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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 018 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 8 mars 2021

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Il s’agit de la 18e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
    Conformément à l’ordre de renvoi du mardi 16 février 2021, le Comité entreprend l’étude du projet de loi C-10, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.
    À titre de rappel, la réunion d’aujourd’hui se déroule en format hybride — en mode virtuel et en personne —, conformément à l’ordre de la Chambre du 25 janvier 2021. La webdiffusion offerte sur le site Web de la Chambre des communes montrera toujours la personne qui parle plutôt que l’ensemble du Comité.
    Enfin, il est interdit de faire des captures d’écran ou de prendre des photos de votre écran. Comme les délibérations d'aujourd'hui ne concernent que le ministère, je présume que nous n’aurons pas de problèmes à cet égard, car les gens du ministère connaissent probablement ces règles mieux que nous.
    Au cours de la première heure, nous recevons des représentants du ministère du Patrimoine canadien.
     Pour des raisons techniques, nous allons faire une courte pause afin de joindre le ministre Guilbeault, qui se joindra à nous en deuxième heure.
    Pour l’instant, nous accueillons Jean-Stéphen Piché, sous-ministre adjoint principal, Affaires culturelles; Thomas Owen Ripley, directeur général, Radiodiffusion, droit d'auteur et marché créatif; et Kathy Tsui, gestionnaire, Politique industrielle et sociale, Radiodiffusion, droit d'auteur et marché créatif.
    Nous allons commencer par une déclaration liminaire d'une durée de 15 minutes.

[Français]

    Monsieur Piché, vous avez la parole pour 15 minutes.

[Traduction]

    Je vous laisse décider si vous voulez la confier à quelqu’un d’autre.
    Monsieur Piché, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité. Nous sommes ravis d'être ici à nouveau.
    Je vais profiter de l'occasion pour vous souhaiter à tous une bonne Journée internationale des femmes.
     Nous vous parlons depuis le territoire ancestral des peuples algonquins Anishinabe, situé dans la région de la capitale nationale.

[Français]

    Comme vous l'avez dit, monsieur le président, je suis accompagné de Thomas Owen Ripley et de Kathy Tsui, qui sont des experts dans le domaine de la radiodiffusion. Ils ont beaucoup contribué à l'élaboration des projets de loi et des projets numériques.
    Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie de nous avoir invités pour vous appuyer dans votre étude du projet de loi C-10. J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier le Comité du travail qu'il effectue sur le projet de loi et de la rapidité avec laquelle il a entrepris ce travail.
    Le projet de loi C-10 apporte des modifications à la Loi sur la radiodiffusion qui profiteront aux artistes, aux radiodiffuseurs ainsi qu'aux Canadiens.
    Pour les producteurs, les réalisateurs, les scénaristes, les comédiens et les musiciens, ce projet de loi multipliera les possibilités de créer du contenu audio et audiovisuel de grande qualité et de rendre ce contenu accessible au public canadien.
    Par ailleurs, le projet de loi donnera lieu à la création d'un cadre réglementaire équitable et souple où les services de radiodiffusion comparables sont assujettis à des exigences réglementaires semblables.
    De plus, le projet de loi permettra de rendre davantage accessibles la musique et les histoires canadiennes par l'entremise de divers services, et il permettra de créer un système de radiodiffusion plus diversifié et plus inclusif qui reflète la société canadienne.

  (1105)  

[Traduction]

    Ce projet de loi renouvelle la Loi sur la radiodiffusion dans le contexte de l’ère du numérique. Les changements qu’il apporte se font attendre depuis longtemps. C’est l’une des quatre initiatives que Patrimoine canadien a proposées pour moderniser le cadre législatif fédéral en matière de communications et l'adapter au monde en ligne.
    Nous sommes également en train d'élaborer une proposition visant à lutter contre les préjudices en ligne tels que les discours haineux, le contenu violent et extrémiste, la propagande terroriste, l’exploitation sexuelle des enfants et la distribution non consensuelle d’images sexuellement explicites.
    Nous travaillons avec Innovation, Sciences et Développement économique Canada pour modifier la Loi sur le droit d’auteur.
    Nous devons en outre assurer que les services de presse canadiens soient rémunérés équitablement pour l’utilisation par les services en ligne des contenus qu'ils créent, un enjeu sur lequel Patrimoine canadien travaille déjà.
    Ensemble, ces initiatives permettront d’établir des règles qui feront du monde en ligne un endroit plus équitable, plus inclusif et plus sécuritaire, tout en veillant à ce qu’il demeure un terrain fertile pour l’innovation et la liberté d’expression.
    Le projet de loi C-10, qui porte sur la radiodiffusion, est la première pièce de ce casse-tête.
    Je vais maintenant céder la parole à Owen Ripley, qui vous expliquera pourquoi le projet de loi C-10 est nécessaire et quels en sont les principaux objectifs.
    Monsieur Ripley, c'est à vous.

[Français]

    Je vous remercie de nous donner l'occasion aujourd'hui de nous adresser au Comité pour discuter du projet de loi C-10 et de la façon dont il modernise la Loi sur la radiodiffusion.
    Avant d'aborder les détails du projet de loi proposé, je voudrais vous parler brièvement de la Loi sur la radiodiffusion et du cadre réglementaire actuel. Il est important de comprendre le système actuel, puisqu'il constitue la pierre d'assise du projet de loi C-10.
    Le projet de loi vise à moderniser notre loi à l'ère numérique, mais également à préserver et à renforcer les composantes essentielles de notre système qui nous ont bien servis durant les dernières décennies, notamment l'organisme indépendant de réglementation des communications, nos radiodiffuseurs canadiens, le soutien à la musique et aux histoires canadiennes, ainsi que notre objectif de veiller à ce que les voix diversifiées, y compris celles des Autochtones, soient entendues partout au Canada.
    La Loi sur la radiodiffusion est un texte législatif important dans le secteur. Elle définit la radiodiffusion, décrit les objectifs stratégiques qui servent de principes directeurs dans l'élaboration des règlements et établit le mandat et les pouvoirs du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, soit le CRTC. Il est important que le CRTC soit indépendant du gouvernement.
    En effet, le CRTC établit les règlements qui gouvernent le secteur médiatique, un secteur qui constitue sans contredit un élément essentiel à l'appui de la liberté d'expression et de l'expression culturelle. Dans une démocratie telle que le Canada, il est important d'établir une distance raisonnable entre le gouvernement et le secteur médiatique. Des pays comme l'Australie, le Royaume-Uni et la France se fient aussi à un organisme de réglementation indépendant pour surveiller le secteur médiatique.
    Le CRTC détient également l'expertise et l'expérience pour prendre des décisions réglementaires pointues tout en conciliant de nombreux facteurs dans l'élaboration des politiques. Ce niveau d'indépendance et d'expertise a bien servi les Canadiens.
    En définitive, le projet de loi C-10 vise à préserver les rôles du CRTC et du gouvernement: le CRTC aura le mandat de surveiller et de réglementer le système de radiodiffusion, alors que le gouvernement veillera au bon fonctionnement du CRTC.

[Traduction]

    Le CRTC a appuyé la culture canadienne notamment en s’assurant que les radiodiffuseurs soutiennent la création et la présentation de contenu canadien. Actuellement, l’une des conditions de licence des chaînes télévisées est de dépenser un certain pourcentage de leur revenu annuel en contenu canadien. De plus, les câblodistributeurs et distributeurs par satellite doivent débourser un certain pourcentage de leur revenu en contribution aux fonds de production et à la programmation locale pour appuyer le développement et la production de contenu canadien. Les chaînes de radios privées et la radio par satellite déboursent une partie de leurs revenus annuels pour contribuer aux initiatives de développement de contenu canadien, notamment le contenu musical. Ces contributions totalisaient 3,34 milliards de dollars en 2019.
    Cependant, la perturbation due à la concurrence des radiodiffuseurs en ligne menace ce soutien. La concurrence croissante des radiodiffuseurs en ligne entraîne d’ailleurs la diminution des revenus des services traditionnels, qui ont vu leurs recettes chuter de 1,4 % entre 2018 et 2019. Au bout du compte, cette concurrence mènera à un financement réduit pour la musique et la programmation canadiennes.
    Les données sur les rendements globaux récemment publiées par le CRTC montrent qu'en 2020, les revenus de radiodiffusion des grands groupes de propriété ont reculé de 7 % par rapport à 2019. Les rendements globaux sont ceux des plus grands radiodiffuseurs et des entreprises intégrées verticalement, mais ils n'incluent pas ceux de diffuseurs plus modestes. Or, comme ils comptent pour la majorité des revenus de l’industrie, on s’attend à ce qu’ils reflètent les tendances générales de l’industrie pour 2020.
    Les services de diffusion en ligne ne sont évidemment pas nouveaux au Canada et fonctionnent en parallèle avec les systèmes de radiodiffusion traditionnels depuis de nombreuses années. Leur exploitation au Canada a été rendue possible grâce à un instrument réglementaire appelé l’Ordonnance d’exemption relative aux médias numériques, qui soustrait les radiodiffuseurs en ligne à l'obligation d'avoir une licence pour opérer au Canada et les dispense des obligations imposées aux radiodiffuseurs traditionnels, comme le soutien au contenu canadien.

  (1110)  

    L’Ordonnance d’exemption relative aux médias numériques a essentiellement permis aux radiodiffuseurs étrangers en ligne de mener leurs activités au Canada à l’extérieur du système de radiodiffusion traditionnel « fermé ». L’ordonnance a été décrétée en 1999 afin de promouvoir la croissance du secteur émergent de la radiodiffusion en ligne. Or, la taille et la viabilité commerciale de ce secteur ont considérablement augmenté depuis cette époque.
    Par exemple, en 2011, seulement 10 % des Canadiens étaient abonnés à Netflix; en 2020, cette proportion était passée à 67 %. Les radiodiffuseurs en ligne prospèrent et n’ont plus besoin d’être soustraits à la réglementation. Ils sont bien placés pour soutenir de façon significative la production de musique et d'histoires canadiennes. Le projet de loi C-10 vise donc à regrouper ces acteurs sous un même cadre réglementaire afin d'assurer que tous les radiodiffuseurs fonctionnent selon les mêmes règles.
    Il est indéniable que l’ère numérique a apporté de nombreux avantages. Une plus grande quantité de services signifie plus de choix pour les Canadiens et plus de débouchés pour les créateurs et les producteurs. Le projet de loi C-10 ne vise pas à nier ces avantages, mais plutôt à créer une tribune pour les voix canadiennes.

[Français]

    Pour favoriser l'inclusion de la radiodiffusion en ligne dans le cadre réglementaire, le projet de loi C-10 ajoute à la Loi une nouvelle catégorie d'entreprises de radiodiffusion: les entreprises en ligne. Ce changement permettra au CRTC d'exiger que des services tels que Crave, Netflix, Amazon Prime, QUB musique et Spotify contribuent financièrement à la musique et aux histoires canadiennes.
    Le ministère du Patrimoine canadien estime que, d'ici 2023, l'inclusion des radiodiffuseurs en ligne pourrait mener à des contributions de 830 millions de dollars au contenu canadien, et ce, chaque année. Or, il ne s'agit pas là d'un objectif. Ultimement, le chiffre final dépendra de la façon dont le CRTC décidera de mettre en œuvre le nouveau cadre réglementaire. Toutefois, cette estimation illustre l'importance du projet de loi C-10 et les résultats concrets qu'il cherche à obtenir pour appuyer les créateurs canadiens.
    Certaines discussions concernant le projet de loi C-10 portaient sur le traitement des médias sociaux. Ces plateformes seront assujetties à la réglementation, mais seulement dans la mesure où elles diffusent du contenu commandé ou produit par la plateforme elle-même ou par des entreprises affiliées.
    Cependant, les utilisateurs des médias sociaux et le contenu qu'ils publient ne seront pas réglementés. Les médias sociaux constituent une forme d'expression importante pour bien des Canadiens, et, comme M. Piché l'a souligné précédemment, une proposition distincte est en cours d'élaboration pour s'attaquer aux répercussions du contenu préjudiciable publié sur les médias sociaux.

