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Chapitre VIII — Motions

Règlements [ 54555656.156.2575859606162636465666767.1 ]

Introduction

Pour obtenir que la Chambre prenne une décision sur une affaire qu’on lui soumet, il faut présenter une motion. En général, il faut donner préavis d’une motion, bien que cette exigence varie selon le type de motion et que plusieurs motions en soient même explicitement exemptées. Par contre, toutes les motions doivent être présentées par écrit et, une fois qu’elles ont été proposées à la Chambre par le Président, elles ne peuvent être retirées que par consentement unanime. La plupart des motions peuvent être débattues, bien que plusieurs, notamment la plupart de celles pour lesquelles aucun préavis n’est exigé, ne puissent faire l’objet d’aucun débat.

Article 54
Avis requis.
54.
(1)
Toute motion tendant à la présentation d’un projet de loi, d’une résolution ou d’une adresse, à la création d’un comité, à l’inscription d’une question au Feuilleton ou à la prise en considération de tout avis de motion donné conformément à l’article 124 du Règlement, est annoncée au moyen d’un avis de quarante-huit heures. Toutefois, cette règle ne s’applique pas aux projets de loi après leur dépôt, ni aux projets de loi d’intérêt privé, ni aux heures d’ouverture ou d’ajournement de la Chambre. Cet avis est déposé sur le Bureau, ou déposé auprès du Greffier, avant 18 heures (avant 14 heures le vendredi) et imprimé au Feuilleton des avis du même jour, sauf dans le cas prévu au paragraphe (2) du présent article. Tout avis déposé auprès du Greffier conformément au présent article est dès lors réputé avoir été déposé sur le Bureau au cours de la séance en question.
Avis lors d’une période d’ajournement.
 
(2)
L’heure limite fixée pour le dépôt des avis auprès du Greffier en vertu du paragraphe (1) du présent article ne s’applique pas le jour de séance où la Chambre s’ajourne conformément au paragraphe 28(2) du Règlement. Les avis peuvent être déposés auprès du Greffier au plus tard à 18 heures le jeudi précédant la prochaine séance de la Chambre et sont imprimés au Feuilleton des avis qui doit être publié pour cette séance.

Commentaire de l’article 54

Une condition préalable est assortie à la discussion ou à la présentation de presque toutes les questions de fond ou motions d’initiative personnelle à la Chambre : il faut en donner avis à l’avance, de sorte que les autres députés et la Chambre dans son ensemble n’aient pas à étudier une question à l’improviste. En vertu de l’article 54(1) du Règlement, un avis de 48 heures est requis dans la plupart des cas. [1] Cela s’applique aux motions tendant à la présentation d’un projet de loi, d’une résolution ou d’une adresse, aux motions portant création d’un comité, à l’inscription d’une question au Feuilleton et à la prise en considération de tout avis de motion donné conformément à l’article 124 du Règlement. (Le type d’avis prescrit à l’article 124 se rapporte à une motion proposée par un ministre tendant au rejet d’une résolution abrogeant un règlement.) Les autres exceptions à la règle des 48 heures comprennent les motions relatives à des amendements apportés par le Sénat à des projets de loi, les motions visant l’opposition à des postes du budget au cours d’une période des subsides (sauf pour la période se terminant le 23 juin) ainsi que les amendements à l’étape du rapport pour les projets de loi ayant été lus une deuxième fois, qui ne requièrent tous qu’un avis de 24 heures. [2] Les questions de privilège, les motions de remplacement [3] et les motions visant les heures d’ouverture ou d’ajournement de la Chambre [4] ne nécessitent aucun avis. On trouve un autre exemple de motions ne requérant aucun avis dans celles qui tendent à l’ajournement de la Chambre (en vertu de l’article 60) lorsqu’elles sont proposées en qualité de motions de fond. De même, une fois présentés, les projets de loi ne requièrent aucun autre avis aux diverses étapes de leur étude (à l’exception des motions d’amendement au stade du rapport et d’étude des amendements apportés par le Sénat), tandis que les motions de clôture et d’attribution de temps, ainsi que les projets de loi privés sont tous assujettis, en matière d’avis, à des exigences qui leur sont propres. [5] En outre, il arrive que l’on présente une motion ou que l’on soulève une question sans préavis conformément aux usages acceptés à la Chambre (la question du jeudi sur les travaux de la Chambre, par exemple), [6] ou encore, du consentement unanime de la Chambre. [7]

Les avis requis en vertu de l’article 54 doivent être donnés par écrit et on les présente simplement en les déposant (en les remettant au Greffier) avant 18 heures au cours d’une séance de la Chambre (avant 14 heures le vendredi). Cependant, les modalités administratives permettent de les expédier directement à la Direction des Journaux, méthode à peu près identique à celle du dépôt d’une pétition (voir l’article 36 du Règlement), à nouveau avant 18 heures (avant 14 heures le vendredi).

Après le dépôt ou la remise, le Greffier (sous l’autorité du Président) examine chaque avis pour y déceler toute éventuelle irrégularité; il peut ensuite, après avoir consulté le député qui en est l’auteur, en modifier la forme et le contenu. [8] L’avis est ensuite inscrit à la rubrique appropriée du Feuilleton des avis. [9] Si le député respecte l’échéance, l’avis entre en vigueur le jour de séance où il est donné et figure dans le Feuilleton des avis du jour suivant. Dans le cas de la règle des 48 heures, l’affaire est transférée au Feuilleton le jour suivant sa publication dans le Feuilleton des avis. [10] Pour la présentation d’une motion le lundi, l’avis peut être donné le vendredi qui précède, la période minimale requise de préavis s’écoulant durant la fin de semaine. [11] Si l’avis est donné après l’échéance, il entre en vigueur le jour de séance suivant.

Le dernier jour de séance précédant une période d’ajournement, l’échéance ordinaire relative aux avis ne s’applique pas. Conformément au paragraphe (2), les avis pour ce jour-là peuvent être déposés au plus tard à 18 heures le jeudi précédant la prochaine séance de la Chambre. L’avis paraîtra à la fois au Feuilleton des avis et au Feuilleton de cette séance.

Puisque le motionnaire demeure maître de l’avis jusqu’à ce que la Chambre en soit saisie, il peut facilement le retirer. Pour ce faire, il peut soit en demander le retrait par écrit au Greffier, [12] soit se lever en Chambre pour le retirer de vive voix. [13] Toute modification de fond à un avis déjà donné requiert la présentation d’un nouvel avis. [14]

Historique de l’article 54

Le paragraphe (1) visant les avis n’a guère changé depuis son entrée en vigueur en 1867. À la Confédération, les mêmes questions qu’aujourd’hui nécessitaient un préavis écrit de 48 heures, à l’exception des avis de motions concernant les décrets-lois qui ont été intégrés à la liste en 1986. [15] D’autres exigences plus précises, telles que l’avis de 24 heures requis pour les motions relatives aux amendements apportés par le Sénat ou l’avis donné de vive voix pour la clôture, par exemple, ont fait leur apparition beaucoup plus tard. En 1982, l’article 43 d’alors, qui autorisait explicitement les députés à présenter des motions sans avis dans un cas d’urgence, était supprimé (voir l’historique de l’article 31), bien que dans certains cas la Chambre ait continué depuis à renoncer aux exigences habituelles d’avis. [16]

De 1867 à 1927, les avis devaient être déposés au plus tard à 17 heures pendant tout jour de séance (y compris le vendredi), bien que l’on ait couramment accepté les avis remis au Greffier comme s’ils avaient été déposés sur le Bureau, et qu’on les ait acceptés jusqu’à 18 heures. [17] En 1927, on en est venu à codifier le délai de 18 heures dans le Règlement. [18] Ce délai a été ramené à 17 heures (pour le vendredi uniquement) en 1968. [19] En 1987, l’échéance des avis pour le vendredi a été fixée à 15 heures si l’avis était déposé sur le Bureau et à 17 heures s’il était déposé auprès du Greffier. [20] C’était ainsi la première fois que l’on codifiait la pratique de la remise au Greffier (au lieu du dépôt sur le Bureau). En 1989, on a repoussé à 19 heures l’échéance des avis pour le lundi afin de tenir compte de la prolongation des heures de séance de cette journée, [21] mais on l’a ramenée à 18 heures en 1991. [22] De même, l’échéance des avis pour le vendredi a été fixée à 14 heures, que l’avis soit déposé auprès du Greffier ou sur le Bureau.

Avant 1995, rien ne régissait l’échéance des avis avant de longues périodes d’ajournement. [23] Cela n’est guère surprenant, car il n’y a pas eu de calendrier parlementaire fixe avant 1982 et de semaines de congé régulières avant 1991 (voir l’article 28 du Règlement). Par conséquent, l’échéance habituelle applicable au dernier jour de séance précédant une période d’ajournement prévalait toujours et les avis donnés pendant le congé entraient en vigueur seulement le premier jour de séance suivant le retour de la Chambre. Comme cela pouvait compliquer les choses pour les députés, un comité a recommandé que les avis soient acceptés jusqu’à 18 heures le jeudi précédant le retour de la Chambre. C’est ce qui a entraîné l’ajout du paragraphe (2). [24]

La pratique veut depuis longtemps que les députés signent leurs avis pour authentifier leurs intentions. La présidence a statué que les avis transmis par télécopieur n’étaient pas recevables, du fait qu’ils ne portaient pas la signature originale du député. [25] Toutefois, suivant les recommandations de deux comités, on a instauré en 2005 un système permettant aux députés de transmettre leurs avis par l’intermédiaire d’un site web sécurisé. [26] À de multiples reprises depuis la Confédération, on a tenté de soulever des questions ou de proposer des motions sans avoir donné l’avis requis, mais la présidence a appliqué de façon très stricte les exigences de la règle. [27]

Article 55
Avis d’une mesure lors d’une prorogation ou d’un ajournement. Feuilleton spécial.
55.
(1)
Dans la période qui précède la première session d’une législature, durant une prorogation, ou quand la Chambre est ajournée, si le gouvernement fait savoir au Président qu’une ou plus d’une mesure du gouvernement doit être examinée immédiatement par la Chambre, le Président fera publier un avis de cette mesure ou de ces mesures dans un Feuilleton spécial qui sera distribué avant l’ouverture ou la reprise de la session. La publication et la distribution d’un tel avis doivent répondre aux dispositions de l’article 54 du Règlement.
Lorsque le Président ne peut pas agir.
 
(2)
Si pour cause de maladie ou autre raison, le Président ne peut agir, le Vice-président agit à sa place aux fins du présent article. En l’absence pour raison majeure du Président et du Vice-président, ou si le poste de Président est vacant, le Greffier de la Chambre est autorisé à agir aux fins du présent article.

Commentaire de l’article 55

Il peut arriver qu’avant le début de la session ou pendant un ajournement, le gouvernement souhaite que la Chambre procède immédiatement à l’étude d’une ou de plusieurs mesures pour lesquelles des avis auraient dû être déposés (voir également l’article 28(3) du Règlement). S’il fait part de son intention au Président, celui-ci doit faire publier un avis concernant ces mesures dans un Feuilleton spécial, qui est alors distribué à tous les députés au moins 48 heures avant l’ouverture ou la reprise de la session. [1]

Si le Président est malade ou ne peut, pour quelque autre raison, faire publier et distribuer ce Feuilleton spécial, la responsabilité en incombe au Vice-président. S’il n’y a pas de Président ni de Vice-président (ou s’ils sont absents), c’est le Greffier de la Chambre qui s’en charge.

