:
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous ai distribué une copie de ma déclaration si vous voulez y jeter un coup d'oeil. Ma déclaration sera bilingue, et je vais m'exprimer dans les deux langues, si cela vous convient.
Je me nomme Robert Larocque, et je suis le vice-président principal de l'Association des produits forestiers du Canada. Je suis très heureux de représenter le secteur forestier dans le cadre de votre étude sur les produits de la chaîne d'approvisionnement secondaire dans le secteur forestier canadien.
[Français]
L'Association des produits forestiers du Canada offre une voix, au Canada et à l'étranger, aux producteurs canadiens de bois et de pâtes et papiers pour des questions qui touchent le gouvernement, le commerce, l'environnement et le sujet dont nous allons discuter aujourd'hui, soit les nouvelles chaînes d'approvisionnement secondaire dans le secteur des produits forestiers.
[Traduction]
Tout d'abord, permettez-moi de vous donner un bref aperçu de l'importance du secteur des produits forestiers pour l'économie canadienne. L'industrie canadienne des produits forestiers a un chiffre d'affaires de 67 milliards de dollars par année, qui représente 12 % du PIB manufacturier du Canada. Il s'agit de l'un des plus gros employeurs du pays, qui a des activités dans 600 collectivités forestières et procure 230 000 emplois directs d'un océan à l'autre.
Le secteur est également important pour l'environnement canadien. Gardien de près de 10 % des forêts du monde, il prend très au sérieux ses responsabilités d'intendant de l'environnement.
Le Canada possède la plus vaste étendue de forêts certifiées par des tiers indépendants dans le monde, 166 millions d'hectares, soit environ 43 % de toutes les forêts certifiées. En fait, des sondages répétés auprès de clients à l'étranger ont révélé que l'industrie canadienne des produits forestiers avait, sur le plan de l'environnement, la meilleure réputation dans le monde.
Les changements climatiques se révèlent être le problème caractéristique de notre époque. Les entreprises forestières ont pris une longueur d'avance en réduisant de leur propre initiative leur empreinte carbone et en exploitant des établissements plus efficaces. En fait, les usines de pâte et papier ont réduit leurs émissions de gaz à effet de serre de 66 % depuis 1990, ce qui équivaut à neuf mégatonnes par année. Le secteur n'utilise pas de charbon; du pétrole, à peine, moins de 1 %.
À la suite des engagements pris par le Canada dans l'Accord de Paris, l'industrie forestière a promis, en mai dernier, de retirer d'ici 2030, 30 mégatonnes par année d'émissions de gaz à effet de serre, soit environ 13 % de l'objectif de réduction des émissions que s'est donné le gouvernement. C'est notre défi « 30 en 30 » des changements climatiques. Nous sommes fiers de faire partie de la solution, et il ne fait aucun doute que l'industrie canadienne des produits forestiers est un chef de file de l'environnement.
[Français]
J'aimerais souligner que les chaînes d'approvisionnement existantes et les produits traditionnels, tels que le bois d'oeuvre et les pâtes et papiers, doivent être soutenus pour assurer l'avenir de ce secteur. Tous les efforts actuels en ce qui a trait à l'innovation, au commerce international et aux projets d'infrastructure sont appréciés et doivent être maintenus, mais de nouvelles chaînes d'approvisionnement, qui permettraient au secteur de produire des biocarburants, des biomatériaux et des immeubles de grande hauteur, sont à portée de main.
[Traduction]
Pour avoir un secteur forestier prospère à l'avenir, il faut notamment assurer un accès durable, stable et économique à la fibre de nos forêts canadiennes. Les impacts des changements climatiques, tels que l'augmentation des incendies de forêt et des infestations de parasites, ont une incidence importante sur les Canadiens, nos collectivités et l'industrie forestière.
Nous sommes également d'avis que nous pouvons en faire davantage pour rendre nos forêts plus résilientes et assurer leur durabilité à long terme. Nous devons poursuivre les recherches sur les impacts potentiels des changements climatiques à long terme tels que la modélisation des feux de forêt et des infestations parasitaires, mettre en place des solutions de résilience climatique, comme le programme Intelli-feu, et collaborer avec nos homologues provinciaux afin de modifier nos activités de gestion forestière de manière à sélectionner et à faire pousser des variétés d'arbres en tenant compte de l'évolution des conditions climatiques.
L'APFC est en train de mettre sur pied un comité fédéral et provincial multipartite en vue de formuler des recommandations et de prendre des mesures liées aux impacts des changements climatiques, à l'amélioration de la gestion forestière et aux politiques qui font obstacle à la résilience des forêts.
