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TRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT AND GOVERNMENT OPERATIONS

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 3 mai 2001

• 1110

[Traduction]

Le président (M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.)): Je pense que nous avons le quorum. Je déclare la séance ouverte.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, des fonctionnaires du ministère des Transports vont venir nous parler aujourd'hui des heures de service dans l'industrie du camionnage.

Pour commencer, permettez-moi de présenter mes excuses pour ne pas vous avoir distribué la lettre du ministre qui nous demandait de nous pencher sur ce sujet. Nous avions convenu la dernière fois que ce serait fait. Le greffier a envoyé la lettre à la traduction. J'endosse entièrement la responsabilité de cette erreur. À l'avenir, j'indiquerai au greffier que ce genre de document doit être distribué directement aux membres du comité. Il n'y a aucun secret là-dedans. En plus, puisque c'était un imprimé, il n'y a aucune raison que cette lettre n'ait pas été distribuée Apparemment, nous devrions la recevoir dans le courant de la journée.

Bienvenue aux fonctionnaires du ministère des Transports. Je vais vous demander de vous présenter. Je suis certain que vous avez préparé votre mémoire. Nous vous accordons cinq minutes pour présenter votre exposé, puis nous passerons aux questions, à moins que le comité accepte de vous accorder un peu plus de temps. Est-ce que cinq minutes vous suffiraient pour exposer les principes généraux couverts dans l'étude?

M. Malcolm McHattie (directeur par intérim, Programmes de la sécurité routière, ministère des Transports): Nous aimerions disposer de dix minutes, monsieur le président.

Le président: Bon. J'ai dit cinq minutes, mais si le comité n'y voit pas d'inconvénient... Est-ce que nous avons un accord unanime?

Très bien. C'est d'accord, allez-y. Le décompte commence.

M. Malcolm McHattie: Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Malcolm McHattie et je suis directeur par intérim des Programmes de la sécurité routière. Nous représentons la direction de Transports Canada qui est chargée des programmes fédéraux de sécurité des transports routiers. Mon collègue Brian Orrbine, chef de la sécurité des transports routiers a été le principal intervenant associé aux travaux que le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé a consacré à la norme no 9 du Code canadien de sécurité concernant la réglementation des heures de service. M. Orrbine a préparé un bref exposé et répondra volontiers à vos questions.

• 1111




• 1114

M. Brian Orrbine (conseiller principal en politiques, Programmes de la sécurité routière, ministère des Transports): Merci, Malcolm.

Bonjour mesdames et messieurs. Comme l'a expliqué Malcolm, je suis chef de la sécurité des transports routiers de la Direction générale de la sécurité routière de Transports Canada depuis 1996. Je m'occupe de la question des heures de services des conducteurs de véhicules commerciaux. J'ai eu le plaisir de siéger au Comité permanent de l'étude canado-américaine sur la fatigue et la vigilance qui a présenté son rapport en décembre 1996.

• 1115

Depuis 1996, j'ai aussi été membre du groupe de projet sur les heures de service du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé et président du groupe de travail affecté à l'élaboration des changements proposés aux règles. Je suis actuellement président du groupe de projet du CCATM.

Tout d'abord, je crois qu'il est important de définir le contexte particulier de cette question qui fait souvent l'objet de discussions et qui est souvent mal comprise. J'aimerais présenter au comité un survol historique.

Les règles qui contrôlent les heures de service qu'un conducteur de véhicule commercial peut effectuer à bord d'un camion ou d'un autobus au Canada figurent à la fois dans les réglementations fédérale et provinciales/territoriales. La réglementation fédérale, qui relève de la Loi de 1987 sur les transports routiers, touche les activités des entreprises extraprovinciales alors que les réglementations intraprovinciales, de compétence provinciale régissent uniquement les entreprises locales qui exercent leurs activités à l'intérieur d'une province ou d'un territoire. Les règles extra-provinciales sont en place depuis qu'une décision du Conseil privé datant de 1954 a statué que le gouvernement fédéral était responsable des entreprises extra-provinciales. Cette décision a donné l'impulsion pour l'adoption de la législation fédérale, la Loi de 1954 sur les transports routiers, qui a délégué aux provinces et territoires les pouvoirs du gouvernement fédéral. Aux termes de cette loi, des règlements ont été établis au cours des années en ce qui a trait à l'octroi de permis et aux heures de service des conducteurs.

En 1987, avec le passage imminent à la déréglementation économique du camionnage, le Code canadien de sécurité (CCS) a été élaboré et accepté par toutes les administrations, fédérale, provinciales et territoriales. Son objectif était de s'assurer que les transporteurs routiers ne sacrifieraient pas la sécurité à la suite d'une concurrence accrue. Le Code canadien de sécurité se compose de 15 normes, la norme no 9 renfermant les règles sur les heures de service. Je dois dire que le Code canadien de sécurité, à l'heure actuelle, n'a pas force de loi mais qu'il sert de modèle pour l'harmonisation des règlements dans toutes les administrations.

En plus d'être le dépositaire des normes, le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé est structuré de manière à fournir une tribune pour les débats et inclut tous les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ainsi qu'environ 400 membres associés.

La réglementation originale sur les heures de service figurant dans le Code du travail du Canada et a ensuite été transférée à la Loi sur les transports routiers en 1987. Elle a été modifiée en 1989 et encore une fois en 1994. Cette réglementation est actuellement en vigueur.

Les règlements provinciaux varient en fonction de leur contexte et selon les différentes administrations. Les règlements actuellement en vigueur au Canada ont été établis, en particulier au début, en l'absence de recherches adéquates pouvant fournir une orientation. Il s'agissait du meilleur effort que pouvaient faire les législateurs pour contrôler la fatigue des conducteurs. Au cours des 25 dernières années, un grand nombre de recherches scientifiques ont été entreprises en vue de fournir une meilleure connaissance de la fatigue et de proposer des solutions possibles à ce problème. Bien que la communauté scientifique ait été active, les solutions simples et concluantes demeurent illusoires. Les recherches ont fourni aux législateurs de meilleures connaissances, grâce auxquelles de meilleures décisions peuvent être prises. Il serait inconsidéré de ne pas dire que les solutions sont loin d'être trouvées. Les recherches se poursuivent sur plusieurs fronts pour trouver de meilleures réponses.

J'aimerais dévier de mes commentaires pour expliquer comment les gouvernements et les intervenants ont abordé la question des heures de service. Depuis le début des discussions, il y a un aspect sur lequel toutes les parties peuvent s'entendre. Il s'agit du fait que les présentes règles ne tiennent pas compte des récentes recherches sur la fatigue. Ces règles sont aussi trop difficiles à comprendre pour les conducteurs et les transporteurs routiers et également difficiles à gérer pour les agents de surveillance. Des changements sont nécessaires et, à cette fin, le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé a entrepris le processus d'examen de la question. Cette initiative a démarré au début des années 90 mais elle a été mise de côté compte tenu des importantes recherches en cours qui étaient parrainées par Transports Canada et nos homologues américains.

Ces recherches se sont terminées en décembre 1996 et Transports Canada a communiqué le rapport en janvier 1997. C'est à ce moment que le comité du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé a remis en marche le processus et commencé à examiner la question en détail. Un groupe de travail a été mis sur pied et j'en ai assumé la présidence. Toutes les parties intéressées pouvaient en faire partie et le groupe comprenait des législateurs de chaque administration, des représentants de l'industrie du transport par autocar et par camion, des scientifiques et des chercheurs, des syndicats, et d'autres parties intéressées, notamment l'Association canadienne des automobilistes et Canadians for Responsible and Safe Highways, ainsi que des représentants américains.

• 1120

Au cours de nos premières discussions, il était important que chacun des membres en apprenne davantage au sujet de la science sous-jacente à la fatigue. À cette fin, des réunions ont été prévues avec des scientifiques et des médecins afin de présenter les résultats des recherches sur la fatigue. Nous avons tous vite appris qu'alors qu'on peut tirer d'importantes leçons de la science, plusieurs des décisions demeureront subjectives.

Au cours des deux dernières années, d'innombrables réunions se sont tenues et les discussions se sont poursuivies sur la question de la réglementation. On a convenu que la norme du CCATM sur les heures de service serait le centre des discussions, mais comme elle était quelque peu dépassée, la réglementation fédérale servirait de modèle.

Comme je l'ai fait remarquer plus tôt, les règles concernant les heures de service sont complexes et le comité a demandé l'aide d'experts dans le domaine de la recherche sur la fatigue et le sommeil. En 1997, Transports Canada mettait sur pied un groupe d'experts en travail par quarts, en sommeil et en performances humaines pour aider le comité à élaborer des options visant les changements à apporter aux règles. Le rapport a été déposé en septembre 1998 et il renfermait des changements proposés pour étude.

Bien que les recommandations du groupe d'experts n'aient pas été toutes adoptées, il me fait plaisir de dire que la majorité ont été mises en oeuvre ou adoptées en partie dans le cadre des changements proposés. Le travail des experts a fourni au groupe de projet des connaissances et des solutions précieuses. J'ajouterais que le groupe d'experts a essayé de prendre en considération les répercussions de ses recommandations sur l'industrie et sur les réalités géographiques du Canada.

Avec le rapport du groupe d'experts, on disposait d'une base solide pour commencer à établir un consensus pour l'élaboration des changements aux règles. Pour aider davantage le groupe de projet, une série de consultations ont été tenues avec des parties intéressées dont la liste avait été préparée à l'avance. J'aimerais faire remarquer qu'il ne s'agissait pas de consultations nationales mais plutôt d'une initiative pour aider à l'élaboration de la proposition de changements. Trente-trois parties intéressées ont été rejointes dans différents secteurs.

Un des aspects les plus difficiles de notre examen a été de lier la question de la fatigue aux données que Transports Canada recueille sur les collisions et, plus particulièrement, sur leurs facteurs de causalité. Les données sur les répercussions que la fatigue a eues sur les collisions sont à tout le moins minimales. Par exemple, en 1998, l'année la plus récente pour laquelle nous disposons de statistiques, il est survenu 360 collisions mortelles impliquant des véhicules lourds au Canada. Seulement deux de ces collisions étaient attribuables à la catégorie «fatigue/somnolence», tel que déterminé par les rapports de police.

Nous savons que c'est probablement en deçà de la réalité car les autorités policières éprouvent des difficultés à identifier la fatigue comme facteur causal. En outre, une étude menée aux États-Unis par l'Université du Michigan laisse entendre que, dans la majorité des collisions mettant en cause des véhicules lourds et des automobiles, la faute première incombait au conducteur de l'automobile. Des recherches en Finlande ont abouti à des résultats identiques.

Le Canada n'est pas le seul à vouloir améliorer les règles qui régissent les heures de travail. Les États-Unis ont adopté une démarche semblable à celle du Canada et, en mai 2000, le Department of Transportation a émis un avis de projet de réglementation et une demande de commentaires au sujet de ses propositions. Environ 70 000 lettres, mémoires et courriers électroniques ont été reçus.

Certains suggèrent que le Canada devrait se rallier aux propositions américaines. J'aimerais souligner que les changements proposés ont fait l'objet d'un lobbying intensif à un point tel que les propositions étaient liées à leur crédit et, qu'en conséquence, elles ont été mises de côté jusqu'au moins en octobre de cette année. Je crois que des comparaisons avec les propositions des États-Unis seraient prématurées à ce moment, étant donné qu'il n'y a pas encore de décisions à leur sujet.

Je voudrais insister sur le fait qu'alors que Transports Canada est d'avis que nous devrions terminer le plus vite possible ces consultations, cela ne signifie pas que nous tirions un trait sur cette question. J'ai souligné plus tôt que nous n'avions pas de réponses à toutes les questions et que nous poursuivons notre engagement et notre appui à la recherche en cours. Je vais citer rapidement quelques travaux.

Par exemple, nous participons avec les États-Unis à un examen des instruments technologiques potentiels pour déterminer la fatigue et nous étudions les mérites d'un programme de gestion qui aborde à la fois le style de vie et les questions médicales, telles l'apnée du sommeil. Nous appuyons davantage de recherches sur le repos et la récupération sur des périodes prolongées et nous travaillons avec le Québec et l'Ontario à l'acquisition de connaissances sur les dispositifs d'enregistrement électroniques, appelés «boîtes noires». Le but est d'acquérir plus de connaissances sur la fatigue et sur les solutions possibles, et d'incorporer ces acquisitions dans les règles.

J'espère que cet aperçu donne au comité une idée des efforts que les parties ont déployés jusqu'à ce jour pour régler cette question. Un élément important reste à compléter, celui des consultations publiques.

• 1125

Je note que l'Alberta a procédé à des consultations publiques l'automne dernier et qu'elle communiquera bientôt son rapport.