  (1115)  

[Traduction]

    Pour tenir compte de l’inclusion de la radiodiffusion en ligne, nous avons besoin d’une approche renouvelée de la réglementation. Le projet de loi C-10 s’éloigne du système rigide d'octroi de licences et adopte un modèle plus souple fondé sur les « conditions de service ». Ce modèle permettra au CRTC d’exiger des contributions financières de tous les acteurs et de leur imposer d’autres conditions, comme des exigences en matière de découvrabilité et de déclaration de l'information, ainsi que des normes de programmation.
    Le CRTC organisera des consultations publiques pour recueillir les commentaires des intervenants et des Canadiens afin d’éclairer ses choix réglementaires. Une fois qu’il aura rassemblé cette information, le CRTC sera en mesure de mettre en place des conditions de service adaptées à chaque radiodiffuseur. Nous voulons éviter une approche trop rigide qui imposerait un fardeau réglementaire indu aux services de diffusion et entraînerait une augmentation des coûts pour les Canadiens.
    Enfin, les objectifs de la politique de radiodiffusion sont mis à jour pour faire en sorte que le système de radiodiffusion réponde aux besoins et aux intérêts de tous les Canadiens et reflète leur diversité. Cela signifie qu’il faut s’assurer que les voix canadiennes, y compris celles des créateurs autochtones, des communautés de langue officielle en situation minoritaire, des communautés racisées et ethnoculturelles, des communautés LGBTQ2+ et des personnes handicapées, sont présentes dans nos médias. C’est pourquoi le projet de loi C-10 prévoit un soutien accru à la diversité du contenu canadien et de ses créateurs.
    Cependant, le projet de loi C-10 ne prévoit pas de quotas ou de cibles pour soutenir certaines variétés de contenu, comme le contenu de langue française. Les quotas et les cibles risquent de devenir des maximums de facto. Le CRTC est mieux placé en tant qu’organisme de réglementation indépendant et expert pour prendre des décisions sur la meilleure façon de soutenir tous les types de contenu et de les faire évoluer au fil du temps.
    Une fois que le projet de loi C-10 aura reçu la sanction royale, le ministre a l’intention de proposer au gouverneur en conseil d’émettre une orientation stratégique à l’intention du CRTC sur la façon dont les nouveaux outils de réglementation accordés par le projet de loi devraient être utilisés. L'exposé technique comprend la description de sept priorités dont il faudra tenir compte à ce chapitre.
    Nous savons que le Comité a demandé une ébauche de cette orientation stratégique afin de mieux comprendre concrètement comment ces priorités seront communiquées au CRTC, et nous pouvons lui assurer que nous travaillons à satisfaire cette demande.
    Bien qu’il s’agisse d’une étape importante, nous savons que le projet de loi C-10 n'aborde pas toutes les questions relatives au secteur de la radiodiffusion, comme le rôle futur de CBC/Radio-Canada et la structure de gouvernance du CRTC.
    Le projet de loi C-10 n'est qu'une première étape pour répondre aux questions les plus criantes en matière de politiques. Il apporte des changements cruciaux qui permettront de veiller à ce que le système de radiodiffusion canadien soit juste et soutienne la musique et les histoires canadiennes pour des années à venir. Nous avons également l'occasion de rendre le système plus accessible et plus inclusif en appuyant les créateurs et les producteurs qui, par le passé, ont été marginalisés. Le projet de loi constitue une révision nécessaire et essentielle de la Loi sur la radiodiffusion du Canada.
    Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions sur le projet de loi.
    Merci, monsieur Ripley. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Nous passons maintenant aux questions
    La parole est à M. Shields, du Parti conservateur. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les témoins de leur présence.
    C'est un plaisir de revoir certains d'entre vous.
    Monsieur Piché, je viens d'entendre plusieurs mots — notamment, la liberté d'expression et les mesures législatives visant à contrôler certains types de discours —, mais il a ensuite été question de la façon dont le CRTC interprète la réglementation, puis de la nécessité de ne pas réglementer à outrance ce secteur et, enfin, du pouvoir de donner des instructions au CRTC. Je ne fais qu'écouter ce qui est dit, mais il y a, me semble-t-il, une certaine différence entre ces déclarations puisqu'elles ne concordent pas tout à fait.
    Voulez-vous faire une observation à ce sujet, monsieur Piché?
    Monsieur le président, le CRTC occupe une place cruciale dans cet espace. Il est très important d'établir une distance appropriée entre les radiodiffuseurs et le gouvernement. C'est pourquoi il y a un organisme de réglementation comme le CRTC, qui est indépendant. C'est pourquoi nous devons trouver un équilibre délicat entre, d'une part, la capacité du gouvernement de donner des instructions au CRTC sur certains changements d'orientation qu'il souhaite apporter et, d'autre part, la possibilité de diriger le tout de manière bien précise et de laisser au CRTC une marge de manœuvre pour qu'il puisse trouver la meilleure façon d'adapter ces instructions au contexte de la radiodiffusion, au fur et à mesure de son évolution.
    C'est là un équilibre délicat, d'où l'importance du travail concernant les instructions, car c'est ce qui permet de calibrer la capacité d'intervention du gouvernement. En fait, nous avions beaucoup de réserves à l'égard de l'ancien article 7 de la loi, qui prévoyait de tels moyens. Cette disposition a été invoquée une fois, ou peut-être deux, je crois, au cours des 30 dernières années. On y a recours très rarement, mais parfois, lorsque l'écosystème subit des changements, le gouvernement se doit d'intervenir. Cela lui permet d'intervenir tout en maintenant la distance par rapport au CRTC.

  (1120)  

    Je comprends cela, mais quand j'entends quelqu'un parler de la façon dont le CRTC « interprète » la réglementation, cela me dérange, parce que nous avons eu des témoins qui se sont dits très préoccupés par les pouvoirs que vous créez. Nous savons bien tous les deux que le pouvoir réside dans les règlements et leur interprétation. Certains témoins sont très inquiets de savoir que vous envisagez maintenant d'élargir les pouvoirs du CRTC. Peu importe les politiques qui sont élaborées ou les instructions qui sont données au CRTC, quand on parle de la façon dont le CRTC interprète la réglementation, on ne fait qu'accroître ses pouvoirs, de sorte que l'équilibre délicat dont vous parlez relève désormais de lui, et cela n'est pas assujetti à la loi.
    L'important, c'est l'applicabilité et la façon dont le tout peut être appliqué. Une instruction n'est pas facultative; elle doit être mise en œuvre. Par contre, la façon dont elle est appliquée — le « comment » — relève du champ d'expertise du CRTC, qui connaît l'environnement, qui sait comment le secteur évolue et qui comprend comment mettre le tout en application. C'est de cela que nous parlons. Il ne s'agit pas de déroger à ce qui est prévu dans les instructions. Les instructions sont très claires. Elles sont explicitement conçues pour être appliquées par le CRTC, mais...
     J'ai bien compris, mais la déclaration qui a été faite concernait la façon dont le CRTC « interprète » la réglementation. C'est là un terme juridique différent, et nous devons être très prudents. Les mots sont importants. Quand vous dites que cela relève de l'interprétation du CRTC, c'est tout à fait différent de ce que vous venez de dire.
    Si j'ai utilisé ce mot, ce que je voulais dire par là, c'est la façon dont cela s'applique. Nous laissons une certaine discrétion pour l'application de ces instructions.
    Les mots comptent. Par conséquent, lorsque nous tenons des audiences comme celle-ci et que vous employez ce genre de mots, alors que nous avons des témoins qui sont très inquiets de voir de tels pouvoirs entre les mains du CRTC, c'est très... c'est un élargissement des pouvoirs du CRTC.
     Je vais passer à une autre question. Nous avons entendu dire à plusieurs reprises que le gouvernement fédéral consacre 80 % de son budget publicitaire aux médias sociaux étrangers. Pourquoi dépenser autant d'argent pour des médias étrangers, alors que les contribuables canadiens... Pourquoi ne pas consacrer ces fonds aux médias canadiens?
     Les dépenses de publicité ne sont pas gérées par le ministère du Patrimoine canadien. C'est fait par d'autres...
    Je sais bien, mais je vous demande votre avis. Vous voulez protéger les médias canadiens. Vous voulez protéger les médias sociaux canadiens. C'est pourquoi vous êtes ici, tous les trois...
    M. Jean-Stéphen Piché: Oui.
    M. Martin Shields: ... pourtant, vous n'avez pas d'opinion. Cela ne vous dérange pas. Cela ne vous concerne pas, mais c'est tout de même une source de recettes pour notre contenu canadien et, sans cela, nous sommes perdants.
    Ce que je peux vous dire...
    Monsieur le président, si vous le permettez, j'invoque le Règlement.
     Pouvons-nous arrêter le chronomètre un instant?
    Madame Dabrusin, allez-y.
    Les membres de notre fonction publique ne donnent pas de directives ni d'opinions en matière de politiques.
    Je vous remercie, madame Dabrusin, de votre observation, mais je suis sûr qu'ils sont tout à fait qualifiés pour se défendre.
    Monsieur Shields, nous vous écoutons.
    Lorsque nous parlons des nombreuses façons de protéger le contenu canadien, nos médias représentent une énorme partie de ce dont il est question, mais nous appuyons des médias étrangers avec l'argent de nos contribuables.
    Je vous remercie. Mon temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à Mme Ien.
    Merci, monsieur le président.
    Cette question s'adresse à M. Piché, à M. Ripley ou à Mme Tsui. Je veux simplement savoir comment le projet de loi permettra d'uniformiser les règles du jeu, du point de vue des radiodiffuseurs communautaires ou locaux.
    Nous avons entendu plusieurs témoins qui étaient préoccupés par le fait que les radiodiffuseurs communautaires avaient été laissés pour compte. Ces témoins ont beaucoup parlé des déserts médiatiques, des déserts d'information dans les régions rurales, où il n'y a pas de grands radiodiffuseurs. Je me demande comment le projet de loi permettra d'uniformiser les règles du jeu à cet égard, compte tenu de la perspective communautaire.

  (1125)  

    Je vais y aller en premier.
    Le projet de loi visera deux objectifs. Bien entendu, il est très important d'uniformiser les règles du jeu grâce à l'intégration des géants du Web, c'est-à-dire des grandes entreprises de l'audiovisuel en ligne, dans le système de radiodiffusion. Il s'agit d'un élément important, mais le projet de loi cherche également à moderniser le libellé concernant le caractère inclusif afin de veiller à ce que les collectivités soient représentées. N'oublions pas que la loi n'a pas été modernisée depuis 30 ans. Nous devons donc adapter le libellé pour qu'il dénote une meilleure distribution, une meilleure compréhension du Canada. Cela rejoint également l'autre objectif du projet de loi, soit celui d'assurer un meilleur accès.
    J'invite M. Ripley à fournir un peu plus de détails sur les objectifs.
    Comme vous le savez peut-être, la radiodiffusion communautaire est déjà reconnue comme l'un des piliers du système de radiodiffusion. Il y a la radiodiffusion publique, privée et communautaire. C'est donc un élément très important du système, et le gouvernement en est certes conscient.
    À titre d'exemple, je tiens à souligner que nous collaborons avec les radiodiffuseurs communautaires dans le cadre de l'Initiative de journalisme local afin d'appuyer les journalistes qui travaillent dans des régions mal desservies et éloignées.
    Les radiodiffuseurs communautaires nous ont bien dit que, selon eux, le projet de loi C-10 devrait aller plus loin pour ce qui est de reconnaître leurs contributions au système.
     C'est une question complexe, en partie parce que le soutien aux radiodiffuseurs communautaires est également lié à la façon dont les entreprises de distribution par câble et par satellite appuient le système. Ces entreprises — en particulier, les câblodistributeurs — travaillent souvent en étroite collaboration avec les radiodiffuseurs communautaires pour fournir des services à leurs collectivités.
     C'est sans contredit une question qui figure sur notre écran radar et que nous examinons. Nous reconnaissons certes les contributions importantes des radiodiffuseurs canadiens.
    En ce qui concerne les géants du numérique, dont Netflix, nous avons entendu plusieurs témoins qui ont fait valoir qu'à leur avis, ils contribuent déjà. Beaucoup d'entre eux ont leur siège social ici. Ils embauchent des Canadiens — des producteurs canadiens, des talents canadiens, des auteurs canadiens. Par conséquent, quand nous leur demandons de contribuer davantage, nous pourrions très bien finir par nous trouver à la croisée des chemins.
    Puis-je obtenir une ou deux observations au sujet des géants qui affirment donner déjà beaucoup au Canada?
    Je peux commencer.
    Il est vrai que, de par leur présence au Canada, les géants du Web exercent des activités au Canada qui profitent aussi aux Canadiens. L'enjeu ici — et le mot d'ordre —, c'est la création de conditions équitables.
    En ce qui a trait au cadre en vigueur au Canada, dans le système traditionnel, pour obtenir une licence, il fallait soit cotiser à un fonds, soit allouer des dépenses à la création de contenu canadien. Ce que le projet de loi cherche à faire, c'est garantir que ces investissements servent à la création de contenu canadien.
     Bien entendu, le volet emploi est important, mais il s'agit de veiller à ce que l'avantage net concorde également avec les obligations que doivent remplir les radiodiffuseurs canadiens dans un tel contexte. C'est pourquoi il faut vraiment imposer des mesures communes pour nous assurer d'établir des conditions équitables dans cet espace.

  (1130)  

    Il y aura beaucoup de travail à accomplir pour définir la marche à suivre. Le « comment » sera déterminé, en grande partie, à l'étape suivante, lorsque ces mesures seront mises en œuvre par le CRTC.
    Merci.
    Merci, madame Ien.

