Passer au contenu
;

CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 22 mars 2022

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Boujour tout le monde.
    Bienvenue à la 11e réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes. Aujourd'hui, le Comité commence son étude des résultats différentiels dans les décisions d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts pendant la réunion. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français. Si l'interprétation est interrompue, veuillez me le signaler immédiatement, et nous veillerons à ce qu'elle soit rétablie avant de poursuivre les délibérations. La fonction « Lever la main » au bas de l'écran peut servir à tout moment si vous souhaitez intervenir ou attirer l'attention de la présidence.
    Avant de commencer, j'ai quelques questions administratives à aborder avec le Comité. Tout d'abord, l'OCASI, le Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants, nous a demandé de comparaître dans le cadre de cette étude. L'OCASI est un organisme-cadre pour le secteur de l'aide aux immigrants et aux réfugiés en Ontario et le plus important du genre au Canada.
    Plaît‑il au Comité d'inviter l'OCASI à comparaître dans le cadre de l'étude sur les résultats différentiels?
    Des députés: D'accord.
    La présidente: Madame la greffière, nous pouvons inviter l'OCASI à comparaître dans le cadre de l'étude sur les résultats différentiels.
    Nous avons un point à aborder avant de passer aux témoins. Nous avons recueilli une grande quantité de données et de témoignages utiles pendant l'étude récente du Comité sur le recrutement et les taux d'acceptation des étudiants étrangers. Les analystes ont confirmé que des données pertinentes pourraient étayer notre étude actuelle sur les résultats différentiels.
    Dans le cadre de son étude sur les résultats différentiels dans les décisions d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, plaît‑il au Comité de prendre en considération les témoignages et la documentation recueillis pendant l'étude sur le recrutement et les taux d'acceptation des étudiants étrangers?
    Des députés: D'accord.
    La présidence: Nous allons maintenant commencer notre étude sur les résultats différentiels dans les décisions d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    C'est avec plaisir que je présente les premiers témoins de cette importante étude.
    Dans notre premier groupe de témoins, nous avons M. Steven Meurrens, un avocat spécialisé en immigration qui comparaît à titre personnel. Nous avons aussi Mme Jennifer Miedema, directrice générale de Remember Ministries, de même que M. Gideon Christian, président de l'African Scholars Initiative.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins qui comparaissent devant le Comité aujourd'hui.
    J'aimerais prendre quelques instants pour la gouverne des témoins. Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous êtes prêts à parler, vous pouvez cliquer sur l'icône de microphone pour activer le vôtre. Je rappelle que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
    L'interprétation de cette vidéoconférence sera très semblable à ce qui se fait lors d'une réunion normale. Lorsque vous vous exprimez, veuillez le faire lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être mis en sourdine.
    Sur ce, tous les témoins ont cinq minutes pour faire des observations liminaires. Après ces observations, nous allons faire des séries de questions.
    Nous allons commencer par M. Steven Meurrens, avocat spécialisé en immigration.
(1105)
    Je tiens d'abord à dire que c'est un honneur de participer à votre étude des résultats différentiels dans les décisions des agents responsables des visas au Canada.
    Quand je me penche sur les sous-sujets de cette étude, je ne peux m'empêcher de penser qu'une partie importante des données et des renseignements pertinents sur ces questions n'a pu être obtenue que par l'entremise de demandes présentées en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et mises en ligne par des particuliers.
    Par conséquent, mon exposé aujourd'hui sera axé sur la transparence.
    La seule façon pour nous d'examiner s'il y a des préjugés systémiques dans les programmes d'immigration du Canada, c'est en veillant à ce que la population ait facilement accès à l'information pertinente. Je veux proposer quelques façons d'y parvenir.
    Premièrement, avant 2016, IRCC publiait chaque trimestre les délais de traitement et les taux d'acceptation pour tous ses programmes. L'information était ventilée par bureau des visas. Elle montrait ce qui s'était fait dans un bureau donné et était très utile. IRCC a arrêté de le faire après 2015. Le site Web du gouvernement dit actuellement qu'on a arrêté parce qu'IRCC ne voulait publier que des renseignements globaux. Même si IRCC a peut-être pour objectif de faire traiter toutes les demandes de la même façon, peu importe le bureau des visas, je pense que tout le monde sait que ce n'est pas le cas dans la pratique. Je proposerais qu'IRCC recommence ses mises à jour trimestrielles pour chaque bureau des visas.
    Deuxièmement, IRCC devrait publier en format PDF téléchargeable le résultat des demandes présentées en vertu de la Loi sur l'accès à l'information qui se rapportent aux manuels internes, aux guides de formation des bureaux des visas sur l'évaluation de l'authenticité d'un mariage ainsi qu'à d'autres documents semblables. À l'heure actuelle, il est possible pour le public de consulter les titres de demandes traitées, mais on doit ensuite attendre de les recevoir par courriel, ce qui peut prendre plusieurs semaines. Une fois de plus, je crois que la majorité des gens ne savent pas que c'est possible. Le gouvernement de la Colombie-Britannique, pendant ce temps, publie en format PDF toutes les publications d'accès à l'information divulguées antérieurement qui ne portent pas sur un particulier. C'est un modèle de transparence que l'IRCC devrait suivre selon moi.
    Troisièmement, je crois qu'IRCC devrait publier des explications et des rapports détaillés sur son utilisation de l'intelligence artificielle pour effectuer le tri et sur le fonctionnement dans la pratique de ses nouveaux outils de traitement. Jusqu'à maintenant, presque tous les renseignements publics ont été obtenus au moyen de demandes d'accès à l'information lourdement caviardées qui ne présentent pas la situation dans son ensemble selon moi. Par exemple, à la fin de 2020, la Loi sur l'accès à l'information a permis d'apprendre que les demandes de visa de visiteur provenant de la Chine et de l'Inde passent toutes par un système de tri par intelligence artificielle depuis au moins 2018. On ne sait pas trop comment le tri par intelligence artificielle fonctionne.
    J'ai publié un document interne en ligne d'IRCC qui remonte à 2018 à propos du tri de ces demandes provenant de l'Inde et de la Chine. Il disait que l'intelligence artificielle était utilisée pour trier les demandes et qu'on n'expliquait pas aux agents des visas pourquoi une demande avait été triée d'une certaine façon, et que les agents examinaient donc encore les demandes. En 2020, on a ensuite ajouté au document une note de bas de page selon laquelle les agents étaient dorénavant informés des faits saillants au sujet d'un client pour réduire le temps consacré à la recherche de renseignements. Cette note de bas de page semble laisser entendre que le ministère ne veut pas que les agents lisent les demandes en entier, et il faut plus de transparence à cet égard.
    IRCC présente l'outil de traitement Chinook et dans une moindre mesure l'intelligence artificielle comme une simple feuille de calcul Excel et un changement de processus. Cependant, le rapport final de Pollara Strategic Insight dit qu'un employé d'IRCC, ou des employés, ont affirmé craindre qu'une plus grande automatisation du traitement intègre les pratiques discriminatoires fondées sur la race de manière à les rendre plus difficiles à voir au fil du temps. On comprend mal pourquoi une feuille de calcul Excel donnerait ce résultat. Il serait formidable d'en entendre plus de la part de la ou des personnes qui ont dit cela pour savoir ce qui est observé sur le terrain.
    Leurs préoccupations et les miennes ne sont peut-être pas tout à fait justes, mais à défaut d'accroître la transparence, les préoccupations de ce genre ne font que s'accentuer.
    Pour conclure, afin que votre comité puisse vraiment déterminer s'il y a des résultats différentiels dans les décisions en ce qui a trait à la race et à la région, le ministère doit faire preuve d'une plus grande transparence et publier de l'information qui rend compte de ce qui se produit vraiment plutôt que d'expliquer les objectifs du gouvernement ou du ministère.
    Merci.
(1110)
    Merci, monsieur Meurrens.
    Nous allons maintenant passer à Mme Jennifer Miedema, directrice générale de Remember Ministries.
    Madame Miedema, vous avez cinq minutes pour faire vos observations liminaires. Je vous en prie.
    Bonjour, madame la présidente, distingués membres du Comité.
    Je suis reconnaissante de pouvoir me joindre à vous aujourd'hui pour parler au nom des réfugiés avec qui je travaille et que je représente.
    Je suis la fondatrice et la directrice de Remember Ministries, un organisme de bienfaisance qui se consacre au parrainage de réfugiés au Canada, plus particulièrement ceux qui ont été persécutés compte tenu de leur foi et de leurs activités religieuses. Depuis sept ans, je suis très engagée dans le parrainage de réfugiés par l'entremise du Programme de parrainage privé de réfugiés du Canada et dans les efforts pour aider d'autres personnes à en faire autant.
    Je tiens à dire que le Programme de parrainage privé de réfugiés du Canada est formidable et intéressant. Je connais beaucoup de personnes qui sont extrêmement reconnaissantes d'avoir le pouvoir d'aider ainsi des réfugiés. Il mobilise la générosité des Canadiens et encourage l'hospitalité dans nos collectivités. Il rend notre pays plus fort.
    Je sais que le Comité étudie la discrimination systémique qui mène à des résultats différentiels dans les décisions d'IRCC. Je ne peux pas parler de la technologie utilisée dans le processus de demande; je peux seulement parler de ce que je connais. Quand je demande à de nouveaux arrivants et à des réfugiés s'ils ont vécu une discrimination flagrante de la part d'IRCC ou de travailleurs des bureaux des visas, ils répondent tous par la négative.
    Cela ne veut toutefois pas dire qu'il n'y a pas de discrimination systémique dans les processus d'IRCC ou dans la façon dont notre gouvernement choisit d'accorder la priorité à certaines populations de réfugiés plutôt qu'à d'autres.
     Cela semble être le cas compte tenu du traitement accéléré des demandes de certaines populations de réfugiés et des longs délais d'attente pour d'autres. L'affectation des ressources indique les priorités ou les populations favorisées. Les ressources ne semblent pas être affectées au traitement des demandes de parrainage privé de réfugiés, ce qui porte à croire qu'elles ne sont pas prioritaires.
    Les délais de traitement actuels pour les réfugiés parrainés par le secteur privé qui viennent de l'Éthiopie, du Kenya, du Soudan et de l'Afrique du Sud vont de 31 à 37 mois. Dans le cas des réfugiés en Malaisie et en Thaïlande, le délai est de 37 mois. Pour les réfugiés au Pakistan, il est de 38 mois. Pour ceux au Liban, il est de 46 mois — presque quatre ans. Les citoyens de ce pays font face à de terribles pénuries d'essence, de médicaments et de nourriture. Imaginez donc la situation des réfugiés là‑bas.
    Les réfugiés qui suivent la procédure et qui sont assez chanceux pour avoir des parrains au Canada qui les aideront financièrement et les soutiendront à leur arrivée ici doivent attendre de trois à quatre ans avant que leurs documents soient traités.
    Je ne saurais expliquer pendant ce court témoignage à quel point ces délais d'attente sont dommageables. Des membres de ces familles de réfugiés meurent en attendant. Les enfants ne fréquentent pas l'école pendant des années cruciales de leur vie.
    Bien entendu, on va naturellement comparer ces délais d'attente à la situation des réfugiés ukrainiens qu'on accueille maintenant grâce à un processus d'octroi de visas accéléré, et à la situation des réfugiés afghans, dont certains voient le traitement de leur demande être accéléré par IRCC alors qu'on tente d'atteindre les nombres promis. Je ne critique aucunement le traitement accéléré des demandes de ces personnes en péril et dans le besoin. Aucune personne parmi nous ne s'opposerait à aider ces réfugiés de la manière la plus compatissante et efficace qui soit.
    Ce que je remets en question, c'est la réaffectation de ressources utilisées pour d'autres réfugiés qui attendent depuis des mois, voire des années. Je m'interroge sur la réduction du nombre d'autres réfugiés accueillis au cours de la même année afin qu'une population donnée de réfugiés puisse être reçue.
    Il faut être en mesure de trouver de nouvelles ressources pour aider les gens qui traversent la crise actuelle sans jamais mettre qui que ce soit dans une catégorie favorisée. Nous devons augmenter le nombre total de réfugiés accueillis lorsqu'il y a une crise, pas renoncer à accueillir d'autres personnes qui attendent déjà le traitement de leurs demandes.
    Des Érythréens fuient l'un des régimes les plus répressifs de la planète depuis des années. C'est un afflux ininterrompu de réfugiés, mais aucun programme spécial n'est mis en place pour eux. À ma connaissance, il n'y en a jamais eu un pour un groupe de réfugiés africains.
    Il est bien que ce comité examine ce qui se produit dans toutes sortes de processus d'IRCC. C'est une bonne chose de demander si la valeur canadienne de l'égalité est bien représentée dans les mandats confiés par le gouvernement à IRCC et dans les systèmes proprement dits du ministère. Les gens vulnérables sont des gens vulnérables. Il ne devrait pas y avoir un concours de popularité entre les réfugiés.
    Merci.
(1115)
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à notre dernier témoin de cet avant-midi, M. Christian, président de l'African Scholars Initiative.
    M. Christian, vous pouvez commencer, s'il vous plaît. Vous avez cinq minutes.
    Madame la présidente, je vous remercie, vous et les membres de votre comité, de votre invitation à venir contribuer à votre étude.
    Je limiterai mon propos à deux grandes questions: d'abord, les différences dans les résultats des décisions prises par le ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté Canada sur les demandes de visas d'études faites en Afrique; enfin, l'utilisation croissante de technologies d'analyse poussée et d'intelligence artificielle, par le même ministère, pour traiter les demandes de visas.
    Les résultats de l'étude montrent clairement que les pays d'Afrique sub‑saharienne sont les plus durement touchés par les refus du ministère. Le rapport Pollara a révélé des préjugés, une discrimination et un racisme systémiques, qui expliquent cette situation, qui va de l'allusion aux pays d'Afrique sous l'appellation des « 30 sales » par les agents des visas du ministère jusqu'à la qualification sans détour des Nigérians comme étant corrompus et peu dignes de confiance.
    Les mécanismes du ministère pour les visas d'études ont été conçus de manière à en rendre encore plus difficile l'obtention par les Africains pour la poursuite de leurs études au Canada. Quand j'ai comparu devant votre comité, le 8 février 2022, j'ai souligné ces conduites discriminatoires par la comparaison de deux programmes de demandes de visas, le Volet direct pour les études, ou VDE, et le Nigerian Student Express, ou NSE, notamment en ce qui concerne les exigences financières discriminatoires de ce dernier.
    Ajoutons également l'obligation, dans le cadre de ce programme, pour un demandeur nigérian de visa d'études, de passer l'examen de compétences en langue anglaise pour prouver sa maîtrise de cette langue à l'agent des visas, en dépit du fait que l'anglais est la seule langue officielle du Nigeria et la seule langue d'enseignement dans tous les établissements d'études de ce pays. Les étudiants nigérians qui vont étudier au Canada en sont dispensés par toutes les universités canadiennes, mais non par le ministère. Cette obligation subtilement discriminatoire aboutit inévitablement à des décisions défavorables non seulement pour les Nigérians mais pour les Africains aussi.
    Mon deuxième propos concerne l'utilisation croissante de logiciels et de l'intelligence artificielle par le ministère pour le traitement des demandes de visas. Notre organisme n'est pas absolument contre. Le ministère possède beaucoup de données qui lui permettent de conditionner l'intelligence artificielle et d'automatiser ses processus de traitement, mais il y a un hic sérieux. Des études externes de ses procédés, particulièrement le rapport Pollara, ont révélé des préjugés, une discrimination, un racisme systémiques dans le traitement des demandes d'immigration. Forcément, les données du ministère sont entachées, elles aussi, des mêmes fautes systémiques.
    Le problème est que l'emploi de ces données pour conditionner l'intelligence artificielle conduira inévitablement au racisme algorithmique des décisions de l'intelligence artificielle en matière d'immigration. En ma qualité de professeur adjoint d'intelligence artificielle et de droit à la faculté de droit de l'Université de Calgary, j'ai consacré les trois dernières années à la recherche sur cette forme de racisme et je peux déclarer, en toute confiance, que les préoccupations que je viens de soulever sont légitimes et réelles. Toute utilisation de l'intelligence artificielle par le ministère devrait être soumise à un examen externe. Le ministère devrait être supervisé de manière à assurer et à améliorer la transparence et l'équité dans l'utilisation de l'intelligence artificielle.
    Bref, nous recommandons une double surveillance indépendante du ministère: par un médiateur indépendant qui superviserait les décisions des agents des visas; par la création d'un organe indépendant d'experts chargés de superviser l'utilisation, par le ministère, de techniques avancées d'analyse et d'intelligence artificielle dans le traitement des demandes de visas.
    J'attends avec impatience vos questions sur les sujets que j'ai soulevés ainsi que sur les résultats inégaux des décisions du ministère. Merci.
(1120)
    Merci, monsieur Christian.
    Je remercie tous les témoins pour leurs déclarations.
    Commençons maintenant les questions. M. Hallan ouvre le bal.
    Vous disposez de six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de s'être déplacés.
    Je pose ma première question à M. Meurrens. D'après les témoignages, le rapport Pollara signale des comportements troublants dans le traitement des Africains et des employés du ministère, où s'exprime un racisme systémique.
    D'après votre expérience, discernez-vous des garde‑fous, actuellement, contre ce qui se passe?
    Je n'en vois pas outre le fait que les particuliers qui ont essuyé des refus peuvent, bien sûr, les contester. Mais il n'existe rien qui se compare à un médiateur, disons, qui recevrait les plaintes des victimes de mauvais traitements.
    Merci.
    Je pose la question à chacun des témoins: croyez-vous qu'un groupe de travail suffise pour corriger ces problèmes?
    Le seul recours, actuellement, semble se trouver à la Cour fédérale. Mais elle est submergée par des demandes d'examen judiciaire de décisions du ministère. Je suis allé voir, il y a deux jours, et 72 % des demandes d'examen dont elle avait été saisie concernaient le ministère, la plupart du temps ses décisions.
    Un médiateur indépendant pourrait non seulement ne s'occuper que de ce problème, mais il contribuerait également à réduire la charge de travail du tribunal sur les décisions du ministère. Il importe beaucoup qu'un médiateur indépendant puisse recevoir les plaintes de victimes de discrimination ou de décisions défavorables du ministère et sans nécessairement qu'elles doivent se soumettre au processus très coûteux d'un examen judiciaire par la Cour fédérale et l'engorger en la saisissant de décisions, parfois surtout déraisonnables, de agents des visas du ministère.
    Merci.
    Et qu'en pensent les autres témoins, s'il vous plaît?
    Je voudrais ajouter, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, que le rapport Pollara d'observation stratégique cite, par exemple, des employés du ministère qui disent craindre que l'intelligence artificielle ne perpétue les préjugés systémiques, et, comme l'a fait observer M. Christian, au moins une personne aurait fait allusion aux « 30 sales ».
    En ce qui concerne le groupe de travail, ce serait réconfortant qu'il aboutisse à quelque chose de concret, parce que, actuellement, les allégations du rapport n'ont pas de suite. Il serait bon que des suites soient données auprès des intéressés, par l'entremise d'un groupe de travail ou par votre comité, pour en savoir davantage sur ce qui se passait.
    Je suis d'accord. Un groupe de travail serait certainement un bon point de départ. Un médiateur semble certainement une bonne idée. Il faut enquêter davantage pour se faire une bonne idée de la situation.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Meurrens, nous savons que, jusqu'ici, personne n'a été réprimandé ni congédié pour aucun des faits allégués. Les choses semblent traîner en longueur sans qu'il se passe quelque chose.
    Je m'adresse encore à chacun des témoins: estimez-vous que le racisme qui règne au ministère contribue à l'arriéré historique de presque deux millions de dossiers d'immigration?
(1125)
    Nous ne disposons pas de données ou de statistiques incriminantes pour le racisme. Mais le rapport Pollara, quant à lui, fait très mal paraître le ministère sur le plan du racisme. Il rend très évident le rôle du racisme dans les décisions sur l'immigration. Il s'ensuit qu'il ne serait pas exagéré d'affirmer qu'il pourrait également expliquer l'arriéré actuel. Il serait très difficile d'affirmer que le racisme en est la seule explication, mais s'il est aussi endémique que le décrit le rapport, il est indéniable qu'il y contribue ou qu'il pourrait y contribuer, sans en être le seul facteur.
    J'ai réfléchi à la question et j'estime que la principale cause de l'arriéré était seulement l'ouverture, par le ministère, de plusieurs nouvelles applications et d'une extraction importante de l'Entrée express. Voilà, d'après moi, le grand fautif. Pour le moment, je ne considère pas le racisme systémique comme un facteur important.
    Moi non plus. C'est certainement un facteur, mais, en même temps, des raisons complexes expliqueraient la longueur actuelle des attentes, notamment la COVID et d'autres mesures prises par le gouvernement pour faire entrer des groupes de réfugiés.
    Je n'ai pas les connaissances voulues pour une meilleure réponse.
    Merci.
    J'emploierai le reste de mon temps pour demander à chacun des témoins de bien vouloir déposer les données ou renseignements qu'ils auraient à leur disposition, pour aider à ce rapport à s'attaquer au racisme systémique au ministère.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Hallan.
    Monsieur El‑Khoury, vous disposez de six minutes. Allez‑y.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins et les remercie grandement de leur présence aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à Mme Miedema.
    Je suis vraiment touché par votre travail et votre engagement. L'humanité a besoin de personnes comme vous qui aident les gens pour qui il est difficile de se faire respecter dans le pays où ils vivent. C'est une mission extraordinaire.
    Pouvez-vous nous décrire certains problèmes auxquels fait face votre organisation, en général? Vous avez mentionné beaucoup de pays pour lesquels les temps de traitement des dossiers sont variables. Plus particulièrement, pouvez-vous nous donner plus de détails sur les dossiers d'étudiants francophones d'Afrique?

