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CC32 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-32


NUMÉRO 011 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 8 février 2011

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare ouverte cette 11e séance du Comité législatif spécial chargé du projet de loi C-32.
    Nous accueillons aujourd'hui Ferne Downey et Stephen Waddell, de l'Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio, ainsi que John Lewis et Paul Taylor, de l'Alliance internationale des employés de scène.
    Nous accordons cinq minutes aux représentants de l'Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio, aussi connue sous le sigle ACTRA. Ferne Downey, la parole est à vous.
    Merci beaucoup. Merci, monsieur le président et tous les membres du comité.
    Comme vous le savez, je m'appelle Ferne Downey. Je suis actrice professionnelle et présidente de l'ACTRA. Je suis accompagnée de Stephen Waddel, le directeur général national de l'ACTRA. Tout d'abord, sachez que nous appuyons l'objectif de ce projet de loi visant à fournir aux consommateurs de nouvelles façons d’accéder à du contenu en tout temps.
    Nous sommes également favorable à l'adoption de normes internationales pour lutter contre le piratage. Cependant, un bon projet de loi doit faire plus que sévir contre ceux qui s'approprient du contenu illégalement. Il doit également préserver le droit des créateurs d'être rémunérés pour l'utilisation légitime de leurs oeuvres.
    Contrairement à beaucoup de Canadiens, les créateurs ne reçoivent pas leur salaire d'un seul employeur. Nous devons accumuler les chèques de paye ici et là pour être en mesure de payer notre hypothèque et se nourrir. Le projet de loi C-32 vient compromettre bon nombre de ces sources de revenus sur lesquelles nous comptons. Le gouvernement déclare la guerre aux licences collectives en présentant une multitude d'exceptions visant à affaiblir le droit d'auteur.
    Comme vous l'a dit le représentant de la Conférence canadienne des arts la semaine dernière, le projet de loi actuel supprime 126 millions de dollars en revenus actuels que les créateurs et les détenteurs de droits touchent en vertu d'un régime d'octroi de licences collectives. Et c'est sans compter ce qui est déjà volé. À nos avis, l'abolition des licences collectives n'est ni moderne ni équilibrée. À l'ère numérique, les sociétés dirigées par les détenteurs de droits représentent le seul moyen réaliste de donner un libre accès aux utilisateurs tout en donnant une rémunération raisonnable aux créateurs. Bref, ce projet de loi nous ramène en arrière.
    Nous avons relevé six lacunes dans le projet de loi auxquelles il faut remédier.
    La première faille concerne le contenu généré par l'utilisateur. Il est curieux que dans le même projet de loi, le gouvernement accorde aux artistes les droits moraux qu'ils réclament depuis longtemps, puis leur enlève au moyen d'une exception de l'application composite qui permet aux utilisateurs de prendre l'oeuvre d'un artiste et d'en faire ce qu'ils veulent. Aucun autre pays dans le monde n'a une telle loi. Pourquoi alors le Canada veut-il devenir un chef de file mondial en privant les créateurs de leurs droits. Cette disposition doit absolument être modifiée ou retirée du projet de loi.
    Stephen.
    Deuxièmement, le projet de loi élargit la portée de l'exception relative à l'utilisation équitable et prévoit de nouvelles exceptions. Cela aura pour effet de faire perdre des millions de dollars aux créateurs et de porter un dur coup à l'industrie de l'édition du matériel éducatif. Ce qui est étonnant, c'est que cette disposition destructrice prévoit de régler un problème qui n'en est pas un. Les établissements d'enseignement peuvent avoir accès à du matériel pour une somme modique, dans le cadre de licences collectives.
    Le projet de loi C-32 doit être modifié pour respecter le test à trois étapes de Berne, reconnu internationalement, qui limite les exceptions autorisées dans les lois nationales à certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.
    Notre troisième préoccupation concerne les dommages-intérêts. Pourquoi accorder un traitement de faveur aux sites illégaux de partage de fichiers en les exemptant des dommages-intérêts? Il faut y remédier. Les dommages doivent être proportionnels, mais il n'est pas nécessaire de faire une distinction entre l'utilisation à des fins personnelles et commerciales. Les violations à caractère non commercial portent également atteinte aux détenteurs de droits.
    Quatrièmement, nous sommes préoccupés par la responsabilité des fournisseurs de services Internet, soit les FSI. Si vous souhaitez réellement prévenir les violations du droit d'auteur, fournissez plutôt aux FSI les outils dont ils ont besoin pour intercepter les gens qui enfreignent la loi sans arrêt. Nous devons dissuader les contrefacteurs en imposant des conséquences.
    La cinquième lacune est l'élimination de la disposition relative à la reproduction mécanique à des fins de diffusion. Encore là, il s'agit d'une attaque en règle contre les licences collectives. Vous soutirez de l'argent aux artistes et créateurs pour les remettre dans les poches déjà pleines des diffuseurs privés.
    Ferne.

  (1105)  

    Notre sixième et dernière recommandation porte sur la reproduction pour usage privé.
    La disposition concernant le changement de support et la reproduction à des fins privées devrait être assortie d'une rémunération, de sorte que les artistes pourront toucher ces revenus, peu importe l'évolution des médias. On doit moderniser la redevance actuelle sur la copie privée afin qu'elle s'applique aux dispositifs numériques conçus, fabriqués et mis sur le marché pour copier de la musique, à défaut de quoi les artistes ne pourront plus percevoir des millions de dollars en redevances.
    Soyons honnêtes. La redevance sur la copie privée ne date pas d'hier. Elle ne s'appliquera pas aux automobiles. Elle ne représente pas un montant de 75 $ et n'est pas une taxe. La seule taxe sur les iPods est la TVH. Nous vous demandons de bien vouloir mettre de côté les beaux discours et de faire ce qu'il faut pour remédier à la situation. Tout le monde ici sait qu'il faut moderniser la redevance plutôt que la laisser mourir à petit feu.
    À un moment ou à un autre, vous vous batterez tous pour conserver votre emploi. Et vous savez tous qu'il y a près d'un million de créateurs qui travaillent avec acharnement pour corriger ce projet de loi. Nous voulons rejoindre toutes les circonscriptions du pays. Nous comptons particulièrement sur les trois partis de l'opposition. Ensemble, vous avez la majorité, tant au comité qu'à la Chambre. Nous avons besoin de vous pour adopter un projet de loi qui reconnaisse le rôle central que jouent les créateurs et les détenteurs de droits dans notre économie numérique et qui veille au respect de leur droits de propriété intellectuelle.
    Si on ne fait rien, le Canada continuera d'être une source d'embarras à l'échelle internationale et de nous faire honte.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à John Lewis.
    Bonjour et merci de nous donner cette occasion de nous exprimer sur le projet de loi C-32. Je suis accompagné par mon collègue Paul Taylor, qui s'adressera également au comité.
    L'AIEST a été fondée en 1893 — en 1898 au Canada — et compte près de 120 000 membres, dont 16 000 résident au Canada, ce qui en fait l'un des plus importants syndicats de l'industrie du divertissement. L'AIEST représente des travailleurs oeuvrant dans le secteur des arts de la scène, principalement dans la production cinématographique et télévisuelle. Nos membres sont essentiels à la production, à la distribution et à la diffusion des films et des émissions de télévision.
    Le nombre d'employés qui travaillent sur une production cinématographique peut varier de 100 à 1 000. Leur travail derrière les caméras est absolument nécessaire à la réalisation des films. Ces personnes travaillent autant sur des productions américaines à gros budget comme Twilight Saga: New Moon à Vancouver, et La Momie: La Tombe de l'empereur Dragon à Montréal, que sur des productions de films ou d'émissions de télévision canadiennes, telles que Republic of Doyle à St. John's, et Heartland à Calgary.
    Les mesures que le gouvernement prendra pour contrer le piratage numérique auront des répercussions directes sur nos membres. Nos membres n'ont aucune sécurité d'emploi. Ils dépendent d'une industrie bien portante pour joindre les deux bouts. Lorsque le piratage fait mal à l'industrie, et qu'on ne produit pas de films, ce sont nos membres qui se retrouvent sans emploi.
    L'AIEST appuie les objectifs clairement établis du projet de loi C-32. Des centaines de nos membres ont écrit à leurs députés les implorant de procéder à une importante réforme du droit d'auteur et, depuis le dépôt du projet de loi, d'en appuyer les objectifs. Nous accueillons avec satisfaction la promesse du gouvernement voulant que le projet de loi crée un cadre moderne, souple et orienté vers l'avenir, un cadre susceptible d'aider à protéger ou à créer des emplois, de stimuler notre économie et d'attirer de nouveaux investissements au Canada.
    Toutefois, nous craignons fortement que le projet de loi, dans sa forme actuelle, n'atteigne pas ces objectifs. Nous avons rédigé un mémoire qui, si je comprends bien, vous a été distribué, mais je vais tout de même vous exposer brièvement notre position.
    Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, M. Taylor.

  (1110)  

    L'AIEST approuve l'approche sérieuse du projet de loi relativement aux mesures techniques de protection, tant au niveau du contrôle de l'accès que de la reproduction. En l'absence de ces mesures, des modèles d'entreprise comme Netflix ne seraient pas possibles au Canada. Si l'on permet d'invalider les mesures techniques à des fins privées ou autres fins licites, on se trouve à saper complètement ces modèles.
    Nous proposons donc que les dispositions sur la facilitation soient modifiées de façon à inclure les services principalement destinés ou offerts pour faciliter l'accomplissement d'actes qui constituent une violation. Les dispositions devraient aussi contenir une mention claire visant les fournisseurs de services d'hébergement et de mise en cache. Ces changements sont nécessaires pour remédier à la situation, puisque la réalité, c'est que les sites pirates qui hébergent du contenu illicite, qui le diffusent en continu ou qui en permettent le téléchargement sont en voie de devenir la source la plus importante de distribution illégale de contenu filmique ou télévisuel en ligne.
    Quant à l'exception du contenu produit par l'utilisateur, l'AIEST estime qu'on devrait supprimer cette exception ou l'amender de telle manière qu'elle ne cause pas de préjudice aux détenteurs de droits d'auteur. Au pis aller, l'exception ne devrait autoriser un utilisateur qu'à créer du contenu original et transformer à des fins personnelles et non commerciales, si toutes les activités peuvent être considérées comme relevant de l'utilisation équitable au sens du régime du droit d'auteur en vigueur et si elles n'ont aucun effet néfaste sur le marché.
    En ce qui concerne les dispositions sur les règles refuges pour le FSI, selon l'AIEST, on devrait resserrer ces dispositions pour s'assurer que les sites illégaux, comme ceux qui encouragent le stockage de fichiers illicites en hébergent, en diffusent ou offrent des copies contrefaites de contenu protégé, ne soient pas dégagés de responsabilité par inadvertance. De plus, dans le but d'assurer l'uniformité avec les normes internationales, on devrait exiger des FSI qu'ils aient une politique efficace pour contrer la violation des droits d'auteur dans leurs réseaux, et particulièrement dans les cas de récidive; qu'ils prennent aussi des mesures pour retirer les œuvres illicites ou en bloquer l'accès, lorsqu'ils possèdent une connaissance directe ou par interprétation d'activité illicite, conformément aux commentaires de la Cour suprême accompagnant la décision sur le Tarif 22.
    Enfin, le projet de loi devrait prévoir un droit d'injonction en faveur des détenteurs de droits d'auteur contre les FSI dont les services sont utilisés par de tierces parties pour violer le droit d'auteur, pour les forcer, par exemple, à bloquer l'accès aux sites illégaux.
    Notre dernière recommandation porte sur les dommages-intérêts. Nous sommes d'avis que le projet de loi devrait être modifié pour intégrer des dommages-intérêts efficaces qui constitueraient des mesures dissuasives réelles à l'échange des fichiers contrefaits et pour donner aux détenteurs de droits d'auteur la capacité de bloquer les facilitateurs du vol en ligne à grand échelle.
    Si le gouvernement désire maintenir un plafond sur les dommages-intérêts pour les individus, il devrait s'appliquer aux violations pour des fins privées plutôt que pour des fins non commerciales; calculer les dommages sur la base de chacune des violations et non pour l'ensemble des violations; et permettre à tous les détenteurs de droits, et non seulement au détenteur initial, d'intenter des poursuites.