[Français]
Du côté des usines, une des nouvelles chaînes d'approvisionnement pour le secteur est la production d'électricité verte. Le secteur a investi des milliards de dollars depuis les années 2000, et aujourd'hui, plus de 40 usines au Canada génèrent de l'électricité verte à partir de résidus. D'après un rapport de Ressources naturelles Canada, ces investissements ont soutenu plus de 14 000 emplois, réduit les émissions de gaz à effet de serre de 543 000 tonnes, les émissions atmosphériques d'environ 15 %, ainsi que l'utilisation de l'eau dans les usines d'une quantité équivalente à celle de 4 000 piscines olympiques.
[Traduction]
Alors que le secteur continuera de générer de l'électricité verte à partir de résidus, de nouvelles chaînes de valeur seront créées à mesure que le secteur se transformera pour produire des biocarburants, des bioproduits et des biomatériaux. Le secteur a entamé la transformation ces dernières années avec plus de 1 milliard de dollars en projets et annonces.
En outre, en partenariat avec le secteur agricole, le secteur a récemment proposé la création d'une supergrappe d'innovation en biodesign pour produire des biomatériaux avancés et des carburants à faible teneur en carbone dans le but d'établir de nouvelles chaînes de valeur de la bioéconomie, d'accélérer les technologies perturbatrices, de soutenir les économies rurales et d'améliorer l'environnement.
La grappe a fixé des objectifs quinquennaux: une croissance économique de 6 milliards de dollars, la création de 64 000 nouveaux emplois directs et indirects et une réduction des GES de l'ordre de 4 millions de tonnes.
Malheureusement, la supergrappe en biodesign n'a pas obtenu le succès escompté dans le cadre de l'Initiative des supergrappes d'innovation. Cependant, le secteur était très heureux que, à peu près au même moment, le Conseil canadien des ministres des forêts ait annoncé un cadre de bioéconomie forestière pour le Canada. L'APFC appuie les quatre piliers proposés: collectivités et relations; approvisionnement en ressources forestières et en bioproduits avancés; demande de bioproduits et de services forestiers avancés, c'est-à-dire la création de nouvelles chaînes de valeur; et soutien à l'innovation. Ces piliers sont bien alignés sur la grappe de biodesign et la transformation du secteur. Nous sommes impatients de travailler avec le Conseil canadien des ministres des forêts à la mise en oeuvre du cadre.
La transition du secteur vers une économie à faibles émissions de carbone créera une nouvelle chaîne d'approvisionnement secondaire dans le secteur des transports. Nous deviendrons un fournisseur de biocarburant. Dans le secteur de l'énergie, nous pourrions devenir un fournisseur de gaz naturel renouvelable. En ce qui concerne le mode de vie durable, on parle de produits utilisés par les Canadiens dans leur quotidien, comme la production de bioplastique, de nanomatériaux et de pièces d'automobile, ainsi que la construction de bâtiments de grande hauteur en bois d'ingénierie avec des matériaux isolants à base de fibres de bois. Cependant, pour y arriver, nous devons travailler ensemble.
Les politiques et les programmes de financement actuels, tels que Technologies du développement durable Canada ou Investissements dans la transformation de l'industrie forestière, qui sont nécessaires, mettent l'accent sur l'investissement en capital pour les nouvelles technologies dans les usines. Pour aller de l'avant, il est essentiel d'améliorer ou de créer de nouvelles politiques et de nouveaux programmes de financement dans deux domaines clés sur lesquels je vais m'attarder aujourd'hui. Ils assurent des forêts durables et saines pour un accès stable et économique à la biomasse et accélèrent l'accès à de nouveaux marchés et chaînes de valeur.
En conclusion, je voudrais remercier les gouvernements, nos collectivités, ainsi que nos partenaires universitaires et autochtones qui ont contribué à l'amorce de la transformation de notre secteur. Grâce à des programmes comme IFIT et le récent programme de croissance propre qui a été annoncé cette semaine, à la vision du gouvernement, au cadre de bioéconomie et à nos partenaires comme FPInnovations, nous nous dirigeons vers un secteur complètement transformé. Cependant, pour accélérer la transformation, tirer parti des possibilités en matière de croissance et de création d'emplois et procurer des avantages pour l'environnement, nous devons tous travailler ensemble pour assurer des forêts durables et saines, maintenir nos programmes actuels pour les installations du secteur forestier et accélérer l'accès aux nouveaux marchés et chaînes de valeur.
[Français]
Je vous remercie beaucoup de votre attention, et je serai heureux de répondre à vos questions.
