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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 23 novembre 1999

• 0907

[Traduction]

Le président (M. John Harvard (Charleswood St. James— Assiniboia)): Nous pouvons commencer la réunion. Nous avons le quorum pour entendre les témoins.

Souhaitiez-vous signaler quelque chose, madame Alarie?

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Oui, monsieur le président. J'aimerais présenter une motion qui serait débattue dans les 48 heures, soit à la séance de jeudi prochain.

Je propose que le comité fasse une étude en vue de rendre obligatoire, et ce, d'une manière transparente, l'étiquetage des organismes génétiquement modifiés et fasse rapport devant la Chambre à ce sujet.

Merci, monsieur le président. Vous avez copie de la motion dans les deux langues.

[Traduction]

Le président: Oui, je vous remercie. Maintenant que vous avez déposé un avis de motion, nous pourrons nous en occuper jeudi.

Mme Hélène Alarie: Très bien.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le président.

Le président: Oui.

M. Howard Hilstrom: J'ai également une motion. Le greffier est en train de la distribuer. Elle est ainsi libellée:

    Je propose de demander au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire de comparaître devant le comité permanent le plus tôt possible, mais au plus tard le 17 décembre 1999, afin de discuter avec lui de l'examen du rendement du ministère et de celui de l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars 1999.

Je demanderais que le comité accepte à l'unanimité qu'on adopte cette motion aujourd'hui.

• 0910

Le président: Je ne crois pas que nous ayons le quorum pour cela. Nous pourrons nous en occuper plus tard, Howard. Pour l'instant nous n'avons le quorum que pour entendre les témoins. Nous allons donc laisser votre motion de côté jusqu'à ce qu'on ait le quorum, vous voulez bien?

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Si vous avez le consentement unanime, vous n'avez pas besoin du quorum, ne croyez-vous pas? Est-ce la règle?

Le président: Nous n'avons pas le quorum, donc...

M. Howard Hilstrom: Je suis certain que la motion sera adoptée à l'unanimité de toute façon, nous pouvons donc attendre pour permettre à d'autres membres d'arriver.

Le président: Oui. Très bien.

M. Howard Hilstrom: Monsieur le président, pouvez-vous nous rappeler le nombre voulu pour atteindre le quorum?

Le président: Neuf.

Nous avons maintenant le plaisir d'accueillir nos amis de la Commission canadienne du blé et quelques messieurs de l'Université de la Saskatchewan. Nous avons Greg Arason, qui est président-directeur général de la Commission du blé et qui est accompagné de son vice-président exécutif, Adrian Measner; Hartley Furtan, qui est professeur au département d'économie agricole de l'Université de la Saskatchewan et Richard Gray, qui appartient au même département.

J'ai déjà parlé à M. Arason. Il aimerait commencer si MM. Furtan et Gray sont d'accord. Dès que Greg aura fini, nous donnerons la parole à l'un de vous deux. Est-ce que vous allez tous les deux... ou est-ce seulement M. Gray qui va commencer?

M. Richard Gray (Département d'économie agricole, Université de la Saskatchewan): Je vais commencer.

Le président: D'accord.

Très bien, Greg. Je vous souhaite à nouveau la bienvenue à Ottawa en cette magnifique journée qui nous fait penser à Winnipeg.

M. Greg S. Arason (président-directeur général, Commission canadienne du blé): Merci, monsieur le président—John. Je suis heureux d'être à Ottawa en cette journée ensoleillée.

Je tiens pour commencer à remercier le comité d'avoir invité la Commission canadienne du blé à comparaître devant lui dans le cadre de son étude du revenu agricole. À la demande du comité, mon exposé portera sur les prix des céréales et les tendances futures dans le secteur agricole en insistant sur l'ouest du Canada.

Les agriculteurs pâtissent du bas prix des céréales depuis de nombreuses années tout en ayant à assumer des coûts d'intrants et de transport plus élevés. Les producteurs canadiens sont contraints de faire face à la concurrence des gouvernements des États-Unis et de l'Union européenne qui subventionnent largement leurs agriculteurs avec l'argent des contribuables; qui subventionnent lourdement leurs exportations, comme l'UE, ou qui appliquent des politiques d'élimination des excédents en faisant souvent don de leurs céréales à des marchés commerciaux, comme les États-Unis.

Les agriculteurs des États-Unis et de l'UE sont protégés contre les prix courants grâce à des subventions gouvernementales massives. Par exemple, on pense que le gouvernement américain dépensera environ 22,5 milliards de dollars américains, ce qui représente environ 33 milliards de dollars canadiens, en subventions directes aux agriculteurs en 1999. Ce montant dépasse le revenu agricole total du Canada.

Il est peu vraisemblable que les prix du blé remontent beaucoup au cours des deux prochaines années, étant donné qu'ils subissent les pressions des stocks des gros exportateurs, notamment les États-Unis et l'UE. Les prix des autres denrées comme le maïs et le soja ont aussi fort peu de chances de remonter, surtout parce que la situation de l'offre est pléthorique aux États-Unis.

Notre document comprend de nombreux graphiques qui illustrent les tendances des prix de ces dernières années. Ils ne sont là qu'à titre d'information.

Si vous regardez les prix à terme du blé, l'année passée à Chicago, ils étaient à leur plus bas depuis 1977. Le marché à terme du blé a déjà connu de tels niveaux dans le passé, mais cela n'a jamais duré aussi longtemps. En termes réels, si l'on tient compte de l'inflation, les prix commerciaux non subventionnés sont les plus bas jamais enregistrés.

Les prix du blé ont connu une amélioration au printemps 1996 en raison de plusieurs années de récoltes de blé inférieures à la moyenne dans le monde et à une forte demande des consommateurs, ce qui a fait tomber à des niveaux extrêmement bas les stocks mondiaux de clôture pour le blé en 1995 et 1996. Toutefois, les prix élevés de cette année-là ont encouragé les agriculteurs à augmenter les superficies cultivées en blé et les intrants, ce qui, allant de pair avec des conditions météorologiques favorables, a provoqué une grosse augmentation de la production dans la plupart des grandes régions productrices de blé du monde.

Au cours des quatre années qui ont suivi 1995-1996, on a eu les quatre meilleurs productions mondiales de blé sur cinq jamais enregistrées. Les stocks mondiaux de blé ont augmenté de 22 p. 100 depuis 1995-1996 et les stocks des cinq principaux exportateurs—les États-Unis, le Canada, l'UE, l'Australie et l'Argentine—ont augmenté de 93 p. 100.

Sur le plan de la demande, la demande mondiale d'importations de blé reste faible en raison des problèmes économiques et financiers qui perdurent en Aise, Russie et ailleurs. De plus, de nombreux pays importateurs continuent à offrir de fortes subventions pour faire augmenter la production, ce qui limite les importations.

• 0915

Pour passer maintenant aux prix mondiaux du blé, les prix du blé d'exportation sont actuellement à leurs plus bas niveaux historiques depuis de nombreuses années. Le prix de la variété américaine Dark Northern Spring 14, qui est un prix généralement représentatif pour le blé de force roux de printemps, est à son niveau le plus bas depuis 1990-1991. Le prix du blé américain Hard Winter Ordinary, qui sert de référence pour les blés de qualité moyenne, est à son niveau le plus bas depuis 1993-1994. Le prix annuel moyen du blé de force roux de printemps a été en dessous du niveau actuel seulement cinq fois au cours des 25 dernières années. Les prix du blé étaient inférieurs aux niveaux actuels pendant la guerre des subventions à l'exportation entre les États-Unis et l'UE du milieu des années 80 et du début des années 90.

Comme l'indique le graphique du sommet, l'écart de prix entre le blé de qualité moyenne et de haute qualité s'est creusé ces dernières années en raison d'une situation mondiale de l'offre et la demande légèrement plus serrée en ce qui concerne le blé de haute qualité ou à forte teneur en protéines; toutefois, l'abondance de blé de qualité moyenne à faible sur le marché mondial a fait fléchir l'ensemble des prix du blé.

Si on passe au rendement de la mise en commun de la Commission canadienne du blé pour le blé roux de printemps de l'Ouest canadien no 1 ou RPOC, le graphique montre ce rendement de 1976-1977 à nos jours. La ligne supérieure indique les rendements nominaux de la mise en commun pour cette période alors que la ligne inférieure représente les rendements de la mise en commun compte tenu de l'inflation. Le point intermédiaire des perspectives de rendement (PDR) de la mise en commun d'octobre pour 1999-2000 est de 167 $ la tonne en magasin. Les rendements de la mise en commun ont diminué en moyenne de 10 p. 100 par an au cours des quatre dernières années. Lorsque le rendement de la mise en commun tient compte de l'inflation, en prenant 1976 comme année de référence, les PDR 1999-2000 pour le RPOC no 1 sont de 56 $ la tonne.

Il faut aussi voir ce déclin énorme des prix des céréales et des rendements de la mise en commun dans le contexte des frais de transport pour les agriculteurs canadiens de l'Ouest qui ont plus que doublé depuis que la subvention prévue dans la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a été éliminée en 1995. Le tarif moyen pour le transport ferroviaire est passé, pour un agriculteur situé au milieu des Prairies, de 15 $ la tonne à environ 34 $. Les coûts de production, le prix des engrais, des produits chimiques et de l'outillage continuent également à augmenter régulièrement.

Si on regarde maintenant le volume et la valeur des ventes de la Commission du blé, le tableau du sommet montre le produit des ventes et le volume cumulatifs des quatre comptes de la mise en commun que tient la commission. Cette information montre que les agriculteurs de l'ouest du Canada ont été très durement touchés pour ce qui est de leurs recettes. Bien que les résultats soient encore provisoires, la Commission canadienne du blé a mis en marché environ 19,6 millions de tonnes de céréales au cours de l'année de la mise en commun 1998-1999, ce qui représente une baisse de 10 p. 100 du volume par rapport à 1997-1998 et de 31 p. 100 par rapport à 1996-1997.

Le produit total des ventes de la Commission du blé en 1998-1999 a baissé de 15 p. 100 par rapport à l'année précédente et de 34 p. 100 par rapport à 1996-1997. C'est une diminution importante de revenu de la Commission du blé pour le secteur agricole canadien de l'Ouest. La Commission du blé espère actuellement une augmentation du volume des ventes de 16 p. 100 en 1999-2000, mais le revenu total devrait rester inchangé en raison des prix bas.

Si nous passons maintenant aux subventions agricoles américaines, le ministère américain de l'Agriculture estime que le gouvernement américain dépensera environ 22,5 milliards de dollars en subventions directes aux agriculteurs au cours de l'année civile 1999—la plus grosse somme jamais accordée. Cela représente une augmentation énorme de 200 p. 100 au cours des deux dernières années. On pense que les producteurs de blé américains recevront en subventions directes plus de 2 $US par boisseau de blé produit en 1999, soit environ 4,6 milliards de dollars.

Le versement des subventions se fait dans le cadre de plusieurs programmes, mais la plus grande partie de l'augmentation récente est due à des dépenses plus importantes pour les défauts de remboursement de prêts et pour l'aide d'urgence. La plupart des subventions sont désignées comme des dépenses des boîtes vertes ou bleues, qui ne sont pas assujetties à des réductions en vertu de l'Accord du cycle d'Uruguay, alors qu'à notre avis, elles devraient l'être dans la prochaine série de négociations de l'OMC.

Les dépenses directes de subventions—le soutien interne et les subventions à l'exportation—dans l'UE sont évaluées à 38 milliards de dollars américains pour 1999. Ces programmes de subvention protègent les producteurs américains et européens de l'effet de leur production excédentaire sur les prix. Les signaux du marché et les décisions relatives à la production sont biaisés, et la diversification des cultures et l'adaptation du secteur agricole subissent des contraintes. Ces subventions offrent aux producteurs américains et européens un avantage injuste et créent des règles de jeu inégales qui sont extrêmement préjudiciables aux producteurs qui ne reçoivent pas d'aide importante sous forme de subventions agricoles dans les autres pays.

• 0920

L'Organisation de coopération et de développement économiques calcule l'aide estimative à la production, que l'on appelait auparavant les équivalents subvention à la production (ESP), qui est un indicateur des transferts monétaires annuels des consommateurs et des contribuables aux producteurs agricoles. Le pourcentage d'ESP, qui est la mesure utilisée dans le graphique du sommet, est le ratio d'ESP par rapport à la valeur des recettes agricoles brutes plus le soutien budgétaire. Comme le montrent clairement les chiffres, les ESP pour le blé en 1998 ont été beaucoup plus élevés dans l'UE et aux États-Unis qu'au Canada. Les pourcentages d'ESP ont augmenté pour l'UE et les États-Unis à la fois du fait de la diminution des revenus agricoles bruts et de l'augmentation des subventions.

Dans le cas de l'UE, les subventions à l'exportation ont augmenté au cours des deux dernières années en réaction à la diminution des prix, alors que l'augmentation des dépenses de subvention aux États-Unis s'est faite sous forme de soutien intérieur. Au cours de la même période, les ESP ont diminué pour le Canada et l'Australie. Comme indiqué plus tôt, les subventions américaines ont augmenté nettement en 1999. Cela se vérifiera dans les ESP de 1999 de l'OCDE, qui seront publiés en l'an 2000.

Si vous regardez le tableau du sommet, en 1998, les ESP pour le blé dans l'UE et aux États-Unis étaient respectivement de 141 et 61 $ la tonne respectivement. Au Canada, ils étaient par contre de 8 $ la tonne. L'ESP pour l'orge dans l'UE était de 171 $ la tonne en 1998, contre 49 $ aux États-Unis et 5 $ au Canada. Ces chiffres montrent des règles de jeu égales qui penchent nettement en faveur des agriculteurs américains et européens.

Si nous passons aux perspectives du marché pour le moyen terme, les stocks de clôture du blé que détiennent les cinq gros exportateurs—les États-Unis, le Canada, l'UE, l'Australie et l'Argentine—constituent un indicateur clé couramment utilisé par les analystes pour évaluer les perspectives du marché et l'orientation future des prix. Il y a eu une augmentation nette de 93 p. 100 des stocks de clôture des principaux exportateurs depuis 1995-1996. Les stocks de clôture pour 1999-2000 sont actuellement évalués à 54 millions de tonnes, ce qui constitue un niveau de plus en plus lourd.

La plus grande partie des augmentations s'est produite aux États-Unis et dans l'UE. Les stocks de clôture américains pour le blé ont pratiquement triplé au cours de cette période pour arriver à un chiffre estimatif de 27 millions de tonnes en 1999-2000, le plus haut niveau depuis 1987. Il est très peu vraisemblable qu'il y ait une remontée importante des prix du blé au cours des deux prochaines années en raison de l'importance des stocks des principaux exportateurs et de la demande qui continue à rester uniforme.

Les prix des autres denrées comme le maïs et le soja ne vont certainement pas non plus remonter rapidement, en raison d'une situation d'offre pléthorique aux États-Unis. Le marché déprimé du maïs fera pression sur les prix de l'orge et les données fondamentales du marché baissier du soja aux États-Unis continuera à peser sur les prix des oléagineux dont le canola.

Plusieurs tendances futures peuvent être envisagées pour le secteur agricole. Une forte croissance est attendue au niveau de la demande alimentaire mondiale et des importations de céréales à long terme—entre 5 et 10 ans—en raison de la croissance continue de la population et des niveaux de revenus. Les tendances mondiales à l'urbanisation continueront à enlever des terres arables à la production et il est possible d'augmenter nettement la base de la demande de céréales et d'oléagineux en créant de nouvelles utilisations industrielles pour ces produits.

Le Canada a l'occasion de continuer à jouer un rôle important dans l'approvisionnement alimentaire mondial, ce qui rapporte des devises étrangères et contribue à la croissance économique. Mais étant donné la situation financière actuelle du secteur agricole dans l'ouest du Canada et les perspectives de marché pour le moyen terme, il est très vraisemblable que de nombreux producteurs ne restent pas en activité suffisamment longtemps pour profiter de ces occasions futures.

