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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 068 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 décembre 2012

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions l'innovation technologique.
    Nous avons un invité spécial aujourd'hui, mon petit-fils Matthew, qui est assis sur le côté.
    Une voix: Imaginez ça!
    La présidente: Il veut assister à la réunion du comité. Ma fille est également ici. Elle vient tout juste d'entrer. Tous deux se joignent à nous au comité de la santé.
    Je voudrais souhaiter la bienvenue à tout le monde. Je sais que nous aurons une journée très chargée. J'aimerais avertir nos témoins que nous pourrions entendre le timbre à un moment donné. Je m'en excuse d'avance, mais, si cela se produit, nous devrons regagner la Chambre pour voter.
    Nous accueillons aujourd'hui quelques personnalités très prestigieuses. De l'Agence de la santé publique du Canada, nous avons le Dr Frank Plummer. Bien entendu, chacun sait qui est le Dr Plummer. Il a énormément contribué à notre comité et à la santé au Canada.
    Par vidéoconférence, de Vancouver, en Colombie-Britannique, nous avons le Dr David Huntsman, professeur de pathologie et directeur médical du Centre de génomique translationnelle et appliquée. Également par vidéoconférence, de Vancouver, en Colombie-Britannique, nous avons M. Marco Marra, directeur du Centre des sciences génomiques.
    M'entendez-vous bien, messieurs?
    Une voix: Oui, nous vous entendons.
    La présidente: Excellent.
    Nous avons également ici M. Warren Chan, professeur à l'Université de Toronto. Nous sommes très heureux de votre présence, monsieur Chan.
    Quelques autres personnes se joindront à nous, je crois. M. Normand Voyer, professeur au département de chimie de l'Université Laval, devrait arriver sous peu.
    Nous sommes donc au complet aujourd'hui.
    Je répète que des votes sont organisés en ce moment. Je suis sûre que nous entendrons le timbre avant la fin de notre réunion. Je vous présente d'avance mes excuses pour l'interruption. Nous déciderons, le moment venu, si nous reprendrons la séance, selon le temps qui nous restera.
    Je vais commencer par les vidéoconférences.
    Monsieur Marra, docteur Huntsman, je sais que vous appartenez à des organisations différentes, mais je vais donner la parole en premier à M. Marra, de l'Agence du cancer de la Colombie-Britannique.
    Vous pouvez commencer, monsieur  Marra.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. J'ai cru comprendre que vous souhaitiez avoir des renseignements sur la nature de nos recherches, nos réussites, nos difficultés et nos recommandations.
    Je vais commencer par vous présenter un bref historique du Centre des sciences génomiques de l'Agence du cancer de la Colombie-Britannique, que j'ai l'honneur de diriger.
    Le Centre des sciences génomiques a été créé par les Drs Victor Ling et Michael Smith vers la fin des années 1990 dans le but de développer la technologie au point de rendre possible le décodage de routine de l'ADN cancéreux. Au moment où je me suis joint à l'équipe, vers 2000, le centre comptait une douzaine d'employés. Les années qui ont suivi ont servi à créer des capacités et à bâtir notre réputation. Je dirai que nous avons atteint un point tournant lorsque nous avons réussi le séquençage du coronavirus du SRAS en collaboration avec le Dr Frank Plummer, qui est avec vous aujourd'hui, le Dr Robert Brunham, du Centre de lutte contre les maladies de la Colombie-Britannique, et d'autres. La raison pour laquelle cette réalisation était importante dans le contexte de notre travail actuel, c'est qu'elle a prouvé que le séquençage de l'ADN peut révéler l'ennemi, si vous voulez.
    La création de capacités s'est poursuivie, de sorte qu'en 2006 et 2007, notre centre est devenu l'un des quatre sites internationaux d'accès à un nouveau type d'appareil représentant la nouvelle génération de séquenceurs d'ADN. Ce lecteur d'ADN peut lire tous les caractères du génome humain à des rythmes considérablement plus élevés que la génération précédente. À l'époque, le prix de la réalisation d'un génome humain était de l'ordre de 75 millions de dollars. Les choses sont très différentes aujourd'hui. Nous sommes un centre international de pointe ayant la capacité de réaliser chaque année quelque 3 000 génomes humains exacts grâce à une infrastructure informatique de calibre mondial. À l'heure actuelle, à notre centre de l'Agence du cancer de la Colombie-Britannique, nous avons une capacité informatique de 60 téraflops, 7 000 coeurs de processeur et 7 petaoctets d'espace disque, grâce à laquelle le prix de la réalisation d'un génome humain exact s'élève maintenant à moins de 5 000 $ et continue à baisser.
    Dans les cinq ou six dernières années, le coût du séquençage d'un génome humain est passé de 50 millions de dollars à 5 000 $. Partout dans le monde, on commence à se rendre compte de tout ce qu'il est possible de réaliser grâce à un séquençage accessible et peu coûteux.
    Aujourd'hui, les enquêteurs principaux du Centre des sciences génomiques s'occupent de 392 projets dotés d'un financement total d'environ 590 millions de dollars. Nous avons actuellement des projets actifs qui coûteront 248 millions de dollars d'ici la fin de 2016, ainsi que 543 collaborations, dont 358 locales, 83 pancanadiennes et 101 internationales.
    Les sources de financement jouent un rôle très important. Nous dépensons entre 20 et 25 millions de dollars par an, que nous devons aller chercher un peu partout, à l'exception d'un million de dollars, en présentant des demandes de subventions aussi bien au Canada qu'à l'étranger. À l'heure actuelle, notre financement vient à 75 p. 100 de sources canadiennes et à 25 p. 100 de sources américaines.
    Nos principaux donateurs comprennent Génome Canada, Génome Colombie-Britannique, les Instituts de recherche en santé du Canada, les National Institutes of Health des États-Unis et la Fondation canadienne pour l'innovation. Cela m'amène à quelques-unes des difficultés que notre centre doit affronter. Le Centre des sciences génomiques est censé constituer une entité fortement basée sur la collaboration. En fait, je collabore très étroitement avec le Dr Huntsman, qui est assis à côté de moi, et continuerai à le faire tant que nous utiliserons cette technologie pour essayer d'éclaircir les mystères du cancer.

  (1105)  

    Pour exploiter un centre comme le nôtre et maintenir la large collaboration dont nous profitons tous, je crois, il est absolument essentiel pour nous de continuer à avoir accès à un important financement. Nous nous félicitons de l'existence de Génome Canada. Nous sommes également encouragés par le fait que les Instituts de recherche en santé du Canada appuient les sciences génomiques. Nous sommes reconnaissants aux National Institutes of Health pour les fonds qu'ils nous avancent et qui, au fil des ans, ont totalisé plus de 135 millions de dollars. De plus, sans la Fondation canadienne pour l'innovation, nous n'aurions pas eu accès aux technologies de pointe. Nous sommes vraiment reconnaissants. Nous remercions toutes ces organisations de leur appui constant aux sciences génomiques.
    Nous tenons beaucoup à insister sur le fait qu'un engagement à long terme au maintien d'une infrastructure de pointe est absolument nécessaire au succès d'une opération à grande échelle comme la nôtre ainsi qu'à la réussite de la nouvelle ère de la médecine personnalisée.
    La Fondation canadienne pour l'innovation fait un travail extraordinaire en créant des occasions, mais nous voudrions recommander d'accroître la fréquence de ces occasions. Lorsque des décisions de financement sont prises, il arrive que les appareils de séquençage de l'ADN ne fassent pas le poids lorsqu'ils sont en concurrence avec des brise-glaces. Je suppose que nos projets sont moins impressionnants que la construction de brise-glaces, mais c'est le genre de concurrence que nous devons parfois soutenir.
    Cela m'amène à la médecine personnalisée, qui est l'un des sujets qu'on m'a demandé d'aborder. Avec la baisse du coût du séquençage, différents groupes, un peu partout dans le monde, ont pris conscience de la possibilité — ou plutôt de l'impératif — d'exploiter cette technologie pour essayer de déchiffrer la signature moléculaire du cancer et de mettre au point des thérapies plus efficaces.
    Nous avons été parmi les premiers du monde à publier, en 2010, nos premières observations concernant l'utilisation du séquençage de l'ADN pour traiter un cancer rare. Je suis heureux de signaler que nous participons actuellement, en collaboration avec le Dr Janessa Laskin, de l'Agence du cancer de la Colombie-Britannique, le Dr David Huntsman et d'autres, à une initiative visant à appliquer la technologie d'une manière plus systématique pour déterminer, dans le cas de maladies qui résistent aux traitements, la meilleure façon d'utiliser les ressources du système de soins de santé.
    Le projet consiste dans une grande mesure à séquencer l'ADN cancéreux, à trouver des mutations et d'autres erreurs du code génétique, puis à essayer de faire correspondre ces mutations et erreurs aux médicaments existants en vue de trouver de nouveaux produits ou de nouvelles combinaisons de produits pouvant améliorer l'état du patient. Nous croyons qu'il est très sensé d'agir ainsi, mais nous avons rencontré de nombreux obstacles.
    L'un des obstacles les plus sérieux relevait non de la technologie, mais du simple accès aux médicaments. Lorsque nous découvrons une nouvelle combinaison de produits pharmaceutiques qui, à notre avis, est susceptible de faire du bien au patient en fonction de son profil moléculaire, il s'avère souvent qu'un ou plusieurs produits sont contre-indiqués pour la maladie en cause. Cela nous empêche d'obtenir de nouveaux médicaments pour les patients. Hier soir, pendant que je discutais avec une personne qui fait le même genre de travail aux États-Unis dans une organisation appelée TGen, je me suis aperçu avec beaucoup d'intérêt qu'elle était en butte à des problèmes identiques.
    C'est peut-être une chose que le comité voudra examiner: Dans cette ère de médecine personnalisée, comment pouvons-nous administrer les médicaments les plus récents à des patients dont le profil moléculaire indique qu'ils peuvent en profiter?
    Cela met fin à mon exposé. Je vous remercie.

  (1110)  

    Merci beaucoup, monsieur Marra. C'était un excellent exposé qui nous a permis d'apprendre de nouvelles choses très intéressantes.
    Je vais maintenant céder la parole au Dr Huntsman.
    Je vous remercie de l'occasion que vous me donnez de m'adresser au comité aujourd'hui. Comme Marco l'a dit, je collabore très étroitement avec lui et, comme beaucoup d'entre vous, j'ai de multiples responsabilités.
    Je dirige une équipe de recherche sur le cancer de l'ovaire en Colombie-Britannique, qui a fait d'énormes progrès dans la compréhension de cette maladie grâce à l'infrastructure bâtie par Marco et ses collègues. Nous avons réussi à découvrir les mutations qui sont à la source de plusieurs types de cancer de l'ovaire, ce qui a immédiatement permis d'adopter de nouvelles stratégies de diagnostic et de travailler à la mise au point de nouveaux traitements.
    Je dirige également le Centre de génomique translationnelle et appliquée qui se sert des découvertes génomiques pour trouver des méthodes diagnostiques cliniquement utilisables. Nous espérons pouvoir ensuite les transférer aux laboratoires non seulement au Canada, mais à l'échelle internationale.
    Ma dernière responsabilité découle de ma participation à l'initiative de médecine personnalisée de la Colombie-Britannique, sur laquelle je reviendrai à la fin de mon exposé. La personnalisation ou individualisation de la lutte contre les maladies présente un grand intérêt parce que c'est le seul moyen d'avancer que nous ayons actuellement. En fait, la génomique prépare la voie à la médecine à haut contenu. Notre but est essentiellement d'améliorer les décisions. En grande majorité, les décisions médicales sont très comparables à une personne qui lance une fléchette sur une cible avec les yeux bandés. Les gens qui prennent des décisions n'ont pas l'information dont ils ont besoin pour faire des choix parfaitement adaptés à leurs patients.
    À mesure que nous avancerons dans l'utilisation de la médecine personnalisée, nous nous demanderons probablement pourquoi nous recourons à la génomique dans le contexte du cancer et de la microbiologie. La raison pour laquelle la génomique vient en premier, c'est que l'ADN — comme beaucoup de criminels l'ont découvert — est très difficile à détruire et que les acides nucléiques sont très faciles à étudier. Nous pouvons nous servir de technologies numériques telles que les extraordinaires appareils de séquençage mis au point par Marco et son équipe pour décoder le cancer.
    Tout ce que nous apprenons sur l'utilisation de la génomique peut s'appliquer à la protéomique, à la métabolomique et à toute autre façon d'examiner la biologie d'une manière large et approfondie.
    Le cancer et la microbiologie viendront toujours en premier. C'est la raison pour laquelle je crois que le Dr Plummer est présent aujourd'hui. En effet, dans les deux cas, il est possible de prélever des tissus malades et d'examiner le génome de l'entité qui cause le problème — c'est-à-dire le cancer ou un quelconque micro-organisme — séparément de l'hôte. Nous apprenons ainsi des choses sur le cancer que nous espérons pouvoir appliquer dans d'autres domaines de la médecine.
    Les découvertes que nous faisons et les choses qui parviennent aux secteurs cliniques devraient améliorer tant la lutte contre le cancer, en fonction de sa susceptibilité, que son traitement grâce à des essais de séquençage de génomes complets faits à la volée pour aider les patients, un seul à la fois. Mais il s'agit là d'un projet très spécial assez étrange. Même si c'est là une chose à laquelle nous consacrons tous d'importants efforts afin de déterminer de quelle façon utiliser l'information, il est difficile de contester que notre séquençage ainsi que nos génomes complets formeront en quelque sorte un élément de base de notre dossier médical d'ici une vingtaine d'années. Comment allons-nous arriver là? Si les soins de santé au Canada doivent se maintenir au niveau qui existe dans le reste du monde, nous devrons trouver un moyen.
    Nous n'avons pas à limiter cela aux établissements de soins tertiaires. Si nous voulons avoir une influence, nous devons le faire là où la plupart des décisions sont prises: même s'il faut commencer dans des cliniques de cancer et des établissements universitaires, nous devons étendre ce processus aux établissements de soins primaires. C'est là qu'intervient l'Initiative de médecine personnalisée de la Colombie-Britannique. Nous avons compris, dans notre province, que même si nous recherchons des succès dans le cas des maladies que nous étudions individuellement, les difficultés que nous rencontrons sont communes à tout le secteur de la médecine, qu'il s'agisse des problèmes éthiques, juridiques ou sociaux qui se posent lorsqu'il faut changer la façon dont les soins de santé sont assurés.
    La génomique n'est pas la seule base, il y a aussi la bioinformatique. S'il faut utiliser l'information pour améliorer les décisions cliniques, nous devons renforcer les moyens informatiques non seulement dans les centres de recherche, mais aussi au niveau des outils de décision utilisés dans les soins primaires. Il faudra pour cela un changement de culture d'une part et, de l'autre, une évolution considérable de la formation donnée à tous les professionnels de la santé.
    Je voudrais à ce stade faire moi aussi état de ma gratitude, particulièrement envers la Fondation canadienne pour l'innovation, car à défaut de son investissement initial dans le Centre des sciences génomiques, aucun élément de ce travail extraordinaire n'aurait pu se faire en Colombie-Britannique ces dernières années.

