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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 082 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 novembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, la 82e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale est ouverte.
    Avant d'inviter nos témoins à prendre la parole, j'aimerais informer mes collègues que le ministre Goodale sera ici jeudi en huit pour parler du Budget supplémentaire des dépenses (B).
    Pour l'étude de l'utilisation des spectromètres de mobilité ionique par le Service correctionnel du Canada, nos témoins d'aujourd'hui sont Irene Mathias, Anne Cattral, Stacey Hannem, Peggy Fitzpatrick et Gail LeSarge.
    Je n'ai pas d'ordre particulier à suivre pour les interventions. J'ignore si vous voulez un entre-deux ou quelque chose du genre. Nous pourrions peut-être commencer par Mothers Offering Mutual Support.
    L'une d'entre vous va-t-elle parler pour vous deux?
    Très bien.
    Merci beaucoup. Je suis impatient de vous entendre.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis Irene Mathias, membre de MOMS, Mothers Offering Mutual Support. Nous sommes un groupe de soutien d'Ottawa pour les femmes dont les êtres chers sont ou ont été en prison. Le groupe, qui a été formé en 2010, compte aujourd'hui près de 60 membres.
    Nos activités s'articulent sur trois objectifs: appuyer, éduquer et défendre. Nous nous entraidons; nous nous renseignons sur le système de justice et le système correctionnel; et nous travaillons pour le changement au nom de nos êtres chers qui sont en dedans et pour les familles de tous les détenus.
    Bonjour, monsieur le président et membres du Comité.
    Je m'appelle Anne Cattral. Je suis moi aussi membre de Mothers Offering Mutual Support.
    Dans le cadre de notre mandat de défense des droits, si je peux l'appeler ainsi — c'est un mot un peu grandiose pour un groupe informel —, nous avons lancé en 2015-2016 une pétition réclamant un examen de l'utilisation des scanners à ions dans les établissements fédéraux.
    Je suis très nerveuse, alors...
    Ne soyez pas nerveuse.
    C'est une occasion mémorable pour nous. Si personne n'y voit d'inconvénient, je vais lire mes notes. Ce sera peut-être plus facile pour tout le monde.
    Nous sommes un groupe très intimidant.
    Des voix: Oh, oh!
    Vous l'êtes, vraiment, mais tellement sympathique que c'est rassurant.
    En 2015 et 2016, MOMS a lancé une pétition demandant au Service correctionnel du Canada de revoir l'utilisation des spectromètres de mobilité ionique, mieux connus sous le nom de scanner à ions, comme outils de détection des drogues sur les visiteurs à l'entrée des établissements fédéraux. Notre initiative s'inspirait de notre expérience personnelle avec les effets effroyables de l'utilisation de cet appareil au SCC.
    Le SCC a commencé à utiliser le scanner à ions en 1995 comme principal outil dans un système visant à empêcher l'introduction de drogues dans les prisons fédérales. Mais il y a aujourd'hui une nette déconnexion entre la politique du SCC, qui reconnaît l'importance de tisser et de maintenir des liens familiaux et un soutien communautaire pour les détenus, et le maintien en service d'un outil peu fiable qui ne bloque pas les drogues à l'entrée des prisons, mais qui est très efficace pour dissuader les visites familiales. Il a aussi des effets négatifs pour nos êtres chers, quelle que soit la validité des résultats des tests.
    Pour ceux qui ne le sauraient pas, les visiteurs qui passent par ce système sont invités à remettre un objet personnel, comme une clé, une montre, des lunettes ou un article de vêtement, sur lequel est effectué un prélèvement, qui est ensuite placé dans l'ioniseur pour détecter d'éventuelles drogues. Si le résultat est positif, le personnel procède à une « évaluation de la menace et des risques », où un superviseur vient mener une entrevue avec le visiteur et rendre une décision.
    Le visiteur peut se voir accorder une visite, ou être restreint à une visite avec séparation, ou se voir intimer l'ordre de quitter les lieux sur-le-champ. Pour le visiteur qui a fait un long trajet et qui n'a pas vu son être cher depuis longtemps, cette entrevue humiliante risque d'être dévastatrice. Les effets du refus de visite à un parent peuvent être profondément troublants pour l'enfant; c'est arrivé à mon petit-fils.
    Selon la politique du SCC, les résultats obtenus du scanner à ions ne sont qu'un facteur parmi d'autres dans la décision concernant les sanctions à imposer suite au résultat positif, mais cette affirmation du SCC est mal éclairée et inexacte. L'information recueillie par le scanner à ions indique seulement qu'une personne comme moi a été en contact avec une drogue ou une substance illicite qui donne un faux positif dans le scanner à ions, ce qui peut venir du simple fait d'avoir été en contact avec des objets ou des surfaces contaminés. On ne fait aucun autre effort pour confirmer la présence ou l'absence de matières interdites. Inutile de demander une fouille, qui sera refusée, de toute façon. Les résultats obtenus du scanner à ions ne servent à rien, ou presque, pour évaluer si un visiteur essaie ou pas d'introduire clandestinement des matières interdites dans l'établissement. C'est tout simplement impossible à savoir.
    Les détails du test sont versés au dossier du détenu. Des tests positifs répétés ont des conséquences sur la sévérité des sanctions imposées au visiteur par la suite; les sanctions sont de plus en plus sévères. Ce dossier a aussi une incidence négative sur le passage du détenu par le système correctionnel.
    Or, le SCC reconnaît d'emblée que le scanner à ions donne souvent de faux positifs. Ces faux positifs surviennent en partie parce que le scanner à ions est un instrument extrêmement sensible de détection de drogues, allant jusqu'au niveau du nanogramme, et c'est là une si petite particule de résidu sur les vêtements qu'on ignore qu'on peut être contaminé par des traces de substances prohibées par le contact avec des articles bien banals, comme de l'argent ou des cartes de crédit ou même par certains produits de nettoyage domestiques, comme les lingettes Clorox ou les produits cosmétiques contenant du parfum — bref, toutes ces choses peuvent déclencher le scanner à ions.
    La non-fiabilité et l'inefficacité des scanners à ions ont été observées ailleurs qu'au Canada.

  (0850)  

    Aux États-Unis, la New York Civil Liberties Union a indiqué en 2004 qu'elle avait reçu de nombreuses plaintes de « personnes mystifiées par les résultats de l'analyse et désemparées par l'impossibilité de prouver leur innocence ». C'est cela qu'il faut faire: prouver son innocence. L'union a dit que le scanner à ions « privait injustement, de façon inappropriée et inutilement des innocents de leur droit de visite ».
    Les conséquences du manque de fiabilité du scanner à ions sont profondes non seulement pour les détenus, mais aussi pour leurs proches. Pour nous, le risque d'un faux positif et de ses conséquences ajoute un niveau de stress lorsque nous visitons nos êtres chers. Un grand nombre de personnes prennent des précautions extraordinaires, comme laver les pièces de monnaie, faire le plein d'essence la veille du déplacement, ne pas toucher aux poignées de porte et ne pas s'arrêter, une fois partis de la maison, avant d'arriver à l'établissement, de manière à limiter le risque d'un faux positif au scanner à ions. De nombreux autres amis et proches sont dissuadés de toute visite.
    Le scanner à ions est un obstacle qui dissuade les détenus d'accéder au soutien familial, qui est pourtant essentiel pour qu'ils se reprennent en main et rentrent chez eux un jour. Cela peut aussi jouer contre eux, parce que les résultats obtenus par les visiteurs sont versés à leur dossier, et peuvent jouer contre eux dans leurs demandes de transfert, de réduction du niveau de sécurité, ou de libération conditionnelle.
    Les effets indésirables du scanner à ions ne sont pas compensés par les avantages qu'il procure. Une recension, même superficielle, des études récentes des médias par des organismes comme la Coalition canadienne des politiques sur les drogues et des rapports du Bureau de l'enquêteur correctionnel révèlent que les drogues demeurent endémiques dans nos prisons, où les taux d'infection au VIH et à l'hépatite C résultant dans une large mesure du partage des seringues sont beaucoup plus élevés que dans la population générale.
    L'utilisation du scanner à ions est tout aussi inefficace pour empêcher l'introduction de drogues dans les prisons, parce que les visiteurs sont les seules personnes soumises à ce processus de détection discriminatoire. Un pourcentage nettement plus élevé de ceux qui entrent dans ces établissements, comme le personnel du SCC, les entrepreneurs en construction et les travailleurs d'entretien, ne sont pas testés.
    Nous tenons à remercier les membres du Comité de nous permettre de témoigner dans ce très important dossier. Comme je l'ai dit, c'est une occasion mémorable pour nous. Nous serons heureuses de répondre à vos questions.

  (0855)  

    Merci.
    Madame Hannem.
    Je m'appelle Stacey Hannem. Je suis professeure agrégée en criminologie au campus Brantford de l'Université Wilfrid Laurier.
    Les scanners à ions ont occupé tout l'espace dans mes réflexions, mes écrits et mon discours depuis 2005, pendant ma recherche doctorale. Ma recherche doctorale s'articulait sur les difficultés confrontant les familles dont un être cher est incarcéré. Je m'attendais beaucoup à des problèmes de stigmatisation, des problèmes financiers et des troubles émotifs. Mais je ne m'attendais certes pas de découvrir que nos établissements correctionnels étaient un facteur aussi draconien d'aggravation de ces problèmes pour les familles.
    Ma recherche a porté sur la technologie IONSCAN pour la première fois en 2005. En 2015, j'ai travaillé avec le Regroupement canadien d'aide aux familles des détenus pour un sondage en ligne et des entrevues de suivi auprès des familles de personnes incarcérées au Canada au sujet de leurs problèmes de santé mentale. Encore une fois, 10 ans plus tard, j'ai vu le scanner à ions comme enjeu toujours important dans mes données.
    Le problème des faux positifs et les questions soulevées par les familles m'ont amenée à étudier plus en détail la technologie elle-même. Je ne suis pas une scientifique — j'ai un doctorat en sociologie —, mais j'ai consacré pas mal de temps et d'efforts à la littérature scientifique et à la consultation de collègues en physique et en chimie afin de mieux comprendre la question et d'acquérir une compréhension de profane de la technologie. C'est ce que j'aimerais apporter au Comité aujourd'hui: une meilleure compréhension du fonctionnement de la technologie et des raisons pour lesquelles les faux positifs sont toujours possibles.
    La science qui sous-tend la technologie d'IONSCAN date des années 1970 et n'a pas été raffinée pour la peine depuis. Elle se voulait au départ un moyen de détecter des traces d'explosifs. Les machines plus récentes ont depuis été étalonnées pour la détection de drogues. Tous les membres de votre comité connaissent la machine IONSCAN. C'est la machine qu'on utilise dans les aéroports du pays et à l'étranger pour détecter les explosifs, sauf que, dans les prisons canadiennes, elles servent à dépister les drogues.
    Le principe de la spectrométrie de mobilité ionique est simple. On prélève un échantillon, comme Anne l'a expliqué, sur une fermeture éclair, une bague, des lunettes, et les particules à l'état de trace qui sont prélevées sont ensuite insérées dans la machine et ionisées: elles sont soumises à une source radioactive qui crée une charge positive ou négative d'ions. Le processus d'ionisation décompose cette substance en toutes ses particules constituantes. Les ions qui se trouvent dans la molécule sont de taille et de poids différents, si vous vous rappelez votre chimie d'école secondaire, et les particules ionisées se déplacent toutes à des vitesses différentes.
    Les particules ionisées sont insérées dans la machine. Elles passent par ce qu'on appelle un « tube de dérive ». C'est un tube court muni d'une plaque électromagnétique à son extrémité. La machine de spectrométrie de mobilité ionique, ou SMI, mesure le temps, à la nanoseconde près, que mettent les particules pour arriver à l'extrémité du tube de dérive. Le tube de dérive contient un gaz inerte conçu pour créer des frictions et entrer en collision avec les particules. Toutes les diverses grosseurs de particules arrivent dans le tube de dérive à différents instants, selon leur taille et leur poids.
    Le dispositif mesure tout cela et génère un spectre de dérive qui ressemble à un petit graphique montrant les temps de dérive de tous les ions composites. Il compare ce graphique généré aux spectres de dérive connus des substances qu'il recherche — en l'occurrence, les drogues illicites. La machine SMI déclenche une alarme si les temps de dérive du spectre de mobilité ionique de l'échantillon correspondent à l'une des substances de sa base de données avec un seuil suffisant.
    C'est ainsi que cela fonctionne. Le problème des faux positifs, bien sûr, est la raison pour laquelle le Parlement s'intéresse à tout cela. Les faux positifs ont été mis en évidence en 2008 aux États-Unis, lorsque le Federal Bureau of Prisons a suspendu l'utilisation des scanners à ions dans toutes ses prisons. Une poursuite avait allégué que des proches d'un détenu s'étaient vu refuser injustement des visites à cause de faux positifs. Lorsqu'il a repris l'utilisation de l'IONSCAN en 2009, le Federal Bureau of Prisons n'a plus autorisé la machine pour le contrôle des visiteurs, mais seulement pour le courrier, les aires de travail et les effets personnels des détenus.
    Un rapport de 2011 du Service correctionnel du Canada par Johnson et Dastouri a révélé que les dispositifs sont, et je cite, « trop sensibles et présentent des limites quant à leur capacité de détecter certains types de drogues ». L'utilisation de l'IONSCAN pour repérer les personnes soupçonnées de trafic de drogues est compliquée par le fait que la technologie elle-même présente plusieurs lacunes connues — bien que souvent non reconnues.