Historique de l’article 55

Lorsque la Chambre a été rappelée en août 1966 afin d’étudier les effets d’un arrêt de travail des cheminots canadiens, il n’avait pas été donné officiellement avis de la présentation d’une mesure législative imposant le retour au travail, car la Chambre s’était précédemment ajournée. C’est pourquoi le premier ministre fut obligé de solliciter le consentement unanime des députés pour que la Chambre l’autorise à présenter un projet de loi à cet effet. Après un long débat, au cours duquel certains députés ont menacé de refuser leur consentement, la Chambre a unanimement convenu de permettre la présentation du projet de loi. [2]

Cet épisode est peut-être à l’origine de l’adoption en 1968 du texte de l’article 55 qui oblige le Président à faire publier et distribuer un Feuilleton spécial lorsque la Chambre a été prorogée ou s’est ajournée, et que le gouvernement souhaite faire étudier une mesure nécessitant un avis à la reprise. [3] Cette disposition a été appliquée pour la première fois en 1971 lorsque le gouvernement réussit, en faisant distribuer un Feuilleton spécial, à déposer une mesure de soutien de l’emploi le premier jour de la reprise suivant l’ajournement d’été. [4] On a également fait imprimer et distribuer des Feuilletons spéciaux en 1972, 1973, 1977, 1978, 1980 et 1987. [5] Chaque fois, la démarche a été entreprise alors que la Chambre était ajournée.

Depuis 1990, on a de plus en plus recours aux Feuilletons spéciaux et l’on en compte trois publications pour la seule année 1991. Si la plupart ont été imprimés pendant que la Chambre était ajournée, [6] il est arrivé qu’on en publie un alors que la Chambre était en prorogation (en 1996) [7] et deux avant la première séance d’une nouvelle législature (en 1997 et 2004). [8] En 1995, on a modifié les dispositions sur l’échéance à respecter lors des longues périodes d’ajournement de façon que les députés puissent donner avis jusqu’à quelques jours à peine avant le retour de la Chambre (voir l’article 54 du Règlement). Par conséquent, de nos jours, c’est uniquement lorsqu’on ne peut pas respecter l’échéance habituelle des avis qu’on fait imprimer un Feuilleton spécial, ou lorsqu’on ne publierait normalement pas de Feuilleton, par exemple lors du rappel de la Chambre ou à l’ouverture d’une nouvelle session.

Un Feuilleton spécial contient uniquement les avis donnés en vertu du présent article. Toutes les autres affaires paraissent dans le Feuilleton dès que sa publication régulière recommence.

Les deux paragraphes de cet article du Règlement n’ont pas été modifiés depuis leur entrée en vigueur en 1968.

Article 56
Avis de motions émanant du gouvernement.
56.
(1)
Après qu’il a été donné avis conformément à l’article 54 du Règlement, les avis de motions émanant du gouvernement sont inscrits au Feuilleton comme ordres du jour dans les Ordres émanant du gouvernement.
Une motion portant que la Chambre se constitue en comité plénier est réglée sans débat.
 
(2)
Les projets de motions inscrits aux Ordres émanant du gouvernement qui portent que la Chambre se constitue en comité plénier à la prochaine séance de la Chambre sont, une fois mis aux voix, réglés sans débat ni amendement.

Commentaire de l’article 56

À la date pour laquelle on a donné avis, les avis de motion émanant du gouvernement sont inscrits au Feuilleton sous la rubrique « Ordres émanant du gouvernement » et peuvent être appelés au même titre que tout autre ordre émanant du gouvernement, dans l’ordre choisi par celui-ci, lorsque la Chambre étudie les affaires émanant du gouvernement.

Toute motion émanant du gouvernement qui porte que la Chambre se constitue en comité plénier à la prochaine séance est mise aux voix sans débat ni amendement. Toute motion portant que la Chambre se constitue en comité plénier pour tenir un débat exploratoire est également mise aux voix sans débat ni amendement, cette fois en vertu de l’article 53.1 du Règlement.

Historique de l’article 56

Quoique l’article 56 du Règlement n’ait été formellement adopté en tant que nouvelle règle qu’en 1955, il reprend certains usages plus anciens. En effet, depuis 1927, les motions présentées par le gouvernement en vue de constituer la Chambre en comité plénier à la séance suivante ne pouvaient plus être débattues. En outre, à l’époque, la disposition du Règlement relative aux motions pouvant faire l’objet d’un débat avait été modifiée de façon à exempter du débat les avis de motion émanant du gouvernement et portant sur la constitution de la Chambre en comité plénier à une date ultérieure. [1] La nouvelle règle adoptée en 1955 a confirmé cet usage et précisé que ces motions ne pouvaient être modifiées. [2]

La règle de 1955 permettait en outre d’inscrire immédiatement à la liste des ordres émanant du gouvernement les avis de motion émanant du gouvernement qui étaient appelés par la présidence pendant l’étude des affaires courantes. [3] Auparavant, ces avis étaient considérés comme un élément des travaux de la Chambre, ne faisant pas partie des affaires courantes, et pouvant être appelés si la Chambre progressait suffisamment dans son ordre du jour. [4] En outre, ces motions pouvaient faire l’objet d’un débat. Une fois intégrées aux affaires courantes, elles ont pu être appelées quotidiennement et, comme l’indiquait clairement la règle, elles ne devaient plus être débattues puisqu’elles étaient portées immédiatement aux ordres émanant du gouvernement dès leur appel par le Président.

Cet article est demeuré inchangé jusqu’en 1987, année où il a été révisé en profondeur. [5] Les avis de motion émanant du gouvernement ne sont plus mis en délibération sous une rubrique distincte dans les affaires courantes; ils sont plutôt présentés pendant la période réservée à l’étude des ordres émanant du gouvernement, à la date indiquée dans l’avis. À ce titre, elles deviennent alors des items à l’ordre du jour, comme toute autre mesure d’initiative ministérielle que la Chambre ordonne d’étudier.

Les motions du gouvernement portant que la Chambre se constitue en comité plénier à sa prochaine séance sont également étudiées à la rubrique des « Ordres émanant du gouvernement » et, comme le voulait la règle de 1955, elles ne peuvent faire l’objet ni d’un débat, ni d’un amendement.

Article 56.1
Si le consentement unanime est refusé, « motion pour affaire courante » d’un ministre.
56.1.
(1)
a)
Dans le cas de toute motion pour affaire courante dont la présentation requiert le consentement unanime de la Chambre, un ministre de la Couronne peut, si ce consentement est refusé, demander au cours de l’étude des affaires courantes ordinaires que le Président saisisse la Chambre de la question.
b)
Pour l’application du présent article du Règlement, « motion pour affaire courante » s’entend de toute motion présentée dans le cadre de l’étude des affaires courantes ordinaires qui peut être requise pour l’observation du décorum de la Chambre, pour le maintien de son autorité, pour l’administration de ses affaires, pour l’agencement de ses travaux, pour la détermination des pouvoirs de ses comités, pour l’exactitude de ses archives ou pour la fixation des jours où elle tient ses séances, ainsi que des heures où elle les ouvre ou les ajourne.
Mise aux voix immédiate.
 
(2)
Une telle motion est mise aux voix sur-le-champ, sans débat ni amendement.
Opposition de vingt-cinq députés ou plus.
 
(3)
En mettant une motion de ce genre aux voix, le Président demande à ceux qui s’y opposent de se lever de leur place. Si vingt-cinq députés ou plus se lèvent, la motion est réputée retirée; sinon la motion est adoptée.

Commentaire de l’article 56.1

Deux articles du Règlement réfèrent explicitement à l’emploi du consentement unanime : l’article 64 et l’article 56.1. L’article 64 stipule qu’un député ayant présenté une motion peut la retirer uniquement par consentement unanime. [1] L’article 56.1 s’applique quant à lui à des circonstances particulières.

Cette règle permet à la Chambre d’examiner une motion pour une affaire courante pour laquelle elle n’a pas reçu d’avis écrit et pour la présentation de laquelle elle n’a pas obtenu le consentement unanime obligatoire. La règle circonscrit les « motions pour affaire courante » aux motions pouvant être requises pour « l’observation du décorum de la Chambre, pour le maintien de son autorité, pour l’administration de ses affaires, pour l’agencement de ses travaux, pour la détermination des pouvoirs de ses comités, pour l’exactitude de ses archives ou pour la fixation des jours où elle tient ses séances, ainsi que des heures où elle les ouvre ou les ajourne ».

Lorsqu’un député ne réussit pas à obtenir le consentement unanime pour la présentation d’une telle motion, un ministre peut demander, au cours de l’étude des affaires courantes, sous la rubrique « Motions », que le Président mette la question aux voix. [2] Conformément au paragraphe (2) de l’article 56.1, une telle motion est mise aux voix sur-le-champ, sans débat ni amendement. Conformément au paragraphe (3), lorsque la présidence met la motion aux voix, il demande à ceux qui s’y opposent de se lever de leur place. Si 25 députés ou plus se lèvent, la motion est réputée retirée; [3] autrement, elle est adoptée. [4]

La règle ne prévoit pas de restrictions ou d’échéances particulières quant au moment où l’on doit mettre aux voix la demande originale visant à obtenir le consentement unanime pour proposer la motion. Il est donc arrivé que la demande originale soit faite, par exemple, trois jours de séance à l’avance, [5] deux jours de séance à l’avance, [6] un jour de séance à l’avance, [7] avant les affaires courantes le même jour [8] et pendant les affaires courantes le même jour. [9] Même si la règle stipule clairement que seul un ministre du Cabinet peut invoquer l’article 56.1 du Règlement, elle n’exige pas que ce soit un ministre du Cabinet qui fasse la demande originale visant à obtenir le consentement unanime pour proposer la motion. [10] Rien n’empêche non plus qu’on essaie plus d’une fois d’obtenir le consentement unanime avant d’invoquer l’article 56.1. [11] En outre, il n’y a aucune limite quant au nombre de fois où le gouvernement peut recourir à cette règle au cours d’une séance. [12]

Le Président a explicitement statué que cet article n’avait jamais été destiné à faire adopter un projet de loi à ses diverses étapes ou un projet de loi n’entrant pas dans la catégorie visée par l’article 71 (c’est-à-dire les projets de loi qu’on fait avancer en cas d’urgence ou de circonstances extraordinaires). Il a de plus indiqué qu’on n’avait jamais envisagé que l’article 56.1 serait utilisé pour renverser les décisions de la Chambre prises par consentement unanime, ni qu’il pouvait être invoqué pour se substituer aux décisions que la Chambre elle-même devait prendre sur des questions importantes. [13] Le Président a statué que l’article 56.1 ne pouvait pas servir à faire adopter les rapports du comité de sélection. [14] Enfin, le Président a autorisé, en vertu du présent article, la présentation d’une motion prévoyant la date et l’heure d’un vote sur la deuxième lecture de deux projets de loi émanant du gouvernement. [15]

Historique de l’article 56.1

Cet article faisait partie d’une série d’amendements adoptés le 11 avril 1991, suivant un débat et une motion de clôture. [16] Depuis, les motions proposées en vertu de l’article 56.1 ont fixé les heures de séance de la Chambre, [17] porté sur l’ajournement et la gestion des affaires de la Chambre [18] et autorisé certains comités à se déplacer. [19]

Depuis l’adoption de cet article, toutefois, des députés se sont plaints nombre de fois qu’on l’invoquait à des fins pour lesquelles il n’avait jamais été prévu, et ne s’entendaient pas sur ce qui constituait ou non une « motion pour une affaire courante ». [20] Les Présidents Parent et Milliken ont tous deux exhorté le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre à examiner le bon emploi de l’article 56.1 à cet égard. [21]

En réponse à des rappels au Règlement soulevés en juin 2001, en octobre 2002 et en mai 2005, [22] le Président Milliken a clarifié certains aspects de l’article, tel qu’expliqué dans le dernier paragraphe du commentaire de l’article 56.1.