:
Je vous remercie de votre invitation. Je suis très heureux d'être ici présent.
Nous avons fait circuler un document qui contient des images, et comme une image vaut mille mots, je pense que cela va favoriser le dialogue.
[Traduction]
Je vais commencer en vous disant qui nous sommes et ce que nous faisons et en vous parlant de l'incidence de notre secteur sur les changements climatiques. Je vais aussi vous donner des exemples concrets.
FPInnovations est une organisation issue de la fusion de quatre organisations en 2007. Elle représente maintenant entre 400 et 500 chercheurs partout au Canada. Son siège social est situé à Montréal et elle possède des bureaux à Hinton, en Alberta, au Québec, à Thunder Bay et à Vancouver, et a 40 conseillers industriels partout au pays. Elle dispose d'un budget d'environ 75 à 90 millions de dollars par année, dont un tiers provenant de l'industrie, qui compte 170 membres, un tiers des gouvernements — neuf provinces, deux territoires et le gouvernement fédéral — et un tiers des contrats, des redevances, des permis et ainsi de suite. Il s'agit d'une organisation à but non lucratif et à charte publique.
J'aimerais vous expliquer aujourd'hui en quoi le secteur forestier a une incidence sur les changements climatiques. Si vous prenez la diapositive 4, vous y verrez que: « Pour atténuer les changements climatiques, il est nécessaire de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et de stocker plus de carbone ». Sachez que des forêts et un secteur forestier en santé peuvent faire les deux. C'est ce dont je vais vous parler aujourd'hui en vous donnant des exemples.
À la diapositive 5, vous verrez que le cycle du carbone de la forêt est une solution naturelle: stocker le dioxyde de carbone à partir des arbres eux-mêmes, stocker les émissions issues de la fabrication industrielle, au moyen de la séquestration à court et à long terme par les bâtiments, puis recycler l'utilisation du bois en production d'énergie ou en fabrication de produits secondaires.
À la diapositive 6, vous verrez les possibilités pour les forêts et les produits forestiers à l'avenir. Il est important de comprendre que FPInnovations fait de la recherche dans de nombreux domaines, c'est-à-dire la sylviculture, la génomique, les opérations forestières, et la transformation secondaire et tertiaire du bois, des pâtes et papiers jusqu'à la bioénergie et la bioéconomie.
Si vous examinez certains de ces projets, vous constaterez qu'on mise sur le stockage de carbone à long terme dans les produits forestiers, tel que le bois dans les bâtiments et les infrastructures. Vous verrez quelques exemples plus tard de ponts en bois, qui sont un nouveau marché fantastique, et aussi de bâtiments en bois de moyenne et de grande hauteur.
Nous faisons aussi beaucoup de recherche pour mieux se protéger contre les incendies et les ravageurs, comme le dendroctone du pin ponderosa et la tordeuse des bourgeons de l'épinette, mais aussi, comme Bob l'a mentionné, nous essayons de transformer le secteur forestier actuel en produits biosourcés en exploitant une bioraffinerie qui utilise la biomasse pour créer des biocarburants, des produits biochimiques ou des biomatériaux. Il est également évident que la bioéconomie qui découle de nos travaux de recherche et d'innovation entraînera une croissance économique et des emplois verts pour les collectivités rurales et urbaines. Nous travaillons sur les deux fronts.
À la diapositive 7, nous avons choisi trois exemples de répercussions du secteur forestier. Certaines sont imprévisibles. Il est question de transport et de mobilité, de bioéconomie et de bâtiments. Si vous prenez la diapositive 8, où il est question de transport et de mobilité, on parle du développement d'une navette électrique autonome, branchée et quatre saisons pour tous les réseaux de transport en commun.
Nous nous penchons sur le transport dans le secteur forestier. Le coût du transport représente 45 % du coût du bois. Ensuite, nous transférons cela au secteur commercial. La première image à droite illustre les autobus intérieurs électriques que l'on peut voir à l'aérogare 2 de l'aéroport de Calgary. Si vous vous y rendez, vous verrez qu'ils ont été développés à partir de la technologie de FPInnovations.
Pour ce qui est de la consommation d'énergie, qui est un aspect très important, selon moi, et nous reviendrons au biodiésel, nous envisageons une remorque 100 % électrique ou hybride-électrique conçue pour l'hiver. Il y a aussi une nouvelle technologie, la circulation en peloton, qui se trouve sur la deuxième photo à droite, où l'on aperçoit trois camions, avec un seul conducteur et un temps d'espacement de 0,6 seconde entre eux. Évidemment, pour les collectivités du Nord, comme celles dans le territoire couvert par le Plan Nord au Québec ou dans la région de Tuktoyaktuk-Inuvik, étant donné qu'il y a une pénurie de conducteurs, ce serait une mesure très intéressante et économique.