La Commission du blé a récemment terminé un sondage auprès des agriculteurs de l'ouest du Canada et 67 p. 100 des répondants ont indiqué qu'ils s'attendaient à ce que leur exploitation agricole perde de l'argent cette année. Chose incroyable, 47 p. 100 d'entre eux ont dit qu'ils allaient faire faillite dans les deux ou trois prochaines années si leurs résultats financiers restaient les mêmes que cette année.

Que ce soit par accident ou par volonté, les politiques de subventions intérieures des États-Unis et de l'UE donnent un avantage concurrentiel très net aux agriculteurs de ces pays par rapport à ceux du Canada et il est vraisemblable que peu de progrès soit réalisé dans ce secteur au cours des prochaines négociations de l'OMC. Le Canada doit adopter une position très ferme à l'égard de telles subventions au cours de ces négociations.

En résumé, il va sans dire que c'est une période très difficile pour les céréaliers des Prairies. Ils ont à maintes reprises exprimé leurs inquiétudes au cours de l'année écoulée. Il n'y a pas de solution immédiate ou simple. L'objectif de la Commission canadienne du blé est de maximiser les rendements pour les producteurs et nous essayons de chercher des moyens de réduire les coûts du système. Nous avons l'intention de mettre en marché tout le blé et l'orge offerts par les producteurs et nous nous efforcerons d'obtenir le maximum pour ces céréales.

• 0925

Nous ne pouvons bien évidemment pas augmenter unilatéralement les prix des céréales dans un environnement compétitif où les clients ont le choix. C'est la réalité du marché mondial, alors que la réalité du Canada veut que de nombreux agriculteurs de l'Ouest, même s'ils sont aussi efficaces sinon plus que leurs homologues américains ou européens, soient à bout de souffle.

Les agriculteurs ne cessent de nous faire part de leurs principales inquiétudes en nous appelant à notre numéro 1-800 et lors des réunions agricoles. Il est très important que le gouvernement reconnaisse ces inquiétudes légitimes et prenne les mesures voulues.

Nous allons entamer une nouvelle série de négociations de l'OMC et, dans ce cadre, il faudra remédier aux facteurs qui contribuent à faire diminuer le prix des denrées. En attendant, il y a un besoin pressant de programmes d'aide efficaces pour combler ce vide et permettre aux agriculteurs canadiens de survivre à moyen terme.

Voilà qui termine nos déclarations officielles, monsieur le président. Nous serons heureux d'en discuter et de répondre aux questions.

Le président: Merci, monsieur Arason.

Nous allons maintenant nous tourner vers M. Gray qui sera suivi de M. Furtan.

Monsieur Gray, soyez le bienvenu à notre comité.

M. Richard Gray: Merci, monsieur le président, et merci au comité de nous avoir invités à prendre la parole sur ce sujet très important.

Je vais commencer en discutant de la façon dont les prix des marchandises se comportent avec le temps. Bien que nous nous soyons attachés aujourd'hui aux prix des céréales, elles ne constituent pas un cas particulier. Les prix des produits en général suivent des schémas d'évolution identiques.

La situation normale des marchandises est que les stocks sont pléthoriques et qu'il n'y a pas de perspective de pénurie immédiate pour ces produits. Dans de telles circonstances, les prix sont à un niveau si bas qu'ils ne suffisent pas pour qu'il y ait une certaine rentabilité et que l'on investisse dans le secteur. C'est une situation normale pour les marchandises, que l'on parle de cuivre ou de blé.

Ces périodes de prix bas ont tendance à être la situation prévalante avec les marchandises et elles sont interrompues par des pointes brèves et des pointes plus durables des prix. Les pointes brèves se produisent lorsque les stocks baissent et que cela pousse les ressources à court terme à augmenter la production d'une marchandise, pour faire remonter les stocks et se retrouver dans une situation d'offre excédentaire durable. La période 1980-1981 est un exemple de pointe brève et celle de 1995-1996 en est une autre. Les prix ont augmenté au point qu'il est devenu rentable de cultiver de nouvelles superficies, d'augmenter les apports d'engrais, notamment, ce qui a facilement renversé la situation.

Les bourses de commerce sont aussi caractérisées par des pointes très importantes des prix sur des périodes beaucoup plus longues. Cela se produit lorsque les investissements à long terme sont insuffisants; or, ils sont nécessaires pour équilibrer l'offre et la demande. Les stocks arrivent à des niveaux très bas et on craint vraiment qu'il n'y ait pas suffisamment de capacité de production dans les secteurs pour fournir la marchandise. On parle de pénuries alimentaires et de ce genre de choses. Nous avons eu cela pour la dernière fois dans les années 70, et si on remonte plus loin dans le temps, à la fin des années 40 et dans les années 20, les prix élevés se sont maintenus sur des périodes prolongées.

C'est à ce moment-là qu'il faut procéder à de très gros investissements et repenser la façon dont se fait la production. Pour le blé, dans le secteur céréalier, par exemple, deux gros investissements ont été faits dans la recherche qui ont donné naissance aux blés semi-nains et à la révolution verte dans de nombreux pays du monde. Ces pointes prolongées des prix sont très importantes pour faire évoluer les technologies de production avec le temps.

Connaissant ce contexte, nous nous trouvons dans une certaine mesure dans une situation normale pour les marchandises, où les stocks sont importants et les marges insuffisantes pour garantir des investissements dans le secteur, même si cela peut paraître déprimant.

Je vais maintenant brièvement résumer la situation à court terme avant de vous parler un peu des perspectives à moyen et long termes. Je donnerai ensuite la parole à M. Furtan qui vous parlera également des implications politiques de l'évolution de la situation que nous connaissons actuellement.

• 0930

À court terme, comme vous le savez tous et comme nous venons de l'entendre, les prix sont tels que les marges sont très faibles en agriculture. En fait, de nombreux agriculteurs risquent de devoir quitter le secteur. La situation pour le blé et les céréales se répercute à l'heure actuelle très facilement d'un secteur à l'autre parce qu'il y a une souplesse beaucoup plus grande, en particulier aux États-Unis, qu'autrefois. Cela veut dire que lorsque le blé n'est pas rentable, on change plus rapidement de culture qu'avant.

Il est également clair que si les prix augmentent pendant un certain temps, il existe aussi une capacité excédentaire importante. Il y a encore 30 millions d'acres dans la réserve de terres sous conservation aux États-Unis. On pourrait facilement en mettre en cultures sans doute la moitié. Il est possible d'augmenter l'utilisation des engrais, etc., ce qui coûtera davantage. Il n'y a donc aucune raison de croire que cette situation va changer très rapidement. Les stocks importants constituent évidemment une surcharge pour le marché à l'heure actuelle et, comme l'a dit M. Arason, les stocks sont suffisamment gros pour que l'on ne puisse pas vraiment envisager de changement important des prix au cours des deux prochaines campagnes agricoles.

Dans l'optique du court terme, les prix des intrants constituent véritablement un problème. Les coûts énergétiques, les prix du pétrole ont encore fait un bond aujourd'hui pour battre le record des neuf dernières années. Cela va avoir des répercussions sur les producteurs puisqu'ils vont devoir payer des prix plus élevés pour l'énergie. Et les agriculteurs essaient encore de s'adapter à l'augmentation des frais de transport de l'Ouest.

Il y a une chose dont on n'a pas parlé au sujet du court terme. Même si la production de céréales est très subventionnée aux États-Unis, le recours aux subventions à l'exportation a été jusqu'ici limité. Cela fait en réalité plusieurs années qu'on n'a pas eu recours au programme EEP pour l'encouragement des exportations dans ce pays. Ce budget attend toujours. Si les Américains voient que la situation mondiale est suffisamment mauvaise, ils pourraient ramener ces outils dans la caisse spéciale et aggraver encore la situation actuelle. Je ne crois pas qu'il faille écarter la possibilité d'une guerre commerciale à la suite de cette période de bas prix.

La situation à court terme est donc très sombre. Sans aide du gouvernement pour les agriculteurs, il y aurait une crise du revenu importante.

Nous pouvons regarder le moyen terme en l'occurrence comme une période de trois à cinq ans. L'élément positif qu'il nous faut rechercher est que, si une partie de la crise actuelle est due à la grippe asiatique, qui est sur la voie de la guérison, peut-être que la demande va réaugmenter jusqu'à un certain point. Elle pourrait revenir à une importance que l'on ne prévoit pas vraiment sur les marchés à l'heure actuelle. C'est donc l'élément positif à l'horizon dont j'aimerais discuter davantage.

Pour ce qui est de la politique de l'UE et des États-Unis, elle est due au fait que dans ces pays, on est déterminé à aider les agriculteurs en ce moment. Il sera difficile de les convaincre de cesser d'aider leurs agriculteurs. Il est peu vraisemblable que la situation s'améliore beaucoup, sauf peut-être s'ils sont prêts à réduire les superficies cultivées, par exemple, ce qu'ils pourraient envisager si les politiques deviennent trop onéreuses.

Pour le long terme, il y a de véritables problèmes à régler. La tendance à long terme pour les prix réels des céréales est très claire. M. Arason vous a présenté un graphique qui indiquait que les prix réels avaient diminué au cours des 20 dernières années. Vous pouvez remonter aux années 1850 et vous constaterez encore cette tendance régulière à la baisse des prix réels des céréales, avec quelques variations que représentent les pointes dont j'ai parlé.

Cela a des répercussions importantes sur l'allure que prendra l'agriculture à l'avenir dans l'ouest du Canada. À quoi doit ressembler l'agriculture pour permettre à des familles d'agriculteurs de tirer un revenu à long terme d'une marchandise dont le prix diminue avec le temps? Je ne vois aucune raison pour ne pas penser que cette baisse des prix réels ne va pas continuer. Il est important de mettre au point un plan ou une vision pour l'agriculture puisque ces prix ont tendance à diminuer avec le temps.

• 0935

Sur ces perspectives rassurantes, je vais donner la parole à M. Furtan qui va vous parler des politiques.

Le président: Merci, monsieur Gray.

Monsieur Furtan, soyez le bienvenu.

M. Hartley Furtan (Département d'économie agricole, Université de la Saskatchewan): Merci beaucoup, monsieur le président. Permettez-moi de vous remercier aussi de nous avoir invités à cette audience.

J'aimerais pour commencer résumer ce que Richard vient de vous dire et vous parler ensuite des questions de politiques agricoles à court terme. Ce sont les questions à l'ordre du jour ou d'actualité.

Nous aimerions aussi faire une proposition pour le plus long terme, suggérer de faire quelque chose qui doit être fait, à notre avis, pour l'agriculture de tout le Canada et pas seulement pour l'Ouest du pays.

Si vous regardez le revenu dans une province comme la Saskatchewan, vous constatez que le revenu agricole, y compris celui de l'élevage du bétail et de la culture céréalière, est resté stable depuis les années 60. Il n'y a pas eu croissance réelle du revenu agricole. Le problème est que les dépenses agricoles continuent d'augmenter d'année en année. Dans les années 60, les agriculteurs disposaient d'une marge d'environ 30 p. 100, ce qui leur donnait une certaine souplesse s'il y avait une mauvaise récolte ou si les prix baissaient.

À l'heure actuelle, les agriculteurs disposent d'une marge de moins de 5 p. 100. Ce que cela veut dire, c'est qu'ils ne peuvent pas faire face à deux mauvaises années consécutives. Ils n'ont tout simplement pas une marge suffisante. Ce risque est impossible à prendre, personne ne peut assumer le risque de deux mauvaises années.

De nombreux agriculteurs de l'ouest du Canada et de l'ensemble du pays ont connu deux, trois ou quatre mauvaises années. Il ne reste tout simplement plus de capital dans les exploitations. C'est donc là le résumé pour le court terme.

Il me semble qu'il y a en gros trois objectifs généraux de politiques que le gouvernement peut viser pour faire face à cette insuffisance prolongée du revenu.

Le premier objectif est que l'on pourrait maintenir le cap. Le gouvernement a lancé plusieurs programmes depuis 1958, en commençant en gros avec la Loi sur la stabilisation des prix agricoles, puis avec la Loi de stabilisation concernant le grain de l'Ouest, le RARB, le CSRN, le programme spécial pour les grains, etc., et maintenant l'ACRA.

Aucun de ces programmes n'a été conçu pour traiter de la diminution des prix des céréales. Leur objectif était de permettre aux agriculteurs de quitter le secteur tandis que le rapport coûts-prix se rétrécissait. C'est en gros ce que vise la politique et nous pourrions continuer sur cette voie.

Le deuxième objectif est que le gouvernement pourrait s'engager à maintenir des exploitations agricoles familiales. Cela voudrait dire maintenir le revenu agricole familial. Je dois avouer que cela serait très coûteux, mais c'est un objectif que le gouvernement pourrait viser.

Le troisième objectif est que le gouvernement pourrait admettre qu'il ne va pas maintenir le revenu des exploitations familiales ni introduire de programme de départ pour les agriculteurs. Autrement dit, cela signifierait clairement que la période des exploitations familiales est terminée, surtout dans le secteur des céréales d'exportation car c'est là que se situent les véritables problèmes. Il pourrait lancer un programme qui permettrait de faire aller les agriculteurs jusqu'à la retraite tout comme le fait n'importe quel autre secteur public ou privé lorsqu'il essaie de réduire ses effectifs.

Le problème que rencontrent de nombreuses communautés agricoles est qu'elles ne savent pas vraiment où veut en venir le gouvernement. Les indications sont très contradictoires pour ce qui est de savoir si le gouvernement essaie de maintenir le revenu familial ou de laisser le secteur s'adapter. Bien que l'on s'adresse ici au gouvernement du Canada, cela vaut également pour les gouvernements provinciaux. Les indications ne sont pas toujours claires.

• 0940

C'est donc le problème à court terme, et les familles et les agriculteurs, surtout au Manitoba et en Saskatchewan, cherchent cette indication et cet engagement.

Le problème à long terme est plus intéressant. L'une des grandes études entreprises à l'initiative du gouvernement fédéral au cours des 30 dernières années a été réalisée par le groupe de travail sur l'agriculture des années 70. Cette étude a été décidée à la suite de la crise agricole des années 60. Le groupe de travail est allé partout au Canada pour écouter les agriculteurs, les familles d'agriculteurs et les collectivités rurales et il a produit un rapport intitulé L'agriculture canadienne des années 70.

Ce document a eu une énorme influence sur les politiques suivies par le gouvernement dans les année 70 et 80. Il portait sur des sujets comme l'instabilité des prix. Il portait sur les problèmes d'insuffisance du revenu. Ces mêmes problèmes se sont posés à nouveau à maintes reprises dans les années 80, dans les années 90, et maintenant, à la veille du nouveau millénaire. Il me semble que c'est le moment voulu pour revoir cela. Devrions-nous avoir un nouveau groupe de travail pour le prochain siècle?

À notre avis, l'une des raisons de cette situation est que le processus politique est tombé en panne. Il n'y a pas de véritable débat national sur les objectifs du gouvernement à long terme pour ce secteur et pour ces gens. Pour beaucoup d'entre eux, c'est un véritable sujet de découragement.

Le groupe de travail des années 70 représentait un jalon planté en terre. Vous pouvez essayer de le retrouver pour le lire. C'était un bon document. Que vous soyez d'accord ou non avec ces conclusions est une autre question, mais il a eu une énorme influence.

Nous vous suggérons aujourd'hui de continuer sur cette lancée. Lançons un nouveau débat national très généralisé sur l'avenir et les objectifs du gouvernement pour l'avenir de l'agriculture canadienne.

Le président: Merci de vos remarques, monsieur Furtan, et merci aussi, monsieur Gray.