[Français]

    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Leurs témoignages sont très éclairants.
    Monsieur Ripley, je voudrais revenir sur vos propos selon lesquels le ministère du Patrimoine canadien estime à 830 millions de dollars les revenus supplémentaires. Vous avez dit qu'il s'agissait d'une estimation et que le montant dépendrait de la façon dont le CRTC allait établir ou mettre en oeuvre la réglementation. Ce que je comprends, c'est que cette somme de 830 millions de dollars est une estimation un peu vague. C'est peut-être même un peu utopique. Cela pourrait très bien s'avérer être 200 millions de dollars, finalement. Comme vous le dites, il s'agit d'une estimation, alors la mienne est tout aussi bonne que la vôtre.
    Ne pensez-vous pas que les industries culturelles canadiennes et les acteurs du secteur canadien de la radiodiffusion auraient besoin d'un peu plus de garanties, à l'heure actuelle? On parle quand même de leur survie dans un marché extrêmement changeant et compétitif.
    J'aimerais entendre votre avis sur la question des revenus de 830 millions de dollars, qui préoccupe beaucoup de membres de ce comité, d'ailleurs.

[Traduction]

     Monsieur Ripley, c'est à vous.

[Français]

    Je vous remercie de la question, monsieur Champoux.
    C'est certain que le modèle proposé se base sur le modèle actuel, puisque nous n'avons pas d'autres points de référence présentement. Nous nous sommes donc penchés sur la façon dont les radiodiffuseurs doivent contribuer au contenu canadien en ce moment. Dans certains cas, ils ont l'obligation d'investir une certaine partie de leurs revenus dans du contenu canadien. Dans d'autres cas, c'est une contribution aux fonds de production, comme le Fonds des médias du Canada, ou encore le financement d'initiatives de développement, dans le cas de la musique.
    Nous avons cherché à déterminer à quoi correspondait chacun des services, notamment celui de Netflix. Dans certains cas, ce n'est pas nécessairement facile à déterminer. Par exemple, est-ce que Spotify est un radiodiffuseur traditionnel dans le domaine de la radio ou plutôt un contrôleur d'accès qui doit contribuer à un fonds de production? Nous avons donc dressé 16 scénarios pour couvrir toutes les possibilités. Les 830 millions de dollars mentionnés correspondent à la moyenne. L'estimation la plus basse était de 750 millions de dollars, tandis que la plus haute était de près de 900 millions de dollars.
    Ce qu'il est important de retenir à propos de ce modèle, c'est qu'il permet d'envisager des contributions importantes au contenu canadien. Bien sûr, nous n'avons aucune garantie quant à la façon dont le CRTC va mettre en œuvre le nouveau cadre réglementaire, mais cela donne une idée des revenus que nous cherchons à obtenir.
    D'un côté, on a les entreprises de radiodiffusion actuelles, qui souhaitent une déréglementation ou un allégement de leur propre charge; de l'autre, on a les diffuseurs en ligne et les géants étrangers qui vont arriver et qui vont faire des interventions auprès du CRTC. Ces entreprises vont probablement demander la même chose: les unes voudront un moins gros fardeau financier, les autres voudront en avoir le moins possible à payer, évidemment. Pour contrebalancer tout cela, il y aura l'industrie culturelle, qui aura probablement beaucoup moins de moyens que ces entreprises.
    Comment pensez-vous que le CRTC va pouvoir faire la part des choses, si la Loi elle-même n'établit pas d'objectifs extrêmement clairs et précis pour faire en sorte d'atteindre un équilibre entre tous les acteurs dans le marché, surtout dans le cas des créateurs de contenu?

  (1135)  

    Le point de départ, c'est que les joueurs doivent apporter une contribution importante mais appropriée. Le défi qui se pose, en 2021, c'est que les modèles d'affaires sont de plus en plus diversifiés. Dans le passé, on avait un modèle de radiodiffusion plus ou moins uniforme. On avait des chaînes qui diffusaient des émissions de drame, les nouvelles, des émissions sportives, etc. On sait que ce n'est plus le cas. Dans le domaine de la diffusion en continu, il y a beaucoup de modèles différents.
    Je reconnais que ce sera un défi, mais le CRTC devra trouver comment créer un cadre réglementaire juste qui continue d'exiger une contribution importante de la part de Bell Média et de Québecor Média, tout en exigeant une contribution importante de la part de joueurs comme Spotify et Netflix. Il s'agit de déterminer la contribution que chacun peut apporter au secteur médiatique du Canada.
    L'actuel projet de loi C-10 enlève l'option du recours au gouverneur en conseil.
    Vu la discussion que nous avons en ce moment, ne pensez-vous pas qu'il serait justifié de rétablir cette disposition?
    Bien sûr, nous avons entendu des inquiétudes de la part de certains intervenants à propos de ce changement. Cependant, ce changement est attribuable au fait que nous envisageons de passer du modèle actuel, où chaque entreprise détient une licence pour avoir des activités au Canada, à un modèle beaucoup plus réglementaire.
    Le CRTC s'occupera surtout de créer des règlements, qui seront publics et transparents. Il va également formuler des ordonnances, qui seront aussi publiques et transparentes. Tout cela va clarifier les règles pour les entreprises qui ont des activités au Canada.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

     Madame McPherson, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de se joindre à nous aujourd'hui. Je vous souhaite une bonne Journée internationale des femmes.
     J'ai quelques questions à vous poser. Tout d'abord, la loi actuelle précise que le système de radiodiffusion au Canada doit être la propriété des Canadiens, mais le projet de loi retire cette mention et ouvre ainsi la porte à la possibilité que les systèmes de radiodiffusion appartiennent également à des intérêts étrangers. J'aimerais comprendre ce qui a motivé le changement proposé et si cela risque de faciliter l'acquisition de nos radiodiffuseurs par, disons, des sociétés américaines.
    Je pose la question à qui veut répondre.
    Je vais commencer, et M. Ripley pourra compléter ma réponse.
    Il y a un point important: si de nouveaux acteurs internationaux, des acteurs étrangers, font partie du système, nous devrons trouver un moyen de reconnaître le fait qu'ils mènent des activités au Canada, tout en protégeant la propriété canadienne. Nous cherchons à trouver le juste milieu entre la reconnaissance de leurs activités et la protection des radiodiffuseurs canadiens à l'intérieur de ce cadre.
    Monsieur Ripley, je vous cède la parole.
    Le défi que nous pose le libellé actuel, c'est qu'il dit que le système doit être la propriété des Canadiens et sous leur contrôle. La tension vient évidemment du fait que ce n'est tout simplement plus le cas. Le projet de loi C-10 visait, à l'origine, à inclure les services de diffusion en continu — Netflix, Crave et Spotify — dans le système de radiodiffusion. La réalité, c'est que bon nombre de ces services ne sont pas détenus et contrôlés par des Canadiens. C'est pourquoi nous avons reformulé l'objectif stratégique, de sorte que toutes ces entreprises soient désormais tenues d'apporter une contribution appropriée au système.
    Pour ce qui est de votre question de savoir si cela signifie que les radiodiffuseurs canadiens pourraient être vendus, la réponse est non. À l'heure actuelle, il existe une directive qui s'adresse au CRTC et qui prévoit des restrictions sur la propriété étrangère dans le cas des entités autorisées. Le fait est que nos radiodiffuseurs en direct et nos entreprises de distribution par câble et par satellite ne peuvent pas appartenir à des intérêts étrangers ni être sous leur contrôle tant que cette directive reste en vigueur.

  (1140)  

    À titre de précision, monsieur Ripley, cette directive a-t-elle force exécutoire? Ce n'est pas quelque chose qui peut être modifié par le CRTC?
    En effet, elle ne peut pas être modifiée par le CRTC.
    D'accord. Parfait. Je vous remercie.
    J'aimerais également savoir combien votre ministère a dépensé en publicité, au cours de l'exercice 2019-2020, sur les plateformes des géants du Web comme Facebook et Google, comparativement à ce qu'il a dépensé dans les médias traditionnels. Est-il possible de fournir certaines de ces statistiques au Comité?
    Oui. Je ne les ai pas avec moi en ce moment, mais nous pourrions les transmettre au Comité, sans problème.
    En ce qui a trait aux dépenses du ministère, comme je l'ai dit, il y a souvent... On a affirmé à maintes reprises que le ministère du Patrimoine canadien ne gère pas de façon centralisée la publicité pour le gouvernement du Canada. C'est le ministère des Services publics et de l'Approvisionnement qui s'en occupe.
    Nous pouvons vous faire parvenir des données qui relèvent plus précisément de notre ministère.
    Monsieur Piché, serait-il possible de compiler ces données, par année, peut-être à partir de 2015?
    Oui, nous pouvons les répartir par année, par type de publicité et par service.
    Ce serait merveilleux.
    Monsieur Ripley, j'ai une autre question à vous poser, si vous me le permettez.
    En ce qui concerne Facebook, YouTube, Pornhub et d'autres services de contenu généré par les utilisateurs, le projet de loi C-10 les exempte explicitement et totalement de la Loi sur la radiodiffusion. Avez-vous reçu des instructions en ce sens de la part du ministre Guilbeault ou de son personnel, ou comment les choses en sont-elles arrivées là? Comment se fait-il que Facebook et YouTube aient été exclus du projet de loi C-10?
    D'abord, je vous dirais qu'ils ne sont pas nécessairement exclus du champ d'application de la loi. Nous tentons d'instaurer un équilibre fragile où certaines activités seront assujetties à la réglementation, dans la mesure où ces entités agissent comme un diffuseur. En d'autres termes, dans la mesure où Google et YouTube ont des services qui achètent du contenu, qui contrôlent ce contenu, ou que leurs sociétés affiliées contrôlent ce contenu, ce sera compris dans la loi. La même chose pour Facebook.
    Parallèlement, nous voulions tenir compte du fait que nombre de Canadiens y ont évidemment recours pour du contenu généré par les utilisateurs. C'est un équilibre difficile à maintenir, mais que nous avons tenté d'atteindre dans ce projet de loi en excluant ces entités quand elles agissent comme des dépôts de contenu généré par les utilisateurs, mais en les incluant quand elles contrôlent le contenu offert par leurs services.
    Concrètement, cela peut signifier que certains services comme Facebook Watch ou YouTube Music seront assujettis à la supervision du CRTC en matière de diffusion. C'est, au bout du compte, le projet de loi que le gouvernement a mis de l'avant, et donc c'est la position du gouvernement sur la question.
    Comme y a fait référence M. Piché, cela ne signifie pas que nous ne sommes pas conscients du fait que ces activités, ce contenu généré par les utilisateurs sur ces plateformes, devraient être réglementées. Nous travaillons sur un projet de loi qui traite des préjudices liés à l'activité en ligne, ou des méfaits en ligne, et qui abordera ce type de questions.
    De notre point de vue, la réglementation sur la radiodiffusion est différente de celle qui devrait s'appliquer au contenu généré par les utilisateurs.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Aitchison pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Piché.
    Je me demande si vous pouvez me donner des éclaircissements, car j'ai l'impression qu'on nous dit que le projet de loi C-10 n'englobe pas tous les changements qui doivent être apportés pour rendre le monde des nouveaux médias plus équitable.
    Estimez-vous qu'il s'agit là d'une observation assez juste de l'état des lieux?