Article 56.2
Motion habilitant un comité à voyager. Question mise aux voix lors des affaires courantes.
56.2.
(1)
La motion d’affaire courante relative aux pouvoirs des comités de se déplacer d’un endroit à l’autre, dont avis est donné par un ministre, est mise aux voix sans débat ni amendement pendant l’étude des affaires courantes dès l’expiration de la période d’avis.
Opposition de dix députés ou plus.
 
(2)
Lorsqu’il met aux voix une motion visée au paragraphe (1), le Président demande aux députés qui s’y opposent de se lever. Si dix députés ou plus se lèvent, la motion est réputée avoir été retirée; autrement, elle est adoptée.

Commentaire de l’article 56.2

Dans le cadre de son ordre de renvoi, un comité peut être appelé à se réunir à l’extérieur de l’enceinte parlementaire. Un comité peut se déplacer uniquement si la Chambre l’y autorise et, dans le cas des comités permanents, si les fonds destinés à leurs déplacements ont été approuvés par le Comité de liaison. [1] Dans certains cas, les autorisations de voyager ont été accordées par consentement unanime, [2] par l’entremise d’un rapport de comité [3] ou de dispositions de l’article 56.1 du Règlement. [4]

L’article 56.2 prévoit un mécanisme distinct en ce qui concerne les pouvoirs d’un comité de « se déplacer d’un endroit à l’autre »; autrement dit, de voyager dans le cadre de ses études. L’article énumère diverses exigences. Premièrement, la motion elle-même doit être une motion « pour une affaire courante » et l’avis s’y rattachant doit être donné par un ministre. Une fois expirée la période de préavis (qui est de 48 heures, selon l’article 54 du Règlement), la motion est mise aux voix sur-le-champ sans débat ni amendement, pendant l’étude des affaires courantes, sous la rubrique « Motions ».

Selon le paragraphe (2) de l’article, quand le Président met la motion aux voix, il demande à ceux qui s’y opposent de se lever de leur place. S’ils sont plus de dix députés à se lever, la motion est réputée retirée. Sinon, elle est réputée adoptée. Cet article n’a jamais été invoqué.

Historique de l’article 56.2

Cet article a été adopté en octobre 2001, suivant la recommandation du Comité spécial sur la modernisation et l’amélioration de la procédure à la Chambre des communes. [5] Le Comité avait jugé inacceptable qu’un seul député « mécontent ou récalcitrant » puisse faire rejeter les motions de procédure autorisant les comités à se déplacer (dont l’adoption était habituellement demandée par voie de consentement unanime). Le Comité a donc proposé que la motion soit réputée retirée seulement si dix députés ou plus s’y opposaient; autrement, elle serait réputée adoptée. [6]

Le Comité a proposé que de telles motions soient mises aux voix mais non débattues et que le moment de leur présentation ne soit pas facultatif : il faudrait donc les proposer à la première occasion après l’expiration de la période d’avis. [7]

L’article est entré en vigueur le 15 octobre 2001 mais n’a jamais été invoqué. [8]

Article 57
Clôture. Avis requis. Durée des discours. Mises aux voix à 20 heures.
57.
Immédiatement avant l’appel de l’Ordre du jour portant reprise d’un débat ajourné, ou si la Chambre siège en comité plénier, tout ministre de la Couronne qui, se levant de sa place, en a donné avis au cours d’une séance antérieure, peut proposer que le débat ne soit plus ajourné ou que le comité procède en premier lieu au nouvel examen de toute résolution ou tout article, paragraphe, préambule ou titre, et que cet examen ne soit pas différé davantage. Dans l’un ou l’autre cas, cette question doit être décidée sans débat ni amendement. Si elle est résolue affirmativement, aucun député ne peut, par la suite, avoir la parole plus d’une fois ni au-delà de vingt minutes dans ce débat ajourné ou, si la Chambre siège en comité, sur la résolution, l’article, le paragraphe, le préambule ou le titre dont il s’agit. En outre, si ce débat ajourné ou cet examen différé n’a pas été repris ni terminé avant 20 heures, il est interdit à tout député de se lever pour prendre la parole après cette heure, mais toutes les questions à décider pour mettre fin audit débat ajourné ou examen différé doivent être résolues sans délai.

Commentaire de l’article 57

L’article 57 fournit au gouvernement un mécanisme de procédure qui lui permet de forcer la Chambre à rendre une décision sur toute affaire dont l’étude est en cours. La motion de clôture d’un débat peut être proposée par un ministre de la Couronne si celui-ci en a donné avis de vive voix au moins une séance auparavant. Le débat sur la question doit avoir commencé. [1] Le Règlement n’établit pas précisément quand l’avis oral doit être donné et celui-ci a en conséquence été présenté, par exemple, aussi bien lorsque la Chambre était saisie d’une question que lorsqu’elle ne l’était pas. Dans le premier cas, l’avis devait normalement se rapporter à la question en délibération, comme cela a été le cas lorsque le ministre a donné avis alors qu’il avait la parole en comité plénier; [2] alors qu’il proposait l’ajournement quotidien du débat sur l’Adresse; [3] et durant le débat sur la motion visée par la clôture. [4] Il est également arrivé que l’avis soit présenté alors que la Chambre étudiait une autre question [5] ou n’était saisie d’aucune question. [6] On a aussi donné un avis pour couvrir plus d’une question. [7] Cette motion est proposée immédiatement avant l’appel de l’Ordre du jour portant reprise du débat auquel la clôture s’appliquera. Si l’affaire visée est un ordre émanant du gouvernement, elle est abordée au moment choisi par le gouvernement durant l’étude des mesures d’initiative ministérielle. [8]

La motion de clôture ne peut faire l’objet d’aucun débat ni amendement. Toutefois, en vertu de l’article 67.1, une fois la motion de clôture proposée, les députés peuvent poser de brèves questions au ministre responsable de l’affaire (ou au ministre qui le représente). Le ministre en question peut ensuite répliquer, l’échange devant durer au plus 30 minutes. [9] Si l’on exige un vote par appel nominal, la sonnerie de convocation des députés fonctionne pendant au plus 30 minutes en vertu de l’article 45(4) du Règlement. Si la clôture est adoptée, les députés habilités à prendre la parole sur la question visée, y compris le premier ministre et le chef de l’Opposition, doivent limiter leur intervention à 20 minutes chacun et ne peuvent prononcer qu’un seul discours durant tout le débat auquel la clôture s’applique. En vertu de l’article 43(1), ces interventions de 20 minutes sont sujettes à une période de questions et observations. [10]Toutes les questions à décider pour mettre fin au débat sur l’affaire visée par la clôture [11] doivent être résolues à 20 heures ou dès que possible par la suite, de sorte que le dernier député ayant obtenu la parole avant cette heure puisse, au besoin, terminer son intervention. [12] Aucun député ne peut obtenir la parole après 20 heures pour intervenir sur l’affaire en délibération. [13] Lorsque le Président interrompt le débat à 20 heures, ou peu après, la sonnerie de convocation des députés en vue d’un vote par appel nominal sur la ou les questions à résoudre ne fonctionne que pendant 15 minutes, en vertu de l’article 45(3) du Règlement. Si le débat visé par la clôture se termine avant 20 heures, la sonnerie de convocation pour un vote par appel nominal fonctionnera pendant 30 minutes, en vertu de l’article 45(5)a) du Règlement, mais seulement jusqu’à 20 heures. [14]

À l’origine, la règle de clôture était destinée à être appliquée aussi bien aux délibérations du comité plénier et de l’ancien comité des subsides qu’à la Chambre même. En comité plénier, la clôture peut être appliquée à l’étude d’une partie d’un projet de loi comme le titre, le préambule ou les articles et paragraphes, considérés isolément ou en groupes selon les circonstances. [15] En raison du recours limité aux délibérations en comité plénier dans la pratique moderne, la clôture y est beaucoup moins appliquée. La règle ne s’applique pas, en revanche, aux autres comités de la Chambre  — permanents, législatifs, spéciaux ou mixtes.

Le débat usuel sur la motion portant ajournement est suspendu lorsqu’on applique la clôture sur une affaire. [16] Cependant, les affaires émanant des députés dont l’étude est prévue sont abordées quand même, en vertu de l’article 99 du Règlement.

Historique de l’article 57

Depuis son entrée en vigueur en 1913, [17] et son application en comité plénier durant l’étude d’un projet de loi relatif aux forces navales cette année-là, [18] la clôture a été appliquée à moins de 50 reprises. Onze de ces applications sont survenues entre 1913 et 1932. [19] Après 1932, la clôture n’a pas été proposée de nouveau avant 1956, et l’hostilité envers cette règle demeure très étroitement liée au débat survenu cette année-là sur la Northern Ontario Pipe Line. Afin de faire adopter un projet de loi permettant de financer la construction d’un gazoduc de l’ouest à l’est du Canada, le gouvernement a eu recours à la clôture à quatre reprises en moins d’un mois aux étapes de la résolution, de la deuxième lecture, du comité plénier et de la troisième lecture du projet de loi no 298, Loi établissant la société de la Couronne « Northern Ontario Pipe Line ». [20]

La clôture a été proposée en 1964 à l’égard d’une motion d’adoption d’un rapport de comité sur la création d’un drapeau distinctif pour le Canada; [21] en 1969, envers une motion d’adoption d’un rapport de comité sur des modifications proposées au Règlement; [22] en 1980, envers une motion portant création d’un Comité mixte spécial sur la constitution; [23] en 1981, envers une motion d’ajournement pour le congé d’été; [24] et en 1987, envers une motion ayant trait à la peine capitale. [25] En juin 1988, la clôture a été proposée envers une motion visant la prolongation des jours et heures de séance de la Chambre durant l’été. [26]

La trente-quatrième législature (de décembre 1988 à septembre 1993) a vu une augmentation marquée du nombre de motions de clôture, proposées en 15 occasions. En décembre 1988, la clôture a été proposée pour une motion portant sur les heures de séance et les travaux de la Chambre, [27] ainsi qu’aux étapes de la deuxième lecture, du comité plénier et de la troisième lecture du projet de loi C–2, Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis d’Amérique. [28] On a ensuite proposé la clôture à l’étape de la deuxième lecture de trois projets de loi émanant du gouvernement en juin 1989, et à l’étape de la deuxième lecture d’un projet de loi du gouvernement en octobre, novembre et décembre 1989 ainsi qu’en février 1990. [29] Le gouvernement a ensuite appliqué la clôture pour une motion visant à adopter des amendements apportés par le Sénat à un projet de loi du gouvernement en mars 1990, [30] à l’étape de la troisième lecture d’un projet de loi du gouvernement en mars 1990, [31] pour amender le Règlement en avril 1991 [32] et pour faire réinscrire au Feuilleton certains projets de loi au début de la troisième session de la trente-quatrième législature en mai 1991. [33]

On a proposé la clôture à cinq reprises durant la trente-cinquième législature (de janvier 1994 à avril 1997). [34] On l’a proposée pour la première fois en juin 1995, pour une motion visant à examiner des amendements apportés par le Sénat à un projet de loi du gouvernement. On a ensuite imposé la clôture pour quatre motions : une pour reconnaître le Québec comme société distincte, en décembre 1995, une pour réinscrire des projets de loi et effectuer des amendements aux travaux des subsides (pour l’année civile 1996), en mars 1996, une pour renvoyer une question de privilège à un comité, en mars 1996, et une pour nommer le vice-président des comités pléniers, en octobre 1996.

