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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 068 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 15 mai 2023

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 68e réunion du Comité permanent des pêches et des océans.
    Cette réunion se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre daté du 23 juin 2022. La séance d'aujourd'hui se déroulera en public pour l'audition des témoignages. Par la suite, nous passerons à huis clos pour les 45 dernières minutes.
    Je vous rappelle de bien vouloir adresser vos commentaires à la présidence. Les captures d'écran ou la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées. Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins, j'informe le Comité que tous les témoins ont effectué le test de connexion requis avant la réunion.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 20 janvier 2022, le Comité poursuit son étude sur les investissements étrangers et la concentration des entreprises en matière de permis et de quotas de pêche.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins que nous entendrons pendant un peu plus d'une heure.
    Claudio Bernatchez, directeur général de l'Association des capitaines-propriétaires de la Gaspésie, témoignera par vidéoconférence. Nous entendrons également Carey Bonnell, vice-président de la Durabilité et engagement d'Ocean Choice International, ainsi que les représentants de la P.E.I. Fishermen's Association, Molly Aylward, directrice exécutive, et Ian MacPherson, conseiller principal, sans oublier Colin Sproul, président de la Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association.
    Nous allons commencer par les déclarations. Chaque témoin disposera de cinq minutes.
    Monsieur Bernatchez, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Mesdames et messieurs membres du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes, bonjour.
    Je vous remercie de m'avoir invité à participer à votre étude.
    Je m'appelle Claudio Bernatchez, directeur général de l'Association des capitaines-propriétaires de la Gaspésie depuis 2020. Nos bureaux se trouvent à Rivière‑au‑Renard, capitale des pêches maritimes du Québec.
    Il y a plusieurs façons d'aborder le concept de propriété étrangère. Sur le plan des captures, les permis d'entreprise peuvent être entièrement transférés d'une province à une autre. Ils ont aussi la particularité de pouvoir être cédés à des intérêts étrangers jusqu'à concurrence de 49 % des permis. Ainsi, il serait facile de penser que les détenteurs canadiens de 51 % des permis peuvent recevoir de l'aide ou encore travailler sous le contrôle des détenteurs étrangers de 49 % des permis. Pour le moment, nous ne savons pas si de telles transactions ont été effectuées dans notre région.
    En ce qui a trait aux usines de transformation, la propriété étrangère est déjà présente dans deux usines de transformation de crevettes dans l'Est du Québec. C'est évident dans le cas de la première, puisqu'elle arbore le pavillon danois, alors que c'est plus subtil dans le cas de la deuxième, puisqu'il s'agit d'un entrepreneur terre-neuvien soutenu par un fonds d'investissement américain. De plus, la première a obtenu un permis de transformation du crabe des neiges du Québec et un permis de transformation du homard provenant de l'extérieur du Québec. La deuxième tenterait d'en faire autant. On voit donc que, lorsque la porte est entrouverte, une usine de propriété étrangère peut élargir ses activités en sol canadien, d'autant plus que la transformation est de compétence provinciale.
    Même si je souscris aux principes de la libre entreprise, je demeure convaincu que les ressources halieutiques des eaux canadiennes doivent servir d'abord les intérêts canadiens, et surtout ceux des habitants des nombreuses communautés côtières, qui dépendent depuis toujours des ressources de la mer comme moyen de subsistance et comme levier de développement. C'est à se demander, parfois, si les ressources halieutiques appartiennent vraiment à l'ensemble des Canadiens. Je prends comme exemple la proportion importante des quotas de pêche commerciale qui appartiennent aux grandes entreprises. Comment se fait-il que nos décideurs fassent fi de cette réalité lors de l'attribution de nouveaux quotas?
    En me préparant à vous rencontrer, je me suis mis à penser à certains mécanismes mis en place par d'autres pays qui exercent aussi un contrôle sur les activités de pêche au Canada.
    Je pense notamment aux restrictions imposées par nos voisins du Sud concernant la protection des mammifères marins, telle la baleine noire de l'Atlantique Nord. Il y a aussi la pêche au maquereau, qui est sous moratoire depuis l'an dernier. Comment se fait-il que les Américains puissent encore le pêcher, alors qu'il est reconnu que c'est en bonne partie le même stock de poisson que celui qu'on retrouve dans le golfe du Saint‑Laurent?
    Par ailleurs, une actrice française est venue nous dire que nous ne devions plus chasser le phoque. On l'a écoutée. Plusieurs décennies après, le ministère des Pêches et des Océans commence à reconnaître, du bout des lèvres, le déséquilibre causé par la surabondance du phoque. Pendant ce temps, l'industrie canadienne des pêches en paie chèrement le prix.
    Parlons maintenant de la concentration des permis. Il faut de l'argent pour gagner de l'argent. On le constate de plus en plus, alors que des permis de pêche se vendent à des prix exorbitants. Les vendeurs savent à qui s'adresser lorsque vient le temps de se départir de leurs permis. Le pêcheur moyen ne peut simplement pas faire concurrence à ceux qui ont des capacités financières plus importantes. Ceux qui s'y risquent se retrouvent parfois dans une situation économique vulnérable. Imaginez alors le mur auquel se heurtent les aspirants propriétaires qui seraient tentés de prendre la relève d'une entreprise de pêche existante.
    La concentration qui se forme représentera un risque au moment où les détenteurs de portefeuilles de permis bien garnis seront prêts à en vendre. On pourra alors voir des intérêts étrangers se manifester pour prendre le contrôle de ces quotas. On pourra également s'attendre à voir des acquéreurs obtenir le soutien financier d'un transformateur pour acquérir un ou plusieurs permis, ce qui, en soi, constitue une entente de contrôle. Il arrive encore aujourd'hui qu'un pêcheur confie la gestion financière de son entreprise à l'usine qui achète son poisson.
    La concentration des permis peut, dans certains cas, contribuer à éloigner le détenteur des activités de pêche, car il ne peut être partout à la fois. Cela peut contribuer à favoriser une culture de résultats à bord des navires de pêche, ce qui augmente les risques d'accident.
    En conclusion, plusieurs facteurs sont perçus comme des menaces pour l'industrie canadienne des pêches commerciales. La propriété étrangère et la concentration des permis en sont deux exemples, mais il y en a d'autres, et elles sont plus près de nous. Nous devons amorcer, d'une part, une réflexion sur une gestion intégrée, qui simplifierait les différentes réglementations en vigueur, et d'autre part, ce qui est encore plus important, une réflexion sur une approche écosystémique en collaboration avec le Secteur des sciences et des ressources du ministère des Pêches et des Océans.

  (1105)  

     Celui-ci doit cesser d'annoncer des moratoires juste avant le début des saisons de pêche. Ces annonces ont des conséquences trop importantes pour qu'on ne s'y prépare pas. Il y en a eu plusieurs, ces dernières années. Nous craignons que le prochain moratoire porte sur la crevette nordique. Pourtant, le sébaste consomme environ 14 fois le quota qui est permis cette année.

[Traduction]

