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OGGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


NUMÉRO 048 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 30 janvier 2023

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. La séance est ouverte.
    Soyez les bienvenus à la 48e réunion du puissant Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes.
    Conformément à la motion qu'il a adoptée le mercredi 18 janvier 2023, le Comité se réunit pour étudier les contrats de consultation octroyés par le gouvernement fédéral à McKinsey & Company.
    L'un de nos témoins est retardé par la circulation et la neige qui encombre encore les rues d'Ottawa. Nous entendrons donc la déclaration préliminaire de notre premier témoin en espérant que Mme Clarke arrivera à temps pour faire la sienne.
    Monsieur Boots, soyez de nouveau le bienvenu à notre comité. Vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
    Avant que vous ne commenciez, je préviens les membres que j'aurai besoin de 15 ou 20 minutes dans la deuxième heure pour m'occuper de régie interne.
    Je vous en prie, commencez.
    Je remercie le Comité de son invitation.
    Heureux de vous revoir. Mme Clarke et moi, nous étions ici, en novembre, dans le cadre de…
    Monsieur Boots, pardonnez‑moi. Je dois vous interrompre brièvement pour une autre question de régie interne.
    Que tous sachent que tous les témoins se sont préalablement pliés aux tests obligatoires de connexion, dans le souci de préserver nos précieux interprètes.
    Désolé de cette interruption, monsieur Boots, vous pouvez commencer à partir du début.
    Il n'y a pas de mal. Merci beaucoup. Je comprends très bien.
    Effectivement, je suis heureux d'être de retour. Mme Clarke et moi, comme vous l'avez dit, sommes venus témoigner ici, en novembre, dans le cadre de votre étude de l'appli ArriveCAN. Je pense pouvoir affirmer sans risque de me tromper que lorsque nous avons entrepris cette recherche, le printemps dernier, nous ne nous attendions pas à attirer autant l'attention.
    L'année dernière, Mme Clarke et moi, nous avons travaillé ensemble à un projet de recherche sur les dépenses fédérales consacrées aux contrats. Pour les besoins de la discussion d'aujourd'hui sur ce sujet, deux optiques ressortent: la première, à l'échelle micro concerne la transparence et la qualité des données dans les renseignements communiqués sur les marchés de l'État; la deuxième, à l'échelle macro, touche ce qui s'ensuit pour la capacité du secteur public et les formes de dépendance à l'égard des gros cabinets-conseils.
    Sur la transparence et la qualité des données, le premier constat est qu'il est difficile de comprendre, à l'échelle de l'administration fédérale, à quoi l'argent est dépensé et de distinguer les principaux fournisseurs. Notre recherche s'est focalisée sur la divulgation proactive, par le gouvernement, de l'ensemble de données sur les contrats, qui sont toutes des données accessibles au public.
    C'est un ensemble de données très précieux, mais quelques raisons expliquent la difficulté de les interpréter rapidement. Tel fournisseur n'est pas toujours désigné par le même nom, et il n'existe pas de numéro unique d'entreprise ni d'autres identifiants uniques. Les modifications apportées aux contrats ne sont pas toujours jointes systématiquement au contrat originel. Sur les contrats pluriannuels, aucune donnée ne précise le montant annuel des dépenses. Pour beaucoup d'enregistrements de contrats, aucune description ne permet de relier sans ambiguïté le contrat à un projet ou à une initiative donnée ou de différencier facilement différents types de prestations de services professionnels.
    Notre équipe de recherche a consacré plusieurs mois au nettoyage et à l'analyse de ces données, et nous avons publié nos résultats et notre méthode en ligne sur le site govcanadacontracts.ca.
    Voici, en plus, des précisions — davantage à l'intention des attachés de recherche dans la pièce. Pour la recherche, sur le site Web, des totaux pour l'ensemble de l'administration fédérale, on peut se servir de l'onglet « All Departments and Agencies » — tous les ministères et organismes —, dans le haut de la page. Pour la comparaison des chiffres d'une année à l'autre, je recommande d'employer des totaux en dollars constants. Vous pouvez les trouver dans les fichiers CSV associés, après avoir cliqué sur l'hyperlien « View source data », en bas de chaque tableau.
    Même après avoir nettoyé les données, il était encore difficile de déterminer l'objet de tel contrat à partir des données publiées. C'est particulièrement vrai des cabinets-conseils en gestion, qui fournissent une large gamme de services aux ministères fédéraux. Dans les données, la description sommaire d'un contrat pourrait être simplement « conseils en gestion ». Il pourrait s'agir de la prestation de conseils stratégiques, de travaux informatiques ou de sous-traitance à un autre fournisseur, plus spécialisé. Il est difficile de déterminer la nature du travail effectué, à plus forte raison dans quelle mesure il a été couronné de succès.
    D'autres pays ont beaucoup fait pour améliorer la qualité des renseignements qu'ils communiquent sur les marchés de l'État. Le moyen qui s'impose d'emblée est l'adoption de la norme relative aux données sur la passation de marchés ouverts, qui permet au public de suivre en détail les dépenses, de la demande initiale de propositions à la fin du contrat.
    Voilà pour l'échelle micro.
    À l'échelle macro, c'est en grande partie le reflet de la capacité de la fonction publique — ou son incapacité perçue — et des façons employées par les cabinets-conseils en gestion pour y suppléer. L'examen annuel des données révèle très rapidement à quel point les dépenses consacrées à ces cabinets ont augmenté au fil du temps. Ces cabinets occupent une place importante dans les catégories « services professionnels » et « informatique » de notre analyse.
    Deloitte, PricewaterhouseCoopers et Accenture sont les principaux bénéficiaires des dépenses. Au cours de l'exercice 2021‑2022, ces cabinets ont reçu des sommes respectivement estimées à 172, à 115 et à 94 millions de dollars. C'est beaucoup plus, annuellement, qu'il y a quatre ou cinq ans, ce que montrent les tableaux de données du site Web.
    D'après les descriptions accessibles, beaucoup de contrats de ces cabinets se focalisaient sur l'informatique ou des domaines adjacents. Ça pourrait englober un gros projet informatique ou de prestation de services, l'automatisation des procédés, la prestation de conseils sur le passage au numérique, la supervision de travaux et ainsi de suite.
    L'augmentation importante des dépenses dont ces cabinets ont bénéficié résulte, dans de nombreux cas, de la reconnaissance accrue du retard des ministères sur le plan informatique par rapport aux attentes du public et de la classe politique. Plutôt que de pouvoir se doter d'une capacité interne, on a confié plus de travail à l'extérieur, à des conseillers en gestion et à de gros cabinets informatiques.
    On peut en dégager deux tendances.
    La première est que les cabinets-conseils en gestion sont souvent embauchés pour préparer les plans d'acquisition et de gestion de projets pour de grands travaux. Même si ces cabinets ne soumissionnent pas pour des projets ultérieurs, on a de bonnes raisons de supposer que ça leur donne des indices détaillés sur les modes d'évaluation des soumissions par les ministères.
    La deuxième est — particulièrement pour les grands projets d'informatique — l'embauche d'un cabinet-conseil en gestion pour superviser le travail d'un cabinet homologue ou d'une grosse boîte d'informatique comme IBM ou CGI. Elle peut conduire à une dynamique dans laquelle chaque cabinet n'est pas nécessairement porté à demander trop d'explications à l'autre, sachant que leurs positions respectives, dans des travaux ultérieurs, pourraient être inversées.
    À la lecture des publications, nous constatons une tendance mondiale à l'expansion des divisions de travaux informatiques des cabinets-conseils en gestion, vu la rentabilité de cette activité. Leurs relations actuelles à la faveur de travaux de prestation de conseils stratégiques et d'audits leur procurent un avantage concurrentiel pour décrocher des contrats d'informatique et de services numériques.
    Cette dépendance des conseillers en gestion fait boule de neige — on a trouvé des explications —, tandis que, de ce fait, la capacité de la fonction publique se dégrade à mesure que le temps passe. Dans d'autres pays, on discute sérieusement de la capacité de l'État ou de l'efficacité des institutions publiques, souvent en réaction à des situations semblables.
    À ma connaissance, la forte dépendance des ministères à l'égard des conseillers en gestion est le signe de difficultés structurelles au sein de la fonction publique, par exemple l'absence de boucles efficaces de rétroaction, une adhésion rigide aux processus en vigueur et l'absence de capacités techniques et d'expertise internes.

  (1540)  

    J'espère que mes propos pourront susciter plus de discussions fécondes sur la réforme de la fonction publique et l'amélioration de nos méthodes de travail.
    Je laisse à Mme Clarke — si elle peut arriver — le soin de discuter de certaines de ces tendances plus en détail.
    Merci de m'avoir invité. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
    Merci, monsieur Boots.
    Oui. Mme Clarke est arrivée.
    Soyez la bienvenue à notre comité. Vous disposez de cinq minutes.
     Je suis heureuse d'être ici. Merci beaucoup de votre invitation. Je suis vraiment emballée de constater que vous poursuivez votre examen de cette question.
    Je suis professeure associée à l'école de politique publique et d'administration de l'Université Carleton. Je fais de la recherche sur l'administration publique au Canada et à l'étranger depuis environ 2010.
    Mon point de vue sur la question des conseillers en gestion dans l'administration fédérale découle de l'outil de données que M. Boots vient de présenter, au lancement duquel j'ai aidé, mais également d'entrevues menées avec des fonctionnaires à qui j'ai demandé de m'expliquer, dans leurs propres mots, ce à quoi ça ressemblait, sur le terrain, que d'être au service du gouvernement. Le phénomène se manifeste à tous les niveaux d'autorité, dans tous les ministères et organismes centraux et opérationnels. Ces entrevues sont particulièrement éclairantes quand on se fait expliquer de la bouche même d'un fonctionnaire comment il perçoit ce phénomène en train de se dérouler. Il est bon que vous y consacriez du temps, parce que c'est vraiment un motif de préoccupation pour beaucoup de fonctionnaires.
    Si j'en crois le compte rendu de votre première réunion, vous avez visiblement à répondre à beaucoup de questions. Celle sur laquelle je tiens à focaliser mon attention est, d'après moi, la plus importante, c'est‑à‑dire: Les marchés de l'État fédéral avec les cabinets-conseils en gestion trahissent‑ils les principes de l'administration publique responsable et, dans l'affirmative, comment empêcher que ça aille plus loin?
    En réponse à la première sous-question, la réponse est oui, absolument. Mes recherches me montrent, de diverses façons, que la fonction publique fédérale enfreint les pratiques exemplaires de l'administration publique responsable quand elle passe des marchés avec des cabinets-conseils en gestion.
    En général, cette pratique soulève trois grandes questions: En a‑t‑on pour son argent? Qu'en est‑il des infractions évidentes aux normes de reddition de comptes au public? Qu'en est‑il de la capacité de l'État qu'on vide de sa substance? Je pourrais davantage développer ces questions, mais je pense que les médias et les publications de longue date sur le sujet posent un excellent diagnostic du problème. Incontestablement, il existe.
    Ma déclaration préliminaire se focalisera sur ce que je crois être ses solutions. J'estime que votre comité pourrait faire beaucoup pour aider à le résoudre. Il y a aussi des pistes que vous pourriez explorer dans les recommandations, qui pourraient l'aggraver. J'ai donc essayé de les signaler.
    Pour le corriger, la première solution — et ça répond aux observations que vient de faire M. Boots — consiste à se focaliser sur les données. Il est vraiment impossible de vous acquitter de vos tâches, vu la piètre qualité des données dont nous disposons pour décrire les cabinets-conseils de gestion — ce à quoi ils travaillent réellement, ce qu'ils produisent, la valeur de cette production — et de suivre les contrats au fil du temps. Vous en avez eu un avant-goût dans votre étude sur l'appli ArriveCAN, quand vous avez essayé de suivre les traces écrites.
    Beaucoup de modèles, à l'étranger, peuvent nous inspirer tant que nous disposons d'argent. Je veux dire par là que, en vérité, nous devons embaucher des fonctionnaires et affirmer que leur travail consiste à rectifier ces données, les publier et travailler avec les parties prenantes, plutôt que de simplement être un ajout. Ça se produit souvent dans ces sortes de projets de données. Il y a une demande pour plus de données, puis les ressources manquent aux fonctionnaires pour en produire et en diffuser. Voilà un premier point.
    Ensuite, en ce qui concerne les projets informatiques précisément — qui prélèvent une part importante de l'argent que dépense l'État fédéral en conseillers en gestion —, il existe des pratiques exemplaires pour limiter la taille des contrats et recruter plus de talents en informatique afin d'être des acheteurs potentiels plus futés et plus sceptiques de ces produits et services. En fait, nous avons développé cette idée dans le rapport que nous avons déposé à votre comité, à notre dernière comparution, quand nous avons discuté d'ArriveCAN. Je ne m'y attarderai pas, mais je serai également heureuse d'en discuter davantage.
    Enfin, troisièmement — et ce qui me paraît le plus important —, les fortes dépenses consacrées aux conseillers en gestion qui effectuent une grande partie du travail de la fonction publique centrale n'arrivent pas par accident. C'est la conséquence inévitable d'une dynamique de la fonction publique qui a souffert d'une absence d'investissements dans le talent et dans le recrutement ainsi que dans la réforme des pratiques concernant les ressources humaines pour faciliter ce recrutement.
    Je crois également que, au fil des années, elle a souffert d'une négligence nocive, de la charge de la production de rapports et d'une sorte de mentalité puriste du « je t'ai eu », dans beaucoup d'examens approfondis, et des exigences formulées à l'égard d'un gouvernement qui ne ferait pas d'erreurs. Tout ça rend difficiles la créativité et l'innovation dans la fonction publique. Dans le même ordre d'idées, j'estime également que lorsqu'on voit confiée une grande partie du travail important dont on se soucie à des consultants en gestion de l'extérieur, c'est évidemment mauvais pour le moral, et ça ne motive en rien les troupes.
    Affirmer le besoin de réformer la fonction publique paraît peut-être imposant, décourageant et insuffisamment précis, mais j'estime que ce ne serait pas aussi difficile que nous le croyons. Beaucoup de pays affrontent exactement les mêmes problèmes que l'administration fédérale et ils réagissent. Ils ont déjà éprouvé différentes solutions. Nous pouvons nous inspirer de leurs exemples.
    Nous n'avons pas non plus besoin de consacrer beaucoup de temps en diagnostics du problème, parce que le consensus sur sa nature est à peu près forgé chez les fonctionnaires et ceux qui ont étudié l'administration publique canadienne. En effet l'organisation est trop cloisonnée et trop de règles et de processus inutiles l'entravent.
    Si vous en voulez un beau témoignage, je vous conseille la lecture d'un document que j'aime vraiment, le rapport de 2016 sur la réduction de la paperasserie interne, préparé par un groupe de fonctionnaires.

