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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 079 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 4 décembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Français]

     Bonjour à tous. Nous allons maintenant entamer la 79e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons nous pencher sur la nomination de l'honorable Sheilah L. Martin à la Cour suprême du Canada.

[Traduction]

    Je suis très heureux d'accueillir notre premier témoin, l'honorable Jody Wilson-Raybould, notre ministre de la Justice et procureure générale du Canada.
     Soyez la bienvenue, madame la ministre.
    Nous accueillons aussi la présidente du Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada, la très honorable Kim Campbell.
    Soyez la bienvenue. Nous sommes très heureux de vous recevoir.
    Nous tous ici présents savons que le gouvernement, le comité consultatif et, certainement, notre comité et les Canadiens considèrent avec beaucoup de sérieux la nomination d'un juge à la Cour suprême, et nous éprouvons un vif plaisir à participer à ce processus. Nous vous remercions d'être ici.
    Mesdames, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président et merci aux membres du comité d'avoir convoqué cette réunion spéciale. Je suis certainement reconnaissante au comité de son engagement permanent à l'égard du processus de sélection des juges de la Cour suprême du Canada. Bien sûr, je suis heureuse de me retrouver en compagnie de la très honorable Kim Campbell.
    L'objet de la séance est double: discuter de la sélection de l'honorable Sheilah Martin par le gouvernement en vue de sa nomination prochaine au poste de juge de la Cour suprême du Canada et décrire le processus qui a conduit à sa sélection. Les Canadiens pourront ainsi mieux comprendre le processus de sa nomination, tandis que vous, les parlementaires, vous pourrez exiger du gouvernement une reddition de comptes.
    Encore une fois, je suis heureuse d'être accompagnée par la très honorable Kim Campbell, qui, pour la deuxième fois, préside le Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada. Je ne saurais dire à quel point je suis ravie qu'elle ait accepté encore une fois de conférer au comité le poids de son autorité considérable.
    Comme vous le savez, le comité consultatif s'est trouvé au coeur du nouveau processus que notre gouvernement a mis sur pied pour la nomination des juges de la Cour suprême. Sept personnalités de marque y ont siégé, et quatre d'entre elles ont été nommées par des organismes professionnels indépendants. Outre la présidente, il comprenait un ancien juge, trois juristes et deux non-juristes.
    Personnellement et au nom du premier ministre et de notre gouvernement, j'assure de ma sincère gratitude chacun de ses membres pour son excellent travail et sa détermination. Je remercie aussi le Conseil canadien de la magistrature, l'Association du Barreau canadien, la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada et le Conseil des doyens et doyennes des facultés de droit du Canada pour avoir nommé des personnes si remarquables. Notre gratitude s'étend aussi à tous ceux que nous avons consultés pendant le processus de sélection, au commissaire à la magistrature fédérale et à son commissariat pour l'excellent soutien administratif fourni au comité consultatif, ainsi qu'aux candidats.
    Je ferai d'abord des observations préliminaires sur les faits nouveaux survenus depuis le premier processus de sélection ainsi que sur les objectifs généraux de l'exercice actuel. Je céderai ensuite la parole à Mme Campbell, qui décrira les étapes suivies par le comité consultatif pour l'établissement de la liste des candidats sélectionnés qu'elle a remise au premier ministre le 23 octobre. Enfin, je discuterai des mérites de la candidature de la juge Martin et de la façon qu'elle répond aux critères d'évaluation et aux qualités exigées.
    En août 2016, le premier ministre a lancé le processus de sélection qui a abouti à la nomination du juge Malcolm Rowe à la Cour suprême. Le processus visait à honorer le double engagement pris par notre gouvernement, qui était d'établir un nouveau processus transparent, responsable, ouvert à tous, axé sur la consultation et favorisant la diversité, qui devait aussi conduire uniquement à la nomination de juges fonctionnellement bilingues.
    Beaucoup de caractéristiques du nouveau processus, notamment la nécessité, pour les candidats, de faire acte de candidature, étaient sans précédent. Notre gouvernement a été attentif à la perception du processus par les Canadiens, et nous avons exprimé notre ouverture et notre disposition à l'améliorer le plus possible. Nous avons été particulièrement reconnaissants de recevoir les observations de votre comité et ses recommandations, dans son rapport de février 2017.
    Je formulerai de courtes observations sur trois aspects du rapport. D'abord, votre comité a affirmé le lien puissant qui existait entre un processus de sélection clair, transparent, facile à comprendre et la confiance du public en notre plus haut tribunal. Je suis totalement d'accord. L'objectif suprême de notre gouvernement, en lançant un nouveau processus, est, grâce au mode de sélection de nos juges de la Cour suprême, de renforcer la confiance des Canadiens en cette institution fondamentale.
    Ensuite, remarquant que le comité consultatif indépendant était un élément indispensable de la réussite du processus, votre comité a recommandé d'en faire un élément permanent de toutes les nominations à venir des juges de la Cour suprême. Puis il a recommandé d'en conserver la composition, par laquelle la majorité de ses membres était nommée par des organisations non gouvernementales de juristes. Ce puissant aval donné au rôle et à la composition du comité consultatif était rassurant. Je suis absolument d'accord avec votre observation selon laquelle la réussite du comité consultatif provient de ce que ses membres formaient un groupe diversifié de personnes compétentes, toutes nommées et sans parti pris.
    Enfin, le Comité a insisté sur l'importance de la représentation des régions dans ce tribunal. Comme vous le savez, la question d'une Cour suprême plus diverse, où les régions seraient bien représentées a occupé une place importante, non seulement dans mes premières discussions avec votre comité, mais aussi dans les débats du Parlement et dans l'esprit des Canadiens. Notre gouvernement a toujours insisté sur l'importance d'y maintenir la représentation des régions. Le premier ministre y est revenu dans sa lettre de mandat au comité consultatif, pour le premier processus de sélection, en lui demandant d'inscrire, dans la liste des candidats sélectionnés, des Canadiens de la région de l'Atlantique. En fin de compte, le processus a permis de sélectionner un éminent juriste de cette région et le premier juge de la Cour suprême originaire de Terre-Neuve-et-Labrador.
    Néanmoins, nous avons écouté votre comité et l'ensemble des Canadiens et nous sommes d'accord: la représentation régionale est un aspect essentiel de la diversité du tribunal et indispensable pour assurer la confiance du public sur laquelle s'appuie sa légitimité. Voilà pourquoi le processus de sélection lancé en juillet dernier pour combler le poste laissé vacant par le départ de la juge en chef McLachlin s'est limité aux candidats de l'Ouest, c'est-à-dire de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba ainsi que du Nord, c'est-à-dire des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Yukon.
    Faute de temps, je ne repasserai pas les recommandations utiles formulées dans votre rapport. Pour de plus amples renseignements, voyez la réponse du gouvernement, que j'ai transmise en juin dernier.
    Passons maintenant au processus en deux étapes où nous nous trouvons. D'abord, il se produira un fait important le 15 décembre, c'est-à-dire le départ à la retraite de la juge en chef du Canada, comme nous le savons tous. Comme le premier ministre et moi l'avons fait remarquer en d'autres occasions, les Canadiens ont contracté une très lourde dette de gratitude à l'égard de la juge en chef, pour ses services, son dévouement et son ascendant exceptionnels. Je suis certaine de ne pas être la seule à éprouver des difficultés à me représenter le tribunal sans elle, mais sa marque est profonde et elle sera durable. Dans l'immédiat, son départ nous oblige à non seulement relever le nombre de juges à neuf, mais, également, à désigner le prochain juge en chef du Canada.
    Comme le gouvernement l'a expliqué au début de ce processus, nous procédons en deux temps. Dans le premier, on choisit le prochain juge. À cette fin, le gouvernement a employé le même processus, comme je l'ai dit, que celui de la sélection du juge Rowe, y compris le recours à un processus ouvert de mise en candidature et la tâche, confiée à un comité consultatif indépendant, de dresser une liste des candidats sélectionnés grâce au même ensemble de critères d'évaluation. Cette étape, qui a conduit à la nomination de la juge Martin est celle que nous examinons aujourd'hui.
    Dans le deuxième temps, le premier ministre détermine qui, parmi neuf êtres d'exception — c'est-à-dire les huit juges restants et le candidat nommé —, est le mieux placé pour devenir juge en chef. Au coeur de cette décision, il y a la reconnaissance du rôle important du juge en chef pour favoriser la collégialité du tribunal, l'importance des responsabilités administratives et responsabilités de chef qu'il assume et la représentation efficace de la magistrature canadienne au Canada et à l'étranger. C'est un poste d'une énorme importance sur les plans juridique, constitutionnel et institutionnel.
    Conformément à la prérogative qui est la sienne, le premier ministre prendra cette décision après avoir consulté différentes personnes, parmi lesquelles votre serviteur, la juge en chef qui part à la retraite et les éventuels candidats. Ensuite, il annoncera publiquement son choix du 18e juge en chef du Canada.
    Cela dit, je cède la parole à Mme Campbell, pour qu'elle décrive le processus suivi par le comité consultatif dans l'accomplissement de son mandat.

