Les règles du débat / Ordre et décorum

Propos non parlementaires

Débats, p. 22676–22677

Contexte

Le 3 octobre 2018, Larry Miller (Bruce—Grey—Owen Sound) invoque le Règlement pour exprimer ses préoccupations concernant la réponse donnée par Justin Trudeau (premier ministre) après le rappel au Règlement soulevé par Lisa Raitt (Milton) concernant l’utilisation par le premier ministre de l’expression « ambulance chaser[1] ». Candice Bergen (Portage—Lisgar) ajoute que, pendant l’échange entre le premier ministre et Chris Warkentin (Grande Prairie—Mackenzie), le premier ministre a aussi répondu qu’il était responsable du Président[2]. Après avoir entendu d’autres députés, le Président prend l’affaire en délibéré[3].

Résolution

Le 22 octobre 2018, le Président rend sa décision. Tout d’abord, le Président aborde la question de l’indépendance de la présidence. Il ne peut confirmer les allégations, mais déclare avoir l’absolue certitude que le Président n’est pas au service d’un député en particulier, mais qu’il est le serviteur de l’ensemble de la Chambre ainsi que le gardien des droits et privilèges de tous les députés. Ensuite, le Président souligne que l’expression employée par le premier ministre n’était pas dirigée vers Mme Raitt, mais qu’il l’a employée dans un sens plus vaste, ce qui est un usage acceptable à la Chambre. Le Président a néanmoins invité les députés à bien choisir leurs mots.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à me prononcer sur le rappel au Règlement soulevé le 3 octobre 2018 par l’honorable député de BruceGrey—Owen Sound concernant des propos non parlementaires. Je remercie le député de Bruce—Grey—Owen Sound d’avoir soulevé cette question importante, de même que le chef de l’opposition, le premier ministre et les députés de Milton, de Portage—Lisgar, de Grande Prairie—Mackenzie et de Barrie—Innisfil de leurs observations.

Le député de Bruce—Grey—Owen Sound a fait part de ses inquiétudes à l’égard de la réponse du premier ministre à la suite du rappel au Règlement soulevé par la députée de Milton concernant l’utilisation d’une expression prétendue non parlementaire par le premier ministre, c’est-à-dire l’expression en anglais « ambulance chaser ».

La députée de Portage-Lisgar a ajouté que les allégations qui mettent en doute l’intégrité, l'honnêteté ou la réputation d’un député sont contraires au Règlement. En outre, elle a fait valoir que les propos qu’aurait tenus le premier ministre lors d’un échange avec le député de Grande Prairie—Mackenzie remettaient en question, dans les faits, mon impartialité et mon intégrité à titre de Président.

Je traiterai d’abord de la deuxième question. L’indépendance de la présidence est essentielle non seulement pour nos délibérations, mais également pour notre système parlementaire. J’ai donc examiné attentivement les enregistrements audio et vidéo ainsi que les interventions concernant cette allégation. Même si je n’ai pas pu confirmer les allégations, je tiens à ce que la Chambre sache sans l’ombre d’un doute qu’en tant que Président je suis le gardien des droits et privilèges de tous les députés; c’est donc dire que je ne suis pas au service d’une partie de la Chambre ni d’un député donné. À titre de Président, je demeure le serviteur de l’ensemble de la Chambre, tel que décrit par le Président britannique William Lenthall le 4 janvier 1642. Tous les députés peuvent avoir l’assurance que j’applique ce principe fondamental, qu’il a participé à établir en passant, tous les jours, quoi qu’il arrive.

Pour ce qui est de la première question soulevée, il incombe toujours à la présidence de veiller à ce que les termes employés par les députés à la Chambre des communes demeurent dans les paramètres de ce qui est jugé conforme au langage parlementaire. Lorsqu’elle s’acquitte de cette responsabilité, la présidence se fonde sur la pratique et les précédents. Comme le dit La procédure et les usages de la Chambre des communes, troisième édition, à la page 624 :

Les expressions qui sont considérées comme non parlementaires lorsqu’elles s’appliquent à un député ne sont pas toujours considérées de la sorte lorsqu’elles s’appliquent de manière générale ou à un parti.

Étant donné que l’expression utilisée par le premier ministre en réponse à une question posée par la députée de Milton n’était pas dirigée directement contre la députée, mais avait plutôt une portée plus générale, le langage utilisé était, en principe, conforme à nos pratiques acceptées. Cela dit, je tiens à rappeler aux députés leur obligation de bien choisir leurs mots, compte tenu de l’effet qu’ils peuvent avoir.

Mon prédécesseur a encouragé les députés à tenir compte de cette réalité lorsqu’il a déclaré dans la décision rendue le 30 octobre 2013, à la page 593 des Débats :

Les Présidents qui m’ont précédé ont tâché de fixer des limites quant à l’usage de certaines expressions […] Voici le conseil que je donne aux députés de tous les partis : quand les Présidents fixent des limites, il faut s’efforcer de ne pas s’en approcher pour voir jusqu’où on peut aller.

En tant que Président, je sais que nous pouvons faire mieux, grâce à la collaboration et à la coopération soutenues de tous les députés.

Je remercie les honorables députés de leur attention.

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[1] Débats, 3 octobre 2018, p. 22159–22160.

[2] Débats, 3 octobre 2018, p. 22157.

[3] Débats, 3 octobre 2018, p. 9848.