'autres? Il y a un jeu d'influence possible.

À cet égard, j'aimerais vous citer un article du Hill Times du 31 mars 1994 dont les informations sont reprises dans le journal Le Soleil du 8 avril 1994. Dans cet article, on dit: «Les plus grosses donations ont été faites par le Syndicat international des marins canadiens, lequel a contribué la somme de 31 500 $, répartie entre onze candidats libéraux. Six d'entre eux sont aujourd'hui ministres ou secrétaires d'État. Suivent de près, ensuite, les compagnies Burns Fry, Onex Corporation, Molson, trois importantes compagnies du monde des communications, Rogers, Canwest Global et Unitel, et ensuite les compagnies pharmaceutiques Merck Frosst, Apotex Limited et Magna International.»

(1810)

En tout, c'est quelque 24 ministres, dont le premier ministre, la vice-première ministre et six secrétaires d'État du gouvernement libéral qui ont profité des largesses de ces compagnies. Il y a de quoi s'interroger.

Il y a un danger, on le reconnaît, il y a un danger. Il y a un danger de jeu d'influence et c'est ce que veut corriger le financement populaire. Bien sûr, on pourrait justifier un plafonnement plus bas, au lieu de 5000 $, on pourrait parler de 3000 $ et je serais ouvert à diminuer le montant. Le montant de 5 000 $ m'apparaît quand même assez raisonnable. Il faut tirer une ligne quelque part, quand même. Certains ont invoqué aussi la Charte des droits et libertés, disant qu'elle ne permettrait pas de limiter la participation des corporations.

Or, on ne rappellera jamais assez que ce ne sont pas les compagnies qui votent ni les personnes morales, mais les électeurs et les électrices. La motion vient donc confirmer la primauté des électeurs sur les finances publiques. N'est-ce pas quelque chose qui va dans l'esprit de la Charte des droits et libertés? Elle vise également à redonner à l'ensemble des citoyens le goûtd'animer et de contrôler leurs institutions politiques largement minées par le passé au plan de leur crédibilité, on s'en rappellera.

Le président de la Banque royale du Canada, Allan Taylor, dans une allocution prononcée le 26 février 1991, faisait lui-même valoir que le financement des partis par les entreprises ne favorisait pas le processus de démocratisation et la participation populaire à la vie politique. Et c'est cité dans le Rapport Lortie à la page 463, où il est question de M. Taylor, le président de la Banque royale du Canada. C'est précisément ce processus de démocratisation et de participation que nous voulons restaurer en proposant le financement populaire des partis politiques.

Restaurer la confiance, c'est réduire au minimum la dépendance de tous les candidats, quels qu'ils soient, à l'égard des dons importants et par conséquent, limiter le risque d'abus de confiance. Est-ce que c'est faisable maintenant, ce financement populaire? Je rappellerai que sept provinces au Canada, plus le Canada, ont légiféré au niveau du financement. Il y a quatre provinces qui limitent les dons, quatre provinces, plus le Canada, exigent que la provenance des sources soit publiée.

Le Québec est le plus progressif dans ce sens, puisqu'il applique intégralement le financement populaire. Ce n'est donc pas quelque chose de nouveau. En pratique, un parti politique fédéral, le Bloc québécois, a mis le financement populaire dans ses statuts et aucun don de compagnie, de syndicat ou d'association n'a été donné à aucun candidat, ni au parti national du Bloc, pendant la dernière campagne électorale, et nous avons quand même pu dépenser 3 500 000 $, et ce, par un don moyen de moins de 50 $ par contribueur.

Maintenant, et je termine là-dessus, je pense qu'il y a deux grands principes qui me guident et qui guident mes confrères du Parti québécois auxquels se sont associés mes confrères réformistes pour faire en sorte que ce financement populaire soit établi sous forme de loi bientôt.

Au sujet de la transparence, les électeurs exigent des élus qu'ils soient des députés au service du bien commun et non au service de certains privilégiés. Un électeur qui fournit 20 $ a beaucoup moins de poids qu'une compagnie qui fournit 50 000 $. Et au niveau démocratique, cela redonne de l'importance à l'électeur, le financement populaire, ça oblige les partis à se rapprocher des électeurs et à se préoccuper de leurs besoins. Le financement populaire permet un membership plus valorisé, contribue à un sentiment d'appartenance des membres à un parti, augmente la vigueur démocratique de la société et force le parti à une décentralisation de ses pouvoirs également.

