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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 097 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 mars 2018

[Enregistrement électronique]

  (1550)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Je vous souhaite tous la bienvenue à la 97e réunion du Comité. Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 30 octobre, nous examinons le projet de loi C-326, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé (lignes directrices relatives à l'eau potable).
    Je prie nos témoins d'excuser notre retard. Le premier ministre a fait une déclaration en Chambre et tous les partis ont présenté leurs commentaires.
    Monsieur Davies, voulez-vous faire une remarque?
    Monsieur le président, on pourrait très bien en discuter à la fin, si nous pouvons garder du temps à ce moment-là.
    La liste des témoins a changé au dernier moment et, en raison de ces changements au calendrier, l'Association of Iroquois and Allied Indians n'a pas été en mesure de venir témoigner aujourd'hui, alors que c'était le premier choix de témoins des néo-démocrates. À l'origine, ces témoins étaient convoqués pour mercredi. Par la suite, leur témoignage a été reporté à aujourd'hui. Je comprends que, pour des raisons logistiques, ils n'ont pas pu, à la dernière minute, se présenter aujourd'hui.
    Je veux tout simplement m'assurer qu'ils seront invités à venir témoigner mercredi. Je pense que nous pourrions très bien en parler à la fin de la réunion, mais je voulais m'assurer que cela soit pris en considération.
    Nous devons prendre une décision à ce sujet, car notre emploi du temps est rempli pour mercredi.
    Les membres du Comité acceptent-ils d'ajouter d'autres témoins pour mercredi?
    Absolument, puisque ces témoins étaient également au nombre de ceux que nous voulions entendre. Nous préférerions les entendre.
    Puisqu'il semble que nous ayons un consensus, nous allons les inviter à venir témoigner mercredi si c'est possible pour eux.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous mes collègues.
    Très bien.
    Me Clayton Leonard, de la JFK Law Corporation, est un des témoins que nous allons entendre aujourd'hui. C'est un avocat de Colombie-Britannique qui représente de nombreux groupes autochtones. Nous entendrons ensuite Jason R. « Jay » Odjick, un auteur et artiste de la nation Anishinabeg située à environ une heure de route au nord d'Ottawa. Nous recevrons aussi M. Graham Gagnon, professeur au Centre for Water Resources Studies, à l'Université Dalhousie.
    Nous allons demander à M. Leonard de commencer le premier, puisqu'il semble avoir un autre engagement par la suite. Il nous parle par vidéoconférence.
    Chaque témoin dispose de 10 minutes pour présenter un exposé. Après quoi, nous passerons à la période de questions.
    Maître Leonard, vous disposez de 10 minutes.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer devant le Comité. Selon mon interprétation, le projet de loi C-326 demande tout simplement à la ministre de la Santé d'examiner les normes relatives à l'eau potable qui s'appliquent dans les pays de l'OCDE et de présenter des recommandations en vue de modifier les lignes directrices nationales relatives à l'eau potable au Canada.
    Comme vous le savez, j'ai travaillé exclusivement avec les Premières Nations sur le dossier de la salubrité de l'eau potable. Par conséquent, tous les commentaires que je présenterai au Comité relèveront de ce contexte. J'ai pris le temps d'examiner le projet de loi au cours de la fin de semaine et j'estime, de manière générale, que cet exercice représente au mieux une diversion, peut-être même une perte de temps, et, au pire, une entreprise qui risque de placer un fardeau supplémentaire que les Premières Nations ne sont pas préparées à supporter.
    Les membres du Comité savent probablement qu'en 2011, l'évaluation technique nationale du réseau d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées desservant les Premières Nations avait recommandé de consacrer environ 5 milliards de dollars à cette question au cours des 10 prochaines années. Certes, l'ancien gouvernement et le gouvernement actuel ont consacré des crédits supplémentaires à ce secteur, mais ni l'un ni l'autre ne sont parvenus à combler les lacunes graves dont souffrent les communautés des Premières Nations depuis de nombreuses décennies.
    J'ai pu constater que les Premières Nations de l'Alberta, de la Colombie-Britannique et des autres régions du pays éprouvent déjà de la difficulté à respecter les normes fédérales en matière d'eau potable. En effet, les Premières Nations sont déjà tenues de respecter de nombreuses normes telles que le Protocole pour les systèmes centralisés de traitement des eaux usées dans les collectivités des Premières Nations, le Protocole pour les systèmes décentralisés d'eau potable et de traitement des eaux usées dans les collectivités des Premières Nations, les Lignes directrices sur la conception des ouvrages et systèmes d'alimentation en eau potable dans les collectivités des Premières Nations, les Lignes directrices relatives à la qualité des effluents et au traitement des eaux usées des installations fédérales, les recommandations de Santé Canada pour la qualité de l'eau potable au Canada, ainsi que les normes sur les niveaux de service d'AANC relatifs aux systèmes d'eau potable et des eaux usées.
    Sur le plan pratique, je ne parviens pas à comprendre, lorsque je lis le projet de loi, comment s'appliqueront les recommandations découlant de l'examen ministériel, ni quelles incidences elles auront sur cette longue liste de lignes directrices que les Premières Nations sont déjà censées respecter.
    Si l'on en croit l'évaluation technique nationale, la plupart des réseaux des Premières Nations ont déjà de la difficulté à respecter ces lignes directrices. Si les responsables des installations et des collectivités doivent respecter des exigences supplémentaires en matière de compte rendu et de surveillance, ils devront déjà en faire plus avec moins de moyens.
    Il faut également se demander quelles seront les incidences sur la mise en oeuvre de la Loi sur la salubrité de l'eau potable des Premières Nations. C'est une loi habilitante et, selon moi, le gouvernement fédéral n'a pas encore pris des mesures importantes dans le pays pour élaborer les règlements découlant de la Loi. Je ne comprends pas de quelle manière l'examen des lignes directrices relatives à l'eau potable en vertu de ce projet de loi pourrait avoir une incidence sur l'élaboration de ces règlements.
    On peut aussi se demander dans quelle mesure la Loi demeurera en vigueur. J'ai travaillé en étroite collaboration avec des Premières Nations de l'Alberta, et l'ancienne ministre Bennett a participé activement à la coordination, lorsqu'elle était dans l'opposition, et nous a aidés à nous opposer à ce texte de loi. Elle s'était engagée à abroger cette loi et à la remplacer par un autre texte législatif élaboré en véritable collaboration avec toutes les Premières Nations du Canada. Cela ne s'est pas encore produit. En fait, nous ne savons pas réellement quel sera l'avenir de ce projet de loi.

