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AGRI Document pertinent de comité

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Le Revenu des exploitations agricoles : Que veut dire la moyenne?

L’enquête financière sur les fermes

L’enquête financière sur les fermes effectuée annuellement par Statistique Canada permet de diviser les exploitations agricoles en sous-groupes. En effet, elle présente les résultats moyens non seulement pour l’ensemble des fermes canadiennes, mais également selon la catégorie de revenu de celles-ci. Il importe de noter que cette enquête mesure le revenu agricole net comptant, qui est le revenu net réalisé avant de tenir compte de l’amortissement et des revenus en nature. L’analyse se concentrera sur deux catégories de ferme : les fermes générant un revenu total annuel se situant entre 100 000 $ et 249 999 $ et les fermes générant un revenu annuel total de 250 000 $ et plus. Ce choix se base sur trois raisons :

  1. Ces deux catégories comptent un nombre relativement semblable de fermes en 2004 (38 160 et 36 780 fermes respectivement, alors que le nombre total des fermes au Canada était de 158 670 en 2004, selon l’enquête) [2].
  2. La fiabilité statistique des diverses estimations pour ces deux catégories est classée comme « très bonne » ou « excellente » par Statistique Canada.
  3. Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) classe les fermes de ces deux catégories comme soit des « exploitations agricoles de grande taille » ou des « exploitations agricoles de très grande taille ».

Le graphique 1 présente le revenu net comptant total (y compris les paiements gouvernementaux) pour la ferme moyenne de l’ensemble des fermes canadiennes, pour la ferme moyenne de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ et pour la ferme moyenne de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus. Comme on peut le constater, le revenu net comptant des fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus était près de cinq fois plus élevé en 2004 que celui des fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $. De plus, on peut constater la différence entre les chiffres moyens sur le revenu net comptant pour l’ensemble des exploitations agricoles canadiennes et ceux pour les fermes de plus grande taille. Pour ce qui est des subventions gouvernementales, les fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus ont reçu en moyenne 44 418 $, alors que les fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ ont reçu en moyenne 18 043 $.

Le graphique 1 présente le revenu net comptant total (y compris les paiements gouvernementaux) pour la ferme moyenne de l’ensemble des fermes canadiennes, pour la ferme moyenne de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ et pour la ferme moyenne de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus.  Comme on peut le constater, le revenu net comptant des fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus était près de cinq fois plus élevé en 2004 que celui des fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $.
Source : Statistique Canada, Enquête financière sur les fermes, 2005.

En ce qui concerne l’évolution du revenu net comptant (y compris les paiements gouvernementaux), les fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus affichent une progression d’un peu plus de 4 p. 100 entre 1997 et 2004, alors que la ferme moyenne de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ affiche une diminution de 29 p. 100 pour la même période. On remarque souvent dans la littérature que les petites fermes ont tendance à avoir des revenus hors ferme plus élevés que les grosses fermes, mais cela ne se vérifie pas nécessairement des deux catégories étudiées ici. Une étude d’AAC pour les fermes inscrites au Programme canadien de stabilisation du revenu agricole (PCSRA) en 2004 indique que les fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus avaient en moyenne des revenus hors ferme légèrement supérieurs à ceux des fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $. Ainsi, si les données présentées dans le graphique 1 incluaient les revenus hors ferme, la différence entre les deux catégories de revenu serait probablement un peu plus prononcée.

On ne doit pas nécessairement s’étonner que les plus grosses fermes aient un revenu net comptant plus élevé que les petites fermes. En effet, une entreprise de plus grande taille, donc avec des capitaux plus élevés, a généralement la capacité de générer des profits plus élevés qu’une entreprise de plus petite taille. Une façon de tenir compte du facteur « taille de l’entreprise agricole » est de ramener le revenu net comptant sur l’actif total de l’entreprise agricole. Le graphique 2 illustre le taux de rendement des trois catégories de ferme illustrées au graphique 1.

Graphique 2 - Revenus nets comptants (excluant les paiements gouvernementaux) divisés par l’actif total en 2004. Le graphique montre que les exploitations agricoles de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus obtiennent un plus haut niveau de rendement (en termes de revenu net comptant) sur l’actif total que les fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $.
Source : Statistique Canada, Enquête financière sur les fermes, 2005.

Le graphique 2 montre que les exploitations agricoles de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus obtiennent un plus haut niveau de rendement (en termes de revenu net comptant) sur l’actif total que les fermes de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $. Le graphique illustre également la différence qui peut exister entre la moyenne simple pour une certaine catégorie de ferme et la moyenne simple pour l’ensemble des fermes.

Paiements gouvernementaux et taille des exploitations agricoles

Le graphique 3 ci-dessous établit le lien entre les paiements gouvernementaux et l’actif total des exploitations agricoles pour les trois catégories.

Graphique 3 - Paiments gouvernementaux selon l’actif total en 2004. Le graphique donne à penser que les paiements gouvernementaux sont essentiellement proportionnels à la taille des fermes. Les fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus que celles de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ recevaient des paiements gouvernementaux qui représentaient en moyenne 1,7 p. 100 de leur actif total en 2004.
Source : Statistique Canada, Enquête financière sur les fermes, 2005.

