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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 146 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 mai 2019

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour et bienvenue à la 146e séance du Comité permanent de la condition féminine. Aujourd'hui, la réunion se tient au public.
    Nous poursuivrons aujourd'hui notre étude sur la situation des femmes au ministère de la Défense nationale. Pour ce faire, je suis ravie d'accueillir, à titre personnel, M. Alan Okros; ainsi que Kristine St-Pierre, directrice du WPS Group.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Okros.
    Vous avez sept minutes pour présenter votre déclaration liminaire.
    Madame la présidente et mesdames et messieurs,

[Français]

mes commentaires seront en anglais.

[Traduction]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole sur le sujet important de l'emploi des femmes au sein des Forces armées canadiennes. À titre d'information, mon expérience relativement aux changements touchant l'emploi des femmes aux FAC a commencé en 1978. Depuis, j'effectue des recherches, je contribue à l'élaboration de politiques, je surveille l'évolution de la situation et je donne des enseignements sur le genre dans l'armée au Collège des Forces armées canadiennes.
    À mon avis, l'étude actuelle est guidée par les objectifs de la Commission royale d'enquête originale pour assurer la pleine participation des femmes dans tous les aspects de la société canadienne. Dans ce cas-ci, c'est pour établir les conditions qui permettent aux femmes d'apporter une contribution optimale à la défense et la sécurité des Canadiens.
    Je vais d'abord annoncer les changements apportés au fil du temps aux FAC afin de situer le contexte actuel. Devant les six recommandations destinées aux FAC dans le rapport de la Commission royale d'enquête de 1970, les années 1970 et 1980 ont été une période de refus et de résistance par de nombreux militaires, mais pas tous. Un certain nombre d'hommes ne pouvaient pas imaginer que des femmes puissent être en mesure de s'acquitter de rôles opérationnels de base. Le discours généralisé accentuait les différences entre les sexes. Tous les hommes pouvaient sauter d'un seul bond par-dessus un grand immeuble; aucune femme ne pouvait grimper en haut d'un escalier.
    Bien que cet avis ne soit plus très répandu, l'accent mis sur la suprématie masculine continue de subsister dans certaines parties des FAC. Au cours des années 1990 et au début des années 2000, on a assisté à un changement vers la tolérance réticente et l'acceptation éventuelle, mais les femmes étaient constamment mises à procès. On pouvait fermer les yeux sur le mauvais rendement d'un homme ou l'excuser, tandis que celui d'une femme pouvait mener à un congédiement. Nous savions qu'elle ne pouvait pas être à la hauteur.
    Dans la foulée des opérations intensives menées en Afghanistan, dans la Corne de l'Afrique et ailleurs, l'évolution depuis 2005 a été considérée par de nombreuses personnes comme l'acceptation complète. Les femmes sont allées là-bas, ont fait le travail et ont gagné le t-shirt et les médailles. Toutefois, ce fait s'est accompagné d'un nouveau discours qui remplaçait la construction des différences entre les sexes par la croyance selon laquelle les FAC ne sont pas sexistes. Une phrase courante qu'on entend est: « je ne vois pas de sexe, je n'entends pas d'accents, je ne vois pas de couleur. Je ne vois que des soldats, et les règles du jeu sont égales pour tous. » Les FAC ne sont pas non sexistes, et les règles du jeu ne sont pas égales.
    Les femmes ont démontré très adroitement qu'elles peuvent assumer des rôles militaires de manières qui les amènent à gagner le respect de leurs supérieurs, pairs et subalternes masculins, mais la plupart le font en adoptant des comportements fortement masculins et, pour certaines, des conceptions du monde, des attitudes et des valeurs masculines. Ce n'est pas surprenant, puisque l'armée participe à des processus très intentionnels pour convertir les civils en soldats, marins, aviateurs, chefs et commandants. La difficulté, c'est que ce qui est produit est fortement masculinisé. Les FAC commencent tout juste à se demander à quel coût.
    De quelles façons interdit-on aux femmes, aux hommes et à d'autres d'apporter une contribution optimale lorsqu'on les amène à penser et à agir d'une façon particulière?
    Je vais maintenant présenter deux premiers commentaires concernant l'opération Honour et le harcèlement des femmes. D'abord, je ne peux pas voir d'autres organisations au Canada ou d'armée à l'échelle internationale qui en fait davantage que les FAC. Le problème, c'est que cela n'est toujours pas suffisant. Ensuite, c'est compliqué. Un certain nombre de raisons expliquent pourquoi les femmes, certains hommes, les personnes LGB et les personnes non binaires sont victimes de comportements non désirés et non professionnels. Les efforts dont vous ont fait part les chefs des FAC sont toutes des mesures nécessaires, mais les FAC doivent encore vraiment s'attaquer à deux facteurs principaux.
    Premièrement, l'armée est une profession où l'on porte beaucoup de jugements. Les personnes se jugent constamment l'une l'autre et pour de bonnes raisons. Elles veulent savoir que ceux qui les entourent les protégeront en cas de coup dur, mais cela devient problématique quand on invente des excuses pour des hommes se mettent dans le pétrin, mais, comme vous l'avez entendu, on ne le fait pas pour les femmes ou d'autres personnes non conformes.
    Deuxièmement, dans le cadre de ce processus où l'on juge constamment les autres, l'armée a créé de très claires hiérarchies sociales qui indiquent qui est le plus important et qui l'est le moins. Les FAC ne sont pas les seuls dans ce cas. Le choix des places dans les salles des comités répond au même objectif. Le principal problème, c'est que cet ordre social est établi et surveillé par l'utilisation du pouvoir social. Les recherches ont clairement démontré que de nombreux cas de harcèlement, mais pas tous, sont une question de pouvoir. Le fait d'étiqueter des gestes comme une inconduite sexuelle est trompeur.

  (0850)  

    Si je vous frappe avec une pelle, vous n'appelleriez pas ça du jardinage.
    La difficulté pour les militaires des FAC consiste à trouver le juste équilibre où tout le monde garde confiance dans la capacité de ses pairs — tout le monde doit se montrer à la hauteur — et où ceux à qui l'on donne du pouvoir — certains ont tout de même besoin de pouvoir — savent comment l'utiliser de façon appropriée, tout en éliminant le risque que des évaluations qui portent des jugements et un pouvoir construit soient utilisés pour marginaliser les femmes ou d'autres personnes qui ne cadrent pas avec la norme hypermasculine.
    Un certain nombre de chercheurs ont donné à penser que la solution consiste à modifier cette norme et à permettre d'autres moyens d'être considéré comme un militaire efficace. Cela supposerait notamment de faire passer l'accent actuel mis sur la conformité normative à l'exercice d'un leadership inclusif.
    Enfin, je vais revenir aux commentaires du général Lawson, lorsque Mme Deschamps a surpris des officiers supérieurs avec ses conclusions. Il a affirmé que les FAC avaient pris des mesures et que la situation s'était améliorée depuis les articles parus dans Maclean's en 1994. Il avait raison, mais il est passé à côté d'un point essentiel. Les attentes des femmes quant à ce qui était acceptable et inacceptable avaient changé de manière radicale. Nous l'avons vu de façon plus généralisée avec le mouvement #MoiAussi. Les attentes sociales continueront d'évoluer et pourraient déboucher sur une autre rupture brutale, où les pratiques tolérées deviennent soudainement inacceptables.
    Cela ne se limite pas juste aux femmes. Une autre expression courante parmi les jeunes Canadiens ces jours-ci, c'est « vérifie ton privilège ». Une vieille expression en vogue chez les officiers militaires, c'est « le grade s'accompagne de certains privilèges ». C'est un choc culturel.
    Je conclurais que les FAC continueront de trouver des moyens de créer les caractéristiques individuelles et les caractéristiques de groupe nécessaires pour les opérations, tout en répondant à l'évolution continue quant à la façon dont les gens s'attendent à être traités et à pouvoir contribuer à la réussite de la mission.
    J'ai une courte liste de recommandations que je déposerai à l'intention du Comité.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à Kristine St-Pierre. Vous avez sept minutes.
    Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs.
    Merci, monsieur Okros.
    Merci de m'avoir invitée dans le cadre de votre étude sur la situation des femmes au ministère de la Défense nationale.
    Je suis ici au nom de mon organisation, mais aussi en tant que membre du comité directeur du Réseau Les femmes, la paix et la sécurité — Canada.
    Il y a quelques semaines, j'ai regardé un documentaire sur la chaîne TVO qui a été diffusé pour la première fois en septembre 2018 et portait sur une partie peu connue de notre histoire canadienne, une campagne menée contre la communauté canadienne LGBTQ+ dans une tentative pour retirer d'une charge publique des membres de cette communauté. Des hommes et des femmes que l'on croyait être des homosexuels travaillant dans la fonction publique canadienne, y compris dans les Forces canadiennes et à la GRC, ont été mis sous surveillance et interrogés. On a envahi au plus haut point leur vie privée, leur carrière a été ruinée, et leur vie, détruite.
    Outre l'injustice incroyable qui a été commise à l'endroit de Canadiens au Canada, il y avait une autre chose que j'ai trouvée très puissante dans ce documentaire. Toutes les personnes touchées racontaient la période qu'ils avaient passée au sein des Forces armées canadiennes ou de la GRC avec grande fierté, disant: « J'étais un excellent soldat » ou « j'étais un excellent agent de police ». Ils s'étaient tous engagés volontairement dans ce type de carrière, souhaitant changer les choses et servir leur pays. Ils étaient tous au courant des sacrifices que cela exigerait, et ils étaient prêts physiquement et mentalement. Ce à quoi ils n'étaient pas prêts et à quoi ils ne s'étaient pas engagés, c'était la culture omniprésente de discrimination et de harcèlement à laquelle il faisaient face, y compris l'intimidation et la violence, ce qui les a finalement obligés à s'en aller.
    Même si les lois ont changé et que des progrès importants ont été réalisés depuis ce moment, comme M. Okros l'a dit, soyons très clairs: le but n'est pas encore atteint. Une grande partie de nos invités de la semaine dernière ont démontré cette réalité très clairement, y compris Sandra Perron, Laura Nash et Julie Lalonde. Nous obligeons les mêmes gens que nous disons vouloir attirer, du moins sur papier, à partir.
    J'aimerais offrir aujourd'hui quelques mesures concrètes qui permettront de régler le problème, à mon avis.
    D'abord, je crois que nous devons repenser le système d'éducation et de formation dans son ensemble. L'un des objectifs stratégiques des Forces armées canadiennes en matière de diversité consiste à « inculquer une culture de la diversité », ce qui exige de « développer une culture organisationnelle militaire plus inclusive et respectueuse démontrant ainsi à la société canadienne que les Forces armées canadiennes adhèrent aux valeurs de la diversité ». Le changement de culture ne va pas se produire avec une formation en ligne de une heure sur l'ACS+ ou une formation de une heure sur le harcèlement sexuel. Le changement de culture va se produire quand on s'assurera que les principes d'égalité, de diversité et les droits de la personne sont au centre même de l'éducation qu'un soldat reçoit. Cela doit être intégré dans tout ce qu'il fait et renforcé à chaque échelon, en plus d'être complété par des politiques strictes de tolérance zéro pour de tels comportements et un processus de plaintes qui font l'objet d'enquêtes appropriées.
    Ensuite, je crois que nous devons tenir une conversation honnête sur le rôle de l'armée au 21e siècle, à commencer par les FAC. Comme on l'a mentionné, des progrès importants ont été réalisés au sein du MDN et des FAC au chapitre de la situation des femmes; toutefois, nous savons que les femmes et les hommes vivent leur carrière militaire de façon très différente, comme nous l'avons entendu au cours des dernières semaines. Partant, il existe un besoin très réel de tenir une conversation honnête et franche au sujet de ce à quoi ressemble la vie dans l'armée selon ces points de vue différents. Nous devons entendre ces voix, puis analyser les conclusions et être prêts à y répondre de manière utile. Il s'agit de s'engager à examiner les structures mêmes dans lesquelles nous plaçons les femmes et d'autres groupes diversifiés. Il s'agit de changer la façon dont on a toujours fait les choses.
    Cette conversation exige un leadership efficace, ce qui est mon troisième point. Un leadership efficace est celui qui stimule le changement de l'intérieur tout en habilitant les autres à croire en ce changement.

  (0855)  

    À mon avis, c'est là où nous avons échoué. Le changement transformationnel vers l'égalité entre les sexes et l'inclusivité oblige tout le monde dans l'organisation à croire en ce changement, depuis les hauts responsables jusqu'aux cadets en passant par les étudiants du CMR. C'est loin d'être facile, mais dans les institutions hiérarchisées, des déclarations audacieuses suivies de mesures audacieuses devraient beaucoup contribuer à améliorer les choses. En outre, il ne peut y avoir une seule personne: plutôt, de nombreuses personnes dans l'ensemble de l'organisation doivent devenir des champions, se lever et remettre en question la façon habituelle de faire les choses et être habilitées à le faire.
    Pour conclure, je crois fermement qu'il existe une énorme occasion pour les Forces canadiennes de changer sa culture et d'être un lieu vraiment inclusif pour tous.
    C'est excellent, merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer notre première période de questions.
    Je vais céder la parole à Bob Bratina, pour sept minutes.