  (0900)  

    Sa première lacune est que, au contraire des empreintes digitales, les spectres de mobilité ionique qui sont générés et lus par les machines IONSCAN ne sont pas des identifiants exclusifs; c'est-à-dire que les spectres de mobilité ionique de composés chimiques étroitement reliés ou similaires peuvent se ressembler tellement que la technologie ne peut les différencier. Selon le brevet initial de Smiths Detection pour l'IONSCAN, la ranitidine, un antiacide commun souvent appelé Zantac, donne un résultat positif pour la cocaïne. La seule façon de reconnaître qu'il s'agit d'un faux positif est de faire un second test en mode d'ions négatifs: la ranitidine émet alors un son, mais pas la cocaïne.
    Smiths Detection dit dans son brevet qu'on devrait utiliser deux machines, la première en mode d'ions positifs et l'autre en mode d'ions négatifs, pour contrôler ce résultat. À ma connaissance, premièrement, le SCC ne fonctionne pas ainsi et, deuxièmement, c'est une correction des plus simplistes parce qu'elle suppose que la ranitidine est la seule autre substance qui donnerait un faux positif pour la cocaïne.
    On sait que plusieurs médicaments pharmaceutiques et autres substances légales déclenchent l'alarme dans les machines IONSCAN parce que leurs compositions chimiques ressemblent à des drogues illicites ou qu'elles partagent avec elles un même composé chimique. Le personnel correctionnel reconnaît avoir une courte liste de médicaments ou d'autres substances dont on sait qu'elles déclenchent des alarmes: les inhalateurs pour l'asthme, la nitroglycérine pour les problèmes cardiaques et l'Adderall pour les troubles d'hyperactivité avec déficit de l'attention déclencheront tous une alarme en tant que méthamphétamines; les crèmes antifongiques pour traiter le pied d'athlète ou le muguet déclencheront l'alarme en tant qu'opiacés, tout comme les graines de pavot sur les bagels et les autres produits de boulangerie; et les lingettes au chlore pour bébés et certains parfums et lotions déclenchent facilement des alarmes en tant que divers types de drogues. Les recherches menées par Dussy et al. en 2008 ont révélé que plusieurs types de détergents déclencheront l'alarme en tant qu'héroïne.
    C'est le plus grand problème: ce ne sont pas des marqueurs d'identification exclusifs. Par conséquent, les risques de faux positifs sont très élevés.
    En second lieu, comme Anne l'a mentionné, il y a aussi un risque élevé de contamination croisée et de contact accidentel avec des traces de drogues.
    Parfois, l'alarme n'est pas chimiquement fausse. Ce que la machine détecte est en fait une très petite particule de drogue illicite, ce qui ne signifie pas que la personne a eu un contact délibéré avec cette drogue, ni que la drogue est présente en quantités suffisantes pour justifier quelque inquiétude au sujet de la visite d'un proche. De nombreux billets de banque portent des microgrammes de drogues illicites — la cocaïne est la plus courante — soit beaucoup plus que le seuil requis pour déclencher l'IONSCAN. Certaines études ont révélé que jusqu'à 90 % des billets de banque soumis à un test de détection de cocaïne donnent un résultat positif. La manipulation d'argent, comme Anne l'a dit, peut être à l'origine d'une alarme.
    Une troisième question, bien sûr, est l'hypothèse selon laquelle les personnes qui présentent un résultat positif essaient de faire du trafic, alors que rien ne permet de le croire.
    De même, l'IONSCAN est sujet à la possibilité d'erreur humaine de l'opérateur. Il doit être nettoyé à fond après une alarme positive. J'ai été témoin du problème dans un aéroport tout récemment. Le fait de ne pas nettoyer la machine après un test positif donnera effectivement des tests positifs par la suite. Si une alarme est déclenchée au SCC, l'opérateur est tenu de changer de gants, de nettoyer les surfaces de comptoir et de tester des prélèvements propres jusqu'à ce que la machine ne déclenche plus d'alarme, sauf qu'en cas d'affluence dans la salle de visite, il n'en est pas toujours ainsi.
    En 2006, dans un audit interne de ses activités d'interception de drogues, le SCC a noté que 5 des 11 établissements audités ne respectaient pas la politique et les procédures relatives aux dispositifs de spectrométrie de mobilité ionique. L'erreur humaine est un problème.
    Un dernier problème, peu probable celui-là, est que l'opérateur peut déclencher l'alarme à volonté. L'appareil doit être étalonné périodiquement avec exposition aux substances concernées, ce qui signifie qu'il y a là des spécimens de drogues pour l'étalonnage. Dans son mémoire de 2016, Diane Schoemperlen, auteure canadienne de renom, rapporte que, lors de sa dernière visite à son ex-partenaire dans un établissement à sécurité moyenne, l'agent correctionnel responsable du scanner à ions a voulu lui faire une blague en fermant délibérément la machine. Voilà qui soulève des questions sur la façon dont l'appareil pourrait servir à cibler des personnes sur qui planent déjà des soupçons.
    Le SCC n'a pas de documentation sur la fiabilité de la machine. Il s'appuie sur l'affirmation du fabricant selon laquelle le taux de faux positifs est inférieur à 0,1 %, mais il continue de noter des cas de faux positifs et il en est très conscient.

  (0905)  

    J'ai plus d'information à donner sur la fiabilité, mais je vous ferai un plaisir de le faire pendant la période des questions.
    Merci, madame Hannem.
    Madame Peggy Fitzpatrick.
    Encore une fois, merci beaucoup de m'avoir invitée. C'est un honneur pour moi d'être ici. J'espère que je pourrai vous transmettre certaines perceptions et vous aider à comprendre l'enjeu.
    Mon propos n'est probablement pas aussi empreint de déférence que celui des témoins précédents. J'ai travaillé six ans dans le système à titre d'agent de libération conditionnelle. En tant qu'enseignante, j'étais directrice d'une école là-bas. Je répondrai à vos questions à ce sujet plus tard.
    J'ai fait beaucoup de recherche là-dessus. J'ai vu pas mal de tout ce qu'ont écrit Stacey, Anne et d'autres personnes au Canada et aux États-Unis. Pour moi, l'enjeu est très proche d'une violation de la Charte, et il faut y voir.
    Je demande un moratoire immédiat sur l'utilisation du dispositif IMS dans tous les pénitenciers fédéraux pour le contrôle des visiteurs des détenus, en attendant la réalisation d'une étude indépendante, par le Parlement ou par un organisme externe, pour confirmer l'efficacité de ce dispositif comme outil de dépistage des drogues dans les établissements.
    Je demande au Parlement d'ordonner au commissaire du Service correctionnel de limiter immédiatement cette utilisation, au Parlement d'étudier la question et de rétablir le statut de visiteur de toute personne qui a été injustement, sans preuve, privée de ses droits de visite jusqu'à ce qu'il soit établi qu'elle mérite d'en être privée.
    Je parle pour des milliers de Canadiens qui ont des êtres chers ou des amis incarcérés dans des établissements fédéraux au pays. Chaque jour, jusqu'à 12 000 personnes, plus ou moins, sont détenues dans une prison fédérale. Les visiteurs, les familles et des aidants de ces détenus sont des personnes respectueuses des lois. Nous avons fait l'objet d'un contrôle juridique et avons obtenu l'autorisation de visiter les établissements. Nous connaissons la politique du SCC concernant les visiteurs des détenus. Nous sommes insultés par l'attitude condescendante et désobligeante du SCC à notre endroit lorsque nous exprimons notre indignation concernant l'utilisation abusive de cet appareil en notre présence.
    J'ai des lettres du ministre et du Service correctionnel qui ne font que réitérer la politique plutôt que de s'attaquer aux problèmes que nous leur présentons. Comme je l'ai dit, j'ai travaillé dans le système pendant six ans, et j'ai été témoin des effets du scanner à ions sur des proches innocents qui ont été refoulés ou dont les visites ont été restreintes même s'ils avaient demandé une fouille pour prouver leur innocence. J'ai été témoin des effets dévastateurs que cela a eu sur les détenus privés de la visite depuis longtemps attendue de leur mère, de leur épouse ou de leur enfant, tout cela malgré le fait que le visiteur n'a rien fait de répréhensible, si ce n'est un résultat positif — un seul — sur le scanner à ions.
    Je parle pour de nombreuses personnes qui ont contesté les décisions injustes prises sur la foi des résultats du scanner à ions, et qui en sont revenues désillusionnées par l'attitude grave du gouvernement et des organismes qui n'ont d'autres soucis que d'appliquer et de donner l'apparence d'appliquer la loi à cet égard. Ils font face à des mesures de représailles lorsqu'ils protestent; c'est documenté par l'expérience de ceux qui osent se plaindre. Ce comportement sous le nez même des responsables de la protection de l'intégrité de notre système correctionnel et de notre système de justice pénale doit cesser si l'on veut que les Canadiens aient confiance dans l'administration de la justice au Canada.
    Maintenant, pour ce qui est des points sur lesquels nous sommes d'accord avec le Service correctionnel, il y en a beaucoup. Les drogues et les autres matières interdites n'ont pas leur place dans nos établissements fédéraux. Ces choses-là causent des dommages incroyables dans nos prisons parmi les détenus, le personnel et les visiteurs dans nos prisons. Nous ne voulons pas de drogues dans nos prisons. Quiconque entre dans un pénitencier risque d'y introduire des matières interdites. Chacun d'entre nous entre en contact par accident à un moment ou à un autre avec des quantités seuil de drogues en manipulant de l'argent, en faisant un plein d'essence, etc., comme nous l'avons entendu ici. Nous pouvons la prendre n'importe où. Si vous mettiez la main dans votre poche tout de suite et touchiez la monnaie qui s'y trouve, vous auriez probablement assez de cocaïne sur les mains pour déclencher une alarme positive sur un scanner à ions.

  (0910)  

    De nombreuses substances illégales possèdent les mêmes propriétés ioniques que les substances illégales. Stacey Hannem en a déjà parlé. Le scanner à ions autorisé par la Directive 566-8-1 du commissaire est un appareil sérieusement déficient, comme l'a reconnu le SCC, en ce sens qu'il donne un nombre excessif de faux positifs.
    Les scanners à ions sont mal entretenus, comme nous l'avons déjà dit. Bien souvent, ils sont mal étalonnés. Le personnel ne sait pas s'en servir; souvent ils ne sont pas nettoyés, ce qui donne d'autres faux positifs. Par exemple, si la personne qui a été testée avant moi avait un résultat positif, je pourrais avoir le même résultat aussi. Cela n'est heureusement jamais arrivé, mais si le nettoyage est mal fait, j'ai toutes les chances que cela m'arrive.
    Les drogues entrent dans nos prisons à un rythme des plus alarmants, malgré les procédures en place. Le personnel, les entrepreneurs, les invités et d'autres personnes ne sont pas soumis au scanner. Le SCC va resserrer la surveillance de ces personnes qui risquent d'introduire des drogues dans nos établissements.
    Entrer dans une prison est un privilège et non pas un droit. La loi et les politiques du SCC reconnaissent que les visiteurs jouent un rôle de premier plan dans la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants. C'est documenté dans les études que j'ai ici. Les détenus qui ont des visites réussissent beaucoup mieux après leur remise en liberté et ont plus de chances d'obtenir une libération conditionnelle. Ceux qui sont là jusqu'à la libération d'office n'ont souvent pas de visiteurs. Le SCC considère que les visites sont une composante importante de la réadaptation des délinquants, mais les politiques et les pratiques en place vont directement à l'encontre de ce qu'il dit sur papier.
    Je voulais parler d'une autre question sur laquelle le SCC est muet.
    Comme nous l'avons dit, seuls les visiteurs sont soumis au scanner à ions. La recherche que j'ai menée au Canada et aux États-Unis révèle qu'environ 10 % — peut-être moins, peut-être un peu plus — de toutes les personnes qui visitent une prison n'importe quel jour sont soumis au scanner, si bien que 90 % ne le sont pas, et que les drogues continuent d'entrer à un rythme alarmant.
    Je vais devoir sauter un long bout parce que je manque de temps. Je vais donc peut-être aller directement à la fin.
    Pour moi les scanners à ions ne trouvent pas de drogues sur les personnes. Ils indiquent tout simplement si la personne est entrée en contact avec des drogues — peut-être. Peut-être que oui, peut-être que non. Le résultat pourrait être un faux positif. Il ne se fait pas de fouilles. On est tenu de vous fouiller, mais on ne le fait pas, si bien que des doutes planent sur la personne. Vous pourriez y aller 100 fois et ne jamais présenter de résultat positif. Vous serez bien accueilli et on vous traitera bien et tout le reste, mais dès que vous aurez un résultat positif, toute la dynamique entre vous et le personnel changera. Vous serez sous un nuage de soupçon, même si on ne vous a jamais fouillé pour trouver quoi que ce soit et qu'il n'y a pas de preuve que vous introduisez des matières interdites.
    Ils devraient utiliser un scanner corporel plutôt qu'un scanner à ions pour découvrir des matières interdites. Si tout ce processus d'interdiction vise les matières interdites plutôt que l'abus de pouvoir, peut-être devrait-il utiliser un moyen capable de découvrir les matières illégales. L'interception des drogues consiste à intercepter les matières interdites, et le scanner à ions ne fait rien de cela.

