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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 009 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 mars 2009

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    Nous poursuivons notre étude de la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada, et je souhaite la bienvenue à nos témoins et les remercie de se mettre à notre disposition aujourd'hui. Je sais qu'ici, au Parlement, la devise semble être « Il est urgent d'attendre », mais nous avons entamé cette étude l'an dernier et nous y revenons maintenant. Nous apprécions que vous ayez fait en sorte de vous rendre disponibles aujourd'hui.
    Nous recevons aujourd'hui M. Battle et Mme Torjman, du Caledon Institute of Social Policy, ainsi que M. Sharp, du Centre d'étude des niveaux de vie.
    Soyez les bienvenus.
    Nous avons également M. Roberts, des Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques, accompagné de M. Williamson et de Mme Pollack.
    Merci infiniment de votre présence aujourd'hui.
    Je crois que chacun d'entre vous a une déclaration liminaire. Si vous pouviez vous limiter à 10 minutes, ce serait excellent. Je sais que les membres auront ensuite des questions pour vous.
    Nous allons donc commencer avec les exposés. Nous commencerons avec le Caledon Institute.
    Vous avez 10 minutes, et merci encore d'être venus. Nous sommes impatients de vous entendre.
    Merci, monsieur le président, et merci de votre invitation à comparaître.
    Sherri et moi allons nous partager la déclaration et nous allons donc devoir sauter par-dessus la merveilleuse introduction que nous avons rédigée et aller droit au vif du sujet.
    Notre principale thèse est que le gouvernement fédéral joue le rôle prédominant dans la lutte contre la pauvreté au Canada. Il peut réduire la pauvreté, il réduit la pauvreté et il devrait le faire encore plus.
    Contrairement à ce qui se passe dans d'autres juridictions, tant les provinces canadiennes que certains pays étrangers, le gouvernement fédéral ne possède pas de stratégie en règle de réduction de la pauvreté, appuyée sur des analyses, des idées de réforme et des objectifs. Cependant, le gouvernement fédéral dispose de quelques instruments potentiellement puissants pour aider à faire reculer la pauvreté, qui pourraient être mis aux services d'éléments primordiaux d'une stratégie de réduction de la pauvreté en règle.
    Ce matin, nous aimerions passer en revue brièvement quelques exemples de programmes fédéraux qui peuvent contribuer à réduire la pauvreté et offrir quelques suggestions pour en améliorer la capacité. Nous distinguons ici entre les améliorations graduelles de programmes existants et les remaniements plus profonds de l'architecture ou de la structure de la politique sociale.
    Alors que le rôle fédéral en matière de lutte contre la pauvreté prend principalement la forme de programmes de sécurité du revenu, il a également à jouer un rôle d'appui aux services offerts par les provinces et territoires. Ottawa peut aussi aider à créer un environnement dynamique qui facilite les interventions communautaires visant à faire reculer la pauvreté.
    Commençons par la plus grande réussite au niveau fédéral en matière de lutte contre la pauvreté, soit l'action en faveur des personnes âgées. Comme vous le savez peut-être, le Canada a réalisé d'énormes progrès dans la lutte contre la pauvreté des personnes âgées. Le taux est passé de 29 p. 100 en 1976 à 5,4 p. 100 en 2006. De fait, le Canada affiche le troisième taux le plus bas de pauvreté des personnes âgées parmi les 23 pays industrialisés.
    Cet énorme recul de la pauvreté est dû principalement à l'amélioration des programmes de pension publics, tels que la pension de sécurité de la vieillesse, le supplément de revenu garanti, et les régimes de pensions du Canada et du Québec, ainsi qu'à l'augmentation historique du taux de participation des femmes à la vie active. Elles sont de plus en plus admissibles à leurs propres prestations des régimes de pensions du Canada et du Québec et, pour une minorité d'entre elles, de régimes de retraite d'employeur.
    Il existe deux façons d'aller encore plus loin dans la lutte contre la pauvreté chez les personnes âgées. Faisons remarquer que les personnes âgées seules connaissent un taux de pauvreté supérieur à la moyenne de leur tranche d'âge. Il est de 16,1 p. 100 chez les femmes et de 14 p. 100 chez les hommes, et beaucoup plus encore vivent juste au-dessus du seuil de pauvreté.
    Le programme le plus évident qui pourrait faire baisser le taux de pauvreté chez les aînés est le supplément de revenu garanti. Celui-ci a fait l'objet de quelques améliorations il y a quelques années — les premières en une génération. Si nous voulons faire reculer davantage la pauvreté chez les aînés, nous pourrions bonifier encore ce programme.
    Une autre possibilité consiste à prendre le crédit en raison de l'âge, qui n'est pas un crédit remboursable, et à le rendre remboursable. Il bénéficierait ainsi aux personnes âgées qui ont un revenu si faible qu'elles ne payent pas d'impôt.
    Un autre domaine d'action contre la pauvreté au Canada réside dans les prestations pour enfants. La prestation fiscale canadienne pour enfants, qui est la portion fédérale de la réforme nationale des prestations pour enfants décidée au niveau fédéral-provincial-territorial, a fait l'objet de très fortes majorations ces dernières années. Les versements maximaux pour le premier enfant sont passés de 1 520 $ en juillet 1996 à 3 416 $ en juillet 2009. C'est une très forte hausse. Caledon et un certain nombre d'autres groupes préconisent un plafond de 5 000 $ comme objectif pour un système de prestations pour enfants bien développé.
    Les prestations pour enfants entament considérablement les chiffres de pauvreté. S'il n'y avait pas de prestations fédérales, le taux de faible revenu des familles avec enfants serait de 15 p. 100. Grâce au système actuel de prestations pour enfants fédéral, le taux de faible revenu des familles avec enfants est de 9,3 p. 100, et avec notre proposition d'une PFCE à 5 000 $, le chiffre tomberait à 8,3 p. 100. Nous verrions des réductions similaires du nombre de familles à faible revenu et de l'amplitude de la pauvreté.

  (1115)  

    La solution pour faire reculer encore plus la pauvreté des enfants par le biais des prestations qui leur sont destinées est simple: la prestation fiscale canadienne pour enfants existe. Il suffit de la majorer graduellement jusqu'à atteindre l'objectif de 5 000 $.
    Un nouveau programme mis en place il y a quelques années est la prestation fiscale pour le revenu de travail. C'est là un soutien pour les actifs pauvres. Cette prestation a comblé un gros trou dans l'architecture de la sécurité du revenu, car auparavant les actifs pauvres ne recevaient aucun soutien du gouvernement fédéral.
    Le PFRT poursuit deux grands objectifs: réduire la désincitation à travailler pour les Canadiens coincés derrière le mur de l'assistance sociale et renforcer l'incitation à travailler des petits salariés. Le programme PFRT initial était extrêmement mince — très modeste. Il était même tellement modeste qu'il ne s'appliquait même pas aux travailleurs à bas salaire à temps plein.
    Grâce, notamment, à l'insistance de notre organisation et d'autres, le ministre des Finances a jugé bon d'améliorer sensiblement la prestation fiscale pour revenu de travail en augmentant le montant maximal et en accroissant le seuil d'admissibilité. C'est là un programme tout nouveau, mais il est potentiellement très important si l'on veut réduire la pauvreté des actifs démunis, qui représentent près de la moitié des Canadiens à faible revenu.
    L'assurance-emploi est un programme mal en point, c'est le moindre qu'on puisse dire. Vous savez peut-être que virtuellement tous les employés cotisent à l'AE mais que seule une minorité peuvent se prévaloir des prestations et des services d'emploi lorsqu'ils deviennent chômeurs. De fait, la couverture des chômeurs est tombée de 83 p. 100 en 1990 à 43 p. 100 en 2008, soit le chiffre le plus faible depuis 1976.
    Il y a un écart des sexes avec l'AE. Seuls 39 p. 100 des chômeuses touchaient l'AE selon les derniers chiffres, comparés à 46 p. 100 des chômeurs. Et cet écart des sexes s'est élargi au fil des ans.
    Les prestations sont loin d'être généreuses. La prestation maximale est tombée de 595 $, après ajustement pour l'inflation, au milieu des années 1990, à 447 $ en 2009. La prestation moyenne versée aux femmes les place à 4 544 $ en dessous du seuil de pauvreté. Même si vous parvenez à vous rendre admissible à l'AE, ce qui n'est pas le cas de la plupart des chômeurs, la prestation versée n'est guère généreuse.
    Que faut-il faire? La plupart des organisations progressistes réclament la suppression de la norme variable d'admissibilité. Il s'agit là du caractère régional de l'AE qui fait que votre admissibilité aux prestations et la durée de celles-ci varie en fonction du taux de chômage régional. Divers groupes prônent une réduction substantielle, voire la suppression, de cette variabilité. Le taux de remplacement du revenu devrait être augmenté. Il n'est que de 55 p. 100 des revenus assurables et ce chiffre pourrait être porté à 60 ou 75 p. 100. Et il faudrait accroître la durée des prestations.
    Nous avons appuyé cette sorte de changements à titre de palliatif à cause de la récession. Comme vous le savez, le budget a seulement accru de cinq semaines la durée maximale des prestations. Cela n'aide pas la majorité des chômeurs qui n'ont même pas droit aux prestations.
    Divers groupes réclament la restauration de l'AE. Nous en faisons autant, mais nous ne pensons pas que cela suffise. Nous pensons qu'il faut apporter des changements structurels majeurs à l'AE afin qu'elle réponde mieux aux besoins de la main-d'oeuvre non standard, qui représente aujourd'hui environ 40 p. 100 de tous les actifs.
    Nous avons travaillé à une nouvelle architecture de prestations ces dernières années qui toucherait et à l'assistance sociale et à l'assurance-emploi. Pour ce qui est de cette dernière, nous mettrions fin à la variabilité régionale, accroîtrions le taux de remplacement du revenu et établirions un nouveau programme, un programme de revenu temporaire financé sur les recettes générales et soumis à une condition de ressources. Ce serait un programme fédéral qui répondrait aux besoins des chômeurs canadiens qui ne seront jamais admissibles à l'AE. Nous créerions en fait un système AE à deux volets.
    Je vais maintenant céder la parole à Sherri, qui va parler du soutien du revenu des personnes handicapées.

  (1120)  

    Cela fait des années que nous nous soucions du fait que les personnes handicapées connaissent au Canada des taux de pauvreté disproportionnellement plus élevés que les autres Canadiens. L'un des problèmes est qu'ils ne peuvent accéder au marché du travail et ne peuvent cotiser à nombre des régimes d'assurance sociale que nous avons, par exemple, la prestation de maladie du régime d'assurance-emploi ou bien la pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada, et de ce fait nous avons quelque 500 000 Canadiens à travers le pays dépendants de l'assistance sociale.
    L'assistance sociale est un programme de dernier recours. Elle n'a jamais été destinée à fournir un revenu garanti à tant de Canadiens. L'une de nos propositions prévoit de retrancher les personnes handicapées de l'assistance sociale et de créer un nouveau programme de revenu de base auquel contribuerait le gouvernement fédéral. Ce serait une structure similaire à celle que nous avons pour les personnes âgées, en particulier le supplément de revenu garanti qui dépend du revenu. La prestation de sécurité de la vieillesse et le supplément de revenu garanti combinés représentent environ 13 700 $ par an, et nous envisageons donc cette configuration comme modèle pour la réforme de la sécurité du revenu.
    Si nous faisions cela, si nous retranchions effectivement ces personnes de l'assistance sociale et instaurions un nouveau programme de sécurité du revenu, cela ferait une économie considérable pour les provinces et territoires. L'une de nos propositions prévoit que, dans le cadre d'un accord négocié avec le gouvernement fédéral, ces montants seraient réinvestis dans les services de soutien aux personnes handicapées. Cela engloberait les aides techniques et équipements, et aussi les soutiens personnels tels que les soins à domicile et les services d'aide ménagère. C'est réellement là un volet important qui a été négligé, et qui concerne non seulement les 16 p. 100 des Canadiens considérés comme handicapés selon la définition officielle, mais aussi pour la population vieillissante du Canada, et il convient donc de prêter attention à cette question.
    Un autre élément fondamental d'une stratégie de lutte contre la pauvreté est l'ensemble des services. Le gouvernement fédéral a réellement un rôle important à jouer dans le financement de ces services. L'un des plus importants sur lequel nous réfléchissons depuis de nombreuses années est la garde des enfants. Les services de garde d'enfants sont primordiaux sur le plan de la politique sociale et aussi de la politique économique. Sur le plan social, une littérature pléthorique souligne la valeur de l'investissement dans le développement du jeune enfant, du point de vue de la capacité d'apprendre et de la santé et du développement mental au fil des ans. Mais nous savons aussi que des garderies abordables et de bonne qualité sont essentielles à l'économie, car elles permettent aux familles de s'instruire et de travailler.
    L'une de nos préoccupations concerne le fait qu'un bon système de développement de la petite enfance exige un engagement financier. Le gouvernement fédéral a joué un rôle majeur à cet égard avec les accords fédéraux-provinciaux-territoriaux qu'il a signés, tant en l'an 2000 qu'en 2003, qui ont réellement permis à ce système de se développer à travers le pays. De nouvelles mesures ont opéré un repli par rapport à cet engagement, et nous estimons qu'une politique de réduction de la pauvreté passe par un investissement majeur dans des garderies de haute qualité et de prix abordable.
    Des logements décents et de prix abordable représentent un autre élément primordial d'une stratégie de réduction de la pauvreté. Cela est notable car le logement est à la fois un filet de sécurité et un tremplin. Il est un filet de sécurité en ce qu'il soutient ceux qui n'ont pas les moyens de payer leur loyer — et beaucoup de Canadiens sont actuellement dans une situation très précaire — mais le fait de vivre dans un environnement stable est aussi un tremplin car il contribue au bon développement des enfants et permet à ces personnes de suivre des cours et une formation professionnelle.
    Nous avons salué l'investissement dans le logement abordable dans le dernier budget: 1 milliard de dollars pour les logements sociaux, 1,9 milliard de dollars pour les accords de logements abordables, les milliiards de dollars supplémentaires consacrés aux logements dans les réserves et dans le nord et pour les personnes âgées, et les 75 millions de dollars pour le logement des personnes handicapées. Toutes ces mesures sont très importantes et nous les avons appuyées et les considérons comme un élément essentiel de notre infrastructure sociale. Notre souci tient au fait que nous n'avons pas réellement dans notre pays une stratégie de logement abordable. Les mesures sont plutôt ponctuelles, au gré des accords individuels, mais il y a véritablement là place pour une initiative fédérale visant à répondre au besoin de logements à prix modique, ainsi que d'un investissement stable au fil du temps. Il est très difficile de dresser un plan de logement abordable en l'absence de financement garanti.

