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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 021 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 16 février 2012

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 21e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Il est question aujourd'hui de l'ordre de renvoi du mardi 1er novembre 2011, le projet de loi C-290, Loi modifiant le Code criminel (paris sportifs).
    Nous avons des témoins parmi nous aujourd'hui. J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Comartin, le parrain du projet de loi, M. Rutsey, et M. Burns.
    Si vous avez une déclaration préliminaire, vous pouvez la faire maintenant.
    Merci, monsieur le président. J'ai une déclaration préliminaire, et M. Rutsey prendra ensuite la parole. M. Burns est également ici pour nous aider à répondre aux questions du comité.
    Encore une fois, je remercie le comité de nous avoir permis d'aller de l'avant avec le projet de loi. Comme vous le savez tous, il a reçu un appui solide de la Chambre à l'étape de la deuxième lecture. D'après l'ensemble des discussions que j'ai eues avec les membres de tous les partis, il reçoit encore cet appui.
    Je veux revenir brièvement en arrière et parler de l'origine des mesures législatives sur le jeu. Cela remonte au XVIIe siècle environ, en Angleterre. À cette époque, nous avions un roi — je pense que c'était l'un des William —, et ses militaires pratiquaient trop le jeu. Comme cela nuisait à sa capacité de faire la guerre, il a banni le jeu au pays.
    Au fil des siècles, nous avons atténué les mesures, y compris ici au Canada, où un certain nombre de modifications ont été apportées. Nous avons importé cela de l'Angleterre au cours du XIXe siècle.
    Par exemple, je souligne qu'il était illégal d'utiliser des dés dans les casinos. Cette disposition a été retirée. À une certaine époque, la roulette n'était pas légale. Cela a été retiré. C'est toujours la même chose.
    L'alinéa  207(4)b) proposé aurait pour effet de supprimer l'interdiction de parier sur une épreuve sportive unique. Je suis certain que la plupart d'entre vous savent qu'au Canada, il est permis de faire des paris sur plusieurs épreuves sportives, mais pas sur une seule. C'est la même chose partout aux États-Unis, sauf au Nevada. Ce serait un avantage important pour l'industrie du jeu au Canada. Une bonne partie se fait à distance, ce qui attire un certain nombre de personnes au Nevada.
    La seule autre observation que j'aimerais faire au sujet de l'évolution historique — je reviendrai sur le volet économique —, c'est qu'en 1985, il y a eu un accord entre le gouvernement fédéral et les provinces qui, en fait, a transféré aux provinces le droit de mener des activités de jeu. Si cette modification est adoptée, bien que cela doit se faire au fédéral, les provinces auront la responsabilité la mettre en oeuvre.
    J'ai proposé le projet de loi et fait avancer les choses rapidement pour deux raisons. L'une d'entre elles, c'est le développement économique. Comme vous le savez, Windsor a l'un des plus importants casinos commerciaux du pays. Nous sommes à la frontière des États-Unis. Entre environ 75 et 80 p. 100 des gens qui vont au casino — et les chiffres sont semblables pour celui de Niagara — proviennent du côté étatsunien de la frontière.
    Depuis que nous l'avons ouvert, il y a presque 20 ans, les États-Unis, le Michigan surtout, mais maintenant l'Ohio et l'Indiana, ont commencé à établir de grands casinos commerciaux similaires, ce qui nous a enlevé une partie importante de clients à Windsor et à Niagara. Buffalo a fait la même chose dans l'État de New York.
    Une étude commandée par l'Association canadienne du jeu, dont les cadres dirigeants sont avec moi aujourd'hui, a été réalisée. Dans son étude, elle souligne que cela nous donnera un avantage important, pour autant que le système est établi dans les casinos. On attirera un plus grand nombre de gens qui non seulement parieront sur des jeux, mais qui profiteront également des autres services offerts par le casino; entre autres, ils pourront y passer la nuit. C'est un avantage important pour les gens qui viennent des États du Michigan, de l'Ohio ou de New York.
    Je ne vais pas me lancer dans les chiffres. Ce que je soulignerais, car c'est propre à ma circonscription et à ma ville, c'est que le projet de loi permettra de sauver et de créer entre au moins 100 et 150 emplois au casino de Windsor, avec des chiffres similaires pour le casino de Niagara, étant donné que nous sommes à côté du marché américain.
    L'autre avantage majeur qui me motivait à mettre le projet de loi de l'avant, c'est qu'il s'inscrit dans la lutte que nous continuons à mener contre le crime organisé.
    En fait, ces paris, qui deviendraient légaux, se pratiquent présentement et, encore une fois, vous entendrez des chiffres énormes tant pour le Canada que pour les États-Unis. Je parle des paris, qui dépassent — la meilleure idée que nous avons à ce sujet au Canada — environ de 8 à 10 milliards de dollars par année. Cela représente les montants pariés.
    Presque tout cela est orchestré par le crime organisé. Les gens de ce milieu tirent des profits du jeu après le versement des montants. C'est une façon de porter un dur coup à ces activités.
    Le montant que nous obtiendrons — M. Rutsey sera probablement en mesure de répondre à toutes les questions que vous pourriez avoir à cet égard — est vraiment difficile à évaluer, car cela dépend de la façon dont les provinces géreront le tout. Encore une fois, c'est à tout le moins un coup porté au crime organisé. Je sais que vous n'avez pas encore terminé l'étude sur le crime organisé, mais d'après une grande partie des témoignages que nous avons entendus au cours de cette période, l'une des façons de leur nuire consiste à leur enlever l'avantage financier qu'ils ont. Cela s'inscrit dans la lutte que les gouvernements mènent pour mettre fin à ce genre d'activités illégales.
    Monsieur le président, les appuis sont très nombreux. Je veux manifester ma gratitude en particulier aux provinces de l'Ontario et de la Colombie-Britannique. Elles souhaitent aller de l'avant toutes les deux. Elles font de la planification pour mettre cela en place. Selon les estimations que j'obtiens du casino de Windsor, une période de 6 à 12 mois est nécessaire pour pouvoir commencer le processus. Elles font déjà ce travail. Évidemment, il faudra que les dispositions législatives soient modifiées avant qu'elles puissent terminer le travail, mais elles souhaitent vraiment aller de l'avant.
    Un certain nombre d'autres provinces examinent la question à ce moment-ci, et selon les échos que nous recevons de la Saskatchewan, de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Nouvelle-Écosse, elles souhaitent vraiment aussi suivre cette voie.
    C'est inévitablement en raison des recettes qui seront générées pour les provinces. Je veux être clair. Selon la façon dont tout sera mis en oeuvre, les montants ne seront pas aussi importants qu'on peut le croire; cela dépend de la façon dont les provinces procèdent: si elles le font dans une moindre mesure, ou si, au contraire, elles mettent en place des jeux de hasard électroniques sur Internet, par exemple.
    Les chiffres varient énormément. Au bout du compte, pour autant que nous sachions, aucune province ne s'y oppose. En fait, la plupart soutiennent la mesure. Je veux aussi mentionner qu'un certain nombre de municipalités — encore une fois, les deux que je connais le mieux sont Windsor et Niagara, et les deux administrations municipales ont adopté des résolutions en ce sens.
    Monsieur le président, permettez-moi de terminer en parlant de la question qu'on soulève parfois lorsque nous parlons d'étendre nos services de jeu: le problème du jeu compulsif. Comment le réglons-nous?
    Pour ceux d'entre vous qui ne le savent pas, j'ai clairement contribué à l'établissement d'un casino à Windsor. J'ai fait partie de la première commission publique que nous avons eue en Ontario pour les casinos. J'ai amplement étudié la question. Toutes les études que j'ai consultées, des études crédibles, montrent très clairement que légaliser un volet du jeu ne se traduit pas par une hausse du nombre de joueurs compulsifs. Ils existent déjà.
    Un certain nombre d'études longitudinales — et encore une fois, je pense que M. Rutsey pourra vous donner des précisions à ce sujet, si vous le souhaitez — montrent qu'en fait, le nombre de joueurs compulsifs ne change pas du tout. La différence est très mince. En fait, les gens qui appliquent le traitement me disent que le nombre peut même diminuer un peu, car s'il ne s'agit pas de jeu illégal, la personne a davantage tendance à demander de l'aide. La personne peut aussi davantage être repérée par la province, par l'établissement dans lequel elle utilise les installations de jeu. Elle peut davantage être repérée et être incitée à demander de l'aide. Je sais que c'est le cas au casino de Windsor, et dans la plupart des casinos commerciaux du pays, si ce n'est dans tous les casinos.
    Nous dépensons beaucoup d'argent pour cela. Je dois dire que ce n'est pas suffisant, à mon avis. C'est l'une des questions que j'ai vraiment mise vivement de l'avant lorsque je travaillais au dossier du casino de Windsor. La province de l'Ontario a accru sa participation de façon importante.

  (1115)  

[Français]

    La province de Québec est celle qui dépense le plus d'argent pour venir en aide aux joueurs compulsifs.

  (1120)  

[Traduction]

    Bien que l'Ontario y consacre plus d'argent en général, les casinos du Québec offrent davantage de traitement sur place que toute autre province. Je crois que d'autres provinces devraient y consacrer plus d'argent, et je ne suis pas convaincu que ce devrait être différent pour l'Ontario et le Québec. Je vous dis donc que si le projet de loi est adopté, incitez vos homologues provinciaux à examiner la question et à vérifier s'il n'y a pas d'autres services qu'elles devraient fournir, comme nous le faisons pour toutes sortes d'autres types de dépendance — à la drogue, à l'alcool, etc.
    Monsieur le président, pour conclure, il faut appuyer le projet de loi pour deux raisons: le développement économique et la lutte contre le crime organisé. Il reçoit un grand nombre d'appuis partout au pays, surtout de la part des gouvernements provinciaux.
    Merci.
    Merci, monsieur Comartin.
    Monsieur Rutsey.
    Merci. Bonjour monsieur le président et honorables membres du comité. Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous.
    Je suis le directeur général de l'Association canadienne du jeu. Je suis accompagné de M. Paul Burns, vice-président des affaires publiques.
    Notre association représente les acteurs principaux du jeu au Canada — exploitants d'installations, fabricants d'équipement et fournisseurs de services. Nous parrainons les travaux de recherche et nous nous prononçons sur des questions nationales et régionales importantes.
    Je travaille dans le domaine du jeu depuis plus de 20 ans, dans les secteurs public et privé. J'ai entre autres participé à la création des politiques en matière de jeu et à l'établissement de casinos en Ontario, en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.
    En tant que responsable des pratiques de Coopers and Lybrand Gaming Consulting Practice — qui s'appelle maintenant PricewaterhouseCoopers —, je donne des conseils à un grand nombre de clients des secteurs privé et public, dont le gouvernement de l'Ontario, et je suis l'auteur de l'Ontario Casino Market and Economic Impact Study , le plan pour l'industrie du jeu dans les casinos en Ontario.
    À titre de DG d'entreprises du secteur privé, j'ai créé et géré des entreprises de jeux en Ontario, à Las Vegas, et ailleurs dans le monde, et j'ai obtenu un permis d'organismes de contrôle du Nevada et de l'Ontario. Je commente régulièrement les questions liées au jeu dans les médias et devant le gouvernement.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour exprimer notre appui à l'égard du projet de loi C-290, une loi modifiant le Code criminel qui autorisera les paris sur les résultats d'une épreuve sportive unique, et pour répondre à toutes vos questions.
    Comme Joe l'a souligné, le Canada participe à des paris sportifs par reports légaux depuis des décennies, mais la restriction actuelle qui empêche les gens de parier sur une épreuve sportive unique ne reflète pas la réalité des parieurs. Grâce à l'adoption du projet de loi, les Canadiens pourront parier légalement sur les épreuves sportives de leur choix.
    L'Association canadienne du jeu appuie cette initiative depuis qu'elle a été mise de l'avant par le gouvernement de l'Ontario il y a environ trois ans et qu'elle est officiellement appuyée par d'autres provinces, dont la Colombie-Britannique, l'Alberta et la Saskatchewan. Depuis ce temps, nous rencontrons un grand nombre de députés de tous les partis, de même que bon nombre de sénateurs pour discuter des avantages.
    La plupart considèrent cela comme un outil d'application de la loi et de développement économique, et tout simplement d'adaptation à ce que les Canadiens font déjà. Le fait est que des Canadiens parient sur des sports principalement par des moyens illégaux, soit par des preneurs de paris ou en ligne. Le projet de loi permettra aux paris sportifs de se faire dans un environnement réglementé, soit dans des installations ou en ligne.
    Un examen des rapports annuels du Service canadien de renseignements criminels indique que les paris illégaux existent dans toutes les régions du Canada, et qu'au bout du compte, le crime organisé en profite. On ne connaît pas la taille du marché canadien, mais on estime qu'il représente plus de 10 milliards de dollars par année. Il y a eu une hausse importante des paris sportifs sur Internet au cours de la dernière décennie; selon les estimations, les Canadiens parient pour presque 4 milliards de dollars par année par des preneurs de paris sportifs étrangers. L'adoption du projet de loi permettra aux Canadiens de faire légalement et de façon sûre ce qu'ils font déjà par des moyens illégaux; aux organismes provinciaux d'être sur le même pied d'égalité que la concurrence en ligne; aux établissements de jeux situés près de la frontière américaine d'avoir un produit de différenciation concurrentielle; et elle permettra d'utiliser l'argent venant de l'économie clandestine à d'autres fins. C'est de la bonne politique publique d'adapter la loi aux activités d'un grand nombre de Canadiens, et de ne pas simplement les traiter comme des scélérats.
    Pour les provinces qui opèrent en ligne, cela peut rendre leurs offres plus complètes et éliminer le milieu défavorable sur le plan compétitif dans lequel elles mènent leurs activités présentement. Puisque les paris sportifs constituent près de 40 p. 100 de toutes les activités de jeu en ligne, à l'heure actuelle, les provinces canadiennes qui ont des activités en ligne n'ont simplement pas de produit pour 40 p. 100 de leurs clients potentiels.
    Ce sera probablement un facteur concurrentiel important pour les établissements qui sont situés près de la frontière. Lorsque les gens s'y rendent pour parier sur des épreuves sportives, souvent, ils restent sur place pour regarder le match. Ils consomment alors de la nourriture et des boissons, jouent peut-être au blackjack ou aux machines à sous, et peuvent même passer la nuit sur les lieux. Si leur conjoint ou conjointe est là aussi, plus de revenus accessoires sont générés.
    Un rapport récent que nous avons commandé concernant les répercussions des paris sportifs sur les casinos de l'Ontario situés près de la frontière met l'accent sur les avantages d'offrir un produit de paris sportifs légal et réglementé dans les casinos de Windsor et de Niagara Falls. Parmi les avantages qui peuvent découler des visites additionnelles de clients américains, il y a la création de jusqu'à 250 nouveaux emplois dans les deux casinos, et des retombées économiques pour la collectivité.
    Présentement, les seules personnes qui sont avantagées par la situation actuelle sont les exploitants étrangers, les preneurs de paris et le crime organisé. Il est très sensé de fermer les vannes d'une telle source de fonds pour les mauvais citoyens et de permettre aux gouvernements provinciaux de financer des programmes et des services pour le bien commun.

