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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 026 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 13 juin 2022

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

[Français]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 26e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 111.1(1) du Règlement, la motion adoptée par le Comité le jeudi 9 juin 2022, le Comité entreprend l'étude du certificat de nomination de Philippe Dufresne au poste de commissaire à la protection de la vie privée, renvoyée au Comité le mercredi 8 juin 2022.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre témoin et le féliciter pour sa nomination.
    Je vais lui céder la parole. Il disposera de cinq minutes pour faire sa déclaration préliminaire.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie.
    C'est un grand honneur et un privilège pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui afin de discuter des qualifications et des compétences qui me serviront à assumer le rôle important de commissaire à la protection de la vie privée du Canada.
    Je profite de l'occasion pour vous remercier pour tout le travail que vous accomplissez à titre de parlementaires, qu'il s'agisse de légiférer, de délibérer ou de demander des comptes au gouvernement.
    J'ai consacré ma vie professionnelle au renforcement des institutions publiques du Canada ainsi qu'à la protection et à la promotion des droits fondamentaux des Canadiens.

[Français]

    J'ai œuvré en ce sens pendant 15 ans dans le contexte des droits de la personne à la Commission canadienne des droits de la personne. Je poursuis ce travail depuis sept ans dans le contexte du droit administratif et constitutionnel, en ma qualité de légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes. J'ai l'intention de continuer dans cette voie si je suis nommé commissaire à la protection de la vie privée du Canada.
    Avant d'être nommé légiste de la Chambre, en 2015, j'ai occupé le poste d'avocat général principal à la Commission canadienne des droits de la personne; j'étais responsable des activités juridiques et opérationnelles de la Commission en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, ainsi que de la Loi sur l'accès à l'information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[Traduction]

    J'ai agi comme avocat principal pour la Commission dans l'affaire historique concernant l'aide à l'enfance des Premières Nations qui a été portée devant le Tribunal canadien des droits de la personne, laquelle a débouché sur le plus gros règlement du genre de l'histoire du Canada. Auparavant, j'ai été avocat principal dans l'affaire Chambre des communes c. Vaid devant la Cour suprême du Canada. Cette cause fait aujourd'hui jurisprudence en droit canadien en ce qui a trait au privilège parlementaire.
    En plus de l'affaire Vaid, j'ai plaidé devant la Cour suprême à 14 occasions distinctes, dans des affaires portant sur des questions telles que le partage des compétences, l'impartialité des tribunaux, les mesures d'accommodement pour les personnes ayant des déficiences, la liberté d'expression, et l'équilibre entre la sécurité nationale et les droits de la personne.
    Il existe des corrélations directes entre mon expérience à la Commission et le rôle de commissaire à la protection de la vie privée. Mon travail consistait notamment à promouvoir et à protéger les droits fondamentaux et à faire enquête sur des plaintes de manière rapide et équitable sur le plan procédural. Il exigeait d'assurer un juste équilibre entre droits fondamentaux et considérations d'intérêt public et d'être en mesure d'expliquer des concepts complexes en termes simples et de manière accessible. Il visait également à travailler avec les secteurs public et privé dans le but de trouver des solutions constructives et d'instaurer une culture axée sur les droits fondamentaux, à prendre en considération les normes et les comparateurs internationaux et à collaborer avec les homologues provinciaux.

  (1105)  

[Français]

    Dans mon rôle actuel de légiste, je suis le conseiller juridique principal de la Chambre et je dirige le bureau chargé de fournir des services juridiques et législatifs à la Chambre et à ses députés.
    J'ai défendu avec succès les privilèges de la Chambre dans l'affaire Boulerice c Bureau de régie interne. J'ai dirigé l'équipe d'avocats qui a représenté le Président de la Chambre dans le contexte de la demande de contrôle judiciaire, l'an dernier, qui portait sur les pouvoirs de la Chambre d'exiger la production de documents.
    De multiples comités m'ont chargé d'interpréter et d'appliquer les principes du droit en matière de protection de la vie privée. Tout récemment, on m'a demandé d'examiner les caviardages proposés dans des documents dont des comités avaient exigé la production dans le cadre de leurs études.

[Traduction]

    J'ai joué un rôle clé dans l'élaboration de codes et de politiques de prévention du harcèlement sur la Colline et pour ce qui est de garantir un environnement sûr et inclusif pour les députés et les employés. J'ai été fier d'être le champion de la diversité et de l'inclusion à l'Administration de la Chambre durant les cinq dernières années.
    Tout au long de ma carrière, j'ai toujours accordé la plus haute importance au service public et trouvé qu'il était essentiel de donner en retour à la collectivité et à ma profession.

[Français]

    Ainsi, j'ai occupé diverses fonctions au sein de l'Association du Barreau canadien, notamment à titre de président de la section du droit constitutionnel et d'administrateur au comité exécutif de l'ABC‑Québec. J'ai également été président de la Commission internationale de juristes Canada, une institution qui vise à promouvoir l'indépendance judiciaire au Canada et à l'échelle internationale.
    Je crois en l'importance de l'éducation et du mentorat. J'ai enseigné à temps partiel dans plusieurs facultés de droit, et, chaque année, je suis juge au concours bilingue de plaidoirie en droit administratif Laskin.
    Dans toutes mes fonctions, j'ai été animé par les valeurs que sont l'équilibre, l'impartialité, l'équité, l'excellence, la primauté du droit, l'intérêt public et le respect des processus démocratiques et législatifs. Si je suis nommé, ce sont les valeurs que je compte véhiculer dans l'exercice de mes fonctions de commissaire à la protection de la vie privée du Canada.

[Traduction]

    Pour toutes ces raisons, j'estime que je peux apporter au poste de commissaire à la protection de la vie privée un éventail vaste et unique d'expériences et de connaissances, de même que la conviction profonde que les droits fondamentaux des Canadiens en matière de droit à la vie privée exigent qu'on déploie des efforts vigoureux et constants pour les défendre, les protéger, en faire la promotion et les faire connaître.
    À titre de commissaire à la protection de la vie privée, je me centrerai sur la protection de la vie privée comme droit fondamental, la protection de la vie privée comme moyen pour favoriser l'intérêt public et appuyer l'innovation et la compétitivité du Canada, et la protection de la vie privée comme moyen pour accentuer la confiance des Canadiens dans leurs institutions et dans l'économie numérique.

[Français]

     En terminant, je souhaite profiter de l'occasion pour remercier Daniel Therrien de son travail et de son leadership exceptionnels au cours des huit dernières années en tant que commissaire.
    J'ai été impressionné par l'excellent travail réalisé par le Commissariat durant son mandat. Si je suis nommé, je me réjouis à la perspective d'œuvrer avec ce groupe de professionnels dévoués pour protéger et promouvoir le droit à la vie privée des Canadiens.
    Sur ce, c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons d'abord entendre M. Bezan, qui dispose d'au plus six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à féliciter le commissaire Dufresne pour sa nomination. Vous avez toujours fait preuve d'intégrité et d'un grand professionnalisme. Je serai heureux de travailler avec vous.
    J'aimerais revenir sur certains moments de votre expérience à titre de légiste parlementaire de la Chambre des communes, surtout sur votre travail au sein du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes, qui s'est penché sur les fuites au laboratoire de Winnipeg et sur l'affaire de privilège parlementaire dans le cadre de laquelle vous avez plaidé au nom du Parlement.
    Pouvez-vous nous parler de cela dans le contexte de la Loi sur la protection des renseignements personnels? Pouvez-vous nous parler du privilège parlementaire et de la suprématie du Parlement, des comités devant lesquels vous témoignez et du travail que nous faisons?
    Je crois que les affaires de privilège parlementaire et mon travail à titre de légiste parlementaire ont donné lieu à la reconnaissance, à juste titre, du rôle fondamental du Parlement, de la Chambre et des comités, et de la nécessité pour ces entités d'avoir la capacité et le pouvoir de faire leur travail de manière autonome, sans faire l'objet d'un examen. En même temps, j'ai toujours fait valoir à la Chambre et aux comités que ce pouvoir devait être exercé de manière responsable, et tenir compte de l'intérêt public.
    C'est la même chose dans le contexte de la vie privée: je crois fermement que le droit à la vie privée est un droit fondamental, qui doit être protégé. En même temps, je ne crois pas que la vie privée soit en opposition avec l'intérêt public ou l'innovation. Les deux sont possibles — il faut avoir les deux — et en tant que commissaire, je travaillerai à atteindre cet objectif.

