Passer au contenu
;

INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 062 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 juin 2017

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Je voudrais d'abord signaler que nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin.
     Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mercredi 26 octobre 2016, le Comité reprend son étude de l'objet du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription.
    De nombreuses personnes sont venues de loin pour témoigner devant notre comité et je voudrais donc que nous commencions nos travaux.
    Nous accordons 10 minutes pour chaque exposé. Certains groupes en feront un tandis que d'autres en feront deux. C'est à vous de voir comment vous partager votre temps. Nous allons respecter l'horaire de façon assez rigoureuse. Je vais essayer de vous avertir à l'avance — trois minutes, deux minutes, une minute avant la fin — alors jetez un coup d'oeil de mon côté car je vais essayer de vous signaler combien de temps il vous reste.
    Notre premier groupe comprend des représentants de l'Association de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador; Viviane Michel et Cynthia Smith, de Femmes autochtones du Québec et Lynn Gehl.
    Le chef Picard va témoigner par téléconférence.
    M. Norton se trouve devant nous.
    Vous pourriez peut-être commencer et nous dire comment vous voudriez procéder.
    Le chef Picard et moi-même avons convenu de nous partager une partie du temps. Il va commencer par une déclaration au nom de l'APNQL. Je terminerai ensuite l'exposé.
    Le mien va durer un peu plus de 10 minutes, car nous avons convenu que le chef Picard sera bref.
    Nous allons commencer par vous, chef. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente et membres du comité.
    Je tiens à mentionner le fait que les délibérations se déroulent sur le territoire traditionnel algonquin non cédé.
    Je désire aussi saluer les autres groupes qui témoignent ce matin, ainsi que le grand chef Norton de la nation Mohawk de Kahnawake.
    Vous avez entendu, plus tôt cette semaine, le chef Rick O'Bomsawin, de la nation abénaquise et de la communauté d'Odanak, qui a présenté son point de vue au nom de sa communauté d'où émane le cas qui nous intéresse, l'affaire Descheneaux. Ce matin, vous entendrez le point de vue d'une autre communauté de notre région et nous savons qu'il s'agit d'une question très délicate, qui préoccupe la majorité de nos nations et cela depuis un certain temps.
    Le plus triste dans tout cela, et c'est certainement le cas en ce qui concerne l'identification, l'appartenance à la bande et les divers problèmes des communautés, c'est que souvent, le gouvernement agit sur l'ordre des tribunaux. Il est vraiment triste que nous en soyons là et cela montre que trop souvent, les manquements du processus politique nous forcent à nous adresser aux tribunaux en dernier recours.
    Comme je l'ai dit, c'est une question très délicate. Dans notre région, nous avons essayé d'animer des réunions à ce sujet compte tenu de la décision du tribunal, et en tant qu'entité ou organisme régional, nous avons essayé de fournir aux communautés tout le temps et l'espace nécessaires pour exprimer leur point de vue afin de le transmettre au gouvernement dans toute la mesure du possible. C'est ce que nous avons fait après les consultations qui ont eu lieu à Montréal, en septembre 2016, et nous avons ensuite envoyé une lettre au premier ministre, en octobre de l'année dernière. La lettre dit clairement quelle est la position de notre région qui s'efforce toujours de refléter et de respecter la position des différentes communautés.
    La dernière chose que je dirais avant de céder la parole au grand chef Norton est que malgré les divergences d'opinions, nous pouvons tous convenir — et telle est notre position — que nos communautés et nos dirigeants sont les seuls à pouvoir établir la liste de leurs membres et c'est une position que nous appuyons tous.
    Nous allons présenter au comité, avant la fin de la journée de demain, une déclaration écrite qui complétera nos observations de ce matin.
    Encore une fois, veuillez m'excuser de ne pas être présent en personne. Je crois important que le grand chef Norton témoigne en personne au nom de sa communauté et de sa nation.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
(0850)
    Merci beaucoup.
    Merci, Ghislain.
    Madame la présidente, vous devez avoir reçu la copie d'une lettre que nous vous avons envoyée. Elle devrait vous être arrivée hier. Elle décrit notre situation, notre position et notre mécontentement très sincère à l'égard de la façon dont les choses ont progressé. Quoi qu'il en soit, notre position… si je suis ici aujourd'hui, c'est juste pour préciser et bien faire comprendre que quoi qu'il puisse se passer ici ou devant les tribunaux, personne ne décidera pour nous ce que nous allons faire.
    Cela réitère ce qui a été dit, la dernière fois que nous sommes venus ici, quand le chef Kahsennenhawe Sky et moi-même avons témoigné.
    La communauté a l'intention et la détermination de faire ce qu'elle doit faire. Il y a chez nous des gens qui, je peux vous le dire, s'ils étaient ici, diraient: « Peu nous importe ce que vous faites. Faites ce que vous voulez. Nous savons ce que nous devons faire et c'est ce que nous sommes en train de faire. »
    En toute sincérité, il vaut la peine de se rappeler que Kahnawake a toujours été confrontée à une situation telle que nous avons dû régler cette question. Il y a eu des moments de notre histoire où nous avons cherché à envoyer un message à tout le monde pour faire connaître notre situation. Ce n'est pas ce que je cherche à faire maintenant. Je vous dis simplement que nous avons entamé un processus, que ce processus va dans une direction et que celui du gouvernement fédéral va dans le sens opposé. J'ignore si les deux finiront par se rencontrer. Il n'y a pas grand-chose que nous puissions dire, voir ou faire pour vous rallier à nous. Nous allons devoir poursuivre notre route, cela ne fait aucun doute.
    Nous le faisons, car nous nous soucions de l'avenir de nos enfants, de l'avenir de notre nation et de l'avenir de nos langues et de nos cultures. Vous avez ici, à Ottawa, une liste fédérale qui compte environ 5 000 noms ne répondant pas aux critères que nous avons établis dans notre communauté. Un grand nombre des personnes sur cette liste ne savent rien de nous et ne se soucient probablement pas de nous. La seule chose qui les intéresse, ce sont les avantages qu'elles gagneront une fois qu'elles seront reconnues, une fois qu'elles viendront à Kahnawake pour exercer leurs droits.
    Pour le moment, simplement parce qu'elles possèdent une carte de bande, ces personnes peuvent acheter des terrains. Elles n'ont même pas à nous en faire la demande; elles peuvent le faire par l'entremise d'AINC. Elles s'adressent au ministère des Affaires indiennes. Du moment que quelqu'un est prêt à leur vendre un terrain à Kahnawake, elles peuvent l'acheter. Je cite cet exemple pour montrer qu'actuellement nous n'avons aucune autorité dans certains secteurs. Nous en avons dans d'autres secteurs.
    La pression du public: telle est notre intention. Nous sommes confrontés à des poursuites devant les tribunaux, à des contestations fondées sur la Constitution ou la Charte à cause de la position que nous avons adoptée, mais nous sommes déterminés. La plupart de ces contestations viennent de l'intérieur et non pas de l'extérieur. Il y a, au sein de notre communauté, des gens qui disent: « Vous avez tort, votre loi est illégale. Ce que vous faites est illégal. » Néanmoins, nous continuons de faire ce que nous devons faire.
    Nous perdrons peut-être des causes devant les tribunaux, mais qu'y gagneront-ils — quelques dollars? Leur reconnaîtra-t-on le droit de revenir dans la communauté, de résider parmi nous, de nous agiter notre loi sous le nez en disant que nous n'avons aucune autorité, que l'autorité est ici, à Ottawa, entre les mains du gouvernement fédéral, en vertu de la Loi sur les Indiens et ce genre de choses?
    Voilà ce qui nous irrite. Voilà ce à quoi nous nous opposons. C'est ce qui nous rend plus déterminés que jamais à nous réorganiser avec des programmes, des activités culturelles, toutes les choses dont nous avons besoin pour assurer la survie de notre culture dans le monde moderne.
    C'est à peu près tout ce que je dirai pour le moment étant donné le peu de temps disponible. Je crois que vous avez sous les yeux une lettre décrivant notre position. Elle est fraîchement imprimée.
    Nia:wen ko:wa.
(0855)
    Merci beaucoup. Je pense que vous avez très bien exprimé votre position.
    Nous pouvons maintenant passer à Mme Lynn Gehl.
     [Le témoin s'exprime en anishinabe.]
    Merci de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Bienvenue dans le territoire algonquin anishinabe. Ce territoire est le mien et je suis donc heureuse d'être ici.
    Je travaille sur le dossier de la discrimination sexuelle dans la Loi sur les Indiens depuis plus de 32 ans. En 1945, l'agent des Indiens, H.P. Ruddy, a informé mon arrière-grand-mère, Annie Menesse, qu'elle était devenue une femme blanche en épousant Joseph Gagné qui était seulement Indien par sa mère, Angeline Jocko. C'était il y a 72 ans, mais la discrimination sexuelle dont mon arrière-grand-mère a été victime continue de priver mes nièces et neveux de leurs droits.
    Quand on a modifié la Loi sur les Indiens en 1985, pour la rendre conforme à la Charte des droits, les dispositions qui protégeaient les enfants nés de pères inconnus ou non déclarés ont été, pour des raisons douteuses, supprimées de la Loi sur les Indiens qui n'en a plus fait mention.
    AINC a ensuite commencé à faire preuve de discrimination à l'endroit de ces enfants, au niveau du ministère, en suivant une politique à l'égard des preuves de paternité qui partait du principe que dans tous les cas où la paternité était inconnue ou non déclarée, les pères n'étaient pas Indiens.
    AINC a fait du tort aux mères et aux enfants autochtones avec cette politique en prétendant qu'ils n'avaient pas la capacité de raisonner et de porter un jugement moral. Pour défendre AINC, le ministère de la Justice a également fait valoir que les femmes autochtones profiteraient du droit d'inscription au Registre des Indiens si la politique présentait une lacune.
    Il m'a fallu 22 ans pour gagner ma cause devant les tribunaux du Canada. J'ai été confrontée à de nombreux obstacles tels qu'une mère qui ne voulait pas que j'examine la question de la paternité d'un oeil critique, le manque de fonds pour défendre ma cause devant les tribunaux, les vastes moyens financiers dont AINC disposait grâce à son accès unilatéral aux terres et aux ressources autochtones et le refus total d'AINC de divulguer la preuve afin que la cour puisse trancher.
    Quelles que soient les difficultés qui m'ont été imposées, en avril dernier, la Cour d'appel de l'Ontario a rendu son jugement en ma faveur. En quelques mots, la cour a jugé déraisonnable la politique d'AINC à l'égard des preuves de paternité à fournir qui partait du principe que, dans tous les cas de paternité inconnue ou non déclarée, le père n'était pas Indien.
    Pour se défendre contre la quête que j'ai entreprise pour obtenir le statut d'Indien, le Canada a dépensé plus de trois quarts de millions de dollars et pourtant, c'est moi qu'on a accusée de malveillance.
    Il me semble maintenant évident que le Canada est déterminé à éliminer le statut d'Indien et les droits issus de traités qui y sont associés au moyen de la discrimination sexuelle, aux dépens des femmes autochtones et de leurs descendants.
    Les avocats considèrent l'issue de ma cause comme une victoire, mais j'ai du mal à partager leur joie. Je me réjouis que la cour ait rejeté la politique d'AINC à l'égard des preuves de paternité, des clauses que mes conseillères juridiques, Emilie Lahaie et Mary Eberts ont fait valoir et de l'évolution de ces clauses dans le cadre des consultations avec le bureau de la ministre Bennett. Une des clauses ordonne à AINC d'accepter des preuves circonstancielles et l'autre lui ordonne de ne pas supposer que le père est non-Indien dans le cas de viol.
    Néanmoins, je déplore que les juges aient dit que j'avais seulement droit au statut en vertu du paragraphe 6(2). Ce n'est pas juste. Je suis née avant 1985 et je devrais donc avoir droit au statut en vertu de l'alinéa 6(1)a). Les descendants des frères de mon arrière-grand-mère ont tous le droit d'être inscrits en vertu de l'alinéa 6(1)a).
    Ce correctif judiciaire qui m'accorde un statut aux termes du paragraphe 6(2) ne m'accorde pas les pleins droits en raison de ma filiation matrilinéaire.
    Les femmes autochtones ont fait des gros efforts pour remédier à la discrimination sexuelle. Mary Two-Axe Earley, Jeannette Corbiere Lavell, Yvonne Bédard, Sandra Lovelace et Sharon McIvor; nous avons suivi ensemble la voie qui nous semblait la bonne.
     Le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir en promettant la réconciliation et le respect des relations de nation à nation. Si le gouvernement met en place, comme je l'espère, le correctif complet de l'alinéa 6(1)a) qui remédiera à toute la discrimination sexuelle dans la Loi sur les Indiens, le premier ministre Justin Trudeau et la ministre Carolyn Bennett ainsi que le reste du Canada auront vraiment quelque chose à célébrer. Autrement, l'image du Canada restera entachée.
    Comme je l'ai dit, il m'a fallu 22 ans pour défendre ma cause devant les tribunaux canadiens où finalement, le prétendu correctif qui m'a été offert n'est rien d'autre qu'une nouvelle forme de discrimination sexuelle. Ce n'est pas juste, ce n'est pas conforme à la Charte et le Canada peut faire mieux.
    Je voudrais d'abord parler de la nécessité de tenir les consultations de nation à nation. Cela n'aura jamais lieu si les descendants matrilinéaires ne font pas partie des bandes des Premières Nations. Ce n'est donc pas le cas actuellement.
    Même si AINC prétend qu'il ne peut pas appliquer le correctif complet de l'alinéa 6(1)a) et supprimer ainsi toute discrimination fondée sur le sexe suite au jugement, il doit tenir des consultations de nation à nation.
(0900)
    En même temps, AINC empêche les Premières Nations d'accueillir leurs membres en leur imposant des restrictions financières qui ne tiennent généralement pas compte de la valeur des relations de nation à nation, par exemple en faisant un partage équitable des terres ou des ressources qui permettrait aux nations autochtones d'accueillir les descendants matrilinéaires.
    Le Canada dit ne pas pouvoir remédier à la totalité de la discrimination sexuelle, car il doit respecter la relation de nation à nation; d'un autre côté, il ne veut pas vraiment que les nations autochtones participent à des discussions qui seront vraiment de nation à nation.
    La deuxième chose que je voudrais vraiment préciser est qu'effectivement, les Premières Nations, comme la bande de ma grand-mère, confondent le statut d'Indien et l'appartenance à la bande. C'est l'excuse qu'AINC invoque pour ne pas éliminer entièrement la discrimination sexuelle, sous prétexte qu'il est nécessaire de consulter les Premières Nations. N'oublions pas que c'est aux Premières Nations et non pas à AINC qu'il revient de gérer l'appartenance aux bandes. Cela dit, ce dont nous parlons aujourd'hui, c'est de la nécessité de résoudre le problème de la discrimination sexuelle dans la loi et non pas dans le code d'appartenance des bandes des Premières Nations.
    Troisièmement, le fait que le Canada n'ait pas remédié à la discrimination sexuelle à l'endroit des descendants matrilinéaires donne un processus de revendications territoriales et d'autonomie gouvernementale colonial et matriarcal en ce sens que les descendants de femmes autochtones sont marginalisés et donc vulnérables. Un vrai respect des relations de nation à nation abolirait la discrimination sexuelle inhérente à la hiérarchie établie aux alinéas 6(1)a) et 6(1)c).
    Quatrièmement, même s'il prétend qu'il faut respecter les relations de nation à nation, le Canada n'en fait rien. Dans le cadre du processus de revendications territoriales et d'autonomie gouvernementale algonquin, on nous a seulement offert 1,3 % de nos terres et 300 millions de dollars. Ce ne sont pas des rapports de nation à nation. C'est vraiment répréhensible.
    La cinquième chose dont je voudrais parler est l'argument selon lequel il serait irresponsable de la part du Canada de mettre en oeuvre le correctif intégral de l'alinéa 6(1)a) sans effectuer une analyse plus poussée. J'estime que c'est en fait un prétexte invoqué depuis des décennies de tromperies et de manoeuvres stratégiques répondant à la nécessité pour le Canada d'éliminer les Indiens. Le gouvernement canadien était parfaitement au courant des efforts déployés par les Autochtones pour supprimer toute discrimination fondée sur le sexe. Cela n'a rien de nouveau. Le Canada a eu des décennies et beaucoup d'argent pour faire les recherches nécessaires en vue de rédiger une loi qui supprimerait toute discrimination sexuelle et serait conforme à la Charte.
    Le Canada a plutôt consacré son temps, son argent et ses efforts à rédiger des modifications législatives qui ignorent, confondent et déguisent et constituent des formes silencieuses de discrimination sexuelle comme celles qui ressortent de la cause Gehl c. Canada. Dans le cadre de ce processus, AINC a, en fait, établi des nouvelles formes de discrimination sexuelle au lieu de veiller à ce que la Loi sur les Indiens soit conforme à la Charte. J'estime que si le Canada prétend qu'il serait irresponsable d'agir sans une analyse plus poussée, c'est plutôt pour ne pas vraiment respecter les relations de nation à nation et pour manipuler l'organisation des femmes autochtones, des femmes autochtones qui sont déjà accablées.
    Je demande aux membres du comité d'appuyer la version modifiée du projet de loi S-3. Il est crucial de défendre les droits humains des femmes autochtones et de leurs descendants et de placer enfin les femmes indiennes et leurs descendants nés avant 1985 sur le même pied que les hommes indiens et leurs descendants nés avant 1985. Je vous demande de bien vouloir entendre les femmes autochtones qui réclament l'application de la Charte et l'égalité.
    Meegwetch.
(0905)
    Merci beaucoup.
    Le troisième groupe est Femmes autochtones du Québec. Bienvenue.

