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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 061 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 10 mars 2023

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.

[Français]

    Bienvenue à la 61e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.

[Traduction]

    La réunion d'aujourd'hui se déroulera dans un format hybride conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 juin 2022. Les députés peuvent participer en personne dans la pièce ou à distance au moyen de l'application Zoom. Veuillez m'aviser en cas de difficultés ou de problèmes techniques. Il est possible que nous devions suspendre la séance quelques minutes pour pouvoir permettre à tous les membres du Comité de participer pleinement.
    Conformément à l'alinéa 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 7 décembre 2022, nous commençons notre étude sur l'ingérence étrangère et les menaces entourant l'intégrité des institutions démocratiques, de la propriété intellectuelle et de l'État canadien.
    Le Comité a adopté une motion de régie interne concernant les tests de connexion pour les témoins.

[Français]

    Conformément à cette motion, je vous informe que tous les témoins ont effectué les tests de connexion avant le début de la séance.

[Traduction]

    La connexion de tout le monde fonctionne parfaitement.
    J'aimerais maintenant inviter nos témoins pour la première heure. À titre personnel, nous avons Gabrielle Lim, doctorante au Citizen Lab de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l'Université de Toronto, qui se joint à nous sur Zoom. Nous accueillons également Cheuk Kwan, qui est co‑président de la Toronto Association for Democracy in China. Enfin, du Projet de défense des droits des Ouïghours, nous avons Mehmet Tohti, le directeur exécutif.
    Madame Lim, nous allons commencer par vous. Vous avez un maximum de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire.
     Bonjour. Je m'appelle Gabrielle Lim et je suis doctorante au Citizen Lab. Je fais également de la recherche au Harvard Shorenstein Center. Mes travaux de recherche portent surtout sur les technologies de l'information, les libertés civiles et la sécurité, avec une spécialisation en mésinformation et en désinformation.
    Les points de vue que je vais exprimer sont les miens, mais ils s'appuient sur la recherche effectuée par mes collègues et moi. Dans mes prochaines observations, je vais parler brièvement de certains effets de l'ingérence étrangère, des facteurs qui contribuent à leur efficacité et de recommandations.
    Premièrement, je veux souligner que prouver des activités ne revient pas à prouver qu'elles ont des conséquences. Par exemple, même si on a laissé entendre que l'Internet Research Agency, qui est établie en Russie, a influencé l'opinion publique américaine, il y a peu de preuves d'une incidence directe sur l'élection présidentielle de 2016. Le gros de ses activités portait en fait sur la création d'un auditoire. Lorsqu'on effectue une comparaison avec le volume de nouvelles que l'Américain ordinaire obtient auprès des médias grand public, indépendants et sociaux, on constate que les activités parrainées par la Russie ne représentent pas grand-chose. Par conséquent, nous devrions éviter les exagérations lorsque nous discutons de ce genre d'activités. Nous risquons autrement de saper la confiance des gens dans nos élections et de semer la discorde entre nous, y compris en nous mettant à dos certaines communautés et en renforçant la xénophobie.
    Deuxièmement, j'aimerais attirer l'attention sur un deuxième type d'ingérence étrangère — la répression transnationale numérique —, c'est‑à‑dire les activités numériques dirigées par des États étrangers qui ciblent des membres des diasporas du Canada. Autrement dit, cela se produit chez nous. Il peut être question de harcèlement, de menaces, d'attaques fondées sur le sexe, ce qui est souvent le cas, de tentatives de piratage et d'autres formes d'intimidation. Ces activités peuvent commencer numériquement, mais elles passent souvent au monde réel.
    Même si la répression numérique transnationale demeure sous-étudiée, nous avons des preuves très solides de ses répercussions négatives. Mes collègues au Citizen Lab ont documenté ses effets sur la santé mentale ainsi que l'autocensure et la crainte de la participation politique qui en découlent. J'attire l'attention sur la répression transnationale parce que même si c'est une forme d'ingérence étrangère, on ne devrait pas la comparer avec, disons, les activités d'information en ligne qui visent à influencer un vaste public, ou avec les allégations d'influence directe de partis politiques. C'est une autre paire de manches, et je tenais à le préciser.
    Troisièmement, j'aimerais aborder des facteurs de risque qui rendent des gens vulnérables à la mésinformation étrangère ou aux activités d'ingérence étrangère. Les activités d'ingérence en ligne peuvent être considérées comme une question d'offre et de demande. Du côté de l'offre, nous avons des acteurs étrangers qui produisent et distribuent du contenu qui cible des Canadiens. Nous pouvons toutefois également conceptualiser les activités d'influence comme un résultat de la demande, alors que certaines communautés ou certaines personnes pourraient être prédisposées à recevoir et à croire de l'information fausse ou trompeuse. Cela découle peut-être de griefs de longue date, d'une discrimination ou d'autres formes de marginalisation et inégalité.
    L'atténuation des activités d'influence potentiellement dangereuses nécessite donc le règlement des griefs et des inégalités chez les Canadiens, car tant et aussi longtemps que ces clivages sociaux pourront s'aggraver, des adversaires voudront les exploiter. À titre d'exemple, les nazis se sont servis du racisme aux États-Unis dans le cadre de leur propagande pendant la Deuxième Guerre mondiale, et les Russes se sont servis des mêmes divisions en 2016 pour essayer de diviser encore plus les Américains.
    Enfin, je veux juste dire que vous devriez faire preuve d'une grande prudence au moment d'envisager une mesure législative. Certains de mes collègues et moi-même avons documenté la situation dans plus de 60 pays qui ont adopté des lois concernant la mésinformation ou les activités étrangères en ligne, et il n'y a vraiment aucune preuve de leur efficacité. Elles ont plutôt tendance à faire l'objet de critiques de plus en plus nombreuses de la part de militants et de groupes de défense des droits qui affirment qu'elles ont pour effet d'étouffer les critiques et des voix importantes. Si le Canada resserre son contrôle de l'Internet, il va légitimer les lois permettant la censure adoptées par des gouvernements antilibéraux et à tendance autoritaire.
    La mise en place de mesures de contrôle de l'information par voie législative risque également d'être un cadeau pour la Russe et la Chine, des pays qui souhaitent que la sécurité de l'information, c'est‑à‑dire le contrôle du contenu que leur population peut consulter, soit une pratique légitime tant dans les pays démocratiques que dans les pays non démocratiques. Lorsqu'on cède les droits démocratiques à la libre expression et à l'accès à l'information à des contrôleurs, on va à l'encontre d'un Internet ouvert et des normes démocratiques sur lesquelles la réputation du Canada repose. De plus, ce genre de contrôles de l'information en ferait probablement peu pour mettre fin à l'ingérence étrangère.
    Je recommande plutôt d'envisager d'autres politiques, comme trouver des moyens de renforcer la confiance à l'égard de nos institutions et de nos médias, établir de meilleurs liens avec les diasporas, soutenir certaines personnes et chercher des façons de s'attaquer aux modèles à but lucratif de notre écosystème médiatique. Si jamais des mécanismes législatifs sont envisagés, nous devons tenir compte de la façon dont ils pourraient toucher des personnes et des communautés qui sont déjà victimisées ou ciblées.
    En conclusion, même si nous ne devrions pas écarter les effets potentiels de l'ingérence étrangère sur nos processus démocratiques, nous ne devons pas exagérer ses répercussions et nous devons faire une distinction entre les différents types d'ingérence et leurs conséquences. Notre réponse devrait tenir compte des analyses et des données probantes. Nous risquerions autrement d'imposer des contrôles inefficaces de l'information, ce qui reviendrait à légitimer des États antilibéraux qui se servent de la censure et de la surveillance tout en ne faisant rien en même temps pour renforcer la résilience et la confiance dans notre gouvernement.
    Merci.

  (0850)  

    Merci, madame Lim. Je sais que les cinq minutes ne donnent pas beaucoup de temps, et vous les avez vraiment maximisées. Je vous en remercie.
    Nous passons à M. Kwan, qui est co‑président de la Toronto Association for Democracy in China. Monsieur, vous avez cinq minutes pour vous adresser au Comité.
    La Toronto Association for Democracy in China a été fondée la veille du massacre de la place Tiananmen, le 4 juin 1989. Notre organisation soutient la démocratie et défend les droits de la personne en Chine. En outre, ces dernières années, nous sommes devenus des observateurs vigilants de l'ingérence chinoise sur le sol canadien.
    La première incursion de la Chine pour exercer son pouvoir de convaincre dans la société canadienne s'est produite au début des années 1990, quand la Chine était désireuse de redorer son image internationale après le massacre de Tiananmen. Sous l'impulsion et avec le soutien des consulats chinois, des organisations ont été créées par des personnes favorables au régime. Parmi elles, le National Congress of Chinese Canadians, le NCCC, et son successeur, la Confederation of Toronto Chinese Canadian Organizations, la CTCCO, sont les plus importantes. Ces organisations, ainsi que de nombreuses autres, pratiquent l'art de la désinformation populaire planifiée, en se faisant l'écho de la ligne du parti pour défendre les politiques étrangères et intérieures de la Chine.
    En plus de mobiliser des universitaires et des entrepreneurs sympathisants pour défendre ses intérêts, la Chine s'affaire à recruter des élus et à infiltrer les institutions politiques à tous les niveaux de la société canadienne. Tout cela est documenté dans le livre du journaliste Jonathan Manthorpe intitulé Claws of the Panda.
    L'un de ces instruments d'ingérence est le département du Travail du Front uni. Selon des documents officiels, le réseau qu'est le Front uni s'intéresse particulièrement aux personnes d'origine chinoise vivant à l'étranger, qu'il considère comme de puissantes menaces extérieures, mais aussi comme des alliés potentiels. Le Front uni emploie également des milliers d'agents qui exécutent la stratégie politique du Parti communiste chinois consistant à exploiter les réseaux internationaux pour promouvoir ses intérêts à l'échelle mondiale. Les individus qui en sont membres harcèlent et intimident également les Canadiens qui critiquent la Chine, qu'il s'agisse de militants, de dissidents ou de défenseurs des droits de la personne, et font ainsi de la communauté sino-canadienne la véritable victime de ce jeu.
    Nous ne sommes donc pas surpris par les conclusions du récent rapport du Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS. Il ne fait aucun doute que l'ingérence chinoise dans le processus électoral canadien est très préoccupante, mais je soutiens qu'il ne s'agit là que de la partie émergée de l'iceberg. L'ingérence de la Chine au Canada s'est faite en douceur, de manière intangible et progressive. Par conséquent, cette accumulation graduelle au fil des ans — les 90 % de l'iceberg qui sont sous l'eau — reste invisible pour de nombreux Canadiens.
    Que les dernières élections aient été équitables ou non, j'estime que c'est cette partie invisible de l'iceberg qui devrait être au centre de nos préoccupations.
    En 2017, la Coalition canadienne pour les droits de la personne en Chine, en collaboration avec Amnistie internationale, a recueilli des preuves de harcèlement et d'intimidation de la part du gouvernement chinois à l'encontre de personnes travaillant au Canada sur la question des droits de la personne en Chine et a publié un rapport à ce sujet. Ce rapport exhorte le gouvernement à mettre en place, pour l'ensemble du pays, une ligne téléphonique d'urgence où l'on peut signaler les incidents de harcèlement et d'intimidation qui sont autrement ignorés par la police locale ou la GRC.
    Nous demandons donc instamment au Canada de s'attaquer à l'ingérence de la Chine sur ces multiples fronts: en adoptant une position ferme et de principe sur les questions mises en évidence dans le rapport du SCRS; en mettant en place une ligne téléphonique nationale de signalement des cas de harcèlement et d'intimidation; et en mettant en place un registre des agents étrangers semblable à celui de l'Australie.
    Bien que ces mesures ne puissent pas éliminer complètement le problème, elles peuvent au moins avoir un effet dissuasif et signifier aux puissances étrangères et à leurs mandataires que nous prenons nos institutions démocratiques et notre souveraineté au sérieux.
    J'aimerais maintenant ajouter quelques phrases qui ne sont pas dans la déclaration que j'ai préparée.
    Je viens tout juste de regarder la conférence de presse du ministre Mendicino, dans laquelle la mise en place d'un registre des agents étrangers est perçue comme une attaque contre la communauté chinoise canadienne. Je vous assure que ce n'est pas le cas.