Nous partageons tous la route avec les camions et les autocars et nous voulons tous être le plus en sécurité possible. Bien que la question soit chère au coeur de bon nombre de Canadiens, ce ne sont pas toutes les parties qui s'entendent sur la manière dont les règles devraient être établies. À cette fin, nous comprenons qu'il est important de développer une perspective globale de cette question importante.

Vous remarquerez que je n'ai pas profité de l'occasion pour aller dans les détails de questions précises ou des changements proposés. Ils sont contenus dans un document de travail, l'exposé de principe. Je crois savoir que vous en avez une copie. Je suis l'auteur de ce document qui renferme les détails des changements proposés ainsi qu'un bref sommaire de la justification.

Merci pour l'occasion qui m'a été fournie de vous faire part de ces brèves remarques sur les heures de service. Je suis disponible si vous avez des questions ou si vous désirez des explications sur des points précis. Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Orrbine.

Je vais demander à M. Hill de l'Alliance canadienne, de faire la première intervention, pendant dix minutes.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, AC): Merci, monsieur le président, et merci, messieurs d'être venus nous parler aujourd'hui de cette question importante.

Pour commencer, j'aimerais dire que je suis un peu déçu de recevoir cette documentation seulement maintenant. Je suppose que tous les membres du comité viennent tout juste de recevoir les révisions proposées. Pourriez-vous me dire pourquoi? Est-ce qu'elles n'ont été imprimées que ce matin? Nous aurions pu... J'en ai un exemplaire, mais il vient juste d'arriver. Il aurait été très utile d'avoir en main plus tôt les révisions proposées.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Objection, monsieur le président. Je ne suis pas certain que cette question s'adresse aux témoins. Je crois que la documentation fournie par le ministère à tous les membres intéressés aurait dû contenir un document sur les heures de service. Je sais que Jay en a pris connaissance et qu'il n'y a donc là rien de nouveau. Je n'ai rien à ajouter.

M. Jay Hill: Ce que je veux dire, c'est que ce n'est absolument pas pareil d'entendre un exposé de cinq minutes... Lorsque je suis devenu critique en matière de transports pour l'opposition officielle, j'ai eu droit à un exposé de trois heures. Il a peut-être été question en passant que le ministère proposait d'apporter des changements, mais c'est tout à fait différent si vous avez le texte des changements proposés devant vous et que vous avez tout le loisir de l'examiner en détail. Il aurait été utile de disposer de cette documentation un petit peu en avance, mais c'est peut-être de ma faute. Je ne sais pas.

Vous avez indiqué dans vos remarques que le but était de simplifier les règles, les règlements, qui sont actuellement trop compliqués. Permettez-moi de faire un bref commentaire à ce sujet.

Je suis député depuis seulement sept ans et demi, mais j'ai remarqué que chaque fois que le gouvernement décide, avec la meilleure volonté, de simplifier quelque chose, les résultats sont loin d'être simples. Je vous souhaite donc bonne chance.

Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de 33 parties ou groupes intéressés. Pouvez-vous nous en parler un peu plus? Dans quelle mesure le secteur du transport routier est-il au courant de ce qui arrive?

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, la question est simple, mais la réponse risque de prendre un peu de temps. Je vais faire de mon mieux pour rester bref.

Toutes les discussions qui ont lieu au Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé réunissent autour de la table une quarantaine de représentants des diverses disciplines, de l'industrie du camionnage en passant par les divers groupes d'intérêt public, etc. Au début, lorsque nous tentions de définir les changements possibles, chacun des membres du comité, chacun de nos interlocuteurs avait sa propre opinion sur ce que devraient être les services, les heures de repos et la quantité suffisante de sommeil. Afin de faciliter le travail du comité, nous avons pensé constituer un groupe de consultation.

Pour répondre à la question de M. Hill, je vais prendre la liste des parties intéressées et lui citer quelques-unes des organisations qui y figurent. Cela lui donnera peut-être une idée des personnes qui faisaient partie de ce groupe. D'autre part, monsieur le président, je suis prêt à présenter ce document au comité si telle est la volonté des membres.

• 1130

M. Jay Hill: Pendant que vous cherchez cette liste—qui serait utile—j'ai peut-être le temps de vous poser une question supplémentaire.

En guise d'introduction à ma question, j'aimerais préciser que j'ai moi-même été propriétaire exploitant d'un tracteur routier. En effet, lorsque je travaillais à la ferme avec mon frère, nous nous étions lancés, un moment donné, dans le camionnage sur longue distance afin de subventionner notre exploitation agricole. Par conséquent, je connais assez bien la question et les règlements actuellement en vigueur que doivent respecter les camionneurs. J'aimerais savoir par exemple dans quelle mesure les propriétaires exploitants ont connaissance des changements proposés. Je pense aux personnes qui ont deux ou trois camions.

M. Brian Orrbine: Autour de la table du CCATM, il y a des représentants provenant de diverses disciplines. Naturellement, l'Association canadienne du camionnage représente le plus grand secteur. Nous avons aussi la Owner/Operator Independent Driver Association qui a beaucoup plus de membres aux États-Unis, mais qui représente aussi des tractionnaires indépendants au Canada. Un des problèmes que soulève M. Hill tient au fait que la plus grande partie du secteur est composée de tractionnaires qui possèdent un seul véhicule. Par conséquent, le secteur n'est pas organisé et il est très difficile de transmettre l'information à des particuliers.

Pour ce qui est des consultations, j'aimerais préciser, avant de répondre, que nos efforts n'étaient pas destinés, comme je l'ai dit dans ma déclaration, à mener une consultation nationale sur les heures de service. Nous voulions essentiellement donner au comité quelques conseils sur la façon d'aborder la question.

Les gouvernements provinciaux étaient représentés au cours de ces consultations par les responsables des transports et de la sécurité routière. Le secteur du camionnage commercial était représenté par diverses associations, l'Association des services pétroliers, la Truckers Association of Nova Scotia, par exemple, les teamsters, la Owner/Operator Independent Driver Association et une autre association de tractionnaires intitulée Com-Car. L'industrie des transports par autobus était représentée à la fois par l'Association canadienne de l'autobus et la motorcoach association.

Quant aux groupes d'intérêt public—si vous me permettez encore une fois d'utiliser cette terminologie—ils comprenaient les Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière, l'Association canadienne des automobilistes, l'Association canadienne de la construction, les Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile et l'Institut canadien des engrais.

Vous voyez donc que nous avions réuni un groupe diversifié afin de tenter de définir les premières étapes de cet effort.

Le président: Deux minutes.

M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

Je suis content que vous reconnaissiez qu'il est difficile de transmettre l'information à ces propriétaires exploitants indépendants, de leur expliquer la nature des changements prévus et de solliciter leurs points de vue, leurs commentaires. Qu'avez-vous l'intention de faire? Envisagez-vous de communiquer avec eux pour les avertir que vous préparez des changements très profonds—j'hésite à dire «graves»—qui risquent d'avoir un impact sur leur gagne-pain?

M. Brian Orrbine: Au cours des derniers mois, le débat principal qui a mobilisé le comité a porté sur la méthode de consultation. Il y a un an environ, les provinces ont convenu de se livrer à des consultations publiques dans chacune des régions relevant de leurs compétences. Je peux vous dire en toute honnêteté que nous espérions pouvoir réunir au cours de ces séances les parties intéressées des diverses provinces.

C'est alors qu'on a demandé à Transports Canada de mener des consultations nationales. Par la suite, il y a eu quelques hésitations quant à la forme que devaient prendre ces consultations. Aucune résolution n'a été adoptée à ce moment-là.

Par conséquent, l'objectif est de consulter le groupe le plus large possible.

M. Jay Hill: Je vois.

• 1135

Pour bien comprendre ce qui se passe aujourd'hui, permettez-moi de préciser qu'à l'origine il était question que les provinces tiennent des consultations publiques, probablement dans les centres principaux de chaque province, et qu'elles s'engagent à publiciser suffisamment la consultation de manière à ce que tous les tractionnaires soient tenus au courant par exemple que la réunion était convoquée à cette fin. Et par la suite, j'ai l'impression que les provinces ont fait marche arrière et se sont adressées à Transports Canada pour vous demander d'organiser ces consultations. Est-ce exact?

M. Brian Orrbine: Si nous revenons un an en arrière, nous remarquons que les discussions concernant les consultations publiques en étaient alors à un stade préliminaire. Nous en étions encore à l'élaboration des règles et des changements proposés. Lorsqu'il a été question des consultations publiques, il était convenu au départ que ce soit les provinces qui s'en chargeraient. Et d'ailleurs, une province, l'Alberta, a organisé l'automne dernier six séances publiques je crois, avec publicité dans les journaux, invitant l'industrie et le public à venir présenter des commentaires sur les changements proposés aux règlements.

Les résultats préliminaires de ces séances de consultation n'ont révélé aucune lacune importante dans les travaux du comité. Nous n'avons pas encore pris connaissance du rapport; j'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire qu'il devait paraître bientôt.

J'aimerais ajouter que la consultation s'inspire d'un exposé de principe élaboré en novembre 1999. Ce document contient l'essentiel de tous les changements proposés. Le document mentionné plus tôt, qualifié d'ébauche de norme, est une présentation plus approfondie et plus clinique des changements à une étape très préliminaire.

Le comité n'a absolument pas le mandat d'apporter des changements à cette ébauche de norme afin de rectifier les écarts par rapport à l'exposé de principe. Par conséquent, mises à part quelques différences de formulation, il n'y aurait aucune surprise dans ce document.

Le président: Très bien. Votre temps est écoulé.

M. Jay Hill: C'est fini? Bon, j'attendrai le deuxième tour.

Le président: Exactement.

M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Je vais demander à John Christopher de nous faire une petite présentation, puisqu'il semble que nous allons devoir entreprendre une étude. Il peut peut-être nous dire comment se présente ce plan d'étude afin de nous donner une idée de ce que nous allons faire.

Je pense que deux minutes vous suffiront, John.

M. John Christopher (attaché de recherche du comité): Je pense que nous allons en parler après l'audition des témoins, mais il me semble qu'il y avait un certain consensus ou que les membres du comité acceptaient de prendre part au processus des politiques publiques en recueillant certains témoignages concernant la politique en cours d'élaboration. Ce serait peut-être une façon d'élargir le processus de consultation évoqué par M. Hill.

Dans la consultation...

Le président: Exactement et nous aurons l'occasion d'y participer.

Je n'ai vu personne du Parti libéral.

Ah si, M. St. Denis.

M. Brent St. Denis: Je vais d'abord laisser la parole à M. Szabo. J'interviendrai ensuite. Qu'en pensez-vous?

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci monsieur.

C'est un sujet extrêmement intéressant et je pense que vous avez remarqué que c'est complexe, qu'il fait l'objet de recherches permanentes et qu'il suscite différents intérêts contraires.

Pour les gens comme nous qui s'occupent de l'élaboration des politiques et des lois, voici les questions qui nous intéressent: quelle est la priorité et quelle est l'urgence d'introduire de tels changements? Quel rang occupe-t-elle dans la liste? Où est donc le problème? Je n'ai pas ressenti cette intensité dans votre exposé qui était plutôt détaché. Je me demande pourquoi.

M. Brian Orrbine: C'est une excellente question, monsieur Szabo. Encore une fois, je vais fouiller dans ma pile de documents pour tenter de vous donner...

M. Paul Szabo: Fermez vos dossiers et parlez-moi plutôt naturellement, comme si nous discutions ensemble.

M. Brian Orrbine: Si j'examine les statistiques dont on s'inspire pour définir les politiques—les questions sur lesquelles on insiste et qui semblent importantes en matière de sécurité routière—il y a certains éléments qui sautent aux yeux. Le premier est l'alcool au volant; il y a aussi l'utilisation des ceintures de sécurité; ou encore les conducteurs dangereux. Au Canada, l'effet combiné de ces trois éléments est la cause d'environ 3 000 morts sur les routes, dont plus de 2 500 imputables à ce secteur.

• 1140

Il n'existe aucune base statistique traitant de la fatigue comme facteur de collision. Toutes les informations que nous avons consultées, y compris dans les rapports de recherche américains indiquent que la fatigue est un facteur dans peut-être 1 à 2 p. 100 des accidents. Cela étant dit, comme je l'ai mentionné plus tôt, tout le monde pense qu'il faudrait changer les règles.

M. Paul Szabo: C'est beaucoup de paroles pour dire, je pense, qu'une proportion importante de risques ou d'accidents de la route est attribuable aux véhicules commerciaux—camions, autobus, etc.—et que cette proportion est à la hausse. Est-ce bien ce que vous avez dit?

Si j'étais à votre place et si je devais témoigner devant des députés je dirais probablement ceci: «Voici ce qui s'est passé au cours des dix dernières années ou depuis que nous avons entrepris cette réforme et voici les statistiques concernant les décès, les changements, etc.» Si j'étais le législateur, je ne m'intéresserais probablement pas aux recherches médicales sur la fatigue, parce que je suis certain que cela a déjà été fait. Je chercherais sans aucun doute à limiter le temps de service des chauffeurs afin qu'ils puissent s'arrêter avant d'être complètement assommés par la fatigue, tout en sachant qu'il faut tenir compte des différences d'un individu à l'autre, des médicaments, etc.

Tout cela ne me paraît pas très compliqué. Mais quand j'examine cette proposition, je suis tout à fait en faveur du temps de repos journalier. Il est question ensuite du report du repos quotidien, du fractionnement du repos et du repos complémentaire. En plus, les règles ne sont pas les mêmes pour ceux qui travaillent au nord du 60e parallèle—60 degrés de latitude. Pas étonnant que les gens soient perdus! Je suis perdu. Il me semble que les humains ne changeront jamais.

Par conséquent, je n'ai senti aucune urgence. Franchement, j'ai l'impression que je ne serai pas convaincu que des changements sont nécessaires tant que vous n'allumerez pas un bûcher devant le comité. Je veux bien croire que vous soyez convaincu, mais vous n'êtes pas parvenu à transmettre votre conviction.

Avant de céder la parole à M. St. Denis, je vous demande d'écouter ma question. Ai-je raison de dire que les personnes qui ont un certain intérêt à ce que les chauffeurs roulent s'opposent à toute autre diminution des limites d'heures imposées aux chauffeurs; et que les syndicats, les chauffeurs et le personnel souhaitent avoir plus de temps pour récupérer et se reposer? Est-ce une confrontation entre les entreprises et les individus? Est-ce là le noeud de la question?

M. Brian Orrbine: Voilà encore une question difficile, mais cette fois je vais essayer d'y répondre de manière plus claire.

Les discussions ont fait appel à de nombreuses parties différentes. L'industrie a collaboré avec le comité afin de trouver des solutions permettant d'améliorer la situation. Je vais vous donner un exemple.

Selon les dispositions actuelles, un chauffeur est censé avoir huit heures de repos la nuit. Cependant, le chauffeur peut, une fois par semaine, réduire ce temps de repos à quatre heures. Pratiquement tout le monde dénonce cette règle, y compris le secteur routier lui-même. Pourquoi couper sur l'élément le plus important, en l'occurrence le sommeil? Pendant les discussions, les représentants du secteur ont bien entendu voulu maintenir certains points, se sont montrés souples sur certains autres ou ont requis une certaine flexibilité pour leur permettre de régler certaines situations. Prenons l'exemple cité par M. Szabo concernant les huit heures qui deviennent dix et qui permettent ensuite au chauffeur de faire un report de deux heures. Dans la réalité, cela permet au chauffeur de s'arrêter en plein milieu de la nuit lorsqu'il est fatigué pour dormir pendant quelque temps.

Certains membres du comité souhaitent diminuer considérablement le nombre d'heures de service. D'autres préfèrent le statu quo. Et d'autres encore opteraient pour une solution mitoyenne. Il n'y a aucun consensus.

M. Paul Szabo: Je vous comprends, mais je pense que je suis d'accord avec M. Hill. Vous avez dit vous-même dans votre témoignage que c'est une question trop complexe pour certaines personnes. Une fois que les règles existent... vous l'avez dit vous-même dans votre exposé, il faut s'accommoder de leur complexité. À partir de là, peu importe les explications scientifiques. Si les gens ne comprennent pas les règles, on ne peut pas leur demander de les respecter. Vous ne pouvez sans doute pas appliquer le règlement puisque vous ne savez pas exactement comment l'interpréter.

• 1145

J'espère que nous allons pouvoir simplifier tout cela afin de mettre l'accent sur les questions principales de sécurité du public et des conducteurs, pour que les règles soient comprises clairement par les personnes qui sont directement concernées et que les exceptions soient le plus limitées possible. Avec n'importe quelle loi, tout se complique dès qu'il y a des exceptions.

M. Shepherd allait poser une question. Avez-vous besoin du reste de mon temps?

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): J'ai une question concernant le point soulevé par M. Szabo.

Le président: Il vous reste trois minutes, car je dois ensuite donner la parole à l'opposition.

M. Alex Shepherd: Très bien.

M. Szabo a soulevé la question du 60e parallèle. Cela m'a frappé dès le début. Quel est le phénomène qui se produit au nord du 60e parallèle? Peut-on conduire plus loin sans être fatigué? Expliquez-nous cela.

M. Brian Orrbine: Je crois que la fatigue est la même chez tous les travailleurs canadiens, quelle que soit la région et le secteur où il travaille.

Le règlement actuel prévoit des exceptions pour la région située au nord du 60e parallèle. Le règlement permet le dépassement normal des heures de service pour tenir compte des conditions climatiques difficiles et de l'isolement relatif des régions nordiques. En effet, en imposant une limite arbitraire, le chauffeur serait obligé—si vous me passer l'expression—de s'arrêter au milieu de nulle part pour éviter de dépasser la limite fixée. Cette façon de procéder semble aller à l'encontre des principes de sécurité.

Pourtant, c'est prévu dans les règles actuelles. Les changements proposés simplifient ce règlement. Je n'entrerai pas dans les détails. L'objectif est de donner une certaine souplesse aux gens qui vivent dans les régions nordiques isolées, en raison des conditions climatiques.

M. Alex Shepherd: J'aurais pensé que, de nos jours, tous les camions étaient équipés de couchette et que ce type de question ne se posait plus. Ce n'est donc pas nécessairement le cas?

M. Brian Orrbine: Non, ce n'est pas nécessairement le cas.

M. Alex Shepherd: L'article 19 indique que le directeur qui délivre un permis peut le modifier, l'annuler ou le suspendre dans certains cas. Pourquoi utiliser le mot «peut» plutôt que «devra»?

Le président: Très bien, c'est la dernière question.

Monsieur Orrbine, veuillez répondre, s'il vous plaît.

M. Brian Orrbine: Lors de l'élaboration des nouvelles règles, nous avons eu un débat au comité sur cette question. Les programmes provinciaux de réglementation qui procèdent à la délivrance des permis recherchent toujours une certaine flexibilité qui leur donne la possibilité d'évaluer le rendement d'un transporteur sur le plan de la sécurité. Ils souhaiteraient pouvoir se servir de leur propre jugement pour évaluer les antécédents d'un transporteur lorsque celui-ci leur présente une demande d'exemption spéciale ou d'extension. Autrement dit, rejeter la demande, accepter la demande ou supprimer la demande si le transporteur enfreint les conditions de cette disposition.

Le président: Merci, monsieur Orrbine.

Madame Desjarlais du NPD, vous avez dix minutes.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie d'être venus aujourd'hui.

Je suppose que vous avez apporté ce document?

M. Brian Orrbine: Non.

Mme Bev Desjarlais: J'aimerais savoir, par simple curiosité, qui nous a apporté ce document aujourd'hui?

Le président: Apparemment, il vient du ministère.

Mme Bev Desjarlais: Très bien.

J'aimerais reprendre le commentaire de M. Hill. Nous aurions pu obtenir ce document plus tôt. Il est daté du 28 mars 2001. On aurait pu nous le faire parvenir. Les membres du comité assis de ce côté ne savent pas à quel moment le gouvernement a l'intention de présenter une loi ou une demande. Je crois que la demande provient du ministre des Transports. S'il avait quelque chose en tête, comme j'en suis convaincue, il aurait pu nous faire parvenir ce document plus tôt. Nous aurions plus préparer des questions plus approfondies.

Toute cette question porte en fait sur des remaniements et des changements d'horaire. Il est question de savoir si on fait lever les chauffeurs à 6 heures ou si on les fait coucher à 20 heures et s'ils font des heures supplémentaires entre 21 heures et 22 heures, il faudrait encore modifier les horaires. Voilà le genre de choses qu'on trouve dans le document.

• 1150

À mon avis, ce règlement n'est pas scientifique et ne contient pas énormément d'explications techniques. Il s'agit tout simplement de régler le temps de travail et le temps de repos des chauffeurs. C'est tout.

J'ai déjà travaillé dans un hôpital, mais je ne suis pas infirmière—je le précise toujours, parce que les gens pensent immédiatement que vous êtes une infirmière quand vous travaillez dans un hôpital—et je peux comprendre les incidences que peuvent avoir les changements d'horaire et d'emploi du temps sur le personnel. Je dis souvent aux gens qui proposent de faire travailler leurs employés 70 heures par semaine avec très peu d'heures de repos, d'imaginer leurs employés dans les fonctions de leur chirurgien qui va les opérer à coeur ouvert ou du médecin qui va pratiquer une appendicectomie sur leur enfant. Si vous êtes convaincus que le fait d'imposer de telles conditions n'est pas dangereux pour votre propre sécurité, n'hésitez pas à changer les règles qui s'appliquent aux chauffeurs de camions. Je cherche à inciter les gens à transposer les conditions dans les secteurs où elles peuvent avoir des conséquences de vie et de mort sur le public.

Quant aux heures de repos et aux heures de service qui s'appliquent en particulier au nord du 60e parallèle est-ce qu'on tient compte des caractéristiques spéciales de la route qui relie Yellowknife à Edmonton et de la distance... Est-ce que l'on tient compte du fait qu'il n'existe pas une seule halte le long de la route? Est-ce que c'est calculé de cette manière?

M. Brian Orrbine: La plupart des discussions qui ont porté sur l'application du règlement au nord du 60e parallèle se sont appuyées sur les conseils donnés par les territoires relativement à leurs conditions routières. Je pense que la plupart d'entre nous savent que les routes sont peu nombreuses dans cette région. D'autre part, il y a le verglas que l'on peut rencontrer n'importe où en hiver—et l'hiver dure longtemps là-haut. Par conséquent, il est très difficile dans les régions nordiques pour un camion de s'arrêter en toute sécurité. C'est pourquoi les représentants des territoires ont demandé à disposer d'une certaine flexibilité pour adapter le règlement à leur situation propre. Dans le reste du Canada, il est plus facile de s'arrêter en toute sécurité. C'est la raison pour laquelle on fait une différence pour la région située au nord du 60e parallèle.

Mme Bev Desjarlais: Ne serait-il pas raisonnable d'exiger que dans de telles situations il y ait deux chauffeurs plutôt qu'un ou qu'un véhicule qui franchit de telles distances soit obligatoirement équipé d'une couchette?

M. Brian Orrbine: On peut sans doute répondre par oui et par non à cette question.

À ma connaissance, on n'a jamais étudié la possibilité de rendre obligatoire l'installation d'une couchette dans les camions. Quant au deuxième chauffeur, le problème c'est qu'il se trouverait assis à côté du chauffeur au volant et qu'il serait lui-même en service bien qu'il ne conduise pas. Par conséquent, l'horloge tourne pour les deux chauffeurs. Ce ne sont pas les mêmes critères qui s'appliquent pour la personne qui conduit, mais la personne assise à côté est également en service. Elle ne conduit pas, mais elle n'est pas en repos et le temps passé à côté du chauffeur compte comme du temps de service. Par conséquent, cette formule ne présente aucun avantage.

Mme Bev Desjarlais: Est-ce que ce serait la même chose si le deuxième chauffeur se reposait dans la couchette?

M. Brian Orrbine: Si le camion est équipé d'une couchette, le deuxième chauffeur peut s'allonger et dormir sans interruption. D'après les règlements actuels, ce serait considéré comme du repos et cette formule pourrait fonctionner. Absolument.

Mme Bev Desjarlais: Je vous remercie d'avoir précisé que les consultations que vous avez faites n'étaient pas considérées comme des consultations nationales. À mon avis, c'est extrêmement important car il manquait, parmi les parties intéressées, tous les autres automobilistes qui fréquentent la route en même temps que les camionneurs. Je reconnais que la plupart des chauffeurs de camions conduisent très prudemment et qu'ils sont conscients de leur responsabilité. Mais je pense que si vous consultez la population, vous constaterez que, dans certaines régions du pays, les automobilistes regrettent un peu que les chauffeurs fassent la loi sur la route. C'est une source de préoccupation.

Pouvez-vous nous dire où se sont tenues les consultations? Ont-elles eu lieu dans certaines villes, certaines régions du pays? Combien de réunions avez-vous eues?

• 1155

M. Brian Orrbine: Les consultations que nous avons eues avec les 33 parties intéressées dont j'ai parlé étaient extrêmement ciblées. Je vous fournirai le rapport qui indique où se sont tenues les consultations. Je tiens à préciser que ces réunions n'étaient pas considérées comme des consultations publiques; c'était en fait des réunions informatives. Je crois d'ailleurs que notre consultant nous a dit qu'il allait poursuivre ces consultations dans les diverses régions. Le programme était très vaste et les consultations ont eu lieu dans pratiquement toutes les régions du pays. Je peux vous faire parvenir le rapport.

Mme Bev Desjarlais: Par conséquent, il n'y a pas eu seulement quatre ou six réunions, mais toute une série de rencontres régulières...

M. Brian Orrbine: Nous avons tenu 33 réunions différentes. Il n'y a pas eu une seule réunion regroupant 33 parties intéressées. Nous avons engagé un consultant et l'avons chargé de rencontrer les parties intéressées et de les consulter sur certaines questions.

Mme Bev Desjarlais: Ah, je comprends, ce n'était pas des réunions de groupe; c'était des rencontres individuelles.

M. Brian Orrbine: Exactement.

Mme Bev Desjarlais: Dans vos commentaires sur les informations recueillies, vous avez dit que ce sont en fait les parties intéressées qui ont en quelque sorte décidé de l'orientation des propositions. Vous avez dit également que très peu des accidents ont été attribués à la fatigue. Or, selon ce que vous nous avez dit aujourd'hui, il n'y a aucun moyen de contrôler le degré de fatigue. Par conséquent, on ne peut pas dire non plus que la fatigue n'est pas la cause.

M. Brian Orrbine: C'est exact. J'ai bien pris la peine dans mes commentaires de m'assurer que tous les membres du comité comprennent que nous nous appuyons sur les rapports de police pour déterminer la cause d'un accident ou d'un décès accidentel. Un des éléments les plus difficiles est de déterminer si la fatigue est en cause. Malheureusement, les conséquences sont souvent terribles ou alors le chauffeur est tout à fait éveillé. Par conséquent, je pense qu'il est pratiquement impossible pour les agents de police qui se présentent sur la scène de l'accident de déterminer si une des personnes impliquées est fatiguée, car ils ont bien assez à faire pour s'occuper des blessés et nettoyer la route. Il n'existe aucun test simple et facile qu'un agent de police peut administrer au bord de la route ou dans un cas particulier pour déterminer le degré de fatigue des personnes impliquées.

Par conséquent, c'est un commentaire tout à fait valable et c'est la raison pour laquelle j'ai tenu à préciser si les statistiques sont très basses, quelle que soit leur provenance, nous pensons que les cas où la fatigue est en cause sont loin d'être tous signalés. Et nous ne savons pas exactement quelle est l'ampleur du problème.

Mme Bev Desjarlais: Bien. Merci.

Le président: Merci.

Monsieur LeBlanc des libéraux.

M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci messieurs pour votre exposé.

Je m'intéresse un peu à la dynamique fédérale-provinciale. Je reconnais que le gouvernement fédéral exerce des compétences partagées en matière de camionnage interprovincial ou international et je comprends que les provinces ont parfois des régimes différents selon les régions. D'après votre expérience, entrevoyez-vous un consensus prochainement entre les partenaires provinciaux? Quelle sera selon vous la dynamique fédérale-provinciale à mesure qu'évoluera ce dossier?

M. Brian Orrbine: L'exposé de principe de novembre 1999 présente les propositions de changement acceptées par tous les représentants provinciaux, territoriaux et fédéraux. Du point de vue du législateur, il y a accord sur les changements proposés. Il restera sans doute quelques petits détails à régler. Cela ne signifie pas nécessairement que toutes les parties en présence appuient les changements proposés, mais du point de vue de la réglementation, je peux vous dire que nous avons obtenu un consensus et que cela est précisé dans le document de novembre.

M. Dominic LeBlanc: Est-ce que les assemblées provinciales ou les ministères provinciaux des Transports entreprennent de leur côté de larges consultations? Est-ce qu'ils procèdent de manière concertée ou est-ce que les consultations se font de manière disparate et isolée?

M. Brian Orrbine: Comme je l'ai dit un peu plus tôt, l'Alberta est la seule province qui fait véritablement des consultations. À mon avis, la plupart des provinces préféreraient de loin un processus national de consultation, contrairement à ce qui était prévu à l'origine.

Tout le monde reconnaît qu'il est important de consulter le public. Il s'agit de savoir comment procéder et comment faire entendre le point de vue de la population canadienne. C'est pourquoi certains souhaitent que le ministre fédéral des Transports organise des audiences ou des consultations nationales sur le sujet. Certaines provinces ne sont d'ailleurs pas les dernières à les réclamer.

• 1200

M. Dominic LeBlanc: Merci.

Monsieur le président, je vais peut-être partager mon temps avec M. Marcil.

[Français]

M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci beaucoup.

D'abord, monsieur le président, j'approuve les remarques qu'ont passées certains députés tout à l'heure. Il me semble que lorsqu'on convoque des témoins, on devrait recevoir à l'avance tous les documents pertinents. Et même dans le cas des prochains témoins que nous recevrons, et aussi sur d'autres sujets qui touchent au transport, on devrait recevoir copie des documents qui parviennent au ministère des Transports, que ce soit des mémoires ou d'autres documents. On devrait les recevoir automatiquement, au moins une ou deux semaines à l'avance.

À ce moment-là, les gens autour de cette table n'auront plus à se plaindre qu'on n'a pas reçu l'information à temps. Je pense que c'est une règle qui relève du respect élémentaire envers les parlementaires. C'est qu'il arrive qu'on ait l'air un peu fou; on prend connaissance d'un document en arrivant à la séance du comité.

Cela étant dit, je vous remercie beaucoup de votre exposé. Vous dites à la page 10 que, dans les statistiques, il y a eu 360 collisions mortelles impliquant des véhicules lourds au Canada. Combien y en a-t-il eu de non mortelles impliquant des véhicules lourds au Canada? Il y a quand même eu des collisions où des gens sont restés estropiés pour le reste de leurs jours, qui ont perdu des membres, etc.

[Traduction]

M. Brian Orrbine: Chaque année, au Canada, environ 3 000 personnes meurent sur les routes. Le chiffre varie, mais il se situe autour de 3 000 par année. J'ai dit qu'il y avait eu 360 collisions mortelles; je crois que 505 personnes y ont perdu la vie et qu'à peu près 500 des 3 000 véhicules en cause étaient des véhicules utilitaires.

[Français]

M. Serge Marcil: Vous ne répondez pas tout à fait à ma question. Combien y a-t-il eu de collisions n'ayant pas causé la mort, mais où des véhicules lourds étaient impliqués?

Je comprends que 3 000 personnes sont décédées dans des accidents de la route, dont à peu près 500 sont reliés directement à une collision avec un véhicule lourd. Mais il doit y avoir eu beaucoup de collisions également qui ont entraîné des pertes physiques.

Je vais poursuivre, si vous le voulez bien, mon raisonnement. Tout le document, dans le moment, porte uniquement sur un sujet: la fatigue. On a tendance à vouloir rattacher tous les accidents de la route à la fatigue et on prépare, par conséquent, certaines modifications aux règlements pour exiger un nombre maximal d'heures par jour ou par semaine, etc., entrecoupées d'heures de repos.

Par contre, vous dites, dans votre document, toujours à la page 10, que selon les études les plus récentes, en Finlande, on avait attribué à la fatigue à peu près 17 p. 100 de toutes collisions fatales mettant en cause des camions. C'est un pourcentage quand même assez minime. Ce que je trouve un peu particulier, c'est qu'avec le chiffre que vous allez nous donner... Est-ce que vous avez la réponse à ma question sur le nombre de collisions?

[Traduction]

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, je pense pouvoir être un peu plus clair à ce sujet.

Lorsque Transports Canada fait le bilan des collisions, nous examinons deux choses, les collisions dans lesquelles deux véhicules ou plus sont en cause et le nombre de personnes impliquées dans ces collisions. Par exemple, en 1998, l'année où il y a eu 360 décès, il y a eu 33 596 collisions, presque 36 000, sur les routes du Canada.

Si vous examinez la ventilation des facteurs qui ont causé ces collisions, vous constaterez—et c'est encore une fois un des problèmes que pose la limitation des données—que sur ces 36 000 collisions, la police a signalé que 31 000 avaient apparemment l'air normal. Donc, il y aurait de nombreux autres facteurs que la fatigue en cause. Je dirais que la fatigue est un élément mineur, mais important.

• 1205

L'autre question soulevée par M. LeBlanc est celle de la cause des collisions. Si vous regardez les collisions qui impliquent un camion, deux rapports viennent à l'esprit. Le premier est produit aux États-Unis et le deuxième touche ce qui se passe dans la province de l'Ontario. Dans ces deux rapports, vous constaterez que dans les deux tiers aux trois quarts de toutes les collisions avec un camion, c'est le conducteur de l'automobile qui est responsable. Les chiffres sont donc loin d'être aussi élevés et il est difficile d'attribuer l'accident à la fatigue ou à d'autres facteurs mettant le camion en cause. Il faut d'abord éliminer le fait que la faute ne peut pas être attribuée principalement au camionneur dans les trois-quarts des accidents impliquant un véhicule lourd. Les chiffres sont beaucoup plus bas.

Le président: Une très courte question, Serge.

[Français]

M. Serge Marcil: Sur les routes canadiennes, il y a eu 33 600 collisions où on mettait en cause... Je ne dis pas qu'on attribuait la responsabilité ou non. Ce n'est pas ça. Est-ce que c'était des camions qui étaient mis en cause ou si ce chiffre porte sur tous les accidents confondus, automobiles, motocyclettes, etc.? Est-ce uniquement des accidents où un camion était mis en cause?

[Traduction]

M. Brian Orrbine: Les statistiques de Transports Canada portent sur les camions impliqués dans des collisions. Nous n'essayons pas d'attribuer le blâme, de savoir qui était responsable. J'ai fait allusion à ces autres rapports et études pour essayer de replacer tout cela dans son contexte, mais ce n'est pas une chose que nous faisons. Il s'agit d'un tableau complet des collisions avec dommages matériels, des collisions avec blessures et des collisions mortelles. Des camions sont impliqués dans 20 p. 100 des accidents mortels au Canada, mais quand on essaie de voir quels sont les facteurs en cause, on s'aperçoit que des choses comme la fatigue n'ont pas tendance à intervenir pour un pourcentage très élevé des accidents. D'autres facteurs comme l'alcool au volant, la non-utilisation des ceintures de sécurité, les conducteurs présentant un risque élevé, ont tendance à expliquer la plupart des problèmes.

Si vous prenez les véhicules utilitaires uniquement, vous verrez que dans un pourcentage très élevé des cas, l'accident s'est produit dans des conditions apparemment normales.

Le président: Merci, monsieur Orrbine.

Nous allons passer à M. Hill, puis je vais céder la parole à mon ami conservateur là-bas, M. Doyle, qui attend depuis un bon moment.

M. Jay Hill: M. LeBlanc a abordé une des questions que je voulais soulever. Avant d'y revenir, je dirai simplement, pour répondre aux questions de M. Shepherd à propos de ce qui se passe au nord du 60e parallèle, ayant moi-même travaillé dans le Nord pendant une bonne partie de ma vie, qu'il y a une différence énorme quand on commence à regarder le risque, le degré de danger. Oui, les camionneurs se fatiguent peu importe où ils travaillent. Peu importe qu'ils voyagent au pôle nord ou au centre-ville de Toronto, les gens se fatiguent. Personne n'y échappe.

Mais je dirais qu'au nord du 60e parallèle, dans l'ensemble, comme le témoin l'a dit, il y a peu de routes. Dans bien des cas, il s'agit de routes de glace. J'en ai emprunté certaines. Et il y a une différence énorme pour ce qui est du risque, parce que si vous vous endormez et dérapez dans le Nord, vous risquez d'écraser quelques épinettes noires; si vous êtes sur la route 401 entre Windsor et Toronto et que vous perdez la maîtrise du volant, vous frapperez peut-être une mini-fourgonnette ou un autobus rempli d'enfants.

Il ne faudrait donc pas oublier cela quand on regarde les écarts, les exemptions ou les exceptions, peu importe le terme utilisé. Je pense que c'est un des problèmes. J'aimerais peut-être que les témoins me disent—et j'en viens au point que M. LeBlanc essayait de faire valoir—s'il est difficile d'en arriver à un consensus dans un pays aussi vaste que le Canada où les conditions varient tant.

Je me dis souvent quand je suis en pleine circulation, en me rendant au travail ou en rentrant chez moi à Ottawa, surtout à l'heure de pointe, quand je rencontre un 18 roues—et j'ai moi-même été conducteur de camion lourd et de train double de type B—qu'aucune somme d'argent n'arriverait à me convaincre d'affronter la circulation, même bien réveillé. C'est pourquoi je tiens à attirer l'attention du comité sur la différence énorme qu'il y a entre une route à circulation libre, où on ne rencontre personne sur une distance de 100 milles, et la conduite en pleine circulation.

Est-ce que ce n'est pas là le problème, la principale raison pour laquelle il est difficile d'en arriver à un consensus? Je crois que c'est ce que M. LeBlanc a dit. Et n'est-ce pas aussi la raison pour laquelle il y des différences dans la façon dont les règles sont appliquées ou pour laquelle il devrait y avoir des règles différentes pour différentes régions du pays?

• 1210

M. Brian Orrbine: Il y a probablement deux raisons à ce type de situation. Tout d'abord, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a la complexité des règles. À moins que le comité le souhaite, je ne vous torturerai pas en essayant de vous donner des exemples pour vous montrer à quel point il est difficile d'appliquer les règles qui existent actuellement.

Parce qu'il y a tellement d'options, de variables et de décisions qui peuvent être prises, il est très difficile d'en arriver à une façon de faire qui serait la même pour tout le monde. Notre objectif est d'en arriver avec nos partenaires provinciaux et territoriaux à une façon d'envisager les règles, les procédures et les interprétations. Nous travaillons fort en coulisse pour qu'il y ait une certaine uniformité.

Pour ce qui est de la diversité du Canada, parce que le Canada est si grand et parce qu'un si grand nombre d'éléments différents entrent en jeu, différents groupes souhaiteraient que certaines questions soient réglées en fonction d'eux.

Si vous me le permettez, je vais vous donner un exemple. Lorsque le CCATM a dit qu'il allait proposer une série de règles, nous avons reçu de nombreuses requêtes de différents intervenants, dont l'industrie des engrais et l'Association canadienne de la construction, qui auraient aimé avoir droit à certaines exemptions.

Dès qu'on établit une règle, les parties intéressées, selon l'endroit du pays où on se trouve, demandent un changement. Il est difficile d'en arriver à un système harmonisé de règles qui plaise à la plupart des gens.

Nous avons laissé intentionnellement en blanc une partie du document que vous avez reçu et qui correspond à une question qui pose de grandes difficultés, celle d'un service de traversier sur la côte est. Le camionneur qui passe, disons, six heures sur le traversier qui va à Terre-Neuve et au Labrador, puis à Terre-Neuve, n'est pas en pause. Il ne s'agit pas d'une période de repos. Donc, qu'arrive-t-il lorsqu'il débarque à Terre-Neuve? Il ne peut aller nulle part. Il n'a rien fait pendant six, sept ou huit heures peut-être, sauf attendre en ligne.

Nous n'avons pas de réponses à toutes les questions, parce qu'il existe encore des situations uniques dans certaines régions du pays.

M. Jay Hill: Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a des cas uniques et je vais vous donner un ou deux exemples pour renforcer vos commentaires.

Je vais tout d'abord répondre à la suggestion de Mme Desjarlais d'examiner la possibilité d'installer des cabines-couchettes à bord de tous les camions. Parce que j'ai travaillé dans un champ de pétrole, je peux vous dire que ce n'est pas pratique. Par exemple, sur les gros camions à plate-forme, les gros camions avec treuil, il n'y a pas de place pour une couchette dans la caisse. C'est une réalité dans les champs de pétrole.

Il est facile pour nous ici, dans notre bulle à Ottawa, d'élaborer toutes sortes de théories à propos de ce qui pourrait fonctionner, mais, dans la vie réelle, il y a des choses qui ne fonctionnent pas, et cela répond à votre question à propos du caractère unique.

Quelqu'un a parlé aussi du port obligatoire de la ceinture de sécurité. Si j'en avais porté une le jour où je conduisais un bouldozeur dans le champ de pétrole, je ne serais pas assis ici aujourd'hui, je me serais noyé. Quand un Cat passe à travers la glace, on n'a que quelques secondes pour sortir de la cabine avant qu'il coule.

Il faut que vous sachiez aussi que l'hiver même où ça m'est arrivé, un fardier tirant un bouldozeur traversait un pont de glace, au nord de Fort Nelson, quand la glace a cédé sous son poids et qu'il a été emporté par le courant. Le camionneur s'en est sorti, mais s'il avait porté une ceinture de sécurité, il serait probablement mort étant donné le temps qu'il faut pour se détacher et sortir du véhicule. Ce que je veux dire, c'est que ce qui peut paraître pratique sur les routes et les autoroutes ne fonctionne pas nécessairement quand on travaille dans un champ de pétrole ou dans une région forestière.

J'ai une dernière question, parce que je sais que mon temps est écoulé pour le moment, monsieur le président. Pour essayer de communiquer les changements imposés au plus de gens possible et avoir leur point de vue sur l'incidence qu'ils pourraient avoir ou ne pas avoir sur leur vie et leur situation économique, a-t-on songé à les afficher sous forme d'ébauche sur un site Web, par exemple, de manière à pouvoir en informer les gens à leur bureau ou même à la maison?

• 1215

S'ils ont accès à un ordinateur, y aurait-il moyen—j'admets que même si j'ai passé ma vie à manier de l'équipement lourd et à conduire des camions, je ne m'y connais pas très bien en ordinateurs—d'interagir et d'obtenir du feed-back au moyen d'un site Web?

M. Brian Orrbine: Lors des discussions avec le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé, lorsque nous avons parlé de la façon de mener les consultations, nous avons brièvement abordé la possibilité de publier les modifications proposées sur un site Web et d'inviter les gens à faire leurs commentaires. Le document de politique, les documents que vous avez reçus récemment—sont actuellement affichés sur le site Web du CCATM. Je ne suis pas certain que le public sache qu'il peut aller sur ce site et faire des commentaires et, à dire vrai, je ne sais pas comment il pourrait l'apprendre. Mais c'est possible.

À Transports Canada, puisque nous jouons en quelque sorte le rôle de porte-parole des autres paliers de gouvernement, nous avons reçu une grande quantité de commentaires et de lettres où il y avait du pour et du contre. Nous nous proposons d'installer un lien vers le site du CCATM sur notre propre site pour que ceux qui consultent Transports Canada pour savoir ce qui se passe en ce qui concerne les heures de service puissent accéder directement au site du CCATM.

Je dis cela parce qu'il ne s'agit pas d'une question qui intéresse uniquement Transports Canada. Nous y travaillons à titre de partenaire avec tous les gouvernements et le fait de la garder dans le contexte du CCATM va dans le même sens.

Le président: Merci.

Je pense que vous avez raison, monsieur Hill, à propos du site Web. Il faudrait qu'il y ait une transparence dans tout ce que nous faisons. Tout le monde devrait être au courant de la situation.

Monsieur Doyle.

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Merci, monsieur le président.

Je tiens à vous remercier de votre exposé, monsieur. Je n'ai qu'une ou deux brèves questions à vous poser.

Tout d'abord, combien de recommandations du groupe d'experts sur la fatigue, qui a présenté son rapport en 1998, ont été intégrées à ce rapport-ci?

M. Brian Orrbine: C'est une bonne question, monsieur Doyle. Je n'ai pas de chiffre précis, mais je pense pouvoir vous dire que nous avons intégré la plus grande partie d'entre elles. Je sais que je ne suis pas très précis, mais une grande majorité des recommandations ont été incorporées complètement, d'autres l'ont été en partie tandis que d'autres ont été laissées de côté. Je dirais cependant qu'un grand nombre de ces recommandations ont été intégrées au rapport.

M. Norman Doyle: Je vois.

Le président: Monsieur Orrbine, vous pourriez peut-être condenser ou simplifier et envoyer de nouveau le tout au comité. Nous vous en saurions gré.

M. Brian Orrbine: Je suis tout à fait d'accord, monsieur le président.

M. Norman Doyle: J'ai récemment reçu une lettre à laquelle je ne savais trop quoi répondre. Je vais vous la transmettre et vous pourrez peut-être la commenter.

Transports Canada a fait préparer un document pour le CCATM en février 1998. D'après Transports Canada, le Canada est le pays qui autorise par règlement le plus grand nombre d'heures de conduite au monde, 13 heures. Aux États-Unis, le chiffre correspondant est de 10 heures et, dans la Communauté économique européenne, de 9 heures tandis qu'en Australie le nombre maximal d'heures de conduite varie par région entre 11 et 12.

Transports Canada a dit aussi qu'aucune recherche n'avait été faite pour comparer la performance au volant sous un régime de 13 heures par comparaison à une limite plus élevée, disons de 14 heures. Par conséquent, rien ne justifie la prolongation du nombre d'heures de conduite au-delà de la limite actuelle de 13 heures. C'est ce que le ministère a dit en 1998.

En vous fondant sur quelles recherches, alors, justifiez-vous cette extension? Pouvons-nous tenir pour acquis que des recherches ont été faites pour justifier ce type de prolongation?

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, la question de M. Doyle se rapporte à des documents qui ont été produits dans le cadre d'un processus très itératif pour le comité. Des documents ont été produits de temps à autre, ainsi que des exposés de position. À mesure que nous nous sommes familiarisés avec la question, nous sommes arrivés à mieux savoir nous-mêmes ce qu'il fallait faire ou ne pas faire dans le cadre de son examen.

• 1220

Il est vrai, comme il est indiqué dans le document, que nous avons les heures les plus longues. En fait, je l'ai probablement dit à une des réunions.

Lorsque nous avons examiné les changements qu'il serait possible d'apporter aux règles actuelles, nous nous sommes fiés aux scientifiques qui nous ont dit qu'il n'y a aucune différence entre le travail et la conduite. Un travail est un travail. Qu'on coupe du bois, qu'on conduise un camion ou qu'on soit en disponibilité, le travail est le travail. Par conséquent, il ne faudrait pas faire de distinction entre la conduite et le travail, comme les règles le font actuellement.

Pour simplifier les règles, le comité a décidé de combiner les deux. Mais comment s'y prendre? Le comité a opté pour 14 heures, ce qui correspond à une réduction de la journée actuelle de travail de 16 heures. De la façon dont il est actuellement rédigé, le projet de norme donne à entendre qu'on pourrait conduire ou travailler jusqu'à 14 heures par jour—actuellement, 13 heures par jour.

La raison derrière tout cela, c'est que la plupart des chauffeurs doivent faire ce qu'on appelle une inspection avant départ, examiner le véhicule. Ils ont des responsabilités qui entrent dans le calcul de la durée de service effective. Donc, si on commence à compter à 14 heures et qu'il faille faire toutes ces inspections avant départ et s'acquitter d'autres tâches, et que l'horloge continue à compter les heures à rebours, il ne restera probablement—et je dis «probablement», parce que les chiffres varient—qu'un peu plus de 13 heures seulement pour la route. Même s'il semble que nous ayons augmenté les heures de conduite, elles sont demeurées relativement les mêmes pour la plupart des individus. Il y a des exceptions, mais c'était là l'objectif.

M. Norman Doyle: Je vois.

Je ne sais pas si vous avez vu le rapport que Les Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière (CRASH) ont publié récemment. Il a été présenté, je crois, à l'Insurance Institute for Highway Safety par une Mme Elisa Braver le 28 septembre 2000. Il passe en revue un certain nombre d'études effectuées entre 1987 et 1994. D'après le rapport, les risques d'accidents augmentent selon un facteur de 1,8 si on conduit plus de huit heures et de 6,2 si on conduit plus de neuf heures.

Je ne sais pas si ce rapport est valable, mais il me semble qu'il devrait nous inquiéter. Que pensez-vous de ces chiffres, à savoir que le risque d'accident augmente de 6,2 si on conduit plus de neuf heures, sans parler de 14 heures? Ce genre de rapport est-il valable, selon vous? Il me semble personnellement très valable. Il a probablement été rédigé par des entreprises dignes de confiance. Il a été présenté par Mme Elisa Braver au forum de Toronto sur la charge de travail des camionneurs.

Je vous ai laissé le temps de penser à votre réponse. Avez-vous une opinion quelconque à ce sujet?

M. Brian Orrbine: Si le député veut continuer, qu'il se sente libre de le faire.

Je ne suis pas un scientifique, de toute évidence, de sorte que je n'ai pas compétence pour commenter le rapport de Mme Braver. C'est une chercheuse bien connue. Tout ce que je peux dire au comité, c'est que lorsque les États-Unis ont rendu publiques les règles qu'ils proposaient, ils ont dit, je crois, qu'il faudrait passer en revue 150 documents de recherche—dont celui de Mme Braver—pour essayer de tirer certaines conclusions.

Je ne peux pas prétendre que je les ai tous lus, mais je suis au fait des commentaires de Mme Braver. Le problème, c'est qu'il y a littéralement une centaine d'opinions différentes sur la question. Mme Braver a la sienne et d'autres ont la leur. Il a été difficile pour le comité d'essayer de prendre toutes ces connaissances et d'en arriver à un ensemble cohérent de règles. Aucune étude en particulier, et pas plus celle de Mme Braver, ne peut servir de réponse définitive. C'est toujours le même problème. La solution miracle continue à échapper à tout le monde. Nous ne pouvons pas la trouver.

• 1225

Je suis persuadé que cette recherche est valable, mais elle est valable par comparaison à la montagne de connaissances qui existent.

M. Norman Doyle: Pouvez-vous m'expliquer—je ne comprends pas très bien certains des termes que vous utilisez—ce qu'on entend par période de récupération de 36 heures?

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, je vais essayer d'être le plus clair possible pour le comité, parce que nous entrons ici dans les détails. Je ferai de mon mieux pour vous dépeindre rapidement la situation, et je dois commencer par ce qui se passe dans une journée. Nous avons une journée de 24 heures, 10 heures hors service et 14 heures de service. La période de récupération de 36 heures, monsieur Doyle, correspond à la période de repos que doit prendre un conducteur après avoir travaillé un certain nombre d'heures cumulatives. Donc, par exemple, si un conducteur débute aujourd'hui un quart de 14 heures, se repose, fait 14 heures de route demain et continue ainsi jusqu'à ce qu'il ait travaillé 70 heures, cinq jours se seront écoulés. Il lui faudra alors prendre au moins 36 heures de repos—c'est-à-dire une journée et demie.

Je vais vous expliquer brièvement cette journée et demie. Les chercheurs ne s'entendent pas, mais je pense qu'il y a consensus pour dire qu'il faut au moins une ou deux bonnes nuits de sommeil pour ne plus sentir les effets de la fatigue chronique. Donc, dans l'exemple que j'ai utilisé, la première nuit de congé permettrait une nuit complète de sommeil. Quant à la deuxième nuit de congé, si le camionneur reprenait la route après 36 heures, il ne ressentirait pas les bienfaits d'une nuit complète de sommeil, mais seulement s'il souffrait de fatigue chronique. Ainsi, le septième jour, il peut revenir au travail après une période de récupération de 36 heures et travailler pendant 14 heures. C'est pourquoi on parle de 84 heures. Il ne s'agit pas de 84 heures de suite, mais de 70 heures suivies d'une période hors service après laquelle on reprend le travail. Il s'agit du jour sept dans le cas de cet exemple. C'est pourquoi on parle de 84 heures. Il s'agit d'une période de repos qui est obligatoire—un peu comme la fin de semaine.

La raison de ces 36 heures, c'est qu'il faut utiliser des multiples impairs. Autrement dit, si un conducteur de nuit termine son quart de travail l'après-midi de sa dernière journée, il faut le ramener au travail la nuit. On ne veut pas qu'il retourne au travail de jour, parce que ce serait un changement de la nuit au jour—une toute autre question.

Je ne sais pas si c'est clair ou non.

Le président: La question et la réponse ont pris beaucoup de temps. Nous allons passer à Serge, puis nous reviendrons à M. Hill. Vous aurez une autre chance plus tard, monsieur Doyle. Et je suis certain que Mme Desjarlais a des questions à poser.

[Français]

M. Serge Marcil: Merci, monsieur le président. Si M. Doyle acceptait de déposer ses documents, il serait également intéressant pour nous d'en prendre connaissance.

D'autre part, puisqu'on parle souvent des causes, les statistiques démontrent que le pourcentage relatif aux causes des collisions entre véhicules lourds, camions et voitures est bas. J'ai de la difficulté avec le fait qu'il soit si bas.

J'ai voyagé pendant neuf ans de ma circonscription électorale de Salaberry-de-Valleyfield jusqu'à Québec, parce que j'étais député à l'Assemblée nationale du Québec. Le voyage prenait trois heures et demi pour l'aller et autant pour le retour. Je voyageais parfois dans la même journée à cause des activités du comté. Je vais vous dire une chose: c'est en soirée qu'on retrouve le plus de camions. J'ai vu des voitures prendre le champ parce que des camions les poussaient carrément sur le pare-chocs et maintes et maintes fois, je me faisais dépasser par des camions, assez rapidement, alors que je conduisais à 120 km/h. Je conviens qu'il y a toujours une cause lorsqu'on parle des accidents de la route, par exemple la fatigue, mais je crois que la vitesse est probablement la principale cause.

• 1230

Cela m'amène à une question qui pourrait peut-être compléter celle de M. Doyle. Dans tous les camions, il y a quand même des fiches techniques qui enregistrent les heures de départ, les journées, etc., à tout le moins, lorsque le camion est en marche.

Établit-on des statistiques en matière d'accidents où des véhicules lourds sont mis en cause? Fait-on ressortir le pourcentage d'accidents causés par des véhicules lourds alors qu'on avait dépassé 12 ou 13 heures de conduite? Est-il possible d'obtenir de telles statistiques, compte tenu que des fiches sont aujourd'hui intégrées à chacun des camions?

[Traduction]

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, M. LeBlanc veut parler des carnets de route qui donnent une idée des heures de travail des camionneurs, de leurs heures de conduite ou de leur période de repos. À ma connaissance, personne au Canada, aucun organisme de réglementation fédéral, provincial ou territorial ne surveille ce que le conducteur inscrit dans son carnet de route. Il existe des règlements, mais personne ne tient de données statistiques. Je sais que les entreprises le font dans le cadre de leur système de rémunération des chauffeurs, si elles s'en servent pour déterminer leur salaire, mais, à ce que je sache, aucun organisme de réglementation ne le fait. Je ne pense pas qu'on le fasse non plus aux États-Unis, à moins de procéder à une étude particulière.

[Français]

M. Serge Marcil: Mon nom est Marcil. Je comprends votre explication.

Tout comme le Code de la route, un règlement est fait pour être appliqué, quoiqu'il soit souvent difficile à appliquer. Il s'agit tout simplement qu'il y ait un policier bien stationné, bien caché. C'est à ce moment précis que la loi s'applique comme telle. Les humains étant des humains, nous avons souvent tendance à oublier les règlements routiers.

Ne pourrait-on pas accompagner un règlement, comme celui que vous proposez, par des obligations? Prenez le cas des personnes dont le permis de conduire a été suspendu pour conduite en état d'ébriété et qui ont absolument besoin de leur véhicule pour travailler. On leur installe un système d'alarme à l'intérieur du véhicule et, pour pouvoir démarrer celui-ci, il faut absolument que l'individu souffle dedans. Si le taux d'alcool est trop élevé, l'automobile refuse de démarrer. L'alarme peut même sonner lors de la conduite.

Compte tenu de l'importance de plus en plus grande du trafic lourd, et à cause du just in time, du just in delivery, du fait qu'il n'y a plus d'inventaires, qu'il n'y a presque plus d'entreposage, que tout se fait 24 heures par jour sur les routes du pays, de telles mesures ne pourraient-elles pas être mises de l'avant? Les entreprises diront encore que ce sont là des investissements dispendieux, mais à mon avis, la vie humaine vaut plus qu'un gros lot.

Enfin, en ce qui a trait à la vitesse, des alarmes ne pourraient-elles pas régler ce problème? Cela a-t-il déjà été soulevé?

[Traduction]

Le président: Ce sont deux questions. Je vais laisser M. Orrbine y répondre, après quoi nous allons passer à M. Hill.

M. Brian Orrbine: Je tiens tout d'abord à présenter mes excuses à M. Marcil. Je ne regardais pas le bon nom.

M. Marcil soulève deux points. Le premier concerne la question des faux carnets de route et je veux parler des carnets qu'un chauffeur est obligé de remplir. Ils sont inspectés par les agents de surveillance provinciaux. Un agent va demander à un camionneur de s'arrêter au bord de la route ou à un des postes de pesage qu'on voit sur les routes—et, en plus de vérifier l'état du véhicule, examinera le carnet de route du conducteur pour voir s'il a respecté les règles. S'il ne les a pas respectées, plusieurs choses peuvent arriver. Le conducteur peut être mis hors service immédiatement pour avoir menti ou falsifié un dossier.

• 1235

Des accusations peuvent être portées en vertu de la Loi sur les contraventions et des règlements provinciaux et, souvent, les amendes sont très lourdes. Il existe donc un système pour faire observer les règles relatives à l'utilisation des carnets de route et vérifier le bien-fondé de ce que le conducteur dit.

En ce qui concerne la vitesse, je suis loin d'être un expert sur la question, et les dispositifs électroniques pour contrôler la vitesse n'entrent pas dans mes cordes.

Le président: Il y a des règlements pour certains véhicules, mais c'est évidemment la police qui est chargée de les appliquer.

Je laisse maintenant la parole à M. Hill.

M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

Je voudrais faire quelques remarques pour faire suite à celles de M. Marcil. Il a dit en gros que les lois étaient généralement appliquées, mais que les camionneurs oubliaient souvent les règlements. Il me semble que c'est ce qu'il a dit. Je tiens à souligner, d'après ma propre expérience, que la grande majorité des camionneurs se comportent de façon très professionnelle et qu'ils respectent non seulement les lois, mais les règlements qui les régissent.

Pour ce qui est de la vitesse, je ne sais pas sur quelle route se trouvait M. Marcil, mais il a dit qu'il circulait à 120 kilomètres heure et qu'il s'était fait dépasser par un camion. S'il faut un système d'alarme quelque part, c'est peut-être dans son auto.

Je veux simplement préciser qu'il est arrivé très souvent que des camionneurs se retrouvent en difficulté et que, pour protéger des automobilistes, des piétons ou d'autres personnes, ils mettent leur propre vie en danger. Je pourrais vous citer une foule d'exemples de ce genre. Je ne voudrais surtout pas—et M. Marcil non plus, j'en suis sûr—que le comité dénigre l'industrie du camionnage ou les camionneurs eux-mêmes.

Vous avez dit dans votre présentation que nous ne possédions pas assez de données sur les effets de la fatigue. Puis, en réponse à une question à ce sujet-là—j'oublie qui l'avait posée—, vous avez répété que c'était très difficile parce que vous deviez vous fonder par exemple sur les rapports de police pour démontrer par des moyens détournés que la fatigue pourrait être un facteur dans certains accidents. Pendant le processus de consultation, avez-vous vu autre chose qu'il serait possible de faire pour essayer d'obtenir des données ou au moins pour nous orienter dans une voie qui nous permettrait de faire un peu plus de recherche sur cette question afin de pouvoir comprendre la gravité du problème?

M. Brian Orrbine: Il y a deux aspects à cette question, monsieur le président. Premièrement, comment peut-on déterminer si la personne qu'on a devant soi est fatiguée? Est-ce que je peux savoir, simplement en regardant M. Hill, s'il est oui ou non fatigué en ce moment?

M. Jay Hill: Je le suis. Je l'avoue.

M. Brian Orrbine: Mais ce qui compte, c'est de savoir s'il l'est assez pour que cela nuise à son rendement. Nous sommes tous fatigués de temps en temps.

C'est sur la route que le problème se pose. Je ne crois pas qu'il existe d'instrument ou de méthode permettant de déterminer le niveau de fatigue. C'est très difficile à dire. Tant que nous ne trouverons pas un moyen technologique ou médical, l'analyse rétrospective des collisions est peut-être la seule façon de procéder. Comme je l'ai déjà mentionné, la police doit d'abord s'occuper des blessés, dégager la route, et ainsi de suite, et il est très difficile de déterminer si la fatigue était en cause, même pour des gens qui sont relativement bien entraînés. La solution pourrait être de demander à un chercheur ou à un enquêteur d'examiner rétrospectivement les causes de collisions. Mais je spécule. Je ne connais aucun moyen concluant.

C'est un des problèmes qui se posent. Malgré toutes les données scientifiques, les connaissances, les études, l'information et les conseils que nous avons reçus, il faut quand même que des gens comme nous tracent une ligne dans le sable quelque part. C'est très difficile de trouver quelque chose pour nous aider à tracer cette ligne. Il y a des lignes directrices, mais il n'existe pas de solution magique, du moins pas à ma connaissance.

• 1240

M. Jay Hill: Pour en revenir à l'étude que M. Doyle a mentionnée tout à l'heure, est-ce qu'on peut dire qu'en un sens, toute cette question est tellement intangible qu'il est très difficile de la circonscrire, parce que tout dépend de tellement de choses?

J'ai déjà parlé du stress lié à la conduite dans la circulation dense, surtout quand on est au volant d'un 18 roues au centre-ville d'Ottawa ou de Toronto à l'heure de pointe. Comme j'ai moi-même été camionneur, je dirais que c'est beaucoup plus fatigant que de conduire sur la grande route, où on peut se mettre plus ou moins en mode de pilotage automatique. Il faut bien sûr rester aux aguets, mais il n'y a pas le même stress constant que quand vous voyez par exemple une petite voiture changer de voie et se faufiler devant vous dès que vous laissez une distance sécuritaire entre votre véhicule et celui d'en avant. C'est beaucoup plus fatigant.

Tout dépend aussi dans une certaine mesure de chaque conducteur. Il y a des gens qui résistent beaucoup mieux à la fatigue que d'autres, dans certaines circonstances, et qui réussissent à fonctionner très bien.

Est-ce que c'est une des difficultés à surmonter pour trouver quelque chose qui serait à toute épreuve? Il est déjà difficile d'essayer d'établir des règles uniformes qui s'appliqueraient aussi bien à Tuktoyaktuk qu'à Toronto, et qui viseraient des personnes différentes et des conditions de conduite différentes même à l'intérieur d'une seule province.

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, je pense que M. Hill a évoqué un des problèmes fondamentaux, si je puis dire, dans ce domaine-là. J'ai fait allusion tout à l'heure à la très vaste étude effectuée au Canada et aux États-Unis au sujet de la fatigue. Elle a coûté plus de 7 millions de dollars et elle a duré six ou sept ans.

Les résultats de cette étude très importante—pas besoin d'être la tête à Papineau pour s'en douter, et j'imagine que je n'apprendrai rien à la plupart d'entre vous—ont révélé qu'il y avait tellement de variations d'une personne à l'autre, et d'une journée à l'autre, qu'il était très difficile—quoique pas impossible—d'en arriver à une solution simple.

Cette étude a notamment démontré que l'heure de la journée était plus déterminante que le nombre d'heures de service, ce que la plupart d'entre nous n'auraient pas su intuitivement. Nous pensons généralement que, plus on travaille longtemps, plus on est fatigué. Il y a des chercheurs qui le disent, comme l'a mentionné M. Doyle. Mais il y en a d'autres qui ne sont pas nécessairement de cet avis.

La conclusion de l'étude, c'est que les camionneurs doivent mieux se reposer. C'est facile à dire. Le plus difficile, c'est de déterminer exactement dans quelle mesure. Comment trouver une formule façon équitable pour tout le monde à qui elle s'appliquera?

Il n'y a pas de règles pour les automobilistes ordinaires, mais ce n'est pas la même chose pour les véhicules utilitaires. Les conducteurs de véhicules de ce genre sont mieux formés pour conduire un type de véhicule en particulier, mais ce sont des êtres humains comme nous tous. Le médecin qui travaille au milieu de la nuit a le même problème. Nous nous retrouvons tous dans des situations de ce genre. Il est toujours subjectif de dire quand c'est assez.

M. Jay Hill: Merci.

Le président: Merci, monsieur Hill.

Nous pourrions prendre plus de temps que prévu, mais je tiens à rappeler au comité que nous devons nous occuper de la motion de Mme Desjarlais.

C'est maintenant au tour de M. St. Denis.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président, et merci aux fonctionnaires d'être ici.

J'ai une série de questions courtes à poser. Je trouve que mes collègues ont déjà soulevé des questions très intéressantes.

Je voudrais ajouter mon grain de sel à ce qu'ont dit Jay et Serge au sujet des camionneurs en général. Même quand on vit un incident malheureux dans lequel un camion est en cause, il est injuste de blâmer tous les camionneurs. C'est simplement qu'ils conduisent un gros véhicule, imposant et bien visible. La vaste majorité des camionneurs font certainement leur travail de la manière la plus sécuritaire possible.

Le but de tout ceci, c'est de rendre ce travail encore plus sécuritaire. Les gens qui ont accepté les propositions, du moins jusqu'à un certain point, doivent être d'avis que cela permettra d'améliorer la sécurité sur les routes. Il peut y avoir des divergences d'opinions sur ce qui est sûr, moins sûr, plus sûr ou assez sûr. C'est probablement un des éléments sur lesquels nous allons essayer de nous entendre—je dis bien «essayer»—au cours des prochaines semaines.

• 1245

Je vais commencer par vous demander dans quelle mesure l'amélioration du régime des heures de service permettrait d'améliorer non seulement la sécurité sur les routes, mais aussi la qualité de vie et la santé des camionneurs eux-mêmes. Je pense qu'il faut tenir compte aussi de ces aspects-là. C'est une question de conditions de travail pour les conducteurs. Si nous améliorons leur régime de travail, si nous le rendons plus sécuritaire non seulement pour eux, mais pour tous les gens qui circulent sur les routes, c'est un moyen indirect d'augmenter la sécurité. J'aimerais savoir si la qualité de vie et la santé des camionneurs eux-mêmes entrent en ligne de compte dans ce débat.

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, M. St. Denis soulève là une question très intéressante, qui fait ressortir quelque chose dont nous n'avons pas encore discuté ce matin. Nous estimons que la qualité de vie est un élément important et qu'elle influe sur des choses comme la fatigue et la réduction de la fatigue.

Les propositions de changements que vous avez sous les yeux représentent une amélioration par rapport à ce qui existe actuellement. Je pense que tout le monde en conviendra, même mes adversaires les plus acharnés. Il s'agit plutôt de savoir si c'est suffisant. C'est une observation très valable. Est-ce que c'est suffisant? Est-ce que cela va assez loin? Ou trop loin? C'est le genre de questions qu'il faut se poser. Mais c'est certainement une amélioration par rapport à la situation actuelle.

En ce qui a trait à la qualité de vie, il est très difficile d'essayer d'établir des règlements à ce sujet-là. Pour tenter de régler le problème, Transports Canada travaille en collaboration avec le gouvernement de l'Alberta, les Américains et d'autres chercheurs, pour examiner toute la question de ce qu'on appelle la «gestion de la fatigue».

C'est une autre façon d'aborder la question de la fatigue. Il s'agit d'améliorer les habitudes de vie, en travaillant avec les propriétaires d'entreprises et les expéditeurs pour leur faire comprendre que la vie des camionneurs est précieuse. Alors, si un camionneur doit se ranger sur l'accotement pour des raisons de sécurité, ou s'il est fatigué, cela n'aura pas de répercussions graves pour lui.

Ce sont les Australiens qui ont été les premiers à implanter cette notion de sensibilisation aux habitudes de vie et de gestion de la fatigue. Ici, au Canada, nous pensons que c'est une solution de rechange très intéressante à l'élaboration d'exigences réglementaires. Nous jugeons que les deux solutions sont nécessaires pour s'attaquer vraiment à la racine du problème, c'est-à-dire les habitudes de vie des camionneurs.

M. Brent St. Denis: Un de mes collègues a demandé, dans un bref aparté, si nous pouvions avoir sur une seule page un résumé de la situation actuelle et des mesures qui ont été proposées.

Les groupes d'intéressés pensent déjà que cela va assez loin. Ils se situent tous quelque part sur l'échelle entre «bravo!», «pas assez loin» et «trop loin».

Serait-il possible d'avoir, sur une ou deux pages, un résumé très succinct de ce qui se passait jusqu'ici, de ce qui est proposé, de la voie que certains voudraient nous voir prendre et des points sur lesquels d'autres souhaiteraient nous voir reculer? Cela nous aiderait puisque nous sommes déjà enterrés sous les papiers.

J'ai une dernière question très courte à poser, monsieur le président. En définitive, il appartiendra aux gouvernements provinciaux et territoriaux de fixer leurs propres règles pour les camionneurs qui circulent uniquement à l'intérieur de leurs frontières. Le but ultime, si tout le monde s'entend, c'est d'harmoniser les règles interprovinciales et les règles intraprovinciales. Quelles sont à votre avis les principales étapes pour en arriver là? Quels sont les principaux jalons entre la situation actuelle, la situation dans l'industrie, et ce qui pourrait se passer dans quelques mois ou dans un an?

Ce sera tout. Merci, monsieur le président.

• 1250

M. Brian Orrbine: Pour répondre à votre commentaire sur la possibilité que nous vous préparions un document d'une ou deux pages sur la situation actuelle et les mesures proposées, par exemple dans un tableau qui montrerait les différents aspects de la question, c'est quelque chose que je peux faire facilement. Je rêve parfois à ce genre de chose, alors je peux facilement le faire si cela peut aider le comité.

M. Brent St. Denis: Ce sont des rêves ou des cauchemars?

M. Brian Orrbine: Parfois les deux, monsieur.

En ce qui a trait à l'uniformité et à ce que nous avons déjà, je ne pense pas avoir mentionné cet aspect-là dans ma déclaration. Il y a des règlements fédéraux, provinciaux et territoriaux sur les heures de service, mais si nous les mettions tous côte à côte, nous nous rendrions compte qu'ils sont à peu près tous identiques, à deux exceptions près. Ces deux exceptions, ce sont l'Alberta et la Saskatchewan, dont les règlements portent sur le nombre d'heures pendant lesquelles quelqu'un peut travailler sur une semaine avant d'être forcé de se reposer—c'est ce que M. Doyle a appelé la période de récupération de 36 heures.

Donc, je dirais qu'il y a déjà une certaine uniformité d'un bout à l'autre du Canada. Et ces deux provinces nous ont déjà laissé entendre qu'elles étaient prêtes à s'aligner sur ce qui se ferait ailleurs. Nous travaillons donc tous ensemble, par l'entremise du CCATM, en vue d'élaborer une série de règles sur lesquelles tout le monde pourra s'entendre et qui pourront se refléter dans les règlements des divers gouvernements.

Le président: Merci.

Mme Desjarlais, du NPD.

Mme Bev Desjarlais: Je vais essayer d'être brève parce que j'ai quelques questions à poser avant de présenter ma motion.

Sur la fiche qu'ils doivent remplir, est-ce que les camionneurs indiquent seulement leurs heures ou s'ils mentionnent aussi l'état de la route, la météo, la circulation? Est-ce que cette fiche comprend des renseignements de ce genre? Voilà ma première question.

J'ai regardé la documentation rapidement, et je n'ai pas l'ensemble de la loi sous les yeux. J'aimerais savoir s'il y a des règlements particuliers pour les conducteurs qui transportent des matières dangereuses. Est-ce que leurs heures de travail sont différentes?

Vous avez aussi mentionné les préoccupations de l'industrie des engrais et de l'industrie de la construction. Je ne comprends pas très bien pourquoi ce sont ces industries qui ont participé au processus de consultation, plutôt que l'ensemble des gens qui font du camionnage ou des autres groupes. Je me demande si les industries devraient avoir leur mot à dire sur la réglementation, et aussi s'il devrait y avoir des différences.

J'ai une autre question. Est-il raisonnable de suggérer que les agents de la GRC ou des autres corps policiers chargés d'évaluer la situation, quand il se passe quelque chose sur la route, soient tenus d'inscrire pendant combien d'heures le conducteur devait travailler, quand il s'est arrêté la dernière fois pour se reposer et depuis combien d'heures il est sur la route?

M. Brian Orrbine: Monsieur le président, je vais commencer par le commencement.

En ce qui a trait aux fiches journalières, le conducteur n'a pas à y indiquer l'état de la route sauf s'il se passe quelque chose de particulier. Il y a une section en blanc, réservée aux commentaires; s'il se passe quoi que ce soit d'anormal, le conducteur peut l'inscrire là. Normalement, il se contente d'indiquer ce qu'il fait: «Je conduis; je ne conduis pas; je dors; je conduis.» C'est la principale raison d'être de cette fiche.

Pour ce qui est des matières dangereuses, la mémoire me fait défaut. La Loi sur les explosifs est la seule dont je me souviens. Si je ne me trompe pas, le nombre d'heures est réduit pour les camionneurs qui transportent des explosifs. Ils doivent faire moins d'heures que dans l'industrie du transport en général. Je ne me souviens pas parfaitement de tout ce qui se passe dans le cas des matières dangereuses, mais je sais qu'il y a des limites en ce qui concerne les explosifs.

Quant à votre question sur les industries des engrais et de la construction, ce sont leurs porte-parole qui ont présenté d'eux- mêmes ces demandes au comité. Il y a plusieurs industries qui ont suivi les discussions. Nos séances sont ouvertes au public. Nos responsables de la réglementation se réunissent parfois à huis clos pour des raisons précises, mais le gros du travail du comité se fait en public.

Le grand public participe rarement beaucoup, mais dans ce cas- ci, tous les gens qui sont régis ou touchés par ces règles sur les heures de service ont suivi nos travaux de près. Ce qu'ont dit les gens de l'industrie de la construction—mais ils ne sont pas les seuls—, c'est que la saison de construction est très courte dans plusieurs régions du Canada et qu'ils aimeraient par conséquent qu'il soit permis de travailler de plus longues heures pendant cette période-là. Et les représentants de l'industrie des engrais nous ont dit la même chose, à savoir que la saison de plantation au Canada est extrêmement courte et cruciale, et qu'ils souhaitent des exceptions aux règles en vigueur. C'est donc le genre de suggestions que ces gens-là nous ont faites, sans que nous les ayons sollicitées.

• 1255

Enfin, pour ce qui est de l'évaluation par la police, je ne pense pas qu'il y ait eu de longues discussions avec les corps policiers au sujet de l'amélioration de leur capacité de détecter la fatigue. Tous les rapports policiers indiquent la cause des incidents, mais malheureusement, comme je l'ai mentionné à votre collègue, les conditions semblent normales dans la plupart des cas. Je pense que ce serait une mesure très longue et très difficile à appliquer parce que même les gens qui s'occupent de cette question ont du mal à déterminer quand la fatigue devient inacceptable.

Le président: C'est tout pour vous, Bev?

Mme Bev Desjarlais: Sur ce point, parce que vous avez mentionné... Je ne voulais pas nécessairement suggérer que la police soit chargée de décider si la fatigue était en cause ou non. Je pensais plutôt à demander aux policiers de poser des questions comme «Depuis combien de temps êtes-vous au volant?» ou «Quand vous êtes-vous arrêté pour la dernière fois?», par exemple, en même temps que toutes leurs autres questions. Je précise pour le compte rendu que c'est ce que je voulais suggérer.

Par ailleurs, est-ce que vos séances étaient annoncées publiquement?

M. Brian Orrbine: Les séances du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé sont annoncées sur le site Web du conseil, mais il n'y a pas d'avis dans les journaux ou quoi que ce soit du genre. Cependant, si quelqu'un veut savoir quand a lieu la séance suivante, il n'a qu'à se rendre sur le site du CCATM; comme je l'ai déjà dit, c'est ouvert au public. La seule différence, c'est que si vous n'êtes pas membre de l'organisation, vous ne recevrez pas le matériel à l'avance.

Mme Bev Desjarlais: C'est tout.

Le président: Merci, monsieur Orrbine et monsieur McHattie. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus. C'est le coup d'envoi de notre étude. Nous allons évidemment établir un plan de travail, examiner votre document et présenter des recommandations. Nous vous remercions de votre contribution et de vos commentaires.

M. Brian Orrbine: Merci.

Le président: Je vais vous laisser quelques minutes pour sortir, après quoi Mme Desjarlais va présenter sa motion puisqu'elle a déposé un avis de motion.

Mme Bev Desjarlais: Merci, monsieur le président.

Je pense que tout le monde a maintenant un exemplaire de ma motion. Je précise à l'intention des membres du comité qui viennent d'arriver au Parlement et qui n'étaient pas au comité des transports pendant la dernière législature—le président pourra certainement le confirmer—que nous avions entendu dire que la loi sur les transports routiers allait être ramenée devant le Parlement. Un certain nombre d'entre nous siégeaient au comité des transports, et nous avons reçu une tonne d'information sur les heures de conduite des camionneurs et sur les différents aspects de la déréglementation du transport par autobus, par exemple, mais à cause de la fusion des lignes aériennes et de diverses autres questions, nous n'avons jamais pu nous attaquer à ces dossiers.

En ce qui concerne la question des heures de service des camionneurs et des chauffeurs d'autobus, la population est très préoccupée par l'allongement de ces heures et par les problèmes de sécurité liés à la circulation des camions. Sur cette note... Je ne veux pas laisser entendre que les camionneurs conduisent mal, parce que dans l'ensemble, je pense que la majorité respectent les règles et reconnaissent que c'est leur vie à eux aussi qui est en jeu. Mais il faut faire en sorte qu'ils sachent tous qu'il y a des règles en place, pour qu'ils puissent les suivre.

Il est important de tenir un débat public. Il n'y en a pas eu jusqu'ici. L'étude du CCATM tenait compte uniquement de certains aspects de l'industrie. Donc, la motion que je veux présenter... Vous l'avez tous lue, alors je n'ai pas l'intention... Vous voulez que je la lise?

Le président: Oui, ce serait une bonne idée que vous la lisiez pour le compte rendu.

Mme Bev Desjarlais: Je vais donc vous la lire pour le compte rendu.

Je propose que, pour élargir nos connaissances et permettre à la population d'exprimer son opinion de façon plus complète, comme l'a suggéré le ministre des Transports, le comité tienne des audiences ouvertes au public partout au pays afin de consulter directement les Canadiens au sujet des heures de service des conducteurs de véhicule utilitaire.

Par la suite, si le comité juge nécessaire d'examiner aussi ce qui se passe aux États-Unis... S'il juge utile d'aller à Washington ou ailleurs, ou même au Mexique, parce qu'en vertu de l'Accord de libre-échange nord-américain... Je suis sérieuse, parce que les règlements en vigueur au Mexique suscitent certaines inquiétudes aux États-Unis. Nous sommes tous dans la même galère à cause de la mondialisation. Donc, si nous voulons procéder à un examen approfondi, nous voudrons peut-être aller voir ailleurs. Personnellement, je tiens beaucoup à ce que nous tenions d'abord des consultations publiques au Canada, mais je comprends que le comité pourrait vouloir aller plus loin.

Le président: Merci. Vous avez présenté votre motion, et M. St. Denis veut en discuter.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président.

• 1300

Bev nous a présenté des arguments convaincants, sauf pour ce qui est de tenir des audiences «partout au pays», du moins pour le moment. À cette exception près, j'appuie sans réserve sa motion. Mais à mon avis, il est un peu prématuré de décider immédiatement que nous allons voyager. Nous déciderons peut-être de le faire, mais pas tout de suite. Premièrement, nous espérons que les gouvernements des provinces et des territoires vont tenir leurs propres consultations, comme ils l'ont annoncé. Celui de l'Alberta l'a déjà fait. Mais je ne voudrais pas que nous intervenions, que nous nous rendions dans leurs capitales, avant qu'ils aient décidé de le faire.

Si vous me permettez, Bev, je pense qu'il serait plus approprié de commencer par dresser une liste de témoins pour voir où ils sont tous. Nous ne pouvons pas aller rencontrer un millier de camionneurs dans tout le pays. Ce n'est pas pratique et cela n'ajouterait rien à nos connaissances. Nous devons plutôt entendre un échantillon représentatif de tous les intéressés.

Tout en appuyant l'esprit de la motion de Bev, sauf pour ce qui est de décider tout de suite que nous allons voyager sans avoir de plan ou sans savoir ce que les provinces et les territoires vont faire pour consulter leurs populations, je propose soit que nous mettions la motion aux voix, soit que Bev la présente à nouveau un peu plus tard, une fois que nous aurons une meilleure idée de la liste des témoins. Il serait probablement utile que nous nous fassions une idée de la situation aux États-Unis; quant à savoir comment nous pourrions nous y prendre, cela reste à voir.

Donc, si la motion est mise aux voix, je ne pourrai pas l'appuyer sous sa forme actuelle, monsieur le président.

Le président: Jay Hill, de l'Alliance canadienne.

M. Jay Hill: Eh bien, je suis indécis moi aussi. Je suis tout à fait prêt à approuver l'esprit de la motion, mais à ma connaissance... Premièrement, je m'excuse d'avoir manqué quelques séances récemment parce que j'avais d'autres engagements ailleurs. Mais j'aimerais beaucoup que nous discutions de nos priorités—de ce que nous voulons faire et du temps que nous avons pour le faire—avant d'ajouter à notre charge de travail.

Je suis tout à fait d'accord avec ma collègue qui a parrainé la motion. C'est certainement nécessaire. Il y a quelqu'un qui a fait un commentaire aux témoins—je pense que c'était M. Szabo—au sujet de l'urgence de cette question. Ce n'est pas que la question n'est pas importante, comme l'a dit le secrétaire parlementaire, mais nous devons voir ce que nous avons d'autre à faire. Et les choses sont encore plus compliquées, comme nous le savons tous, parce que notre comité a une double mission. Combien de temps avons-nous?

Je dois dire que le secrétaire parlementaire m'étonne. Il n'a pas sauté immédiatement sur l'idée de tenir quelques audiences au Mexique l'hiver prochain, mais...

Des voix: Ah, ah!

M. Jay Hill: Mais en ce qui concerne la motion, j'aimerais que la motionnaire nous donne une meilleure idée de ce qu'elle a en tête en termes de calendrier. Elle propose simplement de «tenir des audiences ouvertes au public partout au pays». Est-ce que ce serait maintenant? De toute évidence, c'est impossible. Est-ce que ce serait pendant les vacances d'été? Ou alors à l'automne, ou quand nous pourrons trouver le temps? Je pense que c'est une considération importante, comme tous les membres du comité en conviendront certainement.

Le président: Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo: Monsieur le président, nous avons reçu d'autres suggestions au sujet des travaux futurs du comité, ce à quoi cette motion semble se rattacher. Malheureusement, encore une fois, nous n'avons pas suffisamment de temps pour discuter de l'ajout de cette question à notre ordre du jour. Puisqu'il s'agit à mon avis de déterminer nos priorités et d'établir un consensus parmi les membres du comité, je suggère que nous reportions tout simplement l'étude de la motion à la prochaine séance, ce qui nous laisserait le temps d'examiner les plans et les priorités du comité.

Le président: Monsieur Doyle, et ensuite monsieur Marcil.

M. Norman Doyle: Je veux simplement appuyer la motion, mais j'aimerais avoir une précision sur ce qu'a dit le secrétaire parlementaire. A-t-il voulu dire qu'une fois que nous aurons dressé une liste de témoins de tout le pays, nous pourrions très bien nous rendre dans les différentes régions?

M. Brent St. Denis: Je n'ai pas dit que nous devions voyager ou ne pas voyager. Ce que j'ai dit, c'est qu'en l'absence de plan plus précis—qui sont les témoins, quels sont nos objectifs—et compte tenu de tous les autres travaux du comité, il est possible que 95 p. 100 des séances de consultation que nous voudrons tenir—ce n'est qu'une hypothèse—pourraient avoir lieu ici. Et nous ne savons pas ce que les provinces vont faire.

Donc, je pense que c'est prématuré. Je ne présume pas du résultat. Je dis simplement que c'est prématuré pour le moment, Norm.

Le président: Serge Marcil, du Parti libéral.

• 1305

[Français]

M. Serge Marcil: Monsieur le président, pour rectifier ce que j'ai dit plus tôt à l'égard des chauffeurs de camion, je veux préciser ici que les chauffeurs de camion sont à mon avis des professionnels. Je ne remettais pas en question la qualité des chauffeurs et leur professionnalisme. Je remets plus souvent en question les entrepreneurs que les chauffeurs.

Cela étant dit, je trouve cela un peu prématuré. J'aimerais qu'on ait au moins un programme bien établi de nos priorités, au niveau du Comité des transports, avant de décider. Quelqu'un d'autre pourrait proposer une autre motion de consultation sur un autre sujet et, à un moment donné, on ne pourra jamais respecter... À mon avis, il faudrait un plan de match.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, Serge.

Bev, à la lumière de ce que nous venons d'entendre, seriez-vous prête à me laisser la motion entre les mains pendant quelque temps? Nous pourrions travailler avec le personnel et y revenir plus tard.

Mme Bev Desjarlais: En fait, je voudrais apporter quelques précisions sur certains des commentaires et des questions de mes collègues au sujet de l'échéancier.

Je ne crois pas qu'il soit particulièrement urgent que nous voyagions et que nous commencions nos travaux tout de suite. C'est simplement que la question nous a été posée. Mais je pense que nous allons devoir parcourir le pays; c'est une question d'équité envers les différentes régions.

Je ne suis pas prête à dire, comme le suggère le secrétaire parlementaire, que nous devrions attendre de voir ce que vont faire les provinces. C'est une question nationale, qui concerne le transport par camion dans tout le pays. Nous ne devons pas nous fonder uniquement sur ce que la Saskatchewan ou l'Alberta vont dire parce que, bien franchement, je me suis donné la peine de discuter avec le sous-ministre des Transports de la Saskatchewan quand cette province a modifié son règlement au sujet des heures, et je ne suis pas satisfaite des changements qui ont été apportés.

Vous allez vous rendre compte que, dans certaines provinces, les nouvelles règles ont en fait accru les risques d'accidents. Nous devons voir ce qui serait la meilleure solution pour tous les camionneurs de tout le Canada, parce que c'est de cela qu'il est question ici. Donc, je pense qu'il faut examiner la situation dans son ensemble. Il devait y avoir une conférence au sujet de la situation des camionneurs et des heures de service. Or, les dix plus grandes entreprises de camionnage au Canada sont à Winnipeg, et il n'y avait aucune rencontre prévue à Winnipeg.

Donc, je pense que nous devons examiner tout cela. Il ne s'agit pas simplement d'attendre que les gens qui en sont capables viennent nous rencontrer à Ottawa. Le comité n'a jamais voyagé pour des raisons futiles. Il ne l'a jamais fait dans le passé, et il ne doit pas le faire maintenant. Mais d'après mon expérience, d'après toute l'information que j'ai reçue et tous les commentaires que j'ai entendus tout au long de la dernière législature, et même récemment, la situation inquiète bien des gens partout au pays. Je ne crois pas qu'il soit urgent de voyager. Nous pourrions même le faire en septembre ou en octobre. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de le faire maintenant ou pendant l'été.

Mais je tiens à déposer ma motion tout de suite parce que je suis d'avis que nous devons nous attaquer à ce dossier. J'ai déjà vu le comité se traîner les pieds et se lancer ensuite dans un débat sur une question que je ne trouve pas nécessairement la plus pressante pour l'ensemble des Canadiens. Je pense que nous devons nous occuper de ce dossier.

Le président: Y a-t-il d'autres commentaires?

(La motion est rejetée)

Le président: Merci.

La séance est levée jusqu'à mardi prochain.

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