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CIMM Rapport du Comité

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RECOUVRER SA CITOYENNETÉ — un rapport sur
la perte de la citoyenneté canadienne

INTRODUCTION

La citoyenneté canadienne, ainsi que les droits et les obligations qui s’y rattachent, constituent les fondements mêmes du Canada en tant que pays. Comme l’a exprimé le juge Iacobucci dans une affaire mettant en cause la Loi sur la citoyenneté[1] : « Je ne puis imaginer d’intérêt plus fondamental que la citoyenneté canadienne pour quiconque veut être membre à part entière de la société canadienne[2]. » Par conséquent, toute discussion sur la citoyenneté devrait partir du principe que le gouvernement du Canada ne doit priver personne de sa citoyenneté sans raison valable et sans une procédure équitable.

Depuis l’adoption de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en 1977, on a constaté que bon nombre de personnes, qui estiment être Canadiennes et souhaitent participer à la société canadienne, ne sont pas vraiment reconnues comme des citoyens canadiens. Pour différentes raisons d’ordre juridique, ces Canadiens dits « dépossédés » peuvent avoir perdu leur citoyenneté ou n’avoir carrément jamais été citoyens canadiens. Dans bien des cas, ils ont appris qu’ils n’étaient pas citoyens canadiens au moment de présenter une demande pour obtenir un certificat de citoyenneté canadienne (souvent exigé pour obtenir un passeport) ou un autre document. En plus de la surprise et du choc ressentis à l’annonce d’une telle nouvelle, bon nombre d’entre eux se sont également heurtés à des obstacles d’ordre juridique au moment de se trouver du travail, de se déplacer ou de faire des démarches pour toucher certaines prestations sociales.

Le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration a entrepris une étude sur la perte de la citoyenneté canadienne au début de l’année 2007, soit l’année même du 60e anniversaire de la proclamation de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947[3], et du 30e anniversaire de la proclamation de l’actuelle Loi sur la citoyenneté, qui devait remplacer la Loi de 1947. Le Comité a recueilli le témoignage de personnes qui sont passées entre les mailles des lois canadiennes sur la citoyenneté ainsi que de fonctionnaires qui s’efforcent de régler le problème, qui a pris de l’ampleur en raison de la multiplication des demandes de passeports provoquée par le resserrement des mesures de sécurité à la frontière avec les États-Unis.

Le 29 mai 2007, la ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, Diane Finley, a profité de sa comparution devant le Comité pour annoncer le dépôt à l’automne 2007 de propositions de modifications à apporter à la Loi sur la citoyenneté, afin de résoudre la plupart des cas de Canadiens dépossédés de leur citoyenneté, mais pas tous. Elle a aussi précisé que les modifications proposées ne seraient pas définitives et qu’elle allait tenir compte des recommandations du Comité à cet égard.

En septembre 2007, le Parlement a été prorogé. Quand le Comité s’est réuni durant la nouvelle session en novembre 2007, il a adopté une motion portant la prise en considération des témoignages recueillis et des documents reçus durant la session précédente et il a finalisé le présent rapport.

Le Comité espère que ses recommandations seront prises en compte au moment où le projet de loi sera rédigé, et que leur mise en œuvre permettra d’alléger un peu le fardeau de ces Canadiens dont le statut de citoyen est remis en question. À long terme, nos recommandations devraient être utiles lorsque viendra le temps de rédiger une nouvelle loi sur la citoyenneté et d’orienter l’approche adoptée par Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) pour remédier à certains problèmes systémiques.

CATÉGORIES DE CANADIENS DÉPOSSÉDÉS DE LEUR CITOYENNETÉ

Les personnes qui ont perdu leur citoyenneté canadienne sans le vouloir ou qui, sans même le savoir, n’ont carrément jamais eu le statut de citoyen canadien, se subdivisent en quatre grandes catégories[4] :

§ les épouses de guerre;

§ les personnes nées à l’étranger d’un parent canadien avant que l’actuelle Loi sur la citoyenneté n’entre en vigueur en février 1977;

§ les personnes qui ont perdu leur citoyenneté entre janvier 1947 et février 1977 parce qu’elles-mêmes ou un de leurs parents ont acquis la nationalité et la citoyenneté d’un autre pays;

§ les Canadiens de deuxième génération et des générations suivantes[5] nés à l’étranger depuis l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en février 1977.

1. Les épouses de guerre

Les femmes de soldats canadiens qui ont combattu pendant la Seconde Guerre mondiale figurent au nombre des Canadiens dépossédés de leur citoyenneté. Durant la guerre et tout de suite après, des milliers de femmes européennes ont immigré au Canada pour venir y rejoindre leurs nouveaux maris canadiens. Le démographe Barry Edmonston évalue entre 25 000 et 30 000 le nombre d’épouses de guerre qui vivent toujours au Canada[6].

En vertu de l’Arrêté en conseil visant l’entrée au Canada des personnes à charge des membres des forces armées canadiennes[7], adopté en 1945, des dispositions spéciales s’appliquaient aux personnes à charge (épouses, veuves, et enfants mineurs) des membres des Forces armées canadiennes ayant combattu pendant la Seconde Guerre mondiale. Ce décret conférait aux personnes à charge des membres des Forces armées canadiennes ayant combattu pendant la Seconde Guerre mondiale un statut équivalant à celui des membres « citoyens canadiens » ou ayant leur « domicile au Canada ». Toutefois, avec l’adoption de la Loi sur la citoyenneté canadienne en 1947, ces immigrants, notamment les épouses de guerre[8], cessaient d’être citoyens canadiens s’ils résidaient hors du Canada pendant une période d’au moins six années consécutives, sous réserve de certaines exceptions[9]. Cette période a été prolongée à dix ans dans les années 1950 avant d’être carrément abrogée en 1967. Certaines épouses de guerre et d’autres immigrants canadiens avaient toutefois déjà perdu leur citoyenneté canadienne et, dans bien des cas, à leur insu.

Même une épouse de guerre, qui n’a jamais séjourné à l’extérieur du Canada après y avoir été admise dans les années 1940, peut malgré tout avoir l’impression à tort que sa citoyenneté canadienne est remise en question, si elle présente aujourd’hui une demande de passeport ou cherche à se prévaloir d’un autre service gouvernemental pour lequel une preuve de citoyenneté canadienne est exigée. Ces femmes ont le droit de recevoir un certificat de citoyenneté canadienne sur demande, mais il peut être difficile pour elles de produire les documents nécessaires pour prouver leur citoyenneté, et il n’est pas nécessairement acquis que les fonctionnaires de CIC responsables du traitement de leurs demandes leur reconnaîtront immédiatement ce droit. Le coût, les délais et la complexité du processus administratif servant à établir la preuve de citoyenneté sont certes une source de frustration pour n’importe quel citoyen de longue date.

2. Personnes nées à l’étranger d’un parent canadien avant que l’actuelle Loi sur la citoyenneté n’entre en vigueur en février 1977

Beaucoup de Canadiens dépossédés de leur citoyenneté sont nés a) à l’étranger; b) avant l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en 1977; c) d’un parent canadien. Ils ont toujours tenu pour acquis qu’ils étaient citoyens canadiens du fait qu’un de leurs parents l’étaient. Trois dispositions distinctes de la Loi sur la citoyenneté en vigueur avant 1977 peuvent expliquer qu’ils aient perdu leur statut de citoyen canadien ou ne l’aient carrément jamais détenu. Elles sont tour à tour abordées ci-dessous.

(i) Déclaration de naissance

À partir de l’entrée en vigueur de la Loi sur la citoyenneté canadienne en 1947, les enfants nés hors du Canada d’un parent canadien devaient être inscrits dans les deux années suivant leur naissance pour obtenir le status de « citoyen[s] canadien[s] de naissance[10] ». Certaines naissances n’ont jamais été déclarées. Au fil des ans, le gouvernement a prolongé le délai de déclaration afin de jeter un peu de lest. Le dernier délai fixé pour déclarer toutes les naissances à l’étranger antérieures à 1977 était le 14 août 2004[11]. Certaines naissances n’ont malgré tout jamais été déclarées, de sorte que ces personnes se retrouvent aujourd’hui sans citoyenneté canadienne.

Un enfant né à l’étranger d’une mère canadienne et d’un père étranger mariés n’était pas admissible à la citoyenneté, mais la loi de 1977 prévoyait une procédure simplifiée spéciale pour lui permettre d’acquérir la citoyenneté sans devoir d’abord devenir résident permanent[12]. Toutefois, cette disposition ne s’appliquait elle aussi que jusqu’au 14 août 2004, de sorte que ceux qui ont raté le délai ont également râté.

Même si l’exigence de déclaration et la procédure simplifiée dont il est question ci‑dessus s’appliquaient à tous les enfants nés à l’étranger d’un parent canadien[13] avant l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en 1977, ceux qu’on surnomme les « bébés nés à la frontière américaine » ont été particulièrement pénalisés par cette disposition. Dans bien des cas, il s’agit de personnes nées dans des hôpitaux américains parce que ceux‑ci étaient plus proches du domicile de leurs parents que les hôpitaux canadiens. D’autres sont nées ailleurs aux États-Unis de parents canadiens qui ont

décidé de revenir vivre au Canada après leur naissance. M. Edmonston évalue à 10 000 environ le nombre d’enfants nés aux États-Unis entre 1947 et 1977 et dont au moins un parent était citoyen canadien[14].

Avant d’aborder la prochaine disposition des mesures législatives en vigueur avant 1977 dont l’application a connu des ratés, il convient de noter que les documents délivrés à la suite d’une déclaration de naissance à l’étranger d’un citoyen canadien ont aussi été une source de problèmes pour certaines personnes. En vertu de la Loi de 1947, un document appelé Certificat d’enregistrement d’une naissance à l’étranger (ou CENE) était délivré au moment de la déclaration. Ce document a été et continue d’être une preuve suffisante de la citoyenneté canadienne pour l’obtention d’un certain nombre de services, notamment pour présenter une demande de passeport. Il ne constitue toutefois pas toujours une preuve suffisante de citoyenneté pour ouvrir droit à des prestations provinciales ou territoriales. En conséquence, le statut de citoyen des titulaires d’un tel document peut être mis en doute lorsque ceux-ci cherchent à se prévaloir de programmes provinciaux ou territoriaux de prestations, à moins que, moyennant des frais de 75 $, ils ne troquent leur CENE contre un certificat de citoyenneté, qui est actuellement le document qui tient lieu de preuve de citoyenneté. Un témoin a fait valoir qu’un titulaire de CENE valide ne devrait pas être obligé de payer pour obtenir la preuve qu’il est citoyen canadien. « Cette situation soulève la question de savoir quand un certificat ne naissance n'est pas un certificat de naissance » a-t-il déclaré au Comité[15].

Comme aucun nouveau CENE n’est délivré, les personnes qui le perdent ou l’abîment doivent aussi présenter une demande pour obtenir des certificats de citoyenneté canadienne en guise de documents de substitution pour prouver leur citoyenneté canadienne. Il semble que certains titulaires de CENE se soient fait dire, à tort, qu’ils ne sont pas des citoyens canadiens. D’autres ont l’impression que leur citoyenneté est mise en question lorsqu’on leur demande de présenter une demande pour obtenir l’actuel certificat de citoyenneté.

L’autre pièce d’identité qui occasionne davantage de problèmes que le CENE est celle connue sous le nom de « DND419 ». Il s’agit d’une forme de certificat de naissance que le ministère de la Défense nationale délivre aux enfants de militaires canadiens nés à l’étranger. Le DND419 n’est pas et n’a jamais été reconnu comme une preuve de citoyenneté pour l’obtention d’un passeport ou pour quelque autre fin. En conséquence, toute personne qui essaie de demander un passeport ou de se prévaloir d’autres services offerts par les gouvernements fédéral, provinciaux ou territoriaux en se servant uniquement d’un DND419 risque de se sentir frustrée si on les lui refuse sous prétexte qu’elle doit d’abord obtenir un certificat de citoyenneté. Pire encore, certaines peuvent avoir l’impression que le rejet du DND419 équivaut à un refus de reconnaître leur citoyenneté.