  (0900)  

    Merci à vous deux de vos exposés très intéressants.
    Monsieur Okros, tout d'abord, j'aimerais connaître votre opinion sur le fait que les années 1970 étaient une période de refus et de résistance. Dans quelle mesure enseigne-t-on l'histoire aux militaires pour ce qui est des femmes au combat? Les femmes au combat ont une très longue histoire. Il semble que les femmes soient, de façon générale, de meilleures tireuses d'élite que les hommes. J'ai presque horreur d'aborder les sombres questions de la guerre et des comportements, mais les femmes ont très bien fonctionné dans les pires scénarios.
    Cette réalité est-elle étudiée dans l'ensemble du programme?
    Ni l'histoire ni les changements, et particulièrement les changements législatifs, ne sont étudiés de façon systématique. Les personnes peuvent en prendre connaissance dans le cadre d'études ou de cours, ou souvent, par les commentaires des chefs.
    J'aimerais revenir sur un autre point soulevé par Mme St-Pierre, par rapport à la façon dont on ne peut juste pas offrir une séance de une heure sur un sujet. Cela doit être intégré.
    Les Soviétiques possédaient trois régiments composés entièrement de femmes: les mécaniciennes, les pilotes et les viseuses de lance-bombes. Il y avait quelques exceptions. Vous aviez besoin d'un homme grand comme mitrailleur de queue d'un certain type d'aéronef, et il fallait donc quelques hommes de grande taille, mais pour le reste, ce n'était pratiquement que des femmes, et elles produisaient des résultats remarquables. Je trouve cela difficile à croire. Puis, il existe de nombreux exemples dans la guerre contre Israël, et nous pourrions continuer encore et encore.
    Y aurait-il des avantages à étoffer le programme de cours pour ceux qui s'enrôlent?
    Cette question comporte deux aspects. Le premier est l'histoire. Il y a des endroits où c'est visible. L'armée canadienne a attiré les talents d'un vaste échantillon représentatif des Canadiens — des membres des Premières Nations, des Autochtones, des Canadiens d'origine japonaise durant la Seconde Guerre mondiale. Les exemples sont nombreux. Certains sont au courant des moyens différents grâce auxquels l'armée a attiré la diversité des membres de la société canadienne au fil du temps, mais je ne suis pas certain que ces exemples soient aussi clairs pour ceux qui rejoignent les Forces.
    L'autre aspect, c'est que je ne crois pas que la grande majorité de ceux qui s'enrôlent connaissent l'histoire. Vous avez entendu une partie de l'histoire, dont un pan est récent. Encore une fois, une partie de tout cela tient aux changements survenus après le rapport de 1970 de la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme, les changements survenus après l'entrée en vigueur de la Charte. Des changements importants ont été apportés au sein de l'armée. De nouvelles personnes se joignent à l'armée et découvrent un nouveau statu quo, mais les enjeux, les difficultés et les exigences liés aux changements ne sont pas nécessairement abordés. En ce moment, la préoccupation, c'est que des nouvelles personnes croient que l'armée est non discriminatoire, parce que c'est ce qu'on raconte. Je crois que c'est l'obstacle réel à l'heure actuelle.
    Madame St-Pierre, pourriez-vous me donner plus de renseignements au sujet de votre organisation, Femmes, paix et sécurité?
    Oui. Le réseau Les Femmes, la paix et la sécurité est un réseau réunissant environ 70 particuliers et organisations qui a été établi en 2012. C'est un réseau de bénévoles; or, nous venons juste de nous constituer en organisation non gouvernementale, mais nous demeurons tous des bénévoles.
    Nous conseillons et surveillons le gouvernement relativement à la résolution 1325 du Plan d'action national sur les femmes, la paix et la sécurité. Nous avons été très actifs au fil des ans pour conseiller le gouvernement quant à l'élaboration de son Plan d'action national, en travaillant avec Affaires mondiales, le MDN, la GRC et Condition féminine et en passant en revue le premier et le deuxième plans d'action nationaux.
    Vous vous intéressez particulièrement au maintien de la paix.
    Oui, effectivement.
    Nous n'allons pas appuyer sur un bouton pour que tout aille bien demain, mais je crois que la notion des femmes dans le maintien de la paix pourrait se révéler une excellente occasion pour les femmes, étant donné la nature de cette activité contrairement à une guerre totale. Que diriez-vous au sujet du maintien de la paix?
    Je crois que nous sommes toujours au même... Pour ce qui est du maintien de la paix, c'est toujours dominé à 95 % par les hommes.
    Oui.
    On a déployé des efforts énormes pour augmenter le nombre de femmes dans l'armée et la police, mais il reste que, pour augmenter le nombre de femmes dans les activités de maintien de la paix, nous devons commencer chez nous. Une grande partie du Plan d'action national au Canada...
    Pour ce qui est du premier plan d'action national, nous nous sommes vraiment tournés vers l'extérieur: voici ce que nous allons faire dans le monde lorsque nous serons déployés dans d'autres pays. Une grande partie de nos activités de défense des intérêts, pour le deuxième plan d'action national, consistait à dire que nous ne pouvons pas juste nous tourner vers l'extérieur; nous devons jeter un coup d'œil à l'intérieur. Pour ce qui est de la GRC et du MDN, nous devons examiner nos processus et établir des liens par rapport à l'opération Honour. Nous devons regarder ce que nous faisons à l'interne pour nous assurer d'avoir un plus grand nombre de femmes dans l'armée, puis affecter plus de femmes à des activités de maintien de la paix.

  (0905)  

    Merci.
    Monsieur Okros, pouvez-vous mettre en corrélation le nombre de femmes dans la police et celles dans l'armée? Beaucoup de femmes ont travaillé dans les services de police pendant beaucoup plus longtemps que dans l'armée. Y a-t-il des données croisées qui sont utiles dans ce cas-ci?
    Je ferais valoir deux points de vue. Le premier, c'est que les difficultés qu'ont éprouvées les femmes dans les services de police sont les mêmes que celles auxquelles les femmes font face au sein des Forces armées canadiennes. J'ai travaillé avec la GRC lorsqu'elle a passé en revue son plan d'action sur l'égalité entre les sexes et le respect. Les questions internes que Kristine a soulevées sont courantes.
    Je crois que les deux organisations essaient toujours de comprendre les avantages que les femmes et diverses autres personnes apportent à leurs tâches centrales. Encore une fois, elles exercent toutes deux des pressions énormes sur les femmes pour qu'elles se conforment à des normes et à des comportements principalement masculins, et cela comprend la réflexion à l'égard de la prise de décisions, pas juste des gestes. Je crois que les deux organisations essaient toujours de découvrir comment exploiter et optimiser ce que les femmes pourraient apporter. Je ne crois pas qu'elles l'aient encore reconnu.
    Merci.
    Nous allons maintenant céder la parole à Ron Liepert, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur, j'ai grandi sur une ferme en Saskatchewan. Durant mon enfance, mon père s'assoyait à la table du petit déjeuner et disait: « Helen, j'ai besoin d'un café ». Donc, Helen lui apportait une tasse de café. Ce petit jeu s'est poursuivi longtemps. Évidemment, cette culture a changé de façon assez notable. Je crois que si je disais à mon épouse de m'apporter un café aujourd'hui, si elle décidait de le faire, elle me le verserait probablement sur la tête.
    Comment ce changement de culture a-t-il reflété le changement qui s'est produit dans la société, ou bien a-t-il pris 20 ans de retard et commence-t-il lentement à s'implanter? Si j'utilise mon analogie pour établir une comparaison du point de vue culturel, où en était l'armée durant mon enfance et où se situe-t-elle aujourd'hui?
    Je dirais que je ne crois pas que la société canadienne soit monolithique. Certaines personnes sont plus progressistes que d'autres, et la même chose s'applique, à mon avis, au sein de l'armée. Je crois que certaines personnes, des hommes et des femmes, sont très progressistes et aussi très ouvertes. Elles recherchent de nouvelles façons de collaborer. D'autres affichent une résistance.
    Pour revenir à votre analogie, la plupart des recherches dans la société canadienne indiquent toujours que les femmes font beaucoup plus de travail non rémunéré au sein de la famille que les hommes. C'est une des difficultés qui persistent. Quand des organisations posent en postulat que les hommes n'ont pas besoin de passer du temps à s'occuper de la famille, cela exerce des pressions sur elles. Par exemple, au sein des Forces armées canadiennes, les femmes et les hommes peuvent prendre des congés parentaux à l'arrivée d'un nouvel enfant. On s'attend à ce que les femmes le fassent. Pour certains hommes, cela peut être considéré comme le test de loyauté organisationnel: où est votre loyauté? Les données continuent de montrer que les nouveaux pères ne prennent pas autant de congés qu'ils le devraient. Certains d'entre eux assisteront à des événements sportifs extérieurs aux Pays-Bas après trois jours.
    Des modèles sont établis dans la société, et ils envoient, à mon avis, des signaux auxquels les hommes et les femmes sont confrontés: qu'est-ce qui est attendu de nous? Quel est le rôle à jouer? À quel point dois-je m'investir dans ma carrière? Que dois-je investir dans ma famille? Je crois que cela demeure une difficulté constante.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, madame St-Pierre?

  (0910)  

    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Dans le cadre du travail que j'ai réalisé auprès de la GRC précisément, c'est exactement ce que j'ai entendu: « Je n'ai pas pris de congé de paternité parce que je ne croyais pas que je pouvais le faire ».
    Je remplace un membre régulier du Comité et je n'étais pas là quand la motion a été approuvée. Toutefois, cette motion semble insister beaucoup plus sur le harcèlement sexuel que sur la culture des militaires ou vraiment sur celle des Forces.
    Dans quelle mesure la culture qui a été ancrée dans les diverses organisations est-elle potentiellement responsable du harcèlement sexuel, et si nous changeons la culture, cela va-t-il aider à changer les questions de harcèlement sexuel?
    Je le crois vraiment.
    Je crois que la culture permet... Je veux dire, je crois que c'est entièrement lié et que des dynamiques de pouvoir sont en jeu. Il y a une culture d'impunité. Tout cela combiné au besoin de politiques strictes est essentiel, et je crois que le leadership est essentiel. Quand je parle de leadership, c'est vraiment à tous les échelons. On dit la même chose, qu'il faut suivre la ligne de parti, mais ce devrait être une tolérance zéro pour ces choses.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous, et oui, je dirais que des aspects de la culture devraient être changés.
    Comme j'ai essayé de le mentionner dans mes commentaires, le problème, c'est que l'armée se donne vraiment beaucoup de mal à créer le soldat. Quiconque rejoint l'armée apprend trois éléments clés. Le premier, c'est la conformité normative; en cas de doute, faites ce que tout le monde fait. Le deuxième, c'est l'obéissance à l'autorité; faites ce que le patron vous dit de faire. Le troisième, c'est la loyauté envers le groupe — intégrez-vous aux groupes. Ces principes exercent des pressions énormes sur les gens pour qu'ils trouvent leur place et se conforment.
    De nombreuses personnes — cela fait partie de mon travail auprès des groupes qui passent par le Collège des Forces canadiennes — qui s'intègrent dans... Lorsqu'elles se sont enrôlées, elles n'ont pas eu besoin de changer beaucoup qui elles étaient. Cela les représentait. Il y en a d'autres pour qui ce n'est pas le cas.
    L'armée continue d'essayer de trouver des façons de les aider à être comme tout le monde, plutôt que de changer la culture et de dire: « Vous pouvez continuer d'être qui vous êtes. Vous pouvez être un militaire d'une façon différente que ce que nous faisons actuellement ».
    C'est, pour moi, le problème central, et je ne crois pas que quiconque l'ait encore réglé.
    Aimeriez-vous poser une question, madame la présidente?
    Avec l'approbation du Comité, puis-je poser une question?
    Nous parlons beaucoup de l'opération Honour. Nous avons vu les nouvelles données, et les résultats n'ont pas été fantastiques.
    Quelles recommandations proposeriez-vous pour changer l'opération Honour de manière à ce qu'elle puisse faire ce qu'elle est censée faire pour éliminer le harcèlement sexuel et physique dont sont victimes les femmes?
    Je vais commencer par quelques recommandations.
    Un des aspects essentiels dans l'opération Honour est le devoir de signaler. Le hic avec ce devoir, c'est qu'il rend les incidents immédiatement très officiels. Certaines personnes ayant fait les frais d'un comportement stupide ne souhaitent pas qu'il soit signalé officiellement.
    Ma recommandation, c'est qu'on remplace ce devoir par un « devoir de réagir ». Si on demandait ceci à une personne: « Vous étiez là, vous avez été témoin, vous avez vu quelque chose qui n'était pas professionnel. Comment avez-vous réagi? » Ce pourrait être simplement en apportant du soutien ou en parlant avec la personne. Ce serait une des solutions que je proposerais.
    Je suggérerais aussi que l'armée examine très attentivement les événements sociaux qui mettent l'accent sur la consommation d'alcool. Nous savons que c'est une partie du problème et qu'elle y contribue.
    Je dirais aussi qu'il serait avantageux de fournir aux victimes de l'incident, particulièrement les victimes de traumatismes militaires sexuels, du counseling professionnel.
    Excellent, merci beaucoup.
    Madame Mathyssen, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci beaucoup d'être ici. Nous sommes vraiment reconnaissants des conseils et des points de vue que vous apportez.
    Monsieur Okros, j'aimerais vous remercier tout particulièrement de votre observation concernant la hiérarchie au sein d'un comité et la façon dont le pouvoir est utilisé.
    Je suis sûre que la plupart d'entre nous sont déjà allés dans un mess, et mon Dieu, vous devez connaître le protocole, sinon vous allez avoir des problèmes. Vous pourriez ne pas manger si vous ne comprenez pas la hiérarchie là-bas.
    J'ai été très intéressée par le commentaire concernant l'éducation. Vous avez mentionné le CMR, et cela m'a rappelé une situation avec des cadets dans ma ville d'origine. Pour une raison ou pour une autre, pour une question d'amitié, parce qu'une personne avait accès à un véhicule, un prédateur d'enfants a été accepté comme instructeur. Le réserviste qui a tenté d'attirer l'attention sur ce fait s'est rendu jusqu'à la chaîne de commandement. Il a été renvoyé, et le prédateur est resté. Il me semble que cette éducation dont vous avez parlé doit effectivement commencer très tôt. Je me demande si vous pourriez vous prononcer sur ce sujet.

