Passer au contenu
Début du contenu

HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 050 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 31 mars 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs.
    Bienvenue à cette 50e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées. Nous poursuivons notre exploration du potentiel de la finance sociale au Canada.
    Avec nous. pour la première heure, nous aurons Jeffrey Cyr, directeur général de l'Association nationale des centres d'amitié. M. Cyr est accompagné de Yancy Craig.
    De la Société pour la nature et les parcs du Canada, nous entendrons Éric Hébert-Daly, directeur général national.
    De Vancouver, Evan Saugstad, président du Northern Development Initiative Trust, se joint à nous par vidéoconférence. Bienvenue, monsieur.
    Comme vous le savez, chacun de vos organismes a un maximum de 10 minutes pour les déclarations préliminaires. Je vous ferai signe quand il ne restera qu'une minute à votre période de 10 minutes, puis nous passerons aux questions.
    Commençons donc par l'Association nationale des centres d'amitié.
    Monsieur Cyr.
    Monsieur le président et distingués membres du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, c'est toujours un honneur et un privilège de comparaître devant vous. Merci de m'avoir offert cette occasion de collaborer à votre exploration du potentiel de la finance sociale au Canada.
    Je tiens à reconnaître la nation algonquine sur le territoire de laquelle nous tenons cette réunion aujourd'hui.
    Comme vous le savez, je m'appelle Jeffrey Cyr. Je suis un Métis du Manitoba et je suis directeur général de l'Association nationale des centres d'amitié.
    Passons tout de suite à la finance sociale, qui, selon moi, fait partie d'une série de mécanismes et de structures nécessaires pour faciliter l'innovation sociale. Évidemment, l'innovation sociale est au coeur même de l'enclenchement et de la création du changement systémique.
    En ce qui nous concerne, une chose est claire. On ne pourra pas résoudre les problèmes complexes qui nous entourent, notamment ceux auxquels se heurtent les Autochtones vivant en zones urbaines, par les moyens traditionnels. Je vous dirai franchement que les systèmes actuels n'ont pas été conçus pour régler les problèmes actuels. À ce sujet, je voudrais souligner quelques faits.
    Je vais d'abord vous présenter un aperçu très bref, parce que je sais que vous connaissez un peu le mouvement des centres d'amitié au Canada ainsi que la population autochtone des milieux urbains. Ensuite, je vous donnerai quelques exemples d'innovation sociale et d'initiatives de finance sociale menées dans tout le mouvement des centres d'amitié. Enfin, je décrirai ce que, selon moi, le gouvernement du Canada pourrait faire pour soutenir les occasions d'innovation et de finance sociales pour les Autochtones vivant en milieu urbain du Canada. Bien entendu, si nous en avons le temps, je ferai de mon mieux pour répondre à vos questions.
    Commençons par examiner certains faits. Comme nous le savons, 75 % des Autochtones vivent hors réserves. Près de 60 % d'entre eux vivent dans des milieux urbains. Dans certaines provinces, comme en Ontario, ce nombre monte à près de 84 %. De plus, la population autochtone s'accroît plus rapidement que toute autre population au Canada. Autrement dit, on compte environ 840 000 résidents autochtones dans les villes.
    La population autochtone du Canada est jeune. Elle compte environ 50 % de jeunes de moins de 24 ans, un atout extraordinaire pour le développement social, culturel et économique du Canada de demain. Mais comme vous l'avez entendu de témoins précédents, dont j'ai pris la peine de lire les témoignages, certains jeunes autochtones vivent dans des situations sociales et économiques extrêmement difficiles. Pour garantir aux jeunes autochtones un avenir plus prometteur, plus sain et plus productif, il faut des solutions créatives. Votre comité a entendu d'autres témoins présenter la portée, l'étendue, la profondeur et la force du réseau des centres d'amitié. Aujourd'hui, je voudrais vous démontrer ce que ce réseau pourrait faire pour que des initiatives de finance et d'entreprise sociales menées en partenariat apportent des améliorations réelles et efficaces à la vie des Autochtones qui vivent en milieu urbain.
    En partenariat avec le gouvernement du Canada, l'Association nationale des centres d'amitié administre, à l'heure actuelle, des programmes et des services d'une valeur de 43 millions de dollars dans le cadre de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain qui a été remaniée. Ces fonds ont permis à des centres d'amitié et à d'autres organismes de prestation de services aux Autochtones en milieu urbain, non seulement d'accroître le nombre de services, mais surtout, ce qui est beaucoup plus important, de nouer et d'étendre des partenariats. Avec l'aide d'un éventail de partenaires représentant tous les ordres de gouvernement, les organismes sans but lucratif, le secteur privé ainsi que les organismes de bienfaisance et le secteur philanthropique se mobilisent pour soutenir les Autochtones qui vivent en milieu urbain afin qu'ils puissent participer pleinement à l'économie du Canada.
    L'année dernière, pendant le transfert de ce programme aux centres d'amitié, on a constaté un changement dû à la prestation et à la conception du programme: la multiplication des innovations et des partenariats. À la faveur d'une structuration attentive du volet des partenariats urbains de ce programme, nous avons orienté le financement sur l'innovation et l'entreprise sociales. C'était probablement une première au Canada. C'est l'un des plus grands succès en matière de programmes fédéraux s'adressant aux Autochtones.
    L'innovation et la finance sociales sont des outils extraordinaires pour s'appuyer sur des relations stratégiques afin de créer ou, plus important encore, d'intensifier et de diversifier des initiatives en cours pour en accroître l'efficacité. Notre association nationale, nos associations provinciales et territoriales ainsi que chacun de nos centres communautaires contribuent toujours plus à la transformation de l'innovation et de la finance sociales au Canada.
    Permettez-moi de vous donner quelques exemples. En Colombie-Britannique, l'Association provinciale des centres d'amitié a lancé plusieurs initiatives pour faire avancer l'innovation et la finance sociales. Mon collègue Paul Lacerte, de notre association de la C.-B., a beaucoup parlé des occasions qu'offrent l'innovation et la finance sociales par l'intermédiaire des centres d'amitié. De nombreuses entreprises sociales sont nées dans des centres d'amitié de la Colombie-Britannique.

  (1535)  