Nous avons à peu près une heure pour les questions. Je commencerai comme d'habitude par M. Hilstrom.

M. Howard Hilstrom: Le rapport du groupe de travail des années 70 et 80 contenait-il des recommandations?

M. Hartley Furtan: Oui.

M. Howard Hilstrom: Certaines ont-elles été mises en oeuvre?

M. Hartley Furtan: Oui.

M. Howard Hilstrom: Lesquelles?

M. Hartley Furtan: Les céréaliers ont constaté que la Loi sur la stabilisation des prix agricoles de 1958 ne donnait pas les résultats escomptés. Et la Loi de stabilisation concernant le grain de l'Ouest découle en grande partie du document L'agriculture canadienne des années 70. Ce rapport est aussi pour beaucoup dans l'instauration de la gestion de l'offre—dans la création des offices de commercialisation qui s'occupent de ces questions.

Il y a une autre recommandation qui n'a pas plu beaucoup et qui était qu'il y avait trop de ressources dans l'agriculture. C'est ce que le marché nous dit aujourd'hui. Il y a trop de ressources dans l'agriculture.

Si nous devons jamais nous occuper des terres mises en réserve, cela pourrait découler d'un processus semblable à l'heure actuelle. Nous avons peut-être trop de terres qui sont cultivées.

M. Howard Hilstrom: Il semble que l'apparence de la campagne à l'avenir commence déjà à se dessiner. Vous pouvez traverser Saskatoon et le Sud-Ouest et vous verrez des exploitations de 10 000 acres à Biggar—aucun bâtiment agricole sauf quelques grosses fermes.

J'ai vu une statistique intéressante, selon laquelle la consommation mondiale de blé est légèrement supérieure à la production mondiale. Quelqu'un connaît-il ce chiffre?

D'accord, monsieur Measner, lorsque l'offre et la demande sont en équilibre, pourquoi le prix du blé n'est-il pas plus élevé?

M. Adrian Measner (vice-président exécutif, Marketing, Commission canadienne du blé): En gros, ce qui s'est passé ces deux dernières années, cette année et l'année dernière, c'est que la consommation mondiale a été légèrement supérieure à la production mondiale. Pas de beaucoup, mais légèrement supérieure. Les stocks de report sont si énormes que nous devons les grignoter pour les enlever du marché avant que cela ait des répercussions sur les prix. Donc, même si la consommation dépasse légèrement la demande, la différence n'est pas suffisante pour que cela ait un effet sur les prix. Il faudrait que cela se reproduise pendant cinq ans encore pour que l'on voit cet effet.

• 0945

M. Howard Hilstrom: Le monde souhaite certainement avoir un approvisionnement alimentaire sûr. Je ne pense pas pouvoir souhaiter que ce niveau descende en dessous d'un approvisionnement de 40 ou 50 jours. Il nous faut donc chercher ailleurs le moyen de faire monter ces prix.

Monsieur Arason, le sondage réalisé s'adressait-il uniquement aux détenteurs de permis de la Commission du blé ou a-t-il été fait auprès des agriculteurs de façon générale?

M. Greg Arason: Il a été réalisé par un cabinet d'études et constitue donc en gros un simple sondage agricole. Il n'a pas été réservé aux détenteurs de permis.

M. Howard Hilstrom: Il ne s'est donc pas limité à la commission.

M. Greg Arason: Non.

M. Howard Hilstrom: Ce que le comité essaie de voir notamment, c'est comment augmenter les revenus des agriculteurs. La Commission canadienne du blé est bien sûr le seul négociant pour le blé et, dans une certaine mesure, pour l'orge, en dehors du marché intérieur.

Ce que j'ai vu dans les statistiques, c'est que les exportations de blé américaines, sans recours aux subventions à l'exportation, ont augmenté l'année dernière et que les ventes de blé de la commission ont diminué. Qu'est-ce qui explique cette situation entre 1997-1998 et 1998-1999? Pourquoi les États-Unis ont-ils réussi à vendre du blé en plus grandes quantités que l'année précédente alors que les ventes de la commission ont diminué?

M. Greg Arason: Adrian pourra sans doute vous dire les détails, mais cela a en gros cela à voir avec la production de la récolte 1998, qui a été inférieure. De ce fait, nous avons eu un volume moins important à vendre. Nous avons sans doute eu une récolte d'une qualité supérieure à la normale, mais d'un volume inférieur.

M. Howard Hilstrom: Dans votre exposé, monsieur Arason, vous avez dit que les clients mondiaux ont le choix pour acheter leurs céréales et qu'ils peuvent maintenir les prix bas. Nous avons des producteurs agricoles, comme vous le savez fort bien, qui n'ont pas 36 possibilités pour vendre leur blé d'exportation. La Commission canadienne du blé prévoit-elle de donner aux agriculteurs le choix pour commercialiser leur blé parce qu'ils peuvent, tout comme les clients, chercher le meilleur marché vendeur et augmenter ainsi leur revenu? Est-ce possible?

M. Greg Arason: Le mandat de la Commission du blé est d'être le seul guichet de vente pour le blé et l'orge canadiens d'exportation. C'est le mandat qui nous a été conféré par la loi et c'est pour exécuter ce mandat que nous avons été créés. Notre objectif est donc de remplir ce mandat et nous n'avons pas la possibilité de le modifier. Je crois que la Commission du blé, au nom des producteurs, maximise les recettes et tire profit des occasions de marché. Nous ne pouvons pas changer la situation de l'offre et de la demande, mais nous recherchons les meilleures marchés et nous faisons notre maximum pour optimiser les revenus.

Vous souhaitez peut-être savoir si les producteurs peuvent ou non obtenir de meilleurs résultats individuellement que la commission, mais je crois que c'est une chose que la commission peut faire de façon plus efficace.

M. Howard Hilstrom: Non, nous ne sommes pas ici pour discuter de cela. Notre comité cherche des options pour les agriculteurs.

La Commission du blé, qui est le négociant en blé, peut faire certaines choses. Elle peut vendre, elle peut essayer d'obtenir le prix le plus élevé, mais le prix en gros est celui fixé par le marché à terme de Chicago et il y a là des variations de client à client.

Que peut faire la Commission du blé pour faire monter les prix, étant donné que c'est l'élément essentiel? Vous avez parlé du prix du transport. La commission a indiqué que des économies d'environ 180 millions de dollars ont été réalisées par les chemins de fer, et elles n'ont pas été partagées avec les agriculteurs ces dernières années. Pourquoi la commission n'a-t-elle pas pu récupérer une partie de ces économies pour les agriculteurs? Est-ce que c'est à cause de la législation qui vous régit, ou pour autre chose?

• 0950

M. Greg Arason: La commission négocie des tarifs inférieurs sur les corridors ferroviaires lorsque l'occasion se présente, mais en gros, les tarifs qui ont été mis en place après la suppression de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest n'ont pas été révisés depuis un certain temps, et dans l'intervalle, les chemins de fer ont amélioré leurs ratios d'efficacité et ont bénéficié de ces rendements. Certains ont été remis en partie aux grandes entreprises céréalières et d'autres ont dû être partagés parce que le gouvernement l'exigeait, mais de façon générale les chemins de fer ont gardé une grande partie de leurs revenus.

Le président: Merci.

Je regrette, Howard, votre temps de parole est terminé.

Madame Alarie, vous avez sept minutes.

[Français]

Mme Hélène Alarie: J'ai été très heureuse d'entendre le discours de M. Furtan. On sait toutes sortes de choses: ce qui se passe à moyen terme, ce qui se passe à court terme, ce qui va se passer à long terme, les politiques du gouvernement, les politiques de l'OMC et les politiques internationales. On sait tout cela par coeur, finalement. Il n'y a pas grand-chose qui change. C'est assez immuable et on en arrive toujours à la même conclusion: on est dans une impasse.

C'est la première fois que j'entends dire à ce comité que le problème en est un de société, et que le choix qu'il faut faire est un choix de société. On n'ose pas s'interroger sur l'avenir de la ferme familiale ou de la petite ferme. On n'est même pas capable de la définir. Je pense qu'on obtiendrait autant de définitions qu'il y a de députés autour de cette table.

Or, je trouve que c'est une problématique majeure et que si nous en sommes en concurrence avec les États-Unis et avec la Communauté européenne—je dirais encore plus avec cette dernière—, c'est parce qu'eux ont fait un choix de société. Ils ont décidé de sauver les entreprises agricoles coûte que coûte. À l'OMC, on va écouter tout ce beau monde, tout en sachant d'avance, parce qu'ils ont fait des déclarations tous azimuts, que la Communauté européenne ne reculera pas quant au choix qu'elle a fait de sauver l'entreprise agricole de taille moyenne ou la petite ferme.

Je pense que c'est un défi national et qu'on devrait commencer à en parler le plus tôt possible, parce qu'on ne trouvera pas de solution miracle. Les gens vont se décourager. On a besoin de l'appui de tous les autres secteurs de la société si on veut sauver les entreprises agricoles.

Vous faites trois propositions à long terme. Maintenir le cap actuel ne nous mène nulle part. Vous dites qu'il y aurait un coût très élevé à ce que le gouvernement s'engage à maintenir les exploitations familiales. Serait-ce un coût comparable aux subventions qui sont données en Europe ou aux États-Unis? Pouvez-vous être un peu plus explicite sur ce point?

[Traduction]

M. Hartley Furtan: Cela coûterait certainement davantage. L'une des provinces intéressantes à ce chapitre est le Québec. L'année dernière, je suis allé à l'université Laval et j'ai eu l'occasion de passer une année dans cette province pour étudier la politique agricole. Comme vous le savez, on y applique la formule du coût de production et on a pu de fait conserver davantage d'exploitations de plus petite taille, mais cela coûte très cher. C'est une proposition très onéreuse.

Nous pouvons donc concevoir des programmes qui correspondront aux règles de l'OMC. Nous aurons peut-être davantage de problèmes à la frontière américaine, mais c'est une autre question. Mais il s'agit donc de toute évidence d'un choix de politique publique.

Ce que j'essaie de dire ici, c'est qu'il y a des choix de politique publique à faire. L'un de ces choix est de conserver les exploitations agricoles—et nous voyons cela se faire, comme vous le dites, en Europe. Le Québec a un programme différent. En Saskatchewan, nous n'avons en fait rien pour maintenir l'exploitation familiale, et nos agriculteurs subissent des pressions énormes tandis que l'écart coûts-prix continue à se réduire. Ils sont donc frustrés.

Je ne peux pas vous donner de chiffre, mais je peux vous dire que cela se fait dans d'autres régions et que cela peut être réalisé si c'est un objectif de politique publique.

[Français]

Mme Hélène Alarie: Vous donnez l'exemple du Québec. C'est vrai que nos malheurs ont fait notre bonheur à long terme. On a été obligés très tôt de diversifier l'agriculture à cause de la rareté des bonnes terres.

• 0955

Toutefois, c'est aussi un choix de société qui a été fait. On se fait brasser la cage une fois de temps à autre. On nous dit que ce soutien coûte très cher. Mais on a présenté à la population des calculs qui démontrent que cela coûterait encore plus cher de déplacer ces fermes ou, en tout cas, qu'il y aurait un coût social encore plus grand à payer si on mettait fin à l'entreprise des petites fermes, des fermes familiales.

Est-ce que ce coût-là est aussi évaluable? Comment pourrait-on faire cette preuve, cette démonstration?

[Traduction]

M. Hartley Furtan: On peut évaluer le coût financier assez facilement, mais c'est le coût plus général des collectivités et la façon dont la société souhaite structurer certains secteurs qu'il est pratiquement impossible d'évaluer. Ces choses-là relèvent de toute évidence de la politique publique et de la politique tout court, et c'est pourquoi j'en parle ici.

Le coût économique peut être évalué assez facilement, mais ce que cela veut dire pour les collectivités et l'apparence du pays que souhaite la société est une question de politique, et cela ne peut être évalué. C'est à vous de le faire.

Le président: Merci beaucoup.

[Français]

Mme Hélène Alarie: C'est tout un contrat.

J'ai une autre question et j'en aurai d'autres par la suite. Dans les tableaux que vous nous avez présentés, monsieur Arason, on nous présente toujours la comparaison avec l'Australie, qui donne beaucoup moins de subventions à ses producteurs. On n'a qu'à regarder le tableau de 1998. Comment l'Australie peut-elle être compétitive sur les marchés? Quand on regarde ces tableaux en faisant la comparaison avec les subventions qui sont données aux États-Unis ou dans la Communauté européenne, on a le réflexe de se dire que ces pauvres agriculteurs australiens doivent tous être en faillite. Comment arrivent-ils à survivre avec aussi peu de subventions, en comptant uniquement sur leur productivité et sur leurs marchés?

[Traduction]

M. Greg Arason: Lorsque nous avons discuté avec les Australiens, ils ont reconnu qu'ils avaient les mêmes problèmes en ce qui concerne l'effet des subventions de l'UE et des États-Unis. Leurs prix sont aussi bas.

Mais il me semble que les Australiens ont un avantage important, et c'est celui des coûts, surtout les coûts de transport qui sont nettement inférieurs. La plus grande partie de la région productrice de céréales est située à brève distance des ports maritimes et les coûts de transport sont nettement inférieurs, ce qui me semble être un avantage naturel et c'est ce qui fait la différence.

Le président: Merci.

Monsieur Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Furtan, j'aimerais que vous nous donniez une définition brève et claire de la ferme familiale. Je suis agriculteur de troisième génération. Je suis censé représenter la génération qui va en gros tout ficher en l'air, si on suit les tendances démographiques.

J'ai mené notre exploitation agricole dans une direction totalement différente de celle de mon père, mais j'aimerais beaucoup savoir comment vous définissez l'exploitation familiale.

M. Hartley Furtan: Eh bien, ma définition de la ferme ou de l'exploitation familiale est celle que j'ai donnée à ma classe l'autre jour et je vais donc vous la répéter.

M. Murray Calder: Bien.

M. Hartley Furtan: C'est la ferme ou l'exploitation qui est le lieu de travail de la famille. La famille fait l'essentiel du travail et complète avec des ouvriers engagés. C'est l'élément essentiel: l'exploitation familiale est une exploitation où l'essentiel de la main-d'oeuvre—pas entièrement; il peut y avoir une ou deux personnes qui sont engagées, mais pas 50 évidemment—est familiale.

Il ne s'agit pas de savoir combien l'exploitation compte d'acres. Il ne s'agit pas de savoir combien elle compte de vaches. Mais la définition sur laquelle j'insiste est qu'il s'agit du lieu de travail et vraisemblablement de la résidence de la famille et que la main-d'oeuvre est essentiellement fournie par la famille.

• 1000

M. Murray Calder: Très bien. C'est une bonne définition.

À l'heure actuelle évidemment, étant donné la situation du marché mondial, des céréales et de tout le reste... Lorsque nous avons négocié en 1993, nous avions en gros affaire à une certaine situation de l'offre et de la demande. Avec le prix des céréales et l'instabilité du marché céréalier, nous n'avons pas pu atteindre cet équilibre de l'offre et de la demande. L'un d'entre vous, messieurs, pourrait-il se lancer sur ce sujet et nous dire pourquoi il en est ainsi et comment nous pourrions redresser la situation.

M. Richard Gray: Je contesterais le fait que l'on ait atteint un équilibre. Je crois qu'il est tout à fait normal qu'avec une grande quantité de produits, ce qui se passe, c'est que l'industrie se dote d'une certaine capacité de production, si vous voulez, en réaction à des prix élevés. Elle investit énormément. Elle augmente sa capacité. Tandis que cette capacité augmente, la production augmente. Cela veut dire en gros que les prix subissent des pressions à la baisse et qu'ils restent dans cette situation jusqu'à ce que, sur une période prolongée, les investissements fassent défaut et la capacité de produire soit réduite par rapport à la demande et que les prix remontent à nouveau pour de brèves périodes.