    Monsieur Bernatchez, votre temps de parole est échu. Je dois vous arrêter là. Avec un peu de chance, vous aurez l'occasion de transmettre les informations qu'il vous restait pendant les séries de questions et réponses.
    Au tour maintenant de M. Sproul, qui aura cinq minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de nous donner l'occasion de nous exprimer. Je comparais devant vous aujourd'hui au nom de la Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association, dont je suis le président.
    Nous représentons depuis 28 ans les familles de pêcheurs propriétaires-exploitants sur les côtes de la baie de Fundy, en Nouvelle-Écosse. Notre groupe a une fière tradition de la promotion des pratiques de pêche durable et de la gestion communautaire des pêches. Avec le temps, notre engagement à l'égard de l'utilisation responsable des ressources nous a amenés à établir des partenariats avec de nombreux groupes du milieu universitaire et du milieu de la conservation. Nous avons toujours coopéré avec les gouvernements et les organismes de réglementation à tous les niveaux, ce qui nous a valu la réputation d'allié précieux dans la défense des océans. Nos membres sont fiers de ce travail et sont déterminés à préserver notre mode de vie pour les générations futures de Néo-Écossais.
    La concentration des entreprises et les investissements étrangers sont les deux faces du même problème auquel sont confrontées les collectivités côtières du Canada. C'est le conflit entre, d'une part, les moyennes et grandes entreprises qui ne cherchent qu'à tirer de plus en plus de profits des ressources publiques et, d'autre part, le devoir du gouvernement de protéger les intérêts des familles de pêcheurs, des familles dont l'existence dépend de ces mêmes ressources.
    Les principaux problèmes à cet égard sont la concentration de la capacité de transformation du homard chez des acteurs dont le nombre va en décroissant et l'achat illégal de permis de pêche au homard par des sociétés en dehors du cadre de propriétaire-exploitant que nos membres respectent.
    La question qu'il faut se poser est la suivante: pourquoi les pêcheurs seraient-ils préoccupés par les changements de propriété chez les transformateurs indépendants de homard des Maritimes? La réponse mérite l'attention du gouvernement, car il y va de l'intérêt des collectivités de pêcheurs.
    Lorsque les pêcheurs vendent leurs prises de homard ce soir sur les quais de la Nouvelle-Écosse, que ce soit à Yarmouth, à Sydney, à Digby ou à Lunenburg, ils peuvent tous s'attendre à recevoir le même prix. Mais dans un contexte de libre marché, comment cela se fait‑il? De toute évidence, quelqu'un ou un groupe quelconque fixe ce prix. Si ce n'était pas le cas, les pêcheurs verraient des variations dans le prix de leurs prises, en fonction des pressions normales de l'offre et de la demande exercées par de nombreux exportateurs différents. Ils font plutôt face à un effort concerté pour contrôler les prix au quai.
    Ces actions doivent constituer une violation de la Loi fédérale sur la concurrence et peuvent constituer un cartel. Le paragraphe 45(1) de la loi dit ceci: « Comment une infraction quiconque, avec une personne qui est son concurrent à l’égard d’un produit, complote ou conclut un accord ou un arrangement [...] pour fixer [...] le prix [...] du produit ».
    Les pêcheurs reconnaissent que les marchés du homard sont à la base le reflet de la demande des consommateurs, mais ils reconnaissent également la pression baissière de cette collusion sur les prix du homard. Les pêcheurs ne peuvent pas ignorer le message flagrant envoyé par la fixation des prix dans toute la région.
    Après avoir souffert pendant des décennies dans ce système, on craint de plus en plus dans nos collectivités que les choses empirent à la suite d'une vague d'acquisitions dans le secteur de la transformation par des méga-entreprises de distribution alimentaire, tant étrangères que nationales.
    La deuxième façon dont les grandes entreprises menacent les intérêts des collectivités de pêcheurs, c'est en essayant d'intégrer verticalement l'industrie du homard au moyen de permis de pêche achetés de façon illégale. Ces entreprises cherchent à avoir accès au homard à bas prix et excluent les familles de pêcheurs dans l'espoir d'obtenir un avantage injuste et rentable.
    Bien que le ministère des Pêches et des Océans et le gouvernement aient réalisé d'importants progrès à cet égard récemment au moyen de modifications à la Loi sur les pêches, les résolutions proposées par le ministère sont simplistes, ne tiennent pas compte des énormes possibilités de réconciliation et pourraient, au bout du compte, causer du tort aux collectivités côtières.
    Plus précisément, le plan du ministère de mettre fin aux permis de pêche au homard achetés par ces entreprises, qui a certes un effet dissuasif, constitue une orientation stratégique qui nuira aux perspectives de nouveaux arrivants dans le secteur de la pêche que les modifications à la loi étaient censées favoriser.
    Il semble également illogique que le ministère ne tienne pas compte de la possibilité d'intégrer les titulaires de droits découlant de l'arrêt Marshall aux pêches de l'Atlantique, d'autant plus que le MPO continue d'exproprier l'accès à d'autres espèces sans compensation, de déplacer arbitrairement l'accès au homard d'une zone à une autre au mépris de son propre plan de gestion intégrée des pêches et de faire des déclarations inquiétantes au sujet de l'expropriation dans le secteur de la pêche au homard.
    Ces différends ne seront résolus que par une collaboration de bonne foi entre le gouvernement et les familles de pêcheurs du Canada. Les organismes de réglementation doivent reconnaître que les petits utilisateurs des ressources canadiennes méritent une attention particulière, compte tenu des avantages économiques et culturels énormes, mais diffus, qu'ils procurent à nos collectivités.
    Mesdames et messieurs, merci beaucoup. Je suis disposé à répondre à vos questions.

  (1110)  

    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer à M. Bonnell, qui disposera de cinq minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, bonjour. Merci de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité permanent des pêches et des océans.
    Je représente aujourd'hui Ocean Choice International.
    Ocean Choice est une entreprise familiale de Terre‑Neuve‑et‑Labrador spécialisée dans les fruits de mer. Elle a été fondée il y a plus de 20 ans par les frères Martin et Blaine Sullivan, de la côte Sud, une région de la province dans laquelle l'industrie de la pêche est bien établie.
    Aujourd'hui, Ocean Choice est une entreprise mondiale de produits de la mer verticalement intégrée de la mer à l'assiette. Nous exploitons cinq installations de transformation dans des collectivités côtières rurales, où nous transformons des produits de la mer de haute qualité que nous achetons d'environ 1 900 pêcheurs côtiers indépendants.
    Nous possédons et exploitons également une flotte de navires hauturiers qui capturent et transforment les espèces pêchées dans le respect des quotas auxquels nous avons accès.
    Depuis son siège social à St. John's, à Terre-Neuve, Ocean Choice a établi une forte présence mondiale en établissant son propre réseau de vente international avec des bureaux partout au Canada, aux États-Unis, en Europe — plus précisément au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Italie —, ainsi qu'en Chine et au Japon. Notre équipe des ventes mondiales vend fièrement les fruits de mer de grande qualité du Canada à plus de 30 pays dans le monde.
    Grâce à ces activités, nous employons environ 1 700 personnes provenant de plus de 300 collectivités de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Nous prenons très au sérieux nos responsabilités envers les gens et les collectivités qui comptent sur nous. C'est ce qui motive nos décisions d'investissement et notre planification à long terme.
    Au cours des dernières années, nous nous sommes engagés à investir plus de 100 millions de dollars dans le secteur des fruits de mer dans tout le Canada atlantique. C'est ce que font les entreprises familiales prospères dans le secteur des fruits de mer au Canada. Elles réinvestissent.
    Comme notre entreprise dépend entièrement de la santé des océans, la durabilité est au coeur de tout ce que nous faisons. Nous sommes responsables de livrer l'une des dernières sources de protéines sauvages au monde et nous devons nous assurer qu'elle est toujours disponible. C'est pourquoi plus de 90 % des espèces que nous pêchons sont issues de pêches certifiées conformes à la norme d'excellence du Marine Stewardship Council ou d'un solide programme d'amélioration des pêches.
    Nous comprenons et respectons l'immense valeur et le rôle que jouent tous les secteurs pour créer de la valeur pour les pêches du Canada et les économies locales qui dépendent de la pêche. Tous les acteurs — petits, moyens et grands — sont nécessaires pour assurer une pêche équilibrée qui peut rapporter le plus de bénéfices au Canada.
    Il est décevant de constater que nos employés et notre entreprise sont continuellement ciblés simplement parce que nous sommes l'une des plus grandes entreprises de produits de la mer de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Nos 1 700 employés travaillent fort en mer et sur terre, bon nombre d'entre eux à longueur d'année, pour bâtir une pêche durable et prospère pour l'avenir de Terre‑Neuve‑et‑Labrador et de la région en général.
    Ocean Choice croit en l'avenir de notre entreprise et de notre région, ici, dans la province de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. C'est un avenir qui exige une vision. Il faut de la planification et de l'engagement.
    Nous faisons aujourd'hui des investissements qui soutiendront une pêche prospère et durable pour les générations à venir. Nous avons beaucoup investi dans les pêches, qu'il s'agisse de payer la juste valeur marchande pour chaque livre de quota à laquelle nous avons accès, de développer des marchés pour nous assurer de payer le meilleur prix possible pour les fruits de mer de grande qualité du Canada ou d'investir dans de nouvelles technologies de pointe pour moderniser l'industrie de la pêche.
    Le MV Calvert en est un excellent exemple. Responsable de la création de 70 nouveaux emplois à temps plein toute l'année à Terre‑Neuve‑et‑Labrador, le Calvert est le premier nouveau navire canadien de pêche hauturière du poisson de fond à se joindre au secteur de la pêche hauturière depuis les années 1980. Outre les emplois directs, le Calvert génère des millions de dollars en salaires annuels et en retombées économiques pour les habitants, les entreprises et l'industrie de Terre‑Neuve‑et‑Labrador.
    Comme je l'ai déjà mentionné, Ocean Choice exploite une flotte de cinq navires, et nous nous associons également à 1 900 pêcheurs côtiers indépendants. Chacune de ces entreprises représente environ 50 % de nos activités. Il est évident à nos yeux que tous les secteurs de l'industrie ont un rôle à jouer.
    Il est essentiel d'améliorer la collaboration au sein de l'industrie de la pêche pour en arriver à une pêche plus durable, équitable et efficace qui profitera à tout le monde. Une responsabilité partagée entre le secteur de la pêche, les travailleurs d'usine, les transformateurs, les gouvernements, les syndicats et les autres intervenants du secteur est nécessaire pour que Terre‑Neuve‑et‑Labrador continue d'avoir une industrie locale prospère et concurrentielle sur la scène mondiale.
    Je tiens à réaffirmer, aux fins de votre étude, que nous sommes une entreprise détenue et exploitée à 100 % par des Canadiens et que nous respectons pleinement la politique gouvernementale en ce qui concerne l'indépendance de la flotte côtière dans le Canada atlantique.
    J'espère que ma déclaration et les observations que je ferai par la suite aujourd'hui auront transmis le message que nous sommes une fière entreprise de fruits de mer de Terre‑Neuve‑et‑Labrador qui crée beaucoup d'emplois et de valeur dans les collectivités côtières où nous exerçons nos activités et que nous soutenons. Nous sommes optimistes quant à l'avenir du secteur des fruits de mer en tant que produit durable sur le plan environnemental, avec des avantages bien documentés pour la santé et une demande mondiale qui devrait augmenter considérablement au cours de la prochaine décennie et au‑delà.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de faire une déclaration. Je suis prêt à répondre aux questions et aux observations du Comité.

