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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 009 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 25 février 2020

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

     Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 6 février 2020, nous étudions le projet de loi C-4, Loi portant mise en œuvre de l'Accord entre le Canada, les États-Unis d'Amérique et les États-Unis mexicains.
    Nous avons comme témoin ce matin Maryscott Greenwood, du Conseil des affaires canadiennes-américaines, par vidéoconférence depuis Washington. Bienvenue et merci d'être des nôtres.
    Nous avons également, par vidéoconférence, Jennifer Mitchell, membre du conseil d'administration d'Éditeurs de Musique au Canada.
    De la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, nous avons Andrea Kokonis, avocate générale, et Gilles Daigle, consultant.
    Nous attendons des représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec qui ne sont pas arrivés.
    Nous commencerons par Maryscott Greenwood, du Conseil des affaires canadiennes-américaines.
    Vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous souhaite un Mardi gras.
    Je vous remercie de m'avoir invitée à m'exprimer aujourd'hui et de m'avoir autorisée à le faire depuis Washington. C'est un honneur de conseiller des parlementaires sur un sujet aussi important pour nos deux pays que celui qui est examiné, à savoir le plus important accord commercial du monde, mis à jour et modernisé pour la troisième décennie du nouveau millénaire.
    Vous vous rappelez que le nouvel Accord de libre-échange nord-américain a d'abord été annoncé le 1er octobre 2018. Comme plusieurs experts vous ont dressé un historique de ses éléments, je ne vais pas prendre de votre temps pour récapituler les étapes du chemin assez tortueux qui a mené là où nous en sommes. Nous savons ce qui a été retenu dans l'accord et ce qui ne l'a pas été. Nous savons qu'il ne répond pas à tous les vœux des citoyens ni à tous les nôtres au Conseil des affaires canadiennes-américaines, mais un accord qui ne satisfait pas entièrement toutes les parties, cela s'appelle un compromis, et les compromis sont dans l'esprit même du commerce.
    De plus, je crois que tout le monde reconnaît que l'ACEUM améliore sensiblement non seulement nos politiques commerciales, mais aussi les relations entre gouvernements en Amérique du Nord. Il réaffirme notre engagement à l'égard de la primauté du droit et de notre interdépendance économique, ainsi que notre conviction que le Mexique est un partenaire essentiel de notre prospérité commune. Les trois gouvernements sont convenus qu'il fallait actualiser l'ALENA et, à vrai dire, l'aboutissement des négociations a été un immense soulagement pour les entreprises.
    Comme vous le devinez sans doute, le Conseil des affaires canadiennes-américaines souhaite qu'il prenne force de loi le plus tôt possible. Je parle pour les entreprises des deux pays et je suis ici pour vous dire que ce nouvel accord est un ensemble de règles stables sur lesquelles nous pourrons compter pendant des années. Les entreprises aiment la stabilité et elles détestent l'incertitude. Vous l'avez probablement déjà entendu dire. On a beaucoup écrit sur le fait que les entreprises et les établissements financiers hésitent à investir depuis la crise de 2008, malgré les efforts déployés par les banques centrales pour les encourager à dépenser et à prêter. C'est à cause de l'incertitude.
    Le contexte commercial mondial est instable. Des règles commerciales stables sur lesquelles on s'est entendu sont rassurantes. Est-ce que nous ne voulons pas tous voir les entreprises investir en toute confiance dans la croissance et augmenter les échanges commerciaux en Amérique du Nord?
    En tant qu'ancienne diplomate américaine qui ai été en poste au Canada, et en tant que personne qui se lève tous les matins depuis au moins 20 ans pour œuvrer aux relations entre le Canada et les États-Unis, j'ai pour mission de savoir comment on réagit au Congrès et à la Maison-Blanche aux questions d'intérêt bilatéral qui influent sur notre coalition commerciale. Croyez-moi quand je vous dis que nous vivons un moment exceptionnel aujourd'hui. Si quelqu'un pense qu'il est encore possible de trouver le moyen de récrire l'ACEUM, à mon avis, cette personne ne comprend pas la situation actuelle. Nous sommes vraiment arrivés au point où le Parlement du Canada doit approuver ou rejeter l'accord.
    Cela dit, permettez-moi d'aller un peu plus loin et de vous dire ce qui arriverait, selon moi, du point de vue de Washington, si le Canada rejetait l'accord et le faisait échouer. Vous savez tous que la Chambre des représentants des États-Unis et le Sénat ont ratifié en décembre et janvier ce que nous appelons à Washington l'Accord Canada-États-Unis-Mexique, l'ACEUM. Savez-vous combien de projets de loi ont été présentés jusqu'ici au Congrès au cours de cette session? Des milliers. Savez-vous combien ont été adoptés à la Chambre des représentants? Près de 500. Savez-vous combien ont été adoptés à la Chambre des représentants et au Sénat pour le moment? Quatre-vingt-onze, et la plupart visaient à donner un nom à des bureaux de poste ou à des immeubles du secrétariat aux Anciens Combattants. On ne s'entend pas sur grand-chose à Washington.
    Vous rappelez-vous que la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a déchiré le discours sur l'état de l'Union juste après que le président l'a prononcé en direct à la télévision? Eh bien, elle n'a pas déchiré l'ALENA modernisé, comme certains dans son parti l'auraient voulu. En fait, elle s'est efforcée de manière réfléchie de le faire adopter. Non seulement l'ACEUM a été adopté, mais il l'a été à une immense majorité des deux partis dans les deux chambres. Dans le climat politique actuel, c'est un exploit.
    Ensuite, le président Trump l'a promulgué à la fin du mois dernier et, comme vous le savez, le président Trump ne fait pas toujours ce que le Congrès lui demande. Les planètes se sont donc alignées.
    Permettez-moi à présent de me faire de nouveau l'avocate de l'accord et d'imaginer ce qui risque d'arriver si, maintenant qu'il a été adopté aux deux chambres du Congrès, qu'il a été signé à la Maison-Blanche et, surtout, que le Mexique l'a ratifié, le Parlement canadien ne l'adopte pas.
    Comment vous l'avez probablement entendu dire, le président Trump a tendance à pencher d'instinct vers le protectionnisme. Son slogan, c'est « America First ». Il se décrit lui-même comme favorable aux droits de douane. Il ne réagit pas bien quand il se sent humilié, ce qui serait certainement le cas si le Canada n'entérine pas le nouvel accord. Il considère à raison l'accord comme la grande réussite législative de son premier mandat.
    Il recourrait aux droits de douane. Le Canada, le Mexique et les États-Unis ont déjà traversé ce chapitre regrettable. Si les tendances se maintiennent dans les primaires démocrates, le président Trump pourrait bien avoir pour adversaire cet automne le sénateur Bernie Sanders.
    Le sénateur Sanders se qualifie lui-même, comme vous le savez, de démocrate socialiste. Comme d'autres personnes à gauche de l'échiquier politique, non seulement il n'aime pas les accords commerciaux, comme l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis original et l'ALENA, mais il s'est clairement déclaré opposé à ce nouvel accord. Lui aussi préférerait recourir aux droits de douane pour protéger ce qu'il estime être les intérêts économiques américains. N'oublions pas que le sénateur Sanders est un des rares membres du Congrès à avoir voté contre l'ACEUM.
    J'imagine que vous voyez où je veux en venir. Est-ce que quelqu'un croit vraiment que ce soit une bonne idée de pousser le président ou son rival potentiel à une guerre tarifaire avec le Canada et le Mexique? Un président irrité peut, d'un claquement de doigts, renforcer les contrôles frontaliers, créer des bouchons et donner des maux de tête aux entreprises des deux pays. Mais, étant donné la taille de nos économies respectives, je dirais que les maux de tête seraient pires au Canada.
    Comme je parle au nom de grandes entreprises canadiennes et américaines, j'aimerais souligner que nos membres ont déjà quelques maux de tête. Il y a la question très délicate du blocage des voies ferrées. Et il y a des questions sur la capacité de choisir le tracé ou l'emplacement de nouveaux projets d'infrastructure et de les financer, notamment dans le secteur de l'énergie, comme vous le savez.
    À mon avis, rejeter le nouvel accord commercial dans ce contexte serait non seulement une erreur bête, mais ce serait aussi se tirer une balle dans le pied.
    Cela dit, permettez-moi d'adopter juste quelques instants une approche plus optimiste. Contrairement aux États-Unis, le Canada considère, depuis les années 1980, les accords de libre-échange comme répondant à ses intérêts nationaux essentiels. Étant donné la taille relative de votre marché, les Canadiens ont plus intérêt que la plupart des autres pays à des règles claires et transparentes adoptées d'un commun accord, et c'est probablement pourquoi le Canada a des accords de libre-échange avec l'Europe, le Chili, la Jordanie, Israël, le Costa Rica, le Honduras, la Corée, le Panama et le Pérou.
    Autrement dit, les entreprises canadiennes ont des règles claires et préférentielles avec des marchés qui représentent des billions de dollars. N'est-il pas logique que le Canada actualise, puis adopte un accord avec son principal partenaire commercial? Je suis certaine que quantité d'autres pays aimeraient avoir un accès préférentiel au marché américain aujourd'hui. Être tout près, mais ne pas y avoir accès est pour le moins exaspérant. Un accord avec le plus gros marché du monde est prêt et existe maintenant. Tout le monde attend.
    Le Conseil des affaires canadiennes-américaines estime que le choix qui s'offre à vous est évident. L'accord mis à jour renforce des relations commerciales qui existent depuis que nos deux pays existent. Les efforts consentis ces trois dernières années ont été intenses, parfois éprouvants, mais nous touchons presque au but. C'est une question simple qui est soumise aux parlementaires canadiens et, à mon avis, la poser, c'est y répondre.
    Je vous remercie.
    Je serai heureuse de répondre à vos questions.
(0910)
    Je vous remercie, madame Greenwood.
    Je vais maintenant passer à la Fédération des chambres de commerce du Québec, avec Charles Milliard, président-directeur général; Kathy Megyery, vice-présidente, Stratégie et affaires économiques; et Louis Lyonnais, conseiller, Stratégie et affaires économiques.
    À vous la parole. Je vous remercie. Allez-y, je vous en prie.

[Français]

     Je me présente, je m'appelle Charles Milliard, et je suis le PDG de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je suis accompagné de Mme Kathy Megyery, vice-présidente de Stratégie et affaires économiques.
    Je remercie le Comité de nous recevoir malgré quelques problèmes techniques. Je dois dire que nous avons eu une certaine difficulté à établir la communication et à nous rendre ici ce matin. Je vous remercie de votre patience.
    La Fédération des chambres de commerce du Québec regroupe 132 chambres de commerce partout au Québec et 1 100  sociétés membres. Les membres de la Fédération exercent leurs activités dans tous les secteurs de l'économie et sur l'ensemble du territoire du Québec. Étant le plus important réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec, la Fédération agit également comme chambre de commerce provinciale et, à ce titre, fait valoir les intérêts de ses membres en matière de politiques publiques.
    D'entrée de jeu, la Fédération tient à saluer la signature de l'accord commercial entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, qui, comme on le sait, met fin à plus d'une année d'incertitude pour les entreprises. Ce climat d'incertitude qui régnait avant la conclusion de l'accord nuisait passablement au climat d'affaires et aux investissements au Canada. Cependant, si elle reconnaît pleinement l'importance de ce nouvel accord, la FCCQ demeure fortement préoccupée par certains aspects de l'entente qui devront faire l'objet d'un suivi rigoureux de la part du gouvernement fédéral.
    D'abord, la Fédération tient à souligner que cet accord a malheureusement été conclu au détriment de notre modèle de gestion de l'offre et des producteurs laitiers du Québec. Encore une fois, ils auront en quelque sorte servi de monnaie d'échange. Ce fut le cas au cours des trois dernières grandes négociations d'accords internationaux, soit celles de l'Accord économique et commercial global, ou AECG, de l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, ou PTPGP, et de l'ACEUM.
    De plus, malgré des demandes très claires du secteur québécois de l'aluminium concernant la réglementation du contenu régional, la situation de ce secteur ne s'améliorera pas. En revanche, le secteur de l'acier, qui, comme on le sait, est concentré à 53 % en Ontario, a obtenu pour sa part les protections qu'il réclamait. À l'avenir, le principe d'équité interprovinciale devra guider les concessions faites par le gouvernement fédéral dans le cadre des négociations d'accords internationaux.
    En ce qui a trait précisément à la gestion de l'offre, cette troisième brèche a pour effet de miner la rentabilité de ce système et sa viabilité à long terme, notamment pour les plus petits producteurs. Pour les accords internationaux présents, soit l'AECG et le PTPGP, les annonces relatives aux compensations se sont fait attendre, et leur versement encore plus, malheureusement. À ce jour, les transformateurs laitiers ainsi que les producteurs de volailles et d'œufs attendent toujours qu'on leur verse des sommes. Pour le moment, aucune annonce n'a encore été faite en lien avec l'ACEUM.
    La FCCQ demande donc au gouvernement de définir le plus rapidement possible les paramètres du programme de compensation destiné aux producteurs et aux transformateurs laitiers dans le cadre de l'ACEUM. Elle souhaite également que les producteurs d'ici reçoivent un dédommagement équivalent à l'importance du secteur agroalimentaire québécois dans l'ensemble de l'économie canadienne.
    En ce qui concerne le secteur de l'aluminium, le gouvernement devra également faire preuve de vigilance. À l'origine, une clause de l'accord stipulait que 70 % du contenu régional pour les métaux, soit l'acier et l'aluminium, devaient être assurés par une production sur le continent nord-américain. Ainsi, le Mexique devait s'approvisionner en Amérique du Nord dans une proportion de 70 %. Cependant, un flou dans la définition risquait de permettre au Mexique de simplement s'approvisionner au rabais auprès de la Chine, ce qu'il fait depuis plusieurs mois déjà.
    Dans la nouvelle mouture de l'ACEUM, cette lacune a été corrigée, mais uniquement pour l'acier, et non pour l'aluminium. Cette nouvelle dynamique aura un impact sur les parts de marché du Québec. Les entreprises américaines que le Québec approvisionnait ont déjà amorcé une relocalisation vers le Mexique dans le but de payer leur métal moins cher. En raison de cette situation, nous risquons de perdre de plus en plus de marchés aux États-Unis et, du même coup, de voir se développer une relocalisation des capacités de transformation au Mexique. La FCCQ demande donc au gouvernement fédéral de s'assurer de maintenir la compétitivité de l'industrie dans un marché qui vient de subir un changement majeur et de faire toutes les représentations qui s'imposent, sur le plan diplomatique, auprès des Américains pour forcer les Mexicains à respecter les règles du jeu.
     En vertu des dispositions de l'ACEUM, le Canada a accepté d'augmenter le seuil de perception du droit de douane, soit le seuil de minimis. En effet, il est passé de 20 $ à 150 $ pour les droits. Cette augmentation, demandée depuis longtemps par les commerçants en ligne américains, pourrait mener à une forte augmentation des achats transfrontaliers, ce qui aurait des conséquences évidentes pour les détaillants québécois et leurs employés. Avec l'augmentation du seuil, les commerçants en ligne américains pourraient commencer à offrir des envois sans frais vers le Canada. Nombre d'entre eux offrent déjà ces conditions à leurs clients aux États-Unis. La FCCQ demande donc au gouvernement fédéral de porter une attention particulière au commerce de détail dans son ensemble afin d'assurer sa compétitivité face aux entreprises étrangères.
     La Fédération aimerait également faire part au gouvernement d'une préoccupation qui est souvent exprimée par ses membres, notamment par les PME, soit la diffusion insuffisante d'information à propos des avantages de tous ces accords commerciaux. À leur avis, le gouvernement devrait offrir un meilleur service après-vente en lien avec les accords commerciaux.
(0915)
     Bien que plusieurs mécanismes soient en place, l'information ne semble pas toujours se rendre aussi efficacement que souhaité dans l'ensemble de notre réseau entrepreneurial au Québec. Le gouvernement devrait être plus proactif afin de faire connaître aux entreprises les avantages de nos accords commerciaux, tout en les informant des bénéfices de conquérir les marchés extérieurs.
    À ce titre, nous croyons qu'il est nécessaire d'offrir un accompagnement aux entreprises pour effectuer leur première exportation. Il serait aussi pertinent d'accorder plus de soutien en ligne aux entreprises de plus petite taille et un accompagnement personnalisé aux entreprises à haut potentiel.
    La FCCQ a toujours prôné la diversification de nos marchés d'exportation et son importance. D'ailleurs, elle met à contribution son réseau de chambres de commerce partout au Québec, qui est bien implanté dans leur milieu respectif, pour amener les entreprises québécoises à découvrir les avantages de l'exportation et à saisir les nouvelles occasions d'affaires qui s'offrent à elles.
    Dans le contexte du protectionnisme américain actuel que nous connaissons, il importe que les entreprises québécoises puissent cibler d'autres marchés à haut potentiel et augmenter la pondération des exportations hors États-Unis, qui représentaient plus de 70 % des exportations québécoises l'an dernier, comme vous le savez.
    La diversification de nos partenaires économiques est encore plus importante lorsqu'on considère l'incertitude causée par les surtaxes américaines, qui a nui à notre économie au cours des dernières années.
    En terminant, il appert que beaucoup de produits non conformes à la réglementation actuelle réussissent à passer les frontières, faute de ressources à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. En ajoutant des contraintes, il importe d'augmenter les vérifications et les analyses appropriées afin de s'assurer que les produits importés respectent les mêmes exigences que les produits d'ici.
    Certes, la réglementation canadienne vise à favoriser une meilleure santé pour les consommateurs, mais elle engendre aussi un coût pour les entreprises qui doivent s'y conformer. L'harmonisation est donc essentielle pour assurer la compétitivité de l'industrie agroalimentaire québécoise. Conséquemment, la FCCQ recommande au gouvernement d'augmenter les contrôles et les inspections de l'Agence afin de vérifier que les produits importés sont soumis aux mêmes règles et normes que celles du Canada.
    Je vous remercie de votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
(0920)

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Nous allons passer aux Éditeurs de Musique au Canada, avec Jennifer Mitchell, par téléconférence.
    Bonjour.
    Bonjour et merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner cette occasion de m'exprimer. Je suis désolée de ne pas être des vôtres en personne.
    J'ai le plaisir d'être propriétaire-exploitante d'une société d'édition de musique canadienne indépendante depuis près de 20 ans. J'ai à mes côtés aujourd'hui Casey Chisick, de Cassels, qui est conseiller juridique extérieur des Éditeurs de Musique au Canada et de mes entreprises.
    Je suis ici pour vous parler de la nécessité de mettre pleinement en œuvre la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur, conformément à l'ACEUM, immédiatement, totalement et sans condition. Cela permettra aux auteurs-compositeurs de réussir et aux petites entreprises comme la mienne de prospérer. Il est indispensable pour encourager leurs efforts créatifs et nos efforts commerciaux de ratifier l'ACEUM et de mettre en œuvre sans tarder la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur.
     Le projet de loi C-4 prolonge la durée de la protection des droits d'auteur de quelques œuvres, mais laisse de côté les compositions musicales, autrement dit les chansons. Au nom des Éditeurs de Musique au Canada et des auteurs-compositeurs et compositeurs avec qui je travaille, je demande instamment aux membres du Comité de modifier le projet de loi C-4 afin que le Canada protège, comme ses partenaires commerciaux internationaux, toutes les œuvres musicales, littéraires, dramatiques et artistiques.
    L'édition de musique canadienne est une industrie de 329 millions de dollars, et ce n'est qu'un secteur de l'industrie créative, elle-même évaluée à 53 milliards de dollars. Les éditeurs de musique sont des innovateurs. Leurs stratégies d'exportation dynamiques permettent à des entrepreneurs comme moi d'être mieux préparés à affronter la concurrence internationale. Aujourd'hui, 67 % des revenus des éditeurs de musique viennent de sources étrangères, contre 28 % en 2005. Il est essentiel, avec l'évolution de la technologie, de pouvoir prendre un essor international. Pour cela, nous prenons des risques financiers et nous investissons notre temps, notre énergie et notre argent pour bâtir la carrière internationale d'auteurs-compositeurs, y compris de jeunes talents.
     Par exemple, nous avons signé un contrat avec Tom Probizanski, ce qui lui a permis de venir s'installer à Toronto. Nous avons ensuite payé pour qu'il aille coécrire à Los Angeles et au Danemark, et nous avons organisé ses séances de coécriture. Nous avons également payé pour la promotion de son blogue et de sa sélection, de sorte qu'il a eu droit à un article dans le magazine Clash et qu'il figure dans différentes sélections de Earmilk et Spotify. Si nous avons pu prendre ces risques et investir cet argent, c'est uniquement parce que j'ai pu compter sur les revenus de plusieurs chansons dont mes entreprises possèdent les droits d'auteur — par exemple Imagine de John Lennon; What a Wonderful World; My Way; Y.M.C.A.; Start Me Up des Rolling Stones; Skinnamarink de Sharon, Lois and Bram; et même le thème des Simpsons. Mais un certain nombre de chansons vont bientôt tomber dans le domaine public parce que la loi canadienne sur le droit d'auteur ne suit pas les normes internationales.
    Conserver ces précieux droits d'auteur pendant 20 années de plus représenterait des centaines de milliers de dollars pour payer de bons emplois de la classe moyenne, un réinvestissement dans l'économie canadienne et dans des auteurs-compositeurs canadiens, et la possibilité de faire grandir notre entreprise pour exporter notre musique sur les marchés internationaux. Il faut agir immédiatement pour éviter que d'innombrables œuvres précieuses ne tombent dans le domaine public entre aujourd'hui et la fin de 2022. Autrement, nous risquons d'étouffer l'innovation, la créativité, le potentiel d'exportation et la croissance de petites entreprises comme la mienne. Nous risquons aussi de semer davantage la confusion, car en restant en décalage avec nos partenaires commerciaux internationaux, il demeure compliquer pour les utilisateurs d'obtenir des licences, au lieu de simplifier les choses.
    J'aimerais dire quelques mots sur le rapport du comité de l'industrie sur son examen de la Loi sur le droit d'auteur à la dernière législature. Certains croient qu'une inscription des droits d'auteur est nécessaire à une transition sans heurts. Je ne puis être d'accord. Les éditeurs et les auteurs-compositeurs enregistrent déjà leurs œuvres auprès de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SOCAN et de l'Agence canadienne des droits de reproduction musicaux ltée, la CMRRA, au Canada pour être payés. Un deuxième système d'inscription fédéral ne ferait que créer un fardeau inutile pour les titulaires de droits d'auteur et risque d'entraîner des abus d'un système qui fonctionne déjà très bien pour les créateurs, les utilisateurs et le public. Une inscription obligatoire porterait aussi atteinte aux obligations du Canada aux termes de traités internationaux, même si elle ne s'applique qu'aux 20 dernières années d'une protection prolongée. La législation internationale du droit d'auteur a notamment pour principe élémentaire que la protection doit être accordée sans formalités.
    En conclusion, protéger le droit d'auteur pendant 20 années supplémentaires encourage le dynamisme du secteur créatif, les exportations culturelles canadiennes et la croissance de nombreuses entreprises novatrices qui ont adopté le marché numérique.
(0925)
     Il est grand temps que le Canada rattrape ses partenaires commerciaux internationaux à cet égard. Nous demandons instamment aux membres du Comité de modifier le projet de loi C-4 afin d'y inclure la mise en œuvre immédiate de la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur, sans condition. Les Éditeurs de Musique au Canada ont préparé à ce propos une version préliminaire du libellé législatif qu'ils ont soumise à la greffière afin que le Comité l'examine.
    Je crois comprendre que la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SOCAN, s'exprimera dans quelques instants. Nous avons lu ses mémoires et nous sommes totalement d'accord avec leur contenu.
    Je vous remercie encore de m'avoir donnée l'occasion de m'exprimer sur ce sujet important. Casey Chisick et moi-même répondrons avec plaisir à vos questions.
    Je vous remercie, madame Mitchell.
    Nous allons passer à Andrea Kokonis et Gilles Daigle, de la Société des compositeurs, auteurs et éditeurs de musique. Soyez les bienvenus.

[Français]

    Je m'appelle Andrea Kokonis et je suis chef du service des affaires juridiques de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SOCAN. Je suis accompagnée de Gilles Daigle, un avocat possédant plus de 30 années d'expertise dans le domaine du droit d'auteur.
    La SOCAN est la plus importante société canadienne de droits musicaux, et elle administre les droits d'exécution publique, de communication et de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique. Nous comptons actuellement plus de 160 000 membres et clients au Canada, et nous représentons, de plus, le répertoire d'exécution de toutes les sociétés étrangères et de plusieurs sociétés de droits de reproduction sur le territoire canadien.
    La SOCAN est profondément dévouée à la cause d'une rémunération équitable pour les créateurs de musique canadiens et leurs partenaires d'affaires lorsqu'il est question de l'utilisation de leurs œuvres en vertu d'une protection au Canada qui est en phase avec celle offerte par ses plus importants partenaires commerciaux.
    Le nouvel ALENA présente une nouvelle occasion de mettre en vigueur le changement consistant à porter de 50 à 70 ans la durée de protection après la mort de l'auteur, un changement important et très attendu, et ce, immédiatement. Malgré le fait que l'intention et les mots du nouvel ALENA sont clairs, la prolongation du terme de protection est absente du projet de loi C-4 dans sa forme actuelle.
    Il n'y a aucune raison valable pour que le Canada retarde une fois de plus la prolongation de la durée de protection du droit d'auteur. Nous exhortons donc ce comité de recommander de la manière la plus insistante possible que les modifications nécessaires à la prolongation de cette durée de protection soient immédiatement ajoutées au projet de loi C-4.
    À l'heure actuelle, la durée de protection du droit d'auteur au Canada ne respecte pas les normes internationales en vigueur. Cela signifie que nos membres et tous les créateurs canadiens sont désavantagés par rapport à ceux de nos partenaires commerciaux les plus importants. Une prolongation de cette durée de protection se traduirait par une augmentation des investissements et des activités commerciales axées sur le droit d'auteur du Canada en abolissant les disparités entre le Canada et ses partenaires économiques majeurs.