  (1125)  

    Très, très brièvement, nous avons fait état dans nos écrits de deux autres domaines, soit l'infrastructure sociale et l'environnement porteur. À notre sens, si l'on veut réduire la pauvreté, le logement à prix abordable ne suffit pas. Quatre murs et un toit sont évidemment vitaux, mais il est tout aussi important d'avoir des communautés saines, qui autorisent la participation des citoyens et permettent aux enfants de participer à des programmes récréatifs et artistiques. Nous avons fait valoir que les dépenses d'infrastructure devraient aller également à l'infrastructure sociale, telle que la remise en état de nos écoles, de nos centres communautaires, de nos bibliothèques, de tous les lieux qui font une collectivité dynamique.
    Nous avons été heureux de voir que le dernier budget investissait dans les centres récréatifs. Nous avions fait valoir qu'au lieu de consacrer l'argent à des crédits d'impôt individuels, qui bénéficient aux familles à haut revenu, il faudrait plutôt investir dans les lieux et les quartiers et collectivités où les gens vivent et élèvent leurs enfants.
    Une dernière remarque que je ferai concernant le rôle fédéral — car nous avons parlé d'un rôle fédéral direct relativement à la sécurité du revenu et d'un rôle fédéral partagé sur le plan du financement de certains des programmes sociaux comme la garde des enfants et le logement et l'infrastructure sociale — est que nous aimerions également que le gouvernement fédéral joue un rôle dans l'établissement d'un milieu propice aux groupes communautaires qui recherchent des solutions locales à la pauvreté.
    Il se déroule une somme énorme d'activités à travers le pays, où des groupes locaux collaborent avec les entreprises et les syndicats et le secteur bénévole, et où des pauvres se rassemblent et cherchent leurs propres solutions. Souvent, ils se heurtent à des règles et des politiques des pouvoirs publics et d'autres bailleurs de fonds, ce qui complique leur travail.
    Voilà donc un certain nombre de domaines où nous aimerions voir lever ces barrières et ces difficultés, de façon à ce que les groupes locaux puissent travailler. En outre, bien sûr, il faudrait leur donner un soutien afin que ces groupes puissent s'entraider et apprendre les uns auprès des autres.
    Je vais m'en tenir là. Merci encore de cette invitation à vous faire part de nos vues.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au Centre d'étude des niveaux de vie.
    Monsieur Sharpe, vous avez la parole.
    J'apprécie grandement l'invitation à comparaître devant vous aujourd'hui.
    Le Centre d'étude des niveaux de vie est un institut de recherche économique sans but lucratif ayant son siège à Ottawa, qui s'intéresse particulièrement à la productivité, au niveau de vie et au bien-être économique. La pauvreté est évidemment l'un des facteurs du bien-être économique et nous avons effectué un certain nombre d'études à son sujet.
    Mon propos aujourd'hui est axé sur deux aspects particuliers. Premièrement, je veux donner un aperçu de la nature de la pauvreté, car si nous voulons la réduire, nous devons comprendre sa dynamique. Deuxièmement, je vais passer en revue quelques politiques fédérales qui pourraient atténuer la pauvreté.
    Avant de commencer, j'aimerais aborder deux considérations qui influencent le débat sur la pauvreté. La première intéresse la façon de mesurer la pauvreté, à savoir s'il faut la mesurer en termes relatifs ou absolus. Il existe quantité d'écrits à ce sujet, que vous connaissez sans aucun doute. Mais il importe de signaler que dans le contexte international, lorsqu'on parle de la pauvreté au Canada en utilisant les chiffres de l'OCDE, il s'agit là de pauvreté relative. Par-là, j'entends le pourcentage de la population qui se situe, disons, en dessous de la moitié du revenu médian. Cela signifie que si vous doublez le revenu réel de tout le monde, cela n'aura aucun effet sur le taux de pauvreté, car vous aurez toujours le même pourcentage de la population en deçà de ce seuil. La croissance ne vous sortira pas de la pauvreté.
    Cependant, au Canada nous utilisons une mesure plus absolue appelée le seuil de faible revenu, ou SFR, qui établit un point de coupure particulier. Avec cet indicateur, la croissance économique peut sortir le pays de la pauvreté. Il existe donc beaucoup de confusion dans le débat par rapport aux comparaisons internationales, selon que l'on utilise l'un ou l'autre indicateur.
    Mon analyse aujourd'hui sera fondée sur les mesures canadiennes, les seuils officiels de faible revenu de Statistique Canada, qui ne sont pas une mesure officielle de la pauvreté mais que beaucoup désignent comme telle.
    La deuxième considération, pour qui veut comprendre la pauvreté, est l'existence de deux déterminants fondamentaux des taux de pauvreté. Le premier est la conjoncture économique. Les politiques publiques représentent, bien sûr, le deuxième. Je vais traiter des deux. Il importe de différencier, dans la mesure du possible, l'effet de ces deux influences.
    En ce qui concerne la nature de la pauvreté, en 2006 notre taux de pauvreté au Canada était de 10,5 p. 100. C'est par rapport à la population globale. Cela représente 3,4 millions de personnes vivant dans la pauvreté, après impôt. Il existe des mesures avant impôt qui donnent des taux légèrement supérieurs, mais je me concentrai sur la mesure après impôt.
    Il importe de différencier la pauvreté en fonction des groupes de population. Comme Ken l'a mentionné, le taux de pauvreté des personnes âgées est très faible, autour de 5 p. 100. Le taux de pauvreté des enfants est d'environ 12 p. 100, celui de la tranche d'âge de 18 à 64 ans d'environ 11 p. 100.
    Ainsi, en ce sens, le taux de pauvreté des enfants est supérieur à celui des deux autres tranches d'âge. Évidemment, chez les personnes âgées, nous n'avons virtuellement aucune pauvreté au niveau des familles âgées, environ 1 p. 100, alors que chez les personnes âgées seules, comme Ken l'a mentionné, il est bien supérieur, avec 15 p. 100. En outre, évidemment, si vous ventilez par type de famille, vous constatez que les mères célibataires connaissent un taux de pauvreté très élevé d'environ 32 p. 100, et les personnes seules de moins de 65 ans ont un taux de pauvreté voisin de 31 p. 100. Encore une fois, il importe de considérer les différentes catégories de familles.
    En outre, le taux de pauvreté est extrêmement sensible à la présence d'un soutien économique dans la famille. Par exemple, le taux de pauvreté des familles monoparentales dirigées par une femme, sans soutien économique, est de 80 p. 100. Dès que vous avez un soutien économique du ménage, ce chiffre tombe à 20 p. 100. Voilà, bien entendu, l'effet de l'emploi sur la pauvreté.
    Bien sûr, les taux de pauvreté varient selon les groupes de population. Nous avons des taux très élevés chez les Autochtones, les immigrants récents et, comme Sherri l'a fait remarquer, chez les personnes handicapées.
    Il y a aussi une dimension régionale de la pauvreté au Canada. Les séries statistiques SFR donnent des résultats un peu étranges mais intéressants à examiner. C'est en fait la Colombie-Britannique qui a le taux de pauvreté le plus haut, avec 13 p. 100. La province qui connaît le plus faible taux de pauvreté est l'Île-du-Prince-Édouard, à 5 p. 100. Cela est lié au coût de la vie relativement faible dans l'Île-du-Prince-Édouard, selon... Nos mesures sont entachées d'un grand nombre de problèmes, mais je ne vais pas entrer dans ces détails.
    Une autre dimension, bien sûr, est la persistance de la pauvreté. J'ai mentionné que le taux de pauvreté avoisine 10 p. 100. Sur une période de trois ans, environ 4 p. 100 de la population vit dans la pauvreté pendant trois années consécutives. Sur cette période de trois ans, environ 16 p. 100 de tous les Canadiens ont donc connu un moment de pauvreté. Il y a donc une certaine persistance de pauvreté, mais en même temps beaucoup de gens y entrent et en sortent.
    Il est intéressant de comparer la situation du Canada avec d'autres pays. Nous ne sommes pas si bien placés. Par exemple, pour ce qui est du niveau du revenu médian réel, nous sommes au cinquième rang des pays de l'OCDE. En ce qui concerne le décile supérieur, nous sommes un peu mieux placés, avec environ 6 p. 100. Cependant, si vous prenez uniquement le décile inférieur — c'est-à-dire le dixième de la population qui vit dans la pauvreté — nous sommes au quatorzième rang. Donc, les pauvres ne s'en tirent pas bien au Canada, pas aussi bien que ceux à revenu moyen ou médian, comparés aux autres pays.

  (1130)  

    Comment évolue la pauvreté? Eh bien, en gros, les nouvelles sur le front de la pauvreté ont été bonnes ces dernières années. Nous sommes passés de 4,5 millions de personnes définies comme à faible revenu en 1976 à 3,4 millions, ou en d'autres termes le taux de pauvreté est tombé de 15,7 à 10,6 p. 100. Cependant, nous n'avons toujours pas retrouvé le bon chiffre de 1989, qui était de 10,2 p. 100. Le taux de pauvreté a beaucoup augmenté au cours de la première moitié des années 1990, et ensuite il nous a fallu longtemps pour le ramener là où il était avant la récession du début des années 1990.
    Encore une fois, le groupe clé, pour ce qui est des tranches d'âge, est celui des enfants; il a le plus progressé. Leur taux de pauvreté est tombé de six points, passant de 18 p. 100 environ à 12 p. 100. Comme Ken l'a mentionné, cela est largement dû à la prestation pour enfants; le taux de pauvreté global des personnes âgées et adultes a chuté de quatre points de pourcentage au cours de la dernière décennie.
    Ce qui est intéressant, c'est que le taux de pauvreté des mères seules a considérablement reculé, passant de 52 à 32 p. 100, soit une baisse de 20 p. 100, ce qui est très positif. Cela encore reflète l'amélioration de la situation économique — nombre de ces parents seuls ont un emploi — et aussi l'accroissement des prestations pour enfants.
    Alors, que s'est-il passé récemment? Le problème avec les statistiques de pauvreté est qu'elles ne sont pas récentes. Les derniers chiffres de Statistiques Canada sur le SFR sont pour 2006. Nous nous attendons à recevoir les données EDTR pour 2007 en avril, probablement. Donc, dans un mois, peut-on espérer, nous aurons les données pour 2007, mais il faudra attendre plus d'un an pour obtenir les chiffres de 2008, qui est déjà terminée. Mais en considérant les tendances historiques, on peut assez bien prédire ce qu'il est advenu de la pauvreté.
    En 2007, le taux de chômage est tombé de 6,3 à 6,0 p. 100, et les revenus réels au Canada ont augmenté. Je m'attends à ce que les données fassent apparaître une légère baisse de la pauvreté en 2007. Il se pourrait que nous soyons à 10,2 ou 10 p. 100, au lieu de 10,5 p. 100. C'est ma prédiction. En 2008, l'année qui vient de terminer, le taux de chômage a en fait augmenté un peu. Il a grimpé en flèche à la fin de l'année, mais en moyenne annuelle, il n'est passé que de 6 à 6,1 p. 100. Donc, la pauvreté a probablement été stable en 2008.
    Une question de plus en plus aiguë est de savoir ce qu'il va advenir de la pauvreté maintenant que l'économie dégringole? Eh bien, si vous regardez l'expérience historique du début des années 1990, de 1989 à 1993 le taux de chômage est passé de 7,5 à 11,4 p. 100. Ainsi, le taux de chômage a cru de 4 p. 100, et le taux de pauvretél a grimpé de 10,2 à 14,3 p. 100, soit quatre points de pourcentage. Il y a donc un rapport de un à un entre l'évolution en pourcentage du taux de chômage et celle du taux de pauvreté, et je prédis que la même chose arrivera en 2009. Par exemple, si en 2009 le taux de chômage est de 8 p. 100... et vu la conjoncture économique actuelle, je ne serais pas surpris que nous atteignons ce chiffre. La plupart des gens disent qu'il se situe autour de 7,5 p. 100, mais je pense qu'ils sous-estiment la gravité de la récession. Cela signifie que le taux de chômage va grimper de 6 à 8 p. 100 et le taux de pauvreté en 2009 va probablement suivre, passant de 10,5 à environ 12,5 p. 100.
    Pour chaque chômeur il y aura deux pauvres. La main-d'oeuvre est d'environ 15 millions de travailleurs et la population canadienne d'environ 30 millions, si bien que si nous avons un accroissement du chômage de peut-être 300 000 personnes, nous verrons une hausse de la pauvreté d'environ 600 000. Cela fait en gros un rapport de deux à un en nombres absolus. Cela augure donc mal du point de vue des politiques.
    Que devrait faire le gouvernement fédéral? Eh bien, comme je l'ai mentionné, il y a deux moteurs de la pauvreté, et ces deux moteurs au cours de la dernière décennie étaient très positifs. L'économie se portait bien et nous avons mis en place des politiques. Aujourd'hui, bien entendu, il se passe le contraire, de manière générale. L'économie se porte très mal et il nous faudra donc adopter de nouvelles politiques.

