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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 7 octobre 2003




Á 1105
V         Le président (M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.))
V         M. Hau Sing Tse (vice-président, Direction générale de l'Asie, Agence canadienne de développement international)
V         Le président
V         M. Paul Hunt (vice-président intérimaire, Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international)

Á 1110

Á 1115
V         Le président
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         Le président
V         M. Paul Hunt
V         M. Stockwell Day
V         M. Paul Hunt
V         M. Stockwell Day
V         M. Paul Hunt

Á 1120
V         M. Stockwell Day
V         Le président
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)
V         M. Paul Hunt
V         Le président
V         M. Paul Hunt
V         M. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)

Á 1150
V         M. Hau Sing Tse
V         Le président
V         M. Paul Hunt

Á 1155
V         Le président
V         Le président
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada)

 1205
V         Le président
V         M. Stockwell Day

 1210
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter

 1215
V         Sous-commissaire Garry Loeppky (opérations, Gendarmerie royale du Canada, ministère du Solliciteur général)
V         Le président
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)

 1220
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         S.-comm. Garry Loeppky
V         Le président
V         L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.)
V         L'hon. Wayne Easter

 1225
V         Le président
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le très hon. Joe Clark
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le très hon. Joe Clark
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le très hon. Joe Clark
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         Le très hon. Joe Clark
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         S.-comm Garry Loeppky

 1230
V         Le président
V         L'hon. Art Eggleton
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         S.-comm. Garry Loeppky
V         Le président
V         L'hon Art Eggleton
V         L'hon. Wayne Easter

 1235
V         L'hon Art Eggleton
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Svend Robinson
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Svend Robinson
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Svend Robinson
V         Le président

 1240
V         M. Svend Robinson
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Stockwell Day
V         Le président
V         M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.)
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. John Harvard

 1245
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne)
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Deepak Obhrai
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le très hon. Joe Clark
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Deepak Obhrai
V         Le président
V         Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.)
V         Le président
V         M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.)

 1250
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter

 1255
V         Le président
V         S.-comm. Garry Loeppky
V         Le président
V         Mme Karen Redman
V         Le président
V         M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne)
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         S.-comm. Garry Loeppky

· 1300
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Keith Martin
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Keith Martin
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         Mme Aileen Carroll
V         Le président
V         Mme Aileen Carroll
V         Le président
V         Le très hon. Joe Clark
V         Le président










CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


NUMÉRO 050 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 octobre 2003

[Enregistrement électronique]

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, dans le cadre de notre étude des relations du Canada avec des pays musulmans, nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui comme témoins M. Hau Sing Tse, vice-président, Direction générale de l'Asie, Agence canadienne de développement international, et M. Paul Hunt, vice-président de la Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient, également à l'ACDI. Soyez les bienvenus, messieurs.

    Je tiens à préciser aux membres du comité qu'un vote est prévu à la Chambre. Nous entendrons le timbre trente minutes avant. Il devrait sonner dans vingt minutes environ.

    Monsieur Tse, si vous voulez bien commencer.

+-

    M. Hau Sing Tse (vice-président, Direction générale de l'Asie, Agence canadienne de développement international): Merci, monsieur le président.

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invité à me présenter devant ce comité afin de discuter avec vous de nos programmes d'aide au développement en Malaisie, en Indonésie, en Inde et au Pakistan. À l'exception de la Malaisie, l'ACDI, grâce à divers mécanismes, mène de nombreuses activités en Indonésie, en Inde et au Pakistan, où demeurent un nombre important de personnes pauvres.

    Commençons par la Malaisie. Bien qu'il ne s'agisse pas d'un tigre comme Hong Kong, Singapour, la Corée du Sud et Taïwan, la Malaisie s'en tire bien sur le plan du développement social et économique. Le pays s'est remis assez rapidement de la crise financière de 1997. À bien des égards, il s'agit d'une belle réussite. Au cours des dernières années, l'ACDI a aidé la Malaisie à changer la situation, passant de pays bénéficiaire d'aide au statut de premier partenaire commercial du Canada en Asie du Sud-Est. On parle de 2,5 milliards de dollars en 2002, grâce à des programmes qui ont mis l'accent sur les politiques économiques ainsi que sur la coopération entre les institutions et les entreprises canadiennes et malaisiennes, y compris la formation en gestion et en entrepreneuriat pour les femmes malaisiennes.

    Compte tenu des impressionnantes réalisations de la Malaisie en matière de développement, nos activités d'aide au développement dans ce pays sont maintenant très réduites.

[Traduction]

    Par ailleurs, la situation du développement en Indonésie est fort différente. Il s'agit du plus grand État islamique; la pratique de l'islam y est modérée. Compte tenu de son patrimoine naturel, le pays a enregistré une très bonne croissance tout en réussissant à réduire considérablement la pauvreté. Toutefois, l'Indonésie a été le pays le plus durement touché par la crise financière de 1997, principalement en raison d'une mauvaise gouvernance à l'échelle tant du gouvernement que des entreprises. Les répercussions de la crise sont d'ailleurs toujours visibles; l'Indonésie compte maintenant un nombre important de personnes pauvres et vulnérables. Plus de 60 p. 100 des 216 millions d'Indonésiens vivent avec moins de deux dollars par jour.

    Malgré tout, la crise aura tout de même contribué à précipiter les changements politiques qui ont abouti à l'instauration d'un gouvernement démocratique où le pouvoir est décentralisé au profit des administrations locales. Les premières élections présidentielles directes auront lieu en 2004.

    La liberté politique a également entraîné une croissance explosive des organisations de la société civile qui étaient auparavant réduites au silence. Le programme de l'ACDI en Indonésie a évolué en fonction des besoins du pays. Depuis 1997, l'Agence s'est surtout consacrée à y encourager la bonne gouvernance, les droits de la personne et le développement démocratique à l'échelle centrale et locale, à stimuler la croissance des petites et moyennes entreprises qui créent des emplois pour les pauvres et à améliorer le bien-être des collectivités grâce à une gestion plus durable des ressources naturelles et de l'environnement.

    Les deux pays sud-asiatiques que vous visiterez sont l'Inde et le Pakistan. Parlons d'abord du Pakistan. Je crois savoir que votre comité a eu l'occasion de s'entretenir avec le président pakistanais lors de sa visite au Canada, il y a quelques semaines. Bien que le Pakistan ait tenté de mettre en place des réformes et qu'il ait mis en oeuvre une initiative majeure de décentralisation du pouvoir en faveur des administrations locales, les indicateurs sociaux du pays demeurent très déprimants. Ils présentent en effet les caractéristiques d'un État très fragile.

    L'ACDI, comme d'autres donateurs, a pris certains risques en vue d'aider à la décentralisation. Nous ciblons maintenant la décentralisation au profit des administrations locales, et nous contribuons à renforcer les capacités locales en matière d'autorité et de prise de décisions. Nous mettons l'accent sur la prestation des services de santé et d'éducation à l'échelle locale. Enfin, vu la situation pitoyable des femmes, nous nous efforçons d'améliorer leur sort, en particulier chez les pauvres en milieu rural.

    Quant à l'Inde, la transition qu'elle vit depuis 1991 pour passer d'une démocratie socialiste fermée à une situation socio-économique plus ouverte sur l'extérieur, tout en adhérant à la libéralisation économique et à la décentralisation des pouvoirs vers les administrations locales, a entraîné une croissance économique annuelle de 6 p. 100 au cours des dernières années. Bien que ce pays compte encore le plus grand nombre de pauvres, il représente certainement une force économique émergente qui pourrait avoir un réel impact régional, voire international. En 2030, la population de l'Inde surpassera celle de la Chine, ce qui en fera le pays le plus populeux du monde.

    Le VIH/sida constitue une menace bien réelle pour le développement à moyen terme de l'Inde. Nos programmes actuels soutiennent la réforme économique, le développement social et la gestion de l'environnement.

    Le gouvernement de l'Inde a récemment annoncé sa politique d'aide étrangère, selon laquelle les plus petits donateurs bilatéraux, comme le Canada, coopéreront dorénavant seulement avec la société civile plutôt que directement avec le gouvernement. Nous sommes donc en train de formuler une réponse appropriée à cette politique, de concert avec la ministre Whelan.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: C'est nous qui vous remercions.

    Monsieur Hunt, s'il vous plaît.

[Français]

+-

    M. Paul Hunt (vice-président intérimaire, Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international): Merci beaucoup, monsieur le président. Il me fait grandement plaisir d'être ici avec vous. Je vous remercie de nous avoir invités pour discuter de l'aide publique canadienne en Égypte, en territoires palestiniens et en Jordanie, dans la perspective de la visite que nous ferons prochainement dans ces pays.

    L'ACDI n'a pas de programme d'aide pour l'Iran, l'Arabie saoudite et Israël. Les revenus per capita de ces pays sont supérieurs à ceux des pays en voie de développement.

Á  +-(1110)  

[Traduction]

    L'ACDI assure une présence très modeste, sur le plan de l'aide, en Turquie. La plus grande partie de la collaboration de l'ACDI en Turquie est gérée par le programme de coopération industrielle de l'Agence qui soutient les alliances commerciales à long terme entre les entreprises privées canadiennes et turques. Actuellement, notre participation bilatérale en Turquie gravite autour d'un soutien très faible, mais bien ciblé, de la police nationale turque, son partenaire canadien étant la GRC.

[Français]

    La région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord retient l'attention de la communauté internationale depuis des années, non seulement en raison de ses énormes réserves pétrolières ou du conflit israélo-palestinien, mais aussi à cause de son instabilité persistante. En effet, celle-ci a eu des effets à l'échelle mondiale, entre autres celui de priver les habitants de la région de la possibilité d'améliorer leurs conditions de vie.

    Les spécialistes arabes qui ont préparé le remarquable Rapport arabe sur le développement humain 2002 déplorent cette situation, et les membres du comité souhaiteront peut-être jeter un coup d'oeil sur le résumé de ce rapport.

[Traduction]

    Le rapport fait date en réalité, puisqu'il a été rédigé par des spécialistes arabes qui ont analysé la situation dans la région.

    Les objectifs globaux du Canada en matière de réduction de la pauvreté demeurent au centre de nos activités d'aide en Égypte et au Moyen-Orient. Ils concordent également avec la politique du Canada visant à renforcer l'efficacité de son aide et le souhait exprimé par le gouvernement de mettre l'accent sur l'approche tridimensionnelle, c'est-à-dire la diplomatie, la défense et le développement. Par exemple, nous soutenons l'Égypte dans ses efforts en vue de réduire la pauvreté des groupes marginalisés du pays, notamment des femmes, des enfants et des jeunes, en investissant 40 p. 100 environ de notre budget actuel dans le développement de ressources humaines, surtout dans l'éducation de base. Une autre tranche de 45 p. 100 de nos affectations globales vise à favoriser de meilleures possibilités d'emploi en offrant du soutien au développement de la petite et de la moyenne entreprise. Le programme exécuté en Égypte attire également l'attention sur l'égalité des sexes, la protection des enfants, l'environnement et la capacité des institutions.

    L'aide au développement à long terme de l'ACDI dans les territoires palestiniens mise surtout sur la création d'un environnement favorable à la paix et au développement durable. Le rapport entre la paix, la sécurité et le développement durable est particulièrement pertinent dans le contexte politique actuel. Le Canada continue d'explorer les moyens de s'engager davantage dans le processus de paix et dans le soutien du programme de réforme palestinien. Le Canada est considéré comme un partenaire crédible et fiable dans la région, de sorte qu'il a la capacité de faire davantage.

    En ce qui concerne la Jordanie, le Canada a fait une contribution stratégique pour la soutenir dans ses efforts de développement dans le domaine de l'éducation et à l'appui d'une économie du savoir.

    J'aimerais simplement attirer votre attention, avant que vous vous rendiez dans la région, sur la documentation qui vous a été remise. Il s'agit essentiellement d'un aperçu auquel sont joints une annexe et des renseignements plus détaillés sur les initiatives que soutient le Canada dans le cadre du programme de coopération de l'ACDI. Vous y trouverez également une description des renseignements affichés sur le site Web de l'ACDI au sujet de l'aide offerte à la Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à la Jordanie.

    Le Moyen-Orient est indubitablement une région d'importance stratégique mondiale et d'un grand intérêt économique et politique pour le Canada. C'est une région avec laquelle un nombre important de Canadiens ont des liens personnels et une région dans laquelle tous les Canadiens espèrent voir éclore la paix et le développement socioéconomique.

    Il importe, monsieur le président, de souligner que l'ACDI travaille de très près avec divers partenaires canadiens qui l'aident à créer un environnement favorable à la paix et au développement à long terme. Ses efforts se poursuivent en dépit de l'accroissement des tensions dans la région.

    Pour illustrer mon propos, j'aimerais mentionner simplement la remarquable contribution de quatre partenaires canadiens qui aident la société civile et les intervenants de la région. Le Centre de recherches pour le développement international, par exemple, a offert du soutien en matière de R-D de la capacité au sujet de l'épineuse question des réfugiés palestiniens. La Fédération canadienne des municipalités, elle, a offert de l'aide en vue de conclure des partenariats entre des municipalités canadiennes et palestiniennes et en vue de renforcer la gouvernance locale, ce qui touche les citoyens au niveau local et communautaire. Oxfam et Oxfam-Québec ont pris l'engagement profond et soutenu d'aider les collectivités palestiniennes vulnérables. Enfin, le ministère de l'Éducation du Nouveau-Brunswick a effectué des travaux innovateurs sur l'apprentissage en ligne et l'éducation, dans les deux langues officielles, de concert avec le gouvernement de la Jordanie.

Á  +-(1115)  

[Français]

    Il s'agit là de quelques exemples d'initiatives menées par des partenaires canadiens dans le cadre d'un programme de coopération très intéressant qui met à contribution le Canada et les pays de cette région.

    Monsieur le président, je vais être en mesure de répondre à vos questions.

[Traduction]

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Avant d'entamer la période de questions et de réponses, j'aimerais simplement souligner que nous comptons parmi nous ce matin M. Alan Dershowitz, professeur de droit à l'École de droit de Harvard et éminent avocat en matière de droits de la personne. Il est venu à Ottawa aujourd'hui pour prendre la parole dans le cadre d'une conférence sur la sécurité nationale et les libertés civiles organisée par le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Monsieur Dershowitz, soyez le bienvenu.

    Nous allons donc continuer pour dix minutes encore, dont cinq sont réservées aux questions et aux réponses, avant de suspendre nos travaux pour aller voter.

    Monsieur Day.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Je profite des cinq minutes accordées pour vous remercier tous deux de vos exposés et du travail que vous faites. Notre comité reconnaît que vous n'avez pas beaucoup d'empire sur les questions politiques. Ce sont donc les éléments opérationnels qui nous intéressent. Nous vous sommes reconnaissants de l'excellent travail que vous faites.

    M. Hunt a mentionné quelques fois le travail fait dans le domaine de l'éducation, surtout dans les territoires palestiniens et avec l'Autorité palestinienne. Nous avons maintenant la certitude, confirmée par plusieurs sources, puisque les publications comme telles sont disponibles, que beaucoup de matériel publié sous les auspices de l'Autorité palestinienne est rempli de propos haineux à l'égard d'Israël et des Juifs. Pas plus tard que l'été dernier, nous avons vu des images de ce que diffuse l'Autorité palestinienne sur les chaînes de télévision, dans des annonces publicitaires et dans des articles, y compris lors d'événements destinés à la jeunesse qui encensent ceux qui commettent les attentats-suicide. Mais le plus troublant, c'est qu'il y a dix jours seulement, quelque trente organismes non gouvernementaux ou ONG palestiniens ont refusé de signer un document dans lequel ils s'engageaient à ne pas utiliser l'aide versée au pays—surtout par les États-Unis—à des fins terroristes. Ils ont refusé de signer.

    Étant donné ce qui précède, avez-vous reçu des instructions quant à vos rapports avec ce genre d'organismes s'ils refusent de garantir que les fonds ne serviront pas à des fins terroristes? Qu'est-ce que cela sous-entend pour le Canada?

    Je comprends les contraintes politiques auxquelles vous devez vous soumettre, monsieur Hunt, mais pouvez-vous me dire quelle est notre participation actuelle dans la région palestinienne, étant donné ces faits?

+-

    Le président: Monsieur Hunt.

+-

    M. Paul Hunt: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je ne me rappelle peut-être pas de tous les points que vous avez soulevés dans votre question. Par contre, j'aimerais dire, tout d'abord, que le Canada ne travaille pas particulièrement dans le domaine de l'éducation dans les territoires palestiniens, dans le cadre de son programme de coopération. Les exemples que j'ai mentionnés concernent plus particulièrement la Jordanie et d'autres, la région du Maghreb par exemple, y compris le Maroc.

+-

    M. Stockwell Day: Désolé. Je croyais vous avoir entendu dire que vous travaillez avec des groupes des territoires palestiniens.

+-

    M. Paul Hunt: Oui, mais pas dans le domaine de l'éducation. Au début de votre question, vous avez parlé de manuels, de matériel didactique et ainsi de suite. Je tenais donc simplement à préciser au comité que nous ne travaillons pas à l'éducation dans les territoires palestiniens.

+-

    M. Stockwell Day: Qu'en est-il de ces 30 ONG qui ont refusé de signer le document? Le savez-vous?

+-

    M. Paul Hunt: Je crains de ne pas être en mesure de vous répondre. Je n'ai pas vu la liste des 30, de sorte que j'ignore si ce sont des partenaires ou des intervenants avec lesquels collabore, entre autres, le Canada.

    Je précise toutefois qu'un des importants organismes internationaux par l'intermédiaire desquels le Canada contribue aux efforts dans les territoires palestiniens est l'UNRWA, soit l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient. Il s'agit de l'organisme onusien spécialement mandaté pour s'occuper du bien-être socio-économique des réfugiés de la région. Pendant bien des années, le Canada a fait une contribution annuelle importante aux travaux de cet organisme, qui s'occupe entre autres des enfants, des collectivités locales, des écoles, de l'eau et de techniques sanitaires. Cependant, de concert avec le reste de la communauté internationale, le Canada y contribue.

    Je pourrais me renseigner au sujet des organismes dont a parlé le député et voir si nous pouvons vous fournir un supplément d'information.

Á  +-(1120)  

+-

    M. Stockwell Day: Je vous en serais reconnaissant.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Désolé, mais il faut suspendre nos travaux. Nous serons de retour après le vote.

    Je vous remercie beaucoup.

    Le comité suspend ses travaux pour quelques minutes. Au retour, nous reprendrons là où nous nous sommes arrêtés et, d'ici midi, nous entendrons le solliciteur général.

Á  +-(1120)  


Á  +-(1145)  

+-

    Le président: Nous reprenons nos travaux.

    Nous allons maintenant consacrer le reste du temps, soit jusqu'à midi, à des questions et à des réponses.

[Français]

    Monsieur Bergeron, s'il vous plaît, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Merci, monsieur le président.

    Dans la foulée de la question posée par M. Day, j'aimerais apporter certains éclaircissements, histoire d'équilibrer un peu les différentes perspectives.

    J'imagine que la prochaine visite que fera M. Day en Israël et en Palestine nous permettra de bénéficier d'un point de vue à la fois beaucoup plus large et équilibré sur la situation qui prévaut là-bas.

    J'ai eu le plaisir et l'honneur d'aller en Palestine--entre autres à Jénine--et en Israël à trois reprises, notamment avec ma collègue de Mercier, après les incursions israéliennes qui ont fait la manchette dans les journaux. J'ai été tout particulièrement frappé par le fait que la répression israélienne dans les territoires occupés s'exprimait essentiellement par des attaques brutales contre les infrastructures de l'Autorité palestinienne. Il y avait un genre de paradoxe entre la rhétorique israélienne selon laquelle l'Autorité palestinienne devait contrôler les terroristes et ces attaques de l'armée israélienne qui, dans chacune des localités palestiniennes, visaient avant tout des services tels que les communications ou la police. J'ai également été surpris de constater que toutes les infrastructures: eau, électricité et jusqu'aux feux de circulation au coin des rues, y avaient été systématiquement détruites par les autorités israéliennes.

    Or, on sait qu'une grande partie de ces infrastructures ont été financées grâce à l'aide internationale, notamment celle du Canada. Je me demande donc en quoi il peut être utile pour les pays donateurs, incluant le Canada, d'investir des sommes considérables dans le développement d'infrastructures palestiniennes qui seront systématiquement détruites par les autorités israéliennes?

+-

    M. Paul Hunt: Merci beaucoup, monsieur le président.

    De quelle façon puis-je répondre à cette question, qui a une dimension très politique?

+-

    Le président: Répondez-y de façon non politique, s'il vous plaît.

+-

    M. Paul Hunt: Il nous faut garder en tête que dans le cadre de la coopération canadienne, l'assistance humanitaire est un élément crucial. Cela consiste à répondre aux besoins des communautés en faisant appel à des organisations et à des partenaires compétents qui sont sur place et qui sont respectés dans le milieu. À titre d'exemple, l'organisme des Nations-Unies UNRA, dont j'ai parlé plus tôt, est vraiment respecté, particulièrement dans cette région. Il répond directement aux besoins de la population sur le terrain.

    Il est important de ne pas oublier que les pays partenaires de la communauté internationale ont la responsabilité de s'assurer que dans les communautés, les individus et les familles sont respectés et soutenus. Il s'agit là d'une fonction que le Canada est en mesure d'accomplir.

    Il est vrai qu'à cause du conflit, on est de temps en temps confrontés à des difficultés impliquant les investissements, que ceux-ci soient acheminés par l'entremise d'UNRA ou d'autres intervenants. Néanmoins, l'important est de maintenir le dialogue au plan politique, de continuer à encourager les parties à trouver un terrain d'entente, d'inciter les participants au conflit à régler ensemble leurs différends tout en essayant, même si c'est difficile, d'aider les familles et les individus dans les communautés à répondre à leurs besoins quotidiens.

+-

    M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, j'aimerais très brièvement...

+-

    Le président: Merci.

    Je suis désolé, monsieur Bergeron, mais nous allons devoir passer à Mme Redman.

    Mrs. Redman, please.

[Traduction]

+-

    Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je tiens à vous remercier tous deux pour vos interventions d'aujourd'hui.

    Il arrive que le Canada soit critiqué pour le niveau réel de son aide extérieure, et un des remèdes à cette situation consiste à concentrer notre aide de manière à la rendre plus efficace. Pouvez-vous nous dire s'il existe une masse critique ou commenter l'efficacité de cette stratégie?

    Des analystes nationaux et internationaux nous ont également dit qu'une de nos forces à cet égard sont les rapports que nous entretenons avec les organismes non gouvernementaux. Il est intéressant de noter que, selon M. Sing Tse, l'Inde a en fait demandé que nous continuions d'offrir de l'aide dans le cadre de partenariats avec des organismes non gouvernementaux.

    Vous pouvez peut-être nous dire à quel point cette façon de faire est efficace dans ces régions.

    Par ailleurs, monsieur Hunt, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt ce que vous avez dit tous deux au sujet de l'aide aux femmes, plus particulièrement aux entrepreneures, parce que je faisais partie jusqu'à tout récemment d'un groupe de travail sur les entrepreneures du Canada. Pouvez-vous nous parler un peu des mécanismes qui sont en place pour évaluer le taux de réussite de ce genre de programmes? Comment juger que ces fonds de développement ont été bien dépensés?

Á  +-(1150)  

+-

    M. Hau Sing Tse: Je peux peut-être partager avec vous ma façon de voir la société civile en tant que principale source de contribution au développement. Dans l'exemple de l'Inde, qui est une démocratie bien établie et qui a une société civile très dynamique, notre capacité de travailler avec la société civile en vue de l'aider à faire son travail, à influencer le gouvernement ou à amorcer un dialogue public sur les orientations de tous genres est en plein le genre de domaine où nous pourrions exceller.

    Si vous établissez maintenant un rapport avec la concentration de l'aide dans ces pays, par exemple en Asie, vous constaterez essentiellement que les pays sont immenses, que leurs besoins sur le plan du développement sont gigantesques et qu'ils ne dépendent pas particulièrement de l'aide, si l'on se fie au pourcentage de l'aide au développement par rapport à leur PIB. Par conséquent, de bien des façons, la meilleure aide que puisse donner le Canada de manière à avoir un impact un peu plus stratégique n'est pas de verser plus d'argent, mais de contribuer ses idées, son expérience et ses connaissances.

    Actuellement, dans l'optique de la politique d'aide extérieure de l'Inde, nous examinons différents aspects de ce que peut être une société civile. De bien des façons, les Indiens font une prise en charge locale, suivent leur propre plan de développement en se tournant vers les grands donateurs au sein des institutions financières internationales. Certains de ces donateurs, comme la Russie, sont politiquement motivés à travailler avec eux, de gouvernement à gouvernement. Dans l'ensemble, la plupart d'entre eux aimeraient que les autres donateurs travaillent de concert avec la société civile. Je crois donc qu'on en reconnaît l'importance.

    Pour ce qui est de la mesure des résultats relatifs aux femmes entrepreneures, si je m'arrête à la situation en Indonésie, aux différentes initiatives qui y sont prises, en bout de ligne, il ne faut pas se fier tant au nombre de femmes qui travaillent dans la région qu'au genre de mécanismes en place pour continuer d'encourager la participation des femmes en tant qu'entrepreneures. Dans le cas qui nous occupe, nous insistons beaucoup plus sur l'Asie, par rapport à l'Indonésie... et un petit peu sur l'Inde.

    Paul, j'ignore si vous avez quelque chose à ajouter.

+-

    Le président: Monsieur Hunt, souhaitez-vous prendre la parole?

[Français]

+-

    M. Paul Hunt: Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je pourrais peut-être renchérir au sujet de l'efficacité de l'aide et de sa concentration. J'ai essayé d'en parler dans ma déclaration, mais de toute évidence, la façon dont nous tentons de gérer le programme de coopération du Canada dans la région dont je suis responsable gravite surtout autour des principes clés sur lesquels repose l'efficacité de l'aide, soit des partenariats axés sur la demande, dirigés par le pays visé et misant sur la prise en charge locale comme moyen de s'attaquer aux priorités établies par nos partenaires de la région. Pour ce qui est de la concentration de l'aide, elle est le plus visible dans la façon dont le gouvernement du Canada et l'ACDI ont commencé à investir de nouvelles ressources en Afrique et dans les pays qui sont dans leur mire, de même qu'en Amérique latine et en Asie.

    Dans cette région particulière, nous avons une enveloppe de financement plutôt stable pour l'instant de sorte que nous sommes incapables d'accueillir beaucoup de nouvelles demandes. Il nous faut donc focaliser autant que concentrer la façon dont nous essayons de cibler nos programmes et de les exécuter.

    Par exemple, nous avons récemment refocalisé le programme de contribution du Canada avec l'aide des autorités et de la société civile du Maroc de manière à insister sur l'éducation de base. Pour quelle raison? C'est la clé d'une série de changements favorables qui surviennent sur le plan du développement dans une société. Les autorités marocaines tenaient vraiment, par ailleurs, à obtenir l'aide canadienne dans ce domaine dans les deux langues et de manière à soutenir leurs efforts en vue de mettre en place une stratégie de réforme de l'éducation de base.

    Pour ce qui est de l'importance des organismes non gouvernementaux, c'est à dessein que j'ai essayé de la souligner dans mon exposé de ce matin. Le milieu des organismes non gouvernementaux... les institutions pancanadiennes du Canada sont de très importants joueurs auprès des partenaires de la région, particulièrement dans la région que vous allez visiter.

    En ce qui concerne la participation des femmes et les questions d'égalité des sexes, pour étoffer ce qu'a dit Hau Sing, j'aimerais simplement préciser que l'accès et l'équité sont une des constatations fondamentales du rapport arabe sur le développement. Les questions d'accès et d'équité gravitent plus particulièrement autour de la participation des femmes et des jeunes filles au processus de développement et à leur société. Donc, au sein même du programme de coopération du Canada, on met un accent particulier sur l'éducation des jeunes filles, non seulement pour qu'elles s'inscrivent à des études, mais aussi pour qu'elles les complètent. On veut faire en sorte que les jeunes filles font partie des structures officielles et officieuses d'apprentissage et des initiatives d'apprentissage en ligne, particulièrement en Jordanie..., et que les femmes participent activement aux petites et moyennes entreprises de même qu'aux micro-entreprises.

    Un point que n'a pas mentionné Hau Sing concerne le micro-crédit et le micro-financement. Les données statistiques les plus remarquables et encourageantes révèlent que, lorsque ce genre de crédit est offert aux femmes, le taux de succès de leurs entreprises de même que le taux de remboursement de leur dette en tant que commerçantes responsables sont extrêmement encourageants. Par conséquent, nous essayons de soutenir ce volet de l'aide dans la façon dont nous la structurons, la ciblons et agissons comme partenaires.

Á  +-(1155)  

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Sing, je vous remercie beaucoup.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Hunt, pour votre visite de ce matin, c'est très apprécié. Je remercie aussi tous les membres de l'ACDI qui sont ici présents avec vous.

[Traduction]

    Avant de faire une pause de quelques minutes et d'accueillir le ministre, je tiens à annoncer à tous les membres que nous allons avoir la visite, le 27 et 28 octobre, du président de l'Assemblée nationale de la République du Portugal. J'aimerais savoir si vous m'autorisez à organiser, durant sa visite officielle en compagnie de quatre députés membres du parti ministériel portugais, une rencontre, un repas ou un déjeuner de travail.

    Des voix: D'accord.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Nous allons faire une pause de deux minutes.

Á  +-(1158)  


  +-(1201)  

+-

    Le président: Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude des relations du Canada avec les pays musulmans. Nous avons maintenant le privilège de compter parmi nous l'honorable Wayne Easter, solliciteur général du Canada, et M. Gary Loeppky, sous-commissaire des Opérations de la Gendarmerie royale du Canada.

[Français]

    Monsieur le ministre, bienvenue. La parole est à vous.

[Traduction]

+-

    L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada): Monsieur le président, je vous remercie.

    J'ai une courte déclaration à faire, après quoi je répondrai volontiers à vos questions.

    Tout d'abord, je tiens à vous remercier. C'est pour moi un réel plaisir de me trouver ici aujourd'hui et d'avoir l'occasion de discuter avec vous des Canadiens détenus dans des pays étrangers. J'apprécie à sa juste valeur, ayant moi-même déjà présidé un comité, le rôle vital et le précieux travail que font les comités des deux Chambres.

    La question à l'étude aujourd 'hui est très importante, et je tiens à ce que le comité sache qu'il a toute la coopération et le soutien entier de mon portefeuille. Cela étant dit, je tiens à dire au départ—et je sais que vous comprendrez—que je dois respecter certaines contraintes lorsqu'il est question d'opérations policières.

    En tant que solliciteur général, ma priorité numéro un est la sécurité des Canadiens. Je vous donne l'assurance qu'au Canada, la sécurité n'est pas établie aux dépens des droits démocratiques et des libertés fondamentales. Nous reconnaissons que la Charte canadienne des droits et des libertés symbolise les valeurs mêmes de notre société. À mon avis, le gouvernement a fait de l'excellent travail pour faire en sorte que les collectivités canadiennes sont sûres tout en respectant les valeurs inscrites dans la Charte et les droits et libertés qui y sont garantis et en en faisant la promotion. Comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, le gouvernement actuel a pris l'engagement de mettre en équilibre les droits des Canadiens et la sécurité nationale. Nous sommes extrêmement vigilants quand il s'agit de lutter contre le terrorisme tout en protégeant les droits de nos citoyens.

    Notre approche à l'égard de la sécurité nationale se caractérise par une étroite collaboration des organismes de sécurité et d'exécution des lois, des ministères fédéraux, d'autres gouvernements et de la communauté internationale. En tant que ministre responsable de cette collaboration, je peux vous donner l'assurance qu'en coopérant avec les organismes étrangers, le SCRS et la GRC se comportent de manière professionnelle et convenable, d'une manière conforme aux lois canadiennes et respectueuse des droits des Canadiens. Après tout, notre objectif est de protéger les Canadiens tant ici qu'à l'étranger.

    En ce qui concerne plus particulièrement M. Maher Arar, je me réjouis de voir que les efforts déployés par de nombreuses sources gouvernementales ainsi que par son épouse ont abouti à son retour au Canada en toute sécurité. La campagne menée en vue d'obtenir la libération de M. Arar a inclus des interventions sur plusieurs fronts. La position du gouvernement du Canada a été clairement énoncée par le premier ministre dans une lettre adressée au président de la Syrie en juillet, lettre dans laquelle il déclarait que le gouvernement du Canada ne faisait pas obstacle au retour de M. Arar au pays. Le premier ministre a également demandé que M. Arar soit libéré et retourné au Canada pour des raisons humanitaires.

    Le ministre des Affaires étrangères et ses fonctionnaires ont aussi travaillé avec diligence à la libération de M. Arar. Ils ont notamment travaillé sans relâche en vue d'obtenir pour M. Arar l'accès aux services consulaires grâce à des appels répétés auprès de l'ambassadeur de la Syrie au Canada et à l'intervention de représentants canadiens à Damas. Nous avons donc pu obtenir l'autorisation de rendre plusieurs visites à M. Arar et, tout au long de sa détention, les fonctionnaires des Affaires étrangères ont rencontré son épouse pour la tenir au courant de nos efforts.

    J'aimerais maintenant passer à la question plus générale des responsabilités du gouvernement en ce qui concerne la divulgation de renseignements, particulièrement en matière de sécurité nationale. Les gouvernements successifs du Canada ont constamment soutenu qu'ils avaient l'obligation de protéger certains principes fondamentaux de liberté, y compris le droit à la vie privée, la confidentialité des conseils prodigués par des fonctionnaires aux ministres, le secret du Cabinet et les renseignements de nature délicate au sujet de l'exécution des lois de sécurité nationale et des relations internationales. Dans ce contexte, les hauts fonctionnaires ont l'obligation générale de même que la responsabilité juridique précise de tenir secrètes certaines informations qu'ils pourraient avoir en leur possession dans l'exercice de leurs fonctions. De la même façon, la GRC ne divulgue pas de renseignements au sujet des enquêtes qu'elle mène parce qu'elle pourrait ainsi compromettre l'intégrité des enquêtes en cours.

  +-(1205)  

    De plus, la divulgation publique de renseignements risque de violer la vie privée d'une personne, de compromettre les enquêtes menées par d'autres organismes d'application de la loi et de renseignement, au pays comme à l'étranger, et de contrevenir à des lois nationales comme la Loi sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information. Dans le cadre de ses fonctions, la GRC partage constamment des renseignements avec ses partenaires nationaux et internationaux afin de pouvoir protéger efficacement la sécurité des Canadiens. En confirmant que la GRC a fourni un renseignement précis à un autre organisme dans une enquête donnée, on pourrait compromettre l'intégrité de cette enquête et peut-être même d'autres enquêtes, sans mentionner les atteintes à la vie privée des personnes concernées.

    Par ailleurs, en tant que corps policier qui collabore avec des organismes internationaux d'application de la loi et du renseignement, la GRC doit être en mesure de préserver sa réputation de protéger non seulement les enquêtes en cours, mais également les renseignements sensibles qu'elle reçoit d'autres États. Si elle ne peut demeurer irréprochable à cet égard, des États pourraient choisir de ne pas communiquer des renseignements importants au Canada. Cela nuirait gravement à notre capacité d'assurer la sécurité des Canadiens.

    Pour cette raison, je le répète, je ne parlerai pas d'opérations policières en particulier. Il serait inapproprié de le faire, et ce ne serait ni dans l'intérêt du public ni dans celui de la personne visée. Depuis toujours, c'est la clef du succès des interventions policières.

    Je peux vous confirmer que la GRC n'a pas participé à la décision qu'ont prise les autorités américaines d'arrêter et de déporter M. Arar. Les autorités américaines ont agi de leur propre chef, conformément à leurs lois nationales. De plus, la GRC n'a jamais laissé entendre aux autorités américaines que M.  Arar devait être déporté vers la Syrie. Voilà les faits.

    Monsieur le président, cela vient conclure ma déclaration préliminaire. J'aimerais remercier le comité de m'avoir invité à comparaître, et je suis prêt à répondre à vos questions.

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Nous allons débuter

[Traduction]

    par une question et une période de réponse. Monsieur Day, vous pouvez commencer.

+-

    M. Stockwell Day: Merci, monsieur le président.

    Le ministre a dit différentes choses à propos des accusations de partage de renseignements entre la GRC et l'organisme du renseignement américain. Il a dit qu'il n'y aurait pas d'enquête. Monsieur le président, j'ai plutôt l'impression que l'enquête est déjà commencée. Ce n'est peut-être pas une enquête de plusieurs millions de dollars, mais elle est déjà commencée. Les Canadiens veuillent savoir ce qui se passe, et nous avons des questions à poser à ce sujet.

    Pour ce qui est du partage d'information, s'il y a eu... soyons clairs. La loi que je cite dicte que le SCRS et la GRC sont autorisés à partager des renseignements avec des gouvernements et des organismes étrangers. Ils ont le droit de le faire. Nous devons savoir s'ils ont partagé des renseignements portant sur de véritables problèmes de sécurité... Nous n'avons pas besoin de savoir de quoi il s'agissait. Monsieur le président, le ministre, en disant qu'il ne révélera rien de l'enquête, nous a déjà dit des choses. Il a déjà déclaré qu'il n'y avait pas eu de demande directe de déportation, donc il a déjà parlé de cette enquête.

    Le ministre choisit ses mots avec la plus grande prudence, comme l'a fait le sous-ministre. Il répète sans relâche que la GRC n'a pas participé à la décision de déporter M. Arar. C'est clair, mais ce n'est pas ce que nous lui demandons. La GRC a-t-elle échangé des renseignements sur des inquiétudes à propos de M. Arar? C'est important que nous le sachions pour diverses raisons. L'une d'elles et non la moindre est le fait que s'il y a eu partage d'information, qu'il y avait des inquiétudes en matière de sécurité, et que le premier ministre est intervenu, même si ce n'est qu'au moyen timide et inefficace de sa lettre à « cher Jean », il y a eu un bri de communication entre le premier ministre et les services de sécurité. Nous voulons savoir s'il y a eu partage de renseignements à ce propos. Voilà pourquoi c'est si important.

    De même, qu'il y ait eu partage de renseignements ou non, pourquoi le ministre laisse-t-il planer le doute qu'il pourrait exister des éléments au sein de la GRC qui agissent en justiciers solitaires? Soit lui, soit son cabinet laisse planer le doute. C'est une tache au dossier de la GRC et de son bon travail, et c'est une tache pour le cabinet du ministre. S'il y a des éléments au sein de la GRC qui agissent en justiciers solitaires, comment le solliciteur général intervient-il pour mettre un terme à tout cela? Si rien de tel n'est vrai, finira-t-il par expliquer clairement au public canadien qu'il n'y a pas d'éléments au sein de la GRC qui agissent en justiciers solitaires?

  +-(1210)  

[Français]

    Troisièmement, que M. Arar soit coupable d'un crime ou non, une chose est claire: ses droits fondamentaux ont été bafoués. Pourquoi le gouvernement fédéral n'a-t-il pas demandé d'excuses de la part du gouvernement syrien?

[Traduction]

    Ma dernière question porte sur le partage de renseignements.

    Dans le contexte de ce bris de communication entre le gouvernement et les services de sécurité, cinq pays, cinq de nos alliés, ont mis le groupe des Tigres tamouls hors la loi. Pas plus tard qu'hier, les États-Unis ont répété que les activités de ce groupe étaient interdites. Ce groupe a revendiqué la responsabilité, entre autres, de l'attentat kamikaze d'un premier ministre d'une nation amie, l'Inde, et nous refusons toujours de l'inscrire à notre liste. Est-ce que le SCRS ou la GRC a recommandé au gouvernement d'interdire ce groupe?

+-

    Le président: Il y a un certain nombre de questions. Vous pouvez choisir à laquelle vous désirez répondre en premier. C'est libre à vous.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

    Pour répondre à la dernière question de M. Day—et je le lui ai dit à maintes reprises à la Chambre—le processus d'inscription à la liste est très clair. C'est un processus continu, et lorsque nous interdisons des groupes en vertu de la Loi antiterroriste, nous le faisons exclusivement sur la base de renseignements criminels ou de sécurité.

    Tout ce que je peux vous dire à cet égard, c'est que c'est un processus continu. Je n'ai jamais confirmé ni infirmé que nous examinions la situation d'un groupe x et je ne le ferai pas aujourd'hui.

    Je tiens à être très clair : il n'y a aucun élément au sein de la GRC qui agit en justicier solitaire. Je le répète : il n'y a aucun élément au sein de la GRC qui agit en justicier solitaire.

    Pour ce qui est de votre première question—et je vais demander à Garry de compléter ma réponse—la nature même de l'application de la loi et de la protection de la sécurité, particulièrement depuis le 11 septembre, consiste de façon générale à rassembler et à échanger des renseignements avec les autres pays et les autre organismes d'application de la loi. C'est inhérent à notre mode de protection de la sécurité nationale des Canadiens et des Nord-Américains et en fait de nos alliés dans le monde.

    Je suis tout disposé à parler des progrès enregistrés dans l'échange de renseignements avec nos voisins du sud. Nous avons établi douze équipes intégrées d'application de la loi à la frontière. Ainsi, les forces policières locales, la GRC, les autorités locales américaines et le FBI travaillent tous ensemble sur le terrain afin de mieux veiller à la sécurité des Nord-Américains.

    En tant que solliciteur général, il serait absolument inconvenable que j'entre dans les détails opérationnels de la GRC.

    Je vais céder la parole à M. Loeppky.

  +-(1215)  

+-

    Sous-commissaire Garry Loeppky (opérations, Gendarmerie royale du Canada, ministère du Solliciteur général): Je vous remercie infiniment, monsieur le ministre.

    Même avant le 11 septembre, dans toutes nos enquêtes, qu'elles concernent le crime organisé ou la sécurité nationale, le renseignement et l'information étaient l'unité de base de notre travail. Notre objectif, de toute évidence, est la sécurité du Canada et des Canadiens.

    Nous partageons des renseignements en vertu des protocoles et des lois pertinents en vigueur et nous nous attendons à un partage ou à un échange réciproque. Nous avons besoin de l'aide d'autres pays pour mener nos enquêtes et nous nous attendons à ce que les leurs soient aussi efficaces que les nôtres.

    Il importe que le comité comprenne bien que la divulgation de détails sur une enquête en cours, qu'elle porte sur le crime organisé ou la sécurité nationale, peut compromettre les enquêtes en cours ou les droits à la protection des renseignements personnels des personnes qui sont identifiées et véritablement miner notre crédibilité aux yeux des États étrangers qui partagent des renseignements avec nous. Nous devons donc être bien conscients que la crédibilité du Canada est en jeu, de même que la crédibilité de notre aptitude à effectuer des enquêtes efficaces en matière de sécurité nationale.

[Français]

+-

    Le président: Madame Lalonde, s'il vous plaît.

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci.

    Merci, monsieur le solliciteur général. La question la plus importante en ce moment--il y en aura d'autres à poser plus tard--, c'est de savoir quelle a été la contribution de la GRC qui a fait que les États-Unis ont déporté Maher Arar vers la Syrie. Dans le dossier rendu disponible par le comité d'appui à Maher Arar, il est clair que ce dernier, avant son départ pour la Tunisie et son retour, a été, je dirais, suivi d'une certaine manière par la GRC. Lui qui est ici, qui a travaillé aux États-Unis avec des permis de travail sans aucun problème et qui a voyagé beaucoup, a été arrêté plus d'une fois après le 11 septembre. Par exemple, à Ottawa, on lui a pris son ordinateur, pensant qu'il avait acheté l'appareil aux États-Unis.

    Je passe les faits parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais une chose est certaine, c'est que quand il a voulu, avec un avocat, contacter quelqu'un qui était venu chez lui pendant un de ses voyages, il n'a jamais eu de réponse à la lettre d'avocat, il n'a jamais rencontré la GRC, d'après les faits que j'ai ici.

    Monsieur le solliciteur général, vous avez dit en anglais que la GRC:

[Traduction]

    « did not at any time suggest ... »

[Français]

    En français, vous dites que la GRC n'a suggéré a aucun moment que M. Maher Arar soit déporté. Alors, vous ne dites pas que les faits que vous avez transmis ont pu être à l'origine de cela, et le fait que vous insistez sur la collaboration que vous avez eue avec les États-Unis donne à penser qu'il y a effectivement eu un échange d'information, dont M. Arar, lui, n'a jamais eu connaissance. C'est extrêmement troublant pour tous les autres citoyens d'autres origines et aussi pour des citoyens qui seraient susceptibles d'avoir, dans un quelconque dossier, quelque chose qui pourrait être transmis aux États-Unis. Alors, on a besoin d'explications sérieuses là-dessus.

    D'abord, je réaffirme que la GRC a envoyé de l'information et que, quand vous dites qu'elle n'a pas suggéré, cela confirme qu'elle a envoyé des informations, mais que ce n'est pas elle qui a pris la décision. C'est ce que vous dites.

  +-(1220)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Non, ce n'est pas ce que je dis. En fait, je l'ai dit dans mon exposé et je crois que M. Proulx l'a déjà dit lui aussi devant le comité : la GRC n'a pas participé à la décision prise par les autorités des États-Unis—je veux être très clair—d'arrêter et de déporter M. Arar et n'a jamais laissé entendre aux autorités des États-Unis que M. Arar devait être déporté vers la Syrie. C'est ce que j'ai dit.

    Pour répondre à une question qui a été posée plus tôt, j'ai parlé du partage de renseignements en général, du point de vue de notre capacité d'effectuer notre travail et d'assurer l'application de la loi dans le domaine de la sécurité nationale. Je crois que les membres du comité doivent être prudents, parce qu'au Canada, notre système se fonde sur la présomption d'innocence. C'est la base de notre système. Je ne peux toutefois pas me prononcer sur les façons de faire des autres pays.

    Comme je l'ai déjà souligné, on m'a assuré que la GRC n'avait pas participé à la décision prise par les autorités des États-Unis à cet égard.

    Vouliez-vous ajouter quelque chose?

+-

    S.-comm. Garry Loeppky: Pour reprendre une observation sur les communications avec des personnes, j'aimerais vous donner une réponse générale.

    Dans le cadre de son mandat de fonction publique, la GRC communique avec une foule de gens, qu'ils s'agisse de plaignants qui font appel à nos services, de témoins ou de victimes d'un crime. Il est donc primordial d'admettre que nous nous entretenons avec des gens sur un vaste éventail de questions, et il nous faut certainement être très prudents lorsque nous évaluons l'intérêt pour le public de divulguer des détails de n'importe quelle enquête avant qu'une poursuite criminelle ne soit intentée.

    Nous faisons enquête sur beaucoup de choses au Canada. C'est un fait accepté que nous ne divulguons rien sur l'identité des personnes visées par l'enquête avant qu'il n'y ait divulgation publique devant un tribunal.

[Français]

+-

    Le président: Merci.

    Madame Marleau, s'il vous plaît.

[Traduction]

+-

    L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Monsieur, en règle générale, lorsqu'une chose a l'air mauvais et qu'elle sent mauvais, elle est mauvaise, et cette affaire sent mauvais. Les droits de l'un de nos citoyens ont littéralement été bafoués. Il a été emprisonné sans presque aucune possibilité de communication pendant au moins deux semaines aux États-Unis, puis il a été envoyé en Jordanie, sans pouvoir communiquer avec qui que ce soit encore une fois—nous ne savons pas exactement ce qui lui est arrivé à ces endroits—et finalement, il a été envoyé en Syrie. Nous voulons savoir, si vous pouvez aller au fond des choses, si vous pouvez nous confirmer que le partage de renseignements n'a pas donné lieu à une violation flagrante des droits démocratiques de l'un de nos citoyens. Nous voulons le savoir.

    J'aimerais également savoir si vous avez suffisamment confiance en votre ministère pour croire qu'il vous dira la vérité. J'ai déjà été ministre, et il arrive qu'on dise au ministre ce que l'on croit qu'il doit savoir et non ce qui se passe réellement. Pouvez-vous être certain de pouvoir aller au fond des choses?

    Je sais que vous ne voulez pas d'enquête publique. Toutefois, nous pourrions devoir en tenir une si nous voulons aller au fond des choses.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Comme je l'ai déjà dit, le commissaire de la GRC m'a assuré—et je vous ai présenté les faits—ne pas avoir participé à la décision prise par les autorités américaines. En ma qualité de solliciteur général, je crois que la GRC a respecté son mandat comme il se doit, ainsi que les lois du Canada. C'est ce qui se dégage en gros. J'ai la conviction que la GRC a respecté son mandat et les lois du Canada.

    Nous avons déjà parlé du partage de renseignements en général, dans l'intérêt de la sécurité nationale et de l'application de la loi au Canada, en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde. Je crois que nous avons beaucoup avancé au cours des dernières années pour améliorer le partage de renseignements.

    Je dirais que je suis un peu... je n'oserais pas dire fâché, mais à tout le moins ébranlé par votre affirmation, parce que je crois sincèrement que nous sommes chanceux dans notre pays de jouir des droits et des valeurs démocratiques qui prévalent ici. Jusqu'à maintenant, la GRC a joué un rôle de premier plan pour aider le Canada à se mériter le respect qu'on lui voue pour ses valeurs et la responsabilité dont il fait preuve dans ses activités au Canada et avec ses partenaires dans le monde.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Merci.

    Nous allons passer à M. Clark, s'il vous plaît.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Merci, monsieur le président.

    Monsieur le ministre, j'ai quelques questions plutôt précises qui ne concernent pas les opérations et auxquelles les témoins pourront répondre brièvement.

    Premièrement, après la détention de M. Arar, le 26 septembre 2002, un membre de la GRC aurait-il eu une conversation avec un représentant du gouvernement américain, qui lui aurait demandé si M. Arar risquait de faire l'objet d'accusations s'il rentrait au Canada, question à laquelle le représentant de la GRC aurait répondu qu'il ne devrait pas faire l'objet d'accusations?

+-

    L'hon. Wayne Easter: C'est une question opérationnelle à laquelle je ne peux répondre.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Après avoir dit à la Chambre des communes que vous n'aviez absolument pas participé à cette décision—que le Canada n'avait fourni aucun renseignement utilisé par les États-Unis—de quel droit refusez-vous de répondre à une question aussi simple devant le comité parlementaire, soit la question très simple que je viens de vous poser?

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je ne refuse pas de fournir des renseignements à ce comité, monsieur Clark, de quelque façon. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois que si je confirmais ou infirmais quels renseignements le gouvernement détient et avec qui nous les partageons, je mettrais en péril l'aptitude des organismes canadiens à s'acquitter de leur mandat. Je suis certain...

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, permettez-moi de demander au ministre s'il nie qu'une telle conversation a eu lieu.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Clark, s'il vous plaît. Il ne faut pas s'énerver. On laisse le ministre répondre et ensuite, vous recommencez.

    Monsieur le ministre.

[Traduction]

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je veux qu'il soit très clair aussi, monsieur le président, que je n'accepte absolument pas les prémisses de la première partie de la question de M. Clark. Ce que j'ai dit très clairement et que M. Proulx a dit lui aussi lorsqu'il a comparu devant le comité—je l'ai également répété à la Chambre à diverses reprises—c'est que la GRC m'a assuré qu'elle n'avait pas participé à la décision prise par les autorités des États-Unis qui ont arrêté et déporté M. Arar. Un point c'est tout.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Je remarque, monsieur le président, que...

+-

    L'hon. Wayne Easter: C'est un fait, monsieur le président. M. Clark n'aime peut-être pas ces faits, mais ce sont les faits.

+-

    Le président: Monsieur Clark.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Je remarque, monsieur le président, que le ministre dit maintenant que la GRC « l'a assuré »—c'est un changement dans sa litanie—et qu'il en attribue la responsabilité à ses fonctionnaires. Il a répété encore une fois que « la GRC n'a pas participé ». J'ai une question toute simple : soutient-il que les États-Unis n'ont utilisé aucun renseignement fourni par le Canada pour prendre leur décision?

+-

    Le président: Monsieur Easter.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Monsieur le président, j'ai déjà dit que je n'entrerais pas dans les détails opérationnels ni ne parlerais des échanges opérationnels de renseignements.

    Si M. Loeppky veut ajouter quelque chose, il peut le faire.

+-

    Le président: Monsieur Loeppky.

+-

    S.-comm Garry Loeppky: Je vous remercie infiniment, monsieur le président.

    J'aimerais seulement vous rappeler—sans parler d'un cas en particulier—la nature de la coopération internationale qui doit exister dans toute enquête.

    La réputation du Canada et sa capacité de mener des enquêtes efficaces dépend de ses bons partenariats et de ses bonnes relations. Dans bien des cas, nous partageons des renseignements. Je ne parle pas d'un cas en particulier, mais il est primordial que ce type de relation existe. Nous respectons les paramètres d'échange de renseignements et nous respectons certainement les paramètres des autres pays sur la divulgation lorsqu'ils partagent des renseignements avec nous. J'estime important d'admettre que lorsqu'on parle d'une enquête en particulier et qu'on entre dans les détails, on risque de compromettre des enquêtes en cours ou des sources, et c'est vraiment ce qui nuit le plus à notre capacité de protéger efficacement la sécurité nationale et de lutter contre le crime organisé.

  +-(1230)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Loeppky.

    Nous allons maintenant céder la parole à M. Eggleton. Allez-y.

+-

    L'hon. Art Eggleton: Messieurs, nous avons certes établi, comme vous l'avez répété à maintes reprises, monsieur le ministre, que la GRC n'a rien eu à voir avec la décision des Américains de déporter M. Arar en Syrie. Mais, de toute évidence, des informations ont été divulguées, et doute que vous nous renseigniez sur ce qui s'est dit exactement, même si j'aimerais bien le savoir. Pouvez-vous toutefois nous indiquer si vous connaissez la teneur exacte ou approximative des renseignements transmis aux autorités américaines?

    J'aimerais aussi savoir si M. Arar fait actuellement l'objet d'une enquête. Si vous avez fourni aux Américains des indications qui les ont amenés à prendre une telle décision, vous devez nourrir certains soupçons à l'égard de M. Arar. Alors, y a-t-il enquête à son sujet? J'estime que nous devrions au moins savoir cela.

    Enfin, que connaissez-vous des raisons pour lesquelles M. Arar a été déporté en Syrie? Vous avez parlé de la coopération qui prévaut entre le Canada et les États-Unis sur ces questions; je présume donc qu'il y a dû avoir échange d'informations. Qu'en est-il exactement?

+-

    Le président: Monsieur Easter.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

    Je vais céder la parole à Garry dans un instant, mais je crois qu'il convient d'abord de faire un petit retour en arrière, monsieur Eggleton. Il faut penser aux efforts qu'ont déployés le gouvernement du Canada, le ministère et le ministre des Affaires étrangères, l'épouse de M. Arar et le premier ministre pour que M. Arar revienne au Canada. Ce sont des éléments qu'il ne faut pas perdre de vue. On parle ici d'un effort collectif consenti par le Canada en tant que nation, à partir de différentes sources, pour assurer le retour au pays de M. Arar.

    Pour ce qui est des détails, je pourrais vous expliquer la situation comme suit. Si je confirmais ici, ou devant toute autre tribune, que des renseignements ont effectivement été transmis, c'est comme si j'admettais de facto qu'il y a enquête policière. Ce serait exactement cela : une admission de facto qu'il y a enquête de police.

    Un député: Non.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Vous conviendrez avec moi qu'il serait tout à fait inapproprié qu'un solliciteur général confirme publiquement que la GRC fait enquête. Je ne m'ingère pas dans les activités de la GRC.

    Voulez-vous ajouter quelque chose, Monsieur Loeppky?

+-

    Le président: Avez-vous des commentaires?

+-

    S.-comm. Garry Loeppky: Je tiens seulement à confirmer que le ministre n'est pas mis au courant des détails particuliers aux différentes activités pour de multiples raisons que vous comprendrez tous, j'en suis persuadé. Par ailleurs, il est important de souligner que l'on ne peut pas dire si un individu fait ou non l'objet d'une enquête sans aller à l'encontre de son droit à la vie privée et, plus important encore, de l'intérêt public des Canadiens. Si on commençait à annoncer qui est visé ou non par telle ou telle enquête, cela compromettrait grandement la confiance du public à l'égard de l'indépendance de nos enquêtes criminelles.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

+-

    L'hon Art Eggleton: J'ai demandé aux deux témoins de nous dire ce que leur dialogue avec les Américains leur avait appris au sujet du processus suivi et des motifs de la déportation. Cela n'a rien à voir avec le fait que cet individu fasse ou non l'objet d'une enquête. Qu'est-ce que les Américains, avec lesquels vous discutez beaucoup, vous ont dit au sujet des raisons de la déportation en Syrie?

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je ne peux vraiment pas répondre à cette question, monsieur Eggleton.

  +-(1235)  

+-

    L'hon Art Eggleton: Pourquoi?

+-

    L'hon. Wayne Easter: Parce que je dois m'en tenir à ma première réponse à l'effet que les États-Unis ont pris cette décision en fonction de leurs propres lois, sur leur propre territoire, et qu'une fois cette décision prise, le gouvernement du Canada a tout mis en oeuvre pour ramener M. Arar au pays. Si vous comparaissiez devant un comité du Sénat ou du Congrès des États-Unis, votre question serait peut-être plus pertinente.

+-

    Le président: Merci.

    Nous allons passer la parole à M. Robinson, mais je veux tout d'abord rappeler aux membres qu'un vote est prévu à la Chambre dans 10 minutes. Si vous êtes tous d'accord, nous resterons ici pour autant que l'opposition le fasse aussi, et nous demanderons à deux députés libéraux de quitter la salle. Nous assurerons ainsi un pairage équitable pour le vote en Chambre.

    Monsieur Robinson, je vous en prie.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président.

    J'arrive difficilement à croire que le ministre et M. Loeppky parlent de l'importance de préserver les relations entre le Canada et les États-Unis, alors même que les autorités américaines ont traité Maher Arar, un citoyen canadien, avec le plus profond mépris. Les Américains ont fait fi du droit international et ils n'ont pas donné suite aux demandes d'information des Canadiens; et voilà que nous devrions nous préoccuper de leur réaction dans ce dossier.

    Monsieur le ministre—et je m'adresse directement au solliciteur général—, les Canadiens veulent un ministre, un solliciteur général, qui soit chien de garde des droits des citoyens canadiens comme Maher Arar. Mais, on voit plutôt aujourd'hui un ministre qui fait le gentil toutou pour la GRC et le SCRS, et c'est tout simplement épouvantable. Il n'y a pas d'autre mot, épouvantable.

    Le fait est que le ministre a déclaré, en juillet dernier, qu'un certain nombre d'individus pouvaient prétendre parler au nom d'un organisme et que ce n'était certainement pas ce que souhaitait son bureau. Quoi qu'il en soit, Gar Pardy, qui vient de prendre sa retraite à titre de chef des affaires consulaires aux Affaires étrangères, notre principal représentant consulaire donc, a déclaré ce qui suit :

    Toutes les fois que nous avons parlé aux Américains, ils nous ont dit que le problème était à Ottawa et qu'ils n'avaient agi qu'en fonction des informations qui provenaient d'ici.

    Souvenons-nous aussi de ce que l'ambassadeur américain, Paul Cellucci, a déclaré :

    M. Arar est bien connu des forces de l'ordre au Canada qui comprennent bien pourquoi nous traitons ce cas de cette façon et qui ne se réjouiraient pas de le voir rentrer au pays.

    Et rappelons que l'ambassadeur américain a aussi déclaré : « Je pense que vous feriez bien de relancer vos autorités locales sur cette question », lorsqu'il s'est agi de déterminer si la GRC était impliquée ou non.

    Je veux donc poser directement la question au ministre : le ministre a-t-il donné suite à sa propre hypothèse voulant que des éléments indisciplinés au sein de la GRC aient pu transmettre des renseignements aux autorités américaines? Le ministre a-t-il poussé plus loin cette affaire, et est-il convaincu que les choses ne se sont pas passées ainsi?

+-

    Le président: Monsieur le ministre, à vous de décider, parce que la question est à la limite du permissible, étant donné que M. Cellucci...

+-

    L'hon. Wayne Easter: Monsieur le président, je rejette catégoriquement le point de vue de M. Robinson concernant mon travail ou celui de mes prédécesseur à titre de solliciteur général.

    Comme tous les autres membres du conseil exécutif, je m'acquitte de mes responsabilités avec le plus grand sérieux, surtout lorsqu'il s'agit de protéger les intérêts des Canadiens. Le retour de M. Arar au Canada l'illustre bien à mon avis.

    J'ai parlé précédemment des efforts considérables que nous avons déployés pour mieux protéger les Canadiens et renforcer la sécurité nationale. Sachez qu'une représentante de l'ambassade des États-Unis, Beth Poisson, avait indiqué que M. Arar se trouvait en sol américain lors de son arrestation et que ce sont les autorités américaines qui avaient pris seules cette décision.

+-

    M. Svend Robinson: Je vous ai posé une question au sujet des éléments indisciplinés. Avez-vous déterminé si des membres de la GRC avait effectivement communiqué des renseignements aux États-Unis?

+-

    L'hon. Wayne Easter: En réponse à une question posée tout à l'heure par M. Day, je crois, j'ai expliqué très clairement, et j'insiste là-dessus, monsieur le président, qu'il n'y avait pas d'élément indiscipliné au sein de la GRC.

    La GRC est l'un des organismes d'application de la loi les plus respectés au monde...

+-

    M. Svend Robinson: Y a-t-il eu...

+-

    L'hon. Wayne Easter: ...et la GRC est un réel actif pour notre pays.

+-

    M. Svend Robinson: Monsieur le président, puis-je poser la question : le ministre a-t-il...

+-

    Le président: Non. Vous l'avez déjà interrogé trois fois pour obtenir trois fois la même réponse. Poser la question une quatrième fois n'y changera rien.

+-

    M. Svend Robinson: J'ai une autre question, monsieur le président.

+-

    Le président: Si c'est le cas, allez-y.

+-

    M. Svend Robinson: Je cherche à obtenir une réponse.

+-

    Le président: Posez votre question sans préambule.

  +-(1240)  

+-

    M. Svend Robinson: Monsieur le président, ma question concerne l'ambassadeur américain, Paul Cellucci, qui a déclaré que les États-Unis avaient obtenu des renseignements du Canada. Le ministre lui a-t-il demandé sur quoi se fondait cette déclaration?

    Monsieur le président, je vais présenter une motion à cet égard au moment opportun, mais compte tenu du fait que le ministre fait de l'obstruction et qu'il refuse de répondre aux questions, je propose que le comité convoque l'ambassadeur Paul Cellucci pour lui demander exactement quels renseignements ont été communiqués.

    Je demande au ministre s'il a posé ces questions à l'ambassadeur américain.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Monsieur le président, je ne fais pas d'obstruction. J'ai indiqué très clairement que je ne me parlerai pas des opérations de la GRC. Le sous-commissaire qui m'accompagne a expliqué très clairement, comme moi, pourquoi il ne conviendrait pas de traiter des opérations de la GRC, pour des raisons de confidentialité et bien d'autres encore.

+-

    M. Svend Robinson: Avez-vous rencontré l'ambassadeur?

+-

    Le président: Nous passons à M. Harvard.

+-

    M. Svend Robinson: J'invoque le Règlement, monsieur le président.

+-

    Le président: Je regrette, mais le rappel au Règlement n'est pas fondé. Votre temps est écoulé. Vous avez interrogé le ministre et il vous a répondu.

+-

    M. Svend Robinson: Il a refusé de répondre à ma question.

+-

    Le président: Non, il n'a pas refusé. Il vous a donné une réponse qui ne vous satisfait pas. Vous estimez que ce n'est pas une réponse, mais c'est votre opinion personnelle.

    Passons maintenant à M. Harvard.

+-

    M. Stockwell Day: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Nous avons un vote maintenant... [Note de la rédaction : Inaudible]. C'est un vote assez important.

+-

    Le président: Monsieur Day, je regrette, mais si vous voulez voter, vous pouvez le faire. C'est à vous de décider, mais vous avez le droit de poser une question. Vous êtes libre de partir une fois cela fait. M. Obhrai a le loisir, lui aussi, de poser ou non une question. Mais vous pouvez partir. Vous avez posé une question, et je crois qu'il est juste pour les autres membres de l'opposition et pour les Libéraux de pouvoir poser leurs questions également.

    Monsieur Harvard.

+-

    M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.): Merci, monsieur le président,

    Wayne, la dernière fois que je vous ai posé une question, vous étiez président du Syndicat national des cultivateurs. On a épandu beaucoup de fumier depuis.

    Vous avez dit, Wayne, ne pas vouloir aborder la question des opérations policières, alors nous n'irons pas dans cette direction. Toutefois, vous êtes non seulement un ministre fédéral, mais également un être humain, à qui je vais poser trois questions. N'êtes-vous pas exaspéré par les Américains? Ils ont pris un citoyen canadien et l'ont envoyé dans un goulag syrien. Ils ne l'ont pas envoyé dans un pays démocratique, ni au Canada où il existe un système de justice de bonne réputation. Ils l'ont envoyé dans un goulag syrien. N'êtes-vous pas furieux contre les Américains?

    Deuxièmement, à ce qu'on sache, cet homme est innocent. Il n'a pas été déclaré coupable de quoi que ce soit, mais il a été confiné à ce goulag syrien pendant un an. En tant qu'être humain, Wayne Easter, n'êtes-vous pas abattu par cette situation? Pouvez-vous me regarder droit dans les yeux et me dire que le système fonctionne? Cet homme a été emprisonné pendant un an, même s'il est innocent et n'a pas été déclaré coupable de quoi que ce soit. Pouvez-vous vraiment dire que le système fonctionne?

    Troisièmement, j'aimerais savoir dans quelle mesure vous êtes curieux, en tant qu'être humain, parce que cette affaire doit être élucidée. Avez-vous posé toutes les questions qui s'imposent? Êtes-vous certain en votre âme et conscience que vous avez reçu une réponse à chacune de vos questions et que vous pouvez dire aux Canadiens « J'ai posé toutes les questions et je suis certain qu'aucune faute n'a été commise? »

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je crois avoir été très clair dès le début, John, comme l'a été M. Proulx lorsqu'il a comparu devant votre comité. Le commissaire de la GRC m'a assuré que la GRC n'avait pas participé à la décision prise par les autorités américaines. Vous avez peut-être déjà entendu cette remarque.

    J'éprouve bien sûr de la compassion envers M. Arar et sa famille pour ce qui lui est arrivé en tant que personne. Comme l'a toutefois précisé l'ambassadeur américain, l'arrestation a eu lieu aux États-Unis par suite d'une décision des autorités américaines. Le gouvernement du Canada a pris de nombreuses mesures par l'entremise du ministère des Affaires étrangères, jusqu'au niveau du premier ministre, pour ramener M. Arar au Canada, où il se trouve maintenant.

+-

    M. John Harvard: Avez-vous dit aux Américains, Wayne, que ce n'était pas une façon de traiter un citoyen canadien? Nous sommes partenaires en Amérique du Nord. Nous partageons des renseignements. Ce n'est pas une façon de traiter un citoyen canadien.

    À mon avis, nous devrions nous insurger contre Washington et dire aux Américains : « N'agissez plus jamais ainsi, sinon les bons agents de la GRC, sur lesquels vous dépendez, ne collaboreront plus avec vous ».

  +-(1245)  

+-

    L'hon. Wayne Easter: Votre comité pourrait faire cette recommandation, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

    La parole est maintenant à M. Obhrai.

+-

    M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais revenir sur bon nombre des questions qui ont été posées.

    Il y a deux aspects importants ici. D'abord, tout le monde se demande pourquoi M. Arar a été arrêté. Qu'est-il arrivé?

    Vous dites que pour des raisons personnelles, vous ne pouvez... Je peux vous dire que, d'après vos réponses, les membres du comité et bien d'autres personnes intéressées ne doutent plus que la GRC ait été impliquée dans cette affaire.

    En deuxième lieu, la façon dont vous avez traité ce dossier lorsque M. Arar était en Syrie laisse croire que vous abandonnez à leur sort les personnes qui ont deux nationalités, dont la plupart font partie des groupes minoritaires. Vous traitez les personnes qui ont une double nationalité, dont la nationalité canadienne, comme des citoyens de deuxième ordre.

    Quant aux mesures que vous avez prises par la suite... il a fallu attendre un an avant que M. Arar ne sorte de prison. Vous répétez sans cesse que le gouvernement a fait ceci et cela, mais tout le monde sait bien que c'est l'épouse de M. Arar qui a pris les devants, qui s'est battue pour lui et qui a fait éclater cette affaire au grand jour. C'est à ce moment-là seulement que le gouvernement a davantage cherché à faire libérer M. Arar.

    Comment pouvez-vous nous assurer que les personnes ayant deux nationalités ne sont pas traitées comme des citoyens de deuxième ordre?

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Monsieur le président, d'autres témoins ont comparu devant votre comité et, me semble-t-il, ont été très clairs à ce sujet.

+-

    M. Deepak Obhrai: J'ai été très clair également.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Les personnes qui jouissent de la double nationalité ne sont pas traitées comme des citoyens de deuxième ordre au Canada. Le comité n'aime pas que je répète les faits, alors je ne vais pas les répéter, monsieur le président, mais les faits sont les faits.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Ce ne sont pas les faits. Ce n'est pas toute la vérité.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Ce sont les faits, monsieur Clark.

    Lorsqu'un représentant des Affaires étrangères, M. Sigurdson, a comparu devant votre comité, il a déclaré ceci :

Je peux vous dire que nous avons 3 000 prisonniers incarcérés dans le monde. C'est aux États-Unis, dont j'ai parlé plus tôt, que nous en avons le plus : 2 244.

    À mon avis, le gouvernement déploie tous les efforts possibles—en appliquant, dans certains cas, la Loi sur le transfèrement des délinquants—pour garantir que les intérêts des citoyens canadiens sont en fait protégés. Nous faisons des efforts extraordinaires pour garantir le rapatriement de ces personnes, comme dans cette affaire.

    Je n'y peux rien si vous n'acceptez pas les faits que je vous ai présentés.

+-

    M. Deepak Obhrai: Je ne suis pas d'accord.

+-

    Le président: Nous donnons la parole à Mme Carroll.

+-

    Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): En fait, monsieur le président, les questions que j'allais poser au ministre et au commissaire adjoint, sur l'échange d'informations au quotidien, ont toutes deux été, à peu de choses près, abordées.

    Je laisse la parole à M. Cotler.

+-

    Le président: Monsieur Cotler.

+-

    M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

    La question que je vais poser au ministre est la suivante. Maintenant que Maher Arar a, heureusement, été retourné au Canada, deux questions fondamentales restent sans réponse et ce sont deux questions principales attachées à ce cas plutôt kafkaïen. La première concernait le rôle des autorités américaines dans le processus de déportation de M. Arar vers la Syrie. La deuxième concerne la responsabilité des organismes canadiens de sécurité dans une démocratie.

    En ce qui a trait à la première question, il est évident que le gouvernement des États-Unis a enfreint ses obligations internationales envers le Canada et Maher Arar aux termes de la convention de Vienne : premièrement, en n'informant pas le Canada qu'il détenait un citoyen canadien; et deuxièmement, en ne dévoilant pas que les citoyens canadiens ont des droits consulaires en vertu du traité. De même, les États-Unis ont violé leurs propres lois et politiques nationales à deux égards : premièrement, en l'expulsant vers un pays désigné par les États-Unis, comme étant un État qui appuie le terrorisme; et deuxièmement, en l'expulsant vers un pays où, selon les États-Unis, le droit à un procès juste et équitable n'existe pas.

    Une question se pose. Il semble que les États-Unis justifient la déportation de Maher Arar vers la Syrie, en violation, comme je l'ai dit, de leur obligation internationale et de leur politique nationale, en se basant sur des renseignements obtenus auprès des autorités canadiennes. Pour être plus précis, c'est le secrétaire d'État américain, Colin Powell, qui l'a rapporté à notre ministre des Affaires étrangères, Bill Graham. Pour quelle raison le secrétaire d'État américain ferait-il une telle allégation si elle n'était pas vraie? Quelle justification, si il y a en une, les autorités américaines ont-elles donnée, sinon le fait qu'elles avaient reçu des renseignements des organismes canadiens de sécurité pour enfreindre leur loi nationale ainsi que leur droit international? Connaissez-vous une autre raison que celle qu'ils nous ont donnée pour expliquer leur conduite?

  +-(1250)  

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Merci, monsieur le président et merci monsieur Cotler.

    Plusieurs personnalités américaines ont fait des déclarations qui, pour certaines, affirment que les autorités canadiennes chargées de l'application de la loi n'étaient pas impliquées dans la décision d'expulser M. Arar du Canada. Je crois que l'ambassadeur Cellucci a dit la même chose à un moment donné.

    Je ne connais pas les raisons qui ont poussé les États-Unis à prendre cette décision. Ils ont pris cette décision en se basant sur leurs propres lois. Je ne suis pas d'accord avec leur décision et nous l'avons fait savoir clairement par l'entremise d'autres ministres du gouvernement du Canada.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Bergeron.

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, ce qui est troublant dans cette histoire, c'est qu'on a de plus en plus l'impression que la transmission d'information est à sens unique, c'est-à-dire que nous transmettons de l'information aux États-Unis, mais quand vient le temps pour les États-Unis de transmettre de l'information au Canada, cela semble être moins limpide.

    Ce qui me préoccupe et qui me trouble, tout comme ma collègue de Mercier et les collègues autour de la table, c'est d'entendre le solliciteur général et le commissaire nous dire qu'ils ne peuvent pas nous dire non seulement quelle information ils ont transmise, mais ils ne peuvent pas même nous dire s'il y a eu transmission d'information.

    Et pourquoi? Sous quel prétexte ne peut-on pas nous dire cela? On ne peut pas nous le dire parce que cela pourrait nuire à l'enquête, si tant est qu'il y a enquête. Et M. Loeppky nous a même dit que cela pourrait nuire à la crédibilité de la GRC. Est-ce qu'il y a quelqu'un dans cette histoire qui s'est préoccupé de la crédibilité de M. Arar? Est-ce qu'il y a quelqu'un dans cette histoire qui se préoccupe de savoir comment il se sent?

    M. Loeppky a même poussé l'outrecuidance, dirais-je, jusqu'à dire qu'ils veulent protéger les droits constitutionnels de cet individu. Peut-être que la première chose que souhaite cet individu, c'est qu'on lui dise si oui ou non il y a des doutes qui pèsent contre lui. Actuellement, le silence des autorités canadiennes laisse entendre que cet homme a peut-être pu être associé de près ou de loin à une organisation terroriste. Alors, il faut que le gouvernement dise s'il y a eu transmission d'information, parce que tout indique qu'il y a bel et bien eu transmission d'information, et le silence dans lequel se murent les autorités canadiennes tend à le confirmer. Il y a une délégation qui a rencontré, pas plus tard que le 11 septembre dernier, des représentants de l'ambassade américaine. Les représentants de l'ambassade américaine ont confirmé qu'ils assumaient toute la responsabilité dans la décision d'arrêter et de déporter Maher Arar. Ils ont admis cependant que certaines informations qui leur ont été transmises par le Canada ont justifié leur décision.

    Pourquoi prétendre qu'il n'y a pas d'information qui a été communiquée? Pourquoi ne pas vouloir dire que Maher Arar n'est pas sous enquête? En refusant de le faire, vous confirmez que Maher Arar est bel et bien sous enquête et vous confirmez tous les soupçons que les gens peuvent avoir contre lui. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui se préoccupe, dans ce ministère, de la crédibilité de ce Canadien qu'est Maher Arar?

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

[Traduction]

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je crois, monsieur le président, avoir dit clairement qu'il serait tout à fait inapproprié pour un solliciteur général de confirmer publiquement une enquête menée par la GRC. J'en ai parlé et les déclarations que j'ai faites plus tôt sont au compte rendu. Si dans ce cas, ou dans tout autre cas, je confirmais que des renseignements ont été transmis, cela serait admettre de facto qu'il y a une enquête policière et, cela serait tout à fait déplacé de ma part.

    Je crois que M. Loeppky avait quelques remarques à faire à ce sujet et aussi au sujet d'une des questions précédentes.

  +-(1255)  

+-

    Le président: Monsieur Loeppky, s'il vous plaît.

+-

    S.-comm. Garry Loeppky: Je vous remercie monsieur le président.

    J'ai seulement quelques observations à faire. À la suite des événements du 11 septembre... je voulais simplement préciser que l'échange d'information et la collaboration avec des organisations internationales, dont nous parlons généralement, ne se font pas à sens unique. Nous recevons une somme considérable de renseignements et il est attendu qu'ils ne soient pas divulgués mais aussi que nous devons agir en conséquence et faire preuve de diligence pour répondre aux besoins de la communauté dans son ensemble privilégiant la sécurité publique.

    En parlant des droits constitutionnels il y quelques minutes, je voulais dire que les droits d'un individu à la présomption d'innocence doivent être respectés. Si nous commencions à parler publiquement dans nos communautés à propos d'un suspect quelconque, cela équivaudrait de fait à une violation de ses droits et serait tout à fait inapproprié.

    Je voulais revenir sur un commentaire fait il y a quelques minutes portant essentiellement sur une approche à deux volets à l'égard des citoyens de notre pays. Je tiens à assurer le comité que l'organisation et la GRC accordent la plus haute importance à ce problème, c'est-à-dire que l'impression qu'ont ces communautés que nous sommes insensibles à divers groupes ethniques.

    À la dernière conférence des chefs de police, le thème majeur « changement de visage, faire face au changement » était axé sur la nécessité, pour les services de police, d'être très vigilants en ce qui concerne les aspects du profilage racial et les préoccupations des communautés du Canada dont les services de police ne tiennent pas compte. Je tiens à assurer la communauté que nous accordons la priorité à ce problème et que nous l'abordons au moyen de plusieurs mécanismes, entre autres, notre processus de recrutement et la qualité de nos rapports avec les communautés.

    Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Nous allons terminer par deux petites questions posées par Mme Redman et M. Martin.

    Madame Redman.

+-

    Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

    J'apprécie beaucoup que vous soyez tous deux venus. Il est clair que votre présence tombe à point nommé avec le cas de M. Arar, même si l'on vous attendait pour examiner plusieurs autres cas.

    Monsieur Loeppky, vous avez soulevé un point que je tenais à souligner, c'est-à-dire qu'à la suite des événements du 11 septembre, ces incidents se produiront à maintes et maintes reprises. Je me demande si vous pouvez nous parler, d'une manière plus générale, de ce que nous faisons pour assurer les droits et libertés des Canadiens dans le contexte du droit international, car il est évident qu'une nouvelle situation s'est créée alors que nous luttons contre le terrorisme.

    En outre, est-ce que le point de vue du ministre Easter offre quelque chose de proactif et de constructif que ce comité pourrait entreprendre en plus d'étudier des pays musulmans, n'importe quelle mesure qui assurerait une plus grande sécurité des Canadiens sur la scène internationale?

+-

    Le président: Merci, madame Redman.

    Nous passons à M. Martin. Monsieur Martin, posez votre question s'il vous plaît.

+-

    M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Merci à tous deux d'être venus.

    Nous comprenons entièrement, monsieur le ministre, l'équilibre que vous recherchez, mais, dans le cas de M. Arar les choses ont vraiment mal tourné. Par conséquent, ma question est très simple. C'est un fait que les droits de M. Arar ont été violés aux États-Unis. Voici ma question : pourquoi M. Arar n'a -t-il pas été déporté vers le Canada plutôt que vers la Syrie?

+-

    Le président: Pourriez-vous d'abord répondre à la question de Mme Redman?

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je laisse le soin à M. Loeppky de répondre à la question de Mme Redman, puis je répondrai à celle de Keith.

+-

    Le président: Monsieur Loeppky, s'il vous plaît.

+-

    S.-comm. Garry Loeppky: Immédiatement après les événements du 11 septembre, nous savions qu'il y aurait des problèmes dans la communauté, surtout en raison de la législation supplémentaire adoptée sous la forme du projet de loi C-36. Bien qu'il existe plusieurs moyens de justification de l'utilisation de cette mesure législative, nous nous rendons compte de la nécessité d'une meilleure éducation.

    Nous nous sommes rendus auprès de quelques-unes de ces communautés, la communauté musulmane en Ontario et à plusieurs autres endroits, où nous avons été proactifs au niveau de nos rencontres avec les communautés et de tentatives visant à résoudre leurs problèmes. Je sais, par exemple, que le commissaire a rencontré une communauté de près de 500 personnes à Toronto et a écouté leurs préoccupations; nous avons eu le sentiment qu'ils se sentaient ciblés. Nous reconnaissons que le fait de rencontrer ces communautés et de leur parler représente pour nous un défi permanent.

    Deuxièmement, nous reconnaissons aussi que pour fournir des services de police efficaces, que ce soit dans la communauté musulmane ou dans la communauté chinoise de Richmond, en Colombie-Britannique, notre organisation doit refléter les visages des communautés que nous servons. Aussi, avons-nous pris des dispositions afin d'être plus proactifs dans ce sens et afin que notre organisation reflète les visages de ceux que nous servons.

·  -(1300)  

+-

    Le président: Monsieur le ministre, il y a la question de M. Martin.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Effectivement, nous avons, monsieur Martin, essayé de trouver l'équilibre et je crois que nous avons réussi. Il est indiscutable, comme Garry l'a indiqué, que le monde a bien changé depuis le 11 septembre.

    Mais, nous avons, j'estime, fait de grands progrès au niveau de la collaboration avec des autres pays dans le monde en, comme je l'ai déjà mentionné, formant 12 EIPF. Deux autres EIPF seront bientôt créées suite à l'échange de renseignements de sécurité avec les États-Unis et à nos efforts visant à assurer la sécurité publique et nationale au Canada.

    Je pense sérieusement que l'attaque contre la GRC à ce sujet, est injustifiable.

+-

    M. Keith Martin: La question était : pourquoi M. Arar n'a-t-il pas été déporté vers le Canada plutôt que vers la Syrie?

+-

    L'hon. Wayne Easter: Je pense que, en particulier sur cette question, c'est ce que le comité devrait examiner, mais cela n'est pas le fait des autorités canadiennes. La décision était prise, comme cela était déjà mentionné plusieurs fois par d'autres personnes...

+-

    M. Keith Martin: J'essayais tout simplement de connaître le motif de sa déportation.

+-

    L'hon. Wayne Easter: ...par des Américains sur le territoire américain.

    Nous, en tant que gouvernement du Canada, avions fait tout ce que nous pouvions pour que M. Arar soit retourné au Canada. Il se trouve, aujourd'hui, au Canada et nous sommes très heureux qu'il soit de retour parmi nous. 

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur le ministre.

    Monsieur Robinson.

+-

    M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'invoque le Règlement, je donne avis de la motion suivante. Je crois savoir qu'elle ne peut pas être proposée à cette réunion, mais je veux en donner avis. Puisque nous ne pouvons pas obtenir des réponses du solliciteur général, peut-être pouvons-nous essayer d'obtenir des réponses auprès de l'ambassadeur des États-Unis?

    Je propose que ce comité appelle comme témoin l'ambassadeur des États-Unis au Canada, Paul Cellucci, au sujet du traitement du citoyen canadien Maher Arar par les autorités américaines et au sujet des renseignements qui ont pu être communiqués aux autorités américaines par des membres de la GRC ou du SCRS sur Maher Arar. Je donne avis de cette motion, monsieur le président.

+-

    Le président: Vous donnez avis, et Mme McDonough présentera cette motion à une autre réunion. C'est très bien.

+-

    Mme Aileen Carroll: Y a-t-il eu un changement? Est-ce que Mme McDonough n'est plus membre de notre comité?

+-

    Le président: Non. Mme McDonough est membre à part entière. M. Robinson remplace Mme McDonough ce matin.

+-

    Mme Aileen Carroll: C'est une honte. Elle a beaucoup travaillé dans ce dossier.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Clark.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, le solliciteur général est parti, mais je me demande si nous pouvons lui demander de faire, devant le comité, une déclaration très claire de la compétence législative, en vertu de laquelle, il ne dit pas au Parlement si une remarque faite par un fonctionnaire canadien a entraîné ou non la détention injustifiée et peut-être la torture d'un citoyen canadien.

-

    Le président: Monsieur Clark, le greffier a noté une partie de votre question et nous demanderons une réponse au ministère.

    Merci beaucoup. La séance est levée.