Le Comité est d’avis qu’il y aurait moyen d’améliorer grandement la situation ou peut-être de résoudre le problème, si les titulaires de ces documents étaient, à tout le moins, mieux écoutés et mieux renseignés. Il faudrait également qu’ils reçoivent l’aide nécessaire pour obtenir rapidement leur certificat de citoyenneté.

(ii) Déclaration de rétention

Une deuxième disposition de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947[16] posait aussi problème parce qu’elle exigeait que les personnes ayant acquis la citoyenneté canadienne par filiation affirment leur citoyenneté par l’enregistrement d’une déclaration de rétention entre leur 21e et leur 22e anniversaire de naissance. Le non-respect de cette formalité entraînait la perte de la citoyenneté canadienne. Plus tard, cette exigence a été modifiée de façon qu’une personne dans cette situation puisse conserver sa citoyenneté canadienne à condition a) d’enregistrer ladite déclaration entre son 21e et son 24e anniversaire de naissance, ou b) de vivre au Canada à la date de son 24e anniversaire de naissance. Cette exigence a été carrément abolie au moment de l’adoption de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en 1977. Ainsi, les personnes qui auraient normalement été assujetties à cette exigence, mais qui n’avaient pas encore atteint l’âge de 24 ans au moment où la Loi est entrée en vigueur, ont été soustraites à l’obligation de s’y conformer[17]. Toutefois, les personnes nées plus tôt qui n’avaient pas enregistré de déclaration de rétention et ne vivaient pas au pays à la date de leur 24e anniversaire de naissance, ont perdu leur citoyenneté canadienne.

M. Edmonston estime qu’environ 32 000 personnes nées à l’étranger de parents canadiens avant 1977 vivent actuellement au Canada[18]. D’autres vivent ailleurs, mais on en ignore le nombre. Peut-être sont-elles nombreuses à avoir perdu leur citoyenneté canadienne, si elles n’étaient pas au courant de l’exigence énoncée ci-dessus.

(iii) Le problème des enfants nés hors mariage

Une troisième particularité de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947 et des mesures législatives en vigueur antérieurement, qui a eu pour effet de priver de leur status de citoyen canadien bon nombre de personnes qui autrement l’auraient eu, réside dans la distinction établie entre les enfants nés de parents mariés et ceux nés hors mariage. Une personne née à l’étranger avant 1977 pouvait acquérir la citoyenneté canadienne par filiation paternelle si elle était née dans les liens du mariage, et par filiation maternelle si elle était née hors mariage[19]. Cette règle anachronique a eu pour effet de priver de leur citoyenneté canadienne les enfants nés d’une mère canadienne et d’un père étranger mariés, et ceux nés d’un père canadien et d’une mère étrangère non mariés.

Cette distinction a particulièrement pénalisé le groupe constitué par ceux que l’on appelle communément les « bébés de la guerre », c'est-à-dire les enfants nés de l’union de militaires canadiens et de femmes européennes pendant la Seconde Guerre mondiale et juste après. Bon nombre de ces couples n’avaient pas été autorisés à se marier avant la naissance de leur(s) enfant(s), n’avaient pu le faire ou avaient délibérément choisi de ne pas le faire. En vertu du décret de 1945 mentionné précédemment et aux fins du droit canadien de l’immigration, tous les enfants de membres des Forces armées canadiennes étaient réputés être des citoyens canadiens ou avoir leur domicile au Canada à partir du moment où ils étaient admis au Canada, que leurs parents aient ou non été mariés au moment de leur naissance. Toutefois, ce décret a sans doute[20] été rendu caduc par la promulgation de la Loi sur la citoyenneté canadienne en 1947, qui instituait la règle

voulant que les enfants nés hors mariage tiennent leur citoyenneté de leur mère. C’est ce qui explique pourquoi les bébés de la guerre nés hors mariage d’une mère européenne ont été dépouillés de leur citoyenneté canadienne. M. Edmonston évalue à environ 6 000 le nombre de bébés de la guerre, certains nés hors mariage[21], qui vivent actuellement au Canada. Le plus connu de ces bébés de la guerre est sans doute Joe Taylor, dont le cas est examiné plus loin.

Le deuxième groupe de personnes particulièrement touchées par la distinction faite entre les enfants nés de parents mariés et ceux nés hors mariage est constitué des descendants des mennonites. Cette catégorie englobe les personnes dont les ancêtres canadiens sont déménagés au Mexique dans les années 1920 et se sont mariés à l’église plutôt que civilement[22]. Pendant des années, le Canada a reconnu la validité de ces mariages et a délivré des certificats de citoyenneté aux enfants nés de pères canadiens. Bien plus tard, il a cessé de reconnaître la validité de ces mariages religieux parce que le Mexique ne les reconnaissait pas. Ainsi, les enfants nés de ces unions avaient la réputation d’être nés hors mariage, de sorte qu’avant 1977, la citoyenneté canadienne n’était pas été transmise d’une génération à l’autre par filiation paternelle[23]. Le gouvernement a estimé que les certificats de citoyenneté qui avaient antérieurement été délivrés à ces descendants l’avaient été par erreur[24].

3. Personnes qui ont perdu leur citoyenneté entre janvier 1947 et février 1977 parce qu’elles-mêmes ou un de leurs parents ont acquis la nationalité ou la citoyenneté d’un autre pays

Un troisième groupe de Canadiens ont perdu leur citoyenneté entre 1947 et 1977 parce que, de façon générale, la double citoyenneté n’était pas reconnue à cette époque. En gros, en vertu de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947, un citoyen canadien qui décidait volontairement d’acquérir la nationalité ou la citoyenneté d’un autre pays perdait d’emblée sa citoyenneté canadienne[25]. De plus, tout enfant mineur de ce même citoyen pouvait aussi perdre sa citoyenneté s’il était ou devenait lui aussi citoyen d’un autre pays[26]. La Loi prévoyait un mécanisme pour permettre aux enfants mineurs ayant perdu leur citoyenneté du fait de la décision de leurs parents, de redevenir citoyens canadiens. Il leur suffisait de faire une déclaration exprimant leur désir de reprendre la citoyenneté canadienne entre leur 21e et leur 22e anniversaire de naissance[27]. Malgré tout, beaucoup n’ont pas fait cette déclaration et ont, par conséquent, cessé d’être canadiens.

M. Edmonston estime que le nombre de personnes qui sont nées au Canada entre 1947 et 1977, qui se sont établies aux États-Unis avec leurs parents avant 1977 et qui sont devenues citoyens américains naturalisés par la suite, se situerait dans une fourchette allant de 95 000 à 105 000 individus. Toujours selon les chiffres de M. Edmonston, entre 10 000 et 20 000 d’entre elles sont revenues au Canada et y vivent toujours. Les estimations de M. Edmonston ne représentent pas le nombre total de personnes qui auraient pu perdre leur citoyenneté canadienne à l’époque où elles étaient d’âge mineur, puisque certaines d’entre elles ont acquis une autre citoyenneté que la citoyenneté américaine. Par contre, M. Edmonston affirme que la plupart des personnes nées au Canada qui ont quitté le pays se sont établies aux États-Unis[28].

En 2005, l’actuelle Loi sur la citoyenneté a été modifiée afin de soustraire les personnes ayant perdu leur citoyenneté alors qu’elles étaient d’âge mineur à l’obligation de devenir résidents permanents du Canada pour pouvoir reprendre leur citoyenneté[29]. La réintégration dans la citoyenneté n’est toutefois pas automatique sur présentation d’une demande, et lorsqu’une demande est approuvée, le statut de citoyen canadien n’est pas rétroactif. En conséquence, si une personne a eu un enfant entre le moment où elle a perdu sa citoyenneté canadienne et celui où elle l’a récupérée, elle n’a pu transmettre la citoyenneté canadienne à son enfant par filiation.

4. Canadiens de deuxième génération et des générations suivantes nés à l’étranger depuis l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en février 1977

Le dernier grand groupe de Canadiens dépossédés de leur citoyenneté se distingue des trois autres parce qu’il est constitué de personnes qui ont perdu ou risquent de perdre leur citoyenneté canadienne en vertu d’une disposition de la Loi actuellement en vigueur[30]. L’actuelle Loi sur la citoyenneté stipule qu’une personne née à l’étranger après le 14 février 1977 et possédant la citoyenneté en raison de la qualité de citoyen reconnu à l’un de ses parents, lui-même né à l’étranger et possédant la citoyenneté canadienne par filiation, cesse d’être citoyen le jour de son 28e anniversaire de naissance sauf a) si elle demande à conserver sa citoyenneté et b) si elle réside au Canada depuis un an à la date de la demande ou démontre qu’elle a conservé avec le Canada des liens manifestes. Bref, un citoyen canadien né à l’étranger qui possède la citoyenneté en raison de la qualité de citoyen reconnu à l’un de ses parents, lui-même né à l’étranger, doit prendre des mesures avant son 28e anniversaire de naissance pour conserver sa citoyenneté canadienne[31].

Il est impossible de déterminer combien de personnes font partie de ce groupe et risquent de perdre leur citoyenneté, puisqu’elles peuvent vivre n’importe où dans le monde. Toutefois, le nombre de personnes qui ont effectivement perdu leur citoyenneté en raison de cette exigence est beaucoup plus modeste que le nombre de celles qui risquent de la perdre dans l’avenir puisque ce n’est que depuis le 15 février 2005, soit 28 ans après l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté, que la règle a véritablement pris effet. Selon les témoignages recueillis par le Comité, un certain nombre de personnes appartenant à ce groupe sont au courant de l’exigence, mais sont réticentes à présenter une demande pour conserver leur citoyenneté parce qu’elles craignent que l’examen de leur statut n’aboutisse à la conclusion qu’elles n’ont jamais été citoyens en raison du problème des enfants nés hors mariage[32].

CAS DE CANADIENS AYANT PERDU LEUR CITOYENNETÉ

Au cours de son étude, le Comité a entendu des dizaines de témoins qui, soit ont eux-mêmes raconté leur histoire personnelle, soit représentaient des organisations dont les membres ont été dépossédés de leur citoyenneté. Les membres du Comité ont été émus par le récit de gens dont la vie a été complètement bouleversée lorsque, après avoir vécu toute leur vie en croyant qu’ils étaient citoyens canadiens, ils ont soudainement appris qu’ils ne l’étaient pas et, dans certains cas, qu’ils ne l’avaient jamais été. Des témoins ont exprimé au Comité la colère et la déception qu’ils avaient ressenties à l’annonce de cette nouvelle qui souvent, selon eux, leur a été communiquée abruptement et avec désinvolture, sans explication suffisante. Ils ont raconté s’être sentis frustrés par le manque de cohérence et d’exactitude des conseils qu’on leur a donnés sur la façon de s’y retrouver dans les dédales de la bureaucratie pour réussir à faire reconnaître ou rétablir leur citoyenneté. Ils ont aussi sensibilisé le Comité aux lourdes répercussions juridiques, financières et psychologiques qu’a eues sur leur vie la perte de leur citoyenneté.

Le Comité est d’avis que chaque cas de citoyen canadien ayant perdu sa citoyenneté est important et mérite considération. Quelques-uns sont résumés ci‑dessous parce qu’ils sont représentatifs des différents groupes de personnes touchées. Le dernier cas, à savoir celui de M. Joe Taylor, un bébé de la guerre né hors mariage, a été examiné par la Cour d’appel fédérale et une section distincte y est, par conséquent, consacrée dans le présent rapport.