  (1555)  

    En outre, je ne sais pas exactement à quoi serviront tous les efforts déployés dans le cadre de ce projet de loi sur le plan de la protection de l'eau potable. Au Canada, il arrive que les compétences se chevauchent et que les normes ne soient pas les mêmes. Par exemple, en Ontario, la loi protège les sources d'approvisionnement en eau, alors qu'en Alberta l'application des lignes directrices est laissée au gré de chaque instance. La protection des sources d'approvisionnement en eau est réellement indispensable à la protection de l'eau potable chez les Premières Nations et dans les autres collectivités — quelle que soit la région du pays. À mon avis, c'est vraiment une perte de temps que de vouloir adopter un projet de loi concernant l'eau potable si ce dernier ne s'applique pas précisément à la protection des sources d'approvisionnement en eau.
    Voilà qui termine mes remarques préliminaires.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Odjick qui dispose de 10 minutes pour présenter son exposé. Merci beaucoup.
    [Le témoin s'exprime en algonquin.]
    Bonjour. Je m'appelle Jay Odjick. Je suis un artiste, un auteur et un producteur de télévision de Kitigan Zibi Anishinabeg, communauté qui se trouve à environ une heure et demie de route au nord d'ici.
    J'aimerais parler de plusieurs choses. Je suis ici essentiellement pour parler de la qualité de l'eau potable dans les communautés des Premières Nations. J'aimerais aussi parler de l'occasion qui m'est donnée d'être ici aujourd'hui. Par ailleurs, j'aimerais dire combien il est important de croire.
    Pour moi, en effet, il est très important de croire. Pour moi et pour beaucoup d'autres personnes des Premières Nations, il est parfois difficile d'avoir foi dans le gouvernement. Mais quand je fais le tour de cette pièce, je vois des gens en qui je peux croire, car si nous voulions tendre la main, nous pourrions nous toucher. Je peux croire dans les choses tangibles.
    D'autre part, je tiens à vous remercier de me donner l'occasion d'être ici et de reconnaître que nous sommes sur un territoire algonquin non cédé. J'ai ici l'occasion de m'exprimer à titre personnel, puisque je ne suis pas un représentant élu d'une communauté des Premières Nations, d'un groupe ou d'une organisation. Je suis tout simplement membre d'une communauté qui a reçu un avis concernant la qualité de l'eau potable à long terme.
    Je me sens un peu mal à l'aise de prendre la parole ici, étant donné que notre communauté de Kitigan Zibi n'est pas véritablement représentative des problèmes auxquels font face de nombreuses autres communautés des Premières Nations en matière d'eau potable. Dans beaucoup de communautés, les problèmes sont d'origine bactérienne, alors qu'à Kitigan Zibi, notre problème a toujours été lié aux radiations. J'en parlerai plus tard. Je parlerai aussi un peu des problèmes auxquels font face les autres nations.
    Il est important également de noter les progrès qui ont été accomplis dans le secteur de l'eau potable chez les Premières Nations. Ces progrès sont dus à un travail diligent, notamment la construction d'installations destinées à résoudre ces problèmes, à l'engagement du gouvernement actuel à éliminer les avis d'interdiction de consommation de l'eau dans les communautés des Premières Nations d'ici 2021, ainsi qu'au travail acharné des membres des Premières Nations et aux tests qui ont été réalisés.
    Il peut s'avérer difficile de trouver des chiffres exacts et je pense que c'est une grande difficulté pour beaucoup de gens, parce qu'il faut vraiment savoir où chercher. Quant aux progrès, je pense que pour nous, à Kitigan Zibi, le problème de l'uranium dans l'eau est connu depuis environ le milieu des années 1990,vers 1994. À cela, il faut ajouter le radon qui constitue également un grave problème pour nous.
    En matière de progrès, mentionnons que de 100 à 135 avis concernant la qualité de l'eau potable à long terme ont été émis dans les communautés des Premières Nations en 2015. Il est important de noter qu'il s'agit au total de 135 avis et non pas du nombre de nations ou de communautés touchées. Certaines communautés ont fait l'objet de plusieurs avis. Je connais quelques-unes qui en ont reçu deux ou trois.
    En mars de cette année, le site Web d'AANC citait 78 avis à long terme. Ce sont les chiffres les plus courants. Cinquante-sept avis ont été levés au cours des dernières années. Je pense que ces résultats sont vraiment encourageants. Si plusieurs d'entre nous sont encouragés par ces résultats, il faut savoir que beaucoup sont encore mécontents. Il faut comprendre que cette colère est justifiée. Par exemple, on ne peut que se révolter quand on voit des photos d'enfants de Kashechewan qui souffrent de troubles cutanés après avoir été exposés à l'eau. Pourtant, s'il y a bien une chose qu'on ne devrait pas mettre en doute ici-bas, c'est l'eau. On dit que l'eau, c'est la vie. C'est vrai, mais ce n'est pas toujours le cas.
    Sur une note plus encourageante, je crois que le projet de loi C-326 sera peut-être un facteur qui contribuera à atteindre l'objectif fixé pour 2021. À la lecture du projet de loi, certaines questions me sont venues à l'esprit. Le projet de loi vise à aider le Canada à atteindre ses objectifs en matière d'eau potable et à respecter les normes des autres pays membres de l'OCDE. Je me demande essentiellement si le Canada pourra atteindre ses cibles s'il inclut dans ses rapports l'état de l'eau potable dans les communautés des Premières Nations. Je ne connais pas la réponse à cette question. Je suis un simple quidam. On peut se dire que c'est un idéal auquel aspirer, étant donné l'échéance de 2021 que le gouvernement a fixée pour éliminer les avis concernant la qualité de l'eau potable, mais certaines personnes sont plutôt pessimistes à ce sujet. Quant à moi, je préfère avoir des attentes ambitieuses que le contraire.
    Je pense qu'avec le projet de loi C-326, il est important de prendre en compte les normes concernant la qualité de l'eau potable dans les nations situées à l'extérieur du Canada, mais je crois qu'il faut parallèlement prendre en compte la qualité de l'eau potable dans les nations qui se trouvent à l'intérieur du Canada, soit les Premières Nations. J'espère que le projet de loi C-326 pourra jouer un rôle en ce sens.