  (1545)  

    Je vous invite notamment à prendre connaissance de certains des instantanés de cette paperasserie interne qu'ils décrivent. À la lecture de ce qu'exige quoi que ce soit dans l'administration fédérale d'aujourd'hui, on peut comprendre pourquoi il est difficile d'être créatif et innovant et pourquoi un gouvernement entrant en fonction se tourne rapidement vers un consultant en gestion qui promet une solution rapide. Cependant, ces solutions rapides n'ont pas tendance à lui en donner pour son argent. Elles naissent également dans le secret. C'est ce qui devrait nous alarmer.
    Enfin, en proposant des solutions, le Comité et le gouvernement ont vraiment besoin d'éviter d'ajouter trop de règles ou de processus nouveaux ou encore des exigences en matière de rapports qui soient pénalisantes, au nom de la reddition de comptes. C'est ce que nous avons vu dans le passé. Cela a pour effet de miner davantage les capacités des fonctionnaires de faire le travail qu'on leur demande, parce qu'ils consacrent beaucoup plus de temps à remplir ces formulaires et à faire tourner des processus complexes d'acquisition. Ça rend également la tâche difficile aux entreprises de petite taille, qui sont peut-être plus innovantes… ou du moins à une gamme plus étendue d'entreprises pour soumissionner les travaux de l'État, parce que des processus d'acquisition vraiment complexes exigent que les soumissions soient faites par des équipes. Ce que les petites entreprises n'ont simplement pas.
    Je n'en dirai pas plus. J'attends vos questions.
    Merci.
    Merci, madame Clarke.
    Nous allons commencer avec Mme Kusie pour six minutes.
    Juste avant, toutefois, je veux souhaiter la bienvenue en personne à notre toute nouvelle greffière, Aimée Belmore.
     Bienvenue, madame la greffière.
    Des voix: Bravo!
    Le président: Madame Kusie, c'est à vous pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, madame la greffière.
    Merci, madame Clarke et monsieur Boots, d'être ici aujourd'hui.
    Madame Clarke, d'après les données que vous avez recueillies, quelle est, à votre avis, la principale raison pour laquelle nous avons constaté une si forte augmentation des contrats octroyés une société d'experts-conseils en particulier, à savoir McKinsey & Company?
    Vous avez raison. Les données que nous présentons — que vous avez à votre disposition, je pense, mais que je peux vous transmettre également — montrent que McKinsey affiche le taux de croissance le plus élevé, et de loin, entre 2017 et 2021. Le montant total dépensé en contrats avec McKinsey est toutefois beaucoup plus bas que celui versé à un certain nombre d'autres entreprises.
    Pourquoi cette croissance est-elle si marquée? Je ne peux pas en deviner les raisons. Je ne les connais vraiment pas.
    Il est possible que ces données ne soient pas si solides à partir du point de référence que nous avons. Nous nous sommes demandé pourquoi le montant était si faible en 2017. Il peut y avoir eu des erreurs de saisie de données ou il se peut simplement que cette année‑là, ils n'aient pas obtenu beaucoup de contrats, donc cela semble beaucoup, mais ce n'est pas un changement si énorme, en réalité.
    Il est intéressant de noter que lorsque je demande aux fonctionnaires quelles entreprises les inquiètent, ils mentionnent très rarement McKinsey. Le plus souvent, cela dépend des cas, ils nomment Deloitte. PricewaterhouseCoopers revient souvent, comme Accenture. Certaines grandes entreprises de TI agissent essentiellement comme des sociétés d'experts-conseils en gestion maintenant, dont IBM, qui est une autre entreprise qui revient souvent.
    En ce qui concerne la croissance de McKinsey, je n'ai vu aucune preuve fiable qui me permette d'en déduire les raisons.
    Merci, madame Clarke.
    Sur les 101,4 millions de dollars accordés à McKinsey par le gouvernement libéral — c'est le montant que nous connaissons aujourd'hui, puisque le premier ministre n'a pas voulu nous donner de montant pendant la période des questions —, 20 contrats sur 23 étaient des contrats à fournisseur unique. Un journaliste réfute ce que je dis ici, mais, étant donné que 18 de ces 23 contrats ont été octroyés à partir d'une liste nationale permanente, cela signifie qu'ils ont été sélectionnés sans appel d'offres. Ces 20 contrats sur 23 étaient des contrats à fournisseur unique.
    À votre avis, comment les marchés publics devraient-ils être réformés pour garantir que le gouvernement n'accorde pas de contrats à fournisseur unique à des amis, à des contacts, à des initiés?

  (1550)  

    Il y a sûrement très peu de gens qui recommanderaient les contrats à fournisseur unique pour une gestion responsable des fonds publics. Cela n'a pas tendance à être considéré comme le modèle à suivre pour l'attribution de ce genre de contrats.
    Dans tous les cas, je pense que le processus utilisé, qu'il s'agisse d'un processus complet et ouvert ou d'offres à commandes prêtes à être lancées, doit toujours représenter le meilleur équilibre entre le besoin de résilience, de réactivité et la capacité de passer des contrats rapidement. Il faut également des mécanismes pour garantir que le processus soit concurrentiel, responsable et transparent.
    La question des données est centrale dans les réformes que j'aimerais voir dans le domaine des marchés publics. Si nous adoptions quelque chose comme la norme de données sur les contrats ouverts que M. Boots a mentionnée, nous serions en mesure de suivre les contrats à chaque étape et de vraiment examiner de près les produits et services obtenus. C'est un grave problème. Peu importe à quel point le marché était concurrentiel au départ. Les rapports produits par beaucoup de ces entreprises, l'analyse fournie et les produits ne sont jamais portés à la connaissance du public, de personnes extérieures. Il est vraiment difficile de savoir ce qui se passe, de dénoncer ce qui cloche et ensuite, espérons‑le, d'instituer de meilleures pratiques pour ne plus accorder de contrat à ces entreprises.
    C'est une chose. Il faut mettre l'accent sur la nécessité de recueillir de meilleures données et de divulguer les résultats des contrats. Ce serait une grande amélioration pour résoudre ce genre de problème.
    Une autre réforme que j'aimerais voir consisterait à revoir la taille des contrats. Cela s'applique particulièrement aux projets logiciels. Je pense qu'en général, quand les contrats sont plus petits, on est moins coincé et l'on peut mieux demander des comptes aux entreprises. C'est un autre élément important.
     Je pense qu'il devrait y avoir davantage d'enquêtes et éventuellement de règles régissant la mobilité entre les postes de direction au gouvernement fédéral et les postes de dirigeants au sein de ces entreprises. Il est assez courant, surtout dans le domaine des technologies de l'information, de voir quelqu'un qui occupe un poste de haut niveau dans le domaine du numérique ou des technologies de l'information, notamment un directeur de l'informatique, entamer une seconde carrière chez Deloitte ou Accenture. C'est tellement commun que c'en est presque risible. On se dit: « Tiens! En voilà un autre. »
    Qu'est‑ce qu'ils font là? Évidemment, ils utilisent leurs contacts. Ils comprennent le mode de fonctionnement du gouvernement. D'un certain point de vue, il n'y a rien de mal à cela. Nous devrions encourager davantage les échanges entre les secteurs privé et public. Je ne suis pas contre le principe, mais il y a quelque chose qui me dérange, en tant que citoyenne et chercheuse dans le domaine de l'administration publique, quand je vois des gens ayant autant d'influence obtenir ce genre de contrat.
    L'inverse se produit aussi: des employés de ces entreprises sont détachés pour aider à diriger un projet au sein du gouvernement, on leur donne des adresses électroniques gouvernementales et des autorisations de sécurité. C'est en partie pour des raisons pratiques. Ils doivent pouvoir accéder au système, et c'est pourquoi on fait tout cela, mais ce n'est pas évident.
    Il y a des fonctionnaires qui me disent que, parfois, ils sont dans une pièce à concevoir un nouveau service, à lancer une stratégie de transformation ou à préparer des conseils pour le ministre, et il n'est pas toujours évident de savoir qui est un consultant et qui est un fonctionnaire dans la pièce. Je crois que nous devrions nous en préoccuper, parce que les fonctionnaires ont pour mission de créer de la valeur publique. Il sont également assujettis à un grand nombre de règles concernant les valeurs et l'éthique, le bilinguisme, la loyauté envers la Couronne et tout.
    Le travail d'un consultant en gestion est de générer du profit. Nous devrions savoir qui sont les consultants lorsqu'ils se trouvent dans une pièce parmi des fonctionnaires. Il devrait être vraiment évident qu'ils ont un ensemble différent de valeurs et de motivations, et ce, à juste titre. Les sociétés agiront comme des sociétés. Je ne pense pas que nous voudrions que ces personnes jouent les fonctionnaires. C'est une autre réforme nécessaire.
    À quoi cela ressemblerait‑il concrètement? Il nous faut des règles sur les détachements de consultants au gouvernement et trouver un équilibre avec le risque de rendre les choses si difficiles que cet échange ne puisse jamais être fluide, ce que nous voulons également éviter.
    Je crains de devoir vous interrompre, car nous n'avons plus de temps.
    Oui, je suis désolée, c'était une longue réponse.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Housefather, allez‑y, s'il vous plaît.
     Merci beaucoup à Mme Clarke et à M. Boots d'être encore ici. C'est toujours un plaisir de vous voir.
    Je pense que, tout comme la dernière fois, vos témoignages sont très convaincants sur la vaste question de l'impartition. Nous avons déjà entrepris une autre étude sur l'impartition des marchés, pour évaluer si nous en faisons trop, si nous en accordons trop à des consultants en gestion, par exemple, si nous devrions renforcer les directives du Conseil du Trésor et les pratiques d'approvisionnement et comment nous pourrions rendre de meilleures données accessibles à tous. Vos témoignages seraient tous parfaits dans le cadre de cette autre étude.
    Comme vous le savez, cette étude, pour laquelle nous avons été rappelés d'urgence il y a quelques semaines, pendant les vacances de Noël, porte sur McKinsey. Permettez-moi de vous poser une question sur McKinsey.
    Madame Clarke, avez-vous des informations non publiques que vous aimeriez partager avec le Comité au sujet de McKinsey ou des contrats avec McKinsey aujourd'hui?

  (1555)  

    Non.
    D'accord.
    Monsieur Boots, avez-vous des informations non publiques que vous aimeriez partager avec le Comité au sujet de McKinsey aujourd'hui?
    Je n'en ai pas non plus, non.
    Madame Clarke, avez-vous participé à la négociation de l'un des contrats entre le gouvernement du Canada et McKinsey?
    Non.
    Monsieur Boots, avez-vous participé à ces négociations?
    Non.
    Madame Clarke, avez-vous participé à l'administration de l'un des contrats entre le gouvernement du Canada et McKinsey ou avez-vous des informations non publiques sur la façon dont ils ont été administrés?
    Non.
    Monsieur Boots, je vous pose la même question. Avez-vous des informations non publiques concernant la gestion de ces contrats?
    M. Sean Boots: Non.
    M. Anthony Housefather: La motion que nous avons adoptée — et encore une fois, ce n'est pas du tout de votre faute — était que nous allions « ...[entreprendre] une étude... concernant les contrats de consultation gouvernementaux attribués à McKinsey & Company par le gouvernement du Canada, ou par toute société d'État, depuis novembre 2015, portant sur leur efficacité, leur gestion et leur fonctionnement, y compris la valeur et le service reçus par le gouvernement ».
    Il me semble que vous ne pourriez pas — et c'est ce que je voudrais — distinguer la valeur reçue des contrats avec McKinsey de la valeur reçue des contrats avec Deloitte ou tout autre consultant en gestion, car vous n'avez pas les détails de chacun de ces contrats en ce moment.
    Est‑ce exact, madame Clarke?
    Oui, absolument.
    Monsieur Boots, est‑ce que cela vous semble également exact?
    Oui, c'est la même chose.
    Merci.
    Bien que je prenne votre témoignage très au sérieux dans le contexte de notre autre étude et que je considère que vous êtes des témoins de qualité, de qui j'apprends beaucoup... D'ailleurs, à ce sujet en particulier, comme je vous l'ai déjà dit, madame Clarke, l'article que vous avez écrit est fascinant et vraiment très convaincant. Cela dit, je ne pense pas que dans l'état actuel des choses, vous soyez en mesure de nous éclairer sur l'objet de cette étude précise, qui est censée porter sur McKinsey.
    Permettez-moi de vous poser une dernière question. Je pense que vous l'avez déjà dit en réponse à Mme Kusie. Avez-vous une quelconque raison de croire que les contrats octroyés à McKinsey ont été accordés d'une manière différente de celle des contrats octroyés à toute autre société d'experts-conseils en gestion par le gouvernement du Canada?
    Non.
    Merci.
    Et vous, monsieur Boots?
    Non.
    Je crois que je n'ai plus de questions.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole, monsieur le président. Vous pouvez passer au Bloc.
    Merci, monsieur Housefather.
    La suivante est Mme Vignola.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Clarke, monsieur Boots, je vous remercie d'être présents. Je suis très consciente que vous ne pouvez pas entrer dans les détails des contrats de l'entreprise McKinsey, parce que ni vous ni moi ne les avons encore. Nous espérons les obtenir bientôt.
    Néanmoins, vos éclaircissements et vos réponses vont permettre de mieux comprendre et d'améliorer les processus au sein de la fonction publique et, peut-être, de mieux reconnaître l'expertise de nos fonctionnaires.
    À cet égard, madame Clarke, je me posais la question suivante: selon vos études et recherches, considérez-vous que les gestionnaires de la fonction publique connaissent et reconnaissent les compétences accessibles au sein de leurs équipes? M. Boots pourra compléter votre réponse par la suite.

[Traduction]

    Vous me demandez si les fonctionnaires connaissent leurs propres compétences internes? C'est un peu la question?

[Français]

    Les hauts fonctionnaires reconnaissent-ils les compétences de leurs employés? Du moins, les connaissent-ils?

