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FINA Rapport du Comité

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Opinion libérale dissidente — Juin 2005

1.         Dans son rapport majoritaire de juin 2005, le Sous-comité sur le déséquilibre fiscal du Comité permanent des finances de la Chambre des communes soutient qu'il est urgent de revoir les arrangements financiers actuels entre le gouvernement fédéral et les provinces et les territoires, et de prendre des mesures pour rééquilibrer la fédération. Nous, membres de la minorité libérale du Comité, sommes fondamentalement en désaccord.

2.         Le principal point de désaccord réside dans les imperfections fondamentales inhérentes au rapport. Premièrement, nous contestons l'hypothèse de base du rapport, soit l'existence d'un déséquilibre fiscal vertical. Deuxièmement, nous estimons qu'on a donné trop de poids au point de vue de certains témoins, notamment ceux qui estiment qu'il existe un déséquilibre fiscal, par rapport à celui d'autres témoins. Enfin, le Sous-comité fait abstraction des voeux des Canadiens, qui veulent pouvoir s’appuyer sur des normes nationales, peu importe où ils habitent.

3.         Tout d'abord, nous contestons l'existence d'un déséquilibre fiscal vertical. Le rapport majoritaire du Sous-comité comprend une affirmation de Ronald Watts, professeur émérite à l’Université Queen’s, selon laquelle «  le concept de déséquilibre fiscal comporte un élément de subjectivité : le degré convenable de dépenses et de revenus gouvernementaux n’est pas de nature objective, mais le produit d’une volonté et de décisions politiques sur ce que chaque ordre de gouvernement devrait faire  ». En soutenant qu'il existe un déséquilibre fiscal, le Sous-comité a opté pour une opinion subjective sur l'existence d’un déséquilibre et il a conféré à cette hypothèse un caractère d'objectivité absolue. 

4.         De plus, le Sous-comité reconnaît que, quand on étudie l’ensemble des revenus de toutes les assiettes fiscales, celles qui sont partagées et celles qui relèvent exclusivement de l’un ou l’autre ordre de gouvernement, on constate que «  la distribution des revenus entre les deux paliers de gouvernement était essentiellement égale en 2003-2004  ». De plus, Rodney Dobell, professeur émérite à l’Université de Victoria, a signalé «  que les provinces et les territoires ont accès à toutes les grandes assiettes fiscales et disposent d’un accès exclusif à des assiettes qui connaissent une croissance rapide comme les bénéfices tirés des ressources et les revenus du jeu  ».

5.         M. Dobell a ajouté que «  chaque province ou territoire a le droit d’être différent et de choisir la combinaison de dépenses et d’impôts que sa population appuiera  ». Toujours selon lui, «  (r)ien ne prouve [...] que les provinces et les territoires sont incapables de financer ces programmes (ceux dont ils sont responsables aux termes de la Constitution)  ». Les témoins de l’Atlantic Institute for Market Studies, du Caledon Institute of Social Policy et du Centre canadien de politiques alternatives partagent son avis. 

6.         Les gouvernements provinciaux, comme tous les gouvernements, doivent faire des choix politiques sur les recettes fiscales qu'ils veulent et peuvent percevoir pour financer les services qu'ils souhaitent offrir à leurs administrés. Le gouvernement fédéral doit prendre des décisions tout à fait semblables. Dans ce processus de prise de décisions, les gouvernements fédéraux des dernières décennies ont décidé consciemment de transférer de l'argent aux provinces. Ces transferts se classent dans deux catégories :

7.         (1) Le Programme de péréquation — Ce programme vise explicitement à atténuer les disparités entre les provinces et à faire en sorte que toutes puissent offrir des services raisonnablement comparables en pratiquant une fiscalité qui soit aussi raisonnablement comparable.

8.         (2) Les transferts visant à donner aux provinces les moyens d'offrir des services d'une qualité supérieure à ceux qui seraient autrement possibles.  Le Transfert canadien en matière de santé  et le Transfert canadien en matière de programmes sociaux appartiennent à cette catégorie. Ils sont versés au prorata de la population. Il ne s’agit donc pas de combler l'écart entre les provinces, mais plutôt d’améliorer les services uniformément dans tout le Canada.

9.         De la sorte, le gouvernement fédéral offre des transferts qui assurent l'égalité des services sur lesquels les citoyens peuvent compter d'un bout à l'autre du Canada (grâce au Programme de péréquation) et qui, dans des domaines prioritaires comme la santé, l'éducation et les services sociaux, garantissent que les services offerts dans tout le pays seront meilleurs que si les provinces devaient les financer sans la participation fédérale.

10.       Il est clair que les transferts aux provinces ont beaucoup augmenté au cours des dernières années. En réalité, la réunion des premiers ministres consacrée aux soins de santé, en septembre 2004, a abouti à un engagement selon lequel 41 milliards de dollars de plus seraient injectés dans les soins de santé au cours des dix années suivantes. Au cours d'une réunion distincte des premiers ministres, en octobre 2004, un montant supplémentaire de 33 milliards de dollars sur dix ans a été promis pour le système de péréquation. Ce sont là des montants nouveaux ou des majorations considérables que le gouvernement fédéral accorde aux provinces.

11.       Il importe de ne pas oublier que la notion d’«  équilibre  » est à la fois subjective et politique. C'est un fait qui semble avoir été négligé dans le rapport majoritaire. Dans les années 80, il y a eu débat public sur le «  déséquilibre fiscal », mais, à l'époque, on croyait que la distribution des revenus était à l’avantage des provinces. Avec le temps, les circonstances changent.

12.       Le plus important facteur de ce revirement a été la décision que le gouvernement libéral fédéral a prise dans les années 90, sous la conduite de l'actuel premier ministre, de mettre enfin de l'ordre dans les finances du gouvernement fédéral.

13.       Le Sous-comité n'a pas su expliquer comment les recommandations formulées dans le rapport majoritaire amélioreront le sort ne fût-ce que d’un seul Canadien. Il n'a absolument pas tenté d'expliquer comment l'augmentation des transferts, ou la hausse des impôts provinciaux, amélioreront quelque service que ce soit.

14.       Il n'y a pas de structure ni d’«  équilibre  » entre imposition et dépenses ou transferts entre les ordres de gouvernement qui soient les bonnes de façon inhérente. Il n'y a que des choix politiques que doivent faire les représentants élus, et ceux-ci doivent ensuite se présenter devant les électeurs et défendre leurs choix.

15.       Il était présomptueux et déplacé que le Sous-comité amorce de son étude en posant comme postulat qu'il existe un déséquilibre fiscal et tienne ensuite des audiences pour recueillir des opinions et des « faits » confirmant l'hypothèse de départ. Il n’y a donc pas lieu de s'étonner de ses conclusions.

16.       Même s'il est parti de l'idée préconçue voulant qu'il existe un déséquilibre fiscal vertical, le Comité n'a pas su prouver sa thèse.

Selon de nombreux témoignages d’experts ne représentant pas les gouvernements provinciaux — qui ont un préjugé évident —, les niveaux différents de pressions financières qui s'exercent sur les gouvernements fédéral et provinciaux ou territoriaux sont une question subjective et

directement liée aux priorités des choix politiques plutôt qu'à un déséquilibre fiscal systématique. Par conséquent, à titre de membre libéral du Sous-comité et au nom des membres de mon parti qui m'ont remplacé au cours de certaines audiences, je rejette le rapport majoritaire, ses conclusions et ses recommandations.

 

 

Don Bell, député
North Vancouver
Membre libéral du Sous-comité sur le déséquilibre fiscal