Je crois que l'idée d'avoir des exploitations céréalières rentables, par exemple, pendant une période durable, ou des mines de cuivre rentables pendant une période durable, ce n'est pas de cette façon que les choses fonctionnent avec les marchandises. Si c'est le cas, si elles sont rentables, cela veut dire qu'il y aura des investissements et qu'elles ne vont pas rester rentables parce que la production dépassera en quelque sorte la croissance de la demande. Je ne pense donc pas que ce soit une situation d'équilibre.

M. Murray Calder: Cela n'a rien à voir avec le fait que nous avons eu quatre années consécutives de bonnes récoltes et que nous avons un excédent de céréales dont nous essayons de nous débarrasser à l'heure actuelle et que la meilleure façon d'y parvenir, c'est... le prix le plus bas emportera le marché? D'autres pays sont donc en train de subventionner leurs ventes de céréales pour capter essentiellement ce marché ou simplement pour vendre le surplus.

M. Richard Gray: Cela a certainement à voir avec la météorologie, mais aussi en partie avec les subventions, mais pas énormément. Si nous avions un marché complètement libre, nous verrions aussi ce type de situation se produire. C'est de cette façon que le secteur a évolué. En gros, cela voudrait dire que les pointes des prix seraient un peu plus fortes, et que l'on ferait les investissements supplémentaires correspondants qui seraient faits pendant ces périodes de pointe, et on serait tout de même encore aux prises avec une situation de surabondance. Le gouvernement aggrave la situation avec sa politique étrangère, mais je ne crois pas qu'il la crée.

M. Murray Calder: D'accord. Ce que l'on semble voir depuis quelques années, depuis que l'on se trouve dans cette situation, c'est que l'on se laisse prendre dans ce cercle; on se surveille, on surveille les États-Unis et l'UE. Mais il y a d'autres pays dans le monde qui produisent aussi des céréales. L'Australie en est un. J'ai un ami qui y va chaque année conduire des moissonneuses-batteuses. Mais on ne parle des agriculteurs de ce pays. Est-ce qu'ils ont un problème ou non? Qu'est-ce qu'ils font de bien? Quelle est la situation en Australie? Ce pays exporte aussi des céréales.

M. Richard Gray: Je crois qu'il y a aussi dans ce pays un problème important. Les revenus des céréales sont également très bas. Il se trouve que certains producteurs connaissent des difficultés financières et qu'ils ne font pas les investissements qu'ils font normalement pour maintenir leur production céréalière.

M. Murray Calder: Où êtes-vous allé pour trouver ces chiffres?

M. Richard Gray: Concernant...?

M. Murray Calder: Le problème de l'Australie, sa production. Est-ce qu'on y tient le même discours qu'ici sur les subventions et le reste? Avez-vous des documents qui prouvent ces faits?

M. Richard Gray: J'ai un collègue qui a récemment passé une année en Australie, un économiste agricole. Il s'appelle Julian Alston. Il a étudié les marchés céréaliers et a parlé aux gens et c'est de lui que je tiens mes renseignements.

M. Murray Calder: D'accord.

M. Greg Arason: L'un des autres facteurs dont on ne parle pas souvent—parce que ce n'est pas un pays exportateur, mais il a un effet important sur le marché, c'est la Chine. La Chine, au cours des quatre dernières années, a eu des productions record. Si nous remontons à la période qui a précédé cette situation, la Chine était un gros importateur. Elle importe encore une grande quantité de céréales, mais elle le fait davantage maintenant pour la qualité que pour la quantité et cela a eu un effet important sur le marché.

• 1005

Bien sûr, l'autre retombée a été la situation économique en Russie et dans l'ancienne Union soviétique puisque ces marchés importants ont pratiquement disparu. Ces dernières années, ils sont devenus essentiellement des marchés pour l'aide alimentaire.

Il faut donc prendre en compte ces deux situations et y ajoutez la grippe asiatique, qui semble être sur la voie de la guérison, mais je trouve qu'on a tendance à oublier la situation chinoise comme facteur du marché.

Le président: Merci, Murray.

Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Soyez tous les bienvenus.

Je pense que M. Furtan nous a donné énormément de matière à réflexion avec les trois options qu'il nous a présentées ce matin.

Pour commencer, du moins pour cette première série de questions, j'aimerais m'attacher à la première option qui est, comme il l'a décrite, de maintenir le cap et vous demander à tous de me dire, si possible, ce que vous pensez que le gouvernement devrait faire de son programme ACRA. Comme vous le savez, c'est un programme de deux ans. Devrait-il continuer pendant un certain temps, indéfiniment ou devrait-on s'en débarrasser?

Selon certaines indications, l'ACRA semble fonctionner en dehors des Prairies, ce qui est intéressant puisque c'est cette région qui a à juste titre été identifiée comme celle qui avait le plus besoin d'aide il y a un an. Mais j'aimerais savoir si vous pensez que l'on devrait garder l'ACRA ou non.

M. Richard Gray: Je peux répondre à ça.

Comme vous le savez fort bien, le programme ACRA s'appuie sur une moyenne de trois ans. Ce qui peut paraître ironique, c'est que les producteurs qui ont le moins de réserves monétaires sont ceux qui sortent de trois années difficiles dues à diverses raisons. Ils sont au bas de l'échelle pour ce qui est du revenu et de la viabilité.

Une moyenne de trois ans est une moyenne très courte pour représenter une stabilité réelle utile pour les producteurs et je crois que c'est l'un des problèmes qu'il faut corriger dans l'ACRA.

Si nous décidons de prolonger l'ACRA d'un an ou deux, et que nous avons quatre ou cinq années successives de faible revenu, il ne sera pas utile. Pour ces exploitations familiales qui subissent un gros stress, l'ACRA n'est pas très efficace.

M. Hartley Furtan: Je suis d'accord avec ce que vous venez de dire. Je reconnais que le gouvernement a débloqué une somme importante d'argent. Mais les choses ne se passent pas comme prévu, en grande partie pour les raisons que mon collègue vient de mentionner. Les formules utilisés ne déclenchent tout simplement pas l'application du programme comme l'avaient prévu les auteurs.

M. Dick Proctor: Monsieur Arason, la Commission du blé a-t-elle une opinion sur l'ACRA?

M. Greg Arason: Non, notre conseil d'administration n'a pas d'opinion précise sur l'ACRA. Ce que nous avons dit aujourd'hui, c'est que nous estimons que des programmes efficaces quelconque sont nécessaires pour permettre au secteur de survivre à court terme. Pour ce qui est de savoir si l'ACRA peut répondre à ce besoin ou si des modifications sont nécessaires, notre conseil n'a pas d'opinion officielle là-dessus.

M. Dick Proctor: La semaine dernière, lorsque le ministre a rendu visite au Saskatchewan Wheat Pool, il a indiqué que le Canada avait peut-être été trop prudent—je crois que c'est exactement ce qu'il a dit—dans ses négociations commerciales. Avez-vous une opinion sur le sujet, et s'il a raison, que pourrions-nous faire au cours des prochaines négociations de Seattle pour signaler que nous nous ne serons pas mous?

M. Greg Arason: J'ai assisté à la réunion d'avril au cours de laquelle le secteur agricole canadien et les gouvernements se sont retrouvés pour parler de la stratégie pour Seattle. J'y ai entendu une remarque intéressante de la part d'un représentant d'une organisation agricole qui a dit qu'en entamant ce nouveau cycle, nous devrions veiller, au sujet de ceux qui ont signé les chèques la dernière fois dans les autres pays, à ce que ces chèques ne soient pas sans provision une fois encore.

• 1010

Pour beaucoup, le Canada a fait d'énormes concessions autour de la table des négociations du dernier cycle, et vous pouvez en voir les résultats, alors que d'autres ont trouvé des moyens différents pour soutenir leurs producteurs. L'écart s'est nettement creusé depuis le cycle d'Uruguay et nous sommes dans une situation telle, du moins à notre avis, que les Canadiens n'ont pas vraiment grand-chose à accorder cette fois-ci.

Le président: Merci, monsieur Proctor.

Madame Ur, vous avez cinq minutes.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Je vous remercie de vos exposés. Le dernier qui a pris la parole a ajouté des éléments intéressants à la discussion de ce matin.

Nous avons déjà parlé de cela à plusieurs reprises, surtout lorsque nous avons discuté de l'ACRA. Ayant été moi-même agricultrice antérieurement, je trouve cela vraiment difficile, je ne sais pas comment nous pouvons changer les choses pour les Prairies. Ce sont des producteurs céréaliers et c'est pour cela qu'ils sont reconnus.

Dans ma circonscription, lorsque je parle à des non-agriculteurs, je fais toujours l'analogie suivante: si Ford produit trop de voitures, on ferme les usines. Les agriculteurs ne peuvent pas fermer; ils produisent des céréales.

Comment pensez-vous que nous puissions régler ce problème? Comme Murray l'a dit, nous avons eu tellement de bonnes années parce que les cultures, la technologie et le reste ont été améliorés. Que pouvons-nous faire différemment dans ce domaine pour remédier à cette crise?

Comme l'un des témoins l'a dit, il y a trop de ressources en agriculture. Proposez-vous que l'on transforme des terres agricoles en parcs? Que proposez-vous? Je crois que c'est M. Furtan qui a dit que nous avions trop de ressources.

M. Hartley Furtan: C'est ce que nous dit le marché. Il nous dit que nous produisons trop de céréales d'exportation.

Mme Rose-Marie Ur: Alors nous sommes trop bons.

M. Hartley Furtan: Ce n'est pas nécessairement que nous soyons trop bons, mais il y a trop sur le marché mondial. Et lorsque vous regardez cela en fonction des coûts—de transport, de manutention, etc.—les agriculteurs ne peuvent tout simplement pas couvrir leurs coûts. Je crois donc que l'une des questions que nous devrions essayer d'aborder franchement, c'est de nous demander si nous avons trop de terres cultivées? Chose ironique, il y a 50 ans, c'était notre plus grande force. Aujourd'hui, c'est peut-être notre plus grande faiblesse.

En raison sans doute des expériences politiques du passé, le programme LIFT de réduction des stocks de blé dans les années 70, qui a été introduit au moment précis où les marchés allaient dans une certaine direction, les agriculteurs n'aiment pas du tout cette idée. Il nous faudra cependant nous poser à nouveau la question, comme l'ont fait les États-Unis. L'Europe a adopté un programme de mise en réserve des terres. Peut-être que nous devrions étudier la question.

Peut-être qu'on devrait faire des parcs de prairie. Je crois que c'est une possibilité extraordinaire que de lier cela à l'environnement. Richard Gray est expert en matière de gaz à effet de serre et c'est un sujet dont nous devons nous occuper du fait du protocole de Kyoto. Il y a peut-être là une occasion extraordinaire d'injecter de l'argent dans l'agriculture en changeant les schémas d'utilisation des terres en vertu de l'accord de Kyoto et résout du même coup deux problèmes. Je crois qu'il vaut la peine d'y réfléchir.

M. Richard Gray: Il y a une autre question qui concerne l'utilisation des terres en particulier et qui est que toutes les terres ne se valent pas. Il y a toujours des terres dans une exploitation ou dans une région qui, année après année, rendent moins que les bonnes terres d'à côté. Lorsqu'on parle de retirer des terres à l'agriculture, on ne dit pas nécessairement qu'on va prendre les meilleures terres agricoles.

Mme Rose-Marie Ur: Les terres peu productives ou marginales.

M. Richard Gray: Il pourrait s'agir des terres marginales. On devrait donc y penser.

Mme Rose-Marie Ur: Exactement. Nous avons déjà eu des exposés avant, et nous sommes parfaitement au courant de toutes les subventions que les agriculteurs américains ont reçues cette année. Mais nous avons aussi entendu un discours différent de la part des agriculteurs et des politiciens américains lorsqu'ils disent que chez eux aussi les coffres vont se vider. Ils sont en train d'étudier notre programme du CSRN parce qu'ils pensent qu'il pourrait leur être utile. Quel est votre avis? Je ne pense pas non plus qu'ils puissent continuer indéfiniment à subventionner leurs agriculteurs comme ils l'ont fait cette année.

M. Hartley Furtan: C'est une hypothèse intéressante, mais je ne crois pas qu'elle soit vraie. Je crois que l'agriculture céréalière aux États-Unis est très réduite et étant donné la représentation républicaine au Sénat et ce que cela veut dire, les États-Unis continueront à protéger leurs agriculteurs pendant longtemps encore.

• 1015

Merci.

Le président: Merci beaucoup. Monsieur Breitkreuz.

M. Garry Breitkreuz: Merci beaucoup. J'ai trouvé vos exposés très intéressants et je vous remercie d'être venus. C'est bien de faire venir des experts devant le comité.

L'ACRA aide très peu d'agriculteurs et c'est ce que votre analyse indique clairement. Mais que peut-on faire pour remédier aux lacunes de ce programme, ou pour le corriger? Je sais qu'il y a des problèmes qui existent; vous n'avez pas besoin de me le dire. Il suffit de parler à n'importe quel agriculteur et vous le saurez. Que peut-on faire pour corriger le problème?

M. Richard Gray: Tout d'abord, si vous parlez de maintenir l'ACRA comme hypothèse et que vous demandez comment le corriger, je crois que le fait de passer d'une moyenne de trois à cinq ans, ou du moins de donner aux producteurs la possibilité d'utiliser une moyenne de cinq ans plutôt que trois ans, serait utile. C'est déjà un gros progrès, mais je ne pense pas que cela règle la question essentielle qui est que les producteurs qui ont connu de mauvaises années sont les plus vulnérables à l'heure actuelle.

Il y a peut-être un défaut structurel dans le programme pour lequel vous ne pouvez pas grand-chose. S'il se fonde sur les marges individuelles du passé et qu'on les utilise pour les paiements de l'avenir, c'est tout simplement un défaut du programme pour lequel vous ne pouvez pas grand-chose.

M. Garry Breitkreuz: On ne peut pas le corriger?

M. Richard Gray: Ma foi, on pourrait créer un programme différent.

M. Garry Breitkreuz: Que pouvons-nous faire pour remédier à cette situation et pour que l'argent aille à ces gens qui en ont besoin? Que peut-on faire? Je n'abandonne pas la partie si facilement. Je sais que tout ce que vous avez dit est vrai et que passer à un programme de cinq ans n'est guère utile car vous avez dit que le problème existe depuis trois ans.

M. Richard Gray: Pour moi, les objectifs du gouvernement comptent beaucoup. S'il s'agit de vraiment cibler pour vraiment aider les familles d'agriculteurs qui ont des problèmes; il faudrait peut-être un programme qui soit davantage ciblé que l'ACRA. Peut-être qu'il faudrait envisager des références s'étendant sur des périodes plus longues ou des références moyennes et si les producteurs sont en dessous d'une référence dans une région donnée, on les aiderait.

Cibler n'est pas toujours très bien accepté. Vous allez tout de suite entendre de la part des producteurs qui se situent juste au-dessus de la moyenne: «Mais pourquoi lui donne-t-on de l'argent? Je devrais y avoir droit aussi.» Les producteurs vont donc en moyenne demander des paiements qui aillent à tout le monde. Mais en faisant cela, vous n'avez pas assez d'argent pour aider ceux qui en ont besoin. C'est là le problème politique.

Je vais m'en sortir, comme Hartley l'a fait, en disant que c'est un choix que le gouvernement doit faire. Si vous voulez vraiment aider ceux qui en ont besoin, il faut les cibler. Si vous voulez être populaires auprès de tous les agriculteurs, alors vous donnez un petit peu à tout le monde, mais vous ne réglez pas vraiment le problème.