[Traduction]

    La durée actuelle de la protection des droits d'auteur — la vie de l'auteur plus 50 ans pour les créateurs d'œuvres musicales et autres — ne correspond pas à la législation moderne du droit d'auteur. En 1998, après la ratification de l'ALENA original, les États-Unis ont porté cette protection à la vie de l'auteur plus 70 ans. En 2003, le Mexique l'a, quant à lui, fait passer à la vie de l'auteur plus 100 ans. Dans le cadre de la renégociation de l'ALENA, nous avons demandé des dispositions qui tiennent compte de cette nouvelle réalité et recommandé que la durée minimale de protection des droits d'auteur soit égale à la vie de l'auteur plus 70 ans. Toutes les grandes organisations de l'écosystème musical nord-américain soutenaient notre position.
    Au Canada, la protection des œuvres musicales est égale à la vie de l'auteur plus 50 ans, alors que chez la majorité de ses principaux partenaires commerciaux, la norme générale reconnue est de la vie de l'auteur plus 70 ans au moins. C'est le cas de tous les pays membres de l'Union européenne, du Royaume-Uni, de l'Australie, d'Israël, de la Norvège, de la Suisse, du Pérou, du Brésil, de l'Islande, du Japon et même de la Russie. Le droit canadien actuel ne correspond qu'aux protections minimales établies il y a plus d'un siècle dans la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. L'intention à l'époque était de fixer une durée de protection suffisamment longue pour profiter à deux générations de descendants du créateur de l'œuvre. L'espérance de vie s'allongeant, une durée égale à la vie de l'auteur plus 50 ans ne répond plus à l'intention sous-jacente de ce traité. À l'époque où le Canada a adhéré à la Convention de Berne, en 1928, l'espérance de vie moyenne était de 60 ans. Elle est passée à 81 ans environ entre 2007 et 2009.
    La durée actuelle de la protection prévue par la Loi sur le droit d'auteur ne suffit donc pas pour couvrir deux générations de descendants d'un auteur-compositeur et elle ne répond pas aux objectifs de la Convention de Berne en matière de politique. Comme je le disais, les principaux partenaires commerciaux du Canada en ont pris conscience et y ont remédié. La durée de protection plus courte du Canada est aussi en décalage avec l'importance et la valeur qu'il accorde par ailleurs à la création d'œuvres, au Canada même, dans le cadre de notre patrimoine, et dans le reste du monde, où notre pays compte parmi les chefs de file des exportations culturelles.
    Les auteurs et les compositeurs de musique canadiens, et leurs éditeurs peuvent être désavantagés en tant qu'exportateurs culturels parce que leurs œuvres risquent d'être moins protégées à l'échelle internationale à cause de la durée de protection anachronique du Canada. C'est injuste et très regrettable, car les lois canadiennes ne devraient pas limiter la capacité des créateurs canadiens d'exploiter leurs œuvres dans le monde entier.
(0930)
    Une protection canadienne plus longue permettrait davantage aux éditeurs de musique de réinvestir les recettes tirées de l'exploitation d'œuvres protégées par le droit d'auteur dans la découverte d'auteurs-compositeurs et de compositeurs, dans le soutien à leur apporter et dans le développement de leur carrière. De plus, d'un point de vue multinational, des durées de protection plus longues sur un marché encouragent les entreprises étrangères à investir dans le répertoire sur ce marché. Dans les deux cas, allonger la durée de la protection des droits d'auteurs au Canada renforcerait le réinvestissement intérieur dans le développement et la diversité culturels, ainsi que l'investissement étranger dans les immenses talents locaux canadiens. Rien ne justifie de retarder encore la mise en œuvre de la prolongation. Le gouvernement devrait tenir son engagement dès à présent.
    Quand le projet de loi C-100 a été déposé à la Chambre l'an dernier, puis remplacé par le projet de loi C-4 dans cette législature, la SOCAN et d'autres organisations musicales ont été déçues de voir que, malgré quelques modifications au droit d'auteur prévues dans le projet de loi de mise en œuvre, le texte ne touchait pas à la prolongation de la protection. Il semble que le Canada ait deux ans pour mettre totalement en œuvre l'ACEUM, mais nous sommes convaincus que la prolongation de la durée de la protection était, et reste, un élément essentiel de la renégociation, étant donné les mêmes prolongations adoptées par nos partenaires commerciaux dans leurs lois sur le droit d'auteur respectives.
    En ce moment, la réalité embarrassante est que les auteurs canadiens bénéficient des mêmes protections limitées du droit d'auteur que les créateurs de pays comme l'Iran, le Libéria, le Pakistan, la Syrie, le Zimbabwe, l'Afghanistan, l'Angola et la République populaire démocratique de Corée. Nos membres méritent mieux que cela. Tous les créateurs canadiens méritent mieux que cela.
    La Société canadienne des auteurs compositeurs et éditeurs de musique, la SOCAN, recommande donc que le Canada modifie la Loi sur le droit d'auteur afin de porter la durée de la protection des droits d'auteur pour les œuvres musicales à la vie de l'auteur plus 70 ans, compte tenu des normes internationales actuelles en la matière et de l'intention sous-jacente de la Convention de Berne et d'autres instruments de référence visant à reconnaître la valeur de la propriété intellectuelle. Plus particulièrement, la SOCAN recommande que la durée de base de la protection des droits d'auteur soit augmentée en vertu de l'article 6 de la Loi sur le droit d'auteur, ainsi que des quelques autres dispositions, peu nombreuses, qui doivent être ajoutées.
    Dans le mémoire que nous avons distribué, nous avons également inclus avec les notes préparées le tableau créé par les Éditeurs de Musique au Canada pour montrer les modifications à apporter.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Kokonis.
    Avant de donner la parole aux députés, j'ai reçu une confirmation de l'économiste en chef, Mme Paquet. Elle serait disponible demain de 12 h 45 à 13 h 45. Le Comité est-il d'accord avec cet horaire?
    Des députés: D'accord.
    La présidente. Je vous remercie.
    Nous allons passer à M. Hoback.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    C'est une bonne nouvelle. Nous allons vraiment avoir cette analyse économique.
    Madame la secrétaire parlementaire, pouvons-nous obtenir une copie de l'analyse économique avant qu'elle vienne? Pouvez-vous vérifier si c'est possible?
    Certainement. Comme je l'ai promis la semaine dernière, j'ai demandé à ce qu'on me dise où en est le rapport. J'ai parlé avec des responsables. Je sais qu'ils travaillent d'arrache-pied pour nous le communiquer dès que possible. Je les ai encouragés à venir dès que possible. Il me semble qu'ils étaient censés venir jeudi et, maintenant, ils vont venir mercredi à 12 h 45.
    Je ne dispose que de cinq minutes, alors...
    Cela ne fait pas partie de vos cinq minutes.
    Je suis impatient de le voir. Si nous pouvions le recevoir la veille ou même plus tard cet après-midi, nous pourrions au moins l'examiner ce soir. Je suis certain que c'est un gros document qui demandera donc du temps à parcourir, mais nous ferons de notre mieux. J'espère que nous pourrons le voir.
    Mesdames et messieurs les témoins, je vous remercie de votre présence ce matin.
    Madame Greenwood, nous sommes amis depuis cinq ans, mais généralement, nous nous croisons dans des aéroports. Je n'arrive pas à croire que nous nous voyons ailleurs que dans un aéroport. C'est une blague entre nous, on croirait qu'elle a un siège réservé à l'aéroport d'Ottawa et que le mien est juste à côté du sien.
    Je vais commencer par vous, madame Greenwood. Pouvez-vous nous donner une idée, côté américain, du nombre de fois où M. Lighthizer est en fait allé parler à Nancy Pelosi et aux démocrates avant la renégociation?
(0935)
    Je ne sais pas combien de fois exactement, monsieur Hoback, mais je dirais un bon nombre de fois. Un des éléments sous-estimés de la stratégie de négociation de l'administration Trump est que l'ambassadeur Lighthizer, qui est un véritable défenseur du commerce depuis des années, savait que le sort de cet accord serait entre les mains du parti d'opposition qui contrôle la Chambre des représentants. Il a tout fait pour travailler en coordination avec la présidente de la Chambre et aussi avec les membres du Comité des voies et moyens.
    C'est ce qui est irritant ici. On dit aux gens que nous faisons traîner les choses, ce qui est loin d'être vrai. En fait, j'ai proposé d'avoir une étude préliminaire au printemps dernier. Les libéraux ont refusé. Nous avons proposé de revenir pendant l'été, au besoin. On nous a répondu que ce n'était pas nécessaire. Quand l'accord a été renégocié, nous avons demandé plus de précisions. Nous avons eu droit à une séance d'information. Nous y avons posé des questions, mais nous n'avons pas obtenu de réponses avant janvier. En fait Wayne Easter et moi, nous nous trouvions à une réunion du Conseil des affaires canadiennes-américaines à Ottawa, à laquelle vous y étiez, et nous avons tous deux dit que nous pourrions vous rencontrer en comité plénier en décembre, avant Noël.
    Je m'en souviens.
    Bien entendu, le Parti libéral n'était pas intéressé.
    Le projet de loi sera adopté et je veux que vous sachiez que nous n'allons pas voter contre. Cela dit, et vous le comprendrez aussi, Donald Trump a été élu par les États de la « rust belt » qui se sentaient négligés, qui étaient mis de côté ou auxquels on n'a pas pensé après le dernier ALENA, et je ne veux pas commettre la même erreur. Nous avons reçu quelque 200 mémoires de témoins qui souhaitaient comparaître devant le Comité, et nous proposions d'en avoir terminé le 5 mars au Comité, c'est-à-dire pendant la semaine de relâche, autrement dit, pour un renvoi à la Chambre à la même date que maintenant. Le Parti libéral a dit non, et je comprends pourquoi, parce qu'en examinant le projet de loi, nous voyons l'analyse économique de l'Institut C.D. Howe selon laquelle l'accord coûtera 10 milliards de dollars au Canada. Si on le compare au Partenariat transpacifique (PTP), si nous avions tous accepté ce que voulait le président Obama, la facture se serait élevée à plus de 4 milliards de dollars. Il y a donc beaucoup à absorber.
    Quand on examine cette facture de 10 milliards de dollars, on s'aperçoit que beaucoup de groupes et d'organisations subissent des effets négatifs. Je ne vais pas voter contre le projet de loi et ils le savent, mais ils veulent au moins un plan d'atténuation. Ils veulent savoir ce que l'accord veut dire pour eux et comment le gouvernement va les aider, et c'est tout ce que nous essayons de faire ici. Nous allons donc examiner le projet de loi. J'espère que nous l'étudierons article par article d'ici jeudi et qu'il sera renvoyé à la Chambre, puis au Sénat, mais je précise que je n'ai pas d'influence sur ce qui s'y passe. C'est une autre paire de manches, et bonne chance de ce côté-là.
    Nous avons notamment parlé avant de la clause de minimis et des changements à cette clause, dont le montant passe de 20 $ à 40 $. Je sais que vous auriez probablement préféré qu'il passe à 800 $, mais ce n'est pas le cas. Ensuite, il y a l'exemption de taxe jusqu'à 150 $, mais beaucoup de gens ne savent pas que Postes Canada, principal transporteur au Canada, n'est pas incluse dedans.
    Qu'en pensez-vous et pourquoi Postes Canada ne serait-elle pas incluse et que seules les entreprises de messagerie privées le seraient?
    Monsieur Hoback, je ne connais pas les tenants et les aboutissants en ce qui concerne les différents transporteurs. Vous avez raison de dire que nous étions persuadés qu'il serait logique d'harmoniser les niveaux de minimis des trois pays. Pourquoi? Tout simplement parce qu'il ne nous semblait pas logique de pénaliser les Canadiens qui font du cybercommerce. Quand on pense à toutes les collectivités isolées et à tous les endroits dans un pays aussi vaste que le Canada, aucun détaillant ne peut avoir tous les articles qu'un client pourrait vouloir un jour donné. Nous pensions que ce n'était pas logique de pénaliser les Canadiens dans cette situation et, en fait, le gouvernement perd de l'argent quand il le fait.
    Quant à la raison pour laquelle certains transporteurs ont été inclus et pas d'autres, je ne la connais pas. Je pense que vous devriez poser la question aux négociateurs.
    Très bien. Vous ne pouvez donc pas nous éclairer à ce sujet.
    Je vais passer aux compositeurs, à la SOCAN. Vous parliez des changements au droit d'auteur et vous mentionniez une modification. Vous-mêmes et les Éditeurs de Musique dites que nous devrions essayer de le modifier. Ce n'est toutefois pas possible, à ce que je comprends. Nous ne pouvons pas. Nous n'avons pas le choix, mais nous pouvons noter mentalement de prévoir des pourparlers par la suite. Peut-être même que nous pouvons y réfléchir pendant la mise en œuvre. Peut-être que seule la loi canadienne a besoin d'être modifiée. Il serait donc peut-être bon de renvoyer la question au comité de l'industrie et de suivre cette voie.
    Est-ce que je me trompe?
     Soyons clairs, notre demande ne nécessiterait pas de modifier l'ACEUM. C'est le projet de loi C-4, la loi de mise en œuvre, qui doit être modifié, et nous parlons de modifier les articles 5 à 7 à cinq ou six endroits, voire moins. Il n'y a rien de plus simple. Nous pourrions le faire ici en moins de cinq minutes.
    J'espère que le Comité, tenant compte de cela, fera tout son possible pour changer ces quelques articles. Voilà 30 ans que je suis dans cette industrie et c'est ce dossier qui me donne des cheveux blancs.
(0940)
    Vous en entendez parler depuis 30 ans.
     Et pendant tout le début des années 2000, combien de fois nous a-t-on dit que, dans le cadre du processus de révision permanent du droit d'auteur, on allait prolonger la durée de la protection? Les derniers résultats sont arrivés en 2012, avec des changements importants à la Loi sur le droit d'auteur. La prolongation de la durée de la protection n'en faisait pas partie.
    Je suis désolée, monsieur Hoback, mais votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Dhaliwal.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je tiens également à remercier les témoins de leurs exposés.
    Ma première question s'adresse à Mme Greenwood, à Washington.
    Madame Greenwood, vous avez dit que les entreprises aiment la stabilité. Je viens du monde de la petite entreprise. Je crois savoir que les travailleurs aiment autant la stabilité que les entreprises. En quoi pensez-vous que l'ACEUM aidera non seulement les entreprises, mais aussi les travailleurs de la classe moyenne?
    Madame Greenwood?
    Je crois qu'il y a eu un problème de traduction ou autre chose parce que c'est affiché en français au lieu de... Je crois que c'est la raison du décalage.
    Madame Greenwood, avez-vous entendu la question?
     Madame la présidente, je [Inaudible] français. Je suis désolée.
    Si je pouvais entendre la question en anglais, je répondrais avec plaisir.
    Je crois qu'il y a quelque chose de déréglé dans notre système parce que j'entends le français au lieu de l'anglais, et je ne sais pas pourquoi.
    Recommençons. De toute façon, il ne s'est écoulé qu'une minute et 22 secondes. Nous allons donc recommencer.
    Je suis désolée. C'est ma faute.
    Ce n'est pas votre faute.
    Non, ce n'est pas votre faute. Nous avons eu un petit problème de notre côté.
    Monsieur Dhaliwal, veuillez reprendre.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leurs exposés.
    Ma question est pour vous, madame Greenwood. Vous avez dit que les entreprises aiment la stabilité.
    Je viens du monde de la petite entreprise, étant ingénieur de formation, arpenteur-géomètre, et j'ai travaillé dans l'aménagement du territoire. À ce que je vois, les travailleurs aiment autant la stabilité que les entreprises. Êtes-vous d'accord avec cela?
    La deuxième question sera la suivante: en quoi cet accord aidera-t-il les travailleurs de la classe moyenne et pas seulement les entreprises?
    Tout à fait d'accord.
    À la première question, je réponds que je suis tout à fait d'accord, les travailleurs aiment autant la stabilité que les propriétaires d'entreprise. Nous devons tous trouver le moyen d'équilibrer nos comptes. Nous devons trouver le moyen de payer nos factures, de payer le collège de nos enfants et, aux États-Unis, de payer les soins de santé. Assurément, il est essentiel pour tout le monde, pour toutes les familles — ouvriers, éleveurs, agriculteurs, et j'en passe —, d'être capable de prévoir qu'on pourra tenir jusqu'à la fin du mois et payer les factures.
    Pour ce qui est des avantages pour les travailleurs, en plus des propriétaires d'entreprise, il est intéressant de noter que pour la première fois de l'histoire moderne, l'AFL-CIO, principale confédération syndicale américaine, s'est prononcée en faveur de l'ACEUM, le nouvel ALENA. Je souligne aussi que des représentants des travailleurs au Canada, dont M. Jerry Dias, y sont très favorables depuis le début.
    Pour les gros constructeurs automobiles, qui représentent une part importante de l'économie canadienne, américaine et mexicaine, comme pour les magasins familiaux, il y a un avantage, absolument, non seulement à savoir quelle est la réglementation, mais aussi à savoir comment régler un différend, le cas échéant, ce qui figure aussi dans cet accord — à l'insistance du Canada, je dois le dire. Mais c'est le fait de savoir combien coûteront les intrants et qu'on pourra continuer de faire ce qu'on fait à la fin de chaque mois.
(0945)
    Je vous remercie.
    Ma prochaine question est pour M. Milliard. Vous avez dit que les PME ne profitent pas pleinement de tous les accords et qu'elles doivent être informées de leurs avantages. Pourriez-vous préciser ce que le gouvernement devrait faire et ce que vous, en tant qu'organisation représentant des petites entreprises, devriez faire pour que les petites et moyennes entreprises profitent pleinement de l'ACEUM?

[Français]

    Effectivement, pour les PME et les entreprises au Québec, les États-Unis sont souvent la première destination d’exportation. On sait que les deux tiers des exportations du Québec se font vers les États-Unis. Il est donc très important que toutes les PME, et pas seulement les grandes entreprises sophistiquées, puissent également en profiter.
    Pour ce faire, nous proposons qu’il y ait un meilleur accompagnement pour les aider à comprendre les occasions d’affaires, parce que souvent elles ne savent pas dans quelles parties du pays il se présente des occasions d’affaires. Nous proposons aussi un accompagnement financier pour les aider à faire des démarches dans de nouveaux marchés, démarches qui se font souvent pour la première fois.

[Traduction]

    Je vous remercie
    Ma prochaine question s'adresse aux éditeurs de musique. À ma connaissance, l'ACEUM est un accord qui protège les communautés culturelles dans tout le Québec et la Colombie-Britannique. Pourriez-vous en dire plus? Êtes-vous d'accord avec cela?
     En ce qui concerne la question qui nous préoccupe en particulier, à savoir, avant toute chose, la prolongation de la durée de la protection, l'ACEUM les protège, mais pas la loi de mise en œuvre, le projet de loi C-4, ou du moins pas dans sa version actuelle. Il est inacceptable pour nos membres d'avoir à attendre peut-être jusqu'à deux ans et demi parce que, comme je n'ai pas besoin de vous le dire, en politique et au gouvernement, il peut se passer beaucoup de choses qui pourraient changer cette obligation.
    Dans une réponse à M. Hoback, j'ai commencé à parler du fait qu'on nous a si souvent dit que la prolongation allait être mise en œuvre. En 2012, ce n'est pas arrivé. Dans le cas du PTP, la prolongation était prévue dans la version préliminaire du texte. Le Canada l'en a retirée. Nous passons maintenant au nouvel ALENA. C'est prévu par l'ACEUM, mais pas pour tout de suite. Il faudra jusqu'à deux ans et demi pour la mettre en œuvre. Pourquoi?
    Ce que cela dit à nos membres et à Mme Mitchell en tant qu'éditrice, c'est que leur musique ne vaut pas la peine d'être protégée plus longtemps, comme celle de leurs pairs. Aux États-Unis, les œuvres de Bruce Springsteen sont protégées pendant 70 ans. Celles de Bryan Adams et de Jim Vallance le sont pendant 50 ans. Au Canada, nous ne sommes pas prêts à apporter ce changement aujourd'hui. Nous verrons si nous sommes capables de l'apporter dans les deux ans et demi à venir. Ce n'est plus suffisant pour nos membres. On nous l'a trop souvent dit. Je suis certain que Mme Mitrchell, en tant qu'éditrice, aurait probablement quelque chose à dire aussi à ce sujet.
    Je vous remercie, monsieur Daigle.
    Monsieur Savart-Tremblay.

[Français]

     Je remercie encore une fois l'ensemble des intervenants de leurs exposés toujours diversifiés et pertinents.
    Ma question s'adressera aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je pense que le portrait qu'ils ont brossé rejoint celui du Bloc québécois jusqu'à maintenant. Nous sommes loin d'être contre le libre-échange, mais l'Accord, dans sa forme actuelle, comporte des irritants.
    Vous avez bien expliqué que dans cet accord, contrairement à ce qui a été affirmé à de multiples reprises, l'aluminium n'avait pas droit au même traitement que l'acier et que l'aluminium se trouve essentiellement au Québec, contrairement à l'acier, qui est essentiellement en Ontario.
    Par ailleurs, vous avez aussi parlé de la gestion de l'offre, qui a été mise à mal dans les négociations, comme dans tant d'autres négociations par le passé. Vous avez aussi abordé la nécessité de compensations rapides et à la hauteur. J'ai donc envie de vous poser une question, puisque vous avez quand même appuyé la ratification éventuelle de l'Accord.
    Hier, nous avons reçu les représentants des Producteurs laitiers du Canada. Je leur ai demandé quel serait le bon délai pour la ratification, et ils m'ont dit que cela ne devrait pas être fait avant le 1er mai, pour respecter le délai d'entrée en vigueur de trois mois, ce qui nous mènerait au 1er août, date de début de l'année financière du secteur laitier.
    Y a-t-il une date que vous auriez tendance à privilégier, ou croyez-vous aussi qu'il y a urgence?
(0950)
    Vous avez bien résumé nos propos. Effectivement, ce n'est pas un accord idéal, mais c'est le meilleur accord que nous pouvions avoir. Il est important de le ratifier le plus rapidement possible, dans les meilleurs délais, pour assurer la fin de l'incertitude qui sévit en ce moment, en mettant en place, bien sûr, les compensations nécessaires pour les secteurs touchés, notamment celui de l'aluminium et ceux assujettis à la gestion de l'offre.
    J'aimerais renchérir en vous demandant ce que signifie pour vous « le plus rapidement possible ».
    Il s'agit de ce qui est permis dans le cadre du processus législatif en cours. Je pense que le sentiment d'urgence concerne les mesures compensatoires. Nous avons mentionné que, dans le cadre des autres accords, les mesures se sont fait attendre, et les paiements, encore plus. Il y a donc un sentiment d'urgence quant à la mise en oeuvre de ce plan d'action. Quant à la ratification, cela dépend un peu du rythme de votre travail.
     Croyez bien que nous essayons de faire de notre mieux. Nous y consacrons 40 heures cette semaine et nous y avons passé environ 30 heures la semaine dernière. Toutes les autres activités possibles ont été mises de côté.
    Par ailleurs, vous avez parlé de la nécessité d'offrir de l'information aux PME, principalement. Quelle forme cela pourrait-il prendre? Quel serait le canal de communication?
    Comme vous le savez, nous avons des délégués commerciaux au Québec et au Canada. Au Québec, nous avons renforcé le rôle de ces délégués dans le monde pour leur donner une vocation et une mission de plus en plus économiques. Nous croyons que cela, c'est vraiment une façon de rejoindre les entreprises pour les aider à mieux connaître les possibilités à partir des traités de libre-échange.
    Quand vous parlez de délégués auxquels on a accordé une fonction de plus en plus économique, j'aimerais être certain de comprendre à qui vous référez.
    Je parle des délégués dans les différentes villes dans le monde.
    Vous pensez à ceux des délégations du Québec à l'étranger.
    Exactement.
    Parfait. Je vois.
    J'aimerais poser la même question à Mme Greenwood.
    Vous disiez qu'il fallait faire les choses de manière très rapide, dans les plus brefs délais, et que cela ne devrait pas être remis en question. Ne pensez-vous pas, au contraire, qu'il faut parfois donner du temps au temps pour que les secteurs et les couches les moins favorisés par l'Accord aient au moins le temps de s'adapter?

[Traduction]

    Il est important de saisir l'occasion de ratifier. Je n'ai pas de point de vue particulier sur les mesures d'adaptation qui seront prises pour les secteurs touchés et sur la forme qu'elles devraient prendre dans chacun des trois pays, mais je comprends leur importance.
    Ce que je disais concernait le processus législatif au niveau fédéral, compte tenu du fait que le Mexique a déjà entamé leur processus et que les États-Unis ont terminé le leur. Je crains que nous laissions passer une opportunité en ne ratifiant pas l'accord. Je comprends votre argument, et il est important, sur les conséquences sectorielles, et ce n'est pas de cela que je parle.

[Français]

    Je m'avoue un peu surpris de votre réponse, dans la mesure où vous nous dites que cela presse, qu'il faut absolument aller de l'avant et qu'aucune question ne doit être soulevée à ce sujet. En même temps, vous nous dites que vous ne vous êtes pas penchée sur la question des compensations et des manières de corriger certains excès de l'Accord.
    Je dois dire que votre réponse m'étonne au plus haut point.
(0955)

[Traduction]