  (1145)  

    La loi fournit tous les outils nécessaires pour arriver à cette équité.
    Certaines de ses applications ne seront pas nécessairement écrites dans la loi, mais son application ira dans le sens… et sera appliquée par le CRTC. On n'y trouve pas tous les éléments nécessaires à des conditions équitables. Comme l'a mentionné M. Ripley, nous n'avons pas, par exemple, de contingent précis. Ce sera établi plus tard.
    En ce qui a trait aux conditions équitables, les éléments nécessaires à leur création figurent dans la loi.
    Donc il y a encore du travail à faire par l'intermédiaire de règlements d'application et, bien sûr, c'est le CRTC qui va interpréter ces règlements… en se fondant sur quoi exactement?
    Il n'est pas question « d'interpréter ». Si j'ai dit ce mot, ce n'est pas celui que j'avais l'intention d'utiliser.
    Le CRTC va appliquer les règlements, établir un échéancier adéquat qui tient compte des besoins… d'après sa compréhension de ce qui se passe. Il tiendra des audiences pour établir à quel point il est nécessaire d'intervenir pour assurer l'équité. C'est ainsi qu'il va fonctionner.
    À propos des questions qui doivent encore être tranchées, des questions qui ne sont pas incluses dans le projet de loi C-10, mais qui feront l'objet de règlements d'application, pourquoi ne sont-elles pas importantes aux fins de supervision parlementaire et d'une discussion, à tout le moins dans le cadre de ce comité?
    Pourquoi ne discuterions-nous pas de cela, ici, en tant que parlementaires, en tant que représentant du peuple?
    Je crois que ce sont des questions importantes.
    Je pourrais peut-être demander à mes collègues de parler plus en détail du processus d'après lequel l'instruction au CRTC et l'application de la loi par celui-ci vont fonctionner. Je crois que cela viendrait clarifier de quelle façon tout prendra corps.
    Monsieur Ripley?
    Comme nous le savons, le Comité a demandé un projet d'instruction, qui vous donnera une idée de la façon dont le ministre compte proposer au gouverneur en conseil de communiquer ces objectifs au CRTC. C'est le premier élément. Vous aurez ainsi un aperçu de celui-ci.
    Nous proposons un cadre réglementaire plus moderne pour l'émission d'instructions. Si vous jetez un coup d'œil au projet de loi C-10, vous constaterez que l'un des changements que nous proposerons a trait à l'annonce dans la Gazette du Canada des instructions au chapitre des questions d'orientation, ce qui, par exemple, permettrait à tout le monde de faire valoir son point de vue auprès du gouvernement avant l'émission d'une instruction. Nous estimons qu'il faut instaurer une approche réglementaire plus moderne qui est transparente, c'est-à-dire où le gouvernement énonce clairement que son intention est d'émettre ce type d'instruction et qu'il souhaite obtenir de la rétroaction des parties prenantes.
    Une fois cette instruction émise, il revient en effet au CRTC de suivre ses processus réglementaires usuels, qui donnent tous l'occasion aux parties prenantes de faire valoir leur point de vue. Ceci ne se passe pas à huis clos. C'est le prolongement du mode opératoire du CRTC ces dernières décennies, où les parties prenantes peuvent témoigner et défendre leur position.
    Comme nous le savons, même si nous estimons que l'indépendance est importante, le gouvernement demeure apte à émettre une instruction, qui se doit d'être d'application générale, s'il juge que l'orientation du CRTC n'est pas conforme aux objectifs stratégiques généraux. C'est très important, car cela empêche le gouvernement d'intervenir et, disons, de cibler plus précisément une entreprise médiatique, une décision précise en matière de licence ou quelque chose du genre. Le rôle du gouvernement dans ce cas est d'établir de grands objectifs stratégiques d'application générale.
    D'accord. Merci. Nous n'avons presque plus de temps, et j'ai réussi à couvrir plus de terrain que je ne l'aurais cru.
    Si je pouvais glisser une question complémentaire, cela dit, sur la modernisation...
    Je suis désolé, monsieur Aitchison. Il vous reste littéralement une seconde.
    Madame Dabrusin, la parole est à vous pendant cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir un peu sur ce qui a été dit sur l'instruction et peut-être obtenir une meilleure explication de ce dont il s'agit exactement et du processus qui permettra son émission. Est-ce que l'un de vous peut m'aider là-dessus?

  (1150)  

    Tout à fait. Je vais demander à M. Ripley d'exposer les éléments clés et le processus, car tout se déroule selon un processus déjà établi.
    Dans le cas de l'instruction à émettre au CRTC, le gouverneur en conseil doit rendre une décision sur un décret. C'est le mécanisme en vigueur, ce qui signifie que le ministre doit soumettre une proposition à ses collègues du Cabinet afin d'obtenir leur aval, qui est nécessaire à l'émission de ce décret.
    Si le projet de loi C-10 est adopté, comme j'y ai fait référence dans ma réponse précédente, nous envisageons la création d'un processus d'annonce dans la Gazette du Canada, où il sera possible d'obtenir de la rétroaction. Voici le déroulement prévu: une fois la sanction royale accordée au projet de loi C-10, je crois que le ministre compte émettre une instruction dès que possible. Pour ce faire, il devra d'abord en faire l'annonce dans la Gazette, ce qui, je le répète, donnera l'occasion à toute personne de se faire entendre. Le ministre devra ensuite soumettre l'ensemble des documents nécessaires pour le décret au Cabinet aux fins d'approbation. Enfin, le décret sera émis, et le CRTC devra ensuite s'y conformer.
    Pouvez-vous m'expliquer plus en détail le processus qui permettrait aux gens de concrètement transmettre leurs remarques, pour que ce soit bien clair?
    Bien sûr. Dans le cadre du processus normal de publication dans la Gazette du Canada, il y aurait annonce de l'instrument réglementaire envisagé, donc, dans le cas présent, d'un projet d'instruction. Il y aurait un échéancier, ce qui donnerait l'occasion aux parties prenantes de soumettre leurs remarques ou rétroaction sur l'approche proposée; ces remarques, cette rétroaction, sont généralement publiées, de sorte que tout le monde a une idée de ce qui a été transmis. Ce processus se déroule habituellement dans la partie I de la Gazette du Canada. Ensuite, le gouvernement réfléchit à tout cela et établit s'il doit corriger le tir avant de terminer l'instruction.
    Madame Tsui, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Vous semblez avoir expliqué tout le processus. Je préciserais seulement qu'une disposition de la loi exige actuellement que l'instruction soit déposée devant chaque chambre du Parlement dans le cadre du processus d'annonce dans la Gazette.
    Je vous remercie d'avoir détaillé un peu plus le processus. Comme nous devrions recevoir le projet d'instruction bientôt, il est utile de bien comprendre le processus.
    L'autre question que j'ai porte sur les changements apportés pour accroître la représentation au titre de projet de loi C-10. Pourriez-vous m'aider à mieux cerner la façon dont ce projet de loi va permettre d'accroître la diversité, si l'on parle plus particulièrement des Autochtones, des communautés racisées et des personnes handicapées?
    Je prierais M. Ripley ou Mme Tsui de vous l'exposer.
    Je me permets toutefois de commencer en disant que la modernisation de la législation comprend la modernisation du libellé et même des communautés précisées. C'est l'un des points majeurs. En outre, les objectifs précisent notre volonté de soutenir une plus grande diversité nationale et la compréhension de la réalité autochtone. C'est bien cité. Il y a aussi des objectifs clairs dans l'application de la loi pour atteindre ces résultats.
    Peut-être pourriez-vous étayer ces points, monsieur Ripley.
    Très brièvement, l'un des changements proposés aux objectifs stratégiques de la loi, qui, je le rappelle, établissent en quelque sorte l'espace accordé au CRTC pour comprendre ce qu'il devrait viser, vient modifier une disposition existante qui porte sur la nécessité pour la programmation du système canadien de radiodiffusion et les chances que son fonctionnement offre en matière d'emploi de répondre aux besoins et aux intérêts de l'ensemble des Canadiens.
    Ce que nous proposons de faire est de préciser que cela comprend notamment des Canadiens qui sont issus des communautés racisées ou qui représentent la diversité de par leurs antécédents ethnoculturels, leur statut socioéconomique, leurs capacités et handicaps, leur orientation sexuelle, leur identité ou expression de genre et leur âge. En outre, il y a d'autres changements que nous apportons aux objectifs stratégiques afin de tenir compte de l'importance d'une programmation qui reflète les cultures autochtones, de même que de la nécessité d'accorder une place aux entreprises médiatiques autochtones.
    Ensuite, comme M. Piché y a fait allusion, le ministre a l'intention de reprendre certains de ces thèmes dans l'instruction au CRTC pour veiller à ce que, à l'avenir, il y ait des résultats plus concrets pour les créateurs, les producteurs et les entreprises médiatiques issus de ces communautés.

  (1155)  

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais m'adresser à MM. Piché et Ripley.
    Dans le projet de loi C-10, les alinéas 3(1)f), 3(1)g) et 3(1)h) proposés à la Loi font état d'un contrôle de la programmation.
    Les diffuseurs en ligne se cachent souvent derrière des algorithmes complexes en ce qui a trait aux émissions et à la programmation qu'ils proposent à leurs utilisateurs. Ces entreprises sont-elles considérées comme responsables de leurs algorithmes et de leur programmation? Dans ce contexte, ne pensez-vous pas que nous devrions un peu mieux définir qui contrôle la programmation?
    Je vais laisser le soin à M. Ripley de répondre.
    Je vous remercie de la question, monsieur Champoux.
    Nous parlons toujours de l'article de la Loi qui définit les objectifs de la Politique canadienne de radiodiffusion. Si l'évaluation du CRTC détermine qu'une entreprise est considérée comme un radiodiffuseur, celle-ci est incluse dans ce système, et les alinéas que vous avez cités indiquent qu'elle a la responsabilité des contenus sur sa plateforme, peu importe la méthode grâce à laquelle ils sont présentés aux Canadiens.
    Nous savons très bien que les compagnies comme Crave, Netflix et Spotify utilisent des algorithmes. Cela ne les rend pas moins responsables du contenu qu'elles offrent.
    La question des algorithmes m'intéresse beaucoup.
    Avez-vous l'intention d'obliger ces entreprises en ligne à faire preuve de plus de transparence au sujet de leurs algorithmes, étant donné que c'est souvent le secret de leur fonctionnement? Pensez-vous que la Loi nous permettra d'y parvenir?
    La question sera abordée dans le processus de réglementation. Si l'on veut examiner la question de la découvrabilité et déterminer la meilleure façon de présenter le contenu canadien, nul doute que le CRTC posera des questions sur le fonctionnement des algorithmes. Il n'est pas nécessaire de comprendre leur fonctionnement sur le plan technique, mais il faut en comprendre les résultats et les répercussions, dans le contexte où l'on prévoit établir un système selon lequel ces entreprises de services auront l'obligation de mieux présenter le contenu canadien.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Madame McPherson, allez-y. Vous avez la parole pendant deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les trois témoins d'être de nouveau des nôtres aujourd'hui.
    Très rapidement, pouvez-vous nous dire combien de journaux ont cessé leurs activités au Canada entre 2015 et 2021?
    Je n'ai pas les données sous la main. Ce que je peux vous dire, c'est que le rapport intitulé Le miroir éclaté découlant de l'étude demandée montre que, au cours de la dernière décennie, le Canada a perdu la moitié de ses quotidiens et, depuis 2008, la moitié de ses activités journalistiques professionnelles.
    Monsieur Piché, si c'est possible, si vous pouvez obtenir ces chiffres, pourriez-vous les transmettre au Comité? Ce serait apprécié.
    C'est tiré d'un rapport d'accès public.
    Dans ce cas, nous pouvons nous le procurer. Merci.
    En deuxième lieu, j'aimerais revenir sur certaines des questions que j'ai posées plus tôt.
    Nous comprenons que le changement proposé au contrôle canadien des radiodiffuseurs tient compte de la réalité actuelle où les services en ligne étrangers sont déjà là, où ils exploitent déjà le marché canadien. Donc, pourquoi ne pas maintenir dans la loi les exigences en matière de propriété canadienne pour les radiodiffuseurs traditionnels en plus de tenir compte de la présence des services en ligne étrangers?
    J'aimerais une réponse là-dessus, et aussi, que vous nous expliquiez un peu si vous avez été forcé de procéder ainsi, soit de retirer cette référence au contrôle canadien?

  (1200)  

    Soyons clairs: les limites actuelles sur la propriété étrangère n'ont jamais fait partie de la loi. L'instrument réglementaire que j'ai mentionné a toujours été là pour préciser, entre autres, le pourcentage réel de propriété étrangère permis. C'est compliqué. Si vous le consultez, vous constaterez qu'il y a des pourcentages d'établis pour le contrôle direct, le contrôle indirect, etc.
    L'un des objectifs du projet de loi C-10 est de veiller à ce que nos radiodiffuseurs soient plus concurrentiels. Nos radiodiffuseurs subissent une pression et un stress énormes. C'est l'une de nos grandes préoccupations en ce moment, et je crois que le Comité a entendu des témoins à cet effet. J'ai cité certaines statistiques sur le déclin actuel dans ma déclaration préliminaire. Comme vous le savez, l'Association canadienne des radiodiffuseurs a demandé un rapport sur les fermetures qu'elle anticipe dans un avenir proche.
    L'un de nos objectifs est donc de veiller à ce que nous continuions à avoir des radiodiffuseurs canadiens, car ils constituent un maillon très important du système.
    Il est certes manifeste que certains radiodiffuseurs sont préoccupés par l'absence dans le libellé du projet de loi de l'affirmation de la protection d'une propriété canadienne des radiodiffuseurs et du soutien à celle-ci. Nous en avons pris note. Comme je l'ai dit, l'intention sous-jacente était simplement de reconnaître que le système canadien de la radiodiffusion n'est plus fermé au marché mondial. Il est évident que l'intention de la politique est de soutenir les radiodiffuseurs canadiens.
    Merci, monsieur Ripley. C'est apprécié.
    Merci, madame McPherson.
    Bon, mesdames et messieurs, nous allons devoir suspendre les travaux un instant.
    Madame Tsui, vous ne serez pas là pour la prochaine série de questions. Nous vous remercions pour votre contribution, qui a été très appréciée.
    Messieurs Ripley et Piché, nous allons vous revoir dans un instant.
    La séance est suspendue un bref instant.