  (1540)  

    Bonjour. Je suis ravie de comparaître encore une fois. L'année dernière, nous avons commencé à la case départ pour décrire le processus. Je tiens à dire à quel point je me réjouis de vos commentaires et plus particulièrement de votre soutien et de votre approbation du processus. Je sais qu'il a fait chaud au coeur de tous les membres du Comité de savoir que vous souteniez leur travail.
    Je vais dire une chose au sujet des membres du Comité. Ils sont tous extrêmement honorés de participer au processus et très déterminés à le rendre le plus équitable et le plus pertinent possible, mais ils sont également à l'écoute du besoin des Canadiens qui veulent avoir l'impression que chaque candidature fait l'objet d'un examen complet et équitable. En leur nom, je tiens à vous remercier encore une fois de vos commentaires positifs à propos du processus.
    Cette année, bien entendu, nous avions l'avantage de l'avoir fait avant. Nous avions un nouveau membre. Jeff Hirsch, qui était l'année dernière le candidat de la Fédération des ordres professionnels de juristes, a été remplacé par Sheila MacPherson, qui pratique le droit aux Territoires du Nord-Ouest et à Iqaluit. Elle s'est rapidement mise au fait de notre travail.
    Nous étions d'avis que notre façon de procéder était très bonne parce que nous l'avions déjà fait. Nous avions déjà des modèles pour les entrevues de vérification des références et les entrevues avec les candidats proprement dits, ainsi que pour ce qui est des façons de procéder que nous avons revues, mais que nous n'avons pas eu besoin de réexaminer au complet. Nous avons donc un peu mieux employé notre temps, ce qui est une bonne chose, car contrairement à l'année dernière lorsque nous avons été en mesure de travailler les semaines avant et après la fin de semaine de la fête du Travail, l'automne était un peu plus avancé cette fois-ci, et les gens ont eu des dates d'audience et d'autres choses très difficiles à gérer. Nous avons fini par travailler deux fins de semaine, dont celle de l'Action de grâces.
    Je tiens à remercier tout particulièrement le commissaire à la magistrature et tout le personnel — Marc Giroux, Louise Meagher, qui est présente, Natalie Duranleau et les autres — qui ont vraiment été formidable en travaillant les fins de semaine et en s'adaptant à cette nécessité. Je tiens également à remercier les candidats qui sont venus à Ottawa la fin de semaine de l'Action de grâces pour une entrevue. C'était un peu stressant. Nous aurions aimé ne pas subir autant de pression. Je pense que plus le préavis est long, plus les gens sont en mesure de comparaître à leurs audiences et de mettre du temps de côté pour éviter les conflits avec des engagements antérieurs.
    Nous avons tout de même procédé d'une façon très semblable à la fois précédente, en rencontrant d'abord la juge en chef. C'était également intéressant, car la première année que nous avons rencontré la juge en chef, nous avons passé en revue de façon très détaillée la nature du travail à la Cour suprême du Canada. Cette fois-ci, nous avons pu lui demander si elle voulait nous faire part de choses qu'elle ne nous avait peut-être pas dites l'année d'avant. Nous avons vraiment eu une conversation formidable avec elle.
    Une fois de plus, la philosophie qui sous-tend ce que nous faisons au Comité, c'est essayer de trouver des candidats qui peuvent vraiment faire le travail de la Cour. Comme vous le savez, la Cour suprême du Canada n'a rien à voir avec les autres. Les gens doivent non seulement travailler dans deux langues, mais aussi déménager à Ottawa. La charge de travail est aussi très lourde.
    J'étais à un symposium sur la Cour suprême du Canada il y a quelques semaines, dans le cadre des activités du 150e anniversaire du Canada. Le juge Stephen Breyer de la Cour suprême des États-Unis était présent. Quand on y pense, ils ont également neuf juges pour une population beaucoup plus importante. Il a dit que le secret, c'est que la plupart des lois aux États-Unis sont des lois d'États, ce qui signifie que la Cour suprême des États-Unis est saisie d'un nombre beaucoup plus petit de dossiers, tandis qu'au Canada, le droit pénal est de compétence fédérale. La charge de travail de la Cour est très lourde, et nous voulons donc nous assurer que les candidats que nous recommandons au premier ministre le comprennent bien et sont capables de s'y attaquer le plus efficacement possible.
    Nous avons fait essentiellement la même chose que l'année dernière. Je ne veux pas revoir tous les détails, mais je serai heureuse de répondre à vos questions. Il y avait 14 candidats. Nous en avons rencontré huit. Comme vous le savez, après les entrevues, les candidats font un test de français pour évaluer leur bilinguisme fonctionnel.
    Je crois que l'une des choses que vous devez savoir, c'est que ce processus avait pour toile de fond régionale l'Ouest canadien, et vous seriez vraiment très étonné du nombre de personnes là-bas qui parlent français et de la mesure dans laquelle les juristes, plus particulièrement dans l'Ouest canadien, ont saisi l'occasion créée par le Conseil canadien de la magistrature et d'autres entités pour apprendre le français. Cela fait maintenant partie intégrante de la façon de penser en Colombie-Britannique et en Alberta. C'est très intéressant. M. Boissonnault sait que les avocats, l'Association des juristes d'expression française, sont très actifs en Alberta. Nous avons été agréablement surpris de la qualité du français des personnes que nous avons rencontrées.

  (1545)  

    Je ne veux pas vraiment donner de plus amples détails, car je préfère répondre à vos questions. Une fois de plus, nous nous sommes réjouis de la qualité des candidats. La personne nommée, la juge Martin, est une candidate extraordinaire qui se démarque à bien des égards. Cela dit, tous les candidats sur la courte liste que nous avons donnée au premier ministre auraient pu servir avec distinction à la Cour suprême du Canada. C'est un travail très difficile qui n'a rien à voir avec ce qui se fait dans les autres tribunaux du pays, mais je pense que le premier ministre serait vraiment encouragé par la qualité des juristes qui sont prêts à siéger à notre plus haut tribunal.
    Je pense que je vais m'arrêter ici et vous laisser me poser des questions, car nous en avons déjà discuté, je veux être certaine d'aborder de nouveaux points que vous souhaitez éclaircir.