A.  M. William Smith[33], dont la naissance aux États-Unis n’a pas été déclarée au Canada

Le Comité a entendu le témoignage de M. William Smith, qui est né aux États-Unis en 1949. Au moment de sa naissance, les parents de M. Smith étaient mariés et son père était canadien. Trois semaines après sa naissance, la famille est revenue vivre au Canada. Voici un extrait du témoignage de M. Smith à ce sujet :

Quand nous sommes arrivés à la frontière, sur le train, le seul commentaire des représentants de l’Immigration a été « Ah, vous nous ramenez un nouveau Canadien ». Aucun document n’attestait de mon entrée au Canada. Quelqu’un représentait le ministère de l’Immigration au poste-frontière à l’entrée d’un enfant dans le pays et quelque chose aurait dû être fait. Or, rien n’a été fait.

Apparemment, la naissance de M. Smith à l’étranger n’a jamais été déclarée au Canada, alors qu’à l’époque, il fallait qu’elle le soit pour que M. Smith soit reconnu comme un « citoyen canadien de naissance[34] ».

M. Smith a poursuivé toutes ses études au Canada et a continué d’y vivre comme Canadien : travaillant, payant des impôts, votant aux élections et étant même appelé à faire partie d’un jury dans un procès pour meurtre. Il a affirmé dans son témoignage que toute sa vie, il avait cru posséder la double nationalité.

Ç’a été un choc terrible pour lui d’apprendre qu’il n’était pas citoyen canadien :

Quand j’ai enfin reçu une lettre, j’ai été tellement estomaqué que c’était comme si quelqu’un avait éteint la lumière dans une pièce et que tout ce que je pouvais voir, c’était du rouge…

Il s’est en outre retrouvé sans sécurité d’emploi, puisque tous les postes qu’il postule exigent une preuve de citoyenneté canadienne. M. Smith a affirmé au Comité que le fait de ne pas être reconnu comme citoyen canadien l’a placé dans une « situation financière très précaire ».

B.  Mme Barbara Porteous[35], qui est née aux États-Unis et n’a pas été informée de la formalité dont elle devait s’acquitter avant l’âge de 24 ans pour pouvoir conserver sa citoyenneté

Mme Barbara Porteous se dit canadienne même si, de son point de vue, le Canada la considère comme « une femme de 70 ans sans pays ».

Elle est née en 1936 à Oroville, dans l’État de Washington, d’un père canadien. Elle s’est installée au Canada en 1955, lorsqu’elle a épousé un Canadien né au Canada. À son arrivée au Canada, elle a reçu une lettre et une carte d’immigration attestant qu’elle avait le statut de citoyen canadien. Elle a indiqué au Comité que la lettre lui souhaitait la bienvenue et l’invitait à profiter de sa nouvelle vie au Canada, mais ne renfermait aucun renseignement concernant la possibilité qu’elle perde sa citoyenneté.

En 1959, les Porteous sont retournés vivre dans l’État de Washington pour y travailler. À ce moment, le consulat américain a remis à Mme Porteous un certificat de perte de nationalité parce qu’elle avait prêté serment au Canada pour pouvoir occuper le poste de greffière du scrutin lors des élections fédérales de 1957.

La famille a vécu six ans aux États-Unis avant de revenir au Canada pour s’établir dans la région Osoyoos en 1965. Au cours des 42 dernières années, elle a contribué à la vie de sa collectivité et de son pays. Elle a été recenseure en 1995, elle a travaillé pour Élections Canada jusqu’en 2003. Elle a voté à chaque élection fédérale, provinciale et municipale parce qu’elle estimait que c’était son devoir en tant que citoyenne. Elle et son époux sont mariés depuis près de 52 ans. Ils ont trois enfants, huit petits-enfants et un arrière-petit-fils, qui sont tous nés au Canada et y vivent en permanence.

En 2006, Mme Porteous a demandé une carte de citoyenneté de remplacement en vue d’une demande de passeport. Plusieurs mois plus tard, elle a reçu une lettre de Citoyenneté et Immigration Canada qui disait en substance ceci :

Vous avez cessé d’être une citoyenne le 14 juin 1960, le jour suivant votre 24e anniversaire de naissance, puisque vous ne résidiez pas au Canada à cette date et vous n’avez pas demandé à conserver votre citoyenneté avant cette date.

À cause de cela, elle ne peut plus visiter sa famille élargie — sœurs, frères, et amis, qui sont tous septuagénaires — aller jouer au golf et faire toutes les choses qu’elle a faites librement au cours des 42 dernières années en croyant qu’elle était citoyenne canadienne. Voici ce qu’elle a dit :

Entre Oroville et Osoyoos, ma vie s’est déroulée dans un rayon de 25 milles au cours des 50 dernières années. […] Vous avez fait de moi une apatride. J’ai vécu ici illégalement pendant 42 ans? Allez-vous réclamer un remboursement de ma pension? […] Je n’ai jamais été aussi déçue de mon pays. Je ne peux pas le croire. Je ne sais pas quel est le problème […].

C.  M. Johan Teichroeb[36], qui s’est vu refuser la citoyenneté en raison de l’application rétrospective des dispositions applicables aux enfants nés hors mariage

M. Johan Teichroeb est né au Mexique en 1980. Peu après sa naissance, ses parents ont demandé et obtenu pour lui un certificat de citoyenneté canadienne en faisant valoir que sa mère était Canadienne[37]. Sa famille s’est établie au Manitoba lorsqu’il avait six mois.

M. Teichroeb a grandi au Canada et a réalisé son rêve de devenir camionneur à l’âge de 16 ans. Sachant qu’il devait présenter une demande pour conserver sa citoyenneté avant d’atteindre l’âge de 28 ans[38], il a présenté une demande à cette fin en 2002. Un an plus tard, il a reçu une lettre dans laquelle on lui disait qu’il n’avait jamais été Canadien. La raison invoquée pour justifier cette décision était que le Canada ne reconnaissait pas la validité du certificat de mariage de ses grands-parents, qui datait de 75 ans, parce que le Mexique ne reconnaissait pas les mariages religieux à l’époque. En conséquence, on considérait que le grand-père de M. Teichroeb était né hors mariage et que pour cette raison, l’arrière-grand-père de M. Teichroeb n’avait pu transmettre sa citoyenneté canadienne à son grand-père conformément à la loi canadienne en vigueur à l’époque. Parce que son grand-père n’avait jamais été Canadien, la mère de M. Teichroeb n’avait pas pu acquérir la citoyenneté canadienne par filiation et, conséquemment, M. Teichroeb ne le pouvait pas lui non plus. Le document obtenu en 1980 pour attester sa citoyenneté lui avait apparemment été délivré par erreur.

M. Teichroeb a dit au Comité qu’il avait été foudroyé d’apprendre qu’il n’avait jamais été Canadien alors qu’il vivait au Canada depuis plus de 20 ans. Il est marié et a deux enfants nés au Canada. Dans son cas, la perte de sa citoyenneté a eu des conséquences particulièrement graves puisqu’il a perdu son emploi de camionneur. Voici ce qu’il avait à dire à ce sujet :

[…] J’ai perdu mon emploi. Je ne pouvais plus traverser la frontière, et l’entreprise ne pouvait pas me donner de trajets au Canada, alors je me suis retrouvé sans emploi. […] En raison de tout cela, j’ai tout perdu, y compris ma maison. J’en étais rendu à louer une maison. Pour ce qui est de l’argent, j’en empruntais pour acheter de la nourriture pour les enfants. Je ne savais pas comment je pouvais continuer ainsi. Ma conjointe en était déprimée, et elle a commencé à prendre des antidépresseurs. Rien n’indiquait que nous allions récupérer quoi que ce soit. Je suis donc passé d’un emploi à l’autre, pour tenter de subvenir aux besoins de ma famille, pour tenter de conserver tout ce que j’avais. Mon père était propriétaire d’une entreprise de construction, et il m’a offert un emploi. Il avait un poste vacant. J’ai alors commencé à travailler pour lui. Un an plus tard, je continue de travailler là, et je tente de rembourser ce que j’ai emprunté il y a quatre ans.

M. Teichroeb a fait en vain des démarches auprès de CIC pendant quatre ans afin de trouver une solution à son problème. En février 2007, quatre semaines après que les journaux ont commencé à relater de son histoire, il a enfin obtenu sa citoyenneté. Voici les commentaires qu’il a tenus au Comité à ce propos :

J’en suis très reconnaissant, mais tout ce qui s’est passé m’a coûté très cher. […] Je serais très reconnaissant de savoir que personne d’autre n’aura à subir ce que j’ai subi.

D.  M. Don Chapman[39], qui a perdu sa citoyenneté canadienne à l’époque où il était d’âge mineur, quand ses parents ont pris la citoyenneté américaine

M. Don Chapman a comparu devant le Comité à maintes reprises pour parler de ces questions et de l’organisme Lost Canadian Organization. Il est issu d’une septième génération de Canadiens nés au Canada et ses deux parents sont Canadiens.

On a dit dans les médias à propos de M. Chapman qu’« il ne peut pas être plus canadien. Son arrière-grand-père était l’un des Pères de la Confédération. Le père de Don Chapman a combattu sous le drapeau canadien et sa famille a collectivement donné des millions de dollars aux universités et aux organismes de bienfaisance canadiens. La bibliothèque à l’Université de Colombie-Britannique porte le nom de Chapman en l’honneur du père de [M.] Chapman, M. Lloyd Chapman[40]. »[traduction]

M. Chapman a perdu sa citoyenneté canadienne contre sa volonté et à son insu à l’époque où il était enfant, lorsque son père est parti aux États-Unis pour travailler et a été obligé de prendre la citoyenneté américaine. Même si la loi a été abrogée avec la promulgation de l’actuelle Loi sur la citoyenneté en 1977, qui reconnaît la double citoyenneté, les personnes qui ont perdu leur citoyenneté à l’époque où elles étaient d’âge mineur, sous le régime de l’ancienne Loi, ne l’ont pas récupéré. Voici ce que M. Chapman avait à dire au sujet de cette situation[41] :

Ce qui est arrivé, c’est que le Canada a fait une erreur grotesque dans les années 1700 et encore une fois en 1977. Dans les années 1700, le Canada a aboli l’esclavage mais il l’a fait en utilisant des termes de ce genre. Le Haut-Canada a déclaré que les personnes qui étaient esclaves le demeureraient jusqu’à leur mort, mais que pour les nouveaux, l’esclavage était désormais illégal au Canada. C’est ce qu’ils ont fait en 1977. Ils ont adopté une nouvelle Loi sur la citoyenneté. […] Ils ont parlé des enfants qui se trouvaient dans ma situation, mais c’est la bureaucratie qui s’est opposée à tout cela. Le Canada a donc changé la Loi, mais il l’a uniquement changée pour l’avenir. Les enfants dans mon cas ont été mis de côté.

M. Chapman se bat pour faire reconnaître sa citoyenneté canadienne depuis 1972, à l’époque où, à l’âge de 18 ans, il s’est fait dire à la frontière canadienne qu’il n’était pas citoyen canadien. Il aurait pu présenter une demande pour obtenir le statut d’immigrant reçu, mais il soutient que sa citoyenneté et celle d’autres personnes dans la même situation que lui devraient être reconnues rétroactivement[42]. Il a mis sur pied l’organisation Lost Canadian Organization et créé un site Web où il fournit des renseignements au public au sujet du problème des Canadiens dépossédés de leur citoyenneté.

LE CAS DE M. JOE TAYLOR

L’histoire d’un « bébé de la guerre » qui a particulièrement retenu l’attention est celle de M. Joe Taylor.