  (1125)  

     Du point de vue du tourisme et du développement économique, la question ne se pose même pas. Il y a plus de 100 millions d'Américains à six heures de route d'un casino canadien, et les lois fédérales américaines en vigueur interdisent explicitement les paris sportifs dans les États où cette option n'existe pas déjà légalement — en l'occurrence, le Nevada. Voilà pourquoi les paris sur les manifestations sportives uniques peuvent attirer un nombre considérable de gens, surtout durant des périodes de l'année comme les dépenses folles au mois de mars, les séries éliminatoires de la NFL et de la NBA, ainsi que le Super Bowl.
    Et n'oublions pas que les paris sur les manifestations sportives uniques génèrent déjà des revenus qui ne cessent d'augmenter. L'intérêt que suscitent les paris sportifs est important et omniprésent. Tous les jours, des gens ordinaires — dont certains sont peut-être nos voisins ou nos amis — font des paris sur des manifestations sportives. Aux termes de la loi actuelle, ces gens sont considérés comme étant complices d'activités illégales. Pourtant, ils ne sont pas des criminels, et ce qu'ils font est légal dans bien d'autres pays partout dans le monde.
     Il est temps de rattraper le retard et de se mettre au diapason de la population canadienne et, surtout, de retirer cet argent des mains des malfaiteurs pour le mettre à la disposition du public. C'est non seulement la chose logique à faire, mais c'est aussi la bonne chose à faire.
    Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Comartin et merci, messieurs, de vos déclarations.
    L'ancien porte-parole en matière de justice est ici, devant notre auguste comité. Nous avons manifesté notre appui au projet de loi, mais je dois dire qu'à titre de néo-démocrate, je cherche instinctivement des pépins, surtout à cause de ce qui est arrivé dans ma province.
    Au début des années 1990, dans ma province, le gouvernement avait invoqué des arguments semblables. Le ministre des Finances de l'époque, si je ne me trompe pas, avait dit que nous devions commencer à nous occuper des machines de jeu dans les bars. Il y avait déjà quelques poignées de machines à vidéo poker installées dans des bars. On nous avait prévenus que c'était une affaire de mafia, de crime organisé, et que nous ferions mieux d'intervenir parce que nous pourrions améliorer la situation. Bien entendu, au bout de deux ans, on comptait 800 machines dans les bars partout à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous avons alors vu des cas de gens vulnérables qui...
     Joe, vous avez parlé des joueurs compulsifs, mais en réalité, cette situation a causé l'appauvrissement des gens vulnérables. Il y a eu des cas de suicide. Certaines personnes passaient tout leur temps devant ces machines.
    Le grand coupable, c'est bien entendu la machine à loterie vidéo, que l'on appelle le crack du jeu. Cette question a soulevé un grand débat dans ma province. En Nouvelle-Écosse, on en trouvait dans les épiceries et les dépanneurs, jusqu'à ce qu'on décide de les retirer pour contrer ce fléau.
    On entend des arguments comme: « Mais le tout se fera dans un casino, et nous avons des moyens pour faire face à cette situation ». Si je comprends bien — et monsieur Comartin, vous pourrez me corriger si j'ai tort —, tout jeu de hasard est illégal, sauf là où il ne l'est pas. Même le jeu de bonneteau, peu importe ce que cela signifie, est illégal.
    Alors, on veut maintenant légaliser le pari sur une course. Bon, je pensais que c'était déjà permis dans les hippodromes et qu'on pouvait faire un pari sur la première course, la deuxième, la cinquième ou peu importe. Je me souviens de l'avoir fait moi-même à une ou deux reprises.
    Le projet de loi ne prévoit pas nécessairement... il ne fait que donner aux provinces le pouvoir de délivrer des permis comme bon leur semble. Si elles le voulaient, elles pourraient donner un permis à une association de football. C'est aux provinces d'en décider. En réalité, le projet de loi libère les paris sur les manifestations uniques afin de permettre aux provinces de les réglementer en temps et lieu.
    Évidemment, monsieur Comartin — et vous parlez au nom de vos électeurs, d'après votre histoire —, il s'agit d'un outil de développement économique qui ne me semble pas problématique. Le vrai problème réside dans les conséquences imprévues. Vous pourriez peut-être nous dire quelques mots à ce sujet, monsieur Comartin.
    J'aimerais également connaître l'avis de la Canadian Gaming Association, parce que vous représentez les exploitants. Quelle responsabilité assumez-vous à l'égard des types de conséquences dont je parle?
    Je parle de conséquences très graves dans ma province. Il y a eu des gens qui ont perdu leur maison, qui se sont suicidés... et personne n'est venu à leur rescousse. On voyait des gens faire la file devant des bars pour aller s'asseoir devant des machines; pourtant, il n'y avait personne pour les aider. Ces gens ne sont pas portés à jouer en ligne ou à... Ils ont accès aux machines; c'est la principale différence, selon moi.
    Il est possible qu'on ne parvienne pas à changer le nombre de personnes, mais ce qu'on peut changer, c'est l'accès. S'il y a un accès contrôlé dans le contexte des casinos, je ne vois aucune objection à cela. Mais attention: une fois le chat sorti du sac, il est difficile de l'y remettre.

  (1130)  

    Il reste une minute pour les réponses.
    On ne devinerait jamais que M. Harris vient de Terre-Neuve parce qu'il a la parole facile.
    Je ne suis pas en mesure de répondre à chacune des questions, mais permettez-moi de préciser un point pour que les choses soient bien claires. La Colombie-Britannique envisage, en fait, d'offrir le produit en ligne, ce qui augmenterait certainement l'accessibilité, contrairement à l'Ontario qui parle plutôt, à ce stade-ci, de restreindre les paris dans les casinos commerciaux et peut-être les paris de bienfaisance.
    Par contre, vous avez frappé en plein dans le mille en évoquant la question de l'accessibilité et des appareils de loterie vidéo. En Ontario, à la même époque — et je le sais parce que j'ai participé aux discussions —, on a choisi de ne pas suivre cette voie. Et c'est toujours le cas. En effet, la province de l'Ontario interdit les appareils de loterie vidéo.
    Toutefois, dans d'autres provinces, après une période initiale de difficultés, la situation a tendance à se stabiliser.
    Je ne suis pas sûr, mais peut-être que M. Rutsey ou M. Burns pourraient nous en dire plus à ce sujet.
    Soyez bref.
    Je serais ravi de parler de la question des appareils de loterie vidéo en aparté. Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que les gens font déjà des paris par l'entremise de preneurs aux livres ou en ligne. Tout ce que nous faisons maintenant, c'est permettre aux provinces d'offrir une solution de rechange plus sûre aux gens qui s'adonnent déjà à cette activité.
    Vous avez tout à fait raison sur certains des points que vous avez soulevés concernant les appareils de loterie vidéo, entre autres. La façon dont certains de ces programmes ont été déployés n'était probablement pas le moyen le plus efficace d'introduire les jeux de hasard dans les collectivités. Or, nous ne sommes pas ici pour discuter des appareils de loterie vidéo; nous sommes ici pour discuter du projet de loi C-290 en vue de légaliser les paris sur une manifestation sportive.
    Merci.
    Monsieur Goguen, à vous la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres.
    Ma question porte sur les mesures de protection. On a parlé de crime organisé. Il va de soi que le crime organisé profite des paris sur une manifestation sportive donnée, mais il y a toujours la possibilité qu'une épreuve soit truquée. Dans le cas des arts martiaux mixtes ou d'un match de boxe, c'est un peu moins compliqué. Les équipes sont truquées d'avance, comme en 1919 avec le scandale des Black Sox et du joueur « Shoeless » Joe Jackson. Quelles mesures de protection prévoit-on pour éviter de tels incidents, et qui les surveillera?
    C'est une excellente question. À mon avis, dès qu'on fait monter en surface une activité souterraine et qu'on la soumet à la surveillance d'organismes légitimes — c'est-à-dire des organismes provinciaux ou les exploitants qu'ils embauchent pour s'en occuper —, ce genre d'anomalies ne passent pas inaperçues. Les gens essaient de truquer les manifestations sportives depuis que les paris existent. Toutefois, quand l'activité a droit de cité, on parvient à déceler des anomalies dans les schémas de jeu.
    On trouve un exemple bien connu dans le monde du tennis professionnel. Il y a quelques années, le joueur russe, Nikolay Davydenko, disputait un match contre un adversaire de niveau inférieur, puis tout d'un coup, au cours du match, un grand montant a été misé sur ce dernier. Les sociétés de paris ont tout de suite remarqué cette anomalie. Elles ont gelé tous les paris et lancé une enquête, en collaboration avec l'ATP; les enquêteurs ont réussi à trouver la source des paris suspects, puis ils ont transmis l'information à la police, qui a alors fait ce qui s'imposait.
    Il y a donc un avantage réel à procéder ainsi, au lieu de la situation actuelle où les gens doivent appeler un preneur aux livres pour faire des paris. En rendant l'activité visible, on atténue les préoccupations, et il devient beaucoup plus facile de repérer ce genre d'anomalies.

  (1135)  