[Français]

    Madame la présidente, messieurs les vice-présidents, membres du Comité, kuei.
    J'aimerais tout d'abord remercier la nation anishinabe de nous accueillir dans son vaste territoire non cédé.
    Femmes autochtones du Québec, qui est membre de l'Association des femmes autochtones du Canada, a été fondée en 1974 en réponse à la discrimination basée sur le sexe de la Loi sur les Indiens. Depuis plus de 40 ans, les femmes autochtones au Québec unissent leurs forces pour dénoncer cette loi paternaliste, assimilatrice et coloniale.
    Notre position a toujours été claire et nous restons fermes dans nos revendications. Nous exigeons que le gouvernement du Canada supprime de la Loi toute discrimination basée sur le sexe et toutes celles qui en découlent. Nous revendiquons le droit de grandir auprès des nôtres, de pratiquer nos cultures et nos traditions, de parler nos langues et de transmettre le tout à nos enfants ainsi qu'aux générations futures.
     En 1982, le Canada s'est doté d'une loi dite constitutionnelle, qui comprend une charte des droits et libertés canadienne. Il n'existe pas de plus haute loi au pays que la Constitution. Celle-ci prévoit, pour tout citoyen canadien ou autochtone, des droits de base qui doivent être respectés et protégés. On retrouve parmi ceux-ci le droit à la non-discrimination basée sur le sexe et sur la race.
    Lorsqu'on sait que de tels principes discriminatoires quant au sexe et à la race sont à la base de la Loi sur les Indiens, il est normal de se questionner sur la place d'une telle loi au Canada. Ce pays prétend fêter son 150e anniversaire cette année, mais qu'y a-t-il vraiment à fêter?
    Femmes autochtones du Québec était présente lors de la 16e session de l’Instance permanente sur les questions autochtones des Nations unies. Nous déplorons le discours livré à cette occasion par le Canada, qui dit défendre les droits des Autochtones, plus particulièrement ceux des femmes, mais combien de femmes autochtones se sont vues déracinées, arrachées à leur famille, à leur communauté et à leur identité parce que le Canada a mis sur pied et se bat pour maintenir une loi des plus violentes en matière de discrimination basée sur le sexe et sur la race.
    Nous déplorons le fait d'être encore réunis pour en discuter, en 2017, et de devoir lutter contre cette même loi qui nous infériorise et nous discrimine en tant que femmes et en tant qu'Autochtones. En effet, la discrimination à notre égard est double. Alors que nos sociétés autochtones nous considèrent traditionnellement comme un cadeau de la vie, le Canada a pour sa part introduit dans l'imaginaire des sociétés l'idée voulant que la vie d'une femme autochtone n'ait pas autant de valeur que celle d'un homme. Nos femmes disparaissent, sont assassinées, violentées et agressées sexuellement par les forces étatiques et par la population, et ce, en toute impunité.
    Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes des Nations unies ainsi que la Commission interaméricaine des droits de l'homme ont tous deux conclu que la discrimination fondée sur le sexe de la Loi sur les Indiens était l'une des causes fondamentales de la violence subie par les femmes et les filles autochtones aujourd'hui.
    Femmes autochtones du Québec exige donc que la Chambre des communes assure le respect de la Constitution à tout citoyen autochtone, en particulier à toute femme autochtone et à ses descendants qui se sont vus reniés, déniés, oubliés, enfouis par des gouvernements désireux de les assimiler et d'en finir une fois pour toutes avec la question indienne au Canada, et ce, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul Indien.
    Pour ce faire, Femmes autochtones du Québec exige, dans un premier temps, que le gouvernement accueille favorablement l'amendement connu sous le nom de « 6(1)a) jusqu'au bout ».
    Femmes autochtones du Québec exige également qu'on mette fin à la discrimination découlant d'une paternité non déclarée ou inconnue. Les femmes ont le droit de ne pas indiquer le nom du père sur le certificat de naissance sans pour autant pénaliser leur enfant. Toute femme dite canadienne ne voit pas son enfant discriminé lorsque le nom du père n'apparaît pas dans les registres. L'enfant est tout aussi Canadien que la mère. Pourquoi en serait-il autrement pour les Premières Nations?
    Femmes autochtones du Québec exige aussi que le gouvernement mette fin aux catégories de statut définies aux paragraphes 6(1) et 6(2) de la Loi. Depuis 1985, les catégories donnent lieu à de nombreux scénarios discriminatoires, notamment au sein d'une même famille. Pensez-y; aimeriez-vous qu'une partie de vos enfants soient considérés comme Canadiens et l'autre partie comme non-Canadiens parce qu'ils sont nés après le 17 avril 1985? C'est complètement ridicule.
(0910)
    Comme l'ont mentionné bien d'autres représentants avant nous, l'élimination complète de la discrimination basée sur le sexe est impossible sans ces modifications. Le projet de loi S-3 sans l'adoption des amendements suggérés par le Sénat et sans l'élimination des catégories définies aux paragraphes 6(1) et 6(2) maintient la discrimination envers nos femmes présente dans la Loi sur les Indiens.
    Femmes autochtones du Québec a entendu le gouvernement à maintes reprises insister sur une seconde phase, qui serait plus vaste et qui permettrait que de plus amples discussions soient engagées sur ces revendications. Il nous appert aberrant que le gouvernement ait retardé de cinq mois les modifications à la Loi sur les Indiens sous prétexte d'un manque à son devoir de consultation et qu'il justifie, une fois de plus, son inaction en utilisant le même prétexte. Il faut bien nous comprendre: nous sommes favorables à la défense du devoir qu'a le gouvernement de consulter les peuples autochtones, mais pas dans les circonstances établies par le gouvernement entourant le projet de loi S-3.
    Femmes autochtones du Québec tient fortement à rappeler au gouvernement qu'il ne peut se cacher derrière cette obligation afin de justifier le maintien de dispositions discriminatoires ou contraires à la Constitution canadienne. Femmes autochtones du Québec est d'avis que le gouvernement n'a pas à consulter les communautés pour savoir s'il doit mettre fin à la discrimination qu'il exerce envers les femmes.
    Soyons honnêtes: le gouvernement sait que la Loi sur les Indiens est discriminatoire. Il sait exactement où et quelles sont les solutions pour y mettre fin. Il ne s'agit pas de méconnaissance de la part du gouvernement, mais bien d'inertie et d'un manque de volonté politique.
    Qu'ont fait Jeannette Vivian Corbiere Lavell, Sandra Lovelace Nicholas, Mary Two-Axe Early, Sharon McIvor, Lynn Gehl et d'autres, sinon de vous informer sur les réalités et les discriminations que les femmes et leurs descendants vivent?
    En avril dernier, un rapport sur les séances d'information tenues par Femmes autochtones du Québec pendant la période de prolongation des travaux liés au projet de loi S-3 a été remis au ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien. Ce rapport fait état des impressions des femmes sur le projet de loi S-3, et nous venons porter leurs voix devant vous aujourd'hui. Elles en ont assez et ne veulent pas attendre une deuxième phase pour que les choses bougent.
    Le gouvernement prévoit environ deux ans pour la deuxième phase. Pouvez-vous nous dire ce que vous allez découvrir en deux ans qui ne vous a pas déjà été révélé au cours des quelque 30 dernières années? Les femmes autochtones sont patientes et résilientes, elles vous l'ont répété de nombreuses fois, et continuent de l'être aujourd'hui encore, mais il est de votre devoir de nous écouter et d'agir en conséquence.
    Femmes autochtones du Québec rappelle que les fondements de la Loi sont paternalistes, patriarcaux, coloniaux et assimilateurs. Nous voulons vous faire part de nos craintes. Nous voyons les nôtres intégrer ces principes de loi et les utiliser contre les leurs. Nous ne pouvons nier les effets de la Loi sur les Indiens, des pensionnats et de la rafle des années 1960. Ils sont bien présents aujourd'hui, parfois même au sein des nôtres.
    L'histoire de la colonisation et de l'assimilation a laissé ses marques, et de nombreuses plaies restent encore ouvertes et doivent être guéries au sein même de nos peuples et entre nos peuples. Cette guérison de nos peuples passera par la reconnaissance des nôtres qui ont été mis de côté par les gouvernements, afin que nous puissions imaginer ensemble l'avenir de nos peuples et de nos communautés.
    Les femmes autochtones du Québec et du Canada rassemblent leurs voix pour exiger de vous que vous mettiez fin, une fois pour toutes, aux discriminations fondées sur le sexe, afin que nos jeunes et les sept générations futures puissent guérir des politiques assimilatrices et d'émancipation, des pensionnats et de ce génocide culturel.
    Nous exigeons que vous acceptiez l'amendement « 6(1)a) jusqu'au bout » à compter des années 1800 et que vous éliminiez les catégories définies au paragraphe 6(2). Vous parlez constamment de réconciliation avec nos peuples. Elle commence ici, cette réconciliation, en redonnant aux femmes et à leur descendance la place que le gouvernement leur a arrachée.
    Femmes autochtones du Québec exige que vous pensiez aux générations futures et fassiez en sorte qu'elles n'aient pas à se battre pour leur identité et contre la discrimination. Bâtissons plutôt un monde où nos jeunes peuvent renouer avec ce que signifie être Anishinabe, Eeyou, Innu, Abénaquis, Atikamekw, Mohawk, Naskapi, Wendat, Malécite, Micmac, Inuit, plutôt que de leur laisser un monde où ils perdent l'essence de leur identité en perdant un petit peu plus d'eux-mêmes à se battre contre un système et une loi coloniale et assimilatrice comme la Loi sur les Indiens.
    Vous n'êtes pas responsables de ce que les autres gouvernements ont fait avant vous, ou de ce que peut-être même vos ancêtres ont fait à nos peuples, mais vous êtes responsables aujourd'hui si vous décidez d'être complices de l'assimilation forcée de nos peuples en ne mettant pas en oeuvre les revendications qui vous ont été présentées.
(0915)
    Vous avez ce pouvoir de décider pour nous. Vous avez pris ce pouvoir. Nous ne vous l'avons jamais accordé. Allez-vous nous entendre une fois pour toutes?
    Merci de prendre la décision que vous prendriez pour vos propres femmes, vos propres enfants et vos propres futures générations.

[Traduction]

    Merci.

[Français]

    Faites partie de ceux dont on se souviendra comme ceux qui ont permis la vraie réconciliation entre nos peuples, et non ceux qui ont participé à la disparition des cultures, des langues et des premiers peuples humains de ce territoire.
    Au nom des femmes autochtones du Québec, de nos ancêtres et de nos sept générations futures, tshinashkumitin, meegwetch.

[Traduction]

    Merci.
    Nous passons à un tour de questions de sept minutes. Un député va commencer et disposera de sept minutes pour poser une série de questions.
    Veuillez adresser vos questions aux témoins qui sont devant nous ou au chef Picard qui est présent au téléphone.
    Monsieur Anandasangaree, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci beaucoup à tous de comparaître aujourd'hui. Je vous remercie pour vos exposés mûrement réfléchis.
    D'après ce qu'ont dit les trois témoins, il semble y avoir une contradiction, à savoir que d'un côté, ce n'est pas au gouvernement fédéral ou à qui que ce soit d'autre en dehors de chaque communauté de définir qui peut être membre d'une bande alors que de l'autre, nous sommes presque obligés d'étudier une loi et ses amendements parce que la Loi sur les Indiens est discriminatoire à bien des égards, comme Mme Michel l'a souligné avec éloquence, surtout en ce qui concerne la discrimination fondée sur le sexe.
    Comment résoudre cette contradiction et comment faire en sorte que cette loi réponde au jugement que la cour a rendu dans l'arrêt Descheneaux tout en permettant à chaque communauté de prendre les décisions concernant l'appartenance à la bande?
    Je vais commencer par le chef Picard et le chef Norton et ce sera ensuite à Mme Gehl de répondre.
(0920)
    En ce qui me concerne, c'est assez simple. Ce que vous appelez des positions contradictoires n'en sont pas forcément. Selon moi, la nation mohawk n'est pas identique à la nation algonquine ou aux autres nations. Chacune a ses propres relations historiques avec le Canada et des raisons historiques de faire ce qu'elle a à faire et c'est également notre cas.
    Ces derniers mois, nous avons intensifié nos activités au maximum. Nous ne voulons pas être en conflit avec qui que ce soit, les autres chefs ou représentants. Ce n'est pas le but de notre présence ici.
    Chef, je ne voulais pas dire qu'il y avait un conflit. Je dis qu'il y a une contradiction dans la mesure où nous devons faire deux choses en même temps, alors comment le faire?
    Je comprends. Pour dire les choses très simplement, vous ne pouvez pas appliquer la même solution à tout le monde. Vous devez trouver des solutions pour chacune des communautés ou nations en fonction de leurs convictions ou de celles d'organisations comme Femmes Autochtones du Québec ou l'organisation nationale.
    Pour nous, les Mohawks, c'est différent. Ce n'est pas la même chose.
    Madame Michel.

[Français]

    Évidemment, nous pouvons voir la contradiction. Elle est visible. C'est vraiment le résultat de vos lois. On peut penser ici à l'expression « diviser pour mieux régner ». Nous-mêmes n'arrivons pas à nous entendre.
    Je peux comprendre les enjeux des communautés autochtones: leur survivance économique, le manque d'accès au logement, le manque de financement, le sous-financement, et ainsi de suite. Je peux comprendre l'ensemble de leur situation. Je travaille avec mes confrères à l'Assemblée des Premières Nations et je comprends ces réalités. J'ai moi-même vécu dans une communauté autochtone. Je sais donc de quoi je parle quand il s'agit notamment de la langue et de la culture.
    Cependant, nous parlons aujourd'hui des enjeux qui touchent directement les femmes. L'existence des femmes est importante. Pourquoi les femmes ont-elles été visées dans cette loi? C'est parce que c'est nous, en tant que femmes, qui avons la responsabilité de transmettre la langue et la culture.
    Dans un contexte différent, avant 1985, une femme québécoise qui mariait un Autochtone était, quant à elle, considérée comme une pure Autochtone. Voyez-vous à quel point c'est aberrant?
    Le but ultime de la Loi sur les Indiens était vraiment l'assimilation. Qui était pénalisé? C'était nous, les femmes, nous qui sommes porteuses des futures générations, nous qui sommes les gardiennes de la culture et de la langue.
    Je sais qu'il peut y avoir des contradictions aujourd'hui, c'est évident. Cependant, nous parlerons pour les femmes, car cette loi est vraiment basée sur une discrimination fondée sur le sexe, et nous, les femmes, sommes visées. Je sais néanmoins qu'il y a d'autres enjeux liés à la vie au sein des communautés autochtones.
    Dans le cadre du projet de loi C-3, j'ai marché de Québec à Ottawa et j'ai compris pourquoi mes confrères étaient réticents à nous appuyer. En effet, même si les 40 000 Autochtones étaient inscrits, les budgets dans les communautés étaient inchangés. C'est le côté économique.
    L'existence, pour sa part, est un enjeu vraiment important. Pourquoi est-ce vous qui reconnaissez qui nous sommes, par l'entremise de vos lois? On ne nous donne pas l'occasion de nous reconnaître nous-mêmes. Cela atténuerait bien des choses. Je pense qu'il y aurait un meilleur équilibre entre nos nations.
    J'aimerais ajouter un commentaire à ce que Mme Michel vient de dire.
    Elle a raison: ce n'est pas nous qui détenons le droit de déterminer qui nous sommes. Ce droit nous a été enlevé au cours des années 1800 par le gouvernement. Aujourd'hui, il ne peut pas se déresponsabiliser face à ce qui a été fait.
    Nous entendons dire — et nous sommes heureux de l'entendre dire — qu'il s'agit d'un droit que nous avons et que ce droit est défendu internationalement par la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Cependant, vous avez la responsabilité de réparer le mal qui a été fait, notamment le mal qui a été fait à nos femmes. Elle est là, votre responsabilité.
    Comme Mme Michel l'a mentionné dans sa présentation, lorsque votre responsabilité aura été assumée, nous pourrons nous asseoir pour discuter de qui peut faire partie de nos communautés.
    Meegwetch.
(0925)

[Traduction]

    C'est au tour de M. Yurdiga.
    Merci, madame la présidente et bonjour à nos invités.
    Une fois que le projet de loi S-3 aura reçu la sanction royale, avec ou sans les amendements, comment envisagez-vous le déroulement de la phase deux et quelles sont vos attentes?
    Je voudrais entendre le point de vue de chacun de nos témoins de ce matin.
    Je préfère ne pas en parler. Merci.
    Voulez-vous répéter cela?
     Une fois que le projet de loi S-3 aura reçu la sanction royale et qu'on passera à la phase deux, comment envisagez-vous le déroulement de la phase deux et qu'attendez-vous de la phase deux?
    Je dirai la même chose qu'aujourd'hui. Cela ne changera rien pour moi.
    Très bien.
    Je vais passer à la question suivante.
    Oui?