A.  Les faits

M. Taylor est né à l’étranger en 1944 d’une mère britannique et d’un père canadien non mariés parce qu’on avait refusé à son père militaire la permission de se marier. Les parents de M. Taylor se sont mariés dès qu’ils ont pu, trois jours après la fin de la guerre, mais leur enfant avait déjà quatre mois à ce moment. M. Taylor est arrivé au Canada avec sa mère en 1946 pour y rejoindre son père. En vertu de l’arrêté en conseil de 1945, les deux étaient réputés être des citoyens canadiens dès leur admission au Canada[43]. Toutefois, « [i]l semble qu’après avoir connu les horreurs de la guerre, le père [de M. Taylor] n’était plus le même. Sa personnalité avait changé[44] ». Le mariage des Taylor n’a duré que quelques mois. Lorsque la mère de Joe Taylor est rentrée en Angleterre pour y vivre en novembre 1946, elle a amené son fils avec elle. Six semaines plus tard, la Loi sur la citoyenneté canadienne est entrée en vigueur. En vertu d’une disposition de cette Loi, les enfants qui, comme M. Taylor, étaient nés à l’étranger en dehors des liens du mariage acquerraient leur citoyenneté par filiation maternelle plutôt que paternelle.

En 2003, M. Taylor a présenté une demande pour obtenir un certificat de citoyenneté canadienne, mais s’est fait dire que sa demande n’était pas recevable parce qu’il avait perdu sa citoyenneté en omettant d’enregistrer une déclaration de rétention avant l’âge de 24 ans. Il a présenté une deuxième demande pour obtenir une preuve de citoyenneté, qui lui a aussi été refusée 18 mois plus tard. Cette fois, le refus était justifié par le fait qu’il était né hors mariage et ne pouvait être qu’un citoyen britannique comme sa mère. Il a adressé de nombreuses lettres à des agents d’immigration et à des hommes politiques sans obtenir de résultat.

B.  Affaire en instance

M. Taylor s’est tourné vers les tribunaux pour obtenir une révision judiciaire de la deuxième décision. La Cour fédérale devait trancher deux questions :

1.   La citoyenneté d’une personne née hors du mariage avant le 15 février 1977, à l’extérieur du Canada, ne peut-elle lui venir que de sa mère? (Le problème des enfants nés hors mariage)

2.   Y a-t-il systématiquement perte de la citoyenneté si une demande de rétention n’a pas été présentée par la personne née hors du mariage avant le 15 février 1977, à l’extérieur du Canada, entre 21 et 24 ans? (Exigence relative à la déclaration de rétention)

À la première question, la Cour a répondu par la négative. Les personnes à la charge d’un membre des Forces armées canadiennes durant la Seconde Guerre mondiale, comme M. Taylor, constituaient « un groupe particulier de personnes[45] ». Ces personnes, notamment les bébés de la guerre nés dans les liens du mariage ou hors mariage, tiennent leur citoyenneté de leur père conformément à l’arrêté en conseil, ce dont l’agente de la citoyenneté n’a pas tenu compte avant de rejeter la demande de certificat de citoyenneté présentée par M. Taylor. La Cour a de plus précisé qu’« [i]l en était ainsi malgré le fait que[…] la Loi sur la citoyenneté de 1947 prévoyait que, dans le cas des enfants nés hors du mariage et à l’extérieur du Canada avant le 1er janvier 1947, la citoyenneté ne pouvait leur être transmise que par leur mère naturelle[46] ».

La Cour a en outre souligné que même si l’arrêté en conseil n’a pas la portée que la Cour lui attribue, la distinction qui est faite entre les enfants nés dans les liens du mariage et ceux nés hors mariage dans la disposition pertinente de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947 contrevient aux droits à l’égalité énoncés à l’article 15[47] de la Charte canadienne des droits et libertés[48] et n’est pas justifiée au regard de l’article premier de la Charte[49].

En réponse à la deuxième question concernant le fait que M. Taylor a omis d’enregistrer une déclaration de rétention avant son 24e anniversaire de naissance, la Cour a jugé que cette exigence particulière ne s’appliquait pas à M. Taylor, puisque ce dernier tient sa citoyenneté de l’arrêté en conseil et non de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947. Par conséquent, il n’était pas tenu de déposer une déclaration de rétention de la citoyenneté conformément à cette Loi.

La Cour a finalement conclu que même si l’exigence s’était appliquée, quand elle est interprétée conformément au cadre législatif actuel, elle est contraire aux principes de l’application régulière de la loi et de l’équité procédurale[50]. « La loi ou le règlement devrait prévoir une forme d’avis approprié qui soit donné à la personne concernée. […] [l]a perte automatique de la citoyenneté ne pouvait pas et ne peut toujours pas être appliquée à l’encontre de[M. Taylor] parce qu’elle était et continue d’être contraire au principe de l’application régulière de la loi et qu’elle contrevient aux droits garantis par les alinéas 1a)
et 2e) de la Déclaration canadienne des droits[51] ainsi que par l’article 7[52] de la Charte[53]. » La Cour a de plus jugé que la violation de l’article 7 de la Charte n’était pas justifiée au regard de l’article premier[54].

En ce qui a trait à l’application rétroactive apparente de la Charte et de la Déclaration des droits, la Cour a conclu que la présente instance « porte sur un refus contemporain (en 2005) de délivrer un certificat de citoyenneté au demandeur [M. Taylor] en s’appuyant sur la condition énoncée […] [dans] la Loi sur la citoyenneté actuelle selon laquelle il devait être un citoyen immédiatement avant le 15 février 1977. La légalité

de cette exclusion peut être examinée aujourd’hui au regard de la Charte et de la Déclaration de droits (malgré le fait que [les lois antérieures sur la citoyenneté, sur lesquelles se fonde la décision] ont été abrogées et n’existent plus)[55]. »

En conséquence, la Cour a déclaré que M. Taylor est un citoyen canadien et ordonné au ministre de lui délivrer un certificat de citoyenneté. Elle a de plus déclaré inopérantes les dispositions législatives contestées.

C.  L’appel interjeté par le gouvernement

Le gouvernement a fait appel de la décision Taylor devant la Cour d’appel fédérale. Lorsqu’elle a comparu devant le Comité en février 2007, voici ce qu’a déclaré la ministre[56] :

Le gouvernement du Canada a fait appel de la décision de la Cour fédérale dans l’affaire de M. Taylor, mais je tiens à faire savoir aux membres du Comité que je ne suis pas insensible à sa pénible situation. […] Nous sommes prêts à traiter de façon accélérée la demande de statut de résident permanent qu’il pourrait présenter. Cela lui permettrait de demander la citoyenneté lorsqu’il aura répondu à certaines conditions, notamment celle d’avoir vécu au pays pendant un certain temps. Je tiens à souligner que nous avons porté

en appel la décision de la Cour fédérale parce que nous estimons que cette décision n’est pas fondée en droit. Elle redéfinit la citoyenneté et l’applique à une période où la Loi sur la citoyenneté de 1947 n’existait même pas. De plus, elle donne un effet rétroactif à la Charte, c’est‑à-dire qu’elle l’applique à une période où la Charte n’existait même pas. Ces éléments, avec d’autres, ont des répercussions juridiques qui vont bien au‑delà du cas de M. Taylor.

La Cour d’appel a entendu le pourvoi en septembre et rendu une décision infirmant le jugement du tribunal inférieur en novembre 2007. Dans les motifs du jugement, les trois juges ont dit que les termes employés dans le décret indiquent que celui-ci a été pris « uniquement dans le but de faciliter l’entrée au Canada des personnes à charge des membres des forces armées canadiennes, au sens de la Loi de l’immigration de 1910[57] » (c’est nous qui soulignons). La Cour a expliqué que, lorsqu’il a été admis au Canada, M. Taylor a été assujetti aux lois canadiennes et donc à la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947 entrée en vigueur quelques mois plus tard aux termes de laquelle une personne ne pouvait être un citoyen canadien que si elle répondait aux exigences de la Loi, ce qui n’était pas le cas de M. Taylor. En outre, la distinction qu’établit la Loi de 1947 à l’endroit de M. Taylor du fait de sa naissance « hors du mariage » ne peut pas faire l’objet d’une application rétroactive de la Charte.

Dans le résumé des motifs qui l’ont amenée à conclure que M. Taylor n’est pas devenu citoyen canadien le 1er janvier 1947, la Cour a déclaré : « Si ses parents avaient obtenu la permission de se marier avant que son père fût envoyé en France, M. Taylor se serait qualifié. Aussi infortuné que soit le résultat, il s’agit d’une situation pour laquelle les Cours ne peuvent pas offrir de réparation[58]. »

La Cour ajoute que, de toute manière, même si M. Taylor avait été un citoyen canadien aux termes de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947, il aurait perdu cette citoyenneté en vertu de deux dispositions. Premièrement, il a omis de produire une déclaration de citoyenneté canadienne avant son 24e anniversaire. Deuxièmement, la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947 porte qu’une personne qui est un citoyen canadien autrement que par la naissance perd son statut de citoyen canadien si elle réside hors du Canada pendant dix années consécutives, ce qu’a fait M. Taylor.

Enfin, la Cour a statué que même si la Déclaration des droits et la Charte s’appliquaient aux dispositions sur la perte de la citoyenneté canadienne en question, rien n’impose aux représentants du gouvernement l’obligation d’avertir une personne qu’elle risque de perdre son statut de citoyen canadien.

En conclusion, la Cour a déclaré qu’elle ne pouvait pas satisfaire le souhait de M. Taylor d’être reconnu comme citoyen canadien, mais que celui-ci pouvait présenter une demande d’attribution discrétionnaire de la citoyenneté canadienne en vertu de la Loi actuelle, comme le lui a suggéré l’avocat du ministre au début de l’audience. Apparemment, M. Taylor prévoit porter sa cause devant la Cour suprême du Canada[59].

M. Taylor a beaucoup investi de ses propres fonds pour financer ses contestations judiciaires. Lorsqu’il a comparu devant le Comité en février 2007[60], il a parlé du Programme de contestation judiciaire que le gouvernement venait d’abolir. Ce programme aidait à financer les importantes affaires judiciaires touchant la langue et les droits à l’égalité garantis par la Constitution canadienne. Selon M. Taylor :

Après avoir aboli la seule source de financement sur laquelle je pouvais compter, on me signifiait que si je tenais à me battre encore pour mes droits de naissance, je devais être prêt à envisager la faillite, tandis que le gouvernement pouvait utiliser de vastes ressources payées par les contribuables.

En l’absence du Programme de contestation judiciaire, l’appel que M. Taylor comptait interjeter, ainsi que les autres causes individuelles d’intérêt général devront être financés au moyen de fonds privés.

PROBLÈMES À CARACTÈRE SYSTÉMIQUE

Outre les questions juridiques concernant leur citoyenneté, les témoins qui ont comparu devant le Comité ont fait mention des difficultés qu’ils ont eues dans leurs rapports avec CIC à la recherche de solutions. Ils déplorent notamment le manque d’égards avec lequel les fonctionnaires leur ont appris la perte de leur citoyenneté, les renseignements contradictoires qu’on leur a donnés sur la manière de surmonter leurs difficultés et les périodes d’attente et les coûts excessifs associés au règlement de leurs problèmes.

Par exemple, quand Mme Lisa Cochrane a comparu devant le Comité au nom de sa mère, Mme Marion Galbraith, elle a dit[61] :

Nous nous sommes rendus au bureau de Citoyenneté et Immigration à Halifax, et ce fut un cauchemar. J'ai honte de dire que je n'ai jamais reçu un aussi piètre service de toute ma vie […]. Nous nous sommes approchés du commissionnaire derrière la vitre. Ma mère a commencé par lui dire « Je reviens du bureau des passeports et on m'a dit que je ne suis pas Canadienne. J'ai tous ces documents. Aidez-moi. À qui dois-je parler et que dois-je faire? » Il ne s'est pas laissé toucher par le récit de ma mère et je me suis sentie un peu frustrée. Je lui ai dit « Écoutez, voici ce dont nous avons besoin. Nous devons parler à quelqu'un. Voici ce que nous avons et voici ce qu'on nous a dit, alors comment pouvons-nous régler le problème? » Il m'a répondu « Vous voyez ce téléphone là-bas? » en pointant le doigt […]. « Appuyez sur le 1, appuyez sur le 2, parlez... ».