  (1600)  

    L'autre chose importante à noter est la suivante: l'enchevêtrement des compétences est un des gros défis auquel font face les Premières Nations dans le domaine de l'eau potable. Le problème est le même dans beaucoup d'autres domaines, car il est difficile de savoir ce qui relève des autorités provinciales ou du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral doit prendre ses responsabilités. Voilà le message que nous souhaitons lui faire parvenir.
    D'après ce que je peux constater dans ma propre communauté, la question la plus pertinente que l'on peut se poser dans le cas de l'eau potable chez les Premières Nations est la suivante: Quels sont les éléments que nous devons rechercher dans les analyses? Comme je l'ai dit, ce n'est pas un problème bactérien que nous avons à Kitigan Zibi; ce sont plutôt les radiations qui posent problème chez nous. J'aimerais parler un peu plus de cette situation.
    Dans les années 1990, lorsque nous avons découvert des traces d'uranium, nous nous sommes efforcés de réagir le plus rapidement possible. Nous avons obtenu un financement de Santé Canada pour effectuer des analyses permettant de déceler les traces d'uranium. Je reconnais que je ne suis pas un spécialiste, mais je vais vous dire ce que je sais, ce que j'ai lu et ce que m'ont dit les gens de ma communauté, mon chef et les personnes qui ont travaillé à ce projet. Avec l'aide du gouvernement fédéral, nous avons fait un excellent travail qui nous a permis de réduire les concentrations d'uranium. D'après les données que j'ai en main, le radon était présent dans 43 % des résidences dans les années 1990 et 8 % d'entre elles dépassaient de 3 à 10 fois les niveaux tolérables. Aujourd'hui, nous avons réussi à faire descendre ce pourcentage à environ 17 %.
    Pour traiter l'uranium dans l'eau, nous avons recours à une sorte de résine qui capte essentiellement l'uranium contenu dans l'eau. Comment fonctionne ce procédé? Nous avions peur que la résine devienne radioactive après avoir absorbé l'uranium. Certains se sont demandé ce qui se passerait dans les fosses septiques et les champs d'épuration, ainsi que les champs d'épandage. C'est à ce moment-là que nous avons analysé l'eau provenant de deux ou trois puits de Kitigan Zibi afin de contrôler la présence de radium. Nous avons en effet trouvé du radium. Combien? C'est là que les choses deviennent intéressantes.
    Nous nous sommes adressés à Santé Canada et nous avons dit au ministère que nous avons traité l'uranium et que nous avons également constaté la présence de radium dans des proportions inconnues. Santé Canada nous a alors répondu que l'option la plus économique serait de consommer de l'eau en bouteille. Depuis, la majorité des ménages de ma communauté consomme de l'eau en bouteille. D'après ce qu'on m'a dit, le coût pour la communauté est d'environ 1 800 $ par semaine. Je répète que je ne suis pas un représentant élu, ni un mathématicien, mais je pense qu'à ce train-là, compte tenu de l'augmentation de la population, cette option cessera bientôt d'être la plus économique. Nous devons choisir la meilleure option, celle des droits humains.
    En terminant, je voudrais dire que je fais essentiellement confiance aux gens. Je crois que nous pouvons tendre la main et nous toucher. Je crois en vous. Je crois que vous écoutez. Je crois que vous prenez notre situation à coeur, sinon vous ne seriez pas ici. Vous ne feriez pas ce travail.
    Permettez-moi de prendre quelques instants pour vous faire participer à un exercice de suspension de l'incrédulité. J'aimerais vous faire croire que ce verre d'eau provient de Kitigan Zibi. Comme je l'ai dit, je crois en vous. J'aimerais savoir si vous boiriez cette eau si vous aviez vraiment soif. Vous ignorez les concentrations de radium dans cette eau, mais vous n'avez pas besoin de la boire, puisque vous avez de l'eau en bouteille. Je vais vous poser une question. Je ne sais pas combien d'entre vous ont des enfants, mais supposons que j'apporte ici une bassine contenant de l'eau de Kitigan Zibi. Je répète que je vous fais confiance et que je crois que vous avez à coeur le bien-être des autres. Est-ce que vous baigneriez votre bébé dans cette eau comme nous le faisons chaque jour?
    Je vous fais confiance en tant que personne, mais ce que je vous demande aujourd'hui c'est de nous donner un gouvernement en qui nous puissions avoir confiance. Donnez-nous un gouvernement sur lequel nous pouvons compter, en qui nous pouvons avoir confiance chaque fois que nous ouvrons le robinet.
    Merci.