  (0915)  

    Je conclurai en disant qu'en ce moment même, il y a d'innombrables innocents visiteurs respectueux dans les pénitenciers canadiens qui risquent d'être bloqués en l'absence d'acte répréhensible. Un grand nombre auront parcouru de grandes distances, à grands frais, pour passer du temps avec leur être cher et seront passibles de sanctions sur la foi d'une seule lecture de scanner à ions. Les efforts de réinsertion des détenus touchés seront nuls et certains seront très perturbés après avoir été privés de l'occasion de rendre visite à leurs êtres chers. Il existe des preuves documentées que des détenus se sont enlevé la vie parce qu'on ne les avait pas laissés voir leur mère.
    Quoi qu'il en soit, j'ai terminé.
    Merci, madame Fitzpatrick.
    Je ne veux pas brimer les efforts des témoins. Ils sont manifestement non seulement bien motivés, mais aussi bien documentés, et le Comité a tout à gagner à les entendre, mais je dois maintenir un certain ordre. Habituellement, j'ai plus de problèmes avec les députés qu'avec les témoins.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Notre dernier témoin est Mme LeSarge.
    Allez-y, je vous prie.
    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité.
    Je suis Gail LeSarge. D'entrée de jeu, je dirai que je suis très heureuse que le Comité ait accepté de mener cette étude, et très heureuse de l'occasion de témoigner aujourd'hui devant lui.
     Je veux vous dire un mot de mon expérience personnelle. Pour commencer, je dirai que je visite souvent un détenu dans un établissement fédéral et que j'ai eu ma part d'expériences négatives avec le scanner à ions. En décembre dernier, j'ai adressé une lettre au ministre Goodale pour me plaindre de mes expériences. Environ un mois et demi plus tard, j'ai reçu une lettre d'un représentant du SCC. C'était une courte lettre qui ne répondait pas vraiment à ce que j'avais écrit. Essentiellement, elle disait: d'abord, les drogues sont un gros problème en prison; deuxièmement, les détenus, le personnel et les visiteurs sont tous fouillés et contrôlés, dans un effort de prévention de l'introduction de drogues en prison; troisièmement, le scanner à ions est considéré comme un outil fiable dans cette lutte; et quatrièmement, le scanner à ions n'est qu'un élément de toute l'évaluation du risque. C'est essentiellement ce qu'elle disait, et je voudrais vous parler de certaines de ces choses-là.
    En premier lieu, lorsqu'il s'agit d'assurer la sûreté et la sécurité dans les établissements fédéraux, je ne saurais être plus d'accord sur les objectifs du SCC. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit ici. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour rendre les prisons aussi sûres que possible, notamment pour bloquer l'entrée des matières interdites. L'objectif est important, certes. Les drogues peuvent causer toute une gamme de problèmes graves. Anne en a parlé. Ces problèmes peuvent comprendre la violence et la maladie et nous convenons tous que les drogues ne sont pas une bonne chose en prison. Cela n'est pas contesté.
    Nous avons des politiques en place pour y remédier. Le SCC fera remarquer que les fouilles de visiteurs, de détenus et de membres du personnel font toutes partie de tout cela, mais, pour bien préciser les choses, les membres du personnel ne sont pas soumis à la même sorte de fouilles que les visiteurs, mais pas du tout. De fait, j'ai travaillé au SCC pendant neuf ans, ce qui signifie que je suis entrée dans l'établissement probablement plus de 2 000 fois. Sachez que pas une seule fois je n'ai été soumise au scanner à ions ni reniflée par un chien antidrogue. Ils diront que les fouilles sont pour tout le monde. Mais le même type de fouilles n'est pas pour tout le monde.
    Si le SCC prend vraiment au sérieux la sûreté et la sécurité de ses prisons, comme il le prétend, et si le dispositif IMS est une arme si efficace dans la guerre contre les drogues, pourquoi ne l'utilise-t-il, comme l'a dit Peggy, que sur un faible pourcentage des personnes qui passent chaque jour par la porte d'entrée? Cela ne semble pas très logique. Toute personne qui entre dans l'établissement pourrait être porteuse de matières interdites.
    Le SCC affirme que le scanner à ions est considéré comme un outil efficace de détection des drogues. C'est difficile à comprendre quand l'appareil ne fait absolument rien pour démontrer qu'une personne transporte des matières interdites. Il peut seulement dire qu'il y a peut-être eu contact avec une substance illégale, ce qui n'est pas du tout la même chose. Comme les autres témoins l'ont dit: d'abord, les machines ne sont pas toujours bien maniées; deuxièmement, d'autres substances que des drogues peuvent déclencher l'alarme; et troisièmement, même s'il y a des drogues illégales, elles peuvent provenir de n'importe où. Compte tenu de ces facteurs, il est absolument clair que le scanner à ions n'est pas un outil fiable, à mon avis, dans la lutte contre les drogues en prison.
    Personnellement, je n'ai jamais eu la moindre expérience des drogues dans ma vie. Je ne me tiens pas avec les personnes qui consomment. Je n'utilise même pas de médicaments d'ordonnance. J'ai déclenché cette machine à quelques reprises. À mon avis, il y a quelque chose de sérieusement déficient dans un outil de fouilles non intrusif qui génère si souvent le résultat de punir des innocents comme moi.
    Quand on regarde comment la sécurité aéroportuaire utilise cela, il semble que c'est la façon de faire. Je crois qu'il est juste de dire que si le scanner détecte des particules d'explosif à l'aéroport, cela entraîne une fouille. C'est ainsi qu'on fait le suivi d'une alarme de détecteur à ions à l'aéroport — pas une fouille. La fouille a pour objet d'établir clairement la présence ou l'absence de matières interdites ou d'explosifs.

  (0920)  

    Si on trouve quelque chose, oui, il y a des conséquences. Le voyageur ne pourra s'embarquer. Si l'on ne trouve rien, il poursuit sa route. Il n'y a pas de dossier négatif pas de conséquences. Imaginez si les voyageurs qui prennent des vols importants pour des vacances ou pour leurs affaires se voient interdire l'embarquement sur la foi du seuil IONSCAN, sans autre fouille pour déterminer la présence d'explosifs. Supposons que les responsables de la sécurité disent que les explosifs sont un problème très grave et qu'ils considèrent que l'outil est fiable, et que c'est leur seule réponse. Pourrez-vous imaginer ce que le public aurait à dire à ce sujet. Je pense que l'abus serait corrigé très rapidement, mais, d'une façon ou d'une autre, nous et nos êtres chers en prison sommes perçus comme sacrifiables.
    Le scanner à ions date de nombreuses années. D'après ce que j'ai lu, il y a peu de preuves tangibles de son efficacité. Il y a encore beaucoup de drogues qui entrent, et je ne connais pas de cas où un résultat positif a mené à une saisie de drogues, parce qu'on ne va pas jusque-là. On ne vous fouille pas. On se contente du scanner à ions, mais pourtant, la victimisation de visiteurs innocents et des détenus qu'ils visitent est très réelle, et elle se poursuit année après année.
    Dans le cas de l'évaluation des risques, la politique actuelle est que le résultat de la détection des ions n'est pas utilisé en isolation et est toujours combiné avec d'autres renseignements, mais la réalité est que les visites peuvent se poursuivre sans problème tant que le scanner à ions ne donne pas de résultat positif. Lorsque l'alarme de la machine se déclenche, on procède à une évaluation des risques de menaces, qui consiste à vous demander pourquoi la machine a déclenché l'alarme. Vous dites que vous n'en avez aucune idée et que le chien dépisteur n'a rien détecté, et ils se contentent de vous poser des questions et d'examiner les antécédents des tests de détection à ions. Mais il y aura des sanctions. Est-ce une évaluation des risques avec toutes sortes d'autres éléments qui sont envisagés avant les sanctions. Cela ne semble pas être le cas.
    Ensuite, comme Anne l'a dit, il pourrait y avoir différentes options. On pourrait vous renvoyer. On pourrait vous offrir une visite fermée. Puis, un peu plus tard, il y a une autre étape, celle du comité d'examen des visites. Le comité d'examen des visites peut imposer d'autres sanctions. Si vous avez des visites familiales privées, elles sont invariablement suspendues. Je n'ai jamais entendu parler d'une personne qui ne se soit pas vu imposer de sanctions après un résultat positif sur un scanner à ions — jamais. Il y en aura toujours des sanctions.
    À ces deux stades, le personnel a des possibilités illimitées de choisir les éléments d'information qu'il veut pour créer une évaluation très subjective des risques.
    Je vois que je ferais mieux d'accélérer, à cause du temps qui passe, mais voilà ce qu'il en est. Cette évaluation du risque n'est pas ce qu'ils disent. Elle n'est pas faite équitablement. Il faut absolument changer la politique si le SCC doit garder le scanner.
    Je veux simplement ajouter que lorsqu'on a un être cher en prison, on ne saurait exagérer l'importance de ces visites. C'est le meilleur moyen dont vous disposez pour maintenir vos liens. Vos heures de visite sont très spéciales. Elles sont tellement bénéfiques pour ces perspectives de réinsertion. Elles sont comme un lien qui le rattache à la collectivité, et lui donne espoir pour l'avenir et la certitude qu'on se soucie de lui. À mon avis, détruire ces liens en l'absence de preuve convaincante du risque est tout à fait inhumain.
    L'an dernier, mon partenaire et moi devions avoir une visite familiale privée au temps des Fêtes. Nous attendions cela depuis des mois, car les maisons de VFP avaient été fermées pour des rénovations. Alors, à cause du scanner à ions, la visite a été annulée un jour avant qu'elle commence. C'était dévastateur. C'était vraiment difficile.
    Comment le Canadien moyen se sentirait-il si ce temps très spécial a passé avec un être cher lui était enlevé sans la moindre faute de sa part? Des milliers de visiteurs et de détenus au Canada sont victimes de ce traitement injuste. À mon avis, cela ne devrait pas continuer parce qu'il est difficile de vérifier que l'appareil est utilisé de façon équitable et parce que son efficacité est difficile à déterminer. À mon avis, l'utilisation de l'appareil IMS devrait cesser. Chaque jour où le scanner est utilisé, des Canadiens innocents subissent un préjudice.

  (0925)  

    Merci à toutes pour votre témoignage très éloquent.
    Nous avons terminé la partie de l'audience consacrée aux témoins et nous allons maintenant passer aux questions et réponses. Nous avons une coutume particulière ici, à savoir que les membres s'adressent à la présidence et que les témoins répondent par l'entremise de la présidence. Je ne sais pas si c'est vraiment coulé dans le béton, mais nous allons la respecter.
    Nous commençons par M. Picard.

[Français]

     Monsieur Picard, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Avant tout, j'aimerais vous dire, mesdames Cattral et Mathias, que votre exposé était à la hauteur de tous ceux des experts que nous avons reçus. Ne voyez pas nos questions comme un acte de défiance, mais plutôt comme une façon d'accroître nos connaissances sur le sujet. Nous avons besoin de votre aide et de votre expérience. En effet, vous connaissez ce domaine franchement mieux que moi. Nous avons donc besoin de vos lumières dans le cadre de cette étude. Malgré que certaines questions soient un peu difficiles, l'intention est positive. Il s'agit d'acquérir une meilleure connaissance du problème.
    Madame Hannem, avez-vous pu déterminer si l'application de cette mesure avait un impact sur des aspects autres que la sécurité, par exemple des aspects ethniques ou culturels?
     Est-ce que cela pourrait être une façon de profiler aussi bien les visiteurs que les personnes incarcérées?

[Traduction]

    Je n'ai aucun document qui traite de profilage racial ou ethnique par le détecteur ionique, mais je peux vous dire qu'on l'utilise différemment dans le cas des visiteurs à titre personnel de détenus, par opposition aux visiteurs à titre professionnel. J'ai passé du temps dans les parloirs de plusieurs prisons comme bénévole pour le Regroupement canadien d'aide aux familles des détenu(e)s et je n'ai jamais été soumise au détecteur ionique.

  (0930)  

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    J'ai regardé une jeune femme avec un bébé entrer dans la prison devant moi. Elle a été soumise au détecteur ionique, tout comme les articles appartenant au bébé.
    Je ne dispose pas de suffisamment de données ou de preuves pour laisser entendre qu'on en ferait une utilisation discriminatoire en fonction de l'origine ethnique.
    Ce qui est discriminatoire lorsque le visiteur d'un détenu se présente, c'est que le personnel est souvent au courant de l'infraction commise par le détenu, disons qu'il est incarcéré à cause d'une infraction liée à la drogue, de ce que je comprends — et selon les renseignements que j'ai recueillis auprès de personnes à qui j'ai parlé —, c'est que le soupçon est plus élevé et que les membres de la famille sont plus susceptibles de faire l'objet d'un traitement différent si le détecteur ionique est déclenché.

