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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 119

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 10 juin 1998

. 1400

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLA FAMINE EN UKRAINE
VMme Sarmite Bulte
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Keith Martin
VL'ABITIBI
VM. Guy St-Julien
VLE QUÉBEC
VMme Marlene Jennings
VLES SERVICES D'ÉDUCATION CANADIENS
VM. Yvon Charbonneau

. 1405

VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Derrek Konrad
VLE TRICENTENAIRE DE LA MAISON SAINT-GABRIEL
VM. Raymond Lavigne
VLA VILLE DE L'ANCIENNE-LORETTE
VM. Jean-Paul Marchand
VLE DÉCÈS DE PETER WONG
VM. Raymond Bonin
VL'HÉPATITE C
VM. Reed Elley

. 1410

VLA RECHERCHE SUR LA LEUCÉMIE
VM. Joe Fontana
VLA FAMINE UKRAINIENNE
VM. John Solomon
VL'ALGÉRIE
VMme Hélène Alarie
VLE PARTI RÉFORMISTE
VM. Steve Mahoney
VL'ACCUEIL BONNEAU
VM. André Bachand

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Art Hanger

. 1420

VM. John Richardson
VM. Art Hanger
VM. John Richardson
VLA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VM. Yvan Bernier

. 1425

VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VM. Yvan Bernier
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VL'ENVIRONNEMENT
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Christine Stewart
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Christine Stewart
VL'HÉPATITE C
VM. Greg Thompson

. 1430

VL'hon. Allan Rock
VM. Greg Thompson
VL'hon. Allan Rock
VM. Grant Hill
VL'hon. Allan Rock
VM. Grant Hill
VL'hon. Allan Rock
VLES SOINS DE SANTÉ
VMme Pauline Picard
VL'hon. Allan Rock

. 1435

VMme Pauline Picard
VL'hon. Allan Rock
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Art Hanger
VM. John Richardson
VM. Art Hanger
VM. John Richardson
VLE TRANSPORT AÉRIEN
VM. Michel Guimond
VL'hon. David M. Collenette
VM. Michel Guimond
VL'hon. David M. Collenette

. 1440

VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VLES FORCES ARMÉES CANADIENNES
VM. Claude Bachand
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VMme Val Meredith
VL'hon. Jane Stewart
VMme Val Meredith

. 1445

VL'hon. Jane Stewart
VL'ACCUEIL BONNEAU
VM. Denis Coderre
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'HÉPATITE C
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock

. 1450

VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Jean Dubé
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VM. Jean Dubé
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLE NIGÉRIA
VM. David Pratt
VL'hon. David Kilgour
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Reed Elley
VL'hon. Jane Stewart
VLES CASINOS DE BATEAUX DE CROISIÈRE
VMme Christiane Gagnon
VL'hon. Anne McLellan

. 1455

VLA JUSTICE
VM. Svend J. Robinson
VL'hon. Anne McLellan
VL'EMPLOI
VM. Jean Dubé
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLA GESTION SCOLAIRE
VM. Mauril Bélanger
VL'hon. Sheila Copps
VLE PARC NATIONAL BANFF
VM. Jim Abbott
VL'hon. Sheila Copps
VLA CORPORATION DU PORT DE MONTRÉAL
VM. Réal Ménard

. 1500

VL'hon. David M. Collenette
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLes commentaires de députés
VM. Paul Bonwick

. 1505

VLa période des questions
VM. Reed Elley
VM. Peter Adams
VAFFAIRES COURANTES
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VDÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
VM. Bernard Patry
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VSanté
VMme Beth Phinney
VLA LOI SUR LES BANQUES
VProjet de loi C-420. Introduction et première lecture
VL'hon. Lorne Nystrom

. 1510

VLA LOI SUR L'INTÉRÊT
VProjet de loi C-421. Présentation et première lecture
VL'hon. Lorne Nystrom
VL'ENVIRONNEMENT
VL'hon. Charles Caccia
VPÉTITIONS
VLa loi C-68
VM. Monte Solberg
VLe Sénat
VM. Monte Solberg
VLa loi sur les jeunes contrevenants
VM. Monte Solberg

. 1515

VLe réacteur CANDU
VM. Jim Karygiannis
VLe parc provincial Ipperwash
VM. Gordon Earle
VLes garderies
VM. Scott Brison
VL'aide au suicide
VM. Sarkis Assadourian
VLe contrôle des armes à feu
VM. Jack Ramsay
VLa Loi sur les jeunes contrevenants
VM. Jack Ramsay
VLe mariage
VM. Tom Wappel

. 1520

VLe contrôle des armes à feu
VM. Bill Casey
VLa taxe sur les produits et services
VM. George Proud
VLe contrôle des armes à feu
VM. Jay Hill
VLe fonds d'indemnisation des agents de la sécurité publique
VM. Paul Szabo
VLes armes à feu
VM. Howard Hilstrom
VLes crimes violents
VM. Howard Hilstrom
VLe service de traversier
VM. Gerry Byrne
VLes affaires étrangères
VM. Andrew Telegdi
VLe Code criminel
VM. Andrew Telegdi
VLa taxe sur les produits et services
VM. Andrew Telegdi

. 1525

VL'hépatite C
VM. Greg Thompson
VLe projet de rein bioartificiel
VM. Peter Adams
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VM. John Cummins
VM. Jim Pankiw
VDEMANDES DE DOCUMENTS
VM. Peter Adams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1530

VLA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE
VProjet de loi C-25. Étape du rapport
VMotion d'approbation
VL'honorable Raymond Chan
VTroisième lecture
VL'hon. Raymond Chan
VM. John Richardson
VM. Peter Adams
VM. John Nunziata

. 1535

. 1540

. 1545

VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VM. Peter Adams
VMotion
VLA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE
VProjet de loi C-25. Troisième lecture
VM. John Richardson

. 1550

VM. Keith Martin

. 1555

VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VMotion
VL'hon. Don Boudria

. 1600

VLA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE
VProjet de loi C-25. Troisième lecture
VM. Keith Martin

. 1605

VM. Leon E. Benoit

. 1610

. 1615

VM. Peter Goldring

. 1620

. 1625

VM. David Price

. 1630

. 1635

VM. Maurice Godin

. 1640

. 1645

. 1650

VMESSAGE DU SÉNAT
VLe vice-président
VLA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE
VM. Dick Proctor

. 1655

. 1700

. 1705

VReport du vote sur la motion
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VL'hon. Don Boudria
VLE COMMISSAIRE À L'INFORMATION
VL'hon. Don Boudria
VMotion

. 1710

. 1715

. 1720

VM. Randy White

. 1725

. 1730

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLES MISSIONS MILITAIRES À L'EXTÉRIEUR DU PAYS
VMotion
VM. Bob Mills

. 1735

. 1740

. 1745

. 1750

VM. Ted McWhinney

. 1755

VM. Daniel Turp

. 1800

. 1805

. 1810

VM. Bill Blaikie

. 1815

VM. David Price

. 1820

. 1825

VM. Lynn Myers

. 1830

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLE COMMISSAIRE À L'INFORMATION
VMotion
VM. Bill Blaikie

. 1835

. 1840

VM. Ken Epp
VM. Peter MacKay

. 1845

. 1850

VM. John Bryden

. 1855

VM. Gordon Earle

. 1900

VM. Ken Epp

. 1905

. 1910

VM. John Bryden

. 1915

VLOI SUR L'ÉDUCATION DES MI'KMAQ
VProjet de loi C-30. Troisième lecture
VL'hon. Lucienne Robillard
VM. Bernard Patry

. 1920

. 1925

. 1930

VM. Claude Bachand

. 1935

. 1940

. 1945

. 1950

. 1955

. 2000

VM. Gordon Earle

. 2005

. 2010

VMme Michelle Dockrill

. 2015

. 2020

VM. Gerald Keddy

. 2025

VM. Ken Epp
VM. Derrek Konrad

. 2030

. 2035

. 2040

VM. Gordon Earle

. 2045

. 2050

VReport du vote sur la motion
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VProjet de loi C-4. Deuxième lecture et adoption des amendements proposés par le Sénat
VM. Jay Hill

. 2055

. 2100

. 2105

VMotion

. 2110

VM. Rick Borotsik

. 2115

. 2120

VM. Wayne Easter

. 2125

. 2130

. 2135

VM. Jay Hill

. 2140

VM. Myron Thompson

. 2145

VM. Leon E. Benoit
VM. Dick Proctor

. 2150

. 2155

VM. Leon E. Benoit

. 2200

. 2205

VM. Myron Thompson

. 2210

. 2215

VM. Dick Proctor

. 2220

VM. Mac Harb
VM. Ken Epp

. 2225

. 2230

. 2235

VM. Jay Hill

. 2240

VM. Leon E. Benoit
VM. Wayne Easter

. 2245

VM. Jake E. Hoeppner

. 2250

. 2255

. 2300

VM. Ted White

. 2305

VM. John Bryden

. 2310

VM. Jay Hill
VDemande et report du vote

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 119


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 10 juin 1998

La séance est ouverte à 14 heures. .TUCPrière

 

. 1400 +

Le Président: Comme le veut l'usage le mercredi, nous chanterons Ô Canada sous la conduite du député Bruce—Grey.

[Note de la rédaction: Les députés se lèvent et chantent Ô Canada.]



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA FAMINE EN UKRAINE

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, la communauté ukrainienne dans ma circonscription de Parkdale—High Park, et les Ukrainiens du monde entier commémorent le 65e anniversaire de la famine de 1932-1933 en Ukraine, qui est considérée comme l'une des plus grandes famines du XXe siècle et qui a fait sept millions de morts.

En 1932, sous Joseph Staline, l'Union soviétique avait considérablement accru ses achats de céréales. Le blé cultivé sur les terres ukrainiennes était expédié en Russie, ce qui fait que beaucoup d'Ukrainiens n'avaient plus rien à manger.

Les dirigeants soviétiques, avec l'appui de l'armée et de la police secrète, s'étaient emparés de toutes les vivres en vue de démoraliser les Ukrainiens à l'esprit très indépendant. De vastes parties de l'Ukraine furent ainsi interdites à l'entrée et à la sortie de vivres.

Ce n'est qu'après la chute de l'Union soviétique dans les années 80 que l'attention mondiale a été attirée sur cette terrible tragédie humaine.

Je commémore aujourd'hui avec les membres de la communauté ukrainienne et tous les Canadiens cette famine délibérément provoquée par l'homme, qui a coûté la vie à sept millions d'Ukrainiens.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la situation à la réserve Pacheedaht, qui est située dans ma circonscription, est désespérée. Voilà plus d'un an que les membres de la bande supplient le ministère des Affaires indiennes de faire une enquête sur les allégations de détournement massif de fonds et de manque de responsabilité. Par exemple: détournement de 1,8 million de dollars provenant de Parcs Canada; détournement de 1,3 million de dollars devant servir à la négociation de traités; détournement de 47 000 $ destinés à un programme de prévention du suicide; contamination de la nappe phréatique par des champs d'épuration; fraude en matière d'aide sociale et de pension.

Qu'a répondu la ministre? Allez voir la GRC. Or, la GRC ne peut pas faire enquête. Il s'ensuit donc que la population de Pacheedaht est dans un cercle vicieux dont elle ne peut plus sortir et qui la conduit à vivre dans des conditions sociales dignes du Tiers monde.

Le gouvernement a distribué de l'argent à ces autochtones sans qu'il y ait de comptes à rendre. Voilà qui est proprement abuser des gens de la base.

J'exhorte la ministre à écouter les autochtones, à commander des enquêtes indépendantes et à aider rapidement les gens de la base.

*  *  *

[Français]

L'ABITIBI

M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le Président, le 13 juin prochain, l'Abitibi fêtera le 100e anniversaire de l'annexion de son territoire au Québec.

En 1867, l'espace abitibien faisait partie des Territoires du Nord-Ouest. Des négociations s'amorcèrent alors entre les provinces et le gouvernement fédéral au sujet de l'attribution des régions nordiques du pays.

C'est le 13 juin 1898 que le gouvernement canadien répond favorablement à la demande du gouvernement québécois et les territoires d'Abitibi et de Mistissini sont annexés par voie législative.

Il a fallu 25 années de démarches entre les diverses instances pour faire aboutir ce dossier. Le Québec voyait ainsi son territoire agrandi de 168 749 kilomètres carrés.

Cette région, reconnue pour ses activités minières et forestières, joue un rôle important dans l'histoire économique du Québec et du Canada.

Je transmets mes voeux de succès à tous ceux qui, tout au long de l'été, organiseront des festivités pour commémorer ce grand anniversaire.

*  *  *

[Traduction]

LE QUÉBEC

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, le Canada n'est pas les États-Unis ségrégationnistes de jadis, où des fonctionnaires gouvernementaux, à tous les paliers, se mettaient d'accord pour priver les Américains noirs de leur droit démocratique et constitutionnel de voter à toutes les élections, y compris les élections scolaires. Les ségrégationnistes recouraient à toutes sortes de stratagèmes juridiques pour faire en sorte que les noirs du Sud ne puissent pas faire figurer leurs noms sur les listes des électeurs.

Au Québec, des élections ont actuellement lieu dans les commissions scolaires linguistiques et des milliers d'anglophones sont privés de leur droit de voter pour les commissions scolaires de langue anglaise parce que le gouvernement péquiste a mal conçu le processus d'inscription électorale.

J'invite tous mes collègues, y compris les députés bloquistes, à joindre leurs voix à la mienne pour dénoncer ce fiasco électoral et pour exhorter le gouvernement du Québec à s'assurer que tous les Québécois pourront voter au cours des élections qui auront lieu le 14 juin dans les commissions scolaires linguistiques.

*  *  *

[Français]

LES SERVICES D'ÉDUCATION CANADIENS

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, il y a quelques jours, le 8 mai, se tenait, à l'Université York de Toronto, une table ronde coprésidée par le ministre du Commerce international portant sur la commercialisation des services d'éducation canadiens.

Les participants incluaient des représentants des associations d'éducation nationale, des organismes provinciaux, des établissements privés et publics de tous les niveaux, du Conseil des ministres de l'Éducation, des ministres provinciaux de l'Éducation, y compris le Québec, et des représentants fédéraux.

Cette rencontre mérite d'être soulignée, car elle ouvre la voie à l'augmentation des échanges entre tous les fournisseurs de services d'éducation et de formation du Canada et les partenaires internationaux.

Connaissant les réalisations canadiennes en éducation, ainsi que le potentiel énorme d'échanges et de coopération internationale dans ce domaine, je crois que l'initiative du ministre du Commerce international stimulera la mise en place de nombreux partenariats visant à commercialiser notre expertise en éducation, ici et à l'étranger.

C'est une autre bonne nouvelle, à la fois pour notre économie et pour nos éducateurs-entrepreneurs.

*  *  *

 

. 1405 + -

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, en raison de la décision Delgamuukw, la totalité de la Colombie-Britannique peut maintenant faire l'objet de revendications territoriales.

La compétence juridique du gouvernement de Colombie-Britannique sur ses citoyens autochtones et sur ses ressources naturelles se trouve donc remise en cause. Autrement dit, les bases du gouvernement provincial ne sont plus sûres. Que fait le gouvernement fédéral?

Le budget des dépenses pour l'an prochain montre une réduction d'un peu plus de 200 millions jusqu'en 2001 des dépenses pour les revendications territoriales au ministère des Affaires indiennes. Ce budget des dépenses ne prévoit pas un seul dollar pour un passif éventuel découlant de la décision Delgamuukw.

J'invite le gouvernement à s'attaquer au problème dès que possible. Mettons-nous au travail.

*  *  *

[Français]

LE TRICENTENAIRE DE LA MAISON SAINT-GABRIEL

M. Raymond Lavigne (Verdun—Saint-Henri, Lib.): Monsieur le Président, une page de notre histoire s'est ouverte cette année dans le sud-ouest de Montréal, à Pointe-Saint-Charles, dans mon beau comté de Verdun—Saint-Henri.

En effet, la Maison Saint-Gabriel fête cette année son tricentenaire. Cette maison, construite par François LeBer et achetée par Marguerite Bourgeois en 1668, servait à la fois de métairie et de résidence pour les filles du Roy.

Grâce au partenariat de Patrimoine Canada et de la Maison Saint-Gabriel, des activités couvrant les aspects de la vie quotidienne se tiendront tous les dimanches dans le cadre des fêtes du 300e anniversaire.

En tant que député de Pointe-Saint-Charles, permettez-moi de féliciter toutes les organisatrices et tous les organisateurs qui nous offrent cette page de notre patrimoine, et tout particulièrement, Mme Madeleine Juneau, un pilier de cette organisation.

*  *  *

LA VILLE DE L'ANCIENNE-LORETTE

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, j'habite la ville de L'Ancienne-Lorette, située dans la circonscription de Québec-Est, dont je suis le député.

En 1650, les Hurons, chassés par les Iroquois, sont partis de Penetanguishene, ma ville natale, pour venir s'installer à L'Ancienne-Lorette, que le père Chaumonot, jésuite, devait fonder en 1673.

La ville célèbre donc cette année un événement marquant de notre histoire qui remonte au régime français, soit ses 325 ans de fondation.

Tout au long du mois de juin, plusieurs activités permettront aux citoyennes et citoyens de L'Ancienne-Lorette de fêter ce 325e anniversaire. Souvenirs et plaisirs sont au rendez-vous, puisque les Lorettaines et Lorettains pourront, entre autres, admirer une exposition de photos anciennes, assister à la vie du fondateur, le père Chaumonot, etc.

Je félicite donc tous les organisateurs et organisatrices de ces festivités et souhaite un bon 325e anniversaire à toute la population de L'Ancienne-Lorette.

*  *  *

[Traduction]

LE DÉCÈS DE PETER WONG

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à M. Peter Wong, président de la municipalité régionale de Sudbury.

M. Wong a eu l'honneur d'être le premier président élu de la région.

Ce poste était la culmination d'une longue et brillante carrière au service du public, d'abord comme conseiller scolaire puis comme maire de la ville de Sudbury.

Dans ses fonctions publiques, M. Wong avait un style de leadership fondé sur la confiance, la loyauté et le respect de ses pairs et de ses électeurs. Quiconque rencontrait Peter ou travaillait avec lui savait qu'il avait affaire à un homme de principes, un homme au dévouement altruiste pour sa communauté.

Dans ses rapports avec les diverses organisations locales, il a fixé la barre à un niveau que peu pourront jamais atteindre. Il sera regretté.

Au nom de la population de Nickel Belt et des députés, je présente mes condoléances à la famille Wong, à la femme de Peter, Lynn, à sa fille Nancy et à son fils Eric.

*  *  *

L'HÉPATITE C

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, dans le cadre de sa lutte visant à obtenir une indemnisation pour tous les Canadiens qui ont contracté l'hépatite C en recevant du sang contaminé, le jeune Joey Haché, âgé de 15 ans, compte traverser le Canada à bicyclette. Il quittera Halifax lundi prochain.

Ayant lui-même contracté cette maladie parfois mortelle du foie par suite d'une transfusion sanguine, Joey considère son périple comme «le cycle de la conscience». L'entreprise vise un double objectif: attirer l'attention sur le sort des victimes de l'hépatite C brutalement écartées par le gouvernement libéral et recueillir un million de signatures sur une pétition qui demande au gouvernement d'indemniser toutes les victimes de cette tragédie.

 

. 1410 + -

Je me suis entretenu avec Joey Haché ce matin et je lui ai demandé s'il avait un message pour le premier ministre. Il m'a demandé de lui dire qu'il n'abandonnera pas la lutte tant que le gouvernement n'acceptera pas de faire ce qui est juste et qu'il se présentera comme la conscience du premier ministre.

Tous ceux qui désirent souhaiter bonne chance à Joey avant son départ pourront le voir ici même devant la Tour de la Paix après la période des questions.

Au nom de tous les députés de la Chambre, je tiens à souhaiter bonne chance à Joey Haché.

*  *  *

LA RECHERCHE SUR LA LEUCÉMIE

M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer une cause des plus valables, soit la recherche sur la leucémie au Canada. Cette maladie, qui est en fait un cancer des cellules sanguines, touche les enfants et les adultes de tous âges et milieux sociaux. Les centres canadiens de recherche ont enregistré des progrès intéressants au chapitre de l'espérance de vie des personnes atteintes de la maladie. Le taux de guérison chez les enfants est de 65 p. 100. La situation ne peut s'améliorer qu'avec l'appui soutenu de tous les Canadiens.

Le Leukemia Research Fund of Canada, un organisme bénévole oeuvrant au niveau national, recueille des fonds qui permettent de subventionner les chercheurs canadiens et de sensibiliser la population à cette maladie. Des milliers de bénévoles ont donné plusieurs heures de leur temps au cours des 42 dernières années.

Le Gouverneur général, Roméo Leblanc, a accordé son appui à cette cause des plus louables. Je demande l'appui de la Chambre pour désigner le mois de juin comme le Mois de la recherche sur la leucémie. Je tiens à remercier tous les bénévoles du temps qu'ils consacrent à cette oeuvre et à encourager les Canadiens à se joindre à la lutte contre cette maladie. Je les remercie au nom de ma mère, qui a survécu à cette terrible maladie.

*  *  *

LA FAMINE UKRAINIENNE

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, il y a deux ou trois générations, au pays de mes grands-parents, sept millions d'Ukrainiens sont morts de faim sous le régime de Joseph Staline. Déterminé à soumettre l'Ukraine à l'Union Soviétique, Staline a affamé les agriculteurs ukrainiens et a ensuite expédié leur grain en Russie pour le vendre au pays occidentaux. La nourriture quittait le pays, mais la population y restait bloquée. Cela a eu des effets dévastateurs et a presque détruit une génération entière d'Ukrainiens. Un auteur soviétique a écrit à ce sujet que les gens mouraient lentement, seuls, piégés dans leurs maisons.

Qui plus est, c'était un crime en Ukraine de parler de la famine. De nombreux observateurs occidentaux l'ont même considérée comme une simple rumeur, jusqu'à ce que des documents, divulgués dans les années 1980, en confirment la véracité.

Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada est devenu la nouvelle patrie de nombreux Ukrainiens qui avaient survécu à la famine. Tous les Canadiens se joignent à eux et à leurs familles en ce mois qui marque le 65e anniversaire de la famine ukrainienne. Nous nous souviendrons, pour que cela ne se reproduise plus jamais.

*  *  *

[Français]

L'ALGÉRIE

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, au nom du groupe parlementaire Canada-Algérie, et en mon nom, je tiens à souhaiter la bienvenue à la délégation parlementaire composée de membres du conseil de la Nation d'Algérie, et présidée par M. Bachir Boumaza.

Nous sommes heureux que les présidents des deux Chambres de notre Parlement reçoivent officiellement ces sénatrices et sénateurs qui viennent échanger entre parlementaires sur nos façons de faire. Cette visite nous permettra de tisser des liens et de consolider ceux déjà existants.

Dans les moments difficiles que vit l'Algérie, il faut voir la lueur d'espoir que suscite l'apparition d'un parlement et d'un sénat multipartites. La bataille pour la démocratie en Algérie mérite notre appui.

J'invite donc tous les parlementaires à participer et à apporter leur contribution au raffermissement de la jeune démocratie en Algérie et à échanger avec nos visiteurs algériens.

*  *  *

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, au moment où le Parti réformiste affirme que les Canadiens se joignent en grand nombre à sa soi-disant campagne de l'alternative unie, un sondage d'opinion publique du réseau CTV et de la maison Gallup indique une tendance tout autre. Selon les résultats de ce sondage, le Parti réformiste recueillerait maintenant moins d'appuis que le Parti conservateur. Seulement 12 p. 100 des Canadiens accordent leur appui aux réformistes, comparativement à 15 p. 100 aux conservateurs, qui n'ont même pas de chef. Dans ma propre province, l'Ontario, où ils affirment réaliser des progrès, les réformistes ne recueillent qu'un maigre 8 p. 100 d'appui.

Que peuvent-ils faire pour renverser cette tendance? Ils pourraient peut-être cesser d'aliéner les Canadiens et renoncer aux positions extrémistes qu'ils adoptent dans la plupart des dossiers publics. Mais ils pourraient aussi se débarrasser simplement de leur chef et tenter de refaire leurs appuis en convaincant la députée de Saint John de prendre la tête de la campagne pour une alternative unie.

*  *  *

[Français]

L'ACCUEIL BONNEAU

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à la Chambre pour offrir, en mon nom et en celui de mes collègues conservateurs, tout mon appui et toute ma sympathie à tous ceux qui ont été touchés par la terrible tragédie qui s'est produite à l'Accueil Bonneau, hier, à Montréal.

Par cette occasion, je tiens aussi à souligner l'excellent travail que l'Accueil Bonneau a effectué et doit continuer d'effectuer auprès des sans-abri de la région de Montréal.

Dans cette optique, j'invite donc la population montréalaise à s'impliquer, tant au niveau monétaire que bénévole, pour aider à la reconstruction de l'Accueil Bonneau.

J'invite par le fait même les deux paliers de gouvernement à appuyer les efforts des Montréalais pour que l'Accueil redémarre ses activités le plus rapidement possible.

 

. 1415 + -

[Traduction]

La ville de Saint John a été frappée par une terrible tragédie hier, lorsqu'une explosion s'est produite à la raffinerie de pétrole de la compagnie Irving. Mes collègues et moi offrons notre soutien aux victimes et à leurs familles.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, Ann-Margaret Dickey était un soldat dans les Forces canadiennes.

Aujourd'hui, elle a donné courageusement une conférence de presse durant laquelle elle a affirmé qu'il y a deux ans, elle a été agressée sexuellement à quatre reprises en dix jours sur une base militaire du Québec. Elle a déclaré qu'elle avait signalé ces agressions à la police militaire et aux services médicaux, mais qu'on avait fait fi de ses plaintes et qu'on lui avait dit de ne pas soulever la question à nouveau.

Ma question s'adresse donc au premier ministre. Comment se fait-il que le soldat Dickey ait dû rendre son histoire publique aujourd'hui, révéler des renseignements personnels douloureux, afin d'attirer l'attention du gouvernement sur sa plainte?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est une accusation de nature criminelle qui doit être traitée par un groupe spécial, le service national des enquêtes, responsable de ces enquêtes. On me dit qu'il effectue l'enquête à ce stade-ci.

Hier, nous avons nommé une personne de l'extérieur qui sera chargée d'étudier les plaintes. Le soldat Dickey a décidé de tenir cette conférence de presse aujourd'hui.

On me dit qu'une enquête est en cours à ce sujet et qu'on ira au bout des choses. Si le soldat Dickey a été victime d'actes criminels, les individus en cause seront traînés devant les tribunaux.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, les soldats de sexe féminin n'ont aucune confiance dans les engagements du gouvernement ni dans ses procédures pour traiter les cas de harcèlement sexuel ou d'agressions sexuelles au sein des Forces canadiennes.

Le ministre a nommé un ombudsman et c'est une bonne chose, mais les enquêteurs de cet ombudsman sont exactement les mêmes gens qui ont dit au soldat Dickey d'oublier toute cette affaire. Le ministre répare un maillon de la chaîne, mais c'est la chaîne qui pose un problème. Comment l'ombudsman peut-il s'acquitter de son travail lorsque le gouvernement lui-même essaie de cacher tous ces problèmes?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale a dit très clairement, la semaine dernière, qu'il y aura une politique de tolérance zéro et nous entendons veiller à ce que les auteurs de ces actes répréhensibles soient traînés devant des tribunaux civils.

En 1997, le service national des enquêtes n'existait pas. Il lui incombe justement de s'occuper de ces cas. Le député dit-il maintenant que ce service ne s'acquitte peut-être pas de sa tâche comme il le devrait? Nous nous penchons là-dessus, et je vous dis que si certaines personnes ont commis des actes criminels, elles seront poursuivies devant les tribunaux. De plus, nous avons nommé l'ombudsman.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, tout le monde à la Chambre veut croire que des progrès sont réalisés dans le traitement de ces plaintes. Tous les députés veulent croire qu'il y a une politique de tolérance zéro. Nous voulons croire que quelqu'un, quelque part au gouvernement, va s'occuper des préoccupations des soldats et traiter leurs plaintes avec dignité et rapidité.

Comment pouvons-nous croire que le gouvernement prend tout cela au sérieux, alors que, chaque jour, des gens comme le soldat Dickey nous font part de nouvelles actions répréhensibles?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à l'instar de tout le monde, je trouve cela inquiétant et il y a.

Des voix: Oh, oh!

Le très hon. Jean Chrétien: Oui, je trouve cela inquiétant. Nous avons mis des mécanismes en place, mais pendant longtemps, les gens n'osaient pas parler. Il est vraiment bon que, de nos jours, ils aient assez confiance pour aider le gouvernement à s'assurer que ce type de comportement n'est pas toléré dans l'armée canadienne.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, Ann-Margaret Dickey a porté son cas à l'attention de trois ministres de la Défense successifs, dont le ministre actuel. Pas un ne lui a donné de réponse satisfaisante. Ils ne lui ont même pas dit si une enquête était en cours.

Pourquoi faut-il une conférence de presse à Ottawa pour que le ministre commence à réagir à des allégations aussi graves?

 

. 1420 + -

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, une enquête est toujours en cours à l'échelle nationale. Il ne sied donc pas de faire le moindre commentaire, comme le savent tous les députés.

Les allégations d'agression sexuelle sont prises au sérieux par le ministère de la Défense nationale. Nous prenons nos responsabilités et le Parti réformiste, lui, continue à nous dénoncer. Typique des réformistes.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, le soldat Dickey essaye depuis deux ans d'obtenir justice et depuis deux ans la réaction du gouvernement et des forces armées est d'étouffer l'affaire.

Une ligne téléphonique sans frais mise à la disposition des victimes d'agression sexuelle aurait reçu 40 appels en une semaine. Ann Margaret Dickey a appelé la semaine dernière mais elle n'a pas encore reçu de réponse. Le ministre peut-il nous dire ce qui est advenu des 39 autres appels?

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, on parle de 39, mais sans donner aucune précision. Comme puis-je répondre à quelque chose d'aussi vague?

Le cas du soldat Dickey fait l'objet d'une enquête; nous allons tirer les choses au clair. Nous porterons des accusations quand le moment sera venu.

*  *  *

[Français]

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, alors que la situation se détériore dans l'est du Québec, le ministre québécois de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Guy Julien, vient de déclarer à la presse qu'il n'a en main aucune proposition provenant du fédéral pour régler la question de la Stratégie du poisson de fond, pas plus, d'ailleurs, qu'il n'y a de discussions en cours en ce moment.

Comment le ministre du Développement des ressources humaines pouvait-il déclarer, hier, à la Chambre, qu'il travaillait en concertation avec les provinces pour régler cette question, alors qu'il vient d'être démenti formellement par son collègue du Québec?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je vous assure qu'il y a eu des rencontres au niveau des fonctionnaires, et à ce moment-ci, mon sous-ministre associé est en contact avec plusieurs directeurs généraux et plusieurs représentants des provinces de l'Atlantique.

Je peux vous assurer que les discussions sont vivantes et vont très bien, parce que nous tenons à travailler en concertation. C'est un problème très important, nous sommes conscients de la situation difficile des pêcheurs qui devront vivre dans un environnement où les pêcheries sont très réduites et diminuées, et c'est un problème sur lequel nous voulons nous pencher avec les provinces.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, à quel jeu joue le ministre du Développement des ressources humaines, alors qu'un drame humain sans précédent se joue dans l'est du Québec, en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine et dans l'est du Canada?

À quel jeu joue-t-il quand il nous dit que ses fonctionnaires discutent avec d'autres fonctionnaires? Est-ce qu'il ne comprend pas? C'est lui qui est interpellé comme membre du gouvernement par les travailleurs de la pêche qui ont besoin du gouvernement.

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, ce que je peux dire, c'est que nos gens sont allés rencontrer les gens des provinces avec un mandat précis, avec des choses à discuter qui s'adressent aux communautés et aux individus de ces communautés. Justement parce que nous avons des choses précises à discuter à ce moment-ci, nous serons en mesure de prendre des décisions adéquates au moment opportun.

Mais je pense qu'il est tout à fait normal que le ministre puisse commencer à faire le travail avec les provinces par l'entremise de ses fonctionnaires, mais la décision, nous allons la prendre au bon moment, une fois que les consultations seront terminées.

[Traduction]

Le Président: Je vous demanderais une fois de plus, chers collègues, d'écouter les réponses au lieu de bavarder.

[Français]

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, je répète qu'un drame humain se prépare dans l'est du Canada.

À Terre-Neuve, dans les provinces Maritimes, aux Îles-de-la-Madeleine et enfin, en Gaspésie, toute une population manifeste et crie son désarroi alors que la Stratégie du poisson de fond prend fin.

 

. 1425 + -

Puisque le problème des sinistrés de la pêche est d'une ampleur sans précédent et qu'il nécessite des mesures exceptionnelles, comment le ministre peut-il nous dire, comme il le faisait encore la semaine dernière, que tout ce qu'il envisage pour aider les travailleurs des pêches, c'est d'utiliser les programmes ordinaires de son gouvernement?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je dois dire qu'en effet, la programmation régulière de notre gouvernement est excellente et elle a été largement améliorée au cours des dernières années. Des centaines de milliers de Canadiens sont très heureux de cette programmation régulière.

Je vous assure qu'il y a, parmi les outils que nous pouvons utiliser, des moyens comme les rachats de permis. Nous pouvons prendre des mesures de développement économique. Nous pouvons prendre des mesures d'ajustement. Il y a des outils qui sont là et nous allons nous assurer, en concertation avec les provinces, qu'ils rencontrent les besoins des communautés et des individus en fonction des priorités que nous avons dans le développement.

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, à part d'avoir des mesures ordinaires, on a un ministre ordinaire aussi.

Le ministre est-il conscient que par son attitude technocratique, non seulement il est responsable du gâchis dans lequel se retrouvent les populations, mais en plus, au premier chef, il est maintenant responsable de toute l'agitation sociale dans l'est du Canada?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement a été le premier à réagir dans la situation très pénible que vivait la population. Nous avons mis, dans la situation financière difficile que nous connaissions, 1,9 milliard de dollars dans l'Atlantique pour aider les pêcheurs et les communautés et nous continuons d'être très sensibles à leurs préoccupations.

Je peux vous assurer que notre compassion à l'endroit de ce que vivent ces gens est...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: L'honorable chef du Nouveau Parti démocratique a la parole.

*  *  *

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question pour le premier ministre.

À Kyoto, le Canada a convenu que la réduction des émissions de gaz à effet de serre commence par chez soi. On doit nettoyer d'abord sa propre cour. Mais aujourd'hui, on a des preuves que le Canada travaille en coulisse à Bonn en faveur de négociations d'émissions illimitées, une porte de sortie béante pour éviter de réduire les émissions nationales.

Qu'est-il advenu de l'engagement pris par le Canada à Kyoto? N'était-ce que de la poudre aux yeux?

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement prend très au sérieux l'engagement de Kyoto. Ce n'était pas de la poudre aux yeux. Il était extrêmement important pour le Canada d'inscrire dans le protocole de Kyoto des mécanismes visant la négociation des émissions, la mise en oeuvre conjointe et le développement propre.

Pourquoi voudrions-nous réduire les gaz à effet de serre au tarif de 20 $ la tonne si nous pouvons le faire pour 2 $ la tonne? Voilà pourquoi nous allons dans cette direction.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, pourquoi voudrions-nous signer une entente que nous n'avons pas l'intention d'honorer? Les Canadiens n'ont pas besoin d'échappatoires, mais plutôt de leadership en matière de changement climatique. C'est également ce que veut le commissaire à l'environnement.

Pourquoi le gouvernement dit-il une chose aux Canadiens, et une tout autre chose derrière des portes closes à Bonn?

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, ces allégations sont absolument ridicules. Notre gouvernement a tout à fait l'intention d'honorer son engagement du protocole de Kyoto, et nous allons réduire nos émissions à 6 p. 100 sous les niveaux de 1990. La négociation des émissions constitue un moyen important d'atteindre ces buts non seulement pour le Canada, mais également pour d'autres pays. Nous faisons montre de leadership dans ce dossier.

Nous nous préoccupons de l'environnement. Nous nous préoccupons de la santé des gens, et nous allons atteindre nos objectifs.

*  *  *

L'HÉPATITE C

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, des documents de la commission Krever révèlent que Santé Canada a permis que le plasma ne soit pas soumis à des tests de dépistage jusqu'en 1993, même si on lui avait ordonné de faire tester ce produit avant cette année-là. L'ordre en avait été donné en 1990, sur les conseils de médecins et de la Croix-Rouge.

Le ministre admet-il que ce produit n'a pas été soumis à des tests de dépistage au cours de cette période? Dans l'affirmative, ne doit-on pas conclure que toutes les victimes ayant contracté l'hépatite C après 1990 devraient recevoir une indemnisation?

 

. 1430 + -

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le juge Krever a été saisi de tous les documents mentionnés dans ce rapport. Il a examiné tous les faits et il les a mentionnés dans son rapport.

Le reportage diffusé à la radio ce matin était faux à des égards importants. J'invite fortement le député à examiner les faits.

On allègue qu'aucune mesure n'a été prise avant 1993. En fait, Santé Canada a émis une directive en 1991. On a dit ce matin que Santé Canada avait attendu une étude américaine. C'est faux. Santé Canada avait ordonné aux fabricants de commencer à soumettre le plasma à des tests de dépistage au moins deux ans avant la publication du rapport des États-Unis. La directive de Santé Canada a été émise cinq mois avant que la FDA n'agisse.

Les faits étaient...

Le Président: Le député de Charlotte.

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, le ministre mêle les faits. Nous parlons de la responsabilité de Santé Canada. En dernière analyse, c'est ce ministère qui est chargé de la sécurité de l'approvisionnement en sang du Canada.

Le ministre envisage-t-il d'indemniser les victimes? Malheureusement, ses faits ne concordent pas avec les documents officiels. Encore une fois, songera-t-il à indemniser les victimes non comprises dans le programme d'indemnisation annoncé précédemment pour les victimes infectées entre 1986 et 1990?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, toute la question de l'indemnisation est actuellement examinée par un groupe de travail réuni avec les provinces.

Je voudrais cependant que le député admette qu'il est très important de bien présenter les faits. Les faits ont mal été rapportés ce matin. Santé Canada a émis une directive en 1991. Nous n'avons pas attendu les Américains. Nous avons devancé la FDA.

Soit dit en passant, nous avons accepté les recommandations de la commission Krever au sujet d'une réglementation. Nous allons engager plus de fonds pour établir une meilleure réglementation et pour faire en sorte que, grâce au Conseil de la sûreté du sang, nous possédions les normes de sûreté les plus élevées au profit de tous les Canadiens, car il s'agit là de notre priorité.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Santé soutient que les faits signalés dans le rapport sont inexacts. C'est en septembre 1991 que les États-Unis ont interdit l'utilisation de sang infecté par le virus de l'hépatite C. J'ai ici une directive de la Direction générale de la protection de la santé, qui a été diffusée le 15 novembre 1991 et qui prescrit de ne pas utiliser ce sang à compter du 1er janvier 1993. Les faits sont clairs.

Pourquoi avons-nous continué à utiliser du sang contaminé pendant tout ce temps?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je l'ai dit maintes fois, tous ces faits et tous ces documents ont été présentés au juge Krever; ils font l'objet de descriptions détaillées et de références dans le volume 2 du rapport.

La réponse à la question, c'est qu'en 1990-1991, les pratiques de Santé Canada reflétaient ce qu'on savait et ce qu'on comprenait à l'époque.

En 1991, conformément à la pratique courante, nous avons émis une directive demandant aux fabricants de tester le plasma. Nous étions en avance sur les Américains et sur les nombreux rapports qu'ils ont fait paraître par la suite.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je serais heureux de déposer ces documents à la Chambre, parce qu'ils prouvent que l'utilisation du sang contaminé était illégale aux États-Unis dès septembre 1991, mais qu'elle l'a été au Canada seulement en janvier 1993.

Je repose donc ma question. Pourquoi les responsables de la réglementation canadienne, en dépit des avertissements qu'ils avaient reçus de l'intérieur et de l'extérieur du Canada, ont-ils continué à utiliser du sang contaminé?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de renvoyer le député au volume 2 du rapport, où le juge Krever passe en revue tous les événements, examine tous les faits et les place dans le contexte des connaissances scientifiques de l'époque.

Je tiens à souligner que notre gouvernement a accepté les recommandations du rapport Krever concernant la réglementation. Nous avons mis en place le Conseil de la sûreté du sang. Nous allons avoir les normes les plus sévères au monde, parce que, pour le gouvernement, la sécurité est primordiale.

*  *  *

[Français]

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Santé refuse de reconnaître sa très lourde responsabilité dans la détérioration des soins de santé au Canada. Ses coupures font mal partout, quoi qu'il en dise maintenant.

Pourquoi le ministre refuse-t-il d'admettre que tous les Canadiens sont inquiets quant à l'avenir des soins de santé, que ceux-ci considèrent ce secteur comme la grande priorité et qu'ils souhaitent qu'Ottawa investisse ses surplus pour redonner aux provinces une partie de ce que le fédéral leur a coupé au chapitre des soins de santé?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la santé est une des priorités clés de ce gouvernement. C'est la raison pour laquelle nous avons déjà augmenté les transferts aux provinces pour établir un montant de 12,5 milliards de dollars chaque année, pour toutes les provinces, dans le secteur de la santé.

 

. 1435 + -

Nous avons déjà signalé l'engagement de ce gouvernement de renouveler et de renforcer le système de soins de santé au Canada. C'est une priorité pour ce gouvernement.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, on connaît la situation au Québec. Mais il y a eu des fermetures d'hôpitaux en Ontario. À l'Île-du-Prince-Édouard, on parle d'hôpitaux bâtis avec des fonds privés, et j'en passe.

Si le gouvernement fédéral était aussi généreux qu'il le prétend avec les provinces, comment peut-il expliquer alors que, dans toutes les provinces en même temps, les soins de santé font problème et que les gouvernements n'arrivent plus à répondre aux attentes de la population?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons répondu clairement. Nous avons souligné le fait que pour nous, la santé, c'est une priorité clé.

Nous avons déjà agi à cet égard dans le budget de février dernier. Nous avons investi de l'argent dans la recherche, dans les fonds de restructuration de la santé. Le fait est que le Québec investit moins d'argent que le gouvernement fédéral dans le domaine de la santé.

*  *  *

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, il y a un mois environ, le Comité de la défense, composé de députés libéraux et de députés de l'opposition, s'est réuni à Halifax.

À cette occasion, Ann Margaret Dickey est venue voir le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense et lui a fait part de ses doléances. Il a promis qu'il recommuniquerait avec elle.

Ma question au secrétaire parlementaire est la suivante: Pourquoi n'a-t-il pas donné suite à cette demande?

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que j'enfreindrais les règles. Cette enquête se poursuit. Elle est entre les mains du Service national des enquêtes et toute intervention de ma part à ce moment-ci serait malvenue.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, Ann Margaret Dickey voulait qu'enquête soit faite sur sa plainte. Le prétexte du secrétaire parlementaire est inacceptable.

Va-t-il promettre à Ann Margaret Dickey que cette enquête va avoir lieu sous la direction du SNE et de l'ombudsman? Est-il prêt à faire cette promesse?

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les allégations d'agression sexuelle formulées par la personne nommée ont été examinées.

L'ombudsman n'est pas habilité à intervenir dans les affaires criminelles. De tels dossiers relèvent du SNE et c'est à lui qu'il faut s'adresser lorsque de telles allégations sont formulées. L'affaire est en cours et les enquêteurs s'en occupent.

*  *  *

[Français]

LE TRANSPORT AÉRIEN

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral pénalise Air Canada au nom de sa stratégie qui vise à maintenir deux transporteurs nationaux au Canada.

Ma question s'adresse au ministre des Transports. En quoi cela mettrait-il en péril la grande stratégie de développement de deux transporteurs que d'accorder à Air Canada une liaison directe Montréal-Milan, destination qui n'est même pas couverte par Canadien?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà expliqué que c'est dans l'intérêt de tous les Canadiens que nous ayons des compagnies aériennes qui soient rentables, que ce soit Air Canada ou Les Lignes aériennes Canadien.

[Traduction]

Le député ne rend pas justice aux employés des Lignes aériennes Canadien international en prenant position jour après jour en faveur d'un transporteur commercial. Il n'adopte pas bien sûr une vision pancanadienne et ne s'arrête pas à la santé de l'industrie du transport aérien. Ce n'est pas surprenant étant donné l'étroitesse d'esprit, l'esprit de clocher dont fait toujours preuve le Bloc québécois. Contrairement à ce qu'il dit, il ne s'agit absolument pas de faire du tort à Montréal.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, en quoi cela mettrait-il en péril la grande stratégie de développement de deux transporteurs que d'accorder à Air Canada une liaison directe Montréal-Amsterdam, les Pays-Bas n'étant même pas couverts par Canadien?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, nous avons examiné chacune de ces liaisons. Nous avons méticuleusement analysé la question.

 

. 1440 + -

Je ferai remarquer au député qu'il y a deux ans, ces deux compagnies ont connu une crise. Leur avenir était compromis. Ce gouvernement s'est fermement prononcé en faveur de la concurrence au sein de l'industrie du transport aérien. Nous n'allons pas pénaliser une compagnie, en l'occurrence les Lignes aériennes Canadien international, en faisant quelque chose qui va nuire à son plan de restructuration.

Air Canada a retiré de gros avantages de ces ententes. Le député devrait aller voir les responsables d'Air Canada. Ils lui diront l'argent que cette entente va leur rapporter.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Depuis que la décision Delgamuukw a été rendue, les autochtones de la Colombie-Britannique ont revendiqué 100 p. 100 du territoire de la province. Cela fait plusieurs jours déjà que nous avons demandé à la ministre des Affaires indiennes quelle est sa position et nous n'avons toujours pas eu de réponse.

Le premier ministre peut-il nous dire quelle est la position du gouvernement? Croit-il que ces revendications sont légitimes? À qui appartient la Colombie-Britannique?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, la Colombie-Britannique appartient à tous ses habitants.

Des droits, des intérêts doivent être réconciliés et, à notre avis, le meilleur endroit pour ce faire est la table des traités où ils peuvent être négociés équitablement, ouvertement et dans un climat de confiance.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, la ministre des Affaires indiennes reconnaît enfin que la Colombie-Britannique appartient à tous ses habitants.

Ce que nous voudrions savoir maintenant, c'est si elle comprend l'importante de cette décision pour l'ensemble du Canada et les conséquences qu'elle aura pour Terre-Neuve, le Labrador, le Québec, l'Ontario, la Saskatchewan et l'Alberta. Comprend-elle a quel point cette décision est importante et les répercussions qu'elle aura sur le reste du Canada?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous comprenons quelles sont les répercussions, bien sûr.

Nous avons été à la table avec toutes les parties en Colombie-Britannique. Nous réglons des revendications globales dans tout le Canada. Nous le faisons conformément aux valeurs canadiennes qui reconnaissent que les droits autochtones existent et qu'ils doivent être réconciliés dans un Canada moderne et cela, de façon juste et équitable.

Voilà ce que veulent les Canadiens de la Colombie-Britannique. Voilà ce que veulent tous les Canadiens.

*  *  *

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

On apprend aujourd'hui qu'une autre militaire a été victime d'agressions sexuelles et physiques dans les forces armées alors qu'elle était en poste à Saint-Jean. Elle a subi un véritable enfer, avant de faire face à un mur d'indifférence de toute la structure militaire, y compris de la part de l'actuel ministre de la Défense nationale et de ses prédécesseurs.

Le premier ministre entend-il demander au nouvel ombudsman de se pencher en priorité sur ce cas, de telle sorte que le ministre puisse prendre des sanctions énergiques contre ces prédateurs sexuels afin de mettre fin au...

Le Président: Je regrette d'interrompre l'honorable député. Le très honorable premier ministre a la parole.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répondu plus tôt qu'une enquête est menée sur le dossier en ce moment par un groupe d'enquête qui a été mis en place en 1997.

Évidemment, comme tout le monde le sait et comme le député l'a signalé, un ombudsman, qui ne fait pas partie des forces armées, a été nommé hier. Nous croyons que ces deux organismes sont capables de s'assurer que de tels actes ne se répètent pas, et que s'il y a eu des infractions criminelles, que les coupables en subissent les conséquences.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, le cabinet de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien n'hésite pas à communiquer des renseignements personnels et confidentiels. Or, quand il s'agit de politique gouvernementale, la ministre refuse de communiquer de l'information sur ce que le règlement des revendications territoriales coûtera aux Canadiens.

Combien en coûtera-t-il aux gens de la Colombie-Britannique pour régler les revendications territoriales?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, il faut concilier les droits des autochtones en Colombie-Britannique. Le meilleur endroit pour le faire, c'est à la table des négociations où toutes les parties, qui sont conscientes de leurs restrictions budgétaires, viennent résoudre ces problèmes avec pragmatisme étape par étape.

C'est une approche équitable sur le plan financier. C'est une approche libérale. C'est une approche canadienne. C'est ainsi que nous verrons s'accomplir des progrès sur cet aspect très important de notre histoire moderne.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, il faut rappeler un élément de l'histoire canadienne. Dans les Conditions de 1871 de l'adhésion de la Colombie-Britannique à la Confédération, il était entendu que toutes les questions de règlement des revendications territoriales autochtones incomberaient au gouvernement fédéral.

 

. 1445 + -

Ma question s'adresse au premier ministre et à la ministre des Affaires indiennes. Le gouvernement va-t-il assumer la responsabilité financière de tous les coûts de règlement des revendications territoriales en Colombie-Britannique?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous siégeons à la table avec les représentants du gouvernement provincial et des premières nations. Ensemble, nous allons concilier les droits des autochtones en Colombie-Britannique.

La députée nous suggère-t-elle d'établir une indemnisation par voie législative? Combien est-elle prête à payer pour ça? Les réformistes disent que nous devrions légiférer en l'absence de véritable certitude. Combien sont-ils prêts à payer pour le manque de certitude dans leur approche? Ils disent que nous devrions parler d'argent, non de terres. Combien est-elle prête à mettre sur la table?

*  *  *

[Français]

L'ACCUEIL BONNEAU

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

C'est avec tristesse que nous avons appris que cette explosion qui s'est produite à l'Accueil Bonneau a tué trois personnes et blessé plusieurs sans-abri et bénévoles qui fréquentaient l'établissement à l'heure du midi, hier. Il faut admirer la rapidité des intervenants, aussi bien des passants que des services de secours, dont le travail a réduit l'étendue des souffrances des victimes.

Le premier ministre peut-il nous dire ce que fera le gouvernement du Canada pour venir en aide à ces gens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons tous été attristés par cette tragédie qui a frappé les plus démunis de Montréal. Nous allons mettre tous les services du gouvernement à la disposition des gens sur les lieux pour pouvoir aider ceux qui se retrouvent dans cette triste situation.

Immédiatement après la période des questions orales, le ministre du Développement des ressources humaines se rendra à Montréal pour rencontrer la direction et offrir un soutien financier et autres mesures de soutien qui pourraient les aider dans cette situation tout à fait tragique.

*  *  *

[Traduction]

L'HÉPATITE C

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, le ministre de la Santé rend aujourd'hui un fort mauvais service au juge Krever qui, d'emblée, a recommandé un système d'indemnisation à deux volets pour les victimes de l'hépatite C.

Dans une lettre datée du 28 janvier 1991, des spécialistes recommandaient au gouvernement de ne pas utiliser de plasma contaminé pour les produits coagulants. Malgré cela, on a décidé d'utiliser de tels stocks pour des considérations pécuniaires.

Le ministre de la Santé admettra-t-il que le responsable fédéral de la réglementation n'a pas réussi à protéger les personnes infectées après 1990? Adoptera-t-il, pour l'indemnisation des victimes de l'hépatite C, une position...

Le Président: La parole est au ministre de la Santé.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répondu aux questions factuelles d'autres députés cet après-midi. Si la députée veut savoir quelle était la politique du gouvernement de l'époque au sujet des tests en question, elle devrait peut-être s'en informer auprès du parti qui était alors au pouvoir.

De notre côté, nous avons adopté toutes les recommandations du juge Krever. Dix-sept de ses 50 recommandations concernent la réglementation et la sécurité. Nous les avons adoptées. Nous avons la ferme intention de les mettre en oeuvre et de consacrer les fonds, le temps et l'énergie nécessaires pour faire en sorte que nous ayons, dans l'avenir, le système d'approvisionnement en sang le plus sécuritaire du monde.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, ce sont les victimes de l'hépatite C qui sont laissées pour compte.

Le ministre de la Santé est-il prêt, aujourd'hui, avant la fin de la session, à donner aux victimes de l'hépatite C certaines assurances qu'elles seront indemnisées pour des raisons de responsabilité collective et de compassion humanitaire et non pas en fonction des ressources financières dont dispose le ministre et de subtilités juridiques?

Joey Haché sait que le gouvernement a tort et il fait une tournée d'un océan à l'autre pour le prouver. Pour l'amour de Joey et de tous les autres, le ministre prendra-t-il des mesures et corrigera-t-il les problèmes qui existent actuellement à la Direction générale de la protection de la santé?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, on a déjà mis en place un mécanisme qui permet aux différents gouvernements d'examiner toutes les options possibles pour résoudre le problème des victimes de l'hépatite C.

Tout au cours de la session parlementaire, on a remarqué une tendance chez le NPD, celle de faire des insinuations tous les jours ou toutes les semaines; il s'agissait d'une sorte de mot d'ordre du jour pour le NPD. Il y a quelques semaines, c'étaient les satellites et les jouets qui allaient mettre en danger la santé des enfants, mais il a été prouvé que ces allégations n'étaient pas fondées. Il a ensuite été question d'une conspiration internationale qui s'est avérée non fondée au sujet du contrôle des médicaments. Il y a deux semaines, c'était l'albumine qui était une menace pour la santé, avant que l'on prouve qu'il n'en est rien.

Si la députée veut être prise au sérieux, elle devrait...

Le Président: La parole est au député de Madawaska—Restigouche.

*  *  *

 

. 1450 + -

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, les chômeurs du pays n'ont pas fini de souffrir.

Quand le gouvernement a adopté ses réformes du régime d'assurance-emploi en 1996, quelque 40 p. 100 des chômeurs n'avaient pas droit aux prestations d'assurance-emploi. Aujourd'hui, par suite des réformes, près de 72 p. 100 des chômeurs doivent s'en remettre à l'aide sociale parce qu'ils ne sont plus admissibles aux prestations d'assurance-emploi.

Le ministre dira-t-il à la Chambre que la loi doit être restructurée pour que les Canadiens puissent toucher des prestations d'assurance-emploi quand ils en auront besoin?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, pour commencer, le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale n'a jamais été aussi bas au Canada depuis cinq ans à cause de la croissance économique.

Ensuite, j'invite le député à vérifier les statistiques dans sa province, le Nouveau-Brunswick. Il constatera alors que 80 p. 100 des sans emploi de cette province touchent des prestations d'assurance-emploi, chiffre qui est loin de celui qu'il vient de mentionner.

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, il semble vraiment y avoir une certaine confusion entre Ottawa et les circonscriptions. Tous les bureaux locaux du ministère du Développement des ressources humaines sont d'avis que les réformes ne sont pas efficaces. Le ministre a-t-il pour position d'attendre et d'accepter le statu quo plutôt que d'examiner les carences de son ministère?