    L'accord a été négocié pendant près d'une année, et il y a eu beaucoup d'échanges entre les trois pays. Pour un accord commercial, la négociation a été assez rapide, mais maintenant que nous sommes à la fin de ce processus, la période de négociation est vraiment terminée.
    Je n'ai pas d'avis, et je ne sais pas quelles devraient être les compensations, les mesures d'adaptation ou la période de mise en œuvre progressive pour un secteur ou un autre au Canada. Je ne dis pas que ce n'est pas important, mais simplement que ce n'est pas mon domaine de compétence. Je parle seulement du projet de loi et de la négociation de l'accord commercial même.
    Monsieur Blaikie.
    Madame Greenwood, dans vos observations préliminaires, vous avez parlé de l'interaction entre le pouvoir exécutif et le Congrès aux États-Unis, et de son incidence sur cet accord en particulier.
    Vous savez peut-être, connaissant le processus commercial au Canada, qu'il n'y a guère d'interaction entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Les députés du NPD travaillent dans ce processus pour créer un semblant d'interaction, car nous pensons que ce serait dans l'intérêt des Canadiens.
    Pourriez-vous parler un peu plus de cette interaction? Quelles obligations le pouvoir exécutif a-t-il envers le Congrès en ce qui concerne les accords commerciaux? Comment cela se passe-t-il, selon vous, pas nécessairement à propos de cet accord, mais si vous avez des réflexions sur d'autres cas où l'interaction s'est révélée productive?
    Certainement. Merci de votre question.
    Ce que je remarque d'emblée, c'est la différence entre notre démocratie constitutionnelle et votre démocratie parlementaire. Elles sont très différentes.
    Aux États-Unis, le système se divise en deux pouvoirs séparés qui sont vraiment différents. Les pères fondateurs l'ont conçu de sorte qu'ils soient très jaloux l'un de l'autre, et ils ont des prérogatives différentes. Les États sont venus en premier dans notre système. Ensuite, à la formation du gouvernement fédéral, historiquement, le Congrès a été créé comme contrepoids au pouvoir exécutif, et il faut véritablement l'accord des deux pour accomplir quoi que ce soit.
    Comme vous le savez bien mieux que moi, le régime parlementaire est une tout autre réalité. Il est différent selon que le gouvernement est majoritaire ou minoritaire. Je ne suis pas spécialiste du régime parlementaire, et je ne voudrais pas me prononcer sur le degré d'interaction approprié entre les parties.
    Ce que je dirais, c'est que, dans notre système, même lorsque vous avez le même parti à la Maison-Blanche et à la tête du Congrès, les pouvoirs restent séparés et ils doivent négocier entre eux. C'est une tradition de longue date ici. L'administration Trump savait donc qu'elle devrait négocier avec le Congrès parce qu'il en est ainsi depuis la naissance de notre démocratie.
    Voilà qui est bien dit. Je vous remercie d'avoir pris le temps de nous faire part de ces réflexions.
    J'aimerais poser une question à nos amis du secteur de l'édition. J'entends certainement vos arguments, haut et clair, en ce qui concerne la prolongation de la durée de la protection. De toute évidence, il est frustrant qu'elle ne soit pas intervenue plus tôt. Il est vraisemblable que le gouvernement n'agit pas par malveillance à l'égard de votre secteur. À votre avis, qui gagne à ce qu'on tarde à mettre en œuvre la prolongation de la durée de la protection?
    Je crois que nous allons laisser nos collègues de Toronto répondre à votre question. Ils essaient d'entrer dans la mêlée, mais c'est difficile.
    Très bien, ça me va.
    Qui, selon moi, bénéficie du retard à prolonger la durée du droit d'auteur? Honnêtement, je ne pense pas que quiconque en bénéficie. Les auteurs eux-mêmes, bien entendu, n'en bénéficient pas parce que si on prolonge la durée du droit d'auteur on se trouve à prolonger la période pendant laquelle on peut percevoir des redevances sur les chansons à succès et les chansons qui sont publiées depuis de nombreuses années. Nous réinvestissons ces revenus chez les auteurs.
    Par exemple, lorsque je trouve des auteurs, ces derniers ne se contentent pas de rester à la maison et d'écrire des chansons. Pour qu'ils aient du succès, il faut que je les envoie un peu partout dans le monde pour qu'ils écrivent avec d'autres auteurs — ce que l'on appelle la co-écriture — et c'est très onéreux. Nous devons mettre en place ces relations pour qu'ils puissent écrire des chansons qui seront par la suite enregistrées par des artistes qui produisent des revenus.
    Mon incapacité de pouvoir faire cela entraînerait immanquablement des répercussions sur leur possibilité de faire une carrière. Cela signifierait également moins de contenu canadien, aussi je ne pense pas que cela bénéficie au grand public non plus.
(1000)
    Dois-je comprendre, d'après ce que vous dites, que les gouvernements canadiens successifs, toutes allégeances politiques confondues, refusent avec entêtement d'adopter la prolongation du droit d'auteur, et que personne ne réclame à ce sujet?
    Je ne sais pas si je le dirais de cette manière, mais nous avons accepté dans le cadre de certaines conventions, comme la Convention de Berne, d'harmoniser la durée de protection avec celle qui est accordée par nos partenaires commerciaux internationaux. Je suis convaincue qu'il y a un tas de raisons pour lesquelles on a décidé de ne pas aller de l'avant, y compris le fait que le droit d'auteur est un sujet compliqué. Assurément, c'est une chose qui aurait dû être faite. Maintenant que nous avons accepté les dispositions à ce sujet, nous aimerions qu'elles soient mises en œuvre dès maintenant, et ne pas attendre encore 30 mois.
     Si je puis me permettre, le monde universitaire en particulier a émis des critiques à ce sujet, et on s'inquiète au sujet de l'importance de la robustesse du domaine public. Le problème avec cet argument, c'est que l'on dispose de très peu de preuves en pratique que la prolongation du droit d'auteur entraînera des répercussions économiques ou autres nettes négatives pour la créativité dans le domaine public.
    Il faut également tenir compte d'une considération très pratique, à savoir qu'en réalité, ce qui se produit, c'est que des entités commerciales de tierce partie finissent par tirer avantage d'œuvres qui tombent dans le domaine public. L'exemple le plus récent au Canada auquel je pense est lorsqu'une maison de disques a commencé à publier des reprises d'enregistrements du domaine public pour son propre bénéfice, sans accorder d'avantages aux artistes les ayant enregistrés ni aux entités ayant financé à l'origine ces enregistrements. Il est très difficile de déterminer qui profite du refus du gouvernement depuis de nombreuses années de suivre l'exemple et de ses partenaires commerciaux internationaux et de se joindre à eux en adoptant la prolongation de la durée du droit d'auteur.
    Mme Jennifer Mitchell: J'aimerais aussi ajouter que...
    Je suis désolée, mais je dois vous interrompre. Je vais céder la parole au député suivant. Merci beaucoup.
    Je vous en prie, monsieur Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence.
    Je voulais tout d'abord remercier Mme Greenwood. Lorsque ces négociations ont débuté, nous savions tous que les échéanciers étaient très serrés. Chaque fois que nous descendions aux États-Unis, vous avez toujours réagi très rapidement pour réunir les bonnes personnes afin que nous puissions nous renseigner, et je tiens à vous remercier chaleureusement de l'avoir fait.
    Vous avez mentionné dans votre déclaration que les entreprises aiment la certitude. Nous ne pouvons qu'abonder dans le même sens. Nous savons que l'on a fait une sorte de campagne aux États-Unis pour dire que les conservateurs allaient tenter de freiner la ratification de cet accord; mais je vous l'affirme très clairement: c'est faux. Nous essayons plutôt de faire preuve de toute la diligence nécessaire.
    Ce fut une grande source de frustration pour nous, dans ce comité. M. Hoback souhaitait effectuer une étude préliminaire de la question, le printemps dernier, avant les élections. Mais nous avons été incapables de le faire. Nous savions que la Commission de commerce internationale des États-Unis avait sorti des chiffres selon lesquels cet accord aurait un impact positif net pour les Américains, et qu'il se chiffrerait aux alentours de 68,2 milliards de dollars.
     Nous tentions seulement d'obtenir des perspectives canadiennes à ce sujet. On nous a dit avant les élections que c'était un accord sans perdant. On nous a dit que ce serait une victoire pour les Canadiens, un résultat positif. Nous avons demandé à la ministre et elle s'est montrée très peu coopérative et n'a communiqué aucun renseignement. Vendredi dernier, l'Institut C.D. Howe a présenté un rapport selon lequel la ratification de l'accord entraînerait des pertes de 10 milliards pour le PIB du Canada. Toujours selon le rapport, même si nous subissons des pertes économiques, l'absence d'accord serait encore pire, par conséquent, nous sommes d'accord avec vous qu'il faut adopter cet accord, et s'en servir comme point de départ.
    Je me demandais si le Conseil des affaires canado-américaines disposait d'une analyse économique indépendante que vous pourriez transmettre au Comité. Comme vous venez de l'entendre, nous n'obtiendrons l'optique canadienne que demain, et nous prévoyons effectuer l'étude article par article d'ici la fin de la semaine.
    Auriez-vous de la documentation à nous communiquer, même aujourd'hui, ou d'ici quelques jours, pour éclairer notre lanterne?
    J'aimerais bien avoir une armée d'économistes à mettre à votre disposition sur cette question. Mais nous sommes une organisation qui pratique le régime minceur. Ceci dit, nos membres ont réalisé une analyse de la question l'an dernier. Nous nous ferons un plaisir de vous la transmettre, ou encore, je suis sûre que le Comité peut se procurer lui-même ces renseignements auprès des économistes en chef des diverses banques canadiennes, par exemple, qui se sont toutes penchées sur le sujet.
    Je pense qu'il est important de faire vos devoirs, mais je trouve aussi que parfois les gens utilisent les statistiques hors contexte. Comme vous l'avez vous-même fait remarquer, il faut considérer l'ensemble de la situation et quelle serait alternative. Il ne faut pas analyser la situation dans l'abstrait. Il faut savoir qu'il y a soit le statu quo, soit le nouvel accord, mais si vous ne le ratifiez pas, que se passera-t-il ensuite? Quelles en seraient les répercussions? Nous entrons dans le domaine de la spéculation. Des groupes de réflexion se sont penchés sur la négociation de l'accord en question, mais les seuls renseignements dont je dispose sont ceux que pourraient me fournir nos membres. Soyez sûrs que nous nous ferons un plaisir de les transmettre à quiconque. Les économistes de la banque TD, de la RBC et de la CIBC seraient les économistes canadiens pertinents pour ce qui vous occupe.
(1005)
    C'est très bien, et si vous pouviez nous transmettre ces renseignements, ce serait formidable.
    Je sais que vous avez tenu des conversations et je sais aussi que vous étiez très favorables à la version initiale du PTP. C'est l'une des frustrations que l'on ressent en regardant l'analyse du point de vue canadien. Nous nous attendions à un résultat positif net, de plus de 4,3 milliards de dollars pour notre PIB, et maintenant la seule perspective canadienne dont nous disposons chiffre le résultat à un impact négatif net de 10 milliards de dollars! C'est un peu frustrant pour nous.
    Nous ferons preuve de toute la diligence nécessaire, mais nous voulons nous assurer que pour les familles, les entreprises et les secteurs canadiens qui seront touchés de façon négative, le gouvernement mettra en place des programmes et des mesures de soutien pour les aider à passer au travers de la mise en œuvre de cet accord.
    Merci pour cela, et pour votre appui soutenu.
     Je voulais également parler avec la SOCAN, parce que laministre est venue nous dire qu'elle avait abondamment consulté tous les différents secteurs...
    Essayez de ne pas poser une trop longue question, monsieur Carrie.
    Essentiellement, des représentants de l'industrie laitière et du secteur pharmaceutique nous ont déclaré que l'on n'a pas tenu compte de leurs observations dans l'accord qui a été officialisé.
    Pourriez-vous nous dire si le gouvernement vous a écouté et si vos recommandations ont été prises en compte dans l'accord?
    Essayez de répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Ils nous ont écoutés, mais ils ne souhaitaient pas entendre ce que nous avions à dire.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à Mme Bendayan.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie tous d'être ici.
    Ma question s'adresse à la Fédération des chambres de commerce du Québec.
    Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de votre appui et de votre demande de ratifier l'Accord au plus vite. Comme vous le savez, les échanges commerciaux entre le Québec et les États-Unis sont extrêmement importants. D'ailleurs, ils dépassent les 90 milliards de dollars. Comme vous l'avez si bien dit dans votre présentation, il faut accompagner nos entrepreneurs pour les aider à connaître les possibilités en vertu de nos ententes commerciales.
    Nous avons bonifié le rôle de nos délégués commerciaux, et je précise qu'il s'agit bien des délégués commerciaux du gouvernement fédéral, présents dans plus 160 villes du monde, qui se font un devoir d'aider nos PME à s'orienter vers les marchés internationaux. Nous avons également Développement économique Canada pour les régions du Québec, le DEC, qui offre un financement et un accompagnement très spécialisé et personnalisé à nos entrepreneurs avec une attention axée sur nos petites entreprises. Il y a également Exportation et développement Canada, ou EDC, ainsi que CanExport, qui sont là pour accompagner nos PME.
    J'aimerais avoir votre opinion, ainsi que celle de vos membres, sur toutes ces initiatives et sur la façon dont nous pourrions les bonifier.
    Vous avez raison de souligner toutes ces instances. Ces gens font un très bon travail.
    Par ailleurs, ce que nos membres nous disent est relatif au traité avec l'Union européenne. Ce que les entreprises constatent, c'est que la France est beaucoup plus présente au Québec que les entreprises du Québec ne le sont en France. Je donne cela à titre d'exemple. Cela démontre encore une fois que, malgré tout ce qui est en place, il y a encore plus à faire pour s'assurer que les entreprises du Québec, entre autres, tirent profit d'une relation avec la France, par exemple, relation qui est très naturelle et, évidemment, avec les États-Unis, qui est le premier choix des entreprises, surtout dans le Nord et le Nord-Est des États-Unis. Toutefois, souvent, les PME ne connaissent pas les possibilités, et elles n'ont pas forcément le financement nécessaire pour procéder à des exportations. Avec tous les mécanismes qui sont en place, il faut donc faire encore mieux et plus.
(1010)
    Merci beaucoup, madame Megyery.

[Traduction]

    Madame Greenwood, mon collègue a mentionné certaines recherches effectuées par le secteur privé; j'ai pris connaissance de ces recherches, de même que d'autres, tout comme je pense que vous l'avez fait vous-même. D'importantes recherches menées par le secteur privé montrent les répercussions potentielles qu'aurait pu avoir le retrait des États-Unis de l'Accord de libre-échange nord-américain. Comme vous l'avez mentionné au début de votre témoignage, cette possibilité était bien réelle au début des négociations.
    Je cite ici la Banque Scotia qui a déclaré qu'un retrait des États-Unis de l'ALENA aurait créé une situation dans laquelle « l'économie canadienne connaîtrait de fortes possibilités de tomber en récession ». La Banque royale du Canada a réagi de la même manière et agité la sonnette d'alarme.
    Les recherches me semblent indiquer clairement que la préservation de l'accord de libre-échange avec notre plus important partenaire commercial ne saurait être sous-estimée. Je me demandais si vous auriez des commentaires à ce sujet.
    Je suis entièrement d'accord avec vous.
    La question est de savoir, quels sont les scénarios possibles? En tant que décideurs vous avez raison de vous pencher sur la question. Il ne s'agit pas seulement de dire que nous préférons le nouvel accord, ou que nous l'aimons moins que le précédent. La question est de savoir ce qui se passera si on ne ratifie pas cet accord que vous avez négocié durant toute l'année dernière. Que feront les États-Unis dans ce cas? Et que fera le Mexique?
    Vous avez raison de dire que la situation actuelle est très instable. Vous ne pouvez vous permettre de sous-estimer les mesures de rétorsion que l'actuel locataire du bureau ovale pourrait décider de prendre, peu importe les dommages qu'il infligerait aux États-Unis ce faisant, dans le but de faire pression sur nos partenaires et nos alliés ou de les punir.
    Il s'agit des plus importantes relations économiques au monde, et elles pèsent dans la balance, croyez-moi, avec cet accord.
    Du point de vue des États-Unis, voici comment les décideurs voient la situation: si nous ne parvenons pas à une entente avec le Canada et le Mexique, nos voisins et proches alliés, comment allons-nous négocier avec le reste du monde? Quand l'économie américaine va bien, l'économie de nos voisins et amis va bien.
    Nous sommes vraiment interreliés. Il y a d'énormes intérêts en jeu dans cet accord, il s'agit de notre prospérité commune.
    Merci beaucoup, madame Greenwood.
    Nous allons maintenant passer à M. Kram.
    Merci à tous les témoins qui sont présents ici aujourd'hui.
    Madame Greenwood, j'aimerais revenir sur certaines préoccupations que vous avez exprimées dans votre déclaration préliminaire. J'ai entièrement confiance que la Chambre des communes va ratifier le nouvel ALENA. Vous sembliez en douter dans votre déclaration. Il est certain que les conservateurs, et que les autres partis aussi, vont appuyer cet accord.
    Vous avez également souligné l'importance de la certitude dans les marchés pour que les entreprises puissent fonctionner. Le nouvel ALENA a une durée de 16 ans avant d'arriver à expiration.
    Que pourraient faire le gouvernement du Canada et les politiciens avant l'expiration de cet accord dans 16 ans pour faciliter un plus grand degré de certitude dans les marchés afin que les entreprises puissent se concentrer sur le commerce?
    Institutionnaliser nos accords autant que nous le pouvons est la clé pour prolonger la durée de l'accord. Approfondir certains aspects, comme la reconnaissance mutuelle sur le plan réglementaire, tous les détails entourant la manière dont nous collaborons, la manière dont nos organismes de réglementation travaillent ensemble ou à contre-courant, voilà le genre de choses qui contribueront à ce que l'accord se poursuive longtemps après la date d'expiration.
    Pourriez-vous nous parler un peu des relations, des échanges entre le monde des affaires et le gouvernement? Devrions-nous tenir des réunions plus fréquemment? Que pourrions-nous faire pour faciliter les choses?
    Nous estimons que le dialogue avec toutes les parties prenantes et les électeurs, y compris le monde des affaires, les travailleurs et les défenseurs des intérêts de tous les milieux est une bonne pratique dans une démocratie, et nous essayons de le faciliter, comme nombre d'entre vous ont pu le constater.
    En effet, tenir un honnête dialogue au cours duquel échanger des idées et des préoccupations les uns avec les autres est vraiment important. En passant, nous estimons que cela ne concerne pas seulement les représentants élus et leur personnel, mais aussi les fonctionnaires, les échanges entre les fonctionnaires de nos trois pays respectifs, pour déterminer dans quels secteurs ils peuvent apprendre les uns des autres et reconnaître la réglementation des autres. On constate un énorme espace de coopération qui, dans certains domaines, se déroule bien, tandis que dans certains autres, il y aurait beaucoup de travail à faire.
(1015)
    Vous avez également évoqué la possibilité que Bernie Sanders devienne le prochain président, après novembre. Quel conseil donneriez-vous au gouvernement du Canada pour faciliter le libre-échange et le commerce transfrontalier dans l'éventualité où Bernie Sanders occuperait la Maison-Blanche en novembre?
    Le gouvernement du Canada — et pas seulement le gouvernement, mais tout le Canada, le Canada en tant que pays — a accompli un travail extraordinaire après l'élection du président Trump, une chose que personne n'avait prévue, selon moi, même pas Donald Trump.
    L'approche pancanadienne face à l'engagement des États-Unis pour rappeler à toutes sortes de gens, tant ceux qui gravitent dans les sphères fermées du pouvoir américain que ceux qui se situent en dehors de ces sphères, à quel point nous sommes unis, a été un très bel effort. Nous avons oublié la partisanerie. Ce n'était pas seulement les leaders du gouvernement fédéral. Les premiers ministres des provinces et les maires ont aussi mis l'épaule à la roue. Ce fut un effort général pour rappeler aux Américains que nous sommes unis face à l'adversité et que l'on ne peut pas simplement tourner le dos au Canada.
    Ce type d'effort intensif pour rafraîchir continuellement la mémoire des Américains est une chose que nous faisons au Conseil des affaires canado-américaines, mais c'est également une chose incroyablement importante pour vous, en tant que décideurs, lors de vos déplacements et de vos interactions avec vos homologues.
    J'imagine que ce genre d'effort se poursuivra peu importe le résultat des élections présidentielles américaines, cette année.
    Merci.
    Madame la présidente, combien me reste-t-il de temps.
    Il vous reste 30 secondes.
    Je serai bref. J'aimerais poser une question aux représentants du Québec.
    Vous avez soulevé la question du dumping de l'aluminium en provenance du Mexique. Pourriez-vous nous brosser rapidement le tableau des astuces qui sont déployées pour faire entrer l'aluminium chinois sur les marchés canadiens et américains en passant par le Mexique?
    Essayez de fournir une réponse très brève à une question difficile.

[Français]

     Je n’ai pas entièrement compris votre question, mais nous nous sommes aperçus qu'entre mai et juillet 2019, le Mexique avait obtenu son aluminium directement de la Chine. Malheureusement, la nouvelle entente n’a pas corrigé cela. Cela a été corrigé en ce qui concerne l’acier, mais le gouvernement canadien va devoir vérifier ce qui se passe, parce que nous avons constaté que cela augmentait. Les importations d'aluminium chinois aux États-Unis ont diminué de 60 %, alors qu'au Mexique, elles ont augmenté de 240 % en quelques mois. Nous voyons que c’est vraiment une brèche que le Mexique exploite...

[Traduction]

    Je suis désolée, monsieur. Je dois vous interrompre. Merci beaucoup.
    Monsieur Arya.
    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à Mme Greenwood.
    Madame Greenwood, avant ce nouvel ALENA, nous avons eu le précédent pendant des décennies, mais le commerce entre le Canada et les États-Unis n'a pas vraiment augmenté. Il est demeuré assez stable. Pour vous citer quelques chiffres, en 2011, les exportations canadiennes se chiffraient à 315 milliards de dollars, et en 2019, elles se situaient à environ 319 milliards de dollars; donc, on peut dire qu'essentiellement les exportations canadiennes vers les États-Unis sont demeurées stables. Les exportations américaines à destination du Canada sont elles aussi demeurées stables, entre 281 milliards de dollars et 291 milliards de dollars. Même avec ce nouvel accord, entrevoyez-vous des changements radicaux dans les échanges commerciaux?
    Si vous regardez les chiffres pour établir si l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis a eu une incidence sur le volume des échanges commerciaux, et la même chose par la suite pour l'ALENA, je pense que vous devriez revenir en arrière jusqu'en 1965, l'année du Pacte de l'automobile, et examiner comment le libre-échange entre nos deux pays — et plus tard, lorsque le Mexique s'est ajouté — a créé ce qui est réellement la région économique la plus vaste et la plus prospère du monde.
    Une fois que vous avez enregistré la croissance énorme...
(1020)
    Je comprends. Il est vrai que cela crée une zone économique très stable, probablement la plus vaste du monde. Je comprends cela, mais ces accords n'ont pas accru les échanges commerciaux entre ces trois pays.
    Êtes-vous en train de dire que vous ne croyez pas que l'Accord de libre-échange nord-américain a accru les échanges commerciaux entre ces trois pays?
    Exactement. Les échanges commerciaux sont demeurés stables depuis un bon bout de temps.
    Eh bien, je pense que l'accord lui-même a en réalité stimulé les échanges commerciaux considérablement. Selon moi, avec l'accord modernisé, ce qu'il faut regarder ce sont les flux de données transfrontaliers, les services professionnels et une partie du monde numérique. Il y a tout un éventail de domaines dans lesquels, si on n'avait pas modernisé l'accord, on aurait constaté un recul, parce que l'ALENA d'origine ne prévoyait pas certains des éléments les plus modernes de l'économie.
    Nous savons qu'une concurrence effrénée s'est déclenchée...
    Je suis désolé. Vous avez mentionné que l'accord ne prévoyait pas certains éléments modernes de l'économie. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Certainement. Lorsque le premier Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis a été ratifié, et plus tard, lorsque l'Accord de libre-échange nord-américain a été ratifié lui aussi, le commerce électronique n'existait pas. Aujourd'hui, le commerce électronique alimente une grande part de notre économie, et bon nombre d'éléments différents relatifs à la manière dont les petites et les grandes entreprises exercent leurs activités et font des affaires ensemble.
    Le premier ALENA ne comportait aucune disposition à cet effet. Je veux parler de choses comme la manière de gérer les données, un sujet vraiment important. C'est important dans bon nombre de domaines qui font l'objet, j'en suis persuadée, d'examens du point de vue de la protection de la vie privée. Il existe tout un éventail d'éléments différents relatifs aux données, mais le nouvel ALENA tient compte d'éléments comme les flux de données et la localisation des données, et c'est extrêmement important dans l'économie d'aujourd'hui.
    Merci.
    Ma prochaine question est pour vous, monsieur Milliard. Vous avez beaucoup parlé du secteur de l'aluminium et de la nécessité d'accorder plus de protection à l'industrie de l'aluminium, ici au Canada. Toutefois, le secteur de l'aluminium n'a pas connu de croissance depuis un bon bout de temps. Si je ne m'abuse, au cours des 15 dernières années, une seule nouvelle fonderie s'est ajoutée au Canada.
     Compte tenu de la stabilité du marché, prévoyez-vous que le secteur de l'aluminium accroîtra ses investissements et sa capacité, non seulement pour répondre aux besoins du marché nord-américain, mais aussi à ceux d'autres marchés ailleurs dans le monde?

[Français]

     C'est une bonne question.
    Cependant, on se préoccupe de plus des émissions de GES, et cela va se poursuivre au cours des prochaines années. Le marché québécois, particulièrement celui de l'aluminium, est en train de développer des technologies pour faire un aluminium presque carboneutre. Cela pourrait donc faire en sorte d'augmenter...

[Traduction]

    Excusez-moi, mais vous ne répondez pas à ma question.
    Il vous reste 10 secondes.
    Je vais laisser tomber mes 10 secondes.
    Je m'adresse à notre invité, vous n'avez pas beaucoup de temps, mais aimeriez-vous compléter votre réponse à la question de M. Arya?

[Français]

     Je disais que l'attractivité de l'aluminium québécois va augmenter parce qu'il s'agit d'aluminium propre. Compte tenu de la crise climatique, je crois qu'il sera de plus en plus intéressant à vendre sur les marchés.

[Traduction]

    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

    Ma question s'adresse encore aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Tant qu'à recevoir des gens du Québec, autant en profiter.
    Je salue M. Lyonnais, que je connais depuis des années. J'espère qu'il va bien.
    Vous avez dit tout à l'heure que cet accord n'était pas parfait, mais que c'était un moindre mal dans les circonstances. Cet accord comporte beaucoup de nouvelles intentions, entre autres un chapitre sur l'environnement, mais ce dernier a très peu de mordant. On sait que l'environnement est à plusieurs égards la question de l'heure.
    Seriez-vous prêts à dire que c'est un accord qui, malheureusement, ne correspond pas aux standards de ce que devrait être un accord en 2020?
    C'est une bonne question. Nous avons sondé nos membres au sujet de cet accord. Ce qui en est ressorti très fortement, c'est que les industries ont peur de perdre leur compétitivité à cause de cet accord. C'est le message que nous voulons faire passer aujourd'hui.
(1025)
    Essentiellement, vous dites qu'en ce qui concerne l'aluminium, il n'y a pas de progrès par rapport à l'ancien ALENA alors qu'il aurait dû y en avoir, et qu'il y a un recul pour l'agriculture. C'est un peu le bilan que vous en faites.
    Effectivement, il faut s'assurer que des mesures compensatoires seront mises en place et bel et bien déployées, parce que dans le cas des autres traités, ces mesures tardent à se matérialiser.
    C'est parfait. Je vous remercie.
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose, monsieur Milliard?
    Je disais simplement qu'indépendamment de la croissance de l'industrie de l'aluminium, il reste que le gros de cette industrie est au Québec. Je pense qu'il est du devoir d'organisations comme la nôtre de lever un drapeau sur l'importance de préserver la force de cette industrie au Québec. Il faut que le gouvernement fédéral soit vigilant tant au regard des mesures compensatoires que des efforts diplomatiques pour valoriser cette industrie, indépendamment de sa croissance.
    C'est très...

[Traduction]

    Merci. Je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
    Monsieur Blaikie.

[Français]

    Je vais poursuivre sur le même sujet.
    Qu'est-ce que le gouvernement fédéral devrait faire pour promouvoir l'industrie de l'aluminium, que ce soit au Québec ou en Colombie-Britannique?
    Nous craignons que le Mexique importe de l'aluminium de la Chine et en fasse une transformation très mineure pour qu'il soit considéré comme étant de l'aluminium fabriqué dans les pays signataires. Il faut être très vigilant à cet égard pour que cela ne se produise pas, car cela ferait vraiment reculer les exportations d'aluminium aux États-Unis et au Mexique.
    A-t-on les données nécessaires pour savoir à quel point l'aluminium de la Chine entre au Mexique? Y a-t-il des mesures que le gouvernement fédéral devrait mettre en place pour s'assurer d'avoir les informations nécessaires?
    Les informations sont déjà disponibles. Comme je vous le disais, entre mai et juillet 2019, les exportations d'aluminium ont diminué de 60 % de la Chine vers les États-Unis, alors qu'elles ont augmenté de 240 % de la Chine vers le Mexique, et qu'elles ont aussi augmenté de 260 % du Mexique vers les États-Unis, tout cela, en quelques mois seulement. Nous voulions que ce soit abordé dans l'accord de libre-échange. On l'a fait pour l'acier, mais malheureusement, à cause du flou dans la définition de l'aluminium, cela demeure une de nos préoccupations.
    L'Accord disait qu'il devait y avoir un contenu nord-américain minimal de 70 %. À cause du flou qui n'a pas été réglé en ce qui concerne l'aluminium, ce genre de conséquence malheureuse pourrait se répéter. Cependant, il y a quand même des bases législatives. Il faut que le gouvernement fasse son travail de représentation auprès des Américains et des Mexicains pour qu'ils respectent le contenu minimum de 70 %. C'est le moyen dont on dispose pour le moment. Nous aurions aimé quelque chose de plus solide, comme la protection qui a été accordée à l'acier. Ce n'est pas le cas et il faut faire des démarches en ce sens. C'est ce qu'on peut faire pour le moment.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier tous nos témoins pour une matinée des plus intéressantes, et pour avoir pris le temps de venir nous faire part de vos contributions.
    La séance est levée jusqu'à l'arrivée du nouveau groupe de témoins.
(1025)

(1035)
    Nous reprenons nos travaux.
    Nous poursuivons l'étude du projet de loi C-4, Loi portant mise en œuvre de l'Accord entre le Canada, les États-Unis d'Amérique et les États-Unis mexicains.
    Pour ce segment, nous accueillons du Centre canadien de politiques alternatives, Stuart Trew, chercheur et rédacteur; de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, président et chef de la direction par vidéoconférence; et de l'Association des transformateurs laitiers du Canada, Mathieu Frigon, président et chef de la direction ainsi que Dominique Benoit, trésorier et membre de l'exécutif.
    Je vous souhaite la bienvenue à tous. Nous allons commencer avec la vidéoconférence.
    Monsieur Leblanc, je vous en prie.

