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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 024 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 décembre 2006

[Enregistrement électronique]

  (0910)  

[Traduction]

    Je déclare ouverte la 24e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude du rapport de la Commission d'enquête sur les événements concernant Maher Arar.
    Nous accueillons aujourd'hui le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada.
    Monsieur Zaccardelli, bienvenue au comité. Nous vous remercions d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.
    J'invoque le Règlement.
    On invoque le Règlement.
    Monsieur le président, comme on l'indique aux pages 861 et 862 de Marleau et Montpetit, je demande que le témoin prête serment.
    Très bien. Est-ce que le comité est d'accord?
    Des voix: Oui.
    Le président: Y a-t-il des objections?
    Très bien. Le témoin va prêter serment.
    Allez-y.
     Je jure de dire dans mon témoignage la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
    Merci beaucoup.
    Commissaire, nous allons vous accorder une dizaine de minutes, ou le temps qu'il faut, pour votre déclaration. Nous allons ensuite passer aux questions, en commençant par le Parti libéral. Nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, bonjour.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui et de pouvoir ainsi examiner et discuter avec vous d'un certain nombre de sujets qui ont trait à ma comparution, en septembre dernier, pour commenter le rapport du juge O'Connor sur les événements entourant l'affaire Maher Arar.

[Traduction]

    Ma dernière comparution devant le comité a eu lieu, comme vous le savez, peu après la publication du rapport. Je sais que le comité souhaitait, comme moi, entendre la réponse de la GRC dès que possible, et j'estimais personnellement qu'il était important de présenter sans attendre des excuses à M. Arar et à sa famille. Je voulais aussi exposer en détail au comité le travail important qu'accomplit la GRC pour mettre en oeuvre les recommandations.
    Aussi, je crois que certains aspects de mon précédent témoignage auraient pu être plus précis ou mieux énoncés. Il en a résulté un certain nombre de malentendus et, comme je le mentionnais dans ma lettre au comité, j'attendais avec impatience que me soit donnée l'occasion de rétablir les faits auprès du comité et du public canadien.
    Je crois qu'il serait utile de revenir sur certains faits importants, notamment ce que je savais personnellement et quand, l'information contenue dans les notes de synthèse au ministre et autres, et notre réponse organisationnelle.

[Français]

    Le rapport du juge O'Connor dresse ainsi la liste des événements qui se sont produits.

[Traduction]

    À l'automne 2001, M. Arar est légitimement désigné « personne d'intérêt » dans le cadre de l'enquête antiterroriste amorcée par la GRC après les événements du 11 septembre et baptisée Projet A-O Canada. À cette époque, dans le cadre d'une demande d'information adressée aux Douanes américaines, M. Arar et Mme Mazigh sont inscrits sur une liste qui leur vaudra ensuite d'être étiquetés « extrémistes islamistes soupçonnés d'avoir des liens avec le mouvement terroriste Al-Qaïda ».

[Français]

    Par la suite, M. Arar effectue à deux reprises des déplacements à l'intérieur et à l'extérieur des États-Unis, sans incident. Le juge O'Connor a d'ailleurs conclu qu'il n'avait pu déterminer avec certitude quelles mesures les Américains avaient prises sur la base de cette demande.

[Traduction]

    Je crois qu'il est important de souligner ici ce que le juge O'Connor mentionne: que les cadres supérieurs savaient qu'une demande d'information avait été transmise aux Douanes américaines, sans toutefois en connaître les détails. Et je peux vous dire qu'ils ne recevraient jamais de tels détails dans le cadre de leurs rapports hiérarchiques.
    Au printemps 2002, la GRC communique de l'information à ses homologues américains, sous forme de trois CD contenant une somme importante d'information recueillie jusque-là dans le cadre de l'enquête. Quatre-vingt-quatorze de ces documents faisaient référence à M. Arar et certaines informations factuelles erronées y ont par la suite été relevées par le juge O'Connor.
    En juillet, l'équipe du Projet A-O Canada apprenait que M. Arar et sa famille avaient quitté le Canada pour la Tunisie. Plus tard, elle qualifiait ce départ de « soudain ». Le juge O'Connor a déclaré que cela, combiné au fait que les conditions posées par l'avocat de M. Arar à une entrevue ont été qualifiées de refus, a concouru à donner une image fausse et possiblement très négative de M. Arar. Cependant, à cette époque, l'équipe du Projet A-O Canada ignorait que ce portrait inexact était en train de prendre forme.
    En septembre 2002, M. Arar est arrêté par les autorités américaines alors qu'il faisait escale à New York. Dans ses discussions avec les Américains durant cette période, la GRC a clairement fait savoir qu'elle n'était pas en mesure d'établir de liens entre M. Arar et Al-Qaïda. Cela a été mentionné tant dans les communications écrites que personnelles. Le personnel a maintenu sa position et a continué de dire aux Américains que la GRC n'avait aucune raison de détenir M. Arar, de l'accuser d'une infraction criminelle ou de l'empêcher d'entrer au Canada.
    Les 5 et 7 octobre, le personnel de la GRC informe le FBI que la GRC ne peut associer M. Arar à Al-Qaïda. Monsieur le président, je voudrais, ici, vous renvoyer à la lettre que j'ai fait parvenir au comité le 2 novembre. J'y affirme, et je cite:
Il n'en demeure pas moins que des enquêteurs de la GRC ont clairement informé les autorités américaines qu'il n'y avait aucune preuve appuyant le dépôt d'accusations criminelles contre M. Arar au Canada, qu'on ne pouvait pas l'empêcher d'entrer au Canada et que nous ne pouvions pas le relier à Al-Qaïda.
    Ces renseignements auraient dû avoir pour effet de corriger toute information inexacte qui avait été transmise précédemment. Quand j'ai déclaré le 28 septembre 2006 que nous avions corrigé le dossier, c'est à cela que je faisais allusion. Même si mes remarques auraient peut-être pu avoir été plus claires, je crois que M. Easter a reconnu l'absence de fondement de certaines des questions du comité lorsqu'il a mis en garde contre toute interprétation erronée de ce que j'avais déclaré.
    Le 11 octobre 2001, j'apprends officiellement que M. Arar a été déporté vers la Syrie par les autorités américaines, que la GRC a transmis nos documents d'enquête à celles-ci, et que M. Arar est considéré comme une personne d'intérêt.

  (0915)  

[Français]

    Ici encore, comme l'a fait remarquer le juge O'Connor, il convient de rappeler qu'aucun officier supérieur, y compris moi-même, n'a été informé d'inexactitudes dans l'information transmise aux autorités américaines.

[Traduction]

    Durant l'automne 2002 et au printemps et à l'été 2003, la GRC continue de communiquer avec des organismes canadiens, comme SPPCC, le MAECI, le SCRS, le BCP, et à informer comme il se doit les ministres de la situation concernant M. Arar.
    Le sous-commissaire Garry Loeppky était le premier responsable pour la GRC. Lorsqu'il représentait la Gendarmerie aux nombreuses et régulières réunions interministérielles, il exposait ce que nous savions alors: que la GRC avait échangé des documents d'enquête avec les autorités américaines et qu'elle avait informé les responsables américains qu'elle ne pouvait accuser M. Arar d'une infraction criminelle, l'empêcher d'entrer au Canada ou établir de liens entre lui et Al-Qaïda.
    Le sous-commissaire Loeppky m'informait régulièrement de la situation, comme je l'ai dit, et il en était de même pour le ministre Easter, qui a notamment été informé en détail des opérations en novembre 2003, à savoir que les Américains avaient décidé unilatéralement de déporter M. Arar en Syrie, que la GRC avait échangé des renseignements d'enquête, et que M. Arar était toujours considéré comme une personne d'intérêt.
    Je crois qu'il est important de souligner que, pour la GRC, M. Arar est demeuré une personne d'intérêt durant toute la période que j'ai évoquée. Voilà ce que je savais — tout ce que je savais — durant les trois années qui se sont écoulées entre la déportation de M. Arar et la publication du rapport.
    Quant à savoir qui savait quoi et quand, je crois qu'il convient de citer deux passages du rapport du juge O'Connor.
    Premièrement, en ce qui concerne l'information inexacte contenue dans la demande d'information transmise aux Douanes américaines en 2001, le juge O'Connor affirme ceci: « Les officiers supérieurs n'ont pas su que le Projet A-O Canada avait étiqueté M. Arar et Mme Mazigh comme des extrémistes islamistes dans sa demande d'avis de guet à la frontière adressée aux Douanes américaines. »
    Deuxièmement, pour ce qui est des questions que la GRC a envoyées aux autorités américaines alors que M. Arar était détenu à New York, le juge O'Connor affirme ceci:
Je note que les responsables de la Division A et de la Direction des renseignements criminels n'étaient pas au courant de l'envoi de cette communication.
    Ce n'est que durant l'enquête de la commission que tous les faits et événements entourant la déportation de M. Arar ont été minutieusement compilés. Mais, et il importe de le rappeler, le juge O'Connor confirme également ce que je crois: qu'on ne peut accuser de mauvaise foi les membres du Projet A-O Canada. C'est d'autant plus évident que l'équipe du Projet A-O Canada n'a relevé ou signalé aucune inexactitude aux cadres supérieurs, croyant que l'information utilisée par les autorités américaines serait vérifiée et que M. Arar serait traité comme il se doit, c'est-à-dire conformément à la procédure policière établie.
    Comme je l'ai dit auparavant, la décision prise par les officiers supérieurs, que j'appuie, a été d'accepter ces problèmes au niveau organisationnel et de mettre en place des mesures correctives axées sur, premièrement, une gouvernance centrale forte; deuxièmement, l'échange d'information; troisièmement, la formation; et quatrièmement, l'intégration efficace. Ces mesures visent à renforcer notre efficacité organisationnelle dans le domaine éminemment complexe de la sécurité nationale et de la lutte antiterroriste, de manière à ce que de tels problèmes ne se reproduisent plus.
    Comme l'ancienne vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique Anne McLellan l'a dit au Comité permanent de la sécurité publique et nationale, la semaine dernière:
L'imputabilité revêt de nombreuses formes et nous devons dépasser l'idée que des têtes doivent à tout prix tomber.
S'il faut parfois en arriver là, on doit aussi quelquefois changer les procédures en place qui ont mené à l'erreur, de manière à s'assurer que cela ne se reproduise plus.
Dans d'autres cas, ce sera autre chose, peut-être quelque chose de plus important, de l'ordre de la culture de l'organisation en cause.

  (0920)  

    Monsieur le président, je veux être très clair sur la signification de ce que j'ai dit ici. Pour un haut fonctionnaire, rien n'est plus important que de s'assurer que l'information qu'il communique aux ministres est exacte et complète. Dissimuler des renseignements ou faire des déclarations mensongères constitue une faute grave. Si j'avais commis de tels actes, personne n'aurait à demander ma démission. La réalité, cependant, est que, en raison des circonstances que j'ai évoquées, nous n'avons pris connaissance de certains faits importants qu'à la fin de l'enquête du juge O'Connor cette année. Mes collègues et moi regrettons profondément les erreurs qui ont été commises, mais il importe de souligner que nous avons toujours agi de bonne foi.
    Enfin, avant de passer aux questions, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui. Comme je l'ai dit le 28 septembre, ce processus prouve aux Canadiens qu'il existe un leadership transparent, imputable et réceptif dans le système démocratique canadien, ce qui est le fondement même d'une société civile saine.
    Merci.
    Merci beaucoup, commissaire Zaccardelli.
    Comme le veut la règle, nous allons entreprendre un premier tour de table, d'une durée de sept minutes. Les représentants de tous les partis vont pouvoir intervenir. Nous allons commencer par l'opposition officielle.
    Monsieur Holland, vous avez des questions à poser au commissaire. Allez-y.