M. Garry Breitkreuz: Je ne suis pas sûr que cela nous aide beaucoup.

Passons à la Commission du blé. Vous avez notamment dit qu'elle avait été créée pour que les agriculteurs obtiennent le maximum pour leurs céréales. On s'inquiète beaucoup dans les Prairies de ce que la politique de la commission en matière de transformation à valeur ajoutée lie véritablement les mains des agriculteurs qui souhaitent vraiment augmenter leurs revenus en faisant de la transformation. Vous voyez de quoi je veux parler.

Il semble y avoir vraiment contradiction ici car les agriculteurs, individuellement, sont oubliés dans ce processus. Comment expliquez-vous cette contradiction?

M. Greg Arason: Je crois savoir de quoi vous parler.

M. Garry Breitkreuz: Les transformateurs de Prairie Pasta en sont un exemple.

M. Greg Arason: Une proposition a en particulier fait l'objet d'un véritable débat public. La commission a dit que son mandat n'était pas de favoriser qui que ce soit dans l'industrie de la transformation. Les transformateurs devraient acheter leurs actions auprès de la Commission canadienne du blé au même prix. Autrement dit, nous pourrions créer des règles de jeu égales pour l'industrie nationale de la transformation, en appliquant un prix nord-américain concurrentiel.

• 1020

Ce que nous avons offert aux coopératives de la nouvelle génération, y compris Prairie Pasta, c'est une certaine souplesse, tout d'abord dans la façon dont elles sont payées pour modifier légèrement leurs liquidités et rendre la chose plus acceptable. Nous leur avons également offert la possibilité d'un programme d'échange des actions. De cette façon, les investissements seraient disponibles à tous les producteurs des Prairies, qu'ils soient à proximité de l'usine ou non. Nous pensons que ce que nous avons offert constituait un créneau important. Mais il nous faut prendre garde, comme je l'ai déjà dit, à ne pas donner lieu à un environnement différent pour les transformateurs dans leur ensemble.

Je dirais que la valeur ajoutée, au Canada et dans l'ouest du Canada, a fait des progrès. Nous avons sans doute davantage investi dans l'industrie brassicole que nos voisins du Sud. Cette capacité a été en grande partie améliorée et encouragée dans l'ouest du Canada. De nouvelles brasseries se sont lancées—certaines à proximité de Winnipeg, d'autres plus à l'Ouest. La capacité a augmenté dans plusieurs brasseries qui existaient déjà. Nous estimons donc que notre politique ne fait pas obstacle à la valeur ajoutée; elle permet de la réaliser.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur, mon temps de parole est limité. Est-ce déjà terminé pour moi?

Le président: Oui. Vous avez déjà dépassé d'une minute.

M. Garry Breitkreuz: J'aurais aimé vous interrompre, car votre réponse pose plusieurs problèmes importants.

Le président: Merci.

Monsieur Furtan, lorsque vous parliez à Mme Ur, vous avez indiqué que lorsqu'il s'agissait de fournir des subventions, étant donné la situation actuelle, les Américains risquaient de le faire pendant assez longtemps encore. Pouvez-vous nous dire quelle est l'importance du secteur agricole américain par rapport à la totalité du PIB du pays et faire ensuite la comparaison avec la situation canadienne?

M. Hartley Furtan: Je peux vous donner des chiffres assez exacts en ce qui concerne la main-d'oeuvre. Je crois que 1,5 p. 100 de la main-d'oeuvre américaine est employée dans le domaine agricole alors qu'au Canada il s'agit de plus de 2 p. 100.

Par ailleurs, je ne peux pas vous donner les chiffres exacts pour le PIB, mais l'élément important est que les États-Unis n'exportent pas autant de céréales que nous. Je crois que nous parlons d'un problème d'exportation de céréales actuellement. C'est là le noeud du problème. Nous sommes très vulnérables parce que nous exportons une si grande partie de nos céréales.

Le président: Quels sont les chiffres? Exportons-nous 85 p. 100, monsieur Arason?

M. Greg Arason: Pour le blé, les exportations sont de l'ordre de 75 p. 100.

Le président: Et aux États-Unis?

M. Hartley Furtan: Ce doit être de 30 à 50 p. 100, selon l'année. Donc à peu près la moitié des nôtres. C'est ce qui rend la chose d'autant plus difficile pour nous.

Le président: Oui, c'est compréhensible. Merci.

Monsieur Steckle.

M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Je ne sais trop par quoi commencer.

Le président: Par le début.

M. Paul Steckle: Si je me souviens bien des faits et des chiffres, lorsque nous avons entamé les négociations de l'OMC et de l'ALENA, plusieurs raisons nous ont fait emprunter cette voie, mais c'était pour faire disparaître les subventions du gouvernement au marché. Si je me trompe, cela fait un certain temps que je suis dans l'erreur dans ma façon de voir. Mais cela n'a pas vraiment fonctionné.

Je me demande quelle est votre évaluation de ces accords, et plus particulièrement de celui de l'OMC car il est international.

M. Hartley Furtan: Je crois que nous nous sommes lancés dans l'OMC et dans l'ALENA parce que nous pensions que la libéralisation du commerce entraînerait des avantages économiques. C'est ce que je pense personnellement. J'estime donc que c'étaient des accords positifs dans l'ensemble.

Lorsqu'on essaie de libéraliser le commerce, les pays créent des distorsions de ce commerce avec des subventions. L'une des façons de libéraliser le commerce est donc d'imposer des mesures disciplinaires aux pays qui subventionnent les exportations et, dans une bien moins large mesure, qui ont des subventions intérieures.

• 1025

Avec l'OMC, ce qui s'est produit, c'est que l'agriculture est arrivée pour la première fois en 1995. Avant cela, l'agriculture n'était pas couverte par l'OMC. De nombreuses mesures disciplinaires ont été introduites et c'est là-dessus que je m'oppose un peu à ce qu'a dit M. Arason. En 1995, je crois que les céréaliers canadiens de l'Ouest ont fait d'énormes sacrifices envers l'OMC. Si nous regardons d'autres segments de l'agriculture canadienne, ils n'en ont guère fait, et je soulève ici la question de la gestion de l'offre. On est passé de l'article 2.11c) du GATT, qui était une restriction quantitative, à des tarifs très élevés qui ont donné lieu en gros à un système équivalent.

Je ne veux pas dire que c'est mauvais. Là n'est pas la question. Je veux simplement dire que les céréaliers de l'Ouest ont reçu un traitement différent. Ils ont perdu le taux du Nid-du-Corbeau et il n'aurait peut-être pas fallu le supprimer. Nous avons fait tomber d'autres programmes. C'est ce qui s'est passé du fait de l'OMC en 1995.

Dans l'ouest du Canada, nous avons fait un gros sacrifice pour la libéralisation du commerce, en quoi nous croyons énormément—plutôt en quoi je crois. Je ne devrais pas parler pour les autres, mais j'y crois.

M. Paul Steckle: Quelqu'un a aussi dit que nous avions développé nos industries à valeur ajoutée. Vous avez parlé de l'industrie brassicole. C'est certainement vrai, mais le prix de la bière n'a pas baissé. On vend davantage de bière.

L'importance du succès de toute industrie est mesurée en fonction de sa rentabilité. GM vend toujours à profit ses voitures ou ses camions. Si elle ne peut pas en tirer un profit, elle ne les vend pas. Les banques font des bénéfices exorbitants grâce aux marges dont elles disposent, et c'est de cette façon qu'elles procèdent depuis un certain nombre d'années. Mais les agriculteurs, les producteurs primaires, sont un peu oubliés dans tout ce tableau. Nous avions un système double pour le prix du blé. Cela n'est plus possible parce que nous avons signé des accords internationaux. Si nous ne pouvons pas l'acheter assez bon marché ici, nous l'achetons ailleurs.

Ce ne sont que des propos cyniques que j'entends ce matin. En tant qu'agriculteur, je dois me dire qu'il n'y a en fait qu'une seule chose qui va régler ce problème. Mais ce n'est pas véritablement une solution, c'est l'argent. Nos ressources sont limitées, alors que faisons-nous? Je pense que nous sommes le meilleur pays du monde, mais nous ne pouvons pas nous occuper de ces gens qui s'occupent de nous. Nous ne sommes pas prêts à payer les aliments que nous mettons sur la table. Tout le monde a une marge dans la situation générale actuelle, sauf les producteurs primaires. Tout le monde a une marge dans ses opérations. Comparer! C'est une bonne illustration.

M. Greg Arason: Je m'en remets un peu à mes collègues de l'université, mais mon impression et mon sentiment sont que les prix des aliments en Amérique du Nord, en pourcentage du revenu disponible, sont pratiquement inférieurs à ceux de toutes les autres régions. C'est certainement un problème.

J'ai assisté à une conférence hier à laquelle on a fait une analogie intéressante. Prenez une boîte de céréales. Si Tiger Woods a sa photo sur la boîte, il gagne sans doute dix cents par boîte de céréales vendue mais l'agriculteur ne gagne que cinq cents pour produire le blé. C'est le problème essentiel, à mon avis, et on peut aller jusqu'à dire que l'emballage coûte plus cher que le produit qu'il contient. Toute cette idée de considérer les aliments comme des marchandises et la valeur effective des aliments est un problème essentiel en Amérique du Nord. Je crois qu'il en va autrement en Europe. L'attitude est différente envers l'alimentation, l'agriculture et le prix des aliments. Vous pouvez le voir en observant le prix des aliments sur le marché.

Malheureusement, au Canada, même si nous augmentions le prix intérieur des aliments grâce à un mécanisme quelconque pour restituer une valeur supérieure aux agriculteurs, le fait est que nous avons une population relativement réduite et une très grosse capacité de production. Nous sommes donc encore à la merci des marchés d'exportation pour une grosse partie de notre production, surtout celle des céréales.

Le président: Merci, monsieur Steckle.

[Français]

Madame Alarie.

Mme Hélène Alarie: Vous avez parlé tout à l'heure du marché de l'aide alimentaire. Je vais vous poser une question qui est peut-être très naïve. D'un côté, on a un pays qui surproduit et, de l'autre, on a des gens qui crèvent de faim dans le monde. J'ai déjà demandé comment il se faisait qu'on n'arrivait pas à réaliser un certain équilibre. C'est pourtant un marché intéressant pour les producteurs, mais évidemment pas pour ceux qui vont recevoir les produits.

On m'a répondu que cela engendrerait des distorsions du marché. Eh bien, on a des distorsions avec les subventions. Peut-être devrait-on tenter de trouver une solution. Dans le cours ordinaire des choses, on n'entrevoit pas de solution. Peut-être faudrait-il en imaginer de plus inhabituelles ou même insolites. Ce serait peut-être une façon de disposer de notre surproduction.

• 1030

[Traduction]

M. Richard Gray: Pour l'aide alimentaire, on l'a utilisée dans le passé. Les États-Unis l'ont utilisée de façon plutôt agressive, si vous voulez, pour mettre des céréales sur des marchés qui n'existeraient pas autrement, où les consommateurs n'ont essentiellement pas les ressources voulues ou n'ont pas accès au marché mondial dont ils ont besoin. Grâce aux programmes d'aide alimentaire, les Américains se sont débarrassés de leur marchandise.

Ces programmes continuent, mais il y a peut-être là une possibilité... Si les contribuables avaient la volonté de parrainer ce genre de programmes, cela améliorerait la situation pour les céréales, tout comme un retrait des terres en cultures. Tous deux ont le même effet pour ce qui est de faire disparaître du marché une partie des approvisionnements. Mais il y a là aussi des dépenses. C'est un choix qu'il faut faire.

[Français]

Mme Hélène Alarie: Finalement, on revient toujours aux choix de société, et il serait peut-être temps d'en faire un.

J'ai une dernière question à propos du transport. On dit que le coût du transport pénalise les agriculteurs qui sont plus éloignés. En fait, il n'y a pas d'uniformité dans les coûts du transport. Jusqu'à quel point cette situation est-elle responsable de la crise actuelle? Est-ce majeur? Qu'est-ce que cela représente?

[Traduction]

M. Greg Arason: A priori, nous pensons que le coût du transport et de la manutention réunis représente le coût le plus important que doivent assumer les agriculteurs, et il est de taille. Surtout par rapport aux Australiens, comme je l'ai dit. Le Canada est désavantagé sur le plan géographique dans la mesure où une grande partie de notre production se trouve dans une région éloignée des ports maritimes. Nous sommes obligés de transporter les produits sur terre sur de longues distances, et cela coûte de plus en plus cher. La suppression de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a eu un effet net sur cet aspect des coûts agricoles directs.

Le président: Nous allons passer à M. Murray, puis à M. Casson.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Messieurs, j'ai trouvé vos remarques très intéressantes et je pense que nous avons de la chance que vous soyez venus ce matin.

Je vais me livrer à un petit sondage rapide auprès de vous quatre avant de vous poser des questions, étant donné que vous êtes parmi les mieux informés sur le sujet au Canada. Si vous étiez producteurs céréaliers—admettons que vous ayez une exploitation familiale et que vous ayez des enfants—recommanderiez-vous à vos enfants de reprendre le flambeau? Si possible, j'aimerais bien que vous répondiez par oui ou non sans réserve.

Je commencerai par M. Furtan.

M. Hartley Furtan: Non, sans doute pas. Je ne le ferais pas.

M. Richard Gray: J'ai un fils. Je possède quelques terres agricoles. Si je devais l'encourager à se lancer dans l'agriculture, je lui conseillerais l'élevage du bétail plutôt que la culture des céréales.

M. Greg Arason: J'ai dû prendre cette décision il y a environ 30 ans lorsque le prix des céréales était très bas, à la fin des années 60. Mon père m'a conseillé de chercher un emploi et c'est ce que j'ai fait. Si je me trouvais dans la même position aujourd'hui, je pense que je dirais la même chose à mon fils.

M. Ian Murray: Ou à votre fille, éventuellement.

M. Greg Arason: Ou à ma fille, oui.

M. Adrian Measner: J'ai été élevé dans une ferme familiale en Saskatchewan, et certains membres de ma famille l'exploite toujours, mais mon conseil serait de ne pas se lancer là-dedans.

M. Ian Murray: Merci.

Si j'ai posé la question, c'est parce que nous avons d'une part entendu M. Arason dire qu'il y avait un besoin pressant de programmes d'aide efficaces pour combler «le vide»; M. Gray nous a peint un tableau assez sombre des tendances à long terme des prix des céréales et M. Furtan nous a proposé trois options, la troisième étant essentiellement d'avoir une stratégie de départ.

Je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, monsieur Furtan, mais en écoutant vos trois options, j'ai imaginé que c'était sans doute cette dernière que vous envisageriez très sérieusement si vous étiez à notre place. Je n'essaie pas de vous demander de faire des déclarations politiques. C'est pourquoi je vous ai posé la première question sur l'avenir de la ferme familiale.

En gros, si on mettait de l'argent dans... On a toujours recours à des euphémismes lorsqu'on parle des programmes. On parle d'argent, on parle d'espèces. On parle de sommes que l'on pourrait peut-être placer dans des investissements plus productifs dans notre pays. Puisqu'ils sont économistes, je pense que les universitaires vont comprendre cela. Il y a d'autres investissements que nous pourrions faire et qui entraîneraient une augmentation de l'emploi ailleurs au Canada.

• 1035

Cela va peut-être vous paraître un peu sacrilège, mais je pose des questions difficiles parce que le problème est difficile et qu'il exigera littéralement des milliards de dollars à la longue si nous voulons garder notre place, à ce qu'il me semble.

Aussi, monsieur Furtan, vais-je revenir sur votre troisième option. Pensez-vous personnellement que ce soit une option raisonnable pour le gouvernement?

M. Hartley Furtan: Oui, je pense que c'est une option raisonnable. Elle est difficile à accepter, mais je pense que c'est une option que votre comité devrait envisager très sérieusement puisqu'il y a de trop nombreuses ressources dans le secteur. C'est ce que nous dit le marché. Il n'y a pas de raison de croire que les prix du blé ne vont pas baisser et il nous faudrait très sérieusement envisager, entre autres options, de permettre à ces gens de sortir en les aidant.