[Français]

    En ce qui concerne la deuxième phase, je crois que la position des femmes autochtones au Québec et au Canada est claire: nous n'avons pas besoin d'une deuxième phase à ce projet de loi afin qu'on nous consulte au sujet d'une discrimination qui existe et qui doit être retirée de la Loi sur les Indiens, qui est une loi canadienne. Cela reviendrait à consulter des peuples pour savoir s'ils acceptent d'être soumis à la discrimination. C'est illogique et ridicule.
    On n'a pas besoin de passer à une deuxième phase, qui va peut-être durer deux ans, alors que cela fait plus de 30 ans qu'on entend les témoignages des femmes, des communautés et des nations sur ce qui se passe, la réalité et les conséquences de la Loi. Puisque nous vous indiquons depuis des années ce qui doit être modifié dans la Loi, c'est ce qui doit être fait durant la première phase.
    S'il y a une deuxième phase — et je dis bien « si », parce que cela demeure incertain — et qu'on règle les questions de discrimination qui doivent être abordées durant la première phase, on pourra discuter de la manière de procéder pour se retirer de la Loi sur les Indiens, qui, à la base, reste et restera toujours une loi assimilatrice et coloniale. Si jamais il y a une deuxième phase, ce sont les discussions qui devront peut-être être engagées.

[Traduction]

    Merci.
    Quelqu'un d'autre désire-t-il répondre à la question?
    Ma question suivante s'adresse au chef Norton et au chef Picard. Étant donné que le nombre d'Indiens inscrits pourrait doubler, cela imposera-t-il un fardeau financier aux Premières Nations prêtes à accueillir ceux qui souhaitent devenir membres de la bande?
    J'en ai parlé tout à l'heure dans ma déclaration préliminaire. Dans notre cas, cela doublerait notre nombre. Vous pouvez prendre le nombre de personnes qui sont inscrites ici, indirectement, auprès du gouvernement canadien à Ottawa, auprès d'AINC, dans le cadre du processus actuellement en place. Certaines de ces personnes répondront probablement à nos critères. Pour le moment, notre processus est bloqué pour un certain temps.
    Un certain pourcentage de ces personnes — je ne peux pas vous donner de chiffre exact — voudront certainement réintégrer la communauté pour bénéficier du logement, de l'éducation, des terres et de toutes les choses auxquelles elles estiment avoir droit. Il y a probablement des gens qui ne viendront jamais et ne réintégreront jamais la communauté, mais la situation reste inquiétante, car nous devons déjà redoubler d'efforts pour fournir les services que nous fournissons. Cela crée de l'incertitude pour l'avenir des gens qui vivent actuellement dans la communauté et qui craignent de voir arriver des personnes qui ne savent rien de nous. Une telle situation contribuerait à ce que nous appelons un suicide ethnoculturel.
(0930)
    Chef Picard, voudriez-vous donner votre avis?
    Je répéterai simplement ce que j'ai dit. Les membres du comité doivent bien comprendre que le Québec n'est pas différent des autres régions où les opinions divergent peut-être à ce sujet. Comme je l'ai dit, c'est une question très délicate et épineuse.
    Je serais tenté de dire qu'elle pèse sur nos épaules depuis 1985. Le gouvernement se décharge sur les communautés, donc sur les chefs et les conseils, de la responsabilité d'appliquer, dans ce cas, une ordonnance de la cour. C'est totalement injuste.
    Il y a probablement encore beaucoup de choses à dire au sujet des répercussions, mais si vous faites le bilan de ces 30 dernières années, vous pouvez voir que cette question a causé de l'instabilité pendant toutes ces années et que, dans bien des cas, elle a acculé nos dirigeants au pied du mur.
    Dans notre région, même si le chef pourrait souhaiter mettre fin à la discrimination envers les femmes, un bon nombre d'entre eux vont se demander ce qu'il se passera ensuite. Voilà pourquoi, je pense, certains chefs trouvent très difficile de répondre en sachant qu'ils n'ont pas les moyens de le faire.
    Merci.
    Quelle que soit la décision qu'ils prendront, ils seront tenus responsables. Le problème est là et le cycle d'intervention semble ne jamais finir.
    Merci beaucoup, chef.
    Nous devons passer au suivant qui sera M. Saganash.
    [Le député s'exprime en cri.]
    Je pense que tous les membres de ce comité sont conscients de mon mépris total et absolu pour la Loi sur les Indiens, mais nous devons quand même en tenir compte. Elle sera là jusqu'à ce qu'elle disparaisse.

[Français]

    J'aimerais poser une question à Mme Michel.
    Je veux d'abord vous remercier de votre témoignage devant la commission d'enquête à Val-d'Or sur les relations entre les peuples autochtones et les membres de certains services publics. Merci de votre témoignage. Beaucoup de gens l'ont grandement apprécié.
    Lors de leur témoignage en début de semaine, les représentantes de l'Association des femmes autochtones du Canada ont soulevé une préoccupation sérieuse concernant l'article 10 du projet de loi S-3. Cet article dit, essentiellement, qu'aucune personne qui acquiert le droit d'inscription après la date d'entrée en vigueur de la loi ne peut réclamer des dommages-intérêts. Il s'agit donc d'une clause de non-responsabilité pour la Couronne.
    Les représentantes de l'Association des femmes autochtones du Canada ont exprimé une préoccupation sérieuse quant à cet article. J'aimerais maintenant entendre ce que les représentantes de Femmes autochtones du Québec en pensent.
(0935)
    Nous appuyons la préoccupation de l'Association des femmes autochtones du Canada. Nous l'avions mentionné dès nos premières interventions lors de la première mouture du projet de loi S-3, si je puis dire. Nous maintenons notre réticence face à cet article. Il s'agissait de l'article 8 dans l'ancien projet de loi, mais c'est l'article 10 dans le présent projet de loi.
    La préoccupation à l'égard de cette clause de non-responsabilité a également été mentionnée par d'autres femmes et organisations autochtones. C'est une préoccupation très importante, et elle l'est pour nous aussi. C'est la seule loi au Canada qui permet la discrimination sans que le gouvernement en porte la responsabilité. Cela n'a pour nous aucun sens.
    Là-dessus, nous sommes d'accord. Merci de la réponse.
    Tout à l'heure, vous avez dit que nous avions la responsabilité de réparer le mal qui a été fait. Or, selon moi, cette clause vise essentiellement à justifier aujourd'hui une violation des droits de la personne qu'il y a eu par le passé, ce que je trouve totalement inacceptable.

[Traduction]

    Ma deuxième question porte sur l'hésitation du gouvernement actuel d'adopter l'alinéa 6(1)a).

[Français]

    Mme Michel l'a très bien souligné aussi.

[Traduction]

     C'est surtout parce qu'il souhaite poursuivre les consultations. Est-il justifié de poursuivre les consultations avec les peuples autochtones quant à savoir s'ils voudraient ou non continuer d'être victimes de discrimination? C'est un prétexte vraiment ridicule pour ne pas donner suite au projet de loi S-3.
    Je voudrais savoir ce que vous en pensez, Lynn.
    Oui, je conviens que c'est ridicule. Qui va-t-il consulter? S'agit-il des Premières Nations où il manque des descendants des femmes? Ce n'est pas de nation à nation.
    N'oublions pas que nous demandons au gouvernement de modifier la loi et non pas les règles d'appartenance et que la seule chose qu'il doit consulter, c'est la Charte. La Charte donne d'excellentes lignes directrices pour s'assurer qu'il n'y a pas de discrimination fondée sur le sexe et je crois que le Parlement a la responsabilité de légiférer de façon proactive et pas seulement après coup pour régler les problèmes. Voilà ce que j'en pense.

[Français]

    Madame Michel, croyez-vous que vos droits de la personne les plus fondamentaux et les droits fondamentaux des femmes autochtones sont encore sujets à débat?
    Il y a des gens qui prennent des décisions sans avoir vraiment discuté avec les femmes. Il y a des gens qui pensent que les changements qu'ils apportent aux lois sont les meilleurs, selon leur point de vue, mais ils ne voient pas les conséquences de ces changements.
    Tout à l'heure, nous avons parlé des contradictions qu'il existe. Tel est l'héritage qu'on nous laisse, et c'est à cela que nous devrons faire face plus tard. Si l'amendement est accepté, par exemple, il faudra tout de même que des formes de réconciliation aient lieu entre nous, tellement nos droits ont été brimés et tellement nous avons été mises de côté.
    Je ne vais pas faire notre propre histoire du Canada, c'est-à-dire l'histoire des Premières Nations. Je tiens cependant à souligner qu'autrefois, les rapports étaient égalitaires, mais qu'après la colonisation, nos rapports ont complètement changé. Qui est responsable de cela? Des droits fondamentaux d'existence et de reconnaissance doivent nous être accordés, et ce, en tout respect à notre égard. Cela fait 30 ans que les femmes luttent pour cela et qu'elles disent faire l'objet de discrimination. Une deuxième phase prendrait encore deux ans, mais pour dire quoi? Pour entendre dire encore la même chose?
    On me dit que je dois m'arrêter ici.
(0940)

[Traduction]

    Désolée, mais ce tour est maintenant terminé. Nous passons maintenant à Rémi Massé.

[Français]

    Je vais poser mes questions rapidement, parce que j'ai seulement cinq minutes et j'aimerais clarifier certains éléments des positions soutenues par les témoins.
    Grand chef Norton et chef Picard, dans la lettre que vous nous avez soumise et dont nous avons pris connaissance il y a quelques minutes, vous parlez des répercussions importantes que pourraient avoir les changements à la Loi proposés dans le projet de loi S-3.
    Faites-vous référence à

[Traduction]

l'alinéa 6(1)a)?

[Français]

    Faites-vous référence à l'ensemble des modifications à la suite des amendements du Sénat?

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr d'avoir entièrement compris votre question, mais si vous me demandez si j'envisagerais de modifier la Loi sur les Indiens pour qu'elle réponde à certains objectifs et critères, je vous demanderais simplement à mon tour pourquoi le gouvernement ne reconnaît pas que la nation iroquoise a sa propre façon d'identifier sa population grâce au système de clan ainsi qu'en nommant et en identifiant ses membres et pourquoi ne pas conclure une entente de nation à nation pour que le Canada puisse dire: « C'est ainsi que ces questions sont réglées chez les Mohawks ou les Iroquois. »

[Français]

    Ma prochaine question sera très précise.
    Il s'agit ici d'un processus législatif et d'une décision de la Cour supérieure du Québec consistant à apporter des modifications législatives à la loi que vous connaissez et dont le titre contient un terme que je n'aime pas utiliser. Dans ce contexte, êtes-vous d'accord pour que le gouvernement adopte une approche étapiste?
    Il s'agirait, dans un premier temps, de régler la question posée par les tribunaux à la suite de la décision rendue dans l'affaire Descheneaux, afin que le gouvernement canadien puisse en venir à adopter une loi à l'égard de laquelle il serait à l'aise. Dans un deuxième temps, il s'agirait d'entreprendre une démarche de collaboration et de consultation pour que la question plus large de la discrimination soit examinée.
    Êtes-vous favorables à l'idée que le gouvernement procède de façon étapiste?

[Traduction]

    Je vais demander au chef Picard de répondre.

[Français]

    Je vous remercie de la question.
    En fait, compte tenu du peu de temps que nous avons à notre disposition, il est difficile de répondre de façon vraiment détaillée à votre question. C'est pourquoi j'ai précisé un peu plus tôt que, même si nous étions présents ce matin, par téléconférence dans mon cas, nous allions soumettre aux membres du Comité une déclaration beaucoup plus détaillée d'ici la fin de la journée de demain.
    Cela étant dit, la question que vous soulevez suscite des préoccupations. Je crois savoir que ce sentiment est généralisé chez les chefs du Québec et du Labrador. Certains éléments font tout de même consensus malgré la diversité des positions.
    On est entré en contact avec nous lundi dernier pour que nous fassions une présentation ce matin. Nous avons parfois l'impression que c'est lorsque souffle un vent de panique qu'on vient frapper à notre porte.
    L'année dernière, la décision a été rendue très tôt au cours de l'année. Or la première séance de consultation n'a eu lieu qu'au mois de septembre suivant. Si on avait pris les devants, des réponses auraient peut-être été trouvées à certaines questions.
    Pour ce qui est de l'approche étapiste, elle n'est sans doute pas souhaitable, à mon avis. Je pense qu'autant le grand chef Norton que le grand chef O'Bomsawin sont préoccupés par les conséquences que cela pourrait engendrer.
(0945)

[Traduction]

    Meegwetch.
    Voilà qui termine le premier tour des questions et des déclarations.
    Merci d'être venus. Nous apprécions sincèrement que vous ayez pris la peine de vous joindre à nous en personne ou par téléphone. Je tiens à vous remercier de votre participation.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes pour laisser aux autres délégations le temps de prendre place et de s'organiser.
(0945)