  (1200)  


  (1205)  

    Bon retour à tous. Reprenons les travaux.
    Nous discutons du projet de loi C-10.
    Je souhaite remercier nos invités, mais d'abord, je dois en mentionner un en particulier. M. Jaime Battiste se joint à nous de Sydney—Victoria. J'ai oublié de vous nommer la dernière fois. Je vous prie de m'en excuser. Je qualifie souvent sa magnifique circonscription de porte d'entrée de l'île de Terre-Neuve.
    Je souhaite également remercier le ministre, l'honorable Steven Guilbeaut, qui se joint à nous pour la prochaine heure. Nous accueillons également la sous-ministre, Mme Laurendeau. Enfin, MM. Piché et Ripley sont toujours avec nous.
    Commençons par le ministre.

[Français]

    Monsieur Guilbeault, vous avez la parole pour cinq minutes.

  (1210)  

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais vous saluer, tous et toutes.
    Je me joins à vous de Montréal, sur le territoire traditionnel des Mohawks et des autres peuples haudenosaunee.
    Monsieur le président, membres du Comité, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole devant vous aujourd'hui dans le cadre de l'étude du projet de loi C-10, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.
    J'aimerais aussi souligner qu'aujourd'hui est la Journée internationale de la femme.
    J'aimerais remercier les membres du Comité pour les travaux préliminaires qu'ils ont entamés il y a déjà quelque temps.
    Je suis ravi que ce texte ait enfin été adopté à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes. Les retards engendrés par certains députés conservateurs ont soulevé mon inquiétude, mais nous y sommes parvenus, et nous pouvons continuer d'aller de l'avant. Rappelons-le: ceci n'est pas un projet de loi partisan. C'est un projet de loi axé sur le secteur de la culture, destiné aux Canadiens et aux Canadiennes, et il mérite d'aller de l'avant.
    J'espère que tous les députés ici présents et leur caucus reconnaissent l'urgence de moderniser la Loi sur la radiodiffusion afin qu'elle serve mieux les intérêts de la population canadienne dans le monde numérique.

[Traduction]

    Personne ne peut ignorer aujourd'hui le déséquilibre législatif qui avantage les plateformes numériques au détriment des diffuseurs et des industries créatives canadiennes. Cette réforme répond à un besoin criant. Elle est vitale pour assurer le dynamisme des entreprises de chez nous, dès maintenant et pour les décennies à venir. C'est pourquoi notre gouvernement va continuer à travailler de façon constructive et concertée afin que les Canadiennes et Canadiens puissent bénéficier de l'outil législatif le plus efficace possible dans les meilleurs délais.
    Les secteurs culturels et créatifs ont nourri depuis le début la réflexion sur la modernisation de la loi actuelle. Ils ont donné leur appui à cette réforme et ce mouvement favorable se confirme d'un bout à l'autre du pays, notamment au Québec.

[Français]

    D'ailleurs, depuis le dépôt du projet de loi, cette réflexion importante se poursuit dans l'espace public et devant votre comité. Elle a donné lieu à plusieurs propositions d'amendement, que nous allons examiner avec toute l'attention qu'elles méritent. Nous sommes évidemment ouverts aux améliorations qui maximiseraient les avantages d'une loi modifiée pour les Canadiens et les Canadiennes.
    Je sais que vous avez recueilli les contributions importantes de plusieurs témoins clés, et j'ai hâte de voir les résultats du travail du Comité à cet égard.
    Je suis bien conscient que l'examen du projet de loi doit être mené avec soin, et ce, pour deux raisons. D'une part, il déploie des moyens totalement inédits au Canada pour mettre en place un cadre réglementaire adapté à la réalité d'aujourd'hui. D'autre part, il s'agit d'un enjeu de taille. De nombreux joueurs des industries créatives et culturelles réclament cette mise à jour de la Loi sur la radiodiffusion et comptent sur ce nouvel outil pour continuer à se développer sur les plateformes numériques.

[Traduction]

    Il faut rappeler que le système de radiodiffusion actuel a bien servi les Canadiens durant des décennies. Il a favorisé l'éclosion d'industries créatives et culturelles nationales fortes. Il a permis la diffusion d'un contenu original qui nous ressemble et qui porte la marque de nos valeurs. Le projet de loi C-10 vise à préserver cet héritage. Cependant, il vise aussi à inclure plusieurs nouveaux joueurs et de nouvelles activités. Il doit donc avoir une approche adéquate pour intégrer les radiodiffuseurs en ligne et assurer leur contribution équitable.

[Français]

    Par ce projet de loi, nous voulons mieux faire résonner la diversité des voix canadiennes: les voix des femmes; les voix des francophones et des anglophones; les voix des communautés en situation minoritaire; les voix des Autochtones; ainsi que les voix de toutes les communautés au pays qui sont trop peu souvent représentées à l'écran ou ailleurs, y compris les communautés ethnoculturelles et les communautés racisées.
    Je tiens à préciser que le projet de loi ne vise pas à changer la structure réglementaire en radiodiffusion. Il vise plutôt à mettre à jour les objectifs de la Loi et les outils du CRTC. Il préserve donc l'indépendance donnée au CRTC pour mettre en place la réglementation appropriée et atteindre les objectifs de la Loi. Cette indépendance est d'autant plus importante que le système de radiodiffusion incorporera de nouveaux joueurs ayant des modèles d'affaires différents et que ce système continuera à évoluer.

[Traduction]

    Le projet de loi ne traite ni de la réglementation sur la haine en ligne ni de la rémunération équitable des journalistes par les géants du Web, puisque ce ne sont pas strictement des enjeux de radiodiffusion. Toutefois, je compte déposer deux autres projets de loi sur ces questions dans un avenir rapproché. Le temps venu, je serai heureux de comparaître devant votre comité au sujet de ces autres projets de loi. Toujours dans un esprit de collaboration constructive.

[Français]

    Je me ferai un plaisir de communiquer le décret que nous avons l'intention de publier à la suite de l'adoption du projet de loi. Veuillez noter, cependant, que ce décret a été rédigé avant le dépôt du projet de loi. Il sera donc certainement modifié de façon mineure à la suite des amendements apportés au projet de loi C-10 d'ici la sanction royale.
    De plus, par souci de transparence, et comme prévu par la loi, le décret sera assujetti à une période de consultations publiques afin d'obtenir les observations des Canadiens et des Canadiennes à son sujet.
    Je vous invite à utiliser le décret comme contexte pour vos études et à concentrer vos efforts sur le projet de loi proprement dit, car c'est la Loi qui nous accompagnera durant plusieurs décennies et qui assurera la pérennité du secteur de la radiodiffusion. Au fil des ans, les gouvernements se succéderont et prendront divers décrets au CRTC pour s'adapter aux réalités du moment.
    Finalement, j'aimerais éclaircir la situation suivante. Lors de ma comparution du 5 novembre 2020, le député de Richmond—Arthabaska m'a demandé comment le ministère avait fait le calcul pour déterminer que les investissements supplémentaires dans le contenu canadien diffusé numériquement à la télévision d'ici 2023 seraient de 830 millions de dollars. Le 11 décembre 2020, le ministère a fourni au greffier du Comité permanent du patrimoine canadien les réponses aux questions qui avaient été posées lors des réunions du 30 octobre et du 5 novembre 2020, y compris celle portant sur le calcul du montant de 830 millions de dollars. Lors de ma dernière comparution devant le Comité...

  (1215)  

[Traduction]

    Soyez très bref, monsieur.
    Oui. Je n'en ai plus que pour 30 secondes, monsieur le président.

[Français]

    Je pense que c'est important.
    Lors de ma dernière comparution devant le Comité, le 29 janvier dernier, le député de Richmond—Arthabaska a dit que le Comité n'avait toujours pas reçu cette information. Je suis certain qu'il ne veut pas induire en erreur les membres de ce comité, pas plus que les Canadiens et les Canadiennes qui sont à l'écoute, en affirmant de manière erronée qu'il n'a rien reçu. Je l'invite à parcourir sa boîte de courriel, car il a effectivement reçu l'information, qui a été distribuée à tous les membres du Comité.
    Sur ce, je vous remercie. Je vais rester avec vous pour répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Rayes, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également le ministre et ses collègues de leur présence.
    Vous me permettrez de corriger certains propos du ministre ou du moins de le rappeler à l'ordre, moi aussi.
    Le ministre ne veut pas que ce projet de loi fasse l'objet de partisanerie et il souhaite que nous en reconnaissions l'urgence. J'aimerais l'informer que le Comité a accepté à l'unanimité de procéder en accéléré à l'étude de ce projet de loi, et ce, en dépit du privilège tout à fait légitime qu'avaient les députés de s'exprimer à la Chambre des communes et de poser des questions sur ce projet de loi. Je rappelle que le gouvernement libéral a mis cinq ans pour déposer ce projet de loi. De plus, il a prorogé le Parlement, ce qui a retardé l'étude de projets de loi importants, comme celui-ci sur la radiodiffusion. Nous sommes tout à fait d'accord sur le principe. Si ce n'est pas trop lui demander, j'aimerais que le ministre se garde une petite gêne dans le cas présent, plutôt que d'essayer de nous faire la leçon comme il le fait présentement.
    Cela étant dit, oui, il a raison: nous avons bel et bien reçu un avis, noyé dans un document de plusieurs pages, contenant exactement la même information que celle qui nous a été donnée, c'est-à-dire que le calcul a été fait à partir de simulations. J'aimerais dire au ministre que sa sous-ministre, Mme Laurendeau, a pris la peine durant cette même rencontre de dire qu'il serait important, tant qu'à déposer le document, de fournir des explications, car c'était supposément complexe. Je pense qu'il y a eu un imbroglio. Je le lui accorde, nous avons bel et bien reçu l'information, mais ce n'était rien de très précis. Encore là, il va falloir attendre les directives du CRTC.
    J'aimerais revenir sur ce projet de loi, qui est si important, mais qui ne tient pas compte de plusieurs aspects. Comme l'a dit le ministre lui-même dans son allocution, le projet de loi ne touche en rien aux discours haineux ni au partage des revenus. Les joueurs des réseaux sociaux ne sont pas visés par ce projet de loi. Par ailleurs, malgré l'urgence et les consultations du CRTC, rien n'a été fait encore pour revoir le rôle que CBC/Radio-Canada a à jouer. Il y a donc beaucoup de questions.
    Lorsqu'elle a déposé son document de travail, son supposé livre blanc, la ministre des Langues officielles nous a parlé de l'importance du français et de l'importance pour le gouvernement d'en faire la promotion et de le défendre. Elle a dit que, en matière de radiodiffusion, le français aurait une place importante et qu'on allait y travailler avec ardeur.
    Pourtant, lorsqu'on examine le projet de loi C-10, qui vise principalement les joueurs du numérique, on se rend compte que la seule et unique mesure visant à accroître la place du français, à en faire la promotion et à s'assurer d'avoir du contenu francophone a été de supprimer la mention « au fur et à mesure de la disponibilité des moyens » à la fin de l'alinéa 3(1)k) de la Loi, de sorte qu'il soit simplement indiqué qu'« une gamme de services de radiodiffusion en français et en anglais doit être progressivement offerte à tous les Canadiens ».
    Il me semble que le projet de loi ne prévoit pas grand-chose de substantiel à ce sujet. Pourtant, la ministre nous dit de son côté que le français est important et qu'elle va s'assurer qu'il en sera tenu compte dans tous les ministères. Nous voilà en train d'étudier ce projet de loi, que nous attendions depuis plus de 30 ans. Selon les hauts fonctionnaires et le ministre, c'est un projet de loi historique. Or, il comporte un seul élément qui traite de la protection du français.
    Qu'avez-vous à répondre à tous ces organismes qui s'inquiètent de la place du français en Acadie, au Québec et dans les communautés francophones hors Québec? Là, je ne parle pas de quotas; n'essayez pas de me faire dire qu'il y a des quotas.
     Je vous remercie de votre intervention, monsieur Rayes.
    Il y a plusieurs choses.
    D'abord, comme M. Ripley vous l'a dit tout à l'heure, nous n'avons pas pris le chiffre de 830 millions de dollars dans une boîte de Cracker Jack. Ce chiffre a été obtenu à la suite d'une série de 16 simulations basées sur différentes hypothèses. C'est ce qui nous a permis d'arriver à une prévision du montant investi. Cela pourrait être un peu plus ou un peu moins. C'est dans le cadre de la réglementation qui sera mise en œuvre par le CRTC que seront définis les montants exacts. C'est la première des choses.
    Par ailleurs...