  (1550)  

    Merci, madame Campbell. C'est un immense honneur pour moi d'être assise à côté de vous, et merci beaucoup de votre contribution au processus de la Cour suprême.
    Avant de passer aux questions, j'aimerais juste parler du mérite de la candidate exceptionnelle que le premier ministre a retenue, mais, une fois de plus, comme je l'ai dit, la qualité des candidats sur la courte liste, et comme l'a indiqué le premier ministre, au comité consultatif, était exceptionnelle. C'est vraiment remarquable et une source de fierté nationale de voir la qualité des juristes qui ont présenté leur candidature dans le cadre de ce processus.
    Ma tâche, qui consistait à examiner les candidats et à présenter une recommandation au premier ministre, était certainement extraordinaire et difficile. Je l'ai prise extrêmement au sérieux, en sachant qu'une des plus importantes responsabilités que j'ai en tant que ministre de la Justice est de recommander à cette fin des candidats au premier ministre.
    En ce qui a trait à la consultation — une fois de plus, je vous invite à me poser des questions à ce sujet —, j'ai consulté la juge en chef du Canada, d'autres juges en chef qui connaissaient bien le travail des candidats, divers procureurs généraux provinciaux, le président de votre comité, le président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, ainsi que des porte-parole de l'opposition. J'ai ensuite présenté les résultats de ces consultations et ma recommandation au premier ministre, et bien que je ne puisse évidemment pas révéler le contenu de ces consultations et la recommandation que j'ai présentée au premier ministre, je peux dire que je suis persuadée que la juge Martin apporterait énormément à la Cour et continuerait de servir les Canadiens avec une grande distinction.
    Ce que je peux dire au sujet des compétences de la juge Martin, c'est qu'elle a vraiment tout fait. Elle a été chef de file universitaire, doyenne de la faculté de droit de l'Université de Calgary, une avocate de droit constitutionnel douée, une juge de première instance infatigable et, plus récemment, juge d'appel. Deux choses m'ont frappé à propos de la carrière de la juge Martin. Premièrement, il y a l'ampleur et la portée de son expérience, et deuxièmement, son engagement indéfectible envers la justice et l'égalité pour tous.
    On a dit de la juge Martin qu'elle a une intelligence phénoménale. Elle est l'auteure ou la coauteure de trois livres, neuf chapitres de livre, six rapports et monographies, et seize articles évalués par des pairs. Son expérience en tant qu'éducatrice est manifeste dans ses écrits juridiques. La juge Martin sait comment démêler des questions juridiques et exposer son raisonnement dans un langage clair et accessible. Ses jugements sont rigoureux et convaincants.
    Pendant plus de 30 années, la juge Martin a combiné son intelligence avec un engagement à servir le public. En tant qu'universitaire, elle s'est courageusement prononcée sur ce qui constituait à l'époque des questions litigieuses essentielles à l'égalité des femmes. Dans sa thèse de doctorat, elle a étudié l'incidence de la Charte sur les lois concernant les agressions sexuelles, la contraception, l'avortement et les nouvelles technologies de reproduction. Tout au long de sa carrière, elle a continué d'écrire sur l'égalité, le parti pris contre les femmes et les droits génésiques.
    Dans sa pratique privée, le travail de la juge Martin a porté sur des questions très importantes pour la société canadienne. Je donne l'exemple de son travail sur la réparation pour condamnation injustifiée. La juge Martin a grandement contribué à la préparation de la demande de réparation de David Milgaard qui a passé 23 ans en prison pour un crime qu'il n'a pas commis. De plus, compte tenu de son expérience, en 2000, l'honorable Peter Cory lui a demandé de présenter un rapport d'expert dans un autre dossier d'erreur judiciaire, l'enquête sur l'affaire Thomas Sophonow.
    La question de l'indemnisation pour des préjudices quasi inimaginables a été abordée dans une autre importante affaire dont la juge Martin a été saisie. À la demande de Phil Fontaine, l'ancien chef national de l'Assemblée des Premières Nations, la juge Martin s'est jointe à l'équipe chargée d'élaborer une nouvelle approche pour redresser les préjudices attribuables à la fréquentation forcée de pensionnats par des enfants autochtones. Elle a aidé à jeter les bases de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Elle a décrit ce travail comme l'un des plus importants et difficiles de sa carrière.
    La juge Martin a joué un rôle de premier plan dans la défense des droits des femmes devant les tribunaux. Elle a représenté bénévolement des organisations féminines dans trois causes ayant fait jurisprudence que la Cour suprême du Canada a entendues au sujet de l'autonomie des femmes et des agressions sexuelles.
    Depuis sa nomination à la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta en 2005, la juge Martin a acquis une riche expérience dans le domaine judiciaire dans de nombreux domaines du droit. Cette expérience est particulièrement importante quand on sait que, si sa nomination est confirmée, elle remplacera la juge en chef McLachlin, qui a 28 ans d'expérience à la Cour suprême.

  (1555)  

    En tant que juge de première instance, la juge Martin a également veillé à acquérir de l'expérience à l'extérieur des grandes villes canadiennes. Elle a entendu des causes dans de petites collectivités rurales de l'Alberta en tant que juge de cour de circuit. De plus, à titre de juge suppléante au Yukon, à compter de 2009, elle a fini par comprendre les difficultés propres à l'exercice de la justice dans les collectivités du Nord. La juge Martin a prouvé qu'elle est capable de s'occuper de questions délicates et inhabituelles, par exemple dans l'affaire H.S. qui a donné lieu à la première décision au Canada faisant droit à une demande d'aide médicale à mourir. Sans jurisprudence et dans un délai très serré, elle s'est penchée sur la demande d'une femme atteinte de sclérose latérale amyotrophique, qui n'avait plus que six mois à vivre. Elle a reconnu l'importance du principe de l'audience publique, mais a rendu une ordonnance de non-publication pour tenir compte du besoin de protéger la vie privée et la dignité de la femme.
    L'engagement de la juge Martin envers l'égalité se reflète dans son travail. En 2016, dans une affaire d'agression sexuelle, elle a clairement cerné et dénoncé les mythes et les stéréotypes entourant la façon dont les victimes d'agression sexuelle devraient se comporter. Elle a invalidé la décision d'un tribunal provincial qui démontrait à quelle vitesse ces mythes et ces stéréotypes se manifestent. Elle a décrit comment des attitudes désuètes depuis longtemps face aux agressions sexuelles ont mené à des règles juridiques déséquilibrées et à des procès injustes dans des affaires d'agressions sexuelles. Au-delà de son sens juridique aigu, les personnes qui l'entourent la décrivent comme une force unificatrice et comme quelqu'un qui déborde d'enthousiasme.
    La collégialité est essentielle à la Cour suprême. En effet, les juges doivent être en mesure de gérer respectueusement les désaccords et de parvenir adroitement à un consensus, ce qui aide la Cour suprême à parvenir à une jurisprudence unifiée plutôt qu'à des jugements qui portent à confusion à cause de nombreuses opinions divergentes. La capacité de la juge Martin à rassembler les gens lui sera utile à la Cour suprême du Canada. Claire L'Heureux-Dubé, une juge retraitée de la Cour suprême, a dit que Sheila Martin est précieuse pour la justice au Canada et que lorsqu'on regarde sa carrière dans le milieu juridique, on constate qu'elle n'a jamais raté une occasion de faire la bonne chose.
    Ce sont des valeurs que je veux voir à la Cour suprême du Canada. Nous sommes extrêmement heureuses d'être ici pour répondre à vos questions sur le processus de nomination et sur la juge Martin.
    Merci de nous donner l'occasion de témoigner.
    Madame Wilson-Raybould, madame Campbell, merci beaucoup de comparaître devant nous.
    Je suis certain que vous l'entendrez de toutes parts, mais je tiens tout de même, au nom de tous les membres du Comité, à vous remercier du service exceptionnel, madame Campbell, que vous rendez au pays et de votre travail ininterrompu.
    Je remercie toutes les personnes qui ont contribué au processus: les membres du comité consultatif, le commissaire à la magistrature fédérale ainsi que les membres du personnel qui ont soutenu le travail du comité pour parvenir à cette excellente nomination.
    Nous allons faire deux séries de questions.
    M. Nicholson sera le premier intervenant.
    Je déclare qu'il y a un conflit d'intérêts possible dans la mesure où j'ai eu le privilège de servir dans le gouvernement de Mme Campbell et que j'ai été son secrétaire parlementaire pendant trois ans. Ce fut une bonne période au cours de ma carrière. J'en suis très reconnaissant.
    Félicitations à la ministre et à Mme Campbell pour le processus qu'elles ont mis en place. Nous sommes vraiment impatients d'avoir l'occasion de rencontrer la juge Martin et de lui poser des questions.
    Je suis d'accord avec vous, madame la ministre: elle semble être hautement qualifiée à bien des égards, en tant que juge, en matière de procédure judiciaire ainsi que dans le milieu universitaire. Cela semble très complet, et nous sommes donc impatients.
    Madame Wilson-Raybould, à la suite d'une discussion que nous avons eue lors du dernier processus de nomination d'un juge, si vous vous rappelez, nous avons indiqué très clairement — du moins de ce côté-ci — que selon nous, la tradition, la convention constitutionnelle, voulait qu'il vienne du Canada atlantique. Vous avez mentionné que cela ne poserait pas problème cette fois-ci, que le candidat viendrait de l'Ouest canadien. Je pense que nous voyons cela d'un bon oeil. Selon une autre convention et coutume, il doit y avoir une alternance entre un juge issu de la common law et un juge issu du droit civil. Je sais qu'il y a eu une exception, et le bilan n'est donc pas parfait à cet égard.
    Est-ce une chose que vous recommanderiez au premier ministre, à savoir une alternance entre un juge issu de la common law et un juge issu du droit civil?