(0950)
     Comme nous avons de nombreux témoins qui souhaitent se faire entendre, je vais demander aux membres du comité de revenir à leur place avec leur café. Remettons-nous au travail.
    Ce groupe de témoins se compose de Sharon McIvor, Pam Palmater et Catherine Twinn. Merci d'être venues.
    Vous disposerez chacune de 10 minutes pour faire votre déclaration — c'est notre norme sauf indication contraire — et les députés procéderont ensuite à un tour de questions.
    Selon l'ordre du jour, nous commençons par Sharon.
    Bienvenue.
    Bonjour. Merci de m'avoir invitée.
    Je m'appelle Sharon McIvor. Je suis une Nlaka'pamux, de la région centre-sud de la Colombie-Britannique. J'ai travaillé à ce dossier et à bien d'autres, mais en tout cas à ce dossier pendant toute ma vie.
    Je commencerai en disant qu'il est entendu que les opprimés et les victimes de discrimination n'ont jamais obtenu leur liberté ou l'égalité en la demandant à ceux qui les opprimaient ou les brimaient. Je me demande donc ce que je fais ici.
    Comme vous le savez, ce problème existe depuis de nombreuses années, depuis bien plus longtemps que 30 ans. En ce qui nous concerne, l'immigration a porté gravement atteinte à notre identité depuis environ 525 ans. Comme vous le savez, depuis 150 ans, les immigrants ont la capacité de faire des lois qui nous paralysent. Je sais que les communautés en souffrent, mais ce n'est pas à cause des femmes. Elles souffrent à cause de l'absence de leurs femmes.
    Je mentionnerais également que je suis inscrite au programme pour témoigner « à titre personnel ». Je tiens à préciser que je ne parle pas seulement au nom de Sharon McIvor. Je parle au nom de Mary Two-Axe Earley, Jenny Margetts, Nellie Carlson, Susan Blankenship et Edna Blankenship. Je pourrais vous citer une longue liste de noms. Je parle aussi pour Jeannette Corbiere, Helen Blankinship et toutes celles qui sont encore vivantes et dont la vie a été très perturbée par la Loi sur les Indiens et l'intervention du gouvernement colonial.
    Je voudrais aussi parler un peu de ceux au nom de qui vous parlez. En principe, vous parlez au nom des Canadiens, car ils vous ont élus, mais si vous examinez la question dans son contexte historique, John A. Macdonald était raciste et sexiste. Lorsqu'il était premier ministre, un bon nombre de ces politiques ont été élaborées et ont commencé à toucher les communautés autochtones et plus particulièrement les femmes indiennes. Pour ce qui est des bureaucrates, Duncan Campbell Scott était un très célèbre bureaucrate qui a déployé de gros efforts pendant son mandat pour s'assurer que le maximum d'Indiens perd le droit d'être reconnu comme Indiens.
     Nous parlons aujourd'hui d'un projet de loi. Comme certains d'entre vous le savent sans doute, je suis déjà venue ici à propos de cette question, pour le projet de loi C-31, le projet de loi C-3, le projet de loi S-3 et tous les changements que les tribunaux ont imposés. J'ai aussi été en contact avec des dizaines de ministres des Affaires indiennes. Par exemple, j'ai parlé au ministre Irwin du problème de la propriété matrimoniale dans les réserves et il m'a dit: « Sharon, en tant qu'avocat au tribunal de la famille, je connais bien le problème et je sais que la situation n'est pas bonne, mais je peux vous dire que je ne me risquerais pas à toucher à la Loi sur les Indiens, même avec des pincettes ».
    Nous savons que vous êtes forcés d'être là à cause de l'arrêt Descheneaux. Vous avez été forcés d'être là à cause de l'arrêt McIvor. Vous avez été forcés d'être là à cause de l'article de la Charte sur le droit à l'égalité. Je pense que l'analogie des pincettes a bien fonctionné et je peux vous dire que vous ne reviendrez pas ici tant que les tribunaux ne rendront pas un nouveau jugement. Vous pouvez promettre mer et monde, car vous l'avez fait. Vous l'avez fait en 1985. Vous avez promis de consulter les communautés et apparemment, vous avez dans vos dossiers, dans vos archives, 20 000 documents qui prouvent que les communautés ont accepté que la discrimination soit maintenue.
    Quand nous sommes allés au tribunal, ces documents ont servi à m'empêcher d'obtenir justice de juillet 1989 jusqu'à octobre 2006. Nous avons enfin pu aller en procès. Ces 20 000 documents ne nous ont jamais été divulgués. Nous n'avions aucune idée de ce qu'ils pouvaient contenir pour justifier le maintien de la discrimination contre les femmes autochtones.
    Quand je suis allée au tribunal, le gouvernement du Canada a déclaré qu'il avait examiné toute mon histoire et décidé que j'avais droit au statut d'Indien et que je pouvais le transmettre à mon fils parce que nous défendions cette cause ensemble, lui et moi. Mon cas relevait du paragraphe 6(2), ce qui veut dire que je n'avais pas le droit de transmettre mon statut, que mon mari était un Blanc et que mon fils n'avait pas le statut parce que je l'avais obtenu en vertu du paragraphe 6(2). En juillet 2006, le gouvernement nous a dit qu'il avait examiné tous les dossiers et avait découvert que j'avais, en fait, droit à un meilleur statut et que mon fils pourrait obtenir le statut en vertu du paragraphe 6(2). Il a alors déclaré: « Puisque l'instance est sans objet, rentrez chez vous. »
(0955)
    Nous avons refusé de le faire et en septembre 2006, le gouvernement a présenté une motion pour que notre instance soit déclarée sans objet. Sa motion n'a pas abouti, mais en même temps, nous avons demandé à la cour de déclarer que mon fils avait droit au statut d'Indien, parce que c'était la raison pour laquelle le gouvernement voulait que l'instance soit déclarée sans objet. La Couronne a refusé de consentir à ce que mon fils obtienne le statut. Même si elle est s'est servie de ce prétexte pour faire déclarer l'instance sans objet, elle a refusé de lui accorder le statut d'Indien. Comme nous n'avions pas présenté de demande pour obtenir une déclaration, nous avions besoin du consentement des deux parties. Mon fils n'a donc pas obtenu le statut d'Indien en septembre 2006.
    Lorsque nous sommes retournés au tribunal pour le procès, en octobre 2006, nous avons présenté la motion qui a d'abord été entendue par madame la juge Ross. Nous n'avions pas la moindre idée des raisons pour lesquelles la Couronne estimait que j'avais droit à un meilleur statut à transmettre à mon fils. Nous avons demandé au ministère de la Justice de nous fournir des explications, car nous ne savions pas comment il en était venu à cette conclusion. Il nous a dit que j'avais droit au statut d'Indien parce que ma grand-mère, qui avait toujours eu ce statut pendant toute sa vie, n'était pas mariée avec mon grand-père et que ma mère avait donc le statut d'Indien à sa naissance. Ma mère n'était pas mariée avec mon père et j'avais donc le statut d'Indien à ma naissance, mais je l'ai perdu en 1970 lorsque j'ai épousé un Blanc. Par conséquent, j'ai été réinscrite en vertu de l'alinéa 6(1)c). Les femmes mariées à un Blanc obtenaient le statut en vertu de l'alinéa 6(1)c) et mon fils avait droit au statut en vertu du paragraphe 6(2).
    Cet élément est celui dont je voudrais vous parler aujourd'hui parce qu'en 2006, j'ai obtenu le statut d'Indien en vertu du paragraphe 6(1), mon fils en vertu du paragraphe 6(2), mon frère, qui n'a absolument rien fait à ce sujet, l'a obtenu en vertu de l'alinéa 6(1)a) et sa première femme, en 1972 et sa deuxième femme, en 1983, toutes les deux des femmes blanches, ont eu droit au statut en vertu de l'alinéa 6(1)a). En fait, ma belle-soeur a obtenu le statut en 2007, en vertu de l'alinéa 6(1)a). Une femme blanche a obtenu le statut aux termes de l'alinéa 6(1)a). C'était en 2006 et nous n'avons obtenu le nôtre qu'en 2010.
    Je tenais à dire que l'application de la loi continue de conférer le statut à des femmes blanches aux termes de l'alinéa 6(1)a) alors que je ne peux pas l'obtenir moi-même.
(1000)
    Merci. Vous avez fait une déclaration très claire et passionnée. Je pense que nous comprenons.
    C'est maintenant au tour de Pam Palmater, chaire de gouvernance autochtone, Département de politique et d'administration publique à Ryerson.
    Bonjour, Pam.
     [Le témoin s'exprime en micmac.]
    Je suis de la nation souveraine micmaque, occupant un territoire micmaque non cédé. Je reconnais que nous sommes ici en territoire algonquin, également non cédé, ce qui implique une lourde responsabilité.
    J'espère que chacun des membres du comité a conscience du moment historique que nous vivons. En effet, dans cette salle aujourd'hui se trouvent réunies Jeannette Corbiere Lavell, la sénatrice Sandra Lovelace Nicholas, Lynn Gehl et Sharon McIvor, qui, toutes, ont intenté avec succès une action en justice contre le Canada sur cette question. Malheureusement, Yvonne Bédard n'est pas ici, mais Stéphane Descheneaux ainsi que Susan et Tammy Yantha sont présents. Il y en a aussi beaucoup d'autres.
    Combien de fois encore allez-vous obliger les femmes autochtones à consacrer toute leur vie à lutter pour l'égalité, dans ce pays où l'égalité est en fait un principe légal? Ici, vous n'avez pas à choisir. Ce comité ne devrait même pas exister.
    Le message est très clair. Le fait que le gouvernement, ou n'importe quel comité, se pose des questions ou envisage de retarder d'un seul jour l'instauration de l'égalité montre précisément à quel point ce pays est imprégné de sexisme, auquel s'ajoute, pour les femmes autochtones, le racisme. La loi est là. Sur le plan légal, vous n'avez d'autre choix, mais vraiment aucun autre, que d'adopter ce projet de loi.
    La question ici n'est pas de savoir si le projet de loi est accueilli favorablement ou non par telle ou telle personne, par les organismes masculins ou par quelqu'un d'autre.
    Nous avons instauré l'égalité pour les partenaires de même sexe dans ce pays. Pour cela, il n'y a pas eu d'études démographiques, ni de projections de coûts. Vous n'avez pas fait comparaître ici des gens homophobes. C'était une question d'égalité. Vous l'avez fait parce que la loi l'imposait et que vous deviez le faire. Étant des démocrates dans une société juste qui valorise l'égalité, vous vous êtes réunis pour dire: « Nous en assumerons les coûts, quelles que soient les conséquences des mesures prises pour assurer l'égalité. »
    Dans le cas des femmes autochtones, cependant, c'est un peu différent. Pour elles, c'est une question de vie ou de mort. Voilà la différence. Il ne s'agit pas simplement d'une question d'administration, d'étapes à prévoir ou du genre d'accord financier à conclure avec l'APN; il s'agit d'une question de vie ou de mort. La question devrait être tranchée depuis longtemps.
     Le projet de loi S-3 a un autre aspect historique, que voici. M'est-il déjà arrivé de me présenter devant un comité ou écrire au sujet d'une proposition législative fédérale pour dire: « Je suis en faveur de ce projet de loi »? Cela n'est arrivé qu'une seule fois, et pour cause. Personne ne veut de la Loi sur les Indiens. Personne ne veut plus qu'un gouvernement paternaliste, raciste et sexiste nous dise quoi faire. Cela se produit souvent sans notre consentement ou sans consultation. Toutefois, il s'agit d'un texte législatif fédéral qui est assujetti aux lois garantissant l'égalité. Dans ce domaine, vous n'avez pas de choix.
    Le projet de loi S-3 a une importance historique pour une autre raison. Il est le fruit d'un consensus, d'un consensus non partisan, au Sénat. Combien souvent est-ce que cela survient dans l'arène politique de ce pays? Pas très souvent, il me semble.
    Il y a aussi le sénateur Murray Sinclair, qui préside la Commission de vérité et de réconciliation, qui est celui qui connaît le mieux les moyens d'en arriver à une réconciliation au Canada. Je l'ai rencontré hier et il m'a priée de rappeler au comité qu'il était en faveur du projet de loi. En fait, il estime qu'il ne va pas assez loin, mais il est quand même en faveur et cela est important.
    Il n'y a pas eu d'opposition véhémente. Ce fait est aussi d'une grande importance parce qu'AANC travaille très fort depuis six mois à susciter la dissension. L'argent est une arme puissante. Vous pouvez approcher n'importe quel organisme autochtone et lui proposer, en échange de son soutien, de lui verser des millions de dollars à l'étape suivante pour discuter et discuter, ce que nous avons fait des centaines de fois. Eh bien, voici le point qui importe: aucun des organismes nationaux ou régionaux n'est un détenteur de droits. Aucun ne constitue un gouvernement. Ils n'ont pas voix au chapitre. Ce sont les gens qui sont touchés qui ont leur mot à dire.
    Ils peuvent nous laisser tomber pour obtenir l'argent nécessaire aux consultations, mais cela n'est pas pertinent. La loi s'applique toujours et la question judiciaire demeure l'égalité.
(1005)
    Ce n'est pas seulement l'article 15 de la Charte qui consacre l'égalité entre les hommes et les femmes ou l'article 3 de la Loi canadienne sur les droits de la personne qui interdit expressément au gouvernement fédéral de faire des distinctions illicites entre les sexes. Le paragraphe 35(4) de la Loi constitutionnelle est très important, parce que vous dites souvent aux Premières Nations: « Bon, quel est votre point de vue? Votre droit ancestral vous permet de déterminer la citoyenneté. Voulez-vous exercer une discrimination contre les femmes autochtones? » Eh bien, le paragraphe 35(4) dit que si vous prévoyez exercer un droit ancestral, sachez qu'il est garanti également aux personnes des deux sexes. Au cas où cela ne serait pas clair, le consensus international, exprimé à l'article 44 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada accepte sans réserve, prévoit que chacun des droits qui y sont énoncés sont assujettis au principe de l'égalité entre les sexes. Plus important encore, il n'existe pas un seul régime juridique ou légal dans l'île de la Tortue qui justifie ou maintient l'inégalité entre les humains, hommes et femmes.
    Nos traités garantissent, et à tout jamais, ces droits aux héritiers, pas seulement aux héritiers mâles. Ce n'est pas parce que les organismes masculins ont failli à la tâche, qu'ils ne sont pas ici pour défendre nos intérêts que nous n'avons pas droit à l'égalité.
    Voici une difficulté qui se présente à vous. Si vous voulez, si vous y tenez vraiment, continuer d'être aussi racistes et sexistes que le gouvernement, votre tâche sera lourde parce que vous aurez à prendre un ensemble complexe de mécanismes d'inscription des Indiens et le rendre encore plus complexe afin de vous assurer d'inscrire un nombre de personnes aussi minimal que possible et maintenir dates d'extinction légale pour chaque Première Nation du pays. Si tel est votre but, vous n'êtes pas habilités à parler de réconciliation, de nation à nation, ni de quoi que ce soit.
    Si vous n'adoptez pas ce projet de loi, si vous n'êtes pas solidaires des femmes autochtones qui réclament l'égalité, le message que vous enverrez est que les femmes autochtones ne méritent pas l'égalité. Vous devrez cependant en accepter les conséquences. Cela signifie que vous aurez une part de responsabilité dans l'assassinat et la disparition des femmes autochtones, puisque les Nations unies ont déjà fait savoir au Canada que l'inégalité est l'une des causes premières de ces assassinats et disparitions. Vous direz que c'est bien que le Canada continue d'enlever leurs enfants aux femmes autochtones à une fréquence qui dépasse de loin celle de tout autre pays au monde. La surreprésentation dans les prisons… Vous serez en train de dire aux tueurs en série et aux violeurs qu'ils peuvent continuer de cibler les femmes autochtones à un taux sept fois supérieur à la moyenne nationale, puisqu'ils commettent leurs crimes avec impunité. Personne ne s'en soucie, sinon nous aurions déjà pris les mesures qui s'imposent. Vous maintiendrez aussi les dates d'extinction légale, que rien ne justifie. Assez, c'est assez.
     En 2017, Trudeau a promis une nouvelle relation, de nation à nation, fondée sur l'égalité et le respect des droits ancestraux et issus de traités, qui mettrait fin à la violence dont les femmes autochtones sont victimes. Le gouvernement devait abandonner son approche conflictuelle et renoncer à tout jamais à ses pouvoirs décisionnels paternalistes, exercés du haut vers le bas, et même abroger les lois adoptées sous le régime Harper, qui comprennent, je le rappelle, le très discriminatoire projet de loi C-3 qui faisait suite à l'arrêt McIvor.
    Les paroles sont du vent. Les propos ou les engagements des ministres ne riment à rien. Seule l'action compte, et il n'y a rien dans l'arrêt McIvor, l'arrêt Lovelace, l'affaire Gehl ou l'arrêt Descheneaux qui vous empêche d'agir pour de résoudre le problème de l'inégalité des sexes. En fait, comme l'a dit Masse, il ne faudrait pas faire comme vous faites ordinairement. Je vous exhorte à résoudre le problème une fois pour toutes et à ne pas accorder foi à la campagne de peur du gouvernement fédéral au sujet des millions et millions de personnes qui seront inscrites. Il s'agit d'un mensonge éhonté, destiné à susciter la peur parmi les Premières Nations, et ce n'est pas vrai.
    À l'heure actuelle, il y a moins de 900 000 Indiens inscrits, parmi lesquels 50 % sont des femmes et 50 % sont des enfants. Moins de 100 000 personnes ne peuvent pas en engendrer deux millions. Nous sommes peut-être prolifiques, mais quand même pas à ce point.
    Je demande au comité d'entériner les modifications apportées par le Sénat et d'accorder sans plus tarder l'égalité aux femmes autochtones.
    Merci de votre attention.
(1010)
    Je vous remercie.
    Notre prochain témoin est Catherine Twinn, fille du regretté Walter Twinn, chef et sénateur. Elle est accompagnée de Deborah Serafinchon.
    À tous je souhaite le bonjour.
    Je suis accompagnée aujourd'hui de ma belle-fille, Deborah Serafinchon. J'ai préparé son arbre généalogique et j'ai aussi rédigé le texte de mon exposé, que j'ai malheureusement oublié d'apporter. Je le ferai parvenir au greffier.
    Je ferai cependant circuler la généalogie de Deborah Serafinchon pour montrer pourquoi Deborah n'est pas une Indienne inscrite, ni membre de la bande de Sawridge.
    Elle est descendante, des côtés paternel et maternel, du signataire de traité Charles Nisoteesis. Son ascendance ne pose pas le moindre problème quant à son statut d'Indien, post-traité. Je vous invite à comparer sa situation à celle d'une femme non autochtone qui aurait, par son mariage avant l'adoption du projet de loi C-31 en 1985, obtenu la reconnaissance du statut d'Indien et de l'appartenance à une bande, puis divorcé depuis longtemps sont mari indien, lui-même émancipé avant l'adoption du projet de loi C-31; elle et son enfant ont le statut d'Indien inscrit et sont membres de la bande en vertu de l'alinéa 6(1)a).
    Bien que Deborah ne soit pas inscrite, ce n'est pas parce qu'elle n'a pas essayé. En 2001, Deborah a présenté une demande au ministère des Affaires indiennes et a été informée qu'il y avait un arriéré dans le traitement des demandes; la sienne a été retardée.
    Elle s'est ensuite adressée, en 2002, au Lesser Slave Lake Indian Regional Council, qui administre le programme d'inscription des Indiens pour le compte d'AANC et qui est régi par un conseil de chefs. Elle a présenté sa demande, accompagnée d'échantillons d'ADN fournis par moi-même et mes enfants pour qu'elle puisse prouver son ascendance paternelle, puisque mon mari, son père, est décédé en 1997. Deborah l'avait retrouvé tout juste avant son décès, comme elle avait retrouvé sa mère tout juste avant son décès. Elle ne connaissait pas sa généalogie parce qu'elle avait été prise en charge par le système de protection de l'enfance.
    En réponse à sa demande, Deborah a été informée qu'elle devait retrouver certains membres de la Première Nation de Sawridge, les soeurs et frères survivants de Walter et obtenir d'eux une déclaration sous serment attestant qu'elle était sa fille. C'est ridicule. Elle avait déjà fourni une preuve par ADN. Les soeurs et frères survivants n'avaient aucune idée avec qui Walter avait couché, ni quand. Sur ce point, il n'y avait aucune façon de prouver quoi que ce soit. Ils étaient tous étudiants dans un pensionnat indien, ce qui avait contribué à la rupture des relations. Certains avaient déménagé longtemps auparavant.
    Imposer de telles démarches constitue de l'oppression. C'est une forme de violence administrative. Les responsables étaient réticents par crainte d'incidences majeures.
    En mars 1985, j'ai comparu devant le comité prédécesseur de celui-ci au nom de Premières Nations signataires du Traité no 8. Leur mémoire, qui a été remis au greffier, discutait longuement de ces incidences majeures et a soulevé de réelles préoccupations à l'époque.
    Sharon McIvor a tout à fait raison de dire que l'assurance: « Faites-nous confiance, nous ferons le suivi » n'a jamais abouti à autre chose qu'une succession de promesses rompues. Ils ne font pas le suivi. Cela s'est produit trois fois. Trois fois, vous n'êtes plus dans le jeu.
(1015)
    J'ai lu, le 2 juin, que la ministre s'oppose aux modifications apportées par le Sénat en raison de préoccupations quant à leurs incidences. Je tiens à vous dire que cela est fallacieux et déshonorant. La Couronne, le Canada, les parlementaires du Canada — vous-mêmes — ont l'obligation de traiter honorablement avec notre peuple. C'est la Cour suprême du Canada qui le dit.
     Cela est fallacieux parce qu'à la suite du mémoire présenté par les Premières Nations signataires du Traité no 8, ma communauté, tenue pour le gardien vigilant… L'émission The Fifth Estate de la CBC a produit un documentaire qui faisait de mon regretté époux le gardien vigilant. Ce documentaire a été diffusé en juin 1997, tout juste avant que nous nous présentions en appel d'une décision rendue par la Cour fédérale en première instance. L'un des motifs de l'appel était une crainte raisonnable de partialité de la part du juge de première instance, qui avait tenu des propos indiquant que les Indiens étaient comme des enfants comparés aux Blancs, qui eux agissant en adultes, que les hommes indiens étaient des types vêtus de peau de chevreuil ornée de perlage ne cherchant qu'à soutirer de l'argent de la Couronne et que l'histoire orale se réduisait à un culte des ancêtres, voire à de la mauvaise propagande.
    Nous avons obtenu gain de cause en appel, mais avons dû subir un deuxième procès pendant lequel la Couronne s'est défendue avec vigueur, avec agressivité, et a manifesté beaucoup d'hostilité à notre endroit. Elle a fait venir quatre groupes d'intérêt particulier et a payé les frais de leur participation. Les incidences étaient au coeur du litige, ainsi que les lois de la nature, les lois autochtones. Quels sont les principes en vertu desquels nous nous gouvernons? Quelles sont les normes légales qui régissent nos comportements les uns envers les autres et envers toutes les formes de vie? Tout cela est documenté.
    Je me souviens d'un avocat de la Couronne qui disait: « Où est votre recueil de lois? Vos lois n'existent pas. Nous, nous avons des codes de lois. » Vous voyez l'état d'esprit.
    Quoi qu'il en soit, nous n'avons jamais pu traiter de ces questions parce qu'il y a eu une attaque en règle contre les avocats des plaignants, dont j'étais. Pendant cinq ans, j'ai vécu l'enfer. Je puis vous assurer que, si je m'assoyais avec Sharon McIvor et certaines des autres femmes pour comparer nos histoires, nous ne manquerions pas de conclure qu'il s'agissait d'une querelle entretenue par l'État qui dure depuis beaucoup trop longtemps et qu'elle doit cesser.