  (1135)  

    Pour ce qui est de savoir quelle mesure ne serait pas efficace, je dirais que, dans l'ensemble, majorer le salaire minimum fédéral ne serait pas une politique particulièrement efficace car très peu de travailleurs dans la sphère de compétence fédérale sont au salaire minimum. Il faut aussi conserver une flexibilité régionale. Globalement, le salaire minimum est un instrument très grossier si l'on veut réduire la pauvreté. Il a son rôle, mais il n'est pas toujours efficace parce que beaucoup de salariés au salaire minimum ne sont pas pauvres.
    Une autre idée lancée dans ce débat me paraît exclue, celle d'un revenu annuel garanti. À mon sens, ce débat est plutôt contre-productif. De manière générale, le même gant ne va pas sur toutes les mains. Il faut tailler les programmes de réduction de la pauvreté en fonction des besoins du client particulier. Si vous aviez un revenu annuel garanti suffisant pour sortir tout le monde de la pauvreté, ce serait extrêmement coûteux.
    Qu'est-ce qui marche? Eh bien, encore une fois, à long terme, c'est l'éducation. Nous le savons tous. C'est réellement la clé de la réduction de la pauvreté. Mais nous cherchons ici plutôt des mesures à court ou moyen terme. Et, bien sûr, nous devrions persévérer avec les politiques structurelles mentionnées par Ken. Je suis entièrement d'accord avec lui pour majorer graduellement la prestation pour enfants. Je pense que la prestation fiscale pour le revenu de travail est très positif. Elle était de montant très faible, mais a été accrue et il faudrait l'augmenter davantage.
    Je pense que la politique la plus importante qu'il faudrait mettre en oeuvre à court terme, si le gouvernement veut agir sérieusement, c'est allonger la durée de l'assurance-chômage d'un an pour tous ceux arrivés en fin de droit. Au lieu de 50 semaines, on pourrait toucher l'assurance-chômage pendant 100 semaines. Ce serait temporaire. Ce ne serait pas un changement permanent du programme. Je pense qu'il faut apporter un remaniement structurel à l'AE, comme Sherri l'a mentionné, mais celle-ci serait juste une mesure temporaire.
    Il y a deux raisons à cette politique. La première c'est que c'est un stimulant très efficace. Si vous donnez de l'argent à des chômeurs pauvres, ils vont le dépenser. Ce sera automatique. Ce n'est pas comme une baisse d'impôt où un certain montant de cet argent n'est pas dépensé. C'est un stimulant très efficace. Cela va aussi empêcher le taux de pauvreté d'augmenter.
    Voilà ma principale recommandation. Encouragez le gouvernement fédéral à verser les prestations AE pendant beaucoup plus longtemps qu'à l'heure actuelle.
    Je vais m'en tenir là.
    Merci beaucoup.

  (1140)  

    Merci, monsieur Sharpe.
    Nous allons maintenant passer aux Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques.
    Monsieur Roberts, vous disposez de 10 minutes.
    Merci à vous également, monsieur le président.
    Assis dans ce fauteuil sous le tableau montrant les Pères de la Confédération, je me dis que c'est un moment plutôt opportun pour parler de la pauvreté. Andrew a évoqué la conjoncture économique et les répercussions qu'elle exercera, inéluctablement, sur la pauvreté.
    Avec la permission du président, j'aimerais distribuer quelques transparences, bien qu'elles ne soient pas traduites. Quelques-unes font apparaître surtout des tendances. Regardez les courbes, ne lisez pas le texte. J'aimerais beaucoup que vous les ayez au moins sous les yeux pendant que je fais mon exposé. Je m'en remets à la décision du président.
    Pendant que vous y réfléchissez, je vais me lancer. Si votre choix est autre, je vais procéder comme s'il était acceptable de ne regarder que les diagrammes.
    Le titre de mon exposé est: « Disséquer la ligne de pauvreté ». La question qui nous était posée à tous trois était de savoir quelle est ou pourrait être la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada. Je vais l'aborder selon un angle légèrement différent de celui de Ken et Sherri. Au lieu de considérer les mesures graduelles, je mettrais l'accent davantage sur les mesures structurelles, sans négliger, bien sûr, les idées d'Andrew sur la façon d'amener une telle transformation.
    Il s'agit ici d'un synthèse des recherches des réseaux. Nous faisons de la recherche dans l'espace public depuis une quinzaine d'années. Mon exposé sera centré sur notre recherche mais va également faire intervenir quelques tableaux de chiffres d'Ipsos Reid et de Statistique Canada.
    Je vais commencer très brièvement par rappeler quelques données fondamentales sur la pauvreté, juste pour situer les choses avant de développer mes arguments.
    Premièrement, on a pas mal parlé à l'échelle internationale de l'importance de fixer des objectifs de pauvreté...
    Monsieur le président?

[Français]

    Excusez-moi, monsieur Roberts. Vous souhaitiez qu'on distribue un document, mais la politique veut que les documents soient dans les deux langues. Je pense que vous aviez été prévenu. Je comprends que vous vouliez simplement vous référer aux graphiques, mais il y a aussi du texte. Je pense que le texte est aussi important pour les gens de langue française que pour les gens de langue anglaise. Nous allons donc retenir ce document, le faire traduire et le distribuer par la suite. Je tenais à vous en informer afin que vous en teniez compte au moment de votre présentation.
    Vous pouvez continuer.

[Traduction]

    Excusez-moi, monsieur le président, pourrais-je juste poursuivre?

[Français]

[Traduction]

    Des éléments clés sont liés à la pauvreté.
    Premièrement, les objectifs de pauvreté. L'UNICEF a publié quelques objectifs de pauvreté, soit des réductions de 25 p. 100 en cinq ans. Il semble que cela va être adopté par le gouvernement ontarien.
    Deuxièmement, le gouvernement fédéral, comme vous le savez tous, s'était fixé l'objectif en novembre 1989 d'éliminer la pauvreté chez les enfants d'ici 2000.
    Le troisième point, qu'Andrew a mentionné, c'est la façon de définir et mesurer la pauvreté. Il existe plusieurs mesures: le SFR avant et après impôt, le panier de consommation et une litanie d'autres mesures. Il se pose donc un réel problème de définition de la pauvreté.
    Enfin, pour situer quelques grands groupes à risque — je pense que Sherri et Ken les ont bien décrits: les parents seuls, typiquement des femmes, sans conjoint, entre 45 et 64 ans; les personnes handicapées, principalement celles ayant des limitations professionnelles; les immigrants récents, principalement les réfugiés; les Autochtones; enfin tous ceux dont l'emploi est précaire.
    Actuellement, quatre provinces ont un plan de lutte contre la pauvreté, et une seule, le Québec, est dotée d'une loi sur la pauvreté. Le Québec a fait adopter une loi en 2002 sous Bernard Landry et le plan qui en résulte est sorti sous Charest en avril 2004. Nous avons rédigé un rapport à ce sujet. Deux messages réellement importants se dégagent de cette législation. Mettant de côté l'importance de la législation en général, deux grands aspects ont sous-tendu l'introduction de cette législation, à savoir une motivation politique marquée et un soutien politique. Le gouvernement avait perdu une bonne partie de la confiance du public — sa cote de satisfaction était très faible à l'époque — et il y avait un grand soutien à ce programme dans le public: près d'un tiers des citoyens du Québec étaient favorables à la réduction de la pauvreté.
    Je vais passer à la transparence sur les tendances de la pauvreté pour faire ressortir plusieurs points. Cela va permettre de cerner le problème, comme Andrew et Sherri l'ont déjà fait, et j'ajouterai quelques remarques autres.
    Premièrement, il est notable que certains des taux de pauvreté les plus élevés à travers le pays ont été enregistrés en 1997, et depuis lors on a assisté à un recul assez régulier de la pauvreté. Il est notable — et je crois qu'Andrew l'a évoqué brièvement — qu'en période de croissance économique nous semblons voir la pauvreté reculer et en période de ralentissement économique, il semble qu'elle augmente. C'est là un constat général. Je ne prétends pas que nous avons fait des essais cliniques aléatoires ou une analyse statistique, mais il est pas mal établi que lorsque les économies croissent, il y a moins de pauvreté, et lorsqu'elles se contractent, il y en a plus.
    La question posée revient à dire: si je considère cette courbe de pauvreté, quelle est la contribution fédérale? J'ai fait des recherches pour le déterminer, mais je veux d'abord vous indiquer comment répondre à cette question.
    Ma diapositive suivante porte sur la croissance économique. Il en ressort que si l'on regarde les tendances dans l'économie, en particulier les récessions des années 1980 et 1990 — et malheureusement les données ne vont pas plus loin à ce stade — on voit que les récessions et les reprises subséquentes suivent de très près les courbes de pauvreté.
    Voyons ensuite les tendances des priorités canadiennes. Ceci est un diagramme très récent d'Ipsos Reid, qui porte sur les priorités des Canadiens à l'intérieur d'un éventail d'enjeux de politique publique. Il n'est pas surprenant que l'économie soit au premier rang des préoccupations des Canadiens. En deuxième position vient la santé, en troisième l'environnement et, malheureusement, la pauvreté est reléguée loin dans les 10 premières priorités.
    Sur la diapositive suivante vous voyez les niveaux de pauvreté, et actuellement le niveau de pauvreté par rapport aux priorités des Canadiens: 2 p. 100 en font le premier choix et 4 p. 100 en font un choix d'un autre rang. On peut donc se demander dans quelle mesure le contexte politique actuel se prête à une action transformationnelle dans le domaine de la pauvreté. À l'évidence, les chiffres sur l'importance accordée à la pauvreté sont sensiblement inférieurs aujourd'hui pour le Canada dans son ensemble qu'ils l'étaient dans le contexte du Québec.

  (1145)  

    Dans ma page sur la motivation politique — je ne sais pas si tout le monde en a une copie — vous pouvez voir que les tendances du soutien donné aux divers gouvernements amènent à se demander s'il existe clairement un contexte politique qui se prête à une action transformationnelle sur la pauvreté, par exemple l'adoption d'une législation.
    Des mesures ponctuelles pour réduire la pauvreté...

[Français]

    Un instant s'il vous plaît, monsieur Roberts.
    Il s'agit d'un rappel au Règlement, je crois.

[Traduction]

    Je ne pense pas que M. Roberts ait compris que nous n'avons pas les diapositives, et j'apprécierais si ses explications tenaient compte du fait que nous ne les avons pas.
    Merci. Je le ferai volontiers.
    Dois-je continuer? Merci.
    Je préconise de se concentrer sur quatre aspects touchant la pauvreté. Le premier est le soutien du revenu et le salaire de subsistance. Tout indique qu'un salaire de subsistance devrait se situer autour de 10 $ de l'heure, et bien entendu ajusté selon l'inflation, ce qui n'est typiquement pas le cas.
    Deuxièmement, nous recommandons de veiller au respect de nos normes d'emploi.
    Troisièmement, il devrait exister une quantité suffisante de logements abordables et, quatrièmement, il y a l'éducation préscolaire et les services de garde en général.
    Pour creuser un peu plus loin, en ce qui concerne le lien entre la pauvreté et le logement, nos données et les recherches que nous avons effectuées indiquent qu'il y a deux facteurs en jeu. Le premier est le logis lui-même et le deuxième le quartier dans lequel il se situe. Il y a les problèmes de santé environnementale. Il y a les effets sur la santé psychologique du statut socio-économique, qui sont dus aux séquelles sur le système endocrinien et immunologique du stress. Cela rend les gens plus susceptibles à la maladie. Le logement soulève donc des enjeux très majeurs, avec bien sûr la situation du bâtiment, les chances d'épanouissement réduites et l'accès aux services publics, tous facteurs corrélés étroitement avec l'abordabilité du logement, sa situation et sa qualité.
    Dans un rapport que nous allons publier sous peu, nous décrivons quelques modèles de logement abordable. L'un est le modèle américain Housing First lancé à New York en 1992, et l'autre la version canadienne de celui-ci, plus récente, soit le modèle Streets to Homes de Toronto, également connu sous le nom de S to H. Nous soulignons dans le rapport l'importance de recourir à un modèle de type Housing First comme moyen de fournir un abri, et d'ailleurs l'évaluation du modèle Housing First est très bonne. Des évaluations indiquent clairement que les hospitalisations s'en trouvent réduites et que, de façon générale, les gens conservent le même logement plus longtemps.
    Voilà donc quelques pistes de solutions. Premièrement, un cadre de politique intégré avec une élaboration conjointe des programmes... Si vous regardez pourquoi les pays européens investissent beaucoup plus dans les programmes sociaux, c'est parce qu'ils adoptent une approche beaucoup plus holistique de choses comme la pauvreté. Deuxièmement, nous devons réfléchir à la pauvreté du point de vue du revenu et du patrimoine. Il n'y a pas que le revenu, il y a aussi le patrimoine, car nous savons que les possessions sont l'une des choses qui enferment les gens dans la pauvreté. Il faut donc adopter un point de vue plus holistique au lieu de focaliser uniquement sur le revenu. Troisièmement, nous devons réfléchir à des solutions autres que légales. J'arguerais que le seul fait de s'entendre sur des définitions standards et des objectifs, puis de mesurer les résultats par rapport à ces objectifs, contribuerait de façon fondamentale à la réduction de la pauvreté au Canada. Je sais que d'aucuns voudraient relancer la discussion autour de l'accord ECUS, mais je ne suis pas convaincu qu'il ait produit de si bons résultats. Enfin, il faut investir dans l'innovation sociale.
    Je vais maintenant revenir à la question de la contribution fédérale. J'ai ici une image de la pauvreté au Canada selon la mesure SFR, avant impôt. Vous pouvez voir que c'est une ligne relativement plate. Elle suit une pente légèrement descendante, mais c'est finalement une ligne de tendance sur la période 1980, environ, à 2006, et en tant que théoricien intéressé par les sciences économiques depuis aussi longtemps que moi — un instant, j'allais conclure — je pense qu'il faut disséquer cette ligne afin de la comprendre. J'entends par-là qu'il faut déterminer quelle partie est provinciale, quelle partie est fédérale, quelle partie est en rapport avec le logement, quelle partie est en rapport avec l'éducation et les services de garde d'enfants. Ce n'est que si vous pouvez répondre à ces questions que vous pouvez correctement déterminer quoi faire à l'avenir.
    Je songe à deux débats. Premièrement, il y a le débat qui s'est déroulé lors de la Commission Romanow sur le pourcentage de la contribution fédérale au système de santé, et je crois que personne ne connaissait la réponse; deuxièmement, l'impact de la modélisation économétrique de ces choses. Il est très facile de prendre ces données et d'en faire un modèle pour réellement poser les bonnes questions sur la pauvreté et voir quels seront les résultats. Je dirais donc que l'un des impacts majeurs que vous pourriez avoir consisterait à créer un modèle économétrique portant directement sur la pauvreté.
    Je vais vous laisser sur trois citations. La première est de l'Union européenne: « Les dépenses sociales présentent une corrélation positive avec les niveaux de productivité partout dans le monde développé ».
    Deuxièmement: « Les enfants sont maintenus dans la pauvreté non par un cadenas ouvert par une seule clé, mais par un cadenas à combinaison qui requiert un alignement de facteurs pour s'ouvrir ». C'est de l'UNICEF. Je pense que cela souligne la complexité de ce problème.