[Français]

    Mesdames Cattral et Mathias, vous avez réagi de façon positive lorsque Mme Fitzpatrick a dit qu'il était hors de question d'accepter des drogues et des stupéfiants dans le milieu carcéral et que ce ne serait jamais acceptable. Comme vous avez souri, j'en ai déduit que vous étiez favorables aux propos de Mme Fitzpatrick. Vous voyez que la situation semble alarmante, et c'est également l'avis de Mme LeSarge, je crois. On tient compte du besoin de sécurité autant des personnes incarcérées que des employés et des visiteurs.
    En vous basant sur les recherches et le travail que fait votre association, pourriez-vous nous recommander des instruments moins intrusifs, qui permettraient de faire progresser la vérification en vue d'assurer la sécurité tout en évitant de priver les personnes d'une visite pour de fausses raisons?
     Comme nous sommes d'avis que les visites font partie d'un système de réhabilitation, nous aimerions savoir comment doser notre intervention.

[Traduction]

    Eh bien, nous en avons beaucoup parlé. J'aimerais préciser que la politique de SCC met la priorité sur la sécurité du personnel, des détenus et des visiteurs. Je peux vous dire que les détenus diront que les sentiments de colère, etc., qu'ils ressentent après l'annulation d'une visite vont à l'encontre de la sécurité, parce qu'ils sont tellement frustrés et en colère qu'ils ramènent ces sentiments avec eux.
    Ce dont j'ai parlé — en fait, certains prisonniers ont eu cette idée —, c'est un scanner corporel, que Mme Fitzpatrick a mentionné, je crois. Reconnaissant le fait que les recherches ont été réalisées par Santé Canada pour ce qui est de la sûreté de ces appareils ou machines, je crois que SCC a parlé de mettre en place des scanners corporels, semblables à ceux qui sont déjà utilisés dans certains établissements provinciaux. Maintenant, les scanners corporels en ce qui concerne les visiteurs soulèvent des questions d'ordre religieux et de vie privée.
    Ce que les prisonniers à l'établissement où mon fils est incarcéré ont eu comme suggestion, c'est de contrôler les prisonniers lorsqu'ils quittent l'aire de visite, parce que pour qu'un visiteur entre de la contrebande dans l'établissement et la passe au prisonnier, il doit y avoir contact. Je dois pouvoir la remettre à un prisonnier, qui lui doit la cacher pour pouvoir la ramener dans sa rangée. S'il est contrôlé à la sortie des visites, on trouvera alors toute contrebande qui lui aura été remise. Si un visiteur avait réussi à déjouer le détecteur ionique, le chien, l'appareil de radiographie ou le détecteur de métal et de la remettre au prisonnier, on la trouverait s'ils étaient contrôlés à la sortie.

[Français]

    Merci. Je vous interromps ici. Il arrive que nous devions interrompre les gens parce que nous avons très peu de temps.
    Ma question s'adresse aux deux autres témoins, Mmes Fitzpatrick et LeSarge.
    Vous avez fait partie du système et vous faites le constat que la technologie ne fonctionne pas. De toute évidence, beaucoup de drogues sont introduites dans les pénitenciers et elles entrent par la porte avant, comme vous l'avez signalé.
    Selon vous, de quelle façon la drogue entre-t-elle dans ces établissements? Depuis le temps que ce problème existe, a-t-on déjà fait des recommandations pour contrer l'entrée illicite de drogues?

  (0935)  

[Traduction]

    Rapidement, s'il vous plaît.
    Je n'ai jamais vu de membres du personnel faire entrer des drogues, par exemple, mais lorsque 10 % ou moins des gens qui entrent sont contrôlés au scanner et que 90 % ne le sont pas, puis que plus de 90 % des personnes qui entrent dans un établissement tous les jours sont des membres du personnel, des entrepreneurs ou des personnes qui travaillent pour l'établissement à un titre ou à un autre, il faut examiner cette situation de très près.
    Je pense que les politiques doivent ne plus être centrées sur les visiteurs. Il est bien évident qu'ils doivent contrôler les visiteurs et que certains ont déjà fait entrer de la drogue. Nous le savons. Nous reconnaissons que cela s'est produit par le passé, mais le détecteur ionique n'aide pas à cet égard. On les trouve d'une autre façon. On les trouve par le renseignement. Les autorités reçoivent des appels de personnes qui indiquent qu'une personne en a en sa possession. L'agent du renseignement de sécurité peut recevoir des renseignements qui lui sont transmis par...
    Madame, je vais devoir vous interrompre dans votre réponse à la question de M. Picard.
    Très bien.
    Merci.
    Madame Leitch, vous disposez de sept minutes.
    Merci à tous nos témoins d'avoir pris le temps de venir. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Madame Hannem, je vais commencer par vous poser quelques questions.
    Le gouvernement a été très axé sur les recherches fondées sur des données probantes. Ce matin, je consultais le site Web de SCC, où il est question plus particulièrement de spectromètre à ions. On peut lire précisément qu'il y a très peu de recherches qui sont faites et qu'il est nécessaire d'en faire d'autres. D'après votre expérience, quelles sortes de recherches — et comment — selon vous sont nécessaires pour pouvoir répondre à cette question de l'équilibre entre s'assurer que des drogues ne se retrouvent pas dans ces établissements et s'assurer que les familles ont la possibilité de voir leurs êtres chers?
    Vous posez une excellente question. J'aimerais qu'une tierce partie réalise une étude à l'aveugle de l'efficacité des machines. J'aimerais voir des expériences contrôlées à l'aide des machines. Il est très difficile de le faire, parce que bien entendu la technologie est visée par un brevet et appartient à une entité. Dans les prisons canadiennes, une seule entreprise détient un monopole sur les machines utilisées. À l'instar d'autres fabricants d'appareils technologiques, je pense que cette compagnie est réticente à assujettir sa technologie à un examen par un tiers.
    SCC indiquera que le fabricant dit que la fréquence de faux positifs est inférieure à 0,1 %, mais lorsque j'ai posé des questions l'an dernier par le biais d'une demande d'accès à l'information au sujet de la fiabilité, on m'a répondu que SCC ne possède pas de renseignements sur la fiabilité des machines IONSCAN. On m'a cité la réponse du fabricant et il semble qu'il n'a recueilli aucune donnée indépendante sur les machines.
    Dans un même ordre d'idées, je sais que vous avez tous l'expérience de ces établissements et je pense que nous avons tous une expérience du fait que nous prenons l'avion. Diriez-vous qu'il y a d'autres technologies disponibles qui pourraient être plus constructives?
    Par exemple, on est en train de concevoir des lingettes DrugWipes. Elles sont rapides, efficaces et pas tellement dispendieuses, probablement moins dispendieuses qu'un spectromètre à ions. Existe-t-il d'autres technologies que nous devrions mettre en place ou d'autres processus, semblables à ce dont Mme Cattral a parlé? Devrions-nous examiner une partie différente du processus? Quelles sont vos meilleures recommandations à l'intention du gouvernement sur ce que devrait être la technologie — peut-être qu'il ne devrait pas du tout s'agir de cette technologie — et quel devrait être le processus? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Tout ce qui se fonde sur la présence de traces de particules ne suffit pas pour déterminer une menace — ou une culpabilité, dans ce cas —, au point que l'on pourrait refuser l'entrée à des personnes. Je pense que la façon dont l'aéroport l'utilise, comme on l'a dit, c'est que si vous déclenchez une alarme, vous faites l'objet d'une fouille. Ils recherchent de la contrebande. Le fait qu'il n'y ait pas de suivi à SCC pose vraiment problème.
    Les scanners corporels, qui trouveraient des choses dissimulées sous les vêtements, seraient beaucoup plus utiles, d'après moi. Encore une fois, les lingettes le sont peut-être, mais elles font peut-être l'objet des mêmes genres de faux positifs, selon ce qu'il faut pour déclencher une alarme.
    Est-ce que quelqu'un d'autre a des commentaires?
    J'aimerais dire que je pense que SCC continue d'utiliser le détecteur ionique même s'il n'est pas fiable, parce que le ministère estime qu'il s'agit d'une mesure de dissuasion efficace. Je pense que c'est quelque chose que vous devriez comprendre.
    Tout à fait. Il s'agit d'une mesure de dissuasion qui vise les personnes qui entrent...
    De telle sorte qu'elles auront peur...
    ... et décideront de ne même pas se présenter du fait de la présence de cette machine.
    Pour revenir au détecteur ionique lui-même, nous avons parlé de la sensibilité, c'est-à-dire les faux positifs. De toute évidence, il y a un autre aspect à cela: la spécificité. J'ai passablement lu sur cette question et sur ce qu'il peut déceler et ne peut pas déceler. Est-ce que quelqu'un parmi vous aurait des observations au sujet de la spécificité qu'il faut aussi, d'après moi, examiner en ce qui concerne cette technologie?

  (0940)  

    Au sujet de la spécificité, j'ai déclenché l'alarme je ne sais trop combien de fois jusqu'à maintenant pour tout ce qui est inscrit sur leur fiche, sauf les méthamphétamines. J'ai déclenché l'alarme pour des produits opiacés, la cocaïne, la morphine...
    L'ecstasy.
    Oui, l'ecstasy, la marijuana... Pour tout ce qui est inscrit sur leur feuille, j'ai déclenché l'alarme.
    J'ai une autre question pour vous tous. N'importe qui peut répondre.
     Avez-vous eu l'occasion de rencontrer en personne des fonctionnaires de SCC, des membres de notre comité ou le ministre lui-même et de leur parler de cette question? Si vous aviez cette possibilité — je suis passablement certaine quand je dis que personne d'entre vous n'a rencontré le ministre en personne —, quel serait exactement le meilleur processus à suivre selon vous? Plus précisément, quel devrait être l'échéancier pour la mise en œuvre de ce que vous pensez qui devrait être fait?
    Ici, nous nous en tenons souvent à des généralités au sujet de choses qui pourraient être envisagées, mais je constate que nous oublions souvent qu'il faudrait y associer un calendrier de façon à ce que des mesures soient effectivement prises. D'après vous, quel devrait être ce calendrier si vous aviez l'occasion de parler au ministre ou directement au gouvernement de cette question?
    Comme groupe, MOMS a parlé à la conseillère principale en politiques au cabinet du ministre Goodale, Justine Villeneuve, au sujet de plusieurs questions, celle-ci étant importante.
    Comme groupe, MOMS a souvent parlé à des gens de haut niveau de SCC. Ils ne cessent de répéter le même dogme qu'ils ont sur leur site Web et dans leur politique. Ils répètent la politique: le détecteur ionique n'est qu'un aspect de l'EMR, que nous devons maintenir la prison sécuritaire, etc.
    Ils sont réticents, mais ils m'ont dit qu'ils ont parlé des scanners corporels, mais que le coût était un gros problème. Les détecteurs ioniques sont déjà payés. C'est le coût des scanners corporels...
    Avez-vous une observation au sujet du calendrier de mise en œuvre?
    Étant donné le manque d'efficacité manifeste des détecteurs ioniques pour empêcher les drogues d'entrer dans la prison, je dirais qu'un moratoire immédiat sur leur utilisation serait vraiment approprié et que le gouvernement devrait commencer à chercher des technologies de rechange le plus rapidement possible.
    Pensez-vous que la mise en œuvre devrait se faire sur une période de 6 mois ou de 12 mois? Quel serait d'après vous un calendrier approprié?
    Je ne suis pas une spécialiste de la mise en œuvre de politiques. Je m'essaie parfois à en concevoir, mais je pense que peu importe ce qu'ils choisissent en fait de technologie, il y aura toujours un retard pour la commander et la mettre en place, sans oublier qu'il faut donner une très bonne formation au personnel sur la façon d'utiliser de manière efficace la technologie. Si vous pensez utiliser des scanners corporels, les mettre en place rapidement et obtenir la formation qui s'y rattache en l'espace de 12 à 18 mois, je pense que ce ne serait pas déraisonnable.
    Je dois vous interrompre. Merci, madame Leitch.
    Monsieur Dubé, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être venus ce matin. Nous vous en sommes très reconnaissants. J'étais bien entendu heureux de déposer la pétition et peut-être moins satisfait de la réponse, mais nous allons y venir.
    L'enquêteur correctionnel a déposé son rapport cette semaine et, une fois de plus, il a mentionné que le nombre de faux positifs constitue une source d'inquiétude et il a de nouveau recommandé l'examen et l'étude de cette question. Compte tenu que pendant que cette question est examinée et étudiée, ces choses continuent de se produire et un moratoire mérite certainement d'être envisagé.
    Je voulais revenir sur ce sujet et sur la question de savoir ce que nous appellerions des « sources fiables »; personnel, professionnels et entrepreneurs sont des mots qui ont été mentionnés. Avec votre indulgence, je vais vous lire ce qu'Howard Sapers a dit il y a quelques années lorsqu'il était l'enquêteur correctionnel. Il a dit: « Rien ne montre que ce pic — les drogues dans la prison — est attribuable au fait que des personnes passent en contrebande des choses dans la couche d'un bébé. De fait, simplement l'opposé... ». Il a aussi ajouté: « Vous êtes moins susceptibles de trouver quelque chose qui est introduit dans le cadre d'une visite légitime que vous l'êtes d'autres sources — d'autres personnes qui entrent dans la prison, parfois des personnes dignes de confiance... personnel. Donc, le fait de se concentrer uniquement sur les visiteurs n'a rien à voir avec le problème. »
    Je veux le comprendre de votre point de vue comme personnes qui offrent un soutien mutuel à des êtres chers. Le mot « dissuasion » a été utilisé et je pense que c'est un aspect que nous n'avons pas examiné en détail et seulement l'incidence qu'il a même sur les raisons qui vous incitent à faire ces déplacements. Si vous allez à Kingston, disons, c'est un déplacement de trois ou quatre heures pour certaines personnes, ou même plus selon là où vous habitez. En quoi est-ce que cela vous dissuade de vouloir y aller, sachant que vous pourriez effectivement causer plus de tort que de bien à l'être cher en lui rendant visite?
    Allez-y, s'il vous plaît.