[Traduction]

    Merci pour vos observations. Elles font plaisir.
    Je ne m'occupe pas d'étudiants. Je ne peux donc pas répondre à ce que vous avez dit au sujet des étudiants francophones. J'aide des réfugiés de partout dans le monde à nouer des liens avec les communautés, les bénévoles et les églises du Canada qui peuvent les parrainer.
    En ce qui concerne les problèmes dont je constate l'existence dans mon travail, c'est certainement ceux qui découlent des longues attentes, extraordinairement difficiles pour les réfugiés. Soulever les espoirs d'un réfugié a quelque chose de sacré. Ces espoirs, une fois soulevés, après la transmission de la demande, l'attente qui dure des mois, parfois deux ans, sans que le bureau des visas donne signe de vie, puis trois ans d'attente, ou presque, pour une entrevue — c'est extrêmement difficile pour la santé mentale. Ça se répercute sur la santé physique. Ça change la dynamique familiale, les unions matrimoniales et tant d'autres choses.
    L'un des problèmes que nous avons également éprouvés a été l'acceptation de l'un de mes protégés immédiatement avant l'arrivée de la COVID. Il a fallu mettre l'opération sur pause. Il s'agissait d'un Érythréen du Soudan du Sud. Nous n'avons été mis au courant d'aucune communication. J'ai dû demander à mon député de bien vouloir faire les vérifications. Après des mois sans nouvelles, nous avons constaté, fin 2021, que le délai de sa visite médicale avait expiré en février 2021, mais personne ne l’en avait prévenu. Pas même le bureau responsable des visas. On a demandé au candidat d'essayer d'obtenir un nouveau rendez-vous, mais on ne trouve pas, dans le Soudan du Sud, de médecins agréés par un comité. Nous avons vécu une situation difficile, sans visite médicale fournie et, pourtant, une date dépassée.
    Parfois, les événements qui donnent l'impression d'une désorganisation des bureaux des visas, d'un manque de communication avec les réfugiés et d'un chaos à plusieurs niveaux, causé par la COVID, mais je pense que cette désorganisation existe même indépendamment de ces facteurs. Je demanderais seulement plus de ressources pour le bureau des visas et de meilleures communications avec les réfugiés ou la possibilité de s'informer en ligne sur l'état d'avancement du traitement de son dossier.
    Un médiateur aiderait beaucoup à résoudre les problèmes. Je n'ai vraiment personne à qui m'adresser quand survient un problème au bureau des visas. Nous pouvons seulement attendre.
    Merci.
(1130)
    Merci.

[Français]

    Ma deuxième question s'adresse à M. Meurrens.
    Quand on accorde un visa à un étudiant, il doit venir étudier ici à temps plein. S'il étudie par la suite à temps partiel, il perd son statut d'étudiant.
    Or, les établissements ne définissent pas tous de la même manière ce qui constitue des études à temps plein. Pouvez-vous nous donner plus d'information sur ce problème?
    Il y a un autre problème: comment le ministère peut-il être assuré que les étudiants vont rester au pays et y étudier?