Au cours de la trente-sixième législature (de septembre 1997 à octobre 2000), on a proposé la clôture pour deux affaires; l’une sur les heures de séance et l’adoption d’un projet de loi du gouvernement, en mars 1999, et l’autre sur l’étude d’amendements apportés par le Sénat à un projet de loi du gouvernement, en juin 1999. [35]

En ce qui concerne la trente-septième législature (de janvier 2001 à mai 2004), on a proposé la clôture pour quatre motions : [36] la première pour amender des dispositions du Règlement portant sur les motions à l’étape du rapport, en février 2001, la deuxième portant sur les affaires des comités et la réinscription au Feuilleton de projets de loi du gouvernement et le rétablissement d’un comité spécial au début de la deuxième session de la trente-septième législature, en octobre 2002, la troisième pour exhorter le gouvernement à ratifier le protocole de Kyoto, en décembre 2002, et la dernière pour réinscrire des projets de loi du gouvernement au début de la troisième session de la trente-septième législature, en février 2004.

En date de juin 2005, la clôture a été invoquée une fois au cours de la trente-huitième législature, pour permettre à la Chambre de siéger au-delà de l’ajournement d’été normalement prévu au calendrier parlementaire. [37]

En dépit de la notoriété de la règle de clôture, de l’imprécision de son libellé et du mécontentement qu’éprouvent les députés à son égard, la disposition du Règlement n’a été modifiée que trois fois depuis son adoption; dans chaque cas, la modification portait sur le moment de la mise aux voix. À l’origine, toutes les questions à décider pour mettre fin au débat devaient être mises aux voix à 2 heures du matin. En 1955, on a avancé d’une heure le moment de l’interruption du débat, l’heure ordinaire d’ajournement ayant elle-même été avancée d’une heure. [38] On a ensuite repoussé le moment de leur mise aux voix à 23 heures en avril 1991 [39] pour le fixer enfin à 20 heures en octobre 2001. [40]

Cette disposition a toutefois fait l’objet d’études et de débats à maintes occasions. En décembre 1957, le gouvernement a fait inscrire au Feuilleton un avis de motion portant abrogation de la règle de clôture, mais la motion n’a jamais été mise en délibération. [41] En juillet 1960, le premier ministre a exprimé l’espoir que le comité spécial de la procédure envisagerait la suppression de la clôture, [42] mais le comité n’a pas donné suite à ce voeu. En mars 1962, on a créé un autre comité spécial chargé d’examiner le fonctionnement de la Chambre et, en particulier, l’opportunité d’abroger la règle de clôture; [43] le comité n’a pas fait rapport sur cette question. Le discours du Trône prononcé en septembre 1962 indiquait que la Chambre se verrait demander d’abolir la clôture mais, là encore, aucune suite n’a été donnée à l’affaire. [44] Durant la trentième législature, en septembre 1976, un sous-comité du Comité permanent de la procédure et de l’organisation recommandait, dans son rapport sur l’utilisation du temps, l’adoption d’une nouvelle disposition s’inspirant de la règle de clôture britannique, [45] mais la Chambre n’a jamais été saisie de cette recommandation.

En avril 1993, citant à nouveau la procédure britannique, le Comité permanent de la gestion de la Chambre a recommandé dans son rapport qu’on accorde au Président la responsabilité et le pouvoir de déterminer si la question à l’étude avait été suffisamment débattue avant qu’on n’invoque la clôture. [46] Ce rapport n’a été ni débattu, ni adopté. Toutefois, en octobre 2001, la Chambre a consenti à adopter un nouvel article du Règlement (l’article 67.1), qui toucherait à la fois l’attribution de temps et la motion de clôture. Avec l’adoption du rapport du Comité spécial sur la modernisation et l’amélioration de la procédure à la Chambre des communes, on tiendrait dorénavant une période de questions et de réponses de 30 minutes après la présentation d’une motion de clôture ou d’attribution de temps se rapportant à un projet de loi. Les questions seraient posées au ministre (ou au ministre le représentant) parrainant le projet de loi à l’étude. Selon le rapport, le nouvel article du Règlement aurait pour but « d’insister sur la reddition de comptes ministérielle et d’obliger le gouvernement à justifier le recours à ces mesures extraordinaires ». [47] Les députés continuent toutefois d’exprimer leur mécontentement face à cette règle, et ont même tenté à quelques reprises de la faire supprimer du Règlement. [48]

Outre la modification de forme et l’ajout du nouvel article 67.1, la plupart des stipulations de l’article 57 sont les mêmes que lors de son adoption. Les exigences en matière d’avis, par exemple, n’ont pas changé. Un ministre de la Couronne doit donner avis de la motion, de vive voix, au moins une séance avant celle où la clôture sera proposée. Il s’est produit des cas où l’avis a été donné après plusieurs jours de débat, [49] et d’autres où il a été présenté le premier jour d’étude de l’affaire. [50] Même si rien n’oblige à aviser la Chambre plus d’une fois, il est arrivé qu’un ministre donne un avis à plusieurs reprises lors de séances différentes, afin qu’on ne puisse objecter que l’avis n’avait pas été présenté au cours de la séance précédant celle où la motion était proposée. [51] Même lorsque l’avis a été donné, on peut choisir de ne pas proposer la motion. [52]

L’application sporadique de la clôture depuis 1956 peut s’expliquer par plusieurs facteurs autres que sa réputation douteuse. En général, les changements apportés aux pratiques de la Chambre ont rendu moins fréquente l’éventuelle nécessité d’y recourir et ont ajouté des dispositions de repli. Même si elle n’a été proposée qu’une fois envers le débat sur l’Adresse et sur les subsides, des amendements au Règlement ont carrément supprimé la nécessité de l’invoquer dans ces cas. Les débats sur l’Adresse et sur le Budget, de même que les travaux des subsides sont assujettis à un échéancier prescrit par le Règlement, tout comme les affaires émanant des députés. [53] Facteur plus important encore, depuis 1969, les débats sur les projets de loi d’intérêt public peuvent faire l’objet d’un ordre d’attribution de temps. Les règles visant l’attribution de temps ont elles-mêmes été soumises à la clôture lors de leur adoption par la Chambre. [54] De plus, on limite maintenant la durée du débat sur les motions proposées par un ministre pour qu’un comité prépare et présente un projet de loi, sur les projets de loi portant pouvoir d’emprunt, sur les motions visant à adopter des rapports de comités et sur les motions visant à renvoyer des projets de loi à un comité avant la deuxième lecture. [55]

Lorsqu’ils ont interprété cette règle, les Présidents qui se sont succédés ont constamment été gênés par l’imprécision de son libellé et ont clairement indiqué qu’elle n’était pas sans susciter des doutes ni comporter des écueils. [56] Pourtant, ils ont aussi fermement refusé de s’ingérer dans l’application de la clôture. En 1969, 1987 et 1990, on a instamment demandé à la présidence de faire usage de son pouvoir discrétionnaire pour refuser de saisir la Chambre d’une motion de clôture. [57] Dans les trois cas, le Président a déclaré que la disposition du Règlement avait été légitimement appliquée et que la présidence n’avait pas le pouvoir d’intervenir pour des motifs de procédure. [58]

Article 58
Motions recevables lors d’un débat.
58.
Lorsqu’une question fait l’objet d’un débat, aucune motion n’est reçue, si ce n’est en vue de l’amender, de la renvoyer à une date déterminée, de poser la question préalable, de faire lire l’Ordre du jour, de procéder à une autre affaire inscrite au Feuilleton, d’ajourner le débat, de continuer à siéger ou de prolonger la séance de la Chambre, ou d’ajourner la Chambre.

Commentaire de l’article 58

Lorsqu’une question est en délibération, les motions des catégories indiquées à l’article 58 sont recevables. [1] Une fois proposées, ces motions ont priorité et, par conséquent, elles remplacent la question initialement à l’étude. Elles ne requièrent pas d’avis. Elles ne peuvent être ni conditionnelles, ni proposées lors d’un rappel au Règlement. [2] Les motions d’amendement de la question principale et la question préalable peuvent faire l’objet d’un débat, contrairement aux autres motions de remplacement.

Les motions visées par l’article 58 ont les effets suivants, selon qu’elles sont adoptées ou rejetées. Une motion d’amendement, si elle est adoptée, modifie immédiatement la motion initiale, qui est alors (sous réserve de l’adoption d’autres amendements ou de la continuation du débat) soumise à la Chambre telle que modifiée; s’il est rejeté, l’amendement est bien entendu écarté, et la motion initiale est (ici encore, sous réserve de l’adoption d’autres amendements ou de la continuation du débat) de nouveau mise en délibération. Si elle est adoptée, une motion tendant à renvoyer la question principale à une date déterminée a précisément cet effet, c’est-à-dire que l’étude de la question initiale est reportée à un autre jour de séance; si elle est rejetée, le débat se poursuit sur la question initiale. La question préalable, si elle est adoptée, provoque une mise aux voix immédiate de la motion principale; si elle est rejetée, la motion principale est écartée et rayée du Feuilleton. (Puisque la question préalable peut faire l’objet d’un débat, mais non d’amendements, elle empêche en fait la proposition de tout amendement à la motion principale jusqu’à ce que l’on en ait disposé.) Une motion portant lecture de l’ordre du jour, si elle est adoptée, remplace la question principale alors débattue, laquelle est en conséquence rayée du Feuilleton; si elle est rejetée, le débat se poursuit sur la question principale. Une motion visant à procéder à une autre affaire inscrite au Feuilleton, si elle est adoptée, remplace la question alors en délibération, laquelle est rayée du Feuilleton; si elle est rejetée, le débat sur la motion initiale se poursuit. (En 1956, la présidence a établi que dans le cas des ordres émanant du gouvernement, cette motion ne pouvait être proposée par un simple député, mais uniquement par un membre du Cabinet. [3]) Les motions de ce genre ont également été interprétées comme permettant à la Chambre de passer à une autre affaire plutôt qu’exclusivement à un ordre, c’est-à-dire de passer d’une rubrique ou d’une question des affaires courantes ordinaires à une autre, même si la Chambre n’était alors saisie d’aucune motion indépendante. [4] Une motion d’ajournement du débat ou d’ajournement de la Chambre, si elle est adoptée, a précisément l’effet qu’elle vise. Toutefois, la motion initiale n’est pas rayée de l’ordre des travaux de la Chambre; elle est simplement reportée au jour de séance suivant, et peut alors être abordée de nouveau (voir l’article 41 du Règlement). Si la motion d’ajournement est rejetée, les délibérations sur la question initiale se poursuivent. Les modalités relatives aux motions de prolongation d’une séance sont énoncées à l’article 26 du Règlement.

Historique de l’article 58

Lorsque cette règle a été adoptée par la Chambre en 1906, Sir Wilfrid Laurier en a expliqué ainsi la raison d’être : « C’est une fusion de plusieurs règles qui ne sont pas imprimées hormis dans les manuels mais qui passeront maintenant dans les règles de la Chambre. » [5] La disposition est demeurée inchangée jusqu’en 1965, année où l’on y a ajouté des motions pour prolonger les heures de séance de la Chambre. [6] Pour des raisons de conformité avec d’autres modifications, on l’a de nouveau amendée en 1968, afin d’intégrer les motions tendant à « continuer à siéger » à la catégorie des motions recevables. [7] On trouve des exemples innombrables de présentation de motions de ce genre tout au long de l’histoire parlementaire du Canada. [8]

Article 59
Motion portant lecture des Ordres du jour.
59.
Une motion tendant à la lecture des Ordres du jour a la priorité sur toute motion dont la Chambre est saisie.