  (1600)  

    Merci de votre observation et de la question.
    Bien entendu, nous sommes ici aujourd'hui pour parler de la juge Martin, mais je suis consciente que la deuxième partie du processus est la nomination d'un juge en chef, ce qui, comme pour la juge Martin, appartient entièrement au premier ministre. J'aurai évidemment l'occasion de le conseiller, et il rendra sa décision concernant le prochain juge en chef à la mi-décembre. Je ne veux pas en dire davantage. Ma recommandation est pour le premier ministre.
    Très bien.
    Madame Campbell, les candidats ont eu plus de temps cette fois-ci pour présenter leur demande. Je pense qu'ils n'avaient eu que quelques semaines dans le cadre du premier processus de nomination, tandis qu'ils ont eu environ deux mois pour la préparer cette fois-ci.
    Avez-vous observé un changement dans le genre de demandes, la documentation ou même dans les chiffres qui vous ont été présentés? Avez-vous vu un changement à cet égard compte tenu du délai?
    Rob — ai-je le droit de vous appeler Rob au Comité?
    L'hon. Rob Nicholson: Je vous en prie.
    La très hon. Kim Campbell: Oui. Ce n'est pas tant dans le contenu des candidatures, parce que les gens avaient travaillé très fort l'année passée, mais vous vous souviendrez que la date limite était vers la fête du Travail, à la fin de l'été, et les gens étaient au chalet ou ils étaient occupés à autre chose.
    Cette année, personne ne s'est plaint de devoir remplir la question à la dernière minute. Votre conseil, de donner plus de temps aux candidats, en était un excellent. Je crois qu'ils se sont sentis plus à l'aise avec le processus. Je ne sais pas si cela a changé quelque chose dans la qualité des candidatures, mais les candidats se sont certainement sentis plus à l'aise, ils ont pu bien préparer leur candidature, de la façon qu'ils voulaient.
    Selon le document d'information que nous avons eu, moins de noms ont été soumis à la ministre de la Justice et au Cabinet du premier ministre, cette fois-ci. Je crois que vous aviez cinq candidats précédemment, selon la documentation que nous avions, et trois candidats cette fois-ci, selon les documents fournis par la Bibliothèque du Parlement.
    Pourquoi? Qu'est-ce qui explique ce changement?
    Notre mandat était de fournir une courte liste de trois à cinq candidats. Compte tenu du processus de l'année passée, nous savons que c'est un travail énorme qui s'amorce, une fois que notre liste est transmise au premier ministre. Nous voulions avoir la certitude que chacun des candidats que nous suggérions au premier ministre pouvait être nommé à la Cour, et il s'adonne que parmi les candidats que nous avions, nous estimions en avoir trois qui étaient nettement supérieurs aux autres.
    Nous aurions été parfaitement heureux d'en ajouter deux, mais le faire pour le faire aurait d'après moi miné le processus, car c'est encore plus de travail de suivi pour la ministre et son personnel, ainsi que pour le personnel du premier ministre.
    Nous estimions que nous avions une bonne sélection, mais selon le mandat, c'est de trois à cinq candidats, alors nous avons fait les deux. Nous verrons ce qu'il en ressort, mais je pense que nous avons présenté d'excellentes options au premier ministre.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Nicholson.
    Madame Khalid, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président, et merci, madame Campbell et madame la ministre Wilson-Raybould, d'être venues aujourd'hui pour vraiment discuter du processus. C'est formidable de vous recevoir à nouveau au Comité.
    Madame Campbell, vous avez mentionné que vous avez invité la juge en chef McLachlin à venir répondre aux questions du Comité. Je me demande quel genre de questions vous lui avez posées, si vous voulez bien nous en parler.
    Je dirais que nous ne l'avons pas invitée à venir répondre aux questions du Comité, mais que nous sommes plutôt allés à elle. Elle nous a reçus dans le charmant salon qu'il y a à la Cour suprême.
    L'année passée, nous avions en fait décidé des questions que nous voulions lui poser, par exemple, au sujet du rôle de la langue, de la charge de travail et de toute sorte de choses qu'il était d'après nous important de comprendre. Étant donné que nous l'avions fait l'année passée, nous avons eu cette fois-ci une conversation plus ouverte, car c'était la dernière fois où elle allait conseiller notre comité. Je ne crois pas qu'il y ait d'atteinte à la sécurité avec les questions que nous avons posées, mais il s'agissait principalement d'avoir son idée — après des années à la Cour suprême — de ce qu'il était important que nous sachions; de ce qu'elle pensait qui serait utile pour la Cour et qui pourrait aider les juges à réussir à la Cour.
    Encore là, vous pourriez être un juriste exceptionnel et une personne très brillante, sans être la bonne personne pour la Cour suprême du Canada, selon la façon dont vous travaillez et votre aisance à travailler en collégialité et à prendre des décisions en groupe, et ainsi de suite. C'est tout simplement un contexte très spécial... ou selon la mesure dans laquelle vous êtes à l'aise à l'idée de ramasser vos affaires et de déménager à Ottawa.

  (1605)  