  (1150)  

    La dernière est un mot d'un député, en fait, sur lequel nous sommes tombés lors de nos recherches: « Pourquoi pas une loi contre la pluie? »
    Je dirais donc que si vous voulez réellement résoudre le problème de la pauvreté, il faudra un leadership fort. Me trouvant en face des Pères de la Confédération, je vous félicite de nous l'apporter.

  (1155)  

[Français]

    Merci beaucoup d'avoir fait cette présentation, d'autant plus que vous avez respecté les délais convenus.
    Nous allons maintenant passer à la période de questions. Il s'agit d'abord, pour chaque parti, d'une période de questions d'une durée de sept minutes, suivie d'une période de questions d'une durée de cinq minutes. Nous allons commencer par Mme Folco, du Parti libéral.
    Merci, monsieur le président.
    Il me fait plaisir de vous adresser la parole à titre de président. Nous avons déjà échangé des chaises.
    C'est le doux retour des choses.
    Je voudrais féliciter chacun d'entre vous pour cette présentation, qui a été très concrète et qui nous a apporté des éléments de solution. Plusieurs d'entre nous, de ce côté-ci de la Chambre, et en particulier des gens de mon parti, ont rencontré d'autres personnes à l'extérieur du cadre de ce comité. Vous êtes sûrement au courant de la chose. Le but était d'essayer de trouver non pas une — étant donné qu'il n'existe pas une seule et unique solution à ce problème — mais un certain nombre de solutions concrètes reliées à des éléments tangibles que vous avez tous mentionnés.

[Traduction]

    J'aimerais parler spécifiquement du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Son grand programme — et je viens du Québec — est que dans la relation entre les provinces et les territoires et le gouvernement fédéral, une fois que les provinces ou territoires reçoivent l'argent, elles peuvent le dépenser à peu près comme bon leur semble. Il n'y a pas de reddition de comptes au gouvernement fédéral. Il n'y a pas d'accountability. Il suffit aux provinces de dire qu'elles ont dépensé l'argent dans tel domaine en général, mais elles ne sont pas obligées de préciser sur quoi, spécifiquement, elles l'ont dépensé. C'est un gros problème, de manière générale, et je pense que c'est encore un plus gros problème sur le plan de la pauvreté et de tous les différents facteurs que vous avez mentionnés ici ce matin.
    Ma première question est de savoir si vous préconiseriez des changements, si cela était jamais possible, au Transfert canadien en matière de programmes sociaux, du point de vue de la relation et de la reddition de comptes au gouvernement fédéral, qui tient les cordons de la bourse. Comment faire en sorte que cet argent soit consacré à ces enveloppes particulières, en quelque sorte, au lieu de passer dans les dépenses générales?
    J'aimerais faire une remarque avant d'écouter vos réponses. J'apprécie particulièrement la suggestion de Mme Torjman concernant la structure de la politique sociale. L'une des choses qui nous a frappé dans le budget du gouvernement conservateur, le projet de loi C-10, est que sur le plan de l'infrastructure — cet argent est le bienvenu, bien entendu — les crédits d'infrastructure concernent réellement les hommes dans le milieu de travail, principalement. Les femmes dans le milieu de travail semblent être écartées par le projet de loi C-10. Votre suggestion, madame Torjman, et cela s'adresse également aux autres, serait le moyen pour les femmes actives de bénéficier de ce budget. Je vous remercie donc de cette suggestion. Je voulais donc formuler cette remarque car c'est là une chose qui est très importante pour certains d'entre nous ici.
    Voici ma question. En ce qui concerne le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, que préconisez-vous de faire pour le rendre plus réactif à la situation de la pauvreté au Canada? Je pose la question à qui veut y répondre.
    Merci de votre question.
    C'est une préoccupation que nous formulons depuis des années, depuis que le Régime d'assistance du Canada a été remanié. Initialement, il a cédé à la place au Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Nous avons rédigé un rapport, au milieu des années 1990, intitulé « Les dangers du financement global », qui mettait précisément le doigt sur le genre de problème que vous soulevez.
    Il s'est produit quelques développements positifs dans le pays avec, par exemple, la prestation nationale pour enfants. Ce qui est intéressant dans son cas, et me paraît un modèle utile, c'est qu'il s'agit d'un accord fédéral-provincial-territorial négocié. Donc, l'apport fédéral est assorti d'un ensemble de critères ou de principes qui doivent être respectés. Donc, il y a là une forme de mécanisme de reddition de comptes.
    Je sais qu'il existe des possibilités de désistement, comme toujours. Mais lorsque vous avez ce genre de principes en place, tout le monde les considère comme un étalon pour mesurer la performance. Je pense que c'est une des façons de réagir à ce financement global. On pourrait l'assujettir à un accord négocié.
    De même, pour ce qui est de l'accord sur les services de garde d'enfants et le cadre de développement de la petite enfance mis en place en 2000 puis en 2003, ils étaient assortis d'un ensemble de principes. Là encore c'est une façon de rendre conditionnels ces fonds, dans la mesure où c'est possible dans une fédération.
    Je ne sais pas si vous avez un mot à ajouter, Ken.

  (1200)  

    La réponse brève à votre question est non. Je pense que le fédéralisme a dépassé l'époque du partage des coûts fédéral, où le gouvernement fédéral était aux commandes parce que l'argent fédéral déterminait réellement la politique sociale. Ce n'est plus le cas. Les provinces pèsent d'un poids égal en matière de politique sociale. Je pense qu'il faut examiner les choses politique par politique, comme Sherri l'a mentionné.
    Nous avons employé le terme « fédéralisme cadre ». Dans le domaine de la garde d'enfants, la notion d'un ensemble de principes, similaires aux principes de la Loi canadienne sur la santé, ne vous apporte pas le type de reddition de comptes que vous souhaiteriez, car vous ne savez jamais réellement où va l'argent. Mais on peut avoir une sorte de consensus général sur ce qui se passe, et on peut obtenir que les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral collaborent entre eux.
    La prestation nationale pour enfants, par exemple, est intéressante d'un point de vue historique et social, car elle est l'une des rares occasions que je connaisse où le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux ont apporté des changements à leurs programmes qui exigeaient un remaniement par un autre ordre de gouvernement. Autrement dit, ils ne se sont pas contentés de dire: « Nous coopérons puisque nous allons nous réunir à intervalles réguliers ». Ils ont effectivement apporté des modifications à leur politique qui n'auraient pas été possibles s'ils ne l'avaient pas fait tous ensemble. Les provinces ont retranché les prestations pour enfants de l'assistance sociale et les ont transférées dans d'autres programmes fondés sur le revenu. Le gouvernement fédéral a mis davantage d'argent dans ce qui était un domaine provincial. Il y a eu un accord de réinvestissement, comme Sherri l'a dit.
    Un autre exemple de ce type de fédéralisme amiable, moins formel, est la prestation fiscale pour revenu de travail — le nouveau programme entré en vigueur il y a deux ans. L'une de ses caractéristiques est que les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent varier la configuration du programme fédéral en fonction de leurs propres priorités et besoins en matière de sécurité du revenu. Le Québec, la C.-B. et le Nunavut l'ont déjà fait. Nous avons analysé cela dans notre rapport d'analyse du budget. Il existe des différences assez remarquables dans la conception de ces programmes, mais le gouvernement fédéral le tolère aussi longtemps que le coût n'augmente pas. C'est un autre exemple de la manière dont les gouvernements fédéral et provinciaux peuvent oeuvrer de concert sur la base de principes communs.

[Français]

    Merci. Je vais vous demander d'essayer de resserrer vos réponses le plus possible pour permettre à chaque parti de disposer du même temps de réponse.
     Je vais vous demander de patienter peut-être 30 secondes. En l'absence de notre président, je vais laisser la place à notre première vice-présidente, qui va officier pendant le restant de nos travaux.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lessard.
    Monsieur Sharp et monsieur Roberts, j'aimerais vous entendre plus tard car je crois que vous n'avez guère eu l'occasion de répondre à ma question. Peut-être après la réunion, ou si l'un ou l'autre des membres veut poser la même question, vous aurez l'occasion de répondre. Sinon, j'aimerais m'entretenir avec vous après la réunion.
    Merci beaucoup.
    Notre prochain intervenant est M. Lessard.

[Français]

    Merci madame la présidente. Si nous jouons à la chaise musicale ce matin, en l'absence de M. Allison, c'est pour permettre à chacun de poser ses questions.
    Je vous remercie aussi d'être ici ce matin. L'information que vous nous transmettez est très instructive. J'aimerais commencer par parler de la situation des femmes. On sait que certains groupes sont particulièrement exposés à la pauvreté. Il y a bien sûr les Autochtones, les personnes handicapées, les immigrants, les nouveaux arrivants, les personnes seules, les familles monoparentales et les femmes. Mme Torjman en a plus particulièrement parlé.
    Y a-t-il présentement un programme particulièrement efficace pour lutter contre la pauvreté des femmes? En effet, on sait que généralement, lorsque les femmes sont touchées, les enfants sont aussi beaucoup touchés, de même que l'ensemble de la famille, bien sûr, mais les enfants sont touchés le plus.

  (1205)  

[Traduction]

    Tout programme s'adressant aux pauvres va s'adresser de façon disproportionnée aux femmes, comme vous l'avez dit. Pour vous en donner un exemple concret, revenons aux prestations pour enfants. Du fait de la réforme fédérale et provinciale des prestations pour enfants ces dernières années, elles ont crû en importance pour les familles à faible revenu.
    Pour vous donner une idée des montants, si vous prenez un parent seul d'un enfant de moins de six ans en Ontario, si son revenu du travail était de 15 000 $, ce qui est très modeste, à peine au-dessus du salaire minimum, les prestations pour enfants fédérales sont passées de 15 p. 100 du revenu de cette femme en 1993 à 15,8 p. 100 en 1998, 22 p. 100 en 2005 et juste en dessous de 30 p. 100 en 2007. Cela représente un surcroît de revenu énorme pour cette famille monoparentale à faible revenu. Ce n'est pas la panacée, mais l'accroissement du revenu représente certainement l'une des importantes solutions à la pauvreté.
    C'est un exemple de la manière dont un programme fédéral peut aider disproportionnellement les femmes à faible revenu.
    Le pendant seraient des services de garde de haute qualité et abordables. Il est impossible pour les femmes — ou une famille en général, mais votre question porte particulièrement sur les femmes — de faire des études et de se former, ou même de continuer à travailler, si elles n'ont pas accès à des garderies de haute qualité et abordables. C'est absolument crucial.
    Soit dit en passant, l'autre avantage de l'investissement dans les garderies est que cela crée aussi beaucoup d'emplois pour les femmes. Nous disions tout à l'heure que les crédits d'infrastructure ne font pas grand-chose pour l'emploi des femmes. Eh bien, les femmes sont employées en nombre disproportionné dans les garderies, si bien qu'investir dans les services de garde crée aussi des emplois pour les femmes. Ce genre d'investissement apporte à la fois un soutien et des possibilités d'emplois aux femmes.
    Je souscris à cette évaluation. La prestation pour enfants a été un grand bienfait sur le plan de la réduction de la pauvreté chez les femmes. J'ai indiqué dans mon exposé que le taux de pauvreté des mères seules est tombé de 53 à 32 p. 100 environ au cours des 10 dernières années. C'est largement dû à la vitalité de l'économie, qui a fait que plus de mères seules ont trouvé un travail, et bien sûr à la prestation pour enfants. Je pense que ce programme a été très efficace pour la réduction du taux de pauvreté global des femmes.
    Je n'ai rien à ajouter à ce sujet.

[Français]

    En 1989, la Chambre des communes a adopté unanimement une résolution en vue d'éliminer la pauvreté, plus particulièrement chez les enfants, d'ici l'an 2000. On sait aujourd'hui ce que ça a donné. On connaît aussi l'opinion de la Commission du développement social de l'ONU, qui a été très sévère à l'endroit du Canada il y a trois ans. Je pense qu'on s'entend pour dire qu'une stratégie globale est nécessaire pour éliminer la pauvreté.
    Selon vous, qui avez eu à réfléchir à cette situation dans le cadre de vos travaux, quels seraient les principaux éléments à inclure dans une stratégie canadienne globale visant à combattre la pauvreté?