    Au Québec, le Regroupement des centres d'amitié autochtones réussit depuis longtemps à réunir des intervenants de la société civile ainsi que les gouvernements provincial et fédéral pour aborder des problèmes sociaux et économiques. Le Centre d'amitié autochtone de Montréal a créé un programme de coopératives autochtones pour promouvoir le perfectionnement des compétences artisanales et pour commercialiser les oeuvres d'art. Le Centre d'amitié autochtone de Val d'Or a créé des coopératives de logement pour les familles des Premières Nations.
    Ici, en Ontario, l'Ontario Federation of Indigenous Friendship Centres, l'OFIFC, coopère aussi avec des intervenants clés pour mettre sur pied une entreprise sociale concrète et pour créer des initiatives de financement social, dont un programme qui vise à dispenser de la formation et du perfectionnement en vue d'aider les centres d'amitié à renforcer les capacités et à contribuer au développement d'entreprises sociales locales.
     À l'heure actuelle, l'OFIFC poursuit une occasion d'approvisionnement pour les Jeux panaméricains et pour les Jeux parapanaméricains. Dans le cadre de cette initiative, l'OFIFC produit 10 000 paires de mocassins; cela donne de l'emploi aux artisans des communautés concernées et génère des revenus supplémentaires aux sites des bassins de main-d'oeuvre sous forme de commissions.
    En partenariat avec la fondation de la famille J.W. McConnell, avec le Circle on Philanthropy and Aboriginal Peoples in Canada et avec les Canadiens pour un nouveau partenariat de même qu'avec plusieurs autres organismes, l'Association nationale des centres d'amitié, ou ANCA, collabore avec des personnes de milieux très divers pour organiser un sommet de l'innovation indigène à Winnipeg, en novembre prochain. Ce sommet vise à réunir des praticiens avec ceux qui peuvent offrir des ressources et avec les intervenants au niveau communautaire, cela afin de faire germer l'innovation sociale et d'offrir des programmes d'apprentissage allant du niveau débutant aux niveaux supérieurs. Ce sommet vise donc à développer et à renforcer le domaine de l'innovation sociale au sein des peuples indigènes, et cela comprend la finance sociale.
    De plus, l'ANCA va lancer une initiative — en innovation sociale — en juin. Intitulée « Action for Women », cette initiative a pour objet de développer les innovations sociales générées aux niveaux régional et communautaire comme la Moose Hide Campaign — dont nous portons emblème ici —, le programme de formation « I am a Kind Man » ainsi qu'une plateforme mobile conçue pour lutter contre la violence chez les jeunes autochtones. Dans cette même veine, l'ANCA lancera une autre initiative pour entamer un changement social systémique afin d'éliminer la violence que subissent les femmes et les filles autochtones. Je vous dirais qu'il n'a pas été facile de financer cette initiative en suivant les lignes directrices des programmes traditionnels, même avec des partenaires qui ont de l'influence et malgré la démonstration poussée du concept existant.
    Comme je l'ai dit plus tôt, la population autochtone du Canada est l'une des plus jeunes. On la trouve principalement en milieu urbain, et elle s'accroît très rapidement. Ces jeunes désirent ardemment que les choses changent. Ils dégagent une énergie intense.
    Maintenant parlons du rôle que le gouvernement peut assumer. Depuis que vous menez cette étude, vous avez entendu plusieurs témoins vous décrire en détail les cadres législatifs, réglementaires et fiscaux que le gouvernement du Canada pourrait établir pour que les innovations puissent prospérer. Cela renforcerait considérablement le milieu de l'innovation sociale au Canada. La grande priorité de ceux qui travaillent dans ce domaine au niveau des communautés sera d'éliminer les obstacles à l'innovation et à la finance sociale en ouvrant des portes aux innovateurs sociaux pour qu'ils ne craignent pas de poursuivre sur la lancée de leur succès.
    Il sera également crucial d'assouplir les paramètres des programmes. Pour en revenir à la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain qui, pendant la période de négociations, se trouvait entre les mains de notre bureau, l'Association nationale des centres d'amitié, nous avons réussi à créer quelque chose de novateur et à repousser les limites de cette stratégie. Il faudra considérablement assouplir les paramètres des programmes et investir dans des interventions visant à encourager, intensifier et améliorer.
    En conclusion — au bout de 9 bonnes minutes et 2 secondes — je tiens à réitérer notre engagement d'utiliser le pouvoir de l'innovation et de l'entreprise sociales pour créer des débouchés durables. Grâce à la mise en oeuvre de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain, nous attirons une créativité, mobilisons les énergies et les connaissances qui susciteront des idées et des pensées nouvelles devant être à l'origine d'un changement social durable et de l'inclusion totale des peuples autochtones dans la vie économique, culturelle et sociale du Canada.
     Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que vous aurez, même sur des exemples bien précis.
    Merci.

  (1540)  

    Merci beaucoup.
    Passons maintenant la parole à Hébert-Daly.
    Je vous remercie d'avoir prononcé mon nom correctement, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les membres du comité permanent de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. Je suis très heureux de cette occasion de présenter le point de vue de la Société pour la nature et les parcs du Canada, la SNAP, à une audience comme la vôtre. Je dirai que la SNAP ne comparaît pas souvent devant ce comité, mais ces derniers mois nous nous sommes concentrés sur deux projets assez novateurs que je voudrais vous décrire. Vous comprendrez alors pourquoi je comparais devant vous aujourd'hui.
    Je vais d'abord vous parler un peu de notre organisme. La Société pour la nature et les parcs du Canada, ou SNAP, a été fondée il y a un peu plus de 50 ans avec la mission expresse de protéger nos terres publiques et nos océans. Nous veillons aussi à la bonne gestion des zones protégées de tout le pays et à l'application des normes les plus élevées possible. Nous collaborons avec des gouvernements, avec les peuples autochtones, avec l'industrie et avec les collectivités locales pour trouver des solutions de conservation de paysages terrestres et marins particuliers. Nous désirons protéger au moins la moitié des terres et des eaux publiques du Canada. Nous cherchons des solutions fondées sur des données scientifiques.
    Comme certains d'entre vous le saurez, si vous avez travaillé dans le secteur des oeuvres de bienfaisance, les fonds proviennent surtout de fondations et de donateurs individuels. Bon nombre d'entre eux désirent que nous affections leurs dons à des causes qui les intéressent particulièrement. Par conséquent, aussi précieux que ces dons puissent être, une grande partie de notre financement se limite à des usages particuliers. Évidemment que les dons restreints de particuliers sont très utiles à notre oeuvre, mais d'un autre côté, les dons non restreints nous permettent d'intervenir avec une certaine souplesse là où des occasions de conservation s'offrent soudainement. Malheureusement il ne nous est pas aussi facile d'obtenir des fonds non restreints que des fonds restreints.
    Dernièrement, l'un de nos plus grands donateurs nous a généreusement offert de créer une fondation. Au cours de notre conversation initiale, je lui ai décrit certains des domaines de travail pour lesquels la SNAP avait de la peine à obtenir des fonds des sources traditionnelles de dons de bienfaisance. Notre généreux donateur a offert de nous aider en créant un fonds nous permettant de saisir les occasions qui s'offrent partout au pays et de financer des projets situés dans des régions géographiques difficiles à financer, c'est-à-dire dans l'est du Canada. Au cours de cette conversation, j'ai aussi mentionné qu'il serait possible de donner à cette fondation un format inhabituel — celui d'un bien immobilier. Comme vous le verrez dans les documents que nous vous avons distribués, nous pensons que ce projet sera extrêmement rentable. Non seulement il établira un bâtiment central pour héberger les activités de la SNAP, mais ce bâtiment produira des revenus à long terme. Notre source de revenus sera donc souple, et nous pourrons nous en servir pour saisir les occasions de conservation dès qu'elles se présenteront. En fait, nous envisageons de transformer cette fondation en un bâtiment situé en ville pour préserver et conserver la nature située en dehors des villes. Nous avons commencé à décrire ce concept d'investissement social d'une entreprise dont les profits pourront aider un organisme de conservation sans but lucratif, et les gens y réagissent très positivement.
    Je suis profondément convaincu que les organismes de bienfaisance et le secteur sans but lucratif devraient chercher des entreprises lucratives qui les aident à mener leurs missions à long terme. Toutefois, les règlements actuels rendent une telle solution difficile à réaliser. Je crois que votre comité est bien placé pour recommander que l'on modifie les règlements et les lois de manière à rendre ce « modèle lucratif de soutien aux activités non lucratives » un peu plus facile à concrétiser. Je suis sûr que, à long terme, ce type de source de financement réduira le nombre de reçus d'impôts émis pour dons de bienfaisance, ce qui permettra aux gouvernements d'économiser des revenus fiscaux dont ils ont grand besoin.
    Je voudrais aussi vous décrire une autre stratégie novatrice d'investissement social qui s'insère bien dans votre étude. Il s'agit en fait d'un projet de création d'un parc qui s'appelle Thaidene Nene, situé autour du bras est du Grand lac des Esclaves dans les Territoires du Nord-Ouest. Ce parc se situe dans le territoire traditionnel des Dénés. Le champion de cette proposition est la Lutsel K’e locale, une Première Nation des Dénés qui considère qu'en protégeant une vaste zone située au coeur de son territoire, elle réussira à conserver non seulement sa terre, mais sa culture. Ce parc lui permettra aussi de développer une économie de conservation qui assurera le soutien futur de la communauté.
    Afin de se préparer à créer ce parc national qui, ils l'espèrent, sera d'envergure ambitieuse, les membres de cette communauté locale Lutsel K’e, qui souffre à l'heure actuelle d'un taux de chômage de 70 %, saisissent cette occasion de développement économique local durable et à long terme.