    Merci.
    C'est bien.
    Monsieur le président, puis-je aborder le même point? J'aimerais juste m'y attarder un peu parce que nous en avons parlé au cours de nos discussions préparatoires.
    On constate ici une autre différence, chose qui ne se produit pas quand c'est illégal. Comme l'activité est réglementée et que les fonds se déplacent selon différents schémas, si les membres du crime organisé devaient truquer une manifestation sportive, nous n'aurions aucun moyen de le savoir, comme c'est le cas maintenant.
    Je sais que Paul s'est renseigné auprès d'une personne de la NFL au sujet des mesures qui sont prises maintenant pour surveiller le schéma des paris. Mis à part ce qui est possible au Nevada, il n'y a aucun moyen de surveiller l'activité.
    Le projet de loi donnera en fait aux gouvernements provinciaux, en particulier, et aux gens qui exploitent des manifestations sportives uniques l'occasion de surveiller cette activité de manière continue. Dans ce contexte, si les gens devaient observer une entrée de fonds considérable, ils se diraient qu'il n'y a aucune raison pour cela. D'après leur analyse, les Canadiens de Montréal sont censés gagner la Coupe Stanley cette année. On peut toujours rêver.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Joe Comartin: Par contre, s'ils constataient une grande entrée de fonds pour aider les Canadiens à gagner la coupe, ils s'adressaient alors à la police. Pour l'instant, on ne peut cerner ces anomalies. Cette mesure législative s'ajouterait donc aux outils destinés à lutter contre ce genre de corruption.
    Une des raisons, c'est parce que les preneurs de paris sportifs ont une marge de profit très faible de 5 p. 100, ce qui signifie que 95 p. 100 de l'argent revient aux joueurs. Les preneurs de paris doivent être très précis dans la manière dont ils font les mises; ils doivent surveiller le flux d'argent, parce que la cote pourrait changer si le flux d'argent varie. Il faut sans cesse surveiller les comportements, parce que les preneurs de paris offrent seulement des paris sur les sports qui sont bien connus et largement accessibles; il y a donc une base de connaissances à laquelle tout le monde peut accéder d'une multitude de manières pour faire ses paris. Tout est scruté à la loupe, parce que si on se trompe ou si l'argent se déplace dans la mauvaise direction, les preneurs de paris peuvent perdre de l'argent. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé au Nevada et lors des jeux du Super Bowl. Il arrive parfois que les preneurs de paris perdent tout l'argent sur un jeu parce qu'ils se trompent ou parce que les chances ne sont pas de leur côté. Bref, ils sont bien conscients des flux d'argent.
    Merci.
    Monsieur Casey.
    Bienvenue, messieurs.
    Comme vous le savez, j'ai appuyé le projet de loi la première fois qu'on l'a présenté. Presque aussitôt, des organisations dans l'industrie ont communiqué avec moi — et pardonnez-moi, messieurs Burns et Rutsey, parce que c'était peut-être votre organisation — pour dire que cette mesure législative, quoique bonne, n'était pas suffisante et qu'on voulait autres choses aussi.
    Voici ma question: si cette mesure est le premier point sur votre liste de souhaits, alors quel en sera le deuxième? J'aimerais avoir une idée de la voie que nous empruntons.
    Il n'y a pas d'intentions cachées dans ce dossier. Il s'agit ici d'un projet que la province de l'Ontario envisageait de réaliser il y a presque trois ans. Nous estimons que c'est la bonne chose à faire. Ce n'est pas la première étape d'un processus qui en compte deux ou trois. Nous ne prévoyons rien d'autre que ce qui est proposé dans le projet de loi.
    Quant aux gens qui vous ont parlé d'une série d'autres choses à faire, ce n'était pas nous.
    Si j'ai laissé entendre que vous aviez des intentions cachées, j'en suis navré. Ce n'était absolument pas ce que je voulais dire.
    En fait, voici où je veux en venir. Il est évident que cette question est d'une grande importance pour votre industrie, sinon nous ne serions pas ici. Mais qu'est-ce qui vient après? Les lois canadiennes sur les jeux et les paris doivent être modernisées. Il faut rattraper le temps perdu par rapport à ce qui se passe. Ce dossier en est un exemple.
    Si je peux me permettre, il y a des factions dans l'industrie qui verraient différents types de... Il a été question d'échange de paris ou d'organismes de bienfaisance ayant l'autorisation d'offrir des paris sportifs. Or, ce n'est pas une tâche facile. Il faut posséder une solide base de connaissances, faire preuve d'un certain discernement et bien comprendre ce sur quoi on offre des paris.
    Un échange de paris est un courtage de pari entre deux personnes. Au lieu de servir de maison de paris, on permet essentiellement à deux personnes de faire un pari. Il y a des organisations en ligne qui jouent ce rôle. C'est une façon d'offrir cette option.
    Selon moi, les provinces pourraient déterminer elles-mêmes si elles veulent offrir ce produit. En somme, les échanges de paris ne pourraient toujours pas avoir lieu si ce changement n'était pas apporté. Quant à savoir si les gens veulent avoir cette possibilité à l'avenir, je crois que les provinces ont manifesté un intérêt. Par contre, je ne pense pas que les jeux de bienfaisance aient la capacité d'offrir des paris sportifs. Le tout se fait aux termes du Code criminel et sous l'égide de la province, parce que les organismes de bienfaisance ne peuvent pas offrir, à eux seuls, des jeux électroniques; ils doivent le faire en collaboration avec les organismes provinciaux.

  (1140)  

    C'est ce que je voulais savoir. Merci.
    Dans mon coin de pays, c'est la Société des loteries de l'Atlantique qui gère à peu près tous les jeux de hasard. Suivra-t-on ce genre de modèle dans ce dossier aussi? C'est ce type de formule que vous envisagez?
    En un mot, oui. Si le projet de loi est adopté, alors chaque province choisira la formule voulue pour offrir le produit. Si on décide de confier ce mandat à la SLA, alors le produit sera livré selon une formule déterminée par chacune des provinces qui composent cette organisation.
    Les courses attelées constituent une industrie importante à l'Île-du-Prince-Édouard. D'ailleurs, on trouve le plus grand hippodrome dans ma circonscription.
    Les gens dans l'industrie des courses attelées devraient-ils s'inquiéter de cette nouvelle option de jeu?
    Non. Les livres de paris sportifs pourraient être offerts à l'hippodrome, à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Cette mesure ne change en rien les lois concernant les paris sur les courses de chevaux. Elle vous permet simplement de parier de l'argent sur le cheval qui va gagner ce soir-là, sans avoir à choisir deux ou trois autres gagnants.
    Merci. C'est tout.
    Merci, monsieur Casey.
    Madame Findlay.
    Merci à tous d’être venus nous aider ce matin.
    Je soutiens généralement l’adoption de règles dans l’industrie pour empêcher le crime organisé et d’autres gens mal intentionnés d’en tirer profit. J’ai eu l’occasion dans mon autre vie de témoigner devant la Nevada Gaming Commission au nom d’un client. C’était un exercice intéressant, et leur minutie est remarquable; c’est quelque chose dont nous n’entendons pas vraiment parler ici au Canada.
    Monsieur Comartin, j’aimerais savoir si vous avez sollicité le soutien des provinces à ce sujet. Les provinces ont-elles fait connaître leur opinion au sujet de votre projet de loi? Les autres témoins le savent peut-être.
    Les autres sont mieux placés que moi pour vous répondre.
    Nous savons... En fait, les gouvernements ontarien et québécois ont envoyé des lettres directement au ministre de la Justice pour demander cette modification. Ils en ont fait la demande officielle.
    Je vais laisser la parole à Paul ou à Bill, parce qu’ils sont mieux placés que moi pour vous parler des échanges qu’ils ont eus avec les autres provinces.
    Nous avons discuté avec les sociétés des loteries ou les ministres chargés des loteries de chaque province. Personne ne s’est dit opposé au projet de loi.
    Une ou deux provinces avaient soulevé des doutes il y a quelques années. Les autorités se demandaient ce qui se passerait dans le cas de gens qui parient, par exemple, sur une partie de hockey pee-wee. C’est très facile d’apaiser de telles craintes. Ces paris ne sont tout simplement pas offerts. Je veux dire que seuls deux pères qui regardent leur enfant jouer en prenant un café vont parier sur une partie de hockey pee-wee.

  (1145)  

    Une telle pratique existe.
    On ne peut pas la réglementer.
    On nous rapporte que les gouvernements de l’Alberta et de la Saskatchewan ont envoyé des lettres pour demander ce changement et appuyer le projet de loi, et d’autres provinces ont participé à certains processus. Les sociétés des loteries appuient bien entendu de tout coeur le projet de loi. Pour ce qui est des correspondances officielles à ce jour, nous en avons de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan et de l’Ontario.
    L’ancien gouvernement de la Nouvelle-Écosse nous avait aussi écrit au début, mais le nouveau gouvernement néo-écossais ne l’a pas encore fait, mais il étudie la question.
    Je suis de la Colombie-Britannique, et j’aimerais savoir si chaque province ou chaque région du Canada, à savoir les territoires, a adopté des règlements régissant les sociétés des loteries. Y a-t-il des différences entre les régions?
    Chaque province choisit d’administrer et de réglementer le jeu à sa guise.
    Il y a diverses façons de fonctionner, et les régimes réglementaires varient d’une province à l’autre. Par exemple, au Québec, Loto-Québec gère tous les aspects qui touchent au jeu. Ce sont des fonctionnaires qui nettoient les toilettes et distribuent les cartes.
    En Ontario, la Société des loteries et des jeux de l'Ontario, la SLJO, supervise les entreprises privées qui détiennent les grands casinos, mais elle administre directement les petits établissements. En Colombie-Britannique, votre province, ce sont des entreprises privées qui construisent les établissements et les gèrent, au nom de la BCLC et sous la supervision de la BCLC, avec des ententes de partage de recettes.
    En Saskatchewan, par exemple, un organisme d’État administre deux casinos, et une Première nation en gère six.
    Bref, chaque province est différente. Il y a un processus réglementaire en place dans chaque région, et un organisme d’État supervise le jeu au nom du gouvernement provincial.
    Merci.
    Madame Boivin, allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je remercie aussi les invités et mon collègue Joe Comartin.
    Comme le disait M. Harris, on appuie ce projet de loi. De toute façon, au Québec, la province d'où je viens, comme vous venez de le dire, monsieur Rutsey, le jeu est extrêmement réglementé par Loto-Québec. Cela fait en sorte qu'il ne reste pas beaucoup de place pour le crime organisé, malgré que les organisations criminelles trouvent quand même le moyen d'être présentes. Je ne suis pas de celles qui croient que d'implanter ce genre de système puisse permettre de régler tous les problèmes liés au crime organisé. Par contre, bien évidemment. je suis d'accord pour dire que cela fait perdre aux organisations criminelles certains de leurs moyens.
    J'aimerais poser une question à laquelle M. Comartin pourra peut-être répondre. Les paris uniques dont vous parliez toucheraient-ils aussi l'UFC, par exemple? On sait qu'il y a d'autres dispositions que celles du Code criminel qui interdisent cela. Je ne pense pas que cela irait aussi loin, mais j'aimerais avoir une confirmation à cet égard.

[Traduction]

    Votre projet de loi couvre-t-il cet élément?

[Français]

    Madame Boivin, cela dépend vraiment de ce qui arrivera dans les provinces. Oui, il est possible qu'on puisse faire des paris sur les combats organisés par l'UFC.
    Ils ne seront pas considérés comme des combats concertés, qui eux sont interdits par le Code criminel?

[Traduction]

    Non. Vous pourrez parier. Si Loto-Québec, dans votre exemple, décidait d’offrir des paris à cet égard, ce serait possible. Chaque province décide ce qu’elle souhaite offrir.

[Français]

    C'est l'autre aspect du projet de loi qui ne me déplaît pas. C'est qu'on rend légal un geste qui était considéré comme criminel en permettant aux provinces de déterminer si elles veulent aller de l'avant avec tout cela. Comme l'a dit M. Harris, dans certaines provinces, le jeu peut être ou non un problème, dépendant de la façon dont elles le gèrent.
    Je viens de Gatineau, une région où il y a un casino magnifique. On a tout de même dû se poser certaines questions de société au sujet du jeu compulsif. Je suis toutefois très fière de voir qu'au Québec, on investit beaucoup dans l'éducation. Par contre, cela ne règle pas tous les problèmes. Loin de moi l'idée de prétendre que cela règle tous les problèmes.
    Je ne me rappelle pas qui de M. Rutsey ou M. Burns a parlé des odds. Vous dites qu'un joueur qui effectue un pari unique profite des meilleurs odds. Je n'ai pas de difficultés à comprendre ce principe, mathématiquement parlant. Pouvez-vous comparer ce type de paris avec les autres? Puisqu'on a la chance d'avoir des insiders, on pourrait se faire une idée de la façon de profiter des meilleurs odds et de ce sur quoi on devrait...

  (1150)  

[Traduction]

    Eh bien, je ne veux pas faire de publicité, mais je peux vous dire qu’actuellement au Canada si vous voulez parier sur des résultats sportifs, vous devez déterminer les gagnants de trois parties. C’est semblable à un billet de loterie. C’est assez difficile. Deviner le résultat d’une partie est... mais il faut en deviner trois...
    C’est compliqué.
    C’est difficile. Les sociétés des loteries engrangent une marge de profit d’environ 40 p. 100 à ce chapitre. Ce n’est donc pas une loterie très payante pour les clients. Voilà pourquoi les paris sportifs légaux au Canada plafonnent à un maigre 450 millions de dollars par année, comparativement aux milliards de dollars qui sont misés dans le cas de manifestations sportives uniques. Est-ce bien cela, Paul? Dans ce dernier cas, environ 95 p. 100 des mises sont retournés aux joueurs, parce qu’ils ont réussi à deviner le gagnant. Si le résultat d’une partie vous intéresse et que vous voulez pimenter le tout en misant quelques dollars, voilà les paris qui vous conviennent.
    Merci.
    Monsieur Jean, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je n’ai que deux ou trois questions. Je suis certain que vos actuaires ou vos prévisionnistes ont évalué le montant que l’industrie en question pourrait rapporter au Canada, en particulier en Ontario. Pourriez-vous nous en parler?
    C’est très difficile. Comme nous l’avons dit, il est question d’environ 10 milliards de dollars. Comme il s’agit d’activités illégales, notre meilleure estimation est d’environ 10 milliards et de 4 milliards additionnels en ligne. La loi évolue, et il est maintenant légal de... ce qui ne veut pas dire pour autant que toute cette industrie se fera au grand jour pour différentes raisons. Une province peut décider de ne pas offrir le produit. Les autorités peuvent décider de n’offrir les services que dans les casinos. Ce sera toujours plus facile pour les gens d’appeler leur preneur aux livres que de se rendre à Niagara Falls.
    Une voix: Un téléphone sonne.
    Une voix: J’ai planifié l’appel pour vous déstabiliser.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Bill Rutsey: Qui sait, il s’agit peut-être d’une personne qui veut déposer une mise.
    L’attrait des produits en ligne actuellement... La croissance dans les paris sportifs se fait en lien avec la technologie et l’accès par Internet.
    J’allais justement vous poser la question. Je ne veux pas vous interrompre, mais je n’ai que cinq minutes et le téléphone qui sonnait en a déjà grugé deux. J’aimerais faire valoir mes points.
    Je crois comprendre qu’entre 80 et 380 milliards de dollars pourraient être générés aux États-Unis, ou on estime des chiffres américains que c’est ce qui est actuellement investi dans le jeu.
    Nos chiffres se fondent sur la National Gaming Impact Study réalisée dans les années 1990. C’est l’évaluation qui en a été faite.
    C’est donc possible que ce soit encore plus élevé maintenant, si dans les années 1990 on parlait de...
    C’est possible.
    En fait, si je peux... Je m’excuse; le téléphone me déconcentre.
    Le montant... Il est question de 80 à 380 milliards de dollars; c’est colossal. Actuellement, cette pratique est toujours illégale dans la majorité des États américains. Nous pourrions donc accueillir ici au Canada un nombre considérable d’investisseurs américains, pour ainsi dire.
    Tout dépend de la façon dont c’est offert, des endroits où ce l’est et de l’accès.
    Vous dites que la marge de profit est faible, mais 5 p. 100... Je prendrais n’importe quel pourcentage de ce 5 p. 100. On parle ici d’une somme considérable.
    C’est fort possible. Nous avons fait des recherches il y a moins de deux ans sur le jeu en ligne au Canada, et c’était avant que la Colombie-Britannique et Loto-Québec offrent de tels produits. Nous avons notamment constaté que 70 p. 100 des Canadiens croyaient que cette pratique était illégale sous la forme qu’ils utilisaient, soit des sites étrangers. Plus de 50 p. 100 pensaient que le tout était réglementé par le gouvernement du Canada. En fait, ce n’était rien de tout cela. Il y avait donc un malaise concernant le produit. Dire que les gens changeront leurs habitudes est intéressant.
    À mon avis, les sociétés des loteries veulent avoir l’occasion d’entrer sur le marché. Je crois qu’elles ont envie de se battre pour ce créneau et ces dollars pour lesquels elles n’ont jamais eu l’occasion de se battre auparavant. Il y a donc un potentiel certain. Je dirais qu’environ 10 p. 100 des produits liés au jeu...