[Traduction]

    L'obligation d'étudier à plein temps est apparue vers l'année 2014. Pour elle, le ministère met dans le même panier tous les établissements désignés. Pour obtenir un permis qui permet de travailler au Canada après l'obtention de son diplôme, l'étudiant doit avoir étudié à plein temps.
    On se montre peu compréhensif pour les étudiants obligés d'étudier à temps partiel en raison de besoins familiaux ou de problèmes de santé mentale. Le gros enjeu est que, pour obtenir le permis, l'étudiant doit avoir étudié à temps plein pendant tous les semestres de ses études, sauf le dernier. Ç'a toujours été un peu injuste pour les étudiants qui, pour une raison quelconque, étudient, par exemple, à temps partiel pendant un semestre de la deuxième année d'un cours d'une durée de quatre ans. Ils ne pourront demeurer au Canada pour y travailler après leur diplôme, contrairement à ceux qui étudient à temps plein, sauf au dernier semestre.
    Je voudrais que cette condition change.
    Le temps de M. El‑Khoury est écoulé.
    La parole est maintenant à M. Brunelle-Duceppe, qui dispose de six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie, chers témoins, d'être parmi nous aujourd'hui pour cette étude immensément importante.
    J'irai droit au but parce que je n'ai pas beaucoup de temps.
    Monsieur Christian, j'ai vraiment apprécié votre allocution d'ouverture. J'ai une question pour vous.
    Le ministère semble avoir de la difficulté à parler de racisme au sein d'IRCC. On parle plutôt de préjugés inconscients chez les employés d'IRCC. Or, quand on apprend que des gens font allusion aux nations africaines comme étant les 30 nations corrompues, ou encore que certains gestionnaires affirment que les Latino-Américains viennent au Canada dans le seul but d'obtenir des prestations d'assurance sociale, on comprend qu'on est loin des préjugés inconscients.
    Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus, monsieur Christian?
(1135)

[Traduction]

    J'estime que les expressions figurant dans ces rapports révèlent nettement des préjugés purs et simples, qui ne sont pas inconscients. User de ces expressions, traiter de corrompus et indignes de confiance les ressortissants de certains pays, leur prêter l'intention de venir au Canada y retirer des prestations d'aide sociale et qualifier la plus grande partie du continent de sale ou de corrompue, ce n'est pas des préjugés inconscients. C'est de la discrimination consciente, du racisme explicite, conscient.
    Je ne nie pas l'existence de cas de préjugés inconscients, mais, ces termes sont réfléchis. C'est sans tenir compte de ce que pourraient penser leurs auteurs. D'un point de vue raisonnable, n'importe qui saurait que ce n'est pas convenable, même de la part de gestionnaires d'un ministère.
    Il est malheureux que certains individus doivent désormais étudier des demandes formulées par les mêmes personnes qui ont été qualifiées de corrompues, de peu dignes de confiance ou originaires d'un continent qualifié de sale.

[Français]

    Vous êtes donc d'accord avec moi, monsieur Christian, qu'il faut nommer les choses comme elles sont: il y a du racisme à IRCC, point final.

[Traduction]

    Je vois bien que le fait de soulever la question du racisme rend très mal à l'aise, mais, en fait, il faut bien appeler le racisme par son nom. Malgré les malaises, c'est la seule façon de reconnaître le problème et d'y remédier. Sa dissimulation ou l'esquive ne le résoudront pas.
    Oui, c'est un cas évident de racisme, et nous devrions le considérer comme tel. Nous devrions discuter de ce problème, avec, à l'esprit, une stratégie claire pour nous y attaquer. Le problème existe. Nous ne devrions pas le fuir.
    Je ne le fuis pas. Je suis très heureux d'en discuter et d'offrir des solutions, même à l'échelle du ministère.

[Français]

    Je suis entièrement d'accord avec vous, monsieur Christian. Ma mère dit toujours que, pour régler un problème, il faut d'abord et avant tout être capable de le nommer. Vous venez de nous en faire la démonstration encore une fois, et je vous en remercie.
    Dans votre allocution d'ouverture, vous avez évoqué deux solutions. Vous avez parlé d'un médiateur indépendant et d'un groupe indépendant d'experts qui pourraient se pencher respectivement sur certains problèmes en particulier.
    Que pensez-vous de la proposition visant à créer un poste d'ombudsman à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada? Vos deux suggestions pourraient ainsi être réunies sous le chapeau de l'ombudsman. Si un tel poste était créé au ministère, cela protégerait les gens.
    Pensez-vous que c'est une bonne proposition?

[Traduction]

    Je suis d'accord avec la nomination d'un ombudsman, mais les deux choses que j'ai soulignées sont distinctes. Il serait très difficile d'avoir une personne qui puisse s'occuper de ces deux aspects.
    Lorsqu'il s'agit de questions liées à l'utilisation de l'intelligence artificielle, vous avez besoin d'un groupe d'experts spécialisés dans ce domaine. C'est un domaine très technique. Vous avez besoin d'un groupe d'experts qui se spécialisent dans ce domaine particulier pour traiter les problèmes propres à l'utilisation de la technologie de l'intelligence artificielle par IRCC. Même les documents internes d'IRCC montrent qu'il y a un problème en ce qui concerne l'utilisation des données historiques et les politiques qui perpétuent les préjugés. Ce document n'indique toutefois pas réellement comment traiter le problème.
    En ce qui concerne les problèmes liés aux refus de visa, les personnes chargées de l'utilisation de l'IA peuvent ne pas être bien informées sur les questions relatives aux refus de visa. C'est pourquoi nous avons suggéré d'adopter une approche à deux volets comme solution: un médiateur indépendant chargé de traiter les questions de refus de visa, puis un groupe d'experts indépendants chargés de traiter les aspects techniques. Ceux‑ci ont trait à l'utilisation de l'intelligence artificielle, des logiciels et des analyses avancées par les experts...

[Français]

    Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Christian, mais il ne me reste qu'une minute et je voudrais aussi entendre les commentaires de M. Meurrens.
    Monsieur Meurrens, dans votre allocution, vous avez parlé d'opacité et de manque de transparence.
    À quel point le manque de transparence est-il un problème au sein de ce ministère?

[Traduction]