  (1210)  

[Traduction]

    Encore une fois, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, la stratégie primordiale pour réduire ou éliminer la pauvreté des enfants est, tout d'abord, d'asseoir une économie dynamique. Plus le taux de chômage est faible, et plus faible sera le taux de pauvreté des parents, et donc des enfants. Deuxièmement, c'est le ciblage des prestations sur les enfants. Nous l'avons fait avec d'excellents résultats avec la stratégie sur la prestation nationale pour enfants, où les gouvernements tant fédéral que provinciaux ont mis en place des mécanismes de soutien particuliers et un soutien du revenu pour les enfants.
    Il faut faire plus dans ce domaine. Comme je l'ai mentionné, le taux de pauvreté des enfants a baissé plus que celui des autres tranches d'âge. Mais il reste encore beaucoup à faire. La clé est d'avoir une économie dynamique de façon à ce que les parents puissent se trouver des emplois, et puis il faut orienter les prestations vers les enfants.
    Je vais répondre à la question antérieure en même temps que je réponds à celle-ci.
    J'ai essayé de dessiner les grandes lignes d'une stratégie. Premièrement, elle doit poursuivre des objectifs clairs et convenus. Je pense qu'il y a un appétit pour cela en ce moment au Canada, et l'on constate un peu partout un mouvement vers des stratégies de lutte contre la pauvreté au niveau provincial. Je pense qu'il y a là une occasion pour le gouvernement fédéral de prendre l'initiative et de rassembler les divers acteurs autour de la table pour définir quelques objectifs communs. Il nous faut une définition commune et les indicateurs requis pour l'appuyer. Le gouvernement fédéral pourrait très facilement prendre l'initiative d'un moyen de mesure.
    Deuxièmement, il y a les investissements dans ces domaines clés que nous avons tous décrits, tels que l'éducation préscolaire, les garderies, le logement et le renforcement et le respect de nos normes d'emploi. Enfin, nous devons veiller à effectivement réaliser ces objectifs.
    La question a été posée de savoir comment rallier tout le monde avec les modèles de financement existants. Si l'on envisage des accords de performance relativement à ces objectifs, il existe un appétit pour cela, et cela se fait déjà au niveau intraprovincial. Je pense qu'il faudra faire preuve d'un peu de fermeté, mais une fois que l'on s'est accordé sur des objectifs, je pense que des accords de performance correspondants sont... Il y a une certaine disposition, à condition d'insister.

[Français]

    Je m'excuse, monsieur Lessard, mais votre période de questions est terminée.

[Traduction]

    J'invite maintenant M. Martin à poser ses questions.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins d'avoir préparé et de nous avoir présenté quelques suggestions constructives et positives quant au rôle du gouvernement fédéral.
    Je vous ai tous entendu convenir que le gouvernement fédéral a un rôle assez majeur à jouer et que nous devrions nous engager et agir, et qu'il faudrait une stratégie d'une sorte ou d'une autre. Nous avons parlé avec quelques ministres provinciaux qui travaillent à l'exécution de leur propre stratégie. Ils nous disent que ce sera difficile pour eux sans la contribution fédérale, particulièrement en cette conjoncture difficile.
    J'ai salué les communautés de vues que j'ai entendues, à savoir qu'il nous faut les définitions et les indicateurs, qu'il nous faut pouvoir effectuer des analyses et évaluations et fixer les objectifs. Il nous faut mettre en place une architecture et une structure qui fonctionnent. Vous vous êtes accordés sur le ciblage des personnes handicapées et des femmes et vous êtes tous en faveur de services de garde d'enfant et de l'apprentissage précoce universel, tout comme de logements abordables et de l'infrastructure sociale. Ce dernier point m'a particulièrement intrigué. En outre, nous devons créer un environnement porteur afin que les gens puissent réellement participer.
    Ma question porte sur les moyens d'y parvenir. Comme M. Battle nous l'a dit, nous avions mis en place quelques programmes, comme le Régime de pensions du Canada et celui d'assurance-chômage, comme on l'appelait jadis, qui étaient plus universellement accessibles. L'universalité de certains de ces programmes... J'entends les provinces maintenant parler de 25 et 5 p. 100. Je m'inquiète toujours des 75 p. 100 qui ne vont pas sortir de la pauvreté parce que nous avons décidé de nous limiter à 25 et 5 p. 100.
    Il semble que lorsque nous avons introduit le Régime de pensions du Canada, et je n'en connais pas l'historique, nous n'avons pas dit que nous allions couvrir 25 p. 100 les cinq premières années et que les autres devront attendre. Nous avons décidé de mettre en place un programme qui serait universellement accessible. Nous avons ensuite ajouté le SRG, je crois, pour éviter à ceux tombant en dessous du seuil de pauvreté de se trouver dans un dénuement abject. Nous avons aujourd'hui dans notre pays des personnes âgées qui vivaient dans des conditions très difficiles et qui se portent relativement mieux.
    La question porte sur l'universalité des programmes. Est-ce là une considération importante pour l'avenir ou bien peut-on se contenter de mesures graduelles?

  (1215)  

    Je peux répondre en partie à votre question, Tony.
    Nous tous avons dit que des progrès ont été réalisés au niveau des personnes âgées et au niveau des enfants. Là où nous n'avons pas progressé — de fait, nous avons reculé — c'est à l'égard des adultes en âge de travailler. Cela nous ramène à l'assurance-emploi, qui est tant du point de vue politique que du point de vue des orientations, un panier de crabes. Il est incroyablement difficile de réformer l'assurance-emploi, comme l'expérience nous l'a montré. Pourtant, à mes yeux, le soutien du revenu des chômeurs est un élément absolument crucial de toute stratégie de réduction de la pauvreté. C'est l'un des fondements d'un système de sécurité sociale moderne. Comme vous venez de le dire, ce régime est tellement loin d'être universel que c'est difficile à croire.
    Le rétrécissement de la couverture de l'assurance-emploi est l'événement le plus extraordinairement négatif de l'histoire moderne de la politique sociale canadienne. Si vous y réfléchissez sous l'angle d'un contrat d'assurance sociale entre Canadiens actifs et leur gouvernement fédéral, tout le monde cotise à ce programme, tous les salariés — cela ne couvre pas les travailleurs indépendants, bien sûr — et seul un petit pourcentage d'entre eux, lorsqu'ils en ont besoin, bénéficient du programme. Il n'y a pas que les prestations, il y a aussi les services de formation et d'employabilité qui sont conditionnels à l'admissibilité à l'AE.
    C'est un programme controversé. Il est très, très difficile politiquement pour tout gouvernement d'apporter des changements rationnels à ce programme, mais cela ne change rien au fait que c'est un programme horriblement inéquitable. La condition d'accès variable que j'ai mentionnée signifie que l'assurance-emploi est comme un jeu d'échecs en trois dimensions. L'accès aux prestations, le montant des prestations et leur durée dépend de laquelle des 58 régions à chômage vous vivez. Vous pouvez avoir deux chômeurs, qui avaient les mêmes revenus avant de perdre leur emploi, et l'un peut se retrouver avec la prestation maximale et l'autre ne rien toucher du tout. Ce sont deux Canadiens sans emploi et notre programme fédéral les traite de manière différente, selon la région où ils vivent.
    Je trouve cela simplement incroyable. Entre cela et le fait que l'accès à l'AE est aléatoire, il me semble que cela représente le maillon fédéral le plus faible de notre stratégie de réduction de la pauvreté.
    Nous avons formulé quelques propositions, comme je l'ai dit, et je souscris à ce qu'Andrew a dit sur la nécessité de renforcer ce programme à titre de stimulation financière. C'est ce que font les Américains. Un rôle traditionnel de l'assurance-emploi en période de récession est d'être contracyclique. Mais même si l'économie repart, ce qu'elle va faire, le programme restera quand même insuffisant. Il écartera quand même un énorme pan de la population canadienne, ceux que leur régime de travail rend inadmissibles à l'assurance-emploi. C'est ce qui nous a poussé à réfléchir d'un point de vue plus architectural et à dire que l'assurance-emploi ne sera peut-être jamais adaptée au marché du travail moderne; peut-être faudrait-il ajouter une deuxième sorte de programme, fondé sur le revenu, qui offrirait des prestations de chômage à ceux qui ne vont tout simplement jamais correspondre à un programme d'assurance sociale.
    Nous avons également relié le travail que nous faisons à la réforme de l'assistance sociale. Celle-ci est un autre programme affreux, archaïque, qui ne marche pas. Je sais que ce n'est pas un programme fédéral mais on ne peut parler de réduction de la pauvreté au Canada sans parler de l'un des principaux programmes qui maintient les gens dans la pauvreté, à savoir 'assistance sociale.
    Je dis cela sans vouloir faire de catastrophisme, mais juste pour faire comprendre que nous sommes là face à un énorme défi et qu'il nous faut le confronter. L'assurance-emploi ne peut tout simplement pas continuer ainsi. C'est un programme qui ne marche pas.

  (1220)  

    Merci, monsieur Battle.
    Nous passons maintenant à M. Komarnicki. Ai-je bien prononcé votre nom, monsieur Komarnicki ?
    Oui, merci, madame la présidente. Il est bon de vous voir assurer la présidence.
    M. Tony Martin: [Note de la rédaction: inaudible]
    Excusez-moi, monsieur Komarnicki.
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Martin. Vous avez largement dépassé.
    J'allais juste dire que ce n'est pas moi. C'est Sherri qui avait quelque chose à...
    Laissez M. Komarnicki poser ses questions.
    Nous aurons un deuxième tour. Vous aurez alors l'occasion de parler, madame Torjman.
    Monsieur Komarnicki.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais adresser la plupart de mes remarques à M. Ken Battle.
    Merci beaucoup de votre exposé.
    D'après ce que j'entends, la crise économique fait s'accroître la pauvreté. J'ai entendu madame la présidente dire que le fait de simplement transférer l'argent aux provinces pourrait ne pas être la solution, si on ne canalise pas. Néanmoins, à moins de compenser dans d'autres domaines, la dernière chose à faire est d'amputer les paiements de transfert aux provinces, comme on l'a fait dans les années 1990 ou auparavant à hauteur de quelque 25 milliards de dollars.
    Êtes-vous d'accord avec moi? On peut vouloir recanaliser les fonds, mais il ne s'agit certainement pas de les réduire.
    Absolument.
    Mais nous avons des outils à notre disposition. En lisant votre document, j'ai noté la prestation fiscale pour revenu de travail. Dans le cas d'une famille de trois, je crois, gagnant entre 9 720 $ et 14 500 $, elle toucherait 1 680 $ de plus. Selon votre optique, qualifieriez-vous cela de plutôt substantiel?
    Oui. Comme nous l'avons mentionné, lorsque le PFRT a été introduit, c'était une prestation très minime. Le montant maximal pour les célibataires était de 500 $ par an, et de 1 000 $ pour les familles ou parents seuls.
    Mais vous conviendrez avec moi que l'accroissement de la prestation fiscale pour revenu de travail et l'élargissement de son application ont largement contribué à la réduction de la pauvreté.
    Oui. Bien qu'elle ait été minime au début, ce budget augmente sensiblement la prestation maximale et en ouvre l'accès.
    L'autre problème était qu'au moment de son introduction, elle ciblait plutôt les travailleurs à temps partiel et à faible revenu, mais maintenant elle s'applique à des niveaux de revenu plus élevés et bénéficie au plus grand groupe de travailleurs pauvres.
    Dans votre rapport, vous évoquez ensuite la prestation fiscale canadienne pour enfants et la prestation universelle pour la garde d'enfants. Vous avez signalé qu'un nombre important de familles touchent cette prestation. Vous avec conclu en disant que ce sont là des instruments puissants, « puisque non seulement ils réduisent la pauvreté des enfants et complètent le revenu des familles avec enfants, mais représentent également un stimulant financier de l'économie ».
    Convenez-vous avec moi que c'est là le type d'outils qui est essentiel pour faire reculer la pauvreté?
    Je suis d'accord avec vous pour ce qui est des programmes assortis d'une condition de ressources, comme la prestation fiscale canadienne pour enfants et le crédit de TPS. Je ne suis pas d'accord avec vous lorsqu'il s'agit des deux autres prestations fédérales pour enfants réintroduites: la prestation universelle pour garde d'enfants et le crédit d'impôt pour garde d'enfants non remboursable. Ce ne sont pas des programmes axés sur le revenu. Ces prestations vont à toutes les familles... Elles comportent des inéquités inhérentes. Le montant qui vous reste en main varie d'une province à l'autre.
    Notre position est que nous voulons un programme unique, dépendant du revenu, qui fournit le plus gros avantage aux familles à faible revenu, puis un avantage diminuant graduellement aux familles à plus haut revenu.
    Donc, les deux outils puissants sont la prestation fiscale canadienne pour enfants et la prestation fiscale pour revenu de travail. Ces deux là, dites-vous, sont des instruments essentiels et puissants.
    Oui.
    Lorsqu'on regarde ce qui a été fait dans le budget 2009, comme vous le dites dans votre rapport, deux choses émergent. Vous dites que « le PFRT apportera sensiblement plus à la plupart de ses bénéficiaires ». Vous dites également que « le programme s'appliquera à davantage de bénéficiaires, à savoir les travailleurs gagnant entre 13 000 $ et 16 000 $ ».