  (1110)  

    Comme vous le savez, le président de l'Agence de la santé publique du Canada de l'époque, Iain Stewart, avait refusé de déposer ces documents et avait été convoqué à la barre de la Chambre des communes, où il a été réprimandé par le Président.
    Croyez-vous qu'il s'agissait d'une manière appropriée et cohérente de traiter avec cette personne et de protéger l'intégrité du Parlement?
    Je laisserais la Chambre juger du caractère approprié des décisions des comités. Ce que j'ai dit aux comités, c'est qu'ils ont le pouvoir — tout comme la Chambre — de demander des documents. Lorsqu'ils ne les reçoivent pas, la Chambre peut user de certains pouvoirs, notamment prendre les mesures qu'elle a prises dans ce cas en particulier. Toutefois, il revient à la Chambre et aux comités de prendre ces décisions.
    Elles ne seront pas toujours appropriées, et c'est ce que le privilège reconnaît. C'est une décision qui revient à la Chambre.
    Parce que le gouvernement avait refusé de transmettre les documents et...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Veuillez arrêter l'horloge, s'il vous plaît.
    Oui, l'horloge est arrêtée.
    Madame Khalid, vous invoquez le Règlement.
    Je me questionne sur la pertinence de ces interventions. M. Dufresne témoigne devant nous en tant que commissaire à la protection de la vie privée. Je ne comprends pas pourquoi nous lui posons des questions sur son rôle en tant que légiste parlementaire.
    C'est précisément le but de la réunion: passer en revue le curriculum vitae et l'expérience professionnelle du candidat. Oui, il faut nous assurer de la pertinence de nos questions, mais je crois que c'est l'objectif de la réunion d'aujourd'hui.
    Veuillez poursuivre.
    Merci, monsieur le président.
    Avant que vous ne redémarriez l'horloge, pour réfuter ce rappel au Règlement, je dirais que le Comité est là pour examiner les qualifications, l'expérience et les antécédents d'une personne nommée par le gouvernement. C'est la raison pour laquelle nous tenons cette réunion en vertu du Règlement et...
    Merci, monsieur Bezan. J'ai pris une décision. Je crois que cela suffit.
    J'ai redémarré l'horloge. Allez‑y.
    Je vais poursuivre, monsieur le président.
    Pour revenir à cette affaire, le gouvernement a pris la décision sans précédent de refuser de donner les documents et a même menacé de traîner le Parlement — la Chambre des communes — devant la Cour suprême du Canada. En tant que légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes, vous auriez été en position de témoigner devant la Cour suprême.
    S'il n'y avait pas eu d'élections, est‑ce que vous vous seriez préparé à une telle éventualité? Quels arguments auriez-vous utilisés pour défendre la suprématie du Parlement?
    Puisque nous représentions le Président de la Chambre dans cette affaire, nous avons transmis des mémoires écrits à la Cour fédérale. Notre position, dans cette affaire, était que la Chambre avait l'autorité requise pour prendre les mesures qu'elle avait prises, et que cette autorité n'était pas restreinte par l'adoption de la Loi sur la preuve au Canada. Ce dossier a été abandonné après la dissolution de la Chambre.
    C'est ainsi que s'est déroulé le processus judiciaire.
    Même s'il y a eu dissolution de la Chambre et que la législature a pris fin, croyez-vous qu'il s'agit toujours d'une violation du privilège du Parlement du Canada et qu'il faudrait régler cette affaire à un certain moment? Est‑ce que cette affaire mine la validité constitutionnelle de la Chambre des communes?
    Je crois que, dans cette affaire, la Chambre a pris une décision. Il y a eu contestation; la Chambre et le Président ont pris une décision et ont déposé des arguments juridiques devant un tribunal. En tant que légiste parlementaire, j'étais d'avis qu'il s'agissait de la chose à faire puisque la Chambre avait l'autorité juridique de faire ce qu'elle a fait, et qu'elle n'était pas restreinte par la Loi sur la preuve au Canada à cet égard.
    Merci.
    Monsieur le commissaire, vous et moi discutions avant la réunion des nouvelles technologies et du travail entrepris par le Comité sur les données sur la mobilité, la reconnaissance faciale et l'intelligence artificielle. Lorsque vous pensez à l'avenir, comment voyez-vous votre rôle dans le cadre de la modernisation des lois et règlements actuels afin qu'ils suivent les changements? Quelle sera l'incidence d'une telle modernisation sur la protection de la vie privée des Canadiens?
    C'est une période très importante en matière de protection de la vie privée. C'est l'une des nombreuses raisons pour lesquelles j'ai voulu être commissaire. Il faut moderniser les deux lois fondamentales en matière de vie privée: la Loi sur la protection des renseignements personnels et la LPRPDE. Les parlementaires auront un rôle à jouer à cet égard, tout comme le commissaire, les intervenants et l'industrie. C'est une priorité. En tant que commissaire, je me ferai un devoir de mettre de l'avant les valeurs que j'ai exprimées ici aujourd'hui dans le cadre de l'élaboration de nouvelles lois qui pourraient être présentées à la Chambre.
    La sensibilisation est très importante pour moi. Je crois que les Canadiens doivent en savoir plus sur la protection des renseignements personnels. Le commissaire Therrien a fait un excellent travail à cette fin et je serai heureux de poursuivre sur cette lancée. Le rapport du Comité sur la mobilité est un bon exemple de document pouvant servir à informer la population et à expliquer ces concepts complexes, mais qui touchent absolument tout le monde. Ce sera l'un de mes objectifs.

  (1115)  