  (0915)  

    Oui, je suis d'accord avec vous. Je crois que les gens savent que l'organisation des cadets est une structure distincte, tout comme les Rangers. Les Forces armées canadiennes et l'organisation des cadets s'assurent certainement que, lorsque des gens s'enrôlent, ils sont mis au courant des politiques, des normes et des attentes. Je crois qu'on a déployé beaucoup d'efforts pour clarifier les normes dès le début. À mon avis, le problème dans ce cas-ci, c'est qu'il demeure une confusion, à certaines occasions, quant à ce qu'on doit faire lorsque des gens font face à des circonstances que je vais continuer d'appeler des « comportements non professionnels ».
    Puis, nous entrons dans les difficultés liées au moment où les gens vont dénoncer une situation, et c'est à ce moment-là qu'il se peut que la situation dérape. Vous avez entendu quelques exemples de cas où on ne s'est pas occupé de la situation. Dans de nombreux cas, on s'en occupe de façon très efficace, mais je crois que l'organisation est toujours aux prises avec... Je ne crois pas que ce soit l'instruction initiale dès le départ. Je dirais plutôt que le fait d'équiper efficacement les chefs pour qu'ils abordent ces enjeux est un aspect sur lequel on pourrait insister davantage.
    Merci.
    Madame St-Pierre, aviez-vous quelque chose à ajouter?
    Je veux mentionner que je travaille sur un projet de police en Ukraine. Un aspect de son plan d'action national sur la résolution 1325 consiste à revoir son système d'éducation. Au sein du ministère de l'Intérieur, on a lancé cette révision du système d'éducation pour tous les organismes d'application de la loi, afin qu'ils examinent leurs programmes d'un point de vue sexospécifique. Je me suis dit que c'était assez ambitieux, mais aussi extrêmement important de veiller, comme je l'ai dit dans mes commentaires, à ce que cela soit vraiment intégré dans le cadre du programme entier dès le début.
    C'est intéressant. Pour ce qui est de l'analyse comparative entre les sexes, les gouvernements sont toujours aux prises avec cette question.
    Certainement.
    C'est délicat, et très exigeant.
    Vous avez parlé du plan d'action national, et je me demande comment le gouvernement a réagi. Êtes-vous satisfaite de la réponse? Que pourrait-il arriver d'autre, le cas échéant?
    Nous sommes à la deuxième année. Le deuxième rapport sera déposé, si mon compte est bon. Le deuxième plan d'action national s'est révélé un réel pas en avant. Chaque ministère détient des plans de mise en œuvre précis, soit pour chaque partenaire de la mise en œuvre. En tant que réseau, nous avons travaillé précisément avec le MDN, la GRC et Affaires mondiales pour faire avancer ces plans et offrir des conseils. Je peux assurément vous envoyer certains des rapports que nous avons réalisés, mais nous avons tenté de promouvoir un certain nombre de questions, y compris la championne du programme Femmes, paix et sécurité, qui est en branle, selon ce qu'on nous a dit, ou encore en cours d'élaboration; et le financement destiné aux organisations pour femmes. Nous avons tenté de faire progresser un certain nombre de questions particulières à cet égard.

  (0920)  

    Merci.
    Je trouve intéressant que vous mentionniez le financement destiné aux organisations pour femmes. Nous avons vu une diminution de ce financement — une diminution très importante. Il n'y a plus de financement de base. Tout est fragmenté. Cet aspect sera très intéressant dans votre rapport. Je crois que l'interruption de ce financement de base a créé un grand vide pour ce qui est de la capacité des organisations pour femmes de tenir compte de certains enjeux très importants.
    J'avais aussi une question concernant le rapport de 2016 du vérificateur général. On recommandait d'augmenter la représentation des femmes dans l'armée canadienne. Malgré toutes les bonnes intentions, cela ne s'est pas fait. À votre avis, quels sont les principaux obstacles au recrutement et au maintien en poste des femmes, parce qu'elles pourraient se présenter. Nous en avons vu quelques-unes au Comité qui se sont enrôlées avec des attitudes et des intentions incroyablement positives, et elles ont senti qu'elles n'étaient pas en mesure de continuer.
    Comme M. Okros l'a dit, j'ai rencontré un très grand nombre de femmes qui se sont enrôlées, mais elles sont parties après quelques années parce qu'elles ne sont pas en mesure d'être elles-mêmes, en plus de toutes les autres choses qu'elles pourraient avoir vécues. Assurément, leur voix n'est pas reconnue.
    Un autre point que j'aimerais faire valoir, c'est le fait de nous assurer que nous recueillons des données, car tout au long des témoignages, on a observé une absence de données et d'analyses permettant de comprendre ce qui se passe vraiment.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Sonia Sidhu, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci de nous fournir ces points de vue et merci d'être venus.
    Voici un fait. La sous-représentation des femmes — je veux me faire l'écho de ma collègue — atteint presque 50 à 60 %.
    Comment pouvons-nous augmenter la représentation des femmes? Que peut faire le gouvernement fédéral? J'aimerais vous poser la question à tous les deux.
    Je crois que le changement de l'organisation et de la culture, comme nous l'avons mentionné, contribuerait vraiment à rendre l'organisation plus accessible. Si les femmes ou les jeunes femmes regardent cette organisation et les nouvelles dans les médias, ce n'est pas toujours très positif.
    Le deuxième élément, c'est qu'il y a un très grand nombre de femmes qui veulent se joindre à l'armée. Une fois qu'elles se sont enrôlées, si elles rencontrent tous les obstacles et tout ce que nous avons entendu dans le cadre du Comité et d'autres témoignages, elles ne voudront certainement pas rester.
    La rétention est une partie énorme, mais je crois que c'est très rattaché au fait de s'assurer qu'elles peuvent contribuer à l'organisation de la façon dont elles le peuvent et le veulent. Il s'agit pour elles de se sentir habilitées. Certainement, vous devez suivre l'instruction. Il y a une norme, et je ne la remets pas en question, mais comme M. Okros l'a dit, il s'agit aussi de les laisser être elles-mêmes.
    Je veux dire deux ou trois choses, dont une concerne particulièrement l'ordre de gouvernement. On dépend vraiment de l'image de l'armée et de la façon dont les Forces armées canadiennes sont censées contribuer à la défense et à la sécurité. À un certain moment, il était très clair que l'armée participait à des missions de combat majeures. À ce moment-là, on voyait des types d'annonces qui attiraient très clairement certains Canadiens qui souhaitaient s'enrôler, et en dissuadaient d'autres, particulièrement les femmes et des membres de plusieurs communautés minoritaires.
    Comme Mme St-Pierre l'a dit, si les Forces armées canadiennes apportent des contributions positives au monde, en essayant de définir les conditions de la paix et de la sécurité, il est probable que beaucoup plus de femmes souhaiteront se joindre aux FAC. Voilà une chose, du point de vue gouvernemental.
    Ensuite, toujours du point de vue du gouvernement, la Loi sur l'équité en matière d'emploi conseille et encourage l'utilisation de mesures spéciales, encore une fois, comme nous le savons, afin de tenir compte de la marginalisation historique des quatre groupes désignés. Tant les Forces armées canadiennes que la GRC ont été très réticentes à utiliser des mesures spéciales. Les deux organisations ont tendance à s'accrocher au principe du mérite, et à partir de cela, ma recommandation interne, c'est que l'armée continue de classer les gens selon un ordre donné. Si 1 000 personnes veulent se joindre au Collège militaire royal, on les classe en ordre de 1 à 1 000. En fait, ce n'est pas vrai; les mesures ne sont pas aussi précises. On ferait mieux de les classer selon des groupes de personnes remarquables, acceptables et faibles, et si vous faisiez de vastes regroupements de personnes aux compétences égales, le principe consisterait à sélectionner les premiers parmi ceux qui ont des compétences égales. Vous sélectionneriez donc des personnes en fonction de l'identité démographique.
    Cela s'applique non seulement au moment de l'enrôlement; mais aussi au moment des promotions. Cela s'applique à la nomination de gens à des postes de commandement. En ce moment, il y a une foule de domaines dans lesquels les femmes, en particulier, peuvent souvent se retrouver les prochaines sur la liste. Elles n'ont juste pas été assez concurrentielles pour figurer en haut de la liste, et je crois que le principe consistant à sélectionner les premiers parmi ceux qui ont des compétences égales aiderait à remettre en question cette hypothèse selon laquelle c'est non discriminatoire et que les règles du jeu sont égales. Des mesures peuvent être prises.

  (0925)  

    Merci.
    Madame St-Pierre, vous avez parlé des systèmes d'éducation et d'instruction, disant que c'était la principale stratégie. Croyez-vous qu'on devrait commencer dès l'école ou bien dans le programme des cadets?
    Comme M. Okros l'a dit, le système des cadets est distinct. Pour ce qui est du programme scolaire, l'éducation dans le système public, si vous regardez les plans d'action nationaux qui se penchent sur les femmes, la paix et la sécurité dans le monde, un certain nombre d'entre eux conseillent en fait de changer le programme d'éducation pour faire en sorte que nous abordions ces questions, que cela fasse partie du programme d'études. C'est donc une question beaucoup plus large.
    Pour ce qui est de l'instruction des soldats, que ce soit au CMR ou à d'autres échelons, je crois assurément que beaucoup de choses pourraient être révisées et changées, et il s'agit vraiment de l'approche que vous adoptez, du contenu, de la langue, des exemples et des scénarios. C'est tout un éventail de choses qui pourraient être examinées pour que l'on puisse assurer la promotion de l'égalité, des droits de la personne, des droits des femmes, de la diversité et de l'inclusivité.
    Merci.
    Quelque 27 % des membres des FAC sont victimes d'agression sexuelle. C'est énorme. Comment le personnel de soutien aux victimes est-il formé?
    Monsieur Okros, qu'en pensez-vous?
    Comme vous l'avez entendu, le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle mise sur des employés chargés de fournir des services d'intervention initiale et de soutien aux personnes. D'après ce que je comprends, les travaux sont en cours pour passer de ce qui est, en fait, un service fondé sur un numéro 1-800, à une présence dans les grandes bases afin de pouvoir fournir un soutien en personne, ce que, j'en suis sûr, la plupart des gens reconnaîtraient comme étant important.
    Par conséquent, je dirais que, actuellement, il y a un certain niveau de soutien. Je crois qu'on peut en faire plus, y compris en comprenant la situation dans laquelle les gens se retrouvent.
    Encore une fois, nous savons de façon générale — particulièrement lorsque les femmes sont victimes d'agression sexuelle — que les victimes hésitent à en parler. Il y a, de façon générale, un certain nombre de raisons sociales qui expliquent ce fait. Nous savons qu'il y a des préoccupations liées à la façon dont les pairs, les membres de la famille et d'autres personnes réagiront. Par conséquent, je crois qu'il faut examiner le système de façon plus générale, et c'est la raison pour laquelle j'ai dit entre autres qu'il fallait fournir du counseling psychologique aux personnes lorsqu'elles se retrouvent pour la première fois dans une telle situation, pas au moment des enquêtes officielles et des audiences, mais au début, tout simplement pour les aider à composer avec tout cela. C'est un traumatisme, et je ne suis pas sûr que nous fournissons actuellement le bon soutien aux premières étapes de ce type de traumatisme.