  (1225)  

    C'est juste.
    L'accroissement est vertical et horizontal. Je suppose que vous êtes un partisan fervent de ce volet du budget?
    Oui.
    L'autre aspect était le logement. Il y a là aussi un instrument. L'offre de logements sociaux est un instrument que l'on peut utiliser dans la guerre contre la pauvreté. Je pense que les termes que vous avez employés sont qu'ils « soutiennent à tout le moins une arme critique dans la guerre plus large contre la pauvreté ».
    Donc, les initiatives que vous nous avez vu prendre dans le budget, tels que le milliard de dollars pour financer les réparations sinécessaires aux logements sociaux, 600 millions de dollars pour la réparation de logements dans les réserves et dans le Nord, 400 millions de dollars pour construire davantage de logis pour personnes âgées, et 75 millions de dollars pour des nouveaux logements pour des personnes handicapées, tout cela représente exactement cette arme cruciale dans la guerre plus large contre la pauvreté dont vous parlez.
    Oui, certes, mais...
    Monsieur Battle, je vous vois hocher de la tête. Vous devez exprimer votre accord, pour le procès-verbal. Êtes-vous d'accord avec ce que j'ai dit? Les montants du budget que j'ai cités concernent tous le logement. Convenez-vous avez moi qu'ils s'inscrivent dans la guerre plus large contre la pauvreté et représentent une arme cruciale dans cette guerre?
    Oui.
    Il reste quelques minutes.
    Madame Torjman, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Monsieur Komarnicki, Mme Torjman aimerait ajouter quelque chose. Il vous reste une minute.
    J'ai d'autres questions pour M. Battle.
    Elle offre habituellement quelques réponses très intéressantes, monsieur Komarnicki. Il vaudrait peut-être la peine de l'écouter.
    Je n'en doute pas, mais peut-être sur le temps de quelqu'un d'autre. J'ai quelques autres questions pour M. Battle. Je suis sûr qu'elle aura l'occasion de s'exprimer à un autre moment, si vous le voulez bien.
    D'accord. Il vous reste encore une minute, monsieur Komarnicki.
    Je viens de perdre une minute avec cette interruption.
    En ce qui concerne l'assurance-emploi — et je réalise que c'est un autre outil à employer, surtout du point de vue de l'accès — si je comprends bien les statistiques, parmi ceux qui cotisent à l'assurance-emploi, près de 82 p. 100 y sont admissibles. D'autres, qui ne sont pas partie prenante au système, qui ne cotisent pas, ne sont pas admissibles, et c'est normal. Lorsque vous avez dit que c'était 40 p. 100, d'où tenez-vous ces chiffres et comment expliquez-vous la contradiction avec ce que je dis?
    Nous examinons la couverture des Canadiens chômeurs. Autrement dit, le nombre des chômeurs est le dénominateur et le nombre des prestataires de l'AE est le numérateur.
    Considérez-vous uniquement ceux qui cotisent à l'AE?
    Non, la majorité des personnes qui cotisent à l'AE ne sont pas admissibles aux prestations lorsqu'ils deviennent chômeurs.
    Le deuxième élément était la norme variable d'admissibilité. La logique qui la sous-tend est que ceux qui connaissent dans leur région le taux de chômage le plus élevé ont besoin de moins d'heures pour devenir admissibles et les prestations durent plus longtemps. Qu'avez-vous contre cela?
    Ce que j'ai contre cela est que deux chômeurs canadiens qui se trouvent vivre dans différentes régions de chômage ne devraient pas être traités de manière différente. Si vous êtes chômeur, vous êtes chômeur. Cela ne signifie pas nécessairement...
    Même si le taux de chômage est...
    Monsieur Komarnicki, votre temps est maintenant écoulé. Veuillez autoriser une réponse.
    Un chômeur vivant dans une région à faible chômage ne va pas retrouver ipso facto plus facilement un emploi qu'un chômeur dans une région à fort chômage. Voilà notre argument.
    Désolée. Je vous ai accordé un surcroît de temps.
    Vous avez cinq minutes, monsieur Savage.
    Merci à vous tous de comparaître et de nous apporter ces renseignements. Nous voulons déterminer, au moyen de cette étude, le rôle que le gouvernement fédéral pourrait jouer dans une stratégie anti-pauvreté pour le Canada. Il me semble que pour déterminer le rôle que le gouvernement pourrait jouer afin d'aider les pauvres, deux éléments sont primordiaux. Premièrement, que dépensons-nous directement pour aider ces gens? L'autre est négatif en ce sens que la question est de savoir quelle est la capacité du gouvernement fédéral d'aider les pauvres? J'entends par-là la capacité financière du gouvernement fédéral. Par exemple, lorsque nous avons réduit la TPS de deux points, nous avons réduit la capacité financière du gouvernement fédéral de dépenser pour ceux qui en ont le plus besoin.
    Est-il légitime de le dire?

  (1230)  

    Oui.
    Nous réduisons donc la capacité du gouvernement fédéral. Je regarde un tableau d'un analyste très éminent de la politique publique du nom de Ken Battle, qui indique que le budget fédéral le plus récent accorde à un couple à deux salaires avec deux enfants, c'est-à-dire moi, gagnant 150 000 $, c'est-à-dire moi, une économie d'impôt de 483 $, alors qu'un couple à deux salaires avec deux enfants, gagnant 20 000 $, n'aura rien. Cette inéquité me paraît frappante. Ce n'est pas ce qu'il faudrait faire.
    J'aimerais demander à chacun d'entre vous si vous souscrivez à mon affirmation que cela ne fait rien pour réduire la pauvreté. Dites-moi brièvement quelle mesure vous prendriez avec l'argent englouti dans ces coupures d'impôt pour aider la majorité des pauvres au Canada.
    Je vais commencer avec Ken.
    Veuillez donner une réponse brève, pour laisser du temps aux autres. Nous voulons entendre vos avis, mais s'il vous plaît soyez brefs. Merci.
    Je partage vos réserves sur la TPS. Cela a considérablement entamé la capacité financière fédérale. Cela n'aurait pu intervenir à un pire moment.
    Les baisses d'impôt sur le revenu annoncées dans le budget 2009... En passant, c'est moi qui ai dressé les diagrammes, mais les chiffres provenaient du budget, au cas où d'aucuns s'inquiéteraient de leur origine.
    En fait, l'argument pour vendre le budget voulant que les changements à l'impôt sur le revenu bénéficieraient aux familles à revenu faible et moyen est une pure sornette. Le plus gros montant va aux familles à haut revenu. Chaque fois que vous changez de façon générale l'assiette de l'impôt sur le revenu, cela va toucher tous les contribuables — gros, moyens et petits.
    Dans le contexte du budget de stimulation fiscale, notre argument était que nous devrions placer de l'argent aux mains des familles à revenu faible et modeste, qui vont aller le dépenser et stimuler l'économie. Notre contre-proposition à l'emploi de baisses d'impôt sur le revenu était de doubler le crédit de TPS remboursable, ce qui aurait injecté beaucoup d'argent dans l'économie de manière ciblée, centrée.
    Je m'arrête là.
    Je conviens avec vous, bien évidemment, qu'il y avait une inégalité dans le budget, en ce sens que ceux du haut, ou certains groupes, recevaient plus que ceux du bas. En ce sens, ce n'était pas un budget progressiste.
    Cependant, il contenait aussi un certain nombre de mesures qui étaient progressistes du point de vue des gens en bas de l'échelle des revenus. Nous avons déjà parlé de la prestation fiscale pour le revenu de travail. Celle-ci est concentrée sur le bas de l'échelle et est très bonne pour l'équité. En outre, l'augmentation des dépenses de la prestation nationale pour enfants est aussi bonne pour l'équité. Bien sûr, il y a le prolongement de cinq semaines des prestations AE, qui n'est pas suffisant à mon avis, mais c'est certainement mieux que rien — bien que cela n'aille pas assez loin. Ensuite, le budget contenait aussi un grand nombre de mesures pour la formation. Et je pense que ce sont là des mesures très, très positives pour les défavorisés.
    Si je puis vous interrompre, étant donné que je dispose d'un temps limité, j'ai remarqué dans votre rapport sur le budget que vous y parlez spécifiquement de l'impôt sur le revenu. Je pense que la PFRT est un bon investissement, mais qu'il faut faire plus.
    Oui.
    On pourrait également remanier un peu la prestation fiscale pour enfants.
    Oui.
    Mais en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, vous avez expressément dit qu'il n'est pas stimulant de réduire l'impôt de ceux qui gagnent 150 000 $, comparé à ceux qui gagnent 20 000 $.
    C'est stimulant parce qu'une partie de ces économies d'impôt sera dépensée par le contribuable; c'est simplement moins stimulant que si vous aviez donné la même somme à une personne à faible revenu qui en aurait probablement dépensé la totalité. C'est donc certainement stimulant, mais pas aussi stimulant.
    Je suppose qu'on ne peut avoir un budget qui privilégie exclusivement une catégorie de Canadiens, Vous devez dresser un budget qui donne quelque chose à tous les Canadiens et je suppose que le gouvernement a fait un compromis et décidé d'offrir quelques baisses d'impôt à ceux du haut de l'échelle. Cela avantage aussi ceux du bas.

  (1235)  

    Monsieur Sharpe, je dois réellement vous interrompre. Je suis désolée, mais j'aimerais donner l'occasion à M. Roberts de dire un mot.
    Monsieur Roberts, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Je ne suis pas sûr d'avoir quelque chose à ajouter. Plutôt que de remuer l'histoire et d'analyser le budget actuel, si nous regardons nos chiffres de pauvreté, nous avons encore un long chemin à faire indépendamment du budget qui vient d'être présenté. Il contient quelques mesures positives, mais il reste beaucoup à faire. Donc, au lieu de déterrer les squelettes des budgets antérieurs, je pense qu'il vaudrait mieux réfléchir à ce qu'il faut pour l'avenir? Nous avons indiqué qu'il reste encore du travail à faire dans les domaines du logement social, de la garde des enfants, de l'éducation préscolaire, et des normes d'emploi qu'il faut renforcer.
    Monsieur Vellacott, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    On utilise beaucoup les seuils de faible revenu de Statistique Canada. On a dit aujourd'hui qu'ils servaient de mesure de la pauvreté, mais Statistique Canada va répétant qu'il ne faut pas utiliser le SFR de cette manière, que ce n'est pas une mesure officielle de la pauvreté. Le SFR statistique n'est pas un indicateur de consensus social.
    Ma question est donc de savoir — et nous allons peut-être passer de l'un à l'autre et vous pourrez me donner un oui ou non rapide, avec peut-être une phrase ou deux d'explication — si vous pensez que le SFR lui-même exagère la prévalence de la pauvreté au Canada?
    Êtes-vous d'accord avec cela, en commençant par Ken?
    Il est intéressant que vous souleviez cette question. Il y a quelques années, lorsque je travaillais au Conseil national du bien-être social, il existait une controverse au sujet du SFR. C'était il y a 25 ans. Aujourd'hui, c'est toujours une mesure controversée. À l'époque, l'institut Gallup publiait un sondage tous les ans, avec une question de ce genre: « Quel est le montant absolument minimal dont une famille de quatre » — un couple avec deux enfants — « a besoin pour tout juste s'en sortir dans notre société »? Il sondait les gens, faisait la moyenne et arrivait à un chiffre très précis. Lorsque je comparais ce chiffre au SFR — le seuil de faible revenu, qui est une formule très compliquée et un peu bizarre — les deux étaient si proches que c'en était impressionnant. C'est comme si le SFR était très proche de...
    Il me faut avancer vite car j'ai d'autres questions à vous poser. Je suppose donc que vous ne considérez pas que le SFR exagère la réalité de la pauvreté au Canada.
    Non.
    Je suis d'accord. Je ne pense pas que ce soit vrai.
    Mais le point primordial est que si vous transférez des ressources aux défavorisés, tous les indicateurs vont faire apparaître un recul de la pauvreté au Canada. En ce sens, tous les indicateurs sont très robustes, répercutant un transfert de ressources. De ce point de vue, tout ce débat sur la pauvreté me paraît réellement contre-productif, car la question principale devrait réellement porter sur les politiques de redistribution des ressources aux défavorisés afin qu'ils puissent s'épanouir. C'est réellement là le thème essentiel du débat sur la pauvreté, beaucoup plus que la façon de la mesurer.
    Je dirais que dans certains cas le SFR surévalue et dans d'autres il sous-évalue. Je m'intéresse davantage à l'évolution dans le temps, quel que soit l'indicateur utilisé. La question cruciale est de savoir si les choses s'améliorent au fil du temps. Une fois que vous mesurez l'amélioration, vous n'avez plus à vous préoccuper du niveau réel.
    Bien.
    Nous allons peut-être de nouveau sauter de l'un à l'autre, si vous le permettez, pour entendre vos propositions. M. Savage a mentionné certaines propositions écrites de Ken. Est-ce que chaque groupe pourrait répondre? Je pense que nous ne connaissons encore guère les coûts. On parle de toutes sortes de choses merveilleuses qui pourraient et devraient être faites, et la plupart d'entre nous autour de cette table ne s'oppose pas là-dessus car il serait excellent de faire ces choses. Mais quel serait le coût de ces mesures? Les gouvernements, quoi qu'ils puissent dire, n'ont pas des revenus inépuisables. On peut toujours augmenter les impôts. Si vous les réduisez, comme on l'a fait avec la TPS, l'argent revient aux mains de certains contribuables, mais en contrepartie vous avez moins de recettes fiscales. Combien coûteraient vos propositions, Ken et Sherri, ainsi que les autres?
    Pouvez-vous attendre juste une seconde? J'ai justement les chiffres dans ma serviette.
    Demandons à quelqu'un d'autre en attentant M. Battle.
    D'accord. Je passe à Andrew. Qu'avez-vous?
    Je veux bien commencer.
    Monsieur Roberts, allez-y.
    Nous n'avons pas d'étiquette de prix pour nos chiffres. Mon argument est justement que, franchement, nous avons la possibilité de créer ces devis en mettant au point une sorte de modèle économétrique. Je réfléchis à certaines des expériences que j'ai vécues dans des organisations antérieures, et je crois que le gouvernement fédéral est le lieu où cette initiative devrait être prise. Créez un modèle économétrique auquel vous pouvez appliquer divers scénarios et poser des questions telles que savoir quel serait l'impact si l'on investissait dans le logement abordable. Je pense que c'est réellement là que se situerait la valeur ajoutée.

  (1240)  

     Je n'ai pas de chiffres de coût spécifiques. Tout dépend évidemment du montant que vous êtes prêt à dépenser. C'est le facteur déterminant. Je pense qu'il est plus important de focaliser sur les avantages de la réduction de la pauvreté, pas seulement à court terme mais aussi à long terme. Prenez les Autochtones. Si vous pouvez réduire la pauvreté chez eux, il y aura moins de problèmes de santé, moins de criminalité, et le gouvernement empochera aussi des recettes fiscales supplémentaires. Je pense qu'il faut aborder le problème tant sous l'angle des coûts que des avantages.
    La plupart des études montrent, par exemple, que l'investissement dans l'éducation produit des avantages considérables sur le long terme qui dépassent largement le coût.
    Sommes-nous maintenant à court de temps?
    Eh bien, je suis très flexible quant au temps.
    Monsieur Battle, vous avez le temps d'une courte réponse.
    Désolé, je l'ai laissé... Je voulais juste vous indiquer le prix d'une de nos propositions majeures, soit l'augmentation de la prestation fiscale canadienne pour enfants. Son maximum est actuellement de 3 400 $ ou 3 500 $. Nous proposons de la porter à 5 000 $.
    Notre proposition consisterait à prendre les dépenses fédérales actuelles — c'est-à-dire la prestation universelle pour garde d'enfants, le crédit d'impôt pour enfants non remboursable et la prestation fiscale canadienne pour enfants — et à les regrouper en un seul programme, une prestation fiscale canadienne pour enfants majorée. Cela coûterait environ 4 milliards de dollars. C'est là le coût supplémentaire.
    Quatre milliards de dollars de plus?
    Par rapport à ce que nous dépensons aujourd'hui.
    Pour porter le montant à 5 000 $ par enfant.
    M. Ken Battle: Oui.