    Merci.
    Monsieur Fergus, vous disposez d'au plus six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord féliciter M. Dufresne de sa nomination et lui souhaiter la bienvenue.
    Maître Dufresne, cela fait plusieurs années que je suis votre carrière avec beaucoup d'intérêt. Je dois vous dire que je ne peux penser à une meilleure personne pour occuper ce poste important, et même névralgique.
    Maître Dufresne, j'ai quelques questions à vous poser.
    Mon collègue M. Bezan a parlé de votre carrière antérieure en tant que conseiller parlementaire de la Chambre des communes. Personnellement, j'aimerais plutôt porter mon attention sur votre expérience en tant qu'avocat général principal de la Commission canadienne des droits de la personne.
    De quelle façon ce rôle peut-il vous servir en tant que commissaire à la protection de la vie privée?
     Merci beaucoup, monsieur Fergus.
    Je crois que mon rôle au sein de la Commission canadienne des droits de la personne me servira bien. Il m'a bien formé, parce qu'il y a beaucoup de similarités entre ce mandat et celui du commissaire à la protection de la vie privée.
    La Commission canadienne des droits de la personne traite d'une loi fondamentale. Elle traite de droits fondamentaux des Canadiens, qui doivent être protégés et interprétés de manière large et rigoureuse. En même temps, on parle d'une loi qui doit être interprétée dans la réalité, en tenant compte de considérations d'intérêt public et en tenant compte des répercussions. On doit faire en sorte qu'il y ait une meilleure compréhension de cette loi, tant pour les Canadiens que pour l'industrie et les gouvernements. Il s'agit d'utiliser plusieurs outils pour arriver à l'objectif, soit celui de protéger et de promouvoir ces droits fondamentaux. Les outils peuvent être l'éducation. Les outils peuvent être l'interaction et les ententes au préalable. Les outils peuvent être des politiques ou des lois. Ils peuvent être des mécanismes de plainte. Ils peuvent être des décisions juridiques. Il y a une multitude d'outils possibles.
    En cette période où les changements technologiques ont tellement de répercussions sur notre société, c'est important de considérer tous ces outils et les outils proactifs. J'ai acquis cette expérience à la Commission canadienne des droits de la personne où je traitais de dossiers en matière de parité salariale, entre autres. Ce sont des dossiers qui ont donné lieu à des dédommagements énormes pour les employés qui avaient été victimes de discrimination. Cela prenait beaucoup de temps, et cela demandait des plaintes. On l'a vu dans la nouvelle Loi sur l'équité salariale, qui est un modèle plus proactif.
    Je pense que cette combinaison d'outils proactifs et de systèmes de plainte, tout cela fondé sur un modèle de droit, comporte des similarités avec mon nouveau rôle et m'aura bien formé. Mon expérience en plaidoirie devant les tribunaux supérieurs, dont la Cour suprême, m'a bien servi. Cette expérience m'est utile pour communiquer des concepts complexes de façon simple et accessible pour tous les Canadiens.
    Je vais poursuivre dans la même veine.
    Vous avez mentionné que ce rôle existe aussi pour déterminer les droits des individus à la vie privée par rapport à leur gouvernement.
    Quand vous avez reçu l'appel au sujet de votre candidature, j'imagine que vous avez commencé à visualiser votre rôle dans ce poste. Quelle devrait être l'étendue de vos responsabilités, non seulement en matière de vie privée des Canadiens par rapport à leur gouvernement, mais aussi en matière de vie privée des Canadiens par rapport au secteur privé?
    Selon certains, nous vivons à une époque où la vie privée des gens est menacée par tous les logiciels, par toutes les compagnies privées qui examinent et monnaient toutes les données personnelles des individus.
    Comment voyez-vous votre rôle relativement à cet aspect de la vie privée?

  (1120)  

    Je vous remercie de votre question.
    C'est un fondamental. Dans une de mes réponses précédentes, je disais que le droit à la vie privée, les enjeux de la vie privée touchent tout le monde. Cela touche les personnes plus jeunes, les personnes plus âgées, les personnes fascinées par la technologie, et même celles qui ne le sont pas. Il y a énormément de potentiel et d'innovation à participer à cela. Cependant, cela comporte aussi des risques.
    C'est très important de pouvoir compter sur un régime de protection à la vie privée pour ce qui est de l'industrie privée. En tant que commissaire, mon rôle serait d'abord d'être là pour aviser le Parlement lorsque la prochaine modernisation de la Loi sur la vie privée dans le secteur privé sera présentée au Parlement. Tout commence par cette loi et les principes qui en découlent pour répondre aux recommandations que vous avez faites dans votre rapport.
    Le commissaire à la vie privée joue également un rôle d'interlocuteur avec les Canadiens, et avec l'industrie privée aussi. C'est très important qu'il y ait un régime juridique et qu'il y ait des incitatifs allant dans la bonne direction. Je pense qu'il faut aussi des échanges avec les représentants de l'industrie privée pour connaître leurs préoccupations et leurs réalités. C'est important que le régime soit à la fois pratique et facile d'accès pour les Canadiens afin qu'ils comprennent leurs droits à la vie privée et leurs droits de refus. C'est aussi important de faciliter l'accès pour l'industrie privée afin qu'elle comprenne ce qu'elle doit faire. Ce rôle du commissaire était prévu, qu'il s'agisse de revoir les codes de pratique ou de donner des avis.

[Traduction]

    Je vais devoir vous interrompre.
    Je suis désolé, il est temps de passer la parole à M. Villemure.
    Allez‑y, monsieur Villemure.

[Français]

     Je rassure mon collègue M. Fergus: je vais poursuivre dans la même veine que lui.
    Monsieur Dufresne, je vous félicite pour votre nomination. Votre curriculum vitae parle de lui-même. Nous sommes heureux de vous recevoir ici aujourd'hui.
    J'aimerais aborder quelques éléments.
    Plusieurs citoyens canadiens trouvent qu'ils sont sous surveillance et que cette surveillance endommage leur confiance envers les institutions. Quelle est votre opinion sur cette surveillance?
    Comme cela a été mentionné devant ce comité, il est important que le régime ne soit pas axé exclusivement sur la notion de consentement, qu'il ne remette pas complètement aux citoyens la responsabilité de s'informer sur ces dispositions, qui sont souvent très complexes, de les comprendre et de dire « oui » ou « non ».
     Il faut rassurer les Canadiens en utilisant un régime juridique fondé sur un modèle de droit fondamental. Ce régime doit encadrer certaines pratiques qui ne devraient pas être permises même s'il y a consentement et d'autres qui pourraient l'être sans consentement. Il y a aussi un élément de transparence. Il faut que les entreprises et le gouvernement adoptent des approches proactives et fassent des vérifications relatives à la vie privée. Il faut avoir ce qu'on appelle la protection intégrée de la vie privée et une meilleure communication relativement à ces dispositions. Ainsi, les Canadiens vont savoir ce qui se passe réellement. Parfois, cette préoccupation est fondée, mais elle peut aussi venir du fait qu'on ne comprend pas ce qui se passe, ce qui génère des doutes et des soupçons.
    L'un des thèmes qui ressortaient de votre récent travail sur la mobilité était justement la communication de ce qui était fait, les données qui étaient collectées, la raison pour laquelle elles ont été collectées ainsi que l'utilisation de ces données. Il y avait beaucoup de préoccupations.
    La récente enquête sur Tim Hortons a soulevé d'autres préoccupations de ce type.
    À mon avis, il y a beaucoup à faire en ce qui a trait au régime juridique, à la communication et à l'éducation.
    Les événements passés nous ont démontré que les entreprises sont quand même créatives et qu'entamer un dialogue avec elles est une très bonne idée. Cependant, il y aura toujours des choses légales, mais non éthiques.
    Dans de tels cas, quelle proactivité entendez-vous adopter afin d'être à jour avec un marché qui est toujours en mouvement?
    Je pense qu'il faut avoir des échanges continus avec l'industrie privée, mais également avec les citoyens, les groupes d'intérêt, ainsi que les milieux universitaire et parlementaire.
    Quant à ce qui est légal, mais non éthique, cela soulève des questions très importantes. Si c'est légal et non éthique, est-ce que cela devrait continuer d'être légal? Le régime juridique ne devrait-il pas encadrer cela?
     Lorsque je travaillais pour la Commission canadienne des droits de la personne, j'avais des interactions avec des dirigeants qui étaient de bonne foi et qui voulaient absolument faire la bonne chose. Cependant, ils faisaient face à plusieurs obligations juridiques dans tel ou tel domaine. Il y avait une flexibilité, un cadre. C'étaient des souhaits, mais ce n'était pas obligatoire sur le plan juridique. Les gens établissaient leurs priorités.
    À mon avis, il faut mettre les incitatifs au bon endroit. Si on ne fait que dire que ce sont des voeux pieux ou un idéal, il n'est pas réaliste de penser que les entreprises vont nécessairement donner la priorité à cela au détriment des obligations juridiques qui comportent des délais et des conséquences.