  (0925)  

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Zaccardelli, merci d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord citer un extrait de votre témoignage du 28 septembre. Vous dites : « ...j'ai découvert que les enquêteurs avaient communiqué avec les autorités américaines pendant que M. Arar était en détention. J'ai appris que...les agents de la GRC avaient essayé de corriger les renseignements faux ou inexacts concernant M. Arar. C'est là que j'ai appris pour la première fois... »
    Ce commentaire, vous ne le faites pas juste une fois. Vous répétez la même chose à huit reprises, à savoir que vous avez eu connaissance du dossier beaucoup plus tôt que vous ne le dites aujourd'hui. Car vous affirmez maintenant que vous ne saviez rien, que ce n'est qu'au moment de la publication du rapport du juge O'Connor que vous avez eu vent de l'affaire. Quand vous êtes-vous parjuré devant le comité, aujourd'hui ou le 28 septembre?
    Monsieur Holland, la première fois que j'ai eu l'occasion de lire le rapport du juge O'Connor, c'est à mon retour de l'étranger. Dès que j'ai reçu le rapport de 1 200 pages, je l'ai lu. J'ai essayé de comparaître devant le comité le plus rapidement possible. Nous avons communiqué avec le comité. J'ai essayé de réunir le plus de faits possible.
    Je dois dire, en toute honnêteté, qu'en me préparant en vue de ma comparution le 28 septembre, je pensais que j'allais surtout discuter des recommandations du rapport. Quand j'ai rencontré le comité, j'ai répondu du mieux que je pouvais, en me fondant sur les renseignements les plus précis disponibles à ce moment-là. À la suite de ma comparution, j'ai passé en revue mon témoignage. Je me suis rendu compte, en entendant certains commentaires, que certains aspects de celui-ci manquaient de précision. Voilà pourquoi j'ai tout fait pour revenir devant le comité et rétablir les faits. L'information que je vous ai transmise le 28 était fondée sur les renseignements les plus précis que je possédais à ce moment-là.
    La première fois que j'ai eu connaissance du dossier, c'est en 2002, alors que M. Arar était déjà en Syrie et que l'affaire était rendue publique. C'est à ce moment-là que j'ai commencé à me renseigner, à m'intéresser au dossier.
    Permettez-moi de dire ceci. Votre témoignage d'aujourd'hui et celui du 28 septembre nous amènent à tirer deux conclusions, selon la version que nous choisissons de retenir.
    La première, c'est que vous saviez depuis presque le début ce qui se passait et vous n'avez pas fait grand-chose pour corriger la situation. Franchement, quand nous lisons votre témoignage, que nous analysons vos déclarations et les renseignements fournis par après par Shirley Heafey, l'ex-présidente de la Commission des plaintes du public contre la GRC, qui a affirmé que la GRC refusait de collaborer quand elle essayait d'obtenir de l'information sur des cas relevant de la sécurité nationale... Elle a déclaré publiquement que la GRC, par son refus de lui fournir des dossiers dans le cadre d'enquêtes sur les plaintes du public, contrecarrait le processus d'examen des plaintes.
    J'invoque le Règlement.
    Un instant, monsieur Holland.
    Allez-y, monsieur MacKenzie.
    Elle n'a jamais comparu devant le comité.
    Je n'ai pas dit qu'elle l'a fait. J'ai dit qu'en examinant les témoignages et les renseignements que j'ai pu obtenir, j'ai relevé –
    Vous devez être plus clair.
    Non, elle n'a jamais comparu devant le comité, mais c'est ce qu'a déclaré Mme Heafey, qui était la présidente de la Commission des plaintes du public contre la GRC.
    Laissez-moi finir, car c'est important.
    La deuxième conclusion est la suivante: si nous acceptons le fait — et j'ai beaucoup de mal à le faire — que vous ne saviez rien, cela veut dire qu'en tant que chef de la GRC, vous étiez à ce point coupé de la réalité que vous n'aviez aucune idée de ce qui se passait et que vous ne posiez aucune question à ce moment-là.
    Les deux conclusions sont inacceptables. Franchement, pour être honnête avec vous, soit vous avez induit le comité en erreur, soit vous n'avez pas dit la vérité au comité.
    La question n'est plus de savoir si vous devez ou non être renvoyé, monsieur Zaccardelli. À mon avis, c'est maintenant clair. La question est de savoir pourquoi le gouvernement, le ministre Day et le premier Harper se sont donnés tellement de mal pour vous protéger.
    Dix jours se sont écoulés entre le 18 septembre, date de publication du rapport O'Connor, et le 28 septembre. Je veux savoir ce qui s'est passé au cours de cette période. Y a-t-il eu des réunions? Des discussions?
    C'est ce que je veux savoir, car je ne comprends pas. Lors de sa comparution, le ministre Day a déclaré au comité qu'il vous appuyait totalement, et le premier ministre aussi. Nous n'avons rien dit. Nous avons attendu, nous avons écouté, nous voulions nous assurer d'avoir tous les renseignements en main. Ils n'ont rien fait. Malgré toutes les contradictions, malgré tous les problèmes, bien qu'ils aient eu toutes les raisons du monde de marquer un temps d'arrêt et de poser, à tout le moins, quelques questions, ils n'ont rien fait. Ce sont les partis de l'opposition qui se sont chargés de poser des questions.
    Je voudrais revenir à ce qui s'est passé au cours de cette période. Quand vous avez comparu devant le comité... Pouvez-vous nous dire si vous avez rencontré le ministre Day entre le 18 septembre et le 28 septembre? Si oui, quelle était la teneur de cette réunion? De quels sujets avez-vous discuté? A-t-il été question de l'adoption d'une stratégie de communication pour gérer le dossier?

  (0930)  

    Monsieur le président, je voudrais clarifier deux points.
    D'abord, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration — et le juge O'Connor l'a indiqué dans son rapport — , aucun officier supérieur n'était au courant des erreurs qui avaient été commises et des fausses informations qui avaient été transmises au sujet de M. Arar.
    Monsieur le président, je –
    J'aimerais finir de répondre, monsieur le président.
    M. O'Connor le dit très clairement dans son rapport. Mes officiers responsables et moi n'avons appris qu'à la conclusion du rapport du juge O'Connor qu'on avait commis des erreurs et communiqué de fausses accusations. Ce n'est que le juge O'Connor qui prend tous ces éléments d'erreur et de fausses accusations et les rassemble dans son travail de vérificateur, pour les examiner, qui en tire la conclusion. C'est la première fois que tous ces éléments sont mis ensemble, et il dit très clairement dans son rapport qu'aucun officier responsable n'était au courant.
    Dans mon témoignage du 28 septembre, j'ai clairement laissé entendre que certaines des informations dont j'ai pris connaissance à la lecture du rapport – J'ai laissé entendre que j'aurais pu les connaître en 2002. C'était une erreur de ma part, et c'est la raison pour laquelle je voulais revenir ici pour me corriger officiellement. C'est toutefois très clair, et il importe que le comité le comprenne.
    Il n'y a aucun officier responsable qui était au courant, et nous l'avons tous appris après la publication du rapport du juge O'Connor.
    Pour répondre à la deuxième question que M. Holland a soulevée, j'aimerais revenir aux discussions que j'ai eues avec le ministre sur les soi-disant mauvaises informations, pour reprendre l'expression que vous avez utilisée lors de ma dernière comparution, monsieur Holland.
    Monsieur le président, le rapport a été publié le 18 septembre. J'étais à l'étranger. J'étais au Brésil, à la conférence d'Interpol. C'est le lundi que le rapport est sorti. Je suis revenu le mercredi en fin d'après-midi. Je me suis rendu à mon bureau, je me suis changé, puis je suis allé rencontrer le ministre Day.
    Nous avons discuté du rapport. Il m'a demandé si je l'avais lu. Je lui ai dit que je venais tout juste de le recevoir et que j'étais en train d'essayer de le lire. Je n'avais pas dormi, parce que j'avais passé toute la nuit dans l'avion. Il m'a dit que je devrais dormir un peu. C'est ce que j'ai fait.
    J'ai lu le rapport, puis le jour suivant, le matin suivant, j'étais à mon bureau quand j'ai eu vent pour la première fois que ce comité pourrait se réunir. J'ai donc appelé au cabinet du ministre pour prendre un rendez-vous. En même temps, ce jour-là, j'ai écrit une lettre au ministre pour lui signifier mon désir de comparaître devant le comité et de réagir publiquement au rapport.
    Nous nous sommes rencontrés le jour suivant, monsieur le président, et nous – Je m'excuse, ça n'était pas le jour suivant, mais le jeudi. C'est là où j'ai écrit la lettre, j'ai eu cette discussion et j'ai entendu dire que le comité pourrait se réunir.
    Le vendredi, j'ai rencontré le ministre. Le ministre et moi avons discuté du rapport et de la possibilité de cette réunion. Le vendredi après-midi, nous avons appris que le comité se réunirait le mardi. Nous avons convenu tous les deux que ce serait le moment et l'endroit idéaux pour ma première comparution.
    C'est exactement ce qui s'est passé. C'est ce qui a été convenu entre le ministre et moi. Jamais, monsieur le président, m'a-t-on donné l'ordre ou la consigne de ne pas en parler. Nous avons compris que ce comité allait se réunir le plus rapidement possible, et nous avons convenu que c'était le meilleur endroit pour expliquer ce qui c'était passé.
    Merci infiniment.
    Monsieur Ménard, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le commissaire.
    J'aimerais commencer par une simple question. Que doit faire un officier de police quand il découvre qu'un innocent est en prison, probablement à cause d'une erreur de ses subordonnés?

[Traduction]

    C'est une question intéressante, monsieur le président, parce que si on lit le rapport, si on connaît bien son contenu, on se rend compte que M. Arar était une personne d'intérêt dès le moment où son nom est apparu dans le dossier. Il l'est demeuré pendant l'enquête.
    Je me reporte encore au juge O'Connor. Il était une personne d'intérêt avant même sa détention à New York. Il est resté une personne d'intérêt pendant qu'il était en Syrie. Il est resté une personne d'intérêt jusqu'à ce que le juge O'Connor publie son rapport et nous dise qu'il n'avait été impliqué dans aucune activité criminelle ni terroriste.
    M. Arar a toujours été considéré comme une personne d'intérêt, c'est bien ce que le juge O'Connor affirme. C'est pourquoi il soutient que l'enquête de la GRC était légitime et que nous avions le droit de la mener. Il a toujours été une personne d'intérêt, monsieur Ménard.

  (0935)  

[Français]

     Monsieur le commissaire, je ne crois pas que vous avez répondu à ma question, mais puisque nous avons peu de temps, je vais me contenter de cette réponse, parce que de ne pas répondre est une réponse en soi, et tout le monde le comprend.

[Traduction]

    Si je peux ajouter une chose, monsieur Ménard –

[Français]

    La première fois, je vous ai posé la question suivante: quand avez-vous acquis vous-même la conviction que M. Arar était innocent de toute relation avec un mouvement terroriste?
    Vous m'avez répondu, comme vous l'aviez indiqué à M. Cotler, que dès qu'il a été arrêté, envoyé en Syrie et emprisonné, vous aviez pris connaissance du dossier et vous aviez acquis cette conviction.
    Maintenez-vous toujours cette version?

[Traduction]

    Monsieur Ménard, je veux clarifier cela. Comme je l'ai dit, je suis ici pour corriger les mauvaises informations que je vous aurais fournies par inadvertance.
    J'ai n'appris les erreurs qui ont été commises à l'endroit de M. Arar et les fausses accusations le concernant que lorsque le juge O'Connor a publié son rapport. Le juge O'Connor le confirme aussi, parce qu'il affirme que les officiers responsables n'étaient pas au courant de ces erreurs ni de ces fausses accusations à ce moment-là.
    Je m'excuse si je vous ai donné une fausse impression lors de ma première comparution, mais je suis justement ici pour m'expliquer.

[Français]

    Je comprends. Alors, vous reconnaissez que ce n'est pas tout à fait ce que nous avions compris lorsque vous avez témoigné la première fois.
    Je comprends très bien. C'est pour cette raison que je voulais mettre la situation au clair ici aujourd'hui, monsieur Ménard.
    Ah bon. N'aurait-ce pas été une meilleure occasion, la première fois...? Vous compreniez très bien, par mes questions, que j'étais convaincu, à l'époque, que vous saviez que M. Arar était innocent de toute relation avec des mouvements terroristes au moment où il était détenu en Syrie.
    Il me semble que lorsque je vous ai posé cette question, monsieur Zaccardelli, vous avez dit que dès que vous avez su que M. Arar était en Syrie, vous avez demandé à voir le dossier. Vous saviez que c'était une erreur de la GRC qui l'avait entraîné dans tout cela. Selon tout le monde, vous l'avez laissé pourrir presque un an dans les prisons syriennes. Pour la majorité des Canadiens — pas tous —, avant le rapport de la Commission O'Connor, M. Arar était lié aux terroristes, et vous saviez que c'était faux. C'est ce que je vous disais le 28 septembre dernier.
    Ensuite, je vous ai posé la question suivante: comment ne pouviez-vous pas trouver un moyen d'intervenir et d'informer correctement, personnellement, le ministre?
    Finalement, pourquoi n'avez-vous pas fait tout votre possible afin que M. Arar soit libéré et que sa réputation soit lavée avant le dépôt du rapport?
    N'aurait-ce pas été une bonne occasion, monsieur Zaccardelli, si la version que vous nous donnez ce matin est la vraie, de corriger l'impression que nous avions tous que vous saviez, pendant que M. Arar était détenu dans les prisons syriennes, qu'il était innocent de toute relation avec les terroristes et qu'il était dans une des pires prisons du monde?

[Traduction]

    Monsieur le président, je reviens encore à ma dernière réponse. J'ai essayé de m'informer du mieux que j'ai pu après la lecture du rapport. Je voulais comparaître le plus vite possible. J'ai indiqué que je n'avais peut-être pas totalement représenté les faits fidèlement, mais le juge O'Connor, dans son rapport, affirme très clairement qu'aucun officier responsable n'était au courant de ces erreurs ni de ces fausses accusations, personne. Nous nous en sommes rendu compte après que le juge O'Connor a mis tous ces éléments ensemble dans son analyse exhaustive.
    Je vais utiliser l'analogie d'une vérification, monsieur le président. Une vérification vise souvent une grande organisation et des éléments d'information disparates qu'on rassemble pour dresser un portrait général. M. Arar n'était ni innocent ni coupable pour nous; il était une personne d'intérêt depuis le début jusqu'à la fin du rapport. Je le répète, le juge O'Connor affirme qu'il était de notre droit de le considérer comme une personne d'intérêt pendant cette épreuve, et c'est ce que j'essaie de vous expliquer ici aujourd'hui.

  (0940)  

[Français]

    Monsieur Zaccardelli, oui ou non, saviez-vous, pendant que M. Arar était en prison en Syrie, premièrement, qu'il était innocent de toute relation avec les mouvements terroristes et, deuxièmement, que c'était vraisemblablement à cause d'informations erronées, communiquées aux autorités américaines par la GRC, qu'il avait été envoyé dans une des pires prisons du monde? Le saviez-vous?

[Traduction]

    Encore une fois monsieur le président, pour nous, M. Arar a toujours été une personne d'intérêt. Je n'ai jamais su qu'on avait commis des erreurs et fait de fausses accusations avant la conclusion du rapport du juge O'Connor. Je ne pouvais donc pas le savoir pendant qu'il était détenu aux États-Unis ou en Syrie. Je n'ai appris qu'on avait fait de fausses accusations qu'après la conclusion du rapport.