[Français]

    Madame Beaudin, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Vous parlez d'augmenter la prestation fiscale à 5 000 $. Vous venez de parler de 100 $ par mois, par enfant.

[Traduction]

    Désolé, peut-être puis-je clarifier cela. Les 100 $ par mois sont la prestation universelle pour garde d'enfant. Je la supprimerais.

[Français]

    Vous vous débarrasseriez de ça?
    Ma question commençait par la Prestation universelle pour la garde d'enfants. J'ai passé les cinq dernières années de ma vie sur le terrain avec des familles dites plus défavorisées ayant trois, quatre ou cinq enfants. J'ai encore passé la journée avec elles, hier, pour savoir si ce montant de 100 $ les aidait et les sortait de leur pauvreté.
    D'abord, ces gens continuent de faire des enfants. Ensuite, l'argent va au logement. Les logements sont encore plus ou moins abordables. Donc, ce revenu leur permet de payer un logement qui coûte encore beaucoup trop cher pour la famille qu'ils ont. Il sert aussi à payer d'autres frais. Ces mères ne travaillent pas et leurs conjoints travaillent à bas salaire, de sorte que la situation de ces familles change plus ou moins. Et encore, elles pourraient même avoir tendance à s'endetter, voyant un petit revenu supplémentaire pour s'acheter autre chose.
    Si on aide les parents, il faut le faire parallèlement avec d'autres mesures, par exemple une mesure de logement. Vous disiez qu'il était difficile d'entrevoir une stratégie nationale de logement. Pourquoi? Il faudrait aussi bonifier l'assurance-emploi et donner accès à l'éducation grâce aux organismes communautaires qui oeuvrent sur le terrain avec les familles, tout en mettant sur pied un service de garde pour les enfants.
    Il faut considérer la prestation dans le cadre d'une stratégie globale, entre autres une stratégie nationale de logement. Hier, à l'ONU, le Canada a encore été pointé du doigt quand on a parlé de logement, car il est le seul pays à ne pas avoir de stratégie nationale du logement. Pourquoi?
    Votre question s'adresse-t-elle à une personne en particulier?
     Mme Torjman a parlé de stratégie nationale du logement, mais quelqu'un d'autre peut y répondre.
    Madame Torjman.

[Traduction]

    Merci de votre question.
    Nous sommes tout à fait en faveur d'une stratégie de lutte contre la pauvreté comportant plusieurs volets. D'ailleurs, nous avons rédigé un rapport, intitulé Poverty Policy, qui distingue 10 composants majeurs d'une stratégie. Tous sont reliés entre eux. Nous reconnaissons donc entièrement le problème que vous avez décrit.
    Pour ce qui est du logement, c'est là un domaine où la question se pose toujours de savoir s'il est du ressort fédéral ou provincial. Vous savez, dans quelle mesure le gouvernement fédéral devrait-il intervenir dans un domaine potentiellement perçu comme de compétence provinciale? Il y a des interrogations à ce sujet.
    L'autre aspect, bien entendu, est que le logement représente une grosse dépense. C'est une grosse facture. Si vous allez construire de nouveaux logements, ou même rénover ou réparer des logements existants, cela coûte cher. C'est pourquoi, comme je l'ai dit, nous avons salué l'investissement dans le logement abordable dans ce budget. Ce que nous déplorons, et ce que M. Battle n'a pas eu l'occasion de dire lorsqu'on lui a demandé s'il était favorable à ces mesures, est l'absence de mention de la nécessité d'une stratégie nationale. À la place, on inscrit ces crédits plutôt dans les dépenses d'infrastructure, dans l'investissement immédiat dans l'infrastructure, à des fins de stimulation économique, au lieu de dire: « Cela fait partie du leadership que nous assumons pour régler un problème majeur dans notre pays ».
    C'était donc réellement là notre objection. Tout en étant ravis de cet argent, cette absence nous préoccupe. Je pense qu'il faudrait revoir cela.

  (1245)  

[Français]

    Merci, madame Torjman.
    Vous pourriez me répondre par écrit, s'il le faut.
    D'entrée de jeu, vous avez dit que la situation des aînés s'était améliorée au cours des dernières années. Dans le nouveau budget, on parle de logement pour les aînés et les Autochtones, mais pas pour les familles. Construit-on de nouveaux logements sociaux pour les familles à faible revenu ayant de jeunes enfants, les personnes seules ou chefs de famille monoparentale? On dit que ce sont des clientèles à risque. Or, dans le dernier budget, on ne prévoit pas construire de nouveaux logements sociaux pour ces clientèles.
    Je pense que vous avez fait plutôt un commentaire.
    Non, j'ai posé une question.
    Je ne peux pas vous donner du temps, je m'en excuse.
    Monsieur Lobb, vous avez la parole.

[Traduction]

    Monsieur Roberts, j'ai remarqué que vous parliez dans votre exposé d'une approche holistique. Vous avez parlé du revenu mais aussi du patrimoine. J'ai trouvé cela intéressant. Pourriez-vous nous préciser les types d'avoirs concernés ou en quoi ils vont aider ceux dans le besoin.
    De fait, nous avons présenté un exposé il y a quelques années, que je serais ravi de vous faire parvenir, si vous le voulez. Il traitait de la question du patrimoine, défini très largement. Il y a les avoirs financiers, évidemment, mais aussi le capital humain, le genre de choses dont on a besoin sur la durée. Nous appréhendons cela selon la perspective de la durée de vie. Il faut avoir des outils à sa disposition pour se sortir de la pauvreté, mais pas nécessairement à un moment précis dans le temps. Il faut disposer de ce capital sur la durée de façon à se sortir de la pauvreté.
    Dans votre proposition, cela prendrait-il la forme d'un prêt ou d'un micro prêt?
    Nous ne sommes pas entrés dans ce niveau de détail. Nous disions qu'au lieu de simplement considérer la pauvreté sous l'angle du revenu, il faut y réfléchir aussi sous l'angle de l'actif. Peut-être manquez-vous de revenu à un moment donné, mais vous pouvez disposer d'atouts qui vous permettent de surmonter cela et de vous en sortir à un moment donné. Ce n'est pas qu'une question de revenu.
    Nous avons beaucoup parlé ici de la meilleure façon de mesurer la pauvreté. Les témoins ont-ils une préférence? Préfèrent-ils l'approche du panier de consommation ou bien préférez-vous ou recommandez-vous un indicateur particulier?
    Monsieur Roberts, je suppose que vous pouvez commencer, puisque votre micro est allumé.
    Je ne suis pas sûr de le vouloir. J'hésite un peu à me prononcer car nous n'avons pas vraiment fait de recherche là-dessus. Ayant fréquenté beaucoup d'économistes au cours des 15 dernières années, mon impression est que le SFR est la bonne solution, mais à condition de le modifier selon le coût réel de la vie. Ce peut être le panier de consommation, mais je pense réellement que la solution est un SFR révisé.
    Je ne pense pas que si l'on adopte une autre mesure, on verra de changement dans la tendance globale.
    Il faut des mesures différentes pour des utilisations différentes. D'aucuns s'attachent à l'inégalité dans notre société. Si vous voulez focaliser sur l'inégalité, alors ce que l'on appelle la mesure du faible revenu, l'indicateur international mesurant le pourcentage de la population ayant moins de la moitié du revenu médian, est le bon indicateur. Si vous vous intéressez à l'effet de la croissance économique sur le taux de pauvreté, alors il vous faudra une mesure en termes absolus. Le SFR sera alors la solution.
    Nous devrions avoir tous ces indicateurs à notre disposition. À l'heure actuelle, toute l'attention se porte sur le SFR après impôt. Mettons-nous d'accord là-dessus et concentrons toutes nos énergies sur des politiques visant à réduire le nombre de Canadiens en dessous de cette ligne. Cela devrait réellement être le point focal de cette mesure.
    Cela fait des décennies que l'on discute des moyens de mesure et je ne pense pas que l'on puisse en tirer grand-chose de plus.
    Mais je reconnais que le SFR pose beaucoup de problèmes, au niveau national. C'est bien connu. Le principal problème, par exemple, est que le coût de la vie dépend de la taille de la collectivité, ce qui n'est pas gênant parce que les petites localités tendent à avoir un coût de la vie moindre, mais cela signifierait que toutes les villes au-dessus d'un million d'habitants ont le même coût de la vie. Or, nous savons que le logement coûte moins cher à Montréal qu'à Vancouver ou Toronto, et pourtant nous utilisons les mêmes niveaux de prix pour ces agglomérations. Cela fausse sensiblement les chiffres, donnant à Montréal un taux de pauvreté qui est en réalité trop élevé.
    Il faudrait rectifier ce genre de choses. Il y a du travail à faire à ce niveau, mais je ne pense pas que ce devrait être le point focal du débat sur la pauvreté.

  (1250)  

    J'aimerais répondre brièvement à votre question sur l'actif, car il y a beaucoup de groupes communautaires à travers le pays qui cherchent à aider les familles à faible revenu à se construire un patrimoine de façon à disposer de leur propre filet de sécurité. Le problème est que ces organisations elles-mêmes se trouvent enfermées dans le carcan de la charité. Il faudrait un nouveau cadre juridique et cela incombe clairement au gouvernement fédéral. Beaucoup d'organisations mènent actuellement des recherches et demandent une modification du cadre juridique qui les classe comme organisations caritatives, ce qu'elles ne sont pas réellement. Elles se voient plutôt comme des entreprises communautaires. Au Royaume-Uni et aux États-Unis, leur travail est reconnu comme une entreprise communautaire, mais il existe au Canada un problème de statut juridique qu'il faut réellement revoir et cela incombe clairement au gouvernement fédéral, afin que l'on puisse effectuer ce genre de travail à travers le pays.
    Cela tombe pile.
    Madame Minna, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Premièrement, je veux dire que ce que la plupart d'entre vous, en particulier le Caledon Institute, préconisez figure déjà dans le livre rose du caucus féminin libéral — nombre des principales mesures sur le plan de la garde des enfants, de l'éducation, les 5 000 $ de prestations pour enfants, le logement abordable, etc. À mon point de vue, manifestement, cela influence grandement le revenu des femmes.
    Si vous le permettez, j'aimerais focaliser sur quelques aspects. Monsieur Battle, madame Torjman, vous avez tous deux mentionné deux choses. La prestation pour enfants telle que structurée, soit les 1 200 $, n'est pas imposable. Je crois savoir que le gouvernement touche quelque 300 millions de dollars d'impôt de revenu là-dessus, et donc la prestation ne vaut pas entièrement 1 200 $. Je soupçonne que les 300 millions de dollars proviennent des faibles revenus, car elle est taxée aux mains de la famille à faible revenu. C'est donc un élément négatif.
    Pour que les choses soient claires, vous suggérez de prendre les 1 200 $, ce avec quoi je suis d'accord, vous les ajouteriez à la prestation pour enfants, et prendriez les crédits d'impôt pour enfants — tant le crédit non remboursable que l'autre — et les ajouteriez à la prestation pour enfants, pour porter celle-ci à au moins 5 000 $. Ai-je raison?
    Très rapidement, s'il vous plaît. J'ai encore d'autres questions.
    En gros, nous avions un programme, la prestation fiscale canadienne pour enfant. Il a fallu 30 ans pour aboutir finalement à un programme rationnel, raisonnable, qui marchait bien. Le gouvernement actuel est arrivé et a réintroduit une version de l'ancienne allocation familiale, qui est devenue une prestation universelle pour garde d'enfants de 100 $ par mois. Budget après budget, il a ressuscité le vieux crédit d'impôt pour enfants non remboursable dont nous nous étions débarrassés il y a 10 ans. Nous nous en étions débarrassés pour une bonne raison: il comportait des iniquités inhérentes. En le réintroduisant, nous avons créé un système plus inéquitable. Non seulement la prestation universelle pour garde d'enfants est-elle imposable — si bien que ce que vous voyez n'est pas ce que vous touchez — mais ce que vous touchez dépend de la province dans laquelle vous vivez, car la prestation est imposée également par le gouvernement provincial ou territorial. Je pourrais citer des exemples de provinces où les familles à haut revenu se retrouvent avec plus d'argent dans la poche que des familles à faible revenu d'une autre province. C'est un système très irrationnel.
    Tout ce que nous disons, c'est revenons à un programme unique fondé sur le revenu, soit la prestation fiscale canadienne pour enfants, qui intégrerait l'argent dépensé pour ces deux autres programmes, et l'on aurait ainsi un programme de plus grande envergure et plus efficace.
    Une dernière remarque importante. La proposition que nous formulons est assez coûteuse — 4 milliards de dollars, ce n'est pas rien, même pour un objectif à long terme — mais l'une des raisons est que nous augmenterions aussi les prestations pour les familles à revenu modeste et moyen. Cela fait 20 ou 30 ans, virtuellement, qu'elles n'ont pas vu d'augmentation de leur prestation pour enfants. Nous ne voulons pas d'un système de prestation pour enfants où l'argent va entièrement au bas de l'échelle et ensuite vous avez un effet d'escalier comme ceci, tel que si vous atteignez un revenu modeste, vous vous retrouvez avec une réduction énorme de votre prestation pour enfants. Nous avons donc créé une courbe descendante plus lisse de telle façon que la grande majorité des familles canadiennes verraient une amélioration de leurs prestations. Les faibles revenus verraient la plus grosse amélioration, mais les revenus modestes et moyens en verraient une aussi, et c'est important.