  (1115)  

    N’oubliez pas que ce sont des emplois qui sont en jeu. Ce projet de loi peut améliorer le sort de bon nombre de mes membres. Ce crime fait des victimes. Mes membres sont durement touchés par ce fléau. L’industrie perd de l’argent et cela a pour effet de diminuer le volume de travail. J’encouragerais donc le comité à poursuivre son bon travail et à présenter un projet de loi qui assurera la prospérité de l’industrie pendant encore de nombreuses années.
    Merci beaucoup à nos témoins.
    Nous allons maintenant enchaîner avec la première série de questions. C’est donc M. Garneau, du Parti libéral, qui ouvrira le bal. Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier de votre présence et de votre témoignage.
    J’aimerais tout d’abord que nous parlions de la responsabilité des FSI. Vous avez tous les deux soulevé cette question. Sans entrer dans les détails, vous avez laissé entendre, si je ne me trompe pas, que la procédure « avis et avis » prévue dans ce projet de loi était insuffisante. J’aimerais que vous nous disiez ce qu’il conviendrait de faire, selon vous. De plus, je voudrais que vous m’expliquiez ce qui vous a amené à conclure que la procédure « avis et avis » était insuffisante.
    Merci, monsieur le président et monsieur Garneau.
    La procédure « avis et avis » consiste uniquement à émettre des avis à l’infini aux contrefacteurs. Elle ne fera rien de plus que créer de la paperasse supplémentaire. Personne n’assurera un suivi de ces avis. Ce système peut être efficace seulement si on intervient ou qu’on impose une sanction à la suite d’une violation.
     Nous aimerions que le projet de loi propose une solution mesurée qui obligerait les contrefacteurs à détruire le matériel en question. Il y a divers mécanismes qui pourraient se révéler efficaces, mais la procédure « avis et avis », à elle seule, ne vaut rien. Il doit y avoir une forme d’intervention qui, au bout du compte, oblige le contrefacteur à se défaire de son matériel.
    Nous partageons cet avis. Nous convenons également que la procédure « avis et avis » ne permet pas de régler le problème auquel nous sommes confrontés actuellement. Les gens ne semblent pas en être conscients ou ils justifient leurs actes, qu’ils ne considèrent pas comme un vol.
    Nous sommes catégoriques là-dessus; la contrefaçon constitue un vol et fait du tort à nos membres tous les jours. Cela met leur travail en péril. Nous croyons que les FSI sont les seuls à pouvoir faire plus qu’envoyer des avis. On devrait exiger qu’ils interviennent davantage. Nous recommandons une intervention mesurée qui les obligerait à mettre en place une politique efficace.
    Si vous me le permettez, j’aimerais aller un peu plus loin. Il y a des gens qui disent que la procédure « avis et avis » serait efficace auprès de la majorité des contrefacteurs. Autrement dit, lorsqu’une personne recevra un avis, elle saura qu’elle est sous surveillance et elle ne recommencera plus. Cependant, certains réaliseront que ce ne sont que de simples avis et qu’ils n’auront jamais de conséquences.
    Par conséquent, pourquoi êtes-vous si sûrs que cette approche est vouée à l’échec? Avez-vous des statistiques à l’appui? Je m’adresse aux deux groupes.
    Je ne crois pas que nous ayons des statistiques
    C’est donc plutôt une impression?
    Non. En discutant avec la population en général, surtout avec les jeunes, nous avons constaté qu’ils affichent une attitude complètement différente par rapport à nous, les intervenants, qui voyons les effets du vol sur l’industrie. Les gens doivent comprendre qu’il s’agit bel et bien d’un vol. Il faut que ce comportement change, et cela est possible si on sensibilise les gens et qu’on adopte des lois efficaces qui établissent clairement qu’il est ici question d’un crime. Le régime « avis et avis » ne transmet pas ce message.
    Il y a un aspect qui m'échappe dans tout ce débat au sujet des avis successifs. Si je ne paie pas ma facture de gaz ou d'hydroélectricité, on va me couper le service et je ne vois pas comment cela pourrait empiéter sur les droits de qui que ce soit. Comme mes collègues l'ont fait valoir, c'est bel et bien du vol et on devrait intervenir en conséquence. Ceux qui permettent l'accès, comme les fournisseurs de service Internet, devraient être tenus de fermer la porte aux voleurs.

  (1120)  

    Merci.
    Discutons maintenant des dommages-intérêts préétablis. Vous en avez parlé tous les deux. J'ai eu l'impression que vous estimez que le libellé actuel n'est pas assez fort; qu'il ne permet pas de tenir compte de la gravité de l'infraction.
    Stephen, vous avez fait allusion aux sites de partage de fichiers. J'aimerais que vous nous en disiez davantage au sujet du libellé que vous souhaiteriez retrouver dans ce projet de loi au sujet des dommages-intérêts.
    Le problème vient du fait qu'il n'est désormais plus possible d'exiger d'emblée des dommages-intérêts substantiels en cas d'infraction grave. Il faudrait donc s'adresser aux tribunaux pour prouver qu'il y a effectivement eu préjudice. C'est un processus long et pénible, alors que l'on voudrait simplement fermer des sites comme isoHunt. La seule façon de leur faire comprendre les choses, c'est de prévoir des montants substantiels en dommages-intérêts préétablis. Nous voudrions que ceux-ci soient remis en vigueur dans le cadre de ce projet de loi.
    Qu'entendez-vous par substantiels? Est-il question d'un ordre de grandeur supérieur à 5 000 $?
    Certainement.
    D'accord.
    Merci.
    Dans notre mémoire, nous avons fait trois propositions. Je sais que l'on vous a déjà fait valoir cet argument, mais nous ne voulons pas que les dommages-intérêts deviennent simplement un coût d'exploitation et une autorisation à voler.
    Nous avons soutenu que les dommages légaux devraient s'appliquer aux violations pour des fins privées, plutôt que pour des fins non commerciales; qu'ils devraient être calculés sur la base de chacune des violations et non pour l'ensemble de celles-ci; et que l'on devrait permettre à tous les détenteurs de droits d'auteur, et non seulement au titulaire initial, d'intenter des poursuites.
    Je répète que la mesure doit être dissuasive. Il s'agit d'un vol. On vole des emplois.
    Je vous demanderais de me répondre très brièvement, par un oui ou par un non. Préférez-vous que l'on retire de ce projet de loi l'exception visant les applications composites ou le contenu produit par l'utilisateur, ou seriez-vous prêt à accepter des changements importants à cet égard?
    Avant de faire des commentaires à ce sujet, il faudrait voir de quels changements il est question. Nous indiquons dans notre mémoire qu'il faudrait soit supprimer complètement cette exception ou la limiter de telle manière qu'elle ne puisse pas causer de préjudice.
    Nous estimons que cette exception devrait être limitée de façon à ne permettre que la création d'un contenu de transformation original, pour éviter que quelqu'un se contente d'utiliser une oeuvre protégée en ajoutant simplement un commentaire à la fin. Il faut qu'il y ait une transformation. Il faut ensuite tenir compte des autres aspects dont nous traitons dans notre mémoire.
    Merci.
    Nous passons maintenant au Bloc québécois.

[Français]

    Madame Lavallée, vous avez la parole pour sept minutes.
    Bonjour, monsieur Waddell et madame Downey. Ce matin, je vais vous parler de piratage.
    Le projet de loi vise à contrer le piratage organisé et le téléchargement illégal. Si ce débat public que nous faisons actuellement n'avait pour but que de sensibiliser les gens, la population et les consommateurs au respect des droits d'auteur et des créations, je pense qu'on ferait un grand pas en avant.
    Ainsi, je vais vous parler de piratage organisé et des sites Internet conçus principalement pour inciter au téléchargement illégal, peer-to-peer, ou, en bon français, d'égal à égal.
    D'après vous, de quelle façon devrions-nous approcher les pirates? Quels sont les dommages auxquels vous auriez droit et auxquels vous pourriez vous attendre?

[Traduction]

    Madame Lavallée, merci...

[Français]

    Je veux juste ajouter une chose, car je ne me suis pas bien expliquée.
    Actuellement, il y a des dommages préétablis et plafonnés: 20 000 $ pour le commercial, 5 000 $ pour le non-commercial. Tout le monde sait que ça n'a aucun bon sens: plafonner à 20 000 $ n'a aucun sens. De l'autre côté, la sanction pénale pour le verrou numérique est d'un million de dollars et cinq ans d'emprisonnement, ce qui, entre nous, fait davantage l'affaire des créateurs de logiciels de jeux.
    Je ne sais pas si vous voudriez aller jusque-là. Le voudriez-vous, pour que ce soit égal, disons?

  (1125)  

[Traduction]

    Nous n'aurions aucune objection à ce que certaines de ces personnes se retrouvent derrière les barreaux, soyez-en assurée. Ces individus se livrent à du vol à grande échelle. Alors si votre comité recommande l'incarcération de certains d'entre eux, nous nous en réjouirons.
    Ce projet de loi doit comporter des mesures dissuasives vraiment mordantes pour empêcher isoHunt et les autres contrevenants de continuer à faire des affaires en profitant de la tolérance qui semble malheureusement être la norme dans notre pays.
    Monsieur le président, puis-je intervenir?

[Français]

    Je m'excuse, je pose ma question à Mme Downey. On reviendra à vous si on a le temps.
    Allez-y, madame Downey. Avez-vous le même avis que M. Waddell?

[Traduction]

    Je suis entièrement d'accord.

[Français]

    Sauf erreur, vous voudriez que les dommages préétablis soient plus élevés. Voudriez-vous aussi qu'ils soient plafonnés, ou voudriez-vous suggérer un montant de dommages préétablis ce matin?

[Traduction]

    Comme nous avons négocié des redevances minimales pour nos artistes, nous souhaiterions que l'on établisse pour les dommages-intérêts un montant minimal qu'il serait possible de majorer sans maximum applicable.

[Français]

    Pour vous, un montant non spécifié pourrait-il aller jusqu'à un million de dollars?

[Traduction]

    Nous aimerions bien sûr que ces dommages soient le plus élevés possible. Compte tenu des revenus générés par ces entreprises, je ne crois pas qu'il soit exagéré de parler de 1 million de dollars.

[Français]

    Actuellement, si on fait la même lecture du projet de loi, on s'aperçoit que les dommages préétablis et plafonnés à 20 000 $ pour tous les cas de figure feraient en sorte qu'une oeuvre ne vaudrait jamais plus de 20 000 $. Faites-vous la même lecture?
    C'est un montant de 20 000 $ une fois, pour tous les ayants droits et pour la vie. Essentiellement, ça veut dire qu'un pirate prendrait 20 000 $, qu'il vous l'offrirait et vous inviterait à le poursuivre.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Combien ça coûte pour poursuivre un individu ou une entreprise pour piratage?

[Traduction]

    Les poursuites judiciaires peuvent facilement coûter des centaines de milliers de dollars.
    J'ai bien aimé ce que mes collègues de l'AIES ont dit à ce sujet et j'appuie leur prise de position.

[Français]

    Ça veut dire que le projet de loi n'a pas de mordant contre les pirates. Même si on dit vouloir contrer le piratage, on ne donne pas au projet de loi les moyens nécessaires pour le faire. Ça veut dire que ce projet de loi est tout à fait inefficace.

[Traduction]

    Vous avez raison; c'est inefficace. Comme on l'indiquait, que l'on parle de 20 000 $ ou de 5 000 $... Les amendes de cet ordre deviennent de simples frais d'exploitation. Ces entreprises font des millions de dollars en volant le travail d'autres personnes.
    Il faut que les pénalités soient à la hauteur des très graves infractions qui sont commises.

[Français]

    Plus tôt, vous avez parlé des avis et avis, c'est-à-dire que lorsque quelqu'un constate qu'il y a eu copie d'une oeuvre artistique, la loi prescrit qu'il faut que ce soit l'ayant droit qui débusque le contrevenant. Il doit également faire la démarche auprès du fournisseur de services Internet pour lui demander d'avertir le contrevenant.
     Tout à l'heure, vous avez dit que vous ne trouviez pas ça efficace. Selon vous, quel système serait efficace?

[Traduction]

    Comme nous l'avons indiqué, nous préconisons un système qui prévoirait bien sûr l'envoi d'avis, d'un ou deux avis, après quoi des mesures plus sévères entreraient en jeu si le contrevenant ne donne pas suite à l'avis.
    Nous espérons que votre comité saura trouver le moyen d'intensifier ainsi la pression.

[Français]

    À ce propos, avez-vous des suggestions de moyens pour intensifier la pression?