  (1115)  

    Merci, monsieur Bonnell.
    Au tour maintenant de la P.E.I. Fishermen's Association. Vous aurez cinq minutes pour faire une déclaration, que ce soit l'un ou l'autre d'entre vous ou tous les deux.
    M. MacPherson et moi-même ferons la déclaration. Ce sera moi d'abord, et mon collègue prononcera la conclusion. Merci.
    Au nom de la Prince Edward Island Fishermen's Association, j'aimerais remercier le président et le Comité de nous donner la possibilité de réagir encore une fois au problème qui concerne notre communauté de pêcheurs.
    Notre organisation représente plus de 1 250 capitaines sur des questions importantes qui ont une incidence sur le gagne-pain et l'avenir des pêcheurs. Aujourd'hui, nous sommes saisis de la question des investissements étrangers et de la concentration des entreprises en matière de permis et de quotas de pêche.
    Nous comprenons tous que les industries doivent changer et évoluer afin de répondre aux exigences des clients, que ce soit à bord d'un navire, dans l'usine, au magasin ou au restaurant. Nous comprenons qu'au fur et à mesure que les techniques de transport et de réfrigération s'amélioreront, nos produits de la mer locaux seront savourés par un nombre croissant de gens partout au monde. Nous comprenons également que les chaînes d'approvisionnement doivent être efficaces pour répondre à ces besoins.
    La chaîne d'approvisionnement traditionnelle est constituée de pêcheurs indépendants locaux qui approvisionnent des usines de transformation, lesquelles assurent la distribution à l'échelle nationale et internationale. C'est un bon modèle pour la distribution de la richesse, le maintien en santé des collectivités côtières et la maximalisation des rendements des investissements du gouvernement. Le système actuel comporte de nombreux freins et contrepoids qui visent à maintenir l'efficacité et la rentabilité de la chaîne d'approvisionnement.
    La concentration des entreprises peut mener à une réduction de la concurrence pour les produits, à une diminution ou l'élimination des emplois dans les collectivités côtières et à la perte éventuelle pour le Canada de sa souveraineté alimentaire.
    Aujourd'hui, nous aimerions vous parler des concepts de la souveraineté et de la sécurité alimentaires.
    Nous les Canadiens avons grandi dans un pays où les ressources alimentaires sont abondantes. Nous n'avons jamais dû nous soucier de la restriction des ressources alimentaires ou, pire encore, d'un scénario selon lequel notre nourriture serait cultivée ou pêchée ici sans que nous ayons voix au chapitre.
    Notre industrie des produits de la mer doit relever de nombreux défis liés au déclin et à la gestion des stocks, mais nous n'allons pas aborder ces sujets aujourd'hui.
    Nous observons une concentration des entreprises, attestée par le nombre croissant d'usines, d'installations de réfrigération et d'autres maillons de la chaîne d'approvisionnement, qui se font acheter par les mêmes conglomérats.
    Nous sommes également préoccupés par les permis de pêche hauturière vendus aux sociétés. Cela rend la tâche difficile pour les exploitants indépendants qui souhaitent accéder aux ressources de la chaîne d'approvisionnement à des prix concurrentiels. Comme l'accent est mis sur la valeur et la croissance de la société pour ses actionnaires, cela exerce non seulement une pression sur les ressources océaniques, mais accélère également la disparition de nombreux grands employeurs dans les collectivités côtières.
    Il faut également souligner le fait que dans certains cas, des gouvernements étrangers détiennent des parts variables dans les sociétés, ce qui fait que les règles de jeu ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Ces sociétés recherchent aussi la croissance et la maximalisation des gains des actionnaires, quel que soit le pays de résidence des actionnaires. La majorité des recettes quittent le Canada.
    Lorsqu'on discute de ses enjeux, on perd de vue le fait que les propriétaires-exploitants sont de petites entreprises indépendantes, qui souvent n'ont que deux ou trois membres d'équipage. Ces exploitants ont consacré énormément d'investissements personnels, payent leurs impôts et contribuent au bénévolat dans leurs collectivités locales. Les ressources de cette petite entreprise dépendent d'une chaîne d'approvisionnement qui fonctionne bien. Les pêcheurs cherchent à obtenir des recettes justes et équitables, et non pas à vivre dans une relation conflictuelle qui a des gagnants et des perdants.
    Je cède maintenant la parole à M. MacPherson.

  (1120)  

    Quelles sont certaines des solutions possibles afin de garantir la souveraineté et la sécurité alimentaires?
    Premièrement, déclarer que les produits de la mer canadiens sont une ressource critique. Cette désignation renforcera les règles actuelles visant la concentration des entreprises et les investissements étrangers.
    Deuxièmement, réduire le seuil du Bureau de la concurrence visant l'ensemble des acquisitions d'entreprises de produits de la mer canadiennes et étrangères. Actuellement, seules les grandes acquisitions font l'objet d'un examen par le Bureau.
    Troisièmement, redoubler les efforts visant à commercialiser les produits de la mer auprès des Canadiens, car notre taux de consommation des produits de la mer est le plus bas au monde.
    Quatrièmement, travailler avec les organisations de pêcheurs pour élaborer des plans de retrait des permis de façon à soutenir la viabilité des propriétaires-exploitants indépendants existants et futurs. Cela contribuera également à une meilleure efficacité au chapitre de l'exploitation et à une plus grande diversification des captures.
    Cinquièmement, revoir le besoin de devenir le premier exportateur de produits de la mer en fonction du volume. Accorder davantage d'importance aux produits à valeur ajoutée.
    Sixièmement, exempter du péage au pont de la Confédération les produits dérivés des produits la mer à l'arrivage et en partance de l'Île‑du‑Prince‑Édouard.
    Le Canada est un des pays les plus riches en ressources. Nos grandes réserves d'eau fraîche, nos océans propres et notre nourriture abondante nous assurent une place privilégiée.
    Notre système n'est certes pas parfait, et nous devons être proactifs. Les sociétés et pays étrangers ont nos ressources dans leur collimateur, et cette pression ne fera que s'intensifier. Au fur et à mesure que les zones mortes océans s'étendront, les produits de la mer qui nourrissent le monde proviendront de moins en moins de régions.
    Le gouvernement du Canada doit accorder la priorité à la souveraineté et à la sécurité alimentaires. Une fois que nous aurons perdu le contrôle de nos ressources, il sera très difficile, voire impossible, de le reprendre.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur MacPherson. Vous terminez presque au moment voulu, ce qui est assez rare quand la déclaration liminaire est faite par deux personnes.
    Les questions, maintenant.
    La parole est à M. Small, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
    Monsieur Bonnell, avez-vous eu vent d'ententes d'approvisionnement entre les pêcheurs et les transformateurs de Terre-Neuve-et-Labrador?
    Merci pour la question, monsieur Small.
    Dans la province, divers rapports se créent entre les pêcheurs et les transformateurs. Évidemment, nous en sommes des parties prenantes. Parfois, ces rapports prennent la forme d'une promesse directe d'approvisionnement entre un pêcheur et un transformateur, parfois il s'agit simplement de relations directes entre des pêcheurs et des transformateurs concernant la pêche et la transformation du produit de la pêche et une aide pour sa mise sur le marché.
    Les accords conclus dans la province entre les pêcheurs et les transformateurs prennent diverses formes, pour assurer aux pêcheurs un prix équitable et la mise sur le marché du produit sous une forme convenable.