  (1220)  

    Monsieur le ministre, je vous arrête...
    ... il est faux de...
    C'est le privilège de celui qui pose des questions: je vous arrête ici, monsieur le ministre. Vous voulez revenir sur les 830 millions de dollars. L'information que nous avons reçue...
    C'est vous qui en avez parlé dans votre intervention.
    C'est parfait. Vous voulez revenir sur ce sujet, mais ma question portait sur le français. J'ai seulement voulu corriger le tir en disant que nous avions bel et bien reçu le document, mais tout ce qu'il indiquait, c'était qu'il y avait eu une simulation.
    C'est bien 16 simulations.
    La précision au sujet des 16 simulations, nous venons de l'apprendre aujourd'hui. Dans l'information reçue par écrit, il n'était nulle part question de cela. Nous avons demandé d'avoir accès aux calculs, mais nous ne les avons jamais reçus. Je m'attendais, à la suite du commentaire de Mme Laurendeau, à ce que nous obtenions des explications verbales, étant donné la complexité de ces calculs. Nous n'en avons pas eu.
    Je ne veux pas débattre à ce sujet en ce moment. Ma question porte sur le français.
    La ministre Joly nous a dit qu'on tiendrait compte du français dans le domaine de la radiodiffusion. Or, dans ce mégaprojet de loi si important, un seul petit alinéa prévoit quelque chose de plus concret pour la protection du français.
    Pouvez-vous préciser quelles mesures du projet de loi pourraient sécuriser les organismes de protection du français?
    J'y arrivais, justement, à la question du français.
    Juste avant, je tenais à préciser que vous avez fait une deuxième fausse affirmation en mentionnant que ce projet de loi ne s'appliquerait pas aux réseaux sociaux. Tout à l'heure, vous avez entendu M. Ripley vous expliquer très clairement comment, dans les cas où les réseaux sociaux agissent comme des diffuseurs, la Loi pourra s'appliquer aux entreprises qui gèrent des plateformes numériques. Alors, il est faux d'affirmer comme vous l'avez fait que le projet de loi ne s'applique pas aux réseaux sociaux.
    Le troisième point que je tenais à souligner concerne le fait français. Comment avons-nous réussi à protéger le fait français au cours des décennies? Le CRTC a pris différentes décisions visant à obliger les diffuseurs à investir dans du contenu francophone, et c'est grâce à ces décisions que les émissions en français les plus écoutées aujourd'hui, que ce soit à la télévision ou au grand écran, au Québec ou ailleurs au Canada, sont produites ici. Nous voulons que ces investissements dans le contenu francophone continuent. En plus des diffuseurs conventionnels, les plateformes numériques seront maintenant soumises à des obligations en matière de dépenses, notamment dans du contenu francophone.
    Merci, monsieur Guilbeault.

[Traduction]

    Nous allons maintenant donner la parole à M. Louis pendant six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, chers témoins, je vous remercie de votre présence parmi nous aujourd'hui, et je vous en suis reconnaissant. Pendant que nous travaillons sur cette importante mesure législative, je me réjouis vraiment de l'occasion qui m'est donnée de parler avec vous afin d'obtenir des renseignements supplémentaires.
    Nous savons que la Loi sur la radiodiffusion nous offrira davantage de débouchés dans les secteurs du film, de la vidéo et de l'enregistrement sonore. Il est vraiment important de soutenir ces emplois et d'investir dans notre secteur culturel, surtout en ce moment.
    Comme j'habite ici, dans la région de Waterloo, je peux en parler en connaissance de cause. Il y a dans la région une scène musicale très animée, dont je suis bien conscient, ainsi qu'une production cinématographique et télévisuelle très dynamique, notamment le tournage de nombreuses publicités et d'émissions comme La servante écarlate, Anne, Les enquêtes de Murdoch, et j'en passe.
    J'espère que vous pourrez nous en dire davantage sur la façon dont la mise à jour de la Loi sur la radiodiffusion va générer chaque année près d'un milliard de dollars d'investissements étrangers dans nos films, notre télévision et notre musique, à un moment où le secteur des arts et de la culture est touché de manière disproportionnée par la pandémie, et que vous pourrez nous expliquer à quel point l'ensemble de l'écosystème artistique est important pour nos économies locales et plus particulièrement pour les secteurs du tourisme et de l'accueil, qui sont également très durement touchés par la pandémie.
    Vos propos comportent un certain nombre d'éléments. Je commencerai par aborder votre dernier point, c'est-à-dire la façon dont la culture, le tourisme et l'accueil vont de pair. C'est le cas dans nos grands centres urbains, mais c'est certainement aussi le cas dans bon nombre des régions du Canada. Les gens se rendront à un festival. Ils séjourneront dans des hôtels ou des gîtes touristiques locaux. Ils iront au restaurant. Ils feront du tourisme. Il s'agit vraiment d'un écosystème.
    En ce qui concerne les 830 millions de dollars de nouveaux revenus prévus qui seront investis dans la culture canadienne, je pense qu'il est important de se rappeler que si nous ne prenons pas cette mesure... Nous n'aurons pas 830 millions de dollars de plus. En raison de la réduction des revenus des radiodiffuseurs traditionnels, nous nous dirigeons vers une situation où le financement disponible pour les arts et la culture au Canada diminuera de plus d'un milliard de dollars.
    Ce que nous essayons de faire est extrêmement important pour la préservation de cet écosystème, comme vous l'avez dit, au profit des régions. Autrefois, les tournages de films ou d'émissions de télévision avaient lieu au centre-ville de Montréal ou de Toronto, mais aujourd'hui, ils se déroulent partout au pays. Il y a des productions à Terre-Neuve, ainsi que dans les Prairies. Évidemment, Vancouver est aussi devenue une très grande plaque tournante.
    Nous prenons des mesures pour tenter de nous assurer que toutes les régions du Canada bénéficient d'un secteur artistique et culturel dynamique.

  (1225)  

    Je me réjouis de vous entendre dire cela.
    J'aimerais approfondir un peu plus la question. Les témoins précédents ont mentionné un type de fonds de production — vous parlez des 830 millions de dollars par année — visant à faire en sorte que des entreprises comme Spotify, qui profitent actuellement de nos artistes sans apporter de contributions importantes et appropriées à notre secteur culturel, versent des contributions. Pouvez-vous expliquer un peu mieux comment ce processus pourrait fonctionner, comment nous pourrons nous assurer que les personnes qui profitent de nos arts et de nos artistes — s'il y a des sociétés internationales qui le font — apportent maintenant des contributions, et comment cela peut profiter à nos artistes locaux?
    Comme MM. Piché et Ripley l'ont expliqué précédemment, nous conservons l'essentiel de la structure de la loi et de la réglementation actuelles sur la radiodiffusion.
    Ce que nous faisons dans le projet de loi C-10, et je pense que c'est la raison pour laquelle le projet de loi a été salué par tant de personnes, c'est que nous conservons ce qui fonctionne, et nous ajoutons un autre ensemble d'éléments qui nous permettront d'appliquer la réglementation canadienne à des géants en ligne, comme Spotify, Netflix, Amazon Prime et Apple Music.
    J'aimerais corriger quelque chose que M. Rayes a dit plus tôt, à savoir que nous attendons la prise de ces mesures depuis cinq ans. En fait, ce n'est pas le cas. Mon prédécesseur a mandaté un groupe de personnes qui a parcouru le pays et qui a reçu près de 2 000 exposés de position de la part de différentes organisations. Cela a abouti au rapport Yale, qui a été déposé au début de 2020. Nous avons ensuite utilisé ce rapport pour commencer à travailler sur le projet de loi, qui a été présenté un an plus tard, au milieu de la plus grande pandémie que nous ayons connue en 100 ans.
    Je ne pense pas que nous ayons réellement perdu beaucoup de temps à cet égard. Nous avons agi très rapidement pour que cette mise à jour ait lieu.
    Je vous en suis reconnaissant.
    Il me reste environ une minute, mais je tiens à clarifier un point auquel les questions précédentes ont fait allusion. Des informations erronées ont été communiquées selon lesquelles le projet de loi permettrait, d'une manière ou d'une autre, de contrôler, de réglementer ou de censurer les médias sociaux, et nos témoins précédents ont développé ce point, mais uniquement dans les cas où une entreprise de médias sociaux fait elle-même fonction de radiodiffuseur.
    Pourriez-vous clarifier ce point afin d'éclairer les personnes qui disent que nous voulons censurer les médias sociaux?
    Oui. Manifestement, ce n'est pas ce que nous faisons.
    À l'heure actuelle, la radiodiffusion canadienne ne fait l'objet d'aucune censure. Il y a différents types de postes de télévision et de radio qui abordent la politique sous différents angles. C'est tout à fait normal au sein d'une démocratie. Ce que nous essayons de faire, c'est d'appliquer ce cadre réglementaire aux diffuseurs en ligne.
    Dans le cas de YouTube, par exemple, nous ne nous intéressons pas particulièrement à ce que les gens... vous savez, quand mon grand-oncle affiche des photos de ses chats, cela ne nous intéresse pas en tant que législateurs.
    Par contre, si YouTube ou Facebook fait fonction de radiodiffuseur, la loi s'appliquera alors à cette entreprise, et le CRTC définira comment les choses se passent. Mais en réalité, nous ne nous préoccupons pas du contenu généré par les utilisateurs. Nous nous préoccupons de ce que font les radiodiffuseurs.
    Merci, monsieur le ministre.

[Français]

    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, j'aimerais revenir sur votre allocution et sur votre discussion avec M. Rayes.
    Vous parliez de l'importance de faire résonner la diversité des voix canadiennes, c'est-à-dire les voix francophones et anglophones, les voix des communautés en situation minoritaire, et ainsi de suite. C'est effectivement une préoccupation que nous partageons tous. Pourtant, c'est abordé de façon extrêmement vague dans le projet de loi.
    Si c'est effectivement l'objectif du projet de loi, pourquoi ne l'avez-vous pas mieux précisé à même le texte de loi?
    Je vous remercie de la question, monsieur Champoux.
    Trouvez-vous beaucoup d'éléments dans la Loi actuelle qui ont permis au français d'aller chercher la place qu'il occupe aujourd'hui au petit et au grand écran? La réponse à cette question est non. C'est grâce à la réglementation et aux différentes décisions du CRTC que nous avons réussi à bâtir au Canada une industrie francophone de renommée internationale. Aujourd'hui, nos réalisateurs sont prisés et très convoités un peu partout sur la planète, notamment aux États-Unis. Or, il n'y a pas grand-chose dans la Loi actuelle qui définit le fait français ou qui le protège.
    Pourrait-on apporter des amendements au projet de loi pour qu'il y ait une plus grande reconnaissance du français? Comme je l'ai déjà dit, s'il faut ajouter quelque chose au projet de loi, je suis tout à fait ouvert à cette possibilité. Cependant, il faut comprendre que c'est la réglementation qui s'occupera de la mécanique.

  (1230)  

    J'aimerais revenir sur ce que vous venez de dire à propos de la Loi actuelle. Même si, à l'époque, l'industrie elle-même était complètement différente, il était déjà difficile pour le français de s'y tailler une place. Je parle notamment de ce que je connais le mieux, c'est-à-dire l'industrie de la radio, dans laquelle j'ai œuvré pendant plusieurs années. J'ai vu le combat que l'UDA, l'ADISQ et les organismes de défense des artistes francophones ont dû mener devant le CRTC pour maintenir une place dans cet univers.
    Aujourd'hui, cet univers a complètement changé. De gigantesques joueurs s'y sont ajoutés, notamment les radiodiffuseurs en ligne et les médias numériques étrangers. Les règles du jeu ne sont plus du tout les mêmes, et c'est ce qui me préoccupe.
    Selon moi, il serait préférable d'ajouter des dispositions beaucoup plus claires dans la Loi et de ne pas se fier seulement au CRTC pour établir la réglementation.
    Qu'en pensez-vous?
    Je pense que c'est mal comprendre le rôle d'un organisme de réglementation. Personnellement, je ne suis jamais intervenu auprès du CRTC, mais je suis intervenu auprès de nombreux organismes de réglementation du Québec et du fédéral dans le domaine énergétique.
    Un organisme de réglementation ne prend pas ses décisions proportionnellement au nombre d'entreprises qui exercent des pressions sur lui en faveur d'une déréglementation ou en faveur d'une meilleure réglementation. Ce n'est pas ainsi qu'un organisme de réglementation fonctionne, ni la Régie de l'énergie du Québec, ni la Régie de l'énergie du Canada, ni le CRTC. Il considère plutôt l'ensemble des positions qui lui sont présentées, compte tenu de la loi qui encadre son travail.
    De plus, grâce au projet de loi C-10, le gouvernement se donne une plus grande possibilité de donner des directives au CRTC.
    À la lumière de tout cela, c'est comme cela que le CRTC et l'ensemble des organismes de réglementation rendent des décisions.
    Monsieur le ministre, en tout respect, je pense que c'est un peu naïf de croire que le CRTC ne sera pas quelque peu sensible à la pression; il l'a toujours été. Cet organisme reçoit des gens qui viennent lui faire valoir leurs points de vue. Les géants du Web vont forcément avoir un pouvoir de persuasion beaucoup plus grand que les petits organismes, qui ont moins de moyens.
    Je ne partage pas votre opinion là-dessus, mais une opinion en vaut une autre.
    D'accord.
    Certains témoins se sont montrés préoccupés par le manque de précision sur la nature du contenu canadien ou du contenu francophone qu'on veut avoir. D'ailleurs, puisqu'on parle du CRTC, j'aimerais citer Mme Messier, de l'Association québécoise de la production médiatique:
[...] le CRTC a trop souvent interprété la reconnaissance de la dualité linguistique comme étant la fourniture de contenu en français sans se soucier de savoir si ce contenu consistait en des émissions anglophones traduites, sous-titrées ou doublées.
    Dans l'objectif de protéger la culture francophone dans cet univers extrêmement compétitif, ne pensez-vous pas qu'il y aurait lieu de préciser exactement ce qu'est du contenu original canadien ou du contenu original francophone?
    Il y a effectivement une grande différence entre les deux. Mme Messier et vous avez tout à fait raison.
    Je l'ai dit et je le répète: s'il faut apporter des amendements au projet de loi pour clarifier un certain nombre de choses, j'y serai tout à fait favorable.
    Je vais passer à un autre sujet, monsieur le ministre.
    Il y a un peu moins de deux semaines, M. Richard Stursberg a comparu devant le Comité. Il a laissé entendre que le critère de propriété canadienne ou de contrôle effectif canadien devrait être maintenu dans le cas des entreprises étrangères de radiodiffusion à qui l'on permettrait de s'installer ici et à qui l'on imposerait, de façon juste, les mêmes règles quant à la production de contenu canadien et à leur contribution en la matière. Sans ce critère, les entreprises étrangères pourraient, à terme, prendre le contrôle d'à peu près toute l'industrie de la radiodiffusion au Canada.
    Qu'avez-vous à répondre à cela? Êtes-vous d'accord avec M. Stursberg?
    Non, pas du tout. D'ailleurs, M. Ripley a très bien répondu à cette question tout à l'heure, dans la première heure de la réunion, en disant que ce n'était pas une loi, mais une directive. Le CRTC n'a aucun pouvoir sur cette question. C'est une décision gouvernementale.
    Est-ce qu'un autre gouvernement pourrait décider de changer les choses? Un gouvernement est toujours souverain et libre de prendre ses propres décisions. Quoi qu'il en soit, le CRTC ne peut pas faire cela, et la Loi ne change rien à cela. La directive qui est en place demeure en place.
    D'accord.
    Je pense que le temps de parole dont je dispose est écoulé.
    Je vous remercie, monsieur le ministre.