  (1130)  

[Traduction]

    Je répète que nous souhaiterions une réponse progressive qui ne se limiterait pas au seul envoi d'avis. Il faudrait que le fournisseur de services internet soit tenu de sévir contre les contrevenants, ou alors votre comité devrait trouver un autre moyen de le faire.
    Mais nous estimons qu'une pression constante devrait s'exercer sur les contrevenants jusqu'à ce qu'ils soient obligés de retirer le contenu fautif.
    Merci beaucoup.
    Nous devons maintenant passer à M. Angus qui dispose de sept minutes.
    Merci beaucoup et merci à vous pour vos exposés.
    Je dirais que le projet de loi C-32 concerne surtout le droit de faire des copies, ce qu'on appelle en français

[Français]

les droits d'auteur,

[Traduction]

les droits que détiennent les auteurs.
    Nous vivons à une époque différente, car n'importe qui peut maintenant faire des copies. Il y a dix ans, les gens pouvaient copier des cassettes. Nous pouvons désormais copier les livres, des émissions de télé, et tout cela nous est offert sur la plus grande plateforme de distribution de l'histoire de l'humanité — et les choses ne sont pas près de changer. Notre comité doit se demander quels droits s'appliquent et à qui appartiennent ces droits.
    C'est une situation délicate, car j'entend mes collègues du Parti conservateur — qui sont sur la bonne voie relativement à certains éléments de ce projet de loi — parler des droits du consommateur et des droits des entreprises qui peuvent verrouiller le contenu. Mais l'artiste lui-même ne peut verrouiller son contenu. Alors, on part du principe que les entreprises vont protéger leurs propres droits tout en sauvegardant ceux des consommateurs.
    Mais il faut s'interroger sur ce qu'il advient du revenu des artistes, de leur droit d'être rémunérés pour les copies que l'on fait de leurs oeuvres, ce qui a toujours été le principe fondamental du droit d'auteur.
    Croyez-vous que ce projet de loi porte atteinte à ce droit et à l'octroi de licences collectives?
    Oui, nous y voyons une attaque en règle contre tout le régime des licences collectives. Il limitera les sources de revenus déjà existantes pour les artistes, sans compter le fait qu'il ne leur offre aucune protection pour l'avenir.
    Si l'on était disposé à prendre des mesures pour pallier cette perte directe de revenus, seriez-vous prêt à accepter le reste de ce projet de loi malgré tous les problèmes que vous avez relevés? Est-ce que vous jugeriez suffisants les autres éléments du projet de loi si on réglait les problèmes liés aux redevances des artistes que l'on semble vouloir ici cibler dans le but de s'en accaparer?
    C'est une question très intéressante. Je crois que le projet de loi C-32 comporte suffisamment de lacunes pour qu'une solution globale soit nécessaire si on veut régler tous les problèmes. Ce n'est pas comme si uniquement quelques-unes des dispositions traitaient des droits des créateurs et des artistes; il en est question dans tout le projet de loi.
    Je vais demander à Stephen de vous en dire davantage.
    On vise bien des objectifs avec ce projet de loi. Les créateurs sont détroussés d'un important magot: 126 millions de dollars par année selon nos estimations. Et cela s'applique non seulement aux gens que nous représentons, les artistes canadiens, mais également aux enseignants, aux écrivains et, bien évidemment, aux éditeurs ainsi qu'aux auteurs-compositeurs. Tous les créateurs sont touchés; ce projet de loi ne va malheureusement épargner personne.
    Pour revenir à la question de la redevance visant la copie pour usage privé, la Commission du droit d'auteur a indiqué très clairement dans sa décision quels seraient les droits applicables et qu'est-ce qui serait autorisé. Estimez-vous que les attaques médiatiques des conservateurs à ce sujet sont fidèles à la réalité actuelle et à venir pour ce qui est du système de redevances?
    J'ai entendu ces publicités agressives où l'on parle d'une taxe de 75 $ sur les iPod. Comme nous le savons tous, il ne s'agit pas d'une taxe. Je répète que la seule taxe applicable sur les iPod est la TVH. Il est question ici d'une redevance. Ainsi, la personne qui achète un iPod — j'en ai moi-même un — devrait verser une contribution aux artistes dont elle va copier les oeuvres. Il s'agit vraiment d'un principe fort simple qui est appliqué depuis plusieurs années en Europe, en Amérique du Sud et ailleurs dans le monde.
    Ce n'est pas une taxe. On ne demande pas d'argent aux contribuables; on s'adresse aux gens qui achètent le produit en vue de faire des copies. C'est tout à fait logique. Je ne comprends pas pourquoi les conservateurs partent de l'idée qu'il s'agit d'une taxe et qu'elle est de 75 $. Ce n'est pas 75 $. Actuellement, la redevance se situe entre 2 $ et 25 $. Je ne comprends pas leur attitude.

  (1135)  

    Je m'intéresse à la question des films contrefaits. Vous avez parlé de la perte d'emplois. J'ai l'impression que l'on peut l'attribuer... Il y a des films piratés que l'on peut acheter au dépanneur et aucun service policier ne semble s'intéresser à la chose. On en retrouve partout sur la planète. Il n'y a pas un endroit où vous ne pouvez pas vous procurer de tels films. Il y a de toute évidence en l'espèce une infraction entraînant des pertes commerciales, ce qui ne devrait pas manquer d'intéresser les autorités.
    Il y a aussi des extraits, surtout d'émissions de télé, que les gens téléchargent. Nous avons vu les énormes dommages-intérêts qui s'appliquent aux États-Unis. Il va de soi qu'au sein du Nouveau Parti démocratique, nous nous méfions beaucoup de... En toute franchise, Sony, Universal et compagnie ont brouillé les cartes pour nous, car nous ne souhaitons pas voir des particuliers... Mais le problème des films contrefaits nous inquiète.
    Le troisième élément, c'est que les studios se font extorquer des bénéfices du fait que les copies piratées arrivent sur le marché avant les copies légitimes. Il y a deux ans, nous nous sommes penchés sur le problème des caméscopes. La semaine dernière, quelqu'un m'a remis une copie d'une superproduction qui n'était pas encore diffusée en format DVD. On m'a dit que ce serait bon que je vois cette copie, car elle était d'excellente qualité et qu'on y indiquait très clairement sur le tatouage numérique qu'il ne fallait pas la distribuer et qu'elle devait servir uniquement à des fins promotionnelles en vue d'une remise de prix.
    Il semble donc régner une attitude plutôt insouciante au sein même de l'industrie quant aux films contrefaits si je peux visionner à Ottawa ou Toronto une copie de film provenant d'Hollywood qui devait servir strictement à des fins de promotion en vue d'une des grandes cérémonies de remise de prix.
    Est-il question de sensibiliser les gens à l'intérieur même de l'industrie de la même façon que nous souhaitons sensibiliser les consommateurs? Il m'apparaît assez épouvantable que les films ainsi accessibles nous viennent directement de Hollywood.
    Nous sommes une organisation internationale et nous contribuons de très près aux efforts déployés aux États-Unis pour régler ces questions. J'estime un peu injuste de citer un exemple unique — que ce soit pour les Oscars ou peu importe — où une vidéo promotionnelle a été diffusée. L'industrie a littéralement dépensé des millions de dollars pour sensibiliser ses intervenants, appliquer ses règles et changer véritablement les choses.
    Il y a des possibilités qui s'offrent à nous. Nous pouvons changer les comportements. Vous avez fait référence aux modifications apportées au Code criminel. Le Canada était l'une des principales sources de caméscopie illégale de films avant l'entrée en vigueur de ces modifications. Depuis lors, nous ne sommes plus une source d'approvisionnement pour ces copies illégales. Cela montre bien que si nous prenons les mesures pertinentes, si votre comité fait bien son travail, nous pouvons changer les comportements.
    J'entends des gens dire que le problème est devenu trop gros, que peu importe ce que nous faisons, il est insurmontable. Je ne suis pas d'accord. Nous pouvons modifier les comportements. C'est une question de sensibilisation. Il faut que les gens sachent qu'il y a d'importantes conséquences.
    Mme Lavallée a posé des questions au sujet des dommages-intérêts préétablis. Nous estimons que ces dommages-intérêts devraient aussi viser ceux qui permettent les délits, les sites hôtes. C'est vraiment une des grandes sources de problème.
    Je vais vous le dire carrément, car je pense que mes collègues craignent de le faire: il est bien évident que ces gens devraient être incarcérés. Je ne pense pas que c'est ce que votre comité va recommander, mais pourquoi pas? Ce sont des voleurs.
    Merci.
    Nous allons devoir passer à M. Del Mastro pour une période de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous suis reconnaissant pour vos témoignages.
    Je crois que les Canadiens sont fondamentalement justes. S'il existe des lois, les Canadiens ne vont pas les enfreindre en volant. En général, les Canadiens ne contreviennent pas à la loi. La plupart d'entre eux s'y conforment, surtout lorsqu'elle est exprimée clairement et qu'ils comprennent les règles applicables sur le marché.
    Mais j'ajouterais que les Canadiens en ont maintenant ras-le-bol qu'on vienne sans cesse leur demander plus d'argent. En fait, ils sont vraiment exaspérés. Nous en avons eu un excellent exemple la semaine dernière avec la décision sur la facturation à l'utilisation touchant le CRTC. Je suis persuadé que tous les membres du comité ont reçu des dizaines, si ce n'est des centaines, voire davantage de courriels au sujet de cette décision. Les gens veulent qu'on arrête de puiser dans leurs poches; ils en ont assez. La frustration règne chez les Canadiens.
    Madame Downey, nous avons eu droit à toute une performance lors de votre exposé.
    Il y a une chose que j'aimerais bien savoir. Vous avez indiqué que la redevance visant la copie pour usage privé, ce que nous avons nous-mêmes appelé la taxe sur les iPod, ne s'appliquera pas aux automobiles. Je crois même que vous avez dressé une liste de quelques produits qui ne seraient pas touchés, malgré le fait que la nouvelle voiture de mon épouse est équipée d'un disque dur de 30 gigaoctets — et c'est peut-être même 60 — expressément conçu pour l'entreposage de musique. J'aimerais bien que vous nous disiez à quels appareils cette redevance devrait s'appliquer selon vous.

  (1140)  

    Comme vous l'ont dit les gens de la Société canadienne de perception de la copie privée (SCPCP) la semaine dernière ou la semaine précédente, peut-être même le mois dernier, lorsqu'ils ont présenté leur mémoire, on souhaite viser uniquement les appareils d'enregistrement audionumérique. Nous y allons progressivement, par petites étapes successives. Nous touchons uniquement pour l'instant les disques compacts enregistrables et les systèmes d'enregistrement audionumérique, et la SCPCP n'a pas demandé...
    Mais ne s'agit-il pas de technologies déjà obsolètes? Les gens utilisent maintenant des dispositifs multiplateformes. Si vous voulez cibler seulement les MP3, on recule en 2002. Est-ce vraiment le but que vous vous donnez, ou s'agit-il simplement d'un point d'entrée qui vous permettra de faire la transition vers tous les autres appareils qui permettent d'enregistrer de la musique à partir de plateformes multiples?
    Il faudrait éventuellement que ces mesures deviennent neutres du point de vue technologique, mais nous en sommes encore au point où il nous faut désigner des technologies...
    Alors si c'est neutre au plan technologique, vous dites que cela s'appliquerait à tous les appareils qui servent à emmagasiner de la musique.
    Je ne dis pas que c'est neutre au plan technologique actuellement, mais ne serait-ce pas un objectif idéal?
    C'est ce que vous aimeriez, une approche de neutralité technologique, dans laquelle une redevance numérique s'appliquerait à tous les appareils qui servent à emmagasiner de la musique.
    Nous nous en tenons aux lecteurs MP3, et ce prochain petit pas sera approprié à cette étape-ci.
    Mais ce n'est pas votre objectif ultime. C'est là où vous voulez commencer. Je comprends.
    M. Waddell, pour que ce soit clair, combien de fois les consommateurs devraient-ils payer pour la musique? Vous avez dit que les auteurs devraient être payés quand les gens veulent faire une copie. Si je suis les règles et que j'achète une chanson sur iTunes, j'achète une licence pour faire cinq copies, mais vous dites que je devrais aussi payer une redevance sur l'appareil sur lequel je veux la copier. Combien de fois devrais-je payer?
    Monsieur Del Mastro, en fait, quand vous achetez une chanson sur iTunes, vous ne pouvez la transférer qu'une seule fois.
    Mais je devrais payer plus d'une fois?
    Ce que nous disons, monsieur Del Mastro, c'est que les copies ont une valeur...
    Les copies ont une valeur.
    ... surtout dans l'environnement numérique, où on peut créer des copies parfaites.
    Mais si j'achète le droit de faire une copie, monsieur Waddell...
    Si vous achetez le droit de faire une copie, vous devriez payer pour ce droit; c'est tout ce que nous disons, monsieur Del Mastro.
    Et combien de fois devrais-je payer pour avoir le droit de faire une copie, si j'ai déjà payé pour ce droit?
    Vous devriez payer quand vous achetez l'appareil dans lequel vous placez cette copie.
    Si je vais sur le site iTunes pour acheter une chanson, en principe, je le fais parce que je veux en faire une copie. Mais vous dites que je devrais payer quand je l'achète sur iTunes et que je devrais la payer en plus de l'appareil que je veux acheter.
    C'est exact.
    C'est exact. Donc, je devrais payer au moins deux fois et peut-être plus, parce que...
    Vous devriez payer un petit montant, monsieur Del Mastro, pour avoir le droit de faire la copie sur ce lecteur MP3.
    Et vous n'arrivez pas à comprendre pourquoi les Canadiens qui en ont assez qu'on leur soutire encore et encore de l'argent pensent que ce n'est pas raisonnable?
    Monsieur Del Mastro, vous parlez pour votre circonscription, et nous parlons pour la nôtre.
    Eh bien, je dirais que vous ne parlez pas pour un très grand nombre de Canadiens, qui sont prêts à payer un juste prix...
    Ce n'est pas ce qu'on nous a dit, monsieur Del Mastro.
    ... mais ne sont pas prêts à voir chaque appareil...
    Le comité a reçu des témoignages, avec des sondages, et...
    Monsieur Waddell, vous avez eu l'occasion de faire votre exposé. Maintenant, c'est mon temps de parole.
    Monsieur Del Mastro, la parole est à vous.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Waddell, je dirais que la plupart des Canadiens sont en mesure de comprendre ce qui est raisonnable; s'ils achètent une chanson sur iTunes et qu'ils veulent la mettre sur quelque appareil que ce soit... Et il y a diverses plateformes d'appareils qui servent à emmagasiner de la musique; votre objectif ultime n'est certainement pas de la mettre uniquement sur des lecteurs MP3. Certainement pas.
    En fait, je dirais que c'est presque tricher que de dire qu'on veut seulement cela, alors qu'on va ensuite la transférer dans un appareil qui utilise une technologie plus avancée. Autrement, c'est complètement inefficace. Personne n'achètera de lecteurs MP3; c'est une technologie dépassée, comme les cassettes huit pistes. Les gens sont passés à autre chose; ce sera donc complètement inefficace.
    Le projet de loi est tout à fait neutre au plan technologique. En fait, il n'aborde même pas la question de la redevance pour copie privée, pas du tout.
    J'aimerais aussi savoir ceci. Vous avez dit que l'expansion de l'utilisation équitable a un impact négatif sur les revenus. Pouvez-vous m'expliquer sur quels revenus l'expansion de l'utilisation équitable a un impact négatif, et pourquoi?

