HESA Rapport du Comité
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RÉSUMÉ
Contrairement à la plupart des pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Canada n’a pas de programme national d’assurance‑médicaments, c’est-à-dire de régime unique et public de couverture des médicaments délivrés sur ordonnance. Les Canadiens sont plutôt couverts par un ensemble disparate de régimes publics et privés d’assurance‑médicaments. Dans le contexte actuel, on estime que plus d’un Canadien sur cinq ne se procure pas les médicaments dont il a besoin en raison des coûts[1]. En outre, la capacité du Canada à gérer le coût des produits pharmaceutiques sur ordonnance est défaillante comparativement à celle d’autres pays. En 2015, les dépenses du Canada en médicaments par habitant étaient parmi les plus élevées des 29 pays de l’OCDE, se situant au troisième rang derrière les États-Unis et la Suisse[2]. Ces problèmes risquent d’aller en s’aggravant, compte tenu du nombre de plus en plus élevé de médicaments spécialisés coûteux qui sont utilisés pour soigner des maladies chroniques complexes. Reconnaissant toute l’importance que revêt la question pour les Canadiens, le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes (le Comité) a convenu d’entreprendre une étude sur l’élaboration d’un régime national d’assurance-médicaments en tant que service de santé assuré, en vertu de la Loi canadienne sur la santé, et d’en faire rapport à la Chambre[3]. Dans le cadre de l’étude, les témoins ont dit au Comité qu’une sérieuse réforme des divers régimes publics et privés d’assurance‑médicaments s’impose. Les lacunes au chapitre de la couverture des médicaments sur ordonnance ainsi que les variations dans les formulaires pharmaceutiques, tant à l’échelle du pays qu’entre les régimes publics et privés, figurent également parmi les problèmes importants à régler. Bien que le Canada ait mis en place des mécanismes efficaces pour gérer les coûts des médicaments sur ordonnance, notamment au moyen de l’Alliance pancanadienne pharmaceutique, de l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé et du Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés, le Comité a entendu que ces organismes n’avaient pas les moyens de composer avec les changements que connaît le marché mondial des médicaments. Plus encore, les économies réalisées dans le cadre des négociations menées par l’Alliance pancanadienne pharmaceutique profitent seulement aux personnes couvertes par des régimes publics. Les personnes sans assurance et les 70 % des Canadiens qui souscrivent à un régime privé d’assurance‑médicaments sont laissés en plan. Les difficultés que pose l’augmentation des coûts des médicaments menacent également la viabilité des régimes privés. Le Comité est convaincu qu’il est temps d’agir, et il a examiné de près deux grandes options stratégiques proposées par les témoins :
Selon le Comité, la meilleure solution en vue de l’établissement d’un régime public universel d’assurance médicaments à payeur unique serait d’ajouter aux services assurés en vertu de la Loi canadienne sur la santé les médicaments prescrits reçus à l’extérieur des hôpitaux. À la demande du Comité, le Bureau du directeur parlementaire du budget a examiné cette approche et a estimé, de manière prudente, qu’elle pourrait entraîner des économies de 4,2 milliards de dollars par année[4]. Tous les Canadiens auraient ainsi un accès égal et abordable à des médicaments salvateurs. Bref, cette approche permettrait de « sauver » de l’argent et des vies. Le Comité a déterminé que l’on n’obtiendra pas de meilleurs résultats sur le plan de la santé et que l’on n’assurera pas un meilleur contrôle des coûts si l’on ne fait que remédier aux lacunes touchant la couverture. Pour reprendre les propos de Marc-André Gagnon, professeur agrégé de l’École d’administration et de politique publique à l’Université Carleton, « [s]i on essaie de penser les solutions à partir du système fragmenté actuel, on finit par penser le régime public comme étant une espèce de poubelle des mauvais risques[5] ». Les patients à haut risque ou dont les traitements coûtent cher, les personnes âgées, les pauvres et ceux qui sont proches de ces catégories sont poussés hors des régimes privés vers les régimes publics, quand ils en existent. Le système qui en résulte est pensé « en fonction des besoins commerciaux des régimes privés et non pas en fonction des besoins en santé de la population canadienne[6] ». Or, le Comité reconnaît que pour passer à un régime public universel d’assurance‑médicaments à payeur unique, les gouvernements devront absorber les coûts pris en charge par le secteur privé, qui s’élèvent à quelque 10,7 milliards de dollars, avant de réaliser des économies[7]. Puisque le Canada est un État fédéré, le Comité estime que les coûts d’un tel régime devraient être partagés entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Le gouvernement fédéral devra consulter les employeurs, les syndicats, les administrateurs de régimes privés d’assurance‑médicaments et les Canadiens en général pour déterminer les meilleures stratégies de financement du nouveau régime. Il s’agit d’un changement difficile, mais nécessaire. Pour aller de l’avant, le gouvernement fédéral devra faire preuve de leadership et collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les fournisseurs de soins de santé, les patients, les compagnies d’assurance‑maladie privées, les syndicats et les entreprises. Le présent rapport contient 18 recommandations concrètes qui, selon le Comité, jetteront les bases nécessaires à l’adoption d’un régime d’assurance‑médicaments pour tous les Canadiens. [1] Institut Angus Reid, Opinion publique canadienne sur un programme d’assurance-médicaments, mémoire présenté au Comité HESA, 1re session, 42e législature, 6 juin 2016. [2] Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), Fiche d’information : Coup d’œil sur les dépenses en médicaments, 2017. [3] HESA, Procès-verbal, 1re session, 42e législature, 7 mars 2016. [4] Bureau du directeur parlementaire du budget (BDP), Coût d’un programme national d’assurance-médicaments de régie fédérale, 28 septembre 2017. [5] HESA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 1605, (Marc-André Gagnon, professeur agrégé, École d’administration et de politique publique, Université Carleton, à titre personnel). [6] Ibid. [7] Ibid., p. 46. |