Évidemment, cela n'est pas entièrement fait par FPInnovations. C'est un partenariat, parce que nous ne faisons pas tout, mais nous veillons à ce que tout soit fait. Dans le cas du transport, nous avons un partenariat avec ABB, Ericsson, Motrec et Technoparc Montréal.
En ce qui concerne la bioéconomie, les biocarburants et les produits biochimiques, nous avons un projet majeur à La Tuque, au nord de Trois-Rivières. C'est un partenariat entre le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral, l'industrie finlandaise des hydrocarbures — qui s'appelle Neste — la région de La Tuque et nous-mêmes pour produire du biodiésel à partir de la biomasse forestière résiduelle. Le volet de la recherche comporte trois phases. La première est complétée. Nous avons un partenariat technologique visant à produire du biodiésel qui serait expédié de La Tuque à Trois-Rivières, puis acheminé vers le reste de l'Amérique du Nord. L'investissement total pour la phase commerciale se chiffrerait à un milliard de dollars.
À l'heure actuelle, comme le disait Bob, le remplacement d'une partie du gaz naturel par la biomasse dans le cadre d'un projet pilote à l'usine de pâtes et papiers constitue également un important programme de recherche.
L'aspect le plus fascinant est la bioéconomie, des copeaux de bois jusqu'aux bioplastiques, comme le montre la diapositive 10. Nous avons une usine pilote à Thunder Bay avec Résolu où nous extrayons la lignine H et la cellulose, soit les sucres C5 et C6. La lignine H est d'abord transformée en biochar, mais elle finit par se retrouver dans les aliments pour animaux. J'expliquerais volontiers pourquoi les porcs aiment la cellulose, mais il s'agit d'un tout nouveau marché et il va nous aider à continuer de produire de la pâte à Thunder Bay. En même temps, les sucres C5 et C6 seront expédiés à Sarnia pour être transformés en produits biochimiques et différents acides. Les clients, Michelin et Lego, s'en servent pour fixer leur caoutchouc synthétique.
Nous vous avons donné quelques exemples. Je vais commencer par les immeubles de grande hauteur parce qu'ils semblent avoir suscité un certain intérêt. À la diapositive 12, vous voyez que nous avons déjà d'importants projets d'immeubles de grande hauteur. Nous avons un projet de résidence d'étudiants de 12 étages à Vancouver, et à Montréal, un immeuble en copropriété de huit étages, soit un investissement de 140 millions de dollars. Ces projets contribuent à accroître l'usage du bois dans les bioproduits, comme le pont que l'on voit du côté droit, qui mesure 160 mètres de long et qui pèse 375 tonnes, qui a été construit dans la région de Chibougamau pour la mine Stornoway. Ce sont des exemples de ce que fait le secteur forestier dans le cadre de sa transformation et de sa contribution à la lutte contre les changements climatiques, aux technologies propres et à l'avenir du Canada.
Merci.
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Merci, monsieur Larocque.
J'ai remarqué que vous avez été ingénieur des procédés. J'ai moi aussi été ingénieur principal des procédés agréé. J'ai aussi étudié dans le domaine des pâtes et papiers à l'Université de Toronto et je travaillais pour PetroCan. Je suis très ravi que vous soyez des nôtres aujourd'hui.
Il y a environ 20 ans, PetroCan était reconnu comme un institut de recherche de pointe dans ce secteur. C'est pourquoi je suis si fier d'avoir fait partie de PetroCan il y a 15 ou 16 ans. Puis, il a fusionné avec Forintek Canada Corporation et d'autres qui ont formé FPInnovations.
Si je me souviens bien, la fusion était nécessaire pour faire face à la baisse des profits et pour réduire les coûts en raison de la concurrence accrue dans cette industrie qui était en décroissance à ce moment-là. Puis, il y a quelques années, le Canada a vendu une grande partie de ses produits à haute valeur ajoutée sur le marché mondial. Par exemple, nous avons vendu un département de papier et de produits d'artisanat de haute qualité au marché asiatique. Nos produits forestiers étaient très recherchés.
Cependant, aujourd'hui, il semble qu'on parle davantage de certains bois d'œuvre ou de la matière première des produits forestiers sur le marché mondial et même en Asie ou aux États-Unis. Mais ces produits n'ont plus autant de valeur ajoutée. Bien sûr, parfois, lorsqu'il est question de biocarburants, on parle aussi de biomatériaux et des nouveaux domaines qui pourraient faire l'objet de vos discussions.
