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CIMM Rapport du Comité

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RAPPORT DU NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE
JUDY WASYLYCIA-LEIS, DÉPUTÉE

Le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration a réussi à transformer les propositions médiocres qu’il avait reçues en un règlement de beaucoup amélioré à soumettre au gouvernement. Dans ce travail, le Comité a reçu une aide précieuse des témoins qu’il a entendus et des nombreux autres intervenants qui ont communiqué avec lui pour lui faire part des craintes sérieuses que les dispositions réglementaires proposées au début leur inspiraient. Cette manifestation d’opposition populaire a contribué à améliorer le Règlement. Or, malgré les amendements importants qu’il a subis, il présente encore des défectuosités qui exigent un examen plus approfondi.

Des thèmes récurrents dans les divers témoignages reçus nous ont fait comprendre que le Règlement proposé ne permettrait pas au Canada d’atteindre son but — ouvrir ses portes plus grand encore —, qu’il laissait persister de nombreux problèmes et que beaucoup des conséquences indirectes qu’il ne pouvait manquer d’avoir semblaient avoir échapper à ses concepteurs. La date limite devancée du 28 juin a été maintes fois dénoncée comme un facteur contribuant aux effets néfastes du Règlement. Tous étaient déçus et avaient l’impression que le gouvernement avait raté une occasion rare.

Selon des données de recensement publiées récemment, le taux de croissance du Canada n’est que de 4 pour cent. Les économistes prévoient que si rien n’est fait, cela pourrait causer des pénuries de main-d’œuvre d’ici cinq ans. Bien que notre bien-être économique à venir n’ait jamais été aussi nettement tributaire d’une stratégie d’immigration efficace, nous n’avons pas réussi à faire augmenter l’immigration de un pour cent par année, ce qui constitue le but modeste fixé par le gouvernement actuel. La nouvelle loi et le Règlement ne nous permettent absolument pas de savoir quels résultats une politique d’immigration axée sur la croissance démographique pourrait avoir et constituent encore moins une stratégie bien conçue nous permettant de les obtenir.

Rien ne prouve que le système de points proposé, qui insiste encore plus sur un niveau de scolarité plus élevé, une meilleure connaissance des langues officielles et une plus grande expérience professionnelle — en dépit des amendements que le Comité y a apportées — ; permettra vraiment d’accueillir plus d’immigrants. Ce qu’on sait, c’est que beaucoup de personnes possédant les compétences recherchées par le Canada pourraient être refusées. Et les femmes, qui sont moins susceptibles d’avoir fait des études et de posséder des compétences officiellement reconnues, seront particulièrement défavorisées.

 

Paradoxalement, certaines des initiatives canadiennes qui ont connu le plus de succès en matière d’immigration, comme le Programme des candidats de la province du Manitoba, privilégient les compétences et l’adaptabilité. Ces initiatives sont censées complémenter, et non remplacer, la loi fédérale, un rôle qu’elles jouent de plus en plus au fur et à mesure qu’elles se multiplient dans le pays.

Dans un rapport d’étude récent, le Conseil canadien de développement social brosse un tableau troublant selon lequel les immigrants hautement qualifiés connaissent des taux de chômage et de sous-emploi très élevés, surtout s’ils sont membres de minorités raciales. Lors de l’étude du projet de loi, les Néo-démocrates ont demandé qu’on fasse une analyse comparative antiraciste entre les sexes. Nous la redemandons ici afin d’être certains qu’à tout le moins, la loi et son règlement d’application ne contribueront pas à produire des effets discriminatoires.