    Merci, madame Campbell.
    L'année passée, quand vous avez comparu devant nous, vous nous avez informés des différentes organisations que vous aviez approchées pour trouver ces candidats très qualifiés. Je pense que la personne nouvellement nommée est très qualifiée. J'étais fascinée simplement à lire sa candidature. Elle défendait des choses qui soulèvent ma passion bien avant que je sois au monde, alors cela me touche beaucoup.
    Pouvez-vous nous nommer certaines des organisations que vous avez approchées dans le cadre de votre recherche de candidats?
    L'année passée, nous avions relevé toutes les organisations qui représentent des avocats d'ethnies particulières, d'intérêts particuliers et ainsi de suite, et nous avons communiqué avec elles encore cette année. Nous estimions cette année que la communauté juridique connaissait mieux en général le processus qui se déroulait.
    Comme je l'ai mentionné l'année passée, nous avons aussi des personnes qui nous écrivent à l'occasion et qui nous recommandent des gens. C'est l'un des débats relatifs au processus — que des gens soient trop modestes pour poser leur candidature. Nous pressons les gens qui pensent connaître une ou un candidat potentiel de l'encourager. Nous allons lui écrire et lui dire: « Votre nom nous a été soumis par quelqu'un qui estime que vous êtes un excellent candidat, ou une excellente candidate. Si cela vous intéresse, passez en revue la documentation. Nous vous encourageons fortement à poser votre candidature. »
    Les gens connaissent le processus, mais je crois que l'étape suivante est de chercher à communiquer avec la communauté juridique afin de trouver des façons de diffuser les connaissances sur ce que cela signifie d'aller à la Cour suprême du Canada et de souligner qu'il est important que les gens se portent candidats comme juge au sein de tribunaux provinciaux, de tribunaux de première instance et de tribunaux d'appel. J'ai discuté de cela avec la ministre, et si votre comité peut jouer un rôle dans cela, nous en serons ravis.
    En ce moment, par exemple, il y a partout au pays de nombreux anciens juges de la Cour suprême du Canada qui ont pris leur retraite, et il y aura maintenant une juge en chef à la retraite. Ce serait vraiment intéressant de les amener à tenir des tables rondes partout au pays afin de parler aux gens du travail de la Cour et de ce que cela signifie de siéger à la Cour suprême du Canada, de sorte que des gens puissent surmonter certaines de ces... peut-être décourager les personnes qui ne devraient pas poser leur candidature, mais encourager celles qui estiment ne pas en savoir assez ou trouvent que c'est trop étrange. Je crois qu'il est important de mieux faire connaître la Cour suprême du Canada partout dans la communauté juridique.
    Je crois que nous avons une excellente communication pour ce qui est d'encourager les gens à se porter candidats, mais d'après moi, c'est l'aspect suivant sur lequel nous pourrions nous pencher, maintenant que nous avons créé un processus que nous estimons fonctionner, compte tenu des candidatures reçues.
    J'ai une dernière question.
    Sur les 14 candidats, combien étaient des femmes? Je sais que j'ai posé cette même question l'année passée, mais je dois de nouveau la poser cette année.
    Bien sûr. Il va falloir que je regarde.
    Comme la dernière fois, le Comité consultatif indépendant va, d'ici un mois, rendre public un rapport décrivant chacun des 14 candidats.
    Merci.
    Je peux vous le dire: c'était six femmes.
    Merci beaucoup, madame Khalid.
    Vous pouvez y aller, monsieur MacGregor.
    Madame la ministre, madame Campbell, je tiens à vous remercier toutes les deux de comparaître devant le Comité aujourd'hui. C'est très important pour nous.
    Madame la ministre, si vous me le permettez, j'aimerais commencer par vous demander de parler du processus. Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé des recommandations que le Comité a faites en février dernier, et nous vous savons gré de nous avoir répondu.
    J'aimerais parler de la quatrième recommandation que nous avons faite, voulant que le privilège parlementaire s'applique à l'entrevue avec la ou le candidat de sorte qu'elle revête le caractère d'audience officielle d'un comité parlementaire. Quand nous avons recommandé que le privilège parlementaire s'applique, vous avez répondu: « Le gouvernement estime que le fait de tenir cette séance dans un cadre public comme une université a permis d'offrir des moyens tangibles d'établir un lien entre la Cour suprême, ses candidats et les Canadiens et Canadiennes. »
    Dans une décision de 2003, le Président Milliken a dit: « Nous bénéficions de privilèges parlementaires afin que les autres ordres de pouvoirs du gouvernement, soit le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire, respectent l’indépendance du pouvoir législatif qui est constitué de notre Chambre et de l’autre endroit. Cette indépendance ne pourrait exister si l’un des deux autres pouvoirs avait la possibilité de redéfinir ou de restreindre ces privilèges. »
    Je sais que cette recommandation a été faite à la suite de beaucoup de discussions. Je me demandais si vous pouviez nous expliquer un peu plus pourquoi le privilège parlementaire ne s'appliquera pas à la réunion de demain.

  (1610)  

    Je vous remercie de votre question, ainsi que des recommandations du Comité.
    Nous sommes impatients de discuter ouvertement avec la juge Martin, demain, lors d'une réunion qui se tiendra au sein de la Cité parlementaire. Nous avons entendu la recommandation du Comité concernant la capacité de poser plus de questions et de permettre à chacun des membres de poser des questions, et nous avons augmenté la durée de l'audience à deux heures et demie. Je sais que le but de la recommandation était d'étendre l'application du privilège parlementaire à l'audience. Il est possible pour les membres du Comité ainsi que pour les membres de l'autre endroit de poser des questions exploratoires et robustes sans en venir à tenir des propos diffamatoires. Je suis impatiente d'entendre les questions. Je crois comprendre que de nombreux membres du Comité pensent aux questions qu'ils vont poser à la juge Martin depuis que l'annonce a été faite.
    Nous ne tenons pas l'audience sur la Colline du Parlement, bien que ce soit tout près, entre autres parce que nous voulons nous assurer d'établir un contact avec les étudiants en droit à l'échelle du pays afin de présenter aux Canadiens la nouvelle juge nommée à la Cour suprême du Canada. Ce sera accessible. Encore là, concernant l'avis de l'ancien premier ministre, le principe est de rendre la Cour suprême du Canada plus concrète pour les gens et de leur permettre de regarder l'audience pendant laquelle les dernières questions seront posées.
    Merci.
    Madame Campbell, au début de l'année, il y a eu, dans le Toronto Star un éditorial fondé sur la thèse voulant que le temps soit venu pour qu'une personne d'origine autochtone soit élevée au rang de juge à la Cour suprême. Lors des célébrations du 150e du Canada dans ma circonscription, on a beaucoup parlé de réconciliation. Il y a eu bien des hauts et des bas dans l'histoire de ce pays, mais pensons aux 150 prochaines années. Ma circonscription compte une importante population d'Autochtones. On y retrouve les Cowichans, les Salish de la côte.
    Tous égards restant dus à Mme Martin qui sera nommée à la Cour suprême, j'aimerais connaître votre avis concernant la recherche d'un candidat autochtone. Arriverons-nous à cela un jour? Est-ce que cette fois-ci le processus a inclus des candidats autochtones potentiels?
    Je ne doute absolument pas qu'il y aura un juge autochtone à la Cour suprême du Canada — un juge autochtone exceptionnel dont la nomination n'exigera aucun compromis concernant les critères qui s'appliquent. Le bassin d'avocats autochtones est encore très restreint au Canada. Quand je suis devenue la première femme à occuper la fonction de ministre de la Justice, de tous les membres du Barreau qui étaient admissibles à une nomination à une cour supérieure, 12,5 % seulement étaient des femmes; 25 % des personnes que j'ai nommées étaient des femmes. La ministre compte sur un bassin très limité d'avocats autochtones admissibles qui ont été admis au Barreau il y a assez longtemps pour être nommés à des cours supérieures. Cinq pour cent des personnes qu'elle a nommées sont des Autochtones.
    Nous avons parlé de cela, et notre comité veut vraiment créer ce bassin de personnes pouvant aller à la Cour suprême. L'un des membres de notre comité — Stephen Kakfwi — est un Autochtone, alors nous sommes vraiment résolus à y arriver.
    De plus — et je précise que l'un n'exclut pas l'autre —, nous cherchons chez d'autres candidats non autochtones la connaissance et la compréhension des réalités que vivent nos collectivités autochtones au Canada. C'est un élément d'une très grande importance.
    J'en suis fermement convaincue. Il est intéressant de constater la confidentialité qui entoure les choses, et l'impossibilité d'en parler, mais je suis absolument certaine que cela se produira, peut-être la prochaine fois ou la fois suivante. Cela dépendra de notre situation et des prochaines nominations. Je les vois venir, et ils vont parler français. Ils vont jouer leur rôle avec beaucoup de dignité et de respect, et les Canadiens seront enthousiasmés par la qualité qu'ils ajouteront aux travaux de la Cour.
    Il vous reste à peu près 10 secondes. Vous aurez une autre occasion au prochain tour.
    Merci.
    Monsieur Fraser.
    Merci beaucoup de comparaître devant nous, madame Campbell et madame la ministre. Il est bon de vous revoir pour cette deuxième nomination fondée sur le nouveau processus.
    Je tiens à vous remercier encore, premièrement, madame Campbell, de votre travail et de votre leadership au comité consultatif, et je remercie tous les membres du comité consultatif de l'excellent travail qu'ils accomplissent. C'est un modèle à suivre pour les nominations.
    Je veux aussi faire écho aux observations relatives à la juge en chef McLachlin, qui quitte ses fonctions après un mandat incroyable à la Cour suprême du Canada. Elle a fait de l'excellent travail à ce titre, et tous les Canadiens devraient être très fiers. La remplacer représente un défi de taille, bien sûr.
    Au Comité, nous avons travaillé fort à faire des recommandations éclairées s'appuyant sur les méthodes utilisées lors de la dernière nomination, et nous vous savons gré d'avoir pris très au sérieux certaines de ces recommandations, de toute évidence, en modifiant la façon dont le processus de nomination fonctionne, y compris en faisant de la représentation régionale un aspect fondamental. J'en suis vraiment satisfaite, étant du Canada atlantique. C'était extrêmement important pour moi la dernière fois, et le Comité a fait cette recommandation.
    Madame Campbell, je vais commencer par vous, si vous me le permettez. L'examen des candidatures a été fait de telle sorte que nous voyons les candidatures des personnes choisies. Cette information a été rendue publique pour que le grand public puisse comprendre la qualité de la candidature de la juge Sheilah Martin. Je me demande si vous pouvez nous parler un peu de la façon dont le Comité a reçu la candidature et nous dire si de l'information additionnelle a été fournie aux membres du comité consultatif, outre la candidature elle-même, et si une recherche indépendante a été menée par les membres du comité consultatif, par exemple sur la jurisprudence ou sur les écrits de la juge Sheilah Martin, ou ceux des autres candidats envisagés.