[Français]

    Alors, pourquoi ne m'avez-vous pas corrigé quand je vous ai posé cette question la dernière fois?

[Traduction]

    Monsieur le président, puis-je répondre à cela?
    Oui, allez-y.
    Encore une fois, j'ai dit que si je m'étais trompé ou que je n'ai pas été aussi précis que j'aurais dû, je suis ici pour corriger mon erreur. J'accepte que j'ai peut-être fait une erreur dans certaines de mes réponses, mais j'ai toujours voulu la corriger depuis que je m'en suis rendu compte, depuis que les médias ont commencé à en faire état.
    La greffière sait que le personnel de mon bureau a essayé de communiquer avec elle pour que je revienne. Monsieur le président, j'ai écrit au comité pour revenir comparaître dès que j'ai pu. J'ai fait tout ce que j'ai pu lorsque je me suis rendu compte que je n'avais peut-être pas été aussi précis que possible dans mon témoignage.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Comartin, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie d'être ici.
    Je dois vous dire que dans la lettre que vous nous avez envoyée, vous avez affirmé qu'il y avait eu une mauvaise perception de votre témoignage lorsque vous avez comparu la première fois, et c'est ce que vous répétez aujourd'hui. J'ai exercé le droit devant les tribunaux pendant 27 ans, et j'ai lu la transcription de votre témoignage à de nombreuses reprises, monsieur le commissaire.
    En réponse à quatre députés différents, dont M. Cutler la deuxième fois, vous avez répété encore et encore que vous et les hauts dirigeants de la GRC étiez au courant que des accusations fausses et trompeuses contre M. Arar avaient été communiquées aux Américains dès le moment où il était détenu à New York. Vous l'avez répété au moins cinq fois dans votre témoignage, monsieur.
    Ne serez-vous donc pas d'accord avec moi que ce n'est pas une mauvaise perception de la part de toutes les personnes qui vous ont posé des questions ce jour-là? Ce n'est pas une mauvaise perception de la part des personnes qui écoutaient votre témoignage ce jour-là. C'était une erreur claire de votre part que de nous communiquer cette information.
    Monsieur Comartin, j'accepte totalement que j'ai fait une erreur et je le répète, je ne peux l'attribuer qu'à mon empressement de comparaître devant vous, devant le comité, et au fait que j'essayais d'absorber les 1 200 pages du rapport de mon mieux.
    Il est clair que j'ai transféré les connaissances que j'ai acquises en 2006 à ce que je savais en 2002, ce qui était inexact. J'accepte que j'ai fait une erreur dans ce cas.
    Alors l'information que vous nous avez donnée, selon laquelle ces fausses accusations contre M. Arar auraient été communiquées à vos maîtres politiques — et je suppose que je devrais dire aussi à vos maîtresses —, aux ministres de l'époque, était également inexacte, parce que vous ne pouviez absolument pas leur communiquer cette information si vous ne l'aviez pas.
    Ce que j'ai communiqué au ministre lors des séances d'information, c'est l'information que nous avions, c'est-à-dire que c'était une personne d'intérêt, que nous avions échangé de l'information, etc.
    C'est pourquoi M. Easter et d'autres ont témoigné que je ne les en avais pas informés. Je n'aurais pas pu les en informer parce que je ne connaissais pas cette information. Je leur ai donné toute l'information que j'avais à ce moment-là.
    Commissaire Zaccardelli, il y a une partie troublante de votre témoignage qui me pose problème. Ces cinq ou six fois (ou peut-être M. Holland avait-il raison de dire que vous avez répété la même histoire huit fois), vous avez dit que nous, en voulant dire la GRC, avions essayé, à la fois pendant que M. Arar était détenu à New York et pendant qu'il était détenu en Syrie, de corriger ces faux renseignements. C'est ce que vous avez dit. Vous l'avez répété a maintes reprises. Comment auriez-vous pu corriger de faux renseignements si vous ne saviez pas qu'ils étaient faux?

  (0945)  

    Monsieur Comartin, c'est une très bonne question. Ce que je savais, c'était que les membres de l'époque avaient transmis certaines informations aux Américains sur le statut de M. Arar pour la GRC. Nous avons dit aux Américains quatre jours avant sa déportation que nous ne pouvions pas l'associer à al-Qaïda, que nous ne pouvions pas porter d'accusations criminelles contre lui et que nous ne pouvions pas le détenir ni l'empêcher de venir au Canada.
    Maintenant, je me rends compte que lorsque nos membres le leur ont dit, ils ne leur ont pas dit de corriger le dossier, parce que comme je l'ai appris depuis, lors du témoignage des membres devant le juge O'Connor, ils ont dit que si les Américains avaient cette mauvaise impression ou ces fausses informations, le fait que nous les informions que M. Arar n'était pas lié à al-Qaïda aurait dû rectifier le tir. C'est ce que je voulais dire par corriger le dossier.
    Si de fausses informations avaient été transmises, et nous ne le savions pas, le fait de dire aux Américains que nous ne pouvions pas l'associer à al-Qaïda, que nous ne pouvions pas l'arrêter et que nous ne pouvions pas le détenir aurait dû suffire pour corriger les fausses informations qu'ils avaient.
    Monsieur le commissaire, ce n'est tout simplement pas logique. Cela n'a aucun sens. Pourquoi votre personnel aurait-il corrigé cette information s'il ne savait pas...? Pourquoi aurait-il parlé de corriger quoi que ce soit? Pourquoi n'aurait-il pas dit tout simplement qu'il s'agissait d'une personne d'intérêt, un point c'est tout? Où le lien avec al-Qaïda ou le fait qu'il soit un terroriste, un intégriste musulman ou un fanatique...? Pourquoi en aurait-il parlé aux Américains s'il ne le savait pas?
    C'est ce qui me dérange vraiment, monsieur le commissaire. Votre personnel a-t-il communiqué d'autres renseignements aux Américains, qui ne sont pas ressortis dans le rapport O'Connor et que vous ne nous avez pas divulgués?
    Absolument aucun à ma connaissance, monsieur Comartin. Ce qui est arrivé, c'est que les Américains ont détenu M. Arar. Ils ont appelé les Canadiens et leur ont demandé: « Qu'avez-vous sur lui? Pouvez-vous le détenir? Pouvez-vous l'accuser? » À ce moment-là, la réponse était non, nous n'avons rien sur lui qui l'associe à al-Qaïda, nous ne pouvons pas l'accuser, nous n'avons pas de preuve pour l'accuser, nous ne pouvons pas le détenir et nous ne pouvons pas l'empêcher de revenir au pays. C'est tout ce qu'ils ont dit.
    Monsieur, êtes-vous absolument sûr que ces questions sont venues des Américains? N'était-ce pas plutôt nous, les fonctionnaires canadiens, qui étions sur la défensive?
    Avez-vous étudié les échanges particuliers qui ont eu lieu à ce moment-là?
    Je les ai examinés. C'était mon premier contact avec le dossier, j'ai examiné les échanges qui ont eu lieu. C'est ce qu'on peut lire dans le rapport du juge O'Connor, très clairement. Les membres eux-mêmes, lorsqu'ils ont fourni cette information en 2002, ne l'ont pas fournie dans l'intention de corriger quoi que ce soit, parce qu'ils ne savaient pas que des erreurs avaient été commises; c'est l'un des enjeux. Ils ont simplement répondu à une demande des États-Unis de savoir s'ils pouvaient l'arrêter ou si nous pouvions le détenir. Ils leur ont simplement dit comment le Canada considérait M. Arar, sans savoir que des erreurs avaient été commises et qu'on lui accolait une fausse étiquette.
    Les membres ont seulement témoigné du fait que leur réponse aurait pu avoir un effet correctif devant le juge O'Connor. Ils ont dit que si les Américains n'étaient pas certains de ce que nous avions sur lui, ce que nous leur avons dit à ce moment-là aurait dû clairement les informer du fait que nous ne pouvions pas l'arrêter ni faire quoi que ce soit.
    Continuez.
    Savez-vous, aujourd'hui, qui sont les membres de votre force qui ont inscrit Mme Mazigh et M. Arar sur cette liste des douanes?
    Je ne sais pas précisément qui les a inscrits, mais je connais les personnes qui ont préparé cette liste... Il importe de ne pas oublier que cette liste contenait les noms de nombreux suspects clairement identifiés après enquête, par la GRC, comme des extrémistes musulmans. M. Arar et Mme Mazigh avaient été ajoutés à cette liste. Bon nombre des personnes inscrites sur cette liste étaient donc légitimement considérées comme des extrémistes musulmans. L'erreur qu'ils ont faite en ajoutant les noms de M. Arar et de Mme Mazigh à cette liste, c'est qu'ils n'ont pas précisé que ce n'étaient que des personnes d'intérêt; ils n'ont pas fait de distinction. Il y a une personne à la GRC qui l'a fait, mais cette personne — et le juge O'Connor accepte son témoignage — ne croyait pas qu'ils faisaient quoi que ce soit de mal en ajoutant cette personne à la liste. C'est la raison pour laquelle cette question n'a jamais été mentionnée plus haut, ni les autres erreurs qui ont été commises.

  (0950)  

    Même après coup, ils ne sont jamais allés vous le dire? Quand il est devenu évident pour n'importe quel citoyen canadien du pays à quel point c'était dommageable pour lui, ils ne vous l'ont jamais admis?
    Ils ne s'en rendaient pas compte. Non, cela ne s'est jamais rendu en haut avant que le juge O'Connor ne mette tous les éléments ensemble.
    Nous allons devoir clore ce dernier tour de table.
    M. Monsieur Mackenzie est le prochain pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, merci d'être ici.
    Je pense qu'hier, monsieur le commissaire, vous avez participé à une fonction publique où vous avez parlé de l'affaire Arar. J'aimerais vous lire l'une de vos citations sur l'information inexacte:
Ce n'était pas un fait reconnu à la GRC à ce moment-là, et les officiers responsables, dont moi-même, n'avons pas été mis au courant avant la fin de l'enquête de la Commission. Toute l'information mentionnée ici est documentée et détaillée dans le rapport du juge O'Connor.
    Mes amis de l'autre côté ont parlé des différences entre ces affirmations et celles consignées au compte rendu, et je vais vous lire quelques autres citations du 28 septembre. L'une de vos réponses était la suivante:
Comme je l'ai expliqué à M. Cotler, cela s'est produit au même moment. C'est pendant que je faisais enquête sur ce qui s'était passé dans le cas de M. Arar que j'ai appris que les enquêteurs essayaient de corriger la fausse information qui avait été transmise aux Américains. C'est à ce moment que j'ai pris connaissance de la correspondance entre les Américains et les enquêteurs de la GRC. C'est à ce moment que j'ai appris qu'il y avait eu échange de fausses informations au sujet de M. Arar.
    Puis à M. Ménard, vous avez répété:
Monsieur le président, comme je l'ai déjà dit, j'ai appris qu'une erreur avait été commise, que l'information concernant M. Arar était fausse, après que M. Arar ait [sic] été emprisonné. En même temps, j'ai appris que les enquêteurs avaient fait un effort pour corriger cette fausse information, mais c'était après l'emprisonnement de M. Arar.
    Vous avez ensuite ajouté, toujours en réponse à M. Ménard:
À la suite de ce qu'on a appris, on a entamé les discussions pour le mettre au courant de la situation et on a commencé à aviser les responsables de ce qui s'était passé dans ce dossier.
    Je pense que les Canadiens sont en droit de s'interroger sur ce qui s'est passé. Je sais que vous l'avez dit après avoir lu le rapport de M. O'Connor, mais je ne vois pas ce que le rapport de M. O'Connor a à voir avec l'une ou l'autre de ces situations.
    Je pense qu'il était assez clair pour le comité — et je comprends pourquoi nos amis de l'autre côté sont mécontents — que le 28 septembre, vous avez été très clair sur le moment où vous avez appris ce que vous avez appris et sur les renseignements qui ont été transmis. Pouvez-vous nous dire pourquoi c'est différent aujourd'hui?
    Monsieur, c'est différent aujourd'hui parce que depuis mon témoignage du 28 septembre, j'ai lu et relu, encore et encore. J'ai essayé de m'informer de mon mieux.
    Je me suis rendu compte après mon témoignage que mon témoignage n'était pas aussi précis et exact qu'il aurait pu l'être et que j'avais fait une erreur. Par conséquent, j'ai fait deux choses. J'ai essayé de revenir devant le comité le plus vite possible et je me suis informé en lisant le rapport le plus souvent que j'ai pu et en en parlant avec d'autres personnes.
    Je reconnais que j'ai fait une erreur en laissant entendre ou en donnant l'impression que je savais des choses sur ces erreurs en 2002, alors que je ne pouvais pas être au courant. J'en ai été informé en 2006, parce qu'à partir du moment où j'ai pris le rapport jusqu'à mon témoignage ici, j'ai été absorbé dans le rapport. J'ai clairement fait une erreur en laissant entendre que les connaissances que j'ai acquises à la lecture du rapport, en 2006, étaient mes connaissances en 2002. Je ne les avais clairement pas, et le juge O'Connor affirme clairement que je ne les avais pas.
    Je voudrais aussi dire que si j'avais été au courant à l'époque ou si l'un de mes officiers responsables avait été au courant à l'époque, je pense que le juge O'Connor, dans son rapport exhaustif, l'aurait probablement remarqué et souligné, parce que cette affaire prend des proportions très grandes. Mais c'est pas ce que le juge O'Connor a dit.
    Je le répète donc, je conviens que j'ai été imprécis et que j'ai fait une erreur. Mon erreur semble revenir de façon constante dans mes réponses, mais je suis ici pour la corriger de mon mieux.