Ma question s'adresse aux deux témoins. Selon vous, dans quelle mesure l'industrie est-elle en santé au Canada en ce moment? Avez-vous des plans d'urgence pour gérer le pire des scénarios? Comment maintenons-nous cette recherche de pointe comme nous l'avons fait par le passé? Comment le gouvernement peut-il mieux aider l'industrie à passer à travers les périodes les plus difficiles?
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Très brièvement, lorsqu'il y a une dispute commerciale comme celle que nous vivons, et que nous devons mettre de côté 20 à 25 % pour des droits de douane, les fonds concernés ne peuvent pas être réinvestis dans l'industrie. Jusqu'à maintenant, nous sommes chanceux que le prix du bois aux États-Unis ait augmenté, mais cela signifie également que nous ne pouvons pas réinvestir dans nos installations ou dans de nouveaux produits les droits de douane de 20 ou 25 % que nous devons verser. En raison de ces droits, nos sociétés perdent du capital.
Nous sommes également très préoccupés par l'imposition de droits compensateurs sur le papier journal et le papier qui doit être annoncée en janvier. Si ces droits sont mis en oeuvre, cela signifiera que seuls les pâtes et le bois d'ingénierie ne feront pas l'objet de droits compensateurs de la part des États-Unis. C'est une situation très, très préoccupante. C'est la raison pour laquelle nous devons diversifier notre secteur. Nous devons être en mesure de fabriquer différents produits, pas seulement les pâtes et papiers, le papier journal et le bois d'oeuvre traditionnels.
Le soutien est l'un des principaux problèmes. Certaines sociétés font la promotion de nos produits. C'est le cas, par exemple, de Canada Wood qui organise des démonstrations au Japon. À notre avis, en raison de toute l'aide fournie par FPInnovations, nous pouvons fabriquer ces biomatériaux, mais nous avons besoin d'aide pour convaincre Nestlé, Danone et toutes ces autres entreprises d'utiliser ce genre de produits. Il n'existe actuellement aucun programme conçu pour cela.
Comme je l'ai dit, beaucoup d'investissements en capitaux ont été faits. Il ne faut pas les éliminer, mais plutôt prendre une partie de cet argent pour favoriser la coentreprise, comme une coentreprise entre une société de produits de bois et une société qui travaille dans le domaine du plastique pour mener des essais à l'interne et voir ce qui pourrait fonctionner et ainsi aider à alléger le risque pour le gouvernement fédéral.
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Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui pour nous faire part de votre point de vue.
Nous comprenons absolument les défis du secteur pour tout un éventail de raisons. Il est bon d'entendre parler de la diversification et des innovations du secteur.
Nous avons entendu d'autres témoignages de la part des gens qui sont la force, comme les producteurs primaires, et nous avons été mis au fait des enjeux dans le secteur, du point de vue des fermetures d'usines, etc. Cependant, en même temps, d'autres, comme FPInnovations, viennent nous parler de tout ce qui est possible en matière de diversification et d'innovation, de l'impulsion ou des nouvelles retombées et de la création de nouveaux produits, de nouvelles sociétés et capacités d'experts, et ainsi de suite. Je me suis rendu compte, en entendant tout cela, qu'il semble y avoir un fossé entre le côté primaire et les nouvelles occasions qui émergent.
Ma question s'adresse à vous deux. Quel rôle pourrions-nous jouer pour favoriser le rapprochement de ces deux côtés? Il me semble que les insectes et les incendies représentent des difficultés — il n'y a aucun doute là-dessus. En même temps, nous avons entendu d'autres témoignages voulant qu'une partie du bois qui ne sera pas utilisé d'une façon puisse l'être d'autres façons, ce qui représente le côté de la diversification et de l'innovation. Nous avons entendu des témoignages de gens d'un bout à l'autre du pays. Qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire pour faciliter ce rapprochement?
Je vais poser ma deuxième question dans un instant.
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Bonjour. Je veux commencer par remercier le Comité de me donner l'occasion de me prononcer dans le cadre de cette très importante étude. Je suis le président du Conseil du bois pour les Métallos du Syndicat des Métallos. Le Conseil a été créé dans le sillage de la fusion de 2004 entre le Syndicat des Métallos et mon ancien syndicat, le Syndicat des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés du Canada. Le Syndicat des Métallos représente maintenant plus de 18 000 travailleuses et travailleurs forestiers, dont 32 % travaillent dans la chaîne d'approvisionnement secondaire de l'industrie.