Commentaire de l’article 59

Lorsque la motion « Que la Chambre passe maintenant à l’Ordre du jour » ou « Que l’Ordre du jour soit maintenant lu » est adoptée, elle remplace toute question dont la Chambre est alors saisie; on interrompt les travaux sur l’affaire à l’étude à ce moment et l’on passe outre, s’il y a lieu, à toute affaire ultérieurement prévue dans les travaux du jour pour aborder l’Ordre du jour. La motion peut être présentée par tout député avant que la Chambre n’ait abordé l’Ordre du jour; cependant, lorsque cette étape est atteinte, une telle motion devient sans objet. [1] De même, elle ne peut pas non plus être proposée par la suite, dans le but de revenir à l’Ordre du jour.

Cette motion appartient à la catégorie des motions de remplacement qui, quoique indépendantes de par leur forme, peuvent traditionnellement être proposées sans avis durant le débat sur la question qu’elles visent à écarter. Une fois proposée, une motion conforme à l’article 59 est immédiatement mise aux voix par la présidence sans débat ni amendement [2] et, si elle est adoptée, elle a le double effet d’écarter l’affaire alors en délibération et d’amener la Chambre à passer à l’Ordre du jour. Toute affaire antérieure ainsi mise de côté est rayée du Feuilleton, bien que son étude puisse être de nouveau ordonnée par voie d’une motion ne requérant aucun avis.

Historique de l’article 59

Durant toutes les législatures qui se sont succédées depuis 1867, on s’est souvent prévalu de cet article, qui s’inspire d’une règle britannique plus ancienne, et, même si l’on n’en a pas modifié le libellé depuis la Confédération, il a fait l’objet de diverses interprétations. La question que l’on a soulevée avec le plus de régularité à l’égard du genre de motion prévu par l’article 59 était la suivante : ces motions pouvaient-elles être proposées à tout moment (avant que l’on n’ait abordé l’Ordre du jour), ou pouvaient-elles l’être uniquement lorsqu’un débat sur une autre motion était en cours?

Les précédents divergent à cet égard. En 1956, la présidence a jugé que la Chambre devait déjà être saisie d’une question avant qu’une motion visant à passer à l’Ordre du jour ne puisse être admise; [3] dix ans plus tard, une décision analogue était rendue. [4] En 1970, le Président a admis une telle motion durant la période des questions; [5] en 1983, une motion semblable proposée durant les affaires courantes ordinaires, à la rubrique « Pétitions », a également été acceptée. [6] En février 1987, le Président a mis aux voix une motion tendant à la lecture de l’Ordre du jour qui avait été proposée dès l’ouverture de la séance. [7] Le lendemain, le droit d’un député de présenter une telle motion alors que la Chambre n’était saisie d’aucune question a fait l’objet d’un rappel au Règlement. [8] L’ensemble des précédents récents favorise l’admissibilité des motions tendant à passer à l’Ordre du jour (si elles sont proposées avant que l’on ait abordé l’Ordre du jour), peu importe qu’un débat soit ou non en cours sur une autre motion. [9]

Article 60
Motion d’ajournement.
60.
Une motion en vue de l’ajournement, à moins d’être autrement interdite par le Règlement, peut être faite en tout temps, mais elle ne peut être renouvelée que si la Chambre a, dans l’intervalle, procédé à une autre opération.

Commentaire de l’article 60

Le droit de tout député de proposer « Que cette Chambre s’ajourne maintenant » à n’importe quel moment des délibérations est limité par des conditions explicitement énoncées dans le Règlement, de même que par certaines restrictions imposées par les précédents. Parmi les autres dispositions du Règlement qui interdisent la présentation d’une telle motion, on compte par exemple celles qui visent l’élection du Président (voir l’article 2(3) et les délibérations sur une question que le gouvernement juge de nature urgente (article 53(3)d)). En outre, l’article 25 stipule que lorsque des affaires « doivent se poursuivre, être immédiatement réglées ou terminées à une séance quelconque, la Chambre ne peut être ajournée qu’après les délibérations, sauf en conformité d’une motion d’ajournement proposée par un ministre de la Couronne ». Ainsi, par exemple, une motion d’ajournement de la Chambre (à moins qu’elle ne soit présentée par un ministre) est irrecevable durant un débat sur une motion visée par la clôture ou l’attribution de temps en vertu des articles 57 et 78, respectivement, [1] lorsqu’une motion visant à prolonger les heures de séance a été adoptée en vertu de l’article 26 [2] ou à certains stades des travaux relatifs aux subsides en vertu de l’article 81(17) et (18) du Règlement. Toutefois, on a jugé recevables les motions d’ajournement proposées un jour désigné pour la reprise du débat sur une motion portant adoption d’un rapport de comité. [3] Enfin, l’article 60 prescrit qu’une motion d’ajournement ne peut être renouvelée que si l’on a, « dans l’intervalle, procédé à une autre opération ». [4]

De plus, lorsque la Chambre est déjà saisie d’une motion d’ajournement, on ne peut en proposer une autre. Ainsi, une telle motion est irrecevable durant un débat d’urgence tenu en vertu de l’article 52, de même que pendant le débat sur la motion d’ajournement tenu en conformité de l’article 38.

Les précédents ont également créé certaines restrictions à l’égard des motions d’ajournement. Une motion portant « Que la Chambre s’ajourne maintenant jusqu’à 6 heures ce soir » a été jugée irrecevable puisque, lorsqu’une condition est adjointe à une motion d’ajournement, celle-ci n’est plus le type de motion visée par l’article 60; elle devient une motion de fond ordinaire, requérant un avis. [5]

Si la motion d’ajournement est adoptée, la Chambre suspend immédiatement ses travaux jusqu’au jour de séance suivant et toute affaire dont elle est alors saisie est mise de côté. Si l’affaire en question était inscrite à l’Ordre du jour, elle demeure au Feuilleton, et peut être abordée de nouveau le prochain jour de séance. [6] Dans ce cas, une motion d’ajournement est une motion de remplacement. Lorsque la Chambre n’est saisie d’aucune question, l’ajournement peut être proposé comme motion de fond; dans les deux cas, l’article 60 permet de proposer la motion sans avis. On a fait valoir divers arguments selon lesquels la motion ne devrait pas être autorisée à moins que la Chambre ne délibère sur une autre question soumise par la présidence. [7] Néanmoins, comme dans le cas des motions présentées en vertu de l’article 59 du Règlement, l’ensemble des précédents récents favorise clairement la recevabilité des motions d’ajournement lorsqu’aucune autre motion n’est à l’étude. [8]

Historique de l’article 60

De la Confédération jusqu’en 1906, le Règlement n’imposait à toutes fins utiles aucune restriction au droit d’un député de proposer l’ajournement de la Chambre à tout moment, si ce n’est que deux motions à cet effet ne pouvaient être consécutives. Les députés pouvaient présenter une motion d’ajournement pour de multiples raisons : comme motion de son propre chef, dans le simple but de suspendre les travaux; comme prétexte pour prendre de nouveau la parole afin d’apporter un nouvel élément au débat; pour saisir la Chambre d’une question dont l’étude s’imposait d’urgence; et, souvent, comme simple tactique dilatoire. De plus, la motion pouvait faire l’objet d’un débat. Ainsi, ce mécanisme donnait lieu à de fréquents abus, ce qui a amené le gouvernement à proposer en 1906 un amendement au Règlement (ultérieurement adopté par la Chambre) portant qu’une motion d’ajournement pouvait être proposée à tout moment « excepté lorsqu’elle est faite en vue de discuter une question déterminée et d’une importance publique urgente ». [9] Les modalités visant ce que l’on appelle maintenant les débats d’urgence se trouvaient ainsi mises à part et, par la suite, ont suivi un cheminement distinct de celui des motions d’ajournement ordinaires. [10]

En 1913, on a imposé une autre restriction au recours abusif au droit de proposer une motion d’ajournement à tout moment, la Chambre modifiant le Règlement pour interdire les débats sur de telles motions. [11] Une fois la motion proposée, le Président était obligé, si elle était jugée recevable, de la mettre immédiatement aux voix, ce qui interdisait tout commentaire ou débat.

La règle a été modifiée de nouveau en 1968. [12] Par suite de changements apportés à d’autres articles qui interdisaient à certains moments la présentation de motions d’ajournement, on a étendu la portée de la disposition restrictive de 1906 sur la recevabilité de la motion, pour la faire s’appliquer à toutes les nouvelles limites adoptées en 1968. Actuellement, une motion d’ajournement est toujours recevable, « à moins d’être autrement interdite… » et, comme auparavant, elle ne peut être renouvelée que si la Chambre a, dans l’intervalle, procédé à une autre opération.

Article 61
La question préalable.
61.
(1)
La question préalable, tant qu’elle n’est pas résolue, exclut tout amendement à la question principale, et elle est posée en ces termes : « Que cette question soit maintenant mise aux voix ».
Mise aux voix de la question initiale.
 
(2)
Si la question préalable est décidée affirmativement, la question initiale doit être aussitôt mise aux voix sans amendement ni débat.

Commentaire de l’article 61

L’article 61 du Règlement traite d’une motion de remplacement particulière, à savoir la question préalable. La première partie de la règle indique la forme dans laquelle la motion doit être présentée, ainsi que l’effet de son application sur la question principale : il n’est pas possible de modifier la question principale tant que la question préalable n’a pas été résolue.

Le paragraphe (2) indique les conséquences de l’adoption de la question préalable : la question principale doit être mise aux voix immédiatement, sans amendement ni débat.

Historique de l’article 61

L’article du Règlement concernant la question préalable est resté inchangé depuis son adoption en 1867. De par sa forme, la question préalable « Que cette question soit maintenant mise aux voix » est fondée sur la disposition britannique originelle. [1] Il s’agit d’une motion de remplacement qui a priorité sur la question principale dont la Chambre est saisie. Elle peut avoir deux objectifs : soit empêcher tout amendement à la question principale, et imposer un vote immédiat sur cette question, soit retarder le vote sur la question principale, en prolongeant le débat. Si la question préalable est adoptée, la question principale doit être mise aux voix immédiatement; si elle est rejetée, la question principale est rayée du Feuilleton, mais elle peut être posée de nouveau. [2]

La question préalable s’applique à la plupart des motions qui peuvent être débattues, qu’elles soient présentées par le gouvernement ou par un simple député; elle peut être posée aux différentes étapes de la lecture d’un projet de loi, ou à propos d’une résolution. [3] Elle ne peut l’être lorsqu’un amendement à la question principale est toujours à l’étude, mais une fois que la Chambre est de nouveau saisie de la question principale amendée ou non, la question préalable peut être posée. Cette question peut être débattue, mais non amendée. [4] Elle peut toutefois être retirée du consentement unanime. [5]

La question préalable peut être remplacée par une motion d’ajournement de la Chambre ou du débat. [6] Dans les deux cas, la question préalable et la question initiale restent au Feuilleton. Il est possible de proposer la clôture sur la question préalable, et lorsque celle-ci sert à prolonger le débat sur un projet de loi d’intérêt public, on peut recourir à l’attribution du temps de parole pour limiter le débat. [7]

La procédure de la question préalable a été invoquée de façon sporadique à la Chambre des communes du Canada. On ne relève que quatre cas de questions préalables au cours du XIXe siècle. [8] À la fin des années 1920, dans les années 1940 et au début des années 1950, elle a été posée assez régulièrement, mais n’a pas été posée du tout entre 1964 et 1983. [9] Depuis le milieu des années 1980, on y recourt beaucoup plus fréquemment. [10] Dans la majorité des cas récents, elle s’appliquait à la lecture d’un projet de loi émanant du gouvernement, [11] bien qu’on l’ait également appliquée à des motions du gouvernement, [12] à des motions proposées au cours des affaires courantes [13] ainsi qu’à la lecture d’un projet de loi d’initiative parlementaire. [14]

Article 62
Motion portant qu’un député « ait maintenant la parole ».
62.
Si deux ou plusieurs députés se lèvent, le Président donne la parole à celui qui s’est levé le premier, mais il peut être fait une motion portant que l’un des députés qui se sont levés « soit maintenant entendu » ou qu’il « ait maintenant la parole », laquelle motion est immédiatement mise aux voix sans débat.