Le rapport d'évaluation de l'assurance-emploi de 1997 n'a pas montré ce que nous savons déjà, à savoir que le régime d'assurance-emploi ne fonctionne pas correctement. Le ministre annoncera-t-il à la Chambre aujourd'hui qu'il va améliorer la loi sur le régime d'assurance-emploi et accorder aux Canadiens l'aide dont ils ont besoin en temps opportun?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été très clair sur cette question.

Nous savons fort bien qu'après avoir effectué la plus importante réforme du régime d'assurance-chômage depuis 25 ans afin de le moderniser pour qu'il serve mieux les Canadiens et réponde davantage aux nouvelles conditions du marché du travail, il va falloir que nous suivions la situation de très près. Nous en sommes bien conscients.

C'est la raison pour laquelle j'ai déposé à la Chambre, au mois de janvier, le premier rapport sur les répercussions des réformes de l'assurance-chômage sur les Canadiens et les chômeurs. Nous ferons cet exercice tous les ans afin de nous assurer que les réformes servent bien les Canadiens.

*  *  *

LE NIGÉRIA

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État responsable de l'Amérique latine et de l'Afrique.

La mort du dictateur nigérian, le général Sani Abacha, et son remplacement par un dirigeant intérimaire laisse le pays le plus peuplé d'Afrique sous la coupe d'une junte militaire.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre quelles mesures le gouvernement du Canada va prendre au cours des semaines et des mois qui viennent pour encourager le rétablissement de la démocratie au Nigéria?

L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, le Nigeria et sa centaine de millions d'habitants peuvent être au coeur de la renaissance du continent africain.

Je suis convaincu que les députés conviendront que la mort du général Abacha donne au Nigeria et au peuple nigérian l'occasion de commencer une nouvelle ère. Le général Abubakar pourrait inaugurer cette ère en libérant le chef Abiola, qui entame sa cinquième année en prison. Ce serait une décision merveilleuse pour le Nigeria et pour le monde entier.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, dans une lettre que je déposerai plus tard, le ministère des Affaires indiennes fait savoir au chef de la bande Chemainus qu'il est au courant de la coupe de bois illégale pratiquée sur la réserve, juste à l'extérieur de Nana?mo. Plutôt que d'appliquer les règlements du ministère, les fonctionnaires des Affaires indiennes ont offert de devenir complices d'un acte criminel en aidant le chef et le conseil à vendre le bois prélevé dans cette forêt de vieux peuplement.

La ministre des Affaires indiennes interviendra-t-elle et ordonnera-t-elle que le bois coupé soit saisi avant qu'une seule bille puisse sortir illégalement de la réserve?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je serai heureuse d'examiner toutes les circonstances entourant cette affaire.

*  *  *

[Français]

LES CASINOS DE BATEAUX DE CROISIÈRE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Justice.

Depuis dix ans, les intervenants touristiques de la région de Québec réclament un changement au Code criminel pour permettre aux casinos de bateaux croisières d'opérer une heure avant leur arrivée au port de Québec, plutôt que de cesser leurs opérations à l'entrée du Golfe Saint-Laurent.

La ministre ne voit-elle pas que l'inaction fédérale dans ce dossier, pourtant simple à régler, prive toute la région de Québec de retombées économiques importantes depuis dix ans.

On lui demande une fois pour toutes d'agir. Quand va-t-elle procéder?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, en tant que gouvernement, nous saisissons l'importance de cet aspect du tourisme pour le Québec et sa population. En fait, je ferai très bientôt une annonce à ce sujet.

*  *  *

 

. 1455 + -

LA JUSTICE

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Lundi, les députés de tous les partis, à l'exception du Parti réformiste, ont fortement appuyé la décision que la Cour d'appel de l'Ontario a rendue dans l'affaire Rosenberg et qui accorde aux couples homosexuels les avantages prévus dans la Loi de l'impôt sur le revenu au titre de la pension.

La ministre va-t-elle accepter cette décision courageuse et refuser d'interjeter appel? Le gouvernement va-t-il réexaminer toutes les lois fédérales pour faire en sorte qu'elles soient conformes aux principes de l'égalité qui ont été exprimés avec tant de clarté dans la décision Rosenberg?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, mon ministère examine actuellement la décision Rosenberg. Je transmettrai un avis juridique à mon collègue, le ministre des Finances, relativement à la décision Rosenberg. Comme c'est toujours le cas dans les décisions rendues dans ce domaine, nous étudierons ses conséquences sur la Loi de l'impôt sur le revenu ou d'autres lois fédérales.

*  *  *

L'EMPLOI

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, j'ai vraiment apprécié la réponse du ministre du Développement des ressources humaines. Je ne vois certainement pas là la signature de l'ancien ministre, le trop célèbre Doug Young.

Selon les chiffres du ministère du Développement des ressources humaines, le Nouveau-Brunswick a reçu l'été dernier 5,6 millions au titre du programme Placement carrière-été. Cet été, la province recevra environ 300 000 $ de moins. Les étudiants de tout le Canada sont touchés par ces réductions. Le ministre peut-il expliquer aux étudiants du Nouveau-Brunswick pour quelle raison ils méritent moins d'argent cet été?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait être très heureux, car le nombre de chômeurs a diminué au Nouveau-Brunswick. C'est pour cela qu'il y a eu réaffectation des fonds consacrés au programme.

[Français]

C'est notre gouvernement qui a doublé le programme des emplois. Nous l'avons fait passer de 60 millions de dollars à 120 millions de dollars à travers le Canada, et la formule d'allocation des fonds est en fonction du nombre d'étudiants dans une province, le niveau de chômage et les besoins.

*  *  *

LA GESTION SCOLAIRE

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien.

Bien que l'éducation soit de juridiction provinciale, le gouvernement fédéral est prêt à aider la minorité de langue officielle de l'Ontario en assurant la gestion de ses écoles, selon une entente intervenue la semaine dernière.

La ministre pourrait-elle nous dire en quoi cette entente diffère d'ententes semblables intervenues avec d'autres gouvernements provinciaux?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord remercier tous les députés de tous les partis politiques qui ont travaillé ensemble pour assurer une entente qui représente un investissement de 180 millions de dollars pour cinq ans pour la scolarisation en langue française en Ontario. Cela va toucher la vie de plus de 100 000 étudiants dans 426 écoles en Ontario.

La différence, c'est que nous exigeons un plan d'affaires qui permet de mettre en valeur des objectifs concrets au lieu de simplement donner de l'argent et du financement.

*  *  *

[Traduction]

LE PARC NATIONAL BANFF

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, parlons de Banff. L'automne dernier, la ministre a bloqué un processus démocratique. Ensuite, elle en a lancé un nouveau. Son secrétaire d'État chargé des parcs a travaillé directement avec le maire et le conseil municipal pour définir le processus. Pourtant, sans attendre les résultats, avant même le moindre règlement municipal, la ministre annonce qu'elle ne respectera pas le processus démocratique. Pourquoi coupe-t-elle l'herbe sous le pied de son secrétaire d'État et passe-t-elle outre au processus démocratique?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Au contraire, monsieur le Président. Comme le député le sait, le secrétaire d'État a en main les premiers règlements municipaux depuis des semaines. Lui et moi avons eu l'occasion d'examiner toutes les photographies aériennes.

Ce qu'a fait le conseil municipal de Banff est regrettable. Au lieu de saisir l'occasion de créer une vraie écocommunauté du XXIe siècle, il a choisi une commercialisation outrancière. Le secrétaire d'État, le Cabinet et moi-même avons rejeté cette position.

*  *  *

[Français]

LA CORPORATION DU PORT DE MONTRÉAL

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, dans le comté de Hochelaga—Maisonneuve, une quarantaine de propriétés résidentielles, enclavées dans une zone industrielle et regroupant quelque 250 personnes, sont dramatiquement privées de toute qualité de vie en raison de la pollution produite par les activités du port de Montréal. Les résidants demandent par conséquent à être expropriés depuis 1986.

Comment le ministre des Transports explique-t-il que le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal aient réservé les sommes d'argent nécessaires à cette expropriation, mais que le Port de Montréal, qui relève de sa compétence, refuse de s'impliquer financièrement?

 

. 1500 + -

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà discuté du sujet avec l'honorable député, et oui, il a raison, parce que la situation est grave. Nous avons fait des représentations auprès de la Corporation du port de Montréal pour résoudre le problème.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je veux souligner la présence à la tribune de M. Bachir Boumaza, président du Conseil de la nation d'Algérie.

Des voix: Bravo!

*  *  *

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES COMMENTAIRES DE DÉPUTÉS

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement relativement à des propos qu'a tenus, hier soir à la Chambre, le député réformiste de Wild Rose.

Le député a lancé une accusation contre le député d'Ottawa-Centre. Il a déclaré ouvertement que ce dernier avait menti. Je tiens à préciser que le député d'Ottawa-Centre est l'un des plus respectés et des plus chevronnés à siéger à la Chambre.

 

. 1505 + -

Le Président: Sauf tout le respect que je dois au député, j'étais ici lorsque cet échange de mots a eu lieu et j'ai vérifié le hansard. J'étais au fauteuil et j'ai jugé qu'il ne s'agissait pas d'une accusation directe.

Comme tous les députés, je déplore l'emploi des mots mentir ou menteur, car cela nous interpelle. J'ai cependant jugé, hier, qu'il ne s'agissait pas d'une accusation directe.

J'ai vérifié le hansard et les bandes et je confirme ma décision. J'encourage cependant tous les députés à éviter d'employer les mots mentir et menteur.

Je remercie le député de son intervention.

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que je dépose un document auquel j'ai fait référence dans une question que j'ai posée aujourd'hui.

Le Président: Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

M. Randy White: Monsieur le Président, je crois que notre collègue demande simplement a déposer un document et non pas à présenter une motion.

Le Président: Le député doit obtenir le consentement unanime pour pouvoir déposer un document à la Chambre.

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous avons refusé le consentement unanime parce que nous ne connaissons pas la nature du document, mais nous sommes disposés à l'examiner et à revoir la chose.

Le Président: Nous avons eu un non, puis un peut-être. Vous pourriez peut-être vous réunir et trouver une solution d'ici la fin de la journée.



AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 10 pétitions.

*  *  *

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, en vertu de l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, les rapports de la section canadienne de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, ainsi que les rapports financiers de la réunion de la Commission de la coopération et du développement de l'AIPLF à Genève, en Suisse, du 23 au 25 mars 1998, ainsi que de la Conférence sur le bilan de la démocratisation en Afrique, à Libreville au Gabon, du 30 mars au 2 avril 1998.

*  *  *

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

SANTÉ

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité permanent sur la santé, aux termes du paragraphe 5.1 de la Loi sur le tabac et conformément à l'article 32(5) du Règlement; les règlements antitabac proposés sur la saisie, la remise et les droits d'accise ont été renvoyés au comité en date du mercredi 3 juin 1998. Le comité a étudié les mesures proposées et accepté de les approuver sans modification.

*  *  *

LA LOI SUR LES BANQUES

 

L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD) demande à présenter le projet de loi C-420, Loi modifiant la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d'assurances et la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt (remboursement d'un prêt hypothécaire avant son échéance).

 

. 1510 + -

—Monsieur le Président, j'ai une brève explication à donner au sujet de ce projet de loi. L'objet de cette mesure est d'assurer que les documents hypothécaires expliquent les dispositions relatives à l'annulation en des termes clairs, facilement compréhensibles par la majorité des Canadiens.

Les gens ont le droit de savoir à quoi ils s'engagent, comment ils peuvent s'en sortir et combien il leur en coûtera. Bon nombre de gens ont réclamé une telle loi. C'est une mesure importante pour les consommateurs canadiens.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LA LOI SUR L'INTÉRÊT

 

L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD) demande à présenter le projet de loi C-421, Loi modifiant la Loi sur l'intérêt (intérêts payables lors du remboursement d'un prêt hypothécaire avant son échéance).

—Monsieur le Président, cette mesure porte sur une question au sujet de laquelle nous avons tous fait l'objet de pressions de la part des intervenants du secteur immobilier partout au Canada. Ce projet de loi modifierait la Loi sur l'intérêt pour permettre l'annulation de prêts hypothécaires d'une échéance de cinq ans ou moins. Bien sûr, cette annulation serait conditionnelle au versement des frais d'intérêts prescrits.

Les prêts hypothécaires d'un an ou moins ne seraient pas inclus dans cette modification de la Loi sur l'intérêt.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter une motion qui a été communiquée à tous les chefs de parti. Je propose:

[Français]

    Que la Chambre des communes prenne en considération le fait que plus de 100 nations se rencontreront à Montréal, en juin, afin d'entamer des négociations pour élaborer une Convention mondiale sur la réduction des polluants organiques persistants.

    Étant donné que le Rapport sur l'évaluation des contaminants dans l'Arctique canadien démontre que le polluant organique persistant se retrouve dans la chaîne alimentaire et contamine la nourriture consommée par les Inuits et les peuples autochtones;

[Traduction]

    En conséquence, la Chambre des communes reconnaît la nécessité d'une convention mondiale complète et vigoureuse concernant la réduction des émissions de POP, qui tienne compte des questions de transfert des technologies, d'acquisition de capacité d'intervention et de création d'institutions, ainsi que de la nécessité, pour les peuples autochtones canadiens, d'intervenir activement dans les négociations grâce à leur présence au sein de la délégation canadienne.

[Français]

Le vice-président: L'honorable député de Davenport a-t-il le consentement unanime de la Chambre afin de proposer cette motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

*  *  *

[Traduction]

PÉTITIONS

LA LOI C-68

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je présente aujourd'hui trois pétitions conformément à l'article 36 du Règlement.

La première est signée par plusieurs centaines d'électeurs de ma circonscription de Medicine Hat qui sont loin d'apprécier la loi C-68 et qui voudraient que l'argent nécessaire à son application soit plutôt consacré à des centres de prévention du suicide, à des programmes de prévention du crime, à des centres d'urgence pour les femmes, à des campagne anticontrebande et à la lutte contre le crime organisé et les gangs de rue.

Je suis heureux de présenter cette pétition.

LE SÉNAT

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, plusieurs centaines de personnes de ma circonscription ont également signé des pétitions pour que le Sénat soit élu. Ces pétitions viennent de toute la partie sud de l'Alberta. Bien entendu, cette question fait beaucoup de bruit en Alberta à l'heure actuelle.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, la dernière pétition que je présente concerne les modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. Plusieurs centaines de mes électeurs craignent énormément que la Loi sur les jeunes contrevenants n'apporte pas de réponse adéquate au problème du crime chez les jeunes.

Les pétitionnaires demandent qu'on applique des peines plus sévères. Ils demandent également que l'âge minimum soit réduit à 10 ans dans la loi, que la peine maximum pour meurtre au premier degré soit portée à 15 ans et qu'il soit davantage question de la responsabilité parentale dans le système de justice.

Je suis heureux de présenter cette pétition au nom de mes électeurs.

 

. 1515 + -

LE RÉACTEUR CANDU

M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter une pétition signée par plusieurs milliers de personnes de ma circonscription et de l'ensemble du Canada.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement canadien d'interdire la vente de réacteurs CANDU à la Turquie. Ils mentionnent par ailleurs de ces derniers doivent être construits dans une région sujette à des secousses sismiques pouvant atteindre 8 sur l'échelle de Richter, ce qui pourrait provoquer des fuites nocives dangereuses pour les pays voisins, à savoir, Chypre, Israël, la Syrie, le Liban et l'Arménie.

Les pétitionnaires rappellent que la Turquie est un pays qui ne respecte pas les droits de ses citoyens, qui opprime les minorités, qui a déjà eu recours à la force et à l'agression militaire contre ses voisins plus petits, et qu'en lui donnant la technologie nucléaire, on lui donne les moyens de produire des armes nucléaires de destruction massive et de déstabiliser la région toute entière. Les pétitionnaires demandent donc à la Chambre d'interdire cette transaction.

[Français]

LE PARC PROVINCIAL IPPERWASH

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition.

[Traduction]

Cette pétition a trait à un événement au sujet duquel de nombreuses pétitions ont déjà été présentées. Elle concerne la demande d'une enquête publique sur les événements survenus au parc provincial d'Ipperwash où plus de 200 policiers armés ont été envoyés pour surveiller 25 hommes et femmes non armés. Cet incident, au cours duquel Anthony Dudley George a été tué par balles, soulève de nombreuses questions qui sont toujours sans réponse.

Les pétitionnaires demandent à la Chambre des communes d'ordonner une enquête publique sur les circonstances entourant la mort d'Anthony Dudley George, survenue le 6 septembre 1995, afin de dissiper toute idée fausse que peuvent avoir le gouvernement ou le public sur le gouvernement, la Police provinciale de l'Ontario et les gens de Stoney Point.

LES GARDERIES

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur que de présenter aujourd'hui une pétition, conformément à l'article 36 du Règlement, au nom de certains électeurs de Kings—Hants.

Les pétitionnaires sont préoccupés parce que le gouvernement n'a pas su tenir sa promesse de 1993 d'élaborer une stratégie nationale sur les garderies. Ils estiment que le gouvernement devrait refondre les dépenses fédérales actuelles dans ce domaine pour mettre sur pied un programme national de garderies et qu'il devrait engager des négociations avec les provinces, les territoires et les groupes autochtones afin de discuter de l'élaboration d'un programme national d'une aussi grande importance.

L'AIDE AU SUICIDE

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux de présenter à la Chambre une pétition signée par plus de 500 habitants de Brampton et de la région de Peel.

Les pétitionnaires demandent au Parlement, d'une part, de veiller à l'application rigoureuse des dispositions du Code criminel du Canada relatives à l'aide au suicide et, d'autre part, de n'apporter à la loi aucune modification concernant cette question.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter à la Chambre un certain nombre de pétitions aux termes de l'article 36 du Règlement.

Les deux premières pétitions demandent l'abrogation de la Loi sur le contrôle des armes à feu qui a été adoptée au cours de la dernière législature. Ces 109 pétitionnaires de ma circonscription et d'ailleurs demandent que l'argent consacré à la création et à la mise en oeuvre du système d'enregistrement des armes à feu soit réaffecté à des méthodes plus rentables de lutte contre le crime, notamment, augmenter les effectifs policiers qui patrouillent dans nos rues, mettre sur pied des programmes de prévention de la criminalité et des programmes de prévention du suicide, ouvrir des refuges pour femmes battues, mettre sur pied des campagnes de lutte contre la contrebande et affecter des ressources accrues à la lutte contre le crime organisé et les gangs.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je veux moi aussi présenter quelques pétitions en faveur de modifications majeures à la Loi sur les jeunes contrevenants. Presque 250 pétitionnaires de tout le Canada exhortent le Parlement à faire de la protection de la société la première priorité des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, notamment en abaissant de 12 à 10 ans l'âge auquel les jeunes sont assujettis à la loi, en permettant la publication du nom des jeunes contrevenants qui commettent des crimes avec violence, en augmentant les peines pour tous les crimes avec violence commis par des jeunes et en tenant les parents responsables de leurs enfants.

LE MARIAGE

M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter, qui portent toutes deux sur le même sujet. La première est signée par des Canadiens de Yarmouth, en Nouvelle-Écosse, et des environs. La deuxième a été signée par plus de 300 électeurs de ma circonscription, Scarborough-Sud-Ouest.

Les deux pétitions exhortent le Parlement à promulguer le projet de loi C-225, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) et la Loi d'interprétation, que j'ai moi-même présenté au Parlement, de manière à y préciser qu'un mariage ne peut être conclu qu'entre un homme célibataire et une femme célibataire.

 

. 1520 + -

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir et l'honneur de présenter une pétition signée par des habitants de la région de Stewiacke, en Nouvelle-Écosse.

Les pétitionnaires demandent l'abrogation du projet de loi C-68. Ils affirment, et avec raison, que cette mesure fera perdre des centaines de millions de dollars au Trésor public. Cet argent pourrait être utilisé beaucoup plus efficacement dans la lutte contre le crime s'il servait à augmenter la présence policière dans les rues, à mettre en oeuvre de nouveaux programmes de prévention du crime et à financer d'autres mesures de ce genre.

Cette pétition tombe fort à-propos, puisque des renseignements divulgués récemment ont révélé que le projet de loi C-68 reposait sur des données totalement fausses.

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition au nom d'habitants de l'île.

Ces pétitionnaires exhortent le Parlement à soustraire les livres, les magazines et les journaux à la TPS. Ils croient qu'il est injuste et répréhensible de taxer les ouvrages de lecture. Ils croient aussi que l'exemption qu'ils proposent contribuerait à promouvoir l'alphabétisation au Canada.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(6) du Règlement, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par 125 habitants d'une petite localité du nord de ma circonscription, celle de Fort Nelson.

Les pétitionnaires font valoir que l'enregistrement des armes à feu légales ne contribuera absolument pas à enrayer l'utilisation des armes à feu à des fins criminelles. Ils demandent donc au Parlement d'abroger le projet de loi C-68 et de réaffecter à des méthodes de lutte contre la criminalité qui se sont avérées rentables les centaines de millions de dollars de deniers publics que l'on a gaspillés pour l'octroi de permis à des propriétaires d'armes à feu responsables et respectueux des lois et pour l'enregistrement de leurs armes.

LE FONDS D'INDEMNISATION DES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition au nom d'un grand nombre de Canadiens, dont certains électeurs de ma circonscription, Mississauga-Sud.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que les agents de police et les pompiers doivent quotidiennement mettre leur vie en danger lorsqu'ils s'acquittent de leur travail. Lorsque l'un d'eux est tué dans l'exercice de ses fonctions, toute la population est en deuil et souhaite aider concrètement les membres survivants de sa famille.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de créer un fonds d'indemnisation des agents de la sécurité publique, afin d'aider les familles des agents, policiers et pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.

LES ARMES À FEU

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui. La première concerne la Loi sur les armes à feu.

Les pétitionnaires clament haut et fort que cette loi entraîne un gaspillage d'argent et des ressources policières. Ils disent qu'il n'y a pas suffisamment de policiers par habitant, comparativement à 1972. Ils estiment que l'argent pourrait être mieux employé à cette fin.

LES CRIMES VIOLENTS

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, au nom des victimes de crimes violents, de vols avec violation de domicile, de crimes contre les aînés et de crimes commis par des gangs de rue au Manitoba, des milliers de pétitionnaires réclament haut et fort, eux aussi, que des mesures soient prises relativement à la Loi sur la réforme du cautionnement et que nous soyons plus sévères envers les criminels violents.

LE SERVICE DE TRAVERSIER

M. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.): Monsieur le Président, j'ai ici une pétition signée par des milliers d'habitants de ma circonscription au sujet de la fourniture d'un service de traversier pour voyageurs et marchandises entre Port-aux-Basques, à Terre-Neuve, et North Sydney, en Nouvelle-Écosse.

Ce service constitue une obligation constitutionnelle du gouvernement fédéral et un droit de tous les habitants de Terre-Neuve et du Labrador aux termes de l'article 32 de la Loi constitutionnelle de 1949 de Terre-Neuve. Les pétitionnaires estiment que ce service assure une liaison vitale entre Terre-Neuve et le reste du Canada. Il est indispensable pour assurer le bien-être économique de notre province.

Les pétitionnaires sont d'avis que la fourniture, entre ces deux points, d'un service de transport de haute qualité et axé sur le client doit être garanti de façon régulière et à des tarifs raisonnables pour les usagers. Par conséquent, ces pétitionnaires demandent au Parlement de modifier le Code canadien du travail, à la partie I, afin de prévenir toute interruption de ce service essentiel à cause d'une grève ou d'un lock-out et d'accroître le financement fédéral accordé à Marine Atlantic pour ce service de traversier.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, j'ai un certain nombre de pétitions à présenter. L'une d'elle vient d'électeurs d'origine serbe de ma circonscription.

Ces pétitionnaires demandent au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour bloquer toute forme d'armement destiné au Kosovo et à la Metohija.

LE CODE CRIMINEL

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, la prochaine pétition vient de 113 habitants de ma circonscription qui demandent au Parlement de réaffirmer le devoir des parents d'élever leurs enfants de façon responsable conformément à leur conscience et à leurs croyances, et de maintenir l'article 43 du Code criminel dans son libellé actuel.

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, ma dernière pétition a été signé par 200 habitants de ma circonscription. Les pétitionnaires pressent le Parlement de supprimer la TPS sur les livres, les magazines et les journaux.

 

. 1525 + -

L'HÉPATITE C

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, conformément au Règlement, les pétitions que je présente ont été jugées correctes quant à la forme et au contenu.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de revoir le dossier de l'indemnisation des victimes de l'hépatite C pour répondre aux préoccupations des Canadiens qui souhaitent que tous ceux qui ont reçu une transfusion de sang contaminé bénéficient d'un programme d'indemnisation équitable et empreint de compassion.

Ces pétitions viennent aussi bien de London, en Ontario, que de Terre-Neuve, et plus précisément de la petite localité terre-neuvienne de Clarenville. La Société de l'hépatite C a envoyé ces pétitions pour qu'elles soient prises en considération.

LE PROJET DE REIN BIOARTIFICIEL

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre pétition dont les signatures viennent s'ajouter aux milliers de noms de gens qui croient que le gouvernement du Canada peut répondre plus efficacement aux besoins des 18 000 Canadiens et plus qui souffrent de néphropathies au stade terminal en stimulant la recherche visant à mettre au point un rein bioartificiel.

Les signatures ont été recueillies par le service de police de Peterborough; la firme Grant, Willcox, Whetung, avocats; et le consistoire de Barrie...

Le vice-président: À l'ordre. Je pense avoir déjà prévenu le député qu'il n'est pas pertinent de dire qui a recueilli les signatures. Le député est libre de nous dire qui a signé les pétitions, non pas les noms des gens, mais l'endroit d'où viennent les pétitions et leur teneur générale. Franchement, le député devrait respecter les règles.

M. Jay Hill: Il devrait pourtant le savoir.

Le vice-président: Oh! il le sait. Il a déjà été prévenu à cet égard.

M. Peter Adams: La pétition vient de gens qui croient que ceux qui ont besoin de dialyse et ceux qui ont reçu avec succès une transplantation rénale reconnaissent l'importance de ce traitement salutaire. Ils croient également que les services de dialyse existant au Canada sont inadéquats. Ils demandent donc au Parlement de soutenir la recherche visant à mettre au point un rein bioartificiel. Je ne dirai pas où ces signatures ont été recueillies.

La deuxième pétition appartient à la même série. Les pétitionnaires font remarquer que les ministres de la Santé de tout le pays ont du mal à fournir l'accès aux services de dialyse et que les dons d'organes ne suffisent pas à répondre aux besoins. Ils demandent donc au Parlement d'appuyer le projet de rein bioartificiel.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

[Traduction]

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais attirer votre attention sur la question no 91, qui est en souffrance. Elle concerne l'emploi du médicament appelé méfloquine par les Forces canadiennes stationnées en Somalie en 1993. La question intéresse non seulement les nombreuses personnes qui m'ont écrit à ce sujet, mais aussi le vérificateur général qui est en train d'examiner les rouages de la Direction générale de la protection de la santé.

Quand puis-je m'attendre à ce qu'on réponde à la question?

M. Peter Adams: Monsieur le Président, la Chambre n'ignore pas que j'ai présenté cette semaine plus d'une centaine de réponses à des demandes. Nous avons répondu jusqu'à maintenant à près de 90 p. 100 des 1 000 demandes dont nous sommes saisis. Quant à la question du député, je vais m'en occuper avec beaucoup de diligence dans les jours à venir.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, la question no 78 a été inscrite à l'ordre du jour le 24 février et la question no 79, le 5 mars. C'est aujourd'hui la deuxième fois que j'invoque le Règlement à l'égard de ces questions.

J'ai attendu sept mois à l'égard d'une motion portant dépôt de documents et je n'ai jamais reçu l'information. Je me demande si l'on fera de l'obstruction systématique à ces questions comme on en a fait à la motion dont je parle.

Le commissaire à l'information sortant, John Grace, a dit aujourd'hui que la culture du secret est pire chez les libéraux qu'elle ne l'était chez le gouvernement Mulroney. Il est inacceptable de devoir attendre sept mois pour une motion portant dépôt de documents. Je veux qu'on réponde à ces questions et je voudrais que le secrétaire parlementaire me dise quand je recevrai une réponse à ces questions.

M. Peter Adams: Monsieur le Président, j'ai pris note des questions nos 78 et 79. Je ne répéterai pas mon explication. Nous nous occupons avec diligence de ces affaires et je vais vraiment m'efforcer de produire des réponses à ces questions.

Le vice-président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

*  *  *

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que tous les avis de motions portant production de documents soient reportés.

Le vice-président: D'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1530 + -

[Traduction]

LA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE

 

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.  

L'honorable Raymond Chan (au nom du ministre de la Défense nationale, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.

(La motion est adoptée.)

Le vice-président: Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.  

L'hon. Raymond Chan (au nom du ministre de la Défense nationale, Lib.) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'ouvrir le débat en troisième lecture sur le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence.

Ce projet de loi est un ensemble exhaustif de modifications qui renforceront le cadre juridique régissant le fonctionnement du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes.

Les modifications proposées dans le projet de loi sont les plus importantes qui aient été apportées à la Loi sur la défense nationale depuis sa promulgation en 1950. Le projet de loi C-25 porte sur un large éventail de dispositions de la Loi sur la défense nationale. Cependant, il concerne principalement la justice militaire.

Le système de justice militaire, qui repose sur le code de discipline militaire, est conçu pour améliorer le moral, la discipline et l'efficacité. Il faut comprendre que les Forces canadiennes sont des forces armées entraînées au combat et qu'elles ont besoin d'un système de justice distinct. La discipline est au coeur de l'efficience et de l'efficacité des forces armées. Que ce soit en temps de paix ou en temps de guerre, c'est un élément qui détermine la différence entre l'échec ou le succès des opérations.

Le gouvernement a pris des mesures après un certain nombre d'incidents regrettables survenus au cours des dernières années qui remettaient en question la capacité du système de justice militaire canadien d'assurer la discipline, l'efficacité, le moral et la justice. Pour obtenir des conseils, nous avons consulté les forces armées, le grand public et d'éminents experts canadiens.

Les modifications proposées dans le projet de loi C-25...

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu des consultations entre les partis et je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante:

    Que l'Ordre renvoyant le projet de loi S-2 au Comité permanent des transports soit révoqué et que ledit projet de loi soit renvoyé plutôt à un comité plénier et que ledit comité plénier soit jugé d'avoir étudié ledit projet de loi, d'avoir fait rapport de l'état de la question et d'avoir demandé la permission d'en reprendre l'étude à une séance ultérieure.

M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, je serais très heureux de donner mon consentement à ces questions pourvu que le gouvernement n'essaie pas de les passer en douce lorsque je m'absente et pourvu que je sois consulté à l'avance. Afin de m'acquitter de mes responsabilités à l'égard de mes électeurs de York-Sud—Weston, il me semble qu'avant de donner mon consentement à n'importe quelle motion qui est censée faire l'objet d'un consentement unanime, je voudrais au moins savoir sur quoi je me prononce.

Pour le moment, je ne suis pas disposé à donner mon consentement, mais si le gouvernement souhaite en discuter, je serai heureux de le faire.

Le vice-président: Je crois donc comprendre qu'il n'y a pas consentement.

M. John Richardson: Monsieur le Président, le gouvernement est intervenu après plusieurs incidents malheureux.

Les modifications que contient le projet de loi C-25, qui a fait l'objet d'un débat en deuxième lecture et de l'étude en comité, sont le résultat de ce processus. Par ces modifications, le gouvernement donne suite au rapport du ministre de la Défense présenté au premier ministre en mars 1997 et aux rapports du groupe consultatif spécial présidé par M. le juge en chef Brian Dickson. Le gouvernement a répondu également aux recommandations de la Commission d'enquête sur la Somalie.

Je tiens à profiter de cette occasion pour remercier en particulier mes collègues du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants qui se sont penchés sur le projet de loi C-25. Le comité a approuvé 21 amendements, surtout de forme, au projet de loi.

 

. 1535 + -

Les députés étaient déjà fort occupés à d'autres tâches et ils se sont donné beaucoup de peine pour que le projet de loi franchisse rapidement l'étape du comité. Grâce à leurs efforts, le projet de loi a pu être amélioré et les militaires des Forces canadiennes pourront plus facilement s'acquitter de leurs missions.

Le ministre de la Défense nationale a comparu devant le comité, à l'instar de plusieurs autres témoins qui s'y connaissent dans les questions abordées dans le projet de loi C-25. M. le juge en chef Dickson, qui a présidé le groupe consultatif spécial, et le lieutenant-général Belzile sont venus témoigner. Ils ont approuvé sans réserve les modifications proposées dans le projet de loi. Le groupe consultatif a reconnu que l'adoption de ce projet de loi donne suite à ses recommandations et aide les Forces canadiennes et leurs dirigeants à maintenir la discipline et à remplir la mission qui leur est confiée au nom du Canada.

Je tiens à remercier monsieur le juge en chef Dickson ainsi que les autres témoins pour être venus témoigner devant le comité et pour leur contribution à ce projet de loi.

Comme le ministre l'a dit au comité et à cette Chambre pendant la deuxième lecture, les modifications que contient le projet de loi C-25 moderniseront le système de justice militaire. Ce projet de loi vise notamment à définir clairement les attributions des principaux intervenants dans la justice militaire; à mieux encadrer les enquêtes et les inculpations et à en améliorer la transparence; à moderniser les pouvoirs et les procédures des tribunaux militaires et, enfin, à renforcer l'appareil de surveillance et d'examen. Chacun de ces éléments contribue de façon marquée à la revitalisation de la justice militaire. Pendant l'étude en comité, on a examiné de près chacune de ces composantes et on a soulevé et débattu une variété de questions.

Je profite de cette occasion pour clarifier la position du gouvernement en ce qui touche différents points qui ont été soulevés et débattus en long et en large.

À la deuxième lecture et en comité, on s'est demandé s'il devait exister un système de justice militaire en temps de paix et un autre pour les périodes de conflit. On a également dit qu'il pourrait y avoir un système de justice militaire à l'intérieur du Canada et un autre à l'étranger.

Les Forces canadiennes doivent être prêtes à se déployer en n'importe quel endroit du monde à quelques heures d'avis. Les forces armées ont besoin d'un système qui peut fonctionner immédiatement au Canada et à l'étranger, en temps de conflit comme en temps de paix. Le projet de loi C-25 met en place un tel système. Les témoins qui ont comparu devant le Comité ainsi que nos dirigeants militaires ont exprimé cet avis, et c'est l'avis que nous avons suivi.

À la deuxième lecture et en comité, on s'est également penché sur la question de l'indépendance du juge-avocat général et des juges militaires, deux éléments clés du système de justice militaire. Un certain nombre de membres ont soutenu que le JAG demeurait trop dépendant de la filière hiérarchique et que les juges militaires devraient être des civils ou peut-être des membres de la Cour fédérale, comme l'a recommandé la Commission d'enquête sur la Somalie.

Le JAG est nommé par le Cabinet sur recommandation du ministre. Ses fonctions sont décrites dans le projet de loi C-25. On y précise clairement qu'il est comptable au ministre de l'exercice de ces fonctions. Nous croyons avoir fait le nécessaire pour garantir l'indépendance du JAG.

Quant aux juges militaires, le projet de loi C-25 prévoit des mandats fixes de cinq ans. Les juges seront nommés par le gouverneur en conseil, comme c'est le cas pour les autres juges du système civil. Ils jouiront de la sécurité financière et toute révocation ne pourra avoir lieu que sur recommandation d'un comité d'enquête.

La Cour suprême et le groupe consultatif spécial ont avalisé la pratique de nommer des officiers d'active ayant une formation juridique pour faire les fonctions de juge militaire. Nous sommes convaincus que toutes les mesures nécessaires pour garantir l'indépendance des juges militaires ont été prises.

En vertu du système actuel, le ministre de la défense est une figure clé qui peut jouer un rôle actif dans l'administration courante des cas individuels en vertu du code de discipline militaire. Le projet de loi C-25 libérera le ministre de l'administration courante. Cela évitera l'impression que le ministre intervient dans des cas individuels, réduira la possibilité de conflits d'intérêts et permettra au ministre de se concentrer sur autre chose.

Le processus d'enquête et d'inculpation a été critiqué pour son manque de transparence et pour l'importance des pouvoirs discrétionnaires dont disposent les commandants. Actuellement, un commandant peut prendre la décision finale non seulement pour des infractions mineures, mais aussi dans des cas plus graves pouvant toucher des intérêts extérieurs à l'unité commandée.

Le projet de loi C-25 enlève au commandant le pouvoir de rejeter les inculpations et définit un cadre légal précis limitant la compétence en matière de jugements sommaires aux infractions mineures et aux cas où il est nécessaire de maintenir la discipline interne de l'unité. De plus, les amendements garantiront la participation utile et nécessaire de la hiérarchie au processus.

 

. 1540 + -

Le comité a entendu les témoignages du colonel Mitchell, le commandant de la BFC Petawawa et du lieutenant-général Belzile, ancien commandant de l'armée, maintenant retraité. Ces témoins ont souligné la nécessité pour les commandants, responsables devant la hiérarchie et devant la population du Canada de l'accomplissement des missions qui leur sont confiées par le gouvernement, d'avoir les outils nécessaires pour conserver le contrôle de la discipline dans leur unité. Les deux officiers ont dit clairement dans leur témoignage que les pouvoirs et compétences réduits du fait du projet de loi C-25 n'empêcheraient pas les commandants de faire leur travail.

Pour ce qui est du processus d'instruction sommaire, le ministre a indiqué pendant le débat en deuxième lecture et en comité que la réforme était déjà bien engagée. Les amendements aux ordonnances et règlements royaux édictés le 30 novembre 1997 circonscrivent la juridiction des procès sommaires à davantage d'infractions mineures intéressant la discipline de vérification interne. Ils accordent également aux prévenus le droit de choisir la cour martiale dans tous les cas sauf les plus bénins.

L'un des éléments de la réforme du processus dont il a été question en long et en large au sein du Comité est la nécessité de fournir aux commandants une formation plus appronfondie dans les fonctions et responsabilités de la justice militaire, et de les faire accréditer pour la conduite des procès par voie sommaire.

Le ministre a indiqué clairement aux membres du Comité que nous tenions à l'accréditation pour la conduite des procès par voie sommaire. La formation est en cours de développement et nous espérons qu'elle pourra débuter à l'automne. Une fois que tout sera en place, nous exigerons que les officiers soient accrédités avant qu'ils puissent diriger un procès par voie sommaire.

En comité, on a exprimé des inquiétudes au sujet de la capacité d'imposer la détention aux procès par voie sommaire, et le Comité a demandé des témoignages directs sur cette question.

Le juge en chef Dickson a indiqué au Comité qu'il était d'importance vitale que le commandant conserve le pouvoir de détention. Le général Belzile a également dit au Comité qu'il était essentiel que le commandant puisse continuer d'imposer la détention aux procès par voie sommaire. La peine a néanmoins été réduite de 90 à 30 jours. On a éliminé la rétrogradation automatique à simple soldat. Les membres seront payés comme simples soldats pendant la détention.

Le gouvernement a rendu la loi plus conforme à la Charte canadienne des droits et libertés. La détention demeurera un outil efficace dont les commandants pourront se servir pour faire régner la discipline au sein des unités et assurer l'efficacité opérationnelle.

Au cours du débat, comme en comité, il a été question d'un système de justice à deux niveaux. Avec ce projet de loi, le gouvernement entend promouvoir le traitement égal des membres des Forces armées canadiennes sous le code de discipline militaire, peu importe leur grade et leur sexe. Plusieurs initiatives ont été prises à cette fin et également pour que le système de justice militaire soit comparable au système de justice civile.

Le code de discipline militaire a été revu pour que tout écart par rapport aux normes du système de justice civile puisse se justifier dans un contexte militaire. Lorsque ces écarts sont injustifiés, le code a été modifié. Par exemple, devant les cours martiales, les juges militaires infligeront dorénavant les sentences aux personnes coupables d'infractions d'ordre militaire. Par ailleurs, les travaux forcés et la peine de mort seront abolis par le projet de loi C-25.

Pour ce qui est de l'égalité entre les sexes, les hommes et les femmes doivent être capables d'apporter la même contribution aux forces armées et aussi de travailler ensemble dans un climat de confiance. C'est pour cette raison que le mandat des cours martiales a été élargi pour inclure les cas d'agressions sexuelles qui surviennent au Canada.

La mise sur pied d'un service d'enquête national indépendant garantira le signalement rapide des infractions d'ordre sexuel et la conduite rapide des enquêtes. En permettant aux cours martiales de prendre en délibéré les causes d'agression sexuelle qui surviennent au Canada, le gouvernement montre qu'il tient à ce que ces infractions soient jugées rapidement et il montre aussi qu'il estime que ces infractions sont graves et qu'il tient à instaurer l'égalité au sein des Forces armées canadiennes.

 

. 1545 + -

Les cours martiales générales et disciplinaires, composées seulement d'officiers jusqu'ici, comprendront maintenant des adjudants et des officiers supérieurs lorsqu'elles jugent des sous-officiers. Cela correspond mieux à la gamme des personnes chargées d'assurer le commandement et la discipline dans les Forces canadiennes. Les peines obligatoires ont par ailleurs disparu, éliminant ainsi plusieurs distinctions entre les rangs et dans l'application des peines.

Une peine d'emprisonnement entraînait le limogeage automatique des sous-officiers, mais pas des officiers, par exemple; le projet de loi maintient le limogeage automatique.

Le projet de loi C-25 montre également que le gouvernement tient à renforcer les mécanismes de surveillance et d'examen des Forces canadiennes et du ministère. La nécessité d'une surveillance assurée par l'inspecteur général a été évoquée en comité.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous avons eu de nouvelles consultations et vous constaterez, je crois, que la motion suivante fait l'unanimité:  

    Que l'ordre de renvoi du projet de loi S-2 au Comité permanent des transports soit révoqué et que la mesure soit plutôt renvoyé au comité plénier; et que le comité plénier soit réputé avoir examiné le projet de loi, fait rapport de l'état de la question et obtenu la permission d'étudier la mesure à une séance ultérieure.

Le vice-président: Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cette motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

LA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement, soit lu une troisième fois et adopté.

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, comme le ministre l'a fait remarquer au comité, nous avons mis en place une stratégie à trois volets visant à améliorer la surveillance et l'examen.

Premièrement, nous renforçons notre collaboration avec des organismes de surveillance actuels tels que le Bureau du vérificateur général, le commissaire aux langues officielles et la Commission canadienne des droits de la personne. Deuxièmement, nous établissons de nouveaux organismes de surveillance spécialisés tels qu'un comité indépendant et externe des griefs et la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire.

Comme le ministre l'a annoncé dernièrement, M. André Marin, ancien procureur adjoint de la Couronne et ancien chef de l'Unité des enquêtes spéciales de l'Ontario, a été nommé le premier ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes. L'ombudsman remplacera la chaîne de commandement et jouera un rôle essentiel, celui de conseiller les membres et leurs supérieurs sur le meilleur moyen de régler les conflits et les griefs à la satisfaction des membres.

La nomination d'un ombudsman témoigne de façon on ne peut plus claire de l'engagement du gouvernement d'accroître l'efficacité et la transparence des mécanismes de surveillance, ainsi que la transparence et l'équité au sein des Forces canadiennes. L'ombudsman complétera les mécanismes déjà en place pour exercer une surveillance sur le MDN et sur les Forces canadiennes, y compris le nouveau Comité d'examen des griefs des Forces canadiennes et la nouvelle Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire que j'ai mentionnés.

L'obligation accrue de faire rapport par l'établissement de rapports annuels est une troisième mesure en vue d'améliorer la surveillance. Aux termes du projet de loi C-25, le juge-avocat général, le Comité d'examen des griefs des Forces canadiennes et la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire seront tenus de présenter un rapport annuel. Bref, cela ne laisse plus guère de place pour un inspecteur général. Comme je l'ai dit en comité, toutes les bases sont couvertes.

Je voudrais profiter de ce débat à l'étape de la troisième lecture pour traiter de la suppression des dispositions relatives à la peine de mort dans la Loi sur la défense nationale. C'est une chose qui aurait dû être faite depuis longtemps. La peine de mort a été abolie dans le Code criminel il y a environ 22 ans. Depuis l'adoption de la Loi sur la défense nationale, en 1950, aucun membre des Forces canadiennes n'a été exécuté pour infraction d'ordre militaire en vertu de la loi.

Durant la Deuxième Guerre mondiale, trois soldats ont été condamnés à mort par des cours martiales, mais un seul a été exécuté pour meurtre—une infraction d'ordre civil qui, en ce temps là, pouvait entraîner la peine de mort. De l'avis du chef d'état-major de la défense, aux termes du Code de discipline militaire, la peine de mort n'est plus requise à des fins militaires.

La suppression des dispositions relatives à la peine de mort dans la Loi sur la défense nationale permettra d'aligner le droit militaire sur le droit civil et sur l'approche adoptée par la plupart des pays occidentaux. Pour les infractions plus graves, notamment les actes de trahison, l'emprisonnement sans admissibilité à la libération conditionnelle avant 25 ans, une nouveauté, se révélera un moyen de dissuasion suffisant.

 

. 1550 + -

Aucun des témoins ayant comparu devant le Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants ne s'est prononcé en faveur de la peine de mort. Lorsqu'il a comparu, le juge en chef Dickson a souligné l'importance de faire en sorte que la peine soit proportionnée à la peine maximale prévue par le droit civil.

Les modifications à la Loi sur la défense nationale sont les plus importantes qui y soient apportées depuis 50 ans. Le gouvernement s'est inspiré des rapports du ministre de la Défense nationale, du groupe consultatif spécial et de la Commission d'enquête sur la Somalie. Toujours dans le projet de loi C-25, le gouvernement s'est engagé à revoir les dispositions de la loi dans cinq ans.

Les modifications que contient le projet de loi C-25, ainsi que les réformes déjà entreprises, moderniseront le système de justice militaire tout en respectant les exigences militaires en matière de transférabilité, de rapidité et de capacité de participation à la chaîne de commandement.

En temps de paix comme en temps de guerre, où que soient déployées les Forces canadiennes, ces modifications feront en sorte que nos troupes soient aptes au combat et puissent relever les défis et remplir leurs missions conformément aux voeux des Canadiens, conformément aux valeurs défendues dans notre société et notre Constitution. Notre pays, grâce au dévouement des hommes et des femmes qui forment les Forces canadiennes, ne mérite rien de moins.

J'exhorte donc tous les députés à souscrire à ce projet de loi.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je pense que vous constateriez qu'il y a consentement unanime pour que je partage mon temps de parole de 40 minutes avec trois de mes collègues, de sorte que chacun de nous dispose de 10 minutes.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que le député d'Esquimalt—Juan de Fuca partage son temps de parole en quatre périodes de dix minutes?

Des voix: D'accord.

M. Keith Martin: Monsieur le Président, je remercie la Chambre de sa générosité. Je vais partager mon temps de parole avec les députés de Lakeland, Edmonton-Est et Compton—Stanstead.

Je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-25. Nos militaires, hommes et femmes, servent depuis longtemps notre pays avec courage, avec distinction et en silence. Ils travaillent fort. En fait, ils sont plus occupés maintenant qu'ils ne l'ont jamais été, et ils ont participé à quelque 17 opérations militaires depuis la guerre de Corée. Pourtant, leur moral n'a jamais été aussi bas depuis des années.

Pourquoi? Il y a de nombreuses raisons à cela. Je suis déçu que le projet de loi C-25 n'aille pas au fond des choses; le gouvernement avait pourtant là une belle occasion de le faire.

Mon collègue de Calgary-Est a fait beaucoup de suggestions constructives au gouvernement, mais celui-ci les a toutes rejetées. Elles auraient largement contribué à faire du projet de loi C-25 la mesure qu'il devrait être, c'est-à-dire une mesure prévoyant un système de justice militaire basé sur la reddition de comptes, la transparence et l'honneur.

Nous voulions que l'inspecteur général soit indépendant, ce qui lui aurait donné davantage de pouvoirs pour représenter nos militaires. Quant à la réforme du bureau du Juge-avocat général, nous voulions que le JAG soit indépendant de la chaîne de commandement. En d'autres termes, nous voulions qu'il ait davantage de pouvoirs pour enquêter sur des problèmes au sein des forces armées.

À l'heure actuelle, nos militaires font face à une situation qui les rabaisse. En effet, des activités criminelles, notamment des viols, sont tolérées dans les Forces canadiennes. On ferme les yeux. Les activités répréhensibles d'un tout petit nombre de pommes pourries ternissent la réputation des militaires qui font un travail remarquable et qui sont la très grande majorité de l'effectif.

Le projet de loi ne touche pratiquement à rien de tout cela. Pourtant, on applique des règles et des règlements mesquins qui suppriment l'esprit de corps nécessaire pour former des forces armées capables d'aller jouer leur rôle dans le monde entier. Les traditions de nos militaires sont foulées aux pieds. On interdit à nos militaires de porter des insignes de mérite.

Comment avons-nous pu en arriver à une situation où il n'y a essentiellement plus de promotions et où les gens occupent le même poste pendant dix ans ou plus. Les soldes sont gelées depuis un certain temps, et nous comprenons cela.

 

. 1555 + -

Le gouvernement aurait pu présenter des solutions constructives qui n'auraient pas coûté un sou. J'ai fait état de ces solutions au général Dallaire, qui était responsable de l'armée il y a deux ans, lorsqu'il a comparu devant le comité de la défense. On nous avait promis que des mesures seraient prises, mais il n'y a rien eu.

L'une de ces solutions constructives était d'accorder l'allocation d'aide au logement à tous les militaires et la rendre exempte d'impôt. Les commandants de base devraient avoir plus de pouvoirs et une plus grande capacité de gestion de leurs services. Ils ne devraient plus s'occuper des travaux publics afin de pouvoir mieux se consacrer aux fonctions plus constructives.

Il est important également de considérer notre équipement. Il est vrai que le gouvernement a fait, récemment, quelques achats raisonnables, mais l'armée continue d'utiliser un matériel qui est dangereux et vétuste, et met en péril la santé de nos soldats. Les militaires se déplacent à l'intérieur du pays. Ils déménagent d'une petite base comme Cold Lake en Alberta à la base d'Esquimalt dans ma circonscription, où se trouve le commandement maritime du Pacifique. Ils constatent que le coût d'un tel déménagement a augmenté considérablement et pourtant ils ne reçoivent aucune allocation de déménagement.

Lorsqu'ils entrent dans l'armée, les militaires savent qu'ils peuvent être mutés n'importe où au pays, et ils acceptent cela. Ils savent que cela fait partie du travail, mais ils ne pouvaient imaginer qu'une mutation puisse leur coûter si cher. La situation est si grave qu'il y a des militaires qui fréquentent la soupe populaire. Ils travaillent au noir. Des hommes dont les épouses sont enceintes sont contraints de travailler à l'étranger pour gagner un petit supplément afin de nourrir leur famille. Comment peuvent-ils servir leur pays et remplir nos engagements internationaux correctement lorsqu'ils sont obligés de se livrer à de telles activités?

Nous comprenons tous que le gouvernement est dans une situation financière difficile; nous la subissons tous. Mais ces solutions constructives, comme l'idée d'accorder une indemnité de logement non imposable à tous et celle de réduire le loyer des simples soldats au niveau d'il y a trois ans, ne seraient cependant que justice.

Les loyers des simples soldats ont été majorés à répétition alors que leur solde était gelée. Le message ainsi envoyé à nos militaires est très négatif. Ils ne cherchent pas à faire fortune. Ils connaissent leur situation. Ils comprennent la situation du gouvernement et ses contraintes. Mais ils ne s'en attendent pas moins à un traitement équitable.

Ce n'est pas trop demander de la part de ceux qui vont au loin dans des conditions extrêmement dangereuses parader le drapeau canadien et faire ce qu'exigent les engagements de notre pays, tant à l'étranger qu'au pays.

Il faut aussi songer aux civils qui travaillent pour les forces armées. Le personnel de la base de transit, à Esquimalt, a fait un travail de compression remarquable, à tel point que c'est devenu un modèle pour les autres bases partout au Canada.

Plusieurs de ces personnes travaillent pour les forces à des salaires inférieurs à ce qu'elles pourraient toucher de l'assistance sociale. Mais elles ont préféré travailler pour les forces et le MDN à cause de la fierté que leur procure l'idée d'appuyer une institution qui fait partie de l'histoire de notre pays et qui en forme un chapitre honorable.

Ces personnes n'ont toujours aucune assurance quant à ce que l'avenir leur réserve. On ne leur dit rien à ce sujet. Elles savent qu'un appel d'offres a été lancé par souci d'efficacité. Tout ce qu'elles demandent, c'est de pouvoir y participer équitablement, selon les mêmes règles que les autres. On ne leur permet pas de faire des offres pour des tâches auxquelles elles travaillent honorablement depuis des décennies dans certains cas. Ce n'est pas une façon de traiter le personnel militaire. Ce n'est pas une façon de traiter les honnêtes gens qui travaillent pour le ministère de la Défense nationale.

Il y aurait lieu de prêter l'oreille aux solutions proposées par mon collègue de Calgary-Est pour moderniser nos...

Le vice-président: Le leader parlementaire du gouvernement, sur un rappel au Règlement.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

 

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre afin de présenter la motion suivante:

    Que, nonobstant tout article du Règlement ou usage de la Chambre, le ministre d'État et leader parlementaire du gouvernement à la Chambre des communes puisse déposer un projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur les traitements et en proposer la première lecture pendant les affaires courantes le jeudi 11 juin 1998 et que la Chambre dispose de cette mesure comme suit:

    1. Le débat à l'étape de la deuxième lecture dudit projet de loi commence à 15 heures le jour dit et au bout d'au plus une heure toute question nécessaire pour disposer de la mesure à cette étape est mise aux voix sans autre intervention;

    2. Immédiatement après avoir franchi l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi est étudié en comité plénier et au bout d'au plus trente minutes toute question nécessaire pour en disposer à l'étape de l'étude en comité est mise aux voix sans autre intervention;

    3. Immédiatement après que le comité plénier en a fait rapport, ledit projet de loi est adopté à l'étape du rapport et examiné à l'étape de la troisième lecture et après un débat d'au plus trente minutes toute question nécessaire pour en disposer à l'étape de la troisième lecture est mise aux voix sans autre intervention;

    4. Les motions portant deuxième lecture, adoption à l'étape du rapport et troisième lecture du projet de loi, les motions portant adoption de tout article ou du titre du projet de loi, ou toute motion d'ordre procédural nécessaire pour adopter le projet de loi en comité plénier sont réputées adoptées avec dissidence;

    Que les travaux prévus lors des ordres émanant du gouvernement dans la matinée du 11 juin 1998 soient l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-38, suivie de la troisième lecture du projet de loi C-37, sous réserve que, à 11 heures au plus tard, toute question nécessaire pour mettre fin à l'étude du projet de loi C-38 à l'étape du rapport soit réputée mise aux voix et qu'un vote par appel nominal soit demandé et différé jusqu'à 13 heures et qu'à 13 heures, toute question nécessaire pour mettre fin à la troisième lecture du projet de loi C-37 soit mise aux voix et que les votes par appel nominal nécessaires soient demandés et reportés jusqu'à la fin de l'examen du projet de loi C-38; et

    Que, pendant les délibérations sur les ordres émanant du gouvernement ce jour-là, un député puisse proposer une motion à l'égard de tout amendement apporté par le Sénat au projet de loi C-410.

 

. 1600 + -

(La motion est adoptée.)