  (1545)  

    Ce nouveau parc national attirera l'industrie du tourisme. Les Lutsel K'e collaborent avec Parcs Canada et avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pour élaborer un modèle de gestion du parc qui leur permettra de maintenir leurs pratiques culturelles tout en offrant aux visiteurs du reste du Canada et du monde l'occasion d'admirer ce magnifique paysage nordique et d'y faire brièvement l'expérience de leur mode de vie traditionnel.
    L'un des éléments clés de ce modèle de gestion du parc Thaidene Nene sera de créer une fondation soutenant les Lutsel K’e qui fourniront des services d'interprétation. Ils mènent activement des collectes de fonds et ont déjà réuni à 7 millions de dollars. Ils ont reçu en fait des engagements s'élevant à 11 millions de dollars, et ils comptent recevoir 15 millions de dollars en dons privés d'ici à l'établissement du parc. Ils cherchent aussi à obtenir du gouvernement fédéral un fonds de contrepartie unique pour que grâce à cette fondation de 30 millions de dollars, leur entreprise soit viable à long terme dès que l'exploitation du parc commencera.
    Ce modèle est vraiment excellent. Il assure la durabilité de l'expression culturelle, du développement économique, de la conservation d'une terre splendide d'une grande richesse écologique. Selon moi, tout le monde y gagne, mais c'est loin d'être la meilleure façon de le décrire.
    Dans le cadre de la diversification économique du Canada, ces modèles sont novateurs et avant-gardistes. Ce sont d'excellentes solutions sociales et financières. J'exhorte le comité à reconnaître l'immense potentiel qui se dégage d'un tel investissement social. Il présente des possibilités nouvelles qui me passionnent. J'espère que vous en discuterez en profondeur et qu'ils éclaireront votre étude de ce sujet.
    Une fois de plus, merci de m'avoir donné l'occasion de présenter cette question à votre comité.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions quand il en sera temps.
    Merci pour cette présentation.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Saugstad qui nous parle par vidéoconférence.
    Allez-y, monsieur.
    Je vais faire référence aux diapositives du rapport que j'ai présenté.
    Merci de m'avoir invité. Je m'appelle Evan Saugstad et je suis président du Conseil d'administration de Northern Development Initiative Trust dont le siège social se trouve à Prince George (C.-B.). J'habite dans le nord de la province, mais je vous parle aujourd'hui de Vancouver.
    Diapo no 2. Il y a dix ans, le gouvernement de la Colombie-Britannique, dirigé par le premier ministre Campbell, a vendu la compagnie de chemin de fer BC Rail au CN. Il a réinvesti une part des profits à l'avantage des résidents du centre et du nord de la C.-B. en créant, en vertu d'une loi adoptée par l'Assemblée législative, le Northern Development Initiative, Trust auquel il a accordé un financement de 185 millions de dollars provenant de la vente de BC Rail. Tout au long de cet exposé, je ferai référence à Northern Development sous le nom de « la fiducie ».
    Diapo no 3. Bien que notre organisme ait été créé par le gouvernement provincial, il demeure autonome et prend ses propres décisions, pour autant qu'elles soient conformes aux dispositions de la loi. Nous sommes responsables de l'affectation des fonds et du placement de notre capital de base. La loi nous a permis de décider du format de notre fondation. Bien que nous soyons obligés d'exploiter cette fiducie sous forme de désépargne et de la dissoudre dès que les fonds sont épuisés ou alors de l'exploiter d'une manière durable, nous avons décidé de l'exploiter à perpétuité.
    Aujourd'hui, après avoir octroyé des subventions et des prêts pendant 10 ans, nous avons engagé plus de 125 millions de dollars que nous avons fournis à nos clients. Notre capital de base s'est accru et s'élève maintenant à 250 millions de dollars grâce à nos placements prudents qui produisent près de 7 % d'intérêts chaque année depuis 10 ans.
    Diapo no 4. À notre Conseil d'administration siègent cinq représentants gouvernementaux et huit spécialistes du domaine des fiducies provenant de gouvernements locaux. Quatre conseils consultatifs composés de représentants de tous les gouvernements locaux des régions que couvre la fiducie collaborent pour déterminer comment et quand nous devrions dépenser ou allouer des fonds. Outre nos fonds et nos programmes, les gouvernements fédéral et provinciaux ont aussi choisi la fiducie comme mécanisme de prestation de quelques-uns de leurs programmes.
     Soulignons qu'en 2009, le gouvernement fédéral a confié à Northern Development le soin d'adjuger les demandes et de fournir 30 millions de dollars en fonds d'adaptation des collectivités, en prêts et en subventions. De ces fonds, nous avons prêté 20 millions de dollars à plusieurs entreprises de la C.-B. pour créer de l'emploi pendant la période de ralentissement économique et nous avons alloué 10 millions de dollars à des projets sans but lucratif de création d'emploi. Le personnel et le Conseil d'administration ont accepté en deux mois plus de 500 demandes de contrats qu'ils ont octroyés, et d'ici à la fin de l'année, les entreprises rembourseront ces prêts au gouvernement fédéral, qui s'élèvent en tout à 20 millions de dollars, par l'intermédiaire de la fiducie. Ces transactions n'ont nécessité qu'un pour cent de frais d'administration alors que la Diversification de l'économie de l'Ouest a fourni des fonds pour environ le même montant dans le sud de la C.-B. sur une période de 18 mois avec des frais d'administration beaucoup plus élevés.
    Diapo no 5. Cette fiducie vise à faire croître l'économie du nord de la C.-B. Nous pouvons fournir des fonds soit sous forme de subventions directes, soit sous forme de prêts à faibles taux d'intérêt. Bien que nous devions rendre compte aux résidents du nord de la C.-B. sur la manière dont nous dépensons nos fonds, nous avons créé des programmes qui permettent à l'entreprise privée d'accéder à certains de nos programmes pour étendre la chaîne d'approvisionnement dans le centre et dans le nord de la C.-B.
    Diapo no 6. La majorité de nos programmes exigent que les promoteurs de projets obtiennent des fonds d'autres sources, et pour chaque dollar provenant de la fiducie, les autres bailleurs de fonds doivent investir plus de 8 $.
    Diapo no 7. Le recours au levier financier a considérablement contribué à la croissance de l'économie du nord de la C.-B. Il a permis à plusieurs de nos promoteurs de se servir de nos fonds pour faire démarrer leurs projets et pour attirer d'autres bailleurs de fonds.
    Diapo no 8. Une grande part du levier financier provient du gouvernement fédéral et de ses nombreux programmes, dont un partenariat visant à améliorer des aéroports ruraux. Dans le cadre de son programme Infrastructure de loisirs du Canada, le gouvernement fédéral et la fiducie ont aussi investi dans des installations de loisirs. On a aussi placé des fonds dans des projets qui bénéficiaient de fonds d'adaptation des collectivités de 2009 dont j'ai parlé tout à l'heure.
    Diapo no 9. Ce succès est dû en partie à la formation et au financement de préparateurs de demandes de subvention dans toute la région que couvre la fiducie. De nombreuses collectivités rurales de petite taille avaient beaucoup de peine à accéder à des sources de financement fédérales, provinciales et privées.