  (1145)  

    Puis-je parler, maintenant?
    Monsieur Waddell.
    Merci.
    L'utilisation équitable d'une oeuvre aux fins d'éducation élimine 41,1 millions de dollars, monsieur Del Mastro.
    Pourquoi?
    Parce que cela donne la possibilité aux utilisateurs de créer d'autres copies...
    Non.
    ... sans indemniser les auteurs de ce matériel et les éditeurs.
    La Cour suprême a établi que la reproduction pouvait être considérée comme une utilisation équitable des oeuvres, n'est-ce pas?
    Oui, à certaines fins.
    Non. En fait, ce que la cour a conclu, c'est que de reproduire un document au complet n'était pas une utilisation équitable. Ce que vous dites n'est pas tout à fait exact. Vous avez dit que 41,1 millions de dollars seraient éliminés parce que vous ne comprenez pas ce qu'est l'utilisation équitable et vous interprétez mal ce que la Cour suprême du Canada a établi — ou, honnêtement, ce que le critère à trois volets de la Convention de Berne a établi. Ce n'est pas vrai, n'est-ce pas?
     Très bien. Merci, monsieur Del Mastro.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions de cinq minutes.
    Monsieur Rodriguez.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci à tous d'être ici. J'espère que vous passez une belle journée.
    Nous ne vous inviterons pas, vous deux, à la même fête de Noël, c'est certain.
    Vous avez mentionné qu'il s'agissait d'une attaque contre les licences collectives. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Et vous avez indiqué que 126 millions de dollars risquaient d'être perdus. Pourriez-vous nous donner plus de détails sur ce montant?
    Merci, monsieur Rodriguez.
    L'utilisation équitable aux fins d'éducation, dont il est question à l'article 29, représente 41,4 millions de dollars; la prestation d'oeuvres cinématographiques par les établissements d'enseignement coûterait aux détenteurs de droits 25 millions de dollars; le non-élargissement du régime de copie pour usage privé aux appareils numériques vient chercher 30 millions de dollars dans les poches des interprètes et des détenteurs de droits; les enregistrements éphémères, à l'article 30.9 — le tarif d'émission radio publicitaire — enlèvent 21,2 millions de dollars; et les services de reproduction mécanique à des fins de diffusion, de télévision et autres représentent 8,6 millions de dollars, pour un total de 126,2 millions.
    Très bien. Je vous remercie de cet éclaircissement.

[Français]

    Vous avez évoqué une inquiétude à l'égard du milieu de l'éducation, et nous partageons cette inquiétude.
    Selon vous, quel impact aurait l'ajout du terme « éducation » sur nos écrivains, nos maisons d'édition et nos créateurs? De quelle façon seraient-ils touchés par l'intégration du mot « éducation » dans le fair dealing?

[Traduction]

    Définissez l'éducation. Tout peut être de l'éducation. Le fait d'être assis ici est certainement de l'éducation.
    Le problème, avec l'élargissement du concept d'utilisation équitable pour inclure l'éducation, c'est que malheureusement, c'est un concept qui n'est tout simplement pas assez précis. Nous voudrions certainement qu'il soit encadré ou qu'une formulation plus prescriptive que la définition simple et générale...
    Définissons l'éducation.
    Qu'est-ce que l'éducation pour vous? Comment devrait-on...
    Je ne sais pas. On peut la définir de tant de façons. Nous voudrions être précis...
    Mais pour vous, que devrait...? Serait-ce limité aux universités et aux collèges, par exemple? Avez-vous une idée de ce que devrait être...
    Comme nous le disons, le problème, c'est que ce n'est pas défini. Regarder un film peut être un exercice pédagogique.
    On devrait limiter cela à des recherches précises plutôt que de permettre une utilisation libre à des fins « pédagogiques ».
    D'accord. Vous recommanderiez donc de retirer le mot « éducation ».
    C'est exact.
    Si nous ne choisissons pas cette option, pourquoi ne ferions-nous pas deux choses? D'abord, nous pourrions donner une définition aussi précise que possible de l'éducation, puis introduire un critère qui limiterait l'impact de cet article.
    Cela semble être une approche raisonnable, monsieur Rodriguez.
    D'accord. Merci.
    Je crois que c'est vous, monsieur Lewis, qui avez dit, en ce qui a trait aux FSI, que des règles refuge devraient être établies. Je pense que c'est vous qui avez dit cela, n'est-ce pas?
    Comment pouvons-nous le faire?

  (1150)  

    Le projet de loi, dans sa forme actuelle, prévoit une règle refuge trop générale pour ce qui semble être d'inoffensifs sites d'hébergement, qui peuvent avoir été conçus à d'autres fins que la violation du droit d'auteur. Le libellé actuel limite la responsabilité lorsque les sites sont créés précisément à cette fin. Ils peuvent être conçus pour cela, mais il est difficile de le prouver.
    Ensuite, ils peuvent être modifiés pour une foule d'autres usages répréhensibles. Il est donc nécessaire de modifier le projet de loi en ce qui concerne les sites d'hébergement — et ils prolifèrent.
    Compte tenu de l'évolution de la technologie... Chaque fois qu'on m'en parle, je trouve difficile de toujours être au courant des changements technologiques; nous devons toujours demeurer très vigilants. C'est l'un des secteurs dans lesquels des mesures doivent être prises, selon nous. Si nous ne nous occupons pas des sites d'hébergement, l'exercice n'aura pas été valable.
    Merci beaucoup.
    Nous allons donner la parole à M. Cardin, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame, messieurs, bonjour et bienvenue.
    Avant de commencer, j'ai une chose à faire. La semaine dernière, je n'ai pas eu le temps de finir de poser mes questions et de donner mes éléments de réponse.
    Des témoins ont avancé qu'il y avait des pertes potentielles de 21 millions de dollars sur l'enregistrement éphémère. Je voudrais éclairer les gens du Parti conservateur qui ont insisté fortement pour savoir d'où venait ce nombre. Je vais maintenant leur dire que ça venait d'une déclaration écrite de la Commission du droit d'auteur du Canada. C'est un organisme qu'on pourrait qualifier de crédible. C'est de là que ça venait, monsieur Del Mastro. Par contre, le gouvernement semble n'avoir jamais fait de calcul précis sur l'impact que ça pourrait avoir sur les créateurs.
    Nous avons aussi reçu, la semaine dernière, des témoins de la Chambre de commerce du Canada. Monsieur Webster a dit que les droits d'auteur servaient à récompenser les créateurs. Il n'avait même pas pensé que c'était leur rémunération et leur salaire pour leur travail, leur génie et leur sens de la création. Il a dit que c'était une récompense.
    Il y a peu de temps, on a évalué à 74 millions de dollars la somme en droits d'auteur qui pourrait être perdue de différentes façons. Certains nous disent aujourd'hui qu'elle pourrait même s'élever à 126 millions de dollars. Si M. Webster de la Chambre de commerce du Canada considère les droits d'auteur comme une récompense, comment considère-t-il un projet de loi qui ampute 126 millions de dollars en revenus de droits d'auteur aux créateurs? Comment considère-t-il cette façon d'agir de la part du gouvernement?
    Qu'ont fait les créateurs au gouvernement pour mériter, non pas une récompense, mais des réprimandes et des baisses de revenu?

[Traduction]

    Nous ne savons pas ce qu'ont fait les auteurs pour subir une telle perte de rémunération. Nous essayons toujours d'expliquer avec soin que les artistes canadiens sont très peu rémunérés, mais que leur oeuvre a de la valeur et que les copies de leur oeuvre en ont également. C'est tout ce que nous avons: nos créations et nos produits.
    La perte actuelle de revenu est déjà difficile, et c'est sans parler des bénéfices que nous pourrions retirer de l'expansion des plateformes numériques de distribution. Cela devrait vraiment être plus... On devrait accorder une compensation pour l'oeuvre et pour sa distribution.

[Français]

    Étant donné qu'il s'agit de la Loi sur le droit d'auteur, normalement, on aurait dû s'attendre à ce qu'il y ait non pas des diminutions mais une protection. Ça aurait garanti ce qui est déjà acquis. Potentiellement, ça aurait pu favoriser le développement et suffisamment de création pour suffire aux autres intervenants qui en profitent, comme les diffuseurs.
    Les membres de l'Alliance internationale des employés de scène, de théâtre et de cinéma reçoivent-ils directement des redevances?

  (1155)  

[Traduction]