*  *  *

LA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelques mesures constructives que l'on peut adopter pour veiller à ce que nos militaires puisse accomplir leurs tâches.

Pour rehausser le moral, rendons l'indemnité d'aide au logement non imposable. Cette disposition pourrait s'appliquer à tous les membres des forces armées. Ramenons les loyers au niveau où ils se trouvaient en 1994 au moment où les salaires ont été gelés.

Donnons aux commandants des bases la possibilité de maximiser l'efficacité de leur base et de se débarrasser des travaux publics.

Ramenons les traditions au sein des forces armées. Il est important d'écouter les gens de la base et de leur permettre de porter leurs insignes de mérite. Ravivons les traditions qui les ont rendu fiers.

Cessons de punir les petites infractions sans importance qui accroissent souvent l'esprit de corps, un élément essentiel pour permettre aux militaires de constituer une force unie, mieux en mesure d'assumer les dures responsabilités qui l'attendent à l'étranger.

Soyons sévères à l'endroit des criminels et ne ménageons aucun effort pour enrayer le crime.

Regardons bien les échelons supérieurs de la hiérarchie militaire et assurons-nous qu'il y a là des gens qui travaillent pour leurs soldats et pour la base, que ce ne sont pas des politiciens en costume militaire.

Assurons-nous que les soldats connaissent bien ce qu'on attend d'eux. Il ne doit pas y avoir de messages ambigus de la part du ministre des Affaires étrangères. Par l'intermédiaire du ministre de la Défense, faisons en sorte que les militaires sachent exactement à quoi s'en tenir. Si on leur confie une tâche, ils vont l'exécuter, mais que le message ne comporte aucune ambiguïté.

Nous ne devons pas oublier qu'il ne s'agit pas d'une formation au scoutisme. Nous formons des militaires susceptibles de se rendre à l'étranger et d'y participer à des guerres.

Nous ne devons pas oublier non plus les employés civils qui appuient nos soldats et officiers au ministère de la Défense. Beaucoup y travaillent depuis de nombreuses années. Ils ont subi d'énormes compressions. Ils ont participé de bon gré à des mesures d'efficience et ils ont accompli un excellent travail à cet égard. Nous devons nous tourner vers eux, examiner ce qu'ils ont fait et ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Ce faisant, nous pourrions adopter des systèmes moins efficaces pour notre appareil militaire.

 

. 1605 + -

N'oublions pas que nous possédons une tradition de longue date sur le plan militaire. Des hommes et des femmes se sont battus et sont morts pour que nous vivions dans un pays fort et libre.

Faisons en sorte que notre personnel militaire puisse poursuivre les traditions honorables du passé et s'acquitter de ses obligations à l'étranger et à l'intérieur du pays.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur ce projet de loi. Je parlerai un peu des réformes qui sont prévues dans ce projet de loi, mais, hélas, beaucoup plus de ce qu'on n'y trouve pas, à savoir les postes d'ombudsman et d'inspecteur général indépendant. Je ferai des observations d'ordre général sur les hommes et les femmes qui servent dans les forces.

On a beaucoup parlé de la teneur du projet de loi, qui prévoit des modifications au poste de juge-avocat général. Le projet de loi renferme des modifications utiles, mais, dans l'ensemble, elles sont annulées par le fait que le poste de juge-avocat général reste dans la chaîne de commandement. Il n'a pas assez d'indépendance.

Certaines des modifications préconisées ont perdu de leur valeur parce que l'indépendance est limitée. La police militaire est un autre domaine réformé dans ce projet de loi. Certains changements sont intéressants, mais, encore une fois, ils sont largement annulés par le fait que ce service n'est pas assez indépendant. C'est un problème, et cela restreint dans une large mesure la valeur qu'aurait pu avoir ce projet de loi s'il avait été mieux rédigé.

Voilà ce que l'on trouve dans le projet de loi. Qu'est-ce qu'on ne trouve pas dans le projet de loi? Le poste d'ombudsman. Le poste d'inspecteur général indépendant a été complètement écarté. Il n'en est pas question dans le projet de loi, et il a sûrement été rejeté par le ministre dans sa déclaration d'hier sur l'ombudsman.

Le secrétaire parlementaire, dans ses observations préliminaires, a dit qu'on n'avait pas besoin d'un inspecteur général indépendant. Il a dit que toutes les bases sont couvertes par le poste d'ombudsman et par les dispositions de ce projet de loi. La création de ce poste a été annoncée hier. Je vais montrer le plus clairement possible que toutes les bases ne sont pas couvertes.

Ces postes du système de justice militaire ne jouissant d'aucune indépendance, les gains obtenus, s'il en est, seront bien minces.

Prenons le poste d'ombudsman. Il n'en est pas question dans le projet de loi. Le plus intéressant dans tout cela, c'est que même si la création du poste d'ombudsman a été annoncée par le ministre hier, à l'occasion d'une conférence de presse, aucune loi n'a été présentée pour créer un tel poste. Pourquoi? Le poste d'ombudsman est créé, mais aucune loi n'est adoptée à cet égard. À mon avis, cela signifie que l'ombudsman n'aura aucun pouvoir. C'était très clair à la conférence de presse hier. L'ombudsman qui a été nommé n'a aucun pouvoir.

Le seul véritable pouvoir qu'a cet ombudsman, c'est celui d'informer la population sur ce qui se passe à l'intérieur du ministère. Il est très limité, car l'ombudsman ne transmet pas vraiment à la population l'information qu'il pourrait avoir sur une situation qui n'est pas réglée correctement. L'ombudsman présente plutôt l'information au ministre. Il incombera au ministre de décider s'il fera quelque chose avec l'information qu'on lui transmet. Qu'a-t-on accompli au juste avec cela? Je voudrais que le secrétaire parlementaire m'explique comment toutes les bases ont été couvertes.

 

. 1610 + -

Je tiens à citer des choses qu'ont dites le ministre et le général Kinsman, l'ancien SMD du personnel, à propos du poste d'ombudsman, de ce qu'il permet de faire et de ce qu'il ne permet pas de faire. Il importe de signaler ici qu'il s'agit de l'ombudsman de l'organisation et non de l'ombudsman dont on entend habituellement parler et qui est chargé par un gouvernement provincial ou quelque organisme de régler un problème particulier.

Le général Kinsman a dit ceci: «les fonctions caractéristiques d'un ombudsman d'organisation sont notamment d'écouter les plaintes des membres et d'offrir la possibilité de les ventiler; d'informer les membres sur la politique, la façon de prendre des mesures, l'endroit où trouver l'information, etc; de cerner les problèmes et de mettre au point des options pour les membres; de renvoyer les membres à des gens qui peuvent les aider à s'aider eux-mêmes au moyen de conseils ou d'encadrement; de prendre des mesures non officielles en tant que tiers-intervenant...» Plus la liste s'allonge et plus il est clair que ce poste ne confère absolument aucun pouvoir. Cela a été renforcé hier, en fait, avec l'annonce du ministre.

Le général Kinsman a ajouté ceci: «Compte tenu des objections soulevées par les commandements opérationnels à l'égard de la proposition telle que déposée, on a mis au point une solution de compromis qui limiterait l'accès direct des membres au bureau de l'ombudsman à des mesures administratives seulement, mais autoriserait un accès secondaire sur toutes les autres questions après qu'on eut tenté de résoudre le problème au sein de la chaîne de commandement.»

Les gens dont les plaintes restent lettre morte devront encore une fois passer par la chaîne de commandement et ce n'est qu'après cela que leur plainte pourra, d'une certaine manière, être traitée par l'ombudsman. Comme il n'a aucun pouvoir parce qu'aucune disposition législative ne lui en confère, l'ombudsman en question aura des possibilités très limitées. Hier, en conférence de presse, le ministre a vraiment confirmé cela.

Je voudrais que le secrétaire parlementaire et le ministre expliquent en quoi tous les aspects ont été couverts. Il est clair que très peu de progrès ont été accomplis.

La déclaration la plus dérangeante a été faite par le secrétaire parlementaire, aujourd'hui, et par le ministre, hier, lors de la conférence de presse. Les deux ont dit que la nomination de cet ombudsman rendait inutile la désignation d'un inspecteur général indépendant. Or, il a été recommandé à maintes occasions, notamment par les membres de la commission chargée d'enquêter sur les incidents survenus en Somalie et par bien d'autres personnes qui ont examiné le système militaire, de nommer un inspecteur général indépendant qui ferait rapport au Parlement et qui serait tout à fait à l'extérieur de la chaîne de commandement. Voilà ce qui a été recommandé. Voilà ce qu'il faut et il n'en est absolument pas question dans le projet de loi. C'est une omission flagrante.

Si tous les aspects ont été couverts, le gouvernement n'ira pas loin avec ce projet de loi. Cette question me préoccupe vivement à cause de ses répercussions sur les hommes et les femmes qui servent si bien dans les Forces canadiennes et qui doivent pouvoir se tourner vers quelqu'un lorsque leurs problèmes ne sont pas réglés d'une manière satisfaisante.

Je tiens à préciser que, lorsque je parle du poste d'ombudsman, qui n'est assorti d'aucun pouvoir, et de l'absence de dispositions législatives qui créent ce poste, je ne critique pas celui qui a été nommé, André Marin. Il semble être un jeune homme intelligent et extrêmement compétent si l'on en juge par ce qu'il a accompli. Ses états de service sont impeccables. Je n'ai rien à redire au choix que l'on a fait pour doter ce poste.

Cependant, je crois que M. Marin va connaître des déboires. Après avoir occupé ce poste pendant six mois, il va se rendre compte qu'on lui a confié une tâche impossible. On attend beaucoup de lui mais il ne possède pas les pouvoirs lui permettant de s'exécuter.

 

. 1615 + -

Pour terminer, je vais faire quelques observations sur la portée de cette mesure législative, qui est très faible, sur le poste d'ombudsman, qui est très faible lui aussi, et sur les conséquences de cela pour les hommes et les femmes qui font si bien leur travail dans nos forces armées.

Comme le Comité de la défense de la Chambre des communes a pu le constater, il est clair qu'il y a des gens très compétents dans les Forces canadiennes. Ils sont dévoués. Ce n'est certainement pas l'argent qui les attirent. Ils sont là parce qu'ils veulent servir le pays. Ils sont fiers de ce qu'ils font mais il leur faut aussi quelqu'un qui peut les aider lorsqu'ils ont un problème que la chaîne de commandement n'est pas en mesure de régler. Ils doivent pouvoir s'adresser à quelqu'un.

Ces hommes et ces femmes qui servent si bien leur pays sont déçus de voir qu'une telle mesure législative a pu être proposée et que toutes les bases seront visées. C'est une triste affaire. Il faut faire quelque chose pour corriger le tort qui est causé en présentant une telle mesure législative et en s'en tenant à elle.

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer, en tant qu'humble représentant des électeurs d'Edmonton-Est et porte-parole de l'opposition officielle en ce qui a trait aux affaires des anciens combattants, au débat du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale.

Certains observateurs ont fait remarquer que le programme législatif de la session en cours manquait de substance. Le débat actuel montre à quel point ils peuvent se tromper. Le projet de loi C-25 est une mesure d'une grande importance. Il propose la réforme la plus approfondie de la Loi sur la défense nationale depuis son adoption en 1950.

Comme le disait le ministre de la Défense nationale en mars dernier, le gouvernement entend mettre en oeuvre, par le truchement du projet de loi, 80 p. 100 des recommandations de la Commission d'enquête sur la Somalie, dont le gouvernement avait interrompu les travaux.

Ce projet de loi semble constituer, en partie, la réponse du gouvernement au problème des conflits d'intérêts dans le système de justice militaire, mis au jour lors des enquêtes concernant la conduite de nos troupes en Somalie et en Bosnie. Ce projet de loi semble également viser à corriger la perception de discrimination quant à la façon de traiter les écarts de conduite dans les forces armées. Il semblerait que plus un accusé a un grade élevé, moins on croit que la justice ou les sanctions seront appliquées de façon équitable.

Je participe à ce débat en tant qu'ancien militaire, puisque de 1962 à 1965, j'ai fait partie de la police militaire de l'Aviation royale du Canada.

Certaines personnes soutiennent que les militaires devraient être régis par le même système judiciaire que les civils. D'autres se demandent sans doute pourquoi il existe un système de justice réservé aux militaires. La justice pénale ne devrait-elle pas être administrée de la même manière dans toutes les provinces et pour tous les groupes? Certains pourraient soutenir que rien ne distingue la carrière militaire de n'importe quelle autre profession autonome, où les cas de fautes professionnelles sont tranchés à l'interne, mais où les cas de nature criminelle sont renvoyés au système de justice civile.

D'après moi, un système de justice militaire est important et devrait être préservé. Cela se justifie notamment du fait qu'un grand nombre des causes les plus connues impliquant des militaires avaient trait à des événements qui se sont produits pendant une mission à l'étranger. Il est nettement plus efficace de demander justice pour ces fautes au système de justice militaire du Canada qu'au Comité international sur les conflits en matière de compétence juridictionnelle.

Comme l'a dit le ministre de la Défense nationale, en faisant ses observations sur ce projet de loi, «un système de justice militaire distinct existe par tradition parce qu'il faut procéder sans délai [...] il est nécessaire d'avoir un système qui peut se déplacer. Nous tentons de nous rapprocher le plus possible du système de justice civile».

Mes collègues et moi sommes très favorables aux mesures qui sont proposées pour améliorer le système de justice militaire. Pourtant, nous nous opposerons à ce projet de loi. Nous le ferons surtout parce que nous craignons qu'il soit superficiel et ne modifie pas de façon significative le système de justice militaire. Nous nous demandons si ce projet de loi permettra d'atteindre l'objectif du gouvernement qui veut un système parallèle au système de justice civile, surtout à cause d'une bureaucratie plus lourde.

Nous savons tous qu'il y a de graves problèmes chez les militaires, en particulier en ce qui a trait au moral des troupes et au sentiment généralisé selon lequel plus on est élevé, plus il est facile de violer les règlements.

 

. 1620 + -

La nomination d'un ombudsman pour examiner ces préoccupations ne changera peut-être pas grand-chose. Après tout, la personne nommée, André Marin, fils du juge René Marin, est un juge d'allégeance libérale. Toute démarche pour améliorer nos forces armées doit être entièrement dénuée de parti pris politique, tant perçu que réel. Il a été signalé qu'André Marin a été nommé sur les instances personnelles du ministre de la Défense nationale et en dépit des objections formulées par d'autres personnes qui estiment qu'il y avait des candidats plus appropriés.

Je ne conteste aucunement la compétence de M. Marin. Je trouve curieux et, bien sûr, il s'agit là d'une pure coïncidence, que sa nomination ait été annoncée deux jours avant le débat final sur le projet de loi.

Pourquoi toute question de parti pris perçu ou réel est-elle importante dans l'évaluation des pratiques militaires? C'est que les souvenirs de l'interruption, par le gouvernement libéral, de l'enquête sur l'affaire de la Somalie sont encore frais dans notre mémoire. Comme on se le rappelle peut-être, cette interruption a eu lieu au moment où la commission s'apprêtait à faire enquête sur la participation du gouvernement libéral dans l'affaire de la Somalie. Dans la mesure où l'on peut le considérer comme une tentative du gouvernement de contrer les critiques sur son interruption de l'enquête somalienne, le projet de loi C-25 peut être considéré comme une vaine tentative du gouvernement pour détourner les préoccupations.

À défaut de démarches clairement et entièrement impartiales, perçues ou réelles, le gouvernement risque encore d'être considéré comme un gouvernement qui autorise impunément la perpétuation d'une culture du secret, du camouflage et de l'intimidation dans les forces armées. Le gouvernement risque également d'être vu comme un gouvernement qui sanctionne les conduites et les attitudes de cadres militaires qui ne sont pas tenus responsables de leurs rôles dans de graves erreurs et scandales. Immanquablement, ce sont les subalternes qui sont blâmés, au bout du compte, pour les erreurs commises par leurs supérieurs.

Je voudrais maintenant aborder certaines dispositions du projet de loi concernant plus particulièrement la police militaire. Si l'on reconnaît, comme moi, qu'un système séparé de justice militaire est nécessaire, un service de police militaire devient également nécessaire. Si l'on reconnaît, comme moi, qu'un tel système de justice militaire ne devrait pas différer beaucoup du système de justice régissant les civils, un régime séparé de réglementation pour la police militaire devient alors nécessaire.

Pour donner suite à une recommandation de la commission d'enquête sur la Somalie, le projet de loi C-25 institue un code de conduite de la police militaire. De plus, des processus sont établis pour l'examen des plaintes déposées par les policiers militaires ou contre eux. Les processus d'examen des plaintes contre les policiers militaires sont analogues à ceux que l'on trouve dans le domaine civil. Il y aura donc une commission indépendante d'examen des plaintes concernant la police militaire qui s'occupera de ce qu'on appelle les plaintes pour inconduite. Par ailleurs, quand les policiers militaires se plaignent d'ingérence dans leurs enquêtes, ils peuvent eux aussi porter plainte auprès de la commission d'examen des plaintes. C'est ce qu'on appelle les plaintes pour ingérence.

Un policier militaire qui a mené ou supervisé une enquête peut porter plainte pour ingérence contre un officier des Forces canadiennes ou contre un haut fonctionnaire du ministère de la Défense nationale s'il est fondé à croire, pour des motifs raisonnables, que celui-ci a entravé l'enquête.

Cela met la police militaire sur un autre pied que la police civile. Il existe en droit pénal une infraction appelée entrave à la justice. Les policiers n'ont pas à s'adresser à une commission de police pour faire examiner une telle plainte. On peut simplement porter la plainte en se fondant sur des faits.

Être accusé d'entrave à la justice ne devrait pas dépendre du rang que l'on occupe dans la hiérarchie de la défense nationale. Je crois que les policiers militaires devraient jouir de pouvoirs similaires à ceux des policiers civils. En plaçant une commission entre les faits et des accusations, le gouvernement perpétue l'image de partialité dans l'évaluation des accusations d'entrave à la justice. C'est particulièrement le cas puisque la commission a le pouvoir de faire cesser une enquête. C'est une des lacunes au sein de l'armée qui a été dénoncée dans le rapport d'enquête sur la Somalie et ailleurs.

On a la nette impression qu'on peut faire entrave à la justice au sein de l'armée selon le rang de l'accusé ou dans des circonstances où l'armée s'estime attaquée par un organisme. Toutes les initiatives législatives devraient avoir pour but d'éliminer la moindre impression que de telles obstructions de la justice pourraient se produire ou se produisent encore dans l'armée. Je ne crois pas que cette mesure législative y parvienne.

 

. 1625 + -

Note plus positive: il n'est enfin plus possible, pour un commandant, qui n'est peut-être pas avocat, de suspendre les procédures. C'est qu'il y a nettement apparence de partialité quand des poursuites pénales peuvent être suspendues par quelqu'un qui est directement intéressé dans l'affaire.

Comme mon temps tire à sa fin, je tiens à préciser, aux fins du compte rendu, que ma principale réserve à l'égard de ce projet de loi tient au fait que ce n'est pas ainsi que l'on éliminera toute apparence de partialité dans l'armée. Le projet de loi se veut un premier pas vers la réforme du système de la justice militaire, mais il reste encore beaucoup de travail à faire dans ce domaine et, pour ce qui est de ce projet de loi, il reste encore bien des textes législatifs à peaufiner. J'exhorte mes collègues à voter contre le projet de loi C-25.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, je remercie mes collègues du Parti réformiste d'avoir partagé leur temps.

Je suis heureux de me prononcer sur le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui. Le gouvernement a décidé d'aborder la question de la justice dans les Forces canadiennes, ça urgeait. Comme dans tout ce que le gouvernement fait, quelle que ce soit la noblesse apparente du geste posé, il suffit de gratter un peu la surface pour se rendre compte qu'il y avait un motif caché. Il s'agit le plus souvent de sauver les apparences. C'est précisément le cas aujourd'hui.

Il est important et urgent d'aborder la question de la justice dans l'armée. Mon parti est d'avis que, si l'on veut faire quelque chose dans ce demain, il convient de le faire comme il ce doit. Malheureusement, même s'il n'est pas sans présenter des aspects intéressants, ce projet de loi est loin de s'attaquer aux problèmes réels auxquels les Forces canadiennes sont confrontés de nos jours.

Il y a lieu de nous poser plusieurs questions aujourd'hui. Premièrement, quels événements ont fait que la Chambre des communes se retrouve avec un pareil projet de loi sur les bras? Deuxièmement, le gouvernement a-t-il agi comme il le fallait et est-ce que ce projet de loi comble le besoin de changement? Troisièmement, s'il était adopté, ce projet de loi fonctionnerait-il, une fois mis en oeuvre? Certes, toutes ces questions sont reliées entre elles, mais il serait bon qu'on y réponde à la satisfaction des Canadiens.

La première question est peut-être la plus importante, car les autres en dépendent. Quels événements sont à l'origine de tout ceci? Tous les députés de la Chambre se souviennent des événements qui ont découlé d'autres événements survenus en Somalie. Mais il y a tout lieu de les exposer encore et encore. Les travaux de la commission sur la Somalie ont été interrompus pour des motifs politiques et personnels l'an dernier. C'est la raison pour laquelle nous en sommes là aujourd'hui.

Les commissions d'enquête sont créées pour répondre à une préoccupation exprimée par la population. En tant que représentants élus à la Chambre, nous devons à tout prix prendre ces questions très au sérieux. Il me semble que s'il y a de bonnes raisons de mettre une commission d'enquête sur pied, il doit exister de bonnes raisons de la laisser terminer son enquête.

La question n'a jamais été vidée, car la commission sur la Somalie n'a pas pu terminer son enquête. L'armée canadienne, une excellente institution, a été traînée dans la boue et la question n'est toujours pas réglée. Les Canadiens ne connaissent pas la vérité et l'enquête n'est pas terminée. Le gouvernement ne nous fera pas croire qu'il se soucie tout à coup de la justice militaire. Il a mis fin à une enquête publique avant qu'elle soit arrivée à son terme.

Le mois dernier, le magazine Maclean's révélait que les agressions sexuelles étaient courantes dans l'armée. Les femmes ne se sentent pas bien dans l'armée. C'est inacceptable.

Les députés réformistes croient probablement que les femmes n'ont pas leur place dans l'armée, mais presque tous les autres députés, dont moi et le ministre de la Défense, estiment qu'une telle attitude envers les femmes est inacceptable. Cependant, il ne suffit pas de dire que c'est inacceptable, il faut agir.

Il règne en ce moment une telle atmosphère de méfiance au sein de l'armée canadienne que les militaires qui ont subi une injustice se sentent plus en sécurité et ont l'impression qu'ils auront plus de succès s'ils se confient aux journalistes du Maclean's qu'aux autorités militaires.

 

. 1630 + -

Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond là-dedans, et ce projet de loi ne règle pas le problème.

Le ministre de la Défense nationale a présenté hier un nouvel ombudsman. J'ai félicité le nouvel ombudsman à la Chambre et lui ai souhaité beaucoup de succès dans ses nouvelles fonctions. Quand on lui a posé la question, ce nouvel ombudsman a dit qu'il ne savait pas de combien serait son budget ni de combien d'employés il disposerait et qu'il n'avait à peu près aucune ligne directrice. Ce n'est certainement pas acceptable.

C'est ce qui m'amène au deuxième point, dont je parlais tout à l'heure. Le gouvernement a-t-il agi comme il se doit? Ce projet de loi prévoit-il ce qu'il faut, compte tenu des besoins de changement?

Je viens de dire à la Chambre que je ne suis pas d'accord sur la manière dont ce projet de loi est arrivé ici. Toutefois, ce projet de loi comporte beaucoup d'éléments avec lesquels mon parti est d'accord. Cependant, quand quelqu'un essaie de cacher un problème plutôt que de s'y attaquer, comme le gouvernement le fait si souvent, le résultat laisse souvent à désirer.

De la même manière, comme le gouvernement le présente pour les mauvaises raisons, ce projet de loi n'en fait pas assez pour traiter les vrais problèmes.

Bien sûr, le gouvernement a raté une très bonne occasion de raviver la confiance de la population dans nos forces armées. Le gouvernement pourrait avoir pris les mesures qui feraient vraiment une différence, des mesures que les Canadiens pourraient considérer comme la preuve que le gouvernement les a écoutés et qu'ils peuvent maintenant avoir confiance dans le mode de fonctionnement des forces armées.

Mais le gouvernement n'a pas écouté. Il a préféré mettre un terme à une enquête et étouffer le débat. Maintenant, les Canadiens ont l'impression d'avoir été bernés, et avec raison.

Des enquêtes se poursuivent toujours sur des questions d'agression sexuelle. Cela aide-t-il les Canadiens à être fiers des gens qui portent l'uniforme de leur pays? Je ne le crois pas.

Le gouvernement est fier de dire qu'il a appliqué 80 p. 100 des recommandations de l'enquête sur la Somalie. J'ai deux choses à dire sur cette réalisation qui n'a rien de si extraordinaire.

Premièrement, la commission sur la Somalie s'est fait couper l'herbe sous le pied. Nous ne savons donc pas ce qu'auraient été les recommandations autrement. Deuxièmement, comme le gouvernement pense que 80 p. 100, c'est quelque chose dont il peut se vanter, mon parti considère de son côté que la qualité est beaucoup plus importante que la quantité.

Les responsables de l'enquête sur la Somalie ont recommandé que le juge-avocat général soit un civil. Le gouvernement a fait fi de cette recommandation. Les responsables de l'enquête sur la Somalie ont recommandé la création d'un bureau de l'inspecteur général. Le gouvernement a fait fi de cette recommandation.

L'an dernier, mon parti a proposé, dans le cadre de son programme électoral, et maintient toujours cette proposition, que la création du bureau de l'inspecteur général serait la meilleure manière d'obliger les forces armées à rendre des comptes et à faire preuve de plus de transparence afin d'augmenter la confiance du public dans nos forces armées.

Le ministre de la Défense nationale a dit que les Forces canadiennes n'avaient besoin de personne pour les surveiller. Il a dit ensuite que le rôle de l'inspecteur général est assumé d'autres manières. Il mentionne le Comité des griefs, composé d'éminents Canadiens. Il mentionne le nouvel ombudsman. Se pourrait-il que le Comité des griefs et l'ombudsman ne font pas ce qu'un inspecteur général pourrait faire?

Selon ce projet de loi, le Comité des griefs et l'ombudsman n'auraient absolument aucune autorité. Ils peuvent faire des recommandations et le CED peut les ignorer. Les Canadiens n'ont guère lieu de croire qu'elles ne le seront pas.

Les témoins que nous avons entendus à propos de ce projet de loi connaissaient parfaitement la question. Le professeur Doug Bland, de l'université Queen's, a recommandé au comité de lire le chapitre 44 du rapport de la Commission d'enquête sur la Somalie.

Peut-être serait-il mieux que je vous lise exactement ce qu'il a dit: «Avec tout le respect que je vous dois, j'aimerais attirer votre attention sur la dernière section du rapport de la Commission d'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie—«La nécessité d'un Parlement vigilant», ce qui me ramène au point de départ: j'estime que la défense du Canada, la gestion des forces armées et la délégation des responsabilités, ainsi que toute mesure et tout aspect touchant la politique de défense nationale du pays, relèvent de la responsabilité des députés.»

C'était le 12 mai 1998. J'aimerais à présent vous lire une motion que j'ai présentée le 29 novembre 1997 au CPDNAC: «Que le comité invite les trois membres de la Commission d'enquête sur la Somalie à comparaître devant le comité pour parler du chapitre 44 du rapport intitulé “La nécessité d'avoir un Parlement vigilant”.»

J'ai présenté cette motion cinq mois avant que le professeur Bland et d'autres témoins ne comparaissent devant ce comité pour examiner ce projet de loi précis. Je suis au regret de dire que la motion a été rejetée.

Le gouvernement ne veut pas d'un Parlement vigilant parce que s'il l'était trop, ce gouvernement pourrait bien ne pas s'en sortir comme ça avec toutes ses combines.

Les événements de la semaine dernière, quand il n'y avait un seul ministériel présent à la Chambre, ont démontré que le gouvernement libéral n'a absolument aucun respect ni pour le Parlement, ni pour la démocratie. Les députés de la majorité n'écoutent pas. Ils font ce que le bureau du premier ministre leur dit de faire, sans poser de questions. Depuis le vote sur l'indemnisation des victimes de l'hépatite C, tous les Canadiens le savent, mais c'est vrai dans d'autres cas également.

 

. 1635 + -

Je voudrais passer en revue certains des amendements que le gouvernement, dans toute son arrogance, a refusé même de considérer. Par exemple, si j'avais été convaincu que le gouvernement écouterait, j'aurais présenté une motion visant à créer un organisme indépendant, le bureau de l'inspecteur général, lequel aurait eu le pouvoir d'examiner les problèmes systémiques au sein de la justice militaire; de procéder à des enquêtes sur les cas de mauvaise conduite d'officiers comme ne pas avoir pris de mesures correctrices, s'être mal conduit personnellement, avoir gaspillé des ressources et peut-être été injuste envers des subalternes; de protéger ceux qui signalent des manquements; de protéger des individus contre les abus de pouvoir et les gestes personnels répréhensibles comme le harcèlement racial et le harcèlement sexuel; et, enfin et surtout, de faire rapport directement au Parlement.

Nous savons que le gouvernement ne voulait même pas en entendre parler. Même maintenant, le ministre de la Défense nationale n'écoute pas. Le gouvernement n'a pas accepté le principe de l'inspecteur général pour des raisons que mon parti ne peut accepter.

Une autre recommandation que nous aurions pu faire était celle de rendre obligatoire la mise en oeuvre des recommandations du comité des griefs, et d'imposer un délai maximal de six mois pour l'examen des plaintes.

Mais le gouvernement n'écoute pas. Il n'entend pas. Il ne veut pas d'un bureau doté de véritables pouvoirs.

Mon parti est tout à fait d'accord avec la nécessité de réformer le système de justice militaire, mais il faudrait que le projet de loi aille beaucoup plus loin pour que le changement soit réel. Nous tenons à ce que le public sache que l'armée doit être à son service à lui, et non pas servir ses propres intérêts. Le projet de loi ne fait pas ce qu'il devrait faire et le gouvernement n'a pas fait son travail.

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir intervenir aujourd'hui sur le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, à l'étape de la troisième lecture.

Depuis le moment où le ministre de la Défense nationale a déposé ce projet de loi, il n'a pas cessé de nous faire croire que les modifications proposées au système de justice militaire garantiront une plus grande transparence et une meilleure reddition de comptes de son ministère et des forces canadiennes.

Le projet de loi propose, il est vrai, certains mécanismes de reddition de comptes. Le nouveau Comité d'examen des griefs, la nouvelle Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire et le juge-avocat général devront présenter des rapports annuels que le ministre de la Défense nationale devra déposer au Parlement. À ces rapports s'ajoutent ceux du chef d'état-major de la Défense nationale et du grand prévôt des forces canadiennes, ainsi que d'autres rapports du nouveau Comité de surveillance mis sur pied l'automne dernier par le ministre de la Défense nationale.

On conviendra avec moi que bientôt, nous serons littéralement inondés de rapports annuels de la Défense nationale. Alors qu'on a longtemps reproché à la Défense nationale de faire preuve de fermeture, voici maintenant que son désir de rendre des comptes au public prend des dimensions étonnantes.

Toutefois, malgré l'apparence d'une certaine ouverture, je dois préciser que j'ai des doutes quant à l'objectivité dont feront preuve ces différentes autorités dans la rédaction de leurs rapports, compte tenu de leur proximité institutionnelle. Le juge-avocat général est un militaire; le chef d'état-major est évidemment un militaire; le grand prévôt est un militaire; les membres du comité de surveillance sont des amis du ministre et, finalement, le président du Comité des griefs devra travailler en étroite collaboration avec le chef d'état-major.

Dans ces circonstances, il est raisonnable de croire que nous n'aurons pas accès à des rapports très objectifs. En matière de transparence, il faudra plus que ces différents rapports pour dissiper, chez les Québécois et les Canadiens, l'impression malsaine que les Forces armées canadiennes sont un État dans l'État.

Par conséquent, puisque les parlementaires n'auront pas librement accès à une analyse critique et impartiale des questions touchant la défense, ils ne pourront s'acquitter pleinement de leur rôle de surveillance des affaires militaires.

 

. 1640 + -

Je dois dire que mes propos peuvent paraître sévères, mais il ne s'agit pas ici d'une critique personnelle à l'endroit de ceux qui auront à présenter un rapport annuel, mais tout simplement d'être conscient de la difficulté de faire une critique objective de l'institution dont on fait partie. Généralement, il est préférable d'avoir un regard désintéressé provenant de l'extérieur.

Comme le recommandait la Commission Létourneau, nous croyons que l'inspecteur général indépendant des Forces armées canadiennes, redevable devant le Parlement, assurerait une analyse équitable, neutre et balancée des activités des militaires, ce que le projet de loi actuel ne réussira jamais à faire.

Non seulement nous, du Bloc québécois, croyons qu'il serait préférable d'avoir un organisme de contrôle apolitique et indépendant, mais aussi, tous les autres partis dans cette Chambre se sont exprimés en ce sens.

Quant au ministre de la Défense, il nous dit que la recommandation de la Commission d'enquête sur la Somalie touchant la fonction d'inspecteur général se trouve à être mise en oeuvre, mais sous d'autres formes. Le ministre fait référence, entre autres, au Comité de surveillance qu'il a créé l'automne dernier.

Comme nous l'indiquions en deuxième lecture du projet de loi à l'étude, ce comité n'a rien à voir avec ce qu'espérait la Commission Létourneau. Ce Comité de surveillance est composé de huit personnes qui examineront la mise en oeuvre des changements annoncés au ministère et dans les forces armées. Ces personnes n'auront cependant rien à dire sur la conduite même des Forces armées canadiennes.

De plus, le ministre évite délibérément de dire que ce comité n'est pas permanent, ayant un mandat limité de deux ans seulement. En bout de ligne, que restera-t-il? Tout simplement quelques rapports annuels ici et là pour répondre à l'obligation de rendre des comptes.

Ce faisant, le ministre confond la population et donne l'impression de consentir à une inspection. Je dois dire que nous ne sommes pas dupes au point de croire qu'il y aura une réelle inspection indépendante des activités militaires.

Dans ses différentes interventions sur le projet de loi C-25, le ministre affirme également que la mise en oeuvre de modifications à la Loi sur la Défense nationale va accroître l'équité et l'efficacité du système de justice militaire. À cet égard, les députés du Bloc ont d'ailleurs soulevé plusieurs lacunes procédurales propres aux procès sommaires lors de leurs interventions à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi. Faute de temps à ce moment-là, nous n'avons pu parler des problèmes du système de justice militaire propres à la cour martiale. Nous profitons donc de l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui pour vous faire part de nos commentaires sur le sujet.

La Loi sur la Défense nationale prévoit quatre formes différentes de cour martiale: la cour martiale générale, la cour martiale disciplinaire, la cour martiale permanente et la cour martiale générale spéciale. Les deux premières sont constituées d'un juge militaire et d'un comité variant en nombre, comparable au jury d'une cour criminelle civile.

Ce sont les membres de ce comité qui sont les juges des faits, c'est-à-dire qu'ils déterminent la culpabilité ou l'innocence de l'accusé. En ce moment, il revient aussi au comité de prononcer la sentence dans le cas où l'accusé est déclaré coupable. Mais cette prérogative d'imposer la sentence est abolie par le projet de loi à l'étude, et il reviendra au juge militaire de l'imposer. Par cette modification, on rapproche avec raison le processus judiciaire militaire de la procédure pénale ordinaire.

Toutefois, même si le comité n'a plus d'autorité sur l'imposition de la sentence, il continuera tout de même à décider de la culpabilité ou de l'innocence de l'accusé. Son indépendance judiciaire et son impartialité sont donc déterminantes pour l'accusé.

En ce moment, seuls les officiers peuvent siéger comme membres d'un comité de la cour martiale générale ou d'un comité de la cour martiale disciplinaire. Le projet de loi permet une certaine ouverture aux militaires de rang leur permettant maintenant de siéger au sein d'une cour martiale dans certaines circonstances. Mais puisque ce sont toujours des militaires qui composent le comité de ces cours martiales, la problématique de l'indépendance institutionnelle de ces cours demeure entière.

Un tribunal militaire, composé de militaires, susceptible d'être influencé par la culture militaire, peut-il vraiment être impartial au sens de la Charte canadienne des droits et libertés? A-t-il vraiment l'indépendance suffisante pour rendre un verdict sans crainte raisonnable de préjugés?

 

. 1645 + -

Le principe d'impartialité veut qu'un tribunal ne soit pas influencé par les parties ni par des forces extérieures, sauf dans la mesure où il est convaincu par les arguments et les plaidoiries portant sur la question de droit en litige.

Le statut des décideurs doit garantir qu'ils échappent à l'influence de toute force extérieure. Nous savons que les militaires font l'objet d'une évaluation périodique de leur rendement et que cette évaluation peut avoir un impact sur leur avancement et leur solde. Ainsi, un militaire se retrouve dans une situation où on peut évaluer sa conduite comme membre d'une cour martiale. L'évaluation de son rendement pourrait ainsi traduire la satisfaction ou le mécontentement de son supérieur.

Il est vrai, par contre, que les ordonnances et règlements royaux ont été modifiés, il y a quelques années, de manière à interdire toute considération quant à la performance d'un militaire comme membre d'une cour martiale pour déterminer s'il mérite de l'avancement ou une augmentation de sa solde.

Mais peut-on raisonnablement croire que cette modification réglementaire a eu l'effet escompté? Autrement dit, est-ce que celui qui procède à l'évaluation du rendement d'un militaire peut réellement occulter de son esprit la performance de ce dernier comme membre d'une cour martiale?

D'autre part, est-ce que le membre d'un comité d'une cour martiale peut lui aussi occulter de son esprit les risques qu'il encourt s'il devait aller à l'encontre de la volonté de l'establishment militaire?

Malgré la modification réglementaire, le risque demeure. Quel est l'effet de ce risque? C'est d'être en présence de membres d'un comité qui ne soient pas totalement indépendants, des membres qui peuvent possiblement être affectés par des forces ou des considérations extérieures dans leur jugement.

Nous précisions plus tôt que le projet de loi accorde maintenant aux militaires de rang la possibilité d'agir comme membres d'une cour martiale dans certaines circonstances. Cette ouverture à l'endroit des militaires de rang provient probablement de l'image négative véhiculée par les procès en cour martiale de certains membres du Régiment aéroporté du Canada associés aux incidents en Somalie.

Ces procès ont en effet donné l'impression à toute la population que les militaires de grade inférieur étaient désignés comme boucs émissaires, alors que les officiers supérieurs s'en tiraient. Ces procès ont aussi donné l'impression que le jury des cours martiales comptait un trop grand nombre d'officiers du quartier général de la Défense qui avaient des intérêts à protéger.

Maintenant, on cherche à renverser la vapeur en créant une certaine ouverture à l'endroit des militaires de rang en leur permettant de faire partie du jury d'une cour martiale. Toutefois, imaginez la pression qui s'exercera sur ce militaire de rang d'agir selon les désirs des plus haut gradés qui feront partie du comité de la cour martiale. Imaginez la pression qui s'exercera sur ce militaire de rang de se conformer à l'establishment militaire. Imaginez les conséquences sur sa carrière militaire, s'il devait aller à contre-courant.

Nous ne cherchons pas ici à dénigrer l'intégrité personnelle du militaire de rang qui agirait comme membre d'une cour martiale, mais nous devons admettre que pour une personne raisonnable et bien informée, savoir que le comité d'une cour martiale générale ou disciplinaire est composé d'un militaire de rang en situation de vulnérabilité peut vraisemblablement faire naître dans son esprit une crainte raisonnable quant à l'impartialité du tribunal.

Au risque de nous répéter, mes propos ne visent pas à attaquer de quelque façon que ce soit les militaires. Nous devons tout simplement être conscients des dangers de l'influence hiérarchique.

À cet égard, la Cour d'appel militaire américaine a déjà qualifié l'influence hiérarchique indue comme étant l'ennemi mortel de la justice militaire. Malgré des interdits prévus aux ordonnances et règlements royaux applicables aux forces canadiennes, le problème de l'influence hiérarchique indue reste entier.

Ceci ne veut pas dire que la cour martiale fait systématiquement preuve d'impartialité, sauf que pour une personne raisonnable et bien informée, savoir que le comité d'une cour martiale générale et disciplinaire est composée de militaires peut vraisemblablement faire naître dans son esprit une crainte raisonnable quant à l'impartialité du tribunal.

Par conséquent, la composition même des comités des cours martiales générales et disciplinaires ne satisfait pas aux exigences de l'article 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés.

 

. 1650 + -

Le projet de loi ne répond pas aux préoccupations relatives à l'impartialité des cours martiales. Dans ces circonstances, n'y aurait-il pas lieu d'abolir tout simplement le Comité des cours martiales qui, d'une façon ou d'une autre, s'exposera toujours aux critiques, et de le remplacer par un vrai jury composé de civils, lequel serait plus conforme aux normes d'impartialité et d'indépendance garanties par la Charte?

J'aimerais dire également quelques mots sur la nouvelle Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. En vertu du projet de loi, cette commission aura comme tâche d'examiner les plaintes d'inconduite de la police militaire. Elle examinera aussi les plaintes de la police militaire au sujet de l'ingérence des membres des Forces armées canadiennes et des cadres supérieurs du ministère dans le cadre des enquêtes faites par celle-ci.

À prime abord, la création d'une nouvelle commission a du mérite. Malheureusement, le ministre de la Défense nationale a manqué l'occasion d'accorder à cet organisme de réels pouvoirs d'intervention, puisque les conclusions et les recommandations de la commission ne sont pas exécutoires. En fait, il revient à l'une ou l'autre des autorités prévues par la loi de réviser les conclusions et les recommandations de la Commission d'examen des plaintes. Selon le type de plaintes et de mises en cause, l'autorité de révision variera. Il peut s'agir tantôt du prévôt, du chef d'état-major, du sous-ministre ou du ministre lui-même. Autrement dit, la décision finale quant au traitement des plaintes revient de facto à l'une ou l'autre de ces personnes.

Le résultat est que la commission n'a aucune autorité décisionnelle, puisque la décision finale dans le traitement des plaintes revient soit aux militaires, c'est-à-dire au prévôt ou au chef d'état-major, soit à l'exécutif, c'est-à-dire au ministre ou au sous-ministre. Le ministre s'est donc contenté de recréer un organisme similaire à la Commission des plaintes du public à l'endroit de la Gendarmerie royale du Canada avec, bien entendu, ses imperfections.

Alors, à quoi bon créer une telle commission puisqu'en bout de ligne, le résultat demeure le même? Encore une fois, si le ministre avait réellement voulu corriger le tir, il aurait créé une commission ayant de vrais pouvoirs au lieu de chercher à nous berner en mettant sur pied une commission bidon.

En terminant, le Bloc québécois ne votera pas en faveur du projet de loi C-25. Contrairement à ce qu'affirmait le ministre, nous ne croyons pas que les modifications apportées par le projet de loi garantiront la transparence de la justice militaire et que leur mise en oeuvre accroîtra l'équité du système de justice militaire.

D'une part, les mécanismes de reddition des comptes mis en place par le projet de loi n'auront pas pour effet d'assurer une meilleure analyse des activités de la Défense nationale et des forces canadiennes. D'autre part, puisque les normes applicables à la justice militaire ne présentent pas les mêmes garanties constitutionnelles que celles qui prévalent devant les tribunaux pénaux civils, on ne peut appuyer ce projet de loi. C'est une question de respect à l'endroit de tous les militaires. Ils ont droit, au même titre que tout autre citoyen canadien, d'être traités équitablement. Dans le cas contraire, c'est leur droit à l'égalité devant la loi qui est compromis.

*  *  *

MESSAGE DU SÉNAT

Le vice-président: J'ai l'honneur d'annoncer à la Chambre que le Sénat lui a transmis un message pour l'informer qu'il a adopté un projet de loi qu'il soumet à l'assentiment de la Chambre.

*  *  *

[Traduction]

LA LOI SUR LA DÉFENSE NATIONALE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de participer au débat sur le projet de loi C-25. Ce projet de loi a été déposé en décembre. Il propose la plus importante série de modifications à la Loi sur la défense nationale depuis les cinquante dernières années.

L'objet principal du projet de loi, qui constitue le point central de la loi, vise le système de justice militaire, c'est-à-dire le système de droit pénal distinct qui s'applique aux membres des Forces canadiennes et à toutes les personnes assujetties à la juridiction militaire canadienne.

Les huit parties de la loi qui constituent l'assiette légale du service touchant les infractions militaires et les méthodes d'application, l'enquête, la poursuite, le jugement et l'imposition de peine aux contrevenants représentent le Code de discipline militaire.

 

. 1655 + -

Les infractions d'ordre militaire au Code de discipline militaire comprennent évidemment des infractions qui n'ont trait qu'au service militaire. Toutefois, le Code de discipline touche également des infractions au Code criminel et à d'autres lois fédérales et à quelques exceptions près, il permet au système de justice militaire d'exercer une juridiction sur les gens qui enfreignent ces règles alors qu'ils sont soumis à l'autorité des Forces canadiennes.

Comme nous le savons tous, au cours des dernières années, le système de justice militaire a fait l'objet d'un examen minutieux et de nombreuses pressions ont été exercées en vue d'y apporter des changements. L'un des principaux facteurs à la base de cette révision est sans aucun doute le fait que le Canada n'a pas été engagé dans une guerre importante depuis longtemps et que la situation ne semble pas devoir changer. Cette situation rend les gens moins tolérants à l'égard de toute injustice systémique perçue au sein du système et de la poursuite de l'application de peines jugées excessives ou anachroniques.

L'adoption de la Charte des droits et libertés a également joué un rôle. Ce changement d'ordre constitutionnel a entraîné un examen minutieux du système de justice militaire et du système judiciaire en général, au chapitre des garanties procédurales pour les personnes accusées et des principes de justice et d'égalité de traitement en général.

On a souligné notamment certains aspects du système de justice militaire qui reflètent le traitement différent qui est réservé aux soldats et aux civils ou aux divers groupes au sein de l'effectif militaire, notamment le manque de certaines protections traditionnelles en droit pénal dans les procès par voie sommaire; le fait que seulement les caporaux, les soldats et les sous-officiers, caporaux-chefs et sergents, peuvent être condamnés par procédure sommaire à la détention ou à la rétrogradation; les pouvoirs considérables dont jouissent les commandants pour décider que des accusations seront portées ou ne seront pas portées, même lorsqu'il s'agit d'actes criminels graves; et le fait que des personnes exerçant des fonctions judiciaires, ou ce qui équivaut à des fonctions judiciaires dans le système civil, sont souvent des membres de la chaîne de commandement qui ne possèdent aucune formation en droit et qui exercent d'autres responsabilités apparemment divergentes en matière d'administration du code de discipline militaire.

Au cours des dernières années, de tels problèmes et préoccupations ont été mis en évidence par certaines affaires qui ont attiré beaucoup d'attention, comme celles concernant des cas d'inconduite de la part de certains membres des Forces canadiennes en Somalie et en Bosnie, dont on a amplement discuté ici cet après-midi.

De plus, le rapport sur la Somalie et le rapport Dickson de 1997 recommandent une série de modifications au système de justice militaire. Il y a eu également plusieurs études internes et externes concernant les réformes pouvant être apportées à notre système de justice militaire.

J'aimerais aborder brièvement certains des sujets dont ne traite pas le projet de loi C-25 et dont il a été question dans le comité Dickson. L'un d'eux est le poste d'inspecteur général qui a été mentionné à plusieurs reprises ici cet après-midi.

Dans l'enquête sur la Somalie, on a recommandé la création d'une telle institution, dans le but d'en faire un organisme général de surveillance et d'examen ne faisant pas partie de la chaîne de commandement. Cet organisme n'a pas été établi. La protection des dénonciateurs était une autre question abordée dans le rapport Dickson. Là encore, en s'inspirant de l'enquête sur la Somalie, on a recommandé des mesures précises visant à protéger les personnes qui ont signalé des actes répréhensibles en rapport avec la Somalie, aussi bien à l'époque même qu'au moment de l'enquête, et à protéger également celles qui voudraient le faire à l'avenir.

Une autre question que l'on a choisi de passer sous silence dans le projet de loi C-25 est l'emploi de juges et de jurys civils pour les procès. Dans l'enquête sur la Somalie, on a recommandé qu'un militaire accusé d'une infraction punissable d'une peine d'emprisonnement minimale de cinq ans ait le droit de demander un procès devant jury dans une cour civile. L'enquête sur la Somalie a recommandé également que tous les juges militaires soient des civils nommés aux termes de la Loi sur les juges, et jouissent d'inamovibilité comme les juges civils. Là encore, on n'y a pas donné suite.

En ce qui concerne l'indépendance de la police militaire, un certain nombre de recommandations issues de l'enquête sur la Somalie suggéraient de procéder à des modifications d'ordre institutionnel et procédural afin d'assurer que tous les suspects soient traités de la même façon, sans égard à leur grade, et de soustraire la police militaire à l'influence directe ou indirecte du haut commandement. Il n'a pas non plus été donné suite à ces recommandations.

Il n'est pas étonnant que cela ait incité l'un des trois membres de la commission, Peter Desbarats, à dire que l'interruption des travaux de cette dernière était l'un des camouflages et l'une des dénégations de responsabilité les plus impudents de l'histoire de ce pays. Il a aussi déclaré que les gestes du gouvernement libéral équivalaient à du camouflage et à un refus d'assumer ses responsabilités. À cause du gouvernement qui a étouffé l'enquête, les Canadiens ne connaîtront jamais la vérité sur ce qui s'est produit en Somalie et ne sauront jamais qui a vraiment été responsable de toute l'opération de camouflage. C'est la première fois, et il faut le répéter sans cesse, que, de mémoire de Canadiens, le gouvernement fédéral met fin aux travaux d'une commission d'enquête avant qu'elle n'ait accompli sa tâche des plus importantes. Ce faisant, pendant la législature précédente, le gouvernement a créé un précédent antidémocratique extrêmement dangereux.

 

. 1700 + -

Je veux en terminant parler des accusations d'inconduite sexuelle dans les forces armées révélées récemment, non seulement par la revue Maclean's, mais aussi par d'autres médias. Pour ce faire, je vais parler d'un cas précis, celui de l'une de mes électrices que j'ai rencontrée il y a moins de deux semaines. Je tiens à ce que la Chambre soit au courant.

Avant de raconter son histoire, je tiens à dire que c'est l'affaire la plus révoltante dont j'ai eu à m'occuper depuis le peu de temps que je suis député.

Voici les faits saillants tels qu'ils m'ont été rapportés. Alors qu'elle avait 18 ans, la personne en question s'est engagée comme manoeuvrier. Ça se passait en 1989, et si j'ai bien compris c'était la première fois que les femmes étaient admises à ce poste. On l'a envoyée sur un bateau sur la côte ouest.

Elle dit que pendant l'automne 1989, elle a été l'objet, à plusieurs reprises, d'avances sexuelles importunes incluant des attouchements, des caresses et des claques. Elle a signalé un incident particulièrement dégoûtant qui s'est produit avant Noël 1989, lorsque des membres d'équipage d'un autre navire qui se trouvait au port lui ont présenté un pénis en plastique.

Après les vacances des fêtes, cette personne, qui était entrée dans la marine comme matelot de 3e classe et qui avait maintenant été promue matelot de 2e classe, est retournée sur la côte ouest. Les actes de harcèlement et les avances sexuelles importunes se sont poursuivis à l'occasion et, au cours d'un incident en particulier, un de ses supérieurs de sexe masculin s'est exhibé devant elle, à bord du navire. Cependant, au cours des premiers mois de 1990, elle n'avait aucune idée de ce qui l'attendait, à l'incident qui se produirait, en pleine nuit, au début du mois de mai de la même année.

Elle a déclaré que, ce soir-là, elle dormait à bord du navire lorsqu'elle s'est réveillée en voyant un matelot allongé près d'elle, dans son lit. Le matelot était à moitié nu. Elle a dit qu'elle pouvait sentir son pénis contre sa cuisse et que son soutien-gorge avait été relevé. Selon elle, le matelot avait la main dans sa culotte et un doigt dans son vagin. Ses cris ont réveillé les autres femmes qui se trouvaient dans cette partie du navire réservée aux femmes, lesquelles ont alors commencé à invectiver le matelot, qui aurait à ce moment-là ramassé quelques-uns de ses vêtements et se serait réfugié dans les toilettes réservées aux femmes pour se rhabiller.

La police militaire a été dépêchée et l'homme en question a été arrêté ou détenu. Une trousse de prélèvement en cas de viol a déterminé que la jeune femme, malgré ces actes flagrants de harcèlement, n'avait pas été violée. Elle a cependant été envoyée chez elle, en permission exceptionnelle.

Lorsqu'elle est retournée à bord du navire deux semaines plus tard, elle s'est sentie entièrement isolée, exclue et rejetée par ses pairs et ses supérieurs.

 

. 1705 + -

Les dirigeants militaires se sont montrés d'autant plus insensibles que la femme a été obligée de partager l'autobus que prenait son assaillant sur la base militaire. Deux semaines se sont écoulées avant que quelqu'un ne songe à leur donner des horaires différents afin d'éviter à la militaire de subir cette épreuve.

Elle a ultérieurement demandé un congé. Elle ne pouvait pas remonter à bord du navire. Peu de temps après, elle a voulu quitter les forces et a obtenu sa libération.

Lorsqu'elle se trouvait à Esquimalt, elle recevait des soins psychiatriques, mais après son départ, elle n'était plus admissible aux traitements et il n'y avait pas de psychiatre pour la traiter. Ses parents l'ont aidée à payer des traitements psychiatrique, mais les coûts étant trop lourds, elle y a mis fin. Elle a cessé toute consultation professionnelle.

Il convient de signaler que la marine a perdu tous ses dossiers de rendement et on lui a dit que si elle voulait revenir, il lui faudrait recommencer au niveau de simple matelot.

Je crois que ce que les militaires ont fait après cet incident odieux, horrible et honteux est aussi grave que l'incident lui-même.

Personne n'est jamais entré en communication avec elle. Elle n'a jamais eu l'occasion de témoigner à un procès. Personne ne lui a jamais dit qu'elle pouvait être admissible à une indemnisation en tant qu'ancien combattant.

Cette situation est symptomatique du problème propre aux forces armées. Le personnel est mal rémunéré et son moral laisse à désirer. Il y a également un problème de leadership et je ne crois pas que le projet de loi C-25 apporte quelque solution aux raisons profondes des problèmes qui affectent les forces armées.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.  

[Traduction]

À la demande du whip en chef du gouvernement, la mise aux voix de la motion est reportée à demain, 13 heures.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, un peu plus tôt aujourd'hui, j'ai déposé une motion et je demande le consentement unanime pour proposer une modification mineure au 6e paragraphe de la motion; à la cinquième ligne, je voudrais ajouter, après le mot question, «nécessaire pour disposer du projet de loi C-37 à l'étape de la troisième lecture».

Le vice-président: Le leader parlementaire du gouvernement a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cet amendement à la motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu le libellé de l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement proposé à la motion?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

*  *  *

LE COMMISSAIRE À L'INFORMATION

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:  

    Que, conformément au paragraphe 54(1) de la Loi visant à compléter la législation canadienne en matière d'accès à l'administration fédérale, chapitre A-1 des Lois révisées du Canada (1985), cette Chambre approuve la nomination de l'honorable John M. Reid, C.P., à titre de Commissaire à l'information.