  (1550)  

     Nous avons ainsi fourni de la formation et des fonds à des centaines de personnes, qui ont ensuite réussi à obtenir en tout près de 100 millions de dollars en subventions pour leurs collectivités. Ce groupe comprend également de nombreux peuples des Premières Nations de la C.-B. La majorité de nos gouvernements locaux et de nombreuses bandes obtiennent chaque année des fonds pour engager un préparateur de demandes de subvention pour leurs collectivités.
    Diapo no 10. Voici certains de nos programmes en vigueur. Ils sont tous accessibles, et nous en avons affiché la liste sur notre site Web. En fonction des réactions des collectivités, nous ajoutons et abandonnons les programmes selon les besoins et les conditions économiques. Ces changements dépendent des recommandations de nos comités consultatifs régionaux et de notre personnel, et le Conseil d'administration doit les approuver.
    Diapo no 11 Voici simplement une liste de quelques-uns de nos autres programmes.
    Diapo no 12. Voici un exemple de programme financé par un fonds d'adaptation des collectivités du gouvernement fédéral et fourni par la fiducie. Soulignons que ce programme aurait pu recevoir son financement uniquement de la fiducie si le gouvernement fédéral ne lui avait pas octroyé de fonds. Cette entreprise est encore en affaires aujourd'hui; bien qu'elle semble très petite et peu importante face au monde des affaires de tout le Canada, elle joue un rôle très important dans une collectivité de très petite taille, New Hazelton, qui se trouve dans une région de la C.-B. qui souffre d'un ralentissement économique notable, la côte nord-ouest du Pacifique.
    Diapo no 13. Voici un autre exemple. En 2009, une entreprise privée qui exploitait le silo de Fort St. John a décidé qu'il n'était plus viable et qu'il fallait le fermer. Avec l'aide de la fiducie, des agriculteurs de la région ont établi un plan d'affaires, emprunté des fonds de la fiducie et acheté le silo. Ils l'ont remis en état et en ont repris l'exploitation. Il appartient maintenant au North Pine Farmers Institute, qui rembourse le prêt de 874 000 $ pour un silo et une tête à grains. Le silo fonctionne encore aujourd'hui et il est rentable. Imaginez donc que, depuis, l'industrie privée a offert de le racheter, mais jusqu'à présent les agriculteurs locaux s'y sont opposés. J'ai entendu dire aux nouvelles aujourd'hui que l'autre silo est trop endommagé pour qu'on le répare, donc on va le démolir. Il ne reste plus qu'un silo à Fort St. John.
    Diapo no 14. Merci de m'avoir accordé de votre temps. Je répondrai à toutes les questions que vous voudrez me poser. Si certains d'entre vous désirent obtenir plus d'information, nous nous ferons un plaisir de les recevoir à notre bureau de Prince George, et notre PDG et le personnel seront très heureux de leur faire visiter nos installations.
    Merci.

  (1555)  

    Merci de nous avoir présenté cet exposé.
     Je remercie tous les témoins d'avoir utilisé le temps accordé d'une manière si efficace. Aucun d'entre eux n'a dépassé les 10 minutes allouées.
    Passons à notre première série de questions.
    Madame Sims.
     Je tiens à remercier Jeffrey, Éric et bien sûr Evan — même si vous n'êtes pas dans la salle, en personne — de nous avoir fait ces exposés très concis et je dirais même passionnés.
    Ma première question s'adresse à Evan.
    Evan, au début du mois, Margot Young du SCFP a témoigné devant ce comité. Après cela, un de mes bons amis avec qui j'ai travaillé dans la belle province de la C.-B. bien sûr, John Malcolmson du service de recherche du SCFP, a envoyé un rapport que la greffière a distribué à tous les membres du comité.
    Je crois qu'une des phrases les plus frappantes de ce rapport est la suivante:
Souvent, les fournisseurs de services sociaux qui songent à se tourner vers les OIS sont les mêmes que ceux qui ont été trahis par plus d’une décennie d’austérité financière, d’immobilisme bureaucratique et de politiques laissant à désirer.
     Je suis surprise de constater que la plus grande partie de l'attrait des obligations à impact social tourne autour de la promesse de nouveaux modèles de gouvernance qui renforceraient le soutien aux programmes.
    Ne craignez-vous pas qu'une promesse de changement dans ce domaine n'entraîne à terme un modèle axé sur le marché? Qu'en pensez-vous?
    Je suppose que ce qui nous a rendus uniques est le fait que nous ayons nos propres fonds et que nous prenions chaque année nos propres décisions. Nous pouvons ainsi engager des financements pluriannuels parce que nous connaissons les sommes dont nous disposons. Nous ne dépendons ni du gouvernement, ni de bailleurs de fonds. Nous dépendons uniquement de notre propre capacité à générer les fonds grâce à notre financement des activités de base.
    Selon moi, on pourrait aussi envisager d'utiliser ce modèle, dont la conception ne s'applique qu'à la croissance économique de la C.-B., pour fournir des programmes sociaux et pour déterminer, comme vous venez de le dire, si nous sommes en mesure de poursuivre ces activités.
    Merci beaucoup.
    Maintenant je vais m'adresser à Jeffrey.
    Jeffrey, est-ce vous vous inquiétez de ces changements ou des promesses de changement qui pourraient déboucher sur un modèle mercantile?
    S'ils m'inquiètent? Ça ne m'empêche pas de dormir.
    Les obligations à impact social sont des outils financiers intéressants. Elles ont eu un certain succès dans différents pays: l'expérience de la prison de Peterborough, par exemple. Elles s'appliquent à certains problèmes sociaux et pas à d'autres.
    Le gouvernement du Canada les a mises à l'essai dans un projet pilote. Il nous a demandé ce que nous en pensions. Le problème ne provient pas de la mentalité commerciale ou des moteurs du marché, mais plutôt de la façon dont nous comprenons les avantages qu'elles apportent.
    D'un côté vous avez les sociétés de capital risque — les caisses populaires, les banques, les institutions financières — qui acceptent de ne prendre que ce que je considère comme des risques très faibles dans le cas des obligations à impact social. Vous avez une société sans but lucratif, généralement un organisme sans but lucratif qui élabore une l'idée et fait le gros du travail, et le gouvernement garantit son action. Cela ne me dérange pas. Je crois que ce modèle peut donner lieu à des approches novatrices.
    La seule chose qui me dérange, c'est que ces obligations ne s'appliquent pas à des modèles complexes, parce que tout dépend des statistiques. Prenons par exemple le récidivisme. Je trouve que le récidivisme est extrêmement complexe parce qu'on n'a aucun contrôle sur les leviers qui assurent le succès de la lutte contre le récidivisme.
    Vous pouvez les appliquer à un modèle de service à l'enfance et à la famille, parce que vous connaissez exactement la structure des coûts. Vous savez combien coûte la prise en charge d'un enfant. Vous savez combien une intervention permettrait d'économiser et vous pouvez le calculer. Comme je l'ai dit un jour à un sous-ministre fédéral: « Ne pensez pas que je ne vous fais pas confiance, mais je ne vous fais pas confiance ». Je désire avoir des statistiques avant de m'engager.
     Il est normal de prendre des risques. Mais je pense que, dans le cas du modèle d'obligations à impact social, qui ne constitue qu'un volet restreint du tableau global de la finance sociale, les gens devraient se demander quel rendement du capital investi l'organisme sans but lucratif en retire alors qu'il y engage sa réputation, son énergie et son temps. Si vous devez remettre 7 % ou 10 %, quel que soit le chiffre, à une institution financière, que faites-vous du 1 ou du 2 % à remettre aux organismes sans but lucratif pour qu'ils puissent continuer à développer l'innovation sur le terrain, puisqu'ils en assument le risque?