  (1155)  

    Je crois avoir déjà dépassé mon temps et j’aimerais préciser un dernier point.
    En Alberta, la majorité de l’argent provenant des loteries est remis à des organismes sans but lucratif. Est-ce également le cas en Ontario? Comme je l’ai dit, on parle ici d’une somme considérable.
    J’étais criminaliste et je peux vous assurer que, comme M. Harris, j’ai vu de nombreuses familles détruites en raison du jeu. Beaucoup de gens ont été emprisonnés à répétition, peu importe ce qu’ils faisaient. Comment aborderez-vous ce problème? En Alberta, je crois comprendre qu’une partie de l’argent sert à financer des organismes, comme Gamblers Anonymous. Est-ce le cas en Ontario?
    Oh, oui. C’est en fait l’Ontario qui affecte le plus de fonds à l’étude et au traitement des problèmes de jeu pathologique, soit environ 40 millions de dollars. C’est plus que tout autre dans le monde. Nous abordons très sérieusement cet enjeu.
    Cela étant dit, il faut noter un fait intéressant concernant le taux de gens ayant des problèmes de jeu pathologique. Au Canada, aux États-Unis et partout dans le monde, on mesure ce taux depuis 20 ans, et il ne semble pas varier, et ce, peu importe si le jeu est illégal, s’il est légalisé ou si on étend sa légalisation. Les problèmes de jeu pathologique touchent environ 1 p. 100 de la population.
    Comme M. Harris l’a mentionné, nous modifions l’accès. La construction d’un bar près de votre domicile ne vous rendra pas alcoolique, mais si votre voisin l’est déjà, ce nouveau bar lui rendra peut-être la tâche un peu plus facile pour lever le coude. C’est une excellente métaphore. Le jeu pathologique est un problème très grave qui touche une très faible minorité.
    Cependant, 1 p. 100 de la population représente beaucoup de gens.
    M. Joe Comartin: Par contre, cela existe déjà.
    Merci.
    M. Harris a une brève question.
    Permettez-moi de répondre. L’Alberta ne dépense en fait pratiquement rien. Selon une étude de 2010, l’Alberta dépense 1,5 million de dollars en recherche. Toutefois, nous ne disposons pas des données, et cette étude portait sur les dépenses des provinces. Je présume donc que l’Alberta dépense très peu comparativement aux autres provinces.
    Dans l’ensemble du pays, cela se chiffre à plus de 100 millions de dollars par année.
    Les gens peuvent aussi arrêter d'aller sur les sites de jeu, n’est-ce pas?
    Essayons de revenir à la discussion. Je sais que M. Comartin nage en plein délire au sujet de son équipe de hockey, mais nous voulions...
    J’ai une brève question sur les chances de gagner. Vous avez mentionné que 95 p. 100 de l’argent est retourné aux joueurs et que la maison empoche 5 p. 100. Je ne sais pas s’il s’agit d’une règle; c’est sûrement une pratique. Comment cela se compare-t-il à la concurrence, le soi-disant jeu en ligne, le jeu géré par le crime organisé? Ce 95 p. 100 est-il une règle?
    Ce n’est pas une règle; c’est une moyenne de ce qui se passe, lorsque des gens s’intéressent à une manifestation sportive en particulier, comme le Super Bowl ou la partie de hockey du samedi soir. Les gens étudient les équipes; ils ne suivent pas leur coeur. Ils examinent la situation et déposent leur mise. Dans ce contexte, ils visent juste dans 95 p. 100 des cas. Voilà pourquoi les gains sont peu élevés. Dans ce milieu, la marge de profit est faible, mais le nombre de paris est élevé.
    Je crois que les paris sportifs au Nevada représentent 1 p. 100 des revenus. Les gens viennent déposer leur mise et vont inévitablement manger ou boire. Ils regarderont la partie ou iront faire autre chose; certains resteront même pour la nuit. Cette activité génère beaucoup de revenus additionnels. De manière concrète, cette industrie génère du trafic. Ce n’est qu’une autre façon d’attirer les gens.

  (1200)  

    Merci.
    Monsieur Woodworth, veuillez être bref.
    Monsieur Comartin, je comprends que votre projet de loi vise à abroger l’alinéa 207(4)b), mais pas les alinéas a) et c). J’aimerais que vous m’expliquiez comment ce qui distingue l’activité décrite à l’alinéa b) des activités décrites aux alinéas a) et c). Pourquoi l’alinéa b) mérite-t-il d’être abrogé, mais pas les deux autres?
    Je m’excuse, mais nous abrogeons l’alinéa b) du paragraphe (4). Je ne vois pas d’alinéa c).
    Dans le Code criminel 2010 de Martin, il semble y avoir un alinéa c). De toute façon, pourriez-vous me dire ce qui distingue l’activité décrite à l’alinéa b) de l’activité décrite à l’alinéa a)? Ce serait utile.
    J’étais au mauvais endroit de l’article 207. Un instant.
    Monsieur Woodworth, si je comprends bien, et je le fais à brûle-pourpoint, c’est que l’alinéa b) est le seul qui concerne une manifestation sportive.
    C’est justement ma question. Qu’est-ce qui distingue une manifestation sportive d’un jeu de bonneteau, d’une planchette à poinçonner, d’une table à monnaie ou des activités décrites à l’alinéa c)? Pourquoi voulez-vous particulièrement abroger l’alinéa b), mais pas les deux autres?
    Pourquoi est-ce que je tiens à ce que le jeu de bonneteau demeure illégal?
    Je suppose que oui. Pourquoi est-ce différent de...
    Je n'y ai pas réfléchi du tout. Tout cela était simplement...
    Je ne sais même pas ce qui se passerait si ce genre de sport...
    Donc, en principe, vous n'avez aucune raison particulière pour laquelle...
    Non. Je ne me suis pas penché sur cette question.
    Nous savons qu'une manifestation sportive donne lieu à de nombreux paris qui, pour le moment, sont illégaux. J'ignore totalement si le jeu de bonneteau génère bon nombre de paris ou s'il représente un très faible pourcentage de cette activité. Toutefois, nous savons — je parle encore une fois du point de vue des casinos de ma province — que les paris sur les manifestations sportives pourraient améliorer le bien-être économique de la société.
    J'aimerais trouver le temps de caser une autre question très brève.
    Vous avez mentionné, monsieur Comartin, que vous aviez trouvé des études qui indiquaient qu'en légalisant une facette du jeu, on ne contribuait pas à accroître le jeu compulsif en général, et je me demande si vous pourriez me fournir une copie de l'étude la plus convaincante à cet égard. Je n'en ai pas besoin à l'instant, mais ce serait merveilleux si vous pouviez en faire parvenir une copie soit à moi, soit au comité.
    Monsieur Rutsey.
    C'est l'étude que nous avons commandée. Elle a été menée il y a deux ou trois ans par...
    Pouvons-nous la consulter?
    Oui.
    C'est tout ce que je veux.
    D'accord, vous l'aurez.
    Elle se trouve également sur notre site Web.
    Merci.
    Merci.
    J'aimerais remercier les témoins d'avoir accepté de comparaître devant nous.
    Parce que j'estime qu'en ce moment, tous les partis en présence collaborent bien, nous avons convenu de procéder immédiatement à l'étude article par article. Avec un peu de chance, elle se déroulera très bien.
    (L'article 1 est adopté.)
    Le président: Monsieur Goguen.
    Monsieur le président, j'aimerais proposer un amendement au projet de loi. J'en ai informé M. Comartin, de même que M. Harris et Mme Boivin. Je crois qu'ils en ont parlé à leurs collègues.
    Essentiellement, la motion vise à ajouter un article au projet de loi C-290 afin de mettre en vigueur le projet de loi à une date fixée par décret. L'amendement a pour objet de donner à chaque administration le temps de déterminer si elle autorisera les paris sur les manifestations sportives et, dans l'affirmative, comment ils se dérouleront.
    J'ai préparé le libellé de ce que je propose. Il s'agit d'un deuxième article qui stipule ce qui suit en anglais:
        This act comes into force on a day to be fixed by order of the Governor in Council.

  (1205)  

[Français]

    En français, on dit: « Que la présente loi entre en vigueur à la date fixée par décret.

[Traduction]

     Si cela convient, je peux déposer ces documents auprès du greffier.
    Tous ceux qui sont pour l'amendement que vous venez d'entendre?
    (L'amendement est adopté.)
    Le président: Le titre est-il adopté?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Le projet de loi modifié est-il adopté?
    Des voix: D'accord.
    Le président: La présidence peut-elle faire rapport du projet de loi modifié à la Chambre?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Le comité doit-il demander la réimpression du projet de loi pour usage à l'étape du rapport?
    Des voix: D'accord.
    Je tiens à vous remercier tous.
    Merci.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant quelques minutes, le temp que l'autre groupe d'experts arrive.

  (1205)  


  (1210)  

    Nous allons reprendre nos travaux. Nous sommes un peu en retard par rapport à l’heure où nous devions commencer.
    Nous accueillons quelques témoins dans le but de mettre à jour notre étude sur le crime organisé. Nous avons parmi nous Michel Aubin du Service canadien de renseignements criminels et Eric Slinn de la Gendarmerie royale du Canada.
    Si l’un ou l’autre d’entre vous souhaite faire une déclaration préliminaire, nous serons ravis de vous entendre.
    Allez-y.
    Comme vous le savez, je m’appelle Michel Aubin et je suis directeur général du Bureau central du Service canadien de renseignements criminels.
    Le comité m'a invité à la réunion d'aujourd'hui pour faire le point sur quatre questions: premièrement, le nombre de groupes criminels organisés connus au Canada; deuxièmement, le nombre de groupes criminels organisés selon le niveau de menace qu'ils présentent; troisièmement, le genre d'activités criminelles auxquelles se livrent les groupes criminels organisés et les activités prédominantes; quatrièmement, le remplacement ou la mise à niveau du Système automatisé de renseignements sur la criminalité, qui est connu sous le nom de SARC.
    Avant de vous fournir cette information, je trouve important de vous renseigner sur la façon dont le SCRC recueille de l'information et produit ses évaluations des renseignements criminels. Cette mise en contexte vous permettra de mieux apprécier l'intégrité de l'information et, dans une certaine mesure, de comprendre ses limites.
    Le Service canadien de renseignements criminels compte dix bureaux provinciaux qui entretiennent tous des relations de travail étroites avec divers services de police locaux et d’autres membres importants de la collectivité d’application de la loi. Les bureaux provinciaux recueillent et analysent de l’information sur les crimes graves et le crime organisé sur leur territoire, puis ils produisent les rapports provinciaux d’évaluation du renseignement connexes.
    Ces rapports sont notamment utilisés pour promouvoir le modèle des services de police axés sur le renseignement à l’échelle provinciale. De plus, ils sont envoyés au Bureau central pour que nos analystes stratégiques et nos agents du renseignement puissent élaborer un aperçu national de l'orientation stratégique et de l’étendue du crime organisé et des crimes graves au Canada.
    La technologie qui sous-tend tous ces efforts et le principal outil, la plateforme commune, des organismes d’application de la loi pour recueillir et échanger de l’information est le Système automatisé de renseignements sur la criminalité, ou SARC. Ce système permet d'établir des liens entre les différentes informations sur le crime organisé et les crimes graves à l’échelle du Canada et il nous est fondamental compte tenu du caractère interrégional des activités illicites exercées dans nos collectivités. Le SARC fait partie intégrante de notre processus de production de rapports d’évaluation de la menace et il constitue un outil essentiel aux échanges d’informations entre les organismes membres.
    Je vais commencer par vous parler du nombre de groupes criminels organisés connus au Canada. Au cours des cinq dernières années, leur nombre total a oscillé entre environ 700 et 900. Cette variation résulte en grande partie de problèmes liés à l'échange d'informations dans le SARC. De plus, depuis 2005, les organismes d'application de la loi de tout le Canada ont élargi le concept de « crime organisé » pour qu'il englobe, en plus des groupes fortement structurés, les réseaux criminels intégrés et diversifiés sur le plan ethnique qui sont moins structurés.
    Vous m'avez demandé des statistiques sur le nombre de groupes criminels organisés selon le niveau de menace qu'ils présentent. Je vais faire de mon mieux pour vous répondre, mais je dois avant tout assurer l'intégrité des opérations et respecter le règlement touchant les tierces personnes pour l'information recueillie par les organismes membres. Je ne peux pas vous fournir de chiffres précis, mais je peux vous donner des pourcentages et des renseignements importants sur les groupes présentant une menace importante.
    Dans l'ensemble, 3 p. 100 des groupes criminels organisés présentent la plus grande menace nationale. Ces groupes agissent à l'échelle internationale, interprovinciale ou interrégionale et ils occupent une large part du marché criminel dans certains secteurs d'activité du crime organisé. La majorité de ces groupes sont établis dans les trois plaques tournantes de l'activité criminelle au Canada, c'est-à-dire la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec.
    Les 97 p. 100 de groupes qui restent présentent une menace nationale de niveau provincial ou local.
    Tous les groupes, qu'ils agissent à l'échelle nationale, provinciale ou locale, sont une menace considérable pour la sécurité publique. Comme le crime organisé est réseauté et décentralisé, il faut s'y attaquer au moyen d'interventions réseautées et plurilatérales. À l'heure actuelle, le SARC est le dépôt national réservé au centre de cette démarche réseautée.
    Le comité m'a aussi demandé de l'information sur les types d'activités criminelles auxquelles se livrent les groupes criminels organisés et sur les activités prédominantes. Le SCRC a divisé le marché criminel en trois secteurs d'activité: celui des drogues illicites, celui des autres produits et services illicites et celui du crime financier.
    Comme par le passé, le secteur des drogues illicites se classe au premier rang, sa part du marché criminel se chiffrant à 57 p. 100. La cocaïne, le cannabis et les drogues synthétiques comme la kétamine sont les drogues les plus courantes dans ce secteur d'activité. En fait, nous avons constaté une légère augmentation du trafic de la kétamine, des opioïdes pharmaceutiques tel l'oxycodone et de l'héroïne à l'extérieur des plaques tournantes traditionnelles de l'activité criminelle.