[Traduction]

    C'est une question délicate. C'est délicat parce qu'évidemment, je ne veux pas faire de commentaires sur chaque gestionnaire du gouvernement fédéral. Ce serait impossible.
    De manière générale, je constate deux choses.
    Une minorité de fonctionnaires est, je pense, plus consciente de ce qui pourrait être fait à l'interne et serait enthousiaste à l'idée de le faire. Ces fonctionnaires seraient tout à fait capables de le faire et sont entourés de gestionnaires compétents et motivés, mais le système dans lequel ils baignent rend les choses très difficiles, parce que les fonctionnaires sont enlisés dans un bourbier littéralement incompréhensible de règles et de perceptions de règles. Je vous encourage vivement à vous attarder un peu à toutes les politiques du Conseil du Trésor. Il est consternant de constater à quel point il peut y avoir de points et de sous-points dans ces politiques. Bien sûr, ce serait handicapant pour n'importe qui, donc il y a cela.
    Je pense que vous touchez aussi un point important, cependant, c'est‑à‑dire qu'avec le temps, toute une génération de fonctionnaires s'est peut-être tellement habituée à recourir à des acteurs externes pour certaines fonctions de base de la fonction publique, en particulier dans le domaine des TI et de manière plus générale, qu'ils se voient peut-être plus comme des gestionnaires de contrats que d'équipes pouvant faire le travail elles-mêmes.
    Je ne pense pas que quiconque irait jusqu'à dire qu'il n'estime pas son équipe capable de faire le travail, et je n'ai jamais rencontré de fonctionnaire qui soit vraiment enchanté de la qualité du travail qu'il obtient d'un consultant en gestion par rapport à ce que son équipe pourrait faire, mais je pense qu'il y a une assez bonne reconnaissance du fait qu'il est difficile de produire des résultats aussi vite que certains problèmes d'aujourd'hui ne l'exigent, d'être créatif et d'innover étant donné la densité des règles et des processus imposés à une équipe.

  (1600)  

[Français]

     Vous avez dit que lorsqu'un consultant, qu'il soit de la firme McKinsey ou d'une autre, est embauché, il peut être difficile de savoir s'il est un fonctionnaire ou un consultant externe.
    Au bout du compte, à qui profite l'expertise développée par un consultant externe?

[Traduction]

    Les situations dans lesquelles il est judicieux de faire appel à une expertise extérieure sont... Les fonctionnaires diront parfois que c'est pour des capacités d'appoint, par exemple. S'il y a un besoin soudain de compétences particulières et qu'on ne peut pas embaucher les professionnels compétents ou qu'il ne semble pas judicieux de constituer une équipe permanente, il peut être sensé de recourir à des ressources externes. Il y a parfois des compétences très pointues qu'on n'a pas à portée de main, auquel cas il devrait être encourageant de solliciter des ressources externes. Nous ne voulons pas non plus d'une fonction publique insulaire qui prétend avoir le monopole du savoir.
    Là où cela devient plus problématique, c'est sur les grandes questions stratégiques de l'administration publique, de la conception de programmes ou de l'établissement du public cible. On voit aussi beaucoup ces entreprises travailler à des stratégies de transformation pluriannuelles. À ce que je voie, elles ne semblent pas produire beaucoup de contenu, mais c'est le genre de choses qui devraient être considérées comme faisant partie des fonctions de base de la fonction publique.

[Français]

    Merci.
    J'ai sous les yeux un contrat ouvert, accordé à la firme McKinsey pour des services professionnels informatiques, qui a commencé en août 2019 et qui se terminera à la fin de janvier 2100.
    Dites-moi, madame Clarke, peu importe que ce soit avec McKinsey, Deloitte et les autres firmes que nous avons nommées, qu'est-ce qui justifie un contrat ouvert pendant les 81 prochaines années?
    Qu'est-ce qui justifie qu'on garde un consultant et qu'on n'embauche pas des spécialistes? Je ne peux pas croire que, en 81 ans, on ne soit pas capable de trouver nos propres spécialistes.

[Traduction]

    Je ne connais pas les détails de ce contrat, mais l'idée de conclure des contrats ouverts, sur 81 ans, de surcroît, comme dans ce cas, semble vraiment scandaleuse. Cela porte à se demander quel est l'intérêt d'avoir une fonction publique.
    Notre modèle repose sur l'idée d'une fonction publique permanente, fondée sur le mérite et neutre, qui assure la continuité des services et du savoir institutionnel d'une administration à l'autre. Les ministres doivent pouvoir compter sur la fonction publique pour obtenir des conseils francs et s'assurer d'une prestation de services loyale. C'est le fondement de notre modèle de Westminster. Quand on commence à voir des choses comme cela, comme un contrat ouvert permettant d'obtenir des conseils externes au besoin... La justification était probablement qu'on voulait s'assurer de pouvoir obtenir de tels conseils rapidement, donc avec un contrat ouvert, nul besoin de refaire constamment le processus.
    Je pense que la lourdeur du processus favorise ce genre de choses. C'est une autre raison pour laquelle il faut simplifier les règles entourant la passation de marchés pour réparer ce gâchis. La simplification est la clé. Il ne s'agit pas d'ajouter de nouvelles règles, parce que de nouvelles règles rendraient seulement les choses encore plus difficiles en plus d'ouvrir encore davantage la porte aux offres à commandes et aux contrats ouverts, des solutions qui ne sont pas vraiment...
    Je suis désolé. Je dois vous interrompre à nouveau. C'est tout le temps que nous avions.
    C'est le tour de M. Johns pour six minutes, s'il vous plaît.
    Je vous remercie tous deux d'être de retour ici.
    Pourriez-vous nous dresser un peu l'historique de l'impartition? Quand l'impartition de marchés a‑t‑elle vraiment commencé à prendre autant d'ampleur? Nous nous penchons sur McKinsey, et vous avez parlé de Deloitte. Devrions-nous étudier Deloitte aussi? L'impartition est-elle hors de contrôle là aussi, pour l'octroi de contrats privés?
    Pouvez-vous nous donner un peu de contexte? Quand est‑ce que cela a vraiment commencé?
    Les consultants en gestion ont toujours joué un rôle assez important dans les administrations publiques du monde entier, bien que cela puisse prendre diverses formes. L'histoire du Canada est vraiment intéressante, parce qu'il a travaillé avec des consultants en gestion dès les premiers exercices de réforme du gouvernement dans les années 1960, vers...

  (1605)  

    Avec McKinsey, nous assistons à une véritable explosion. Y a‑t‑il une entreprise que le gouvernement conservateur a ainsi favorisée et qui a pris son envol de cette façon? Y a‑t‑il quelque chose que nous devrions examiner et analyser?
    Ce genre d'impartition effrénée de marchés, conjuguée à la négligence systématique de l'État ou à un sous-investissement dans l'État, a vraiment commencé dans les années 1980 dans la plupart des pays comme au Canada. C'était l'ère de l'externalisation, et le phénomène s'est accentué depuis. Les consultants en gestion ont toujours été présents, quelle que soit l'administration au pouvoir. Je pense que c'est assez neutre politiquement, en ce sens.
    Ce que je voulais dire, c'est que McKinsey, par exemple, recevait 2 millions de dollars de contrats à l'époque du gouvernement conservateur, alors qu'il en a maintenant pour plus de 100 millions de dollars.
    Y a‑t‑il une autre entreprise qui bénéficie ainsi de l'externalisation et qui a les faveurs du gouvernement, sur laquelle nous devrions nous pencher en plus de McKinsey?
    Je comprends que des facteurs précis ont mené à cette attention particulière portée à McKinsey, mais à mon avis, il n'est pas pertinent de se concentrer sur McKinsey.
    Notre comité devrait‑il étudier la question de Deloitte et les contrats avec cette société?
    Je pense que l'accent mis sur l'externalisation et la passation de marchés au sein du gouvernement fédéral est un cadre suffisamment vaste pour englober ces questions. Toute entreprise donnée…
    Cela n'aboutira pas à un résultat utile, car si nous réglons le problème posé par McKinsey en créant une série de règlements, on sera toujours dans une situation où les consultants en gestion font largement le travail du gouvernement sans être soumis à une reddition de comptes et sans offrir un bon rapport qualité-prix. Je ne pense donc pas que cela va résoudre ce problème.
    Selon vous, si le Canada se dotait de solides lois sur la dénonciation, cela aiderait‑il à freiner une partie de cette externalisation? Les fonctionnaires seraient-ils en mesure de se manifester et de sonner l'alarme lorsqu'ils voient des contrats prendre une telle ampleur, et lorsqu'ils ont des préoccupations à cet égard au sein de la fonction publique?
    Je pense que si l'on mettait l'accent sur la dénonciation, cela impliquerait que dans chacun de ces cas, il s'agirait d'une violation évidente et sensationnelle de la bonne gouvernance. Mais en réalité, ce genre de situation se développe lentement, et parfois, c'est plus subtil. Je pense que si les fonctionnaires dénoncent… Ils ne vont pas dénoncer le fait qu'un de leurs collègues a une adresse électronique gouvernementale et travaille pour Deloitte, car ce n'est pas une situation flagrante. Ce n'est pas une révélation fracassante qui suscite un grand intérêt.
    Toutefois, je pense que cette érosion plus importante de la capacité de l'État au fil du temps est l'enjeu que le Comité a l'occasion d'aborder. C'est sur cet enjeu qu'il faudrait se concentrer.
    Honnêtement, je pense que la question de McKinsey nous détourne un peu du vrai problème.
    En 2016, vous avez écrit un article sur le paradoxe dans lequel le gouvernement fédéral se trouve, car il craint l'échec tout en ayant besoin d'innover. Pouvez-vous réfléchir au rôle que joue le savoir institutionnel dans la capacité d'un gouvernement fédéral à innover, et s'il est avantageux ou non que certains emplois ou certaines tâches soient effectués par une tierce partie à l'extérieur du gouvernement? Il me semble qu'un gouvernement ne peut pas innover lorsque le rôle de l'innovation est externalisé ou qu'il ne peut pas tirer des leçons d'un échec lorsque cet échec est absorbé par une entreprise privée.
     Avez-vous des commentaires à formuler sur ce paradoxe et sur ses liens avec McKinsey et les contrats qu'elle reçoit?
    En ce qui concerne les recherches liées à la stagnation et aux obstacles à l'innovation au sein du gouvernement fédéral, lorsqu'on demande aux fonctionnaires pourquoi le gouvernement fédéral se plaint beaucoup de ces enjeux, ils répondent presque tous que... C'est assez courant. La greffière pourrait trouver des citations qui remontent à des décennies et qui concernent le fait que la fonction publique fédérale a une aversion pour le risque et que cela nuit à l'innovation.
    Comment cela est‑il lié à l'externalisation? Comme je l'ai dit plus tôt, lorsqu'on est coincé dans un tel environnement, il est difficile de faire preuve d'initiative et d'innovation et d'encourager et d'équiper ses équipes en conséquence. C'est parfois la raison pour laquelle on fait appel à des experts-conseils en gestion. C'est donc un cercle vicieux. En effet, si on compte sur ces experts-conseils en gestion, on ne fait pas le travail difficile qui consiste à enquêter sur les raisons pour lesquelles notre service public n'est pas en mesure de fournir ces services.
    L'aversion pour le risque et les flambées de reddition de comptes qui minent en réalité la reddition de comptes représentent des points importants qu'il faut absolument aborder. Je pense que les parlementaires ont joué un rôle important à cet égard, car dans de nombreux cas, les fonctionnaires affirment qu'ils agissent de cette façon et qu'ils sont si peu enclins à prendre des risques parce qu'ils ne sont pas dans un environnement qui leur permet d'essayer de nouvelles choses, de faire des erreurs et d'apprendre en cours de route. Il est impossible de faire preuve d'innovation dans un tel contexte.
    Les médias, les universitaires, les parlementaires et tous ceux qui exercent une surveillance externe à l'égard du gouvernement ont un rôle à jouer, car ils formulent des critiques et ils enquêtent sur les échecs du gouvernement, mais ils pourraient peut-être aussi permettre aux fonctionnaires d'expérimenter un peu plus. Ce n'est pas une chose qui est vraiment tolérée dans notre culture politique, mais ce n'est pas vrai dans tous les cas. J'ai parlé à des fonctionnaires d'autres pays qui ne vivent pas la même chose.

  (1610)  

