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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 112 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 juin 2018

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bienvenue à cette réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord. Aujourd'hui, nous parlons de soins de longue durée.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins qui comparaissent par vidéoconférence. Lorsque nous passerons aux questions, assurez-vous d'indiquer si vous parlez aux témoins qui sont ici, à Ottawa, ou aux témoins par vidéoconférence.
    Avant de commencer, j'aimerais vous rappeler que le Canada est sur la voie de la réconciliation et que la première étape, c'est la vérité. Nous reconnaissons donc toujours que nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin, ici, à Ottawa. Comme je fais partie des colons des Prairies, je crois qu'il est important que nous reconnaissions toujours notre histoire.
    Maintenant, je pourrais essayer de lire ceci, mais ce serait une terrible insulte. D'après ce que je comprends, c'est un mot mohawk qui signifie « notre maison », ce qui est très beau, car c'est un établissement de soins de longue durée. Ensuite, nous accueillons la représentante du UW-Schlegel Research Institute for Aging, un institut de recherche sur le vieillissement, ainsi que Bonita Beatty, professeure à l'Université de la Saskatchewan.
    Nous entendrons d'abord Tammy. D'accord. Vous avez 10 minutes, et je tenterai de vous faire signe lorsque votre temps sera presque écoulé, si vous en avez besoin. Nous entendrons tous les exposés et nous passerons ensuite aux questions.
    Bienvenue au Comité.
    Tammy, vous pouvez livrer votre exposé.
    Je suis Tammy Cumming, du UW-Schlegel Research Institute for Aging, à Waterloo, en Ontario. Je suis ici pour vous parler d'un programme dont je suis responsable. Il s'agit d'un programme financé par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée et appelé les Centres de l'Ontario pour l'apprentissage, la recherche et l'innovation en matière de soins de longue durée. Ce programme est codirigé par trois organismes, à savoir le UW-Schlegel Research Institute for Aging, à Waterloo, le Centre des sciences de la santé Baycrest, à Toronto, ainsi que l'Institut de recherche Bruyère, à Ottawa.
    Nous dirigeons ce programme depuis plusieurs années, et nous avons obtenu le renouvellement de notre financement à l'été 2017. L'objectif du programme est essentiellement d'appuyer le renforcement de la capacité des établissements de soins de longue durée en cernant et en élaborant diverses ressources, afin d'améliorer la qualité des soins et la qualité de vie des résidents qui reçoivent des soins de longue durée.
    La portée du programme peut être assez large. Aujourd'hui, je parlerai seulement de certains des travaux que nous entamons pour appuyer les résidents autochtones qui reçoivent des soins de longue durée.
    En 2016, on a cerné quelques lacunes dans certains des travaux qui étaient menés pour répondre aux besoins en matière de soins de longue durée des peuples autochtones. La rétroaction des parties intéressées en matière de soins de longue durée nous a fourni cette information et ensuite, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a indiqué que nous devions répondre à ce besoin. Ainsi, nous avons mené une évaluation des besoins, que nous avons terminée en 2017. L'évaluation des besoins visait essentiellement à cerner certaines lacunes et à déterminer si des mesures pouvaient être prises dans le cadre du mandat du programme pour les combler.
    L'évaluation des besoins était composée d'entrevues et de rencontres avec certaines parties intéressées dans le secteur des soins de longue durée, et nous avions un comité consultatif formé de personnes qui connaissaient bien la culture autochtone et l'appui aux soins de longue durée.
    Plusieurs conclusions importantes ont été formulées et elles se trouvent dans un rapport complet. Parmi ces conclusions importantes, je voulais souligner aujourd'hui que les peuples autochtones ont des besoins uniques, sur le plan culturel, auxquels nous devons répondre. Nous devons également tenir compte de ces besoins lorsque nous leur offrons des soins de longue durée. De plus en plus de données probantes démontrent que lorsqu'on rétablit une culture et qu'on en tient compte, cela peut contribuer à la guérison, et cela pourrait même protéger contre la dégradation de l'état de santé pendant les soins de longue durée.
    L'autre conclusion, c'est que notre pays a une longue histoire de colonisation, de traumatismes historiques, de racisme et de méfiance face à la médecine occidentale, et ce sont des facteurs uniques dont nous devons également tenir compte lorsque nous tentons de répondre aux besoins des résidents autochtones dans les établissements de soins de longue durée.
    Il est nécessaire d'élaborer des ressources et de recenser celles qui existent déjà et de les diffuser dans tous les établissements de soins de longue durée — pas seulement dans les établissements de soins de longue durée qui ont le plus grand nombre de résidents autochtones, mais dans tous les établissements de soins de longue durée. C'est ce que nous ont dit certaines des parties intéressées, c'est-à-dire les représentants des établissements de soins de longue durée, car des résidents autochtones arrivent dans leur établissement et ils ne savent pas comment les appuyer sur le plan culturel.
    Manifestement, comme toujours, il est très important que nous établissions des partenariats avec les peuples et les organismes autochtones lorsque nous menons nos activités.
    Après l'évaluation des besoins, il était évident que le programme pouvait répondre à certains besoins et mener quelques activités, mais nous n'étions pas des spécialistes de la culture autochtone. Nous avons donc dû trouver des partenaires et nous avons décidé de former un cercle consultatif. Je vous parlerai surtout de ce cercle consultatif pendant le reste du temps qui m'est imparti.
    Nous avons réfléchi pendant quelque temps au cercle consultatif, et nous voulions que les membres de ce cercle possèdent une expérience en matière de soins de longue durée et de culture autochtone, mais qu'ils soient également représentatifs des régions du Nord et du Sud de l'Ontario. Nous avons fait une série d'appels téléphoniques et nous avons mené des entrevues, afin de trouver des membres pour ce cercle. Puisque nous n'avions pas de cercle consultatif pour orienter nos efforts, nous avons décidé qu'il était préférable de recruter certains Autochtones au sein de notre équipe pour nous aider dans nos activités de recrutement, et nous avons donc embauché un assistant de projet autochtone, ainsi qu'une personne autochtone pour faciliter et orienter le processus de recrutement. C'était très important.
    Lorsque nous avons finalement trouvé les 11 membres, nous leur avons envoyé une lettre d'invitation officielle et nous avons ajouté un cadeau de pochettes de tabac pour leur montrer que nous souhaitions intégrer leur culture dans nos activités.
    Nous sommes heureux d'annoncer qu'il y a six semaines aujourd'hui, nous avons eu notre première réunion. C'était très important pour nous d'avoir une rencontre en personne avec les membres du comité. Neuf membres sur onze ont été en mesure d'assister à la réunion en personne. Nous avons passé toute la réunion à créer des liens et à définir la façon dont nous allions mener nos travaux, et nous avons donc essentiellement consacré cette réunion à l'établissement d'un cadre de référence pour le cercle consultatif.
    Cette réunion était différente de toutes les autres auxquelles j'ai participé. Je n'ai pas participé à un grand nombre de conversations sur l'établissement d'un cadre de référence, mais c'était fondé sur les partenariats et la collaboration. Ensemble, les membres du cercle consultatif ont aussi donné le nom de Ontario Caring Advisory Circle au cercle, et ils ont défini leur mandat, que j'aimerais vous lire. Le voici: « L'Ontario Caring Advisory Circle fait preuve de leadership en orientant l'identification et l'élaboration de ressources culturelles appropriées pour appuyer les résidents autochtones qui reçoivent des soins de longue durée. »
    L'autre élément important de cette première réunion, c'est que nous avons élaboré un modèle de décision fondé sur le consensus, ce qui donne à tous les membres l'occasion de parler en tout temps et de contribuer aux décisions. Étant donné que la plupart de nos réunions se dérouleront par téléconférence, nous étions d'avis qu'il était très important d'adopter un modèle dans lequel tout le monde avait l'occasion de parler en tout temps et non le type de réunions dans lesquelles deux ou trois personnes parlent et les autres ne font que hocher la tête en arrière-plan. Nous avons établi cela très clairement. Cela nous a permis d'établir des liens de façon efficace et de coordonner les travaux futurs.
    Six semaines se sont maintenant écoulées depuis cette première réunion. Nous avons fait une téléconférence, nous avons eu une invitation à parler à la Chambre des communes et on nous a également demandé d'agir à titre de consultants dans certains projets de recherche pour un autre organisme. Nous croyons que le besoin existe et que la ressource du cercle est peut-être la ressource la plus précieuse du spectre.
    Maintenant, j'aimerais donner la parole à Teresa et à Vincent, deux membres de l'Ontario Caring Advisory Circle. Teresa parlera de son expérience et Vincent est ici pour l'appuyer.

  (1540)  

    Bonjour, madame la présidente et membres du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord. Je vous remercie de m'avoir invitée à vous parler aujourd'hui.
    On m'a demandé de vous parler de mon expérience de travail dans le domaine des soins de longue durée dans un établissement qui fait partie du très petit nombre d'établissements situés dans une collectivité autochtone. À titre de superviseure d'un établissement de soins de longue durée de 50 lits, au cours des 17 dernières années, j'ai assumé différents rôles, de secrétaire-réceptionniste d'unité à adjointe administrative, en passant par adjointe aux activités, et je suis maintenant superviseure des services récréatifs et des loisirs.
    Si vous me demandiez de vous communiquer la chose la plus importante que j'ai apprise, je vous dirais que le temps est l'une des choses que les résidents des établissements de soins de longue durée ont en surabondance pendant leur séjour, alors qu'au contraire, les employés n'ont pas suffisamment de temps pour fournir les soins de qualité que les résidents méritent.
    La notion du temps est fondamentale chez les peuples autochtones de partout dans le monde. Ils ont survécu dans un environnement naturel maintenant communément connu sous le nom de Terre Mère. De plus, de nombreux ouvrages et manuels d'anthropologie indiquent comment les premiers peuples ont survécu et comment ils prenaient soin des terres sur lesquelles ils vivaient.
    Comparez cela à votre propre notion du temps. Accordez-vous une valeur au temps, l'utilisez-vous sagement ou est-ce une chose qui doit être conquise, avec un gagnant et un perdant au bout du compte?
    Même si je ne peux pas parler pour d'autres peuples et collectivités autochtones, mes observations proviennent d'une infirmière psychiatrique autorisée à la retraite, dont la carrière a débuté dans le Sud de l'Ontario. Elle a ensuite déménagé à Sioux Lookout et enfin en Colombie-Britannique, où elle a pris sa retraite sur l'île de Vancouver. Cette infirmière est également ma mère.
    La prière d'action de grâce, ou l'Ohen:ton Karihwatehkwen, est la prière et l'invocation centrales des Haudenosaunees, également connus sous le nom de Confédération iroquoise des Six-Nations, à savoir la nation mohawk, la nation des Oneidas, la nation des Cayugas, la nation Onondaga, la nation Seneca et la nation Tuscarora. Elle reflète la relation qui consiste à remercier la vie et le monde autour d'eux. Les Haudenosaunees ouvrent et terminent chaque rencontre sociale et spirituelle avec cette prière, afin de saluer le monde naturel et de demander à tout le monde d'utiliser un bon esprit pendant la durée des activités. Dans une collectivité mohawk, une personne était reconnue pour réciter cette prière d'action de grâce tous les matins, au lever du soleil, afin de veiller à ce que chacun vive un autre jour.
    On reconnaît que les peuples autochtones sont les premiers scientifiques, car ils étaient des généticiens, comme mes ancêtres, qui ont créé de bonnes graines, des physiciens — les théories quantiques sont partout aujourd'hui — et des mathématiciens. Les activités de la famille évoluaient au gré des saisons. Les gardiens de la foi et les gardiens du savoir continuent d'éduquer et d'encourager leurs peuples aujourd'hui.
    Dans les enseignements, on inclut également les rituels ou les pratiques de la collectivité qui se déroulent à divers moments de l'année. C'est le temps d'envoyer des remerciements au monde naturel, au monde spirituel et au Créateur, tout en leur demandant de maintenir la santé et la prospérité des nations. Selon la façon dont les cultures autochtones vivaient sur la terre — les chasseurs-cueilleurs, les pêcheurs et les agriculteurs —, le calendrier de leurs activités était axé sur le monde naturel, afin d'assurer la survie.
    Il y a plusieurs années, j'ai participé à un projet d'étude sur les poissons. Notre financement provenait du Québec. Nous avons dû interrompre nos activités, car lorsque les oies sont arrivées, nos chercheurs et l'objectif de notre projet — toutes nos activités — se sont arrêtés. Les gens du village nous ont dit que rien ne se ferait pendant les deux prochaines semaines, car tout le monde était parti à la chasse.
    La communauté et la famille représentaient tout pour les peuples autochtones. Malheureusement, ce cycle très important de traditions et d'enseignement a été fracassé par les pensionnats, au début du XXe siècle, et par la rafle des années 1960, pendant laquelle des enfants ont été pris à leur famille et placés dans des familles d'accueil non autochtones, avec différents taux d'échecs.
    Sur le plan historique, lorsque les premiers établissements de soins ont été créés dans la culture occidentale, les résidents jouaient un rôle actif dans le fonctionnement de l'établissement en accomplissant divers travaux pour payer leur séjour. En effet, les résidents accomplissaient les mêmes tâches ménagères qui se font dans tous les foyers, et tout le monde devait participer et partager la charge de travail pour permettre la survie, pour se sentir utile et pour contribuer à la communauté. Plus tard, ces établissements sont devenus des endroits mornes et on considérait qu'il s'agissait d'endroits où les gens allaient mourir, jusqu'à ce qu'on introduise l'initiative des soins de rétablissement, en 2010.
    Récemment, dans l'établissement dans lequel je travaille, on a mené des entrevues auprès des résidents et ils ont répondu à un sondage sur leur satisfaction relativement aux services alimentaires. Un résident qui avait été agriculteur toute sa vie a demandé ce qui arrivait à la nourriture qui n'était pas consommée et où elle allait. Lorsqu'il a appris que cette nourriture était jetée, il a dit que nous devrions garder des cochons et les nourrir avec les restes, et que nous pourrions les abattre à l'automne. Est-ce que ce sont les paroles d'une personne qui attend la mort?