En fait, Structurlam, en Colombie-Britannique, qui a été mentionnée par le représentant de FPInnovations, nous appartient. Je n'ai pas vu les photos du pont pendant son exposé, mais j'étais à un exposé qu'ils ont présenté précédemment, et le pont de cette photo a été construit par nos membres du Québec. Nous sommes surtout connus pour nos bûcherons et nos travailleurs d'usine, mais nous sommes partout.
Veiller à la robustesse de l'industrie forestière n'est pas seulement dans l'intérêt de nos travailleurs ou de nos 600 collectivités tributaires des forêts, mais c'est aussi essentiel pour la santé de l'économie du Canada. Notre syndicat a lancé une campagne qui vise à soutenir les travailleurs et les collectivités. Elle s'intitule « The Working Forest » et se trouve sur le site workingforest.ca. C'était ma petite publicité.
L'année passée, l'industrie forestière représentait plus de 23 milliards de dollars du PIB du Canada, ce qui fait que nous sommes au diapason. La chaîne d'approvisionnement secondaire emploie plus de 92 000 personnes à l'échelle du pays; cependant, le secteur à valeur ajoutée, qui comprend tout, de la production de guitares à la construction moderne en lamellé-croisé, a perdu plus de 43 000 emplois depuis 2001. Notre syndicat croit que le Comité des ressources naturelles doit reconnaître cette baisse et recommander que la situation soit inversée au moyen d'une stratégie nationale sur la forêt qui reconnaît les secteurs distincts, mais intégrés de l'industrie forestière.
En 2017, les événements comme l'actuel conflit du bois d'oeuvre avec les États-Unis, les feux de forêt de l'été passé en Colombie-Britannique et l'infestation par le dendroctone du pin — toutes des choses dont vous avez entendu parler aujourd'hui —ont eu des effets négatifs sur l'industrie forestière et sur la chaîne d'approvisionnement secondaire. Les changements climatiques, qui sont la cause de plusieurs hivers chauds de suite, signifient que le dendroctone du pin pourrait continuer de produire des effets sur la forêt boréale pour encore 13 ans.
En ce qui concerne le dossier du commerce, sans accord sur le bois d'oeuvre en vue, nous sommes à quelques semaines de la décision finale sur les droits du département du commerce des États-Unis. Depuis l'expiration de cet accord, les exportations de bois d'oeuvre de l'UE aux États-Unis ont augmenté. À elle seule, la Finlande a augmenté ses exportations aux États-Unis de 293 %. L'agitation et l'instabilité que cela cause sont intolérables, manifestement. Le gouvernement du Canada doit en arriver à une solution juste et équitable à cette crise.
Le Canada fait bien sûr face à une montée du protectionnisme non seulement aux États-Unis, mais à l'échelle mondiale. Notre ressource naturelle étant abondante et renouvelable, les priorités de notre gouvernement devraient être de favoriser l'emploi et l'innovation au Canada afin de bâtir une industrie concurrentielle et attrayante sur les marchés mondiaux.
Pour répondre à certaines de vos questions antérieures, le comportement des sociétés produit aussi des effets sur les emplois et les collectivités ainsi que sur notre capacité de soutenir la concurrence. Sans moyen d'exercer un contrôle là-dessus, les sociétés canadiennes qui investissent aux États-Unis accaparent essentiellement l'investissement de l'industrie dans ce pays.
Le contrôle de l'exportation des billes de bois est un facteur de la capacité du Canada d'être concurrentiel dans le secteur à valeur ajoutée. Les exportations de billes de bois ont augmenté de façon spectaculaire sur deux décennies. En quelques petites années, de 1997 à 2004, la quantité de bois non transformé exporté de la Colombie-Britannique est passée de 200 000 mètres cubes à bien plus de 5,5 millions de mètres cubes par année.
La transformation du bois dans d'autres pays a directement causé la fermeture d'usines et la perte d'emplois, et cette fibre ligneuse n'est plus ici pour créer les extraordinaires produits novateurs dont nous avons entendu parler à la dernière séance. En somme, on ne peut espérer maintenir une industrie à valeur ajoutée viable au pays si on ne tente même pas de freiner l'exportation du bois et de transformer la matière ici.