M. Ian Murray: J'aimerais poser une dernière question car je crois qu'il ne me reste qu'une minute.

La Saskatchewan est une province qui a essentiellement été construite autour des céréales. Que va-t-il se passer dans cette province—et encore une fois je ne veux pas paraître trop dramatique—si nous sortons progressivement de ce secteur, si nous payons les agriculteurs pour qu'ils s'en aillent, car ils n'ont en gros pas d'autre régime de pension, et que nous nous assurons qu'on s'occupera d'eux, alors il y aura moins de terres cultivées qu'aujourd'hui? Qu'est-ce que cela va faire à l'assiette fiscale de la Saskatchewan si les terres ont une moins grande valeur? Cela veut-il dire en gros que c'est la fin de la province? Je n'essaie pas d'être trop dramatique, mais ce secteur représente une grosse part du revenu de la province.

M. Richard Gray: Si vous prenez en compte le long terme, cette tendance—le fait de quitter l'agriculture—n'est pas un phénomène nouveau. Regarder la diminution du nombre des agriculteurs avec le temps; je crois que nous arrivons en moyenne à 1,7 p. 100 de pertes par an depuis les années 30. Que les années soient bonnes ou mauvaises, il y a eu confirmation de la tendance et si le gouvernement devait offrir un programme d'aide quelconque à ces agriculteurs qui, pour une raison ou l'autre, se trouvent dans une situation où leur exploitation n'est pas très viable, vous accéléreriez quelque peu cette tendance.

Mais je crois qu'il se trouve en fait que nous en sommes arrivés, cela dépend de la façon dont vous faites le calcul, à 70 000 ou 50 000 agriculteurs en Saskatchewan sur un million de personnes. On peut peut-être doubler ce chiffre si on veut prendre en compte la population qui réside effectivement dans les fermes, mais cela ne va pas créer une arrivée massive dans les villes. Ce problème n'existe plus.

Il y a par ailleurs de nombreuses autres activités rurales qui ne sont pas agricoles. On continuera donc sans doute à cultiver les terres, et il y aura des intrants agricoles, en excluant les terres peu productives. On verra donc simplement une légère accélération du processus de réduction du nombre des fermes. Les agriculteurs se sont adaptés dans le passé et je crois qu'il y aura de nouvelles adaptations à l'avenir, mais il nous faut prendre en compte les coûts sociaux de cette évolution.

Le président: Merci.

Monsieur Murray, si vous m'aviez posé votre première question, je vous aurais dit que mes parents ont eu six fils et qu'ils leur auraient conseillé à tous de ne pas se lancer dans l'agriculture. Aucun d'entre nous ne l'a fait. Mon père nous a suggéré de trouver des emplois moins risqués; je me suis donc lancé dans la politique.

Monsieur Casson.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Qu'a dit votre père de ce choix?

Le président: Il était déjà décédé parce que j'ai attendu très longtemps pour le faire.

M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

Monsieur Furtan ou monsieur Gray, combien de temps faudra-t-il attendre avant de voir des résultats à la ferme du fait de cette nouvelle série de négociations de l'OMC? Combien de temps faudra-t-il avant qu'un agriculteur voit un changement, si changement il doit y avoir? Cela va-t-il prendre cinq ans?

M. Hartley Furtan: Dix.

M. Rick Casson: Dix ans. Donc, si nous avons quelque espoir que les Européens ou les Américains réduisent leurs subventions pour que les prix montent, autant oublier cette idée.

M. Hartley Furtan: Oui.

M. Rick Casson: Lorsqu'on essaie de faire augmenter les résultats financiers des agriculteurs, on prend généralement en compte, entre autres choses, les subventions et vous dites que cette aide ne viendra pas avant longtemps, si jamais elle se produit.

On envisage la transformation secondaire dans les Prairies ou dans l'ouest du Canada pour améliorer la situation et on envisage aussi la réduction des coûts des intrants. Pour la transformation secondaire, pouvez-vous chiffrer l'aide que cela pourrait représenter pour le producteur céréalier moyen de l'Ouest? Que pouvons-nous faire au niveau de la transformation secondaire pour apporter davantage d'argent à l'agriculteur?

• 1040

M. Richard Gray: Je crois qu'il est important de remarquer que les familles d'agriculteurs en Saskatchewan obtiennent une plus grande part de leur revenu en dehors de la ferme que dans l'exploitation à l'heure actuelle. Ces emplois ruraux sont donc très importants pour les agriculteurs. Il ne s'agit peut-être pas toujours de transformation à valeur ajoutée, mais l'emploi rural est une source très importante de revenu pour ces familles d'agriculteurs et tous les moyens que vous pourrez offrir pour faire augmenter ces emplois extra-agricoles vont permettre de garder ces familles à la ferme. Elles ne parviennent peut-être pas à gagner assez d'argent avec l'agriculture proprement dite, mais cette dernière reste une source très importante pour que ces familles restent dans les régions rurales pour les maintenir en activité.

M. Rick Casson: L'idée de la transformation secondaire n'est donc pas d'augmenter la valeur de la marchandise que produit l'agriculteur, c'est pour lui donner une autre possibilité de revenu.

M. Richard Gray: Oui.

M. Rick Casson: Monsieur Furtan, je suis sensible à votre définition de la ferme familiale. Prenez-vous en compte les recettes ou les revenus nets lorsque vous pensez à la famille agricole?

M. Hartley Furtan: Non. Je crois qu'on devrait insister sur le fait que la famille s'occupe de la production et de la gestion de la ferme, qu'elle y vit sans doute, mais qu'elle fournit l'essentiel de la main-d'oeuvre. C'est fondamental. Il pourrait donc s'agir d'une très grosse exploitation, il pourrait y avoir des millions de recettes, et cela resterait cependant une ferme familiale.

M. Rick Casson: Supposez-vous dans votre troisième option—je ne sais jusqu'à quel point vous avez approfondi la chose—selon laquelle il y aurait un programme d'appoint, que si on opte pour cette solution, les terres ainsi abandonnées ne seront plus cultivées ou seront consacrées à une autre production?

M. Hartley Furtan: Non. Je crois que le marché foncier doit être laissé au marché libre. Il trouvera son propre équilibre entre les acheteurs et les vendeurs. Cela suppose qu'il n'y ait pas de programme de retrait des terres en cultures. Mais je crois qu'elles seront cultivées.

M. Rick Casson: Je trouve aussi intéressant que vous nous ayez montré qu'il y avait eu quatre récoltes record consécutives. Est-ce que cela vaut pour la production mondiale? Nous parlons parallèlement de réchauffement de la planète et de catastrophes naturelles, mais cela n'a pas eu d'effet sur l'importance des récoltes obtenues.

Vous avez aussi un peu parlé des puits de carbone et des crédits qu'on leur associe. Avez-vous pensé à la façon dont cela pourrait se passer dans le cas des collectivités agricoles, à la façon dont cela pourrait apporter davantage d'argent aux exploitations?

M. Richard Gray: Je crois que pour les crédits de carbone et ce genre de choses, les perspectives sont assez minces pour que l'on voit de véritables réformes dans le cadre de l'OMC. Je pense que Kyoto en est un autre exemple. Alors que le protocole de Kyoto n'a pas encore été ratifié, bien qu'il puisse l'être, il se pourrait qu'on ratifie son petit-fils. Mais en fait des marchés ont été créés pour le carbone, ce serait un autre type d'utilisation des terres, d'autres activités qui pourraient sans doute profiter pas mal à l'agriculture. Surtout si le produit des céréales diminue suffisamment, d'autres activités, telles que l'exploitation agroforestière, deviendraient davantage viables.

Le président: Merci.

Nous allons entendre M. McCormick puis M. Proctor et ce sera à peu près tout.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis arrivé en retard parce que j'avais une réunion rurale, mais grâce à toutes les bonnes questions, j'ai pu déduire une bonne partie des remarques faites par nos témoins au début.

Ma question est la suivante: si la crise agricole continue... Vous savez, on entend parfois dire dans les villes qu'on va connaître la faim, ce qui ne sera bien sûr pas le cas car les aliments existent à l'heure actuelle et ils viendront du Canada. Personne ici ne peut prédire l'avenir, mais vous vous êtes pas mal livrés à cette opération et je me demande quel pourcentage de nos terres agricoles—sans prendre en compte les terres peu productives—serait exploité par des multinationales au cours des dix prochaines années si nous avons au moins dix ans avant que les négociations de l'OMC changent quelque chose pour ceux qui vivent dans les régions rurales de la Saskatchewan.

M. Richard Gray: Je ne crois pas que beaucoup de terres soient exploitées par des multinationales. Les multinationales aiment les bénéfices.

M. Larry McCormick: Mais elles ont beaucoup d'argent à investir dans l'avenir.

M. Richard Gray: Je ne crois pas que le rendement soit suffisant pour attirer vraiment des multinationales. Mais par ailleurs, l'exploitation céréalière sur grande échelle, lorsqu'il y a plusieurs exploitants qui se regroupent, qu'il s'agisse d'une société ou d'une ferme collective, a été un échec cuisant dans le passé. Je ne crois pas qu'on voie véritablement d'orientation dans ce sens tout d'un coup et que six exploitants se regrouper pour former une seule unité. Je crois que cela n'a pas changé. Il y a eu des unités père-fils qui ont pris de l'ampleur, mais je ne crois pas que la reprise des terres par de grosses sociétés soit un problème important.

• 1045

M. Larry McCormick: On a dit qu'on perdait 1,7 p. 100 de nos agriculteurs depuis les années 30. On entend des projections sur le nombre de fermes que l'on pourrait perdre au cours des trois prochaines années—ou même en beaucoup moins de temps que ça—s'il n'y a pas de volonté politique ni de soutien de la part des Canadiens. On a lancé toutes sortes de chiffres. Pour vous quels sont-ils? J'aimerais que les deux groupes de témoins répondent.

M. Greg Arason: Comme je l'ai déjà dit, dans notre sondage récent des perspectives immédiates, certains agriculteurs ont dit qu'ils allaient cesser leurs activités l'année prochaine. Ils ne sont pas très nombreux, mais il y en a. Mais si vous allez jusqu'à deux ou trois ans, le nombre de personnes qui disent qu'elles auront disparu dans ces circonstances représentent 47 p. 100 des répondants. C'est en effet le nombre de personnes qui ont dit qu'elles ne pourraient pas maintenir leur exploitation dans ces circonstances pendant plus de deux ou trois ans.

J'ai parlé à un agriculteur hier qui m'a dit que son endettement avait quadruplé au cours des trois dernières années. Je ne dirais pas que c'est un agriculteur âgé; il se situe dans la moyenne. Il est sérieusement en train d'étudier les possibilités qui s'offrent à lui.

Voilà la situation dans laquelle nous nous trouvons.

M. Larry McCormick: Merci.

M. Hartley Furtan: Je vous ferais remarquer que, traditionnellement, nous perdons davantage d'agriculteurs pendant les bonnes périodes que pendant les mauvaises. Cela a toujours été le cas parce que les agriculteurs veulent tenir le coup. Ils ne veulent pas vendre à bas prix, ils veulent bien vendre.

Une voix: Le pourront-ils?

M. Hartley Furtan: Il n'y a pas de raison de croire que l'exode sera plus rapide cette fois-ci que dans le passé.

M. Larry McCormick: Cela a-t-il un effet sur la gravité du problème? Nous entendons dire que le besoin immédiat est beaucoup plus grand.

M. Hartley Furtan: Dans nos familles, nous avons tous des gens qui quittent la terre. J'ai une fille et un gendre qui ont abandonné l'agriculture la semaine dernière. Ils ont pris leurs cliques et leurs claques à Kipling en Saskatchewan. Ils sont partis, mais c'est bien pour eux. Ils n'arrivaient pas à s'en sortir, mais ils ont 21 ans et des diplômes universitaires en droit.

M. Larry McCormick: Nous avons entendu parler de la Chine et des occasions qui s'offrent dans ce pays. Je reviens bien sûr toujours à la Corée du Nord, et je l'ai déjà fait dans le cadre des délibérations du comité. Je sais que cela ne ferait pas une grosse différence pour notre mise en marché, mais j'estime, étant du côté du gouvernement, que l'on devrait prêter davantage attention aux ressources dont nous disposons. Je ne veux pas parler d'argent, je veux parler d'aliments. Depuis deux ans, il y a 20 millions de personnes qui mangent de l'écorce et de l'herbe en Corée du Nord. Je ne sais pas pourquoi on ne prend pas d'initiative politique pour faire davantage pour ces gens.

Lorsque vous avez fait votre remarque sur la Chine, la différence, c'est que... Tout d'abord, j'aimerais savoir combien d'autres pays pourraient utiliser notre aide. Quelle petite différence cela ferait-il en pourcentage pour la Commission canadienne du blé si nous mettions des produits là-bas?

M. Greg Arason: La Commission du blé aimerait certainement participer à un programme d'aide alimentaire que le gouvernement pourrait décider de mettre en oeuvre. C'est l'une des stratégies que l'on pourrait adopter. Cela permettrait de réduire un peu l'excédent et de faire des ventes supplémentaires. Le fait est que sans l'aide du gouvernement, ces ventes ne vont pas se faire car ces pays n'ont pas la capacité de payer. C'est là le problème dans une grande partie du monde. Il y a les riches et les pauvres. Voilà longtemps que cette situation dure et elle existe toujours. Certains ont réussi à l'inverser—et j'ai parlé de la Chine—mais pour d'autres, c'est un problème chronique.

C'est donc une solution possible. Mais c'est une solution partielle de toute façon.

Le président: Merci.

Je veux rappeler aux membres du comité que nous devons nous occuper d'une ou deux motions mais que nous pouvons dépasser 11 heures de quelques minutes.

Nous allons donner la parole à M. Proctor et nous en resterons là pour ce qui concerne nos témoins.

M. Dick Proctor: Je n'ai en fait qu'une question. Elle s'adresse aux représentants de la Commission du blé, mais M. Furtan a indiqué que le taux du Nid-du-Corbeau a eu un effet important. Le ministre Vanclief a parlé d'une augmentation de 300 p. 100 des frais de transport. Quelqu'un d'autre a dit que cette mesure avait éloigné les agriculteurs des Prairies de plusieurs milliers de milles supplémentaires de la mer.

• 1050

Dans votre sommaire, monsieur Arason, vous avez parlé de programmes d'aide efficaces pour remédier au problème à moyen terme. En matière de transport plus précisément, quels programmes d'aide efficaces pourraient être mis en oeuvre selon la commission?

M. Greg Arason: L'étude que nous avons entreprise au début de l'année a montré, dès la première phase du travail de M. Kroeger, qu'il y avait environ 5 $ la tonne de recettes supplémentaires pour les chemins de fer qui pourraient être récupérées et restituées aux agriculteurs. Plusieurs propositions émanent du travail de M. Kroeger, mais je crois que ce chiffre est demeuré. Sur un mouvement total d'environ 30 millions de tonnes, cela représente 150 millions de dollars qui pourraient aller aux agriculteurs au minimum.

M. Dick Proctor: Êtes-vous optimisme, vous attendez-vous à ce que cet argent revienne effectivement aux agriculteurs?

M. Greg Arason: Dans l'optique du plafonnement du revenu, c'est une bonne question. Ce que nous espérons, c'est que si cette idée du revenu est mise en oeuvre, elle ne devienne pas une cible pour le revenu et que les chemins de fer maximisent leurs recettes dans une telle situation, mais qu'il y aura véritablement un effort pour réorienter ces fonds vers les producteurs soit directement en baissant les tarifs de transport soit par d'autres mécanismes.

Le président: Merci, monsieur Proctor.

Je crois que nous devrions en rester là. Tout le monde a eu droit à la parole. Prenons une pause de deux minutes environ. Nous devons nous occuper d'une ou deux motions.