  (0955)  

    Malgré tout le respect que je vous dois, monsieur, en tant que policier... Je reconnais que nous prenons des notes et que notre personnel en prend aussi. Depuis le 28 septembre jusqu'à aujourd'hui, vous n'êtes retourné vérifier auprès personne ce que vous nous avez dit alors? Vous vous fiez seulement à ce que vous lisez dans le rapport du juge O'Connor pour nous dire que vous avez fait une erreur?
    Non, j'ai relu mon témoignage. Absolument.
    Je parle de notes et de renseignements de n'importe qui. Lorsque vous nous avez dit que vous aviez appris que les enquêteurs avaient transmis de fausses informations et qu'ils avaient essayé de les corriger — il s'agit ici de 2002. Depuis le 28 septembre jusqu'à hier, où vous avez publiquement dit que vous n'aviez pas cette information, n'êtes-vous pas retourné parler à ces personnes?
    Je suis désolé, je –
    Tout ce que je vous dis, c'est que vous avez déclaré très clairement le 28 septembre que les enquêteurs vous avaient informé des erreurs commises.
    Ce n'était pas exact, parce qu'ils ne m'ont pas informé.
    Tout ce que je vous demande, c'est si vous êtes retourné les voir pour confirmer s'ils l'avaient fait ou s'ils ne vous avaient rien dit ou si encore vous vous fiiez exclusivement à ce qui est écrit dans le rapport du juge O'Connor.
    J'en ai effectivement reparlé à mes principaux collaborateurs et aucun d'entre eux n'était au courant. Ces cadres supérieurs m'ont ainsi confirmé que s'ils ne m'ont pas transmis l'information, c'est simplement parce qu'ils n'en savaient rien. C'est d'ailleurs exactement ce qu'a indiqué le juge O'Connor dans son rapport: aucun cadre supérieur n'était au courant. Les instances supérieures n'ont pas été informées étant donné que les enquêteurs qui travaillaient indépendamment de leur côté... Il a fallu attendre l'intervention du juge O'Connor pour que tous ces petits éléments d'information soient enfin rassemblés. Les enquêteurs ne pensaient pas mal agir à ce moment-là, et le juge O'Connor en convient. C'est pour cette raison que nous n'avons pas été informés.
    Êtes-vous en train de nous dire qu'il n'y a pas eu de séance de consultation avec votre personnel avant le début des audiences de la Commission O'Connor? C'est pourtant un dossier qui faisait les manchettes. C'est généralement le genre de dossier au sujet duquel vous allez tenir des réunions pour discuter. Avez-vous eu de telles discussions?
    Eh bien, il y a eu des discussions avec –
    Des discussions avec vos employés –
    Oui, nous avons examiné une partie de ces questions, mais je devais me montrer très prudent relativement aux résultats de l'enquête du juge O'Connor qui avait le mandat de rassembler tous ces éléments d'information pour en faire l'analyse. Il m'était impossible d'intervenir à l'égard des différentes composantes du dossier, car j'aurais couru le risque de nuire à l'enquête du juge O'Connor; nous devions avoir un portrait d'ensemble de la situation afin de pouvoir l'analyser en toute connaissance de cause. Il aurait été irresponsable de ma part d'intervenir après seulement un témoignage ou deux. Il est préférable d'attendre qu'un portrait général de la situation soit dégagé, ce qui fut le cas lorsque le rapport a été rendu public le 18 septembre.
    Je peux le comprendre, mais il s'est écoulé un certain temps avant que le juge O'Connor ne soit désigné pour mener cette enquête. Entre le moment où M. Arar a été libéré et ramené au Canada et la nomination du juge O'Connor, ne vous êtes-vous jamais réuni avec des cadres supérieurs ou des enquêteurs pour tirer les choses au clair?
    Non, parce que tout ce que nous savions c'est que M. Arar était une personne d'intérêt, que nous ne pouvions pas porter d'accusation contre lui et qu'il n'avait pas de lien avec al-Qaïda. Nous n'avons pas été mis au fait des erreurs commises, car les enquêteurs ne croyaient pas avoir fait fausse route, comme l'indiquent leurs témoignages devant la Commission O'Connor.
    Par exemple, je peux vous citer un point soulevé par le juge O'Connor. Entre le moment où M. Arar a vendu sa maison et son départ pour la Tunisie, il s'est écoulé cinq mois. Dans leurs notes, les enquêteurs ont indiqué que M. Arar avait quitté précipitamment le Canada. Dans les conclusions qu'il a tirées à la suite de son enquête, le juge O'Connor a dit que son départ n'avait pas été précipité, car on parlait quand même d'une période de cinq mois. Les enquêteurs ne croyaient pas qu'il s'agissait d'une erreur. C'est l'une des inexactitudes qui ont été relevées et qui posent problème. Ces petites informations disparates fausses ou trompeuses n'étaient pas considérées comme des erreurs à ce moment-là; cette perception a changé une fois que le juge O'Connor a terminé sa vérification détaillée pour réunir tous ces éléments et en arriver à sa conclusion.
    Merci.
    Nous passons maintenant à notre deuxième tour où chacun aura droit à cinq minutes pour les questions et les réponses.
    Monsieur Alghabra.
    Merci, monsieur le président.
    Commissaire Zaccardelli, merci pour votre présence.
    Je vais essayer de résumer brièvement la situation.
    C'est le 18 septembre dernier qu'a été rendu public le rapport du juge O'Connor révélant des manquements graves aux protocoles de la GRC alors que de fausses informations ont été transmises aux autorités policières des États-Unis. Les Canadiens avaient grand hâte d'entendre ce que vous aviez à dire à ce moment-là. Il a fallu dix jours pour que vous comparaissiez devant notre comité pour nous faire part de vos réactions. Vous nous avez alors dit de façon très claire — il n'y avait pas d'imprécisions et il ne s'agissait pas d'impressions — que vous aviez découvert en 2002 que des renseignements erronés avaient été transmis aux Américains, que vous aviez tenté de rectifier le tir et que vous en aviez avisé les ministres concernés à l'époque.
    Je dois également mentionner qu'entre le 18 et le 28 septembre, soit avant que vous ne vous présentiez devant notre comité, le ministre Day a confirmé sans équivoque son appui à votre bureau. Par ailleurs, certaines informations laissaient entendre que le cabinet du premier ministre n'affichait pas une telle confiance à ce moment-là, mais a ensuite changé son fusil d'épaule pour se rallier et appuyer votre travail et vos déclarations.
    Après le témoignage où vous nous avez déclaré avoir transmis l'information aux ministres en poste en 2002, trois anciens ministres ont comparu devant notre comité pour affirmer que vous ne les aviez jamais mis au courant.
    Et voilà que tout à coup, hier, vous prononcez une allocution devant le Economic Club pour expliquer toutes ces contradictions. C'est d'ailleurs une tournure des événements que je trouve fort intéressante étant donné que lors de votre dernière comparution — soit le 28 septembre — vous avez indiqué ne pas avoir fait de déclarations publiques parce que vous estimiez que notre comité constituait la seule tribune appropriée pour rendre compte aux Canadiens de vos actions et de la teneur de vos responsabilités. Mais il semble bien qu'hier vous avez décidé de présenter ce compte rendu devant le Economic Club, plutôt que devant notre comité.
    Ceci étant dit, vous nous avez indiqué ce matin que vous étiez disposé à parler de vos rencontres avec le ministre Day alors même que les membres du comité ont dû déployer des efforts considérables pour arriver à obtenir quelque détail que ce soit concernant de possibles rencontres politiques ou autres avec le ministre. Mais vous nous dites aujourd'hui que vous avez effectivement rencontré le ministre.
    Pourriez-vous nous indiquer à quel moment vous avez rencontré le ministre Day et qui était présent à cette rencontre?

  (1000)  

    D'accord. Merci beaucoup pour vos questions.
    Concernant le dernier point que vous soulevez, il est effectivement vrai que lors de ma dernière comparution, le 28 septembre, je n'étais pas aussi disposé à parler de mes rencontres avec le ministre. Si je ne l'ai pas fait, c'est parce que je n'avais pas pu en parler au ministre auparavant. Je croyais préférable de lui demander son autorisation ou s'il était d'accord pour que je parle de ces discussions ou de leur teneur. C'est la raison pour laquelle je me suis abstenu de le faire à ce moment-là. Depuis la séance du 28 septembre, j'ai pu parler au ministre Day qui m'a donné son accord pour que j'explique le tout. Alors je vais vous fournir toutes les explications voulues.
    Voilà qui est intéressant. Vous admettez donc que le ministre Day exerce une certaine forme d'influence sur le contenu de vos témoignages et de vos déclarations. C'est un point très important et je suis heureux que vous ayez fait la lumière à ce sujet.
    Ingérence politique.
    Pourriez-vous maintenant répondre à ma question?
    Je vous prie de m'excuser, mais je dispose d'un temps très restreint.
    Je veux une réponse à cette question. De quoi avez-vous parlé avec le ministre Day entre le 18 et le 28 septembre et qui était présent lors de cette rencontre? C'est ce que je veux savoir.
    Je vous prie de laisser au commissaire la chance de répondre.
    Je dois apporter des précisions à ce sujet, parce qu'il n'y a pas eu d'ingérence. J'ai simplement demandé au ministre s'il était d'accord pour que je divulgue à votre comité la teneur des discussions que j'ai eues avec lui. Je crois que c'était la bonne façon de faire les choses. Je serais malvenu de révéler le contenu de telles discussions sans son autorisation.
    Comme je l'ai indiqué, je suis revenu le mercredi après-midi. Le jeudi matin, j'ai appris que votre comité pourrait tenir une séance. J'ai écrit au ministre le jour même pour lui faire savoir que je voulais comparaître dès que possible pour faire connaître mes réactions dans ce dossier. J'ai rencontré le ministre le lendemain. Nous avons discuté du dossier. C'est au cours de cette discussion que nous avons constaté que le comité siégeait le mardi suivant. Nous nous sommes dit que c'était la bonne –
    Le comité ne vous a-t-il pas contraint à témoigner?
    Pas à ce moment-là. Nous en avons entendu parler, mais nous avons indiqué très clairement que ce comité constituait la tribune à privilégier pour discuter de ce dossier très important. C'est la raison pour laquelle les médias ont été si critiques à mon endroit. Je n'ai pas voulu en parler à la presse dans un premier temps. J'ai choisi de garder le silence de manière à parler d'abord de ce dossier devant le comité.
    Il s'est avéré qu'il m'aurait peut-être fallu davantage de temps, car je ne pouvais pas encore saisir à ce moment-là toutes les répercussions des différentes constatations de ce rapport.
    Qui était présent lorsque vous avez rencontré le ministre Day?
    M. Day et sa sous-ministre.
    Existe-t-il des notes d'information relativement à cette rencontre que vous pourriez fournir à notre comité?
    Non, aucune note n'a été prise; il s'agissait d'une brève rencontre très informelle. Le comité devait se réunir et nous avons tous les deux convenu que c'était le meilleur endroit pour faire connaître mes réactions, et c'est la raison pour laquelle nous avons pris les dispositions nécessaires à ma comparution. Mais vous n'avez pas tenu de séance ce mardi-là, parce qu'il y avait d'autres réunions prévues, et le tout a été remis au jeudi. C'était la séance du 28 septembre.

  (1005)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Ménard, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le commissaire, vous ne savez toujours pas pourquoi les Américains ont décidé d'envoyer Maher Arar en Syrie?
    Excusez-moi...
    Vous ne savez toujours pas pourquoi les Américains ont décidé d'envoyer Maher Arar en Syrie?
    Non, je ne le sais pas.
    Vous n'avez pas reçu, de la part des Américains, d'autres informations sur M. Arar?
    Non, pas du tout.
    Mais dans le cadre de cette lutte que mènent les pays civilisés avec nos alliés, quand on possède sur un citoyen d'un autre pays des informations qui justifient une mesure radicale comme son renvoi en Syrie, où on sait à quels risques il sera exposé, n'est-il pas naturel de faire part de ces informations au service de renseignement du pays dont il est citoyen?

[Traduction]

    Monsieur le président, je ne connais pas encore aujourd'hui les motifs de la décision des Américains d'envoyer M. Arar en Syrie. Le juge O'Connor n'a pu en arriver à une conclusion définitive à ce sujet étant donné que les Américains ont refusé de témoigner. Je ne suis au courant d'aucun renseignement qui aurait pu être échangé par qui que ce soit relativement à cette affaire, que l'on parle des Syriens ou des Américains.

[Français]

    C'est donc vraisemblablement après avoir reçu des informations exagérées ou erronées de la part de la GRC que les Américains ont décidé d'envoyer M. Arar en Syrie, en sachant d'avance quel sort lui serait réservé, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Je répète que le juge O'Connor n'a pas pu en arriver à une conclusion nette sur les fondements de la décision des États-Unis étant donné qu'aucun Américain n'a témoigné devant lui. Il a bel et bien indiqué que les États-Unis disposaient de renseignements provenant du Canada, de la GRC, en précisant qu'il est fort probable que ces renseignements aient influé sur leur décision. Mais il n'a pas été en mesure de tirer une conclusion définitive à cet effet.

[Français]

    Monsieur le commissaire, je trouve invraisemblable que les Américains, s'ils possédaient d'autres informations impliquant M. Arar dans des réseaux terroristes, n'aient pas informé les autorités canadiennes de ces faits. Pour ma part, je trouve inadmissible qu'un officier de police, apprenant qu'à cause d'erreurs commises par ses subordonnés un individu est en prison, ne fasse pas tout ce qui est en son pouvoir pour le faire libérer de prison.
    Je trouve aussi inadmissible que ce fait ne soit pas communiqué au ministre. C'est pourquoi je vous demande, si vous êtes un homme d'honneur, de démissionner.