    À mon sens, il est fallacieux que la ministre dise aujourd'hui: « Oh, nous sommes préoccupés par les incidences. » Vous n'y avez pas donné suite en 1985 pour répondre au mémoire des signataires du Traité no 8. Vous auriez pu traiter de cette question avec nous au moment de notre action en justice, mais vous avez refusé de le faire. Vos avez préféré pointer votre artillerie ailleurs.
     C'est d'autant plus fallacieux aujourd'hui, puisque les Métis sont désormais, en vertu de l'arrêt Daniels, visés par le paragraphe 91(24). Nous sommes tous sous la même tente, et je vous demande alors ce que nous faisons ici. Sommes-nous en train de déplacer les chaises sur le pont du Titanic? Les fédéraux sont responsables de cette situation. Le paragraphe 91(24) s'applique à tous les peuples autochtones. Il faut donc cesser ce jeu de whack-a-mole.
    Quant à la position d'AANC sur les services et les programmes…
    Mon temps est-il écoulé?
(1020)
    Il vous reste une minute.
    De longue date, AANC maintient que les services et programmes ne procèdent pas d'une obligation légale; ils sont offerts selon le bon vouloir de la Couronne. S'il le croit vraiment, pourquoi alors tant de préoccupations de sa part?
    Quoi qu'il en soit, la réputation d'AANC est notoire. Il y a eu des rapports du vérificateur général et aussi d'autres sources, qui font ressortir l'inefficacité et le gaspillage dans les programmes et services qu'il administre. Le regretté George Manuel disait qu'un cent sur un dollar de dépenses fédérales aboutissait dans la poche des Indiens de la base. AANC a contesté ce chiffre, disant: « Non, c'est 10 cents. »
    Quoi qu'il en soit, on constate qu'il existe des solutions novatrices. La Fondation McConnell m'a appris qu'au Québec elle s'était associée avec une communauté des Premières Nations pour s'attaquer au problème de la pénurie chronique de logements. Elle a élaboré une formule novatrice de financement qui a permis la construction de plus de 400 maisons qui, bien qu'appartenant à des particuliers, ne portent pas préjudice au titre ancestral de propriété collective. Un hôtel et une école des métiers ont également été construits.
    Merci de votre attention.
    Je vous remercie.
    Nous passons à la période de questions, qui vous donnera l'occasion de développer vos points et d'autres que les membres pourraient soulever.
    J'invite Mike Bossio à ouvrir le bal.
    Je vous remercie de nouveau de votre présence ici. Merci aussi de la patience dont vous faites preuve depuis des décennies en reprenant sans cesse ce dossier. L'une de mes amies, Marlene Brant Castellano, que vous connaissez peut-être, a été traitée de la même manière, quoique sa situation ait été rectifiée en vertu d'une loi antérieure. Peu importe, j'ai toujours trouvé épouvantable que de telles situations puissent exister.
    J'ai assisté en 2014 à un symposium sur la justice réparatrice pour les femmes. Je ne savais rien de la situation avant que Marlene… Memee Dawn Harvard y était, de même que Waneek Horn-Miller et Jeannette Corbiere Lavell, dont nous avons également entendu le témoignage ici. J'ai pu la rencontrer de nouveau ce jour-là et discuter avec elle.
     J'ai été estomaqué d'apprendre que cette situation existait. La plupart des gens n'en savent rien. Je demeure ébranlé par toutes les discussions et par les allers-retours du projet de loi S-3, qui a d'abord été ici, puis a été envoyé au Sénat avant de revenir ici dans sa forme modifiée. Il m'a été très difficile de comprendre tous les tenants et aboutissants de cet imbroglio, n'étant qu'un humble député qui n'a pas passé des décennies dans ce dossier, contrairement à vous qui le connaissez de fond en comble et qui en êtes révoltée de tout votre être. La passion que vous manifestez laisse transparaître le sentiment de révolte qui vous habite.
    Je connais aussi l'autre côté de la médaille. J'ai été informé par mon propre chef des préoccupations profondes qui existent quant à la possibilité que la communauté soit submergée. Il s'agit d'une des réserves en croissance, et une bonne part de cette croissance est attribuable à l'arrivée de gens de l'extérieur. Il s'inquiète non seulement de la disponibilité de fonds, quoique cela soit certainement une source d'inquiétude, mais aussi de la disponibilité de ressources humaines pour composer avec vague, éventuellement très importante, de nouveaux arrivants. Dans notre étude sur le suicide, nous avons également constaté que l'un des aspects clés influant sur les déterminants sociaux de la santé était justement la disponibilité de ressources humaines et d'éléments d'infrastructure en place pour composer avec les problèmes existants dans beaucoup de communautés autochtones.
    Puis, il y a le sénateur Sinclair, qui a exprimé des préoccupations au sujet de l'application « mur à mur » de l'alinéa 6(1)a) en raison de certaines conséquences non voulues qui pourraient résulter de la formulation actuelle de cette disposition.
    Nous avons entendu les témoignages de l'Association du Barreau Autochtone et de l'AFAC, qui ont également exprimé des préoccupations. Je ne cherche pas du tout à les monter l'un contre l'autre. Je tente simplement de signaler que la réalité de la situation pourrait nécessiter une mise en oeuvre par étapes. Environ 35 000 personnes ont déjà été identifiées.
    Je sais que vous n'allez pas aimer ce que je vais dire — je le vois à votre expression, et vous en avez déjà des frissons —, mais si le processus est en place, c'est que l'engagement a été pris et que cet engagement est inscrit dans le texte de loi. Il ne s'agit pas ici de nier le caractère tout à fait inacceptable de la discrimination et du racisme qui existent dans le système actuel. Nous sommes devant un nouveau texte de loi, et le devoir de consulter, le devoir de préparer, le devoir de s'assurer que les ressources sont disponibles pour composer de manière à… pour même s'y attaquer tout simplement parce que, concrètement, les ressources ne sont pas disponibles en ce moment…
    Voyez-vous une certaine validité au fait d'organiser un processus consultatif, non tellement pour justifier la nécessité de résoudre la situation une fois pour toutes, mais pour établir un cadre nous permettant de mettre en oeuvre ces changements de manière responsable?
    Je termine là-dessus, parce que je vois bien que vous êtes tous prêts à me sauter à la figure. Alors, ne vous gênez surtout pas.
(1025)
    Vous avez deux minutes pour les réponses.
    Merci de votre question. La réponse est non. Il n'y a aucun confort dans un processus par étapes.
    Nous sommes dans un processus par étapes depuis les années 1970. La première étape a été l'affaire Sandra Lovelace, qui a été l'occasion de promesses de consultations et de modifications à la Loi sur les Indiens. Sans suite.
    La deuxième étape a été l'affaire McIvor. Autres promesses de consultations et de modifications à la Loi sur les Indiens. Sans suite là non plus.
    La troisième étape a été l'affaire Descheneaux, suivie très rapidement de la quatrième étape, avec l'affaire Lynn Gehl, parce que, désormais, on n'est plus à la hauteur du nombre de litiges découlant du fait qu'on n'a pas réglé la question de la discrimination sexuelle.
    Combien encore de promesses et combien de promesses trahies? Et puis la loi ne dit pas « Nous promettons de mettre fin à la discrimination sexuelle à la deuxième étape ».
    Est-ce que je peux ajouter quelque chose? Serait-il possible de prévoir dans la loi quelque chose qui serait une sorte de garantie que les choses aient une suite?
    Je ne parle pas de simplement dire qu'on va consulter, de prévoir des échéances et des engagements détaillés pour ne pas dire qu'on ne va pas le faire, mais... est-ce qu'on pourrait inscrire quelque chose dans la loi pour donner une certaine garantie que tout cela sera enfin réglé une fois pour toutes?
    Oui. Mettre fin à la discrimination sexuelle et appuyer une modification du Sénat. La garantie, c'est la cessation de la discrimination sexuelle. Les promesses, non. Il y en a déjà eu.
    Bien franchement, on peut accélérer le processus par étapes pour régler la question de l'inscription et de la filiation autochtone en général en commençant par adopter cette modification. Ça, c'est pour le court terme. À moyen terme, on tient ensuite la promesse d'entamer des discussions sur l'appartenance à une bande et sur d'autres questions. Troisièmement, il y a la question de l'autodétermination. Et cela, c'est pour le long terme.
    C'est ce que devraient être les trois étapes, mais la question de la discrimination sexuelle devrait être réglée. Il n'y a aucune excuse.
    Merci.
    Écoutons le député Viersen.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier nos invitées d'être venues nous voir. Je sais que Catherine Twinn vient de la plus belle région du pays. Je ne suis peut-être pas objectif, mais...
    Ma question s'adresse à tous les témoins ici présents. Si la ministre siégeait ici aujourd'hui, quelles questions lui poseriez-vous ou sur quoi voudriez-vous attirer son attention?
     Je vais commencer par Catherine.
    Je lui dirais que faire et refaire toujours la même chose et s'attendre à un résultat différent est une forme de folie, que la conscience qui a créé le problème ne peut être celle qui va le régler et que la conformité à la Constitution doit être primordiale, qu'elle est urgente et que c'est un enjeu différent de la question des répercussions.
    La question des répercussions, comme je l'ai déjà, est invoquée de façon déloyale et honteuse. Je pense qu'il faut organiser une consultation sur les répercussions, mais je crois qu'elle devrait être dirigée par les deux chambres et dans le cadre d'une collaboration. Elle devrait englober les gens qui seront directement touchés. On a dit et redit — et je suis sûre que ce n'est pas nouveau pour vous — que nous sommes en présence d'un traumatisme historique qui est transmis d'une génération à l'autre. Ce traumatisme a des conséquences sur la façon dont les gens pensent et dont ils agissent les uns envers les autres. Nous sommes en présence d'un problème complexe qui découle d'une loi coloniale, et cela veut dire que nous devons travailler ensemble pour le régler.
     Mais un érudit autochtone du nom de Peter Menzies — et je m'adresse à vous, Mike Bossio — a expliqué que ce traumatisme, qui se répercute aux quatre niveaux d'interaction humaine, à savoir le sujet, la famille, la collectivité et la nation, se manifeste entre autres, à l'échelle collective, par une inaptitude à revendiquer les membres de sa propre collectivité. Je le sais, parce que, si on examine le registre des Indiens, on peut voir que 503 personnes ou êtres humains sont inscrits à Sawridge. Or nous n'avons que 45 membres, dont un seul enfant.
    Où sont nos enfants? L'un des groupes les plus concernés par le projet de loi C-31 est celui des enfants. Beaucoup d'entre eux n'appartiennent pas à une bande. C'est inconcevable, c'est honteux.
(1030)
     Je lui dirais trois choses essentielles si elle venait parler aux personnes directement touchées.
    Premièrement, qu'une position rigide, non négociable, est simplement un signe de mauvaise foi, puisque cela représente une violation de son obligation juridique et fiduciaire d'agir en tout temps dans l'intérêt des Premières Nations, et cela est censé inclure les femmes.
    Deuxièmement, que son refus systématique de régler la question de l'inégalité des sexes est un procédé abusif. Cela contraint les femmes autochtones à continuer de solliciter les tribunaux pour défendre encore et toujours les mêmes causes, et cela est pour certains une source d'enrichissement injustifiée. En refusant d'accorder les programmes et les services qui sont dus et en ne tenant pas compte des droits issus de traités, le gouvernement fédéral fait perdurer la situation parce qu'il s'abrite sous la loi pour ne pas avoir à payer plus tard.
    Enfin, le fait qu'Affaires indiennes agite l'épouvantail de coûts astronomiques pour les Premières Nations est un coup doublement discriminatoire. Le ministère invoque le sous-financement chronique et discriminatoire des Premières Nations pour défavoriser les femmes autochtones, et c'est la quintessence de ce que représente le MAINC. Il n'y a aucune excuse à tout cela.
    Je n'ai pas grand-chose à ajouter, sauf que les répercussions ou le coût de la modification ne doivent pas entrer en ligne de compte. Les tribunaux se sont clairement prononcés à ce sujet. Vous voulez reporter les choses. Vous ne voulez pas faire ce que vous êtes censés faire et votre excuse est que nous pourrions ne pas en avoir les moyens. Ce n'est pas une justification.
    Deborah, vous vouliez ajouter quelque chose?
    Je ne suis pas avocate. Ce n'est pas mon domaine. Tout ce que je sais, c'est que je ne comprends pas les différents statuts — d'après l'alinéa 6(1)a), le paragraphe 6(1), le paragraphe 6(2) ou peu importe. En ce qui me concerne, un Indien est un Indien, c'est tout. Je ne comprends pas pourquoi il y a différents niveaux de statut.
    Ma mère était assez indienne pour être placée en pensionnat indien. Elle l'était suffisamment pour me cacher quand j'étais bébé, parce qu'on séparait les mères non mariées — les « mères indiennes » — de leurs enfants. Donc elle s'est cachée avec moi. Elle a quitté l'hôpital et s'est cachée avec moi, parce qu'elle était assez indienne pour cela. Par contre, elle n'était pas assez indienne pour être inscrite en tant que telle. Il a fallu qu'elle se batte pour obtenir son statut.
    Qu'est-ce qui a changé en 50 ans? Sa fille est en train de se battre pour la même chose, et je ne comprends pas. Je suis assez indienne pour être victime de discrimination, mais pas assez pour obtenir mon statut.
    Il vous reste une minute.
    Ce qui est intéressant, entre autres, ici, c'est que nous traitons d'un aspect de la Loi sur les Indiens. Je travaille dans le secteur automobile, et il arrive qu'un véhicule soit trop abîmé. On essaie de réparer le roulement de roue, mais il faut aussi réparer des tas d'autres choses, et le nouveau roulement de roue ne vous fera donc avancer que de cinq kilomètres.
    Est-ce que je décris la situation correctement d'après vous, Catherine?
(1035)
    Eh bien, j'ai rédigé un certain nombre de modifications dont j'espère que le Comité tiendra compte pour faire en sorte que la voiture fonctionne. Ce n'est pas sorcier, mais cela demande courage et indépendance d'esprit. Vous ne pouvez pas être redevables aux maîtres de vos partis, vous devez faire ce qu'il faut faire.
    Je vais présenter ces modifications. Je ne peux évidemment pas en parler, mais j'espère qu'on en tiendra compte, et elles sont facilement réalisables bien avant le 3 juillet.
    Merci.
    La parole est au député Saganash.
    Merci, madame la présidente.
    Bienvenue et merci à vous toutes. Je suis très sensible à ce que vous dites.
    Je voudrais commencer par quelque chose que vous avez demandé, Sharon. Dans votre lettre aux sénateurs, vous parliez des préoccupations soulevées par les collectivités au sujet des répercussions du futur alinéa 6(1)a). Dans l'un des paragraphes, vous écrivez ceci:
Comme je l'ai déjà expliqué auparavant, je récuse radicalement cet argument. Les bandes et les collectivités indiennes n'ont aucun droit légitime de se prononcer sur la question de savoir si le gouvernement du Canada devrait continuer à exercer une discrimination à mon égard et à l'égard des autres Indiennes en raison de notre sexe. Le gouvernement du Canada a l'obligation juridique, en vertu de la Constitution et du droit international, et l'obligation fiduciaire de ne pas exercer de discrimination en raison du sexe, que les bandes et les collectivités autochtones soient d'accord ou non. À l'heure qu'il est, la plupart des bandes et des collectivités autochtones ne souhaitent pas que la discrimination en raison du sexe perdure.
    Dans vos remarques préliminaires, vous avez parlé des gens que vous représentez et dit que vous n'êtes pas simplement ici à titre personnel. Vous avez parlé des femmes que vous représentez ici, et cela me semble tout à fait légitime.
    Puis, toujours dans vos remarques, vous nous avez demandé qui nous représentions, pour qui nous parlions, et c'est, je crois, la question fondamentale ici. Bien entendu, comme député, je représente les électeurs de ma circonscription, mais comme membre du Parlement et législateur, je parle aussi au nom de la primauté du droit. J'ai l'obligation fondamentale, à ce titre, de faire valoir la primauté du droit. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire respecter la Constitution. Dans notre Constitution, il y a la Charte des droits et libertés et il y a l'article 35 sur les droits inhérents. C'est pour cela que nous sommes ici. Donc, je vous remercie d'avoir posé cette question.
    Pam, vous avez raison de dire que nous ne devrions même pas être ici à discuter de cette question. Je suis absolument d'accord. C'est la raison de mon profond et absolu sentiment de mépris pour la Loi sur les Indiens. Elle est contraire aux droits humains fondamentaux des Autochtones de ce pays, et elle ne devrait pas exister. Je l'ai déjà dit. Qu'on invoque notre Constitution ou le droit international, par exemple la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, ces droits sont inhérents. Ils existent parce que nous existons comme Autochtones. Je pense que ce devrait toujours être le point de départ, qu'on discute d'une politique ou d'une loi.
     Ma question est plutôt simple. Vous recommandez au Comité d'appuyer le projet de loi S-3 et au Parlement de l'adopter. Je suis également d'accord avec cela. J'ai posé une question au sujet de l'article 10 à la représentante de l'AFAC mardi dernier; je l'ai également posée à la représentante de l'Association des femmes autochtones du Québec. Il s'agit de la disposition de « non-responsabilité » du projet de loi, qui, selon moi, est problématique. Par cette disposition, nous demandons essentiellement au Comité et au Parlement de justifier la discrimination historique et la violation historique des droits de la personne.
    Je voudrais entendre chacune d'entre vous à ce sujet. Que nous recommandez-vous concernant l'article 10 en particulier?
(1040)
    La question a été soulevée également en 2010. Le projet de loi révisé a été produit par le Comité. Ses membres y ont introduit un article très semblable à celui que nous sommes en train de parler. Lorsque le projet de loi a été renvoyé à la Chambre des communes, le président a estimé que les changements étaient irrecevables. Mais nous avions éliminé la disposition de « non-responsabilité », et c'est la seule qui n'a pas été jugée irrecevable. La réaction du gouvernement a été de rejeter le projet de loi et de tout recommencer, parce qu'il avait obtenu ce qu'il voulait. Tout a été modifié, sauf cette disposition.
    Évidemment, personne ne devrait être exempté des conséquences de ses crimes, quels qu'ils soient. Ce serait fantastique de pouvoir dire « Je vais faire ceci, mais je vais m'exempter des conséquences que cela pourrait avoir ». Cela n'a évidemment pas de sens, ni sur le plan juridique ni sur le plan du bon sens. Cette disposition ne devrait pas être là. Si on pouvait supprimer ce genre de protection, on aurait probablement des lois qui respectent le droit.
    Il vous reste seulement une minute dans cette série.
     Il faut absolument supprimer cette disposition. Nous avons également recommandé de supprimer le même article dans le projet de loi S-3. C'est une incitation pour le gouvernement à continuer d'exercer une discrimination en toute impunité en attendant le moment où il décidera qu'il est temps de régler le problème ou sera contraint de le faire. Je l'ai expliqué dans mon mémoire. Je peux le présenter à nouveau ici pour dire qu'il faut supprimer cette disposition, parce que tout le monde sait que c'est de la discrimination.
    Veuillez être très brève, s'il vous plaît.
    Cela témoigne du sentiment de droit colonial et cela porte atteinte au principe de la primauté du droit. La Couronne et une Première Nation exerçant le pouvoir conféré par l'article 10 ont des relations fiduciaires. Elles ont toutes deux une obligation fiduciaire à l'égard du peuple. Elles ne peuvent pas être exemptées des conséquences de leur comportement: cela reviendrait à autoriser les infractions à la loi et au principe d'application régulière de la loi, autrement dit on leur permettrait de faire ce qu'elles veulent sans avoir à en subir les conséquences. C'est inacceptable.
    Merci.
    Monsieur le député Anandasangaree.
    Madame la présidente, je vais laisser mon temps de parole à M. McLeod.
    Merci aux témoins. Je suis très sensible à votre passion et à votre dévouement à l'égard de cet enjeu.
    Catherine Twinn, il y a quelque temps, j'ai suivi l'une de vos séances sur la violence latérale, et j'y ai beaucoup appris.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, et c'est un gros problème pour moi. Dans les Territoires du Nord-Ouest, j'ai cinq grands gouvernements autochtones qui voudraient avoir leur mot à dire à ce sujet.
    Je me demande vraiment, et je trouve cela inquiétant, pourquoi nous parlons de tout cela ici. Pourquoi est-ce qu'Affaires indiennes se conduit comme un ministère de l'immigration pour les Indiens? Je pense que Romeo l'a bien exprimé hier en disant qu'il y a beaucoup plus de gens qui sont accueillis dans ce pays qu'il n'y en a qui subiraient les conséquences de cette décision.
    Par ailleurs, les Autochtones et les gouvernements autochtones de ma circonscription s'attendent à être consultés. Ils y tiennent absolument, quel que soit l'enjeu, et cela inclut celui-ci.
    Pam, je crois que vous avez dit qu'aucune organisation autochtone ne devrait être consultée. Elles ne sont pas titulaires des droits.
    J'ai deux questions.
    Tout d'abord, dans cet ordre d'idées, qui devrait-on consulter d'après vous et s'il y a lieu dans le cadre de la deuxième étape? La question s'adresse à vous toutes: y a-t-il des titulaires de droits qu'il y aurait lieu de consulter?
    Catherine Twinn, vous avez dit que la consultation sur les répercussions devrait être dirigée par les deux chambres. Pourriez-vous expliquer votre point de vue? Selon vous, comment cela fonctionnerait-il?
(1045)
    Nous avons déjà dépassé le temps dont nous disposions. Pourriez-vous répondre très brièvement, s'il vous plaît? Merci.
     Je pense que vous avez peut-être mal compris ce que j'ai dit. Je disais que, en ce qui concerne la discrimination sexuelle, le MAINC n'a pas cessé de consulter depuis des décennies, mais on n'a pas à consulter pour savoir si on peut ou non faire de la discrimination.
    Concernant les problèmes liés à l'appartenance à une bande, au financement, etc., il faut bien entendu consulter les Premières Nations, d'abord et avant tout, et tous ceux qui en subiraient les conséquences, mais ce que j'essayais de dire, c'est que les organisations autochtones nationales ou régionales n'ont pas le droit de nous priver de l'égalité des sexes pour des raisons financières en demandant une deuxième étape de consultation sur des questions qui n'ont aucun rapport.
    Je vais me montrer très libérale et vous donner une chance de parler, si vous le désirez.
    Je crois qu'il y a certainement des précédents parlementaires concernant, par exemple, le rapport du Comité Penner sur l'autonomie gouvernementale des Autochtones. On avait créé un comité spécial multipartite, mais je crois qu'il ne relevait que de cette chambre, pas des deux.
     Je pense que les législateurs doivent s'engager à fond et je ne crois pas que le MAINC peut ou devrait diriger ce processus.
    Nous allons mettre fin au débat ici.
    Merci beaucoup d'être venues nous voir. Je vous remercie de l'avoir fait à si peu de préavis et d'être venues nous parler de choses dont vous avez déjà beaucoup parlé auparavant.
    Meegwetch.
(1045)