  (1605)  

    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Graham Gagnon pour qu'il puisse présenter ses observations pendant une dizaine de minutes.
    Je remercie les membres du Comité, ainsi que M. Casey, de me donner l'occasion de parler aujourd'hui de la question de l'eau potable au Canada.
    Je suis actuellement directeur du Centre for Water Resources Studies, professeur et titulaire de la chaire industrielle de recherche du CRSNG à l'Université Dalhousie, à Halifax, en Nouvelle-Écosse.
    Dans notre laboratoire, mon rôle consiste à dialoguer avec les étudiants et à les superviser dans les projets de recherche qui concernent l'eau potable dans les collectivités canadiennes. Nos travaux portent en particulier sur certains de nos partenaires tels que Halifax Water et la municipalité régionale du Cap-Breton, mais j'ai aussi l'occasion de collaborer avec de nombreuses autres municipalités canadiennes. La semaine dernière, je me suis penché sur un projet en cours à Regina, en Saskatchewan, ainsi que sur un nouveau problème auquel sont confrontés les habitants de Regina.
    À titre de directeur du centre, j'ai aussi eu l'occasion de collaborer avec l'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs, dont le siège social se trouve à Cole Harbour, en Nouvelle-Écosse. Les chefs de ma région sont très préoccupés par l'eau potable et une des solutions qu'ils proposent est la création d'un office de l'eau dédié aux Premières Nations, approche novatrice visant à relever les défis en matière d'eau potable auxquels font face les Autochtones dans la région en raison de l'agrégation, de la combinaison des services et des structures de gestion qui sont vraiment novatrices dans le paradigme que propose Services aux Autochtones Canada.
    À titre de directeur du centre, j'ai également eu l'occasion de travailler avec plusieurs organismes provinciaux et fédéraux. Je viens de terminer récemment un projet avec Santé Canada. Je travaille actuellement sur un autre projet avec le gouvernement du Nunavut, un projet avec le ministère de l'Environnement de Nouvelle-Écosse, ainsi qu'avec les provinces de l'Ontario et de l'Alberta. Toutes ces activités et tous les travaux que j'entreprends avec les municipalités révèlent clairement un besoin, en particulier au sein des municipalités, de recueillir les meilleures informations disponibles. Au Canada, la plupart de nos municipalités sont membres d'une organisation appelée American Water Works Association, ou AWWA, dont le siège social se trouve à Denver, au Colorado. Comme vous pouvez l'imaginer, beaucoup de nos grandes métropoles s'adressent à l'AWWA pour obtenir les meilleures informations disponibles. La disposition du projet de loi concernant l'obtention par le gouvernement fédéral des meilleures informations disponibles dans le rapport annuel de l'OCDE devrait, selon moi, plaire aux municipalités qui sont déjà nombreuses à rechercher de telles informations; la volonté de sortir des sentiers battus et d'imaginer de nouvelles façons de gérer l'eau potable ne pourrait que plaire à de nombreuses municipalités.
    D'autre part, je travaille avec un certain nombre d'entreprises de technologie propre. Au Canada et dans la région de l'Atlantique, l'économie des technologies propres est florissante dans le secteur de l'eau potable. Une des entreprises avec lesquelles je collabore régulièrement s'appelle LuminUltra. Cette société de biotechnologie de premier plan, dont le siège se trouve à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, s'efforce de mettre au point de nouveaux tests visant à mesurer la qualité bactériologique de l'eau potable. La plupart des activités de cette société sont destinées à l'étranger, étant donné que beaucoup de clients canadiens n'en voient pas nécessairement l'utilité. Cependant, l'étude d'autres instruments pour la mise en place de paradigmes ou de régimes réglementaires au Canada permettrait de définir de nouvelles façons de mesurer la qualité bactériologique et d'engager des entreprises de biotechnologie comme LuminUltra.
    Cependant, dans le contexte canadien, l'élaboration d'une politique relative à l'eau potable ne peut se faire qu'en tenant compte d'une perspective locale et régionale. Au Canada, le gouvernement canadien fait appel au Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable qui permet la collaboration des organismes fédéraux et de leurs partenaires provinciaux pour garantir la salubrité de l'eau potable. Pourtant, une voix manque terriblement au sein de ce comité et c'est bien sûr la voix des Autochtones. Je reconnais que Services aux Autochtones Canada siège à ce comité, mais cet organisme ne peut remplacer un expert technique ni un membre d'une communauté des Premières Nations. Tout comme mon collègue M. Odjick, je suis convaincu que la représentation et le point de vue d'un membre des Premières Nations sont indispensables à ce type d'organisme ou comité fédéral. Un grand nombre de nos partenaires provinciaux vivent et élèvent leurs familles dans les provinces qu'ils représentent lorsqu'ils siègent en tant que membres d'un comité. Un représentant des Premières Nations pourrait exprimer ce point de vue local qui n'existe pas actuellement au Comité fédéral-provincial-territorial. La représentation des Inuits, des Métis ou des membres des Premières Nations me paraît indispensable pour comprendre les problèmes liés à l'eau potable dans les collectivités.
    J'invite les membres de votre comité à en tenir compte dans leur réflexion sur la politique actuelle et le projet de loi C-326. Essayez d'imaginer quel effet cela pourrait avoir sur les communautés des Premières Nations et quelle serait l'utilité pour le Comité fédéral-provincial-territorial d'accueillir une voix autochtone.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter mon point de vue et je suis prêt à répondre à vos questions.