  (0855)  

    La communauté chinoise canadienne, tout comme la communauté ouïghoure, la communauté tibétaine et d'autres personnes, est favorable au registre. Un registre des agents étrangers n'est pas la même chose qu'un registre de tous les Canadiens d'origine chinoise.
    Je serai ravi de répondre à vos questions à ce sujet.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Kwan.
    Monsieur Tohti, vous avez cinq minutes pour vous adresser au Comité.
    Bonjour tout le monde. Je vous remercie de l'invitation.
    Je suis Mehmet Tohti, activiste de longue date et directeur général du Projet de défense des droits des Ouïghours, basé à Ottawa. En tant que voix de premier plan pour les Ouïghours canadiens, nous effectuons des travaux de recherche, de documentation et de défense des droits en vue de promouvoir les droits des Ouïghours et des autres peuples turcs du Turkestan oriental qui continuent de faire face au génocide et aux crimes contre l'humanité commis par le gouvernement chinois.
    Je me permets une brève remarque sur le langage. Nous sommes Ouïghours canadiens. Nous ne faisons pas partie de la diaspora chinoise. C'est précisément pour cette raison, parce que nous refusons de devenir « Chinois » et de nous assimiler à la culture chinoise en préservant farouchement nos identités ethniques, religieuses et linguistiques, que nous sommes assujettis à un génocide en Chine. La situation est semblable à cet égard pour les Tibétains et les Mongols qui ne s'identifient pas comme Sino-Canadiens ou comme membres de la diaspora chinoise.
    Le sujet de l'ingérence de l'État chinois n'est pas pour nous une nouveauté. Les Ouïghours canadiens sont, depuis des décennies, assujettis à de nombreuses formes d'intimidation et de harcèlement par le Parti communiste chinois. Depuis le début de ma vie en exil, il y a de cela 33 ans, j'ai personnellement fait l'expérience de toutes les formes d'ingérence chinoise dans ma vie personnelle et professionnelle: j'ai notamment été complètement isolé de mes parents et de mes frères et sœurs qui vivent encore au Turkestan oriental, en plus d'avoir fait constamment face à des menaces, à de l'intimidation et à du harcèlement.
    C'est en décembre 2003 que le ministère de la Sécurité publique de la Chine a annoncé sa première liste d'organisations terroristes. Le World Uyghur Youth Congress, dont j'étais le président à l'époque et qui est enregistré en Allemagne, figurait sur cette liste. Compte tenu de cette mésinformation et de cette attaque contre nous, je ne peux pas voyager ou je suis interdit d'entrée dans de nombreux pays comme la Turquie, le Pakistan, l'Afghanistan, des républiques de l'Asie centrale et des pays du Moyen-Orient. Au cours des 32 années qui se sont écoulées depuis que j'ai quitté ma terre natale, il m'a été impossible de visiter ma famille. Il lui est également impossible de venir me visiter au Canada, car aucun membre de ma famille n'a reçu un visa. C'est pour cette raison que je parle d'une isolation complète.
    Il y a exactement 17 ans, j'ai été mêlé à l'affaire de l'Ouïghour canadien Huseyin Celil, qui a été enlevé en Ouzbékistan avant d'être condamné à la prison à vie en Chine. J'ai commencé à remarquer des choses suspectes autour de moi à cette époque.
    J'aimerais vous présenter une comparaison entre la situation actuelle et ce qu'il en était il y a 16 ans. Voici le passage d'un article de Charlie Gillis publié dans la revue Maclean's le 14 mai 2007. Il est intitulé « Beijing is Always Watching », ou « Pékin surveille tout le temps »:
Le fonctionnaire, qui s'est seulement identifié comme membre de l'infâme Commission des affaires étrangères de la Chine, avait une longue liste d'instructions. Il sommait Tohti de cesser ses efforts visant à stimuler la sympathie des Canadiens pour les Ouïghours, la population principalement musulmane opprimée de la province du Xinjiang qui est devenu une épine dans le pied de Beijing. Tohti devait cesser de répandre ses allégations de génocide culturel contre la République populaire, et il était particulièrement important qu'il ne participe pas à une conférence imminente organisée en Allemagne, où des groupes ouïghours de partout dans le monde prévoient se réunir pour former un congrès international. « Nous avons ici votre mère, ainsi que votre frère », a ajouté le fonctionnaire de façon énigmatique, mentionnant que la police les a reconduits sur une distance de 260 km jusqu'à Kashgar, au quartier général de la police de la région, afin de les aider à communiquer le message de Beijing. « Nous pouvons faire ce qui nous chante. »
En effet. Au cours des trois années qui se sont écoulées depuis cette nuit, Tohti, maintenant âgé de 43 ans, a vécu suffisamment de démêlés avec le long bras de l'appareil de sécurité chinois pour conclure que les agents de Beijing continuent de faire ce qu'ils veulent, non seulement en Chine, mais aussi au Canada [...]
    Je vous propose de lire l'article plus tard.
    En juillet 2020, juste avant que je témoigne devant un comité parlementaire, j'ai reçu un message sur Twitter de la part de la Ville de Kunming, en Chine, où il était indiqué « VOTRE P***** DE MÈRE EST MORTE », juste pour m'empêcher de témoigner devant le comité parlementaire. Kunming se trouvait à 4 000 kilomètres de l'endroit où ma mère habitait.
    Je vais vous donner un autre exemple récent. Il y a moins de deux mois, le 16 janvier, j'ai reçu un appel de la part de la police d'État chinoise d'Urumchi, qui avait pris mon oncle, le frère de ma mère, en otage.

  (0900)  

    On m'a dit que mes deux sœurs étaient mortes, de même que ma mère. Le sort de mes trois frères, de leurs épouses et de leurs enfants est inconnu.
    Cet appel a eu lieu 15 jours avant le vote sur la motion M‑62 à la Chambre des communes par rapport à la réinstallation de 10 000 réfugiés ouïghours, le fruit d'une campagne que j'ai commencé en 2017. Pékin surveille tout le temps. Il y a des menaces, de l'intimidation et du harcèlement.
    Merci.
    Merci, monsieur Tohti.
    Je vous suis très reconnaissant pour vos paroles et je remercie tous les témoins pour leurs déclarations liminaires. Je sais que les membres de notre comité vont vous poser beaucoup de questions. Je déteste la manière de procéder des comités à cause des délais, mais les intervenants auront six minutes lors du premier tour. Je vais devoir m'en tenir à cela puisque nous avons un autre groupe complet de témoins à entendre après le premier.
    Nous allons commencer par M. Barrett pendant six minutes.
    Madame Lim, monsieur Tohti, monsieur Kwan, merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Je fais remarquer que ce n'est pas sans risque pour vous et qu'il n'est jamais facile pour qui que ce soit de comparaître devant un comité parlementaire, surtout dans les circonstances que vous venez de décrire, monsieur Tohti. Nous sommes bien conscients de la gravité de la situation.
    Ma première question est pour vous, monsieur Tohti.
    Que fait le régime communiste à Pékin aux Ouïghours qui se trouvent au Canada, et pourquoi s'en prend‑il à eux?
    Le régime communiste de Pékin n'est pas un régime démocratiquement élu. Il ne rend pas de comptes à son peuple. Il agit comme une organisation criminelle.
    Ce régime tient à garder le contrôle sur les Ouïghours et les autres peuples, et c'est la raison pour laquelle il prend en otage les membres de nos familles — je parle au nom des Canadiens d'origine ouïghoure —, uniquement pour contrôler notre vie ici au Canada. Même dans un pays démocratique et libre comme le Canada, les Canadiens d'origine ouïghoure ne sont tout simplement pas libres parce que le régime chinois exerce de la pression sur eux et les menace de prendre les membres de leurs familles en otage.
    Essentiellement, le régime ne veut pas que les Canadiens d'origine ouïghoure exercent leur droit de manifester et de parler des crimes atroces commis par le Parti communiste chinois. Il s'agit de la plus grande menace pour le gouvernement chinois, et pour cette raison, ces activités pacifiques sont considérées comme des questions de sécurité nationale. Voilà pourquoi le régime applique des mesures très sévères pour les réprimer.

  (0905)  

    Merci.
    Monsieur Kwan, vous avez dit que Pékin a eu recours à la coercition. Pouvez-vous nous donner quelques exemples de la façon dont le régime communiste de Pékin tente de contraindre à l'obéissance et d'intimider les Canadiens d'origine chinoise?
    Je peux vous faire part de nombreux incidents. Je vais vous donner un exemple qui illustre la force de la loi du régime chinois ici au Canada et la façon subtile dont il peut exercer son contrôle en suscitant la peur au sein de la communauté chinoise canadienne. Un agent peut vous appeler pas seulement en pleine nuit, mais aussi au milieu de la journée, et vous dit ceci: « Alors, comment vont vos parents au Sichuan, en Chine? » Vous comprenez le message. Cela signifie que si vous ne vous comportez pas bien, les numéros de téléphone et l'adresse de vos parents pourraient être compromis ou même que le bien-être physique de vos parents pourrait être menacé.
     En ce sens, la menace est très subtile, et le régime l'a utilisée avec de nombreux Canadiens d'origine chinoise. Je suis sûr qu'il a agi de même avec M. Tohti. Je peux vous le garantir.
    D'une manière très anodine, j'ai vécu la même chose. En 2005, je suis allé à Hong Kong pour participer à un événement culturel. Je suis cinéaste. J'ai donc présenté mon film lors d'un festival du film là‑bas. On m'y a suivi. Un agent du régime communiste chinois m'a posé des questions pendant la période de questions et réponses. Le régime commet ce genre de petits gestes qui veulent dire: « Vous savez que je sais que vous savez que je vous surveille. » C'est comme cela que le régime exerce son emprise sur vous.
    Merci.
    Vous avez dit que vous aviez des soupçons, ou que vous aviez parlé aux médias de l'ingérence présumée du régime de Pékin dans le processus électoral au Canada, en particulier en ce qui concerne le choix des candidats. Je crois que vous avez parlé d'autobus bondés avec à leur bord des gens qui étaient en route vers des assemblées d'investiture, le tout organisé par des agents de Pékin au Canada.
    Il nous reste environ une minute, pourriez-vous nous en parler?
    C'est le modus operandi habituel. Les consulats chinois ne mèneront pas nécessairement ces activités eux-mêmes. Ils ont leurs mandataires qui agissent en catimini. Il s'agit d'hommes d'affaires qui louent des autobus et versent des indemnités, de l'ordre de 20 ou 50 dollars par jour, pour que des gens se présentent à des assemblées d'investiture, ou participent à des contre-manifestations. C'est ce que nous avons observé dans une des luttes au Conseil scolaire du district de Toronto, lorsque des étudiants internationaux de Waterloo et de Guelph sont arrivés par autobus pour se livrer à ce genre d'activité.
    J'ai été témoin de ces situations et on m'a dit qu'elles survenaient aussi dans de nombreuses autres circonscriptions.
    Je pense que mon temps est écoulé. J'y reviendrai.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Barrett.
    Monsieur Fergus, vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

    Habituellement, je pose mes questions en français.

[Traduction]

    Je vais m'adresser à nos témoins en anglais.
    Tout d'abord, j'aimerais remercier M. Tohti, M. Kwan, ainsi que notre invitée de la Munk School de leurs témoignages.
    Si vous me le permettez, je vais commencer avec vous, monsieur Kwan. Vous avez parlé de la façon dont le ministère du Front commun s'était mobilisé pour propager de la désinformation populaire planifiée. Pouvez-vous nous donner un exemple récent de désinformation populaire planifiée?
    Je vais vous parler de la désinformation populaire planifiée pendant la lutte pour l'indemnisation au titre du droit d'entrée imposé aux Chinois, où la communauté chinoise du Canada a demandé au gouvernement de lui payer une indemnité et de s'excuser pour la Loi sur l'exclusion des Chinois et sa taxe d'entrée. La communauté chinoise du Canada a mené cette campagne pendant plus de 20 ans. Je représentais l'une des organisations, la principale à l'époque, qui menait cette lutte.
    Comme je l'ai mentionné, juste après les événements de la place Tiananmen, les Chinois ont mis sur pied un organisme-cadre appelé le Congrès national des Canadiens d'origine chinoise, le CNCC. Cet organisme a pris le contrôle de la question, même s'il n'avait aucun lien avec elle. Le Congrès est composé d'immigrants chinois récents. Ils n'ont rien à voir avec la Loi sur l'exclusion des Chinois et pourtant, ils se sont emparés du sujet. Ils ont publié des communiqués de presse. Ils ont mis sur pied plus de 300 organisations mandataires, enregistrées auprès de Corporations Canada, dont certaines ont des directeurs et des adresses postales en commun, etc.
    Il s'agit d'exemples de désinformation populaire planifiée. Les agents créent de fausses organisations, publient des communiqués de presse et organisent des conférences de presse.

  (0910)  

    Je suis heureux que vous et votre organisation surveilliez ce qui se passe en matière d'ingérence étrangère. Vous n'avez pas besoin de nous donner tous les détails aujourd'hui, mais je me demandais si vous accepteriez de fournir au Comité le nom des organismes qui, selon vous, agissent de la sorte?
    Je serais heureux de le faire.
    Ce serait formidable.
    Lorsque vous surveillez ce que font ces organismes, surveillez-vous aussi ce que font les membres des conseils d'administration et de la direction?
    Oui.
    Seriez-vous à l'aise de nous envoyer ces renseignements également?
    Cela remonte à tellement loin. Je vais certainement faire de mon mieux.
    D'accord. C'est une question intéressante. Pourriez-vous nous donner des exemples récents de ce que votre organisme surveille?
    Je n'en ai pas, mais je peux certainement obtenir des renseignements et vous les communiquer, si vous le souhaitez.
    Ce serait très utile.
    Il s'agit principalement de documents publics.
    J'aimerais soulever un autre point. Je parle la langue, je connais la culture et je comprends le modus operandi du Parti communiste chinois, ainsi que de plusieurs de ses mandataires. Les gens comme moi savent donc ce qui se passe sur le terrain. Nous savons à peu près qui fait quoi. C'est‑à‑dire que nous pouvons sans doute deviner qui sont les 11 candidats potentiels identifiés par le SCRS. C'est un secret de polichinelle que M. Tohti et moi gardons. Nous savons qui fait quoi. C'est pourquoi, après tant d'années, les révélations explosives contenues dans le rapport du SCRS ne nous surprennent pas.
    Je m'adresse maintenant à notre invitée de la Munk School.
     Plusieurs témoins nous ont parlé du registre des agents étrangers que l'Australie a adopté. Avez-vous fait des recherches sur son efficacité? Quels sont les éléments que nous devrions adapter au contexte canadien? Quels sont les éléments que nous ne devrions pas adapter au contexte canadien?
    Je n'ai pas fait de recherches précises sur le registre australien des agents étrangers. À mon sens, le Canada pourrait en créer un. Quelle serait l'efficacité d'un tel registre...?
     Bon nombre des opérations auxquelles nous faisons allusion sont secrètes ou clandestines. Même si l'on mettait en place un registre dans lequel on inscrirait le nom de tous les agents, j'ai l'impression qu'ils trouveraient des moyens d'échapper à leur inscription au registre ou de le contourner.
    Il n'existe pas non plus de preuve solide qui démontre que le fait de coller l'étiquette d'agent étranger ou d'entité étrangère à ces acteurs peut changer l'opinion de la population à leur égard. Par exemple, YouTube est doté d'une procédure d'étiquetage. L'entreprise étiquette tout contenu qui provient, par exemple, d'un organisme d'État russe, d'un organisme d'État chinois ou de tout autre organisme d'État. Les effets sont mitigés. Les gens continuent de regarder ces vidéos. Ils commentent toujours ces vidéos. Ils continuent de consommer ce contenu. En toute honnêteté, nous ne savons toujours pas si ces initiatives dissuadent ou non les gens de regarder ces vidéos ou de croire ce qu'on y dit.
    Toutefois, M. Kwan a soulevé un point plus tôt qui, à mon avis, mériterait d'être exploré. Il s'agit de la mise en place d'une ligne téléphonique d'intervention rapide pour les personnes ou les communautés qui ont vraiment besoin de sécurité. Elles pourraient recevoir de l'aide lorsqu'elles sont victimes de harcèlement en ligne, hors ligne, ou les deux à la fois. D'habitude, ces deux formes de harcèlement se chevauchent.
    Nous pourrions également envisager la création d'une agence indépendante, distincte des organismes d'application de la loi, de l'ASFC ou du SCRS, qui se pencherait précisément sur la répression transnationale. Je pense qu'une telle agence serait très utile pour soutenir les victimes et les communautés ciblées.
    Je pense qu'il existe d'autres méthodes.