    J'aimerais maintenant aborder la question de la propriété, car l'externalisation du risque et de l'innovation s'accompagne de l'externalisation de la propriété et du développement. Il me semble que cette stagnation s'applique aussi au développement des ressources de notre fonction publique.
    Pouvez-vous nous parler des droits de propriété intellectuelle et de la capacité des ministères à partager des ressources dans le cadre de contrats d'externalisation comme celui de McKinsey?
    Malheureusement, il ne vous reste qu'une dizaine de secondes.
    Essentiellement, la question de la propriété intellectuelle et de la propriété des données est certainement très importante dans un environnement de sous-traitance. En effet, dans plusieurs cas, les gouvernements se retrouvent à racheter les données des entreprises avec lesquelles il a passé des contrats, en particulier pour la prestation de services. Ces entreprises font donc ainsi coup double, en quelque sorte.
    C'est un bon point à soulever, et je serais heureuse d'en discuter davantage lorsque j'aurai plus de temps.
    Je reviendrai à vous.
    Je vous remercie beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Barrett. Il a cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Clarke, dans le cadre de vos recherches, avez-vous trouvé un exemple d'une entreprise dont les contrats avec un gouvernement — et plus précisément avec le gouvernement du Canada — ont été multipliés par 50 sur une période de moins de huit ans, pendant que le responsable de cet organisme était un ami proche du chef du gouvernement? Dans ce cas‑ci, il s'agit du premier ministre.
    Non, je n'ai jamais vu cela auparavant. Pour être honnête, je n'ai pas cherché exactement ce type de situation, mais je n'ai jamais vu cela auparavant.
    Il est intéressant que vous souligniez que vous n'avez pas vu cela, mais que vous n'avez pas cherché cette situation exacte. Cet enjeu a été révélé dans les médias. Des efforts ont également été entrepris par des journalistes du monde entier en ce qui concerne plus précisément McKinsey.
    Avez-vous lu des rapports sur d'autres entreprises que vous avez mentionnées, par exemple PricewaterhouseCoopers, IBM ou KPMG, qui organisent des retraits d'entreprise à quelques milliers de mètres d'un camp de concentration ou avez-vous lu des rapports sur de tels événements? Connaissez-vous des exemples de ce genre?
    Non. Pour répondre à votre question, lorsque j'ai passé en revue l'objet de cette étude, il y a…
    J'ai dit plus tôt que McKinsey nous éloignait du vrai problème, mais je devrais apporter des précisions à cet égard. Je pense que le fait de se concentrer sur McKinsey peut nous éloigner du vrai problème lorsqu'il s'agit de la question de savoir comment améliorer la résilience de la fonction publique et comment mieux gérer les marchés publics. On peut toutefois soulever une question stratégique intéressante à ce sujet, à savoir à quel moment le comportement éthique et les valeurs d'une entreprise l'excluent de la course. Devrions-nous commencer à élaborer des règles à ce sujet?
    Je ne suis pas une experte sur les antécédents de McKinsey, mais je lis les nouvelles comme tout le monde et les antécédents de cette société contiennent effectivement quelques points très problématiques. Oui, il est légitime de se demander s'il s'agit d'une question sur laquelle le gouvernement fédéral devrait se pencher. Toutefois, à mon avis, il faut séparer cette question de celle plus générale de la réforme en matière d'approvisionnement et des problèmes plus immédiats, selon moi, liés à la gestion de l'approvisionnement au Canada.
    Pensez-vous que des incidents comme celui‑là ou, par exemple, les travaux menés, selon certains documents, par McKinsey pour Purdue Pharma, plus précisément en aidant la société à stimuler les ventes d'opioïdes dans les ventes d'OxyContin…? Au bout du compte, c'est ce qui a mené au désastre qui s'étend à toute l'Amérique du Nord, c'est‑à‑dire l'épidémie mortelle de consommation d'opioïdes qui sévit. À votre avis, lorsqu'une société qui fait ce genre de travail tout en devenant un fournisseur ou un entrepreneur avec des contrats de plus de 100 millions de dollars pour le gouvernement fédéral…? Pensez-vous que cette association mine, ou risque de miner, la confiance du public à l'égard de la fonction publique?
    Je ne sais pas, mais je pense que c'est une question qu'il faut certainement étudier. Vous pourriez mener des recherches sur l'opinion publique pour déterminer comment les contrats liés à McKinsey changent l'opinion publique à l'égard de l'État. Oui… Mais à ce moment‑ci, je ne fais qu'émettre une opinion. Je ne sais pas dans quelle mesure les Canadiens prêtent attention à ces questions ou si cela mine leur confiance.
    D'accord. À cet égard, dans la mesure où les Canadiens prêtent attention à cet enjeu, il semble justement que le public s'y intéresse beaucoup, comme en témoignent les nombreux articles publiés par la presse sur la question.
    Même si vous n'avez probablement pas cherché cet exemple particulier, dans le cadre de vos recherches, avez-vous trouvé des exemples d'une autre société de gestion qui a commencé à recevoir un montant d'argent 50 fois plus élevé de la part du gouvernement fédéral dans les contrats qui lui étaient octroyés après avoir dirigé la politique d'immigration pour l'administration Trump aux États-Unis? Est‑ce une chose que vous avez observée au cours des huit dernières années?
    Non.
    Non. Je suppose que ce qui me préoccupe plus particulièrement au sujet des questions soulevées par M. Housefather, c'est que nous avons ici l'occasion d'obtenir une analyse des répercussions de ces types de contrats sur le gouvernement fédéral. Vous êtes certainement experte en la matière. Les observations dont je discute avec vous sont très importantes, car le type de société que représente McKinsey est exactement le type de société avec lequel les Canadiens ne choisiraient pas de faire affaire dans leur vie personnelle. J'ai donné quelques exemples, dont McKinsey, qui aide le gouvernement saoudien à traquer ses opposants politiques pour ensuite exercer des représailles sur leurs familles.
    Ce qui me préoccupe, monsieur le président, et la raison pour laquelle nous parlons de McKinsey aujourd'hui, c'est que compte tenu du type de société qu'est McKinsey et le type de pays qu'est le Canada, la société McKinsey pourrait nuire à la réputation du Canada.

  (1615)  

    Excellent. Merci, monsieur Barrett.
    La parole est maintenant à Mme Thompson pour les cinq prochaines minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Clarke et monsieur Boots, je vous souhaite encore une fois la bienvenue devant le Comité.
    Je veux d'abord vous citer deux articles qui remontent à un certain nombre d'années. Le premier date de novembre 2013. Voici ce qu'on pouvait lire au milieu de cet article:
Selon un examen des comptes publics récemment déposés qui a été effectué par Postmedia News, Deloitte […] a obtenu du gouvernement fédéral au cours des trois dernières années des contrats de 100 000 $ et plus totalisant près de 53 millions de dollars, et touché plus de 135 millions de dollars à la faveur de tels marchés publics importants depuis l'accession au pouvoir du gouvernement Harper. Les marchés dont la valeur est inférieure à 100 000 $ ne sont pas individuellement pris en considération dans les comptes publics annuels.
    L'autre article remonte à septembre 2011. Je vous en lis un extrait:
Le gouvernement Harper se justifie d'avoir payé près de 90 000 $ par jour à un important cabinet privé pour lui conseiller des façons de réaliser des économies en faisant valoir qu'il lui est impossible d'accomplir un tel travail correctement à l'interne.
« Nous estimons devoir nous appuyer sur un point de vue externe », a déclaré mardi le ministre des Finances Jim Flaherty.
« À vrai dire, il n'est pas souhaitable qu'un gouvernement se contente d'évaluer ses propres activités. On peut compter au Canada sur un vaste bassin d'expertise, en matière de productivité du secteur public notamment, et nous nous réjouissons à la perspective de pouvoir bénéficier des conseils de Deloitte dans ce dossier. »
Selon un reportage publié par La Presse canadienne, les services de Deloitte Inc. ont été retenus le 15 août dans le cadre d'un marché de 19,8 millions de dollars pour conseiller le Cabinet fédéral et les hauts fonctionnaires afin qu'ils puissent dégager suffisamment d'économies pour atteindre l'équilibre budgétaire d'ici 2014.
    Je crois vraiment que tout cela intervient davantage dans le contexte de l'étude sur l'impartition des marchés que nous avons entreprise et qu'il est très important selon moi que nous menions à terme. Pour revenir à ce qui nous intéresse aujourd'hui, la valeur des marchés fédéraux d'expertise-conseil attribués à McKinsey a augmenté en 2020‑2021 par rapport aux années précédentes, une hausse sans doute attribuable, tout au moins en partie, aux services liés à la pandémie. C'est une considération à retenir pour McKinsey dans le cadre de la présente étude, sans lien avec celle que nous réalisons sur l'impartition des marchés.
    Pouvez-vous nous fournir des renseignements sur les marchés octroyés à McKinsey en 2020‑2021?
    Non, je ne peux pas.
    Merci.
    Monsieur Boots, j'ai écouté avec grand intérêt vos commentaires sur la transparence et la qualité des données. Je partage votre avis. Je pense que c'est un élément incroyablement important dans le cadre de notre étude sur l'impartition des marchés. J'estime qu'il s'agit de considérations sur lesquelles nous devrons bien entendu nous pencher plus à fond.
    Aux fins de la présente étude, pouvez-vous nous parler de la transparence et de la qualité des données en lien avec les marchés octroyés à McKinsey?
    Je ne peux vous donner aucun détail sur les contrats signés avec McKinsey.
    Je noterais seulement qu'il convient de reconnaître que l'équipe chargée de la divulgation proactive des renseignements sur les contrats publie des données ouvertes de bien meilleure qualité depuis 2007‑2018, un exercice qui sert par conséquent de base de référence pour nos recherches. Il existe bien quelques données éparses pour les années précédentes, mais nous pouvons difficilement nous en servir à des fins d'analyse. C'est à partir du moment où la qualité des données est devenue suffisante que nous avons pu entreprendre notre travail.
    D'accord, mais j'essaie d'éviter que nous menions la même étude en parallèle.
    Pour revenir à McKinsey, pouvez-vous nous dire quoi que ce soit concernant la transparence ou la qualité des données dans le contexte des contrats signés avec cette firme?
    Non, nos résultats de recherche ne comportent aucune donnée particulière touchant McKinsey.
    Merci.
    Monsieur le président, je vais renoncer au reste du temps qui m'est imparti. Je vous remercie.
    Merci beaucoup, madame Thompson.
    Madame Vignola, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Boots, une des dispositions concernant l'octroi d'un contrat à fournisseur unique prévoit que l'entreprise aura des droits exclusifs.
    Arrive-t-il fréquemment qu'une entreprise ait des droits exclusifs sur des services destinés à la population?

  (1620)  

    C'est une bonne question.
    La base de données contient des informations qui indiquent si la propriété intellectuelle est détenue par l'entreprise ou le gouvernement. Toutefois, ces informations ont seulement été ajoutées à la base de données au cours des quelques dernières années, alors il est difficile d'en faire un historique complet. Cela dit, dans la plupart des cas, pour ce qui est des contrats pour des services professionnels, la propriété intellectuelle est détenue par l'entreprise. Les ministères doivent suivre un processus d'exception pour détenir la propriété intellectuelle eux-mêmes, mais il y a des éléments qui rendent cela très difficile.
    C'est l'objet d'une des recommandations que Mme Clarke et moi avons présentées dans notre petit rapport.
     Tout à l'heure, j'ai fait mention d'un contrat accordé à McKinsey & Company qui est ouvert jusqu'en 2100. Il porte le numéro EN537‑05IT01/233/EI‑001.
    Lorsqu'on regarde sur le site Buyandsell.gc.ca pour savoir combien coûte ce contrat aux contribuables, on constate qu'il est établi à zéro dollar.
    C'est merveilleux de voir ainsi les choses à long terme. C'est l'objectif d'une personne d'État. Néanmoins, le contrat est établi à zéro dollar.
    Cela pose-t-il un problème?
    Dans le cas d'une réponse affirmative, comment pouvons-nous faire pour que les contribuables sachent combien ce contrat va réellement leur coûter au bout du compte?
    C'est une excellente question.

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur Boots, mais nous n'avons plus de temps. Auriez-vous l'obligeance de bien vouloir répondre au Comité par écrit? Merci beaucoup.
    Monsieur Johns, vous avez deux minutes et demie.
    Merci.
    Madame Clarke, je veux revenir à la question de la propriété intellectuelle et de la mise en commun des connaissances et des ressources entre les ministères. Pouvez-vous nous parler des façons de faire du gouvernement fédéral qui paie pour l'utilisation ou la conception d'un service, et doit ensuite payer à répétition pour utiliser ce même service en formule bail ou permettre à une autre agence de le faire? On a l'impression qu'il y a énormément d'argent qui est ainsi jeté par les fenêtres.
    En quoi les choses seraient-elles différentes si le service en question était conçu à l'intention de la fonction publique par les fonctionnaires eux-mêmes?
    Vous soulevez différents enjeux avec cette question.
    Toutes les fois qu'un marché est octroyé à une firme pour la conception d'un système ou d'une quelconque plateforme numérique servant d'interface avec le citoyen, il devient possible de recueillir de vastes quantités de données qui peuvent parfois soulever certaines préoccupations du point de vue de la protection de la vie privée, mais qui peuvent également revêtir une grande valeur dans le cadre des efforts déployés notamment pour améliorer les processus et permettre au gouvernement d'agir de façon plus judicieuse.
    Il y a eu des cas — et je ne sais pas dans quelle mesure cela peut être fréquent au sein du gouvernement fédéral — où les contrats en question ne précisaient pas que les données générées appartiennent ensuite au gouvernement. Certains gouvernements ont ainsi dû racheter ces données. C'est un problème qui peut se poser.
    Vous avez aussi traité de la possibilité d'utiliser à d'autres fins les services acquis par le gouvernement. On serait porté à croire que les choses devraient effectivement se passer de cette manière. Si vous dirigiez votre propre entreprise et que vous deviez payer pour un conseil ou un service qui pourrait vous être utile dans les différentes divisions de votre organisation, vous n'hésiterez pas à vous en prévaloir.
    Il y a quelques éléments qui font en sorte que cette pratique est peu répandue au sein du gouvernement. Il arrive ainsi qu'un contrat précise que cela est impossible, mais je pense que c'est plus souvent attribuable au fait que les ministères ne se parlent pas entre eux. Il est fort probable, et j'ai eu vent de certains cas semblables, que si nous disposions de plus de données au sujet de ces marchés, nous constaterions que, dans bien des cas, les ministères et leurs différentes divisions paient à répétition les mêmes entreprises pour obtenir les mêmes services.
    Je trouve cela scandaleux.
    Pouvez-vous nous parler également des risques pour la vie privée des Canadiens lorsque le gouvernement externalise des services informatiques mettant à contribution leurs données personnelles?
    Il arrive que les firmes avec lesquelles on travaille aient mis en place les meilleures pratiques possible en matière de sécurité et de protection des renseignements personnels, si bien que le problème ne se pose pas nécessairement. Ce n'est pas d'hier que le gouvernement doit se préoccuper d'un tel recours à des ressources externes pour accomplir ce genre de travail. Le simple fait de concevoir un produit, un service ou une stratégie vous permet d'en apprendre beaucoup sur la nature d'un programme, ses utilisateurs et ses répercussions. D'après moi, c'est ce qui amorce le processus d'amenuisement des connaissances d'un État. Plus vos relations avec les utilisateurs du service, les intervenants et les différentes composantes de vos programmes se font par l'intermédiaire d'un tiers engagé par contrat, moins vous en savez sur vos propres activités. Plus le gouvernement externalise ainsi son travail, plus il s'abrutit et plus il est obligé d'octroyer encore davantage de contrats parce qu'il n'a plus les connaissances nécessaires. C'est un véritable cercle vicieux.
    J'estime que c'est une préoccupation légitime qui se manifeste tout particulièrement dans la sphère informatique en raison des grandes quantités de données en jeu, mais qui est aussi présente dans tous les processus de sous-traitance d'un gouvernement, que ce soit auprès d'experts-conseils en gestion ou d'organismes sans but lucratif. Il est toujours difficile de boucler la boucle de manière à s'assurer que toute l'information produite dans le cadre d'un exercice d'externalisation semblable peut être utilisée à l'interne pour la prise de décisions…

  (1625)  