  (1600)  

    Il vous reste environ 15 secondes.
    Je vais m'arrêter ici.
    Le modèle axé sur le marché ne m'inquiète pas du tout.
    Merci.
    Monsieur le président, je voudrais maintenant présenter une motion pour que le comité invite le ministre de l'Emploi et du Développement social à témoigner à une séance télévisée de deux heures sur le renvoi du Budget principal des dépenses et pour que cette séance ait lieu le 28 mai 2015.
    Nous interrompons la série de questions pour la motion qui vient d'être déposée.
    Monsieur Armstrong.
    Je propose que nous passion à huis clos pour discuter de cette activité du comité.
    C'est une motion dilatoire, donc nous ne pouvons pas en discuter.
    Je dois demander le vote sur cette motion, et ensuite nous déterminerons....
    Oui, madame Sims.
    Je n'avais pas l'intention d'interrompre la réunion.
    Je présenterai cette motion quand nous traiterons des activités du comité pour que nous puissions continuer à écouter le témoin.
    C'est bien.
    Est-ce que les deux parties sont d'accord pour retirer les motions qu'elles ont présentées?
    Des voix: Oui.
    Le président: Alors nous allons poursuivre la série de questions.
    Merci d'avoir accepté cela.
    Monsieur Armstrong, vous avez cinq minutes.
    Je tiens à remercier tous nos témoins d'être venus aujourd'hui.
    Je vais d'abord m'adresser à Evan.
     J'ai lu votre document en PowerPoint et visité la boulangerie Skeena, qui se trouve à Hazelton en Colombie-Britannique. Pouvez-vous nous expliquer comment cette boulangerie s'y est prise pour demander le financement et dans quoi elle dépense ces fonds? Je crois que certains de ses employés souffrent de handicaps graves.
    Pouvez-vous nous expliquer de quelle façon l'argent a été transféré et comment cette entreprise a été fondée?
    Oui.
    Je vais vous expliquer cela aussi bien que je le pourrai, et si mes explications ne sont pas suffisantes, nous pourrons probablement vous remettre un résumé écrit plus tard.
    Quand le gouvernement fédéral a annoncé le Fonds d'adaptation des collectivités et qu'il a déclaré que nous disposerions de 30 millions de dollars — 20 millions de dollars en prêts et 10 millions de dollars en subventions — nous avons mené une campagne de promotion et avons reçu 500 demandes.
     La fiducie applique un modèle d'évaluation où nous prenons en compte tous les détails de chaque demande; nous les classons, puis nous soumettons à l'approbation du Conseil d'administration les demandes les mieux cotées. Je pense qu'après deux réunions, nous avions approuvé toutes les demandes qui se trouvaient en haut de la liste, ainsi que deux ou trois de plus au cas où certaines des premières soient rejetées.
    Dans le cas de la boulangerie Skeena, un organisme sans but lucratif a présenté la demande indiquant qu'il avait besoin d'argent pour acheter de l'équipement et pour louer un bâtiment, mais c'était pour former des personnes handicapées à la gestion en boulangerie. Une fois cette demande approuvée — je crois qu'il a fallu l'approbation finale du gouvernement fédéral — sur nos recommandations, cet argent a été transféré directement à la boulangerie sous forme de subvention.
    Cette entreprise s'est avérée rentable, et elle est encore florissante, n'est-ce pas?
    Oui, elle fonctionne encore aujourd'hui. Comme je vous le disais, je travaille partout dans cette collectivité et je vois cette boulangerie, elle est encore active et joue un rôle crucial au sein de cette collectivité.
    Avez-vous une idée de votre taux de réussite avec ce type de subvention? Est-ce que la plupart des entreprises que ces subventions ont permis d'établir sont encore en affaires, rentables et est-ce qu'elles apportent une contribution à la collectivité?
    Oui, la majorité d'entre elles le sont. Nous en sommes arrivés à un point où les membres du Conseil d'administration et la fiducie se sont dit qu'ils ne prenaient pas assez de risques, alors nous avons augmenté le niveau de risque. Je crois que cette année nous verrons de voir notre premier manquement, une entreprise qui n'a pas réussi à assumer ses obligations. On pourrait dire que nous allons perdre de l'argent, mais nous ne voyons pas les choses comme ça: nous ne sommes pas une banque, notre objectif est avant tout de faire croître et prospérer l'économie. Nous sommes obligés de prendre des risques.
    Tant que nous fixons un plafond au montant que nous sommes prêts à perdre, c'est acceptable parce que, selon nous, si nous ne subissons aucun échec, c'est que nous ne saisissons pas toutes les occasions.
    Je suis d'accord avec vous.
    De tous les projets que vous avez financés avec ce type particulier de subvention, vous n'avez fait face qu'à un défaut de paiement, et cela ne s'est produit que dernièrement parce que vous aviez rehaussé votre niveau de risque acceptable. Est-ce que tous vos autres projets se sont soldés par une réussite?
    Jusqu'à présent, oui.
    Je vous en félicite.
    Je crois qu'en grande partie, ce succès est dû au fait qu'à titre de politiciens, quand vous connaissez les gens et que vous considérez notre structure, qui est très particulière, nous connaissons toujours dans notre organisme une personne qui comprend les requérants et leurs demandes. Nous avons des liens dans tous les gouvernements locaux et auprès de la plupart des Premières Nations. Dans les petites collectivités, la plupart des politiciens locaux connaissent tout le monde, ou ils peuvent demander de l'information à quelqu'un qui connaît la personne en question. Nous avons un réseau de diligence raisonnable incroyable.

  (1605)  