    Ce que j'ai entendu, c'est que nos membres ne reçoivent pas directement de paiements, et je présume que vous parlez des redevances. Non, la rémunération pour la plupart est inférieure... une équipe, soit les membres que nous représentons, reçoit une rémunération horaire pour les heures travaillées. Nous n'avons pas de paiements additionnels découlant de la vente ou de l'exposition d'un produit.
    C'est pourquoi, bien honnêtement, cette question n'est pas la nôtre. Nous n'avons pas vraiment adopté de position à ce sujet, et comme nous le voyons encore aujourd'hui, la discussion porte surtout sur cette question, qui est très sérieuse et très importante pour mes amis; or, elle ne l'est pas pour moi.
    Par contre, le bien-être de l'ensemble de l'industrie l'est. Ce sont les emplois de mes membres qui sont en jeu. On m'a parlé d'un montant de 130 millions de dollars. C'est beaucoup. C'est aussi le coût du tournage d'un film à Montréal, actuellement. C'est ce type d'impact que subit l'industrie. L'industrie et les emplois en souffrent.
    Merci beaucoup.
    Nous allons donner la parole à M. Lake, pour cinq minutes.
    Monsieur Lewis, pourriez-vous nous en parler un peu plus en détail? Nous avons tendance à nous enliser dans les détails de ce que les gens n'aiment pas au sujet du projet de loi, car c'est généralement ce dont les gens veulent parler lorsqu'ils viennent témoigner. Puisque le comité entend divers points de vue sur ce qu'il faut changer ou non, j'aimerais savoir quels éléments du projet de loi il faut absolument protéger, selon vous.
    Pourquoi ce projet de loi est-il si important? À quel point est-il important d'adopter ce projet de loi, puisque compte tenu du contexte de gouvernement minoritaire, nous ignorons si nous pourrons en terminer l'étude? Au rythme actuel, nous n'allons certainement pas y arriver.
    Quelle est l'importance de ce projet de loi pour vos membres?
    Il est d'une importance cruciale. Il est intéressant de constater le changement d'attitudes. Tous les trois ans, j'assiste à une conférence mondiale avec les représentants de syndicats qui travaillent dans l'industrie cinématographique partout dans le monde. Il y a quatre ans, on n'en parlait nulle part. L'AI considérait cela comme un problème sérieux.
    J'ai assisté en novembre à l'une de ces conférences, et tout le monde en parle en Europe, en Asie et en Afrique. Cela n'a pas seulement des conséquences au Canada, mais partout ailleurs, et nous prenons du retard. Vous en êtes conscients. Il nous faut agir et aller de l'avant. Cela a un impact sur les emplois.
    Nous n'avons pas tenté d'indiquer le nombre d'emplois perdus, car tout le monde essaie alors d'en déterminer le nombre pour l'industrie. Mais il y a des pertes importantes, pas seulement pour le service extérieur et les grands studios, mais aussi pour l'industrie nationale, dans laquelle le financement est très précaire et les producteurs font des pieds et des mains pour obtenir un spectacle. Si vous amputez le flux de rentrées d'un élément... c'est une partie intégrante du financement, et des spectacles sont annulés à cause de cela.
    Merci.
    Monsieur Waddell, c'est intéressant, car je suis amateur de musique, de films et de télévision, mais vos propos m'ont amené à ressentir de la culpabilité. J'aime à penser que je suis un client des gens que vous représentez, mais vous venez ici et me critiquez parce que je pourrais vouloir écouter l'une des chansons que j'ai achetées sur mon appareil iPod. Je ne comprends pas.
    Ma conjointe possède un iPhone; elle achète donc les chansons directement. Elle en entend une à la radio, elle se dit qu'elle veut l'acheter et paie 1,29 $ pour l'acheter directement de son iPhone. Vous dites que ce n'est pas suffisant et vous voulez une partie du iPhone sur lequel elle écoutera sa chanson. Je ne comprends pas.
    Soit dit en passant, c'est la Commission du droit d'auteur qui a proposé une redevance de 75 $. Je tenais à le préciser. Ce n'est pas un chiffre inventé. C'est une proposition de la Commission du droit d'auteur. 
    Mais comment justifiez-vous cela? Je ne comprends pas.
    Je vous remercie de la question, monsieur Lake.
    Et non, je ne suis pas ici pour vous critiquer. J'essaie simplement de bien vous faire comprendre ce que nous voulons. Nous voulons faire en sorte que les créateurs soient payés pour leurs droits de propriété intellectuelle, tout comme la société Microsoft l'est quand elle vend des licences d'utilisation de logiciel. Si on utilise un logiciel de Microsoft sur plusieurs appareils, on doit payer plusieurs licences. C'est le principe, et c'est tout ce que nous demandons pour les créateurs.
    Nous parlons d'une modeste somme d'argent, monsieur Lake. Oui, c'est 75 $. Je suis un négociateur et au départ, je vise toujours haut en espérant trouver un compromis acceptable pour toutes les parties.

  (1200)  

    D'accord.
    Maintenant, j'aimerais que nous passions à autre chose, même si je sais qu'il y a là matière à discussion. À propos du régime d'avis successifs, vous avez parlé à plusieurs reprises de « ceux qui commettent des violations ». Mais toute la question est de savoir si les personnes incriminées ont effectivement commis une infraction. Vous supposez ou affirmez que c'est le cas. Mais le propre du régime d'avis successifs, c'est qu'on n'émette un avis que si on croit qu'il y a eu infraction, en guise d'avertissement — bien sûr, il est dans l'ordre des choses que le FSI conserve des renseignements signalétiques, par exemple.
    On ne coupe pas le gaz chez quelqu'un simplement parce que quelqu'un d'autre a dit que cette personne avait enfreint une règle ou quelque chose du genre. Il faut prouver que la personne visée n'a pas payé ses factures avant de lui couper le gaz, n'est-ce pas?
    Je ne crois pas. Je pense que la compagnie de gaz coupera tout simplement l'alimentation.
    Mais elle devra d'abord prouver que la personne a bel et bien...
    Oui.
    Elle pourrait faire face à de sérieux problèmes si elle coupait le gaz chez des gens sans avoir démontré préalablement qu'ils ont...
    Évidemment, il faut que la situation dure un, deux ou trois mois. Ensuite, on envoie des avis et enfin, on dépêche quelqu'un sur place. Au bout du compte, il se peut que le gaz soit coupé.
    Ce n'est pas parce que vous dites que quelqu'un a commis une infraction que c'est véritablement le cas.
    Merci à notre groupe d'experts. Merci aussi aux membres du comité.
    Nous allons faire une courte pause puis entendre les témoins de notre second groupe de spécialistes.

  (1200)  


  (1205)  

    Je déclare ouverte cette 11e séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-32.
    Notre deuxième groupe d'experts compte un grand nombre de témoins représentant trois groupes différents. Nous recevons Patricia Feheley, Johanna Robinson et Miriam Shiell, de l'Association des marchands d'art du Canada; nous accueillons également April Britski et Anthony Urquhart, du Front des artistes canadiens; et enfin, Christian Bédard et Nadia Myre, du Regroupement des artistes en arts visuels du Québec.
    Nous allons entendre en premier les représentants de l'Association des marchands d'art du Canada. La parole est à vous; vous disposez de cinq minutes.
    Bonjour. Je m'appelle Patricia Feheley; mes collègues et moi représentons l'Association des marchands d'art du Canada. Pour commencer, nous tenons à remercier le président et les membres du comité de nous avoir invitées à comparaître aujourd'hui.
    L'Association des marchands d'art du Canada, ou AMAC, est la seule association nationale représentant les marchands d'art professionnels et les galeries commerciales. Nous sommes le principal moteur de développement du marché de l'art. Je comparais aujourd'hui accompagnée de deux de mes collègues de l'AMAC: Johanna Robinson, qui est directrice générale de l'association; et Miriam Shiell, présidente sortante et marchande confirmée sur les marchés d'art canadiens et internationaux. Je possède une galerie commerciale qui se spécialise dans l'art inuit contemporain et les oeuvres de quelques artistes autochtones triés sur le volet.
    Le marché de l'art au Canada est de plus en plus fragilisé. Les dépenses de consommation en art au Canada ont plongé de 20,3 p. 100 entre 2000 et 2008. Les exportations d'oeuvres d'art, qui sont essentielles au maintien de la vitalité du marché de l'art canadien pour nos artistes, ont reculé de plus de 25 p. 100 au cours de la même période. Le revenu moyen d'un artiste est dérisoire.
    Nous n'avons pas préparé de mémoire en bonne et due forme au sujet du projet de loi C-32, parce que nous sommes contre la majorité des dispositions qu'il contient, et aussi parce que nos collègues d'autres sous-secteurs culturels sont mieux placés que nous pour en parler. La plupart des dispositions du projet de loi C-32 nous confortent dans notre opinion selon laquelle il est crucial que tous les créateurs conservent non seulement le contrôle sur leurs oeuvres, mais aussi des droits sur tous les revenus qui en découlent.
    Nous sommes particulièrement favorables à une révision de la Loi sur le droit d'auteur tous les cinq ans. En fait, nous avons accepté de comparaître devant vous aujourd'hui simplement parce que nous avons été informés de l'effort concerté pour inclure, dans le projet de loi C-32, une disposition relative au droit de suite, qui permettrait à certains artistes de se partager le produit des ventes de leurs oeuvres sur le marché secondaire. Pour les fins du compte rendu, je ferai désormais référence à cette disposition comme étant le DDS.
    La position que nous défendons est simple: il est prématuré et il serait irresponsable d'inclure ce droit dans le projet de loi C-32 à ce stade-ci. Il y a beaucoup d'aspects négatifs à considérer. Il s'agit d'une question extrêmement complexe qui pourrait avoir des répercussions sur le marché de l'art dans ce pays. Ces répercussions sont assez graves pour mériter qu'on y réfléchisse sérieusement, qu'on pousse plus loin la recherche et qu'on mène des consultations, ce qui prend du temps. À notre avis, si nous ajoutons la disposition relative au DDS dans le projet de loi C-32, nous ne disposerons pas du temps nécessaire pour faire ce travail, et il sera trop tard.
    N'oubliez pas que nous sommes les professionnels les plus étroitement liés aux marchés locaux et internationaux de l'art. Pourtant, ni l'AMAC, ni les maisons de ventes aux enchères, qui pèsent également très lourd sur le marché, n'ont été consultées sur cette question. Regardez quels pays ont adopté le DDS. Les États-Unis, à l'exception de la Californie, ne l'appliquent pas encore, pas plus que les pays d'Asie. Le premier pays est le plus gros acheteur d'art contemporain canadien; et les seconds sont considérés comme les acheteurs affichant la plus forte croissance sur le marché canadien.
    Une part considérable du marché de l'art européen s'est déplacée vers la Suisse, qui est un centre d'art européen majeur. La Suisse ne reconnaît pas ce droit. En Europe, la conception et la mise en oeuvre du DDS posent des problèmes fondamentaux. Des plaintes ont été déposées par les marchands et les artistes. Une immense part des marchés d'art européens s'est déplacée vers la Suisse et même vers New York.
    Comme nous le révèle l'expérience européenne, le DDS devra le plus souvent être absorbé par les marchands. Normalement, les commissions pour des ventes sur le marché secondaire varient entre 10 et 20 p. 100, car nous devons être compétitifs par rapport aux taux de commissions applicables aux ventes aux enchères. Rajouter 5 p. 100 serait considérable, et il faudrait inclure le montant dans le prix de revente, ce qui aurait pour effet de le faire augmenter. Au bout du compte, ce sont les clients qui paieraient la différence. Alors que le marché de l'art est déjà fragile, l'ajout de cette taxe de 5 p. 100 au prix de l'oeuvre à vendre pourrait grandement dissuader les collectionneurs, surtout, comme cela arrive fréquemment, si l'oeuvre devait être vendue à perte.
    Nous estimons qu'une bonne partie des ventes sur le marché de l'art secondaire se ferait dans la clandestinité ou à l'étranger, ce qui nuirait à la bonne réputation dont jouissent les artistes sur ce marché.

  (1210)  

    Il convient également d'examiner la question des coûts. Autant les petites entreprises que le gouvernement devront s'assurer que cette disposition sera correctement mise en oeuvre et suivie — par exemple, il faudra veiller à ce qu'elle soit respectée lorsque une oeuvre sortira du marché habituel, comme c'est le cas avec les ventes sur eBay. Revenu Canada devra aussi tenir compte du DDS pour les déductions et les dons.
    Plus important encore, les ventes sur le marché secondaire qui seraient visées par le DDS ne représentent qu'une très petite partie du marché total de l'art au Canada. De ce fait, les avantages ne profiteraient qu'à un nombre limité d'artistes.
    D'après une récente étude sur le DDS réalisée en Grande-Bretagne, les 10 artistes les plus renommés se partagent 80 p. 100 du montant total collecté.
    En France, 70 p. 100 de ce montant est concentré entre les mains de sept artistes et leur famille.
    Très bien, je vous remercie beaucoup. Nous allons devoir conclure.
    Peut-être pourrez-vous le faire pendant la période consacrée aux questions.