  (1125)  

    Il faut donc quelque chose de clair.
    Nous avons récemment présenté un rapport sur la mobilité. Le commissaire Therrien nous a dit qu'il avait été consulté, mais qu'il n'avait pas été impliqué dans l'étude en question.
     La fonction de commissaire est garante de la confiance du citoyen envers le gouvernement. Que doit-on penser lorsque le gouvernement lui-même ne consulte pas son propre représentant dans de tels cas?
    Dans les échanges que vous avez eus avec le commissaire Therrien, il a noté qu'il avait offert ses services, mais que le gouvernement avait choisi d'utiliser ses propres experts. Je crois que le commissaire Therrien a reconnu que le gouvernement avait le droit de faire cela et que le commissariat n'était pas nécessairement le seul expert.
    Cependant, là où cela devient important, c'est sur le plan de cette confiance. Le fait qu'on soit allé chercher des avis internes a généré des soupçons. Ces avis seront-ils aussi indépendants que les avis externes? C'est un rôle que le commissaire peut jouer, et cela a fait l'objet de recommandations dans votre rapport. Le commissaire peut faire des audits proactifs. Il pourrait donc vérifier cela, en discuter avec vous et ensuite, valider ce que vous faites. Je pense que ce serait utile.
     Croyez-vous que ce qui est arrivé, c'est-à-dire la consultation et non l'implication du commissaire, était justement un manque de crédibilité du Commissariat ou était-ce plutôt une prérogative ou un droit que le gouvernement a choisi d'exercer?
    J'hésite à me prononcer ou à spéculer là-dessus, parce que je n'étais impliqué dans ce dossier d'aucune façon. Cela dit, je pense que, en ce qui a trait aux conséquences dont on a discuté devant ce comité, on a pu entendre plusieurs interlocuteurs vous dire qu'il était préférable que le commissaire joue ce rôle. Vous avez fait des recommandations à cet égard.
    Puisque c'est encore un peu flou chez les citoyens, qu'est-ce que le Commissariat pourrait faire en ce qui concerne l'éducation en matière de vie privée?
    Une recommandation a été faite à cet égard dans le cadre de la loi fédérale sur la protection de la vie privée, qui a un mandat plus explicite à ce sujet et qui existe déjà dans le cadre de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, pour le domaine privé.
    Il existe plusieurs outils, mais, là encore, il faut être créatif. Le Commissariat publie énormément d'excellents documents, mais je pense qu'on pourrait envisager de créer un modèle éducatif destiné aux étudiants du secondaire et aux élèves plus jeunes, et pas nécessairement aux experts ou aux praticiens. Je crois que la Commission d'accès à l'information du Québec a travaillé à cela.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Green, qui dispose d'au plus six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais commencer par vous faire part de ce qui me déçoit avec le témoignage de M. Dufresne au sujet de cette nomination aujourd'hui: je n'aurai pas eu l'occasion de profiter de son savoir à titre de légiste parlementaire. Il était évidemment très qualifié et fort respecté, et maintenant il s'acquittera de nouvelles fonctions.
    Je tiens premièrement à vous remercier pour votre service public incroyable dans le cadre de ce rôle. J'ai eu le privilège de vous voir devant le comité d'examen de la Loi sur les mesures d'urgence, et vous nous avez donné de sages conseils avec la franchise à laquelle je m'attends de vous lorsque vous serez commissaire.
    Mon ami, M. Fergus, a parlé du temps que vous avez passé à la Commission des droits de la personne. Est‑ce que vous pourriez nous en parler? Je vous ai entendu parler d'un « droit fondamental ». Pouvez-vous d'abord nous expliquer pourquoi vous croyez que le droit à la vie privée est un droit fondamental pour les Canadiens et comment vous useriez d'une approche fondée sur les droits dans le cadre de votre travail au Commissariat à la protection de la vie privée?
    Merci, monsieur Green, pour vos bons mots et merci aussi pour votre travail dans le cadre de l'examen de la Loi sur les mesures d'urgence. C'était un privilège pour moi de témoigner devant vous en cette capacité.
    Je crois que les droits de la personne et le droit à la protection de la vie privée sont essentiels. Le droit à la vie privée a été reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, alors que nous reconnaissions l'importance des droits de la personne. Ce droit aborde des éléments d'une importance fondamentale — et encore une fois, il a été reconnu dès 1948 — pour les particuliers, qui doivent être protégés contre les actions que pourrait prendre l'État. C'était l'objet de la Déclaration. Nous voyons aujourd'hui que, dans le contexte de la protection de la vie privée, il n'est pas uniquement question de l'État, mais aussi du marché, et nous avons utilisé le terme « capitalisme de surveillance ».
    Le droit à la vie privée a été reconnu. Il a été reconnu par la Cour suprême à titre de valeur fondamentale d'un état démocratique moderne dans l'affaire Dagg, puisqu'il est associé à l'autonomie physique et morale, et à la liberté de pensée, d'action et de décision. Je crois que si c'était vrai en 1948 et 1997 dans l'affaire Dagg, c'est certainement vrai aujourd'hui, alors que les possibilités associées à la collecte, à l'obtention et au partage des renseignements sans le consentement d'une personne sont accrues.
    C'est ce que je défendrai avec passion dans le cadre de mon rôle, si je suis nommé à titre de commissaire. C'est ce qu'a fait le commissaire Therrien. Je continuerai sur cette voie et j'espère — et je crois — que mon rôle à titre de praticien des droits de la personne me donnera une crédibilité en ce sens.

  (1130)  

    Vous avez parlé de la LPRPDE, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Bien sûr, il y a aussi la Loi sur la protection des renseignements personnels. Comment percevez-vous votre rôle à titre de conseiller du Parlement au sujet de ces mesures législatives?
    Je considère que mon rôle en matière d'offre de conseils consiste à comparaître devant votre comité, à publier des avis et des recommandations et à discuter avec les fonctionnaires, les parlementaires et les intervenants du milieu universitaire. Je pense que l'une des discussions que j'ai vues au sein du CPVP portait sur la question d'échanger davantage avec le milieu universitaire, les praticiens, les citoyens, l'industrie et les secteurs privé et public.
    Je crois qu'il y a un rôle très important à jouer à cet égard, mais les décisions relatives au contenu de la LPRPDE et de la Loi sur la protection des renseignements personnels modernisées relèvent bien entendu de la prérogative du Parlement, et vous reviendront donc — c'est‑à‑dire à votre comité et, au bout du compte, à la Chambre. Toutefois, à titre de commissaire, je ferai certainement tout en mon pouvoir pour vous fournir les meilleurs conseils dans les circonstances et pour m'assurer que le nouveau projet de loi qui deviendra loi soit fondé sur les droits et qu'il inspire confiance aux Canadiens, afin qu'ils participent à l'économie numérique et qu'ils puissent faire confiance à leurs institutions.
    Quelles seront vos principales priorités dans le cadre de votre mandat? Je suis sûr que vous avez déjà beaucoup réfléchi à cette question.
    Mes principales priorités seront de veiller à ce que les Canadiens puissent avoir une meilleure compréhension et une meilleure protection. Le droit du secteur privé a des attentes qui peuvent passer en premier. C'est certainement le cas avec le projet de loi C‑11. Ce serait donc une priorité de s'assurer que les Canadiens puissent participer à l'économie numérique. Le marché canadien…
    Avez-vous d'autres commentaires à formuler sur le projet de loi C‑11? Je suis heureux que vous l'ayez mentionné, car c'est certainement un sujet sur lequel nous semblons nous être enlisés. J'aimerais que vous nous donniez votre point de vue sur le projet de loi C‑11, c'est‑à‑dire l'ancien projet de loi.
    Un grand nombre de commentaires formulés par le commissaire devant le Comité en ce qui concerne le fait de se pencher sur les renseignements anonymisés, le modèle fondé sur les droits, les pouvoirs accrus pour le commissaire à la protection de la vie privée pour rendre des ordonnances, les sanctions et le régime connexe montrent que ce sont toutes des choses importantes, tout comme le sont le consentement et sa validité, la proportionnalité et la nécessité, et le fait de s'assurer que certaines fins et certaines utilisations sont définies comme étant soit interdites, soit autorisées, sans consentement, mais dans des cas appropriés.
    Ce sont là encore des possibilités. Nous devons les harmoniser avec le secteur international, le RGPD et le projet de loi no 64 au Québec, afin de s'assurer qu'il y a interopérabilité et que nous pouvons traiter avec le secteur privé et le secteur public d'une manière cohérente. Nous avons vu, dans le cadre de votre étude sur la mobilité, ces partenariats public-privé. Nous les voyons de plus en plus, et nous devons donc trouver une façon d'harmoniser les choses, afin que le gouvernement ne puisse pas faire appel à des sous-traitants du secteur privé et que la même protection soit offerte partout.