[Français]

—Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre ces quelques minutes pour présenter à la Chambre la candidature de l'honorable John M. Reid au poste de commissaire à l'information.

 

. 1710 + -

L'honorable John Reid est natif de Fort Frances, en Ontario. Il a fait ses études au Collège Saint-Paul, à l'Université du Manitoba et à l'Université de Toronto. Il a été élu pour la première fois à la Chambre des communes du Canada en 1965, et ensuite, en 1968, 1972, 1974, 1979 et 1980. Il a été secrétaire parlementaire du président du Conseil privé en 1972 et ministre d'État aux Relations fédérales-provinciales à compter du 24 novembre 1978.

Il a oeuvré aussi pendant plusieurs années pour un groupe que tous les parlementaires connaissent bien, le Forum pour les jeunes Canadiens. M. Reid s'est distingué auprès de ce groupe.

Beaucoup plus important aux fins de la conversation aujourd'hui est le fait que l'honorable John Reid, pendant qu'il a siégé ici à la Chambre des communes, a été l'un de ceux qui voulaient une loi régissant les dépenses électorales dans notre pays. Il a oeuvré à cette cause et a fait un excellent travail. Plusieurs, d'ailleurs, lui donnent aujourd'hui crédit pour certains éléments de la loi qui nous régit en cette matière.

Dans un deuxième temps, il a également, accompagné cette fois-ci de l'ancien député, M. Alfred Hales, ainsi que de plusieurs autres, travaillé à l'établissement d'un système concernant l'accès à l'information, pour que le public canadien puisse apprendre à mieux connaître la machine du gouvernement du pays.

[Traduction]

Le poste de commissaire à l'information, que nous sommes sur le point de doter, n'est pas une sinécure. Il requiert de son titulaire qu'il se consacre à l'élaboration constante de pratiques démocratiques. Il requiert aussi de lui qu'il ait la volonté et la capacité d'exprimer des opinions fermes tout en ayant une excellente connaissance des rouages du gouvernement et de la fonction publique.

Le poste a été occupé, jusqu'à tout récemment, par M. John Grace, dont le mandat, à ma connaissance, a pris fin le 30 avril 1998. Je voudrais en profiter pour féliciter M. John Grace de son travail à titre de commissaire à l'information.

En vertu de la Loi sur l'accès à l'information de 1983, les Canadiens ont un large accès à l'information enregistrée de quelque façon que ce soit et contrôlée par la plupart des institutions fédérales, sous réserve d'exceptions spécifiques et limitées.

Le commissaire à l'information est un ombudsman très spécial nommé par le Parlement pour enquêter sur des plaintes concernant le refus de fournir des renseignements conformément à la loi. Ses priorités sont multiples: persuader le gouvernement de communiquer librement les renseignements, sans qu'il soit nécessaire de recourir à des procédures juridiques ou aux tribunaux; adopter, quand c'est possible, une approche non-accusatoire; régler les plaintes d'une manière juste, équitable et expéditive; et garantir que les délais de réponse sont constamment respectés partout au gouvernement.

Le poste exige de l'expérience en matière de gestion de cadres supérieurs, d'innovation et de gestion d'une équipe multidisciplinaire chargée d'étudier des questions délicates dans un environnement public.

En plus de posséder une profonde connaissance de la Loi sur l'accès à l'information et, bien sûr, des règles de la justice naturelle et de l'équité, le commissaire doit comprendre à fond les principes qui sous-tendent les administrations publiques, la structure gouvernementale actuelle, le processus décisionnel interne du gouvernement, les complexités des compétences fédérales et provinciales, et les exigences gouvernementales en matière de sécurité.

Le gouvernement et moi sommes d'avis que l'honorable John Reid possède les qualités exceptionnelles qui sont nécessaires pour atteindre les résultats visés, soit fournir l'information aux députés et aux Canadiens ordinaires, respecter les limites que je viens de décrire et reconnaître la Loi sur la protection de la vie privé et le contrepoids qu'elle offre lorsque la situation s'y prête et l'exige.

 

. 1715 + -

À cet égard, je remercie mes collègues à la Chambre qui ont porté à mon attention et à l'attention du gouvernement la candidature de l'honorable John Reid. Même si M. Reid a déjà été député dans un gouvernement libéral, je pense que ses qualités sont particulièrement mises en valeur du simple fait que sa candidature ait été proposée au gouvernement par des députés des autres partis à la Chambre.

Je remercie les députés de Winnipeg—Transcona et de Pictou—Antigonish—Guysborough d'avoir porté son nom à l'attention du gouvernement. Bien sûr, c'est le gouvernement qui propose officiellement la candidature d'une personne, et c'est ce que je suis en train de faire. Le gouvernement a agi en vertu des pouvoirs du premier ministre. Je demande maintenant le consentement de la Chambre pour la ratification de cette nomination.

M. Reid est historien de formation. Comme je le disais, il a été député fédéral durant un certain nombre d'années. Son frère, Patrick Reid, a été député à Queen's Park durant plusieurs années. Il était le doyen de l'Assemblée législative de l'Ontario à l'époque où j'y siégeais moi-même. C'était il y a longtemps, à l'époque où j'avais des cheveux.

Une voix: Ça fait longtemps.

L'hon. Don Boudria: Un de mes collègues signale que ça fait longtemps. Le leader de l'opposition à la Chambre comprend probablement comment je me sens.

Pour revenir à M. John Reid, je veux aussi dire un mot au sujet du décès de Jed Baldwin. Jed Baldwin, qui était député conservateur, a travaillé inlassablement à l'adoption de la législation sur l'accès à l'information au Canada. Je me rappelle, quand j'étais employé subalterne à la colline parlementaire, longtemps avant de me faire élire député pour la première fois, je passais devant le bureau de Baldwin et je le voyais travailler inlassablement comme il le faisait à l'époque. Je lui rends hommage à lui aussi, car c'est un pionnier de cette législation.

Cela dit, je propose à la Chambre, au nom du très honorable premier ministre et du gouvernement, la candidature de l'honorable John Reid, c.p., au poste de commissaire à l'information pour le Canada. Je remercie d'avance mes collègues d'en face non seulement d'appuyer généreusement la candidature de l'honorable John Reid mais aussi d'avoir signalé son nom au gouvernement, en reconnaissant bien sûr que sa candidature est proposée par le gouvernement et qu'elle sera, espérons-le, entérinée plus tard aujourd'hui par la Chambre des communes.

Je recommande vivement ce candidat. Je crois qu'il servira loyalement notre pays comme il l'a fait dans les fonctions qu'il a exercées auparavant. La législation sur l'accès à l'information étant ce qu'elle est, les personnes qui exercent ces fonctions, en servant loyalement le pays, ont souvent tendance à porter des jugements qui déplaisent parfois davantage au gouvernement qu'à l'opposition. C'est la vie, comme on dit.

Je reconnais que cela arrivera probablement de temps à autre une fois que M. Reid aura assumé ce poste. Je m'engage certes à respecter ce fait, comme nous le ferons sûrement tous, une fois qu'il aura commencé à remplir les fonctions de commissaire à l'information. Je suis convaincu, cependant, qu'il exercera ces fonctions avec sagesse et qu'il accomplira un excellent travail pour le pays qu'il aime tant, le Canada.

 

. 1720 + -

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je me réjouis de voir autant de mes collègues ici aujourd'hui. Je vais parler de la façon de nommer un commissaire à l'information.

Nous allons appuyer cette nomination. J'ai eu l'occasion et le plaisir d'interviewer M. John Reid et j'ai été très impressionné. Je vais expliquer comment cela se passe. J'espère faire comprendre à mes collègues d'en face que le processus n'est pas aussi menaçant qu'ils pourraient le croire.

Dans ma vie, j'ai probablement interviewé de 300 à 600 personnes. Il y a des années que j'ai cessé de compter. J'y ai toujours vu un avantage, non seulement pour la bureaucratie, mais aussi pour l'entreprise. Il est tellement courant de faire passer des entrevues que le contraire est plutôt rare. La procédure de sélection est courante.

Je suis persuadé, monsieur le Président, que vous y avez eu recours dans les entreprises que vous avez eues. Il faut savoir quel genre de personne on recherche pour son entreprise ou pour tout emploi, tel celui de commissaire à l'information. Il faut publier l'offre d'emploi le plus largement possible afin de joindre les candidats les plus éminents. Il faut examiner toutes les demandes et dresser une liste restreinte, ce qui ne surprend personne ici. Il faut interviewer les personnes dont le nom figure sur la liste restreinte et en choisir une. Il faut ensuite vérifier les références pour voir si l'on a fait le bon choix.

Ce processus n'a rien d'étrange au Canada, sauf à la Chambre des communes. Je ne tiens pas à rabaisser toute conversation à propos de nominations partisanes, mais je veux vraiment amener mes collègues à comprendre que le processus que nous avons adopté pourrait fonctionner pour les hauts fonctionnaires de la Chambre des communes et pourrait même un jour être étendu à d'autres dignitaires. Le processus dont j'ai parlé aurait été un minimum acceptable en l'occurrence.

Au lieu de ça, il y a quelque temps, une personne a été proposée par le gouvernement. Je ne connaissais pas cette personne. J'ignore dans quelle mesure mes collègues ou les médias ont autant besoin de ce commissaire que l'opposition. L'annonce du nom de la personne a provoqué de vives réactions. Beaucoup ont affirmé qu'elle ne possédait pas les qualités voulues pour occuper le poste.

Deux problèmes se posent. Tout d'abord, celui ou celle qui a pensé que cette personne pouvait occuper le poste a commis une grave erreur. Deuxièmement, nous avons mis cette personne dans l'embarras. Elle a un emploi ailleurs et, tout à coup, la moitié du pays s'est ligué contre elle en affirmant qu'elle ne pouvait pas être un bon commissaire à l'information. Le processus de sélection ne fonctionne pas, c'est évident. Il laisse beaucoup de place au favoritisme.

Examinons le processus suivi. Une fois la candidature de cette personne rejetée avant même une interview, un autre nom a été lancé. Heureusement, mes deux collègues qui ont proposé ce deuxième candidat avaient fait un bon choix, mais ça aurait pu ne pas être le cas. Nous avons pris une chance. Le gouvernement a pris une chance et a demandé que cette personne se présente devant le comité des opérations gouvernementales où les députés pouvaient lui faire subir une forme d'interview.

Si ce deuxième candidat avait été comme le premier, la situation aurait pu être extrêmement embarrassante. Finalement, cette personne était, à mon avis, très compétente. Pendant l'interview, j'ai posé les questions que j'ai posé tout naturellement à des centaines de personnes, des questions comme «quelles sont vos compétences, vos qualités et vos qualifications», «comment voyez-vous le poste» et «quelle est l'utilité de ce poste pour la société en général et pour les gens qui recherchent de l'information». Mais surprise, non seulement cette personne avait de bonnes réponses à ces questions, elle en avait d'excellentes! John Reid avait d'excellentes réponses.

 

. 1725 + -

Quelle est la conséquence? Nous venons d'en voir la conséquence. John Reid était, selon moi, un excellent candidat. Je ne saurai jamais si c'était le meilleur, car c'est le seul auquel j'ai parlé.

Je ne le déprécie en rien, car je crois qu'il fera de l'excellent travail. Mais je crois que John Reid serait le premier à reconnaître qu'il peut se présenter contre quiconque à un interview et être à peu près certain d'obtenir le poste. Je pense d'ailleurs que si on lui en avait parlé, il aurait probablement insisté. Voilà toute l'estime que j'avais pour lui et sa personnalité.

Nous avons laissé une porte ouverte. Nous ne saurons jamais si nous avons le meilleur, mais nous savons que nous avons quelqu'un de très bien.

Ce processus a une autre conséquence. Qu'en est-il de toutes les autres personnes qualifiées au Canada à l'heure actuelle? Il y a des cadres d'entreprise tout à fait qualifiés qui ont été remplacés ou se retrouvent sans poste parce que leur société à fermé ses portes ou pour toute autre raison. Ces personnes aimeraient certes obtenir ce genre de poste. Elles apprécieraient sûrement la possibilité d'être candidats. Sans insister pour avoir le poste, elles voudraient pouvoir se présenter au concours. Ce que nous disons à ces excellents candidats, c'est qu'ils ne peuvent poser leur candidature. À mon avis, c'est inacceptable.

Il y a un autre effet qui, celui-là, est peut-être positif. Je pense que nous avons beaucoup progressé. Je félicite tous les députés de cela. Toutefois, la prochaine fois qu'un autre poste de dirigeant de la Chambre deviendra vacant, j'inviterais les députés à se donner la peine de l'annoncer, de s'interroger sur le candidat recherché, de dresser une courte liste de candidats, de les recevoir en entrevue et, à la fin du processus, ils sauront qu'ils ont vraiment retenu le meilleur des candidats au-delà de tout doute raisonnable.

Nous allons appuyer la nomination de M. John Reid. Je le félicite. Je pense qu'il est un excellent candidat. Je félicite aussi les députés du NPD et du Parti progressiste conservateur qui ont pu évaluer si cette personne était compétente et qui ont proposé son nom.

Nous devons aller plus loin. Le gouvernement va se rendre compte que cela s'est fait sans heurt. En agissant ainsi, on a simplement conféré plus de crédibilité au processus. La prochaine fois, il lui faudra aller jusqu'au bout. Selon l'opposition officielle, s'il procède ainsi, il n'y aura pas de sottises ni de tactiques. Le travail se fera équitablement et honnêtement et toujours dans les règles.

Je félicite M. John Reid. Je me réjouis d'un processus qui n'est qu'à moitié parfait, mais qui peut encore être amélioré.

Le président suppléant (M. McClelland): Nous approchons rapidement de l'heure des initiatives parlementaires, mais nous allons donner d'abord la parole au député de Winnipeg—Transcona. Je sais que le député de Pictou—Antigonish—Guysborough voudrait dire quelques mots.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, je ne sais pas s'il est possible, sur le plan de la procédure, de demander le consentement unanime de la Chambre pour terminer cette question avant de passer aux initiatives parlementaires. Je ne sais pas si le député de Red Deer serait d'accord avec cela.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Winnipeg—Transcona a demandé le consentement unanime de la Chambre pour prolonger les initiatives ministérielles pendant assez longtemps pour accorder de cinq à dix minutes au député de Winnipeg—Transcona. Ensuite, le député de Pictou—Antogonish—Guysborough disposerait de cinq minutes pour finir et nous pourrions passer aux initiatives parlementaires.

 

. 1730 + -

Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant aux initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LES MISSIONS MILITAIRES À L'EXTÉRIEUR DU PAYS

 

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.) propose:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait solliciter l'appui de la majorité, au moyen d'un vote officiel à la Chambre des communes, avant d'engager un important contingent de militaires canadiens dans une mission militaire active à l'extérieur du pays.

—Monsieur le Président, je vais expliquer la motion avant de commencer.

Je n'ai pas inscrit de chiffres précis, ce qui est intentionnel, pour que le gouvernement agisse à sa discrétion. Nous ne parlons pas de quelques personnes allant fournir des services de télécommunications. Nous ne parlons pas de certaines missions d'envergure réduite. Nous parlons plutôt d'engagements majeurs et, bien sûr, du genre d'événements qui se sont déjà produits. Bon nombre de mes collègues de l'autre côté ont décrié avec vigueur, à la fin des années 80 et au début des années 90, le fait que le gouvernement ne veuille pas discuter de la question à la Chambre des communes, ni informer les Canadiens, ni demander la permission des parlementaires pour envoyer des troupes accomplir des missions de ce genre.

Aujourd'hui, je suis certain que mes honorables collègues du côté du gouvernement appuieront la motion. Je pourrais citer bon nombre de propos, de la part de gens qui sont encore là, au sujet du gouvernement antérieur et du fait qu'il ne consultait pas les parlementaires.

Je vais examiner certaines motivations à cet égard. Je veux parler tout d'abord de militaires canadiens que j'ai rencontrés en voyageant dans de nombreuses parties du monde et plus précisément de nos soldats en Bosnie et à Haïti.

J'ai eu le privilège de rencontrer ces soldats dans ces deux endroits. En Bosnie, j'étais un observateur des élections. Je faisais partie de la mission de l'OCDE chargée d'observer les élections, un rôle exercé essentiellement au service de l'Union européenne.

En Haïti, je voyageais avec le ministre des Affaires étrangères et, à cette occasion, nous avons eu la chance de constater le rôle de nos troupes et de notre GRC dans cette situation.

J'étais fier de ce que je voyais. J'étais fier des hommes et des femmes avec lesquels j'ai eu la chance d'effectuer des patrouilles. À un certain moment, je me trouvais avec un traducteur suédois dans le clos d'entraînement, dans une voiture louée, et nous avons rencontré un véhicule blindé canadien qui arborait un drapeau canadien et avait à son bord des soldats canadiens. Je leur ai fait signe au milieu de la route; ils se sont arrêtés et m'ont demandé ce qu'un député du Parlement du Canada faisait à Bihac. Ils étaient surpris.

En tant que Canadien au service des électeurs canadiens, j'ai éprouvé là un sentiment de fierté que je ne peux décrire à la Chambre.

 

. 1735 + -

Il serait bon de mieux connaître le travail que l'armée y accomplit en notre nom à tous. À mon avis, les Canadiens ne sont pas suffisamment informés au sujet de ce que nos troupes accomplissent à l'étranger. En informant la Chambre à ce sujet, ça aurait au moins l'avantage de faire comprendre aux Canadiens pourquoi nous y envoyons nos soldats, hommes et femmes.

Je ne puis m'empêcher d'exprimer aux députés la fierté que j'ai éprouvée quand de petits enfants m'ont amené voir une école en Bosnie et ont dit: «Regardez. Voici le drapeau canadien. Et voici le drapeau bosniaque. Vos soldats, de leur propre initiative, ont rebâti cette école, y ont posé les fenêtres, ont remis les pupitres en place et nous avons maintenant une vraie école.» Une vieille dame m'a fait visiter l'hôpital. Elle m'a dit: «Voyez. Voici un drapeau canadien. C'est que, de leur propre initiative, vos soldats se sont présentés sur les lieux et se sont portés volontaires pour effectuer toutes sortes de tâches, histoire d'améliorer un peu notre sort.»

Et puis je n'oublierai jamais la fois où je suis allé en patrouille, à deux heures du matin, dans certains secteurs chauds de Haïti. Il m'a alors été donné de voir quel genre de relations nos troupes ont su tisser avec les habitants de ce pays extrêmement pauvre.

Il nous faut songer à cette question, à la motion dont nous sommes saisis et à l'objectif que je poursuis en présentant cette motion d'initiative parlementaire.

J'aime faire des photos. Quand je prends la parole à un club rotary ou à une chambre de commerce, je surveille les visages des gens quand ils voient les petits enfants, la vieille dame et l'hôpital sur ces photos. Leur visage s'illumine de joie. Ils disent qu'ils ne savaient pas que nos troupes accomplissaient ce genre de chose. Tout ce dont ils ont entendu parler, ce sont les histoires à scandale que les médias adorent publier. Ils n'ont jamais entendu parler du travail de nos soldats dans les écoles et dans les hôpitaux et de toutes ces choses positives.

Pour engager nos jeunes femmes et nos jeunes hommes dans des missions à l'étranger, il est essentiel que nous examinions cette question à la Chambre. Je crois qu'il est inacceptable que la décision de nous engager quelque part dans le monde vienne d'en haut, qu'elle soit prise uniquement au Cabinet.

On nous dira que ces choses arrivent soudainement et que nous n'aurons pas le temps de discuter de la situation. Rien n'arrive du jour au lendemain. Nous étions au courant de la situation en Bosnie. Dans les années 80, nous parlions déjà de la Bosnie et de son potentiel. Beaucoup de gens pensaient que la situation exploserait en premier au Kosovo. Or, il s'avère que c'est peut-être là qu'elle explose en dernier. Nous savions que quelque chose allait arriver. Il y a 1 500 ans que nous savons qu'il y a des problèmes dans cette région.

Quand j'étais au Rwanda, en 1985, il était tout à fait clair qu'il y avait des problèmes. Quand le général Dallaire est allé là-bas en 1990, il a clairement fait savoir à tout le monde qu'il allait y avoir de graves problèmes. Il nous a parlé des tensions entre les Tutsis et les Hutus. Pourtant, rien n'est arrivé. Les gens n'ont pas été informés des problèmes. Ces choses n'arrivent pas comme ça.

En 1925, les Américains étaient à Haïti. Ils ont essayé de régler les problèmes de ce pays. Ils ont construit des écoles et mis en place l'infrastructure. Nous savons que 85 p. 100 des gens dans ce pays sont illettrés et sans emploi. Nous savons quels sont les points chauds potentiels. Nous connaissons les problèmes du Soudan. Nous savons ce qui se passe au Nigéria.

 

. 1740 + -

Ce n'est pas une excuse valable de dire que le gouvernement ne pourrait pas examiner la question, que ce serait impossible..

Je suis sûr que la Chambre donnerait son consentement unanime afin que la question soit examinée, après tout il s'agit de la vie de soldats que nous envoyons à l'étranger.

Je crois pas qu'une seule personne ici oserait s'opposer à une motion de la sorte. Dire que ce n'est pas possible est tout simplement inacceptable. Dire que le gouvernement ne pourrait pas examiner la question est tout aussi inacceptable. C'est bien sûr ce qui a été dit en 1990 et à d'autres occasions, mais ce n'est pas vrai. Ce n'est pas une excuse.

Comment devrions-nous procéder? Comment veiller à la responsabilité et à la transparence? Comment cela fonctionnerait-il à la Chambre?

J'aimerais proposer un processus comme celui-ci. Les députés sont au courant des débats spéciaux que nous avons à la Chambre. Ces débats spéciaux instructifs ont eu lieu, dans le dernier cas, le lendemain de la publication, en bas, d'un communiqué de presse et des déclarations à la presse selon lesquels nous poursuivions notre mission à Bosnie pendant au moins encore une autre année.

Il y a eu ensuite, le jour suivant, le débat instructif auquel un ou deux députés ont assisté. C'est typique. Ce n'est pas ce dont je parle. Ce n'est pas ce qu'on entend par démocratie.

Je parle plutôt des cas où il y a un problème dans le monde. Le gouvernement canadien affirme qu'il s'agit d'un problème dont nous devons nous préoccuper et auquel les Canadiens devraient s'intéresser.

Nous venons ensuite à la Chambre, en comité plénier, et nous disons que tous les députés ont l'occasion et, selon moi, la responsabilité d'être présents pour écouter les experts. Il s'agit de politique non partisane.

C'est à ce moment-là que tous les députés vont pouvoir entendre les experts militaires, les diplomates, les universitaires qui vont leur parler de l'histoire de cette région du monde dans laquelle nous proposons d'envoyer des troupes.

Cela nous en apprend beaucoup, ainsi qu'aux Canadiens. J'irais jusqu'à dire qu'il serait avantageux pour le Parlement de voter des fonds de publicité pour que le Canadiens sachent qu'ils vont pouvoir regarder sur leur réseau national de télévision les délibérations et obtenir de l'information venant d'experts sur la Bosnie, Haïti, le Zaïre, le Nigeria, le Soudan, ou je ne sais quel autre pays.

Nous avons rencontré, hier, des parlementaires du Pakistan. Nous leur avons demandé comment nous pourrions résoudre le problème au Cachemire.

Le sénateur pakistanais a déclaré que la façon de résoudre ce problème et ce que les parlementaires canadiens pourraient faire, c'est d'envoyer une mission au Cachemire pour voir sur place les atrocités qui s'y produisent—60 000 personnes sont mortes jusqu'à maintenant—et faire rapport là-dessus à la communauté internationale afin que cette dernière puisse ensuite prendre des mesures.

C'est le rôle que le Canada devrait jouer, selon lui. C'est la meilleure façon de désamorcer la crise au Pakistan et en Inde.

C'est peut-être une chose que le gouvernement voudrait proposer pour obtenir les meilleurs renseignements. La seconde phase, c'est d'avoir des intervenants de chaque parti qui présenteraient, d'un point de vue militaire et diplomatique, la position de leur parti sur l'envoi de troupes dans une région donnée.

Tous les partis ont ainsi leur mot à dire. Il n'est pas nécessaire d'écouter dix discours dont certains sont écrits par des recherchistes et simplement lus. Les intervenants seraient des gens qui ont vraiment travaillé sur cette question et qui connaissent bien le sujet.

Il est évident que nous sommes suffisamment occupés à la Chambre pour que les députés ne soient pas spécialisés dans tout. Ils se concentrent sur leur petit secteur de responsabilité et ne travaillent que là-dessus. Ce sont ces gens-là que l'on entendrait et que, à mon avis les parlementaires écouteraient.

 

. 1745 + -

Il y a eu une séance d'information de deux heures. On a eu l'occasion d'en débattre pendant deux heures. Voilà le moment le plus important. C'est le moment où, après avoir été renseignés et avoir entendu la position des partis, on passerait au vote sur la question d'envoyer nos jeunes en mission dans un coin du globe qui n'est pas sûr.

Nous avons une responsabilité. Nous devons permettre aux Canadiens de se renseigner et leur faire connaître notre position en tant que parlementaires. Puis aurait lieu un vote libre.

Voilà, à mon avis, comment il faut décider, de façon responsable, d'envoyer ou non des troupes à l'étranger. Je ne vois pas comment tout gouvernement, à l'aube du XXIe, pourrait s'opposer à une telle façon de procéder, qui respecte l'obligation de rendre compte. Nous sommes responsables de toutes les vies que nous mettons en danger quand nous envoyons des troupes à l'étranger.

J'imagine qu'on aurait le consentement unanime à la fin d'un tel processus. Je ne pense pas que ce serait très controversé. Nous nous sentirions tous mieux. Les Canadiens seraient informés. Ils comprendraient ce qu'ils liraient dans les journaux et, par conséquent, nous leur aurions sans doute rendu le meilleur service possible.

En présentant cela sous forme de motion, on pourra renvoyer la question à un comité, qui l'étudiera de près. Le comité pourra la modifier, l'améliorer comme il veut.

Voilà le cadre général dont nous parlons. Et avec ce cadre général, je crois que nous avons adopté une approche à laquelle tous souscriront.

J'espère sincèrement que tous les partis seront d'accord avec cette mesure, qu'ils l'appuieront et qu'ils n'auront pas recours aux arguments éculés que nous entendons si souvent de la bouche de ceux qui prétendent que le gouvernement aurait alors les mains liées, que le gouvernement est responsable. Nous sommes tous responsables. Nous voulons tous partager l'information et ressentir une certaine fierté.

Nous voulons être fiers de savoir ce que nos jeunes gens accomplissent là-bas. Je trouve très inquiétant de ne pas savoir ce qu'ils font. Je suis choqué de n'entendre que les aspects négatifs alors qu'il y a tant de commentaires positifs à faire sur nos troupes.

Un sondage mené récemment par le gouvernement a démontré que 61 p. 100 des Canadiens veulent en savoir davantage sur la politique étrangère. Ce sondage a été commandé par le ministère des Affaires étrangères et présenté par le ministre. Selon ce sondage, 61 p. 100 des Canadiens veulent être informés.

Quelle meilleure façon de les informer que de commencer avec les missions de paix et de leur en faire part ici à la Chambre? Quelle meilleure façon de rehausser l'image de la Chambre et de chacun de ses membres dont nous faisons partie. Tous les députés, quel que soit leur parti, devraient se faire un devoir d'être ici pour ces débats informatifs. S'ils ont des jeunes gens des forces armés parmi leurs électeurs, ils feraient mieux d'y assister. De même, s'il y a parmi leurs électeurs des parents ou des grand-parents de ces jeunes, ils feraient beaucoup mieux d'y assister.

Les Canadiens leur diront que c'est là une façon raisonnable de prendre une telle décision. Les Canadiens disent que c'est ce qu'ils veulent. Les sondages du ministre le démontrent bien.

Cela justifierait les budgets que bon nombre de personnes ne comprennent pas. Des millions de dollars sont prévus au budget pour ces missions. Cela permettrait de justifier jusqu'à un certain point le montant de ces dépenses.

En terminant, je dirais que l'une des choses les plus importantes qu'il convient de dire à nos troupes est que nous nous intéressons à eux, que nous, les parlementaires, les épaulons.

 

. 1750 + -

Nous avons étudié la question. Vous nous avez vus à la télévision d'État nous pencher sur la question. Nous en avons discuté et nous avons voté. Nous sommes en train de vous dire que nous sommes derrière vous, que les Canadiens sont derrière vous. Peu nous importe ce que les médias voudraient nous faire croire. Nous croyons en vous. Nous vous faisons confiance.

C'est ce qui importe. C'est pourquoi j'espère que tous les députés voudront bien appuyer la motion. Modifiez-la, renvoyez-la aux comités et retravaillez-la, mais ce genre de concept devrait être adopté.

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député de Red Deer a fait montre d'une attitude constructive et coopérative au comité des affaires étrangères. Nous sommes parfois en désaccord, mais non quant à l'orientation générale de ses positions. Comme je l'ai dit hier au comité, nous écoutons ses idées et nous en prenons les meilleures.

Il se pose en l'occurrence un problème fondamental de droit constitutionnel. Le héros dans l'affaire «personne», ce ne furent pas les cinq dames, bien qu'elles furent magnifiques, mais bien le timide lord juriste, lord Sankey, qui a effectivement décidé, et c'était une décision révolutionnaire, que les femmes étaient des personnes. Il a également énoncé le concept de constitution comme un arbre vivant, non un ensemble doctrinal figé. Il faut se rappeler qu'il en va de même dans le cas du Parlement. Le Parlement évolue.

Les députés qui avaient été élus et défaits avant 1993 et qui sont revenus siéger au Parlement ont été très étonnés de voir à quel point il avait changé. En 1994, 1995 et 1996, et le député de Red Deer était présent, nous avons changé le Parlement.

Nous avons institué ces débats de politique étrangère qui se poursuivaient jusqu'à tard dans la nuit. Une vingtaine ou une trentaine de députés restaient jusqu'à 2 heures ou 3 heures du matin pour parler de ces questions. C'est un usage qui a été lancé par notre gouvernement, qui a été poursuivi par deux ministres des Affaires étrangères et trois ministre de la Défense et qui n'est pas réversible. C'est un changement dans l'usage parlementaire, dans l'accessibilité des idées et dans le débat.

Nous sommes réticents à constitutionnaliser au sens américain. Les Américains ajoutent des amendements rigides à leur constitution, puis consacrent un précieux temps et les efforts de leurs meilleurs juristes à les contourner. Nous connaissons tous les dispositions de la constitution américaine, mais nous nous rappelons que le président Johnson, avec le concours d'excellents conseillers juridiques, les a littéralement renversées. Si on examine la résolution sur le golfe du Tonkin, on peut constater qu'elle contourne les dispositions de la constitution.

Nous préférerions que les tendances déjà établies par le gouvernement soient maintenues et améliorées, celles-ci ayant permis que la question du maintien de la paix soit assujettie à l'opinion parlementaire. Il y a une souplesse qui se prête bien à la solution de problèmes d'une façon très concrète. Je vous en donne un exemple parfait.

Au moment où je suis devenu secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, en juillet, de l'an dernier, la question de l'extension du mandat de nos forces en Haïti était prioritaire parce qu'elle était soulevée par le président des États-Unis et d'autres en raison de la situation d'urgence. Le Parlement ne siégeait pas à ce moment-là. Pouvions-nous le convoquer?

J'ai pris l'initiative, en consultation avec le ministre des Affaires étrangères, qui était à l'étranger à ce moment-là, je crois, d'appeler les porte-parole de tous les partis d'opposition pour leur faire part de notre proposition et leur demander s'ils pouvaient donner leur consentement vu que le Parlement était hors session. Ils ont tous répondu qu'ils accepteraient, et je les ai remerciés. Je leur ai dit que nous venions probablement d'établir un précédent.

Nous avons donc établi un principe selon lequel, outre la consultation du Parlement durant les sessions, on pouvait consulter les porte-parole en dehors des sessions. Si l'un d'eux s'opposait fortement à une proposition en disant que ça ne peut pas ou ne doit pas se faire, le ministre serait alors saisi de l'affaire.

Le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères sont donc véritablement des activistes constitutionnels.

Un organisme aussi prestigieux que le Comité des affaires étrangères a connu des changements stupéfiants au cours des dernières années. Il était assez conservateur dans sa façon de fonctionner avant que la vague de nouveaux députés déferle sur le Parlement, en 1993—ces 208 nouveaux députés dont mon collègue de Red Deer faisait partie, tout comme moi.

J'examine ce que nous avons fait et le rapport présenté par le Comité des affaires étrangères, plus précisément par son sous-comité spécial du commerce international chargé de l'AMI, l'Accord multilatéral sur l'investissement. Ce rapport est aussi bon que ce qu'un comité américain aurait pu nous offrir. Le comité a les pouvoirs, les juristes, une minorité et une majorité. Le rapport est excellent; c'est une excellente synthèse et c'est innovateur. Lorsque le Comité des affaires étrangères sera saisi de tout autre problème majeur de ce genre, j'espère que des études semblables seront effectuées.

 

. 1755 + -

Nous avons institué des comités itinérants. L'un d'eux s'est rendu en Bosnie. Le député de Red Deer était allé en Bosnie lors d'une mission précédente. Un autre comité, dirigé par un ministre, selon les exigences imposées par le gouvernement algérien, s'est rendu en Algérie.

Un troisième revient du Chiapas, au Mexique. Ces comités étaient représentés par trois partis d'opposition. Ce groupe était multipartite. Il formait une équipe, comme me l'ont assuré le président et tous les participants. Il a remis son rapport. Il fait suite aux négociations ou consultations directes avec le gouvernement mexicain, et nous prévoyons que ce comité continuera d'étudier ce dossier. Il y a actuellement un comité parlementaire mexico-canadien.

C'est ce que j'appelle une évolution très dynamique du droit. Comme le député l'a dit aujourd'hui, des visites ont eu lieu de part et d'autre. Un groupe algérien est au Canada aujourd'hui, et nous espérons qu'un autre groupe canadien se rendra en Algérie, et un autre encore par la suite.

Le comité est en constante évolution.

Je voudrais également citer l'exemple du groupe d'étude spécial sur les régions, formé par le ministre des Affaires étrangères, concernant le Moyen-Orient, la région située entre le Proche-Orient et le sous-continent indien, la région inconnue. Les services étrangers de renseignement ne donnent pas suffisamment d'informations. Nous en ferons l'étude. Je me réjouis de pouvoir compter sur la collaboration et le soutien du député de Red Deer, car, si l'on procède à cette étude sur les affaires étrangères, nous voulons que tous les partis y participent.

On assiste à une transformation et une évolution des comités parlementaires. Cela illustre la démarche pragmatique, empirique, progressive et axée sur la résolution des problèmes qui caractérise le développement de la Constitution. Elle n'est pas typiquement américaine, mais nous estimons qu'elle est plus efficace. Elle comporte un élément de souplesse. Il n'est pas nécessaire de retenir les services d'un avocat pour examiner les dispositions de la Constitution, ce que les Américains font trop fréquemment, à mon avis. Cette façon de faire suscite méfiance et répugnance à l'endroit de la Constitution.

Je crois que nous avons saisi la substance de la proposition du député. Je tiens à lui assurer que, avec son soutien et celui d'autres députés, le rôle du Comité des affaires étrangères continuera de s'élargir. Je suis très fier d'avoir été associé à ce comité indirectement, en un sens, étant donné le lien entre ce comité et le ministre. Les travaux du comité sont impressionnants et témoignent d'une révolution dans le régime parlementaire que n'ont pas connue ceux dont le mandat parlementaire s'est terminé avant 1993.

Si je puis me permettre de faire une suggestion utile au député, je dirai que nous préférerions conserver la souplesse dont nous disposons actuellement, mais j'ajouterai que l'essentiel de ce qu'il réclame est déjà là. Le ministre de la Défense et le ministre des Affaires étrangères reconnaissent l'intérêt du Parlement et de tous les partis pour l'engagement de nos troupes à l'étranger. Si le Parlement siège lorsqu'il est question d'envoyer des troupes à l'étranger, il est clair qu'il y a un débat et que 20, 30 et, si nécessaire 50 députés peuvent exprimer leur point de vue. Cela peut être exténuant pour l'occupant du fauteuil de la présidence, mais le Président reconnaîtra, j'en suis sûr, que c'est un bien petit prix à payer si on peut éclairer les députés.

C'est la façon canadienne de faire les lois. Cependant, je crois que ce que réclame le député se fait déjà. En passant, rien n'empêche le comité parlementaire des affaires étrangères d'étudier cette question ou toute autre modification constitutionnelle. Il a déjà été suggéré que le comité étudie le pouvoir de conclure des traités. Je crois que j'ai eu des discussions avec mon vis-à-vis sur la question devant un sous-comité, qui est, pour ainsi dire, inactif. Je me demande à qui la faute.

Quoi qu'il en soit, nous aimons l'idée de consulter le Parlement. Le ministre des Affaires étrangères a apporté des changements. Il n'est pas question pour le moment de revenir en arrière et je m'attends à ce que nous poursuivions sur notre lancée.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre pour dire que le Bloc québécois appuiera la motion présentée par le député de Red Deer en vertu de laquelle il souhaite voir le Parlement jouer un rôle plus important, plus décisif, quant à la question de décider de l'envoi de contingents de soldats canadiens à l'étranger.

 

. 1800 + -

Le député de Red Deer et moi-même avons, à plusieurs reprises, pendant les travaux du Comité permanent des affaires étrangères, indiqué le souci que nous avions que le processus par lequel les contingents devaient se rendre à l'étranger pour servir au sein de missions et d'opérations de maintien de la paix, qu'il s'agisse de missions sous l'égide des Nations unies ou sous l'égide de l'OTAN, devait être démocratisé et devait faire en sorte que les élus participent davantage qu'ils l'ont fait par le passé aux décisions importantes que prennent et que sont appelés à prendre de plus en plus les gouvernements.

De telles missions se multiplient à un rythme important et font que les armées aujourd'hui, y compris l'armée canadienne, jouent un rôle important lorsqu'il s'agit de maintenir la paix et la sécurité internationale.

Je trouve que la révolution dont parlait le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères demeure fort inachevée. S'il est vrai que depuis 1993 des débats ont lieu en cette Chambre et au Comité des affaires étrangères sur la question de l'envoi de troupes à l'étranger, ces discussions se sont faites tantôt dans cette Chambre, tantôt au Comité permanent.

Ces débats n'ont pas souvent eu d'impact sur l'opinion publique. Ce sont des débats qui ont eu lieu, comme tout récemment concernant le renouvellement du mandat des Forces canadiennes au sein de la SFOR, dans un Parlement vide où le ministre des Affaires étrangères, suivi de son collègue, le ministre de la Défense nationale, parlaient devant une assemblée où il n'y avait peu ou pas de députés.

À mon avis, il s'impose d'achever cette révolution. Je trouve que la proposition que nous formule le député de Red Deer aujourd'hui est fort constructive en la matière.

La motion a été complétée par quelques explications du député qui nous présente un processus nouveau en trois phases, qui ferait que, dans cette enceinte, les députés soient convenablement informés des enjeux et des intentions du gouvernement et des ministres des Affaires étrangères et de la Défense, qu'un véritable débat puisse avoir lieu entre les représentants des membres des formations politiques présentes dans cette Chambre, et que cette assemblée puisse donner un avis, puisqu'il s'agira toujours d'un avis, cette question relevant et continuant de relever de la prérogative.

Puisque le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères nous faisait en quelque sorte un petit cours de droit constitutionnel, j'aimerais tout de même lui rappeler que ce Parlement est en mesure de modifier la prérogative. Il est même en mesure de l'abroger, s'il le voulait.

Peut-être peut-on penser que la motion du député de Red Deer pourrait être plus ambitieuse, puisque si ce Parlement le souhaitait, une loi pourrait être adoptée, comme c'est le cas dans d'autres pays, pour faire en sorte que le Parlement doive approuver l'envoi de forces étrangères ou doive approuver les dépenses inhérentes à l'envoi de telles forces.

Donc, la proposition du député de Red Deer en est une qui, me semble-t-il, répond à des exigences démocratiques et à des exigences de transparence qui ne sont pas des exigences qui sont remplies à l'heure actuelle, bien que l'on doive reconnaître que des débats plus nombreux ont été faits sur la question de l'envoi de contingents de soldats canadiens à l'étranger.

Au Bloc québécois, nous avons été à plusieurs reprises invités à faire part de nos critiques sur la façon dont les décisions ont été prises, la façon dont les décisions ont été annoncées et les débats préparés concernant l'envoi depuis la rentrée parlementaire de septembre dernier de contingents canadiens.

J'ai déjà pu dire dans cette Chambre que je trouvais que cette pratique était inconsistante, qu'elle manquait d'uniformité, et peut-être que c'est cette inconsistance et ce manque d'uniformité que veut préserver le secrétaire parlementaire, puisqu'il veut garder cette flexibilité qui semble convenir trop souvent au gouvernement.

 

. 1805 + -

Par conséquent, nous sommes favorables à cette motion qui, à mon avis, est une contribution tout à fait utile au débat sur la démocratisation des décisions du gouvernement en matière d'affaires étrangères et de celles aussi importantes que l'envoi de contingents à l'étranger.

Je veux aussi ajouter, par ailleurs, puisque le secrétaire parlementaire y a fait allusion plus tôt, qu'il appartiendrait que le débat soit élargi à des questions additionnelles en matière de politique étrangère. Le secrétaire parlementaire a laissé entendre que la Chambre, par son Comité permanent des affaires étrangères, avait été associée de façon relativement intime au débat sur l'adoption ou la conclusion de l'Accord multilatéral sur l'investissement.

C'est une implication, une association qui a été encore trop discrète et trop peu importante. Si la question de l'Accord multilatéral sur l'investissement en est une dont le Comité permanent des affaires étrangères et son sous-comité ont été saisis, c'est bien parce que, à un moment donné, il y a une fuite. Le texte de l'AMI, ou le projet de traité de l'AMI, a été rendu public par une organisation non gouvernementale qui a mis en lumière les problèmes qui pouvaient résulter de son adoption et de l'adhésion du Canada ou d'autres pays à ce traité.

Encore là, sans doute faudrait-il, et c'est l'intention du Bloc québécois et de votre humble serviteur, présenter un jour une motion ou un projet de loi d'initiatives parlementaires qui stipulerait que le gouvernement doive obtenir l'assentiment de la Chambre avant de procéder à la ratification de traités, comme d'ailleurs la tendance existe dans d'autres pays, dans d'autres juridictions, comme l'Australie par exemple.

Cette tendance à vouloir associer le Parlement va aller en s'accroissant à cause de l'importance de plus en plus grande des traités internationaux, de la réglementation internationale, ainsi que l'importance qu'ont, de plus en plus, des missions de maintien de la paix et de maintien de la sécurité internationale.

En définitive, ce que le député de Red Deer fait en présentant cette motion, c'est nous interpeller, nous demander de répondre à un véritable déficit démocratique qui fait en sorte que le gouvernement, dans un régime parlementaire comme celui que nous connaissons, détient un pouvoir, qui est devenu sans doute exorbitant, du droit commun, qu'il doit maintenant envisager de partager avec la Chambre des communes, avec des élus qui ont des responsabilités et qui ont à répondre à leurs concitoyens de la latitude et des politiques gouvernementales en matière d'affaires étrangères.

Lorsqu'il s'agit de questions aussi importantes que l'envoi de contingents militaires, la Chambre doit, non seulement être consultée, mais également être intégrée de plus en plus au processus décisionnel. Un jour devra-t-elle sans doute vouloir participer à la décision d'envoyer des contingents.

En conclusion, dans un monde où les armées nationales et les forces militaires vont être mises de plus en plus au service du maintien de la paix et de la sécurité internationale, il me paraît de plus en plus opportun que le Parlement soit associé à des décisions comme celle de partager la responsabilité de l'envoi de contingents à l'étranger. Dans ce sens, la proposition du député de Red Deer est un effort tout à fait louable qu'appuie le Bloc québécois, et un processus qui mérite d'être raffiné.

Le député de Red Deer peut compter sur l'appui des députés du Bloc québécois et de notre aile parlementaire pour qu'il puisse raffiner cette proposition et convaincre, comme nous en sommes convaincus, que le gouvernement a tout intérêt à partager sa responsabilité avec le Parlement.

 

. 1810 + -

[Traduction]

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, c'est avec un grand plaisir que je prends part au débat sur la motion du député de Red Deer et je le félicite de l'avoir présentée.

Cette motion nous donne l'occasion de débattre d'un point dont il est très important, selon moi, de saisir ce Parlement, et c'est la mesure dans laquelle le présent gouvernement et dans bien des cas, les gouvernements antérieurs ont omis de consulter convenablement le Parlement lorsque des militaires canadiens ont été envoyés dans des missions militaires au-delà de nos frontières.

Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas eu, de temps à autre, des débats sur diverses missions de maintien de la paix. Je me souviens de certains de ces débats parce que j'y ai participé moi-même. Ils prennent la forme de débats exploratoires. Nous n'avons pas un débat où le Parlement peut s'exprimer dans un sens ou dans l'autre, par un oui ou par un non, à l'égard d'une mission militaire particulière à l'extérieur du pays, selon les termes employés dans cette motion.

Je tiens certainement à me prononcer en faveur de cette motion. Je tiens à me prononcer en faveur d'une consultation plus sérieuse et plus générale du Parlement de la part du gouvernement lorsqu'il est question de prendre ces types de décisions. Il y a plus que le respect du Parlement en cause. On devrait saisir le Parlement d'une question aussi importante d'une manière sérieuse et sincère et non pas en se disant qu'il suffit de les laisser en discuter un peu. Le Parlement devrait être saisi d'une telle question d'une manière qui lui permette de s'exprimer sérieusement.

Dans l'ensemble, les types d'activités dans lesquels le gouvernement engage nos troupes sont des activités qui recevraient l'appui du Parlement. Nos militaires pourraient participer à ces missions particulières avec l'esprit tranquille et en se sentant encouragés parce qu'ils savent qu'ils jouissent de l'appui inconditionnel du peuple canadien exprimé par leurs représentants ici au Parlement. Voilà pourquoi je me prononce en faveur de cette motion.

J'ai écouté le secrétaire parlementaire, qui a expliqué comment, selon lui, le gouvernement se conformait déjà à l'esprit de cette motion.

Permettez-moi de citer ce que je considère être un écart flagrant à cet égard, soit le fait que ce gouvernement a signé un décret concernant l'agrandissement de l'OTAN, une importante affectation des forces armées du Canada, au-delà de nos frontières, sans qu'il y ait eu le moindre débat là-dessus ici au Parlement.

Par l'élargissement de l'OTAN, nous engageons des hommes et des femmes des Forces armées canadiennes à la défense, non seulement des pays qui sont déjà membres de l'OTAN, mais aussi de nouveaux membres tels que la République tchèque, la Pologne et la Hongrie. La chose a-t-elle jamais fait l'objet d'un débat au Parlement? Non seulement avons-nous engagé nos forces armées à défendre ces trois pays, mais, compte tenu de la doctrine flexible de l'OTAN concernant l'usage des armes nucléaires, nous avons engagé le Canada à participer à un échange nucléaire avec quiconque violerait les frontières de ces trois nouveaux pays membres, en plus de tous les autres pays membres, sans qu'un mot ne soit prononcé pour expliquer cette décision.

L'aspect embarrassant et honteux de la chose est que le Canada est le seul pays membre de l'OTAN à agir de la sorte. Les recherches que j'ai effectuées m'ont permis de constater que dans tous les pays membres de l'OTAN, à l'exception du Royaume-Uni, l'élargissement de l'OTAN doit être soumis à la ratification du Parlement. Mais pas au Canada. Chez nous, une décision de cette importance peut être prise par décret. La même chose est possible au Royaume-Uni, puisque là aussi la tradition permet à la Couronne de conclure des accords de ce genre.

Au Royaume-Uni cependant, on a suffisamment respecté le Parlement pour tenir un débat à la Chambre des communes, à Westminster, sur l'élargissement de l'OTAN. Avons-nous tenu un débat ici? Le ministre a-t-il fait une déclaration à laquelle l'opposition aurait pu répondre? Non.

 

. 1815 + -

Imaginez l'embarras si nous devions examiner la question en détail. Nous ne cessons de vanter le Canada, de le présenter comme une grande démocratie et nous voulons exporter nos valeurs démocratiques et culturelles vers tous ces pays du tiers monde pour qu'ils nous ressemblent.

Or, ici même au Canada, une décision de cette importance peut être prise sans que le Parlement ne soit consulté et sans débat parlementaire. Dans tous les autres pays membres de l'OTAN, une décision de ce genre devrait obligatoirement être soumise à l'approbation du Parlement ou du Congrès.

Je soulève cette question pour faire contrepoids à ce que disait le secrétaire parlementaire. Le gouvernement devrait examiner sa propre conscience parlementaire quant à la façon dont cela a transpiré.

On aurait pu prendre cette décision cruciale sur le plan militaire et de la politique étrangère sans le bénéfice d'un débat au Parlement. C'est pourquoi, entre autres, j'ai décidé d'appuyer la motion de l'honorable député. Bien que la motion ne fasse pas précisément référence à l'OTAN ou à l'élargissement de l'OTAN, je pense que le député serait d'accord pour dire qu'il s'agit du genre de chose qu'il aurait pu avoir à l'esprit lorsqu'il a rédigé sa motion. Je pense qu'il pensait sans doute plus simplement à divers engagements des forces, mais l'élargissement de l'OTAN suppose certes un engagement potentiel et réel de première importance pour les forces canadiennes. Cela a eu lieu sans le bénéfice d'un quelconque débat parlementaire.

C'est pourquoi j'espère que nous pourrons soit adopter la motion du député, soit en débattre de sorte que le gouvernement examine son bilan dans ce dossier, et d'autres, et qu'il améliore ses procédures en conséquence.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur cette motion, car cela me permettra de dévoiler certaines vérités sur le Parti libéral qui est au pouvoir et sur le Parti réformiste qui a proposé cette motion.

Le Parti libéral n'a pas intérêt à voir le Parlement intervenir dans les décisions nationales les plus cruciales, celles qui visent à envoyer à l'étranger des jeunes Canadiens qui seront exposés à des dangers. Quant au Parti réformiste, en libellant sa motion comme il a choisi de le faire, il montre une fois de plus qu'il ne comprend strictement rien aux affaires étrangères ou au fonctionnement du monde réel.

Je veux lire la motion afin que la Chambre comprenne bien de quoi je parle:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait solliciter l'appui de la majorité, au moyen d'un vote officiel à la Chambre des communes, avant d'engager un important contingent de militaires canadiens dans une mission militaire active à l'extérieur du pays.

Le sentiment qui a inspiré cette motion est louable et j'en félicite le Parti réformiste. À deux occasions depuis le début de la session parlementaire en septembre, la Chambre s'est réunie pour discuter de la décision du gouvernement d'envoyer des soldats canadiens à l'étranger. La première fois, c'était en février de cette année. Je m'en souviens fort bien. Permettez-moi d'expliquer à la Chambre pourquoi je m'en souviens aussi bien.

Alors que la tension montait dans le golfe Persique parce que Saddam Hussein refusait de laisser les inspecteurs des armements des Nations Unies faire leur travail, les États-Unis et la Grande-Bretagne continuaient de renforcer leur présence dans la région. La situation semblait très sérieuse. On avait l'impression qu'il pourrait y avoir une autre guerre.

Le dimanche avant que la Chambre ne reprenne ses travaux après le congé d'hiver, le chef de mon parti a communiqué avec le premier ministre et lui a dit que nous allions demander la tenue d'un débat d'urgence. Le premier ministre et la Chambre ont rejeté la demande de débat d'urgence présentée par mon parti. Ce n'est que la semaine suivante, après que le président Bill Clinton eut demandé l'aide du Canada, que le premier ministre a reconnu que la tenue d'un débat s'imposait.

Il a dit à la Chambre qu'il avait prévenu le président qu'il ne pourrait lui donner de réponse avant que la question ait fait l'objet d'un débat public à la Chambre. Il a dit aux Canadiens qu'il vérifierait d'abord auprès de la Chambre avant d'annoncer au président des États-Unis que le Canada acceptait d'envoyer des soldats. Ce n'était pas exact.

En réalité, dans une apparition à la télé, Madeleine Albright, la secrétaire d'État américaine a dit au monde entier que le président Clinton avait l'appui du Canada. C'était dimanche matin, le 8 février. Le premier ministre n'a pas dit aux Canadiens que son entretien avec le président avait même duré jusqu'au dimanche après-midi.

 

. 1820 + -

Ce même débat dont le premier ministre avait dit qu'il était nécessaire avant de donner sa réponse aux Américains n'a eu lieu que dans la soirée du 9 février. En fonction de ces dates, ou bien la secrétaire d'État américaine a dit qu'elle avait l'appui du Canada avant de l'avoir, ou bien le premier ministre s'est engagé à appuyer les États-Unis avant la tenue du débat. Selon ce dernier scénario, le premier ministre a fait croire aux Canadiens que le débat revêtait une importance réelle. C'est une honte.

La deuxième fois où la Chambre s'est réunie pour débattre de la question d'envoyer des troupes à l'étranger était le 28 avril de cette année. Ce débat portait sur la prolongation, à compter du 20 juin, de la participation du Canada à la mission en Bosnie, cette fois sous l'égide de l'OTAN.

La motion présentée ce soir-là par le gouvernement demandait que cette Chambre note que le gouvernement du Canada a l'intention de renouveler sa participation à la Force de stabilisation (SFOR) de l'OTAN en Bosnie.

Noter que le gouvernement du Canada avait l'intention, c'est tout ce que nous avons fait ce soir-là. Selon le Règlement de la Chambre, les ministres responsables de la décision de laisser des jeunes Canadiens dans une zone militaire dangereuse avaient le droit de parler pendant 20 minutes. Ce soir-là, le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale ont partagé leur temps de parole. Laisser des militaires canadiens en Bosnie n'était pas suffisamment important pour que les ministres en parlent pendant tout le temps dont ils disposaient. C'est honteux. C'est décourageant pour les Canadiens et pour les membres des Forces canadiennes qui servent ces derniers.

Qu'on ne s'y trompe pas, quand le gouvernement s'engage dans un débat d'une importance cruciale, ce n'est pas parce que le premier ministre s'intéresse à l'opinion des autres partis. C'est uniquement une question d'optique, il s'agit de bien paraître aux yeux des médias.

J'ai dit alors que le débat aurait dû servir à autre chose qu'à noter les intentions du gouvernement et que si ce dernier avait eu du courage il aurait permis que la motion fasse l'objet d'un vote. Le gouvernement actuel est dénué de tout courage.

Du fait que ce gouvernement n'a pas de courage, le Parti réformiste semble penser qu'aucun gouvernement canadien n'a jamais ou ne fera jamais preuve de courage.

Je partage les sentiments qui sous-tendent la motion. Malheureusement, comme d'habitude, le Parti réformiste a mal fait les choses. L'expression «important contingent de militaires canadiens» n'est pas claire. Le député de Red Deer dit que c'était pour donner plus de latitude au gouvernement. Offrez-lui un pouce, il prend un mille, comme il le fait maintenant. Rien ne change. Je devrais peut-être reconnaître le mérite du député de Red Deer. Je suis certain qu'il a subi des pressions venant de la direction du Parti réformiste pour inclure un référendum dans sa motion. Les réformistes voudraient bien qu'il y ait un référendum pour décider d'envoyer de nombreux militaires canadiens à l'étranger, n'est-ce pas? Le parti des référendums serait-il favorable à cette proposition?