    J'ai bien peur de devoir vous interrompre à nouveau, madame Clarke.
     Merci, monsieur Johns.
    Comme nous devrons nous arrêter à 16 h 31, cela laisse deux minutes et demie pour Mme Block et deux minutes et demie pour M. Housefather.
    À vous la parole, madame Block.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je joins ma voix à celle de mes collègues pour souhaiter la bienvenue à nos deux témoins d'aujourd'hui.
    Vos témoignages passés ont toujours été d'un grand intérêt à mes yeux. Votre comparution d'aujourd'hui est d'autant plus importante qu'elle servira pour notre comité de mise en contexte afin de mieux comprendre non seulement les enjeux touchant l'impartition des marchés, mais aussi les discussions stratégiques qui deviennent nécessaires lorsque les médias se saisissent de cas problèmes comme celui de McKinsey qui a obtenu du gouvernement des contrats dont la valeur est 50 fois plus élevée qu'auparavant, comme l'ont indiqué mes collègues.
    Même lorsque les Canadiens ne sont pas sensibilisés à une problématique, nous nous devons certes de l'être. Nous devons assurément approfondir la question pour non seulement déterminer exactement quelles sont les règles d'approvisionnement et d'affermage qui favorisent cette dépendance à l'égard de firmes-conseils en gestion pour l'externalisation de notre travail, mais aussi pour mettre au jour les lacunes et les échappatoires au sein du système qui font en sorte que la part de marché d'une entreprise comme McKinsey peut croître aussi rapidement.
    Nous avons bien sûr pu prendre connaissance de différents rapports à ce sujet. Des fonctionnaires ont en outre fait part publiquement, sans toutefois trop s'engager, de leurs préoccupations quant au travail ainsi accompli. Ils ne sont pas certains que leur ministère sorte gagnant lorsque des mandats sont confiés à des firmes d'experts- conseils. Ils ne savent pas ce que cette expertise peut apporter de plus. Je pense que nous avons tout lieu de nous poser des questions lorsque les fonctionnaires commencent ainsi à s'interroger sur la justification d'une telle externalisation du travail.
    Je crois vous avoir entendu dire qu'une réforme en profondeur des règles d'attribution des marchés s'impose, mais que cela ne doit pas nécessairement passer par l'augmentation de la quantité de règles et l'alourdissement du fardeau administratif.
    Vous avez aussi indiqué qu'il existe à l'échelle internationale différents modèles dont nous pourrions nous inspirer pour rectifier le tir. Je ne sais pas si vous pourriez nous donner quelques exemples de pays qui pourraient nous guider dans cette démarche.
    J'ai bien peur que ce soit tout le temps que vous aviez. Nous allons devoir vous demander, monsieur Boots, de bien vouloir transmettre une réponse écrite au Comité.
    Monsieur Housefather, il vous reste quelque chose comme 30 secondes.
    J'ai droit à deux minutes et demie, monsieur le président, et je compte bien les utiliser.
    D'abord et avant tout, merci de comparaître à nouveau devant nous.
    M. Barrett a profité de sa question pour glisser certains commentaires, certaines hypothèses. Madame Clarke, est‑ce qu'à votre connaissance, le premier ministre est un ami personnel très proche de Dominic Barton? Pouvez-vous directement nous confirmer que c'est bel et bien le cas?
    Pas directement, mais je sais que c'est le cas. Je ne me tiens pas avec eux.
    Pas plus tard que mercredi, nous allons recevoir Dominic Barton lui-même et nous allons pouvoir lui poser la question.
    Vous ne pouvez pas nous en dire plus long sur le lien qui les unit, mais vous êtes à même de nous confirmer que ce n'est pas le premier ministre qui attribue les marchés dans le cadre de notre système d'approvisionnement, n'est‑ce pas?
    Je ne sais pas comment les choses se sont déroulées dans ces cas particuliers.
    Cependant, d'après ce que je comprends des règles en vigueur et des processus en place, tout indique que la plupart du temps, les ministres, et à plus forte raison les premiers ministres, ne se mêlent pas directement de ces questions.
    On parle d'une valeur 50 fois plus élevée. Si j'avais un contrat d'une valeur de 100 $ avec une entreprise et que, l'année suivante, je lui octroie un marché d'une valeur de 5 000 $, quel est le pourcentage d'augmentation?

  (1630)  

    Désolée, mais est‑ce que vous posez la question dans le contexte du contrat de McKinsey?
    Ce serait 50 %, n'est‑ce pas? La valeur du contrat devient 50 fois plus élevée en passant de 100 $ à 5 000 $. Nous avons ici une entreprise comme McKinsey qui obtient quelque 100 millions de dollars en contrats gouvernementaux sur une période de sept ans. Ce n'est pas beaucoup d'argent pour les firmes d'experts-conseils de cette envergure dans le contexte du gouvernement du Canada. Il est possible que les sommes versées à Deloitte par exemple aient augmenté davantage d'une année à l'autre, mais que cela corresponde seulement au double de la valeur initiale, plutôt qu'à 50 fois celle‑ci.
    Est‑ce que je me trompe?
    C'est difficile à dire. Je conviens qu'il y a quelque chose d'étrange avec les données et l'augmentation. Je pense qu'il est possible qu'il y ait eu des erreurs dans la saisie des données ou des problèmes quant à la façon de comptabiliser le tout.
    Je pense que M. Boots a bien présenté les choses, mais qu'il faut éviter de considérer que nous vous exposons ici un tableau précis de la situation, car nous pouvons uniquement nous fonder sur les données à notre disposition. Il est possible que la valeur des contrats accordés précédemment à McKinsey ait été supérieure à celle indiquée. Nous ne le savons pas encore vraiment.
    Voici où je voulais en venir avec mon exemple. Si je n'avais pas de contrat avec Oracle, ou encore un contrat d'une très faible valeur, et que je décide de faire installer un système Oracle, il va de soi que les sommes que je vais verser à cette entreprise vont grimper de façon exponentielle, sans que cela ne soit nécessairement déraisonnable.
     C'est cet aspect que nous devons tirer au clair. Nous devons connaître les détails.
    Tout à fait, et nous avons toujours cherché à faire valoir, en présentant les données concernant la hausse colossale de la valeur des contrats octroyés à McKinsey pendant cette période, qu'il est possible que cela découle uniquement de la séquence des différents marchés attribués aux différentes entreprises pendant un laps de temps donné.
    Nous verrons bien.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Boots et madame Clarke, nous vous remercions d'avoir été des nôtres encore une fois. Comme toujours, vos témoignages ont été fort intéressants. J'espère vraiment que notre comité pourra vous accueillir de nouveau dans le cadre de la présente étude ou pour d'autres que nous réaliserons. Un grand merci pour le temps que vous nous avez consacré.
    Nous allons maintenant nous interrompre quelques minutes, le temps d'établir la connexion avec nos prochains témoins.
    La séance est suspendue.

  (1630)  


  (1635)  

    Merci à tous. Nous sommes de retour.
    Je veux indiquer à nos témoins que je vais essayer de réserver les 15 à 20 dernières minutes pour permettre aux membres du Comité de discuter de questions qui ne peuvent pas attendre.
    Nous allons d'abord entendre les observations de Mme Carr.
    Madame Carr, je profite de l'occasion pour vous souhaiter encore une fois la bienvenue. Je crois que c'est votre troisième comparution devant le Comité. Encore quelques autres et vous aurez droit à un café gratuit.
    Vous avez cinq minutes.
    Bonjour à tous. Je m'appelle Jennifer Carr et je suis présidente de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada. Je suis accompagnée aujourd'hui de Jordan McAuley, notre expert en externalisation des services gouvernementaux qui m'aidera à répondre à vos questions.
    L'Institut représente 72 000 professionnels de la fonction publique au Canada, surtout dans la sphère fédérale.
    J'ai témoigné devant le Comité en octobre dernier, et je vous remercie de reconnaître encore une fois l'Institut pour son expertise de premier plan en matière de sous-traitance. Nous avons produit plusieurs rapports sur cet enjeu crucial et nous sommes toujours disposés à discuter avec vous de nos conclusions.
    Il y a environ un an, un marché octroyé à McKinsey relativement au système de paye Phénix a aussi fait les manchettes et donné lieu à de nouvelles questions concernant le recours accru à l'externalisation par le gouvernement. Voilà maintenant des années que nous voyons le gouvernement s'en remettre de façon démesurée à la sous-traitance, une solution très coûteuse. L'exemple de McKinsey est seulement l'un des plus récents en la matière.
    Voici comment on pourrait résumer notre position sur la question. Le travail donné en sous-traitance a un impact sur la sécurité des systèmes d'information du gouvernement et entraîne des coûts plus élevés et une réduction de la qualité des services offerts aux Canadiens. C'est un travail moins transparent qui ne permet pas une reddition de comptes aussi systématique. Il y a une perte des connaissances et des compétences institutionnelles, et le gouvernement devient moins apte à recruter et à maintenir en poste les professionnels dont il a besoin. En négligeant d'investir dans la fonction publique, on impose des coûts plus élevés aux contribuables tout en leur offrant des services moindres.
    Non seulement les marchés attribués à McKinsey sont-ils superflus et scandaleux, étant donné leur pertinence douteuse et la qualité des conseils fournis, mais ils ne constituent en fait que la pointe de l'iceberg. C'est à juste titre que le gouvernement actuel fait l'objet de critiques à cet égard, mais c'est un problème qui ne date pas d'hier. Les gouvernements précédents, toutes allégeances confondues, n'ont jamais cessé d'investir de plus en plus dans la sous-traitance.
    Des années de dépenses incontrôlées dans l'externalisation par différents gouvernements ont créé une fonction publique fantôme formée d'experts-conseils et d'employés temporaires travaillant parallèlement aux effectifs gouvernementaux. Cette fonction publique parallèle est assujettie à des règles totalement différentes. Les embauches ne sont pas fondées sur le mérite, la représentativité, l'équité ou la transparence. Cette fonction publique est à l'abri des restrictions budgétaires ou des gels d'embauche, et elle n'a aucun compte à rendre à la population canadienne. Cela n'empêche toutefois pas le gouvernement fédéral de continuer, année après année, de prendre des décisions coûteuses en faveur de l'externalisation de ses services. À lui seul, l'Institut a déposé plus de 2 500 griefs concernant du travail confié à cette fonction publique parallèle.
    Afin de mieux situer les marchés octroyés à McKinsey dans le contexte plus général du recours à des experts-conseils par la fonction publique fédérale, j'aimerais porter à votre attention certains chiffres particulièrement préoccupants.
    Je vais laisser M. McAuley vous brosser un tableau des grandes tendances.
    Je suis Jordan McAuley. Je suis un analyste de données à l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, IPFPC. Je travaille avec les données de divulgation proactive depuis au moins cinq ans maintenant. J'aimerais réitérer certains points qui ont été soulevés à la dernière réunion.
    Il y a de graves problèmes concernant la qualité des données. Nous sommes tout à fait conscients qu'il s'agit d'estimations et pas nécessairement de chiffres précis. En examinant la situation de plus près, vous pouvez certainement relever certaines tendances. Il y en a trois que je voudrais souligner dans le cadre de cette audience.
    Premièrement, comme la présidente Carr y a fait allusion, il s'agit d'un problème qui remonte à bien au‑delà de 2015. Il y a eu des années, sous le gouvernement Harper, où les dépenses en consultants approchaient le milliard de dollars par année. Plus précisément, nous avons examiné les consultants en TI, les consultants en gestion et les services d'aide temporaire. Nous pensons que ces trois catégories de consultants représentent le mieux l'externalisation du personnel, qui est ce qui nous préoccupe le plus.
    Deuxièmement, depuis que le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir, en 2015, le problème s'est aggravé. Et ce, malgré l'engagement pris par le premier ministre, lors de sa campagne, de ramener les dépenses d'externalisation aux niveaux de 2006. Nous ne voyons aucune indication dans les données qu'il s'agissait d'un engagement sérieux. Les dépenses, notamment en TI, ont continué à augmenter chaque année. De façon générale, les chiffres semblent avoir à peu près doublé entre 2015 et 2022 dans ces trois catégories de consultants.
    Enfin, en ce qui concerne les 150 millions de dollars de contrats attribués à McKinsey, bien que ce soit une bonne chose dans la mesure où cela nous a permis d'avoir cette discussion, c'est très peu par rapport aux grands contrats de TI. Je sais que cela a été discuté à la dernière réunion. Une entreprise comme IBM, par exemple, a reçu en 2016 plus du double de ce que McKinsey a fait sur une période de huit ans en une seule année. Et c'est seulement pour les consultants en TI.
    L'examen des données et de ce que nous suivons depuis plusieurs années montre que l'ampleur du problème va bien au‑delà de McKinsey ou de toute autre entreprise.

  (1640)  

    Merci.
    J'ai bien peur que les cinq minutes soient écoulées. Merci de votre déclaration liminaire.
    Monsieur McAuley, c'est toujours un plaisir d'avoir un autre McCauley au Comité aujourd'hui, même si vous ne l'épelez pas correctement.
    Nous allons commencer avec Mme Kusie, s'il vous plaît, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, madame Carr et l'autre M. McAuley, de votre présence ici aujourd'hui.
    À la page 62 du livre tristement célèbre When McKinsey Comes to Town écrit par Walt Bogdanich et Michael Forsythe — et je suis sûre que vous m'entendrez y faire référence au cours des prochaines semaines dans le cadre de notre étude de l'entreprise McKinsey —, on peut lire ceci: « McKinsey s'est infiltrée dans les organismes fédéraux et d'État en vendant l'idée que les fonctionnaires ordinaires n'avaient pas la formation et l'expérience nécessaires pour comprendre les nuances du [gouvernement]. »
    Je pense que c'est semblable à ce que Mme Carr a décrit ici.
    Je vais maintenant passer à un article de la CBC datant du 4 janvier 2023, qui fait état que le ministère qui a fait le plus appel à McKinsey est Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Dans cet article, deux fonctionnaires expliquent que les nombreuses décisions stratégiques ont été prises par McKinsey plutôt que par des fonctionnaires. Ils affirment également que ces décisions stratégiques ont été prises sans que l'intérêt public soit la priorité absolue.
    Madame Carr, quel est le moral des fonctionnaires lorsque des sociétés d'experts-conseils arrivent et reprennent les projets des fonctionnaires?
    Vous savez, pour être tout à fait honnête, cela nuit au moral. Nous avons un ensemble de personnes professionnelles qui ont été embauchées pour leurs talents et leurs compétences. Ne pas faire partie de la conversation est très dommageable. C'est vraiment enraciné dans la main-d'oeuvre. Lorsque le travail est sous-traité, encore une fois, ces compétences et cette expertise quittent la fonction publique lorsque le contrat prend fin. Cela signifie essentiellement que l'externalisation a un coût beaucoup plus élevé que de simples dollars et cents. Nous perdons de la reddition de comptes. Nous minons la capacité de nos employés de travailler avec ces systèmes, et nous nuisons à la capacité de conserver notre personnel.
    Pensez-vous que les sociétés d'experts-conseils accordent la priorité à ce qui sert le mieux l'intérêt public par opposition aux fonctionnaires?
    Je ne le crois pas. Je crois que leur but est de faire de l'argent, de pouvoir avoir un contrat. Je crois que certains contrats sont en fait rédigés de manière à ce qu'ils puissent avoir ce travail perpétuellement. Un exemple que je peux vous donner est celui de Phénix, le système de rémunération sous-traité à IBM. Même si mes membres, des travailleurs des TI très qualifiés, savent comment le réparer, ils ne peuvent pas le faire parce qu'il s'agit d'un contrat à fournisseur unique et que nous n'avons pas le droit d'intervenir et d'apporter les corrections qui, nous le savons, seraient utiles.
    Lorsque le moral est bas dans la fonction publique pour des raisons telles que l'externalisation vers des sociétés d'experts-conseils comme McKinsey, comment pensez-vous que cela nuit à l'efficacité et à l'efficience de notre fonction publique?