  (1115)  

    Je dirai en outre qu'il faut financer non seulement l'infrastructure, mais aussi les projets — qui doivent être examinés par les pairs — qui utilisent cette infrastructure. Nous avons besoin par exemple de l'appui continu des IRSC. Cela est essentiel si nous voulons améliorer la santé des Canadiens et avoir une économie saine.
    Enfin, je voudrais m'associer à Marco au sujet de sa dernière observation. Si nous devons personnaliser le traitement du cancer et d'autres maladies, il faudra repenser la façon de considérer les preuves au stade de l'homologation des médicaments. Les grands essais cliniques de la phase III, qui constituaient le pilier des décisions d'homologation au cours des dernières décennies, ne pourront pas s'appliquer à la médecine personnalisée parce que nous ramenons les échantillons à leur plus bas niveau: n=1. Avec des échantillons de cette taille, il n'y a aucun moyen de réaliser des essais de phase III.
    À tous les stades du processus — de la génomique de base à la validation, puis à la mise en oeuvre dans les laboratoires et les cliniques et à l'examen par les organismes de réglementation —, il faudra constamment relever des défis. Je crois que les avantages possibles pour nos patients et pour la santé du pays seront énormes si nous acceptons ce défi et commençons à appuyer les équipes qui adoptent des approches d'avant-garde visant une médecine personnalisée à haut contenu. C'est là une occasion pour le Canada de devenir un chef de file international. Je sais que Marco et moi sommes vraiment enthousiasmés par la possibilité de participer à ce processus et d'y jouer un rôle de premier plan.
    Je crois que je vais m'arrêter ici. Nous pourrons ensuite tous les deux répondre à vos questions.

  (1120)  

    Merci, docteur Huntsman. Nous apprécions beaucoup l'approche de collaboration que vous avez tous deux ainsi que les observations du plus haut intérêt que vous avez présentées.
    Nous entendrons maintenant le Dr Frank Plummer. Nous savons tous qu'il est conseillé scientifique en chef et directeur général du Laboratoire national de microbiologie.
    Encore une fois bonjour, docteur Plummer.
    Bonjour, mesdames et messieurs. C'est un plaisir pour moi de prendre la parole devant vous. Je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée de vous parler de la façon dont nous utilisons la technologie.
    Nous vivons des temps extraordinaires sur le plan des progrès technologiques. La plupart d'entre nous ont vécu l'émerveillement de voir l'homme marcher sur la Lune et la présence d'humains dans une station spatiale; nous sommes passés de l'ère des ordinateurs qui occupaient d'immenses salles à tout un monde qui tient au creux de notre main, de la découverte de l'ADN au séquençage de tout un génome en un très court laps de temps.
    Pour vous donner une idée du rythme des progrès réalisés, je vous rappelle qu'il a été possible d'élucider l'empreinte génétique du virus du SRAS en moins de deux semaines en 2003. C'était un exploit extraordinaire à l'époque, que nous avions réalisé en collaboration avec le Centre des sciences génomiques et le Centre de lutte contre les maladies de la Colombie-Britannique. En 2009, en plein milieu de l'épidémie de grippe, il ne nous a fallu que deux jours pour séquencer le virus H1N1. Ce serait encore plus rapide aujourd'hui.
    Ces moyens sont extrêmement importants pour réagir rapidement aux maladies infectieuses. D'après diverses estimations, on a découvert de 35 à 50 nouveaux virus et bactéries au cours des 40 dernières années. Certaines des choses qui nous inquiètent beaucoup aujourd'hui, comme l'E. coli 0157, le VIH, etc., étaient inconnues lorsque j'ai entrepris mes études de médecine. Il s'agit dans tous les cas d'organismes nouvellement découverts ou nouvellement pathogènes pour l'homme. Nous avons toutes les raisons de croire qu'on en découvrira de plus en plus, au rythme d'environ une fois par an.
    Pourquoi ces menaces se font-elles plus nombreuses? Diverses raisons peuvent expliquer cette augmentation. Il y a, par exemple, les changements écologiques qui permettent à des vecteurs tels que les moustiques de peupler de nouvelles régions. Ainsi, pour la première fois depuis des années, nous avons eu des cas de dengue hémorragique en Floride. Il y a aussi les changements démographiques et l'évolution des comportements humains: les gens sont de plus en plus concentrés dans les villes et se désintéressent de l'agriculture de subsistance; certains vont maintenant s'établir dans des régions autrefois inhabitées; de plus, avec la mondialisation, la période d'incubation de la plupart — mais non de la totalité — des maladies infectieuses est inférieure au temps qu'il faut pour aller d'un point du globe à un autre.
    Il y a aussi la croissance rapide de la technologie, y compris celle de la santé, qui, malgré les améliorations qu'elle apporte à notre vie, peut à l'occasion susciter de nouvelles menaces. Il faut ajouter à cela l'adaptation et l'évolution des microbes, qui changent beaucoup plus rapidement que nous ne pouvons le faire.
    Les agents infectieux illustrent parfaitement la théorie de l'évolution de Darwin et ce, dans un laps de temps très court. Ils sont intrinsèquement conçus pour s'adapter et survivre en évoluant constamment pour contrer les interventions humaines. Ils ont une vie sexuée et échangent du matériel génétique qui leur donne des caractéristiques jusqu'alors inconnues.
    Nous sommes un peu comme la reine rouge de Lewis Carroll dans De l'autre côté du miroir. Nous devons courir de plus en plus vite pour rester au même endroit et nous tenir à l'abri de ces menaces. Le plus difficile, pour une agence de santé publique qui essaie de lutter contre les maladies infectieuses, c'est d'essayer de prévoir ce qui va se produire. Il est impossible en fait de tout prévoir dans les détails, mais il faut être prêt à affronter n'importe quoi ou presque.
    Je vais vous parler des cinq tactiques que nous utilisons, à l'Agence de la santé publique et ailleurs, pour faire face à ces menaces.
    La première tactique consiste à détecter rapidement les maladies infectieuses et à donner l'alerte. L'Agence de la santé publique du Canada dispose à cet effet de divers outils, dont certains que nous avons nous-mêmes mis au point pour combler les lacunes existantes. Le Réseau canadien de renseignements sur la santé publique, ou RCRSP, est l'un des plus importants. C'est un système en ligne sécurisé qui compile les renseignements de différents systèmes de surveillance et envoie des alertes aux usagers. Nous pouvons nous servir de l'information recueillie, comme des ventes inhabituelles de médicaments sans ordonnance contre la diarrhée, pour déceler des circonstances insolites. Cette information ne nous renseigne pas d'une façon précise sur ce qui se passe, mais nous indique que quelque chose ne va pas. Le système a été mis au point par le personnel de l'agence. Plus de 4 000 agents de santé publique l'utilisent couramment, sur une base quotidienne, partout dans le pays.
    Ces outils nous aident également à déterminer l'existence et l'ampleur d'une éclosion en décelant des cas similaires dans différentes administrations. Ils ont beaucoup servi dans le cadre de notre réaction à la crise causée par la contamination à l'E. coli de la viande provenant des abattoirs de XL Foods, il y a environ un mois.

  (1125)  

    La deuxième tactique est le confinement rapide à la source. Il arrive qu'il ne soit pas possible d'envoyer le spécimen au laboratoire. Nous avons donc mis au point une stratégie nous permettant d'envoyer le laboratoire au spécimen. C'est parfois plus commode d'envoyer sur place nos gens équipés de la technologie nécessaire que d'envoyer des échantillons au laboratoire.
    Nous avons mis au point deux laboratoires mobiles très particuliers. Le premier est un laboratoire sur roues. Ce laboratoire de niveau 3 à la fine pointe de la technologie peut se rendre à des endroits tels que les sites olympiques de Vancouver ou les lieux de réunion du G8 ou du G20 en Ontario pour intervenir en cas d'actes de bioterrorisme. Une partie du travail qui est accompli comprend l'échantillonnage de l'air et la vérification des colis suspects.
    L'autre laboratoire, qui tient dans une série de 13 valises, peut être placé à bord d'un vol régulier. Il permet d'intervenir en cas d'éclosion de maladies infectieuses, comme la fièvre hémorragique Ebola en Afrique. Nous avons récemment envoyé une équipe en République démocratique du Congo pour lutter contre une éclosion d'Ebola.
    Notre personnel a adapté à cette fin une technologie de base pour créer un laboratoire permettant aux membres de telles équipes de travailler en toute sécurité sur des échantillons pouvant contenir de tels agents. Ils peuvent ainsi réaliser des tests diagnostiques sur place dans les régions les plus reculées de la planète. L'équipe a été envoyée en Angola, en République démocratique du Congo, au Congo, au Kenya, en Iran et à différents autres endroits.
    Cela a changé radicalement la façon dont l'Organisation mondiale de la santé réagit à des épidémies. Vous pouvez imaginer l'avantage qu'il y a dans de telles situations à réaliser un test diagnostique sur place en deux heures au lieu de deux semaines, comme c'était auparavant le cas.
    La troisième tactique consiste à utiliser des virus pour combattre des virus. Notre laboratoire de Winnipeg utilise les outils les plus perfectionnés du génie génétique pour créer de nouveaux moyens de produire des vaccins. Nos travaux portent sur des vaccins contre le VIH et des vaccins universels contre la grippe, mais nos percées les plus importantes concernaient deux vaccins contre l'Ebola. Dans les deux cas, nous avons utilisé d'autres virus, inoffensifs pour les humains, pour transmettre à l'organisme des protéines Ebola et des protéines Marburg qui trompent le système immunitaire, lui faisant croire qu'il a affaire à de vrais virus pathogènes pour qu'il produise des anticorps.
    Nous travaillons avec le secteur privé en vue de la commercialisation de ces vaccins, qui peuvent jouer un rôle important dans la prévention de la guerre biologique et l'intervention en cas d'épidémies ou d'expositions accidentelles en laboratoire.
    La quatrième tactique consiste à utiliser des appareils à haut rendement pour comprendre la génétique. La compréhension de la génétique d'un virus et de ses hôtes, comme les humains, nous aide à reconnaître de nouvelles éclosions du même agent, à créer des vaccins et des traitements, à comprendre l'origine du virus et, dans le cas des hôtes humains, à mieux comprendre de quelle façon les gens sont infectés et pourquoi certaines personnes sont atteintes tandis que d'autres ne le sont pas.
    Cette stratégie a beaucoup servi lors de l'éclosion de listériose en 2008 et, plus récemment, lors de la crise de la viande contaminée de XL Foods.
    J'ai parlé de la technologie que nous avons mise en place pour le séquençage génétique rapide des virus et des bactéries. Nous avons besoin pour la compléter de capacités dans une discipline que nous appelons la bioinformatique et dont M. Marra et le Dr Huntsman viennent de nous parler.
    Il est facile aujourd'hui de produire d'énormes volumes de données, mais leur compréhension constitue un grand défi. Nous pouvons recourir à cette fin à un groupe d'experts de haut calibre qui peut analyser des masses incroyables de données à l'aide de plus de 1 200 processeurs et d'une capacité de stockage de 250 téraoctets. Ces chiffres ne sont pas aussi impressionnants que ceux de M. Marra, mais ils représentent une puissance de calcul considérable.
    En fait, cette technologie est tellement perfectionnée que les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis nous ont demandé de les aider à analyser les génomes des bactéries cholériques prélevées lors de l'éclosion qui s'est produite à Haïti.
    La cinquième tactique consiste à utiliser la biologie des systèmes pour comprendre les maladies infectieuses. J'ai mentionné la génétique d'un hôte il y a quelques instants. Quand nous parlons d'hôtes, il s'agit habituellement d'humains. La compréhension de notre propre biologie et des interactions des systèmes biologiques nous a fourni une foule de renseignements qui nous permettent de mieux comprendre les infections dues à des pathogènes tels que le VIH et les virus de la grippe.