Mme Cochrane a raconté au Comité comment quatre demandes de renseignements sur les démarches à entreprendre ont abouti à quatre jeux de formulaires différents à remplir qui auraient représenté 430 $ de droits et n’auraient même pas nécessairement produit les résultats souhaités. Elle a fini par se rendre compte qu’il lui suffisait de remplir une demande de carte de citoyenneté, « mais personne n'a pris le temps d'écouter ou de comprendre » a-t‑elle dit.

Mme Gail E. Forrest a dit au Comité qu’elle avait tenté pendant des années de récupérer sa citoyenneté canadienne. Elle a dit avoir été emballée quand Don Chapman (de l’organisation Lost Canadian) a communiqué avec elle, parce qu’avant cela, « j'avais l'impression d'être seule dans mon combat contre la bureaucratie canadienne[62] ». Elle a ajouté :

Lorsque je parle de combattre la bureaucratie, je veux dire que chaque fois que j'ai communiqué avec les bureaux de Citoyenneté Canada au Canada, ou encore une ambassade ou un consulat aux États-Unis, on m'a dit de nombreuses choses différentes au sujet de ma situation. Vos bureaux de la citoyenneté ne comprenaient pas ma situation et ne la connaissaient pas. Certains bureaux m'ont dit que si j'étais née au Canada, alors j'étais une citoyenne canadienne, point à la ligne.

Mme Sheila Walshe aussi a eu des démêlés pénibles avec CIC. Elle a parlé au Comité du manque de communication de la part de CIC quand elle a voulu se procurer un certificat de citoyenneté canadienne :

J'ai pris mes formulaires et je les ai envoyés et en l'espace de 11 jours, j'ai reçu une réponse de CIC, Citoyenneté et Immigration Canada, disant que j'allais recevoir mon certificat dans les cinq ou sept mois suivants à moins qu'on ait besoin d'autre chose. C'était très bien. En octobre 2005, j'ai reçu une lettre de CIC; on me disait que les choses prenaient plus de temps que prévu et on me remerciait de ma patience. Rien depuis; aucune nouvelle depuis ce temps. Oh, j'appelle périodiquement […] je pose des questions à quelques mois d'intervalle. Je me rends au bureau de CIC et je pose des questions. La dernière fois que je suis allée à Kelowna, l'agente a vérifié pour moi et m'a dit « Je suis vraiment désolée, mais votre dossier est en attente ». Alors je lui ai dit « Croyez-vous que CIC m'accordera ma citoyenneté après ma mort? [63]»

M. Johan Teichroeb a lui aussi attendu longtemps la régularisation de sa situation, mais il a finalement trouvé le moyen de faire accélérer les choses[64] :

[…] l'étude de ma demande a pris quatre ans. Mais tout à coup, lorsque nous avons commencé à parler de l'histoire dans les journaux, j'ai reçu une réponse — en quatre semaines. Je l'ai reçue le 28 février 2007.

Mme Magali Castro-Gyr est une Canadienne de la dixième génération et une enseignante. Elle a perdu sa citoyenneté canadienne quand elle était enfant, lorsque son père a pris la citoyenneté américaine. Elle a montré au Comité une lettre de CIC l’informant qu’elle n’était plus canadienne. On y dit[65] :

Votre père [...] a acquis la citoyenneté américaine en 1958, année où vous aviez la double nationalité (française et canadienne).

Mme Castro-Gyr a dit au Comité [66] :

C'est intéressant, parce que, tout d'abord, ce n'était pas en 1958, mais en 1975. Et je n'étais même pas née à cette époque. Je suis née en 1959, alors je ne pouvais pas avoir une double citoyenneté en 1958; je n'étais même pas née.

[…]

Il y a aussi des fautes d'orthographe dans cette lettre. Tout d'abord, Beverly Foggoa, celle qui l'a signée, a écrit « Camada » au lieu de Canada. Elle a fait des erreurs en écrivant le nom de mes enfants. Elle a mal écrit notre nom de famille. J'ai eu affaire à une bureaucratie aussi négligente que cela.

[…]

Lorsque j'ai reçu cette lettre, j'ai retenu les services d'un avocat. J'ai dépensé personnellement 27 000 $ dans cette affaire […] Une révision judiciaire a eu lieu pendant deux ans. J'ai ensuite reçu une « offre » — et je dois mettre cela entre guillemets — en mai 2003, dans laquelle on énonçait neuf choses que je devais faire si je voulais rester ici.

[…]

Je suis partie, et deux mois plus tard — déstabilisant ma famille encore une fois — le gouvernement a changé de cap et m'a accordé, à moi et à mes fils, la citoyenneté. Toutefois, il ne reconnaît pas que je suis née ici d'une mère canadienne-française et que je suis Canadienne.

M. Charles Bosdet a fait part au Comité des constats particulièrement inquiétants qui résultent de ses démarches au bureau de Sydney de CIC[67] :

[À] un certain moment, dans les lettres que m'envoyait mon évaluatrice, on n'accusait même pas réception des documents que j'envoyais, et ces lettres ne correspondaient pas du tout au contenu de ces documents. Dans certains cas, on ne tenait pas compte des preuves secondaires qui, d'après le Guide des politiques de citoyenneté, sont acceptables et doivent être acceptées à la place de preuves primaires.

Dans mon cas, je pense que l'évaluatrice a totalement enfreint l'interdiction d'imposer un fardeau exagéré à un requérant indiquant qu'on ne peut pas imposer à une personne un fardeau financier anormal pour l'obliger à répondre aux exigences de l'évaluateur en matière de preuves.

Cette évaluatrice a en outre fait preuve d'un certain manque de professionnalisme. Elle a tenté d'apporter la preuve du contraire de ma citoyenneté en appliquant une loi concernant la nationalité étrangère à un de mes ancêtres. Dans un entretien ultérieur, il était parfaitement manifeste que cette évaluatrice ne comprenait — et, en fait, ignorait totalement — qu'il y avait une différence entre cette loi étrangère en matière de nationalité et celle du Canada.

[…]

Ce qui m'inquiétait, c'est qu'elle ne connaissait pas la loi; ce qui m'ennuyait plus que tout, c'était son manque d'intérêt total pour l'acquisition de nouvelles connaissances. […]

M. Bosdet a dit au Comité que, quand son dossier a été pris en mains par une évaluatrice d’Ottawa, la représentante du bureau de Sydney a présenté à celle-ci une information déformée sur son cas et a omis de l’aviser de l’existence de plusieurs documents importants. C’est lui qui a dû envoyer ces documents par télécopieur à l’évaluatrice d’Ottawa quand il s’en est rendu compte.

Ce qui est arrivé à M. Bosdet n’est peut-être pas monnaie courante. Il reste cependant que les témoignages ne manquent pas quant à la piètre qualité du service à la clientèle de CIC. Force est de conclure qu’il ne s’agit pas d’incidents isolés et que le Ministère emploie de nombreux agents qui sont peu au fait de la loi et qui manquent de tact dans leurs rapports avec leurs clients. Bien sûr, les fonctionnaires, qui doivent interpréter et appliquer des dispositions législatives complexes, n’ont pas la tâche facile, mais les problèmes systémiques et une attitude qui laisse souvent à désirer ne font qu’exacerber le problème.

Quand les porte-parole de CIC ont comparu devant le Comité en juin 2007[68], ils lui ont fait part des mesures qui avaient été prises pour remédier aux problèmes que l’on vient de soulever. Le Comité a alors appris que CIC avait réservé une ligne du centre d’appel aux questions de citoyenneté auxquelles répondent des opérateurs expressément formés. Les cas qui doivent être approfondis sont renvoyés à un spécialiste et traités avec diligence. En outre, CIC a lancé une campagne de sensibilisation de la population qui a suscité une augmentation des consultations au centre d’appels[69].

En ce qui concerne le manque d’égards du personnel, un protocole a été établi pour traiter les cas de perte de citoyenneté. Entre autres améliorations, les agents disposent maintenant de scripts qui leur proposent un langage empreint de considération. Mme Janet Siddall a dit au Comité qu’elle avait rencontré les représentants d’autres services du gouvernement fédéral susceptibles d’être le premier point de contact des personnes concernées avec le gouvernement, notamment le directeur général du Bureau des passeports, qui a envoyé aux employés une note leur rappelant l’importance de faire preuve de tact dans leurs rapports avec les personnes qui n’ont pas de preuve de leur citoyenneté canadienne. Elle a dit qu’elle avait également rencontré à ce sujet des représentants de l’Agence des services frontaliers du Canada et du Bureau des affaires consulaires du ministère des Affaires étrangères[70].

CASIER JUDICIAIRE ET CITOYENNETÉ

Le Comité abordera ici la manière dont on se sert de la législation en matière de citoyenneté dans le contexte des poursuites au pénal intentées contre des Canadiens ayant perdu leur citoyenneté. Le Comité a entendu un avocat, M. Christopher Veeman, représentant M. Robert Clark[71].

M. Clark et ses frères sont nés de parents canadiens dans un hôpital du Dakota du Nord situé à proximité de leur résidence dans le sud du Manitoba. Après chaque naissance, y compris après la naissance de M. Clark en 1947, la famille est rentrée chez elle au Canada. Toute leur vie, les Clark se sont considérés comme Canadiens.

En 2006, M. Clark a été reconnu coupable d’un acte criminel. Quand quelqu’un a remarqué qu’il était né aux États-Unis, une enquête en matière d’immigration a été lancée au terme de laquelle on a appris à M. Clark qu’il était un ressortissant étranger et qu’il n’avait pas de statut légal au Canada. À cause de sa condamnation, une ordonnance de déportation a été rendue contre lui.

Pour l’instant, la Cour fédérale a accordé à M. Clark une suspension provisoire de l’ordonnance de déportation au motif qu’il serait peut-être citoyen canadien aux termes de la Loi sur la citoyenneté. Pour leur part, les deux frères de M. Clark ont acquis la citoyenneté canadienne en février 2007 aux termes du pouvoir discrétionnaire de la ministre d’accorder la citoyenneté canadienne dans des cas spéciaux[72]. M. Clark, lui, n’a pas obtenu la citoyenneté canadienne comme ses frères, sans doute à cause de sa condamnation au pénal.

L’avocat de M. Clark, M. Veeman, a dit au Comité :

[…] j'estime qu'un système qui permet à des personnes, qui se considèrent ouvertement comme des Canadiens, de vivre au Canada pendant 59 ans pour émettre ensuite une ordonnance d'expulsion après une audition sommaire en présence d'un fonctionnaire de l'Agence des services frontaliers du Canada est un système défectueux.

Voici les suggestions que je voudrais faire au Comité : si vous comptez remanier la Loi sur la citoyenneté, il faudrait limiter autant que possible l'exercice du pouvoir discrétionnaire et envisager la nomination d'un décideur indépendant pour ces types de questions […].

Le Comité considère que le fait de déporter des personnes qui ont ainsi perdu leur citoyenneté canadienne parce qu’elles sont coupables d’un acte criminel n’a rien à voir avec l’objet supposé de ces déportations, à savoir débarrasser le pays des criminels étrangers. Or, M. Clark et les autres comme lui sont des Canadiens dans tous les sens du terme, même s’ils ne le sont pas sur le plan purement légal. Il est donc abusif de la part du gouvernement d’exploiter ainsi une aberration juridique qui prive M. Clark de la citoyenneté canadienne. C’est injuste envers M. Clark, qui se trouverait ainsi doublement pénalisé pour son crime : d’abord par la sentence rendue par le tribunal proportionnellement à sa faute, et ensuite par un bannissement illimité du pays où il vit depuis soixante ans. C’est injuste aussi envers les États-Unis, un pays avec lequel M. Clark n’a qu’un lien ténu et fugace qui doit demeurer sans conséquence. Bref, une personne bien établie au Canada qui a perdu la citoyenneté canadienne dans les circonstances dont il est question dans le présent rapport, et qui commet un acte criminel, doit être traitée comme les personnes dont la citoyenneté canadienne est incontestée.