  (0930)  

    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer le deuxième tour. Avec votre consentement, je vais poser quelques questions.
    Au CMR, monsieur Okros, quel est le protocole — le processus — en cas de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle?
    J'enseigne au Collège des Forces canadiennes, pas au Collège militaire royal.
    Je sais que des protocoles ont bel et bien été élaborés et mis en place précisément pour les cadets, à la lumière de certains problèmes. Vous avez entendu Julie Lalonde parler de son expérience là-bas. Je n'ai pas de renseignements détaillés précis sur la façon dont les responsables s'occupent de tout cela.
    Est-ce quelque chose que vous connaissez? C'est encore dans la chaîne de commandement dont on entend parler... Lorsque les gens sont réellement... Et qu'ils... C'est le même type de processus.
    Oui. Cela reste au sein de la chaîne de commandement.
    D'accord.
    Madame St-Pierre, je vais passer à vous. Nous avons abordé — et M. Bratina en a parlé — le fait que certaines forces armées comptent des troupes féminines et ce genre de choses. Y a-t-il, parmi nos alliés, des pays qu'on peut examiner où il y a eu une augmentation du nombre de femmes? Avez-vous vu quoi que ce soit du genre, des pratiques exemplaires que nous pourrions adopter? Croyez-vous que bon nombre de ces autres pays composent avec les mêmes problèmes que nous?
    Je dirais que, oui, ils sont confrontés aux mêmes défis. Je ne connais pas la situation des autres pays. Je sais que l'Australie a fait beaucoup de choses pour mettre en place des politiques. C'est un pays qui essaie vraiment de changer la culture au sein des forces armées. C'est quelque chose que vous pourriez examiner, mais ce n'est pas quelque chose que je connais bien.
    M. Okros peut peut-être en parler.
    J'ai travaillé avec les Australiens et je suis d'accord. L'Australie et les pays scandinaves sont assurément les pays vers lesquels on peut se tourner, mais je ne limiterais pas notre examen à ces pays-là. Il y a plusieurs pays au sein de l'Union africaine qui ont vraiment fait d'importants progrès pour changer les politiques et augmenter le nombre de femmes. Il y a certains pays où les forces armées sont maintenant composées à 30 % de femmes.
    Nous avons tendance à toujours regarder les mêmes pays habituels et similaires. Je crois que nous pouvons tirer des leçons en regardant ailleurs aussi.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Madame St-Pierre, je reviens à vous. Vous avez dit avoir écouté The Fruit Machine il y a deux ou trois semaines. Nous avons eu la grande chance d'accueillir Michelle Douglas et Martine Roy durant la première réunion du Comité.
    Vous avez regardé le documentaire, qui est très, très puissant, et vous avez peut-être fait certaines recherches par la suite ou vous vous êtes peut-être penchée davantage sur tout cela après. Cependant, que voyons-nous lorsque nous examinons la communauté LGBTQ+? Constate-t-on des changements de ce côté-là ou est-ce encore le même refrain: « Vous faites partie de ce groupe, alors vous valez toujours moins qu'un cisgenre »?
    Je ne suis pas la mieux placée pour répondre. Je n'ai pas travaillé auprès de la communauté LGBTQ+. Si vous entendez ce genre de choses de la part de femmes au Comité et que vous obtenez toutes ces données sur ce que vivent les femmes, alors je ferai valoir que, assurément, il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas au sujet de la communauté LGBTQ+ et de ce que vivent les membres de cette communauté au sein des Forces armées canadiennes.
    Je crois qu'il y a probablement beaucoup de choses à découvrir quant aux situations avec lesquelles ces personnes doivent encore composer.
    Monsieur Okros, s'il vous plaît.
    Je peux formuler deux commentaires rapidement. L'un des principaux facteurs — pour revenir à certains de mes commentaires — au sein de l'armée, c'est la question de base: « Pouvez-vous faire le travail? » et tant que les gens sont en mesure de prouver qu'ils peuvent faire le travail, ils — la plupart d'entre eux pas tous — sont acceptés au travail, au sein de l'équipe. Assurément, il y a certaines personnes qui peuvent ensuite subir des pressions en raison de leur mode de vie personnel: « Laisse ça à l'extérieur du milieu de travail, laisse ça à l'extérieur des endroits où on socialise, n'amène pas ton partenaire au mess ». Bien sûr, la socialisation est très importante au sein de l'armée, alors il ne fait aucun doute qu'il y a encore des personnes à qui on fait comprendre qu'elles ne sont pas tout à fait acceptées.
    Vous avez accueilli une personne de la communauté trans. J'ai effectué certaines recherches dans ce domaine. C'est un dossier beaucoup plus complexe. Je crois — comme c'est aussi le cas de beaucoup de personnes au sein de la société canadienne — que les Canadiens et les membres des Forces armées canadiennes apprennent de plus en plus de choses au sujet de l'identité transgenre et de ce que cela signifie. Certains sont très mal à l'aise avec cela, particulièrement — et cela découle de travaux que j'ai faits aussi avec des collègues de l'étranger — avec ceux qui font la transition d'homme à femme, ce qui a tendance à être courant dans l'armée. Je dirais que c'est en partie en raison du fait que cette personne correspondait au prototype idéal — elle était masculine, c'était un homme — et elle choisit consciemment de laisser tomber tout cela, d'abandonner cet idéal. Ça devient problématique.

  (0935)  

    Excellent. Merci beaucoup.
    Je vais maintenant passer à Mme Nassif. Vous avez cinq minutes.
    Merci.

[Français]

    Ma première question s'adresse à Mme St-Pierre.
    Comprenez-vous le français? Avez-vous besoin d'interprétation?
    Non, ça va.
    Vous avez parlé des femmes dans les opérations de maintien de la paix, un domaine dont vous dites qu'il est dominé à 95 % par des hommes. Parliez-vous de la situation actuelle?
    Oui. Il faudrait vérifier les données les plus récentes, mais c'est la situation en général.
    Cela dépend de la nature des opérations en question. Pour les activités policières, il peut y avoir 15 ou 16 % de femmes, un pourcentage qui a peut-être augmenté un peu. Pour les activités militaires, par contre, il n'y a toujours pas plus de trois ou quatre pour cent de femmes, ce qui est encore très peu.
    Pourriez-vous nous parler de ce que vous allez faire concernant le plan d'action national en matière de recrutement des femmes? Quelle est la stratégie?
    Le plan d'action national est un plan du gouvernement du Canada, qui vise notamment la Défense nationale et la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC.
    Pour ce qui est des affaires étrangères, il y a une volonté internationale d'augmenter le nombre de femmes qui se joignent aux Nations unies en tant que Casques bleus. À ce sujet, vous avez peut-être entendu parler de l'Initiative Elsie du gouvernement du Canada, laquelle vise une collaboration internationale permettant le déploiement d'un plus grand nombre de femmes lors d'opérations de maintien de la paix.
    Comme membre de la société civile, notre organisme offre ses conseils chaque fois qu'il le peut ou qu'il participe à différentes discussions.
    Selon vous, à quel point cela permettra-t-il de modifier le pourcentage de femmes par rapport aux hommes dans ces opérations? Quel pourcentage de femmes est visé?
    L'Organisation des Nations unies, ou ONU, avait établi différents objectifs. Pour l'ensemble de ses effectifs, cette organisation vise 50 % de femmes. Pour ce qui est des opérations de maintien de la paix, divers objectifs ont été proposés entre 2010 et 2020, mais j'ignore s'il existe un objectif précis à l'heure actuelle.
    À titre d'exemple, l'objectif était de 20 % pour les activités policières, mais on n'en est pas encore là.
    Parlez-vous de la participation du Canada?
    Non.
    Ma question concernait le Canada.
    D'accord.
    Quel est l'objectif?
    Me demandez-vous quel est l'objectif du gouvernement du Canada?
    Oui.
    Je ne crois pas qu'il y ait d'objectif concret par rapport à la participation des femmes canadiennes aux opérations de maintien de la paix, si ce n'est d'y en voir davantage.
    La GRC vous dirait que la situation change. Elle envoie effectivement de plus en plus de femmes participer à ces opérations. Il existe peut-être un objectif concret, mais je ne le connais pas.
    Monsieur Okros, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Traduction]

    Je crois qu'il est important de reconnaître que les militaires déployés ne sont pas choisis aléatoirement. Si on décide de déployer un groupe tactique — on parle de forces de combat — , eh bien les femmes représentent environ 2 ou 3 % de ces militaires. Par conséquent, il faut se pencher sur... C'est une discussion en cours à l'échelle de l'OTAN: la composition des professions et des ensembles de compétences que les CAF doivent déployer. Si l'armée continue de se concentrer sur les forces de combat et les autres professions, les chiffres n'augmenteront pas de façon importante.

[Français]

    Selon les résultats d'un sondage mené en 2018 par Statistique Canada au sujet des inconduites sexuelles au sein des Forces armées canadiennes, ou FAC, le nombre de signalements est passé de 28 % en 2016 à 30 % en 2018. Il n'y a pas beaucoup de signalements d'inconduite sexuelle au sein des FAC. Qu'est-ce qui ne fonctionne pas? Selon vous, pourquoi le nombre de signalements n'augmente-t-il pas davantage? Les femmes ont-elles peur de signaler ces inconduites?

  (0940)  

    M. Okros pourrait vous répondre mieux que moi, mais je vous dirais qu'il y a encore beaucoup de stigmatisation dans ce domaine. Les personnes qui ont réussi à déposer des plaintes ont dû faire face à des réactions négatives dans les médias, ce qui peut avoir un effet dissuasif.
    Cela empêche les gens de le signaler. N'est-ce pas?
    Oui, et c'est encore plus difficile dans une organisation comme les forces armées.
    Quel est le processus, monsieur Okros?
    Désolée. Je vois qu'il ne me reste plus de temps.

[Traduction]

    Je suis désolée, il n'y a pas assez de temps pour une autre question.
    Merci.
    Nous allons mettre fin à la séance maintenant.
    Au nom du Comité, je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir comparu aujourd'hui. Nous allons suspendre la séance jusqu'à 9 h 45, afin qu'on puisse passer au prochain groupe de témoins.
    Le Comité suspend ses travaux.

  (0940)  


  (0945)  

    Reprenons la 146e réunion du Comité permanent de la condition féminine.
    Durant la deuxième heure, je suis heureuse de souhaiter la bienvenue à la brigadière générale Virginia Tattersall, commandante adjointe, Génération du personnel militaire, à la brigadière générale Lise Bourgon, championne de la Défense, Femmes, paix et sécurité, à Lisa Vandehei, directrice pour l'égalité des sexes, diversité et inclusion, et à Sean Cantelon, chef de la direction, Service de bien-être et moral des Forces canadiennes.
    Je vais maintenant céder la parole à la brigadière générale Virginia Tattersal.
    Vous avez sept minutes pour présenter votre déclaration préliminaire.
    Bonjour, madame la présidente et bonjour aux membres du Comité. Merci de m'avoir invitée à venir vous parler aujourd'hui du traitement des femmes au sein du ministère de la Défense nationale. C'est un sujet qui m'interpelle autant personnellement que professionnellement, puisque j'ai passé la plus grande partie de ma vie au sein des Forces armées canadiennes.
    Je suis la brigadière générale Virginia Tattersall, et, jusqu'à la semaine dernière, j'étais commandante du Groupe de la Génération du personnel militaire. Ce groupe, que nous militaires appelons aussi GENPERSMIL, est notamment responsable du recrutement, de l'instruction et de l'entraînement des nouveaux membres des Forces armées canadiennes. Je possède donc une certaine expertise dans le domaine et je serai heureuse de répondre à vos questions précises sur le recrutement des femmes.
    La diversité, et cela inclut la représentation des femmes, est d'une importance primordiale pour les Forces armées canadiennes. Grâce à la diversité, l'organisation veut non seulement être à l'image de la société, ce qui est important, bien sûr, mais elle veut également puiser dans tout le bassin de talents du Canada et dans la richesse de pensées, de capacités et de compétences qui en découle.
    Les femmes servent dans les Forces armées canadiennes depuis plus d'un siècle. La tâche n'a pas toujours été facile, mais nous continuons de nous améliorer en tant qu'institution. Lorsque nous cernons des problèmes, nous tentons de nous y attaquer et de trouver des solutions, même si on ne le fait peut-être pas toujours aussi rapidement qu'on aimerait.
    Aujourd'hui, les femmes et les hommes peuvent servir dans le groupe professionnel de leur choix, pour autant qu'ils remplissent les critères d'enrôlement. En outre, je suis fière de dire que nous avons été parmi les premières forces armées au monde à permettre aux femmes de servir dans tous les groupes professionnels.
    Pourquoi est-ce que les femmes s'enrôlent dans les forces armées? Pour les mêmes raisons que les hommes. La chance de servir leur pays. La chance d'avoir une profession respectée, stimulante et enrichissante qui offre un bon salaire et des avantages sociaux. Et il y a aussi l'occasion de nouer des amitiés qui dureront vraiment toute une vie.
    Comme vous le savez, un de nos objectifs institutionnels est que les femmes forment au moins 25 % des Forces armées canadiennes d'ici 2026. Il s'agit d'un objectif ambitieux, mais nous faisons des progrès. En date de janvier 2019, nous comptions 1 316 femmes de plus dans les Forces armées canadiennes qu'en 2015.
    La stratégie de recrutement des FAC en ce qui concerne les femmes vise à favoriser la sensibilisation aux possibilités de carrière. Pour ce faire, les FAC ont recours à la mobilisation et à l'information, à la publicité, aux offres d'emploi, aux partenariats médiatiques, aux médias sociaux et aux efforts individuels des recruteurs. La Défense nationale a réalisé un certain nombre d'initiatives au cours des dernières années dans le but d'accroître la représentation des femmes au sein des forces armées, notamment grâce au programme Les femmes font la force, initiative permettant aux femmes de vivre l'expérience associée au fait de servir dans l'armée, et la campagne de réenrôlement des femmes libérées précédemment.
    Nos collèges militaires jouent un rôle en matière de recrutement en accordant la priorité aux candidates qui répondent aux critères d'enrôlement. Ainsi, les femmes représentent 19,7 % de la population des élèves-officiers au cours de la dernière année scolaire. Surtout, grâce à l'opération Honour, nous continuons de renforcer le respect et l'inclusivité et de lutter contre la culture négative qui a assujetti des hommes et des femmes à des comportements sexuels dommageables et inappropriés.
    À l'heure actuelle, les femmes sont bien représentées dans huit principaux groupes professionnels et nous persévérons pour accroître la représentation des femmes dans l'ensemble des Forces armées canadiennes.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, les Forces armées canadiennes sont une organisation qui reconnaît l'excellence et accueille ceux et celles qui veulent atteindre l'excellence comme objectif personnel. En outre, nous continuons de recruter des femmes et de les encourager à s'enrôler. Je ne suis qu'un exemple de ce qu'une femme peut accomplir en s'enrôlant dans les Forces armées canadiennes. Je peux vous dire que ma carrière m'a offert de nombreuses possibilités et expériences. Si on me permettait de tout recommencer au début, je n'hésiterais pas une seconde.
    Je vous remercie de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

  (0950)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à la brigadière générale Lise Bourgon.
    Allez-y, vous avez sept minutes.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, merci de me donner aujourd'hui l'occasion de comparaître en compagnie de mes collègues. Je vous remercie aussi de l'intérêt que vous portez à ce thème important.