  (1645)  

    Cette question comporte plusieurs niveaux. J'aimerais dire qu'il est décourageant pour les fonctionnaires de voir que leur travail est sous-traité. En fait, le gouvernement attache tellement de valeur à ce travail qu'il paie le taux du marché du service plus une majoration, alors que les fonctionnaires se font constamment dire que le gouvernement ne peut pas respecter les taux du marché pour eux.
    Je ne mentirai pas; les travailleurs du secteur des TI quittent la fonction publique pour rejoindre des entrepreneurs, parce qu'ils obtiennent le respect dont ils ont besoin et le salaire qu'ils méritent. Pourquoi ne le feraient-ils pas? C'est un cycle sans fin. Si nous ne le brisons pas maintenant, il décimera la fonction publique fédérale.
    Lors de sa conférence de presse avec McKinsey, il y a deux semaines, le chef de mon parti a mentionné le rapport qualité-prix de recourir à des entrepreneurs externes par opposition à des fonctionnaires à l'interne.
    Pensez-vous que le gouvernement obtient un bon rapport qualité-prix en attribuant des contrats à McKinsey au lieu de faire le travail à l'interne?
    Je ne pense pas.
    Je pense que nous avons un ensemble de compétences à l'interne. Il serait plus prudent pour le gouvernement fédéral d'investir dans ces travailleurs et de les perfectionner pour leur permettre de faire le travail au nom des Canadiens, en gardant à l'esprit l'optimisation des ressources — et non pas l'utilisation perpétuelle de contrats qui emploient des personnes et génèrent des actions et des dividendes pour les entreprises.
    Vous y avez fait référence dans votre déclaration liminaire. Quelles normes de reddition de comptes et de transparence les fonctionnaires doivent-ils respecter par rapport aux sociétés d'experts-conseils?
    Il y a les valeurs et l'éthique, ainsi que la divulgation des conflits d'intérêts. Ils doivent également passer par des analyses comparatives entre les sexes et d'autres programmes pour justifier les solutions qu'ils proposent.
    Bien entendu, les fonctionnaires doivent être bilingues. Ils doivent représenter la diversité de la nation. Ils ont une répartition régionale. Un fournisseur unique ou une grande entreprise ne doit pas satisfaire à tous les critères pour travailler avec la fonction publique.
    Pourquoi pensez-vous que le gouvernement sous-traite à des entreprises comme McKinsey au lieu de perfectionner la fonction publique?
    Vous y avez fait référence dans votre déclaration liminaire.
    Veuillez fournir une réponse brève, je vous prie.
    La réponse courte est qu'en ce moment, nous devons améliorer nos politiques d'embauche du gouvernement. Nous devons nous assurer qu'ils sont embauchés plus rapidement et plus efficacement.
    Nous devons moderniser notre approvisionnement en TI et investir dans notre expertise à l'interne. Nous devons également payer pour cette expertise interne. Dépenser trois ou quatre fois plus pour externaliser le travail alors que nous pouvons payer un salaire relativement bon pour assurer cette prestation uniforme des services et des programmes sur lesquels les Canadiens comptent... C'est veiller à ce que les contribuables en aient pour leur argent.
    Merci, madame Carr et madame Kusie.
    Nous allons maintenant entendre M. Kusmierczyk, s'il vous plaît, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, présidente Carr et monsieur McAuley, de vous joindre à nous encore une fois au Comité des opérations gouvernementales et de vos excellents témoignages. De plus, merci aux formidables fonctionnaires que vous représentez.
    Nous avons vécu tellement de choses au cours des deux dernières années. Grâce aux travailleurs — les fonctionnaires que vous représentez — qui sont engagés et dévoués, les Canadiens ont pu traverser les deux années les plus difficiles. Je voulais simplement vous remercier, au nom de toux ceux qui sont autour de cette table, du travail extraordinaire de vos membres.
    Depuis environ 2015, notre gouvernement a énormément investi dans nos fonctionnaires. Vous pouvez regarder le fait que depuis 2015, lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir, nous avons embauché environ 60 000 employés à temps plein dans la fonction publique, ce qui représente un investissement d'environ 20 milliards de dollars supplémentaires. Ce sont 60 000 employés à temps plein qui ont été embauchés. Je ne dirais pas que ce gouvernement fédéral hésite à ramener des services à l'interne ou à investir dans notre fonction publique.
    Je voulais simplement vous demander de commenter le fait que nous avons vu une croissance énorme du nombre de fonctionnaires à temps plein et un investissement accru dans notre fonction publique fédérale.

  (1650)  

    Oui, je pense que nous devrions voir où ces investissements ont été effectués. D'emblée, nous voulons nous assurer que le gouvernement nous fait pleinement participer à toute forme d'examen de la prestation des services publics.
    Nous sommes actuellement confrontés à un changement technologique et nous devons nous assurer que le gouvernement s'engage auprès de sa main-d'oeuvre en ce qui concerne les changements rapides du gouvernement sur le lieu de travail. Nous devons également être plus transparents envers les Canadiens. Il ne fait aucun doute que le dernier examen stratégique qui a eu lieu, lorsque nous parlons d'une grande fonction publique, a mené à des compressions généralisées, et lorsque nous examinons où l'embauche est faite, nous devons déterminer si elle a été faite d'une manière stratégique pour atteindre certains objectifs. Je dirais que la dépendance excessive à l'égard des consultants en TI mène à ce que nous appelons une fonction publique fantôme, qui ne fait qu'éroder notre capacité d'agir au nom des Canadiens.
    Merci, présidente Carr. Je peux vous dire que nous tous autour de la table prennent vos observations au sérieux. Nous voulons examiner très attentivement l'externalisation et la manière dont nous pouvons améliorer le système et renforcer la reddition de comptes et la transparence d'un système en ce qui concerne nos processus d'externalisation.
    Vous soulignez la croissance, évidemment, comme une préoccupation en ce qui a trait à l'externalisation, mais pouvez-vous décrire des situations où l'externalisation est logique, où certaines des compétences et de l'expertise qui sont fournies par ces entreprises externes complètent vraiment le travail de notre excellente fonction publique fédérale?
    Oui, je vais reprendre le message de Mme Clark à ce sujet, à savoir qu'il y a des moments où nous avons besoin de sous-traiter des services, encore une fois, avec une capacité de pointe ou dans un but spécial. Malheureusement, j'ai l'impression que ce qui se passe, c'est que nous sous-traitons l'ensemble du projet au lieu de faire appel à des personnes pour aider à amplifier ou à fournir cet élément manquant à la fonction publique et faire profiter de ce talent ou de cette expertise à notre personnel à l'interne, en veillant à ce que la capacité interne soit exploitée.
    Ce que nous avons tendance à faire, c'est de laisser ces contrats en place pour l'ensemble du projet, lorsque ces [Difficultés techniques] et de renforcer cette capacité à l'interne.
    Me permettez-vous d'interrompre la discussion un petit instant? Votre écran a gelé pendant une seconde. Auriez-vous l'obligeance de répéter la réponse, madame Carr?
    D'accord, où devrais‑je commencer?
    Les 30 dernières secondes.
    Ce que je disais, c'est que lorsque nous sous-traitons, ce qui se passe, c'est qu'au lieu de transférer ces connaissances à l'interne et de tirer parti du contrat pour relever les lacunes et améliorer les compétences des travailleurs du gouvernement, cette partie part généralement avec le contrat et nous laisse dans la même situation que nous étions au début, au lieu de créer une main-d'oeuvre qualifiée qui peut relever ces défis au niveau suivant.
    Merci beaucoup, présidente Carr.
    Vous avez mentionné que nous vivons une période de perturbation extrême au Canada et dans le monde. Certaines forces agissent sur le monde, que ce soit l'automatisation, l'intelligence artificielle,l'informatique en nuage ou même le travail à distance. Toutes ces forces s'exercent sur le travail que nous accomplissons en tant que gouvernement.
    Une entreprise mondiale comme McKinsey, par exemple, qui compte 30 000 employés dans 65 pays, pourrait-elle avoir une certaine expertise ou compréhension des meilleures pratiques qu'elle pourrait transmettre à la fonction publique fédérale et à laquelle nous n'avons peut-être pas accès parce que nous n'avons pas ces contacts quotidiens ou ces réseaux mondiaux? Y a‑t‑il une valeur en ce sens, pour ce qui est de transmettre des connaissances à une entreprise qui, encore une fois, est très connectée à l'échelle mondiale?
    Veuillez répondre en 30 secondes, s'il vous plaît.
    Oui, c'est correct. La réponse se trouve dans votre question, à savoir la transmission des connaissances. Je ne trouve pas que l'entreprise transmet ses connaissances. Ses employés arrivent pour faire le travail et repartent avec le travail.
    Il y a une différence entre le fait de venir pour aider à résoudre le problème et mettre au point une solution qui fonctionne à l'interne, et le fait de créer une dépendance excessive à votre expertise sans ajouter à l'expertise à l'interne dont nous avons besoin.

  (1655)  

    C'est un excellent argument. Merci.
    Merci, madame Carr.
    Madame Vignola, allez‑y, s'il vous plaît, pour six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Carr, monsieur McAuley, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d'être parmi nous.
    Vous avez déjà répondu à ma première question, qui porte sur le problème lié au fait de recourir à des consultants. On parle ici de McKinsey & Company, mais on fait appel à plusieurs autres entreprises. S'il manque des éléments, vous pourrez les ajouter, mais vous avez répondu que ces entreprises n'étaient pas tenues aux mêmes normes éthiques, à la divulgation et à la reddition de comptes. Elles ne sont même pas tenues de respecter les mêmes normes en matière de diversité et d'inclusion.
    Faire appel à des consultants peut être nécessaire. Ayant connu le milieu scolaire, je sais qu'on peut être amené à faire appel à des services externes pour créer l'étincelle de créativité qui permet de trouver une solution. Cela arrive parfois. Cependant, lorsque les consultants n'ont pas les mêmes normes, cela ne peut-il pas devenir une façon de contourner les règles afin de faire appliquer de nouvelles idées? C'est la question que je me pose.
    Pour ce qui est du recours à des consultants, votre syndicat a-t-il reçu beaucoup de griefs de la part des fonctionnaires? Le cas échéant, combien y en a-t-il eu et pour quels motifs?
    Commençons par ces deux questions.

[Traduction]

    En ce qui concerne l'innovation, je pense que ce qui se passe avec les consultants externes — je reviens au moral —, c'est que vous avez beaucoup de gens qui sont capables de faire le travail mais qui se heurtent à un plafond de verre à cause des barrières linguistiques de la répartition régionale. Ils ne peuvent pas surmonter ces barrières. C'était l'un des points positifs de l'espace de travail virtuel — nous pouvions embaucher des talents de tout le pays afin de pourvoir ces postes, de créer ces talents et de les faire progresser au sein du gouvernement.
    J'ai mentionné qu'à l'heure actuelle, nous avons 2 500 griefs contre la fonction publique fédérale et contre le Conseil du Trésor à propos desquels nous savons que le travail effectué par les consultants enlève du travail à nos membres. Ce sont là des tâches que les consultants accomplissent et qui pourraient être réalisées à l'interne par des fonctionnaires. Nous savons également, par l'entremise du Bureau d'information du Canada, qu'il nous manque 7 000 travailleurs des TI. Si nous ne pouvons même pas recruter des membres et garder les membres que nous avons, nous n'atteindrons jamais l'objectif d'avoir une fonction publique fédérale autonome et notre dépendance à l'égard des contrats ne fera qu'augmenter.

[Français]

    Je vais poursuivre sur la question de l'informatique. L'embauche de consultants par le gouvernement pour effectuer du travail informatique coûte cher et contribue à l'érosion de la mémoire institutionnelle. Vous venez de dire qu'il manquait 7 000 travailleurs dans le domaine des technologies de l'information.
    Ces gens ont-ils déjà été engagés ou s'agit-il d'un manque à gagner?
     Que faudrait-il pour que ces spécialistes trouvent la fonction publique attrayante, stimulante et suffisamment agréable pour y offrir leur expertise en ayant bon espoir qu'elle sera reconnue?

[Traduction]

    Il y a clairement des éléments qui font défaut. Encore une fois, il y a le plafond de verre à cause de la répartition régionale. Il y a des gens qui ne seraient pas prêts à déménager dans la capitale nationale pour gravir les échelons. L'échelle salariale est loin derrière celle de nos homologues du secteur privé, alors il faut vraiment prendre une décision au début. Il y a le système de rémunération Phénix, bien sûr, donc même si nous pouvions embaucher des gens dans un bon poste, ne pas savoir s'ils vont pouvoir être payés correctement est un énorme obstacle à l'heure actuelle. Le fait que le gouvernement dépende davantage de contrats externes pour les TI et dépense plus d'argent que pour ses propres travailleurs en TI à l'interne envoie également un message silencieux à nos travailleurs selon lequel ils ne sont pas appréciés à leur juste valeur et que le gouvernement préfère sous-traiter à l'externe pour faire le travail.

  (1700)  

[Français]

    Je vous remercie.
     Vous avez parlé de 2 500 griefs liés à des tâches qu'on a fait faire par des sous-traitants, mais que les fonctionnaires auraient été en mesure d'accomplir. Combien de ces 2 500 griefs concernaient-ils précisément le recours à des consultants, notamment McKinsey & Company?
     Est-il possible de faire la distinction entre les griefs?

[Traduction]

    Je ne pense pas que je pourrais faire cela. Non. Ce sont tous des consultants.

[Français]

     Dans les situations où faire appel à un consultant est absolument incontournable, y a-t-il des moyens d'obliger le consultant à observer les mêmes règles qu'un fonctionnaire?
    Comment pourrait-on mettre en place ces règles?