  (1545)  

    Toutes les personnes de 18 ans et plus peuvent être admises dans un établissement de soins de longue durée. En effet, les soins aux résidents autochtones ne se limitent pas aux personnes âgées fragiles. Avec la désintégration de l'unité familiale, certaines personnes font de mauvais choix de vie et un traitement holistique pourrait les aider. La plupart des cérémonies médicinales et des enseignements traditionnels tiennent compte de l'ensemble de la personne dans les traitements. Cela comprend les parties sociale, physique, émotionnelle, spirituelle et intellectuelle de la personne. Lorsque leur esprit et leur corps n'ont pas eu l'occasion de gérer le traumatisme découlant de générations de mauvais traitements, ces personnes peuvent recevoir un diagnostic de maladies qui sont directement connexes. Malheureusement, certains services de santé sont axés sur les mesures de prévention pour les membres de la collectivité, et les demandes liées aux résidents d'un établissement de soins de longue durée peuvent être mises de côté.
    Ces gens ont grandi en entendant dire que ce qui se passe dans la maison doit rester dans la maison et que personne d'autre ne doit savoir, et les aidants naturels et les membres de la famille éprouvent donc des difficultés lorsqu'ils prennent soin de leurs proches à la maison. En effet, il est honteux de demander de l'aide. Cela revient à admettre qu'on a échoué.
    Dans les établissements de soins de longue durée, l'équipe de soins est composée de professionnels de la santé et de membres de la famille qui collaborent pour éduquer et fournir aux résidents les soins ou le traitement qu'ils choisissent. Par exemple, j'ai déjà vu une résidente âgée qui ne se sentait pas bien demander une tasse d'eau chaude. En réalité, elle voulait se faire une tasse de thé de cèdre, mais elle n'avait pas les ressources, la capacité ou l'autonomie nécessaire pour demander ce dont elle avait besoin. Sa mère était une herboriste et une guérisseuse reconnue et respectée. C'était une occasion perdue d'apprendre des choses sur les remèdes à base de plantes.
    Il y a 50 ans, lorsque je faisais partie d'un groupe de jeunes de mon église, j'ai participé à une visite de Noël dans un établissement de soins qui se trouvait dans une collectivité autochtone. Ma mère avait appris qu'un de ses amis et voisins d'enfance y vivait, et elle m'a donc demandé de le trouver et de lui lire une lettre. Puisque j'avais 11 ans, je ne voulais pas faire cela. Je me souviens qu'on m'a amenée dans une salle sombre qui contenait deux rangées de lits en métal alignés sur chaque mur. Lorsque je me suis approchée d'une personne endormie dans un lit, l'employé a dit « Percy John, vous avez de la visite » et il est parti aussitôt. Je ne savais pas si le patient était endormi ou non, alors je lui ai lu la lettre à haute voix, sans quitter la page des yeux. Dans la lettre, ma mère rappelait à Percy qui elle était, elle lui expliquait qui j'étais, elle lui racontait quelques souvenirs d'enfance et terminait en lui souhaitant Joyeux Noël. Soulagée d'avoir accompli cette tâche, je l'ai finalement regardé et j'ai vu que son visage ridé était rempli de larmes. Je ne savais pas quoi lui dire, alors j'ai simplement laissé la lettre sur son lit et je suis partie.
    La même chose pourrait s'être produite la semaine dernière, car les résidents qui sont maintenant sous mes soins présentent les mêmes manifestations de solitude, c'est-à-dire qu'ils s'assoient près des portes d'entrée et attendent que quelqu'un vienne leur parler.
    Le nouveau Cercle consultatif de l'Ontario sur les soins de longue durée pour les Autochtones a été créé en avril de cette année au centre des naissances de Toronto, en Ontario. Les personnes qui se sont rassemblées pour cette réunion se sont volontairement engagées pour deux ou trois ans au sein du groupe. Au début de cette journée, neuf personnes ont entrepris une aventure. À la fin de la journée, les membres d'une équipe — y compris deux membres absents, dont on a présumé le consentement — ont convenu de collaborer et d'établir un horaire de réunions pour les mois à venir.
    La culture autochtone célèbre une nouvelle vie avec la famille et les amis. Une personne qui choisit de mourir dans son lit est entourée de sa famille et elle est soutenue par la communauté sur le plan spirituel. Lorsqu'un cycle de vie arrive à sa fin, ce moment est également souligné avec ce que la société appelle maintenant une célébration de la vie, au cours de laquelle les membres de la famille et les amis se réunissent une fois de plus pour honorer la personne décédée.
    Les professionnels de la santé, qui sont essentiellement des scientifiques, considèrent que la mort est un échec. L'écart entre les générations des familles autochtones a maintenant l'occasion de se refermer grâce à des renseignements et à des conseils. Plutôt que de laisser les jeunes craindre les personnes âgées fragiles, surtout lorsque ces personnes âgées ne vivent plus dans leur propre maison, on encourage les membres des différentes générations à raconter leurs histoires et à partager un repas, car c'est une expression d'amour universelle. Ces célébrations communautaires pourraient se dérouler dans les établissements de soins de longue durée, où les résidents autochtones pourraient recevoir les membres de la famille et de la communauté.

  (1550)  

    Les membres du Cercle consultatif ont des origines diverses pour ce qui est de la provenance, de l'appartenance à une nation et du bagage d'expérience. Ils partagent toutefois les mêmes objectifs. Ils souhaitent faire montre du leadership nécessaire pour déterminer quelles ressources sont appropriées du point de vue culturel et les développer au besoin; s'assurer que la culture autochtone est prise en compte en tant qu'élément déterminant des soins de longue durée; et aiguiller les fournisseurs de soins de santé vers les outils et les ressources appropriées.
    Est-ce que vous me permettez de lire un extrait de la Bible en terminant?
    J'aimerais donc que vous teniez compte de ce qui suit, en n'oubliant pas que je suis des années 1970:
Il y a un moment pour tout et un temps pour toute activité sous le ciel:
Un temps pour naître et un temps pour mourir;
    Je vais continuer:
Un temps pour planter et un temps pour arracher ce qui a été planté;
Un temps pour tuer et un temps pour guérir; un temps pour démolir et un temps pour construire;
Un temps pour pleurer et un temps pour rire; un temps pour se lamenter et un temps pour danser;
Un temps pour lancer des pierres et un temps pour en ramasser; un temps pour embrasser et un temps pour s'éloigner des embrassades;
Un temps pour chercher et un temps pour perdre; un temps pour garder et un temps pour jeter;
Un temps pour déchirer et un temps pour coudre; un temps pour se taire et un temps pour parler;
Un temps pour aimer et un temps pour détester; un temps pour la guerre et un temps pour la paix.
    Nous tenons à vous remercier de votre attention.
    Voilà une déclaration qui a beaucoup d'impact. Nous vous en remercions.
    Nous nous tournons maintenant du côté de la vidéoconférence. Vous avez un maximum de 10 minutes pour votre exposé.
    Nous sommes réunis pour parler principalement des soins de longue durée dans les réserves. Je me présente devant vous aujourd'hui avec mon bagage personnel de recherche et d'expérience.
    J'ai grandi dans une réserve du Nord. J'ai encore ma maison dans cette réserve et j'ai de longs trajets à faire pour aller travailler.
    J'ai fait mon doctorat en services de santé en m'intéressant plus particulièrement à la situation des Premières Nations et à l'élaboration de services de santé à leur intention. Lorsque nous avons commencé à recevoir les transferts en santé au début des années 1990, nous avons constaté à quel point nos aînés étaient nombreux. Je dois préciser une chose lorsque je parle des aînés. Nous savons qu'une personne est considérée comme âgée lorsqu'elle atteint 65 ans et peut toucher sa pension. Cependant, compte tenu des problèmes de santé généralisés que connaissent les réserves, certains fixent maintenant ce seuil à 55 ans, voire encore moins.
    Nous nous sommes donc rendu compte que nos aînés étaient très nombreux. La plupart sont septuagénaires, mais ils commencent surtout à devenir fragiles à compter de 80 ans.
    Nous nous employions à l'époque à mettre en place nos services de soins à domicile et de soins continus avec tout ce que cela nécessite. Je n'aurais jamais imaginé alors que j'en viendrais un jour à avoir recours à ces services pour mes propres parents. On ne pense jamais à ces choses-là, mais c'est effectivement ce qui est arrivé. Au cours des 10 dernières années, mes deux parents sont décédés alors qu'ils avaient 80 ans passés, tout comme mes oncles et mes tantes. Au fil de mes démarches au sein de ma propre collectivité ainsi qu'auprès de l'organisation provinciale responsable de la santé des Premières Nations, j'ai pu constater que les problèmes que j'éprouvais pour prendre soin de mes parents étaient les mêmes que ceux que connaissaient toutes les autres familles autochtones. Des obstacles semblables se dressaient également devant des familles non autochtones dont les proches finissaient leurs jours en souffrant de démence et de maladies de la sorte. C'est notre lot à tous en tant que Canadiens.
    Je vous parle aujourd'hui depuis le territoire visé par le Traité no 6 à Saskatoon. Ma propre bande, la nation des Cris de Peter Ballantyne vient également de ce territoire. C'est le traité pour lequel la clause relative aux médicaments a été interprétée comme désignant un ensemble complet de soins de santé. Nous prenons donc la santé d'une personne en charge avant même sa naissance, et ce, jusqu'à sa mort. Nous parlons de ces saisons de la vie que nous devons tous obligatoirement traverser. Cependant, en notre qualité de citoyens de ce pays, nous devrions tous pouvoir nous attendre à recevoir les soins nécessaires, à mourir dans la dignité et à être traités avec respect.
    Ce sont là les grands objectifs que je vise. Je vais simplement vous livrer les grandes lignes de mon exposé en insistant sur la nécessité de construire des établissements de soins de longue durée dans les réserves tout en prévoyant le financement suffisant pour que les aînés soient assurés à long terme d'avoir accès à ces installations à proximité de leur résidence et de leur famille, en plus des soins pouvant leur être dispensés à domicile.
    Les médias nous rapportent par exemple ces histoires d'aînés du Nunavut qui ont été placés à Ottawa. Des gens de collectivités isolées de ma région sont placés dans des centres urbains où ils sont pris en charge par des personnes qui ne comprennent pas leur culture... Même s'il s'agit de professionnels de la santé bien intentionnés, ils ne saisissent tout simplement pas ces particularités et n'arrivent pas à interagir, à communiquer et à travailler avec les familles d'une façon respectueuse et efficace du point de vue des soins.