  (1235)  

    Merci, monsieur Champoux.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

     Madame McPherson, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier le ministre de s'être joint à nous aujourd'hui. J'attends avec impatience le moment où nous pourrons nous réunir dans la même pièce, mais je dois me contenter de ce mode de communication pour l'instant. C'est bien que notre technologie ait fonctionné aujourd'hui pour la tenue de la séance.
    J'aimerais poser quelques questions au sujet de la CBC et de son financement. Bien entendu, la CBC est d'une importance cruciale pour bon nombre des électeurs de ma circonscription et pour de nombreux Canadiens partout au pays.
    En ce qui concerne le niveau de financement par habitant de notre radiodiffuseur public, savez-vous où le Canada se classe parmi les 18 pays de l'OCDE?
    J'avais l'impression que nous allions parler du projet de loi C-10 aujourd'hui, donc la plupart des informations que j'ai apportées traitent des questions relatives au projet de loi C-10.
    Vous vous rappelez peut-être que le gouvernement a investi un montant record dans la CBC au cours de son mandat précédent, après des années de restrictions budgétaires sous le gouvernement Harper.
     Je n'ai pas cette information en main, mais je suis sûr que nous pourrions vous la fournir.
    Ce serait formidable. Merci.
    Je pose ces questions parce que, bien entendu, le fait d'avoir l'occasion de vous parler ouvre la voie à toute une série de questions que je me pose.
    L'un des suivis de cette question est le suivant: combien de recommandations du rapport Yale portant sur le renforcement du rôle de la CBC et de Radio-Canada avez-vous mises en œuvre jusqu'à présent?
     J'ai été clair à ce sujet depuis le début. Le projet de loi C-10 ne réglera pas tous les problèmes liés à la radiodiffusion en général. Il ne règle pas les problèmes liés à la CBC.
    Nous faisons partie d'un gouvernement minoritaire. Nous nous sommes donc attaqués à la mise en œuvre des éléments du rapport Yale qui nous semblaient les plus cruciaux. Comme je l'ai déjà dit, il y a un certain nombre d'autres recommandations issues du rapport Yale que nous aimerions mettre en œuvre. Nous ne pouvons tout simplement pas tout faire en même temps. Si je présentais à la Chambre et à ce comité un projet de loi qui s'occupait de tous les enjeux possibles, je doute sincèrement que nous parvenions à le faire adopter.
    Je pense que nous pouvons réussir à faire adopter le projet de loi C-10. Il ne résoudra pas tout, mais il résoudra une partie importante de l'équation. Le gouvernement a foi en le radiodiffuseur canadien. Nous avons fait des investissements importants dans ce radiodiffuseur, et je veux lui assurer un avenir prospère.
    Tout comme moi, bien sûr, monsieur le ministre.
    À titre d'information, je vous signale que le Canada dépense environ 29 $ pour financer la radiodiffusion publique, alors que nous savons que le Royaume-Uni en dépense 105 $. En France, ils dépensent 73 $. Je vous encourage à assumer un rôle de chef de file à cet égard afin de garantir que la CBC sera financée de manière adéquate à l'avenir. Bien entendu, vous bénéficiez du soutien du NPD pour faire ce travail.
    La prochaine question que je souhaite vous poser concerne la publicité en ligne diffusée par les géants du Web. Nous avons eu l'occasion d'en discuter avec vos collègues au cours de la première heure.
    Oui, j'ai écouté leurs interventions.
    Pendant les années 2018 et 2019, combien d'argent le gouvernement fédéral a-t-il consacré à la publicité en ligne, comparativement aux médias numériques? Pouvez-vous répondre à cette question? Je sais qu'ils avaient l'intention de fournir des chiffres selon leur point de vue, mais j'aimerais bien vous poser la même question.
    Je vais vous donner la même réponse que M. Piché vous a donnée tout à l'heure. Nous n'avons pas ces chiffres sous la main, mais nous serions heureux de vous les fournir.
    Si vous me le permettez, je voudrais ajouter qu'il y a une tendance au Canada, qui a commencé avant notre arrivée au pouvoir —  donc une tendance amorcée par le gouvernement précédent —, à investir de plus en plus d'argent dans des publicités diffusées par des plateformes en ligne. C'est une tendance que nous avons commencé à modifier. Vous n'observerez pas ce changement avant l'année prochaine, mais nous avons commencé à modifier nos investissements dans des publicités en nous éloignant des plateformes en ligne.
    Je suis d'accord. Nous avons trop investi dans les plateformes en ligne, et nous devons changer cela.
    Vous vous engagez à tâcher d'équilibrer les choses, je suppose, afin que nous ne financions pas de grandes entreprises au détriment de nos médias locaux, qui doivent fermer leurs portes à cause de cette concurrence déloyale.
    Nous avons déjà commencé à nous atteler à cette tâche.
    Comme je l'ai dit, une fois que les chiffres de cette année auront été compilés et publiés, ils montreront que nous avons commencé à changer cette tendance, mais le problème n'est pas résolu. Je suis le premier à l'admettre.
    Je vais donner un peu suite aux propos de mon collègue, M. Champoux.
     Plus tôt aujourd'hui, M. Ripley nous a dit que le CRTC ne pourra pas modifier l'orientation concernant l'inadmissibilité des non-Canadiens aux licences, une inadmissibilité qui protège, bien sûr, la propriété canadienne des médias canadiens. Je ne comprends toujours pas le problème. Pourquoi renoncer à protéger la propriété canadienne des radiodiffuseurs conventionnels par le biais de la loi? Pourquoi n'est-il pas possible d'utiliser la loi pour tenir compte à la fois de la réalité commerciale des entreprises étrangères en ligne et de la protection de la propriété canadienne des radiodiffuseurs conventionnels?

  (1240)  

    Comme M. Ripley l'a expliqué plus tôt, nous ne sacrifions pas la propriété des diffuseurs canadiens. Nous ne le faisons pas. Ce n'est tout simplement pas le cas.
    Ce que nous faisons, par le biais des modifications qui figurent dans le projet de loi proposé, c'est veiller à ce que les lois et les règlements canadiens puissent s'appliquer aux plateformes en ligne, ce qui n'est pas le cas en ce moment. Si nous ne prévoyons pas un espace pour le faire dans le projet de loi, comment pourrons-nous appliquer nos lois et nos règlements à ces plateformes? Si nous ne le faisons pas, alors toute cette discussion à propos des 830 millions de dollars supplémentaires consacrés la culture canadienne ne pourra jamais se concrétiser.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur le président, je vous redonne la parole.
    Merci, madame McPherson.
    Nous allons maintenant passer à notre deuxième série de questions en cédant la parole à M. Waugh.
    Monsieur Waugh, la parole est à vous.
    Je vous souhaite la bienvenue, à vous, monsieur le ministre, vous qui êtes à Montréal, et à vos fonctionnaires. Je remercie tous les gens de leur participation à la séance d'aujourd'hui.
    Les délibérations étaient intéressantes. J'ai écouté votre conversation au sujet du transfert de l'argent des plateformes vers les médias canadiens, et pourtant les journaux ruraux du Canada reçoivent de moins en moins d'argent du gouvernement. Il n'y a pas si longtemps, John Hinds, qui était le PDG de Newspapers Canada, consacrait une page dans le Toronto Star, le Globe and Mail et d'autres journaux du pays à des plaintes à propos de cette situation. Ils sont en grande difficulté à cause de Facebook, Google, etc. Kevin Chan, comme vous le savez, a déclaré pendant une séance de comité que ce n'était pas un problème, qu'ils les aidaient au lieu de leur nuire. Pourrais-je obtenir vos commentaires à ce sujet?
     Nous traitons avec des journaux de l'Ouest. Même pendant la pandémie de COVID-19, le Winnipeg Free Press n'a reçu que deux publicités de votre part. Je ne vois pas où vous investissez de l'argent dans des journaux et des médias locaux.
    Il n'y a peut-être eu que deux publicités — il faudrait que nous vérifiions —, mais sous le gouvernement Harper, il n'y en aurait eu aucune, alors je suppose que deux valent mieux que zéro. C'est la première chose que je dirais.
    La deuxième, c'est que nous avons octroyé près de 800 millions de dollars aux médias canadiens depuis le budget de 2019, afin de les aider à passer à travers la crise.
    La troisième chose que je dirais — et que j'ai dite dans mon discours préliminaire —, c'est que nous travaillons à un projet de loi. La radiodiffusion et les médias ne sont pas dans le même panier, mais j'ai dit à maintes reprises que j'étais pour une compensation juste de la part des géants du Web comme Facebook et Google à l'intention des médias. Je n'approuve donc pas les commentaires faits par M. Chan en public ou devant le Comité à ce sujet. À l'instigation du Canada, nous avons mis sur pied une coalition internationale de pays qui travaillent ensemble à cette fin, avec l'Australie, l'Allemagne, la France, la Finlande et beaucoup d'autres très bientôt. Je ne crois pas que nous soyons passifs. Nous avons été très proactifs.
    Oui, l'année 2020 a été difficile pour bon nombre d'organisations et je crois qu'elles sont nombreuses à vouloir vous remercier pour les 500 millions de dollars octroyés par votre ministère en 2020.
    Je crois que vous avez déjà octroyé 300 millions de dollars cette année, mais selon ce que je comprends, dans les faits, le budget du Patrimoine canadien est sans précédent et n'est pas viable.
    Votre ministère a-t-il un plan pour revenir à des dépenses plus raisonnables lorsque la pandémie sera terminée?
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Excusez-moi.
    Allez-y.
    Nous avons eu une conversation assez large jusqu'à maintenant, mais elle semble s'être grandement éloignée du projet de loi C-10. Je me demandais si nous pouvions revenir à notre sujet, soit la modernisation de la Loi sur la radiodiffusion.
    Madame Dabrusin, je vous remercie. Vous avez raison. Les deux dernières questions — ou les deux derniers intervenants —, et les 10 dernières minutes nous ont quelque peu éloignés des questions que nous devons aborder. C'était la même chose pendant la première série de questions également.
    J'accorde habituellement à mes collègues le temps auquel ils ont droit, et je leur donne aussi beaucoup de liberté. Comme vous le savez, dans le cadre du budget des dépenses, nous pouvons aborder à peu près n'importe quel sujet avec le ministre, s'il y a un lien avec son ministère.
    Toutefois, je dois rappeler à mes collègues que la réunion d'aujourd'hui porte sur le projet de loi C-10. Certains des sujets abordés étaient plutôt accessoires, mais d'autres étaient très loin du sujet du jour, comme l'a fait valoir Mme Dabrusin.
    Pourrions-nous revenir à l'essence du projet de loi C-10 ou à ce qui l'entoure, aux fins de notre étude?
    Monsieur Waugh, vous disposez de deux minutes pour conclure.
    Merci, madame Dabrusin.