  (1130)  

    L'agence a déployé des efforts considérables dans ce domaine. Nous espérons qu'ils nous fourniront la clé qui mettra fin à la pandémie du VIH. On fonde actuellement beaucoup d'espoirs sur des médicaments contre le VIH. Les médicaments sont importants, mais je ne crois pas qu'ils suffisent pour régler le problème. Nous avons besoin d'un vaccin.
    C'étaient là quelques tactiques importantes mises en œuvre pour combattre les éclosions. Je voudrais maintenant vous dire quelques mots d'autres progrès de la santé publique que la technologie rend possibles.
    Nous entendons beaucoup parler ces temps-ci des médias sociaux et de l'influence qu'ils peuvent exercer sur les opinions et le cours des choses. Cette technologie aussi ouvre des perspectives, mais comporte des risques pour la santé puisqu'elle a contribué, par exemple, à la propagation des maladies transmises sexuellement. Toutefois, les médias sociaux peuvent aussi servir à promouvoir la santé, à intervenir et même à donner l'alerte rapidement. Pendant la pandémie de H1N1, l'Agence de la santé publique a eu recours à des médias sociaux tels que Facebook et Twitter pour communiquer avec les gens.
    Compte tenu du temps dont je disposais, je n'ai pu qu'effleurer certaines des technologies les plus récentes en donnant quelques exemples. Toutefois, je crois que vous conviendrez, sur la base de ce que vous avez entendu, que dans ce domaine hautement technique où l'innovation est indispensable, l'Agence de la santé publique est à la fine pointe quand il s'agit d'utiliser ces outils pour la promotion de la santé publique.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, docteur Plummer. Comme d'habitude, vous avez présenté au comité des renseignements aussi utiles qu'intéressants.
    Nous allons maintenant passer à M. Warren Chan.
    Je crois, monsieur Chan, que vous avez des diapos Powerpoint à nous présenter. Êtes-vous prêt à commencer?
    Très bien.
    Je dois dire aux membres du comité, avant que M. Chan prenne la parole, que j'ai combiné les deux sujets — génomique et nanotechnologie — et que nous allons maintenant aborder la partie relative à la nanotechnologie. Je l'ai fait parce que, comme vous le savez, nous allons bientôt entendre le timbre du vote. Je voulais donc permettre à tous nos témoins de nous présenter leurs exposés.
    Je m'excuse d'avance d'avoir combiné les deux sujets, mais il était nécessaire de le faire.
    Veuillez commencer, monsieur Chan.
    Permettez-moi d'abord de remercier le comité de m'avoir invité à parler de la nanomédecine et de la nanotechnologie.
    Je voudrais commencer par souligner que la nanotechnologie est essentiellement une technologie habilitante qui permet de recourir à différents types d'applications. On s'en sert pour fabriquer des processeurs plus rapides et des écrans plus minces. On l'utilise aussi pour diagnostiquer et traiter des maladies.
    À l'heure actuelle, le Canada n'accorde pas une très grande attention à la recherche sur la nanotechnologie, à comparer aux autres pays développés du monde. Pour vous donner un exemple, je vous dirai qu'en ce moment, 16 p. 100 de l'ensemble des publications produites à Singapour traitent d'une façon ou d'une autre de nanotechnologie. La Corée du Sud, la Chine et tous les autres pays asiatiques y consacrent beaucoup d'efforts.
    Pour ce qui est de l'application de la nanotechnologie en médecine, les États-Unis constituent le premier chef de file. Les Américains ont lancé un programme de nanotechnologie lié à la lutte contre le cancer il y a 12 ans. Ce programme a débouché depuis sur sept centres de traitement du cancer et continue de produire de nouveaux types d'entreprises et des essais cliniques de nouveaux types de médicaments.
    J'ai pensé consacrer ces 10 minutes à la nanotechnologie afin d'expliquer en quoi elle consiste et pourquoi elle est importante. Je veux le faire parce que nano est maintenant un préfixe à la mode. On peut voir des tas de films dans lesquels des méchants essaient de changer certaines structures pour devenir encore plus méchants. La nanotechnologie constitue un domaine de recherche très intéressant qui est en pleine croissance.
    Il importe tout d'abord de définir la nanotechnologie. Il existe actuellement trois ou quatre définitions. Les États-Unis en ont une, le Japon une autre et le Royaume-Uni une autre encore. Celle que je préfère a été produite par la British Standards Institution. Elle dit que la nanotechnologie est un processus délibéré de conception, de synthèse, de caractérisation et d'application de structures, de dispositifs et de systèmes par le contrôle de la taille et de la forme dans une gamme de dimensions allant de 1 à 100 nanomètres.
    Je vais essayer de donner une idée de ce que cette gamme de dimensions représente. Un cheveu, par exemple, a un diamètre compris entre 1 et 10 micromètres. En nanotechnologie, les dimensions sont de 100 à 1 000 fois plus petites que le diamètre d'un cheveu. Il est très important de travailler sur des matériaux taillés dans cette gamme de dimensions parce qu'il est alors possible d'en modifier les propriétés. Dans les technologies traditionnelles, pour produire un nouveau matériau, on commence par en faire la synthèse, ce qui revient à dire qu'il faut créer un nouveau composé chaque fois qu'on souhaite obtenir une propriété différente.
    La caractéristique unique en nanotechnologie, c'est que pour obtenir un matériau ayant une propriété tout à fait particulière, il suffit d'en modifier la taille ou la forme. Un fragment tout petit par rapport à un fragment plus grand aura des propriétés complètement différentes, même si le mode de fabrication des deux fragments est identique. La nanotechnologie permet de disposer d'un très grand nombre de matières premières.
    Je vous montre ici la vraie nature de la nanotechnologie. C'est cette caractéristique qui a amené les États-Unis à consacrer près d'un milliard de dollars à différentes applications. L'or constitue un bon exemple. Nous avons tous des bijoux en or et savons donc que l'or a une couleur jaunâtre. Toutefois, si on observe l'or à l'échelle nanométrique, on se rend compte qu'en réalité, il est rouge. La couleur peut en fait varier entre différentes teintes de rouge à mesure qu'on modifie la taille du matériau.
    Si on a un tout petit fragment, ayant par exemple 1 à 3 atomes d'épaisseur, la couleur est blanchâtre. À une plus grande échelle, par exemple entre 19 et 26 atomes d'épaisseur, la couleur est rouge. Entre 1 et 100 nm, on peut faire varier la couleur en modifiant la taille: avec 6 atomes d'épaisseur, on a du bleu; à 12 atomes, on peut avoir du vert; à 19 atomes, on verra du rouge.
    Dans le cas d'un bijou en or, quelle qu'en soit la dimension, la couleur reste jaune. Toutefois, à l'échelle nanométrique, on peut passer du rouge à l'orange ou au vert selon l'épaisseur.
    La caractéristique unique des matériaux à l'échelle nanométrique, c'est leur adaptabilité et la possibilité d'obtenir de multiples matières premières pouvant servir à toute une gamme d'applications. Comme je l'ai dit, pour un matériau donné, on peut modifier les propriétés optiques, les propriétés magnétiques et les propriétés électriques. C'est pour cette raison que la nanotechnologie est couramment utilisée pour fabriquer de meilleurs appareils électroniques.
    J'ai comme exemple cinq fioles différentes de ce qu'on appelle des points quantiques. Ce sont des nanocristaux de cadmium et de sélénium. À l'origine, ils avaient été produits par l'ancienne Union soviétique pour augmenter la puissance des bombes et fabriquer des matériaux pour la guerre biologique. Aujourd'hui, on trouve des points quantiques dans toutes les nouvelles lumières de Noël vendues par Walmart. Les nouveaux écrans LCD de Samsung contiennent maintenant des points quantiques parce qu'ils donnent une meilleure définition. Voilà la direction vers laquelle les choses commencent à s'orienter.

  (1135)  

    Ces cinq fioles contiennent exactement les mêmes matériaux, du cadmium et du sélénium. La seule différence, c'est que la verte a 3 nm tandis que la rouge en a 6. La raison pour laquelle le matériau est adaptable à cette taille, c'est qu'on force les électrons à se comporter d'une certaine façon. C'est la base de cette technologie.
    Si vous observez les particules d'or présentées sur la droite de la diapositive, vous constaterez qu'elles ressemblent à des petites sphères distinctes observées sous un microscope. C'est essentiellement un métal dur sur lequel on prélève des éclats d'une très faible épaisseur.
    L'image suivante montre ce que les scientifiques peuvent faire aujourd'hui des matériaux de taille nanométrique. Ils réalisent de petites structures appelées nanorice, nanostar ou nanocube. Toute forme qu'on peut voir avec les yeux peut maintenant être réalisée à l'échelle nanométrique. Il a fallu 20 ans pour perfectionner les stratégies de fabrication de ces matériaux particulaires. Chaque forme, chaque taille donne des propriétés physiques différentes. Encore une fois, le même matériau peut donner naissance à de multiples matières premières.
    Au cours des sept ou huit dernières années, on s'est particulièrement intéressé aux nanotechnologies pour répondre à certains besoins médicaux. Je vais vous donner quelques exemples.
    En médecine, il convient de considérer la nanotechnologie essentiellement comme un moyen habilitant permettant de régler certains problèmes liés au diagnostic et au traitement du cancer ainsi qu'à la détection des maladies infectieuses. On commence également à s'en servir pour produire des vaccins et faire de la détection cardiovasculaire. Je vais vous expliquer de quelle façon.
    La nanotechnologie a une vaste gamme d'applications. De nombreux chercheurs tentent de produire ce qu'on appelle des agents théranostiques: il s'agit de nanostructures qu'on pourrait injecter dans l'organisme pour détecter une maladie et, une fois la détection faite, pour libérer un médicament permettant de traiter la maladie. Cette façon de procéder se fonderait sur la capacité de détecter et de reconnaître l'environnement local pour déterminer le produit à utiliser et la façon de traiter l'organisme. C'est un nouveau concept qui commence à faire son apparition.
    Comme je l'ai mentionné, le grand élan imprimé à la nanomédecine par le gouvernement des États-Unis, vers la fin des années 1990 et le début des années 2000, avait pour but d'établir le programme de nanotechnologie du cancer. Les Américains croient qu'avec la nanotechnologie, on peut détecter le cancer à ses débuts. C'est le concept de la détection précoce: plus tôt le cancer est détecté, plus grandes sont les chances de survie. Une fois que le cancer commence à essaimer dans l'organisme, il devient très difficile à trouver. On souhaite donc le déceler avant qu'il ne se propage. Autrement, c'est un peu comme essayer de trouver une aiguille dans une botte de foin. Les cellules se trouvent un peu partout dans le corps et, même si on traite le cancer à un site, les cellules d'autres sites peuvent commencer à se multiplier.
    L'autre application que vise la nanotechnologie du cancer, c'est la thérapie ciblée. On peut en fait concevoir des structures capables de porter le médicament exclusivement au site du cancer en épargnant les cellules saines. L'un des problèmes de la chimiothérapie, c'est qu'on inonde l'organisme d'un produit toxique en espérant qu'il tuera davantage de cellules malades que de cellules saines. Cela explique les effets secondaires de la chimiothérapie. Toutefois, s'il était possible de maintenir le produit toxique à l'intérieur d'une nanostructure et de ne le libérer que dans le site malade, on éviterait complètement d'exposer des tissus sains.
    Le troisième élément consiste à améliorer la précision des interventions chirurgicales. Lorsqu'on essaie de procéder à l'ablation d'une tumeur, il suffit de laisser survivre deux cellules cancéreuses pour que la tumeur réapparaisse. Des travaux réalisés à l'Université Rice ont permis d'utiliser des particules produisant de la chaleur pour cibler une tumeur et la détruire au laser.
    Cette façon de procéder présente deux difficultés. Premièrement, il faut pouvoir transporter le produit jusqu'à la cible. Comment le faire? Quelle taille et quelle forme conviennent le mieux? Une particule dont la taille est inférieure à 100 nm peut se déplacer dans l'organisme, mais comment contrôler son parcours? Il y a aussi la toxicité du produit utilisé. Certains matériaux ont une surface métallique qui peut occasionner des problèmes.
    Le second aspect de la nanotechnologie concerne les processus diagnostiques. Cette diapositive montre une stratégie basée sur l'utilisation de petits grains remplis de nanomatériaux de différentes couleurs, qui servent à produire des codes à barres. Nous avons tous vu à l'épicerie le balayage des codes à barres qui permet au magasin de surveiller ses stocks de chaque produit. Pouvons-nous faire la même chose dans le cas des maladies? Nous pouvons utiliser ces codes à barres à l'échelle moléculaire pour déceler différents caractères génétiques et différentes sortes de protéines associées aux maladies. On pourrait ainsi déceler celles-ci en utilisant non seulement une protéine ou un gène, mais une série de protéines ou de gènes caractéristiques de la maladie.
    Les travaux actuels visent à utiliser cette technologie pour créer un appareil portable qu'il serait possible d'utiliser dans les centres de soins pour déceler automatiquement les infections. On n'aurait en fait qu'à appuyer sur un bouton pour savoir, en l'espace d'une heure, si le patient est atteint de la maladie A, B ou C. Sur la dernière diapositive, je prends l'exemple du paludisme, dont une forme est mortelle tandis que l'autre ne l'est pas.

  (1140)  

    Dans les quelques prochaines années, on insistera beaucoup sur les moyens de transposition et de diagnostic. Des dispositifs portables de diagnostic et de traitement in vitro seront alors commercialisés. Pour ce qui est des applications in vivo, il reste encore beaucoup de travail à faire, mais il sera probablement possible, d'ici 10 à 15 ans, d'injecter certaines substances dans l'organisme pour déceler et traiter les maladies.
    Il ne me reste plus qu'à vous remercier. C'était mon exposé sur la nanotechnologie.
    Merci, monsieur Chan. Vous nous avez présenté un exposé vraiment extraordinaire. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Nous entendrons maintenant M. Voyer.
    Je vais présenter mon exposé en français, mais je suis prêt à répondre à des questions aussi bien en anglais qu'en français.

  (1145)  

    Nous avons des interprètes. Il n'y aura pas de difficultés de ce côté.

[Français]

    J'aimerais tout d'abord remercier...

[Traduction]

    Souhaitez-vous que je suspende la séance pour quelques instants?
    Tout va bien? D'accord.

