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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 127 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 23 octobre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration tient sa 127e réunion. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous examinons les enjeux et possibilités liés à l'immigration au XXIe siècle.
    Nous remercions tous les témoins d'être avec nous. Il est très tard actuellement à Kampala. Nous sommes très heureux que vous puissiez vous joindre à nous. Nous disposons d'environ 50 minutes pour la première partie de la réunion. Les membres du Comité entendront les témoins nous parler de leurs histoires et de leurs préoccupations ou de leurs idées. Nous entamons une étude sur les gens en déplacement, parce qu'ils ont été forcés de quitter leur maison ou parce qu'ils ont choisi de le faire.
    Nous allons demander à l'Angels Refugee Support Group Association de commencer. Vous disposez de 7 à 10 minutes pour faire votre exposé.

[Français]

    Je m'appelle Bibe Kalalu et je suis président de l'Angels Refugee Support Group Association, une organisation qui a été créée en Ouganda en 2009 en raison de la discrimination et de la persécution exercées à l'égard non seulement des ressortissants LGBT en Ouganda, mais aussi des personnes LGBT des pays des Grands Lacs d'Afrique et de l'Est de l'Afrique.
    Je suis un réfugié congolais faisant partie de la communauté LGBT qui vit en Ouganda.
    J'aimerais vous dire pourquoi les réfugiés LGBT en Ouganda souffrent beaucoup en raison de leur identité de genre et des problèmes que cela occasionne.
    Tout d'abord, l'Ouganda est un pays extrêmement homophobe, où les personnes LGBT vivent constamment sous tension et où elles font l'objet de poursuites.
    Au cours des sept prochaines minutes, je vais aborder quatre points.
    Premièrement, il s'exerce beaucoup de discrimination à l'endroit des LGBT dans le secteur de la santé. En Ouganda, les soins de santé donnés aux LGBT sont très médiocres et aucun hôpital n'accepte de soigner des réfugiés LGBT.
    Deuxièmement, pour des raisons de sécurité, la communauté des réfugiés en Ouganda ne travaille pas ou ne collabore pas avec les réfugiés LGBT.
    Troisièmement, les personnes LGBT ne trouvent pas de travail et ne reçoivent aucune assistance.
    Quatrièmement, l'Ouganda refuse de conférer le statut de réfugié aux réfugiés LGBT vivant dans ce pays et rejette leurs demandes d'asile.Cela nous affecte vraiment beaucoup.
    Je vais maintenant donner la parole à mon collègue et je reprendrai ma présentation après.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Je ne sais pas si c'est à mon tour de parler. Je devrai sans doute attendre.
    Allez-y. Vous pouvez partager le temps à votre guise. Vous pouvez parler tous les deux ou procéder comme bon vous semble.
    Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée, ainsi qu'à la Rainbow Heritage Initiative, une organisation qui s'occupe des réfugiés et des demandeurs d'asile LGBTI ici en Ouganda, de prendre la parole aujourd'hui.
    Pour des raisons de sécurité, je préfère qu'on m'appelle Témoin 1 dans cette salle de conférence. Je vais vous faire part des obstacles auxquels se heurtent les réfugiés et les demandeurs d'asile LGBTI comme nous ici en Ouganda.
    Premièrement, je vais vous parler des demandes d'asile basées sur l'identité de genre ou l'orientation sexuelle. Il est essentiel de pouvoir présenter une demande d'asile basée sur l'identité de genre ou l'orientation sexuelle, mais il est difficile de le faire pour les réfugiés et les demandeurs d'asile LGBTI parce qu'ils risquent d'être arrêtés sur-le-champ en le faisant.
    À l'heure actuelle, nous avons six membres du Burundi et du Rwanda dans notre organisation qui n'ont pas de documents d'asile ou de statut de réfugié. Nous avons parlé du problème au Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et au bureau du premier ministre, mais nous attendons en vain. Nous éprouvons un sentiment de faiblesse et de frustration. Nous craignons de ne pouvoir rien faire pour nos membres si nous n'élevons pas la voix.
    C'est un grave problème pour nous, car si nos membres se tournent vers la police pour demander l'asile en raison de leur identité de genre ou de leur orientation sexuelle, ils risquent d'être arrêtés sur-le-champ. Nous avons des exemples concrets de membres qui ont été libérés après avoir été détenus. Ils sont retournés dans leur pays natal, et nous ne savons pas s'ils sont toujours vivants.
    Deuxièmement, j'aimerais vous parler de mon expérience personnelle de réfugié LGBTI en Ouganda et d'homme transgenre venu du Rwanda. J'ai quitté mon pays natal en 2010 après avoir été détenu et torturé parce que je suis une personne LGBTI. J'ai été quatre ans sans avoir un document valide, et pendant cette période, je n'avais pas de… je n'ai pas pu obtenir de papier d'identité comme réfugié. J'ai ensuite été agressé physiquement et sexuellement plusieurs fois par un voisin. Bien sûr, il m'a été impossible de rapporter ces agressions, parce que je n'avais pas de papier et que je risquais d'être arrêté.
    Je n'ai donc pas pu obtenir d'aide, et j'ai attendu plus de quatre ans avant d'être réinstallé. C'est une vie triste, misérable et pénible.
    Troisièmement, j'aimerais vous parler de la réinstallation. En Ouganda, il existe trois solutions durables: le rapatriement volontaire, l'intégration locale ou la réinstallation. Le rapatriement volontaire comporte des risques, car nos membres ont fui la violence, la persécution et la discrimination, et ils risquent d'être tués en retournant dans leur pays.
    La deuxième solution est l'intégration locale, ce qui est totalement impossible ici en Ouganda en raison du haut degré d'homophobie qu'on trouve partout au pays.
    La troisième solution, qui demeure la seule véritable solution durable pour sauver les réfugiés LGBTI, est la réinstallation.

  (1540)  

    Le gouvernement de l'Ouganda et la police sont contre l'homosexualité. Si les membres d'une organisation humanitaire tentent de les aider, le gouvernement les réduit au silence, car il considère qu'ils font la promotion de l'homosexualité.
    Je vais passer rapidement à mon dernier point, soit les recommandations.
    Nous demandons, premièrement, au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration du Canada d'avoir des discussions avec les autorités gouvernementales de l'Ouganda et d'insister pour qu'elles changent leurs pratiques actuelles, car si on réduit l'aide internationale, les autorités se vengent sur nous et deviennent très homophobiques, en prétendant ainsi défendre les valeurs africaines.
    Nous demandons, deuxièmement, au comité permanent d'exercer des pressions sur les pays ayant des missionnaires qui se rendent en Afrique, des chefs religieux comme Scott Lively, par exemple, pour promouvoir la haine. Même lorsqu'ils se trouvent dans d'autres pays, ces gens doivent obéir aux lois des États-Unis. Nous demandons donc au Canada d'entamer le dialogue avec les États-Unis pour trouver des solutions à ce problème.
    Nous demandons, troisièmement, au comité permanent d'engager à nouveau le dialogue avec le bureau du premier ministre pour demander que les réfugiés LGBTI se voient accorder le statut de réfugié. Ils doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits et libertés aux termes de la loi de 2006 que les autres groupes.
    Enfin, nous demandons au comité permanent de demander à divers pays d'ouvrir leurs frontières aux réfugiés LGBTI qui vivent en Ouganda, parce que nos vies sont en danger. Nous tenons à dire au Canada et au Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés que nous ne sommes pas en sécurité et que le fait de passer plus de deux ans — et certains d'entre nous ont déjà passés 10 ans et plus ici — est une forme de torture et que c'est risqué pour nous. On quitte l'Ouganda après avoir été harcelé, arrêté à maintes reprises, et certains y laissent leur peau. Ils quittent lorsque leur vie est déjà chamboulée.
    Merci beaucoup de nous avoir écoutés.

  (1545)  

    Merci à vous deux.

[Français]

    Merci de vos présentations et de nous avoir raconté votre histoire.

[Traduction]

     M. Sarai sera le premier intervenant.
    Je vous remercie d'avoir le courage de venir nous parler. Témoin 1, je vous félicite, ainsi que votre collègue, de porter la situation à notre attention.
    Comme vous le savez, nous menons une étude sur la migration et les mouvements migratoires. Nous sommes bien au courant de vos difficultés. Certains de nos membres se sont rendus en Afrique et ont pu constater de visu en quoi consiste la vie dans les camps et les difficultés auxquelles vous devez faire face.
    Je vais poser mes questions en commençant par la fin.
    J'aimerais avoir des précisions au sujet d'une recommandation. Vous avez dit que vous vouliez que le Canada exerce des pressions sur les États-Unis et d'autres pays, ou plutôt que les États-Unis avaient des lois concernant les missionnaires et ce qu'ils prêchent.
    Pourriez-vous clarifier ce point pour que je comprenne bien en quoi consiste votre demande?

[Français]

    Je parlais de l'exemple palpable entourant la venue de M. Scott Lively en Ouganda, en 2009. C'est après son départ que des lois ont été adoptées visant à condamner l'homosexualité. Les personnes LGBT ont alors commencé à avoir beaucoup de problèmes.
    Nous avons alors demandé au Canada qu'il s'entretienne avec les États-Unis pour que celui-ci prenne des mesures susceptibles de faire cesser les propos homophobes qui engendrent de la haine. C'est de cela que je parlais.
    J'espère avoir été plus clair.

[Traduction]

    Je comprends mieux maintenant. C'est ce que je voulais clarifier.
    Ma deuxième question porte sur votre quatrième recommandation qui demande au Canada et à d'autres pays amis de convaincre l'Ouganda d'être plus tolérant et de cesser son homophobie. Connaissez-vous des pays africains qui se montrent plus accueillants pour les membres de la communauté LGBTQ? Vous nous aiderez ainsi à bâtir des alliances.
    Quels autres pays sur le continent africain sont tolérants?

[Français]

    Mon collègue va vous répondre, mais je vais peut-être vouloir apporter des précisions par la suite.
    Aucun des pays d'Afrique n'encourage l'homosexualité. C'est faux et archi-faux de dire que certains pays sont tolérants. Dans tous les pays d'Afrique, on enseigne que l'homosexualité est une question taboue. Quand on utilise le mot « tabou », cela signifie qu'une chose est impure. On observe cette attitude partout en Afrique: un homosexuel n'est jamais considéré comme une personne morale et physique. Tous les LGBT qui quittent leur pays sont exposés à de la discrimination, et cela commence au sein de leur famille. Cela se manifeste ensuite au gouvernement, puis dans la population.
    Ce que nous recommandons aux grandes puissances, comme le Canada et les États-Unis, c'est de définir ce qu'est une personne LGBT et de protéger notre communauté. Il faut continuellement parler de la question des personnes LGBT aux gouvernements africains. Ce sont eux qui encouragent la population à rejeter les personnes LGBT. Les institutions, comme les gouvernements et les églises, disent que tous les homosexuels sont soumis au tabou. On peut se poser la question: qu'est-ce qu'un tabou?
    Un homosexuel, comme tout être humain, est la création de Dieu. Ce n'est pas l'individu qui choisit d'être homosexuel. Pourtant, il est l'objet d'un tabou. Même si on demande à 1 000 docteurs, à 1 000 pasteurs et à 1 000 chefs d'État de changer l'identité de genre de quelqu'un, cela ne peut pas se faire. C'est impossible.
    Il faut que les grandes puissances, comme le Canada, qui se rendent en Afrique profitent de cette visite pour éduquer convenablement les gouvernements de l'Afrique en ce qui concerne la communauté LGBT. Il faut expliquer qui nous sommes et ce que nous sommes.

  (1550)  

[Traduction]

    Aimeriez-vous ajouter quelque chose? Soyez bref, s'il vous plaît, car il me reste quelques questions.

[Français]

    Oui.
    Je voulais ajouter que nous présentons nos doléances au Canada parce que ce pays manifeste de la pitié pour nous.
    Pour en revenir à votre question, des pays Scandinaves, dont la Suède, la Norvège, le Danemark et la Hollande, montrent qu'ils ont du coeur. Ce n'est pas une question d'amitié, il s'agit d'une impulsion venant du coeur.
    Pour le moment, nous voyons que l'Ouganda exagère quant à la question des personnes LGBT.