  (1215)  

    En 2011, nous avons déterminé que la criminalité financière occupait une part d'environ 11 p. 100 du marché criminel. La fraude par carte de paiement reste de loin la plus importante forme de criminalité financière et elle continue de prendre de l'ampleur. Le secteur des autres produits et services illicites occupe la part restante de 32 p. 100 du marché criminel. Le vol, la contrebande — d'alcool, de tabac — et le commerce du sexe sont, dans l'ordre, les activités les plus importantes de ce secteur du crime organisé.
    Je vais maintenant vous parler du SARC. Le système a été créé en 1976 pour un groupe de 50 utilisateurs à l'échelle nationale. Aujourd'hui, il compte plus de 3 000 utilisateurs qui travaillent dans 1 400 différents bureaux partout au Canada. En plus de problèmes de capacité évidents, le système ne permet pas aux collectivités du renseignement et des opérations de profiter des grandes innovations technologiques actuelles.
    Si le SARC n'est pas remplacé, certains services de police et certaines provinces envisagent d'adopter un autre système dans un environnement local. Le crime dépasse les frontières, alors il est absolument essentiel que les organismes d'application de la loi puissent continuer de s'échanger et de consulter en temps réel de l'information locale et provinciale à partir d'un dépôt national. Il est nécessaire de remplacer le SARC. La façon dont ce besoin peut être satisfait devra être prise en considération par le nouveau cadre de gouvernance des Services de police nationaux.
    En 2012, la réalité du travail policier, c'est qu'il est toujours plus complexe et qu'il change constamment. La valeur de l'information et du renseignement de nos jours vient du fait que les organismes d'application de la loi peuvent les recueillir, les comprendre et les transmettre rapidement.
    Les innovations technologiques et la mondialisation ont permis au crime organisé de se développer au-delà des frontières locales, provinciales et nationales. Les frontières n'arrêtent pas les groupes criminels, qui victimisent les Canadiens sans scrupule. Bien que les groupes criminels organisés continuent de se livrer principalement au trafic de la drogue, beaucoup d'entre eux ont élargi la portée de leurs activités et s'adonnent à plus d'un type d'activité criminelle. Ils sont aussi de plus en plus évolués et de plus en plus diversifiés, comme vous l’avez sûrement entendu dire au cours de votre étude.
    En conclusion, monsieur le président, le SCRC et les organismes qui en sont membres travaillent dur pour échanger de l'information et pour promouvoir l'adoption d'un modèle de services de police intégré et axé sur le renseignement au Canada. Nous avons récemment officialisé nos relations de travail avec nos homologues d'unités opérationnelles. C’est en fait une stratégie nationale. Cette collaboration entre les unités du renseignement et les unités opérationnelles nous met en position favorable pour échanger de l'information et pour réduire l'impact qu'ont les groupes criminels organisés sur nos collectivités. Cependant, il est essentiel que les organismes d'application de la loi aient les outils technologiques nécessaires pour améliorer la sécurité publique.
    Je vous remercie encore une fois de nous avoir invités à venir vous parler aujourd'hui. Nous répondrons à vos questions avec plaisir.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, étant donné que vous avez tous une copie de mon discours, je peux, si vous le désirez, renoncer à le prononcer et commencer immédiatement à répondre à vos questions, si cela vous est plus profitable. Je suis prêt à le faire.
    Allez-y, et prononcez-le. M. Harris ne peut pas le lire à la vitesse où vous le diriez.
    Nous pouvons le lire, mais nous ne pouvons pas vous interroger pendant que nous le lisons.
    D’accord, c’est de bonne guerre.
    Nous entendons habituellement un exposé.
    Dans ce cas, voulez-vous que je lise mon discours?
    Oui, s’il vous plaît.
    Très bien.

[Français]

    Monsieur le président et membres distingués du comité, bonjour. Merci de nous avoir invités à nous adresser à vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Eric Slinn et je suis le directeur de la Sous-direction de la police des drogues et de la Sous-direction du crime organisé. Je suis accompagné de l'inspecteur Greg Bowen, officier responsable du Programme de protection des témoins à la Direction générale de la GRC.

  (1220)  

[Traduction]

    La protection des témoins est reconnue partout dans le monde comme un outil essentiel pour enquêter efficacement sur les membres du crime organisé et les terroristes ainsi que les poursuivre. En effet, il est peu probable que quelqu'un accepte de mettre sa vie en péril en témoignant en cour ou en collaborant avec les organismes chargés de l'application de la loi si aucun mécanisme n'est en place pour assurer sa protection.
    La Loi sur le programme de protection des témoins confère au commissaire de la GRC la responsabilité d'administrer le programme fédéral de protection des témoins. Ce programme a pour objet d'offrir des services de protection des témoins à tous les organismes canadiens chargés de l'application de la loi et, dans certaines circonstances, de conclure des ententes de protection avec des gouvernements étrangers ou des tribunaux pénaux internationaux, avec l'accord du ministre de la Sécurité publique et du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
    Comme le surintendant principal Thomas Bucher l'a indiqué lors de sa comparution devant le présent comité le 13 avril 2010, il est important de souligner que le programme fédéral de protection des témoins n'est pas le seul du genre au Canada. Les provinces de l'Ontario, du Québec, du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan ont toutes leurs propres programmes. Les trois provinces des Prairies ont présentement des programmes établis par la loi. En Ontario et au Québec, il s'agit de programmes régis par des politiques. La plupart des services de police urbains et provinciaux ont un groupe chargé de la protection des témoins.
    Mais le fait d'avoir des programmes indépendants n'empêche pas ces organisations d'avoir recours au programme fédéral. Par exemple, dans un cas particulièrement difficile, on peut solliciter l'aide de la GRC et demander que le témoin soit inscrit au programme fédéral. De telles situations se présentent à l'occasion étant donné que les programmes provinciaux et municipaux répondent généralement aux besoins à court terme des témoins et ne sont pas nécessairement conçus pour ceux qui ont besoin d'une protection à vie ou d'un changement d'identité.

[Français]

    J'aimerais ajouter que le gouvernement fédéral ne dédie aucun fonds à la protection des témoins au Canada et, donc, au Programme fédéral de protection des témoins administré par la GRC. Cette situation apporte des difficultés supplémentaires au programme fédéral et aux petites organisations qui enquêtent sur des crimes graves, mais qui n'ont pas les moyens de payer pour la protection des témoins.
    Présentement, la GRC dépense entre 8 et 9 millions de dollars par année pour la protection des témoins. Cependant, ce montant peut facilement fluctuer selon le nombre et la complexité des cas.
    Les difficultés associées à la prestation d'un service efficace de protection des témoins sont considérables. Les organisations criminelles ont des moyens et des réseaux de plus en plus importants pour retracer et intimider les témoins ou leur causer du tort. Les mesures de protection des témoins doivent donc évoluer continuellement.
    Depuis le 11 septembre, le recours à la biométrie et à la technologie ajoute aux problèmes auxquels les agents de protection des témoins doivent faire face.

[Traduction]

    Le rapport du Comité permanent de la sécurité publique et nationale sur la protection des témoins paru en 2008 et le rapport subséquent de 2010 de la Commission d'enquête relative aux mesures d'investigation prises à la suite de l'attentat à la bombe commis contre le vol 182 d'Air India contenaient une série de recommandations pour améliorer le programme fédéral de protection des témoins.
    Ces recommandations ont toutes été étudiées. En effet, la GRC, de concert avec des représentants du ministère de la Sécurité publique, a lancé un processus de consultation approfondi auprès d'un grand nombre de partenaires et autres intervenants, tant au fédéral qu'au provincial.
    Même si le programme reçoit un bon appui en général, les consultations ont permis de cerner un certain nombre d'éléments qui gagneraient à être améliorés. Ces éléments, parallèlement aux changements déjà envisagés par la GRC, sont au coeur d'un document interne de la GRC qui contient plusieurs recommandations visant à accroître l'efficacité et l'efficience globales du programme fédéral de protection des témoins.
    Nous nous employons actuellement à répondre à deux préoccupations. On envisage de modifier la Loi sur le programme de protection des témoins. Les modifications proposées visent à combler les lacunes identifiées par les partenaires provinciaux, afin que la loi soit plus axée sur les attentes des provinces.
    De plus, la GRC met en oeuvre plusieurs modifications à son programme de façon à améliorer la prestation des services de protection des témoins. Les changements prévus visent à s'assurer que le programme fédéral sera plus axé sur les bénéficiaires, à permettre une amélioration de la sécurité du public, une meilleure reddition de comptes et la présentation d'une autre série de modifications au programme, de sorte que le programme sera de loin supérieur au programme actuel.
    Permettez-moi de prendre un moment pour présenter brièvement quelques-uns des changements que nous apportons au programme fédéral. La GRC met actuellement la dernière main à un modèle d'évaluation et de gestion des risques propres à la protection des témoins. Le modèle s'appliquera à tous les cas où il faudra déterminer l'admissibilité au programme d'une personne ou des personnes à sa charge. Le modèle permettra d'assurer l'uniformisation, dans l'ensemble du pays, des normes relatives aux dossiers d'admissibilité au programme de protection; elles s'appliqueront à tous, avant l'admission au programme.
    De plus, on fera intervenir des psychologues spécialement formés qui joueront un rôle essentiel pour s'assurer que les besoins des personnes protégées sont comblés et que les risques potentiels pour les personnes protégées et la population sont cernés et résolus le plus tôt possible.
    La formation sur la protection des témoins a été grandement améliorée. Elle fait une plus grande place à la définition des besoins sociopsychologiques des personnes protégées et sera assortie d'une formation tactique et de perfectionnement propre à la protection des témoins.

  (1225)  

[Français]

    De plus, le Programme fédéral de protection des témoins bénéficiera de l'utilisation accrue d'une technologie mise au point actuellement et qui aide les coordonnateurs de la protection des témoins à suivre les dossiers de protection, à solutionner les problèmes et à rendre des comptes avec une plus grande exactitude.
    Les changements feront en sorte que le Programme fédéral de protection des témoins demeure un service moderne de premier ordre qui réponde aux besoins de la population canadienne et du système de justice canadien.