Je terminerai par cette phrase, en espérant que cela puisse influencer les députés au pouvoir comme ceux de l'opposition, en disant ceci: «Dis-moi qui te finance et je te dirai qui tu sers.»

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, je pense que le projet de loi présenté par le député de Richelieu s'inspire des grandes lignes qui ont été dégagées par le Parti québécois, lors de son accession au pouvoir en 1976, à savoir une démocratisation du fonctionnement des partis politiques et de l'État en général d'ailleurs. Cela est survenu, je pense, après qu'on ait vécu au Québec et au Canada,-mais particulièrement au Québec, puisque le Parti québécois est un parti provincial-certains comportements des politiciens, ce qui faisait en-

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sorte que les citoyens et les citoyennes remettaient en cause l'honnêteté des politiciens.

Tout le monde a parlé des «frigidaires à Duplessis» et des bouteilles de gin lors de l'élection. C'était un peu du folklore, mais il y a plus que des «frigidaires», plus que des bouteilles de gin dans le financement. Il y a eu les camions de la Brinks du Parti libéral, en 1970 au Québec.

Or, le Parti québécois a voulu faire en sorte d'assainir tout le fonctionnement démocratique. Je pense qu'on a vu ce qui s'est passé depuis ce temps, et même le Parti libéral du Québec fonctionne maintenant avec les règles démocratiques qui sont en vigueur au Québec. Cela ne l'empêche pas d'avoir une caisse électorale qui est fort intéressante, même si avec cette caisse ils n'ont pas pu réussir à gagner la dernière élection.

Il n'en demeure pas moins que tous les partis respectent cette règle et que tous les partis ont fait en sorte que d'autres gouvernements au Canada s'en sont inspirés, pas suffisamment, dont le gouvernement canadien, et c'est l'objectif que poursuit le député de Richelieu.

Je pense qu'il ne me reste plus de temps, monsieur le Président.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 18 h 16, la Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote!

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, le vote sur la motion proposée est reporté au mardi 27 septembre 1994, à 15 heures.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le président suppléant (M. Kilger): Consent-on à l'unanimité à suspendre la séance jusqu'à l'appel de la présidence? La Chambre reviendrait à 18 h 30, pour le débat d'ajournement.

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 18 h 18.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

(La séance reprend à 18 h 25.)

_____________________________________________

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MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES TRANSPORTS

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, le 16 juin dernier, j'ai pris la parole à la Chambre pour m'enquérir auprès du ministre des Transports de ses projets concernant le réseau de transport pancanadien parce que tout semblait indiquer que l'on s'apprêtait à démanteler notre réseau national.

Il est ironique de penser que, d'une part, le gouvernement libéral se vante d'avoir accompli tant et tant dans le cadre de son programme d'infrastructure -entendons par là pour ce qui touche les réseaux d'égouts, les routes et les autoroutes- et d'autre part, il s'apprête à démanteler, en application de la politique de transport que le ministre a annoncée plus tôt dans le courant de l'année, l'élément le plus fondamental de notre infrastructure de transport, à savoir notre réseau national de transport aérien.

J'ai été heureuse de constater dans une lettre que le ministre des Transports m'a fait parvenir vers la fin juin qu'il serait curieux de savoir ce que l'on pensait de la politique de transport dans toutes nos circonscriptions.

Avant même que je ne puisse entreprendre cette consultation, soit à peine trois semaines après m'avoir lancé cette invitation, le ministre a exposé dans un discours toute sa politique de transport.

Il me semble qu'il ne devait pas vraiment vouloir que les députés consultent leurs électeurs, s'il ne nous a pas donné plus de temps que cela pour le faire. Cela m'a fait penser qu'il y avait peu de rapport entre les objectifs dont le ministre nous avait donné les grandes lignes en réponse à ma question et ce que j'étais à même de constater.

Lors de l'annonce de la politique nationale sur les aéroports nationaux-un des éléments de la politique des transports-on a vu clairement où le gouvernement voulait en venir. Il cherchait manifestement à transférer aux municipalités, aux provinces et aux territoires la responsabilité à l'égard des aéroports. Il n'y a rien de bien «national», à mon avis, à laisser les collectivités se débrouiller toutes seules.