  (1245)  

    Je vous remercie pour vos commentaires, monsieur le président.
    J'ai participé aux consultations du CRTC sur CBC/Radio-Canada en janvier. J'ai été surpris d'apprendre que votre gouvernement accordait un financement de 1,7 milliard de dollars à la société. Ce qui m'a surpris, monsieur le ministre, c'est que l'organisme de réglementation britannique a récemment établi un plafond de 10 % pour les dépenses de la BBC associées au numérique. Je ne sais pas si vous le savez, mais à CBC/Radio-Canada, ce taux est de 20 %, et il augmente. On retire des fonds au volet radio, puisque le volet télévision est le plus important, suivi de la plateforme numérique.
    Est-ce qu'il s'agit de la façon dont les diffuseurs peuvent livrer concurrence à CBC/Radio-Canada et à son monopole, comme l'a fait valoir M. Ripley au cours de la dernière heure?
    Par où commencer? CBC/Radio-Canada n'a pas le monopole. Il y a de nombreux autres diffuseurs au pays, tant à la radio qu'à la télévision. Je crois qu'en déplaçant du contenu en ligne, la société fait ce que bon nombre d'autres diffuseurs font.
    Nous pourrions parler de Bell Média ou de Québecor. C'est parce que de plus en plus d'utilisateurs... Je sais que mes enfants n'écoutent pas la radio comme moi, et ne lisent pas non plus les journaux en version papier comme je le fais. Ce n'est pas leur façon d'obtenir de l'information. Je crois que CBC/Radio-Canada fait ce que la plupart des joueurs du marché font.
    Avec le projet de loi C-10, nous tentons de veiller à ce que les producteurs de culture et les artistes canadiens puissent profiter pleinement de cette transformation.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Housefather, vous disposez de cinq minutes. Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mes questions ont trait au projet de loi C-10, mais avant de les poser, je tiens à dire au ministre que j'ai beaucoup aimé son exposé. J'aimerais qu'il nous parle des compressions budgétaires proposées à Radio-Canada International. J'espère que le ministre étudie la question. Je crois que ces compressions sont problématiques.
    J'ai hâte de voir la réglementation proposée par le ministre pour le retrait du contenu illégal des plateformes en ligne.
    J'ai écouté les propos de M. Rayes et de M. Champoux.

[Français]

    Moi aussi, je suis préoccupé par le manque de précision, dans le texte proposé, au sujet du contenu original en français. Je suis très content d'avoir entendu le ministre dire qu'il étudierait attentivement les amendements qui pourraient être proposés par le Comité.
    Par ailleurs, la question du contenu pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire me préoccupe aussi.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, nous avons entendu des groupes de francophones à l'extérieur du Québec et des groupes d'anglophones du Québec nous faire part de leurs inquiétudes, parce que la presque totalité du contenu français du Canada vient du Québec et que la presque totalité du contenu anglais vient de l'extérieur du Québec. On produit très peu de contenu français à l'extérieur du Québec et très peu de contenu anglais au Québec.
    Est-ce que vous accepteriez certains amendements au projet de loi que nous pourrions proposer pour aborder les préoccupations des communautés de langue officielle en situation minoritaire?
    Je vous remercie pour votre intervention et pour vos questions, monsieur Housefather.
    Nous n'avons pas souvent l'occasion de réviser un projet de loi comme celui sur la radiodiffusion... Nous le faisons après 30 ans, alors il faut que ce soit le meilleur projet de loi possible et qu'il permette de régler le plus grand nombre de problèmes possible. Ainsi, je serai donc heureux d'étudier tous les changements proposés qui pourraient nous aider à l'améliorer davantage.

  (1250)  

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Il est très important d'avoir du contenu original en français produit au Canada, mais il est également important d'encourager la création de contenu anglophone aussi bien au Québec qu'ailleurs au Canada. J'aimerais bien que nous puissions trouver un terrain d'entente à ce sujet.

[Traduction]

    Les producteurs de médias indépendants ont témoigné devant le Comité et se sont dits inquiets de la façon dont certaines sociétés, comme Netflix, achètent leurs droits de propriété intellectuelle. Ils ont parlé d'un système du Royaume-Uni qui encourage les accords entre les producteurs de médias indépendants et les grands diffuseurs ou sociétés en ligne comme Netflix.
    Monsieur le ministre, seriez-vous prêt à accepter un amendement qui exigerait de l'organisme de réglementation qu'il étudie la question?
    Bien sûr, la propriété intellectuelle est un élément très important de la production canadienne, et pas seulement au Canada. Il s'agit d'un volet important des productions culturelles de partout dans le monde, et d'une question prioritaire.
    Nous avons eu de nombreuses conversations à ce sujet. J'ai rencontré des producteurs indépendants à plusieurs reprises au cours de la dernière année et demie. J'ai entendu leurs préoccupations et leurs idées, et nous songeons à la meilleure façon de protéger la propriété intellectuelle par la modification de la Loi sur la radiodiffusion, pour aider le plus possible les artistes et les sociétés du Canada. C'est notre objectif.
    Je vous remercie et j’ai entendu ce que vous avez dit au sujet de l’historique de la réglementation et des mesures qui ont été prises par le CRTC par le passé, qui répondent à plusieurs des préoccupations qui ont été évoquées aujourd’hui. Mais, bien sûr, c’est la seule chance pour les législateurs de conseiller l’organisme de réglementation et je crois qu’il faut le reconnaître.
    Monsieur le ministre, nous avons entendu l’opinion de divers groupes, et je crois que tous s’entendent sur l’importance de mettre en œuvre ces changements le plus tôt possible. Qu’ils veuillent ou non que des amendements soient apportés au projet de loi, la plupart des groupes veulent que le projet de loi entre en vigueur rapidement.
    Avez-vous des mots d’encouragement au sujet de l’échéancier?
    Oui, c’est un point très important. Comme je l’ai dit plus tôt, nous formons un gouvernement minoritaire. Dans le système parlementaire britannique, les gouvernements minoritaires ne restent pas au pouvoir très longtemps. Je crois qu’il est possible d’adopter le projet de loi, et ce n’est pas seulement moi qui le dis. Plusieurs organisations que vous avez rencontrées ont dit qu’il s’agissait d’un projet de loi novateur. Certains l’ont qualifié d’historique.
    Nous pouvons travailler ensemble et adopter le projet de loi le plus rapidement possible. Je ne dis pas qu’il faut tourner les coins ronds, mais nous devons collaborer pour atteindre notre objectif. Ainsi, je crois que nous pourrons affirmer que nous avons aidé les artistes canadiens, et que nous avons aidé la culture canadienne à entrer dans le prochain siècle.

[Français]

    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, tout à l'heure, nous parlions de la latitude que vous souhaitez laisser au CRTC.
    Un article publié vendredi dans le magazine Playback fait état du processus du CRTC Parlons télé, que vous connaissez sûrement. Il s'agit d'une série de consultations qui ont eu lieu en 2014. On dit que, depuis ce temps, les services facultatifs, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas imposés dans les forfaits télé, ont connu une baisse de 20 % chez les diffuseurs indépendants, alors que, du côté des câblodistributeurs, ils ont connu une hausse à peu près similaire. Cet exemple illustre bien l'importance d'encadrer les décisions que devra prendre le CRTC.
    J'ai aussi cette inquiétude en ce qui a trait aux télévisions et aux radios communautaires, qui sont un peu oubliées dans le projet de loi.
    Je voudrais vous entendre nous en parler un peu.
    Le phénomène auquel vous faites allusion est évidemment le corollaire de l'arrivée des plateformes et des chamboulements très importants que nous avons connus dans le monde de la radiodiffusion au Canada et ailleurs dans le monde. Voilà pourquoi ce projet de loi est important: il encadrera ce qui se fait en ligne. Évidemment, il régira les activités en ligne des géants du Web, mais également celles des entreprises canadiennes.

  (1255)  

    Oui, mais je vous parle de joueurs qui étaient déjà inclus dans la réglementation actuelle.
    Je comprends très bien.
    Le CRTC n'a pas vraiment réussi à protéger ces joueurs, d'une certaine façon. C'est pourquoi il est important de diriger un peu mieux les décisions que prendra le CRTC. N'êtes-vous pas d'accord?
    Il faut faire attention: le législateur ne peut pas se substituer à l'organisme de réglementation, de la même façon que l'organisme de réglementation ne peut prendre la place du législateur. Dans notre écosystème, nous avons tous et toutes des fonctions et des rôles à jouer. L'une des innovations dans le projet de loi C-10 est d'accroître la capacité du gouvernement à donner des directives au CRTC. C'est possible de le faire, présentement, mais ce n'est pas facile. Grâce à cette modification, nous nous donnons une plus grande marge de manœuvre.
    Imaginez ce qui se passerait si le législateur, en l'occurrence le Comité qui se rencontre quelques heures par semaine, essayait de tenir des audiences publiques pour définir des éléments de réglementation. On n'y arriverait jamais. La France, la Grande-Bretagne et l'Australie confient l'application de leur loi en matière de radiodiffusion à un organisme de réglementation. Je ne connais pas de pays qui fonctionnent différemment. Je ne pense pas que nous ayons inventé le modèle. À la rigueur, nous avons peut-être été parmi les premiers à l'utiliser, il y a longtemps.
    Merci, monsieur Champoux.

[Traduction]

    Madame McPherson, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président, et merci encore, monsieur le ministre.
    Je vous remercie de votre ouverture au sujet des amendements. Il est très important de faire avancer ce projet de loi. Nous avons plusieurs amendements que nous continuerons de partager avec vous.
    Il faut profiter de la chance que nous avons d’être en présence du ministre. Je vais vous poser une question que j’ai déjà posée auparavant, parce que je veux vous entendre à ce sujet.
    Lorsque le projet de loi C-10 a été mis en place, il visait de façon explicite à exempter le contenu généré par les utilisateurs de Facebook et de YouTube de la Loi sur la radiodiffusion. Avez-vous demandé au ministère d’intégrer cette exemption à la Loi ou était-ce son idée?
    Facebook et Google ne sont pas exemptés de la Loi ou des règlements. Je crois que M. Ripley, M. Piché et moi-même avons déjà répondu à la question. Lorsque ces sociétés agissent en tant que diffuseurs, la réglementation s’applique à elles.
    Comme je l’ai dit plus tôt en réponse à une question de M. Waugh, en tant qu’organisme de réglementation, les publications de chats sur YouTube ou Facebook par des particuliers ne nous intéressent pas. C’est pourquoi nous avons exclu le contenu généré par les utilisateurs de la réglementation. Lorsque ces sociétés agissent en tant que diffuseurs, alors elles doivent respecter la réglementation.
    Ce qui me préoccupe, c’est qu’il y a une possibilité d’élections. Le projet de loi C-10 sera peut-être le seul projet de loi qui sera adopté au cours de la législature. Comment allons-nous veiller à ce que le contenu problématique... Vous avez parlé de présenter d’autres mesures législatives, mais nous n’en aurons peut-être pas l’occasion. La Loi sur la radiodiffusion traite de la publicité politique. Elle traite de financement du contenu canadien, des alertes d’urgence...
    Pourquoi Facebook et YouTube sont-ils exemptés de ces normes?
    Comme je l’ai dit, le projet de loi C-10 n’exclut pas Facebook et YouTube. C’est une hypothèse erronée. Ils ne sont tout simplement pas...
    Elles le sont, pour les cas dont je parle, et pour ce qui peut... La loi ne tiendra pas les sociétés comme Facebook et YouTube responsables du contenu haineux qu’elles partagent.
    Très rapidement, monsieur le ministre.
    C’est un projet de loi à venir.
    Je veux dire, ce n’est pas...
    Nous ne nous rendrons peut-être pas à ce projet de loi.
    S’il vous plaît.
    ... un projet de loi à propos de tout et de rien. Je suis désolé, mais c’était impossible.

  (1300)  

    Je suis désolé aussi, parce que je dois mettre fin à la réunion.
    Je remercie sincèrement nos invités. Monsieur Guilbeault, j’étais heureux de vous revoir et je vous remercie d’avoir passé du temps avec nous. Je remercie aussi les gens qui vous accompagnaient: notre sous-ministre, Mme Laurendeau, M. Piché et M. Ripley. Merci beaucoup.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je me tourne maintenant vers vous, parce que nous devons discuter de nos travaux.
    La réunion s’achève. Je suis certain que vous avez eu l’occasion d’examiner le rapport du Sous-comité. J’aimerais maintenant que nous l’adoptions. Le rapport compte sept points. Avez-vous des questions à son sujet avant que nous prenions une décision? En passant, nous devons adopter le rapport afin que le Comité poursuive ses travaux.
    Je vois que personne ne s’objecte à l’adoption du rapport. C’est très bien.
    Merci beaucoup à tous. Je suis désolé d’avoir procédé au vote de façon aussi informelle, mais la réalité virtuelle l’est tout autant. Néanmoins, le rapport du Sous-comité est adopté.
    Nous allons nous revoir ce vendredi 12 mars. Nous recevrons les témoins qui n’avaient pas pu comparaître il y a quelques semaines.
    La séance est levée.
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