[Traduction]

    D'après le peu de connaissances que j'ai, oui, c'est possible. Il est possible de préciser dans le libellé du contrat qu'il faut avoir un certain nombre, vous savez, de personnes bilingues... un certain nombre de femmes, un certain nombre de personnes de couleur.
    Je sais qu'aux États-Unis, lorsqu'ils engagent des sous-traitants, ils doivent payer le même salaire. Il y a des restrictions salariales. Ils doivent offrir un montant équivalent...
    Je crains de devoir vous interrompre, madame Carr. Les six minutes sont écoulées. Vous pouvez peut-être conclure votre réponse dans un mémoire écrit au Comité, ou vous pouvez le faire durant le temps de parole de M. Johns.
    Allez‑y pour six minutes, monsieur Johns.
    J'aimerais d'abord vous remercier pour votre loyauté envers tant de fonctionnaires, auxquels nous pouvons faire confiance pour assumer la responsabilité de fournir des services à la population canadienne et de s'acquitter de ce mandat.
    Nous venons d'apprendre, madame Carr, de la part — et je ne me ferai pas beaucoup d'amis parmi mes collègues en l'affirmant — des libéraux que l'externalisation à McKingsey est passée d'un montant de 2 millions à 100 millions de dollars. Il a aussi été déclaré que cela ne représentait pas une somme importante si l'on tient compte du contexte général. Ils peuvent essayer de faire valoir que la somme est minime par rapport au total de 15 milliards de dollars donnés en sous-traitance, mais, à mes yeux, si on se fonde sur le salaire moyen d'un employé du gouvernement — qui est de 79 470 dollars —, cela représente 1258 équivalents temps plein.
    Pourriez-vous parler du moral des fonctionnaires face à cet argument du gouvernement?
    Je répète qu'il est très décourageant pour un travailleur du secteur fédéral de constater qu'on n'en a pas pour notre argent quand on compte démesurément sur l'externalisation. Cela réduit la propre capacité du gouvernement de recruter les professionnels dont il a besoin. Cela n'a pas de sens que le gouvernement paye les tarifs du marché à des agences externes, mais pas à ses propres professionnels. Lorsque l'on prend du retard relativement à la rémunération, le recrutement et le maintien en poste deviennent très difficiles. Votre comité doit se pencher sur la relation qui existe avec ces entreprises.
    Pourquoi est‑il acceptable de payer les tarifs du marché ajustés à l'inflation, plus les frais généraux, à un fournisseur externe au lieu de le faire pour ses propres fonctionnaires, qui ont la motivation et les compétences pour faire ce travail au nom des Canadiens?
    Je vous suis vraiment reconnaissant d'avoir abordé certaines des erreurs qui ont été commises par le passé, comme le système de paye Phénix, qui devait faire épargner 80 millions de dollars par année, mais qui nous a coûté plus de 2 milliards de dollars.
    Le bal a été lancé par les conservateurs, qui ont réduit la taille d'Anciens Combattants d'un tiers et qui planifiaient d'utiliser la technologie pour accélérer le traitement des demandes de prestation d'invalidité. Le vérificateur général a été très clair sur le fait qu'il y avait un lien direct entre les coupes dans les emplois à la prestation de services et les délais de traitement des demandes, ce qui a mené à des dépenses reportées, des sommes qui auraient dû être versées pour les vétérans.
    Parlez-moi du moral des fonctionnaires quand certains ne reçoivent pas leur argent en raison de l'externalisation, lorsque des gens qui mettent leur vie en jeu n'obtiennent pas les prestations parce que le contrat a été sous-traité ou que des services destinés à des personnes qui se sont battues pour notre démocratie ont été supprimés.
    Je dois préciser que le service public fédéral est une vocation et l'a toujours été. Nous endurons beaucoup de choses, parce que nous accordons de la valeur au travail que nous faisons au nom de la population. Quand nous avons les mains liées, disons, par exemple, par le système de paye Phénix, nous avons des employés en TI qui pourraient travailler à résoudre les problèmes, mais nous ne pouvons rien faire.
    Il nous faut faire partie des discussions. Nous devons participer aux décisions qui déterminent que tel travail doit être sous-traité et tel autre travail peut être accompli à l'interne, si vous nous dotez des ressources et des niveaux d'effectif appropriés pour le faire au nom des Canadiens et de la façon la plus rentable pour les Canadiens.

  (1705)  

    Mme Kusie vous a posé une excellente question au sujet de la garantie que doit obtenir le gouvernement de payer effectivement les tarifs du marché pour les consultants. Vous avez parlé de l'ajout d'une marge pour ces services.
    Quand vous dites « marge », il s'agit de profit. Est‑ce exact?
    C'est exact.
    Je pourrais ajouter que nous avons discuté ici des contrats du secteur informatique, mais je représente également les infirmières du secteur fédéral. Elles constatent une surdépendance aux agences, où leurs collègues gagnent trois fois et demie ce que gagnent les fonctionnaires. Leurs homologues des agences ont des conditions souples, ne sont pas envoyées dans des situations dangereuses, et reçoivent des primes pour travailler la veille de Noël ainsi que d'autres mesures incitatives. Si le gouvernement offrait simplement une rémunération et une reconnaissance adéquates, nous n'aurions pas à dépendre de personnel externe pour pourvoir ces postes.
    Avez-vous une idée de la marge de ces pourcentages que ces entreprises obtiennent, ou des sommes qui vont aux chefs des entreprises qui font ces profits? Il y a une marge supplémentaire qui s'ajoute à la marge pour certains de ces consultants qui recourent à des sous-traitants.
    Pouvez-vous parler de l'effet de cette situation sur le moral de vos travailleurs?
    Je peux tout à fait vous en parler. Quand un professionnel — dans le cas présent, j'utiliserai l'exemple des infirmières, qui possèdent l'agrément — voit arriver un paramédical provenant d'une agence, qui n'a pas de certification, mais qui gagne trois fois son salaire... Qu'est‑ce qu'il fait? Il doit pouvoir avaler le fait que son employeur ne se soucie pas vraiment de son travail, et que tout ce qui compte, c'est de mettre quelqu'un en poste, sans égards au rôle que joue cette personne.
    En ce qui concerne les marges et le reste, je n'en suis pas certaine.
    Monsieur McAuley, avons-nous examiné cette question? Y a‑t‑il des données publiques à ce sujet?
    Une réponse brève, s'il vous plaît.
    Pas de problème. C'est facile. La réponse est non. Rien ne nous indique que ce soit le cas. Nous avons essayé de trouver ces renseignements.
    J'ai une question très rapide. Vous avez parlé de la fonction publique fantôme. Nous recevrons Dominic Barton, mercredi. Je suppose que c'est un ancien ministre de la fonction publique fantôme.
    Y a‑t‑il d'autres anciens ministres ou chefs d'entreprise que vous aimeriez voir comparaître à notre comité?
    Aucun ne me vient à l'esprit. Je suis désolée.
    Merci.
    Nous allons nous arrêter ici.
    Merci, monsieur Johns.
    C'est votre tour, madame Block.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Puisque le temps est compté, je n'ai qu'une question rapide pour nos témoins.
    Merci d'être parmi nous aujourd'hui. Vous nous avez fourni des rapports, où vous soulevez des inquiétudes quant aux efforts insuffisants en matière de dotation. Vous inquiétez-vous des postes qui ne sont pas dotés en raison des contrats actuels et des contrats à fournisseur exclusif, créant ainsi un cercle assez vicieux?
    Il s'agit absolument d'un cercle vicieux. Il se nourrit lui-même. Si l'on n'investit pas à l'interne, on voit des fonctionnaires fédéraux qui partent pour devenir entrepreneurs ou qui quittent la fonction publique fédérale, ce qui relance tout le cycle à nouveau.
    Bien que l'étude porte sur le secteur informatique, ce sont les infirmières... Les infirmières partent de Services aux Autochtones Canada ou du Service correctionnel du Canada pour travailler pour les agences, pour faire l'argent qu'elles devraient faire en ce moment comme fonctionnaires fédérales et pour obtenir le respect qu'elles méritent sur le plan professionnel.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Bains, la parole est à vous, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Carr et monsieur McAuley, d'être parmi nous aujourd'hui et pour tout ce que vous faites pour la fonction publique.
    À votre avis, les parlementaires et la population ont-ils accès à suffisamment de renseignements sur les contrats pour prendre des décisions éclairées sur la pertinence, la portée et la valeur des soumissions?
    Je passe le relai à M. McAuley. Je pense que la réponse est non, il n'y en a pas beaucoup, mais c'est lui, l'expert des données.
    Allez‑y, monsieur McAuley.
    Pour la population générale, il ne fait aucun doute que ces renseignements ne sont pas facilement accessibles. L'information se trouve sur le portail gouvernemental de données ouvertes, qu'il faut télécharger. Ce gargantuesque ensemble de données est des plus désordonnés. Il me semble qu'il s'y trouve un outil pour parcourir un contrat en particulier, mais il est difficile de s'y retrouver si on ne sait pas ce qu'on cherche.
    Les renseignements se retrouvant dans ces données publiques sont parfois très incomplets. Les détails sont rares. La raison d'être de bien des contrats est inconnue. On peut faire une recherche au moyen de l'identifiant d'approvisionnement du contrat pour obtenir plus d'informations. Or, il est difficile, surtout pour le citoyen moyen, de s'y retrouver.

  (1710)  

    Que pourrait‑on améliorer? Quels renseignements le gouvernement fédéral devrait‑il systématiquement rendre publics?
    Le gouvernement pourrait peut-être s'appuyer sur des normes plus strictes pour la publication des données. Je crois que la qualité des données augmente. Comme le témoin l'a indiqué pendant la dernière réunion, les données s'améliorent sans contredit depuis 2017. Or, une description plus claire de l'objectif du contrat... Parfois, ces champs sont optionnels. On indique habituellement la catégorie générale, mais, dans certains cas, on sait seulement qu'il s'agit d'un contrat de consultation en TI, sans plus. Il est impossible de savoir quels services seront rendus.
    On ignore combien d'experts-conseils sont embauchés pour un contrat de consultation donné. Nous aimerions ardemment pouvoir examiner ces données parce qu'un contrat de services de conseil en technologies de l'information, ou TI, d'une valeur de 10, 20 ou 100 millions de dollars sera octroyé à une grande entreprise. On ne connaît pas le nombre d'experts-conseils faisant partie du contrat ou la somme que ces derniers ont touchée. On ignore si le contrat a été donné en sous-traitance.
    Il serait vraiment intéressant d'avoir accès à ces données.
    Vous avez fait allusion à un élément... Les TI ont fait couler beaucoup d'encre et, manifestement, notre attention est tournée vers les travailleurs de ce milieu. Je crois que nous sommes aussi conscients du bassin limité de travailleurs disponibles détenant ces compétences, et nous avons grandement discuté des salaires. Disons qu'un gouvernement décide d'augmenter les salaires et que le secteur public rivalise avec les entreprises privées pour s'arracher les mêmes experts en TI, les salaires — comme on le sait — augmenteront. Le problème n'en sera-t‑il pas exacerbé? Que pourrions-nous faire sur ce plan?
    Il nous est parfois très difficile de savoir combien touchent les travailleurs en TI du secteur privé. Prenons l'exemple des multinationales: nous n'avons pas la certitude que leurs travailleurs touchent une rémunération similaire, surtout s'ils ne sont pas des travailleurs canadiens. De plus, nous ne savons pas à combien se chiffre la majoration de ces contrats. Nous avons beaucoup de mal à brosser un tableau complet de la situation.
    Ce que nous savons, c'est que les employés subissent à répétition ce que j'appellerais des microagressions: il leur est impossible d'être payés, de travailler dans leur domaine d'expertise, de se perfectionner... Ces emplois ne sont ni statiques ni immuables. Les travailleurs doivent être au fait des nouvelles technologies et maîtriser leur domaine. Si le gouvernement n'investit pas à ces égards, les Canadiens ne pourront recevoir le meilleur service qui soit.
    Merci.
    Voilà qui conclut mes questions pour aujourd'hui. Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Bains.
    Madame Vignola, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous arrêterai tous les deux au terme de deux minutes et demie, pas une seconde de plus.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Carr, avant de poser ma question, j'aimerais faire un commentaire.
    Jusqu'à maintenant, la réponse que j'ai entendue le plus souvent à propos des détails des contrats, c'est « je ne le sais pas ». À mon avis, le problème est là: on ne sait rien.
    Parmi tous vos membres, combien gagnent 1 500 $ l'heure, incluant les avantages sociaux?

[Traduction]

    Je ne pense pas être en mesure de répondre à cette question, mais je peux vous envoyer la réponse sans faute après la réunion. Le salaire du travailleur moyen n'est pas terriblement élevé.

[Français]

    En moyenne, combien gagne un travailleur?

[Traduction]

    Monsieur McAuley, connaissez-vous le salaire du travailleur en TI moyen? Je pense qu'il se chiffre à 76 000 $.
    Oui, je pense qu'il s'élève à 76 000 $ par année.

[Français]

    Pour connaître l'écart entre ce que coûtent les fonctionnaires et les contractants, il faudrait multiplier 1 500 $ par 37,5 heures par 52 semaines.
    J'imagine qu'aucun fonctionnaire ne gagne 1 500 $ l'heure.

  (1715)  

[Traduction]

    Aucun, effectivement.

[Français]

    Je vous remercie infiniment, madame Carr.