[Traduction]

    Monsieur le président, je l'ai déjà répété à maintes reprises aujourd'hui... J'ai essayé d'être aussi précis et aussi exact que possible. J'ai admis avoir commis une erreur et avoir peut-être fait des déclarations qui n'étaient pas tout à fait justes... À l'instar de mes principaux collaborateurs, je n'avais aucune information au sujet des erreurs commises par les membres de la GRC jusqu'à ce que le rapport les dévoile en 2006. Le juge O'Connor l'affirme d'ailleurs très clairement. J'ai cité le juge O'Connor à ce sujet aujourd'hui. Il est donc inexact d'affirmer que je disposais de ces renseignements au moment où M. Arar était à New York ou en Syrie.

[Français]

     Pourtant, vous savez très bien que c'est ce que nous croyions en vous écoutant la dernière fois. Or, vous ne nous avez pas corrigé à ce moment-là. Ne serait-ce pas plutôt que depuis ce temps, vous avez compris la gravité des informations qui n'étaient pas dans le rapport O'Connor mais que vous nous avez vous-même communiquées depuis?

[Traduction]

    Monsieur le président, je me suis présenté ici pour essayer de rectifier les faits en m'exprimant aussi ouvertement que possible. Je ne crois pas être la première personne à comparaître devant un comité pour apporter des précisions relativement à un dossier dans lequel on n'a pas nécessairement toujours donné l'heure juste; et je ne serai sans doute pas le dernier. J'ai commis des erreurs, et j'en commettrai probablement d'autres, mais je me présente ici pour rectifier les faits dans toute la mesure du possible afin d'aider le comité à tirer les conclusions qui s'imposent.
    Avez-vous une dernière question?
    Nous vous écoutons.

[Français]

    Vous avez dit à M.Cotler que quand vous avez appris que M. Arar avait été emprisonné en Syrie, vous avez demandé le dossier et vous avez constaté les erreurs qui avaient été faites et qui avaient été corrigées. Donc, vous possédiez les éléments nécessaires pour comprendre que si les Américains ne vous disaient pas autre chose, c'était à cause de ces erreurs que M. Arar avait été emprisonné et que, par conséquent, un innocent était incarcéré en Syrie et que, vraisemblablement, les fausses informations que vous aviez trouvées dans le dossier, au moment où vous avez demandé à le consulter, étaient à l'origine des événements.

  (1010)  

[Traduction]

    Je le répète, monsieur le président, ce n'est que lorsque le rapport a été rendu public que j'ai su que des erreurs avaient été commises et que M. Arar avait été présenté sous un faux jour. Si j'ai fourni des informations erronées quant à ma connaissance du dossier en 2002, c'est parce que, comme j'ai essayé de l'expliquer, j'étais absorbé par la lecture du rapport, ce qui a probablement créé une certaine confusion entre ce que j'ai appris en 2006 et ce que je savais en 2002. À ce moment-là, je savais seulement que M. Arar était considéré comme une personne d'intérêt. Ce fut le cas dès le départ jusqu'à la conclusion du rapport.
    Je savais aussi qu'il nous était impossible de l'arrêter. Nous ne pouvions pas déposer des accusations contre lui. Nous ne pouvions pas l'empêcher de revenir au Canada. C'est tout ce que je savais. C'est tout ce qu'on m'avait dit. Ce sont les renseignements que j'ai transmis à la ministre au meilleur de mes connaissances, ce que j'ai continué de faire avec le ministre actuellement en poste. Nos cadres supérieurs n'en savaient pas davantage. Le juge O'Connor a bien précisé que ces renseignements n'avaient pas été transmis aux échelons supérieurs de l'organisation parce que les enquêteurs ne croyaient pas qu'une erreur avait été commise. À la suite de son examen exhaustif du dossier, le juge O'Connor a rassemblé tous les faits pour en arriver à cette conclusion que nous avons acceptée entièrement. Nous avons pris d'importantes mesures pour mettre en oeuvre ses excellentes recommandations de telle sorte que des erreurs de ce genre ne puissent pas se reproduire.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Brown pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Commissaire, voilà vraiment un épisode tragique dans la glorieuse histoire de la GRC. Je suis très déçu.
    Vous avez indiqué à M. Holland que vous n'aviez pas été aussi précis que vous auriez pu l'être dans vos réponses du 28 septembre et je dois dire, en toute franchise, que cela ne tient pas la route. Vous avez été en fait très précis. Vous nous avez indiqué exactement à quel moment vous avez supposément obtenu l'information. Vous nous avez indiqué avoir été mis au courant des erreurs commises et vous êtes même allé jusqu'à donner comme excuse le très bref délai accordé pour la note d'information qui a induit en erreur le Bureau du Conseil privé, ce qui est tout à fait faux comme nous le savons maintenant. Pouvez-vous prétendre le contraire? Comment expliquez-vous ces indications erronées que vous avez fournies en réponse à ma question du 28 septembre, concernant la note d'information pour le BCP?
    Merci pour cette question, monsieur Brown.
    Pour ce qui est de la note d'information destinée au BCP, comme j'ai déjà essayé de l'expliquer... et je dois admettre à nouveau que ma réponse n'a pas été aussi exacte qu'elle aurait pu ou dû l'être parce que je ne détenais pas à ce moment-là tous les renseignements voulus. J'ai indiqué que nous disposions d'un délai de 24 heures pour rédiger la note d'information. En réalité, nous disposions, je crois, de neuf ou 14 jours. Si j'ai parlé de 24 heures, c'est parce que c'est le temps qu'il nous restait lorsque j'ai été avisé que mon personnel devait préparer une note d'information à l'intention du BCP. Vingt-quatre heures avant l'expiration du délai prévu pour la présentation de la chronologie des événements au BCP, mon sous-commissaire m'a informé de cette échéance. J'ai donc présumé qu'on nous avait octroyé 24 heures pour ce faire. Je ne savais pas à ce moment-là — je l'ai appris plus tard — que nous avions en fait eu droit à neuf ou 14 jours, ce qui nous avait permis de commencer à accumuler l'information requise. Malgré le fait que nous avions amorcé le travail depuis neuf ou 14 jours, nous n'avons pas été en mesure de rassembler toute l'information disponible pour le compte rendu que nous devions présenter... C'est la raison pour laquelle nous avons fourni ces renseignements au meilleur de nos capacités, mais de façon progressive. Ainsi, lorsque nous avons fourni au BCP une première série de renseignements, nous avons bien expliqué qu'il y en aurait d'autres à venir parce qu'il nous avait été impossible de rassembler toute l'information disponible.
    J'ai donc parlé d'un délai de 24 heures parce que mon sous-commissaire m'a avisé de cette échéance seulement 24 heures à l'avance. Je me suis alors demandé comment on pouvait nous accorder seulement 24 heures. Mais nous travaillions sur ce dossier depuis déjà neuf ou 14 jours, je ne peux malheureusement pas être plus précis à ce sujet. Malgré un tel délai, il ne nous a pas été possible de rassembler toute l'information et nous avons indiqué au BCP que nous allions leur transmettre ces renseignements au fur et à mesure, le plus rapidement possible...

  (1015)  

    D'accord.
    Vous avez également dit que le juge O'Connor avait mis au jour tous ces faits qui vous avaient, on ne sait trop comment, échappé. Mais il faut bien préciser, commissaire, que l'information obtenue par le juge O'Connor concernant les erreurs commises par la GRC lui provenait des agents de la GRC eux-mêmes. Comment est-il possible que le commissaire ne puisse pas obtenir de tels renseignements des membres de son organisation, même si l'on admet que son but n'était pas d'induire notre comité en erreur ou de camoufler la vérité, comme vous le prétendez maintenant? Ne pourrait-on pas en conclure que vous n'avez tout simplement pas été à la hauteur à titre de commissaire de la GRC?
    Encore là, c'est une bonne question.
    Vous savez que 25 000 employés relèvent de mes ordres. En tout temps, des dizaines de milliers d'enquêtes et de dossiers sont ouverts. Nous avons un système qui permet d'acheminer les dossiers les plus importants, ceux dont je dois être informé, en précisant notamment des délais pour ce faire. Il faut se souvenir que le dossier qui nous intéresse ciblait un certain nombre de présumés terroristes islamistes. M. Arar n'était pas parmi les suspects directement visés; c'était une personne d'intérêt qui évoluait en marge de ce groupe. Normalement, ce n'est pas le genre de dossier dont je devrais être informé. Ce n'est donc que lorsque le dossier a pris de l'importance, après l'incarcération de M. Arar en Syrie, qu'on a commencé à me tenir au courant.
    Par ailleurs, comme je l'ai moi-même indiqué et comme le juge O'Connor l'a confirmé, les membres de la GRC qui ont fourni les renseignements erronés ou présenté M. Arar sous un faux jour ne savaient pas eux-mêmes qu'ils faisaient fausse route. C'est seulement lorsque le juge O'Connor a rassemblé tous les éléments à l'issue de son travail de vérification... Cette situation n'est pas inhabituelle dans une grande organisation où des éléments d'information disparates peuvent être dispersés un peu partout. Il est difficile de dégager le sens de chacun de ces éléments tant qu'ils ne sont pas réunis dans le cadre d'une enquête ou d'une vérification.
    C'est exactement ce qui s'est produit en l'espèce. C'est la raison pour laquelle aucun de mes cadres supérieurs n'était au courant et qu'il leur était donc impossible de m'en informer, parce que les agents directement concernés n'étaient pas conscients que des erreurs avaient été commises ou qu'on avait présenté l'intéressé sous un faux jour. C'est l'un des principaux enseignements à tirer du rapport O'Connor. C'est ce qui nous a incités à dispenser une formation plus approfondie. Nous avons également mis en place des politiques plus rigoureuses en matière d'échange de renseignements. C'est ce que nous a apporté le travail du juge O'Connor; nous avons vraiment tiré des leçons de cette expérience et pris les moyens pour que de telles erreurs ne puissent se reproduire.
    Commissaire, c'est une question très importante. Nous parlons ici d'un homme qui a été envoyé en Syrie et qui y a été torturé. Nous parlons aussi des contribuables canadiens qui risquent de devoir débourser 400 millions de dollars.
    Je veux revenir un peu à ce que vous nous disiez dans votre déclaration préliminaire d'aujourd'hui en citant l'ancienne ministre McLellan qui affirmait qu'il n'est pas nécessaire de faire tomber des têtes pour avoir une reddition de comptes. Mais cela peut parfois être nécessaire. Croyez-vous que ce serait le cas dans ce dossier?
    Je suis persuadé que je vais manquer de temps, mais je veux également vous interroger au sujet des changements de procédures dont vous nous avez parlé un peu. Quelles autres mesures sont mises en place afin de s'assurer que de tels événements ne puissent se reproduire?
    Comme je l'ai indiqué, à la lumière du rapport du juge O'Connor, nous pouvons maintenant compter sur une structure de gouvernance très rigide, qui fait en sorte qu'aucun renseignement ne peut être communiqué à l'extérieur de la GRC sans qu'on ne procède à toutes les vérifications et à toutes les approbations requises à l'administration centrale. Ainsi, les renseignements ne sont communiqués qu'après examen du dossier par les cadres supérieurs pour faire en sorte que toutes les politiques applicables soient respectées. Il s'agit là d'une structure de gouvernance très rigoureuse et très centralisée.
    Nous offrons une formation approfondie à nos employés pour qu'ils soient bien conscients du fait que lorsqu'une personne est étiquetée, surtout lorsqu'il est question de sécurité nationale, il faut agir très prudemment car toute erreur peut être grave et avoir des conséquences sérieuses. C'est une priorité que nous voulons faire ressortir même à l'extérieur de nos compétences en matière de sécurité nationale. Il y a donc un processus d'apprentissage très rigoureux.
    Les échanges d'information sont soumis à un contrôle très serré. La formation dispensée est bien meilleure qu'auparavant. Nous avons conclu de nouveaux protocoles d'entente avec le SCRS. Nous avons un protocole très strict et très détaillé qui fait en sorte que chacun comprend bien ce que l'autre fait. Nous sommes en bonne voie de concrétiser tous les enseignements tirés du rapport du juge O'Connor. Bien qu'on ne puisse jamais être sûr de rien, cela m'amène à croire que les importants progrès que nous avons réalisés à ce chapitre devraient nous permettre d'éviter que de telles erreurs se reproduisent.
    Mais je veux également revenir à l'opinion émise par le juge O'Connor concernant nos enquêteurs. Il a dit qu'ils étaient des employés vaillants et dévoués. Il a fait valoir qu'ils avaient commis des erreurs de bonne foi, qu'ils n'étaient pas mal intentionnés et qu'ils ne voulaient causer de tort à personne. Ils ont fait du mieux qu'ils ont pu dans un contexte qui était très lourd et très difficile. C'est la raison pour laquelle, à mon avis, le juge O'Connor se montre aussi équitable en matière de reddition de comptes. Il prend en considération l'ensemble de la conjoncture dans laquelle ces personnes travaillaient et nous propose des enseignements à en tirer; il formule ensuite les recommandations qui s'imposent pour éviter que les mêmes erreurs soient commises.