Commentaire de l’article 62

L’article 62 confère au Président le pouvoir de donner la parole au député qui s’est levé le premier lorsque deux ou plusieurs députés ont manifesté, en se levant de leur place, leur désir d’être entendus. Il permet également qu’un député puisse, par l’entremise d’un rappel au Règlement, [1] proposer que la parole soit accordée à un député autre que celui auquel le Président a déjà donné la parole. Cette motion, qui doit viser un député qui avait, lui aussi, cherché à obtenir la parole en se levant de sa place, ne peut être proposée si le député auquel le Président a donné la parole a déjà entamé ses propos. La motion, si elle est jugée recevable, est immédiatement mise aux voix sans débat. [2]

Historique de l’article 62

Le Règlement comporte depuis 1867 une disposition qui confère au Président le pouvoir de donner la parole à un député lorsque deux ou plusieurs députés se lèvent simultanément; la disposition faisait également partie des règles des diverses assemblées législatives avant la Confédération. [3]

La règle de 1867 établissait que lorsque deux ou plusieurs députés se levaient pour être entendus, le Président devait donner la parole à celui qui s’était levé le premier. Cependant, elle stipulait également qu’il était possible de présenter une motion portant que soit entendu tout député s’étant levé. [4] Le libellé de cet article est demeuré inchangé jusqu’en 1906, année où on l’a modifié pour prescrire la mise aux voix immédiate, sans débat, d’une telle motion. [5]

Au cours des premiers temps de la Confédération, lorsque deux députés se levaient en même temps, l’un cédait la parole à l’autre [6] ou la décision du Président était acceptée sans contestation. [7] En avril 1913, la Chambre a adopté une motion portant que soit entendu un député autre que celui auquel le Président avait donné la parole. [8] À ce moment, alors que l’on délibérait sur la raison d’être de la motion, il a été signalé que la règle n’avait jamais été appliquée au Canada et qu’une motion de ce genre n’avait jusqu’alors jamais été mise aux voix. [9]

Dans la pratique, l’article vise deux types de circonstances, et il a été interprété en conséquence par les Présidents qui se sont succédés. Dans le premier cas, lorsque deux ou plusieurs députés se levaient simultanément, la disposition prescrivait au Président de donner la parole à l’un d’entre eux. Il arrivait souvent que le Président, après avoir exercé son choix, l’explique ou le justifie. Parmi les principes sur lesquels la présidence a fondé ses décisions, on compte le désir de donner la parole à des députés faisant valoir des points de vue différents sur la question, le désir de poser un geste de courtoisie envers l’un des chefs de parti reconnus, et le désir d’accorder la parole en alternance aux divers partis représentés à la Chambre. [10] Souvent, ces décisions étaient acceptées sans contestation. [11]

Dans le deuxième type de circonstances, des députés invoquaient cette disposition du Règlement pour demander à la présidence de donner la parole à un autre député et, dans certains cas, proposaient alors la motion appropriée. Les députés justifiaient souvent ce geste en déclarant qu’un de leurs collègues s’était souvent levé sans obtenir la parole, qu’un député semblait avoir « de la difficulté » à attirer l’attention du Président, ou qu’un représentant d’un parti ou un député indépendant n’avait pas obtenu la parole. [12]

Dans ses décisions concernant la recevabilité d’une motion de ce genre, la présidence a refusé de la mettre aux voix, entre autres raisons, [13] parce que son adoption aurait eu pour effet de clore le débat alors en cours; [14] parce que le député nommé dans la motion ne s’était pas, au départ, levé pour obtenir la parole; [15] parce que la motion aurait eu pour effet d’interrompre le discours d’un député qui avait légitimement la parole; [16] ou parce que la motion était présentée une deuxième fois après qu’une motion portant qu’un député soit entendu eut été rejetée ou adoptée, sans que l’orateur ayant obtenu la parole n’ait terminé son discours. [17] En outre, la motion ne peut être présentée si la présidence n’a pas encore donné la parole à un député, [18] si la Chambre a adopté une motion précisant l’ordre d’intervention à respecter durant un débat, [19] si le député nommé dans la motion a déjà pris la parole [20] ou durant la période des questions et observations. [21] Enfin, la présidence a statué que si la période réservée au débat expirait avant que la Chambre n’ait voté sur la motion portant que la parole soit donnée à un député, la motion devenait périmée. [22]

Article 63
Motion portant renvoi à un comité.
63.
Une motion portant renvoi d’un projet de loi, d’une résolution ou d’une question quelconque à un comité permanent, spécial ou législatif, ou à un comité plénier, exclut tout autre amendement à la question principale.

Commentaire de l’article 63

Cette disposition vient ajouter un autre type de motion à la liste, stipulée par l’article 58, des motions recevables lors d’un débat. La motion visée ici ne requiert aucun avis et, lorsqu’elle est proposée, elle est mise aux voix par la présidence sans débat ni amendement. À ce titre, elle a préséance sur la question débattue au moment de sa présentation. Si la motion est rejetée, le débat sur la question principale se poursuit; si elle est adoptée, la question principale est écartée et l’on renvoie le projet de loi, la résolution ou l’affaire au comité nommément désigné dans la motion.

Cependant, les projets de loi ainsi renvoyés à un comité n’ont pas automatiquement franchi une étape de lecture; et pour qu’ils puissent poursuivre leur cheminement dans le processus législatif, il faut en reprendre l’étude à l’étape qu’ils avaient atteinte avant leur renvoi. [1] La question principale ainsi écartée est retranchée du Feuilleton, mais elle peut être réinscrite soit par motion, soit par l’adoption du rapport du comité, si le rapport en recommande la réinscription.

Historique de l’article 63

Puisque l’effet visé par la motion prescrite à l’article 63 peut être obtenu par d’autres mécanismes, on a rarement eu recours à cette disposition, bien qu’elle ait été intégrée au Règlement dès la Confédération et que sa forme soit demeurée approximativement la même depuis lors. En 1927, l’article 45 de l’époque a été révisé à la suite de la recommandation d’un comité spécial. Le libellé original était le suivant : « Une motion pour soumettre un bill ou une question à un comité exclut, jusqu’à ce qu’elle soit décidée, tout amendement à la question principale ». Dans son rapport à la Chambre, le comité s’est dit d’avis que :

[…] cet article devrait être simplifié ou rédigé en des termes moins techniques, et les mots « pour renvoyer un bill, une résolution ou question quelconque au comité général ou à tout comité permanent ou spécial » seront mieux compris et devraient servir à la rédaction de cet article. [2]

La Chambre a de nouveau modifié le texte de cette disposition en 1985 [3] pour y faire mention des comités législatifs nouvellement créés; l’article 63 est demeuré inchangé depuis.

Le précédent le plus clair qui démontre les mécanismes de procédure de cet article est survenu en 1930, lors d’un débat de la Chambre sur une résolution proposée, et sur un amendement à celle-ci, concernant les pensions de guerre. [4]

Article 64
Retrait d’une motion du consentement unanime.
64.
Un député qui a fait une motion ne peut la retirer qu’avec le consentement unanime de la Chambre.

Commentaire de l’article 64

Une fois proposée, toute motion appartient à la Chambre. Cet article stipule que le député ayant proposé une motion peut en demander le retrait, [1] et que tous les députés présents doivent consentir à la demande pour qu’elle ait l’effet voulu. Aucun vote n’a lieu; par conséquent, aucun commentaire ni débat n’est autorisé, de la part du motionnaire qui présente la demande [2] aussi bien que de celle des autres députés. Si un député s’oppose à la demande, ou se lève pour prendre la parole sur la motion initiale, le Président considère qu’il n’y a pas eu consentement unanime visant la demande de retrait. À l’inverse, si aucune voix dissidente ne se fait entendre, le Président déclare que la motion est retirée, et une mention à cet effet est portée aux Journaux. Toute motion ainsi retirée peut être proposée de nouveau à une date ultérieure. [3]

L’article 64 s’applique de la même façon à un amendement et à un sous-amendement, qui ne peuvent être retirés que du consentement unanime, après qu’une demande à cette fin ait été faite. [4] De même, un député qui souhaite retirer sa motion, son amendement ou son sous-amendement pour le modifier ou le remplacer par un autre doit demander et obtenir le consentement unanime pour le faire. [5] Enfin, aucune motion (ni amendement) ne peut être retirée si la Chambre est en train d’étudier un amendement (ou un sous-amendement) au texte initial. [6]

Le Règlement comporte de nombreuses autres dispositions prévoyant le retrait automatique d’une motion, selon certaines circonstances, notamment lorsqu’un certain nombre de députés s’opposent à sa présentation. [7]

Historique de l’article 64

Le libellé de cet article est demeuré identique de la Confédération jusqu’en 1955. Durant cette période, son application n’a occasionné ni décision de procédure ni précédent notables, si ce n’est de ceux ayant permis de le peaufiner ou d’en clarifier l’application. Par exemple, en 1873, Sir John A. Macdonald a invoqué le Règlement pour le motif que le libellé d’une motion présentée à la Chambre ne concordait pas exactement avec celui de l’avis préalable, et la motion a été modifiée en conséquence. [8] En 1941, le Président a décidé qu’un amendement retiré pouvait être proposé ultérieurement. [9]

En 1955, un comité spécial constitué en vue d’envisager des remaniements au Règlement a proposé de préciser le libellé de l’article 53 de l’époque, mais aucune modification n’était présentée dans la pratique. La Chambre a adopté la recommandation au cours de la même année, [10] et le libellé de l’article n’a pas été modifié depuis.

Article 65
Motions présentées par écrit et appuyées. Lues dans les deux langues.
65.
Toute motion est présentée par écrit et appuyée, avant de faire l’objet d’un débat ou d’une mise aux voix. Lorsque la motion est appuyée, le Président en donne lecture en anglais et en français s’il connaît les deux langues; sinon, le Président donne lecture de la motion dans une langue et charge le Greffier de la lire dans l’autre, avant qu’elle ne soit mise en discussion.

Commentaire de l’article 65

La disposition stipulant qu’une motion doit être présentée par écrit garantit que si elle est recevable, le Président la mettra en délibération selon les termes exacts utilisés par le proposeur. [1] Cette prescription s’applique à toute motion, qu’un avis soit ou non requis, de même qu’à tout amendement ou sous-amendement, tant à la Chambre que dans ses comités.

Lorsqu’un avis a déjà été donné, cette prescription est automatiquement observée puisque le texte de la motion figure par écrit au Feuilleton. [2] Dans tous les autres cas, le Président doit recevoir une copie écrite de la motion avant de la mettre en délibération. [3]

Toutes les motions présentées à la Chambre doivent être appuyées; [4] si personne ne le fait, le Président ne met pas la question en délibération et aucune inscription n’est faite aux Journaux, la Chambre n’ayant pas été saisie de l’affaire. [5] Les motions émanant du gouvernement, que seuls les ministres sont autorisés à proposer, peuvent être appuyées par n’importe quel député. [6]

À présent, on déroge souvent à la disposition voulant que toutes les motions soient lues intégralement, particulièrement pour les longues propositions. Dans ces cas, le Président lit d’ordinaire les premières phrases et demande : « Puis-je être dispensé de la lecture de la motion? », ce à quoi les députés répondent presque toujours par l’affirmative. [7] On passe régulièrement outre, également, à l’obligation de lire toutes les motions dans les deux langues, étant donné le caractère bilingue de la Chambre et la présence de services d’interprétation simultanée. [8]

Historique de l’article 65

L’utilisation des deux langues officielles à la législature fédérale du Canada était sanctionnée par la coutume et le droit avant même la Confédération. Certaines des dispositions de l’article 65 étaient déjà en vigueur lors de la première session de l’Assemblée législative du Bas-Canada en 1792, durant laquelle on a décidé qu’aucune motion ne serait débattue ou proposée à la Chambre, à moins qu’elle ne soit d’abord lue en anglais et en français. [9] Puisque M. Panet, le Président de l’époque, n’était pas bilingue, « il a été par la suite résolu que [dans de tels cas] le Président lirait la motion dans l’une des deux langues… et le Greffier ou son adjoint au Bureau la lirait dans l’autre ». [10] Le libellé de l’actuel article 65 a été adopté en 1867 et n’a jamais été modifié depuis.