  (1555)  

    La croissance démographique est l'une des premières choses à considérer relativement au placement des aînés des Premières Nations. La population autochtone est en croissance. Nous constatons certes également une augmentation du nombre d'aînés. Des estimations faites à partir des données de Statistique Canada indiquent qu'il y avait en 2011 environ 6 % d'aînés parmi les 1,4 million d'Autochtones. En 2016, cette proportion avait grimpé à 7,3 % sur un total de 1,7 million d'Autochtones. La croissance se poursuit donc. D'après certaines projections, la population d'aînés devrait doubler ou plus que doubler d'ici 2036.
    Il est bien évident que la situation ne va pas s'améliorer si l'on n'investit pas expressément dans des ressources et des stratégies en vue de bonifier le continuum de soins offerts dans les réserves et à l'extérieur. Il faut en effet pouvoir venir en aide à une personne que l'on ne peut toutefois pas considérer isolément. Cette personne fait partie d'une famille et est également membre d'une communauté des Premières Nations. Cette appartenance s'accompagne de multiples valeurs traditionnelles qui sont uniques et distinctives. D'une région à l'autre au Canada, les Autochtones ne sont pas les mêmes. C'est un facteur à prendre en compte lorsqu'il s'agit de concevoir et d'offrir des programmes et des services adaptés à la culture.
    Certains sont portés à croire que tous les Autochtones sont pareils, mais nous avons des origines qui diffèrent. Nous ne parlons pas tous la même langue et nous venons de différentes régions. L'enfance est un peu la même partout, mais certains ont dû vivre des expériences particulières... C'est ce qui est vraiment tragique. Bon nombre de ces aînés qui souffrent maintenant de démence sont peut-être passés par le système des pensionnats indiens ou celui des sanatoriums pour la tuberculose, un autre scandale qui vient d'être mis au jour. Ils ont peut-être également séjourné dans l'un de ces hôpitaux indiens comme on les appelait. Il y a bien des risques qu'ils aient pu ainsi, lors de leur enfance ou à l'âge adulte, connaître des expériences traumatiques qui s'ajoutent à tout ce qu'ils ont pu vivre par ailleurs.
    Ce sont autant d'éléments qui doivent être pris en compte, et ce, même par les familles qui s'occupent d'un proche. Je sais que l'une des questions qui était posée... J'ai mené de nombreuses études sur les soins de longue durée, l'élaboration de programmes et les aidants naturels. Je réalise toutes ces recherches non pas parce que je suis en quête de la réponse à une question en particulier, comme c'est le cas pour la plupart des chercheurs, mais plutôt parce que mes collègues ou les gens de ma collectivité m'exposent un problème pour lequel il faut absolument trouver une solution. Nous essayons simplement ainsi de dénicher le plus de renseignements possible dans le cadre de notre recherche afin de pouvoir prendre des décisions éclairées dans un souci de juste équilibre et de rentabilité.
    Parmi les thèmes que j'ai explorés abondamment, il y a la question de la vulnérabilité des aînés devenant fragiles qui est ressortie. Je parle avec les plus vulnérables, sans me limiter aux aînés dans les établissements de soins de longue durée, car il y a aussi parfois des jeunes qui doivent vivre avec une incapacité. Ceux-là également font partie des plus vulnérables qui doivent composer avec les problèmes dont on vous a déjà fait mention, à savoir la solitude, l'isolement et l'abandon. L'une des questions qui revient sans cesse sur le tapis et que j'ai entendue en visitant des aînés ainsi que des proches est la suivante: « Qui prendra soin de nous lorsque nous serons vieux et que nous ne serons plus autonomes? »
    Je suppose que nous nous posons tous la même question, mais il est grand temps de mobiliser les ressources nécessaires pour jeter les bases d'un véritable système de soutien pour ceux qui en sont rendus à cette saison de leur existence. Nous devons pouvoir prendre soin d'eux jusqu'à la toute fin.
    Je voulais donc surtout témoigner devant vous pour parler de la situation actuelle des services de soins continus. On parle généralement au Canada d'un panier de services. Nous savons que cela inclut les soins à domicile, les soins de longue durée, le répit et les soins palliatifs. Ce panier est cependant particulièrement petit dans le cas des réserves. D'après les statistiques actuelles, les soins de longue durée dans les réserves sont plutôt fragmentés. Certaines Premières Nations ont le grand bonheur d'avoir leur propre établissement de soins de longue durée. C'est cependant plutôt rare. Je crois qu'il y en a peut-être trois en Saskatchewan pour une population de plus de 90 000 Autochtones. C'est un aspect que vous devriez considérer.

  (1600)  

    La situation est à peu près la même pour ce qui est des soins de longue durée dans les provinces de l'Ouest. Il n'y a pas de financement spécialement consacré à la mise en place d'établissements à cette fin dans les réserves. Il n'y a pas non plus de programme de subventions, comme cela peut être le cas à l'échelle des provinces et des territoires, pour assurer le maintien à long terme de telles installations. C'est entièrement une affaire de partage des compétences et d'orientations stratégiques prises par le gouvernement.
    Il y a également toute la question de l'abordabilité. Les services provinciaux sont offerts en fonction de divers critères fondés sur le revenu. Les pensions représentent la source de revenu la plus courante pour les membres des Premières Nations. À titre d'exemple, notre Première Nation de la bande Standing Buffalo dans le sud de la Saskatchewan connaît vraiment des difficultés actuellement. On y trouve un établissement de 22 lits où séjournent également des jeunes vivant avec une incapacité. Les problèmes sont donc nombreux. Nous multiplions les efforts pour essayer d'améliorer les choses.
    Pour tout vous dire, dans le contexte des problèmes croissants associés aux soins à dispenser aux aînés des Premières Nations, nous avons absolument besoin d'un plan stratégique national inscrivant les soins de longue durée dans les réserves dans le cadre d'un continuum empathique et uniforme de services de santé plaçant les aînés et leurs besoins au coeur des préoccupations.
    Voilà ce que j'avais à vous dire pour l'instant.

  (1605)  

    Nous passons maintenant aux questions des membres du Comité. Je rappelle à chacun de bien indiquer à qui il adresse sa question.
    Nous commençons avec Dan Vandal.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens d'abord à tous vous remercier pour vos exposés.
    Je vais procéder rapidement, car nous ne disposons que de sept minutes. Ma première question s'adresse à Teresa et Vincent. Je vous laisse décider qui va répondre.
    J'aimerais savoir de quelle nature sont vos relations avec le gouvernement fédéral. Je sais que nous avons le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits. Dites-moi tout d'abord si vous avez des interactions avec les responsables de ce programme...?
    De façon détournée, par l'entremise de notre directeur et de notre conseil.
    Que pouvez-vous me dire à ce sujet? Pouvez-vous m'indiquer comment les choses se passent?
    Commençons d'abord avec ça.
    Je n'occupe pas depuis très longtemps ce poste d'administrateur si bien que je n'ai pas encore eu beaucoup d'interactions à ce niveau.
    Teresa, pouvez-vous...
    Je viens d'Akwesasne, ce qui devrait vous aider à comprendre bien des choses. Notre conseil mohawk reçoit son financement du gouvernement fédéral, si bien que nos conseillers élus sont sans cesse à la recherche de fonds. Mike Mitchell est le plus grand défenseur des droits de notre collectivité. Il est l'un de nos porte-parole les plus actifs. Nous l'avons d'ailleurs rencontré pour en apprendre davantage sur les débuts de Tsiionkwanonhso:te, notre établissement de soins.
    Je vous prie de m'excuser. Mike Mitchell est le...?
    C'est un homme politique très connu et très respecté d'Akwesasne. Il est à la retraite, mais il travaille maintenant pour l'assemblée des chefs à Ottawa.
    D'accord.
    Nous sommes assurément actifs dans ce dossier et je pense que nos relations ont toujours été plutôt cordiales.
    D'accord, j'y reviendrai.
    Tammy, votre institut de recherche a publié en 2011 une étude intitulée « Using the Labyrinth for Spiritual Practice ». Je ne sais pas si vous étiez déjà là à l'époque.
    Je n'y étais pas encore.
    Est-ce que vous connaissez ce rapport?
    J'en ai entendu parler, mais je n'en connais pas très bien le contenu. Si je ne m'abuse, l'institut compte maintenant 11 chaires de recherche, ce qui nous donne beaucoup de travaux à suivre. Il arrive que nous déterminions que certaines recherches touchent également les soins de longue durée, mais ce n'est pas toujours le cas. Je suis surtout responsable de ce programme financé par le gouvernement.
    Ce programme étant... ?
    C'est le programme des Centres ontariens pour l'apprentissage, la recherche et l'innovation en soins de longue durée. Ce programme est financé par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée depuis six ans. On vient tout juste de reconduire notre financement l'an dernier. Ces travaux sont réalisés dans le cadre du financement de base fourni par le gouvernement ontarien.
    D'accord. Je sais que vous en avez sans doute glissé un mot dans votre exposé, mais pourriez-vous nous indiquer encore une fois quelles sont les grandes lignes?
    Du programme... ?
    Oui. Quelles mesures de soutien offrez-vous?
    Il y en a un large éventail.
    Je pourrais justement vous donner l'exemple des efforts que nous déployons pour appuyer la prestation de soins de longue durée dans le respect de la culture autochtone. Nous avons un programme permettant de mieux tenir compte de la diversité entre les clientèles selon l'origine ethnique, le sexe et l'orientation sexuelle. Les établissements sont ainsi mieux à même d'offrir des soins personnalisés.
    Nous offrons toute une gamme de programmes, notamment en matière d'éducation. L'un d'eux consiste en des classes interactives pour la formation des préposés aux soins de soutien à la personne et des infirmières praticiennes dans les établissements de soins de longue durée. Ceux-ci sont aux prises avec de graves pénuries de personnel, surtout pour ce qui est des préposés. Il est important de les former en les exposant à la réalité d'un tel établissement. Nous avons aussi un programme de formation dans le cadre duquel les soins sont dispensés en partenariat avec les collèges. Nous avons un éventail très diversifié d'outils de formation.
    Il s'agit de déterminer quelles sont les ressources déjà en place afin d'éviter de faire double emploi. On s'assure ensuite de mettre au point celles dont le secteur a indiqué avoir besoin. C'est le but visé par le programme.
    D'accord.
    J'ai une question pour Bonita Beatty.
    Vous menez des recherches sur les soins de longue durée. Vous êtes-vous intéressée à l'importance des soins à domicile et de la possibilité pour les Autochtones de demeurer à la maison?

  (1610)  

    Certainement.
    Comme je l'indiquais, il y a trois étapes principales dans le continuum de soins pour les aînés autochtones. Ils sont d'abord à la maison. Il y a ensuite une transition vers un établissement de soins de longue durée. La dernière étape est le séjour dans cet établissement. Il n'est pas rare que les programmes de soins à domicile et de soins continus soient plutôt limités dans les réserves. Ils peuvent être offerts uniquement pendant les heures de bureau. Il n'y a aucun service le soir et les fins de semaine.
    Il n'y a rien après les heures de bureau et les fins de semaine?
    Non.
    Lors de notre recherche sur les aidants naturels, nous avons constaté que c'est souvent à ces moments-là que les aînés ont besoin d'aide. Heureusement, nous offrons pour notre part des cliniques de santé accessibles en tout temps. Des infirmières en soins primaires sont sur place, et ce sont elles qui sont généralement appelées à intervenir en cas d'urgence. Nous avons aussi des ambulances à certains endroits.
    Dans les collectivités isolées qui peuvent être à trois ou quatre heures de route d'un hôpital, il devient très difficile de garder les gens à la maison. Quelle que soit la source que vous consultez, vous constaterez que la très vaste majorité des aînés, qu'ils soient autochtones ou non, préfèrent ne pas quitter leur domicile. Ils veulent rester auprès de leur famille et obtenir son soutien. C'est ce que souhaitent également les aidants naturels.
    J'ai une dernière question.
    Notre gouvernement comprend bien l'importance des soins à domicile. Nous avons ajouté un financement de 6 milliards de dollars pour les provinces. J'ai toutefois de sérieux doutes quant aux possibilités que cette aide additionnelle se fasse ressentir jusque dans les réserves.
    Je n'y crois pas moi non plus.
    Il me reste seulement une vingtaine de secondes.
    Auriez-vous des conseils à donner au gouvernement? À quel niveau devrions-nous en faire davantage, ou quels changements devrions-nous apporter?
    Il faut améliorer les programmes de soins à domicile. On n'offre pas de soins palliatifs. Il n'y a pas non plus de soins de répit, pas plus que des heures supplémentaires pour les soins à domicile. Ceux-ci sont offerts à tous les malades chroniques et pas seulement aux aînés. Il y a bien des gens qui souffrent de problèmes chroniques de santé, et il arrive que les aînés soient isolés. Dans le cadre du programme des soins à domicile et des soins continus, il faut un plan stratégique ciblant expressément les aînés au moyen de mesures améliorées à leur intention. Ces améliorations sont absolument essentielles ne serait-ce que pour soutenir la comparaison avec ce qui est offert à l'échelle provinciale.
    Merci.
    D'accord.
    La parole est maintenant à Kevin Waugh.
    Bienvenue à tous nos témoins.
    Je vais continuer sur ce sujet des aînés qui veulent demeurer à la maison.
    Dans quelle mesure les programmes fédéraux pour les soins à domicile et en milieu communautaire permettent-ils aux aînés de rester chez eux?
    Je vais d'abord adresser la question à vous, madame Beatty, car je crois que vous avez un lien avec la nation des Cris de Peter Ballantyne. C'est ce que vous avez indiqué tout à l'heure.
    Quels sont les programmes fédéraux actuels qui sont utiles et le sont-ils vraiment?
    Pour Peter Ballantyne, nous offrons uniquement les soins à domicile et les soins continus. Nous avons déployé bien des efforts pour essayer d'obtenir un établissement de soins de longue durée sur la réserve, même dans une version simplifiée, par exemple sous la forme d'une résidence avec services d'assistance personnelle ou quelque chose du genre. Il n'y a ni financement de soutien ni budget de fonctionnement et d'entretien qui soit prévu actuellement dans l'enveloppe stratégique pour les soins à domicile et les soins continus. Les établissements s'inscrivent dans cette démarche. On essaie de garder les gens à la maison ou tout au moins le plus près possible de chez eux.
    Il y a aussi la question des services de santé non assurés. Il y a des restrictions quant aux services offerts. Il n'y a pas de financement possible pour bon nombre des travaux à effectuer pour le maintien à domicile et la capacité d'accès. C'est même le cas pour les rails dans les résidences. Pour des familles qui ont déjà de la difficulté à garder leurs aînés à domicile, la situation devient encore plus complexe en l'absence des équipements dont une personne en perte de mobilité a besoin comme un lit électrique ou un dispositif de soulèvement. Il y a de nombreux problèmes.
    Comme je l'indiquais, il est primordial de se pencher sur la question des soins aux personnes atteintes de démence, car elles sont de plus en plus nombreuses au sein de nos collectivités, d'autant plus que ce sont les aînés les plus vulnérables qui sont touchés. Dans le foyer de soins personnels de notre collectivité, il y en a quatre que nous aurions voulu maintenir à domicile. C'est habituellement en dernier recours que l'on sort ces personnes de chez elle pour les placer dans un établissement de soins de longue durée. Les statistiques nous indiquent que c'est la même chose pour la population canadienne en général. Le plus souvent, les gens se retrouvent dans ces établissements parce qu'ils n'ont pas d'autre choix en raison des risques pour leur santé. Il en va de même...