[Français]

    Plus de 30 ans ont passé depuis que j'ai amorcé ma carrière en tant qu'élève-officier au Collège militaire royal de Saint-Jean. Depuis lors, à titre d'officier et de pilote d'hélicoptère dans l'Aviation royale canadienne, j'ai été témoin et j'ai fait l'expérience de bon nombre des difficultés particulières auxquelles les femmes doivent faire face dans les Forces armées canadiennes, dont cette étude se fait l'écho.

[Traduction]

    Je crois néanmoins à l'importance des FAC et de leur mission ainsi qu'en leur capacité d'apprendre et de s'adapter en tant qu'institution. Ma carrière m'a procuré des possibilités et des expériences que je n'aurais pu trouver nulle part ailleurs, et j'adore encore me rendre au travail jour après jour. Je me suis enrôlée dans l'armée pour obtenir un diplôme, et j'avais ensuite l'intention de démissionner et de regagner le monde civil. J'ai eu tellement de plaisir que j'ai tout simplement oublié de démissionner, et je suis encore ici 32 ans plus tard.
    Dans mon rôle actuel de championne du programme Femmes, paix et sécurité de la Défense, mon objectif primordial consiste à nous rendre plus fortes et plus efficaces dans le contexte des opérations militaires. Outre que ce sont des lieux de travail pour des milliers de Canadiennes et de Canadiens, le MDN et les FAC constituent des outils importants dont le Canada se sert pour apporter la sécurité, la stabilité et des secours humanitaires dans les régions fragiles et déchirées par la guerre partout dans le monde.

[Français]

    Afin d'accomplir ce travail efficacement dans un contexte opérationnel moderne, les Forces armées canadiennes doivent pouvoir comprendre comment les conflits et d'autres crises touchent différemment les femmes, les hommes, les filles et les garçons, et aussi comment des défis liés au genre peuvent être aggravés par des problèmes liés à la sécurité et aux crises humanitaires, voire y contribuer.
    Dans son plan d'action national de 2017 sur les femmes, la paix et la sécurité, le gouvernement reconnaît ce besoin et réclame une approche coordonnée de tous les secteurs de la société canadienne, tant militaires que civils, pour améliorer la sécurité, promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes, et édifier une paix durable.

[Traduction]

    Au moment où nous apportons la dernière main au rapport d'étape pour l'exercice 2018-2019, je suis heureuse des efforts que nous avons déployés et du succès remporté à l'égard des quatre piliers suivants: gouvernance et responsabilisation, formation et instruction, recrutement et maintien en poste et intégration dans les opérations.
    Puisque je suis sous-chef d'état-major — Opérations au Commandement des opérations interarmées du Canada et championne du programme Femmes, paix et sécurité, l'intégration dans les opérations est l'enjeu auquel je m'intéresse le plus.
    Bien sûr, ce volet du programme Femmes, paix et sécurité qui met l'accent sur les opérations est inextricablement lié aux enjeux plus axés sur l'institution qui sont étudiés par le Comité, étant donné que, pour réussir dans nos opérations, nous devons être appuyés par une vigoureuse institution et par le bon groupe de personnes.

[Français]

    Afin de progresser vers cet objectif, les Forces armées canadiennes doivent pouvoir dialoguer avec tous les segments d'une population donnée et les comprendre, y compris ceux qui risquent d'avoir du mal à traiter avec une force militaire principalement masculine.

[Traduction]

    Voilà pourquoi il est si important d'attirer, d'entraîner et de maintenir en poste un nombre suffisant de femmes dans les FAC, dans des rôles clés et à tous les grades. Non seulement cet effort accroît l'égalité hommes-femmes au sein de nos propres effectifs, ce qui est un but valable et important en soi, mais en plus il contribue à faire des FAC une entité militaire mieux préparée, plus souple et plus efficace.

[Français]

    J'ai bien hâte à la discussion de ce matin. C'est avec plaisir que je répondrai à toutes les questions concernant l'importance des questions de genre et des perspectives en ce domaine qui touchent les opérations des Forces armées canadiennes.

[Traduction]

    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à Sean Cantelon, pour sept minutes.

  (0955)  

    Les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes travaillent au nom du chef d'état-major de la Défense et sous l'autorité du ministère de la Défense nationale. Nous fournissons des programmes et des services axés sur le bien-être physique, mental et social et le bien-être financier des membres et des vétérans des Forces armées canadiennes et de leur famille.

[Français]

    En tant que chef de la direction des Services de bien-être et moral des Forces armées canadiennes, mon travail consiste à faire en sorte que nos services et nos programmes favorisent la préparation et l'efficacité opérationnelles des FAC et contribuent à la résilience et à l'autonomie de ses membres et de leurs familles. Nous le faisons d'une manière qui associe des fonds publics et des fonds non publics, selon un modèle d'entreprise sociale.
    Nos activités couvrent un large éventail de services, notamment des services de vente au détail, des services financiers et des services d'assurance, ainsi que des services d'entraînement physique et de sports, de loisirs et de soutien à la famille. Nous gérons également la cause caritative officielle des FAC. Appuyons nos troupes.
    Les Services de bien-être et moral des FAC appuient de plusieurs façons la prévention et l'intervention quant à la violence basée sur le genre dans la communauté des FAC.

[Traduction]

    Tout d'abord, à titre de partenaire financé dans le cadre de la stratégie fédérale visant à prévenir la violence sexiste, les Services aux familles des militaires sont en train de mettre sur pied, dans les bases et les escadres de tout le Canada, des équipes qui renseigneront et soutiendront les personnes touchées par la violence. Ces équipes se composent de spécialistes militaires et civils qui procurent toute une gamme de services de soutien et de programmes dans un contexte multidisciplinaire, holistique et axé sur la collaboration. Sont ainsi fournis des moyens de prévenir la violence, des outils d'éducation et de sensibilisation ainsi que des mesures de soutien aux victimes et aux agresseurs.
    Ces équipes comprennent des membres du centre local de ressources pour les familles des militaires, comme les travailleurs sociaux, des agents de liaison avec les familles, du personnel des services de santé des FAC, comme des travailleurs sociaux, du personnel infirmier spécialiste de la santé mentale, des membres de la Police militaire, qui peuvent offrir des services aux victimes, des représentants de l'aumônerie et du Programme de soutien du personnel faisant la promotion de la santé. Les équipes travaillent en collaboration avec des professionnels de la santé et des travailleurs des services sociaux du milieu civil pour mettre en commun leur expertise et accroître la sensibilisation à l'égard des programmes et services communautaires.
    L'importance de cette initiative est aussi reflétée dans l'initiative 22 de la Politique de défense du Canada, Protection, Sécurité, Engagement. Dans le cadre de cette initiative, les Services aux familles des militaires ont dispensé une formation sur un large éventail de sujets liés à la violence sexospécifique aux travailleurs sociaux qui travaillent directement avec les familles et les militaires. Durant l'exercice 2018-2019, les Services aux familles des militaires ont fourni 380 000 $ aux communautés des Forces armées canadiennes pour leur permettre de réaliser des activités, des ateliers et des cours de formation ciblant la violence sexospécifique. Les Services aux familles des militaires gèrent une ligne d'information téléphonique accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 qui donne accès à des conseillers bilingues pouvant aider et soutenir les militaires et leur famille qui ont aussi été touchés par la violence. Ce service offre l'option d'avoir des séances de counseling virtuelles à court terme.
    Au sein de la Division du Programme de soutien au personnel des Services de bien-être et moral des Forces canadiennes, notre équipe responsable de promouvoir la santé offre le programme Respect dans les FAC. Ce programme est fourni directement aux militaires dans les bases et les escadres de tout le Canada. Le programme a pour but de favoriser le respect grâce à la prise de conscience et à la compréhension. Il vise à amener les membres des FAC à prendre position contre l'inconduite sexuelle et à les sensibiliser en ce qui concerne le soutien aux victimes. Ce programme est réalisé en partenariat avec l'équipe d'intervention stratégique des Forces armées canadiennes sur l'inconduite sexuelle.
    L'autre option de soutien pour les militaires et leur famille est le Fonds Appuyons nos troupes, qui est offert grâce à nos fonds non publics. Cette initiative permet d'offrir une aide financière, sous la forme de subventions d'urgence. Les personnes qui ont été touchées par la violence peuvent avoir accès à un financement pour des choses comme un logement d'urgence, des moyens de transport et des produits de première nécessité, comme de la nourriture et de l'essence.
    Les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes continueront de travailler avec tous les intervenants de la Défense et de la collectivité pour faire en sorte que les membres des FAC et leur famille qui sont touchés par la violence soient soutenus. Notre organisation continuera de mettre l'accent sur l'éducation et la prévention, tout en veillant à ce qu'une gamme de services d'intervention existe de manière à ce que les personnes touchées sachent de quelle façon et à quel endroit elles peuvent avoir accès à l'aide dont elles ont besoin.
    Voilà qui termine ma déclaration.
    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant passer à Lisa Vandehei.
    Madame Vandehei, vous avez sept minutes.
    Mesdames et messieurs, madame la présidente, merci beaucoup de m'accueillir ici aujourd'hui. Je suis heureuse de participer à la réunion ce matin.
    Je m'appelle Lisa Vandehei. Mon rôle au sein de l'équipe de la Défense consiste à fournir une expertise pour aider à la mise en œuvre de l'analyse comparative entre les sexes plus, l'ACS+. Nous tous aujourd'hui travaillons en collaboration afin d'accroître la diversité et l'inclusivité au sein du milieu de la Défense.
    La politique de défense du Canada contient l'engagement d'intégrer l'ACS+ dans toutes les activités liées à la défense dans l'ensemble des Forces armées canadiennes et au ministère de la Défense nationale. L'équipe de la Défense est déterminée à institutionnaliser l'utilisation de l'ACS+ afin que nous puissions prendre des décisions efficaces, équitables et fondées sur des données probantes. Nous nous efforçons d'élaborer des pratiques et des systèmes durables à l'appui de notre leadership afin que nous soyons tous responsables de réaliser des ACS+ et d'élaborer des politiques et des programmes étayés par les constatations de telles analyses.
    Nous sommes chargés d'appliquer l'ACS+ à toutes nos activités, qu'il s'agisse de nos achats, des édifices que nous entretenons ou construisons, de la science ou de la technologie que nous utilisons ou encore de nos politiques, nos pratiques, nos programmes et nos projets. L'ACS+ est un processus analytique puissant permettant d'améliorer le fonctionnement pour chacun des membres de l'équipe de la Défense et l'impact qu'a l'équipe sur les autres aussi. Cela comprend l'acceptation des changements culturels et la création d'un milieu de travail accueillant et inclusif, conçu pour les employés que nous souhaitons attirer et maintenir en poste.

  (1000)  

    Nous avons déjà entendu dire que la politique PSE reconnaît que la diversité et l'inclusion sont des capacités indispensables qui donnent à l'équipe de la Défense la capacité nécessaire pour innover, travailler localement et à l'échelle internationale et, au bout du compte, s'acquitter avec succès de son mandat, mais de quelle façon exactement peut-on y arriver?
    Nous savons que la diversité est une source d'innovation et de créativité grâce à une gamme élargie de modes de résolution de problèmes, de points de vue et d'idées. Le fait que les gens puissent faire part de leur expérience vécue lorsqu'on tente de régler des problèmes complexes est important. La diversité des points de vue éclairés permet d'explorer les objections comme les solutions de rechange de façon plus efficace, de trouver des solutions plus rapidement et d'adopter ces dernières avec une confiance accrue. Une équipe de la Défense qui reflète la population canadienne en ce qui concerne le genre, la race, l'ethnicité, l'orientation sexuelle et tous les autres aspects de notre vécu est mieux outillée pour comprendre ces besoins changeants en matière de sécurité et pour créer des solutions gagnantes.
    Je souhaite aujourd'hui communiquer trois messages clés aux membres du Comité et à la présidente.
    Nous avons réalisé des progrès, et l'ACS+ a des incidences positives. Jusqu'ici, nous avons effectué des ACS+ ou des sondages connexes relativement à des projets, des programmes et des politiques dont la valeur s'élève à environ 40 milliards de dollars, ce qui a mené à des changements concrets. En outre, d'autres changements suivront.
    À titre d'exemple, l'ACS+ est un critère de financement évalué à 20 % du programme MINDS, qui offre des possibilités de collaboration entre l'équipe de la Défense, le milieu universitaire et le milieu des experts en défense et en sécurité. Pour ce qui est d'un autre exemple, les Forces armées canadiennes offrent une indemnité de 160 $ par année pour l'achat de soutiens-gorge, par souci de confort et de sécurité au travail. Cette indemnité double lors des déploiements à l'étranger. Pour la première fois, cette politique englobe les soutiens-gorge de maternité et d'allaitement et les bandes thoraciques.
    Notre deuxième message, c'est que l'institutionnalisation de l'ACS+ est un processus complexe. Il ne s'agit pas uniquement de mieux sensibiliser les gens aux inégalités et aux questions de diversité et d'inclusion. Pour bâtir une capacité, il faut des moyens et une planification à long terme. Il faut des compétences, des connaissances et un leadership et il faut avoir accès à des recherches et à des données désagrégées. Nous connaissons un excellent départ. Nous disposons du soutien de la direction et avons reçu des ressources pour faire le travail.
    Pour terminer, changer la culture d'une organisation est parmi les plus grands défis de la direction. La culture d'une organisation est constituée d'un ensemble entremêlé de buts, de rôles, de responsabilités, de valeurs, de pratiques en matière de communication, d'attitudes et d'hypothèses. L'ACS+ est un outil qui nous permet de relever le défi et de changer notre façon de travailler, et c'est ce que nous faisons actuellement.
    Merci.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par une série de questions de sept minutes. La première intervenante est Emmanuella Lambropoulos.
    Bonjour. Je tiens à commencer par tous vous remercier d'être là ce matin pour répondre à nos questions.
    J'ai entendu parler de toutes les excellentes choses qui se produisent au sein du ministère, mais d'autres témoins ont discuté longuement de la façon dont la culture est la principale raison qui explique ce qui se produit au sein des forces armées lorsqu'il est question de la façon dont les femmes sont parfois traitées et victimes de harcèlement sexuel et tout le reste. Y a-t-il quoi que ce soit qui se passe sur le terrain pour changer la culture? Y a-t-il des programmes qui sont actuellement en vue et qui visent à nous aider à offrir aux femmes un meilleur contexte que le contexte actuel?
    Je pose cette question à n'importe lequel d'entre vous.