[Français]

     Bonjour. Je vous remercie de votre invitation. Si je l'avais reçue plus tôt, j'aurais pu être des vôtres.
    La Chambre de commerce du Montréal métropolitain est une organisation qui est en poste depuis près de 200 ans pour représenter la communauté d'affaires du Montréal métropolitain. Depuis 36 ans, nous accompagnons des entreprises vers les marchés d'exportation. Pour ce faire, nous sommes appuyés par le gouvernement du Canada par l'entremise de Développement économique Canada pour les régions du Québec. Nous collectons des fonds dans les entreprises et le secteur privé. Nous sommes aussi appuyés par le gouvernement du Québec.
    Cette expérience sur les marchés internationaux nous a amenés, d'abord, à comprendre l'importance du marché américain. Depuis des décennies, le milieu des affaires montréalais est très conscient de l'importance des marchés américains, à la fois pour leur croissance et leur approvisionnement et, dans le cas de bien des entreprises, pour l'efficacité de leur chaîne de production, qui est bien intégrée et qui traverse la frontière dans les deux sens. Cela a mené la Chambre de commerce, depuis plus de 20 ans, à soutenir de façon durable, robuste et permanente le déploiement d'ententes de libre-échange. Ainsi, de notre point vue, l'entente avec les États-Unis est évidemment la pierre angulaire de notre développement économique.
    Soixante-dix pour cent des exportations du Québec vont aux États-Unis et nous estimons que 20 % du PIB du Québec dépend de cette relation commerciale fluide avec les États-Unis. Au fil des années, le nombre d'emplois, ici, directement liés au commerce avec les États-Unis n'a cessé de croître. Dans bien des cas, se sont des emplois très bien rémunérés, qui sont soit dans la région de Montréal ou dans l'ensemble du Québec.
    L'entente de libre-échange qu'on devait renouveler et qui est devenue l'ACEUM était cruciale. Nous avons appuyé ce renouvellement depuis le début. De plus, il y a maintenant près de deux ans, nous avons amené, à Montréal, 24 dirigeants de chambres de commerce de grandes villes nord-américaines — il y en avait huit des États-Unis, huit du Canada et huit du Mexique —, pour discuter de ce que nous pouvions faire pour nous assurer du renouvellement de l'entente. Nous avons été extrêmement heureux de voir les progrès accomplis et, finalement, le renouvellement d'une entente.
    Dans le cadre du renouvellement de cette entente, il a été dit que des choses auraient pu être encore plus intéressantes, notamment dans le dossier de l'aluminium. De la même façon, lorsqu'il y a eu la négociation de l'entente avec l'Union européenne, des enjeux sont apparus chez les producteurs agricoles. Nous estimons qu'aucune entente n'est parfaite et, dans ce cas, nous avons probablement la meilleure entente qu'il était possible d'espérer avec les États-Unis. Nous estimons que, s'il y a des points que nous aurions voulu voir améliorés, relativement à l'aluminium, par exemple, notre défi consiste à trouver comment on peut aider le secteur de l'aluminium et absolument pas comment bloquer, rejeter ou retarder la mise en place et la ratification de l'entente.
    Le message que nous vous lançons et que nous avons communiqué à tous les politiciens, c'est qu'il n'y a aucune ambiguïté du point de vue de l'économie du Québec, de la région de Montréal ainsi que des entreprises actives à partir de Montréal et que l'entente doit être ratifiée sans délai et appliquée le plus rapidement possible.
    Je vous remercie.
(1040)

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Leblanc. J'apprécie vos commentaires.
    Nous allons poursuivre avec M. Trew du Centre canadien de politiques alternatives.
    Je tiens à remercier le Comité au nom du CCPA de nous offrir l'occasion de vous présenter nos observations quant à la ratification de la loi sur l'ACEUM.
    Le CCPA est l'institut de recherche indépendant le plus ancien du Canada. De fait, nous célébrons cette année le 40e anniversaire de notre création. Depuis ses tout débuts, le CCPA fonde ses recommandations en matière de politiques dans les valeurs de justice sociale et de durabilité environnementale. C'est tout aussi vrai pour la recherche que nous effectuons dans les domaines du commerce et des investissements. Nous avons récemment travaillé à l'échelle internationale sur les négociations de l'ALENA avec quelques amis aux États-Unis et au Mexique.
    J'aimerais débuter par une chose que Michael Geist a dite au Comité la semaine dernière, à savoir que la chose la plus importante ici n'est peut-être pas la mise en œuvre de la loi elle-même, mais plutôt l'impact que l'accord aura sur les Canadiens et sur les politiques publiques canadiennes à l'avenir. Je pense que c'est une idée que de nombreux témoins ont soulevée eux aussi.
    En ce moment, le Parlement dispose de peu de moyens de modifier l'ACEUM. Mais pourtant, il y a des mesures que le Canada peut prendre de sa propre initiative sans rouvrir l'accord afin d'améliorer les aspects positifs du traité et d'en atténuer les aspects les plus dommageables. Je vais vous énumérer rapidement certains de ces aspects.
    Le premier enjeu consiste à rendre les médicaments plus abordables. Selon le chapitre initial sur les droits de propriété intellectuelle de l'ACEUM, le Canada aurait été forcé de prolonger les limites de la durée de protection des données sur les médicaments biologiques de huit à 10 ans. Les médicaments biologiques jouent un rôle de plus en plus important dans le traitement de la maladie de Crohn, de l'arthrite rhumatoïde et de nombreuses autres maladies. Le directeur parlementaire du budget avait prévu que la prolongation initiale de l'exclusivité des données dans l'ACEUM aurait entraîné une hausse de leurs coûts dans le cadre des régimes d'assurance-médicaments publics et privés d'environ 160 millions de dollars par année.
    Aux États-Unis, grâce aux démocrates, cet amendement a été retiré de l'accord. Les démocrates sont également parvenus à retirer de l'ACEUM les dispositions qui auraient facilité l'approbation de brevets pour de nouvelles utilisations de médicaments existants — la question de la perpétuation des brevets — qui empêche la mise en marché de médicaments génériques moins coûteux.
    Le Canada devrait tabler sur ces victoires pour s'attaquer sérieusement aux coûts élevés des médicaments, ici au pays. Nous pouvons le faire en allant de l'avant avec les propositions visant à améliorer la manière dont nous réglementons les prix des médicaments de marque. Santé Canada estime, par exemple, qu'en éliminant les États-Unis et la Suisse du panier de pays dont le ministère se sert pour déterminer les prix au Canada, nous pourrions économiser, en moyenne, près de 1,2 milliard de dollars en coûts de médicaments.
    Deuxièmement, je pense que nous devrions rapidement adopter un régime universel d'assurance-médicaments à payeur unique, comme l'a recommandé le groupe d'experts gouvernementaux sur les régimes d'assurance-médicaments, étant donné que cette décision permettrait de réduire considérablement les coûts des médicaments en accroissant le pouvoir de négociation des acheteurs publics. Ces deux mesures sont déjà dans la mire du Secrétaire d'État au Trésor des États-Unis, par exemple, qui cherche à faire pression sur le Canada pour qu'il n'aille pas de l'avant avec ces projets, parce qu'ils subiraient les foudres de leur industrie pharmaceutique. Il faut donc que nous bougions rapidement.
    Le deuxième enjeu consiste à faire appliquer les droits du travail dans le nouvel ACEUM. Comme le Comité l'a déjà entendu de plusieurs témoins, les dispositions relatives au travail de l'ACEUM marquent une amélioration significative par rapport à l'ALENA. Le défi maintenant pour les trois pays est l'application de ces dispositions.
    Au-delà de l'engagement à recevoir et à examiner les plaintes publiques concernant les violations des dispositions relatives au travail au Canada, au Mexique ou aux États-Unis, ces dispositions de l'ACEUM ne peuvent être appliquées que dans le cadre d'un mécanisme de règlement des différends entre gouvernements. Pour diverses raisons, ce n'est pas idéal. On ne peut pas toujours faire confiance aux gouvernements pour qu'ils se portent à la défense des travailleurs.
    Une manière pour le Canada d'aborder cette question consisterait à mettre sur pied un processus de règlement des plaintes indépendant et national qui permettrait aux syndicats, citoyens et groupes de citoyens de présenter une plainte lorsque les normes internationales du travail sont violées. Il devrait exister un organisme impartial pour entendre ces plaintes, de la même manière que des instances impartiales entendent les plaintes en matière d'approvisionnement dans le cadre d'autres parties des accords commerciaux. Si elles sont dignes de foi, les plaintes seraient entendues quoi qu'il arrive.
    En matière d'environnement et d'urgence climatique, nous dirions que le nouvel ALENA est résolument moins satisfaisant. Cela reflète, évidemment en partie, le fait que nous négocions avec une administration américaine climatosceptique. Néanmoins, le PTPGP, le Partenariat transpacifique, et l'accord commercial avec l'UE ne sont pas tellement supérieurs sur le plan de l'environnement. Aussi, on ne peut pas rejeter l'entièreté du blâme sur l'obstructionnisme de l'administration américaine.
    Le chapitre de l'ACEUM sur l'environnement est techniquement exécutoire au moyen d'un mécanisme de règlement des différends d'État à État. Mais, encore une fois, est-ce bien vraisemblable? Les obligations qu'il contient sont tellement faibles que ça n'a pas vraiment d'importance. Mis à part quelques règles strictes concernant des questions telles que les subventions à la pêche et trafic d'espèces sauvages, les engagements contenus dans ce chapitre sont pour la plupart vagues et volontaires. Il contient aussi une brèche gigantesque en ce sens qu'il ne s'applique qu'à trois fédérations, à trois États fédéraux. Il ne s'applique donc qu'au niveau fédéral dans les trois pays.
    La plus grande avancée de l'ACEUM en matière d'environnement a consisté à se débarrasser du RDIE, le règlement des différends entre investisseurs et États. Le Canada a dû affronter des dizaines de cas de RDIE, plus que tout autre pays dans la région de l'ALENA, et bon nombre de ces cas contestaient des décisions légitimes, légales et non discriminatoires sur la gestion de l'environnement et des ressources. L'élimination du RDIE dans l'ACEUM est certainement importante, comme l'a déclaré la ministre Freeland au Comité la semaine dernière, et elle devrait établir un précédent. La difficulté maintenant pour le Canada consiste à éliminer le RDIE des dizaines de traités en matière d'investissement avec d'autres pays.
(1045)
    J'aimerais aborder brièvement la déréglementation dans l'ACEUM. Les chapitres et les annexes de l'ACEUM qui portent sur la manière dont les gouvernements assurent la réglementation de façon générale ont suscité relativement moins d'attention dans les trois pays que d'autres parties de l'accord; pourtant, ils pourraient se révéler aussi importants et controversés que le RDIE l'est devenu dans l'ALENA. Rappelez-vous, lors de la signature de l'ALENA, nous ne savions pas grand-chose au sujet du règlement des différents entre investisseurs et pays, ni sur son mode de fonctionnement. La même logique s'applique avec le chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation, lesquelles, pour la première fois dans un accord de libre-échange, enchâssent une idéologie très précise en matière de réglementation, selon laquelle le commerce devrait régner en maître, et le principe de précaution serait relégué au second plan, voire jeté aux oubliettes.
    Les organismes centraux de réglementation, par exemple le Conseil du Trésor au pays ou l'OIRA aux États-Unis, sont tenus selon l'ACEUM de veiller à ce que les organismes fédéraux évitent les restrictions inutiles à la concurrence sur les marchés lorsqu'ils prennent des décisions sur les mesures de protection appropriées en matière de santé ou d'environnement. Il existe des possibilités importantes pour que les multinationales abusent d'un nouveau processus d'avis et d'examen dans l'ACEUM selon lequel les organismes de réglementation doivent chercher à répondre à toute recommandation visant à modifier ou à abroger une réglementation qui est susceptible d'imposer un fardeau aux entreprises.
    Les producteurs mondiaux de produits chimiques, de pesticides, de produits pharmaceutiques, d'OGM, de cosmétiques, de tabac, d'additifs alimentaires, et ainsi de suite, remettent continuellement en question de bons arguments scientifiques concernant les risques que leurs produits posent pour la santé humaine et l'environnement. Désormais, aux termes de l'ACEUM, un pays pourrait forcer un gouvernement à se présenter devant le mécanisme de règlement des différends au sujet d'une plainte présentée par un autre pays pour le compte de l'une de ses industries. La plainte pourrait par exemple porter sur le refus soutenu ou récurrent de tenir compte des plaintes d'entreprises au sujet de règlements pris dans l'intérêt public. Le Conseil de coopération Canada-États-Unis en matière de réglementation, un processus qui est maintenant intégré à l'ACEUM et qui jusqu'ici exerce ses activités sur une base volontaire, pourrait entraîner des retards dans l'élimination de toxines connues, de carcinogènes connus, de composés biocumulatifs et de perturbateurs endocriniens dans les produits de consommation en raison de pressions liées à l'harmonisation transfrontalière dans l'intérêt du commerce, encore une fois, ces dispositions sont intégrées au chapitre sur les bonnes pratiques réglementaires.
    Comme l'a habilement démontré l'ancien directeur général du CCPA Bruce Campbell, de telles pressions ont entraîné l'harmonisation à la baisse des normes sur la sécurité du transport ferroviaire au Canada et des normes en matière de sécurité aérienne ayant conduit à des tragédies comme celle de Lac-Mégantic et à des catastrophes comme celle de Boeing. En théorie, le chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation de l'ACEUM laisse la porte ouverte aux gouvernements qui souhaiteraient réglementer de manière plus prudente et offrir plus de protection, cependant l'objectif premier du chapitre est clairement de réduire le fardeau imposé aux entreprises. De fait, la coopération en matière de réglementation est définie dans l'ACEUM comme, d'abord et avant tout, un moyen de faciliter et de promouvoir la croissance économique, et non un moyen d'améliorer la protection du public.
    Par conséquent, il est plus important que jamais que le Canada fasse contrepoids aux pressions en vue de la déréglementation prévues dans cet accord et dans d'autres accords de libre-échange en intégrant le principe de précaution dans la loi. Une directive réaffirmant le pouvoir de nos organismes de réglementation d'accorder le bénéfice du doute à la protection de la santé publique; d'éliminer les substances toxiques potentielles de la circulation, les plastiques par exemple; de protéger les populations animales; etc, correspondrait à la compréhension qu'ont la majorité des Canadiens de ce que l'on entend par une bonne réglementation.
    En conclusion, l'ACEUM est une macédoine, du moins d'un point de vue progressiste. Mais s'agit-il d'un modèle pour les futurs traités commerciaux canadiens? Nous répondons non, pas du tout. Les Canadiens reconnaissent que la signature de cet accord constituait une mesure défensive. En dépit du nouvel accord, tout comme avec l'ALENA, notre accès au marché américain demeure précaire. Les États-Unis sont la plus grande puissance mondiale. Ils feront ce que bon leur semble. Je ne vois pas comment le Canada pourrait faire abstraction de cette réalité. Le défi maintenant pour le pays consiste à trouver des moyens de contourner l'ACEUM pour améliorer les normes en matière de travail et les mesures de protection de l'environnement dans toute l'Amérique du Nord, diminuer les coûts des médicaments pour les Canadiens, rendre rapidement notre économie carboneutre conformément aux engagements pris dans l'Accord de Paris et reconnaître pleinement la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones pour s'engager sur la voie d'une réconciliation véritable.
    Merci beaucoup.
(1050)
    Merci beaucoup, monsieur Trew.
    Nous allons maintenant passer aux Transformateurs laitiers, Mathieu Frigon et Dominique Benoit.

[Français]

     Bonjour, membres du Comité. Au nom de l’Association des transformateurs laitiers du Canada, je vous remercie de l’invitation à comparaître ici ce matin pour discuter du projet de loi concernant la mise en œuvre de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique, l’ACEUM, et des répercussions qu'aura cet accord sur l’industrie canadienne de la transformation laitière.
    Je suis trésorier et membre de l’exécutif du conseil d’administration de l’Association des transformateurs laitiers du Canada, ainsi que vice-président principal d'Affaires institutionnelles et Communications d'Agropur, la plus grande coopérative laitière au Canada. Je suis accompagné de Mathieu Frigon, notre président-directeur général.
    Ce matin, nous allons d’abord attirer votre attention sur les préjudices que causera cet accord à notre industrie, puis sur les mesures d’atténuation gouvernementales qui aideraient notre industrie dans ses efforts d’adaptation au nouvel environnement de marché auquel nous sommes maintenant assujettis en raison de l’ACEUM et des autres accords qui ont été récemment signés.

[Traduction]

    À titre de deuxième industrie de transformation alimentaire en importance au Canada, les transformateurs laitiers contribuent pour plus de 14 milliards de dollars annuellement à notre économie nationale. Les transformateurs laitiers donnent de l'emploi à 24 000 Canadiens dans 471 usines aux quatre coins du pays, pour une masse salariale de 1,2 milliard de dollars. Notre industrie est un grand employeur dans les collectivités rurales et urbaines et fournit des emplois bien rémunérés aux Canadiens de la classe moyenne.
    Les transformateurs laitiers canadiens ont investi 7,5 milliards de dollars au cours de la dernière décennie dans leurs entreprises. Ces investissements comprennent notamment des investissements en capital pour agrandir et mettre à niveau les usines existantes ainsi que pour en construire de nouvelles pour répondre aux besoins d'une production accrue. Ils comprennent également des investissements dans la recherche et développement afin de stimuler l'innovation et d'amener de nouveaux produits sur le marché.
    Les producteurs laitiers sont déterminés à investir dans un secteur dynamique pour soutenir les emplois et l'économie canadienne. Cependant, de récents accords commerciaux menacent de freiner la croissance et de diminuer la compétitivité à long terme du secteur laitier canadien.

[Français]

    Lorsque l'ACEUM sera pleinement mis en œuvre, l'accès accordé, ajouté aux concessions existantes en vertu des autres accords, représentera près de 18 % de notre marché canadien. Si l'on tient compte des trois derniers accords commerciaux, les transformateurs laitiers canadiens perdront 320 millions de dollars par année au chapitre des marges nettes une fois que les accords seront complètement mis en œuvre.
    En plus des concessions de marché, l'ACEUM comprend un article imposant des plafonds d'exportation qui limitent dans le monde entier les exportations canadiennes de poudres de lait, de concentrés de protéines et de préparations pour nourrissons. Pour vous donner un exemple, en ce qui concerne la poudre de lait écrémé et les concentrés de protéines de lait, il y aura un plafond imposé de 55 000 tonnes dès la première année, et ce plafond passera à 35 000 tonnes dès la deuxième année.
    Si l'on considère qu'au cours de l'année laitière 2017-2018, le Canada a exporté plus de 70 000 tonnes de poudre de lait écrémé, il ne fait aucun doute que cet article de l'?ACEUM limitant nos exportations dans le monde entier aura des répercussions considérables sur les transformateurs de lait canadien et sur nos besoins d'approvisionnement en lait provenant des fermes laitières canadiennes. Nous estimons que les plafonds d'exportation pourraient entraîner une perte annuelle de 60 millions de dollars pour les transformateurs laitiers.
    Nous tenons également à souligner un aspect extrêmement particulier, qui est l'imposition de plafonds aux exportations canadiennes de poudre de lait vers tous les pays, y compris ceux qui ne font pas partie de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique. C'est une première dans un accord commercial international et un dangereux précédent pour le Canada.
    Le gouvernement pourrait atténuer l'impact négatif des plafonds d'exportation en s'assurant que l'Accord entre en vigueur le 1er août 2020, ou plus tard, afin que l'industrie fonctionne une année complète de plus sous un plafond d'exportation de 55 000 tonnes.
(1055)

[Traduction]

    Afin d'atténuer l'incidence négative de cet accès accru au marché canadien aux termes de l'ACEUM, nous proposons une approche en deux volets: premièrement, l'attribution aux transformateurs laitiers canadiens de permis d'importation de produits laitiers, et deuxièmement, un programme d'investissement pour les transformateurs laitiers.
    Nous souhaitons rappeler aujourd'hui que les permis d'importation de produits laitiers, mieux connus sous l'appellation de contingents tarifaires, doivent être attribués aux transformateurs laitiers. Les transformateurs laitiers possèdent l'expertise et le réseau de distribution pour importer un large éventail de produits laitiers qui complètent l'offre nationale, plutôt que de la remplacer. Le gouvernement doit éviter de répéter la même erreur que celle qu'il a commise avec l'AECG; dans le cadre de cet accord, il a attribué plus de la moitié des contingents tarifaires de fromage de l'AECG à des parties prenantes autres que les transformateurs laitiers, comme des détaillants et des courtiers. Ces parties prenantes autres que les transformateurs laitiers n'ont aucun intérêt particulier, contrairement aux transformateurs laitiers, à importer des produits laitiers qui atténueraient l'incidence sur les lignes de production et les plateformes de fabrication existantes au Canada sans déplacer le lait des exploitations laitières canadiennes. De plus, les transformateurs laitiers continuent d'investir, d'entretenir et de générer des emplois bien rémunérés dans tout le pays, et particulièrement dans les régions rurales. Des importations additionnelles mal planifiées ou mal ciblées compromettront la survie de nombreuses entreprises.
    Le deuxième outil d'atténuation que nous recommandons est un programme d'investissement pour les transformateurs laitiers. Le secteur de la transformation des produits laitiers est constitué d'entreprises de diverses tailles et offrant diverses gammes de produits, qui seront toutes touchées par l'incidence de ces accords commerciaux de diverses manières. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement crée un programme d'investissement et de compensation pour les produits laitiers qui serait destiné à soutenir les investissements dans la capacité de transformation, la compétitivité et la modernisation des transformateurs laitiers. Ce programme comprendrait notamment des outils tels que des contributions non remboursables et des crédits d'impôt remboursables. Le programme fonctionnerait sur le principe de l'appariement. Pour recevoir des fonds, un transformateur laitier devrait effectuer des investissements ici même, au pays.

[Français]

    L'année dernière, des recommandations ont été soumises au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire par le groupe de travail sur l'atténuation, créé par le gouvernement en octobre 2018, sur les programmes à mettre en avant pour contrer l'impact financier sur le secteur de la transformation laitière des trois ententes commerciales. Nous avons activement participé à ces travaux. Nous avons formulé des recommandations fondées sur l'engagement du gouvernement à indemniser pleinement et équitablement le secteur, c'est-à-dire tant les producteurs de lait que les transformateurs laitiers.
    Nous espérons que le prochain budget insufflera une confiance bien nécessaire dans l'avenir de la transformation laitière grâce à une annonce concernant un programme d'investissement dans la transformation laitière.
     Adéquatement mises en marche, ces deux mesures, soit l'attribution de quotas d'importation aux transformateurs et un programme d'investissement dans le secteur laitier, ensemble, pourraient indemniser pleinement et équitablement l'industrie de la transformation laitière du Canada de l'incidence négative des accords commerciaux. Ce n'est que grâce à ces mesures d'atténuation que l'industrie de la transformation du lait pourra préserver les emplois et les investissements importants existant au Canada tout en continuant à développer notre avenir.
    Je vous remercie de votre temps et de votre considération. Nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Lewis.
    Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins qui se sont déplacés aujourd'hui.
    Permettez-moi d'entrée de jeu de déclarer que nous sommes certainement le parti le plus favorable au libre-échange. Il n'est pas dans notre intention de retarder de quelque manière la ratification de l'ACEUM, mais nous devons par ailleurs faire preuve de toute la diligence nécessaire. C'est pour nos familles, nos entreprises et notre pays. C'est la raison pour laquelle nous posons beaucoup de questions. Comme bon nombre d'entre vous le savent, contrairement au Congrès des États-Unis auquel on a fourni une étude économique approfondie, les parlementaires canadiens n'ont reçu aucune analyse, et ce, malgré des demandes répétées. Nous avons dû nous rabattre sur d'autres études, telles que le rapport publié récemment par l'Institut C.D. Howe et sur les témoignages qui sont présentés devant notre comité.
    Des chefs de file de l'industrie ont décrit l'ACEUM en termes peu flatteurs; allant jusqu'à dire que c'était un pis-aller, tandis que d'autres lui ont offert un appui enthousiaste. La plupart ont salué la stabilité qu'il confère après trois années marquées par l'incertitude. Certains ont déclaré que tout est dans les détails.
    À la Chambre de commerce, monsieur, vous représentez divers secteurs au Québec. Est-ce que le niveau d'enthousiasme pour cet accord diffère selon le secteur?
(1100)
    Oui, en effet, l'enthousiasme exprimé n'est pas le même, mais de manière générale, il est très élevé. Il n'est pas égal dans tous les secteurs, mais collectivement, on sent un réel appui à cet accord.
    Est-ce que vous avez effectué ou est-ce que la chambre a effectué une analyse des incidences économiques? Est-ce que les résultats de cette analyse coïncident avec ceux de l'évaluation réalisée par l'Institut C.D. Howe comme quoi le PIB du Canada chutera de 0,4 % et l'économie canadienne enregistrera des pertes pouvant atteindre 10 milliards de dollars?
    Non. À la lumière de divers échanges que j'ai eus au fil des années, ce sont plutôt les répercussions de ne pas avoir d'accord qui étaient énormes. Lorsque nous avions des chiffres, ils portaient davantage sur l'incidence sur nos entreprises d'exportation, nos entreprises d'ici, si nous n'avions pas conclu un tel accord avec les États-Unis. Bien entendu, CGI à Montréal, Couche-Tard à Montréal, et Saputo à Montréal, sont toutes des entreprises qui sont aujourd'hui très actives sur les marchés étrangers, y compris aux États-Unis.
    Manifestement, le signal que nous envoyaient toutes nos entreprises était que le prix à payer, en tant qu'économie, si nous ne parvenions pas à conclure un accord, serait énorme.
    Je vous ai entendu dire le mot « exportation ». Est-ce que la Chambre de commerce entretient des préoccupations au sujet de la mise en œuvre, en particulier compte tenu du court délai de 90 jours qui est alloué de la ratification à la mise en œuvre? Partagez-vous les préoccupations de l'Institut C.D. Howe au sujet de l'éventualité d'un resserrement à la frontière, autrement dit, des difficultés avec les tarifs, des problèmes avec l'ASFC qui ne disposerait pas des ressources ou du financement supplémentaires nécessaires pour réaliser la mise en œuvre de toutes ces dispositions?
    Comme toujours, lorsqu'il y a de nouveaux accords et de nouvelles règles, nous nous inquiétons au sujet des répercussions qu'ils pourraient avoir. Nous organisons ce que nous appelons des « missions commerciales », et l'une de ces missions commerciales les plus populaires réunit les nouveaux exportateurs à la frontière où ils ont l'occasion de se familiariser avec les processus et le traitement des exportations. De toute évidence, nous nous attendons au cours des prochains mois à recevoir énormément de demandes afin de nous assurer que tout le monde comprend ce qui a changé ou pas.
    En effet, il y aura probablement une période d'adaptation, mais encore une fois, la signature de cet accord est vue comme une évolution positive du point de vue de notre groupe. Nous étions très préoccupés à l'idée que, compte tenu de la position du président Trump, nous pourrions ne pas réussir à conclure un tel accord. Nous sommes donc très satisfaits d'en avoir un, et nous souhaitons aller de l'avant le plus rapidement possible.
    Merci beaucoup pour vos réponses.
    Merci, madame la présidente.
    La parole est à M. Sarai.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous d'être venus témoigner.
    Je vais commencer par vous, monsieur Trew. Ma question porte sur le RDIE. Lorsqu'il a été mis en œuvre la première fois, beaucoup de gens ont pensé qu'il serait utile aux entreprises canadiennes et qu'il les protégerait contre les modifications réglementaires qui pourraient être imposées aux États-Unis. Par la suite, on s'est rendu compte que ce fut exactement l'inverse. Nous avons dû en affronter davantage.
    Pensez-vous que l'absence de ce mécanisme, toutefois, pourrait avoir des répercussions à l'avenir, c'est-à-dire que des abus pourraient être commis, seulement parce que nous aurions peut-être pris des mesures en pensant que ce serait plus discriminatoire à l'endroit des entreprises canadiennes, et moins dans l'autre sens? Croyez-vous que le fait de ne pas disposer du régime de règlement des différends pourrait entraîner des difficultés dans le futur?
    Si je comprends bien la question, voulez-vous dire, est-ce que la situation sera plus mauvaise pour les entreprises canadiennes que pour celles des États-Unis en l'absence du RDIE?
    M. Randeep Sarai: Oui.
    M. Stuart Trew: Les résultats sont assez désastreux en ce qui concerne les entreprises canadiennes ayant eu recours au RDIE pour contester des politiques américaines. Elles n'ont jamais remporté une seule cause. Je pense que c'est très révélateur de ce qui se passe lorsque l'on veut contester les règles d'un pays aussi puissant que les États-Unis. Il existe de nombreuses possibilités, de nombreux moyens que les entreprises canadiennes peuvent utiliser pour faire valoir leurs droits en vertu des lois américaines, leurs droits de faire des affaires avec les États-Unis, qui sont exhaustifs. Le système judiciaire américain est l'un des mieux établis et des plus complets dans le monde en ce qui a trait à la protection de la propriété privée. Je ne pense pas que les entreprises canadiennes s'exposent à des risques en exerçant leurs activités aux États-Unis en l'absence du RDIE.
(1105)
    Merci. C'est ce que je voulais entendre.
    Pour ce qui est des dispositions sur le travail, vous avez dit que les nouvelles améliorations sont très positives. Pensez-vous que l'accès à un recours pourrait être amélioré? Si j'ai bien compris, le fait que ce soit le gouvernement qui devra présenter les plaintes en matière de travail vous inquiète. Cela se ferait à l'échelle nationale plutôt qu'à l'échelle individuelle. Comment envisagez-vous la mise en application des dispositions sur le travail?
    Ce que nous entrevoyons pour l'instant, comme j'en ai brièvement parlé dans mon exposé, c'est une espèce de mécanisme prima facie qui permettrait aux syndicats, aux particuliers ou aux groupes communautaires de présenter une contestation liée aux protections en matière de travail et d'obtenir une décision indépendante, qui porterait sur le bien-fondé de la cause et la pertinence d'aller de l'avant.
    Si le décideur juge que la cause est valable selon un processus semblable à celui qui est appliqué aux différends liés aux marchés publics, alors le gouvernement n'aurait pas le choix de recourir au mécanisme de règlement des différends entre gouvernements.
    Actuellement, ce n'est pas prévu dans le système. Les trois pays devront se concerter pour arriver à une solution.
    Oui, c'est exact.
    Ma prochaine question s'adresse à vous, monsieur Leblanc.
    Pour ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, que peut faire la Chambre de commerce, dont vous êtes le représentant, pour mieux faire connaître les nouvelles possibilités offertes, et j'irais même jusqu'à dire celles qui sont déjà offertes par l'ALENA, pour aider les Canadiens, et notamment les PME, à accroître leur volume d'activités dans les deux autres pays?
    Nous faisons beaucoup de choses, et nous pourrions probablement en faire plus. Bien entendu, c'est toujours une question de financement. Je souligne au passage que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer.
    Tout d'abord, pour ce qui est des entrepreneurs, nous tentons de notre mieux de leur faire comprendre qu'ils doivent avoir une perspective internationale dès le départ. Dès la création et la mise au point de leurs plans d'affaires, nous encourageons les PME à envisager la possibilité d'exporter leurs produits, et nous les accompagnons sur cette voie. Par exemple, quand elles conçoivent leur site Web, elles doivent s'assurer qu'il est transactionnel. Au Québec, il peut être transactionnel en anglais. Quand elles font affaire à l'étranger, nous leur faisons voir que si elles engagent du personnel, elles doivent avoir une optique de développement de leurs marchés internationaux. C'est une première chose.
    Ensuite, nous offrons énormément d'activités de formation. Par exemple, comme je l'ai déjà mentionné, nous amenons des groupes à la frontière. L'objectif est de leur expliquer ce qui se passe et qu'ils réalisent tout simplement que pour les PME, le marché américain est dans leur cour et qu'elles ont tout intérêt à l'intégrer à leur plan de croissance.
    Enfin, nous organisons des missions aux États-Unis, et nous accompagnons les PME... Habituellement, ce ne sont pas de grosses entreprises parce qu'elles n'ont pas besoin de nous. Nous accompagnons des représentants de PME aux États-Unis, dans la région de New York ou dans la Silicon Valley. Nous jouons le rôle d'intermédiaires avec le personnel de la délégation du Québec, de l'ambassade ou des consulats. Nous les aidons à établir des liens personnels. Toute notre stratégie vise à faire réaliser aux PME, aussi rapidement que possible, que leur croissance dépend de leur accès à ce marché.
    Pour ce qui est du nouveau...
    Avez-vous aussi...
    Je suis désolée, monsieur Sarai, mais votre temps est écoulé.
    J'ai attendu un peu pour ne pas couper la parole à notre témoin.
    C'est au tour de M. Savard-Tremblay.