  (1125)  

    D'après vous, monsieur Bonnell, la suspension actuelle de la pêche du crabe et de la crevette est‑elle reliée d'une façon ou d'une autre au contrôle de cette pêche, dans la province, par des entreprises?
    Non. La province se distingue de ce point de vue. Une convention collective en vigueur permet de négocier le prix des prises. C'est un processus indépendant, institué par son gouvernement.
    Chaque année, nous adoptons une position en prévision de la décision que prendra l'arbitre indépendant, comme le font d'ailleurs les transformateurs et les pêcheurs. Parfois, après un cycle de discussions, on s'entendra sur le prix. Sinon, l'arbitre indépendant tranchera. Que les négociations aient lieu entre 2 ou 20 compagnies, le processus est indépendant.
    Je juge très saine la concentration des entreprises de transformation dans la province et je pourrai l'expliquer. Si on compare la pêche à d'autres secteurs alimentaires canadiens, ou à d'autres secteurs canadiens tout court, la concentration y est plus faible que dans le secteur de la viande bovine, des produits laitiers ou d'autres secteurs de l'économie.
    Dans ce cas également, Terre-Neuve-et-Labrador est unique en son genre, mais la province dispose bien d'un processus indépendant de fixation des prix.
    Dans son témoignage, la semaine dernière, M. Pretty a parlé du contrôle des pêcheurs par les transformateurs. Voici pour vous l'occasion de lui répondre.
    Si les pêcheurs sont absolument indépendants des transformateurs, grâce à des mécanismes de financement ou par d'autres moyens, la concurrence pour les produits de la pêche entre les transformateurs de Terre-Neuve-et-Labrador est‑elle libre?
    D'après moi, la concurrence entre les pêcheurs et les transformateurs de Terre-Neuve-et-Labrador est libre.
    Je peux le dire pour ce qui concerne notre compagnie. Nous respectons en tout point les règles de la région de l'Atlantique en vigueur actuellement dans la politique du propriétaire-exploitant et la politique de séparation de la flottille ainsi que celles qui régissent la préservation de l'indépendance de la flottille de pêche côtière.
    Comme n'importe quel autre groupe, nous préconisons le dialogue avec les pêcheurs. Nos cinq usines de transformation à terre, dans la province, emploient un millier de personnes. Il faut un approvisionnement constant de matière première pour les faire fonctionner et assurer aux travailleurs un emploi saisonnier et, dans certains cas, un emploi pour toute l'année. Ce genre de rapport, essentiel au maintien de notre capacité et de nos infrastructures, existe.
    Pour les prix, l'année est exceptionnelle. Votre comité a beaucoup discuté de la situation de la pêche du crabe des neiges cette année. Si on retourne un peu en arrière, on verra que les pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador ont bénéficié, en 2022 et 2021, de prix sans précédent pour cette espèce. Plus loin encore en arrière, nous avons bénéficié de prix assez stables, ce qui me fait croire que les pêcheurs ont certainement obtenu des prix équitables.
    Merci, monsieur Bonnell.
    Je cède le reste de mon temps à M. Perkins.
    Le président: Ça lui fera plus d'une minute.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Sproul, les homards comprennent‑ils la limite tracée entre les zones de pêche du homard ZPH 33, 34 et 41?
    Non. Ils ne savent rien de son tracé ni de l'identité de leurs pêcheurs.
    Dans la zone ZPH 41, à peu près trois fois plus étendue que la Nouvelle-Écosse, une compagnie possède le monopole absolu de la pêche. Elle a demandé de ce fait une augmentation du total autorisé des captures.
    Quelles seraient les conséquences pour les homards de la zone côtière, vu qu'ils ne semblent pas savoir où se trouve la limite?
    Au bout du compte, toute augmentation du total autorisé des captures accordée à un très gros joueur exploitant un navire de pêche serait autant de perdu pour les pêcheurs côtiers. Le homard du golfe du Maine est une ressource unique pour cette région, et aucun fait scientifique ne confirme que ces zones possèdent des ressources distinctes ou qu'une capture dans la zone 41 n'aura pas d'incidence dans les zones contiguës.
    Il importe également de souligner que l'immense majorité — 80 ou 90 % — des débarquements de Clearwater provient de l'habitat le plus important du homard au Canada, le vivier qui alimente en homards le banc de Brown, contigu à la zone fermée. La compagnie pratique une pêche intensive jusqu'à la limite de cette zone. Cette pratique a des conséquences vraiment sérieuses sur nous.

  (1130)  

    Quelqu'un prend‑il les moyens de s'assurer qu'elle ne franchira pas la limite?
    Monsieur Perkins, je suis désolé. Votre temps est écoulé. De toute façon, dans les quelques secondes qui restent, vous n'auriez pas réussi à placer la question.
    Monsieur Morrissey, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question pour M. Sproul.
    Dans votre déclaration, vous avez fait allusion aux entreprises qui appuyaient l'achat de permis de pêche du homard. Vous avez également fait allusion à l'emploi, à cette fin, de moyens illégaux.
    Auriez-vous la bonté de bien vouloir préciser un peu desquels il s'agit?
    Je faisais allusion aux accords de fiducie, moyen par lequel un prête‑nom facilite l'achat de permis de pêche du homard dans différentes zones. De cette manière, des sociétés verticalement intégrées peuvent acheter, transformer et exporter du homard, du casier à la table.
    Ces accords influent‑ils sur la propriété du permis principal — détenu par le pêcheur sur son bateau?
    Pas légalement, mais certainement dans les…
    Je comprends que ce n'est pas légal. Vous disiez que ça se pratique à la faveur des accords de fiducie.
    Il s'est fait beaucoup de bon travail, ces dernières années…
    N'est‑ce pas que la politique du propriétaire-exploitant était censée l'interdire?
    Oui. Ç'a toujours été interdit, mais des modifications de la loi l'ont rendu plus difficile.
    Je faisais allusion à l'intention du gouvernement de mettre fin aux permis qui se révèlent enfreindre la loi, quand, manifestement, la loi était modifiée pour améliorer la situation des nouveaux venus dans l'industrie.
    Si le gouvernement devait mettre subitement fin à l'accès dans la communauté, les perdants ne seraient pas seulement les nouveaux venus, mais, également, les fabricants de casiers, les fournisseurs de carburant, les épiciers et tous les autres métiers connexes.
    Très bien.
    Je questionne M. MacPherson ou Mme Aylward.
    À votre connaissance, est‑ce que ç'a également lieu dans l'Île‑du-Prince-Édouard?
    Actuellement, je ne peux entrer dans aucun détail. À mesure qu'augmente le prix des flottilles, notre souci est certainement le financement et la suffisance des ressources là‑bas pour financer ces achats.
    Je pense que, dans une réunion antérieure de votre comité, il a été dit que le financement des flottilles devait être accessible aux entreprises de pêche que nous appuyons. Nous nous focalisons vraiment sur des mécanismes étanches avec les transformateurs et les fournisseurs ou les membres de la famille et nous ne faisons qu'entrouvrir la porte.
    C'est actuellement l'un de nos soucis. En effet, les options sont nombreuses.
    Bien.
    Monsieur MacPherson, vous avez dit qu'il fallait déclarer les fruits de mer canadiens « ressources critiques ». Pourriez-vous expliquer un peu les avantages qu'en tireraient les pêcheurs et le Canada?
    Si vous avez plus de détails, j'aimerais que vous communiquiez des renseignements à notre comité sur deux ou trois éléments, mais vous pouvez vous étendre sur celui‑ci et, aussi, sur l'abaissement du seuil d'examen sous la rubrique des questions intéressant les entreprises.
    Rapidement, en ce qui concerne les ressources critiques, c'est la première fois que je l'entendais.
    Pas plus tard que l'autre jour, je lisais un article sur un autre pays qui essayait d'accaparer le cobalt sur le marché pour les batteries des véhicules électriques. C'est de cette manière que nous devrions considérer les denrées alimentaires.
    Comme je l'ai dit, c'est assez bien équilibré, mais il y a beaucoup d'activités dans l'achat très rapide d'exploitations familiales, et les fusions se succèdent également à un rythme très rapide.
    Est‑ce que c'est au niveau de la transformation?
    Oui, mais, en fin de compte, les effets se font sentir jusque chez les pêcheurs, par une diminution de la concurrence et, peut-être, par des restrictions plus lourdes.
    Monsieur le président, je ne suis pas certain d'avoir le temps, et vous allez certainement me le rappeler. Je tiens à poser une petite question à M. Bonnell.
    Dans votre déclaration, monsieur Bonnell, vous avez dit que vos employés étaient visés. Pourriez-vous l'expliquer? Ces propos m'ont inquiété. Comment le seraient‑ils et pourquoi?
    La meilleure réponse est que notre entreprise est visée en raison de sa taille. Ce pourrait être à cause des employés ou de la compagnie même. Nous sommes très fiers d'être une entreprise familiale. Martin et Blaine Sullivan sont nés dans une famille de pêcheurs. C'était le métier de leur père. Je suis moi‑même issu d'une entreprise de pêche sur petits bateaux. Nous avons construit cette compagnie à partir de zéro. Nous sommes très fiers de nos réalisations.
    Notre compagnie est grande, et nous savons qu'il en découle des responsabilités, mais nous estimons qu'elle est injustement visée, vu le nombre de personnes que nous employons dans la région et parce que nous obtenons pour le produit de la pêche une valeur équitable dans la plupart des années. Cette année, en 2023, les défis sont nombreux, ce que nous acceptons, mais nous nous estimons injustement visés en notre qualité de compagnie active dans la région.
    J'espère m'être bien expliqué.

  (1135)  

    Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    Encore 45 secondes.
    Merci.
    Je questionne de nouveau M. Sproul et, peut-être, M. MacPherson.
    Vous avez parlé de concentration des entreprises. J'entends beaucoup parler, chez nos pêcheurs, de la diminution du nombre d'acheteurs indépendants, et nous entendons beaucoup parler de notre sujet préféré, le désir des Chinois d'acheter des entreprises qui achètent du homard. Que recommanderiez-vous au gouvernement de faire?
    Les usines de transformation et les acheteurs sont du ressort des provinces et réglementés par elles. Avez-vous exprimé vos craintes à des provinces sur la concentration en cours des entreprises à ce niveau? Dans l'affirmative, pourriez-vous communiquer à notre comité la teneur de votre message, pour les besoins de notre rapport?
    Monsieur Morrissey, votre temps est écoulé. Je conseille à M. MacPherson ou à ses collègues de répondre à cette question par écrit à notre comité.