  (1610)  

    Merci à tous pour vos exposés.
    Nous allons maintenant entamer un tour de questions de sept minutes et nous allons commencer par Mme Sidhu.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de nous avoir présenté ces commentaires si touchants.
    Ma première question s'adresse à M. Odjick. Quels sont les obstacles qui s'opposent à la mise en oeuvre du projet de loi C-326? Comment pouvons-nous les surmonter?
    J'aimerais que chacun d'entre vous me donne son point de vue à ce sujet.
    D'après moi, l'eau potable a toujours posé problème dans les collectivités des Premières Nations, en particulier dans le cas des communautés isolées. Les coûts peuvent être très élevés. Comme le disait mon collègue, l'important est de consulter les chefs des Premières Nations et les personnes qui ont de bonnes connaissances en matière de main d'oeuvre, de budgets et de solutions possibles. Ces gens-là seraient mieux en mesure que moi de répondre. La meilleure façon de faire sera toujours de nous accorder une place autour de la table et de nous permettre d'exprimer notre point de vue.
    D'autre part, comme je l'ai dit, il faudrait définir une fois pour toutes comment se répartissent les responsabilités entre les gouvernements provinciaux et fédéral. Le gouvernement fédéral doit se manifester et prendre ses responsabilités.

  (1615)  

    Merci.
    Je vous en prie.
    Monsieur Gagnon, pouvez-vous nous recommander des amendements à apporter à ce projet de loi?
    Oui.
    Je pense que nous avons tous les trois souligné assez clairement la nécessité d'accorder une voix aux Premières Nations. Comme l'a dit M. Leonard, je pense que les nouveaux règlements ne devraient pas être de simples paroles en l'air, mais devraient refléter l'ensemble de la population canadienne, avec la participation des peuples autochtones, quelle que soit la forme que cela pourrait prendre. Ce serait un amendement important à apporter à ce projet de loi.
    Monsieur Leonard, avez-vous un commentaire à ajouter à ce sujet?
    Oui, j'aimerais souligner au Comité que cela nous ramène la sempiternelle question des ressources par opposition aux règlements. Que ce soit dans l'évaluation technique nationale, le comité d'expert sur l'eau potable chez les Premières Nations, ou dans les nombreux rapports du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, c'est toujours le même thème qui ressort, à savoir que les ressources financières sont indispensables pour construire, gérer et entretenir de manière appropriée les réseaux d'approvisionnement en eau potable. On ne peut pas, par règlement, ou simplement par l'adoption de lignes directrices, produire de l'eau potable de qualité.
    C'est tout le problème de la Loi sur la salubrité de l'eau potable des Premières Nations. C'est, selon moi, le problème auquel se heurte ce projet de loi. Nous avons beau promulguer toutes les normes possibles à propos de la situation que vivent les Premières Nations, ces normes ne garantiront pas la salubrité de l'eau coulant du robinet. Il faut des ressources financières et aucun gouvernement n'a présenté de plan financier ou d'engagement pour répondre aux besoins signalés par l'évaluation technique nationale.
    Connaissez-vous des nouvelles technologies ou méthodes susceptibles d'améliorer la qualité générale de l'eau?
    Je ne suis pas hydraulicien, mais j'ai fait le tour des stations de traitement des eaux dans les Premières Nations et je travaille actuellement sur plusieurs problèmes avec Engage Canada.
    Je répondrai simplement à la question que beaucoup des systèmes de traitement des eaux dans les Premières Nations, ceux des villes et des villages, sont de simples systèmes de chloration qu'on ne verrait pas dans d'autres collectivités canadiennes. Il n'y a aucun traitement à barrières multiples, on n'utilise pas de rayons ultraviolets ou d'autres sortes de technologie membranaire actuelles. La plupart des systèmes des Premières Nations sont vétustes. Je parle des villes et des villages, parce que dans bien des communautés, 60 %, 70 %, voire 80 % de l'eau consommée en zone rurale vient de puits, de citernes ou est acheminée par camion, et dans tous ces cas...
    Voyez ce qui se passe dans la Première Nation Kainai, aussi appelée tribu des Blood, dans le Sud de l'Alberta. Elle compte environ 13 000 membres. C'est une des plus grandes réserves du Canada. Elle dispose d'un petit parc de camions-citernes qui parcourent des milliers de kilomètres sur des routes sommairement aménagées pour faire le plein de citernes trop petites pour le nombre de personnes qui vivent dans la réserve.
    Cela pose un problème sur le plan de la réglementation, du financement ou des directives — tout ce qui touche à la consommation d'eau en milieu rural. Jusqu'ici, la conversation nationale porte sur tout ce qui a trait à un traitement des eaux centralisé et urbain. C'est certes un problème pour les Premières Nations, mais le principal défi, c'est l'approvisionnement des foyers en milieu rural.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Madame Gladu.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie aussi les témoins.
    En préambule à mes questions, j'aimerais exposer brièvement mes antécédents. Lorsque j'étais ingénieure chimiste chez Dow Chemical, j'ai travaillé à la mise au point de systèmes membranaires et de systèmes à échange ionique pour le traitement des eaux et l'élimination de contaminants. Ensuite, j'ai travaillé dans l'industrie de l'eau embouteillée. Puis j'ai travaillé chez Suncor en qualité de directrice de l'ingénierie et de la construction pour le développement, la conception et la construction de tous les systèmes d'eau potable, comme les installations de traitement par osmose inverse pour assurer la qualité de l'eau. Après cela, je suis allée travailler chez WorleyParsons, où nous avions une technologie de traitement des eaux importante, et j'ai travaillé sur différents systèmes d'alimentation en eau, tant municipaux qu'industriels.
    Une des difficultés que je vois par rapport à cette réglementation, c'est qu'il s'agit d'une autre mise à jour qui vient s'ajouter à toutes les autres mises à jour. Chaque municipalité a ses propres spécifications et chaque province a sa propre série de codes ou de spécifications, et le gouvernement fédéral vient s'ajouter à tout cela.
    Je me demande si l'un de vous a des idées pour mieux rationaliser les niveaux provincial, municipal et fédéral afin d'arriver à une norme qu'on pourrait aider à respecter.
    Je commencerai par vous, monsieur Gagnon.