  (1005)  

    Je vais peut-être commencer en expliquant deux choses dont je peux parler.
    Du point de vue du recrutement, une partie du processus préalable à l'enrôlement inclut en fait la sensibilisation des gens au serment relatif à nos valeurs, et nous avons bien évidemment un certain nombre d'idées sur la façon dont nous pourrions insister sur la mesure dans laquelle ces valeurs sont importantes. Lorsque les gens arrivent à notre école de leadership et de recrutement, à Saint-Jean, ils consacrent 60 périodes — ou 40 heures sur un programme de 10 semaines — à des séances d'information, des exposés et des engagements liés au commandement sur tous les sujets associés à l'opération Honour, l'éthique et les valeurs des Forces armées canadiennes, ce qui est un investissement assez important.
    En ce qui concerne la formation structurée, ça ne commence même pas à refléter l'engagement et le mentorat continu durant le temps que les recrues passent à l'école auprès du personnel qui, en prêchant par l'exemple, renforce la culture des Forces armées canadiennes; il faut reconnaître, cependant, que la période passée à l'école des recrues est une période d'assimilation au sein des Forces armées canadiennes. On fait passer les gens de civils à quasiment des membres formés des Forces armées canadiennes.
    J'aimerais ajouter quelque chose du point de vue des opérations parce que je vais axer, dans une certaine mesure, mes interventions aujourd'hui sur l'aspect opérationnel des choses.
    Nous avons les analyses comparatives entre les sexes plus, mais nous avons aussi un aspect lié à la planification de l'analyse comparative entre les sexes auquel participent nos soldats, nos aviateurs et nos marins avant d'être déployés afin qu'ils comprennent mieux l'application du point de vue du genre dans le cadre des opérations, sur le terrain; nous voulons qu'ils voient les différences, cet équilibre. C'est quelque chose qui se fait durant toute la carrière des militaires, maintenant. C'est quelque chose qu'on leur montre dès le début, l'aspect formation. C'est quelque chose qui se poursuit durant leur carrière, avant les déploiements. Nous changeons cette culture un jour à la fois, à chacune des étapes.
    J'ajouterais seulement que l'autre partie officielle de cette initiative, que nous avons établie en conjonction avec le reste, c'est le programme Respect dans les FAC. Contrairement à la formation relative au déploiement, ce programme est offert dans toutes les bases, à l'échelle du pays. Il porte précisément sur la culture des Forces armées canadiennes, mais il s'étend également à la culture communautaire. Nous allons également en faire la promotion par l'entremise des centres de ressources pour les familles et des ateliers communautaires. Nous touchons aux trois aspects que sont l'inscription initiale à titre de recrue, le soutien au déploiement et le programme Respect dans les FAC, lequel est axé sur le mode de vie quotidien à la base.
    J'ajouterais que les efforts déployés à l'égard de l'ACS+ à l'échelle de la communauté de la défense sont complémentaires à cette initiative. Tous les membres des FAC et de la fonction publique sont responsables. Par exemple, s'ils mettent en place un programme ou un projet ou même qu'ils obtiennent un contrat, ils sont responsables de réaliser une ASC+ à l'égard du travail qu'ils font. Ce n'est pas spontané au début; ce n'est pas facile.
    Vous demandez aux gens de comprendre l'expérience de vie d'autres personnes avec qui ils pourraient interagir dans le cadre de ce programme ou de ce projet. Notre équipe de la Défense comporte maintenant une équipe formée de 13 personnes qui aident les gens tout au long de ce processus. Lorsqu'on collabore avec des gens dans ce cadre, on peut constater le changement d'attitude. On peut même voir des gens s'enthousiasmer de pouvoir dire: « Oh, je n'avais jamais compris à quel point cela pouvait toucher quelqu'un de cette manière. Merci beaucoup. » C'est très satisfaisant de constater ces changements qui se déroulent parfois sous nos yeux.
    C'était ma prochaine question.
    Durant la période pendant laquelle vous avez réalisé l'ACS+, avez-vous remarqué ce changement à tous les égards? Voyez-vous du changement?
    Vous venez tout juste de répondre à la question.
    Je présume que d'autres aspects sont touchés également?
    Je répondrais en utilisant certains exemples concrets concernant notre école de recrutement.
    L'un des obstacles que doivent franchir les recrues comprend essentiellement un ensemble d'échelles horizontales qu'ils doivent traverser en croisant les mains dans les airs. Nous avons constaté que la hauteur causait beaucoup de blessures, particulièrement chez les femmes, qui risquaient des blessures pelviennes si elles tombaient. Normalement, les femmes ont tendance à être plus petites. Lorsqu'elles tombent, elles tombent de plus haut et se blessent; c'est pourquoi nous avons changé la hauteur de ces barres.
    De même, nous nous sommes penchés sur la formation que nous donnons en vue du stage final en leadership sur le terrain. Auparavant, les recrues marchaient 13 kilomètres avec un sac à dos. Nous avons maintenant changé cet exercice, car, encore une fois, nous avons constaté qu'il y avait beaucoup de blessures, particulièrement chez les femmes, ce qui, dans bien des cas, les forçait à prendre une pause pour guérir, avant de revenir à l'entraînement.
    Nous avons changé cette partie de l'entraînement. Maintenant, les recrues marchent sept kilomètres et prennent part à une activité de tir. Ce changement peut sembler petit, mais c'est un exemple concret de la façon dont nous modifions notre façon de penser en regardant les aspects de notre formation et en tenant compte du fait que le contexte n'est plus le même qu'il y a 50 ans.

  (1010)  

    Mon autre question concerne le recours à des conseillers en matière d'égalité entre les sexes pour aider à changer la situation également. Pouvez-vous expliquer brièvement leur rôle et en quoi cela a aidé?
    Il y a maintenant des conseillers en matière d'égalité entre les sexes dans toutes nos organisations majeures, soit la Force aérienne, la Marine et le personnel militaire. Au sein de l'institution, nous avons des conseillers en matière d'égalité entre les sexes qui rendent directement des comptes au commandant en ce qui a trait aux questions liées aux sexes, et cela va au-delà des hommes et des femmes; il est question de l'ACS+ et de tout ce qui concerne, entre autres, l'âge et la religion. Le rôle du conseiller en matière d'égalité entre les sexes est très diversifié.
    Nous avons également mis en place une structure de conseillers en matière d'égalité entre les sexes dans le cadre des opérations. Des conseillers en matière d'égalité entre les sexes sont affectés à l'opération Impact, au groupement tactique de la présence avancée renforcée, à l'opération Unifier, au Mali, et à la nouvelle mission en Irak de l'OTAN. Ils travaillent avec le commandant afin de s'assurer qu'on tient compte des questions liées au genre dans la réussite des opérations. Les conseillers sont déployés.
    Dans le cadre d'autres missions, il y a aussi un responsable de la coordination pour l'égalité des sexes. C'est comme un conseiller en matière d'égalité entre les sexes. Le titulaire du poste porte deux chapeaux. Ce n'est pas sa seule responsabilité, mais il doit s'assurer que le commandant tient compte de ces questions.
    Nous avons institutionnalisé le rôle du conseiller en matière d'égalité entre les sexes avec ceux du conseiller général et du responsable de la coordination pour l'égalité des sexes.
    Merci.
    Madame Harder, vous avez la parole pour sept minutes.
    Au cours des dernières années, on a publié divers articles et présenté un sondage, qui a été réalisé par Statistique Canada, au sujet des agressions sexuelles dans les forces armées. Bien sûr, plus récemment, le rapport du vérificateur général au sujet de l'opération Honour a été publié. Avant cela, en 2016, le vérificateur général a présenté un autre rapport sur la participation des femmes dans les Forces armées canadiennes.
    Madame Tattersal, durant votre déclaration liminaire, vous avez dit que les Forces armées canadiennes avaient pour objectif d'avoir un effectif composé à 25 % de femmes d'ici 2026, et vous avez dit qu'il s'agissait d'un objectif ambitieux.
    Vous dites que nous réalisons des progrès. En 2019, il y avait 1 316 femmes de plus dans les Forces armées canadiennes qu'en 2015. Dans son rapport de 2016, le vérificateur général a dit que le recrutement des femmes avait été minime, que nous n'avions pas nécessairement les programmes ni l'engagement attendus pour recruter des femmes.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la situation?
    Certainement. Nous sommes en 2019, et depuis que nous avons pris le commandement des opérations en 2017, nous avons consacré beaucoup d'efforts au recrutement de femmes. Comme je l'ai mentionné, nous avons mis à l'essai le programme Les femmes font la force, car nous savons que les femmes et la majorité des milléniaux — puisque nous recevons des commentaires comme: « Pourquoi le programme s'adresse-t-il juste aux femmes et pas aux hommes? » — veulent pouvoir vivre l'expérience des forces et avoir une idée de ce que c'est.
    Nous avons établi une équipe spéciale qui, avec l'aide du carrefour du BCP, s'est penchée essentiellement sur toutes nos pratiques de recrutement afin d'examiner le langage que nous utilisions dans nos publicités. Étaient-elles trop destinées aux hommes? Pourrions-nous changer la formulation?
    Nous avons fait beaucoup de travail dans la sphère des médias sociaux et au chapitre de nos publicités pour présenter la femme dans le contexte des Forces armées canadiennes, parfois à notre détriment, car l'une des choses que les femmes ne veulent pas, c'est être prises à part. En fait, cela se retourne contre nous lorsque, publicité après publicité, tout ce qu'elles voient c'est un groupe de femmes, car elles pensent qu'elles ne sont là que pour la forme et qu'elles ne font pas réellement partie des forces.
    Il est certain que nous réalisons des progrès, mais nous sommes aux prises avec les mêmes problèmes que lorsque vient le temps de recruter des membres de n'importe quel groupe désigné au Canada ou même des citoyens canadiens en général. C'est attribuable au fait que la majorité des Canadiens, même s'ils savent que nous avons une armée, ne savent pas réellement ce que font les militaires. Ils croient que leurs activités sont essentiellement axées sur le maintien de la paix et l'aide humanitaire, et ils ne sont certainement pas au courant des possibilités offertes.
    Si le grand public canadien n'est pas au courant, on peut certainement s'imaginer que les jeunes femmes ne sont elles non plus pas au courant des activités que nous menons. Nous sommes présents sur les médias sociaux et nous organisons des activités au cours desquelles une jeune femme militaire devient recrutrice d'un jour et répond aux questions. Nous présentons des vidéos qui montrent à quoi ressemble l'instruction pour les hommes et pour les femmes.
    Nous progressons lentement, car nous devons lutter contre ce manque de sensibilisation générale. Nous réalisons des progrès; le nombre de femmes dans les forces continue d'augmenter. Il y a un certain nombre d'autres initiatives que je pourrais décrire. La liste est longue et continue de s'allonger. Nous faisons tranquillement des progrès, mais la plus grande difficulté consiste à sensibiliser les Canadiens au fait que les Forces armées canadiennes représentent plus que le soldat d'infanterie que vous voyez dans le film Il faut sauver le soldat Ryan. Cela va des aumôniers aux logisticiens en passant par les électriciens, les pilotes d'aéronef et les médecins.