[Français]

    Ça va, merci.
    J'aimerais d'abord remercier les membres du comité de cette invitation à présenter une partie de mes travaux de recherche qui visent, comme vous pouvez le voir, à construire des nanostructures d'inspiration biologique pour essayer de détruire des cellules bactériennes et cancéreuses.
    Je suis chimiste et je remercie

[Traduction]

    … M. Chan de son excellente introduction…

[Français]

sur la nanotechnologie. Je n'aurai donc pas à la refaire.
    Nous, les chimistes, construisons des molécules à partir de zéro. Nous voulons construire des molécules de l'ordre du nanomètre pour tuer des cellules cancéreuses et bactériennes.
    Pourquoi voulons-nous faire cela? En ce moment, sur la planète, la plus importante menace — et le Dr Plummer en a beaucoup parlé — vient du fait qu'il y a de plus en plus de bactéries résistantes à la chimiothérapie actuelle. De plus en plus de cancers sont résistants aux médicaments actuellement utilisés en clinique. S'il n'y a pas de nouveaux développements et si on ne découvre pas de nouveaux médicaments avec de nouveaux modes d'action, on aura un grave problème au cours des années futures. Il sera plus difficile de contrer les infections bactériennes, les infections virales et les infections de toutes sortes, en plus d'avoir des problèmes avec des cancers de plus en plus résistants.
    Mon domaine de recherche est prometteur à cet égard. Cette nouvelle avenue pour contrer ce fléau est la nanochimiothérapeutique. Comme vient de le dire le Dr Chan, lorsqu'on développe des substances de dimensions nanométriques, celles-ci ont des propriétés physico-chimiques et biologiques totalement différentes des composés qui ne sont pas de l'ordre du nanomètre.
     La nature exploite la nanotechnologie depuis des centaines de milliers d'années puisqu'elle développe des virus, de véritables nanorobots, mais aussi des toxines et des protéines qui ont une dimension nanométrique et qui ont des propriétés absolument incroyables. Une de ces propriétés est de briser l'enveloppe de nos cellules utiles, ce qui conduit à une très grande toxicité.
    Pour bien comprendre mon domaine de recherche, il faut essayer de voir que chaque être humain est composé de milliards de petites cellules. Les bactéries sont des organismes n'ayant qu'une seule cellule, mais les humains en possèdent des milliards. L'intégrité de ces cellules est maintenue par ce qu'on appelle la membrane cellulaire. C'est une toute petite couche mince, une espèce de Saran Wrap qui maintient l'intégrité de la cellule. Or lorsqu'on réussit à percer cette membrane des cellules cancéreuses et des cellules bactériennes, cela conduit à la mort des cellules. Par conséquent, certaines toxines et certaines substances que les bactéries vont sécréter ont la possibilité de briser cette membrane et de tuer des cellules.
    Notre approche, dans notre laboratoire à l'Université Laval, est d'essayer de mimer ces protéines, de faire le design et la synthèse de nanostructures ou de composés de dimensions nanométriques qui ont la propriété de mimer les toxines naturelles qui attaquent et percent les membranes. On veut viser les cellules qu'on veut détruire, soit les cellules cancéreuses et les cellules des bactéries qui sont de plus en plus résistantes.
    L'avantage de cette technique est que cela nous amènera un jour dans une famille qu'on appelle les agents nanochimiothérapeutiques, par extension de la chimiothérapeutique conventionnelle d'aujourd'hui. Ces outils vont potentiellement être des agents thérapeutiques universels pour toutes les bactéries ou tous les virus puisque le mode d'action est totalement inédit. En effet, il n'y aura pas de possibilité de résistance à ce type de mécanisme.
    Pour vous donner un exemple, je vous montre un prototype. La source d'inspiration est une protéine, que vous voyez à gauche, avec des rubans verts et de petites boules pourpres. Cette protéine est sécrétée par une bactérie. Il s'agit d'une toxine qui détruit les globules rouges. Si vous êtes infectés par cette bactérie et que cette toxine est dans votre sang, elle va détruire vos globules rouges et vous allez mourir.

  (1150)  

    Nous nous sommes inspirés de cette protéine pour créer — et vous pouvez le voir à droite — des nanostructures dont la dimension est de trois à quatre nanomètres et qui auront la possibilité de percer la membrane de certaines cellules indésirables. Jusqu'à maintenant, nous avons réussi à démontrer leur activité en tuant des cellules cancéreuses, mais aussi des bactéries.
    Dans le cadre du prochain cliché, je vous montre un petit film. Vous pouvez voir la même nanostructure circuler dans un vaisseau sanguin. Vous voyez les globules rouges à l'arrière. Vous voyez au bas le début d'une cellule cancéreuse de leucémie. La nanostructure va détecter la présence de cette cellule cancéreuse. Par la suite, elle va s'incorporer à la membrane de celle-ci pour créer un port qui va permettre de laisser entrer des ions sodium qui sont en excès. Ce faisant, les ions sodium vont créer un déséquilibre dans la biochimie interne de la cellule cancéreuse. Celle-ci va mourir d'elle-même par un mécanisme qu'on appelle l'apoptose et au sujet duquel je ne vais pas entrer dans les détails. C'est un processus mécanique qui permet de trouer la membrane de la cellule cancéreuse et, par le fait même, de la détruire.
    Évidemment, ce n'est pas pour demain. Dans combien de temps prévoit-on qu'une nanostructure de ce genre pourra être utilisée en clinique? On parle d'environ 10 ou 20 ans. Il s'agit ici d'essais très fondamentaux. Des travaux doivent être réalisés. Il faut préparer des analogues, comprendre en détail le mécanisme d'action, comment il fonctionne et permet de tuer sélectivement des cellules indésirables et non les cellules saines de notre corps. Il faut aussi déterminer l'innocuité, la dose thérapeutique, l'efficacité et ainsi de suite.
    Pourquoi le gouvernement du Canada devrait-il soutenir ces travaux? La nanomédecine, qui comprend le nanodiagnostic, dont on a beaucoup parlé plus tôt, et la nanothérapeutique, implique des technologies dont le potentiel est énorme et qui peuvent révolutionner la façon dont nous diagnostiquons et traitons les patients. Cela va faciliter un diagnostic très précoce, soit un

[Traduction]

    contrôle direct au centre de soins.

[Français]

     Cela va évidemment diminuer les coûts associés aux soins de santé et améliorer la qualité de vie.
    Mais la raison principale est la suivante: pour qu'on puisse un jour voir le fruit de ces travaux de recherche au Canada, il faut absolument que le gouvernement subventionne ces derniers, qui sont trop risqués pour l'industrie. En effet, les industries n'ont pas l'argent nécessaire pour étudier et développer ces technologies qui arriveront à maturité dans 10 ou 20 ans. Cela va coûter très cher et elles n'ont pas ces ressources. C'est à ceux qui font de la recherche fondamentale dans les universités, aux chercheurs universitaires, de développer ces nouvelles approches. Par la suite, les compagnies pourront les faire fructifier et en développer les applications concrètes.
    Je voudrais terminer en remerciant les organismes subventionnaires, particulièrement le CRSNG, qui a toujours appuyé mes travaux de recherche.
    Il va me faire plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup pour cet exposé très intéressant. En fait, nous avons eu droit ce matin à une série d'exposés d'un intérêt extraordinaire.
    Comme nous n'avons pas encore entendu le timbre, nous allons poursuivre. Je m'excuse d'avance de l'interruption qu'il y aura lorsque le timbre retentira.
    Docteur Plummer, je crois savoir que vous devez partir à 12 h 15. Je tenais à le signaler au comité pour que les membres qui ont des questions à vous poser le fassent avant votre départ.
    Monsieur Marra et docteur Huntsman, je crois que vous restez avec nous jusqu'à midi. Pouvez-vous rester quelques minutes de plus si c'est nécessaire?

  (1155)  

    Peut-être une dizaine de minutes de plus. Autrement, il sera en retard pour sa prochaine réunion.
    Très bien. Nous allons probablement nous retrouver tous pour déjeuner. Si vous n'aviez pas été en Colombie-Britannique et le Dr Plummer à Ottawa, j'aurais pu penser que vous essayez de vous esquiver, mais je ne crois pas que ce soit le cas.
    Nous allons maintenant passer aux questions et réponses parce qu'il est rare que nous ayons l'occasion d'interroger des témoins aussi savants sur des sujets que nous connaissons bien peu nous-mêmes.
    Je vais commencer par donner la parole à Mme Davies.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'espère être en mesure de poser quelques questions intelligentes. Je n'ai jamais pensé que j'assisterai à une réunion du Comité de la santé où il serait question du fonctionnement des lumières décorant les arbres de Noël. J'ai trouvé cela très intéressant.
    Je dois dire aussi que je me suis sentie un peu dépassée. J'ai pris beaucoup de notes pour me souvenir des principaux points de chaque exposé. J'ai eu l'impression de suivre un cours intensif d'une heure sur la génomique, la nanotechnologie, etc. J'en ai absorbé une partie, et je sais que j'ai d'innombrables questions à poser.
    Toutefois, voici ce à quoi je pense. Nous avons des recherches incroyables qui sont en cours à différentes étapes. Dans certains cas, le Canada est très avancé, ce que nous apprécions beaucoup. Pour moi, cependant, la question qui revient constamment, c'est de savoir comment mettre ces extraordinaires nouvelles technologies à la portée des gens.
    C'est M. Marra, je crois, qui a parlé de toute la question de la médecine personnalisée. Il a dit, par exemple, que l'accès à de nouveaux médicaments aux fins de la médecine personnalisée et des recherches en cours changera la façon dont nous menons nos essais cliniques parce que nous devrons travailler à un niveau élémentaire. M. Chan nous a également parlé de la nanotechnologie et nous a dit qu'il faudra attendre les résultats pendant 10 ou 20 ans.
    La question que je me pose, parce que le comité a entrepris cette étude, concerne ce que nous devons faire pour nous préparer d'avance en vue des applications qui font actuellement l'objet de vos recherches. J'ai eu l'impression que nous faisons déjà ce qu'il faut dans une certaine mesure, mais que, dans certains cas, les échéances sont beaucoup plus éloignées. Il serait vraiment fâcheux d'en arriver à un point où, après avoir réalisé des progrès, nous n'aurons pas la possibilité — à cause d'essais cliniques, d'approbations ou même de l'accès aux patients — de mettre en application les connaissances acquises, créant ainsi un grand vide.
    Je ne sais pas s'il y en a parmi vous qui ont abordé ce domaine. C'est peut-être simplement que vous êtes à l'avant-garde et que d'autres s'occupent des suites à donner. Quoi qu'il en soit, vous pouvez peut-être nous donner une idée des questions sur lesquelles le comité devrait concentrer son attention lorsqu'il rédigera son rapport. À quoi devons-nous nous préparer sur le plan des politiques pour être en mesure de mettre en application les résultats de vos recherches et d'aider les gens à l'avenir? Y en a-t-il parmi vous qui veulent répondre à cette question?
    Qui veut répondre en premier?
    Je crois que cela nous ramène à certaines des questions que Marco et moi avons abordées et auxquelles d'autres ont fait allusion. Si nous devons adopter le concept d'une médecine plus individualisée comme moyen de rendre notre système de soins de santé plus efficace, plus économique et plus attrayant, nous devons repenser notre processus d'homologation des médicaments et notre façon de considérer les nouvelles interventions spécialement conçues pour des patients donnés, par opposition à ce que nous avons fait jusqu'ici. Dans son ensemble, notre système de soins de santé se fonde essentiellement sur des approches génériques de lutte contre les maladies. Il y a des aspects qui relèvent de la compétence fédérale et il y en a évidemment d'autres qui relèvent d'autres administrations. Cet aspect peut être contrôlé au niveau fédéral.
    Il y a aussi le financement de la recherche sur le changement des systèmes. Nos systèmes de dossiers médicaux sont conçus en fonction d'un volume minimal de données pour chaque patient. Cela ne suffira pas à l'avenir. Nous nous orientons vers une médecine à haut contenu, dans laquelle le génome et d'autres renseignements constitueront des éléments de base du dossier médical. Il faudra peut-être être très innovateurs et envisager des dossiers électroniques contrôlés par les patients ainsi que d'autres nouvelles idées.
    À l'échelle fédérale, nous pourrions mettre en place un cadre pour essayer différents modèles et, en cas de réussite, pour en assurer l'adoption à l'échelle nationale. Toutes ces initiatives relevant d'une médecine plus personnalisée à haut contenu nécessiteront différentes recherches pouvant toucher les services de santé ou être d'une nature plus fondamentale. Toutefois, pour faire profiter les Canadiens des découvertes phénoménales qui sont faites au sujet de nombreuses maladies, nous devons commencer à penser à ce qui se passe en aval.

  (1200)  

    Je m'associe aux observations que David vient de faire. La question est de savoir comment éviter d'aboutir à un grand vide. Je dirais…
    Monsieur Marra, il ne reste que quelques minutes, et deux autres personnes souhaitent donner une réponse. Puis-je vous demander de vous limiter à une minute ou 30 secondes pour que chacun puisse avoir son tour?
    D'accord.
    Le problème n'est pas seulement d'aboutir à un grand vide. J'allais dire que nous sommes en fait au bord d'un précipice et qu'il nous faut agir rapidement.
    Excellent argument.
    À vous, docteur Plummer.
    Je note que toutes ces choses se produisent très rapidement et qu'à mon avis, notre société n'est pas prête à s'y adapter. Il y a toutes sortes de questions concernant les renseignements personnels sur la santé et leur utilisation auxquelles nous n'avons pas encore pensé. Le problème se pose aujourd'hui. Je crois que les autres en conviendront. Dans ce domaine, nous devons encore réfléchir à de nombreux aspects.
    Monsieur Chan.
    Je veux d'abord parler du cycle de vie du développement. À titre d'universitaires, nous sommes à la base de ce cycle. Nous avons besoin d'entreprises qui puissent ou qui souhaitent mettre en application les connaissances acquises. En ce moment, le problème est qu'il n'y a pas d'entreprises dans ce domaine. Si je veux mettre en application ma technologie, à qui dois-je m'adresser? En fait, j'ai obtenu de la collaboration aux États-Unis. Toutefois, comme je vis au Canada, j'aimerais que mes recherches profitent à l'économie canadienne. Voilà l'un des problèmes.
    Pour y remédier, nous avons créé une société qui n'en est encore qu'à ses débuts, mais qui vend déjà des matériaux. Nous les vendons un peu partout dans le monde. J'espère m'en servir comme infrastructure pour permettre à la société de s'occuper de ma technologie. Nous avons des activités à l'échelle mondiale, même si la société n'existe que depuis deux ans.
    C'est un grand problème de la recherche universitaire: comment toucher les gens, comment passer du laboratoire au monde pratique. Sans entité commerciale, cela ne peut pas se faire. La technologie n'est pas mise en application, ne touche pas les gens. Ce n'est qu'une étude intéressante sur papier.
    Je vous remercie.
    Monsieur Voyer, vous souhaitez également répondre.
    Oui. Je serai très bref.
    Je veux simplement dire qu'à mon avis, nous avons besoin — comme on l'a évoqué plus tôt — d'une stratégie nationale de recherche en nanomédecine qui s'appliquerait aussi aux entreprises. Nous avons besoin d'une stratégie de R-D qui englobe aussi bien ceux qui font de la recherche fondamentale que les ingénieurs et les entreprises.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je ne sais pas vraiment où commencer. Nous avons entendu aujourd'hui tant de témoins intéressants.
    Je vais peut-être commencer par poser une question au Dr Plummer. C'est avec un grand intérêt que je vous ai entendu parler de l'utilisation de virus pour combattre les virus. Je me souviens d'un chercheur en maladies du système immunitaire qui nous avait dit la même chose il y a quelques années. Je crois qu'il étudiait la spondylarthrite ankylosante ou une maladie du même genre et qu'il avait découvert que l'administration d'un virus inoffensif aux patients permettait d'alléger les symptômes des maladies auto-immunes.
    Vous avez dit que vous avez travaillé sur deux vaccins Ebola et avez également évoqué leur commercialisation. Quelle était la portée de ces recherches? Croyez-vous que les résultats seront disponibles dans les prochaines années? Dans quelle mesure est-il difficile de commercialiser des produits de ce genre?
    L'utilisation de virus comme vecteurs d'un gène qu'on souhaite transmettre est devenue plus ou moins courante en thérapie génique et, plus récemment, en vaccinologie. Nous utilisons deux virus pour transmettre des gènes Ebola: un nanovirus et un virus des vaches appelé virus de la stomatite vésiculaire. Les deux engendrent de fortes réactions immunitaires qui protègent les singes contre un virus Ebola mille fois plus mortel. Les vaccins semblent également avoir une certaine efficacité après l'exposition, de sorte qu'ils peuvent probablement avoir un certain rôle thérapeutique lorsqu'une personne est accidentellement exposée au virus Ebola.
    Ce genre de thérapie génique a une multitude d'applications possibles — dont je n'ai pas une connaissance spécialisée — qui comprendraient certainement le cancer et certaines maladies causées par des déficiences génétiques. La thérapie génique n'est pas encore très courante, mais nous avons décidé de foncer dans le cas de la commercialisation de ces deux vaccins. Nous avons trouvé des entreprises intéressées à la distribution de cette technologie sous licence. Nous avons l'intention d'entreprendre quelques essais cliniques avec elles dans les deux prochaines années.
    Ces vaccins n'auront pas un très grand marché. Il s'agit essentiellement d'un créneau pouvant intéresser les militaires, les milieux de la sécurité et les laboratoires. Toutefois, je crois qu'ils seront commercialisés dans les deux prochaines années.