  (0915)  

    Merci, madame Lim. Nous y viendrons peut-être dans quelques secondes.
    Avant de céder la parole à M. Villemure, je voudrais m'assurer, monsieur Kwan, que vous avez votre oreillette pour écouter l'interprétation. Madame Lim, assurez-vous que vous êtes sur le bon canal d'interprétation.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Kwan, je vous remercie d'être parmi nous ce matin.
    Croyez-vous que le gouvernement du Canada abandonne la diaspora chinoise qui subit des représailles de la part du régime chinois?

[Traduction]

    À mon avis, « abandonner » est un mot très fort. Le terme « ignorer » serait plus à propos pour décrire ce genre de chose.
    Depuis de nombreuses années, nous communiquons les mêmes messages haut et fort. Déjà en 2006, lorsque je m'étais présenté devant ce comité, nous disions ni plus ni moins que la Chine avait le contrôle sur tout; qu'elle savait tout. Même si vous changez de téléphone cellulaire, le régime peut rapidement vous retrouver, à partir de Pékin et de Toronto. À ce sujet, je pense que le gouvernement devrait adopter un message et une position plus fermes.
    Je suis d'accord avec les nombreuses critiques à propos du registre qui soutiennent que ce dernier ne serait peut-être pas efficace à 100 %. Évidemment, nous comprenons cela. Nous pensons que tant que nous n'ignorons pas... Tant que le gouvernement sera perçu comme essayant activement de protéger l'intégrité de ses élections et de sa communauté, il enverra ce message fort aux pays et aux forces hostiles comme la Chine, la Russie et l'Iran: « Nous veillons aussi sur nos citoyens canadiens, alors n'essayez jamais d'exercer des pressions sur eux, de les harceler ou de les intimider. »

[Français]

    Selon votre opinion, le gouvernement du Canada n'envoie pas présentement ce message aux dirigeants chinois.

[Traduction]

    Pourriez-vous répéter votre question? Je m'excuse.

[Français]

    Certainement.
    Selon votre opinion, présentement, on n'envoie pas au gouvernement chinois le message selon lequel le Canada va protéger les citoyens.

[Traduction]

    Je crois fermement qu'une démonstration publique plus explicite en vaut la peine.
    En ce moment, comme vous le savez, nous traversons la pandémie de COVID. Les gens pensent au racisme envers les Canadiens d'origine chinoise. Je n'accepte pas l'argument selon lequel la création d'un registre est une attaque contre la communauté chinoise du Canada. Il s'agit du message habituel véhiculé par le Parti communiste chinois. Il utilise les mêmes arguments pour la pandémie de COVID que pour tout autre sujet.
    J'espère que le gouvernement ne croira pas que le simple fait de mettre sur pied un registre des agents étrangers signifie que l'on établit un registre pour tous les Canadiens d'origine chinoise.

[Français]

    La distinction est fondamentale.
    Pouvez-vous nous parler un peu des postes de police chinois dont on entend parler dans les médias?

[Traduction]

     Oui, cette situation a été révélée par une organisation non gouvernementale espagnole et nous n'en avions pas connaissance avant. Cependant, nous n'avons pas été surpris lorsque nous avons appris qui dirigeait ces postes et quelles organisations civiles les appuyaient, parce qu'il s'agit de noms bien connus.
    Je tiens à souligner, monsieur, que le Journal de Montréal a publié hier un article à propos de deux postes de police à Brossard et à Montréal. L'article nous apprenait que ces postes étaient dirigés par la même femme, qui est conseillère municipale à Brossard. Cette femme s'est ouvertement affichée comme étant proche du Parti communiste chinois. Ce genre de chose ne nous surprend pas.

  (0920)  

[Français]

    Croyez-vous qu'on a déjà eu recours à de telles tactiques ailleurs dans le monde ou que ce qui se passe au Canada est une première?

[Traduction]

    Ces tactiques ont été utilisées dans de nombreux autres pays. Je crois que l'organisme dont je vous ai parlé a découvert 100 postes de police dans le monde. Le Canada en compte cinq ou six, je crois. Il y en a trois à Toronto et maintenant deux à Montréal et un à Vancouver.

[Français]

    Le Service canadien du renseignement de sécurité ne devrait donc pas être surpris de l'existence d'une telle installation, puisque celle-ci fonctionne déjà ailleurs dans le monde.

[Traduction]

    En effet. Le rapport a été publié par Safeguard Defenders. C'est une organisation espagnole.
    Je sais que la Chine mène des opérations très semblables, voire plus graves, en Australie, en Espagne et dans de nombreux autres pays européens et, bien sûr, dans d'autres pays non européens.

[Français]

    Vous avez mentionné un peu plus tôt que vous connaissiez le nom des circonscriptions des parlementaires qui étaient en cause ici. Si je me fie à votre opinion, c'était de connaissance commune.
    Seriez-vous en mesure de nommer les circonscriptions ou les régions?

[Traduction]

    Je peux vous faire part de deux élections que l'on soupçonne fortement d'avoir été influencées par des agents étrangers. Dans la circonscription de Kenny Chiu, le député conservateur a perdu son siège parce qu'il avait présenté un projet de loi d'initiative parlementaire sur le registre des agents étrangers. Ensuite, ce qui s'est passé dans la circonscription de Bob Saroya, à Markham, est extrêmement louche. M. Saroya avait remporté la victoire dans toutes les autres élections avec une avance de 20 000 ou 15 000 voix, mais cette fois‑ci, un candidat de l'autre parti qui se rangeait du côté des Chinois l'a emporté avec au moins 5 000 ou 7 000 voix d'avance.
    Merci, monsieur Kwan.
    Merci, monsieur Villemure.
    Monsieur Green, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Il était important que notre comité aborde des sujets qui n'avaient pas encore été étudiés par d'autres comités, afin d'éviter de refaire les mêmes études. Je pense qu'il est important de commencer en parlant des répercussions concrètes de la situation sur les personnes présentes. Je suis heureux que nous puissions entreprendre cette étude.
    Madame Lim, dans l'article intitulé The Risks of Exaggerating Foreign-Influence Operations and Disinformation, vous avez déclaré que nos craintes et nos préoccupations quant au fait que des acteurs étrangers interfèrent d'une manière ou d'une autre avec la démocratie dans le discours politique accélèrent, de façon contre-intuitive, l'érosion de la démocratie et du discours politique. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, en relation avec les allégations actuelles d'ingérence étrangère?
    Oui, je crois que nous avons recensé 79 pays qui, au cours des 10 dernières années, ont adopté des lois sur la mésinformation et l'ingérence étrangère dans les élections. Ces pays renvoient souvent à des nations démocratiques comme les États-Unis, le Canada, la France, l'Allemagne le Royaume-Uni ou l'Australie pour justifier leurs actions. Cette justification semble s'inscrire dans le thème général de la sécurité nationale. Voilà pourquoi je crois qu'il est dangereux de se limiter aux moyens législatifs pour freiner ces phénomènes. D'autres pays moins démocratiques que le nôtre et démunis des garde-fous dont le Canada s'est doté se serviront de nos discours pour adopter et justifier leurs propres lois.
    À mon avis, le Kirghizistan en est un exemple. Le gouvernement y a adopté une loi très vaste lui permettant de retirer ou de censurer tout contenu qui lui déplaît. Pour motiver cette mesure législative, il a spécifiquement cité le livre blanc du Royaume-Uni sur les méfaits en ligne ainsi que NetzDG, le projet de loi allemand. Je crois que le gouvernement a aussi cité un projet de loi français fictif ayant fait l'objet d'une fausse nouvelle.
    Je le répète: je ne suggère pas qu'il faut faire fi de ce qui se passe au Canada. Je crois que nous devons présenter les événements avec la plus grande prudence et seulement dénoncer les effets et résultats. Je trouve que les témoignages des autres témoins font valoir à quel point c'est important. C'est la raison pour laquelle je souligne également la répression transnationale, qui se démarque des autres types d'ingérence étrangère.

  (0925)  

    Comment définiriez-vous la « répression transnationale », au juste?
    Je crois que deux facteurs majeurs la définissent.
    Tout d'abord, elle doit être ordonnée par un gouvernement étranger et se produire sur notre territoire.
    Je soulève cette question parce que je viens d'Hamilton. Nous avons été témoins d'un incident particulier en septembre 2019, alors que des étudiants de l'Université McMaster ont accueilli un activiste ouïghour bien connu, Rukiye Turdush. L'événement a été perturbé par des étudiants qui y ont été amenés en autobus.
    Cet incident correspond-il à ce type d'action?
    Il pourrait y correspondre, mais il faudrait aussi davantage de preuves, n'est-ce pas? Nous ne pouvons présumer que les perturbateurs, simplement parce qu'ils s'opposent au conférencier, sont automatiquement influencés et dirigés par le gouvernement chinois.
    Oui.
    Le début du titre de votre article, auquel j'ai fait référence, se lit « Les risques de l'exagération de l'influence étrangère... » Croyez-vous que les risques quant aux allégations soulevées en ce moment au Canada sont exagérés?
    Je crois qu'il faut revenir à cette question: quelles allégations? Parlons-nous d'opérations d'influence en ligne, de façon générale, ou de harcèlement très ciblé? Je ne pense pas que nous exagérons les effets du harcèlement ciblé. Ils sont très évidents et, comme l'ont démontré les autres témoins, perdurent dans le temps.
    Je suis un peu plus ambivalente en ce qui concerne l'incidence et l'efficacité des vastes campagnes de mésinformation ou des activités cherchant à influencer autrui. Il est difficile de cerner précisément leurs effets. J'hésite un peu plus à me lancer en conjectures à ce sujet.
    Au cours des cinq ou six dernières années, à la lumière de ce que l'intelligence artificielle, les algorithmes, l'information en ligne, la désinformation et les fermes de trolls... Vous savez, je dirais que j'ai moi-même été la cible de fermes de trolls. J'ai eu connaissance de ce qui était de toute évidence des comptes artificiels ciblant toute décision politique donnée.
    Je ferais cette affirmation: au Canada, surtout en raison de l'occupation du convoi et de la montée du populisme de droite, la démocratie est fragile. La population est cynique et ne fait plus confiance à bon nombre de nos institutions démocratiques. La prédominance de l'information en ligne — particulièrement celle qui cible certains groupes — et les études expliquant l'interaction entre le cerveau et les médias sociaux...
    Ne considérez-vous pas que ces tendances pourraient être le produit d'acteurs hostiles, dans le contexte de la démocratie canadienne?
    Oui. Je ne crois pas que vous avez tort par rapport à tous les points que vous venez de soulever.
    Pour revenir à mes propos, je crois que nous devons comprendre pourquoi les gens consomment ce type d'information, ce qui nous ramène aux doléances. Comment rebâtir la confiance dans les institutions et les médias?
    Vous en avez parlé. Vous avez affirmé que le fait de trop s'attarder aux acteurs malveillants et à la présence de désinformation détourne notre attention des problèmes concrets qui alimentent la demande en contenu douteux d'origine suspecte ainsi que la réceptivité à ce contenu.
    Pouvez-vous décrire en quoi le fait de fermer les yeux sur les problèmes concrets des Canadiens peut les rendre plus vulnérables à l'influence étrangère?
    Soyez aussi concise que possible, madame Lim. Il vous reste 12 secondes.
    Laissons tomber, je vais mettre cette question de côté. J'aurai un tour de deux minutes et demie tout à l'heure, et vous pourrez l'entamer en répondant à cette question.
    Merci. Voilà qui conclut notre première série de questions. Nous allons commencer la deuxième.
    Pour la gouverne du Comité, je précise que les conservateurs auront cinq minutes; les libéraux, cinq minutes; le Bloc, deux minutes et demie; et M. Green, deux minutes et demie. Nous passerons ensuite à notre prochain groupe de témoins.
    Monsieur Kurek, vous disposez de cinq minutes.
    Permettez-moi d'abord de remercier sincèrement les témoins de leur courage pour leur comparution aujourd'hui et pour dénoncer sans relâche ces enjeux et ceux qui s'y rapportent.
    Monsieur Tohti, pouvez-vous décrire plus en détail la pression, l'influence, les menaces et l'intimidation de la dictature communiste de Pékin auxquelles se heurtent les Ouïghours vivant au Canada? Pourriez-vous approfondir la forme qu'ont prise ces actions pour vous ou ceux que vous connaissez?
    Merci.
    La liste est longue, et nous communiquons cette information à nos gouvernements depuis le début des années 2000. À titre d'exemple, je suis un citoyen canadien, mais je suis un Canadien ouïghour; vous êtes également citoyen canadien et détenez le même passeport que moi. Si un Canadien ouïghour et un autre citoyen canadien se rendent au consulat de Chine pour obtenir un visa chinois, les deux devront remplir des formulaires complètement différents, et les procédures seront complètement différentes. Les deux demandeurs se feront traiter de façon diamétralement opposée.
    Les Canadiens ouïghours se font demander, par exemple, comment ils parviennent à demeurer au Canada et s'ils ont fait une demande d'asile. Ils doivent aussi recevoir une invitation de leurs parents. Les membres de leurs familles doivent détenir une autorisation de sécurité. Les exigences sont innombrables. En outre, les Canadiens ouïghours doivent signer une promesse de loyauté envers le Parti communiste chinois, ce qui les isole vraiment de leurs familles. Ces contraintes créent la peur que, si je décide de manifester, il s'ensuivra une conséquence, et je pourrais ne plus revoir mes parents, ou je pourrais ne pas pouvoir inviter mes parents à venir me voir puisque les passeports sont délivrés par le gouvernement.
    Le gouvernement chinois impose des règles complètement différentes aux Canadiens ouïghours, non seulement en Chine, mais également au Canada. Pour cette raison, il n'est pas rare qu'ils reçoivent des appels téléphoniques menaçants pour les dissuader de participer à des manifestations, mais les actions vont beaucoup plus loin: on leur demande d'être des informateurs pour le gouvernement chinois et de signaler tout ce qui se produit au Canada. Ne faites rien qui aille à l'encontre des intérêts du Parti communiste chinois.