Il y a aussi la question connexe des vérifications des antécédents réalisées par la GRC et le SCRS avant qu’on accorde ou qu’on restitue la citoyenneté canadienne aux personnes concernées. Le Comité a entendu des témoignages contradictoires sur le temps nécessaire à ces vérifications; aux dires de certains, elles peuvent prendre 120 jours, mais d’autres affirment qu’il suffit de deux semaines[73].

Abstraction faite de la durée de ces vérifications, qui varie sans doute d’un cas à l’autre, le Comité estime que les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté qui ont des liens solides avec le Canada ne devraient pas faire l’objet de telles vérifications pour retrouver la citoyenneté canadienne. Le fait d’omettre celles-ci accélérerait la régularisation de la situation des personnes concernées. Sur un autre plan, plus fondamental encore, il importe de se souvenir qu’il s’agit en l’occurrence de régulariser la situation de personnes qui sont en fait et ont toujours été des Canadiens; rien de commun avec un étranger qui sollicite la citoyenneté canadienne. Ainsi, si un Canadien dépossédé de sa citoyenneté possède un casier judiciaire ou présente une menace pour la sécurité nationale, il doit être considéré, sur le plan moral, d’abord et avant tout comme un citoyen canadien ordinaire.

LE POINT DE VUE DU GOUVERNEMENT

Quand elle a comparu devant le Comité pour la première fois à ce sujet[74], la ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a déclaré que le problème « est bien réel et mérite qu'on s'y intéresse sans tarder mais il n'est certainement pas aussi grave que l'ont rapporté les médias ou certains députés[75] ». Elle a dit qu’il ne restait qu’environ 450 cas connus de personnes dont la situation n’était pas encore régularisée, qu’elle se servait des pouvoirs discrétionnaires que lui confère la Loi sur la citoyenneté pour les régler le plus rapidement possible et qu’elle avait jusqu’alors obtenu, par l’intermédiaire du gouverneur en conseil, l’autorisation d’accorder la citoyenneté à 33 personnes à titre exceptionnel[76].

Sur le plan plus général, la ministre a décrit cinq mesures prises par le Ministère pour remédier au problème[77] :

Nous avons renforcé le personnel affecté au traitement des cas et créé une unité spéciale à notre télécentre, afin que les gens qui ont des questions au sujet de leur citoyenneté puissent parler directement à quelqu'un en mesure de les aider.

La plupart du temps, lorsqu'il s'agit de perte de la citoyenneté, le cas est confié à un agent de programme.

Nous veillons, avec nos partenaires, à ce que personne ne fasse l'objet d'une mesure de renvoi, ni ne cesse de recevoir ses prestations, comme les soins de santé ou les prestations de sécurité de la vieillesse, pendant que leur dossier est examiné.

Nous collaborons avec le bureau des passeports afin qu'il dirige les gens vers notre télécentre où ils peuvent s'adresser directement à des agents de la citoyenneté.

Nous accélérons également le processus pour les personnes qui n'ont pas perdu leur citoyenneté mais leur preuve de citoyenneté et qui doivent présenter une demande pour en obtenir une nouvelle.

Quand elle a comparu devant le Comité la seconde fois, la ministre a rapporté que sur les 450 cas connus signalés précédemment, il n’en restait plus que 285 à régler, dont 250 attendaient l’issue de l’appel dans l’affaire Taylor, et qu’elle avait obtenu du gouverneur en conseil l’autorisation d’accorder la citoyenneté canadienne à titre exceptionnel à 49 personnes[78].

La ministre a indiqué par ailleurs que le Ministère avait lancé une campagne de sensibilisation ciblant les personnes qui pourraient avoir perdu leur citoyenneté canadienne ou qui risquent de la perdre. Des annonces ont été publiées dans les grands quotidiens et les journaux régionaux en précisant où s’adresser au Ministère pour obtenir de l’aide à ce sujet.

Elle a aussi annoncé son intention de déposer à l’automne un projet de loi modifiant la Loi sur la citoyenneté pour remédier aux problèmes les plus urgents examinés par le Comité. Elle a donné les précisions suivantes au sujet des mesures envisagées :

Premièrement, aucune de ces modifications ne vise à retirer la citoyenneté à toute personne qui possède actuellement le statut de citoyen au Canada […]  Notre objectif […] consiste […] à corriger le problème survenu par le passé et à protéger la citoyenneté en vue de l'avenir.

Deuxièmement, toute personne née au Canada à compter du 1er janvier 1947 verra sa citoyenneté confirmée, même si elle l'a perdue en vertu d'une disposition de la Loi de 1947. Les seules exceptions visent les personnes nées au Canada d'un diplomate étranger accrédité et celles qui ont personnellement renoncé à leur citoyenneté à l'âge adulte.

Troisièmement, toute personne naturalisée au Canada à compter du 1er janvier 1947 verra sa citoyenneté confirmée même si elle l'a perdue en vertu d'une disposition de la Loi de 1947. Les seules exceptions visent les personnes qui ont personnellement renoncé à leur citoyenneté à l'âge adulte et celles dont la citoyenneté a été révoquée par le gouvernement parce qu'elle a été obtenue par des moyens frauduleux.

Quatrièmement, toute personne née d'un citoyen canadien à l'étranger, que cette personne soit son père ou sa mère et qu'elle-même soit née à l'intérieur ou à l'extérieur des liens du mariage, à compter du 1er janvier 1947, est un citoyen canadien et verra sa citoyenneté confirmée dans la mesure où elle fait partie de la première génération de Canadiens nés à l'étranger. Les membres des générations ultérieures de Canadiens nés à l'étranger ne verront pas leur citoyenneté confirmée

Selon la ministre, ces propositions résoudront les problèmes de la plupart des personnes dont la situation vis-à-vis de la citoyenneté n’est pas encore régularisée, supprimeront les exigences coûteuses et portant à confusion en ce qui a trait à la rétention de la citoyenneté et garantiront que la situation ne se répétera pas. Elle a admis cependant que les mesures législatives envisagées ne régleront pas tous les cas et qu’il restera encore à trouver une solution au cas des personnes nées à l’étranger avant le 1er janvier 1947 dont le statut de citoyen canadien n’est pas encore confirmé.

RECOMMANDATIONS

Le Comité formule les recommandations suivantes. Certaines concernent des mesures à intégrer au projet de loi promis, d’autres visent à offrir des recours immédiats avant l’adoption du projet de loi, d’autres encore prônent la promulgation d’une toute nouvelle loi sur la citoyenneté et d’autres enfin portent sur certains des problèmes d’ordre systémique observés à CIC. Le Comité formule par ailleurs aussi des recommandations relatives à l’affaire Taylor.

A.  Recommandations relatives au projet de loi promis

Le Comité est d’avis que le projet de loi devrait rendre la Loi sur la citoyenneté conforme à plusieurs principes fondamentaux de la notion de citoyenneté par l’application d’un nombre minimal de règles faciles à comprendre et à appliquer.

Recommandation 1 :

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur la citoyenneté de manière à refléter plusieurs principes fondamentaux.

Dans les années 1940, quand le Parlement a promulgué la Loi sur la citoyenneté canadienne, on trouvait normal que la citoyenneté soit transmise par un des parents, mais pas par l’autre; on pensait qu’il valait mieux avoir divers types de citoyenneté (par filiation et autrement) assortis de règles différentes; on considérait qu’il était acceptable qu’une personne perde la citoyenneté canadienne ou ne l’obtienne jamais pour des raisons dont elle ignorait parfois l’existence ou qui étaient totalement indépendantes de sa volonté.

La société canadienne a évolué au fil des ans et avec elle, nos valeurs en matière de citoyenneté. La Loi sur la citoyenneté actuelle, entrée en vigueur en 1977, reflète les valeurs de l’époque moderne : désormais, la citoyenneté serait transmise par la mère ou le père, et le fait que les parents soient mariés ou non au moment de la naissance serait sans conséquence en matière de citoyenneté; enfin, les conditions d’immatriculation et de rétention de la citoyenneté étaient éliminées, le tout au bénéfice uniquement des générations futures.

L’idée que nous nous faisons de la citoyenneté et des droits et responsabilités qui y sont rattachés a continué d’évoluer au cours des trente dernières années. Ainsi, la Loi de 1977 ne traduit pas nécessairement les vues de notre société en 2007. En particulier, nous souscrivons aux principes suivants, que nos lois en matière de citoyenneté devraient refléter.

Recommandation 2 :

Le Comité recommande que les modifications de la Loi sur la citoyenneté soient conformes aux principes fondamentaux suivants :

§ La citoyenneté est un statut permanent que l’on ne perd que par renonciation à l’âge adulte ou par révocation pour l’avoir acquis par fausse déclaration, fraude ou dissimulation intentionnelle de faits importants.

§ Les règles régissant la détermination du statut de citoyen canadien doivent être peu nombreuses, claires et faciles à appliquer de manière que les gens puissent eux-mêmes déterminer s’ils ont la citoyenneté canadienne sans avoir à consulter Citoyenneté et Immigration Canada ou à prendre un avocat.

§ Les gens doivent pouvoir être sûrs de leur citoyenneté. Une fois une période prescrite écoulée, le gouvernement ne devrait pas pouvoir révoquer un certificat de citoyenneté au motif qu’il a été délivré par erreur. La seule exception à cette règle doit être les cas où le certificat a été acquis par fausse déclaration, fraude ou dissimulation intentionnelle de faits importants.

§ Les principes énoncés ci-dessus devraient s’appliquer à tout le monde et pas seulement aux personnes nées après une certaine date ou à celles qui ont perdu leur citoyenneté aux termes d’une loi donnée. En conséquence, les personnes dépossédées de leur citoyenneté canadienne devraient la récupérer avec effet rétroactif à la date où elles l’ont perdue. Les personnes qui n’ont jamais eu la citoyenneté canadienne aux termes de la loi en vigueur mais l’auraient aux termes d’une nouvelle loi devraient être considérées comme des citoyens canadiens rétroactivement à la date de leur naissance.

§ Les vérifications des antécédents ne se justifient que pour les candidats à la citoyenneté et non pour les personnes dont la citoyenneté est un droit acquis à la naissance. Si la citoyenneté présente un caractère permanent, les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté n’ont pas à faire l’objet d’une vérification des antécédents pour la récupérer.

D’autres pays ont vécu des problèmes semblables à ceux du Canada relativement aux lois sur la citoyenneté. Le Comité constate que la République de Trinité-et-Tobago a appliqué une solution simple à un problème similaire, soit l’adoption d’une disposition prévoyant qu’un individu qui cesse d’être un citoyen de Trinité-et-Tobago est réputé avoir repris la citoyenneté à la date où il l’a perdue[79].

Recommandation 3 :

Le Comité recommande que les modifications de la Loi sur la citoyenneté portent que quiconque a perdu la citoyenneté canadienne la récupère avec effet rétroactif à la date où elle a été perdue. Cette mesure s’applique aux personnes à qui on a délivré par erreur une carte de citoyenneté canadienne ou une carte de citoyenneté portant une date d’expiration et à celles qui, à une époque, étaient réputées être des citoyens canadiens au sens de l’arrêté de 1945. Font exception les personnes dont la citoyenneté a été révoquée parce qu’elles l’ont acquise par fausse déclaration, fraude ou dissimulation intentionnelle de faits importants et celles qui, une fois adultes, ont renoncé à la citoyenneté canadienne. La solution adoptée par Trinité-et-Tobago en 2000 pourrait servir de modèle pour le Canada.