    À l'heure actuelle, c'est un problème énorme. Les délais de traitement indiqués sur le site Web d'IRCC sont inexacts. Sur le site Web lui-même, on dit qu'ils sont inexacts. Encore une fois, ce n'est que par le recours à la Loi sur l'accès à l'information que nous avons appris que presque aucun dossier d'aide familial n'a été traité depuis 2019. À peu près tous les renseignements que nous avons obtenus sur l'intelligence artificielle et son utilisation à IRCC sont le résultat du recours à la Loi sur l'accès à l'information. C'est surprenant. La Cour fédérale a rendu des décisions au sujet de refus de VRT — de visa de résident temporaire — pour des demandes venant de la Chine et de l'Inde, et aucune de ces décisions ne mentionne l'utilisation de l'intelligence artificielle, parce que personne ne savait qu'elle jouait un grand rôle dans le processus de détermination.
    À l'heure actuelle, le manque de transparence est énorme.
(1140)
    Merci.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, votre temps est écoulé.
    Madame Kwan, vous avez six minutes pour poser vos questions. C'est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leurs exposés.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Meurrens, et vous inviter à poursuivre vos observations sur le manque de transparence. En particulier, sur la base des renseignements que vous avez obtenus, par la voie de l'AIPRP et de la LAIPVP, ou encore par d'autres processus, pouvez-vous nous dire ce que vous avez appris ou quelles sont vos préoccupations concernant le système Chinook?
    Pour autant que je sache, Chinook est essentiellement une feuille de calcul Excel qui permet le traitement en masse des demandes. J'ai deux préoccupations principales concernant cet outil. La première est de savoir s'il permet ou non aux agents de traiter rapidement des dossiers, éventuellement en vrac, sans lire l'intégralité des demandes. Ma deuxième préoccupation est que, jusqu'à présent, IRCC a refusé, même dans le contexte d'un contrôle judiciaire, de fournir les captures d'écran ou la documentation sur la façon dont un dossier a été traité dans Chinook ou les indices de priorité que Chinook a pu relever.
    Mes deux principales préoccupations seraient donc que cet outil permet, du moins je le soupçonne, de traiter des demandes en masse sans que personne ne lise les dossiers, et qu'il manque de transparence quant à la manière dont les dossiers sont évalués.
    En somme, on utilise un système qui aide à traiter les demandes plus rapidement, je suppose. Mais à la lumière de ce processus, et à la lumière du rapport Pollara, qui révèle l'existence de discrimination explicite ainsi que de préjugés internes et d'attitudes qui prévalent au sein d'IRCC — lorsque vous mettez ces deux choses ensemble, sachant que Chinook est en fait conçu et développé par le personnel d'IRCC —, quelles seraient vos préoccupations, alors, quant à l'application de Chinook, un outil dans lequel seraient intégrés des points de vue et des préjugés discriminatoires?
    Je vais demander à M. Christian de répondre à cette question.
    Le problème [difficultés techniques] l'analyse de pointe est un manque absolu de transparence. La plupart des renseignements que nous possédons sur ces technologies ont été obtenus à la suite de demandes d'accès à l'information. Ce ne sont pas des renseignements fournis par IRCC.
    Je ne peux même pas dire exactement ce qu'est Chinook. On nous dit qu'il s'agit d'un logiciel — une feuille Excel —, mais je sais que des avocats en droit de l'immigration ont fait des demandes d'accès à l'information, et certains aspects de Chinook étaient en fait exemptés de divulgation en vertu du paragraphe 15(1) de la Loi sur l'accès à l'information. L'article 15 traite des affaires internationales et de la défense.
    Le problème que je vois alors est le suivant: si Chinook est une feuille de calcul Excel ordinaire, pourquoi évoquent-ils l'article 15 de la Loi sur l'accès à l'information, qui traite des affaires internationales et de la défense, pour justifier le refus de divulguer certains renseignements sur Chinook?
    Je pense que Chinook recèle plus de choses que nous n'en savons et qu'IRCC n'est disposé à divulguer. C'est la question de la transparence dont nous parlons. Si c'est un enjeu qui relève effectivement de la défense nationale, demandons à un organisme indépendant d'experts de l'analyser et, bien sûr, de savoir ce qui doit être mis à la disposition du public et ce qui doit être gardé secret.
    IRCC semble être seul à décider de ses propres affaires et cela manque de transparence.
    Merci.
    Monsieur Meurrens, je vous invite à répondre à la même question.
    Mes critiques et préoccupations générales à l'égard de Chinook sont peut-être en fait mieux résumées par la réponse à une demande d'AIPRP que j'ai reçue d'un gestionnaire d'IRCC aux États-Unis. Ils ont envisagé d'utiliser Chinook aux États-Unis. Les bureaux des visas aux États-Unis ont tendance à traiter des demandes de réhabilitation de criminels ou des demandes de visas de personnes provenant d'une multitude de pays.
    Le gestionnaire du programme aux États-Unis a déclaré que son bureau ne se prêtait pas à l'utilisation de Chinook, étant donné que chaque demande présente des circonstances uniques qui doivent être examinées au cas par cas. Le responsable a ensuite déclaré que, contrairement aux bureaux des visas, leur charge de travail n'était pas homogène.
    Ce qui me préoccupe à propos de l'utilisation de Chinook dans certains pays, c'est qu'il est évident qu'IRCC considère les demandes provenant de la Chine ou de l'Inde, par exemple, comme étant homogènes, et que les circonstances particulières des personnes n'ont pas nécessairement besoin d'être examinées, contrairement à celles des personnes provenant des États-Unis, par exemple — du moins selon ce gestionnaire de programme.
(1145)
    Est‑ce qu'il faudrait, comme l'a suggéré M. Christian, que des spécialistes procèdent à un examen particulier et indépendant du système Chinook?
     Qu'en pensez-vous, monsieur Meurrens?
    Je suis tout à fait d'accord, oui.
    Tout à l'heure, on a parlé d'un groupe de travail. Quel devrait être, selon vous, le mandat de ce groupe de travail concernant l'examen du racisme au sein d'IRCC?
    J'aimerais que M. Meurrens réponde, et ensuite M. Christian.
    Je pense que le mandat devrait correspondre à l'étude que fait actuellement le Comité. Je ne sais pas comment cela fonctionnerait en pratique, mais ce groupe devrait avoir la possibilité d'interroger directement les employés d'IRCC qui pourraient être en mesure de nous éclairer davantage sur ce qui se passe réellement, par opposition aux objectifs du ministère.
    Je serais d'accord avec...
    Je suis désolée de vous interrompre, mais le temps de Mme Kwan est écoulé. Vous aurez peut-être l'occasion de répondre au deuxième tour.
    C'est maintenant au tour de M. Genuis.
    Monsieur Genuis, vous disposez de cinq minutes pour vos questions. Allez‑y.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Meurrens, ce comité a des pouvoirs particuliers en ce qui concerne l'obtention de documents. Le Comité a une discrétion absolue à cet égard, et c'est un principe fondamental de notre réalité constitutionnelle. Vous nous parlez des problèmes de transparence, mais le Comité a en fait le pouvoir de prendre certaines mesures pour vous aider concrètement à les résoudre.
    Je suis en train de formuler au pied levé un projet de motion que nous pourrions examiner à une date ultérieure. Je me demande si vous pouvez préciser les données que vous souhaitez, car notre comité pourra alors les demander et les publier.
    Il semble que vous cherchiez les taux d'acceptation et de refus ventilés par pays et régions infranationales de demande et les types de visas demandés, en remontant jusqu'en 2015.
    Est‑ce exact? Y a‑t‑il d'autres données que vous souhaiteriez que nous demandions et publiions?
    Non. Il est possible d'obtenir les taux de refus et d'approbation en fonction du bureau des visas au moyen de demandes présentées en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Ce que j'aimerais, c'est que les personnes qui traitent ces dossiers nous disent comment elles les traitent concrètement. M. Christian, qui est un expert en IA, pourrait alors nous en dire plus sur les mots clés du tri réalisé par l'IA, en fonction du bureau des visas.
    Comment l'IA fonctionne‑t‑elle réellement dans Chinook? Quels sont les mots clés qui sont introduits dans les fichiers de signalement, et comment les choses fonctionnent-elles réellement sur le terrain en ce qui concerne le traitement des demandes?
    Merci.
    En raison des limites de temps, je demanderais dans ce cas à tous nos témoins de nous faire parvenir par écrit des renseignements précis, qu'il s'agisse des mots clés de l'outil Chinook ou autre, que le Comité devrait demander et publier, de sorte que nous puissions nous assurer que vous disposez de ces renseignements à l'avenir et que nous les ayons également.
    Monsieur Christian, monsieur Meurrens et madame Miedema, pourriez-vous confirmer d'un signe de tête que vous êtes en mesure de le faire prochainement — de nous faire parvenir ces renseignements? Nous nous efforcerons de faire adopter une motion au Comité à cet égard. D'accord. Je vous remercie.
    D'accord. Merci.
    J'inclurais même aussi l'information qu'il est possible d'obtenir par l'AIPRP. Étant donné les questions de censure et d'accès, je pense qu'il est toujours utile pour le Comité d'inclure certains de ces renseignements dans une motion de demande de documents afin de les publier sur notre site Web et d'en faciliter l'accès.
    Madame Miedema, je vous remercie du formidable travail que vous accomplissez à l'égard des réfugiés ainsi que de votre témoignage aujourd'hui. Quand je discute avec les personnes engagées dans le parrainage privé, je suis constamment frustré par l'accumulation de difficultés, de formalités administratives et de fardeaux supplémentaires. On a l'impression que l'approche consiste systématiquement à freiner les répondants privés, au lieu de leur donner les moyens d'agir et de faciliter l'excellent travail qu'ils font.
    Il me semble également, pour que le système soit le plus juste et pour que nous puissions accueillir le plus de réfugiés, que le gouvernement devrait consacrer le plus de temps, d'énergie et de ressources possible à soutenir les répondants privés, notamment au moyen d'un plus grand nombre de programmes de parrainage conjoint. Si nous abandonnions ce modèle qui sépare le public du privé et que nous mettions toutes ces ressources au service du parrainage conjoint, nous pourrions accueillir davantage de réfugiés, et les réfugiés eux-mêmes seraient avantagés s'ils étaient accueillis par une communauté. Les réfugiés parrainés par le secteur privé ont un avantage énorme dans la mesure où ils arrivent dans des communautés prêtes à les aimer et à les soutenir, alors que les réfugiés parrainés par le gouvernement bénéficient d'un certain soutien financier, mais n'ont pas le type de soutien psychosocial qui accompagne l'appartenance à une communauté.
    Partagez-vous ces idées et ces préoccupations? Est‑ce que vous pourriez nous donner plus de précisions sur la façon dont nous devrions nous éloigner de la mentalité actuelle, qui consiste à accumuler les obstacles pour les répondants privés, et nous parler des choses que nous pouvons faire pour habiliter plus de gens, leur donner du soutien et faire en sorte que plus de gens s'offrent à faire ce travail?
(1150)
    Oui. Je vous remercie de vos propos. Vous avez tout à fait raison dans tout ce que vous dites.
    Il existe certaines possibilités de partenariat entre le gouvernement et les groupes privés, dans le cadre du Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas, ce qui est formidable, mais nous avons vraiment besoin de plus de places.
    De nombreux répondants privés sont prêts à soumettre des demandes chaque année, et tout le monde se bat toujours pour les places. Je ne sais pas pourquoi, car les particuliers apportent leurs propres fonds et sont prêts à fournir cette aide à l'établissement pour la première année, donc oui, vous avez raison de parler de plus de répondants.
    Oui. C'est absolument insensé d'empêcher les gens qui veulent aider les réfugiés et payer eux-mêmes.
    Je suis désolée de vous interrompre, mais votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à Mme Kayabaga.
    Vous avez cinq minutes pour poser vos questions.
    Merci, madame la présidente. Je vais commencer par remercier nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je vais m'adresser directement à M. Christian. Vous avez parlé de la discrimination que vous constatez dans la collecte axée sur l'IA. Je crois comprendre qu'elle sert à recueillir des données et à les fournir aux décideurs qui sont des humains.
    Quels autres obstacles voyez-vous dans le système qui recueille ces données et les fournit à un humain qui prend ces décisions, lorsqu'il s'agit des taux de refus pour les pays africains?
    Comme l'intelligence artificielle est utilisée par IRCC maintenant, selon les documents internes obtenus, nous en sommes au point où IRCC utilise l'IA pour automatiser les refus de visa. Nous avons donc le traitement en bloc de demandes de visa. M. Meurrens a évoqué précédemment l'absence de personnalisation du traitement des demandes. Les demandes ne sont pas traitées individuellement. Elles semblent être traitées comme si elles étaient homogènes, ce qui est rarement le cas.
    Ce qui me préoccupe le plus dans l'utilisation de cette technologie par IRCC, c'est que pour former un algorithme d'IA, il faut d'énormes quantités de données. IRCC dispose inévitablement de données provenant d'une collecte historique de données. Le problème est que, historiquement, vous collectez des données qui semblent comporter des biais à l'encontre d'un groupe particulier de personnes ou d'un continent particulier. Lorsque vous utilisez ces données pour former un algorithme d'IA, ce que l'algorithme d'IA fait est simplement de régurgiter ces biais. Cette fois, c'est encore plus difficile, car l'identification du problème se complexifie.
    Le problème que nous avons ici, et que j'essaie de mettre en évidence, c'est que si IRCC utilise ces données pour former des algorithmes d'IA — ce que je crois qu'il fait maintenant — sans essayer de résoudre adéquatement la question des biais, nous allons nous retrouver dans une situation où le problème que nous avons relevé dans le rapport Pollara est intégré dans la technologie et devient plus difficile à identifier.
    Cela perpétue la discrimination que nous avons soulignée à l'encontre des personnes originaires du continent africain subsaharien, notamment en ce qui concerne les demandes de visa d'études en provenance de cette partie du monde. Cela nous préoccupe beaucoup, à ASI Canada.
(1155)
    Cela m'amène directement à ma prochaine question.
    Étant donné qu'il y a un taux plus élevé de refus des demandes provenant de pays africains, que les demandeurs soient anglophones ou francophones, je me demande si vous savez que le Ghana, par exemple, dessert environ 13 pays. Quelles suggestions feriez-vous à IRCC pour améliorer cette situation?
    Il est plus facile de parler de l'IA qui recueille des données destinées directement à un décideur humain. Est‑ce qu'il y a un problème de ressources dans cette situation?
    L'IA est une technologie extraordinaire. Elle accomplit des tâches en une fraction du temps qu'il faudrait aux humains pour les accomplir, donc sur le plan de l'efficacité, oui, l'IA améliore l'efficacité des tâches. Elle permet de traiter un plus grand nombre de demandes en une fraction du temps qu'il faudrait aux humains pour le faire.
    Je suis désolée, monsieur Christian. Ma question porte sur les ressources des bureaux des visas et l'augmentation du nombre de bureaux sur le continent. Le Ghana traite environ 13 pays et supervise 26 autres pays. Quels sont vos commentaires à ce sujet?
    Je dirais que si nous pouvons avoir plus de bureaux des visas qui traitent ces demandes — en particulier des bureaux des visas locaux —, avec plus de ressources et plus d'humains qui font le travail, plutôt que d'essayer de sous-traiter le travail à la technologie, cela contribuera grandement à résoudre le problème. Les humains chargés de prendre ces décisions devraient être ceux qui sont formés pour être aptes à reconnaître les préjugés conscients et inconscients lorsqu'ils en voient.
    En quoi consisterait cette formation? Supposons qu'une personne qui traite des demandes de visa au Ghana traite une demande de visa provenant du Kenya. Comment peut‑elle prendre la décision? Quelles recommandations feriez-vous pour une personne qui se trouve un peu plus loin et qui prend ces décisions? Que voudriez-vous qu'elle sache?
    Si nous devions accroître les ressources pour nous assurer qu'elles sont adéquates, quel type de recommandations feriez-vous à cet égard?
    Les gens qui prennent ces décisions doivent être très conscients de la situation des demandeurs relativement à leur origine. Le fait de comprendre la réalité culturelle et individuelle des demandeurs contribuera grandement à éliminer les préjugés et à éviter que des personnes soient considérées comme étant corrompues simplement en raison de la région ou de la partie du monde dont ils sont originaires.
    Cela signifie que vous savez, monsieur Christian, qu'au bout du compte, les décisions sont prises par un humain et non par l'intelligence artificielle...
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Kayabaga. Votre temps est écoulé.
    C'est maintenant au tour de M. Brunelle-Duceppe, qui dispose de deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je profite de l'occasion pour remercier les témoins qui participent à la séance d'aujourd'hui. Nous allons tirer profit de leur expertise lors de la rédaction de ce rapport et de la formulation de nos recommandations. Je les remercie infiniment.
    J'aimerais poser une question à M. Meurrens, qui est avocat en droit de l'immigration.
    Je vais émettre une hypothèse. Est-il possible que le sous-financement des bureaux d'IRCC qui doivent traiter les demandes occasionne un traitement plus rapide et moins exhaustif des dossiers?
    Prenons l'exemple d'un agent qui travaille dans un bureau d'IRCC en sous-effectif. S'il voit la pile de dossiers augmenter chaque jour, est-ce que cela peut influencer ses décisions? En effet, la décision de refuser une demande peut se prendre rapidement, tandis que celle d'en accepter une peut demander plus de temps.
    Est-il possible que le sous-effectif contribue au problème?

[Traduction]

     Oh, bien sûr que oui. Je critique le fait que les demandes ne sont pas examinées de façon intégrale, mais je sais également qu'étant donné les effectifs actuels, il est impossible d'examiner toutes les demandes au complet. Je ne sais pas quelle est la solution, et c'est une question difficile, mais compte tenu du volume important...
    Je ne peux imaginer le travail qu'un agent des visas doit accomplir, le grand nombre de pages qu'il est censé lire durant une journée.

[Français]

    Monsieur Christian, comme il ne me reste qu'une minute, je vais vous laisser le mot de la fin.
    Si vous aviez à écrire une recommandation dans le rapport que nous allons rédiger, quelle serait votre priorité absolue?

[Traduction]

    Ma première recommandation a trait au fait qu'IRCC utilise les technologies de l'intelligence artificielle et continue de les utiliser. C'est inévitable. Par conséquent, il devrait y avoir un organisme indépendant composé de spécialistes qui serait chargé de surveiller l'utilisation qu'IRCC fait des technologies de l'intelligence artificielle.
    Ce serait là ma première recommandation, et je la fais en raison du manque de transparence au sujet de l'utilisation de ces technologies par IRCC.
    Puisque je travaille dans ce domaine, le manque de transparence m'inquiète vraiment. Je crois que de nombreux avocats spécialistes de l'immigration au Canada sont vraiment préoccupés par le manque de transparence d'IRCC à l'égard de son utilisation des technologies informatiques et des technologies de l'intelligence artificielle.
(1200)
    Merci. Nous allons terminer la première partie de notre réunion avec Mme Kwan.
    Vous disposerez de deux minutes et demie. Allez‑y, s'il vous plaît.
    J'aimerais revenir à la dernière question que j'ai posée à M. Christian concernant le mandat. Pourriez-vous y répondre, s'il vous plaît?
    Pouvez-vous répéter la question s'il vous plaît? Je l'ai oubliée.
    Parlez-vous du mandat du comité ou des mandats [difficultés techniques]?
    Excusez-moi, madame la présidente. Pourrais‑je ne pas perdre mon temps de parole? Il semble qu'il y ait eu quelques difficultés techniques. Je n'ai pas pu entendre la réponse de M. Christian et je ne pense pas qu'il ait entendu ma question.
    Il voulait savoir quelle était la question. Pouvez-vous seulement lui dire exactement quelle est votre question?
    Oui.
     Ma question porte sur un mandat concernant l'examen de l'utilisation de l'intelligence artificielle dans le contexte du rapport Pollara et l'idée d'essayer de contrer la discrimination au sein d'IRCC. Quel doit être le mandat dans le cadre de cet examen?
    On devrait tout d'abord établir des garde-fous en ce qui concerne l'emploi de données pour conditionner l'intelligence artificielle utilisée par IRCC. Ensuite, il s'agirait de déterminer pour quel aspect du traitement des demandes de visa d'IRCC il est approprié d'utiliser les technologies de l'intelligence artificielle.
    Enfin, l'intelligence artificielle ne devrait pas prendre de décisions en matière d'immigration. Elle devrait fournir aux agents des visas les renseignements dont ils ont besoin pour prendre eux-mêmes les décisions, mais ces décisions ne devraient pas être prises par l'intelligence artificielle.
    Monsieur Christian, en ce qui concerne le problème de discrimination au sein d'IRCC en général, et compte tenu de l'information qui a été fournie dans le rapport Pollara, quelle mesure recommanderiez-vous au gouvernement de prendre en premier lieu pour corriger la situation?
    Je lui recommanderais tout d'abord d'examiner plus à fond le problème qui a été soulevé dans le rapport Pollara, d'interroger des gens, un plus grand nombre de personnes au sein d'IRCC, pour pouvoir déterminer l'ampleur du problème de racisme à IRCC, et d'établir un cadre clair pour s'attaquer à la question des préjugés dans le traitement des demandes d'immigration à IRCC.
    Monsieur Meurrens, pourriez-vous répondre à la même question?
     Surtout en ce qui concerne le traitement des demandes de visa en provenance d'Afrique, je recommande une nouvelle formation complète ou une sorte d'examen sur le personnel afin de déterminer pourquoi les taux d'acceptation sont aussi bas.
    Merci. C'est ce qui met fin à la première partie de notre réunion. Au nom de tous les membres du Comité, je prends un instant pour remercier les trois témoins d'avoir comparu devant le Comité dans le cadre de l'étude importante que nous débutons.
    Je vois que notre deuxième groupe est arrivé. Je vais suspendre la séance quelques minutes pour que la greffière puisse effectuer les tests de sons avec les témoins.
(1200)