  (1205)  

    Merci beaucoup.
    Ma question suivante s'adresse au Dr Huntsman. De quelle façon le gouvernement pourrait-il réduire les tracasseries administratives de façon à faciliter la réalisation de projets de recherche conjoints financés à l'échelle provinciale et fédérale? On nous dit que les choses évoluent très vite et que le gouvernement doit établir un cadre de réglementation. Selon vous, que devons-nous faire pour réduire cette part des tracasseries administratives que les chercheurs doivent affronter?
    Les chercheurs ont en général beaucoup d'imagination et réagissent très bien lorsqu'on leur offre une carotte. Vous contrôlez le financement. Si vous estimez que l'élimination des tracasseries administratives est importante, vous pouvez vous en occuper à Ottawa, mais vous pouvez aussi offrir des possibilités de financement à l'échelle interprovinciale et vous attaquer aux grands problèmes entourant la personnalisation des soins de santé. Ainsi, vous pourriez capter l'imagination d'autres intéressés dans le but de trouver des solutions.
    Le domaine de l'homologation des médicaments relève de la compétence fédérale. Vous pourriez y jouer un très grand rôle en travaillant avec les milieux intéressés pour réorganiser le processus d'homologation des médicaments dans le contexte de la médecine personnalisée. Beaucoup de gens ont probablement comparu devant vous et essayé d'intervenir ailleurs — comme Janet Dancey, de l'Institut ontarien de recherche sur le cancer, et des membres du Groupe d'essais cliniques de l'Institut national du cancer du Canada — pour souligner la nécessité de repenser le processus d'approbation des médicaments. Ce serait une mesure d'une importance considérable.
    Les approbations n'ont pas à être complètes. Elles peuvent s'appliquer seulement à l'étude sur le terrain sans aller jusqu'à l'approbation générale. Il y a différents moyens d'envisager les choses.
    Bref, dans le domaine du financement, si des occasions sont offertes pour encourager les gens de différentes provinces à travailler ensemble, des solutions peuvent certainement en découler.
    Très bien.
    Monsieur Marra, je voudrais revenir à la question soulevée par Libby parce que ce domaine de recherche a toute une gamme d'applications, qu'il serait cependant très coûteux d'appliquer à l'ensemble de la société. Je me demande si vous avez des idées ou si vous pouvez nous en dire davantage sur les moyens de réduire les coûts pour que ces applications soient adaptables et abordables pour les Canadiens.
    Les recherches sont encore en cours. L'évolution de la technologie continuera à réduire les coûts, mais je n'ai pas l'impression, compte tenu de ce que je sais du traitement du cancer, que le coût d'une analyse génomique détaillée soit excessif, même en milieu clinique. Si on considère que le coût direct d'une greffe de moelle osseuse dépasse le quart de million de dollars, le fait de consacrer 1 000 $ à une analyse génomique destinée à déterminer si une personne profitera ou non de la greffe constitue non un coût, mais un investissement. Voilà où nous en sommes actuellement. Cela explique que la médecine personnalisée se manifeste et qu'on recourt énormément à la génomique dans ce contexte.
    Le Dr Huntsman a noté qu'il existe d'autres moyens de mesure qui peuvent s'appliquer et qui s'appliqueront à la médecine personnalisée. C'est tout à fait vrai. Nous ne savons pas pour le moment-ci s'il sera vraiment nécessaire de faire une analyse génomique complète de chaque patient qui pourrait en profiter.
    Nous n'avons pas besoin d'invoquer la réduction du prix de la technologie en deçà du niveau actuel pour nous prononcer en faveur de la médecine personnalisée.
    On peut observer un phénomène intéressant qui se manifeste dans le domaine public. C'est ce que certains appellent la « génomique récréative »: vous vous adressez à une société qui vous demande de cracher dans un tube et de lui envoyer cet échantillon de votre ADN. Pour quelques milliers de dollars, la société vous renvoie un imprimé non médical indiquant ce que révèle votre génome, y compris la propension de vos oreilles à produire du cérumen. Le public achète ce genre de service sans en tirer un avantage médical quelconque. C'est pour cette raison qu'on parle de génomique récréative, mais cela donne une idée de l'intérêt des gens. Il y a des entreprises qui vivent de cet intérêt.
    Nous sommes à une époque où les gens s'intéressent à l'information et veulent avoir ce genre de renseignements. Ils sont très attirés par la médecine personnalisée. Le public l'exigera. La question est de savoir comment en arriver là tout en profitant des avantages médicaux.
    Les prix baisseront. Plus nous aurons recours à la technologie et, comme l'a dit le Dr Huntsman, plus les gens s'y intéresseront, plus rapidement les prix diminueront. Cela augmentera la faisabilité, mais ne changera rien au fait que tout cela est réel et actuel.

  (1210)  

    Merci beaucoup de votre réponse, monsieur Marra. Vous nous avez dit que vous souhaitez partir vers cette heure-ci. Docteur Huntsman, monsieur Marra, pouvez-vous rester quelques minutes de plus, ou bien allez-vous partir tout de suite? Je voudrais vous remercier de votre présence. Quelle est votre réponse?
    Je peux rester quatre minutes de plus.
    Je peux aussi rester cinq minutes.
    Excellent.
    C'est maintenant au tour de M. Easter.
    Merci, madame la présidente.
    Je voudrais également remercier les témoins.
    Je dois admettre que je ne fais pas ordinairement partie de ce comité, mais c'est probablement l'une des séances les plus intéressantes et les plus tournées sur l'avenir auxquelles j'ai assisté depuis longtemps.
    Je viens de rentrer des États-Unis où j'ai assisté aux réunions de l'Association interparlementaire Canada-États-Unis. Nous avons discuté du gouffre fiscal, du système américain de soins de santé par rapport au nôtre, etc. Compte tenu des mesures que Washington doit prendre pour réduire son énorme déficit budgétaire, de sérieuses craintes se manifestent aux États-Unis. Dans une certaine mesure, c'est un peu la même chose au Canada.
    De nombreux secteurs craignent qu'on sabre le financement de la R-D. Ayant écouté les exposés d'aujourd'hui, je crois, madame la présidente, que ce ne serait pas une bonne idée chez nous. Deux choses semblent ressortir de ces exposés.
    L'un de nos témoins — je crois que c'était vous, docteur Plummer — a dit que nous avons besoin de repenser notre système d'homologation des médicaments et que les interventions médicales personnalisées devraient être adoptées plus rapidement. Quelqu'un l'a dit. La seconde chose, c'est que nous avons besoin d'une stratégie de R-D tenant compte de la nanotechnologie, etc. De quoi avons-nous besoin pour réaliser ces deux objectifs?
    Qui veut répondre à cette question?
    À vous, docteur Plummer.
    Ce n'est pas moi qui ai parlé du processus d'homologation des médicaments personnalisés. Je crois que c'est une question importante. Je n'ai pas de solution à proposer, mais il faut y réfléchir et penser aussi à la façon dont ces technologies modifient notre façon d'agir dans le secteur des soins de santé.
    Ayant consacré beaucoup de temps à présenter des demandes de subventions de recherche — pas en nanotechnologie, mais dans d'autres domaines —, j'estime que nous avons besoin de subventions d'un montant plus élevé et d'un financement plus ciblé que ce que nous avons actuellement afin d'être en mesure de concentrer nos efforts sur des secteurs donnés, qu'il s'agisse de la nanotechnologie, de la génomique ou d'autre chose.
    Monsieur Chan.
    En ce qui concerne la nanotechnologie, la première chose que je ferais serait de créer des capacités dans les universités pour aider les jeunes chercheurs qui travaillent dans ce domaine. Il y a eu des programmes financés par le CRSNG et les IRSC, mais il arrivait souvent que les gens modifient leurs recherches pour les adapter à l'espace nano lorsqu'il n'y avait pas vraiment beaucoup de chercheurs de calibre mondial en nanotechnologie.
    La première question à se poser est la suivante: comment amener les universités à attirer des gens compétents qui travaillent dans ce domaine? Je ne suis pas originaire du Canada. J'ai été « importé ». J'ai été l'un des premiers à travailler à l'échelle nano en biologie et en médecine. Par conséquent, comment faire venir ces gens au Canada?
    Ensuite, il faut élaborer une stratégie, établir des centres et bâtir des infrastructures. Nous avons suffisamment d'infrastructures grâce aux subventions de la Fondation canadienne pour l'innovation, mais nous n'avons pas actuellement assez de compétences dans cet espace particulier par rapport à d'autres pays. Il y a actuellement une forte concurrence dans ce domaine entre Singapour, la Corée du Sud et les États-Unis. Nous avons en outre besoin de mettre un financement suffisant à la disposition de ces gens pour leur permettre de soutenir la concurrence.
    Je crois que ce sont les premières choses à faire: trouver les gens, mettre en place les compétences voulues pour soutenir la concurrence à l'échelle mondiale. À mon avis, nous n'y sommes pas parvenus en nanomédecine. Nous avons des gens capables de tâter ce domaine, mais peu d'experts. En ce moment, nous ne pouvons pas nous comparer à Singapour au chapitre des capacités.

  (1215)  

    Monsieur Voyer.
    Je crois que le Canada a bien réussi à créer des capacités en génomique en établissant des liens entre les gens. Je pense que nos collègues peuvent en témoigner.
    Parallèlement à Génome Canada, nous avons besoin d'une sorte de « Génome-Nanomédecine Canada » qui regrouperait les scientifiques du domaine. En ce qui concerne la nanotechnologie et la nanomédecine, c'est un secteur de recherche pluridisciplinaire très complexe.
    Une voix: C'est vrai.
    M. Normand Voyer: Nous avons besoin d'ingénieurs, de chimistes, de biologistes et de médecins qui travaillent ensemble. Nous avons besoin d'un réseau de scientifiques travaillant conjointement. Nous pouvons créer un tel réseau en établissant une série…
    La présidente: Docteur Plummer.
    M. Normand Voyer: … de programmes nationaux.
    Je m'excuse, monsieur Voyer.
    À vous, docteur Plummer.
    Je dirai simplement que j'appuie ce point de vue. Génome Canada a très bien réussi à créer des capacités en génomique. La même stratégie pourrait aussi être envisagée…
    Est-ce que nos deux témoins de la Colombie-Britannique peuvent également répondre?
    Monsieur Easter, le Dr Huntsman voulait intervenir au sujet de votre dernière question. Êtes-vous d'accord?
    Oui.
    À vous, docteur Huntsman.
    Je crois qu'au Canada, il ne suffit pas d'avoir les meilleurs soins de santé. Il faudrait aussi que ces soins soient équitablement dispensés. Il est nécessaire d'être équitable au niveau aussi bien provincial qu'interprovincial. Pour ce qui est de l'homologation des médicaments, c'est Santé Canada qui s'en occupe. Il faudrait peut-être organiser des réunions « remue-méninges » avec Santé Canada et les équipes d'approbation des médicaments du ministère pour essayer d'examiner la question puisqu'il ne sera pas possible de trouver des solutions sans quitter les sentiers battus. Il y a cependant des gens qui étudient certaines idées. Ils sont bien connus des décideurs de Santé Canada.
    Si nous pouvons aller de l'avant à cet égard, le Canada sera à l'avant-garde des approches individualisées du traitement du cancer et d'autres maladies. Si nous ne pouvons pas le faire, nous prendrons du retard, ce qui serait vraiment dommage parce que beaucoup des données de base dont nous pouvons nous servir pour aller de l'avant sont attribuables à des chercheurs canadiens et à des investissements du gouvernement canadien.
    Docteur Easter… Je crois que je vous ai donné une promotion. Monsieur Easter, il vous reste encore une minute.
    Y a-t-il dans ce domaine une coordination suffisante pour assurer le succès, surtout au niveau national, mais aussi au niveau international? Je crois que Génome Canada a bien travaillé, mais faut-il adopter le même modèle dans le cas de la nanotechnologie? Quelqu'un doit faire preuve du leadership nécessaire pour aller plus loin. C'est ce que j'essaie de dire.
    Est-ce là ce dont nous avons besoin pour essayer de relier tous les éléments à l'échelle nationale, sous la direction du gouvernement fédéral, en incluant le secteur de la recherche, le secteur universitaire, etc.?
    Qui veut répondre?
    Monsieur Chan.
    Je crois qu'il est nécessaire d'établir un lien clair avec la communauté internationale en ce qui concerne la nanomédecine et la recherche nanobiologique.
    Nous collaborons avec des gens des États-Unis. En ce moment, j'ai des discussions au sujet d'une participation à l'établissement d'un programme conjoint entre Toronto et l'Université Nanjing. Ces questions sont en discussion.
    En fin de compte, il y a beaucoup de compétences un peu partout dans le monde. Il y en a aussi au Canada, mais c'est un espace mondial…
    Merci, monsieur Chan.
    Je vais maintenant donner la parole à Mme Block.
    J'aimerais savoir, madame la présidente, si nos témoins en vidéoconférence vont partir tout de suite. Je sais que nous leur demandons constamment de rester quelques minutes de plus, mais pouvez-vous confirmer qu'ils vont rester?
    Messieurs, devez-vous partir tout de suite ou bien pouvez-vous encore répondre à quelques questions?
    D'accord, madame Block, vous pouvez y aller.
    Je crois que Marco vient de partir. Personnellement, je n'ai pas le temps de répondre à d'autres questions.
    Au revoir, Marco. Nous vous gardons en otage, docteur. Merci beaucoup de votre présence.
    Docteur Plummer, je crois que, pour vous aussi, c'est le temps de partir. Docteur Plummer, monsieur Marra, docteur Huntsman, nous vous sommes très reconnaissants de votre témoignage, de votre aide et des renseignements très intéressants que vous nous avez présentés.
    Au revoir. Madame Block, vous pouvez poser votre question suivante.
    Merci beaucoup, madame la présidente. J'avoue que quelques-unes de mes questions étaient destinées aux témoins qui viennent de partir. Je voudrais cependant m'associer à beaucoup de mes collègues qui ont parlé des renseignements que nous avons reçus aujourd'hui. Je trouve extraordinaire de penser à toute la recherche qui est actuellement en cours dans ce domaine et au fait que nous n'en avons qu'une compréhension limitée autour de cette table.
    Quoi qu'il en soit, je voudrais revenir à certaines des observations formulées au sujet de cette technologie. J'ai pris quelques notes: l'évolution est très rapide; la société n'est pas prête, nous sommes au bord du précipice. J'aimerais donner aux témoins présents la possibilité de nous parler des préoccupations qu'ils pourraient avoir en ce qui a trait au rythme de progression de cette technologie et à ce que nous devons faire, comme société et comme gouvernement, pour établir un cadre réglementaire.
    Je vous invite tous deux à répondre à cette question.