  (1620)  

    Je vous remercie. Je suis heureux d'apprendre que vous êtes ingénieure chimiste de formation.
    L'idée d'essayer de rationaliser la consommation provinciale, municipale et fédérale de l'eau est un vrai défi. J'aime regarder ce qui se fait dans d'autres pays entre autres parce que le Canada peut découvrir d'autres façons de procéder. Je suis très impressionné, par exemple, par la méthode adoptée par le Royaume-Uni.
    La Grande-Bretagne, comme vous le savez peut-être en tant qu'ingénieure, applique une méthode axée sur les risques. La plupart des compagnies des eaux sont privées, mais cela n'a rien à voir. L'Australie et la Nouvelle-Zélande suivent aussi une approche axée sur les risques, un peu comme l'industrie du transport aérien et le secteur bancaire. En fait, le Canada et les États-Unis accusent un certain retard en ceci que nous acceptons le paradigme qui nous fait nous retrouver dans ce piège. Ce dont Me Leonard a parlé, le paramètre précis que nous devons respecter. Au Canada, nous en avons plus de 80, ce qui complique beaucoup la vie aux petites communautés à court de ressources.
    Une approche de la gestion axée sur les risques dit: préparez un plan de gestion et nous, gouvernement, nous l'évaluerons, un peu comme le secteur bancaire évalue les habitudes de dépenses individuelles, puis prend des décisions relativement aux risques par rapport à ces habitudes. Nous n'évaluons pas chaque achat que vous faites, mais nous avons un cadre. Cela nous donne beaucoup plus de latitude dans notre analyse.
    Il y a un mois environ, j'étais à Pond Inlet, au Nunavut, qui est une des communautés les plus septentrionales du Canada. L'eau y est acheminée par camion, comme dans la majorité des communautés arctiques. Cependant, notre politique repose pour l'essentiel sur l'idée que nous allons acheminer l'eau d'une installation à un foyer par des conduites. Ce paradigme ne fonctionne pas dans les communautés arctiques.
    La plupart de nos règlements commencent à s'effondrer comme des châteaux de cartes parce que nous voyons le monde de cette manière. Une approche axée sur les risques nous permet essentiellement d'avoir une certaine latitude, de poser des questions sur un camion, sur sa propreté, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
    Une approche ou un examen de l'OCDE nous permettrait de demander s'il existe une autre façon pour nous de réglementer l'eau, ce qui, à mon sens, nous permettrait aussi d'examiner la question très difficile que nous posons. Pouvons-nous procéder autrement qu'avec de multiples niveaux?
    Avez-vous quelque chose à ajouter, maître Leonard?
    Je reconnais qu'il est intéressant de voir ce qui se fait dans d'autres pays de l'OCDE, mais je ne suis pas certain qu'il soit nécessaire de le prévoir dans une loi. Le ministre et le ministère peuvent s'en charger.
    Travaillant dans un contexte de Premières Nations, si j'avais eu plus de temps pour me préparer à cette audience, j'aurais pu vous apporter un tas de rapports des 30 dernières années dans lesquels nous avons étudié le problème sous tous les angles. Nous savons tous ce qu'il faut faire.
    Plus généralement, je vais revenir à la protection des sources d'eau. Si vous êtes ontarien, des dispositions législatives protègent votre source d'eau. Si vous vivez en zone rurale en Alberta, il n'y en a aucune à vrai dire. Vous êtes responsable de votre puits et de la consommation sur vos terres. Il n'existe rien de comparable au système en place en Ontario.
    Selon moi, le gouvernement fédéral pourrait, s'il en a la volonté politique, ce dont je doute, créer une norme nationale pour les provinces et territoires et les autres paliers de gouvernement. En vertu de cette norme, il serait possible de légiférer comme on l'entend en matière de protection des sources d'eau, mais en respectant des normes minimales. De cette manière, tous les Canadiens, autochtones, non autochtones, de l'Ouest, du Centre, des provinces de l'Atlantique, sauraient que la même norme s'applique à tous en ce qui concerne la protection des sources d'eau.
    Je crois que c'est la seule approche conforme aux déclarations et engagements internationaux du Canada pour ce qui est de l'accès à de l'eau potable en tant que droit de la personne. Elle correspond aussi aux termes de la déclaration des Nations unies sur le droit à l'eau potable.