(1205)
    Nous reprenons.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Beba Svigir, directrice générale de la Calgary Immigrant Women's Association.
    Nous accueillons également Mme Anila Lee Yuen, présidente et directrice générale du Centre for Newcomers.
    Notre troisième témoin de ce groupe est Mme Fatima Filippi, directrice générale du Rexdale Women's Centre.
    Je vous remercie de prendre le temps de comparaître devant le Comité.
    Chaque témoin dispose de cinq minutes pour faire sa déclaration préliminaire. Nous passerons ensuite aux questions. Nous allons entendre tout d'abord la directrice générale de la Calgary Immigrant Women's Association, Mme Beba Svigir.
    Vous disposez de cinq minutes. Vous pouvez commencer.
(1210)
    Au fil des ans, la Calgary Immigrant Women’s Association, ou CIWA, a travaillé avec en tout 23 agents environ. Je crois qu'environ 27 % d'entre eux étaient racialisés. Nous croyons que c'est à l'égard de l'étendue des différences dans les résultats pour nos clients racialisés que notre organisme d'établissement peut vous être le plus utile dans le cadre de votre étude.
    Selon le rapport sur le sondage d'IRCC, bon nombre des employés interrogés étaient au Canada parce qu'ils y avaient immigré, et ils étaient reconnaissants de pouvoir contribuer au travail et au mandat d'IRCC. Cela correspond également à l'expérience de notre organisme. Plus de 90 % de nos clientes sont racialisées, tout comme 76 % des membres de notre personnel et de notre équipe de direction. Par conséquent, en travaillant avec la CIWA, IRCC travaille avec environ 12 000 immigrantes racialisées par année. Nos déclarations sur les différences dans les résultats sont basées sur des décisions relatives au financement des programmes, aux services offerts aux clients et aux politiques.
     En ce qui concerne les règles discriminatoires dans le traitement des demandes d'immigration provenant de certains pays par rapport à d'autres, le problème a été constaté et relevé par certaines clientes de la CIWA concernant les demandes de permis d'études. Le délai de traitement dans le Volet direct pour les études va jusqu'à 20 jours pour les 14 pays qui figurent sur la page Web d'IRCC, tandis que le délai de traitement dans le processus de demande de permis d'études normal peut varier entre 90 et 300 jours.
     Nous avons constaté que les clientes qui viennent du Nigeria avec un visa d'étudiant n'amènent généralement pas leurs enfants avec elles, car le taux de refus est plus élevé lorsque des enfants sont inclus dans la demande de permis d'études. Elles font appel à la CIWA pour obtenir de l'aide afin de faire venir leur famille après leur arrivée au Canada. Ces retards causés par des délais de traitement différents font en sorte que nous faisons face à des facteurs de stress supplémentaires découlant de la réunification tardive des familles, notamment les difficultés parentales et les conflits familiaux, qui ont tous deux des effets considérables sur les familles.
    Un cas extrême relatif à la notion d'expériences régionales est celui d'une cliente soudanaise de la CIWA qui a fait une demande de parrainage privé de réfugiés pour sa fille et ses huit enfants. La demande est dans la file d'attente à Nairobi depuis décembre 2020, et coûtera 80 000 $ au groupe de parrainage privé. Le groupe de parrainage a déjà dépensé plus de 15 000 $ l'année dernière pour la nourriture, les médicaments, une maison en hutte de terre et la scolarisation des enfants pendant cette période d'attente.
    Alors que certains bureaux des visas dans d'autres pays ont traité des demandes tout au long de la pandémie de COVID, le bureau du Kenya était fermé. Le parrainage privé de réfugiés, qui fait la fierté des Canadiens, vacillera sous le poids des coûts élevés causés par des temps inégaux.
    Un exemple qui illustre les différences dans les décisions de financement d'IRCC est la décision qu'a prise le gouvernement fédéral, à la fin de 2018, d'investir dans des programmes d'emploi spécialisés pour les femmes immigrantes racialisées partout au Canada. On a invité les organismes à faire une demande pour un projet de 28 mois visant à faciliter la mise en œuvre de programmes de transition vers l'emploi. Après les élections fédérales de 2019, le même gouvernement a décidé d'annuler le financement et a abandonné le projet après seulement 16 mois. Cela a été largement perçu comme une promesse électorale visant à attirer des électeurs et l'attention des nouveaux arrivants à l'époque, et il nous a semblé que cette décision pouvait être perçue comme étant très différente. Étant donné nos capacités et d'autres soutiens financiers auxquels nous avons dû accéder à l'époque, nous avons terminé le projet conformément à notre calendrier initial de 28 mois.
     En ce qui concerne l'automatisation accrue du traitement des demandes, qui intègre des pratiques discriminatoires fondées sur la race d'une manière qui sera plus difficile à voir avec le temps, cette question nous tient vraiment à cœur, car nous croyons que nous en savons beaucoup sur les risques qui y sont associés. Les décisions déterminantes prises par IRCC pour améliorer la prestation de services touchent directement les organismes qui fournissent des services ainsi que les clients. Ces décisions devraient être exécutées après consultation des parties prenantes. Les résultats inattendus doivent être connus et atténués. Les conséquences négatives découlant des décisions relatives à l'automatisation qui sont prises de façon précipitée auront assurément des effets négatifs sur les nouveaux arrivants confrontés à de nombreux obstacles, y compris ceux qui sont racialisés.
     Nous comprenons que les approches axées sur les processus et l'analyse sont nécessaires pour éliminer les arriérés. Cependant, l'automatisation du traitement des demandes des populations vulnérables devrait être considérée comme une amélioration seulement si des exceptions bien définies...
(1215)
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Svigir. Votre temps est écoulé. Vous aurez l'occasion d'en dire davantage durant les séries de questions.
    C'est maintenant au tour de Mme Yuen.
    Madame Yuen, vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui. Je me trouve sur le territoire traditionnel visé par le Traité no 7, à Calgary, en Alberta, dont le nom pied-noir est Mohkinstsis.
    Je suis présidente et directrice générale du Centre for Newcomers. J'aimerais soulever cinq points concernant le racisme, la discrimination et les obstacles systémiques en ce qui concerne IRCC. Bien que des choses vraiment merveilleuses se soient produites au cours des dernières années, notamment quant à la priorité accordée à l'apprentissage des nouveaux arrivants sur les peuples autochtones, à la priorité concernant les communautés LGBT+ et racialisées et j'en passe, j'ai pensé profiter de ce moment pour parler de certaines des choses que nous considérons comme des obstacles ainsi que des changements que nous souhaiterions.
    Tout d'abord, ce qui est vrai et ce que perçoit la population en général, c'est que les mesures prises à l'égard des personnes déplacées varient selon leur lieu d'origine. Nous le voyons de manière beaucoup plus générale, surtout en ce moment. Les organismes d'établissement comme le nôtre sont encore ébranlés par l'acceptation des réfugiés afghans et de l'assistance qui leur est fournie. La situation a été, bien sûr, comme c'est le cas pour toutes les personnes déplacées en temps de guerre, très difficile pour la communauté — mais nous constatons qu'il est beaucoup plus facile pour les citoyens ukrainiens de venir au Canada. Cela pose problème lorsque nous devons expliquer à nos clients et à la communauté pourquoi les choses sont différentes pour des communautés racialisées — qu'elles soient syriennes, irakiennes, qu'elles viennent de Colombie en Amérique du Sud ou d'ailleurs, ou du Pendjab potentiellement en tant que réfugiées politiques de l'Inde —, et tous ces différents endroits qui sont racialisés.
    Bien que nous soutenions la communauté ukrainienne et toutes les communautés, il existe une énorme différence. La seule que nous pouvons voir est la race. C'est vraiment un problème dans le cadre du travail que nous accomplissons.
    L'autre élément à ce sujet, c'est la différence de traitement basée sur le statut d'immigration. Nous disposons d'un mécanisme bien légal permettant aux gens de demander l'asile une fois qu'ils sont arrivés au Canada, mais ils n'ont droit à aucun des services, à aucune aide à l'établissement pendant qu'ils suivent le processus pour devenir des résidents permanents. Cela a également des effets néfastes sur la longévité. De nombreuses études montrent que les enfants et les petits-enfants resteront dans un état de traumatisme parce que leurs parents n'ont pas reçu le genre de services... avant quelques années plus tard, lorsqu'ils ont reçu leur statut de réfugié. Cela pose également problème.
     Il y a également la question de savoir ce qu'il adviendra des Ukrainiens. Actuellement, ce sont des résidents temporaires. Que ferons-nous s'ils demandent l'asile et choisissent de rester, ou s'ils ne peuvent pas retourner chez eux? Quels types de services pourrons-nous leur offrir? À l'heure actuelle, IRCC ne permet pas aux organismes d'établissement comme le nôtre d'offrir des services aux résidents temporaires ou aux demandeurs d'asile. Cette situation pose un problème quant à la manière dont ces communautés vont pouvoir obtenir de l'aide.
     L'une des choses que nous avons apprises dans le cadre de la réponse à la COVID, c'est que notre groupe est responsable d'un taux de vaccination de 99 %, le premier au Canada, et très certainement en Alberta, dans le Nord-Est de Calgary, un espace communautaire qui compte de nombreux nouveaux arrivants racialisés. Nous avons pu prouver qu'en temps de crise, quelle que soit la crise, même si les gens parlent couramment l'anglais ou le français, on les traite avec dignité lorsqu'on leur donne la possibilité de s'exprimer dans leur langue maternelle. C'est un autre élément qui, selon nous, est extrêmement important dans tous les services qui sont offerts. Les services ne devraient pas être offerts seulement en anglais et en français. Nous devrions faire un effort concerté, surtout en temps de crise, pour pouvoir offrir aux gens de l'aide dans leur langue maternelle.
    Une chose que nous avons constatée pendant la pandémie de COVID, c'est que les agents d'IRCC n'étaient pas désignés comme des travailleurs essentiels. Les bureaux étaient fermés. S'ils avaient été désignés travailleurs essentiels, nous n'aurions pas constaté une telle disparité entre les services offerts aux nouveaux arrivants et aux immigrants par rapport à d'autres communautés.
     Enfin, au cours de la dernière décennie peut-être, les groupes communautaires ethnoculturels n'ont généralement pas été inclus dans le financement. Pour ce qui est de l'appui offert à notre communauté, nous pensons que nous devons vraiment envisager d'ajouter des options de financement pour les groupes communautaires ethnoculturels.
    Merci.
(1220)
    Merci, madame Yuen.
    Nous allons maintenant entendre Fatima Filippi, directrice générale du Rexdale Women's Centre.
    Madame Filippi, vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire. Veuillez commencer.
    Merci de me recevoir aujourd'hui. Je suis un peu nerveuse, alors je vous demande d'être indulgents.
    Je voulais seulement parler brièvement de mon expérience auprès de l'organisation et IRCC.
    Notre organisation a été fondée en 1978. Nous aidons les nouveaux arrivants, les femmes réfugiées et leurs familles à surmonter les défis auxquels ils sont confrontés lorsqu'ils arrivent au Canada. L'an dernier, nous avons offert des services à bien au‑delà de 8 000 personnes durant la pandémie.
    J'aimerais également signaler que depuis 2019, je suis la coprésidente du caucus des femmes du Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants, qui est une organisation-cadre des organismes offrant des services aux immigrants en Ontario.
    À l'instar de nombreux collègues de notre secteur, nous avons été choqués et attristés par les conclusions du rapport Pollara, mais autant nous sommes outrés, autant nous ne sommes pas surpris par ces conclusions.
    J'aimerais commencer par vous faire part de l'expérience de mon organisation dans le cadre de son travail auprès des communautés de femmes racialisées et IRCC.
    Nous avons fait l'expérience d'un traitement différencié dans les négociations budgétaires. Mme Yuen a parlé un peu des options de financement plus ouvertes, et c'est l'une des choses dont nous voulions parler. En tant qu'organisation de femmes qui travaille auprès des communautés de femmes racialisées, on nous a demandé de fournir des détails supplémentaires que les autres fournisseurs du secteur n'ont pas eu à fournir. Citons notamment une ventilation détaillée des coûts du budget administratif que les autres fournisseurs du secteur n'ont pas été tenus de fournir. On nous a également demandé ces renseignements pour justifier le pourcentage administratif exigé par IRCC, même si les contrats font clairement état que nous pouvons réclamer jusqu'à 15 %.
    Nous comprenons maintenant que si l'agent d'établissement était issu d'une communauté racialisée — dans ce cas‑ci, il l'était —, il devait faire preuve d'une plus grande diligence raisonnable afin de justifier sa recommandation et de fournir la preuve qu'il gérait efficacement notre contrat et notre dossier.
    Un agent d'établissement qui a maintenant quitté le ministère m'a raconté qu'à son retour du bureau après avoir visité mon agence, on l'a réprimandé et on lui a demandé ce que cela faisait de travailler avec une organisation de femmes, comme si notre portefeuille était dégradant et de moindre valeur par rapport à la gestion d'autres portefeuilles.
    Nous sommes préoccupés par le fait que le personnel racialisé se voit refuser des promotions et doit travailler davantage pour justifier ses décisions. Les décisions de ces personnes sont remises en question lorsqu'elles travaillent avec des organismes de services du secteur. Ainsi, nous sommes également préoccupés par la façon dont cela se reflète sur les décisions relatives à l'admission des communautés racialisées au Canada.
    Des conseillers en établissement de notre agence m'ont dit que nos clients racialisés doivent se soumettre à des étapes supplémentaires afin de satisfaire aux exigences du processus de demande. Je sais que M. Christian en a longuement parlé dans le cadre du processus du système Chinook.
    On a demandé à un grand nombre de clients de se soumettre à des analyses d'ADN pour des membres de leur famille, ce qui est un processus coûteux et souvent difficile à obtenir dans certains pays. Cela entraîne des retards extraordinaires. Les habilitations de sécurité sont également coûteuses et difficiles à obtenir. Les exigences en matière de visa dans certains pays constituent un fardeau financier additionnel.
    Nos clientes musulmanes ont maintenant aussi commencé à nous dire qu'on leur pose des questions de nature sexuelle concernant leur relation avec leur époux et qu'elles doivent fournir une preuve de mariage dans le cadre du programme de parrainage des familles.
    Nous nous demandons si ces procédures et questions visent tous les nouveaux arrivants et immigrants éventuels ou s'il ne s'agit de quelques-uns.
    J'aimerais également saisir l'occasion de présenter quelques recommandations dans mon rôle de coprésidente du caucus des femmes de l'OCASI.