  (0930)  

    Je vous remercie énormément de cette réponse.
    Je sais que le temps est limité, mais si vous désirez nous faire part d'autres exemples ou récits, n'hésitez pas à les transmettre à notre comité. Il est évident que votre témoignage d'aujourd'hui doit nous pousser à prendre la situation au sérieux. Je vous remercie.
    Monsieur Kwan, vous avez donné des exemples décrivant comment la dictature communiste de Pékin exerce des pressions sur les Canadiens et sur les infrastructures démocratiques canadiennes. Dans quelle mesure cette réalité était-elle connue avant les plus récentes révélations? Pouvez-vous nous expliquer à quel point la diaspora chinoise et vous-même étiez au courant de ces faits?
    Nous étions très au courant de ces faits. En fait, nous les condamnons depuis 15 ou 20 ans. Nous avons été témoins de bien des cas sur le terrain, bien entendu, et bon nombre d'entre eux n'ont pas été signalés ou, s'ils ont été signalés auprès de la police locale ou de la GRC, ils ne feront pas l'objet d'enquêtes parce que les preuves sont insuffisantes. Voilà qui explique pourquoi, en 2017, nous avons été nombreux à joindre nos efforts pour recueillir des preuves et des témoignages qui ont servi à rédiger, en collaboration avec Amnistie internationale, le rapport sur le harcèlement et l'intimidation que nous avons transmis aux ministères gouvernementaux pertinents.
    Je vous pose cette question avec le temps qu'il me reste: si nous détenons toutes ces preuves, comment expliquez-vous l'hésitation ou le refus du gouvernement à agir?
    Je n'en suis pas certain. Nous n'avons reçu aucun accusé de réception, jusqu'à maintenant. Normalement, quand on écrit une lettre à un député ou à un ministre, on reçoit au moins un accusé de réception et une promesse de suivi. Nous n'avons même pas reçu ces messages.
    Puis-je vous demander à qui vous avez envoyé cette information?
    D'abord, nous l'avons envoyée à Affaires mondiales, puis, bien sûr, à la Gendarmerie royale du Canada, avec qui nous tenons particulièrement à entrer en communication.
    L'avez-vous fait parvenir à des ministres?
    Je crois que nous avions mis certains ministres en copie. Je ne me rappelle pas exactement qui l'était.
    Seriez-vous en mesure de nous envoyer cette information?
    Si je la retrouve, oui.
    Merci, monsieur Kurek.
    Nous passons maintenant à Mme Hepfner, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux moi aussi remercier tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Kwan, je veux revenir à un commentaire que vous avez fait au sujet de Markham—Unionville. Je veux dire que je ne suis pas du tout surprise que Paul Chiang ait remporté l'élection. Il a été policier dans la région pendant 28 ans. Il parle huit langues et il fait un excellent travail de député depuis deux ans. Je veux que ce soit inscrit au compte rendu.
    Je veux vous demander depuis combien de temps, à votre avis, la Chine exerce de l'influence étrangère au Canada. Vous avez affirmé que c'est le cas depuis les années 90. Vous avez comparu devant un comité parlementaire en 2006; il s'agit donc d'un problème qui s'est produit sous plusieurs gouvernements.
    J'aimerais que vous nous donniez une idée de l'évolution du problème pendant cette période.

  (0935)  

    D'abord, la Chine emploie des méthodes plus sophistiquées, plus subtiles. Ses efforts précoces étaient perçus comme étant gauches à bien des égards et n'étaient peut-être pas pris très au sérieux par nos élus ou par les forces de l'ordre. Mais la Chine a maintenant relevé son niveau, et ses interventions sont devenues beaucoup plus subtiles.
    Je peux vous donner un exemple. La Chine ne respecte pas les règles de conduite que nous connaissons en Occident. Disons qu'on a un contrat avec une entreprise chinoise pour installer des appareils de radioscopie dans toutes les ambassades canadiennes et que le contrat prévoit différentes interdictions, y compris celle de partager certains renseignements. À notre avis, la Chine ne respectera pas ce genre de contrat; en Occident, nous percevons un contrat comme étant contraignant.
    Si on embauche une entreprise chinoise pour traiter les demandes de visas pour les consultats du Canada, on présume que les employés recrutés par la compagnie respecteront les règles de confidentialité et toute autre disposition du contrat, mais ce n'est en réalité par le cas. Le gouvernement chinois est persuasif pour s'assurer de la loyauté des gens envers le parti, le gouvernement et le pays, et pour faire ce qui doit être fait. Ces façons de faire ne devraient étonner personne.
    Merci.
    Je m'adresse maintenant à Mme Lim.
    Vous avez parlé de xénophobie dans votre déclaration liminaire, et je me demande si vous pouvez décrire l'effet que peuvent avoir l'ingérence étrangère et les discussions autour de l'ingérence étrangère sur la vie des Canadiens d'origine chinoise et peut-être sur leur participation au processus démocratique au Canada.
    Oui, bien sûr.
    Très brièvement, je répète qu'un lien de corrélation n'est pas nécessairement un lien de causalité, mais il s'agit d'un constat que nous faisons également pour d'autres communautés. Quand Israël fait l'objet de critiques, par exemple, on rapporte davantage d'agressions antisémites. De même, pendant la COVID — le coronavirus —, il y a eu davantage de ressentiment envers les immigrants chinois. Également, après les attentats du 11 septembre, il y a eu beaucoup de réactions négatives envers les personnes perçues comme ayant la peau foncée, pas seulement arabes. Voilà le contexte général dans lequel nous nous trouvons.
    À mon avis, il faut faire attention à la façon qu'on a de dire certaines choses. Il faut répéter qu'il s'agit des agissements du Parti communiste chinois, ou PCC, et non de la population chinoise en général... Je crois — et la plupart d'entre vous en êtes bien conscients; ce n'est pas nouveau — qu'il faut être prudent quant aux mots utilisés... Nous devrions critiquer le PCC et mettre en lumière toutes ses activités, mais je voudrais également éviter de me faire cracher au visage ou de me faire crier une insulte raciste dans la rue. C'est une simple mise en garde. Il nous faut être prudents dans notre manière de traiter de ce sujet.
    Êtes-vous d'avis que même des allégations d'influence étrangère ont un effet sur le choix des Canadiens d'origine chinoise de se porter bénévoles, ou non, pour une campagne politique, par exemple, ou de travailler pour un parti politique? Est-ce qu'elles limitent leur capacité à participer pleinement à notre processus démocratique s'ils le souhaitent?
    Pourriez-vous répondre brièvement, s'il vous plaît?
    Oui. À la lumière des données probantes actuelles, je ne peux pas vous répondre avec certitude.
    Je vous présente à nouveau mes excuses, madame Lim. Il semble que vous interveniez toujours à la fin des tours. Je n'aime pas vous interrompre, croyez-moi.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais retourner à M. Kwan.
    Monsieur Kwan, si vous aviez l'amabilité de nous transmettre le rapport de 2017, nous vous en serions très reconnaissants.

[Traduction]

    Oui. C'est le rapport du tribunal.

[Français]

    Je vous remercie.
    Selon votre opinion, est-ce que l'ingérence de la Chine dans les affaires du Canada a augmenté depuis l'avènement au pouvoir du Parti libéral en 2015?

  (0940)  

[Traduction]

    Je ne crois pas pouvoir affirmer quoi que ce soit à ce sujet, simplement parce que, comme l'a mentionné Mme Lim, on ne peut établir de lien de causalité dans le cas présent. À mon avis, elle était tout aussi présente pendant le gouvernement conservateur du premier ministre Harper.
    Le fait que l'ingérence ait augmenté au cours des sept dernières années ne signifie pas que la situation soit attribuable au gouvernement libéral.

[Français]

    C'est peut-être simplement que l'ingérence a augmenté pendant cette période.

[Traduction]

    Oui, il y a eu coïncidence.

[Français]

    Quel est l'avantage du régime chinois à vouloir déstabiliser des régimes démocratiques?

[Traduction]

    Pékin agit ainsi partout dans le monde. Le Canada n'est pas une exception.
    Je donne l'exemple de l'Australie, notre cousine, un pays de taille, de population et de démographie semblables. La Chine œuvre en Australie depuis de nombreuses années. Les Australiens se sont défendus, d'abord en établissant pour leurs élus des règles de conduite très strictes envers le PCC, ainsi qu'en créant et en faisant respecter un registre des agents étrangers.
    Bien sûr, l'Australie en a souffert. Elle a fait l'objet de sanctions commerciales et de harcèlement de la part de la Chine, mais j'admire le courage qu'elle a eu de lui tenir tête.

[Français]

    Il me reste quelques secondes pour une dernière question.
    Croyez-vous qu'une enquête publique indépendante soit nécessaire afin que la population se sente plus en sécurité?

[Traduction]

    Oui, je le crois. Je pense qu'un ancien premier ministre australien a déclaré à la télévision il y a à peine une semaine qu'il fallait de la lumière, qu'il fallait mettre ces événements en lumière aux yeux du public. Non seulement l'examen de ces activités nous aide, mais il indique aussi à la Chine qu'elle ne peut plus agir clandestinement. Tout ce que la Chine fait est exposé aux yeux de la population, et c'est elle qui en jugera.

[Français]

    Merci, monsieur Kwan.
    Merci, monsieur Villemure et monsieur Kwan.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la dernière intervention de deux minutes et demie.
    Merci.
    Madame Lim, dans l'une de vos interventions précédentes, vous aviez commencé à donner des détails stratégiques supplémentaires. Je veux vous donner un peu de temps pour aborder d'autres éléments que nous devons prendre en compte et les inscrire au compte rendu.
    Oui, bien sûr.
    Ce point a probablement déjà été abordé, mais la reddition de compte — le fait de véritablement rappeler les représentants à l'ordre si nécessaire — est importante. Cela pourrait consister à convoquer les diplomates des pays concernés; à émettre des déclarations très publiques condamnant ce type d'agissements; et à rassembler les preuves, comme l'a aussi dit M. Kwan, pour mettre en lumière les événements. À mon avis, c'est vraiment important.
    Je pense qu'il faut agir davantage pour soutenir les victimes et les communautés ciblées. Il me semble que le Federal Bureau of Investigation américain, ou FBI, a une ligne d'urgence et que la police du Royaume-Uni a offert sa protection lorsqu'il y a eu des agressions envers la diaspora iranienne.
    Il devrait y avoir de la formation sur le monde numérique, une formation de base en matière de sécurité. Également, si une agence devait être fondée pour s'attaquer précisément à la répression transnationale, on devrait y offrir une bonne formation pour que les intervenants comprennent ce que vivent les victimes.
    De plus, il ne faut pas victimiser à nouveau des personnes qui ont déjà été ciblées. Par exemple, une personne pourrait être ciblée en raison de son appartenance à une diaspora, ce qui pourrait entraîner une surveillance accrue de cette personne par les forces de l'ordre. Ce n'est pas nécessairement souhaitable, car elle peut avoir déjà eu une mauvaise expérience avec la police.
    Il faut tenir compte de tous ces aspects.
    Mon dernier point concerne la participation du secteur privé. Nous savons que beaucoup de harcèlement a lieu sur Twitter, Facebook, Telegram, WeChat et les autres plateformes. Ce pourrait être difficile, parce que ce sont des entreprises à but lucratif qui sont souvent basées à l'étranger, mais songez au rôle qu'elles pourraient jouer.
    Également — je suis désolée, je vais à toute allure...
    Aucun problème. L'objectif est d'inscrire vos propos dans le compte rendu.
     ... il faudrait explorer l'idée de sanctions ciblées à l'endroit d'entreprises qui exportent ou vendent des produits technologiques à des pays qui nous utilisent contre des personnes.
    Je m'arrête ici.
    J'ai une dernière question, parce que vous parlez d'ingérence étrangère. De nombreux exemples concernent des pays non occidentaux qui s'ingèrent dans des démocraties occidentales.
    Pourriez-vous commenter l'ingérence des démocraties occidentales dans les élections d'autres pays dans le monde?

  (0945)  

    Oui, absolument, cette ingérence se produit tout le temps. Prenons les États-Unis et le Canada. Les États-Unis sont notre principal voisin. Ils nous influencent constamment, que cela nous plaise ou non. Voilà pourquoi nous avons des règles sur le contenu canadien.
    Pendant le convoi des camionneurs, que vous avez mentionné un peu plus tôt, il y a eu beaucoup d'influence en provenance des États-Unis et même de politiciens américains. De l'argent a été envoyé des États-Unis. Il nous faut en être conscients. Il aurait aussi pu s'agir de harcèlement.
    Nous avons dépassé le temps imparti de 30 secondes, monsieur Green.
    Je termine en disant que, effectivement, cela se produit aussi entre démocraties.
    Merci, madame Lim.
    Voilà qui conclut la première partie.
    Je veux remercier tous nos témoins pour leur présence et pour les renseignements, à mon avis, précieux et convaincants qu'ils nous ont transmis aujourd'hui.
    Monsieur Kwan, monsieur Tohti et madame Lim, au nom du Comité et des Canadiens, je vous remercie pour votre comparution.
    Nous suspendons la séance quelques minutes afin de nous préparer pour le prochain groupe de témoins.
    Je préviens les membres du Comité que le temps sera réparti de la même façon pendant les séries de questions. Le déroulement sera très semblable à celui de la première partie.
    Merci.

  (0945)  


  (0950)  

    Nous reprenons la séance. Bienvenue à tous.
    Nous sommes sur le point d'accueillir notre deuxième groupe de témoins.

[Français]

    J'informe le Comité que tous les tests techniques requis ont été faits.
    Monsieur Villemure, je vous confirme aussi que les tests pour l'interprétation ont été faits.