[Français]

     Ma première question s'adresse à M. Trew, du Centre canadien de politiques alternatives.
    Vous vous réjouissez de la disparition du chapitre 11 sur le règlement des différends entre investisseurs et États, qui, à la base, visait à assurer une stabilité auprès des investisseurs, à l'époque où il y avait des gouvernements moins stables dans différents pays. Finalement, on a vu que cela portait atteinte à la capacité d'adopter des mesures sociales en matière d'environnement et de santé publique. On s'est rendu compte qu'il y avait des effets délétères assez forts, et le Canada a été le champion pour ce qui est du nombre de poursuites reçues. Dans ces cas, la multinationale est toujours la demanderesse et l'État est toujours le défendeur. À l'inverse, ces traités ne prévoient pas de recours pour protéger des citoyens lésés par une multinationale. Ce chapitre de l'ALENA était une première, mais la mesure a été imitée dans à peu près tous les accords par la suite.
     Croyez-vous que la disparition de ce chapitre laisse augurer quelque chose de bien pour la suite des choses? À partir de maintenant, on ne pourra pas considérer que cela va de soi dans la signature de futurs accords.
(1110)
    Je vous remercie beaucoup de votre question. Je vais y répondre en anglais.

[Traduction]

    Oui, je suis tout à fait d'accord avec la ministre quand elle affirme que cela devrait servir de précédent. On dira ce qu'on voudra sur le fait que d'autres pays n'accordent pas la même importance que le Canada à la primauté du droit, la réalité est que les entreprises canadiennes ont abusé de ce système, comme elles l'ont fait au Canada, pour contester des décisions tout à fait légitimes en matière d'environnement et de gestion des ressources.
    Je pense que notre monde nous donne des signes de plus en plus clairs que certains types d'activités économiques nuisent à l'environnement, contribuent à la crise climatique et, dans certains cas, aux inégalités dans d'autres pays, ou du moins ne produisent pas les bénéfices que devraient normalement produire les investissements des pays du Nord, et qu'il faut vraiment songer à limiter ou à rééquilibrer le type de droits conférés par les accords commerciaux.
    Il est évident que les droits des sociétés prévalent dans ces processus. Il faut trouver un nouvel équilibre pour redonner l'importance qui leur revient aux droits environnementaux, aux droits autochtones et aux droits de la personne.

[Français]

    Je vous remercie.
    Mes questions vont maintenant s'adresser aux messieurs de l'Association des transformateurs laitiers du Canada.
    Vous avez dit qu'il y avait eu des indemnités pour beaucoup de producteurs. C'est un constat qu'on fait souvent, quoique dans le cas de l'accord actuel, on n'ait pas encore versé d'indemnités. Dans le cas des accords précédents, cela a pris du temps, mais elles ont fini par être versées. Or les transformateurs n'ont pas eu d'indemnités.
    D'abord, quelle forme d'indemnités souhaitez-vous obtenir et dans quels délais?
    Ensuite, comment le milieu réagit-il à l'élimination de la classe 7? On sait qu'il a longtemps été question des protéines laitières. Je crois que vous êtes chez Agropur. Avant que ce soit la mode de dénoncer cela politiquement, vous avez été parmi les premiers à bannir le lait diafiltré, si je ne m'abuse. Il n'en demeure pas moins que beaucoup de transformateurs ont eu recours à cette pratique pendant un certain temps.
    Effectivement, l'été passé, des sommes ont été annoncées uniquement pour les producteurs laitiers. Rien n'a été annoncé pour les transformateurs laitiers, et c'est certain que cela été une grande déception chez nous, comme nous l'avons dit dans notre allocution.
    Vous parlez de l'accord précédent?
    Oui, je ne parle pas de l'ACEUM.
    Cela nous avait déçus. Nous espérons que ce sera dans le prochain budget. Comme nous l'avons mentionné dans notre allocution, nous avons fait partie du groupe de travail qui s'est penché sur les répercussions financières et les façons de les atténuer. Il faut un programme d'investissement et une allocation de contingents tarifaires, ce qu'on appelle des licences d'importation, à nos membres, c'est-à-dire les transformateurs laitiers.
     Nous aimerions avoir des mesures de compensation en deux volets.

[Traduction]

    Désolée, votre temps est écoulé.
    Monsieur Blaikie.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous en reparlerons plus tard.

[Traduction]

    Monsieur Trew, j'aimerais revenir sur une remarque de M. Sarai à la fin de son intervention. Il a dit que ce que vous proposez devra faire l'objet d'une négociation entre les trois parties.
    Si j'ai bien compris, vous parlez d'un processus interne, que le Canada pourra établir sans consulter les deux autres parties. Je veux tout simplement m'assurer que la version rapportée au compte rendu est la bonne.
    C'est exact. Je suis désolé si j'ai impliqué qu'il y aurait des négociations. En effet, je parlais de quelque chose que le Canada pourra établir par lui-même. Par exemple, il pourrait permettre à des citoyens d'un autre pays, et sans doute du Mexique et des États-Unis, d'exercer un recours si, par exemple, aucun mécanisme du genre n'existe dans leur pays. Cela ne devrait pas empêcher quiconque de faire valoir les droits en matière de travail que lui garantit l'accord. Le Canada pourrait jouer un rôle de chef de file dans ce domaine.
    Des représentants des autres parties pourraient contribuer au processus, mais le Canada pourra prendre ses propres mesures pour atténuer certaines répercussions de l'accord.
    Tout à fait.
    En ce qui a trait au chapitre 28, le NPD se réjouit de l'abolition des dispositions de l'ALENA sur le règlement des différends entre un investisseur et un État. Cela dit, des doutes subsistent quant aux conséquences négatives du chapitre 28 sur la réglementation d'intérêt public.
    Est-ce que le Canada pourrait, de son propre chef, rectifier le tir, par exemple en élargissant la définition de partie ou de personne intéressée pour qu'elle ne se limite pas aux personnes ayant un intérêt commercial dans la réglementation, mais qu'elle englobe aussi les intérêts des citoyens? Je pense à l'environnement, aux Autochtones qui craignent une atteinte à leurs droits, ou aux travailleurs qui craignent les effets d'une réglementation ou de l'absence de réglementation d'un secteur en particulier.
    Avez-vous des suggestions pour atténuer certaines des répercussions potentiellement négatives du chapitre 28?
(1115)
    Il est vrai qu'en un sens, l'ACEUM offre au Canada beaucoup de latitude pour changer ses mécanismes de réglementation. Le chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation met de l'avant une approche de la réglementation qui est très procommerce et qui relègue le principe de précaution assez loin sur la liste des priorités.
    Par exemple, certaines parties de l'ACEUM obligent le Canada à réglementer, sur une base permanente, le domaine des produits de beauté selon une approche axée sur le risque qui serait très éloignée de l'approche de précaution appliquée en Europe ou ailleurs dans le monde, ou selon une approche axée sur les dangers, qui pourrait mieux protéger la santé de la population.
    Dans la plupart des cas, le Canada pourrait se contenter d'une directive du Cabinet, comme il le fait actuellement à intervalles réguliers pour modifier ses pratiques en matière de réglementation. Il pourra ainsi favoriser une participation accrue de ces autres groupes d'intérêts et faire en sorte que la réglementation assure un meilleur équilibre entre les intérêts commerciaux des sociétés touchées et la protection de l'environnement, des animaux ou des personnes susceptibles de subir les effets de produits mis en marché.
    Si nous nous projetons au-delà de l'ACEUM et que nous pensons aux autres accords envisagés entre le Canada et la Chine ou le Royaume-Uni, pour ne mentionner que ceux-là, dans quelle mesure est-il important de tirer des leçons du processus que nous examinons actuellement?
    Par exemple, un témoin venu des États-Unis nous a expliqué les interactions des branches exécutives et législatives dans ce pays. Nous avons demandé au gouvernement de faire preuve de plus de transparence dès le début au sujet des objectifs de négociation, et de présenter d'office une analyse économique au dépôt d'un projet de loi de ratification d'un futur accord.
    Quelles leçons pouvons-nous tirer des aspects négatifs de ce processus, et dans quelle mesure la participation citoyenne dès le début pourrait-elle permettre au Canada de négocier des accords plus avantageux à l'avenir?
    Ces dernières années, le Centre canadien de politiques alternatives a été l'un de ceux à militer, par l'intermédiaire du budget fédéral de substitution, pour une refonte de l'ensemble de notre politique commerciale afin qu'elle tienne mieux compte de l'urgence climatique et des inégalités croissantes. Il faut trouver un nouvel équilibre dans la manière dont ces accords fonctionnent.
    Le Parlement a un rôle à jouer dans cet exercice, et il est clair qu'il doit contribuer davantage à l'articulation des objectifs des négociations d'un accord entre le Canada et les pays du MERCOSUR, la Chine ou d'autres parties. Actuellement, si j'ai bien compris, vous intervenez à la toute fin du processus pour donner votre aval ou non, mais on ne vous consulte ni sur le mandat ni sur les objectifs du gouvernement canadien.
    Il y a deux choses à faire. Premièrement, le Canada doit tenir des audiences ou des consultations sur son programme commercial au XXIe siècle, et y intégrer des considérations comme la crise climatique et...
    Monsieur Trew, je dois vous interrompre.
    Monsieur Kram.
    Je remercie tous nos témoins de participer à nos travaux aujourd'hui.
    Ma question s'adresse à M. Frigon et à M. Benoit, de l'Association des transformateurs laitiers du Canada. Vous avez dit que les nouveaux droits d'exportation coûteraient 60 millions de dollars à votre industrie. C'est ce que coûteraient les droits d'exportation, qui ne s'appliqueront pas seulement aux États-Unis et au Mexique, mais également dans le reste du monde.
    Pouvez-vous nous donner une idée de ce que cela représente pour le transformateur laitier type? Est-ce que c'est un coût important pour chaque transformateur, ou est-ce plutôt un léger désagrément?
    Bien entendu, les répercussions seront différentes d'un transformateur à l'autre, suivant leurs activités. Je vais m'en tenir aux répercussions pour Agropur.
    Nous sommes un joueur important au Canada. Nous transformons un très gros volume de solides non gras en poudre de lait écrémé et autres produits.
    Je vais vous donner un exemple. L'année dernière, notre société a exporté près de 35 000 tonnes de poudre de lait écrémé. Inutile de vous dire que les répercussions seront énormes pour nous et pour tous ceux qui transforment un volume important de lait pour produire ces ingrédients.
    La question est de savoir comment nous nous adapterons. Qu'allons-nous faire avec les solides non gras qui sont excédentaires par rapport à la demande canadienne? C'est pourquoi nous demandons de l'aide, parce que nous en aurons besoin si nous voulons investir dans la mise au point de technologies pour gérer les solides non gras.
(1120)
    Quand votre groupe a-t-il été mis au courant de l'imposition de nouveaux droits sur l'exportation des produits laitiers?
    En même temps que tout le monde. Personne ne nous a consultés sur le plafonnement des exportations vers tous les autres pays du monde.
    Nous n'avons pas été consultés quand le Canada a envisagé de limiter ses exportations vers tous les autres pays. C'était tout à fait nouveau pour nous et nous avons été pris de court.
    D'accord, mais j'imagine que vous l'avez appris à un moment donné. Était-ce à la fin de l'année dernière, ou en 2018?
    Vous souvenez-vous du moment où vous l'avez appris?
    Nous l'avons appris quand l'accord a été annoncé.
    D'accord.
    Et selon vous, combien coûteront ces nouveaux droits d'exportation à votre industrie?
    Pour ce qui concerne les transformateurs, je peux seulement parler au nom d'Agropur. Nous ne paierons pas les droits de 54 ¢ pour exporter nos excédents. Ce ne serait pas économiquement rentable.
    C'est pourquoi des sociétés comme la nôtre auront une décision à prendre concernant nos achats de lait. Si nous ne pouvons pas exporter, il faudra trouver d'autres façons d'utiliser notre lait. La question sera celle de savoir comment il sera utilisé.
    Les transformateurs qui paieront les droits ont-ils eu des discussions avec le gouvernement sur la manière dont ce nouveau revenu sera utilisé?
    À notre avis, aucun transformateur ne paiera les droits. Je peux me tromper, mais c'est ce que nous prédisons puisque ces droits enlèveront toute rentabilité aux exportations vers des marchés étrangers.
    Vous avez affirmé que les nouveaux droits forceront l'industrie à opérer des changements et à s'adapter à une nouvelle réalité.
    Quels sont les projets de l'industrie et que peut faire le gouvernement pour lui venir en aide?
    L'industrie doit se conformer à l'élimination de la classe de lait 7, et elle a entrepris de le faire. Maintenant, nous allons devoir réduire nos exportations de ces produits en fonction des seuils fixés.
    Chaque société examine actuellement son plan d'affaires et cherche des solutions. Des investissements seront nécessaires. C'est pourquoi nous demandons une aide pour nous adapter aux nouvelles conditions.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sheehan, c'est à vous.
    Tout d'abord, merci beaucoup pour vos éclairages. Le travail que nous faisons actuellement est très important pour la 43e législature.
    Nous avions entrepris une étude préliminaire au cours de la 42e législature. Nous avons entendu divers témoignages oraux et lu des mémoires. Parmi les témoins qui ont comparu dans le cadre de l'étude préliminaire de l'ALENA, nous avons reçu entre autres les Producteurs laitiers du Canada. J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'une de leurs déclarations, si vous êtes d'accord ou non, ou si vous avez quelque chose à ajouter. La voici:
L'indemnisation entière et équitable promise par le gouvernement fédéral est essentielle pour assurer la survie du secteur laitier par suite des concessions accordées dans les récents accords commerciaux. L'objectif des producteurs laitiers était de maintenir les niveaux d'importation.
    Les producteurs ont aussi fait valoir que l'indemnisation avait été offerte par le gouvernement comme consolation pour avoir sacrifié le secteur laitier au profit d'autres avantages potentiels des récents accords commerciaux.
    Puis-je avoir vos commentaires sur cette déclaration? Êtes-vous d'accord?
(1125)
    Oui, nous croyons que les producteurs et les transformateurs laitiers doivent être indemnisés pleinement et équitablement.
    Oui, je suis tout à fait d'accord.
    Il y a des choses que je ne comprends pas. Il est important, essentiel, que tous les Canadiens, pas seulement les électeurs de ma circonscription de Sault Ste. Marie, comprennent le rôle névralgique de la gestion de l'offre. Il faut que les gens saisissent les enjeux.
    Quand Trump a affirmé très clairement que son objectif était de démanteler le système de gestion de l'offre, c'était absolument... Je viens d'une ville de l'acier. Quand il dit quelque chose, que ce soit au sujet des droits sur l'acier et l'aluminium prévus à l'article 232 ou du démantèlement du secteur laitier, je le prends très au sérieux. Il ne lance pas des paroles en l'air pour faire avancer les négociations commerciales, comme certains ont pu le croire au début.
    Quelle est l'importance du système de gestion de l'offre pour le secteur laitier? Il faut insister pour que ce soit inscrit au compte rendu et que les téléspectateurs comprennent. Si l'objectif de démantèlement du système de gestion de l'offre avait été atteint, où en serait le secteur laitier aujourd'hui?
    De toute évidence, comme nous sommes une coopérative — je vais mettre mon habit de représentant d'Agropur et parler en son nom pour un instant —, les propriétaires d'Agropur sont les producteurs laitiers. Nos agriculteurs veulent que le système de gestion de l'offre reste en place. La question ne se pose même pas. Je crois que toutes les négociations commerciales ont mis ce système en péril.
    La question n'est plus de savoir s'il faut une entente ou non. Actuellement, l'important est d'obtenir une indemnisation pleine et équitable pour les transformateurs. C'est ce que nous demandons. Nous en parlons depuis des années, mais nous attendons toujours.
    Nous sommes impatients de recevoir l'indemnisation qui nous a été promise, pour ainsi dire, parce que les difficultés s'accumulent. Près de 18 % de notre marché sera approvisionné par des importations, et nous devons poursuivre la croissance de nos activités, de notre industrie. Agropur, comme les autres transformateurs au Canada, veut élargir ses activités, mais nous aurons besoin d'aide pour nous adapter aux répercussions des accords commerciaux qui ont été signés.
    La vérité est que si Trump avait gagné son pari de démanteler le système de gestion de l'offre, l'industrie laitière canadienne serait morte, ou agonisante.
    L'industrie serait assez mal en point, en effet.
    Merci de le confirmer. C'est essentiel que les gens saisissent bien à quel point c'est important.
    Monsieur Trew, j'ai une question pour vous. Le premier ALENA a été négocié il y a longtemps, je dirais même il y a une éternité aux yeux de beaucoup de personnes, y compris de certaines qui se trouvent dans la salle. Trump a demandé une clause de temporisation applicable aux cinq ans environ. Toutes les industries, sans exception, ont rétorqué qu'au lieu de leur offrir la stabilité tant vantée, cette clause les forcerait à négocier de manière continue.
    Selon la nouvelle disposition, l'accord restera en vigueur pendant 16 ans et sera révisé aux 6 ans. Dans 6 ans, certains éléments pourront être ajustés. Que pensez-vous de cette disposition de l'ALENA?
    Je n'ai pas grand-chose à dire, si ce n'est que ce serait bien de tirer avantage de cette période. Nous avons six ans devant nous. L'échéance pourrait être plus courte, selon le résultat des élections aux États-Unis. Comme vous l'avez entendu, il se peut que nous soyons de retour à la table de négociation dans quelques mois. Il faudra profiter de toutes les occasions qui s'offriront à nous, quand viendra le temps de réexaminer l'accord, de faire un bilan des éléments positifs et des éléments négatifs.
    Merci beaucoup.
    J'aurais une question pour la Chambre de commerce...
    En fait, vous n'avez plus de temps.
    C'est au tour de M. Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais aller un peu plus loin avec vous, monsieur Benoit. Mon collègue a évoqué la volonté de M. Trump de démanteler le système de gestion de l'offre. Vous savez que lorsque la version originale du Partenariat transpacifique a été négociée, le contingent tarifaire avait été fixé à 3,5 % plutôt qu'à 7 %.
    Si la version originale du Partenariat transpacifique, qui englobait l'ALENA, avait été adoptée... En fait, elle devait être signée 14 mois avant l'assermentation de M. Trump. Les républicains étaient majoritaires au Congrès et beaucoup de démocrates favorables au libre-échange étaient prêts à adopter l'accord, mais notre homme ne le trouvait pas suffisamment progressiste.
    Si la version originale du Partenariat transpacifique avait été signée, votre entreprise se trouverait-elle en meilleure posture? La situation du secteur serait-elle meilleure maintenant, ou le nouvel ACEUM est-il plus avantageux pour lui?
(1130)
    Je pense que le nouvel ACEUM ajoute trois nouvelles conséquences par rapport au Partenariat transpacifique.
    Le Partenariat transpacifique a ouvert notre marché aux pays signataires, et l'ACEUM augmente cet accès parce qu'il s'ajoute à tout ce qui avait été concédé par le partenariat, y compris pour les États-Unis. C'est une première conséquence. Deuxièmement, dans la dernière version de l'ACEUM, nous avons accepté l'élimination de la classe de lait 7 et, troisièmement, nous avons accepté de plafonner nos exportations vers tous les pays du monde.
    Pour l'Association des transformateurs laitiers, l'ACEUM ajoute trois nouvelles conséquences que n'avait pas le Partenariat transpacifique.
    Et j'en ajouterais une quatrième qui découle des dispositions sur le droit de regard dans l'ACEUM. Essentiellement, nous avons donné au gouvernement des États-Unis le droit de surveiller tout ce qui touche le secteur laitier du Canada.
    Je comprends que le gouvernement essaie d'obtenir un accord gagnant-gagnant-gagnant. Je rappelle qu'avant les élections, aucune analyse des répercussions économiques ne nous avait été présentée et qu'on nous annonçait une victoire pour les Canadiens, un accord gagnant-gagnant-gagnant. Malheureusement, la seule analyse à jour qui nous livre une perspective canadienne a été publiée vendredi dernier. Il s'agit du rapport de l'Institut C.D. Howe. En gros, nous avons appris que la version originale du Partenariat transpacifique a privé l'économie canadienne, de 4,3 milliards de dollars, et que ce chiffre atteint 10 milliards de dollars avec la version actuelle de l'ACEUM.
    Le dilemme auquel nous sommes confrontés, et nos témoins semblent assez unanimes à ce sujet, est que ce sera pire si nous ne signons pas l'accord. Le temps est maintenant venu de nous entendre sur les mécanismes de mise en œuvre et d'indemnisation parce que, en fin de compte, ce sont les familles, les entreprises et les industries qui subissent les contrecoups, et il est clair que le gouvernement doit tout mettre en œuvre pour faciliter la transition.
    J'aimerais vous entendre davantage sur la question de mon collègue concernant les limites applicables aux exportations vers des pays tiers. À mon sens, pour compenser les concessions que le gouvernement a faites dans cet accord, l'industrie canadienne devrait pouvoir développer des produits et augmenter ses exportations vers d'autres pays.
    Pouvez-vous nous donner des précisions ou des chiffres concernant les pertes envisagées pour notre industrie puisque, pour le moment, même nos ventes aux pays qui ne sont pas signataires de l'ACEUM seront plafonnées. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les chiffres?
    Oui. Les pertes atteindront 60 millions de dollars, comme nous l'avons déjà dit. Dominique a mentionné que la particularité est que ces dispositions s'appliquent à tous les pays. C'est une première dans un accord commercial. Selon notre avocat, c'est la première fois qu'un accord entre deux ou trois pays impose des limites aux exportations vers tous les pays, y compris ceux qui ne sont pas signataires. Les conséquences seront évidemment énormes.
    C'est pourquoi la date de mise en œuvre de l'ACEUM est importante. La première année, comme nous l'avons mentionné dans notre exposé, les exportations seront plafonnées à 55 000 tonnes. La deuxième année, le plafond sera abaissé à 35 000 tonnes. Donc, la date d'entrée en vigueur sera très importante.
    Je suis désolée, mais votre temps est écoulé, monsieur Carrie.
    Madame Bendayan.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente. Si vous me le permettez, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue du Parti vert afin de lui permettre de poser des questions également.
    En tant que fière Montréalaise, j'aimerais quand même adresser la parole à M. Leblanc, de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
    Monsieur Leblanc, j'étais très heureuse de vous entendre parler de nos compagnies montréalaises qui font de l'exportation à l'étranger. Dans ma circonscription, comme vous le savez peut-être, nous avons le Mile End, Côte-des-Neiges et Outremont, et on y trouve de plus en plus d'entrepreneurs-exportateurs, surtout dans les domaines de l'avenir, comme l'intelligence artificielle.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que l'existence même de cet accord modernisé est importante pour approfondir notre relation avec les centres d'innovation tels que San Francisco et Boston, et qu'elle va permettre à nos petites entreprises montréalaises d'accélérer davantage leur croissance?
(1135)
    Oui, tout à fait. D'ailleurs, dès l'année dernière, nous avons envoyé des missions additionnelles dans ces régions. Une mission qui s'appelait Femmes en tech Ubisoft est allée dans la région de la Silicon Valley pour établir des liens individuels.
    Comme vous l'avez dit, le domaine de l'intelligence artificielle est devenu une puissance à Montréal, et compte tenu des politiques américaines concernant l'immigration, nous sommes en mesure d'intéresser beaucoup de talents de calibre mondial à s'établir au Canada, notamment dans la région de Montréal. Nous sommes donc en situation de voir nos entreprises accélérer leur croissance et avoir des relations avec les principaux centres d'innovation aux États-Unis.
    Notre défi sera de créer ici des entreprises de services qui pourront faire de l'exportation. C'est pourquoi l'accès obtenu par l'entremise des accords de libre-échange est tellement essentiel. Si la recherche est de qualité ici et qu'on réussit la commercialisation, il faut avoir accès à ces marchés, et cet accord le permet. C'est donc un excellent accord du point de vue de notre base économique, notamment en innovation.
     Merci, monsieur Leblanc.
    Je vais céder la parole à M. Manly.