Le Parti réformiste n'a aucune confiance dans les institutions canadiennes, y compris celle du premier ministre. Soyons honnête, le gouvernement libéral actuel ne fait rien pour donner confiance. Cependant, mon parti croit que le premier ministre doit être en mesure d'agir énergiquement en temps de crise. Cela signifie envoyer des troupes, malgré un bref préavis, quand il le faut. Il faudrait être sot pour prétendre savoir à quel type d'urgences un premier ministre peut être confronté. Il serait imprudent de dire que la sécurité nationale ne dépendra jamais de la capacité du premier ministre d'agir énergiquement et immédiatement. J'appuie les intentions qui sous-tendent la motion et j'ai hâte d'en discuter plus à fond avec le député de Red Deer.

À mon avis, un des problèmes, c'est que les parlementaires n'ont pas les renseignements que le premier ministre et les membres du Cabinet possèdent, et qu'il faut pour prendre une telle décision. La plupart des parlementaires, et comme c'est parfois évident avec le gouvernement actuel, certains ministres puisent leurs renseignements dans la presse et les obtiennent à l'occasion lors de séances d'information ministérielles. C'est vraiment là que se situe le problème.

Plus tôt aujourd'hui nous avons débattu le projet de loi C-25 modifiant la Loi sur la défense nationale. Au cours de ce débat, comme je l'ai fait à d'autres moments, j'ai cité le chapitre du rapport du commissaire de la défunte enquête sur la Somalie intitulé «La nécessité d'avoir un Parlement vigilant». Il avait notamment recommandé de constituer un véritable groupe d'experts qui rendrait compte directement au Comité de la défense. Ce groupe pourrait renseigner les parlementaires. Il veillerait à ce que le gouvernement soit vigilant. Il améliorerait la démocratie.

 

. 1825 + -

Même si le gouvernement semble n'avoir aucun respect pour le Parlement, comme il l'a prouvé plus tôt cette semaine en n'ayant aucun député présent à la Chambre, j'ai hâte de discuter avec le député de Red Deer et d'autres députés qui veulent améliorer la démocratie à la Chambre.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis de pouvoir dire quelques mots sur cette motion parce je crois que le temps que la Chambre passe à parler du travail important qu'accomplissent les forces canadiennes est du temps bien employé.

En 1996, une motion similaire a été débattue et, à l'époque, nous n'étions pas d'accord pour qu'on tienne obligatoirement un vote avant de déployer des militaires canadiens à l'étranger. Cela demeure la position du gouvernement.

En ajoutant des étapes au processus de déploiement, on risque de retarder notre capacité de réagir. Il faut éviter cela.

Au cours du débat tenu en 1996, le gouvernement avait souligné son intention de faire participer chaque fois que possible le Parlement au déploiement de troupes. Le gouvernement soutient toujours ce principe. Une discussion approfondie de tout déploiement majeur de troupes canadiennes est une activité importante et précieuse et nous avons engagé le Parlement sur ces questions.

En février dernier, le Parlement a débattu la participation possible des forces canadiennes à une action militaire contre l'Irak, dans le golfe. La majorité des députés a appuyé une telle participation canadienne si tous les efforts diplomatiques étaient épuisés.

En avril dernier, la Chambre a débattu la reconduction de la participation canadienne aux forces de stabilisation dirigées par l'OTAN en Bosnie. Après un débat approfondi, tous les partis ont convenu que les troupes canadiennes devaient rester dans ce pays déchiré et y poursuivre leur précieux travail.

Aussi en avril, à une séance mixte spéciale des comités des affaires étrangères et de la défense, on a discuté de la participation possible du Canada à une force de maintien de la paix en République centrafricaine. Cette option a été choisie parce qu'il fallait prendre une décision et déployer des troupes aussi rapidement qu'il était humainement possible de le faire. Les deux ministres ont participé à la séance spéciale où une résolution favorisant une aide canadienne a été adoptée à l'unanimité.

Le gouvernement a engagé le Parlement parce que c'est ce que veulent les Canadiens. Les Canadiens sont fiers du rôle que jouent les forces canadiennes à l'étranger. Ils croient qu'il fait mieux vivre en ce monde parce que le Canada accepte de jouer un rôle au plan international.

Les Canadiens comprennent aussi que ces missions peuvent être très dangereuses. Il s'ensuit qu'ils s'attendent à ce que leurs représentants élus s'engagent lorsqu'une mission est envisagée ou reconduite. Il faut veiller, toutefois, à s'assurer que le Canada peut réagir rapidement et efficacement aux événements internationaux. Pourquoi? Parce que les Canadiens exigent en outre que nous ayons une politique de défense qui relève les défis de l'après-guerre froide. Notre gouvernement a répondu à cette exigence et notre politique de défense reconnaît que la situation qui prévaut dans le monde des années 90 en matière de sécurité est nouvelle.

Il vaut la peine de signaler qu'un comité mixte spécial de la Chambre et du Sénat a énormément contribué au développement de cette politique. Le gouvernement estimait à raison que les députés joueraient un rôle utile en aidant à définir comment le Canada devrait agir dans le nouveau contexte de la sécurité internationale.

Les actions prises par les Canadiens dans ce nouveau contexte incluent le maintien de notre belle tradition de gardiens de la paix. En effet, la contribution des forces canadiennes au maintien de la paix dans le monde est sans égal, et l'engagement du Canada ne s'est jamais démenti.

À la fin de la guerre froide, 80 000 militaires canadiens avaient servi dans des opérations de maintien de la paix, et il est difficile de trouver des missions de paix—sous l'égide de l'ONU ou d'autres—au sein lesquelles les Canadiens n'ont pas joué un rôle de premier plan.

Nombreux sont ceux qui disent que le Canada est l'autorité la plus compétente en matière de maintien de la paix. Cette compétence est encore nécessaire en cette période d'après-guerre froide. C'est un fait que le nouveau contexte de sécurité lui doit beaucoup. La fin des tensions entre l'Est et l'Ouest est un changement tout à fait bienvenu. La menace d'un conflit mondial a diminué et, à ce niveau, le monde est devenu un endroit plus sûr.

Toutefois, à d'autres niveaux, la sécurité est difficile à assurer, notamment au niveau régional où la menace est parfois plus grande que jamais. Les récents essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan en sont un bon exemple. Nous avons aussi vu des États sombrer dans l'anarchie et, dans ces cas, le prix humain a été absolument énorme.

Les conflits alimentés par le nationalisme ethnique font les manchettes quotidiennes avec une régularité désolante. Ces problèmes nécessitent l'attention de la communauté internationale. Ils sont trop horribles pour qu'on se contente de les ignorer.

 

. 1830 + -

En guise de conclusion, permettez-moi de dire que, la plupart du temps, lorsqu'une mission sera sur le point d'être commencée ou que le gouvernement envisagera de renouveler un engagement existant, le Parlement prendra le temps de discuter des problèmes connexes, soit dans le cadre d'un débat à la Chambre ou en invitant les ministres et autres autorités à témoigner devant les comités permanents.

Le gouvernement continuera à profiter des points de vue exprimés à la Chambre. Cela dit, il est essentiel que celui-ci conserve le pouvoir d'agir de façon rapide et décisive lorsque c'est nécessaire.

La pratique bien établie qui consiste à consulter le Parlement à cet égard nous a bien servis. Mais si nous n'appuyons pas la motion, c'est parce qu'elle risquerait de gêner notre capacité de réagir avec célérité. J'invite tous les députés à en prendre bonne note.

Le vice-président: On m'informe que la prochaine fois que ce sujet sera débattu à la Chambre, le député disposera encore de cinq minutes pour terminer ses observations.

[Français]

La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE COMMISSAIRE À L'INFORMATION

 

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Bill Blaikie (Winnipeg-Transcona, NPD): Monsieur le président, j'aimerais commencer, avant de parler de la nomination du nouveau commissaire à l'information, par remercier le commissaire sortant, John Grace, et lui témoigner mon estime pour son excellent travail et en particulier pour son rapport final et les nombreuses recommandations qu'il y formule sur les façons d'améliorer l'accès à l'information au Canada.

La question du choix du nouveau commissaire à l'information mijote depuis quelques semaines. J'aimerais tirer certaines choses au clair sur ce qui c'est passé ces dernières semaines concernant le processus de nomination du commissaire à l'information, comment le nom de M. Reid a fait surface et comment il s'est produit que nous en soyons maintenant à discuter de sa nomination par le gouvernement au poste de commissaire à l'information.

Avant que le nom de M. Reid surgisse, le gouvernement avait suggéré aux leaders parlementaires le nom d'une certaine Mme Gusella. Selon ce que ma présence aux réunions m'a permis de comprendre, cette dame se disait disposée à comparaître devant un comité parlementaire et croyait même que c'était une bonne idée. Elle voulait cependant savoir auparavant si l'un ou l'autre parti s'opposait à sa nomination. À défaut d'une telle approbation préalable, elle préférait que son nom ne soit pas retenu et que, par conséquent, elle ne soit pas appelée à comparaître devant le comité.

Il est apparu, après consultation, que la nomination de Mme Gusella en inquiétait certains, non parce qu'ils doutaient de sa compétence ou de sa personnalité, ou autres choses du genre, mais parce qu'ils se demandaient si, étant donné ses antécédents personnels, elle était un candidat indiqué pour le poste de commissaire à l'information. Je ne crois pas qu'il soit exact de dire que son nom à été retiré. La vérité, c'est qu'il n'a jamais été proposé.

Après cela, j'ai appris que le gouvernement envisageait M. Reid, une candidature suggérée au gouvernement non pas par le NPD ou par moi, mais par quelqu'un d'autre.

Lors d'une réunion des leaders à la Chambre, j'ai demandé s'il était vrai que l'on considérait M. Reid et, si oui, si on laisserait M. Reid comparaître devant un comité du Parlement, pour que les députés se fassent une idée de sa personnalité, parce que tous les députés ne sont pas dans la même situation que moi, qui ai siégé avec M. Reid à la Chambre de 1979 à 1984.

 

. 1835 + -

D'une façon ou d'une autre, ma suggestion de demander au gouvernement, s'il envisageait la nomination de M. Reid, de le faire comparaître devant un comité pour répondre aux questions des députés, a fait boule de neige. Il y a une heure ou deux à peine, le leader du gouvernement et le leader de l'opposition officielle auraient dit sur le parquet de la Chambre que, d'une manière ou d'une autre, le nom de M. Reid avait été avancé par moi et le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Ce n'est pas le cas. Je regrette que l'on pense cela, et que même M. Reid le pense. J'ai vu qu'on disait qu'il l'avait mentionné.

Il est vrai que j'ai demandé au gouvernement si, oui ou non, il le considérait et j'ai alors suggéré la comparution devant le comité. Il est vrai que, étant donné ce que je me souviens du travail de M. Reid à la Chambre, j'étais favorable à l'idée de le voir se présenter devant les députés pour qu'ils déterminent s'il est apte à occuper le poste.

La minute où nous avons posé la question, le gouvernement s'est écrié: «Quelle bonne idée!» et à neuf heures le lendemain, M. Reid comparaissait devant le comité. Il faut être naïf pour croire que le gouvernement n'avait pas considéré sa candidature avant que je me renseigne, étant donné qu'il a été convoqué devant le comité dès le lendemain matin. Nous n'avons eu le temps de suivre le processus comme il se doit.

Il aurait fallu attendre un jour ou deux après la discussion des leaders de la Chambre et donner avis que M. Reid comparaîtrait devant le comité, pour que les groupes préoccupés, pour toutes sortes de raisons, par la nomination de M. Reid aient la possibilité de communiquer avec les députés et les membres du comité qui allaient engager des discussions avec M. Reid. Cela ne s'est pas produit. Si je comprends bien, M. Reid s'en est bien tiré lors de la réunion du comité, à en juger par tous les participants à la réunion. Mais là n'est pas la question. Le problème, c'est que le processus ne s'est pas déroulé en bonne et due forme.

Je suis d'accord avec les réformistes lorsqu'ils disent qu'il est grand temps, si des postes de ce genre deviennent vacants, de les afficher et de les annoncer publiquement d'une façon ou d'une autre, pour que le grand nombre de Canadiens qui possèdent les qualités voulues puissent les postuler. Au lieu de cela, des noms surgissent à travers les méandres de la bureaucratie ou le réseau des petits copains du Parlement, ce qui n'est pas mauvais en soi. Mais ce n'est tout simplement pas acceptable à une époque où les gens ont le droit de savoir que ces postes sont ouverts et comment présenter leur candidature.

Dans le cas du commissaire à l'information, le fait est que le titulaire est un haut fonctionnaire du Parlement. Des demandes pourraient être présentées. Des personnes nommées par chacun des partis pourraient dresser une courte liste et la présenter à un comité. Elles pourraient dresser une autre courte liste et finalement choisir le meilleur candidat pour le poste. Cette démarche serait beaucoup trop rationnelle pour quoi que ce soit au Parlement. À mon avis, c'est bien dommage.

Nous avons cependant réalisé des progrès. Le fait que M. Reid ait comparu devant le comité, quoique d'une façon qui laisse à désirer, est néanmoins un pas en avant. Je félicite le gouvernement de ce minuscule pas en avant. Il faut aller beaucoup plus loin que cela. Ce ne peut être du travail bâclé comme c'est le cas à l'heure actuelle.

Je déplore vivement la perception selon laquelle le gouvernement ne faisait que rester là, l'esprit vide, sans jamais penser à John Reid et que tout à coup, les néo-démocrates et les conservateurs lui ont dit: «Pourquoi pas John Reid? N'est-ce pas une merveilleuse idée? Cela ne nous était jamais venu à l'esprit.» Le gouvernement a ensuite donné l'impression que cela venait de l'opposition, alors qu'on sait que le gouvernement lui-même envisageait cette nomination, à la suggestion de je ne sais qui.

Je voulais mettre les choses au point à ce sujet. Je veux également préciser que nous avons des réserves au sujet de la nomination de M. Reid. Une chose qu'on a apprise dans les jours qui ont suivi la circulation de son nom, c'est ses liens avec l'industrie nucléaire.

 

. 1840 + -

Les députés qui me connaissent savent que je ne pense pas qu'il y ait personne à la Chambre qui s'oppose avec plus de vigueur à l'énergie nucléaire que moi. J'ai présenté de nombreux projets de loi d'initiative parlementaire là-dessus, dont certains ont fait l'objet d'un vote. Depuis une semaine, je soulève des questions à la Chambre au sujet de la vente de réacteurs CANDU en faisant connaître mon opposition et celle de mon parti à ces ventes. Toutefois, cela dit, je ne pense pas que le fait d'avoir des liens avec une industrie en particulier, soit, de prime abord, un défaut.

On peut être en désaccord avec le rôle des réacteurs nucléaires et de l'énergie nucléaire sans pour autant utiliser cet argument pour remettre en question la pertinence d'une candidature ou la valeur d'une personne pressentie pour occuper un poste particulier. Beaucoup de personnes croient, à juste titre, que ce n'est pas n'importe quel type d'industrie, mais qu'il s'agit de l'industrie nucléaire.

Je me suis occupé de cette industrie pendant plus de 19 ans à la Chambre et auparavant, j'ai milité contre l'énergie nucléaire et la course aux armements nucléaires. C'est une des cultures les plus secrètes au monde. Il est extrêmement difficile d'apprendre quoi que ce soit au sujet de l'industrie nucléaire. On va vous envoyer une tonne de renseignements sans importance. On va inonder votre maison de documents et de notes de service qui vous prendront toute une vie à lire. Cependant, il est extrêmement difficile de découvrir ce que vous voulez découvrir, la chose tout à fait essentielle.

M. Reid a un obstacle à franchir. Il a des preuves à donner à ceux qui craignent qu'à cause de ses liens passés avec l'industrie nucléaire, il ne puisse pas se démarquer, sortir de la culture dans laquelle il a été plongé et être un bon commissaire à l'information. J'espère qu'il va surprendre agréablement ces gens qui sont inquiets de sa nomination. J'espère que les craintes que beaucoup de mes collègues et moi-même avons au sujet de ses anciens liens se révéleront sans fondement.

Seul le temps nous le dira, mais il est important pour nous de faire part de ces réserves.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, permettez-moi de poser une question au député qui vient juste de parler.

Il a indiqué qu'il était inexact que le nom ait été proposé par lui et le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Puis quelques minutes plus tard, il a dit qu'ils l'avaient fait effectivement.

Si le député le veut bien, j'aimerais qu'il nous explique le processus. Je suis aussi extrêmement curieux de savoir à qui exactement il a proposé le nom en question.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, je ne crois pas avoir tenu les propos que me prête le député. Je n'ai pas dit que nous ne l'avions pas fait, puis que nous l'avions fait. J'ai dit que nous ne l'avions pas fait.

J'ai expliqué dans quel contexte j'ai avancé le nom de M. Reid dans une réunion de leaders à la Chambre; j'avais l'impression que le gouvernement songeait à lui et je voulais savoir si on serait disposé à le faire comparaître devant un comité. C'est le contexte dans lequel j'ai mentionné son nom.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans ce débat. Je suis également heureux d'intervenir après le député de Winnipeg—Transcona, comme cela se produit souvent au cours de nos travaux.

Il a présenté avec justesse et exactitude l'historique des événements qui ont mené à la nomination dont il est question à la Chambre aujourd'hui. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans les détails, si ce n'est d'ajouter que je pense que sa chronologie des faits est passablement exacte. Je tiens à ce que le compte rendu indique que le Parti progressiste conservateur a effectivement proposé le nom de M. Reid, mais de façon très informelle.

Il importe de noter qu'il ne s'agissait pas d'un processus coulé dans le béton. Il suffit de dire que le nom a été très bien reçu et reçu de façon très opportune par le gouvernement. Comme le député l'a mentionné, le moment de sa comparution devant le comité semble indiquer, ou à tout le moins laisse entrevoir, qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau nom, ou que la proposition n'a pas constitué le facteur décisif dans la décision du gouvernement à cet égard.

 

. 1845 + -

Quoi qu'il en soit, nous avons là une personne de toute évidence parfaitement qualifiée, qui s'acquittera à la perfection du rôle très important de commissaire à l'information. Le commissaire à l'information serait un fonctionnaire du Parlement, pas du gouvernement. C'est un point important. Le commissaire sera notre commissaire, celui des Canadiens, le commissaire de cet endroit, de cette Chambre, non pas celui du gouvernement. Aussi suis-je heureux d'avoir participé aux consultations et au processus qui ont mené à cette nomination.

Les députés qui ont pris la parole avant moi ont parlé d'une amélioration du processus de sélection du commissaire à l'information. Tout n'est pas parfait, il y a encore des problèmes, mais c'est une amélioration. Le député a parlé de petits pas dans la bonne direction. C'est peut-être un peu plus que ça. Au moins, nous avons maintenant un processus transparent qui permet aux membres d'un comité d'interroger directement le candidat proposé, car sa nomination n'est pas encore officielle.

Le nom de cette personne est venu à la suite d'une conversation que j'ai eue avec le leader du gouvernement à la Chambre qui, je présume, a dû avoir une conversation similaire avec le député de Winnipeg—Transcona. Le processus a été différent de ce qu'il était par le passé, lorsque le premier ministre, sur la suggestion d'un parti, je suppose, nommait le commissaire.

Je n'ai pas l'intention de faire un rappel chronologique des faits, mais il est nécessaire, aux fins de ce débat, de revoir un peu l'histoire de la Loi sur l'accès à l'information. C'est une histoire à laquelle le Parti conservateur est fier d'avoir participé.

La paternité de la Loi sur l'accès à l'information revient généralement au défunt Ged Baldwin, ancien député conservateur de la circonscription de Peace River. Monsieur le Président, vous vous souvenez peut-être de feu Ged Baldwin. Il a amorcé sa campagne en faveur de l'accès à l'information en 1969.

Le gouvernement progressiste conservateur dirigé par le très honorable Joe Clark a déposé le premier projet de loi émanant du gouvernement dans le dossier de l'accès à l'information en 1979. Monsieur le Président, comme je sais que vous êtes bien au fait des affaires parlementaires, vous vous en souviendrez certainement. Ce projet de loi, qui ne satisfaisait pas tous les désirs de M. Baldwin, a contribué de façon importante à la mise au point de la fonction de commissaire à l'information. Malgré l'accident, soit la malencontreuse chute du gouvernement de M. Clark, les gouvernements subséquents ont poursuivi les mesures entreprises. La loi actuelle a été parrainée et adoptée par l'honorable Francis Fox en 1982, et la loi a été promulguée en 1983.

Une lutte d'une durée de quatorze ans nous a menés là où nous en sommes aujourd'hui. C'est une lutte qui visait à mettre sur pied ce que M. Baldwin considérait comme une alliance profane du parlement, de la presse et du public contre la bureaucratie. M. Baldwin considérait la loi actuelle comme un point de départ. Il a beaucoup misé sur le commissaire du Parlement pour y apporter des améliorations.

Après 15 ans, il est généralement reconnu que la loi de 1983 a besoin d'être revue et améliorée. Elle a été rédigée avant la prolifération des ordinateurs et leur arrivée à la Chambre, la naissance du courrier électronique, utilisé tous les jours au Parlement, et le recours universel au bouton «supprimer» que l'on retrouve sur tous les ordinateurs. On doit donc composer maintenant avec des conditions nouvelles, de nouveaux paramètres physiques et des perfectionnements électroniques et technologiques que même M. Baldwin, dans sa grande clairvoyance et sa connaissance de l'usage de l'information, ne pouvait prévoir en ces temps révolus.

Ce sont là des questions importantes sur lesquelles nous devons nous pencher aujourd'hui. Je signale le nom de M. Reid, qui a été présenté à la Chambre aujourd'hui. Qui mieux qu'un ancien parlementaire peut faire avancer cette cause? Qui peut mieux comprendre les besoins du Parlement que quelqu'un qui a déjà été élu à la Chambre, qui comprend le système et le fonctionnement du Parlement et qui connaît les attentes et les pressions qu'on y retrouve?

 

. 1850 + -

C'est avec plaisir que je déclare catégoriquement que le Parti conservateur appuie la nomination et la confirmation de M. Reid à ce poste. L'honorable John Reid a prouvé qu'il était capable d'obtenir des résultats au Parlement. Cela lui sera très utile dans son nouveau rôle de commissaire et aussi dans la tâche qu'il entreprendra pour faire entrer le Parlement dans le XXIe siècle.

Il a la réputation d'être intègre et d'esprit indépendant et de ne pas avoir peur de défendre ses convictions quand il le faut. Il lui est arrivé de dire à des premiers ministres et à des chefs de parti qu'ils avaient tort, probablement aux dépens de sa carrière politique. Outre qu'il croit fermement à l'accès à l'information, il a des antécédents parlementaires distingués. Je pense que ce sera un atout pour le Parlement.

Tout aussi important est le fait que M. Reid est prêt à s'attaquer à la culture du secret qui imprègne parfois cet endroit et qui est une constante au sein de la fonction publique. C'est un défi formidable qui l'attend vu l'énormité de la bureaucratie. À certains moments, l'information est si volumineuse qu'il semble presque impossible de s'y retrouver.

Comme l'a signalé son prédécesseur dans ses rapports, M. Reid va devoir relever un défi énorme.

En guise de conclusion, j'aimerais saluer le commissaire sortant, M. John Grace, pour sa diligence. Il a bien servi les Canadiens, il s'est très bien acquitté des fonctions qui lui avaient été confiées, et nous lui en sommes reconnaissants. Le Parti progressiste conservateur et tous les Canadiens lui sont reconnaissants du bon travail qu'il a accompli en tant que commissaire à l'information. Nous sommes persuadés que ses efforts seront poursuivis avec une vigueur renouvelée par son successeur, M. Reid.

Enfin, j'aimerais ajouter les membres du caucus du Parti progressiste conservateur du Canada à la liste des orateurs qui ont offert à M. Reid leurs félicitations et leurs souhaits de réussite à l'occasion de cette nomination bien méritée. Nous espérons qu'il s'acquittera de ses nouvelles fonctions avec honneur et intégrité.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Je suis heureux de pouvoir faire quelques observations.

L'une des raisons qui ont fait que le nom de M. Reid a franchi les étapes aussi rapidement, et je ne dis pas cela parce que j'ai des renseignements privilégiés, c'est qu'il était évident pour beaucoup d'entre nous, parmi les ministériels, que c'était un très bon candidat. Ce n'est pas surprenant que, quand son nom a été mentionné, au cours d'une simple conversation, il ait immédiatement attiré l'attention des dirigeants de ce côté-ci.

Parlant de M. Reid et du rôle qu'il devra assumer, je précise qu'il ne servira pas seulement d'intermédiaire entre les médias et le public, d'une part, et les fonctionnaires, d'autre part. Nous devons nous rendre compte qu'il arrive que le gouvernement soit obligé de garder des secrets.

Ce que nous attendons de ce nouveau commissaire à l'information, c'est qu'il gagne la confiance des deux parties. Il n'aura pas simplement pour tâche d'agir au nom des médias ou des députés, des simples députés comme moi ou comme d'autres dans l'opposition, il devra aussi gagner la confiance des fonctionnaires qui sont chargés de veiller aux intérêts de la nation. Ce n'est pas une question de défense ou d'affrontement. Ce que nous voulons vraiment, c'est une personne dans cette position qui peut gagner la confiance des deux parties et prendre les décisions nécessaires qui sont, tout bien pesé, dans l'intérêt national. Nous avons en M. Reid une personne digne de cette mission.

Je veux aussi dire un mot de M. Grace. M. Grace s'est admirablement bien acquitté de sa tâche de commissaire à l'information. Au cours des dernières années, ses rapports jetaient un coup d'oeil général sur le fonctionnement du gouvernement et signalaient les éléments qui nécessitaient plus d'ouverture. M. Grace quitte son poste au moment où nous commençons une nouvelle ère, en matière d'accès à l'information.

Comme mon collègue d'en face, j'espère qu'une nouvelle loi ou une modification à la loi sera bientôt présentée à la Chambre.

 

. 1855 + -

J'espère que mon collègue appuiera cette loi. J'aimerais qu'il me dise si lui ou son parti sont disposés à appuyer certaines des initiatives parlementaires qui sont actuellement au Feuilleton, sur les questions d'accès à l'information.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, j'apprécie ces propos éloquents et pleins de bon sens. Ils témoignent, selon moi, de l'impartialité avec laquelle ce processus s'est déroulé.

M. Reid possède assurément plusieurs des qualités que l'on recherche au moment de combler ce poste important.

Il est question de l'appui du Parti progressiste conservateur à des projets de loi et à des mesures législatives d'initiative parlementaire dont la Chambre est actuellement saisie. Si je ne connais pas le détail d'une mesure législative donnée, je ne suis pas disposé à souscrire automatiquement à un texte quelconque qu'il ne m'aurait même pas été donné de lire. Suivant la nature des projets de loi, nous y affectons tel ou tel critique.

Toute mesure législative touchant le commissaire à l'information et visant à accroître la transparence et à améliorer les règles de divulgation, en vue de rétablir quelque peu la confiance dans le gouvernement et la bureaucratie qui règne ici, obtiendra à coup sûr l'appui des députés du Parti progressiste conservateur.

Les délibérations de ces derniers jours nous auront montré que le moment est venu de réfléchir quelque peu au rôle du gouvernement certes, mais également à celui des simples députés et de l'opposition et aux interactions qui ont lieu dans cette enceinte. Il se peut fort bien que le commissaire à l'information soit appelé sous peu à participer à ce processus, puisque des interactions et des échanges de renseignements ont lieu entre les députés dans leur ensemble et d'autres services avec lesquels nous travaillons ici même.

Je remercie le député de ses observations. Je remercie la présidence de son indulgence.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, dans son discours, le député a parlé de la nature impartiale du poste de commissaire à l'information. À titre d'ancien ombudsman et de personne chargée d'assurer l'accès à l'information, je conviendrai sûrement que l'impartialité est l'un des principaux éléments du poste en question.

Le commissaire à l'information doit non seulement être impartial, il doit le paraître. C'est très important. Je reprends les préoccupations exprimées par notre leader à la Chambre concernant les antécédents de la personne que l'on veut retenir. Il est indispensable que cette personne soit en mesure de montrer clairement son impartialité en s'acquittant de ses fonctions.

En tant qu'ancien collègue de M. John Grace, je tiens aussi à lui dire mon admiration pour le travail qu'il a accompli en tant que commissaire à l'information.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je remercie mon collègue, le député néo-démocrate de la Nouvelle-Écosse. Je le félicite pour le travail qu'il a fait avant de venir au Parlement et je sais qu'il va poursuivre ses vaillants efforts pour ses électeurs.

Quant au commissaire à l'information, il a des connaissances profondes qui pourraient aider M. Reid à un moment donné. Je suis certain que, s'il ne connaît pas encore M. Reid, il fera sa connaissance très prochainement.

Encore une fois, je pense que les commentaires apolitiques que nous venons d'entendre au cours du débat et tout au long du processus de sélection de M. Reid marque un très bon début, un début très rafraîchissant. Nous avons tout à gagner en allant au-delà de la ligne de parti, quand il est question de nominations de ce genre.

Je suis certain que le député conviendra que nous sommes encouragés et que nous espérons que M. Reid remplira très bien son rôle. Malgré son ancienne allégeance au parti qui est au gouvernement, je doute que cela influence les décisions qu'il prendra. Il a prouvé qu'il était un homme intègre qui comprend l'importance de ne pas se sentir lié au gouvernement quand il est question de diffuser l'information.

 

. 1900 + -

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je ne m'attendais pas à prendre la parole dans le débat d'aujourd'hui étant donné que le leader de mon parti à la Chambre a assez bien résumé notre position dans ce dossier. Cependant, parce que je me suis intéressé, depuis mon arrivée à la Chambre en 1993, aux questions concernant l'accès à l'information et l'intégrité du gouvernement, j'ai décidé de dire quelques mots. J'ai été porte-parole de mon parti en matière d'éthique pendant quelque temps. J'ai participé, comme vous, monsieur le Président, aux travaux du comité mixte qui devait examiner un code de conduite pour les députés et les sénateurs.

J'ai tellement réfléchi à cette question que j'ai pensé vous faire part du fruit de mes réflexions. En temps normal, je ne l'aurais peut-être pas fait, mais à cause de l'extraordinaire motion que tous les libéraux d'en face ont adoptée, j'ai encore neuf heures de travail devant moi aujourd'hui, étant donné que la Chambre va siéger jusqu'à quatre heures du matin. J'ai donc pensé que je pourrais utiliser ce temps à bon escient en vous faisant part de certaines de mes idées.

Je voudrais tout d'abord parler un peu de la façon de procéder, parce que, à mon avis, c'est ce qui laisse le plus à désirer dans la nomination d'un nouveau Commissaire à l'information et, d'une manière générale, dans les nominations à des postes comme celui-là. Quelqu'un a dit, à juste titre, qu'il faut déployer le filet le plus largement possible afin de retenir les meilleures candidatures.

La même chose vaut pour le contrat qui vient récemment d'être accordé à Bombardier, sans appel d'offres. Les ministres nous disent que c'était une excellente affaire pour les contribuables canadiens, mais nous ne pouvons pas avoir cette certitude étant donné que les autres n'ont pas été invités à soumissionner. Même si l'argument exposé est valable dans une certaine mesure, il ne l'est pas entièrement, car le processus a été très exclusif.

J'ai la même impression par rapport à la nomination du Commissaire à l'information. Le nom d'un candidat a été proposé et il a été retiré peu après, parce qu'un examen superficiel a permis de découvrir que certaines conditions n'étaient pas respectées.

Voilà la démarche qui a été suivie. Le nom d'un candidat a été proposé, et je pense que le gouvernement s'attendait à pouvoir le faire accepter en douce, en présentant une motion ou un rapport qui aurait été approuvé et le tour aurait été joué. Certains faits ont toutefois été dévoilés et, dans un vent de controverse, le nom du candidat a été retiré.

Un autre nom a alors été proposé, à la suite, il faut bien le reconnaître, d'une démarche tout à fait différente. Il semble que le candidat en question rallie tous les partis. Je sais que le leader du Parti réformiste à la Chambre a donné une très bonne note à M. Reid lors de son entrevue.

Mon expérience en gestion du personnel, notamment les entrevues et l'embauche de candidats, m'a permis de constater que, même après avoir fait des entrevues poussées avec plusieurs candidats, après avoir vérifié leurs références, évalué leur expérience de travail, et ainsi de suite, il arrive que l'on ne prenne pas la bonne décision. Nous prenons la bonne décision dans la plupart des cas, mais parfois nous pourrions faire mieux. Le même principe s'applique dans ce cas-ci. Nous aurions dû avoir plus de candidats, faire passer l'entrevue à deux, trois ou quatre personnes, puis choisir la plus qualifiée.

C'est tout ce que je veux dire au sujet du processus. Je veux lancer un défi personnel à M. Reid, puisqu'un vote sera pris très bientôt à la Chambre et que l'intéressé sera confirmé dans ses fonctions.

 

. 1905 + -

Je veux lui lancer un défi personnel. C'est peut-être une façon curieuse de faire les choses, étant donné qu'il n'est pas ici, mais je suis sûr qu'il va nous lire. Ce que je veux dire est directement lié à ses fonctions et à son travail. Peut-être devrions-nous nous assurer qu'il obtient une copie du hansard.

Premièrement, le grand défi consiste à être juste. Je sais que M. Reid va s'efforcer de l'être. Toutefois, celui-ci fera l'objet de pressions énormes parce qu'il devra s'occuper de situations conflictuelles. Le commissaire à l'information n'intervient pas lorsqu'un député de l'opposition, un député de l'arrière-ban ou un journaliste présente une demande d'accès à l'information. Si la demande est traitée en temps opportun, le commissaire n'intervient pas, parce que le processus a fonctionné. La plupart du temps, il intervient lorsqu'il y a un conflit, par exemple, lorsqu'un représentant des médias, une personne mentionnée ci-dessus ou un citoyen qui veut savoir ce qui se passe dans un ministère présente une demande et, pour une raison ou une autre, se fait envoyer de Ponce à Pilate. Le commissaire peut aussi intervenir lorsque des tactiques dilatoires sont utilisées, qu'une trop grande partie de l'information a été supprimée, ou que des lettres sont envoyées pour dire que l'information demandée n'est pas disponible ou n'est pas conservée. C'est dans de tels cas que le commissaire intervient. Il agit alors comme arbitre. Ses fonctions consistent, en un sens, à jouer le rôle d'ombudsman pour la vérité, parce que c'est la vérité que l'on veut connaître. Les Canadiens ont le droit de savoir. C'est une question d'éthique pour le gouvernement, les entreprises et les particuliers. Il s'agit de faire connaître la vérité.

Je le mets personnellement au défi, au nom de mon parti et, je l'espère, au nom de tous les partis au Parlement, de faire preuve d'une équité irréprochable lorsqu'il examinera ces situations à la lumière des principes et des lois applicables. La personne a-t-elle le droit d'accéder à cette information? Dans l'affirmative, il ordonnera clairement et rapidement qu'elle lui soit communiquée. Si l'information n'est pas disponible, il fournira des explications claire et justifiables, afin de rendre sa charge de plus en plus digne de confiance, pour que les Canadiens fassent de plus en plus confiance à la manière dont le gouvernement fonctionne.

Je mets également au défi le nouveau commissaire qui sera nommé prochainement par la Chambre d'éviter la moindre apparence de favoritisme à l'endroit du Parti libéral. Je dis cela parce que le nouveau commissaire est un libéral bien connu. Il a déjà été député et ministre libéral. Il est connu comme un libéral. À moins que les libéraux ne quittent la Chambre et qu'il n'y ait un changement de gouvernement, il est à prévoir que nous continuerons d'avoir un gouvernement libéral pour les deux ou trois prochaines années. Puis que cet homme porte une étiquette libérale, il devra faire preuve de la plus grande prudence. Je prédis que, d'ici quelques années, il sera accusé de favoritisme à l'endroit de ses amis libéraux.

Je vois un député libéral secouer la tête et je suis tenté de lui donner raison. Je suis tenté de croire que cet homme saura faire preuve d'équité. Je suis prêt à lui donner tout le bénéfice du doute et à lui accorder sa chance. Le commissaire devra cependant faire preuve d'une grande prudence car il est connu comme étant un libéral.

Il nous a donné l'assurance qu'il n'entretient aucune amitié au sein du Parti libéral et qu'il fera preuve d'équité. Il nous l'a dit dans l'entrevue. J'étais présent à l'entrevue du comité. J'ai trouvé rafraîchissant d'entendre cette personne affirmer sans hésiter qu'il saurait faire preuve d'équité.

 

. 1910 + -

Je tiens à le mettre en garde au sujet des accusations dont il risque de faire l'objet et de la nécessité d'être doublement certain de ne pas favoriser le gouvernement libéral sinon, comme c'est déjà le cas du conseiller en éthique, nous le considérerons comme un membre de l'équipe chargée de limiter les dégâts politiques.

J'ai ici quelques exemples précis de cas où des renseignements demandés en vertu de l'accès à l'information ont été refusés et auraient dû être communiqués. Nous n'avons pas réussi à les obtenir, bien que nous ayons utilisé tous les moyens d'accès possibles. Je ne vais pas exposer ce cas de nouveau car je l'ai déjà fait durant la dernière législature. Je me contenterai de rappeler que nous avons demandé des renseignements, mais que nous n'avons obtenu que des feuilles blanches estampillées. Je ne me souviens pas du numéro qui avait été estampillé, mais c'était le numéro d'un article de la loi en vertu duquel on refusait de divulguer cette information.

L'information n'a pas été divulguée parce que c'était un renseignement personnel. L'information en cause n'aurait pas dû figurer dans le document parce que le lien avec l'intéressé n'aurait pas dû être porté à la connaissance du gouvernement.

Il y avait un conflit. Nous avons argué, avec raison à mon avis, que ce renseignement, même s'il était de nature personnelle, aurait dû nous être communiqué puisqu'il figurait dans un document public. Notre argument était qu'il n'aurait pas dû figurer dans ce document pour commencer.

Comment allons-nous obtenir des réponses sur ce genre de chose? J'ai dit à l'époque, et je le redis aujourd'hui, qu'en pareil cas, il valait mieux dévoiler la vérité. Je me souviens d'avoir été interviewé par les médias à ce sujet. J'ai dit que la seule façon de mettre fin à la controverse consistait à dévoiler simplement les faits. On aurait dû dire «Voici les faits. Que voulez-vous savoir d'autre?» Voilà comment il faudrait procéder avec les bureaux gouvernementaux et ministériels.

L'accès à l'information doit être clair. On ne doit pas tenter d'embrouiller ceux qui veulent avoir des renseignements. On ne doit pas refuser de divulguer des renseignements. On ne doit pas tenter de tromper les gens ni de les envoyer sur une fausse piste.

J'ai fait deux choses durant mon discours. Je suppose que mon expérience à titre d'enseignant et de moniteur pendant de nombreuses années ressort. D'abord dire ce qui doit être dit, puis récapituler. J'ai fait deux choses. J'ai parlé du processus. J'espère sincèrement que le gouvernement entendra le message et, pour des fonctions semblables, qu'il veillera à ce que le processus soit transparent. Tous devraient pouvoir postuler. Une courte liste devrait être dressée. Le meilleur candidat, la personne la mieux qualifiée, pourrait ensuite être choisi.

Le deuxième point que j'ai soulevé, c'est le défi personnel quant à la vérité et à la transparence.

Je voudrais que le commissaire à l'information acquière sa propre intégrité, à l'instar du vérificateur général et du conseiller en matière d'éthique, qui semblent vraiment indépendants des ministres, du premier ministre notamment, afin que la population du pays puisse faire vraiment confiance à cent pour cent au gouvernement. C'est une chose que les libéraux ont promise au cours des deux dernières élections. C'est une promesse qu'ils tardent à remplir. Nous aimerions qu'ils le fassent plus rapidement.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie ce qu'a dit le député de Elk Island, car je me rappelle l'intérêt qu'il a manifesté au cours de la dernière législature pour la Loi sur l'accès à l'information et les initiatives qu'il a proposées.

Il aborde un point sur lequel on ne saurait trop insister à la Chambre: pour que les députés d'opposition, les députés d'arrière-ban, les députés en général, qu'ils siègent de ce côté-ci ou en face, s'acquittent bien de leur travail, qui est d'interroger le gouvernement, de poser des questions sur les activités du gouvernement, il leur faut un accès légitime aux documents du gouvernement.

 

. 1915 + -

Il ne peut pas y avoir de reddition de comptes sans transparence. Nous nous accordons tous à dire de ce côté-ci de la Chambre que nous sommes sur le point de prendre la bonne décision en proposant ce candidat pour devenir notre nouveau commissaire à l'information.

Je sais que le député de Elk Island en conviendra avec moi, la prochaine mesure à prendre consiste sûrement à revoir la loi actuelle sur l'accès à l'information, car elle est devenue vieille. Elle est devenue désuète. Il existe trop de moyens de la contourner.

Le député de Elk Island a évoqué quelques une de ses expériences touchant la Loi sur l'accès à l'information; je lui affirme que les problèmes qu'il a connus à cet égard n'avaient rien à voir avec le commissaire actuel ni avec son prédécesseur. Ils tenaient aux lacunes de la loi. En interprétant la loi, les fonctionnaires l'ont interprétée honnêtement et correctement, nous le présumons. Néanmoins, le député d'en face n'a pas obtenu l'information dont il avait besoin pour poser à la Chambre des questions qui, je présume, intéressaient tous les Canadiens.

Le député est-il d'accord pour dire qu'il est dans l'intérêt de tous les députés à la Chambre, qu'ils siègent sur les banquettes ministérielles, les premières banquettes, les dernières banquettes et où que ce soit du côté de l'opposition, de décider maintenant de revoir, de corriger et de renouveler la Loi sur l'accès à l'information?

M. Ken Epp: Monsieur le Président, comme je l'ai dit, j'ai depuis de nombreuses années l'habitude de parler succinctement, ayant été instructeur et ayant eu à communiquer de façon claire, je l'espère. J'ai donc maintenant beaucoup de mal, dans le rôle de politicien, à essayer de répondre longuement à la réponse que le député m'a posée. La réponse est oui, je suis d'accord.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

[Français]

LOI SUR L'ÉDUCATION DES MI'KMAQ

 

L'hon. Lucienne Robillard (au nom de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose: Que le projet de loi C-30, Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Bernard Patry (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je me présente aujourd'hui à la Chambre pour parler du projet de loi C-30, Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation, à l'étape de la troisième et dernière lecture.

Il s'agit véritablement d'une mesure législative historique. C'est en effet la première fois depuis la Confédération que la responsabilité de l'éducation est transférée du gouvernement fédéral aux mains des Premières Nations comme il se doit.

Je tiens tout d'abord à remercier mes collègues députés de l'appui qu'ils ont accordé au projet de loi C-30 lors de la deuxième lecture. L'éducation représente peut-être l'investissement le plus important que puisse faire une société, et les députés de tous les partis ont reconnu la nécessité pour les jeunes des Premières Nations d'acquérir les connaissances et les habiletés requises dans la nouvelle économie.

Au même titre, nous avons convenu que les compétences en matière d'éducation devraient être exercées sur le plan local par les parents et les collectivités dont les enfants poursuivent des études.

 

. 1920 + -

Je veux aussi rendre hommage au peuple des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse pour avoir pris cette initiative sans précédent qui pourrait ouvrir la voie à de nombreuses ententes semblables avec d'autres Premières Nations de tous les coins du Canada.

Les collectivités mi'kmaq participantes ont fait preuve de détermination, de patience et d'engagement dans la négociation des modalités de transfert. Un seul but a guidé leurs efforts: assurer un meilleur avenir à leurs enfants.

Je ne veux pas omettre de remercier le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord pour avoir réalisé une étude approfondie du projet de loi C-30. De nombreux témoins se sont présentés devant le Comité et la grande majorité d'entre eux se sont prononcés en faveur de la loi proposée et ont demandé son adoption sans délai. À la suite d'un débat réfléchi, le Comité a retourné le projet de loi C-30 à la Chambre.

L'adoption du projet de loi C-30 est essentielle à la mise en oeuvre d'un accord définitif sur le transfert de l'éducation signé par le Canada et neuf Premières Nations mi'kmaq, en février 1997. J'aimerais faire ressortir brièvement les grandes lignes de ce projet de loi et dire quelques mots de leur importance pour les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse et les autochtones d'ailleurs au Canada.

[Traduction]

J'ai trouvé très perspicaces les observations de l'un des témoins qui a comparu devant le comité permanent et qui a expliqué l'impact de la mesure législative proposée. Je veux parler du chef Lindsay Marshall qui est venu témoigner au nom de la bande mi'kmaq qui a décidé d'adhérer à l'accord de transfert.

L'exposé du chef Marshall m'a surtout frappé à cause d'une simple déclaration:

    Pendant de nombreuses années, tout le monde sauf les peuples autochtones eux-mêmes ont pris les décisions concernant l'éducation autochtone.

Voilà qui résume très bien ce que nous voulons changer au moyen du projet de loi C-30. Nous préparons le terrain pour que les Mi'kmaq et les autres peuples autochtones puissent exercer de vrais pouvoirs à l'égard de l'éducation et non pas seulement un contrôle administratif.

Le projet de loi C-30 amorcera une nouvelle tendance qui va dans le sens contraire de celle que l'on voit depuis toujours, où les premières nations sont privées de la responsabilité au niveau local. En appuyant cette mesure législative, nous pouvons reconnaître la capacité des peuples autochtones de se prendre en main.

Au moyen du projet de loi C-30, le gouvernement déléguera aux neuf communautés mi'kmaq participantes les pouvoirs en matière d'éducation élémentaire et secondaire dans les réserves. Ces communautés prendront également en charge le programme d'aide au financement des études postsecondaires d'étudiants admissibles vivant dans les réserves et hors des réserves. Aux termes de l'accord final, les responsables mi'kmaq doivent également offrir aux non-membres vivant dans les réserves une éducation équivalente. Le niveau et la qualité de l'éducation doivent être tels que les étudiants pourront passer sans difficulté à n'importe quel autre système d'éducation au Canada.

Pour exercer ces pouvoirs, chaque première nation mi'kmaq établira sa propre autorité scolaire dotée d'une constitution où sont énoncées ses responsabilités, ses attributions et la structure hiérarchique lui permettant d'adopter des lois en se donnant un processus d'appel transparent.

Le projet de loi C-30 prévoit également l'établissement d'une nouvelle corporation mi'kmaq qui fournira des services communs aux neuf premières nations par exemple pour l'élaboration d'un programme d'études, pour les initiatives en matière de culture et de langue et pour l'éducation spéciale.

[Français]

Cette initiative de transfert répond à une recommandation de la Commission royale sur les peuples autochtones à l'effet d'accorder aux Premières Nations une plus grande maîtrise sur l'éducation. Elle renforcera les collectivités participantes, conformément aux objectifs établis par le gouvernement dans «Rassembler nos forces», notre réponse au rapport de la Commission royale.

Avec la délégation de cette compétence, les Premières Nations participantes pourront concevoir le programme pédagogique de leurs enfants. La prestation des cours et des programmes sera conforme aux coutumes et aux traditions des Mi'kmaq et, dans certains cas, elle se fera même dans la langue mi'kmaq.

Ainsi, ces Premières Nations pourront préserver leur histoire tout en préparant les étudiants pour l'avenir. Il en résultera, sans aucun doute, une éducation de meilleure qualité pour les enfants et les jeunes Mi'kmaq.

J'aimerais rappeler à mes collègues députés les consultations publiques exhaustives qui ont eu lieu à chaque étape du processus de la négociation de l'accord définitif sur le transfert de l'éducation. Ce sont d'ailleurs les consultations avec les collectivités qui ont inspiré cette initiative de transfert.

 

. 1925 + -

Au cours des cinq années qu'a nécessitées la conclusion de l'accord définitif, il y a eu un échange bilatéral constant d'informations avec les Mi'kmaq. On a tenu littéralement des douzaines de rencontres publiques dans les treize collectivités mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse. Des présentations ont été faites aux écoles des Premières Nations, au milieu universitaire, à l'Association des commissions scolaires de la Nouvelle-Écosse et aux représentants provinciaux de l'Éducation.

Chez les Mi'kmaq, des bulletins d'information ont été distribués dans les foyers et des kiosques de renseignements ont été érigés lors des pow-wows annuels et d'autres événements. Le journal autochtone de la Nouvelle-Écosse, The Micmac-Maliseet Nations News a publié de nombreux articles sur l'initiative de transfert de l'éducation.

[Traduction]

À la fin des consultations, le processus de ratification communautaire a eu pour résultat que neuf collectivités mi'kmaq ont décidé de procéder au transfert dès maintenant. N'importe laquelle de ces premières nations peut se retirer de l'entente finale à l'avenir. Les quatre autres nations peuvent se placer sous le coup de la loi en faisant ajouter leur nom, sous réserve d'un processus semblable de ratification, à l'annexe du projet de loi C-30.

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a été consulté à fond sur le programme d'éducation des Mi'kmaq. Cela remonte au début de 1994. Le gouvernement provincial a confirmé qu'il appuyait le transfert par la signature d'un accord tripartite avec le Canada et les chefs mi'kmaq en décembre 1996. Les autorités provinciales ont aussi été consultées pendant la rédaction du projet de loi C-30, tout comme les chefs mi'kmaq. Il s'ensuit que la mesure à l'étude ici répond aux besoins et aux attentes de tous les intéressés.

Le gouvernement a reçu beaucoup de lettres favorables au projet de loi C-30. Les présidents des universités St. Francis Xavier, Saint Mary's, Mount Saint Vincent et King's College ont tous appuyé le transfert, tout comme le Collège d'agriculture de la Nouvelle-Écosse, la Nova Scotia School Boards Association et l'évêque d'Antigonish, le très révérend Colin Campbell.

L'Assemblée des Premières Nations a écrit au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pour exprimer son appui à ce transfert historique de compétences. Elle voit dans le projet de loi C-30 une étape importante dans le rétablissement de l'autonomie gouvernementale des Mi'kmaq. Le premier ministre MacLellan de la Nouvelle-Écosse a récemment adressé une lettre de soutien récemment. Le premier ministre provincial a réitéré l'engagement de son gouvernement de présenter le plus tôt possible un projet de loi provincial qui soit le pendant du projet de loi C-30.

Les appuis les plus importants sont venus de témoins représentant les Mi'kmaq qui ont comparu aux audiences du comité permanent sur le projet de loi C-30. Le vice-chef de l'Assemblée des premières nations, Rick Simon, a fait remarquer que l'éducation ouvrait bien des portes qui étaient fermées depuis trop longtemps pour les membres des premières nations:

    Ce projet de loi vise à modifier de façon importante le cours de l'éducation... le temps est maintenant au changement.

La directrice adjointe de la division des services mi'kmaq du ministère provincial de l'Éducation, soeur Dorothy Moore, avait ceci à dire:

    En cette aube du XXIe siècle, nous, Mi'kmaq, nous rendons compte plus que jamais qu'il est prioritaire que nos enfants reçoivent un enseignement de qualité. Pour cela, il faut que les gens aient la maîtrise de leur éducation.

La présidente de la Nova Scotia School Boards Association a aussi comparu devant le comité permanent pour appuyer le projet de loi C-30. Marg Forbes a dit au comité:

    Ce devrait être un exercice très positif pour tout le monde que de permettre aux Mi'kmaq d'être responsables du processus d'éducation et d'y participer activement.

Les chefs des neuf communautés mi'kmaq participantes ont adopté une résolution demandant au gouvernement d'aller de l'avant avec ce projet de loi le plus rapidement possible. Il faut que le projet de loi C-30 soit adopté rapidement pour qu'on puisse commencer à mettre en oeuvre les conventions finales avant l'année scolaire 1998-1999.

C'est avec cela à l'esprit que je demanderai aux députés de confirmer leur appui pour cette initiative historique de transfert en adoptant le projet de loi C-30 afin qu'il soit renvoyé rapidement à l'autre endroit.

 

. 1930 + -

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-30 qui concerne les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation.

Je sais que probablement beaucoup de Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse écoutent actuellement nos discours, parce que pour eux, c'est un pas extrêmement important dans la bonne direction, dans la direction de l'autodétermination et de la prise en main de leur éducation. D'ailleurs, j'en ferai rapport plus tard. Il y a effectivement des autochtones qui nous ont dit que l'éducation était définitivement un pas dans le sens de l'autodétermination, et je les salue bien fraternellement.

La première lecture de ce projet de loi a eu lieu le 6 février. Il vise à transférer la compétence législative et administrative en matière d'éducation. Cela veut donc dire que le Conseil d'éducation des Mi'kmaq, qui sera composé de plusieurs chefs des différentes nations signataires, pourra définitivement prendre en main l'éducation. Ce ne sont plus des choses qui seront décidées dans les bureaux des fonctionnaires d'Ottawa. Les gens, dans leurs communautés respectives, pourront dire: «Voici de quelle façon nous prenons l'éducation en main. Voici de quelle façon on entend teinter l'éducation de notre culture. Voici de quelle façon on entend enrichir l'éducation par la langue mi'kmaq.»

C'est donc quelque chose d'extrêmement intéressant pour eux et neuf des treize nations mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse ont déjà signé l'entente.

D'habitude, selon le projet de loi qui est à l'étude, je dis souvent quelques mots dans une langue autochtone, mais aujourd'hui, j'ai tenté de ressortir les récits mi'kmaq, c'est-à-dire la trame de fond des récits mi'kmaq. Il m'apparaît toujours important de commencer ainsi pour qu'on puisse, en toile de fond, voir la façon dont réagissent les Mi'kmaq et comment ils perçoivent non seulement l'éducation, mais la vie dans son entité.

Pour ceux qui l'ignorent, le mot «mi'kmaq» a une certaine signification. Que signifie-t-il? Cela veut dire «peuple de l'aurore» ou «peuple qui est le plus à l'est». On comprendra que les premiers, au Canada, qui voient le soleil, le matin, ce sont les Mi'kmaq, les gens de l'est. Il y a donc une importance extrême accordée à la notion du soleil.

Pour eux, le soleil est le lien entre le Créateur, l'Homme et l'environnement. Cela explique aussi tout le concept de l'origine de l'homme et de l'origine de la terre. C'est une image souvent très vivide, très vivante du soleil, duquel s'échappent des étincelles. Les étincelles donnent forme à la vie.

La ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration semble très intéressée par mes propos, et cela me fait grandement plaisir.

Alors, je continue. Cette étincelle est divisée en trois parties. Il y a une forme d'étincelle qui disparaît et qui se décompose après la mort et une forme qui transcende le temps, qui se retrouve dans les terres et les âmes des hommes. Elle s'appelle mntu, et c'est l'aspect de l'étincelle le plus important pour les Mi'kmaq. Finalement, il y a l'étincelle qui agite la vie, c'est-à-dire celle qu'on appelle le bon génie et qui aide d'ailleurs durant le passage sur la terre. Tout cela, dans une conception que tout ce qui est sur la terre est vivant.

Nous avons l'impression que les animaux, les plantes, les hommes sont vivants, mais pour eux, selon leurs croyances, cela va au-delà. Les hommes et les plantes sont effectivement vivants, mais ils prêtent aussi vie aux cours d'eau et aux animaux. Pour eux, tout est doté d'intelligence. C'est pour cela qu'on décourage beaucoup la négligence du côté des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse, tout comme chez beaucoup de nations autochtones. La négligence et le gaspillage ne sont pas des mesures courantes chez les autochtones, justement à cause du grand respect qui est accordé à toutes ces étincelles de vie qui composent l'ensemble de leur environnement. Ils croient que la forme peut se désintégrer, mais le mntu, dont je parlais plus tôt, demeure toujours vivant.