[Traduction]

    Nous recevons notre deuxième groupe, qui est composé de trois témoins.
    Je veux souhaiter la bienvenue à M. Bill Chu, porte-parole du Groupe sino-canadien d'examen des violations des droits de la personne du Parti communiste chinois; ainsi que Cherie Wong, directrice exécutive, et Ai‑Men Lau, conseillère, de l'Alliance Canada Hong Kong. Je vous remercie, madame Wong, de témoigner ce matin.
    Vous constaterez que tous nos témoins comparaissent par vidéoconférence.
    Monsieur Chu, nous commencerons par vous. Vous disposez de cinq minutes pour vous adresser au Comité. À vous la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président et honorables membres du Comité.
     Je m'appelle Bill Chu. Je témoigne depuis Vancouver, en Colombie-Britannique, qui serait la tête de pont de la guerre sans restriction de la République populaire de Chine, ou RPC, au Canada.
    L'expression « guerre sans restriction » est tirée d'un livre du même nom publié en 1999 par deux caporaux de l'Armée populaire de libération, où ils décrivent une nouvelle forme de guerre qui n'utilise pas des armes traditionnelles comme les fusils et les bombes, mais plutôt des armes furtives comme la désinformation dans les médias, l'influence achetée grâce aux pots‑de‑vin, au sexe, aux échanges commerciaux, à la gloire, aux menaces et autres manœuvres, ainsi que le cyberpiratage, la collecte de données et l'espionnage intellectuel. Nul besoin de transporter des soldats, puisqu'il suffit de convertir des gens du pays pour en faire des fantassins. C'est un plan parfait, car en brouillant des frontières ou même en entretenant le doute sur la présence de la guerre, la RPC a aussi acquis l'image d'un pays prétendument pacifique.
    Cependant, en utilisant WeChat et d'autres applications, la RPC envoie silencieusement des nouvelles et des directives officielles à des dizaines de milliers d'étudiants et d'immigrants chinois qui restent ici. Avec en plus des médias et des plateformes sociales de langue chinoise, la RPC a acquis au sein d'une grande partie de la communauté chinoise locale une influence supérieure à celle du Canada lui-même. Au besoin, la RPC peut mobiliser d'imposants groupes de Chinois, et elle ne s'est pas privée de le faire.
     Il ne fait aucun doute que les Canadiens ont senti que quelque chose n'allait pas quand ils ont eu vent des diverses formes d'influence indue de la RPC au Canada, mais ils ne sont pas certains si le gouvernement saisit la gravité de la situation ou s'il dispose d'un plan pour régler le problème.
    Malheureusement, le premier ministre s'est avéré mal préparé et a même tenté de minimiser le danger quand il a réagi dans les médias à l'ingérence chinoise lors des élections. Il est facile de sous-estimer la Chine, car elle s'est faite discrète pendant des décennies.
    Mais la Chine s'est jointe à l'Organisation mondiale du commerce, et le monde est si ébloui par sa montée fulgurante que la plupart des pays ont oublié que la RPC est un État dirigé par un parti autoritaire unique qui proscrit le pluralisme idéologique. Jamais on ne doit dénaturer le communisme, pas même les progressistes autoproclamés qui considèrent qu'il s'agit d'un choix légitime, puisque le fait d'accepter le communisme signifie ironiquement qu'il n'y a plus de choix.
    Par conséquent, les dirigeants chinois n'ont pas besoin du vote populaire pour accéder ou rester au pouvoir. Pendant sept décennies, ils ont pris l'habitude de faire fi des protestations ou des droits du peuple, recourant à la propagande, aux mensonges et à la suppression brutale pour contrôler les dissidents, ce qui est facile à faire quand les trois organes du gouvernement sont censés servir exclusivement les intérêts du parti. Pendant des décennies, la Chine a été séparée du monde, mais avec l'entrée de la RPC sur la scène mondiale, ses dirigeants doivent s'efforcer de maintenir la validité de leur idéologie problématique et de leurs prétentions saugrenues non seulement devant leur peuple, mais devant le monde.
    Dans le cadre de la guerre secrète qu'elle mène dans le monde, la RPC a dépensé des milliards de dollars pour acheter ou agrandir des médias, pour faire de la propagande, notamment en achetant de pleines pages de publicité et des encarts dans de grands journaux occidentaux, et en rejetant les critiques sur le Parti communiste chinois, ou PCC, affirmant qu'il s'agit de mensonges sans fondement et, ultérieurement, du racisme envers les Chinois, entre guillemets.
    Afin de préparer le terrain pour cette dernière prétention, le parti a, pendant des décennies, intentionnellement joué sur le terme « PCC », remplaçant « de Chine », le pays, par « chinois », le peuple. Son objectif consistait à faire taire les critiques dont il fait l'objet en affirmant que le critiquer revient à critiquer tous les Chinois. Il voulait également stimuler un sentiment tordu de nationalisme chez tous les Chinois, y compris au sein de la diaspora.
    Le fait est que le Département du travail du Front uni de la RPC est à l'œuvre depuis longtemps au sein des communautés de la diaspora chinoise. Les années 1970 ont été particulièrement opportunes pour le PCC au Canada, le gouvernement ayant abrogé la dernière des lois discriminatoires envers les Chinois. Les Sino-Canadiens entrant dans une vie plus équitable et plus stable, la plupart des organisations et les clans chinois locaux de longue date ont découvert que leur mandat historique avait subitement disparu.
    À Vancouver, je prendrai la Chinese Benevolent Association à titre d'exemple flagrant. C'est la triste histoire d'une association qui œuvre depuis une centaine d'années dans le quartier chinois. Le PCC n'a pas tardé à comprendre qu'il pouvait exploiter son nom bien connu, et ces dernières années, l'Association a publié de pleines pages de publicité dans des journaux de langue chinoise, incitant docilement des centaines d'organisations chinoises à clamer leur soutien aux politiques draconiennes de la Chine.

  (0955)  

    Ces...
    Monsieur Chu, nous avons maintenant dépassé les cinq minutes. Je sais que les membres du Comité auront de nombreuses questions; nous pouvons donc peut-être nous arrêter ici. Je suis désolé de vous interrompre.
    Nous entendrons maintenant Mme Wong et Mme Lau, qui, d'après ce que je comprends, se partageront les cinq minutes.
    Commencerons-nous par Mme Wong ou Mme Lau?
     Nous prendrons la parole à tour de rôle, mais...

  (1000)  

    D'accord. C'est excellent.
    Bonjour.

[Français]

    Je vous remercie de nous avoir invitées à témoigner aujourd'hui.

[Traduction]

    Je m'appelle Ai‑Men Lau et je suis conseillère pour l'Alliance Canada Hong Kong. Je réside actuellement à Taïwan où je travaille comme analyste de recherche pour l'organisation de la société civile chinoise nommée Doublethink Lab.
    Je m'appelle Cherie Wong. Je me trouve à Ottawa, et je suis directrice exécutive de l'Alliance Canada Hong Kong. Je vous remercie de nous recevoir.
    L'ingérence étrangère au sein de nos institutions n'est pas un phénomène nouveau. Depuis les années 1990, des communautés chinoises dissidentes attirent l'attention sur l'influence étrangère dans toutes les facettes de la société canadienne, laquelle s'exerce non seulement dans les élections, mais également dans la recherche, la société civile, le milieu universitaire et les entreprises privées. Même si la diaspora constitue la cible première des efforts d'ingérence étrangère, Pékin cible toutes les personnes influentes, et de nombreux Canadiens ne connaissent pas ses tactiques.
    Votre comité a également convenu d'examiner la question de la xénophobie croissante au Canada. Bien que je me réjouisse de voir qu'on discute ouvertement de l'ingérence étrangère lors des élections canadiennes, je suis déçue de constater que les discours des médias, de la sphère politique et de la société font fi des observations des communautés de la diaspora, lesquelles possèdent pourtant de précieuses connaissances qui permettent notamment de faire la différence entre une personne d'intérêt, une cible de l'influence étrangère, un complice consentant, un agent actif et une personne ayant des liens avec le consulat. Certains points de vue sensationnalistes ont suscité des sentiments racistes et xénophobes à l'endroit des Asiatiques au Canada, ne faisant pas les nuances que peuvent apporter les voix dissidentes venant du Tibet, de Hong Kong et des communautés ouïgoures.
    À titre d'organisation diasporique racisée, nous sommes invités à traiter exclusivement de la xénophobie même si nous avons rédigé des rapports et été fort consultés à propos de l'influence étrangère au Canada. Pendant ce temps, les gouvernements et les médias font appel à des experts dont les champs de compétences résident ailleurs et tentent de résumer leurs recherches sur les choses mêmes que la diaspora observe aux premières lignes.
    Le racisme envers les Asiatiques augmente au Canada, et les menaces de violence transnationale parrainée par l'État se sont également intensifiées au fil des ans. Les communautés de la diaspora sont exclues du discours canadien, tout en survivant à l'influence de Pékin. L'idée selon laquelle toutes les communautés ethniques chinoises appuient les autorités chinoises est raciste et simpliste. Ces communautés ne sont pas monolithiques et brillent plutôt par leur vitalité et la diversité de leurs langues, de leurs cultures et de leurs politiques.
    Les membres de notre communauté observent depuis longtemps les activités d'ingérence étrangères qui se déroulent sous notre nez, notamment quand on remet des formulaires de mise en candidature dans des circonscriptions lors d'événements associés au consulat, quand des agents du Bureau chinois des affaires étrangères courtisent des d'élus, quand des journalistes ethniques assistent à des conférences parrainées par Pékin, et quand on prend des photos et s'efforce de choyer les élites du monde des affaires et du milieu politique.
    Quand la diaspora résiste aux efforts de contrôle transnationaux de Pékin, les pneus de dissidents sont crevés, des activistes sont harcelés et menacés, les permis d'étudiants étrangers sont refusés et des demandes de passeport sont rejetées. Les gens qui critiquent ouvertement Pékin ou dénoncent les efforts d'influence de la RPC risquent de perdre des possibilités de carrière, des occasions d'affaires ou du financement à la recherche. Ils pourraient ne plus pouvoir retourner en RPC, et leur sécurité et celle des membres de leur famille élargie pourrait être menacée. Rien d'étonnant à ce que de nombreuses personnes s'autocensurent en raison de l'efficace système mondial de contrôle et de surveillance de Pékin.
    Je voudrais donc formuler des recommandations suivantes pour que le Comité les étudie.
    Premièrement, il faut adopter une approche faisant intervenir l'ensemble de la société afin de contrer l'ingérence étrangère, puisqu'elle se manifeste dans toutes les facettes de la société canadienne. Si on omet la moindre facette, ce sont les communautés les plus vulnérables qui en pâtiront.
    Deuxièmement, il faut offrir aux gens des lieux sécuritaires et anonymes où ils peuvent exprimer leurs préoccupations afin de prévenir les représailles de la part d'acteurs étrangers hostiles.
    Troisièmement, il faut inclure les communautés marginalisées, les centres culturels et les groupes linguistiques dans votre approche.
    Notre témoignage d'aujourd'hui met l'accent sur l'expérience vécue par les communautés et les connaissances d'experts sur les efforts d'influence étrangère de Pékin. Je veux également profiter de l'occasion qui nous est donnée pour encourager les décideurs à rétablir la confiance avec les communautés de la diaspora, qui sont nombreuses à avoir depuis longtemps l'impression de ne pas être écoutées et d'être ignorées.
    Sachez enfin qu'il serait naïf de penser que la RPC est le seul pays à s'adonner à l'ingérence étrangère. Nous pressons donc le Comité à examiner des solutions ne ciblant pas un pays en particulier et à consulter les autres diasporas pour connaître leurs opinions.
    Nous vous remercions de nouveau de nous avoir invitées à témoigner.
    Nous répondrons à vos questions avec plaisir.
     Nous vous remercions, madame Lau et madame Wong.
    J'imagine qu'il est probablement tard à Taïwan maintenant.
    Monsieur Barrett, vous disposez de six minutes pour votre intervention.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de se joindre à nous. J'apprécie à sa juste valeur le travail que vous effectuez à titre d'experts de votre domaine.
    Je commencerai par vous, madame Wong, car j'ai regardé une vidéo de votre apparition lors d'une émission canadienne d'affaires publiques, au cours de laquelle vous avez indiqué que vous preniez un risque en participant à cette émission. Le risque ne vient pas de votre participation à l'émission, mais du travail que vous faites et dans le cadre duquel vous êtes devenue experte de l'ingérence étrangère pendant les élections.
    Pouvez-vous nous expliquer ce qui vous a menée à ce point et comment la menace se manifesterait dans votre cas?

  (1005)  

    Je vous l'expliquerai volontiers.
    C'est là que la conversation se complique un peu. Quand il est question d'ingérence et d'influence étrangères, il n'est pas nécessairement facile de détecter ces activités et de pouvoir dire qu'un État étranger intervient dans sa vie.
    Par exemple, depuis mon apparition sur CBC vendredi dernier, Internet est extrêmement lent à la maison et j'ai reçu plus d'appels, de courriels et de messages textes frauduleux. Est‑ce un acte d'ingérence ou d'influence étrangères? Je l'ignore, ne possédant pas l'expertise nécessaire pour dire si ces phénomènes découlent de mon apparition dans les médias.
    Le principal problème, c'est que la communauté craint d'apparaître dans les médias, car dans certains cas extrêmes, des activistes et des dissidents ont reçu des menaces sur les médias sociaux et en personne. Certains membres de la communauté ont déploré que leurs pneus aient été crevés après avoir participé à un événement organisé pour commémorer le 4 juin.
    Il existe tant de menaces et de tentatives d'ingérence que nous ne pouvons pas simplement affirmer « cela s'est produit », sinon nous pourrions identifier le problème. Nous ne sommes pas des experts en sécurité.
    Je conseillerais au Comité de consulter un de nos derniers rapports.
    Il s'agit d'un rapport d'enquête sur les efforts d'ingérence mondiaux de Pékin en réaction à des manifestations démocratiques de Hongkongais. Nous avons observé des démarches coordonnées à l'échelle mondiale visant à contrer les efforts que déploient les Hongkongais pour manifester à l'étranger.
    Pourriez-vous faire parvenir ce rapport à la greffière du Comité?
    Je vous remercie.
    Madame Lau, pourriez-vous expliquer comment Pékin tente d'influencer la politique au Canada?
    Je reviens à quelque chose que Mme Wong a dit sur les pneus crevés et d'autres activités. Est‑ce que Pékin exploite le climat de peur comme principal outil dans ses tentatives d'influence et d'ingérence, particulièrement contre les communautés de la diaspora au Canada?
    Le climat de peur est certainement un outil, mais je ne dirais pas que c'est nécessairement le principal. Il fait toutefois certainement partie de l'éventail de tactiques que Pékin peut déployer.
    C'est la partie délicate dont il faut discuter quand on parle d'ingérence. Cette dernière ne se limite pas à la politique et aux bulletins de vote, mais s'étend à nos infrastructures culturelles et sociales et à la recherche, un autre domaine que j'ai mentionné.
    Sur le plan de la politique, nous avons certainement observé des efforts visant à augmenter la participation civique, notamment chez des organisations affiliées. Il nous est toutefois très difficile de trouver directement un exemple et de dire qu'il s'agit d'ingérence étrangère.
    C'est un sujet délicat et nuancé à appréhender.
     Je vous remercie.
    Monsieur Chu, dans la minute qu'il me reste, pouvez-vous me donner des exemples de tentatives d'intimidation ou d'influence ciblant votre groupe?