M. Garry Breitkreuz: J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'aimerais qu'il soit dit dans le procès-verbal que j'estime que nous n'avons pas suffisamment de temps pour poser les questions voulues aux témoins qui comparaissent devant nous. Nous avons encore de très bonnes questions à poser à ces témoins et je veux qu'il soit indiqué que nous n'avons pas assez de temps, à ce comité, pour vraiment interroger ces personnes. D'autres questions importantes auraient dû être soulevées, mais nous n'avons pas pu le faire en raison des contraintes d'horaire.

Le président: Nous essayons de traiter d'un maximum de choses, monsieur Breitkreuz. Mais je suis certainement d'accord avec vous, très souvent, surtout aujourd'hui où nous avons d'excellents témoins, il est difficile de couper court à la discussion.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Lorsque vous irez dans l'Ouest, ne convoquez pas trop de témoins à vos séances pour que la discussion puisse durer plus longtemps.

M. Garry Breitkreuz: Je proposerais bien sûr que l'on tienne des séances plus longues.

M. Gar Knutson: Oui.

Le président: Je remercie infiniment les témoins.

Nous allons interrompre la séance pendant deux minutes. Nous devons nous occuper de ces motions. Nous allons saluer nos témoins et revenir dans deux minutes.

• 1052




• 1055

Le président: Mesdames et messieurs, nous reprenons la séance. J'aimerais un peu de silence, s'il vous plaît.

Nous devons nous occuper d'un voyage possible dans l'Ouest. Mais auparavant, nous devrions peut-être traiter de l'avis de motion de M. Hilstrom. Au début de la matinée, M. Hilstrom a donné avis de sa motion. Il a demandé le consentement unanime. Sa motion me semble raisonnable.

Puis-je vous poser une question, monsieur Hilstrom? Vous mentionnez la date limite du 17 décembre dans votre motion. Vous pouvez la laisser, mais en général les ministres ne viennent que lorsqu'ils en ont le temps. Je ne sais pas. Qu'en pensez-vous?

M. Howard Hilstrom: Je crois qu'étant donné ce qu'a dit le ministre à Regina, quant à l'urgence de la question du revenu et des différents problèmes qui touchent l'agriculture à l'heure actuelle, l'urgence est telle que le 17 décembre me semblerait... Il pourra toujours dire au comité que c'est matériellement impossible, et nous pourrons revenir sur la motion. Je préfère laisser la date du 17 décembre pour qu'il revienne nous trouver.

Le président: Qu'en dit son secrétaire parlementaire?

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): J'imagine qu'il va accéder à cette demande. Mais il va y avoir la semaine à Seattle et ensuite une semaine au cours de laquelle nous serons dans l'Ouest; il ne nous reste donc guère que la semaine prochaine. Pour ce qui est de savoir s'il a le temps de venir la semaine prochaine, nous pourrons le vérifier.

Le président: Il y a encore la dernière semaine avant Noël.

M. Joe McGuire: Nous essayerons d'accéder à cette demande dans la mesure du possible.

Le président: Nous avons donc, pour commencer, le consentement unanime des membres du comité pour renoncer à l'avis de motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée)

Le président: C'est votre jour, monsieur Hilstrom.

Au sujet de notre voyage possible dans l'Ouest pour rencontrer des agriculteurs et d'autres personnes, mais surtout des agriculteurs, nous devons adopter une motion pour son financement.

Permettez-moi de vous donner un peu le contexte. J'ai parlé à tous les porte-parole des partis d'opposition, aussi ce que je vais vous dire ne va guère vous surprendre.

Tard mercredi soir, le jour avant que le ministre Vanclief se rende à Regina pour prendre la parole au cours de l'assemblée annuelle du Saskatchewan Wheat Pool, il m'a indiqué souhaiter que le comité voyage dans l'Ouest pour parler aux agriculteurs et à d'autres personnes concernant la situation actuelle du revenu. Je savais que nous disposions de peu de temps. J'ai parlé à quelques collègues du gouvernement qui m'ont dit qu'ils pensaient que c'était une bonne idée.

J'ai ensuite parlé à notre estimé greffier qui connaît davantage la logistique que moi. Il s'est montré sceptique en raison du peu de temps dont nous disposions, mais le président ayant usé de la contrainte, il a convenu d'envisager un plan possible. Il a admis que c'était faisable et nous avons donc préparé un plan de travail pour le voyage.

Selon le plan de travail, nous devrions tous nous trouver à Winnipeg dimanche 5 décembre au soir pour pouvoir prendre l'avion pour Dauphin (Manitoba) dans la matinée du 6 décembre et pour Brandon (Manitoba) dans l'après-midi du 6 décembre. Ensuite, selon les moyens de transport disponibles, nous irions à Portage la Prairie (Manitoba) pour une réunion dans la matinée du mardi 7 décembre.

• 1100

Puis nous prendrions l'avion pour Saskatoon afin d'y tenir une séance en fin d'après-midi mardi. Nous pourrions être à Regina pour une séance du matin mercredi 8 décembre. Nous irions à Weyburn dans l'après-midi et ensuite nous reviendrions à Regina pour nous diriger vers Grande Prairie (Alberta) où les agriculteurs ont connu des difficultés particulières au cours des deux, trois ou quatre dernières années en raison des conditions météorologiques et autres.

Nous irions ensuite à Edmonton, mais nous ne nous rendrions pas en ville. Nous choisirions une localité agricole près de l'aéroport—parce que je peux vous dire qu'il est important de rester près des aéroports si nous voulons faire cela très rapidement. Nous pourrions choisir comme lieu de réunion Leduc, qui est situé près de l'Aéroport international d'Edmonton. Ce serait en fin d'après-midi ou en début de soirée jeudi.

Puis nous partirions pour Calgary. Nous ne tiendrions pas de réunion au centre-ville de Calgary. Nous irions dans une localité appelée Airdrie qui n'est pas loin de l'aéroport. Je crois que c'est à environ 15 minutes. La réunion aurait lieu vendredi 10 décembre au matin.

Voilà le plan de travail. Il y a encore une chose cependant. Pour que cela puisse se faire, nous devons adopter le budget que j'ai demandé encore une fois au greffier de préparer.

L'avez-vous distribué?

Le greffier du comité: Non. Voulez-vous que je le fasse?

Le président: Avant que je ne distribue la motion car la motion, comme toutes les autres, nécessite un préavis de 48 heures, et j'aurai donc besoin du consentement unanime du comité pour, premièrement, renoncer à l'avis de 48 heures. Je distribuerai ensuite la motion et nous pourrions alors commencer.

Des voix: D'accord.

Le président: Je vous demanderais de ne pas trop blêmir lorsque vous verrez le budget. Voyager coûte cher. Le pays est grand.

Monsieur le greffier, êtes-vous en train de distribuer la motion?

Le greffier: Oui.

Le président: Distribuez-vous les deux options?

Le greffier: Oui.

Le président: Très bien. Permettez-moi de vous expliquer les deux options. L'option A consisterait à prendre les vols commerciaux et l'option B à noliser un appareil. Comme vous pouvez le constater, chers collègues, l'option B, qui consiste à noliser un appareil, est bien meilleur marché. Elle coûte en gros 20 000 $ de moins. Étant du genre parcimonieux, j'ai tendance à pencher pour l'option B—en ce qui concerne mon argent en tout cas.

M. Larry McCormick: Puis-je faire une remarque à ce sujet, monsieur le président?

Le président: Oui, monsieur McCormick.

M. Larry McCormick: Oui, l'option B a l'air bien. Ça fait penser—et c'est juste pour une semaine—à l'époque où nous avons fait l'examen des services sociaux pour Développement des ressources humaines. Certains d'entre nous y étaient. Nous avons visité 26 villes en 35 jours dans dix provinces et les deux territoires à l'est de l'Arctique; nous avons loué un avion et économisé beaucoup d'argent. Je suis sûr que le président fera en sorte que l'on termine les séances dans les temps, sinon on fait attendre l'avion à l'aéroport si on prolonge jusqu'à minuit chaque jour, Dieu m'en garde—et le lendemain matin, on n'est pas très vif. C'est juste une remarque que je voulais faire. Nous voulons collaborer et l'argent est important.

Merci, monsieur le président.

M. Garry Breitkreuz: C'était le bon vieux temps, Larry.

M. Larry McCormick: Oui, la facture a été un record encore jamais battu.

Le président: À propos, soyez la bienvenue, madame Vautour. Je crois que c'est votre première visite à notre comité. Vous constaterez que nous sommes un groupe très amical.

M. Larry McCormick: Nous votons tous la même chose pour tout, vous voyez.

Le président: Nous mangeons tous la même chose, j'imagine; ou quelque chose de ce genre.

Quoi qu'il en soit, vous avez le budget sous les yeux, chers collègues. Avez-vous des questions à son sujet? Comme je le disais, ce sont des montants élevés, mais je peux vous garantir que j'ai parlé au personnel et que tout cela est tout à fait normal. C'est ce qu'il en coûte de voyager.

Si vous vous posez des questions sur le personnel, encore une fois, c'est normal. Il s'agit des interprètes, des techniciens et bien sûr des deux attachés de recherche et du greffier. Tout est assez clair.

Howard.

M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.

• 1105

J'aimerais faire une observation. Il ne me semble pas normal pour un comité que le ministre de l'Agriculture lui demande de voyager. Normalement, un comité, autant que je comprenne le protocole parlementaire, décide de son propre ordre du jour et prend ses décisions tout seul; ce n'est pas le ministre de l'Agriculture qui décide pour lui.

J'ai quelques observations à faire au sujet de ce voyage. Je tiens à dire que le Parti réformiste et moi-même sommes tout à fait favorables à un voyage dans l'ouest du Canada, en particulier en ce moment, et nous pourrions même envisager d'aller dans le sud de l'Ontario. Certains des problèmes que connaît l'ouest du Canada se retrouvent également dans le sud de l'Ontario. Je suis allé dans cette région parler aux agriculteurs.

Je tiens à dire, monsieur le président, qu'en réalité les membres libéraux du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire veulent maintenant se rendre dans l'ouest du Canada pour discuter de la crise durable du revenu agricole après avoir déclaré au comité, le 4 novembre, qu'il était inutile de se déplacer. Le Parti réformiste, comme je l'ai dit, a toujours été favorable aux déplacements du comité pour entendre directement les agriculteurs dans leur localité.

Nous pensons que la proposition de voyage que nous avons sous les yeux doit être efficace et utile. Les audiences organisées à la hâte ne donneront pas une idée exacte de la situation du revenu agricole et ne permettront pas non plus de faire des recommandations utiles au ministre, ce qui est l'objectif du voyage, j'en suis sûr.

J'ai bien sûr été avisé oralement par le président 22 heures à l'avance du fait qu'il avait l'intention de faire adopter une motion de voyage à cette séance du comité.

Comme je l'ai dit, le voyage proposé doit commencer le 5 décembre et se terminer le 10 décembre. Les endroits proposés sont essentiellement des villes. Ma question est la suivante: Le délai est-il suffisant pour organiser des réunions utiles? Y a-t-il suffisamment de temps pour que les agriculteurs changent leurs emplois du temps pour faire de la place pour le comité? Le comité va-t-il effectivement entendre directement des agriculteurs ou simplement des groupes qui ont déjà comparu devant lui à Ottawa? Le plan de voyage présenté par le président fait qu'il est pratiquement impossible d'atteindre ces objectifs.

Le Parti réformiste est favorable aux déplacements du Comité de l'agriculture pour consulter directement les agriculteurs, comme je l'ai dit. Mais les déplacements récents des autres comités permanents de la Chambre des communes n'ont été que des événements organisés sans véritable consultation. Je ne permettrai pas que cela soit le cas pour notre comité.

Pour que les consultations avec les agriculteurs soient vraiment utiles, le Parti réformiste exige les cinq conditions suivantes.

Premièrement, la liste des témoins n'est pas disponible actuellement pour qu'on puisse en discuter et pour que l'opposition donne son avis à son sujet, ce qui donne au président la possibilité de choisir arbitrairement les témoins. Pour consulter les producteurs de façon efficace, le comité doit entendre les agriculteurs directement et non pas seulement les groupes de pression agricoles. Pour ce faire, nous demandons que 50 p. 100 des témoins qui vont comparaître devant le comité soient proposés par l'opposition et que 50 p. 100 des endroits retenus pour les audiences soient aussi proposés par l'opposition.

Deuxièmement, tous les témoins agriculteurs qui se déplaceront pour venir aux audiences du comité devront être entièrement remboursés de leurs frais de transport et autres dépenses par la Chambre des communes.

Troisièmement, nous exigeons que toutes les audiences du comité soient ouvertes au public et télévisées. De cette façon, on sera sûr que les réunions sont ouvertes et fiables et que les exposés des agriculteurs pourront être vus par le ministre de l'Agriculture et le premier ministre—je veux bien sûr parler des exposés proprement dits.

Quatrièmement, la proposition actuelle ne prévoit que deux heures et demie par séance. Ce n'est pas suffisant pour entendre plus qu'une poignée d'agriculteurs. Le comité devrait tenir des audiences de quatre heures au minimum par endroit et dans deux endroits au minimum par jour.

Cinquièmement, une semaine n'est pas suffisante pour consulter comme il se doit les agriculteurs. Les audiences du comité doivent être prolongées en janvier pour que le comité dispose du temps voulu pour planifier et tenir les audiences dans les localités rurales où vivent les agriculteurs. Les agriculteurs ne se laisseront pas duper par un voyage planifié à la hâte qui ne leur donne pas le temps de faire connaître leurs inquiétudes au comité, au ministre de l'Agriculture et au premier ministre.

Je le répète, je ne peux pas permettre que cela arrive au comité.

Voilà les remarques que je voulais faire, monsieur le président. Je vous donnerai copie de la lettre que je vous ai adressée.

Le président: Monsieur Calder, vous avez indiqué que vous vouliez dire quelque chose je crois.

M. Murray Calder: Oui.

Je suis un peu déçu, Howard. Bien franchement, lorsqu'on a parlé auparavant de voyager... et je croyais qu'on en avait discuté longuement. Nous avons écouté ici quelques témoins très crédibles qui nous ont donné des renseignements très fiables sur lesquels fonder notre travail. Nous avons maintenant l'occasion d'aller dans l'Ouest, et on nous a informé de la situation qui y règne tandis que les gens, comme je l'ai déjà dit, sont au sommet de la colline pour regarder ce qui se passe dans la vallée. C'est la seule façon de proposer des solutions au problème qui existe à l'heure actuelle.

• 1110

Lorsque vous avez commencé à parler de la répartition 50-50, la force du comité dans le passé—et j'en fais partie depuis le premier jour, c'est-à-dire depuis 1993... À mon avis, étant donné que nous faisons partie de la Chambre des communes, j'ai toujours estimé que nous avons essayé de nous sortir des impasses dans lesquelles nous nous trouvions à ce comité, et bien franchement, votre suggestion de la répartition 50-50 me semble entraîner une certaine division. Si nous partons travailler dans l'Ouest avec un groupe divisé, c'est exactement ce que nous allons avoir: un groupe divisé.

Je veux trouver des réponses à cela. Je ne veux pas aller là-bas pour orchestrer un spectacle médiatique en indiquant que le Parti réformiste va essayer de s'en prendre au gouvernement.

Une voix: Une fois de plus!

M. Murray Calder: Cela ne va pas du tout contribuer à résoudre le problème. Ce que vous faites, c'est uniquement semer la division et c'est faire de la politicaillerie de la plus basse espèce. Essayons plutôt d'aller faire quelque chose d'utile.

Le président: Monsieur Knutson.