Article 66
Motion reportée aux Ordres émanant du gouvernement.
66.
(1)
Lorsque le débat sur une motion, à l’exception d’une motion portant adoption d’un rapport d’un comité permanent ou spécial, présentée après le début de la séance (après 14 heures le lundi et après 11 heures le vendredi) et avant la lecture de l’Ordre du jour est ajourné ou interrompu, l’ordre de reprise de ce débat est transféré sous la rubrique « Ordres émanant du gouvernement » et considéré sous cette rubrique.
Débat sur une motion d’adoption d’un rapport de comité.
 
(2)
Une motion portant adoption du rapport d’un comité permanent ou spécial sera à l’étude durant au plus trois heures; après cette période, à moins qu’on en ait disposé auparavant, le Président devra interrompre et mettre aux voix toute question nécessaire pour disposer de la motion sans autre débat ni amendement; cependant si le débat est ajourné ou interrompu :
a)
la motion sera de nouveau étudiée lors d’une journée désignée par le gouvernement, après consultation avec les leaders des autres partis, et, dans tous les cas, au plus tard le dixième jour de séance suivant l’interruption;
b)
le débat sur la motion sera repris à l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien le jour désigné en vertu de l’alinéa a) du présent article et ne sera plus interrompu et ajourné;
c)
lorsque personne ne demande plus à intervenir ou trois heures après le début du débat, selon la première éventualité, le Président mettra aux voix toute question nécessaire pour disposer de ladite motion, sous réserve que si un vote par appel nominal est demandé à l’égard de la motion étudiée lors d’une journée désignée en vertu de l’alinéa a) du présent article, il sera réputé différé à un moment désigné le mercredi suivant au plus tard à la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement lors de cette séance.
 
 
(3)
Une seule motion portant adoption d’un rapport d’un comité permanent ou spécial peut être proposée au cours d’une même journée de séance.

Commentaire de l’article 66

Cet article établit la manière dont on dispose d’une motion présentée après le début de la séance (ou après 14 heures le lundi ou 11 heures le vendredi) et avant la lecture de l’ordre du jour, si le débat sur cette motion est ajourné ou interrompu. Les motions susceptibles de débat pouvant être reçues durant cette période sont celles qui sont proposées pendant les affaires courantes ordinaires, à savoir principalement celles qui ont trait aux travaux de la Chambre et celles tendant à l’adoption d’un rapport de comité. [1] Le débat peut être interrompu, par exemple par les déclarations des députés ou les affaires émanant des députés, ou ajourné, soit par voie de motion ou parce qu’on est arrivé à l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien.

Pour toutes les motions présentées durant les affaires courantes, à l’exception des motions portant adoption du rapport d’un comité, le paragraphe (1) de l’article 66 stipule que si le débat est interrompu ou ajourné, il peut être repris lors d’une prochaine séance de la Chambre. Dans ce cas, l’ordre est plutôt transféré à la rubrique des « Ordres émanant du gouvernement », et considéré sous cette rubrique, c’est-à-dire dans l’ordre établi par le gouvernement, en vertu de l’article 40(2) du Règlement.

Le paragraphe (2) traite du débat sur la motion portant adoption d’un rapport de comité. Si le débat est interrompu ou ajourné, la motion n’est pas transférée aux ordres émanant du gouvernement. Au lieu de cela, on la transfère à la rubrique « Adoption de rapports de comités » et l’on reprend le débat à l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien le jour désigné par le gouvernement, après consultations avec les autres partis. Le jour désigné pour la reprise du débat ne peut excéder le dixième jour de séance suivant l’interruption ou l’ajournement du débat initial. C’est habituellement un membre du gouvernement qui se lève à la Chambre pour désigner le jour en question. [2] Si l’on ne désigne aucun jour, la reprise du débat est automatiquement programmée pour le dixième jour de séance suivant. [3]

Après un total de trois heures de débat, [4] (ce qui comprend le débat initial et le débat repris), ou lorsque personne ne demande plus à intervenir, selon la première éventualité, le Président met la motion aux voix. Si l’on demande un vote par appel nominal le jour où l’on a repris le débat, le vote est automatiquement différé au mercredi suivant, au plus tard à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement. Si le débat n’est ni interrompu ni ajourné, on peut tenir un vote par appel nominal immédiatement ou plus tard, conformément à l’article 45 du Règlement.

Le présent article s’applique uniquement aux débats interrompus ou ajournés, et non à ceux qu’une autre motion remplace, comme une motion visant à passer à l’Ordre du jour. Dans ces cas, l’affaire à l’étude disparaît du Feuilleton, qu’il s’agisse d’une motion portant adoption ou toute autre motion pour une affaire courante. [5]

Le paragraphe (3) stipule qu’on ne peut proposer qu’une seule motion portant adoption d’un rapport de comité au cours d’une même journée de séance. Si deux députés ou plus se lèvent pour proposer une motion portant adoption le même jour, le Président propose la motion dont avis a été donné en premier. [6]

Historique de l’article 66

Avant 1965, la reprise du débat sur les motions proposées durant les affaires courantes ordinaires survenait sous cette même rubrique le jour de séance suivant. À plusieurs reprises, des motions d’adoption d’un rapport de comité ont fait l’objet d’un long débat se prolongeant pendant plusieurs jours, ce qui a empêché la Chambre d’aborder toute affaire dont l’étude était ultérieurement prévue au Feuilleton.

En mai 1965, le premier ministre Pearson présentait deux résolutions distinctes dans lesquelles il proposait d’importantes modifications à la procédure, et notamment l’ajout au Règlement d’une disposition stipulant le transfert à la rubrique des « Ordres émanant du gouvernement » des débats ajournés ou interrompus sur les motions proposées durant les affaires courantes ordinaires. Voici comment la raison d’être d’un tel changement était décrite :

Ainsi, les débats prolongés sur une motion n’empêcheront plus la Chambre d’aborder la période des questions ou les autres affaires courantes. Ce changement fera en sorte que ne se reproduise plus la situation survenue lors de l’étude du rapport du comité sur le drapeau du Canada, où la période des questions n’a pu être abordée durant plusieurs jours. [7]

Durant le débat sur ces résolutions, certains députés ont exprimé des réserves, estimant que si de telles motions étaient transférées aux ordres émanant du gouvernement, les dispositions du Règlement alors en vigueur qui laissaient au gouvernement la latitude de déterminer l’ordre de mise en délibération de ses mesures ne garantissaient pas que les motions ainsi transférées seraient ultérieurement abordées. [8] Par conséquent, la Chambre a adopté des amendements aux propositions initiales, dont deux ont influé sur les dispositions de l’article 66 (il s’agissait alors de l’article 43). Le premier stipulait que l’ordre de reprise du débat sur toute motion transférée serait « considéré comme le premier des ordres du jour inscrits au nom du gouvernement ». Le deuxième prescrivait que les ordres émanant du gouvernement pouvaient être appelés dans l’ordre établi par le gouvernement, « sauf les dispositions de l’article 43… ». [9] Ainsi, le Règlement obligeait le gouvernement à donner à la reprise du débat ajourné ou interrompu sur une motion la priorité sur les autres ordres émanant du gouvernement le jour de séance suivant.

L’obligation pour le gouvernement de mettre en délibération les ordres ainsi transférés avant tout autre ordre émanant du gouvernement a été mise en question trois ans plus tard par un autre comité spécial de la procédure de la Chambre. Dans son troisième rapport, déposé à la Chambre le 6 décembre 1968, ce comité faisait l’observation suivante :

…en vertu de cette règle provisoire, le gouvernement est tenu de présenter ce genre de question avant tout autre ordre du gouvernement… Le Comité croit que cette restriction… devrait disparaître… [10]

Dans son cinquième rapport, déposé le même jour, le comité proposait un amendement qui changeait cette obligation. [11] Le 20 décembre suivant, la Chambre adoptait le rapport, [12] permettant ainsi au gouvernement de mettre ces affaires en délibération dans l’ordre qu’il souhaitait, sans l’ancienne restriction.

Le libellé de l’actuel article 66(1) a de nouveau été révisé en 1982, pour tenir compte du réaménagement de l’horaire de la Chambre. [13] Des changements semblables ont été apportés en 1986, 1987 et 1989, encore une fois pour tenir compte du réaménagement de l’horaire de la Chambre. La disposition initiale se lisait en partie comme suit : « Lorsque le débat sur une motion présentée après 14 heures… »; en 1986, lorsque les affaires courantes ordinaires ont été déplacées pour être étudiées le matin, on a remplacé ces mots par les suivants : « Lorsque le débat sur une motion présentée avant la lecture de l’Ordre du jour… ». [14] Un autre changement est survenu en juin 1987, lorsque la rubrique des « Ordres émanant du gouvernement » a été déplacée de façon à précéder et à suivre les affaires courantes ordinaires le vendredi. [15] En 1989, la rubrique des « Affaires courantes » a été repoussée plus tard en journée les lundis, ce qui a entraîné un autre changement. [16]

Avant qu’on n’ajoute provisoirement les paragraphes (2) et (3), en 2005, [17] on ne faisait pas de distinction entre les motions portant adoption d’un rapport de comité et les autres motions pour affaires courantes. En fait, les dispositions du paragraphe (1) sur le transfert étaient appliquées presque exclusivement aux motions portant adoption. [18] Confirmant semble-t-il les craintes exprimées en 1965, le gouvernement n’a que rarement repris le débat sur une motion d’abord proposée par un simple député au cours des affaires courantes. [19] La présidence a statué qu’aussi longtemps que la motion transformée en ordre émanant du gouvernement demeurait au Feuilleton, les autres députés n’étaient pas autorisés à la proposer de nouveau. [20] Les députés se sont souvent plaints du fait que la Chambre n’avait pas l’occasion de se prononcer sur ces motions. [21] Pour remédier à la situation, la Chambre a adopté le paragraphe (2). Ce faisant, elle est revenue à la philosophie de l’article original de 1965, lequel exige que le débat reprenne dans un délai relativement court. Elle a toutefois ajouté, dans ce cas, une limite précise à la durée du débat. Le paragraphe (3), ajouté en même temps, limite le nombre de motions portant adoption d’un rapport de comité pouvant être proposées au cours d’une même journée de séance. En outre, le débat doit reprendre à l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien plutôt qu’empiéter sur le temps réservé aux ordres émanant du gouvernement.