    Oui, est c'est probablement l'un des avantages que vous avez par rapport à la structure du gouvernement fédéral pour gérer ce type de système, n'est-ce pas?
    Oui. Les systèmes bureaucratiques n'ont pas du tout cette capacité.
    Merci.
    Monsieur Cyr, je vous remercie une fois de plus d'être venu.
    Vous nous avez parlé des Jeux panaméricains et de la fabrication de mocassins. Pourriez-vous nous donner des détails sur ce programme?
    Je n'ai pas ces renseignements devant moi.
    Excusez-moi.
    L'Ontario Federation a soumis une proposition pour fournir des mocassins aux Jeux panaméricains. Ils sont produits dans des centres d'amitié partout en Ontario. C'est un modèle d'entreprise intéressant, puisque les centres utilisent leur propre financement interne pour confectionner le produit, puis réinvestir les profits.
     Je crois que, le plus important, et ce comité a probablement entendu dire cela des dizaines de fois, c'est que le moteur ultime de l'économie et de la finance sociales n'est pas de faire des profits, mais d'apporter des changements sociaux. En fin de compte, le profit en soi n'aide pas vraiment à moins que nous visions en tout temps à changer des systèmes. C'est ce que l'Ontario Federation vise en confectionnant des mocassins. Elle peut ensuite en investir les profits dans des programmes offerts dans les centres.
    Je vais vous donner un exemple rapidement en 30 secondes.
    À Courtenay, en Colombie-Britannique, il y a un centre d'amitié. À Courtenay, il avait des écoles abandonnées à cause des changements démographiques et des grand-mères de la collectivité ainsi que le centre d'amitié se sont mis à planter des herbes médicinales et des plantes pour faire du thé. Ces produits sont devenus très populaires, alors ils ont commencé à les empaqueter pour les vendre. Ils ont maintenant 160 boutiques partout au Canada. Ils en investissent les profits dans des programmes pour les jeunes et dans des centres d'amitié. Ils viennent d'acheter une empaqueteuse gigantesque de la Chine.
    Ce modèle est différent. Il vise à réinvestir ultimement dans la collectivité et à former les gens en fonction des besoins. C'était mon deuxième exemple.
    Passons à M. Eyking.
    Vous avez cinq minutes, monsieur.
    Je remercie nos invités d'être venus aujourd'hui.
    Je viens du Cap Breton. C'est le berceau du modèle de coopérative. Les gens du Cap Breton ont traversé de nombreuses périodes de difficulté économique au fil des ans, alors on y trouve un vaste élément d'interaction sociale et de financement social.
     Nous avons au Cap Breton quelques cas de grande réussite, comme New Dawn et BCA Holdings. La collectivité est très engagée. Ces organismes comblent les manques créés parfois par le gouvernement pour différentes raisons, qu'il s'agisse de logement social ou d'aide aux petites entreprises.
    Vos rapports font état de votre immense succès. Vous n'avez qu'un tout petit pourcentage d'échecs. Vous y décrivez votre administration et ce que vous faites pour éviter l'échec. C'est un modèle à encourager et à soutenir.
    La première question que je vous adresse à tous a trait aux gouvernements fédéral et provincial, parce que vous octroyez certains de vos fonds sociaux grâce à un financement provincial. Que faudrait-il changer du côté fédéral pour promouvoir cela?
    Ce problème touche tous les domaines. Nous voyons certains besoins dans le domaine de la garderie d'enfants, et certains groupes chez nous voudraient ouvrir des garderies. De quelles façons le gouvernement fédéral pourrait-il contribuer à combler les lacunes pour subvenir à bon nombre des besoins urgents que nous observons dans notre société et dans l'avenir? Comment pourrions-nous emboîter le pas des provinces pour que cette aide soit plus ou moins la même partout au pays?
    Je ne suis pas expert là-dessus, mais dans le modèle que nous avons ici, l'obstacle principal que nous voyons est qu'à l'heure actuelle, si vous êtes un organisme de bienfaisance constitué en société de bienfaisance, vous n'avez pas le droit de dégager des profits sur une base régulière. Ces profits doivent constituer une toute petite partie des recettes et doivent être liés à la mission.
    Le modèle dont je vous parle, l'idée d'avoir un bâtiment, vous oblige à fonder une société lucrative qui fasse essentiellement don de la totalité de ses profits à l'organisme de bienfaisance. Ce modèle est un peu étrange, mais c'est ce qu'il faut faire au final pour permettre à un organisme de bienfaisance, par exemple, d'exploiter une entreprise lucrative. La Loi de l'impôt sur le revenu comporte probablement des dispositions prévoyant des façons pour les organismes de bienfaisance d'éliminer certains de ces obstacles pour appliquer ce modèle. Ce n'est pas un problème entre les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral. Je le répète, les organismes de bienfaisance relèvent de la compétence fédérale, donc je ne peux pas trop vous en dire sur le partage des responsabilités dans ce cas.
    Je crois que les deux autres témoins sont probablement plus à même de répondre aux questions qui concernent les programmes sociaux.

  (1610)  

    Bien sûr. Je vais essayer de répondre rapidement.
    Une des choses que nous avons apprises dans l'établissement du programme de partenariats urbains, en particulier sur l'innovation et l'économie sociale, c'est que plus l'argent se rapproche de la communauté avant qu'il soit décidé de la manière dont il sera utilisé, plus il devient efficace. La communauté a besoin de s'approprier des projets, appelons-les comme ça; il doit s'agir de projets communautaires, gérés par la communauté. Sans l'assentiment de la communauté, vous n'arriverez pas à les maintenir à long terme.
    L'une des choses que nous avons constatées avec les structures fédérales-provinciales, c'est que chez nous, nous poussons les ressources vers le niveau communautaire, selon un modèle qui s'apparente à celui de notre collègue de Colombie-Britannique ici présent, parce que nous ne sommes qu'à un degré des gens sur le terrain qui eux, ont à faire fonctionner le projet. Aucune structure descendante ne fonctionne vraiment. Elle doit être poussée vers la communauté, et elle doit laisser de la place à un minimum de risque. Pour les programmes fédéraux, dans le cas de celui que nous administrons, nous avons constaté que le fait de pousser les ressources vers le niveau communautaire a été bénéfique.
    Je suis entièrement d'accord avec mon collègue. Je représente un organisme sans but lucratif. D'une part, je ne peux pas faire de profit, d'autre part, les règles fiscales qui régissent actuellement les organismes sans but lucratif m'empêchent de réinvestir tout profit dans l'organisme. Je dois toujours finir l'année avec un résultat nul. Avec un budget de 49 millions de dollars, ce n'est pas toujours évident de ramener un solde à zéro à la fin de l'année.
    Comment faites-vous? Vous transférez les profits dans une fiducie?
    Par une planification très minutieuse et en faisant très attention aux dépenses.
    Vous ne distribuez pas de dividendes.
    Ça ne fonctionne pas comme au privé, où c'est possible de verser des dividendes. Je dois dépenser toutes les ressources affectées au programme. J'ai le droit de reporter les revenus non réalisés, et c'est ce que je fais. Ce sont de très petits montants.
    Je pense la même chose pour les obligations à impact social: nous avons besoin d'un moyen de réinvestir dans les organisations communautaires pour leur donner les moyens de générer des recettes et de les utiliser pour le bien commun. Autrement, on se retrouve piégé dans nos propres système financiers. C'est là que la finance sociale peut s'avérer utile.
    À mon avis, il y a du travail à accomplir au sein de gouvernement fédéral et de l'ARC. Je sais qu'en tant que ministère, EDSC s'est penché sur une partie de ces questions, mais je ne sais pas si cette démarche a été fructueuse. Je sais que la finance sociale faisait partie des trois derniers budgets fédéraux. On suppose qu'on va essayer de repousser cette limite.
    C'est possible d'éliminer les barrières. Quand on pousse l'argent vers ce niveau, mes collègues provinciaux sont capables de tirer parti des provinces, parce que fondamentalement, elles deviennent un centre de gravité des ressources.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Mayes.
    Je remercie les témoins pour leur présence.
    Je suis heureux de vous rencontrer, monsieur Cyr. J'ai toujours admiré le leadership dont vous faites preuve au sein de l'Association nationale des centres d'amitié.
    Ils l'appellent finance sociale parce qu'ils veulent des résultats sociaux. Vous avez raison de dire que ce n'est pas une question de profits, c'en est une de résultats sociaux. Nous avons parlé des différents programmes dont vous disiez qu'il serait bien de pouvoir rentabiliser les investissements afin de pouvoir investir davantage dans ce genre de chose. Mais comment mesurer les résultats sociaux? Souvent, nous constatons que les programmes fonctionnent bien et qu'ils portent fruit, mais dès que les gens ont acquis les compétences ciblées, tout ce qui a été fait s'arrête net. Ce que nous voulons, c'est mettre ces acquis à contribution pour créer du changement, du changement social. Avec le temps, j'ai pu constater ce phénomène à quelques reprises, surtout avec les Premières Nations. Prenons les questions entourant la propriété foncière: j'ai vu des membres des communautés des Premières Nations former des jeunes aux métiers de charpentier et de plombier, ce genre de choses, et voilà que par magie, la propriété foncière devient une réalité, le changement social apparaît. C'est assez impressionnant. Je me demande si vous avez des expériences semblables à nous raconter.
    La deuxième question s'adresse à tout le monde.
    En tant que gouvernement, y a-t-il des politiques que nous devrions-nous envisager de modifier? Il a été fait mention de problèmes du côté de Revenu Canada et du fait que les organismes de bienfaisance ne peuvent pas enregistrer de profit. Si nous devons modifier une politique, n'est-ce pas justement cet aspect qu'il faudrait examiner pour faire en sorte qu'un organisme sans but lucratif puisse faire des recettes à condition que l'argent soit réinvesti dans le programme ou dans une autre initiative qui profite à l'ensemble de la communauté?