  (1615)  

    Oui. Je vais maintenant me tourner du côté de Teresa, si vous n'y voyez pas d'objection.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez? Je vois que vous avez 50 lits. Pouvez-vous nous parler des programmes fédéraux pour les soins à domicile et en milieu communautaire? Obtenez-vous une aide quelconque pour garder vos aînés à domicile?
    Je ne sais vraiment rien des modalités administratives.
    L'une de nos forces, à Akwesasne, c'est que nous avons ces services. Nous offrons du soutien à domicile à 85 à 90 clients actuellement. Nous offrons des soins de santé holistiques. Nous avons tous ces programmes et oui, ils sont financés, mais nous notons un manque de formation. Il y a pénurie d'infirmières, d'infirmières auxiliaires, de préposés au soutien à la personne. Pour la survie de ces services, il faut offrir plus de formation au personnel, afin de le maintenir à jour. Nous avons tout simplement besoin de plus de formation.
    Si je peux ajouter une chose, concernant la normalisation de la formation de préposé, il y a des préposés qui viennent travailler en soins de longue durée qui peuvent n'avoir suivi qu'un cours par correspondance, sans véritable expérience pratique. Ils s'épuisent, puis s'en vont. Nous nous retrouvons ensuite avec des problèmes d'abus dans nos établissements, donc je pense que la normalisation serait un élément clé en matière d'éducation.
    Oui. Je pense que nous apprenons tous. Les soins palliatifs restent très nouveaux depuis 2015. La santé mentale est un grave problème. Nous n'avons pas encore tout décortiqué. Ce sont d'autres problèmes.
    Prenons seulement le gouvernement fédéral. Recommanderiez-vous une approche unique ou plutôt 10 programmes différents dans les provinces et trois autres dans les territoires? Comment le gouvernement fédéral compte-t-il régler les problèmes liés aux soins palliatifs dont nous avons parlé, les problèmes de démence, les problèmes de santé mentale? Quelles recommandations auriez-vous à nous faire en vue de notre rapport sur le sujet? J'oserais dire que nous sommes encore en terrain nouveau et que nous commençons à peine à nous pencher sur ces enjeux.
    Nous commencerons par Tammy, si vous le voulez bien, après quoi nous pourrons entendre Teresa et Mme Beatty.
    Nous demandez-vous si les services devraient être offerts par province ou nationalement?
    Oui. Faut-il favoriser une approche unique?
    Je crois que non, parce que les structures diffèrent tellement d'une province à l'autre pour les services de longue durée. C'est mon impression. Je ne suis pas une experte des modes de financement fédéraux, et notre programme est financé par la province.
    J'ajouterais, toutefois, que tout le monde souhaite rester le plus longtemps possible chez lui, mais que les soins de longue durée sont inévitables dans certains cas, parce que les gens ont besoin de cette aide. En Ontario, nous essayons désespérément d'améliorer la perception des soins de longue durée. Nous avons progressé en passant d'un modèle institutionnel à un modèle social, mais il reste encore fort à faire. Quoi qu'il en soit, il y a déjà des soins extraordinaires qui s'offrent dans la province dans certaines résidences, qui font un travail fantastique, mais l'on n'entend parler que des histoires d'horreur.
    C'est vrai qu'il est assez ennuyeux de parler des soins de qualité qui s'offrent, parce que les soins devraient toujours être de qualité, mais nous devons mieux faire connaître ces exemples, parce que les gens ont vraiment peur de recevoir des soins de longue durée. Ils croient qu'ils s'en vont à l'hôpital.
    Allez-y, Teresa. Comment le gouvernement fédéral devrait-il distribuer cet argent? Devrait-il y avoir une seule façon de faire pour tous ou 13 formules différentes?
    Dans le domaine des loisirs, nous sommes toujours à la recherche de matériel. Je préférerais une approche unique que nous pourrions modifier selon nos besoins.
    Bonita, qu'en pensez-vous?
    Oui, c'est un peu comme quand les soins à domicile et les soins prolongés sont apparus. Je pense qu'il faut établir des normes similaires partout, particulièrement dans les réserves, parce qu'elles sont de compétence fédérale et autochtone, donc il faudrait examiner les normes de soins palliatifs pour qu'ils puissent être offerts dans les réserves. Je pense qu'on pourrait avoir des normes similaires partout, mais comme je l'ai dit, il pourrait aussi y avoir des distinctions d'un fournisseur à l'autre. Nous pourrions faire bon usage de normes.

  (1620)  

    Merci. Je n'ai plus de temps.
    Merci.
    Au tour de Rachel Blaney de poser ses questions.
    Je vous remercie tous infiniment d'être ici aujourd'hui.
    Teresa, si vous le voulez bien, je serais très contente de commencer par vous. Premièrement, je souhaite vous remercier de votre belle philosophie. J'ai beaucoup apprécié votre ton pendant votre exposé. Je pense que vous avez réussi à nous orienter de façon très agréable et importante.
    Vous nous avez parlé de l'importance de l'histoire de la personne qui demande de l'eau chaude mais qui souhaite en fait boire un thé médicinal. Vous nous avez dit aussi que les aînés ont beaucoup de temps, contrairement aux fournisseurs de soins. Je pense qu'il y a là une connexion importante.
    Je me demande si vous avez des propositions ou des idées sur la façon dont nous pouvons bâtir un environnement dans lequel le fait de demander de l'eau reviendrait à demander du thé médicinal?
    Posez-vous votre question aux gens de Saskatoon?
    Je la pose à Teresa. Je l'ai dit au début.
    En ce moment, en raison de la loi, nous fonctionnons par tâche. Nous avons 20 minutes pour offrir des soins à un résident. Dans notre résidence, nous avons ce que nous appelons des unités de travail. Il y a un employé pour 10 résidents. La personne arrive à 7 heures et doit aider 10 résidents à se lever et à se préparer pour le déjeuner. Ils doivent se laver, s'habiller, faire ce qu'ils ont besoin de faire. Cela ne laisse pas beaucoup de temps pour les interactions. Mon rôle, dans ces activités, consiste à essayer de créer des signaux et des outils que le personnel pourra utiliser. Donc si l'on se rend compte qu'un résident ne se rappelle plus le nom de ses petits-enfants, il pourra y avoir une courtepointe au mur arborant les photos de ses petits-enfants et leurs noms. Cela permet au préposé de lui demander comment telle ou telle personne se porte aujourd'hui, si elle en a eu des nouvelles dernièrement, parce que les préposés n'ont pas vraiment le temps d'interagir avec les aînés autant qu'il le faudrait.
    Ils n'ont pas le temps non plus de voir tous les signaux qu'une personne est en détresse. On nous enseigne à reconnaître la douleur et à regarder le visage du résident, son langage corporel, mais quand une personne est assise sur la toilette, qu'une autre actionne la sonnerie d'appel et que le personnel doit aller l'aider en urgence, tout le monde court. Il n'y a tout simplement pas de temps, donc la personne se sent seule et sans valeur.
    Merci.
    Tammy, vous avez parlé de votre travail axé sur l'Ontario. Je me demande simplement si le cadre auquel vous travaillez pour ce nouveau cercle sera réutilisé ailleurs au pays. Est-ce le modèle prévu?
    Nous avons le désir de partager nos ressources et nos idées avec les autres régions du pays, donc oui, nous sommes financés pour concevoir des outils adaptés à l'Ontario, mais il y a absolument des occasions de partage. Le mandat du RIA est national et mondial, donc il y a effectivement des partages, bien sûr.
    Diriez-vous qu'il y a un petit manque de financement, peut-être, pour un mécanisme fédéral afin de faire connaître ce genre de modèle, question de prendre toutes les mesures nécessaires pour favoriser la réconciliation?
    Absolument.
    Merci.
    Je me demande une chose. Dans vos travaux, mettez-vous l'accent sur les communautés rurales et éloignées, par opposition aux communautés urbaines, qui ont des réalités très différentes?
    Oui, nous le faisons, mais on accorde de plus en plus d'attention aux petits centres de soins de longue durée qu'on trouve dans les régions rurales et nordiques. Les résidences sont généralement plus grandes, et les plus ouvertes s'adaptent au changement. Donc oui, on accorde de plus en plus d'importance à cela dans le contexte du nouveau financement.
    C'est bien. Je représente une circonscription rurale et éloignée, et bien souvent, les membres des communautés autochtones et non autochtones sont forcés de s'exiler et de perdre toute leur infrastructure sociale. Je pense que les gouvernements fédéral et provinciaux doivent collaborer à cet égard, particulièrement dans le contexte autochtone.
    Bonita, je voulais seulement dire que j'ai lu votre article dans lequel vous mentionnez que la nation a élaboré un scénario ou des scénarios idéaux de gestion des soins. Pouvez-vous nous en parler un peu plus? Avez-vous des exemples qui répondent aux critères du scénario de gestion des soins idéal?
    J'aimerais en avoir. Les choses évoluent constamment, n'est-ce pas?
    Nous nous sommes penchés sur le concept des « soins combinés » faute d'un meilleur terme. Le mot « soins » est surutilisé, mais on parle de soins combinés quand on travaille avec les professionnels de la santé locaux de la réserve. J'étudie actuellement d'autres réserves, des réserves rurales, parce que c'est mon domaine d'études et d'expérience.
    Quand on évalue la situation à domicile, qu'on travaille avec les familles des patients (des aînés, qui sont les clients), qu'on travaille avec les professionnels, bien souvent, ils doivent être placés en fin de compte. Ils peuvent se retrouver dans une maison de répit pendant deux semaines ou être plutôt orientés vers des soins de longue durée, particulièrement s'ils souffrent de troubles comme la démence ou si leurs proches ne peuvent plus s'en occuper sans risque médical à domicile. Quand ils quittent la réserve, pendant la période de transition où ils sont placés, ils ne peuvent pas simplement être parachutés dans une résidence de soins de longue durée située loin de chez eux. Nous le savons tous.
    Il faut donc travailler avec les professionnels de l'établissement (les infirmières, les aides à domicile, tout le monde) pour que les familles soient dans le coup, pour qu'on puisse offrir des soins combinés entre la santé à domicile, la famille, le patient et le centre de soins de longue durée hors réserve, en ville. Il faut que ce type de relation s'établisse. C'est ce qu'on appelle la gestion de cas. C'est ce qu'on appelle les soins combinés.
    Concrètement, nous avons toujours des réunions communes. Habituellement, la famille... Dans mon cas, je tiens toujours à garder les canaux de communication ouverts, parce qu'il faut connaître les médicaments d'ordonnance que l'aîné prend, savoir qui sont ses médecins, connaître ses antécédents médicaux et autres. Quelle est son origine? La personne ne parle-t-elle que le cri? Ne parle-t-elle que le déné? La langue est une variable importante. Les valeurs culturelles, de même que les croyances de la personne sont aussi importantes.
    Il faut donc essentiellement former les professionnels de la santé à cela. Je leur en parlais il y a quelques semaines, et c'est exactement ce qu'ils me disaient: « Nous avons besoin de formation; nous avons besoin de comprendre l'origine des aînés qui arrivent chez nous. » Nous-mêmes, qui faisons partie d'une Première Nation ne savons même pas où sont placés les aînés en Saskatchewan. Nous devons même chercher ceux de notre propre bande, parce qu'en ce moment, ils sont placés un peu partout.
    Il faut donc offrir des soins combinés, ne pas laisser ces personnes loin de leur réserve, loin de leur maison, simplement parce qu'elles sont placées dans un centre de soins de longue durée hors réserve.
    C'est une question de liens. Je pense que cela fonctionne bien dans plusieurs cas, donc nous continuons notre travail en ce sens.

  (1625)  

    Cela vient clore votre temps, tout juste.
    Passons au député Mike Bossio.
    Merci, madame la présidente. Je sais que je n'ai que de deux minutes.
    J'ai une question à poser. Nous avons eu la chance d'entendre le grand chef Abram Benedict la semaine dernière. Nous avons également entendu le chef R. Donald Maracle des Mohawks de la baie de Quinte. Je sais qu'ils sont en démarches pour la construction d'un centre de soins de longue durée dans leur communauté, pour la région environnante.
    Pour les Premières Nations comme les Mohawks de la baie de Quinte, quels seraient, d'après vous, les facteurs les plus importants et les difficultés à surmonter pour réussir à ouvrir et à exploiter un centre de soins de longue durée? Cette question s'adresse à Mme Doxtdator David ou à M. Lazore, l'un ou l'autre, selon qui se sent à l'aise de répondre à cette question.
    Je pense que l'un des aspects importants serait de veiller à établir un plan sur 20 ou 25 ans. Il faut ensuite s'assurer du financement pour le maintien de l'infrastructure. Les bâtiments vieillissent, puis l'on n'a pas d'argent pour les réparer. C'est ce qui me semble important, dans une perspective d'avenir, il faut prévoir du soutien à l'infrastructure.
    Quel serait le ratio optimal entre les travailleurs de soutien et les patients? Teresa, je sais que vous avez mentionné que c'est un aspect difficile, mais quel devrait être le ratio optimal, d'après vous? Vous avez dit qu'il était actuellement de 1:10.
    Dans notre résidence, il est de 1:10, et nous sommes chanceux. Dans les résidences plus grandes, il est inférieur à cela.
    Il y a parfois un seul travailleur de soutien pour 20 patients.
    Croyez-vous qu'un ratio de 1:10 serait gérable?
    C'est gérable, mais ce pourrait être encore mieux, parce qu'il y a beaucoup d'épuisement attribuable à la pénurie de personnel.

  (1630)  

    C'est bon à savoir.
    Merci. J'aurais aimé avoir plus de temps. J'aurais beaucoup d'autres questions à poser.
    Je vous remercie beaucoup d'être venu nous rencontrer. Nous vous en sommes reconnaissants. Meegwetch.
    Nous prendrons maintenant une courte pause, après quoi nous reprendrons avec le prochain groupe.

  (1630)  


  (1630)  

    Je souhaite la bienvenue à tous les membres de ce groupe de témoins. Nous parlons maintenant de l'Alberta, après avoir parlé un peu plus tôt de la Saskatchewan et de l'Ontario.
    Nous disposons d'une heure pour discuter des soins de longue durée. Nous avons des interlocuteurs à l'écran qui semblent en bien plus haute résolution que ceux de la Saskatchewan. C'est la raison pour laquelle nous rions. Vous êtes très beaux. On ne dirait jamais qu'il neige en Alberta. Nous avons aussi deux témoins présents en personne à Ottawa. Nous sommes très heureux de vous accueillir aussi.
    Nous commencerons par les témoins par vidéoconférence, puis vous devinez la suite: ceux qui sont présents en personne concluront les témoignages.
    Normalement, nous vous octroyons 10 minutes, mais si vous voulez prendre un peu plus de temps, nous serons souples, parce que nous recevons trois groupes.
    Allez-y.

  (1635)  

    Je m'appelle Jeff Anderson. Je suis président du Fort Vermilion Seniors' and Elders' Lodge Board 1788. Je suis accompagné, par téléphone, du chef Rupert Meneen, chef de la Première Nation Tallcree, un partenaire de premier plan de notre conseil, et vous accueillez également en personne notre trésorier, M. Bill Boese, ainsi que Natalie Gibson, attachée de recherche et conseillère du conseil.
    C'est un grand honneur pour nous de nous exprimer devant le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord sur l'enjeu important des personnes âgées et des soins aux aînés.
    Pendant plus de 10 ans, la communauté de Fort Vermilion a milité activement pour une résidence pour personnes âgées dans la région de Fort Vermilion. Nous souhaitons souligner le besoin non comblé de soins de longue durée pour les personnes âgées et les aînés de la région du Mackenzie, en Alberta, surtout si l'on tient compte des besoins de l'une des populations autochtones connaissant la croissance démographique la plus rapide au Canada.
    Notre conseil et nos partenaires des Premières Nations demandent au gouvernement du Canada de travailler avec les provinces afin de répondre aux besoins des personnes vivant dans les régions rurales, éloignées et nordiques où il y a un manque de services. Cela ne touche pas que les soins de longue durée, d'ailleurs, mais tous les autres services de soutien ayant une incidence sur la qualité de vie.
    Nous avons déjà toutes les études voulues pour attester de ce besoin, mais aucune mesure concrète n'a encore été prise.
    En 2014, le gouvernement de l'Alberta, en partenariat avec le comté du Mackenzie, a réalisé une étude afin d'évaluer les besoins en matière de logement dans la région. Cette étude, qui a coûté 100 000 $, a permis de déterminer qu'il faudrait entre 117 et 200 lits supplémentaires pour les aînés d'ici 2031 dans la région. Dès 2014, les chercheurs recommandaient de 8 à 13 lits supplémentaires pour personnes semi-autonomes à Fort Vermilion, il y a quatre ans, en fait, et de 14 à 24 lits supplémentaires d'ici 2031. On s'attend à ce que la population des 65 ans et plus augmente de 123,8 % d'ici 2031, pour un total approximatif de 2 417 personnes.
    Depuis 2014, le total de 122 lits réservés pour des soins spécialisés dans la région du Mackenzie a très peu changé, puisque seuls 4 lits s'y sont ajoutés en 2017. À l'heure actuelle, toutes les résidences pour personnes semi-autonomes de la région sont remplies à pleine capacité, et la liste d'attente est telle qu'il peut falloir jusqu'à deux ans pour obtenir une place. Cependant, ces établissements ne tiennent pas compte de la diversité culturelle unique de la région. Des personnes âgées sont contraintes de rester à domicile plus longtemps ou de quitter la région pour obtenir du soutien. Le fait que ces personnes restent à domicile plus longtemps crée d'autres difficultés.
    Nous accusons également une pénurie de professionnels de la santé. Nous avons appris que certaines infirmières locales n'ont pas pu prendre de vacances depuis deux ans.
    Dans les régions rurales et éloignées, les services de santé sont beaucoup plus difficiles d'accès qu'ailleurs. Les personnes âgées vivant près des centres urbains peuvent toujours prendre un taxi pour se rendre au supermarché ou demander du transport adapté pour aller voir un médecin et faire renouveler une ordonnance. Dans les communautés éloignées du Nord de l'Alberta, il arrive que les aînés ne puissent même pas appeler le 911 en urgence faute de services cellulaires.
    Nous avons donc constitué un groupe de bénévoles dévoués qui a officiellement pris le nom du Fort Vermilion and Area Seniors' and Elders' Lodge Board 1788. Je vous invite à lire les 10 points que vous trouverez dans la note d'information, qui vous présentent notre progression.
    Pour en faire un résumé, notre conseil se compose de 13 personnes, dont 4 administrateurs élus: un de la Première Nation Dene Tha', un du gouvernement tribal de Tallcree, un de la Première Nation Beaver et un de la nation crie de Little Red River. Avec l'aide de nos partenaires, nous avons recueilli plus de 200 000 $ en dons et profits d'une vente-bénéfice pour la communauté. Des terres nous également été données, et nous aurions aussi accès à deux autres parcelles de terre pour construire un centre.
    Nous travaillons très fort pour sensibiliser les autorités au fait que les formules habituellement utilisées pour évaluer et suivre les besoins en services de santé et de soutien ne s'appliquent pas bien aux communautés nordiques éloignées. Nous faisons actuellement partie d'un vaste groupe de travail stratégique interministériel, auquel sont représentés les ministères provinciaux et fédéraux, afin de discuter des lacunes en matière d'information et de fourniture de services. À ce jour, le groupe de travail s'est réuni à trois reprises, par téléconférence, mais nous n'avons encore aucun résultat.
    Pour vous permettre de comprendre un peu mieux la réalité de notre région, vous voyez ici dans la note d'information que nous faisons partie de ce qu'on appelle le comté de Mackenzie. Géographiquement, il s'agit du plus grand comté au Canada; sa superficie est presque égale à celle de l'Île-du-Prince-Édouard au complet. À la page 2 de vos notes d'information, vous pouvez voir la réserve de Garden River, dans l'Est, qui se situe à environ deux heures et demie de route de l'Hôpital général St. Theresa, qui se trouve à Fort Vermilion.

  (1640)  

     De Fox Lake, un peu au sud, comme vous le voyez sur la carte, il faut trois ou quatre heures pour se rendre par barge jusqu'à Fort Vermilion. À High Level, qu'on voit au centre gauche de la petite carte, il y a un hôpital et le lieu du foyer proposé, avec 25 chambres en milieu de soutien. Même avec ces nouvelles installations, on est loin d'une réponse complète à nos besoins.
    Jeff, je veux que vous sachiez que nous n'avons pas votre exposé sur papier, parce qu'il est toujours à la traduction. Nous n'avons pas la carte, mais nous pouvons l'imaginer. Nous vous suivons, Jeff.
    D'accord. Voici de quoi cela a l'air. C'est à peu près ici.
    Voilà. Cela nous aide beaucoup.
    Je suis désolé, MaryAnn. J'ai envoyé cela par courriel à Mike ce matin.
    Continuez. Vous avez encore quatre minutes.
    Je vous remercie. En fait, vous êtes intervenue à point nommé. J'en étais à la fin de mon exposé pour le moment. J'aimerais céder la parole au chef Meneen. Il aimerait dire quelques mots.
    Bonjour à tous. Je vous remercie de nous donner l'occasion d'être avec vous aujourd'hui.
    Je suis le chef Rupert Meneen. Je fais partie du gouvernement de la Première Nation Tallcree. Je participe depuis 10 ans aux travaux de ce groupe en vue de l'aménagement des installations inclusives sur le plan culturel dont nous sommes en train de parler.
    Je suis l'un des quatre chefs qui forment le Conseil de la tribu de North Peace, qui englobe la bande de Dene Tha', le gouvernement tribal de Tallcree, la Première Nation de Beaver et la nation crie de Little Red River. Nous représentons une population d'environ 7 500 personnes vivant dans des réserves et de près de 4 000 personnes vivant hors réserve. Une bonne partie de ces gens vivent dans la région du Mackenzie, et cela inclut la population métisse. Plus de 40 % de la population de la région du Mackenzie est autochtone.
    La situation est alarmante dans le Nord. Nous avons des aînés qui vivent dans des maisons surpeuplées et qui n'ont pas la chance de vivre leurs vieux jours dans un lieu où ils ne seraient pas obligés de cuisiner ou de sa battre pour avoir un lit où dormir. Ils ne vont pas déménager dans des installations situées dans un environnement qu'ils ne connaissent pas, à l'extérieur de leur région et loin de leurs proches.
    Nous avons des aînés dans des lits de soins de longue durée, dans des hôpitaux, parce qu'il n'y a pas de places en milieu de soutien pour eux. Nos aînés et chefs spirituels sont respectés dans nos collectivités des Premières Nations, et j'estime qu'il est de mon devoir de chef de faire ce que je peux pour veiller à ce qu'ils soient traités avec le respect qu'ils méritent.
    Avant, la jeune génération s'occupait de nos aînés, mais la crise sociale entourant la toxicomanie, les opioïdes, les pénuries de logements et le chômage a créé un environnement où les jeunes membres des familles sont incapables de s'occuper de nos aînés.
    Nous croyons qu'il est important que le Comité porte son regard sur l'ensemble des besoins réels de soins dans notre région. Les soins de longue durée sont un élément. Les soins à domicile en sont un autre. Et le logement, un autre encore. J'appuie des installations inclusives sur le plan culturel, compte tenu de notre infrastructure. L'emplacement qui convient le mieux est à Fort Vermilion. Nous vivons dans des régions rurales et éloignées où il est difficile d'obtenir des soins de santé, ce qui fait que les soins de santé doivent être accessibles dans les installations ainsi qu'avant l'entrée dans le système de soins de santé.
    Notre espérance de vie est inférieure dans le Nord, par rapport à de nombreuses autres régions, à cause des conditions socioéconomiques déplorables, et nos résidents ont besoin d'avoir accès à des foyers pour personnes âgées au moins 10 ans avant la population non autochtone. Si on nous ignore tant, c'est parce que les données des Alberta Health Services et de Santé Canada ne sont pas saisies ou suivies de la même manière, et les formules de financement se concentrent dans une très grande mesure sur les populations urbaines.
    Ce que nous voulons, et ce qu'il nous faut en ce moment, premièrement, c'est que le gouvernement du Canada et le gouvernement provincial compétent se mettent sur la même longueur d'onde concernant la collecte et le suivi des données dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques. Deuxièmement, il faudrait plusieurs analyses de rentabilisation, dont une à Fort Vermilion, pour examiner la possibilité d'un partenariat public-privé pour l'offre de services de santé inclusifs sur le plan de la culture. Troisièmement, il faut renforcer la capacité, former les personnes requises pour bâtir les installations, ainsi que veiller à la dotation, à la gestion et au soutien nécessaires à l'offre de soins aux aînés.
    Encore une fois, je vous remercie tous de nous avoir permis de vous renseigner sur ces installations essentielles. Merci de votre temps.