[Traduction]

    Ces changements s'inscrivent dans la lignée de ceux dont ont parlé le surintendant principal Thomas Bucher et l'inspecteur Greg Bowen lors de leur dernière comparution devant le comité pour répondre à des questions sur la protection des témoins.
    À ce moment-là, la GRC a accepté de fournir au comité la liste des changements qu'elle prévoit apporter au programme fédéral de protection des témoins. Le document en question a été transmis au ministère de la Sécurité publique et au comité. Les services à la direction devraient être en mesure de le confirmer. Sinon, je pourrai le faire.
    Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer les questions, avec M. Harris.
    Merci. Permettez-moi de commencer par la GRC et le surintendant Slinn.
    Si votre rapport avait été distribué au préalable nous aurions pu avoir l'occasion de le lire. On ne peut pas poser des questions sans l'avoir lu.
    Par rapport à votre dernier commentaire, au sujet du rapport, avez-vous dit qu'un rapport a été préparé et envoyé au comité? Une des raisons pour lesquelles vous êtes ici, c'est que nous voulions avoir ce rapport. Je ne l'ai pas vu, mais nous l'avons peut-être. Vous avez dit que vous préparez un document afin de rendre le programme de protection plus axé sur les personnes protégées. Nous allions vous poser des questions à ce sujet.
    Robin, est-ce que nous l'avons?
    Il semble que le comité ne l'ait pas, pour l'aider à la rédaction de son propre rapport. Nous aimerions en avoir un exemplaire, si vous pouviez nous le faire parvenir.
    Pour ce qui est de la question du financement du programme fédéral de protection des témoins et du nombre de participants, combien y en a-t-il en ce moment à l'échelle fédérale?
    Premièrement, nous avons envoyé un exemplaire à Sécurité publique Canada en août 2010. Je vous présente mes excuses pour le fait que vous ne l'ayez pas reçu. Je suis venu ici en pensant que vous aviez lu le rapport et que les questions s'y rapporteraient. C'est fort malheureux. Nous allons nous assurer de vous en fournir un exemplaire dans les prochains jours.
    Pour ce qui est du nombre de personnes inscrites au programme fédéral de protection des témoins, il y en a actuellement 830.
    Vous avez parlé des recommandations et, bien entendu, je suppose que dans le rapport, que nous n'avons pas vu, certaines d'entre elles sont abordées. Il y a eu neuf recommandations au Comité de la sécurité publique, dont une était qu'un organisme indépendant s'occupe de ces questions au sein du ministère de la Justice de façon à ce qu'il n'y ait aucun lien avec votre corps policier et qu'on puisse mieux coordonner les choses avec les provinces.
    Le rapport en fait-il mention? Quel est votre avis à ce sujet?
    Oui, il en est question dans le rapport.
    Nous attendrons donc de l'avoir.
    Je vais m'adresser à M. Aubin.
    J'ai écouté votre témoignage attentivement, monsieur, et pour être honnête, je l'ai trouvé plutôt vague. Il y avait beaucoup de généralités. En fait, à l'occasion du témoignage précédant devant le comité, on nous a fourni des précisions sur le nombre de groupes qui entrent dans les catégories 1, 2, 3, et 4. Vous venez de parler des 3 p. 100 des groupes qui présentent la plus grande menace nationale, ce qui serait, je suppose, la catégorie 1.
    Est-ce le cas? La catégorie 1 semble être pour ceux qui représentent la plus grande menace et qui agissent à l'échelle internationale; on y compte 16 groupes. La catégorie 2 était pour les groupes qui agissent à l'échelle internationale et interprovinciale, mais il n'y avait aucune indication sur le niveau de menace, et vous avez indiqué qu'elle comprend 300 groupes. La catégorie 3 concerne les groupes qui ont des activités dans une seule province, mais dans plus d'une ville; il y en a 100. La catégorie 4 est réservée, en somme, à ceux qui sont actifs dans une seule région ou une seule ville. Je suppose qu'il s'agit de gangs de rue ou de petits groupes.
    La variation semble plutôt importante d'une année à l'autre, et il a été dit que l'échange de renseignements n'avait rien de certain. C'est un peu dérangeant, pour être honnête. Il y a 10 organismes distincts qui recueillent ces renseignements, et on obtient une variation de l'ordre de 150 sur 900. Cela semble un peu étrange.
    Et d'où vient cette variation? Est-ce dans le nombre de groupes locaux? Je suis certain que les Hells Angels sont toujours sur la liste; les menaces principales y figureraient toujours.
    Y a-t-il une variation de l'activité à l'échelle locale, ou parlons-nous de petits groupes de trafiquants de drogue qui sont arrêtés et jetés en prison, de sorte qu'ils disparaissent? De quoi est-il question?

  (1230)  

    Merci, monsieur Harris. Je vais essayer de faire de mon mieux pour répondre de la façon la plus claire possible.
    Vous avez abordé deux ou trois sujets. Premièrement, si vous le permettez, je voudrais d'abord dire que le processus de collecte de renseignements — c'est-à-dire la façon dont nous arrivons à un chiffre annuel — commence au sein des organismes d'application de la loi, passe par des bureaux provinciaux et aboutit dans un bureau central. Donc, en réalité, il s'agit d'un processus de collecte de renseignements national.
    Ce processus, d'un point de vue théorique, devrait se faire par l'intermédiaire de la base de données du SARC. Il y a beaucoup de problèmes associés à la base de données; en conséquence, ce n'est pas tout le monde qui l'utilise, d'où le fait que les bureaux provinciaux et même le bureau central sont contraints d'utiliser leur propre système de collecte de renseignements pour essayer d'obtenir le chiffre exact.
    C'est ce qu'on appelle la méthodologie d'évaluation intégrée des menaces, qui a été mise en oeuvre en 2003. En fait, je dirais que c'est à compter de 2007 que nous avons la participation des 10 provinces. Il a donc fallu un certain nombre d'années pour y arriver. Depuis 2005, tout le monde au Canada utilise la même définition du crime organisé. Il s'agit de la définition du Code criminel.
    Ce que nous indique la variation — les fluctuations —, c'est qu'en réalité, cela relève de plusieurs facteurs. D'abord, il y a le SARC, mais c'est lié à la capacité des organismes, tant à l'échelle provinciale qu'à l'échelle nationale, de respecter les délais. Si une province tarde à transmettre les renseignements, cela peut avoir une incidence sur le chiffre.
    De plus, à titre d'exemple, la tenue des sommets du G8 et du G20 en Ontario, l'an dernier, a beaucoup nui à la capacité du bureau provincial de l'Ontario de terminer le processus de collecte, de fournir des données complètes ou un portrait d'ensemble de la situation du crime organisé dans la province.
    Au cours de la dernière année, l'Alberta a examiné son processus. Cette année, et même pour 2012, nous prévoyons avoir les données de toutes les provinces.
    Les fluctuations peuvent aussi être attribuables à... Vous avez raison, certains groupes comme les Hells Angels y figurent toujours. Cependant, nous pouvons être informés de l'existence d'autres groupes et ne pas avoir de renseignements à leur sujet pendant deux ou trois ans. Parfois, ce qui se produit, c'est que certains bureaux retirent ces groupes de leur liste, ou ils établiront un plafond quant au nombre d'organisations.
    Pourrais-je vous interrompre et poser une question?
    La définition du crime organisé pose-t-elle problème? Au sens du Code criminel, il faudrait que vous, le surintendant Slinn et moi commettions un acte criminel à plus d'une occasion. Ce serait aux fins d'une poursuite en vertu du Code criminel, mais nous pourrions ne pas être une véritable menace. Nous ne poserions peut-être pas une grave menace, parce que nous ne sommes ni armés, ni violents, mais nous serions tout de même considérés comme une organisation criminelle.
    De quelle façon utilisons-nous l'expression « crime organisé » pour déterminer la menace? Je crois comprendre que nous parlons d'organisations internationales ayant des desseins violents, etc. Cependant, en quoi est-ce utile à l'échelle municipale s'il s'agit de la définition du Code criminel, mais que cela ne porte pas vraiment sur les niveaux de menace? C'est ce qui m'intéresse, tout comme le public, d'ailleurs. Nous voulons connaître la menace plutôt que de chercher à savoir si deux ou trois personnes commettent un crime, dans une sorte de complicité, parce qu'il n'y a peut-être pas une organisation.

  (1235)  

    Une courte définition, je vous prie. Le temps est écoulé depuis très longtemps.
    Je suis tout à fait d'accord.
    La question est de savoir si c'est utile.
    C'est exactement ce que fait la définition que nous voulons utiliser; on s'éloigne des cas comme les trois personnes qui se réunissent et qui commettent une série d'introductions par effraction dans plusieurs chalets puis qui s'enfuient. On parle véritablement d'organisations — trois ou plus — qui se regroupent et qui agissent non pas de manière aléatoire, mais de façon continue. De plus, il faut que ce soit à l'avantage d'une organisation, et non d'une seule personne. Donc, nous l'appliquons avec rigueur.
    En toute franchise, l'avons-nous fait parfaitement? La réponse est: non. Les organismes d'application de la loi apprennent à collaborer de plus en plus. Nous sommes de plus en plus précis.
    En 2012, le fait que les 10 provinces y participent est un bon indicateur.
    Être obligés de s'en remettre à une base de données désuète est aussi une réalité avec laquelle nous devons composer. La base de données ne fonctionne pas avec la technologie actuelle, ni avec les systèmes de gestion des dossiers ou les systèmes de gestion des cas graves. En fait, il faut que les organismes téléchargent les données vers l'amont manuellement. Elle est incompatible avec les versions actuelles de certains logiciels; donc, la version de 2010 d'Adobe doit être en mode dégradé de 2003, si on veut télécharger et lire des documents. Voilà la difficulté avec laquelle nous devons composer actuellement, et nous devons trouver des solutions de rechange pour obtenir un portrait complet de la situation.
    Merci.
    Surintendant Slinn, je crois que le problème que nous avons eu s'est passé pendant une autre législature et un autre comité. Le document a été envoyé au Comité de la sécurité publique, et nous sommes le Comité de la justice. Donc, si vous pouvez nous l'envoyer, nous en serions heureux.
    Monsieur Jean.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être venu aujourd'hui. J'ai eu l'occasion de lire le chapitre 3 du rapport sur le programme de protection des témoins dont vous avez parlé, et j'ai remarqué deux ou trois choses. En particulier, il semble que... Vous avez mentionné que le coût annuel global du programme s'élevait à...?
    Environ sept ou huit millions de dollars.
    Le coût lié aux agents de la GRC doit être inclus dans ce montant, n'est-ce pas?
    Oui; tout est inclus.
    En 2005-2006, le programme en soi coûtait environ deux millions; ce sont les données les plus récentes. On semble indiquer qu'en 1996-1997, il y a eu 152 personnes admises, tandis qu'en 2005-2006, elles étaient 66. Donc, il y a eu une importante diminution sur cette période de 10 ans. En effet, il y a eu quatre cas de fin sollicitée de la protection en 1996-1997, et 21 en 2005-2006.
    Il me semble que beaucoup de personnes ne se prévalent pas du programme. Est-ce une affirmation juste, ou est-ce que c'est la tendance qui se dessine?
    Les statistiques peuvent parfois être trompeuses. Il peut y avoir de nombreuses explications. Ce peut être en raison du niveau de violence des organisations criminelles, il peut y avoir un sentiment de sécurité... que la police n'est peut-être pas en mesure de les protéger aussi bien qu'elle le pourrait. Ensuite, il y a les réseaux que les organisations criminelles utilisent pour retracer les témoins. Les gens sont plus conscients, je pense.
    Je comprends.
    En réalité, ne serait-il pas juste de dire que la plupart des problèmes surviennent en Colombie-Britannique, en ce moment? Est-ce exact? De 1996 à 2007, dans 50 p. 100 des cas, la plupart des plaintes viennent de la Colombie-Britannique.
    Il y en a un certain nombre en Colombie-Britannique, mais il s’agit de personnes protégées provenant d’autres régions du pays.
    Je faisais seulement allusion aux plaintes en ce qui a trait au Programme de protection des témoins.
    Non, je crois qu’il y a des plaintes en Ontario.
    Oui. Mais il y en a eu plus de 50 p. 100 en Colombie-Britannique, la plupart liées aux drogues ou à des personnes impliquées dans le commerce de la drogue et membres du crime organisé.
    Cela me paraît probablement vrai.
    Je joue au hockey, ce qui m’intéresse le plus dans ce sport ce n’est pas de m’entraîner, mais de gagner les parties. Et c’est comme ça que je perçois le crime organisé. Je suis surpris de voir une si faible probabilité de déclarations de condamnation de membres du crime organisé. C'est principalement à cause d’avocats rusés, comme je l’ai été moi-même, je suppose. Les avocats utilisent des stratégies qui ne sont avantageuses pour personne d’autre que leurs clients. Je comprends aussi qu’il faut attendre très longtemps avant que le procès n'ait lieu et qu’il y a en particulier deux éléments: trouver une définition du crime organisé et déterminer si oui ou non la personne en question est membre d’un groupe de crime organisé.
    J’ai eu l’occasion de consulter le rapport et ce qu’il préconise de mieux, à mon avis, c’est la modification de certaines stratégies liées au procès au pénal dans le but d’assurer davantage de condamnations et d’utiliser plus efficacement les ressources pour justement obtenir ces condamnations.
    Cela vous paraît-il juste?