  (1615)  

    Merci. C'est une excellente question.
    Premièrement, nous avons tous examiné les demandes individuellement, sans nous consulter. Il n'y a donc pas eu de pensée unique. Nous avons évalué les candidatures chacun de notre côté, car nous ne remarquons pas nécessairement tous la même chose chez un candidat. Nous avons voulu être le plus juste possible avec tout le monde. Nous ne nous entendions pas toujours sur tout, mais nous avons vraiment tenté de mener une évaluation on ne peut plus complète.
    Tous les candidats avaient également fourni des références, et nous avons parlé à bien des gens afin d'en apprendre davantage sur chacun d'eux.
     Deuxièmement, nous avons lu les décisions qu'ils ont rendues. Nous voulions évaluer la clarté d'expression, leur connaissance du droit, etc. Nous étions d'avis qu'il revenait plutôt au gouvernement de se prononcer sur la philosophie soutenant leurs opinions. C'est pourquoi, une fois notre partie terminée, la ministre et son personnel, ainsi que le premier ministre, ont examiné de très près le profil judiciaire des candidats. Mais nous avons effectivement évalué tout cela.
    S'il coûte si cher de soumettre sa candidature, c'est que chaque candidat doit remettre la liste de toutes les affaires qu'il a entendues ou pour lesquelles il a produit une publication. Nous allons au-delà de la demande en soi.
    Merci beaucoup.
    En ce qui a trait au processus de nomination en tant que tel, puisque vous avez présidé deux fois le comité consultatif, je me demandais si vous aviez d'autres recommandations à nous faire pour améliorer le processus davantage.
    J'aimerais que nous disposions d'un peu plus de temps. C'est très bien que nous ayons pu consacrer plus de temps aux candidats. Ce n'est pas que nous ayons précipité le travail de quelque façon que ce soit, mais il a parfois été difficile de trouver le temps de nous réunir et de rendre justice au processus.
    Comme je le disais plus tôt, nous aimerions participer à la création d'un bassin d'avocats et de juristes intéressés, et mieux faire connaître le processus. Si nous pouvons jouer un rôle à cet égard, nous serons heureux de le faire. Mais nous ne sommes peut-être pas les mieux placés pour cela.
    C'est intéressant. J'ai participé à un groupe de discussion au Symposium de la Cour suprême du Canada, où Bob Ray s'est dit en faveur du bon vieux système de la « tape sur l'épaule » pour choisir les juges de la Cour suprême du Canada. Je crois que le fait qu'il s'agisse d'un processus ouvert, que les candidats ne soient pas nécessairement ceux qui recevraient cette tape sur l'épaule des gens influents de la communauté juridique... Certains n'étaient peut-être pas prêts à être nommés à la Cour suprême, mais c'était certainement intéressant de voir leur parcours. Qui sait, peut-être qu'on parlera de leur potentiel à la ministre ou qu'ils seront davantage appelés à faire connaître leur travail. C'est merveilleux de voir la richesse des candidats, y compris de ceux qui ne sont pas encore mûrs pour la Cour suprême, mais qui ont néanmoins de grandes aptitudes. Nous pourrions d'ailleurs tâcher de trouver des façons pour que l'information se rende à la ministre.

  (1620)  

     Merci.
    Ai-je encore du temps?
    Vous avez 20 secondes.
    Ça ira, merci beaucoup.

[Français]

     Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer au deuxième tour de questions, et nous allons commencer par M. Ehsassi.

[Traduction]

    Je me joins à mes collègues pour vous remercier d'avoir accepté l'invitation du Comité. Il est certainement très utile d'entendre toutes vos explications, et je suis convaincu que vous avez mis en place une approche extrêmement bien ficelée.
    J'ai trouvé fascinant d'apprendre que la collégialité et la collaboration étaient des qualités recherchées chez les juges de la Cour suprême.
    Comme vous avez pris part à ce processus exigeant, pouvez-vous me dire comment ces qualités ont été évaluées chez les candidats?
    C'est une bonne question.
    Parfois, ces qualités sont mises en lumière par ce que d'autres écrivent sur eux, ce que nous disent leurs références, mais nous leur posons aussi la question. Nous leur demandons de nous parler de leur expérience du travail en collaboration. Les candidats qui siègent à des cours d'appel en ont l'habitude. Pour les juges de première instance... un juge de première instance est tout-puissant dans la salle d'audience, alors c'est une tout autre culture.
    Nous leur posons des questions, nous sollicitons leur point de vue et tâchons de déterminer leur expérience à cet égard, car c'est un aspect très important du travail.
    Absolument.
    Voici ma deuxième question. Évidemment, la juge Martin a pris très au sérieux l'affaire des pensionnats indiens, un dossier majeur. Je pense ainsi à toute l'ampleur de l'expérience incroyable qu'elle apporte dans ce dossier.
    Selon vous, quelle sera l'incidence des décisions judiciaires à l'issue de la Commission de vérité et réconciliation? De quoi aurons-nous besoin pour nous assurer qu'on donnera suite à ces recommandations?
    Pour ce qui est du côté judiciaire, des affaires ont été portées devant les tribunaux. Il est crucial pour les juges de comprendre ce qu'ont vécu les plaideurs. Je crois que ce qui suivra n'engagera pas beaucoup les tribunaux. Ce sera aux gouvernements d'intervenir. Les tribunaux seront occasionnellement appelés à agir à titre d'arbitres.
    Excellent.
    C'était les deux seules questions que j'avais.
    Alors c'est au tour de M. Cooper.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame la ministre. Merci, madame Campbell, pour vos exposés, pour votre travail et pour le travail du comité consultatif, qui a le mandat de trouver un candidat hautement qualifié pour la nomination à la Cour suprême.
    Madame Campbell, vous avez parlé brièvement des échéances et vous avez dit que vous aimeriez disposer de plus de temps. Le premier cycle s'était échelonné sur 22 jours et environ 31 candidats y avaient pris part. Cette fois-ci, le processus a été deux fois plus long, pour seulement 14 candidats.
    Selon vous, pourquoi le nombre de candidats a-t-il été coupé de moitié pour ce deuxième cycle? Est-ce parce que la zone de sélection était limitée à l'Ouest du Canada, et non étendue à l'ensemble du pays, ou est-ce que d'autres facteurs sont à considérer?
    Ce cycle a été presque trois fois plus long, puisqu'il s'est échelonné sur 63 jours. Le processus a donc été beaucoup plus long. Je crois que c'est surtout dû aux restrictions géographiques et au fait que la région visée est bien loin d'Ottawa. Il faut tenir compte de cela.
    La Loi sur la Cour suprême oblige les juges de la Cour suprême du Canada à résider dans la région de la capitale nationale. Pour bien des membres hautement qualifiés de la communauté juridique du Canada, ce n'est tout simplement pas possible. Ils ont peut-être des empêchements familiaux ou n'ont vraiment aucune envie de laisser derrière famille et amis. Il est important de comprendre l'engagement que cela suppose. Les juges ne voient pas nécessairement cela comme un sacrifice, mais c'est certainement un grand bouleversement que de se réinstaller ailleurs.
    Je suis de Vancouver. Qui veut quitter Vancouver? N'empêche que j'ai des amis d'Edmonton, et Edmonton, ce n'est pas mal non plus. L'idée, c'est que ce n'est pas rien. Quand il faut s'éloigner à ce point du centre de notre univers, c'est encore plus difficile. Je crois que cela en décourage quelques-uns. C'est pourquoi ce serait bien de mieux faire connaître le travail. Peut-être qu'à défaut d'être encouragés, les candidats potentiels verraient que c'est moins inquiétant qu'ils le croient.
    Puisque c'est la région la plus éloignée de la capitale, on peut présumer que c'est dans l'Ouest qu'il est le plus difficile de trouver des candidats, car tous ne sont pas prêts à un tel chambardement.