  (1015)  

    Je pense que vous soulevez un bon point. Cela m'amène à ma prochaine question.
    Le visage des forces armées est en train de changer. Leurs fonctions changent. Par conséquent, les femmes et les hommes peuvent maintenant occuper divers postes qui ne faisaient peut-être pas partie des forces dans les années 1970, 1980 ou 1990.
    Ainsi, il semble approprié qu'une femme puisse entrer dans l'armée et avoir une famille. Elle devrait raisonnablement pouvoir s'attendre à ce qu'il y ait des services de garde et à ce que des mesures d'adaptation soient offertes pour la vie de famille. Les Forces armées canadiennes prennent-elles des mesures d'adaptation pour s'assurer que les femmes peuvent élever des enfants et faire partie de l'armée?
    Je suis mariée et j'ai deux adorables enfants; je vais donc répondre à cette question de mon point de vue personnel. Les Services de bien-être et moral et le Centre de ressources pour les familles des militaires sont là pour offrir du soutien. La famille est la force derrière l'uniforme. Nous comprenons les besoins des femmes — et des hommes —, car de nos jours, les nouveaux militaires de la génération des milléniaux cherchent cette qualité de vie et veulent être présents pour leurs enfants. C'est un enjeu qui ne touche pas seulement les femmes. Les hommes sont aussi de plus en plus touchés, et ce changement sera permanent. L'accès à des services de garde, à un soutien... Je suis l'épouse d'un militaire; mon époux était un militaire. Tout au long de nos carrières, l'armée a fait un travail exceptionnel en conciliant nos besoins et les missions; lorsque j'étais en déploiement, mon époux restait avec les enfants, et lorsqu'il était en déploiement, je restais avec les enfants. Au bout du compte, l'armée aurait pu forcer l'un de nous à quitter son emploi, mais elle aurait perdu quelqu'un, et le maintien en poste est essentiel.
    C'est une petite armée, mais nous prenons soin de plus en plus de nos gens. Nous nous soucions de nos militaires. Le maintien en poste est essentiel, et il existe beaucoup d'initiatives visant à soutenir les femmes et les hommes.
    En outre, nous offrons les mêmes avantages que le gouvernement fédéral aux femmes qui choisissent d'avoir une famille et à leurs conjoints pour ce qui est des indemnités de maternité et des indemnités parentales. Nous offrons un salaire égal; il n'y a donc aucune différence de paie entre les hommes et les femmes, et le montant des prestations qu'ils touchent sont les mêmes. Ils profitent des mêmes possibilités. Nous ne jugeons pas les gens selon leur genre. À ma base d'attache — celle de Borden —, il y a un service de garde; nous travaillons très fort pour nous assurer de pouvoir soutenir la population à cette base. Nous collaborons avec les responsables de l'infrastructure et l'Agence de logement des Forces canadiennes pour offrir plus de logements. Manifestement, cela a des répercussions financières. Les fonds que nous sommes en mesure d'investir dans l'infrastructure sont limités.
    En ce qui a trait à la politique relative aux carrières, nous nous efforçons d'affecter les couples militaires au même endroit et de soutenir les familles.
    Excellent, merci beaucoup.
    Madame Mathyssen, vous avez sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup d'apporter ce point de vue.
    Je vais poser quelques questions, et sentez-vous libre de répondre ou d'ajouter quoi que ce soit aux réponses données. Je voudrais commencer par Mme Tattersal. Vous avez parlé de la force de la diversité et, lorsqu'on regarde toute collectivité, il est tout à fait vrai que la diversité des points de vue et des expériences de vie constitue notre force. Nous avons également entendu dire que des pressions étaient exercées pour que l'on se conforme à la norme masculine dans l'armée. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

  (1020)  

    Mon commentaire est formulé de mon point de vue, d'après ma propre expérience personnelle. Je dois poser la question: qu'est-ce que la norme masculine? En ce qui concerne les personnes qui m'ont entourée et pour qui j'ai travaillé, j'ai toujours admiré leurs forces et leur conduite et cherché à savoir ce que je pouvais apprendre d'elles qui m'aiderait à être une meilleure dirigeante. Quant à la question de savoir si nous pourrions considérer le fait que, si ces gens se trouvaient dans une salle et qu'ils avaient un argument à faire valoir, ils parleraient fort... En ai-je tiré un apprentissage? Oui, j'ai appris que, si je voulais qu'on m'entende, je devais parler fort. Cela ne signifie pas nécessairement qu'on me force à adopter une personnalité plus masculine. Selon moi, je fais ce que toute femme fait, peu importe sa profession. Nous cherchons des exemples de succès pour voir ce qui nous permettra de réussir.
    Dans le cadre de notre recrutement, et certainement dans le cadre de la formation que nous recevons à l'école des recrues, nous n'insistons sur aucune sorte de modèle, selon lequel on doit entrer dans telle case. Y a-t-il des aspects que nous pourrions examiner et modifier, du point de vue de l'ACS+ et de la façon dont nous évaluons nos modèles de leadership? Selon moi, c'est possible, mais je ne pense pas être plus masculine que n'importe laquelle d'entre vous du point de vue de mes caractéristiques et de mes forces.
    Je vous remercie.
    Je viens du milieu de l'enseignement, et je peux vous affirmer que, quand la première directrice adjointe de l'école secondaire a été nommée, cela a été dur pour elle. On l'a mise à l'épreuve. C'était — je ne sais pas — à la fin des années 1980, il n'y a pas très longtemps.
    Vous avez parlé d'attirer des femmes qui avaient été libérées et avez affirmé vouloir les faire revenir. Je me demandais quel était le processus et si vous avez eu le moindrement de succès. Peut-être que vous pourriez même nous donner la raison pour laquelle elles avaient été libérées.
    Il s'agissait d'une campagne épistolaire, où nous nous sommes adressés à des femmes qui avaient été libérées au cours des cinq années précédentes. Cette période avait pour but que nous n'ayons à répéter aucun volet de la formation fondamentale, dans le cas où elles auraient perdu leurs compétences.
    Le taux de réponse a été très faible. Nous n'aurions pas dû être surpris, parce que les principales raisons pour lesquelles ces femmes sont libérées... Certes, il y en a qui le sont parce qu'elles ont vécu une terrible expérience, mais beaucoup de femmes sont libérées parce qu'elles subissent des pressions familiales et qu'elles prennent la décision personnelle de ne pas rester dans l'armée. Nous aurions été naïfs de nous attendre à ce qu'en cinq ans, certaines de ces situations familiales aient changé, surtout si c'était lié au fait d'élever des enfants.
    Dans la même veine, beaucoup de femmes sont libérées à certains moments en raison de blessures. Encore là, si elles sont libérées pour une telle raison, il est fort probable qu'elles ne se soient pas rétablies ou qu'elles ne soient pas guéries de cette blessure particulière cinq ans plus tard.
    Les raisons — et je viens tout juste de vous en donner trois — pour lesquelles elles sont sorties n'avaient pas changé; elles ne souhaitaient donc pas revenir dans les Forces armées canadiennes.
    D'accord.
    Le moment est-il venu de nommer un chef d'état-major de la Défense de sexe féminin?
    Le moment est venu si la femme possède l'expérience et les capacités personnelles nécessaires à l'exercice de cette fonction.
    Compte tenu de tous ces facteurs, envisagez-vous un avenir où nous aurions une femme à ce poste?
    Absolument.
    D'accord. C'est bon.
    Brigadière-générale Bourgon, vous êtes la championne de la défense. Je vous en remercie.
    Vous avez parlé du maintien de la paix. Nous avons entendu dire que les femmes ont un rôle important à jouer à ce chapitre. Compte tenu de certains des éléments négatifs, comme l'expérience en Haïti et à d'autres endroits, pourriez-vous nous parler de la force que les femmes apportent à ce rôle?

  (1025)  

    La diversité est une force. Les femmes et les hommes pensent différemment. Ils apportent des perspectives différentes. Plus un effectif est diversifié, meilleures sont les solutions. De la même manière, les soldates de la paix peuvent établir des liens plus facilement avec les collectivités, surtout avec les femmes.
    Il est essentiel que nous ayons cette force et cette capacité d'établir des liens avec les collectivités ainsi que de comprendre les problèmes sur le terrain et de pouvoir les régler. C'est la clé du succès opérationnel. C'est pourquoi nous le faisons. Nous suivons la stratégie sur la parité hommes-femmes de l'ONU au moment de fournir des effectifs à l'ONU pour ses missions de maintien de la paix.
    Vous avez parlé de la crise sur le terrain. Nous savons que, quand les Canadiens interviennent en situation de crise, il y a des viols, des déplacements et toutes sortes d'expériences très horribles qui ont traumatisé la population.
    Quelle est l'importance des femmes pour ce qui est de faire face à ces situations? Avez-vous une expérience directe?
    Je n'ai pas d'expérience de déploiement directe, mais nous comprenons l'importance de la présence de femmes sur le terrain en ce qui a trait à la capacité de communiquer. Les personnes qui ont été victimes d'agression sexuelle se sentent plus à l'aise d'aborder des soldates. C'est un fait connu. Leur présence facilite cette communication et cet échange d'informations, éléments essentiels d'un point de vue opérationnel.
    Je vous remercie. Votre temps de parole est écoulé.
    Les membres du Comité acceptent-ils que j'utilise la période réservée aux libéraux pour poser des questions?
    Je remercie tous les témoins de s'être présentés aujourd'hui.
    Vous devez avoir vu le rapport qui a été déposé par le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense intitulé Le harcèlement et la violence sexuels dans les Forces armées canadiennes. Les sénateurs y ont formulé certaines recommandations.
    L'une d'entre elles est: « Que le mandat et les ressources du Centre d’intervention sur l'inconduite sexuelle soient revus afin qu'ils répondent mieux aux besoins des individus qui y demandent du soutien et qu'un mécanisme externe soit mis en place pour mesurer l'efficacité du Centre. »
    Nous avons également entendu parler de cette recommandation dans les témoignages qui nous ont été présentés précédemment. Quel est votre point de vue à ce sujet?
    Cela n'est pas lié à mon expérience dans mon portefeuille d'attache, alors je ne formulerai aucun commentaire au sujet de cette recommandation.
    Monsieur Cantelon, quel est votre point de vue?
    Le centre est l'un des partenaires avec lequel nous travaillons au sein des services à la famille. Il importe de faire une distinction avec le mandat du centre à l'égard des employeurs, c'est-à-dire les membres des forces armées et la souplesse qu'apportent les services de moral, du fait qu'ils sont accessibles aux conjoints dans un autre contexte et un autre cadre, élément que j'ai abordé dans ma déclaration préliminaire. Certains de nos travailleurs sociaux virtuels sont disponibles afin de s'occuper de ces personnes dans le cadre d'une intervention en situation de crise, puis pour travailler avec les partenaires communautaires locaux.
    Pour ce qui est du centre précisément, encore une fois, c'est en dehors de mon mandat, mais relativement au centre — et nous travaillons avec ses intervenants —, nous devons nous assurer d'englober la totalité de l'expérience, parce que, évidemment, si un militaire et un conjoint civil sont touchés, les compétences sont différentes, mais, en fin de compte, c'est la famille dans son ensemble qui a besoin d'être guérie et appuyée, ou soutenue au moment où elle en arrive au résultat inévitable dans le cas d'une séparation. Il faut toutefois gérer ces situations.
    Il s'agit là d'un volet lié au centre responsable de l'officialisation sur lequel nous allons continuer de travailler pour nous assurer...
    Madame Vandehei, voudriez-vous ajouter quelque chose?
    Je suis désolée, c'est hors de mon mandat également.
    Ma prochaine question porte également sur la recommandation formulée dans le récent rapport du Sénat sur le harcèlement et la violence sexuels. Les auteurs affirment que les FAC et le MDN doivent mettre en place des politiques et des pratiques fondées sur des données probantes pour s'assurer que tous les membres des FAC, anciens membres des FAC et civils qui travaillent pour l'une ou l'autre des organisations ont accès aux ressources et aux services dont ils ont besoin pour guérir du traumatisme sexuel auquel ils ont fait face dans l'armée. Les FAC et le MDN déploient-ils actuellement des efforts dans le but d'intervenir auprès des victimes de harcèlement et de discrimination en déterminant les besoins en matière de services et de ressources pour ce groupe particulier?
    Je vais répondre à cette question parce que l'un des postes budgétaires sous la rubrique de la Condition féminine qu'ont reçus les Services de bien-être et moral était destiné à la tenue d'une étude sur la violence familiale qui englobe la violence sexualisée ainsi que d'autres formes de violence familiale. Ce rapport provisoire a été rédigé et vient tout juste d'être présenté au médecin-chef. Il s'agit d'une approche multidisciplinaire adoptée par tous les fournisseurs, que j'ai abordée dans ma déclaration préliminaire. Comme dans tous les rapports, il est indiqué que nous disposons d'une marge considérable pour améliorer les services offerts aux membres des Forces armées canadiennes, harmoniser une partie de la gouvernance et, en particulier, nous concentrer de façon holistique sur l'environnement familial en entier, de sorte que les militaires puissent composer avec les changements culturels.
    Nous prévoyons être en mesure de rendre ce rapport public d'ici l'automne. Il contient essentiellement 12 recommandations axées sur un vaste éventail d'activités visant à régler les problèmes soulevés par le comité sénatorial. Soulignons que la rédaction de ce rapport a commencé avant la publication du rapport du comité sénatorial, mais qu'il est en voie d'être parachevé.