  (1645)  

    Merci. Meegwetch.
    C'est maintenant à vous deux.
    Natalie.
    J'aimerais réitérer les propos de Jeff et du chef concernant les données. La stratégie de logement de la région du Mackenzie était complète. L'évaluation de nos besoins était complète il y a quatre ans. On y disait qu'il fallait de 117 à 200 lits dans la région, et c'est encore la même chose maintenant, quatre années plus tard.
    Quand nous nous sommes penchés sur les données, nous avons constaté que les données de Santé Canada et des Alberta Health Services mesuraient les choses différemment. De plus, il y avait une différence de 2 000 personnes entre les données de Statistique Canada et celles des affaires municipales pour la région. C'est un facteur qui entre en jeu au moment d'utiliser des formules de financement fondées sur la population. C'est sans compter que la population autochtone est mesurée en fonction de 3 groupes d'âge, alors qu'on mesure la population générale en fonction de 7 à 10 groupes d'âge.
    Ce qui est important, ici, c'est que nous ne savons pas ce que nous ne savons pas. Quand le gouvernement provincial ou le gouvernement fédéral nous demande combien de lits il nous faut vraiment — avec le modèle flexible du marché actuel —, nous ne le savons pas.
    L'autre gros problème, comme Jeff l'a dit, c'est la main-d'oeuvre dans la région. Pour environ 40 % de la population — là où nous pouvons la recenser —, ce sont les soins de longue durée et les soins de soutien, ainsi que le maintien. Pour ce qui est des 13 réserves de nos quatre Premières Nations, nous avons très peu de données permettant un regroupement régional. Comme le chef l'a mentionné, que ce soit dans les réserves ou hors des réserves, notre optique est régionale. Dans la population métisse, plus de 1 000 Autochtones vivent au sein de la collectivité, et bien sûr, il y a la collectivité de la région du Mackenzie qui est un secteur en soi.
    J'ai un joli tableau qui illustre cela, quand vous allez trouver les notes. On constate que déjà de 450 à 500 personnes ont des soins à domicile. Les soins à domiciles sont l'étape suivante du maintien dans le système des soins de santé. C'est dans ce domaine particulier que nous manquons de personnel — nous manquons de préposés aux soins et d'infirmières en général. De plus, en ce qui concerne la responsabilité, nous avons rencontré les représentants de la province en plusieurs occasions, de même que des gens ici à Ottawa, et nous constatons que dans le cas de ce foyer en particulier, le dossier passe d'une personne à l'autre et d'une compétence à l'autre. Comme le chef l'a dit, nous devons avoir des partenaires pour ce dossier, et nous explorons des façons novatrices d'établir un partenariat public-privé qui permettra aux aînés de vieillir gracieusement chez eux.
     Bonjour. Je m'appelle Bill Boese. Je pense bien représenter l'histoire qu'ils relatent. Nous sommes déménagés à Fort Vermilion en 1963. C'est là que j'ai grandi. Mes parents ont établi une ferme à cet endroit. Quand ils ont pris leur retraite, ils ont dû aller au sud pour obtenir des soins de santé. Faute de possibilités dans le Nord, ils ont abouti à Red Deer.
    Je ne crois pas que les choses aient beaucoup changé depuis. Plusieurs installations ont été construites là-bas, depuis. Elles affichent complet. Il est très difficile d'y entrer, et la situation ne change pas. Les parents vieillissants de plusieurs de mes amis continuent de s'en aller ailleurs pour vivre dans des établissements de soins. C'est ainsi que cela se passe là-bas.
    Il y a des dizaines d'histoires comme celle de ma famille, et je m'attends à ce que le nombre soit encore plus grand que cela dans les Premières Nations. Les gens ne veulent pas s'éloigner de leur famille et de leurs racines culturelles.
    Vous n'avez pas nos notes, qui comportent une liste de choses. Je vais donc vous en faire la lecture, en guise de conclusion.
    Nous recommandons l'établissement d'indicateurs pour le Nord qui comportent des données quantitatives et qualitatives reflétant véritablement les réalités des régions nordiques et leurs besoins particuliers, afin de favoriser l'aménagement d'une résidence pour aînés durable et adaptée aux réalités culturelles et aux différences entre les sexes, en particulier pour les membres des Premières Nations et les Métis qui sont majoritaires dans le secteur. Le gouvernement devrait travailler avec les gouvernements provinciaux afin de collaborer activement à l'uniformisation des ensembles de données de base et veiller à ce que les données régionales soient justes en y incluant les indicateurs relatifs au Nord, l'accent étant mis sur les besoins non satisfaits et sur les populations mal desservies.
    En vue de l'aménagement d'une résidence pour personnes âgées inclusive sur le plan culturel qui desservirait Fort Vermilion et le secteur, un groupe de travail interministériel devrait travailler à une analyse de rentabilisation fondée sur les indicateurs relatifs au Nord et donner au personnel la responsabilité et le pouvoir de prendre des décisions visant la croissance de leur cercle d'influence plutôt que de déléguer les responsabilités à d'autres ministères. L'analyse de rentabilisation comporterait des scénarios pour une résidence durable, inclusive sur le plan culturel et adaptée à la culture et à la spécificité des sexes, en particulier pour les membres des Premières Nations et les Métis qui sont majoritaires dans le secteur. L'analyse engloberait des options novatrices de partenariat public-privé ainsi que des stratégies pour recruter des employés et les maintenir en poste.
    Nous aimerions faire partie des 100 bénéficiaires dont M. Keith Conn a parlé lors de la réunion du 24 mai, quand il a parlé d'un arrangement de type subvention sur une période de 10 ans répondant aux besoins de la collectivité en fonction de ses priorités. L'analyse de rentabilisation tiendrait compte des options de développement économique à l'intérieur de l'établissement ainsi que des options relatives à la prestation de services. L'analyse de rentabilisation comporterait également des options visant la prestation du bon niveau de service, au bon moment, à l'intention du bon patient.
    Il faut combler les lacunes dans les données d'information. Il nous faut une solution pour répondre au besoin immédiat d'une résidence pour aînés à Fort Vermilion.
    Troisièmement, pour renforcer les capacités des travailleurs en soins de santé, il est important que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux s'engagent davantage sur le plan de la formation et des résultats dans les régions rurales et éloignées. Le recrutement et le maintien en poste des employés peuvent motiver l'offre de services privés.
    Nous avons un bon exemple de cela dans le Nord, en ce moment. Un entrepreneur s'est mis à construire des maisons prêtes à déménager. Elles sont construites par des gens dans la réserve en vue d'être déménagées ailleurs dans la réserve. C'est un excellent exemple de ce qui peut découler de nos efforts.
    De la formation supplémentaire peut contribuer à la capacité des Premières Nations de fournir efficacement des soins de santé dans leurs collectivités.
    Enfin, les bienfaits quantitatifs directs seraient des ensembles de données pertinentes à la région; des stratégies visant à faire intervenir des partenaires traditionnels et non traditionnels dans l'aménagement d'un établissement durable: la prise en charge par les collectivités locales, l'emploi et le développement des entreprises; un sentiment de fierté autochtone par l'intégration de valeurs inclusives dans l'établissement et dans l'élaboration de l'étude; et la promotion du vieillissement dans la dignité, ainsi que la promotion de la résidence pour aînés desservant Fort Vermilion et le secteur comme modèle pour d'autres collectivités rurales isolées ou éloignées du Nord du Canada.
    De plus, il est possible d'établir des partenariats avec le secteur privé pour obtenir du financement privé et profiter d'une image de marque, ainsi qu'avec les collèges communautaires offrant la formation professionnelle pour les emplois requis.

  (1650)  

    C'est excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons entamer les séries de questions. Encore une fois, je vous demande de préciser la personne à laquelle vous voulez parler.
    C'est le député Will Amos qui va commencer.
    Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins. Nous avons entendu d'excellents exposés. Cela nous aide à comprendre certains des besoins, en particulier dans les collectivités les plus isolées.
    Chef Meneen, qu'est-ce que vous entendez de la part des aînés de la collectivité? Qu'est-ce qu'ils vous disent à propos des besoins — de leurs besoins à mesure qu'ils vieillissent — non seulement en ce qui concerne l'infrastructure qui est nécessaire, mais aussi la façon dont ils veulent vivre, la façon dont ils veulent vieillir au sein de leurs collectivités? Quel est votre point de vue sur la façon dont le gouvernement fédéral peut le mieux soutenir cela?
    Je dirais que dans notre culture, nos aînés aiment être avec leurs petits-enfants et leurs enfants, et simplement faire partie de leur famille et être inclus dans tout ce qui s'y passe. Je pense que s'ils sont obligés de quitter la collectivité pour s'installer à deux heures et demie ou trois heures et demie de route, là où ils ne font plus partie de la famille... Les membres des Premières Nations sont élevés à l'intérieur d'une grande famille, alors je pense que s'ils peuvent être près de chez eux, là où la parenté, les enfants et les petits-enfants peuvent les visiter, et où ils sentent qu'ils font partie de cela, ils vont vieillir gracieusement.
    D'après ce qu'ils me disent, je crois qu'il est important pour eux d'être dans une résidence inclusive sur le plan culturel, où l'on sert la nourriture qu'ils aiment et où ils peuvent faire partie d'un groupe et interagir avec les autres. Dans notre culture, parler, rire et se visiter sont des choses qui prennent beaucoup de place. Nous sommes ainsi. Je pense qu'avoir une résidence où ils peuvent vivre ainsi est très important. Pour moi, avoir ce groupe de gens — Jeff, Bill et Natalie —, et pouvoir réaliser cet établissement... Il y a aussi les Métis, car il ne faut laisser personne de côté. Dans notre culture, nous ne laissons personne de côté. Nous incluons tout le monde dans cela.
     Je crois qu'il est très important d'avoir cette résidence, dans notre région nordique. Nous voyons l'énorme besoin, et nos aînés aussi, et ils nous poussent pour que nous réalisions cette résidence.
    Je vous remercie de cette question.

  (1655)  

    Merci.
    Quelles sont certaines des choses que le gouvernement fédéral devrait éviter de faire, au moment d'envisager le rapport que nous préparons? Nous allons entendre des témoignages de partout au pays — des groupes autochtones d'un océan à l'autre. Je suis sûr qu'il y aurait de bonnes suggestions soulignant que vous ne voulez pas que le gouvernement fédéral aille de l'avant avec des soins de santé de longue durée si c'est l'orientation qu'il veut prendre.
    Ce que je vois, en tant que membre des Premières Nations et que chef, c'est qu'en général, on nous dit comment faire les choses. Je dis depuis un bon moment aux ministres que nous voulons être inclus aux étapes de la planification et des discussions de ce que sera cet établissement. Nous voulons participer, nous voulons le construire, et vous devriez nous laisser le faire. Nous allons faire tout ce que nous avons à faire, mais ne nous dites pas comment le construire. Nous allons le construire.
    La semaine passée, nous avons appris que d'ici 2036, le nombre d'aînés dans les réserves, partout au Canada, pourrait plus que doubler. Je ne peux même pas imaginer ce que cela représente comme efforts, pour faire face à cette poussée démographique à venir. Comment voyez-vous votre collectivité faire face à la population croissante des aînés ayant besoin de ce type de soins? Ma question s'adresse aux autres aussi.
    J'estime de mon côté que nous n'avons pas la capacité. Nous avons une pénurie de logements. Nous avons des logements surpeuplés. Nous avons besoin d'installations comme cela pour placer nos aînés là où on pourra s'occuper d'eux. Nous ne pouvons pas nous occuper d'eux à cause de tous les problèmes auxquels nous faisons déjà face au quotidien. Je pense qu'il est important que nous ayons des installations où nos aînés pourront aller et vivre heureux.
    Merci.
    Est-ce que les autres témoins ont des observations à faire en réponse à cela?
    Oui, si vous me le permettez.
    Il faut tenir compte du fait qu'il y a plus de 12 000 membres des Premières Nations dans la région, en plus de 1 000 Métis. Donc, la population professionnelle tourne autour de 24 000 personnes. Ce qu'il est important de retenir, c'est que la construction de l'établissement n'est qu'un élément; l'établissement doit être suffisamment flexible pour s'adapter à la démographie dans 5, 20 ou 30 ans.
    Pour avoir travaillé avec la nation métisse, je sais qu'un établissement de soins de longue durée d'environ 20 unités a été construit et qu'il est sous-utilisé. Les autorités ont de la difficulté à recruter des infirmières et du personnel pour assurer la sécurité de l'établissement jour et nuit. De plus, il y a un goulot d'étranglement pour l'obtention d'un permis de manipulation des aliments, ce qui a un impact sur le nombre d'individus qui peuvent se trouver dans l'établissement.
    Concernant ce que propose le chef en matière de capacité, une de nos recommandations est d'examiner, dans le cadre de la planification à long terme, la capacité de formation en soins de santé aux niveaux auxquels on ne pense pas habituellement. Il y a les conseils, la province et vous, mais il est également très important d'examiner d'autres modèles semblables à un partenariat public-privé pour tenir compte de tous ces éléments.
    Merci.
    Madame la présidente, s'il reste du temps à mon intervention, j'aimerais l'offrir à mon collègue, le député Robert-Falcon Ouellette.
    Il vous reste entre 30 et 45 secondes.
    Dans ce cas, j'ai terminé.
    Merci.
    D'accord. Monsieur Viersen, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, aux témoins d'avoir accepté notre invitation.
    Bill, j'aimerais confirmer une chose. Vous dites que vos parents devaient se rendre jusqu'à Red Deer. On parle d'une distance de combien de kilomètres?
    Red Deer est à environ 800 ou 900 kilomètres.
    Et c'est un trajet de combien d'heures?
    On parle de 10 heures de route.
    Jeff, à plusieurs reprises, vous avez fait référence aux « indicateurs relatifs au Nord ». C'est une très bonne expression. Il suffit de comprendre ce que cela signifie. Est-ce que cela sert à mesurer le nombre de personnes ayant besoin de soins ou les niveaux de soins? Pourriez-vous nous fournir un peu plus de détails?
    Certainement. Merci, Arnold.