  (0945)  

    Il ne vous dissuade pas seulement d'y aller, mais je veux vous expliquer qu'il s'agit en réalité d'une expérience terrifiante.
    La première fois que j'ai déclenché l'alarme, c'était à Millhaven et je l'ai déclenchée pour de l'héroïne. Je me suis retrouvée dans un état de choc et de terreur, parce que je me retrouve dans un milieu où des gens sont armés et c'est une prison. Je sais que je n'ai rien fait de mal, mais je suis tout de même terrifiée. Je tremble littéralement et je dis au gardien « Regardez-moi, qu'est-ce que c'est... »
    On m'a obligée à me mettre debout et on a fait venir un chien. Puis, j'ai eu droit à une visite « avec séparation » au téléphone. Cette expérience a été éprouvante, à tel point qu'il est très difficile pour moi de recommander à un autre membre de la famille d'affronter le détecteur ionique, qu'il n'y a rien là. C'est un problème. On vous laisse dans la crainte, sans aucune raison. Je pense que... Peu importe, je vais m'en tenir à cela.
    Je pense que SCC espérait que le fait de devoir franchir le détecteur ionique serait une mesure de dissuasion pour les gens qui passent en contrebande des drogues, mais ce navire a quitté le port il y a bien longtemps. Les gens savent qu'il y a tellement de faux positifs qu'ils ne s'en soucient plus. S'ils veulent passer des drogues en contrebande, ils vont s'essayer.
    Mon expérience personnelle a été très pénible. Mon petit-fils ne retournera pas après l'évaluation des menaces et des risques que nous avons subie.
    C'est peut-être...
    Peut-être que quelqu'un d'autre a autre chose. Pas moi.
    J'aimerais parler un peu des recherches auxquelles on a fait allusion sur le site Web de SCC.
    C'est intéressant. Leurs conclusions... Je vous regarde, madame Hannem, uniquement pour avoir le point de vue d'une universitaire pour ce qui est, bien honnêtement, de l'absurdité d'une telle conclusion sur le site Web d'un ministère. Il y a eu une étude internationale et ils l'ont publiée sur leur site Web.
    La conclusion du ministère est la suivante: « Le présent examen révèle que les SMI constituent des outils efficaces pour détecter la plupart des drogues. » Vous vous dites, d'accord, cela semble bien, mais voici les phrases suivantes:
Ces outils sont toutefois souvent trop sensibles et présentent des limites quant à leur capacité de détecter certains types de drogues. Il est nécessaire de mener d'autres recherches pour obtenir des données manquantes, qui permettront entre autres de déterminer l'effet des SMI sur la consommation de drogues par les détenus et sur leur comportement en établissement, ainsi que sur le trafic de drogues par les détenus, les employés et les visiteurs, etc.
    Tout simplement d'un point de vue de la valeur, je tiens à vous entendre, comme universitaire, sur ce genre de conclusion concernant les recherches. Est-ce que c'est jugé acceptable ou non?
    Je tiens à dire clairement que les recherches menées par SCC sont ce que l'on appelle une analyse de données secondaires. SCC faisait une méta-analyse de recherches déjà publiées et provenant d'autres établissements et de travaux universitaires. C'est bien. C'est tout à fait acceptable pour recueillir les données probantes qui existent.
    La conclusion, à savoir qu'il s'agit d'un moyen efficace pour détecter les drogues, est intéressante, parce qu'essentiellement SCC ne réussit pas à faire la distinction entre un faux négatif et un faux positif. Cette machine ne présente pas de faux négatifs. Si la drogue est présente, oui, elle la trouvera, tout à fait. Pour ce qui est de ces conclusions, oui, elle détecte les drogues.
    Le problème n'est pas celui des faux négatifs. Le problème est celui des faux positifs. Lorsque la machine indique que oui, il y a des drogues alors qu'il n'y en a peut-être pas ou que peut-être la quantité est tellement faible que c'est négligeable.
    Voilà le problème avec ce genre de conclusion. Elle est tout simplement trompeuse.

  (0950)  

    Finalement, puisqu'il me reste 30 secondes, une demande d'accès à l'information a révélé que les détections positives provenant des détecteurs ioniques sont les raisons pour lesquelles le plus grand nombre de visites sont refusées dans des prisons au Canada. Je me posais simplement des questions à ce sujet. Le ministère se vante d'utiliser d'autres formes de détection en complément, mais qu'est-ce que cela nous dit en réalité au sujet de la situation?
    Cela dit qu'ils acceptent que cette machine empêche des familles de visiter des êtres chers en prison et cela contredit totalement leur politique sur l'importance de maintenir les liens communautaires et familiaux pour la réinsertion des prisonniers.
    Merci, monsieur Dubé.
    Madame Dabrusin, vous avez sept minutes.
    J'aimerais tous vous remercier de vos témoignages et des renseignements que vous nous avez communiqués aujourd'hui, parce qu'ils ont été très utiles.
    Plus particulièrement en ce qui concerne Mothers Offering Mutual Support, je vois vraiment la valeur de lancer une pétition uniquement pour sensibiliser les gens. Je tiens à saluer le fait que vous avez accompli un travail fantastique de sensibilisation sur cette question. J'ai lu quelques articles qui ont paru peu de temps après la mention de la pétition dans les journaux. Vous avez choisi une excellente façon de faire connaître l'histoire et d'amener les gens à y réfléchir. J'essaie toujours de rejoindre mes électeurs et de leur parler de la valeur des pétitions et vous avez vraiment fait la preuve que cela fonctionne. Je tenais à vous en remercier.
     L'un des articles qui a paru à peu près au moment de la pétition était dans le Globe et je pense qu'il vous citait, madame Hannem. Il parlait de la procédure officielle sur le terrain qui ne faisait pas l'objet d'un suivi. Je me demandais si vous pourriez nous en parler un peu plus. Quelle est votre compréhension de ce que devrait être la procédure officielle? Qu'est-ce qui ne fait pas l'objet d'un suivi?
    Cette différence est exactement ce qu'Anne et d'autres autour de la table ont mentionné. Lorsque l'alarme du détecteur ionique retentit, elle est censée être suivie d'une évaluation des menaces et des risques. Elle est habituellement suivie d'une sorte d'entrevue, mais il n'y a pas de fouille de suivi. Ma compréhension après avoir parlé à des gens est que la fouille de suivi n'est pas effectuée. Souvent, ils demanderont pourquoi il y a un résultat positif, mais les gens n'en ont aucune idée. Ils n'ont pas de bonne réponse. L'absence d'une bonne réponse est perçue comme la preuve qu'ils doivent faire quelque chose de mal, puis les visites sont refusées. Il y a un manque de suivi, de faire ce qui je pense constitue une évaluation efficace des visiteurs.
    L'autre problème, c'est la dichotomie entre ce que prévoit la politique quant à la façon de faire fonctionner la machine et le fait qu'ils ont trouvé eux-mêmes, à savoir qu'ils n'exploitent pas toujours les machines selon les spécifications du fabricant et qu'ils ne suivent pas toujours les protocoles de nettoyage.
    Pour ma gouverne, parce que je ne connais pas grand-chose à cela, existe-t-il un recours — une procédure d'examen ou pour porter plainte — pour pouvoir consulter la fiche et dire « attendez, il y a ces faux positifs et, de fait, aucun suivi n'a été fait au sujet de la fouille »?
    Comme quelqu'un l'a mentionné, une fois que vous avez déclenché l'alarme, votre dossier est transféré au Comité d'examen des visites. Que je sache, SCC ne conserve aucune documentation ni statistique au sujet des faux positifs.
    Il n'existe aucune façon directe pour vous de demander précisément un examen de cela?
    Non. Une fois que vous déclenchez l'alarme, vous avez cinq jours pour communiquer avec la personne dont le nom figure au verso de la fiche, habituellement le ou la gestionnaire des visiteurs, et de lui faire part de votre version des choses, qui est fondamentalement la même question: pourquoi pensez-vous avoir déclenché l'alarme? En réalité, tous les comportements compulsifs que j'ai acquis au fil du temps, notamment laver les pièces de monnaie, etc., sont venus de la gestionnaire des visiteurs. C'est ce qu'elle m'a dit de faire.
    Puis-je répondre également?
    Bien sûr.
    L'an dernier, dans le cadre de ma demande d'accès à l'information, j'ai demandé d'obtenir la documentation de SCC au sujet des faux positifs et on m'a répondu ceci: « Étant donné qu'une telle chose se produit rarement, les ‘faux positifs’ ne sont pas consignés par un établissement de SCC. Par conséquent, il serait difficile de [vous] donner un chiffre réel. »

  (0955)  

    Pourriez-vous nous en remettre une copie?
    Bien sûr. Je peux vous donner ma demande d'accès à l'information...
    C'est simplement pour nous permettre d'en avoir une copie.
    Oui.
    Très bien. Par contre, que je sache, vous n'êtes pas au courant des cas de réussite de personnes qui ont été en mesure de rectifier leur dossier. De ce que je comprends de votre histoire, plus il y a de ces faux positifs dans votre dossier, plus vous faites l'objet de fouilles ultérieures.
    Non seulement des fouilles ultérieures, mais votre privilège de visite sera suspendu pendant trois ou six mois, puis le comité d'examen se réunira de nouveau, y réfléchira un peu plus et vous rendra une autre décision. Donc, oui, les sanctions sont...
    Merci.
    Il me reste encore quelques minutes, n'est-ce pas?
    J'examinais la réponse à la pétition que vous avez présentée, qui disait que SCC entreprend un examen de l'utilisation des détecteurs ioniques. De fait, lorsque je consultais le rapport annuel, j'ai vu un engagement vis-à-vis de cet examen, qui comportait une date d'achèvement de janvier 2018.
    Madame Hannem, avez-vous une idée de la façon dont on effectue cet examen et est-ce vous avez eu une possibilité d'y contribuer?
    Ils ne m'ont pas consultée et je n'ai aucune idée de la façon dont ils mènent cet examen.
    Madame Cattral.
    On m'a dit que l'on communiquerait avec moi lorsque l'examen commencerait pour que j'y contribue. Jusqu'à maintenant, on ne m'a pas contactée...
    D'accord.
    Mme Anne Cattral: ... et nous sommes en novembre 2017.
    Mme Julie Dabrusin: Merci.
    Je crois qu'il me reste une minute, madame Fitzpatrick. Il m'a semblé que vous manquiez de temps et que vous aviez une pile complète d'études.
    Vous avez une minute. Pouvez-vous me parler un peu plus de ce que vous aviez dans cette pile dont vous vouliez nous parler?
    J'avais deux points en réalité. Le détecteur ionique lui-même ne trouve pas de contrebande. Ces appareils coûtent aux environs de 50 000 $ chacun, ou à peu près 45 000 $, mais ils ne trouvent rien. Lorsque l'alarme est déclenchée, il n'y a aucun suivi et aucune fouille pour confirmer. Si c'est au sujet de la contrebande et non au sujet d'un autre programme possible, je ne sais pas de quoi il s'agirait, mais ce n'est pas évident. Cela ne semble pas avoir trait à la contrebande. De plus, il n'y a aucune preuve. Nous ne pouvons pas tout simplement accuser les gens en l'absence de preuves. Ce n'est pas normal. Cela va à l'encontre de notre façon d'appliquer la loi au Canada.
    Il doit y avoir des preuves avant que l'on puisse vous infliger des sanctions et il n'y a tout simplement pas de preuves. Ils font un examen et si vous déclenchez l'alarme, ils font venir un gestionnaire correctionnel pour vous interviewer. Ils vous posent une ou deux questions. Certains d'entre eux ne sont même pas intéressés par ce que vous dites. Ils vous disent: « Dépêchez-vous, dépêchez-vous », nous avons autre chose à faire. Donc, vous sortez de là et...
    Je m'excuse, madame Fitzpatrick, mais « dépêchez-vous, dépêchez-vous » constitue le problème.
    Des voix: Oh, oh!
    Si vous déclenchez l'alarme une fois, vous passerez un deuxième examen.
    Le temps de Mme Dabrusin est écoulé, mais je vous remercie de nouveau.

[Français]

     Monsieur Paul-Hus, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame, je dois d'abord vous dire que je comprends quel est le problème. Pour vous, le fait de devoir subir une vérification au scanner peut être très irritant.
    Avant d'aller plus loin, je vous demanderais quelque chose. Chacune de vous a fait différentes demandes au ministère et a reçu des réponses. Pourriez-vous envoyer au Comité une copie de ces questions et réponses, afin que nous puissions avoir l'ensemble de votre témoignage d'aujourd'hui?
    Nous sommes ici aujourd'hui pour étudier l'utilisation du spectromètre. De ce que je comprends, l'appareil est très efficace, même trop parce qu'il détecte le Zantac ou d'autres produits de ce genre. Je crois que le problème est plutôt lié au discernement...