[Traduction]

    Vous avez dit que la communauté des réfugiés ne travaille pas avec la communauté des LGBTQ. Pouvez-vous nous en dire davantage? Est-ce que ce sont les représentants du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés qui ne veulent pas travailler avec vous ? Est-ce les représentants du gouvernement ougandais, ou est-ce les deux?

[Français]

    C'est tout à fait normal: c'est le gouvernement qui est à la tête du pays et qui prend les décisions.
    Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, ou HCR, veut aider les personnes LGBT, mais il ne peut pas aider celles dont la demande d'asile a été rejetée par le gouvernement ougandais. Une personne qui se présente comme étant transgenre, lesbienne ou gaie, voit sa demande d'asile automatiquement rejetée parce que son appartenance à cette communauté est connue de la police. Elle n'a pas droit à l'assistance du gouvernement.
    L'autorité du HCR se trouve en dessous de celle du gouvernement ougandais, et c'est ce dernier qui a le dernier mot dans les affaires mettant en cause des personnes LGBT. Il influence les églises et la population. Il influence tout.
    Les réfugiés LGBT et les personnes LGBT ougandaises doivent avoir accès aux services de santé et au marché du travail dans le pays.
    Ce sont les grands défis que nous devons affronter et ils viennent des gouvernements, et ces défis touchent aussi les organisations. C'est cela le problème.

[Traduction]

     Merci.
    Nous passons maintenant à M. Tilson.
    Merci. J'ai une question, et Mme Rempel prendra le relais.
    J'ai un électeur dans ma circonscription qui vient du Nigeria et qui est gai. Il était marié, et son ex-femme et sa famille ont menacé de le tuer s'il retournait au Nigeria. Il s'agit du Nigeria, il est vrai, pas de l'Ouganda, mais le gouvernement du Nigeria a des lois similaires à celles de l'Ouganda.
    J'aimerais l'aider, car il risque d'être déporté au Nigeria dès la semaine prochaine, et nous essayons d'empêcher que cela se produise. Que se passe-t-il en Ouganda lorsque les autorités ou le gouvernement découvrent qu'une personne est gaie? Qu'arrivera-t-il à cette personne, et quelles sont les sanctions?

  (1555)  

    À l'heure actuelle, si on vous trouve en pleine action, c'est la mort qui vous attend. On peut mousser les allégations, et nous en sommes toujours les victimes, car même si nous déménageons, on trouve toutes sortes de raisons pour nous causer des problèmes, et cela va même jusqu'à la façon de mettre nos vêtements. Je suis vraiment désolé pour lui, mais il risque d'être tué.
    Par le gouvernement...?
    Oui, par le gouvernement, une foule qui décide de faire justice, ou la police. Il peut s'agir de n'importe qui, car c'est une question qui mobilise la population, la police et tous les gens du pays.
    Madame Rempel.
    Vous avez parlé des dangers et des menaces pour les membres de la communauté LGBTQI qui font une demande de statut de réfugié. Pouvez-vous nous expliquer les menaces ou les dangers potentiels qui les attendent aux différentes étapes du processus lorsqu'ils présentent une demande de statut de réfugié auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés en Ouganda?

[Français]

    Pour demander le statut de réfugié, une personne doit s'adresser d'abord aux policiers chargés de recevoir les réfugiés. On parle ici de policiers du service de renseignement. Lorsqu'elle se présente, la personne est soumise à un examen, et si on découvre son identité de genre, sa demande est automatiquement rejetée, sans préavis, sans assistance et sans négociation. La majorité des personnes LGBT qui vivent en Ouganda n'ont pas le statut de réfugié. Nous nous sommes demandé alors comment nous pourrions l'obtenir. Certaines ont eu de la chance et l'ont obtenu, mais ce n'est pas le cas de la majorité. C'est à l'étape de l'entrevue avec les policiers du service de renseignement que les demandes de statut de réfugié sont carrément rejetées.
     Les responsables du HCR disent dépendre de la loi ougandaise et ils nous incitent à nous adresser à la police. Or la police et le premier ministre de l'Ouganda ne veulent pas octroyer l'asile aux personnes LGBT, même si ces dernières se trouvent plongées dans un gouffre très profond. Une personne LGBT qui quitte son pays ne peut pas obtenir ce statut. Il est donc vraiment difficile de l'obtenir du fait de notre orientation en tant que personne LGBT.
     J'aimerais ajouter quelque chose, si vous me le permettez.
    Pour ce qui est des étapes du processus, il faut d'abord se présenter au service de police, puis au bureau du premier ministre, où il faut encore rencontrer des policiers. Une personne qui reçoit finalement le statut de réfugié n'est plus considérée comme un demandeur d'asile. C'est à partir de ce moment que l'on peut normalement s'adresser au HCR.
    Cependant, j'ai déjà dit que certaines personnes du Rwanda et du Burundi étaient victimes de la politique relative au pays d'origine. Par exemple, le Rwanda est un pays que l'on qualifie de politiquement stable, et le conflit du Burundi n'est pas vraiment reconnu par les autres pays. Quand ces personnes arrivent en Ouganda, elles continuent à y être victimes d'homophobie. C'est pour cette raison que beaucoup de personnes n'obtiennent pas le statut de réfugié ni les documents remis aux demandeurs d'asile.
    Merci beaucoup.

  (1600)  

[Traduction]

    Il me reste peu de temps. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés affirme pourtant avoir un processus de plaintes en place pour les cas de discrimination.
    Compte tenu de votre expérience, avez-vous confiance en ce processus?

[Français]

    Pour ce qui est du processus de demande d'asile, j'aimerais mentionner trois choses. Même si votre demande de statut de réfugié est rejetée après l'étude de votre dossier parce que vous êtes une personne LGBT, le HCR peut quand même plaider votre cause et vous aider à trouver un pays tiers si vous avez reçu le titre de demandeur d'asile, même si vous n'avez pas obtenu le statut de réfugié.
    En revanche, le HCR ne peut pas plaider votre cause auprès de la police ou du bureau du premier ministre pour que l'on vous accorde le titre de demandeur d'asile ou le statut de réfugié. Nous avons déjà négocié avec le HCR à ce sujet. Nous avons plusieurs témoins, comme ces neuf réfugiés LGBT qui ont quitté le Kenya, le Burundi et le Rwanda, qui ont connu beaucoup de problèmes ces derniers temps. Il y a six ou sept mois, certains ont été arrêtés, d'autres tabassés et harcelés, et leurs droits ont été bafoués. La situation était catastrophique. Nous avons plaidé leur cause auprès du HCR, lequel a essayé de négocier avec le bureau du premier ministre, mais sans succès jusqu'à maintenant.
    Je voudrais ajouter qu'il y a eu des réunions bilatérales entre le bureau du premier ministre et le HCR. L'organisme Interaid a également fait partie de ces réunions en tant que partenaire de mise en oeuvre, mais cela n'a pas eu de résultat tangible. Le HCR affiche avec courage sa volonté d'aider les personnes LGBT. Cependant, à cause de la pression actuelle exercée par le gouvernement, la présidente du Parlement, Mme Kadaga refuse toujours tout débat sur les personnes LGBT. Cela nous blesse, et nos coeurs saignent.
    Merci.

[Traduction]

    Madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais souligner que mon collègue Randall Garrison, qui est porte-parole du NPD dans ce dossier depuis de nombreuses années et un ardent défenseur de la cause, assiste aujourd'hui à la réunion en tant qu'observateur.
    J'aimerais remercier nos témoins de leur courage et des efforts que vous déployez sans relâche en Ouganda.
    Je comprends mieux aujourd'hui les difficultés auxquelles vous vous heurtez. Le 17 octobre, lors de la 139e  Assemblée de l'Union interparlementaire, une motion a été déposée dans le but de reconnaître les droits des membres de la communauté LGBTQI. La motion a soulevé l'hostilité, et le mot est sans doute faible, du représentant de l'Ouganda. Je vais citer ses propos pour le compte rendu. Il a dit: « Nous allons continuer de nous opposer à toute discussion sur la scène internationale des LGBT jusqu'à ce que les gens ici se rendent compte que les relations homosexuelles sont inhumaines et anti-culturelles. » Je cite ici les paroles du représentant Francis à la rencontre.
    Je pense que cela nous donne une bonne idée de l'hostilité, des difficultés et des risques auxquels doit faire face la communauté dans ce pays.
    Pour revenir à ce que le Canada peut faire pour défendre vos droits sur la scène internationale, je pense qu'il est assez juste de dire que tous les membres du Comité vont défendre vos droits et souhaitent que notre pays et notre gouvernement le fassent également.
    Pour ce qui est des mesures précises à prendre, avez-vous des idées? Vous avez parlé d'un dialogue avec les États-Unis. Le dialogue est un peu difficile avec les États-Unis, et je ne vais pas m'étendre sur la question. Y a-t-il des mesures précises que nous pouvons prendre, comme participer à une rencontre, ou adopter une motion à la Chambre des communes, ou toute autre mesure du genre, qui vous aideraient et vous appuieraient dans vos efforts?

  (1605)  

[Français]

    Merci beaucoup, madame Kwan.
    C'est vraiment difficile pour nous, parce que nous sommes doublement victimes. L'Ouganda est un pays très conservateur qui est vraiment axé sur la culture. Je ne sais pas comment l'expliquer. Peut-être Mme Kadaga nous cause-t-elle du tort pour s'attirer les suffrages, sinon pour pouvoir faire tout ce qu'elle veut ou peut faire. Cela nous blesse doublement parce que nous avons dû quitter notre pays natal pour nous retrouver ici. Les Nations unies demandent toujours que nous soyons traités comme des êtres humains, mais elle refuse, ce qui a des répercussions au Parlement, dans la population et dans les services de police.
    Cela nous affecte beaucoup. Quelqu'un a demandé si cela avait aussi des incidences pour le HCR. C'est le cas, et cela influence le travail de ses représentants. Ce serait bien si, de grâce, vous pouviez négocier, avec qui que ce soit, pour faire en sorte que cela cesse.
     Je vais aussi commenter sur cela.
    Vous vous souvenez peut-être que nous travaillions auparavant avec le Refugee Project. Cet organisme défendait les cas des personnes LGBT en Ouganda, mais cette protection a conduit à la fermeture des bureaux d'aide aux réfugiés pendant toute une année. Cela a choqué, et le Refugee Project a connu beaucoup de problèmes. Le Refugee Project a essayé de faire davantage pour les personnes LGBT vivant en Ouganda. Auparavant, nous travaillions beaucoup et sérieusement avec cet organisme, mais c'est difficile à l'heure actuelle.
     Le Refugee Project déploie notamment des efforts en matière de santé et de protection. Auparavant, si une personne était arrêtée, l'organisme pouvait envoyer un avocat pour l'aider. Le Refugee Project ne peut actuellement pas fournir les services d'un avocat à une personne arrêtée de façon arbitraire. Nous souffrons de maladies transmissibles sexuellement, comme le VIH, et d'autres problèmes de santé. Or, si une personne LGBT se présente dans un hôpital, quel qu'il soit, et qu'elle reconnaît être une personne LGBT, elle se fait chasser. On nous chasse partout. Nous travaillions beaucoup avec le Refugee Project, avec qui nous collaborions dans 80 % des cas. Cette collaboration se limite à seulement 3 % des cas auxquels nous travaillons maintenant.
    Nous commençons à souffrir sur le plan de la sécurité et sur celui de la santé.

[Traduction]

     Je vais poser une dernière question, avant de manquer de temps.
    Lorsque le Comité s'est rendu en Ouganda, j'ai demandé à un représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés si l'Ouganda était un pays sûr pour les membres de la communauté LGBTQI, et il m'a répondu, et c'est un des problèmes, que c'était le cas lorsqu'ils n'affichaient pas leur homosexualité.
    Compte tenu de la réponse, je ne sais pas trop… de toute manière, je ne vais pas discuter de ce commentaire.
    Au sujet de la réinstallation, comment pouvez-vous, dans les circonstances, faire une demande auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés? Vous avez parlé des difficultés à cet égard.
    Recommanderiez-vous que le Canada mette en place une initiative spéciale afin d'accorder la priorité aux gens qui sont persécutés dans leur pays ou déplacés à l'intérieur de leur pays, comme la communauté des LGBTQI, pour en faire un volet particulier de la réinstallation au Canada, afin que nous puissions nous en occuper d'une façon différente auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et, espérons-le, venir en aide aux gens qui s'y trouvent?