  (1220)  

    Au chapitre de la nanotechnologie, le problème en ce moment est que les différents organismes ne savent pas comment la réglementer. Faut-il la réglementer comme médicament ou comme dispositif? Je collabore tant avec la FDA des États-Unis qu'avec Santé Canada. Les deux organismes essaient d'aboutir à une réponse à ce sujet. En ce moment, la nanotechnologie est considérée comme une chose spéciale à étudier au cas par cas. C'est l'une des difficultés.
    L'autre difficulté concerne l'information. Nous mettons au point des moyens de déceler les facteurs génétiques. Est-ce trop d'information? Cela suscite des questions éthiques. Si nous savons qu'une personne a certaines prédispositions génétiques, surtout si nous l'avons déterminé à l'aide d'un dispositif utilisé dans un centre de soins, quels en sont les effets sur la personne qui fait l'analyse? Facebook et les médias sociaux ont changé notre conception de la communication. Autrement dit, la technologie nous permet de mieux communiquer. S'il vous suffit de consulter votre iPhone pour déterminer si vous avez une prédisposition génétique à telle ou telle maladie, qu'allez-vous faire de ce renseignement? C'est à ces questions que nous devons répondre aujourd'hui.
    Dans cette optique, c'est une question d'éthique.
    Allez-y, monsieur Voyer.
    Merci beaucoup de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue à ce sujet. Je crois que l'un des dangers, à l'heure actuelle, est de prendre du retard sur beaucoup de pays du monde. L'Europe, les États-Unis et même Singapour et d'autres pays asiatiques font de grandes percées en nanotechnologie, surtout dans le secteur médical.
    Je crains beaucoup que tout l'argent investi au Canada dans la recherche fondamentale qui a produit de nouveaux dispositifs et de nouveaux développements finisse dans la poche de sociétés étrangères. Si nous sommes déterminés à tirer parti dans la mesure du possible des investissements que nous avons déjà faits en nanotechnologie, nous devons nous réunir pour discuter et constituer au Canada un réseau de scientifiques et de sociétés capables d'utiliser les résultats de la recherche fondamentale dans des applications pratiques utiles pour la santé et le bien-être des Canadiens.
    Vous avez parlé de la nécessité pour l'industrie, les chercheurs et les sociétés de travailler en commun pour lancer ce genre de partenariat. À votre avis, comment faut-il procéder pour le faire?
    Voici justement la première difficulté. Nous n'avons pas vraiment une industrie de la nanotechnologie au Canada. Même si nous souhaitons mettre le secteur privé dans le coup, cela pourrait être difficile parce qu'il n'y a pas beaucoup d'activités de nanotechnologie dans de grandes entreprises. Nous avons peut-être quelques sociétés en démarrage de trois ou cinq personnes, mais les intervenants de calibre mondial sont plutôt rares.
    Si nous voulons y parvenir, comment faire? Comment intéresser des sociétés à ces activités et comment les encourager à y réussir concrètement, pas seulement en théorie? C'est une difficulté. Je collabore actuellement avec des sociétés américaines parce qu'elles disposent d'une certaine infrastructure, possèdent des brevets et ont les moyens de mettre en application certains résultats de la recherche. Nous essayons de faire la même chose au Canada, mais, encore une fois, c'est difficile.
    On ne peut pas agir auprès des universités, de l'industrie, etc. Par conséquent, la première chose à faire est de trouver un moyen de bâtir une industrie dans ce secteur émergent. Cela nécessite encore plus de réflexion quant à la façon de mettre en application les résultats de la recherche.
    Je crois aussi qu'il y a des occasions au Canada, même si le secteur industriel n'est pas très développé. Vous savez sans doute que le secteur pharmaceutique et le secteur biopharmaceutique sont en train de changer du tout au tout au Canada parce que toutes les grandes sociétés pharmaceutiques se retirent de la recherche fondamentale. Il y a un groupe de travail formé de scientifiques incroyablement compétents qui peut contribuer. Il y a des sociétés en démarrage que nous devrions subventionner différemment. Il y a un nouveau modèle à définir dans le cas de ces recherches à risque élevé qui peuvent mener à de grandes découvertes et à de nouvelles technologies pour traiter différents types de cancer, les bactéries résistantes, etc.
    Le diagnostic constitue aussi un autre domaine qui s'appuie de plus en plus sur la nanotechnologie. Cela se fait déjà.

  (1225)  

    Il vous reste environ une minute.
    Monsieur Chan, je voudrais vous poser une question précise au sujet de votre horizon temporel. Dans le contexte des questions précédentes, de quelle façon est-ce que ces facteurs, ces réalités se répercutent sur les délais d'application de ces technologies?
    Je suis en train de construire. C'est un peu comme si j'étais architecte scientifique. J'ai commencé il y a 10 ans. Je sais que la commercialisation est importante. C'est la raison pour laquelle nous avons lancé cette entreprise à Burlington. L'année dernière, nous avons commencé à vendre des matériaux. Nous n'avons pas jugé nécessaire de nous occuper tout de suite d'articles à la fine pointe de la technologie. L'année dernière, nous avons eu des recettes d'environ 500 000 $ dans notre deuxième année d'existence. Nous avons établi des réseaux mondiaux. Nous avons un centre de distribution en Chine et un autre en Australie. Je me sers de cette entreprise pour bâtir un scénario et constituer des compétences. Ainsi, lorsque nous serons prêts au niveau universitaire, nous aurons un moyen de mettre nos résultats en pratique.
    C'est juste ma stratégie personnelle, mais, encore une fois, tout le monde n'a pas des stratégies de ce genre. Comme nous n'avons pas un réseau au Canada, les sept centres de nanotechnologie du cancer font de grands efforts pour trouver des collaborateurs et des partenaires industriels et pour entreprendre des essais cliniques. Je suis en relation avec quelques-uns de ces centres dans le cadre de collaborations, parce qu'ils ont besoin de notre expertise.
    Ainsi, il faut qu'on construise soi-même, comme universitaire, à cause du manque de compétences, ou alors on laisse l'industrie le faire. Il arrive cependant que l'industrie ne comprenne pas vraiment les technologies émergentes. Il faut en outre former des gens pour leur apprendre à mettre en application les résultats de la recherche. Comme il s'agit de nouveaux domaines, certaines personnes désireuses de lancer une entreprise pourraient ne pas comprendre toute l'importance que revêt la nanotechnologie. On a besoin d'expérience. Les gens peuvent avoir lu certaines choses, mais ils ont besoin d'expérience pratique pour agir.
    Merci beaucoup, monsieur Chan et madame Block. Une très bonne question et une très bonne réponse.
    Nous allons maintenant entreprendre un tour de cinq minutes. Je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas encore entendu le timbre. C'est merveilleux.
    Une voix: Il n'y a pas de vote.
    La présidente: D'accord, c'est changé. Je vous remercie.
    C'est maintenant au tour de Mme Sellah. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins qui sont présents et ceux que nous avons entendus par l'entremise d'une vidéoconférence. Malheureusement, ils n'auront pas eu l'occasion de m'entendre.
    En tant que Canadienne, je suis très fière des nouvelles technologies dans le domaine de la santé publique, ne serait-ce que la nanotechnologie et la génotechnologie, si on peut l'appeler ainsi. Je suis par contre désolée de voir que, même si nous avons la possibilité d'être un leader à l'égard de ces deux technologies, il y a des obstacles, si j'ai bien compris vos exposés respectifs.
    Ma première question s'adresse au Dr Voyer.
     Selon la liste que j'ai sous la main, votre travail porte surtout sur la recherche fondamentale. Comment croyez-vous que les compressions appliquées présentement par le gouvernement vont affecter la recherche appliquée de demain? Je crois qu'il y aura probablement des conséquences économiques. Ma crainte concerne l'effet des compressions actuelles en matière de recherche fondamentale sur la recherche appliquée et, par conséquent, sur l'accès des Canadiens à des technologies modernes.
    L'autre partie de ma question concerne le financement. Comment voyez-vous l'équilibre entre le financement public et le financement privé, compte tenu que le financement privé a pour but l'obtention de dividendes découlant de la recherche appliquée?
    Merci.
    Je vous remercie. Comme vous m'avez posé la question en français, je vais y répondre en français.
    Dans tous les pays du monde où l'on fait de la recherche, on observe une forte tendance à diminuer les fonds publics destinés à la recherche fondamentale au profit de la recherche orientée. Il n'y a pas nécessairement de mal a faire de la recherche orientée; c'est même souhaitable en matière de développement. Il reste que les grandes découvertes scientifiques qui ont un impact réel sur la qualité de la vie de tous les jours émanaient de la recherche fondamentale. On peut penser, par exemple, à la découverte du nylon ou du téflon. Au départ, il s'agissait de recherche fondamentale, réalisée dans un laboratoire. Il faut donc absolument financer la recherche fondamentale.
    Cependant, la recherche fondamentale d'aujourd'hui n'est pas ce qu'elle était auparavant. Elle est maintenant beaucoup plus transdisciplinaire. On ne travaille plus en silo, mais horizontalement. Pour que la recherche fondamentale puisse déboucher sur des découvertes pratiques, il faut travailler avec des scientifiques de différents secteurs. Par conséquent, il faudrait que les programmes de subvention soient adaptés à cette réalité.
    J'ai été au CRSNG pendant plusieurs années. Pour le moment, les programmes de subvention touchent plusieurs domaines. Nous tentons de nous adapter, mais nous avons besoin de programmes plus flexibles qui vont nous permettre de faire de la recherche fondamentale au stade préliminaire, de façon à faire de grandes découvertes, à travailler par la suite avec l'industrie et à bénéficier alors de

  (1230)  

[Traduction]

    financement de relais.

[Français]

    Quelle était votre deuxième question?
    Je vous parlais du financement public par rapport au financement privé.
    Les chercheurs ont toujours besoin de plus d'argent. Comme le disait le Dr Chan, quand on arrive à la phase du développement, cela coûte de plus en plus cher. La seule façon d'arriver à poursuivre le développement est de faire en sorte que les entreprises disposant de capitaux investissent dans la recherche fondamentale tout en continuant à appuyer la recherche à incidence industrielle. La recherche est ce qui va permettre à la nanotechnologie et à la nanomédecine de générer de réelles applications pratiques qui vont profiter aux Canadiens.