Cela dit, nous ne demandons pas une interdiction totale des exportations. Toutefois, les occasions de réduire les exportations canadiennes de grumes non transformées sont nombreuses; les conjuguer à des soutiens visant à outiller et dynamiser de nouveau un grand nombre de nos usines permettrait d'augmenter le nombre de produits de bois de fabrication canadienne disponibles au pays et à l'étranger. Si l'objectif de votre étude est de recommander des mesures pour assurer la croissance de l'industrie, il faut adopter des stratégies nationales et provinciales qui établissent clairement le rôle que doit jouer l'investissement public et les politiques gouvernementales afin de décourager les exportations excessives de grumes et d'encourager la fabrication au Canada. Le gouvernement fédéral doit prendre les rênes et collaborer avec les provinces afin de créer des conditions propices à la croissance.
Par exemple, notre mémoire parle du besoin d'infrastructure, en particulier de routes principales et secondaires. Nous sommes d'accord avec l'Association de l'industrie forestière de l'Ontario pour dire que le manque d'infrastructure empêche au secteur de retrouver sa pleine productivité.
Une exploitation forestière judicieuse est un autre enjeu dont il faut tenir compte dans la stratégie nationale sur l'industrie forestière. Pour assurer la croissance de la chaîne d'approvisionnement secondaire, il est impératif de maintenir un volume de récolte convenable et constant. Cela dit, la recherche et le développement sur les produits du bois de diverses applications, y compris la construction, les produits industriels, les produits de consommation et bien d'autres domaines doivent se poursuivre grâce à des possibilités de financement et un engagement fédéral à utiliser le bois et ses produits lors des acquisitions.
Pour terminer, permettez-moi de répéter que de l'exploitation forestière à la transformation, en passant par le développement de produits, tout est interrelié et dépend de politiques publiques et de démarches stratégiques judicieuses qui améliorent les perspectives d'avenir de la foresterie au Canada. Notre industrie propre et verte a façonné le Canada d'un océan à l'autre.
Je vous demande instamment de profiter de l'occasion pour aider nos membres et les 600 collectivités dépendantes de l'industrie forestière en recommandant l'adoption d'une stratégie nationale qui assurerait la durabilité des forêts et des chaînes d'approvisionnement secondaires connexes.
Je vous remercie encore de m'avoir donné cette occasion, et je répondrai à vos questions avec plaisir.
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J'aimerais vous remercier de me laisser vous présenter des solutions sur les produits secondaires du secteur forestier.
Je vais vous parler brièvement de moi. À partir de 1991, à ma sortie de l'école secondaire, j'ai évolué dans l'industrie pétrolière et gazière en tant qu'abatteur pour sentiers d'exploration séismographique. Compte tenu des nombreux aléas de l'industrie, du milieu de travail malsain, je suppose, et de l'éloignement, j'ai décidé de diversifier mes activités en 2012. Puisque je m'occupais des arbres, je voulais avoir la meilleure entreprise arboricole qui soit avant de quitter l'industrie. J'ai assisté à une conférence de CanBio à Vancouver, qui m'a donné quelques idées, après quoi j'ai entrepris ma mission.
La chaîne d'approvisionnement secondaire de notre entreprise traite désormais du bois de milieux urbains, qui provient surtout de municipalités. Notre approche comporte quatre étapes: nous retirons les arbres, recyclons, rebâtissons et replantons. Différents produits sont créés à chaque étape du traitement de l'arbre. Tous ces produits créent différentes valeurs et divers avantages pour l'économie, l'environnement et le secteur de la bioénergie.
Il y a des avantages et des inconvénients. Lorsque nous retirions les arbres de la forêt sans les recycler, nous nous contentions de l'abattre, puis de nous en débarrasser. C'était un problème. Il avait peu ou pas de valeur lorsque nous le jetions au site d'enfouissement ou le réduisions en morceaux. Une fois que nous avons commencé à recycler le bois, qui est la première étape et la plus facile pour la plupart des gens, nous transformions l'arbre en copeaux, que ce soit pour le dépôt de couverture, l'aménagement paysager ou la rétention d'eau. Encore une fois, ce produit n'avait que très peu de valeur. Sous cette forme, le bois peut être utilisé comme biomasse pour les chaudières à copeaux et ce genre de choses.
L'étape suivante a été de scier le bois. Ce produit avait une valeur modérée: du bois brut non séché qui servait pour les clôtures et les matériaux de construction. Le bois était encore un peu instable et présentait des défis.
Lorsque nous avons fait l'acquisition d'un four, nous avons constaté que c'est à ce moment que les affaires ont vraiment fait un bond. Un vaste marché s'est ouvert à nous puisque nous séchions notre bois au séchoir. C'est l'étape que nous devions atteindre pour approvisionner ceux qui veulent construire quoi que ce soit avec la matière: des maisons, des meubles haut de gamme et n'importe quoi d'autre, que ce soit un crayon ou un chalet.