  (1215)  

    Je vous remercie énormément.
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre les représentants du Front des artistes canadiens.
    Je m'appelle April Britski et je suis directrice nationale du CARFAC. Je suis accompagnée de Tony Urquhart, un artiste en arts visuels de Colborne, en Ontario.
    Le Front des artistes canadiens, ou CARFAC, est l'association nationale représentant les artistes professionnels en arts visuels, qui sont environ 17 000 au Canada.
    Nous vous remercions de l'occasion que vous nous donnez de comparaître devant vous aujourd'hui pour parler du droit d'auteur et de la manière dont il s'applique aux artistes en arts visuels.
    Certains aspects du projet de loi proposé nous conviennent, incluant les nouveaux droits accordés aux photographes, aux portraitistes et aux graveurs. Mais nous avons quelques réserves à l'égard de certains amendements dont nos collègues du Regroupement des artistes en arts visuels du Québec vous parleront plus en détail.
    Je vais me concentrer sur un amendement que les artistes aimeraient voir ajouter au projet de loi; je veux parler du droit de suite.
    Le droit de suite vise à accorder aux artistes visuels une portion du produit de la revente de leurs oeuvres réalisé par les maisons de vente aux enchères ou les galeries commerciales.
    Bien souvent, une oeuvre n'est pas vendue à sa pleine valeur la première fois. Des artistes voient souvent le prix de leurs oeuvres augmenter à mesure qu'ils se taillent une réputation sur le marché. À titre d'exemple, M. Urquhart, auteur du tableau The Earth Returns to Life, avait obtenu environ 250 $, en 1958, pour son oeuvre, et l'hôtel des ventes Heffel Fine Arts l'a revendue, en 2009, pour la somme de 10 000 $.
    Instaurer un droit de revente permettrait aux artistes en arts visuels d'avoir une source de revenus supplémentaire. C'est important, car la moitié de ces artistes gagnent moins de 8 000 $ par année, au Canada; le revenu moyen étant de 14 000 $. Les artistes réputés, dont les oeuvres sont les plus susceptibles de se retrouver sur le marché secondaire, ont un revenu médian de 5 000 $. Même ceux qui ont remporté des prix ont du mal ou n'arrivent carrément pas à vivre de leur art.
    Par ailleurs, bon nombre d'artistes autochtones, en particulier ceux vivant dans des localités isolées du Nord, ne touchent presque rien des énormes bénéfices que rapportent leurs oeuvres sur le marché secondaire, où les marges brutes sont très élevées.
    Les artistes canadiens ne touchent rien des redevances tirées de la vente de leurs oeuvres au pays, mais aussi à l'étranger. Une fois le droit de suite établi au Canada, les artistes bénéficieraient des accords de réciprocité conclus avec d'autres pays. Le Canada se mettrait ainsi en conformité avec ses partenaires commerciaux dans ces pays. La France a été la première, en 1920, à fixer ce droit dans une loi. Depuis, 59 pays, dont tous les membres de l'Union européenne et l'Australie, lui ont emboîté le pas. Notre proposition se fonde sur l'expérience tirée de la façon dont ce droit est appliqué ailleurs dans le monde.
    Le marché canadien est en expansion et les ventes aux enchères battent de nouveaux records chaque année. En novembre dernier, la vente d'une oeuvre d'Alex Colville, intitulée Man on Venrandah, a atteint le prix record de 1 287 000 $, ce qui est un prix inégalé pour la vente d'une oeuvre d'un artiste canadien vivant.
    Ce soir-là, 12 autres records personnels ont été battus. La grande majorité des oeuvres d'art est partie à des prix beaucoup plus bas, mais si le droit de suite était applicable, des artistes de renommée, comme Rita Letendre, auraient perçu des redevances de 790 $, et un jeune artiste nouvellement établi, comme Kent Monkman, aurait touché 4 400 $.
    Ces montants dérisoires ne feront certainement pas s'effondrer un marché qui draine des millions de dollars, mais ils n'en demeurent pas moins significatifs. Même si le marché est en croissance, actuellement, les artistes ne tirent aucun bénéfice de ces ventes. Il est important de se rappeler qu'il s'agit d'une redevance fondée entièrement sur les ventes commerciales des oeuvres d'artistes et que cela ne coûterait rien au gouvernement.
    La propriété et la durée du droit d'auteur sont plus complexes que pour la plupart des biens, comme les maisons ou les voitures. Les artistes conservent leur droit d'auteur quand ils vendent une oeuvre, à moins qu'ils décident de céder ce droit à quelqu'un d'autre. Dans le domaine des arts visuels, on parle de propriété intellectuelle et non d'un bien matériel. D'autres artistes, comme les écrivains et les compositeurs, conservent le droit de tirer un avantage financier de l'utilisation subséquente de leurs oeuvres.
    Le droit de suite permet de reconnaître que l'artiste joue un rôle important dans la valeur de son oeuvre, et que sans artistes, il n'y a pas d'oeuvres d'art.
    Merci.
    Je vous remercie beaucoup.
    La parole est maintenant au Regroupement des artistes en arts visuels du Québec.

[Français]

    Je remercie beaucoup les membres du comité de nous recevoir et de nous entendre. Je suis Christian Bédard, directeur général du Regroupement des artistes en arts visuels du Québec. Nous représentons plus de 3 000 artistes en arts visuels.
    Je suis accompagné de Mme Nadia Myre, une artiste des Premières Nations très connue au Québec. Elle a exposé au Québec, à travers le Canada et à l'étranger.
    Tout comme CARFAC, nous demandons l'inclusion, dans la Loi sur le droit d'auteur, du droit de suite sur la revente des oeuvres d'art. J'aimerais vous citer un exemple qui nous vient du Québec. Une oeuvre de Marcel Barbeau a été pratiquement donnée, dans les années 1950. Elle a été revendue en 2008, par l'héritier de la personne à qui il l'avait donnée, pour 86 000 $. Le taux de redevance de 5 p. 100 l'aurait aidé. Ce monsieur a maintenant plus de 85 ans. Il est malade et il a besoin de tous les revenus qu'il peut obtenir.
    De plus, le RAAV désire souligner d'autres aspects du projet de loi C-32 qui ne le satisfont pas. Cela touche directement les artistes en arts visuels du Québec et du Canada. Ces artistes sont en majorité des travailleurs autonomes qui désirent assurer leur indépendance financière par leur travail de création. Le gouvernement fédéral ne devrait pas miner leur capacité de le faire.
    Depuis la reconnaissance du droit d'exposition dans la Loi sur le droit d'auteur, en 1988, de nombreux artistes en arts visuels ont vu leurs revenus augmenter sensiblement. Malheureusement, la mention d'une date limite dans la loi, celle du 8 juin 1988, fait en sorte que toutes les oeuvres produites avant cette date ne sont pas couvertes par le droit d'exposition. Cela constitue, selon nous, une forme de discrimination qui affecte surtout les artistes plus âgés. C'est pourquoi nous demandons respectueusement aux membres de ce comité de faire cesser la discrimination envers les artistes plus âgés, en enlevant de la Loi sur le droit d'auteur les mots « créée après le 7 juin 1988 ».
    Le RAAV salue l'intention du gouvernement de reconnaître les droits d'auteur des photographes, graveurs et portraitistes. Toutefois, l'article 38 du projet de loi réduit la capacité de ces artistes d'être rémunérés équitablement pour l'utilisation de leurs oeuvres. C'est pourquoi nous prions le comité de retirer l'article 38 du projet de loi C-32, afin de permettre aux photographes, portraitistes et dessinateurs de bénéficier équitablement des fruits de leur travail.
    Finalement, aucun autre article du projet de loi C-32 ne sera aussi potentiellement dommageable pour les artistes en arts visuels du Québec et du Canada que l'inclusion de l'éducation parmi la liste des utilisations équitables. L'exception éducationnelle sera une source permanente de contestations légales entre les artistes et tous les organismes et individus qui prétendront faire oeuvre d'éducation. Les artistes n'ont pas les moyens de dépenser des fortunes en frais légaux.
    Pour le domaine des arts visuels, ce sont tous les revenus provenant de la présentation en classe de leurs oeuvres qui seront mis en danger, comme les reproductions dans les manuels scolaires qui ne seraient plus rémunérées. Notre plus grande crainte est que les musées et centres d'exposition subventionnés prétendent être couverts par cette exception, étant donné qu'une partie de leur mission est d'ordre éducationnel. Ces institutions sont les principales sources de revenus de droit d'auteur pour les artistes en arts visuels. Parce que nous ne pouvons pas deviner ce qu'un juge estimera équitable dans notre domaine artistique, il est fort possible que la principale source de revenus des droits d'auteur pour les artistes en arts visuels se tarisse définitivement. C'en serait alors fini du droit d'exposition que nous avons mis tant d'années à faire reconnaître.
    Avec plus de 90 autres organismes culturels qui ont signé la déclaration commune des industries culturelles canadiennes, nous demandons, par conséquent, le retrait de cet article du projet de loi. Ces demandes peuvent vous paraître accessoires, mais elles représentent beaucoup pour les artistes en arts visuels. Il est important pour ces artistes que l'État canadien ne nuise pas à leurs efforts quotidiens pour atteindre l'indépendance financière.
    J'arrête ici mon intervention, afin que nous puissions discuter de ces recommandations.

  (1220)  

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer à la période de questions et réponses.
    Monsieur Rodriguez, vous disposez de sept minutes.
    Soyez les bienvenus.

[Français]

    Bonjour et bienvenue.
    En ce qui a trait à la question de droit de suite, laissons faire les considérations techniques et législatives en lien avec la loi. Si on considère la question de façon plus humaine et plus logique, il me semble qu'il est un peu normal que des gens qui ont créé quelque chose puissent, lorsque leur oeuvre est revendue, avoir ne serait-ce qu'un petit retour sur le prix de vente. J'ai constaté plusieurs exemples de toiles vendues à des prix très élevés sans que l'artiste ne touche quoi que ce soit, alors même que ce dernier et les membres de sa famille vivaient dans une grande pauvreté. Pendant ce temps, lors d'un encan, des gens discutaient afin de savoir qui paierait le prix plus le plus élevé, le prix fort, pour une oeuvre d'art.
    Je comprends vos inquiétudes, mais il me semble que le système fonctionne dans 59 pays; je ne crois pas que les marchés se soient effondrés. Il s'agit d'un défi pour vous, mais je ne pense pas que cela fasse en sorte que le marché s'effondre.
    J'aimerais connaître votre réaction à leur commentaire lorsqu'ils disent qu'en Europe ou dans certains pays, 10 p. 100 des principaux artistes en arts visuels récoltent 80 p. 100 des revenus. Si on inclut cette mesure dans le projet de loi, est-on en train de créer quelque chose pour des gens très connus et très riches? Cet élément pourrait-il plutôt aider beaucoup plus de gens que cela?

  (1225)  

[Traduction]

    Si vous souhaitez le faire maintenant, allez-y.
    La réponse est oui, et l'expérience nous montre — si on se fie aux plus récentes données venant de Grande-Bretagne, où on a adopté récemment le DDS — que 80 p. 100 des fonds collectés vont à 10 p. 100 d'artistes, dont la plupart sont de grandes vedettes sur le marché de l'art. Il n'existe donc pas de preuves réelles que cela va aider l'artiste moyen. Les montants que reçoivent les artistes, une fois toutes les dépenses payées — lesquelles sont d'ailleurs considérables — , sont dérisoires.
    C'est donc une solution symbolique. Il s'agit d'une excuse pour faire d'autres changements réels sur la façon dont les artistes reçoivent...
    Pour que les artistes puissent vivre de leur art, il faut que le marché de l'art soit prospère. Les quelques exemples de monstres sacrés vendant leurs oeuvres aux enchères ne reflètent pas la réalité du marché de l'art.
    Mais je crois que vous ne voyez pas les choses de cette façon. Avez-vous un commentaire?
    Pour autant que je sache, lorsque la loi a été adoptée au Royaume-Uni, on avait établi à environ 1 000 livres le prix de vente minimal admissible pour le droit de revente. C'était en réalité une recommandation pour permettre à davantage d'artistes qui n'ont pas la réputation de Damien Hirsts sur le marché de toucher plus de redevances.
    Prenons l'exemple d'une vente qui a été réalisée au Canada, en novembre dernier, par la maison de vente aux enchères Heffel; une vente au cours de laquelle, comme je vous l'ai mentionné, une oeuvre d'art s'est vendue à 1,3 million de dollars, mais la majorité des redevances tirées de la revente auxquelles auraient eu droit les artistes participant à cette vente aux enchères auraient été très inférieures. Il y avait environ 13 artistes à cette vente, pour lesquels les redevances auraient oscillé entre 350 $ et 4 400 $. Par conséquent, la majorité des artistes ayant participé à cette vente aux enchères n'étaient pas de grandes vedettes du monde de l'art et n'auraient pas touché de redevances très juteuses.
    Non, attendez une seconde.

[Français]

    Si j'ai bien compris, monsieur Bédard, il y a également un droit de réciprocité. Tant et aussi longtemps que le Canada n'offre pas le droit de suite, nos artistes visuels qui travaillent ailleurs, par exemple en Europe, dans des pays qui l'offrent, ne peuvent pas recevoir de redevances liées à ce même droit de suite. Est-ce exact? C'est uniquement si on l'a nous-mêmes, si on applique cette réciprocité.
    En effet, comme dans toutes les ententes relatives au droit d'auteur, il y a un principe de réciprocité.
     Si le Canada n'adopte pas le droit de suite, il est évident que les artistes canadiens ou québécois qui réalisent des ventes en France ou dans d'autres pays européens, comme l'Angleterre, ne pourront pas bénéficier du droit de suite, de la même façon que les artistes étrangers ne peuvent pas en profiter ici. C'est une question de réciprocité, en effet.
    D'accord.

[Traduction]

    Voulez-vous répondre rapidement?
    En tant que marchande d'art internationale, je dois payer un DDS toutes les fois que j'achète une oeuvre aux enchères en Europe, nous sommes donc pénalisés sur le marché.