M. Gar Knutson: Je préférerais, quel que soit le plan de travail qu'on adopte, que tout le monde l'accepte et admette que nous allons tous essayer d'agir de bonne foi et de faire ce qu'il faut pour la communauté agricole canadienne. Cette discussion devrait être renvoyée à un comité de direction, et John et peut-être Joe devraient essayer de s'entendre avec l'opposition et de convenir d'un plan qui sera acceptable pour tout le monde.

M. Murray Calder: Je suis d'accord.

M. Gar Knutson: Je ne sais si c'est possible maintenant, mais c'est le conseil que je donnerais.

Le président: Peut-être devrais-je vous donner encore plus de détails car je crois que M. Hilstrom ne comprend pas parfaitement certains des faits.

Pour ce qui est des endroits, étant donné que nous allons dans neuf localités de trois provinces, nous devons les choisir relativement près des aéroports et aller dans celles qui ont des aéroports. Je connais très bien la province du Manitoba, monsieur Hilstrom. Ce serait très bien d'aller à Snowflake (Manitoba). Ce serait encore mieux d'aller à Dallas ou même à Miami, toutes deux au Manitoba. Mais il se trouve qu'elles sont loin des aéroports. Il y a des gens très bien qui vivent là-bas, mais il nous faut faire des choix.

Dauphin, Brandon et Portage sont des centres régionaux fortement orientés vers l'agriculture et je crois que les agriculteurs seront très heureux que l'on vienne dans ces collectivités importantes. Si le Parti réformiste souhaite asseoir sa réputation sur quelque chose d'autre, très bien, monsieur Hilstrom.

La Saskatchewan est différente du Manitoba dans la mesure où les grandes villes sont très influencées par la politique agricole. Vous pouvez aller à Saskatoon et à Regina et ce que vous y dites et ce que vous y faites se répercute dans toute la province. Weyburn se trouve dans un secteur où il y a eu beaucoup de pluie en juin.

J'ai travaillé très fort avec le personnel pour mettre au point un plan.

Il en va de même pour l'Alberta, monsieur Hilstrom.

Vous avez parlé de la télévision. Je ne pense pas que nous ayons le contrôle à cet égard. Je suis surpris que ce soit une suggestion de la part d'un parti qui s'oppose toujours très fort au contrôle de l'État. Demandez-vous à l'État d'intervenir, monsieur Hilstrom, pour la télévision? Je ne crois pas que nous puissions donner l'ordre à CTV ou Global de venir pour couvrir nos séances.

Quant aux témoins, nous allons vous laisser le choix dans plus de 50 p. 100 des cas. Vous avez déjà commencé, monsieur Hilstrom—et je vous en remercie—à proposer des listes de noms d'agriculteurs pour qu'ils comparaissent devant le comité. Je veux que le NPD fasse la même chose ainsi que les conservateurs, et je veux que le parti ministériel le fasse aussi. Nous avons cinq partis, monsieur Hilstrom. Si tous les partis proposent des noms d'agriculteurs, vous en proposerez 80 p. 100, et non 50 p. 100. Nous pouvons donc faire plus qu'accéder à vos demandes.

Si vous voulez examiner les listes, je prendrai la vôtre, je prendrai celle de M. Proctor et je ne sais qui proposera celle du Parti libéral, et je prendrai celle de M. Borotsik et nous choisirons les agriculteurs au fur et à mesure qu'ils comparaissent devant le comité.

• 1115

Mais je dois vous rappeler une chose, monsieur Hilstrom. Il s'agit d'un comité parlementaire. Nous avons certaines convenances à respecter. Je ferai mon maximum pour permettre aux agriculteurs de s'exprimer le plus possible. Je le ferai en ma qualité de président.

Étant donné les gens que nous avons déjà reçu, étant donné les réunions que nous avons eues jusqu'ici, je peux sans doute limiter les comparutions d'organisations à une par séance—par exemple, j'aimerais que l'on entende Keystone au Manitoba. Un témoin, à chaque séance, représentera une organisation; les autres seront de simples agriculteurs. Et il s'agira de réunions de trois heures.

M. Breitkreuz se plaignait il y a quelques instants de la brièveté de nos séances aussi. Nous allons vous donner trois heures par localité. Cela fait 27 heures au total.

Je pense donc que vous devriez vous montrer un peu plus reconnaissant, monsieur Hilstrom. Après tout, vous êtes l'un des premiers à avoir proposé d'aller parler aux agriculteurs. Voilà donc ce que nous essayons de faire. Je pense que nous devrions mettre le moins d'obstacles possible à cette entreprise pour qu'elle puisse se réaliser.

Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Eh bien, j'imagine...

M. Howard Hilstrom: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Lorsque des remarques me sont adressées directement, je crois qu'il est de mise, dans une séance comme celle-ci, que l'on me permette de réagir à ces remarques au lieu de donner la parole à droite et à gauche.

Le président: Je serais tout à fait heureux de vous écouter dans un instant.

Allez-y, monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Je dois dire que moi aussi j'ai été avisé de cela, comme M. Hilstrom, il y a 22 heures seulement. Mais lorsque le président nous a décrit le voyage proposé, je l'ai trouvé très logique. Il en a dit davantage sur les témoins en demandant à tous les partis de proposer une liste pour toutes les séances. Je crois que c'est juste et raisonnable.

Pour ce qui est des options A et B—peut-être que je vais un peu trop vite. Je ne suis pas contre ce qu'a dit M. Knutson et le comité de direction devrait peut-être étudier tout cela si nous n'arrivons pas à une solution rapidement. Pour les options A et B, bien évidemment, comme le président, je suis d'accord avec la solution la moins chère qui est celle de l'avion nolisé. Mais dans le cadre prévu, il sera peut-être possible d'envisager, pas nécessairement des localités supplémentaires, mais d'autres endroits où l'on pourrait aller.

Je pense notamment à la Saskatchewan. Bien souvent, la population de la Saskatchewan doit aller à Saskatoon ou à Regina. Il serait bon que l'on aille en avion à Estevan, North Battleford ou Lloydminster—bref, là où l'on éviterait de longs trajets à la population. Nous pourrions nous rapprocher d'elle tout en ayant une séance très importante.

Le président: Très bien.

Monsieur Hilstrom.

M. Howard Hilstrom: Tout d'abord, monsieur le président, à qui faites-vous allusion lorsque vous parlez de respecter les convenances au maximum? Avez-vous dit qu'on ne les respectait pas?

Le président: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que lorsque nous tiendrons nos séances dans l'Ouest, il faut qu'elles soient structurées d'une certaine façon. C'est pourquoi j'ai proposé cette façon de faire. C'est tout ce que je voulais dire.

M. Howard Hilstrom: Très bien. Je crois que vous avez parlé de la réputation du Parti réformiste. Eh bien, notre réputation est bâtie uniquement sur les agriculteurs de la base. C'est pourquoi j'ai demandé que ces séances se prolongent en janvier pour que l'on puisse voyager davantage. J'ai constaté, et c'est une simple remarque sur la liste des localités, que Weyburn se trouve à la limite. Si vous regardez les chiffres de production de Weyburn, vous constaterez qu'ils ont été assez bons cet année. Si vous prenez Melita au Manitoba et Carnduff en Saskatchewan, vous constaterez que ce sont ces agriculteurs à qui il faut parler. C'est là qu'il nous faut aller, dans ces zones-là, pour rencontrer les agriculteurs et leur donner à tous la chance de s'exprimer.

Je suis donc à 100 p. 100 pour ce voyage. Je pense que nous devrions nous en remettre au comité de direction qui aurait d'ailleurs dû s'en occuper pour commencer, au lieu que ce soit le ministre de l'Agriculture qui nous commande de partir en voyage le 5 décembre 1999.

M. Dick Proctor: J'invoque le Règlement. J'étais à la réunion de la semaine dernière. En toute justice pour le ministre de l'Agriculture, il n'a rien exigé de notre comité. Il a dit: «Je ne peux que recommander au comité de faire un voyage dans l'Ouest», et je l'ai signalé au président du comité. Il n'y a absolument rien de dictatorial dans tout ça, monsieur Hilstrom, absolument rien.

M. Howard Hilstrom: Non, ça va.

• 1120

Le fait est que le ministre nous a demandé de le faire et nous sommes maintenant censés, en quelques jours, mettre au point un voyage dans l'Ouest de 211 000 $ qui va nous permettre de réaliser quoi? De parler à quelques agriculteurs et de dire que c'est représentatif de toute la situation agricole de la région? Les agriculteurs ont eu un an et demi depuis que ces audiences ont commencé l'automne dernier, à la suite de ma motion voulant que l'on tienne des audiences sur la situation du revenu. Grand Dieu, pourquoi nous précipiterions-nous dans l'Ouest en une semaine pour revenir dire que nous avons consulté les agriculteurs de l'Ouest?

Les agriculteurs, comme je l'ai dit dans mon exposé, ne seront pas dupes et comprendront que c'est un coup monté pour venir encore une fois les tromper. Et je ne veux pas faire partie de ce genre de choses. Je ne saurais trop insister là-dessus. J'aime bien la suggestion de M. Knutson voulant que l'on soumette la question au comité de direction pour qu'il planifie cela comme on planifie toutes les audiences importantes qu'on a l'intention de tenir. Des audiences aussi importantes doivent être faites comme il se doit et être aussi nombreuses qu'il faut et je serais d'accord avec la suggestion de M. Knutson de remettre la question au comité de direction pour qu'il mette au point quelque chose de convenable et pour que l'on ait suffisamment de temps.

Il y a une dernière remarque que j'aimerais faire, monsieur le président. Vous avez dit que la priorité du comité était d'aller de ville en ville en restant à proximité des aéroports. Moi je dis que la priorité du comité est de servir les agriculteurs de l'ouest du Canada et que les agriculteurs devraient passer avant le comité. Si nous devons travailler 12 heures par jour, qu'il en soit ainsi! Nous sommes au service de ces personnes, de ces agriculteurs. Nous ne sommes pas leurs maîtres.

Le président: Je puis vous garantir, monsieur Hilstrom, que le plan que j'ai conçu prévoit des journées de 18 heures. J'ai bien dit 18 heures de travail par jour. Je puis vous garantir, monsieur Hilstrom, que si vous voulez voir des agriculteurs, comme moi, comme nous tous, il faut prendre en compte le transport. Autant que je sache, vous ne pouvez pas voler. Vous devez compter sur un avion, sur des routes et sur des aéroports. Ce sont des facteurs tout à fait essentiels, monsieur Hilstrom. Je suis tout simplement abasourdi que vous ignoriez ces faits essentiels.

M. Garry Breitkreuz: Vous savez, il y a quelques questions qui sautent immédiatement aux yeux. Par exemple, qu'est-ce qui a changé dans les six dernières semaines et qu'est-ce qui nous empêche de prolonger cette entreprise pour qu'elle dure trois ou quatre semaines en prenant un autobus comme moyen de transport? Je ne pense pas que nous devions absolument prendre l'avion.

M. Gar Knutson: L'Ouest est loin.

Le président: Ma foi, Noël n'est pas très loin. Je crois qu'à l'heure actuelle la question est très présente dans tout l'Ouest et j'imagine que la plupart des agriculteurs seraient heureux que l'on vienne.

M. Howard Hilstrom: Monsieur le président, vous ne nous avez pas dit de façon explicite pourquoi il était urgent de faire cela le 5 décembre au lieu de faire un bon travail en commençant en décembre et en continuant tout le mois de janvier? Pourquoi est-il si urgent de le faire maintenant? Et vous pouvez nous parler plus longuement des objectifs de l'opération.

Le président: Eh bien, voilà ce que je peux dire. Si vous regardez le calendrier, monsieur Hilstrom, Noël est dans un mois. Certains d'entre nous seront à Seattle la semaine prochaine. La semaine suivante est celle que je propose pour notre voyage dans l'Ouest. La semaine d'après est la dernière de la session parlementaire avant Noël. Si nous ne comptons pas la semaine actuelle, il nous reste donc en gros trois semaines de travail. Si nous voulons préparer un rapport pour le Parlement, disons d'ici la reprise parlementaire au début février, il vaudrait mieux aller rendre visite aux agriculteurs avant Noël. Je crois que le rapport devrait être entre les mains du gouvernement avant que le Comité de la sécurité du revenu se réunisse en février car ce sera sa dernière réunion avant qu'il n'arrive à une entente pour le nouvel exercice financier, le 1er avril.

Monsieur Proctor, puis M. Hilstrom.

M. Dick Proctor: Non, je passe pour cette fois.

[Français]

Mme Hélène Alarie: Monsieur le président, je pense qu'on a entendu les revendications de chacun de ceux qui en avaient à faire. M. Knutson nous a fait une proposition. J'appuierais sa proposition et suggérerais que le comité directeur prenne les décisions finales, parce que c'est là que nous en sommes.

• 1125

[Traduction]

Le président: Permettez-moi de demander au greffier.

M. Howard Hilstrom: J'étais le suivant.

Le président: Je vous donnerai la parole dans un instant, Howard.

S'il doit y avoir une réunion du comité directeur, elle devrait se faire cet après-midi. Le greffier dit qu'il trouvera une salle.

Oui, Howard.

M. Howard Hilstrom: Ne voyez-vous pas qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans ce que nous faisons? Le président a encore une fois dit que la priorité est encore l'opinion du comité voulant que l'on fasse cela avant Noël. Il nous faut le faire cette semaine-là de décembre parce que nous devons aller à Seattle et nous avons d'autres choses à faire.

Pourquoi ne peut-on pas faire ce travail comme il convient, planifier et mettre au point notre plan en novembre, peut-être organiser quelques audiences la semaine de décembre en question et ensuite continuer tout le mois de janvier? Nous serons tous en vacances pendant tout le mois de janvier. Nous pourrons certainement voyager pendant ce temps et finir ce travail en donnant la parole à tous les agriculteurs qui ont besoin de s'exprimer. Ce sont les agriculteurs qui sont la priorité.

Une voix: Prenons une ou deux semaines de plus.

M. Dick Proctor: J'aimerais avoir une précision.

Le président: Dick, puis Rose-Marie.

M. Dick Proctor: Les comités sont-ils autorisés à se réunir lorsque la Chambre ne siège pas?

Le président: Oui.

Rose-Marie.

Mme Rose-Marie Ur: On est peut-être en vacances, mais 99,9 p. 100 des députés font sans doute du travail dans leur circonscription en janvier. Je ne vais pas passer tout le mois de janvier dans le sud ensoleillé. Je suis très présente et je travaille très fort dans ma circonscription, ce n'est donc pas que je passe du bon temps. Je crois que c'est important; c'est le moment où nous pouvons être dans notre circonscription. Il faut aussi prendre cela en compte. J'ai des agriculteurs dans ma circonscription.

M. Howard Hilstrom: J'ai des éleveurs de porcs dans ma circonscription. C'est pourquoi j'ai parlé du sud de l'Ontario.

Mme Rose-Marie Ur: Je croyais que c'était juste le sud de l'Ontario.

M. Howard Hilstrom: Non, non. Il nous faut faire ce travail convenablement.

Mme Rose-Marie Ur: D'accord.

Une voix: C'est un travail un peu trop fait à la hâte pour qu'il ait bonne allure.

M. Gar Knutson: Non, ce n'est pas le cas.

Une voix: C'est simplement une apparence.

Le président: Si vous le voulez bien, il y aura une réunion du comité directeur cet après-midi. Nous reviendrons jeudi matin pour ratifier ce qui sera décidé cet après-midi. Cela vous paraît-il acceptable? Surtout pour les membres du gouvernement...

M. Larry McCormick: Qui n'a pas besoin d'y aller?

Le président: Je vais vous donner les noms de ceux qui font partie du comité directeur. Il s'agit de M. Calder, de M. McGuire, de Mme Ur, de M. McCormick et de moi-même. Vous devrez donc être à cette réunion. Pour les autres, nous vous verrons plus tard. Nous communiquerons avec vos bureaux dès que nous le pourrons.

Merci. La séance est levée.