L’étude du CCDS et d’autres illustrent que les compétences acquises à l’étranger et l’expérience de travail sont sous-évaluées, d’où les problèmes graves de réinstallation — aspect crucial pour la réussite de tout programme d’immigration, aspect que le gouvernement fédéral n’a à toutes fins utiles pas tenu compte. Partout dans le monde, le type d’immigration et les tendances en matière d’immigration changent, et notre capacité à attirer de nouveaux immigrants dépendra en grande partie de notre réputation. En n’assurant par la reconnaissance des compétences et en ne se montrant pas proactif sur le plan de la réinstallation, le gouvernement se repose sur ses lauriers, mais ils auront tôt fait de flétrir face au chômage et à la discrimination qui attendent les immigrants. Les mauvaises nouvelles se répandent vite et, en l’occurrence, risquent de nuire à la prospérité économique future du Canada. Nous devons également nous méfier du danger d’accorder trop d’importance à d’étroites considérations économiques au détriment de l’équilibre de l’immigration de la catégorie des parents — le rempart confirmé de notre programme d’immigration. L’avenir de l’immigration repose en grande partie sur le rôle que joueront les liens de famille forts.

En plus des mesures visant à améliorer la reconnaissance des compétences, plusieurs autres questions de justice et d’équité demeurent sans réponse. Par exemple, le Nouveau Parti démocratique a demandé que soit modifié le Programme concernant les aides familiaux résidants. Rien n’est prévu à cet égard dans le Règlement. Il faut reconnaître les compétences des aides domestiques, et les personnes admises au Canada aux termes du programme des aides familiaux doivent pouvoir obtenir le statut de résident permanent. Le programme devrait être abandonné progressivement. Entre-temps, cependant, les participants devraient bénéficier des même droits fondamentaux accordés aux employés. Cibler les résidents permanents en les assujettissant à des règles sur l’ingérence dans la vie privée auxquelles les autres Canadiens ne sont pas assujettis est une autre source de préoccupation. La nécessité

 

d’inclure des données biométriques sur la nouvelle carte d’identité, par exemple, n’a pas été suffisamment démontrée, et cette possibilité d’intrusion devrait être abandonnée. Si, à l’avenir, le ministre détermine que l’information est nécessaire, il devrait soumettre la question à la Chambre des communes et au commissaire à la vie privée.

Une levée de boucliers a accueilli la proposition visant à appliquer le Règlement rétroactivement. Avec raison, car il ne faut pas régler le problème du manque de ressources et de l’arriéré en changeant injustement les règles en cours de route. Le Comité a bien essayé de jouer avec les dates, mais l’application rétroactive du Règlement demeure inacceptable. Cette question a causé du tort à notre réputation et accentué l’impression que le Canada n’est pas à la hauteur de la tâche qu’exige la situation. Ce n’est pas une image rassurante.

Le défaut de la Loi de créer un climat clair et accueillant est aggravé par l’hésitation du gouvernement à s’engager d’une façon qui correspond davantage à notre capacité d’accueillir des réfugiés. Nous sommes loin de compter parmi les chefs de file dans le monde à cet égard. Nous pouvons assurément faire davantage pour soulager la situation intolérable à laquelle sont confrontés ceux qui fuient l’oppression. Pourtant, le Règlement continue de créer des obstacles comme les critères d’« établissement » qui relèvent de l’immigration et qui n’ont pas leur place dans un processus de sélection de réfugiés.

Compte tenu de l’évolution démographique du Canada depuis 25 ans, nous avons vraiment commencé à créer un endroit que tous les habitants de la planète peuvent considérer comme leur lieu de résidence. Préparer une nouvelle Loi et un nouveau Règlement nous a donné la chance de réfléchir sur la nouvelle réalité et sur notre dépendance accrue envers les immigrants en adoptant une nouvelle vision audacieuse de l’immigration de l’avenir. Or, le Règlement renforce une Loi qui parle de « resserrement » plutôt que d’« ouverture ». Y prédominent les restrictions, les moyens d’empêcher les gens d’immigrer au Canada et de les dissuader sauf les plus déterminés. Beaucoup de ceux qui sauraient s’adapter et contribuer se voient exclus. Il reste encore du travail à faire.