  (1135)  

    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    Monsieur Williams, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Par votre entremise, et pour faire écho aux sentiments du reste de nos collègues, il semble que nous ayons confié ce rôle à la bonne personne. Je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais parler un peu plus de l'ancien projet de loi C‑11. La vie privée est évidemment beaucoup plus difficile à protéger de nos jours, car elle est numérique. Vous avez mentionné le consentement et la proportionnalité et vous avez parlé du RGPD. Dans le cadre de vos fonctions de légiste, avez-vous vu autre chose au sujet de l'évaluation de l'ancien projet de loi C‑11 et de son efficacité? Croyez-vous qu'on devrait s'inspirer du RGPD de l'Europe?
    Certaines des préoccupations qui ont été soulevées — et le CPVP a formulé de nombreux commentaires, y compris récemment devant votre comité — ne revenaient pas nécessairement sur le projet de loi C‑11, mais anticipaient, en ce qui concerne la nouvelle version, ce que devraient être certains de ces éléments. Le premier élément est un cadre fondé sur les droits, c'est‑à‑dire qu'il faut s'assurer que le régime n'est pas exclusivement fondé sur le consentement et qu'il reconnaît la vie privée comme un droit fondamental. Il est très important d'aborder la question des renseignements dépersonnalisés et de s'assurer que la réidentification est interdite, et il faut vérifier que cela n'est pas en marge de la loi. Il faut aussi aborder de nouvelles notions qui n'étaient pas présentes, comme les décisions automatisées et l'intelligence artificielle.
    Dans le cadre du projet de loi C‑11, il y a eu des discussions pour déterminer s'il fallait mettre sur pied un tribunal qui examinerait les décisions du commissaire en matière de pénalités. Le CPVP a estimé que cela ne devrait pas être le cas et que la décision définitive devrait revenir au CPVP, et qu'elle doit faire l'objet d'une révision judiciaire. Il sera important d'examiner cette question. Je crains aussi que l'ajout de plusieurs étapes d’examen ne fasse que prolonger la prise d'une décision définitive. Je suis aussi préoccupé à l'idée que le commissaire fédéral a peut-être moins de pouvoirs que ses homologues provinciaux, mais d'autres options ont été soulevées au cours de cette discussion quant à la possibilité d'un appel direct auprès de la Cour d'appel fédérale ou d'un tribunal spécialisé.
    L'essentiel est de veiller à ce que le CPVP soit en mesure de fonctionner efficacement dans le cadre de ce régime. Il y a eu des discussions au sujet des ressources. On a soulevé une préoccupation liée aux nouveaux pouvoirs ou aux nouvelles responsabilités du commissaire en matière de vérification des codes de pratique. Le commissaire, à juste titre selon moi, a soulevé le fait que, si c'est le cas, il pourrait être nécessaire d'accorder une certaine discrétion quant aux questions sur lesquelles se concentrera ce travail, car autrement, cela pourrait très rapidement prendre une grande partie des ressources.
    C'est une chose que j'ai faite au sein de la Commission canadienne des droits de la personne. En effet, nous avons adopté une approche stratégique en matière de litige d'intérêt public, dans laquelle nous concentrons nos principales ressources sur les cas importants qui auront le plus grand impact pour les Canadiens. Cette approche a été très fructueuse.
    Cela me semble formidable.
    Je pense que la plus grande critique qu'on a formulée à l'égard du projet de loi C‑11, c'est qu'il a autant la capacité d'étouffer l'innovation que de la protéger. Vous avez dit plus tôt à M. Bezan que la protection de la vie privée ne s'oppose pas à l'innovation et que nous pouvons avoir les deux. Comment, selon vous, pouvons-nous avoir les deux? À votre avis, quel est l'équilibre approprié entre la protection de la vie privée et l'innovation?
    Je dirais que c'est pour la même raison que je ne considère pas que les droits de la personne limitent l'innovation ou l'intérêt public. Ce sont des notions qui peuvent coexister, à condition d'avoir la collaboration nécessaire. Cela peut aussi nécessiter une meilleure compréhension et une meilleure communication, mais je considère que ces notions peuvent coexister dans le sens où des droits à la vie privée solides, bien établis et concrets encourageront les Canadiens à participer à l'économie numérique.
    Ce sera une bonne chose pour l'industrie. Cela permettra à l'économie et à l'industrie canadiennes d'inspirer la même confiance et la même crédibilité que leurs homologues en Europe et sur d'autres marchés. De manière générale, cela indiquera que nous soutenons les échanges et le commerce. Je ne crois pas que ces deux notions soient opposées.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur.
    Vous avez parlé de l'élargissement de la portée du rôle et du rôle que vous voyez le Commissariat à la protection de la vie privée jouer en ce qui concerne la Loi sur la protection des renseignements personnels et la LPRPDE. Je me demande donc surtout si ces lois ont besoin de mécanismes d'application rigoureux et de pénalités sévères et énergiques pour être efficaces.
    J'ai bel et bien abordé cette question, et je pense que je parlais d'incitatifs. En effet, je pense que les incitatifs sont importants. En ce qui concerne l'existence de ces pouvoirs et de ces pénalités, on espère toujours qu'on n'aura pas à les utiliser, mais je pense que le fait qu'ils existent donne plus de poids aux points de vue et aux positions exprimées par le CPVP. De plus, ils encouragent la conformité et l'élimination des retards. Si on a une recommandation qui doit ensuite être examinée et qui peut être transformée en une ordonnance plus tard si une demande est présentée au tribunal, cela ajoute du temps au processus. Je pense que nous observons une tendance à cet égard.

  (1140)  