  (1010)  

    [Inaudible] demander à la communauté plutôt qu'à notre groupe, car au fil du temps, nous avons sillonné la communauté pour observer ou surveiller l'évolution de la situation au sein de la communauté chinoise de la région de Vancouver, et nous avons vu les éléments pro-PCC mobiliser un imposant groupe de gens pour qu'ils participent à des contre-manifestations.
    Même quand un groupe s'inquiète de la situation à Hong Kong, nous avons remarqué — comme vous l'avez probablement fait — qu'il se produit des affrontements physiques en public dans la rue. Voilà qui est inacceptable à nos yeux. C'est un des exemples les plus criants. Dans mon propre groupe, soit dit en passant, une femme a reçu des menaces directes par téléphone le soir, à son numéro de téléphone résidentiel.
    Ces incidents se produisent.
    Je vous remercie, monsieur Chu.
    Monsieur Fergus, vous disposez de six minutes.
    Je remercie beaucoup les témoins de comparaître.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Lau et à Mme Wong. Je vous remercie de votre exposé et des recommandations que vous avez formulées.
    Je comprends la recommandation selon laquelle il faut adopter une approche faisant intervenir l'ensemble de la société.
    En ce qui concerne votre deuxième recommandation consistant à offrir aux gens des lieux sécuritaires et anonymes pour qu'ils puissent fournir de l'information aux autorités canadiennes afin que nous ayons une meilleure idée de l'identité des acteurs qui exercent des pressions extraordinaires sur les communautés de la diaspora, pourriez-vous m'en dire davantage à ce sujet?
    Pourriez-vous nous en dire plus également sur la manière dont nous pourrions empêcher le Département du travail du Front uni d'utiliser le même outil pour diffuser encore plus de désinformation et brouiller les cartes en nous indiquant qui sont ceux qui accomplissent du bon travail, comme celui que vous faites toutes les deux?
    Je vous remercie de cette importante question.
    Tout d'abord, vu le climat de peur qui existe, il faut offrir des lieux sécuritaires et anonymes où les membres de la diaspora peuvent se sentir en confiance et communiquer leurs préoccupations et leurs observations. Il est vrai que le Département du travail du Front uni et ses agents utiliseront probablement ces mêmes lieux pour diluer l'information que reçoit le gouvernement du Canada.
    Je pense que nous devons nous montrer proactifs à cet égard, pas seulement en identifiant les acteurs étatiques qui sont à l'œuvre au Canada — c'est le travail de nos organismes d'exécution de la loi et du renseignement —, mais également en effectuant des recherches de source publique. Bien souvent, le Front uni publie les noms des personnes et des organisations qui lui sont affiliés. Si vous effectuez des recherches en langue chinoise et de source ouverte, vous pourrez identifier les agences et les organisations.
    Je peux céder la parole à Mme Lau si elle veut ajouter quelque chose.
    Oui. Je dirais que si c'est ce qui vous préoccupe, je me tournerais également vers la société civile. Je pense que les informations de source publique sont très utiles en pareil cas. L'information est très facile à trouver; il suffit d'avoir la capacité de la chercher. Les organisations de la société civile peuvent intervenir et combler le manque à cet égard.
    Je vous remercie.
    J'espère que vous avez toutes deux regardé le témoignage du groupe précédent. Quelqu'un a proposé d'examiner le modèle australien et d'envisager de tenir un registre public des agents étrangers.
     Pensez-vous que ce soit une bonne idée?
    La création d'un registre des agents étrangers est certainement une bonne première étape. Je suis toutefois d'accord avec les critiques soulevées par le premier groupe de témoins. Nous devons admettre que cet outil a une portée limitée.
    Je pense qu'il faut examiner comment la mise en œuvre d'une telle loi s'est passée en Australie ou dans d'autres pays qui ont adopté des lois semblables afin de voir quels en sont les effets. Les objectifs ont-ils été atteints? Quelles leçons peut‑on tirer de cette expérience?

  (1015)  

     J'ajouterais que le modèle de transparence en matière d'ingérence étrangère en Australie se limite au domaine de la participation politique. Il reste donc un grand vide à combler dans d'autres sphères telles que la recherche, le secteur privé et la société civile, où les agents étrangers et les agents associés à une puissance étrangère utilisent des ressources et de l'argent pour se livrer à de l'ingérence. Il faut tenir compte de cet aspect.
    Je pense que c'est un pas dans la bonne direction, mais le registre devrait avoir une portée plus grande pour contrer efficacement l'ingérence étrangère au Canada.
    Je le conçois très bien.
    Existe-t-il un modèle international de registre qui viserait plusieurs secteurs, dont nous pourrions nous inspirer pour mettre en place une approche plus globale qui nous permettrait de repérer les agents en question?
    Il existe une grande variété de mesures législatives dans différents pays. Nous pourrions nous en inspirer et en retenir les meilleurs éléments. Selon moi, le modèle idéal n'existe nulle part dans le monde pour l'instant.
    Je suis d'accord avec Mme Wong sur cette question.
    J'ai un dernier point.
    Je ne pourrais être davantage en accord avec votre troisième recommandation, qui porte sur l'engagement auprès des communautés de la diaspora. Vous recommandez aussi aux services de renseignement au Canada d'établir des relations plus étroites avec ces communautés pour bien prendre le pouls des gens sur le terrain.
    Très brièvement, que nous recommanderiez-vous pour que nous nous assurions que les services de renseignement développent ces relations? Comment ces derniers pourraient-ils s'y prendre concrètement pour établir des liens avec les communautés de la diaspora?
    Veuillez être très brève.
    Avant toute chose, il faut comprendre que la diaspora n'est pas une communauté monolithique. Elle se compose à la fois de Sino-Canadiens qui sont établis au Canada depuis plusieurs générations et de nouveaux arrivants qui proviennent de partout dans le monde.
    Il faut comprendre aussi que les membres de la communauté sino-canadienne n'ont pas nécessairement de liens avec la RPC, et que le chinois n'est pas la seule langue parlée par ces groupes.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poser ma première question à Mme Lau.
    Selon vous, est-ce que le gouvernement du Canada en fait assez pour donner confiance aux membres de la diaspora?

[Traduction]

    Je dirais que nous pourrions certainement prendre d'autres mesures.
    Il est important de souligner que nous décrivons les tactiques d'ingérence, comme on nous le demande, mais que nous aimerions aussi participer à la solution. À mon avis, une approche globale impliquant toute la société devrait inclure la diaspora chinoise dans les conversations. Les communautés devraient elles aussi être invitées à proposer des solutions.
    En plus de la diaspora, il faut inclure d'autres communautés ciblées par l'ingérence ainsi que les communautés les plus vulnérables. Si nous avons l'impression d'être mis de côté en ce moment, c'est en partie parce que nous sentons la présence d'une voix dominante. Aujourd'hui, c'est encourageant de constater la diversité des voix qui ont été invitées à parler dans un forum comme celui-ci, mais nous devons vraiment réfléchir à la manière dont la diaspora pourrait contribuer à cette lutte contre l'ingérence étrangère.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Lau.
    Madame Wong, dans le mémoire que vous avez déposé, vous parlez de tactiques utilisées par le Parti communiste chinois. Vous en énoncez sept.
    Est-ce que vous pourriez brièvement faire le tour de ces sept tactiques, pour nous aider à les comprendre un peu mieux?

[Traduction]

     C'est exact.
     Au sujet de cette conversation, nous avons enregistré divers actes d'influence politique et diverses tentatives d'emprise sur les élites. Ces activités visent des dirigeants à l'échelle du pays, particulièrement aux échelons inférieurs de gouvernance tels que les commissions scolaires, les administrations municipales et les autorités régionales. L'objectif n'est pas nécessairement de faire élire certains candidats, mais plutôt de mettre en place un contexte favorable pour Pékin, y compris pour le secteur privé en Chine.
    Une autre point qui mérite d'être soulevé, c'est la manipulation de l'information et les stratégies discursives et narratives. Je pense que M. Kwan a parlé de la désinformation populaire planifiée qui circule dans certains espaces communautaires. Ce type de désinformation est véhiculé dans les médias et dans le discours public. Les agents du Front uni se présentent comme la seule voix et la seule autorité des communautés chinoises. Ils essaient de dominer la conversation et de lui donner un éclairage pro-Pékin.
    Un autre élément clé que le Comité devrait vraiment examiner est le Département du travail du front uni. Ce département n'est pas seulement un organisme étatique. C'est en fait un organisme du Parti communiste chinois qui vise à influencer et à renforcer la loyauté envers Pékin. Il agit à tous les niveaux de gouvernement et à l'international. Nous pouvons apprendre de nos partenaires ailleurs dans le monde pour savoir quand et où contrer les activités du Front uni.
    Je pense que les éléments suivants sont assez évidents, c'est-à-dire le harcèlement et l'intimidation à l'endroit des communautés de la diaspora. Les actes de cette nature suscitent encore d'énormes préoccupations dans nos communautés. Nous ne savons pas si les membres de la diaspora qui dénoncent le régime sont en sécurité. C'est vraiment préoccupant.
    Le dernier élément que j'aimerais mentionner rapidement est l'influence exercée dans le milieu universitaire et les vulnérabilités des mécanismes de transfert de propriété intellectuelle. À cause de la vulnérabilité des processus de financement au Canada, le PCC utilise souvent ses capitaux et ses ressources pour financer des activités de recherche précises au sein des établissements canadiens. À terme, le PCC peut alors acheter la propriété intellectuelle des résultats de recherche à très faible coût.

  (1020)  

[Français]

    Toujours dans votre rapport, vous mentionnez que plusieurs personnes ont peur de critiquer le gouvernement chinois, car cela pourrait leur coûter des possibilités de carrière ou des perspectives commerciales.
    Sur le plan macroéconomique, croyez-vous que le Canada est trop dépendant de ses relations économiques avec la Chine et que cela l'empêche d'agir dans certaines circonstances?

[Traduction]

    On ne peut nier que les communautés sont aux prises avec une certaine dépendance. Le sous-financement de la diaspora et des communautés racisées oblige souvent ces dernières à aller chercher des fonds ailleurs. La dépendance envers des sources de financement peu fiables ou douteuses les rend particulièrement vulnérables.
    La même situation s'applique à tous les secteurs au Canada. Dans les universités, lorsque les chercheurs manquent de financement, ils regardent ailleurs. Ils accepteront le maximum de financement qui leur demandera le moins de travail possible, peu importe la provenance des fonds... Les Canadiens et les établissements canadiens sont dans une position très vulnérable.

[Français]

    En quelques mots, puisqu'il ne me reste pas beaucoup de temps de parole, pourriez-vous me dire quel est le but poursuivi par le Parti communiste chinois lorsqu'il fait de telles ingérences?

[Traduction]

    Les ambitions mondiales se sont intensifiées sous la direction actuelle du PCC. Le régime ne cherche pas à nouer des alliances idéologiques, mais plutôt à accroître son pouvoir économique et politique à l'échelle internationale. Ces ambitions se manifestent sous différentes formes. Outre l'influence et l'ingérence étrangères, il y a les investissements économiques comme la nouvelle route de la soie appelée « une ceinture, une route », ainsi que la route polaire de la soie. Le régime essaie tout simplement d'étendre son pouvoir partout où c'est possible, ainsi que de défier, voire de réécrire les normes internationales.
    Merci, madame Wong.
    Nous avons M. Green pour six minutes.
    La parole est à vous, monsieur Green.
     Merci.
     Bienvenue à tous les témoins. Je connais bien votre travail et j'ai d'ailleurs discuté avec certains d'entre vous.
    Madame Wong, l'article de la CBC intitulé « Nous savons où habitent vos parents » citait des militants de Hong Kong qui affirmaient que la police canadienne ne faisait rien contre les menaces en ligne. Vous avez relaté les menaces que vous receviez et l'incapacité de la police d'amener les auteurs de ces menaces à répondre de leurs actes.
    Je voulais souligner cela, car cette tactique a été mentionnée par l'autre groupe de témoins, si je ne m'abuse. Je ne peux imaginer à quel point ces menaces doivent être bouleversantes, particulièrement pour les personnes qui ont de la famille dans leur pays d'origine ou qui reçoivent des menaces voilées au Canada.
    Pouvez-vous décrire les conséquences de l'incapacité des forces policières canadiennes à intervenir dans les cas de divulgation de données personnelles et d'autres formes de harcèlement?