 

. 1935 + -

Pour eux, un arbre ne meurt pas; il va repousser à l'endroit où il est tombé. Pour eux, un animal ne meurt pas; son sang va pénétrer la terre et conduire, éventuellement, à un mécanisme de réincarnation de l'animal.

Il m'apparaissait important, comme entrée en matière, d'expliquer un peu la philosophie mi'kmaq. Cette législation s'inscrit parfaitement dans la philosophie que j'ai tenté de décrire.

Donc, le fédéral transfère sa compétence en matière d'éducation aux neuf bandes mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse. Je vais les nommer, ce sont les Premières Nations de Eskasoni, de Membertou, de Chapel Island, de Whycocomagh, des Wagmatcook au Cap-Breton, de Shubenacadie, d'Annapolis Valley, d'Acadia et de Pictou Landing.

La convention qui a amené ce projet de loi a été signée le 14 février 1997 avec les neuf bandes mi'kmaq. Le projet de loi C-30 met en oeuvre la plupart des composantes de cette entente.

L'entente est subdivisée en plusieurs parties. Il y a une partie qui touche les pouvoirs en matière d'éducation. Ce que je disais tantôt est toujours vrai. Tout ce qui était décidé à Ottawa pour les communautés mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse sera désormais décidé par eux. Ce qui implique des transferts aux niveaux législatif, administratif et financier.

L'aspect financier apporte une certaine originalité au projet de loi qui est devant nous. On leur en donne non seulement l'autorité complète, mais il y a un plan quinquennal, assorti d'un montant d'environ 150 millions de dollars, que nous aurions souhaité plus élevé pour inclure les membres qui ne résident pas sur les réserves. Je vais revenir là-dessus un peu plus tard.

Je veux féliciter les neuf groupes qui ont réussi, non seulement à signer l'entente, mais qui seront associés dans un conseil d'éducation où les chefs seront représentés. Ce qu'il y a d'original aussi dans le projet de loi C-30, c'est qu'il y a une option par laquelle chacune des quatre communautés qui n'est pas signataire peut adhérer n'importe quand à l'entente. Si le gouvernement arrive à s'entendre avec une de ces quatre nations, elle peut faire partie de l'accord et être sujette au projet de loi à l'étude présentement.

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse—parce que c'est une entente tripartite, l'éducation étant normalement de compétence provinciale—devra légiférer. Je sais que le Mi'kmaq Education Act est actuellement en préparation dans cette province et devrait venir donner l'élan final pour que ces gens-là prennent leur éducation en main.

Je disais tantôt que c'est un pas vers l'autodétermination des autochtones. L'éducation, on le sait, permet à tout citoyen de bien cheminer dans la vie. C'est vraiment une porte d'entrée vers la libération.

Pour les autochtones, l'éducation leur permet d'ouvrir des portes qui leur étaient fermées jusqu'à maintenant. Le chef de Chapel Island, que je veux saluer pour ses très grands efforts, M. Lindsay Marshall a dit, lors de sa comparution au Comité permanent, le 26 mai dernier, quelque chose de fort intéressant. Je le cite: «La compétence en matière d'éducation est un droit fondamental dont jouissent tous les Canadiens, mais c'est un droit que notre nation mi'kmaq n'a plus exercé depuis l'époque de la colonisation, autrement dit, depuis 500 ans.»

Phil Fontaine disait qu'il était entièrement d'accord avec le fait que l'éducation est un moyen d'accès à l'autodétermination. Forcément, les générations autochtones grandissent au sein d'un système d'éducation. Cela fait en sorte qu'on leur inculque des valeurs, une culture et une langue qui ne sont pas les leurs. Ces gens ne sont pas et ne pourront jamais être sur le chemin de l'autodétermination.

Avec la nouvelle réalité qui se présente à eux, l'éducation pourra éventuellement les amener vers une plus grande autodétermination ainsi qu'à une préservation de leur culture, de leur langue et de leur patrimoine. Ce sont des choses extrêmement importantes pour la culture autochtone.

 

. 1940 + -

Quand ces jeunes fréquentent des écoles provinciales, il leur est difficile de parler mi'kmaq ou de suivre un cours en langue mi'kmaq, parce qu'ils sont jumelés à d'autres enfants non autochtones. Maintenant, ils pourront donner leur propre cours de langue, enseigner leur propre culture mi'kmaq, enseigner le type de récits que je viens de mentionner, à savoir d'où viennent les mi'kmaq, ce qu'ils ont fait, où ils en sont rendus, à quelle croisée des chemins ils se trouvent aujourd'hui.

Il faut se rappeler que, historiquement, on a tout fait pour nier la culture autochtone mi'kmaq, et pas seulement celle-là, mais l'ensemble des cultures autochtones, leur langue, leur culture, leur patrimoine, leur droit de décider eux-mêmes de leur vie. Tout cela leur avait été nié. Les écoles résidentielles sont une tache au dossier du Canada, et c'est le meilleur exemple de négation de la culture autochtone, de la langue autochtone, du patrimoine autochtone.

Là comme dans d'autres parties du Canada, on arrachait systématiquement les enfants à leur famille et on les plaçait à l'école résidentielle, tout cela, dans un esprit d'assimilation. L'objectif final était de faire en sorte de tuer les cultures autochtones, les langues autochtones, que ces gens deviennent assimilés et intégrés à la société canadienne.

Beaucoup d'autochtones ont souligné, dans leurs témoignages en comité, que non seulement cela a engendré chez eux un sentiment de perte de confiance, mais également un sentiment de honte à l'égard de leur propre culture.

Il faut le dire, le système résidentiel a été mis sur pied dans le but de briser la culture autochtone, dans le but de les assimiler. Finalement, on a réussi à broyer une génération complète d'autochtones. Grâce à Dieu, au Créateur comme disent les autochtones, on est en train de renverser cette tendance et de reconnaître que dans les communautés autochtones et dans la culture autochtone, on retrouve une certaine diversité qui va venir enrichir la société canadienne, comme la société québécoise d'ailleurs.

On a anéanti une génération complète d'autochtones. C'est un aspect très honteux. D'ailleurs, la ministre l'a reconnu dernièrement dans sa déclaration sur la réconciliation. Elle a reconnu que du côté des écoles résidentielles, c'était un échec lamentable et que ce concept n'aurait jamais dû être développé.

Il y a un autre concept que je veux soulever maintenant. Hier soir, pendant la nuit infernale où il y eu 80 mises au voix, et ce, jusqu'à 3 heures du matin, j'ai eu l'occasion de lire une partie du rapport de la Commission royale d'enquête, et j'y ai noté qu'un concept qui a été sous-estimé, c'est celui de la réinstallation.

Les Mi'kmaq qui nous écoutent actuellement connaissent bien leur histoire. Ils savent très bien à quel point ils ont été victimes aussi de réinstallation en Nouvelle-Écosse. Quand je parle de réinstallation, cela veut dire déraciner certaines communautés, les amener ailleurs, sous toutes sortes de prétextes.

Le prétexte invoqué en Nouvelle-Écosse était d'ordre administratif. Les fonctionnaires et les agents des Indiens disaient à l'époque: «Ils sont trop répartis sur le territoire. Ça coûte trop cher d'assumer les services partout.» Au début des années 1900, des communautés complètes ont été fermées, souvent avec le concours des Églises, ou avec celui de la Compagnie de la Baie d'Hudson qui disait: «Je vais fermer le poste de traite dans tel village.» Alors, le village mourait automatiquement.

Ces gens devaient changer d'endroit s'ils voulaient survivre. La réinstallation, à l'époque, se faisait à Eskasoni, qui est d'ailleurs un des signataires de l'entente devant nous aujourd'hui, sur l'île du Cap Breton, et à Shubenacadie, qui est sur le continent, et qui est signataire, elle aussi, de l'entente devant nous.

C'est une lourde histoire, et même si le gouvernement fédéral, au cours de ces années-là, a tenté d'arracher et de déraciner la culture autochtone, on doit féliciter les Mi'kmaq qui se sont accrochés et qui ont traversé cela. Finalement aujourd'hui, non seulement ils voient la lumière au bout du tunnel, mais ils ont fait un pas très important vers leur complète autonomie. Quand on contrôle notre éducation, c'est le premier pas à faire.

 

. 1945 + -

Le projet de loi C-30 jette un peu de baume sur ce passé lourd de sens pour eux. Évidemment, le Bloc québécois a non seulement écouté l'ensemble des témoins, mais il a aussi décidé de présenter certains amendements qui, malheureusement, ont été défaits hier. Je pense qu'il est important d'en traiter en troisième lecture.

Entre autres, l'article 7 du projet de loi stipule que ce seront uniquement les personnes qui habitent sur les réserves autochtones qui pourront être titulaires de l'ensemble des services dont je viens d'énumérer. Les personnes qui n'habitent pas sur les réserves ne pourront pas être titulaires du même programme d'éducation, ce qui veut donc dire que celles-ci devront fréquenter les écoles provinciales. Malheureusement, les discussions au sujet de la culture, des langues et du patrimoine autochtones n'auront pas la même ampleur que dans leur propre système d'éducation. Le gouvernement fait donc preuve d'une certaine discrimination à l'égard de ces personnes.

Pourquoi ces personnes-là n'habitent-elles pas sur les réserves? C'est souvent pour des raisons qui sont hors de leur contrôle. Je vais vous lire l'extrait de la loi qui fait en sorte que l'on consacre le programme actuel uniquement aux personnes qui habitent sur les réserves. Le projet de loi dit ceci, au paragraphe 6.(1):

    Dans la mesure prévue par la convention, la communauté est tenue d'offrir—directement ou indirectement—aux résidents de sa réserve des programmes et des services en matière d'éducation de niveaux primaire, élémentaire et secondaire.

C'est donc dire que vous pouvez être membre mi'kmaq de n'importe quelle nation, mais si vous n'habitez pas sur la réserve, vous n'avez pas droit aux mêmes programmes que ceux qui l'habitent. Nous avions présenté un amendement visant à inclure l'ensemble des membres, mais pour des raisons purement financières, je pense, le gouvernement et certains partis d'opposition ont malheureusement rejeté cet amendement. Je parlais plus tôt d'un montant de 150 millions de dollars pour l'octroi de l'ensemble des services, et cette mesure, à notre avis, représentait 60 millions de dollars de plus.

Il faut savoir que dans le cas des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse, les chiffres que l'on a sont peut-être approximatifs, mais environ 30 p. 100 des membres de la communauté n'habitent pas sur les réserves. La décision du gouvernement est donc tout à fait déplorable.

Lors de la présentation de mon amendement, j'ai discuté de la situation des autochtones hors réserves, parce que c'est une situation qui ne s'applique pas uniquement aux Mi'kmaq, mais partout au Canada. Dans certaines communautés, jusqu'à 50 p. 100 des membres inscrits n'habitent pas sur la réserve.

Il est déplorable que le gouvernement fédéral considère que deux ministres devraient s'occuper de cette question. Effectivement, la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien s'occupe de tous les autochtones sur les réserves et des gens au nord du 60e parallèle, c'est-à-dire les Inuits, et un autre ministre s'occupe des Métis et des autochtones hors réserves, d'où la discrimination dont on parlait plus tôt.

Je me souviens que le député ministériel qui m'a donné la réplique sur l'amendement disait que le gouvernement fédéral ne pouvait pas s'ingérer dans ce domaine, que c'était maintenant un débat de juridiction provinciale, c'est-à-dire que le débat concernant tous ceux qui n'habitent pas sur une réserve et qui fréquentent l'école provinciale est laissé aux provinces. Effectivement, je ne peux pas contester ce fait, mais je trouve que le gouvernement se déleste très facilement de ses responsabilités de fiduciaire à l'égard de ces gens-là. Je dirais même qu'il est parfois tentant de penser que le gouvernement les encourage à quitter la réserve parce que cela lui coûterait moins cher et que ce serait les gouvernements provinciaux qui auraient ces gens-là sur les bras.

C'est donc une question d'équité et de non-discrimination, à notre avis. Il est dommage que la note finale fasse en sorte que les gens qui n'habitent pas sur les réserves n'aient droit aux mêmes services que ceux qui l'habitent. On sera donc beaucoup plus enclins à tenter d'assimiler les membres hors réserves et les inclure dans les programmes provinciaux qui tiennent très peu compte des réalités autochtones.

Lorsque je dis que les gens n'ont pas vraiment le choix, c'est facile à comprendre. Il y a aussi d'immenses problèmes pour ce qui est des logements autochtones.

 

. 1950 + -

Actuellement, la surpopulation dans les réserves autochtones amène forcément les gens à déménager. Le manque d'emplois sur les réserves force les gens à aller en chercher ailleurs. Dès qu'ils franchissent la frontière de leur réserve, le gouvernement fédéral dit que ce n'est plus son problème et que ce sont les provinces qui doivent les prendre en charge. Ce qui fait que parfois, dans les réserves, trois ou quatre générations demeurent sous le même toit. Il arrive que 16 personnes doivent rester sous le même toit, dans un appartement de trois pièces. Imaginez la surpopulation.

Pour leur bien-être ou pour trouver un emploi, les gens doivent quitter la réserve. Cela souligne l'importance de l'appartenance à la bande. Cela vient désolidariser ceux qui ne restent pas sur la réserve et qui seront forcément assimilés. On a donc deux classes de citoyens.

Cela a également un effet négatif sur leur culture. Plus on se rend sur les réserves mi'kmaq, plus on se rend compte que lorsque les autochtones prennent leur éducation en main, ils peuvent revenir à leur culture et à leur langue autochtones. Ces gens sont plus à même de s'identifier à leur passé, de mieux savoir d'où ils viennent pour mieux savoir où ils veulent aller.

Certains me diront qu'on ne veut pas non plus faire des ghettos d'éducation sur les réserves, et ils ont raison. On nous l'a dit lors des témoignages devant le comité. Les autochtones ont bien fait attention d'arrimer le programme scolaire autochtone au programme scolaire des niveaux postsecondaire et universitaire. Il ne faudrait pas que les jeunes qui sortent des réserves ne puissent pas poursuivre des études supérieures.

Il ne s'agit pas de créer un ghetto, mais plutôt de leur permettre de redécouvrir leur culture, leur langue et leur patrimoine et d'en être fiers, même au niveau de l'éducation postsecondaire. Ceux qui vont aller à l'école néo-écossaise risquent davantage, forcément, de perdre leur culture, leur langue et leur patrimoine.

Mon amendement visait donc à corriger cela. Je veux remercier mon collègue d'Halifax-Ouest, qui est ici aujourd'hui, car il a bien compris l'impact de cet amendement et il l'a appuyé à la Chambre. D'ailleurs, il vient de la Nouvelle-Écosse et il comprend bien la dynamique mi'kmaq dans cette province. C'est pour cela que je tenais à le féliciter publiquement de sa prise de position.

Il y a un ballottement entre le gouvernement fédéral et les provinces et la motion visait à le corriger. C'est toutefois peine perdue. Ce sont les provinces qui vont écoper, qui vont payer, et ce sont les non-résidants des réserves qui vont payer de leur culture, de leur patrimoine et de leur langue. Ce que je disais tantôt est vrai. Le gouvernement a rejeté cela, parce qu'il aurait dû payer 60 millions de dollars de plus.

C'est déplorable, car le gouvernement se targue d'avoir atteint le déficit zéro, d'avoir mis de l'avant un budget bien équilibré, alors qu'on sait toutes les coupures qui ont été faites à l'assurance-emploi et le maintien, à leur niveau actuel, des cotisations des employeurs. C'est dommage, parce qu'on sait que le gouvernement aura sûrement un surplus l'an prochain. Il aurait eu la possibilité de racheter les erreurs passées, mais il l'a ratée.

Un autre amendement qui m'apparaissait important est celui du traité. Le gouvernement a plusieurs possibilités au lendemain d'une entente. Il peut faire ce qu'il a fait ici, présenter un projet de loi, soit le confirmer dans un traité. Le gouvernement a décidé de présenter un projet de loi.

Je tiens à lire la motion que j'avais présentée: «Dans les trois ans suivant l'entrée en vigueur des dispositions de la présente loi, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien convoque une conférence réunissant les signataires de la convention afin de déterminer si la présente loi devrait être convertie en traité au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.»

Cela me semblait important, parce que lorsque j'ai posé la question aux fonctionnaires, ceux-ci m'ont dit: «Ce sont les Mi'kmaq qui ne voulaient pas.» Lorsque j'ai posé la question à ces derniers, ils m'ont dit: «Non, non. Nous, on voulait, mais c'est le gouvernement fédéral qui ne voulait pas.»

 

. 1955 + -

Nous avons invoqué des excuses comme celle-ci: «Si on fixe, dans une entente, un montant d'argent, et que, par la suite, on doit transcrire cela dans un traité, cela fait en sorte que ce montant d'argent est gelé.»

C'est pour cela que l'amendement que je proposais visait à donner une chance à l'entente et au projet de loi de demeurer en vigueur pendant trois des cinq années, et qu'ensuite, on réévalue la situation avec les neuf signataires—ou dix ou onze, si certaines communautés s'y ajoutent—pour voir si on peut les convertir en traité.

La question du traité est importante. Des gens des quatre communautés non signataires sont venus témoigner et ils nous ont dit que si c'était un traité ou si cela pouvait devenir un traité, ils pourraient être tentés de signer. Même si l'amendement a été défait, j'invite le gouvernement à porter beaucoup d'attention à cela, parce que les traités ont une valeur très symbolique.

Que veut dire un traité? Il n'y a pas juste des traités internationaux. Les premiers arrivants européens ici signaient des traités avec les nations autochtones. Pour les nations autochtones, un traité, c'est solennel et c'est presque sacré, parce que c'est de nation à nation que cela se fait.

Donc, j'invite le gouvernement à songer sérieusement à ce que cette entente, maintenant convertie en projet de loi, soit convertie en traité, ce qui assurerait finalement une protection, avec le fameux article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Le gouvernement a préféré un projet de loi. Un traité et un projet de loi ont des dimensions très différentes. Même si on a adopté la voie du projet de loi, il s'agirait peut-être de voir si, dans quelques années, on ne pourrait pas prendre la voie du traité.

Pour amener un peu d'eau au moulin à ma théorie à savoir que certains autochtones seraient intéressés, je veux citer le vice-président de l'Assemblée des Premières Nations de la Nouvelle-Écosse, Rick Simon, qui a dit, lors de sa comparution, le 26 mai: «Nous avons bel et bien discuté de la possibilité de conclure un traité moderne sur l'éducation nous assurant une protection aux termes de l'article 35 de la Constitution, mais le gouvernement fédéral ne voulait pas aller aussi loin. En fait, nous avons probablement passé six mois à discuter de l'opportunité de conclure un traité pour qu'on nous dise finalement que ce n'était pas la bonne formule.»

Naturellement, les autochtones, étant très pragmatiques, se voyaient alors confrontés à poursuivre leur lutte encore plus longtemps pour obtenir un traité. Pendant ce temps, les fonctionnaires d'Ottawa auraient continué d'administrer l'ensemble des services éducationnels dans ces communautés.

Donc, ces gens se sont dit: «Faisons un pas. Acceptons que l'entente de février 1996 ou 1997 soit convertie en projet de loi et on verra plus tard s'il est possible de la transformer en traité.» Le projet de loi à l'étude offre d'ailleurs cette possibilité, mais mon amendement forçait quand même la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à convier les signataires et à examiner avec eux la pertinence de convertir l'entente en traité.

Le Bloc québécois donnera son appui au projet de loi C-30. Je veux aussi souhaiter bonne chance aux Mi'kmaq. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que ces gens sont parfaitement capables de contrôler leur éducation, je dirais même que ces gens-là sont capables de contrôler leur économie, leur culture, leur patrimoine. Ce sont donc des gens qui en sont tout à fait capables.

J'ai toujours été convaincu que la question de briser la dépendance des autochtones à l'égard du fédéral passe par l'éducation, par une plus grande autonomie gouvernementale et par des revendications territoriales avec une base territoriale suffisamment grande pour leur permettre l'autosuffisance financière.

Je suis tout à fait convaincu que c'est la seule solution qui fera en sorte que nous allons finir par briser la dépendance de ces gens à l'endroit du gouvernement fédéral, dépendance qui a créé énormément de problèmes comme la toxicomanie, l'alcoolisme, les suicides, la violence conjugale, le désespoir. Il faut donner espoir à ces gens.

 

. 2000 + -

Cette étape du côté de l'éducation est un pas vers l'autonomie gouvernementale complète et un pas vers l'autosuffisance, parce qu'il ne faut pas oublier que souvent, la principale richesse d'une société, ce ne sont pas nécessairement ses forêts ou ses mines, mais souvent les enfants qui sont dans ses classes.

En terminant, j'ai accepté avec grand plaisir l'invitation de plusieurs chefs autochtones de voyager cet été en Nouvelle-Écosse. À la fin du mois de juillet, j'ai l'intention de me rendre en Nouvelle-Écosse et d'aller rencontrer, en grande partie, je l'espère, les communautés autochtones de cette province.

Je pense que les Mi'kmaq forment une des grandes nations autochtones du Canada. Il m'a fait plaisir, au nom de Bloc québécois, de les aider dans leur cheminement vers l'autosuffisance et vers une autonomie gouvernementale complète. Je leur souhaite bonne chance dans leur programme d'éducation en Nouvelle-Écosse.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, tout d'abord, je dois vous signaler que je partagerai le temps qui m'est alloué avec ma collègue, l'honorable députée de Bras D'Or.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle, c'est que vous avez 40 minutes. La mauvaise, c'est que vous ne pouvez pas partager cette période avec quelqu'un d'autre.

M. Svend J. Robinson: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je me demande si la Chambre accepterait à l'unanimité que le député partage le temps dont il dispose avec le député de Bras d'Or.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Burnaby—Douglas demande le consentement unanime pour permettre au député de Halifax-Ouest de partager le temps dont il dispose. Il n'y aurait pas de période de questions et d'observations et chaque député aurait 20 minutes.

Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

M. Gordon Earle: Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-30, Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation. Ce projet de loi transférerait la responsabilité de l'éducation aux membres de neuf bandes mi'kmaq de ma province, la Nouvelle-Écosse.

Lindsay Marshall, chef de la bande de Chapel Island et président de Mi'kmaw Kina'matnewey/Éducation, a déclaré ceci devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord:

    La responsabilité de l'éducation est un droit fondamental dont jouissent tous les Canadiens et un droit que notre nation mi'kmaw n'a pas exercé depuis le début de la colonisation du pays, il y a 500 ans.

Le projet de loi vise à mettre fin à cette injustice et à confier la responsabilité de l'éducation à des organismes locaux.

J'appuie le projet de loi C-30 au nom du Nouveau Parti démocratique et de son chef.

À l'exception de quelques défauts mineurs auxquels il faudra remédier, rien de sérieux n'empêche la Chambre des communes d'appuyer le transfert de pouvoir.

J'ai discuté de ce projet de loi avec de nombreuses personnes dans ma province, en Nouvelle-Écosse, ainsi qu'avec un grand nombre de témoins qui ont comparu devant le comité. J'ai également des copies de lettres d'appui pour cette mesure législative historique venant du directeur exécutif de l'Association des conseils scolaires de la Nouvelle-Écosse, des recteurs des universités Saint Mary's, Mount Saint Vincent et St. Francis Xavier, et du King's College, ainsi que du directeur du Collège d'agriculture de la Nouvelle-écosse et de l'évêque d'Antigonish.

Ce large appui montre que nous avons parcouru un certain chemin, en fait, depuis les horreurs du système des pensionnats auxquelles nous commençons seulement à faire face maintenant. La Commission royale sur les peuples autochtones a dit qu'au début du siècle, l'éducation des autochtones cherchait à enlever aux enfants toutes leurs racines indiennes.

Dans ses observations, le chef Marshall a ajouté:

    Pendant de nombreuses années, tout le monde, sauf les peuples autochtones eux-mêmes, ont pris des décisions au sujet de l'éducation des autochtones. Ce processus de prise de décisions a eu des répercussions catastrophiques sur nos collectivités. Cela comprend notamment la désintégration sociale, la perte d'identité culturelle et des difficultés à bien se réaliser. Le projet de loi C-30 proposé donnera à nos dirigeants l'autonomie nécessaire pour élaborer et mettre en oeuvre des programmes pertinents sur le plan culturel qui vont promouvoir la langue, les coutumes et les traditions du peuple Mi'kmaq.

 

. 2005 + -

Le 14 février 1997, les chefs d'Eskasoni, Membertou, Chapel Island, Whycocomagh, Wagmatcook, Pictou Landing, Shubenacadie, Annapolis Valley et Acadia ont signé un accord de transfert de compétence dans le domaine de l'enseignement sur les réserves. Ce projet de loi donne un cadre législatif aux principes et à l'objet de cet accord.

Il y a plus de sept ans, l'Assemblée des chefs de la Nouvelle-Écosse s'est mise en rapport avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et a proposé qu'un conseil scolaire Mi'kmaq soit créé pour assumer totalement le contrôle de l'éducation des premières nations en Nouvelle-Écosse.

En tant qu'habitant de la Nouvelle-Écosse et porte-parole en matière d'affaires autochtones de mon parti, je suis heureux que ce ne soit pas la première initiative reliée à l'éducation prise par les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse. Le conseil de bande Potlotek de Chapel Island a décidé, l'année dernière, de déclarer le Mi'kmaq comme langue officielle de la réserve.

Ce projet de loi représente non seulement une étape-clé du contrôle des Mi'kmaq sur l'éducation en particulier, mais un pas sur la voie de l'autonomie gouvernementale. Le projet de loi C-30 établit les pouvoirs, les devoirs, les fonctions et les structures de la personne morale Mi'kmaw Kina'matnewey, qui s'occupera de l'éducation.

Cette entente donne à ces collectivités la capacité d'adopter des lois pour l'enseignement primaire, élémentaire et secondaire dans la réserve pour les membres de la base seulement. Cependant, aux termes de cet accord, les Mi'kmaq sont tenus d'offrir un enseignement primaire, élémentaire et secondaire équivalent aux non-membres.

Un des points saillants de l'accord est que les programmes et services d'éducation offerts par la nation Mi'kmaq doivent être comparables à ceux qu'offre tout autre système d'éducation au Canada.

Comme l'a dit Rick Simon, vice-chef de l'Assemblée des premières nations:

    Un des aspects importants de cette convention est que les normes en matière d'éducation sont transférables entre la première nation mi'kmaq et les autres systèmes d'enseignement canadiens.

Alors que le territoire du Nunavut est sur le point de voir le jour, les récits abondent sur les difficultés qui attendent ceux qui seront élus pour guider notre nouveau territoire sur le chemin de l'émancipation. Alors que, à l'échelle nationale, le pourcentage des jeunes de plus de 15 ans qui n'ont pas terminé leur 9e année est de 14 p. 100, au Nunavut il est de 42 p. 100.

Plus l'enseignement tient compte de la vie, de la culture, de l'histoire et de la langue des peuples autochtones, plus ils poursuivront leurs études. Le chef Simon souligne que, dans l'ensemble, le niveau d'instruction des autochtones est à peu près inférieur de moitié à la moyenne nationale. Ces chiffres témoignent du fait que traditionnellement nous nous sommes servi de l'éducation, et j'utilise le verbe servir au sens le plus vil d'exploiter, pour dépouiller les jeunes autochtones de leur âme culturelle et spirituelle.

C'est l'inverse que nous devrions faire. Au lieu de dépouiller les jeunes de leur identité culturelle, l'éducation devrait puiser dans les leçons de leur passé collectif de quoi les inspirer et les nourrir de façon à ce qu'ils puissent s'épanouir et développer leur plein potentiel et se mettre au service de leur communauté.

Le projet de loi C-30 est un pas en avant pour faire en sorte que l'éducation et non la rééducation soit la norme.

L'éducation des Mi'kmaq n'est pas une idée nouvelle ni un processus qui a débuté en même temps que les négociations entreprises au début de la décennie. Comme l'a dit au comité la soeur Dorothy Moore, directrice intérimaire de la Division des services micmacs du ministère de l'Éducation et de la Culture de la Nouvelle-Écosse:

    Ce qui doit être reconnu en premier lieu, c'est le fait historique que l'éducation des Mi'kmaq n'a pas débuté à l'époque du débarquement des Européens sur ce continent. Ses origines remontent à plusieurs siècles. C'est l'éducation qui a permis d'assurer la survie des Mi'kmaq pendant plusieurs siècles. Au cours du XXe siècle, les innombrables techniques d'éducation officielle utilisées pour intégrer et assimiler les élèves micmacs ont échoué parce qu'elles n'ont pas tenu compte de la culture, de la langue, de l'histoire ni de la façon de comprendre la vie de notre peuple.

Je suis très conscient que de nombreux problèmes liés à cette entreprise sont encore sans solution. M. Don Julien, directeur de la Confederacy of Mainlands Micmacs, a soulevé plusieurs points importants. Il se demande notamment comment on comblera le vide qui risque d'être créé après l'expiration de la convention de cinq ans. M. Julien fait remarquer:

    Aucune protection n'est prévue pour répondre aux besoins à long terme des collectivités en matière d'éducation ou au droit à l'autonomie politique des Mi'kmaq et à l'éducation des générations à venir. Aucun engagement n'est pris à l'égard d'un régime d'enseignement au-delà de l'expiration de la convention après cinq ans.

 

. 2010 + -

J'ai appuyé un amendement qui demandait la tenue d'une conférence trois ans après l'entrée en vigueur de la loi pour déterminer si elle pourrait être convertie en traité. Comme l'a mentionné plus tôt le député de Saint-Jean, malheureusement, cet amendement n'a pas été appuyé par le gouvernement à l'étape du rapport.

M. Julien et d'autres ont souligné que ce projet de loi établit les limites géographiques des réserves. En outre, bien qu'aucune disposition ne traite des Mi'kmaq vivant à l'extérieur des réserves, selon le projet de loi, l'enseignement doit être assuré aux non-Mi'kmaq qui habitent dans les réserves.

J'ai parlé plus tôt de cette question, en appuyant un amendement qui étendrait les dispositions de ce projet de loi à tous les membres des premières nations signataires, qu'ils habitent ou non dans des réserves. Encore une fois, comme on l'a déjà mentionné, cet amendement n'a pas reçu l'appui du gouvernement à l'étape du rapport.

Bien que des enjeux nécessitent un effort soutenu, les dispositions de ce projet de loi annoncent un important transfert de pouvoir.

Le gouvernement continue de n'effleurer que la surface des problèmes qui concernent les premières nations et d'autres peuples autochtones. Si seulement le gouvernement donnait pleinement suite aux recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones, qui s'est réunie pendant plusieurs années à un coût de plusieurs millions de dollars. Si seulement il donnait suite à la foule de recommandations et de constatations énoncées dans ce rapport au sujet des questions d'éducation.

Tandis que le gouvernement libéral commet une grave injustice à l'endroit des autochtones en refusant de donner suite aux recommandations de sa propre commission royale, le projet de loi C-30, cette initiative des dirigeants et des membres de la collectivité mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse, mérite notre appui.

En terminant, je voudrais féliciter les aînés, les chefs, les conseils de bande, les activistes, les membres de la collectivité, les dirigeants et les négociateurs qui se sont employés, au cours de l'année, à revendiquer l'éducation pour les Mi'kmaq. Je félicite également les ministériels, tant les représentants élus que leur personnel, qui ont oeuvré ensemble à l'aboutissement de ces efforts.

Tous ceux qui ont formulé des recommandations au comité ont joué un rôle essentiel pour faire ressortir les enjeux qui concernent cette initiative. Le personnel du comité et la Bibliothèque du Parlement ont apporté leur aide précieuse pour faciliter le processus et la recherche sur ce projet de loi.

Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de dire que j'appuie le projet de loi C-30 concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation.

Tout ce que je puis dire alors que nous levons ce dernier obstacle législatif à l'autodétermination des Mi'kmaq, c'est «enfin».

Enfin, nous ne considérons plus la culture des Mi'kmaq comme un problème auquel il faut remédier, mais comme un legs dont nous devons nous réjouir.

Enfin, l'autodétermination qui va améliorer des vies devient une réalité. Ce ne seront plus des mots, des promesses des politiciens afin de se sentir mieux.

Enfin, cette Chambre peut être fière de sa contribution au débat permanent sur la contribution de nos premières nations au passé et à l'avenir du Canada.

Enfin, c'est un projet de loi de portée limitée, qui aura un impact sur moins de 10 000 habitants de neuf collectivités réparties dans une petite province. Mais je ne saurais trop souligner l'importance de l'impact qu'aura l'adoption de ce projet de loi.

Il met de côté une fois pour toutes l'attitude dont a trop longtemps fait preuve Ottawa, qui s'est toujours targué de savoir ce qui était dans l'intérêt des autochtones et de quels outils ils avaient besoin pour réussir. Il est très bon de mettre de côté cette attitude et ce, pour une raison bien simple. Elle était mauvaise. C'était une attitude immorale qui n'a rien donné.

Les politiques du Canada à l'égard des premières nations sont une liste d'échecs et de crimes des siècles durant. D'autres échecs ont suivi alors que nous avons essayé de corriger nos erreurs passées: les pensionnats et les réserves qui sont devenus de véritables ghettos. Même quand nous voulions bien faire, nous faisions mal.

 

. 2015 + -

Comment s'étonner alors que tous ces beaux plans et ces beaux programmes en vue de civiliser les autochtones, de les intégrer dans le courant principal de la société occidentale blanche aient échoué? Il n'y a rien d'étonnant, ils ont échoué parce qu'ils avaient un défaut essentiel, un défaut insurmontable, celui de ne pas faire appel à la participation des gens qu'ils étaient censés aider.

À maints égards, le gouvernement canadien se conduit toujours de la même façon. Il ne tient pas compte des préoccupations et des idées des autochtones lorsqu'il élabore des politiques qui les touchent.

Regardez ce qui est arrivé à l'énorme rapport détaillé qu'a publié la Commission royale sur les peuples autochtones. Le gouvernement l'a mis aux oubliettes sans en tenir compte. C'est un rapport qui renfermait les voix de nos premières nations et ces voix ont encore une fois été bâillonnées.

Les choix que nos gouvernements ont faits les couvrent maintenant de honte. Toutefois, le projet de loi C-30 jette un peu de lumière sur l'histoire autrement plutôt désolante des relations autochtones au Canada. Nous sommes témoins ici de consultations réelles entre les bandes et entre les gouvernements sur plusieurs années, et ce avec un objectif différent à l'esprit, soit celui de mettre au point un système d'éducation purement mi'kmaq pour les bandes de la Nouvelle-Écosse.

Le porte-parole de mon parti dans le dossier des affaires autochtones a fait un excellent travail et a présenté de façon très claire la position du Nouveau Parti démocratique sur le projet de loi. Il a présenté la mesure à la Chambre de façon claire et concise, soulignant les lacunes et les imperfections ainsi que les éléments positifs que j'ai soulignés de nouveau aujourd'hui.

J'aimerais maintenant me pencher sur les questions plus vastes qui entourent tout le dossier du projet de loi C-30, tout particulièrement les attaques souvent malveillantes de l'opposition officielle.

L'opposition officielle s'est tout particulièrement attachée au mot égalité et a brossé un tableau essentiellement axé sur le projet de loi. On y retrouve des intérêts particuliers et des intentions cachées qui se dissimulent derrière la façade du multiculturalisme et de la justice. Des mots de codes et des allusions de l'opposition ont créé l'impression que le projet de loi C-30 pourrait être un genre de cheval de Troie laissant présager une invasion sans borne qui déferlera bientôt sur le monde genre «famille Plouffe» qu'on voudrait nous présenter comme le Canada. C'est une vraie honte et ça me rappelle les mauvais jours d'autrefois dont je parlais tout à l'heure. Pire encore, l'impression qui est ainsi créée est fausse.

Le chef Lindsay Marshall de la réserve Pudletek de Chapel Island, dans ma circonscription, a été l'un des principaux défenseurs autochtones de ce projet de loi et il a travaillé très fort à sa promotion au cours des dernières années. Dans son témoignage devant le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord canadien, il a donné l'heure juste au sujet du projet de loi C-30 et de la position du Parti réformiste.

La politique angulaire du Parti réformiste est le même traitement pour tous les Canadiens. On a dit craindre que le projet de loi C-30 ne place les Mi'kmaq à part. Je crois que le projet de loi assurera un traitement égal à tous les Canadiens, y compris les autochtones.

Pour la première fois depuis la colonisation, les peuples autochtones auront le droit de faire des lois concernant l'éducation de leurs enfants, comme le reste des Canadiens. L'adoption du projet de loi C-30 permettra aux responsables de l'éducation de poursuivre leur collaboration étroite avec la province de Nouvelle-Écosse, en vue de combler les écarts qui persistent entre les programmes d'enseignement des écoles des premières nations et des écoles provinciales.

Des étapes importantes qui ont contribué à combler les écarts ont été franchies durant la période de mise en oeuvre de l'accord: une loi provinciale concernant la création d'un conseil d'enseignement mi'kmaq; la représentation des Mi'kmaq aux conseils scolaires provinciaux; et la promotion de la langue et de la culture mi'kmaq dans le programme scolaire public auprès des édudiants autochtones et non autochtones.

Ce sont là les vraies origine et intention du projet de loi C-30. Ce projet de loi engendrera et renforcera l'égalité, au lieu de la diminuer et de la détruire.

 

. 2020 + -

Les réserves du Parti réformiste au sujet de ce projet de loi découlaient peut-être du fait qu'il provient de cette base dont aiment à parler les réformistes et qu'il est le fruit de consultations menées dans les communautés et auprès des particuliers, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des réserves.

Au lieu de produire des résultats négatifs et d'être une source d'impulsions destructrices et de division, la base a su produire ce projet de loi, qui fait mentir l'opposition officielle. C'est la preuve que lorsque nous parlons aux gens ordinaires et respectons leurs opinions, ils proposent souvent des solutions applicables à tous, qui contribuent au bien-être de l'ensemble de la communauté au lieu de répondre seulement au attentes de certains.

La force de ce projet de loi est illustrée par la diversité des bandes en Nouvelle-Écosse. Il y a 13 bandes mi'kmaq, mais seulement neuf ont adhéré aux dispositions auxquelles le projet de loi donnera force de loi. Les quatre autres réservent leur jugement, en restant en consultation étroite avec le chef Marshall et les autres qui appuient le processus. Elles attendent de voir les résultats; s'ils leur plaisent, elles se joindront aux autres bandes en tant que partenaires égaux.

Là encore, cela révèle la solidité du projet de loi et des processus dont il découle. Si seulement les réformistes pouvaient promouvoir un tel système de tolérance et de respect. S'ils pouvaient reconnaître que les décisions ne se limitent pas au noir foncé et au blanc, la culture politique de notre pays s'en trouverait bien meilleure.

On dit souvent que nous avons beaucoup à apprendre de nos autochtones. J'espère que certains des points que j'ai soulevés illustreront cette vérité.

Le projet de loi C-30 est un document souple qui permet une expérience en matière d'indépendance et de justice qui se faisait attendre depuis longtemps. C'est aussi un exemple de ce qu'on peut réussir à faire quand les bandes et les gouvernements mettent leurs divergences d'opinions de côté et travaillent dans l'intérêt collectif, car ce n'est que lorsque la collectivité est en santé que les individus peuvent s'épanouir. Il s'agit peut-être de la meilleure leçon que ce débat puisse apprendre à la Chambre.

C'est un truisme de dire qu'il est plus facile de détruire que de créer, mais il vaut la peine de le répéter. J'espère que tous les députés trouveront une inspiration dans ce modeste effort de création et seront fiers d'avoir voté pour créer un avenir meilleur pour au moins quelques milliers de citoyens de notre beau grand pays.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, j'ai suivi le débat, ici, ce soir, et, à l'exception peut-être de quelques observations de deux ou trois députés, je l'ai trouvé plutôt impartial. Je tiens certes à féliciter le gouvernement d'avoir présenté ce projet de loi et de l'avoir piloté au Parlement.

J'approuve le projet de loi. En tant que porte-parole progressiste conservateur pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, c'est avec plaisir que je l'ai appuyé.

Je tiens à rendre hommage à tous les députés et à tous les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord qui ont examiné le projet de loi et participé au débat. La plupart ont fait valoir de bons points. Nous ne sommes pas toujours d'accord en comité, mais avec un peu de chance, au lieu de nous attarder à essayer de faire ressortir les erreurs de tout le monde, nous profitons de nos désaccords pour mener un débat vraiment fructueux qui débouchent sur des solutions améliorées.

Ce projet de loi améliorera sans conteste l'enseignement dans les réserves de la Nouvelle-Écosse. Il faut certes rendre hommage à un certain nombre de Mi'kmaq et d'Autochtones de la Nouvelle-Écosse, mais d'abord et avant tout au chef de la réserve de Chapel Island, à l'île du Cap-Breton, ou Unama'ki, en langue mi'kmaq, Lyndsey Marshall. Il mérite certainement d'être reconnu et félicité, car il connaît exceptionnellement bien son domaine.

J'ai pris plusieurs fois la parole sur cette question. Je n'ai pas l'intention d'abuser ici ce soir du temps de la Chambre. Je félicite les Mi'kmaq et la nation mi'kmaq d'avoir eux-mêmes proposé cela et de l'avoir défendu au Parlement en maintenant la pression politique sur le gouvernement aussi bien que sur tous les députés de l'opposition pour qu'ils appuient le projet de loi. Ils ont du mérite. Cela montre qu'ils ont de l'influence politique au sein de la nation mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse et en tant que citoyens de notre pays.

 

. 2025 + -

Il est intéressant que le secrétaire parlementaire ait employé ce soir exactement la même analogie que j'avais écrite dans mes propres mots, à cette exception que j'y ai mis un peu plus de saveur que lui. Le secrétaire parlementaire a dit que l'éducation était la clé du succès. Cela m'a fait sourire de l'entendre, car j'avais moi-même écrit: «Si l'éducation est la clé de la porte de l'avenir, la 36e législature a certes contribué à ouvrir cette porte pour les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse.» Je crois que c'est vrai.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais soulever une question qui est très importante.

J'ai écouté le discours du député du Nouveau Parti démocratique et je dois dire très franchement et avec le plus de calme que je peux que cela me blesse énormément lorsqu'il m'accuse de choses qui ne sont pas vraies. Il m'accuse d'attitudes à l'égard des Autochtones que je n'ai tout simplement pas. J'en prends ombrage.

Le député conservateur vient de faire un bon discours où il appuie la mesure législative et pourtant, les conservateurs ont sur leur site web toutes sortes de choses qui me traitent personnellement et en tant que réformiste de façon très négative. Il pourra peut-être nous en dire quelques mots.

Selon moi, nous devons en arriver à travailler ensemble en tant que Canadiens et à faire les choses d'une manière typiquement canadienne. Nous nous voulons tous du bien. Nous cherchons à nous entraider. Nous faisons ce qu'il faut pour que toutes ces questions soient réglées à la satisfaction de tous. J'aimerais que l'on cesse de lancer ainsi des flèches qui ne font que blesser.

M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, honnêtement, je ne sais comment répondre à ces commentaires. J'ignore ce que contient le site web du Parti progressiste conservateur.

Je peux dire avec la conscience tranquille, connaissant les positions de notre parti, notre orientation, notre réputation et notre histoire où des politiques claires et justes dominent, qu'il faut croire que le député se trompe. C'est ce que je suppose.

Je tiens toutefois à préciser que dans mes observations de ce soir, j'ai pu remarquer que tous les députés participant au débat sur le projet de loi Mi'kmaq, le sujet dont il est question ici, ont présenté sincèrement leurs points de vue. Nous n'étions pas toujours d'accord et nous ne serons probablement jamais toujours d'accord. Mais il faut écouter ce que les autres ont à dire si l'on veut ce débat débouche sur des réponses.

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui avec mes collègues au sujet du projet de loi sur l'éducation des Mi'kmaq. Nous en sommes maintenant à la troisième lecture et il m'est encore impossible d'appuyer ce texte de loi.

Comme on l'a déjà mentionné, tous les membres du Comité ont travaillé de façon constructive dans un esprit de coopération et de respect. Il n'y a pas eu d'échanges sur le ton âpre qui semble continuellement de mise dans cette Chambre.

Il est regrettable que nous n'ayons pas réussi à faire adopter l'important amendement que mon parti et moi-même considérions indispensable pour rendre le projet de loi acceptable à nos yeux, mais les choses sont ainsi.

Ce projet de loi mettrait en oeuvre un accord signé par le gouvernement du Canada et neuf des treize communautés Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse.

 

. 2030 + -

Il a pour objet d'établir une société sans capital-actions appelée Mi'kmaw Kina'matnewey, chargée d'administrer l'enseignement primaire et secondaire. En réalité, il s'agit plus ou moins d'un conseil scolaire.

Cette société aura pour but d'appuyer la prestation des services et programmes d'éducation en vertu de la loi proposée. Les membres du conseil seront les chefs des neuf communautés participantes et ils seront élus d'office.

Ensemble, ils formeront le conseil d'administration et seront responsables en dernier ressort de la gestion et de la conduite des affaires de la société.

Le Parti réformiste ne peut soutenir ce projet de loi parce qu'il nous cause un problème majeur, à savoir que les chefs eux-mêmes seront automatiquement les membres de Mi'kmaw Kina'matnewey, établie par le projet de loi.

Dans mon discours précédent à ce sujet, j'ai expliqué que le projet de loi devait être amendé pour que nous puissions l'appuyer. Nous ne voulions pas que les chefs des neufs communautés signataires soient membres d'office du conseil, mais plutôt qu'ils soient nommés ou peut-être élus si telle était la volonté des membres de leurs communautés. Nous voulions que ces postes soient ouverts à d'autres personnes également.

Le fait que les chefs soient des politiciens ne nous préoccupe pas. C'est à eux qu'il incombe d'être des visionnaires, de voir ce qu'ils peuvent faire pour améliorer la vie de leurs communautés. En l'occurrence, leur vision consistait à contrôler l'éducation dans ces communautés. Nous leur rendons hommage pour cela d'avoir voulu que le contrôle de l'éducation soit conféré aux membres de leurs communautés. Après tout, leur travail est de promouvoir et de protéger, de fournir le cadre législatif dans lequel les choses se produiront.

Je suis d'avis également que les politiciens ne devraient sans doute pas se mêler de l'administration quotidienne des programmes, c'est-à-dire en quelque sorte la vente de leur produit. Dans d'autres domaines, les choses ne fonctionnent pas de cette façon. Pourquoi serait-ce le cas ici?

Nous estimons que ce conseil pourrait être constitué de professionnels qualifiés, de personnes expérimentées intéressées par l'éducation, désireuses de se porter candidates au conseil d'administration de la société et soucieuses de contribuer au progrès de leur collectivité. Ce serait une façon de procéder.

On pourrait aussi avoir au conseil des ménagères, des hommes d'affaires ou des travailleurs qui désirent contribuer à leur collectivité en tant que citoyens de la base. Ils ne pourront y siéger qu'en se présentant d'abord à la direction de la bande et en acceptant toutes les autres responsabilités qui vont avec le titre de chef.

Pour les chefs, membres de droit du conseil, la gestion des millions de dollars nécessaires pour les affaires du conseil signifie un autre chèque de paye. Nous voudrions que l'activité économique soit mieux distribuée. Il y a une concentration des chèques de paye, une accumulation de responsabilités, alors que les chefs sont déjà très occupés, et de responsabilités dans un domaine où ils ne sont pas nécessairement des experts. Ils seront responsables de l'administration de produits et de services d'enseignement.

Cela pourrait conduire à une mauvaise gestion, même si les chefs y consacrent beaucoup d'efforts et de bonne volonté. Il serait également logique que les membres du conseil scolaire soient responsables devant la population de leurs décisions en matière d'enseignement seulement, et non pas de décisions dans une foule d'autres domaines choses sans rapport avec l'éducation.

Pourquoi un électeur devrait-il décider de voter pour un chef en fonction d'une question qui n'a pas de rapport avec le travail de chef? Il n'y a pas de doute que les chefs que j'ai rencontrés ont des qualités.

Je dois dire que lorsque nous sommes arrivés à la réunion du comité, nous avons rencontré bon nombre de leaders des collectivités participantes. Tous des chefs ou des personnes travaillant avec les chefs. Néanmoins, nous pensons qu'un conseil élu qui se consacrerait à la seule question de l'enseignement serait dans l'intérêt de la population, en l'occurrence celle des collectivités elles-mêmes.

Des conseils scolaires élus, c'est-à-dire des organismes qui se consacrent entièrement à l'éducation, seraient dans le meilleur intérêt de la population, dans l'intérêt des collectivités elles-mêmes dans ce cas.

 

. 2035 + -

Les chefs eux-mêmes ont une perspective plus large. Ils ont été élus pour diriger leurs bandes et c'est grâce à leur vision que des corps policiers et des conseils scolaires ont vu le jour. Ils devraient élever leur pensée vers d'autres choses tout aussi importantes pour leurs collectivités et garder le contact avec ceux et celles qu'ils représentent. Ils devraient laisser à d'autres la gestion de ce qu'ils ont édifié grâce à leur dur labeur, à leurs initiatives et à leur vision.

Nous croyons que le projet de loi concentre trop de pouvoir entre les mains des chefs et leur donne trop de travail. C'est pour cela que nous voudrions que le projet de loi soit amendé. De toute évidence, il ne le sera pas.

Notre appui au projet de loi était conditionnel à l'adoption de notre amendement fondamental. Nous savons ce qui s'est passé au comité. Les libéraux ont défait notre proposition. Ils se sont ligués contre notre proposition, tout comme les députés des autres partis qui, contrairement au Parti réformiste, ne sont pas en train d'établir une forte tradition de démocratie et d'attirer des électeurs d'un océan à l'autre.

Nous avons demandé pourquoi ils rejetaient une proposition aussi sensée. La réponse, je l'ai dit, c'est qu'ils n'ont pas la tradition de démocratie et de responsabilisation des réformistes, parce qu'ils n'appartiennent pas à un parti fondé sur la démocratie et la responsabilisation. Le gouvernement ne tient pas à ce que les choses changent.

Le projet de loi comporte d'autres défauts à nos yeux. Ainsi, il n'a pas l'appui de toutes les collectivités. Quatre des treize bandes de la province n'ont pas signé l'entente. Pendant l'étude en comité, les représentants de ces bandes nous ont fait part de sérieuses préoccupations au sujet du projet de loi. Ce sont des gens de la base qui ont exprimé des réserves.

Les chefs et leur entourage ont exprimé un soutien inconditionnel au projet de loi. Le ministère de l'Éducation de la Nouvelle-Écosse avait de sérieuses préoccupations. Il aurait aimé que l'amendement proposé soit adopté.

Les membres des bandes qui ne sont pas de l'entourage des chefs ont donné un autre son de cloche que les chefs. Ils n'ont pas été satisfaits des consultations. Les gens ne comprenaient pas les répercussions du projet de loi qui leur était présenté. Ils n'aimaient pas non plus l'idée de remettre tant de pouvoirs entre les mains d'un petit groupe de personnes.

Et la démocratie là-dedans? La démocratie ne consiste-t-elle pas à donner le pouvoir au peuple, aux gens de la base, à ceux qui ont besoin des services pour assurer leur qualité de vie et qui recevront ces services tous les jours? Les gens qui sont touchés ne sont pas persuadés qu'ils bénéficieront des avantages découlant des programmes d'éducation que le conseil administrera. Ils ne veulent pas que les chefs fassent partie de la composition du conseil.

Ce n'est pas la première fois qu'un tel cas se produit. Les fonds sont versés aux dirigeants, mais on dirait qu'ils finissent rarement par atteindre les gens qui en ont besoin. Je ne dis pas que ce sera encore le cas ici, mais le risque est là, vu la concentration des pouvoirs.

À notre avis, il serait sage que le gouvernement cesse de pousser l'adoption de ce projet de loi et étudie sérieusement diverses propositions de modifications démocratiquement élaborées pour voir s'il n'y aurait pas lieu de les intégrer. Des gens ont affirmé à la Chambre et au comité que l'on n'écouterait pas un représentant élu qui ne soit pas un chef. Or, tout le monde sait que si un chef ne cherche pas à se faire élire ou réélire, il ne perdra pas du coup l'influence qu'il exerce au sein de sa communauté. Il y sera toujours considéré comme un aîné. Il exercera beaucoup d'influence, son prestige sera grand, et les gens rechercheront son leadership, même si ce n'est pas sur le plan législatif.

Nous rejetons l'hypothèse voulant que les gens n'écouteront pas ce que dit un conseil élu. Nous croyons qu'il existe dans ces collectivités assez de gens capables et désireux d'assurer le leadership nécessaire. Oui, il y a des gens compétents qui seraient en mesure d'assurer ce leadership si l'occasion se présentait à eux, ce qui serait le cas si ce projet de loi était modifié de façon à instituer un conseil élu.

 

. 2040 + -

Notre parti se veut le champion de l'égalité de tous les citoyens et son but ultime est que tous les autochtones participent pleinement à la société, à la leur en premier lieu. Ce droit ne leur serait pas refusé sous le seul prétexte qu'ils ne sont pas chefs de bande.

Malheureusement notre parti ne peut souscrire à ce projet de loi parce qu'il confère des pouvoirs et des droits spéciaux aux chefs et non à l'ensemble de la bande. Nous craignons que les gens qui sont touchés par le projet de loi soient tenus à l'écart de la société canadienne du fait qu'on les confine à un système d'éducation réservé aux autochtones.

Nous estimons que toute la population de la Nouvelle-Écosse devrait avoir l'occasion d'apprendre comment les Mi'kmaq se gouvernaient, comment ils vivaient avant notre arrivée, comment ils vivent de nos jours, comment ils ont évolué au sein de leur société, de leurs structures de gouvernement, de leurs familles. Nous pensons que le système scolaire ordinaire devrait donner accès à tout ce qui compte pour les Mi'kmaq, les Canadiens et les résidants de la Nouvelle-Écosse.

Nous ne nous opposons pas au principe voulant que les Mi'kmaq aient le contrôle de leur éducation. Nous voulons simplement que ce contrôle soit réparti de façon un peu plus large et ne soit pas concentré entre les mains d'un groupe.

Le projet de loi a parfois été décrit par les représentants du ministère des Affaires indiennes et de l'Assemblée des premières nations comme une mesure importante, voire historique. Il importe de se rappeler ces qualificatifs. Il s'agit d'une mesure législative importante et historique qui établira de nouvelles relations entre les peuples autochtones et le gouvernement fédéral.

Comme il s'agit d'une mesure toute nouvelle, il n'y a aucune raison de l'adopter à toute vapeur. Il faut prendre tout le temps nécessaire, et il faut écouter ceux qui pourraient avoir des préoccupations légitimes. Si des personnes disent ne pas avoir été incluses dans le processus de consultation, il est de leur responsabilité de se faire entendre, mais il est de notre responsabilité de s'assurer qu'elles puissent effectivement être entendues et nous faire part de leurs préoccupations.