[Traduction]

    Monsieur Manly.
    Merci beaucoup de partager votre temps pour me permettre de poser des questions.
    La première sera pour M. Trew. J'aimerais parler des mesures à prendre pour atténuer les conséquences et améliorer l'accord. Avez-vous d'autres suggestions? Quels types de procédures et de mécanismes de reddition de comptes seront nécessaires pour nous permettre d'évaluer le fonctionnement de l'accord et ses répercussions socioéconomiques pour les Canadiens en vue des processus d'examen aux six ans?
    Très franchement, nous n'avons pas vraiment réfléchi à ce processus d'examen. À notre avis, cet examen ne permettra pas vraiment de déterminer, par exemple, si l'accord favorise une réduction des émissions dans la région. En fait, nous n'avons pas vraiment réfléchi à ce genre de mécanismes d'examen.
    D'accord.
    J'aimerais poser ma deuxième question à M. Leblanc. Je sais que vous représentez un bon nombre d'industries culturelles de Montréal. Je sais aussi que certains électeurs de ma circonscription sont des travailleurs culturels et qu'ils doivent soumettre leur demande de permis de travail six mois à l'avance et payer 600 $ pour faire une tournée aux États-Unis. Les travailleurs culturels qui viennent des États-Unis ont simplement à présenter leur permis de travail et à payer des droits de 10 $ pour obtenir l'autorisation de travailler ici, et il n'y a aucun délai.
    Avez-vous des commentaires à ce sujet? J'aimerais vous entendre aussi sur les processus qui seront nécessaires pour faciliter l'application de l'accord par l'ASFC, sur la réglementation à mettre en place pour assurer le respect de l'accord par les importateurs et les exportateurs, ainsi que sur l'harmonisation des processus de formation.
    Je trouve votre question très intéressante, mais je dois la replacer dans le contexte actuel. Le marché du travail à Montréal connaît une pénurie de main-d'œuvre, et je dirais que c'est la même chose partout au Québec. Tous les secteurs sont touchés, y compris le secteur culturel. Par conséquent, la venue de travailleurs des États-Unis ou d'ailleurs n'est plus aussi préoccupante qu'elle l'a déjà été.
    Il est clair que l'objectif doit être de faire en sorte que l'accord offre aux résidants des États-Unis qui peuvent contribuer à notre essor économique — par exemple, dans le domaine de l'intelligence artificielle, dont nous venons de parler — la possibilité de venir s'installer ici sans difficulté. Évidemment, ce que vous avez dit s'applique au secteur des services, aux personnes qui se rendent aux États-Unis pour offrir des services aux consommateurs et pour développer des marchés. Ce n'est pas toujours facile. La solution se trouvera dans la réglementation plutôt que dans l'accord lui-même.
    Merci pour votre réponse.
    Nous passons maintenant à M. Savard-Tremblay. Vous avez deux minutes et demie.

[Français]

    Je vais poursuivre la conversation là où nous l'avons laissée tout à l'heure.
    Je vais répéter ma question rapidement.
    Concernant la question des protéines laitières, j'imagine que le milieu a été longtemps divisé par rapport à l'importation de lait diafiltré américain. C'est de cette façon que nous sommes arrivés, finalement, à la fameuse classe 7 dans l'accord. Agropur était parmi les premiers à bannir la chose.
    Aujourd'hui, comment vous situez-vous à cet égard?
(1140)
    Il faut remettre la classe 7 dans le contexte de la stratégie des ingrédients qui a été développée par l'industrie laitière canadienne pour se doter d'infrastructures et de moyens de produire au Canada les ingrédients requis pour les besoins de la transformation.
    Par l'élimination de la classe 7, l'Accord fait un retour en arrière pour trouver ensemble, comme industrie, à cet enjeu, qui était le lait diafiltré, mais qui est plus largement la production au Canada d'ingrédients à prix concurrentiel afin d'être capable de fabriquer nos produits.
    Alors, l'industrie y travaille, et cela aura un prix pour elle, c'est évident. Nous travaillerons avec la solution lorsqu'elle sera implantée. C'est pourquoi nous souhaitons actuellement des mesures d'atténuation pour nous permettre d'amortir des effets de l'élimination de la classe 7.
     Pour dire comme on dit chez nous, qu'est-ce qu'on fait?
    Chacune des entreprises a son plan d'affaires. Dans le cas d'Agropur, je peux affirmer que nous allons continuer d'utiliser des ingrédients laitiers entièrement canadiens. Nous avons pris cet engagement et nous le maintenons.
    En ce qui concerne l'industrie, nous devons trouver ensemble des solutions. Qu'est-ce qu'on fait? Je peux dire qu'on y travaille très ardemment, entre producteurs et transformateurs. Les transformateurs laitiers du Canada et les producteurs laitiers du Canada se sont engagés dans la recherche de cette solution pour remplacer la classe 7.
    C'est un énorme chantier qui est entrepris, seulement trois ans après qu'on ait implanté la classe 7. Alors, nous retournons en arrière. Nous retroussons nos manches et nous y travaillons.
    Vous confirmez donc l'existence...

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Savard-Tremblay. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Blaikie.
    Monsieur Benoit, vu les conséquences de l'accord sur le secteur laitier canadien, le gouvernement devrait à tout le moins octroyer la totalité des permis d'importation aux transformateurs.
    Si jamais le gouvernement n'arrive pas à la même conclusion, croyez-vous que l'autre solution serait d'interdire aux détaillants qui ont reçu des permis d'importer des produits qui sont en concurrence avec ceux qu'offrent déjà les producteurs laitiers canadiens? Autrement dit, ces détaillants pourraient introduire seulement des produits nouveaux dans le marché canadien, et il leur serait interdit d'importer des produits qui forceraient les producteurs canadiens à baisser leurs prix.
    Notre position est très claire. Les contingents tarifaires d'importation doivent être octroyés aux transformateurs. Pour quelle raison? Parce que nous offrirons aux consommateurs des produits complémentaires à ce qui est offert au Canada plutôt que des produits qui remplaceront les produits canadiens.
    C'est la raison pour laquelle nous avons tant insisté pour que le gouvernement octroie ces contingents tarifaires aux transformateurs. C'est notre peau qui est en jeu. Ce sont nos usines qui devront réduire leur production pour le marché intérieur à cause des importations. Si on nous octroie les contingents d'importation, nous pourrons limiter les répercussions pour nos usines, notre main-d'œuvre et l'économie du secteur laitier canadien. C'est ce que nous visons.
    Le gouvernement n'a aucune raison d'octroyer des contingents tarifaires d'importation à nos clients. Nous continuons de participer aux consultations et de plaider que c'est une simple question de bon sens du point de vue des affaires.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Blaikie.
    C'est ce qui conclut l'audition de ce groupe de témoins. Merci à vous tous d'avoir participé à nos travaux.
    Nous allons suspendre la séance et nous commencerons l'audition du prochain groupe de témoins à midi.
(1145)