(1045)
     La séance est ouverte. Reprenons notre travail.
    Je tiens d'abord à remercier les représentants du ministère des Affaires autochtones et du Nord d'être parmi nous et notamment l'honorable Carolyn Bennett.
    Je crois que les membres du Comité ont tous reçu un exemplaire de votre discours, et j'aimerais commencer dès que vous serez prêts.
(1050)
    Merci, madame la présidente. C'est un bonheur d'être de retour parmi vous. Merci de me recevoir aujourd'hui pour parler du projet de loi S-3. Je veux tout d'abord souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
     Je vous remercie d'avoir compris l'urgence de ce projet de loi. Je vous remercie aussi pour le travail que vous avez accompli durant l'étude préliminaire du projet de loi.
    Comme vous le savez, en réponse aux recommandations du comité sénatorial permanent, le gouvernement a obtenu une prolongation de cinq mois pour examiner le projet de loi S-3. Grâce à cette prolongation, de nombreuses améliorations ont été apportées à la version originale du projet de loi S-3, lesquelles ont été bien accueillies et soutenues par le gouvernement. Le projet de loi traite maintenant de manière proactive d'autres groupes touchés par des iniquités fondées sur le sexe, qui ont été identifiées par l'Association du Barreau Autochtone. La décision récente de la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire Gehl a également permis au gouvernement de traiter la question de la paternité non déclarée en enchâssant des protections procédurales additionnelles dans la loi aux termes de ce projet de loi.
    De plus, je suis consciente du scepticisme compréhensible des Premières Nations, des personnes touchées et des parlementaires quant aux changements véritables qui pourront découler de la deuxième étape de la réforme touchant l'inscription et l'appartenance. C'est pourquoi le gouvernement a proposé une série de modifications aux termes desquelles le gouvernement devra faire rapport au Parlement un certain nombre de fois et de diverses manières, afin de vous tenir au courant, ainsi que tous les Canadiens, de nos progrès relatifs à une réforme plus étendue. La législation prévoit désormais trois rapports distincts au Parlement.
    Dans le cadre du processus de la deuxième étape, je veux que vous sachiez que je m'engage, au nom du gouvernement et à titre personnel, à concevoir le processus de concert avec les Premières Nations, y compris les collectivités, les personnes touchées, les organismes et les experts, pour mettre en oeuvre des réformes significatives sur le plan de l'inscription, y compris d'éventuels changements législatifs à l'avenir. Ce processus intégrera toute la gamme des personnes touchées et s'appuiera sur une perspective des droits de la personne.
     Je veux souligner clairement qu'à la deuxième étape, la conformité à la Charte constituera le seuil, et non la limite maximale, et il se peut très bien que dans certains secteurs de réforme nécessaire, le consensus ne soit pas atteint. Le gouvernement a établi clairement que le consensus ne sera pas une condition essentielle à l'action. Toutefois, pour les cas où le gouvernement devrait agir en l'absence d'un consensus, cette absence ne fera qu'accroître la nécessité de prendre des décisions sur la base de consultations véritables et d'éléments de preuve crédibles concernant les répercussions possibles de la réforme.
    La nécessité d'équilibrer les besoins liés à la mobilisation des personnes concernées et ceux du processus parlementaire n'a donné que deux périodes écourtées de trois mois, même compte tenu de la prolongation accordée par le tribunal.