  (1610)  

[Français]

     Merci beaucoup.
    C'est exact. C'est surtout cela que nous voulons. Le 12 juillet, nous avons tenu une réunion avec des gens de Protection Desk Uganda. Je demande depuis longtemps que les personnes LGBT soient traitées comme des gens ayant des besoins spécifiques. Pourquoi? Parce que les personnes LGBT sont rejetées partout dans le monde et qu'elles sont obligées de s'enfermer dans leur maison pour ne pas se faire agresser et ne pas se heurter à des problèmes à l'extérieur.
    Comment peut-on cacher son homosexualité? Les personnes LGBT doivent vivre leur vie. Elles doivent parler aux voisins, se rendre au marché ou à l'hôpital. C'est totalement impossible. Je pense que vous pouvez négocier avec des responsables pour qu'ils accordent la priorité aux personnes LGBT, parce qu'elles ne sont vraiment pas traitées comme les autres. J'ai parlé de la Loi sur les réfugiés adoptée en 2006. Il faut tenir compte de nos besoins liés à l'emploi, à la liberté, aux droits fondamentaux. Nous n'avons jamais connu cela en tant que personnes réfugiées LGBT. Les membres de la communauté LGBT veulent être traités comme tout le monde.
    Je vais ajouter un commentaire et revenir à la question que vous avez posée à un agent du HCR. Si une personne cache son identité de genre, elle peut effectivement recevoir de l'aide. Or si on est grand, comment peut-on être petit? Si on est gros, comment peut-on être mince? Comment peut-on cacher sa grosseur et devenir mince? Si on est né comme cela, comment peut-on changer ou cacher cela? C'est un peu difficile. On ne peut pas cacher son identité de genre. Le corps a besoin d'être tout ce qu'il est, tout comme vous. Être une personne LGBT, ce n'est pas être un criminel. Ce n'est pas être un voleur. Une personne LGBT n'est pas un grain de poussière sans valeur. C'est en ce sens que nous vous demandons de bien vouloir nous protéger et de bien vouloir nous financer.
    C'est aussi une question de santé. En Ouganda, nous souffrons vraiment beaucoup de problèmes de santé. La situation de toutes les personnes LGBT qui tombent malades devient catastrophique. Nous sommes nombreux à mourir, à perdre notre vie pour rien, ici en Ouganda. L'accès à la santé et au marché du travail, entre autres, est un problème pour nous à cause de notre identité de genre. Si nous allons travailler quelque part et qu'on découvre que nous sommes des personnes LGBT, on nous chasse automatiquement, sans nous payer. Cela devient un peu difficile. En fait, cela devient un crime.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Whalen.
    Merci beaucoup d'être avec nous.
    Pour en savoir un peu plus au sujet de l'Angels Refugee Support Group Association, pourriez-vous nous dire à combien de gens vous venez en aide?

[Français]

    Merci beaucoup de la question.
    Les membres de l'Angels Refugee Support Group Association travaillent dans plusieurs régions en Ouganda, soit à Kampala, dans les camps de réfugiés Kyaka II et Nakivale, ainsi que dans le district de Hoima. Notre sommes actuellement 55 à Kampala, 35 au camp de Nakivale, 40 au camp Kyaka II et 25 à Hoima. Je parle ici de ceux qui s'identifient en tant que membres de la communauté LGBT pour le moment. Il y a d'autres personnes qui continuent à s'identifier comme tels. Nous sommes plus de 150 personnes LGBT qui vivent en Ouganda.

  (1615)  

[Traduction]

    Avez-vous une idée du nombre de réfugiés LGBTI qui se trouvent dans les camps?

[Français]

     Il y a trois camps de réfugiés, et il y en a dans la capitale, à Kampala. Plusieurs de nos membres sont dans les camps à Kampala, à Kyaka II, à Nakivale et à Hoima. Ici, à Kampala, nous sommes 55, à Nakivale, 45, à Hoima, 35, et à Kyangwali, 32.
    Ici, il est 23 h 30. Nous avons eu trois cas très urgents. Après cette réunion, je vais me diriger vers les camps de Nakivale parce qu'il y a eu des arrestations. Je vais y aller aujourd'hui et très tôt demain matin.

[Traduction]

    Au sujet des Ougandais qui s'identifient comme membres de la communauté LGBTI, est-ce que vous venez en aide également à ceux qui sont déplacés?

[Français]

    Pouvez-vous répéter la question, s'il vous plaît?

[Traduction]

    Votre organisation vient-elle en aide aux Ougandais qui sont persécutés en raison de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre?

[Français]

    Effectivement, il y a des Ougandais qui recourent à notre organisation lorsqu'ils ne peuvent pas s'adresser à une organisation ougandaise.
    Nous collaborons avec des organisations ougandaises. En Ouganda, il y a beaucoup d'organisations qui s'occupent de personnes LGBT et qui ont également beaucoup de membres. Les gens s'adressent à notre organisation et aux organisations qui aident les réfugiés pour recevoir du counseling, être orientés et avoir des conseils.

[Traduction]

    Au Canada, nous avons un programme pilote d'aide aux réfugiés Rainbow qui est offert en collaboration avec un groupe à Vancouver. Depuis 2011, le gouvernement fédéral aide ce groupe à parrainer, à titre privé, des réfugiés de la communauté LGBTI. Votre organisation a-t-elle déjà participé à leurs programmes pour parrainer, à titre privé, des réfugiés de l'Ouganda?

[Français]

    Non, non, non. Il y a beaucoup d'organisations en Ouganda qui se consacrent à la protection des LGBT, mais quand des réfugiés LGBT s'adressent à elles, les gens leur disent qu'ils ne travaillent pas avec les réfugiés. Cela crée de la confusion. C'est la même chose quand nous demandons des services ou du secours: les responsables des organismes nous disent qu'ils ne travaillent pas avec les réfugiés.
    J'aimerais ajouter quelque chose.
    L'une de nos membres a fait des déclarations dans les médias. Elle travaille en collaboration avec Rainbow Railroad, et je remercie beaucoup Rainbow Railroad. Je l'ai aidée au cours de ce processus, mais cela nous a pris du temps pour intervenir. De temps à autre, elle connaît des difficultés parce qu'elle est maintenant connue de tout le monde.
    En tout cas, il faut viser l'entraide en ce qui concerne l'immigration. Il vous faut examiner comment vous pouvez intervenir pour résoudre les problèmes urgents de nos membres.

[Traduction]

    Quelles pratiques exemplaires d'autres pays avec qui vous avez travaillé pour réinstaller des réfugiés LGBTI chez eux recommanderiez-vous au Canada d'adopter?

  (1620)  

[Français]

    Tout d'abord, je vous remercie beaucoup de la question.
    Je vous demanderais de mettre l'accent sur les interventions d'urgence et sur la réinstallation des réfugiés LGBT vivant en Ouganda. Je vous demanderais de bien vouloir offrir une assistance très rapide, du financement et des services de réinstallation.
    De plus, cela prend au moins 18 ou 20 mois avant de recevoir un visa d'un pays comme le Canada. Entretemps, nous attendons et nous souffrons ici, en Ouganda. Si vous pouviez réduire les délais relatifs à l'obtention d'un visa pour que cela ne prenne pas aussi longtemps, cela pourrait faciliter notre départ du pays. Ce pays présente beaucoup de défis pour nous. Il faudrait que le Canada aide les organisations qui s'occupent des personnes LGBT, surtout sur les plans de la sécurité et de la santé.
    Voilà notre recommandation.
    Je me permets d'ajouter une suggestion.
    Les réfugiés LGBT qui ont des documents sont encadrés par le HCR et d'autres organisations humanitaires. Toutefois, les personnes qui n'ont aucun document, les sans-papiers, de qui relèvent-elles? Vous pouvez penser à elles. Si cela ne fonctionne pas du côté du HCR et du gouvernement, vous pouvez peut-être essayer d'imaginer d'autres moyens pour que les demandeurs d'asile ne meurent pas devant nos yeux.
    Vous pouvez penser mieux que nous; vous pouvez élargir les possibilités plus que nous ne pouvons le faire. Nous sommes constamment sous pression parce que nous risquons la mort.
    Le Canada est un grand pays. Nous vous remercions, mais nous vous demandons de continuer à penser à nous. Nous vous félicitons d'avoir le courage d'intervenir et de nous venir en aide de façon rapide, très rapide comparativement à d'autres pays. Nous avons été en contact avec beaucoup d'ambassades et de délégations, et nous avons été touchés parce que vous prenez à coeur nos difficultés.
    Merci.

[Traduction]

     Monsieur Maguire.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les deux de prendre le temps de témoigner ce soir, dans votre région du monde, ou cet après-midi pour nous ici au Canada.
    Je m'adresse au Témoin 1. Vous avez mentionné avoir déménagé. Vous avez quitté votre pays natal pour vous rendre en Ouganda.
    Quand cela s'est-il produit? Est-ce que cela fait longtemps?

[Français]

    Cela fait plus de huit ans. J'habite ici depuis août 2010.
    Quant à moi, j'y habite depuis mars 2007.

[Traduction]

    Merci.
    J'étais parmi les membres du Comité qui se sont rendus en Tanzanie et en Ouganda. J'ai rencontré des membres de votre organisation l'été dernier, en juin, et j'ai entendu parler de votre situation désespérée, qui ressemble à celle de nombreux réfugiés d'autres pays voisins de l'Ouganda.
    Lorsque vous parlez de la possibilité ou du droit de vous rendre dans d'autres régions du monde, ou de vous sentir plus en sécurité où vous êtes, quelle est votre priorité? Est-ce de quitter l'endroit où vous vous trouvez, ou, dans un contexte plus large, de demander au Canada d'exercer des pressions pour qu'il soit plus sécuritaire pour vous de vivre dans votre pays natal, ou en Ouganda où vous vous trouvez actuellement?

[Français]

    Au nom de notre pays natal, je vous remercie beaucoup.
    La secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie, ou OIF, vient de notre pays. Il y aura des discussions à propos de cela et on pensera peut-être aux personnes LGBT. Ce n'est pas de notre faute si nous sommes ce que nous sommes, c'est ainsi que nous avons été créés.
    J'ai été prise en Amérique il y a plus de quatre ans. J'ai été victime de la politique actuelle de l'Amérique. Pendant plus de quatre ans, j'ai vécu d'autres menaces. Il y a le cas de l'incident qui a eu lieu au Club Venom, en 2016. J'ai été touchée par cela et c'est pour cette raison que j'ai eu le courage de ne pas baisser les bras. J'ai créé le Rainbow Heritage Network à cause de l'injustice dont sont victimes les personnes réfugiées en Ouganda.
    Cela fait plus de quatre ans. Je vais peut-être aller en Amérique bientôt, ou pas. Je ne sais pas ce qui se passera là-bas.

[Traduction]

    Je ne sais pas ce que l'avenir me réserve,

[Français]

parce que les personnes LGBT sont toujours menacées.

  (1625)  

    J'aimerais intervenir aussi.
    Nous aimerions dire que les priorités, pour votre pays, devraient être ce qui suit.
    Premièrement, il faut voir comment vous pouvez donner la priorité à la réinstallation des personnes LGBT, parce que nous souffrons, ici.
    Deuxièmement, il vous faut investir dans des initiatives visant à assurer la sécurité et la santé des personnes LGBT réfugiées.
    Troisièmement, il vous faut essayer de parler avec le gouvernement ougandais pour essayer de faire diminuer la souffrance des personnes LGBT, d'aider à régler les problèmes. Elles reçoivent des menaces, mais pas seulement en Ouganda, mais aussi au Congo, au Nigeria et dans tous les pays d'Afrique. Vous pourriez en faire des priorités.

[Traduction]

     Merci.
    J'ai une autre question qui porte sur le sujet.
    J'ai noté que vous avez dit que pour procéder à une demande de statut de réfugié pour quitter le pays, vous devez d'abord vous adresser à la police et subir un examen. Si on découvre votre orientation, vous êtes refusé. Dans votre situation, ce n'est pas l'idéal pour vous de vous adresser à la police.
    Y a-t-il une façon de procéder pour que...? Actuellement, les représentants du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés doivent se fier aux documents de la police. Peut-on changer cela?

[Français]

    Nos moyens sont très limités. Nous n'avons que nos voix pour décourager cela. Nous sommes vraiment limités. Je répète que nous sommes victimes de la politique de notre pays d'origine. Étant donné que le Rwanda est un pays politiquement stable, on ne peut pas oser invoquer la raison politique. On ne peut pas oser dire qu'on est une personne LGBT, car on risquerait d'être arrêté immédiatement.
    S'il y avait des moyens autres que le recours à la police, ils seraient sûrement utilisés. Nous nous sentons très menacés lorsque nous nous présentons devant des policiers. Nous sommes des personnes persécutées, et nous craignons d'être torturés par les policiers.

[Traduction]

    Puis-je vous interrompre un instant?
    Excusez-moi, mais notre temps est limité.
    Y a-t-il un autre groupe, autre que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, qui pourrait faire sortir plus efficacement les réfugiés de l'Ouganda? Ce que je veux dire, c'est qu'à l'heure actuelle, nous comptons sur ce que le Haut Commissariat nous fournit. Y a-t-il d'autres moyens ou d'autres scénarios que nous devrions envisager pour vous aider à cet égard?

[Français]

    Merci beaucoup de la question.
    Auparavant, il y avait l'organisme HIAS, dont HIAS Ouganda, HIAS US et HIAS Kenya, mais cet organisme a malheureusement fermé ses portes. Cela a touché la vie des personnes LGBT parce qu'il aidait bon nombre d'entre elles. Quelques-unes sont au Canada en ce moment et d'autres sont en Amérique.
    Il y a aussi le Refugee Law Project, qui s'occupe de sujets touchant les personnes LGBT, mais cet organisme n'offre pas de moyens de réinstallation. Nous, les petits organismes, travaillons sur le cas de nos semblables, les réfugiés LGBT.

  (1630)  

     Je voulais ajouter quelque chose. Une fois que les policiers identifient une personne LGBT, cette dernière perd toute chance, car la police ne peut accepter de telles personnes suivant la législation ougandaise.
    Une meilleure façon d'enregistrer les personnes LGBT pourrait être de passer par d'autres organismes, comme le Refugee Law Projet, qui peuvent faire la demande d'asile en leur nom. Ce pourrait être une façon d'enregistrer ces personnes ici, en Ouganda.
    Notre organisation ne peut pas se permettre de tenir tête au gouvernement. C'est très difficile. D'autres organismes plus importants comme le HCR ou le Refugee Law Projet peuvent peut-être s'en charger. Vous pourriez donc les contacter et leur demander comment cela pourrait se faire.

[Traduction]

    J'ai bien peur d'avoir à vous dire que vous allez devoir arrêter là. Je vous signale que l'opposition doit une dizaine de minutes au parti ministériel. Nous les récupérerons plus tard. Je ne voulais pas interrompre les témoins parce que je trouve que les questions et les réponses d'aujourd'hui sont très bonnes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à féliciter nos deux témoins de leur courage et je les remercie d'être venus ici aujourd'hui pour nous livrer leurs importants témoignages.
    Témoin no 1, dans votre exposé, vous avez brièvement évoqué les pays scandinaves. Ces pays ont-ils des programmes de réinstallation des réfugiés LGBT dont nous pourrions tirer des leçons?

[Français]

    Merci beaucoup de la question.
    J'ai parlé des pays scandinaves comme la Hollande, la Suède, le Danemark et la Norvège, parce que, par rapport à d'autres pays, ils acceptent un nombre important de réfugiés LGBT. Je ne parle pas de la France, du Royaume-Uni, de la Suisse ou d'autres pays. Le Canada et les États-Unis accueillaient des réfugiés LGBT venant des pays où l'organisme HIAS intervenait, mais ses portes sont fermées à l'heure actuelle. Nous ne savons rien de leur sort, parce que l'accès aux informations est limité et cela demande des enquêtes approfondies, mais nous avons pu constater la générosité de ces pays.
    Je suis désolé, mais nous avons terminé cette partie de la réunion. Je vous remercie de votre participation et de vos témoignages.

[Traduction]

    Cela nous a été très utile et nous vous garderons à l'esprit, à la fois dans notre rapport et dans nos efforts continus pour inciter notre gouvernement et les gens de notre monde à adopter une meilleure approche pour vous aider à assurer votre sécurité et à répondre à tous vos besoins. Je vous remercie beaucoup.
    Nous allons suspendre la séance une minute pour permettre le changement de témoins. Je vous remercie.

  (1630)  


  (1635)  

    Nous allons commencer. Nous avons un témoin qui nous parvient par vidéoconférence, mais puisque nous avons des témoins sur place, nous allons commencer par elles.
    Pour vous situer, je suis en train de me demander si nous ne pourrions pas révoquer le statut d'organisme de bienfaisance — et les avantages fiscaux qui accompagnent ce statut — aux organismes religieux qui prêchent la haine. C'est exactement ce à quoi je réfléchis en ce moment. Je pense à nos derniers témoins et je me dis: « Comment pouvons-nous permettre aux groupes confessionnels de prêcher la haine tout en leur donnant le statut d'organisme de bienfaisance et les avantages fiscaux qui en découlent? » C'est précisément où j'en suis dans mes réflexions.
    Beaucoup de choses pourraient entrer dans cette catégorie.
    Oui, mais pas les mennonites. Nous allons commencer par deux personnes du CCM, le Comité central mennonite du Canada, Mme Rebekah Sears et Mme Anna Vogt.
    Nous allons commencer par vous, puis nous passerons à notre témoin qui est en vidéoconférence.
    Le Comité central mennonite du Canada, ou CCM, est un ministère d'églises anabaptistes qui répond aux besoins humains fondamentaux et travaille pour la paix et la justice. Notre ministère a commencé en 1920 avec l'aide aux réfugiés qui cherchaient à fuir l'ex-Union soviétique. Aujourd'hui, le CCM est présent dans le monde entier. Rien que l'an dernier, nous avons aidé plus de 300 000 personnes en déplacement.
    Le CCM se réjouit de l'occasion qui lui est donnée de faire part de ses expériences au Comité et de formuler des recommandations au sujet des migrations forcées qui ont lieu un peu partout dans le monde.
    Les membres du Comité sont peut-être mieux informés que d'autres au sujet du travail du CCM sur la réinstallation des réfugiés, puisque c'est nous qui avons aidé à la réinstallation du tiers des réfugiés désignés par le bureau des visas du Canada en 2017. Le travail de réinstallation au Canada et le rôle de chef de file que joue le Canada pour encourager la réinstallation à l'échelle mondiale sont d'une importance capitale.
    Cela dit, le CCM entend constamment dire par ses partenaires internationaux que, quelle que soit la solution adoptée, il faudra toujours qu'elle ait une composante de lutte contre les causes profondes de la migration forcée.
    Alors que le CCM travaille sur le thème de la migration dans le monde entier, notre travail régional le plus rigoureux se déroule actuellement en Amérique latine, où j'ai récemment travaillé. Je vais vous décrire plusieurs facteurs qui incitent les populations à migrer, avant de vous parler de la réponse de nos organisations partenaires et de nos recommandations à l'intention du gouvernement canadien. Je mettrai surtout l'accent sur nos partenaires en Amérique centrale, au Mexique et en Colombie, des organismes qui nous tiennent au courant des tendances migratoires à mesure qu'elles se développent.
    Nous entendons dire que la migration dans cette région est forcée par des environnements hostiles qui sont le terreau de la violence. On pense notamment aux graves inégalités socioéconomiques, aux économies illicites associées à la corruption et à la faiblesse des institutions, ainsi qu'à la progression de la militarisation.
    L'Amérique latine est la région du monde où les inégalités sont les plus prononcées. Plus de la moitié des terres productives de la région sont détenues par le 1 % des plus grandes exploitations agricoles. Cette situation s'accompagne d'une dépendance économique croissante à l'égard de l'extraction des ressources, notamment dans le secteur agro-industriel, dans le secteur minier et dans celui des hydrocarbures. Cet état de fait a entraîné une diminution de la production alimentaire locale et un resserrement de l'accès à l'eau potable, facteurs qui encouragent la migration, en particulier lorsqu'ils s'accompagnent de menaces de violence pour le contrôle des terres ou du développement.
    Bien que la Colombie soit parmi les pays du monde qui comptent le plus de personnes déplacées — avec sept millions —, les déplacements internes sont à la hausse en Amérique centrale et au Mexique.
    Ces inégalités déstabilisent la région puisqu'elles contribuent à la croissance des activités économiques illicites. Même lorsque le crime organisé n'est pas directement responsable de la violence, il peut avoir une incidence indirecte sur la violence en gangrenant les institutions étatiques et en restreignant l'accès aux mécanismes de sécurité et de justice ainsi qu'à la santé et à l'éducation. Le chômage élevé et l'exclusion poussent les jeunes à devenir membres de gangs, ce qui entraîne une augmentation de la violence urbaine. Cela dit, la migration elle-même alimente elle aussi l'instabilité. Dans les régions frontalières, l'économie illégale entourant la migration est devenue plus rentable que le trafic de drogue.
    La militarisation accrue de la lutte contre le crime organisé conjuguée à l'absence de réaction des institutions étatiques face aux violations des droits de la personne exacerbe la violence. Le renforcement des politiques de sécurité donne lieu à des exécutions extrajudiciaires et à la répression de manifestations non violentes.
    L'Amérique latine est actuellement l'endroit le plus dangereux au monde pour les défenseurs des droits de la personne ou de l'environnement. La militarisation des frontières et des routes, en particulier près des frontières du Mexique, contribue à l'augmentation du nombre de décès et de disparitions de migrants. Les migrants et les demandeurs d'asile empruntent en effet des itinéraires moins connus pour éviter la détection officielle et se retrouvent fréquemment entre les mains de cartels ou dans des régions désertiques aux conditions extrêmes.
    Dans ces scénarios fort complexes, les efforts de développement et les interventions économiques de l'étranger peuvent, par inadvertance, faire plus de mal que de bien. Partout dans la région, cependant, le CCM travaille avec des organismes partenaires locaux qui s'efforcent de remédier à cette complexité.
    Permettez-moi de vous donner un modeste aperçu de ce travail diversifié et créatif.
    Par exemple, en Colombie, notre partenaire Sembrandopaz accompagne plus de 40 communautés agricoles déplacées et rapatriées dans le cadre d'un projet de réconciliation et de droits de la personne. Notre partenaire s'efforce avant tout de rassembler les jeunes de communautés divisées en recourant au sport comme outil de développement du leadership et de résolution non violente des conflits. Dans un processus parallèle, les dirigeants communautaires ont formé un mouvement de réparation et de défense qui cherche à leur permettre collectivement de rester sur leurs terres et de mettre au point des solutions de rechange sur le plan économique.
    Le travail de lutte contre la corruption au Honduras, dirigé par l'Association pour une société plus juste, utilise des mécanismes de suivi fondés sur des données probantes pour surveiller les contrats et les dépenses du gouvernement en matière d'éducation et de santé. Or, l'association rapporte que ce travail s'est traduit par une augmentation du nombre de jours que les enfants passent en classe.
     Dans le sud du Mexique, Voces Mesoamericanas fait partie d'un réseau d'organismes — réseau qui s'étend à l'Amérique centrale — qui surveille la violence aux frontières. Ce réseau documente également les déplacements internes et fait le suivi de signes avant-coureurs permettant de repérer les zones où les conflits sont susceptibles d'éclater et où les flux migratoires risquent d'augmenter.
    En réponse à cette dynamique contextuelle et à ces facteurs d'incitation à la migration, le Comité central mennonite du Canada offre les recommandations suivantes au gouvernement canadien, non seulement pour l'Amérique latine, mais pour toutes les régions du monde où il y a des migrations forcées. Premièrement, augmenter les investissements consacrés à la prévention des conflits; deuxièmement, envisager les choses dans une optique de « ne pas nuire »; troisièmement, établir des partenariats avec divers acteurs; et quatrièmement, continuer à jouer un rôle de premier plan dans les accords mondiaux.