  (1700)  

    Désolé, Jeff, je ne voulais pas vous mettre sur la sellette.
    Non, ça va.
    Une fois que nous avons atteint 50 000 pieds par rapport aux indicateurs relatifs au Nord, ce que nous avons compris au cours des deux dernières années, environ, alors que le processus s'accélérait au cours des 10 dernières années, c'est que le gouvernement municipal a ses propres statistiques, tout comme les gouvernements provincial et fédéral. Nous avons défini et reconnu les écarts qui existent entre ces trois ordres de gouvernement.
    Nous souhaitons comparer des pommes avec des pommes. Nous savons ce qu'il nous faut, par exemple, un établissement de 25 unités de niveau DSL2 pour un nombre X de personnes, de niveau DSL3 pour un nombre Y de personnes et des soins de longue durée pour un nombre Z. J'aimerais vous dire, monsieur Viersen, à quoi cela correspond exactement, mais actuellement, je peux vous garantir que les données ne me le permettent pas.
    Je ne saurais vous dire à quel point les données sont faussées en raison de ces écarts. Natalie pourrait certainement vous aider à ce sujet.
    Natalie, auriez-vous quelque chose à ajouter?
    Comme je l'ai souligné, pour la région, il existe quatre ensembles de données très faussées. Je sais que la province travaille à saisir les aspects uniques de la population autochtone de la région ainsi que dans la province.
    Dans le cadre d'une téléconférence la semaine dernière, il a été convenu qu'un pourcentage d'erreur de 5 % était acceptable. Je trouve cette déclaration intéressante. Ils font de leur mieux, mais ils n'ont pas de données sur lesquelles s'appuyer. On parle de 5 % de quoi? Parle-t-on de 100 personnes, de 200 personnes ou de 500 personnes pour les soins à domicile? Cela peut avoir une incidence importante sur le nombre de lits d'un établissement et l'adaptabilité de celui-ci.
    À mon avis, les indicateurs relatifs au Nord... Nous savons que la population autochtone en Alberta croît à un taux quatre fois plus élevé que la moyenne nationale et, dans la région, à un taux six fois plus élevé que la population non autochtone. Nous savons également que l'âge moyen est de huit ans inférieur au reste de la population. Toutes ces données ont un impact sur les listes d'attente et la prévalence des maladies chroniques.
    Lorsque l'on parle des indicateurs relatifs au Nord, on parle des conditions socioéconomiques et du mélange culturel unique des mennonites, Métis, membres des Premières Nations et Autochtones qui vivent dans la région. On a même relevé que les Autochtones qui vivent à l'extérieur des réserves ont un taux de maladies chroniques plus élevé que la population en général. Tous ces exemples démontrent que la formule — une formule de financement utilisée pour effectuer les calculs — ne fonctionne pas pour les communautés rurales, éloignées et du Nord.
    Est-ce que cela répond à votre question, monsieur Viersen?
    Je crois que oui.
    Une des choses intéressantes concernant les indicateurs relatifs au Nord, c'est que, bien souvent, ceux qui conviennent à la région d'Edmonton ne conviennent pas à la région du Nord de l'Alberta. Auriez-vous des exemples semblables pour votre région en particulier?
    Concernant la population en général — et Jeff en a parlé dans son exposé —, les données de la province et du fédéral ne nous permettent pas de comparer des pommes avec des pommes.
    Alberta Health Services recueille des données dans le cadre du programme Meditech. Affaires autochtones, au gouvernement fédéral, recueille ses données dans le cadre d'un autre programme. Nous n'avons aucune donnée sur des listes d'attente comparables d'autres communautés, mais nous savons qu'il est impossible d'appeler un taxi ou d'avoir accès à des médicaments.
    Les personnes âgées et les aînés ne choisissent pas de rester plus longtemps à leur domicile; ils y sont forcés, car ils n'ont nulle part d'autre où aller. S'ils choisissent de quitter, ils doivent se rendre à deux ou trois heures plus loin, à Peace River. Si votre nom figure sur une liste d'attente, qu'une place se libère, mais que vous choisissez de ne pas y aller, ce que l'on appelle un refus, vous tombez plus loin sur la liste d'attente.
    Ce sont toutes des choses dont il faut tenir compte. N'oubliez pas que le conseil est composé de bénévoles. Ces gens n'ont aucune formation médicale. À notre connaissance, certaines des données médicales concrètes qui devraient exister et que l'on devrait pouvoir comparer avec d'autres données n'existent pas.
    J'aimerais maintenant m'adresser au chef Meneen. On m'a souvent dit, notamment en ce qui a trait aux établissements privés, que certains conseils du logement ferment des petits établissements et en construisent de plus gros dans de grands centres.
    Avez-vous eu des cas, dans vos communautés, où des aînés qui vivaient dans un petit établissement ont été déménagés dans un centre plus grand, parce que le petit établissement où ils se trouvaient a été fermé?

  (1705)  

    Non, je ne le crois pas. Il n'y a actuellement qu'un seul établissement dans le Nord, à La Crète. C'est le seul. Un de nos aînés s'y trouve.
    D'accord.
    Si je comprends bien, l'établissement de La Crète, est un établissement privé financé par le gouvernement de l'Alberta.
    Je crois que oui.
    Il s'agit donc d'un établissement privé où les frais pour ceux qui y habitent sont couverts par le gouvernement de l'Alberta.
    On compte 122 lits dans la région et ils sont tous occupés.
    D'accord.
    L'un d'entre vous aurait-il quelque chose à ajouter? Il reste 30 secondes à mon intervention.
    Merci.
    Madame Blaney, vous avez la parole.
    Merci beaucoup à vous tous d'avoir accepté notre invitation. J'ai bien aimé vos exposés.
    Je représente une circonscription rurale en Colombie-Britannique et certaines des communautés autochtones de ma circonscription sont très éloignées. Il faut prendre un bateau jusqu'à une route pour pouvoir s'y rendre. Donc, nous comprenons très bien les problèmes d'accessibilité et les défis auxquels bon nombre de personnes âgées sont confrontées lorsqu'elles quittent la communauté. J'ai entendu des histoires déchirantes au sujet de personnes âgées — surtout des aînés atteints de démence qui, lorsqu'ils sont loin de chez eux, oublient l'anglais et se remettent à parler leur langue maternelle, langue que personne d'autre ne parle — et les défis associés à la prestation de soins. Je comprends très bien ce que vous dites.
    Natalie, j'ai bien aimé ce que vous avez dit, soit que nous ignorons ce que nous ignorons. Je comprends et d'autres avant vous nous ont parlé de ce problème de données.
    Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails sur ce que le gouvernement fédéral — puisque vous témoignez devant un comité fédéral — pourrait faire pour nous aider à mieux comprendre la situation dans ces communautés?
    Je crois qu'il faut la participation de plusieurs ordres. Pour en arriver à établir une politique adéquate et à prendre les bonnes décisions, nous croyons que les gouvernements régionaux, des Premières Nations, autochtones, provinciaux et fédéral doivent travailler ensemble.
    Une de nos recommandations est de normaliser les données essentielles et de permettre ensuite une certaine souplesse afin de pouvoir ajouter d'autres données en fonction des besoins régionaux. Comme vous l'avez souligné, certaines communautés dans le Nord ne sont accessibles que par barge ou par avion.
    Cela va au-delà de... Le mot « collaboration » est parfois surutilisé. Je vais donc parler de « partenariats » où les partenaires s'entendent sur ce qui constitue des données essentielles et la façon dont les choses vont fonctionner. Ensuite, il est possible de mieux planifier les établissements et partenariats. Au sud de la région en question, une municipalité a décidé de construire son propre établissement. Nous avons appris d'Alberta Health Services que la municipalité ignore comment gérer l'établissement, car elle a tout fait elle-même. Donc, les choses ne concordent pas.
    À mon avis, la même situation se reproduira s'il s'agit d'un projet fédéral ou provincial. Selon nous, la solution serait de créer un groupe de travail ou une équipe multidisciplinaire.
    D'accord. Merci.
    J'entends également parler des sommes d'argent qui ont été investies dans la recherche pour vous permettre d'avoir des données utiles.
    Je me demande ce qui bloque. Les recherches sont terminées. Pourriez-vous me dire pourquoi nous attendons encore quatre ans plus tard? Qu'est-ce qui n'a pas été fait? Qu'est-ce qui bloque? Pourquoi y a-t-il un fossé?
    N'importe lequel d'entre vous peut me répondre. J'ignore qui serait le mieux placé.
    Ici le chef Meneen. Puis-je répondre?
    J'aimerais revenir à la question de ce que le gouvernement fédéral devrait faire. À mon avis, le gouvernement fédéral devrait regarder ce que nous avons fait.
    Nous avons créé des partenariats et avons communiqué avec Alberta Health, Santé Canada et le gouvernement fédéral. Nous avons réuni un groupe de personnes plus que disposées à collaborer à la réalisation de ce projet. Nous avons fait notre part et il est temps pour le gouvernement de regarder ce que nous avons fait et d'agir le plus tôt possible.
    Je dis toujours qu'il est temps de s'activer. On semble faire du surplace depuis un certain temps et je crois qu'il est temps d'agir. Nous avons fait nos devoirs et il reste encore du travail à faire. Je crois qu'il faut agir dès aujourd'hui.
    Merci.
    J'aimerais faire écho aux propos du chef et ajouter que beaucoup de travail a été fait et qu'il y a encore du travail à faire. Mais, comme le disait Nathalie, nous ne sommes que des bénévoles. Je ne suis ni médecin, ni infirmier, ni statisticien. Nous ne sommes qu'un groupe de gens passionnés qui savent que c'est maintenant que nous avons des besoins urgents, pas en 2036 ou en 2031, selon l'ensemble de données utilisé. Si nous ne prenons pas dès maintenant les devants dans ce dossier, ce sera pire plus tard. Nous souhaitons vraiment obtenir votre aide.

  (1710)  

    Oui.
    Récemment, dans le cadre d'un autre comité, j'ai participé à une étude où il était question d'une stratégie nationale pour les aînés et de la nécessité d'amorcer la planification, car il s'agit d'une population grandissante. Les populations autochtones ont été identifiées parmi les populations les plus vulnérables.
    Comme je l'ai dit, je représente une circonscription qui compte des communautés très rurales et éloignées. Pourriez-vous me dire quels sont les avantages? Je comprends très bien lorsque vous parlez d'un trajet de neuf heures de route. Il est très important de le souligner. À mon avis, les gens à Ottawa ne comprennent pas toujours les réalités des communautés rurales et à quel point il est important de trouver des solutions créatives, ce que vous faites, à mon avis, pour construire des établissements qui permettront aux gens de rester près de chez eux.
    Pourriez-vous nous parler un peu des défis auxquels votre groupe de bénévoles est confronté et ce que pourrait faire le gouvernement fédéral pour être plus réceptif?
    Allez-y, Jeff.
    J'essaie de voir par où commencer.
    Je vais vous raconter une brève histoire. Marguerite Peecheemow est une dame de plus de 80 ans qui nous tient très à coeur. Elle a grandi à Fox Lake. Il s'agit de l'une de ces communautés uniquement accessibles par barge ou par avion ou par une route de glace l'hiver.
    Elle vivait à l'établissement de soins de longue durée de La Crète située à environ trois ou quatre heures de route de sa famille et de ses amis. En raison du manque d'inclusivité culturelle, si je puis m'exprimer ainsi, nous étions nombreux à nous rendre à La Crète pour passer du temps avec elle en l'absence de sa famille qui ne pouvait faire le trajet en raison de conditions économiques et de problèmes d'accessibilité.
    Disons que Marguerite s'est gracieusement brisé la hanche et que les autorités ont dû la relocaliser à Fort Vermilion. Elle y est beaucoup plus heureuse, car elle est un peu plus près de sa famille.
    Selon son témoignage, elle s'est brisé la hanche en raison des installations débordantes et parce que le personnel ne pouvait pas se rendre à elle et prendre soin d'elle. Comme je l'ai dit plus tôt, nous manquons de personnel. Une de nos trois recommandations est d'étudier comment accroître l'éducation et la formation dans la région. C'est en raison d'un effet cumulatif que les gens comme Mme Peecheemow se blessent.
    Je me suis entretenu il y a quelques semaines avec un des membres de sa famille. Rien ne leur ferait plus plaisir que d'être plus près de Marguerite. La réalité, c'est que de nombreux membres des Premières Nations n'ont pas de voiture et qu'il leur est parfois impossible de faire deux ou trois heures de route, encore moins neuf heures, pour voir les membres de leur famille. J'ai appris, en m'entretenant avec cette personne, qu'elle n'avait pas vu sa propre mère depuis deux ans et demi et celle-ci se trouve dans la région. Imaginez lorsque les gens se trouvent à l'extérieur de la région.
    J'ignore comment l'expliquer autrement. Je sais que je me laisse emporter par ce genre d'histoire anecdotique, mais c'est ce que je voulais vous partager.
    Très bien.
    Nous devons passer au prochain député. Je donne la parole à M. Robert Ouellette.
    Tansi. Merci beaucoup d'être ici. Je suis heureux d'avoir l'occasion d'entendre vos témoignages.
    J'aimerais parler un peu plus de la formation. Avant, j'étais professeur à l'Université du Manitoba, et nous examinions la possibilité de mettre en place un programme lié aux soins des aînés dans les collectivités des Premières Nations.
    Quelles sont les difficultés que vous éprouvez par rapport aux niveaux de qualification et lorsque vient le temps de trouver des personnes qualifiées non seulement qui ont suivi une formation dans une profession du domaine de la santé, mais aussi qui ont une compréhension des collectivités autochtones et qui sont prêtes à vivre au sein de la collectivité pendant longtemps et à en faire partie?
    C'est une question générale qui s'adresse à tous.
    Il faut qu'il y ait un lien avec un continuum de soins. On appelle le nord de l'Alberta la zone nord. Parce que c'était tellement difficile d'attirer ou de former du personnel, même pour les postes d'aide en santé, d'infirmière auxiliaire autorisée ou d'infirmière autorisée, le directeur régional a créé un programme qui porte le nom « Grow Your Own ». Même les étudiants adultes pouvaient commencer leur formation dans la région, mais ils devaient la finir dans la municipalité de Grande Prairie, qui est située à quatre heures au sud. Ils devaient quitter leur famille pour finir leur formation; pour cette raison, il arrivait souvent qu'ils ne terminent pas les programmes d'apprentissage.
    Grow Your Own a donc été lancé, en partenariat avec le Collège Northlands. On essaie de mettre des solutions en oeuvre, mais les lacunes sont encore nombreuses. Comme Jeff l'a mentionné, deux postes d'infirmière autorisée ont été affichés pendant deux années complètes et personne ne les a pourvus. De plus, les spécialistes de certains services de soutien n'habitent pas la région; ils s'y rendent en avion occasionnellement. Il faut parfois attendre 30 jours avant d'avoir un rendez-vous.