  (1020)  

    Seriez-vous en faveur de la création d'un comité de surveillance parlementaire, d'un comité de parlementaires?
    Comme vous le savez, le juge O'Connor déposera un rapport sur la surveillance à la fin du mois, et j'accepterai les recommandations que le gouvernement décidera d'appliquer. J'ai affirmé dans le témoignage que j'ai rendu devant le juge O'Connor que j'accepterai tout mécanisme de surveillance qui nous sera imposé, parce qu'il ne faut pas que les Canadiens perdent confiance dans leur force policière nationale. J'appuierai toute décision prise par le gouvernement en matière de surveillance, que ce soit la mise sur pied d'un comité parlementaire, d'un autre type de comité ou d'un autre mécanisme de surveillance.
    Merci.
    Nous allons passer au troisième tour de table, mais auparavant, j'ai une question qui s'impose d'elle-même. Après la séance du 28 septembre, vous avez sûrement demandé un breffage quelconque à votre personnel supérieur. Pourriez-vous décrire l'une ou l'autre des notes de breffage que vous a remises votre personnel? Pourriez-vous également fournir au comité les notes de breffage rectificatrices que votre personnel vous aurait remises? Seriez-vous prêt à faire cela, monsieur?
    Honnêtement, j'ignore s'il existe des notes de breffage, monsieur le président. Après la séance du 28 septembre, je me suis assis avec mon personnel et mes conseillers et nous avons examiné ce qui c'était produit. Évidemment, il est apparu alors... On m'a dit que mes réponses n'étaient pas aussi précises qu'elles auraient pu l'être, et nous avons commencé à examiner encore ce qui se trouvait dans le rapport. Nous avons entrepris cet examen et nous avons obtenu la transcription de mon témoignage et nous l'avons comparé avec le rapport et avons regardé quelle était l'information, etc.
    Vous vous souviendrez que peu de temps après, je crois, les membres du comité se sont entretenus avec d'anciens solliciteurs généraux, et on a signalé que le commissaire ne les avait pas informés, etc. C'est alors que nous avons appelé le greffier et le comité pour comparaître de nouveau devant vous.
    Il y a donc eu une série de discussions et on a analysé mon témoignage, ce qui se trouvait dans le rapport et ce qui s'était produit, mais je vais vérifier et s'il existe des notes ou autre chose, monsieur le président, je vais assurément vous les fournir.
    Je pense davantage à une enquête quelconque que vous avez dû lancer au sein de votre ministère pour savoir ce qui s'était passé. Et vous dites que nous n'avez reçu aucune note de breffage à la suite de cette enquête?
    Nous n'avons pas mené d'enquête. Nous avons examiné ce que j'avais dit, quelles étaient les questions et quelles étaient mes réponses, ce que le juge O'Connor a dit et quel témoignage a été rendu devant lui. Nous nous sommes concentrés sur cela. C'est ce que nous avons examiné.
    D'accord
    Monsieur Cotler, êtes-vous prêt à commencer le prochain tour de table?
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, mes questions sont très simples en ce sens qu'elles requièrent seulement une réponse factuelle. Je crois que les réponses sont peut-être même déjà publiquement connues.
    Est-il vrai que les responsables de la GRC, qui relèvent de votre autorité générale, ont donné des renseignements faux et trompeurs aux responsables américains — des renseignements qui, comme l'a dit le juge O'Connor, ont vraisemblablement contribué à la déportation de M. Arar en Syrie — et que les responsables canadiens ont par la suite fourni aux autorités américaines un correctif concernant cette information fausse et trompeuse? J'ajouterais que vous avez vous-même témoigné dans ce sens.
    Je répondrais, au mieux de ma connaissance, oui à la première partie, en ce sens que nous avons fourni cette information, cette information qui a été mal classée, qui était inexacte. Oui, nous avons fourni cela...
    C'est tout ce que je voulais savoir, monsieur le commissaire.
    – mais votre question comportait une deuxième partie; nous n'avons jamais envoyé de correctif aux Américains.
    Je croyais que vous aviez affirmé que les renseignements faux et trompeurs avaient été corrigés. Vous dites maintenant que ce n'est pas le cas. Je ne sais pas quelle version il faut retenir à cet égard, monsieur le commissaire, alors permettez-moi de continuer.
    Est-il vrai que les responsables de la GRC ont donné aux responsables américains des renseignements faux et trompeurs que vous n'avez jamais donnés aux responsables canadiens, et que cette information a été corrigée auprès des responsables américains, mais jamais auprès des responsables canadiens?

  (1025)  

    Non. Des renseignements ont été donnés — et ceci s'applique à votre première question — aux Américains, que nos enquêteurs ne croyaient pas être faux ou inexacts, mais que le juge O'Connor, dans son rapport, juge être inexacts, faux et trompeurs et nous n'avons pas... Nous n'avons donc jamais remis cette information aux ministres, parce que nous n'avons jamais cru... Je n'avais pas cette information; elle ne m'avait jamais été communiquée.
    Permettez-mois de vous poser cette question, monsieur le commissaire. Saviez-vous que la GRC, dans un geste sans précédent, pour emprunter les mots du juge O'Connor, avait fourni sa base de données Supertext en entier aux représentants américains au sujet de M. Arar et de toutes enquêtes connexes?
    Je l'ai appris en lisant le rapport du juge O'Connor.
    Vous ne saviez pas qu'un geste sans précédent et aussi grave que celui de fournir une base de données Supertext en entier avait été commis sans que vous ne l'ayez autorisé et à votre insu, même si vous êtes le commissaire responsable des activités de la GRC? Cela n'avait jamais été fait.
    C'est exact. Il y a plusieurs éléments à considérer.
    Répondez simplement oui ou non. Le saviez-vous?
    Non, mais c'était une époque sans précédent. C'est pourquoi il y a eu des échanges d'information sans précédent.
    Je reprends les mots du juge O'Connor; c'était un geste sans précédent.
    Permettez-moi de poser la prochaine question. Quelle que soit la version –
    Eh bien, monsieur le président –
    Non, monsieur le commissaire, je vous ai simplement posé la question comme un exposé de fait. Vous avez répondu que vous ne le saviez pas.
    Je n'ai pas répondu à la question, monsieur le président. Je veux pouvoir répondre à la question.
    Allez-y, monsieur Zaccardelli.
    C'était un geste sans précédent, et j'accepte le rapport du juge O'Connor. Si ma mémoire est bonne, j'ai peut-être vu une ou deux notes de breffage mentionnant que cet échange extraordinaire d'information entre Canadiens et Américains avait eu lieu, mais ceci a également été confirmé auprès du juge O'Connor.
    Je veux être très précis. Je crois que j'aurais été mis au courant après les faits, lors d'un breffage que j'aurais reçu à titre de commissaire.
    Monsieur le commissaire, quelle que soit la version que nous retenons, votre témoignage du 28 septembre ou celui d'aujourd'hui, il est clair que vous n'avez jamais corrigé l'information qui circulait, notamment les fuites selon lesquelles M. Arar était un terroriste et un « individu très peu recommandable », ce qui, selon le juge O'Connor, a eu un effet dévastateur sur Maher Arar, même si vous saviez, selon votre propre témoignage d'alors et celui d'aujourd'hui — et cela au moins est cohérent — qu'il n'y avait aucune preuve montrant que M. Arar était un extrémiste islamiste associé à al-Qaïda. Comme vous l'avez déclaré aujourd'hui, il n'y avait aucune raison de l'arrêter, de le garder en détention, de lui refuser d'entrer au Canada. Or, lorsque toutes ces fuites dommageables sont survenues — et le juge O'Connor parle de huit fuites dommageables — causant un tort très grave à M. Arar, vous n'avez jamais rectifié ce qu'on disait publiquement. Ne croyez-vous pas qu'à titre de commissaire de la GRC, vous aviez la responsabilité de rectifier l'information qui circulait, alors qu'un citoyen canadien se trouvait dans un pays qui, nous le savions, infligeait couramment des tortures à des citoyens canadiens?
    Monsieur Cotler, comme je l'ai dit précédemment et aujourd'hui, M. Arar était une personne d'intérêt depuis le tout début de cette enquête. Il a continué d'être une personne d'intérêt pour la GRC lorsqu'il était détenu à New York, détenu en Syrie, en prison, et tout au cours de l'enquête. Il a cessé d'être une personne d'intérêt pour nous seulement lorsque le juge O'Connor a déposé son rapport.
    Il a toujours été une personne d'intérêt pour nous. Le juge O'Connor dit que nous étions légitimement en droit de le considérer ainsi et de mener une enquête sur lui. C'est pourquoi je ne pouvais rien dire à ce sujet. À la première occasion, lorsque le rapport a été rendu public, j'ai présenté publiquement des excuses pour le rôle que la GRC avait pu jouer dans l'épreuve qu'avait subi M. Arar.
    J'ai une dernière question.
    Ce sera votre dernière question. Rapidement, je vous prie.
    Quelle que soit la version que nous retenons, votre témoignage du 28 septembre ou celui d'aujourd'hui, il est clair que vous n'avez jamais fourni aux ministres canadiens, comme le juge O'Connor le dit, la chronologie détaillée des faits et les données d'enquête qu'ils auraient dû avoir. Deuxièmement, vous n'avez jamais rectifié l'information qui circulait, comme je l'ai précisé aujourd'hui. Troisièmement, vous n'avez pas appuyé la lettre consensuelle, comme vous auriez dû le faire selon le juge O'Connor, même si les droits de M. Arar avaient été et continuaient d'être gravement brimés après cela. Quatrièmement, vous n'avez pas pris la peine, même si on vous a demandé de le faire à titre de commissaire de la GRC, de faire toute la lumière sur un Canadien qui était gardé en détention. Oubliez ce qu'on vous a dit et ce qu'on ne vous a pas dit. Vous-même, vous n'avez pas fait ces efforts.

  (1030)  

    Votre temps est écoulé, monsieur Cotler.
    Ma question est la suivante: est-ce que le commissaire de la GRC, avec toutes les lacunes que je viens d'exposer et d'autres, doit continuer d'être responsable des activités de la GRC alors qu'il a clairement manqué à ses responsabilités, comme je l'ai décrit et comme le juge O'Connor l'a décrit?
    Pourrais-je avoir une réponse brève?
    Monsieur Cotler, vous me posez environ sept questions dans une seule. Je vais essayer de répondre de mon mieux.
    Vous dites que je n'ai pas ou que la GRC n'a pas informé les ministres de ces erreurs ou de ces faits. Comme je l'ai dit précédemment, et comme M. O'Connor le dit dans son rapport, je ne pouvais pas le faire puisque je n'avais pas cette information. Cette information a été connue seulement après que le juge O'Connor a terminé son enquête exhaustive et son examen du dossier. Dès lors, j'ai comparu devant votre comité et j'ai présenté des excuses, comme je l'ai dit, pour que M. Arar comprenne que nous étions désolés d'avoir joué un rôle quelconque dans l'épreuve qu'il a subie.
    Nous avons fait tout ce que nous pouvions. Je me suis informé. J'ai dit à maintes reprises, et j'ai transmis cette information à nos ministre et au BCP, que M. Arar était une personne d'intérêt . Il a continué d'être une personne d'intérêt tout au cours de l'enquête. Nous ne pouvions pas porter d'accusation criminelle contre lui. Nous ne pouvions pas le détenir s'il revenait au Canada. Nous ne pouvions pas l'empêcher d'entrer au Canada. Nous avons transmis toute l'information que j'avais. Je n'ai pas pu transmettre l'information que je n'avais pas, et le juge O'Connor le dit dans son rapport. 
    Merci.
    Monsieur Norlock, je vous prie.
    Bonjour, monsieur le commissaire. Je vous remercie de comparaître de nouveau devant nous.
    Lors de votre dernière présence ici, je vous ai posé une question concernant le processus que vous étiez en train de mettre en place pour garantir que ceci ne se reproduirait plus. Je crois que j'avais parlé d'un échange de pratiques exemplaires avec d'autres grandes organisations policières, au Canada ou ailleurs — je n'ai peut-être pas dit ailleurs, et nous avons certainement d'autres organisations au Canada.
    Vous avez dit au comité aujourd'hui que vous aviez mis en place une structure pour faire en sorte que les circonstances entourant l'affaire Maher Arar ne se reproduisent plus. Je me demande si quelqu'un de l'extérieur de votre organisation a examiné la mise en oeuvre de ce plan, de manière à ce qu'un regard neuf puisse peut-être apporter un autre éclairage sur la situation.
    Ma question est la suivante: vous êtes-vous tourné vers l'extérieur pour obtenir d'autres renseignements ou demander une opinion? Le cas échéant, à qui vous êtes-vous adressé et quel échange d'information avez-vous eu?
    Merci beaucoup de poser cette question.
    Oui, nous sommes allés à l'extérieur de la GRC. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons renouvelé notre protocole d'entente, par exemple, avec le SCRS si bien que nous travaillons maintenant plus en phase et de façon beaucoup plus étroite, que nous comprenons beaucoup plus clairement nos mandats respectifs et que nous veillons à synchroniser notre travail. Nous avons appris quelles étaient leurs pratiques exemplaires en matière de gestion des renseignements délicats, la manière d'échanger ces renseignements.
    Nous sommes allés également à l'extérieur du Canada, par exemple, en Grande-Bretagne. Comme vous le savez, la Grande-Bretagne a été mise au défi de nombreuses façons sur le plan de la sécurité nationale. Nous nous sommes entretenus avec le Met en Angleterre et avec des représentants du MI5. Nous sommes allés en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans d'autres pays qui doivent faire face aux mêmes défis que pose le terrorisme et qui doivent déterminer comment les services de sécurité et les organismes chargés de l'application de la loi peuvent travailler ensemble et de façon intégrée dans ces dossiers. Nous avons échangé de l'information.
    Nous avons examiné les pratiques exemplaires. J'ai envoyé une équipe partout dans le monde pour examiner les pratiques exemplaires. Nous avons intégré ce travail, ainsi que les recommandations du juge O'Connor, dans nos politiques, nos pratiques, notre formation, etc.
    Encore une fois, je ne peux rien garantir à cet égard. Le juge O'Connor a dit que nos politiques étaient très bonnes, même avant le 11 septembre. Je crois que nous avons un très bon système qui résisterait au meilleur examen du juge O'Connor ou de n'importe qui d'autre et qui est comparable, sinon meilleur, à celui d'un bon nombre de pays. Il doit en être ainsi, puisque nous avons tiré beaucoup de leçons ici. Cette situation a causé du tort à beaucoup de personnes. J'ai moi-même traversé des semaines difficiles depuis mon dernier témoignage. Si quelqu'un a été gravement touché du fait que l'information n'était pas précise, c'est bien moi.
    Nous avons donc tous tiré des leçons. C'est ce que j'essaie de faire. Je regarde vers l'avenir, sans oublier le passé, mais en essayant de corriger ces erreurs, et nous avons parcouru le monde pour examiner ces pratiques exemplaires.