  (1625)  

    Je prends acte de votre remarque. Si on fait plus de recommandations mais qu'on ne prévoit pas les moyens pour les appliquer, elles sont totalement inutiles. Nous avons déjà des normes que nous ne respectons pas et malgré les 8,4 milliards de dollars promis par le gouvernement pour mettre fin aux avis d'ébullition de l'eau quand il a été élu, et même si on note quelques progrès, il reste que... Si vous aviez donné 8,4 milliards de dollars à notre société d'ingénierie il y a des années, le problème serait réglé. Je pense qu'il faut muscler un peu ce projet de loi et que recommander d'autres mesures en plus de ce qui existe déjà ne réglera pas nécessairement la question.
    Avez-vous des commentaires à ce sujet, monsieur Odjick?
    Je suis tout à fait d'accord avec ce qu'ont dit les autres témoins. Il est important, selon moi, de se rappeler qu'il y a certes du travail à faire, mais que nous ne pouvons pas faire peser la responsabilité financière sur les communautés autochtones à cause d'un manque de financement et de budget. Il faudrait une autre approche. Le gouvernement fédéral devrait s'associer aux Premières Nations et traiter avec elles sur ce type de questions, simplement parce que, dans la plupart des communautés, et je peux parler en particulier de la mienne, les ressources et la main-d'oeuvre sont déjà utilisées au maximum.
    Je trouve l'idée des normes fantastique. Je suis d'accord avec Me Leonard. Comme je disais, si nous pouvons voir ce qui se fait dans d'autres pays... Surtout, nous devons analyser soigneusement l'eau potable dans les Premières Nations parce que, dans des communautés comme la mienne, on peut dire: « Des bactéries? Non. De l'uranium? Non. Du radium? Peut-être. » Ce « peut-être » n'est pas suffisant. En fin de compte, la première étape, celle des analyses approfondies, est essentielle et après, tout le reste suivra.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous au sujet des 8,4 milliards de dollars.
    Votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Davies, c'est votre tour.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Nous sommes le comité de la santé et je ne crois pas qu'il y ait de question plus essentielle pour la santé humaine que l'accès à de l'eau potable. Je ne veux pas sembler mélodramatique à ce sujet, mais l'eau est l'essence de la vie. Je ne pense pas que nous puissions vivre trois ou quatre jours sans eau, ce qui me fait dire que de toutes les questions soumises à ce comité, c'est une des plus importantes.
    Ce qui me vient à l'esprit, alors que nous étudions ce projet de loi, c'est la gravité du sujet et son importance en matière de santé. Que propose le projet de loi? Est-ce tout ce que nous pouvons faire? Il demande, pour l'essentiel, au ministre de procéder à un examen des normes en matière d'eau potable dans des pays membres de l'OCDE et, le cas échéant, de recommander des modifications aux directives nationales relatives à l'eau potable.
    Maître Leonard, si je vous ai bien entendu, vous avez dit que le projet de loi est, au mieux, une distraction ou une perte de temps et, au pire, un fardeau imposé aux Premières Nations. Étant donné que nous savons tous que la situation en ce qui concerne l'eau potable dans les communautés autochtones est déplorable dans tout le pays — il suffit de voir le nombre incroyable d'avis d'ébullition de l'eau —, devons-nous vraiment adopter une mesure législative pour regarder ce qui se fait dans les pays de l'OCDE? Ne ferions-nous pas mieux de consacrer des ressources aux besoins mécaniques sur le terrain? Est-ce que nous comprenons si mal quels sont ces besoins mécaniques?
    Je ne crois pas que nous comprenions si mal quels sont les besoins mécaniques. Je suis d'avis qu'il vaudrait mieux consacrer nos ressources et notre attention à remédier à ce que je considère comme une honte nationale. Je ne comprends pas qu'une personne qui vit en Alberta, qui est un des plus gros créateurs de richesses du pays, doive s'inquiéter quand elle ouvre un robinet chez elle parce qu'elle vit dans une réserve. Tant qu'on n'accordera pas toute l'attention et toutes les ressources nécessaires à ce problème, je considérerai tout le reste comme une distraction. C'est comme cela que je vois le monde aussi.
    Je vous remercie.
    Je m'adresse à M. Leonard. En 2014, lorsque vous représentiez quatre Premières Nations de l'Alberta qui avaient intenté une action en justice contre le gouvernement fédéral afin de régler de vieux problèmes d'eau potable, vous avez déclaré ceci: « Combien de fois allez-vous annoncer la même somme d'argent? Si vous avez dépensé 2 milliards de dollars et qu'après, vous vous apercevez que 73 % des Premières Nations restent confrontées à de graves problèmes d'eau potable, il est très évident que ce n'est pas assez. »
    Nous avons appris dernièrement que les deux tiers des communautés des Premières Nations du Canada ont fait l'objet au moins une fois au cours de la dernière décennie d'un ordre de faire bouillir l'eau, et nous savons qu'aux dernières élections, M. Trudeau se donnait cinq ans pour mettre fin aux ordres de faire bouillir l'eau dans les communautés autochtones. Cependant, d'après un rapport récent de la Fondation David Suzuki, le gouvernement fédéral est mal parti pour tenir sa promesse et n'a, en fait, aucun plan pour la tenir.
    Il me semble que le directeur parlementaire du budget en est arrivé à des conclusions similaires. Dans un récent rapport, il explique que le gouvernement fédéral ne dépense que de 50 % à 70 % de ce qui est nécessaire pour tenir sa promesse de mettre fin aux ordres de faire bouillir l'eau dans les réserves des Premières Nations en l'espace de cinq ans.
    Voici ma question. Vous avez déclaré que les investissements sont loin d'être suffisants pour répondre aux besoins. Combien faudrait-il, si vous le savez, pour que toutes les communautés des Premières Nations de ce pays aient accès à de l'eau potable et combien manque-t-il actuellement par rapport à cette somme?