    Voici ma dernière question, monsieur. Croyez-vous que votre bureau devrait être l'organe qui applique ces pénalités?
    Eh bien, il revient au...
    Il vous faudra répondre par oui ou non, car le temps imparti est écoulé.
    Est‑ce donc un oui ou un non?
    C'est au Parlement de décider, mais j'agirai en conséquence.
    Je vous remercie.
    Madame Khalid, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Dufresne, d'être avec nous aujourd'hui. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir proposé votre nom.
    Voici la première question que j'aimerais vous poser. Est‑ce que le fait d'avoir été légiste au Parlement et d'avoir assisté aux délibérations vous offre une perspective unique pour comprendre et… Même si vous aviez un rôle plus réactif en ce qui concerne les mesures que vous avez eu à prendre, dans votre rôle actuel de commissaire à la protection de la vie privée, pensez-vous que vous serez plus proactif en ce qui concerne les enjeux que vous avez définis comme étant prioritaires? On dit que le Commissariat à la protection de la vie privée reçoit beaucoup de plaintes. Le cas échéant, comment géreriez-vous les ressources pour être plus proactif?
    Je vous remercie.
    Pour moi, le rôle de commissaire à la protection de la vie privée est une combinaison, en quelque sorte, de mon expérience à titre d'avocat des droits de la personne pour la Commission et à titre de légiste à la Chambre. Je pense que dans le cadre de ce rôle, il est important de comprendre les parlementaires, les législateurs et les lois. Il y a aussi la capacité de travailler avec des membres de tous les partis qui ont des intérêts différents, de trouver un équilibre et de comprendre la situation.
    Pour ce qui est de la proactivité, je pense qu'à titre de commissaire à la protection de la vie privée, j'aurai tendance à être plus proactif lorsqu'il s'agit d'exprimer mes opinions sur ce que devraient contenir les lois. Ainsi, à titre de légiste, je ne faisais généralement pas cela, car je me concentrais davantage sur les droits et privilèges des parlementaires. Toutefois, je considère certainement que le rôle de commissaire consiste à être proactif en ce qui concerne la promotion, la protection et l'expression d'opinions et à veiller à ce que le processus de traitement des plaintes soit utilisé aussi efficacement que possible, c'est‑à‑dire en favorisant une utilisation stratégique, en me concentrant sur les cas importants, en m'assurant que les ressources sont utilisées aussi bien que possible et en veillant à ce que le commissaire puisse disposer de la marge de manœuvre nécessaire pour avoir le plus grand impact possible.
    Cela ne veut pas dire que les cas individuels ne sont pas importants. Ils le sont certainement. Il faut se concentrer sur ces cas, mais il est possible de faire les deux.
    Je vous remercie.
    Nous avons beaucoup parlé de la protection de la vie privée à l'ère numérique. Je pense que nous serions négligents si nous ne parlions pas aussi de l'autre côté de la médaille, c'est‑à‑dire l'ère de la désinformation. À titre de commissaire à la protection de la vie privée, pensez-vous avoir un rôle à jouer dans la lutte contre la désinformation qui se répand non seulement dans le secteur public, mais aussi dans le secteur privé?
    Je le pense. Je pense que cela incombe aux fonctionnaires. Je pense que cela s'appliquerait certainement aux hauts fonctionnaires du Parlement. Je considérais que la Commission était importante pour exprimer des points de vue qui permettent de rectifier les faits si des déclarations inexactes ont été faites.
    Il est essentiel, bien entendu, d'être toujours juste en ce qui concerne les faits, car de telles postes confèrent une grande crédibilité. Je pense que ce rôle devrait servir non seulement à formuler des conclusions qui peuvent être défavorables au gouvernement, mais aussi des conclusions qui sont favorables au gouvernement ou à l'industrie, par exemple en soulignant qu'une chose a été faite de manière appropriée et les raisons pour lesquelles c'est le cas. Cela contribue également à inspirer confiance.
    Cela correspond à l'idée d'avoir des audits proactifs, car ils peuvent permettre de rassurer les gens. Le but n'est pas de faire des reproches ou de condamner qui que ce soit, mais de travailler en collaboration et de trouver des solutions. S'il y a des choses à reprocher, s'il y a une résistance et s'il est nécessaire, au bout du compte, de déposer une plainte, c'est ce qui sera fait.
    On a aussi l'occasion de mettre en évidence les choses qui sont faites correctement. Je pense qu'il est important pour les Canadiens d'entendre cela et de l'entendre de la bouche des fonctionnaires.
     Je vous remercie.
    Nous étudions actuellement les technologies de reconnaissance faciale. Plusieurs témoins nous ont dit qu'un moratoire sur l'utilisation des technologies de reconnaissance faciale est nécessaire pour que le gouvernement puisse protéger le droit à la vie privée des Canadiens.
    J'aimerais connaître votre avis sur un tel moratoire et j'aimerais savoir si vous pensez qu'une telle mesure est possible. Pensez-vous qu'un tel moratoire permettrait réellement au gouvernement de continuer à protéger la vie privée des Canadiens?

  (1145)  

    Je pense que cela pourrait être approprié dans certaines situations.
    Ce qui est important, c'est de mettre en place un régime et des lignes directrices. Je pense que c'est ce que vous ont dit l'ancien commissaire à la protection de la vie privée, M. Therrien, et d'autres intervenants. Un cadre commun été publié le 2 juin — si je ne me trompe pas — et ce cadre indique la façon dont il faut procéder en ce qui concerne la proportionnalité, la nécessité, l'intrusion minimale et l'utilisation dans les cas appropriés en attendant qu'une loi soit mise en œuvre. C'est un bon document. C'est un bon point de départ pour savoir comment procéder dans la situation actuelle, mais on demande aussi fortement la création d'un cadre.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Dufresne, plusieurs entreprises demandent une loi qui établirait clairement ce qu'elles peuvent faire. D'autres entreprises disent que cela engendrerait des coûts et que cela les empêcherait de faire des affaires.
    Chez nos voisins américains, la législation sur la vie privée est plutôt minimale, disons. Quelle est votre position sur la capacité des grandes entreprises à se réglementer elles-mêmes à cet égard?
    Le problème de l'autoréglementation, c'est qu'il s'agit d'incitatifs. Dans certains domaines, il y a une réglementation, et des obligations sont prévues. On a vu des situations dans lesquelles il y avait eu une utilisation inappropriée ou des problèmes sur le plan de la perception.
    Quand il s'agit d'autoréglementation, je ne pense pas qu'on puisse avoir la confiance qui accompagne un régime de droit et qui entraîne des éléments plus précis et plus clairs pour les Canadiens.
    C'est un problème complexe et c'est une réalité qui nous touche tous. Nous avons tous vu les exemples de Tim Hortons, Facebook et Clearview AI, qui démontrent que nous avons besoin d'un régime à cet égard.
    Merci beaucoup.
    Il ne me reste que très peu de temps et je vais poser une autre question.
    Vous avez beaucoup parlé de confiance. La confiance, on la retrouve notamment dans la conformité. Est-ce qu'on la retrouve strictement dans la conformité? De manière plus large, qu'est-ce que vous appelez la confiance?
    Premièrement, je pense que la confiance découle de l'existence d'un régime juridique clair fondé sur un modèle de droit. Ainsi, les Canadiens savent que ce régime les protège et que la pleine et entière responsabilité de se protéger devant ce nouveau monde ne leur est pas déléguée.
    Deuxièmement, cette confiance découle de l'existence de mécanismes et d'organismes comme le Commissariat. Ces organismes permettent aux citoyens de bien comprendre ce qu'ils ont à faire et d'avoir l'assurance qu'ils ont une protection en ce qui a trait aux éléments fondamentaux. Ils savent aussi que les entreprises connaissent leurs obligations.
    On parle du concept de protection de la vie privée dès la conception, on parle de créer cette culture de la vie privée. Quand les entreprises commencent à mettre sur pied ces programmes de manière transparente et qu'elles communiquent leurs obligations relatives aux plaintes et qu'elles répondent à leurs obligations en matière de divulgation proactive, c'est là qu'on s'approche d'une culture de la vie privée.
     Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Green, vous avez deux minutes et demie.
    Je vous remercie beaucoup.
    Vous allez élaborer un plan pour votre ministère. Vous allez vous organiser pour reprendre là où M. Therrien s'est arrêté. Dans le cadre de cette planification, quels sont, selon vous, les plus grands défis auxquels vous devez faire face?
    Je vous remercie.
    Bien entendu, j'ai très hâte de rencontrer les membres de l'équipe et de parler avec tous les collègues.
    J'ai examiné le RMR. Je pense que la première chose à considérer, c'est le fait que le décret d'extension de la Loi sur la protection des renseignements personnels en juillet et l'élargissement de la portée du mandat provoqueront un afflux de nouveaux cas. Je sais que le commissaire avait demandé des fonds supplémentaires à cet égard. Il faudra donc assurer un suivi dans ce dossier.
    On a également dit que si la nouvelle LPRPDE s'inspirait du projet de loi C‑11 — avec, espérons‑le, des améliorations fondées sur un grand nombre des commentaires formulés —, elle nécessiterait elle aussi un doublement des ressources, comme l'a mentionné le commissaire Therrien, si je me souviens bien.
    Ce sont là quelques-unes des discussions que j'aurai dès le départ avec les membres de l'équipe.
    Plus précisément, en ce qui concerne le pouvoir de rendre des ordonnances et le type de structure nécessaire, le commissaire Therrien a parlé d'arbitres, etc. Ce sont donc certains des éléments à considérer. Il faut également veiller à ce que le Bureau soit prêt à conseiller le Parlement lorsque ce projet de loi sera présenté.

  (1150)  

    Qu'en est‑il de l'horizon à plus long terme?
    À plus long terme…
    Compte tenu de l'évolution technologique qui obéit à la loi de Moore et de notre processus législatif qui semble avoir beaucoup de mal à suivre dès qu'un changement intervient, comment entrevoyez-vous les défis à long terme pour…
    Je crois que les défis à long terme vont surtout s'articuler autour des innovations numériques que nous sommes à même d'observer, un contexte où il faudra s'assurer d'adapter notre cadre législatif en conséquence et de voir à ce que le Commissariat puisse compter à l'interne sur les experts capables de bien le conseiller à ce sujet, notamment pour ce qui est des codes d'éthique.
    Il y a eu des discussions à propos de la dépersonnalisation des données et de la prévention de la réidentification. Qu'est‑ce qui est raisonnable? Comment pouvons-nous l'entériner et quels types de mécanismes devons-nous mettre en place pour que la dépersonnalisation puisse être acceptée en toute connaissance de cause? Est‑ce que nous minimisons les risques de réidentification? Il est absolument essentiel qu'un cadre soit mis en place à cette fin.
    Dans le domaine de l'intelligence artificielle, de plus en plus de décisions sont prises au moyen d'algorithmes utilisant les informations disponibles. Comment pouvons-nous gérer le tout? Certains éléments du Règlement général sur la protection des données et du projet de loi C‑11 traitent de la transparence des algorithmes, de la nécessité de comprendre comment ces décisions sont prises et, dans un monde idéal, de la possibilité de contester ces décisions. Du point de vue des droits de la personne, des préoccupations ont été soulevées quant aux risques de profilage. Il faut donc déterminer comment nous devons composer avec cette technologie qui évolue à un rythme accéléré.
    Je crois d'ailleurs que c'est l'un des problèmes. La technologie évolue très rapidement, mais le processus législatif est beaucoup plus lent. Nous devons trouver des façons d'adapter plus rapidement nos lois.
    Merci, monsieur Dufresne. Nous avons nettement dépassé le temps imparti.
    Monsieur le président, il est tout aussi enthousiaste que moi.
    Effectivement.
    Aurons-nous droit à un autre tour, monsieur le président?
    J'ai sur ma liste Mme Gallant, puis Mme Hefpner. Cela va nous amener à la fin du deuxième tour de questions. S'il reste du temps, nous pourrions peut-être permettre une question additionnelle aux députés qui le voudront, mais je veux d'abord et avant tout m'assurer que nous terminions le second tour. Il est aussi possible que nous soyons saisis à ce moment‑là d'une motion concernant la nomination.
    Cela dit, je cède la parole à Mme Gallant.
    Merci, monsieur le président.
    Il arrive souvent que l'on ne se rende compte qu'après coup d'une atteinte à la vie privée, comme dans le cas des métadonnées que Santé Canada a achetées des fournisseurs de services de téléphonie cellulaire pour justifier les confinements cruels et inhumains que nous avons dû subir.
    Envisageriez-vous, si vous êtes nommé commissaire à la protection de la vie privée, d'exiger des entreprises de télécommunications et des géants du Web, par exemple, qu'ils obtiennent l'approbation préalable de votre commissariat avant de pouvoir collecter, utiliser ou vendre des métadonnées?
    Je pense qu'il a été notamment recommandé d'avoir recours à des audits proactifs ou de s'assurer, lorsqu'il est question de ce genre de métadonnées ou de données de géolocalisation — votre comité en a traité dans le contexte du gouvernement, mais il en va de même d'une tierce partie — que l'on informe les personnes concernées des renseignements qui seront collectés, des raisons pour lesquelles on le fait et des utilisations que l'on en fera. Il convient également d'imposer des contraintes quant aux entités auxquelles les renseignements en question pourront être communiqués, le cas échéant. On s'est inquiété de la possibilité que ces renseignements sortent des cadres du gouvernement ou même de ceux d'un ministère qui voudrait en faire profiter d'autres ministères. Il faut donc déterminer comment il est possible d'informer les gens de façon proactive à ce sujet.
    J'estime que c'est l'un des éléments à considérer. Il arrive souvent que cette information soit disponible, mais qu'on oblige les gens à se débrouiller pour la trouver. Je pense qu'il ressort notamment de votre rapport — et je suis du même avis — qu'il faut rendre le processus aussi convivial que possible. Il faut qu'il soit simple et facile de refuser son consentement et de savoir exactement de quoi il en retourne.
    Vous ne jugez toutefois pas que votre approbation devrait être requise avant que l'on puisse aller de l'avant, à moins qu'il soit facile de choisir d'acquiescer ou non.
    Je ne suis pas certain qu'il soit réaliste de penser que le Commissariat puisse donner son approbation dans absolument tous les dossiers. Il peut cependant y avoir certains cas où cette approbation est nécessaire, et il faudrait se concentrer sur ceux‑là. Plus les risques sont sérieux, plus il sera important selon moi que le tout soit approuvé, que ce soit par le CPVP ou autrement.

  (1155)  