  (1240)  

    Un système plus efficace est toujours bienvenu. Les autorités chargées de l’application des lois, ainsi qu’un certain nombre de procureurs, ont exprimé leur frustration vis-à-vis du système pour ce qui est de mener des enquêtes sur le crime organisé .
    Je suis d’accord et en fait…
    J’invoque le Règlement, je conviens que c’est très intéressant, et pas seulement pour M. Jean, mais nous parlons aujourd'hui du Programme de protection des témoins et nous voulons savoir quels sont les développements touchant ce programme. C’est la raison pour laquelle nous sommes ici et je pense que nous ne devrions pas nous écarter du sujet.
    Je crois que tout cela revient à l’étude, je pense donc que ces propos sont recevables.
    Monsieur Jean, continuez.
    Merci monsieur le président.
    Je comprends ce que M. Harris veut dire, mais je veux que la sécurité règne dans les rues et le crime organisé est l’un des principaux…
    Je ne le conteste pas, mais votre remarque est péjorative et tout à fait injustifiée.
    Nous avons invité les témoins à revenir pour parler du Programme de protection des témoins. La présidence a jugé que vos propos étaient recevables, mais vous n’êtes pas le seul à vouloir des rues plus sûres.
    Merci pour cet éclaircissement monsieur Harris.
    Ce qui m’est apparu clair en lisant le rapport, c’est le temps incroyable — j’ai découvert que ça équivalait aux trois cinquièmes de la durée d’un procès — consacré à définir ce qu’est une organisation criminelle et à déterminer si la personne en fait partie ou non. Le saviez-vous?
    Je vois que M. Aubin opine de la tête pour dire oui.
    M. Aubin a participé à une grande enquête sur le crime organisé au Québec, il sait donc ce qu’il en est.
    Je dirais que l’on consacre beaucoup d’efforts durant l'enquête pour prouver qu’une personne est membre d’une organisation criminelle, qu'elle agit au profit ou sous la direction de cette organisation ou est en association avec elle. Nous devons prouver qui est à la tête de l'organisation et où se situe la personne dans la hiérarchie.
    Cela demande un gros travail d’enquête. Mais je ne pourrais pas vous dire si cela a lieu ou non au procès.
    J’ai une proposition simple à vous faire et je veux être sûr que M. Harris comprend bien que mon intention n'était pas d’être sarcastique en faisant cette observation. Je voulais m’assurer qu’il comprenait ce que je voulais dire.
    Quel avantage y a-t-il, durant le procès, à garder la définition ou à déterminer si une personne appartient ou non à un groupe de crime organisé ou si ce groupe est un groupe de crime organisé? Ne serait-il pas tout aussi bien de faire cela lors de la détermination de la peine?
    Je le dis seulement parce que — vu le nombre de condamnations — si l'on cherche à déterminer, lors de la détermination de la peine, si la personne appartient ou non à un groupe de crime organisé ou si ce groupe est un groupe de crime organisé, cela ne s’appliquerait qu’aux 7 ou 8 p. 100 de personnes déjà condamnées pour acte criminel. Et nous pourrions alors utiliser les ressources du gouvernement et les tribunaux pour avoir davantage de procès. Cela vous paraît-il logique?
    Je ne suis pas sûr que nous, les autorités chargées de l’application des lois, soyons en mesure de répondre à des questions portant sur le déroulement de la procédure. Nous sommes partie intégrante du déroulement, mais c’est aux procureurs de répondre à ces questions.
    Mais vous confirmez bien et êtes d’accord que la majeure partie du travail accompli ne sert à rien en fin de compte puisque l’objectif n’est pas atteint — nous n'incarcérons pas des gens — à cause du déroulement de la procédure.
    Je vais ajouter quelque chose. Nous avons donné un témoignage sur ce point et j’ai aussi témoigné à ce sujet. Le fait est que lorsqu’il est prouvé, au cours d’une procédure judiciaire, qu’une organisation s’adonne à des activités criminelles, le problème pour la police se pose quand il faut qu’elle présente à nouveau toutes les preuves. Il a été prouvé dans un procès que les Hells Angels étaient une organisation criminelle, mais s’ils sont à nouveau poursuivis en justice quelque part ailleurs au Canada, nous devons…
    Exactement.
    … réunir les preuves, les présenter et s’assurer qu’elles sont encore une fois concluantes. Donc la position annoncée, en mai 2009 me semble-t-il, était que nous étions en faveur d’inscrire dans une liste les organisations criminelles dès qu’il est prouvé qu’elles sont bien des organisations criminelles.
    Je suis d’accord.
     Merci beaucoup.
    Monsieur Casey.
    Monsieur le président, cela me rappelle un conseil qui a été donné: il est parfois préférable de ne rien dire et risquer que les autres vous prennent pour un idiot que d’ouvrir la bouche et leur donner raison.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Sean Casey: Je n'ai pas de questions.
    Merci.
    Monsieur Goguen.
    D'accord, j'y vais à mes risques et périls.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Robert Goguen: L’ébauche de ce rapport a été faite il y a quelque temps et l’une de ses recommandations était que le gouvernement modifie son programme provincial actuel de protection des témoins dans le but d’obtenir des pièces d’identité fédérales sans que les personnes protégées par un programme provincial aient à être inscrites au programme.
    La GRC n’est pas connue pour ne rien faire. Préparez-vous un cadre de travail? Pensez-vous qu’il y a des obstacles? Cette mesure est-elle coûteuse? Avez-vous un avis sur cette question?.

  (1245)  

    Je vais laisser à l’inspecteur Bowen, qui est l'officier responsable, le soin de vous répondre. Il est probablement mieux placé que moi pour vous donner des renseignements pertinents.
     La possibilité d’obtenir des documents du fédéral dans le cadre des programmes provinciaux de protection des témoins sans avoir à transférer les témoins des programmes provinciaux au programme fédéral est un problème de longue date. La GRC travaille actuellement en étroite collaboration avec Sécurité publique. Ce ministère et la GRC ont convenu que c’était ce qu’ils devaient faire et nous continuons à chercher la meilleure solution à ce problème dans le cadre du processus législatif.
    Ce ne peut pas être un problème aussi grave. Vous disposez des ressources pour y arriver. Ce ne serait pas coûteux, n'est-ce pas? Évidemment, tout a un prix, mais ce n'est pas...
    Non. Le transfert d'une personne protégée d'un programme provincial au programme fédéral est généralement perçu par les provinces comme un empiètement sur leur capacité d'administrer efficacement leurs programmes; cependant, nous faisons des transferts depuis 1996.
    Deux choses sont rattachées à ce transfert. L'une est que nous reconnaissons qu'il est très important que les provinces aient la possibilité d'obtenir les documents du fédéral afin de promouvoir les intérêts de leurs programmes. Sur une plus grande échelle, ce qui nous importe le plus, bien sûr, c'est que les futurs processus, quels qu'ils soient, alors que nous visons cet objectif, sont mis en place très attentivement pour promouvoir la sécurité des personnes qui nous aident dans la prestation des services dont nous avons besoin.
    Merci monsieur.
    C'est bon.
    Madame Borg.

[Français]

    Je remercie nos témoins d'être présents aujourd'hui parmi nous. Ma première question s'adresse à M. Aubin.
    Dans l'ancienne version de notre rapport qu'on souhaite mettre à jour, on l'a divisé en quatre sections, comme vous l'avez mentionné. Dans une section, on a les groupes qui travaillent au plan international. Auparavant, on avait des statistiques indiquant qu'il y avait 16 organisations. Maintenant, vous dites que c'est 3 p. 100. Pouvez-vous expliquer la différence?
    Selon moi, il me semble qu'il y a une légère augmentation. Est-ce parce qu'on a établi des relations avec de nouveaux pays?
    Si vous me le permettez, le chiffre 16 et la mention du 3 p. 100 veulent sensiblement dire la même chose. C'est le nombre d'organisations qui ont une étendue et une influence au plan international. Je voudrais simplement faire la différence quant à leur incidence, car on n'en parle pas. Si leur influence se situe au niveau local, elles peuvent avoir la même portée au niveau international. La catégorisation se fait alors selon leur degré et leur sphère d'influence. Par exemple, pour l'année 2011, on remarque que 24 groupes sont impliqués dans des activités internationales, ce qui représente environ 4 p. 100, tandis que 262 groupes sont actifs sur le plan interprovincial, ce qui représente environ 40 p. 100.
    En ce qui a trait aux groupes qui oeuvrent au plan international, on voit que d'une année à l'autre cela correspond à environ 3 à 4 p. 100 des organisations criminelles qui sont recensées au Canada. Les organisations qui se trouvent dans la catégorie 4 exercent leur sphère d'influence sur le plan local et représentent environ 20 p. 100. Nous évaluons présentement de quelles façons on catégorise les organisations dans l'évaluation nationale pour possiblement passer de quatre catégories à trois. Une discussion nationale est en cours pour être encore plus précis dans notre recensement.
    Justement, pensez-vous combiner deux catégories? Comment allez-vous procéder?
    Il y a une certaine difficulté en ce moment à différencier les catégories 1 et 2 parce que les deux impliquent des activités au niveau interprovincial voire international. Il faut découvrir à quel point ces organisations dominent un marché ainsi que leur niveau de sophistication. Pour s'assurer de la clarté du processus, cela se fait avec tous les analystes impliqués à l'échelle du Canada. Ces analystes regardent présentement de quelles façons on peut peaufiner cette catégorisation pour mieux informer les corps policiers.

  (1250)  

    Merci.
    Croyez-vous que ces organisations ont des liens avec certains pays en particulier? Nous avons entre les mains les statistiques de 2008. Y a-t-il eu un certain changement depuis?
    Je n'ai pas l'information relativement à la corrélation entre les pays, mais il va de soi que l'on a quand même une correspondance assez significative en ce qui a trait aux drogues en Amérique du Sud et dans les Caraïbes où ces pays sont utilisés comme point de transit pour la cocaïne. On a aussi une certaine corrélation en ce qui a trait à l'héroïne dans les pays du sud-est asiatique.
    Aujourd'hui, avec ce que l'on appelle la

[Traduction]

    « alerte stratégique rapide, »

[Français]

    on porte une attention particulière à ce qui se passe dans le monde, par exemple dans le nord du continent africain. Avec ce qui se passe actuellement, cela crée des opportunités pour le crime organisé. Il en est de même dans certains pays européens avec la question de la stabilisation de l'économie. Y aura-t-il une déstabilisation de l'Union européenne qui créera des opportunités pour le crime organisé établi au Canada et ayant des relations dans ces pays?
    Premièrement, il faut évaluer la situation actuelle ainsi que la corrélation entre les pays. Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas les données entre les mains. On regarde également les événements futurs à l'extérieur du pays. Cela représente-t-il des opportunités pour le crime organisé? On regarde donc ces deux facteurs.
    D'accord. Est-ce qu'il me reste encore du temps?

[Traduction]

    Vous avez une minute et demie.

[Français]

    Je serai brève. Au cours de votre présentation, vous avez dit qu'on avait constaté une légère augmentation du trafic de la kétamine et des opioïdes pharmaceutiques, etc. Dans le rapport de 2008, on dit que le trafic de l'ecstasy et du cristal meth est vraiment préoccupant. Est-ce encore le cas? Est-ce que ce sont toutes des inquiétudes qui se retrouvent sur cette liste? Est-ce seulement parce qu'il y a eu une augmentation?
    Absolument. On constate que ces autres marchés demeurent des marchés relativement stables selon l'information qui nous est rapportée. Dans le cas de la kétamine, on voit qu'il y a une certaine incidence et un accroissement de ce marché auquel participe le crime organisé. Cela fait partie de nos fonctions d'informer les instances opérationnelles relativement aux marchés qui sont en croissance, en déclin ou qui sont stables.
    Merci.

[Traduction]

    Si vous permettez, j'ajouterai, à titre de directeur de la Sous-direction des drogues, qu'en ce qui concerne les tendances, la vogue de l'ecstasy est celle qui nous déconcerte le plus. Beaucoup d'entre vous avez entendu parler des morts qui ont eu lieu ces deux derniers mois en Colombie-Britannique et en Alberta. Une grande quantité de prétendue ecstasy a été vendue, alors que c'était en fait de la méthamphétamine qui a causé d'énormes problèmes chez nos jeunes.
    Merci.
    Il y a deux points sur lesquels je vais essayer d'aider l'analyste qui doit rédiger le rapport. Pour l'un de ces points, vous avez mentionné les groupes. Vous les divisez en combien de groupes maintenant...?
    Il y a eu quatre catégories durant les années précédentes et jusqu'à cette année. Nous envisageons de passer à un modèle de trois catégories.
    Pouvez-vous nous donner les chiffres concernant les quatre catégories et nous dire à quelle année ils correspondent? Est-ce 2010 ou 2011?
    Pouvez-vous nous donner les chiffres?
    Pour 2011, monsieur, il y a 24 groupes dans la catégorie 1 et 262 dans la catégorie 2; 121 dans la catégorie 3 et 210 dans la catégorie 4. Il y a 30 groupes que nous n'avons pas classés pour différentes raisons et nous avons reçu 82 groupes additionnels après la publication des évaluations nationales de la menace.
    D'accord, merci.
    Est-ce la catégorie 4 qui est composée essentiellement de gangs de rue dont le nombre varie?
    Non, elle regroupe principalement les groupes qui ont une influence locale.
    M. Lamontagne peut probablement vous l'expliquer.
    S'agit-il des groupes dont le nombre varie le plus?
    Pour l'heure, je ne dirais pas qu'ils le sont, mais ils sont les plus difficiles à analyser puisqu'ils apparaissent et disparaissent un peu plus souvent des évaluations provinciales de la menace, ce qui a un effet retentissant sur les évaluations nationales de la menace.
    Assez souvent, comme Michel l'a expliqué, nous comptons énormément sur les organismes d'application de la loi, municipaux, provinciaux et autres pour qu'ils fournissent ces renseignements aux bureaux provinciaux qui nous les transmettent par la suite. Il y a souvent une limite concernant le nombre de groupes qu'ils nous signalent et nous supposons qu'il s'agit donc de groupes locaux dont le nombre diminue.
    Mais il y a une forte variation. Il y a eu, cette année, pour les groupes de la catégorie 1 un changement de peut-être 45 p. 100 par rapport à l'an dernier. Il y a beaucoup de changements, pas seulement pour les groupes moins importants, mais aussi pour ceux d'un niveau plus élevé.