(1200)
    Nous allons reprendre la séance. Nous étudions le projet de loi C-4 portant mise en œuvre de l'Accord entre le Canada, les États-Unis d'Amérique et les États-Unis mexicains.
    Plusieurs témoins sont à la table. Darren Erickson, pharmacien propriétaire de Tofield PharmaChoice, ainsi que Gayleen Erickson, propriétaire de la Guardian Pharmacy à la Tofield Medical Clinic, témoigneront à titre personnel. Nous entendrons également David Wiens, président des Producteurs laitiers du Manitoba; Joel Prins, représentant la Prima Dairy Farm, ainsi que Matthew Flaman, représentant le Saskatchewan Milk Marketing Board.
    Je vous souhaite la bienvenue.
    Monsieur Wiens, représentant les Producteurs laitiers du Manitoba, voulez-vous commencer?
    Je vous remercie de me donner la chance de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Notre ferme est située près de Grunthal, au Manitoba, à 80 kilomètres environ au sud de Winnipeg. Je suis un producteur laitier de la troisième génération. Mes grands-parents sont arrivés au Canada dans les années 1920 afin de commencer une nouvelle vie et de fonder une famille. Mes parents ont repris leur ferme dans les années 1950.
    Depuis les années 1960, quand le système de gestion de l'offre est entré en vigueur, leur revenu d'exploitation s'est stabilisé. Cette stabilité leur a permis d'agrandir la ferme et de faire vivre leur famille. La gestion de l'offre a permis aux exploitations laitières de contribuer à la prospérité de leurs communautés.
    Mon frère, moi-même et nos familles avons repris l'exploitation laitière sur laquelle nous continuons de travailler aujourd'hui. La ferme familiale nous a permis, à mon frère et à moi, d'élever nos familles. Nous avons continué de l'agrandir et de contribuer à notre communauté.
    Aujourd'hui, à titre de président des Producteurs laitiers du Manitoba, je représente 270 familles exploitant des fermes laitières dans la province. L'ACEUM aura des répercussions négatives à long terme sur la très dynamique industrie laitière du Manitoba. Les concessions que nous avons faites se traduiront par des pertes permanentes. L'ACEUM n'est pas un accord avantageux pour les secteurs laitiers du Canada ou du Manitoba. Ce secteur fait partie des deux plus importants secteurs agricoles dans 7 provinces sur 10, mais pas au Manitoba. Malgré tout, ses retombées sont importantes pour la province puisque la transformation des produits laitiers se classe au quatrième rang dans le secteur de la transformation d'aliments.
    L'ACEUM élargit l'accès pour le lait venu d'ailleurs, il élimine la classe de lait 7, il diminue notre souveraineté en raison de l'exigence des États-Unis d'avoir droit de regard sur l'élaboration des politiques sur le secteur laitier, et il impose une surtaxe sur les exportations de protéines de lait. Ces concessions auront de fortes conséquences à l'échelle locale. Pour le marché manitobain, l'élargissement de l'accès fera chuter les revenus annuels de 8,4 millions de dollars. Pour l'ensemble du Canada, les pertes atteindront 190 millions de dollars. Ces chiffres ne tiennent pas compte des répercussions de l'élimination de la classe de lait 7 et du plafonnement des exportations. En accordant aux Américains un droit de regard sur le système de gestion du secteur laitier canadien et la possibilité de s'ingérer dans l'élaboration de nos politiques, nous renonçons ni plus ni moins à souveraineté.
    Au Canada, ce sont 3,9 %, ou 100 000 tonnes de lait ou de produits laitiers étrangers qui pourront pénétrer dans notre marché. Dans une perspective pancanadienne, la perte de 3,9 % du marché équivaut à la disparition presque complète de l'industrie laitière du Manitoba.
    Les concessions accordées dans l'ACEUM ont des répercussions profondes sur les piliers de la gestion de l'offre, c'est-à-dire les mécanismes de contrôle des importations, la gestion de la production et la prévisibilité des importations. Ces piliers sont aussi importants que les trois pieds d'un tabouret à traire. Enlevez-en un, et il ne tient plus. Les répercussions de l'ACEUM ne se feront pas sentir seulement sur l'industrie laitière du Manitoba, de la ferme au transformateur, mais sur notre capacité de contribuer au produit intérieur brut à long terme. À l'échelle nationale, on parle de 19,9 milliards de dollars, et de 582 millions de dollars au Manitoba. Des emplois seront perdus, dans la province puisque les produits de provenance étrangère feront chuter la demande en lait de provenance locale.
    Le recul de notre production agricole aura un effet boule de neige dans toutes les régions rurales du Manitoba. Si les exploitations familiales disparaissent, les fournisseurs de services comme les vétérinaires, les mécaniciens ou les nutritionnistes subiront une baisse de la demande. Il y aura aussi un recul de la dépendance à des produits agricoles comme l'orge fourragère, ou même la farine de canola qui sont produites au Manitoba et qui sont utilisées par les fermes laitières.
    Ces répercussions ne toucheront pas seulement le Manitoba rural. Si moins de lait est produit au Canada et qu'on importe plus de lait des États-Unis, nos 12 transformateurs seront touchés. Au Manitoba, l'industrie laitière génère 7 955 emplois équivalents temps plein. Ces chiffres diminueront. Par ailleurs, l'accord a entraîné une suspension des investissements dans le secteur manitobain de la transformation parce que les transformateurs ont pris un temps de réflexion pour déterminer les effets sur leurs activités et quels types de procédés de transformation devront être favorisés à l'avenir. Le gel des plans d'investissement compromet les perspectives d'installation d'un nouveau transformateur ou d'expansion d'un transformateur existant. L'accroissement des activités de transformation de produits laitiers aurait entraîné la création d'emplois durables et la hausse des volumes de lait produits et transformés dans la province et, par conséquent, du produit intérieur brut du Manitoba.
(1205)
    De plus, l'augmentation de l'accès au marché canadien aura pour conséquence de réduire la part du marché intérieur des producteurs laitiers, sur laquelle reposent leurs décisions d'investissement. Cette part de marché est aussi déterminante dans la décision de beaucoup de jeunes agriculteurs de se lancer ou non dans cette industrie. Les produits laitiers étrangers supplanteront le lait canadien et les produits fabriqués avec ce lait, même si les normes de salubrité et de qualité qui régissent les produits importés ne sont pas aussi strictes que celles auxquelles sont tenus les agriculteurs canadiens conformément au programme national de salubrité alimentaire à la ferme, que nous appelons « proAction ». C'est le prix à payer pour renoncer à cette part du marché intérieur et respecter l'engagement du gouvernement d'octroyer une indemnisation en compensation de ces concessions.
    La clause liée au droit de regard porte atteinte à la souveraineté du Canada et à sa capacité d'élaborer et d'administrer des politiques sans que les États-Unis interviennent. Malheureusement, les États-Unis ne seront pas obligés de soumettre leurs systèmes à une surveillance aussi étroite du Canada. Ce régime est un autre exemple des coups que portera l'ACEUM à notre avantage concurrentiel et de la dépendance dans laquelle il place l'industrie laitière canadienne par rapport aux décisions des Américains. Il ne faut pas minimiser cet effet à long terme sur le secteur laitier canadien. La clause de souveraineté de l'ACEUM minera notre capacité à administrer nos propres politiques à l'abri de l'ingérence américaine. En permettant aux Américains de nous dicter nos politiques, nous menottons notre industrie.
    Le dernier effet de l'ACEUM dont je veux parler a trait à l'imposition de restrictions aux exportations canadiennes. Le Canada a obtempéré aux demandes des États-Unis de plafonner ses exportations de poudre de lait écrémé, de concentrés de protéines de lait et de préparations pour nourrissons. L'effet combiné de ces mesures restreindra nos capacités de croissance du marché intérieur. La clause sur les exportations paralyse l'industrie laitière canadienne sur les deux fronts. Non seulement perdra-t-elle des parts de marché, mais elle ne pourra plus exporter ses produits en raison des surtaxes et des restrictions draconiennes.
    Le programme d'indemnisation annoncé pour compenser l'élargissement de l'accès aux termes de l'AECG et du Partenariat transpacifique était un premier pas en ce sens. Toutefois, nous demandons au gouvernement canadien d'octroyer aux producteurs laitiers une aide directe pour les sept années restantes du plan d'indemnisation pleine et équitable visant à atténuer les répercussions de ces accords, et d'inscrire ces sommes au Budget principal des dépenses de 2020. Nous demandons aussi au gouvernement de respecter sa promesse d'octroyer une indemnisation pleine et équitable pour compenser les répercussions de l'ACEUM.
    Des mesures doivent être prises pour atténuer les répercussions des droits à l'exportation. Des mesures administratives pourraient être négociées avec les États-Unis, même après la ratification de l'ACEUM. Les plafonds imposés marquent un dangereux précédent pour tous les produits canadiens exportables puisqu'ils réduisent la compétitivité du Canada dans les marchés mondiaux. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement canadien de négocier une entente administrative avec le gouvernement américain pour que les droits prévus à l'ACEUM s'appliquent seulement aux exportations vers les États-Unis et le Mexique, et pas aux exportations vers d'autres pays.
    Il faut souligner que si l'ACEUM entre en vigueur avant le 1er août, soit la date de début de la campagne laitière, les seuils d'exportation de poudre de lait écrémé, de concentrés de protéines de lait et de préparations pour nourrissons subiront une baisse spectaculaire de près de 35 % en quelques mois. Ce serait un autre coup dur pour le marché des produits laitiers, parce qu'il n'y aura pas de période de transition. Pour que la période de transition soit suffisante avant l'imposition de seuils d'exportation, nous demandons que l'ACEUM n'entre pas en vigueur avant le 1er août de cette année.
    Pour terminer, je trouve important d'attirer votre attention sur le fait que plus les importations sont importantes, plus le risque est grand, et qu'il faut par conséquent augmenter les ressources pour assurer une bonne surveillance et l'application des règles et des normes commerciales à la frontière. Actuellement, les niveaux de formation, les outils et les ressources de l'ASFC ne lui permettent pas d'assurer un contrôle efficace des importations au Canada. Par exemple, les États-Unis autorisent encore l'utilisation de l'hormone de croissance artificielle STBr dans le secteur laitier, mais elle a été interdite au Canada pour des raisons de santé animale. Nous demandons une hausse des ressources, des outils et des niveaux de formation pour permettre à l'ASFC d'améliorer rapidement et de manière transparente ses interventions à la frontière.
    Merci.
(1210)
    Merci beaucoup, monsieur Wiens.
    Nous donnons la parole à M. Prins, de Prima Dairy Farm.
    Je suis Joel Prins, et j'ai travaillé dans l'industrie laitière toute ma vie. J'ai grandi et je travaille actuellement dans une ferme près du petit village de Warburg, en Alberta, à une heure au sud-ouest d'Edmonton.
    Comme tant d'autres producteurs laitiers de notre région, mes parents ont tous deux émigré des Pays-Bas au Canada en quête de nouvelles possibilités. Au milieu des années 1980, ils ont pu économiser assez d'argent pour verser un acompte sur une petite ferme laitière qui comptait 37 vaches et 160 acres de terre. Ils ont travaillé jour et nuit depuis afin d'avoir la certitude d'être en mesure de nous élever, mes trois jeunes et frères et moi, sur la ferme.
    En grandissant, mes frères et moi avons appris de nombreuses leçons précieuses, de l'importance de prendre soin des animaux à l'importance de l'engagement et du dévouement à la tâche. Quand nous fréquentions l'école primaire, mes frères et moi nous levions à l'aube pour veiller à nourrir tous les veaux avant de rentrer à la maison sans tarder pour nous préparer à prendre l'autobus.
    C'était la même chose après l'école. Nous nous dépêchions souvent à la sortie de l'autobus d'aller aider nos parents dans les champs, à ratisser ou mettre le foin en balles, ou dans l'étable à traire les vaches. On pourrait dire que la production laitière nous a été inculquée, à mes frères et à moi, dès notre plus jeune âge, et j'ai appris que c'est un mode de vie, pas seulement un travail. Dans cet état d'esprit, rendus à l'âge adulte, mes frères et moi avons pu continuer à faire grandir la ferme pour en arriver aux 400 vaches que nous trayons aujourd'hui.
    Le système de gestion de l'offre est la principale raison pour laquelle nous avons pu prospérer. La gestion de l'offre permet aux agriculteurs, comme ma famille, de continuer à investir dans le secteur, sûrs de la stabilité future. Elle garantit aussi que nous touchons un prix équitable pour le produit que nous vendons et que nous n'avons pas à dépendre de subventions directes de l'État pour la production, dont les producteurs laitiers d'autres pays sont si dépendants.
    Par exemple, les agriculteurs européens touchent 55 milliards d'euros de subventions par an, et les Américains ont versé 4 milliards de dollars de subventions en 2009. Les producteurs laitiers canadiens tirent leurs revenus du marché, et non de l'État. Nous apprécions les programmes d'indemnisation de l'État pour atténuer une partie de l'impact du rétrécissement de notre marché, mais si nous avions eu le choix, nous aurions de loin préféré avoir un marché intérieur qui ne subisse pas les contrecoups d'accords commerciaux, sans programmes d'indemnisation pour l'industrie laitière.
    Les producteurs laitiers sont aussi un moteur important de l'économie canadienne. L'industrie laitière continue à générer annuellement 20 milliards de dollars pour le PIB du Canada. Les producteurs laitiers soutiennent aussi grandement nos économies rurales locales. Rien que sur notre ferme, nous avons cinq employés locaux et nous créons de nombreuses retombées par les achats que nous faisons dans les collectivités voisines pour aider à maintenir la vigueur de notre économie rurale.
    Dans l'ensemble, l'industrie laitière emploie plus de 220 000 Canadiens, de la ferme au détaillant en passant par la transformation et toutes les étapes intermédiaires. La gestion de l'offre permet non seulement d'employer des gens locaux, mais aussi aux consommateurs de savoir que leur lait est local et qu'ils soutiennent les fermes voisines. Sondage après sondage, il est clair que les Canadiens soutiennent les fermes laitières locales et le lait produit localement. C'est rassurant pour plusieurs, puisque le lait canadien répond à des normes parmi les plus rigoureuses au monde. Ce qui est inquiétant, c'est que le lait étranger qui entre au Canada en vertu de ces accords commerciaux n'est pas tenu de respecter les mêmes normes de production.
    Au cours des deux dernières années, sur notre ferme, ma famille est passée par les étapes de la planification de la relève. Mes frères et moi commençons tous à fonder notre famille et notre seul souhait est d'élever nos enfants sur une ferme laitière où nous pouvons leur enseigner les valeurs qu'ils ne peuvent apprendre que sur une ferme. Cette planification de la relève exige une grande confiance dans notre système de gestion de l'offre et dans l'État, qu'ils continueront à soutenir notre industrie en la défendant et en la protégeant.
    Nous avons tous contracté des dettes de plusieurs millions de dollars, qui prendront des années à rembourser. Cependant, ces derniers temps, nous remettons en question notre décision d'assumer ce genre de risque. On dirait que notre industrie est sans cesse donnée en pâture pour conclure un accord commercial. La gestion de l'offre au Canada s'érode graduellement, en commençant par l'Accord économique et commercial global, l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste et maintenant, l'Accord Canada-États-Unis-Mexique.
    À lui seul, l'ACEUM demande 3,9 % de notre marché intérieur. Si nous additionnons les trois accords, cela représente 18 % de notre marché intérieur d'ici 2024, quand ils seront tous mis en œuvre. Cet accès au marché a des répercussions dramatiques sur nos fermes et n'a probablement qu'un effet minime sur les pays qui bénéficient de cet accès accru.
(1215)
    Par exemple, 3,9 % d'accès pour un producteur laitier américain est loin d'être une solution à son problème de surproduction. L'État du Wisconsin produit plus de lait que le Canada dans son ensemble, donc ce petit accès n'aide pas à régler son problème et nuit considérablement à nos fermes locales. Non seulement l'accord commercial élargit-il l'accès nos marchés intérieurs, mais il nous oblige aussi à limiter notre production de lait de classe 7.
    D'autres concessions comprenaient un plafond à l'exportation mondiale qui limite l'exportation de produits laitiers canadiens dans le monde entier. C'est très inquiétant, car les implications de ce plafond vont au-delà des trois pays pour lesquels l'accord commercial est négocié. Le Canada devrait pouvoir défendre ses propres droits et s'opposer aux répercussions commerciales dans ces pays au lieu de voir ses pays voisins les lui dicter.
    Au-delà de l'accès accru au marché, de l'élimination d'une de nos classes de lait et du plafonnement mondial des exportations, l'élément le plus préoccupant est que l'industrie laitière canadienne devra aussi consulter les États-Unis pour toute modification de la politique intérieure relative à la classification du lait. Il s'agit d'une grave atteinte à notre souveraineté canadienne. L'industrie laitière canadienne ne devrait pas avoir besoin de l'approbation d'un autre pays pour modifier une politique intérieure.
    Nous estimons que cela nuira à notre capacité à nous adapter et réagir aux demandes du marché et à innover. Nous ne pourrons plus prendre des décisions qui servent au mieux les intérêts des Canadiens, puisque nous devrons consulter les États-Unis avant de modifier des politiques. Cette politique ne sert pas les intérêts des Albertains ni des Canadiens. L'effet économique de cette disposition est difficile à déterminer, mais on peut supposer que les États-Unis ne verraient pas d'un bon œil une politique qui profiterait aux Canadiens face à l'industrie laitière américaine. Posez-vous la question: les États-Unis ou le Mexique auraient-ils accepté cette disposition si les rôles avaient été inversés?
    L'accord commercial entre le Canada, les États-Unis et le Mexique a de nombreuses répercussions négatives sur nous en tant qu'industrie laitière assujettie à la gestion de l'offre. Même si l'accord n'a pas encore été signé, il a eu de nombreuses implications. Des transformateurs ont hésité à réinvestir au Canada, tandis que certains ont même abandonné de nouveaux projets qui étaient sur le point d'être conclus. Ce sont des occasions ratées pour la croissance de l'économie canadienne.
    Même à la ferme, lorsque nous nous entretenons avec des collègues agriculteurs, nous ressentons un malaise et une réticence par rapport à ce qu'ils doivent faire. J'ai même vu quelques voisins qui ont décidé de quitter l'industrie en raison du stress accru qu'ils vivaient à cause des accords commerciaux. Ils font encore remarquer que d'autres accords commerciaux s'en viennent et ils craignent que nous finissions encore par être donnés en pâture. Même pour mes frères et moi, cet accord commercial nous tourmente énormément. Nous venons de prendre la relève de nos parents et nous sommes découragés et frustrés de voir notre croissance sur notre marché intérieur être sacrifiée périodiquement à quelques années d'intervalle.
    Comment une industrie peut-elle survivre si on lui demande de stagner ou de rétrécir pour permettre à des pays étrangers d'y entrer avec leurs produits? Cela ne pourra plus fonctionner à long terme.
    En conclusion, je voudrais dire que les producteurs laitiers veulent simplement pouvoir tirer leur subsistance de leur marché, en faisant ce qu'ils aiment faire sans la menace constante de voir le gouvernement les offrir sans cesse en sacrifice dans le prochain accord commercial. Personnellement, je veux pouvoir me réveiller dans 30 ans et transmettre à mon fils une exploitation laitière prospère, et savoir qu'il pourra aussi le faire un jour pour ses enfants. Je veux raconter comment mon gouvernement a défendu nos fermes laitières et apprécié nos contributions à ce grand pays, mais aujourd'hui, je ne sais pas si je pourrai avoir cette conversation, si nous sommes continuellement confrontés aux obstacles que le gouvernement crée contre notre industrie.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir donné l'occasion de vous faire part de certaines des implications de l'ACEUM pour ma ferme laitière et les fermes laitières à la grandeur du Canada et de ce que l'avenir réserve à notre industrie.
    Je vous remercie.
(1220)
    Merci beaucoup, monsieur. C'est très apprécié.
    Monsieur Flaman.
    Je suis Matthew Flaman. Ma femme, mes fils et moi sommes des producteurs agricoles de quatrième et cinquième générations de Vibank, en Saskatchewan, près de Regina.
    Aujourd'hui je parle en mon nom et au nom de 165 producteurs laitiers de la Saskatchewan. Je vous remercie de me donner l'occasion de vous faire part de mes réflexions sur les répercussions que l'ACEUM aura sur moi.
    La gestion de l'offre a permis à notre ferme et à ma famille de contribuer à l'économie locale en faisant appel à des employés locaux, des vétérinaires, des concessionnaires de machinerie agricole et d'autres services à proximité. La stabilité offerte par la gestion de l'offre m'a permis d'avoir la confiance nécessaire pour investir dans notre ferme, notre collectivité et notre région. Les concessions accordées dans les accords commerciaux ont maintenant créé une certaine incertitude quant à la conjoncture future.
    Les producteurs laitiers ne voulaient pas de concessions, mais elles sont là — 3,9 % dans l'ACEUM et près de 18 % à venir. Il est important pour moi que l'on entende, dans les termes que notre gouvernement a employés, qu'une indemnisation « complète et équitable » sera versée pour compenser les répercussions directes de ces concessions. Nous avons réclamé des paiements directs, parce que nous nous sommes fait soutirer une partie de notre marché. Les programmes qui stimulent les innovations sont formidables, mais ils peuvent être mis en œuvre en tout temps. Ils ne constituent pas une indemnisation pour la perte de marché.
    Jusqu'à présent, nous avons reçu un paiement dans le cadre d'un précédent accord commercial européen, et nous l'avons utilisé pour faire des gains d'efficacité en améliorant le confort des vaches et la ventilation dans notre étable pour nos plus jeunes veaux. Nous l'avons aussi utilisé pour financer la prochaine génération, dans le cadre de la planification de la relève.
    Je tiens aussi à parler des plafonds d'exportation qui sont entrés en vigueur dans le cadre de l'ACEUM. Ils touchent une corde sensible chez moi, non seulement comme producteur laitier, mais aussi comme citoyen canadien. Comme mes collègues vous l'ont dit, ces plafonds sont sans précédent. Pour répondre à la question de M. Prins, à mon avis, il n'y a aucune chance que les États-Unis ou le Mexique permettent un jour que des plafonds qui devaient se limiter aux trois pays soient étendus au monde entier. Comme Canadien, c'est très troublant pour moi, et pas seulement comme producteur laitier. Les répercussions vont bien au-delà du secteur laitier et ces plafonds peuvent être utilisés dans n'importe quel autre secteur lors de futures négociations commerciales. Cela me fait peur.
    En conclusion, je tiens à dire que la production laitière m'a donné une bonne vie. Elle m'a donné une bonne occasion d'élever ma famille. Elle m'a donné la possibilité de faire travailler quelques employés locaux et de permettre à quelques jeunes de faire des études. Elle a été pour moi une source de fierté dans ma vie. Je ne demande rien d'autre que mon entreprise puisse prospérer et que mes fils prennent un jour la relève et mènent eux aussi une vie prospère.
    Je crains qu'on fasse subir à l'industrie une mort à petit feu. Non seulement perdons-nous un accès au marché, mais les plafonds à l'exportation qui nous empêchent d'expédier nos concentrés de protéines dans le monde entier me préoccupent beaucoup, parce qu'ils limitent nos possibilités d'expansion. Si cette situation perdure, je ne sais pas quel conseil je donnerai à mon fils dans ses efforts pour devenir un producteur laitier.
    Je vous suis reconnaissant du temps que vous m'avez accordé. Je vous remercie de m'avoir donné cette occasion.
(1225)
    Merci beaucoup, monsieur Flaman.
    Nous allons passer aux Erickson, à qui des deux voudra ouvrir le bal.
    D'accord, allez-y.
    Merci.
    Nous sommes reconnaissants d'avoir l'occasion de vous adresser la parole. La possibilité de décrire ce qui se passe sur le terrain, dans nos entreprises, peut être mutuellement bénéfique pour cette législature et celles à venir.
    J'ai aussi grandi sur une ferme, mais j'ai fini par posséder une pharmacie. Je suis le propriétaire de Tofield PharmaChoice. Tofield est une municipalité située à environ une demi-heure d'Edmonton. Je gère en plus une clinique médicale voisine et je suis l'actuel président de l'Alberta Pharmacists' Association. Je ne parle pas aujourd'hui en leur nom, les opinions que je présente aujourd'hui sont mes opinions personnelles.
    L'ACEUM a beaucoup retenu l'attention à cause des changements touchant le secteur de l'automobile et l'industrie laitière, comme nous venons de l'entendre. Le Comité permanent devrait se préoccuper des dispositions de l'accord susceptibles d'avoir des répercussions importantes sur l'industrie pharmaceutique et, par conséquent, sur mes patients.
    Je crois comprendre que l'ACEUM original aurait prolongé de huit à 10 ans la protection des données découlant d'essais de médicaments pour un sous-ensemble de médicaments connus sous le nom de médicaments biologiques innovants. Je vais vous expliquer de quoi il s'agit.
    Comme pharmaciens et comme patients, nous connaissons très bien les petites molécules simples qui ont été produites au cours des 50 dernières années, dont l'acétaminophène, la codéine et les antibiotiques. Elles sont faciles à reproduire, car nous pouvons en faire un produit générique et ces produits se vendent à environ 25 % du coût d'un produit de marque. Nous utilisons ces produits génériques depuis leur arrivée il y a environ 35 ans, et j'étais là dès le début. La disponibilité de produits génériques a augmenté la disponibilité de médicaments pour tous les patients et permis d'économiser des millions de dollars aux régimes d'assurance-médicaments privés, provinciaux et fédéraux.
    Un médicament biologique est un produit un peu différent. Il s'agit d'une grosse molécule complexe, généralement fabriquée en manipulant des cellules vivantes pour produire une protéine précise. La plus courante que tout le monde connaît est l'insuline. Les médicaments biologiques ont de nombreux avantages, notamment celui d'être une option thérapeutique exceptionnelle soit parce qu'ils ont moins d'effets secondaires ou qu'ils constituent un traitement plus efficace pour une maladie. Le prix des médicaments biologiques peut être de cinq à 10 fois supérieur à celui des petites molécules simples. Quand je parle de molécules, je parle de médicaments.
    Les versions génériques de médicaments biologiques sont appelées « biosimilaires », parce qu'ils ne sont pas identiques, contrairement à la fabrication d'un générique d'une molécule simple. Ils sont très proches d'être identiques et ils produisent les mêmes résultats dans l'organisme pour une maladie donnée. De nombreuses provinces les traitent comme des substituts, même s'ils ne sont pas interchangeables, mais en comparaison, ils vont permettre aux payeurs d'économiser plusieurs millions de dollars par an. Les biosimilaires sont disponibles et nous les utilisons maintenant à la grandeur du Canada.
    La loi canadienne en vigueur prévoit 20 ans de protection des brevets, ce qui n'est pas la même chose que la protection des données. Les brevets de médicaments sont comme des brevets de produits. La protection de données est un peu différente. Comme il faut mener des recherches pour mettre au point un médicament, sa mise en marché prend beaucoup de temps. Une protection est offerte aux entreprises après la mise en marché du médicament parce que le délai de 20 ans n'offrirait pas une protection suffisante.
    Contrairement aux autres brevets, les médicaments doivent faire l'objet d'essais et d'analyses pour prouver leur efficacité et leur innocuité, ce qui épuise une grande partie de la période de protection offerte par le brevet. La protection des données débute au moment où les fabricants commencent à commercialiser le médicament et elle offre concrètement une durée minimale d'exclusivité commerciale, peu importe le statut du brevet. La protection des données interdira aux fabricants de médicaments d'utiliser les données pour obtenir l'approbation commerciale de la sécurité et de l'innocuité d'un médicament. Lorsqu'une société titulaire d'un brevet teste un produit dans le secteur des génériques, si les gens étaient autorisés à utiliser une partie de ces données pour mettre en marché leurs médicaments, c'est essentiellement ce qu'offre cette protection des données: elle protège le médicament pour nombre d'années afin de permettre à l'entreprise de faire un peu d'argent.
(1230)
    Avant sa signature en décembre, l'ACEUM prévoyait deux années supplémentaires de protection des données pour les molécules biosimilaires. C'est important, car cette protection supplémentaire aurait augmenté le prix des produits et était valide deux années de plus. D'après ce que j'ai compris, la durée a été ramenée à huit ans le jour de la signature, le 10 ou 11 décembre, je crois.
    En Alberta, nous avons récemment été témoins de modifications dans nos régimes d'assurance-médicaments publics qui remplacent pour les patients des médicaments biologiques par des biosimilaires moins coûteux. Ces politiques ont été explicitement mises en œuvre afin de réduire les dépenses du régime d'assurance-médicaments public. Plus le recours à des biosimilaires sera répandu en Alberta, plus les économies réalisées par les payeurs et les patients seront grandes. L'Alberta a dépensé plus de 238 millions de dollars en 2018-2019 pour des médicaments biologiques et ces coûts augmentent chaque année.
    Le coût par patient pour des médicaments biologiques originaux peut être supérieur à 25 000 $ par an, tandis que les versions biosimilaires coûtent jusqu'à 50 % de moins. L'initiative de l'Alberta relative aux biosimilaires permettra d'économiser environ 30 millions de dollars par an, une somme qui pourrait être investie dans d'autres services de santé pour les Albertains. La modification de la protection des données prévue dans l'ACEUM aurait directement compromis l'accès de l'Alberta à des pharmacothérapies biologiques abordables.
    Voici quelques exemples. Pour un patient qui se présente au comptoir de ma pharmacie, le prix moyen du Remicade, un médicament biologique de marque utilisé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, est de 1 553 $ par mois pour ce patient ou un tiers payeur, comme la Croix Bleue ou Anciens Combattants Canada, contre 848 $ par mois pour un médicament biosimilaire. Ce prix exclut tout frais ou majoration, ce qui représente une économie annuelle d'environ 8 460 $.
    Prenons un autre exemple: l'insuline Lantus coûte environ 100 $ par mois, contre 75 $ pour un biosimilaire, une économie de 300 $ par an. Cela semble peu, mais lorsqu'on multiplie cette somme par le nombre de diabétiques en Alberta, qui augmente, les économies sont substantielles. Le patient à revenu fixe sans assurance-médicaments ne verra aucune différence concrète entre les deux produits et il utilisera peut-être les économies réalisées pour acheter des bandelettes de test glycémique afin de mieux contrôler son diabète et éviter des séjours à l'hôpital. Rien qu'à ma pharmacie, nous avons probablement 20 à 25 patients qui font ce changement.
    À l'échelle nationale, si la protection des données avait été prolongée à 10 ans au lieu de huit, cela nous aurait coûté plus de 169 millions de dollars en 2029. Je parle de 2029 parce que les brevets sont en voie d'être obtenus pour des produits qui seront disponibles cette année-là, et ce sont eux que l'ACEUM touchera. D'après ce que je comprends, une clause de droits acquis s'applique aux médicaments déjà autorisés.
    D'après ce que je comprends, les modalités définitives de l'ACEUM maintiennent la protection des données à huit ans, ce qui permettra aux payeurs comme mes patients et aux régimes d'assurance-médicaments privés et publics, comme les régimes gouvernementaux, de continuer à faire des économies et ce qui maintiendra le caractère abordable des médicaments pour les patients qui fréquentent ma pharmacie.
    Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de témoigner.
(1235)
    Merci, monsieur Erickson.
    Madame Erickson, avez-vous une déclaration à faire?
    Allez-y, je vous en prie.
    Je suis Gayleen Erickson, propriétaire de Guardian Pharmacy et de la clinique médicale Tofield à Tofield, Alberta. J'ai des réserves à propos de l'ACEUM et des effets qu'il aura sur mes activités commerciales.
    J'aimerais vous fournir quelques données de base sur la pharmacie au Canada et l'incidence des pénuries de médicaments sur ma pharmacie et nos patients. Nous avons vécu de nombreuses pénuries de médicaments, dont le nombre semble augmenter. Les pénuries s'expliquent par de nombreuses variables et circonstances, notamment des inspections d'usines qui révèlent la présence de contaminants, l'accès aux matières brutes qui entrent dans la fabrication des produits, la demande internationale de produits et, le plus souvent, le prix trop bas des produits génériques. Les prix bas rendent les produits plus populaires et moins rentables à fabriquer. La baisse du bénéfice peut convaincre les fabricants d'arrêter la production en faveur d'autres molécules plus rentables, d'où une diminution des réserves qui font office de tampons entre l'offre et la demande. Les produits pharmaceutiques ont des dates de péremption, ce qui limite la quantité de produits dans le système.
    Toutes ces préoccupations engendrent un système d'offre et de demande très inélastique pour les produits pharmaceutiques. À tout moment, le site penuriedemedicamentcanada.ca fait état de pénuries pour environ 2 000 médicaments. Actuellement, notre pharmacie est incapable de fournir à nos clients 60 médicaments courants en raison de ruptures de stock. De plus, tout arrangement conclu par des payeurs privés ou le gouvernement peut exercer un stress supplémentaire sur un système surchargé. Voici quelques exemples de ces pénuries.
    Le pantoprazole a été en rupture de stock après que le principal payeur public de l'Alberta lui a donné préséance comme médicament à prescrire à tous les patients souffrant de reflux gastrœsophagien pathologique, autrement dit de brûlures d'estomac. C'était uniquement dans un souci d'économie.
    La metformine, un antidiabétique courant, n'est plus rentable en raison de la compression des prix pratiqués par de nombreux fabricants, et ils en ont arrêté la production.
    En 2017, un groupe d'environ 20 à 30 médicaments chirurgicaux injectables n'étaient plus disponibles après la découverte d'une contamination dans la seule usine qui en produisait et qui approvisionnait les hôpitaux et les pharmacies au Canada. Nous n'avons pu fournir aux services d'ambulance Beaver des produits essentiels à leurs activités quotidiennes. Bon nombre de ces produits injectables demeurent disponibles en quantités contingentées auprès de notre grossiste, ce qui limite les quantités qu'une pharmacie peut acheter.
    Une pénurie de valsartan a frappé le monde entier lorsqu'un contaminant a été découvert en juillet 2018 dans un produit brut utilisé pour fabriquer les comprimés. Ce rappel, conjugué à la compression des prix, a engendré des problèmes d'approvisionnement qui perdurent pour toute la catégorie des médicaments appelés « antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, ou ARA ». La plupart des molécules de losartan, irbésartan, telmisartan, candésartan et olmésartan sont en pénurie par un effet domino.
    À l'été 2019, les pharmacies canadiennes n'ont pu approvisionner les citoyens canadiens en EpiPen. Les agences de presse ont fait savoir que les gens devaient utiliser des injecteurs périmés en cas d'urgence, tandis qu'aux États-Unis, il n'y a pas eu de pénurie, mais des injecteurs ont été vendus à un prix plus élevé dans un marché à marge plus élevée. Les décisions de prix du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, de l'Alliance pancanadienne pharmaceutique et des régimes provinciaux peuvent avoir une incidence sur l'offre de médicaments de marque et génériques. Les prix des génériques sont souvent basés sur le prix des produits de marque.
    Les pharmaciens sont très préoccupés par les politiques des États-Unis qui permettraient l'exportation supplémentaire de médicaments d'ordonnance du Canada vers les États-Unis. L'importation de médicaments par les États-Unis, tant à titre personnel qu'en gros, n'est ni pratique ni viable. L'ACEUM n'a pas traité de cette préoccupation importante avec laquelle les pharmacies canadiennes doivent composer. Le gouvernement doit être conscient de ces pénuries et des effets de celles-ci sur notre industrie et sur le bien-être de tous nos patients. Bernie Sanders a récemment encouragé les Américains à acheter leurs fournitures pharmaceutiques au Canada à des prix plus avantageux.
(1240)
    Nous avons assisté hier à la période de questions et nous avons été très inquiets d'entendre une motion concernant l'assurance-médicaments. Nous avons du travail à faire pour régler les problèmes actuels d'approvisionnement en produits pharmaceutiques au Canada. La compression des prix, les problèmes de fabrication et les rappels demeurent des sources de problèmes majeures.
    En conclusion, nous vivons d'importants problèmes d'approvisionnement en médicaments au Canada. Ces problèmes sont passés sous silence. Ils augmentent chaque année et nos patients en subissent les conséquences. J'aimerais confirmer que l'ACEUM n'oblige pas ou ne suggère pas que nous fournissions des produits pharmaceutiques en dehors de notre chaîne d'approvisionnement sans garantie d'approvisionnement supplémentaire. Il est essentiel que les modèles d'approvisionnement futurs tiennent compte de la situation actuelle qui se vit dans les pharmacies à la grandeur du Canada.
    Merci, madame Erickson.
    Nous donnons la parole à M. Kurek.
    Merci beaucoup, madame la présidente. C'est un plaisir de pouvoir assister à la séance ce matin.
    Je tiens à remercier chacun des témoins. J'apprécie le fait qu'il y a trois agriculteurs, deux propriétaires d'entreprises et un pharmacien. Vos commentaires sont très appréciés. Je vous suis reconnaissant d'avoir fait le voyage et pris le temps de nous faire part de vos opinions d'experts. Elles sont précieuses et nous vous sommes reconnaissants d'être venus participer à cet exercice démocratique important pour garantir que le projet de loi C-4 fasse l'objet de l'examen requis.
    Je crois qu'il y a un vaste consensus au pays sur l'importance du libre-échange, sur la nécessité d'avoir une relation commerciale solide avec nos partenaires étrangers, mais les différents points de vue qui ont été présentés ici aujourd'hui montrent toute l'importance de soumettre ce texte législatif à la surveillance et à l'examen voulu pour faire en sorte que les Canadiens en comprennent les répercussions.
    Ma question s'adresse à M. et Mme Erickson. Reconnaissant la réalité du libre-échange... En fin de compte, le rôle d'une pharmacie au sein du réseau de la santé consiste à veiller à ce que les patients au Canada aient accès aux soins dont ils ont besoin pour être en bonne santé et être bien traités.
    L'un de vous a-t-il d'autres réflexions sur les répercussions de la vente de médicaments aux États-Unis? Pourriez-vous expliquer son effet sur vos activités quotidiennes? De plus, pouvez-vous aider les membres du Comité à comprendre quelles options s'offrent à nous pour régler ce problème, afin que les gens puissent être conscients de sa gravité.
    Nous avons apporté un exemple de la commande de médicaments que j'ai envoyée samedi. Nous avons commandé 111 produits, dont 33 étaient en rupture de stock. Il ne s'agit même pas d'une liste de tous les articles que nous utiliserons. Il nous manque actuellement une soixantaine de molécules. Chaque fois que j'entends parler d'un autocar qui arrive des États-Unis... Je sais qu'ils ont besoin de médicaments, mais nous avons des problèmes d'approvisionnement ici, actuellement, et nous devons être conscients de cette réalité. Si l'un des membres du Comité se rendait à sa pharmacie aujourd'hui et demandait si elle éprouve des problèmes d'approvisionnement pour un quelconque médicament, il obtiendrait le constat de son pharmacien. C'est la situation partout au Canada. J'ai des amis qui gèrent des pharmacies dans tout le Canada, c'est la même situation partout au Canada.
    Nous voulons prendre le dessus sur ce problème d'approvisionnement. Lorsqu'il y a une pénurie de produits, nous avons beaucoup de travail à faire comme pharmaciens. En Alberta, nous prescrivons; nous substituons des produits. Au Canada, beaucoup de pharmaciens ne peuvent pas prescrire, ils doivent renvoyer le patient chez son médecin. Cela devient une tâche assez lourde de faire cheminer ces patients dans le système.
    Donc, quand j'entends parler de l'arrivée de l'assurance-médicaments, d'un contrôle accru ou de produits moins chers, je n'arrive pas à croire ce qui se passe déjà ici.
    En ce qui concerne les ventes futures aux États-Unis, je crois que nous devons assurer la maîtrise de notre produit ici au Canada. Si nous pouvons avoir la garantie d'un approvisionnement, et si nous pouvons obtenir des stocks, je suis pour. Je suis conscient que nous devons avoir des échanges commerciaux avec les États-Unis.
(1245)
    J'aimerais simplement ajouter que mes pharmaciens passent environ 20 % de leur temps chaque jour à la pharmacie à essayer de trouver des médicaments pour des clients. Il y a un médicament pour les oreilles que nous ne pouvons plus nous procurer. Nous avons dû trouver des pharmacies qui peuvent préparer le produit et c'est la seule façon pour nous de le fournir.
    Nous avons des situations où, à cause de contaminations dans différentes usines, un produit tombera en rupture de stock. Nous devons alors offrir d'autres options. Des médicaments en vente libre sont en pénurie et nous devons maintenant fournir des ordonnances à ces clients.
    Merci beaucoup, madame Erickson.
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Kurek.
    J'apprécie beaucoup. Je pense que cela souligne l'importance d'avoir une discussion approfondie sur le nouvel ALENA — cet ACEUM — ou tout autre dossier soumis au Parlement. Je suis heureux de connaître les différents points de vue et même du simple fait d'apprendre la différence entre les médicaments biologiques et les biosimilaires.
    Brièvement, si je peux...
    Il faut que ce soit très bref. Il vous reste 10 secondes.
    Il est aussi important de reconnaître l'incidence que cela peut avoir sur le développement de nouveaux médicaments et sur ce secteur d'activités au Canada.
    Cependant, comme mon temps de parole est écoulé, je suis heureux d'avoir eu l'occasion de prendre la parole, madame la présidente.
    Merci encore aux témoins pour leurs contributions. J'apprécie vraiment que vous soyez venus et que vous ayez pris part à la discussion.
    Monsieur Dhaliwal.
    Merci aux témoins d'être venus.
    Monsieur Prins, votre histoire était très inspirante. En l'écoutant, cela m'a rappelé mon père. Son histoire ressemblait beaucoup à la vôtre, sa jeunesse passée dans une famille d'agriculteurs. Après avoir fait toutes les corvées, il enfourchait son vélo pour faire l'aller-retour de 37 kilomètres au collège. C'est très inspirant. Je vous souhaite tout le meilleur et je vous remercie pour votre excellent travail.
    Vous avez dit que le gouvernement devait défendre les producteurs laitiers; nous l'avons fait. Le président Trump voulait démanteler la gestion de l'offre, mais nous avons réussi à la protéger. Vous avez mentionné que 3,9 % de la production laitière est touchée et que l'effet est dévastateur. J'essaie simplement d'imaginer quelles auraient été les conséquences si nous n'avions pas protégé la gestion de l'offre. C'est ce que j'essaie de voir.
    Merci pour les compliments.
    Je suppose que c'est quelque chose que nous n'imaginons même pas nous-mêmes et que nous ne pouvons pas comprendre parce que nous sommes vendus à ce concept de la gestion de l'offre et c'est pourquoi nous nous battons si fort pour le défendre. Nos familles comptent là-dessus. Même avec ces 3,9 %, cela ne semble pas beaucoup, mais on dirait que cela s'additionne à chaque fois; nous ne commençons jamais avec une page blanche. Nous avions déjà conclu plusieurs autres accords commerciaux dans lesquels nous renoncions aussi à un pourcentage, c'est pourquoi cela donne l'impression que l'objectif de notre gouvernement est d'en venir à s'en débarrasser.
    Ce n'est pas ce que nous espérons, et ce n'est pas ce que nous imaginons. Nous voulons rester forts dans ce que nous faisons. Ces 3,9 % s'ajoutent donc aux autres. On dirait que tous les deux ou trois ans, à la conclusion d'un nouvel accord commercial, nous nous préparons à faire face à une autre perte. Pourquoi devons-nous toujours le faire?
(1250)
    Qu'en est-il de la demande locale? La demande locale de lait et de produits laitiers a-t-elle augmenté au cours de la dernière décennie, avec l'arrivée de nouveaux immigrants et de différentes communautés?
    Je crois que vous avez bien cerné le problème. Le Canada est un grand pays qui assiste à l'arrivée de nombreux immigrants chaque année. Essentiellement, il semble que nous cédons la croissance qui aurait pu découler simplement de l'arrivée de gens au pays. Au lieu de permettre à nos producteurs de lait de continuer à croître avec la population, nous cédons maintenant cette croissance supplémentaire. Beaucoup d'immigrants aiment nos produits laitiers. Il y a aussi beaucoup d'innovations, ne serait-ce que les transformateurs qui essaient de nouvelles choses et de nouvelles technologies pour que nous puissions apprécier davantage de produits laitiers.
    Oui, vous avez tout à fait raison de dire que le secteur laitier a un potentiel de croissance à l'intérieur du pays, mais nous, agriculteurs, n'en bénéficions pas.
    Merci.
    Ma question s'adresse à Mme Erickson. Je suis d'accord à propos de l'un des médicaments que vous avez mentionné, celui pour les oreilles. Tout ce dont je me souviens, c'est qu'il vient dans une bouteille jaune; je laisserai à mes filles le soin de se souvenir du nom. Il était en rupture de stock. Je suis allé voir mon pharmacien et il nous a fait des reproches. Il a dit que nous faisions baisser les prix des médicaments.
    D'une part, le consommateur souhaite que les prix baissent. D'autre part, lorsque nous le faisons, les pharmaciens nous le reprochent. Comment pouvons-nous arriver à l'équilibre entre les deux?
    Il faut d'abord nous assurer d'un approvisionnement. Actuellement, ils négocient un prix si bas, en ne prévoyant qu'un seul fournisseur pour certains médicaments, qu'en cas de contamination dans cette usine, toute la production est arrêtée. Par la suite, il faut rétablir la chaîne d'approvisionnement à l'usine et il faudra peut-être attendre trois mois avant que le médicament soit à nouveau produit. Pendant cette période, les pharmacies doivent se tourner vers d'autres médicaments, des produits similaires, pour assurer leur approvisionnement.
    C'est comme pour l'olmésartan et tous les ARA. Subitement, l'approvisionnement de tout un groupe de médicaments est interrompu parce que les usines ne peuvent plus les fournir et la situation ne fait que s'aggraver.
    Pour certains produits, comme la metformine, il y avait plusieurs fournisseurs, mais maintenant, je crois qu'il n'en reste plus qu'un. C'est tout ce que nous avons à la pharmacie. C'est un médicament antidiabétique très courant et personne d'autre ne le fournit, donc s'il y a une contamination dans cette usine, nous sommes cuits. Nos clients, nos patients, devront s'en passer.
    Les gens ne se rendent pas compte de la gravité de la situation. Nous avons eu des médicaments pour le cœur... Le médicament pour les oreilles est un médicament mineur, mais quand vous consultez votre médecin et que celui-ci vous dit « Je suis désolé, nous ne pouvons pas le fournir. Utilisez du vinaigre et de l'eau » et vous risquez de perdre l'ouïe... C'est arrivé à notre fils. C'est pourquoi cela me tient à cœur. Ça arrive partout.
    Il y avait un médicament pour les femmes qui éprouvaient des problèmes de contrôle de la vessie. Le prix a été négocié tellement à la baisse que les compagnies ont cessé de le produire. Il n'y a plus de médicament pour cette affection.
    Merci beaucoup, madame Erickson.
    Monsieur Savard-Tremblay.

[Français]

     Je remercie l'ensemble des intervenants de leurs présentations.
    Dans le cas de plusieurs intervenants provenant du milieu agricole, cela a commencé par un résumé de ce que vous faites. Cela me semble très intéressant parce qu'au-delà de votre militantisme, cela nous montre les êtres humains qui se trouvent derrière, qui vivent concrètement les effets de ce qui se négocie, de ce qui se décide, de ce qui se signe et de ce qui se débat. Cela ajoute un visage humain particulièrement intéressant dans le cas présent.
    Tout d'abord, ma question s'adresse aux trois personnes du milieu laitier, du milieu agricole, présentes ici. Je vais vous poser la même question que j'ai posée à plusieurs témoins. Existe-t-il un consensus en la matière? Je pense que vous vous entendez tous sur le fait qu'il faut qu'il y ait des compensations pour votre secteur et pour les producteurs qui ont été lésés par les négociations.
    Il y en a eu dans le cas de traités précédents. En ce qui concerne celui-ci, nous espérons que cela va être annoncé dès le prochain budget. Pouvez-vous nous dire quelles formes de compensations vous souhaitez? S'agit-il de compensations directes ou d'une autre forme, comme un programme d'investissements ou de modernisation?
(1255)

[Traduction]

    Je pourrais commencer à répondre à votre question en disant que les producteurs laitiers souhaitent recevoir un paiement d'indemnisation direct. La raison en est que toutes les exploitations agricoles se trouvent à un moment différent de leur cycle financier.
    Par exemple, certains exploitants agricoles ont fait des investissements importants dans leur ferme afin d'améliorer les soins aux animaux et ainsi de suite, alors cela ne fonctionnerait pas. Ils ne recevraient pas de paiement une fois que des travaux ont été faits. D'autres comptent le faire. Il faut parfois plus de temps aux jeunes agriculteurs pour réunir leur financement. C'est pourquoi il est si important de verser des paiements directs aux agriculteurs, parce qu'ils connaissent précisément la meilleure façon de garantir que le paiement serve à la viabilité future de ces exploitations.
    Je dois être d'accord avec David. Le paiement direct est assurément la façon dont les producteurs laitiers du Canada souhaitent le toucher. Que vous soyez le plus petit agriculteur, le plus gros ou n'importe où entre les deux, vous êtes quand même indemnisé. Vous n'avez pas besoin de soumettre une demande et espérer faire partie des 200 ou 300 qui gagnent la loterie. En ce sens, le paiement direct est la procédure la plus équitable.
    J'aimerais ajouter quelque chose.
    Je suis aussi d'accord avec le paiement direct. La raison en est que l'innovation et l'investissement sont différents dans chaque ferme. David y a un peu fait allusion. Dans certains cas, c'est très nouveau. En Saskatchewan, nous avons un programme pour agriculteurs débutants, comme dans le reste du pays. Dans un tel cas, le paiement servirait peut-être à réduire la dette. Dans d'autres cas, il pourrait servir à améliorer le confort des vaches grâce à de meilleures litières ou une meilleure ventilation. Dans d'autres cas, il pourrait servir à la robotique ou à d'autres innovations pour la traite des vaches. Il offre un choix aux agriculteurs. Comme Joel l'a dit, cela permet à chaque agriculteur d'avoir la possibilité de l'utiliser équitablement, quelle que soit la taille ou la maturité de l'exploitation agricole.

[Français]

     Je constate qu'il y a un consensus, non seulement entre vous, mais entre l'ensemble des personnes issues de votre secteur qui sont venues témoigner devant nous depuis deux semaines.
    Votre réponse ne me surprend donc pas. Cependant, il est important de constater que l'ensemble des témoins nous confirment que c'est là la formule qui est retenue et souhaitable.
    Il y a également une autre question qui a été posée à plusieurs des intervenants. Selon vous, comment évalue-t-on le montant de ces chèques?