  (1625)  

    Merci de votre réponse.
    Vous avez mentionné Bob Rae. Il a évidemment critiqué publiquement le processus. Il a particulièrement remis en question la pertinence de devoir présenter sa candidature. Il a laissé entendre que cela peut décourager certaines personnes qualifiées de présenter leur candidature, parce qu'elles ne se sentent peut-être pas à l'aise de le faire ou qu'elles ont peut-être peur de se sentir humiliées si elles ne sont pas choisies.
    En plus d'accepter les candidatures présentées au Comité consultatif, voyez-vous un avantage à évaluer la candidature d'autres personnes que celles qui ont présenté leur candidature et à chercher d'autres candidats parmi les juristes, les éminents universitaires et d'autres groupes de la région? Y aurait-il un certain avantage à le faire?
    Les gens du milieu juridique prennent déjà l'initiative d'encourager des collègues à présenter leur candidature. L'an dernier, je me rappelle que des candidats disaient qu'ils n'avaient pas l'intention de présenter leur candidature et que des collègues les en ont convaincus. Cela facilite grandement la chose.
    Je comprends cette modestie, et ce n'est pas de la fausse modestie. Cela veut dire que les gens comprennent l'importance du processus. C'est l'une des raisons pour lesquelles la confidentialité du processus est très importante. À certains égards, c'est un processus extrêmement transparent. Vous êtes au courant de la manière dont nous évaluons les candidatures, et vous voyez les questionnaires et les détails concernant les personnes nommées.
    La confidentialité du processus est notamment très importante, parce que certains ne veulent pas que leurs collègues soient au courant qu'ils ont présenté leur candidature. Je peux vous dire une chose; il n'y a certainement aucune honte à avoir présenté sa candidature dans le cadre de ce processus et à ne pas avoir été choisi, parce que tous les candidats étaient en très bonne compagnie et étaient tous des personnalités canadiennes remarquables issues du milieu juridique. Cette question est importante. Voilà pourquoi nous voulons nous assurer...
    Étant donné que des juges en chef et des procureurs généraux font le tour du milieu et essaient de convaincre des gens de présenter leur candidature, je ne pense pas qu'il y a un candidat exceptionnel qui a été oublié. Il y en a peut-être pour lesquels c'est simplement un processus difficile et inconfortable, et ils ont besoin d'être encouragés à le faire.
    Madame Campbell, vous avez mentionné avoir l'impression qu'un grand nombre de juristes qualifiés et d'autres personnes apprenaient le français et pouvaient parler français. Parmi les 14 candidats, combien avions-nous de candidats effectivement bilingues?
    Seuls les candidats qui ont été convoqués en entrevue ont été évalués, et il y avait plus de candidats qui étaient effectivement bilingues que de candidats qui ne l'étaient pas. Lorsque nous déposerons notre rapport, je crois qu'il y aura des données sur les résultats des évaluations.
    En terminant, en ce qui a trait uniquement aux consultations qu'a tenues le Comité consultatif, avez-vous également consulté les procureurs généraux provinciaux et les juges en chef? J'ai vu dans votre mandat que le Comité consultatif doit consulter la juge en chef, mais il n'est pas question des procureurs généraux provinciaux ou...
    La ministre a parlé avec les procureurs généraux.
    La ministre l'a fait après. D'accord. Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Boissonnault, allez-y.
    Madame la ministre, je vous remercie de nous donner l'occasion d'échanger sur la question.
    Madame Campbell, je me souviens du jour où vous êtes devenue première ministre. Je siégeais au conseil étudiant à l'époque, et je me rappelle que c'était un grand moment pour le Canada. J'étais fier de vous à l'époque, et je suis fier de vous aujourd'hui.
    La très hon. Kim Campbell: Merci.
    M. Randy Boissonnault: C'est un honneur de vous représenter à la Chambre en tant que député d'Edmonton-Centre.
    La très hon. Kim Campbell Oui. C'est vrai.
    M. Randy Boissonnault: C'est un grand honneur.
    À titre de membre du caucus autochtone libéral, j'apprécie vraiment vos deux réponses concernant le grand moment de notre histoire que nous vivrons lorsque nous aurons un juge autochtone à la Cour suprême.
    Vous et moi avons eu l'occasion d'échanger dans d'autres tribunes au sujet des diverses formes que prend le leadership, et votre travail au Peter Lougheed Leadership College est l'une des formes sous lesquelles se manifeste le leadership. Pour en arriver à une courte liste de candidats, quelle importance avez-vous accordée au leadership à l'égard des droits des minorités — l'égalité entre les sexes, les droits des femmes, les droits des minorités sexuelles, les droits des personnes qui ont des identités et des expressions sexuelles différentes — et des enjeux touchant les minorités, y compris les minorités visibles, pour avoir le sentiment que les minorités sont représentées?

  (1630)  

    Cela faisait partie de notre mandat. Le premier ministre nous a donné comme consignes d'essayer de rendre la Cour suprême la plus diversifiée possible et de chercher des candidats qui possédaient toutes ces qualités. L'un des membres de notre comité est un membre très actif de la communauté LGBTQ. Nous avons un Autochtone qui siège au comité. De plus, lorsque nous discutons avec les candidats, nous leur demandons de nous parler de leur expérience quant à la diversité de la société canadienne, et les candidats le font évidemment de manière confidentielle. Certains d'entre eux ont vécu eux-mêmes ou connaissent des membres de leur famille qui ont vécu des expériences très intéressantes.
    Nous essayons de nous assurer que la réalité vécue par les Canadiens de tout acabit est comprise par les personnes qui siègent au tribunal. La juge Martin a réalisé tellement de choses et a connu tellement de tensions et de dualités très différentes au sein de la société canadienne que je crois que cela contribue vraiment à son humanité et renforce sa capacité de comprendre la société.
    La réponse courte est que nous en faisons un élément central de nos démarches.
    Je m'en réjouis, parce que, comme vous le savez, sans la Cour suprême, il aurait fallu attendre beaucoup plus longtemps pour que l'orientation sexuelle soit incluse dans les lois canadiennes sur les droits de la personne dans toutes les provinces et au gouvernement fédéral.

[Français]

     Comme vous le savez, je suis un fier Franco-Albertain.

[Traduction]

    Dans mon travail relativement aux communautés francophones en Alberta et partout au pays, j'ai appris que les personnes qui grandissent dans une communauté linguistique en situation minoritaire développent une vision particulière de la société.
    En ce qui concerne la juge Martin, comme elle a grandi dans la communauté de langue anglaise en situation minoritaire au Québec, son expérience a-t-elle influé sur votre recommandation de l'inclure sur la courte liste de candidats?
    Cela faisait tout simplement partie de son bagage diversifié et de sa compréhension de ce que cela signifie d'être une minorité qui doit se battre pour ses droits. Plus tôt aujourd'hui, j'ai dit qu'une certaine humanité émanait d'elle en raison de tout ce qu'elle a vu et vécu.
    Évidemment, bon nombre de gens ne réalisent pas qu'il y a une grande communauté francophone en Alberta ou que l'Université de l'Alberta a un campus francophone, et c'est à cet endroit que Randy Boissonnault a fait ses études. Ces enjeux ne touchent pas seulement le Québec. Ils sont vécus par les communautés de langue française partout au pays, et je crois que la juge Martin connaît très bien la réalité des tensions qui existent dans les diverses sociétés canadiennes sur le plan très humain.
    L'un des aspects intéressants concernant les Edmontoniens — des recherches intéressantes ont été réalisées en la matière —, même si la ville se situe plutôt au nord et qu'elle est à la même latitude que Moscou, c'est qu'ils ne se considèrent pas comme des habitants du Nord. Vous devez en fait vous rendre dans le Nord pour connaître ce qu'est vraiment le Nord.
    Dans quelle mesure l'expérience de la juge Martin à l'égard du système de justice dans le Nord et des communautés autochtones nordiques vient-elle renforcer l'humanité qui émane d'elle dans sa candidature et justifier sa présence sur la courte liste de candidats?
    Si vous avez déjà visité des communautés nordiques, vous savez qu'elles ont leur propre défi et leur propre diversité. Cela faisait encore une fois partie de notre mandat, parce que notre recherche nous a menés vers le nord. L'un de nos membres, Sheila MacPherson, qui représente la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, exerce à Yellowknife et à Iqaluit, et elle est bien consciente de ce que cela signifie d'avoir de l'expérience de travail dans les tribunaux de ces régions.
    C'est vraiment merveilleux, parce que la Cour suprême n'est pas un tribunal où les gens vont... Ce n'est pas une expérience d'apprentissage. C'est vrai que vous y apprenez beaucoup, mais vous devez être en mesure de rapidement vous mettre au travail. Plus un juge a de l'expérience, plus il est sage, plus il comprend la richesse et la diversité des expériences vécues par les Canadiens lorsqu'il arrive à la Cour suprême, plus il est préparé à vraiment rendre justice dans les affaires qu'il entend.