[Traduction]

    Je m'excuse, monsieur Paul-Hus.
    Est-ce que quelqu'un d'autre entend l'interprétation?
    Je m'excuse, je l'ai mis sur le mauvais canal. Je suis désolé.
    Des voix: Oh, oh!

  (1000)  

    C'est la dernière fois que je vous demande de me remplacer.
    Donnez-moi 30 secondes de plus.

[Français]

    Je reprends ma question.
    Selon ce que j'en comprends, l'appareil est très efficace. Le problème a plutôt trait à la gestion des résultats. Au fond, c'est le côté humain qui pose un problème. On ne peut pas être contre le fait qu'un appareil est trop efficace; c'est souvent le problème inverse. Ce qui compte, ici, c'est que le personnel exerce un discernement.
    Le problème majeur concerne-t-il l'employé du service correctionnel lorsqu'il y a un résultat positif? Vous avez mentionné à plusieurs reprises qu'il n'y avait pas de fouille. Les gens sont stressés et ils doivent remplir un formulaire. C'est tout ce qu'ils doivent faire.
     Je veux bien comprendre. Doit-on s'attaquer à l'appareil ou à la procédure? Comprenez-vous ma question?

[Traduction]

    Ce n'est pas uniquement un problème dans l'utilisation du résultat réel par les personnes. C'est un problème dans l'exploitation de la machine.
    Je me suis déjà retrouvée dans une salle des visites où vous faites la queue et une personne après l'autre entre. Des gens qui ne se connaissent pas et qui ne se sont jamais rencontrés auparavant, mais qui font la queue pour une visite déclencheront tous l'alarme pour une combinaison des trois mêmes drogues. Qu'est-ce cela dit? Cela dit que la machine n'est pas nettoyée.
    Nous parlons de problèmes d'exploitation, de réglage de la machine, de nettoyage de la machine, de l'attention réelle à y apporter et de la procédure par la suite. Si vous déclenchez l'alarme, il doit y avoir une façon de vérifier ce que signifie ce résultat positif et s'il s'agit d'un faux positif ou non, mais il n'y a aucune procédure.
    Puis-je répondre? Je m'élèverais contre l'idée de dire qu'une machine qui ne réussit pas à faire efficacement la distinction entre des substances illicites et non illicites est en réalité efficace.
    Imaginez si vous preniez des empreintes digitales et que nos empreintes digitales n'étaient pas en fait uniques. Nous trouverions des empreintes digitales sur une scène de crime et nous dirions que c'est forcément l'une de ces cinq personnes, de sorte que nous les condamnerions tout simplement toutes.
    Nous ne conclurions pas qu'il s'agit d'une utilisation efficace de ce marqueur. Je pense que nous pouvons présenter le même argument au sujet de cette machine. Elle ne fait tout simplement pas un travail efficace.

[Français]

    Prenons l'exemple d'une personne qui arrive à l'aéroport et qui a dans son bagage à main un jouet en forme de pistolet. La machine détectera une forme de pistolet et, à ce moment, on vérifiera l'objet en question. On constatera qu'il s'agit d'un jouet et la personne pourra alors passer. N'est-ce pas le même principe qui s'applique à un produit comme le Zantac, où l'on constate par la suite qu'il ne s'agit pas de cocaïne?
    Vos témoignages contiennent plusieurs éléments. Le sentiment d'oppression en est un et concerne la manière dont on est traité au service de contrôle, et l'appareil en est un autre. Pour le Comité, c'est important de faire une distinction entre l'aspect humain, soit la gestion des visiteurs, des mères, des frères, des soeurs ou des amis, et l'aspect de la sécurité, qui est important pour les pénitenciers.
    J'aimerais savoir ce qu'il en est du facteur humain pour vous, malgré le fait qu'il y ait des considérations techniques.
    Madame Cattral, je vous écoute.

[Traduction]

    Je dirais que l'appareil est efficace pour détecter de très petites particules de drogues illicites. Elle n'est pas efficace pour détecter si la personne fait effectivement de la contrebande.
    L'aspect humain est différent. Il faut peut-être une meilleure formation à ce sujet, mais l'appareil lui-même ne fonctionne pas de la façon que SCC pense qu'il fonctionne, c'est-à-dire qu'il empêche la contrebande d'entrer dans les établissements.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    J'ai par inadvertance interrompu M. Paul-Hus pendant quelques secondes. Donc, madame Mathias, allez-y.
    Je tiens à dire très clairement que nous nous inquiétons beaucoup des drogues dans les prisons, d'autant plus qu'on commence à trouver déjà du fentanyl. Non seulement nous ne voulons pas que l'on utilise le détecteur ionique, mais nous voulons que SCC mette en place de toute urgence des méthodes pour empêcher les drogues d'entrer dans les prisons, notamment par des drones et des membres du personnel et par des travailleurs d'entretien, parce que nos êtres chers qui sont incarcérés sont à risque.

  (1005)  

    Merci.
    Madame Damoff, vous avez cinq minutes.
    Merci à tous d'être venus, et merci de nous avoir fait part de vos expériences personnelles. Je sais que ce n'est pas facile pour vous de comparaître devant nous. Nous vous en sommes très reconnaissants.
     Premièrement, le ministre a répondu effectivement à la pétition et dans sa réponse, il a demandé à SCC de mener un examen. Vous l'avez probablement vue. Je pense que ce serait utile, monsieur le président, si comme comité nous en recevions une copie lorsque l'examen sera terminé.
    Je pense aussi qu'il est important pour vous tous de savoir que nous reconnaissons l'importance des membres de la famille qui visitent les délinquants, l'importance de la réadaptation et de vouloir en même temps que les drogues n'entrent pas dans les prisons... Dans le rapport du Bureau de l'enquêteur correctionnel, l'enquêteur a dit effectivement que ces détecteurs avaient été mis en place en 1995 et je le cite:
... l'introduction de détecteurs ioniques a peu de répercussions importantes sur le taux de résultats positifs obtenus lors d'analyses d'urine aléatoires. Le taux est demeuré stable en dépit d'importants investissements dans de nouvelles méthodes de détection [...] et des technologies de surveillance conçues pour empêcher les drogues d'entrer dans les établissements fédéraux.
    Nous voulons empêcher les drogues d'entrer, mais ce n'est pas cette machine qui le fait, selon l'enquêteur correctionnel. Je me demande si quelqu'un parmi vous a des exemples de ce qui se fait ailleurs. Je ne pense pas que ces machines connaissent nécessairement beaucoup de succès non plus, mais je demande si vous avez des suggestions quant à ce que d'autres pays utilisent dans le cas des drogues.
    Je pense que le fait de ne pas composer efficacement avec l'entrée de drogues dans les prisons constitue un symptôme de la façon dont nous séparons notre personnel des autres visiteurs.
    En 2006, lorsque le soi-disant rapport du groupe d'experts indépendant sur les corrections a examiné les pratiques correctionnelles, l'interdiction de drogues a été soulevée comme question à cette époque. La réponse du syndicat des agents correctionnels a été de consacrer plus de temps, plus de chiens détecteurs de drogues, plus de détecteurs ioniques et des examens plus approfondis des visiteurs. Tout cela a été totalement inefficace pour réduire la quantité de drogues qui entre dans les prisons.
    On doit alors se demander pourquoi nous n'explorons pas d'autres avenues. Si un examen plus minutieux, plus de chiens détecteurs de drogues et plus de détecteurs ioniques pour les visiteurs ne réduisent pas la quantité de drogues qui se retrouve dans les prisons, pourquoi ne regardons-nous pas du côté des entrepreneurs, du personnel et de toutes les autres personnes qui vont et viennent dans les établissements? Je pense que les pays qui ont été les plus efficaces pour empêcher les drogues d'entrer dans les prisons ont une vue plus holistique de la provenance de la menace.
    En 2013, j'ai lu un article paru dans le National Post sur ces questions. Quelques-uns d'entre vous ont parlé de l'ASFC qui utilise ces machines. Le grand titre était « Nouveaux détecteurs de pointe dispendieux à la frontière souvent en panne, moins efficaces que les chiens détecteurs ». À cela, l'un des porte-parole du syndicat de l'ASFC a dit: « Il ne fait aucun doute que nos meilleurs outils de détection marchent et ont un rythme cardiaque... » et il faisait précisément référence aux agents du renseignement et aux chiens détecteurs. Je me demande si vous auriez des observations à cet égard.
    Les chiens, lorsqu'ils sont bien entraînés, sont d'excellents outils. D'après ce que je crois comprendre, ils ne sont pas totalement infaillibles. Un chien qui a été très bien entraîné répondra aussi à son maître et on peut lui ordonner de s'asseoir d'une façon qui ne serait pas évidente pour quiconque n'a pas été formé à cet effet. Lorsqu'ils sont correctement utilisés par des personnes compétentes, éthiques, ils sont excellents.
    Dans la minute et 15 secondes qu'il me reste, quelles sont vos recommandations quant à ce que devrait faire SCC? Il semble que l'une d'elles est d'augmenter le nombre de personnes qui sont contrôlées lorsqu'elles arrivent dans les établissements. J'aimerais que vous me répondiez en une minute.
    Je tiens à ce que vous sachiez que lorsque le détecteur ionique a été introduit, on l'a utilisé pour contrôler les membres du personnel, mais en raison du nombre trop élevé de faux positifs, qui avaient pour conséquence d'empêcher le personnel d'entrer et de travailler et toutes sortes de choses, c'est le syndicat qui a demandé à SCC de cesser d'utiliser le détecteur pour le personnel.
    Je ne sais pas s'il nous revient de dire à SCC comment empêcher les membres de son personnel et les travailleurs d'entretien de faire entrer des drogues. Il doit y avoir des exemples et des technologies dans d'autres pays dans le monde où ils peuvent aller voir. Ils n'ont qu'à faire les recherches.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Damoff.
    Monsieur Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être venus. Je pense que vous nous apportez un élément que l'on ne voit pas souvent ici. Nous avons tous une mère et les mères ont tendance à tourner nos cœurs dans une autre direction.
    Je suis allé seulement une fois dans une prison. Je visitais un immigrant reçu en fait. Je tiens à préciser que...
    Des voix: Oh, oh!
    M. Dave Van Kesteren: ... mais si j'avais été en prison, je le reconnaîtrais aussi. Lorsque j'y suis allé, j'ai été tout à fait horrifié des conditions et de l'étroitesse des cellules avec tout le monde à cette époque qui était réuni dans ce qui ressemblait à une cage.
    Cela m'a laissé une impression. Évidemment, je ne peux pas imaginer que vous en fassiez l'expérience de façon régulière. Vous avez déclaré que vous convenez que les drogues ne devraient pas entrer dans les prisons. Les détenus sont-ils autorisés à fumer en prison?

  (1010)  

    Non.
    Qu'en pensez-vous? S'il vous plaît, ne soyez pas politiquement correcte. Nous en avons beaucoup par ici. Il y a beaucoup trop de rectitude politique.
    En réalité, je pense que c'est très difficile pour eux, parce que beaucoup de gardiens fument. Ils s'éloignent un peu, fument une cigarette, puis reviennent. Vous sentez constamment quelqu'un d'autre qui fume. Pour beaucoup de gens... Je suis une personne qui a été accrochée à la nicotine pendant des années et je continue de fumer par intermittence. Je sais qu'il s'agit de l'un de mes mécanismes d'adaptation. Pour moi, cela réduit mon niveau de stress. Il n'y a même pas d'endroit à l'extérieur pour fumer.
    Les gens se tournent alors vers tout ce qu'ils peuvent trouver pour réduire leur stress. Ils font leur propre bière. Ils font des boissons alcoolisées et peu importe. On peut faire beaucoup d'argent et je pense qu'il s'agit d'un facteur qui incite les travailleurs, peu importe leur emploi, à entrer des drogues dans la prison. Il y a beaucoup d'argent à faire.
    Vous avez tout à fait raison.
    Nous avons tous eu une mère. La mienne est décédée, mais je dirai qu'elle était probablement l'une des femmes les plus sages. Elle n'a jamais fumé, nous parlions de fumer et, bien entendu, dans une grande famille, il y en avait quelques-uns qui fumaient. Elle disait que les gens ont besoin de leurs vices. Je ne peux pas imaginer être en prison lorsque l'on vous dépouille de toutes ces choses. Je pense que vous avez décrit parfaitement ce que c'est — un remède contre le stress — et nous n'avons aucune idée des genres de stress.
    Pensez-vous que c'est un droit de la personne pour ces gens de fumer en prison?
    C'est tellement difficile. Je suis moi-même une ancienne fumeuse. Mon fils est en prison. Il est un non-fumeur et il est tellement heureux que personne ne soit autorisé à fumer, mais je dirais qu'il serait très difficile de s'attendre à ce que quelqu'un qui a fumé depuis l'âge de 12 ou 13 ans, peut-être pendant une vingtaine d'années, arrête du jour au lendemain.
    Encore une fois, je dirais, tout comme Irene, que s'il y avait un abri à l'extérieur pour fumer ou un endroit où ils pourraient aller et fumer en toute légalité des cigarettes — elles sont illégales — ainsi que d'autres techniques de réduction des méfaits dont ils ont besoin dans la prison pour ce qui est d'autres toxicomanies qu'ils ont... Il s'agit d'une toxicomanie.
    Est-ce que ces contraintes de ce genre s’appliqueraient à quelqu’un qui a un paquet de cigarettes? Si on prend une personne en possession de cela, et...
    Oui, absolument.
    Oh, oui.
    J’ai vu un homme placer ses cigarettes dans un casier, très bêtement. Des agents de la Police provinciale de l’Ontario l’ont escorté jusqu’à la sortie.
    Je dois vous poser une dernière question. Il me reste une minute. J’ignore si vous aurez le temps d’y répondre. Le gouvernement va légaliser la marijuana dans un an, et il s’agit peut-être d’une question théorique: est-ce qu’on permettra aux prisonniers d’avoir accès à ces drogues légales? Quel est votre avis à cet égard?
    Que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur, je crois avoir une seule et même idée au sujet de la légalisation. À mon avis, la criminalisation n’est pas une solution. J’ignore s’il serait utile d’avoir des gens...
    Permettez-moi de vous poser cette question. Est-il juste d’interdire l’utilisation aux détenus et non aux jeunes de 18 ans?
    Je crois que nous devrons laisser tomber cette question.
    Je l’ignore.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Spengemann, vous aurez peut-être une réponse à cette question.

