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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 158 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 mai 2019

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Puisqu'il est 15 h 30, je déclare ouverte la 158e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Aujourd'hui, nous commençons notre étude de la partie 4, section 16, du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en oeuvre d'autres mesures.
    Pour la première séance, nous recevons le ministre Blair et ses représentants. Je crois comprendre que le ministre Blair présentera un exposé d'un peu moins de sept minutes. Nous commencerons immédiatement par cet exposé, et nous espérons avoir le temps de lui poser des questions pour toutes les 51 minutes.
    Monsieur Blair, allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais essayer de passer cela en revue le plus rapidement possible. Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité aujourd'hui. Je suis heureux de parler de notre système d'octroi de l'asile et de nos propositions en matière d'application de la loi à la frontière, que nous avons incluses dans le projet de loi C-97.
    Monsieur le président, nous vivons dans un monde qui connaît des niveaux de migration sans précédent. L'Agence des Nations unies pour les réfugiés a estimé à environ 258 millions le nombre de personnes qui se déplacent à l'échelle mondiale, y compris des migrants économiques. Toutefois, 25,4 millions de ces personnes sont réputées être des réfugiés, qui fuient la guerre et la persécution et cherchent une protection.
    À l'instar de nombreux autres pays du monde — presque chaque autre pays sûr au monde —, le Canada a constaté une augmentation de la migration. La croissance de la migration mondiale donne à penser qu'il est probable que le nombre de demandeurs d'asile continue d'augmenter et fait ressortir la nécessité de continuer de nous assurer que nos frontières et notre système d'octroi de l'asile sont bien gérés pour nous acquitter de nos obligations juridiques internationales et canadiennes.
    Il est impératif que nous maintenions un système de protection des réfugiés qui repose sur deux principes importants: l'équité et la compassion. Le budget de 2019 a proposé l'investissement de 1,18 milliard de dollars sur 5 ans, à compter de 2019-2020, et de 55 millions de dollars par année par la suite pour renforcer l'intégrité des frontières du Canada et de notre système d'octroi de l'asile. Ces investissements soutiennent aussi la stratégie du gouvernement en matière de protection frontalière. Ils permettront d'accroître la capacité du système d'octroi de l'asile de gérer des volumes élevés de demandes afin de fournir une protection en temps opportun à des réfugiés et de faire en sorte qu'un demandeur d'asile débouté soit renvoyé rapidement et avec compassion de notre pays.
    La stratégie en matière de protection frontalière suppose de déceler et de décourager la mauvaise utilisation de notre système de visas en empêchant les personnes qui ne sont peut-être pas des demandeurs de visa temporaire légitimes de voyager au Canada. Cela signifie d'investir considérablement dans la collecte de renseignement et l'analyse des tendances pour limiter le nombre de visas canadiens délivrés à des gens qui pourraient utiliser un visa canadien uniquement pour s'établir de façon permanente au Canada.
    Nous poursuivons également le travail avec nos partenaires internationaux pour échanger des renseignements et des analyses des tendances qui pourraient avoir une incidence sur la délivrance de visas; qui augmentent considérablement l'interdiction de migrants irréguliers éventuels à l'étranger; qui suscitent la participation de pays récalcitrants à l'appui d'activités de renvoi, grâce à l'obtention en temps opportun de leur coopération pour ce qui est de la délivrance de titres de voyage pour des demandeurs d'asile déboutés une fois qu'ils ont épuisé tous les recours juridiques au Canada; et nous décourageons également les migrants irréguliers éventuels au moyen d'une sensibilisation ciblée, en corrigeant la désinformation et en fournissant les faits au sujet du système d'octroi de l'asile du Canada, pour nous assurer que les gens comprennent nos lois et le fonctionnement de ce système.
    Monsieur le président, la stratégie en matière de protection frontalière permettra aussi de maintenir l'intégrité des frontières du Canada. Nous investissons dans l'établissement continu d'une capacité pour les interceptions entre les points d'entrée, tandis que la Gendarmerie royale du Canada continue d'accroître ses capacités dans des lieux clés à la frontière et d'investir dans un nouvel équipement de technologies frontalières.
    Nous mettons en place des mesures d'urgence pour nous assurer d'être prêts à réagir à toute augmentation possible du nombre de migrants irréguliers, et nous avons présenté des modifications législatives qui permettront d'améliorer, à notre avis, notre capacité de gérer les flux le long de la frontière en cas d'augmentation et d'afflux. Cela comprend, par exemple, un amendement qui éliminera le délai de trois jours offert aux agents pour déterminer si la demande d'asile d'une personne est recevable avant que la demande soit automatiquement déférée à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada indépendante. L'élimination de cette exigence fournira au gouvernement une plus grande souplesse pour gérer des volumes à la frontière et fera en sorte que tout le monde fasse l'objet d'un examen approprié et équitable.
    Nous mettons aussi en place des mesures pour décourager la migration irrégulière de ceux qui essaient de présenter des demandes multiples dans des pays différents — et c'est écrit dans la modification législative de la Loi d'exécution du budget. Tout comme dans d'autres cas d'interdiction de territoire, ces personnes se verront interdire l'accès à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. Plutôt, elles auront accès à un examen des risques avant renvoi amélioré, ou ERAR, avant le renvoi, pour qu'on veille à ce qu'elles ne soient pas renvoyées dans une situation de risque.
    Monsieur le président, je crois qu'il est très important d'insister sur le fait que personne qui s'est vu interdire l'accès à la CISR comme résultat de cette nouvelle mesure ne sera renvoyé sans la tenue d'une audience d'ERAR. Cette mesure proposée contribuera aussi à réduire le nombre de dossiers à la CISR, tout en faisant en sorte que tout le monde reçoive un traitement équitable avant que des renvois ne surviennent.
    Monsieur le président, nous maintenons la confiance du public envers notre système en traitant les gens qui franchissent irrégulièrement la frontière exactement de la même façon que ceux qui le font actuellement dans des points d'entrée réguliers, comme moyen pour éliminer tout incitatif ou toute perception d'avantage injuste.
    De plus, nous continuons de solliciter les États-Unis afin de moderniser et d'améliorer l'Entente sur les tiers pays sûrs. Le gouvernement du Canada communique de façon continue avec le gouvernement américain sur des questions liées à notre frontière commune.

  (1535)  

    Je vous informe aussi que j'ai récemment rencontré de nombreuses parties prenantes, y compris des membres du Congrès américain, de la Customs and Border Protection et des représentants du département de la Sécurité intérieure des États-Unis, et nous cherchons à renforcer notre coopération avec les États-Unis pour régler des enjeux liés à la migration irrégulière, y compris la modernisation et l'amélioration de l'Entente sur les tiers pays sûrs dans l'intérêt mutuel des deux pays.
    Le Canada et les États-Unis ont en commun un intérêt mutuel pour assurer la gestion ordonnée des demandes d'asile tout en protégeant la sécurité de nos citoyens et en respectant les droits de ceux qui fuient la persécution.
    Nous investissons dans un système d'octroi de l'asile qui sera rapide, équitable et définitif. Nous augmentons actuellement le financement pour le système d'octroi de l'asile dans son ensemble afin de traiter des volumes supérieurs de demandes. Cela permettra à la CISR de prendre des décisions portant sur jusqu'à 50 000 demandes d'asile et 13 500 appels d'ici l'exercice 2021. Grâce à ce financement additionnel, la Commission sera en mesure de rendre un plus grand nombre de décisions, réduisant ainsi les délais d'attente pour les personnes ayant besoin de protection, et débouchant sur des renvois plus rapides et efficaces des demandeurs d'asile déboutés.
    Je signalerais aussi que, pour reconnaître l'augmentation des volumes de demandes d'asile, nous investissons davantage dans un financement destiné à l'établissement, puisqu'un plus grand nombre de gens se verront accorder le statut de personne à protéger. Étant donné que les personnes à protéger sont admissibles à des services d'établissement comme la formation linguistique, il s'agira d'un investissement dans l'avenir du Canada.
    De plus, nous augmentons le financement pour permettre le renvoi en temps opportun des personnes qui sont reconnues comme n'ayant pas un besoin véritable de protection et nous prenons des mesures pour accélérer le renvoi des demandeurs d'asile déboutés qui franchissent irrégulièrement la frontière au Canada.
    Enfin, grâce aux investissements du budget de 2019 et à la proposition législative que je vous présente aujourd'hui, le Canada continuera de respecter ses obligations internationales pour les gens qui fuient légitimement la persécution, et nous parviendrons à donner à notre système d'octroi de l'asile un caractère définitif.
    Merci, monsieur le président.
    Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Comme les membres le savent, nous ferons de notre mieux pour limiter les questions et les commentaires concernant la partie 4, section 16. Mais il s'agit d'une analyse du budget et de commentaires sur celui-ci, donc les gens seront heureux que la portée soit un peu plus vaste.
    Monsieur Tabbara, allez-y.
    Merci, monsieur le ministre, d'être ici aujourd'hui.
    Nous venons de terminer une étude sur la migration mondiale, et d'après les chiffres que vous nous avez fournis, nous savons qu'environ 258 millions de personnes sont en déplacement, dont de nombreux réfugiés, comme vous l'avez dit dans votre déclaration.
    Vous avez parlé d'investir à la frontière — de nous assurer que nos frontières sont sécuritaires, que les hommes et les femmes qui travaillent aux frontières possèdent les outils appropriés et que le gouvernement fédéral investit dans celles-ci pour que nous préservions l'intégrité de notre frontière. Toutefois, au cours des dernières années, le budget de l'ASFC a été amputé de 143 millions de dollars. J'aimerais que vous en parliez. Devant cette nouvelle tendance mondiale, où plus de 250 millions de migrants sont en déplacement, nous avons avantage à être préparés à investir dans nos frontières, sinon nous nous retrouverons peut-être avec une situation difficile à gérer.
    Depuis que vous êtes au pouvoir, pouvez-vous nommer certains des changements que vous avez constatés? Il y a déjà eu des compressions; maintenant, nous investissons. J'aimerais vous demander des précisions à ce sujet.
    Nous avons fait un certain nombre de choses importantes.
    J'aimerais faire part de quelques bonnes nouvelles au Comité. Nous avons observé des réductions importantes du nombre de gens qui se présentent de façon irrégulière à notre frontière et qui soumettent ensuite une demande d'asile. Jusqu'ici, depuis le début de l'exercice, nous avons constaté une réduction d'environ 47 % du nombre de personnes qui ont franchi nos frontières de façon irrégulière. C'est le résultat direct de quelques interventions très efficaces que nos organismes et nos représentants ont effectuées — la sensibilisation des populations aux États-Unis et ailleurs dans le monde pour leur fournir de meilleurs renseignements au sujet de notre système. Malheureusement, il y a énormément de désinformation, et les gens qui l'exploitent se trouvent dans une position vulnérable, ce qui a, je crois, contribué à cet afflux de gens à notre frontière.
    Nous avons aussi travaillé en étroite collaboration avec les États-Unis et d'autres représentants internationaux à la délivrance de visas. Par exemple, nous avons vu un nombre important de gens en provenance d'un pays particulier d'Afrique qui se voyaient délivrer un visa de touriste pour venir aux États-Unis et se présentaient par la suite à la frontière canadienne pour demander l'asile. Comme résultat direct d'interventions effectuées par des patrouilleurs frontaliers américains et de leur système de délivrance de visas, et grâce à des investissements consentis par l'ASFC, qui ont permis à des représentants à l'étranger de travailler en collaboration avec les représentants américains à la délivrance de ces visas, nous avons obtenu une réduction de 73 % du nombre de personnes en provenance de ce pays via les États-Unis qui présentaient par la suite une demande d'asile.
    Une des choses que nous avons constatées, et j'espère que cela répond à votre question, c'est qu'il nous fallait aussi augmenter considérablement la capacité de la CISR de tenir des audiences en temps opportun. Sa capacité de mener ces audiences était le résultat de son retard de plus en plus important attribuable au volume de personnes qui présentaient une demande — et pas juste de façon irrégulière. Nous avons aussi observé une augmentation importante du nombre de personnes qui franchissent de façon régulière la frontière dans des aéroports, des points d'entrée réguliers, qui présentent des demandes dans un bureau intérieur. Il nous fallait donc investir dans la capacité de la CISR de tenir des audiences en temps opportun.
    Nous avons investi l'an dernier quelque 73 millions de dollars pour commencer à renforcer cette capacité. Cela a grandement amélioré la capacité de la CISR de traiter cet arriéré, mais nous avons reconnu le besoin d'en faire davantage. C'est pourquoi nous ajoutons dans le budget de 2019 plus de 207 millions de dollars destinés à la CISR, en espérant que, d'ici 2020, elle puisse traiter 50 000 audiences de demandeurs d'asile chaque année. Grâce à une meilleure administration de ces audiences, on obtient des résultats en temps plus opportun, et le temps qu'il faut pour régler ces demandes de recevabilité est grandement réduit. En parvenant à cette réduction, je crois que nous serons en mesure de créer un système beaucoup plus équilibré et envers lequel les gens ont une attente raisonnable selon laquelle, s'ils ont besoin d'une protection, ils la recevront rapidement, et s'ils n'en ont pas besoin, ils seront renvoyés du Canada en temps opportun.

  (1540)  

    En ce qui concerne certains des amendements qui sont présentés, pourriez-vous parler davantage de nos obligations internationales et des répercussions globales sur la migration dont il est fait mention dans le rapport des Nations unies? Nous assurons-nous d'avoir un système d'immigration qui fait preuve d'équité et de compassion pour ceux qui arrivent à nos frontières?
    Je vais vous dire que, parmi les piliers et les valeurs sur lesquels notre système de protection des réfugiés et d'immigration repose, à mon avis, on trouve l'équité et la compassion ainsi que le respect de nos obligations internationales et de la primauté du droit. Dans chaque étape de ce processus, nous nous sommes assurés de nous conformer à ces exigences, tant à la lettre du droit international qu'à son esprit.
    Je suis très reconnaissant du soutien apporté et des commentaires formulés, par exemple, par le HCR, l'agence des Nations unies pour les réfugiés, qui a reconnu que, dans le cadre de tous ces changements et des investissements qu'il fait, le Canada maintient et respecte en tout temps ses obligations internationales afin de fournir à des gens une procédure établie et une décision opportune au sujet de la recevabilité de leur demande, et que, comme résultat direct des investissements que nous accordons à la CISR, le Canada maintient un système d'octroi de l'asile de calibre mondial.
    J'ai aussi eu récemment l'occasion de rencontrer des représentants d'Amnistie internationale et de passer beaucoup de temps avec eux. J'ai expliqué exactement comment notre système fonctionnait et j'ai été en mesure de leur fournir, par exemple, la garantie selon laquelle, avant que quiconque soit renvoyé du Canada, que la personne puisse ou non avoir accès à la CISR, peu importe les circonstances de son arrivée, elle a le droit de subir un examen des risques avant renvoi amélioré; et, d'après nos lois, elle aurait toujours l'occasion d'être entendue et d'être représentée par un avocat. Si on déterminait que ces personnes étaient à risque, nous ne les renverrions pas dans une situation dangereuse. Elles se verraient plutôt offrir le statut de personne à protéger.
    Vous avez dit que notre système était rapide, équitable et définitif. Pourriez-vous préciser cela davantage?
    Pour qu'un système soit géré de manière appropriée et efficace et que l'on puisse maintenir l'équité, les gens doivent s'attendre à une décision opportune relative à leur demande. Faute de ressources et d'une capacité adéquate de la CISR de parvenir à une décision, le processus était trop long.
    Ce retard contribue en fait à l'iniquité du système. Pour les gens qui ont vraiment besoin de protection dans une situation non réglée, cela ne contribue pas à leur établissement et à l'intégration dans la vie canadienne. En même temps, pour ceux qui n'ont pas droit à notre protection, le long délai a servi un peu comme un incitatif pour présenter une demande et participer à ce processus. Son accélération est un investissement qui contribue aussi réellement à son équité.

  (1545)  

    Madame Rempel, allez-y.
    Je pense que nous devrions peut-être arrêter de raconter des inepties.
    Vous êtes assis ici, monsieur le ministre, dans une position inventée avec des bureaucrates qui ne relèvent pas de vous, mais qui, néanmoins, ont le malheur de travailler avec vous. Nous en sommes aux derniers jours d'une législature qui a vu votre gouvernement donner volontairement — encore une fois, peu importe votre opinion sur le président américain — un coup de poing dans l'oeil des Américains avec le mot-clic #BienvenueAuCanada, puis permettre à plus de 40 000 personnes d'entrer illégalement au pays et d'y demander l'asile, tout en disant que l'Entente sur les tiers pays sûrs respecte... puis mettre en place une ville de tentes permanente, établir des programmes de transport en autobus vers la région du Grand Toronto et dépenser des centaines de millions de dollars en frais d'hôtels pour des gens qui, de l'aveu de vos propres collègues, n'ont probablement pas présenté de demande d'asile valide.
    Puis, vous décidez de vilipender tout Canadien qui a dit qu'il se trouve peut-être des gens dans le Nord de l'État de New York qui n'ont pas vécu le même niveau de persécution qu'une personne qui vient du Nord de l'Irak. Nous ne devrions peut-être pas dépenser des centaines de millions de dollars en frais d'hôtel et créer des facteurs d'attraction dans notre système qui débouchent sur des arriérés de plusieurs années.
     Vous avez vilipendé n'importe qui. Votre collègue, le ministre de l'Immigration, et le premier ministre lui-même ont tenté de marquer des points politiques faciles avec le mot-clic #BienvenueAuCanada, désignant ensuite les gens qui le remettaient en question comme anti-Canadiens et racistes, ce qui a exacerbé les tensions. Vous vous êtes assis ici et avez dit en fulminant que nous ne pouvions pas déclarer que c'était illégal, puis vous avez dépensé des centaines de millions de dollars de plus sur ce programme. Vous avez intensifié la rhétorique jusqu'à ce que nous commencions à nous rapprocher d'une élection.
    Puis, tout d'un coup, nous avons la section 16 de la Loi d'exécution du budget, qui comprend des mesures qui ont été constamment critiquées par presque tous les professionnels en immigration au Canada et qui ne pourraient vraisemblablement pas soutenir la moindre contestation judiciaire que ce soit. Bien franchement, les gens témoigneront durant ces audiences que ces mesures sont susceptibles d'entraîner un arriéré et un fardeau administratifs encore plus importants pour le système.
    Votre collègue et vous avez ensuite jeté le blâme de cette situation sur Stephen Harper. Bravo; il faut ce qu'il faut, être payé pour être un communicateur. Mais la réalité, c'est que vous avez hérité d'un arriéré de 10 000 cas, qui avait bien sûr été réduit à partir d'un arriéré massif de la CISR sous un gouvernement libéral précédent. Nous nous retrouvons maintenant avec un arriéré de 71 000 cas à la CISR, d'après le vérificateur général.
    Vous avez dit que le système est rapide. Cela veut dire plus de cinq ans pour la tenue d'une audience relative à une demande d'asile.
    Vous avez augmenté l'arriéré en levant l'obligation de visa pour le Mexique tandis que votre gouvernement n'avait pas effectué d'examen officiel du système. Nous avons maintenant vu, je crois, plus de 1 500 demandes en provenance du Mexique au cours des 2 derniers mois. Nous savons qu'environ 22 % de ces demandes seront réputées valides. Le nombre de cas moyen en ce moment, ou le niveau moyen, est d'environ 55 %, et nous savons que bon nombre de ceux-ci sont des demandes bidon.
    Je crois que notre système d'octroi de l'asile devrait être solide. Nous devrions accepter au pays des gens qui ont des besoins légitimes en raison de la persécution, mais vous avez géré ce système comme une farce pour obtenir des votes. Rapide, vraiment? C'est la faute de Stephen Harper? Lorsque nous formerons le gouvernement en octobre, nous devrons faire le ménage dans un arriéré de 120 000 cas que vous nous aurez laissé.
    Maintenant, dans les derniers jours de la présente législature, quand les sondages ont révélé que votre mauvaise gestion de ce dossier est impopulaire parce que les gens disent que ce n'est pas juste, soudainement, vous voulez injecter quelque chose dans un projet de loi omnibus sur le budget. Un de mes collègues au Comité a dû se battre pour le faire analyser ici — un seul texte de loi était parvenu jusqu'au Comité durant l'intégralité de la présente législature — et cela ne va même pas fonctionner. C'est probablement illégal et inconstitutionnel.
    Vous n'avez même pas pris le téléphone pour appeler les Américains. Votre ministère est littéralement resté assis à ne rien faire, et nous lui avons demandé si le gouvernement lui avait fourni une quelconque orientation pour éliminer les échappatoires dans l'Entente sur les tiers pays sûrs. La réponse, monsieur le ministre — au cas où vous n'avez pas eu l'information —, c'était non. C'est parce que vous n'avez même pas pris le téléphone, disant que vous ne savez même pas si les Américains peuvent... Vous n'avez même pas pris le téléphone pour dire que nous avons un problème ici et que nous devrions peut-être nous en occuper.
    Non. Vous avez demandé à votre ministre des Affaires étrangères de s'asseoir sur une scène au milieu d'une négociation commerciale avec le président américain — encore une fois, peu importe votre sentiment à son égard — et l'avez comparé à Bashar al-Assad et au dictateur de la Corée du Nord. Ce n'est peut-être pas la meilleure chose à faire au milieu d'un accord commercial pendant que vous essayez de négocier la réforme du système d'octroi de l'asile.

  (1550)  

    C'est de l'incompétence. J'ai vu beaucoup d'incompétence, mais celle-ci a un visage humain, parce que les centaines de millions de dollars que vous avez dépensés pour colporter des inepties ont fait perdre de l'argent aux contribuables canadiens. Cela fait perdre de l'argent aux gens qui essaient d'entrer légalement au pays, car vous redirigez des ressources vers des personnes qui profitent de notre système et haussez les taxes pour les Canadiens. Ce n'est pas ainsi qu'il faut gérer un système d'immigration.
    Ensuite, pis encore, le gouvernement vous embauche. Il vous embauche pour agir comme communicateur dans le dossier. Vous n'avez aucun pouvoir sur ces bureaucrates. Vous n'avez pas la capacité de présenter un mémoire au Cabinet ou de donner à la GRC des instructions sur ce genre de choses. Vous êtes un porte-parole glorifié pour le premier ministre dans ce dossier.
    Cela a des répercussions réelles. Vous avez tellement maltraité ce dossier — tellement que c'est embarrassant — et vous devriez en être tenus responsables à l'automne. Nous sommes juste fatigués. C'est une comédie. C'est une farce.
    Ma question pour vous est la suivante. Êtes-vous à l'aise avec votre héritage personnel — vous avez connu une longue carrière en tant que ministre —, c'est-à-dire avoir immolé le système d'immigration du Canada sur l'autel des gains politiques pour vous-même et pour le Parti libéral?
    Merci beaucoup de poser la question.
    Des députés: Ha, ha!
    L'hon. Bill Blair: Je suis très à l'aise. La tâche qu'on m'a confiée supposait de prendre des mesures pour gérer de façon plus efficiente et efficace la question de la migration irrégulière, et, comme j'en ai déjà informé le Comité, je suis très...
    Je vais donc prendre cela comme un oui, et j'espère que les électeurs vous demanderont des comptes en octobre.
    Si vous ne voulez pas le reste de la réponse, madame Rempel, je vais m'en remettre au président.
    Je crois juste...
    Il vous reste environ 25 secondes.
    Je crois juste que la réponse est oui. Vous savez, je me sens mal pour vous, monsieur Blair, vraiment.
    Je me sens mal pour vous, donc je vous souhaite tout le succès possible après octobre.
    Merci. J'ai terminé.
    Madame Kwan, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre, et merci à vos employés d'être ici aujourd'hui. Je pourrais pester, mais je vais m'en abstenir et plutôt vous poser quelques questions.
    Jean-Nicolas Beuze, du HCR, a dit dans un article en avril que le gouvernement l'avait assuré que « personne » ne serait renvoyé « sans audience ». C'est une citation. En ce moment, l'examen des risques avant renvoi ne garantit pas la tenue d'une audience. Le gouvernement prévoit-il changer le processus d'examen des risques avant renvoi et en élargir l'utilisation et la portée afin d'inclure un processus d'audience garanti?
    Merci beaucoup de poser la question.
    Essentiellement, la réponse est oui. Notre objectif, c'est que les gens dont on a déterminé que la demande ne pouvait pas être déférée à la CISR parce qu'ils ont présenté une demande ailleurs — c'est ce qui figure à la section 16 — dans un autre pays qui est réputé être un pays sûr auront l'occasion de faire l'objet d'un examen des risques avant renvoi. Ce ne sera pas juste un exercice sur papier. Il y aura réellement une audience. Ils auront l'occasion de faire venir un conseil juridique, et leur demande sera entendue.
    Ils pourraient aussi profiter d'un contrôle judiciaire devant la Cour fédérale. Juste pour faciliter cette procédure, les propositions budgétaires comprennent une augmentation du nombre de juges fédéraux — trois — afin de faciliter ces audiences de façon opportune.
    De plus, une fois qu'ils auront eu cette audience, si on détermine qu'ils sont à risque, ils ne seront pas renvoyés.
    D'accord. Vous dites qu'on garantira à tout le monde un processus d'audience. Celui-ci sera dirigé par des juges par l'entremise de la Cour fédérale. Est-ce que je vous ai bien compris?
    Non. Cela serait dirigé par des représentants. Les représentants qui effectuent actuellement les examens des risques avant renvoi conserveront cette autorité et cette responsabilité, mais il s'agira d'une audience en personne, pas d'un exercice sur papier, où une personne aura un conseil juridique...
    Je suis désolée. Je vais vous interrompre un instant.
    L'hon. Bill Blair: ... et cela fait l'objet d'un contrôle judiciaire.
    Mme Jenny Kwan: S'agira-t-il d'une audience? Ou est-ce une entrevue? Il y a une différence notable entre une audience et une entrevue. Ce dont vous parlez en ce moment dans le cadre de ce processus est une entrevue auprès de représentants. N'est-ce pas?
    Nous vous donnerons une réponse absolument claire.
    Monsieur MacKinnon, pourriez-vous clarifier exactement comment l'ERAR va fonctionner?
    Oui. Je crois que « audience » est le terme exact, monsieur le président. Je dirais aussi que, au cours de l'audience...
    Je suis désolée; qui seront les représentants qui effectueront ces audiences? S'agira-t-il de représentants d'IRCC?
    Des représentants d'IRCC.
    Comment seront-ils formés pour mener ces audiences?
    Monsieur le président, ce sont des personnes qui sont formées pour prendre une décision au sujet du statut de réfugié tout comme les commissaires de la CISR sont formés. Ils examinent exactement les mêmes questions. Ils examinent la Convention sur les réfugiés et la Convention contre la torture.
    Ils sont indépendants. Ils ne reçoivent aucune orientation de notre part. Ils peuvent prendre des décisions à leur discrétion et possèdent des années d'expérience dans ce travail.

  (1555)  

    Pour combien d'audiences IRCC recevra-t-il des fonds?
    IRCC est financé pour gérer ce que nous évaluons comme étant environ — nous allons vérifier le chiffre exactement, monsieur le président — environ 3 500 audiences, le nombre d'audiences qui auraient dû être traitées, si cela s'était appliqué, dans ce nouveau système au cours des dernières années.
    Nous recevons des fonds pour cela dans le budget de 2019.
    Vous recevez des fonds pour 3 500 audiences. Nous prévoyons que 50 000 demandes sont présentées.
    Le ministre vient de dire que tout le monde aura accès à cette audience, donc il vous manque 15 000...
    Il importe de se rappeler, monsieur le président, qu'il s'agit de personnes qui ont présenté une demande dans un autre pays, comme les États-Unis.
    Ce n'est pas la cohorte complète de 50 000 demandes. La grande majorité des personnes se présentent devant la CISR.
    Pour être clair, nous ne changeons pas le processus d'ERAR pour les personnes dont la demande d'asile a été réputée irrecevable. Nous ne le changeons pas pour ceux qui n'ont jamais présenté de demande d'asile et qui participent au processus de renvoi.
    Nous ajoutons cela pour les personnes qui ont déjà présenté une demande dans un deuxième pays, un pays sûr, et dont la demande ne pourrait donc pas, en vertu de ces règles, être déférée à la CISR. Elles profiteront de cet ERAR amélioré.
    D'après le propre examen du gouvernement de 2016, « [l]'une des principales résultats (sic) de l'évaluation précédente était que le programme » — le programme auquel il fait allusion est le programme d'examen des risques avant renvoi — « avait évolué par rapport à son objectif initial d'offrir un "filet de sécurité" aux migrants visés par une mesure de renvoi, pour devenir une étape de plus dans le système d'octroi de l'asile et représenter, dans les faits, le mécanisme d'appel pour les demandeurs d'asile déboutés. »
    N'est-ce pas ce que vous faites avec ce processus, transformer essentiellement le processus d'examen des risques avant renvoi en processus d'appel dans les faits?
    Pour les personnes qui sont peut-être — et nous pouvons personnaliser le processus — allées aux États-Unis et ont déjà présenté une demande dans ce pays, lorsqu'elles arrivent ensuite au Canada et tentent de présenter une deuxième demande, elles ne peuvent être déférées à la CISR. Cependant, elles ne peuvent pas être renvoyées aux États-Unis. Elles seraient renvoyées dans leur pays source.
    Mais au préalable, elles pourront maintenant se prévaloir d'un examen des risques avant renvoi, qui est en fait une audience, où elles seront représentées par un conseil juridique et feront ensuite l'objet d'un contrôle judiciaire par une cour fédérale. C'est pour faire en sorte que ces personnes jouissent d'une protection. Nous ne voulons pas renvoyer quelqu'un qui se trouve dans une situation dangereuse et risquée.
    L'examen des risques avant renvoi pour ces personnes, étant donné les circonstances qui font en sorte qu'elles ne peuvent être déférées à la CISR, représente, à notre avis, un niveau de protection approprié pour elles.
    D'accord, je ne vais pas en débattre; je veux juste obtenir des réponses à certaines de ces questions.
    Puisque l'examen des risques avant renvoi n'est accessible que si vous êtes à risque d'être renvoyé, qu'arrive-t-il aux personnes qui proviennent d'un pays avec lequel le Canada a prévu une suspension temporaire ou un sursis administratif du renvoi à ce moment-là? Ce sont les pays qui sont jugés comme trop dangereux pour qu'on y expulse qui que ce soit.
    Qu'arrive-t-il à ces personnes?
    Allez-y, monsieur MacKinnon.
    Monsieur le président, elles resteraient au Canada, tout comme si elles s'étaient présentées devant la CISR et que ce renvoi était en place.
    Nous n'allons pas renvoyer qui que ce soit dans un pays...
    Désolée, mais elles n'ont pas le droit de se présenter devant la CISR.
    Si elles ont franchi la frontière de façon irrégulière à partir des États-Unis, disons, et qu'elles ont déjà présenté une demande aux États-Unis, ce projet de loi les empêche de présenter une demande d'asile ici, au Canada.
    J'essayais de dire que c'est un processus comparable.
    Si elles passent à travers ce nouveau processus et qu'une mesure de renvoi est en place, après la tenue de l'audience, le gouvernement ne renverrait personne vers un pays où une mesure de renvoi était en place.
    Dites-vous que ces personnes seront ensuite dirigées vers ce processus d'examen des risques avant renvoi, et ensuite, s'il est déterminé que le pays n'est pas sûr — s'il figure apparemment sur la liste des pays qui, aux yeux du Canada, ne sont pas sûrs...? Pourquoi les renvoyons-nous vers une audience lorsque nous savons déjà que ce pays n'est pas sûr? Ne s'agit-il pas d'un chevauchement des services?
    En fait, juste par rapport à ce point, nous détenons un rapport du vérificateur général selon lequel le problème important au sein du gouvernement, ce sont les chevauchements. Il pourrait y avoir une personne qui demande...
    Vous pourrez peut-être y revenir durant vos trois dernières minutes, madame Kwan.
    Pardon?
    Nous pourrons peut-être y revenir durant vos trois dernières minutes, mais vous êtes déjà rendue à sept minutes.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Sarai.
    Monsieur le ministre, merci d'être venu.
    Dans le cadre de votre bref mandat comme ministre, et après l'audience d'aujourd'hui, je suis plutôt impressionné que nous ayons été en mesure de réduire les passages frontaliers irréguliers de 47 % d'une année à l'autre, si je ne m'abuse, et ce, sans législation spéciale ou distincte. En réalité, on l'a fait au moyen d'activités de sensibilisation, de mesures d'application de la loi efficaces et du traitement par votre ministère et le ministère relevant d'IRCC.
    Pour moi, évidemment, la Colombie-Britannique est une circonscription importante. Pouvez-vous me dire combien de migrants irréguliers ont franchi la frontière canado-américaine en Colombie-Britannique dans les mois subséquents...?

  (1600)  

    En Colombie-Britannique, pour l'année civile jusqu'à maintenant, c'est 67.
    Seulement 67 personnes ont franchi la frontière?
    Pour l'année civile de 2018, c'était 479.
    Grosso modo, on dirait que c'est une baisse de 70 ou de 80 %.
    Oui.
    Comment cette loi pourra-t-elle continuer de restreindre l'afflux de migrants non admissibles tout en protégeant nos obligations internationales et notre historique de motifs d'ordre humanitaire?
    Elle le fera d'un certain nombre de façons.
    Il y a la mesure que nous venons de mettre en place: ceux qui ont déjà présenté une demande dans un autre pays, aux États-Unis, un pays sûr, ne peuvent pas par la suite présenter une demande au Canada et ne seront pas déférés à la CISR. Cette règle est déjà en place pour les gens qui franchiraient la frontière à un point d'entrée régulier, donc nous nous assurons seulement... et cela repose sur le principe d'équité.
    Les gens sont assujettis à des règles s'ils devaient franchir une frontière à un point d'entrée régulier. Nous croyons que les gens seraient assujettis à des règles semblables s'ils franchissaient la frontière à un point d'entrée irrégulier. Cela vise à éliminer tout incitatif ou avantage d'un passage irrégulier. Nous essayons d'encourager les gens à entrer au pays de façon appropriée.
    Il y a aussi eu une sensibilisation assez importante auprès des collectivités où des gens n'ont, en fait, pas besoin de protection, mais désirent peut-être migrer au Canada pour des raisons économiques ou pour avoir une meilleure vie. Nous avons aussi effectué beaucoup de sensibilisation dans le but de diriger les gens vers les moyens appropriés de présenter une demande d'immigration au Canada, et je crois que ces efforts se sont révélés également efficaces. Toutefois, nous reconnaissons aussi le besoin de répondre à tout ce qui se présente à nos frontières.
    Nous avons procédé au renforcement de notre capacité, car nous voulons être en mesure de garantir aux Canadiens que, dans un premier temps, la sécurité du pays est maintenue, et que, dans un deuxième temps et de façon tout aussi importante, nous respectons nos obligations internationales et la primauté du droit canadien. Les Canadiens s'attendent à un système juste et fondé sur la compassion, mais ils veulent aussi qu'il soit bien géré.
    Nous nous assurons de nous adapter et nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires des États-Unis et d'autres pays pour faire en sorte que les renseignements appropriés soient recueillis, que les gens prennent des mesures proactives pour gérer la situation et que ceux qui viennent se voient donner l'accès à un système plus rapide. Je ne vais pas dire que le système est assez rapide en ce moment; il ne l'est pas. C'est pourquoi nous consentons de nouveaux investissements importants dans le budget de 2019 pour accroître la capacité de la CISR de rendre des décisions en temps opportun quant à la recevabilité des demandes.
    Nous travaillons aussi d'arrache-pied pour nous assurer que ces processus et ces systèmes sont efficaces, de sorte que l'ASFC puisse s'acquitter de ses responsabilités à l'égard de ceux dont la demande est jugée irrecevable de manière à ce qu'elle puisse renvoyer ces personnes en temps opportun.
    Quelle a été la réaction de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés relativement à la loi proposée?
    Nous avons reçu une réponse très positive. Bien sûr, nous l'avons consultée avant la mise en œuvre de toutes les mesures.
    Sa préoccupation, c'était — et c'est exactement la même que celle dont nous a fait part Amnistie internationale — qu'elle voulait s'assurer que chaque personne, avant d'être renvoyée dans une situation de risque possible, pourrait se prévaloir d'un examen des risques avant renvoi, et que nous reconnaîtrions l'importance de la même décision dans ce pays, afin que les gens puissent être représentés par un conseil juridique, avoir une audience en bonne et due forme et faire l'objet d'un contrôle dans nos cours fédérales.
    Nous avons pu fournir cette garantie, et le HCR nous a fortement fait savoir qu'il estime que les mesures que nous mettons en place respectent les obligations internationales du Canada, sont entièrement conformes aux principes de la primauté de l'asile et fournissent aux gens ce qu'il juge être un système de détermination de l'asile de calibre mondial au Canada.
    Aux fins du compte rendu, cela s'applique aux gens qui ont présenté une demande d'asile dans des pays comme les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, et s'ils en ont présenté une ici, ils ne peuvent pas en présenter de nouvelle.
    Parallèlement, ils ne seraient pas renvoyés dans un pays qui est considéré par le Canada comme à risque, où il serait dangereux de les renvoyer. Ils seraient protégés, et je crois que Mme Kwan...

  (1605)  

    Tout d'abord, les pays auxquels ils ont déjà présenté une demande — s'ils l'ont fait — sont ceux avec lesquels nous avons une Entente sur l'échange de renseignements, et ce sont les pays du Groupe des cinq que vous avez mentionnés. Une partie importante de ce processus, c'est que même si des gens ne pouvaient pas être déférés à la CISR parce qu'ils avaient présenté une demande dans un de ces autres pays, ils pourraient tout de même profiter de l'examen des risques avant renvoi, et si on déterminait qu'ils sont à risque, ils recevraient la protection du Canada.
    Avez-vous une idée du volume de demandes qui sera touché? Quelle partie de notre volume de demandes d'asile cela toucherait-il? S'agit-il de 10, de 20 ou de 30 %? Quelle cohorte...
    Sur les 40 000 personnes qui sont entrées irrégulièrement au Canada à nos frontières, je crois savoir qu'environ 3 000 d'entre elles avaient déjà présenté une demande aux États-Unis.
    C'est à peu près le niveau de 3 500 demandes sur une période de deux ans.
    Que comprenez-vous des aspects légaux liés à cela? On a dit que cela pourrait être assujetti à la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Singh c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration. Votre ministère l'a-t-il examiné, les deux ministères l'ont-ils examiné, pour voir si cela résisterait à une contestation en vertu de la Charte?
    Je crois que oui. Bien sûr, tout est assujetti à la possibilité d'une contestation, mais nous croyons fermement que c'est constitutionnel. C'est conforme aux décisions précédentes des tribunaux et cela respecte nos obligations juridiques et nos obligations à l'échelle internationale.
    Il ne vous reste que 20 secondes, monsieur Sarai.
    C'est bon, merci.
    Tandis que nous passons à notre prochaine série de questions de cinq minutes, je reconnais que le temps appartient aux membres et qu'ils peuvent l'utiliser comme bon leur semble, mais j'espère que nous pouvons faire preuve de respect et tenter de nous en tenir aux questions liées à la législation qui nous est présentée.

[Français]

    Bienvenue, monsieur Paul-Hus. Vous n'êtes pas un membre habituel de notre comité, mais j'aimerais entendre vos questions.
    Si elles sont en français, les personnes qui ont besoin de l'interprétation peuvent mettre l'oreillette.
    Bonjour à vous, monsieur le ministre, ainsi qu'à ceux et celles qui vous accompagnent.
    Monsieur le ministre, nous avons eu aujourd'hui le rapport du vérificateur général sur la gestion du dossier de l'immigration, surtout des demandes d'asile. Ce rapport est assez cinglant.
    Faisons abstraction des gens qui sont venus au Canada pour demander l'asile et occupons-nous des problèmes administratifs qu'il y a au sein de l'appareil gouvernemental.
    Pour gérer ces problèmes, le ministre de l’Immigration n'était pas en mesure de faire le travail et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile avait d'autres chats à fouetter. Le gouvernement a donc décidé de créer un nouveau poste de ministre de la Sécurité frontalière et de la Réduction du crime organisé, pour coordonner les efforts. Vous avez été nommé dans ce nouveau poste l'an passé.
    Pouvez-vous nous dire en quoi votre travail a été efficace?

[Traduction]

    Bien franchement, c'était il y a un peu moins d'un an. Dans les responsabilités qu'on m'a confiées, j'ai travaillé en étroite collaboration avec des cadres supérieurs. Je crois que nous avons réalisé des progrès importants, comme je vous l'ai déjà mentionné. Nous avons vu une diminution marquée du nombre de gens qui se présentent de façon irrégulière depuis ma nomination, et à vrai dire, cela n'avait rien à voir avec ma nomination. C'est le résultat direct de quelques mesures très efficaces qui ont été appliquées par nos représentants et du travail qu'ils ont fait à l'échelle internationale. C'est très important de le reconnaître.
    Nous avons aussi proposé un certain nombre de mesures qui, nous l'espérons, continueront de renforcer la capacité dans le budget de 2018, et maintenant, dans le budget de 2019, et d'adapter la capacité de la CISR de déterminer en temps opportun l'admissibilité des gens. Et nous avons présenté des mesures qui, je crois, éliminent certains des désavantages et peut-être des incitatifs qui existaient dans le système précédent, lesquels encourageaient des gens à traverser la frontière de manière irrégulière. Nous avons...

[Français]

    Je vous arrête ici, monsieur le ministre. Vous parlez encore des gens qui veulent venir au Canada et du fait qu'on essaie de les en dissuader. Nous savons qu'il faut apporter des changements à l'Entente entre le Canada et les États-Unis sur les tiers pays sûrs, mais là je vous parle des problèmes que nous avons actuellement à l'interne.
    Le gouvernement fédéral a investi plus de 1 milliard de dollars sur trois ans. C'est sans compter les dépenses des provinces pour la gestion du dossier. En quoi le projet de loi et les crédits demandés vont-ils régler les problèmes à l'interne?
    Nous avons appris aujourd'hui que tout le monde travaille en vase clos et qu'il n'y a pas de coordination. Les gens d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et ceux de l'Agence des services frontaliers du Canada travaillent chacun de leur côté et ne se parlent pas. L'arriéré est énorme et on ne se parle pas. On nous dit qu'il y a des problèmes informatiques.
    Vous êtes en poste et c'est maintenant votre fonction. En quoi le projet de loi va-t-il rendre les choses plus efficaces?

[Traduction]

    Oui, peut-être ne connaissez-vous pas le Conseil de gestion du système d'octroi de l'asile qui a été établi pour réunir les cadres supérieurs d'IRCC, de l'ASFC, de la GRC et de tous les ministères qui ont la responsabilité de gérer la question du système d'octroi de l'asile, y compris la migration irrégulière. Ce conseil a été formé en 2018. Il a amélioré de manière considérable la collaboration et l'intégration horizontale de ces services.
    De plus, je crois que vous verrez dans le budget de 2019 que nous avons repéré des endroits où des investissements supplémentaires étaient requis à IRCC, à la CISR, à l'ASFC et à la GRC, afin de soutenir le travail important qu'ils font pour maintenir l'intégrité de nos frontières et gérer de manière efficace, équitable et conforme...

  (1610)  

[Français]

    Monsieur le ministre...

[Traduction]

    ... notre système d'octroi de l'asile.

[Français]

    On ne parle que d'investir encore et encore. N'y a-t-il pas autre chose qui pourrait être fait pour régler les problèmes?
    Il n'y a pas de coordination et on ne donne pas de directives, mais il doit bien y avoir moyen de changer cela. On parle de plus de 1 milliard de dollars d'investissements et il n'y a aucun résultat. Ce n'est pas nous qui le disons, mais le vérificateur général.
    Il me reste une minute et j'aimerais que vous me parliez de sécurité.
    Le rapport du vérificateur général souligne qu'il y a un problème au sein de l'Agence des services frontaliers du Canada relativement aux évaluations de sécurité de certaines personnes. Il y a au moins 400 personnes qui ont franchi notre frontière sans avoir fait l'objet d'une vérification de sécurité efficace. Pouvez-vous nous en parler?

[Traduction]

    En 45 secondes, s'il vous plaît.
    Permettez-moi de dire avec énormément d'insistance que personne présentant des préoccupations en matière de grande criminalité ou de sécurité n'a été admis au Canada. Il y a eu un très petit nombre de personnes dont les données biométriques n'ont pas été correctement inscrites dans les bases de données.
    Monsieur Ossowski, rapidement, voulez-vous commenter l'un ou l'autre des aspects du travail que l'ASFC fait à cet égard?
    Je crois qu'il convient de ne pas confondre l'inscription de données biométriques dans le Système mondial de gestion des cas et la vérification de sécurité appropriée. Vous pouvez toujours effectuer une vérification des bases de données criminelles américaine et canadienne à partir de données biographiques. Nous le faisons. Nous avons effectué un examen manuel des dossiers et nous nous sommes assurés que c'était bel et bien fait et que les représentants traitaient la criminalité de la même manière qu'ils le feraient pour qui que ce soit qui se présente avec un problème de criminalité.

[Français]

    Merci, monsieur Ossowski.
    Monsieur Ayoub, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je veux commencer par m'excuser auprès des fonctionnaires qui vous accompagnent pour les commentaires qui ont été faits. Je trouve ce genre de commentaires ignobles. Monsieur le ministre, vous êtes venu témoigner ici et je suis convaincu que vous travaillez avec vos collègues pour améliorer le système partout au Canada.
    Vous avez parlé des résultats obtenus, mais j'aimerais que vous répétiez les chiffres, car je pense qu'on n'a pas bien compris. On a dit que le nombre de demandes irrégulières avait baissé de 47 %. À l'été de 2017, on a été très occupé du côté du Québec à cet égard.
    Quels seront les effets du projet de loi? Qu'est-ce qui vous permet d'avoir bon espoir qu'il va améliorer les choses?

[Traduction]

    Certainement, je crois que, lorsque l'afflux immédiat s'est produit au Québec, on a très bien répondu à ce moment-là, mais c'était une réponse réactive, vu la grande vague de personnes qui se sont présentées à la frontière, particulièrement au bout du chemin Roxham, au Québec. Les répercussions se sont aussi fait sentir dans d'autres lieux, comme Emerson, au Manitoba, et sur l'autoroute du Pacifique, en Colombie-Britannique, mais nos représentants, je crois, ont répondu de manière assez appropriée et ont affecté les ressources et intégré des processus très efficaces, que j'ai examinés de manière très approfondie. Je suis assez rassuré par l'excellent niveau de collaboration et la façon réfléchie dont ils ont géré cette augmentation, que l'on connaît partout dans le monde, mais qui a été exceptionnellement bien gérée, à mon avis, par nos représentants à la frontière. Grâce aux fruits de leur travail, nous avons constaté une réduction considérable du nombre de personnes qui se présentent de manière irrégulière à notre frontière.
    Je vais vous donner un autre exemple. Nous avons entendu parler plus tôt de la Colombie-Britannique. Au Manitoba, en 2017, près de 1 300 personnes ont traversé la frontière de manière irrégulière en provenance des États-Unis. L'an dernier, ce chiffre a baissé, pour atteindre environ 500 personnes. Au cours des trois premiers mois de l'année, ce nombre est tombé en deçà de 10. C'est l'excellent travail qui a été effectué par nos représentants en collaboration avec leurs partenaires des États-Unis et d'autres régions du monde qui a directement influencé ce changement. Mais en même temps, nous reconnaissons que la prise de décisions en temps opportun par la CISR exigeait de nouveaux investissements importants, et nous avons donc travaillé avec le nouveau directeur de la CISR pour faire en sorte qu'il soit doté du personnel supplémentaire nécessaire pour prendre ces décisions en temps opportun.
    Le degré d'innovation et de collaboration entre nos représentants par l'entremise de ce nouveau conseil de gestion composé de nos cadres supérieurs qui supervisent ces processus a entraîné un certain nombre d'innovations. Par exemple, nous avons maintenant un projet d'évaluation intégrée des demandes d'asile en cours, qui apporte une plus grande efficacité à ces processus. Pour les personnes qui cherchent à demander l'asile au Canada et n'ont peut-être pas besoin de notre protection, je crois qu'il y a une meilleure connaissance au sujet des gains d'efficacité améliorés et des décisions prises en temps plus opportun, ainsi que de la certitude qu'elles feront l'objet d'un renvoi si on détermine qu'elles ne sont pas à risque, ce qui nous aide à réduire le nombre de personnes qui se présentent de façon irrégulière à la frontière.

  (1615)  

[Français]

    Si jamais vous avez les chiffres du Québec au sujet des demandes irrégulières, j'aimerais beaucoup les avoir.
    L'autre aspect de ma question concerne l'équité dans le traitement des demandes venant de personnes qui entrent au Canada de façon irrégulière et de celles venant de personnes qui entrent illégalement au pays. Comment s'assurera-t-on que ce système traitera toutes les demandes de ces personnes de façon équitable et en toute justice et que les droits de la personne seront respectés?

[Traduction]

    Monsieur Ayoub, au début de la discussion sur le nombre élevé de personnes qui se présentent et qui franchissent nos frontières de manière irrégulière pour demander l'asile, on a beaucoup laissé entendre que cela représentait un risque pour la sécurité. Je peux vous assurer que ce n'est pas le cas. Nos représentants font des pieds et des mains pour s'assurer qu'il n'y a pas de menace de criminalité ou de menace pour la sécurité nationale.
    Il a aussi été question de l'équité. Je crois que de nombreux Canadiens étaient préoccupés par le fait que les gens qui se présentaient de manière irrégulière recevaient peut-être un certain type d'avantage indu. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons travaillé très fort avant de proposer des mesures dans le projet de loi sur le budget pour réduire tout incitatif ou avantage que les personnes qui choisissent de franchir irrégulièrement la frontière auraient sur celles qui choisissent de traverser la frontière à un point d'entrée régulier. C'est simplement une reconnaissance et un respect du sentiment d'équité des Canadiens. Le système doit être équitable et efficace, et il sera toujours fondé sur la compassion.
    Pour les quatre dernières minutes, je crois que nous pouvons maintenant passer à une combinaison de Mme Rempel, qui partage son temps avec M. Maguire.
    Madame Rempel, allez-y.
    À quel pourcentage des gens qui sont entrés illégalement au Canada à partir du Nord de l'État de New York depuis janvier 2017 et ont par la suite présenté une demande d'asile la section 16 de la LEB s'appliquerait-elle?
    Pour ceux qui avaient déjà présenté une demande aux États-Unis, je crois savoir que le chiffre se situe quelque part entre 3 000 et 3 500.
    Est-ce exact, monsieur Ossowski?
    Était-ce moins de 10 %, comme 5 ou 6 %?
    C'est pour cette disposition particulière, pour ceux qui avaient déjà présenté une demande.
    Merci. Je voulais juste le faire inscrire au compte rendu.
    Vous n'avez pas vraiment répondu à la question de votre collègue. Je crois qu'il vous a demandé si vous aviez fait une analyse pour voir si cela résisterait à une contestation devant la Cour suprême ou à une contestation judiciaire. Vous avez dit que vous croyez que...
    Une analyse a-t-elle été effectuée, et pourriez-vous la déposer au Comité à des fins d'examen?
    Nous avons certainement travaillé avec le ministère de la Justice sur cette analyse, et nous avons l'analyse en vertu de la Charte. Monsieur le président, que le ministère de la Justice soit ou non d'accord pour que nous la déposions devant le Comité... Nous ferons assurément un suivi sur cette question.
    Je dirais que cela revêt une certaine importance pour la présente étude. Si cette analyse révèle qu'il pourrait ne pas résister à une contestation judiciaire — et c'est ce que je pense — avez-vous l'intention d'utiliser la disposition de dérogation pour le maintenir?
    Je demeure convaincu qu'il pourra, en fait, résister à cette contestation. C'est le conseil que nous avons reçu du ministère de la Justice, mais encore une fois, je ne voudrais pas parler pour lui. Si nous pouvons déposer cette opinion auprès du Comité, nous le ferons certainement.
    Vous attendez-vous à des contestations judiciaires par rapport à ce projet de loi?
    Selon mon expérience, presque chaque domaine du droit est visé par un litige. C'est la nature de toute nouvelle loi, donc c'est assurément possible que quelqu'un puisse chercher...
    C'est autre chose.
    ... à le contester, mais je demeure convaincu de sa constitutionnalité.
    Avez-vous prévu quoi que ce soit au budget pour tenir compte du fait que cela fera assurément l'objet d'un litige? Quels coûts prévoyez-vous? Encore une fois, prévoyez-vous utiliser la disposition de dérogation?
    Nous n'avons rien présenté dans le budget de 2019 qui porte précisément là-dessus. Nous ne prévoyons pas avoir besoin de ressources extraordinaires pour nous occuper d'une telle contestation.
    Je vais céder la parole à M. Maguire.
    Une des choses que j'ai pris sur moi de faire l'an dernier, c'était de remettre une lettre au directeur parlementaire du budget concernant tous les coûts liés aux personnes ayant traversé illégalement la frontière pour venir jusqu'au Canada durant cette période. Le gouvernement avait prévu au budget quelques centaines de millions de dollars pour tout cela. Il est revenu en novembre dernier et nous a dit que c'était 1,1 milliard de dollars. Maintenant, je vois que vous avez prévu 1,18 milliard de dollars pour la recommandation 2.28 sur cinq ans, afin de tenter de couvrir une partie du coût du traitement de 40 000 demandes d'asile. Il y a un arriéré de 71 000 demandes d'asile.
    Croyez-vous que cela correspondra à peu près au coût nécessaire pour le gérer, compte tenu du fait que cela n'inclut pas de sommes équivalentes à celles que les provinces ont déjà dit qu'elles devraient aussi verser?

  (1620)  

    Nous croyons que le budget que nous avons présenté est le budget approprié afin de doter adéquatement en ressources IRCC, la CISR, l'ASFC, la GRC et d'autres organismes fédéraux qui ont une responsabilité à cet égard.
    Croyez-vous que ce sera suffisant lorsqu'il y a déjà un arriéré de 71 000 demandes? Vous vous occuperez de 50 000 demandes, et selon ce que je comprends du rapport publié aujourd'hui, il y a des demandes pour lesquelles vous espérez... on espère que cela permettra de rattraper le retard, parce que s'il y en a moins qui sont présentées durant l'année, cela permettra aux représentants de reprendre le temps perdu par rapport à une partie de l'arriéré lourd et très public.
    Pour bien gérer cela, monsieur Maguire, nous faisons deux choses. Nous déployons un effort considérable pour réduire le nombre de gens qui franchissent la frontière de façon irrégulière, et nous avons obtenu, comme je l'ai déjà mentionné au Comité, un succès important à cet égard. Nous procédons aussi à l'augmentation significative de la capacité de nos organismes et de nos ministères, en particulier la CISR...
    Monsieur Blair, c'est un peu tard. Comme ma collègue l'a dit un peu plus tôt, il nous reste quelques mois avant l'élection. Pourquoi n'avez-vous pas commencé il y a deux ans et demi quand ce problème est apparu?
    Nous l'avons fait.
    Non, vous ne l'avez pas fait.
    Vous ne vous en souvenez peut-être pas, mais dans le budget de 2018, nous avons ajouté 74 millions de dollars, par exemple, pour augmenter de manière considérable la capacité de la CISR de mener des audiences. Si je me souviens bien, on a abordé cette question au Comité. Je ne sais pas si vous vous rappelez ou non que...
    C'est justement ce que je dis, monsieur Blair. Les 74 millions de dollars constituent une goutte d'eau dans l'océan par rapport à ce qui est exigé des provinces, et même de vos ministères fédéraux, afin qu'ils puissent gérer l'arriéré des dernières années. En deux ans, environ 40 000 personnes ont franchi illégalement la frontière.
    Il n'y aura pas suffisamment de temps pour répondre à cette question, mais peut-être que Mme Zahid posera une question du même type.
    Merci, monsieur le ministre, d'être venu aujourd'hui. J'ai dans ma circonscription de Scarborough-Centre de nombreux immigrants, et vous avez aussi de nombreux immigrants dans des circonscriptions voisines. Comme tous les Canadiens, ils croient en l'importance d'un système d'immigration équitable pour tous. Je sais que le Canada est un pays accueillant qui appuie dans l'ensemble fortement l'immigration. La perception selon laquelle le système est équitable pour tous est essentielle pour maintenir cet appui du public.
    Pourriez-vous s'il vous plaît nous assurer que les changements qui sont proposés dans la section 16 protégeront l'intégrité de notre système d'immigration, tout en répondant à la fois aux obligations internationales du Canada et en garantissant que nous sommes un lieu qui accueille les personnes ayant un besoin véritable de protection?
    Madame Zahid, je crois que votre question est importante.
    Je pense que le maintien de la confiance des Canadiens envers leur système de protection des réfugiés est capital. Nous avons travaillé très fort pour nous assurer qu'il détient les ressources adéquates pour gérer les volumes que le Canada et d'autres pays du monde connaissent actuellement. Nous avons vu une augmentation assez significative du nombre de personnes qui demandent l'asile. Nous avons aussi entendu les préoccupations de nombreux Canadiens concernant le fait que les personnes qui franchissaient la frontière de manière irrégulière étaient traitées de la même manière que celles qui choisissent de demander l'asile ici, à un point d'entrée régulier.
    Nous avons examiné toutes les règles et travaillé d'arrache-pied pour veiller à trouver le juste équilibre et à maintenir l'équité dans le système. Nous nous sommes aussi assurés qu'il n'y aura pas d'avantage particulier pour une personne qui pourrait choisir de franchir la frontière de manière irrégulière, tout en reconnaissant aussi que, pour les personnes qui fuient la guerre et la persécution et craignent pour leur vie et la sécurité de leurs enfants, nous serons toujours un pays accueillant et réceptif et qui offre la protection à ces personnes.
    Nous comprenons également que l'équité dans le système exige une décision en temps opportun quant à savoir si une personne est ou non admissible à la protection du Canada, et nous savons donc qu'il nous fallait consentir de nouveaux investissements importants dans la capacité de la CISR à ce chapitre. En même temps, nous devrons nous assurer que ces systèmes sont aussi dirigés de manière efficace, parce que certaines de ces personnes sont réputées ne pas être admissibles. Elles doivent faire l'objet d'un renvoi en temps opportun, et c'est fait de manière soignée et avec compassion, mais il importe que le système parvienne aussi à rassurer les Canadiens quant à son équité. Je crois que nous avons réussi à trouver le bon équilibre.
    Comme je l'ai déjà dit, je me suis longuement entretenu avec le HCR et Amnistie internationale ainsi que d'autres entités qui veulent faire en sorte que le Canada maintienne une approche axée sur la compassion et accueillante à l'égard de ceux qui ont vraiment besoin de protection et que nous respections nos obligations juridiques. Je crois très sincèrement que les mesures que nous proposons dans le budget de 2019, dans le projet de loi présenté au Comité, ont réussi à atteindre cet équilibre et que nous mettons en œuvre des mesures qui sont réfléchies, raisonnables, légales et appropriées dans les circonstances.

  (1625)  

    Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit qu'il se trouve 24 millions de réfugiés dans le monde et que 258 millions de migrants sont en déplacement. Les réfugiés sont en train de fuir des zones de guerre ou ont dû quitter leur pays en raison de catastrophes naturelles. Croyez-vous que le nombre de personnes qui franchissent la frontière de manière irrégulière pour venir au Canada était le fruit d'un simple gazouillis?
    Honnêtement, je crois que c'est une absurdité. On n'a qu'à lire le journal pour voir ce qui se passe dans le monde et comment d'autres pays qui sont, comme le Canada, des lieux accueillants, sûrs et qui font preuve de compassion, où des gens du monde entier auraient pu demander l'asile...
    De nombreuses régions du monde sont en proie à des conflits et des risques réels. Le Canada a une longue et très fière histoire de terre d'accueil pour les personnes ayant vraiment besoin de notre protection. Nous réfléchissons également à la contribution de ceux qui ont demandé l'asile ici à l'édification d'un Canada formidable, fort et résilient.
    Je crois que c'est une source de grande fierté pour nous tous, mais le fait de laisser entendre que 250 millions de personnes étaient soudainement en déplacement en raison d'un gazouillis est ridicule, et le fait de dire que le phénomène mondial où près de 25 millions de vrais réfugiés sont influencés... Juste pour mettre les choses en contexte, sur ces 25 millions de personnes que l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés considère comme étant de vrais réfugiés, moins de 0,16 % ont demandé l'asile au Canada.
    Nous avons une dernière série de questions de trois minutes, par Mme Kwan.
    J'aimerais juste parler de chiffres pour une minute.
    Vous avez un arriéré de 71 000 cas. La CISR nous a dit qu'elle attend environ 60 000 cas cette année et 60 000 nouvelles demandes l'année prochaine. Le budget prévoit le financement de 40 700 cas cette année et de 50 000 cas l'an prochain. De simples calculs mathématiques nous disent que vous allez en fait vous heurter à un « arriéré 2.0 ». Le problème que les conservateurs vous ont légué avec l'« arriéré 1.0 » deviendra maintenant en fait l'« arriéré 2.0 », même avec votre financement supplémentaire. Comment cela va-t-il vraiment régler le problème?
    Pour ce qui est de créer un volet d'examen des risques avant renvoi et d'y pelleter 3 500 cas, n'allez-vous pas en fait détourner le travail de la CISR vers IRCC, qui fera exactement la même chose?
    Non. Par rapport à votre deuxième question, je dirais en tout respect que non, ce n'est pas le cas. Les processus de la CISR — tous les examens et les appels subséquents, ainsi que le contrôle judiciaire — exigent passablement de temps. L'examen des risques avant renvoi, nonobstant la tenue d'une audience avec un conseil juridique, et sous réserve du contrôle judiciaire, peut être fait de façon beaucoup plus rapide, je crois. Je crois aussi que les personnes qui se rendent compte qu'elles n'ont pas accès au processus complet d'examen d'une deuxième demande d'asile si elles ont déjà présenté une demande dans un autre pays seraient encouragées et invitées à rester dans le pays où elles se trouvent, ce qui nous aidera à réduire les chiffres.
    Je suis d'accord: il faut du temps. Nous avons tenu de nombreuses discussions avec la CISR. Il faut du temps pour renforcer sa capacité de traiter le nombre de demandes actuellement dans la file d'attente, mais elle réalise de réels progrès. L'augmentation de sa capacité fait partie de notre stratégie, tout comme la réduction du nombre de demandes. Nous visons à faire en sorte que les gens comprennent clairement nos systèmes d'immigration et les lois se rattachant aux demandes d'asile dans le pays, et à nous assurer... nous avons découvert que, en étant proactifs, en communiquant de manière plus efficace et en travaillant avec nos partenaires internationaux, nous avons pu obtenir une réduction très importante du nombre de personnes qui se présentent.
    Merci. Toutefois, d'après la propre projection de la CISR relativement au nombre de cas qu'elle prévoit cette année et l'année prochaine, si vous passez en revue tous ces chiffres, vous aurez tout de même un arriéré de plus de 80 000 cas. Vous ne réglez pas vraiment le problème. Ces 80 000 cas, même d'après le rapport du vérificateur général — il ne projetait qu'une augmentation de 50 000 cas chaque année, et son bureau projette maintenant un processus quinquennal où les gens seront coincés dans les limbes — ce n'est pas bien mieux, franchement. En fait, c'est pratiquement la même chose que ce que les conservateurs vous ont légué. Ce que le gouvernement fait maintenant, à la veille d'une élection, c'est léguer cet arriéré à quiconque entrera en fonction après cela.

  (1630)  

    Madame Kwan, pourriez-vous poser votre question très rapidement? Vos trois minutes sont écoulées, mais si le ministre est prêt à rester et à y répondre, il peut le faire.
    Je vais poser une question très rapide. J'ai demandé au ministre si je pouvais m'entretenir en privé avec lui afin de passer en revue la législation et pour qu'il réponde aux questions sans contrainte de temps. Cette demande ne m'a pas été accordée. Je me demande si je peux ou non maintenant présenter la demande au ministre.
    Bien sûr. Je ne sais pas quelle était la difficulté au moment de prévoir du temps, mais vous et moi avons eu l'occasion de nous entretenir plus tôt sur d'autres questions. Si nous pouvons trouver un moment qui fonctionne pour tous les deux, je serai heureux de vous rencontrer.
    Dites-moi quand, et je serai là.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous allons prendre une pause d'une minute pendant que nous changeons le groupe de témoins. Je crois comprendre que vos représentants restent pour la prochaine heure.
    Merci.

  (1630)  


  (1630)  

    Nous avons maintenant l'occasion de poursuivre avec les représentants ministériels sur des questions que nous venons d'entendre avec le ministre Blair concernant la section 16 de la partie 4 de la Loi d'exécution du budget de 2019.
    Je crois que la première personne à poser des questions aux représentants est M. Sarai.
    Monsieur Sarai, c'est à vous.
    Je vous remercie encore une fois d'être ici et de donner de votre temps.
    Ma première question porte sur quelque chose que je voulais peut-être demander au ministre, mais je vais vous le demander à vous.
    Il y a un nouveau pouvoir d'émettre un décret pour cesser le traitement des visas de résident temporaire si les gouvernements étrangers refusent de manière déraisonnable de délivrer des titres de voyage ou en retardent la délivrance. Je crois qu'il s'agit de l'article 304.
    Je suis curieux de savoir si c'est une pratique courante. Le cas échéant, dans combien de pays est-elle utilisée? Croyez-vous que cet outil sera essentiel pour régler ce problème?
    Monsieur le président, je peux dire certaines choses à ce sujet. Je sais que le Royaume-Uni suit un processus semblable. Le concept pour aider nos collègues à l'ASFC à recevoir des titres de voyage est assez simple. Le gouvernement croit que deux choses pourraient se révéler utiles: des mesures incitatives positives pour travailler avec ces pays sur des choses comme l'intégrité de leurs titres — leurs passeports — mais aussi peut-être, dans certains cas, décider que le gouvernement doit interrompre la délivrance de visas pour tous les ressortissants ou une cohorte particulière de ressortissants. Cette décision serait prise, monsieur le président, à ce moment-là, à la lumière d'une relation bilatérale élargie, pas seulement de la délivrance de visas et de la question du renvoi.

  (1635)  

    Y a-t-il une épidémie en ce moment? Y a-t-il certains pays qui nous donnent du fil à retordre avec leurs titres de voyage pour que nous sentions la nécessité d'agir ainsi?
    Il y en a certains, mais c'est un environnement très dynamique, je dirais. Vous devez le situer dans le contexte de la relation bilatérale élargie à un certain moment. Ce ne serait qu'un outil utile parmi tant d'autres que nous pourrions utiliser. J'aimerais insister sur ce qu'a dit M. MacKinnon: il faut essayer de bâtir avec ces pays une relation positive, dans un sens élargi, et de reconnaître notre intérêt à renvoyer ces gens et de travailler avec eux pour rendre la transition aussi harmonieuse que possible.
    En ce qui concerne les nouvelles orientations au moment de déterminer si des demandeurs d'asile peuvent être déférés à la CISR, la première étape, quand une demande d'asile est reçue au Canada, consiste en un examen de la recevabilité. Le délai de trois jours avant le renvoi devant la CISR serait maintenant éliminé. De combien de temps les agents ont-ils actuellement besoin pour évaluer la recevabilité des demandes?
    Assurément, de notre côté, lorsqu'ils se présentent à un point d'entrée, il faudrait peut-être jusqu'à 8 heures pour passer en revue une demande. Cela dépend de la complexité, du nombre de membres dans la famille, et de ce que nous découvrons durant ce processus.
    Pourquoi est-il nécessaire d'éliminer ces trois jours? Dit-on qu'on pourrait les traiter plus rapidement ou plus lentement? J'essaie de comprendre l'intention qui sous-tend ce changement.
    Je crois que c'est vraiment juste pour que nous ne soyons pas pressés artificiellement, sans avoir le temps de traiter les demandes de façon appropriée. Durant des périodes de grands volumes, cela nous permettra de maintenir l'intégrité du processus sans être assujettis à un délai artificiel.
    Dans le passé, à quelle fréquence le délai de trois jours était-il dépassé?
    Nous pouvons obtenir ces chiffres pour vous, monsieur le président. Cela se produit vraiment durant des périodes d'afflux important à la frontière. Si vous retournez à l'été de 2017, lorsqu'un grand nombre de personnes sont entrées, une partie de ces demandes se situaient à l'extérieur de la période de recevabilité. Nous obtiendrons les chiffres et vous les communiquerons. Je ne veux pas prendre de votre temps.
    Bien sûr.
    J'ai posé la question au ministre au sujet de l'article 306 du projet de loi C-97, qui consiste à interdire à une personne de présenter une demande d'asile si elle en a présenté une dans un autre pays, un des pays du Groupe des cinq avec lequel nous avons un accord. Une personne dans cette situation serait autorisée à demander l'examen des risques avant renvoi. Si cette disposition était mise en œuvre, quels effets aurait-elle à votre avis sur le volume des demandes d'examen des risques avant renvoi reçues par la CISR? Je sais que, en ce moment, le ministre a dit qu'il y aura environ 3 000 ou 3 500 demandes concernant des migrants irréguliers... mais cela aurait aussi une incidence sur ceux qui arrivent par avion ou peut-être sur les personnes éventuellement visées par le délai imminent du programme DACA aux États-Unis, qui ont présenté une demande aux États-Unis? Les États-Unis pourraient autrement juger que les demandes sont irrecevables aux États-Unis, mais ces gens ont présenté une demande là-bas.
    Oui, je crois que la meilleure approximation que nous avons, monsieur le président, pour deviner ce qui va se produire dans l'avenir, c'est de regarder en arrière, et ce sont les 3 500 cas que le ministre a mentionnés au Comité. Une bonne partie de ces 3 500 cas seraient des demandeurs d'asile irréguliers. Cela s'applique non seulement aux demandeurs d'asile réguliers, comme vous le savez, mais aussi à tous les demandeurs d'asile qui arrivent. Nous nous attendons à voir ces plus de 3 500 demandes d'asile sur une période d'environ deux ans et nous nous y préparons, mais de façon prospective, il est difficile de savoir exactement à quoi ce chiffre pourrait ressembler.
    Comment prévoyez-vous composer avec l'afflux si la capacité augmente? Y a-t-il des mesures pour traiter cela efficacement et rapidement, afin que cela ne devienne pas un arriéré en soi?
    Nous recevons un financement en fonction des chiffres que nous évaluons, donc c'est à peu près ces 3 500 cas, mais je crois, monsieur le président, que tout comme nous l'avons fait durant les dernières années, nous pourrions examiner comment gérer certains afflux — ce que nous avons fait au chemin Roxham —, et le président de l'ASFC a réaligné le travail, et nous pourrions donc examiner comment procéder. Nous ne nous attendons pas à ce type d'afflux dans cette cohorte.

  (1640)  

    Vous aviez dit plus tôt... Ce qui est disponible maintenant n'est pas très clair, mais pour ce qui est d'effectuer une audience d'ERAR, les transcriptions seront-elles rendues accessibles durant les appels? Les gens auront-ils le droit à un avocat là-bas? Ces audiences se tiendront-elles en personne ou s'agira-t-il simplement d'une demande papier?
    Je vais peut-être juste dire quelques mots au sujet du rôle du conseil, car je crois que cela fait partie de votre question. Le conseil est autorisé à aider le demandeur à se préparer en vue de l'audience, à clarifier des questions et à donner un coup de main avec les réponses, mais il est aussi en mesure, à l'audience, d'aider à clarifier ou à corriger des renseignements mis au jour durant le processus d'audience.
    Merci, monsieur MacKinnon. Peut-être que quelqu'un vous donnera l'occasion de terminer la réponse.
    Monsieur Tilson, allez-y.
    Il me semble que les trois principales entités concernées ne se parlent pas. Je le dis en raison de la conclusion du vérificateur général selon laquelle les systèmes de gestion de l'information d'IRCC, de l'ASFC et de la CISR sont essentiellement incompatibles. Je me demande si vous auriez des commentaires à cet égard. Si mon hypothèse est bonne, comment cela sera-t-il réglé?
    Une des choses que nous avons mises en place l'an dernier, c'était un conseil qui s'appelle le Conseil de gestion du système d'octroi de l'asile. C'est un conseil où les responsables des ministères — M. Ossowski ici, moi-même et la CISR — se réunissent environ toutes les six semaines. Le but de ce conseil est de discuter de ces enjeux, lorsque nous avons des types de préoccupations concernant l'échange de renseignements ou de mettre en place de nouvelles initiatives lorsque nous voulons nous réunir collectivement de sorte que, dans l'avenir, nous nous exprimions en fait du point de vue d'une personne, mais aussi de celui des TI.
    Une des choses que les récents investissements budgétaires nous ont donnée, c'était 36 millions de dollars pour investir dans de nouvelles TI. Une des choses qui ont présenté un défi pour nous, c'est que nous avons des types de systèmes très anciens du point de vue des TI et qu'ils ne se parlent donc pas. Dans l'avenir, ce que nous voulons, évidemment, c'est être en mesure d'établir des liens en matière d'échange de renseignements du point de vue électronique également. En ce moment, nous utilisons le conseil que nous avons, où nous nous réunissons régulièrement pour parler de ces enjeux: comment gérer les projets et comment mettre en œuvre ces systèmes, du point de vue tant des communications que des technologies; donc, en fait, ces systèmes se parlent.
    À quelle fréquence les gens se réunissent-ils?
    En ce moment, nous nous réunissons environ toutes les six semaines, mais parfois, nous pouvons nous réunir plus souvent afin d'aborder des enjeux précis. À titre d'exemple, dans le cadre des investissements budgétaires, nous avons réuni un conseil de manière à pouvoir parler de la façon de mettre en œuvre collectivement ces initiatives, de manière à ne pas nous gêner les uns les autres, ou à être en symbiose de façon à ne pas perdre contact par inadvertance.
    C'est votre réponse aux commentaires du vérificateur général. Vous avez l'impression que ce comité de gestion règle le problème.
    Ce serait un exemple, mais dans le cadre du comité de gestion, monsieur le président, nous avons une structure de gouvernance entière.
    Pour vous donner un exemple, nous avons un certain nombre de groupes de travail composés de directeurs généraux qui collaborent sur un certain nombre de questions de mise en œuvre de politiques et d'activités. Nous travaillons avec d'autres ministères, comme Affaires mondiales, Sécurité publique, nos homologues de la GRC et du SCRS, Services publics Canada, à titre d'exemple, et Services partagés. Ces groupes collectifs travaillent ensemble pour que nous puissions réellement influencer tout le système au chapitre de l'échange de renseignements et de la communication, de manière à faire avancer le système de façon intégrée.
    Monsieur le président, j'aimerais faire référence à l'article 301, qui a pour but: « de préserver l'intégrité du système d'immigration canadien grâce à la mise en place d'une procédure équitable et efficace ».
    J'aimerais savoir ce qui a motivé l'ajout de cet article.

  (1645)  

    Monsieur le président, je crois que cela apporte juste des précisions quant à l'objectif de ces dispositions et s'harmonise avec des objectifs existants semblables dans la LIPR, en plus d'énoncer simplement que l'objet est de maintenir l'intégrité du système d'octroi de l'asile canadien. C'est un type d'affirmation contextuelle qui est conforme aux autres parties de la LIPR.
    Il n'y avait donc rien qui n'était pas équitable ou efficace dans le texte de loi existant.
    C'est juste une affirmation curieuse à faire, mais peut-être que vous avez répondu à la question.
    Monsieur le président, je crois que ce devrait être la réponse.
    Et je ne vais pas insister davantage.
    Monsieur le président, le vérificateur général a concrètement énoncé que le système de demande d'asile n'est pas suffisamment doté en ressources. Ce n'est pas à moi — ni à mon parti — de préconiser l'augmentation des dépenses du gouvernement, mais nous avons des obligations juridiques et des obligations découlant de traités pour décider qui est ou non un véritable réfugié. Cela exige un système de détermination de l'asile suffisamment doté en ressources.
    Quels efforts le gouvernement a-t-il faits pour élaborer un modèle de financement plus flexible qui répond aux fluctuations du nombre de demandes présentées chaque année?
    Une des choses sur lesquelles nous avons commencé à travailler en ce moment avec nos collègues des Finances et du Conseil du Trésor, c'est l'élaboration d'un modèle de financement plus conforme pour tenir compte des fluctuations que nous observons dans le système et nous assurer que les ressources nous sont fournies en temps opportun.
    Bien sûr, nous faisons tout le temps des choses, comme M. MacKinnon l'a indiqué plus tôt. Quand nous observons des pressions dans un certain domaine, nous déplaçons des ressources, nous nous parlons pour voir comment nous pouvons les atténuer. Ce n'est pas un moyen durable de mener des activités, donc une partie des conversations que nous avons avec nos représentants des Finances et du Conseil du Trésor portent sur la façon de créer un système qui nous permet d'être plus fluides au chapitre de nos ressources. Nous avons entamé ces conversations et nous recherchons des choses qui ont une incidence sur nous, comme des flambées du nombre de demandes d'asile ou des répercussions en matière de déplacements, afin que nous puissions élaborer une formule qui nous aidera à le faire. Ce travail a cours en ce moment, et nous espérons présenter quelque chose ici dans les prochains mois.
    Il vous reste environ 20 secondes, monsieur Tilson.
    Je vais céder la parole, merci.
    Madame Kwan, allez-y.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais juste revenir à IRCC, le nouveau volet qu'il va entreprendre pour environ 3 500 cas, le processus d'examen des risques avant renvoi. Combien de cas gère-t-il maintenant?
    Vous gérez maintenant 2 400 cas. Vous vous attendez à recevoir 3 500 cas de plus. D'où les ressources qui vous permettent de les gérer proviennent-elles?
    Par l'entremise d'IRCC, monsieur le président, nous détenons un effectif extrêmement robuste de décideurs dans l'ensemble du Canada et à l'étranger. Le recrutement se fait à même IRCC; ce sont des gens qui possèdent de l'expérience et de l'expertise pour ce qui est de prendre ces décisions difficiles.
    Combien de personnes ajouteriez-vous à IRCC pour qu'elles se consacrent à ce volet précis?
    En ce moment, monsieur le président, je ne pourrais pas vous fournir de réponse exacte, mais nous examinons activement les différents modèles et ce qui serait exigé, en plus de la formation nécessaire pour faire en sorte que ces personnes prennent de bonnes décisions.
    Plus tôt, on nous a dit qu'elles étaient déjà formées; vous dites maintenant qu'elles doivent être formées. Vous devez trouver les gens et vous ne savez pas combien vous en trouverez pour faire ce travail.
    En ce moment, nous avons un groupe de personnes qui prennent des décisions relatives à l'ERAR. De plus, afin de répondre à la demande et à l'inventaire qui a été créé, nous embauchons des personnes supplémentaires à qui nous fournirons une formation.
    D'accord, donc vous cherchez à embaucher des gens. Vous ne les avez pas encore et vous n'avez pas prévu combien de personnes vous embaucherez pour traiter ces 3 500 cas.
    Je vais m'arrêter ici une minute. J'aimerais poser quelques autres questions.
    Je vois que le gouvernement a ajouté — mis à part les États-Unis, qui est le lieu évident — les pays du Groupe des cinq à la liste des pays en provenance desquels les gens ne pourront pas présenter de demande. L'Australie est un de ces pays. En 2016, les Nations Unies ont statué que la détention indéfinie de réfugiés par l'Australie, sur l'île de Nauru, pour des motifs de sécurité secrets, était aussi arbitraire qu'illégale. Amnistie internationale, Human Rights Watch et d'autres groupes se sont longtemps prononcés contre cette pratique continue. En 2017, les tribunaux de l'Australie ont ordonné au gouvernement de verser plus de 70 millions de dollars à des réfugiés et à des demandeurs d'asile qui avaient subi des blessures physiques et mentales durant leur détention dans des centres de détention sur l'île Manus. Le Global Legal Action Network et la International Human Rights and Conflict Resolution Clinic de la faculté de droit de l'Université Stanford se sont présentés devant la Cour pénale internationale pour faire valoir que le traitement des réfugiés dans les installations sur ces îles avaient atteint le degré de crime contre l'humanité.
    Les crimes contre l'humanité sont-ils acceptables dans la mesure où nous détenons une Entente sur l'échange de renseignements?

  (1650)  

    Monsieur le président, dans ce cas précis, comme ces personnes n'auraient pas présenté de demande en Australie, puisqu'elles ne sont pas autorisées à le faire là-bas, elles devraient passer à travers le processus de la CISR ici, au Canada. Nous ne les soumettrions pas à ce processus, parce que la composition de cette cohorte tient entièrement au fait qu'elles ont présenté une demande d'asile authentique.
    Et si elles ont réellement présenté une demande? Si elles ont réussi à se rendre aux États-Unis et à présenter une demande là-bas, vous les soumettriez à ce processus, n'est-ce pas?
    Si elles présentaient une demande d'asile authentique aux États-Unis, oui. Mais au sujet de votre exemple précis...
     Non. Même si elles présentaient une demande d'asile authentique, même si elles présentaient juste une demande, comme elles ont présenté une demande aux États-Unis en vertu de ce système, aux termes du projet de loi C-97, elles seraient refusées.
    Oui. Mais pour reprendre votre exemple précédent, si elles tentaient de présenter une demande en Australie, elles ne seraient pas autorisées à le faire, dans cet exemple. Elles ne viendraient donc pas de cette cohorte.
    Si elles se trouvaient aux États-Unis et présentaient une demande, oui, cela s'appliquerait à cette cohorte.
    Disons qu'elles ont en quelque sorte quitté l'Australie, qu'elles se sont rendues aux États-Unis et qu'elles ont présenté une demande là-bas, puis elles ont traversé la frontière pour venir au Canada. Elles devraient passer par ce processus. J'illustre ce point comme un problème réel lié au processus que le gouvernement a établi et pour mettre en lumière les lacunes possibles qui mettent des gens à risque.
    Monsieur le président, juste pour donner quelques précisions, il convient de se rappeler que, lorsqu'elles viennent au Canada, nous les évaluons en vertu de nos obligations internationales. C'est différent de... Nous ne les renvoyons pas dans un pays afin qu'elles y soient jugées. Elles passent à travers le processus d'ERAR ici, et nous sommes convaincus que cela satisfait à nos obligations internationales.
    Voyons cela d'un autre angle.
    Si, dans le scénario que j'ai décrit, vous dites à la personne: « D'accord, nous n'allons pas vous refuser — vous irez maintenant à IRCC pour être évalué en vertu du processus d'ERAR », ne s'agit-il pas d'un chevauchement du travail, lorsque vous savez déjà que l'Australie l'a déjà fait? Donc, je mentionne le point qui a été soulevé par le vérificateur général au sujet des chevauchements. La main droite ne sait pas ce que fait la main gauche. Des gens demandent un processus accéléré. Entretemps, ils continuent d'être traités de façon régulière. Il s'avère que le processus accéléré n'est pas plus rapide que le processus régulier.
    Ici, vous mettez sur pied un autre système pour traiter avec ce groupe spécifique de personnes, ce qui crée effectivement, pour autant que je sache, un chevauchement dans le processus. Je ne suis pas bien certaine de l'efficacité de ce processus. Peut-être que sur le plan des chiffres, si nous réacheminions 3 500 cas vers cet autre processus, cela semblerait réduire la demande pour la CISR. Mais même ce faisant, la CISR est tout de même saisie de plus de 40 000 cas et n'est pas financée adéquatement pour faire le travail. Toute l'argumentation du rapport du vérificateur général concerne l'incapacité du gouvernement de s'assurer que la CISR a un accès rapide à des ressources pour traiter les demandes. Cela ne règle pas vraiment le problème. L'absence de ressources ne règle pas vraiment le problème.
    J'ai une autre question que j'aimerais poser. Je ne sais pas si je l'ai ratée quand je suis allée à la salle de bain.
    Une disposition du projet de loi permettrait au gouvernement d'interdire la délivrance de visas temporaires à tous les citoyens d'un pays si ce pays refuse de délivrer des passeports à certains de ses citoyens. Donc, effectivement, vous puniriez un groupe de personnes en provenance d'un pays particulier si ce gouvernement refuse de délivrer des passeports à certains de ses citoyens.
    Dans quelles circonstances prévoyez-vous utiliser cette disposition? Pourquoi l'a-t-on insérée dans le projet de loi C-97?
    Il ne vous reste que 25 secondes, mais je signale qu'on a répondu à cette question dans une question posée par M. Sarai.
    Je peux répondre.
    Je crois que c'est juste un autre outil que nous pouvons mettre en place, et d'autres pays le font. Le Royaume-Uni le fait. Ces pays essaient de dialoguer, de manière positive, avec le pays pour s'assurer de comprendre nos intérêts lorsque nous reprenons leurs gens...

  (1655)  

    Autrement dit, en fait, c'est essentiellement un bâton. C'est une menace, de dire que nous allons faire cela.
    Ce que j'ai dit plus tôt, c'était...
    Nous allons passer à Mme Zahid.
    Je remercie les représentants.
    Quelle période le vérificateur général a-t-il étudiée? Le rapport du vérificateur général reposait sur quelles années?
    C'était de janvier 2015 au 30 juin 2018.
    Depuis, le gouvernement a-t-il consacré des investissements ou apporté des changements qui répondent directement aux conclusions et aux recommandations du vérificateur général? Pourriez-vous s'il vous plaît expliquer les changements que vous avez apportés ou les ressources qui ont été investies au-delà de cette période?
    Je peux commencer de notre côté, certainement.
    Nous avons certainement tiré profit d'investissements dans le budget de 2018 pour nous aider à nous adapter à cette nouvelle situation à laquelle nous devions répondre, puis, par la suite, dans le budget de 2019. Il y a eu une évolution constante tout au long de la période examinée par le vérificateur général. Depuis la fin de l'étude du vérificateur général, nous avons examiné des investissements visant à accroître notre efficacité dans la façon dont nous traitons les gens avant leur arrivée, dans le travail sur l'interception que nous faisons avec nos homologues américains; puis à l'arrivée et au cours du processus subséquent, y compris celui devant la CISR et le renvoi subséquent, si l'on juge que ces personnes n'ont pas besoin de protection.
    Monsieur le président, les investissements que nous avons vus appuient ces types de piliers, les secteurs sur lesquels nous focalisons notre attention afin d'accroître la capacité de répondre aux volumes, d'être plus efficaces et de travailler en collaboration dans nos processus et nos moyens de dissuasion.
    Dans les diverses poches... nous voyons des investissements dans l'ensemble des divers ministères. Pour donner quelques exemples, à IRCC, il y a environ 280 millions de dollars; et à la CISR, environ 208 millions de dollars. Ce sont des sommes investies pour nous aider à accroître notre capacité et notre efficience. Cela comprend des choses comme l'ajout de nouvelles ressources afin de pouvoir répondre au volume de demandes que nous recevons, et en même temps, de mettre des choses en place, comme les structures dont j'ai parlé plus tôt, par exemple le Conseil de gestion du système d'octroi de l'asile, qui travaille de façon plus efficace dans l'ensemble du spectre élargi.
    Maintenant, si quelqu'un qui franchit la frontière à un poste régulier présente une demande, le traitement sera effectué par les représentants d'IRCC. Y a-t-il un programme de formation en place pour les agents qui procéderaient à des audiences d'ERAR?
    Je suis très fier du travail qui a été réalisé par des collègues à la GRC et à l'ASFC, et aussi à IRCC, qui visait précisément à faire en sorte que nous ayons des flux migratoires bien gérés relativement aux migrants irréguliers. Nous voulons que le processus soit équitable et qu'il reconnaisse le fait que ce n'est pas illégal de demander l'asile au Canada; nous voulons aussi nous assurer que ces personnes sont traitées de manière équitable et humaine.
    Les gens font l'objet d'un traitement extrêmement efficace. Par exemple, ils reçoivent du soutien fédéral provisoire en quelques jours. Ils reçoivent également des permis de travail, car nous voulons que ces personnes accèdent au marché du travail très rapidement. C'est fait de façon très intégrée. C'est pourquoi nous avions l'an dernier le projet pilote appelé « Centre intégré d'analyse des demandes d'asile », en fonction duquel nous nous réunissions, avec nos collègues de l'ASFC, de la CISR et d'IRCC, et examinions les meilleurs moyens d'effectuer le traitement afin de nous assurer qu'il était rapide et efficace.
    Quelle est la différence entre le processus d'audience à la CISR et l'ERAR? Pourriez-vous expliquer en quoi ces deux processus diffèrent?
    Partagez-vous votre temps à M. DeCourcey?

  (1700)  

    Oui, je vais partager mon temps avec mon collègue.
    La Section de la protection des réfugiés est un tribunal quasi-judiciaire. C'est semblable à un tribunal judiciaire, donc si le délégué du ministre intervient, le processus devient accusatoire.
    Dans le contexte de l'examen des risques avant renvoi, c'est un représentant d'IRCC qui examine la demande, et dans le cas où il y a une audience, c'est lui qui interrogerait le demandeur dans le cadre de cette audience.
    N'oubliez pas que, dans les deux cas, on examine les mêmes questions afin d'établir l'octroi de l'asile. Il s'agit de la Convention relative au statut des réfugiés et de la Convention contre la torture. On utilise donc la même norme.
    Madame Zahid, vous pouvez continuer pendant une minute et demie. Je crois que M. DeCourcey a accès au temps alloué à M. Tabbara.
    J'ai une question pour les fonctionnaires de l'ASFC.
    Je crois que, dans le passé, il y a eu une certaine confusion concernant le filtrage de sécurité des demandeurs d'asile. Pourriez-vous décrire le processus de sécurité mis en place lors du passage de la frontière ainsi que le processus de sécurité une fois qu'une demande est jugée recevable?
    Lorsque quelqu'un se présente à un point d'entrée, nous menons une série de processus pour tous les demandeurs d'asile, en utilisant des données biographiques et biométriques. Nous effectuons des vérifications des antécédents judiciaires par l'entremise du CIPC, le Centre d'information de la police canadienne, et du NCIC, qui est le système américain d'information sur le crime, et nous échangeons des renseignements biométriques avec nos partenaires afin de voir si ces demandeurs d'asile ont déjà présenté des demandes d'asile dans d'autres pays.
    Au cours d'une entrevue, nous rassemblons tous ces renseignements et nous nous assurons d'abord de régler toutes les questions d'interdiction de territoire, puis nous abordons les aspects liés à l'admissibilité. Ils doivent avant tout être admissibles à entrer au Canada, et nous traiterions ensuite de la recevabilité de la demande d'asile.
    À la suite du processus, lorsqu'ils ont finalement leur audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, nous effectuons un processus de filtrage de sécurité plus approfondi. Il s'agit davantage de vérifier les menaces à la sécurité nationale et des éléments liés au crime organisé; nous consultons d'autres bases de données et collaborons avec nos partenaires de la sécurité nationale, en particulier le SCRS.
    Nous passons maintenant aux séries de questions de cinq minutes, à commencer par M. Maguire.
    L'ASFC a-t-elle examiné les mesures législatives qui seraient nécessaires pour supprimer l'échappatoire en ce qui concerne les membres de la famille prêts à aider qui arrivent au point d'entrée?
    Il s'agit de l'Entente sur les tiers pays sûrs.
    Oui.
    Nous avons, bien sûr, participé à des discussions avec des fonctionnaires américains, ainsi qu'avec nos collègues d'IRCC, et sous la direction du ministre. Oui, nous...
    Avez-vous obtenu des résultats avec ce processus?
    Nous avons toujours des discussions fructueuses, mais c'est un processus. C'est en cours, et il y a beaucoup de bonne volonté, mais cela s'inscrit dans le contexte plus large des relations bilatérales. Cela pourrait donc prendre un certain temps.
    Quel processus a effectivement eu lieu? S'agit-il de discussions avec des ministères équivalents aux États-Unis?
    Oui. En fait, je me trouvais aux États-Unis il y a quelques semaines et j'ai eu des discussions à ce sujet avec les responsables de la Homeland Security. Ils ont exprimé beaucoup de bonne volonté pour examiner la question.
    Pensez-vous que les solutions à ce problème devraient faire partie de la section 16?
    Je pense que nous avons signé un traité distinct avec les États-Unis. Il serait distinct de tout cadre législatif que nous établirions dans le cadre du processus actuel.
    À titre d'exemple, si une personne au Canada franchissait la frontière américaine entre des postes frontaliers — entre des points d'entrée —, comment serait-elle traitée si elle demandait l'asile aux États-Unis? Comment cette personne serait-elle traitée en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs?
    Voulez-vous dire en vertu des nouvelles mesures législatives proposées ou actuellement?
    Non, simplement...
    Actuellement, si des personnes se présentent entre des points d'entrée aux États-Unis et qu'elles ont déjà entamé un processus de demande d'asile aux États-Unis, elles pourraient toujours présenter leur demande ici. Est-ce exact?
    Que feraient les Américains avec ces gens?
    Monsieur le président, ils auraient accès au système d'octroi de l'asile des États-Unis. Les responsables ne peuvent pas renvoyer ces gens au Canada, car le traité fonctionne dans les deux sens. S'ils entraient aux États-Unis par un point d'entrée officiel, ils seraient bien sûr renvoyés au Canada.
    Monsieur le président, le Rapport du vérificateur général indique que 65 % des audiences ont été reportées au moins une fois avant qu'une décision soit rendue. Chaque fois qu'une audience est reportée, cela cause des retards importants — généralement cinq mois en moyenne, selon le vérificateur général — comparativement aux cas où il n'y a eu aucun report. Pour environ un quart des demandes d'asile, les audiences ont été reportées plusieurs fois, rallongeant ainsi le délai d'au moins huit mois; 25 % des demandes d'asile.
    Ce ne serait pas si grave, je suppose, mais il semble que, dans certains cas, de nouvelles demandes d'asile ont été traitées avant celles qui ont fait l'objet d'un report. Il semble s'agir d'un pourcentage très élevé.
    Pouvez-vous expliquer pourquoi il en est ainsi? Quel est le processus qui n'a pas été suivi pour que cela se produise?

  (1705)  

    Je ne peux pas vous expliquer en détail comment se déroulent la mise au rôle et les reports, mais les audiences sont reportées pour plusieurs raisons. Il se peut que le filtrage de sécurité ne soit pas prêt au moment de l'audience. Il pourrait s'agir d'une question de justice et d'équité, lorsque les demandeurs, les demandeurs d'asile ou leur conseil ne sont pas en mesure de se présenter à une audience, ou pour des raisons opérationnelles internes, par exemple si le décideur à la CISR est malade ou non disponible.
    La CISR procède ensuite au report, et c'est à elle de décider comment elle effectue la mise au rôle, à la lumière de toutes les autres demandes d'asile inscrites au registre des audiences.
    D'après ce que j'ai compris, bon nombre de ces reports étaient attribuables à des facteurs administratifs qui, selon le Rapport du vérificateur général, relèvent du contrôle du gouvernement. Si vous examinez les pratiques de mise au rôle de la Commission, il est indiqué qu'une nouvelle date pour l'audience reportée doit être fixée au plus tard 10 jours ouvrables après la date initiale, mais seulement 10 % de ces audiences l'ont été. Que fait-on pour améliorer cette situation?
    J'ajouterai peut-être quelques éléments au commentaire de M. Baril.
    L'une des choses que nous avons établies avec notre Conseil de gestion du système d'octroi de l'asile est un thème de discussion spécifique qui permet d'examiner ce que nous appelons des « problèmes épineux » — le genre de choses qui engorgent ou bloquent le système — puis de les décortiquer afin de trouver la racine du problème. Par exemple, supposons qu'il y a un retard dans les autorisations de sécurité; pourquoi ce retard? Est-ce un élément lié à l'échange de renseignements ou à un autre ministère? D'autres choses que nous...
    Merci, madame MacDonald. Espérons que nous pourrons avoir plus d'exemples dans la prochaine série de questions.
    Nous passons maintenant à M. Ayoub.

[Français]

    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais aller directement aux nouvelles directives.
    À l'heure actuelle, lorsqu'une demande d'asile est déposée au Canada, la première étape est de déterminer la recevabilité de cette demande d'immigration ou de statut de réfugié. Cet examen doit se faire dans un délai de trois jours.
    Désormais, il ne sera plus obligatoire de respecter ce délai. Quelles seront les nouvelles procédures? Qu'est-ce qui explique l'abandon de ce délai? Quelle sera la suite des choses pour ces personnes? Continueront-elles d'être traitées de façon équitable?
    En fait, ce que le projet de loi supprime, c'est le fait qu'au-delà du délai de trois jours, toute demande d'asile soit automatiquement réputée recevable, même si elle n'a pas été évaluée par un agent de l'Agence des services frontaliers du Canada ou d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    Nous avons toujours l'intention de déterminer la recevabilité d'une demande dans un délai très court, qu'il s'agisse des huit heures que mentionnait M. Ossowski ou de quelques jours, selon l'information que nous recevons lors de la demande.
    Par contre, advenant un afflux de migrants à la frontière, nous voulons donner à nos agents la capacité et le temps de bien examiner la recevabilité de chaque demande avant de la déférer automatiquement à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada.
    Il s'agit donc d'une mesure sécuritaire de plus dans les cas où les demandes seraient plus nombreuses et où l'on aurait besoin de davantage de flexibilité. Est-ce bien la logique qui sous-tend cette mesure?
    Oui. Cette mesure donnera plus de temps à nos agents pour étudier l'admissibilité au Canada et la recevabilité de la demande d'asile.
    À quelle fréquence ces demandes sont-elles carrément refusées ou directement envoyées à une autre instance?

  (1710)  

    Selon les chiffres que nous avons, depuis janvier 2017, à peu près 23 400 demandes ont été automatiquement déférées à la Commission sans que nos agents aient pu finaliser leur étude. Naturellement, nos agents continuent leur étude même après la transmission. À cette étape, nous avons trouvé à peu près 25 cas où nous avons dû revoir la recevabilité de la demande et arrêter les démarches entamées par la Commission.
    Il est très important de préciser qu'IRCC s'engage à traiter les demandes reçues de façon rapide et efficace. Il est tout à fait à notre avantage de répertorier ces demandeurs, de nous assurer qu'ils ont accès à des soins de santé et qu'ils obtiennent un permis de travail afin de s'intégrer au marché du travail le plus vite possible.
    Je vous remercie de cette précision.
    J'ai une autre question, cette fois sur l'article 306 du projet de loi. Lorsqu'une personne a déjà présenté une demande dans un des quatre pays avec lesquels le Canada a conclu un accord d'échange de renseignements et qu'elle vient au Canada pour également y présenter une demande, cette dernière sera désormais jugée irrecevable.
    Avez-vous une idée du nombre de demandes que cette mesure aurait fait rejeter parmi toutes celles que nous avons déjà reçues ou qui sont présentement à l'étude?
    Non, nous n'avons pas cette information.
    Cette nouvelle mesure se veut dissuasive. Nous espérons qu'elle poussera les gens à poursuivre le processus entamé dans le pays où ils ont présenté leur demande d'asile et à se conformer à la décision qui y sera rendue.
    Selon nos chiffres, si cette mesure avait été en vigueur en 2017 et 2018, de 3 200 à 3 400 personnes auraient pu être visées, puisqu'elles avaient présenté plusieurs demandes d'asile. Environ 75 % d'entre elles étaient arrivées au Canada de manière irrégulière. La majorité de ces cas n'ont d'ailleurs pas encore été traités par la Commission.
    Une centaine de ces personnes ont présenté une demande d'asile au Canada, puis sont allées faire la même chose aux États-Unis, avant de revenir au Canada présenter une nouvelle demande d'asile.
    Par ailleurs, environ 150 personnes ont présenté une demande d'asile à leur port d'entrée au Canada, mais ont été renvoyées vers les États-Unis, en vertu des dispositions de l'Entente entre le Canada et les États-Unis sur les tiers pays sûrs. Par la suite, ces personnes ont décidé de revenir au Canada, mais de manière irrégulière. La plupart d'entre elles sont de nationalité haïtienne. Pour l'instant, le taux d'approbation de leurs demandes est assez bas, mais beaucoup de ces dossiers n'ont pas encore été traités par la Commission.
    Retrouve-t-on un jeu de vases communicants lorsque les gens entrent au Canada et font une demande qui est ensuite jugée irrecevable? Est-ce que leur dossier est quand même étudié ultérieurement, de sorte que celui-ci n'est pas rejeté sans aucune autre mesure? Y a-t-il une autre étape offrant une possibilité que leur dossier soit étudié ou est-ce la dernière étape pour eux?
    Malheureusement, monsieur Ayoub, nous n'avons pas assez de temps pour obtenir une réponse à cette question.
    Le témoin pourrait nous fournir une réponse écrite.
    Si M. Tilson pose la même question, nous aurons une réponse.

[Traduction]

    Monsieur Tilson, la parole est à vous.
    J'aimerais en dire un peu plus sur un aspect de la section 16, qui modifie la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés afin d'empêcher les demandes d'asile au Canada si un demandeur d'asile a été refusé dans certains autres pays avec lesquels nous avons signé une entente sur l'échange de renseignements.
    Je suppose que c'est le domaine qui préoccupera le plus les témoins qui comparaîtront devant nous après vous. Je me demande si vous pourriez nous aider quant à la raison qui sous-tend cela. En écoutant ce qui a été dit dans les médias et ailleurs, je peux m'attendre à ce que cette question ne soit pas bien accueillie par un grand nombre de personnes.
    Monsieur MacKinnon, qu'en pensez-vous?
    Je peux formuler quelques réflexions. Je suppose que ma première idée serait que nous sommes convaincus que cela respecte nos obligations internationales, bien que le processus soit différent de celui de la CISR. Comme je l'ai dit à quelques reprises, la décision est fondée sur les mêmes normes et les mêmes seuils que la CISR.
    Mon deuxième et dernier point serait que, dans un certain sens, nous n'innovons pas ici. Nous rencontrons des situations dans lesquelles les demandeurs d'asile qui arrivent au Canada n'ont pas accès à la CISR et passent directement à un examen des risques avant renvoi.
    Je vais vous donner quelques exemples. Monsieur le président, je peux vous en donner cinq ou six, si cela vous aide.
    Si quelqu'un a déjà présenté une demande d'asile au Canada — y compris les personnes dont la demande d'asile a été retirée ou dont le désistement a été prononcé —, s'il bénéficie déjà d'une protection dans un pays tiers, c'est-à-dire s'il a déjà obtenu l'asile, mais qu'il se présente au Canada et soumet une autre demande d'asile, il passera directement à l'examen des risques avant renvoi. Ou bien, si une personne est interdite de territoire pour raison de sécurité — atteinte aux droits humains ou internationaux, grande criminalité ou criminalité organisée —, elle ne se retrouve pas directement à la CISR pour comparaître devant la Section de la protection des réfugiés, la Section d'appel des réfugiés, la Cour fédérale, pour passer ensuite à l'ERAR. Dans ces exemples, les personnes passent directement à l'examen des risques avant renvoi, un processus comparable à ce que nous proposons pour la présente cohorte.
    Le principal point dont je veux vous faire part, toutefois, c'est que le cas de ces personnes est examiné en application des obligations internationales du Canada, ce qui est essentiel. Le gouvernement ne veut renvoyer personne vers une situation de persécution.

  (1715)  

    Je m'attendrais à tout le contraire, c'est-à-dire au rejet des demandes d'asile.
    Au rejet des demandes d'asile? Non, il s'agit de reconnaître que vous devez présenter votre demande d'asile dans le premier pays sûr où vous entrez.
    M. David Tilson: Oui.
    M. Paul MacKinnon: Mon collègue a exposé des chiffres concernant le nombre de demandeurs d'asile aux États-Unis qui venaient ensuite au Canada afin de demander l'asile, puis qui étaient renvoyés aux États-Unis en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs, pour ensuite revenir au Canada par le chemin Roxham. Dans ce cas, nous pensons qu'il est préférable pour le système global que cette personne présente sa demande d'asile dans le premier pays sûr.
    Je peux vous poser une question politique, mais nous verrons ce que le président dit. Nous allons le mettre à l'épreuve. Il est temps qu'il soit mis à l'épreuve.
    Êtes-vous au courant de discussions avec les Américains à ce sujet?
    Eh bien, je sais, parce qu'en tant que fonctionnaires...
    Êtes-vous en mesure de nous en parler?
    Cela pourrait être une question politique, monsieur le président.
    Je ne suis pas sûr de la question...
    J'espère que vous direz que ça n'en serait pas une.
    En tant que hauts fonctionnaires, nous parlons tout le temps à nos collègues américains.
    Oui, mais c'est une préoccupation. Ce point sera soulevé devant le Comité, alors je suis intéressé par les propos qui ont peut-être été échangés entre vous et les Américains.
    Je ne peux parler que de mes discussions. De manière générale, nous leur donnons de l'information sur ce que le gouvernement met en place dans la LEB, et nous les tiendrons au courant pendant que le Comité délibérera sur le cheminement du projet de loi. Il s'agit surtout d'une séance d'information.
    Comment ont-ils réagi?
    Je pense qu'il est juste de dire, monsieur le président, qu'ils ont réagi de façon positive, en ce sens qu'ils n'ont soulevé aucune préoccupation concernant les éléments figurant dans la LEB.
    Le gouvernement a-t-il un plan pour la mise en œuvre des recommandations du vérificateur général relatives à la conception d'un mécanisme de financement plus flexible? Madame MacDonald, je pense que vous en avez parlé.
    Monsieur Tilson, c'est une excellente question, mais je crains que vos cinq minutes ne soient écoulées.
    Je vais maintenant passer à M. DeCourcey.
    Monsieur MacKinnon, je voulais vous donner l'occasion de répondre à une question à laquelle je pense que vous n'avez pas eu l'occasion de répondre correctement plus tôt. Quelle est la différence importante entre un demandeur d'asile qui aurait été empêché de demander l'asile en Australie, qui s'est rendu aux États-Unis où il a demandé l'asile, puis est venu au Canada, par rapport à un demandeur d'asile qui était en Australie, incapable de demander l'asile, et qui est ensuite venu au Canada? Pourriez-vous s'il vous plaît répondre à cette question, afin que la réponse soit consignée au compte rendu? En quoi le traitement de ces deux demandeurs d'asile serait-il nettement différent selon la section 16?
    En ce qui concerne la question précédente du député, monsieur le président, dans l'exemple des gens en Australie qui se rendent dans l'une des deux îles, ils ne présentent pas de demande d'asile en Australie. Ils ne sont pas autorisés à demander l'asile en Australie. S'ils finissaient par arriver au Canada, on ne sait pas comment, et présentaient une demande d'asile ici au Canada, ils auraient accès à la CISR. Ils ne feraient pas partie de cette cohorte, car l'élément clé ici est que vous devez avoir fait une demande d'asile dans l'un des autres pays avec lesquels nous échangeons des renseignements et, essentiellement, ces personnes n'ont pas présenté une telle demande d'asile.
    D'accord. Je vous remercie.
    Je me demande si les gens assis à la table pourraient parler plus en détail du volume important d'activités entreprises — non pas à la suite du Rapport du vérificateur général, mais du rapport Yeates déposé il y a plusieurs années — pour aider à renforcer les capacités des ministères concernés et de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié; le rapport Yeates énonçait clairement que la Commission manquait de ressources et était incapable de répondre à la demande à l'égard du système.
    Pourrions-nous peut-être parler de la longue liste des activités qui ont amélioré l'efficacité et accru les ressources permettant à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié de traiter plus facilement les demandes relatives à notre système d'octroi de l'asile?

  (1720)  

    Je peux formuler quelques observations, et d'autres voudront peut-être intervenir.
    Monsieur le président, il y a certes eu des investissements importants dans tous les organismes, simplement pour maintenir leur capacité. Ces investissements ont été réalisés dans le budget de 2018 et se situent largement au-dessus du milliard de dollars dans le présent budget de 2019.
    On a investi dans la collecte et l'analyse du renseignement portant sur ces cohortes de manière générale et sur la façon dont nous pouvons travailler avec d'autres pays, par exemple, pour la délivrance de visas. Monsieur le président, nos collègues de la Direction générale des opérations ont travaillé d'arrache-pied, en collaboration avec des fonctionnaires américains et d'autres pays, pour la délivrance de visas américains à ces citoyens, car, comme vous le savez, un fort pourcentage de personnes arrivant principalement au Québec ont effectivement un visa américain valide.
    Nous avons eu des contacts importants avec des députés et d'autres personnes, en particulier juste après les arrivées de Haïtiens, ce qui, à notre avis, a contribué, du moins en partie, à ce nombre d'arrivées irrégulières. Je devrais m'arrêter ici pour respecter le temps alloué. Je ne sais pas si M. Ossowski a d'autres observations à formuler.
    J'ajouterais simplement que, pour l'essentiel, le rapport Yeates énonçait que nous devions considérer le tout comme un système et nous assurer d'être mieux coordonnés que nous ne l'étions réellement. C'est quelque chose que nous avons pris à coeur. Nous avons déjà parlé de notre Conseil de gestion du système d'octroi de l'asile à plusieurs reprises. C'est le mécanisme que nous utilisions pour travailler ensemble sans empiéter sur les conclusions et les processus quasi judiciaires indépendants de la CISR.
    Il y a encore beaucoup de choses que nous pouvons faire pour veiller à ce que la mise au rôle s'effectue correctement et quant à la façon dont nous pouvons établir les priorités de notre travail, mais cela ne nuit pas à l'indépendance des responsables et n'empiète pas sur celle-ci dans la prise de décisions.
    Il pourrait être utile pour les personnes assises à cette table de comprendre comment la CISR effectue un meilleur tri des demandes d'asile afin de rendre le système plus efficace et d'assurer la finalité et l'équité, rapidement. Pouvons-nous en parler un peu?
    Répondez très brièvement, s'il vous plaît.
    Je tiens à souligner, monsieur le président, que j'ai parlé du projet pilote consistant à établir un Centre intégré d'analyse des demandes d'asile que nous avions à Montréal. Nous redoublons d'efforts afin de mettre en place un centre similaire à Toronto, où sont présentées la plupart des demandes d'asile. On s'occupe des demandes d'asile en trois phases, pour ainsi dire. On cherche vraiment comment répartir certaines de ces demandes d'asile et être plus efficace dans leur traitement. On se penche sur la dotation, l'embauche et la formation dont nous avons parlé. On étudie des solutions de TI pour les différentes entités qui participent à ce Centre — la CISR, l'ASFC et IRCC — et on dispose d'un registre plus centralisé qui faciliterait le traitement des demandes d'asile.
    Vous pourriez peut-être prendre quatre minutes si vous le souhaitez, madame Kwan. M. Maguire et moi-même allons prendre une minute à la fin.
    Merci beaucoup. C'est très gentil.
    Je veux revenir à l'exemple australien pour une minute. Dans le cas des personnes qui sont venues d'Australie et qui sont finalement entrées aux États-Unis pour présenter une demande d'asile, si elles décident ensuite de se rendre au Canada, elles seraient soumises au processus d'IRCC. Voilà ce qui en est. Elles n'iront pas à la CISR; je veux le dire très clairement.
    Si le processus d'examen des risques avant renvoi d'IRCC prévoit les mêmes normes et le même seuil que la CISR, pourquoi alors mettre en place un autre processus? Pourquoi ne pas simplement passer par la CISR si c'est effectivement la même chose?
    C'est ce que j'entends de la part du gouvernement, du ministre et des fonctionnaires. Ils disent: « Ne vous inquiétez pas, nous allons vraiment les faire bénéficier de la procédure appropriée. » Pourquoi mettre en place un processus différent si toutes choses sont égales par ailleurs et qu'ils devront se soumettre au processus, de toute façon?
    Le ministre a parlé de « moyens de dissuasion ». Cette partie concerne également les moyens de dissuasion potentiels dans le système. Les gens ne présenteront pas de demande d'asile dans l'un de ces pays, pour ensuite venir au Canada et présenter une autre demande d'asile.

  (1725)  

    Essentiellement, il s'agit d'un processus permettant d'envoyer un message à des personnes, les exposant potentiellement à un risque, en disant: « Ce n'est pas la peine de venir si vous avez déjà présenté une demande d'asile, même si vous avez peut-être déjà une demande d'asile valide. » Même si, en vertu de la convention internationale relative au statut des réfugiés, elles peuvent très bien avoir une demande d'asile valide, nous leur disons simplement: « Ne venez pas de toute façon. »
    Il s'agit ici d'une procédure qui touche 3 500 demandes d'asile, selon les projections du gouvernement. Six mois après une élection, le gouvernement veut faire une déclaration politique à la population: « Ne venez pas présenter de demande d'asile », s'alignant ainsi sur les conservateurs qui disent aux demandeurs d'asile: « Ne venez pas au Canada pour demander l'asile. » en gros, c'est ce que je j'apprends maintenant.
    Je comprends. C'est un commentaire politique qui s'adresse non pas aux fonctionnaires, mais au gouvernement. J'aimerais que le ministre soit ici pour entendre cela, parce que nous jouons essentiellement avec le feu et avec la vie des gens, simplement pour envoyer un message. À quel risque? Les personnes qui ont une demande d'asile valide n'ont nulle part où aller. N'ayant nulle part où aller, elles se retrouvent dans cette situation. C'est ce dont nous parlons. À mes yeux, c'est stupéfiant.
    Nous entendrons d'autres témoins qui vont parler des risques auxquels les gens sont confrontés, notamment le fait d'être aux États-Unis. Je sais que le gouvernement et le HCR diront qu'ils se trouvent dans un pays sûr, mais de nombreux autres experts affirment qu'ils ne le sont pas. En fait, Amnistie internationale a fait venir un expert pour lequel nous avons organisé un déjeuner — avec tous les partis et les sénateurs —, et les experts des Amériques nous ont dit que, en réalité, leurs habitants sont confrontés à la pire violence au monde. Ils sont confrontés à la violence sexuelle et à celle des gangs. Les personnes qui demandent l'asile aux États-Unis seront rejetées d'emblée parce que l'administration Trump a déclaré qu'elle n'acceptait plus ces demandes d'asile. Ces personnes sont obligées de demander l'asile ailleurs.
    Des enfants âgés de sept à neuf ans sont recrutés par des gangs, et les travailleurs là-bas essayaient de négocier avec les membres de gang. Qu'essayaient-ils de négocier? « S'il vous plaît, ne recrutez pas les enfants avant qu'ils aient 13 ans. » C'est ce qu'ils négociaient. C'est pourquoi les gens traversent de manière irrégulière, car ils sont absolument exposés à un risque. Que fait le Canada? Nous allons lever autant d'obstacles que possible pour dire aux gens: « S'il vous plaît, ne venez pas au Canada », juste pour que nous puissions réduire le nombre de migrants. C'est le jeu politique qui est en train d'être joué: il s'agit vraiment de protéger les conservateurs et la droite ultra radicale en vue de fermer la frontière canadienne.
    Franchement, je...
    Merci beaucoup, madame Kwan.
    ... trouve cela choquant. Oui, ce sont mes quatre minutes, je vais donc les utiliser en conséquence.
    C'étaient vos quatre minutes.
    C'est incroyable que nous en soyons arrivés à ce stade.
    Merci beaucoup, madame Kwan.
    Monsieur Maguire, vous avez la parole.
    Je voulais dire plus tôt que, lorsque je soulevais la question des audiences reportées, la période de 10 jours... Tout au long du processus, les gens craignent que ceux dont l'audience étaient reportée se retrouvent, en fait, court-circuités par les nouveaux demandeurs d'asile qui arrivent et passent devant eux; ainsi, les audiences reportées sont reportées encore plus loin. C'est un point qu'il fallait soulever. Nous pouvons lire les conclusions du rapport sur les retards et ce genre de choses. J'allais le lire, mais je ne prendrai pas la peine de lire la conclusion.
    Nous sommes ici pour dire que, en d'autres termes, ce n'est pas la bureaucratie qui fait en sorte que tout cela se soit transformé en de longs délais d'attente, en arriérés et tout le reste. C'est simplement le fait que le gouvernement n'a pas donné aux ministères la marge de manœuvre ou les ressources nécessaires pour réduire l'arriéré en temps opportun.
    Madame MacDonald, le montant alloué dans le budget pour la prestation de ce programme correspond-il au montant recommandé par votre ministère ou s'agit-il d'un montant inférieur?
    C'était l'option que nous avions proposée à notre gouvernement, en tenant compte de tous les divers facteurs auxquels nous faisons face dans l'ensemble du système.
    Nous allons suspendre la séance pour permettre aux gens de souper, puis nous reprendrons la séance à 17 h 30.

  (1725)  


  (1735)  

     Merci de venir à cette troisième série de questions de la 158e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, où nous discutons de la partie 4, section 16, du projet de loi C-97, la Loi d'exécution du budget de 2019. Nous venons de terminer la rencontre avec le ministre Blair et les représentants ministériels au sujet de cette partie du budget.
    Nous aimerions remercier Christian Leuprecht, professeur au département de Sciences politiques du Collège militaire royal du Canada; Nafiya Naso de la Canadian Yazidi Association; et Jean-Nicolas Beuze, qui vient souvent témoigner devant le Comité, du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés au Canada, dont il est le représentant, d'être avec nous aujourd'hui.
    Monsieur Leuprecht, si vous êtes bien installé après le retard de votre train, je commencerai par vous, ou nous pourrions commencer par quelqu'un d'autre.

  (1740)  

[Français]

[Traduction]

    Allez-y, s'il vous plaît, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci de l'invitation.
    C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions dans les deux langues officielles.

[Traduction]

    Je vais fournir certains renseignements contextuels, puis vous donner une idée de notre position relativement au projet de loi actuel et quant à certains de ces éléments qui, selon moi, pourraient être améliorés de façon plus globale à l'avenir.
    Soyons clairs: il y a toute une série de pressions à l'échelle internationale, de la croissance de la population de 3 milliards de personnes de plus au cours des quatre prochaines décennies, aux changements climatiques, en passant par les perturbations sociales et économiques, les luttes civiles et religieuses et je ne sais quoi encore, qui exerceront des pressions continues en matière de migration, et tout particulièrement les problèmes de guerre et de guerre civile ainsi que les situations similaires dans certains pays d'Amérique du Sud. De ce point de vue, nous pouvons nous attendre à ce que le nombre de demandes reste au même niveau ou, ce qui est plus probable, augmente.
    La coopération avec les États-Unis a été absolument cruciale au maintien de l'intégrité de notre système, et cela inclut de tout, depuis les autorisations de voyage améliorées jusqu'aux titres de voyage contenant des données biométriques en passant par l'échange de renseignements. Je peux mentionner par exemple la coopération avec les autorités américaines de mi-2017 à mi-2018, qui a permis de réduire l'arrivée de voyageurs irréguliers ceux qui traversent la frontière, de 87 à 42 par jour.
    Cela montre bien que démoniser notre voisin ou remettre en question la primauté du droit, la situation et l'intégrité de notre voisin est une folie du point de vue stratégique. Vu les changements que nous avons apportés pour faire en sorte qu'il est plus difficile de venir au Canada par avion pour des gens qui pourraient, autrement, être interdits de territoire, nous devons continuer de nous attendre à une pression accrue aux frontières terrestres, raison pour laquelle la coopération sera évidemment d'une importance cruciale pour... Puisque nous avons un seul partenaire bilatéral pour ce qui est des frontières terrestres.
    Puis, il y a les problèmes d'approvisionnement qui ont déjà été mentionnés par le vérificateur général et d'autres intervenants, comme Neil Yeates, dans son rapport sur le système.
    Nous devons aussi souligner en contexte qu'il y a un contrat social relativement à l'immigration au Canada, et il compte trois piliers. La première composante, c'est une politique migratoire bien administrée fondée sur des règles et des principes, misant sur la primauté du droit qui protège l'intégrité et la sécurité des frontières canadiennes. La deuxième composante, c'est la socialisation et l'intégration économique et politique réussie des migrants au sein de la société canadienne. La troisième composante concerne le fait que l'immigration est de façon générale avantageuse pour la société canadienne et la prospérité du Canada dans son ensemble. Ces trois composants font partie intégrante de la protection de la sécurité, de la durabilité et du caractère légitime du système d'immigration.
    Le rapport du vérificateur général, comme celui de Neil Yeates et d'autres, souligne que les Canadiens et d'autres se posent des questions sur la mesure dans laquelle notre système est bien administré. Des questions sont posées au sujet de la possibilité de contrôler les frontières pour assurer une approche axée sur des principes en matière de migration. Il y a des défis liés à la socialisation et l'intégration des migrants. À 1 % de notre population, nous affichons maintenant un taux d'immigration légale accentué par une vague de demandeurs d'asile. Il y a de graves défis quant à savoir si la prémisse des 100 dernières années en matière d'immigration et de socialisation des migrants pourra continuer à soutenir notre société. Je crois qu'il faut aussi nous demander si nous pourrons maintenir nos avantages collectifs.
    Le problème plus général, ce sont les gens qui tirent profit du droit de demander l'asile sans respecter les critères d'admissibilité. Le défi consiste alors à rendre les politiques du Canada en matière d'asile plus rapides et efficaces au moment de distinguer entre les personnes qui ont vraiment besoin de protection en vertu des accords internationaux du Canada et celles qui aspirent à émigrer à des fins économiques et qui tentent d'exploiter les échappatoires du système de gestion des frontières canadien.
    À cet égard, nous avons constaté et observé une tendance vers ce que je pourrais appeler une approche « libertarienne » en matière de gestion des frontières qui est essentiellement facilitée par la facilité des déplacements, la communication, des stratégies générales de communication, la mésinformation et la désinformation dans les médias sociaux et autres relativement à l'accessibilité du Canada et Dieu sait quoi d'autre. Tout ça est facilité à l'échelle internationale par des réseaux de passeurs de clandestins organisés, qui sont bien documentés et qui génèrent environ 10 milliards de dollars par année. Par conséquent, en ne veillant pas à l'intégrité de notre système, nous aidons aussi implicitement l'industrie du passage de clandestins à l'échelle internationale.
    Je tiens aussi à repousser l'idée que, d'une façon ou d'une autre, nous pouvons attendre la fin du mandat de l'exécutif politique américain actuel. Le phénomène que nous constatons a peut-être été exacerbé par certaines des décisions prises par l'administration Trump, mais nous pouvons prouver empiriquement que le processus était là bien avant l'arrivée au pouvoir de l'administration Trump. Par conséquent, les tendances se poursuivront après cette dernière, et nous devons trouver une approche durable dans ce dossier.

  (1745)  

    Par exemple, les deux tiers des personnes qui traversent de façon irrégulière...
    Excusez-moi, monsieur Leuprecht, vous parlez rapidement, et les interprètes ont de la difficulté à...
    J'ai régulièrement ce problème lorsque je comparais devant des comités, alors je vais ralentir.
    Par exemple, les deux tiers des personnes qui traversent la frontière de façon irrégulière — le plus important groupe de migrants irréguliers au Canada, sont les Nigérians qui entrent aux États-Unis grâce à des visas de visiteur. Nous constatons le même phénomène documenté en ce qui a trait aux ressortissants saoudiens. Je cite ces exemples précis, parce que l'information a été obtenue de source ouverte. C'est ici, par exemple, que la coopération avec les autorités américaines est cruciale, puisque c'est le point d'appui utilisé par environ les deux tiers des gens qui traversent irrégulièrement la frontière. Il ne s'agit pas de personnes qui visent à fuir des décisions relativement à leur statut de protection temporaire, comme certains l'ont laissé entendre.
    Il est important de maintenir des freins et contrepoids efficaces pour assurer l'accès à notre système d'asile aux gens qui ont besoin de protection, tout en limitant les abus réels ou possibles du système. Je souligne ici tout particulièrement dans le projet de loi l'article 306. Avec mon collègue, Geoffrey Hale, avec qui j'ai coécrit le mémoire... Je crois qu'une interdiction absolue des demandes d'asile séquentielles est peut-être une réaction excessive à une préoccupation valide. Pour des raisons que je n'ai pas le temps d'expliquer qui concernent différents processus administratifs et choses du genre, nous suggérerions de limiter l'exclusion proposée de l'admissibilité pour les demandeurs d'asile à peut-être trois ans à partir de la date où des demandes d'asile préalables dans des pays avec lesquels nous avons conclu des accords sont parachevées.
    En ce qui a trait à l'article 304, il est logique... Vu l'application de la réciprocité dans l'application des lois nationales en matière d'immigration, la façon dont la disposition est libellée laisse beaucoup de place à l'interprétation. Je suis très préoccupé par les ambiguïtés qui persistent relativement au ministre, et ce sont des choses qu'il faudrait préciser.
    De façon générale, nous soutenons fortement les mesures prévues dans le budget actuel, vu qu'il est toujours difficile pour les gouvernements de prévoir et de gérer toutes les concessions associées aux décisions stratégiques en général, particulièrement lorsqu'il est question de migration.
    J'aimerais conclure en parlant de ce qui nous attend. La marche à suivre doit s'appuyer sur le rétablissement de l'article 41 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, un règlement appelé « mécanisme de renvoi temporaire ». Cette disposition permet à une personne qui court un grand risque de présenter une demande de statut de réfugié des États-Unis, si elle n'est pas autrement visée par les dispositions de l'entente sur les tiers pays sûrs. De telles mesures constitueraient un filet de sécurité en cas de modification des dispositions américaines touchant le statut de protection temporaire, qui risquerait de causer une autre vague importante de migration régulière.
    Cependant, une condition nécessaire au rétablissement de l'article 41 consisterait à apporter les amendements dans l'Entente sur les tiers pays sûrs prévoyant l'arrêt de toute procédure d'expulsion prospective américaine de toute personne en attente d'une audience sur la protection des réfugiés au Canada en vertu de telles dispositions. La mise en œuvre de telles mesures exigerait des protections pour préciser la catégorie de personnes à risque visées par de telles dispositions, pour conserver les avantages découlant de l'Entente sur les tiers pays sûrs et permettre un triage efficace des demandeurs d'asile des tiers pays.
    Merci, monsieur Leuprecht.
    Vous avez réussi à dire tout ça dans le délai qui vous était accordé. Cependant, si vous avez cette recommandation précise par écrit, nous pouvons la déposer.
    Elle est dans le mémoire. Je crois qu'on n'a tout simplement pas eu le temps de le traduire. J'ai reçu la demande de comparaître un peu à la dernière minute.
    Nous passons à Mme Naso.
    Merci de m'accueillir ici. C'est un honneur d'être parmi vous et de participer à une conversation aussi importante. Je représente aujourd'hui la communauté yézidie au Canada pour parler de l'importance de la réunification des familles.
    Nous remercions le gouvernement canadien de prolonger la période d'un an. Cette mesure a redonné espoir à de nombreuses familles qui ont découvert que des membres de leur famille avaient fui l'EI et avaient maintenant une occasion d'être réunis à nouveau. Nous recevons souvent des nouvelles de membres de la famille qui ont réussi à fuir, et le fait de savoir que cet obstacle ne sera plus problématique est crucial à la réunification des familles. Cependant, ce n'est que la pointe de l'iceberg.
    Le mode de vie traditionnel des Yézidis est fondé sur une mère qui prend soin de la maison et d'un père qui travaille à l'extérieur et subvient aux besoins de la famille. Le gouvernement canadien a admis principalement des femmes et de jeunes enfants de culture yézidie, qui ont toujours vécu de cette façon... c'est le cas depuis des milliers d'années. De quelle façon peut-on s'attendre à ce que ces personnes intègrent avec succès la société et deviennent un avantage pour notre économie et notre tissu social au Canada si nous les condamnons à l'échec et nous assurons qu'elles devront dépendre de l'aide sociale toute leur vie? Elles ne pourront pas s'intégrer ou s'établir avec succès.
    Il faut élargir la définition de famille pour inclure des parents éloignés de cette population yézidie vulnérable et traumatisée si on veut assurer sa réussite et sa prospérité. Il faut modifier la définition de famille dans le cadre du programme de réunification des familles. Actuellement, seuls les membres de la famille immédiate sont admissibles. Il s'est écoulé cinq ans, maintenant, depuis le début du génocide, et beaucoup de personnes n'ont toujours aucune nouvelle du sort des membres de leur famille immédiate ou encore elles ont déjà appris leur décès. Tout comme un programme spécial a été créé par le gouvernement pour parrainer des Yézidis, nous avons maintenant besoin que les politiques reflètent les réalités sur le terrain et tiennent compte de la situation spéciale de cette population yézidie traumatisée.
    Il s'est écoulé cinq ans depuis le début du génocide des Yézidis, et il est toujours en cours. Les femmes yézidies qui ont essuyé les attaques les plus barbares de l'EI veulent qu'on leur donne des réponses et qu'on leur rende justice. En Irak et partout dans le monde, différentes mesures sont prises pour fournir de l'aide, et les victimes commencent à guérir. Par exemple, des pays comme le Royaume-Uni et l'Allemagne ont commencé à recueillir des éléments de preuve afin d'intenter des poursuites juridiques contre les agresseurs tout en obtenant justice pour les victimes. En Irak, un groupe d'enquêteurs a été envoyé en vertu de la résolution 2379 du Conseil de sécurité pour recueillir des éléments de preuve de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et d'actes de génocide commis par l'EI et pour commencer l'exhumation des fosses communes.
    Je travaille avec des femmes yézidies à Winnipeg et j'ai parlé à des membres de la communauté yézidie partout au Canada. Il y a un consensus selon lequel la justice consisterait pour eux actuellement à être réunis avec les membres de leur famille. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles la Canadian Yazidi Association a donné la priorité à la réunification des familles.
    Il y a deux ou trois mois, des membres de la Canadian Yazidi Association ont fait du porte-à-porte auprès de chaque famille yézidie au Manitoba pour consigner les noms et les renseignements des membres de leur famille qui restent encore en Irak. Nous avons consigné tout juste un peu plus de 1 000 noms. Nous avons la capacité, la volonté et les moyens financiers de réunir ces familles et de leur donner l'occasion de vivre une vie réussie et productive au Canada, mais la volonté politique doit être là pour qu'on puisse y arriver. Nous espérons que notre gouvernement fera la bonne chose et permettra à ces familles vulnérables d'être réunies à nouveau.
    Merci.

  (1750)  

    Merci de vos commentaires, madame Naso.
    Nous passons à M. Beuze.
    Merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité à nouveau au sujet des modifications proposées au système d'asile canadien décrites dans la loi d'exécution du budget.
    Prodiguer des conseils techniques pour accroître l'efficience du système d'asile fait partie intégrante du rôle consultatif à l'échelle internationale du HCR, l'organisme des Nations unies responsable des réfugiés. Nous voulons soutenir toute mesure qui assure un processus décisionnel rapide tout en maintenant l'élément essentiel d'un système d'asile équitable. Alors que le nombre de demandeurs d’asile qui arrivent au Canada a augmenté au cours des deux dernières années, j’ai précédemment fait remarquer, devant le Comité, que les mesures qui ont été prises ont maintenu l’accès à l’asile de manière humaine et efficace avec des vérifications de sécurité adéquates.
    Le HCR reconnaît que les gouvernements, y compris celui du Canada, doivent trouver le juste équilibre entre gérer les flux migratoires, assurer la sécurité à la frontière et maintenir la confiance du public relativement aux systèmes d’asile et d’immigration. Ce faisant, ils doivent respecter leurs obligations internationales d’accorder le refuge aux personnes à risque de persécution. Dans ce contexte, les flux mixtes et les déplacements secondaires de personnes provenant de pays comme les États-Unis peuvent être perçus, particulièrement par le grand public, comme un abus du droit d’asile. On en a parlé précédemment. Il est, par conséquent, légitime pour les gouvernements de prendre des mesures pour tenter de répondre à ces inquiétudes et d’instaurer des systèmes de triage qui assureront des processus d’étude des demandes d’asile robustes, justes, efficaces et dans un temps raisonnable.
    Le HCR salue les importants investissements du Canada dans son système d’asile reflétés dans le budget de 2019. Ces derniers misent sur l’amélioration de son efficacité depuis quelques années. Les récents changements législatifs proposés dont nous discutons aujourd’hui font partie d’une plus large stratégie. Ils incluent une augmentation significative du financement des corps policiers, de l’agence frontalière, de l’aide juridique et de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Ils ont pour but d’atteindre un meilleur rapport coût-efficacité aux premières lignes du processus d’asile. Les investissements dans les soins de santé et l’hébergement bénéficieront aux réfugiés et aux demandeurs d’asile.
    Selon les amendements proposés, comme on l’a entendu aujourd’hui, les personnes qui ont présenté une demande d’asile auprès des autres pays ayant une entente d’échange de données avec le Canada se verraient interdire l'accès à une audience devant la CISR. Cependant, ils ne se verront pas interdire de demander l’asile au Canada ou d’y être reconnus comme réfugiés. En fait, ils seront acheminés vers l’évaluation des risques avant renvoi, aussi appelé ERAR. L’ERAR a le même objectif de protection que le processus de détermination du statut de réfugié devant la CISR. Il est fondé sur les mêmes motifs et confère le même degré de protection aux réfugiés. En d’autres mots, la même définition s’appliquera pour évaluer si une personne a besoin de protection au Canada en raison des risques auxquels elle pourrait faire face dans son pays d’origine.
    J’aimerais prendre un moment afin de discuter d’une préoccupation souvent évoquée récemment. Il est vrai que l’ERAR a un taux d’acceptation de 7 % lorsqu’il est utilisé comme mesure de dernier recours, à la suite des décisions négatives de la CISR et de la Cour fédérale. Ce faible taux d’acceptation laisse entendre que la CISR et les tribunaux accomplissent leur mandat d’une manière efficace. Cependant, le taux d’acceptation monte à approximativement 30 % lorsqu’il s’agit d’un mécanisme de première instance. Il faut noter que, d'après les données des deux dernières années, environ de 3 à 4 % des demandeurs seront dirigés vers l’ERAR en tant que mécanisme de première instance. Toute analyse de ces taux d’acceptation doit être prise avec un grain de sel. Ce qui compte, en définitive, c’est qu’aucun individu ne soit forcé de retourner vers un pays où il sera à risque d’être torturé ou persécuté. De plus, chaque cas sera examiné au mérite.
    Les garanties de protection qui font partie intégrante du processus d’ERAR doivent maintenant être pleinement utilisées, et tous les partenaires ont la responsabilité de faire en sorte qu’elles le soient afin d’assurer l’équité du processus. Nous avons entendu le ministre Blair expliquer ces mesures. Il a affirmé au HCR que, grâce au processus amélioré d'ERAR, nul ne serait renvoyé sans que son dossier ne passe à travers un processus équitable, ce qui inclut notamment le droit à une audience avant le renvoi, en conformité avec la jurisprudence canadienne et internationale.

  (1755)  

    Les demandeurs d’asile qui tombent dans cette nouvelle catégorie auront toujours besoin d’avoir accès à l’information relative au processus d’ERAR, à des services d’interprétation compétents et à un conseil. Pareillement, les agents de l’ERAR devront recevoir une formation complémentaire sur la manière de mener des audiences individuelles de façon impartiale et efficace, notamment en s’assurant que les conseils jouent pleinement leur rôle par le biais d’interventions durant l’audience. Encore une fois, les ministres et les fonctionnaires ont expliqué les mesures actuellement envisagées.
    Dans le passé, le HCR a aussi préconisé la réduction des étapes procédurales que suppose le processus de traitement des cas en première ligne, lesquelles sont responsables de retards et de coûts accrus. Nos recommandations incluaient des exceptions pour les personnes provenant de pays visés par un moratoire afin qu’elles puissent bénéficier du statut de personnes protégées, vu qu’elles ne peuvent être renvoyées dans leur pays d’origine, de même qu’un sursis automatique de renvoi lorsqu’il y a appel des décisions négatives de demandes d’asile.
    Le HCR attend avec intérêt les leçons tirées des différents projets-pilotes relatifs à la coordination interinstitutionnelle du processus de traitement des cas — ce dont il a été question dans l’exemple de Montréal —, à la simplification de la collecte de données et des formulaires, au système de triage et à la rationalisation. De plus, le renvoi des personnes n’ayant pas besoin de protection internationale une fois qu'elles ont épuisé tous les recours disponibles et selon l’application régulière de la loi, continuera d’être la clé pour garantir l'équité et l'efficacité du système d’asile, et ainsi maintenir la confiance du public.
    Le HCR soutient depuis longtemps la CISR et son indépendance comme un modèle à suivre et continue de le faire. Chercher des façons d’accroître l’efficacité grâce à un meilleur système de triage tout en défendant l’accès à des procédures équitables est cependant légitime. En discutant de ces réalités complexes, souvent de nature technique, nous avons tous une responsabilité et devons travailler ensemble afin de nous assurer que le dialogue relatif à l’asile et aux réfugiés demeure objectif et équilibré ainsi que fondé sur une analyse juridique raisonnée et sur les faits. Les systèmes d’asile doivent en tout temps être flexibles pour tenir compte des changements et des différents profils des demandeurs d’asile afin de demeurer équitables, efficients et efficaces, et ainsi maintenir la confiance du public en leur intégrité.
    Merci.

  (1800)  

    Merci beaucoup, monsieur Beuze.
    Merci à tous nos invités d'avoir présenté de brefs exposés.
    Nous allons maintenant commencer par M. Sarai.
    Merci à vous tous de vos exposés.
    Ma première question est destinée à M. Leuprecht. Vous avez parlé des trois ingrédients permettant d'assurer la réussite d'une politique d'immigration. Je ne veux pas les passer en revue en raison du temps qui m'est alloué. Vous êtes chargé de cours au Collège de défense de l'OTAN. De quelle façon croyez-vous que ce projet de loi est perçu par, au moins, les partenaires du Groupe des cinq qui sont aussi membres de l'OTAN? Avez-vous eu des conversations avec eux? Le libellé du projet de loi est-il similaire à celui qu'ils utilisent?
    Je crois que c'est une très bonne question, parce que, bien sûr, les défis dont nous parlons ici ne sont pas uniques au Canada. Ce sont des défis qu'on rencontre partout dans le monde.
    Une façon de résumer le problème, c'est que la quantité de migrants potentiels dépasse de loin les capacités budgétaires et sociales de la plupart des pays hôtes, comme vous l'avez souligné. En outre, la gestion efficace des politiques d'immigration est cruciale à notre prospérité continue ainsi qu'à la cohésion sociale et à la légitimité démocratique.
    Beaucoup de gens de partout dans le monde regardent le Canada comme étant capable de créer un modèle réussi, pas seulement en ce qui a trait à l'immigration... Ce qui est unique au Canada, surtout depuis le milieu des années 1990 — et Keith Banting et Stuart Soroka ont fait des travaux très intéressants à ce sujet — c'est le soutien populaire accru relativement aux politiques d'immigration parallèlement à l'augmentation des niveaux d'immigration. Ces deux choses ne font pas nécessairement l'objet d'une corrélation négative.
    Je crois qu'il est important que le Canada puisse, en ce qui a trait aux problèmes qui ont été présentés, mener par l'exemple, parce qu'il y a tellement d'autres pays qui ont de la difficulté avec tout ça. Je crois qu'il y a un risque que, à la lumière des défis que l'on a décrits... Je crois que c'est un problème que...
    L'une des choses uniques au Canada, c'est que 95 % des gens qui viennent ici sont des gens que le Canada choisit, alors qu'il y en a 5 % — un peu plus depuis 2016 — qui se présentent tout simplement. En Europe, c'est le contraire: 95 % des gens se présentent tout simplement. Je crois que, parmi le Groupe des cinq, c'est quelque chose qu'on reconnaît. En raison de notre situation géostratégique unique, nous avons l'occasion de bâtir un système qui est légitime et durable et d'en assurer la coordination.
    Si nous ne pouvons trouver une façon à l'avenir de composer efficacement avec la situation actuelle touchant la migration irrégulière, je crois qu'on enverra à nos partenaires un signal selon lequel il n'y a probablement pas beaucoup d'espoir, surtout pour les partenaires européens, par exemple, dans le cadre du processus de Dublin, de trouver une façon de coordonner efficacement la politique sur les réfugiés. Je crois que la stratégie à moyen terme au sein du Groupe des cinq — et je crois que la plupart des gens le comprendront — vu la coopération dont nous bénéficions, doit être une certaine harmonisation accrue de la façon dont nous abordons ce problème précis.
    Il y a une sensibilisation de haut niveau quant au problème précis que vous soulevez.
    Monsieur Beuze, vous avez dit dans le Globe and Mail le 16 avril que la gestion plus stricte des demandeurs d'asile assurée par le gouvernement fédéral n'est pas une raison de s'inquiéter.
    Pouvez-vous expliquer ce que vous vouliez dire?
    Ce sont les mots utilisés par le journaliste. Ce que j'ai dit précisément ,c'est que les mesures envisagées maintenant en vertu de la Loi d'exécution du budget ne violeraient aucune obligation internationale du Canada, parce que les demandeurs d'asile auraient tout de même accès à une ERAR permettant d'évaluer leur risque de persécution. Puisque nous avons appris que le gouvernement s'assure qu'une telle chose sera faite par l'intermédiaire d'une audience prévoyant le droit à un avocat — à des conseils juridiques — un tel régime respecte la jurisprudence des mécanismes internationaux et du Canada visant à garantir une audience appropriée avant qu'une personne soit expulsée du pays.

  (1805)  

    Vous surveillez les tendances migratoires et les tendances liées aux demandes d'asile partout dans le monde en raison de la nature de votre travail. Croyez-vous que les gens migrent au Canada en raison d'un gazouillis du premier ministre ou parce que les conditions à l'échelle internationale ont entraîné le déplacement de 23 millions de personnes?
    J'ai eu l'occasion de préciser ce point. Il est très clair qu'il y a des facteurs d'incitation et d'attraction qui poussent des gens à traverser les frontières internationales et à demander l'asile. Chaque cas est différent. Je crois qu'il serait inapproprié de penser que les gens qui fuient la persécution se retrouvent au Canada tout simplement en raison d'un gazouillis. Ils procèdent ainsi en dernier ressort, lorsqu'ils jugent que leur vie et celle de leurs êtres chers sont en danger. Ils prennent un certain nombre de risques pour y arriver, y compris, parfois, se tourner vers des passeurs et des trafiquants. C'est aussi pour cette raison qu'il est important de maintenir l'intégrité totale du système d'asile.
    Croyez-vous que l'Italie ou la Grèce a communiqué des gazouillis similaires en 2015-2016 pour justifier le grand nombre de migrants qui ont traversé la mer Méditerranée pour demander l'asile?
    Encore une fois, je répète que je ne crois pas qu'un gazouillis ou une déclaration précise de représentants du gouvernement, ici, ou dans d'autres pays, sont à même de déclencher de tels déplacements. Les gens ont de la difficulté à quitter leur chez-soi, et ils ont de la difficulté à traverser des frontières internationales et elles le font en dernier ressort lorsqu'elles estiment que c'est la seule façon de se protéger et de protéger leurs êtres chers.
    J'ai posé la question qui suit plus tôt à M. Leuprecht: connaissez-vous d'autres pays, des destinations pour les demandeurs d'asile, peut-être, qui ont adopté des types de lois similaires, où, si une personne demande l'asile dans un pays, elle ne peut pas présenter une nouvelle demande ailleurs? Y a-t-il des types de législation similaires à celle-ci ou le Canada est-il un chef de file en la matière, comme il l'a dit, en ce qui a trait aux attentes au chapitre de l'immigration et de l'asile?
    Les pays d'asile trouvent des façons de trier les cas pour s'assurer de trouver non seulement les façons les plus efficaces, mais aussi les façons les plus économiques d'évaluer qui a besoin de protection internationale. C'est important que ce processus reste robuste et équitable, ce qui est le cas des mesures envisagées actuellement par le Canada. Cependant, il est aussi important pour nous de nous assurer que les dossiers des gens sont traités en temps opportun afin qu'ils n'aient plus à se demander s'ils pourront rester légalement au pays où ils ont demandé l'asile.
    Par conséquent, l'Europe et d'autres pays ont adopté des mesures similaires en matière de triage des cas.
    On a dépassé le temps de 20 secondes, alors nous allons passer à Mme Rempel.
    Vous partagez votre temps avec M. Tilson?
    Je crois bien. On verra.
    Je vais commencer par vous, monsieur Leuprecht. Vous avez beaucoup écrit, je crois, sur le passage de clandestins et certains des enjeux connexes. Je veux y venir, mais j'aimerais d'abord aborder certains des commentaires que vous avez faits relativement à la renégociation de Dublin et la coordination de la réforme du système d'asile.
    D'après ce que j'ai compris, le Canada peut appliquer l'Entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis tout en respectant ses obligations internationales, parce que certaines des dispositions de l'article 19 de la Convention de Genève sont là, encore une fois, pour empêcher les gens de pouvoir demander l'asile dans plusieurs pays et en raison de la façon dont l'accord est structuré.
    Il me semble que la section 16 de la Loi d'exécution du budget, le projet de loi C-97, ou peu importe... Je ne sais pas si ça survivra. Pour commencer, je ne crois pas que tout ça résistera à une contestation judiciaire dans le contexte canadien.
    Il n'y a pas vraiment d'impact sur les gens. Comme le ministre vient de le dire, cela aura une incidence sur moins de 10 % des personnes qui sont entrées au Canada à partir des États-Unis grâce à l'échappatoire de l'Entente sur les tiers pays sûrs au cours des dernières années et qui ont demandé l'asile.
    C'est la raison pour laquelle j'estime que nous devons en fait entreprendre — c'est l'un des rôles que le Canada pourrait jouer — une réforme du système d'asile international dans le cadre de laquelle on envisagerait un réseau d'accords sur les tiers pays sûrs. Nous pourrions utiliser des tribunes internationales pour vraiment diriger une telle discussion sur ce en quoi constitue un tiers pays sûr et sur les accords de surveillance qu'il faut mettre en place afin de s'assurer que tout ça se passe sur une longue période.
    Je ne crois pas que la section 16 le permette. Je crois que c'est un raccourci de dernière minute — c'est un peu ainsi que je l'ai lu — qui ne fonctionnera probablement pas. Diriez-vous que mon évaluation est bonne ou que je vais dans la bonne direction?

  (1810)  

    Vous savez, il faut commencer quelque part, selon moi, vu la situation actuelle. Je dis souvent que l'espoir, ce n'est pas une méthode. Le fait de simplement attendre et espérer que quelque chose change à la lumière des facteurs qui sont soulevés ne fonctionnera pas...
    Je sais. Dans cette situation, cependant, on ne parle pas d'espoir. Il y a quelque chose qui est proposé, et cela provoquera probablement beaucoup de litiges au sein du système juridique canadien, beaucoup de coûts pour le gouvernement. Puis il y aura des appels et des droits qui seront protégés et ainsi de suite, comme on le voit souvent; ne serait-il pas mieux de remplacer cet espoir par la prise de mesures concrètes?
    Je suis allée en Europe l'année dernière et j'ai rencontré des collègues du Parlement européen de toutes les allégeances politiques relativement à la renégociation de Dublin. C'est un début, mais, encore une fois, ça ne donne pas beaucoup d'espoir. Je me demande tout simplement si, peut-être, le Canada ne devrait pas vraiment adopter un rôle de chef de file en disant: « regardez, nous soutenons les demandes d'asile, mais nous ne soutenons pas les systèmes d'asile utilisés pour faciliter la migration économique — franchement, ça reviendrait à appeler un chat un chat, puisque c'est ce qui se passe en fait actuellement au Canada — alors voici les façons que peuvent utiliser les migrants économiques pour venir au Canada ».
    En ce qui concerne les réfugiés, les négociations de Dublin, comme vous le savez, sont dans une impasse. L'une des choses auxquelles le Canada doit réfléchir... Oui, nous devons établir un régime international avec d'autres pays qui constituent des destinations recherchées. Il faudra le faire, au bout du compte, et, comme le projet de loi le souligne — et comme M. Sarai l'a aussi souligné — un arrangement au sein du Groupe de cinq point à l'horizon, et c'est probablement la perspective la plus probable. Je crois qu'il faut bâtir tout ça de bas en haut.
    Parallèlement, je crois que nous pourrions faire du meilleur travail au moment d'inciter les gens à adopter de meilleurs comportements, des gens qui — par exemple, dans le cadre du processus de Dublin — ont un droit de veto. Par exemple, j'ai suggéré, même à l'époque où le gouvernement a décidé d'accueillir un grand nombre de réfugiés syriens, que nous pourrions peut-être utiliser certains des chiffres que nous avions à notre disposition pour inciter la conclusion du genre d'accord qui fait défaut aux Européens en ce moment, en disant que le Canada pourrait épauler, par exemple, pendant un nombre x d'années, certains des pays qui mettent actuellement leur veto dans le cadre du processus de Dublin, de façon à ce que ces pays puissent non seulement renforcer très lentement leur système, mais...
    Ça semble beaucoup d'argent.
    ... puissent aussi...
    Si vous me permettez, c'est parce que je vais manquer de temps...
    M. Christian Leuprecht: Nous allons avoir besoin d'incitatifs.
    L'hon. Michelle Rempel: Je veux passer à Mme Naso.
    Je vais vous poser une question très simple, madame Naso, et je vous laisse le reste de mon temps pour y répondre. Au cœur de cette conversation, on tente vraiment de déterminer qui devrait avoir un accès prioritaire dans les systèmes de réfugiés et d'asile du Canada. Je veux vous donner un peu de temps pour définir votre position à ce sujet et nous expliquer pourquoi vous l'adoptez.
    Par où commencer? Je travaille à temps plein comme coordonnatrice de l'établissement et j'aide des réfugiés yézidis. Mon travail consistait à aider les familles yézidies bénéficiant de parrainage privé ainsi que la vague de réfugiés parrainés par le gouvernement qui sont arrivés. Nous les aidons en ce moment. Les familles qui sont arrivées sont toutes des familles brisées, de jeunes mères avec beaucoup de jeunes enfants. Nous recevons constamment des appels de membres de la famille élargie qui sont encore dans des camps de réfugiés. Il y a des centaines de milliers de Yézidis qui composent avec la dure réalité des camps de réfugiés en Turquie et en Irak à l'heure actuelle. Il y a bien plus de 3 500 enfants et femmes yézidis encore captifs de l'EI.
    L'un des plus gros projets sur lesquels nous oeuvrons actuellement consiste à travailler en collaboration avec tous les ordres de gouvernement pour réunir certaines de ces familles. Par exemple, je m'occupe actuellement d'une famille de trois frères et soeurs et de leur belle-mère. Il y a environ un an, cette dernière a appris que son frère de 17 ans était vivant, et qu'il avait réussi à fuir l'EI et qu'il avait en fait été racheté auprès de passeurs pour 14 000 $ américains. Nous avons présenté une demande dans l'espoir que le gouvernement réunisse ce frère et cette soeur. La demande a été rejetée. Elle a été rejetée parce qu'il faut la signature des parents. Eh bien, les parents manquent à l'appel et sont probablement morts. Il y a donc des choses qu'il faut changer relativement à cette population précise. Lorsque je parle de « famille brisée », ce sont des familles qui, pour la plupart, comptent beaucoup de membres qui manquent à l'appel. Par conséquent, lorsqu'on parle de réunification des familles et du besoin de modifier la définition, nous voulons dire qu'il ne faut pas se limiter aux parents et aux frères et soeurs. Il faut élargir la définition et inclure les tantes et les...

  (1815)  

    Je vais maintenant passer à la prochaine série de questions.
    Allez-y, madame Kwan.
    Merci aux témoins.
    Je vais revenir sur ce que Mme Naso a dit et lui donner une minute pour finir ce qu'elle avait à dire, parce que je crois que c'est très important pour elle de le dire, de demander au gouvernement, si j'ai bien compris, d'élargir la définition pour prévoir, au-delà des seuls parents et enfants mineurs en vue d'un parrainage, d'inclure aussi les frères et les sœurs, par exemple. Certains affirmeraient qu'il faut inclure les tantes et les oncles, parce que bien des communautés différentes définissent leur famille immédiate différemment. Mon interprétation est-elle bonne?
    Oui, vous avez raison. Merci beaucoup de ce que vous avez dit.
    En passant, le Canada avait auparavant un programme permettant aux frères et soeurs de se parrainer les uns les autres. C'est de cette façon que je suis arrivée au Canada. Ma tante a parrainé mon père, et une famille comptant huit membres est venue au Canada, et c'est ainsi que nous avons fait du Canada notre chez-nous. Nous devrions en fait revoir le système et donner la même possibilité aux réfugiés.
    Merci beaucoup.
    Je veux poser certaines de mes questions au représentant du HCR. Le HCR a écrit un rapport de 20 pages pour décrire les changements apportés en 2012 par le gouvernement Harper relativement au système de détermination du statut de réfugié dans le projet de loi C-31. C'était en mai 2012. Entre autres choses, il y avait un certain nombre de recommandations clés. L'une d'elles tenait au fait que le HCR recommandait d'abandonner le traitement différentiel réservé aux réfugiés et aux demandeurs d'asile lorsqu'un tel traitement constitue un manquement aux droits établis des réfugiés. D'après ce que je peux voir dans le projet de loi C-97, on réserve des traitements différents aux réfugiés de différents volets maintenant. Par conséquent, pourquoi est-ce acceptable, cette fois-ci, alors que ce ne l'était pas en 2012?
    Il est important de ne pas oublier que les tendances et les profils des demandeurs d'asile changent au fil du temps. La situation de 2012 et celle de 2019 sont radicalement différentes en ce qui a trait aux nombres, mais aussi au profil des gens qui arrivent au pays, y compris par des moyens réguliers. C'est le premier point.
    Le deuxième point, c'est que nous avons précisé — comme vous l'avez souligné — qu'il est question de garanties procédurales. Comme on l'a entendu aujourd'hui, en vertu du processus, les personnes visées par ce nouveau volet auront encore droit à une audience et auront le droit d'être représentées; l'avocat qui les représente pourra participer activement aux discussions. Ce n'est pas une question d'organisme. C'est une question de garanties procédurales qui sont accordées aux demandeurs d'asile pour que l'on puisse s'assurer que le processus est équitable.

  (1820)  

    Merci de votre réponse.
    Je ferai valoir que, en ce qui concerne les personnes qui ont traversé la frontière de façon irrégulière jusqu'à présent, en vertu du processus de détermination de la CISR, plus de la moitié ont été jugées des demandeurs d'asile authentiques. Cela dit, je vais laisser ce point de côté un instant. Cependant, le problème tient non pas vraiment au fait qu'ils ont traversé, n'est-ce pas? C'est plutôt de savoir si, oui ou non, ils ont accès à un processus approprié une fois qu'ils sont au Canada. C'est le point que vous soulevez.
    Vous dites que, en vertu du projet de loi C-97, il y a un processus approprié à leur égard. Je ne suis pas d'accord. Actuellement, ceux qui passent au travers du processus d'examen des risques avant renvoi n'auraient pas accès à un processus d'appel. À l'époque, le HCR avait recommandé que tous les demandeurs d'asile aient accès à un processus d'appel sur le fond de leur demande devant la Section d'appel des réfugiés. En vertu de ce système, lorsque les gens font l'objet du processus d'examen des risques avant renvoi, il n'y a pas de processus d'appel pour eux. Ils ne peuvent pas entreprendre un processus devant la SPR. L'OCASI, une organisation dans notre communauté, s'est en fait élevée contre cette situation. Elle est profondément préoccupée par la possibilité que le projet de loi C-31 ne crée un système à deux vitesses de protection des réfugiés au Canada, un système qui fera en sorte que certains demandeurs d'asile n'auraient pas le droit d'interjeter appel. C'est ce qui se produit actuellement en vertu du projet de loi C-97. Pourquoi est-ce acceptable maintenant alors que ce ne l'était pas alors?
    Je ne suis pas d'accord avec votre interprétation. Les gens pourront interjeter appel devant la Cour fédérale, ce qui respecte la jurisprudence canadienne et internationale.
    Eh bien, les gens visés par le processus d'examen des risques avant renvoi n'ont pas le droit de se présenter devant la SPR.
    Ils peuvent interjeter appel auprès de la Cour fédérale. Le HCR a été très clair dans la jurisprudence internationale et énonce formellement qu'il s'agit de garantir un processus équitable, et que cette responsabilité soit confiée à la Cour fédérale. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il s'agit d'un mécanisme rigoureux permettant d'évaluer si l'agent d'ERAR a peut-être manqué certains éléments au moment de décider si la personne devait être protégée en tant que réfugié au Canada ou non.
    J'aimerais bien pouvoir étudier également l'accès à la Cour fédérale et voir à quel point il est difficile pour des demandeurs d'asile d'accéder à cette instance et à ce processus et d'être représentés afin qu'ils puissent bénéficier des procédures justes et équitables qu'on leur offre. Selon moi, la majorité des gens n'y ont pas accès.
    C'est pourquoi nous sommes très heureux d'entendre le ministre confirmer que ces personnes auront accès à un conseil juridique.
    Le ministre a déclaré que le processus était en place, mais pour ce qui est de savoir qui pourra réellement y avoir accès, c'est une autre histoire. Comme nous le savons, de nombreux demandeurs d'asile n'ont souvent pas accès aux services d'un avocat et, par conséquent, aux procédures judiciaires.
    Nous sommes tout à fait ravis que le budget fédéral bonifie l'aide juridique.
    En fait, en Ontario, nous venons tout juste d'apprendre que l'aide juridique était coupée. Les réfugiés n'y ont pas accès.
    Je veux aborder cet autre enjeu également. Nous n'avons manifestement pas la même opinion. Le HCR a aussi recommandé d'éliminer l'interdiction de cinq ans à partir de la date de la décision ou de la désignation visant les étrangers désignés pour la présentation d'une demande CH. Cela remonte à 2012. Maintenant, au titre du projet de loi C-97, une période est également imposée pour le dépôt d'une demande CH.
    Je pose la question de nouveau. Pourquoi le HCR est-il muet quant aux projets d'expansion actuels de l'interdiction liée à la présentation d'une demande CH?
    Nous espérons que des mécanismes seront mis en place afin de permettre à ceux qui doivent présenter une demande CH de recevoir la protection appropriée. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration, en attendant que la Cour fédérale rende une décision finale dans toutes les affaires, nous proposons respectueusement qu'un sursis de renvoi soit accordé, pas seulement aux gens qui font partie de ce nouveau volet, mais également à ceux qui, au titre des dispositions antérieures de la loi, risquent d'être renvoyés avant le jugement final de la Cour fédérale.
    En ce qui concerne l'interdiction visant les demandes CH au titre du projet de loi C-97, un groupe de réfugiés ne pourraient pas présenter de demandes CH sous le régime actuel. Dans les faits, cela signifie que certaines personnes se verront refuser cette possibilité. Je soulève le problème, car ce qui est très important, c'est qu'au bout du compte, le Canada soit à la hauteur et s'assurer que tous les réfugiés ont accès au même processus — c'était la position initiale du HCR — en ce qui a trait au système de détermination du statut de réfugié. Voilà ce que risque de compromettre le projet de loi C-97.

  (1825)  

    Je tiens à répéter qu'il s'agit de la même garantie procédurale.
    Merci, monsieur Beuze.
    Sauf votre respect, ce n'est pas la même chose.
    Monsieur Ayoub, vous avez sept minutes et demie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Beuze, j'ai bien entendu les questions.
    Le Canada a toujours été considéré comme un pays de refuge. Je dirais même qu'il l'est de plus en plus et que c'est encore mieux maintenant. D'ailleurs, c'est un peu pour cela qu'il y a eu une augmentation du nombre de demandes.
    Comme M. Leuprecht l'a dit, nous sommes dans une situation géographique particulière qui fait que 95 % des immigrants au Canada ont été choisis. C'est le chiffre qui nous a été donné. La question de l'équilibre est vraiment importante. Il faut rechercher un équilibre entre ce que nous devons faire, ce que nos ententes internationales prescrivent et ce que la population canadienne est prête à faire et à recevoir. C'est le rôle du gouvernement, et c'est ce que nous avons fait dans les dernières années.
    Je suis toujours préoccupé lorsque j'entends des doubles discours hypocrites au sujet des politiques en matière d'immigration et de protection des réfugiés. Des partis demandent à ce que nous bloquions ou refusions certains réfugiés, mais, en même temps, on met plus d'accent du côté pécuniaire, lorsqu'on parle de donner plus d'argent ou de services à des réfugiés qui ont besoin d'un logement temporaire, par exemple. Cela alimente la contre-information et la fausse information.
    De notre côté, nous voulons nous assurer de la qualité des gens présents, pour que ce soit sécuritaire pour les Canadiens. C'est entre autres ce que fait ce projet de loi. Il s'agit de rassurer les Canadiens pour que nous puissions continuer de faire de notre pays un endroit accueillant.
    J'aimerais que vous nous expliquiez comment cela se passe présentement sur le plan des droits des réfugiés et des immigrants lorsque leur demande est refusée, par exemple. Il y a des cas où la demande est refusée, mais ils ont le droit de faire appel de la décision. Tout à l'heure, on demandait qui allait pouvoir les aider, car ils n'auront pas accès à ces services. On parlait de consultants; c'est une possibilité.
    Quel est votre avis, monsieur Beuze?
    Lorsque les demandeurs d'asile n'ont pas été reconnus comme réfugiés ou comme ayant besoin de la protection internationale du Canada, ils ont droit à certains appels. Il peut s'agir d'un recours devant la Cour fédérale du Canada à la suite d'un examen des risques avant renvoi ou d'un recours devant la Section d'appel des réfugiés après avoir comparu devant la Section de la protection des réfugiés. Après avoir eu recours à tous ces appels, ces gens doivent retourner dans leur pays d'origine.
    Leur renvoi peut s'accompagner de mesures visant leur réintégration dans leur pays et dans leur communauté d'accueil. Souvent, ils sont partis à cause de la pauvreté et du manque de possibilités d'emploi. Il existe des mesures d'accompagnement qui peuvent être mises en place, et qui ont été mises en place.
    À mon avis, il est important aujourd'hui d'envoyer le signal selon lequel les personnes devraient faire attention et ne devraient pas compter sur le système d'octroi de l'asile pour immigrer au Canada. Si elles veulent immigrer ici, elles peuvent recourir à des processus différents de celui de l'asile. Elles ne doivent pas dépenser leur argent et mettre leur vie en danger en prenant des bateaux ou en demandant à des passeurs de faire venir leur famille. Il faut leur dire que leur admission ne sera pas automatique à leur arrivée au Canada et qu'elles ne peuvent pas abuser — c'est ce que l'on entend souvent de la part du public — du système d'octroi de l'asile.
    Cela envoie aussi le signal que le Canada reste un pays qui accueillera ceux qui sont en droit d'obtenir l'asile et qui ont besoin de cette protection. Ceux-ci pourront avoir recours à des processus similaires, mais différents, étant donné qu'il faut trouver des manières plus rapides et plus rentables de faire le travail. Cependant, tous ces processus ont le même objectif, dans le fond, soit la protection de ceux qui ne peuvent pas retourner chez eux en raison des risques de torture et de persécution.

  (1830)  

    Je vous remercie, monsieur Beuze.
    Il me reste à peine deux minutes. Je vais les laisser à mon collègue M. DeCourcey, qui a quelques questions.

[Traduction]

    Messieurs Leuprecht et Beuze, je me demande si vous pourriez clarifier ce qui suit, car j'ai entendu Mme Rempel parler de la nécessité que le Canada fasse preuve de leadership au sujet de la réforme mondiale du régime d'asile. Elle a parlé de l'importance que les représentants du Canada soient présents à la table, qu'ils discutent avec leurs homologues au sujet de l'Entente sur les tiers pays sûrs.
    N'est-ce pas pour ces questions précises que le Canada est présent à la table et qu'il agit à titre de chef de file en ce qui a trait au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières? Oui ou non?
    Nous sommes dans une situation où les gens se dispensent massivement de respecter les formalités des politiques nationales d'immigration dans des pays...
    Monsieur Leuprecht, je suis désolé, mais ces conversations se tiennent-elles lorsque les pays se rencontrent au sujet du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières?
    Donnez-lui la chance de répondre à la question.
    Elles sont incluses dans le document. Ces questions ne font-elles pas partie intégrante du rôle de chef de file que joue le Canada?
    Nous parlons exclusivement de questions nationales. Rien dans ce projet de loi ne me laisse croire que le Canada s'inspire d'autres pays ou qu'il travaille en coordination avec d'autres États.
    Non, je vous pose une question à propos d'un commentaire fait plus tôt sur la nécessité que le Canada assume un rôle de chef de file relativement à une réforme mondiale de l'asile et aux ententes sur les tiers pays sûrs dans le monde.
    Monsieur Beuze, cela s'inscrit-il dans le cadre de la conversation au sujet du Pacte mondial?
    La réponse est oui.
    Serait-il juste de dire que les propos alarmistes tenus avant Noël à cet égard par le chef conservateur contredisent complètement ce que dit son porte-parole à l'heure actuelle quant à la nécessité que le Canada fasse preuve de leadership? Vous n'avez pas à répondre à cela.
    Monsieur Beuze, êtes-vous convaincu que les garanties procédurales en place...
    Pourquoi soulever la question alors? Simplement pour le plaisir?
    ... permettrons de composer avec les mécanismes prévus à la section 16?
    J'en suis convaincu, et j'espère qu'à un certain moment, les mesures qui ont été décrites par M. Blair seront inscrites dans une loi.
    Y a-t-il autre chose que le gouvernement puisse faire pour renforcer ces garanties et assurer l'équité du système d'asile — qui, comme nous le savons, est important —, de façon à permettre au Canada de continuer d'être un lieu de refuge?
    Maintenir la décision — celle dont il a été question ici — de tenir une audience, d'accorder le droit aux services d'un conseil, d'offrir la possibilité d'interjeter appel et de faire en sorte que ces procédures soient pleinement reconnues dans une mesure législative.
    Madame Naso, merci d'être ici aujourd'hui et de faire preuve de leadership au sein de la communauté yézidie à l'échelle du pays avec Operation Ezra à Winnipeg.
    Il s'agit d'une partie importante du leadership du gouvernement concernant la réinstallation, et je suis certain que nous discuterons davantage des possibilités de réinstaller plus de yézidis ici au Canada.
    Êtes-vous d'accord pour dire qu'il est important que les Canadiens comprennent la distinction entre un système d'asile juste et solide et un système de réinstallation et sachant que ce sont deux processus et systèmes distincts, et êtes-vous d'avis qu'il y faut fournir aux Canadiens des renseignements clairs sur certains aspects importants, afin que l'on puisse s'assurer qu'ils acceptent notre leadership mondial continu en matière de réinstallation?
    Oui.
    Monsieur Leuprecht, je vais peut-être simplement me prévaloir de la prérogative du président pour les 10 dernières secondes. Vouliez-vous ajouter quelque chose au dernier point soulevé par M. DeCourcey?
    Monsieur Leuprecht, je tiens à m'excuser. J'espérais seulement obtenir une courte réponse avant que le temps soit écoulé.
    Si vous le lui permettez, monsieur le président, je l'autoriserai.
    Combien de temps dure votre réponse?
    Dix secondes.
    La raison pour laquelle j'interviens, c'est qu'on discute beaucoup trop en quelque sorte de la protection de ceux qui viennent ici. Nous devrions insister sur la protection des personnes les plus vulnérables, plutôt que des personnes qui se sont délibérément dispensées de respecter les formalités des politiques nationales d'immigration.
    Rien dans ce projet de loi n'élimine le fait qu'il s'agit du problème d'envergure que nous devons aborder pour régler la grande question. Au lieu d'insister uniquement sur la protection de ceux qui arrivent au Canada, consacrons nos efforts à aider les gens, comme mes collègues...
    Monsieur Leuprecht, ce genre de conversation devrait se tenir dans le cadre de ces forums internationaux. N'êtes-vous pas d'accord?
    Monsieur DeCourcey, je crois que nous avons terminé. Merci beaucoup.
    Nous allons prendre une courte pause, puis j'inviterais les prochains et derniers témoins à prendre place.

  (1830)  


  (1835)  

    Nous poursuivons avec le quatrième groupe de témoins de la 158e réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes.
    Pour la prochaine heure, nous sommes en compagnie de Justin Mohammed et Marilynn Rubayika, d'Amnistie internationale Canada; ainsi que de Lobat Sadrehashemi, qui représente l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés.
    Chacun de vos organismes disposera de sept minutes pour présenter un exposé, puis il y aura une série de questions de sept minutes, je crois.
    Nous allons commencer par Amnistie internationale.
    Merci, monsieur le président. Je tiens d'abord à souligner que nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Il s'agit d'un message particulièrement important à transmettre au sein du Comité, car à l'exception de nos peuples autochtones, bien sûr, lorsque nous discutons des questions d'immigration et de réfugié, nous avons tous une histoire qui tire ses racines de la migration.
    Aujourd'hui, nos déclarations porteront exclusivement sur l'article 306 du projet de loi, qui introduit un motif d'irrecevabilité pour les demandes d'asile présentées à la Section de la protection des réfugiés de la CISR. Je tiens à préciser que nous contestons le fait que les changements qu'on propose d'apporter au régime de protection des réfugiés du Canada font partie d'un projet de loi omnibus. Nous saluons la décision du Comité d'examiner tout de même la question, mais nous sommes consternés de ne pas avoir été consultés avant le dépôt de ce projet de loi.
    Durant mon exposé, j'aimerais faire valoir trois points. D'abord, Amnistie internationale estime que le projet de loi C-97 ne respecte pas les engagements du Canada sous le régime du droit international. Ensuite, le projet de loi aura une incidence négative sur la pratique canadienne touchant les réfugiés en créant un système de protection des réfugiés à deux vitesses. Enfin, le Canada ne doit pas s'appuyer sur les régimes de protection d'autres pays pour respecter ses obligations internationales.
    En ce qui concerne l'incohérence avec le droit international, Amnistie internationale est d'avis que l'article 306 du projet de loi C-97 va à l'encontre du droit international des réfugiés, car il constitue un obstacle automatique au renvoi d'une demande au système de détermination du statut de réfugié du Canada, soit la Section de la protection des réfugiés.
    Cet article s'applique sans égard au moment où la demande antérieure a été déposée; à l'état de la demande dans un autre pays, qu'elle ait été traitée, acceptée, rejetée, retirée, etc.; à l'équité du système de détermination du statut de réfugié dans l'autre pays; ou aux autres motifs possibles de bonne foi pour lesquels une personne peut chercher à obtenir la protection au Canada après avoir demandé asile ailleurs. Nous estimons que ces interdictions automatiques touchant l'examen des demandes d'asile ne sont pas conformes à la Convention relative au statut des réfugiés.
     En outre, la convention interdit la discrimination chez les réfugiés fondée sur la race, la religion ou le pays d'origine. Même si la mesure prévue dans le projet de loi C-97 n'est pas discriminatoire selon ces motifs, elle est arbitraire et constitue de la discrimination fondée sur une demande déposée dans un autre pays s'il s'agit de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni ou des États-Unis ou de tout autre pays avec lequel le Canada a signé une entente.
    Nous sommes d'avis qu'il s'agit d'un motif analogue de discrimination à l'endroit des personnes visées par la Convention relative au statut des réfugiés et que cela va donc à l'encontre de l'esprit sinon de la lettre de cette convention.
     De plus, il s'agit d'un système à deux vitesses. Amnistie internationale s'oppose à la mesure prévue dans le projet de loi C-97, car elle introduit un système de protection des réfugiés à deux vitesses. Même si certains demandeurs d'asile auront accès au rigoureux système de détermination du statut de réfugié de la CISR, d'autres n'auront accès qu'à l'ERAR.
    Le HCR a déjà exprimé des préoccupations à cet égard:
Lorsque l'accès au processus de détermination du statut de réfugié est refusé et que les demandes sont renvoyées aux fins d'une décision fondée sur l'ERAR, il y a un risque de créer un système à deux vitesses, au sein duquel les risques liés à la protection d'une classe de demandeurs d'asile sont évalués par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, alors que ceux d'une autre classe sont évalués par les représentants de CIC. Cela peut influer sur l'efficience du système et l'uniformité du processus décisionnel.
    Le guide du HCR, réédité en février 2019, dit la même chose:
Il devrait y avoir une autorité clairement désignée — dans la mesure du possible, une seule autorité centrale — responsable d'examiner les demandes de statut de réfugié et de prendre une décision en première instance.
    Amnistie internationale appuie ce point de vue, car le modèle à deux vitesses donne lieu à d'importantes différences. Je vais maintenant les aborder.
    D'abord, il y a l'indépendance. Même si la CISR est un tribunal quasi judiciaire et indépendant, un agent d'ERAR est un employé d'IRCC. Ce nouveau système minerait la politique canadienne de longue date selon laquelle les demandes d'asile sont instruites par un décideur indépendant.
    Ensuite, il y a les audiences. Elles sont discrétionnaires dans le cadre de l'ERAR. Toutefois, même si une entrevue de vive voix est accordée, elle n'offre pas les mêmes protections qu'une audience devant la CISR. Le demandeur d'asile n'a pas la capacité de faire appel à un témoin ni de sonder la preuve sur laquelle s'appuie un agent.
    Enfin, il y a les appels. On peut interjeter appel des décisions de la Section de la protection des réfugiés auprès de la Section d'appel des réfugiés, alors que les appels concernant l'ERAR sont renvoyés à la Cour fédérale à des fins de contrôle judiciaire. Les deux respectent des normes de contrôle judiciaire différentes et, fait plus important encore, même si un appel interjeté auprès de la Section d'appel des réfugiés donne lieu à un sursis de renvoi automatique, ce n'est pas le cas pour une demande de contrôle judiciaire.
    Pour conclure, Amnistie internationale craint que le projet de loi C-97 s'appuie exagérément sur des systèmes étrangers de détermination du statut de réfugié donnant lieu à des cas bien documentés de violation des droits des demandeurs d'asile. Les États-Unis en sont un bon exemple.
    Dans son rapport de 2018 intitulé Vous n'avez aucun droit ici, Amnistie internationale a documenté trois catégories de violations des droits de la personne qui ont été commises aux États-Unis: les renvois forcés illégaux à la frontière mexicaine, la séparation de familles et la détention arbitraire et illimitée.

  (1840)  

    Depuis la publication de ce rapport, une série de politiques administratives qui ne respectent pas les droits des réfugiés ont été adoptées. L'une refuse la libération sous caution des demandeurs d'asile tant que le traitement de leur demande n'est pas terminé, ce qui, nous le savons, peut prendre des années. Une autre établit une règle générale qui exclut les victimes de violence de gang et de violence familiale du droit de demander l'asile. Pas plus tard que la semaine dernière, l'administration Trump a distribué une note de service qui vise à démanteler davantage le système de protection en affectant des gardes-frontières, plutôt que des agents d'asile, à l'examen de ces demandes.
    Je voudrais maintenant céder la parole à ma collègue, Mme Rubayika, afin qu'elle donne un exemple concret du type de demande qui sera touché si le projet de loi C-97 entre en vigueur.

  (1845)  

[Français]

    Monsieur le président, messieurs et mesdames les députés, nous aimerions vous exposer le profil d'une personne qui, grâce au système tel qu'il existe aujourd'hui, s'est vu accorder la protection qu'elle revendiquait et qui lui revenait en tant que personne réfugiée.
    En 2006, cette personne a quitté son pays d'origine, l'Arabie saoudite, pour poursuivre des études supérieures aux États-Unis. Pendant ce temps, en Arabie saoudite, son père, une personnalité publique reconnue comme prisonnier d'opinion par Amnistie internationale, s'est fait arrêter et emprisonner à deux reprises. Il a été accusé d'avoir critiqué certaines lois et politiques discriminatoires et d'avoir demandé leur réforme.
    La personne a donc entamé une campagne sur les médias sociaux, sur Facebook, revendiquant la liberté de religion et d'expression et, ultimement, la mise en liberté de son père. Un membre de sa famille, qui participait également à la campagne, n'a pas tardé à se faire arrêter et s'est retrouvé dans l'obligation de faire des confessions incriminantes.
    C'est sur ces bases que la personne a choisi de présenter une demande d'asile aux États-Unis, pour sa famille et pour elle-même. Cet asile leur a été refusé, et ce, malgré la dénonciation publique faite par Human Rights Watch et Amnistie internationale au sujet des arrestations des membres de sa famille.
    De peur d'être déportée en Arabie saoudite avec les membres de sa famille, où elle aurait sans doute été exposée à un risque de persécution, la personne a décidé d'entrer de façon irrégulière au Canada. À la suite de l'étude de son dossier, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada a reconnu que cette personne devait être protégée ici, au Canada, faute de quoi elle serait exposée à un risque de persécution dans son pays d'origine. Ce même dossier, qui avait été rejeté par un fonctionnaire aux États-Unis, a abouti à une décision affirmative devant cette commission indépendante.
    Amnistie internationale encourage donc le Comité ci-présent à considérer les difficultés procédurales auxquelles cette personne se serait heurtée si elle n'avait pas eu l'occasion de démontrer sa recevabilité auprès d'une commission indépendante.
    Je dois vous demander de conclure.
    Merci. J'en ai pour 10 secondes.
    Pour des raisons obscures, sa demande avait été rejetée aux États-Unis.
    Les réfugiés ont le droit d'être entendus par une commission indépendante, et il revient au Canada de s'assurer qu'il respecte les obligations internationales auxquelles il s'est engagé.
    Merci.

[Traduction]

    Madame Sadrehashemi, de l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés, vous avez la parole.
    Certaines personnes ont affirmé que nous nous efforçons en vain de nous opposer à ces modifications. Elles disent que ces dispositions font partie d'un projet de loi budgétaire et qu'elles seront donc inévitablement inscrites dans la loi.
    Je comparais ce soir au nom de l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés parce que ces modifications sont injustes et qu'en fin de compte, elles sont mauvaises pour notre système de détermination du statut de réfugié. Nous sommes rassemblés dans cette salle parce que la collectivité nous a confié la tâche de promulguer des lois qui sont justes et de nous prononcer contre les mesures inéquitables, et je veux que nous agissions en conséquence. Je veux que vous vous demandiez si vous vous sentez à l'aise d'adopter de cette manière — à la hâte au moyen d'un projet de loi budgétaire — des lois qui minent directement les droits de certains des membres les plus vulnérables de notre collectivité.
    Je consacrerai mon temps de parole à l'article 306, la modification qui crée un nouveau motif d'irrecevabilité. Vous avez entendu aujourd'hui le témoignage du ministre Blair, de fonctionnaires et du représentant canadien du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Vous les avez entendus vous assurer que les modifications contenues à l'article 306 ne sont pas importantes, qu'elles n'auront pas d'incidence profonde. La majeure partie de leur foi semble être fondée sur des promesses qu'on ne retrouve même pas dans le projet de loi. Je ne comprends pas leur position. La création d'un nouveau motif d'irrecevabilité est un changement important pour notre système de détermination du statut de réfugié qui a une incidence sur une vaste catégorie de personnes et retire de nombreuses mesures de protection importantes à ces demandeurs d'asile.
    Cette modification n'aura pas seulement une incidence sur les demandeurs d'asile qui traversent la frontière de façon irrégulière. Elles touchent tous les demandeurs d'asile, quelle que soit la façon dont ils ont voyagé jusqu'ici et sans égard au fait qu'ils ont déjà présenté ou non une demande d'asile dans l'un des pays avec lesquels il se trouve que le Canada a conclu une entente d'échange de renseignements. Ces conséquences ne se limitent pas uniquement aux personnes dont la demande d'asile a été rejetée par un autre pays. Il suffit qu'elles aient présenté une demande d'asile. L'effet ne se limite même pas aux demandes d'asile que ces personnes ont présentées à l'âge adulte. Même si elles étaient enfants et qu'elles faisaient partie de la demande d'asile présentée par leurs parents dans l'un de ces pays, elles n'auront pas droit à une audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
    Que perdront les demandeurs d'asile appartenant à cette vaste nouvelle catégorie? Beaucoup. Il ne s'agit pas de modifications mineures et de quelques différences procédurales. Ces demandeurs d'asile perdront des droits fondamentaux. Ils perdront le droit d'avoir une audience complète devant un tribunal indépendant. Ils perdront l'accès à un appel sur le fond. Ils ne peuvent pas s'adresser à la Section d'appel des réfugiés. Ils ne disposent d'aucune protection contre le renvoi si une décision fait l'objet d'un examen par la Cour fédérale. Il n'y a aucun sursis automatique aux mesures de renvoi. Aujourd'hui, vous avez entendu le ministre Blair et d'autres intervenants affirmer qu'il est inutile de s'inquiéter parce que ces demandeurs d'asile se verront encore offrir une protection grâce aux ERAR.
    Je voudrais d'abord traiter de ce qui est soumis à notre étude: la LIPR et les modifications prévues dans le projet de loi budgétaire. Ensuite, nous pourrons nous occuper des garanties qui ne figurent nulle part dans la loi, soit les prétendus ERAR améliorés dont vous avez entendu parler aujourd'hui. L'ERAR n'est pas la même chose qu'une audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Tout avocat en droit des réfugiés vous le dira. Il s'agit d'un processus écrit. On remplit des formulaires. On formule des arguments par écrit, qu'on adresse à un employé d'IRCC. La LIPR prévoit précisément que les agents ne sont pas obligés de tenir une entrevue, et ils n'en tiennent effectivement pas. Il est extrêmement rare qu'ils le fassent. Même dans ces rares circonstances, il ne s'agit pas d'une audience, comme vous l'a déjà expliqué M. Mohammed d'Amnistie internationale.
    Aujourd'hui, nous avons entendu le ministre Blair nous assurer que l'ERAR serait amélioré. J'ai écouté attentivement le témoignage, et je suis perdue. On nous a dit que personne ne serait expulsé sans avoir fait l'objet d'une audience. Quand on lui a demandé si, par « audience », il voulait dire une entrevue, il a répondu que non, ce sera une audience devant un responsable, pas une entrevue. À ce que je crois comprendre, le gouvernement n'a pas le pouvoir d'établir un processus d'audience en dehors du régime de la loi.
    Il est également évident que le ministère n'a pas réfléchi à la façon dont ce système fonctionnerait, d'un point de vue opérationnel, s'il devait désormais tenir des milliers d'audiences. Premièrement, les agents d'ERAR ne sont pas qualifiés pour le faire. Aujourd'hui, un fonctionnaire a affirmé que la formation que reçoivent les agents d'ERAR afin de pouvoir prendre des décisions concernant le statut de réfugié est la même que celle que reçoivent les commissaires de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. J'ai trouvé cette réponse ahurissante. Ce n'est pas vrai. L'ERAR n'a jamais été conçu pour être un substitut à la SPR. Il s'agit d'un processus écrit qui se déroule lorsqu'une personne a déjà fait l'objet d'une audience devant la Section de la protection des réfugiés. Les agents ne sont pas qualifiés pour faire ce travail. Ils n'effectuent pas d'évaluations complètes de la crédibilité. C'est à peine s'il leur arrive de tenir des entrevues. Ils n'ont pas reçu de formation sur la façon d'examiner adéquatement le cas d'une femme qui a subi de la violence. Il n'existe aucune ligne directrice à ce sujet. Ils ne possèdent pas les outils nécessaires.
    Deuxièmement, ils ne disposent pas de l'infrastructure nécessaire pour le faire. Vont-ils créer un registre et fixer des dates pour les audiences, l'interprétation et la communication des documents? Où sont les salles d'audience? On n'a réfléchi à rien de tout cela.
    Il est très facile de promettre des choses sans les inscrire dans la loi, sans même réfléchir à la façon dont elles se dérouleront, d'un point de vue opérationnel.

  (1850)  

    Pourquoi cela ne faisait-il pas partie de la LEB? Si cette protection est aussi essentielle et aussi fondamentale que vous le dites, vous devriez vous demander pourquoi elle ne figure pas dans le projet de loi. Tout cela fait ressortir la nécessité de retirer cette disposition du projet de loi budgétaire et de l'étudier adéquatement, ainsi que les mesures de protection promises. Les promesses du gouvernement m'amènent à vous poser la question suivante: si vous devez accorder une audience à tout le monde, pourquoi créer un processus parallèle? Quelle est la logique de cette mesure? Elle ne fera que créer davantage d'arriérés et de retards.
    On n'a pas procédé à un examen approfondi des conséquences de ces dispositions, notamment celles qui sont liées au genre. Ces dispositions toucheront disproportionnellement les femmes. Par exemple, aux États-Unis, on ne reconnaît pas les demandes d'asile fondées sur la violence familiale, même si le pays d'origine n'offre aucune protection aux femmes contre cette violence. Le Canada reconnaît depuis longtemps que la violence familiale est un motif pour lequel les femmes peuvent demander la protection du pays; pourtant, au titre de ces modifications, nous punirions une femme dont le cas a été rejeté aux États-Unis ou qui a abandonné sa demande d'asile dans ce pays parce qu'elle savait qu'elle serait refusée. Nous punirions ces femmes et leurs enfants au moyen d'un processus inférieur et leur dirions qu'elles ne méritent pas une pleine audience indépendante devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
    Je ne sais pas comment j'expliquerais à une cliente qui, après avoir vécu des années de violence familiale, s'est débrouillée pour s'échapper et se rendre du Honduras jusqu'aux États-Unis, où elle a été détenue et adéquatement avisée que ce pays ne reconnaîtra pas sa demande d'asile, pourquoi, après tout cela, après avoir réussi à se rendre au Canada, elle n'aura pas la possibilité de présenter sa cause à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Elle sera reléguée à un processus inférieur auprès d'un fonctionnaire, et elle n'aura pas la possibilité d'interjeter appel sur le fond. Est-ce que je vais lui dire que notre gouvernement croit qu'elle se magasine un pays d'asile? Il ne s'agit pas de femmes qui se magasinent le meilleur pays où immigrer. Elles cherchent la protection et la sécurité. Absolument rien ne justifie que l'on punisse ces demandeuses d'asile. Leur offrir un processus inférieur est une punition.
    Les modifications proposées comportent de très nombreux aspects problématiques. Elles ne permettront d'atteindre aucun objectif légitime du gouvernement. L'ACADR exhorte le Comité à les rejeter.

  (1855)  

    Nous allons commencer par Mme Zahid.
    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui et de leur témoignage.
    L'article 306 du projet de loi C-97 rendrait irrecevable une demande d'asile présentée par une personne au Canada si elle a déjà présenté une telle demande dans un autre pays avec lequel le Canada a conclu une entente d'échanges de données, plus précisément l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et le Royaume-Uni. Les personnes dans cette situation auraient la permission de demander un examen des risques avant renvoi. Pourrais-je vous demander à tous les deux de nous adresser vos recommandations pour nous aider à nous assurer que l'audience d'ERAR est renforcée et que tout le monde bénéficiera d'une chance raisonnable dans le cadre ce processus? Avez-vous des recommandations à formuler pour nous aider à renforcer cette protection?
    Je vais commencer par vous, monsieur Mohammed.
    Amnistie internationale recommande que le processus d'audience prévu soit le même, sans égard au fait qu'une demande d'asile a déjà été présentée ou non. Après tout, les mesures de protection offertes par la CISR existent toutes pour une raison. Je pense que, si nous faisons preuve de logique, nous pourrons comprendre que le régime de protection qu'offre la CISR est là parce qu'il vise à protéger les droits des réfugiés.
    Quant au fait d'établir un processus distinct fondé sur l'ERAR, je ne comprends pas ce qu'on obtiendrait de plus, si nous reconnaissons qu'il s'agit des mesures de protection dont devraient bénéficier les demandeurs d'asile au Canada. Nous recommandons que, de fait, les mêmes mesures de protection dont bénéficie une personne qui prend part au processus de la CISR soient également offertes à tout demandeur d'asile au Canada.
    Madame Sadrehashemi, voudriez-vous formuler un commentaire?
    Je souscris aux commentaires formulés par le représentant d'Amnistie internationale. J'ajouterais simplement que je pense qu'il est problématique qu'à cette étape, nous parlions de recommandations de mesures de protection. Si ces modifications ne prévoient pas un processus équitable — et ce processus est soumis à votre étude —, nous ne devrions pas les adopter.
     Non, mais tout le monde aurait une chance. Personne ne serait renvoyé. Sous le régime de la section 16 du projet de loi C-97, tout le monde aurait la possibilité de faire l'objet d'une audience d'ERAR. Ma question concernait le fait que...
    Je suis désolée de vous interrompre, mais ce n'est pas vrai.
    Je crois comprendre qu'il y a eu des communications — et j'ai vu les communications envoyées aux députés par le cabinet du ministre Blair — disant que tout le monde aura droit à un solide processus d'audience et à un appel, mais, je suis désolée, ce n'est simplement pas vrai. Ce n'est pas ce que contiennent ces modifications.
    Quand le ministre parle d'un examen des risques avant renvoi amélioré, il ne fait qu'affirmer que ce sera offert. Ce n'est pas ce que vous avez sous les yeux. Ce n'est pas inscrit dans le projet de loi.
    Si la demande d'asile que présentent ces personnes n'est pas recevable, elles obtiendront une audience d'ERAR.
    Non. Elles obtiendront un processus d'ERAR. Elles auront accès à un ERAR, et il s'agit généralement d'un processus écrit. La LIPR énonce clairement que non seulement les agents ne sont pas obligés de tenir une audience, mais ils ne sont même pas obligés de tenir une entrevue. Par conséquent, tout ce que vous entendez au sujet de cet ERAR amélioré n'est pas prévu dans la LIPR; cela ne fait pas partie des modifications prévues dans le projet de loi budgétaire. Cela n'y figure pas.
    Nous avons entendu le témoignage du ministre Blair, et il a précisé qu'une entrevue sera tenue, alors il est faux d'affirmer qu'il n'y en aura pas. Il s'est présenté ici à 15 h 30 aujourd'hui et a mentionné très précisément dans son témoignage que tout le monde aura la possibilité de faire l'objet d'une audience d'ERAR.
    Oui, je l'ai entendu, et il a affirmé que tout le monde aurait la possibilité de faire l'objet d'une audience, mais, si vous regardez le libellé de la LIPR et les modifications prévues dans le projet de loi budgétaire, il n'y a rien. Les modifications ne contiennent rien au sujet de l'ERAR, alors cet examen demeure tel qu'il est prévu dans la LIPR.
    Le projet de loi budgétaire n'apporte aucune modification à l'ERAR, alors il s'agit d'une méprise. C'est très malheureux, car c'est quelque chose de très grave qui touchera des gens, et il est inacceptable que l'on vous ait fourni ces garanties qui ne sont en fait pas prévues dans la loi.

  (1900)  

    Je voudrais partager mon temps de parole avec M. DeCourcey.
    Madame Sadrehashemi, si ces éléments font l'objet d'une garantie par voie de règlement, serait-ce satisfaisant? Y aurait-il moyen de renforcer ce processus afin de nous assurer que l'ERAR amélioré garantit la tenue d'une audience en personne pour les réfugiés n'ayant pas accès à la CISR parce qu'ils ont déjà présenté une demande d'asile dans un autre tiers pays sûr?
    Y a-t-il une recommandation que vous pouvez nous adresser afin que, si le nouvel examen des risques avant renvoi est adopté, nous puissions y ajouter des mesures de protection pour garantir la tenue d'une audience en personne?
    Je commencerais par dire que, comme vous le savez, il est facile de modifier la réglementation, alors cela me pose problème si c'est ainsi que nous nous assurons que ce processus sera équitable. Ce sont des mesures de protection clés.
    Toutefois, la réglementation peut également être renforcée bien plus facilement que d'autres types de dispositions.
    Eh bien, je ne comprends tout simplement pas. S'il s'agit d'une mesure de protection clé, pourquoi refusez-vous de l'inscrire dans les modifications prévues dans le budget?
    Elle ne figure nulle part. Je n'ai vu aucune ébauche de disposition réglementaire. Par ailleurs, il est très évident que les dispositions réglementaires peuvent facilement être modifiées et retirées par des gouvernements subséquents, et je ne me sentirais pas à l'aise avec des garanties qui sont prévues par règlement, et je n'en serais pas satisfaite.
    En l'occurrence, elles ne sont même pas prévues par règlement. Elles ne figurent nulle part.
    Vous avez mentionné les conséquences sexospécifiques potentielles. Disposez-vous de données probantes donnant à penser que ce seraient les femmes et les filles qui subiraient l'effet défavorable de ce système, surtout étant donné que l'agence internationale de l'ONU considère encore les États-Unis comme un tiers pays sûr, lequel est doté d'un système d'octroi de l'asile mature et solide permettant de statuer adéquatement sur les demandes d'asile?
    Très rapidement, s'il vous plaît.
    Je sais que, demain, un témoin comparaîtra, qui vous parlera du système d'octroi de l'asile américain et plus particulièrement des demandes d'asile fondées sur le sexe, mais il est très clair que les États-Unis ne traitent pas les demandes fondées sur la violence familiale de la même manière que le Canada. Il y a une décision — Matter of A-B- —, la décision de Jeff Sessions.
    Je ne pense pas que ce soit une position controversée, alors, tout ce que nous disons, c'est qu'il existe des motifs très légitimes pour lesquels des femmes pourraient abandonner leur demande d'asile aux États-Unis ou pour lesquels leur demande d'asile pourrait être rejetée si elle est fondée sur la violence familiale. Je ne vois pas pourquoi ces femmes devraient être punies pour cette raison.
    Monsieur Tilson, vous avez la parole.
    Eh bien, vous êtes très directs. Je pense que vous affirmez tous les deux que le projet de loi est irrécupérable, qu'il n'y a pas de place pour des modifications. Vous ne faites aucune suggestion d'amendements, et vous dites simplement aux députés de voter contre le projet de loi.
    Serait-ce juste? J'espère ne pas avoir mal interprété vos propos.
    Certes, madame Sadrehashemi, vous semblez avoir cet avis en tant qu'avocate.
    Notre position est que nous vous exhortons à rejeter la modification et, si vous ne le faites pas, que vous la sépariez au moins du projet de loi budgétaire et l'inscriviez dans un projet de loi indépendant qui fera l'objet d'un débat approprié.
    Le gouvernement ne le fera pas.
    Monsieur, allez-y.
    Oui, c'est exact. Nous pensons que les mesures de protection... et je voudrais répéter certaines des positions. Nous avons examiné le projet de loi budgétaire. Encore une fois, l'article 306, la disposition que nous étudions, ne prévoit rien au sujet de mesures de protection améliorées. C'est problématique parce que la disposition est irrécupérable en ce sens. Elle ne prévoit rien qui offrirait une protection équivalente aux mesures actuellement offertes par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Les obligations de cette commission existent pour une raison. Elles sont là pour protéger les droits des réfugiés.
    Y a-t-il d'autres réformes que vous recommanderiez en ce qui a trait au système d'octroi de l'asile? Autrement dit, j'en reviens à la question de savoir si des modifications devraient être apportées. Vous pourriez avoir d'autres idées en ce qui concerne les modifications qui pourraient être apportées à cet égard. Vous nous avez dit de voter contre. Je le comprends; vous ne pourriez pas être plus clairs. Avez-vous d'autres suggestions de réformes du système relatif aux demandes d'asile du Canada? Cette question s'adresse à vous deux.
    De façon générale, nous sommes d'avis que ces genres de réformes législatives majeures du système d'asile ne devraient pas être effectués au moyen d'un projet de loi budgétaire.
    J'affirmerais que, si nous devons parler de toutes ces mesures de protection qui seront offertes aux gens, on s'attendrait à ce qu'elles soient au moins incluses. Si vous devez adopter une modification parce qu'on vous a garanti que les gens ne seront pas renvoyés pendant que la décision à leur égard fait l'objet d'un contrôle judiciaire ou que tout le monde obtiendra une audience, à tout le moins, on s'attendrait à ce que ces mesures fassent partie du projet de loi.

  (1905)  

    Qu'en est-il d'Amnistie internationale, monsieur Mohammed?
    Je n'ai rien d'autre à ajouter.
    Je n'ai pas d'autres questions, monsieur Maguire.
    Madame Sadrehashemi, votre opinion est très claire. Vos deux exposés sont très clairs concernant cequi ne figure pas dans le projet de loi. Si rien ne figure dans cet article, si la modification est prévue ainsi dans le projet de loi omnibus, pourquoi, selon vous, a-t-on même intégré cet élément à la LEB?
    Je ne peux pas formuler d'hypothèse à ce sujet. Je n'ai pas vraiment...
    Je ne formulerais aucune hypothèse à ce sujet, moi non plus.
    Le moment choisi est curieux: il nous reste un mois de session, et des élections auront lieu cet automne. Je me demande si vous avez des commentaires à formuler à ce sujet.
    Un certain nombre d'éléments — comme l'a souligné mon collègue — se retrouvent dans des projets de loi omnibus alors qu'ils ne devraient peut-être pas y figurer. Une mesure récente concernant les « accords de poursuite suspendue » me vient également à l'esprit. Je pense qu'elle a été démolie par tout le monde dans tout le pays au cours des quatre ou cinq derniers mois.
    Vous avez également mentionné que rien n'est prévu dans l'article 306 au sujet de la protection améliorée. Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet?
    L'article 306 prévoit seulement la création de ce nouveau motif d'irrecevabilité. Il énonce qu'une demande d'asile présentée par une personne qui a déjà demandé l'asile dans un pays avec lequel le Canada a conclu une entente d'échange de renseignements sera désormais irrecevable. C'est sous le régime de la LIPR que ces personnes auront accès à l'ERAR si leur demande n'est pas recevable. Aucune disposition du projet de loi budgétaire ne modifie le processus normal d'ERAR.
    Alors, peut-être que des modifications pourraient être acceptables à certains égards. Quand on vous a demandé, auparavant, s'il y avait une modification à apporter, il pourrait s'agir de l'un des aspects à l'égard duquel on pourrait faire quelque chose. Toutefois, je souscris entièrement à votre opinion selon laquelle cette mesure aurait probablement dû être présentée en tant que projet de loi distinct dans ce domaine.
    Selon un des commentaires qui ont été formulés, essentiellement, le fait d'emprunter cette voie nous a fait perdre notre souveraineté. Y a-t-il des commentaires à ce sujet?
    Le seul commentaire supplémentaire que je formulerais à ce sujet, c'est que, dans le projet de loi, les régimes de protection d'autres pays auxquels nous nous fions se limitent, pour l'instant, à ceux des pays que de nombreuses personnes désignent informellement comme étant le Groupe des cinq. Ce sont les pays avec lesquels le Canada a signé un accord d'échange de renseignements.
    Le problème tient au fait que le projet de loi ne contient aucune disposition au sujet de Groupe des cinq. Il ne contient rien au sujet des pays que d'autres témoins et moi-même avons mentionnés. Je parle de ceux avec lesquels le Canada a signé un accord d'échange de renseignements. Il n'y a aucune limite quant aux autres pays avec lesquels le Canada pourrait conclure ce type d'accord dans l'avenir. Alors, il s'agirait de remettre les obligations du Canada au titre du droit international entre les mains d'autres pays — pensez ce que vous voulez des quatre pays qui sont inclus dans les accords d'échange de renseignements actuellement en vigueur —, et c'est là que réside le problème. Il n'y a aucune mention au sujet de l'ajout potentiel d'autres pays.
    Ensuite, simplement pour répéter, il y a le problème des demandes d'asile présentées dans d'autres pays. J'ai nommé les États-Unis en guise d'exemple. Des recommandations et des réponses ont été formulées par des personnes qui laissent entendre que les États-Unis sont un pays appliquant la primauté du droit, où il y a encore un Congrès fonctionnel. Je mentionnerais au Comité que, même si le Congrès ou l'organe judiciaire des États-Unis peuvent atténuer les excès de l'administration Trump en ce qui a trait aux réfugiés et aux demandeurs d'asile, ces changements prennent du temps. Entre-temps, des personnes sont touchées par ces décisions en ce moment même.
    La décision...

  (1910)  

    Je vous remercie, monsieur Mohammed.
    Nous allons maintenant passer à la prochaine série de questions de sept minutes, avec Mme Kwan.
    Je vais laisser M. Mohammed terminer sa réflexion, puis je poserai certaines questions.
    Je vous remercie, madame Kwan.
    Là où je veux en venir, en définitive, c'est simplement qu'il y a des personnes qui sont touchées par cette décision en ce moment même. La décision de l'ancien procureur général Jeff Sessions, dans l'affaire A-B- à laquelle vous a renvoyés ma collègue, a actuellement force de loi. Elle s'applique aux gens en ce moment même et, tant que ces excès n'auront pas été atténués par le Congrès ou par l'organe judiciaire — s'ils le sont et dans la mesure où ils le seront —, des gens seront touchés par ces modifications.
    Merci.
    Tout d'abord, je voudrais adresser mes remerciements à M. Mohammed et à Mme Rubayika pour avoir présenté la position d'Amnistie internationale. Après avoir écouté le témoignage présenté aujourd'hui par le ministre Blair, je me suis dit: « Seigneur, Amnistie internationale a-t-elle changé d'idée? Est-elle maintenant favorable à cette disposition? » Alors, je suis vraiment heureuse d'avoir entendu l'exposé que vous avez présenté clairement concernant la position de votre organisation.
    Quant au problème lié au fait que des réfugiés et des demandeurs d'asile seront traités différemment ici, au Canada, sous le régime de ces dispositions — parce que c'est ce que nous étudions en ce moment —, plus tôt aujourd'hui, un représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a fait valoir que, comme le processus d'examen des risques avant renvoi est en place et qu'une personne qui est rejetée au titre de ce processus aura accès à la Cour fédérale en guise de mécanisme d'appel, tout va bien. Un traitement équitable leur sera accordé.
    Je voudrais obtenir vos commentaires à ce sujet. Je commencerai par Mme Sadrehashemi, puis nous passerons à vous, monsieur Mohammed.
    Un contrôle judiciaire à l'échelon de la Cour fédérale est entièrement différent d'un appel interjeté devant la Section d'appel des réfugiés. Le contrôle judiciaire à l'échelon de la Cour fédérale exige d'abord le dépôt d'une demande d'autorisation. Il faut demander la permission de la Cour seulement pour que votre cause soit instruite. En outre, il ne s'agit pas d'un appel complet, alors on ne peut pas présenter de nouveaux éléments de preuve. Il ne s'agit pas d'un appel complet sur le fond. Même si vous avez gain de cause à la Cour fédérale, elle peut seulement renvoyer la demande. Elle n'a pas le pouvoir d'affirmer que vous êtes un réfugié, comme c'est le cas de la Section d'appel des réfugiés. En outre, la plupart du temps, l'examen est fondé sur la norme du caractère raisonnable. On vérifie si la décision était raisonnable ou non, pas si elle était exacte, parce que la Cour n'a pas le pouvoir d'affirmer que vous êtes un réfugié; cela ne relève pas de sa compétence. Alors, ce sont deux éléments fondamentalement distincts.
    De surcroît, les personnes dont la demande est rejetée à la suite de l'ERAR n'obtiendront pas de sursis automatique à la mesure de renvoi pendant qu'elles déposent une demande et qu'elles font l'objet d'un contrôle judiciaire à l'échelon de la Cour fédérale. Vous ne pouvez pas être renvoyé lorsque vous interjetez appel devant la Section d'appel des réfugiés, ni lorsqu'une décision défavorable de cette section à votre égard fait l'objet d'un contrôle judiciaire par la Cour fédérale.
    Ce qui sera accordé à ces demandeurs d'asile est totalement différent. Il s'agit de ce qu'ils perdront, en réalité.
    Monsieur Mohammed, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?
    Je n'ai rien à ajouter.
    Merci.
    J'aimerais parler de cette notion. En quelque sorte, le gouvernement et le ministre nous ont expliqué qu'il va y avoir un processus amélioré pour l'ERAR, mais nous ne savons pas qui va s'en occuper. Le processus d'embauche est en cours, et on ne sait pas quel type de formation sera requise. Nous n'avons pas beaucoup de renseignements à ce sujet.
    Ce qui est plus pertinent, ou tout aussi important, c'est ceci: si nous allons faire passer les gens par ce nouveau processus amélioré plutôt que par celui de la CISR — et le représentant a dit qu'ils étaient pareils, toutes choses étant égales —, pourquoi mettre en place un nouveau processus? Pourquoi ne pas passer par celui de la CISR, tel qu'il est établi? Il s'agit d'un processus indépendant solide et respecté.
    Est-ce que quelqu'un souhaiterait dire quelque chose à ce sujet?
    Oui, je suis d'accord. Ce n'est vraiment pas logique, particulièrement à l'heure actuelle. Le vérificateur général a dit qu'il estimait que la CISR était en mesure d'instruire les demandes et n'avait besoin que de ressources et de gains d'efficacité. La Section de la protection des réfugiés de la CISR a dépassé ses objectifs de l'an dernier. Il y a eu un nouvel investissement fait à la CISR, donc pourquoi, à ce stade, mettons-nous en place un processus parallèle qui est moins efficace et qui nécessitera beaucoup de ressources et d'infrastructure?

  (1915)  

    L'un des enjeux qui ont été soulevés est le suivant. Selon le vérificateur général, on estime qu'il y aura 50 000 demandes supplémentaires par année. Les représentants nous ont dit aujourd'hui que 3 500 demandes passeraient par le nouveau processus amélioré. Il nous resterait alors 46 500 demandes qui passeraient par la CISR, en tenant pour acquis qu'il s'agit du processus que les gens vont suivre. À toutes fins utiles, nous sommes en train de compromettre tout le processus équitable pour les demandeurs d'asile pour un petit nombre de demandes.
    Les représentants ont dit que ces demandes ne constituent pas la seule raison pour laquelle ils font cela; ils le font à des fins dissuasives. Cela nous ramène à la question posée, il me semble, par M. Maguire. Pour quelle raison pensez-vous que le gouvernement fait cela? Permettez-moi de faire des hypothèses. Ne fait-il pas cela pour pouvoir dire maintenant, six mois avant les élections, que les droits des réfugiés et leurs vies sont en péril, lui permettant ainsi de dire qu'il sévit par rapport aux demandeurs d'asile, pour 3 500 demandes?
    Est-ce que je me trompe si je pense cela? Avez-vous quelque chose à dire à cet égard?
    Je n'ai rien à dire à ce sujet.
    Je n'ai pas de commentaire précis à ce sujet, mais j'aimerais parler d'un élément que vous avez souligné par rapport aux régimes de dissuasion. Il s'agit d'une chose qu'Amnistie internationale a soigneusement documentée, et qui figure également dans le rapport auquel j'ai fait référence, et ailleurs sur le continent.
    Nous avons eu des discussions. Le responsable pour les Amériques était au Canada pour parler de certains de ces enjeux. La réalité, c'est que des régimes de dissuasion sont implantés dans bon nombre de pays — j'ai donné l'exemple des États-Unis. Ils mettent en place des mesures de dissuasion pour un problème qui est bien plus vaste dans d'autres contextes que ce que nous voyons ici au Canada.
    Il ne s'agit pas d'amoindrir le défi auquel fait face le Canada. Il s'agit simplement de comprendre qu'à l'heure actuelle, au Venezuela, il y a 3,4 millions de demandeurs d'asile à la frontière des pays qui l'entoure. Le Canada ne fait pas face...
    Je vais vous demander de conclure.
    Je vais terminer en disant que cet enjeu doit être compris dans le contexte de l'Amérique du Nord. Le Canada ne fait pas partie de ce problème.
    Merci.
    Nous passons à M. Tabbara pour la dernière série de questions.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Le Comité siège depuis un certain nombre d'heures maintenant, et dans le précédent groupe de témoins, il y avait un représentant de l'ONU, Jean-Nicolas Beuze. Il a dit que les nouvelles mesures ne contreviennent pas au droit international.
    Il me semble que vous avez dit dans votre témoignage qu'il s'agit d'une violation. J'aimerais que vous vous prononciez là-dessus. Si vous aviez été ici avec le groupe de témoins précédent, qu'auriez-vous dit par rapport aux remarques du représentant?
    Je vais commencer par M. Mohammed.
    Je ne répéterai pas ce que j'ai déjà dit quant à la raison pour laquelle Amnistie internationale est d'avis que cela va à l'encontre du droit international des réfugiés. Je vais simplement ajouter que l'idée des régimes de protection — et les autres mesures similaires — ont été étudiées par des experts en matière de droit des réfugiés, qui ont également parlé de la question d'exclure certaines demandes de la protection des réfugiés. Dans ce cas, nous avons un motif analogue qui peut être invoqué, soit que le demandeur a accès à une protection dans un autre pays avant de présenter sa demande au Canada.
    Même le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés reconnaît qu'il peut y avoir des raisons pour lesquelles une personne a fait une demande dans un autre pays, puisque les circonstances peuvent changer et que le régime de protection de l'autre pays peut changer. Par conséquent, le Canada ne peut pas se soustraire à ses obligations internationales en ne tenant pas compte de cette demande.
    Si c'était le cas, est-ce que l'ERAR renforcé déterminerait si cette personne doit être renvoyée?
    Je vais poser la même question que j'ai posée à votre collègue plus tôt. Si ce processus était mieux expliqué et que les mesures de protection adéquates étaient en place pour que l'on puisse s'assurer qu'il y ait un type de processus d'audience, qui respecte nos obligations... est-ce que cela convaincrait Amnistie internationale — en partie, du moins — que nous respectons nos obligations envers les demandeurs d'asile qui arrivent au pays?
    Il m'est difficile de répondre à cela. Encore une fois, il s'agit de la raison à laquelle ma collègue faisait référence. En fait, vous me demandez de commenter quelque chose qui n'est pas établi par la loi, qui ne figure pas dans un projet de loi; je ne vois cela nulle part.

  (1920)  

    Je vous demande votre recommandation sur la façon de renforcer la loi et le projet de loi pour qu'Amnistie internationale soit satisfaite.
    À cet égard, je vais revenir sur les commentaires que j'ai faits plus tôt. La protection nécessaire est en place. C'est ce que nous avons à la CISR. Si vous voulez avoir des recommandations sur ce qui protège adéquatement les droits des réfugiés, reportez-vous à la procédure de la CISR.
    Monsieur Mohammed, vous venez de dire que, lorsqu'une personne est déterminée à aller dans un pays, avant que vous ne la renvoyiez, elle doit passer par un ERAR. Ce que nous voyons ici, c'est que quiconque fait partie de cette cohorte — ceux qui ont précédemment fait une demande d'asile dans un tiers pays sûr — passerait non seulement par un ERAR, mais également par un ERAR amélioré pour que l'on puisse évaluer leur sécurité et déterminer si cette personne doit être renvoyée dans son pays d'origine. S'il est établi qu'il n'est pas sécuritaire pour cette personne d'y être renvoyée, nous ne le ferions pas. Elle obtiendrait le statut de protection ici au Canada.
    Peut-être que j'ai manqué une partie de la question, mais vous avez parlé de tiers pays sûr. Je n'ai certainement pas parlé de cela dans mon témoignage. La discussion portait sur le régime de protection des réfugiés qui est en place dans les quatre pays qui seraient présentement visés par ce projet de loi et où il y a des lacunes dans le régime de protection, ce qui peut donner lieu à une raison très valable pour laquelle les demandeurs d'asile demanderaient la protection du Canada, par opposition à la protection de l'un des autres pays ayant conclu une entente de partage de renseignements.
    Le Canada s'appuierait sur les conseils du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés par rapport aux pays qui seraient considérés comme étant sécuritaires pour les demandeurs d'asile. Depuis très longtemps, le Canada s'assure de fonder ce genre de décisions sur l'expertise d'organismes internationaux, avec leur expertise, afin de nous aider à prendre ce genre de décisions. Je crois que la plupart des gouvernements, et certainement le nôtre, seraient d'accord avec cela.
    Si nous pouvions nous assurer de mettre en place un processus avant renvoi assorti de mesures de protection qui permettent de veiller à ce que nous ne renvoyions pas quelqu'un dans un pays non sécuritaire, nous le ferions. J'étudie le contexte du projet de loi qui est devant nous à l'heure actuelle. Y a-t-il une façon dont nous pourrions renforcer le processus d'examen préalable avant renvoi ainsi que les mesures de protection afin de nous assurer que nous ne renvoyons personne dans un climat dangereux?
    En ce qui concerne la position du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et ce qu'il considère comme un tiers pays sûr, je crois que j'ai également donné au Comité d'autres ressources à examiner afin de déterminer à quel point les États-Unis sont un tiers pays sûr. J'ai souligné un rapport ainsi que des décisions d'autorités judiciaires des États-Unis, et les discussions publiques en cours par rapport aux mesures prises par les États-Unis, qui, à mon avis, pointeraient certainement vers une autre conclusion.
    Est-ce que je peux vous demander vos derniers commentaires par rapport aux mesures prises par le gouvernement, autre que cette mesure en particulier — laquelle a été traitée différemment par vos deux organisations —, qui aident à la fois à régler la question de l'immigration irrégulière dans le monde et les personnes qui sont déplacées ou qui se trouvent dans une situation de réfugiés, qui viennent au Canada en tant que réfugiés réinstallés ou à la recherche de voies économiques? De plus, quel est votre avis sur ce que fait le gouvernement pour renforcer la capacité et l'efficacité de la CISR afin de régler cette question rapidement et de façon équitable et définitive?
    Estimez-vous que ces autres mesures renforcent le rôle du Canada comme un pays ayant à la fois un régime d'asile solide et qui continue d'être un leader en matière d'immigration équitable et de réinstallation des réfugiés?
    Nous sommes certainement en faveur de l'investissement pour la CISR. Il me semble que c'est ce qui est logique, mais voilà ce qui ne l'est pas: la CISR a déjà un système pour faire cela de façon équitable. Pourquoi alors créer ce processus parallèle?
    J'aimerais clarifier un point, parce que j'estime qu'il y a une certaine confusion. Pour être claire, cela s'applique à n'importe quel pays avec lequel le Canada a une entente concernant l'échange de renseignements. Cela n'a rien à voir avec les pays sûrs. Il n'y a rien qui parle de s'assurer que le pays a un système de détermination du statut de réfugié qui soit comparable à celui du Canada. Il est seulement question d'échange de renseignements.
    Est-ce que cela pourrait faire l'objet de sanctions?
    Le Canada peut conclure toute entente de partage...
    Voilà ce qui conclut cette période de questions.
    J'aimerais remercier nos témoins.
    Nous allons prendre une courte pause, puis il y aura cinq minutes de travaux du Comité qui se feront à huis clos avant que nous ne levions la séance.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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