[Français]

     Madame Desbiens, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie les témoins qui sont ici présents aujourd'hui.
    Je vais m'adresser à vous, monsieur Bernatchez.
    Vous êtes inquiet, et je vous comprends. Dans votre témoignage, vous avez mentionné que le Canada, en particulier l'industrie canadienne des pêches, dont le Québec occupe une large part, paie le prix d'un certain manque de pouvoir sur nos voisins du Sud, les États‑Unis. Vous avez parlé de la pêche à la baleine noire et au maquereau et de la chasse au phoque. Tout cela sème l'inquiétude. L'industrie de la pêche est déstabilisée. Or on voit s'installer ici des entreprises étrangères.
    Selon vous, comment peut-on évaluer le risque que l'expertise de pêche disparaisse de nos régions? Le risque qu'elle disparaisse est-il suffisamment grand pour que le ministère des Pêches et des Océans, ou MPO, prenne des mesures draconiennes afin de renverser la vapeur de ce que vous évoquez?
    Chaque fois qu'une pêcherie est fragilisée par les interventions, nécessaires ou non, du MPO dans le but de la faire plier sous la pression de l'étranger, des propriétaires d'entreprises peuvent alors être enclins à jeter l'éponge. Il peut aussi arriver, comme c'est le cas présentement, que les équipages de certaines pêcheries fuient les bateaux, car les prises ne sont pas au rendez-vous et, par conséquent, les revenus non plus.
    À partir du moment où on fragilise une pêcherie d'une quelconque façon, on s'expose à ce que, dans certaines communautés, et une à la fois, une partie de l'expertise quitte ces milieux.
    Que fera-t-on si on perd la relève et que les usines de transformation, avec leurs grands tentacules, ne trouvent plus sur place le savoir-faire et la compétence du milieu?
    Est-ce là un argument important qu'il faudrait faire valoir au MPO?
     La pêche, c'est une danse bien orchestrée entre plusieurs danseurs. Si certains d'entre eux ne veulent pas participer à la danse, cela risque de fragiliser les autres. Les transformateurs font partie des acteurs dont l'apport est important pour l'ensemble de l'industrie.
    Je ne vous cacherai pas qu'il est plus en plus difficile d'attirer la relève pour faire de la capture. En effet, les coûts d'acquisition des permis de pêche ont explosé, de sorte que ceux qui veulent se lancer dans ce genre d'entreprise doivent maintenant assumer un risque financier très important.

  (1140)  

    La perte de ce savoir-faire ouvre-t-elle la porte aux étrangers, aux bateaux-usines et à la prise de possession de nos produits de la mer au détriment des régions?
    Comme je le disais dans mon allocution d'ouverture, nous n'avons pas nécessairement d'exemples d'entreprises étrangères qui se sont glissées dans les activités de capture. C'est beaucoup plus subtil que cela.
    Si nous devions en arriver à un point où les détenteurs d'un permis commercial devraient baisser les bras, cela pourrait entrouvrir la porte à des intérêts étrangers, qui deviendraient partenaires d'entreprises locales dans certaines entreprises de pêche.
    Comment le Comité pourrait-il intervenir? Quelles sont les recommandations les plus importantes que le Comité pourrait faire au ministère des Pêches et des Océans pour essayer de contrer la tendance?
    Comme dans n'importe quel domaine d'activités, lorsqu'on met en place une réglementation, il faut s'assurer de pouvoir la faire respecter. Cela ne donne rien, de créer une série de mesures s'il n'y a personne sur le terrain pour faire appliquer les règlements.
    Avant d'adopter de nouvelles lois ou de nouveaux règlements, on doit s'assurer de faire respecter la réglementation actuelle.
    Le milieu des pêches gaspésien est-il inquiet?
    Il y a beaucoup d'inquiétude. L'ensemble des moratoires annoncés au cours des trois dernières années fait que la majorité des propriétaires de flottille se posent des questions sur ce qui va leur arriver.
    On sait que l'industrie de la capture est cyclique, mais il y a lieu de s'inquiéter. En effet, au moins cinq moratoires ont été annoncés dernièrement. Il faut surtout commencer à réfléchir, de concert avec les scientifiques de Pêches et Océans Canada, à l'adoption d'une approche écosystémique. Nous ne pouvons plus gérer une ressource à la fois. Il faut tenir compte de toutes les conséquences que l'ensemble des ressources ont sur les autres ressources halieutiques.
    Merci beaucoup, monsieur Bernatchez.

[Traduction]

    Merci, madame Desbiens.
    Madame Barron, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leur participation.
    Je questionne d'abord M. Sproul.
    L'UFAWU-Unifor a lancé une pétition pour demander de mettre fin à la propriété étrangère dans les quotas. Quelles sont vos observations générales sur cette pétition?
    Merci pour la question.
    Royal Greenland est la propriété exclusive du gouvernement du Danemark. Cette société a acquis des participations dans A&L Seafoods, en Nouvelle-Écosse, et Quin‑Sea, à Terre-Neuve, où c'est l'un des plus grands transformateurs.
    Aucune de ces acquisitions n'est conforme à la loi fédérale. Royal Greenland dépouille les habitants de Terre-Neuve et de Nouvelle-Écosse et verse les profits à un gouvernement étranger. On ne s'explique pas pourquoi le législateur n'est pas encore intervenu.
    Nous observons le même phénomène également dans des compagnies canadiennes. En Nouvelle-Écosse, nous avons vu Champlain — une société de capital-investissement dont le but est de redistribuer ses profits aux actionnaires — acquérir Lobster « R » Us Seafood, Premium Seafoods, Captain Dan's Seafood, Chéticamp Fisheries, Riverside Lobster International, Downeast Cape Bald Packers et Petit De Grat Packers. Aux États-Unis, les filiales sont encore plus nombreuses, notamment Cape Bald ainsi que Boston Lobster Company et Boston Wholesale Lobster.
    Champlain et ses émules s'y prennent de la même façon. Ils commencent à acquérir des vendeurs, des congélateurs et des conditionneurs de boëtte dans le Canada atlantique, ce qui est de très mauvais augure pour nous.
    Certaines de ces acquisitions sont un peu des « tigres de papier », en ce sens que les pêcheurs néo‑écossais sont encore libres de vendre leurs prises à l'acheteur de leur choix. Certains de ces acheteurs sont l'objet d'acquisitions en raison de leur accès au produit, mais, le pêcheur pourrait en tout temps s'associer à un autre acheteur. La stratégie des acquisitions s'est donc portée vers les fournisseurs de boëtte, pour prendre les pêcheurs au piège. C'est très préoccupant pour les joueurs du secteur.

  (1145)  

    Merci, monsieur Sproul.
    M. Bonnell maintenant.
    Qu'en pensez-vous? Si on décidait de mettre fin à la propriété étrangère et aux quotas, quelles en seraient les conséquences pour Ocean Choice International? Quelles répercussions prévoyez-vous dans les collectivités locales?
    De notre côté, notre entreprise est entièrement détenue et exploitée par des Canadiens.
    Je tiens à mentionner que, la semaine dernière, Mark Waddell, a comparu devant le Comité au sujet de l'enquête sur la propriété effective et il a confirmé que, dans la région de l'Atlantique, au moins 98 % de tous les permis sont détenus par des entités canadiennes.
    De notre point de vue, si des entreprises étrangères investissent dans la région, tant qu'elles respectent les règles, cela ne nous pose aucun problème. En ce qui nous concerne, nous nous concentrons sur l'exploitation de notre propre entreprise, et c'est ce que nous allons continuer de faire.
    Merci, monsieur Bonnell.
    Avez-vous eu des discussions quant aux mesures que prendrait Ocean Choice International si on mettait fin à la propriété étrangère et aux quotas?
    Nous n'en avons pas discuté. Je le répète, en ce qui a trait aux quotas, ils sont entièrement respectés dans la région de l'Atlantique. Comme je l'ai dit, un audit juricomptable mené par le gouvernement du Canada au cours des derniers mois a permis de confirmer que 98 % des permis de pêche sont détenus par des entités canadiennes.
    À notre avis, il s'agit d'un faux problème. Si cela devenait un problème à un moment donné, nous envisagerions bien sûr d'exprimer notre opinion à ce sujet. À l'heure actuelle, nous ne considérons pas qu'il s'agit d'un problème. Le gouvernement du Canada l'a d'ailleurs vérifié la semaine dernière.
    Je vous remercie pour votre réponse.
    La prochaine question s'adresse encore à M. Bonnell.
    Le registre public — qui est bien entendu une recommandation formulée dans le cadre de l'étude de 2019 sur la propriété effective sur la côte Ouest — fournit des renseignements. Que pensez-vous de ce registre public et de ses répercussions éventuelles sur les pêches sur la côte Est?
    Je ne suis pas très au courant de la situation sur la côte Ouest.
    Pour ce qui est de la côte Est, comme je l'ai mentionné durant ma déclaration liminaire, nous respectons entièrement les politiques sur le propriétaire-exploitant et sur la séparation des flottilles ainsi que la préservation des flottilles côtières au Canada atlantique.
    Jennifer Mooney a comparu devant le Comité — la semaine dernière, je crois — et elle a mentionné que près du quart des permis de pêche côtière détenus dans la région de l'Atlantique ont fait l'objet d'une vérification, et qu'on a constaté un niveau élevé d'observation de ces politiques. Ces constatations du gouvernement du Canada constituent selon moi une bonne indication que les changements qui ont été apportés sont respectés dans l'ensemble.
    Merci.
    Je pense que ma prochaine question sera la dernière, monsieur Bonnell, car je pense que mon temps est presque écoulé.
    J'aimerais obtenir votre opinion au sujet des différences. Je sais que vous connaissez très bien la situation sur la côte Est, mais pouvez-vous nous parler des différences entre la situation sur la côte Est et celle sur la côte Ouest, ou bien nous expliquer les avantages ou les inconvénients?
    Tout ce que je peux dire à ce sujet… Je ne connais pas très bien la situation sur la côte Ouest, mais je siège au Conseil canadien des pêches et je fais affaire avec de nombreux collègues sur la côte Ouest, de nombreuses entreprises familiales et un grand nombre d'entreprises dont les priorités sont similaires aux nôtres et qui poursuivent les mêmes objectifs que nous, à savoir offrir une valeur significative, créer des emplois valorisants pour leurs employés et offrir une juste valeur marchande aux pêcheurs. J'ai constaté et j'ai compris que nous avons tous un objectif commun, c'est‑à‑dire faire croître l'industrie canadienne des fruits de mer.
    M. MacPherson, qui comparaît aussi aujourd'hui, et moi-même avons discuté à maintes reprises au fil des ans de la nécessité d'une plus grande coopération et d'une meilleure harmonisation afin de créer davantage de valeur dans le marché mondial, et je crois que nous devrions concentrer nos ressources et notre énergie là‑dessus.