[Français]

    Je pense que, étant donné le contexte de la mobilisation limitée à l'intérieur des délais imposés par la Cour, il est important d'aborder la portée prévue du projet de loi S-3.

[Traduction]

    Le projet de loi S-3 doit remédier aux iniquités connues fondées sur le sexe qui sont associées à l'inscription des Indiens dans la Loi sur les Indiens, qui n'est pas conforme à la Charte.
     Cette mesure ne se limite pas aux situations pour lesquelles un tribunal a déjà rendu un jugement. Elle s'étend également aux jugements futurs des tribunaux où l'on pense trouver une violation des dispositions de la Charte fondée sur le sexe. Cependant, le gouvernement a indiqué clairement que, dans les circonstances où les tribunaux ont établi que des politiques étaient conformes à la Charte, où dans les situations plus complexes que celles concernant simplement les iniquités alléguées fondées sur le sexe, l'action gouvernementale doit être basée sur des consultations véritables, comme le prévoit la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
(1055)
     Même s'il a appuyé de nombreuses modifications proposées et adoptées par le comité sénatorial, le gouvernement a établi clairement qu'il ne peut soutenir un amendement proposé par la sénatrice McPhedran et accepté par le Sénat. L'intention de l'amendement proposé par la sénatrice McPhedran concernant l'article premier du projet de loi S-3 semble d'être d'accorder l'admissibilité à l'inscription à tous les descendants directs nés avant le 17 avril 1985, de personnes ayant déjà été inscrites comme Indien en vertu de toutes les versions de la Loi sur les Indiens, y compris les versions antérieures allant jusqu'à 1876. En termes simples, cette disposition vise à mettre en oeuvre une approche communément appelée l'application universelle de l'alinéa 6(1)a).

[Français]

    Je crois que cet amendement a été proposé avec la meilleure intention du monde, mais la manière dont il est rédigé crée une ambiguïté quant à savoir s'il aurait l'effet visé.

[Traduction]

    Cette ambiguïté a été soulignée par le sénateur Sinclair pendant l'examen article par article en comité et par l'Association du Barreau Autochtone lors de son témoignage devant ce comité. Et si cette clause est interprétée de façon à appliquer de façon générale l'alinéa 6(1)a), elle pourrait étendre le statut à un large éventail de personnes touchées par une gamme imposante d'iniquités alléguées — bien au-delà des iniquités fondées sur le sexe.
     Le gouvernement est disposé à examiner cette approche lors du processus de la deuxième étape, mais nous n'avons pas consulté adéquatement ceux qui pourraient être touchés et nous ne disposons pas actuellement des données démographiques requises pour comprendre les implications pratiques d'une telle approche. Le gouvernement amorce actuellement ces travaux, mais les estimations préliminaires ne sont pas fondées sur des données fiables et concernent de larges éventails de personnes potentiellement admissibles au statut d'Indien — entre 80 000 et 2 millions de personnes. Le fait de souligner ces chiffres ne signifie pas que ces deux pôles représentent l'impact de la mesure. Nous souhaitons plutôt faire ressortir la vaste étendue des estimations actuelles et la nécessité d'avoir de meilleures données.

[Français]

    Non seulement y a-t-il un manque de compréhension des implications pratiques de cette approche, mais il est clair que la consultation nécessaire n'a pas eu lieu.

[Traduction]

    Cette clause peut avoir des incidences profondes sur les collectivités, qui pourraient se retrouver avec un très grand nombre de nouveaux membres ayant peu de relation avec elles, voire aucune, et ce sans véritables consultations préalables. Je veux comprendre les perspectives et les préoccupations du grand nombre de personnes potentiellement touchées qui n'ont pas été consultées à propos de l'application générale de l'alinéa 6(1)a). Cette disposition n'a pas fait l'objet de consultations antérieures.
    Je veux l'affirmer clairement: j'exprime ma solidarité envers les femmes autochtones qui se battent sur ces questions depuis des décennies. Je suis consciente de la douleur qu'elles ont vécue en recevant une lettre annonçant qu'elles étaient dorénavant une « femme blanche » en raison de leur mariage. Que les problèmes qui subsistent soient liés ou non à la Charte, je veux contribuer à les régler. Mais nous devons prendre garde de ne pas répéter les erreurs du passé où, parfois même avec des intentions admirables, des politiques ont été mises en application en l'absence de consultations ou de données probantes et ont entraîné de terribles conséquences inattendues. Je veux collaborer avec les collectivités, les personnes touchées et les experts pour veiller à ce que ces problèmes soient finalement réglés.
     Les préoccupations soulevées par de nombreuses personnes au sujet du libellé de cette clause démontrent à quel point il est facile de se tromper sur cette question quand le travail est réalisé trop vite. Comme vous le savez sans doute, nous avons une échéance fixée par la Cour pour cette législation, soit le 3 juillet.

[Français]

    Si le projet de loi, qui répond aux éléments de conformité à la Charte soulignés dans l'arrêt Descheneaux, n'est pas adopté avant le 3 juillet, les articles annulés par la Cour seront inopérants au Québec.

[Traduction]