  (1035)  

    J'ai quelques petites questions. Je dis « petites » en ce sens qu'elles peuvent être courtes, mais leur portée n'est certainement pas minime.
    Dans votre témoignage d'aujourd'hui, vous avez dit que vous ne pouviez pas, que la GRC ne pouvait pas se permettre que les Canadiens se mettent à douter que la principale force policière du Canada ne soit entièrement pure, dans la mesure où c'est ce qu'on peut attendre de n'importe quel groupe d'hommes et de femmes.
    Étant un agent de police depuis 36 ou 37 ans, lorsque vous voyez les répercussions du témoignage que vous avez présenté devant notre comité, tant sur l'institution du gouvernement que sur la relation que votre force policière entretient avec lui, croyez-vous que d'autres changements organisationnels seraient nécessaires — en fait, à titre de premier directeur, vous avez apporté certains changements — en ce qui a trait au personnel et à ses responsabilités actuelles, et pour aller plus loin et reprendre ce qu'a dit M. Ménard –
    Pourriez-vous conclure? Votre temps est écoulé.
    Monsieur le Commissaire, pourriez-vous nous donner une réponse brève?
    Oui, mais pour poursuivre ce que M. Ménard a dit, lorsqu'on réalise qu'on a fait une chose qui a entraîné un certain dérapage, ne devrait-on pas s'adresser directement aux gens qu'on a mal informés? Autrement dit, lorsque vous avez remarqué que vous aviez mal informé notre comité, n'avez-vous pas songé à envoyer immédiatement une note au président du comité, de manière à ce que nous n'apprenions pas la nouvelle d'une autre tribune publique à laquelle vous avez participé?
    Comme vous le savez, monsieur, mon bureau a appelé immédiatement le greffier et le ministère pour communiquer avec le comité, mais le comité avait d'autres travaux, etc. Nous espérions revenir avant d'autres témoins, et j'ai rédigé une lettre, en date du 2 novembre, il y a donc plus d'un mois.
    Nous avons essayé tout ce que nous pouvions, mais nous avons travaillé en étroite collaboration avec le comité pour trouver un arrangement qui convienne de part et d'autre. Je crois que j'ai fait tout ce que je pouvais. J'ai reconnu que des correctifs étaient nécessaires immédiatement, et nous avons pris toutes les mesures possibles.
    Monsieur Chan, je vous prie.
    Monsieur Zaccardelli, le 28 septembre vous avez fait des déclarations qui ont eu des incidences énormes. Vous êtes tellement certain de ce qui s'est produit dans ce cas. Je crois que certaines circonstances vous ont amené à faire ces déclarations, à cause des incidences. Et les choses n'apparaissent pas, ne se produisent pas d'elles-mêmes. Il doit y avoir certaines circonstances qui vous ont amené à faire pareilles déclarations.
    J'aimerais en arriver au motif et aux circonstances qui vous ont amené à faire ces déclarations que vous essayez maintenant de nier.
    Tout d'abord, entre le 18 septembre et le 28 septembre, vous parliez de votre rencontre avec le ministre Day. Vous êtes allé jusqu'à rencontrer le ministre Day le vendredi 22 septembre. Pouvez-vous nous dire qui était présent à cette rencontre et ce qui y a été discuté? De quoi a-t-on parlé à cette rencontre et à toutes autres rencontres que vous avez eues avec le ministre Day?

  (1040)  

    Monsieur le président, j'aimerais répondre à la première partie de la question.
    Monsieur Zaccardelli, nous n'avons pas besoin de réponse à ce sujet. Nous voulons savoir ce qui a été discuté avec M. Day, qui était présent à cette rencontre et à toutes autres rencontres que vous avez eues avec M. Day avant votre témoignage.
    Monsieur le président, cette question comporte certains aspects qui doivent être corrigés, je crois.
    Il y a tout d'abord le témoignage du 28 septembre dont il est question. J'y ai beaucoup réfléchi. Les conséquences ont été graves pour moi. Je ne crois pas que j'aurais fait cela intentionnellement.
    Comme je l'ai dit, j'ai essayé de donner la meilleure explication que je pouvais donner et j'ai essayé d'absorber la meilleure information. Toutefois, il est clair que j'ai fait une erreur en transmettant ce que j'ai appris et ce qui m'a motivé en 2006 à la lecture du rapport. J'ai laissé entendre et j'ai affirmé que j'avais peut-être eu cette information en 2002, ce que je n'avais pas.
    Les dernières semaines ont été très difficiles pour cette raison. Je suis le seul à en avoir souffert.
    Non.
    Monsieur Chan, je vous remercie de votre question.
    Lorsque j'ai rencontré le ministre le vendredi, la seule autre personne présente était la sous-ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Mme Suzanne Hurtubise.
    La seule chose dont nous avons parlé, c'était la comparution devant votre comité. Le jeudi, nous savions que le comité allait peut-être se réunir et le vendredi, nous savions que le comité allait probablement se réunir le mardi. Nous avons donc conclu que c'était l'endroit approprié pour donner suite à cette affaire.
    C'est pour cette raison que je n'ai pas fait de déclaration publique en m'adressant aux médias, et c'est pour cette raison que j'ai été sévèrement critiqué par les médias, selon lesquels j'aurais dû réagir. Ils m'ont posé des questions lors de la cérémonie commémorative sur la Colline du Parlement.
    Nous avons tous deux décidé de l'endroit le plus approprié pour le faire.
    Monsieur Zaccardelli, en discutant avec le ministre Day, avez-vous parlé d'une stratégie de communications quelconque concernant ce que vous alliez dire à cette réunion?  
    Absolument pas.
    D'accord. Merci.
    Entre le 18 septembre et le 28 septembre, avez-vous rencontré ou contacté d'une façon quelconque des hauts fonctionnaires de SPPCC ou de tout autre ministère au sujet du rapport ou des déclarations sur le rapport que vous auriez faites aux médias ou à notre comité?
    Je ne suis pas certain de pouvoir vous répondre avec précision. Je crois avoir parlé au sous-ministre de Sécurité publique et Protection civile Canada, à qui j'ai dit que je souhaitais trouver un moyen de m'exprimer sur le sujet le plus tôt possible. Je ne suis pas sûr d'avoir correspondu ou parlé avec quiconque du Bureau du Conseil privé.
    Mais j'ai signalé à certains de mes amis et à d'autres personnes que j'étais impatient de vider la question. C'est un dossier très important, et je souhaitais comparaître pour en parler. Cependant, ces gens ne m'ont en aucune façon donné des directives ou des conseils, car ils ne disent pas quoi faire au commissaire de la GRC.
    Jamais, au cours de la discussion que nous avons eue, le ministre ne m'a indiqué ce que je devais faire ou dire.
    Entre le 18 septembre et –
    Je suis désolé, votre temps est écoulé, monsieur Chan. Vous pourrez intervenir à nouveau plus tard, mais nous voulons donner à tous l'occasion de parler.
    Monsieur Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Zaccardelli, vous avez dit aujourd'hui que le 5 et le 7 octobre 2002, le personnel de la GRC avait avisé le FBI que la GRC ne pouvait établir de lien entre M. Arar et al-Qaïda.
    Le 11 octobre, on vous a officiellement informé que M. Arar avait été renvoyé en Syrie par les autorités américaines, que la GRC leur avait transmis des renseignements et que M. Arar était considéré comme « une personne d'intérêt ».
    À n'en pas douter, le fait que les Américains aient renvoyé M. Arar en Syrie laissait croire qu'à leurs yeux, il était davantage qu'une personne digne d'intérêt. Vous-même ou quelqu'un d'autre de la GRC auriez dû agir à ce moment-là, de votre propre chef ou en collaboration avec les autorités gouvernementales, pour tenter de protéger les droits d'un citoyen canadien ou intervenir en son nom. Quelqu'un n'aurait-il pas dû prendre conscience du fait que M. Arar était plus qu'une personne d'intérêt pour certains?

  (1045)  

    Comme vous l'avez fait remarquer à juste titre, nous avons analysé au mieux les renseignements et les preuves dont nous disposions au sujet de M. Arar. Les Américains nous l'ont demandé. Nous leur avons expliqué notre situation et leur avons transmis l'information. Puis, ils l'ont déporté.
    Nous ignorons sur quoi ils se sont fondés exactement; le juge O'Connor a déclaré que c'était probablement sur des renseignements de source canadienne. Nous avons demandé aux autorités américaines comment elles en étaient arrivées à prendre une telle décision, mais nous n'avons reçu aucune réponse.
    L'un des solliciteurs généraux — je ne suis pas certain s'il s'agissait de M. Easter ou de M. MacAulay — a eu des discussions avec le procureur général Ashcroft par la suite, et celui-ci a déclaré au ministre que les États-Unis s'étaient appuyés sur diverses sources d'information pour prendre leur décision.
    Vous saviez certainement avant le rapport O'Connor de 2006 que quelque chose d'autre s'était produit à l'époque. J'ai peine à croire qu'un policier qui compte 36 ans d'expérience puisse, dans une situation aussi grave, commettre l'erreur d'appliquer des connaissances acquises en 2006 à une situation survenue en 2002. Il me semble que je serais, moi, retourné lire les notes que moi-même ou quelqu'un d'autre sous mes ordres aurions tenues à l'époque, pour vérifier si l'information dont on dispose en 2006 était vraiment connue en 2002. J'ai du mal à concevoir que vous puissiez faire une erreur comme celle de transposer des connaissances d'aujourd'hui à une situation d'il y a quatre ans.
    Je répète que dès mon retour, je me suis plongé dans le rapport, que j'ai lu en entier. En entrant dans cette pièce le 28 septembre, j'en savais autant que possible. Certes, j'ai fait certaines déclarations inexactes, et j'ai dit que je le regrettais.
    Les agents de police tiennent de très bonnes notes — je le sais — et pour une question de cette gravité, à votre place, j'aurais certainement consulté les notes de l'époque pour vérifier si les faits qui viennent d'être portés à ma connaissance sont vraiment nouveaux, ou si je les connaissais déjà en 2002.
    Je suis désolé, mais j'ai du mal à croire qu'un policier aussi expérimenté que vous puisse faire ce type d'erreur.
    Mais à l'époque, je n'avais aucune note. Les seuls renseignements dont je disposais étaient contenus dans le rapport. En 2002, lorsque je suis intervenu, une fois M. Arar en Syrie, j'ai demandé ce qui s'était produit et qui il était; on m'a répondu que c'était une personne d'intérêt. On m'a avisé que nous avions transmis du matériel d'enquête aux Américains et que nous leur avions dit ne pas pouvoir inculper M. Arar. C'est ce qu'on m'a déclaré et ce dont nous avons informé le ministre par la suite.
    C'est seulement à la lecture du rapport que j'ai découvert, outre cela, que des enquêteurs avaient commis des erreurs avant la détention de M. Arar à New York. Le juge O'Connor a dit qu'il s'agissait d'erreurs commises de bonne foi, et c'est pourquoi ils n'ont pas été informés; donc, personne ne m'a posé de questions, ni à moi, ni à mes subalternes.
    Je pense que vous pouvez concevoir pourquoi, de part et d'autre de ce comité, nous trouvons cela un peu difficile à croire.
    Je peux le comprendre, monsieur.
    J'ai une question très brève. Je sais quelle sera votre réponse, mais je tiens à ce que cela figure au compte rendu.
    Mme McLellan a dit qu'il s'agissait peut-être d'un problème plus vaste touchant à la culture de l'organisation. La culture de la GRC pose-t-elle problème, même si j'ai le plus grand respect pour cette institution?
    Je crois qu'il n'y a aucun problème de ce côté-là.
    Encore une fois, monsieur, je me reporte aux propos du juge O'Connor. Il dit que son équipe était composée d'enquêteurs très expérimentés et consciencieux, qu'on a placés dans un contexte inédit, sans précédent. Soit dit en passant, c'est à cette même situation que se sont heurtés tous les pays démocratiques du monde. Le juge affirme que les enquêteurs n'étaient pas les mieux formés dans le domaine, même s'ils avaient d'autres compétences, mais il ajoute comprendre la situation et, ainsi, relativise la gravité de l'erreur. Il a recommandé certaines améliorations, que nous avons mises en oeuvre. Ce sont des personnes hautement compétentes et dévouées qui ont fait de leur mieux dans le cadre de l'enquête. Elles ont fait des erreurs; le juge O'Connor le reconnaît. En tant que commissaire, je dois considérer cela au moment de décider des mesures à prendre concernant les auteurs de ces erreurs.
    Je suis également bien conscient de la culture de l'organisation et des gestes à poser pour faire avancer le dossier. C'est pourquoi, je le répète, j'ai accueilli toutes les recommandations. Nous avons appliqué la plupart d'entre elles et parcouru le monde pour connaître les meilleures pratiques et apprendre des autres. C'est ce que nous avons fait, et je m'engage à continuer dans ce sens.