  (1635)  

    J'aimerais vraiment savoir s'il y a quelque chose dans la jurisprudence de la juge Martin, étant donné que vous êtes une femme qui a ouvert la voie dans bien des domaines, qui vous a personnellement poussé à vouloir inclure son nom dans la courte liste de candidats.
    Toutes ces réponses...?
    Étant donné que je suis à l'origine de la protection des victimes de viol dans le Code criminel, j'ai trouvé intéressant que cette question revienne au goût du jour. Évidemment, je crois que la jurisprudence de la juge Martin à cet égard me tient à coeur, compte tenu de mon propre travail dans l'élaboration de ces mesures législatives.
    Merci, madame Campbell.
    Merci beaucoup.
    Pour conclure la série de questions, nous aurons M. Liepert, puis ce sera le tour de M. MacGregor.
    Monsieur Liepert, allez-y.
    Je me joins aux autres pour vous remercier de votre présence au Comité.
    Je n'ai pas l'impression d'avoir beaucoup d'expertise en matière de droit, mais je suis entouré par bon nombre de gens qui en ont. Ce que je fais, c'est que je vais voir les personnes qui en ont, je leur demande leur opinion et j'exprime ensuite leur opinion. Je peux vous dire que j'ai communiqué avec des professionnels du milieu juridique en Alberta, et je peux vous dire que tous ces professionnels sont beaucoup plus conservateurs que je le suis. J'aimerais vous lire certains commentaires que j'ai reçus de leur part concernant la nomination.
    Le premier commentaire est: « La nomination de Sheilah Martin à la Cour suprême du Canada est brillante. Sheilah sera une merveilleuse addition à la Cour suprême. Elle est vraiment brillante, elle a un excellent jugement et elle n'est surtout pas une idéologue de gauche. »
    Le deuxième commentaire est: « Je peux dire que je suis un ardent partisan de la juge Martin. Elle est très intelligente; elle travaille fort; elle est réfléchie et respectueuse du droit. Elle est polie envers les témoins, les parties, les avocats et leur conseil. Mon expérience avec elle, même si elle n'est pas grande, a toujours été positive. »
    À titre de député albertain, je présume que je n'ai pas vraiment de questions, mis à part de vous communiquer certains des commentaires que j'ai reçus.
    S'ils sont heureux, je le suis.
    Me permettez-vous de faire un commentaire?
    Je crois que le droit n'appartient pas seulement aux avocats. L'un des grands atouts de la juge Martin est son sens de la communication. Elle croit vraiment que c'est important que le public comprenne le droit. Le droit ne devrait pas être un mystère pour ceux qui ne l'exercent pas ou qui n'ont pas étudié dans ce domaine.
    Je dois dire que les commentaires de vos amis... Je suis persuadée que tout juge serait honoré et enchanté d'entendre de tels commentaires à son sujet, et cela représente la plus haute aspiration pour un juge dans un système de justice indépendant et démocratique. Je vous remercie donc de ces commentaires.
    Même si les commentaires concernant la nouvelle nomination provenaient de professionnels du milieu juridique, je crois qu'il ne s'agissait pas nécessairement seulement d'opinions d'ordre juridique.
    Oui. Il s'agissait de merveilleux commentaires.
    Merci, monsieur Liepert.
    Je tiens à souligner que les contributions des quatre membres du Comité qui ne sont pas des avocats sont hautement appréciées par les six d'entre nous qui le sont.
    Des voix: Ah, ah!
    Le président: Ce commentaire que je voulais faire à titre de président rappelle l'importance des précédents gouvernements et du gouvernement actuel dans ce processus non partisan de nomination des juges à la Cour suprême qui permet aux gens de tous les partis d'être convaincus du bien-fondé de la nomination d'un juge. Regardons ce qui se passe chez nos voisins du sud chaque fois qu'une personne est nommée à la Cour suprême. Je suis très fier à titre de Canadien de ce processus non-partisan qu'ont mis en place les précédents ministres de la Justice et l'actuelle ministre de la Justice.
    Monsieur MacGregor, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    En tant que fier habitant de l'île de Vancouver, je vous remercie d'avoir mentionné plus tôt les difficultés que pose la distance pour les Britanno-Colombiens. C'est tout un changement de déménager ici pour les juges qui vivent dans notre climat ensoleillé. C'est très important de le reconnaître dans le cadre du processus.
    J'ai été ravi d'entendre que vous avez personnellement constaté que le niveau de français est en hausse et atteint ce niveau d'excellence, parce que j'ai participé plus tôt cette année à une intéressante conférence sur le bilinguisme judiciaire. C'est incroyablement difficile de réussir à comprendre ces notions juridiques très complexes dans les deux langues, d'autant plus que nous avons évidemment deux régimes juridiques différents au pays.
    Vous avez parlé du critère « effectivement bilingue » et vous avez dit avoir eu 14 candidats. Vous en avez convoqué huit en entrevue, puis leur français a été évalué. Lorsque vous parlez du critère « effectivement bilingue », l'évaluation a-t-elle trait à la capacité des candidats de comprendre des thèmes juridiques complexes dans les deux langues? Pouvez-vous nous résumer un peu le tout? Cela suscite un vif débat dans l'Ouest canadien, mais c'est aussi très important pour mes collègues québécois. Je fais certainement partie de ceux qui sont d'avis que le plus haut tribunal du pays devrait être bilingue. J'aimerais vous entendre à cet égard.

  (1640)  

    Le commissaire à la magistrature fédérale a élaboré une évaluation structurée. Cela inclut la capacité de comprendre et de lire des plaidoiries en français et de converser en français. Lorsque nous avons rencontré la juge en chef l'an dernier, elle a mentionné qu'elle continue d'améliorer son français.
    Je ne crois pas que les juges arrêtent de penser à la question, de s'améliorer à cet égard et de toujours essayer d'avoir le meilleur français possible. Il est possible d'avoir recours à des services de traduction, mais je crois qu'un juge qui ne peut pas feuilleter et comprendre les dossiers aura vraiment du mal à s'y retrouver dans les travaux à la cour et les plaidoiries. Je suis convaincue que le commissaire à la magistrature fédérale sera ravi de vous montrer l'évaluation ou même de vous la faire passer si vous voulez voir ce dont il s'agit. L'évaluation n'est pas rigoureuse au point où seules les personnes qui connaissent à fond la langue peuvent la réussir, mais elle est suffisamment rigoureuse pour être vraiment en mesure d'établir la capacité d'un juge d'exercer ses fonctions en français.
    En guise de conclusion, je vous remercie de votre exposé aujourd'hui. Je vous en suis reconnaissant.

[Français]

     Tout le plaisir est pour moi.
    C'était un plaisir de vous recevoir, monsieur MacGregor. Vous avez amélioré la qualité de votre français, comme l'ont fait plusieurs membres du Comité.
    Étant le seul membre du Québec, j'aimerais dire que je suis très heureux de voir que la juge qui a été nommée est diplômée en droit civil et est une candidate bilingue de l'Ouest.

[Traduction]

    Mesdames, nous vous remercions énormément de vos témoignages aujourd'hui au Comité. C'est un véritable plaisir de participer à ce processus. Je vous remercie encore une fois toutes les deux de votre présence devant le Comité aujourd'hui.
    La séance est levée.
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