    Premièrement, nous recommandons un examen exhaustif de l'équité raciale du système d'immigration et de protection des réfugiés du Canada, ce qui comprendrait des lois, des règlements, des politiques et des pratiques.
    Les lois, règlements et politiques sont rédigés soigneusement en vue d'éliminer les préjugés raciaux. Cependant, même les règlements relatifs aux préjugés raciaux peuvent avoir une incidence disproportionnée sur certaines personnes et communautés en raison de l'histoire mondiale profondément enracinée du colonialisme et du patriarcat, de l'incidence de la traite transatlantique des esclaves et du génocide, ainsi que du colonialisme et du racisme systémique actuels au Canada.
    Par exemple, le Canada a des exigences en matière de visa pour les pays du Sud principalement. Il y a également des pays qui ont des populations racialisées. L'exigence d'avoir un visa rend les visites familiales des parents et des grands-parents et la réunification des familles plus difficiles pour les résidents racialisés du Canada.
    Dans la pratique, IRCC aurait apparemment scruté à la loupe les demandes de parrainage familial provenant principalement de demandeurs racialisés. C'est ce que nous a dit M. Christian. Les demandes de parrainage d'un époux pour l'Inde sont examinées à la loupe pour vérifier l'existence de fraudes liées aux mariages. Les demandes de parrainage d'un enfant pour la Chine et de nombreux pays africains sont scrutées pour vérifier l'authenticité des relations parents-enfants. On demande souvent aux demandeurs de fournir une preuve d'ADN comme preuve de lien.
(1225)
    Bien que les lois, règlements et politiques soient neutres, leur application est sujette à de la partialité et à des préjugés. Ces préoccupations ont été relevées par les employés d'IRCC dans le groupe de discussion de 2021 et les groupes d'employés d'IRCC.
    Deuxièmement, nous recommandons la collecte de données désagrégées par race, ethnie et foi, de même que par genre et autres facteurs démographiques sur lesquels IRCC recueille actuellement des données.
    Désolée de vous interrompre. Votre temps de parole est écoulé. Vous aurez l'occasion de parler davantage dans la série de questions.
    Sur ce, nous allons maintenant procéder à notre série de questions, en commençant avec M. Redekopp, pour six minutes.
    Monsieur Redekopp, veuillez commencer.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux trois témoins. Vous faites de l'excellent travail dans les organisations que vous dirigez. Félicitations.
    Je veux également souligner, madame Lee Yuen, que votre Centre for Newcomers est situé à Calgary Forest Lawn, la circonscription de mon collègue Jasraj Singh Hallan. C'est intéressant.
    Madame Filippi, pourriez-vous simplement continuer et nous faire part de la deuxième et troisième recommandations? On vous a interrompue.
    D'accord. Je ne vais pas entrer trop dans les détails. Je vais juste vous faire part des recommandations, mais pas du contexte.
    Nous recommandons la collecte de données désagrégées par race, ethnie et foi, de même que par genre et autres facteurs démographiques sur lesquels IRCC recueille actuellement des données.
    Troisièmement, nous recommandons un examen indépendant et une surveillance continue du système Chinook d'IRCC, et de toute utilisation future de l'intelligence artificielle ou de la technologie pour la présélection et le traitement, ainsi que la communication complète des données de traitement des cas ventilées par race, ethnie et foi, de même que d'autres données démographiques actuellement recueillies par IRCC.
    Pour terminer, nous recommandons de la formation à la lutte contre le racisme dans une optique sexospécifique obligatoire pour tous les employés; l'établissement d'un bureau de l'ombudsman indépendant et doté de ressources suffisantes pour IRCC; et une loi sur la lutte contre le racisme au Canada, ce qui donnerait au Secrétariat de la lutte contre le racisme un fondement législatif et renforcerait son travail. Il faudrait que l'ensemble des lois et des règlements du gouvernement soient assujettis à un examen de l'équité raciale semblable à celui qui a été entrepris dans le cadre de la Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes de 2018.
    Merci.
    Je veux continuer de m'entretenir avec vous sur la question de la famille. Je sais que nous avons souvent eu des cas dans ma circonscription où les gens n'ont pas pu être réunis avec leur famille, ce qui peut être une situation très stressante.
    Observez-vous des tendances concernant l'authenticité de la relation? Quels sont les facteurs utilisés? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Lorsque nous travaillons avec des familles, en faisant venir des enfants principalement ou leurs parents ou grands-parents, cela devient vraiment difficile en ce qui concerne le processus, lorsque nous demandons des exigences supplémentaires pour des analyses de l'ADN et les habilitations de sécurité.
    Si les enfants approchent de l'âge où ils ne seront plus considérés comme des personnes à charge, cela devient un problème supplémentaire pour la famille. S'ils ne commencent pas leurs démarches assez tôt dans le processus — et il faut beaucoup de temps étant donné tous les obstacles et les barrières qu'ils doivent surmonter —, ils dépassent le temps imparti. Ils doivent alors se présenter en tant que demandeurs indépendants, et les familles sont découragées par tout ce processus, qui devient très difficile.
    Ce sont là des situations typiques, mais pouvez-vous relever des cas de racisme? Y a‑t‑il certains pays ou...
    Si vous cherchez à savoir de quels pays il s'agit, certainement, mais si vous demandez des données génétiques, des preuves provenant de pays africains, c'est une autre question. Nous avons des clients somaliens qui doivent fournir des preuves concernant leurs enfants. Nous avons vu des cas avec les réfugiés syriens, mais ils ne sont pas trop nombreux. Je ne sais pas si la situation est semblable avec les réfugiés afghans qui arrivent au pays en ce moment. Il y a des femmes très surveillées qui viennent de l'Inde et qui ont besoin d'une preuve de relation de mariage. Ce sont des femmes racialisées.
    On a des femmes musulmanes à l'heure actuelle qui doivent fournir des renseignements sur la nature sexuelle de leur relation avec leur époux. Ce n'est pas un sujet que les gens sont à l'aise d'aborder. Bien entendu, c'est ce qui se passe avec certaines communautés raciales. Nous le voyons de plus en plus.
(1230)
    Exact.
    Ce qui nous préoccupe pour nos clients, c'est que s'ils n'entament pas les démarches assez tôt dans le processus, leurs enfants dépasseront le temps imparti et deviendront des personnes indépendantes.
    L'une des choses que nous avons constatées dans ma circonscription, c'est quand IRCC prend des décisions à propos d'un client, d'une personne, c'est souvent l'ASFC qui doit les faire appliquer. J'ai eu des problèmes dans ma circonscription de Saskatoon-Ouest où j'ai dû intervenir auprès d'un ministre pour arrêter la déportation d'un homme ougandais. Il était un réfugié qui fuyait son pays parce qu'il était gai. L'ASFC ne semblait voir qu'une personne noire.
    D'après votre expérience, pouvez-vous établir un lien avec certaines des mesures qui sont prises par l'ASFC?
    Certainement. C'est inhérent au fait que nous avons entendu que ces groupes essaient simplement d'escroquer le système, qu'ils sont des menteurs ou qu'ils tentent de resquiller. Nous avons entendu des observations de ce genre. Cela devient problématique lorsque nous traitons avec certains agents dans certaines régions, en Ontario, et que nous essayons de leur faire surmonter ces préjugés qu'ils ont. Oui, cela devient problématique.
    Ce n'est pas seulement un aspect du système; c'est d'une certaine façon dans tout le système que les choses deviennent problématiques. Le traitement différencié ne commence pas seulement à un endroit pour s'arrêter à un autre. Il touche tout le système, et c'est ce que nous constatons.
    Lorsque les gens font appel à des avocats, cela devient un processus coûteux pour le Canada. Je peux certainement parler de l'exemple de l'IA. Ils perdent souvent leur cause. Il devient très coûteux d'administrer cela, en ayant à annuler et à passer par le système judiciaire, et ainsi de suite, mais c'est également coûteux pour le client. La question est de savoir pourquoi certains groupes se voient poser certaines questions à toutes les étapes du système, mais pas d'autres.
    Madame Svigir, je remarque que vous avez un programme philippin dans votre organisation. Bien sûr, nous avons une communauté philippine importante dans ma circonscription. J'ai eu un cas où une femme atteinte d'un cancer du sein en phase terminale a fini par être expulsée. Elle essayait de demander l'asile, mais elle ne l'a pas obtenu... Avez-vous eu des expériences de ce genre, où l'expulsion et le racisme vont de pair?
    Oui, absolument, pour bon nombre de nos clients. La communauté philippine est très particulière pour ce qui est des craintes et des inquiétudes quant à son engagement dans tout type de système social et, certainement, dans les aides gouvernementales, en raison de ses expériences inhérentes avec le système.
    L'objectif principal du programme philippin est de travailler avec les commissions scolaires de Calgary et la communauté philippine, y compris les établissements religieux, pour assurer le confort...
    Je suis désolée de vous interrompre. Votre temps de parole est écoulé, madame Svigir.
    Nous allons maintenant entendre Mme Lalonde.
    Madame Lalonde, vous disposerez de six minutes pour poser vos questions. Veuillez commencer.
    Je veux premièrement remercier tous nos merveilleux témoins qui sont ici aujourd'hui. Je tiens à répéter à quel point votre travail est extraordinaire et très difficile, je sais, et plus particulièrement parce que la COVID a une incidence sur tout votre personnel et vous. Au nom de ce comité, je veux vous remercier de tout ce que vous avez fait.
    Ma question s'adresse à vous trois, et j'aimerais certainement avoir cette conversation. C'est très lié au moment où vous travaillez avec vos clients. Avez-vous quelque chose à signaler concernant des obstacles récurrents auxquels se heurtent les nouveaux arrivants racialisés surtout et la façon dont IRCC peut éliminer ces barrières?
    Je peux commencer.
    Juste très brièvement, en ce qui concerne les obstacles récurrents, l'une des tendances récurrentes que nous avons constatées, bien entendu, pendant la pandémie de COVID, c'était un clivage entre les multiples ordres de gouvernement. Chaque fois que nous avons quelque chose qui vient d'IRCC, en raison de la façon dont notre système est construit en tant que fédération, il doit y avoir un lien très important avec les gouvernements provinciaux aussi. Lorsque ce n'est pas forcément le cas et qu'il n'y a pas autant de communication, cela peut devenir un problème de taille.
    En ce qui concerne les barrières, nous ne voyons pas suffisamment de soutiens linguistiques plus particulièrement pour les communautés de nouveaux arrivants et de personnes racialisées. De plus, il y a un manque d'infrastructure, comme je l'ai dit, et plus particulièrement lorsque les gens sont nouvellement arrivés et ne sont pas encore des résidents permanents, et ce, même si nous avons de multiples avenues et que nous savons qu'ils deviendront des résidents permanents.
    Je vais laisser le soin à mes collègues de poursuivre.
(1235)
    Je peux continuer.
    En ce qui concerne les barrières et les populations racialisées, notre agence peut ajouter le genre à la discussion. Je suis persuadée que Mme Filippi peut appuyer cela, et Mme Lee Yuen aussi, de toute évidence; elles offrent aussi des services aux femmes. Quand vous ajoutez ces trois éléments et les relier à la valeur de l'équité et de la justice, nous devrions les utiliser lorsque nous soutenons nos clients, tant dans les décisions en matière de financement que dans notre travail avec les clients directement, vous pouvez comprendre qu'il y a un énorme problème de quantité et de qualité dans le travail avec les immigrantes racialisées.
    Quand je parle de quantité, je parle de services qui existent et qui sont financés par IRCC plus particulièrement pour les femmes. Dans le même ordre d'idées, il y a le volet qualité, soit la valeur de l'équité et des services adaptés, depuis les services de garde à toutes sortes d'autres problèmes, y compris les problèmes de violence familiale avec lesquels nous devons traiter de plus en plus. Il y a le fait qu'il y a un nombre limité d'organisations qui existent pour fournir des services aux femmes les plus vulnérables qui sont également racialisées. Il y aussi la pleine compréhension de cette composante d'équité que chaque personne qu'IRCC amène au Canada devrait mériter et recevoir dans le cadre de son intégration réussie, ainsi que la façon dont cela a une incidence sur le bien-être de ces enfants que ces femmes élèvent pour devenir des citoyens responsables de ce pays.
    Cette question témoigne en soi d'un énorme manque d'attention à l'égard des questions de genre. À l'échelle mondiale, toutes les femmes et en particulier [difficultés techniques] sur les décisions de financement d'IRCC. Nous sommes probablement le plus grand organisme d'établissement axé sur le genre au Canada, et nous avons des tonnes de programmes de transition différents qui aident les femmes immigrantes à obtenir un emploi équitable. Nous avons offert les cadres de mesure des résultats de ces modèles de programmes — des modèles de programmes validés — à IRCC pour qu'il les diffuse dans tout le Canada, afin que tous les autres centres puissent utiliser ces programmes. Toutefois, très peu d'entre eux ont fait l'objet d'une réciprocité.
    Que pouvez-vous faire avec les 30 clients à qui vous offrez des services par l'entremise de l'un ou l'autre de ces programmes de transition où il y a 3 000 femmes qui devraient avoir accès à ces programmes, et ce, dans la ville de Calgary — sans compter les autres villes?
    Donc, la race et le genre sont des enjeux importants qui ont été très mal gérés par IRCC dans le passé.
    Je vais permettre à Mme Filippi de...
    Je suis d'accord.
    Ce qui nous préoccupe, c'est qu'il n'y a pas de données ventilées sur le financement des organismes pour les femmes au Canada. Nous les demandons à IRCC depuis deux ans — presque trois— , mais nous ne les avons toujours pas.
    Vous parlez des diverses conditions de financement... Par exemple, le plafond de financement de 15 % pour les frais administratifs d'une organisation ne permet pas d'aller bien loin lorsqu'on a un budget de 1 million de dollars, provenant d'une subvention. Les organisations qui disposent d'un budget de 10 millions de dollars pourront mieux administrer le contrat et servir les clients avec ce financement de 15 %.
    J'aimerais aussi vous parler du fossé numérique qui existe, surtout pour les femmes de ma collectivité qui ont un faible revenu. Nous offrons un accès à Internet haute vitesse pour des services offerts par l'entremise du programme de traitement des demandes, pour l'examen pour la citoyenneté, par exemple, et nous avons dû créer un...
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Filippi, mais le temps de Mme Lalonde est écoulé.
    Nous allons maintenant entendre M. Brunelle-Duceppe, qui dispose de six minutes.
    Allez‑y.