  (1715)  

    Aussi, parfois, il faut seulement des aides-soignants.
    Oui, absolument.
    Le chef Meneen et les autres témoins ont parlé d'examiner les possibilités pour ce qui est d'offrir plus de formation à l'intérieur des réserves et des terres désignées de la région. Les aides-soignants pourraient aider les gens à rester à la maison plus longtemps. Comme vous l'avez dit, un facteur essentiel des soins de longue durée de toutes sortes, c'est qu'ils permettent aux personnes âgées et aux aînés de rester à la maison plus longtemps.
    Pendant le vol, nous parlions des médecins de l'Hôpital général St. Theresa. Ils viennent d'Afrique du Sud et ils se rendent dans la région par avion. Quatre personnes se relayent; elles ne viennent donc pas de la collectivité ou de la région. Elles peuvent parfois décider ce qui est fait et ce qui n'est pas fait dans la région.
    Chef Meneen, avez-vous quelque chose à dire concernant les exigences en matière de formation qui existent dans votre collectivité de Fort Vermilion, en Alberta?
    Oui, c'est important que nous formions nos propres employés parce qu'évidemment, nous voulons que nos établissements soient inclusifs sur le plan culturel. Il faut que les employés parlent déné et cri. Si un emploi les attend, les gens de notre collectivité... Le problème dans notre région, c'est que les jeunes vont étudier ailleurs. Ils reçoivent une éducation, mais aucun emploi ne les attend dans notre région parce qu'il n'y a rien ici. Ils partent donc tous pour aller travailler ailleurs.
    Nous discutons avec Alberta Health Services, et notre députée provinciale, Danielle Larivee, appuie aussi la mise en place d'un programme de formation qui nous permettrait d'accueillir des étudiants d'ici et de les faire travailler dans cet établissement.
    Il y a une remise de diplômes la semaine prochaine. Si je m'y rendais et je disais aux étudiants que j'ai un emploi à leur offrir, mais que je voudrais qu'ils suivent une formation à cette école pendant le nombre d'années nécessaire pour qu'ils puissent travailler ici, où ils pourraient prendre soin de nos grands-parents, de nos aînés, d'après moi, les gens afflueraient de toute la région pour venir s'occuper de nos aînés.
    Vous n'auriez pas à faire venir par avion des personnes de l'extérieur pour prendre soin d'eux.
    J'aimerais aussi que vous me parliez des ententes de financement qui sont nécessaires au succès des soins des aînés, des ententes qui permettent de réduire les coûts et d'éviter d'envoyer les personnes à l'extérieur de leur communauté, et grâce auxquelles les gens peuvent rester à la maison avec leur famille et poursuivre leur vie tout en recevant des soins continus. Pouvez-vous nous dire à combien devrait s'élever la contribution du gouvernement fédéral, celle de la province et celle de la collectivité?
    À quoi devrait ressembler la collaboration relativement à ces ententes de financement?
    Le gouvernement fédéral, Alberta Health Services et la province pourraient fournir une contribution égale. La province s'est montrée très ouverte dans toutes les discussions que nous avons eues avec elle et elle est vraiment prête à travailler avec les Premières Nations. Je pourrais lui faire une proposition et lui dire: « Voici le coût. Pouvez-vous en payer un quart ou la moitié ou une partie quelconque pour former les gens afin qu'ils puissent travailler dans un établissement? » D'après moi, elle serait tout à fait ouverte à cela et le prix ne ferait peur à personne.
    Mme Gibson, suivie de M. Boese.
    Différents modèles peuvent aussi être examinés. L'étude qui a été faite en 2014 inclut des données fiables qui auraient dû être utilisées, mais qui n'ont jamais mené à des actions. Cette étude montre que près de 35 % de la population est à faible revenu, ce qui comprend les personnes âgées à faible revenu. Lorsque nous essayons de trouver des façons d'organiser les niveaux de soutien du revenu et d'aller chercher ce soutien dans la région, nous devons examiner la recherche et tenir compte des conditions socioéconomiques.
    Il existe aussi d'autres modèles en Alberta et au pays. Avec Housing as a Business, HaaB, les logements sont au coeur du projet, mais vous pouvez aussi lancer une entreprise connexe d'aménagement paysager, de construction de terrasses, de peinture ou de toiture; on génère donc également des revenus.
    C'est ce genre de modèle que nous avons examiné par rapport à la durabilité, aux possibilités d'emploi et au renforcement des capacités. Les données concernant l'achèvement de tels programmes chez les Autochtones ne sont pas toujours très bonnes, et cela peut être dû à la non-détention d'un permis de conduire ou à d'autres circonstances. Il faut tenir compte de tout cela, non seulement pour le foyer à long terme, mais aussi pour l'établissement même.

  (1720)  

    Je donne maintenant la parole à Mme Cathy McLeod.
    Je remercie tous les témoins et je les félicite de s'être réunis afin de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux besoins de leur communauté.
    J'ai tendance à croire que le gouvernement fédéral devrait être plus ouvert aux solutions pilotées par la communauté. Nous devrions simplement avoir des objectifs. Parfois, les solutions universelles ne sont pas si universelles que cela. Nous devrions peut-être établir des normes liées à nos objectifs, puis laisser de la place à la créativité et à la souplesse; à mon sens, c'est quelque chose que nous pourrions prendre en considération lorsque nous préparerons notre rapport.
    Quelqu'un a dit que le temps était venu de faire quelque chose. Ma question est: que faut-il faire? Vous avez dit que vous étiez au point mort. Selon vous, quelle est la prochaine étape que vous devriez franchir?
    Je peux répondre.
    Je sais que vous n'avez pas encore reçu les notes, mais juste pour répéter ce que M. Boese a dit, selon nous, les prochaines étapes sont nos trois recommandations: établir les indicateurs relatifs au Nord, faire une analyse de rentabilisation inclusive sur le plan culturel pour l'établissement et commencer à renforcer les capacités des travailleurs en soins de santé dans le Nord.
    Un terrain a-t-il été réservé pour l'établissement? Avez-vous un plan d'aménagement? Êtes-vous rendus à l'étape d'un plan détaillé?
    Oui, un terrain a été réservé, mais nous ne sommes pas encore rendus à l'étape du plan d'aménagement. Nous aimerions poursuivre les recherches pour cerner exactement quels sont les besoins actuels et futurs afin que le plan traduise une vision à long terme et non seulement à court terme.
    La situation était un peu différente en Colombie-Britannique, mais je sais que B.C. Housing et peut-être la SCHL offrent du financement pour les prochaines étapes, comme l'analyse approfondie, qui doit aller plus loin que ce que les bénévoles peuvent faire. Avez-vous exploré cette possibilité?
    Nous la considérons certainement. La SCHL fait partie du groupe de travail stratégique que nous avons mis en place avec des ministères de la province et du gouvernement fédéral. De fait, nous tiendrons une autre réunion demain et la SCHL sera présente, mais nous n'avons pas encore établi exactement quelle serait sa contribution.
    Je sais qu'elle a fourni les capitaux d'amorçage à un projet de ma circonscription, ce qui lui a permis de passer à la prochaine étape.
    Je vois que Natalie aimerait intervenir.
    J'aimerais en dire un peu plus sur le groupe de travail. Le groupe de travail est né de réunions que nous avons eues avec AANC, les services d'emploi à Ottawa, ainsi que les ministres de la Santé et des Relations avec les Autochtones de l'Alberta. Les membres de ce groupe ont parlé du besoin d'inclure différents ministères dans le groupe de travail.
    En Alberta, nous avons le ministère des Aînés et du Logement, qui reçoit du financement de la SCHL. Depuis, nous avons tenu trois conférences téléphoniques; nous avons réuni les groupes divers pour voir à qui nous devrions nous adresser. Alberta Health Services nous a dirigés vers Santé Canada, qui nous a dirigés vers le ministère des Aînés et du Logement de l'Alberta. Maintenant, le groupe est réuni afin de déterminer de quel ministère nous relevons.
    C'est très intéressant de suivre la progression parce que nous ne sommes toujours pas certains, et les différents organismes non plus. Le groupe de travail en est à l'étape préliminaire d'établir quelle est la prochaine étape. C'est excitant que 36 personnes aient participé au dernier appel. Le chef Meneen nous encourage très bien: « Quel a été le résultat? » « C'était un bon appel. » « Quel a été le résultat? »
    Nous ne sommes pas encore rendus là. Durant votre 109e séance, M. Conn a parlé des 100 bénéficiaires de projets pilotes. Nous aimerions en faire partie, s'il vous plaît. Nous ajouterons cela à nos recommandations.

  (1725)  

    Par rapport aux autres programmes qui sont liés au soutien des personnes âgées ou des aînés recevant des soins, actuellement, les volets sont très différents. Je présume donc qu'Alberta Health Services doit s'occuper des soins à l'extérieur des réserves...
    Vous devrez répondre oui ou non, car le temps est écoulé.
    ... et que les services aux Autochtones doivent s'occuper des soins à l'intérieur des réserves. Est-ce la situation actuelle ou y a-t-il un mélange?
    Il y a très peu de mélange.
    Merci.
    Le dernier intervenant est M. Mike Bossio.
    De nombreuses questions ont déjà été posées, et j'aimerais obtenir quelques précisions. M. Robert Ouellette a posé plusieurs questions sur la formation, et j'aimerais mieux comprendre ce qui se passe sur le terrain.
    Selon ce que j'ai compris, à l'heure actuelle, aucun travailleur de soutien en santé ne vient des collectivités mêmes. Ai-je raison lorsque je dis qu'ils viennent tous de l'extérieur? Je parle de la prestation des soins à domicile.
    Il y a quelque temps, nous avons eu des problèmes avec les services de dialyse dans le Nord. Tous les centres de santé ont déjà des travailleurs de la santé. Nous avons deux infirmières à Tallcree. Chaque collectivité compte deux ou trois infirmières. J'ai offert de prêter nos infirmières à l'établissement à un moment donné pour qu'elles puissent appuyer la formation ou accomplir n'importe quelle tâche requise.
    À l'heure actuelle, ce qui nous empêche de lancer pleinement la formation, c'est que le gouvernement ne nous a pas encore dit qu'il allait nous appuyer et nous construire un établissement. Si j'obtenais cette confirmation, je pourrais m'adresser aux ministres ou aux personnes concernées et leur dire que je dois commencer à former les employés dès maintenant. Nous ne sommes pas encore rendus au point où je peux commencer à assembler les morceaux qui doivent être assemblés.
    Aujourd'hui, des services de soins à domicile sont-ils offerts dans chacune des collectivités?
    Oui.
    Des aidants et des professionnels de la santé se rendent à domicile pour fournir des soins, mais il n'y a pas de soins à long terme.
    Oui. Je suis l'un des chefs du North Peace Tribal Council, et nous avons un groupe de coordination qui fournit actuellement du soutien aux collectivités.
    En ce moment, ces services sont-ils fournis strictement par des Autochtones?
    Oui, la plupart sont des Autochtones.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup d'être venus et de nous avoir fourni des renseignements, tant en personne que par vidéoconférence. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous préparerons le rapport durant l'été, et il sera publié à l'automne. Merci beaucoup pour votre participation.
    Meegwetch.
    La séance est levée.
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