  (1030)  

    Madame Bourgon, voudriez-vous ajouter quelque chose?
    Non, merci.
    Ma prochaine question s'adresse à tout le monde. Pensez-vous qu'il existe un écart entre les politiques qui sont établies dans le but de s'attaquer au harcèlement sexiste et sexuel et leur mise en œuvre par les autorités? Comment pouvons-nous relever le défi consistant à nous assurer que les politiques que nous avons établies sur papier sont appliquées? Qui sera responsable de leur mise en œuvre?
    Je pense que c'est une question de leadership et qu'il s'agit évidemment de la responsabilité de tous les commandants et de tous les dirigeants des forces armées. Le général Vance a créé l'opération Honour pour cette raison. Il croit vraiment que l'équipe de commandement et que tous les militaires ont l'obligation de fournir du soutien. Alors, c'est une question de leadership et c'est évident.
    Je peux en parler précisément. L'une des fonctions que nous exerçons aux services de bien-être consiste à donner des conseils au chef du personnel militaire et aux responsables de l'élaboration de politiques sur les DAOD 5044-4, qui concernent la violence familiale. Le MDN est en train de les reformuler en conséquence de l'étude et d'autres commentaires, alors il s'agit là d'un élément précis, et on travaille là-dessus avec l'équipe d'intervention en matière d'inconduite sexuelle et le centre pour s'assurer qu'elles sont mises en application.
    D'autres politiques sont envisagées. Nous prévoyons publier une instruction générale des Forces canadiennes, signée par le chef d'état-major de la défense, à la fin de l'été ou au début de l'automne, encore une fois pour aborder ces politiques.
    Je ferai remarquer au Comité que la révision de politiques prend toujours plus de temps que prévu, en raison de la grande taille de l'appareil de défense nationale.
    Nos témoins précédents ont désigné le manque d'expertise en ce qui concerne les questions de genre et de sexualité comme l'un des obstacles majeurs au règlement des problèmes liés à la discrimination et au harcèlement au sein des Forces armées canadiennes et du MDN. Ils ont également mentionné un manque d'expertise au chapitre du traitement des griefs, de la formation et de la sensibilisation relativement à ces problèmes. Voudriez-vous formuler un commentaire à ce sujet et nous expliquer comment nous pouvons régler ces problèmes?
    Je formulerai quelques commentaires à ce sujet. L'un des éléments que nous avons soulignés dans le rapport provisoire était que nous devons modifier la composition de l'expertise dans ces domaines. Je m'occuperais précisément de cet aspect. Le dernier volet — concernant les lacunes — de votre dernière question sort un peu de mon champ de compétence, en réalité. En ce qui concerne les services aux familles en général, ils visent à nous assurer que nous disposons de toutes les capacités qui existent dans la société civile et dans les collectivités locales et que nous pouvons reproduire en ayant recours à des sous-traitants ou en offrant des services précis par l'intermédiaire du ministère ou des services à la famille. Il y a de la place à l'amélioration dans ce mélange.
    Nous allons céder la parole à Mme Harder, pour une période de cinq minutes.
    Je vous remercie.
    Je ne suis pas certaine de savoir à qui adresser cette question, alors je vous laisserai décider quelle personne est la mieux placée pour répondre.
    Pouvez-vous formuler un commentaire non seulement sur la procédure, mais aussi sur les pratiques qui sont mises en place dans le but de mieux servir les femmes lorsqu'elles font face à une agression ou à une inconduite sexuelle?
    La raison pour laquelle je pose cette question, c'est que nous avons entendu de nombreux témoins affirmer qu'il ne s'agit pas d'établir davantage de procédures, de formalités administratives ou de platitudes ou d'avoir de bonnes intentions; c'est simplement une question de pratique. Ils affirmaient qu'un grand nombre des procédures sont déjà en place et qu'un grand nombre des attentes ont déjà été énoncées.
    Madame Tattersal, je crois que vous avez mentionné que 40 heures de cette semaine initiale...

  (1035)  

    C'est 10 semaines.
    Désolée... Quarante heures des 10 semaines sont consacrées à l'éthique, à la conduite et à des choses de ce genre, ce qui est exceptionnel. Il semble tout de même y avoir certaines faiblesses dans la culture des Forces armées canadiennes.
    Je sais que ce n'est pas une seule personne qui est pleinement responsable de changer cette culture. Manifestement, il s'agit d'une énorme entreprise, et chaque militaire doit s'engager à la soutenir.
    Je suppose que je cherche à obtenir d'autres réflexions en ce qui concerne l'aspect pratique plutôt que seulement les procédures.
    Je vais répondre en ce qui a trait à notre école des recrues.
    Si un incident survient à cette école, on a évidemment l'obligation de le signaler. Nous ne pouvons pas réagir à ce qui n'a pas été signalé. Ce n'est pas toujours la victime qui déclare que quelque chose s'est produit. La mesure que nous prenons immédiatement, dès que nous sommes au courant du fait qu'un incident s'est produit, peu importe à qui il a été signalé, c'est veiller à ce que les dirigeants interviennent et créent cette séparation. La personne qui aurait — parce que nous sommes innocents jusqu'à preuve du contraire — fait quelque chose d'inapproprié, qui qu'elle soit, est retirée du peloton et du logement en question et placée ailleurs. Pourquoi? Parce que la victime présumée a besoin de cette séparation pour avoir un sentiment de sûreté et de sécurité et pouvoir recevoir du soutien de la part du personnel. Je pense que nous procédons à une intervention immédiate très pratique. Nous le faisons à notre école des recrues, dans tous nos autres établissements de formation, ainsi que dans toutes nos unités.
    À quoi ressemble le changement de culture?
    Je comprends qu'il s'agit d'une entreprise très difficile au sein de toute organisation. Plus particulièrement, j'imagine qu'au sein des Forces armées canadiennes, c'est énorme. À quoi ce changement ressemble-t-il? Comment l'entreprenez-vous? Comment vous assurez-vous qu'il y a effectivement une culture de camaraderie et de respect mutuel entre toutes les personnes?
    Le défi lié au changement de culture au sein des Forces armées canadiennes est le même que celui auquel nous faisons face dans la société canadienne, car nous sommes le reflet de cette société. Comme je l'ai expliqué — parce que je fais habituellement cela dans le cadre d'une diatribe improvisée —, quand j'étais petite et que je regardais la télévision, c'était The Waltons et The Beachcombers. Vous pouvez me juger en fonction de l'âge que j'ai, mais ces émissions étaient porteuses de certaines valeurs relativement à la façon dont on se retrouvait là-dedans et dont on se conduisait.
    De nos jours, si on allume la télévision le dimanche soir, on va regarder Keeping Up with the Kardashians, émission qui véhicule des attentes très différentes quant à la façon de se conduire, à ce qui est acceptable et à ce qui ne l'est pas. Toutes les personnes que nous enrôlons apportent dans les Forces armées canadiennes ce qu'elles ont appris de leurs parents, de leurs familles et de la société dans son ensemble. Alors, à mesure que nous travaillons à leur inculquer — et il s'agit là de la valeur de la formation que nous donnons à nos recrues — les valeurs des Forces armées canadiennes et que nous tentons de renforcer ces valeurs au moyen de nos processus, de nos politiques et de notre formation, en même temps, nous cherchons à changer cette culture encore prévalente, parce que, quand les militaires rentrent chez eux le soir, ils font encore face à cette culture. Voilà pourquoi vous nous entendez affirmer que changer la culture prend un certain temps, mais il s'agit aussi de changer la culture du grand public canadien.
    Merci. Je vous suis reconnaissante de cette réponse.
    Je pense aussi — quand on y réfléchit — que c'est une question de sensibilisation. Il faut sensibiliser les gens au sujet des valeurs et de nos attentes. Il faut exercer une surveillance du début à la fin. Il faut prendre des mesures, au besoin, parce que certaines personnes feront des erreurs. Il faut les remettre sur la bonne voie. Les personnes qui occupent des postes de dirigeants doivent également montrer l'exemple.
    Merci infiniment.
    Nous allons maintenant passer à M. Bratina pour la dernière période de cinq minutes.
    Merci.
    Je veux poser une question au sujet d'un élément qu'a abordé Mme Harder. Je la formulerai simplement d'une autre manière.
    J'apprécie les témoignages que vous avez présentés. Ils sont positifs et inspirants pour l'avenir des forces armées. Nous avons entendu d'autres témoins affirmer, en quelque sorte, le contraire. Ils disent: « Ouais, ces personnes ne font que vous dire ce que vous voulez entendre, mais voici ce qui se passe vraiment. » Comment expliquez-vous que des gens soient très fâchés et critiques? Vous avez lu leurs histoires dans le journal, et ainsi de suite.
    Je demanderai aux généraux Tattersal et Bourgon de formuler un commentaire sur les personnes dont les besoins ne sont pas comblés et qui s'expriment ouvertement d'une manière très négative, par rapport à ce que nous espérons être le cas.

  (1040)  

    Il est malheureux que toute personne vive une expérience autre que positive au sein des Forces armées canadiennes.
    Je ne peux parler que de ma propre expérience, et je ne peux pas la généraliser à l'ensemble des militaires. Mon expérience est positive, et je me plais à penser qu'il y en a d'autres comme moi, mais je reconnais certainement le fait que de nombreuses personnes ont vécu une expérience terrible. Je me sens exceptionnellement démoralisée par cet état de fait parce que ces situations ne devraient jamais se produire. Ce n'est pas ce que font les chefs de file. On ne doit pas permettre à ces situations de se produire.
    Encore une fois, c'est exactement l'expérience que je pense qu'on aurait dans le vaste contexte civil également. Certaines personnes ont une expérience positive, et elles peuvent être contredites par celles qui ont connu une expérience horrible. Ce fait ne devrait rien enlever à ce qu'elles ont subi ni à l'expérience que j'ai vécue.
    Je suis d'accord avec Virginia. C'est triste. Je pense que nous ne pouvons pas regarder en arrière; nous devons regarder en avant et sensibiliser les gens, et nous assurer que de tels événements ne se reproduisent pas.
    Encore là, ce n'est pas parce que je ne l'ai jamais vécu que cela ne s'est pas produit, alors je ne peux pas formuler de commentaires. Toutefois, nous devons accepter le fait que nous ne sommes pas parfaits, et nous devons nous tourner vers l'avenir et nous assurer de combler la lacune afin qu'à mesure que nous progressons, ces événements ne se reproduisent pas.
    Y a-t-il un aspect du recrutement qui...? Peut-être que certaines personnes ne sont pas qualifiées pour être dans l'armée. Je suis certain que c'est le cas.
    Je me souviens d'avoir entendu, au sein du comité des anciens combattants, le témoignage d'un soldat australien qui avait déclaré: « Il faut faire plus que simplement embuer un miroir pour entrer dans notre armée », ce que j'ai trouvé intéressant.
    Comment pouvez-vous parler aux recrues de la question de savoir si cette vie leur convient ou pas? C'est votre vie, et vous l'adorez. L'armée ne convient peut-être simplement pas à d'autres personnes.
    Je dirais que le processus de recrutement comporte un certain nombre d'étapes à franchir, notamment une entrevue, où nous discutons avec les candidats de ce que le service suppose, de la carrière potentielle pour laquelle ils postulent et des raisons pour lesquelles ils veulent s'engager dans les rangs. De fait, sur notre nouveau site Web, vous trouverez une lettre qui est conçue pour les parents, les mentors ou les conseillers en orientation et qui leur permet de tenir des discussions au sujet des raisons pour lesquelles on voudrait s'enrôler et faire ce travail dans la vie.
    Certes, en ce qui concerne les recrues, une fois que nous les avons amenées jusqu'à l'école, nous savons que certaines d'entre elles vont découvrir que cette vie ne leur convient pas, et c'est très bien. Nous n'essayons pas de les forcer.
    Nous ne vous conscrivons pas; nous vous recrutons. Vous voulez faire ce travail volontairement, et vous pouvez changer d'avis.
    Il pourrait y avoir des personnes qui, en cours de route, se rendent compte du fait qu'elles ne veulent plus servir. Si elles n'ont pas conclu de contrat obligatoire — c'est-à-dire que nous payons leurs études —, elles peuvent partir.
    Si les gens ne respectent pas nos valeurs, nous les forcerons à partir parce qu'ils n'ont pas leur place au sein des FAC.
    Ma sœur a eu une longue carrière dans l'armée; elle a pris sa retraite à 42 ans. Il y a eu des obstacles en cours de route. Elle est très fière d'avoir servi le pays. Je pense que c'est probablement vrai des deux côtés, qu'on soit militaire ou pas. La vie ne se déroule pas toujours sans heurts, et il y a des problèmes auxquels on doit faire face, qu'on soit dans l'armée ou pas. Souscririez-vous à cette opinion, général Tattersal?
    Absolument. Ma propre histoire en est un exemple. Quand j'ai commencé, je voulais être ingénieure. À Noël, la première année, ma moyenne de 37 % dans cinq des sept cours signifiait que je n'allais pas y arriver. Toutefois, savez-vous quoi? Cela a été pour moi un excellent apprentissage qui m'a permis de grandir dans le cadre de ma carrière.
    Il vous reste 10 secondes. Vouliez-vous ajouter quoi que ce soit?
    Non, il est inutile que vous entendiez le reste de l'histoire de ma carrière et des obstacles qui l'ont parsemée.
    Au nom de tous les membres du Comité, je voudrais remercier tous les témoins d'avoir comparu aujourd'hui et d'avoir présenté des réflexions importantes pour l'étude en cours. Merci.
    Je veux seulement informer les membres du Comité du fait qu'à l'occasion de la prochaine séance — du jeudi 30 mai —, le Comité commencera à se pencher sur le rapport provisoire concernant l'étude des femmes aînées.
    Sur ce, la séance est levée.
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