Je ne voulais pas me contenter d'être un fournisseur. Je souhaitais conserver mes employés à l'année et créer des emplois. Puisque nous contrôlions essentiellement le produit brut, nous avons formé une supergrappe avec les entreprises auxquelles je vendais le bois. Nous sommes cinq organisations à travailler ensemble: une entreprise de charpente de bois, une entreprise de construction domiciliaire, un tourneur de bois, une entreprise de fraisage à commande numérique personnalisée, ainsi que moi, le gars qui coupe l'arbre.
Nous avons constaté que faire passer le produit brut par toutes ces étapes était le meilleur moyen de créer le plus d'emplois possible et, évidemment, d'offrir un éventail de produits et de services.
Notre dernière étape, la plus décisive, est la replantation. Grâce à la collaboration des municipalités en régions urbaines, nous ne plantons pas que de minuscules semis. Nous utilisons plutôt des pelles hydrauliques à arbres. Nous en avons deux ou trois tailles différentes. On parle ici de reboisement urbain et de toutes les occasions qu'offrent les arbres en zone urbaine. Les forêts urbaines présentent des défis puisque le temps d'abattage est plus vite, je suppose. Une forêt urbaine ne vit généralement qu'une centaine d'années, en raison des contraintes de l'infrastructure et de la croissance. Il y a donc une excellente occasion de replanter des arbres dans nos villes et nos zones urbaines.
Ce sont les quatre « R » de mon entreprise.
L'exploitation forestière urbaine présente des défis, et il est difficile de convaincre une municipalité de revenir à l'ancienne façon de procéder. Nous coupons beaucoup d'arbres, mais au lieu de tout jeter au site d'enfouissement, nous faisons comme nos grands-pères en avaient l'habitude, puis construisons avec le bois. Il n'est pas simple de convaincre les municipalités qu'il s'agit d'un bon bois stable une fois qu'il est séché au four. Nous avons l'habitude de tout commander d'autres pays. Nous jetons nos arbres au site d'enfouissement, puis nous commandons des matériaux de construction. C'est assurément notre plus grand défi.
À Red Deer, nous commençons à faire des progrès et à construire à l'aide des produits qui proviennent justement du site. Les Jeux d'hiver de 2019 auront lieu à cet endroit. Pas plus tard qu'hier, nous avons utilisé les arbres d'un de nos sites afin de construire le bâtiment qui abritera un anneau de patinage. Il y a des projets dont nous sommes très fiers.
Un modèle du nom de Cannery a été créé à Davis, en Californie. L'objectif est d'installer une ferme aux abords d'un quartier pour qu'elle nourrisse les gens qui y demeurent. Notre approche est la même, mais avec des arbres. Une ferme recycle le bois; nous érigeons un quartier à côté de celle-ci, après quoi la ferme cultive les aliments et les arbres dont le voisinage a besoin.
Nous avons aussi lancé un programme d'éducation très impressionnant du nom de Sawing for Schools. Nous avons installé une scierie à l'école. Nous coupons tous les types de bois dans notre municipalité. Nous avons donc montré aux élèves les procédés et les étapes à suivre pour en faire un matériau de construction viable, puis avons donné ces matériaux à l'atelier. Avec ceux-ci, nous avons commencé à construire des chalets uniques, des arbres de Noël dont on voit la bordure naturelle, et d'autres produits en bois aux côtés des étudiants. À nos yeux, l'aspect éducatif est très important, et il faut faire connaître le processus au grand public. Pour ce faire, nous préférons passer par les jeunes. Nous constatons que le projet suscite un grand intérêt lorsqu'une fillette de 6e année sculpte à l'aide d'une scie à chaîne lors d'une exposition. Nous en sommes plutôt fiers.
Voilà donc ce que mon entreprise fait.
J'ai écouté les présentations des autres témoins. La bioénergie est formidable, mais si nous extrayons tout ce que nous pouvons afin de créer des matériaux de construction utilisables avant de déchiqueter le bois, nous pourrons en tirer un peu de bioénergie, laisser la fibre vivre encore quelques centaines d'années puis, lorsque le temps sera venu, nous aurons alors accès à cette capacité de biodiesel ou de bioénergie. J'aime utiliser l'arbre à son maximum. Nous croyons que c'est ce qui crée le plus d'emplois et optimise la valeur de nos superbes arbres et forêts. Nous pouvons fabriquer des produits d'exportation, mais nous pourrions aussi garder nos arbres ici et faire en sorte que nos quartiers soient totalement verts.
Je vous remercie.