  (1615)  

    Vous avez mis le doigt sur le problème avec la finance sociale. C'est une question de mesure, plus précisément, de mesure des résultats. Ce qui est compliqué avec les programmes sociaux — et ça fait des dizaines d'années qu'on est en butte à cette difficulté — c'est comment mesurer le succès. Si vous mettez en place un programme de leadership, comment savez-vous si, en bout de ligne, vous avez créé un leader? Pourtant, il existe des façons de le faire. Le hic, c'est qu'elles ne cadrent pas forcément — et cela peut paraître un peu irrespectueux — avec la logique bureaucratique traditionnelle en ce qui concerne la portée ou le calendrier du programme et le temps qu'il faut y consacrer avant de pouvoir mesurer les résultats, les présenter au Conseil du Trésor et déterminer si le programme est une réussite ou pas.
    La première chose que je dirais, c'est que les programmes doivent être de longue durée. Ils doivent s'étendre au-delà de deux ou trois ans pour que l'on puisse vraiment voir du changement. Demander aux organisations de déterminer comment mesurer ce changement, c'est leur mettre trop de pression sur les épaules. Ce changement est généralement mesuré — et je peux vous donner un exemple d'un travail auquel nous collaborons — par des moyens non conventionnels, en écoutant ce que les gens racontent, par exemple. En fait, c'est en faisant un suivi de la vie des gens que vous pouvez voir ce que vous avez apporté. Une chose est certaine: écouter les récits personnels qui nous permettent de savoir où les gens en étaient avant le programme et où ils en sont maintenant, c'est quelque chose de très puissant. Les histoires de personnes que les centres d'amitié ont aidé sont monnaie courante, et cela est aussi vrai à plus vaste échelle. Nous devons nous améliorer en matière de mesure. Une des raisons pour lesquelles nous tenons un sommet de l'innovation indigène à Winnipeg, c'est justement pour discuter de mesure. L'objectif est trouver une solution à ce problème. Nous nous donnons trois ans, parce que même le sommet doit être mesuré par rapport à lui-même afin de savoir s'il a été un succès et s'il a créé du changement.
    Par exemple: nous avons commencé à faire des travaux préliminaires avec la Fondation de la famille J.W. McConnell sur les bons d'études canadiens. Du côté des communautés autochtones, la participation aux bons d'études canadiens est vraiment faible parce que pour eux, les obstacles sont nombreux, des choses qui ne nous viennent même pas à l'esprit, comme des questions d'identité et de compte bancaire, sans compter la peur et l'anxiété face au système. Pour quelqu'un qui n'as pas l'habitude de faire affaire avec une banque, même y mettre les pieds peut s'avérer une tâche presque insurmontable quand on est originaire de Coss Lake et qu'on vient d'arriver à Winnipeg.
    Le Winnipeg Boldness Project, notre projet, cherche des solutions à ce problème. Le projet Omega, à Toronto, a examiné la question avec succès: le taux de participation aux bons d'étude du Canada y a grimpé de 40 à 60 %.
    Le volet « innovation sociale » dans tout cela, c'est que tout cet argent qui retourne dans les banques soit réinvesti par des banques locales dans des programmes communautaires sociaux, au niveau de la coopérative de crédit ou de la banque. C'est par là que commence l'innovation. L'argent est là. Le gouvernement a déjà mis ces capitaux dans le Bon d'étude canadien. C'est déjà là. Il s'agit seulement d'y accéder, pour le bien des personnes démunies et vivant sous le seuil de la pauvreté. À ce moment-là, on aura un effet mesurable.
    Je pense que Stephen Huddart, de la Fondation de la famille J.W. McConnell a comparu devant ce comité. Il a raconté que vous prenez un enfant de 4 ans — j'ai cinq enfants — qui sait que de l'argent a été mis de côté pour son éducation, il commencera immédiatement à changer ses comportements. Voilà ce qu'est le changement social. Et comment allez-vous mesurer vos résultats pour ce petit de quatre ans? Le cycle de planification gouvernemental ne vous permettra pas de le faire. Nous avons besoin de systèmes de mesure longitudinaux.
    Malheureusement, comme je l'ai dit tout à l'heure, les systèmes que nous avons ne sont pas conçus pour le changement social dont nous avons besoin. Le Conseil du Trésor doit savoir que ce changement sera long à réaliser. Ça prendra beaucoup de temps, car il nous faut observer les changements que nous voulons vraiment voir se concrétiser à court, à moyen et à long terme.
     J'ai largement dépassé mon temps et le président va probablement en tenir compte. Je ne vais pas essayer de répondre à la deuxième question, je pense qu'on y a un peu répondu.
    Vous avez raison. Votre temps est écoulé depuis un bon moment, mais ça va.
    Nous allons vous accorder beaucoup de latitude parce que vos commentaires sont très pertinents.
    Passons maintenant à la deuxième série de questions, en commençant par Mme Groguhé.
    Oh, désolé, madame Morin plutôt.

[Français]

     Je suis désolée, monsieur le président. Nous aurions dû vous prévenir.
    Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation. Vos témoignages étaient tous très intéressants.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Cyr. Elle vise principalement votre organisation.
     Les modèles de rémunération au rendement reposent sur l'évaluation des résultats pour savoir si les organismes ont atteint ou non les objectifs fixés. Par contre, l'évaluation des résultats est difficile à faire lorsque l'on veut mesurer, par exemple, la réussite de certains programmes sociaux. Je ne dis pas que c'est complètement infaisable mais cela peut parfois constituer un défi supplémentaire, si on pense à un point de vue qualitatif et pas seulement quantitatif.
    Selon vous, quels types d'indicateurs devrait-on utiliser pour mesurer les résultats d'initiatives de finance sociale? Quelles mesures devrait-on prendre pour améliorer l'évaluation et le suivi des impacts des modèles de finance sociale?
    Je vous remercie.

  (1620)  

[Traduction]

    Merci pour cette question.
    J'essaierai d'être plus bref que la dernière fois et de m'exprimer dans un meilleur anglais.
    C'est difficile de répondre à votre question sans examiner chaque programme en particulier. Pour dire les choses simplement, l'innovation sociale et la finance sociale sont une question d’amélioration du bien commun. Mais encore faut-il savoir, au départ, en quoi consiste le bien commun. Qu’est-ce que nous voulons accomplir?
    Prenons l'exemple du Bon d'études canadien, ou encore le modèle d'entreprise sociale que nous utilisons dans le cadre de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain. Nous en connaissons les objectifs généraux. Nous essayons de développer le leadership.
    C'est possible de mesurer ça, mais ça exige beaucoup de temps. Nous avons créé un système grâce auquel un jeune de 12 ans peut participer à un programme de mentorat en leadership. Vous en extrayez une tranche de 20 minutes, un peu comme on le ferait avec un outil d'évaluation de la clientèle, et vous mesurez exactement où il en est. Supposons que le programme de mentorat porte sur l’engagement et sur l’aptitude à s'exprimer en public. Quatre mois plus tard, à la fin du programme, la différence devrait se voir, s’il y en a une. S’il n'y a pas de changement, c'est également bon à savoir, de même que la quantité d'effort et de temps investie.
    On peut utiliser une foule d’indicateurs. Je pense qu’il existe 264 indicateurs couramment utilisés dans le monde. Nous pouvons ramener ce nombre à 15, environ. Nous avons fait nos devoirs à l’avance sur ce genre de question.
    Je ne crois pas que les hauts fonctionnaires qui mettent en place ces programmes travaillent à ce niveau-là et c’est là, selon moi, que réside une partie du problème. Parfois, ils vous demandent des indicateurs quantitatifs alors que vous avez vraiment besoin d’indicateurs qualitatifs… C’est une bonne chose de changer de cadre de référence. Je ne m'attends pas à ce que chacun change du jour au lendemain et je ne dis pas que tous les programmes fonctionnent de la même façon.
    Si on veut voir davantage de personnes participer au programme Bon d'études canadien et augmenter ainsi le taux d’obtention de diplôme, il faut être prêt à attendre 15 ans pour mesurer les résultats, et il faut aussi être prêt à prendre certains risques. Le risque est faible, mais il fait partie de l'engagement envers le changement. Je dirais qu’on aura besoin d’entendre des récits personnels, d’ordre qualitatif.
    Chez nous, il y a 25 personnes dans ce programme et nous avons observé du changement dans la vie de 15 d'entre elles. Si on revient quatre ans plus tard, on notera encore du changement. Où en sont-ils maintenant? Voilà le genre de suivi qu’il faut faire à long terme. Et pour y parvenir, ça demande de l’engagement.
    Il y a une tonne d’indicateurs que l’on peut utiliser pour mesurer les résultats à tous les niveaux, qu’il s’agisse de l’augmentation de la participation économique, de l’amélioration du niveau scolarisation ou du degré d’adaptation sociale. Il y a moyen de le faire. Ce n'est pas sorcier à réaliser, ça demande seulement beaucoup d'effort. Il est donc très est important d’élaborer les systèmes très consciencieusement, dès le départ.
    Il faut parfois adopter des systèmes plus globaux. Très brièvement, si un enfant ne réussit pas à l'école, que vous retournez en arrière et utilisez un indicateur pour tenter de comprendre pourquoi, vous allez trouver que l’enfant habite avec quatre autres familles et que ses parents ne sont pas capables de l’aider dans ses devoirs. L’indicateur ne montrera pas peut-être pas qu’il ne reçoit pas la scolarisation adéquate; c'est plutôt le système de soutien qui est en cause. C'est la raison pour laquelle les centres d'amitié adoptent un modèle « enveloppant », une démarche holistique. Si nous ne pouvons pas mettre le doigt sur le problème, alors nous ne pourrons pas... C'est ce que la finance sociale est censée faire : remonter à la cause et non au symptôme. Cela exige une réflexion à plus long terme.
    J'espère que mes observations vous sont utiles.