  (1025)  

    Avant toute chose, nous vivons dans un pays qui possède une longue histoire de violence systémique et institutionnalisée envers les personnes racisées. Je pense particulièrement aux membres de la communauté chinoise, dont bon nombre se rappellent très bien la taxe d'entrée, entre autres formes d'exclusion.
    D'abord, les membres de la communauté ressentent une certaine méfiance et une certaine insécurité à l'égard de la police à ce sujet. Ensuite, lorsque nos confrères militants comme M. Kwan — je me considère comme une novice comparativement à des militants comme M. Kwan — me disent qu'ils signalent des actes de harcèlement et d'intimidation depuis 1990 et que rien n'a été fait, je suis très réticente à aller voir la police.
    J'ai toutefois signalé un des incidents qui me sont arrivés au service de police de Vancouver, qui ne s'est même pas donné la peine de me rencontrer en personne pour discuter de la menace en question. Je me suis rendu compte à ce moment-là que la police n'était pas la solution pour contrer les menaces et les actes d'intimidation dirigés contre la communauté.
    Je comprends tout à fait votre point de vue.
    Les témoins précédents ont proposé la mise en place de ressources qui permettraient par exemple de surveiller les téléphones et les appareils et de fournir des solutions technologiques de contre-ingérence pour assurer en somme un rôle défensif.
    Je souhaiterais avoir en main de bonnes recommandations portant sur des mesures que le gouvernement canadien pourrait prendre à l'égard de choses qu'il peut contrôler, et non pas à l'égard, par exemple, du contenu qui circule sur Internet et d'autres phénomènes difficiles à contrôler.
    Une de vos recommandations est d'accroître le financement du gouvernement versé aux organismes communautaires et aux groupes de la diaspora. Votre organisme a-t-il pensé à des moyens qui, à l'échelle de votre communauté, pourraient contribuer à assurer la sécurité des gens? Avez-vous pensé à des ressources qui pourraient être fournies à la communauté concernant des aspects techniques — que vous avez mentionnés précédemment — comme Internet et la surveillance des appareils et qui permettraient de mettre en place en quelque sorte des mesures de contre-surveillance qui pourraient vous soutenir?
    Ce que vous venez de dire est très pertinent. Je pense que la plupart des dissidents — presque tous, en fait — seraient ravis que quelqu'un surveille leur téléphone et le réseau de cybersécurité. Nous n'avons aucune ligne directrice à part celles que nous avons élaborées. Nous nous entraidons grâce aux connaissances qui existent dans les communautés.
     Notre organisme a mis sur pied certaines règles de sécurité que nous demandons aux bénévoles de respecter. Ils doivent par exemple installer un RPV, utiliser un pseudonyme pour leur compte courriel et avoir un deuxième téléphone si nécessaire. Ce sont des mesures supplémentaires qui nécessitent des ressources et du financement, auxquels les dissidents et les Sino-Canadiens ne peuvent pas tous avoir accès pour assurer leur protection. À mon avis, il devrait y avoir plus de changements systémiques et de changements d'attitude sur la gestion de ces enjeux.
    Monsieur Chu, dans votre travail, pourriez-vous énumérer d'autres ressources qui pourraient être offertes aux membres de la diaspora qui vivent au Canada et qui pourraient contribuer aux efforts de contre-surveillance, ou aux efforts de défense devrais-je dire contre la surveillance et l'intimidation étrangères?
    Dans notre travail, nous nous butons constamment aux relations presque dysfonctionnelles entre la GRC et le SCRS. Les deux organisations sont censées travailler ensemble, mais nous constatons qu'il y a un fossé entre les deux. Comme les autres témoins l'ont mentionné, nous déposons une plainte à la GRC, mais rien ne se passe.
    Quant aux membres du SCRS, ils savent pertinemment que les recherches et les informations qu'ils produisent ne se rendent pas vraiment à tous les politiciens.
    Je dirais d'entrée de jeu que c'est le système qui ne fonctionne pas bien.
     Puis-je poser une question liée à ce que vous venez de dire? Sachez que vous n'êtes pas tenu d'y répondre. Je ne voudrais pas mettre qui que ce soit en danger en posant cette question.
    Est-ce que ce serait utile, ou peut-être est-ce déjà le cas... En fait, le SCRS prévient-il les membres de votre communauté lorsqu'ils sont la cible d'ingérence? Cette information est-elle divulguée habituellement? Cela pourrait les aider à se protéger... Trouveriez-vous utile d'obtenir cette information si vous étiez la cible d'ingérence, ou est-ce que pour des raisons de sécurité nationale...

  (1030)  

    La plupart des Sino-Canadiens ne savent pas exactement quel est le rôle du SCRS. Les personnes qui reçoivent des menaces s'adressent habituellement à la GRC, mais si leurs démarches s'avèrent infructueuses, elles finissent par ne plus faire confiance au système.
    Il est important de rebâtir la confiance. Le message doit venir d'en haut. Or, la réponse donnée par le premier ministre a été très décevante, pour ne pas dire autre chose.
    Merci, monsieur Green.
    Merci, monsieur Chu.
    Voilà qui conclut la première série de questions. Je vous rappelle que nous passons aux conservateurs et aux libéraux, pour ensuite passer aux questions de deux minutes et demie du Bloc et du NPD, ce qui conclura la période de questions.
    Je pense que Villemure aura quelque chose à dire à la fin de la séance.
    Monsieur Kurek, votre nom figure dans la liste.
    Monsieur Barrett, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Kurek.
    Si vous me le permettez, je vais donner un avis de motion:
Que le comité, en ce qui concerne son étude sur l'ingérence étrangère, invite Katie Telford, cheffe de cabinet du premier ministre, à comparaître seule pendant trois heures, à condition qu'elle soit assermentée ou qu'elle fasse une déclaration sous serment.
    Je cède la parole à M. Kurek.
    Merci.
    L'avis de motion est accepté.
    La parole est à vous, monsieur Kurek.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens, encore une fois, à remercier les témoins de leur bravoure, de leur militantisme et des efforts qu'ils déploient pour la défense de leur communauté et pour la défense des droits de la diaspora chinoise au Canada et partout dans le monde. Je vous remercie de prendre part à cette conversation.
    Monsieur Chu, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de la réaction du premier ministre, qui semblait, selon vous, banaliser — je pense que c'est le mot que vous avez employé — le problème.
    Vous avez écrit au premier ministre pour lui faire part de vos préoccupations sur la dictature communiste et l'ingérence de Pékin au Canada.
    Si vous le voulez bien, je vais vous laisser une minute pour que vous nous décriviez le contenu de votre lettre au premier ministre.
    Au-delà de la lettre que j'ai écrite, il y a la lettre ouverte signée par notre groupe. Nous voulions essentiellement souligner qu'aucune mesure appropriée n'est prise à l'égard de tout ce qui se passe dans notre communauté. Nous pressions le gouvernement de se concentrer sur des choses simples comme les médias de langue chinoise et leur incidence dans la communauté.
    Je ne peux pas me rappeler exactement les mots que nous avons employés, mais essentiellement, nous disions que c'est sous le couvert d'une autre langue qu'ils peuvent véhiculer impunément une version trafiquée de la réalité. Notre communauté est confrontée à des tactiques qui sèment la peur chez un grand nombre d'entre nous. Face à un gouvernement à parti unique qui agit dans un seul but, nous ne sommes pas... Notre communauté est pratiquement la seule qui est soumise à cette forme de lavage de cerveau. Autrement dit, nous sommes exposés à une philosophie, à une idéologie et à des discours différents de ce à quoi est exposé le Canadien moyen. Nous subissons une grande oppression.
    Nos médias d'information n'offrent aucune diversité de points de vue. Les perspectives deviennent de plus en plus étroites. Les libertés diminuent comme peau de chagrin.
    Je vous remercie.
    J'aimerais avoir une petite précision concernant la lettre ouverte que vous avez envoyée au premier ministre et au gouvernement: avez-vous reçu une réponse?
    Pas que nous nous souvenions.
     Je vous en remercie.
    Vous avez mentionné une chose que j'ai trouvée très préoccupante, à savoir que la dictature communiste de Pékin exploite la diaspora chinoise et, en particulier, l'histoire, souvent riche, qui constitue une grande partie du Canada.
    J'aimerais vous donner l'occasion de nous en parler davantage. Vous avez mentionné une organisation de Vancouver. Comment le Parti communiste chinois exploite‑t‑il la diaspora chinoise? Vous avez parlé des journaux et des sources d'information en langues étrangères et du patrimoine. Dans les 50 secondes qu'il me reste, pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

  (1035)  

    Tout d'abord, la communauté chinoise a connu une longue histoire de discrimination au Canada jusque dans les années 1960 et 1970. Ce n'est qu'ensuite que toute la législation en ce sens a été révoquée. Le Parti communiste chinois essaie d'exploiter cette histoire pour rappeler à la plupart des Canadiens d'origine chinoise qu'ils ont besoin de la mère patrie pour les protéger; c'est presque sa façon de l'exprimer. Il essaie de l'associer à la situation actuelle, soit aux tensions entre l'Est et l'Ouest, pour suggérer que tout ceci est de l'intimidation contre la Chine. Il utilise le mot « racisme » comme excuse pour contester toute critique formulée à l'encontre du parti.
    Voilà comment il utilise l'histoire pour essayer de toucher une corde sensible chez tant de Canadiens d'origine chinoise.
    Merci, monsieur Chu.
    Monsieur Bains, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici, de se joindre à nous et d'essayer de faire partie de la solution.
    J'essaie de déterminer l'impact des messages multimédias qui circulent et ce que cela signifie que de participer à notre processus électoral.
    Je vis à Richmond, en Colombie-Britannique. C'est probablement l'une des villes les plus diversifiées du Canada au complet. En fait, les Nations unies désignent un tronçon de cinq kilomètres de la ville de « route du paradis » ou « Highway to Heaven ». On y trouve plus de 28 organisations confessionnelles différentes qui s'y côtoient. J'y ai vécu toute ma vie.
    Je tente de tisser des liens avec les diverses communautés. Il y en a une qui se démarque. Je sais que Mme Wong a parlé de la peur, tout à l'heure — tout le monde en a parlé. Nous essayons souvent de tisser des liens avec la communauté chinoise, mais si l'on frappe à sa porte, elle n'ouvre pas. Ses membres ne veulent pas communiquer avec nous ni nous donner d'informations personnelles, par exemple.
    Quand nous examinons les messages que la communauté reçoit sur les plateformes de médias sociaux, comment nos services de sécurité peuvent-ils faire la distinction entre les documents rédigés en cantonais ou en mandarin qui proviennent d'une source gouvernementale en Chine et ceux rédigés par des Canadiens d'origine chinoise établis ici, au Canada?
    Mme Wong pourrait-elle me répondre, s'il vous plaît?
    Je vous renvoie à notre rapport, In Plain Sight, en particulier à la partie intitulée « Information and Narrative Discursion Warfare » (guerre de l'information et du discours narratif). Si le Parti communiste chinois utilise ses principales plateformes d'État sur WeChat ou Weibo pour parler de son idéologie et mettre sa rhétorique de l'avant, ses propos sont aussi relayés par les médias qui entretiennent des relations amicales avec le parti. Nous le voyons dans les camps d'entraînement, où Pékin accueille des médias étrangers en langue chinoise du monde entier. Le parti y explique comment bien présenter la Chine. Bien que ces médias étrangers en langue chinoise ne soient pas exactement des organes d'État, ils répètent la rhétorique de l'État. C'est le genre de zones grises et de nuances qu'il faut apprendre à gérer et à contrer.
    Il y a aussi l'utilisation d'influenceurs et de leaders d'opinion clés dans les médias sociaux pour raconter l'histoire de la Chine. Bien que ces personnes ne soient pas affiliées à l'État, leurs propos reprennent la rhétorique de l'État. Lorsque nous lisons ces publications et ce type de messages, il est clair pour nous, au sein de la communauté, qu'ils reprennent exactement ce que l'État aurait dit. Il est beaucoup plus difficile...

  (1040)  

    Je vais...
    ... pour les personnes qui n'ont pas de grande culture numérique ni les connaissances de base nécessaires de repérer ces discours comme étant de la rhétorique de l'État.
    Si l'on compare...
    Je pense que ma collègue, Mme Lau, aurait beaucoup à ajouter à ce sujet.
    Oui, peut-être que Mme Lau peut se joindre à la conversation et faire la comparaison, disons, entre de l'information trompeuse de l'État et de la désinformation, même dans le contenu canadien local ou le contenu américain.
    Je voudrais juste souligner, au sujet de toutes les facettes interreliées de l'ingérence étrangère, ce que Mme Wong a dit, c'est‑à‑dire que le sous-financement de ces communautés contribue également en grande partie aux problèmes. Par exemple, pour ce qui est des médias, l'incitation à reproduire la rhétorique du parti est due en grande partie à la volonté d'offrir des occasions d'affaires au marché chinois. Il y a là des leviers qui peuvent également... Prenons par exemple la différence entre les différentes plateformes de médias sociaux en Chine et leurs interactions avec les médias étrangers. C'est quelque chose à examiner, c'est certain.
    Je peux dire, en observant les médias en langue chinoise, qu'il n'y a pas beaucoup de ressources financées pour les journalistes de groupes ethniques différents. Beaucoup d'entreprises sont avant tout des sociétés de marketing. Il n'y a pas, je dirais, de véritables reportages originaux réalisés par les médias en langue chinoise qui sont reproduits.
    D'accord. Je vous remercie de votre attention.
    C'est tout le temps que vous aviez, monsieur Bains.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Chu, en quelques mots, croyez-vous que le gouvernement du Canada comprend bien la Chine?

[Traduction]

    Si l'on se fie à ses réactions face aux nombreuses occurrences d'infiltration et d'ingérence qui se produisent, je ne pense pas que le gouvernement soit conscient du fait que la Chine utilise beaucoup d'organisations non gouvernementales, mais pourtant organisées par l'État, tant au niveau local qu'à l'étranger. Certaines portent même des noms qui semblent tout à fait inoffensifs, comme l'Association des étudiants et des universitaires chinois. Ce genre d'organisation mondiale contrôle littéralement tellement d'associations d'étudiants dans les universités du Canada et d'ailleurs.

[Français]

    Merci, monsieur Chu. Je m'excuse, mais je n'ai pas beaucoup de temps de parole.
    Madame Wong, je vous pose la même question: croyez-vous que le gouvernement du Canada comprend bien la Chine?

[Traduction]

    Sans des personnes ayant les compétences culturelles et linguistiques nécessaires pour prendre ce genre de décisions, non, nous n'avons pas la capacité de vraiment comprendre Pékin et ses dirigeants à l'heure actuelle.