[Traduction]

    Merci, madame Vignola.
    Monsieur Johns, vous avez la parole.
    Madame Carr, vous avez mentionné les infirmières travaillant aux côtés de leurs collègues du secteur privé qui, elles, gagnent un revenu trois plus élevé. Les pénuries d'infirmières, de médecins et de travailleurs de la santé du secteur public font les manchettes. Pouvez-vous nous indiquer combien d'infirmières le secteur public a perdues au profit du secteur privé et à quel point il est crucial d'immédiatement arrêter cet exode, étant donné la crise actuelle dans le secteur de la santé?
    Je ne peux donner de chiffres. Je sais, par contre, que le taux de postes d'infirmières vacants chez Services aux Autochtones Canada au Manitoba est actuellement de 60 % et que, pour l'ensemble du ministère, il s'élève à environ 50 %. Le taux de postes vacants non comblés est on ne peut plus alarmant. Lorsque ces postes sont pourvus, ils le sont par des travailleurs d'agences qui gagnent, comme je le disais, un généreux salaire trois fois et demie plus élevé — voire plus — que les infirmières du secteur public. C'est sans compter les primes, les frais de déplacement et l'avantage d'être payé à temps, ce qui représente — je le répète — un important atout.
    Pouvez-vous vous prononcer sur la gravité de la menace qui pèse sur notre système de santé public universel?
    On assiste ni plus ni moins à la privatisation des soins fédéraux prodigués aux membres des communautés éloignées, isolées et des Premières Nations. Une crise sévit.
    N'oublions pas que le gouvernement alimente cette crise de son plein gré parce que nous ne reconnaissons pas la contribution qu'apportent ces fonctionnaires et nous ne les rémunérons pas adéquatement. À titre d'exemple, les infirmières et les professionnels de la santé de la fonction publique fédérale n'ont pas reçu d'indemnités de risque pendant la crise de COVID, contrairement à leurs homologues.
    Que faut‑il faire pour veiller à stopper cette situation sans plus tarder?
    Il faut notamment corriger le système de paye Phénix, qui, selon moi, demeure un système bidon.
    Nous devons être en mesure de verser des salaires équitables. Nous ne visons ni l'abondance ni les salaires les plus élevés, mais la rémunération offerte doit être juste.
    Nous devons reconnaître que le gouvernement devrait aspirer à embaucher des fonctionnaires compétents pour la prestation des services aux Canadiens. Il ne devrait pas continuellement dépendre de travailleurs de l'externe, ce qui nourrit le cercle vicieux.
    Merci beaucoup, madame Carr, d'avoir comparu devant nous.
    Monsieur McAuley, c'est toujours un plaisir de vous voir.
    Je vous permets à tous deux de prendre congé. Merci encore d'avoir été parmi nous. Nous vous sommes reconnaissants de vos observations.
    J'aimerais régler — très rapidement, je l'espère — quelques questions administratives.
    Pour la première question, je vais demander un consentement unanime ou ce que désire le Comité. Je crois que les documents que nous avons reçus de GC Strategies étaient incomplets puisqu'ils manquaient les factures que nous avons demandées. L'ASFC nous les a fournies, contrairement à GC Strategies. Je vous demande, chers membres du Comité, de donner l'aval au président pour qu'il les demande par écrit à la compagnie. Nous procéderons comme par le passé: nous obtiendrons les versions non caviardées. Les versions caviardées seront diffusées publiquement au terme du processus approprié.
    Est‑ce que cette approche vous convient?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Parfait.
    Nous avons reçu des documents, qui ont tardé, sur les frais de déplacement de la gouverneure générale. Vous les avez reçus. Ils proviennent du MDN, de la GRC et d'Affaires mondiales. Ils ne représentent pas grand-chose de nouveau. Je demande au Comité la permission de les publier à l'instar de l'autre liasse volumineuse que nous avons reçue.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Parfait.
    Le dernier élément porte sur la lettre de la société McKinsey, que vous avez tous lue et qui stipule deux demandes: la production de documents sur une base continue et le souhait de discuter de modalités de protection en matière de confidentialité. À titre de président, je dirai rapidement que, à mon avis, la motion décrivait clairement le souhait du Comité. Je demande toutefois l'opinion du Comité pour déterminer si nous devrions nous en tenir au délai de cinq semaines, comme nous le demandions, ou si nous permettons à la société de produire des documents au fur et à mesure où ils seront disponibles. Je vous demande aussi si vous voulez discuter de la possibilité d'offrir à McKinsey une protection en matière de confidentialité. Ici encore, la motion diffère de la demande.
    Allez‑y, monsieur Housefather.

  (1720)  

    Merci.
    J'ai deux choses à dire. Premièrement, à mon avis, la production de documents sur une base continue ne pose pas de problème, à condition qu'on respecte la date limite. C'est même préférable, car on peut faire traduire les documents au fur et à mesure.
    Je crois que les représentants demandent à envoyer les documents après la période de cinq semaines.
    Je comprends, mais l'idée de produire les documents au fur et à mesure est une bonne solution. Quant à la date limite, je suis d'avis qu'il faut la maintenir telle quelle.
    Deuxièmement, et j'en ai déjà parlé, je pense qu'il est juste de s'attendre à ce que des entreprises privées s'inquiètent de la confidentialité des renseignements qui figurent peut-être dans des documents que nous n'avons pas encore vus. Il pourrait s'agir de secrets commerciaux qui doivent être protégés ou de toutes sortes d'autres choses. Je pense que le Comité devrait s'engager à examiner soigneusement les documents et à accorder une attention raisonnable à toute demande qu'on nous fera. Nous n'en garantirons pas l'issue, mais nous devons prendre ces demandes au sérieux, car ce n'est que juste.
     Je ne ferais donc aucune promesse, mais je dirais que, si les représentants dressaient une liste des points qu'ils voudraient porter à l'attention du Comité, nous les prendrions en considération. Je pense qu'il serait juste, monsieur le président, de vous donner le pouvoir d'en discuter.
     C'est une option. Nous pouvons, par l'entremise du Comité, leur écrire pour leur demander de nous expliquer plus précisément ce qu'ils réclament. Là encore, je m'en remets au Comité.
    Madame Kusie, vous avez la parole.
    Je peux comprendre ce que dit M. Housefather. Je n'ai rien contre votre idée de leur demander plus de précisions sur ce à quoi ils pourraient faire allusion, mais j'ai deux observations à faire.
    Tout d'abord, d'après ce que la majorité des membres du Comité ont proposé, l'objectif de l'étude et de la lettre était de mettre en lumière et de rendre transparent tout le travail de McKinsey afin que nous puissions mieux comprendre et évaluer son rôle auprès du gouvernement.
    Ensuite, et je pense que cela découle du premier point, je n'accepte pas — et je crois qu'aucun de mes collègues de ce côté‑ci de la table n'accepterait, de quelque manière que ce soit — que l'on cache des renseignements au Comité ou que l'on refuse d'être complètement transparent en l'absence d'une raison valable justifiant la décision de ne pas nous transmettre ces renseignements.
    Je suis ouverte à l'idée proposée par M. Housefather, c'est‑à‑dire celle d'obtenir une liste des questions potentielles, mais je suis sceptique. Je le dis d'emblée. Je pense qu'il faudrait un très bon raisonnement, et si je peux me le permettre, monsieur le président, ce n'est pas la première fois que McKinsey agit ainsi. À la page 59 du livre When McKinsey Comes to Town, on peut lire qu'un groupe de conseillers, Missouri Health Care for All, s'est également interrogé sur la société McKinsey. Les membres du groupe ont écrit qu'il leur était impossible de savoir si McKinsey avait des conflits d'intérêts parce qu'ils ignoraient qui étaient tous ses clients actuels.
    Il me semble que McKinsey a l'habitude de ne pas vouloir jouer franc jeu quand vient le temps de fournir des renseignements sur ses clients. Comme je l'ai dit, s'il y a des préoccupations légitimes, comme la sécurité des personnes ou de véritables intérêts en matière de sécurité nationale, je suis disposée à en tenir compte, mais ce n'est certainement pas quelque chose qui devrait empêcher notre comité, en tant qu'organisme représentant la population, d'avoir pleinement accès à ces documents aux fins de son étude.
    Je vous remercie.
     Nous allons entendre Mme Vignola, puis M. Housefather.

[Français]

     Je serai brève. Arrêtez-moi si la mémoire me fait défaut. On ne sait jamais.
    Nous avons demandé à GC Strategies de nous fournir des documents. L'entreprise avait des inquiétudes quant à la confidentialité. Elle nous a dit que les documents complets n'étaient pas accessibles en ligne et que seuls les documents caviardés l'étaient afin de cacher les informations personnelles des gens.
    Pourquoi ne pas faire la même chose avec McKinsey & Company?
    Nous verrions l'information complète, mais les documents accessibles en ligne ne divulgueraient pas les informations personnelles. Nous suivrions avec McKinsey la même pratique qu'avec GC Strategies.
    Le public aurait accès à l'information importante, mais pas aux informations personnelles.

  (1725)  

[Traduction]

    Je vais vous donner la parole dans un instant. À mon avis, s'il y a peut-être des questions de conflit d'intérêts, ce genre de renseignements devraient être rendus publics. Je vais laisser M. Housefather intervenir, mais, avant de vous céder la parole, permettez-moi d'ajouter un autre point. Si le Comité le souhaite — et il semble y avoir un peu de volonté en ce sens —, nous pouvons communiquer avec les représentants de McKinsey pour leur demander plus de détails et exiger une réponse de leur part d'ici la réunion de lundi prochain. Ainsi, nous pourrons au moins prendre une décision à ce moment‑là. Sur ce, la parole est à vous, monsieur Housefather.

[Français]

    Je suis tout à fait d'accord. C'est ce que j'étais en train de suggérer.
    J'aimerais m'exprimer en anglais.

[Traduction]

    Je ne voulais pas laisser entendre que le Comité n'obtiendrait pas l'information. Le Comité devrait obtenir tout ce que nous demandons, mais ce que les représentants pourraient dire et ce qu'ils font valoir, à mon avis, c'est qu'ils ne veulent pas que ces renseignements soient rendus publics. Je crois que c'est parfaitement légitime. Leurs adresses électroniques, leurs numéros de téléphone cellulaire, certains renseignements qui pourraient se trouver là‑dedans ne devraient pas être rendus publics. Nous n'avons pas encore vu le document, mais, selon moi, nous devrions voir l'information complète et, par la suite, nous examinerons raisonnablement toutes leurs demandes en fonction de la teneur du document. Je pense que nous devrions tout obtenir, mais évitons de dire automatiquement que tout sera rendu public parce que, bien entendu, il pourrait y avoir des choses là‑dedans comme des renseignements personnels qui ne devraient pas être rendus publics. C'est là où je voulais en venir, monsieur le président.
    En tout cas, j'appuie votre demande.
     À vous la parole, madame Block.
    Pourrions-nous procéder de la même façon que nous l'avons fait pour les renseignements que nous avons reçus de GC Strategies? Est‑ce bien ce que vous proposez, monsieur Housefather?
    Voici ce que je propose. J'ignore ce que les représentants vont demander, mais il peut y avoir des choses, comme je l'ai dit, qui vont au‑delà des simples courriels et numéros de téléphone. Nous devrions les examiner en groupe, une fois que nous aurons lu les documents, pour voir s'il s'agit vraiment de secrets commerciaux. Par exemple, si un secret commercial est en cause, nous ne devrions pas le rendre public, car ce ne serait pas juste. Par contre, si les représentants nous disent qu'ils ne veulent pas se retrouver dans l'embarras à cause de ceci ou cela, eh bien, ce serait là une excuse ridicule.
    Nous devons comprendre leurs objections, et nous devons absolument tout obtenir, mais nous devrions en parler ensemble avant de dire automatiquement que tout doit être rendu public — donc, de manière générale, la réponse est oui.
    On dirait que deux choix s'imposent. Nous pourrions leur écrire maintenant pour leur demander de préciser en quoi consistent ces questions de privilège, ou l'autre option est de leur demander de tout nous envoyer, et nous déciderons plus tard.
    Y a‑t‑il une préférence entre les deux?
    Nous vous écoutons, madame Block.
    J'aime la deuxième option: nous leur demandons de nous envoyer tous les renseignements que nous avons demandés et, ensuite, nous profiterons de l'occasion pour déterminer...
    Oui, c'est exactement ce que je dis. Je suis d'accord.
    Je pense que vous devriez leur demander, monsieur le président, de nous donner des précisions et leur dire que nous allons tout examiner. Nous ne voulons pas que le Comité reçoive des documents caviardés, mais s'ils nous font une liste très précise de tous les renseignements qui doivent être caviardés, nous en tiendrons compte dans la limite du raisonnable, en tant que groupe, et nous leur donnerons une réponse, mais ils doivent quand même nous fournir, en vertu de nos pouvoirs, les documents que nous avons demandés.
     Est‑ce que cette approche vous convient? Je pense que nous avons établi la marche à suivre.
    Très rapidement, parce que je m'apprête à clore la séance, à propos du calendrier des travaux, nous allons essayer d'organiser — et c'est loin d'être une tâche facile, étant donné l'horaire de tout le monde — un comité de travail ou un sous-comité, mais pour le moment, à cause de la difficulté à concilier les horaires des témoins et des ministres, nous allons essayer de mener cette étude pendant tout le mois de février. Ensuite, nous aurons à examiner les budgets de dépenses qui seront présentés. D'ici là, c'est ainsi que nous procéderons, et si quelque chose de plus important se présente, nous nous en occuperons.
    Parlons maintenant du projet de voyage. J'ai envoyé un texto à tout le monde. Il s'agit du voyage dans le cadre de l'étude sur la construction navale, que l'on reporte sans cesse. Je crois que les conservateurs cherchent à savoir si ce déplacement devrait avoir lieu pendant une semaine de séance. J'ignore si les libéraux veulent toujours faire le voyage ou si mes collègues conservateurs sont partants.
    Si je ne me trompe pas, les conservateurs vont voir s'il leur sera possible de faire le voyage pendant une semaine de séance. Je crois qu'on ne veut pas se déplacer durant une semaine de relâche en raison de l'horaire de M. Johns. C'est dommage, mais, par souci d'équité, nous devons tenir compte de l'horaire de M. Johns parce que sa circonscription se trouve dans un endroit très difficile d'accès.
    Je demanderai donc à chaque parti de consulter les whips pour savoir en quoi consistent leurs décisions. Ensuite, nous consacrerons quelques minutes mercredi...
    Une voix: [Inaudible]
    Le président: Je suis désolé. Puis‑je avoir la parole?
    Nous disposons, à tout le moins, d'un budget déjà établi depuis la dernière fois. Nous avons jusqu'au 8 février pour le déposer. Je propose que le Comité en fasse le dépôt, ne serait‑ce que pour signaler un intérêt. Par la suite, si les partis ont d'autres plans pour notre calendrier, eh bien, qu'il en soit ainsi, mais nous ne voulons pas rater la date limite du 8 février.
     Je sais que Mme Vignola y tient vraiment, et je rappelle qu'il s'agira probablement d'un investissement de 300 à 400 milliards de dollars au cours des 20 prochaines années. Je pense donc que cela en vaut la peine. Je suis moi-même allé là‑bas plusieurs fois. C'est très utile, mais nous en resterons là.
    Merci à tous de m'avoir écouté avec patience. Je vous suis reconnaissant d'avoir pris le temps de participer à la discussion d'aujourd'hui. Je vous remercie.
    La séance est levée.
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