Recommandation 4 :

Le Comité recommande que les modifications de la Loi sur la citoyenneté fassent en sorte que les personnes suivantes soient des citoyens canadiens :

§ Quiconque est né au Canada, à compter de la date de sa naissance, les seules exceptions étant les enfants d’un diplomate étranger accrédité et les personnes qui, une fois adultes, ont renoncé à la citoyenneté canadienne.

§ Quiconque est né à l’étranger d’une mère canadienne ou d’un père canadien, à compter de la date de sa naissance, s’il s’agit de la première génération née à l’étranger, les seules exceptions étant les personnes qui, une fois adultes, ont renoncé à la citoyenneté canadienne.

§ Quiconque a acquis la citoyenneté canadienne par naturalisation, les seules exceptions étant les personnes qui, une fois adultes, ont renoncé à la citoyenneté canadienne et celles qui ont acquis la citoyenneté canadienne par fausse déclaration, fraude ou dissimulation intentionnelle de faits importants.

Recommandation 5 :

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada dépose le projet de loi recommandé modifiant la Loi sur la citoyenneté à la Chambre des communes avant le 15 février 2008.

B.  Recommandation visant à offrir un redressement immédiat, avant même l’adoption du projet de loi

Le Comité estime que les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté ont besoin de régulariser leur situation le plus tôt possible. Bien que nos recommandations, une fois adoptées, permettraient de résoudre les cas de perte de citoyenneté, nous craignons que ce règlement n’intervienne parfois trop tard, car un bon nombre des personnes concernées sont âgées. Chaque jour qui passe sans règlement est pour ces personnes un jour de plus à avoir du mal à voyager ou à toucher certaines prestations auxquelles elles auraient normalement droit. Les personnes concernées qui ne sont pas encore à la retraite peuvent se trouver dans l’impossibilité de travailler dans la profession de leur choix pour faire vivre leur famille. Comme le Comité l’a constaté durant les audiences, de nombreux Canadiens dépossédés de leur citoyenneté sont bouleversés, se sentent exclus et continuent d’éprouver colère et déception.

Recommandation 6 :

Le Comité recommande que la ministre envisage de se servir de ses pouvoirs discrétionnaires aux termes de la Loi sur la citoyenneté pour mettre en œuvre les recommandations ci-dessus avant même que le projet de loi soit déposé à la Chambre des communes. La priorité doit être accordée aux personnes que la situation a rendues apatrides[80].

C.  Facteurs qui militent en faveur de la promulgation d’une toute nouvelle loi sur la citoyenneté

En 2005, le Comité a déposé un rapport répondant à six questions du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration de l’époque, L’honorable Joseph Volpe. Il y disait espérer que ses réponses « permettront le dépôt d’une nouvelle loi sur la citoyenneté dans les plus brefs délais[81] ». Nous continuons d’insister sur la nécessité d’adopter une nouvelle loi sur la citoyenneté qui reflète les valeurs de la société canadienne contemporaine et simplifie la détermination de la citoyenneté canadienne.

Nous pensons qu’il devrait être simple de déterminer si une personne a le statut de citoyen canadien. Ainsi, la nouvelle loi ne devrait pas contenir de renvois à des lois antérieures. Une personne ne doit pas avoir à prouver des faits au sujet de ses ascendants autres que ses parents pour établir sa propre citoyenneté.

D.  Recommandations visant à remédier à certains des problèmes à caractère systémique observés à CIC

La législation actuelle du Canada sur la citoyenneté est compliquée et, disons-le, injuste dans certains cas. Les fonctionnaires de CIC, chargés de l’appliquer, ont en conséquence bien du mal à s’acquitter de leurs responsabilités. Le Comité est convaincu que la plupart des agents de CIC sont très compétents, professionnels et consciencieux. Il a cependant entendu des témoignages montrant que, dans certains cas, des fonctionnaires de CIC ont mal renseigné des personnes demandant des éclaircissements sur leur statut; les gens avaient du mal à comprendre l’information qu’on leur avait donnée; ou l’on avait informé très cavalièrement et sans égard une personne qu’elle n’avait peut-être pas la citoyenneté canadienne comme elle le pensait. Dans chaque cas, les conséquences légales, financières et psychologiques de l’information donnée étaient ou pouvaient être très graves pour la personne concernée.

Or, il est extrêmement important que les représentants de CIC fournissent rapidement aux requérants une information exacte et claire, et ce, avec les égards voulus et qu’ils soient en tout temps courtois et serviables. En conséquence, le Comité formule les recommandations suivantes :

Recommandation 7 :

Le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada produise une trousse d’information à l’intention des députés et de leur bureau de circonscription pour les aider à répondre aux questions des personnes qui les consultent en matière de citoyenneté.

Recommandation 8 :

Le Comité recommande que, dans toute lettre informant une personne qu’elle n’a pas la citoyenneté canadienne ou rejetant une demande de citoyenneté, Citoyenneté et Immigration Canada précise les démarches à accomplir pour faire corriger une erreur, le cas échéant, ou pour obtenir d’un complément d’information ou des explications.

Recommandation 9 :

Le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada cherche à obtenir une rétroaction sur ses services pour identifier les secteurs problématiques. Il faudrait communiquer au public une adresse de courriel et une adresse postale où envoyer plaintes, suggestions et remerciements au sujet des services de CIC, notamment dans les lettres de CIC à des particuliers, sur les affiches apposées dans les salles d’attente de CIC et sur le site Web de CIC.

Recommandation 10 :

Le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada prenne les mesures voulues pour intervenir quand un de ses agents fait l’objet de multiples plaintes.

Recommandation 11 :

Le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada vérifie s’il existe une raison impérieuse et pressante de continuer de ne pas admettre le formulaire DND419[82] comme preuve de citoyenneté canadienne. CIC devrait encourager Passeport Canada et les autres ministères et organismes publics fédéraux, provinciaux et territoriaux à accepter le formulaire DND419, ainsi que le certificat d’enregistrement d’une naissance à l’étranger comme preuve de citoyenneté canadienne.

Recommandation 12 :

Le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada produise un feuillet d’information clair et simple sur le formulaire DND419 et le certificat d’enregistrement d’une naissance à l’étranger expliquant la nature et la portée de ces documents. Les feuillets d’information doivent être remis aux titulaires des documents au moment opportun et aux employés de première ligne pour les aider à expliquer aux titulaires des documents en question que leur citoyenneté n’est pas contestée.

E.  Épilogue : l’affaire Taylor

Le Comité remarque que M. Taylor a supporté un lourd fardeau, financier et psychologique, et a contribué à l’amélioration de la législation canadienne en matière de citoyenneté.  

Recommandation 13 :

Le Comité recommande que, en attendant la promulgation du projet de loi recommandé, la ministre envisage de faire approuver par décret l’octroi de la citoyenneté canadienne à titre exceptionnel à M. Taylor et, au cas par cas, aux quelque 250 autres personnes qui se trouvent dans la même situation que lui. La ministre est priée de comparaître devant le Comité afin de l’informer des mesures qu’elle entend prendre suite à cette recommandation.

CONCLUSION

La citoyenneté est un élément fondamental de l’appartenance à la société canadienne. Elle transcende les différences et constitue le dénominateur commun qui nous unit comme nation. Le Canada doit être un club dont nous sommes tous membres.

Les lois sur la citoyenneté de 1947 et de 1977 étaient le produit de leur époque et reflétaient les conventions sociales et convictions du temps. Notre société a évolué depuis, tout comme notre conception du principe d’équité sur lequel doit reposer la citoyenneté. Malheureusement, la législation canadienne en matière de citoyenneté n’a pas suivi.

Nous devons nous garder de nous laisser brider par des lois anachroniques qui continuent d’influer sur les décisions en matière de citoyenneté. Le gouvernement a l’occasion de modifier certains aspects des lois passées en matière de citoyenneté. Le Comité presse le gouvernement de mettre en œuvre intégralement toutes ses recommandations, et ce, dès que possible, pour aboutir à un régime responsable, juste, humain et inclusif adapté au Canada.



[1]              L.R. (1985), ch. C‑29.

[2]              Benner c. Canada (Secrétaire d’État), [1997] 1 R.C.S. 358, par. 68 [« Benner »].

[3]              S.C. (1946), ch. 15.

[4]              Certaines d’entre elles peuvent appartenir à la fois aux deuxième et troisième catégories.

[5]              Les Canadiens de deuxième génération sont les Canadiens nés à l’étranger d’un parent canadien lui aussi né à l’étranger. Cette catégorie englobe aussi les générations suivantes de Canadiens nés à l’étranger.

[6]              M. Barry Edmonston, « Mémoire présenté au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration », réunion no 44, 26 mars 2007, p. 4. Les chiffres de M. Edmonston englobent toutes les Européennes qui ont immigré au Canada avec un époux canadien entre 1946 et 1955 (et non simplement celles qui sont arrivées ici immédiatement après la guerre) et qui résident encore au Canada. Les femmes qui vivent peut-être des difficultés concernant leur citoyenneté canadienne forment un petit sous-groupe.

[7]              C.P. 1945‑858 (9 février 1945).

[8]              La loi ne ciblait pas les épouses de guerre. Elle s’appliquait à tous les citoyens canadiens qui n’étaient pas citoyens canadiens « de naissance ». Les Canadiens naturalisés de même que les sujets britanniques qui avaient leur domicile au Canada le 1er janvier 1947 appartenaient eux aussi à cette catégorie et risquaient, par conséquent, de perdre leur citoyenneté canadienne en vertu de la même disposition.

[9]              À titre d’exemple, toute période durant laquelle une personne a été hors du Canada parce qu’elle était au service du Canada ou d’une de ses provinces n’est pas prise en compte à cet égard. D’autres exceptions s’appliquent aussi. Voir l’article 20 de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

[10]           Le parent canadien devait être le père, dans le cas d’un enfant né dans les liens du mariage, et la mère, dans le cas d’un enfant né hors du mariage. Voir plus loin la sous-rubrique intitulée « Le cas des enfants nés hors mariage ». Voir aussi le sous-alinéa 5b)(ii) de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

[11]           Les naissances à l’étranger postérieures à février 1977 n’ont pas à être déclarées.

[12]           Lorsque l’actuelle Loi est entrée en vigueur en 1977, elle prévoyait certains accommodements pour les personnes nées à l’étranger avant 1977 d’une mère canadienne et d’un père étranger mariés. Leur « parent responsable » étant leur père, ces personnes étaient jusque-là traitées comme des étrangères au Canada. L’alinéa 5(2)b) de la Loi de 1977 comportait une « offre de durée limitée » pour leur permettre d’acquérir la citoyenneté canadienne sans devoir d’abord obtenir le statut de résident permanent. Cette solution comportait toutefois plusieurs lacunes. D’abord, elle s’appliquait uniquement aux enfants nés d’une mère canadienne et excluait les enfants nés hors mariage d’un père canadien. (Dans l’affaire Augier c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2004 CF 613, la Cour fédérale a conclu que cette disposition violait les droits à l’égalité garantis par l’art. 15 de la Charte.) Ensuite, elle ne conférait pas systématiquement la citoyenneté sur demande. Un candidat devait quand même se soumettre à une vérification de ses antécédents et pouvait se voir refuser la citoyenneté s’il avait commis une infraction. (Dans Benner (note 2 ci‑dessus), la Cour suprême a conclu que cette disposition violait les droits à l’égalité garantis par l’art. 15 de la Charte.) Enfin, lorsque la citoyenneté était accordée, elle n’était pas rétroactive à la date de naissance. Enfin, parce que l’offre était de durée limitée, elle prenait fin le 14 août 2004 et il n’est plus possible de s’en prévaloir.

[13]           Pour que la naissance puisse être déclarée, le parent canadien de l’enfant devait être le père, dans le cas d’un enfant né dans les liens du mariage, ou la mère, dans le cas d’un enfant né hors mariage. Pour pouvoir se prévaloir de la procédure simplifiée, le parent canadien de l’enfant devait être la mère (et l’enfant devait absolument être né dans les liens du mariage). L’enfant né d’un père canadien et d’une mère étrangère non mariés était traité comme un étranger au Canada.