  (1150)  

    Merci, madame Barron.
    La parole est maintenant à M. Armold pour cinq minutes maximum.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager un peu mon temps de parole avec M. Perkins.
    Je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Bonnell.
    Dans votre liste de priorités, monsieur Bonnell, quel rang occupe un approvisionnement constant en produits afin de permettre à votre entreprise de répondre à son marché, à ses ventes?
    Je dirais que c'est essentiel à la fois pour nos activités de pêche côtière et de pêche hauturière.
    La stabilité des parts de quotas est essentielle pour nos activités de pêche hauturière. Nous employons des centaines de personnes sur nos navires hauturiers. Une partie des produits est transformée dans nos usines de transformation, et nous avons également des services de soutien.
    En ce qui a trait à la matière première, nous nous approvisionnons auprès d'environ 1 900 pêcheurs indépendants à Terre-Neuve-et-Labrador, et je peux dire que cette matière première est absolument essentielle pour les cinq usines de transformation que nous possédons dans la province, qui emploient environ 1 000 personnes. C'est d'une importance capitale pour notre entreprise. Des parts de quotas stables pour nos activités de pêche hauturière et un approvisionnement stable contrôlé par des quotas pour nos activités terrestres sont extrêmement importants pour nous.
    Je suppose qu'une entreprise comme la vôtre ferait tout en son pouvoir pour s'assurer d'avoir une source fiable de produits.
    Nous faisons ce que nous pouvons en respectant les règles. Il est important d'entretenir des relations pour nous assurer d'obtenir la matière première nécessaire à nos activités, mais je dirais, monsieur Arnold, qu'il est d'une importance cruciale, dans le cadre de ces relations, d'offrir aux pêcheurs le meilleur prix au quai. Nous bénéficions d'un réseau mondial de vente et de distribution qui consacre beaucoup de temps et d'énergie chaque année à essayer de maximiser les débouchés pour les produits afin que tout le monde y gagne, tant le secteur de la pêche que celui de la transformation.
    Merci.
    Je vais maintenant m'adresser à M. Sproul et à M. MacPherson.
    Nous avons beaucoup parlé de la propriété étrangère des permis, des quotas et du contrôle étranger ou centralisé de ces permis et quotas. Y a‑t‑il d'autres facteurs qui déterminent où un pêcheur peut apporter son produit, comme la chaîne d'approvisionnement reliée à ses activités, la glace, le carburant, l'équipement et ainsi de suite? Le contrôle des permis et des quotas serait‑il le seul élément à examiner, ou y a‑t‑il d'autres éléments également?
    La plupart des pêcheurs du Canada atlantique entretiennent des relations de longue date avec les gens qui achètent leurs fruits de mer. Souvent, on leur fournit d'autres services au quai pour les inciter à continuer de vendre leurs produits. Les préoccupations soulevées par l'industrie concernent la consolidation de l'approvisionnement en appâts et la possibilité d'un contrôle des prix découlant de la consolidation des entreprises à mesure que les grands conditionneurs se regroupent, mais il y a aussi ces grandes sociétés qui se déplacent le long de la chaîne d'approvisionnement. Ce sont des acheteurs au quai qui achètent des produits sans même que le sachent les pêcheurs qui vendent ces produits.
    Monsieur MacPherson, avez-vous quelque chose à ajouter avant que je cède la parole à M. Perkins?
    Je voulais ajouter, comme M. Sproul l'a expliqué, qu'il y a des entreprises qui se taillent une place assez importante sur le marché et qui contrôlent tous les coûts qu'il a mentionnés. Nous avons certes la même préoccupation.
    Merci.
    Je vais céder la parole à M. Perkins.
    Merci.
    Monsieur Sproul, vous avez mentionné qu'un certain nombre de sociétés étrangères achètent des acheteurs et d'autres entités dans l'industrie, mais qu'en est‑il de la Chine? Par exemple, sur la côte Est, je vois des entreprises chinoises acheter un très grand nombre de nos acheteurs. Quelles en sont les répercussions? Je crois savoir qu'elles contrôlent également les transitaires à l'aéroport d'Halifax.
    Je vous remercie pour votre question, monsieur Perkins. Je suis très heureux de vous entendre soulever cette question.
    Je pense que l'une des choses les plus importantes que le gouvernement puisse faire, c'est de veiller à ce que le Canada contrôle à l'échelle nationale sa chaîne logistique à l'intérieur du pays. Elle ne devrait pas être contrôlée par le secteur privé de quelque façon que ce soit, car cela placerait tout le monde sous l'influence des gens qui possèdent la chaîne logistique. L'entreprise Atlantic ChiCan, dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, a acheté au moins six de ses concurrents locaux au cours de la dernière année ou année et demie. Cela témoigne de cette tentative de consolidation.
    Je pense qu'il vaut la peine de souligner que l'entrée de la Chine sur le marché des fruits de mer au Canada a été bénéfique pour l'industrie à certains égards, mais nous devons trouver un équilibre entre faire en sorte que le Canada soit ouvert aux affaires et ouvrir la voie pour nos produits vers de nouveaux marchés en Asie. Nous devons également protéger les intérêts des pêcheurs et la souveraineté de notre chaîne d'approvisionnement, de Yarmouth à la Chine.

  (1155)  

    Ce sont des permis provinciaux...
    Merci, monsieur Perkins. Votre temps est écoulé.
    La parole est maintenant à M. Cormier pour cinq minutes maximum.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Bernatchez, avant d'aller plus loin, j'aimerais que vous me disiez quelles espèces pêchent les capitaines-propriétaires que vous représentez. Représentez-vous des capitaines-propriétaires qui pêchent le crabe, par exemple?
    Oui, tout à fait. Les capitaines-propriétaires que je représente pêchent à peu près tout ce qui se pêche dans le golfe: le crabe, la crevette, les poissons de fond, tout ce qui s'y trouve.
    D'accord.
    Depuis quelques années, les permis de pêche au crabe ont atteint un prix exorbitant, comme vous l'avez dit tantôt. Il en va de même pour les permis de pêche au homard, mais mes questions porteront davantage sur la pêche au crabe. Vous avez aussi dit que, quand des permis sont détenus par des entreprises ou des pêcheurs d'autres régions, cela fragilise nos pêcheries et nous fait perdre une expertise.
    Des propriétaires de permis de pêche au crabe ont quitté ma région pour aller dans la vôtre. Je pense que vous êtes au courant de cela. Nous avons donc perdu cette expertise dans notre région, mais aussi des emplois, des capitaines et des hommes de pont.
    Le critère de résidence est différent au Nouveau‑Brunswick, étant fixé à seulement six mois, comme vous le savez probablement, alors qu'il est de deux ans au Québec. Trouvez-vous que cette règle est juste?
    Qu'arriverait-il, selon vous, si des pêcheurs du Nouveau‑Brunswick ou d'ailleurs allaient se procurer des permis chez vous, au Québec, pour les rapporter au Nouveau‑Brunswick? Quelle serait votre réaction?
    Comme je le disais dans mon allocution, je suis pour le principe de la libre entreprise. Je m'attendrais donc à ce que cela se produise. Nous ne sommes pas à l'abri de cela.
    Pour répondre à votre question, monsieur Cormier, si la réglementation mise en place par le MPO s'appliquait uniformément d'un bout à l'autre du pays, même dans les différentes régions d'une même province, il n'y aurait pas de telles surprises.
    Je ne comprends pas pourquoi les critères de résidence sont différents d'une province à l'autre. Je ne comprends pas pourquoi des contraintes sont imposées aux différentes régions d'une même province pour faire des transactions de permis. Cela me semble insensé.
    Je pourrais aussi vous parler des limites de profondeur pour pêcher certaines espèces. Pourquoi est-ce si différent d'un endroit à l'autre?