[Traduction]

    Je vais y venir.
    Les producteurs laitiers et les représentants du gouvernement ont discuté entre eux après la ratification de l'AECG et du PTPGP. Ils ont convenu que les dommages atteignaient 2 milliards de dollars, un montant validé par le gouvernement. Les mêmes modalités devraient suivre la ratification de l'ACEUM, c'est-à-dire que l'industrie laitière devrait avoir l'occasion de tenir une discussion de même nature avec le gouvernement au moment de la ratification de cet accord.
(1300)
    Pour moi, j'étais trop jeune à l'époque des premiers accords. D'après ce que mon père m'a raconté, des groupes de travails ont été mis sur pied pour analyser les répercussions des accords sur l'ensemble des coûts. Comme M. Wiens l'a indiqué, ce coût total était de 2 milliards de dollars. Lorsque l'ACEUM sera ratifié, un autre groupe de travail devrait être mis sur pied pour analyser les effets de ce dernier, y compris les effets à long terme, sur les agriculteurs. Ce groupe de travail devrait donner un chiffre qu'il sera en mesure de justifier.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Blaikie.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je souhaite la bienvenue à tous nos invités, et en particulier à M. Wiens. Nous avons déjà eu l'occasion de nous entretenir chez nous, au Manitoba, il n'y a pas si longtemps et je suis ravi de reprendre avec lui certains sujets que nous avions alors abordés.
    Dans vos remarques préliminaires, vous avez parlé du recours à la somatotrophine bovine. La part de marché octroyée en application de l'ACEUM est-elle indépendante du contenu de la viande provenant des États-Unis? Les producteurs américains sont-ils autorisés à exporter chez nous des produits qui ne respectent pas les normes canadiennes? Comment cela fonctionne-t-il et qui le surveille?
    C'est exact. L'emploi de l'hormone STBr, une hormone de croissance utilisée aux États-Unis, est illégal au Canada, parce qu'on y craint qu'elle ait des effets sur la santé des animaux. Cela dit, rien n'empêche ces produits d'entrer au Canada. Cela amène à craindre que les consommateurs canadiens ne soient pas toujours bien informés de ce qu'ils achètent, qui pourrait ne pas avoir été produit dans le respect des normes que nous avons définies, en particulier dans le cadre de notre programme d'assurance proAction dont tous les agriculteurs suivent les normes. Celles-ci traduisent la valeur de tous les Canadiens et nous en sommes très fiers.
    Diriez-vous que si les transformateurs canadiens de produits laitiers détenaient le contingent tarifaire, à la place, par exemple, des détaillants, ils seraient mieux à même de déterminer dans quelle mesure les produits en provenance des États-Unis se comparent aux produits canadiens?
    Nous pensons effectivement que ce sont les transformateurs qui devraient détenir les contingents tarifaires. Ils ont et auraient une approche beaucoup plus stratégique dans le choix des produits qu'ils importent et cela perturberait moins l'industrie.
    Nous savons que, dans le cas de la mise en œuvre de l'AECG, plus de 50 % des contingents tarifaires n'ont pas été attribués aux transformateurs, mais aux détaillants. Qu'est-ce que cela a signifié pour l'industrie laitière canadienne? Quelles ont été les répercussions de cette décision administrative du côté canadien? Elle ne découle pas des négociations sur l'accord, mais relève d'une décision unilatérale du gouvernement canadien.
    Elle a eu des effets très néfastes sur les transformateurs de ce pays. Il est certainement facile de calculer les pertes enregistrées sur le marché à la suite de cet accord commercial, qui correspondent à la valeur des 17 000 tonnes de fromages importés. Une partie des répercussions s'est aussi manifestée… Nous pourrions alors discuter du dumping, mais il a réduit les marges des transformateurs canadiens. Il est très difficile de faire concurrence aux largesses de l'Union européenne ou, dans ce cas-ci, des États-Unis.
    Lorsque nous parlons des contingents tarifaires que détiennent les détaillants, est-il juste de dire que les consommateurs canadiens ne s'inquiètent pas uniquement du prix, mais également du choix qui leur est offert?
    Selon le choix du détenteur du contingent tarifaire canadien, celui-ci pourrait servir à tirer les prix vers le bas, y compris à tenter de réduire les marges des producteurs canadiens, ou il pourrait servir à élargir la gamme des produits offerte aux consommateurs canadiens en y ajoutant des produits qui ne font pas actuellement concurrence aux produits laitiers canadiens. Le type d'utilisation qui est faite de ce contingent tarifaire (élargir le choix de produits ou faire baisser les prix) change-t-il quelque chose pour l'industrie?
    Ce choix a certainement des répercussions sur le marché canadien. Dans le cas des transformateurs, une fois encore, leurs importations de produits ont une dimension stratégique, même si une part tellement plus importante du quota d'importation est attribuée aux détaillants par l'AECG, ce qui nuit de façon importante à notre industrie. Une fois encore, les transformateurs agissent de façon beaucoup plus stratégique quand ils utilisent ces quotas d'importation. On peut affirmer que ni les consommateurs, ni les transformateurs, ni les agriculteurs n'ont réellement bénéficié de la façon dont le quota est réparti par l'AECG.
(1305)
    Merci beaucoup, monsieur Wiens.
    Je me demande si nos autres témoins du secteur laitier aimeraient intervenir sur ces questions?
    Oui. J'aimerais faire quelques commentaires rapides sur les importations de lait dans notre pays. Il ne fait aucun doute que l'hormone STBr pose un problème. Il y a une autre chose, touchant ce qui concerne presque une norme de l'industrie, qui est que la qualité du lait au Canada est sans pareil. C'est une norme mondiale.
    Les États-Unis ont leur propre norme qui, dans certains cas, n'est pas aussi bonne. Je ne veux pas… Je suis certain qu'elle est très souvent pleinement satisfaisante. Partout aux États-Unis, ils utilisent ce qu'on appelle la numération des cellules somatiques, qui contribue à la qualité des fromages et qui est, pour l'essentiel, une mesure de la santé de la vache. Quoi qu'il en soit, le chiffre obtenu est environ le double de ce qu'il serait au Canada, peut-être pas tout à fait le double, mais proche.
    Nous sommes très fiers de la qualité du lait que nous produisons sur nos fermes, qui nous donne ensuite des produits laitiers de qualité.
    M. Daniel Blaikie: C'est bien ça. Je vous remercie.
    Nous vous écoutons, monsieur Kram.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je souhaite la bienvenue parmi nous à M. Flaman, qui représente SaskMilk.
    Avec l'entrée en vigueur du nouvel ALENA, les producteurs laitiers canadiens vont perdre 3,9 % de leur accès au marché intérieur. Étant donné le taux de croissance de ce marché et les marges bénéficiaires des producteurs laitiers, pouvez-vous nous donner une idée de ce que signifie une perte de 3,9 % pour un producteur laitier typique de la Saskatchewan.
    En résumé, je crois que cette perte de 3,9 % correspond à peu près à notre taux de croissance prévu pour les années à venir. Cela revient donc à nous priver de notre croissance et en faire cadeau à quelqu'un d'autre. Concrètement, cela aura des effets sur notre avenir. Pour moi, c'est une source de problèmes. Plus important encore, j'y reviens encore, on plafonne le niveau de nos exportations. Non seulement nous prive-t-on de notre croissance sur notre marché intérieur, mais en plus on nous prive de notre croissance sur nos marchés extérieurs. C'est très inquiétant.
    Je pense que si d'autres coupures nous sont imposées à l'avenir, ou que d'autres importations arrivent sur notre marché, on assistera vraiment à la disparition de milliers de fermes laitières.
    Pouvez-vous nous décrire ce que les producteurs laitiers canadiens ont fait, y compris le lancement de nouveaux produits, au cours des dernières années pour prendre de l'expansion sur les marchés d'exportation?
    Je crois que, pour nous, l'avenir se trouve dans les concentrés de protéines du lait. Je ne peux vraiment pas vous dire grand-chose de ce qui se dessine, mais… C'est différent, c'est innovant et c'est ce que le monde attend de nous. C'est bien adapté à notre situation actuelle au Canada, et en Amérique du Nord, alors que la demande de crème et de matière grasse du beurre est forte. Ce qui nous reste, ce sont les protéines de notre composant du lait. Elles peuvent servir dans les préparations pour nourrissons, dans les poudres protéinées et bien évidemment pour accroître la teneur en protéines de pratiquement tous les aliments que nous consommons.
    Comment ces marchés seront-ils touchés par les nouveaux tarifs douaniers imposés aux exportations?
    Pour l'essentiel, avec un plafond très bas de 35 000 tonnes, nous sommes menottées à nos partenaires commerciaux, non seulement aux États-Unis et au Mexique, mais aussi ailleurs dans le monde. Si nous comprenons bien la situation, nous allons perdre ce marché.
    Quand SaskMilk a-t-elle pris connaissance des nouveaux tarifs d'exportation imposés sur les produits laitiers qui entreront en vigueur avec le nouvel ALENA?
    C'était bien après la conclusion de l'accord. Nous n'avons pas été consultés sur les plafonds des exportations, sur les niveaux auxquels ils ont été fixés ni sur les répercussions qu'ils auraient. Peut-être avons-nous été…
    Je vais céder la parole à M. Wiens qui a suivi ce dossier. Nous avons été informés à ce sujet, mais pas consultés. Si M. Wiens a quelque chose à ajouter…
    Lors des négociations, j'ai fait partie de la délégation qui s'est rendue à Washington, à Mexico et à Montréal pour suivre leur déroulement. L'annonce du plafond des exportations, après la signature de l'accord, a été un choc pour nous. Les personnes qui suivaient très attentivement ces discussions n'ont pas non plus été informées de la disposition sur la surveillance par les États-Unis de notre propre politique laitière intérieure.
(1310)
    Monsieur Flaman, si vous voulez poursuivre…
    J'aimerais conclure avec le volet exportation de cet accord. Il me semble en effet qu'il n'a pas de précédent. Il est très inquiétant. Si vous réfléchissez à n'importe quel autre secteur d'activité, qu'un pays signataire d'un accord commercial exerce un contrôle en dehors de cet accord, peu importe le produit dont il s'agit — s'il s'agit d'un type quelconque de fabrication ou d'exportation que nous faisons — c'est très inquiétant. Ce n'est pas bon du tout.
    Monsieur Flaman, avez-vous calculé ce que les nouveaux tarifs douaniers sur l'exportation de produits laitiers vont coûter à l'industrie?
    Je crois que nous avons quelques chiffres à ce sujet.
    Une approximation me suffira.
    Si nous faisons des projections à partir des données antérieures, nous devrions acquitter entre 10 et 20 millions de dollars en droits.
    Faites vite, s'il vous plaît, monsieur Krame.
    Avez-vous eu l'occasion de discuter avec le gouvernement de l'utilisation des fonds qui seront ainsi recueillis?
    Nous ne sommes pas encore rendus à ce point-là.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Monsieur Dhaliwal, la parole est à vous.
    Je vous remercie. J'en reviens au secteur laitier.
    Monsieur Wiens, vous nous avez dit que, au Manitoba, votre secteur emploie 7 950 personnes.
    À votre avis, combien d'entre elles perdront leur emploi du fait de l'entrée en vigueur de l'ACEUM?
    Les répercussions vont aller au-delà du simple nombre des emplois. C'est ainsi que dans notre province nombre des cliniques vétérinaires se sont implantées dans les régions dans lesquelles la production laitière occupe une part importante des activités agricoles. Ces cliniques risquent donc d'être touchées. Les fabriques d'aliments et de tourteau de canola pour vaches laitières en ressentiront toutes les effets. Le résultat net sera comme lieu de voir les exploitations agricoles prospérer, on assistera à leur stagnation.
    À l'heure actuelle, il est très difficile de déterminer avec précision le nombre d'emplois qui seront perdus parce que nous ne connaissons même pas les répercussions complètes de l'élimination de la classe de lait 7. Elle était très efficace pour nous permettre de trouver des débouchés. Comme M. Flaman vous l'a dit, toutes nos importations nous privent de la possibilité de produire pour le marché intérieur, mais les restrictions sur les exportations nous compliquent encore davantage la tâche pour répondre au reste du marché intérieur parce que nous aurons ce surplus de protéines. Qu'allons-nous en faire? C'est la difficulté à laquelle nous sommes confrontés et c'est ainsi que les répercussions se feront sentir dans toutes les cliniques vétérinaires de la province, sur toutes les fermes. Leur croissance est terminée.
    J'ai parlé à des agriculteurs. Certains m'appellent. Ils entrevoient les difficultés qu'ils auront à aller de l'avant. Ils demandent: « Où allons-nous avec ces dispositions? » J'essaie de leur répondre sans vraiment savoir comment les choses vont se passer. Cela se traduit cette année par un ralentissement réel des investissements sur les exploitations agricoles. Lorsque nous parlons à nos fournisseurs, ils nous confirment voir la même situation. C'est aussi vrai pour le volet transformation du secteur. Les transformateurs, s'ils sont en phase de croissance, continueront à accroître leur production. Ce que nous disons au sujet des exploitations laitières est que peu importe que vous ayez 60 ou 500 vaches, il vous faudra environ une personne pour 50 à 60 vaches. C'est la norme. De cette façon, nous allons assister à une réduction de l'emploi dans tous les sous-secteurs de l'activité laitière.
    Saskatchewan, Alberta, Manitoba, Colombie-Britannique, Québec… Une province sera-t-elle plus touchée que les autres, ou cela se produira-t-il d'un océan à l'autre?
    Nous nous attendons à ce que ce soit d'un océan à l'autre. Les modalités varieront selon la province. Il est vrai que, il y a tout juste trois ans, 100 millions de dollars ont été investis dans notre province pour fabriquer ces concentrés de protéines du lait, et celles-ci étaient destinées à l'exportation. L'autre volet de cette opération était la production de beurre pour le marché intérieur. On ignorait alors que l'ACEUM allait être conclu et qu'il nous retirerait la capacité d'exporter les produits protéinés, les concentrés de protéines du lait. Cela a provoqué un ralentissement marqué de la production de cette usine. Nous, les agriculteurs, mais aussi les transformateurs, avons dû réévaluer où nous en étions et ce qu'il allait se passer ensuite. On constate beaucoup de manifestations d'inquiétude dans l'industrie.
(1315)
    Madame Erickson, vous avez dit n'avoir plus qu'un fournisseur de Metformine. Ce que vous nous avez raconté est très inquiétant.
    Je peux probablement corriger cette impression. La Metformine est un médicament utilisé très couramment pour traiter le diabète et on en comptait auparavant 14 fabricants. Lorsqu'il a fallu procéder aux compressions à la suite de la décision du gouvernement canadien de fixer les prix de ces produits, en fait de les réduire, le nombre de fabricants de Metformine a diminué. Il n'y en a plus eu que sept. Tout d'un coup, il y a une pénurie de produits. Ce n'est pas que ce ne soit pas viable. Nous faisons face à une pénurie de produits et les fabricants ajustent leur production. Mais lorsqu'une catastrophe se produit comme la contamination actuelle dans une entreprise, le nombre de fabricants baisse à six et, là, nous avons des problèmes.
    Je suis navrée, monsieur Dhaliwal, mais votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Lewis, nous vous écoutons.
    Je vous remercie, madame la présidente,
    Je remercie également les témoins qui sont venus ici aujourd'hui.
    Alors que je faisais quelques recherches, j'ai trouvé une lecture intéressante. Elle est intitulée « L'industrie de la transformation laitière en chiffres ». Je vais commencer par vous parler du bon côté des choses.
    Depuis 2008, on enregistrait des investissements de 7,5 milliards de dollars, un apport au PIB canadien annuel de 18 milliards de dollars, un taux de croissance de 16 % du PIB réel de la transformation laitière, un nombre de 12 000 fermes laitières canadiennes soutenues par des transformateurs laitiers et 24 500 Canadiens employés par des transformateurs laitiers, avec une masse salariale annuelle agrégée de 1,2 milliard de dollars.
    J'en viens maintenant au côté négatif des choses: des pertes prévues sur le rendement des investissements de 670 millions de dollars imputables à l'AECG, et d'autres de même nature de 730 millions de dollars imputables, elles, au PTPGP, auxquelles il faudra ajouter des centaines de millions de pertes sur le rendement des investissements imputables à l'ACEUM
    J'ai trouvé ça très intéressant.
    J'ai trois questions à poser à quiconque du secteur laitier qui s'estimera le mieux à même de répondre. Les transformateurs laitiers ont demandé au gouvernement du Canada d'inclure un contingent tarifaire dans l'accord d'indemnisation. Pourriez-vous m'expliquer comment cela pourrait compenser les pertes de marché à la suite de l'entrée en vigueur d'un nouvel ALENA.
    Je peux vous répondre.
    Il est évident que, dans une certaine mesure, les transformateurs seraient mieux placés pour vous en parler. J'ai fait allusion à ceci auparavant. En l'absence de contingent d'importation, il n'y a pas de façon stratégique de faire venir les produits importés. Je crois que, dans cette situation, les transformateurs sont plus touchés, étant donné la façon dont ils comblent les importations. S'ils avaient le contrôle du contingent d'importation, cela réduirait très certainement les répercussions négatives au niveau global, parce qu'ils pourraient prendre des décisions très stratégiques sur les produits qu'ils apporteraient et le moment auquel il les importeraient.
    Certains transformateurs pourraient vous en dire davantage à ce sujet.
    Je vous remercie.
    Je n'ai pas pu m'entretenir avec les transformateurs lors de la dernière série de questions, c'est pourquoi je les pose maintenant.
    Il semble que le gouvernement du Canada n'ait pas attribué de ressources additionnelles à l'ASFC ni à l'ACIA pour garantir le maintien des normes et de la réglementation sur la qualité des produits.
    Vous inquiétez-vous pour leur qualité avec la mise en œuvre de la nouvelle ALENA?
    Je peux vous en parler, mais M. Flamand voudra peut-être ajouter quelque chose.
    Oui, cela nous préoccupe. Dans le passé, l'ACIA participait à la surveillance des importations. Elle disposait des connaissances techniques nécessaires. Lorsque ce rôle lui a été retiré, l'ASFC a pris le relais bien que son personnel n'ait suivi que très peu de formation dans ce domaine. C'étaient davantage des généralistes. On craint, s'ils doivent examiner de la poudre de lait d'un type particulier ou un autre produit, qu'ils n'aient pas les compétences techniques nécessaires pour le ranger dans la bonne catégorie. Si nous n'avons pas les moyens de bien le faire, ces contrôles des importations perdent tous leurs sens parce qu'il n'y a aucun moyen de les contrôler.
    C'est une préoccupation, et nous espérons que l'ASFC sera dotée du personnel nécessaire et fera l'acquisition des connaissances voulues pour faire la distinction entre les divers produits.
(1320)
    Je comprends.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, M. Flamand?
    Non, il a dit tout ce qu'il y avait à dire.
    Très bien. Je vous remercie.
    Voici maintenant ma dernière question et j'espère qu'elle ne vise pas trop directement les producteurs laitiers, mais les producteurs et les transformateurs nous ont dit qu'imposer un plafond des exportations est un précédent regrettable. Étant donné la dynamique de la négociation et la situation difficile du Canada dans celle-ci, qu'aurait-il été possible de faire au lieu de concéder ces plafonds d'exportations? Les mesures administratives sont-elles réellement praticables?
    Je l'ai déjà dit plus tôt. En oubliant un moment le secteur laitier, cela me gêne beaucoup comme citoyen canadien. Nous nous trouvons dans un accord trilatéral conclu avec deux autres pays, et ils vont contrôler ce que nous faisons sur la scène internationale. C'est très inquiétant. Je ne saurais imaginer, lorsque cet accord entrera en vigueur, ce que les autres secteurs vont ressentir ou craindre à la suite de cela. Maintenant, cela peut toucher n'importe qui. Il y a un précédent, ou il pourrait y en avoir un. Je crois qu'en recourant aux modalités administratives nous aurions, peut-être, la possibilité de préciser les modalités de cette partie du texte en notre faveur.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Merci à vous.
    La parole est à M. Dhaliwal.
    Merci.
    Monsieur Erickson, le pouvoir réside dans les connaissances que nous avons et, dans notre cas, ces connaissances proviennent uniquement de spécialistes comme vous. Cela fait de nous des gens très puissants quand nous discutons de ces questions. C'est très important.
    J'essaie de bien comprendre ceci, en particulier parce que nous allons également, par la suite, mettre en œuvre une politique d'assurance-médicaments. C'est à notre programme. Je tiens à m'assurer à la fois que les Canadiens seront en mesure de se procurer les médicaments dont ils ont besoin à des prix abordables et que nous pourrons garantir aussi les approvisionnements.
    Que pouvons-nous faire pour parvenir à cet équilibre? Comment devrions-nous nous y prendre si nous allons de l'avant dans cette direction?
    L'une des façons d'empêcher cela de se produire est de laisser les forces du marché œuvrer par elles-mêmes.
    Pour les compressions, nous en avons eu l'expérience avec les médicaments génériques dont les prix ont été réduits ou contrôlés. Il y a alors des fabricants qui ont abandonné la fabrication de certaines molécules.
    Nous constatons aussi que des usines sont très facilement contaminées. Elles sont maintenant soumises à des critères très rigoureux, ce qui entraîne la fermeture de certaines d'entre elles.
    La combinaison de ces réductions de prix et d'une baisse des stocks, en cas de contamination, nous plonge dans une situation réellement problématique. Cela vient tout juste de se produire pour un médicament, le Valsartan. Celui-ci était le bloqueur de recaptage d'angiotensines le plus utilisé. Nous avons maintenant une pénurie de sept d'entre eux parce que le Valsartan a été contaminé il y a environ un an et demi.
    Je suis partisan de laisser davantage de marge de manœuvre au marché. Comme pharmacien, nous craignons que, avec une assurance-médicaments, quelqu'un décide de réduire les prix encore plus et nous annonce: « Vous savez, pour la Metformine, nous n'aurons plus dorénavant qu'un seul fournisseur. » Si les installations de celui-ci sont contaminées, nous allons manquer de Metformine et nous éprouverons des difficultés.
    Il faut que nous conservions un certain nombre de fabricants dans le système et que nous conservions des prix un peu plus élevés. C'est ainsi que nous pourrons nous protéger.
    Je vous remercie.
    Je dirais aux représentants du secteur laitier que je les ai écoutés et que je sais fort bien que, en particulier avec le plafond qui nous est imposé, vous ne pourrez pas faire d'affaires dans d'autres pays que les deux concernés: les États-Unis et le Mexique. L'une des choses que M. Wiens nous a dit est que nous devrions prévoir l'octroi d'une subvention directe aux agriculteurs pour nous assurer qu'ils ont les moyens d'innover et de poursuivre leurs activités dans ces circonstances.
    Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez ajouter à ce commentaire? Même si je m'enorgueillis que nous puissions encore protéger et préserver la gestion de l'offre, ce 3,9 % dont vous me parlez commence aussi à m'embêter. C'est pourquoi j'essaie de bien cerner les états pour les solutions concrètes dont nous disposons outre le versement liquide que le gouvernement devrait faire, pour nous assurer que les activités des producteurs laitiers perdureront, mais aussi qu'elles pourront se développer.
(1325)
    C'est une bonne question. Quantité de choses peuvent se produire.
    En ce qui concerne le versement direct aux agriculteurs, avec la description qu'on nous en a donnée, va-t-il nous aider à franchir cette difficile période de transition. Il aura bien évidemment des répercussions sur les revenus agricoles et sur les investissements que nous ferons, ce qui est un avantage.
    Nous savons également que notre gouvernement négocie d'autres accords de libre-échange avec d'autres pays ou régions, comme avec le bloc de l'Amérique du Sud, et que le Brexit va probablement entraîner d'autres négociations.
    Une chose importante pour l'industrie laitière, à l'avenir, est de ne plus céder d'autres marchés à d'autres pays. C'est une étape importante pour restaurer la confiance dans l'industrie laitière, à la fois celle des agriculteurs et celle des transformateurs, pour qu'ils puissent faire les investissements dont nous aurons besoin pour continuer à avoir un secteur laitier productif et efficace.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Savard-Tremblay pour deux minutes.

[Français]

     Ma question s'adresse à M. et à Mme Erickson.
    Comme vous l'avez dit, le prix des médicaments est plus élevé aux États-Unis qu'au Canada. Vous avez mentionné plusieurs politiques internes qui pourraient être mises en place ici.
    Cela dit, je veux vous relancer pour faire le lien avec l'Accord. Vous avez dit que le seul changement qu'il aurait pu y avoir est la prolongation de la protection, mais que, de toute façon, cela se trouvait dans une version antérieure de l'Accord.
    Aujourd'hui, dans sa forme actuelle, quels en sont donc les effets?

[Traduction]

    En ce qui concerne la protection des données, si je comprends bien, la situation reste la même. Ils ont obtenu un prolongement. Au départ, la protection des données devait durer 10 ans et, tout d'un coup le 11 décembre, lors de la signature de l'ACEUM, nous avons appris, si je ne me trompe, que la durée était ramenée à 8 ans. Je ne suis pas sûr d'avoir très bien tout saisi, mais à ce que je comprends, c'est dorénavant huit ans. Cela continue donc et c'est très bien. Ce sera une bonne chose pour mes patients. La prolonger davantage serait une vraie perte d'argent. Il semble que cela continuera de la même façon.

[Français]

     En fin de compte, il y aurait eu des effets en ce qui concerne la version précédente s'il n'y avait pas eu de prolongement. Cependant, selon l'actuelle version, quels seront les effets concrets de l'Accord?

[Traduction]

    Dans la version actuelle du texte, il semble qu'aucune modification ne sera apportée à la protection des données pour les produits biologiques, et uniquement pour eux.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Blaikie, vous disposez de deux minutes.
    Il y a une chose que j'essaie de tirer au clair dans votre témoignage. Certains témoins nous ont dit que les prix plus faibles ont causé des problèmes d'approvisionnement, et c'est quelque chose qui vous inquiète. Vous nous avez aussi dit qu'il y aurait avantage à ne pas prolonger la durée de protection des brevets pour les médicaments, ce qui a eu pour effet de maintenir les prix bas. J'essaie de comprendre ce qui me paraît une contradiction entre la défense de prix élevés pour soutenir l'offre et la satisfaction de voir des dispositions dans l'accord qui les maintienne bas.
    J'essaie simplement de préciser l'enseignement que je devrais retirer de votre témoignage.
    Je vous ai parlé, en quelque sorte, de deux groupes de médicaments. Le premier comprend les médicaments génériques à molécules simples, et l'expérience que nous en avons eue au cours de la dernière décennie. Une alliance pharmaceutique pancanadienne à exercer le contrôle des prix, les poussant à la baisse, ce qui a entraîné une réduction du nombre de fabricants. Nous avons également vécu ces catastrophes causées par les stupéfiants et par la contamination des installations des fabricants.
    C'est un domaine en soi. Les prix sont si faibles que les fabricants arrêtent de produire ces médicaments et que nous avons du mal à nous approvisionner.
(1330)
    Est-ce parce que les fabricants ne font pas de profits ou parce qu'ils n'obtiennent pas les rendements qu'ils aimeraient avoir ?
    Je crois que, en règle générale, les fabricants auront accès à davantage de molécules rentables. La Metformine est un médicament assez populaire, et ils devraient donc décider…
    Il s'agit donc plus de l'avantage marginal conféré par la production d'autres médicaments génériques, au lieu de l'idée qu'ils ne peuvent pas du tout gagner d'argent avec leurs coûts de production.
    Je crois que c'est la simplicité de la fabrication de certains produits ou ce qui convient le mieux à leur machinerie. La décision de fabriquer ou non une molécule dépend largement des choix qui ont été faits auparavant. Nous savons que lorsque les réductions de prix ont été imposées au cours des 10 dernières années, nous avons perdu, j'en suis sûr, de 30 à 40 % des produits que nous fabriquions, le nombre de sources d'approvisionnement a diminué et, dans certains cas, il n'en est même resté qu'une seule.
    Je crois que l'un des inconvénients…
    Merci beaucoup, monsieur Blaikie. Je suis navré, mais le temps dont nous disposions est écoulé.
    Je suis toujours impressionnée par ce que chaque groupe de témoins nous apprend. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez consacré.
    Je suspends la séance. Nous reprendrons nos travaux à 15 h 30.
    Merci beaucoup à tous et, encore une fois, tout particulièrement aux témoins.
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