[Traduction]

    Merci, madame Sellah.
    À vous, monsieur Lobb.
    Merci, madame la présidente.
    Chaque fois que je me bercerai de l'illusion que j'ai une intelligence supérieure, j'essaierai de relire le procès-verbal de cette réunion pour revenir sur terre.
    Ma première question s'adresse à M. Chan. Comment vous êtes-vous intéressé à ce domaine?
    J'ai reçu une formation de chimiste. J'ai fait mon doctorat entre 1996 et 2001. Ma discipline était encore la chimie. La nanotechnologie n'était pas encore très courante aux États-Unis. Finalement, en 2000 ou 2001, les Américains ont lancé leur programme de nanotechnologie du cancer. Étant chimiste, je sais fabriquer des matériaux. J'ai ensuite fait des études postdoctorales en génie biomédical, domaine dans lequel nous apprenons maintenant à nous attaquer aux tumeurs en trouvant de nouveaux moyens de diagnostic pouvant aboutir à de nouvelles thérapies. Cette formation a duré deux autres années. Je suis ensuite allé à l'Université de Toronto.
    Vous avez donc fait vos études aux États-Unis?
    Oui.
    Qu'est-ce qui vous a amené à aller à l'Université de Toronto?
    C'est assez intéressant. J'aime la ville. Je l'avais visitée il y a longtemps, et je l'avais beaucoup aimée. J'ai moi-même grandi à Chicago. Lorsque j'ai commencé à chercher un poste d'enseignement, je voulais m'établir dans une ville. Comme j'avais fait mes études supérieures dans une petite agglomération, la ville me manquait. C'est ainsi que j'ai fini par aboutir à Toronto.
    Il y a une heure et demie, je ne connaissais rien de tout ce domaine. C'est peut-être ma faute. Vous avez parlé de bâtir une industrie et de créer des capacités. Pour le faire, nous avons besoin de ressources humaines. Nous pouvons en former chez nous tout en essayant d'attirer des compétences comme les vôtres. Pouvez-vous nous donner une idée de ce qui se passera dans les 5 à 10 prochaines années? Votre parcours a duré une dizaine d'années. Que pouvons-nous faire à l'échelle intérieure et comment pouvons-nous attirer les gens qui connaissent déjà le domaine?
    Pour moi, l'un des bons moyens consiste à faire de bonnes offres de démarrage. Aux États-Unis, établir simplement un laboratoire pour un nouveau membre du corps enseignant revient aux alentours de 600 000 $ à 700 000 $. Offrir un tel montant pourrait être difficile dans les universités canadiennes dont les offres de démarrage ne sont pas aussi élevées. Par conséquent, le meilleur moyen de le faire est d'établir un bon réseau stratégique: les gens attirent d'autres gens.
    Les scientifiques sont des gens intéressants. Si vous avez un très bon laboratoire de recherche, vous attirerez les scientifiques qui veulent travailler dans ce domaine particulier parce que les gens ont tendance à se regrouper pour résoudre les problèmes qui se posent. C'est la raison pour laquelle nous faisons de la recherche. Nous aimons résoudre des problèmes.
    Pour revenir aux États-Unis, les Américains ont établi des réseaux de nanotechnologie du cancer afin de regrouper des gens de différentes disciplines pour essayer de résoudre un problème. Génome Canada a fait du bon travail dans le domaine de la recherche génomique. Dans le cas de la nanotechnologie, j'aime mieux considérer le tableau d'ensemble des technologies émergentes plutôt que la nanotechnologie prise à part, qui n'est qu'un élément des technologies émergentes. Nous ne possédons pas des centres de ce genre. C'est l'une de nos difficultés.
    Si vous voulez recruter des gens au Canada, vous devez faire des offres compétitives. C'est la première chose. À ce stade, vous disposerez déjà de certaines capacités. Il faut alors demander à ceux qui ont été recrutés de se faire connaître pour en attirer d'autres. Il faut aussi les encourager à publier des articles dans les bonnes revues. C'est la deuxième chose. Lorsque je cherche une personne avec qui collaborer, je considère d'abord les éléments les plus brillants. Dans les milieux universitaires, on les reconnaît au niveau des revues qui publient leurs articles. Il existe actuellement 6 300 revues scientifiques, dont trois ou quatre seulement se classent parmi les meilleures qui traitent essentiellement de nanotechnologie. Je connais les meilleurs éléments des différents pays. C'est cela qui m'a attiré.

  (1235)  

    Vous avez créé une entreprise. Je suppose que vous l'avez financée grâce au revenu tiré de votre université et aux autres sources que vous avez mentionnées. Votre entreprise serait donc semblable à beaucoup d'autres petites sociétés en démarrage. Quelles difficultés prévoyez-vous à l'avenir? Qu'il s'agisse d'accès à des fonds ou à du capital de risque ou encore de la recherche de partenaires, quelles sont pour vous les prochaines étapes?
    C'est une très bonne question.
    Je fais confiance aux gens. Le PDG avec qui je me suis associé est un homme extraordinaire. C'est un vendeur d'un grand dynamisme. Il sait comment bâtir des structures. Nous avons en fait monté cette entreprise sans aucun soutien financier, de sorte qu'il n'a reçu aucune rémunération depuis trois ans. Tous ses efforts tendent à développer la société. Nous avons eu recours à différents types de subventions pour mettre en application les résultats de la recherche. En ce moment, notre entreprise compte trois ou quatre personnes. Elle n'est pas très grande, mais nous avons déjà réalisé des bénéfices après deux ans. Nous utilisons chaque dollar de revenu pour acheter davantage d'équipement. Au lieu d'essayer de trouver du capital de risque, nous investissons tout notre revenu dans notre infrastructure. Nous préférons ne pas recourir à du capital de risque pour éviter de voir quelqu'un d'autre essayer de contrôler nos opérations. Nous sommes déjà compétitifs parce que nos matériaux sont nettement supérieurs à ce que les autres entreprises produisent. Ils sont beaucoup mieux caractérisés.
    Une autre question rapide…
    Je regrette, mais votre temps de parole est écoulé. Toutes mes excuses.
    Je voulais parler de propriété intellectuelle.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Kellway.
    Merci, madame la présidente.
    Je suis bien d'accord avec M. Lobb que tout cela est très intimidant. Je crois que j'ai étudié la chimie en 12e année du temps où nous avions encore la 13e année en Ontario. Ce n'était vraiment pas très avancé.
    Monsieur Chan, au cours de notre étude, nous avons entendu parler de la frustration que certains ressentent au sujet de la commercialisation des résultats de la recherche au Canada. Je vous avoue que je ne vois pas très clairement de quelle façon on peut passer de la recherche fondamentale, par exemple, à la prestation de soins aux Canadiens malades.
    J'aimerais demander à nos deux témoins de prendre quelques instants pour décrire le cheminement des résultats de la recherche fondamentale. Quel devrait être le rôle de cette recherche? Nous avons entendu parler de recherche industrielle. Pouvez-vous la définir ou la décrire? Comment fait-on pour utiliser cette technologie dans le système des soins de santé?
    Je me suis orienté vers le monde universitaire parce que je ne voulais pas travailler dans le secteur privé. Je voulais être libre de choisir mon domaine de recherche. J'ai découvert que cela n'est pas possible en réalité, mais j'étais encore jeune et plein d'illusions.
    Néanmoins, j'admire beaucoup les scientifiques qui réussissent à créer leur propre entreprise. Je crois que le rôle des chercheurs universitaires est d'évoluer, d'avoir de nouvelles idées et de former les éléments les plus brillants pour qu'ils puissent lancer ce genre d'entreprises. Je crois personnellement que le meilleur transfert de technologie que je puisse faire consiste à former de bons étudiants des cycles supérieurs, qui pourront travailler pour la société de M. Chan.
    Le mieux que nous, universitaires, puissions faire, c'est découvrir des choses ayant un grand potentiel. Nous créons de la propriété intellectuelle. Nous la protégeons. Nous devrions avoir un groupe de travail chargé de transférer ces technologies et ces brevets sous licence à des entreprises. C'est essentiellement ce qui manque au Québec. Nous avons besoin de plus de gens capables de nous aider et d'un peu plus d'argent pour permettre aux universités d'engager des gens pouvant assister les scientifiques dans la rédaction de brevets. Bien sûr, nous devons pouvoir tirer un revenu de ces brevets. C'est une chose d'obtenir un brevet, c'en est une autre de l'utiliser pour gagner de l'argent.
    Je suppose que M. Chan a créé de la propriété intellectuelle grâce à ses recherches. Il n'a réussi à gagner un revenu que parce qu'il a lancé sa propre entreprise. Voilà comment il faut procéder: faire de la recherche fondamentale, créer de la propriété intellectuelle, la transférer à l'industrie locale et donner aux éléments les plus brillants la formation nécessaire pour qu'ils puissent travailler dans ces entreprises.

  (1240)  

    Je ne sais toujours pas quel rôle le secteur privé joue dans ce processus dans le contexte du système des soins de santé.
    S'il existe une industrie liée à une technologie émergente, c'est vraiment l'endroit idéal pour mettre en application les résultats de la recherche. Le problème, à l'heure actuelle, c'est que cette industrie n'existe pas. La vraie question est donc la suivante: comment pouvons-nous créer de telles industries au Canada? C'est la question à 1 milliard de dollars que presque tous les pays se posent. La Corée a bien réussi parce que Samsung a pris les commandes. La société a acheté des hôpitaux. Elle sait qu'il est important de s'établir dans le domaine des soins de santé. Et comme Samsung a des activités partout dans le monde, elle a pris elle-même l'initiative et a choisi de s'orienter dans cette direction.
    Au Canada, nous n'avons pas une véritable industrie dans le domaine des technologies émergentes. Comment créer l'énergie nécessaire? Nous pouvons choisir entre deux moyens. Le premier, c'est la loterie: on lance toute une série de sociétés en espérant qu'une ou deux réussiront. L'autre moyen, c'est l'approche ciblée, qui consiste à choisir un petit nombre de domaines et à espérer qu'il sera possible d'y réaliser des percées en l'espace de quelques années, à condition de fournir le soutien nécessaire.
    C'est une grande question que tout le monde se pose. J'aimerais vous donner quelques détails sur les événements qui m'ont amené à faire ce que je fais actuellement. Pendant que je faisais mes études supérieures, j'ai mis au point les points quantiques que vous avez vus dans ces fioles. Je voulais m'en servir en biologie. Tout le monde les utilisait déjà en électronique. En 1977, j'avais lu une communication rédigée par un scientifique russe. Mon conseiller m'a dit que nous pouvions utiliser les points quantiques en biologie. Nous les avons donc brevetés et avons vendu le brevet à une société, la Quantum Dot Corporation. Toutefois, après quatre ou cinq ans, cette société n'avait pas encore trouvé une application pratique à ce que nous avions développé.
    Comme scientifique, on a un attachement affectif à la technologie qu'on a créée. J'étais vraiment déçu de l'inaction de cette société, que je n'arrivais pas à m'expliquer. J'ai appris plus tard qu'il y avait eu des conflits internes et des divergences de points de vue. J'ai donc décidé que j'exercerai moi-même plus de contrôle sur la façon de mettre en application les résultats de mes recherches. Toutefois, je ne suis pas sûr qu'il y a beaucoup de scientifiques qui aient ce but particulier. Personnellement, je voulais que les choses avancent.
    Je ne sais pas dans quelle mesure vous êtes à l'aise pour parler de…
    Je regrette, monsieur Kellway.
    Je vous regardais, madame la présidente.
    Je sais, mais je ne vous regardais pas moi-même. J'aurais bien voulu vous laisser plus de temps, monsieur Kellway, mais vous avez déjà eu cette minute.
    À vous, monsieur Lizon.
    Merci, madame la présidente. C'est vraiment dommage que les deux autres témoins nous aient quittés.
    Merci, messieurs.
    Je me sens encore plus handicapé que M. Kellway parce que j'ai fini mes études universitaires beaucoup plus tôt.
    Allons donc, vous n'avez pas à vous sentir handicapé.
    J'essaie de digérer ce que j'ai entendu. Vos exposés étaient d'un grand intérêt.
    Ma première question est la suivante. Je regrette encore que les autres témoins ne soient pas là. Comment tous ces travaux différents sont-ils combinés? En fait, le sont-ils? Y a-t-il quelqu'un qui s'occupe de recueillir les résultats obtenus en génétique pour en faire la synthèse? J'ai l'impression que le travail se fait à des endroits complètement distincts les uns des autres et qu'il n'y a rien pour faire le lien.
    C'est tout à fait faux. La nanotechnologie influe considérablement sur la recherche en génomique. C'est ainsi que la nanotechnologie a permis de produire des nanopastilles et de séquencer tous les gènes pour un millier de dollars. Il y a quelques années, cela coûtait 1 milliard. La nanotechnologie a déjà laissé sa marque sur la recherche en génomique, de sorte qu'intrinsèquement, les disciplines travaillent ensemble. Les découvertes en nanotechnologie influent sur différents domaines. Lorsque nous en parlons — on considère aujourd'hui que ce sont des choses ordinaires —, ceux qui s'occupent de génomique tiennent tout pour acquis et veulent aujourd'hui s'en servir dans des applications de médecine personnalisée. Bref, la nanotechnologie a certainement influencé la génomique.
    Comment se font les choses à l'échelle internationale? Il y a des milliers de scientifiques qui travaillent dans les différents pays, non? Y a-t-il des échanges d'information, ou bien est-ce que chacun essaie de réinventer la roue?

  (1245)  

    Je collabore avec des gens de l'étranger. Grâce à des choses telles que Skype et FaceTime, nous pouvons nous réunir régulièrement pour discuter de projets. En fait, il nous arrive même de présenter des demandes communes de subventions. Les États-Unis permettent à des non-résidents de demander des subventions de recherche. Dans ce cas, si mes interlocuteurs arrivent à obtenir quelque chose, ils m'en envoient une partie pour que je puisse faire des recherches, ici au Canada.
    A l'heure actuelle, la recherche est mondialisée, les scientifiques commencent aussi à l'être. Beaucoup de scientifiques peuvent avoir des laboratoires à la fois en Arabie Saoudite et aux États-Unis. C'est la tendance. En Arabie Saoudite, on procède de la même façon. Les Saoudites ont de l'argent à distribuer, mais ils forcent les gens à aller sur place à temps partiel. Toutefois, ils n'exigent pas d'eux qu'ils quittent leur emploi. Aujourd'hui, la science est devenue internationale. Lorsque nous obtenons des résultats, nous les partageons avec nos collaborateurs, que ce soit aux États-Unis, en Chine ou en Europe. Il n'y a plus de tours d'ivoire, comme il y en avait dans le temps. Auparavant, les pays étaient en concurrence les uns avec les autres. Aujourd'hui, tout le monde collabore pour essayer de trouver de nouveaux moyens d'améliorer les soins de santé. En fin de compte, c'est vraiment ce que les scientifiques essaient de faire.
    L'essentiel, pour un scientifique, est d'arriver à publier les résultats de sa recherche. Nous faisons beaucoup de recherches, nous publions beaucoup d'articles et nous lisons ceux des autres. Nous connaissons les experts du domaine et assistons aussi à des réunions. Ainsi, nous sommes au courant de ce qui se passe et participons à de nombreux travaux internationaux réalisés en collaboration en Europe, au Japon et, plus récemment, en Chine.
    Je vais probablement manquer de temps pour ma dernière question. Vous avez dit qu'il est difficile de mettre en application les résultats de votre recherche avec la participation de l'industrie. Supposons que je suis un homme d'affaires et que je m'intéresse à votre travail. Vous venez me voir pour me présenter vos résultats. Comment allez-vous expliquer ce que vous essayez de faire? Supposons que vous venez me voir pour me proposer un scanner pouvant balayer tout le corps et trouver le code génétique de chaque cellule. C'est probablement impossible, mais supposons que cela sera réalisable à un moment donné. Quel est votre objectif réel? Sur quoi travaillez-vous en ce moment? Qu'essayez-vous de développer?
    En ce moment, le premier dispositif que nous voulons réaliser est un appareil portable permettant de diagnostiquer les maladies infectieuses. Nous prenons toute l'information génomique dont nous vous avons parlé et nous nous en servons pour constituer notre système de codes à barres. Est-il possible de développer un appareil qui lira le code à barres de votre sang et nous dira de quoi vous souffrez? Pourrons-nous ensuite stocker cette information dans une base de données?
    J'ai présenté un exposé à la DIA, ou Defense Intelligence Agency des États-Unis, qui s'intéresse aussi à ce concept à des fins de surveillance des activités. En même temps, nous sommes à la recherche de collaborateurs. J'en ai trouvé un au Minnesota. Nous avons des collaborateurs en Afrique du Sud et à Nairobi. En fait, nous allons peut-être analyser des échantillons prélevés sur des prostituées de Nairobi, qui sont atteintes de toutes sortes d'infections. Nous prenons l'information développée par les experts en génomique et la combinons à nos résultats de nanotechnologie afin de créer ces appareils portables. Par conséquent, si vous étiez un homme d'affaires, je vous présenterais des arguments différents de ceux que je soumettrais à un universitaire.
    Merci, monsieur Chan.
    Nous allons maintenant passer à M. Morin.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Si cela ne vous dérange pas, je vais prendre seulement une minute de mon temps de parole afin de déposer une motion. J'aimerais qu'on se penche ensemble sur cette motion lorsqu'on abordera les affaires courantes du comité.
    Vous pouvez distribuer la motion.
    Elle se lit comme suit:
    