[Français]

    Merci infiniment, madame la présidente.
    Mesdames Lee Yuen, Svigir et Filippi, votre présence au Comité aujourd'hui est tellement importante. Ce que vous nous dites nous aidera à rédiger notre rapport et nos recommandations. Je suis extrêmement touché par ce que vous nous avez dit aujourd'hui.
    J'aimerais entendre vos commentaires à toutes les trois à propos de ce qui suit.
    IRCC nous dit qu'il y a des préjugés inconscients au sein du ministère. Or, êtes-vous d'accord que, si l'on veut s'attaquer aux racines du problème, il faut être capable de le nommer convenablement? Je vois une différence entre dire qu'il y a des préjugés inconscients et dire qu'il y a carrément du racisme et, comme vous nous l'avez dit, du sexisme au sein d'IRCC. Croyez-vous comme moi qu'il faut nommer ces choses?
(1240)

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup d'aborder la question, parce que je crois qu'il s'agit d'un problème. Souvent, dans la bonne société, on parle des préjugés inconscients. On parle de la compétence culturelle. On prononce toutes sortes de beaux mots de la sorte, mais dans les faits, selon le rapport Polaris et selon ce que nous avons entendu dans le cadre des conversations courantes avec le personnel d'IRCC et d'autres collègues, c'est qu'il y a bel et bien du racisme. La discrimination est bien réelle et si nous ne la nommons pas et que nous n'appliquons pas les mesures appropriées... C'est comme pour tout autre type d'action: si nous voulons changer les choses, il faut pouvoir parler à ces gens.
    Sur le plan de l'équité, nous ne demandons pas une représentation proportionnelle. Nous demandons une représentation équitable, ce qui signifie qu'il faut que la communauté des PANDC soit mieux représentée à tous les échelons. Il faut aussi — à mon humble avis — offrir plus de formation sur le racisme et aborder un problème que tous ont peur de nommer. Ce qui est intéressant, c'est que dans les années 1990, on n'avait pas peur d'en parler, mais aujourd'hui, plus personne ne veut parler du privilège blanc. Avant, on en parlait et on savait qu'il fallait aborder la question, mais aujourd'hui il est très difficile de le faire.
    Je suis très heureuse que vous me posiez cette question et je suis tout à fait d'accord avec vous.

[Français]

    J'aimerais entendre rapidement la réponse des autres témoins.
    Par la suite, je vous poserai une dernière question à tous les trois.

[Traduction]

    J'aimerais ajouter, très rapidement, que les préjugés inconscients sont un phénomène que nous devrions tous mieux connaître. Ils viennent d'un manque d'éducation et de compréhension à l'égard d'un enjeu. Certains d'entre nous sont mieux informés et plus expérimentés dans certains domaines, tandis que d'autres le sont moins.
    Le problème, c'est que la dernière entité du gouvernement du Canada qui devrait avoir le droit de tolérer les préjugés inconscients, c'est IRCC. Le ministère existe pour travailler avec nous, les membres du secteur de l'établissement, et avec tous les autres partenaires, pour offrir des services équitables aux nouveaux arrivants. Je dirais que le ministère fait bien son travail: il nous parle et nous pose des questions au sujet de nos expériences. J'aimerais croire qu'il tient compte de nos commentaires. Toutefois, les intervenants du ministère doivent assumer la responsabilité de leur manque de connaissances et du message qu'ils envoient dans ce rapport. La philosophie de base du Canada au sujet des nouveaux arrivants — équité et acceptation — réside dans la capacité de ces gens à comprendre la question, puisqu'ils prennent des décisions au sujet de millions de personnes qui arrivent au Canada au fil des années. Je ne crois pas qu'on puisse excuser une personne qui ne comprend pas bien le racisme, la discrimination, le sexisme et les problèmes de genre associés à l'immigration, ou les avantages de l'immigration pour bâtir le pays et répondre aux besoins du marché du travail.
    L'immigration est essentielle au pays. Au cours du troisième trimestre de 2020, il n'y a eu aucune croissance de la population au Canada. Les personnes qui prennent des décisions difficiles en matière d'immigration ne peuvent accepter les préjugés.

[Français]

    Je crois que mon temps de parole est presque écoulé, mais, puisque vous n'avez pas eu le temps de répondre, madame Filippi, je vais vous poser une autre question directement.
    Séance après séance, on nous dit qu'il y a un énorme manque de transparence au sein de ce ministère. À ce manque de transparence s'ajoutent du racisme et du sexisme au sein d'IRCC. N'est-ce pas une combinaison désastreuse pour les personnes immigrantes?
(1245)

[Traduction]