  (1230)  

    Êtes-vous en train de dire que vous avez la preuve que cela nuit au marché?
    Cela ne fait aucun doute.
    En avez-vous la preuve?
    Oui, parce qu'il faut payer chaque fois qu'une oeuvre change de propriétaire. La différence, peut-être, entre le marché de l'art et le marché que représentent les autres témoins qui comparaissent aujourd'hui, c'est que nous ne parlons pas de propriété intellectuelle. Nous parlons d'un objet. L'artiste crée un objet.
    Oui, mais vous en avez besoin. Vous avez besoin de ce que les artistes produisent. Il faut qu'un peintre fasse une toile pour que vous puissiez la vendre et réaliser un profit, n'est-ce pas?
    Vous partez également du principe que le marché secondaire, qui est extrêmement limité dans ce pays — peut-être qu'il représente 10, 15 ou 20 p. 100 du marché total de l'art, tout au mieux, ce qui représente peut-être un milliard de dollars par année...
    Alors, les artistes en art visuels se trompent. Ils font erreur sur toute la ligne.
    Nous considérons que ce n'est pas la bonne approche pour régler le problème du niveau de revenu des artistes dans ce pays. Il s'agit d'une solution temporaire.
    Au contraire, il s'agit d'une solution permanente.
    C'est une solution permanente, je vous le concède, mais ce n'est pas une réponse adéquate, et le coût d'administration pour les petites sociétés...
    Personne ne dit que c'est une panacée. Personnellement, je pense que c'est une partie de la solution et qu'il faudrait prendre des mesures additionnelles.
    Cela nuira au marché et, par voie de conséquence, aux artistes. Nous avons la preuve qu'en Grande-Bretagne, les marchands d'art changent leurs habitudes; ils ne soutiennent plus les artistes émergents en raison de l'augmentation des coûts associés à la responsabilité civile. Je ne parle pas de responsabilité au sens juridique, mais au sens de l'augmentation des coûts relatifs à l'administration du DDS. Ils ont décidé d'aller ailleurs.

[Français]

    Voulez-vous réagir à cela?

[Traduction]

    Voulez-vous réagir à cela?
    Oui. Nous avons manifestement obtenu des chiffres différents sur la Grande-Bretagne. Je sais qu'en 2007, on avait réalisé une enquête indépendante auprès d'artistes et de professionnels du marché de l'art sur la question du droit de suite, et on s'était rendu compte que plus de 60 p. 100 des professionnels du marché de l'art avaient dit que l'administration du droit de suite leur prenait moins de cinq minutes et leur coûtait moins de 10 livres sterling par trimestre. Et 87 p. 100 d'entre eux ont déclaré que le droit de suite n'avait pas nui à leurs affaires.
    On pourrait prétendre que le droit de revente affectera surtout les maisons de vente aux enchères plutôt que les galeries commerciales, parce que 90 p. 100 du marché de la revente canadien se fait dans les maisons de ventes aux enchères et non dans les petites galeries d'art.
    Je vous remercie beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Lavallée, pour sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup monsieur le président. Cette discussion m'apparaît fort intéressante parce qu'elle met en relief deux aspects du projet de loi. D'une part, on constate que ce projet de loi est fortement déséquilibré. Il y a l'Association des marchands d'art du Canada qui représente les entreprises, qui ne meurent pas de faim, et d'un autre côté, il y a les artistes qui réclament à grands cris un droit de suite, droit qui est déjà appliqué dans 59 autres pays du monde.
    D'autre part, il y a un principe fondamental qui oppose les conservateurs et les partis de l'opposition, et qui oppose les artistes aux marchands d'art, si je peux dire. C'est que l'oeuvre de création appartient aux créateurs. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est un grand philosophe, John Locke. C'est sur cette philosophie voulant que l'oeuvre de création appartienne aux créateurs que s'est appuyée la reine Anne d'Angleterre pour instaurer la première loi sur le droit d'auteur. Cela me semble immensément intéressant. Cela est clairement mis en relief aujourd'hui.
    On peut, comme Mme Shiell vient de le dire, réduire l'oeuvre à un objet matériel, en disant que si elle est vendue, elle est vendue. On peut aussi se demander, comme le faisait M. Del Mastro tout à l'heure, combien de fois on va payer un CD. Quand on achète un CD, on achète le droit d'écouter ce qu'il contient en se servant de ce CD. À partir du moment où on fait des copies sur un autre support, la moindre des choses, si on considère que l'oeuvre appartient à son créateur, est de rémunérer l'artiste en conséquence.
    D'après ce que je constate, vous réclamez un droit de suite pour les artistes en arts visuels. M. Rodriguez a dit que c'était une question de gros bon sens. Bien sûr, et pourquoi? C'est parce que l'oeuvre appartient à son créateur. Par la suite, même si c'est simplement un objet matériel aux yeux de certains — un objet matériel qui fait l'objet de grandes spéculations —, il reste quand même que ce qu'achètent les amateurs d'art, c'est le plaisir de jouir de leur acquisition, le plaisir de la regarder. Cependant, l'oeuvre elle-même est toujours la propriété de son créateur et, en ce sens, on devrait effectivement verser des droits de suite, comme cela se fait dans les autres pays du monde, et surtout ne pas priver les créateurs du Québec et du Canada de leur dû quand leurs oeuvres sont vendues à l'étranger.
    Je peux bien vous poser des questions, mais je ne vois pas comment on pourrait passer à côté d'un droit comme celui-là pour les créateurs en arts visuels.
    Ma question s'adresse au Regroupement des artistes en arts visuels du Québec. Dans un de vos documents, vous suggérez, et je cite: « [...] que le régime de la copie privée soit étendu à tous les appareils qui permettent de naviguer sur l'Internet [...] » etc., et qu'il s'applique également aux artistes en arts visuels. J'aimerais que vous nous expliquiez davantage votre projet.

  (1235)  

    En effet, ce qui est téléchargé de nos jours, comme vous le savez, ce n'est pas seulement de la musique, ce sont aussi des films et des oeuvres d'arts visuels. Une nouvelle a été diffusée pas plus tard qu'hier. Google permet maintenant de visiter certains grands musées en ligne, tout comme Google Earth permet d'explorer le monde. Alors, les gens pourront visiter à distance un musée, vivre l'expérience du musée et voir les oeuvres en détail. Ces utilisations entraîneront des téléchargements, et des oeuvres seront copiées, emmagasinées, téléchargées et utilisées de différentes manières. Il faut absolument que les artistes en arts visuels puissent profiter des revenus, des retombées économiques de cela. L'économie numérique est fondée sur les contenus qui, eux, doivent être rémunérés d'une certaine manière. À mon avis, il est important de bien comprendre que la copie privée est quelque chose qui devrait s'appliquer à tous les appareils, et toutes les disciplines artistiques devraient en bénéficier.
    Actuellement, quelle société de gestion collective vous verse des droits d'auteur et pour quel usage?
    Les sociétés de gestion collective comme Copibec et Access versent des droits d'auteur pour les utilisations en milieu scolaire, la reproduction d'oeuvres, les présentations scolaires d'oeuvres. C'est un petit montant. Au Québec, on parle d'environ 300 000 $ à 350 000 $ par année. Ce n'est peut-être pas beaucoup, mais ça fait du bien à un artiste qui n'a pas beaucoup de revenus et qui reçoit, avant les Fêtes, un petit 400 $. De plus au Québec, un crédit d'impôt s'applique sur les revenus de droit d'auteur, ce qui devrait d'ailleurs se faire aussi au fédéral. Donc, c'est avantageux.
    Les autres revenus proviennent des utilisateurs comme les musées, les centres d'artistes autogérés, les centres d'exposition. Dans ces cas, ce sont de plus gros montants — bien qu'insuffisants — pour le droit d'exposition, lorsqu'on présente des oeuvres dans un endroit public et que ce n'est pas à des fins de vente ou de location. Il y a aussi des droits de reproduction, lorsqu'on reproduit des oeuvres pour en faire du matériel promotionnel, que ce soit commercial ou non, pour des catalogues et toutes sortes d'utilisations, et également lorsqu'on les met sur Internet. Alors, il y a des droits d'auteur qui sont payés ou qui devraient l'être pour cela.
    Tout à l'heure, vous avez parlé du crédit d'impôt. En effet, le gouvernement du Québec donne un congé d'impôt sur les droits d'auteur perçus par les artistes de toutes les disciplines.
    Y a-t-il un maximum?
    Oui, le crédit d'impôt peut aller jusqu'à 15 000 $, dans le cas d'un revenu maximal de 30 000 $. Au-delà de cela, le crédit d'impôt diminue jusqu'à disparaître lorsque le revenu atteint 60 000 $ et plus.
    Vous dites qu'il n'y a rien de tel du côté du gouvernement fédéral.
    Malheureusement non, et cela devrait s'appliquer aussi au fédéral.
    Donc, vous payez de l'impôt sur les droits d'auteur, même sur le petit 400 $ que vous recevez avant Noël.
    Oui.
    Combien les artistes en arts visuels peuvent-ils retirer de l'ensemble des versements faits par Copibec?
    Pour chaque artiste, le maximum est de 650 $, je crois. Environ de 3 p. 100 à 4 p. 100 du montant total recueilli par Copibec est versé aux artistes en arts visuels. Cela devrait être plus, mais on est en discussion avec Copibec à cet égard. Ce sont des sommes relativement petites comparativement aux gros chiffres, mais c'est important pour les artistes individuels.

  (1240)  

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Angus, vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie beaucoup.
    Merci. C'est une discussion fascinante. Je dois ajouter que ces deux dernières semaines ont été mémorables pour le monde de l'art. Nous avons sauvé des Riopelle à Montréal. Cela aurait pu être un désastre pour notre pays. Alors, remercions les pompiers de Montréal pour leur intervention.
    Par ailleurs, contrairement à M. Bédard, je trouve que le Google Art Project est l'une des initiatives les plus enthousiasmantes dont j'ai jamais entendu parler, au même titre que Google Books, qui nous a permis d'avoir accès à des ouvrages qui n'étaient plus publiés. Partout dans le monde, des gens iront consulter ces musées virtuels et voudront voir les oeuvres en vrai ou en découvrir davantage. Par conséquent, je pense que le potentiel est énorme, et nous devrions encourager les gens, dans chaque petite communauté de ce pays et partout ailleurs dans le monde, à se familiariser avec l'art, parce que ces personnes voudront ensuite se déplacer pour aller voir les oeuvres.
    La question dont nous parlons ici, selon moi, ressemble davantage à un désaccord très technique entre marchands et artistes, et on nous demande d'essayer de voir ce qui serait juste pour tout le monde. La notion d'équité est importante.
    À combien s'élèvent généralement les commissions sur la vente d'oeuvres d'artistes?
    Comme je l'ai dit dans mon mémoire, sur le marché de la revente, les commissions peuvent monter jusqu'à 20 p. 100. Parfois elles sont inférieures à 10 p. 100, tout simplement parce que ce sont des commissions réalisées par des maisons de vente aux enchères. On est loin des 50 p. 100 supposés.
    Mais sur l'oeuvre originale...
    Je vous parle des ventes sur le marché secondaire, parce que dans les faits, les marchands d'art agissent comme des courtiers ou des intermédiaires entre acheteurs et vendeurs.
    Vous avez conclu votre intervention en disant qu'il s'agit d'une question entre artistes et marchands d'art, et je réfute cette affirmation. Ce que nous disons, c'est qu'effectivement, les marchands d'art et les maisons de vente aux enchères... la facture sera refilée à quelqu'un d'autre, et je pense qu'il ne faut pas passer cet élément sous silence.
    Notre préoccupation, c'est la bonne tenue du marché de l'art en général. Il n'y a pas d'antagonisme entre les deux.
    Vous parlez donc des commissions prélevées sur le travail de vos artistes? Est-ce qu'elles peuvent atteindre 50 p. 100?
    Ça, c'est sur le marché primaire. Nous devons faire une distinction entre les marchés primaire et secondaire, parce que le DDS ne s'applique qu'au marché secondaire.
    Il y a une différence fondamentale, une fois de plus, avec ce que Mme Lavallée...
    Lorsque vous vendez une oeuvre d'art, vous transmettez son titre de propriété. Je trouve que c'est assez différent du téléchargement et de toutes les complications qui s'y rattachent. Vous cédez un titre de propriété. Il s'agit d'un acte juridique. L'artiste vend son oeuvre.
    Il y a aussi une réelle confusion entourant la participation des artistes sur le marché secondaire. On nous parle de prix atteints lors de ventes aux enchères, et c'est très intéressant que les maisons de vente aux enchères ne soient pas représentées autour de cette table. Je pense que c'est très discutable. Mais toutes les fois qu'un marchand d'art perspicace utilisera et manipulera ces prix pour réévaluer des marchandises, et cela inclut les oeuvres des artistes, parce que les prix obtenus lors de ventes aux enchères constituent le Dow Jones sur le marché... Par conséquent, les artistes ne font que contribuer, tout au long de leur carrière, à l'augmentation des prix. Il est impossible d'utiliser l'argument selon lequel une oeuvre vendue 250 $ en 1955... Tony m'excusera...
    Pardon. Je vais poursuivre, car nous n'avons que sept minutes. Excusez-moi de vous presser, mais j'essaie de poser le plus de questions possible.
    Monsieur Urquhart, vous jouissez d'une longue expérience en la matière. Vous avez parlé de 50 p. 100. Est-il courant qu'on demande à un artiste d'absorber des coûts comme l'assurance, le transport, l'encadrement et certaines dépenses de publicité? Est-ce une pratique répandue?
    Oui. Si vous vendez une oeuvre 20 000 $, au bout du compte, vous vous retrouvez avec environ 8 500 $ en poche, parce que la commission est de 50 p. 100. Mais vous partagez les coûts de publicité et de lancement, par exemple.