Ce projet de loi est une mesure importante et historique parce qu'il constitue un modèle dont pourront s'inspirer d'autres bandes. Cette mesure n'est pas une fin en soi. Certains ont dit que le projet de loi favorisera très certainement les possibilités d'éducation des Mi'kmaq. Toutefois, c'est seulement lorsque nous aurons des preuves concrètes que c'est le cas qu'on pourra faire de telles affirmations. En attendant, de telles déclarations sont tout au plus des hypothèses fondées. La justesse de ces affirmations ne pourra être confirmée que dans quelques années. Étant donné que nous ne pourrons revenir en arrière, j'exhorte le gouvernement à étudier ce dossier plus en profondeur et à ne pas précipiter les choses.

Faisons les choses de la bonne façon du premier coup, pour ne pas avoir à revenir en arrière pour essayer de modifier une mesure qui laisserait à désirer d'une façon aussi fondamentale.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, j'ai trouvé extrêmement intéressantes les idées du député qui vient de prendre la parole, idées qui sont représentatives de la position du Parti réformiste sur ce projet de loi.

J'ai aussi trouvé très intéressant d'entendre le député mentionner que d'autres partis appuient ce projet de loi parce que ces autres partis n'ont pas les profondes convictions démocratiques du Parti réformiste, alors que les opinions qu'il exprimait me semblaient tellement contraires à la démocratie.

C'est un fait que ce projet de loi donne suite à ce que les autochtones ont demandé et aux désirs qu'ils ont exprimés, mais ce parti essaie de faire valoir que ce qu'il propose est bien mieux, que les pouvoirs ne devraient pas être conférés aux chefs selon leurs désirs, mais plutôt à l'ensemble des membres.

 

. 2045 + -

Ainsi, parlant de démocratie, nous avons neuf bandes qui s'entendent là-dessus, et quatre qui ne sont pas d'accord. Nous savons que la règle de la majorité est un principe de la démocratie. Je ne sais pas comment votent les réformistes, quand ils exercent leur droit à la démocratie, mais pour ma part, 9 sur 13, c'est une majorité. Le fait que les quatre autres bandes conservent la possibilité d'adhérer à l'entente est aussi un point très important. Nous devons nous interroger sur les idées entourant l'opposition à ce projet de loi.

Nous entendons des questions et des observations; ceci est une observation. Le député a dit qu'il craignait que ce système sépare les autochtones de l'ensemble de la société. Dans quelle mesure, parce qu'ils auraient leur propre système d'éducation et parce qu'ils tireraient les ficelles, les autochtones pourraient-ils être plus séparés de l'ensemble de la société qu'ils ne l'ont été au cours des très nombreuses années où nous avons tenté d'en faire des gens comme les autres?

Nous avons essayé de les «civiliser». Nous avons essayé de les «assimiler». Au fil des ans, le gouvernement du Canada a fait bien des efforts pour les amener à faire ce qu'on croyait convenir aux autochtones, plutôt que de leur permettre de créer pour eux-mêmes ce qu'ils savaient être dans leur intérêt.

Nous voilà encore aux prises avec les mêmes attitudes. Si ce n'est pas fait à notre façon, ce n'est pas ce qu'il leur faut. Je trouve que c'est très, très troublant, et j'exhorte très fortement les députés qui défendent un tel point de vue à s'arrêter et à se regarder dans le miroir en réfléchissant un peu à ce qu'ils sont en train de dire. J'exhorte les députés à la Chambre à ne pas se laisser impressionner par ces arguments, pendant le débat qui devrait mener à l'adoption de ce qui est vraiment une mesure législative importante et historique.

M. Derrek Konrad: Monsieur le Président, en dépit du nom que porte le parti du député qui vient de parler, nous ne pensons pas qu'il est aussi démocratique que son nom le laisse entendre.

J'ai dit qu'il ne semblait pas y avoir eu des consultations suffisantes pour un projet de loi qualifié d'important et historique. Personne ne nie que l'on peut rapprocher le pouvoir du peuple. Nous voulons nous assurer que suffisamment de gens aient voix au chapitre, que suffisamment de gens puissent faire valoir leur point de vue afin que nous ayons la certitude que c'est ce qu'ils veulent.

Quand à savoir si le système actuel fonctionne, il a ses points forts et ses points faibles. Un certain nombre de chefs ont comparu devant nous en compagnie de leurs adjoints administratifs et de leurs enseignants. C'étaient des gens bien instruits qui s'exprimaient bien. J'estime donc qu'il est ridicule de mettre tous les gens dans le même panier et d'affirmer qu'ils ne sont pas bien instruits parce qu'ils ont été formés dans un système différent de celui que nous avons connu. Les gens peuvent s'épanouir dans n'importe quel système.

Le système prévu dans ce projet de loi pourrait leur convenir parfaitement. Quand est présentée une mesure aussi historique et importante que ce projet de loi, qui pourrait déterminer l'éducation de toute une génération, ce n'est sûrement pas trop demander que de s'attendre à de vraies consultations pour être certains que la démocratie a été respectée.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

 

. 2050 + -

 

Le président suppléant (M. McClelland): Par conséquent, le vote est reporté à demain, vers 13 heures.

*  *  *

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 juin, de la motion concernant les amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): C'est un plaisir, malgré l'heure tardive, de parler ce soir des amendements que le Sénat a apportés au projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

Avant de m'attarder sur les amendements apportés par le Sénat, je voudrais parler de la situation dans laquelle nous nous trouvons ce soir. Je suis persuadé que cette façon de procéder laisse à désirer. Nous avons vu que, malgré les plaidoyers des céréaliculteurs de l'ouest du Canada qui seront grandement touchés par le projet de loi, le gouvernement n'a guère tenu compte de leurs préoccupations. Le processus qui a permis à ce projet de loi de franchir les différentes étapes au Parlement laisse énormément à désirer.

Au début de la 36e législature, le ministre responsable de la Commission canadienne du blé et des Ressources naturelles s'était engagé à présenter ce projet de loi au tout début du nouveau mandat qui serait conféré à la suite des dernières élections, et il a tenu parole. Je pense que le projet de loi a été présenté au début d'octobre. À cause de la nouvelle façon de procéder, il a été renvoyé directement au comité au lieu d'être étudié à l'étape de la deuxième lecture, malgré le fait qu'une majorité de députés de l'opposition à la Chambre des communes avaient reçu énormément de lettres de céréaliculteurs de l'ouest du Canada qui exprimaient leurs inquiétudes au sujet du projet de loi. Malgré cela, le gouvernement a renvoyé ce dernier directement au comité.

Cette façon de procéder est censée donner au comité plus de temps pour étudier les modifications de fond et pour entendre des témoins et plus de temps pour que les députés des différents partis puissent contre-interroger les témoins à l'étape de l'étude en comité. Nous avons toutefois eu droit à une étude accélérée, même au sein du comité.

Le gouvernement, fort de sa majorité au sein du Comité permanent de l'agriculture, a fait franchir très rapidement l'étape de l'étude en comité au projet de loi et l'a ensuite renvoyé à la Chambre pour l'étape du rapport. Ayant senti cela, les partis d'opposition se sont abstenus de proposer des amendements, préférant le faire à l'étape du rapport, afin d'éviter qu'ils soient rejetés après une étude très sommaire. Ils ont préféré les garder pour l'étape du rapport.

 

. 2055 + -

À notre insu, et malheureusement pour les agriculteurs de l'Ouest du Canada, le gouvernement a procédé à toute vitesse à l'étape du rapport et il a invoqué la clôture, interdisant ainsi la poursuite du débat, même si la question n'avait pas été discutée à fond au comité.

Le processus est vraiment mauvais et le gouvernement n'écoute même pas les préoccupations des agriculteurs. Même si, à l'étape du rapport à la Chambre des communes, les quatre partis d'opposition ont proposé quelque 48 amendements, dont 30 environ venaient de l'opposition officielle, tous ces amendements ont été rejetés. Ils ont été très peu débattus, parce que le gouvernement a proposé une motion d'attribution de temps.

Il y avait des amendements importants, comme celui de la motion no 1 qui aurait amendé le préambule de la loi pour que la nouvelle Commission canadienne du blé agisse et s'administre dans l'intérêt des agriculteurs. De même, un amendement aurait éliminé les renvois au président en tant que membre du conseil d'administration, de sorte que le conseil d'administration aurait pu engager et congédier le président et directeur-général, contrairement à ce que prévoit le projet de loi actuel, qui réserve ce pouvoir au ministre.

Des amendements, qui auraient vu à ce que les 15 membres du conseil d'administration soient élus, et non dix élus et cinq nommés par le ministre, ont été rejetés par le gouvernement. La liste n'est pas exhaustive. Des amendements importants ont été proposés non seulement par l'opposition officielle, le Parti réformiste, mais par tous les partis d'opposition. On a fait remarquer, au cours du débat abrégé, qu'il n'y avait probablement jamais eu, dans l'histoire de la législation en matière agricole, un gouvernement qui ait provoqué l'ire d'autant d'intervenants en ce qui concerne la Commission canadienne du blé.

Nous avons rencontré des gens de tous les secteurs qui étaient très mécontents de cette mesure législative et contrariés de voir que le gouvernement ne tenait pas compte des préoccupations des agriculteurs et qu'il persévérait dans ce sens en dépit du fait qu'eux souhaitaient que des changements soient apportés. Les amendements que l'opposition a proposés répondaient directement aux préoccupations dont on nous avait fait part dans le cadre des travaux du comité ainsi que dans des lettres et dans nos conversations avec des groupements professionnels agricoles.

Dans son exposé de lundi soir sur le projet de loi C-4, dont nous étions alors saisis, le député de Brandon—Souris s'est dit d'avis que mes collègues réformistes et moi, nous nous sommes contredits quand nous avons décrié les amendements provenant du Sénat.

Il faut voir ce que ces amendements vont faire. Dès que la Chambre a renvoyé le projet de loi C-4 au Sénat, l'opposition officielle et tous les autres députés d'opposition ont certes encouragé le Sénat à tenir des audiences dans l'ouest canadien afin que les agriculteurs de l'ouest puissent lui faire part directement de leurs réserves à l'égard de cette mesure législative, ce que le Sénat a fait d'ailleurs.

J'ai trouvé à redire au résultat obtenu en bout de ligne, pas au fait que le Sénat soit au moins allé demander aux agriculteurs ce qu'ils pensaient du projet loi. Malheureusement, il ne les a pas écouté et il n'a pas proposé les amendements auxquels tenaient les agriculteurs.

La plus grosse lacune que présente cette mesure est assurément le manque de liberté de choix. Sous le régime du projet de loi C-4, les agriculteurs vont continuer de se voir imposer de lourdes amendes, quand ils ne seront pas emprisonnés, s'ils vont vendre leur grain eux-mêmes aux États-Unis. Que dire des possibilités qui vont bientôt s'ouvrir aux producteurs ontariens de grain?

 

. 2100 + -

Il faut se demander pourquoi il y a deux poids, deux mesures. Les Réformistes le font sans arrêt, et il n'y a pas de doute que les agriculteurs de l'Ouest le font constamment. Pourquoi y a-t-il des règles pour les producteurs de céréales de l'Ontario et des règles tout à fait différentes pour ceux de l'Ouest?

Ce vice fondamental du projet de loi et du fonctionnement de la Commission canadienne du blé va perpétuer cette différenciation. L'élection que ce projet de loi exige pour les dix places au conseil d'administration réservées aux producteurs finira par tourner en lutte opposant les producteurs qui prônent la vente par un guichet unique et privilégient le régime obligatoire actuel et le statu quo aux partisans d'une plus grande liberté de choix, de la démocratisation et d'une commission du blé totalement facultative.

Les agriculteurs en viendront probablement, en définitive, au lieu de voter pour les candidats qu'ils jugent les plus compétents et les plus aptes à gérer une entreprise de 6 milliards de dollars par an, à se prononcer sur un seul enjeu: préfèrent-ils maintenir la structure du guichet de vente unique de la Commission canadienne du blé ou une plus grande liberté de choix et l'examen d'options qui permettent aux agriculteurs de vendre leur grain, en tout ou en partie, sans passer par la Commission canadienne du blé? Je pense qu'il est malheureux que les agriculteurs aient à faire ce choix quand ils éliront, sans doute à l'automne, les dix membres du conseil.

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a déposé son rapport sur le projet de loi C-4 le jeudi 21 mai, après avoir consacré des milliers de dollars des contribuables à voyager dans tout l'Ouest canadien afin d'entendre ce que les agriculteurs pensent de la mesure. J'en ai déjà parlé, et j'applaudis à l'initiative du Sénat, qui a cherché à recueillir ces témoignages.

Au cours des audiences, il est devenu très clair, même aux yeux de certains sénateurs, que la majorité des agriculteurs n'étaient pas satisfaits du projet de loi. Ces derniers ont dit aux sénateurs qu'ils voulaient plus d'options quant à la possibilité de vendre leur produit sans avoir à passer par la Commission canadienne du blé et qu'il fallait éliminer la disposition d'inclusion, en vertu de laquelle d'autres grains pouvaient être assujettis à la Commission.

Certains agriculteurs avaient bon espoir que le Sénat propose d'importants changements qui tiennent compte des témoignages entendus, mais le Sénat a prouvé une fois de plus qu'il n'est qu'une marionnette dont le gouvernement tire les fils.

Je compte présenter tout à l'heure des sous-amendements aux cinq amendements du Sénat.

Le premier de ces amendements est corrélatif au deuxième, et ce dernier aura véritablement pour effet d'obliger le ministre à consulter le conseil d'administration au sujet de la nomination du président directeur général. Le ministre aura toujours le pouvoir de nommer le président de façon arbitraire la première année suivant l'entrée en vigueur de la modification.

Nous estimons—et nous avons proposé des amendements en ce sens pendant que le projet de loi était à l'étude à la Chambre—que c'est le conseil qui devrait avoir pleins pouvoirs en matière de nomination, y compris celui de congédier le président directeur général si celui-ci ne fait pas l'affaire.

Je vais proposer un sous-amendement qui va corriger la situation en garantissant que ce soit le conseil qui soit investi de ce pouvoir et qu'il nomme le président en consultation avec le ministre, et pas l'inverse.

Le troisième amendement du Sénat a trait au vérificateur général. Il s'agit d'un autre amendement que le Parti réformiste a présenté pour faire en sorte que le Commission canadienne du blé soit assujettie aux vérifications qu'effectue le vérificateur général et à la Loi sur l'accès à l'information.

Nous avons demandé à maintes reprises que la Commission canadienne du blé laisse le vérificateur général vérifier ses livres. Nous voyons dans cette mesure un élément de solution. Dans ce cas encore, le libellé de l'amendement présente de graves lacunes. Cet amendement ne stipule pas que le vérificateur général doit publier ses constatations. Un rapport adressé simplement au ministre est inefficace et inadéquat. Il s'agit d'une occasion que ne se représentera pas. Il n'est pas question d'entreprendre d'autre vérifications. De plus, l'amendement ne précise pas l'année ou les années d'activité de la Commission canadienne du blé à l'égard desquelles le vérificateur général entreprendra une vérification. On peut imaginer que la vérification pourrait porter sur les activités d'il y a 20 ans et rien de plus récent.

 

. 2105 + -

Lorsque des députés d'opposition l'ont consulté propos de cet amendement, le Bureau du vérificateur général a écrit une lettre au ministre responsable de la Commission canadienne du blé pour lui exposer les préoccupations que cet amendement lui inspirait. Les conseillers juridiques du vérificateur général ne voyaient pas très bien comment cet amendement pourrait s'inscrire dans le mandat et dans la loi régissant les fonctions du vérificateur général. La lettre exprimait la crainte que l'intention apparente de l'amendement tel que libellé ne donne pas grand-chose par rapport aux dépenses qu'il entraînerait.

Je présenterai moi aussi un sous-amendement; s'il est adopté, il confiera au vérificateur général un rôle permanent pour vérifier les opérations de la Commission canadienne du blé, il lui assurera la plus grande flexibilité possible pour effectuer ces vérification, et il garantira en outre qu'il fera rapport au Parlement, comme il devrait le faire et comme il le fait dans d'autres cas, et non simplement à l'organisme et au ministre responsable.

Les deux derniers amendements que le Sénat a proposés portent sur les dispositions d'exclusion et d'inclusion. Le quatrième a trait à l'exclusion et le cinquième, à l'inclusion, et ils découlent l'un de l'autre. Ce que nous constatons de nouveau ici c'est que le Sénat est revenu fondamentalement au statu quo, ajoutant un léger obstacle par lequel le ministre devrait prévoir la tenue d'une consultation et d'un plébiscite s'il désire ajouter de nouveaux grains.

On nous a répété je ne sais combien de fois ce que les agriculteurs pensent de la possibilité, si mince soit-elle, de nouvelles inclusions ou d'autres produits dans le mandat de la Commission canadienne du blé. C'est tout simplement inacceptable. Encore une fois, je présenterai un sous-amendement à ce sujet.

Je pourrais poursuivre mes commentaires sur certaines des recommandations du Sénat qui s'ajoutent à ces amendements, mais je n'ai pas suffisamment de temps à ma disposition. Je passerai donc aux sous-amendements que je compte déposer.

Ces recommandations ne lient en rien le gouvernement ou le ministre. C'est également là une lacune importante. Je crois que certaines de ces recommandations sont valables et je l'ai fait savoir. Ce ne sont toutefois que des recommandations. Ce ne sont pas des amendements. Les agriculteurs, particulièrement dans l'Ouest du pays, doivent bien le comprendre. Les recommandations qui portent sur le processus électoral menant au choix des directeurs sont basées sur un fondement géographique et les amendements qui traitent de l'imposition d'un plafond au fonds de réserve ne sont que des recommandations. Rien ne garantit qu'on en tiendra compte.

Ce qui m'amène à proposer mes sous-amendements. Je propose:  

    Que l'on amende la motion en en supprimant tout le texte et en le remplaçant par ce qui suit: «Qu'un message soit envoyé au Sénat informant Leurs honneurs que la Chambre adopte les amendements nos 1 et 4 apportés par le Sénat au projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, et qu'elle souscrit aux principes énoncés dans les amendements nos 2, 3 et 5, auxquels elle propose cependant d'apporter les amendements suivants:

    Que l'on amende l'amendement no 2 en remplaçant tout le texte du paragraphe 3.09(1) par ce qui suit: «Le président directeur général est nommé par le gouverneur en conseil sur la recommandation des administrateurs et exerce ses fonctions à titre amovible pour la durée que fixe le conseil d'administration.»; en remplaçant le terme «ministre», au paragraphe 3.09(2) et à l'alinéa 3.09(2)a), par le terme «conseil»; et en remplaçant le terme «conseil», à l'alinéa 3.09(2)a), par le terme «ministre»;

    Que l'on amende l'amendement no 3 en remplaçant tout le texte du premier paragraphe par ce qui suit: «Dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur du présent article, le vérificateur général du Canada commence la vérification des comptes, des transactions financières, des systèmes de gestion de l'information et des pratiques de gestion de la Commission pour les exercices dont il juge indiqué de les vérifier, et fait rapport de sa vérification à la Commission, au ministre et au Parlement.»

    Que l'on amende l'amendement no 5 en ajoutant à l'article 5 le texte qui suit: «c) la participation des producteurs à la Commission canadienne du blé est facultative.»

Autrement dit, l'amendement no 5 ne serait pas adopté, et il ne serait permis en aucune circonstance d'inclure davantage de denrées sous le régime de la Commission canadienne du blé jusqu'à ce que la participation à cette dernière soit volontaire.

 

. 2110 + -

Le président suppléant (M. McClelland): L'amendement est recevable.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris): Nous sommes manifestement en période creuse, monsieur le Président. Les libéraux n'ont pas prêté l'oreille aux amendements lorsque moi et d'autres députés de l'opposition les avons proposés initialement. Ils ne semblent pas disposés à entendre des amendements logiques à cette étape du débat sur le projet de loi C-4.

Des voix: Oh, oh!

M. Jay Hill: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je vous demanderais d'ordonner aux libéraux en face d'essayer de faire moins de bruit. J'aimerais entendre ce que dit le député de Brandon—Souris dans le cadre du débat sur mes sous-amendements.

Le président suppléant (M. McClelland): Il s'agit d'une requête bien raisonnable.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le Président. Il se fait tard, non seulement en ce qui concerne la séance, mais aussi la soirée. Les gens d'en face ont laissé entendre que je devrais donner une leçon au député de Prince George—Peace River, mais la seule chose que je donnerais à ce député, ce sont de bonnes notes pour sa persévérance. Je le ferais parce qu'il a élaboré un amendement qui a été discuté à satiété au comité et dans cette auguste assemblée. Cet amendement améliorerait le projet de loi.

J'ai eu l'occasion d'intervenir sur les amendements du Sénat et j'ai parlé en leur faveur, même si je l'ai fait avec réticence. Franchement, de nombreux amendements proposés par le Sénat ont fait l'objet de discussions parmi les députés d'opposition au comité. Je reconnais le mérite du Sénat qui a pu ainsi améliorer le projet de loi. Ce projet de loi est loin de la perfection, mais il est bon parce qu'il traite de diverses questions très délicates. Le député a aidé à proposer des amendements qui ne sont pas extrêmement importants, mais qui sont susceptibles d'améliorer le projet de loi.

Nous le savons tous, le gouvernement exerce le pouvoir et il adoptera ce projet de loi d'une façon ou d'une autre. Malheureusement, cela ne réglera pas les problèmes qui se posent dans l'Ouest du Canada. Quand le projet de loi sera adopté, il exacerbera peut-être les problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs de l'Ouest.

 

. 2115 + -

À voir les députés qui sont là aujourd'hui, il se pourrait bien que nous traitions de cette mesure législative avant que la 36e législature ne s'ajourne pour de bon. Je pense qu'elle va revenir à la Chambre avant trois ans.

Je voudrais faire certains commentaires à propos des amendements qui ont été proposés. Le Parti conservateur les appuiera pour la simple raison que, généralement, c'est nous qui les avons présentés à la Chambre et en tout cas au comité.

Le premier qui concerne la nomination du président par le conseil, n'est pas nouveau. Cette question a été discutée ad nauseam et c'est la bonne façon de diriger une entreprise. Quand le président-directeur général est responsable du conseil d'administration, l'entreprise doit rendre des comptes. Quand le président-directeur général est nommé par une tierce partie, le conseil d'administration n'est plus comptable devant cette personne dont la responsabilité est alors très franchement compromise.

Je suis heureux d'avoir enfin une audience. C'est agréable de constater qu'après un petit faux-pas, le whip du Parti libéral a peut-être plus d'autorité qu'il n'en avait avant.

Le deuxième amendement concerne le vérificateur général, mais n'est pas nouveau. Il a déjà été proposé. Le vérificateur général sert de contrepoids, ce contrepoids que veulent les Canadiens et que veulent aussi les propriétaires de la Commission canadienne du blé—les producteurs. On nous dit constamment que ce sont les producteurs qui possèdent la Commission canadienne du blé, malheureusement, les producteurs n'ont pas l'occasion de savoir ce qu'ils possèdent vraiment et comment la commission fonctionne.

L'amendement du Sénat est une amélioration du projet de loi. Maintenant, au moins, le gouvernement a accepté que le vérificateur général joue un rôle dans la Commission canadienne du blé. Toutefois, cela ne va pas assez loin. J'ai dit de l'amendement qu'il nous amenait à un autre niveau, un bien meilleur niveau.

Le vérificateur général devrait avoir la possibilité et le droit de vérifier les comptes de la Commission canadienne du blé. Le public et les propriétaires de la commission, les producteurs, devraient avoir le droit d'accès à ce que dit le vérificateur général.

Le vérificateur général va bien dans les ministères du gouvernement leur dire ce qu'ils font de mal et comment améliorer la situation. C'est une vérification opérationnelle, pas seulement un examen des états financiers que les producteurs reçoivent déjà de la Commission canadienne du blé.

L'amendement est légitime et solide et il rendra cette organisation bien plus responsable à l'égard de ses propriétaires, les agriculteurs.

Nous avons parlé longuement, très longuement, de l'inclusion et de l'exclusion, et je dirais que c'est la clause la plus dangereuse de cette mesure législative. J'ai dit dans cette Chambre que si le gouvernement supprimait la clause d'inclusion, nous accepterions, malgré nos réserves, d'appuyer ce projet de loi.

Avec l'amendement du Sénat à cette clause, un amendement mineur, on a une protection et un certain équilibre. Il est toujours question de plébiscite, comme dans la loi initiale. Mais on stipule maintenant que le plébiscite ne consiste pas simplement en une décision d'un ministre ou du conseil d'administration, et que la résolution finale devra être renvoyée à la Chambre et adoptée sous forme de loi.

Je puis assurer les députés que, si quelqu'un présentait à la Chambre une mesure législative visant à confier un autre produit à la Commission canadienne du blé, on assisterait à des émeutes dans les rues de nos collectivités de l'Ouest. Les producteurs n'accepteraient pas de devoir passer par la Commission canadienne du blé pour vendre d'autres produits.

Il s'agit là d'un bon amendement et je félicite le député de Peace River de l'avoir présenté. C'est un bon amendement en ce qu'il stipule qu'une disposition d'inclusion n'a pas sa place tant que la participation des producteurs à la Commission canadienne du blé ne se fera pas à titre volontaire. C'est tout à fait sensé. Pas question d'ajouter un autre produit tant qu'il ne s'agira pas d'un organisme à participation volontaire. Mais inclure d'autres produits quand la commission du blé deviendra un organisme à participation volontaire pour qu'elle puisse être sur un pied d'égalité avec d'autres compétiteurs. Donc, c'est tout à fait sensé.

 

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Je suis désolé de devoir le dire, mais c'est la première fois que le député fait preuve de bon sens, avec ces quatre bons amendements. Quoi qu'il en soit, nous allons appuyer les amendements tels quels. L'ennui, c'est que je suis convaincu—et le député de Peace River le confirmera—que ces amendements, qui sont pourtant tout à fait logiques et amélioreraient considérablement la mesure législative, ne seront pas approuvés. Il est très difficile de prendre la parole ici et de dire que, même si ces amendements sont de nature à améliorer le projet de loi, ils ne seront toujours pas acceptés par le gouvernement.

J'ignore pourquoi le gouvernement n'approuvera pas ces amendements. Mais il s'en gardera bien. Des députés là-bas s'apprêtent à en parler. Ils nous diront pourquoi on aurait tort de permettre aux gens de choisir, tout comme on aurait tort de faire de la commission du blé un organisme qui doive rendre des comptes. Les députés libéraux vont nous expliquer ce qu'a de si terrible l'idée que le président directeur général ait des comptes à rendre au conseil d'administration. Ils vont nous expliquer pourquoi c'est si épouvantable.

Je regrette que nos amendements ne puissent aller plus loin que l'étape du vote demain. Ces amendements, qui ont été déposés par des députés de tous les partis de l'opposition à l'exception du NPD, reviendront à la Chambre. Nous ne serons peut-être pas là pour les examiner, mais il en sera de nouveau question, car le projet de loi laisse à désirer. Il ne résoudra pas les problèmes qui se posent sur les marchés. Il va les aggraver. Le lendemain de la proclamation du projet de loi, les problèmes qui existent aujourd'hui subsisteront.

J'ajouterai que, avec les amendements que le Sénat a proposés au projet de loi C-4, nous appuierons cette mesure avec réserve. J'aurais préféré l'appuyer avec les amendements que nous proposons. Malheureusement, à mon avis, cela ne se produira pas.

Ce fut un exercice très utile. Le député de Peace River a expliqué, comme d'autres intervenants, comment le projet de loi s'est retrouvé à la Chambre. Je suis d'ailleurs un peu déçu que le gouvernement n'ait pas écouté davantage les producteurs visés par cette mesure législative.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, la Commission canadienne du blé et les amendements proposés constituent une question très sérieuse.

Le député de Prince George—Peace River doit avoir la mémoire courte en ce qui concerne ce qui s'est produit et la façon dont nous sommes arrivés à ces amendements d'aujourd'hui après avoir tenu des audiences.

Le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire a tenu des audiences exhaustives dans tout l'ouest du pays. Les députés et moi-même avons assisté à des audiences où les agriculteurs nous faisaient part de beaucoup de choses. Il est regrettable que mon collègue n'ait pas été là. Il était dans sa propre région. Le comité permanent a présenté un grand nombre d'amendements au projet de loi pour donner suite aux voeux des producteurs. Ces amendements rendaient la commission plus puissante du point de vue des agriculteurs et donnait suite à ce que les agriculteurs nous avaient demandé de faire.

Je l'ai dit à de nombreuses reprises, la Commission canadienne du blé est sans aucun doute une agence fort respectée dans le monde entier. Elle a le respect des agriculteurs canadiens. Elle les sert bien depuis sa création, en 1935. Durant des années difficiles dans le secteur céréalier, elle a réussi à maximiser les rendements pour les producteurs.

 

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Lorsqu'on compare nos rendements nets à ceux des producteurs américains, on s'aperçoit que nous avons généralement et presque toujours mieux réussi à maximiser les rendements nets pour les producteurs primaires. Il n'a pas été simplement question d'un marché libre ici ou là. Il s'agit plutôt de l'argent que les agriculteurs ont dans leurs poches. Or, à cet égard, la Commission canadienne du blé a très bien servi les intérêts des agriculteurs au fil des ans.

Je veux parler un instant des tactiques utilisées par l'opposition et dire ce qu'elle fait. Les députés de l'opposition, surtout les réformistes, jouent le jeu des grandes sociétés céréalières fondamentalement avec les amendements qu'ils présentent. C'est ce qu'ils font. Ces amendements affaibliraient les outils de commercialisation sur lesquels les producteurs céréaliers de l'Ouest peuvent compter pour maximiser leurs rendements. Les députés de l'opposition jouent le jeu d'entreprises comme Cargill Grain et d'autres.

J'ai eu l'occasion de beaucoup parcourir les États-Unis au fil des ans. Il est intéressant de constater que lorsqu'on s'adresse aux agriculteurs américains, beaucoup d'entre eux disent souhaiter avoir une agence comme la Commission canadienne du blé pour détenir le pouvoir que la commission donne aux producteurs canadiens.

Je voudrais vous citer ce que Robert Carlson, du Syndicat national des agriculteurs des États-Unis, avait à dire devant le Comité de l'agriculture de la Chambre des représentants: «D'un point de vue compétitif, les agriculteurs américains n'ont pas un organisme comme la Commission canadienne du blé qui leur donne un pouvoir de commercialisation sur le marché international des grains. Fondamentalement, nous le vendons pour le meilleur prix offert par nos silos locaux et nous ne nous intéressons plus à notre grain après cela. Nos exportations sont dominées par quelques...»

Une voix: Ils obtiennent des prix plus élevés.

M. Wayne Easter: Si le député écoutait, il comprendrait que, du point de vue des agriculteurs qui font face à la concurrence, les amendements proposés par le Parti réformiste contiennent des erreurs qui leur seraient préjudiciables.

Comme je le disais, notre marché des exportations est dominé par quelques grandes entreprises qui sont intéressées à acheter à faible prix mais à revendre au prix fort.

Les réformistes n'ont peut-être pas encore compris que celui qui vend au plus bas prix détermine le prix du marché international. Si un producteur primaire au Canada vend à faible prix, cela aura un effet à la baisse sur l'ensemble des prix au Canada. En appliquant un système de vente à guichet unique, la Commission canadienne du blé tente de maintenir les prix élevés et de protéger la structure des prix au Canada contre une concurrence négative.

M. Carlson ajoute que notre marché des exportations est dominé par quelques grandes entreprises qui sont intéressées à acheter à faible prix mais à revendre au prix fort, afin d'accroître les revenus de leurs propriétaires, qui ne sont généralement pas les producteurs du grain qui est vendu. Selon lui, le but avoué des défenseurs du libre-échange agricole est de créer un marché des grains sans frontières nationales, sans subventions intérieures, sans contingentements ni tarifs et sans mises en commun ni mécanismes de soutien des prix comme les STE. Il ajoute que ce serait formidable pour les acheteurs de grain, mais déplorable pour les producteurs, qui seraient pleinement vulnérables sur le plan économique.

Il termine en affirmant que si nous détruisons—et c'est précisément ce que tentent de faire les réformistes par leurs amendements—les institutions que les agriculteurs de nombreux pays ont mis sur pied pour accroître leurs chances de survie économique, il ne restera que des producteurs dépourvus parmi les ruines des structures qui leur assuraient un pouvoir et les protégeaient dans un marché dominé par des géants.

Voilà ce qu'il en est à l'heure actuelle. La Commission canadienne du blé nous assure un pouvoir énorme.

Permettez-moi de parler brièvement de la vérification. Mes vis-à-vis veulent que le vérificateur général examine les comptes de la Commission. Or, le vérificateur extérieur attitré des comptes de la Commission canadienne du blé est le réputé cabinet d'experts-comptables Deloitte & Touche. Chaque rapport annuel de la Commission contient des états financiers vérifiés en profondeur.

En vertu du projet de loi C-4, le conseil d'administration, qui serait contrôlé par les producteurs, aurait le pouvoir de créer son propre comité de vérification interne, comme n'importe quelle autre entreprise privée.

 

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Le Sénat a approuvé un amendement au projet de loi C-4 qui autoriserait le vérificateur général à faire une seule vérification des comptes et des transactions financières de la commission et de faire rapport au conseil d'administration, qui est composé d'une majorité de deux tiers d'agriculteurs, ainsi qu'au ministre. Rien d'autre ne devrait être nécessaire.

Il reste que le rapport annuel de la commission est vérifié par une firme réputée. Il contient 84 pages d'information sur les transactions financières de la Commission canadienne du blé. Avons-nous ce genre d'information sur Cargill Grain? Bien sûr que non. Y a-t-il une des grandes sociétés céréalières qui fait montre d'une telle transparence? Bien sûr que non.

L'introduction du rapport annuel de 1995-1996 de la Commission canadienne du blé stipule qu'une évaluation du rendement de la commission a été faite en 1995-1996. Selon cette évaluation, le Canada obtient d'excellentes notes auprès de ses clients pour ce qui est de la qualité du produit, du service aux clients, du soutien technique et de la fiabilité de l'approvisionnement.

Une autre étude effectuée par trois économistes montre que le système de comptoir unique de la Commission canadienne du blé génère des ventes supplémentaires de blé totalisant 265 millions de dollars, ce qui accroît la compétitivité du Canada et permet aux producteurs d'empocher plus d'argent.

M. Leon E. Benoit: Vous avez déjà présenté cet argument.

M. Wayne Easter: Le député a dit que j'avais déjà présenté cet argument. Oui, c'est vrai. Il semble pourtant que le député de Lakeland n'ait pas saisi la valeur de la Commission canadienne du blé, car il continue de l'attaquer. Il continue de parler du double système de mise en marché, qui n'existe tout simplement pas. Nous ne pouvons pas avoir simultanément un comptoir de vente unique et un système de vente libre. Il y a là une contradiction flagrante.

Si nous avions les deux systèmes en même temps, nous n'aurions en fait qu'un système de vente libre, car ce système finirait par miner le système de comptoir de vente unique, dont l'objectif est de procurer le prix maximum aux producteurs en éliminant les effets négatifs de la concurrence que, de toute évidence, le député de Prince George—Peace River appuie. Il doit de toute évidence appuyer les prix déprimés pour les producteurs de céréales parce que c'est inévitablement à cela que conduirait son amendement.

La Commission canadienne du blé a travaillé à renforcer ses trois piliers: le comptoir de vente unique, la mise en commun des prix et le partenariat avec le gouvernement fédéral, qui garantit les emprunts et les prix initiaux.

Le député de Prince George—Peace River a présenté un amendement, je crois, pour que tous les membres de la Commission soient élus.

Je présume qu'il faut se demander: Dans cette nouvelle Commission, le conseil d'administration aura-t-il un vrai pouvoir? Pour ma part, je suis partisan d'une Commission dont les membres sont élus. Ils ont bien rempli leurs fonctions au fil des ans. Nous avons nommé des commissaires pour leur savoir-faire en commercialisation. Ils ont mis sur pied un merveilleux programme de ventes en Chine et dans d'autres pays. Comme je l'ai dit précédemment, ils ont remis chaque année aux producteurs quelque 265 millions de dollars de plus que ce qu'ils auraient reçu en l'absence de cette Commission. J'ai appuyé ce système.

J'ai toutefois clairement entendu les producteurs dire qu'ils voulaient une plus grande mainmise sur la Commission. Ils auront cette mainmise, car 10 des 15 administrateurs seront élus par les producteurs. Auront-ils un vrai pouvoir? Il est évident que la réponse est oui. Contrairement à ce que disent les députés d'en face, ils auront un vrai pouvoir. Comme dans toute entreprise moderne, tous les pouvoirs de la Commission canadienne du blé seront conférés aux administrateurs.

 

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Le projet de loi dit clairement: «La direction et l'administration des affaires de la Commission sont assurées par un conseil d'administration investi, à ces fins, de tous les pouvoirs conférés à la Commission.» C'est ce que dit le projet de loi. Le conseil est investi de tous les pouvoirs conférés à la Commission.

Les membres du conseil auront certes une lourde responsabilité à assumer, puisqu'ils seront chargés d'une entreprise de 6 milliards de dollars.

Le député d'en face demande ce qu'il advient du président directeur général. Le fait est que les administrateurs choisiront un président parmi un des leurs. Les réformistes affirment que le conseil d'administration devrait choisir le président.

Les contribuables du Canada assurent un énorme soutien financier aux producteurs céréaliers de l'ouest du Canada, par l'entremise du gouvernement du Canada et plus précisément de la Commission canadienne du blé. Donc, nous devons certainement avoir notre mot à dire dans la nomination du premier dirigeant.

L'an dernier, on a approuvé quelque 60 millions de dollars de garanties sur les emprunts et les prix initiaux. C'est un lourd engagement financier pour les contribuables canadiens. Nous voulons nous assurer que nous avons quelque chose à dire dans le choix du premier dirigeant, mais nous nous assurons également, par ce projet de loi, que le conseil a aussi son mot à dire et qu'il sera consulté sur le choix du premier dirigeant.

Comme je le disais, les administrateurs choisiraient l'un des leurs à titre de président du conseil. Ils seraient consultés sur la nomination du président directeur général et détermineraient eux-mêmes la rémunération du président directeur général, du président du conseil et des administrateurs. S'ils n'aimaient pas le président directeur général, ils réduiraient simplement sa rémunération. C'est aussi simple que cela.

Ils contrôleraient la gestion, la supervision et l'orientation stratégique de la Commission canadienne du blé.

Si les administrateurs n'étaient pas contents de certains aspects du fonctionnement de la Commission canadienne du blé, ils pourraient faire les changements nécessaires. Ils auraient aussi la responsabilité de présenter les nouveaux outils de commercialisation comme les transactions au comptant, le versement accéléré de rajustements et le paiement forfaitaire anticipé des livraisons en commun.

Les amendements présentés par le député de Prince George—Peace River nuiraient à ce puissant outil de commercialisation pour les producteurs céréaliers de l'ouest canadien. De ce côté-ci de la Chambre, nous prenons la défense des producteurs céréaliers de l'Ouest. Nous voulons assurer leur prospérité dans les années à venir et ces nouvelles dispositions, ces nouveaux pouvoirs, ces nouvelles procédures qui leur sont conférés grâce au projet de loi C-4 comptent parmi les moyens qu'ils auront à leur disposition. Nous sommes sûrs que cette mesure législative leur donnera les moyens d'obtenir ce qu'ils désirent.

Le président suppléant (M. McClelland): Questions et observations. Le député de Prince George—Peace River. Je demanderais au député d'être bref.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je ne sais pas comment on peut se limiter à une intervention courte après avoir écouté la tirade socialiste du député.

Aux yeux des agriculteurs qui suivent le débat de ce soir, et je suis sûr qu'il y en a quelques uns, ce genre d'absurdités est exactement ce contre quoi les gens se sont battus au fil des ans pour défendre leur liberté. Depuis la nuit des temps, les gens doivent lutter pour protéger leur liberté contre ce type d'attitude. C'est un fait.

Comme nous sommes pressés par le temps, je n'aborderai qu'une seule question, celle du système mixte de commercialisation, de la liberté de choix et de la participation volontaire à la Commission canadienne du blé.

Comment se fait-il que les agriculteurs ontariens puissent élire tous les membres du conseil d'administration de l'Office de commercialisation du blé de l'Ontario? Ils élisent la totalité du conseil d'administration, pas uniquement les deux tiers. Ils pourront vendre eux-mêmes leurs grains directement à l'étranger sans passer par le Commission canadienne du blé.

Pourquoi ce qui est juste et bien et qui fonctionne en Ontario ne pourrait pas fonctionner dans l'Ouest?

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, je ne suis pas vexé de m'être fait traité de socialiste.

M. Jay Hill: Parce que vous en êtes un.

M. Wayne Easter: Je ne sais pas ce qu'en pensent mes collègues, mais personnellement ça ne me vexe pas. Pour moi, cela veut dire que je prends la défense des gens et je dois admettre que c'est ce que j'ai toujours fait.

 

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Je me souviens de l'époque où le député d'en face était le porte-parole des agriculteurs de la région de Peace River et que j'étais dirigeant d'une organisation agricole nationale dont le siège était à Saskatoon, dans la Saskatchewan. Il y a une caractéristique dans cette organisation que j'ai toujours défendue et que je continue à défendre aujourd'hui quand je défends les agriculteurs de ce pays et les céréaliculteurs de l'Ouest.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le député d'en face veut miner les chances de ces agriculteurs de réaliser un profit maximum sur le marché international. Ça me dépasse.

Pour ce qui est de la comparaison entre l'Office de commercialisation du blé de l'Ontario et la Commission canadienne du blé, cette dernière reçoit une aide importante du gouvernement canadien en ce qui a trait à ses marchés désignés.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trois petites questions. Je veux que le député sache que je me suis entretenu au téléphone avec plusieurs agriculteurs de ma circonscription qui regardent la chaîne parlementaire ce soir et qui m'ont demandé de poser ces trois questions et qui veulent entendre la réponse du député ce soir.

Première question. Il y a un céréaliculteur de ma circonscription qui affirme: «Je me suis battu pour la liberté. Pourquoi l'ai-je perdue?»

Deuxième question. Un autre agriculteur dit ceci: «Il est arrivé au fil des ans que Revenu Canada envoie des vérificateurs pour examiner mes livres, que je confie à une entreprise privée. Pourquoi ne pourrait-on pas demander à l'occasion au vérificateur général de confirmer cette entreprise privée?»

La dernière question est celle d'un jeune agriculteur qui demande: «Pourquoi les agriculteurs de l'Ontario et du Québec ne se bousculent-ils pas au portillon de cette magnifique Commission canadienne du blé? Pourquoi ne se précipitent-ils pas tous pour s'inscrire si c'est une si bonne affaire?»

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, en réponse à la question du député de Wild Rose concernant l'agriculteur de 82 ans qui dit s'être battu pour la liberté, ce dernier a raison et c'est ce qui explique en fait pourquoi nous avons ce débat aujourd'hui.

La liberté existe sous le régime de la Commission canadienne du blé. Il y a de la liberté dans notre pays. Le comité consultatif de la Commission canadienne du blé a été constitué pour conseiller cette commission. Dans toutes les élections qui ont eu lieu dernièrement, ce sont des personnes qui étaient pour la Commission canadienne du blé qui ont été élues. C'est là la preuve que le milieu agricole de l'Ouest y est favorable, car il élit des producteurs qui sont pour la commission du blé.

Le député a posé une question au sujet de Revenu Canada. L'amendement apporté par le Sénat traite de cette question. Personnellement, je n'y vois pas d'utilité. Comme je l'ai dit, la Commission canadienne du blé publie un rapport annuel qui comprend tous les états financiers dûment vérifiés. C'est très transparent. Ce n'est pas le cas de la compagnie Cargill et des autres compagnies. Toutes les données sont là et c'est très clair.

Je vais vous citer ce que disent en partie les agriculteurs de l'Ouest. Nettie Wiebe est présidente du Syndicat national des cultivateurs. Je crois que certains députés la connaissent. Voici ce qu'elle avait à dire: «La grande majorité des agriculteurs tiennent à ce que la Commission canadienne du blé soit renforcée et agrandie. Ils tiennent à ce qu'elle soit protégée dans la série de pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce prévue en 1999.»

 

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Les agriculteurs sont heureux de pouvoir compter sur les économies et la sécurité qu'apporte la garantie du gouvernement à l'égard de tous les prix. Ils sont heureux de pouvoir compter sur la garantie du gouvernement à l'égard des emprunts et des opérations et ils tiennent à ce que ces garanties soient renforcées. Voilà ce que disent les agriculteurs.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, je reviendrai tout à l'heure sur des observations du député. Ma question au député de Malpèque est très simple et directe: en tant que producteur laitier de l'Île-du-Prince-Édouard, comment peut-il prétendre savoir mieux ce qu'il faut faire que les agriculteurs ontariens qui ont clairement opté pour une commission du blé responsable à participation volontaire?

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, au moins, le député de Lakeland se rapproche de la vérité. La dernière fois que j'ai pris la parole à la Chambre, il m'a appelé le producteur de pommes de terre. Maintenant, il est un peu plus près de la vérité. Je sais ce qui se passe dans l'ouest du Canada. J'ai passé 17 ans de ma vie à faire du syndicalisme dans l'Ouest.

J'ai fait plus d'assemblées de cuisine et d'assemblées publiques dans l'Ouest que le député. J'ai manifesté dans la rue pour qu'on renforce les pouvoirs de la Commission canadienne du blé au fil des années lorsque des gouvernements essayaient de les miner.

Lorsque l'ancien ministre chargé de la Commission canadienne du blé, Charlie Mayer, a essayé de miner le pouvoir de la Commission canadienne du blé en lui retirant illégalement la commercialisation de l'orge, j'ai manifesté dans la rue pour sauver ce pouvoir. Où diable était le député lorsqu'il a fallu faire cela? En tant que Canadien et ancien chef de file du secteur agricole, j'ai parfaitement le droit d'exprimer ici mon opinion et l'opinion des agriculteurs de l'Ouest qui, je le sais très bien, appuient la Commission canadienne du blé.

D'après Nettie Wiebe, qui préside l'union des agriculteurs, «la vaste majorité des agriculteurs veulent que les pouvoirs de la Commission canadienne du blé soit renforcés et étendus.» Les amendements proposés par le député de Prince George—Peace River mineraient les pouvoirs mêmes que les agriculteurs veulent voir renforcer et étendre.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, le député de Lakeland a dit il y a quelques minutes qu'il s'agissait d'un vieux discours emprunté au député de Malpèque. Si tous ces discours devaient être nouveaux, nous aurions été silencieux sur cette question depuis environ le 15 octobre, car il n'y a rien eu de neuf dans ce débat depuis à peu près la première semaine où il a commencé. Les choses se sont détériorées depuis.

Nous sommes encore une fois ici ce soir en partie en raison des amendements présentés par le député de Prince George—Peace River. Le Sénat s'est prononcé sur le projet de loi C-4. À la suite de leurs audiences dans l'ouest du Canada, plus tôt ce printemps, les sénateurs ont proposé trois amendements et formulé deux recommandations.

La Chambre est maintenant saisie du projet de loi amendé par le Sénat. Que le gouvernement le présente à la Chambre signifie qu'il approuve le projet de loi amendé ou, du moins, qu'il accepte ses dispositions. Sinon, il aurait décidé de ne pas le présenter de nouveau.

 

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Le projet de loi modifié fera l'objet d'un débat unique. Il n'y aura pas de partage de temps et il n'y aura pas de vote sur chaque amendement proposé. Il n'y aura qu'un seul vote.

Si la mesure législative est adoptée—et le gouvernement va s'assurer que c'est le cas—celle-ci sera prête pour la sanction royale. Elle ne sera pas renvoyée à l'autre endroit pour un autre vote.

Les amendements proposés par le Sénat incluent la suppression des dispositions actuelles d'inclusion et d'exclusion. Il existe un mécanisme pour inclure ou exclure des types de grain, mais en réalité la décision initiale est prise par le ministre. Dans la version originale du projet de loi, la décision d'inclure ou d'exclure certains types de grain aurait été prise par un ou plusieurs groupes d'agriculteurs.

Selon nous, c'est là une autre indication selon laquelle le projet de loi ne fait pas ce qu'a toujours prétendu le ministre, c'est-à-dire donner le contrôle aux producteurs de grains. Celui-ci prévoit plutôt que, chaque fois que les choses se corsent, il faut redonner le contrôle au gouvernement ou, dans ce cas-ci, au ministre. Au lieu de donner le contrôle aux producteurs de grains, comme l'a prétendu le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, le projet de loi éloigne encore davantage ces derniers du processus décisionnel.

Le ministre doit consulter le conseil d'administration et faire tenir un vote par les producteurs sur l'inclusion et l'exclusion. En outre, le Parlement devra maintenant adopter des mesures législatives précises pour inclure ou exclure des types de grains. Nous pensons que c'est là une capitulation des intéressés et du lobby des producteurs de la droite, qui voulaient que les deux articles soient supprimés du projet de loi. Ils ne voulaient pas vraiment que la disposition d'exclusion soit supprimée, mais nous sommes prêts à faire ce compromis pour nous débarrasser de la disposition d'inclusion.

À notre avis, la disposition sur l'ajout de cultures était l'une des rares caractéristiques rachetant les défauts du projet de loi, selon certains partisans de la commission du blé, y compris le SNC, comme l'a fait remarquer le député qui vient de parler, et le comité consultatif de la commission du blé.

En ce qui a trait au deuxième point des recommandations du Sénat, les modifications proposées par le Sénat stipulent que le ministre doit consulter le conseil avant de nommer un président. Le ministre n'était pas tenu de le faire aux termes du projet de loi C-4, mais il a dit qu'il le ferait de toute façon, de sorte que ce n'est pas une grande amélioration.

En ce qui concerne la modification proposée par le Sénat qui porte sur le vérificateur général et l'accès à l'information, on lit que deux ans après l'entrée en vigueur de la loi, le vérificateur général devrait soumettre la société à une vérification. La question de la transparence de la commission du blé était très importante pour le Parti réformiste et ceux qui s'opposent à la commission. Le ministre responsable de la commission a hésité à autoriser le vérificateur à le faire, mais il a fini, de toute évidence, par accepter.

Les sénateurs ne proposent pas que la commission soit assujettie aux lois sur l'accès à l'information. Ils estiment que les nouveaux administrateurs auront accès à toute l'information pertinente et qu'ils devraient décider ce qui doit être rendu public.

Outre ces trois amendements, le Sénat a fait deux autres recommandations. Des dix administrateurs élus, cinq viendraient de la Saskatchewan, trois, de l'Alberta, et deux, du Manitoba.

Deuxièmement, les règlements stipulent que le fonds de réserve ne dépassera pas 30 millions de dollars. C'est un petit pas dans la bonne direction, mais le directeur général de la commission du blé croyait que le fonds de réserve pourrait s'élever jusqu'à 575 millions de dollars.

Troisièmement, le fonds de réserve doit être divisé en trois comptes en fonction de leur usage, soit les paiements garantis initiaux, la couverture des pertes des comptes communs et la couverture des pertes possibles dans les échanges au comptant.

Le Sénat a également fait remarquer que les agriculteurs devraient voter pour les administrateurs sur la base d'une voix par agriculteur plutôt que sur la base du volume de grain livré, comme le suggérait le Parti réformiste l'automne dernier. Il faudrait imposer des limites de dépenses pour les élections, mais les sénateurs n'ont rien suggéré à cet égard.

Les sénateurs ont noté l'intensité et l'amertume du débat sur la question du double système de commercialisation. Ils n'ont pas pris position, mais ont dit que le nouveau conseil d'administration pourrait prendre plus tard des décisions à ce sujet.

Pour notre part, nous, du caucus des députés néo-démocrates fédéraux, nous sommes contre le projet de loi même avec la disposition d'inclusion. Nous nous opposerons au projet de loi avec ces amendements qui ont essentiellement pour effet de supprimer cette disposition. Nous voterions contre les autres recommandations que nous avons entendu proposer ce soir par le député de Prince George—Peace River.

Notre caucus s'oppose au projet de loi C-4 parce qu'il sape l'intégrité de la Commission canadienne du blé et continuera de saper la confiance que les agriculteurs lui portent. Nous croyons que les agriculteurs n'ont pas les moyens de se payer le fonds de réserve prévu dans le projet de loi et qu'ils n'en veulent pas. Les sénateurs ont accepté le fonds de réserve, mais, comme je l'ai fait remarquer, ils recommandent qu'il soit limité à 30 millions de dollars.

 

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L'une des rares dispositions utiles à notre avis est que la commission puisse ajouter des grains à son mandat ou en supprimer. La décision d'inclure ou d'exclure des céréales serait prise à la demande de groupes d'agriculteurs et par suite d'un vote pris par tous les agriculteurs concernés.

Une coalition formée par la Winnipeg Commodities Exchange et d'autres groupes commerciaux a exercé de fortes pressions contre cette disposition. Pour arriver à ses fins, cette coalition a demandé que tant l'ajout que l'exclusion d'une céréale soient rejetés, et les sénateurs ont capitulé devant ce lobby tenace. À la place du processus démocratique d'ajouter ou d'exclure une céréale, les sénateurs ont proposé une solution de rechange qui rendrait pratiquement impossible l'ajout ou l'exclusion d'une céréale.

La disposition d'inclusion était une des rares caractéristiques rachetant les lacunes du projet de loi C-4, et elle a été vidée de sa substance. Nous, les députés réformistes, avons toujours été de fermes partisans de la commission du blé parce qu'elle défend les intérêts des agriculteurs. Nous devons travailler ensemble à assurer un avenir radieux à la commission du blé.

En ce qui concerne toute la question du secret entourant la commission du blé, je suis tout à fait d'accord avec le député de Malpèque. Il s'agit d'une entreprise qui coûtera près de 6 milliards de dollars par année. Elle devait rendre compte au Parlement. Le Parlement a exigé qu'un vérificateur indépendant de l'extérieur examine les livres de la commission du blé. Le vérificateur est la société Deloitte & Touche, qui dépose tous les ans un rapport au Parlement. La dernière vérification que j'ai vue est celle de 1996. Cette société de comptabilité reconnue et respectée a conclu que les livres de la commission étaient fort bien tenus.

Il est vrai que la commission du blé n'est pas assujettie aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information, et nous croyons que, s'il en est ainsi, c'est pour assurer la confidentialité des activités commerciales de la commission du blé et de celles de la clientèle. Si les grandes et petites entreprises ne peuvent avoir l'assurance que leurs transactions commerciales avec la commission resteront confidentielles, alors elles feront affaire avec un autre organisme.

Fait à signaler, les groupes qui reprochent souvent à la commission du blé de ne pas obtenir de prix satisfaisants pour leur grain voudraient maintenant miner la capacité de la commission de le faire.

La Commission canadienne du blé est probablement le meilleur organisme de commercialisation dans le monde, et il sert très bien les agriculteurs de l'ouest depuis plus de 60 ans. C'est un organisme qui est couronné de succès et qui doit rendre des comptes à la population canadienne, par l'entremise du Parlement et au moyen de vérifications externes.

Les membres de notre caucus ont toujours appuyé la commission du blé parce que, comme je l'ai dit, nous pensons qu'elle travaille dans l'intérêt des agriculteurs. Nous nous opposons au projet de loi C-4 parce que c'est une mesure législative qui laisse à désirer et qui ne servira qu'à miner la commission.

Les réformistes s'opposent au projet de loi C-4 parce qu'ils trouvent qu'il ne va pas suffisamment loin et qu'il ne sonne pas assez rapidement le glas de la commission. Nous nous opposons donc au projet de loi C-4 et nous n'appuierons certainement pas les amendements qui ont été proposés ce soir.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, dans mon exposé, je vais faire des observations sur l'amendement parrainé par le porte-parole réformiste en matière d'agriculture, selon trois rubriques: la fin du monopole de la commission du blé, la plus grande transparence de la commission et l'obligation de rendre compte aux agriculteurs.