[Traduction]

    Monsieur MacPherson, j'ai le même genre de questions à vous poser. En 2019, un pêcheur de homard de l'Île-du-Prince-Édouard, Brody DesRoches, a acheté un permis de pêche au crabe dans ma région pour quelques millions de dollars. Le coût se situait probablement entre 10 et 15 millions de dollars. À ce moment‑là, le MPO a dit que toutes les règles avaient été suivies.
    Est‑ce que vous le croyez, et connaissez-vous ce cas?
    Il est certain que le prix d'un grand nombre de permis constitue une grande préoccupation. Il serait intéressant de voir les données économiques à ce sujet, et, sans doute, combien d'autres soumissions ont été présentées. Est‑ce que ces soumissions correspondaient à la réelle valeur marchande d'un tel permis?
    Ma question vise plutôt à savoir si vous pensez que toutes les règles ont été suivies lors de l'achat de ce permis.
    Je ne connais pas les détails, mais une chose que les groupes de pêcheurs réclamaient collectivement, c'était des règles très strictes et rigoureuses. Il y a la question de la confidentialité, bien entendu…

  (1200)  

    Bien sûr. Je comprends cela. Mon père a été pêcheur de homard pendant presque toute sa vie. Comme vous l'avez dit plus tôt, le coût des permis de pêche au homard est exorbitant, si je puis dire. Ils valent beaucoup maintenant. Il est difficile, je pense, pour la prochaine génération, la jeune génération, d'acheter un permis. Il est difficile pour elle d'obtenir auprès d'une banque une marge de crédit ou quelque chose du genre, comme un prêt.
    Il existe des programmes pour les Premières Nations qui leur donnent la possibilité d'acheter des permis. C'est très bien. Pensez-vous que nous pourrions aussi mettre en place un programme de ce genre pour la jeune génération de pêcheurs, qui veut maintenir la tradition et être en mesure d'acheter un permis? Pensez-vous que nous devrions mettre sur pied des programmes partout au Canada pour nous assurer que la jeune génération puisse continuer à pêcher?
    Tout à fait. Je dois dire que nous avons un très bon programme à l'Île-du-Prince-Édouard. Il n'est pas tellement axé sur le financement, car il vise plutôt l'enseignement des compétences nécessaires à la réussite, à l'exploitation et à la survie de l'entreprise. J'ai reçu des appels d'autres organisations, et nous leur avons communiqué cette information…
    Voici une brève question: pensez-vous que de nouveaux règlements sur la pêche feront en sorte que toutes ces ententes parallèles qui ont lieu parfois ne se reproduiront plus, ou se produisent-elles toujours?
    Ce qui nous préoccupe, c'est qu'elles se produisent encore.
    Pardonnez-moi, monsieur Cormier. Votre temps est écoulé, mais nous pouvons demander à M. MacPherson de faire parvenir sa réponse par écrit au Comité.
    La parole est maintenant à Mme Desbiens pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Bernatchez, dans le contexte de votre témoignage et de vos propos, êtes-vous étonné de savoir que des pêcheurs et des organisations de pêcheurs demandent à témoigner de façon confidentielle? Cela vous surprend-il?
    Je ne peux pas vous dire pourquoi il y en a qui souhaitent témoigner de façon confidentielle. J'espère que nous sommes tous capables de nous sentir à l'aise de témoigner. Je crois — en tout cas je l'espère — que nous n'avons rien à cacher. Soyons transparents. Faisons en sorte qu'ensemble nous puissions continuer à développer une industrie des pêches au Canada qui prend en considération toutes les réalités, mais faisons-le de façon uniforme.
    Merci.
    Vous avez parlé de réglementation, plus tôt. Une réglementation suppose des pénalités; des pénalités impliquent une surveillance pour pouvoir les appliquer. Êtes-vous en mesure de me confirmer qu'il faudrait augmenter, sur le terrain, le personnel de surveillance du respect de la réglementation pour appliquer des pénalités?
    Cela peut-il entrer dans un cadre de vérification financière des entreprises et des corporations d'investissements?
    Pour ce qui est de savoir s'y prendre, je n'ai pas de réponse.
    Je crois que, s'il y avait plus de ressources mises en place par notre gouvernement pour faire respecter les réglementations, on pourrait éviter certaines situations vécues, comme celles qui ont été relatées aujourd'hui, et d'autres à venir. Sinon, comme dans toute chose, si personne ne maintient l'ordre, le chaos va s'installer.
    Pensez-vous que des pénalités financières seraient nécessaires?
    Selon ce que j'en sais, les pénalités financières imposées parfois aux contrevenants sont vraiment...
    Elles ne font pas grand-chose.
    Cela ne fait pas vraiment mal.
    Par contre, si on retirait son permis à quelqu'un qui l'a acquis de façon douteuse ou illégale, cela pourrait commencer à faire mal.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci, madame Desbiens.
    La parole est maintenant à Mme Barron pour deux minutes et demie maximum.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Sproul.
    Si nous devions aller de l'avant et mettre fin à la propriété étrangère et aux quotas, que pensez-vous de la question de l'application de la loi à cet égard? Pensez-vous que ce serait facile à gérer?
    Je suis spécialiste des pêches et de la gestion des pêches, et non pas de la réglementation, mais je pense qu'il faut appliquer une sorte de critère de propriété aux sociétés concernées. Si on constate qu'elles ne le respectent pas, les quotas qu'elles possèdent devraient être offerts à la population canadienne et utilisés aux fins d'une nouvelle entrée dans le secteur de la pêche et de la réconciliation.
    Merci, monsieur Sproul.
    Avez-vous quelque chose à ajouter au sujet des différences que nous observons entre l'Est et l'Ouest et à propos des avantages et des leçons que le Comité devrait examiner?
    Oui, bien sûr.
    Je pense que la triste et désastreuse situation que vivent les pêcheurs côtiers indépendants de la Colombie-Britannique devrait servir d'avertissement à tout le monde dans cette salle. Le gouvernement et les pêcheurs devraient travailler ensemble et faire tout en leur pouvoir pour empêcher qu'une situation semblable ne détruise les pêches de la côte Est, qui se sont révélées être le fondement de notre économie et qui ont créé une renaissance économique au Canada atlantique.
    En Colombie-Britannique, où il y a une énorme concentration d'entreprises dans l'industrie, il y a une très grande différence entre l'ampleur des retombées de la pêche pour les collectivités côtières et ce que nous observons ici dans le Canada atlantique. Je pense que nous devrions en tenir compte, car il s'agit d'un avertissement inquiétant.
    Merci, monsieur Sproul.
    Monsieur Bonnell, je vous ai posé pas mal de questions au dernier tour. Je veux vous donner l'occasion de vous exprimer avant de terminer mes questions. Avez-vous une dernière réflexion à faire à l'intention du Comité dont nous devrions tenir compte dans nos recommandations pour la suite des choses?

  (1205)  