[14]           Edmonston, note 6 ci‑dessus, p. 5. Cela représente la population totale de « bébés nés à la frontière » et non le nombre total d’entre eux pouvant vivre des difficultés concernant leur citoyenneté canadienne, soit un sous-groupe.

[15]           M. Erl Kish, vice-président national, Légion royale canadienne, réunion no 41, 19 mars 2007, à 12 h 25.

[16]           La disposition en question a été ajoutée à la Loi sur la citoyenneté canadienne après sa promulgation en 1947.

[17]           En d’autres termes, les personnes nées après février 1953 n’ont pas eu à se conformer à cette exigence parce qu’elles n’avaient pas encore atteint l’âge de 24 ans lorsque l’exigence en question a été abolie en février 1977.

[18]           Edmonston, note 6 ci‑dessus, p. 6. M. Edmonston estime qu’environ 10 000 de ces enfants sont nés aux États-Unis. Seul un sous-groupe de ces personnes nées à l’étranger de parents canadiens avant 1977 vivent actuellement des difficultés concernant leur citoyenneté.

[19]           Comme il est mentionné précédemment, il y avait aussi d’autres exigences à remplir. Par exemple, il fallait déclarer la naissance et enregistrer une déclaration de rétention, conformément aux exigences en vigueur à l’époque.

[20]           Selon la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c. Taylor, 2007 CAF 349 [l’« appel Taylor »], la citoyenneté conférée par l’arrêté en conseil différait de la citoyenneté canadienne telle que nous la connaissons aujourd’hui. Par conséquent, la promulgation de la Loi sur la citoyenneté canadienne en 1947 a fait en sorte que certains bébés de la guerre, qui avaient acquis leur citoyenneté aux termes de l’arrêté en conseil, n’étaient plus reconnus comme citoyens. Toutefois, il semblerait que l’appelant envisage de porter en appel la décision auprès de la Cour suprême du Canada : note 59 ci-dessous.

[21]           Edmonston, note 6 ci‑dessus, p. 5. Ce chiffre est un recensement approximatif du nombre total de personnes qui sont nées en Europe entre 1939 et 1955, qui ont déclaré être citoyens canadiens de naissance et qui vivent actuellement au Canada. Il n’est en rien représentatif du nombre de personnes susceptibles d’être touchées par la distinction établie entre les enfants nés de parents mariés et ceux nés de parents non mariés, puisque beaucoup de bébés de la guerre sont nés dans les liens du mariage.

[22]           Comité central mennonite du Canada, Bill Janzen, « Deux problèmes qui concernent certains Canadiens nés à l’étranger », mémoire, réunion no 38, 26 février 2007 : « Dans les années 1920, plus de 7 000 mennonites du Manitoba et de la Saskatchewan sont partis s’installer en Amérique latine, principalement parce que les gouvernements de ces provinces les forçaient, en leur imposant des amendes de manière systématique, à envoyer leurs enfants dans les nouvelles écoles publiques. […] Quelques petits groupes les ont suivis dans les années 1940. […] Au cours des 50 dernières années, bon nombre de leurs descendants sont revenus au Canada, principalement pour fuir la pauvreté. »

[23]           Dans les cas où les enfants étaient réputés être nés hors mariage avant 1977, la citoyenneté canadienne était transmise d’une génération à l’autre par filiation maternelle, si la mère était canadienne.

[24]           Comité central mennonite du Canada, note 22 ci‑dessus.

[25]           Voir l’art. 16 de la Loi sur la citoyenneté canadienne.

[26]           L’enfant cessait d’être citoyen canadien en même temps que son parent « responsable », s’il devenait citoyen d’un autre pays en même temps que le parent «responsable » ou était déjà citoyen d’un autre pays au moment où le parent « responsable » devenait citoyen d’un autre pays. Cette règle a probablement été instituée pour éviter que les enfants mineurs dépouillés de leur citoyenneté canadienne ne deviennent apatrides. Le parent « responsable » était le père, dans le cas d’un enfant né dans les liens du mariage, et la mère dans le cas d’un enfant né hors mariage.

[27]           Voir le par. 18(2) de la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

[28]           Edmonston, note 6 ci‑dessus, p. 3. Cette estimation ne représente pas le nombre de personnes qui vivent actuellement des difficultés concernant la citoyenneté.

[29]           Voir le par. 11(1.1) de l’actuelle Loi sur la citoyenneté.

[30]           Voir l’art. 8 de l’actuelle Loi sur la citoyenneté.

[31]           Soulignons que même si ces personnes ne font pas de demande pour conserver leur citoyenneté après l’âge de 28 ans, tant que chaque génération suivante de Canadiens donne naissance à un enfant avant l’âge de 28 ans, la citoyenneté canadienne peut être transmise indéfiniment à de multiples générations nées à l’étranger.

[32]           Comité central mennonite du Canada, note 22 ci‑dessus, p. 8.

[33]           Réunion no 44, 26 mars 2007, à partir de 11 h 25.

[34]           Loi sur la citoyenneté canadienne, alinéa 5b)(ii).

[35]           Réunion no 38, 26 février 2006, à partir de 12 h 05.

[36]           Réunion no 41, 19 mars 2007, à partir de 11 h 10.

[37]           À l’époque où M. Teichroeb est né en 1980, la Loi permettait que la citoyenneté canadienne soit transmise par l’un ou l’autre parent, que l’enfant soit né dans les liens du mariage ou non.

[38]           M. Teichroeb, qui est né après l’entrée en vigueur de l’actuelle Loi sur la citoyenneté, estimait être lui-même un Canadien de deuxième génération ou des générations suivantes né à l’étranger et croyait, en conséquence, devoir se soumettre à l’exigence de la Loi actuelle relative à la conservation de la citoyenneté, dont il est question précédemment.

[39]           Réunion no 36, 19 février 2007; réunion no 38, 26 février 2007; réunion no 41, 19 mars 2007; réunion no 44, 26 mars 2007 et réunion no 60, 29 mai 2007.

[40]           CBC Investigation, « Lost Canadians », mars 2007, http://www.cbc.ca/news/background/lostcanadians/.

[41]           Réunion no 36, 19 février 2007, à 13 h 05.

[42]           CBC Investigation, note 40 ci‑dessus.

[43]           Arrêté en conseil, note 7 ci‑dessus, par. 3 : « Chaque personne à charge [épouse, veuve ou enfant mineur d’un membre des Forces armées canadiennes qui a servi à l’étranger pendant la Seconde Guerre mondiale] qui a obtenu permission d’entrer au Canada, en vertu de l’article deux de la présente ordonnance, sera censée, pour les fins de la Loi d’immigration du Canada, être citoyen canadien si le membre des forces à qui elle est à charge est un citoyen canadien, et sera censée posséder un domicile canadien si ledit membre possède un domicile au Canada. »

[44]           Taylor c. ministre de la Citoyenneté et de l’immigration, 2006 CF 1053 [Taylor], par. 16.

[45]           Ibid., par. 253.

[46]           Ibid.

[47]           Le paragraphe 15(1) dit ce qui suit : « La Loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la Loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques. »

[48]           Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, soit l’annexe B de la Loi de 1982 (R.‑U.) sur le Canada, ch. 11 [Charte].

[49]           L’article premier précise que : « La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. »

[50]           Taylor, note 44 ci‑dessus, par. 224.

[51]           Déclaration canadienne des droits, S.C. 1960, ch. 44, reproduite à l’annexe III des L.R.C. 1985, [Déclaration des droits]. Selon l’alinéa 1a) : « Il est par les présentes reconnu et déclaré que les droits de l’homme et les libertés fondamentales ci‑après énoncés ont existé et continueront à exister pour tout individu au Canada quels que soient sa race, son origine nationale, sa couleur, sa religion ou son sexe : a) le droit de l’individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu’à la jouissance de ses biens, et le droit de ne s’en voir privé que par l’application régulière de la loi »; l’alinéa 2e) dit en partie ce qui suit : « [N]ulle loi du Canada ne doit s’interpréter ni s’appliquer comme : e) privant une personne du droit à une audition impartiale de sa cause, selon les principes de justice fondamentale, pour la définition de ses droits et obligations. »

[52]           L’article 7 dit que : « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. »

[53]           Taylor, note 44 ci‑dessus, par. 249.

[54]           Ibid., par. 252.

[55]           Ibid., par. 218. Cette conclusion est conforme à un jugement unanime rendu par la Cour suprême assez récemment. Dans Benner, note 2 ci‑dessus, la Cour suprême a statué que lorsque l’article 15 est appliqué « à des questions de statut, l’élément important n’est pas le moment où la personne acquiert le statut en cause mais celui auquel ce statut lui est reproché ou la prive du droit d’obtenir un avantage » (sommaire).

[56]           Réunion no 36, 19 février 2007, à 11 h 15.

[57]           Appel Taylor, note 20 ci-dessus, par. 37.

[58]           Ibid., par. 72.

[59]           Curt Petrovich, CBC Radio — World Report, November 3, 2007, 8:00 EDT.

[60]           Réunion no 38, 26 février 2007, à 11 h 50.

[61]           Réunion no 60, 29 mai 2007, à 11 h 10.

[62]           Réunion no 41, 19 mars 2007, à partir de 11 h 15.

[63]           Il importe de noter que Mme Walshe a finalement récupéré sa citoyenneté canadienne en octobre 2007.

[64]           Réunion no 41, 19 mars 2007, à 11 h 15.

[65]           Réunion no 38, 26 février 2007, à 12 h 00.

[66]           Ibid.

[67]           Réunion no 44, 26 mars 2007, à partir de 11 h 05.

[68]           Réunion no 62, 5 juin 2007.

[69]           Ibid., selon Mme Janet Siddall, sous-ministre adjointe associée, Opérations, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, à 11 h 10. Soulignons que la ministre, lorsqu’elle a comparu devant le Comité pour la première fois en février 2007, a indiqué que le Ministère avait fait passer des annonces dans les journaux afin d’informer les Canadiens qui pouvaient être touchés par l’exigence relative à la conservation de la citoyenneté. Dans une lettre adressée par la suite au Comité, la sous-ministre a corrigé les observations de la ministre, précisant qu’il n’y avait eu aucune publicité commerciale en date de sa lettre. Ladite lettre est annexée au rapport.

[70]           Réunion no 62, 5 juin 2007, à 11 h 40.

[71]           Réunion no 44, 26 mars 2007, à 11 h 35.

[72]           Loi sur la citoyenneté, par. 5(4).

[73]           L’honorable Jim Karygiannis, membre du Comité et Mme Janet Siddall, sous-ministre adjointe associée, Opérations, Citoyenneté et Immigration Canada, réunion no 62, 5 juin 2007, à 12 h 15.

[74]           Réunion no 36, 19 février 2007.

[75]           Ibid., à 11 h 05.

[76]           Ibid., à 11 h 10.

[77]           Ibid.

[78]           Réunion no 61, 29 mai 2007, à 15 h 35.

[79]           An Act to amend the Citizenship of the Republic of Trinidad and Tobago Act, Act No. 63 of 2000, article 2 ajoutant l’alinéa 11(2E) à la Loi.

[80]           Le Canada est un État contractant de la Convention sur la réduction des cas d’apatridie (Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) adoptée le 30 août 1961 et entrée en vigueur le 13 décembre 1975.

[81]           Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration, Actualiser la Loi sur la citoyenneté du Canada : Il est temps d’agir, Douzième Rapport, adopté par le Comité le 4 octobre 2005 et présenté à la Chambre des communes le 6 octobre 2005, recommandation 15, p. 5.

[82]           Il s’agit d’un certificat de naissance délivré par le ministère de la Défense nationale aux personnes à charge des membres des Forces canadiennes nées à l’étranger.