[Français]

    Madame Wong, croyez-vous qu'une enquête publique et indépendante sur les relations Canada-Chine et sur toute l'ingérence qu'on observe actuellement serait une bonne chose?

[Traduction]

    Nous avons peut-être perdu Mme Wong. Je vais arrêter votre temps, monsieur Villemure. Je vois que son écran a gelé.
    Madame Wong, êtes-vous de retour?
    Je m'excuse. Je crois bien avoir des problèmes d'Internet, mais si vous m'entendez, je peux vous répondre.
    Je pense que vous y avez fait allusion dans votre déclaration préliminaire, n'est‑ce pas?
    Oui, c'est presque comme s'ils nous regardaient.
    Allez‑y. Je repars le chronomètre.
    Merci beaucoup.
    Je pense qu'il est essentiel de rétablir la confiance envers nos institutions démocratiques et de permettre au public de voir et de comprendre ce qui se passe. C'est très important.
    D'un autre côté, je comprends aussi que des gens de la diaspora qui auraient voulu participer à cette conversation et à cette étude ne se sentent peut-être pas en sécurité dans une formule publique et une étude ouverte. Je demande aux gens de ma communauté de me dire comment ils souhaiteraient participer à cette étude sur l'ingérence et de l'influence étrangères au Canada.

  (1045)  

    Merci, madame Wong.

[Français]

    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Green, pour la dernière intervention, vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup.
    Madame Lau, vous avez mentionné, je pense, une chose très importante en recommandant des solutions ne ciblant pas un pays en particulier. Seriez-vous d'accord pour dire que la fixation sur ce cas particulier, uniquement sur les allégations d'ingérence chinoise, pourrait peut-être nous faire passer à côté de l'essentiel, surtout lorsqu'il s'agit de trouver des solutions qui, espérons‑le, protègeraient d'autres communautés aussi de la diaspora?
    Pourriez-vous nous dire pourquoi vous estimez important que toutes les communautés concernées soient prises en compte et que cet examen ne se limite pas à une seule communauté de la diaspora en particulier?
    C'est une excellente question.
    En ce qui concerne cette fixation, actuellement, je pense qu'elle pourrait avoir pour avantage... Comme cela a été mentionné par le groupe de témoins précédent, il faut faire la lumière sur tout cela. Nous devons absolument apprendre de ces tactiques. Nous devons absolument voir quelles sont ces tactiques pour nous en prémunir. En même temps, l'ingérence étrangère et l'ingérence dans les élections n'ont rien de nouveau, et nous pouvons raisonnablement nous attendre à ce que cela reste un problème et un défi à l'avenir, auquel nous devrons tous nous attaquer.
    J'espère que pendant qu'on braque les feux des projecteurs sur ce problème, on réfléchit aux solutions à notre portée pour l'avenir et à la façon dont nous pouvons nous protéger et être proactifs.
    Je pense aussi, par exemple, concernant la répression transnationale étrangère, dont il a également été question, que la diaspora chinoise n'est pas la seule à être confrontée à ce problème. D'autres communautés vivent la même chose, comme les Syriens, les Iraniens ou les Ukrainiens. Il faut regarder ces autres communautés aussi et voir qu'il ne s'agit d'un problème isolé, que nous sommes interreliés et que nous avons des choses à apprendre les uns des autres.
    Je pense également, comme beaucoup de mes collègues militants, j'en suis sûre — Mme Wong et M. Chu pourraient aussi vous en parler — qu'on vit dans un monde très solitaire quand on est la cible de répression transnationale étrangère. Nous nous disons toujours que nous sommes fous de penser que quelque chose est en train de se passer. Quand nous en parlons, puis que nous constatons qu'il s'agit d'un problème réel pour d'autres personnes aussi, cela renforce la résilience de la communauté.
     Merci beaucoup à tous les témoins présents. Nous vous sommes vraiment reconnaissants de vos témoignages ici aujourd'hui.
    Merci, monsieur Green.
    Voilà qui met fin à cette série de questions et à la comparution de ce groupe de témoins.
    Au nom du Comité et au nom des Canadiens, je tiens à vous remercier, monsieur Chu, madame Wong et madame Lau, d'avoir pris le temps de comparaître devant le Comité aujourd'hui. Les informations que vous nous avez fournies et que vous nous fournirez sont extrêmement précieuses. Je pense que tous les membres du Comité seront d'accord sur ce point. Je vous remercie.
    Nous allons maintenant continuer.

[Français]

    Monsieur Villemure, je comprends que vous avez un avis de motion à présenter. Vous avez la parole.
    Merci.
    Je vais déposer une motion, qui a peut-être été distribuée par la greffière dans les deux langues officielles. Je crois que tous les partis en ont déjà une copie. Je vais la lire:
Que, dans le cadre de son étude sur l’ingérence étrangère, le Comité invite à témoigner M. Raphaël Glucksmann à titre de président de la Commission spéciale sur l’ingérence dans l’ensemble des processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation; que le Comité alloue au minimum une heure pour entendre ledit témoin lors d’une des trois premières séances du vendredi matin prévues pour l’étude, en priorisant d’abord celle du vendredi 24 mars, puis celle du 31 mars ou du 17 avril 2023.
    Merci, monsieur Villemure.
    Je voudrais dire que M. Glucksmann est déjà sur notre liste de témoins. Je pense que vous voulez préciser des dates pour sa comparution. Ce sera peut-être un peu difficile pour le 24 mars.

[Traduction]

    Cependant, il est de mon ressort, en tant que président, d'envisager les dates du 31 mars ou du 17 avril.
    Allez‑y.

[Français]

    Ma principale demande, au-delà de la date, c'est qu'il soit entendu seul durant une heure, étant donné sa fonction et les rapports qu'il a rédigés par le passé qui se rapportent directement à notre étude.

[Traduction]

     La motion de M. Villemure est soumise au Comité. Y a‑t‑il des objections? Je pense que nous pouvons nous entendre sur ce point.
    Monsieur Fergus, allez‑y.
    La seule objection que j'aurais concerne l'idée d'entendre un seul témoin pendant la séance. Je pense que c'est une bonne idée d'en discuter davantage, mais je pense qu'il y a d'autres personnes aussi compétentes que le témoin proposé par M. Villemure qui pourraient l'accompagner. Je serais heureux de vous soumettre quelques noms.

  (1050)  

    Nous sommes saisis d'une motion.
    Monsieur Green, je vois que vous levez la main.
    Merci beaucoup.
    J'appuie la motion. Je pense que plus une personne est compétente en la matière, le mieux c'est. Mais s'il n'y avait pas de consensus autour de la table pour que le témoin intervienne pendant une heure seulement, ce qui pourrait aider — parce qu'avec tout le respect que je vous dois, je vous rappelle que certains sont limités à des interventions de deux minutes et demie dans ce tir nourri de questions —, ce serait que le Comité envisage la possibilité de permettre à ce témoin de rester pendant les deux heures de la réunion pour que nous puissions continuer de l'interroger.
    C'est une autre option à laquelle je viens de penser, mais je suis prêt à appuyer la motion telle quelle aussi.
    Monsieur Fergus, allez‑y.
    Monsieur le président, est‑ce que ce sera la dernière réunion sur cette question?
    Je pense que nous devons avoir cette discussion en comité. Je vais nous laisser un peu de temps pour en reparler après cette première réunion. J'ai discuté avec chacun d'entre vous de l'orientation à donner à cette étude compte tenu des circonstances dans lesquelles se trouve le Comité. Je pense que la réunion d'aujourd'hui a été extrêmement utile; elle nous a en quelque sorte donné une perspective différente. Je pense qu'il serait bon d'en discuter davantage. Je m'attends à ce que nous tenions au moins une autre réunion sur la question. Nous devrons en reparler peut-être dès le mardi, à notre retour, pour déterminer ce que nous voulons faire.
    C'est ce qui se passera, mais ce ne sera pas nécessairement le 24. Ce pourrait être difficile à cette date. Le 31 ou le 17 sont probablement les deux dates auxquelles nous pourrions nous réunir à ce propos, si cette motion est adoptée.
    Serait‑il possible d'avoir cette discussion au sein du sous-comité pour essayer d'établir un cadre?
    S'il ne nous reste qu'une dernière réunion, nous voudrons nous assurer que même s'il y a deux groupes de témoins... J'aime l'idée de combiner les deux heures ou qu'il y ait peut-être un ou deux autres témoins en même temps. À moins qu'il y ait deux ou trois réunions de plus, j'aimerais seulement le savoir.
    Nous avons une liste de témoins assez solide, dans laquelle nous pourrions puiser. Ce n'est pas comme s'il était difficile de trouver des témoins compétents. Que nous soyons d'accord ou non, j'aimerais que cela se fasse d'ici le 31 mars si possible.
    Monsieur Villemure, seriez-vous d'accord pour que ce témoin comparaisse pendant deux heures ce jour‑là?

[Français]

    Est-ce que ce serait possible, ou est-ce que vous tenez à ce que ce témoin comparaisse pendant une heure?
    Je ne voudrais pas retarder ou empêcher les travaux du Comité. Cela dit, puisque M. Glucksmann a été le président d'une commission qui a rédigé deux rapports sur le sujet, nous aurons sûrement plusieurs questions à lui poser. Ce n'est pas coulé dans le béton, mais, la raison pour laquelle je propose cette motion, c'est simplement pour que nous ayons suffisamment de temps pour donner à tout le monde l'occasion de lui poser des questions.
    D'accord.
    Nous sommes donc saisis de la motion. Je préfère que nous réglions cette question. Si la motion ne reçoit pas le consentement unanime, nous pouvons passer au vote.

[Traduction]

    Monsieur Fergus, allez‑y.
     Nous comptons appuyer cette motion. J'aimerais simplement bien saisir le contexte.
    Est‑ce dans le contexte de six réunions de plus sur le sujet ou dans le contexte d'une ou deux réunions supplémentaires?
    Je suis d'accord avec vous pour dire que le sous-comité devrait se réunir à ce sujet. Je vais le proposer aux vice-présidents. Je dirais qu'il s'agirait probablement d'une seule réunion de plus sur cette question. Bien entendu, c'est sous toute réserve des discussions qui auront lieu au sous-comité.

  (1055)  

    Dans ce contexte, nous sommes d'accord. Nous n'avons pas besoin de procéder au vote. Nous comptons toujours sur la bonne foi de chacun.
    D'accord.
    Allez‑y, monsieur Barrett.
    S'agirait-il d'une autre réunion après cette‑là ou d'une autre réunion après aujourd'hui?
    Je n'ai pas encore bien compris ce point.
    Vous voyez, c'est le problème que j'ai, parce que je ne peux pas m'engager pour le 24.
    Non, non, je comprends.
    Donc, si nous devons tenir cette séance, nous devrons la tenir le 31.
    Je m'excuse, monsieur le président, mais que prévoyait la motion initiale? Six réunions?
    Le président: Oui.
    M. Michael Barrett: D'accord. C'est bon. Nous pouvons reporter le reste, la discussion plus générale, à une prochaine réunion ou la confier au sous-comité.
    La motion initiale prévoyait six réunions pour l'étude sur l'ingérence étrangère. C'est aujourd'hui qu'elle commençait. Si vous vous souvenez bien, le plan était de nous pencher sur l'ingérence étrangère les vendredis les cinq prochaines semaines également. Je ne pense pas qu'il soit possible de nous réunir le 24 à ce sujet. Cela signifierait probablement que si nous nous réunissons le 31, il y aurait deux réunions supplémentaires à ce sujet. Toutefois, je soumettrai la question à la discussion du sous-comité.
    Là est le problème.
    Je ne veux pas m'éterniser sur le sujet. Je suis désolé. C'est une vraie question.
    Il me semblait seulement que quand nous en avons parlé, nous nous étions dit informellement que nous ne voulions pas dupliquer les efforts d'autres comités, alors il y a des chances que ces six réunions ne soient pas toutes nécessaires.
    Peut-être. C'est toutefois au sous-comité que cette discussion doit avoir lieu. C'est l'orientation que je voudrais prendre. Je ne suis sûr de rien à ce stade‑ci. Encore une fois, c'est du ressort du sous-comité. Nous pourrions en fait profiter de la réunion du 24 pour aborder un autre sujet. Si nous ne sommes pas en mesure de la tenir... Je n'en sais rien à ce stade.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avions demandé et obtenu six rencontres. Nous nous étions entendus pour ne pas faire de travail en double, et, jusqu'à maintenant, je ne crois pas que nous en ayons fait. Proposer la comparution de M. Glucksmann ne constitue pas du travail en double non plus.
    Il est difficile de déterminer s'il y aura une, deux ou trois rencontres. Pour ma part, je respecte le fait que nous devons éviter le travail en double. Cependant, notre comité peut aborder le sujet sous un angle différent de celui du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, et je tiens à ce que cela se fasse.
    Pourrait-on demander au Sous-comité du programme et de la procédure, où vous êtes majoritaires, de discuter de la motion?
    Je demande le vote.
    D'accord.
    La motion a été présentée et elle est recevable. Il est clair pour moi, en tant que président, que nous n'avons pas de consentement unanime.
    Je propose donc que nous passions au vote.

[Traduction]

     Madame la greffière, pourriez-vous procéder au vote sur la motion qui a été présentée?
     Je rappelle également au Comité que la comparution de ce témoin est déjà prévue. Il est sur la liste. Il s'agit simplement d'une heure et de dates très précises. C'est le but de cette motion.
    (La motion est adoptée par 8 voix contre 0.)
    Merci, madame la greffière.
    La motion est adoptée. Je vais suivre le conseil de M. Fergus et convoquer une réunion du sous-comité pour que nous puissions en discuter davantage. Laissez-moi le soin de voir avec la greffière quand ce témoin comparaîtra. Nous tiendrons compte de la motion qui vient d'être adoptée.
    Voilà, c'est tout. Je vous souhaite une bonne semaine de relâche. Passez du bon temps avec votre famille, tout le monde.
    Je remercie les analystes, la greffière et tous les techniciens présents dans la salle.
    Je tiens tout spécialement à remercier ma femme, qui est ici aujourd'hui.
    Des députés: Bravo!
    Le président: Elle est restée ici cette semaine pour s'occuper de moi et de mon pauvre dos: merci.
    La séance est levée.
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