  (1630)  

    Je n'ai pas ces chiffres en main, mais je sais, par exemple, qu'une évaluation technique nationale réalisée en 2011 dressait le tableau le plus précis. Elle n'est pas sans problèmes, mais c'est l'examen le plus approfondi dont nous disposions à l'échelle nationale et elle concluait qu'il faudrait un peu moins de 5 milliards de dollars sur 10 ans.
    Nous avons eu peut-être 330 millions de dollars sous le gouvernement Harper. Je ne suis pas certain du montant pour l'instant dans le mandat du premier ministre Trudeau.
    Il n'a pas été répondu à ce besoin. L'autre évidence dont personne ne parle est que lorsqu'on parle d'ordres de faire bouillir l'eau, c'est de l'eau des stations de traitement des eaux des Premières Nations. Comme je l'ai dit, dans beaucoup de communautés, nous avons des systèmes décentralisés: des camions, des citernes ou des puits, et ils ne sont pas surveillés de la même façon que les stations de traitement de l'eau potable. Nous ne savons donc pas combien de personnes ouvrent leur robinet dans ces foyers et s'exposent à des risques sanitaires.
    Il y a un autre perpétuel problème que ne règle pas l'initiative actuelle, même si elle dispose d'un financement suffisant. L'évaluation nationale réalisée par Neegan Burnside conclut, et je cite de mémoire, que 60 à 65 % des systèmes d'eau potable des Premières Nations du pays sont classés comme présentant un risque moyen. Autrement dit, il faut y investir des fonds pour qu'ils fonctionnent bien ou pour assurer leur entretien et pour, à terme, les remplacer. Nous avons donc cette bosse dans le serpent qui se dessine. Nous nous occupons peut-être maintenant des communautés visées par des ordres de faire bouillir l'eau, mais nous avons ce problème d'infrastructure qui se profile à l'horizon et qui coûtera des milliards de dollars à régler, et cela ne fera qu'empirer, puisque rien n'est fait.
    Nous avons un petit problème, messieurs dames. Nous avons un vote dans 28 minutes et 29 secondes. Nous avons donc besoin d'un consentement unanime pour continuer jusqu'à peut-être 15 minutes du vote.
    Avons-nous un consentement unanime?
    Une voix: Non.
    Le président: Nous n'avons pas de consentement unanime.
    Très bien, nous devons suspendre nos délibérations. Le vote a lieu dans 28 minutes. Il dure une dizaine de minutes, après quoi il nous faut cinq minutes pour revenir ici. Nous devons aller voter. Cela nous prendra un petit moment. Je dirai près de 45 minutes, étant donné que le vote est dans 28 minutes.
    J'espère que nos témoins peuvent attendre. Nous serons de retour dès que possible, mais cela fait partie de nos obligations. Nous devons aller voter.
    Je vais suspendre la réunion maintenant.
    Monsieur Leonard, souhaitez-vous faire un commentaire?
    J'ai une autre chose à faire aujourd'hui, puis un vol pour Calgary à attraper. Je vais donc devoir m'excuser.
    Très bien. Je vous remercie beaucoup de votre contribution.
    Monsieur Davies.
    Monsieur le président, je me demande au sujet du temps. Si le vote est dans 28 minutes, il est à 17 heures. Le vote prendra 15 minutes, ce qui nous met à 17 h 15. Le temps que nous revenions, il sera 17 h 20. Je ne vois pas comment nous pouvons poursuivre la réunion, s'il est prévu qu'elle se termine à 17 h 30. Je ne voudrais pas que les témoins restent si nous ne sommes pas en mesure de continuer.
    Nous devrions lever la séance.
    Je vois que le consensus est donc que nous mettions fin à la réunion.
    Je suis désolé. Votre témoignage était fort utile jusque-là et nous l'apprécions vraiment, mais la volonté du Comité est de mettre fin à la réunion et de reprendre les travaux mercredi.
    La séance est levée.
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