  (1050)  

    J'approuve l'évaluation que vous faites de vos agents.
    Merci.
    Nous avons terminé notre tour de table. J'aimerais seulement demander quelque chose au comité. Est-ce que tous les partis ont encore une question à poser, pour conclure? Le Bloc, oui, ainsi que le NPD. Nous allons donc tenir une série de questions de deux minutes pour –
    Nous avons toujours eu des tours de cinq minutes, monsieur le président.
    Eh bien, nous n'avons que cinq minutes. Souhaitons-nous mettre fin à la séance maintenant?
    Non, monsieur le président. J'ai une question. Je demande mon temps de parole de cinq minutes, s'il vous plaît, conformément à la procédure habituelle –
    Vous refuseriez donc d'accorder leur temps d'intervention aux autres partis.
    Nous avons toujours procédé ainsi.
    Non. Si nous approchons de la fin de la séance, nous partageons tous le temps qui reste. Je suis désolé.
    Les autres disent qu'ils acceptent que je dispose de cinq minutes.
    D'accord, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je dirai d'emblée que, si l'on se fie au témoignage d'aujourd'hui, il y a clairement eu ingérence politique. En fait, vous nous avez déclaré avoir dû obtenir l'aval du ministre quant au contenu de votre témoignage, ce qui constitue une autre contradiction majeure par rapport à ce qui a déjà été dit.
    J'aimerais poser quelques questions –
    On invoque le Règlement.
    Je continue. Mon message est passé. J'ai quelques questions, si vous me permettez.
    Oui, mais on invoque le Règlement; nous allons vous interrompre pour un moment.
    Allez-y.
    Tout d'abord, je crois que votre interprétation s'éloigne beaucoup de ce qui s'est dit.
    Il s'agit d'une divergence de vues, et non d'un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Vous avez affirmé qu'il y avait eu ingérence politique. Or, je pense qu'il n'en a jamais été question.
    J'ai droit à mon opinion. Il s'agit d'une divergence d'opinions, et non d'un rappel au Règlement. À quel propos invoquez-vous le Règlement?
    Vous essayez de faire porter au compte rendu quelque chose qui n'a jamais été dit.
    Monsieur Holland, allez-y.
    Si je puis me permettre, pour la période qui a commencé le 18 septembre, pourriez-vous nous dire si vous avez fait appel à des consultants quant à la manière dont vous deviez traiter du dossier avec les médias ou ce comité?
    Monsieur le président, j'aimerais revenir à la première remarque formulée par M. Holland.
    J'ai seulement cinq minutes. Pourriez-vous, s'il vous plaît, répondre à ma question?
    Monsieur le président, ma réponse est –
    Commissaire Zaccardelli, pourriez-vous, s'il vous plaît, répondre à la question que je vous ai posée?
    J'ai été très clair au sujet du 28 septembre, et j'ai bien dit aujourd'hui qu'il n'y avait jamais eu d'intervention politique pour dicter ou influencer ce que j'allais dire sur le sujet, comment et quand. Toute insinuation en ce sens est entièrement fausse, monsieur le président.
    Vous vous êtes contredit à ce sujet, mais je vous ai posé une question, et j'apprécierais que vous y répondiez. Avez-vous, oui ou non, entre le 18 septembre et aujourd'hui, bénéficié des conseils de consultants en ce qui concerne la façon de répondre aux médias ou à ce comité?
    J'ai reçu des conseils de diverses sources pour préparer ma comparution devant le comité.
    Y compris des firmes de consultants?
    Êtes-vous prêt à fournir au comité un exemplaire complet d'un agenda ou d'un calendrier tenu par votre bureau qui ferait état de toutes les rencontres ayant eu lieu entre la publication du rapport, le 18 septembre, et le témoignage du 28 septembre?
    Un calendrier de quoi?
    De votre emploi du temps entre le 18 et le 28 septembre. Êtes-vous, oui ou non, prêt à le fournir au comité?
    Monsieur le président, je vais demander un avis juridique à ce sujet. Si je peux vous remettre l'agenda, je le ferai certainement.
    Êtes-vous disposé à fournir au comité tout agenda téléphonique que vous pourriez avoir conservé pour la période du 18 septembre au 28 septembre, oui ou non?
    Monsieur le président, la même réponse s'applique.
    Êtes-vous disposé à fournir au comité toute la correspondance que vous avez reçue, y compris les courriels qui ont pu circuler entre votre bureau, de hauts fonctionnaires de la GRC, de hauts fonctionnaires et du personnel politique à SPPCC, le ministre Day, le premier ministre, du personnel du CPM et toute tierce partie externe, comme un conseiller ou un consultant, concernant le rapport de la commission d'enquête, entre le 18 et le 28?
    Monsieur le président, la réponse que j'ai déjà donnée s'applique également à cette question.
    Hier, vous avez prononcé au Château Laurier un discours dans lequel vous avez abordé, entre autres choses, le témoignage que vous deviez donner ici aujourd'hui. Pourriez-vous me dire qui savait que vous alliez prononcer ce discours? En particulier, est-ce que le ministre Day, des membres de son personnel ou du cabinet du premier ministre, ou encore un conseiller ou un consultant externe, étaient au courant du fait que vous alliez donner ce discours?
    Juste avant de prononcer ce discours, j'ai envoyé une copie de mes notes au ministère, comme je le fais d'habitude, et au BCP. Cela s'est fait littéralement moins d'une demi-heure avant que je ne prononce le discours.
    Donc, le personnel de ces ministères a été informé du discours d'hier.
    Est-ce qu'une autre personne a vu une ébauche de votre discours avant que vous ne le prononciez? Si oui, qui? Y a-t-il eu des commentaires sur cette ébauche? Si oui, quelle était la teneur de ces commentaires?

  (1055)  

    Monsieur le président, j'ai parlé à beaucoup de gens quand je préparais mes notes –
    C'était un discours important. Vous vous souvenez sans doute des gens à qui vous avez parlé. À qui avez-vous parlé du discours et de sa teneur?
    Monsieur le président, j'ai parlé à beaucoup de gens à propos de –
    Parmi ces gens, y avait-il des membres du personnel du cabinet du ministre Day ou du CPM?
    Monsieur Holland, si vous permettez, donnez au témoin la chance de répondre.
    En réponse à cette question bien précise, la réponse est non. Personne du cabinet du ministre n'a eu quoi que ce soit à voir avec ce discours, pas plus que des membres du CPM.
    Avez-vous pris seul la décision de donner ce discours? Avez-vous donné ce discours de concert avec quelqu'un ou à la demande de quelqu'un? Si oui, qui en particulier? Est-ce que le ministre Day, un membre de son personnel ou du CPM, ou un conseiller ou consultant externe a participé à la décision de prononcer ce discours?
    La seule personne qui a eu quoi que ce soit à voir avec la préparation de ce discours, c'est moi. Le Canadian Club m'a demandé de faire un discours et j'ai accepté. Je n'ai consulté personne au gouvernement relativement à ce discours. C'est par hasard que c'est arrivé deux jours de suite.
    Même si vous leur avez communiqué l'information, vous alliez prononcer ce discours.
    Votre temps est écoulé, monsieur Holland.
    Oui, ça a été une coïncidence. Je tentais de revenir devant le comité. En fait, je crois que j'avais déjà envoyé la lettre de demande de comparution devant le comité avant d'accepter de prononcer ce discours. On n'a confirmé que très récemment la date de ma comparution devant votre comité. C'est donc une pure coïncidence si les deux journées se suivent, monsieur Holland.
    Le Bloc a renoncé à son temps. Donc, monsieur Comartin, vous pouvez poser une brève question.
    Merci, monsieur le président.
    Commissaire, lors de votre dernière comparution devant nous, vous nous avez présenté un certain ensemble de faits. À cette occasion, je vous ai reproché de ne pas avoir fait de rapport à votre ministre. Comme nous le savons maintenant, vous ne pouviez transmettre cette information, car vous ne l'aviez pas. Aujourd'hui, mes critiques s'adressent à vous et aux fonctionnaires du ministère et de la GRC à ce sujet
    Comme je l'ai dit plus tôt, il n'y a pas une seule personne dans notre pays qui n'aurait pas saisi l'importance de ces fausses accusations, particulièrement au cours de la période dont il s'agit, si peu de temps après le 11 septembre 2001. Puisque vous êtes commissaire, votre sens des responsabilités n'aurait-il pas dû vous conduire à imposer des sanctions disciplinaires? N'est-il pas suffisamment grave que des gens ne vous aient pas rendu compte de ces fausses accusations? Vous l'avez appris dans le rapport O'Connor. Est-ce que ce n'était pas un de ces cas où le simple fait de changer de procédure, ce que le juge O'Connor, franchement, a trouvé très utile...? Ce n'est pas là-dessus qu'ont porté les critiques du juge O'Connor. Elles visaient l'application ou, plus exactement, la non-application des politiques de la part de votre personnel de première ligne. N'est-ce pas un cas où leurs superviseurs immédiats, au lieu de recevoir une promotion — comme un certain nombre d'entre eux en ont reçu, d'après nos informations — auraient peut-être dû se voir imposer des sanctions disciplinaires?
    Monsieur Comartin, c'est là une très bonne question et j'aimerais prendre un peu de temps pour y répondre.
    Monsieur Zaccardelli, je voudrais simplement ajouter l'élément suivant. Ne me servez pas à nouveau la réponse de l'ancienne ministre MacLellan. Je lui ai déjà dit que je n'étais pas d'accord avec elle sur ce point.
    Pourriez-vous nous répondre brièvement à cette dernière question?
    La réponse sera peut-être un peu plus longue, mais je ne vais pas aborder la question de savoir si des têtes devraient tomber ou non. Ce sera pour une autre fois.
    Au sujet évoque des erreurs qui ont été commises, tout d'abord, il y avait un document sur les avis de surveillance, dans lequel où se trouvaient les noms d'un certain nombre de personnes. Elles étaient la cible légitime d'enquêtes parce qu'elles étaient soupçonnées d'être d'éventuels extrémistes islamistes. Les noms de M. Arar et de son épouse ont été ajoutés à cette liste. Cela n'aurait pas dû arriver. Lorsque leurs noms ont été ajoutés, on aurait dû les identifier. C'est là la première erreur dont nous parlons. Toutefois, dans son rapport, le juge O'Connor affirme clairement qu'après la diffusion de l'avis de surveillance, M. Arar a fait deux aller-retour aux États-Unis et il ne lui est rien arrivé. Le juge ajoute dans son rapport qu'il ne peut pas établir ce que les Américains ont fait de cette déclaration.
    Parmi Les autres erreurs, si nous voulons employer ce mot, il y a la déclaration indiquant , comme je l'ai déjà dit, que M. Arar a vendu sa maison et est parti pour la Tunisie « soudainement », selon notre c'est là la description du comportement de M. Arar. Lorsqu'il a analysé cette allégation trois ans plus tard, le juge O'Connor a déclaré que nous n'aurions pas dû préciser que son départ était survenu « soudainement ».
    Une autre erreur a été commise par les enquêteurs, lorsqu'ils ont affirmé que M. Arar était à Washington le 11 septembre 2001. Il n'y était pas.
    Une autre erreur concerne la soi-disant réunion qu'il a eue ici avec une de nos principales cibles dans un café. Les enquêteurs ont dit qu'il était venu de Québec pour participer à cette réunion. En fait, il était déjà ici.
    Bien que le juge O'Connor ait dit qu'il ne croyait pas qu'il s'agissait d'erreurs délibérées de leur part — laissez-moi terminer, monsieur Comartin —, au bout du compte, après avoir analysé ces faits et vérifié de façon approfondie tous les éléments, il est arrivé à la conclusion que ces petites erreurs, combinées, auraient pu donner aux Américains l'impression que le cas de M. Arar était plus préoccupant que nous ne l'avions pensé à l'origine. J'accepte cela sans réserve.
    Toutefois, le juge O'Connor écrit dans son rapport que les enquêteurs n'ont pas agi intentionnellement. Ils n'avaient pas reçu la bonne formation. L'organisation ne leur avait pas donné la formation voulue. Donc, le juge O'Connor a replacé leurs actes dans le contexte. Je ne sais pas trop comment il faut traiter quelqu'un qui fait une erreur de bonne foi, lorsqu'un juge...

  (1100)  

    Mais est-ce que cela ne vous dit pas, monsieur Zaccardelli, que c'est justement cela le problème?
    Le temps file.
    Le problème, c'est qu'ils ne vous ont pas communiqué ces informations. Voilà la grosse erreur qui a été commise.
    Parce qu'ils ne croyaient pas que c'était une erreur.
    Il nous faut mettre fin à cet échange. Il faut donner la chance à tout le monde.
    Deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux que les choses soient on ne peut plus claires. Monsieur Holland, vous avez cherché à faire consigner dans le compte qu'il y aurait eu ingérence politique.
    J'aimerais que le commissaire indique avec une parfaite clarté à M. Holland, qui ne comprend pas le mot « non », que vous avez déclaré ne pas avoir reçu de directives.
    Il semble s'intéresser davantage à une période de temps en septembre plutôt qu'en 2002, moment où sa ministre aurait dû poser les vraies questions.
    Y a-t-il eu de l'ingérence politique? Répondez très clairement, de manière à ce que mon collègue comprenne.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité.
    Je remercie le comité de ses questions. Je suis persuadé qu'elles nous ont permis de mieux comprendre les faits.
    La séance est levée.