     Pratiquement parlant, il s'ensuit que ces dispositions deviendraient inopérantes au Canada: 90 % des Indiens sont inscrits par le gouvernement fédéral en vertu des dispositions qui deviendraient inopérantes. Outre les quelque 35 000 personnes attendant que leurs droits soient reconnus grâce au projet de loi S-3, nous devons prendre en considération les milliers d'autres qui ne pourront pas être inscrites si l'échéance de la Cour est dépassée et que les dispositions susmentionnées deviennent inopérantes.
(1100)
    En conclusion, je vous demande de voter contre l'alinéa 6(1)a) et son application générale et de renvoyer au Sénat une version de ce projet de loi qui respecte notre obligation de consulter et qui nous donne le temps nécessaire, à travers la deuxième étape, de faire enfin les choses comme il faut.
    Merci.
    La première question sera posée par le député Michael McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à la ministre et aux membres de la délégation qui sont venus nous parler de cette question ici aujourd'hui.
    Je suis bien mal à l'aise de devoir décider qui peut être reconnu comme Autochtone et de me débattre avec cette question qui ne devrait pas avoir lieu d'être. Le processus aurait dû faire l'objet d'une consultation il y a bien longtemps. Nous ne devrions pas être en train de nous heurter à un gouvernement qui résiste au changement. Tout cela n'aurait pas dû passer par les tribunaux. Mais c'est là que nous en sommes.
    Je viens des Territoires du Nord-Ouest. Il se passe beaucoup de choses autour de certaines questions relatives au programme des Autochtones et de leurs répercussions sur nous. Il y a dix séries de discussions en cours, dont des négociations concernant des revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale. Nous n'avons pas de réserves. Nous avons des collectivités publiques. Donc l'arrivée de nouveaux venus ne nous inquiète pas autant. Cela dit, nous sommes inquiets des répercussions sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale. L'indemnité relative à la superficie foncière est intégralement une question de chiffres. Pour nous, plus il y a de gens, plus les chiffres sont élevés et plus nous sommes à même de négocier des ententes intéressantes. Cela dit, nous en sommes encore à négocier à partir de chiffres remontant à 1970.
    En quoi cela se répercute-t-il sur les gens? Comment parler aux personnes qui participent à ces discussions? Ils décideront eux-mêmes de leurs affiliés, mais ils partiront des données remontant au moment où ils auront signé. Je suis un peu nerveux: faut-il attendre, pour régler les revendications territoriales, que cette question soit elle-même réglée ou devons-nous aller de l'avant? Qu'en pensez-vous?
    C'est une excellente question. Comme je l'ai déjà dit au Comité, la citoyenneté d'une Première Nation ne regarde pas le Canada. La Déclaration des Nations unies est très claire à cet égard. Seules les Premières Nations peuvent déterminer les conditions d'accès à leur citoyenneté. Nous avons l'impression que ce processus d'élimination de la dépendance de la Loi sur les Indiens et la possibilité de régler les inégalités qui y étaient enchâssées fait partie d'un processus plus vaste d'autodétermination — qui mettra mon amie Nathalie au chômage. C'est bien ce que nous voulons faire, en définitive.
    Comme vous l'avez dit, c'est la population d'une collectivité qui doit décider. Cela ne doit pas être décidé par les tribunaux du Canada de cette façon. Nous avons l'impression que c'est une étape provisoire et que la deuxième étape en sera une autre, mais, entre-temps, nous essayons de poursuivre ces conversations concernant l'autonomie gouvernementale afin que les collectivités puissent prendre leurs propres décisions.
    En effet. Merci de cette réponse. Je suis très heureux que nous ne soyons plus en train de nous battre au sujet de ce texte législatif. Nous avançons. Mais il y a une modification qui cause du souci. Nous avons entendu ce qui préoccupe le sénateur Sinclair. L'Association du Barreau Autochtone a, elle aussi, expliqué comment la formulation pourrait entraîner des complications. Ce n'est pas rédigé comme il faut. Cela peut entrer en contradiction avec d'autres parties du projet de loi.
    On a également dit que personne ne fait confiance au ministère des Affaires autochtones. Cela a été exprimé haut et fort. Le plan de consultation de 18 mois nous mènera probablement au prochain gouvernement. Peut-être que je ne siégerai plus ici. Ces sièges pourraient être occupés par d'autres personnes.
    Aujourd'hui, j'ai entendu Catherine Twinn proposer quelque chose d'intéressant, dont je n'avais pas idée que cela puisse être une solution. Permettez que je pose la question: est-il possible que les consultations sur les répercussions soient dirigées par les deux chambres, le Sénat et cette chambre-ci?
(1105)
    Je crois que nous sommes ouverts à cette éventualité. Je crois que l'un des meilleurs comités auxquels j'aie siégé était un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat.
    Dans le cadre de notre engagement à concevoir le processus de concert avec les Autochtones, les personnes touchées, les Premières Nations ou peu importe... s'ils pensent qu'il serait plus efficace de procéder ainsi, et ainsi de ne pas le faire deux fois, nous sommes ouverts à toutes les idées possibles. Ce que nous codifions dans le projet de loi, c'est que nous rendrons compte des progrès accomplis d'ici 12 mois. Nous devons trouver une solution efficace au sujet de la conception commune du processus d'ici six mois. Nous devons faire en sorte que la participation soit valable pour veiller à rejoindre ceux qui ne sont généralement pas représentés à ces tables, mais qui sont touchés ou risquent de l'être. Comment obtenir que tous les intéressés participent aux séances?
    Rappelez-vous qu'il y a trois engagements. Nous devons rendre compte de la conception du processus d'ici cinq mois; nous lançons le processus d'ici six mois; et nous devons rendre compte de nos progrès au Parlement d'ici 12 mois.
    Nous comprenons bien que « personne ne fait confiance à l'agent indien ». Je suppose que je dis cela parce que je suis féministe et que j'ai passé ma carrière en relation avec des patients, mais aussi avec des élus, des membres de la collectivité et des citoyens engagés. Je suis déterminée à faire en sorte que cette participation soit valable et à obtenir des résultats réels qui nous permettront de mettre en oeuvre concrètement les nouveaux changements à venir. Nous voulons veiller à ce que le processus d'instauration de l'égalité et de l'équité soit juste, que tout le monde participe au processus et que ce processus soit légitime et équitable.
    Merci.
    La parole est à Cathy McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, madame la ministre, d'être venue nous voir aujourd'hui pour discuter de cet important texte législatif.
    Je voudrais d'abord faire remarquer que c'est un processus très bizarre. En général, à la Chambre des communes, on examine un projet de loi une fois qu'il a été référé par la Chambre. Or, dans ce cas-ci, dès le mois de novembre, nous l'avons appuyé pour faire preuve de diligence raisonnable, compte tenu du délai imposé par la Cour suprême du Canada, et nous avons procédé à une étude préalable pendant que le comité l'examinait. Nous faisons en ce moment une autre étude préalable, et je crois savoir qu'on est en train de faire une analyse article par article accélérée. De plus, il n'y a pas eu un seul moment de débat à la Chambre. Je tiens à signaler que voilà certainement une situation très inusitée compte tenu de mon expérience de parlementaire depuis 2008.
     Cela dit, je suis très inquiète de certaines choses qui ont été dites en novembre et que nous entendons ici maintenant. Je voudrais retourner au 21 novembre. J'avais demandé aux représentants du ministère s'ils étaient convaincus que le projet de loi S-3, dans la version d'alors, « éliminerait les iniquités fondées sur le sexe connues ». On m'a répondu officiellement: « Nous sommes confiants ».
    La fonctionnaire avait déclaré:
Pour ce qui est de votre question sur la discrimination fondée sur le sexe, oui, le projet de loi corrige tous les problèmes.
    C'est ce qu'on nous a dit à l'époque.
    Aujourd'hui, on nous renvoie une sorte de version révisée. Il y a bien sûr l'affaire Gehl, ainsi que d'autres changements apportés entre-temps, et vous parlez d'en apporter en fonction de ce que l'Association du Barreau Autochtone vous a dit au sujet des inégalités fondées sur le sexe.
    Mardi, j'ai dit:
La notion de « connu » dépend-elle de ce que les tribunaux ont déterminé ou de ce que l'on sait du problème aujourd'hui?
    M. Reiher a alors répondu ceci:
En fait, comme nous l'avons dit, cela dépend de ce que les tribunaux ont déterminé, plus ce qui est évident.
    Je pense que, en novembre dernier, vous étiez au courant de l'affaire judiciaire en cours. Vous étiez au courant de ces questions. Quand je pense que j'ai de nouveau demandé, mardi, si on traitait de toutes les inégalités fondées sur le sexe, comment avoir confiance dans la réponse qu'on m'a donnée, alors que c'est exactement la même qu'en novembre et que nous discutons de changements? En fait, pour moi, il est inconcevable que vous ayez été au courant d'une affaire judiciaire en cours et qu'on n'en ait pas tenu compte.
    Peut-être pourriez-vous m'expliquer comment nous pouvons vous faire confiance aujourd'hui, alors que, en novembre dernier, on nous a donné la même réponse et que c'était manifestement faux.
(1110)
     Je voudrais commencer, Cathy, par dire que la première chose que nous avons dû faire a été de supprimer le contrôle judiciaire que le gouvernement conservateur avait imposé à l'égard de la décision Descheneaux. Puis nous avons dit que nous accepterions le contenu exact de cette décision. Ensuite, nous avons dit que nous pourrions y ajouter certaines choses que nous savions. À la suite de quoi, l'affaire Gehl a souligné la question de la paternité non déclarée, et nous avons ajouté un certain nombre de choses au strict contenu de la décision Descheneaux pour élargir le champ de ces questions, qui, selon nous, relèvent de la Charte.
    La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a déclaré que l'application générale de l'alinéa 6(1)a) dans l'affaire McIvor n'était pas... Il n'était pas nécessaire de remonter si loin pour respecter la Charte, de sorte que nous disons maintenant que nous faisons tout ce que nous estimons être de l'ordre de la Charte, et plus, mais que nous devons consulter concernant ce qui relève de décisions politiques par opposition à ce qui relève du respect de la Charte.
    Voulez-vous dire que l'affaire Gehl ne répondait pas à vos critères parce qu'il ne s'agissait pas de discrimination sexuelle ou que cela remontait trop loin selon vous?
    Je crois que nous avons dit au comité sénatorial que nous estimions à ce moment-là que la paternité non déclarée serait abordée à la deuxième étape, et je crois que des gens comme le sénateur Sinclair et d'autres espéraient vraiment que nous puissions régler cette question à cette étape-ci. C'est l'affaire Gehl qui nous a permis d'apporter cette modification et ce changement maintenant, mais nous pensons que le reste relève de décisions politiques au sujet desquelles il faut consulter les Premières Nations, compte tenu du principe de « rien sur nous sans nous », puisqu'il ne s'agit pas de questions relevant de la Charte.
    Je crois que la déclaration selon laquelle on traitait de toutes les inégalités fondées sur le sexe, mais que celle-là pouvait attendre la deuxième étape, a suscité un peu d'inquiétude.
    Je voudrais passer à ma prochaine question...
    Cathy, nous pensions que cela ne relevait pas de la Charte, mais, comme le tribunal a rendu sa décision, nous avons décidé que nous pouvions le faire à cette étape-ci, et c'est un plus.
    Je sais que sept minutes, cela passe très vite, et je voudrais donc vraiment passer à ma prochaine question.
    Concernant l'application générale de l'alinéa 6(1)a), on m'a dit, mardi, que cela pourrait avoir des répercussions très vastes, bien au-delà des inégalités fondées sur le sexe. Je rappelle que la greffière a ajouté, pour plus de clarté, le nouvel alinéa 6(1)a.2), qui, aux fins de la vision actuelle, précise qu'il s'agit en fait de la lignée matrilinéaire et de la question des inégalités fondées sur le sexe. Ne pensez-vous pas que la formulation, qui est, en fait, plus claire que la modification proposée par les libéraux — parce que c'est exactement la même modification que les libéraux ont proposée pour McIvor —, étant donné que la greffière a précisé de quoi il s'agissait, ne pensez-vous pas, dis-je, que cela apporte la clarté nécessaire du point de vue des enjeux de l'égalité des sexes?
    Vous pouvez répondre très brièvement. Vous disposez de 10 secondes.
    Non, je crois, comme Michael McLeod et le sénateur Sinclair l'ont dit au sujet de l'ambiguïté qui existe, que l'intention prévue au départ pourrait ne pas se concrétiser et que cela pourrait contredire d'autres parties du projet de loi. Voilà pourquoi nous devons tenir des consultations et pourquoi il faut également consulter divers intervenants sur la façon de déterminer le processus équitablement et d'en assurer la mise en place avec intégrité, ce que nous pourrons appuyer.
    Merci.
    C'est au tour du député Saganash de poser des questions.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie, madame la ministre, de revenir témoigner aujourd'hui.
    Je tiens à souhaiter encore une fois la bienvenue aux autres personnes qui étaient ici mardi.
    Dans vos observations, vous avez mentionné que les gestes posés par le gouvernement doivent reposer sur des consultations sérieuses auprès des Autochtones et vous avez fait allusion à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Il est malheureux que votre gouvernement, et vous par la même occasion, malgré vos promesses, n'appliquiez pas cette règle à tous et je peux citer plusieurs cas à l'échelle du pays — prenons par exemple le site C qui représente un cas typique.
    Sur la question de l'application générale de l'alinéa 6(1)a), je suis profondément troublé par le choix suggéré entre les droits de la personne et l'argent à verser. Ces propos sont troublants et bouleversants. Dans ce pays que nous appelons le Canada en 2017, l'idée suggérée d'opérer un choix entre les droits de la personne et l'argent à verser n'est pas acceptable. J'ai également entendu cette suggestion des membres d'en face.
    Je ne crois pas que nous devrions fonder notre jugement sur ce point de vue, pas dans ce pays.
(1115)
    Je suis d'accord.
     Vous avez appuyé les modifications proposées dans le passé lorsque vous étiez députée de l'opposition. L'actuelle ministre de la Justice était également favorable à ces modifications dans le passé, lorsqu'elle était vice-chef pour la Colombie-Britannique. Alors, que s'est-il produit depuis ce moment-là? Quel chapeau porte Carolyn Bennett qui est devant nous aujourd'hui?
    Comme vous le savez, je n'étais pas porte-parole en la matière à ce moment-là, puisque je n'étais pas avocate. Je crois que cette décision avait été prise par Todd Russell qui souhaitait qu'un processus se concrétise.
    J'essaie de vous dire qu'il faut maintenant comprendre que l'atteinte de l'égalité et de l'équité n'est pas une question d'argent. Il s'agit d'assurer l'équité et d'adopter un processus afin de déterminer qui a un statut d'Indien et qui n'en a pas dans le cadre d'un processus intègre que les gens comprennent et auquel ils adhèrent.
    Puisque la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a statué que cela n'est pas nécessaire pour respecter la Charte, nous devons tenir des consultations afin de veiller à établir ce processus adéquatement. Il faut pour cela tenir compte de tous les intervenants et pas seulement des chefs et des conseils. Il faut s'adresser aux femmes et aux personnes qui ont été cruellement touchées par cette injustice pendant si longtemps et voilà pourquoi nous avons établi deux phases. Ces deux phases s'imposent, car il y aura des conséquences pour les communautés et nous devons nous assurer qu'il existe des ressources afin que les communautés puissent être en mesure d'interpeller les nouveaux membres et d'examiner les modes de scrutin sur l'éducation et les revendications territoriales. Tous ces facteurs reposent sur un taux de participation de 25 % d'électeurs.
    Ces facteurs pourraient être grandement compromis si le travail n'est pas bien fait et si nous ne déployons pas les ressources qui s'imposent pour permettre aux communautés de collaborer avec leurs nouveaux membres. Voilà pourquoi l'exercice de consultation de la deuxième phase devient si important.
    Ce qui m'étonne de cette discussion c'est que vous, en qualité de ministre, avez décidé que les consultations doivent porter davantage sur les droits de la personne.
    Pouvez-vous me dire s'il existe un autre groupe dans ce pays, que vous désignez comme constituant le Canada en 2017, qui doit être consulté relativement aux droits fondamentaux de la personne? Outre les peuples autochtones, connaissez-vous d'autres groupes?
    Même au cours des discussions initiales, Romeo, on a constaté d'autres cas d'iniquité dans la Loi sur les Indiens, notamment sur la question de l'émancipation. À un moment donné, il faudra obtenir des données et nous devrons trouver un moyen d'adopter un processus adéquat. C'est à ce moment-là qu'interviendra la deuxième phase. Nous voulons abolir tous les cas d'iniquité dans la Loi sur les Indiens. Ce sont ces cas-là qui sont traités dans le projet de loi S-3 et que le tribunal nous a demandé d'examiner et nous avons excédé le rôle que le tribunal nous a confié.
    Maintenant, nous devons poursuivre notre travail et abolir les autres cas d'iniquité et je suis déterminée à m'y consacrer.
    Je salue votre engagement personnel. Selon une déclaration récente du Tribunal des droits de la personne, qui portait sur vous, sur vos paroles et sur votre ministère, vous dites une chose et votre ministère fait exactement le contraire.
    Pouvez-vous bien me dire qui est aux commandes?
(1120)
    Tout d'abord, je ne partage pas votre opinion...
    Voilà pourquoi personne ne fait confiance à AANC.
    Je tiens à préciser que les fonctionnaires d'AANC n'ont rien fait d'autre que d'assurer la mise en oeuvre d'un processus et c'est ce que les loyaux fonctionnaires veulent être en mesure de réaliser. AANC compte presque 30 % d'Autochtones qui peuvent maintenant laisser leurs marques sur de meilleures politiques à partir de maintenant.
     Je suis très fière de mon ministère et je crois, encore une fois, qu'il s'agit d'une question de liens que ces incroyables personnes ont tissés dans les communautés. Elles ont vécu ce genre de situation et nous devons utiliser avec prudence ces généralisations, car, j'estime, qu'il appartient aux décisionnaires de montrer l'exemple, à commencer par le premier ministre. Il n'aurait pas pu être plus clair auprès de chaque ministre et fonctionnaire que cette relation est la plus importante qui soit et nous devons déployer beaucoup d'efforts pour rectifier le tir. Mais nous devons nous concentrer sur une étape à la fois et je suis fière des progrès que nous avons accomplis.
    Pouvez-vous commenter brièvement la disposition 10 qui traite de la non-responsabilité de l'État? Je m'oppose vigoureusement à cette disposition, car elle nous incite... En 2017, cette proposition sert à justifier les préjudices commis dans le passé au nom des droits de la personne. Est-ce également votre impression?
    Vous disposez de 15 secondes.
    Il s'agit d'une disposition répandue dans la plupart de nos activités, mais elle vise également à protéger les communautés des Premières Nations concernant leur responsabilité relative aux décisions qu'elles ont prises. Je crois comprendre qu'une partie de cette disposition est débattue devant les tribunaux maintenant, mais elle est nécessaire afin de protéger les communautés des Premières Nations.
    Merci.
    C'est maintenant au tour du député Bossio de poser des questions.
    Je vous suis très reconnaissant de votre présence ici aujourd'hui, madame la ministre.
    Comme je l'ai indiqué à des témoins précédents, je ne savais pas même que cette question représentait un enjeu avant 2014, quand j'ai participé à un symposium de justice réparatrice pour les femmes autochtones. Mme Marlene Brant Castellano est une amie et je ne savais même pas à ce moment-là qu'elle était touchée par cet enjeu. Les participants étaient nombreux. Jeannette, qui a témoigné précédemment, était ici également et je l'ai rencontré ce jour-là, et j'ai écouté les récits de ces personnes au sujet de leur lutte pour demander réparation.
    Pour moi, cette question est consternante et je dois me rallier à l'opinion de Romeo: cette injustice sévit encore de nos jours au Canada. C'est incroyable.
    Je dois dire que je suis consterné par la passion et la frustration suscitées par plusieurs décennies de règne des gouvernements qui se sont succédé en déclarant: « Oui, nous allons régler ce problème. Nous allons mener des consultations et nous allons nous en occuper une fois pour toutes et régler le tout ». Voilà encore le gouvernement qui s'évertue à dire, « Eh bien, vous savez quoi? On va faire un bout de chemin afin de régler un perpétuel problème, et le problème ne sera pas entièrement résolu, en vue d'y faire face une fois pour toutes ».
    Oui, des engagements sont pris pour la deuxième phase afin de pouvoir déclarer que nous avons adopté un processus, que nous allons y adhérer et que nous nous sommes fixé des échéanciers. Mais rien ne garantit que la deuxième phase permettra de résoudre le problème, que le gouvernement sera en mesure, dans le cadre de ce mandat, de mettre un terme une fois pour toutes à la discrimination sexuelle dont sont victimes les femmes et les jeunes filles autochtones et les générations de frères et soeurs.
    La Carolyn Bennett que je connais souhaite, dans son âme et conscience, mettre fin définitivement à cette discrimination, mais, pour reprendre vos propos, nous devons redoubler d'efforts pour tenter de rectifier le tir et de nous engager dans la voie qui nous semble la plus appropriée. Si nous ne mettons pas un terme, une fois pour toutes, à la discrimination sexuelle dès aujourd'hui, grâce à ce projet de loi modifié et que la deuxième phase du processus porte seulement sur la question de discrimination autre que sexuelle et sur la façon de mettre en oeuvre ce projet de loi... Comment pouvez-vous leur donner cette garantie, si aucune mesure n'est prévue dans le projet de loi dans sa forme actuelle?
(1125)
    Tout d'abord, je vous remercie d'avoir cela, car nous devons souligner la très longue lutte des femmes.
    Nous avons déjà parlé des vraies incidences de la Loi sur les Indiens, mais, avant cela, il y a eu les colons qui, eux, ne s'adressaient qu'aux hommes. Le fait de réduire les femmes au silence au fil des générations se conclut par une enquête sur la disparition ou sur l'assassinat de femmes et de jeunes filles autochtones. Il ne fait aucun doute que le silence des femmes autochtones dans leur communauté et le sort que le gouvernement leur a réservé ont eu des conséquences dévastatrices.
    Je comprends tout cela et je crois à l'engagement qui consiste maintenant à traiter des questions de la date limite de 1951 et de l'inadmissibilité de la deuxième génération, de l'adoption et de l'émancipation des personnes ayant fait des études universitaires ou servi dans les forces armées. Nos intentions devront être très claires pour faire face à tous les cas de discrimination et d'iniquité dans la deuxième phase.
    L'engagement de ma part et l'engagement du ministère sont incroyablement sérieux. Nous allons déployer les efforts que nous pouvons maintenant, mais aussi honorer mon engagement sur l'obligation de mener des consultations pour garantir l'application du processus que nous avons mis en place dans les secteurs pour lesquels il n'existe pas de dossiers fiables — qui obtient le statut d'Indien, qui ne l'obtient pas? Comment pouvons-nous nous mobiliser et obtenir une réponse à savoir quel système il faut adopter pour veiller à ce que les personnes qui obtiennent un statut d'Indien puissent exercer leurs droits qu'elles détiennent à juste titre? Les personnes visées veulent un système intègre, car, encore une fois, nous étudions maintenant un domaine en particulier — et nous en avons discuté lors de mon précédent passage ici, et il est question de la date de naissance et de tous ces éléments-là. Il faut nous pencher sur les secteurs où les dossiers sont déficients et c'est là que nous devons concevoir un vrai processus pour faire les choses correctement.
    Bien entendu, l'autre grande question à laquelle nous tentons de répondre consiste à essayer de déborder du cadre de la Loi sur les Indiens là où l'autodétermination s'applique à l'ensemble des communautés autochtones. D'une part, nous voulons que les communautés autochtones aient le droit de déterminer qui va être membre et qui ne le sera pas, et qui va détenir un statut d'Indien ou non. Mais, d'autre part, nous devons tenir compte des cas de discrimination qui existent depuis des centaines d'années. Comment pouvons-nous concilier, d'une part, l'autodétermination et les Premières Nations qui en déterminent les critères et, d'autre part, la Charte des droits et libertés et ce qui constitue, comme nous le savons, des cas de discrimination flagrante?
    Je crois que la question est encore plus complexe que cela, Mike. Dans la reconstitution des nations, la gouvernance repose actuellement sur les chefs et les conseils en vertu de la Loi sur les Indiens et on compte beaucoup de chefs héréditaires qui estiment ne pas être entendus. À mesure que nous reconstituerons les nations, ce processus deviendra de plus en plus complexe en raison de la façon de nous y prendre pour reproduire ce que l'on entend par nation à nation et par gouvernement à gouvernement. Il s'agira de vraiment passer à l'autodétermination et de permettre aux peuples autochtones d'assumer la responsabilité de leur citoyenneté.
    Merci.
    La période de cinq minutes débute à l'instant et la parole va au député Yurdiga.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous suis reconnaissant, madame la ministre, d'être présente ici aujourd'hui. J'ai l'impression que nous cherchons à compliquer les choses. Nous affirmons que ce processus est trop complexe. L'égalité entre les sexes exprime bien de quoi il est question. Ce qui vaut pour A vaut également pour B. On ne peut simplement légiférer sur qui l'on est. C'est une question de génétique. Je crois comprendre que le gouvernement ne va pas appuyer les amendements proposés par le Sénat.
    Juste un amendement.
    De toute façon, ces enjeux peuvent-ils être traités à la deuxième phase et pouvez-vous préciser qui sera responsable de cette phase? S'agit-il d'AANC ou de la commission? Ou comment va-t-elle être constituée, car cette question est très importante?
    Cette question a fait l'objet d'une longue discussion. Certaines personnes ont suggéré qu'un représentant ministériel spécial pourrait en assumer la responsabilité. D'autres estiment que c'est une mauvaise idée. Nous allons devoir décider comment nous effectuerons cet exercice. J'ai écouté avec intérêt la suggestion des deux chambres qui voulaient que le processus soit reconnu, car nous nous sommes engagés à faire rapport au Parlement sur la conception du processus dans un délai de cinq mois. Nous sommes déterminés à inaugurer la deuxième phase dans un délai de six mois; à présenter un rapport d'étape au Parlement, soit aux deux chambres, d'ici 12 mois; on prévoit également une disposition relative à un examen après trois ans afin de déterminer si nous avons réussi à éliminer l'ensemble des cas d'iniquité fondée sur le sexe.
    Je m'engage personnellement à ce que cet exercice soit rigoureux et à ce que nous recueillions l'avis de tous ceux à qui il faut prêter une oreille attentive ainsi que de l'ensemble des personnes qui sont touchées ou qui pourraient l'être dans le cas de leurs enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants. C'est encore là où il faudra concentrer nos efforts au cours des cinq prochains mois, car le processus représente un volet et la conception un autre. Il est crucial que les gens aient confiance dans ce processus et sachent qu'il s'agit d'un exercice significatif comme ce fut le cas quand mes collègues ministres et moi avons passé du temps à concevoir le processus pour les femmes et les jeunes filles autochtones disparues ou assassinées afin de tenir compte des traumatismes vécus et à ce que les familles soient au coeur du processus. Les efforts déployés pour concevoir le processus sont parfois aussi importants que le processus lui-même.
(1130)
    Merci. Je crois qu'il s'agit plus d'une question d'argent que de n'importe quoi d'autre à la lumière des témoignages que nous avons entendus de l'autre partie... l'accès aux ressources et le montant qu'il faudra débourser et je pense que le gouvernement a pour mandat réel de faire durer le processus sur quatre, cinq, six ans ou peu importe le temps qu'il faudra. Le gouvernement a-t-il calculé le montant à débourser pour éliminer tous les cas de discrimination sexuelle? Est-ce que les chiffres qui ont été avancés auraient consterné le gouvernement pour l'amener à affirmer, « Eh bien, nous ne pouvons donner suite à ce processus, car il faut débourser x dollars »? Est-ce que les calculs ont déjà été faits, car je crois que c'est la première chose à faire?
    Eh bien, j'ai bien peur que cette question explique la raison pour laquelle le gouvernement conservateur a mené au départ l'examen juridique, car les chiffres précisent qu'il y aurait de 25 000 à 35 000 nouvelles personnes à inscrire à titre d'Indien. Nous avons souscrit à ce constat. Nous allons tenir compte de ces chiffres et davantage, s'il le faut. Cela fait suite aux propos tenus par Romeo Saganash: la question ne doit pas être partagée entre les droits des Autochtones et l'argent. Nous en faisons abstraction, mais nous estimons qu'il faut adopter un processus intègre afin de déterminer les personnes qui y ont droit.
    Les causes Descheneaux et Gehl précisent clairement les personnes ayant ces droits. La deuxième phase consistera à dresser un processus qui nous permettra d'obtenir le bon nombre de personnes ayant le droit d'être inscrites à titre d'Indien.
    Merci.
    Vous disposez de 30 secondes.
    Ce délai est bien court.
     Quand la deuxième phase sera-t-elle déployée? Manifestement, nous voulons que la Chambre puisse étudier le projet de loi S-3 sous peu. Quand la deuxième phase va-t-elle être lancée?
    Le texte dit que le déploiement doit intervenir après six mois et que nous devons faire rapport au Parlement après cinq mois au sujet de la conception qui a été acceptée de sorte que nous puissions lancer le processus au sixième mois à partir de la date de la sanction royale.
    Merci.
    Ensuite, c'est au tour du député Anandasangaree de poser des questions.
    Merci, madame la présidente.
    Madame la ministre et chers collègues, encore une fois bienvenue.
    Madame la ministre, nous avons beaucoup entendu parler du scepticisme que suscite l'approche adoptée par les gouvernements canadiens précédents pour élargir la portée de la définition établie et de la lutte pour l'égalité des personnes inscrites en vertu de la Loi sur les Indiens. Les témoins précédents ont mentionné les causes Lovelace, McIvor et Descheneaux et tous les processus relevant de la deuxième phase qui auraient dû avoir lieu, mais rien ne s'est produit et on n'y a pas donné suite par l'adoption d'une mesure législative à venir. Je crois que ces inquiétudes sont vraiment légitimes et l'histoire nous a montré qu'il s'agit de la réalité.
    Qu'est-ce qui est différent maintenant? Qu'est-ce qui fait que la situation est différente — outre que vous êtes aux commandes du ministère — et que cela permettra de s'assurer que la deuxième phase est utile, que les résultats sont concrets et qu'une mesure législative adéquate suivra?
(1135)
    Nous avons d'abord retiré notre appel sur la révision judiciaire menée par le gouvernement précédent. Ensuite, nous avons accepté la décision Descheneaux. Gary, je crois qu'il est important de comprendre que la cause Descheneaux a été portée en appel au motif que le projet de loi ne corrigeait pas les lacunes mentionnées dans la cause McIvor.
    Ce que nous essayons de dire aujourd'hui, c'est que nous avons fait un bout de chemin, mais que nous ne sommes toujours pas arrivés à destination. Nous allons concevoir un processus pour nous assurer que tout soit fait, alors que vous, les parlementaires, allez vous assurer que ce soit fait correctement, sans répercussions inattendues et qu'aucune lacune ne soit ignorée. Il faut remédier une fois pour toutes à la discrimination présente dans la Loi sur les Indiens.
    Quand il a témoigné mardi, David Schulze a mentionné qu'une conférence de gestion des travaux avait porté sur la possibilité de repousser l'échéance. Comme le temps presse, et en vue des modifications apportées par le Sénat, serait-ce approprié pour nous de solliciter une prolongation? Si oui, êtes-vous en mesure de nous donner les dernières nouvelles à ce sujet?
    Selon moi, ces mesures ont démontré ce qui se produit quand on ne s'engage pas pleinement. Je suis convaincue que ce projet de loi doit être adopté. Nous devons faire en sorte que les droits de ces quelque 35 000 personnes soient reconnus. Certains ont des enfants qui fréquenteront bientôt l'université; ils doivent obtenir leur statut avant l'automne, soit avant de présenter une demande d'admission à l'université. Selon moi, si nous retardons à nouveau le processus pour les gens qui jouissent clairement de droits octroyés par le tribunal, de même que pour tous les gens que nous avons ajoutés au cours de ce processus, nous ne leur rendrons pas service. Nous devons nous y mettre et conclure le tout assez rapidement afin de reconnaître les droits de tous les gens qui méritent un statut.
    Supposons que ce projet de loi soit adopté. Disposez-vous déjà d'un processus pour accélérer le traitement des inscriptions pour ceux qui en auraient besoin, comme ceux qui présenteront une demande d'admission à l'université à l'automne, par exemple? Peut-être que la registraire pourrait répondre. Est-ce que ce processus sera mis en place afin d'assurer que les dossiers des gens qui pourraient avoir besoin de cette reconnaissance additionnelle soient traités en priorité?
    Tout à fait. La registraire s'appelle Nathalie et son service est en train de recruter des ressources supplémentaires afin de gérer les dossiers des gens qui obtiendront un statut si le projet de loi S-3 est adopté.
    Nathalie, aviez-vous autre chose à ajouter?
    La ministre a raison. Nous sommes en train de recruter du personnel additionnel. Un total de 19 millions de dollars a été affecté pour soutenir le processus de demande pour les personnes ajoutées au registre.
    Merci.
    La parole est à Cathy McLeod, pour une dernière série de questions.
    Merci, madame la présidente.
    Madame la ministre, nous vivons avec un gouvernement majoritaire. J'ai cru comprendre que vous acceptez ce projet de loi sans l'alinéa 6(1)a). Est-ce exact? C'est décidé?
(1140)
    Oui, nous avons accepté tous les conseils et toutes les autres modifications provenant du Sénat. Mais nous ne pouvons pas accepter ce que nous trouvons difficile d'appliquer concrètement.
    Je tiens à mentionner que vous avez fait référence au sénateur Murray Sinclair, mais je crois que le Sénat a voté unanimement en faveur du projet de loi, n'est-ce pas, y compris...
    Non. Le sénateur Sinclair a voté contre la modification.
    Merci pour cette précision.
    J'ai une autre question. C'est la troisième fois que je la pose. Êtes-vous persuadée que le projet de loi S-3, dont vous suggérez l'adoption par le Comité, éliminera toutes les iniquités connues fondées sur le sexe et qu'on trouve dans la loi?
    Effectivement. Nous avons dit « iniquités connues fondées sur le sexe » et nous nous basons sur la décision rendue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, qui a statué que la recommandation McIvor n'était pas nécessaire pour que le ministère respecte la Charte. Dans cette situation, nous voulons tenir compte de la règle de l'exclusion après la deuxième génération et du régime en place jusqu'en 1951, ainsi que de tous les enjeux de la deuxième phase.
    Passons à votre processus de la deuxième phase. Comme je l'ai déjà indiqué, je ne crois pas que le concept de relation de nation à nation soit clair pour tout le monde. Vous discutez déjà de sujets aussi essentiels que l'inscription et la façon de faire avancer le processus de deuxième phase avec les collectivités, les nations et les bandes. Donc, ne croyez-vous pas que vous devriez préciser la définition de « relation officielle » avant de procéder à ces importants travaux? Selon moi, c'est la première étape, suivi de la deuxième. Je ne vois pas comment vous pouvez parachever la première étape en respectant l'échéancier que vous vous êtes fixé. C'est assez logique, si l'on se fie à ce que vous avez dit en tant que gouvernement sur votre façon de procéder.
    Que vous parliez de l'APN ou d'autonomie gouvernementale...
    De nation à nation.
    Dans le cas qui nous concerne, la relation de nation à nation n'est pas si pertinente, puisque nous devrons consulter un nombre de gens qui sont exclus. Nous devrons composer avec tous les chefs et les conseils, de même qu'avec les dirigeants des nations autonomes. Nous les avons contactés. Nous sommes inquiets pour les gens qui n'ont pas vraiment de lien avec leur collectivité pour des raisons historiques.
    Donc...
    Donc ce sont ces voix qui devront être entendues lors des consultations.
    Je comprends que vous ayez besoin de ces voix supplémentaires, mais je crois qu'il y a plusieurs collectivités qui n'ont pas décidé de quelle nation ils faisaient partie pour les besoins de ces pourparlers. Vous avez besoin que ce soit fait.
    Ces travaux s'étaleront probablement sur quelques années, mais nous y arriverons. Nous sommes très heureux de voir que ces nations se reconstruisent grâce au système d'éducation, à une pêcherie ou encore à toutes les choses qui leur permettent de se rassembler à nouveau en tant que nation.
    Comment pouvez-vous passer à la deuxième phase sans avoir exécuté ces travaux?
    Nous le faisons.
    Vingt secondes.
    Merci, madame la ministre.
    Tout est dans la conception. Ce ne sera pas une solution unique. Le degré d'engagement variera selon les situations qui prévalent aux quatre coins du pays.
    Merci.
    Merci à la ministre et au personnel d'avoir participé à cette audience historique concernant le projet de loi S-3. J'apprécie votre attention et votre collaboration. Nos plus sincères remerciements, meegwetch.
     Chers membres du comité, en ce qui a trait au projet de loi S-3, je vous rappelle que, si vous désirez vous préparer et proposer des modifications, vous devez contacter les conseillers législatifs le plus tôt possible. Si le Comité étudie le projet de loi S-3 article par article le jeudi 15 juin, comme c'est prévu à l'horaire, je demanderais aux membres de soumettre leurs modifications finales au greffier au plus tard le mardi 13 juin. Vous pouvez aussi le faire à la Chambre, mais il est préférable que ce soit un processus plus élaboré afin que les textes complets soient prêts à temps pour notre rencontre de jeudi.
    Cathy.
(1145)
    Merci, madame la présidente. Je voulais savoir si les modifications pouvaient provenir de la Chambre.
    Oui.
    Merci. Voilà qui conclut nos travaux pour aujourd'hui.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU