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CHPC Rapport du Comité

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CHAPITRE 6 : CONCLUSION

Quand le Comité a entrepris son étude sur la Politique canadienne du long métrage, Du scénario à l’écran, il voulait aborder deux grands sujets de préoccupation :

 la faible performance, au guichet, des films canadiens dans le marché anglophone;  
 la durabilité de remarquables augmentations de l’auditoire dans le marché canadien francophone. 

Il est très rare qu’une politique bien conçue parvienne à produire des résultats extraordinaires dans un tiers du pays, mais n’apporte pratiquement aucun changement dans les deux autres tiers. Le Comité est bien conscient du fait que le cinéma de langue anglaise fait face à des défis considérables. Cependant, il constate aussi que les programmes de soutien fédéraux élaborés pour le livre et le disque canadiens ont réussi, avec le temps, à élaborer des stratégies efficaces afin de surmonter des difficultés semblables, et ont obtenu des résultats impressionnants.

Certes, le Comité applaudit au succès du cinéma de langue française et souhaite que les réalisations dans ce secteur se poursuivent, mais il est aussi convaincu que des changements considérables doivent être apportés afin d’accroître l’auditoire du cinéma de langue anglaise.

Le défi est donc le suivant : proposer un ensemble de changements qui, sans nuire aux réalisations dans le marché francophone, favorise l’atteinte de résultats semblables pour le cinéma anglophone. Pour ce faire, le Comité a décidé de proposer quelques modestes changements à la politique, ainsi que des changements de plus grande envergure à sa mise en œuvre et à ses programmes de soutien.

Du scénario à l’écran a été une réalisation importante. Par-dessus tout, la politique a su reconnaître la nécessité de «  former et garder des créateurs de talent  » et de «  bâtir un public plus vaste […] pour le film canadien  ». Le Comité appuie sans réserve ces deux objectifs et demeure convaincu qu’ils doivent former les pierres angulaires de la politique.

Cependant, pour réaliser ces deux objectifs, tout un train de modifications s’impose.

En tout premier lieu, il faut manifestement reconnaître l’existence de deux marchés linguistiques différents pour le cinéma et établir des recettes-guichet cibles différentes pour chacun.

Le Comité estime en outre qu’il faut se pencher non seulement sur les objectifs de recettes-guichet, mais aussi sur tous les contextes hors salle dans lesquels les Canadiens visionnent des films. Comme le souligne le présent rapport, les Canadiens regardent beaucoup plus de films à la télévision ou sur DVD qu’au cinéma. C’est pour cette raison qu’une politique révisée doit reconnaître l’importance d’évaluer le visionnement de films canadiens dans les nombreux contextes hors salles.

Lorsque nous avons examiné la politique et sa mise en œuvre, les témoins ont souligné plusieurs autres facteurs importants. En premier lieu, il semble que la définition rigide du contenu canadien nuit considérablement à la création de films pouvant attirer un grand public dans le marché anglophone. Nous recommandons, à cet égard, d’adopter une autre approche, semblable à celle utilisée pour l’industrie du livre et du disque. Nous sommes convaincus qu’une telle stratégie offrira la souplesse nécessaire dans le marché anglophone, sans pour autant compromettre la production de films de qualité dans le marché francophone.

L’étude du Comité a aussi révélé des difficultés liées à la mise en œuvre de la politique par l’entremise de divers organismes responsables. En résumé, les mécanismes actuels de gouvernance et de responsabilité ne donnent pas les résultats escomptés. L’éventail d’instruments qui existent pour appuyer la politique est beaucoup trop compliqué et bureaucratique; de plus, personne ne semble tenir la barre.

Les recommandations du Comité pour régler ces problèmes visent à reconnaître l’important rôle du ministère du Patrimoine canadien et à accroître les mesures de soutien qu’offre le Ministère à la politique et au programme.

Ainsi, la gamme des instruments de programme présente une grande lacune, soit l’absence de soutien continu pour les producteurs, les distributeurs et les présentateurs. Pour remédier à cette lacune, le Comité recommande l’élaboration d’un nouveau programme dont la réalisation relèverait du ministère du Patrimoine canadien. Ce programme, qui s’apparenterait à celui du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) qui relève aussi du Ministère, pourrait offrir un soutien continu aux compagnies de production, aux distributeurs et aux présentateurs jugés admissibles, en fonction des recettes-guichet générales recueillies pour les films canadiens. Une telle mesure n’empiétera pas sur le champ de compétences des provinces en matière de distribution et de présentation. De plus, elle pourra servir à faciliter le passage au cinéma numérique et électronique.

Les diffuseurs du Canada doivent aussi aider à appuyer le cinéma canadien. Voilà pourquoi nous recommandons que le gouvernement donne instruction au CRTC d’élaborer une politique pour la promotion des longs métrages.

Pour ce qui est de Téléfilm Canada, les attentes à l’égard de cette société d’État sont à la fois trop élevées et trop faibles. D’après le Comité, les représentants de Téléfilm manquaient de franchise concernant les résultats de la politique, et ils étaient peu disposés à admettre les échecs dans le marché anglophone. Ces réticences montrent à quel point le ministère du Patrimoine canadien doit améliorer les rapports qui lui sont présentés sur les résultats de la politique et des programmes connexes.

Nombre de changements doivent être apportés au sein de Téléfilm. Le Comité souhaite que les projets soient choisis par des personnes compétentes, selon un mode de sélection analogue à celui utilisé par d’autres organismes culturels (p. ex. le Conseil des Arts du Canada). Bref, le choix des projets à appuyer ne devrait pas incomber à des fonctionnaires. Ceux-ci sont à même de décider du type de projets admissibles, mais le choix des projets particuliers doit être effectué par des pairs et des spécialistes de l’extérieur de Téléfilm176.

Le rapport constate également que des améliorations doivent être apportées à l’évaluation des progrès et des rapports sur la réalisation des objectifs et des cibles fixés par la politique. C’est pour cette raison que le Comité invite le ministère du Patrimoine canadien à assumer la responsabilité de la coordination, de la collecte, et de la publication des mesures de rendement utiles relativement aux objectifs de la Politique canadienne du long métrage.

Soumis à des contraintes de temps, le Comité n’a pas pu consacrer toute l’attention qu’il aurait voulu à certaines questions importantes. Le rapport conclut donc par un certain nombre de recommandations sur ces sujets. La plus importante concerne peut-être la nécessité d’inclure les longs documentaires dans la politique du long métrage.

Le train de changements que propose le Comité ne pose pas de difficulté de mise en œuvre. Certains nécessitent des efforts, d’autres des modifications de réglementation et une autre approche à l’égard de la gouvernance du système.

Le Canada a le bonheur de compter parmi ses citoyens nombre de créateurs et d’innovateurs, et cette créativité est particulièrement évidente dans le milieu des arts et de la culture. Nous pouvons compter sur des poètes, des romanciers, des auteurs-compositeurs-interprètes, des danseurs et des compagnies de danse, des patineurs artistiques, et des compagnies d’opéra et de théâtre de réputation mondiale. Des créateurs comme Claude Jutra et Denys Arcand ont réalisé des films qui combleront le public tant que le cinéma existera. C’est tout un exploit.

Le Comité est convaincu que les changements recommandés dans le présent rapport fourniront aux créateurs la possibilité et la liberté voulues pour produire des films qui pourront et sauront attirer des auditoires.

Le Comité tient à affirmer qu’il appui sans réserve le rôle du gouvernement fédéral à l’appui de l’industrie canadienne du long métrage. Cet appui devrait inclure un financement stable et à long terme à un niveau égal, ou supérieur, à ceux disponibles en ce moment.


176Bureau du vérificateur général, Rapport de la vérificatrice générale du Canada, Chapitre 5, Le soutien accordé aux industries culturelles, p. 25-26.