Que le Comité étudie les moyens pour le Canada de s’acquitter de la responsabilité qui lui incombe d’élaborer une stratégie nationale de prévention de la cécité, en vertu de la résolution 56.26 adoptée à l’Organisation mondiale de la santé en 2003, appelée Vision 2020 : le droit à la vue. La stratégie devrait être basée sur quatre grands objectifs : intégrer les soins de la vue aux systèmes de santé déjà existants; les doter durablement en ressources financières et autres; qu'ils soient équitables et accessibles pour tous et non seulement aux riches; assurer leur excellence à tous les niveaux.
    Je m'excuse auprès des témoins d'avoir présenté cela tout de suite, mais j'aime que la population canadienne soit informée de ce qu'on fait en comité, et les sessions à huis clos m'horripilent.
    Je vais maintenant poser des questions aux témoins. En novembre, le gouvernement conservateur a apporté des changements importants au Conseil national de recherches Canada. L'une des premières conséquences de ces changements est la perte de centaines d'emplois en recherche qui sont liés au Conseil national de recherches Canada.
    En tant que témoin, trouvez-vous que les changements apportés par le gouvernement conservateur au Conseil national de recherches Canada vont vous aider dans votre travail? Est-ce une bonne chose pour la recherche au Canada?

  (1250)  

    C'est une excellente question. En fait, le gouvernement du Canada a toujours eu des centres de recherches. Le Conseil national de recherches a toujours été un ambassadeur incroyable pour le Canada en matière de recherches. Toutefois, avec les années, on a observé une multiplication potentiellement très utile des conseils nationaux de recherches. Par contre, les subventions en recherche fondamentale étant de plus en plus difficiles à trouver, le gouvernement devait faire un choix entre le CRSNG, les IRSC et les autres organismes tels que le CRH, en plus de soutenir la recherche faite dans les milieux universitaires.
    C'est dommage que certains conseils de recherches du Canada aient dû fermer leurs portes. Plus d'une centaine de scientifiques extrêmement chevronnés vont perdre leur emploi. Par contre, dans les universités canadiennes, de plus en plus de jeunes chercheurs très prometteurs manquent cruellement de subventions et ne peuvent donc faire de la recherche de haut niveau et compétitionner sur la scène internationale.
    En effet, c'est dommage pour le Conseil national de recherches, mais les chercheurs universitaires sur le terrain s'entendent pour dire qu'une rationalisation du Conseil national de recherches était nécessaire. Toutefois, si cela se fait au détriment de toute la recherche fondamentale, je pense qu'on n'aura rien gagné au Canada.
    Je vous remercie de cette réponse.
    Cela m'amène à la deuxième partie de ma question.
    Le président du CNRC, John R. McDougall, avait confirmé que les changements apportés à son conseil entraîneraient des modifications quant au genre de recherches menées par le CNRC. Il mentionnait qu'il y aurait moins de recherches scientifiques que de recherches fondamentales, et qu'il y aurait plus de recherches concernant les répercussions sur l'industrie et la vente commerciale.
    Selon nos deux témoins, est-ce une bonne réorientation de la mission du CNRC?

[Traduction]

    Monsieur Chan.
    J'ai juste un commentaire à formuler à ce sujet.
    Je crois que la façon dont le CNR a procédé pour passer de la recherche fondamentale à la recherche appliquée n'était pas très judicieuse. Les scientifiques ont une formation qui les amène à réfléchir d'une certaine façon. Or ce changement radical s'est fait soudainement en l'espace d'un an. Il est difficile pour les gens de changer du jour au lendemain. C'est un peu comme un poisson qu'on sort de l'eau. Je crois que c'est l'un des problèmes qui se posent dans le cas des chercheurs du CNR. J'ai discuté avec quelques-uns d'entre eux parce que nous songeons à une collaboration. C'est un premier aspect.
    Le second, c'est que si chacun s'oriente vers la recherche appliquée, il arrivera un moment où on ne réussira pas à comprendre quelque chose, ce qui mettra fin à la recherche. Comment construit-on les ordinateurs? Si nous avons des ordinateurs, c'est qu'il y a des gens qui ont découvert le mouvement des électrons. Comment peut-on construire un ordinateur sans connaître la façon dont les électrons se déplacent? Sans cette connaissance, on ne pourra pas modifier leur parcours.
    À mon avis, la difficulté actuelle au CNR est de trouver un juste équilibre en faisant suffisamment de recherche fondamentale pour produire la matière première nécessaire à la recherche appliquée.
    À la place des responsables, j'aurais échelonné la transition sur une période de cinq à sept ans, en agissant progressivement pour éviter de désarçonner les scientifiques actuels. On ne peut pas demander à des scientifiques de jouer un rôle pour lequel ils ne sont pas faits. Or c'est ce qu'on leur demande actuellement au CNR.
    Merci beaucoup, monsieur Chan et monsieur Morin.
    Mes collègues de la partie gouvernementale m'ont permis de poser une question. Ce sera la dernière parce que nous arrivons à la fin du temps qui nous est attribué.
    Vous avez parlé de cancer et de nanotechnologie. Vous avez dit qu'une détection précoce améliore les chances de survie et qu'une thérapie ciblée peut réduire les effets secondaires. Comme nous le savons, lorsque les toxines se propagent dans l'organisme, il arrive que le remède soit pire que le cancer lui-même, affectant le cœur et faisant toutes sortes d'autres dégâts.
    Vous avez dit que la nanotechnologie du cancer peut améliorer la précision de la chirurgie. Lorsqu'un cancer tel qu'un lymphome essaime, il devient presque impossible à trouver. De quelle façon la nanotechnologie peut-elle s'appliquer dans un tel cas? Peut-elle améliorer les chances de survie d'un patient? Les progrès réalisés sont-ils actuellement suffisants pour qu'il soit possible de trouver les sites cancéreux qui se sont propagés dans tout l'organisme?
    Parlez-vous des métastases? Cherchez-vous à savoir ce que la nanotechnologie peut faire quand un cancer s'est propagé?
    Oui.
    Lorsqu'une tumeur commence à se disperser et que des cellules cancéreuses se détachent pour aller se multiplier ailleurs, leur surface contient une empreinte unique qui distingue chacune de ses molécules. Si on connaît la nature de ces molécules, il est possible, grâce à la technologie, de les colorer. On peut leur donner les cinq couleurs différentes que nous avons montrées. On injecte un bolus contenant une combinaison de ces marqueurs dotés de différentes cibles. Les marqueurs se propageront à travers l'organisme et, on peut l'espérer, trouveront les cibles voulues pour les colorer. C'est un exemple d'une façon de procéder.
    C'est là que la recherche fondamentale devient très importante parce que nous ne comprenons pas encore parfaitement comment les particules se déplacent dans l'organisme une fois injectées. Nous savons qu'elles peuvent se déplacer très librement à cause de leur taille. L'organisme est essentiellement formé de différents compartiments auxquels certaines choses peuvent accéder. Nous ne comprenons pas encore le processus. Si on développe cette technique, elle pourrait aussi avoir des effets secondaires. Si les particules atteignent des compartiments protégés, auxquels elles ne devraient pas normalement avoir accès, elles peuvent causer des problèmes.
    Des études fondamentales visant à trouver des moyens de concevoir les bonnes particules nous permettront de bâtir de meilleures structures. Mais, en fin de compte, il faut arriver à combiner la nanotechnologie à la biologie. Les experts en génomique et en protéomique doivent trouver les cibles voulues. Nous les lierons ensuite à nos particules, que nous injecterons dans l'organisme de façon à illuminer les sites atteints.

  (1255)  

    Il est rare de rencontrer un scientifique qui a monté une entreprise. Il est vraiment remarquable de voir cela se produire. À titre de scientifique et d'homme d'affaires, vous avez parlé tout à l'heure de cibler votre recherche et d'essayer de cerner… Si j'ai bien compris ce que vous avez dit, nous n'avons pas vraiment de grandes entreprises de nanotechnologie au Canada. Vous êtes venu des États-Unis et vous vivez à Toronto. D'après vous, les occasions sont limitées. Dans ce cas, comment faire pour monter une entreprise?
    Au niveau fédéral, nous consacrons depuis des années beaucoup d'argent au cancer. Si vous concentrez tous vos efforts sur une chose telle que le cancer — qui atteindra une personne sur quatre dans notre pays —, ne pouvez-vous pas obtenir la collaboration d'autres entreprises? L'avez-vous jamais envisagé? J'ai l'impression, d'après la démonstration que vous nous avez faite aujourd'hui, que vous avez une idée claire des moyens de développer la nanotechnologie dans le domaine du cancer. Est-ce bien le cas?
    J'ai actuellement 20 chercheurs qui travaillent dans mon laboratoire. Nous concentrons nos efforts sur deux domaines: le diagnostic et l'application in vivo. Les choses sont très claires et bien définies. Toutefois, comme nous travaillons dans un système universitaire, les étudiants finissent par obtenir leur diplôme. Quand on a fini de les former, ils sont déjà prêts à passer à autre chose. Je dois ainsi tout recommencer toutes les quelques années.
    À mon laboratoire, notre façon de travailler consiste à mettre tout le monde sur un ensemble ou un bloc de problèmes. Une fois cela fait, nous passons au bloc suivant pour les quatre années qui suivent. Nous devons procéder ainsi parce que les subventions des IRSC et du CRSNG ne sont pas assez élevées pour nous permettre de travailler autrement. La subvention moyenne des IRSC est de l'ordre de 100 000 $, ce qui permet de financer deux ou trois étudiants, alors qu'on a besoin de beaucoup de gens. C'est un problème.
    L'autre problème concerne les gens. Je fais partie d'une commission d'examen des IRSC. C'est ce qui explique ma présence ici. En fait, il n'y a pas beaucoup de spécialistes de la nanotechnologie du cancer qui aient la compétence voulue pour examiner les demandes. Un spécialiste de la biologie moléculaire pourrait ne pas comprendre cet aspect du traitement du cancer. C'est la raison pour laquelle on a fait appel à moi pour m'occuper de l'aspect nanotechnologie. Par conséquent, quand je présente moi-même une demande, il n'y a peut-être personne qui puisse comprendre la nature exacte de mes travaux. Dans ces conditions, nous avons décidé de mettre en commun toute une série de subventions afin d'avoir suffisamment d'argent pour passer d'une étape à une autre. Je dispose actuellement de quelque 13 subventions. Si on considère que chacune rapporte en moyenne 50 000 $ à 55 000 $, cela nous fait au total environ 600 000 $. C'est le budget dont je dispose pour financer 20 personnes.
    Je comprends parfaitement votre point de vue. Il est extrêmement intéressant de voir ce que vous faites, mais je pensais qu'une entreprise qui pourrait souhaiter faire un investissement voudrait sûrement gagner l'argent nécessaire à son propre développement. Avez-vous pris des mesures concrètes pour amener des entreprises à vous aider? Avez-vous la possibilité de le faire? Comment procédez-vous autrement?
    J'ai en fait trouvé des sociétés américaines qui sont intéressées, mais pas des sociétés canadiennes. Il y en a une qui faisait partie des toutes premières entreprises américaines dans lesquelles la Fondation Gates a investi de l'argent. J'ai des contacts suivis avec son directeur financier et son directeur de l'exploitation. Ce n'est pas officiel, mais, à un moment donné, ils voulaient venir s'établir à Toronto pour travailler avec nous dans ce domaine. Malheureusement, je n'ai pas réussi à trouver des fonds de contrepartie. Le CRSNG a des programmes qui offrent de tels fonds, mais seulement à des sociétés canadiennes bien établies, même si on est en mesure d'obtenir de l'argent à l'étranger.
    Cette société finance en fait l'un des centres de nanotechnologie du cancer de la Caroline du Nord. Elle a pensé que ce serait une bonne idée d'avoir des activités tant au Canada qu'en Caroline, afin d'être en mesure de combiner les deux infrastructures de façon à faire progresser la technologie.
    Jusqu'ici, la plupart des sociétés qui m'ont approché l'ont fait sur la base des articles que nous avons publiés. Quand elles lisent ces articles et qu'elles ont besoin de compétences, elles prennent contact avec moi pour m'offrir de travailler pour elles.

  (1300)  

    Tous les deux, de même que tous les témoins que nous avons entendus aujourd'hui, vous avez contribué d'une façon tout à fait exceptionnelle aux travaux de notre comité. Nous aimerions beaucoup vous demander de revenir à un moment donné, si le comité le permet. Nous avons eu une journée des plus intéressantes. Je vous en remercie.
    Cela étant dit, nous allons lever la séance. Je suis vraiment très contente que nous n'ayons pas été interrompus par le timbre.
    Je vous remercie. La séance est levée.
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