Bien sûr, en tant qu'habitante du Nord, du Yukon, je trouve cette question particulièrement importante, parce qu'il est très difficile pour les petits aéroports des régions rurales et du nord du Canada de s'autofinancer. Si un gouvernement s'est vraiment engagé à établir un réseau national de transport aérien, il doit en tenir compte dans ses politiques. Malheureusement, cela n'était-

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pas évident dans la réponse du ministre à ma question, ni dans ses observations subséquentes.

L'impact de la politique nationale de transport sur les régions rurales et du Nord, sur les coûts tant pour les consommateurs que pour les transporteurs et, bien sûr, sur les frais de sécurité suscitent de nombreuses questions.

Le gouvernement a décidé de jouer sur les mots en employant le terme «commercialisation» au lieu de «privatisation», mais il s'agit bel et bien de privatisation.

J'ai récemment assisté à des consultations régionales sur les systèmes automatisés de navigation aérienne qui sont proposés. Les consultations menées par Transports Canada ont certes été utiles-je pense qu'ils ont fait une bonne présentation-, mais je dois avouer qu'après avoir écouté les arguments et les représentants de l'industrie, il est clair que cette politique aura deux résultats: premièrement, le système de navigation aérienne sera privatisé; deuxièmement, les coûts vont augmenter aussi bien pour les consommateurs que pour les propriétaires des compagnies de transport.

Rien n'indique que les coûts vont baisser ou même rester les mêmes pour les consommateurs et les transporteurs.

La politique de transport du ministre laisse de nombreuses questions sans réponse. J'en pose une ce soir, mais il en reste beaucoup d'autres. Je crains que cela ne se fasse pas de façon fondamentale avec des consultations à grande échelle. Le simple fait de privatiser pour mettre à pied des fonctionnaires fédéraux n'est pas la réponse au rêve national d'un réseau transcanadien de transport.

M. Harbance Singh Dhaliwal (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je suis sûr que vous conviendrez qu'un système de transport efficace, fiable, sécuritaire et viable est absolument essentiel pour assurer la croissance et la prospérité du Canada dans l'avenir.

Le Canada doit avoir un système de transport national qui met l'accent sur la sécurité et la fiabilité, qui est efficace, qui permet aux entreprises de transport terrestre, maritime et aérien de prospérer. Il est temps de donner un peu de répit aux pauvres contribuables canadiens. Il est temps que les usagers du système de transport paient leur juste part afin que le gouvernement puisse mieux répartir nos maigres ressources financières.

Dans le budget, on demande à Transports Canada d'étudier la possibilité de commercialiser certaines de ses principales activités. Cela se fera en consultation avec les intéressés, dans le but d'améliorer l'efficacité et d'assurer la viabilité à long terme.

La commercialisation veut dire que ce sont les usagers qui décident des services qu'ils veulent obtenir et de la manière de contrôler les coûts. La commercialisation suppose que, quelle que soit l'option choisie, la discipline de marché assurera des services plus efficaces, une plus grande souplesse et une moins grande dépendance à l'égard de l'argent des contribuables.

Le but de la commercialisation, c'est d'offrir aux usagers des services plus efficaces et de meilleure qualité à meilleur prix pour les contribuables. Par exemple, le ministre des Transports a annoncé récemment une nouvelle politique nationale à l'égard des aéroports. Conformément à cette politique, l'administration des aéroports les plus importants et les plus achalandés du Canada sera transférée à des autorités aéroportuaires canadiennes formées d'entreprises de la communauté. Ces autorités seront en mesure d'exploiter au maximum le potentiel commercial de leur aéroport, d'explorer de nouvelles façons de trouver du financement, d'atteindre un meilleur rendement à meilleur coût et d'adapter leurs services à la demande locale.

La priorité de Transports Canada n'en demeurera pas moins d'assurer et, si possible, d'améliorer la sécurité de tous les Canadiens.

Transports Canada n'a pas besoin de posséder et d'exploiter un service pour s'assurer qu'il est de bonne qualité. Le rôle du ministère peut être défini en fonction de la politique et de la réglementation.

Tout porte à croire qu'une commercialisation soigneusement planifiée entraînera des économies appréciables pour les contribuables et un meilleur service à la clientèle.

Comme l'a dit le ministre des Transports en réponse à la première question du député concernant la commercialisation, le gouvernement fédéral va continuer de s'occuper du contrôle, de la réglementation et de la politique.

Le président suppléant (M. Kilger): La motion d'ajournement étant adoptée d'office conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 33.)