[Français]

     Merci beaucoup. C'était très intéressant.

[Traduction]

    Vous avez 10 secondes. Aimeriez-vous...?
    Ça va.
    Monsieur Boughen, voulez-vous terminer cette ronde pour nous, je vous prie?
    Merci, monsieur le président. Je joins ma voix à celle de mes collègues pour dire à nos témoins que nous sommes très heureux qu'ils aient pris une partie de leur journée pour venir nous rencontrer et nous faire profiter de leur expertise.
    Jeffrey, dans votre exposé vous avez évoqué l'existence d'une tension qui mérite de l'attention en ce qui concerne la population croissante des jeunes Autochtones et leur intégration à la société. Que constatez-vous? J'ai entendu dire qu'il a de la richesse, mais que pour beaucoup de jeunes autochtones, ces ressources n'ont pas été exploitées de manière efficace et cela, malgré le grand besoin d'universitaires, de personnes de métier, de professionnels et ainsi de suite, qui se fait sentir dans notre société. Les membres des communautés autochtones peuvent combler tous ces besoins, mais comment les voyez-vous évoluer dans ces domaines? Historiquement, ils n'ont pas occupé ce genre de postes. Nous avons besoin de leur présence dans ces domaines.

  (1625)  

    C'est une grande question.
    Nous savons que les membres des communautés autochtones, les indigènes, qui se rendent jusqu'à l'obtention d'un diplôme de cycle supérieur, une maîtrise ou un doctorat, réussissent aussi bien que n'importe quel autre Canadien. Le problème se situe donc en amont de la chaîne. Le défi, c'est de mobiliser les jeunes Autochtones, les jeunes indigènes, dans un système d'éducation. De toute évidence, les obstacles sont multiples, tant sur le plan de l'accès à la scolarisation que sur celui de la pertinence culturelle. L'emplacement compte beaucoup, parce pour un jeune qui doit aller finir son secondaire 5 à Thunder Bay et qui vient d'une réserve située encore plus au nord, le fait de déménager seul dans une ville, sans aucun soutien familial, peut être très traumatisant. Cela soulève beaucoup de questions. Je suis sûr que mes frères et sœurs des Premières Nations en auraient long à dire sur les questions d'éducation. Si je pouvais essayer de ramener la question dans le contexte de l'innovation sociale, je dirais que les jeunes ont peut-être leurs façons à eux de faciliter l'engagement. Ils pensent différemment que moi et que Yancy, et pourtant, nous sommes tous deux Autochtones. Vous savez, les moins de 24 ans ne pensent pas comme nous.
    C'est ce que nous avons découvert assez pertinemment grâce à A4W Live, la plateforme mobile d'action pour les femmes que nous sommes sur le point de développer pour les téléphones cellulaires. Elle sortira en juin. C'est une plateforme conçue pour changer les comportements sexistes entre hommes et femmes autochtones, entre garçons et filles, et pour contrer la violence sexuelle, ce genre de problèmes. J'ai formé des groupes de discussion et effectué des tests qui nous ont permis de comprendre que les jeunes ont une conception de la réalité tout à fait différente de la nôtre. Je crois que ce sont eux qui constituent la source d'énergie et de dynamisme au sein de la communauté. Je reviens, autant que possible, à l'idée de la facilitation d'approches à la résolution d'un problème qui soient dirigées par la communauté et trouvent leur source dans la communauté, une fois les mécanismes nécessaires en place. Actuellement, nous savons que lorsque nous recevons du soutien... Prenons, par exemple, la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain. Elle vise surtout la canalisation de partenariats. Si nous pouvions ramener et appuyer cette stratégie au niveau communautaire, il serait possible de mobiliser ce que j'appelle l'énergie nichée au sein des communautés des grandes et des petites villes.
    Honnêtement, c'est une question complexe. Elle suppose un grand nombre de leviers différents, et beaucoup de choses à faire. Sous l'angle de la finance sociale et de l'innovation sociale, tout est en place. L'un des volets de notre sommet sur l'innovation sociale, c'est d'engager comme animateurs des jeunes qui arpentent les rues et qui apprennent des choses auprès des gens qui font de l'innovation sociale, que ce soit le Centre MaRS ou un des gros laboratoires d'innovation sociale. Nous croyons que les jeunes ont besoin de s'approprier ce sommet. Si le projet est entre leurs mains, il prospérera. Ce n'est pas exactement au cœur de notre sujet, mais ça complète ma réponse.
    Merci beaucoup pour ces éclaircissements.
    Éric, dans votre exposé, vous avez parlé d'optimisation du financement. Ce graphique illustre l'engagement du gouvernement. Y a-t-il un mouvement visant à exclure le gouvernement de ce financement et à obtenir un engagement financier plus important de la part de donateurs? Sommes-nous obligés de maintenir l'engagement gouvernemental à 38 %?
    Je crois que vous faites allusion à un autre exposé, à celui d'Evan, peut-être.
    Votre organisme reçoit-il du financement fédéral?
    Non, nous ne recevons aucun financement gouvernemental.
    Voilà qui conclut notre séance, monsieur Boughen. Notre temps est écoulé.
    Temps écoulé! Nous avons le bon témoin et nous manquons de temps. Je vous donne donc la parole, monsieur le président.
    Merci.
    Nous tenons à remercier nos trois témoins pour avoir pris le temps de comparaître devant ce comité. Vos exposés ont apporté à cette étude des éléments très révélateurs et vos réponses aux questions nous ont permis de connaître vos points de vue, qui seront intégrés à l'étude.
    Si vous avez quelque chose à ajouter, nous vous invitons à le communiquer par écrit au président de ce comité et nous l'intégrerons dans la version définitive de notre compte rendu. Comme vous le savez, il s'agit d'une étude très importante. Au nom du comité, je vous remercie grandement.
    Nous allons prendre une courte pause avant de passer aux travaux du comité.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU