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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 083 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 novembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (0850)  

[Traduction]

    Je déclare ouverte la 83e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
    Bonjour à tous. Nous poursuivons notre brève série de réunions sur les questions liées à la réinstallation des femmes et des filles yézidies, conformément à une motion adoptée par le Comité.
    Nous sommes ravis de vous recevoir tous les trois ici, aujourd'hui, pour nous informer sur l'expérience et l'état de la réinstallation des Yézidis aux Canada.
    Nous commencerons par Operation Ezra. Nafiya et Lorne, vous avez sept minutes à vous partager.
    Avec la permission du président, je laisserai Nafiya commencer.
    Excellent.
    Bonjour, mesdames et messieurs.
    Operation Ezra est un projet communautaire, né en mars 2015 avec pour principaux objectifs d'accroître la sensibilisation et de lever des fonds pour le parrainage privé de réfugiés yézidis à Winnipeg. À ce jour, Operation Ezra a réussi à amasser bien plus plus de 500 000 $ au Canada. Des demandes de parrainage privé ont été soumises pour une dizaine de familles en tout, soit 55 personnes. Sept familles, soit 41 personnes, sont déjà arrivées au Canada. Une autre famille arrivera aujourd'hui même, en fait, et les deux autres arriveront au cours des prochaines semaines.
    Operation Ezra est un projet communautaire bien organisé et dirigé par un comité de direction et plusieurs comités de programme. Outre l'appui général qu'offre Operation Ezra, ses partenaires et un vaste groupe de bénévoles fournissent aux réfugiés les outils et les services suivants pour faciliter leur intégration: l'aménagement et l'ameublement complets de maisons grâce à des dons de particuliers et d'entreprises; des vêtements et des chaussures donnés par des entreprises; l'accueil des nouvelles familles et de l'aide afin de remplir tous les papiers nécessaires pour qu'elles puissent refaire leur vie au Canada; un accompagnement sur l'utilisation du transport en commun, les services bancaires et la recherche de professionnels médicaux; l'accompagnement des réfugiés à tous leurs rendez-vous; l'inscription des enfants à l'école et la recherche d'emploi. À ce jour, les bénévoles d'Operation Ezra emploient 13 personnes. Nous offrons aussi un programme de formation en anglais langue seconde, et les cours sont offerts par des professionnels bénévolement. Nous offrons enfin de l'aide à la coordination des événements communautaires yézidis afin de favoriser la création d'une communauté d'entraide forte et unie dans la ville.
    En 2018, nous prévoyons continuer nos activités de sensibilisation, continuer d'appuyer les familles qui bénéficient déjà d'un parrainage privé d'Operation Ezra, continuer de lever des fonds et d'offrir du parrainage privé aux réfugiés yézidis et continuer de venir en aide aux familles parrainées par le gouvernement. Nos services comprennent de la traduction, de l'ameublement, des vêtements et des chaussures, le programme de formation en anglais langue seconde, des invitations à participer à tous les événements sociaux et la recherche de logement et d'emploi.
    Je cède maintenant la parole à Lorne Weiss.
    Merci.
    L'un de nos défis, c'est de ne pas seulement essayer d'aider les femmes, les enfants et les familles yézidies individuellement, mais aussi de les aider à rebâtir une communauté. Nous croyons que c'est un aspect important de la réinstallation, tant pour l'entraide que pour le sentiment de sécurité que la communauté procure dans un nouvel environnement qui peut paraître très étranger.
    Nous avons toutefois un problème de logistique, parce que nous perdons beaucoup de temps à chercher des titulaires d'ententes de parrainage privé qui n'ont pas encore atteint leur quota et qui peuvent encore parrainer des familles. C'est encore plus difficile pour nous que de trouver les fonds requis pour aider une famille pendant une année. Nous aurions besoin d'un plus grand nombre de titulaires d'ententes de parrainage privé dans les grands centres où il y a déjà des communautés yézidies. Il faut également relever les quotas. Nous avons des titulaires d'ententes qui n'ont plus de place. D'après ce que nous comprenons, ils ont du mal à obtenir l'autorisation d'accueillir plus de personnes ou même à conserver leur quota. Pour nous, c'est l'un des grands obstacles au succès du parrainage privé.
    Nous aimerions aussi que le gouvernement encourage les parrains à être plus actifs dans l'accueil de familles yézidies. Je sais que dernièrement, le Comité a surtout mis l'accent sur les femmes et les enfants qui ont souffert aux mains de l'EI ou qui ont perdu des proches. Or, pour bâtir une communauté forte, il faut d'abord en jeter les bases. Nous croyons qu'en augmentant le nombre de familles accueillies au Canada, nous pourrons mieux jeter les bases nécessaires à l'établissement de la communauté.
    Nous recommandons également, avant d'accueillir de nouvelles familles dans une ville, d'envisager fortement de privilégier les villes où il y a déjà des communautés yézidies dynamiques. Il vaut mieux éviter d'installer de nouvelles familles dans des villes où il n'y a pas de communauté yézidie susceptible de les aider dans leur réinstallation. Dans bien des cas, les organismes d'accueil municipaux n'ont pas assez de ressources pour les aider convenablement dans le processus de réinstallation. Quand nous avons comparu devant le Comité il y a un peu plus d'un an, nous avions recommandé la création d'un programme hybride entre le gouvernement et les organisations de parrainage privé comme Operation Ezra, pour que nous puissions convenir ensemble d'une entente pour venir en aide aux familles parrainées par le gouvernement qui ont besoin de plus d'aide que ce que les fonctionnaires ne peuvent leur offrir normalement.
    Nous comblons déjà ce vide, mais le fait est que si nous pouvons lever des fonds expressément pour parrainer des réfugiés, il est difficile de trouver du financement pour absorber les coûts de fonctionnement d'organisations privées. La plupart des donateurs veulent voir les effets concrets de leurs dons. Nous croyons que nous pourrions en faire beaucoup plus s'il y avait un partenariat officiel entre le gouvernement et les organismes de parrainage privé, qui nous permettrait d'embaucher du personnel non pas pour remplacer les fonctionnaires, mais pour aller au-delà de ce que le gouvernement peut faire pour aider ces personnes.
    Nous sommes déterminés à rebâtir des communautés, particulièrement à Winnipeg, où nous accueillons des familles. Nous essayons de les réinstaller proches les unes des autres, pour que leurs enfants fréquentent les mêmes écoles et que les familles puissent interagir. Malheureusement, nous avons parfois les mains liées. Nous manquons d'argent pour cela. Nous dépendons presque entièrement de l'aide de nos bénévoles. Nous aimerions pouvoir aller chercher de l'aide professionnelle, à temps plein ou à temps partiel, pour aider ces familles.

  (0855)  

    Je vous demanderais d'essayer de conclure assez rapidement.
    Sans problème.
    Il faudrait accorder la priorité aux possibilités de réunification de familles, car la famille joue un rôle déterminant dans l'intégration des nouveaux arrivants.
    Monsieur le président, voilà qui termine mon exposé et nos recommandations.
    Excellent. Merci beaucoup. Vous avez très bien ouvert la voie.
    Monsieur Hesso.
    Bonjour. Je vous remercie de cette occasion de vous parler au nom de la Yazidi Association of Manitoba.
    Je m'appelle Hadji Hesso. Je me tiens aujourd'hui devant vous au nom de mes frères et soeurs qui vivent dans des conditions déplorables en Irak et dans le reste du Moyen-Orient. En leur nom, je vous demande instamment de relocaliser ici au Canada les femmes et les filles yézidies, qui sont si vulnérables.
    En tant que communauté religieuse et ethnoculturelle, les yézidis sont au Manitoba, en particulier à Winnipeg, en Ontario et à Calgary depuis un certain temps déjà. Nous travaillons en étroite collaboration avec des organismes d'établissement de Winnipeg, surtout. Nous aidons ces gens. Nous travaillons en partenariat, et nous offrons des occasions de socialiser à ceux qui sont isolés, ainsi que des services de transport et d'interprétation.
    Le 3 août 2014, les yézidis ont subi l'attaque la plus dévastatrice jamais perpétrée contre eux. Cette attaque de l'État islamique, ou EI, a été la 74e tentative d'élimination du groupe religieux. Je pense que je n'apprends rien à personne. Nous savons tous ce qui s'est passé cette journée-là. Tout a été documenté depuis. La population vit cette réalité au quotidien, et le problème perdure même si l'EI a été vaincu dans la majorité des régions d'Irak et de Syrie.
    Nous exhortons le gouvernement canadien à réunir les réfugiés yézidis canadiens avec leurs proches capturés qui ont trouvé refuge dans les camps du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, ou HCR, situés en Irak, en Turquie, en Grèce, en Syrie ou en Jordanie. Les yézidis de partout prient pour que le Canada leur donne l'espoir d'un avenir meilleur qui leur permettra de vivre dans la liberté et la dignité malgré leur passé inoubliable.
    Je vais parler de ce que les yézidis ont vécu, et plus particulièrement des traumatismes de ceux qui sont arrivés au Canada. En fait, le traumatisme est très présent, que la personne ait été capturée par l'EI ou se soit enfuie dans les montagnes. Nous l'avons tous remarqué. Nous l'avons vu dans les vidéos ou les enregistrements diffusés à la télévision, dans un magazine ou ailleurs. Nous avons vu ce qui leur est arrivé le 3 août 2014, quand les gens ont couru vers la montagne pour échapper aux militants de l'EI et survivre. Chaque personne que j'ai rencontrée a été traumatisée dans une certaine mesure. Un bon exemple du traumatisme subi par les personnes capturées par l'EI comprend des femmes violées régulièrement par plusieurs personnes, vendues à des tiers et utilisées comme servantes. Dès l'âge de quatre ans, des enfants sont régulièrement séparés de leur mère et gardés dans des pièces sans nourriture ni eau pendant de longues périodes. Il y a plusieurs histoires de femmes adultes qui ont été témoins de la torture et du viol de jeunes filles. De nombreux jeunes garçons ont été séparés de leur mère pour servir les hommes de l'EI. Les garçons ont été entraînés à se battre et à tuer. Les filles et les femmes de 12 ans et plus ont été utilisées comme servantes, ont été vendues à de nombreuses personnes et forcées à regarder quotidiennement des vidéos de membres de l'EI tuant des hommes yézidis.
    Une grande partie des femmes et des filles qui sont arrivées au Canada ont connu une période difficile. C'est grave, et la situation varie d'une personne à l'autre. Nous le constatons au quotidien lorsque nous rencontrons les yézidies pour des rendez-vous, des transports ou quoi que ce soit d'autre.
     Les yézidis s'adaptent malgré tous ces événements traumatisants. Nous le constatons dans la façon dont ces personnes s'installent dans leur nouveau pays, notamment lorsqu'elles suivent des cours d'anglais, apprennent la langue ou participent à divers rassemblements communautaires. Les grandes familles qui arrivent au pays semblent s'adapter plus vite que les personnes isolées ou qui appartiennent à des familles plus petites.

  (0900)  

    La communauté yézidie actuelle de Winnipeg est très active. Elle vérifie souvent le bien-être des gens et organise des rassemblements communautaires. Les nouveaux arrivants sont très reconnaissants du soutien de ce milieu.
    Presque tous les nouveaux arrivants parlent des membres de leur famille qui sont encore dans des camps de réfugiés. Quand ils font venir des proches, d'autres restent là-bas. Certains ont été capturés ou sont portés disparus depuis août 2014. La majorité des hommes, soit 95 % d'entre eux, ont été tués ou n'ont pas donné de nouvelles, mais nous espérons que les femmes et les filles les retrouveront un jour.
    Beaucoup d'entre vous ont peut-être eu vent de l'histoire du garçon yézidi que nous avons réuni avec sa mère en août dernier. Il avait été capturé par l'EI en 2014, puis il a été retrouvé vivant en juillet dernier. La mère était arrivée ici en février après avoir tout perdu. Toute la famille a été décimée, comme beaucoup de familles yézidies. Elle est venue ici, et elle a appris que son fils était vivant. Nous espérons de tout coeur qu'il arrive la même chose à de nombreuses familles ayant vécu ces atrocités.
     En ce qui a trait à l'école et au système d'éducation au Canada, tous les enfants ont dit aimer l'expérience de l'école et des apprentissages. Cela leur donne de l'espoir pour l'avenir. Mais même s'ils disent tous que l'école leur plaît, ils ont du mal à apprendre en raison du traumatisme vécu, qui rend difficiles les apprentissages et la rétention d'information.
    Tous les adultes adorent les cours d'anglais, mais ils ont souvent du mal à apprendre en raison du traumatisme vécu. Ils semblent mieux s'en tirer au sein de groupes de conversation, où ils créent des liens et nouent des relations avec les autres. Nous avons demandé aux organismes de réinstallation de Winnipeg de ne pas réunir tous les yézidis, pour éviter qu'ils utilisent leur langue maternelle, et pour qu'ils apprennent plus vite que lorsqu'ils discutent entre eux.
    Nous entendons régulièrement parler de la mesure dans laquelle les assistants sont touchés par les histoires partagées. Voilà qui démontre l'atrocité du traumatisme que le peuple yézidi a subi.

  (0905)  

    Je dois vous demander de conclure assez vite.
    D'accord.
    À Winnipeg, étant donné que les yézidis nouvellement arrivés rencontrent la communauté et divers assistants dès leur arrivée, ils semblent entamer beaucoup plus tôt la nouvelle étape vers le rétablissement, et nous espérons que la tendance se maintienne. C'est important, car les yézidis commencent à établir des liens et à nouer des relations avec les autres. Les arrivants yézidis doivent faire preuve de beaucoup de courage pour y arriver, de même que la communauté qui essaie de les aider.
    En février dernier, le gouvernement du Canada a promis de faire venir 1 200 yézidis. C'est à ce moment que tout a commencé, et nous avons rencontré 650 personnes à ce jour. Il ne reste maintenant que deux mois avant la fin de l'année, et j'ignore si nous pourrons atteindre ce chiffre. Il y a quelques années, lors de la guerre civile en Syrie, le gouvernement canadien avait accueilli 25 000 Syriens. Nous ne pourrons pas atteindre 1 200 yézidis d'ici la fin de l'année, alors que des groupes religieux et minoritaires entiers tels que les yézidis et les chrétiens subissent tous ces massacres, ces viols et ces meurtres. Les Nations unies ont reconnu qu'il s'agit d'un génocide contre l'humanité.
    Merci.
    Madame Abdallah.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de m'avoir invitée aujourd'hui.
    Je m'appelle Dalal Abdallah, et je viens de la communauté yézidie de London, en Ontario. Je suis ici pour représenter Yazda.
    Je suis venue comparaître le 3 mai 2016 pour vous présenter la voix des filles yézidis de l'Irak, de la Syrie et de la Turquie.
    Pendant la guerre du Golfe, ma famille a fui vers la Syrie dans l'espoir d'une vie meilleure. Ma famille est restée dans des camps de réfugiés syriens pendant huit ans, jusqu'à ce que nous ayons l'autorisation de venir au Canada. En tant que petite fille, c'était un rêve devenu réalité pour ma famille et moi. C'était un des meilleurs jours de ma vie lorsque le Canada m'a donné l'occasion de commencer une nouvelle vie en nous acceptant sur son territoire. Les difficultés et les souffrances que ma famille a vécues étaient inimaginables.
    Les familles yézidies qui sont en Irak, en Turquie et en Syrie vivent encore ces difficultés et ces souffrances. Le 3 août 2014, nous étions tous sans voix lorsque nous avons été témoins du génocide horrible qui se déroulait sous nos yeux. Des milliers de yézidis ont perdu leur foyer et leurs proches, certains ont été témoins d'effroyables assassinats de masse alors que d'autres ont été vendus et violés continuellement par des membres de l'État islamique, ou EI.
    Je suis à nouveau devant vous aujourd'hui parce que ces atrocités surviennent encore dans la communauté yézidi de l'Irak. Il y a encore des milliers de yézidis qui manquent à l'appel, et encore des centaines de filles qui sont violées au quotidien et vendues pour aussi peu qu'un paquet de cigarettes. Je suis ici afin de me battre pour ces âmes sans voix qui sont abandonnées en Irak.
    Je remercie le gouvernement du Canada d'avoir ouvert ses portes aux survivants yézidis. J'ai eu le plaisir de travailler avec certains de ceux qui sont arrivés récemment au pays. Une des femmes avec qui je reste en contact s'appelle Ghazel. Quand je lui ai dit que je venais ici, elle m'a demandé de vous raconter son expérience. Elle est arrivée au Canada il y a moins de deux ans avec une fille et deux garçons. Son mari a été capturé par l'EI, et une de ses filles de moins de 12 ans aussi. La femme a réussi à s'échapper avec deux garçons et une fille.
    Elle voulait que je dise au gouvernement canadien qu'elle vous remercie du fond du coeur. Vous lui avez donné une vie pour laquelle elle ne pourra jamais vous remercier suffisamment. Ses enfants fréquentent une école canadienne sécuritaire, et elle assiste elle-même à des cours d'anglais langue seconde. Sa détermination me pousse à être une meilleure personne. Malgré toute la douleur et les difficultés qu'elle a endurées et qu'elle endure encore, elle a toujours ce beau sourire en phase avec la société canadienne. Elle veut apprendre l'anglais et se faire la voix de ceux qui n'en ont pas.
    Quand je lui ai demandé ce qu'elle souhaitait obtenir du gouvernement canadien, elle m'a dit exactement ce qu'elle voulait: garder ses portes ouvertes pour faire venir plus de survivants au Canada, protéger ceux qui ne veulent pas quitter Shengal pour qu'ils puissent vivre dans la paix et, enfin, fournir toute aide nécessaire aux familles qui sont encore en Irak. La dernière chose qu'elle m'a dit, c'est que de nombreux réfugiés qui viennent au Canada ont été séparés de leur famille en Irak. Nous aimerions qu'il y ait un programme permettant aux yézidis de renouer avec les membres de leur famille restés là-bas, puis de les faire venir au Canada pour réunir la famille.
     Les yézidis ont toujours été exploités et maltraités, que ce soit par le gouvernement kurde ou bien irakien, mais ce peuple n'a pourtant toujours pas de voix en Irak. Il est temps que les yézidis se fassent entendre. Les gestes qui sont perpétrés contre eux sont des crimes contre l'humanité.
    Je suis la même petite fille sans espoir ni avenir qui avait jadis fait un souhait sous les étoiles brillantes, dans l'attente que le Canada m'appelle, et dans l'espoir de venir dans un beau pays comme le Canada. Il y a en ce moment même des milliers de filles qui attendent que le Canada leur donne une chance de vivre une vie meilleure. Imaginez si c'était votre fille qui vous appelait à l'aide: resteriez-vous là à tourner le dos aux yézidis? Le Canada est leur seul espoir. Je suis une fière Canadienne qui continuera à se battre pour ces belles âmes en difficulté.

  (0910)  

     Je veux tous que vous oubliiez ces costumes pour un instant — juste un instant —, et que vous imaginez un moment la douleur et la souffrance des yézidis. À l'instant où nous parlons, il y a une fille qui crie à l'aide. En tant que fière Canadienne, je vous supplie d'ouvrir vos coeurs et vos portes aux yézidis.
    J'ai eu le plaisir de rencontrer Ahmed Hussen. J'admire son travail et son dévouement envers les réfugiés. Je voudrais toutefois qu'il y ait plus de yézidis parmi les réfugiés. Nous faisons venir des milliers de réfugiés au Canada. Nous en avons accueilli des milliers. Nous voulons au moins que certains d'entre eux soient yézidis. Je me bats surtout pour les filles qui souffrent actuellement en Irak. Elles se rendent au Kurdistan sans rien. Elles n'ont absolument rien. Il n'y a aucun service là-bas. La totalité du pays — le Kurdistan, l'Irak — est corrompue. Ce n'est pas un endroit où une petite fille peut se remettre d'avoir été violée plusieurs fois par jour ou d'avoir été vendue à autant d'hommes. Ce n'est pas à cet endroit qu'elle pourra récupérer. Le Canada est le lieu qu'il lui faut pour se rétablir.
    J'ai été témoin de cela. C'est ce que je vois chez les femmes que nous avons fait venir. Celles que j'ai rencontrées dans ma ville de London, en Ontario, sont des exemples remarquables. Leurs histoires sont incroyables. Il est incroyable de constater combien elles sont motivées à faire autant au pays. Je crois en elles, parce que j'étais une de ces filles. Quelqu'un s'est battu pour moi ici, m'a fait venir au Canada et m'a donné la chance de vivre une vie meilleure.
    Je suis aujourd'hui devant vous afin de me battre pour mes soeurs qui sont abandonnées là-bas. Je vous demande vraiment d'ouvrir vos coeurs. Veuillez s'il vous plaît faire tout ce que vous pouvez pour aider les yézidis. Ils n'ont personne. En réalité, tout le monde est contre eux. Nous assistons encore aujourd'hui à ce génocide qui se poursuit. Il y a encore des centaines de filles qui crient à l'aide. Il y a encore des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants qui sont capturés par l'EI. Il est vrai que l'EI a quitté certains lieux, mais ces gestes vont se poursuivre. Je crois fermement que les yézidis demeureront une cible pendant très, très, très longtemps.
    Notre pays offre son aide et intervient dans toutes les situations qui se surviennent — nous sommes les premiers à réagir —, et je suis très fière d'être Canadienne pour cette seule raison. Nous devons agir. Nous devons intervenir et aider le groupe minoritaire yézidi.

  (0915)  

    Je crains de devoir vous interrompre.
    Merci infiniment de votre temps et de votre écoute. J'espère vraiment que vous allez tous y réfléchir, non pas en tant que politiciens, mais bien en tant qu'êtres humains à l'égard d'autres humains.
    Merci.
    Merci, madame Abdallah.
    Madame Zahid.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'aujourd'hui de leur détermination à sensibiliser les gens au sort des yézidis, et de leur travail visant à faire venir les réfugiés yézidis au Canada, et à les aider à s'installer dans leur nouveau foyer. Je tiens vraiment à vous remercier du fond du coeur.
    J'aimerais d'abord m'adresser aux deux témoins d'Operation Ezra. Pourriez-vous parler de votre relation de travail avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, dans ce projet visant à faire venir les yézidis au pays et à les réinstaller? Le ministère a-t-il été sensible aux problèmes que vous avez soulevés dans ce processus?
    Je dois dire que nous avons de très bonnes relations avec le gouvernement.
    Certaines des familles nous ont contactés directement par l'intermédiaire de la communauté — et directement grâce à des gens comme Nafiya, à qui ils sont à l'aise de parler —, et ils ont besoin d'une aide supplémentaire. Nous utilisons donc nos ressources pour les groupes que nous parrainons, et nous intégrons ces familles aux activités. Par exemple, nous nous réunissons une fois par semaine, soit le jeudi. Il s'agit en partie d'un programme d'anglais comme langue supplémentaire, en partie d'une occasion pour eux de tisser des liens avec les autres, et en partie d'une occasion pour les enfants d'avoir des aires de jeux supervisées. Nous essayons de créer cette communauté.
    Nous ne nous considérons pas comme une solution de rechange à IRCC. Nous améliorons plutôt certains des programmes que le ministère offre. Nous intervenons également pour fournir ce qu'il manque à certaines familles.
    Ont-ils été sensibles aux problèmes que vous avez soulevés dans le cadre de ce processus?
    Les familles ou IRCC?
    IRCC a-t-elle tenu compte de vos préoccupations?
    Nous avons pu compter sur leur collaboration. Ils savent ce que nous faisons. Nous aimerions poursuivre nos efforts en ce sens. Ce n'est pas IRCC qui pose problème, mais plutôt notre capacité à financer nos activités.
    Monsieur Hesso, auriez-vous quelque chose à ajouter?
    Je tiens à remercier IRCC et nos partenaires. Nous, à l’Association des yézidis du Manitoba, avons parrainé une famille à Winnipeg, par l'entremise d'IRCC. Nous collaborons et discutons régulièrement avec eux. Ils nous viennent en aide. Pour toutes les familles qui sont arrivées à Winnipeg, particulièrement dans le cadre du programme de réinstallation du Canada, pour éviter qu'elles souffrent d'isolement, nous offrons des occasions de socialiser, des services de transport, des soins médicaux, et le plus important, des services d'interprétation et d'intégration au sein de la société canadienne.
    Vous savez sans doute que le Canada ne demande habituellement pas aux réfugiés ou aux candidats à l'immigration de déclarer leur religion ou leur origine ethnique dans leur formulaire de demande ou pendant leur entrevue avec les agents des visas. Dans ce cas, le Canada leur a offert la possibilité de fournir volontairement cette information. Je comprends que les yézidis soient souvent réticents à déclarer cette information. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi les yézidis craignent autant de s'identifier comme tels aux fonctionnaires?
    Je peux répondre à cette question. Je connais quelques familles en Turquie, par exemple, qui ne sont pas dans des camps de réfugiés et qui vivent parmi d'autres groupes religieux. Ils ont peur de parler de religion à l'intérieur d'autres groupes. Étant donné tout ce qu'ils ont vécu, les yézidis ont peur de s'identifier — du moins les familles que je connais qui ne sont pas dans des camps de réfugiés.

  (0920)  

    Qu'en est-il de ceux qui vivent dans les camps?
    Tous les yézidis en Irak, en Syrie et en Turquie sont confinés dans des camps isolés. Ce sont des camps réservés aux yézidis.
    Madame Abdullah, auriez-vous quelque chose à ajouter? Vous traitez avec bon nombre d'entre eux.
    Oui. Je crois que beaucoup de yézidis, comme Nafiya l'a dit, ont peur d'exposer leur culture et leur religion parce qu'ils sont l'une des cibles de l'État islamique au Moyen-Orient.
    Pour la majorité d'entre eux, lorsqu'ils se présentent à l'entrevue et qu'on leur pose la question sur le formulaire de demande, je ne crois pas qu'ils hésitent à dire qu'ils sont yézidis, à la condition qu'ils soient persuadés qu'ils s'adressent réellement à un représentant du gouvernement canadien, et non pas à d'autres gouvernements qui veulent s'en prendre à eux. Je pense qu'à ce moment-là, ils sont à l'aise de dire qui ils sont et qu'ils ont besoin d'aide.
    Les yézidis demandent de l'aide. Tout le monde ignorait notre existence avant le début de ce génocide. Au début, on entendait les gens dire: « Qui sont les yézidis? Où habitent-ils? » Personne n'avait jamais entendu parler de nous auparavant. Aujourd'hui, nous nous faisons entendre. Nous avons une voix beaucoup plus forte et nous affirmons que nous sommes des yézidis, que nous avons besoin d'aide et que nous sommes persécutés.
    Je comprends que la communauté est très importante pour les yézidis — comme pour n'importe quelle communauté — et pour leur intégration au Canada. Pourriez-vous nous parler de la communauté yézidie qui est déjà au Canada? Combien sont-ils? Où sont-ils? Dans quelle mesure peuvent-ils accueillir les nouvelles familles qui arrivent au pays?
    Je pense qu'à un certain moment, la population la plus importante se trouvait à London, en Ontario, d'où je viens. Ils sont également de plus en plus nombreux à Winnipeg...
    Selon vous, combien y a-t-il de familles à London?
    Je crois que la communauté yézidie prend de plus en plus d'importance à London, en Ontario. La dernière fois que j'ai vérifié, ils étaient 400, mais ce nombre augmente constamment avec les réfugiés qui arrivent. Pour ce qui est de Winnipeg, je ne suis pas certaine.
    C'est à peu près pareil. Nous avons remarqué qu'il y a quelques familles qui se sont installées à Calgary. Si je ne me trompe pas, il y a sept familles qui sont arrivées récemment.
    Il y en a quelques-unes à Scarborough également.
    Sont-elles en mesure d'accueillir et d'aider les nouveaux arrivants?
    Absolument. Nous avons une communauté incroyable à London, en Ontario. Nous avons le London InterCommunity Health Centre qui offre beaucoup plus que des services médicaux, c'est-à-dire des services de counselling et d'aiguillage vers les ressources dont les nouveaux arrivants ont besoin. Ils appuient les refuges pour femmes et gardent contact avec eux. De plus, l'hôpital où je travaille a mis sur pied un programme destiné aux réfugiés. Il ne s'adresse pas uniquement aux yézidis, mais je travaille là et je m'assure que tous ceux qui ont besoin de ces services, que ce soit des femmes, des hommes, des jeunes filles et des jeunes garçons, puissent les obtenir.
    Il y a aussi une barrière linguistique. Étant donné que ce sont des services spéciaux et que la langue seconde est le kurmandji, il est très difficile d'obtenir des traductions exactes dans les renvois à des psychiatres et à des psychologues. C'est très difficile.
    Je crains de devoir vous arrêter ici. Vous aurez peut-être l'occasion d'y revenir plus tard.
    Madame Rempel.
    En général, lorsque nous effectuons une étude, après avoir entendu les témoins, le Comité formule des recommandations et présente un rapport au Parlement, en demandant au gouvernement de donner suite à ces recommandations. Pensez-vous que cela serait utile dans le cadre de cette étude?
    Je pose la question à tout le monde.
    Bien sûr.

  (0925)  

    Oui.
    Absolument.
    Excellent.
    Pour ce qui est des recommandations du Comité, j'ai pris en note certaines de vos observations. Je vais peut-être consacrer tout mon temps à la formulation de ces recommandations, mais vous n'avez qu'à me dire si oui ou non vous pensez qu'elles pourraient être utiles.
    Tout d'abord, on pourrait réserver un certain nombre de places au sein du programme de parrainage privé de réfugiés pour la communauté yézidie au cours de la prochaine année. Serait-ce utile?
    Beaucoup.
    Combien? Quel devrait être le nombre limite? Devrions-nous tout simplement accueillir tous les yézidis qui veulent venir ici?
    À ce stade-ci, je crois qu'il ne faut pas limiter le nombre de places. On n'en a pas fait assez pour les yézidis. Il est temps...
    D'accord, à ce moment-là, nous devrions éliminer le plafond pour les réfugiés parrainés par le secteur privé.
    Je pense que la limite va s'imposer d'elle-même, en fonction de la capacité de réunir des fonds.
    Absolument.
    Recommanderiez-vous également d'intégrer un groupe additionnel au sein des réfugiés parrainés par le gouvernement cette année?
    Absolument.
    Merci.
    Devrions-nous privilégier la réinstallation des yézidis qui arrivent au Canada dans des endroits où il y a déjà des communautés yézidies établies?
    Ce serait une très bonne chose, en effet.
    Excellent.
    Recommanderiez-vous que, dans le cadre des programmes de RPSP et de RPG, nous accordions la priorité à la réunification des familles yézidies pour aider ces femmes à surmonter leur traumatisme?
    Oui.
    Merci.
    Recommanderiez-vous que le gouvernement mette sur pied un programme de réinstallation unique ou innovateur destiné expressément à la communauté yézidie pour mieux soutenir les activités de vos groupes à l'appui des services d'interprétation, de transport et de soutien aux personnes ayant subi un traumatisme, et les relier aux services gouvernementaux existants en vue d'accélérer leur prestation?
    Ce serait effectivement une recommandation que je ferais. De cette façon, tout le monde bénéficierait de bien meilleurs services.
    Aux fins du compte rendu, j'aimerais que tout le monde me donne sa réponse.
    Madame Naso et Monsieur Weiss.
    Mme Nafiya Naso: Oui.
    L'Hon. Michelle Rempel: Monsieur Hesso et Madame Abdallah.
    Oui.
    Oui.
    Compte tenu de ce que ma collègue, Mme Zahid, a dit au sujet de l'identification ou plutôt de la réticence des yézidis à s'identifier comme tels, devrions-nous établir un programme spécial au Canada en dehors du processus traditionnel du HCR, comme nous l'avons vu cette année, pour permettre aux yézidis de participer au programme de réinstallation du Canada sans nécessairement passer par ce processus?
    Oui. Je considère que c'est une mesure grandement nécessaire pour les yézidis.
    Pourquoi?
    L'une des principales raisons pour lesquelles je suis ici, c'est parce que j'ai vu le résultat. On n'a pas accueilli le nombre de yézidis qu'on avait promis. C'est très important. Je crois que les yézidis sont en quelque sorte perdus dans le processus des Nations unies. Nous devons créer un programme qui leur est spécifiquement destiné.
    Nous l'avons vu. Nous avons fait venir un grand nombre de réfugiés. Nous pouvons accroître le nombre de réfugiés yézidis. Je ne crois pas que ce soit un problème, et il y a beaucoup de gens qui attendent que le Canada les appelle. Il est urgent que le Canada agisse. Il faut qu'on double ce nombre. Nous nous sommes engagés à faire venir 1 200 yézidis au Canada, alors que ce sont des milliers d'hommes, de femmes, de jeunes filles et de jeunes garçons qui se font tuer.
    Je dispose de très peu de temps, alors j'aimerais simplement avoir quelques précisions. Si le Canada s'en remet exclusivement au HCR, pensez-vous que cela va empêcher les familles de rejoindre les communautés yézidies déjà établies?
    Oui.
    Je dirais que oui.
    Pourquoi?
    Le fait que le HCR approuve les demandes facilite la tâche au Canada, d'après ce que je peux voir, étant moi-même un ancien réfugié syrien qui s'est installé au pays il y a plus de 10 ans.
    Je pense que nous devons accélérer les choses... je considère que si on pouvait prendre des mesures particulières à l'endroit des yézidis, ce serait beaucoup mieux.
    Le représentant du haut-commissaire vient tout juste d'affirmer que le HCR ne recommandait pas des réfugiés au Canada en fonction de leur origine ethnique. Dans ce cas, recommanderiez-vous qu'on accorde la priorité aux demandeurs yézidis?
    Oui.
    Absolument.
    Excellent.
    Combien de familles y a-t-il à Calgary? Est-ce qu'il y avait une communauté yézidie à Calgary avant que le Canada entreprenne son initiative de réinstallation?

  (0930)  

    Non. Il n'y avait pas de communauté yézidie. Je crois qu'il y avait seulement une famille, et cela remonte à 20 ans.
    Savez-vous pourquoi les familles ont été réinstallées à Calgary?
    À vrai dire, non. Il y avait une famille à Moose Jaw, en Saskatchewan, également. Nous les avons fait venir à Winnipeg. Ils voulaient se rapprocher de la communauté déjà établie.
    Recommanderiez-vous qu'on se penche sur l'endroit où les yézidis ont été réinstallés cette année, en vue de peut-être les déplacer...?
    Oui.
    Excellent.
     Même si l'organisme de réinstallation des réfugiés à Calgary a communiqué avec l'Association des yézidis du Manitoba pour offrir des services d'interprétation et de traduction aux nouveaux arrivants.
    De qui n'avons-nous pas entendu parler? Qui devrions-nous faire comparaître devant le Comité pour obtenir les bonnes recommandations pour notre rapport? Y a-t-il quelqu'un d'autre au Canada?
    À titre personnel?
    Oui. Y a-t-il des gens ici au Canada que nous devrions absolument inviter?
    Je pense que ce serait formidable d'inviter des survivants de l'EI à cette table, des gens comme Ghazel, dont j'ai parlé plus tôt. Ces gens peuvent décrire concrètement ce qu'ils ont vécu et le déroulement du processus. Je pense qu'il serait utile pour le Canada de constater le travail qui se fait et à quel point on redonne une vie à ces personnes qui ont survécu aux atrocités perpétrées par l'EI.
    Si je puis me permettre, je suis sûr que vous vous rappelez tous du garçon Emad, qui a pu retrouver sa mère après quelques années. La première chose qu'il a dite à son arrivée, c'était qu'il n'était pas le seul dans cette situation. Il y a des milliers d'enfants qui ont vécu la même chose que lui.
    J'aimerais que vous invitiez un enfant à témoigner, car il n'y a personne qui peut mieux expliquer la situation que quelqu'un qui l'a vécue.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à Mme Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous nos témoins de consacrer autant d'efforts à la défense des droits, de ne jamais abandonner et de nous rappeler ce qui est le plus important. Je vous en suis très reconnaissante.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier, monsieur Hesso, et l'Association des yézidis du Manitoba pour votre travail remarquable. Lorsque nous avons vu le reportage au sujet du jeune garçon dont vous avez parlé, Emad, je me suis aussitôt mise au travail et j'ai fait tout ce que j'ai pu pour aider et exhorter le gouvernement à le ramener ici au pays. Je suis ravie qu'il soit finalement au Canada.
    Vous avez tout à fait raison. Il y en a beaucoup d'autres dans cette situation.
    Oui.
    Nous pouvons en faire davantage. Cela dit, mes questions vont dans le même sens que celles posées par ma collègue, Michelle Rempel. Elle a précisément demandé si le gouvernement devrait élargir le parrainage privé. J'aimerais donc aborder cet aspect en premier lieu.
    On vient tout juste de publier les niveaux d'immigration pour 2018, et on parle de 18 000 réfugiés parrainés par le secteur privé.
    Selon vous, le gouvernement devrait-il éliminer le plafond pour l'ensemble des réfugiés parrainés par le secteur privé, que ce soit des yézidis ou d'autres groupes? En réalité, c'est la mesure dans laquelle les Canadiens se porteront volontaires et accepteront de parrainer des réfugiés qui va déterminer le nombre de réfugiés. Le plafond va donc s'imposer de lui-même.
    Le gouvernement devrait-il élargir le parrainage privé pour toutes les catégories? Puis-je obtenir une brève réponse de chacun d'entre vous?
    Madame Naso.
    Oui.
    Oui, mais à une condition. Je pense qu'il faut reconnaître que les groupes comme les yézidis sont des groupes ayant des besoins particuliers. Je ne voudrais surtout pas qu'ils aient à rivaliser pour des places avec d'autres groupes mieux établis qui ont plus de fonds pour le parrainage privé.
    Je ne veux pas dire que le parrainage privé devrait être accessible à tout le monde. Selon moi, il faut privilégier certains groupes, notamment ceux qui essaient de fuir un génocide.
    Dans ce cas, si le plafond est éliminé pour tout le monde, à ce moment-là, tout le monde aurait la possibilité de venir, et il n'y aurait pas d'obstacles pour les yézidis.
    J'ai l'impression qu'il faut accorder des encouragements particuliers à certains groupes.
    Monsieur Hesso, oui.
    Oui.
    Oui.
    Madame Abdallah.
    Oui, bien sûr.
    Merci.
    Je tiens à poser la question des réfugiés parrainés par le gouvernement, parce que, d'après certains témoins que nous avons entendus sur cette question, nous devrions en viser au moins 1 000 mais, dans un premier temps seulement, pour ensuite en viser plus. D'autres continuent de préconiser pour les gouvernements un objectif de 5 000, tandis que les fonctionnaires qui ont comparu devant nous nous ont à peu près dit que le gouvernement n'avait pas l'intention d'en faire plus que jusqu'ici. À la question de la prise en charge des réfugiés par le gouvernement, le chiffre publié pour 2018 est fixé à 7 500. Et c'est pour l'ensemble des réfugiés de partout que prennent en charge les gouvernements. Ce nombre devrait-il augmenter?
    J'ai toujours espéré, pour les yézidis particulièrement, que les 1 200 que le gouvernement s'est engagé à accueillir constitueraient une mesure spéciale en sus des réfugiés accueillis d'ailleurs. Ça ne s'est pas produit.
    Demanderiez-vous que, à l'avenir, le gouvernement augmente ce nombre et que, au moins, il essaie de viser l'objectif que les autres témoins ont signalé à notre attention, c'est-à-dire 5 000 en sus des 7 500 immigrants visés?
    Je demande l'avis de chacun des témoins.
    Madame Naso.

  (0935)  

    Oui, je pense que 5 000, c'est assez élevé.
    Merci.
    Monsieur Weiss.
    Absolument.
    Merci.
    Monsieur Hesso.
    Oui, ce serait beaucoup mieux avec au moins 5 000.
    De plus, à titre de mesure particulière.
    Oui.
    Pour les besoins du compte rendu, tous les témoins approuvent en faisant un signe de la tête.
    Madame Abdallah.
    Oui! Au moins 5 000.
    Merci.
    Allons maintenant à la question de la localisation, parce que des témoins antérieurs et vous, ici, avez souligné l'importance de l'existence d'une communauté pour assurer un soutien mutuel. Les fonctionnaires ont dit que les emplacements désignés étaient Toronto, London, Winnipeg et Calgary. Je suis un peu déconcertée d'apprendre que Calgary ne possédait ni les infrastructures ni la communauté qui permettraient de soutenir les réfugiés yézidis. Lethbridge est une autre communauté qui a été reconnue. Est-ce qu'elle possède les infrastructures en place?
    Monsieur Hesso.
    J'ai eu une discussion sur le sujet avec un adjoint en immigration pour les Prairies et les Territoires du Nord-Ouest. Lethbridge était envisagée, et on allait y accueillir des familles précisément dans cette ville, mais après consultation des yézidis on s'est aperçu que ceux qui arrivaient au Canada voulaient se retrouver dans des communautés existantes. Peu importe l'endroit où ils arrivaient au Canada, l'aéroport international Pearson de Toronto, celui de Montréal ou n'importe où ailleurs au Canada, ils voulaient se retrouver dans les communautés yézidies existantes. Ça facilitait l'intégration, compte tenu des conditions particulières auxquelles ils pouvaient être soumis, et c'est mieux ainsi. Ça facilite la tâche de tous.
    Absolument. Je suis d'accord. Est-ce que Lethbridge est l'une de ces communautés?
    C'en était une, effectivement.
    D'accord. Excellent! Je tenais à m'en assurer.
    À ma connaissance, il n'y a aucune famille à Lethbridge. Il y en a à Calgary.
    Il n'y a personne à Lethbridge?
    Pas que je sache.
    Alors, ce n'est pas une communauté avec les infrastructures?
    À ma connaissance, aucune famille yézidie ni aucun yézidi isolé ne vit à Lethbridge, aujourd'hui.
    Je vois. Merci.
    Voilà des renseignements importants.
    Connaissez-vous d'autres bonnes communautés pour la réinstallation de familles yézidies. Si vous pouviez en informer notre comité, qui informerait à son tour le gouvernement, ce serait vraiment important. De ce ce point de vue, c'est le b.a.-ba de la réinstallation.
    Les services de réinstallation sont l'un des moyens indispensables dont nous devons assurer l'existence. Que doit faire le gouvernement pour qu'ils soient convenables?
    Nous commençons par vous, monsieur Hesso.
    Je pense que le gouvernement doit collaborer avec les communautés existantes et les personnes ayant des logements libres et connues d'IRCC particulièrement. Je pense que ça facilite le travail de tous quand on offre des possibilités de socialisation, de l'interprétation et des services médicaux, de toutes les façons possibles. Je pense que ça réconforte les familles d'être accueillies à l'aéroport et que ça les rend heureuses d'être accueillies par des familles yézidies.
    Merci, monsieur Hesso.
    Monsieur Whalen.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les séances où on nous raconte le vécu des yézidis, les horreurs et le génocide qu'ils subissent sont toujours tellement traumatisantes.
    J'essaie d'arriver à comprendre comment nous pouvons concilier certains échos que nous recevons de la commission onusienne et comment nous pouvons reconnaître les yézidis, si l'ONU ne le fait pas.
    Madame Naso, vous avez dit qu'il y a des camps essentiellement peuplés de yézidis. Lesquels?

  (0940)  

    Il y en a au Kurdistan, sept, peuplés uniquement de yézidis et un gros camp en Turquie.
    Ils sont uniquement peuplés de yézidis.
    Oui.
    Connaissez-vous les noms de ces camps?
    Oui. En Turquie, c'est le camp de Midyat, où se trouvent les familles que nous parrainons à titre privé. En Irak, il y a le camp de Khanke et...
    Vous pourrez les énumérer plus tard, si c'est plus utile.
    Vous pouvez communiquer une liste des camps à notre comité.
    Vous auriez l'impression que si nous ciblions nos efforts de réinstallation des réfugiés sur ces camps, nous accueillerions par inadvertance un grand nombre de yézidis pour cette raison.
    Oui.
    Je peux communiquer ces noms à votre comité.
    Je vous en remercie.
    Monsieur Hesso.
    Dans le passé, nous avons offert notre aide à IRCC, pour participer à la mission qui visite ces camps, pour y trouver les yézidis et faciliter pour tous le traitement des dossiers. Nous pouvons établir les familles qui ont échappé aux sbires de l'État islamique ou les femmes et les filles dont nous avons parlé aujourd'hui. Nous sommes disposés à être...
    Merci.
    Peut-être qu'un fonctionnaire...
    C'est merveilleux. Je passe à ma prochaine question. Merci. C'est vraiment utile.
    Madame Abdallah, vous avez parlé de votre travail à London, dans le système de santé, et vous aidez les femmes, les filles et les garçons à accéder à des services médicaux. Fournissez-vous des services de traduction ou de soutien psychologique et moral? Quel est votre rôle?
    Mon rôle, ici, avec les femmes yézidies, est de nouer des liens et des rapports avec elles. Je vois les besoins de la famille. Il arrive même que d'autres organismes, comme le centre de santé intercommunautaire me contacte, comme je l'ai dit et que, parfois, il me demande de me rendre sur place. À l'hôpital, je participe beaucoup au programme qui a été élaboré à l'intention des réfugiés.
    C'est excellent. Vous êtes la personne idéale à qui poser cette question. Combien de clients ou de familles êtes-vous en mesure d'aider avec un poste à temps plein comme celui-là?
    Je fais du bénévolat auprès de ces filles et de ces femmes, alors mon temps est très limité. Je dois subvenir à mes besoins. J'ai des factures à payer. Je fais autant de bénévolat que je peux. Je discute avec elles pour qu'elles puissent être à l'aise avec moi.
    Avez-vous une idée du nombre de familles que vous aidez? Avez-vous un chiffre?
    Je vois actuellement environ cinq familles de survivants. C'est difficile pour moi d'entendre leurs récits et d'être aussi impuissante.
    Pour former les gens de votre collectivité à suivre votre exemple et à participer à ces efforts d'établissement, il semble qu'on aurait besoin de 50 ou 100 bénévoles comme vous pour accueillir 5 000 personnes dans les diverses collectivités. Nous ne semblons pas encore avoir atteint la masse critique, mais nous allons dans la bonne direction pour ce faire. S'il est question d'accueillir 5 000 Yézidis, combien de temps faudra-t-il pour avoir suffisamment de bénévoles comme vous, madame Abdallah, afin d'offrir aux réfugiés les services nécessaires à leur bonne intégration?
    À London, en Ontario, bien des membres de la collectivités ne sont pas des Yézidis, mais ils leur viennent en aide. Tous les membres de la collectivité se mobilisent pour s'aider mutuellement. Bien entendu, ils se sentent à l'aise avec moi, car je leur parle en kurmanji. Je suis très à l'aise avec eux. Je les rencontre pendant mes temps libres ailleurs qu'à l'hôpital et que dans tous ces autres contextes qui sont parfois écrasants.
    Je crois qu'il est très important pour la communauté yézidie de prendre des mesures pour venir en aide aux nouveaux réfugiés de façon à ce qu'ils se sentent soulagés et suffisamment à l'aise pour dire ce dont ils ont besoin. Ces gens ne connaissent rien à notre société, alors nous devons leur montrer ce que nous avons et les types de services que nous offrons.
    Pour ce qui est des différences culturelles, encore une fois, excusez mon ignorance en ce qui concerne le yézidisme, votre religion, et votre culture, mais j'essaie de comprendre si les gens veulent ou non venir au Canada.
    Si je prends la répartition des Yézidis à l'extérieur de la région du Kurdistan, il y en a 100 000 en Allemagne, où se trouve une communauté solide de personnes qui peuvent communiquer entre elles, et si vous regardez la liste qui figure sur Wikipedia, vous voyez que les nombres varient; il y en a aussi peu que 7 000 en Suède, et encore moins au Canada.
    Votre culture requiert-elle une masse critique pour que les gens demeurent yézidis au Canada?

  (0945)  

    Non.
    Les gens veulent-ils rester ou veulent-ils venir au Canada?
    Je crois savoir qu'ils aimeraient beaucoup que le Canada leur ouvre ses portes. Il y a peu de Yézidis au pays, car nous ne l'avons pas fait, nous ne leur avons pas donné de chance.
    Je sais que Yazda peut vous remettre une liasse de demandes présentées par des personnes qui pleurent, qui attendent, qui se battent pour venir au Canada.
    Estimez-vous qu'il y ait suffisamment de demandes pour accueillir 5 000 réfugiés?
    Oh oui, j'en suis persuadée, et même plus.
    Par l'intermédiaire des camps, vous serez donc en mesure de nous fournir une liste...
    Oui.
    ... ce qui serait la façon la plus facile de procéder dans ce cas.
    Oui.
    D'accord.
    Le représentant des Nations unies nous a aussi fait réfléchir en laissant entendre qu'une partie des femmes et des enfants qui étaient déjà arrivés ici étaient à risque au sein de leurs propres communautés.
    Avez-vous l'impression que c'est un risque légitime ou qu'il n'est pas fondé sur des faits? Le cas échéant, si nous faisons venir des personnes des mêmes camps, peut-on nous assurer qu'il ne s'agira pas des personnes qui mettront encore plus à risque les enfants que nous avons fait venir ici? C'est un des facteurs de risque que le représentant a mentionnés lorsqu'il a assisté à notre réunion de mardi. Si certains de ces enfants ont été autorisés à venir au Canada, c'est qu'ils n'étaient pas en sécurité dans le camp.
    Soyez très bref.
    Pouvez-vous préciser la question qui porte sur ce qui s'est passé dans leur propre collectivité? Pouvez-vous être plus précis?
    Oui, il a notamment mentionné que les enfants des femmes qui avaient accouché pendant qu'elles étaient aux mains de l'EIIL étaient à risque. Ils faisaient partie des gens qu'on devait emmener au Canada par mesure de protection.
    Je pense que nous sommes tous conscients des actes qui ont été commis en 2014, actes que les Nations unies ont reconnus comme étant un génocide.
    Nous savons tous que ces femmes et ces filles avaient été vendues, comme mon collègue l'a reconnu, à peine pour le prix d'un paquet de cigarettes. Je ne pense pas qu'elles soient allées en vacances. Elles ont été violées et réduites en esclavage pendant des mois et des mois, et même pendant des années. Nombreuses sont celles qui sont tombées enceintes et qui ont accouché.
    Mais que pouvons-nous faire? Si on oublie le côté religieux, sur le plan humain, je pense que l'enfant qui est né n'a rien à voir avec les actes commis. Nous devons d'abord cibler les gens qui l'ont fait, voilà ce que nous devons faire. Nous avons besoin de les faire venir ici, de les guérir et de reconnaître ce génocide pour venir en aide à d'autres yézidis.
    Merci.
    Je dois terminer ici et mettre fin à la discussion de ce groupe.
    Merci beaucoup de votre contribution à notre mise à jour. Nous tentons d'avoir une petite idée de la situation pour voir où nous en sommes. Vos commentaires ont été très utiles.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant quelques minutes le temps de changer de groupe d'intervenants.

  (0945)  


  (0950)  

    La séance est à nouveau ouverte.
    Dans le cadre de la présente réunion, nous avons de l'interprétation simultanée de l'anglais au français, du français à l'anglais, et de l'anglais à l'arabe, qui sera une interprétation à relais du français à l'anglais à l'arabe, si nécessaire. Un interprète communautaire peut aussi assurer les services linguistiques en kurmanji, si bien que nous couvrirons toutes les langues si besoin est pendant notre réunion. Je tiens à remercier le greffier d'avoir organisé ce service.
    Nous entendrons un certain nombre de témoins pendant la seconde partie de la réunion. Basema Ali Jedaan Alo ne peut pas être présente, car son enfant est malade, mais nous avons d'autres témoins.
    Nous allons commencer par M. Payam Akhavan, qui prononcera des remarques pendant sept minutes, et nous continuerons à partir de là.
    Vous nous rejoignez depuis Oxford.

  (0955)  

    Auriez-vous l'obligeance de changer la langue que j'entends dans mon oreillette?
    D'accord.

[Français]

     Bonjour d'Oxford.
    Tot d'abord, j'aimerais remercier les membres du Comité de m'avoir invité. Je suis honoré de pouvoir partager avec vous quelques idées sur la situation de la minorité yézidie.

[Traduction]

    Je tiens vraiment à remercier le Comité de toujours étudier cette question. Après nombre d'années passées à travailler dans le domaine des droits de la personne, je suis conscient du fait que lorsque les grands titres passent à un autre sujet, les victimes et les survivants sombrent dans l'oubli, mais malheureusement, ils sont...
    Je suis désolé. J'ai un souci avec l'interprétation.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je pense que le problème est que la langue qui est diffusée sur la chaîne 1 n'est pas celle qui l'est normalement.
    Oui, j'ai remarqué. Je soupçonne que c'est parce que nous avons des chaînes supplémentaires aujourd'hui.

[Français]

    Le canal 2 est celui de l'anglais, et le canal 1 est celui du français.

[Traduction]

    Vous n'avez pas besoin d'écouter en ce moment; vous pouvez simplement parler.
    J’entendais l'interprétation pendant que je vous parlais; cela m'a un peu déconcentré. Désolé.
    À l’été 2006, j’ai passé du temps à conseiller le gouvernement régional kurde sur la question de la responsabilité des atrocités commises par l’EIIL à l’encontre des yézidis. À ce titre, je me suis rendu à Erbil et à Dohuk et j’ai rencontré un certain nombre de survivants, y compris dans le camp de Kabato. J’ai même parlé à certaines des personnes gardées en captivité par l’EIIL à la prison de Dohuk, alors je vais vous faire part de cette expérience dans la mesure où elle pourrait être pertinente pour les travaux du Comité.
    Ma première observation est que les conditions dans les camps de personnes déplacées restent assez difficiles. Certains des survivants s’y trouvent maintenant depuis 2014. Dans certains cas, ils utilisent encore les mêmes tentes qu’il y a trois ans. Il y a toutes sortes de secteurs où on devrait offrir une aide humanitaire aux personnes qui se trouvent toujours dans ces camps.
    Ma deuxième observation est que pratiquement toutes les personnes avec qui je me suis entretenu ne voulaient pas quitter l’Irak pour trouver refuge dans d’autres pays; elles préféraient pouvoir retourner dans leurs villes et villages. Bien entendu, aujourd’hui, Mosul n’est plus sous le contrôle de l’EIIL comme à l’époque où j’y suis allé. L'EIIL représente toujours une menace dans des endroits isolés dans les régions les plus éloignées de l’Irak et de la Syrie, mais un nouveau problème se pose maintenant pour les yézidis, soit la milice chiite. Elle a occupé certaines des régions dont l’EIIL s’est retiré, si bien qu’il continue d’y avoir un problème sur le plan de la sécurité qui ne permet pas à bien des personnes déplacées de regagner leurs villages. J’ai entendu dire à maintes reprises que les gens voulaient rentrer chez eux.
    Ma troisième observation est que les survivants ont des besoins psychosociaux très pressants; je sais que le Comité en a tenu compte dans le cadre de ses travaux, notamment avec le témoignage concernant les efforts avant-gardistes déployés en Allemagne pour y emmener les femmes et les filles les plus gravement traumatisées afin, entre autres, qu'elles puissent bénéficier d’un type de thérapie. Je suis certain qu’on a aussi envisagé le problème en ce qui concerne les membres de la minorité yézidie qui arrivent au Canada comme réfugiés.
    Cela dit, j’aimerais que mes commentaires d’aujourd’hui portent, si vous voulez, sur un autre aspect, soit le besoin de thérapie et de guérison collectives parmi les survivants, domaine de spécialisation pour lequel on m’a demandé de prodiguer des conseils au gouvernement régional kurde. À cet égard, j’aimerais revenir au rapport du 15 juin 2016 de la Commission d’enquête indépendante de l’ONU sur la Syrie à propos du génocide yézidi, que je sais que le Comité a déjà étudié. Je crois comprendre que, sur recommandation du Comité, le gouvernement a adopté certaines des recommandations de la Commission sur les besoins psychosociaux des personnes déplacées et des réfugiés yézidis.
    J’aimerais m’arrêter aujourd’hui à une des recommandations de cette commission à laquelle j’ai participé et qui, selon moi, est toujours négligée et a d'importantes conséquences sur les processus de guérison et de réconciliation des collectivités locales de Dohuk et de cette région qui a été la plus directement touchée par ces atrocités. Cette recommandation se trouve à l’alinéa 209b) du rapport de la Commission, dans lequel elle formule la recommandation suivante:

  (1000)  

au gouvernement de l’Irak et au gouvernement régional kurde… b) Créer un forum, dans la région de Duhok, pour promouvoir les efforts de réconciliation entre la communauté yézidie et les musulmans arabes et kurdes. Pareil forum pourrait comprendre la mise en place d’une commission de vérité appuyée par des conseillers internationaux. Cette dernière chercherait tant à élaborer un dossier historique qu'à donner aux survivants une catharsis et une occasion de guérir en livrant leurs récits, et elle mettrait au jour et délégitimerait les crimes de l’EIIL dans la région grâce à la diffusion et à la distribution des témoignages.
    Cette recommandation que nous avons formulée à la Commission de l’ONU a généralement été ignorée, bien qu’il s’agisse d’une façon très simple et abordable d’offrir, si vous voulez, une aide psychosociale collective aux survivants.
    Nous savons que les discussions concernant les poursuites relatives à ces crimes devant la Cour pénale internationale n’ont malheureusement pas abouti. Le gouvernement irakien a refusé de reconnaître l’autorité de la Cour. On a déployé certains efforts, généralement vains, pour intenter des actions en justice à l’échelon local. Mon expérience du travail dans diverses zones de guerre dans le monde m’a appris que cette démarche est primordiale pour les survivants. Nadia Murad en a, bien sûr, parlé très en détail. Pour que les survivants guérissent et puissent retrouver leur propre humanité, il est extrêmement important que les coupables sont tenus de rendre des comptes. Au-delà de la justice pénale, une commission de vérité offre aux survivants une tribune très importante pour livrer leurs récits, composer avec leur passé et promouvoir la réconciliation; dans ce sens, elle devrait être vue comme un mécanisme de reddition de comptes qui aurait aussi une incidence psychosociale de grande portée.
    En conséquence, les commentaires que je formule aujourd’hui ne concernent pas vraiment les réfugiés qui sont acceptés au Canada — ce qui, selon moi, est très louable — mais plutôt la façon dont nous pouvons venir en aide à des populations beaucoup plus importantes qui resteront invariablement dans les camps de personnes déplacées et qui auront toujours besoin de composer avec ce traumatisme profond.
    Je crains de devoir vous demander de conclure.
    Merci.
    Nous allons aussi entendre l’autre témoignage par vidéoconférence. Nadia Murad Basee Taha partagera son temps avec Haider Elias. Peut-être que nous pourrions commencer par Mme Taha et que vous pourriez ensuite partager votre temps comme bon vous semble.

  (1005)  

     [Difficultés techniques]... Ils nous ont emmenés dans une province allemande, Baden-Wurttemburg, où nous étions 1 000 survivants. Nous avons maintenant une vie meilleure. Nous sommes en sécurité. Nous bénéficions de soins médicaux. Il y a plus de 250 familles, et nous espérions que le Canada accueillerait plus de yézidis, et nous nous attendions à ce qu'il le fasse.
    Je communique personnellement avec bien des survivants et des familles. Ils n’ont passé qu’un ou deux entretiens avec le Canada et attendent toujours d’être acceptés. Ils ignorent quand ils viendront au Canada, car ils ont dû attendre entre deux et quatre mois pour passer leurs entretiens. Ils ont subi tous les examens médicaux nécessaires et attendent de partir. Des centaines de familles qui ont passé ces entretiens communiquent toujours et nous posent les mêmes questions: quand notre tour viendra-t-il? À quel moment sommes-nous censés venir? Nous espérons qu'il ne faudra pas plus de temps au gouvernement du Canada pour accueillir ces gens.
    Les gens sont si fatigués. Ils sont épuisés. Ces camps abritent des milliers de survivants qui s’ennuient de leurs êtres chers et de leurs familles, et qui attendent d'avoir la chance de commencer une nouvelle vie.
    Sinjar souffre toujours. À l’heure actuelle, aucun de ces charniers de yézidis n’a été ouvert ou n’a fait l’objet de discussions.

  (1010)  

    J'ai besoin de vous interrompre un instant.
    Il vous reste une minute. Si vous voulez donner du temps à M. Elias, il n'aura qu'une seule minute.
    D'accord.
    Monsieur Elias.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie sincèrement de nous avoir invités mes collègues et moi à venir témoigner pour vous donner notre point de vue sur la réinstallation de membres de la communauté yézidie au Canada.
    Je vais être très bref, car je n'ai plus que 10 % du temps. Je vais vous parler des difficultés et défis auxquels a fait face Yazda, notre organisation, au cours au moins des huit derniers mois, pour participer au processus de présentation des demandes au gouvernement du Canada pendant l’initiative de réinstallation. Je vais vous parler brièvement de certains problèmes auxquels nous nous sommes heurtés depuis la création de notre organisation à la fin 2014.
    Nous avons créé une base de données sur les femmes et les fillettes yézidies, et tout autre survivant de leur communauté ayant été victimes de Daech et des violences en Irak. Toutes les données étaient prêtes pour ces demandes. Nous avions confirmé leur admissibilité, en particulier celles des femmes et des fillettes qui avaient été persécutées. Nous avons soumis leurs demandes. Nous avons alors eu un problème qui a rendu les choses très compliquées pour Yazda. Les exigences ont été relevées. Il nous était plus difficile de soumettre des demandes pour les familles admises au Canada. Nous nous sommes rendu compte alors que le HCR traitait avec de multiples personnes et organisations au hasard, ce qui a entraîné des doublons. De nombreux dossiers ont été rejetés parce que deux demandes ont été soumises au HCR par deux personnes ou organisations différentes. Les familles ont dû porter le fardeau de se voir refuser comme réfugiés alors que ce n’était pas de leur faute.
    On a relevé les exigences récemment pour les demandes. Par exemple, on exige maintenant que les familles aient très récemment survécu ou échappé à Daech. Des centaines si ce n’est des milliers de demandes sont dans notre base de données depuis janvier 2015. Nous recevons encore chaque jour des demandes de survivants. C’est une autre de nos difficultés. Être très sélectifs et exiger cela des personnes et des familles qui viennent d'être libérées est très pénible pour nous.
    De plus, les organisations n’ont pas toutes été traitées de la même manière. Yazda s’est vu imposer des exigences différentes de celles d’autres organisations. Yazda a soumis de nombreuses demandes pour des cas qui étaient admissibles selon notre base de données, en ce qui concerne le gouvernement irakien et toute organisation aidant les familles à se rendre en Australie, en Allemagne ou au Canada. Selon nos normes de référence, ces familles étaient admissibles, mais certaines ont été refusées. On se plaignait que…

  (1015)  

    J'ai bien peur de devoir vous interrompre pour m'assurer que les membres du Comité auront le temps de vous poser des questions. Je suis certain que vous pourrez en dire plus long en répondant aux questions.
    Pas de problème.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Barber.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Matthew Barber. Je suis étudiant au doctorat et j'étudie la pensée islamique et l'histoire du Moyen-Orient à l'Université de Chicago. J'avais effectué des recherches avec la communauté yézidie pendant plusieurs années avant le génocide, et je vivais en Irak au moment où il s'est produit. Par la suite, j'ai commencé à défendre la cause de la communauté, et j'ai servi plus tard pendant un an en Irak, en 2015-2016, où j'ai dirigé des initiatives de Yazda dans le domaine de l'aide humanitaire et de la défense des intérêts de la communauté yézidie.
    Comme je ne suis pas canadien, je ne peux pas parler des enjeux ici au Canada, mais je peux vous parler longuement de la situation en Irak et vous aider, je l'espère, à la comprendre. Je suis sincèrement reconnaissant au gouvernement du Canada de jouer un rôle de chef de file dans ce dossier, et j'espère qu'il servira d'inspiration à mon pays sur les mesures à prendre pour aider la communauté yézidie. Nous devrions avoir honte de ne pas faire ce que vous faites et de ne pas en faire davantage.
    Pour ce qui est des survivants en Irak à l'heure actuelle, les yézidis sont encore entourés de sympathisants convaincus de Daech, mais l'organisation a été démantelée et ne représente plus une menace organisée pour la communauté. Cela n'élimine pas pour autant toute possibilité future d'un génocide, mais pour l'instant, les massacres et les nouveaux cas d'esclavage ne sont pas ce qui est le plus à craindre.
    La réinstallation des survivants au Canada ou dans d'autres pays n'a pas perdu de son importance pour autant, toutefois, en raison principalement de leurs conditions de vie, car quatre grands facteurs menacent le rétablissement des survivants.
    Le premier facteur est l'absence de services de soutien psychosocial et de santé mentale adéquats dans le pays, comme l'a souligné le dernier groupe de témoins.
    Le deuxième est l'instabilité politique. Je ne suis pas d'accord avec M. Akhavan lorsqu'il dit que les milices chiites ont remplacé Daech comme menace et que c'est ce qui empêche les yézidis de retourner dans la région. C'est faux. Le gouvernement régional du Kurdistan constituait un obstacle beaucoup plus grand à leur retour à Sinjar. Cette menace n'en est toutefois plus une, puisque le PDK, le parti au pouvoir, a retiré les peshmergas. La situation s'est améliorée au vu d'un retour potentiel des gens, mais le climat demeure tendu et la situation politique est encore instable. Il faut qu'il y ait une transition entre les milices chiites al-Hachd al-Chaabi et le type d'autonomie gouvernementale que revendiquent les yézidis depuis trois ans. Ainsi, l'instabilité politique demeure, même si les choses s'améliorent lentement.
    Le troisième facteur est les conditions économiques. Les gens peuvent difficilement retourner à Sinjar, car leurs maisons et leurs fermes ont été détruites. Beaucoup de femmes qui ont connu l'esclavage, et qui ont maintenant de graves problèmes psychologiques et de santé mentale, doivent travailler de longues heures dans un environnement très difficile et déprimant. Ce n'est pas le genre d'environnement dans lequel une personne peut rebâtir sa dignité après avoir subi les traumatismes dont M. Hadji Hesso a parlé précédemment. Le Canada peut offrir aux femmes qui ont subi cette forme de violence un environnement où elles ont plus de chances de retrouver leur équilibre mental, etc.
    Le dernier facteur, à mon sens, serait les familles yézidies. Certaines sont très en santé. Elles ont accueilli les femmes qui ont subi l'esclavage comme leurs chefs religieux leur avaient demandé de le faire. D'autres familles — comme partout ailleurs — sont moins en santé et luttent contre les préjugés, etc. La situation est difficile aussi pour les jeunes femmes qui sont poussées au mariage et à la maternité avant d'avoir eu la chance de se rétablir psychologiquement, ou même de décider si elles veulent des enfants. Il peut être très éprouvant d'avoir des enfants après avoir connu l'esclavage. Je pense qu'il est très important et une excellente idée d'accroître le nombre de réfugiés yézidis qui peuvent venir s'installer au Canada, en particulier pour les survivants.
    J'aimerais mentionner un dernier point avant de terminer. Je pense qu'il faut, en plus de la stratégie de réinstallation, une réponse concertée et globale au génocide yézidi et aux besoins de la communauté. Les efforts de réinstallation, etc. doivent viser à assurer la survie à long terme de la communauté. Il est merveilleux de voir des milliers de personnes se réinstaller ici. C'est très important pour eux. Toutefois, plusieurs centaines de milliers de yézidis ne quitteront pas l'Irak et y resteront, certains par choix, d'autres parce qu'ils n'ont pas l'occasion de le faire. Ceux qui choisissent de rester sont déterminés à rebâtir leur patrie, la région de Sinjar, un centre religieux très important. Je peux vous parler en détail de la religion yézidie et du fait que l'Irak demeure un lieu de culte important pour la communauté. On peut difficilement reproduire cela dans la diaspora. Il est donc primordial de préserver leur patrie en Irak pour ses traditions et sa culture.

  (1020)  

     Je sais que le Comité se concentre sur la citoyenneté et l'immigration, mais je crois qu'il faudrait aussi un dialogue avec les autres comités et organismes pour mettre l'accent sur l'aide humanitaire et les efforts de reconstruction afin d'aider la communauté yézidie qui est demeurée à Sinjar. C'est vital.
    Enfin, je mentionnerai que lorsque j'étais en Irak, j'ai supervisé un programme de réinstallation — du côté des ONG, avec Yazda — en collaboration avec le gouvernement australien pour des réfugiés yézidis nés en Syrie qui avaient traversé la frontière pour se rendre en Irak en raison de la violence du conflit syrien. L'Australie a réinstallé toute la population dans son pays et a collaboré avec nous tout au long du processus. Au sujet des questions que le membre du Comité avait sur la collaboration avec le HCR, le désir des yézidis de partir, et l'identité ethnique et religieuse, et des défis de cette nature, il est malheureux que la personne ait quitté, car j'aurais pu en parler pendant la période de questions.
    Merci.
    Très bien.
    J'ai l'impression que vous en avez encore beaucoup à dire.
    J'aimerais rappeler à tous les témoins qu'ils peuvent nous fournir de l'information par écrit. C'est toujours très utile.
    J'ai remis un document détaillé avec mes recommandations et suggestions.
    Le président: Il est ici. J'ai...
    M. Matthew Travis Barber: Je crois savoir que la traduction sera prête vendredi.
    Excellent.
    C'est au tour de notre dernier témoin, M. Ismail.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, distingués invités, c'est un honneur pour moi d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner à cette séance d'information sur les questions liées à la réinstallation des femmes et des filles yézidies.
    J'aimerais également remercier le respecté gouvernement du Canada pour avoir su reconnaître le génocide yézidi commis par Daech. Les yézidis sont, en effet, les victimes d'un génocide, et je supplie chacun de vous de les sauver d'une mort certaine.
    Les yézidis sont un peuple ancien et fier qui est originaire du coeur de la Mésopotamie, le berceau de la civilisation et d'un grand nombre de religions dans le monde. Nous croyons en un Dieu suprême et à ses sept archanges. Le mot yézidi désigne une religion, une langue et une culture.
    Vous êtes probablement au courant de la lutte politique actuelle en Irak entre le GRK et le gouvernement central. Lorsque le GRK a déclaré l'indépendance du Kurdistan le 25 septembre, la Force de mobilisation populaire de l'Irak a lancé les combats contre lui et a reconquis Kirkouk et une grande partie de la province de Mossoul, y compris Sinjar, la principale ville yézidie qui a été frappée la plus durement par Daech. Comme la plupart des yézidis et des chrétiens habitent dans la zone soi-disant disputée, Sinjar et la plaine de Ninive, une bande de terre entre Arabes et Kurdes, nous avons été pris dans l'enfer de la guerre. Lorsqu'il y a un conflit, les minorités comme la nôtre en paient le prix de leur vie.
    Les femmes et les filles yézidies qui se sont réinstallées au Canada sont très heureuses et profondément reconnaissantes au gouvernement du Canada des efforts qu'il a déployés pour les amener ici, où elles peuvent vivre en sécurité et en liberté et dormir sans avoir peur. Il est très émouvant de voir ces femmes et ces filles traumatisées renaître à une vie normale. Toutefois, les femmes et les filles qui arrivent au Canada ne savent pas qu'il existe une communauté yézidie bien établie au pays. Elles n'en sont pas informées, et le gouvernement ne les met pas en contact avec elle, ce qui ajoute à leur traumatisme, leur peur et leur sentiment d'isolement.
    Certains yézidis ne parlent pas arabe, mais les interprètes du gouvernement qui viennent à leur rencontre à leur arrivée à l'aéroport parlent cette langue. Lorsqu'ils demandent à aller vivre avec des membres de leur famille élargie, l'interprète leur répond que ce n'est pas possible, qu'ils doivent aller dans une autre ville, une autre province, et que c'est la loi. Cela vient accentuer leur confusion et leurs craintes. Certains pensaient même être retombés aux mains de Daech.
    Ils doivent ensuite se trouver un logement, ce qui n'est pas facile. Les ONG leur fournissent une liste d'appartements, mais ils doivent ensuite se débrouiller. Ils doivent le faire sans connaître la culture, la langue, les modes de transport, etc. Les familles yézidies nouvellement arrivées au Canada dans le cadre du programme sont des femmes avec de jeunes enfants qui ont perdu leur mari.
    Il y a aussi des problèmes du côté des enfants. Certaines familles, notamment celle de Mme Basema — qui devait être ici, mais qui n'a pas pu venir malheureusement en raison de problèmes personnels — sont arrivées au Canada depuis plus de quatre mois et n'ont toujours pas reçu leur prestation fiscale pour enfants. En attendant, le montant qui leur est accordé couvre à peine le loyer, sans compter la nourriture et les autres dépenses. De plus, les propriétaires ne leur demandent pas seulement le premier et le dernier mois, même si c'est illégal, mais jusqu'à quatre mois d'avance. Cette situation laisse donc les réfugiés sans argent, sans nourriture, sans moyen de transport, sans vêtements et sans autres produits essentiels.
    De plus, les intervenants qui s'occupent des réfugiés ont souvent plus de 70 familles à s'occuper. Ils n'ont pas le temps de s'en occuper pleinement, et ces réfugiés traumatisés se retrouvent isolés. Comme ces femmes et ces enfants sont des survivants directs de Daech et qu'ils sont gravement traumatisés, il leur faut un programme de soutien pour les aider.
    Lorsqu'une famille emménage dans sa nouvelle demeure, il faut parfois plus de deux semaines avant que le gouvernement lui procure des meubles, y compris des lits. Ils doivent donc dormir et manger sur le sol en attendant.

  (1025)  

    C'est pourquoi les familles qui arrivent sont mieux logées à proximité de la communauté yézidie. C'est important pour leur sentiment d'appartenance et de bien-être. La communauté accueille à bras ouverts les nouveaux réfugiés, ce qui aide beaucoup à guérir les traumatismes de ces femmes et enfants rescapés. Les ONG sous contrats ne prennent pas cela en considération lors de la réinstallation des familles, qui ne parlent pas la langue, sont isolées, sans moyen de transport et sans réseau de soutien.
    L'Abraham Project a été mis sur pied il y a trois ans par la Mozuud Freedom Foundation et la Yezidi Human Rights Organization-International. Son but est de réunir les familles yézidies. Certains membres de la famille sont ici au Canada et d'autres se trouvent encore dans des camps de réfugiés des Nations unies en Turquie ou ailleurs. Project Abraham compte aujourd'hui plus de 150 bénévoles qui offrent un soutien et une aide exceptionnels aux nouveaux réfugiés de la communauté.
    Voici nos recommandations et solutions. Au cours des trois prochaines années, nous demandons au Canada d'accueillir 20 000 yézidis, en accordant la priorité aux femmes, aux enfants et aux orphelins rescapés qui sont des victimes directes de Daech, ainsi qu'aux membres de leur famille immédiate.
    Citoyenneté et Immigration Canada devrait permettre aux rescapés yézidis traumatisés de demeurer dans la ville où ils ont des parents et devrait informer la communauté yézidie de leur venue avant leur arrivée.
    L'allocation mensuelle accordée aux yézidis dans le cadre du programme n'est pas suffisante, en particulier pour le loyer. Nous recommandons fortement au gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements municipaux pour leur offrir des logements de l'État.
    Je vais devoir vous demander de conclure; il ne vous reste que quelques secondes.
    Nous demandons au gouvernement canadien d'intervenir dans la libération des plus de 3 000 femmes et enfants yézidis qui sont toujours aux mains des membres du groupe État islamique en Irak, en Syrie et dans d'autres États du Moyen-Orient. Nous demandons au gouvernement d'appuyer la création d'une région autonome pour les yézidis et les Assyro-Chaldéens à Sinjar et dans les plaines de Ninive, en les dotant de leurs propres services de police et de sécurité, et de leur fournir le matériel et la formation nécessaires afin qu'ils puissent se défendre eux-mêmes contre toute attaque future.
    Nous demandons au gouvernement de faire parvenir de l'aide humanitaire, de toute urgence, directement aux personnes déplacées en Irak. Il existe un risque réel de famine, de déshydratation et de maladies, surtout sur le mont Sinjar. Cette aide devrait provenir de sources non gouvernementales neutres afin d'éviter le détournement des vivres, de l'eau et des médicaments.

  (1030)  

    Je suis désolé, mais je dois vous interrompre. Merci beaucoup.
    Pour la gouverne des membres du Comité, je propose que nous ayons trois séries d'interventions de sept minutes, ce qui signifie que nous dépasserons d'environ cinq minutes l'heure à laquelle nous levons normalement la séance, au cas où quelqu'un serait pressé de partir. Si certains députés veulent partager leur temps de parole, il n'y aura qu'un seul tour pour chaque parti.
     Monsieur Tabbara, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence.
    Depuis que la crise des yézidis a éclaté en août 2014, la communauté internationale a tardé à réagir. De 2014 à 2015, le gouvernement précédent n'a fait venir que trois yézidis sous son mandat. En revanche, depuis la publication du rapport, le gouvernement actuel a fait venir 807 survivants, et nous redoublerons d'efforts afin d'accueillir 1 200 réfugiés avant la fin de l'année.
    Monsieur Payam Akhavan, j'aimerais savoir ce que vous pensez de la citation suivante. À la dernière séance, un des témoins, M. Jean-Nicolas Beuze, a dit:
Il y a plus de 22 millions de réfugiés sur la planète. Nous avons établi que 1,2 million d'entre eux ont besoin d'être réinstallés. De ce nombre, nous serons en mesure d'en réinstaller moins de 90 000 cette année, surtout aux États-Unis, au Canada et en Australie.
    Un grand nombre de réfugiés partout dans le monde ont besoin d'être réinstallés, mais seule une poignée d'entre eux peuvent l'être. Pourriez-vous nous en parler plus longuement?
    Comme je l'ai dit, et comme d'autres témoins l'ont également expliqué, il est impossible de réinstaller des centaines de milliers de victimes, et le Canada doit assumer sa part, de concert, espérons-le, avec d'autres pays. C'est pourquoi nous devons également assurer la protection des personnes déplacées dans les camps et déterminer comment nous pouvons aider ces gens à s'enfuir ou à retourner chez eux; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai parlé de la situation en matière de sécurité à Shengal. Même si votre comité se concentre sur l'admission de réfugiés yézidis, il devrait mettre en contexte cet objectif dans le cadre d'un engagement plus vaste. À cet égard, je tenais à souligner la recommandation de créer une sorte de commission de vérité qui contribuerait, de façon très abordable, au processus de guérison et de réconciliation, car, comme l'a expliqué un des témoins, il subsiste toujours des tensions avec les villages musulmans arabes et kurdes avoisinants qui ont participé à ces atrocités. Nous devons régler ces problèmes si nous voulons trouver une solution à long terme et permettre le retour des personnes déplacées à Shengal.
    C'est un bon enchaînement.
     Monsieur Barber, vous avez parlé d'une approche en trois volets dans la région. Je pense que tous les membres du Comité seraient d'accord pour dire que la communauté internationale doit miser sur la sécurité et la viabilité dans la région pour assurer la protection continue non seulement des minorités, mais aussi de tous les habitants de la région.
    Pourriez-vous nous donner plus de détails sur l'approche en trois volets que vous avez évoquée brièvement dans votre exposé?
    Depuis le génocide, au cours des quelque trois ans et demi, la communauté yézidie a tenu un discours extrêmement constant sur ce qu'elle veut. Les yézidis ont une position très unifiée à cet égard. Ils veulent une administration locale autonome dans la région de Sinjar afin de permettre aux yézidis de la région de gouverner leurs affaires, avec l'aide d'une force de sécurité locale non partisane. Un des problèmes qui se posent dans la région de Sinjar, c'est que les forces de sécurité qui l'ont contrôlée dans le passé ont toujours été membres de milices ou affiliées à certains groupes politiques. Les peshmergas, qui ont quitté Sinjar et qui ont permis le génocide, n'étaient pas une force de défense nationale kurde résolue à défendre tout le Kurdistan de façon égale. Ils étaient redevables à un parti en particulier, et c’est d’ailleurs ce qui explique la perte de confiance des yézidis à l'égard du Kurdistan. Je suis tout à fait d'accord avec M. Akhavan sur la nécessité de rétablir la sécurité à Shengal, à Sinjar, et de permettre aux yézidis placés dans des camps de retourner chez eux. C'est le moment opportun de le faire.
    Le gouvernement kurde n'a aucune légitimité à l'égard de la communauté yézidie; par conséquent, à mes yeux, la création d'une commission de vérité basée à Dohuk est un peu contestable. Je crois également qu'il faut avant tout aider les yézidis à retrouver une vie normale — ils confinés dans des camps depuis plus de trois ans. Aidons-les à rentrer chez eux et à créer le type de gouvernement local dont ils ont besoin à Sinjar, où ils seront en sécurité; ce n'est qu'ensuite que nous pourrons entamer les efforts de réconciliation. Il est difficile d'envisager une réconciliation avec quelqu'un qui vous a fait du tort lorsque vous souffrez toujours des conditions de vie dans les camps, et tout le reste.
    Cela dit, la communauté internationale tarde à donner suite à cette demande de la communauté yézidie. Après le retrait du parti démocratique du Kurdistan et des peshmergas, il reste maintenant deux candidats dans la région de Sinjar: les milices parrainées par le parti travailliste kurde et les milices yézidies qui relèvent des milices chiites, dont M. Akhavan a parlé. Ces groupes doivent faire la transition vers une force locale moins politisée, sous la direction des yézidis, et ils ont besoin de l'appui de la communauté internationale pour faciliter une telle démarche.

  (1035)  

    Puis-je vous interrompre là? Je voulais partager mon temps de parole avec M. Ehsassi, et j'aimerais m'assurer de lui donner assez de temps.
    Je voudrais souhaiter à M. Akhavan un bon retour parmi nous. Je tiens d'abord à vous féliciter d'être l'orateur principal dans le cadre des conférences Massey.
    J'étais en train de passer en revue la transcription de vos témoignages au fil des ans. Vous avez toujours maintenu une position très constante. Vous avez porté votre regard au-delà des défis immédiats. Vous avez toujours jugé qu'une commission de vérité ferait partie intégrante de cette approche, mais vous dites aujourd'hui que cette demande est restée, en somme, lettre morte. Y a-t-il un pays qui contribue déjà à ces efforts, et que devrait faire le Canada à ce stade-ci?
    Merci beaucoup, Ali, de m'avoir invité.
    La réponse à votre question est simple: la communauté internationale n'a guère manifesté d'intérêt à l'égard des initiatives plus locales, même si ces efforts permettront non seulement de favoriser le cheminement vers la guérison, mais aussi de transformer la culture politique qui a permis que de telles atrocités soient commises et que ce climat d'intolérance persiste. Je conviens qu'il y a...
    Je vais devoir vous interrompre, un peu brusquement, parce que je dois vraiment respecter les contraintes de temps. J'en suis désolé.
    Madame Kwan.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins. Vous nous avez donné des renseignements très importants et très convaincants.
    Je tiens d'abord à saluer et à remercier Nadia, qui se joint à nous à partir de New York. Je me souviens que, la dernière fois que les divers témoins étaient des nôtres, le gouvernement était saisi d'une demande d'action en urgence pour la réinstallation des yézidis, ce qui a abouti à la décision d'accueillir 1 200 réfugiés. Si ma mémoire est bonne, ce n'était que le début de ce que les gens espéraient comme intervention.
    Nous avons entendu aujourd'hui M. Ismail proposer le chiffre de 20 000. Je voudrais donc poser la même question que j'ai posée au dernier groupe de témoins: êtes-vous pour ou contre l'idée que le gouvernement adopte une mesure spéciale en augmentant le nombre de réfugiés yézidis réinstallés, jusqu'à un minimum de 5 000, sans déduire ce chiffre du nombre de réfugiés pris en charge par le gouvernement ou parrainés par le secteur privé? Puis-je obtenir une réponse courte? Je vais commencer par Nadia.
    Je m'abstiendrai de répondre...
    Je vais demander à Nadia de répondre en premier.
    Pouvez-vous répéter la question?
    D'accord. La question brève est la suivante: seriez-vous d'accord pour que le gouvernement porte le nombre de yézidis réinstallés à au moins 5 000, comme mesure spéciale — ce qui est bien au-delà de la limite de 7 500 fixée pour les réfugiés pris en charge par le gouvernement — et qu'il élimine le plafond imposé au nombre de réfugiés parrainés par le secteur privé, toutes catégories confondues?

  (1040)  

    Bien sûr. Nous voulons que le gouvernement augmente le nombre de yézidis pouvant venir ici afin que nous ayons une plus grande communauté au Canada. Cela serait d'une aide incroyable pour les yézidis, surtout si le nombre de réfugiés réinstallés devait augmenter.
    Merci.
    Monsieur Ismail.
    Les yézidis sont victimes de génocide. Je crois qu'une guerre civile est très différente d'un génocide. On comptait 23 millions de yézidis il y a 750 ans, et il n'en reste aujourd'hui que moins de 2 millions à l'échelle mondiale. Le Canada a toujours joué un rôle de premier plan pour ce qui est de sauver des vies, et nous espérons qu'il pourra atteindre cet objectif. Nous savons que les Canadiens pourront y arriver. Nous espérons qu'ils feront venir plus de 20 000 yézidis au cours des trois prochaines années — c'est ce que nous demandons — afin d'assurer leur survie. Nous vous en serions grandement reconnaissants.
    Merci.
    Monsieur Elias.
    Je suis tout à fait d'accord là-dessus, et je réponds oui à votre question. Je pense qu'il est très important d'accroître le nombre de réfugiés yézidis au Canada, car ils sont victimes de génocide. À mon avis, ce plan ou projet de réinstallation est une véritable bénédiction pour les yézidis. Ils sont très touchés par ce geste. Aucun autre pays ne leur a accordé une telle aide spéciale.
    Je crois que les yézidis n'oublieront jamais qu'ils ont été attaqués au coeur de leurs terres ancestrales, qu'ils ont été victimes de génocide et que leur propre pays n'a pas su les protéger contre les viols, les meurtres et tout le reste, mais ils n'oublieront pas non plus que le peuple canadien, à des milliers de kilomètres de là, leur a tendu la main. Les Canadiens les ont aidés. C'est un moment très historique et...
    Merci beaucoup. Je ne veux pas être impolie, mais j'aimerais pouvoir poser d'autres questions en présentant des recommandations.
    J'en viens donc à la prochaine recommandation. Je crois qu'un certain nombre de témoins ont parlé du besoin actuel d'aide humanitaire et de la nécessité de collaborer avec un organisme indépendant de sorte que l'aide puisse se rendre dans les camps et aller aux gens qui en ont besoin. Comme on l'a mentionné, il faut appuyer les gens qui sont là et qui risquent de ne pas obtenir un soutien à la réinstallation.
    Je voudrais que les témoins abordent ce sujet très brièvement et qu'ils nous donnent des recommandations précises sur les mesures que le gouvernement devrait prendre maintenant à cet égard. Je pourrais peut-être commencer par M. Barber; je vous prie de répondre brièvement afin que tout le monde puisse intervenir.
    Je n'ai pas suivi de très près la situation au Canada, mais le chiffre que j'ai vu circuler est de 25 millions de dollars pour la réinstallation. Grâce à une telle somme, on pourrait reconstruire plusieurs villes.
    Pardon, nous n'avons pas 25 millions de dollars; c'est plutôt 25 000 $.
    Très bien, je cède la parole à M. Ismail.
    En tout cas, c'était une sorte de crédit budgétaire.
    Ce n'est pas 25 millions de dollars, croyez-moi.
    Même avec une petite somme d'argent, on peut rebâtir de nombreuses maisons.
    Merci.
     Je passe à M. Ismail.
    Le 25 octobre, le vice-président américain a dit qu'à partir de cette date, les États-Unis allaient fournir une aide humanitaire directement à la communauté persécutée. Nous espérons que le Canada fera de même, c'est-à-dire qu'il enverra de l'aide directement aux gens, par l'entremise d'ONG, surtout dans les monts Sinjar, et y acheminera tout ce qui est nécessaire.
    Avez-vous un chiffre en tête, en guise de recommandation?
    En somme, ces gens ont besoin de tout. Ils n'ont rien. Le GRK bloque l'entrée des produits alimentaires et de l'eau potable depuis un an, et il y a maintenant entre 80 000 et 100 000 personnes sur le mont Sinjar; ces gens n'ont rien du tout et ils ne reçoivent aucune aide humanitaire.
    Merci.
    Monsieur Elias.
    Je crois que le gouvernement américain a décidé de contourner la bureaucratie interne des Nations unies. Selon moi, le gouvernement canadien devrait faire la même chose et s'associer directement aux ONG locales, à Sinjar, qui essaient de rebâtir les communautés là-bas. Des milliers de maisons sont piégées. Beaucoup d'entre elles ont été détruites ou pillées, et même les cadres de porte et les fenêtres ont été arrachés. La communauté yézidie a besoin d'aide de toutes sortes, notamment de l'électricité, des services d'éducation et des services hospitaliers.
    Je passe maintenant à M. Akhavan, par vidéoconférence.
    J'ajouterai tout simplement que, selon moi, les conditions de vie dans les camps sont épouvantables. Il est possible de fournir de l'aide immédiate aux gens là-bas. Je crois également qu'il est temps de commencer à songer aux efforts de reconstruction afin de permettre aux personnes déplacées de regagner leur ville ou leur village, si les conditions de sécurité s'y prêtent.

  (1045)  

    Merci.
    Au sujet des problèmes de réinstallation locale, les témoins précédents nous ont dit qu'il y a certains défis en ce qui concerne l'endroit où les gens sont réinstallés, de sorte qu'ils puissent bâtir ces communautés.
    Monsieur Elias, vous dites avoir une liste de familles. Est-ce exact? Avez-vous des recommandations quant aux collectivités ayant l'infrastructure nécessaire pour assurer la réinstallation des yézidis? Si vous avez une telle liste, pouvez-vous nous la faire parvenir pour... ?
    Je vais devoir vous demander de soumettre cela par écrit au Comité, d'une façon ou d'une autre.
    Nous avions une base de données qui...
    Nous allons devoir obtenir cela autrement qu'en ligne.
    Je dois passer à Mme Rempel. Nous sommes dans une très...
    Nous serons heureux de vous fournir cette liste.
    Madame Rempel.
    Merci, monsieur le président. Je crois que je vais tout simplement poursuivre sur cette lancée.
    Monsieur Elias, je vais vous demander de faire parvenir au Comité la liste des personnes dont les demandes ont été rejetées, que vous avez envoyée au Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Si vous souhaitez caviarder les noms, ce n'est pas un problème. Je crois que cela nous sera utile.
    D'accord.
    Dans une situation comme celle-là, lorsqu'un comité parlementaire entreprend une étude — nous avons eu deux séances de suivi —, habituellement, on demande au comité de fournir un rapport, puis au gouvernement de répondre à ce rapport. Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait vous être utile dans cette situation?
    Je vais juste faire un tour de table.
     Monsieur Barber?
    Monsieur Ismail?
    Oui.
    Monsieur Elias?
    Absolument.
    Nadia?
    Bonjour, Nadia. Je ne sais pas si elle est branchée.
    Laissez un moment pour permettre l'interprétation en arabe.
    D'accord, je vais continuer.
    Oui. La réponse est oui. Je vous entends.
    D'accord. Très bien.
    Dans ce cas, poursuivons. On nous a fait de nombreuses recommandations; certaines d'entre elles ont été formulées par ma collègue, Mme Kwan. J'en ai proposé quelques-unes au premier groupe d'experts, alors je ne les répèterai pas.
    Je reviens sur une partie des notes concernant les sujets que vous avez abordés.
    Monsieur Elias, croyez-vous que le Comité devrait recommander au gouvernement de faire un audit sur les demandes en suspens qui ont été relayées au Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, mais qui n'ont pas été recommandées aux fins de réinstallation au Canada?
    Oui.
    Très bien.
    Monsieur Barber et certains de nos témoins en vidéoconférence, vous avez évoqué nombre de problèmes qui ont une incidence sur la reconstruction, mais aussi sur la réinstallation. Je dois souligner que la motion adoptée par le Parlement canadien acceptait aussi les recommandations 210, 212 et 213 du rapport de 2016, intitulé They came to destroy.
    Recommanderiez-vous que le gouvernement fournisse une réponse au Parlement concernant les efforts qu'il a déployés pour donner suite à ces recommandations et les mesures qu'il a prises à cet égard?
     Absolument.
    Formidable.
    Madame Ismail?
    Oui.
    Monsieur Elias?
    Oui.
    Très bien.
    Mon collègue, M. Tabbara, a fait remarquer — et je suis d'accord avec lui — qu'il y a beaucoup de gens dans le monde qui auraient besoin d'être réinstallés. À l'heure actuelle, les plus grands défis en matière de politique publique sont probablement les problèmes de migration forcée et de déplacement à l'échelle mondiale. Pourtant, notre premier ministre a affirmé que la réinstallation de 25 000 Syriens n'était qu'une question de volonté politique. Une priorité a été accordée à cette cohorte.
     Étant donné que votre peuple a été la cible d'un génocide, êtes-vous d'avis que le gouvernement devrait accorder une priorité semblable à la poursuite de la réinstallation de victimes de génocide, tant dans les filières de réfugiés qu'il parraine que dans celles qui sont parrainées par le secteur privé?
    Oui.
    Merci.
    Nadia, qu'en pensez-vous?
    D'accord.
    Monsieur Barber, vous avez évoqué le chiffre de 25 millions de dollars. Par souci de clarté, le budget de 2017 prévoit un montant de 27 millions de dollars pour l'initiative de réinstallation des yézidis. Les représentants du ministère nous ont indiqué cette semaine qu'ils avaient réduit ce financement à 21 millions de dollars.
    Recommanderiez-vous de ramener ce financement à ce qu'il était?
    Oui, c'est ce que je ferais. Je ne proposais pas que ce montant soit utilisé pour la reconstruction de Sinjar, non plus.
    L'hon. Michelle Rempel: Bien entendu.
    M. Matthew Travis Barber: Je faisais simplement une comparaison pour dire que ce même montant pourrait aussi être utilisé de manière efficace pour la reconstruction.
    Recommanderiez-vous aussi que le Comité — ou peut-être un autre comité du Parlement, voire la Chambre des communes elle-même — entreprenne une étude sur les mesures qui ont été prises pour répondre aux autres recommandations que le Parlement a adoptées par l'intermédiaire de la motion de l'an dernier? Au risque de me répéter, il s'agit des recommandations 210, 212 et 213.
    Très certainement. Du reste, l'étude ne devrait pas se limiter au passé, mais aussi examiner ce qui pourrait être fait dans l'avenir.
    Dans cette optique, êtes-vous d'avis que le gouvernement du Canada devrait demander aux Nations unies d'entreprendre une étude de suivi du rapport de 2016 intitulé They came to destroy afin de prendre acte de ce que la communauté internationale a accompli et de formuler des recommandations à l'intention de cette communauté et des États membres quant à l'aide qui devrait être apportée aux yézidis?

  (1050)  

    Je ne suis pas certain qu'il faille laisser cela entre les mains des Nations unies. Selon moi, le Canada devrait plutôt intervenir directement auprès de la communauté de la région de Sinjar et mener sa propre enquête sur le type de mesures qu'il devrait privilégier.
    Formidable. Cette recommandation est encore meilleure que la précédente. Nous y voilà.
    Nadia, qu'en pensez-vous?
     Oui. Je suis d'accord avec Matthew.
    Très bien.
    Je vais utiliser le temps de parole qu'il me reste de la façon qui suit. Nous avons consacré exactement quatre heures à l'étude de ce sujet. Des témoins nous ont dit que nous devrions entendre d'autres témoins. Comme vous pouvez le voir, il s'agit d'un enjeu très sérieux. Ma collègue m'a aussi fait remarquer qu'il y avait des incohérences entre les témoignages des représentants ministériels et ceux des témoins, incohérences dont elle a l'intention de parler, si je ne m'abuse.
    Je m'apprête donc à demander qu'on nous donne plus de temps pour étudier cette question. La motion officielle que je vais proposer va aussi demander que le gouvernement réponde au rapport que lui remettrons.
    Je propose donc:
Que, nonobstant la motion qu’il a adoptée le 16 octobre 2017, le Comité tienne une réunion supplémentaire avant le 20 décembre 2017 concernant les questions de réinstallation relatives aux femmes et aux filles yézidies; que le Comité fasse rapport de ses constatations à la Chambre; et que le gouvernement présente une réponse.
    Pour les témoins, je viens de demander aux membres du Comité d'envisager une réunion supplémentaire afin que nous puissions entendre les témoignages de survivants. Nous n'en avons pas encore entendu. Pour ce faire, il faudra aussi que le Comité dépose une réponse officielle avec ces recommandations.
    Mes collègues ont un choix à faire. Ils peuvent se prononcer sur cette motion, ici, devant vous, puisque nous sommes en réunion — et j'espère que c'est ce qu'ils feront pour que nous puissions prolonger cette audience et permettre la préparation d'un rapport —, ou décider d'ajourner le débat, ce qui signifiera qu'ils ne sont probablement pas disposés à procéder de la sorte. J'aimerais que vous assistiez à cela.
    J'exhorte mes collègues à mettre de côté leurs divergences politiques pour un moment et à faire en sorte que nous ayons au moins une séance additionnelle pour entendre les témoignages de survivants qui ont réussi à venir au Canada. L'adoption de la motion nous contraindra également à rédiger un rapport officiel — compte tenu de la gravité et du sérieux de certaines des recommandations qui ont été proposées aujourd'hui — et elle nous permettra de nous assurer d'avoir une réponse du gouvernement.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Avant d'engager la discussion à ce sujet, je vous rappelle qu'un autre comité est censé prendre possession de cette salle à 11 heures. Nous n'aurons donc pas un débat complet. Une motion a toutefois été proposée. Je vais tenter de voir si nous devons en débattre ou en discuter.
     Monsieur le président, j'aurais un léger amendement à proposer, si vous n'y voyez pas d'objection.
    Je pense que cela pourrait recevoir l'approbation des membres du Comité. Le petit changement que j'aimerais apporter serait de préciser que cette séance additionnelle pourra se tenir après la rentrée de janvier. Je pense que le gouvernement veut atteindre sa cible. Cette cible était de 1 200 personnes avant la nouvelle année. Les chiffres à jour qu'on nous communiquera en janvier nous permettront de savoir exactement où nous en sommes et d'étayer l'information que nous allons relayer.
    Je tiens à vous rappeler qu'en tant que président de ce comité, je ne me soucie pas tant que cela du gouvernement. Je me soucie du travail du Comité et de son calendrier.
    Je dois vous signaler que nous avons trois séances non programmées possibles en décembre. Sans vouloir m'imposer, je recommanderais au Comité de prendre l'une de ces séances pour poursuivre son étude à ce sujet. Vous auriez peut-être intérêt à envisager cette possibilité. Il y a trois séances qui sont encore disponibles et il y a des témoins que nous pourrions entendre. Je tenais simplement à vous donner ces renseignements concernant un possible horaire.
    Madame Kwan.
    Merci, monsieur le président. J'appuie cette motion sans réserve. Nous devons faire ce travail avant le début de la prochaine année. Les témoins nous l'ont dit: il y a d'autres informations qui pourraient s'avérer utiles pour le Comité et étayer son point de vue sur la question et, de surcroît, qui pourraient fournir un meilleur éclairage au gouvernement quant aux mesures à prendre pour la suite des choses.
    Dès que nous nous sommes lancés dans l'étude estivale à ce sujet, j'ai compris que cela n'était que la première étape du travail qui doit être fait, et que la phase initiale de la réinstallation des 1 200 réfugiés syriens n'était que le début de la crise et du génocide qui nous interpellent. Il y a beaucoup de travail à faire, et je suis tout à fait d'accord avec l'idée de prolonger la présente étude.
    À cette fin — et je sais qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps —, je vais invoquer le Règlement et souligner le fait qu'il y a des incohérences dans les renseignements que les fonctionnaires d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada nous ont communiqués. Cela me trouble profondément. Le problème concerne le nombre de personnes dont les demandes ont été rejetées. J'ai l'impression que le nombre de personnes qui ont vu leur demande rejetée pourrait être plus élevé. Nous devons attendre de recevoir l'information que M. Elias va nous transmettre, puis sommer les fonctionnaires de nous donner l'heure juste à ce sujet. De plus, je voudrais que...

  (1055)  

    Je dois vous interrompre. Je ne permettrai pas que l'on fasse des commentaires négatifs au sujet des fonctionnaires du gouvernement au sein du Comité. Vous venez de porter une accusation à leur endroit, et je ne l'accepte pas.
    Monsieur le président...
    J'accepterai qu'il nous faille réconcilier deux opinions différentes.
    C'est ce que je dis; il y a un écart et nous devons faire ce qu'il faut pour tirer cela au clair.
    Fort bien.
    Je vous demanderais de demander aux fonctionnaires d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada de nous fournir cette clarification.
    Absolument.
    L'autre élément au sujet duquel il semble y avoir incohérence, c'est l'endroit où l'on réinstalle les gens. Après avoir entendu les fonctionnaires, je croyais que les gens étaient réinstallés dans des endroits où il y a d'autres familles yézidies et du soutien, mais il semble que ce n'est peut-être pas le cas. J'aimerais aussi avoir des clarifications à ce sujet.
    Très bien.
    Plaît-il au Comité de mettre cette motion aux voix maintenant et de laisser le soin au greffier et au président de fixer la date de la tenue des séances?
    Sur combien de séances devons-nous nous prononcer?
    La motion parle d'une séance additionnelle.
    Nous pouvons procéder à une mise aux voix. Je crois que nous sommes tous d'accord.
    Par souci de clarté, la motion parle aussi d'un rapport et d'une réponse du gouvernement.
    Nous ne pouvons pas vous donner de date butoir pour garantir que le rapport sera prêt avant Noël...
    Bien sûr.
    ... puisque nous devons préparer l'autre rapport. Il pourra néanmoins y avoir un rapport.
    J'aimerais comprendre exactement en quoi consiste la motion. Est-ce qu'elle porte seulement sur la tenue d'une autre réunion ou y est-il aussi question de la préparation d'un rapport?
    La motion comprend les deux.
    Aimeriez-vous la relire?
    La motion va comme suit: « Que, nonobstant... »
    En fait, puis-je demander que cette question soit remise à plus tard? Je crois que j'ai une réunion avec un autre comité qui commence dans trois minutes.
    Je crois que nous devrions voter. Nous pourrions le faire dès maintenant.
    Je suis prête.
    Nous devrions voter. Deux secondes et c'est fini. Personne ne sera en retard.
    Je propose l'ajournement de la réunion.
    C'est insensé. Pour les témoins qui nous regardent, ce sont les députés du gouvernement qui essaient de mettre un terme au débat sur la tenue d'une séance additionnelle au sujet de votre peuple. C'est dégoûtant.
    Pour ceux qui nous regardent, sachez que ceci est une mise en scène des conservateurs.
    Ce ne l'est pas; c'est la réalité. Votons sur-le-champ.
    Selon moi, expédier cette question en trois minutes...
    Votons tout de suite.
    À l'ordre s'il vous plaît. La parole n'appartient qu'à une seule personne à la fois. La parole est à M. Sarai.
     Je propose que l'on mette fin au débat maintenant.
    Procédons au vote dès maintenant, à un vote par appel nominal.
    Votons.
    Demandez-vous de mettre fin au débat ou à la réunion?
    Un vote par appel nominal.
    Nous pourrons reparler de cela ultérieurement. La préparation d'un rapport et la tenue d'une réunion additionnelle sont deux choses. Je ne vois pas d'objection à ce que nous ayons une autre réunion à ce sujet, mais je dois savoir dans quel contexte le rapport s'inscrit.
    Mme Michelle Rempel: Vous n'avez pas besoin de faire un appel à l'ordre pour cela.
    Oui.
    Excusez-moi, quel était le dernier rapport dont vous parliez?
    Je ne vois pas d'objection à la tenue d'une autre réunion, mais il n'a pas été décidé que ceci devait faire l'objet d'un rapport. Ces séances ne visaient qu'à nous permettre d'aller chercher des renseignements sur la situation...
    Cela signifie que vous êtes contre l'idée de présenter un rapport au gouvernement?
    Oui, pour l'instant, je suis contre.
    Randeep, cela n'est pas exact.
    Cela ne fait aucun sens. Pourquoi nous abstiendrions-nous de faire des recommandations?
    Au départ, quand nous avons voté, nous ne voulions pas de rapport. Nous avons voté contre un rapport.
    C'est la motion dont nous sommes saisis.
    Une voix: C'est une manoeuvre dilatoire.
    Nous avons déjà préparé un rapport.
    Pourquoi faire une étude si elle ne débouche pas sur des recommandations à l'intention du gouvernement?
     J'essaie de ramener le Comité à l'ordre.
    Je remercie la députée de sa motion. Nous l'examinerons à la prochaine réunion.
    La séance est levée.
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