Dans les mois qui ont suivi l’ajout des paragraphes (2) et (3), les députés ont proposé de nombreuses motions portant adoption de rapports de comités. [22] Dans presque tous les cas où le débat a été ajourné ou interrompu, la Chambre a consenti à ne pas reprendre le débat. [23] En mai 2005, on a demandé en trois occasions au Président de juger de la recevabilité d’amendements apportés à des motions d’adoption visant à renvoyer les rapports en comité pour qu’ils soient modifiés. [24]

Article 67
Motions pouvant faire l’objet d’un débat.
67.
(1)
Peuvent faire l’objet d’un débat :
Les motions :
(a)
figurant au Feuilleton, sauf disposition contraire du présent Règlement;
(b)
portant adhésion à un rapport d’un comité permanent ou spécial;
(c)
tendant à la question préalable;
(d)
tendant à la deuxième lecture d’un projet de loi et au renvoi de ce projet de loi à un comité permanent, spécial ou législatif, ou à un comité plénier de la Chambre;
(e)
visant à l’étude de tout amendement à proposer à l’étape du rapport d’un projet de loi présenté par un comité permanent, spécial ou législatif;
(f)
tendant à la troisième lecture et à l’adoption d’un projet de loi;
(g)
visant l’étude des amendements apportés par le Sénat aux projets de lois de la Chambre des communes;
(h)
visant une conférence avec le Sénat;
(i)
visant l’ajournement de la Chambre en vue de la discussion d’une affaire précise d’une importance publique pressante;
(j)
portant la prise en considération d’un ordre des voies et moyens (Budget);
(k)
portant la prise en considération de toute motion relative à l’étude des travaux des subsides;
(l)
portant l’adoption en comité plénier de toute motion, article, paragraphe, préambule ou titre à l’étude;
(m)
portant institution d’un comité;
(n)
portant renvoi à un comité d’un rapport ou d’un état déposé sur le Bureau de la Chambre;
(o)
portant suspension de tout article du Règlement, sauf disposition contraire;
(p)
toutes autres motions, présentées au cours des Affaires courantes ordinaires, nécessaires à l’observation du décorum, au maintien de l’autorité de la Chambre, à la nomination ou à la conduite de ses fonctionnaires, à l’administration de ses affaires, à l’agencement de ses travaux, à l’exactitude de ses archives et à la fixation des jours où elle tient ses séances, ainsi que des heures où elle les ouvre ou les ajourne.
Motions ne pouvant pas faire l’objet d’un débat.
 
(2)
Toutes les autres motions, sauf disposition contraire du présent Règlement, sont résolues sans débat ni amendement.

Commentaire de l’article 67

L’article 67 dresse une liste des motions considérées comme pouvant faire l’objet d’un débat, et précise que toutes les autres motions doivent être résolues sans débat ni amendement.

En raison de la clarté de cette règle interdisant tout débat, à moins qu’une motion n’appartienne à un type expressément stipulé, la présidence n’a eu à rendre que très peu de décisions dans ce domaine. Pour des fins de clarté cependant, il convient de signaler que l’alinéa a) vise toute motion à l’égard de laquelle un avis a été donné, et toute affaire inscrite à l’ordre du jour (sous réserve des autres dispositions du Règlement). L’alinéa p) vise les propositions étudiées sous la rubrique « Motions » des affaires courantes ordinaires. À l’égard de l’alinéa p), la présidence a toujours décidé que toutes les motions qui ont trait à l’organisation des affaires de la Chambre devaient être présentées par le leader parlementaire du gouvernement. [1] Certaines motions des affaires courantes doivent être résolues sans débat ni amendement, comme celles qui sont proposées en vertu de l’article 56.1, les motions relatives aux déplacements des comités proposées en vertu de l’article 56.2 ou les motions relatives à la nomination des hauts fonctionnaires en vertu de l’article 111.1 du Règlement.

Historique de l’article 67

La version initiale de l’article 67 a été adoptée à titre d’amendement à l’article 17 en avril 1913. [2] Lorsqu’il a proposé l’adoption de cette nouvelle règle, le premier ministre a soutenu qu’elle avait pour objet de permettre de discuter pleinement de toute motion de fond, portant sur l’opportunité d’adopter un projet de loi, une mesure ou des crédits, et de faire en sorte que les motions devant être considérées comme purement de forme ne soient plus débattues. [3] De concert avec deux autres mesures, les amendements n’ont été adoptés qu’après un débat enflammé. [4]

Avant 1913, le Règlement faisait état de plusieurs questions devant être résolues sans débat, dont les motions portant qu’un député soit maintenant entendu, les appels d’une décision du Président relativement à un rappel au Règlement, et les demandes de permission pour la présentation d’une motion d’ajournement en vue de discuter d’une question urgente. [5] Jusqu’alors, l’usage voulait que toute motion puisse faire l’objet d’un débat à moins qu’une règle ou une coutume parlementaire ne prescrive le contraire. Les modifications de 1913 précisaient que toutes les motions devaient être résolues sans débat ni amendement, à moins d’être expressément reconnues comme sujettes à débat par le Règlement. [6]

Cette règle est demeurée inchangée jusqu’en mars 1927, lorsqu’un comité spécial chargé d’examiner la procédure a recommandé de désigner nommément comme sujettes à débat des motions additionnelles telles que celles ayant trait à la deuxième lecture d’un projet de loi, à une conférence avec le Sénat et à la création d’un comité. [7] Parallèlement, le comité estimait nécessaire de donner quelques exemples des motions ayant trait aux affaires de la Chambre et visées par cette disposition. [8]

En juillet 1955, par suite de changements apportés à d’autres articles du Règlement, on ajoutait à l’alinéa a) les mots « sauf disposition contraire du présent Règlement ». [9] En décembre 1968, on procédait à une importante refonte du Règlement par suite des décisions prises sur l’abolition des comités des subsides et des voies et moyens, sur le renvoi des projets de loi aux comités permanents et spéciaux, ainsi que sur la restauration de l’étape du rapport. [10] Ces changements se sont trouvés reflétés dans le libellé de l’article 67, qui est demeuré le même depuis 1968, exception faite de l’ajout, en juin 1985, des dispositions visant le renvoi aux comités législatifs. [11]

Article 67.1
Questions sur une motion de clôture ou d’attribution de temps.
67.1.
(1)
a)
Lorsqu’une motion est proposée conformément à l’article 57 ou 78(3) du Règlement, une période d’au plus trente minutes est réservée pour permettre aux députés de poser de brèves questions au ministre responsable de l’affaire qui fait l’objet de la motion conformément à l’article 57 ou 78(3) du Règlement, ou au ministre représentant le ministre qui parraine l’affaire, et le ministre en question peut répliquer.
b)
À la fin de la période prévue au sous-alinéa a) du présent article, le Président met aux voix la motion présentée conformément à l’article 57 ou 78(3) du Règlement, selon le cas.
Prolongation de la séance.
 
(2)
Dans le cas où une motion relative à un projet de loi prévue par le présent paragraphe est présentée et adoptée, un certain jour, au début des délibérations relatives aux Ordres émanant du gouvernement et où l’ordre relatif à ce projet de loi est ensuite mis en délibération puis débattu le reste du jour de séance en question, la durée de ce débat doit être considérée comme étant d’un jour de séance pourvu que la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement est prolongée d’une période correspondant à la période consacrée à la prise en considération des affaires prévues au paragraphe (1) du présent article, dans l’après-midi du jour de séance où cette considération a eu lieu. Le cas échéant, la prise en considération des affaires émanant des députés et l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien sont retardées en conséquence, nonobstant les articles 24, 30 et 38 du Règlement ou tout ordre adopté conformément à l’article 27 du Règlement.

Commentaire de l’article 67.1

Selon l’article 67.1(1)a), lorsqu’on propose une motion de clôture (soit pour une motion ou à l’étape d’un projet de loi) en vertu de l’article 57 ou une motion d’attribution de temps (à l’étape d’un projet de loi) en vertu de l’article 78(3), avant que la question ne soit véritablement mise aux voix, les députés disposent d’une période ne dépassant pas 30 minutes pour poser des questions au ministre responsable de l’affaire ou au ministre qui le représente. Ce ministre peut ensuite répliquer. Puis, selon l’article 67.1(1)b), suivant cette période de questions, le Président interrompt les interventions et met aux voix la motion de clôture ou d’attribution de temps.

L’article 67.1(2) prévoit ensuite divers scénarios de procédure à suivre après l’adoption de la motion de clôture ou d’attribution de temps, si la motion s’applique à un projet de loi. Premièrement, si la motion est proposée et adoptée au début de la période réservée aux ordres émanant du gouvernement, un certain jour, et que le projet de loi soit ensuite mis en délibération et débattu le reste de la journée, la durée du débat est considérée comme étant d’un jour de séance. Deuxièmement, si les conditions précédentes ont cours, il faut ajouter à la période réservée aux ordres émanant du gouvernement de ce jour-là autant de minutes qu’on en a pris pour la période des questions. Enfin, cette section de l’article stipule que les affaires émanant des députés (le cas échéant) et l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien doivent être retardés en conséquence. Ce report prend place nonobstant les dispositions des articles 24 (ajournement quotidien), 30 (programme quotidien) et 38 (délibérations sur la motion d’ajournement), et tout autre ordre pris en vertu de l’article 27 du Règlement (prolongation des séances en juin).

Historique de l’article 67.1

Depuis l’adoption de la règle de clôture (actuel article 57), en 1913, la motion de clôture n’a jamais été sujette à un débat ou à des amendements. [1] En ce qui concerne la règle d’attribution de temps, sauf dans les cas où tous les partis étaient d’accord (actuel article 78(1)), les motions d’attribution de temps proposées en vertu des articles 78(2) ou 78(3) ont été sujettes à un débat maximal de deux heures et à de possibles amendements. La disposition régissant ce débat de deux heures a été en vigueur dès l’adoption de la règle, en 1969, jusqu’à ce qu’on la supprime lors de l’adoption d’une série d’amendements au Règlement, en avril 1991. [2] Depuis mai 1991, date où les nouveaux articles sont entrés en vigueur, les motions de clôture et d’attribution de temps sont résolues sans débat.

En octobre 2001, la Chambre a adopté les recommandations du premier rapport du Comité spécial sur la modernisation et l’amélioration de la procédure à la Chambre des communes, selon lequel il y aurait lieu de tenir une période de questions et de réponses de 30 minutes après la présentation d’une motion de clôture proposée en vertu de l’article 57 ou d’une motion d’attribution de temps proposée en vertu de l’article 78(3), mais avant que ces motions ne soient véritablement mises aux voix. [3]

Durant cette période de 30 minutes, les questions seraient posées au ministre (ou au ministre le représentant) parrainant le projet de loi à l’étude. Selon le rapport, le nouvel article du Règlement aurait pour but « d’insister sur la reddition de comptes ministérielle et d’obliger le gouvernement à justifier le recours à ces mesures extraordinaires ». Si le nouvel article ne donnait aucune directive quant à la manière de mener cette période de 30 minutes, le Comité a souligné qu’il avait « pleinement confiance en la capacité du Président de régir les interventions et d’exercer son jugement dans le choix des questions ». [4]

Cet article a été invoqué à 13 occasions depuis son adoption; neuf fois pour une motion d’attribution de temps se rapportant à des projets de loi [5] et quatre fois pour une motion de clôture se rapportant à des motions émanant du gouvernement. [6]

À chacune de ces 13 occasions, les députés ont pris avantage de la période de 30 minutes en entier et, au bout du compte, tenu un vote par appel nominal pour décider de la motion. Il n’est arrivé qu’une seule fois qu’on soulève une question de privilège ou un rappel au Règlement sur l’interprétation de cet article, pour autre chose que le temps alloué à chacune des questions et réponses, en mars 2002. Un député a invoqué le Règlement pour s’opposer au fait que c’était un ministre autre que le ministre responsable du projet de loi à l’étude qui allait répondre aux questions. La présidence a alors statué que le libellé de l’article autorisait un ministre « représentant le ministre qui parraine l’affaire » à répliquer. [7]

Pour des questions au sujet de la procédure parlementaire, communiquez avec la Direction des recherches pour le Bureau

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