Le graphique 3 donne à penser que les paiements gouvernementaux sont essentiellement proportionnels à la taille des fermes. Aussi bien les fermes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus que celles de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $ recevaient des paiements gouvernementaux qui représentaient en moyenne 1,7 p. 100 de leur actif total en 2004. Ce résultat n’est pas surprenant, puisqu’au Canada le soutien aux fermes agricoles tend à être proportionnel aux revenus de celles-ci, plus particulièrement pour ce qui est des marges. Le maximum des paiements au titre du PCSRA est fixé à trois millions de dollars par participant. Étant donné son envergure, cette limite ne représente pas vraiment une contrainte pour la vaste majorité des fermes canadiennes. Quant à lui, le programme d’assurance-stabilisation du revenu agricole du Québec impose des niveaux minimums de production comme critère d’admissibilité, mais ne fixe aucun maximum à la couverture.  [3]

La question de moduler l’aide gouvernementale en fonction de la taille des entreprises, par exemple au moyen d’un plafond sur l’aide totale accordée par ferme, fait l’objet de beaucoup de débats aux États-Unis. Les tenants d’une limite globale à l’aide gouvernementale par ferme invoquent des arguments économiques et politiques à l’appui de leur thèse [3]. Du point de vue économique, ils avancent que des paiements gouvernementaux illimités bénéficient surtout aux grandes exploitations, encouragent la fusion des petites fermes en de très larges unités, font augmenter le prix des terres et désavantagent la ferme de type familial du point de vue de la compétitivité. Ils croient qu’une limite globale plus restreinte sur les paiements réduirait l’incitation des fermes à prendre de l’expansion et augmenterait la capacité des plus petites exploitations à accroître leur superficie et l’entrée de nouveaux producteurs sur le marché. Du point de vue politique, ils croient que des paiements substantiels aux grandes unités de production minent l’appui général du public aux programmes de soutien à l’agriculture.

De leur côté, les critiques d’une limite globale aux paiements par ferme estiment que toutes les fermes ont besoin de soutien, particulièrement au cours des périodes difficiles de baisses de prix, et que les grandes exploitations ne doivent pas être pénalisées pour les économies d’échelle et l’efficacité qu’elles ont pu atteindre. Ils disent également que les paiements gouvernementaux basés sur la quantité produite aident le pays à devenir plus concurrentiel sur les marchés mondiaux et que l’imposition d’une limite serait contraire à l’objectif de rendre les exploitations agricoles plus compétitives à l’ère de la mondialisation.

Conclusion

Historiquement, la moyenne simple a été utilisée pour dresser le portrait de la situation financière de l’ensemble des fermes. Cette pratique est toujours utilisée, malgré l’évolution de la structure des fermes depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, évolution qui a rendu la réalité agricole moins homogène et donc beaucoup plus complexe. Le fait de décortiquer la moyenne simple de l’ensemble des fermes canadiennes en diverses catégories permet de voir certaines différences entre les fermes pour ce qui est de la rentabilité financière. Deux catégories de fermes ont été étudiées dans le présent document, celles de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus et celles de la catégorie de revenu 100 000 $ à 249 999 $. Il faut noter que les données pour les fermes de plus petite taille (revenu inférieur à 100 000 $) semblent suivre la même tendance que les résultats que nous avons exposés. Toutefois, la précision statistique des estimations pour les fermes au revenu inférieur à 100 000 $ était plus faible.

Si la présentation de la situation financière des fermes est souvent basée sur une moyenne simple de l’ensemble des exploitations agricoles, les paiements gouvernementaux, par contre, sont souvent proportionnels à la taille des fermes, ce qui fait que la majorité des versements gouvernementaux vont aux entreprises agricoles de grande taille. En 2004, par exemple, les entreprises agricoles canadiennes de la catégorie de revenu 250 000 $ et plus représentaient 23 p. 100 de l’ensemble des fermes canadiennes et ont reçu 58 p. 100 des paiements gouvernementaux [4]. Cette situation soulève la question de savoir quels doivent être les objectifs d’une politique agricole. La réponse à cette question est d’une importance fondamentale lorsqu’il s’agit de savoir s’il faut moduler ou non l’aide gouvernementale en fonction de la taille des exploitations agricoles au Canada.

[2]
L’Enquête financière sur les fermes exclut les fermes dont le chiffre de ventes des produits agricoles est inférieur à 10 000 $, les fermes institutionnelles, les pâturages communautaires, les fermes situées sur des réserves indiennes et celles appartenant à des entreprises à exploitations agricoles multiples.
[3]
J. Monke, Payments Limits for Farm Commodity Programs: Issues and Proposals, Washington (D.C.), Ressources, Science and Industry Division, Congressional Research Service, Library of Congress, 2007.
[4]
Statistique Canada, Enquête financière sur les fermes, 2005.