Je dois commenter ce qu'ont dit les députés des autres partis politiques. Je commence par les propos du député du Parti conservateur. Plus tôt, il a dit qu'il appuierait à reculons ces amendements, même s'il les approuve tout à fait. Je me demande bien pourquoi.

Évidemment, le député a des copains au Sénat et les sénateurs conservateurs pourraient tirer un peu sur la ficelle. Ils sont du genre à insister pour qu'on soit d'accord à tout prix avec ce qu'ils disent. J'accorde au député d'en face un certain mérite parce qu'il ne se laisse pas complètement mener à la baguette par le Sénat. Je me devais de faire cette observation.

De même, je dois commenter ce qu'a dit le député de Malpèque, qui n'est pas un producteur laitier, mais un céréaliculteur. Le Parti réformiste compte plus de 20 agriculteurs.

 

. 2200 + -

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. On m'a accusé de ne pas être céréaliculteur. En plus d'être producteur laitier et éleveur de bovins de boucherie, je cultive aussi des céréales. J'ai déjà aussi cultivé de l'orge, du blé et de l'avoine. J'aimerais bien qu'une commission du blé existe à l'Île-du-Prince-Édouard...

Le président suppléant (M. McClelland): Comme vous le savez, les juments mangent de l'avoine, les biches également, tandis que les agneaux mangent du laurier à mouton. Je cède maintenant la parole au député de Lakeland.

M. Leon E. Benoit: Mes excuses, monsieur le Président. Je ne savais pas que le député était céréaliculteur, mais je sais qu'il ne commercialise pas ses céréales par l'entremise de la Commission du blé. Je me demande pourquoi. À ma connaissance, le député n'a jamais fait de lobbying pour que la compétence de la Commission du blé s'étende à sa province. S'il le faisait, il ne resterait pas longtemps député de Malpèque.

Le député a parlé de l'époque où il était porte-parole d'un groupe d'agriculteurs. Je me souviens bien qu'il a parlé du rôle qu'il a joué au Syndicat national des cultivateurs pendant 17 ans. J'aimerais lui poser une question. Je sais qu'il ne peut y répondre, et c'est parfait. De toute façon, je connais déjà la réponse. Comment la participation à ce syndicat a-t-elle changé au cours de sa présidence et au-delà? En fait, elle a diminué d'une façon soutenue jusqu'au point où ce syndicat, assez gros au départ, est devenu très petit.

Le député chante les louanges de la Commission canadienne du blé. J'aimerais encore le dire très clairement, comme je l'ai dit je ne sais pas combien de fois déjà, il semble que le député de Malpèque et certains de ses camarades du Parti libéral n'aient toujours pas compris. Ce que je comprends, c'est que l'enjeu n'a jamais été de savoir si oui ou non la commission du blé assure bien la prestation de services aux agriculteurs. Je ne crois pas que cela ait jamais été un enjeu central.

Le principal reproche que l'on fait à la commission concerne son comportement monopolistique et le fait que les agriculteurs n'ont pas le choix. C'est de loin l'enjeu le plus important du débat à son sujet.

Mais le député persiste, en dépit des nombreux éclaircissements que j'ai donnés en Chambre, parfois en sa présence, à dire que le débat porte sur l'abolition de la commission. Il n'est pas du tout question d'abolir la commission, mais plutôt de donner aux agriculteurs le choix de passer par la commission pour vendre leur produit ou de procéder autrement. Voilà le véritable enjeu, et j'aimerais bien que le député cesse ses élucubrations. Il est question ici de choix, de rendre facultative la participation à la commission.

Le député prétend appuyer la commission du blé, alors comment diable peut-il être opposé au principe de départ, soit à la participation facultative? Ce n'est qu'en 1942 ou en 1943 que le monopole a été institué, en vertu de la Loi sur les mesures de guerre. Il est intéressant de voir comment le député saute ce détail, quand cela lui convient.

Revenons aux trois enjeux que j'ai mentionnés tout à l'heure. Le premier, l'enjeu central, consiste à mettre fin au monopole de la commission du blé. Il fait l'objet d'un débat depuis quelque temps déjà dans l'ouest du Canada et en Ontario. L'Ontario a eu la chance de pouvoir se prononcer à ce sujet et a choisi de mettre fin au monopole et de donner le choix aux agriculteurs. C'est donc ce qui se passera en Ontario grâce aux changements apportés. J'ignore les raisons pour lesquelles le gouvernement actuel est manifestement contre un pareil changement dans l'ouest du Canada, pourquoi il n'autorisera jamais la tenue d'un pareil vote.

Il faut que nous mettions fin à ce monopole pour permettre aux agriculteurs de choisir, qu'il s'agisse de mettre en place un double marché, de les autoriser à exercer l'option de refus ou de leur proposer un autre mécanisme. Il faut leur laisser le choix. C'est ce que le porte-parole du Parti réformiste en matière d'agriculture, le député de Prince George-Peace River, dit dans son amendement. C'est très important et il en est question dans l'amendement. Pour cette seule raison, il faut appuyer l'amendement.

Quant à savoir ce que les agriculteurs veulent, là n'est plus la question. Des sondages effectués dans toutes les provinces et dans ma circonscription révèlent que les agriculteurs veulent qu'on leur laisse le choix. La question ne se pose plus. Je ne sais pas pourquoi le député de Malpèque persiste à dire que là est le problème.

 

. 2205 + -

Il est question ensuite d'une plus grande transparence au sein de la commission. Je dis bien au sein de la commission, parce que je crois que la plupart des agriculteurs de l'Ouest canadien veulent probablement la conserver. Là n'est pas le problème. La plupart d'entre eux estiment qu'elle est utile. Ils voudraient ne pas y recourir quand bon leur semble. Des changements doivent y être apportés pour la rendre plus transparente et plus responsable. Je voudrais que les députés le comprennent.

Le député de Prince George—Peace River, le porte-parole du Parti réformiste en matière d'agriculture, traite de la question de la transparence et de la responsabilité dans son amendement. Voilà deux autres bonnes raisons d'appuyer l'amendement. Le Parti conservateur, qui n'est pas vraiment de l'avis du Parti réformiste, va appuyer ces amendements. Le député qui a parlé sait que les producteurs de l'Ouest veulent ces changements. Il le sait très bien, tout comme moi et tout comme la vingtaine de députés réformistes qui sont ou ont été eux-mêmes producteurs savent que ces changements sont attendus.

Le Sénat a proposé que le vérificateur général examine les livres, mais cela pose certains problèmes. Premièrement, nous ne savons pas si le vérificateur général aurait accès à tout ce qu'il voudrait. Deuxièmement, aurait-il des comptes à rendre au Parlement? Non. Il rendrait des comptes au ministre ou au conseil d'administration dont une partie des membres sont nommés.

Nous attendons un avis juridique sur ce qu'a dit le vérificateur général parce que ce n'est peut-être pas légal. Cet amendement que le Sénat a proposé et que nous appuyons n'est peut-être légal. Ce qu'il prévoit ne fait peut-être pas partie du mandat du vérificateur général. Voilà un autre problème. Le Parlement reçoit du vérificateur général un rapport partiel qui n'est pas rendu public, et qu'est-ce que nous avons gagné? Probablement pas grand-chose.

Pour assurer la responsabilité envers les producteurs, il faut aussi avoir un conseil d'administration formé uniquement de producteurs élus et pourvu d'un contrôle réel. Si en plus le conseil est composé de bénévoles, comme c'était le cas au début dans l'Ouest du Canada, et s'il est transparent pour que nous puissions savoir ce qui s'y passe, la Commission du blé devrait, à mon avis, recevoir l'appui des producteurs de l'Ouest. Je crois que la grande majorité des producteurs de l'Ouest appuieraient la Commission et y ferait appel dans ces conditions, c'est-à-dire si elle était formée de bénévoles, transparente et plus responsable.

Voilà ce que je voulais dire. Nous reprenons le même débat. Je ne pense pas avoir à en dire plus long. J'attends les questions des députés des autres partis.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Je suis très heureux de parler de cette question, probablement pour la dernière fois. Je vais m'adresser directement à vous, monsieur le Président. Comme vous êtes originaire de cette merveilleuse province qu'est l'Alberta, vous allez vous rendre compte que ce que je dis correspond en tous points à ce que pensent les agriculteurs, surtout ceux de Wild Rose, que je connais très bien.

J'aimerais faire un commentaire au sujet du discours du député conservateur, un discours qui ne tient pas debout. Le député affirme qu'il appuie sans réserve telle et telle initiative, mais qu'il va voter sans grand enthousiasme—je ne sais pas très bien ce qu'il voulait dire.

Je tiens à lui dire que je suis très fier de mes collègues de Prince-George—Peace River et de Portage—Lisgar. Ils ont abordé cette question bien avant que le député n'arrive à la Chambre. En fait, il n'y avait que deux seuls membres du Parti conservateur à l'époque. Le député de Sherwood, comme la plupart des députés de ce côté-là, n'avait pas la moindre idée de ce qu'est une commission du blé.

 

. 2210 + -

Je suis aussi inquiet que bon nombre des agriculteurs de Wild Rose avec qui je me suis entretenu au téléphone au cours des deux ou trois dernières heures. Ils voudraient savoir si le ministre des Pêches et des Océans a fait campagne en faveur de la Commission canadienne du blé dans sa circonscription. Je suis certain que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a défendu vivement la Commission dans sa circonscription. Je suis certain que tous les députés de l'Ontario l'ont fait dans leur circonscription.

Ils appuient ce projet de loi, mais il ne touche aucunement leurs électeurs. Il touche plutôt les agriculteurs de l'Ouest. Ils se soucient peu des agriculteurs de l'Ouest. S'ils s'en souciaient, ils auraient reconnu, comme je l'ai fait, qu'il n'y a pas tellement longtemps, dans un référendum tout ce qu'il y a de plus légal dans la province de l'Alberta, 66 p. 100 des producteurs d'orge ont voté en faveur de la double commercialisation.

Les deux autres députés libéraux d'Edmonton s'en rappellent. Ils ont vraiment une drôle de façon de le montrer lorsque vient le moment de voter à la Chambre des communes. Ils se moquent de ce que subit l'agriculteur de l'Ouest. Tout ce qui les intéresse, c'est ce que leurs infaillibles collègues des premières banquettes leur disent de faire. Le whip sort son fouet et ils obéissent.

Par votre intermédiaire, monsieur le Président, je parlerai à ceux qui nous regardent à la télé ce soir.

Des voix: Oh, oh!

M. Myron Thompson: Je m'excuse du bruit que font les gens d'en face. Ils ne savent pas ce qu'ils font. J'espère que mes collègues agriculteurs leur pardonneront. Ils ne peuvent pas s'en empêcher. L'été est à nos portes et je trouve agréable d'adresser mes commentaires à quelqu'un qui est vivant, sobre et bien portant. Je ne prêterai aucune attention à ce qui se passe en face. Je veux que les agriculteurs de l'Ouest canadien n'oublient pas que cela leur a été imposé par les députés de ce groupe libéral, qui ont voté. Aucun de leurs électeurs n'est touché par les dispositions du projet de loi sur la commission du blé.

J'ai parlé au téléphone ce soir à Gordon Reid, un agriculteur de Cremona. Je sais qu'il n'intéresse pas les libéraux de savoir ce qu'il m'a dit au téléphone, mais je voudrais le citer. Il aimerait recevoir un coup de fil de l'un des experts de l'autre côté. Vu que l'unité est un grave problème au pays, il a demandé pourquoi nous sommes traités comme des citoyens de deuxième catégorie. Son numéro est le 403-637-2193. Ils devraient le noter. Il serait heureux de recevoir en tout temps un appel d'eux. Il a certaines choses à leur dire au nom de bien des agriculteurs. J'espère qu'ils vont l'appeler à l'instant même pour le saluer.

Ils aimeraient aussi savoir ce qu'il faut faire pour avoir un Sénat efficace? Des sénateurs se sont rendus dans l'Ouest du pays pour parler aux agriculteurs. J'ai entendu ce que les agriculteurs avaient à dire. J'ai assisté à certaines audiences. Mes collaborateurs ont assisté à toutes les séances, ont enregistré les débats et ont pris tous les renseignements. Dans les amendements qui viennent du Sénat, on ne retrouve qu'une infime partie de ce qu'ont dit les agriculteurs de l'Ouest canadien. Ils se posent des questions au sujet du Sénat.

 

. 2215 + -

Si le député est aussi brave qu'il le croit, je vais lui demander de venir avec moi et nous allons l'appeler ensemble. Je ne voudrais pas qu'il perde le numéro.

Le président suppléant (M. McClelland): Il ne va plus être question de crise cardiaque de ce côté; il ne va plus être question de ce côté d'aller où que ce soit. Tenez-vous-en au sujet.

M. Myron Thompson: Je voulais simplement aller où se trouvent les téléphones. Nous n'avons pas de téléphones ici.

Je ne crois pas qu'ils comprennent grand-chose. Peut-être que si quelqu'un venait leur donner un coup sur la tête, ils comprendraient mieux.

Ces agriculteurs pensent que le Sénat les a laissé tomber. Ils estiment que le Sénat est censé représenter les différentes régions du pays, et qu'ils ne devraient pas être exploités par les grandes régions. Ils pensent que c'est ce qui s'est produit dans ce cas, et ils sont extrêmement déçus que le gouvernement ait laissé une telle chose se produire. Ils estiment avoir été exploités par les régions les plus peuplées.

Si le nouveau député de la Colombie-Britannique pouvait arrêter de bâiller et écoutait plutôt ce qui se passe dans l'Ouest, il saurait que ce que je dis est vrai. Je lui conseille d'écouter très attentivement.

Monsieur le Président, je vous souhaite de passer un bon été.

M. Mac Harb: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. De toute évidence, le député de Wild Rose s'est permis quelques minutes de bon temps. Hier soir, durant notre débat, à 21 h 45, il s'est levé en Chambre et nous a officiellement, mais aussi officieusement, traités de menteurs. Certains de mes collègues, notamment le député de Wentworth-Burlington, l'ont entendu.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député d'Ottawa-Centre est allé voir la présidence à ce sujet. La chose avait été soulevée plus tôt. C'est la première occasion qu'il a de soulever la question en présence du député de Wild Rose.

Connaissant le député de Wild Rose, comme nous tous d'ailleurs, et sachant qu'on s'échappe parfois dans un débat enflammé, le député d'Ottawa-Centre a indiqué que si le député de Wild Rose avait la courtoisie d'indiquer qu'il n'avait aucunement l'intention de le traiter de menteur, il l'apprécierait.

M. Myron Thompson: D'abord, je n'ai traité personne de menteur. C'est faux. J'ai dit que c'est dommage que des gens aient à mentir pour défendre leur point de vue. Je n'ai parlé de personne en particulier.

Quand quelqu'un dit que je prends des enfants par les talons et que je les fouette, il faut que je réagisse. Un député qui affirme une chose pareille me doit des excuses. Je ne retirerai rien de ce que j'ai dit.

Le président suppléant (M. McClelland): Le mot «mentir» figure au hansard. Ce n'est pas un mot qui est utilisé dans cette Chambre. Le député de Wild Rose a dit ce qu'il avait à dire. En ce qui me concerne, le dossier est clos.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): J'ai écouté attentivement l'intervention du député de Wild Rose, et je veux rectifier quelque chose qui, j'en suis certain, il n'a pas voulu dire mais qu'il a dit néanmoins. Il a parlé du fait que 66 p. 100 des agriculteurs de l'Alberta se sont opposés au vote sur l'orge en 1997, ce qui est exact. Mais sans rougir, il a transformé le vote de 66 p. 100 des agriculteurs de l'Alberta en un vote contre le vote sur l'orge, alors qu'on sait tous que le vote global dans l'Ouest canadien était de 62 p. 100 en faveur du maintien de l'orge sous la compétence de la Commission canadienne du blé.

 

. 2220 + -

Je me demande si le député de Wild Rose reconnaîtra que ce sont bien là les faits.

M. Myron Thompson: Monsieur le Président, le député a raison parce que le vote auquel il fait allusion était un vote pour tout ou rien. Ce n'est pas ce sur quoi les agriculteurs de l'Alberta ont voté à l'origine. Ce qu'ils veulent, c'est la double commercialisation. Les députés devraient se mettre ça dans la tête. Ils veulent la double commercialisation. C'est tout ce que j'avais à dire.

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai jamais vu personne autant faire un effort d'imagination que le député de Wild Rose. Nous avons ici quelqu'un du Nouveau Parti démocratique qui nous a démontré une fois de plus jusqu'à quel point le député de Wild Rose a poussé la vérité jusqu'à la limite.

Le député a refusé de se lever et de présenter ses excuses à la Chambre. Il a fait honte à la Chambre encore une fois. S'il avait l'audace et le vrai sens de l'honneur d'un député, il présenterait ses excuses, pas à moi, mais à la Chambre et aux contribuables de cette ville et de tout le pays.

Le président suppléant (M. McClelland): Comme le député n'est pas à son siège, il ne peut pas répondre.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelques soirs, les libéraux étaient absents de la Chambre, en fait ils brillaient par leur absence, avec les conséquences que l'on sait. C'était toutefois mieux je pense que le groupe aviné et querelleur que nous avons là-bas ce soir.

Le président suppléant (M. McClelland): Je demande au député d'Elk Island de retirer sa remarque.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, par pur respect pour la présidence, je retire sans évoque ma remarque.

Avec tous ces cris, ils manquent de respect à l'égard d'une question qui préoccupe énormément les Canadiens de l'Ouest, les agriculteurs canadiens des Prairies et de la Colombie-Britannique. Je trouve tout à fait incroyable qu'il y ait ici à la Chambre, au Parlement du Canada, un groupe de parlementaires qui croit avoir compétence pour imposer aux Canadiens de l'Ouest un système de commercialisation du grain auquel ils ne souscrivent pas et dont les agriculteurs de l'Ouest ne veulent pas.

Je sais qu'ils peuvent brandir le plébiscite qui a eu lieu. Mais comme l'a dit mon collègue il y a quelques minutes, la question posée dans ce plébiscite était: Voulez-vous conserver la Commission canadienne du blé telle quelle ou la supprimer? Manifestement, je voterais pour conserver la Commission parce qu'il y a un grand nombre de petits agriculteurs qui n'ont pas les moyens ou la capacité de commercialiser leur propre grain ou de trouver le meilleur marché.

Par contre, il y a des centaines de fermiers qui sont tout à fait capables de le faire et qui en aurait souvent l'occasion. Je fais donc appel aux députés qui détiennent un pouvoir dont ils abusent.

 

. 2225 + -

De par le système démocratique, la Chambre compte plus de libéraux que d'autres députés. C'est la réalité et je le reconnais. Ils ont obtenu 38 p. 100 des votes dans l'ensemble du pays et environ 20 p. 100 dans ma province. Ils ne répondent pas aux voeux des gens de là-bas, c'est aussi simple que cela.

Je vais mettre des gants blancs pour dire ce qui suit. Je n'aime pas me servir de ce terme, mais on constate une certaine arrogance. Prétendre à quelque 3 000 milles de distance que nous savons mieux qu'eux ce qui est bon pour eux, c'est une très grave erreur.

Inversons les rôles. Je vais maintenant parler de l'industrie laitière. Elle possède ses offices de commercialisation, ses systèmes de quotas. Imaginons pour un moment que le système soit inversé.

Supposons que le parlement soit en Alberta. Supposons que tous les producteurs de blé de l'Alberta décident que les producteurs laitiers de l'Ontario et du Québec ne pourront plus obtenir les meilleurs prix pour leurs produits laitiers. La plupart d'entre eux vendent le lait cru. Ils ne peuvent plus vendre à l'acheteur qui leur donne le meilleur prix. Dans tous les cas, ils doivent vendre à quelqu'un d'autre qui leur donne de 20 à 25 p. 100 de moins.

J'espère que les députés peuvent voir maintenant ce qui leur arriverait. Ils diraient que ce n'est pas juste, que les agriculteurs de l'ouest n'ont pas à les obliger, à perte, à faire quelque chose qu'ils ne veulent pas.

C'est ce qui se produit ici, et c'est pourquoi la question est si grave. C'est très sérieux. Nous demandons franchement aux agriculteurs s'ils veulent que la Commission du blé reste comme elle est, s'ils veulent qu'elle soit réformée, s'ils veulent avoir, le cas échéant, le droit démocratique de vendre une partie du grain qu'ils produisent à leurs propres frais sur leur propre terre. Si l'occasion se présentait de vendre quelques camions à 25% de plus que ce que leur offre la Commission canadienne du blé, ils voudraient pouvoir exercer ce droit. C'est ce que disent les agriculteurs.

Ils sont empêchés d'exercer ce droit à cause d'une loi adoptée là-bas à Ottawa. Je ne fais que lancer un appel au gouvernement. Tout le système démocratique est faussé ici. Je ne sais pas si le ministre responsable de la Commission du blé, celui qui prend la décision finale, qui dit au whip comment les autres députés doivent voter, je ne sais pas s'il entend mon appel. Je ne sais pas s'il peut me voir à la télévision ou s'il va entendre mon appel. C'est lui qui prend la décision.

Je pourrais tout aussi bien parler à des fauteuils vides puisque ceux qui les occupent ce soir ne sont pas en mesure de répondre à mon appel.

Ils doivent voter suivant la ligne du parti. Les excellents sous-amendements du député de Prince George—Peace River corrigeraient au moins quelques-unes des erreurs que contient le projet de loi et le rendraient plus acceptable aux agriculteurs de l'Ouest.

Il y a pourtant de la résistance. Des rires et du manque de respect. C'est fini. Je veux être honnête. Ils écoutent attentivement. C'est bien.

 

. 2230 + -

Ces sous-amendements présentés par mon collègue sont le fidèle reflet d'au moins certains des changements que les agriculteurs de l'Ouest demandent. J'implore les députés de parler au ministre, de se réunir, de faire ce qui doit être fait et d'adopter ces sous-amendements. Si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, avec ces sous-amendements, peut-être pourrons-nous éventuellement y apporter d'autres modifications. À mon avis, le parlement a la prérogative de modifier les lois à l'occasion. Nous sommes ici pour cela. Et c'est vraiment ce qui devrait être fait.

Sinon, le gouvernement n'aura pas respecté les libertés fondamentales auxquelles ces agriculteurs de l'Ouest ont droit.

J'ai déjà donné l'exemple qui suit, mais par chance, certains députés présents ici ce soir étaient alors absents ou peut-être n'ont-ils pas lu chaque page du hansard depuis notre arrivée ici. J'aimerais donc citer cet exemple de l'agriculteur qui m'a dit il y a quelques années qu'un organisme fédéral, la Société du crédit agricole, faisait pression sur lui, qu'elle voulait de l'argent et le menaçait de saisie.

Pendant ce temps, ses greniers étaient pleins de grain, le meilleur grain au monde, car il savait cultiver et travaillait très méticuleusement. Son grain était d'une excellente qualité. Il s'agissait du blé dur le plus intéressant au pays.

Il voulait vendre ce grain, mais la commission du blé n'accordait pas de quota à l'époque, de sorte que le grain est demeuré entreposé. Il aurait pu le charger dans un camion et le vendre, car il connaissait un acheteur intéressé. Non seulement le lui acheter et lui procurer ainsi l'argent dont il avait besoin pour effectuer le paiement qui était exigé, mais dans ce cas en particulier, il aurait pu obtenir environ 25 p. 100 de plus que ce qu'il pouvait espérer toucher de la Commission canadienne du blé, même avec l'ajustement de fin de campagne. Mais la loi l'a empêché de le faire.

Alors, il a été obligé d'aller supplier sa banque de lui faire crédit jusqu'à ce que la Commission lui permette de vendre son grain. La banque a dit qu'elle allait simplement accroître les privilèges à l'endroit de ses biens, prendre tous les bâtiments, tous les terrains, tout le grain engrangé, les bêtes de l'étable, tout cela comme sûreté en attendant que la Commission ait vendu son blé.

Je ne veux pas dire par là que la Commission ne vend pas de blé. Elle en vend beaucoup. De nombreux agriculteurs sont très bien servis par la Commission. Des tas d'agriculteurs ne se retrouvent jamais coincés de cette manière. Mais quand un agriculteur se trouve au pied du mur et qu'il arrive à trouver une solution à son problème, à savoir vendre le grain qui lui appartient à quelqu'un qui est prêt à le lui acheter à un prix raisonnable, il n'est pas logique que la loi l'en empêche. C'est une atteinte considérable à la liberté de la personne.

J'implore donc les députés, au nom des agriculteurs de l'Ouest, de faire ce qui s'impose pour une fois. Je ne dirai même pas pour une fois. Je ne veux pas les insulter. Faites ce qui s'impose dans le cas qui nous occupe. Entérinez ces sous-amendements. Apportez les corrections nécessaires. Pensons à l'avenir. On dit des agriculteurs de l'Ouest qu'ils sont le pivot de l'agriculture canadienne et que l'Ouest est le grenier du monde. Nous nous devons d'intervenir et de prendre les mesures qui s'imposent.

Le gouvernement canadien ne devrait pas empêcher les agriculteurs d'exploiter leur entreprise avec succès. Cela ne devrait pas être. Je réclame donc qu'ils disposent d'une plus grande latitude. Attelons-nous à la tâche, approuvons les amendements dès maintenant et nous pourrons apporter d'autres changements par la suite.

 

. 2235 + -

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais corriger quelques erreurs d'interprétation faites par le député de Malpèque plus tôt au cours du débat.

La première a trait au sous-amendement que j'ai proposé afin de donner au vérificateur général une plus grande latitude dans la façon de procéder pour la vérification de la Commission canadienne du blé. Le député de Malpèque est d'avis que l'amendement proposé par le Sénat pour que le vérificateur général effectue cette vérification ponctuelle donnerait satisfaction aux agriculteurs qui réclament que la Commission fasse preuve de plus de transparence et d'imputabilité.

Il a évoqué le fait que c'est le très réputé cabinet de vérification comptable Deloitte et Touche qui effectue actuellement les vérifications de la Commission canadienne du blé, ce que je reconnais. Ce que le député n'admet pas et n'a jamais admis tout au long des débats que nous avons eus sur le sujet, c'est que le vérificateur général fait beaucoup plus qu'une simple vérification financière. Il ne se contente pas de compter les grains, pour ainsi dire, comme le ferait un autre cabinet de vérification ou un comptable.

Le député le sait. Il est ridicule de sa part de prétendre le contraire. L'amendement que j'ai proposé, c'est-à-dire le sous-amendement aux amendements du Sénat, vise à donner au vérificateur général une plus grande marge de manoeuvre dans la façon dont il mènera sa vérification, afin qu'il puisse vérifier l'efficacité réelle avec laquelle la Commission canadienne du blé commercialise le blé et l'orge dans l'Ouest canadien, et aussi à faire en sorte qu'il en rende compte au parlement et non simplement au ministre et au conseil d'administration de la Commission.

Je veux tirer cela au clair et demander au député d'Elk Island de nous dire ce qu'il en pense.

De même, le député de Malpèque prétend que ce nouveau conseil d'administration, dont dix des quinze membres seront des représentants des producteurs, exercera une grande emprise sur le fonctionnement de la Commission canadienne du blé. Selon lui, c'est implicite dans le projet de loi. En fait, il va même jusqu'à faire écho aux propos du ministre responsable de la Commission canadienne du blé, qui a souvent répété que le conseil pouvait toujours réduire la rémunération du président de la Commission et ainsi exercer un contrôle sur lui.

Je ne sais pas si le député de Malpèque a déjà entendu parler de congédiement injustifié, mais si le conseil d'administration osait faire cela, je pense qu'il serait vite traduit en justice par le principal intéressé pour rupture de contrat. Ça ne fait aucun doute dans mon esprit.

J'aimerais aussi entendre ce que le député d'Elk Island a à dire à ce sujet.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, mon collègue soulève des questions très importantes, et la responsabilité en est sûrement une. Comme nous le savons tous, le vérificateur général ne fait pas que dresser des bilans. Il s'assure également que le contribuable canadien en a pour son argent, que l'organisation est solide et qu'elle est bien dirigée.

Le vérificateur général a une plus grande marge de manoeuvre quand il procède aux vérifications, et je suis entièrement d'accord avec ce que mon collègue a dit.

Puis, on nous jette de la poudre aux yeux à propos de la Commission. Certains membres sont élus, d'autres nommés. C'est merveilleux que les agriculteurs puissent élire certains de leurs membres, mais, comme l'a mentionné mon collègue et comme l'indique un des sous-amendements, une commission élue devrait avoir la prérogative de choisir son président-directeur général. Cela ne devrait pas être une question de politique décidée à distance par Ottawa.

Je suis convaincu que les agriculteurs de l'Ouest sont tout à fait aptes à diriger leur propre organisation. Ils sont tout à fait capables de faire en sorte qu'elle soit responsable. Il n'y a aucune raison pour que la Commission ne puisse avoir le premier mot à dire dans le choix du président-directeur général.

 

. 2240 + -

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au député d'Elk Island. Mais je voudrais tout d'abord corriger une erreur commise par le Nouveau Parti démocratique et le parti au pouvoir.

Ils ont dit que le député de Wild Rose avait cité des faits incorrects en réponse à une question. Ils ont tort. Les chiffres donnés par le député de Wild Rose sont exacts. Lorsque le député a dit que 66 p. 100 des agriculteurs de l'Alberta sont en faveur de la liberté de choix pour l'orge, il avait raison. Quand il a dit que la majorité de ceux de l'Ouest du Canada appuient la liberté de choix, il avait raison. Le gouvernement de la Saskatchewan, qui appuie inconditionnellement le monopole de la Commission du blé, a fait un sondage qui révèle que plus de la moitié des agriculteurs de la Saskatchewan sont en faveur de la liberté de choix. Il s'agit là d'un appui clair.

Je trouve intéressant que, durant tout ce débat, le ministre responsable de la Commission du blé n'a pas été présent dans cette Chambre pendant une seule minute. Il n'a pas entendu un seul mot de tout ce qui s'est dit ici.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, je souscris à la déclaration concernant les statistiques. Mais je constate que le ministre est maintenant présent et nous ne pouvons plus dire qu'il n'a pas été ici une seule seconde. Cela fait six secondes qu'il est là. C'est une joie de le voir.

J'estime qu'il est très important, lorsque nous débattons de cette façon, que nous puissions nous entendre les uns les autres. Il ne suffit pas simplement de prévoir que l'on prononcera des discours jusqu'à quatre heures du matin. Il faut aussi faire en sorte que les arguments soient entendus et que ceux qui les entendent soient disposés à changer d'avis en raison de ces arguments.

M. Leon E. Benoit: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai déclaré tout à l'heure que le ministre responsable de la Commission du blé ne se trouvait pas dans la salle. En fait il ne s'y trouve plus. Il y a été pendant environ 30 secondes...

Le président suppléant (M. McClelland): Tous les députés savent que nous ne faisons pas allusion à la présence ou à l'absence des autres députés à la Chambre.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'aurais réellement dû répondre aux questions du député de Prince George—Peace River parce que ses commentaires n'étaient pas adressés au député d'Elk Island, mais plutôt à moi.

Au sujet de la vérification, j'ai une question pour le député d'Elk Island. Le député de Prince George—Peace River, dans les questions qu'il a posées au député d'Elk Island, a parlé de la vérification. Mes arguments tiennent toujours concernant ce que j'ai dit plus tôt.

Le député d'Elk Island pourrait peut-être nous expliquer la démarche que suit la Commission canadienne du blé actuellement afin que nous comprenions ce qui se passe à la Commission dans le domaine des finances et de la commercialisation. Elle publie son rapport annuel. Elle tient d'interminables réunions de district, avec des périodes de questions, et ce, dans 11 districts répartis dans tout l'Ouest canadien, au cours desquelles les commissaires eux-mêmes...

Le président suppléant (M. McClelland): Le député d'Elk Island a une minute et trente secondes pour répondre.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, il s'agit bien sûr d'une question de responsabilité. Selon le scénario actuel, le vérificateur général aura une seule occasion de faire son travail et ce sera ensuite au tour des vérificateurs commerciaux. Cela n'est pas suffisant. Nous demandons que le vérificateur général fasse son travail comme il le ferait pour une société d'État.

 

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Une autre chose qui est selon moi très importante, c'est que ce sont les agriculteurs qui paient la facture et qui ont tout intérêt à ce que la Commission fonctionne bien. Aussi, ils devraient disposer de l'information voulue. Il est incroyable qu'ils ne puissent même pas savoir combien touchent les divers membres et employés de la Commission même si ce sont eux qui paient la facture. Ce n'est pas bien et ce n'est pas juste et cette situation devrait être corrigée. J'exhorte le gouvernement à la corriger.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, je trouve incroyable la publicité qui m'est accordée ici ce soir. On réclame que je prenne la parole. Je croyais avoir tout dit l'autre jour, mais je veux bien me rendre aux appels qui me sont faits et dire quelques mots au sujet des modifications proposées.

J'espère que la presse se trompe quant aux rumeurs que l'on peut y lire ces derniers jours. Je sais qu'il n'y a pas de céréaliculteur de l'Ouest parmi les libéraux, mais il y a au moins un ministre de l'Ouest responsable de la Commission canadienne du blé. J'entends dire maintenant qu'il doit être transféré à d'autres responsabilités. J'espère bien que l'on ne donnera pas suite à cette rumeur car il va nous manquer à bord des vols en direction d'Ottawa. Nous aimons bien nous rencontrer de temps en temps même lorsque nous appartenons à des formations opposées.

Ce que j'aimerais savoir clairement, c'est la position du parti libéral relativement à la Commission canadienne du blé. Que l'on me corrige si j'ai tort. Juste avant la dernière élection, au Manitoba, ce parti a constitué un comité chargé de sauver la Commission. J'ai assisté à cette réunion, puis un grand rassemblement a eu lieu plus tard devant les immeubles de la Commission du blé. J'ai vu au moins cinq députés libéraux monter sur l'estrade et déclarer qu'ils protégeraient la Commission canadienne du blé et qu'ils défendraient le principe du guichet unique.

Durant le congrès des libéraux, juste avant les élections, on a fait plusieurs propositions à soumettre aux membres. L'ex-députée de Dauphin—Swan River, Marlene Cowling, une dame qui commande beaucoup de respect dans le milieu agricole, en a fait une. Elle a proposé que le parti adopte une résolution pour marquer son ferme appui au maintien du guichet unique à la Commission du blé.

Dans une autre résolution proposée au nom des agriculteurs, on réclamait que soit légalisée la culture du chanvre. L'assemblée ne pouvait débattre qu'une seule résolution. Laquelle le gouvernement libéral a-t-il appuyée? Celle proposant la légalisation de la culture du chanvre. Où son engagement envers la Commission canadienne du blé s'est-il envolé?

Est-ce que je me trompe? Est-ce ce qui est arrivé?

Une voix: Vous vous trompez.

M. Jake E. Hoeppner: Je me trompe. En quoi? C'est ce que la presse a rapporté. La motion à l'appui de la Commission du blé n'a jamais été mise à l'étude parce qu'elle sèmerait trop la discorde dans l'ouest du Canada.

Après les élections, nous avons vu ce qui est arrivé. J'ai été vraiment surpris ce soir, lorsque le député de Malpèque a pris la parole. Il a dit que le gouvernement avait tenu beaucoup d'audiences. Je pensais que le député de Malpèque nous dirait enfin quelque chose d'intéressant. Je pensais que nous allions connaître la vérité, les faits, mais il n'en a pas dit plus long. Il s'est ensuite mis à parler de maximiser les profits. La vérité a été déguisée, si vous voyez ce que je veux dire. Pour l'industrie céréalière, c'est de la fumisterie. C'est ainsi que s'est déroulé le discours d'un bout à l'autre. On a déguisé la vérité.

Je vais expliquer à la Chambre exactement pourquoi. C'était pour maximiser les profits. Il est inutile de dire au monsieur d'en face que, lorsque nous avons tenu des audiences, je voulais que le président de la Commission canadienne du blé nous explique en quoi consiste son mandat. On m'a arrêté. On m'a dit que ma question était irrecevable.

Une voix: Le procès était en cours à l'époque.

 

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M. Jake E. Hoeppner: L'affaire est maintenant réglée. La commission d'appel a déclaré que la Commission canadienne du blé n'avait pas pour mandat de vendre le grain au meilleur prix. Son seul mandat consistait à organiser méthodiquement la vente du grain.

M. Leon E. Benoit: Allez savoir ce que cela veut dire.

M. Jake E. Hoeppner: Comme vous dites. Je m'étais préparé, et j'ai englouti des milliers de dollars pour découvrir la vérité à propos de cette affaire. Nous essayons encore de la porter devant un juge pour qu'il puisse se prononcer sur les faits. Il va y avoir un autre appel, et le ministre le sait. Cet agriculteur de l'Ouest est têtu; il ne lâche pas facilement. Il veut savoir la vérité. Les agriculteurs veulent savoir la vérité.

J'ai entendu le député de Malpèque dire que ces agriculteurs jouent le jeu des grandes compagnies céréalières, le jeu de ces grands méchants, de ces méchants loups, ou je ne sais trop quoi. Je produis des cultures spéciales depuis 1957. J'ignore pourquoi, mais ces affreuses entreprises céréalières, ces affreuses industries de cultures spéciales m'ont toujours fait faire plus d'argent que je n'en ai fait avec les céréales de la Commission du blé. Si je n'avais pas fait de cultures spéciales, j'aurais fait faillite au bout de 10 ans. Si ces affreuses compagnies céréalières sont aussi épouvantables pour les agricultures, pourquoi obtiennent-elles plus d'acres, et non moins, chaque année? Pourquoi vendent-elles une plus grosse part des produits des agriculteurs canadiens de l'Ouest que jamais auparavant?

Si nous regardons le prix du canola aujourd'hui, alors que nous en avons cultivé un nombre record d'acres l'an dernier, vous constaterez qu'il est encore à près à 9 $ le boisseau. Que feraient-ils, les gens de l'autre côté, si nous n'avions pas les cultures spéciales? Ils nous enverraient des subventions à n'en plus finir pour garder les agriculteurs dans les champs. Ils devraient au moins le reconnaître.

Il y a quelques minutes, j'ai demandé au ministre s'il avait reçu comme moi un coup de fil hier. Vers 10 heures, quand j'attendais mon tour pour débattre en Chambre, le téléphone a sonné et c'était un monsieur des États-Unis. Selon le ministre de la Commission du blé, l'appel venait probablement de la Pennsylvanie.

L'interlocuteur voulait trois camions de blé dur biologique. Il disait qu'il le lui fallait parce que ce blé n'était pas disponible au Montana ou dans le Washington. Quand on en produit, il n'est pas de la qualité du blé qu'on fait pousser en Saskatchewan ou en Alberta. Il ne pouvait pas en obtenir parce que le producteur ne voulait pas aller voir la Commission du blé pour obtenir un permis d'exportation parce qu'elle réclame de 70 ¢ à 1 $ le boisseau pour la mise en commun, et elle n'en fait absolument rien. Il en a assez de cette fumisterie. La Commission ne veut ni l'acheter, ni le transporter, ni le vendre, mais elle veut 1 $ le boisseau pour affirmer son pouvoir. Ça n'a pas de bon sang du tout.

On retire de l'argent de l'économie de l'Ouest, de l'argent qui devrait plutôt y rentrer.

M. Mac Harb: Foutaise!

M. Jake E. Hoeppner: Si le député ne veut pas le croire, qu'il en parle à tous les agriculteurs, de la frontière Ontario-Manitoba à la Colombie-Britannique. Ces derniers lui diront qu'ils ont besoin de plus d'argent. Ils n'arrivent pas à joindre les deux bouts. Si nous ne faisons rien pour augmenter le prix du grain ou le revenu de ces agriculteurs, nous aurons une catastrophe sur les bras comme on n'en a jamais vue. Pourquoi ne pas les laisser commercialiser leur grain s'ils peuvent en obtenir un meilleur prix?

Je suis estomaqué de voir jusqu'à quel point nous les politiques nous n'écoutons pas les gens quand ils nous disent ce qui ne va pas. Nous nous sommes rendus à deux reprises dans l'Ouest canadien pour rencontrer les agriculteurs. Le Sénat a fait de même. Les agriculteurs veulent avoir le choix. Je peux vous assurer que s'ils pouvaient participer de façon volontaire à la Commission canadienne du blé et qu'ils avaient confiance en elle, ils commercialiseraient davantage de grains commercialisés par la Commission qu'ils commercialiseraient sans doute de cultures spéciales. La preuve en a été faite dans d'autres domaines. Or, les politiques ne rendent pas de comptes et n'ont pas la confiance des agriculteurs. Ils ne veulent pas écouter ce que leur disent les agriculteurs.

Si la Commission fait effectivement le travail qu'elle prétend faire, elle ne devrait avoir absolument aucune objection à ce que le vérificateur général examine ses livres.

 

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S'il n'y a rien à cacher, alors pourquoi devons-nous lutter avec autant d'acharnement pour que le vérificateur général vérifie ses livres? À mon avis, il y a quelque chose de louche. Si Revenu Canada ne me fait pas confiance, il peut vérifier mes livres. Depuis que j'ai commencé à m'en prendre à la Commission et à exiger qu'elle rende des comptes, je fais l'objet de vérifications non pas tous les cinq ans mais bien tous les ans. N'est-ce pas étrange? De toute ma vie, je n'avais jamais fait l'objet de vérifications jusqu'à ce que je commence à remettre en question les méthodes de la Commission canadienne du blé. Comment expliquez-vous cela?

Si Revenu Canada constate que j'ai dérogé à la loi, je vais m'attendre à être poursuivi en justice. Est-ce la raison pour laquelle la Commission hésite à laisser qui que ce soit examiner ses livres? Si elle n'a rien à se reprocher et si ses livres sont en ordre, elle ne devrait pas avoir d'objection à ce qu'on les vérifie.

Une voix: Qu'a fait Deloitte & Touche?

M. Jake E. Hoeppner: Deloitte & Touche a fait ce qu'elle fait.

Il s'agit d'une entreprise extraordinaire. Personne ne dit qu'elle n'a pas fait son travail, mais elle ne peut vérifier que ce qu'on lui donne à vérifier. J'aimerais demander au député pourquoi, si Deloitte & Touche a fait un travail exceptionnel, les activités sur la bourse des marchandises ne figurent pas dans le rapport. Pourquoi ne les retrouve-t-on pas dans le rapport? Pendant des années, la Commission canadienne du blé a nié utiliser la bourse des marchandises. Je peux produire toutes sortes de documents. Il n'y a pas de paris ou de spéculation. C'est dommage.

Tout à coup, un témoin affirme devant le Sénat que c'est le plus gros joueur du Minneapolis Grain Exchange. Il joue dans la mesure où il le peut. Mais il ne permet pas aux agriculteurs d'en faire autant. Pourquoi n'est-ce pas inscrit dans les dossiers de la Commission?

J'ai écrit au commissaire pour le prier de m'envoyer un état annuel des activités boursières de la Commission. J'ai fait la même demande au ministre. Je n'ai pas encore reçu le rapport, et j'aimerais bien le voir. Il y a toutes sortes de suppositions à l'effet que tout n'est pas tout à fait régulier. Le problème, c'est qu'il y a un doute, et les agriculteurs ne veulent plus douter. Ils veulent des faits et des garanties, parce que le grain vendu par la Commission canadienne du blé ne leur rapporte pas assez.

J'ai une autre petite anecdote qui s'est produite au cours des derniers mois. Des agriculteurs ont été emprisonnés parce qu'ils avaient vendu du grain à l'étranger sans permis d'exportation. Soudain, l'hiver dernier, j'ai reçu des plaintes de toutes parts à l'effet que les compagnies céréalières canadiennes achetaient du blé fourrager hors-Commission pour le moudre, et que celui-ci disparaissait. J'ai expliqué être impuissant à faire quoi que ce soit sans données ou documents. Un agriculteur m'a présenté des documents en noir sur blanc. Une prime d'un dollar le boisseau était offerte pour le blé fourrager produit hors-Commission comparativement au blé ordinaire.

J'ai dit que c'était illégal, une violation non seulement de la Loi sur la Commission canadienne du blé mais aussi de la Loi sur la Commission canadienne des grains. On ne peut jouer comme cela avec les céréales. Il faut payer le prix prévu du grade où elles sont classées. Et puis je me suis dit que je tenais quelque chose. J'ai ensuite reçu un appel d'un agriculteur qui m'a dit: «Jake, s'il vous plaît, ne vous servez pas de cette information». Je lui ai alors demandé pourquoi en ajoutant qu'on pourrait régler ce problème. Il m'a répondu: «Je ne sais pas quelle sera la réaction de mes voisins, ils vont me tuer».

Je suis ensuite allé voir le commissaire adjoint de la GRC que j'avais embauché à titre de consultant et je lui ai demandé ce que je devrais faire. Je lui ai dit que le gars ne voulait pas que je me serve de l'information et que je ne savais pas quoi faire. Il m'a répondu que j'étais en possession d'une information permettant d'entreprendre des poursuites au criminel et qu'il leur faudrait examiner ce dossier.

 

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Qu'est-ce que je dois faire? Voilà comment les compagnies céréalières se comportent et pourquoi les agriculteurs sont jetés en prison. C'est quelque chose. C'est là le problème dans l'économie d'aujourd'hui. Si c'est vous qui le faites, c'est mal, mais si c'est moi, c'est bien. Voilà pourquoi le pays va si mal.

Le taux de criminalité chez les cols blancs de nos organisations est incroyable, tout comme le montant de taxes que perd le gouvernement. Personne n'est prêt à faire quoi que ce soit pour remédier à la situation. Nous nous arrangeons tous pour ne pas nous mouiller, pour ne pas avoir à faire quelque chose.

Il faudra que ce système change, sinon nous allons suivre la même voie que l'ex-Union soviétique et les autres pays qui ont fait de même. Regardons ce qui est arrivé aux Philippines, en Indonésie et dans les autres pays où les cols blancs ont pris le contrôle de l'économie.

Si c'est ce que nous voulons chez nous, restons bien tranquilles, ne faisons rien et laissons les choses aller. Ce n'est pas pour cela que j'ai été élu à la Chambre. On m'a envoyé ici pour sauvegarder les lois et pour faire en sorte qu'elles soient appliquées.

Lorsque je vois la façon dont les choses se passent aujourd'hui dans le monde des affaires, je m'étonne que notre pays fonctionne encore, car ce n'est pas sur ces bases qu'il a été édifié. Notre pays repose sur l'honnêteté, l'intégrité et le travail acharné. Aujourd'hui, tout ce que nous voulons, c'est savoir comment faire des affaires et comment soutirer le plus d'argent possible aux autres. Ce n'est pas comme ça que je conçois la véritable économie. Je me battrai jusqu'au bout de mes forces pour faire disparaître ces procédés, pour que mes enfants, mes petits-enfants et mes arrières petits-enfants n'aient pas à payer la facture un jour. Je ne veux pas en être tenu responsable.

Si cela n'est pas un avertissement, je ne sais pas ce que je peux faire d'autre pour avertir la Chambre. J'ai fait ce qui m'a semblé juste. Lorsqu'on m'a appelé au beau milieu de la nuit pour me dire que dans trente minutes je serais mort, j'ai estimé que c'en était assez. La GRC ne peut pas intervenir.

Que se passe-t-il? Je suis très sérieux quand j'affirme que d'une manière ou d'une autre, je découvrirai le fond de cette affaire. Ce type d'appel téléphonique n'est pas fait par des ivrognes, mais par des personnes qui visent à intimider et à détruire. Ce n'est pas cela qui m'incitera à quitter. Ils devront me passer sur le corps pour me faire partir. J'espère qu'ils prendront mes paroles au sérieux car je n'ai pas terminé. J'espère que le ministre m'a bien compris.

Je vous remercie et je vous souhaite de bonnes vacances.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté patiemment le débat de ce soir. J'ai été frappé par le fait, et je ne suis pas du tout céréaliculteur, qu'il y a de ce côté de la Chambre un groupe de personnes qui a recueilli 38 p. 100 des suffrages aux élections de 1997 et qui dispose de tous les pouvoirs voulus pour imposer sa volonté à la population. Dans l'Ouest canadien, ce groupe a obtenu moins de 20 p. 100 des votes mais possède toute la latitude nécessaire pour imposer ses vues et distribuer des faveurs contre le gré des destinataires.

Cela me rappelle le début des années 80 lorsqu'un ministre qui était assis de ce côté, Francis Fox, a tenté d'imposer sa façon de voir lorsque des personnes ont voulu installer des antennes paraboliques pour pouvoir capter les signaux de télévision de leur choix.

M. Fox a autorisé la saisie de ces antennes. Dans la région de Vancouver, elles ont été enlevées des immeubles à logements. Le ministre a fini par perdre la bataille car, même s'il disposait de tous les pouvoirs au début, le groupe contre lequel il luttait était trop important. Ce groupe voulait plus de choix qu'il ne poulait leur en accorder. Il a fini par perdre la bataille et nous avons obtenu le droit d'utiliser des antennes paraboliques.

D'une certaine manière, je trouve que cela s'apparente à ce que le gouvernement libéral tente de faire aujourd'hui. Il éprouve le besoin irrésistible d'imposer sa volonté à des gens qui ne veulent pas du tout passer par ses conditions. Comme je l'ai dit, je ne suis pas moi-même un céréaliculteur. Il n'y a pas de céréaliculteurs de ce côté-là de la Chambre. J'ai entendu de ce côté-ci un groupe de producteurs de grains de l'Ouest qui veulent qu'on leur donne le choix, tout comme les gens dans les années 80 voulaient avoir le choix dans la transmission par satellite de leurs signaux de télévision. Je ne comprends pas pourquoi les gens d'en face cherchent à leur imposer quelque chose de différent.

 

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J'aimerais poser une question au député qui vient tout juste de parler. J'aimerais qu'il me dise ce qui pousse les gens de l'autre côté de la Chambre à imposer leur volonté à des céréaliculteurs contre leur gré.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question. Je ne comprends pas. Je ne sais pas pourquoi. D'un point de vue politique, ce qu'ils font est stupide. Le caucus libéral n'obtiendra pas plus de votes en agissant de la sorte.

Il serait bon, un jour, comme je l'ai déjà indiqué, que l'on tienne des votes libres sur certaines de ces questions. Ils comprendraient mieux. Les députés libéraux de l'Ontario trouvent normal que les agriculteurs de l'Ontario puissent élire tous les membres du conseil et vendre la totalité ou une partie de leur grain sur le marché d'exportation américain. C'est ce qu'ils veulent. C'est ce que veulent les agriculteurs de l'Ouest. Pourquoi ne pas le leur donner?

S'ils pouvaient adhérer volontairement à la Commission canadienne du blé, ils feraient de meilleures affaires. Ils vendraient plus de grain. J'ai été agriculteur pendant 35 ans. Les gens ont toujours appuyé la Commission, qu'ils gagnent de l'argent ou non. Ils estimaient qu'on pouvait faire confiance à cet organisme. Tout d'un coup, ils ont perdu confiance dans la Commission du blé.

Lorsque les agriculteurs sont venus me voir, je me suis penché sur les irrégularités. Jamais, au grand jamais, je n'aurais pensé que ce serait là la première question que j'aurais à étudier en ma qualité de député. Je n'aurais jamais imaginé ça. Plus on examinait la question et plus on étudiait les documents, plus on réalisait qu'il y avait quelque chose d'anormal. Quand un agriculteur touche de 1 $ à 1,10 $ de plus qu'un autre agriculteur pour la même qualité de blé, quelque chose ne tourne pas rond dans le système de mise en commun.

Cela n'est pas arrivé à des étrangers. C'est arrivé à ma famille. C'est arrivé à deux de mes frères. Leurs fermes sont à dix milles l'une de l'autre. L'un produisait en fait un blé de meilleure qualité. Or il a touché 1,10 $ de moins par boisseau que son frère qui produisait un blé affecté par le fusarium. C'était parce qu'il y avait de la concurrence entre les silos à un endroit et, à l'autre endroit, ce n'était pas le cas.

À tous les députés de ce côté, je dis que c'est de la malhonnêteté, et ce n'est pas ce pour quoi le système de mise en commun a été créé. C'est la raison pour laquelle je crois que ces gens ne peuvent pas comprendre. Nous avons 101 sièges en Ontario. Ils donnent satisfaction à leurs agriculteurs mais ils ne veulent pas offrir les mêmes possibilités aux agriculteurs de l'Ouest canadien. Il y aura un retour de manivelle.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je me dois d'intervenir, parce que le député vient juste de dire, essentiellement, que ce qui ne va pas avec cet excellent projet de loi, c'est que le gouvernement n'essaie pas de gagner des votes. C'est précisément ce qui a anéanti le Parti conservateur dont les mesures législatives et les politiques visaient toujours à gagner des votes.

Les mesures législatives de l'actuel gouvernement sont responsables, justes et bonnes pour tous les Canadiens. C'est cela la démocratie.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord avec le député, sauf que le fait de donner aux agriculteurs un choix en matière de commercialisation ne leur permet pas d'acheter des votes en Ontario. Ils ont les votes en Ontario et essaient désespérément de les conserver. C'est la raison pour laquelle ils donnent à leurs agriculteurs de telles options.

S'ils veulent des votes dans ouest du Canada, ils feraient bien d'y venir et de nous donner les mêmes possibilités; sinon, ils diviseront notre pays encore plus qu'ils ne l'ont fait jusqu'à présent.

 

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M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, il est 23 h 10 et il y a de nombreux chahuteurs en face, qui semblent beaucoup s'amuser ce soir sans contribuer utilement au débat, soit dit par parenthèses, et qui se contentent de gêner les députés qui essaient de débattre de cette très importante question pour l'Ouest du Canada. Malgré tout cela, j'aimerais en venir à la question que posait mon honorable collègue de Vancouver Nord un peu plus tôt, à savoir: pourquoi le gouvernement impose-t-il ce projet de loi aux céréaliculteurs de l'Ouest?

Compte tenu de tout cela, je suis heureux que le ministre responsable de la Commission canadienne du blé soit à la Chambre ce soir, à 23 h 10. Je lui saurais certainement gré de me dire pourquoi le gouvernement choisit cette voie, s'il le veut bien une fois que mes collègues auront fait leurs observations.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, je vais manquer de réponses. Les questions arrivent de tous côtés.

Voici. J'ai présenté mon point de vue avec autant de vigueur que possible et je crois que mes collègues ont fait de même. Nous avons obtenu beaucoup de succès dans ce débat à en juger par l'auditoire que nous avons en face. Il y a des ministres qui travaillent ou qui écoutent. Il est près de minuit, tout de même.

Nous faisons ce qu'il faut de ce côté-ci. Je demanderais au ministre de répondre également à cette question. J'aimerais demander le consentement unanime de la Chambre pour qu'il y réponde.

Le président suppléant (M. McClelland): L'ordre que nous avons adopté pour ce débat interdit, entre autres, les motions de consentement unanime.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Comme aucun autre député ne souhaite participer au débat et étant donné l'ordre adopté le mardi 9 juin 1998, l'amendement dont la Chambre est saisie est mis aux voix et le vote par appel nominal est demandé et reporté au jeudi 11 juin 1998, à 13 heures.  

Comme il est 23 h 11, conformément à l'ordre du mardi 9 juin 1998, la Chambre s'ajourne à demain, à 9 heures.

(La séance est levée à 23 h 11.)