  (1255)  

    Pouvez-vous expliquer pour l'analyste ce que le terme catégorie signifie dans ce contexte?
    La première catégorie... celle dont a brièvement parlé Michel. La catégorie 1 et la catégorie 2 sont très similaires. Ce qui distingue la catégorie 1, c'est qu'on analyse tous les groupes de la catégorie 2 afin de déterminer s'ils méritent d'être classés comme présentant un niveau plus élevé de menace.
    Essentiellement, les groupes de la catégorie 1 présentent une grande menace nationale. Ils agissent à l'échelle interprovinciale, interrégionale ou internationale. Ils sont fortement impliqués dans certains commerces, soit un commerce bien déterminé ou même plusieurs. Il y a un très important groupe dans cette catégorie.
    Les groupes de la catégorie 2 agissent aussi à l'échelle internationale, interrégionale ou interprovinciale, seulement ils sont réévalués afin de déterminer s'ils doivent être classés dans la catégorie 1. Ce qui se passe, c'est que tous les groupes de la catégorie 1, faute d'un meilleur terme — et j'essaie de faire de mon mieux pour l'expliquer — sont d'abord classés dans la catégorie 2 jusqu'à ce que les analystes du bureau central et des bureaux provinciaux se réunissent pour évaluer les groupes auxquels il faut accorder la plus grande priorité. Ces groupes passent à la catégorie 1.
    Les groupes de la catégorie 3 sont habituellement ceux confinés à une seule province.
    Les groupes de la catégorie 4 exercent leurs activités dans une seule région. On les compare assez souvent aux gangs de rue; c'est la catégorie qui fait le plus parler d'elle.
    Voilà essentiellement les différences entre les catégories.
    Et il y a — c'est probablement davantage vrai pour la catégorie 4 — une différence entre les groupes ruraux et les groupes urbains ou bien sont-ils en majorité urbains?
    Pour l'instant, nous n'établissons pas de différence entre eux. Mais c'est quelque chose qu'on veut analyser et qui a de plus en plus d'importance. Nous envisageons sérieusement cette année la possibilité de faire quelque chose dans ce sens, mais nous ne faisons pas nécessairement cette distinction dans nos évaluations.
    Cependant, nous avons fait une évaluation cette année de ce que nous appelons l'Appréciation des renseignements criminels, soit une évaluation des secteurs. Nous avons fait aussi une évaluation de ce que nous appelons une alerte stratégique rapide qui consiste à prévoir que certaines zones rurales auront un effet sur le crime organisé en raison d'une expansion ou de divers changements importants dans l'industrie, etc. Le crime organisé tirera profit de ces changements.
    C'est dans cette voie que nous nous sommes engagés, mais nous n'en sommes pas au point où je pourrais dire qu'une analyse concrète est en cours.
    Merci.
    Monsieur Seeback.
    À propos de ce que vous venez de dire, je consultais les chiffres pour 2008. Il y avait 430 groupes dans la catégorie 4 et 200 dans la catégorie 3. Il me semble que vous venez de me dire qu'il y en avait 200 et 200.
    Ai-je mal entendu?
    Désolé. Il y a 121 groupes dans la catégorie 3 cette année et 210 dans la catégorie 4.
    Vous avez raison. La différence est énorme.
    Y a-t-il une raison qui justifie cette énorme différence?
    C'est en partie dû au fait que cette année une province ne nous a pas fourni de renseignements sur les groupes avant la publication des évaluations nationales de la menace et que dans une autre province un nombre élevé de groupes n'ont pas été classés.
    Je répète que de plus en plus, à cause du manque de ressources et de facteurs de ce genre, certains bureaux provinciaux nous signalent un nombre limité de groupes. Ils nous donnent des renseignements sur les groupes qui les intéressent et pas forcément sur tous les groupes qui existent dans ces provinces.
    Et les chiffres s'en ressentent beaucoup.
    Si vous permettez — et je vous remercie d'avoir soulevé ces points — alors que nous allons de l'avant, je dois dire que le processus est de plus en plus sophistiqué. Nous l'améliorons.
    Comme je l'ai dit, en 2012, toutes les provinces participent au processus. Des améliorations ont été également apportées dans d'autres domaines liés à la collecte de renseignements.
    Ces chiffres varieront toujours à l'avenir en raison du changement du nombre de groupes criminels organisés à travers le Canada et d'autres défis, mais le processus d'établissement de rapports et la qualité des rapports ne cessent de s'améliorer.
    Vous avez peut-être déjà donné cette information, mais je n'étais pas ici au cours de la dernière législature lorsque l'étude a débuté, et il y a longtemps que j'ai lu le rapport.
    Vous avez dit que le secteur des drogues illicites représente environ 57 p. 100 du marché criminel. Avez-vous une ventilation de ce chiffre en fonction des diverses catégories: cocaïne, cannabis, drogues synthétiques? Avez-vous une idée de ces chiffres?

  (1300)  

    Je n'ai pas de ventilation sur ce que nous appelons les sous-marchés, le marché étant les drogues illicites. Comme je l'ai dit, la part du marché des drogues illicites est de 57 p. 100. Nous voyons également que 83 p. 100 des groupes criminels organisés sont actifs dans le secteur d'activité des drogues illicites.
    Pour ce qui est des chiffres exacts, je ne les ai pas en ce moment, mais du point de vue des priorités, la cocaïne demeure la drogue illicite prédominante, suivie du cannabis, et des opioïdes pharmaceutiques, comme l'OxyContin.
    Vous avez parlé du SARC, le système automatisé de renseignements sur la criminalité.
    Avez-vous une estimation du coût de remplacement de ce système? Je sais que vous ne pouvez pas aller chez Wal-Mart pour en acheter un; je suppose que vous aurez besoin d'un logiciel conçu sur mesure.
    Oui, nous en avons une.
    Je vais essayer d'être bref. Ce qui est arrivé, c'est qu'en 2006, l'organisme qui assure la gouvernance du SCRC, le Comité exécutif national, a reconnu la nécessité de remplacer le SARC. En fait, un effort national a été entrepris et un dossier d'analyse a été préparé. Nous avons défini un nouveau système qui serait moderne et répondrait aux besoins de tous.
    Une évaluation des coûts a été effectuée à ce moment-là et la somme nécessaire était assez substantielle, autour de 70 millions de dollars. Nous sommes en train de revoir les coûts, et, à la lumière du dossier d'analyse et de l'architecture également, nous nous assurons que le système est conforme aux normes actuelles de l'industrie. Ce travail est en cours en ce moment parce que notre tâche concernant le remplacement du SARC a maintenant été confiée à un nouvel organisme de gouvernance pour les Services nationaux de police.
    Comme je l'ai dit, en 2010, l'évaluation s'élevait aux environs de 70 millions de dollars. Ceci dit, je dois ajouter que la GRC a fait l'acquisition de certains éléments de ce nouveau système et qu'elle est en train d'en faire l'essai.
    Nous sommes en train d'évaluer ces éléments par rapport au système; alors, certaines économies pourraient être réalisées à ce niveau également.
    Excellent. S'il reste du temps, je sais que M. Jean semble avoir une question.
    Merci, monsieur Seeback.
    Très brièvement, j'ai remarqué à partir du rapport de coûts que les agents de la GRC coûtent près de quatre dollars pour chaque dollar que coûte le programme de protection des témoins, est-ce exact?
    Le coût est de 9 millions de dollars, comparativement à une somme d'environ 1,8 million de dollars qui va directement aux témoins. Alors, le coût des agents de la GRC est d'environ quatre dollars pour chaque dollar.
    Oui, les chiffres sont les chiffres. C'est ce que nous avons de mieux.
    Il est clair que la plus grande partie de la rémunération va aux personnes qui assurent la protection. Comme vous pouvez l'imaginer, c'est un travail très laborieux.
    Je comprends que cela puisse être le cas.
    Étant donné que les chiffres ont diminué de manière spectaculaire, pourquoi les coûts n'ont-ils pas diminué de manière proportionnelle?
    Eh bien, cela dépend. Je suppose que je devrais généraliser. Les coûts de protection ont augmenté. Certains des cas qui nous ont été confiés au cours des dernières années étaient d'une envergure considérable et, en conséquence, les coûts de la protection ont augmenté. Si on considère le degré d'attention accordé aux détails, par exemple, je crois qu'aujourd'hui, le programme est beaucoup plus axé sur la personne protégée que c'était le cas au moment de sa création.
    Tous ces éléments ensemble entraînent les coûts que nous avons aujourd'hui. Une bonne partie des coûts liés à la rémunération comprennent également, par exemple, le coût des heures supplémentaires. Nos coordonnateurs doivent voyager sur de longues distances, dans certains cas, pour rencontrer les personnes protégées.
    Quelle proportion du coût des heures supplémentaires serait…
    Désolé, monsieur Jean, mais votre temps est écoulé.
    Je n'ai pas les données précises. Si vous le désirez, je pourrais probablement les obtenir pour vous.
    L'analyste avait une question, cependant.
    Il a entendu le surintendant Slinn dire devant le Sénat hier que le cannabis était le plus important…
    Statistiquement… Permettez-moi de reformuler mon affirmation. Je vois que mes paroles reviennent me hanter.
    Pour le crime organisé, le cannabis est le carburant aviation. Je pense que c'est la terminologie que j'ai utilisée pour le crime organisé. Il existe en quelque sorte une dissuasion faible dans le sens que les sanctions dans le cas du cannabis ne sont pas rigoureuses et que son rendement financier est énorme en raison de la très grande taille du marché aux États-Unis.
    Cette affirmation n'est pas fondée sur une analyse statistique; elle est fondée, d'un point de vue opérationnel, sur ma connaissance du crime organisé, qu'un grand nombre de ces groupes se mêlent de faire la culture du cannabis.
    Juste avant que nous quittions, je veux vous informer que l'analyste peut rédiger un rapport, espérons-le, la semaine prochaine, pendant que nous sommes absents. Nous pourrons l'avoir peu de temps après. Je crois qu'un de nos analystes devra nous quitter pour un certain temps. Plutôt nous pourrons examiner le rapport à notre retour…

  (1305)  

    Monsieur le président, je suppose qu'il y a une lettre qui demeure sans réponse. C'est la lettre envoyée à Don Head, du Service correctionnel du Canada. Je crois comprendre qu'elle a été envoyée quatre fois. Elle remonte aux environs du 15 décembre 2011.
    Quelle est la conséquence pour ce qui est de finaliser ce rapport?
    Une voix: On peut l'assigner à comparaître, je suppose.
    M. Robert Goguen: Il y a cette possibilité, mais cela signifie que…
    Cela signifie que nous ne rédigerons pas ce rapport. Voilà ce que cela signifie vraiment.
    Tout ce qui nous intéresse là, c'est la présence du crime organisé dans les prisons, pour mettre ces chiffres à jour. Je ne suis pas certain si c'est important.
    Je ne suis tout de même pas impressionnée de savoir que quelqu'un ne répond pas à notre lettre. Honnêtement, c'est un choc pour moi d'entendre cela, venant de quelqu'un de cette importance.
    Je pense la même chose. Je suis prêt à attendre, mais combien de temps encore? Ou est-ce que nous allons de l'avant et renonçons à l'information?
    Il y a une façon provisoire de le faire et nous pourrions adopter une motion indiquant que si nous restons sans nouvelles de lui à une date déterminée, nous allons demander qu'il soit assigné à comparaître.
    Je ne veux pas dire que…
    Mon problème ici, c'est que voulez-vous faire au sujet…
    Y a-t-il une manière plus douce de le faire? Je suis d'accord avec mon collègue pour dire que nous demandons de l'information et que la collaboration de ces gens avec les comités parlementaires devrait aller de soi.
    Je propose que si nous ne recevons pas de lettre de Don Head, commissaire du Service correctionnel du Canada, d'ici notre retour dans 10 jours, nous envisagions les mesures qui pourraient être nécessaires pour le faire comparaître devant nous.
    Je suppose que ma seule question, c'est de savoir à quel point cette information est indispensable.
    À titre de président, je dis que quelqu'un doit se faire une idée, parce que c'est cela ou bien nous ne rédigerons pas ce rapport.
    Une voix: C'est une motion.
    C'est cela ou nous indiquons dans le rapport que nous n'avons pu mettre à jour les données parce qu'il était… Je ne l'écrirais pas de cette façon, mais vous comprenez ce que je veux dire. Malheureusement, nous l'avons invité de façon répétée et il n'a tout simplement pas… Si c'est là le moyen choisi, je maintiens que nous devrions le forcer à venir témoigner.
    Un instant. Il faut passer par l'intermédiaire du président.
    Une motion a été présentée.
    Concernant la motion, je suis simplement hésitant à le convoquer si rien d'important ne découle de cela. C'est la seule chose.
    Je n'ai pas de boule de cristal. Je suis presque tenté de…
    La motion est appuyée.
    Y a-t-il une discussion?
    (La motion est adoptée [voir le Procès-verbal] )
    Le président: Monsieur Aubin, vous aviez une observation.
    Monsieur le président, j'avais une précision à apporter à mon témoignage.
    En ce qui concerne les sous-marchés liés aux drogues illicites, le troisième est constitué, en fait, des drogues synthétiques. J'ai parlé des opioïdes pharmaceutiques, mais il s'agit des drogues synthétiques.
    Merci beaucoup.
    Je remercie le groupe de témoins de sa présence ici.
    La séance est levée.
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