  (1015)  

    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais tenter de partager au moins une partie de mon temps avec notre visiteur, M. Levitt, alors je serai bref et précis. J’aimerais adresser mes questions à Mme Hannem.
    Madame Hannem, dans le cours de vos recherches, avez-vous observé une incidence importante sur le plan du genre? Avez-vous noté une différence dans la façon qu’on traite les transgenres, ou les détenus de sexe masculin et féminin?
    Je n’ai rien observé qui me permettrait de l’affirmer. On utilise ces appareils dans les prisons pour hommes et pour femmes.
    Or, vous n’avez aucune raison de recommander qu’on examine la question du genre dans ce contexte. Aucune raison importante ne justifie une telle étude.
    Je ne le crois pas, même si nous savons qu’un grand nombre de femmes sont incarcérées pour raison de drogues.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Les établissements carcéraux n’offrent pas seulement des services correctionnels. Des activités policières ont également lieu à l’intérieur et autour des prisons. Serait-il raisonnable de dire qu’une partie de l’intérêt à cet égard porte, pas tant sur la quantité de drogues qui entre dans les prisons, mais sur le contact des détenus avec le monde extérieur, notamment avec le crime organisé et sur la gestion du trafic de stupéfiants? Par ailleurs, les établissements carcéraux permettent de recueillir des renseignements sur les personnes qui ont des contacts avec les détenus. Si cette hypothèse est raisonnable, peut-elle expliquer certains des problèmes dont nous discutons aujourd’hui?
    Toute personne qui visite un établissement fédéral fait l’objet d’un rapport du Centre d’information de la police canadienne; elle doit être approuvée au préalable avant même d’être autorisée à y entrer. Il serait ahurissant que le Service correctionnel du Canada permette à une personne ayant des liens notoires avec le crime organisé d’entrer dans une prison fédérale. Je ne peux même pas imaginer qu’on autoriserait une telle chose.
    À moins qu’ils ne soient des informateurs et vraisemblablement déjà connus des autorités?
    Oui.
    D’accord.
    Avez-vous idée de ce qu’il advient des données quant aux résultats positifs, qu’il s’agisse de faux positifs ou non? Comment le SCC recueille-t-il ces données? Est-ce qu’ils partagent cette information?
    Je ne le crois pas. On semble rédiger des rapports d’incidents. Selon le Bureau de l’enquêteur correctionnel, il y aurait eu 3 532 rapports d’incidents impliquant des visiteurs de février 2015 à avril 2017, alors que les détecteurs ioniques affichaient des résultats positifs pour 25 % d’entre eux. Cela semble être toute l’information disponible à cet égard. J’ai fait plusieurs demandes de renseignements et c’est tout ce que j’ai pu obtenir.
    À votre connaissance, les données individuelles ne sont pas recueillies en fonction des personnes qui sont...
    Cela reste dans leur dossier. C’est inscrit dans le registre des visiteurs et on conserve des fiches électroniques au sujet des personnes qui entrent et sortent des établissements, de sorte qu’il existera un lien avec le nom de cette personne.
    Mais nous ne savons pas ce qui se produit par la suite...?
    Non.
    D’accord. Je n’ai plus d’autres questions.
    Je partagerai le reste de mon temps avec M. Levitt.
    Monsieur Levitt, bienvenue au Comité.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à vous remercier tous de vos commentaires. J’ignore si les grands esprits se rejoignent ou si les sots se reconnaissent entre eux, mais j’allais aussi poser une question quant au genre.
    Madame Cattral, vous avez parlé de l’expérience de votre petit-fils. Nous sommes conscients des difficultés qu’éprouvent les détenus, notamment ceux aux prises avec des problèmes de santé mentale et j’imagine que les contacts avec leurs enfants sont une énorme source de soutien pour eux pendant leur incarcération.
    J’aimerais avoir votre avis — et peut-être aussi le vôtre, madame Hannem. Quels sont les impacts de ce genre de résultats faux positifs sur les enfants et qu’arrive-t-il lorsqu’on interdit les contacts entre les détenus et leurs enfants?
    Vous pouvez probablement en parler à titre personnel, madame Cattral, mais quel effet un incident de la sorte aura-t-il sur les détenus? Cela me semble vraiment émouvant.
    Oui, nous avons tous les trois trouvé cela assez épouvantable. Dans mon cas, le résultat du test de détecteur ionique s’est révélé positif le jour de notre arrivée. Mon petit-fils m’accompagnait; nous étions autorisés à rendre visite à son père. En fin de compte, nous avons eu droit à une visite avec séparation. Je n’entrerai pas dans les détails, étant donné que cela ressemble au syndrome de stress post-traumatique: le fait d’en parler me fait revivre ces événements.
    Nous ne désirons pas rouvrir vos vieilles blessures.
    Non. À la fin de cette visite, mon petit-fils a dit à son père: « Papa, je ne pourrai pas te serrer dans mes bras. » C’est tout ce qu’il a dit… Mon fils était foudroyé. Mon petit-fils a pleuré tout le long du retour. Nous étions à quatre heures de route, alors vous pouvez imaginer quel genre de voyage j’ai fait ce jour-là. Mon petit-fils a refusé d’y retourner. Il m’a dit: « Mamie, je ne peux pas y aller, parce qu’ils vont refuser de nous laisser entrer. Ils cherchent de la drogue et nous n’en avons pas, alors je ne peux pas y retourner. » Il n’a pas rendu visite à son père. C’était il y a un an, peut-être plus, et il n’a pas visité son père depuis.
    Merci.
    Madame Hannem...

  (1020)  

    Malheureusement, je dois vous arrêter ici. Merci. Votre visite a été très brève.
    Nous allons terminer le premier tour de questions en donnant la parole à M. Dubé pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Il s’agit d’un tour de trois minutes seulement, madame Hannem, et j’aimerais en savoir davantage au sujet de la poursuite intentée dans l’État de New York relativement à l’utilisation des détecteurs ioniques. Pouvez-vous nous donner plus de détails quant à ce qu’ils ont vécu? Au-delà des plaintes, y a-t-il eux des résultats probants qui pourraient nous être utiles?
    Le procès qui a déclenché l’examen des détecteurs ioniques dans l’État de New York, et par la suite de façon plus générale au sein du Federal Bureau of Prisons, portait sur l’accès et sur une famille à qui on a refusé l’accès en raison de résultats faux positifs. La Cour a leur a donné raison et ils ont découvert qu’il y avait eu des problèmes relatifs aux faux positifs dès le départ. Le Federal Bureau of Prisons a décidé de cesser de les utiliser. Ils les utilisaient seulement pour le courrier et les effets personnels des détenus et pour examiner les salles de visites avant et après les rencontres. J’ignore quel en était l’objectif.
    On a recommencé à utiliser les détecteurs ioniques de façon clandestine en 2011. Certaines prisons les utilisent sur les gens. J’étudie les démarches des groupes de défense des droits des prisonniers aux États-Unis. C’est un problème qui perdure. Encore une fois, il s’agit de savoir si cette question devrait faire l’objet d’une poursuite en matière de droits de la personne.
    Alors, sur le plan technique, est-ce que la politique interdit leur usage, en dépit de ce qui pourrait ou non se passer?
    Oui.
    D’accord.
    Voila pour moi. Merci, monsieur le président.
    Pour la deuxième série de questions, les intervenants auront cinq minutes chacun, en commençant par Mme Damoff.
    Merci. Je vais activer ma minuterie.
    Vous ne faites pas confiance à notre gestion du temps.
    Non, c’est que je désire savoir ce que répondra le témoin...
    J’aimerais revenir sur les solutions que vous envisagez et peut-être sur les politiques en place au SCC. Nous avons beaucoup entendu parler des problèmes liés aux détecteurs ioniques et aux personnes sur lesquelles on les utilise. J’ai posé une question à cet égard la dernière fois, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet des autres méthodes, comme les chiens détecteurs de drogue et les scanneurs corporels, en soulignant celles que vous préférez?
    Je présume que cette question ne s’adresse pas à chacun de vous. Je ne m’attends pas à ce que les gens soient des experts dans des domaines qui leur sont étrangers. Mais toute suggestion que vous pourrez offrir à cet égard nous serait utile.
    Jusqu’à présent, je n’ai pas étudié la technologie liée aux scanneurs corporels. J’en ai une vague connaissance et j’ai examiné certaines choses. À mon sens, ces appareils peuvent détecter les drogues que les gens ont en leur possession. Je ne sais trop. J’aimerais savoir s’ils peuvent détecter des choses camouflées dans une cavité corporelle. Je ne suis pas certaine. Je crois savoir que les chiens détecteurs de drogue trouvent généralement les produits cachés avant de s’asseoir.
    Pouvez-vous nous décrire le processus? J’ai lu la procédure à suivre dans un des rapports du SCC. Si le détecteur ionique affiche un résultat positif, d’autres choses sont censées se produire. Pouvez-vous nous parler de la procédure actuelle et nous dire si elle est respectée? Par ailleurs, avez-vous des suggestions à cet égard, dans le cas où on utilise les détecteurs ioniques?
    L’évaluation des risques et des menaces consiste d’abord à effectuer un deuxième balayage. Si l’appareil n’a pas été nettoyé ou s’il détecte des particules de trace, alors l’objectif d’un deuxième balayage devient moins évident à mon avis. Dans le cas où le résultat est négatif...
    Cela n’a aucune d’importance.
    ... cela n’a aucune importance. Il n’en reste pas moins que vous avez obtenu un résultat positif la première fois. Cependant, vous passez une entrevue pour discuter de l’emplacement des drogues et des raisons pour lesquelles vous vous en êtes procuré.
    Le traitement varie selon le rang de la personne. En 2011, l’honorable Kim Pate — plusieurs d’entre vous la connaissent peut-être personnellement — a déclaré devant un comité sénatorial, celui qui étudiait l’interdiction des drogues, je crois, qu’un détecteur ionique lui avait donné un résultat positif. Les agents correctionnels ont par la suite passé beaucoup de temps à chercher ce qu’elle aurait pu toucher ou consommer. Ils ont décidé qu’il s’agissait du Dimetapp qu’elle avait administré à son enfant la veille. On l’a laissée entrer.
    Si vous êtes membre de la famille, on laissera tomber toutes ces formalités qui ont pour but de vous donner le bénéfice du doute et de trouver la cause précise d’un résultat positif. On vous dira simplement: « Vous avez un résultat positif et c’est un problème. » Les agents tenteront de savoir si vous avez déjà obtenu un tel résultat. Le cas échéant, on dira qu’il semble s’agir d’une tendance récurrente, et il se peut fort bien que votre visite soit annulée. On pourrait même révoquer votre attestation de sécurité.