    Non. J'ai dit tout à l'heure que tout ce que je peux faire, c'est parler pour la côte atlantique. Chose certaine, sur la côte atlantique, nous avons un niveau élevé de conformité, tant en ce qui concerne la propriété canadienne que les politiques côtières existantes. Nous continuerons à fonctionner dans ce cadre et à le respecter, et nous espérons offrir une valeur ajoutée aux secteurs de la pêche et de la transformation.
    Nous nous sommes tous engagés à soutenir les régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador et du Canada atlantique en tant qu'entreprises et exploitants. À mon avis, nous devons nous concentrer sur une plus grande coopération.
    Merci, madame Barron.
    La parole est maintenant à M. Bragdon pour cinq minutes maximum.
    Merci, monsieur le président. Je vais céder mon temps de parole à M. Perkins. Merci.
    Monsieur Sproul, la question des accords d'approvisionnement a été abordée plus tôt par M. Small. Auparavant, nous avions des accords de fiducie, mais la politique du propriétaire-exploitant rendait ces accords illégaux. Des avocats intelligents ont réussi à trouver une autre solution grâce à des accords d'approvisionnement.
    Vous avez mentionné plus tôt que les pêcheurs sont libres de choisir l'acheteur auquel ils vendent leurs produits, mais dans le cadre des accords d'approvisionnement — ou de nos accords d'approvisionnement en Nouvelle-Écosse, si j'ai bien compris —, ils n'ont pas vraiment le choix, surtout lorsqu'il s'agit de financer leurs navires. Est‑ce exact?
    Oui. Nous avons vu que les entreprises qui ont tenté l'intégration verticale par le biais d'accords de fiducie se sont tournées vers d'autres mécanismes juridiques, qu'il s'agisse d'accords de contrôle ou d'accords d'approvisionnement. Ces accords exigent que les pêcheurs livrent leur homard à un certain acheteur de homard, qui était auparavant le véritable propriétaire, lorsque l'exploitant était un propriétaire nominal, et ils sont maintenant forcés de vendre à ces entreprises intégrées verticalement à un prix réduit, en dessous du prix pratiqué par tous les autres dans l'industrie.
    Je vais revenir à la première question que je vous ai posée au sujet de la ZPH 41 et de l'incidence d'accorder à Clearwater une augmentation du TAC. Le TAC actuel est de 72 000 tonnes, je crois. Est‑ce bien cela?
    M. Colin Sproul: Je n'ai pas les chiffres sous les yeux.
    M. Rick Perkins: Si on augmente le TAC sans aucune donnée scientifique à l'appui, d'après ce que je peux voir, qu'est‑ce que cela signifierait pour les pêcheurs côtiers?
    Il y a une chose que cela signifie pour la pêche côtière, qui est plus subtile à discerner, et c'est que cela créerait une pression à la baisse sur les prix de l'industrie, ce qui permettrait à Clearwater de mettre beaucoup plus de homards sur le marché avant l'ouverture de la pêche hivernale au homard dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, une activité qui existe depuis des décennies. Cela renforcerait davantage la capacité de cette société à exercer une influence sur les prix du homard à l'échelle régionale.
    L'acquisition par la Chine d'acheteurs de poissons et d'autres entreprises a‑t‑elle déjà une incidence sur les prix?
    À mon avis, il a été clair aux yeux de tous les pêcheurs que l'entrée des acheteurs chinois sur le marché avait, au départ, influencé les prix à la hausse.
    Les pêcheurs de homard, avant et pendant la pandémie, profitaient de bons prix pour le homard. Je crois que la crainte réside dans la conglomération. La réponse claire dans la situation actuelle est qu'un mécanisme doit être mis en place pour dissuader les entreprises de posséder plus d'un certain seuil de capacité de transformation ou d'exportation du homard.
    Je ne veux pas mettre dans le même panier tous les Chinois qui sont entrés sur le marché et dire que leur arrivée fut négative. Manifestement, nous avons besoin des marchés asiatiques et il nous faut développer davantage de marchés pour le homard, mais il faut le faire de façon à empêcher quelque entreprise que ce soit d'acquérir trop de contrôle. Il faut s'attaquer à l'enjeu de la collusion parmi les entreprises qui fixent les prix par région dans le secteur du homard, une manœuvre illégale.
    Paient-ils la valeur marchande de ces entreprises?
    Nous ne connaissons pas les sommes payées, mais je dirais qu'ils paient des prix vraiment élevés pour ces entreprises.
    Nous voyons aussi des entreprises demeurer au nom de leur propriétaire d'origine, à mon avis une tentative de maintenir la relation personnelle entre le pêcheur et les acheteurs.
    On m'a dit que les acheteurs de homard dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse apportent maintenant leurs homards à Moncton, à New York ou à Chicago pour les exporter, en raison du contrôle étranger du terminal des produits de la mer vivants à Halifax. Est‑ce vrai?
    Oui, on m'a aussi rapporté cette situation, qui est désavantageuse pour les acheteurs de propriété canadienne, c'est évident.

  (1210)  

    Il s'agit d'un désavantage non seulement sur le plan du transport, mais aussi, je présume, du coût que les transitaires sont...
    Oui, le coût est certainement plus élevé.
    Je cède mon temps à M. Small ou à M. Arnold.
    Combien de temps me reste‑t‑il, monsieur le président?
    Le président: Il vous reste 35 secondes.
    M. Mel Arnold: D'accord.
    Il semble y avoir un mélange de compétences fédérales et provinciales. La transformation relève‑t‑elle du palier fédéral ou provincial? La réglementation fédérale a‑t‑elle quelque emprise que ce soit sur la propriété de la transformation, monsieur Sproul?
    En Nouvelle-Écosse, l'octroi de permis aux acheteurs et aux transformateurs de poisson est une compétence provinciale, mais je crois que le gouvernement fédéral a un rôle à y jouer, particulièrement quand il s'agit de propriété étrangère. Il me semble qu'à ce stade, il revient au gouvernement fédéral de défendre les Canadiens et les provinces de l'Atlantique.
    Merci, monsieur Arnold.
    Nous passons maintenant à M. Kelloway pour conclure.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis ravi de voir les témoins en ligne et en personne relativement à notre étude.
    Je vais me concentrer sur M. Sproul. Je poserai quelques questions, puis je vous laisserai le champ libre pour répondre.
    J'essaie de résumer la discussion que nous tenons aujourd'hui sur la création d'une économie plus forte pour le Canada atlantique et son secteur des produits de la mer. Nous voulons nous assurer qu'il y ait un équilibre avec les entreprises de propriété canadienne là où c'est nécessaire. Pourriez-vous nommer trois mesures que l'on pourrait adopter à court terme et trois mesures à long terme pour renforcer cet équilibre? Voilà deux questions.
    La troisième question concerne un sujet abordé par M. Perkins et que j'aimerais analyser davantage.
    Nous l'avons compris, la majeure partie de la transformation est un champ de compétences des provinces. Vous avez parlé de contrôle national de la chaîne logistique. Je me demande si nous pourrions en parler davantage. D'abord, pourquoi est‑ce important? Plusieurs parmi nous trouveront cette question évidente, mais j'aimerais approfondir le sujet.
    Également, quel est votre avis quant au renforcement des liens entre la province et le gouvernement fédéral là où c'est possible?
    À court terme, je crois que le gouvernement doit reconnaître qu'en ce qui concerne le homard, le produit des pêches le plus précieux du Canada, les appâts sont un enjeu fondamental. Nous connaissons une crise des appâts en raison des mesures de conservation adoptées par le ministère pour les espèces pélagiques. À mon avis, le gouvernement doit créer des avenues pour que les pêcheurs de homards aient accès à des appâts par l'entremise des attributions de quotas.
    Je crois aussi que le gouvernement doit tenir compte du fait que... Nous sommes tous ici pour tenter de préserver l'avenir de ce secteur. Les nouveaux venus font aujourd'hui face à un nouveau concurrent, le ministère des Pêches, qui veut et doit intégrer au secteur les pêcheurs qui exercent à des fins de subsistance convenable. Le gouvernement doit prendre un pas de recul et reconnaître que toute mesure qu'il prend a des conséquences involontaires sur les nouveaux venus dans le secteur des pêches. Il est possiblement plus difficile que jamais pour un nouveau pêcheur ou une nouvelle pêcheuse d'entrer dans le secteur. Je crois qu'il s'agit d'un fait qu'il nous faut tous reconnaître.
    À long terme, la logistique jouera un grand rôle. À mes yeux, il importe surtout que le gouvernement... Ce n'est un secret pour personne que le gouvernement actuel mène une stratégie de l'économie bleue. L'océan est un lieu qui a ses limites. Il paraît immense aux yeux de tous les autres, mais les lieux où les pêcheurs doivent mener leurs activités pour demeurer rentables sont parfois très petits. À mon avis, le gouvernement doit reconnaître que les utilisateurs à petite échelle des ressources, comme les pêcheurs côtiers, méritent un traitement spécial. Il faut leur réserver des lieux sécuritaires et durables où pêcher dans l'avenir.
    Peut-être pourriez-vous approfondir l'amélioration du contrôle de la gestion de la chaîne logistique. Je crois qu'il s'agit d'un aspect important à aborder.

  (1215)  

    C'est à mon avis une question d'argent. Je crois qu'il doit y avoir des investissements de la part des gouvernements provinciaux et fédéral dans le Canada atlantique pour créer une chaîne logistique indépendante d'acheteurs et d'expéditeurs de homard. Il est assez évident qu'une entreprise qui achète le homard à quai, qui contrôle le seul moyen d'expédition vers l'Asie et qui fait du profit sur toutes les étapes du processus est en conflit. Je crois que cela exigera des investissements aux deux paliers de gouvernement et je les encourage à collaborer à cette fin.
    Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    En fait, vous avez 40 secondes, mais j'aimerais les récupérer pour nous donner le temps de passer à huis clos.
    Faisons cela.
    Vous êtes un homme généreux.
    Je suis un homme généreux.
    Merci, monsieur Kelloway, puisque nous sommes un lundi, entre autres choses.
    Je veux remercier nos témoins — M. Bernatchez, M. Sproul, M. Bonnell, Mme Aylward et M. MacPherson — de s'être joints à nous aujourd'hui et d'avoir fait part de leurs connaissances aux membres du Comité dans le cadre de la présente étude.
    À nouveau, merci à tous et à chacun.
    Il nous faut maintenant nous déconnecter. Certains d'entre nous devront se connecter à nouveau.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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