  (1245)  

    Madame Myre, êtes-vous une artiste active sur le marché?
    Oui.
    Pensez-vous qu'il soit nécessaire d'améliorer les relations contractuelles entre les artistes et les marchands pour protéger les droits des artistes, et que ces droits devraient être clairement indiqués dans les contrats?
    Je sais que Rebecca Belmore a été poursuivie par son marchand d'art. Il y a de quoi se poser des questions. Pensez-vous qu'il faille revoir les modalités et déterminer quels artistes ont des droits contractuels?
    Je suis intimement convaincue que les artistes et les marchands d'art devraient avoir des obligations contractuelles. Actuellement, les contrats se font souvent par entente verbale ou prennent la forme de courriels et ne sont pas rédigés en bonne et due forme. C'est la pratique.
    En tant qu'artiste qui vend ses oeuvres, je suis totalement en désaccord avec Miriam Shiell. Je pense que quel que soit le montant que peut recevoir un artiste, même 250 $, c'est toujours bon à prendre. Tout au long de ma carrière, j'ai vu la valeur de mes oeuvres augmenter, particulièrement pour une pièce très importante, qui s'est appréciée de 5 000 $. C'est grâce à mon travail acharné et à ma prudence. Je pense que je mérite de recevoir 5 p. 100 du produit de la vente. Ce n'est pas exagéré. Et ce ne serait même pas tout à fait 5 p. 100, parce qu'il faudrait tenir compte de ce qui irait aux sociétés de droits d'auteur qui administreraient ces droits et géreraient l'argent, comme vous le proposez. Je pense donc que nous ne demandons qu'un très petit montant et que c'est raisonnable.
    Monsieur Bédard, si je comprends bien, votre organisation inclut les droits de suite, actuellement, dans certains contrats. Comme c'est le cas pour le Nunavut. Est-ce que la responsabilité d'indiquer s'il y a un droit de suite incombe aux sociétés de gestion des droits d'auteur, ou faut-il légiférer en la matière parce qu'il s'agit de la vente d'un bien?
    Il faudrait que ce soit inclus dans la loi.
    Certains artistes l'ajoutent à leurs contrats. Libre ensuite au vendeur, au revendeur ou au propriétaire de l'oeuvre d'art de respecter cette condition. Il faudrait absolument que ce soit défini dans la loi, et plus particulièrement dans la Loi sur le droit d'auteur. Et le Canada devrait profiter de ce moment exceptionnel pour adopter les normes internationales en vigueur, parce que 59 pays l'ont déjà fait.
    Est-ce que les marchands d'art sont favorables à des contrats standardisés, de façon à ce qu'il y ait...
    Cela ne nous pose aucun problème; d'ailleurs, nous croyons que cela existe dans la pratique. Les marchands de bonne réputation ont des « contrats de connaissance » avec leurs artistes. Selon la tradition, une poignée de main peut aussi représenter un contrat et a force exécutoire. Mais que ce soit bien clair, les marchands n'ont rien contre les contrats. Si ces contrats devaient être normalisés, l'Association des marchands d'art du Canada serait ravie de les proposer à ses membres. Nous représentons 80 galeries partout au pays. Nos 3 500 artistes sont des artistes prolifiques qui vendent leurs oeuvres sur le marché.
    On continue de remettre sur le tapis certaines choses. Un grand nombre des 59 pays en question sont membres de l'Union européenne et contraints par d'autres forces d'adhérer à ce régime, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas fonctionner de manière indépendante.
    Merci. Nous allons devoir conclure.
    C'est pour cela que la Grande-Bretagne a dû s'y soumettre.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Braid.
    Merci, monsieur le président, et merci aussi à nos témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Madame Feheley, dans votre allocution, vous avez laissé entendre que le marché de l'art est fragile. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi c'est ainsi? Dans la foulée, pourriez-vous nous dire ce qui pourrait le rendre plus fort?
    Nous devons être réalistes et admettre que la récession n'a rien fait pour améliorer la situation. Le marché de l'art canadien est toujours fragile, parce que nous n'avons tout simplement pas un bassin de population suffisant pour appuyer tous nos artistes. Par conséquent, le combat est parfois perdu d'avance pour ceux d'entre nous qui faisons la promotion du travail des artistes. Il est important d'aller à l'étranger, partout dans le monde, parce que notre marché de l'art n'est pas assez gros.
    Il est particulièrement fragile ces temps-ci, mais il ne faut pas perdre de vue que le marché de l'art est cyclique, comme tout le reste. Il connaît des hauts et des bas. Il est plus fragile à certaines époques qu'à d'autres. Je pense que nous devons faire attention de ne pas imposer de choses de façon permanente.

  (1250)  

    Absolument.
    Ainsi, nos plus grands marchés sont à l'étranger. Vous avez parlé des États-Unis et de l'Asie. J'imagine que cela touche aussi l'art autochtone?
    Oui.
    Est-ce que je me trompe?
    Non, pas du tout.
    Très bien.
    Madame Shiell, vous étiez en train de répondre à une question de M. Angus lorsqu'il vous a interrompue parce qu'il ne voulait pas entendre ce que aviez à lui dire. Vous étiez sur le point d'expliquer les lacunes dans la comparaison entre ce qu'avait rapporté une oeuvre d'art en 1958 par rapport à ce qu'elle rapporte maintenant. Pourriez-vous nous donner des précisions?
    Cet argument ne tient absolument pas la route. J'ai dû demander à Tony Urquhart, assis ici, à combien s'élevait le loyer de son atelier en 1959. À cette époque, le marché de l'art était si florissant que n'importe quel artiste aurait été ravi de faire une vente qui lui aurait permis d'améliorer grandement son quotidien. Nous ne sommes pas en train de dire que ce n'est plus le cas aujourd'hui. Chaque vente est importante pour n'importe quel artiste. Mais dire que c'était 250 $ — on ne tient pas compte de l'inflation. En fait, si cette oeuvre d'art se vend maintenant, 60 ans plus tard, aux enchères à 10 000 $, on perd probablement de l'argent. Et cette question n'a pas encore été abordée. Si vous appliquez le DDS à l'ensemble des ventes faites sur le marché secondaire, comment saurez-vous que le vendeur perdra de l'argent ou non? Si c'est le cas, est-ce que le gouvernement va lui accorder une déduction pour la moins-value réalisée?
    Il faut se poser de plus en plus la question de savoir qui assumera les coûts associés au DDS. Normalement, les riches sont les grands acheteurs d'art. Et ce sont ceux que nous envisageons de taxer à nouveau. L'argent ira là où il offre le meilleur rendement, c'est-à-dire qu'il ne servira pas à payer ces frais supplémentaires. En fait, il va y avoir l'émergence d'un marché clandestin. Je crois que c'est cela le véritable problème, parce que c'est d'abord et avant tout un marché marginal.
    Ainsi, nous devons empêcher l'émergence d'un marché noir, n'est-ce pas?
    Il faut contrer les marchés gris et aussi le marché noir. Il faut empêcher la conclusion d'ententes entre collectionneurs, où les marchands servent d'intermédiaires et où on ne paie aucune taxe. Ces pratiques sont monnaie courante. New York est le plus gros marché d'art au monde, et il n'est qu'à un jet de pierre de chez nous. C'est comme avoir un éléphant dans un magasin de porcelaine, cela ne fait aucune doute, et nous ne devrions jamais l'oublier.
    Le marché de l'art britannique génère 18,5 milliards de dollars par année, comparé au marché canadien qui, dans les années 1990, drainait un demi milliard de dollars par année. En étant généreux, on pourrait dire que cela représente maintenant un milliard de dollars par année. C'est probablement beaucoup moins que cela. Nous n'avons pas les chiffres les plus récents de Statistique Canada pour vous dire ce qu'il en est exactement. Mais ce n'est pas énorme.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vais maintenant m'adresser à Mme Britski, parce qu'il nous reste peu de temps. Pour commencer, madame Britski, savez-vous que le DDS et la question relative aux expositions, également, dont vos collègues du Québec... que ces deux propositions sortent du cadre du projet de loi C-32 et que, par conséquent, à toutes fins utiles, elles sortent du cadre de discussion de ce comité?
    Je sais qu'actuellement, le droit de suite ne figure pas dans le projet de loi, mais il y a un article qui fait référence aux ventes, que Christian connaît mieux que moi. Je crois néanmoins que c'est le meilleur endroit pour introduire la notion de droit de suite, parce que, comme vous le savez tous, cela peut prendre des années avant de pouvoir faire modifier la Loi sur le droit d'auteur...
    Nous en sommes conscients, effectivement.
    Oui. Je considère qu'il est important de rappeler que le Canada a été le premier pays au monde à permettre que les artistes qui exposent leurs oeuvres dans une galerie d'art publique touchent une redevance, en vertu du droit d'exposition d'oeuvres artistiques prévu dans la Loi sur le droit d'auteur. Cela me brise le coeur de penser que nous serons, au mieux, le 60e pays à adopter le droit de suite.
    Pour ce qui est des autres qui ne l'ont pas adopté, je dirais qu'au mieux nous serons les 60e, parce que je crois comprendre que les États-Unis, le Japon, la Suisse et le Venezuela, semble-t-il, sont sur le point de l'adopter également.

  (1255)  

    Ce qui préoccupe notamment l'Association des marchands d'art du Canada, à propos du DDS, c'est qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultations sur la question. Qu'en pensez-vous? Pourriez-vous nous dire quelles consultations vous avez menées, quelles consultations le CARFAC a réalisées?
    Nous avons tenu un certain nombre de séances d'information partout au pays, auprès d'artistes essentiellement, et nous avons l'intention d'en organiser d'autres. Nous avons mené de vastes consultations auprès d'autres pays au sujet de la façon dont fonctionne le droit de suite et dont il est administré, ainsi que de son incidence sur le marché. Nous avons parlé avec des gens, un peu partout dans le monde, pour déterminer quel serait l'impact chez nous.
    Nous avons entendu le point de vue de plusieurs marchands d'art et maisons de vente aux enchères sur la façon dont cela fonctionnerait ici, et certains y sont favorables, mais d'autres pas, évidemment. Donc, il y a effectivement eu des consultations.
    Madame Feheley, vous avez expliqué que l'expérience en Europe s'était révélée pour le moins mitigée. Pourriez-vous nous expliquer plus en détail ce qu'il en est?
    Je crois que je vais devoir déposer quelque chose sur la table. Il y a deux... eh bien, en fait, un livre et un autre rapport majeur publié au cours des deux ou trois dernières années qui contiennent énormément d'informations sur les problèmes qu'ont causés les DDS dans d'autres pays.
    Aucun des documents que j'ai lus ici, au Canada, sur la question ou concernant cette discussion n'y fait référence. Nous avons le texte d'un de ces documents qui nous a été envoyé il y a quelques jours. Si nous n'avions pas eu qu'une semaine pour nous préparer à la rencontre d'aujourd'hui, nous aurions rédigé un mémoire beaucoup plus volumineux.
    Nous devons reconnaître que beaucoup des arguments invoqués sont simplistes et qu'ils se fondent également sur de vieilles données. Il existe énormément de nouvelles preuves concernant les problèmes que pose le DDS, particulièrement en Europe.
    Malheureusement, je ne peux vous lire les 26 pages du document, mais je peux vous fournir les références, au cas où cela vous intéresserait d'y regarder de plus près.
    Merci beaucoup. Ce sera le mot de la fin. Eh bien...
    Puis-je vous donner simplement un exemple?
    Non, nous n'avons plus de temps. Je suis désolé, nous tenons à rester équitables pour ce qui est du temps de parole accordé.
    Je remercie les témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui et de leurs exposés fort instructifs.
    La séance est levée.
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