  (1025)  

    Quelle serait la procédure dans les établissements correctionnels, si on n’utilisait pas les détecteurs ioniques? Si on imposait un moratoire à leur égard, à votre avis, quel serait le meilleur moyen de fouiller les visiteurs ou les employés?
    Une voix: Le chien.
    Oui, même dans le cas où on utilise un détecteur électronique, le chien devra renifler les personnes.
    Non, pas toujours.
    Chaque fois que je suis rentrée, c’était...
    Cela se passe la plupart du temps.
    Une voix: Chaque établissement a ses procédures.
    Il y a le chien et, comme Stacey l’a mentionné, si le maître-chien est une personne de principe et fiable, s’il ne fait pas réagir le chien et ne lui donne pas de signaux, alors on perçoit le chien comme étant plus fiable que le détecteur ionique. Il y a les appareils à rayons X dans lesquels vous faites passer tous vos effets personnels, votre sac à main, votre manteau, les chaussures que vous aurez enlevées, tout. Et vous passez par le détecteur de métaux.
    Il y a ces trois façons de procéder. Par ailleurs, quand on entre dans la salle de visite, il y a des caméras partout. Celles-ci permettent aux agents correctionnels d’observer les détenus et leurs visiteurs à partir de leur poste de contrôle. Les gens sont sous surveillance directe et les agents écoutent les conversations au moyen des dispositifs audio placés sur les tables. Toutes ces mesures de sécurité sont en place et on fouillera ceux qui vont à la salle de bain. Ils subiront une fouille tactile en revenant.
    Même en l’absence de détecteurs ioniques, tous ces systèmes sont déjà en place. Le seul visiteur que j’ai vu se faire prendre à tenter de faire passer de la drogue dans la prison l’a été en raison des caméras et de l’observation directe des agents.
    Votre temps est écoulé.
     Nous passons maintenant à Mme Leitch pour une période de cinq minutes.
    Tout à l’heure, un député d’en face a dit qu’il vous incombait de proposer un processus quant à la fouille des employés et des personnes qui entrent dans la prison. Je ne crois pas que ce soit le cas. À mon avis, cette responsabilité appartient au gouvernement. La recherche a donné des résultats très clairs: les autres employés et les entrepreneurs font partie de ce problème. La recherche le confirme.
    Madame LeSarge, avez-vous des réflexions quant aux demandes du gouvernement — même si je ne crois pas qu’il s’agisse de votre responsabilité — et quant aux autres mesures qui pourraient être mises en place? Ou devrait-on simplement traiter toutes les personnes qui entrent dans ces institutions de la même façon équitable?
    Par ailleurs, j’aimerais que tous les témoins se prononcent sur la question de la vie privée. Si une personne est inscrite sur une liste en raison d’un résultat faux positif, que fait-on de cette information? Le savez-vous? Avez-vous des questions pour le gouvernement quant à l’utilisation des renseignements à votre égard, lesquels pourraient être inscrits sur une liste dont vous ignorez l’existence? Avez-vous des questions à cet égard?
    Je n’ai jamais songé à la possibilité que mon nom puisse figurer sur une liste quelque part. Ce n’est pas une question qui me préoccupe.
    Quant aux choses qui pourraient changer, je dirai qu’il existe une culture généralement punitive au sein du SCC. Cela n’est qu’une partie du problème, mais il ne s’agit pas d’une chose qu’on corrigera de sitôt.
    Comme le disait Anne, une foule de mécanismes sont en place lorsqu’on entre dans une prison. Vient ensuite le détecteur ionique. Cet instrument semble être celui qui nous crée beaucoup d’ennuis, même pour ceux d’entre nous qui n’ont pas de mauvaise intention. Il y a le chien. À l’instar de Peggy, je crois qu’il serait raisonnable d’imposer un moratoire immédiatement si on continue à utiliser les chiens. On les utilise encore et ils effectuent des fouilles efficaces — nous l’espérons — la plupart du temps. On a utilisé un chien pour me fouiller chaque fois que je suis entrée dans une prison.
    Pourquoi ne pas utiliser les détecteurs de métaux, les autres instruments, les chiens et l’observation tandis que le moratoire est en vigueur? Je n’ai pas d’autres suggestions. Je désire seulement qu’on me traite de façon équitable.
    À votre avis, devrait-on traiter toutes les personnes qui entrent dans les prisons exactement de la même façon, peu importe leurs antécédents?
    Oui, si elles ont subi un examen de contrôle et été approuvées à titre de visiteur.

  (1030)  

[Français]

     Monsieur Paul-Hus, il vous reste deux minutes.
    Madame Fitzpatrick, vous avez été très directe au début de votre témoignage. Vous dites que l'usage de cet instrument contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés. Vous voudriez qu'on en limite l'utilisation et vous avez demandé un moratoire à ce sujet. J'aimerais que vous m'expliquiez en quoi l'usage de cet instrument contrevient à la Charte comparativement à d'autres systèmes d'inspection.

[Traduction]

    Bon, quand on peut poursuivre ou accuser une personne sur la base d’un soupçon, qu’il soit raisonnable ou non, et la traiter comme si elle était coupable, sans équité procédurale... Les détenus ont droit à une équité procédurale. Nombre de jugements de la Cour suprême l’ont confirmé. L’arrêt Cardinal c. Directeur de l’Établissement Kent a statué qu’on doit suivre une procédure équitable si on désire supprimer les privilèges que la politique du SCC accorde aux détenus. Les détenus doivent avoir la chance de s’exprimer. Cela s’applique aussi lorsqu’on tente de supprimer leur droit d’avoir des visiteurs.

[Français]

    La contravention à la Charte concerne les visiteurs; or vous me parlez des détenus qui ont droit aux visites.
     Est-ce ce qui pose problème?

[Traduction]

    Bon, il s’agit de la liberté d’association. C’est l’un des problèmes qui est ressorti aux États-Unis. Le deuxième amendement de la Constitution américaine est l’un des enjeux qui ont été soulevés. Je ne suis pas tout à fait certaine, mais je crois qu’il s’agit du deuxième amendement qui porte sur la liberté d’association.
    Pour autant qu’ils suivent les règles et qu’il n’y a pas... Les détenus ont le droit de s’associer à leurs familles. Stacey a évoqué cela lors de son intervention. Il s’agit d’une question constitutionnelle et d’une question de...
    Merci, madame Fitzpatrick.
    Monsieur Dubé, vous disposez de cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci.
    Vous semblez vouloir intervenir tous les deux. Je vous donnerai peut-être l’occasion d’ajouter vos commentaires.
    À mon avis, trouver un moyen efficace de soumettre les employés et les préposés à l’entretien à des balayages est aussi urgent que cesser d’utiliser le détecteur ionique sur les visiteurs.
    Je vous prie de ne pas penser qu’on peut simplement utiliser les détecteurs ioniques en place sur l’ensemble du personnel et des travailleurs. Les employés entrent et sortent plusieurs fois par jour. Ils ont des pauses-café. Cela engorgerait tout le système.
    À mon avis, on devrait encourager ou inciter le SCC à trouver d’autres moyens efficaces pour dépister les drogues qui pourraient être utilisées sur toutes les personnes qui entrent dans les prisons.
    Merci.
    Des mécanismes sont déjà en place pour le dépistage des drogues et de la contrebande, mais j’ajouterai — en espérant que tous le savent — que tout détenu qui quitte une pièce à la fin d’une visite est soumis à une fouille corporelle.
    Merci.
    Il me reste encore quelques minutes. Avant la fin de cette réunion, j’aimerais que l’on précise ce que nous attendons du gouvernement et du Service correctionnel du Canada. N’hésitez pas à nous en dire davantage à ce sujet.
    Nous avons le moratoire sur l’utilisation du détecteur ionique et je crois que nous avons également une étude indépendante quant à l’efficacité ou à l’inefficacité de cette technologie. Ensuite, nous pourrions étudier les autres moyens de dépister les drogues dans les prisons. Je crois qu’il existe aussi un consensus: personne à cette table, ni vous ni les membres du Comité, n’est d’avis qu’on devrait ignorer ce problème. S’agit-il des trois éléments essentiels? Devrait-on en ajouter d’autres?
    Allez-y, madame Hannem.
    Quelle que soit la technologie que le gouvernement décide d’adopter, j’encouragerai les autorités à agir très prudemment en engageant un chercheur indépendant — un scientifique ou une personne compétente — dans le but d’effectuer une expérience contrôlée relative à cette technologie, parce que la technologie est un important secteur industriel.
    Toutes les sociétés technologiques qui conçoivent et commercialisent des technologies de sécurité sont en affaires pour gagner de l’argent. Elles diront que leur technologie de sécurité est efficace, tout comme Taser/Axon avait insisté que ses armes étaient non-létales, avant qu’ont découvre, ce fut un choc véritable, qu’elles sont peut-être un peu moins létales. On a dû légèrement modifier la commercialisation, n’est-ce pas?
    Les entreprises dans le domaine de la technologie de sécurité veulent faire de l’argent. Elles vous diront que leur technologie est efficace. Si vous n’allez pas au bout des choses, en faisant votre propre étude, vous devrez laisser leurs équipes de marketing vous expliquer comment fonctionne cette technologie.

  (1035)  

    Madame Fitzpatrick, je crois que vous désirez intervenir.
    À mon avis, la directive CD 566-8-1, qui décrit les procédures entourant le détecteur ionique, devrait inclure une exigence selon laquelle une fouille doit être effectuée avant qu’une sanction soit imposée à qui que ce soit. Si on ne trouve aucune contrebande, il ne se produit rien, aucun dossier n’est ouvert, rien n’est inscrit au dossier des détenus. Les résultats des détecteurs ioniques n’ont aucune valeur probante. On ne peut pas continuer à ajouter une succession de zéros et établir l’historique d’un problème relatif à un visiteur lorsqu’il n’existe aucun historique, étant donné que l’élément de preuve n’a aucune valeur, parce qu’il n’y a pas d’élément de preuve.
    Excellent. Sur ce, je crois que nous pouvons conclure, à moins que quelqu’un désire ajouter quelque chose.
    Merci.
    Merci, monsieur Dubé.
    Monsieur Spengemann, je vous en prie. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je désire utiliser mon temps pour tracer un cercle plus large autour du problème. En fait, le problème se situe au niveau de la demande pour des drogues, des stupéfiants et des substances illicites dans notre système carcéral.
    J’aimerais demander à chacun d’entre vous — à ceux qui veulent se prononcer: quelles sont vos préoccupations quant à la programmation actuelle, la consultation en toxicomanie et les mesures à prendre pour prévenir la toxicomanie dans le système carcéral? Sommes-nous sur la bonne voie? Quelles améliorations devons-nous apporter, compte tenu de la psychologie associée à l’incarcération?
    Les institutions fédérales offrent des programmes. Ils souffrent tous de lacunes importantes, mais le problème est grave dans le cas des programmes de soutien aux toxicomanes. Autrefois, les programmes portaient sur des thèmes particuliers. Selon la nature de leur infraction, les détenus avaient accès à différents programmes. Ainsi, ils pouvaient suivre des programmes sur la pornographie juvénile, la gestion de la colère ou la toxicomanie.
    En réalité, la consultation a été regroupée en un programme général qui s’applique à tous les détenus. Ils doivent tous le compléter, qu’il s’applique à eux ou non. Ce regroupement a certainement créé un goulot d’étranglement. On attend des années avant de commencer le programme en raison d’un manque de personnel et du fait que tous les détenus doivent le compléter.
    Une personne qui a été détenue, et qui n’a pas eu de soutien, est enfin condamnée; elle se retrouve dans une institution fédérale où elle ne reçoit aucune aide. Elle subit tous les stress et toutes les choses qui vont avec l’incarcération et elle aura accès à un programme peut-être une année plus tard.
    Parce qu’ils n’ont pas complété leur programme, on refuse d’accorder des audiences de libération conditionnelle à certains de nos proches qui font partie du groupe Mothers Offering Mutual Support, lorsqu’ils ont purgé le tiers ou la moitié de leur peine. Ce n’est pas parce qu’ils refusaient de participer; c’est parce que les programmes ne leur étaient pas offerts. Ils sont enfin libérés à la date d’expiration du mandat sans avoir suivi de programme.
    Merci beaucoup.
    Madame Hannem, tout à l’heure, en réponse à ma question, vous avez dit qu’il n’y avait pas d’impact significatif sur le genre. Qu’en est-il pour nos communautés autochtones? Ce Comité s’intéresse beaucoup à la situation des Autochtones dans notre système correctionnel. En fait, nous examinons cette question. Existe-t-il des effets différents possibles sur la population autochtone dans le milieu carcéral?
    En général et la plupart du temps, les Autochtones qui entrent dans le système carcéral fédéral ont des problèmes et des antécédents de toxicomanie. Évidemment, il s’agit des séquelles de notre attitude coloniale à leur égard. Lorsque je parle de l’utilisation disparate du détecteur ionique et des mesures punitives à l’endroit des personnes qui ont des antécédents de toxicomanie ou d’infractions liées à la drogue, cela aurait certainement une incidence disproportionnée sur cette population.
    J’encourage le Comité à réfléchir de façon encore plus générale à la question de la drogue dans les prisons, car nous pouvons mettre en place des programmes, mais les prisons ne sont pas des endroits agréables ou propices aux programmes de réadaptation. Les endroits qui ont eu le plus de succès en matière de réadaptation, de réduction de la consommation et de la récidive adoptent une approche plus générale quant au traitement des prisonniers.
    Même en ce qui concerne les plus récents rapports médiatiques sur la piètre qualité des aliments, toutes ces choses ont une incidence sur le moral et la santé mentale des détenus, sur la façon dont ils composent avec les agents correctionnels qui offrent les programmes, et sur leur réceptivité à ces programmes. Évidemment, suivre un traitement pour une dépendance ne figure peut-être pas dans les priorités d’une personne qui souffre de problèmes mentaux, de dépression, ou d’alimentation inadéquate.

  (1040)  

    Merci beaucoup, monsieur le président. Voilà les questions que je souhaitais poser.
    Merci, monsieur Spengemann.
    Au nom du Comité, je désire remercier chacun d’entre vous pour les témoignages clairs et convaincants que vous avez livrés ce matin. Je sais que certains d’entre vous ont fait de grands efforts pour être ici à très court préavis. Encore une fois, je vous remercie.
    La séance est levée.
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