    L'utilisateur aurait toujours la possibilité de se servir de l'application, du système d'exploitation ou de ce qu'offre par ailleurs son forfait de téléphonie cellulaire, conformément au contrat qu'il a signé. La renonciation ne porte en fait que sur cet aspect bien particulier. Le consommateur a tout de même la possibilité d'y adhérer, mais sans qu'aucune forme de contrainte ne s'exerce.
    Nous avons aussi eu le cas de l'application de Tim Hortons. On avait indiqué aux utilisateurs que les fonctions de géolocalisation n'étaient activées que lorsque l'application était ouverte, mais on a appris ultérieurement que l'application collectait des renseignements même lorsqu'elle était fermée.
    Considérez-vous que le commissaire à la protection de la vie privée pourrait avoir comme rôle de court-circuiter les agissements de la sorte? Dans le cas de Tim Hortons, personne ne pouvait toucher ses points bonis sans télécharger l'application, ce qui revient à dire qu'il fallait permettre l'accès à ses renseignements personnels pour obtenir ses points.
    Tout à fait. Votre dernier commentaire, madame Gallant, va entièrement dans le sens de cette culture du consentement à l'aveugle dont il a été question lors de l'étude des données sur la mobilité menée par votre comité. Les gens cliquent simplement « oui » pour toutes les politiques parce qu'ils veulent utiliser la technologie. Je crois qu'il s'agit notamment de veiller à ce que les Canadiens puissent utiliser cette technologie numérique et participer à son évolution, mais pas au prix de leur droit à la protection de la vie privée.
    Dans l'affaire Tim Hortons, on pouvait s'interroger sur le but de l'exercice. Rien ne justifiait que l'on collecte autant de renseignements. Le processus était très intrusif en ce sens que l'on continuait d'accumuler des données à intervalles très réguliers, même lorsque l'application n'était pas utilisée. Il y avait aussi des préoccupations au sujet du consentement. Les utilisateurs n'avaient pas été informés de l'ampleur que cela prendrait, et ils ne savaient pas que leurs données de géolocalisation seraient utilisées de façon aussi excessive. On devait en outre s'inquiéter du fait que les dispositions du contrat offraient une trop grande flexibilité au fournisseur quant à la manière dont les données pouvaient être utilisées et quant aux comptes qu'il avait à rendre à cet égard.
    Selon moi, un commissaire avec un mandat lui permettant de mener des audits proactifs aurait pu discuter de tous ces aspects avec l'entreprise pour lui demander de tenir compte de la protection de la vie privée dès la conception de l'application et de réaliser une véritable évaluation des répercussions sur la protection des renseignements personnels.
    Il y a certes un rôle à jouer pour le Commissariat. Il y a aussi un rôle pour les législateurs qui doivent rendre obligatoires les processus de reddition de comptes à cette fin.
    Des dispositions devraient être mises en place par le Commissariat ou par voie législative pour exiger que toutes les applications déjà existantes qui, à notre insu, collectent des renseignements ou les vendent…
    Le Commissariat pourrait poser certains gestes en s'appuyant sur les pouvoirs que lui confère la loi. Je pense qu'il faudrait commencer par la loi pour que le Commissariat puisse mener des audits à l'égard des conditions prescrites aux différentes organisations.
    Merci, madame Gallant.
    Nous passons maintenant à celle qui sera sans doute la dernière à pouvoir poser ses questions. Madame Hepfner, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais savoir ce que M. Dufresne pense de l'idée d'une identité numérique unique. Ainsi, nous pourrions avoir une seule identité nationale canadienne, ce qui nous donnerait davantage de contrôle sur notre propre information. Certains craignent toutefois que cela permette de nous suivre à la trace.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de ce concept?
    J'aurais peut-être dû en parler en répondant tout à l'heure à la question de M. Green, si je ne m'abuse, au sujet des enjeux à considérer pour l'avenir. En voilà un bon exemple. Il faudrait que j'en sache davantage sur les aspects techniques de la chose.
    Je pense que vous avez pu en discuter avec M. Therrien. Il en est ressorti que cela pourrait devenir un outil très précieux et efficace, peut-être davantage que le numéro d'assurance sociale et des identificateurs semblables, mais qu'il y a également des risques pour la protection de la vie privée.
    C'est un exemple de situation qui exigerait une évaluation minutieuse des facteurs relatifs à la vie privée pour déterminer comment cette identité numérique serait utilisée, dans quelle mesure elle serait sécuritaire et comment on va s'y prendre pour limiter l'information collectée. Il s'agit encore une fois de travailler dans l'intérêt public des Canadiens, mais pas au mépris de la protection de leur vie privée.
    Merci.
    À titre de commissaire fédéral à la protection de la vie privée, comment entrevoyez-vous vos interactions et votre travail avec vos homologues provinciaux?
    Je m'attendrais à un esprit de parfaite collaboration pour effectuer ce travail d'une importance fondamentale avec mes collègues, et je m'engagerai en ce sens. Il y a certaines régions du pays où notre Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques s'applique en parallèle, et d'autres, comme le Québec, la Colombie-Britannique et l'Alberta, où il y a une loi provinciale. Il est absolument nécessaire de collaborer avec toutes les instances provinciales, comme nous avons pu le constater avec les enquêtes conjointes qui ont dû être menées pour Clearview AI et Tim Hortons. Ce sont là de bons exemples.
    Cette collaboration est très importante non seulement pour la mise en commun de l'expertise et des connaissances, mais aussi pour l'impact que cela donne à notre travail. Je me réjouis à la perspective de poursuivre dans le même sens et de rencontrer tous mes homologues, si bien sûr ma nomination est confirmée.

  (1200)  

    Merci.
    Lors d'une séance précédente du Comité, j'ai proposé une motion visant l'étude de la protection de la vie privée pour les gens qui travaillent à la maison. Il n'y avait pas suffisamment d'intérêt du côté de l'opposition pour que nous puissions aller de l'avant avec cette étude bien que tout semble indiquer que les employeurs surveillent de plus en plus leurs employés qui travaillent à domicile.
    Compte tenu de cette évolution dans le fonctionnement de notre société, dans quelle mesure votre commissariat pourrait‑il s'adapter rapidement aux problèmes que risque de poser la protection de la vie privée des télétravailleurs?
    J'estime important que le commissaire fédéral et ses homologues provinciaux soient à l'avant-garde des dossiers de ce genre. C'est un exemple d'une situation qui peut être davantage de compétence provinciale sous certains aspects, car cela relève du domaine de l'emploi, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a des répercussions sur la protection de la vie privée. Comme toutes les fois où l'on peut mettre à profit de nouvelles technologies pour en tirer de nouveaux avantages, il faut s'interroger sur les conséquences et la façon de minimiser les répercussions sur la vie privée.
    Il est possible, en fonction des compétences en jeu, que ce ne soit pas le CPVP qui soit chargé d'appliquer les dispositions en la matière, mais j'estime qu'il aurait tout de même un rôle à jouer pour sensibiliser les gens à cette problématique. Je pense qu'il est important de demeurer bien au fait de ces évolutions technologiques, et je vois notamment le Commissariat devenir un centre d'excellence pour tous les éléments liés à la protection de la vie privée.
    Comme il ne me reste qu'une minute, j'aimerais revenir à ce que j'ai pu comprendre de tout cela. Nous avons discuté, principalement dans le cadre de notre étude des données sur la mobilité, de la notion de consentement éclairé, et je crois comprendre de votre témoignage d'aujourd'hui que nous devrions renoncer à ce concept de consentement éclairé en délestant l'utilisateur de ce fardeau pour le faire porter davantage aux législateurs et à l'entreprise.
    Est‑ce bien ce que vous avez voulu nous dire? Comme il est si difficile d'obtenir un consentement éclairé en bonne et due forme, peut-être qu'il serait préférable de libérer l'utilisateur de cette responsabilité pour la confier plutôt aux entreprises et aux législateurs.
    Il y aura toujours une place pour le consentement, mais ce consentement doit dans tous les cas être valable. Il faut pour ce faire que le consentement soit éclairé, c'est‑à‑dire que la personne sache ce que l'on va faire avec les données et pour quelle raison, et qu'elle ait la possibilité de refuser de donner son consentement.
    Il peut aussi y avoir des situations où il n'est pas approprié d'obtenir le consentement, car les utilisations prévues ne sont ni permissibles ni justifiées. On a alors besoin d'un régime qui prescrit certaines limites à ne pas franchir. Il y a certaines choses que l'on ne peut pas faire, même avec un consentement. Il y a d'autres choses qu'il est possible de faire, mais qui exigent un consentement. Il peut aussi y avoir des choses auxquelles on ne va pas consentir notamment parce que cela va à l'encontre de l'intérêt public ou de la santé publique. Il y a tout un éventail de possibilités.
    Merci beaucoup.
    Très bien. Je ne vois personne d'autre qui aurait une question à poser.
    Madame Khalid, vous vouliez avoir la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une motion à présenter. Je propose:
Que le Comité fasse rapport à la Chambre de ce qui suit :
Votre Comité a étudié le certificat de nomination de Philippe Dufresne, candidat proposé au poste de commissaire à la vie privée, renvoyé au Comité le mercredi 8 juin 2022, conformément au paragraphe 111.1(1) du Règlement.
Votre Comité a examiné la question de la nomination de Philippe Dufresne comme commissaire à la vie privée et recommande à la Chambre des communes de confirmer la nomination de celui‑ci en tant que commissaire à la vie privée du Canada.
    La motion est recevable.
    (La motion est adoptée.)
    Des députés: Bravo!

  (1210)  

    Merci, monsieur Dufresne, d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
    Je vais faire rapport de notre recommandation à la Chambre dès que possible.
    Sur ce, la séance est levée.
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