  (1640)  

     Nous encourageons un investissement accru dans les initiatives de prévention des conflits, en particulier les initiatives locales de consolidation de la paix et de médiation entre différents secteurs et différentes confessions. Au moment de cartographier les facteurs de conflit, il est crucial de recenser les forces et les capacités qui existent déjà localement et qui peuvent être utilisées pour construire une paix durable.
    Nous encourageons également le gouvernement à tenir compte dans tous ses programmes de l'aspect de propension aux conflits — c'est-à-dire de faire attention à ne pas nuire — afin d'assurer que les mesures prises n'exacerbent pas par inadvertance la dynamique des conflits ou les inégalités socioéconomiques. Pour lutter contre l'insécurité dans le monde, le Canada devrait prioriser l'affectation de ressources à des moyens non militaires. Le CCM encourage également le Canada à accroître ses efforts diplomatiques en matière de prévention des conflits et à appuyer les solutions de rechange non violentes au recours à la force.
    En outre, nous encourageons le Canada à établir des partenariats avec divers acteurs, en mettant particulièrement l'accent sur le soutien aux partenaires locaux, sur le renforcement des réseaux locaux de solidarité et sur la promotion de mécanismes de coopération entre acteurs de différents échelons, en particulier dans les situations de déplacement interne prolongé. Reconnaissant le rôle important que jouent les organisations locales pour répondre aux besoins des déplacés internes, nous encourageons la multiplication des possibilités de financement.
    Enfin, le Comité central mennonite du Canada souhaite voir une coopération accrue entre Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et Affaires mondiales Canada afin de renforcer les capacités qu'ont les deux ministères de répondre de façon créative à l'ensemble des questions internationales complexes auxquelles notre monde actuel est confronté au chapitre des migrations forcées. Nous encourageons le Canada à continuer de faire preuve de leadership dans la mise en oeuvre du Pacte mondial sur la migration et du Pacte mondial sur les réfugiés en tenant compte des causes profondes et de la prévention, et en accordant une attention soutenue à la réinstallation à l'échelle mondiale.
    Il y aura plus d'informations sur tous ces sujets dans la soumission écrite que nous sommes en train de faire traduire.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Clayton, de l'organisme La bourse du Samaritain Canada, à Calgary.
     Monsieur Clayton, soyez le bienvenu.

  (1645)  

     Bonjour. C'est formidable d'être en contact avec vous, monsieur le président et honorables membres du Comité. Je tiens à remercier le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes de m'avoir donné l'occasion de parler des problèmes associés à la migration forcée, le sujet dont il a été convenu de traiter.
    C'est la deuxième fois que je comparais devant ce comité. Je tiens à vous remercier, ainsi que le gouvernement du Canada, d'avoir pris des mesures pour aider les yézidis dont nous avons parlé précédemment.
    Je suis ici pour représenter La Bourse du Samaritain Canada, un organisme de bienfaisance enregistré à Calgary. Nous faisons partie d'une organisation chrétienne internationale qui est en première ligne des pires tragédies qui se produisent dans le monde. Or, dans presque toutes ces tragédies, il y a une part de migration forcée.
    D'entrée de jeu, je voudrais formuler quatre observations. Premièrement: la politique canadienne doit se concentrer sur les causes profondes, comme nous l'avons déjà entendu. Cela réduira au minimum les migrations forcées et permettra aux déplacés de rentrer chez eux en toute sécurité.
    Deuxièmement: la réinstallation doit se faire en toute impartialité. Cela doit être une ligne directrice.
    Troisièmement: le processus de renvoi du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés exige la vigilance du Canada pour assurer la reddition de comptes.
    Quatrièmement: des politiques d'immigration sûres, ordonnées et régulières peuvent être impopulaires, mais l'alternative est également inhumaine.
    En lisant le communiqué de presse concernant l'étude actuelle de ce comité, je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer les parallèles qui existent entre l'ordre du jour de la présente séance et celui des réunions que l'ONU tiendra en décembre prochain, lorsque le Pacte mondial sur la migration sera sans doute ratifié. Le pacte mondial est un accord non contraignant, mais il façonne la volonté politique et les visées de la communauté internationale. Avec cette ratification, le Canada sera mis devant des décisions stratégiques s'alignant sur le pacte mondial et la nécessité de mettre au point ses propres politiques en la matière.
    Avec des dizaines de millions de personnes déplacées de force, l'ampleur de la crise actuelle à l'échelle mondiale est ahurissante. Nous constatons qu'il s'agit en grande partie d'un phénomène d'origine humaine attribuable à une mauvaise gouvernance ou à une gouvernance corrompue, et que ce sont des dynamiques qui, dans une vaste mesure, pourraient être évitées dès le départ. À juste titre, le pacte mondial désigne la lutte contre les causes profondes des mouvements de réfugiés comme une priorité pour toutes les nations du monde.
    Pour le Canada, si j'ai bien compris, la lutte à ces causes profondes est du ressort de la politique étrangère. Le Canada a besoin d'une politique qui cible l'aide et le développement économiques canadiens pour réduire les facteurs qui incitent les populations à migrer. Cette focalisation des ressources permettra aux personnes déplacées de retourner dans leur pays d'origine en toute sécurité et dans la dignité, ce qui est l'option la plus souhaitable de toutes.
    J'ai été témoin du succès de ces interventions et de ces efforts à la source. J'ai passé les premières années de ma carrière à La Bourse du Samaritain en Croatie et en Bosnie. J'ai été à même de constater le succès de l'accord de paix de Dayton, en 1995, qui, même s'il n'était pas parfait, a permis aux réfugiés et aux déplacés de rentrer, à tout le moins, dans leurs pays respectifs, sinon dans leurs foyers.
    Deuxièmement, depuis le milieu des années 1990, notre organisme participe activement aux efforts de secours au Soudan du Sud. L'accord de paix global de 2005, qui a été précédé par le Protocole de Machakos, en 2003, a été largement facilité par une initiative et un financement de la politique étrangère canadienne. Cela a permis à des millions de personnes de rentrer chez elles.
    J'espère que le pacte mondial et les travaux de votre comité aideront à clarifier les priorités de la politique étrangère du Canada et à axer ces priorités sur les causes profondes. La triste réalité est que le pacte mondial et la politique ne peuvent pas remédier à toutes ces causes profondes, et que la migration forcée va continuer. Certains problèmes sont insolubles et laissent des millions de personnes dans une situation désespérée. J'ai été particulièrement impressionné par les observations du témoin précédent, Anna, parce qu'elles faisaient écho à ma propre histoire.
    En 1920, mes grands-parents mennonites ont fui la persécution en Union soviétique et sont arrivés dans une ferme des Prairies. L'Ukraine a récemment ouvert ses archives du KGB, révélant le sort de ceux qui n'ont pas fui: ils ont été rassemblés pour des simulacres de procès, puis on les a exécutés ou envoyés au goulag.
    Les situations impossibles et terribles de ce monde me touchent énormément. Je crois que lorsque l'on examine ces situations, des priorités émergent. Ce ne sont pas tous les migrants forcés de ce monde qui se retrouvent dans des situations dangereuses, voire impossibles, et le principe humanitaire d'impartialité nous impose de donner la priorité à ceux qui ont le plus besoin d'être réinstallés sans discrimination. Ce principe humanitaire d'impartialité doit guider les politiques et les priorités du Canada.
    Le Canada a agi comme il se doit à l'égard des yézidis, et j'en suis particulièrement fier. Je pense que les yézidis continuent d'être un exemple patent de migration forcée et que leur situation est l'une des pires au monde. Ils sont les victimes d'un génocide désigné en tant que tel par l'ONU. Il s'agissait d'un groupe minoritaire vilipendé déplacé de son pays d'origine avec peu de chances de trouver la sécurité ou une certaine forme de liberté pour l'avenir. Le Canada a fait preuve d'impartialité lorsque les yézidis ont été amenés ici. Je crois que nous devrions ouvrir nos portes à un plus grand nombre d'entre eux.

  (1650)  

    Les Rohingyas du Myanmar sont un autre groupe de personnes qui méritent une attention prioritaire.
    J'ai également observé votre comité examiner les processus de détermination et d'aiguillage du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et l'engagement du Canada dans ces processus. Le Haut Commissariat s'est engagé à respecter de très nobles principes humanitaires. Toutefois, il est évident que certains groupes culturels dominants au sein du Haut Commissariat peuvent faire preuve de racisme systémique, d'intolérance ou de partialité à l'égard de groupes minoritaires en leur sein.
    Je crois que le Canada a été sage d’envoyer des représentants dans le nord de l'Irak pour prêter main-forte à l'immigration des yézidis et assurer l’impartialité du procédé. La vigilance à l'égard des partis-pris ou des préjugés du Haut Commissariat et la possibilité d'intervenir en faveur des groupes minoritaires qui ne sont pas traités de façon impartiale devraient également faire partie de la politique canadienne. La transparence doit être saluée et priorisée à cet égard.
    Lorsqu'ils tenaient de définir leurs politiques en matière de migration et d'immigration, le Canada et la communauté internationale ont pendant des décennies utilisé les adjectifs « sûres », « ordonnées » et « régulières ». Tout écart par rapport à ces principes directeurs a des conséquences. Ces écarts ouvrent la porte à la traite des êtres humains et à la criminalité. Ils encouragent la prise de risques qui mettent des vies en danger. Ils permettent d'éventuels compromis en matière de sûreté et de sécurité à l'intérieur du Canada, et ils transmettent par inadvertance aux nouveaux arrivants la notion que la primauté du droit au Canada n'est pas importante et qu'ici, les voies légitimes et l'application régulière de la loi ne sont pas respectées. Enfin, ces écarts réduisent l'efficacité de la coordination des services canadiens de soutien à la réinstallation des réfugiés. C'est ce qui me fait dire que ces conséquences sont vraiment inhumaines.
    Le Comité se réunit pour discuter de l'avenir de la politique canadienne. Le pacte mondial conclu avec le système des Nations unies s'appuie sur une action humanitaire intentionnelle et fondée sur des principes. Cependant, notre culture est de plus en plus séduite par le populisme, par les attitudes vertueuses et par la nécessité d'être perçue comme admirable lorsqu'il s'agit d'aider, sans égard pour les répercussions et l'incidence que ces attitudes pourraient avoir sur les citoyens et les procédés canadiens. Il faut s'y opposer. Les politiques canadiennes sur la migration forcée doivent rester fondées sur des principes solides.
    Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de vous parler.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Tabbara.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être là.
    J'ai eu l'occasion de rencontrer beaucoup de gens. Je me souviens très bien des nombreuses fois où je me suis entretenu avec des représentants du CCM, notamment avec Rebekah Sears.
    Anna, vous avez formulé des recommandations, entre autres, celle d'augmenter les investissements consacrés à la prévention des conflits — ce qu'a également recommandé notre témoin par vidéoconférence — et vous avez ajouté que les causes profondes sont liées, en grande partie, aux conflits et aux individus qui sèment le chaos.
    J'ai ici un rapport de l'Observatoire des situations de déplacements internes, qui appuie, en gros, ce que vous avez dit au sujet des conflits. Selon le rapport, les déplacements qui ont eu lieu entre janvier et juin 2018 provenaient principalement de cinq pays: l'Éthiopie, la Syrie, la République démocratique du Congo, le Nigeria et la Somalie. Voici le nombre de personnes déplacées, dans le même ordre: 1,4 million, 1,2 million, 946 000, 400 000 et 300 000, grosso modo. Il s'agit là du nombre de personnes déplacées, durant cette période, en provenance de ces pays.
    Un autre point que j'aimerais mentionner et aborder, c'est que nous observons beaucoup de déplacements dus aux changements climatiques. Permettez-moi de vous énumérer quelques endroits qui ont été touchés par des désastres entre janvier et juin 2018, et c'est de là que proviennent bon nombre des personnes déplacées. En Inde, les inondations de mousson ont causé le déplacement de 373 000 personnes. La Somalie a également été frappée par des inondations, et environ 300 000 personnes ont été déplacées. Au Kenya, c'est le même bilan, soit 300 000 personnes déracinées. Aux Philippines, il n'y a pas si longtemps, 150 000 personnes ont dû quitter leur domicile. Je peux vous citer bien d'autres exemples.
    Nous pouvons accomplir beaucoup de choses grâce à la diplomatie. Nous pouvons essayer d'injecter plus de fonds dans des mesures de prévention afin d'éliminer les conflits dans les quelques pays que j'ai mentionnés au début. Quelles sont certaines des mesures que nous devons prendre pour aider ces réfugiés climatiques? Que recommanderiez-vous au gouvernement de faire pour que ces chiffres cessent d'augmenter continuellement?
    Si je peux me permettre d'intervenir, bien des fois, lorsqu'on pense aux réfugiés dont le déplacement est causé par les changements climatiques, il y a plusieurs autres facteurs qui entraînent leur migration forcée. Souvent, surtout d'après ce que nous observons en Amérique centrale, les changements climatiques constituent le dernier facteur qui force les gens à migrer.
    Il faut adopter une approche holistique pour comprendre les raisons pour lesquelles les gens s'enfuient, tout en reconnaissant que les changements climatiques exacerbent, eux aussi, les conflits, surtout en ce qui concerne l'accès aux ressources naturelles. Dans le cadre de notre engagement à lutter contre les changements climatiques à l'échelle mondiale, je crois que nous devons quand même tenir compte de la prévention des conflits. Par exemple, les agriculteurs honduriens peuvent normalement produire deux récoltes de maïs par an, mais cette année, ils ont pu à peine en produire une en raison de la sécheresse causée par les changements climatiques dans leurs régions. Ces gens se retrouvent également dans des situations très précaires, si bien qu'ils craignent déjà d'être déplacés ou d'être chassés de leurs terres, et les changements climatiques constituent un facteur supplémentaire qui les force à partir.
    Encore une fois, comment pouvons-nous intégrer cette perspective pour comprendre la cause holistique de la migration, tout en reconnaissant l'importance des changements climatiques dans pareilles situations?

  (1655)  

     Monsieur Clayton, vous aimeriez peut-être nous dire un mot là-dessus, vous aussi.
    Je crois qu'il est difficile de prédire les répercussions des changements climatiques, en raison de leur envergure planétaire, et de savoir où surviendront les catastrophes. Il faut investir dans le milieu des ONG ou dans les structures qui existent au sein du gouvernement pour la réduction des risques de catastrophe, l'état de préparation en vue de pouvoir réagir à de tels événements et l'atténuation des effets lorsque surviennent de telles situations — voilà le genre de priorités qui, selon moi, constituent de bons investissements en matière d'initiatives du gouvernement du Canada ou d'Affaires mondiales Canada. Toutefois, en raison de leur portée très large, ces initiatives ne sont pas une priorité quand vient le temps de répondre aux besoins immédiats des populations déplacées. Il s'agit de réfléchir à la façon dont vous pouvez investir dans la prévention lorsqu'il existe des besoins criants d'intervention face aux événements qui ont lieu actuellement dans le monde.
    Je ne crois pas qu'il existe un moyen d'atténuer les changements climatiques. Il s'agit d'être prêt à réagir efficacement lorsque cela se produit. À mon avis, ce sont les capacités de ce genre qui font défaut dans bon nombre de ces pays.
    Au Canada, nous assurons la réinstallation des réfugiés de diverses façons. À votre avis, y a-t-il quelque chose que nous faisons peut-être correctement ou que nous pourrions améliorer? Nous avons le Programme de réfugiés pris en charge par le gouvernement, le Programme de parrainage privé, ainsi que les visas au titre du Programme mixte. Y a-t-il un aspect sur lequel nous devons continuer de travailler dans le cadre de ces trois programmes, ou nous recommanderiez-vous même d'ajouter une autre mesure pour aider à réinstaller les réfugiés?
    Je pourrais peut-être obtenir vos recommandations, à commencer par Anna, suivie de M. Clayton.
    Monsieur Tabbara, votre collègue aimerait avoir une minute. Je serai heureuse de lui accorder quelques minutes supplémentaires.
    Chers témoins, vous avez environ 30 secondes pour répondre à cette question.
    Je me contenterai de dire que ce n'est pas mon domaine d'expertise. Notre collègue, Brian Dyck, peut également répondre à certaines de ces questions. Il a déjà témoigné devant le Comité. Il se trouve actuellement en Éthiopie. Il avait souligné la nécessité que le Canada intervienne à l'échelle mondiale pour promouvoir la réinstallation et déterminer comment d'autres pays peuvent également y participer.
    Je sais que cela ne répond pas directement à votre question, mais...
    Permettez-moi d'intervenir pour poser une question. J'ai quitté le fauteuil pour cette raison.
    Monsieur Clayton, les témoins du groupe précédent venaient de l'Ouganda. Ils nous ont laissé entendre qu'une des causes profondes de la migration forcée était la haine prêchée par des églises missionnaires en Afrique contre les communautés LGBTQI.
    J'aimerais connaître la relation entre La Bourse du Samaritain Canada et Franklin Graham, le président de votre organisation internationale, et j'aimerais savoir si vous adhérez aux propos qu'il a tenus cet été lorsqu'il a dit, en réponse aux commentaires de l'ancien président Jimmy Carter sur le mariage homosexuel, que l'homosexualité est une abomination, en alléguant que Sodome et Gomorrhe étaient une punition de Dieu et que ces décès avaient été provoqués à cause de l'homosexualité.
    Franklin Graham est le président de La Bourse du Samaritain Canada. Je ne suis pas au courant des propos exacts auxquels vous faites allusion. Je ne crois pas que notre organisation ait quoi que ce soit à voir avec la promotion de la violence qui sévit en Ouganda.
    Voici ce que Franklin Graham a dit:
Malgré tout le respect que je lui dois, je ne suis pas d'accord avec [l'ancien président Jimmy Carter] sur ce point. Il se trompe complètement quand il dit que Jésus approuverait le mariage homosexuel. Jésus n'est pas venu pour promouvoir le péché. Il est venu pour nous sauver du péché. La Bible dit clairement que Dieu a détruit les villes de Sodome et de Gomorrhe à cause de l'homosexualité.
Cela laisse entendre que Dieu a tué des gens parce qu'ils étaient homosexuels.
    Votre organisation partage-t-elle cet avis?

  (1700)  

    Je ne suis pas venu préparé pour commenter des propos tenus par Franklin et, d'ailleurs, je ne crois pas, personnellement, que cela représente, de quelque façon que ce soit, la vérité biblique.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Oliphant, avez-vous terminé?
    M. Robert Oliphant: Oui.
    La vice-présidente (L'hon. Michelle Rempel): Puis-je reprendre ma place?
    Merci.
    Allez-y, madame Rempel.
     Monsieur Clayton, j'aimerais m'attarder sur ce que vous avez dit au sujet de la discrimination possible dans le processus du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. J'aimerais commencer par reconnaître que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a un rôle important à jouer dans la réinstallation des réfugiés, mais l'une des choses que nous voulons également faire, c'est nous assurer d'améliorer ces processus afin de protéger les personnes les plus vulnérables du monde.
    Nous savons que les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays figurent parmi les plus vulnérables au monde. À l'heure actuelle, dans le cadre des programmes de réinstallation des pays d'accueil qui comptent sur les listes fournies par le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays ont du mal à accéder au processus de réinstallation du Haut Commissariat.
    Je voulais simplement vous donner un peu de temps pour nous en dire davantage à ce sujet. Vous pouvez peut-être fournir de l'information au Comité ou nous faire part de données quantitatives ou de preuves sur la discrimination dont vous avez parlé ou sur certaines des réformes que le Canada pourrait préconiser afin de renforcer les processus pour que les groupes minoritaires vulnérables qui sont déplacés à l'intérieur de leur pays jouissent d'un accès équitable ou prioritaire à des programmes de réinstallation. Pourriez-vous également nous expliquer comment les pratiques et politiques nationales du Canada pourraient tenir compte de cette réalité?
    D'accord. Tout d'abord, je n'ai pas apporté de renseignements quantitatifs. J'ai des renseignements anecdotiques provenant de nos opérations menées dans divers endroits. Plus précisément, comme je le disais au sujet de la situation des yézidis, nous participons très activement aux efforts d'intervention depuis la chute du groupe État islamique à Mossoul et les événements survenus par la suite. Force a été de constater qu'il existe des partis pris dans les cultures dominantes des régions où intervient le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Je ne crois pas que nous les jugions. Parfois, ces choses sont tout simplement inhérentes à la vision du monde des gens et aux idées qu'ils se font lorsqu'ils entrent en contact avec différents groupes de personnes. Quand vous faites partie d'un groupe dominant et que vous avez affaire à des groupes minoritaires avec qui vous n'avez eu aucune relation ou au sujet desquels on vous a appris des choses négatives, il est très difficile pour vous de faire preuve d'objectivité ou de vous accrocher aux principes humanitaires, aussi nobles soient-ils.
    Je crois comprendre que des représentants canadiens ont contribué au processus de renvoi qui a eu lieu dans cette région précise. Je ne suis pas au courant d'autres endroits où cela se produit, mais chaque fois qu'il y a un groupe minoritaire au sein d'un groupe dominant de ce genre, il est possible que de tels problèmes se posent, alors je pense...
    Désolée de vous interrompre. Nous avons reçu des représentants du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et, au cours de cette législature, nous avons également entendu des témoins — par exemple, des membres de la communauté LGBTI — qui ont parlé des difficultés d'accès aux programmes de réinstallation, en raison du processus. Nous entendons deux versions: d'une part, on nous dit qu'il y a de la discrimination et des difficultés et, d'autre part, l'ONU affirme qu'il n'y a pas de problème.
    Je me demande comment, en tant que fournisseurs de services — et je m'adresse également au Comité central mennonite —, nous pouvons dénouer cette impasse. Si nous tenons à ce que le système fonctionne bien, si nous voulons obtenir l'approbation sociale, c'est-à-dire amener les gens à accepter que le système est équitable, comment pouvons-nous briser cette impasse? Comment pouvons-nous faire pression pour que des réformes soient apportées, sachant que l'ONU est une organisation très bureaucratique?
    Que nous proposez-vous, surtout du point de vue d'une personne qui en a assez de mener ce combat chaque fois qu'il y a un groupe de personnes déplacées et que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés vient témoigner devant notre comité?

  (1705)  

    Il y a un moyen bien simple. Si on instaure des mécanismes de reddition de comptes, le tout sera complètement transparent. Ainsi, en cas de remise en question, les représentants seraient disposés à ce qu'une enquête soit menée sur l'objectivité et le...
    En quoi consiste cette reddition de comptes? Qu'est-ce que cela signifie sur le plan d'un mécanisme précis ou d'une recommandation pour le Comité?
    Je dirais que, comme point de départ, les représentants devraient cesser de nier l'existence de problèmes. Cela leur permettrait de dire: « Venez examiner comment nous respectons ces principes humanitaires. » Si un organisme affirme qu'il n'y a pas de problème et si vous êtes un des principaux bailleurs de fonds de ses opérations, il devrait être heureux de pouvoir démontrer sa transparence, son adhésion et sa capacité d'obtenir des résultats.
    Voulez-vous dire quelque chose comme une initiative canadienne ou une demande présentée par le Canada pour un examen du processus par un organisme indépendant?
    Oui.
    Je ne sais pas à quoi cela ressemblerait, mais je sais qu'il y a des gens compétents qui pourraient réfléchir à la façon d'effectuer une visite de contrôle ou une évaluation du respect de ces principes.
    À votre connaissance, y a-t-il eu quelque chose de ce genre? Trouverions-nous des groupes indépendants ou des pays qui ont déjà mené une vérification du processus, si notre comité devait envisager une telle mesure en guise de pratique exemplaire?
    Je ne saurais le dire.
    C'est un sujet dont nous avons parlé à notre bureau et dont nous avons discuté à l'interne. À notre avis, il ne faudrait pas éviter une telle éventualité si jamais une demande en ce sens était faite. Je crois que la réponse indique que nous devons peut-être envisager quelque chose de différent ici.
    D'accord.
    Je vais donner le reste de mon temps aux représentantes du CCM pour leur permettre de dire un mot sur le point que j'ai soulevé.
    Oui, bien sûr.
    Un des piliers de notre organisation, c'est le partenariat avec des organisations locales qui font un très bon travail en matière de documentation et de sensibilisation aux lacunes possibles au sein des institutions, surtout à la lumière de ce que nous avons entendu plus tôt aujourd'hui de la part des témoins de l'Ouganda. Obtenir ce genre de renseignements et de preuves auprès de partenaires locaux est fondamental pour certains de ces processus.
    Par exemple, une des organisations avec laquelle nous avons collaboré dans le Sud du Mexique et dont j'ai parlé tout à l'heure, Voces Mesoamericanas, reçoit du financement de la part du CCM pour aller dans des centres de détention mexicains afin de mener des enquêtes et de déterminer si les migrants reçoivent des soins adéquats lorsqu'ils finissent par être détenus au Mexique. Nous pouvons ensuite utiliser cette information pour faire pression sur l'État mexicain. Ce genre de mécanismes permettent à nos partenaires locaux qui y ont accès de nous fournir cette information.
    Rebekah, vouliez-vous ajouter quelque chose?
    Je vous remercie de ces questions.
    Pour en revenir à l'autre exposé et aux mécanismes mondiaux, comme le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et le Pacte mondial, il y a un manque de représentation de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays. Bon nombre des groupes dont vous avez parlé se classeraient dans cette catégorie, et cela comprend aussi les groupes de la séance précédente. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés s'occupe de ces groupes un peu par défaut.
    Je crois que j'ai déjà entendu des experts en matière de déplacements internes témoigner devant le Comité; ils ont affirmé qu'il n'y a aucun organisme chargé de ce groupe de personnes, malgré la représentation des personnes déplacées à l'intérieur de leur pays. La Colombie enregistre l'un des chiffres les plus élevés. On y trouve presque deux fois plus de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays que de réfugiés au sens de la convention.
    Par ailleurs, les déplacements internes sont de bons signes avant-coureurs qui montrent que quelque chose ne tourne pas rond dans un pays. En effet, avant que les réfugiés commencent à traverser les frontières, on observe un nombre croissant de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, ce qui comprend souvent des minorités et d'autres groupes ciblés par leurs propres gouvernements.
    Merci.
    Merci.
    Madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins de leurs exposés.
    Anna, l'un des enjeux que vous avez évoqués relativement aux déplacements internes, ou l'une des difficultés liées aux questions de migration, porte sur la violence conjugale. Nous avons aujourd'hui, aux États-Unis, un président qui dit carrément que ce facteur ne sera pas pris en considération dans le dossier des demandeurs d'asile.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez, et dites-nous aussi quelles seraient les conséquences pour les personnes qui se trouvent dans de telles situations.

  (1710)  

    Tout à fait. Je vous remercie d’avoir soulevé cette question.
    Il s’agit là d’une préoccupation très pressante. Sur le plan de la violence familiale, l’Amérique latine possède l’un des taux de violence faite aux femmes les plus élevés du monde. Souvent, lorsque les femmes fuient, même au sein de la caravane de migrants provenant du Honduras, elles fuient aussi la violence familiale.
    Lorsque nous examinons les multiples raisons pour lesquelles les gens quittent leur pays, il est très important de continuer de tenir compte de la sexospécificité. Leur départ pourrait être lié à la violence fondée sur le sexe combinée aux changements climatiques, à des situations d’instabilité, à la corruption, au manque d’accès aux mécanismes judiciaires ou à des institutions potentiellement affaiblies. Il se peut que les femmes ne puissent pas obtenir une protection dans leur propre pays, en particulier dans les régions où elles peuvent être victimes d’une plus grande discrimination ou dans les pays où, de même, il n'est pas acceptable sur le plan culturel de dénoncer la violence familiale.
    Dans ce contexte, je soutiendrais que les personnes qui arrivent au Canada des États-Unis après avoir traversé la frontière de manière irrégulière sont dans une situation précaire.
    Compte tenu des circonstances auxquelles nous faisons face en ce qui concerne les États-Unis et le point de vue de son président actuel à cet égard, diriez-vous que les États-Unis sont un pays sécuritaire?
    Je ne peux pas me prononcer à cet égard. Mon organisation n’a pas de position à ce sujet, mais je dirais qu’il est impératif de prêter une attention particulière à ces cas et de déterminer soigneusement si les femmes ou d’autres membres de la communauté LGBTQI sont en mesure d’obtenir une protection adéquate.
    D’accord.
    Lorsqu’une personne est forcée de passer des États-Unis au Canada de façon irrégulière, au lieu de traverser la frontière de façon officielle afin de pouvoir faire valoir son droit d’asile — parce que l’Entente sur les tiers pays sûrs ne lui permet pas de le faire —, elle est obligée de traverser la frontière dans des conditions dangereuses.
    Oui.
    Pensez-vous que cette situation est optimale pour les gens qui ont besoin d’une terre d’accueil ou de demander l’asile?
    Je pense que la situation optimale pour les gens, c'est qu’ils puissent avoir un accès aussi aisé que possible à des voies qui leur apportent la sécurité le plus rapidement possible, en particulier pour les gens qui fuient la violence familiale ou la violence tout court.
    D’accord. Donc, dans ces circonstances, on estimerait que le fait d’être forcé de traverser la frontière à des emplacements irréguliers n’est pas la meilleure option.
    C’est exact... on parle de situations où l’accès à la sécurité est aussi peu traumatisant que possible.
    Merci.
    Nous parlions du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés ou, si vous voulez, des communautés LGBTQI et des autres personnes déplacées à l’intérieur de leur pays d’origine. Elles ont un accès très limité aux programmes de réinstallation pour une foule de raisons. Par exemple, si ces personnes déclarent être membres de la communauté LGBTQ et que l’homosexualité est illégale dans leur pays, elles mettent immédiatement leur vie en péril. Par conséquent, les gens ne peuvent pas faire cela.
    Avez-vous des suggestions à faire quant aux mesures que le Canada pourrait prendre pour appuyer ces personnes?
    De plus, est-il possible ou recommandez-vous que le Canada travaille sur le terrain avec des groupes communautaires locaux, en collaboration avec des groupes canadiens, en vue d’offrir à ces gens un programme d’immigration, et le Canada devrait-il prévoir des fonds spéciaux pour ce genre de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays d’origine?
    Comme CMM travaille déjà sur le terrain avec des partenaires locaux, nous pouvons constater la valeur de faire équipe avec des personnes locales qui — comme cela a été mentionné plus tôt au cours de notre témoignage — sont pleinement conscientes de la situation, qui peuvent parler d’après leur expérience personnelle, qui sont très bien informées et qui ont également accès à d’autres personnes qui font face au même genre d’oppression ou de situations. Je pense qu’il est crucial d’établir des partenariats.
    Cela figure aussi sur notre liste de recommandations. Nous incitons effectivement le Canada à nouer des partenariats avec divers groupes de personnes exerçant leurs activités dans différents secteurs.
    Si nous le faisons, pensez-vous qu’il devrait s’agir d’une mesure spéciale, une mesure qui s’ajoute au volet de réinstallation de réfugiés?
    Je sais qu’une partie du problème que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a remarqué en Ouganda était liée au fait qu’un nombre très important de personnes avaient besoin d’un soutien à l’établissement et que le Haut-Commissariat disposait de très peu de places. Il lui était donc très difficile de prendre des décisions en vue de désigner les personnes prioritaires, car les situations de millions de personnes semblaient prioritaires.
    Compte tenu de cet ensemble de circonstances, si nous cherchions vraiment à cibler un groupe de personnes qui fait face à un danger imminent, qui est activement persécuté, dont l’existence même enfreint la loi et dont les membres sont passibles de sanctions, le Canada devrait-il prendre une mesure spéciale pour réinstaller les personnes de ce genre?

  (1715)  

    Je pense que c’est un domaine dans lequel le Comité a probablement acquis une plus grande expérience que moi, mais je crois que cela nous ramène à la réponse que j’ai donnée aussi à propos de la violence familiale. Ce que nous cherchons à distinguer — et cela représente peut-être des mesures spéciales —, ce sont les personnes qui ont besoin d’obtenir la plus grande protection de la façon la moins traumatisante et la moins dangereuse pour leur vie possible, ainsi que la façon dont nous pouvons leur offrir cette protection?
    Rebekah, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
    Je sais que nous avons répété cela à plusieurs reprises, mais j’aimerais simplement faire ressortir l’importance d’établir des liens avec les communautés locales qui ont accès à ces communautés minoritaires. Je pense simplement au travail de CCM. Au Moyen-Orient, nous entretenons des liens avec les populations majoritaires, mais aussi avec les populations minoritaires à risque. Il faut donc établir ces liens et découvrir également ce que souhaitent les communautés.
    La raison pour laquelle je soulève la question de cette mesure spéciale est la suivante. En ce moment, il y a seulement un certain nombre de réfugiés parrainés par le gouvernement, soit 7 600. Par exemple, si vous prenez les yézidis que nous avons réinstallés, leur nombre était censé faire partie d’une mesure spéciale qui s’ajoutait au nombre de réfugiés parrainés par le gouvernement. Cependant, ils ont été tirés du bassin régulier de réfugiés parrainés par le gouvernement.
    Cela veut dire que toutes les autres personnes qui ont grandement besoin d’aide, des personnes que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés cherche désespérément à réinstaller n’ont pas pu bénéficier de ces places.
    Lorsqu’un groupe est en difficulté, ne devrions-nous pas reconnaître cette situation précaire — comme dans le cas du génocide des yézidis —, prendre une mesure spéciale à cet égard et ne pas empiéter sur le nombre de réfugiés parrainés par le gouvernement?
    À cet égard, je peux peut-être m’adresser à M. Clayton afin d’obtenir une brève réponse de sa part, car le président me dévisage.
    Je ne connais pas toutes les différentes politiques du point de vue des affectations et des différents aspects de l’aide qui peut être apportée aux gens, mais si les 1 200 yézidis étaient censés faire partie d’une affectation spéciale, je ne crois pas que leur réinstallation aurait dû avoir une incidence sur le nombre total de réfugiés parrainés par le gouvernement.
    Je n’ai rien d’autre à ajouter.
    Oui, sauf que cela n’a pas été le cas. Leur nombre a réduit le nombre de réfugiés ordinaires parrainés par le gouvernement.
    Merci.

[Français]

    Merci.
    Nous allons continuer avec M. Ayoub.
    Merci, monsieur le président.
     J'aime beaucoup la passion de ma collègue. Nous avons beaucoup de questions et c'est pour cela que sept minutes, c'est très peu.
     Je commence par vous, monsieur Clayton. Je ne suis pas certain d'avoir bien compris — vous me le confirmerez —, mais dans une de vos remarques, vous avez dit que la meilleure solution pour l'intégration des réfugiés était de pouvoir éventuellement les retourner chez eux. Vous avez dit que ce serait un but éventuel.
    Est-ce que je vous ai bien compris? Je ne veux pas présumer que c'est ce que vous avez dit.

[Traduction]

    Je pourrais reprendre mes notes et les consulter, mais je crois que… Oui, la plupart des gens déplacés auxquels j’ai parlé souhaitent retourner dans leur pays d’origine.
    D’accord. C’est leur point de vue.

[Français]

    C'est exact.
    Dans un même ordre d'idées, comment un pays comme le Canada, qui veut intégrer les réfugiés, peut y parvenir de la meilleure façon possible et juger du succès de ses efforts s'il part de la prémisse que ces gens doivent éventuellement retourner chez eux?

[Traduction]

    Je pense qu’il y a une distinction entre les efforts en matière de politique étrangère ou les efforts en matière d’affaires étrangères visant à supprimer les causes profondes des problèmes et à permettre aux gens de retourner dans leur pays et la question de savoir qui ne pourra jamais faire l’objet d’une réinstallation, compte tenu des critères établis. À cet égard, il y a deux dynamiques qui entrent en jeu et qui sont liées à la migration et à l’immigration.

[Français]

    Ce que je comprenais, c'est que l'on parlait de réfugiés, et non d'immigration. L'immigration, c'est une autre dynamique. Les gens qui veulent immigrer entreprennent normalement les démarches eux-mêmes à cette fin. Or, les réfugiés sont dans une situation de vulnérabilité, ils fuient la violence et l'intimidation, et ils veulent sauver leur vie.
     Je suis député du Québec, une province où nous tentons de voir comment réduire, peut-être à court terme, le nombre d'immigrants et de réfugiés afin d'avoir le temps de mieux les intégrer et d'éviter ainsi qu'ils partent pour retourner dans leur pays ou s'établir ailleurs. Dans notre cas, nous cherchons à avoir une majorité de réfugiés francophones.
    Comment pouvons-nous équilibrer tout cela?

  (1720)  

[Traduction]

    Je crois que cela se résume au processus de réinstallation, aux critères établis, à la façon dont les gens sont interviewés, à leur situation et à leurs intentions. Je sais qu’il y a des gens qui souhaitent venir au Canada. Bon nombre de mes amis qui sont originaires d’autres parties du monde et qui ont fait du Canada leur foyer sont enthousiasmés par la vie qu’ils mènent ici.
    En ce qui concerne le processus de recommandation des Nations Unies, j’ignore comment vous pouvez les inciter à coopérer avec vous, ou est-ce que l'organisation établit des critères différents pour l'aider à déterminer les gens qui vont vraiment s’intégrer et qui, dans votre contexte particulier du Québec, sont adaptés au milieu et répondent à vos attentes?

[Français]

    Madame Vogt et madame Sears, avez-vous un commentaire à faire? Comment voyez-vous cette intégration à deux volets? Partagez-vous ce point de vue?

[Traduction]

    Je crois que tout dépend également de la situation dont nous parlons. Par exemple, bon nombre de gens peuvent être dans une situation de déplacement protégée — ou même logés dans des camps de réfugiés — et ne jamais se réinstaller au Canada non plus, puisque la solution la plus durable pour eux pourrait être de retourner dans leur pays. Je pense que cette situation est légèrement plus complexe que celle des gens qui se réinstallent au Canada, qui s’intègrent à la population locale, puis retournent dans leur pays. Comment envisageons-nous les divers groupes non seulement en ce qui concerne la question de savoir qui sont les réfugiés ou les migrants, mais même, plus globalement, du point de vue de l’endroit où ils se trouvent ainsi que de leur propre désir de retourner dans leur pays d’origine?
    Je pense que l’intégration est une merveilleuse étape que le Canada entreprend avec les nouveaux arrivants afin de s’assurer qu’ils font partie intégrante de la société canadienne. Je pense qu’il est également bon d’encourager d’autres pays qui sont aux prises avec d’importantes populations de demandeurs d’asile ou de migrants à prendre des mesures d’intégration, en particulier aux endroits où les personnes pourraient ne jamais avoir le choix de retourner dans leur pays d’origine.
    Rebekah, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Je soulignerai peut-être simplement les arguments qu’Anna a fait valoir au cours de son exposé à propos de l’importance de faire le choix de migrer ou non.
    Pardon, je viens de perdre le fil de ma pensée.

[Français]

    Je vais partager mon temps de parole avec mon collègue puisqu'il a une question.
    On veut sauver des vies en faisant de la prévention à l'international. Est-ce qu'un transfert dans un pays voisin pourrait être une solution à court terme?
    Lorsque l'on fait venir des réfugiés de façon temporaire, il semble selon moi y avoir un conflit entre les questions de sécurité et le degré d'appartenance à la société canadienne comme indicateur du succès de l'immigration. Selon moi, il n'y a pas de demi-mesure: on vient au Canada parce qu'on veut devenir Canadien à 100 %, ou pas.
    Je vais donner la parole à mon collègue.

[Traduction]

    Merci beaucoup, Ramez.
    J’adresse ma question uniquement aux représentantes du CCM. Compte tenu de l’engagement et de l’intention du gouvernement de réinstaller 1 000 femmes ou jeunes filles vulnérables, dont un grand nombre auront été victimes de violence fondée sur le sexe et d’autres formes de persécution, avez-vous des conseils à nous donner quant aux partenaires avec lesquels nous devrions travailler, et les processus que nous devrions entreprendre pour nous assurer de faire les choses efficacement et d’obtenir les résultats que nous nous sommes engagés à atteindre?
    Cet engagement a-t-il été pris par rapport à des régions particulières?
    C’est effectivement la question que je pose. Avez-vous des recommandations ou des conseils à nous fournir quant à l’endroit d’où elles devraient venir, aux gens avec lesquels nous devrions travailler et à la façon dont cela peut être accompli efficacement afin que nous puissions réinstaller ces 1 000 femmes ou filles?
    Oui. En fait, il y a quelques années, un lien direct avait été établi entre des réfugiés colombiens et des églises mennonites canadiennes. Le Comité central mennonite, le CCM, avait contribué à faciliter le parrainage d’un certain nombre de réfugiés colombiens qui arrivaient directement de la Colombie.
    L’un des processus qui ont rendu la réinstallation très efficace était le fait qu’un lien direct avait été noué avec le pays d’envoi, de manière à ce que nous soyons en mesure de fournir des renseignements, même au sujet des traumatismes vécus, aux familles et aux groupes confessionnels qui participaient à la réinstallation de ces réfugiés et qui les accompagnaient pendant leur adaptation à la vie au Canada. Cette capacité de communiquer des renseignements culturels et contextuels et même des renseignements à propos des éléments déclencheurs de leur situation pendant leur adaptation au Canada a rendu la situation beaucoup plus viable en ce qui concerne la capacité des gens à s’intégrer au Canada et à sentir que des gens les accompagnaient à chaque étape du processus, de leur demande d’asile à leur arrivée au Canada.
    J’estime qu’il est essentiel de tenir compte de la façon dont nous pouvons être informés et conscients de l’existence de partenaires communautaires locaux qui peuvent contribuer à la mise en commun d’information au sujet des situations que les gens peuvent avoir vécues, ainsi qu’à l’intégration de ces gens dans la société canadienne.

  (1725)  

    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Maguire, qui dispose de cinq minutes pour nous amener à la fin de nos délibérations.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Clayton et mesdames Vogt et Sears, je reconnais que vos deux organisations font un excellent travail dans le domaine de la réinstallation de réfugiés, et je vous remercie des exposés que vous avez donnés aujourd’hui.
    L’un des faits que nous avons appris et que j’ai eu l’occasion d’observer en juin, c’est que, lorsque vous visitez des camps de réfugiés et que vous parlez à ses occupants, ils vous indiquent qu’ils souhaiteraient se réinstaller, mais que leur dernier choix serait de le faire dans un tiers pays. Ils aimeraient se réinstaller dans leurs propres régions d’origine.
    Ce qui m’a poussé à poser la question suivante, madame Vogt, c’est le fait que vous avez mentionné qu’il y avait 7 millions de personnes déplacées en Colombie et que vous l’avez appuyée, madame Sears, en déclarant qu’il y avait deux fois plus de personnes déplacées que de réfugiés dans le monde et que le nombre de réfugiés s’élevait à 64 millions. Cela m’amène à vous demander quel est, selon vous, le plus important besoin à satisfaire pour nous assurer que, malgré tous les succès que chacun de vous a connus ainsi que les réussites enregistrées par les programmes de réfugiés du gouvernement, nous sommes en mesure d’en réaliser au moins un pourcentage, autant ou davantage, en partageant les possibilités qui existent au Canada?
    Les réfugiés ont-ils des besoins linguistiques ou d’autres besoins lorsqu’ils arrivent ici, ou devons-nous simplement nous assurer de disposer d’un processus robuste pour déterminer qui, parmi les occupants des camps de réfugiés, peut venir au Canada, et quelles autres ressources financières il serait bon d’utiliser?
    Le problème est en partie liée à l’enjeu que j’ai commencé à aborder au début, c’est-à-dire au fait de s’attaquer aux causes profondes de la migration. Je précise encore une fois qu’il faut affecter davantage de fonds à la prévention des conflits locaux, tenter d’établir des partenariats avec différents intervenants, ainsi qu’investir davantage dans la médiation des situations susceptibles d’engendrer des conflits en raison des flux migratoires. Il faut examiner le problème sous un angle global et considérer la réinstallation comme l’un des moyens dans l’arsenal dont le Canada dispose pour s’attaquer au problème de la migration forcée. Toutefois, le Canada peut aussi intervenir de nombreuses autres façons.
    Même en étudiant la situation en Colombie et toutes ces personnes déplacées, il faut reconnaître que les organisations locales dans l’ensemble des pays sont celles qui assument en fait la tâche de recevoir ces personnes, en particulier parce que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés n’est pas tellement en mesure d’intervenir, étant donné qu'il s’agit de déplacements à l’intérieur du pays. Comment le gouvernement canadien peut-il reconnaître et appuyer le travail de ces organisations sans avoir à accueillir toutes ces personnes au Canada?
    Je pense que Rebekah aimerait répondre à cette question.
    J'aimerais simplement ajouter que c'est un fardeau pour les pays d'accueil, surtout ceux avoisinant les zones de conflit. Par exemple, je pense que 85 % des réfugiés syriens se trouvent encore dans la région, dans des pays voisins comme le Liban, la Turquie et la Jordanie. Ce sont donc les pays d'accueil qui portent le fardeau.
    Comme Anna l'a dit, la réinstallation est une option, mais ce n'est pas nécessairement ce que les gens veulent faire. Réinstaller l'ensemble des réfugiés n'est pas forcément la meilleure solution. Il est préférable d'appuyer les pays d'accueil afin qu'ils soient en mesure de soutenir les réfugiés et les personnes déplacées, en passant, encore une fois, par les organisations locales, surtout lorsqu'il est question de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays, car la cause du problème est souvent le gouvernement.
    Oui, merci. La situation était la même en Ouganda.
    Monsieur Clayton, pouvez-vous nous présenter votre point de vue?

  (1730)  

    Oui, monsieur Maguire. D'après moi, le gouvernement du Canada et les personnes ici présentes doivent se demander s'ils veulent se donner des objectifs généraux ou précis. Il faut être réaliste quant aux ressources dont le Canada dispose. Nous pouvons adopter une approche aléatoire et disperser nos efforts, ou nous pouvons choisir de nous attaquer à des initiatives très précises.
    Je reviens à l'exemple de ce qui a été investi dans l'accord de paix global entre le Soudan et le Soudan du Sud. Malgré les problèmes avec lesquels le Soudan du Sud est aux prises aujourd'hui, je suis d'avis que beaucoup d'initiative et de ressources financières ont été investies pour contribuer à la solution au problème.
    Que voulons-nous faire? Voulons-nous nous donner des objectifs généraux ou précis? Je ne peux pas répondre à cette question. Selon moi, le Canada doit se fixer des objectifs réalistes quant à ce qu'il peut accomplir comme pays; il ne doit pas essayer de tout faire pour tout le monde, mais plutôt se consacrer pleinement à des dossiers précis.
    Merci.
    Ma dernière question porte sur des observations que vous avez faites, madame Vogt, concernant la prévention des conflits; vous venez d'en reparler. Les conflits semblent répandus aussi en Afrique, mais vous dites qu'ils sont très courants en Amérique latine. Nous le constatons. Des personnes sont en train d'émigrer. Elles sont sur l'autoroute en ce moment même.
    Que faut-il faire pour redresser la situation? Selon vous, quelle serait la meilleure façon d'exploiter au maximum les fonds utilisés actuellement dans ces régions? Vous avez parlé de la nourriture et du sport. Quelle est la meilleure façon de réinstaller les gens et d'utiliser les fonds afin de réduire les conflits dont vous avez parlé?
    Vous avez 30 secondes.
    Parfait, c'est facile.
    Je le répète, je pense qu'il faut établir des relations avec des partenaires locaux, des gens qui comprennent très bien leur propre région et leur propre contexte, des gens qui sont déterminés à apporter des changements dans leur propre milieu. Comment peut-on trouver différents groupes dans une variété de secteurs et travailler avec eux à la prévention des conflits? De tous les exemples que j'ai vus en Amérique latine, je pense que c'est la façon la plus durable d'apporter des changements importants et de favoriser la consolidation de la paix.
    Nous devons nous arrêter là.
    Merci beaucoup à toutes et à tous.
    Merci aux membres du Comité. Nous reprendrons notre travail jeudi.
    La séance est levée.
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