  (1255)  

    Merci.
    Il y a en fait deux questions, je m'en excuse, et si vous avez le temps d'y répondre, l'autre porte sur l'amalgame de l'AE et de l'assistance sociale. Je comprends ce que vous nous dites, à savoir que même en réformant l'AE, il y aura toujours des laissés-pour-compte, à cause du travail à temps partiel, à cause de toutes sortes de facteurs, qui touchent les femmes en particulier et peut-être les immigrants qui n'avaient pas d'antécédents de travail à leur début ou qui étaient étudiants ou tout ce que vous voudrez. Il est très difficile de couvrir tout le monde.
    Vous envisagez donc d'amalgamer l'AE et l'assistance sociale comme revenu. À toutes fins pratiques, il s'agirait d'une sorte de revenu garanti. Est-ce que vous y intégreriez également le PRFT, si vous envisagez un revenu garanti pour les adultes? Voilà une question.
    L'autre est la question de l'équité, qui influe sur les taux de pauvreté des femmes adultes et requiert une analyse sexospécifique de nos dépenses et leurs effets sur la pauvreté de certaines femmes dans ce pays.
    J'envisage donc un puzzle plus vaste avec des pièces plus grandes. Toutes sont reliées entre elles. On ne peut simplement en extraire une. J'aimerais donc avoir votre avis à ce sujet.
    Vous avez tout à fait raison. Toutes les parties sont interdépendantes. C'est pourquoi nous avons construit ce que nous appelons une nouvelle architecture des prestations pour adultes, avec ces pièces reliées entre elles. Non, nous ne préconisons pas l'amalgame de l'assurance-emploi et de l'assistance sociale, comme vous l'avez décrit. Nous conserverions toujours un système d'assurance-emploi. À cela nous ajouterions un système de revenu temporaire. Lorsque j'ai parlé de retrancher certaines personnes de l'aide sociale, je songeais en particulier aux personnes gravement handicapées, qui passeraient de l'assistance sociale à un nouveau programme dépendant du revenu.
    Il ne s'agissait donc pas d'un programme de revenu garanti généralisé couvrant tout le monde. On garderait en place certains éléments importants, comme la prestation fiscale pour revenu de travail, la prestation fiscale pour enfants, l'assurance-emploi, un petit programme d'assistance sociale, et un nouveau programme mixte pour les personnes handicapées.
    Monsieur Cannan.
    Merci, madame la présidente.
    Et merci aux témoins qui se sont joints à nous cet après-midi.
    J'aimerais aborder plusieurs choses. Je ne sais pas de combien de temps je dispose, nous arrivons presque à la fin de la séance.
    J'apprécie les chiffres que vous avez donnés sur les personnes âgées seules. Je représente une circonscription de la Vallée de l'Okanagan et, dans le dernier recensement, elle affichait le plus gros pourcentage de personnes âgées en zone métropolitaine. L'augmentation du SRG, comme vous l'avez dit, a été la première en une génération et elle a été bien reçue.
    Je réfléchis à d'autres façons de collaborer avec nos partenaires provinciaux et municipaux. Nombre de ces enjeux exigent que les trois ordres de gouvernement travaillent de concert. J'ai passé neuf ans au conseil municipal et au comité de planification sociale.
    Sherri, je pense que c'est vous qui avez parlé de logement décent, abordable. Pourriez-vous définir ce que vous entendez par logement décent, abordable?
    Je ne l'ai pas ici, mais la Société canadienne d'hypothèques et de logement a des définitions des besoins de logement élémentaires du point de vue de l'abordabilité. Si vous dépensez 30 p. 100 ou plus de votre revenu pour le logement, il devient inabordable. Elle a également quelques directives concernant le nombre de personnes dans le ménage et le nombre de personnes qui doivent partager une chambre à coucher. Il existe donc quelques lignes directrices très claires applicables à l'échelle nationale.
    Un aspect sur lequel il faut réellement se pencher lorsqu'on parle de logement décent et abordable, c'est une dimension nouvelle, qui commence seulement à être prise en compte, ce que l'on appelle la « visitabilité ». Cela signifie que votre logement doit être accessible et visitable par des personnes handicapées. En effet, avec une population vieillissante, nous devons veiller bien davantage à ce que toute la population ait accès au logement et que les logements soient construits de manière accessible.
    Il existait une contrainte d'abordabilité et d'espace, et maintenant on y ajoute une contrainte d'accessibilité.

  (1300)  

    J'en ai bien conscience.
    L'autre aspect concerne la Colombie-Britannique, province que je connais le mieux. En 2006, nous avons signé un accord C.-B-Canada de transfert pour logements sociaux, d'une durée de 30 ans, qui fonctionne très bien. Le ministre Coleman, qui est le ministre provincial, est appelé Monsieur Logement, et le premier ministre Campbell travaille à une initiative pour aider les personnes âgées et les familles à faible revenu à trouver des logements abordables. Tout cela met aussi en jeu les problèmes de santé mentale, celui des sans-abri. C'est un sujet complexe et qui relève principalement du mandat provincial.
    Mon autre remarque intéresse la TPS. C'est la réduction d'impôt qui profite le plus aux moins nantis, car ils utilisent le plus gros pourcentage de leur revenu pour acheter les produits de première nécessité. On ne peut sous-estimer l'intérêt d'une baisse de la TPS et aussi la stimulation économique qui en résulte. Nous entrons maintenant dans cette récession économique planétaire. Comme je l'ai dit, il faut espérer que les derniers arrivants à la fête soient les premiers à repartir. Plus vite nous en sortirons, mieux ce sera.
    M. Roberts a fait une remarque sur laquelle le comité devrait réellement se pencher, à mon avis.
    Vous avez parlé d'un modèle économétrique et dit qu'il fallait analyser les coûts et les avantages. Avez-vous un modèle que nous puissions utiliser? L'un des problèmes dans ce comité est que l'on peut parler de la pauvreté pendant 100 ans et on bute toujours sur la même chose; on se saisit de toutes les études. Que ce soit ici ou au comité sénatorial, quantité d'études ont été faites, mais le problème est d'arriver à cerner les coûts et les avantages pour voir comment procéder.
    Comme Maurice l'a indiqué, chacune de ces mesures comporte un coût considérable. Il y a 4 milliards de dollars pour le crédit d'impôt pour enfants. Si vous voulez faire passer l'AE de 50 à 100 semaines, vous pouvez doubler le coût... C'est illimité, à moins de faire comme les États-Unis et de faire marcher la presse à billets. Mais nous devons nous montrer financièrement responsables et réalistes.
    Monsieur Roberts, avez-vous une sorte de modèle avec lequel nous pourrions travailler dans notre comité?
    Je n'ai pas de modèle, mais il n'est pas si compliqué à créer. Je l'ai fait dans deux domaines différents.
    L'un était les dépenses de santé. Nous avons ventilé pour l'inflation et la démographie et les changements de volume. Nous avons ensuite ventilé par niveau fédéral et par province et territoire. Nous avons morcelé par composantes. En gros, c'est là le modèle.
    J'en ai réalisé un similaire pour déterminer le nombre de médecins dont nous avons besoin en Ontario. Nous avons examiné combien il en faudrait en fonction des maladies, des facteurs de risque, de la démographie.
    C'est assez simple, mais c'est aussi relativement coûteux. L'avantage est que le débat cesse de porter sur le nombre de médecins que nous avons et porte plutôt sur ce que nous pouvons faire pour effectuer ces changements.
    Je pense que ce serait un bon usage du temps de notre comité, une fois que nous décidons de ce que nous voulons faire.
    Un dernier commentaire concerne l'aide aux personnes handicapées. Je sais que notre régime enregistré d'épargne-invalidité...
    Je suis désolée, je dois vous interrompre.
    Avant de clore cette séance, j'ai une question émanant de notre équipe de recherche. Elle s'adresse à M. Battle et concerne l'entrée variable dont vous avez tellement parlé, le fait que vous aimeriez qu'elle soit uniforme pour tout le Canada.
    Je viens à vous dans un moment, monsieur Martin.
    Pensez-vous que les prestations elles-mêmes devraient être variables à travers le Canada, ou bien pensez-vous qu'elles devraient être identiques?
    Identiques.
    Identiques, d'accord.
    Monsieur Martin, il ne reste plus de temps, et j'ai quelques petits points à régler.
    J'aimerais mentionner à M. Roberts...
    Monsieur Martin, sur un rappel au Règlement.
    Sur un rappel au Règlement, madame la présidente, permettez-moi de rappeler que nous avons commencé cette séance en retard. Il était 10 minutes après l'heure lorsqu'elle a été ouverte. Ensuite, nous avons eu la discussion entre nous sur la façon de gérer les tours de questions aux témoins, et j'ai accepté la formule à condition d'avoir mon tour à la fin, que le temps serait géré de telle manière que je pourrais poser mes questions à la fin. Je veux simplement vous faire savoir que je ne suis pas satisfait de la manière dont les choses se passent et je ne trouve pas cela juste.
    Monsieur Komarnicki.
    Je pense que la façon dont c'était censé fonctionner est que M. Martin aurait son tour et que le nôtre serait le dernier. S'il y avait un manque de temps, alors c'est notre tour qui disparaissait plutôt que celui de M. Martin. La journée d'aujourd'hui a peut-être été un peu inhabituelle à cause du début tardif, mais je n'ai pas d'objection. Je sais que notre côté n'aurait pas d'objection à ce qu'on lui donne cinq minutes.
    Avez-vous des objections, monsieur Savage?
    M. Michael Savage: Non.
    La vice-présidente (Mme Raymonde Folco): D'accord.
    Je n'ai pas d'objection et je vous présente mes excuses. Évidemment, il y a eu un roulement à la présidence et je n'étais pas au courant de cet arrangement.
    Avant de vous accorder votre temps, monsieur Martin, pourrais-je mentionner deux ou trois choses?
    Premièrement, monsieur Roberts, vous avez dit que vous nous enverriez un document. Je vous rappelle simplement que tout document envoyé à ce comité doit être adressé au greffier.
    Par ailleurs, cette liste que vous avez reçue — et je m'adresse là aux membres du comité — des témoins potentiels pour une étude de la pauvreté, est un regroupement des deux listes que nous avons reçues la semaine dernière. Tout a été regroupé et ceci est la liste avec laquelle nous allons travailler.
    Enfin, je rappelle à tout le monde que la réunion de jeudi prochain commencera à 10 heures et non 11 heures.
    Maintenant, monsieur Martin, vous avez la parole.

  (1305)  

    Merci beaucoup.
    Ma question s'adresse à vous tous, mais particulièrement à M. Battle. Cela fait longtemps que je m'intéresse au sujet. J'ai remarqué qu'au cours des 10 à 15 dernières années, le moteur de toutes ces mesures anti-pauvreté a été surtout une stratégie de marché du travail, soit intégrer ces gens dans la main-d'oeuvre, abaisser le mur de l'assistance sociale et ce genre de choses, ce qui laisse beaucoup de gens de côté, tels que les inemployables, dont beaucoup ont des problèmes de santé mentale, et beaucoup de familles monoparentales.
    Je sais que vous avez conçu un programme, la prestation fiscale pour enfants et le supplément qui était initialement repris aux familles qui ne travaillaient pas. Si l'on veut faire sortir les enfants du système d'assistance sociale, cela n'a pas eu l'effet voulu. Au contraire, cela les y replongeait d'une manière qui n'était pas prévue.
    Nous voyez-vous opter pour une stratégie nationale sur la pauvreté qui ne soit pas autant liée à une stratégie de marché du travail?
    Si nous revenons au début de notre discussion, Andrew a expliqué que le taux de pauvreté des familles monoparentales dirigées par une femme a été presque divisé par deux au cours des 10 dernières années. L'explication réside en partie dans l'accroissement des prestations pour enfants et en partie dans l'augmentation du taux d'emploi des femmes.
    On nous reproche souvent de ne pas prêter suffisamment d'attention au marché du travail dans notre camp. Je dis que c'est réellement important, mais cela ne signifie pas que nous ne devrions considérer que le marché du travail, loin de là. Tout le travail que nous faisons sur cette nouvelle architecture des prestations pour adultes n'intéresse pas seulement les personnes employables, mais aussi celles que l'on appelle inemployables — les personnes handicapées, des personnes incapables d'occuper un emploi régulier — et l'aide que nous pouvons leur apporter. Nous ne préconisons certainement pas de privilégier une politique de marché du travail par rapport à une politique de sécurité du revenu; nous pensons qu'il faut les deux.
    Pour ce qui est de la prestation pour enfants, je suis d'accord avec vous. Nous avons accru les prestations pour enfants uniquement pour les familles laborieuses, et celles vivant de l'assistance sociale n'ont vu aucune augmentation réelle de leurs prestations pour enfants, car elles obtenaient auparavant le double de ce que touchaient les familles laborieuses. Il était manifestement injuste qu'une catégorie de familles pauvres touchent un certain montant de prestations pour enfants et une autre catégorie touche un montant différent. Nous voulions retrancher les prestations pour enfants de l'assistance sociale et les intégrer plutôt à des programmes dépendant du revenu qui traitaient toutes les familles à faible revenu sur un pied d'égalité. Donc, en fin de compte, que vous soyez actif ou pauvre, assisté pauvre ou entre les deux — vu que les familles passent souvent d'une catégorie à l'autre — vous avez une source de prestations pour enfants transférables. Elle vous suit quelle que soit votre situation professionnelle et elle traite toutes les familles à faible revenu de la même façon. Nous avons réussi à faire cela au fil des ans, et aujourd'hui même les familles assistées jouissent d'un accroissement réel de leurs prestations pour enfants grâce à l'investissement fédéral continu dans ces prestations.
    Mesdames et messieurs, je sais combien vous devez vous sentir frustrés. Croyez-moi, je le suis tout autant que vous. C'est là un sujet tellement important et nous avons eu si peu de temps, individuellement et collectivement, pour poser nos questions. Si vous souhaitez compléter vos réponses par écrit, veuillez nous envoyer les documents par l'intermédiaire de notre greffier.
    Encore une fois, je pense que la frustration est également partagée dans la salle, mais vous devez la ressentir particulièrement, madame Torjman. Je vous ai tellement souvent coupé la parole ce matin.
    Mesdames et messieurs, merci beaucoup d'être venus.
    La séance est levée.
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