    Tout à fait. C'est désastreux. Il y a un manque de transparence dans l'affectation des fonds, ce qui entraîne des conséquences désastreuses sur les communautés, puisqu'elles sont servies par des organisations qui manquent de ressources. Je crois qu'il faut reconnaître ce lien. On vous souhaite la bienvenue dans un Canada ouvert et multiculturel, mais ensuite la réalité vous frappe et on vous traite différemment. C'est alors que vous remettez en question la dynamique du pays et que vous vous demandez si vous avez pris la bonne décision...
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Filippi. M. Brunelle-Duceppe n'a plus de temps.
    Nous allons maintenant entendre Mme Kwan.
    Madame Kwan, vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins pour leur discours et pour le travail qu'ils font dans nos communautés.
    J'aimerais aborder le sujet du traitement défavorable, du racisme institutionnalisé et du racisme explicite au sein d'IRCC. Croyez-vous que ces enjeux se reflètent dans les politiques du ministère?
    Par exemple, bon nombre de personnes voient leur demande rejetée parce qu'on pense qu'elles ne retourneront pas dans leur pays. À ce titre, certains pays présentent des taux de refus très élevés, comme les pays d'Afrique et les pays du Sud.
    Croyez-vous que le racisme institutionnalisé, le racisme implicite et le racisme explicite sont reflétés dans ces politiques et entraînent de tels résultats? Ma question s'adresse à tous les témoins.
    Mme Filippi pourrait répondre en premier cette fois‑ci.
    D'accord. Merci.
    Oui, c'est préoccupant. Nous savons que le racisme existe. Nous l'avons vu à maintes reprises. Nous avons des études qui le démontrent. Le personnel d'IRCC a fait valoir que c'était un problème, mais nous n'avons pas réussi à l'aborder. Comment pouvons-nous nous attaquer au problème?
    Certaines personnes ont vu leur demande de visa pour rendre visite à un proche mourant refusée parce qu'IRCC craignait qu'elles ne retournent pas dans leur pays ou qu'elles présentent une demande dans un bureau intérieur afin d'obtenir le statut de réfugié, ou encore qu'elles disparaissent dans le système d'une quelconque façon.
    Je crois que la situation est très grave lorsque des proches veulent prendre soin d'une personne malade ici au Canada et ont besoin de notre soutien pour le faire, mais se font refuser un visa ou l'entrée au pays. Cela nous inquiète. Le problème est amplifié lorsqu'une demande est refusée et qu'il faut transmettre plus de données. Nous avons parlé des tests d'ADN et des cotes de sécurité. Parfois, le bureau d'immigration se trouve très loin et les gens doivent parcourir de longues distances pour y accéder et faire avancer leur demande.
    Tous ces éléments entrent en jeu. Aussi, certains pays n'ont pas accès à Internet alors oui, les communautés racialisées où le revenu est faible sont touchées de façon disproportionnée par ces problèmes. La situation nous préoccupe grandement. En tant que femmes, nous savons qu'il est important de pouvoir soutenir notre famille. L'absence de ces systèmes de soutien crée des problèmes familiaux et sociétaux supplémentaires ici au Canada, et dans les pays d'origine.
    Allez‑y, madame Svigir.
    J'aimerais ajouter quelque chose.
    La notion de politiques est très importante, parce qu'elles nous touchent tous, n'est‑ce pas? Les politiques orientent les décisions en matière de financement, et aussi la mise en œuvre de ce financement pour nous tous.
    Toutefois, le monde n'est pas noir ou blanc, et c'est peut-être malheureux... Les mariages et les funérailles ne font pas partie de notre quotidien. Il y a parfois des événements complexes qui affectent notre vie; les politiques relatives aux populations vulnérables devraient toujours être évaluées en fonction du nombre d'exceptions sensées — à défaut de trouver un terme plus juste — qui vont évidemment se présenter lorsqu'on travaille avec des humains.
    Lorsque je pense à la notion de TI et au traitement des demandes, et à tout ce qui a trait aux populations vulnérables... Certaines femmes qui viennent à nous n'ont jamais tenu de crayon dans leur main et nous sommes responsables, en tant qu'organismes, de les aider à faire la transition... [difficultés techniques]... vie au Canada. Donc, parfois, les exceptions aux politiques devraient correspondre à notre capacité de comprendre la vie qui nous entoure, et les politiciens qui occupent des postes élevés devraient songer à l'acceptation lorsqu'ils rédigent ces politiques.
    Le secteur de l'établissement existe parce que le gouvernement ne peut pas servir tous les nouveaux arrivants qu'il accepte au Canada. C'est la raison pour laquelle il achète nos services, qui sont équitables, adaptés à la culture, axés sur les immigrants et fondés sur la compréhension. Ainsi, les gens qui ont besoin d'un soutien adapté peuvent l'obtenir.
    Les politiques doivent se fonder sur les connaissances et la compréhension du sujet. Le contexte est très large et le gouvernement comprend qu'il doit se fier à nos conseils, à l'ensemble de...
(1250)
    Je suis désolée de vous interrompre. Il ne me reste qu'une minute et je veux vraiment aller au cœur de la question. Maintenant que nous avons établi qu'il y avait un problème de politiques et de discrimination au sein d'IRCC, que pouvons-nous faire pour y remédier? Que devons-nous faire?
    Est‑ce qu'on devrait nommer un ombudsman qui examinera les politiques gouvernementales dans le but de s'attaquer au racisme à IRCC? J'aimerais obtenir un oui ou un non, rapidement, de la part des trois témoins.
    Oui, tout à fait.
    Oui, absolument. Je suis d'accord.
    Oui. C'était l'une de mes recommandations. L'ombudsman serait une excellente ressource.
    Merci.
    Merci, madame Kwan.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions. Étant donné le temps qu'il nous reste, M. Benzen et M. Ali disposeront de trois minutes chacun, et M. Brunelle-Duceppe et Mme Kwan disposeront d'une minute et demie.
    Monsieur Benzen, vous disposez de trois minutes. Allez‑y.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins pour leur présence avec nous aujourd'hui et pour leur excellent travail.
    Nous avons eu une conversation intéressante. J'aimerais discuter davantage de l'équilibre entre les ressources humaines et la technologie. On parle d'immigration, et nous savons qu'il n'y a pas suffisamment de ressources humaines. Dans certains cas, ces ressources ont un parti pris. Ainsi, on introduit la technologie pour nous aider et accélérer le traitement des dossiers, en se disant qu'elle ne sera pas biaisée. On peut présenter une demande en ligne. On a recours à l'intelligence artificielle, mais nous avons appris aujourd'hui qu'elle peut elle aussi être altérée. Ce n'est pas parfait. Il y a toujours un certain biais.
    Comment pouvons-nous atteindre le bon équilibre entre les ressources humaines et la technologie pour éliminer tous les préjugés en matière d'immigration? J'aimerais entendre le point de vue de nos trois témoins à ce sujet.
    Ce sont des humains qui élaborent les questions. Il faut donc exercer un contrôle et nous demander s'il y a des préjugés inhérents à la façon dont nous posons la question ou aux mots qui sont utilisés dans le cadre de la question. Nous devons aussi nous assurer que la question nous permet d'obtenir les réponses que nous cherchons. Il faut parler aux membres du personnel d'IRCC et aux communautés qui sont racialisés, par l'entremise de groupes de discussion et leur dire: « Voici notre intention. Est‑ce qu'elle est bien véhiculée dans la question? » Je crois qu'il faut se pencher là‑dessus. Peut-être que certains mots, dans un certain contexte, donnent lieu à des préjugés inhérents que nous ne percevons pas, parce que nous avons une position privilégiée, comparativement à une autre personne qui pourrait ne pas comprendre la question de la même façon.
    Je vais vous donner un exemple. Lorsque nous parlons du formulaire de demande — intake en anglais —, certains de nos clients pensent que nous voulons leur faire ingérer quelque chose; les faire manger. Je dois leur expliquer qu'il s'agit d'un formulaire énonçant qu'ils comprennent que nous allons recueillir des données. Parfois, les mots n'ont pas la même signification d'une culture à l'autre, au‑delà de la langue. Ainsi, notre compréhension du système ou du secteur peut être différente de celle des autres. C'est un exemple simple, mais clair de la façon dont le message peut être difficile à traduire parfois.
(1255)
    J'aimerais ajouter quelque chose. Je crois qu'avant tout, il faut songer à l'intention. Ce qui est déconcertant pour bon nombre d'entre nous, c'est qu'il nous manque de gens pour prospérer au Canada, mais nous érigeons tellement d'obstacles pour ceux qui veulent vivre et travailler ici... Pourquoi?
    Je crois qu'une partie des préjugés est associée aux humains qui rédigent les questions. Il faut tenir compte de l'intention générale des questions. Est‑ce que nous tentons de bâtir une communauté prospère ou d'empêcher les gens d'entrer? Souvent, avec toutes ces règles, on rejette plus de personnes qu'on en accueille, alors que notre intention première est d'accepter les gens qui veulent venir au pays.
    Il semble que le système se concentre davantage sur la capture. Il se concentre sur le négatif plutôt que sur le positif. C'est inquiétant de voir la quantité d'énergie investie dans ce but plutôt que dans son contraire.
    Une voix: Oui. Est‑ce que le pays…
    Je suis désolée, mais le temps imparti à M. Benzen est écoulé.
    Monsieur Ali, vous avez trois minutes pour votre série de questions. Vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente. Par votre entremise, j'aimerais remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Ma [difficultés techniques] approfondir votre recommandation au sujet d'un ombudsman. En quoi cela différerait‑il du processus offert aux clients par la Cour fédérale? Pouvez-vous citer un autre exemple au sein des gouvernements provinciaux ou du gouvernement fédéral où il existe un ombudsman dont le rôle est similaire à celui que vous recommandez?
    Certainement. Je pense que cela évite, tout d'abord, un long processus à la fois pour le client et pour le gouvernement. De plus, c'est un organisme indépendant. Il est difficile de mener un examen indépendant au sein du ministère, et il est difficile de justifier l'absence d'un examen indépendant, étant donné les circonstances et les interrelations entre le personnel, les superviseurs, le gouvernement et ainsi de suite dans le système. Je pense donc que nous pouvons envisager quelque chose comme l'ombudsman des droits de la personne de l'Ontario, par exemple. Il y a même un ombudsman dans la ville de Toronto.
    Nous créerions des mandats à différents niveaux pour déterminer à quoi ressemblerait la surveillance exercée. Cela aidera certainement à convaincre davantage la communauté que le système et l'examen sont impartiaux et que les gens seront entendus équitablement, au lieu d'être entendus au sein d'un ministère et de craindre les préjugés et les résultats déterminés à l'avance. En résumé, il est tout à fait possible d'avoir un ombudsman indépendant, et il serait très facile pour le Canada d'adopter cette approche et d'envisager une surveillance et des paramètres en ce qui concerne les pratiques discriminatoires déjà en cours.
    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant m'adresser aux trois témoins. Vous avez chacune des décennies d'expérience dans l'offre de services d'établissement aux nouvelles arrivantes. Pourriez-vous nous donner une idée des changements que vous avez connus dans votre capacité à offrir ces services au cours de ces décennies? Y a‑t‑il des trajectoires de changement positif que nous pouvons aider à mesurer?
    Je peux vous faire part de mes réflexions sur le sujet. J'ai mentionné que nous sommes probablement le plus grand organisme d'établissement au Canada. Il y a 15 ans, la capacité de la CIWA — manifestement, elle est toujours définie par le budget — était de 1,5 million de dollars. Nous profitons maintenant d'un financement de presque 19 millions de dollars. Nous sommes donc un exemple concret de la façon dont IRCC a merveilleusement bien compris ce type d'investissement et les avantages qui en découlent pour les femmes immigrantes.
    Toutefois, nous ne sommes qu'une minuscule composante dans l'ensemble du pays et cette composante devrait être multipliée au centuple. En effet, il devrait y avoir 100 organismes qui font ce travail au pays, et de nombreux organismes le font. Donc, pour un échantillon de l'investissement, je suis certaine qu'IRCC pourrait examiner tous les organismes pour les femmes au Canada afin d'obtenir des données désagrégées et constater les avantages qui en découlent. En fait, nous avons mené des études longitudinales à ce sujet, et elles ont été citées dans le monde entier.
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Svigir, mais le temps de M. Ali est écoulé.
    Nous allons maintenant entendre M. Brunelle-Duceppe. Il a une minute et demie.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Chères témoins, permettez-moi de vous dire que vous avez été exceptionnelles. Merci beaucoup.
    Je vais vous laisser le mot de la fin pour nous dire quelle serait votre priorité absolue.
    Commençons par Mme Lee Yuen, puis Mme Filippi et Mme Svigir pourront répondre à leur tour.
(1300)

[Traduction]

    Il s'agit de mettre fin à la discrimination entre les niveaux d'immigration, entre les résidents temporaires et les demandeurs d'asile par rapport aux résidents permanents, car notre financement nous permet seulement de servir les résidents permanents, ce qui ne nous aide pas à couvrir l'ensemble du spectre.

[Français]

    Je vous remercie.
    Qu'en est-il pour vous, madame Filippi?

[Traduction]

    Si vous parlez de notre situation au sein d'IRCC — et je suis d'accord avec Mme Lee Yuen —, je recommanderais de mener un examen complet sur l'équité raciale au sein du système d’immigration et de protection des réfugiés du Canada, y compris les lois, les règlements, les politiques et les pratiques, et la façon dont ces notions s'appliquent à tous les niveaux au sein d'IRCC, et pas seulement dans un ministère.

[Français]

    Merci beaucoup. Vous avez respecté parfaitement la limite de temps, soit dit en passant.
    Quelle serait votre priorité à vous, madame Svigir?

[Traduction]

    Je suis d'accord avec les déclarations de Mme Lee Yuen et de Mme Filippi. La discrimination raciale conjuguée à la discrimination sexuelle a toujours été notre priorité et cela le sera toujours. Nous voulons que le Canada se montre attentif aux femmes immigrantes racialisées qui arrivent au pays.
    Le temps de M. Brunelle-Duceppe est écoulé. La parole est maintenant à Mme Kwan, qui posera la dernière série de questions à ce groupe de témoins.
    Madame Kwan, vous avez une minute et demie. Vous avez la parole.
    Madame Yuen, vous avez commencé votre déclaration préliminaire aujourd'hui en parlant des différents traitements accordés par le gouvernement dans le cas des mesures spéciales en matière d'immigration pour les personnes qui sont en crise ou qui font face à une crise humanitaire.
    Le gouvernement devrait‑il aussi offrir les mesures spéciales en matière d'immigration qu'il a offertes aux Ukrainiens aux personnes qui viennent d'autres pays et qui font également face à des crises humanitaires, comme l'Afghanistan, Hong Kong, la Syrie, etc., et élargir la portée des mesures en matière d'immigration pour permettre le parrainage de la famille élargie et les demandes de visa spécial pour les personnes qui viennent de ces autres régions?
    J'aimerais d'abord entendre la réponse de Mme Yuen.
    Oui, certainement. Le gouvernement devrait incontestablement faire cela. C'est l'une de nos recommandations les plus importantes. Nous appuyons entièrement cette idée, à condition que les gens ne viennent pas à titre de résidents temporaires sans avoir la possibilité de devenir très rapidement des résidents permanents une fois qu'ils sont ici. En effet, dans la situation actuelle, IRCC ne nous fournira pas le financement nécessaire pour soutenir les personnes qui ne sont pas des résidents permanents.
    Nous pouvons faire venir toutes ces personnes déplacées, mais aucun organisme d'établissement n'est en mesure de leur fournir des services. C'est une énorme rupture dans le système.
    Madame Fatima Filippi, veuillez répondre à la même question, s'il vous plaît.
    Oui. Pensez à ce qui se passe au Yémen, par exemple. Une guerre y fait rage depuis des lustres, mais on ne laisse pas entrer les gens qui viennent de ce pays. Nous avons des réfugiés afghans déplacés au Pakistan qui font face à d'énormes difficultés pour présenter leurs demandes, et elles ne sont même pas approuvées au bout du compte, même si ces gens ont trouvé un refuge sécuritaire à l'extérieur de l'Afghanistan.
    Nous comprenons que les aéroports de ces régions ne sont pas aussi accessibles en ce moment qu'ils peuvent l'être en Ukraine, mais on n'offre pas les mêmes possibilités aux ressortissants d'autres pays qui ont la possibilité de quitter les lieux.
    Nous devons donc nous pencher sur cette question et créer des possibilités de soutenir ces gens lorsqu'ils arrivent ici.
    Je suis désolée de vous interrompre, madame Filippi, mais le temps est écoulé.
    Je vous remercie sincèrement d'avoir comparu devant le Comité et de nous avoir fait part de vos recommandations et de vos réflexions, car elles sont très importantes. Au nom de tous les membres du Comité, je tiens à vous remercier de tout le travail que vous faites pour les nouveaux immigrants, et en particulier pour les femmes marginalisées.
    Avant de terminer, si des témoins souhaitent formuler des recommandations ou ajouter quelque chose à leurs témoignages pendant que nous poursuivons notre étude, elles peuvent les envoyer par écrit à la greffière du Comité. Ces renseignements seront ensuite communiqués à tous les membres du Comité.
    C'est ce qui met fin à la réunion d'aujourd'hui. Le Comité souhaite‑t‑il lever la séance?
    Des députés: Oui.
    La présidente: La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU