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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 29 septembre 1998

• 1533

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je souhaite la bienvenue à tous ceux qui sont ici aujourd'hui.

Diverses institutions financières étrangères qui interviennent sur le marché canadien comparaissent aujourd'hui devant le Comité des finances. Ces institutions remplissent un rôle important dans le secteur des services financiers. Elles fournissent de nouvelles sources de concurrence, comme le souhaitait le gouvernement fédéral. Elles proposent au Canada de nouvelles façons de faire des affaires. Ce que nous pouvons apprendre de ces témoins est particulièrement important, car ils ont choisi de servir le marché canadien de façon originale et innovatrice.

Comme pour tous les témoins, nous vous demandons de traiter du rapport du groupe de travail et de nous dire quelles recommandations vous semblent valables et quelles recommandations vous rejetez. J'aimerais en outre que vous expliquiez aux membres du comité le rôle qui vous semble convenir aux institutions financières étrangères au Canada. Nous aimerions que vous décriviez le processus que vous avez suivi pour entrer sur le marché canadien, les difficultés que vous avez éprouvées et les raisons pour lesquelles vous croyez que les recommandations du rapport MacKay faciliteraient l'arrivée d'autres intervenants sur le marché.

Nous accueillons aujourd'hui, de la Capital One Financial Corporation, M. David Willey, vice-président principal et trésorier ainsi que M. Christopher T. Curtis, avocat général associé. Nous entendrons aussi les représentants de la First Union Corporation, M. Wayne Ehgoetz, chef, Division des opérations canadiennes, et Mme Jean Anderson, conseillère juridique, McMillan Birch, Toronto, ainsi que M. Richard Owens, de la Norwest Financial/Trans Canada Credit, et M. Gadi Meir, vice-président adjoint de la Wells Fargo Bank. M. Arkadi Kuhlman, président-directeur général, et Mme Karen Dalton, directrice de la gestion des risques, représenteront ING Direct. Je vous souhaite à tous la bienvenue.

Écoutons d'abord les représentants de la Capital One Financial Corporation.

M. David M. Willey (vice-président principal et trésorier, Capital One Financial Corporation): Bonjour. Je m'appelle David Willey et je suis vice-président principal et trésorier de la Capital One Financial Corporation. Je suis accompagné de M. Chris Curtis, avocat général associé de Capital One. J'aimerais aussi souligner la présence de M. Richard Owens, un partenaire de Smith, Lyons, qui comparaît aujourd'hui au nom de la Norwest. M. Owens représente aussi Capital One, et son aide nous a été très précieuse pour comprendre le système de réglementation bancaire au Canada.

• 1535

Je tiens à remercier les membres du comité de nous avoir invités aujourd'hui à comparaître devant eux. Il s'agit de la deuxième comparution de Capital One devant votre comité. J'ai témoigné devant vous il y a exactement deux ans, à peu de chose près, au sujet du Livre blanc de 1996 dans lequel le gouvernement proposait de réviser à la baisse l'autorisation juridique récemment accordée à Capital One et d'exiger que nous établissions une banque en vertu de l'annexe II.

Aujourd'hui, je pense à tout ce qui s'est passé au cours de ces deux années. Premièrement, il y a deux ans, Capital One ne menait aucune activité commerciale au Canada. Aujourd'hui, l'entreprise sert des centaines de milliers de titulaires de carte de crédit au Canada et vient de se lancer dans un second secteur d'activité au Canada, le prêt à tempérament.

Deuxièmement, le rapport publié par votre comité et par le comité sénatorial des banques, qui critiquait la proposition du Livre blanc et auquel nous et d'autres intervenants nous étions opposés, a eu pour conséquence directe le retrait de la proposition. Pour cet appui, nos nombreux clients au Canada et nous-mêmes vous remercions.

Des propositions plus progressistes ont alors été présentées. Aiguillonné par les travaux du comité et du comité sénatorial des banques, le gouvernement a proposé l'adoption d'un régime de succursales de banques étrangères pour la première fois dans l'histoire du Canada, et le Canada s'est engagé dans le processus de l'OMC pour mettre ce régime en place d'ici l'année suivante.

Comme je l'ai fait il y a deux ans, j'ai l'intention d'exposer brièvement les activités de Capital One à l'extérieur du Canada. La Capital One Financial Corporation est une société de services financiers dont la principale filiale, la Capital One Bank, émet des cartes de crédit aux États-Unis et au Royaume-Uni. Au 30 juin 1998, Capital One gérait environ 23 milliards de dollars canadiens et servait 14 millions de clients dans le monde entier. Capital One est l'un des dix principaux émetteurs de cartes MasterCard et Visa aux États-Unis. Il s'agit là de notre principal secteur d'activité. Nous consentons aussi des prêts à tempérament aux États-Unis et au Royaume-Uni, et je maintiens quelques autres secteurs d'activité aux États-Unis.

Capital One n'est pas une société émettrice de cartes de crédit comme les autres. À la fin des années 80, nous avons constaté qu'aux États-Unis, toutes les sociétés de carte de crédit percevaient le même taux d'intérêt, environ 19,8 p. 100 annuellement. Comme nous ne sommes pas banquiers de vocation, nous avons profité de l'occasion pour proposer une nouvelle approche au sein de l'industrie. Nous avons utilisé des modèles statistiques puissants pour définir nos pratiques de commercialisation et de crédit, ce qui nous a permis d'offrir des taux plus intéressants à de nombreux clients ainsi qu'une plus large gamme de produits, notamment des cartes de crédit à des clients qui n'auraient pas été admissibles en vertu des normes de prêt traditionnelles des banques.

Les clients américains ont largement bénéficié de la concurrence accrue que Capital One et d'autres intervenants ont instaurée sur le marché grâce à la réduction des prix, à l'amélioration de la qualité des produits et à la plus grande accessibilité du crédit. Même si nous sommes de taille bien inférieure à celle des grandes sociétés américaines émettrices de cartes, par exemple Citibank et MBNA, notre rôle sur le marché dynamique des cartes de crédit aux États-Unis a été notable, et cela est reconnu dans le rapport du groupe de travail qui fait l'objet de votre audience d'aujourd'hui. Nous y faisons allusion, dans le document de référence numéro un, à la page 75.

Capital One a commencé à émettre des cartes de crédit au Canada vers la fin de 1996, peu après ma comparution devant votre comité. Nos activités dans le secteur des cartes de crédit au Canada sont maintenant importantes et en rapide progression.

En outre, nous avons récemment commencé à consentir des prêts à tempérament au Canada, mais je constate que malgré les bonnes nouvelles en matière de politiques, ces deux dernières années, le gouvernement a fixé à l'actif un plafond de 200 millions de dollars, une mesure qui semble être un relent des approches de réglementation restrictive que votre comité a contribué à envoyer aux oubliettes.

Depuis 1996, le marché des cartes de crédit au Canada a connu des changements spectaculaires. En 1996, les produits étaient peu diversifiés et les taux étaient élevés. Les banques canadiennes percevaient des taux annuels qui s'approchaient des 20 p. 100. Les cartes de crédit à taux d'intérêt réduit étaient rares et elles n'étaient pas commercialisées de façon énergique. Ces deux dernières années, le marché a rapidement évolué vers une plus grande diversification des produits et une réduction des taux offerts aux consommateurs canadiens. Capital One a été le premier à proposer une carte de crédit platine au Canada, assortie de lignes de crédit généreuses et d'importants avantages. Aujourd'hui, la plupart des sociétés émettrices de cartes offrent une carte platine.

• 1540

Le nombre des cartes de crédit à faible taux a doublé. Les taux d'intérêt perçus pour ces cartes ont chuté, parfois même de trois points de pourcentage, et les cartes sont maintenant commercialisées de façon dynamique par la poste et d'autres façons.

Les taux des cartes standard ont eux aussi baissé, et certaines sociétés émettrices offrent maintenant des taux de lancement de l'ordre de six ou sept pour cent. Les taux à long terme ont également diminué. Il importe de reconnaître que ces divers produits et les taux plus bas sont maintenant offerts non seulement par les nouvelles sociétés étrangères, dont Capital One et MBNA, mais aussi par les grandes sociétés émettrices nationales, qui ont rapidement réagi au nouveau climat de concurrence. Le marché canadien des cartes de crédit illustre bien les avantages d'une concurrence accrue.

Capital One appuie la libéralisation que propose le groupe de travail MacKay. Un régime d'entrée libéral pour les banques étrangères a beaucoup aidé Capital One. Il nous a permis à nous, société plus petite que les géants de l'industrie et beaucoup plus petite que les banques inscrites à l'annexe I, de pénétrer le marché canadien de façon expérimentale, ce qui a produit les avantages commerciaux et concurrentiels que je viens de décrire. Une libéralisation plus poussée continuera de faciliter ce processus, dans le secteur des cartes de crédit et, très certainement, dans d'autres secteurs des services financiers.

J'aimerais mettre l'accent sur trois recommandations du groupe de travail MacKay qui me semblent particulièrement importantes. Premièrement, le groupe de travail appuie la proposition gouvernementale visant la création d'un régime de succursales de banques étrangères au Canada. Nous appuyons nous aussi cette proposition. Les succursales canadiennes permettraient d'élargir considérablement la gamme polyvalente des produits commerciaux de Capital One, en particulier si le régime était offert aussi bien aux banques commerciales qu'aux caisses d'épargne. Les institutions financières américaines sont régies par des régimes de réglementation comparables les uns avec les autres.

Deuxièmement, nous appuyons les admonestations du groupe de travail au sujet de la réglementation prudentielle, qui ne devrait pas être imposée inutilement, que ce soit en réponse à des préoccupations liées à l'équité des règles du jeu ou pour d'autres raisons. La réglementation superflue freine les affaires et empêche les consommateurs de profiter pleinement de tous les avantages de la concurrence. Plus précisément, le groupe de travail conseille d'éviter la réglementation prudentielle dans le cas des organismes qui n'acceptent pas les dépôts de détail. Capital One n'accepte pas les dépôts de détail au Canada.

Finalement, nous appuyons la recommandation du groupe de travail visant l'élimination des impôts retenus sur les intérêts applicables aux prêts transfrontaliers. Parce que Capital One n'accepte pas les dépôts de détail au Canada, la réforme permettrait d'accroître considérablement les fonds que Capital One pourrait prêter au Canada et, par conséquent, réduirait les coûts de financement de l'entreprise et entraînerait très certainement les mêmes effets pour de nombreuses autres entreprises au Canada. Cette réduction, évidemment, se traduirait par de meilleurs prix aux consommateurs.

Pour terminer, Capital One est ravie des nouvelles perspectives que les recommandations du groupe de travail ouvrent au Canada en matière de réglementation. Nous proposons que le comité et le gouvernement mettent en oeuvre les recommandations du groupe de travail, en particulier celles que je viens de décrire, dans les plus brefs délais.

Je vous remercie infiniment de nous avoir permis de participer à la discussion d'aujourd'hui.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Willey.

Nous allons maintenant écouter la First Union Corporation, représentée par M. Wayne Ehgoetz. Je vous souhaite la bienvenue.

M. Wayne Ehgoetz (chef, Division des opérations canadiennes, First Union Corporation): Je vous remercie d'avoir invité la Congress Financial Corporation Canada à participer à l'examen du rapport du groupe de travail. Je suis le directeur administratif de la Congress Financial Corporation Canada. La dernière fois que j'ai comparu devant le comité, la Congress Financial était une filiale à 100 p. 100 de la Corestates Financial Corporation. Les temps changent, et nous sommes maintenant une filiale à 100 p. 100 de la First Union Corporation, la sixième banque d'Amérique du Nord, depuis la fusion, en avril, de First Union et de Corestates.

Le secteur financier canadien est très intéressant, même si toutes les bonnes recommandations du rapport MacKay n'ont pas été mises en oeuvre. Comme Austin Adams, vice-président exécutif de First Union, le mentionnait dans un article publié le 21 septembre dans le Globe and Mail, le Canada possède l'un des systèmes les plus modernes et les plus efficaces au monde.

Si les recommandations du groupe de travail étaient mises en oeuvre pour que les banques étrangères puissent venir au Canada plus facilement et à moindre coût, le système financier du Canada servirait mieux que jamais les Canadiens, à meilleur prix.

• 1545

C'est en offrant des choix aux petites et moyennes entreprises que Congress Financial s'est fait le plus de clients au Canada. Nous sommes la principale société de services financiers du Canada à accorder aux entreprises des prêts pour leurs fonds de roulement fondés sur l'actif, et les prêts autorisés totalisent aujourd'hui plus de deux milliards de dollars canadiens.

Nous avons aussi des bureaux à Toronto, à Montréal et à Calgary. Dans bien des cas, les entreprises à qui nous prêtons n'auraient pu emprunter dans des banques, car nous sommes les seuls à posséder l'expertise et les capacités de contrôle que nécessitent ces services spécialisés.

Nos principaux concurrents ne sont pas des banques, mais d'autres sociétés de services financiers non réglementées, dont GE Capital, Penfund, First Treasury, Finova et CCFL. Si Congress Financial est assujettie à de nouveaux règlements simplement parce qu'elle appartient à une banque étrangère, cela n'aura pour effet que d'accroître nos coûts. Nous devrons alors transmettre ces coûts à nos clients canadiens.

Congress Financial n'emprunte qu'auprès de gros investisseurs sur le marché des billets de trésorerie ou par l'intermédiaire de banques. Elle ne fait pas affaire avec des particuliers et ne consent pas de prêts personnels ni de prêts à des familles ou à des ménages. Elle n'accepte de dépôts d'aucune sorte.

Comme le confirme le rapport, il a toujours été difficile pour les banques étrangères de fournir des services au Canada. M. MacKay a lui-même signalé les mauvais résultats obtenus par le Canada dans un sondage sur la concurrence des banques étrangères dans les marchés nationaux—le Canada est arrivé 41e sur 53 pays visés par le sondage.

Le document de consultation du ministère des Finances sur l'entrée des banques étrangères, paru en septembre de l'an dernier, a donné espoir que les choses deviennent plus faciles pour les banques étrangères souhaitant servir les Canadiens. Cependant, parmi les deux options qu'il proposait, l'une aurait imposé des restrictions limitant l'entrée des banques étrangères, et l'autre aurait rendu plus coûteuse l'exploitation de ces banques au Canada.

Nous appuyons sans réserve la recommandation suivante du groupe de travail:

    Il ne faut pas imposer de réglementation par mesure de prudence là où ce n'est pas nécessaire.

Nous ne sommes pas contre un régime qui exige que les banques étrangères s'inscrivent et observent la législation sur la protection du consommateur, pourvu que cette législation s'applique aussi aux autres sociétés de services financiers semblables. Cependant, si les intérêts des déposants et des titulaires de police ne sont pas en jeu et si le système de paiement n'est pas menacé, alors aucun règlement n'est nécessaire. En imposer ne servirait qu'à limiter la concurrence et les choix pour les consommateurs canadiens.

Congress Financial n'est en faveur d'aucune des options énoncées dans le document de consultation du ministère des Finances. La première lui permettrait d'être exploitée au Canada comme entreprise réglementée ou non réglementée, mais pas les deux. Comme Congress Financial est déjà très active comme entité non réglementée, First Union ne pourrait se lancer dans le secteur bancaire, même si cela devait permettre d'accroître la concurrence entre les banques et le choix pour les consommateurs.

Quant à la deuxième option, qui consiste à exiger des banques étrangères qu'elles établissent des filiales qui seront peu réglementées, elle n'est pas non plus très logique. Pourquoi réglementer Congress Financial, ne serait-ce que dans une faible mesure, puisqu'elle ne présente aucun risque pour les déposants, les titulaires de police ou le système financier?

Des règlements ne serviraient qu'à faire augmenter nos coûts, et nous devrions ensuite les transmettre à nos clients ou bien réduire le montant que nous pourrions prêter aux petites et moyennes entreprises.

Je terminerai en incitant vivement le comité à recommander que l'on donne rapidement suite à la conclusion du groupe de travail, à savoir que lorsqu'il n'existe aucun risque, il ne faut réglementer les banques étrangères exploitées au Canada que dans une faible mesure ou ne pas les réglementer du tout. On peut assurer l'équité concurrentielle en permettant aux banques canadiennes de se réorganiser en sociétés de portefeuille. Les Canadiens n'en retireront que des avantages, c'est-à-dire une conférence accrue et l'accès aux nouveaux services offerts par les banques étrangères.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Ehgoetz, de cet exposé.

Nous allons maintenant entendre le représentant de Norwest Financial/Trans Canada Credit. M. Richard Owens.

Je vous souhaite la bienvenue.

M. Richard Owens (Norwest Financial/Trans Canada Credit): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je m'appelle Richard Owens. Je suis associé d'un cabinet d'avocats de Toronto, le cabinet Smith, Lyons, et je représente aujourd'hui la Norwest Financial Corporation. Comme M. Willey le disait, je suis aussi conseiller juridique de Capital One. Steve Wagner m'accompagne aujourd'hui; il est le conseiller juridique principal de Norwest Financial. Norwest Financial est la société mère de Trans Canada Credit Corporation. Je suis aussi accompagné de M. Nick Scarfo, avocat général de Trans Canada Credit.

• 1550

Trans Canada Credit offre des services financiers aux consommateurs dans tout le Canada. Elle émet des cartes MasterCard, consent des prêts aux petites entreprises ainsi qu'aux consommateurs et offre des services de carte de crédit sur le marché des cartes de crédit commerciales. Depuis son arrivée au Canada, elle a vu son effectif passer de 700 employés à 1 400 employés. Elle a pris le relais des activités pancanadiennes de la Central Capital Corporation, qui a fait faillite et a été rachetée par Norwest.

En quelques mots, Norwest désire appuyer les principes établis par le groupe de travail: aucune réglementation prudentielle ne devrait être imposée sauf quand elle est nécessaire, lorsque des considérations de prudence sont en jeu, que la concurrence des banques étrangères est importante, comme l'a prouvé la présence de Norwest, de Wells Fargo, de Capital One et d'autres dans cette pièce et sur le marché canadien l'ont prouvé. Cette concurrence est de plus en plus efficace sur le marché canadien et elle continue en outre de profiter à ce marché.

Les remarques présentées aujourd'hui par Norwest porteront sur l'entrée des banques étrangères sur le marché grâce à l'acquisition de fournisseurs de services financiers non réglementés, en vertu de décrets prononcés conformément à l'article 521 de la Loi sur les banques.

Trans Canada est une entité de ce type. Norwest a obtenu un décret en vertu de l'article 521 de la Loi sur les banques afin d'acquérir Trans Canada.

Ces entreprises ne sont pas des banques inscrites à l'annexe II; elles n'acceptent pas de dépôts. Elles ne risquent que le capital des actionnaires au Canada, comme c'est le cas pour Newcourt Credit et d'autres fournisseurs de services financiers canadiens non réglementés. Elles ne risquent les fonds d'aucun déposant, titulaire de police, bénéficiaire d'une fiducie ni autre personne du genre, parce qu'elles n'en ont pas.

Nous sommes une filiale d'une succursale de banque étrangère. Le rapport précise:

    Lorsqu'une filiale d'une succursale de banque étrangère ne se livre à aucune activité donnant lieu à des préoccupations de prudence c'est-à-dire l'acceptation de dépôts de détail, nous [le groupe de travail] croyons que la réglementation la plus souple possible devrait s'appliquer.

Le groupe de travail fait ici allusion aux activités comme celles de Trans Canada et de ses filiales. Nous croyons qu'il convient d'accepter ce raisonnement et d'écarter les derniers obstacles à l'entrée des banques étrangères dont les activités n'englobent pas l'acceptation de dépôts.

D'après les recommandations contenues dans le rapport, on devrait accepter que les banques étrangères désireuses de mener des activités de crédit à la consommation ou d'émission de cartes de crédit et d'autres activités de ce genre ne donnant lieu à aucune préoccupation de prudence ne se voient pas interdire l'accès au marché et qu'elles ne soient pas soumises à la réglementation prudentielle au Canada. La réglementation du comportement du marché est assurée de façon responsable par les gouvernements provinciaux et dépasse dans tous les cas la compétence du gouvernement fédéral.

Le rapport fait allusion à l'utilisation de la réglementation prudentielle, par le passé, pour «uniformiser les règles du jeu» lorsqu'on croyait que les banques canadiennes ne pouvaient exercer les mêmes activités de la même façon et il suggère qu'il n'est pas dans l'intérêt des consommateurs canadiens ni du roulement efficace de l'économie canadienne d'imposer une réglementation prudentielle aux concurrents étrangers uniquement dans cette intention. Nous sommes parfaitement d'accord.

La réglementation prudentielle est, dans le meilleur des cas, mal adaptée au contrôle de la concurrence sur le marché. De telles tentatives d'uniformiser les règles du jeu ont été minées par une mauvaise compréhension de la dynamique concurrentielle des marchés des services financiers.

Les responsables de la réglementation des banques ne devraient pas intervenir pour élever des obstacles au commerce. En outre, à mon avis, la perception de l'avantage concurrentiel des banques étrangères est dans une large mesure illusoire. Je ne pense pas qu'on l'ait adéquatement examiné, et lorsqu'on l'aura fait, nous découvrirons que les banques canadiennes jouissent de leurs propres avantages sur le marché. Comme l'a souligné le groupe de travail, de tels efforts pour nuire à la concurrence sont, au bout du compte, répercutés sur le consommateur, qui a moins de choix en ce qui concerne les services financiers et doit assumer des coûts plus élevés pour ces services.

Comme le signale le groupe de travail, par ailleurs, le régime de société de portefeuille qu'elle recommande, et qui nous semble une idée opportune, arriverait dans tous les cas à calmer les préoccupations exprimées par les banques canadiennes au sujet des filiales non réglementées des banques étrangères qui pourraient jouir d'un avantage concurrentiel injuste.

Une fois ces principes posés, nous avons quelques suggestions précises à présenter.

Les demandes d'entrée des banques étrangères désireuses de posséder des entreprises non réglementées comme Trans Canada sont régies par l'article 521 de la Loi sur les banques. À l'heure actuelle, ces demandes sont approuvées par le gouverneur en conseil. Un niveau de surveillance si élevé nous semble toutefois inutile. La responsabilité de ces approbations, en l'absence de toute considération liée à la prudence pour ce qui est du fonctionnement d'une entreprise, devrait plutôt incomber au surintendant des institutions financières. Si l'on considère qu'une surveillance politique est nécessaire, ce qui ne nous paraît pas être le cas, la responsabilité pourrait en revenir au ministre des Finances, mais non pas à l'ensemble du Cabinet. De la sorte, on pourra abréger le processus de demande et les délais nécessaires à l'entrée d'une nouvelle entreprise sur le marché.

• 1555

Il importe aussi de reconnaître que le débat qui entoure l'entrée des banques étrangères ne concerne pas seulement les opérations bancaires au Canada, mais aussi les entités non réglementées, et lorsque nous parlons de succursales, nous parlons aussi d'entités comme Trans Canada et Capital One et bien d'autres, qui ne prétendent pas accepter de dépôts, ne soulèvent aucune préoccupation de cette nature liée à la prudence et, par conséquent, ne devraient être assujetties à aucune contrainte quant à la façon dont elles mènent leurs activités au Canada.

Les politiques limitent actuellement la capacité, en vertu de la Loi sur les banques, d'établir une entreprise qui n'est pas constituée en société au Canada. Nous ne croyons pas que cela soit nécessaire et nous proposons que les entreprises aient plus de liberté si elles souhaitent mener des activités à titre de partenaire ou de propriétaire ou de succursale au Canada plutôt qu'uniquement par l'entremise d'une société constituée. L'élimination de cet obstacle pourrait permettre une réduction des coûts, créer certains avantages fiscaux et réduire les coûts pour les consommateurs.

En vertu de la Loi sur les banques, il est actuellement possible au ministre des Finances d'établir une distinction entre ce que l'on appelle les quasi-banques et les banques réglementées, en vertu d'un décret qui refuse une certaine liberté de fonctionnement aux entreprises non réglementées au Canada, elles-mêmes des entités considérées comme plus réglementées dans les compétences étrangères. Par conséquent, les institutions mères sont classées soit comme quasi-banques soit comme banques véritablement réglementées. Quand elles s'inscrivent dans la dernière catégorie, même si elles se livrent au même type d'activités au Canada que les quasi-banques, ces entreprises sont traitées différemment. Elles ont moins de liberté en vertu de la réglementation.

La distinction n'est pas entièrement basée sur les principes puisque nous avons une entité comme la General Electric Capital Corporation, un fournisseur de services financiers plus important que la Banque Royale, qui est considérée comme une quasi-banque alors que des fournisseurs de services financiers à but limité, notamment Capital One, même s'ils sont en expansion, sont traités comme des entreprises réglementées. Cette distinction, en toute honnêteté, n'est d'aucune utilité. Ces entités ne présentent pas de risque distinct au Canada et elles devraient être traitées de la même façon et avoir le droit de livrer concurrence sur un pied d'égalité.

Finalement, il était coutumier pour les banques étrangères de faire à la Couronne des promesses qui limitent leurs activités au Canada. De telles promesses ou accords contractuels de ne prendre aucune expansion ou de ne pas entrer dans de nouveaux secteurs d'activité sans consentement préalable ne nous semble pas nécessaire lorsqu'il n'existe aucune préoccupation liée à la prudence. La loi restreint déjà l'acceptation des dépôts ou l'offre de services de fiducie et autres activités connexes sans consentement précis ou forme précise de constitution en société. Ces engagements à l'heure actuelle ne sont d'aucune utilité, et les entités, une fois installées au Canada, devraient jouir d'une liberté complète pour ce qui est de concurrencer les autres entreprises dans toute la gamme des activités non réglementées ou ne comportant aucune considération de prudence.

Par ailleurs, ces promesses ont justifié l'imposition d'un plafond de 200 millions de dollars à l'actif, auquel M. Willey a fait allusion. Il s'agissait d'une mesure temporaire pour veiller à ce que les nouveaux arrivants ne prennent pas d'expansion au-delà d'un certain seuil pendant que le débat stratégique concernant les banques étrangères se poursuivait au Canada. Ce plafond n'a plus aucune utilité et devrait être éliminé.

Pour résumer, nous appuyons sans réserve les recommandations du groupe de travail MacKay au sujet du rôle de la réglementation prudentielle, qui ne devrait intervenir qu'en cas de préoccupations réelles liées à la prudence, et non pas comme moyen de réduire la concurrence.

Nous considérons que les banques étrangères devraient jouir d'une liberté considérable pour mener des activités au Canada et qu'elles devraient avoir plus de liberté quant à la structure d'entreprise qu'elles utilisent au Canada.

Nous nous permettons de suggérer que de telles demandes ou d'autres demandes en vue d'entrer au Canada devraient être dirigées non pas vers le Cabinet dans son ensemble mais plutôt vers le surintendant des institutions financières.

Nous proposons l'élimination de la distinction actuellement établie à l'alinéa 512(1.05) de la Loi sur les banques, entre quasi-banques et banques réglementées.

Nous proposons l'élimination de l'obligation de faire des promesses et l'abolition du plafond de 200 millions de dollars d'actif.

• 1600

Finalement, j'aimerais faire une dernière observation. Vous nous avez demandé quel devrait être le rôle des banques étrangères au Canada. Je crois que la croissance de la Trans Canada Credit Corporation sur le marché canadien a prouvé la valeur des compétences de Norwest au Canada, tout comme nous avons vu la concurrence sur le marché des cartes de crédit stimulée par la présence de Capital One, et j'ai constaté la valeur des institutions étrangères pour ce qui est de créer des liquidités sur le marché des prêts au Canada à une époque où ce marché éprouvait des difficultés. À mon avis, il faut en conclure que le monde est vaste et qu'il y a bien des compétences et des services financiers à l'extérieur de nos frontières, et que nous ne devrions adopter aucune règle susceptible de réduire notre capacité de profiter de ce qui peut rendre notre marché plus dynamique.

Au nom de Norwest, je vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de vous présenter ces remarques aujourd'hui.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Owens.

Nous allons maintenant accueillir le représentant de la Wells Fargo Bank, M. Gadi Meir. Soyez le bienvenu.

M. Gadi Meir (vice-président adjoint, Wells Fargo Bank): Merci. Je m'appelle Gadi Meir et je représente la Wells Fargo Bank. Je suis venu de San Francisco aujourd'hui.

Je pense que la situation de la Wells Fargo Bank intéressera le comité, sans doute pour deux raisons principales. Premièrement, nous sommes uniques car nous consentons des prêts aux petites entreprises. Cet aspect suscite des préoccupations particulières dans le rapport MacKay et intéresse l'économie canadienne et la petite entreprise. Deuxièmement, je pense que nous utilisons une structure originale pour pénétrer sur le marché canadien. Nous consentons des prêts transfrontaliers depuis les États-Unis et nous n'avons aucune présence concrète au Canada.

Je vais vous fournir quelques détails au sujet de Wells Fargo et de son programme au Canada, puis j'aborderai certaines des questions que vous avez posées quant à la façon dont nous sommes venus au Canada, au régime de réglementation, aux contraintes auxquelles nous sommes confrontés actuellement et à ce qu'en dit le groupe de travail; je vous indiquerai aussi ce que nous en pensons.

Vous pouvez suivre. Je vous ai fait distribuer un résumé de mon exposé et je vais commencer à la page trois, pour sauver du temps. Vous devriez aussi avoir un sommaire d'une page, qui a été traduit en français, contenant nos recommandations.

Pour commencer, parlons d'abord de Wells Fargo. Notre entreprise est établie depuis longtemps, comme de nombreuses banques canadiennes. Nos activités en Californie remontent aux années 1850. Pour vous donner une idée de cette longue histoire et simplement pour alléger un peu le ton de l'exposé, j'ai consulté les archives, qui sont actuellement diffusées sur notre site Web, pour examiner ce qui s'est passé il y a 150 ans dans l'histoire de Wells Fargo. À cette époque, nous stockions l'or et nous transportions le courrier, etc.—bien d'autres choses, à ce qu'il semble. Le 24 septembre 1862, une lettre du Département de la guerre a été envoyée à un agent à San Francisco en vue de l'arrestation d'une personne dont les propos semblaient compromettre la sécurité de l'État.

Wells Fargo a donc une longue histoire et a offert une gamme de produits et services divers, dont quelques-uns étaient plutôt étranges.

Pour en revenir à aujourd'hui, nous sommes le premier ou le deuxième prêteur aux petites entreprises en Amérique, selon la façon dont les chiffres sont compilés après un certain nombre de fusions aux États-Unis. Nous avons dix milliards de dollars d'engagements en prêts aux petites entreprises. La majorité de ces prêts sont inférieurs à 50 000 $. C'est un niveau en deçà duquel de nombreuses autres banques considèrent qu'il est peu rentable de prêter. Quatre-vingt pour cent de nos clients affichent des ventes de moins d'un million de dollars, alors nous visons vraiment la très petite entreprise.

Nous avons connu une croissance extraordinaire. Notre réussite s'appuie sur un vaste investissement dans le domaine de la technologie d'évaluation par score, une importante mise de fonds au titre des essais et des erreurs, un marketing direct en plusieurs étapes pour chercher à déterminer ce qui donne des résultats et à améliorer nos modèles d'évaluation par score, ainsi qu'un réaménagement complet de notre processus de vente pour éliminer la procédure de prêt en personne et procéder à distance.

Nous sommes très engagés dans notre entreprise. C'est un secteur d'activité très important pour nous. Aux États-Unis, nous avons promis publiquement de prêter 35 milliards de dollars aux petites entreprises au cours des dix prochaines années. Cette promesse englobe un engagement de dix milliards de dollars au titre des prêts aux entreprises possédées par des femmes, ce que nous avons fait en partenariat avec la National Foundation of Women Business Owners.

Voilà qui peut vous éclairer un peu au sujet de Wells Fargo. Parlons maintenant de notre programme au Canada.

• 1605

Étant donné notre succès aux États-Unis, nous avons lancé ce modèle éprouvé sur le marché canadien. Il s'agit d'une ligne de crédit non garanti d'un maximum de 75 000 $. Il est important de noter que ce crédit est non garanti car il compte énormément pour toutes les entreprises de service et les entreprises à base de connaissance. Le rapport MacKay a beaucoup insisté là-dessus.

Nos sollicitations se font entièrement par la poste, par télémarketing, par photocopieur et par téléphone. Nous n'avons pas de filiale ici. Nous ne sommes pas physiquement présents au Canada. Nous prêtons à toute la gamme des industries et le produit lui-même, est autonome. Il n'y a pas de ventes liées. Les dépôts ou autres produits ne nous intéressent pas. Notre produit est autonome.

Un des avantages qu'il offre est qu'il s'agit d'un processus extrêmement simplifié, un formulaire de demande d'une demi-page que le propriétaire d'une petite entreprise peut remplir en quelques minutes. Nul besoin de mettre son plus beau costume et la cravate, pour descendre en ville rencontrer le directeur de la succursale en amenant des montagnes d'états financiers, de déclarations de revenu, de certificats de constitution en société, etc. Il n'y a aucune restriction en ce qui concerne les fonds, et nos opérations sont presque totalement menées depuis les États-Unis.

L'avantage pour le Canada est, je crois, assez évident pour le comité. C'est la possibilité d'un choix. Cela représente un produit de plus pour les petites entreprises canadiennes. C'est un produit qui a fait ses preuves aux États-Unis et nous le lançons maintenant au Canada. C'est une source de fonds de plus. Beaucoup de petites entreprises n'ont de rapports qu'avec une seule banque et elles ont des difficultés à obtenir un prêt d'autres établissements bancaires. Nous vous offrons donc une autre option. Bien sûr, on peut aussi invoquer l'argument de la création d'emplois et de l'aide aux petites entreprises afin de leur permettre de devenir des entreprises plus importantes.

Passons maintenant à la réglementation. Lorsque nous nous préparions à entrer sur le marché canadien, nous ne voulions manifestement pas enfreindre la Loi sur les banques et nous tenions aussi à maintenir un programme centralisé, à gérer entièrement notre programme des États-Unis, à maintenir des opérations centralisées de la même manière que nous le faisons à l'égard des autres États américains. La plupart de nos opérations sont basées en Californie, mais nous prêtons de l'argent aux 50 États américains. Dans une quarantaine d'entre eux environ, nous ne sommes pas physiquement présents.

Nous pensions ne pas être assujettis à la Loi sur les banques, mais à cause de la réputation de Wells Fargo, nous avons pris contact avec le BSIF afin d'être sûrs que nous interprétions la Loi sur les banques de la même manière que lui. Comme la loi ne définissait pas les opérations bancaires au Canada de manière suffisamment précise, nous avons accepté certaines restrictions sur lesquelles le BSIF insistait. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici. La loi manque de clarté en ce qui concerne les entrées sur le marché telles que la nôtre.

Permettez-moi de vous décrire certaines des restrictions que nous avons acceptées et que nous souhaiterions vivement voir réduites.

Nous sommes obligés d'envoyer par la poste toutes nos sollicitations et toutes nos déclarations depuis les États-Unis, au lieu de pouvoir les expédier directement d'une poste canadienne, à Winnipeg, par exemple, possibilité dont nous avons discuté. Nos agents de service à la clientèle sont tenus d'être domiciliés aux États-Unis. Ce sont des personnes dont le travail consiste simplement à répondre aux demandes de renseignements au sujet des soldes de compte et à dire si la transaction a été effectuée, ou autres questions du même genre. Aux États-Unis, il est difficile de trouver des représentants du service à la clientèle qui savent où se trouvent l'Île-du-Prince-Édouard ou ce que lÂÎle-du-Prince-Édouard représente ou qui sont capables de parler un français acceptable pour les clients québécois.

La seconde restriction est que nos clients canadiens sont obligés de nous envoyer leurs paiements aux États-Unis. Il nous est interdit d'utiliser un système de recouvrement accéléré au Canada. Autrement dit, nous remettons des enveloppes aux clients qui les utilisent pour envoyer leurs chèques de paiement à Seattle. Dans cette ville, nous avons un messager qui ramène le tout à Vancouver, où notre correspondant bancaire traite les chèques.

La troisième restriction tient au fait que nos clients ne sont pas autorisés à utiliser les guichets bancaires automatiques au Canada pour accéder à leur ligne de crédit. C'est un système d'accès qui existe aux États-Unis et qui est fort appréciée par les clients. À mon avis, les conséquences pour les clients sont assez évidentes. Ils reçoivent leur courrier et leurs relevés avec un certain retard. L'accès reste limité: ils ne peuvent pas utiliser le GAB. Il y a des inconvénients. Les clients sont obligés de poster au Canada leur courrier destiné aux États-Unis, ils doivent le faire plusieurs jours à l'avance à cause du temps supplémentaire que prend le courrier pour arriver aux États-Unis et en revenir. Tout cela augmente les coûts.

• 1610

Permettez-moi de vous expliquer ce que sont les répercussions de cette situation sur Wells Fargo. C'est un portefeuille qu'il a été très difficile d'évaluer du point de vue du crédit car les paiements n'arrivent pas au moment où ils devraient, et beaucoup d'entre eux sont en retard. Des lettres venant de la Saskatchewan prennent parfois 17 jours pour parvenir à Vancouver via Seattle.

Le groupe de travail MacKay a examiné la question et a conclu que ces exigences ne sont pas défendables du point de vue commercial ou prudentiel. Nous sommes totalement d'accord.

Passons maintenant aux recommandations du groupe de travail pour que je vous donne mon avis sur elles.

Le groupe de travail a étudié les services financiers transfrontaliers et dans les cas où l'organisme financier n'était pas physiquement présent, il a recommandé le recours à un processus d'accréditation. Wells Fargo est parfaitement d'accord avec cette recommandation. Nous demandons donc instamment qu'elle soit mise en oeuvre le plus rapidement possible.

Nous voudrions cependant apporter quelques éclaircissements à ce sujet. La recommandation du groupe de travail avait un caractère très général et nous voudrions être bien sûrs que le comité comprend certains des détails de la question.

Nous voulons nous assurer que Wells Fargo pourra être accrédité, indépendamment de ce que les autres filiales et les autres divisions de la banque peuvent vouloir faire. Nous fusionnons actuellement avec Norwest qui est assujetti aux dispositions. Il y a une procédure en vertu de l'article 521 au Canada. Cela n'affecte pas nos opérations et nous espérons donc que nous pourrons nous prévaloir de ce processus d'accréditation, que nous soyons assujettis ou non à l'annexe II ou à l'article 521 au Canada.

Deuxièmement, nous voudrions être certains que ce processus d'accréditation sera simple et rapide. Une fois que nous aurons pris les engagements décrits dans le rapport MacKay, nous espérons que cela se réglera sans difficulté.

Le rapport MacKay évoque un processus de règlement des différends, ce à quoi nous n'avons aucune objection. Nous tenons simplement à être sûrs—ce qui n'est pas précisé ici—que les contrats et les ententes avec le client demeureront sous le régime de la loi, dans notre cas sous celui de la loi californienne, à laquelle nous nous conformons pour nos prêts au Canada.

Nous y tenons parce que c'est la loi que nous connaissons le mieux et c'est sous son régime que notre programme fonctionne dans l'ensemble des États-Unis, ainsi d'ailleurs qu'au Canada pour le moment, où il a très bien réussi. En tout cas, nous sommes tout à fait partisans d'un processus de règlement des différends auquel les Canadiens pourraient avoir recours au Canada.

Il conviendrait également que la définition de présence physique soit un peu plus précise. Pour le moment, tous les envois par la poste effectués au Canada sont interdits, précisément parce qu'il n'y a pas de définition très claire. Nous voudrions donc que la présence physique soit clairement définie et nous voudrions qu'elle signifie une installation permanente au Canada, appartenant au prêteur étranger et exploitée par lui. Nous serions ainsi certains de ne pas enfreindre le règlement.

Le rapport MacKay a négligé la question des GAB et nous voudrions être certains que nos clients pourront utiliser ces GAB au Canada afin d'avoir accès à leurs lignes de crédit.

Nous fonctionnons de la manière suivante: lorsque nous accordons une ligne de crédit à une petite entreprise, nous lui envoyons des chèques qu'elle peut utiliser, mais nous lui envoyons également une carte de crédit portant le logo de MasterCard, qui peut être utilisée à Canadian Tire ou ailleurs mais qui peut l'être également à un GAB. Or, pour le moment, il nous est interdit de procéder ainsi à cause d'un des paragraphes de l'article 508 de la Loi sur les banques qui interdit l'utilisation des GAB.

Nous tenons également à préciser que nous appuyons les recommandations du groupe de travail en faveur de la suppression de la retenue fiscale pour couvrir l'intérêt sur les emprunts sans lien de dépendance. Vous trouverez plus de détails à ce sujet dans le rapport du groupe de travail. Je ne voudrais pas m'attarder là-dessus, mais n'hésitez pas à me poser des questions, si vous le désirez.

En conclusion, nous estimons avoir beaucoup à offrir au marché canadien. Notre programme est un succès aux États-Unis et si nous l'avons introduit ici, c'est qu'il répond à un besoin très important des petites entreprises au Canada. Nous apportons notre technologie de pointe, notre système d'administration qui a fait ses preuves, et des prêts à un prix compétitif. Nous ne reculons pas non plus devant les risques, et c'est un des points sur lesquels nous nous distinguons des banques canadiennes.

• 1615

Notre succès au Canada dépendra en premier lieu de la réceptivité des entreprises canadiennes, et jusqu'à présent les réactions à notre publicité distribuée par la poste ont montré que notre offre est très bien accueillie par les petites entreprises canadiennes. En deuxième lieu, naturellement, tout dépendra du cadre réglementaire. Nous pensons que si les réformes proposées dans le rapport MacKay sont adoptées, nous pourrons accroître l'efficacité et la compétitivité de notre produit, et cela ne pourra qu'aider les petites entreprises canadiennes.

Ce que nous souhaiterions donc c'est un système réglementaire plus ouvert, plus transparent et plus souple, un système qui élimine certains des obstacles inutiles à l'innovation et qui encourage les banques étrangères à fournir ce genre de services au Canada.

Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions. Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Meir.

Nous allons maintenant entendre M. Arkadi Kuhlman, qui représente ING Direct. Soyez le bienvenu.

M. Arkadi Kuhlman (président-directeur général, ING Direct): Merci, monsieur le président, et merci à vous aussi, membres du comité de permettre à ING Direct de vous faire part aujourd'hui de ses réactions au récent rapport MacKay et au débat sur la restructuration de l'industrie des services financiers.

À notre avis, le rapport MacKay est une alerte pour le Canada. Nous avons aujourd'hui l'occasion de voir avec vous si le Canada devrait continuer à somnoler ou s'il devrait entrer dans la mêlée.

Nous souhaiterions prendre un instant pour vous montrer ce qui nous distingue des autres participants que vous avez entendus jusqu'à présent. ING Direct est une banque de crédit à la consommation et de dépôt qui s'adresse au grand public. Nous ne sommes pas une banque spécialisée et nous n'avons pas qu'une seule gamme de produits. Nous sommes une organisation de caractère populaire qui offre aux consommateurs canadiens des produits bancaires de haute qualité et d'usage facile, des dépôts d'épargne, des prêts, des prêts hypothécaires et des REER. En ce sens, nous sommes bien plus représentatifs de la petite banque de village que du grand établissement de Bay Street. Nous avons vraiment été créés «par des Canadiens, pour les Canadiens», et nous utilisons pour cela des capitaux étrangers. Je crois que cela a toujours été une illustre tradition au Canada.

En dépit de toutes ses difficultés de démarrage, ING Direct a non seulement réussi à survivre et à prospérer, mais au cours de sa première année d'activité elle est parvenue à se faire 100 000 clients. Les consommateurs ont déposé un milliard de dollars chez nous et nous avons payé aux Canadiens plus de 35 millions de dollars d'intérêt additionnel, montant qui serait autrement allé dans la poche des actionnaires des grosses banques. Il est permis d'en conclure que les produits que nous offrons intéressent les Canadiens.

La concurrence est importante pour le Canada, et les obstacles qui continuent à exister sont évidents, à en juger d'après les recommandations du groupe de travail—124 au total, dont beaucoup sont très intéressantes en théorie mais dont peu parviendraient, si elles étaient mises en oeuvre, à faire disparaître le déséquilibre qui existe actuellement. C'est à la structure de base du système bancaire qu'il faudrait s'attaquer, et en ce sens, le rapport MacKay n'est pas une référence.

Beaucoup de travail reste à faire sur certains aspects du système de base qui inclut l'assurance de l'ADC, les contraintes réglementaires, l'impôt sur le capital et le système de paiement lui-même. Si aucun changement n'est apporté dans ces quatre domaines clés, la concurrence demeurera limitée. Les consommateurs continueront à faire les frais de l'inefficacité de l'ensemble du système.

Permettez-moi de dire, pour commencer, que les Canadiens sont mieux servis par la concurrence, par l'adoption de normes mondiales au Canada et par un plus large esprit d'ouverture. C'est un sentiment qui ressort très clairement des conclusions du groupe de travail. Celui-ci considère en effet que la concurrence offre plus de choix et de meilleurs prix aux consommateurs. Cela devrait se traduire par des frais de service moindres et par des intérêts plus élevés sur l'épargne. Nous estimons qu'au Canada, la concurrence pourrait fournir les mêmes débouchés que d'autres pays développés où la réglementation de la technologie et l'efficacité des règlements prévalent indiscutablement.

La concurrence crée également des emplois. ING Direct en a créé plus de 175 au Canada. Nous voudrions en créer d'autres. En fait, nous voudrions créer ici une base technologique et offrir nos produits aux États-Unis. Pour des raisons évidentes, dont je vais vous parler dans un instant, vous allez voir que c'est presque une impossibilité pour nous.

La concurrence permet également aux Canadiens de jouer un rôle dans l'économie mondiale, et il est certain que le GATT et l'Organisation mondiale du commerce ont demandé à ce pays d'ouvrir ses frontières. Il est regrettable que jusqu'à présent, les banques canadiennes aient restreint l'accès au Canada. Maintenant que certaines d'entre elles veulent fusionner, et que nous voulons faire ceci dans le cadre d'une stratégie de croissance et pour accroître l'efficacité au nom de la concurrence, nous entendons beaucoup de gens dire qu'ils sont d'accord avec les recommandations du rapport du groupe de travail, avec l'Organisation mondiale du commerce et avec le GATT. Mais ce n'est certainement pas la première fois que nous l'entendons dire.

• 1620

Pour qu'il y ait concurrence, il faut que les règles du jeu soient vraiment les mêmes pour tous. ING Direct n'a pas eu la tâche facile, et notre société constate avec un certain soulagement que le groupe de travail MacKay reconnaît combien le Canada a eu une attitude monopolistique à l'égard des démarrages d'entreprise.

Avec 124, «que se passerait-il si...», on en est au point du compromis politique—que va-t-on dire, que va-t-on faire, que va-t-il se passer, qu'allons-nous faire pour appliquer ces recommandations, quelles mesures allons-nous prendre pour que l'ensemble du système fonctionne vraiment bien?

Le rapport contient très peu de recommandations qui remettent vraiment en cause la structure du secteur bancaire. Sans changements structurels et sans plan de mise en oeuvre bien conçu, je ne suis pas du tout sûr que les consommateurs bénéficieront en fin de compte de cette soi-disant efficacité et des avantages qui en découleraient.

Venons-en maintenant à deux ou trois exemples précis. La SADC, qui est essentiellement une société d'assurances demande le paiement de primes d'un certain montant. Nous en arrivons maintenant à une formule de pondération des primes en fonction du risque. C'est une dépense qui arrive à représenter 10 p. 100 de nos recettes. Il est certain que lorsqu'il s'agit d'un fournisseur direct de produits de consommation escomptés, 10 p. 100 des recettes pour être assuré crée un obstacle à l'entrée sur le marché, c'est indiscutable. Il faut donc que nous trouvions un moyen d'appeler les choses par leur nom. Si c'est un obstacle à l'entrée, il faut le dire, et il faut en avertir les banques étrangères d'entrée de jeu. Manifestement, il serait bon que la SADC joue un rôle plus actif et plus important dans l'industrie.

En ce qui concerne le fardeau du règlement, nous demeurons prisonniers du problème de la formule passe-partout. Que vous soyez une petite banque étrangère, une jeune entreprise ou une très grosse entreprise nationale, vous êtes soumis au même règlement. Cela coûte non seulement beaucoup d'argent, mais complique le choix des entreprises dont on devrait rechercher la clientèle.

L'impôt sur le capital. Là encore, nous sommes obligés d'avoir plus de capital que ne sont tenues d'en avoir les grosses banques nationales. ING est un groupe coté AA sur le marché international; les grandes banques canadiennes aussi. Pourtant, au Canada, nous sommes obligés de payer un impôt de 25 p. 100 supérieur. Lorsque vous êtes une banque nationale, d'escompte, offrant des services directs au grand public qui tente d'offrir un produit de très haute qualité à votre client, payer 25 p. 100 d'impôt est bien lourd.

Près de 50 p. 100 de nos coûts mensuels de service à la clientèle sont constitués par la taxe sur le capital, l'assurance de l'ASDC, et les frais de compensation. Le groupe de travail MacKay reconnaît l'existence de cette situation. Il va falloir que nous fassions des progrès dans ce domaine si nous voulons fournir des produits de meilleure qualité aux consommateurs.

L'Association canadienne de la paie. Si nous libéralisons le système et permettons à plus de gens, qu'ils soient réglementés ou non, de participer à celui-ci, et si nous nous efforçons d'améliorer et d'assurer la sécurité du système de paiement, nous serons bien obligés de reconnaître que si le nombre des intervenants est plus élevé, il faudra que nous ayons une ACP plus forte et mieux réglementée.

L'Association canadienne de la paie a un problème à régler avec les adhérents directs et les sous-adhérents au système de compensation. Il n'est pas possible que les banques étrangères ou les petits intervenants qui font appel aux services de compensation de ce système soient pénalisés par les prix fixés, le règlement des transactions, et le moment auquel ces transactions sont effectuées.

Il faut savoir qu'il y a une véritable guérilla au niveau du consommateur car ces derniers ont énormément de difficultés à transférer leur argent entre les établissements de leur choix. Je ne vois pas comment nous pourrions continuer à autoriser les banques à se regrouper sans régler la situation anticoncurrentielle qui existe actuellement sur le marché.

À moins que le gouvernement, par l'intermédiaire du ministère des Finances, ne décide de concentrer ses efforts sur les questions fondamentales, ce sont les banques qui prendront le contrôle de l'élaboration du système. Cela soulève une vieille question à laquelle toutes les autres industries ont déjà répondu, à savoir, ce qui est bon pour les banques est-ils bon pour le pays? Les banques devraient-elles être autorisées à fusionner sans aucun changement de la structure de base de l'industrie? Si nous apportons ces changements, le statu quo demeurera, et nous considérons qu'il devrait en être autrement.

Certes, le consommateur ne connaît en général pas l'inégalité des règles du jeu ni l'effet de ces questions sur les services bancaires eux-mêmes, bien que les coûts soient en fait répercutés sur lui sous forme de droits, de frais de gestion, de paiement de faibles intérêts sur les dépôts, ou d'intérêts élevés sur les prêts. Il n'est pas surprenant que la semaine dernière, les consommateurs aient encore fait les frais de l'incertitude de la situation. Notre comparution aujourd'hui devant le comité ne saurait venir en temps plus opportun, alors même que nous venons d'apprendre que la Banque du Canada a relevé ses taux d'intérêt de un pour cent et que toutes les banques ont augmenté leurs taux d'intérêt sur les prêts. Les dépôts ont fluctué, d'abord à la hausse, puis de nouveau à la baisse. Il est permis de se demander si, encore une fois, ce sont les consommateurs canadiens qui absorbent les pertes commerciales et autres des grandes banques sur le plan national et international. Pour la plupart de ceux qui, comme nous, appartiennent à l'industrie, c'est l'évidence même.

• 1625

On annonce maintenant aux consommateurs qu'ils peuvent s'attendre à des fermetures de filiale à la suite des fusions. Est-ce que, par hasard, ce serait les consommateurs qui auraient payé le maintien de ces filiales? En tout cas, ils ont toujours payé les changements technologiques; autrement dit, ont-ils payé deux fois—une fois pour que les filiales demeurent ouvertes, et une seconde pour couvrir le coût de la nouvelle infrastructure et des nouvelles avances technologiques?

Dans presque tous les secteurs industriels au Canada, la restructuration est payée par les actionnaires. Le coût comptable de cette restructuration se traduit par une augmentation de votre coefficient multiplicateur et des actions sur le marché pour lequel cela signifie que la restructuration est une bonne chose et que ces coûts seront compensés par des profits futurs. Comment se fait-il que dans le secteur bancaire, ce sont les clients qui sont obligés d'assumer totalement les coûts de restructuration? J'estime qu'il y a là un déséquilibre entre le risque et la nécessité de payer.

Enfin et surtout, il reste encore deux ou trois choses à régler. Il est intéressant de noter que nous parlons de privilège dans ce pays. La responsabilité sociale et la nécessité de sauvegarder le système me préoccupent quelque peu, mais j'ai aussi toujours peur que le client ne se retrouve finalement avec des services bancaires de base qui devraient être automatiques alors que dans la pratique, on en fait presque un privilège.

Vous m'avez déjà entendu parler de la nécessité d'avoir un guichet de dernier recours. Je ne saurais trop insister sur le fait que dans ce débat il faut que nous considérions l'idée de notre banque fonctionnant comme un bureau de poste, afin que tous les Canadiens puisse avoir accès à un dépôt simple, encaisser un chèque de paie, ou demander un prêt hypothécaire simple ou un prêt ordinaire s'ils ne peuvent s'adresser à personne d'autre. Dans ce pays, nous nous sommes refusés à accepter le fait que le privilège a ses limites, mais il faut maintenir les droits des consommateurs, si nous voulons affronter un marché plus vaste, ouvert, et soumis à plus de fluctuations.

En conclusion, commençons par améliorer l'état de la route avant de l'utiliser. C'est une remarque qui n'est pas neuve, mais elle me paraît juste. Je vous remercie de votre attention.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Kuhlman. Nous allons maintenant passer à la séance de questions et de réponses. Commençons par M. Harris.

M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Merci, monsieur le président. Messieurs, je vous remercie de vos excellents exposés. Vous nous avez remis des documents intéressants à lire après cette séance. Ma première question s'adresse à M. Willey, à M. Curtis et à M. Owens, qui représentent des établissements de crédit et qui ne sont donc pas à proprement parler des banquiers.

Je voudrais essayer de déterminer votre attitude à l'égard des prêts aux petites entreprises, en particulier ce qu'on pourrait appeler les microprêts et les prêts de démarrage aux petites entreprises. C'est un domaine dans lequel il existe actuellement, à mon avis, une énorme lacune dans notre pays, pour un prêt d'un maximum de 20 000 $ destiné à assurer le démarrage d'une entreprise à domicile. Pour créer une entreprise personnelle de plomberie ou de rénovation de logements, il est indispensable d'acheter du matériel. Dans la plupart des cas, vous avez les compétences nécessaires pour faire ce travail mais vous n'offrez pas les garanties ou le cautionnement nécessaires pour obtenir un prêt bancaire.

Chacun d'entre vous pourrait-il esquisser en quelques mots la manière dont l'établissement auquel il appartient considère ce type de prêt. N'oubliez surtout pas les prêts de démarrage.

M. David Willey: Permettez-moi de m'écarter momentanément du sujet pour vous expliquer un peu ce qu'est Capital One. Nous avons deux filiales nationales, Capital One Bank et Capital One Federal Savings Bank. La différence entre les deux est, selon sa charte, Capital Bank ne peut faire que des prêts sur carte de crédit aux consommateurs. Capital One FSB, notre caisse d'épargne, a été établie il y a deux ou trois ans pour pouvoir offrir d'autres types de services financiers.

• 1630

Votre question concerne en réalité Capital One FSB. En fait, depuis un ou deux ans, nous avons commencé à faire l'essai du genre de prêt dont vous parlez. Il s'agit de prêts aux petites entreprises. Dans bien des cas, l'effectif de ces entreprises se réduit à deux ou trois personnes—nous sommes donc en plein dans le domaine des microprêts, des prêts de démarrage. Nous faisons cela depuis un peu plus d'un an. Nous utilisons la même approche que pour les prêts sur carte de crédit. La seule différence étant que nous sommes beaucoup moins avancés dans ce domaine. C'est un marché qui nous intéresse beaucoup; en fait, c'est une des raisons pour lesquelles nous sommes toujours prêts à ouvrir des filiales au Canada, bien que ce ne soit pas possible pour le moment.

Il demeure que si la caisse d'épargne était autorisée à ouvrir une filiale au Canada, c'est un des produits que nous pourrions maintenant offrir aux consommateurs. Bien que ce soit un domaine encore relativement nouveau pour vous, il nous intéresse beaucoup.

M. Dick Harris: Merci.

M. Richard Owens: Lorsque vous avez parlé du marché qui existait pour ce genre de prêt, vous avez dit que les petites entreprises qui souhaitent obtenir une aide financière se sont heurtées jusqu'à présent à un obstacle qui les a découragées ou les a empêchées d'agir. Il s'agissait du manque d'avoirs ou de garanties suffisants pour obtenir le prêt. Cela me paraît être une façon restrictive de consentir des prêts, et c'est précisément l'approche qui est utilisée dans ce pays depuis longtemps. Il ne s'agit pas nécessairement de critiquer ce qu'ont fait les banquiers, mais je crois que nous devrions réfléchir un peu plus à la manière d'améliorer l'accès à ce genre de fonds au Canada.

Autant que je puisse à en juger en tant qu'avocat indépendant et compte tenu du nombre de participants dans cette salle, la solution me paraît être liée à l'expertise et à la technologie que les prêteurs étrangers peuvent apporter à notre pays—non point parce qu'ils sont étrangers, mais parce qu'il semble que c'est de chez eux que vient l'initiative. Ce sont des organisations telles que Capital One, Norwest et Wells Fargo qui sont parvenues à une excellente compréhension de leurs marchés et des efforts de commercialisation requis et qui utilisent des méthodes beaucoup plus sophistiquées et fondées sur des données démographiques pour déterminer le niveau de risque que chez nous où l'on se contente de dire que telle garantie mérite tel crédit, ce qui est un peu simpliste.

L'entrée en scène de telles organisations apportera au Canada de nouvelles techniques, de nouvelles capacités, qui stimuleront la concurrence et, en fin de compte, créeront plus de liquidités sur ces marchés.

Steve, je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter.

M. Steve R. Wagner (avocat général adjoint, Norwest Financial): Je voudrais simplement ajouter que Trans Canada au Canada et Norwest Financial aux États-Unis sont surtout des firmes de crédit à la consommation. Nous achetons des contrats de crédit de vente aux petites entreprises, aux fournisseurs de différents biens et services, ce qui est une façon de leur apporter une aide financière. Ces entreprises peuvent commercialiser ainsi leurs biens et services, nous reprenons les contrats de vente à crédit. Cette méthode permet en fait de fournir aux petites entreprises les capitaux dont elles ont besoin. Nous ne sommes cependant pas vraiment spécialisés dans la fourniture de capitaux de démarrage ou de capitaux de risque aux petites entreprises.

Le président: Monsieur Wagner, monsieur Harris ou monsieur Meir.

M. Dick Harris: Je voudrais entendre ce que M. Meir a à dire.

M. Gadi Meir: D'accord. Au début, vous n'aviez pas interrogé Wells Fargo.

Je crois que le produit que nous offrons répond à votre question au sujet des prêts non garantis aux petites entreprises. Nous ne tenons pas compte des avoirs ou des garanties que l'entreprise peut offrir. Nous utilisons des modèles statistiques comparables à ceux dont Richard parlait. Ce sont des modèles sophistiqués qui sont basés sur l'énorme volume de prêts que nous avons déjà consentis et qui nous permettent de comprendre les risques représentés par les sociétés. Nous utilisons la formule du portefeuille. Nous savons très bien qu'il y aura beaucoup d'échecs, mais tant que nous calculons un prix approprié, il nous est possible d'accorder des prêts qui sont profitables.

• 1635

En ce qui concerne les démarrages, il faut que les entreprises fonctionnent déjà depuis deux ans pour que nous leur prêtions de l'argent. En toute franchise, je ne pense pas qu'on soit encore parvenu à résoudre le problème du financement des démarrages. Dès que nous l'aurons fait, soyez assurés que nous nous attaquerons à ce marché.

La solution utilisée jusqu'à présent sur de nombreux marchés est celle de la création de coentreprises entre organismes gouvernementaux et banques ou établissements financiers.

M. Dick Harris: Ce à quoi je veux en venir, c'est que je ne crois pas que le gouvernement devrait intervenir dans le domaine des prêts aux opérations commerciales à risque. Nous sommes une société de libre entreprise et c'est aux prêteurs professionnels qu'il appartient de s'occuper de l'ensemble du marché, depuis les petites entreprises familiales nouvelles jusqu'aux très grosses sociétés qui empruntent des centaines de millions de dollars.

Ce que j'attendais donc au cours de ce processus c'est l'exposé d'un établissement qui s'intéresse vraiment aux microprêts, mais j'attends toujours.

M. Arkadi Kuhlman: Pourrais-je faire une remarque à ce sujet?

ING Direct a en fait un programme de prêts dont vous ignorez probablement l'existence. Il s'agit de prêts non garantis plafonnés à 50 000 $. La demande peut se faire par téléphone et le prêt est habituellement approuvé par nous en l'espace de 15 à 30 minutes. Trente pour cent des demandes de prêt, dont le total hebdomadaire est actuellement de l'ordre de 10 millions de dollars, portent en moyenne sur des sommes de 30 000 $. Les requérants sont des personnes qui ont un ou deux employés. Il s'agit de microentreprises. Ce sont des personnes qui travaillent chez elles ou en partenariat. Près de 55 p. 100 d'entre elles vivent dans les régions rurales du Canada; ce ne sont pas des gens qui vivent dans les grandes villes mais qui ont des adresses à la campagne.

Nous avons trouvé que ce programme était extrêmement facile à administrer et extrêmement utile. Il s'agit essentiellement de prêts non garantis, ce qui est un des problèmes clés auxquels sont confrontées les personnes qui essaient d'obtenir de l'argent pour refinancer leur entreprise. Autre point intéressant à noter, 25 p. 100 de nos prêts sont utilisés pour refinancer les produits haut de gamme offerts par mes collègues. Nous nous situons en quelque sorte au bas de cette chaîne alimentaire.

Il y a donc quelqu'un sur le marché qui offre les services que vous recherchez.

Le président: Je comprends.

Monsieur Loubier, avez-vous une question à poser?

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): J'aimerais poser quatre grandes questions. Je trouve fort intéressant que les banques étrangères participent aux travaux du Comité des finances et à ce débat sur le rapport MacKay. Je tiens à vous féliciter de nous avoir fourni des documents en français. Cela donne une leçon à certaines de nos entreprises financières canadiennes qui n'ont pas daigné faire le même effort depuis le début des consultations, voire même depuis les cinq dernières années.

Je vais vous poser mes deux premières questions. Comment les représentants de banques étrangères voient-ils la question de la fusion des quatre grandes banques canadiennes? Est-ce que l'ouverture et la déréglementation, telles que proposées dans le rapport MacKay, seraient suffisantes pour vous attirer sur le marché canadien davantage qu'au cours des dernières années, alors qu'on avait une réglementation plus serrée? Je poserai mes deux autres questions au retour.

[Traduction]

Le président: Qui veut commencer? Monsieur Willey?

• 1640

M. David Willey: Oui.

En fait, je porte ici deux chapeaux car je m'occupe du côté consommateurs mais je suis également trésorier de la société qui, au nom de Capital One, emprunte aux banques commerciales canadiennes. Ma réponse varie donc selon le chapeau que je porte.

D'une part, plus la banque est importante, plus elle peut apporter d'aide. De l'autre, moins il y a de banques sur le marché, et plus les craintes au sujet de la concurrence ont de raisons de se manifester. Je crois que la position d'équilibre adoptée dans le rapport du groupe de travail est la bonne car elle encourage ou, devrais-je dire, appuie la fusion... ou fournit le cadre nécessaire, car on ne saurait trop encourager cette fusion—en adoptant une attitude plus éclairée et plus dynamique à l'égard de l'entrée des banques étrangères afin d'accroître le nombre des intervenants sur le marché des services financiers. Cela permet à la fois aux banques de devenir suffisamment importantes pour affronter la concurrence mondiale dont je constate partout l'existence... En fait, deux des personnes qui participent aujourd'hui à notre groupe sont en plein milieu d'une telle fusion. C'est manifestement important, mais pour maintenir la concurrence, il faut également compenser cela en autorisant d'autres participants à entrer aussi sur le marché. En fin de compte, je crois que ces deux éléments sont nécessaires pour que l'on puisse atteindre tous les objectifs du groupe de travail et du comité.

Le président: Quelqu'un d'autre a-t-il une remarque à faire? Monsieur Curtis.

M. Christopher T. Curtis (avocat général adjoint, Capital One Financial Corporation): Je voudrais ajouter deux ou trois observations à ce que vient de dire M. Willey.

Premièrement, et je souligne là une de ses remarques qui est l'évidence même, si le marché national devient beaucoup plus concentré, ce qui se produira si les fusions proposées aboutissent, il n'en deviendra que plus important de maintenir un régime de libre accès pour les banques étrangères afin de préserver une certaine concurrence.

Ma seconde remarque porte sur un point assez spécifique qui est lié à une des fusions proposées, celle qui aura lieu entre un émetteur de cartes Visa et un émetteur de cartes MasterCard. Je crois que la MasterCard Association of Canada a fait observer au Bureau de la concurrence que dans un contexte ou un régime de non-dualité comme c'est le cas au Canada, un organisme peut émettre des cartes Visa ou des cartes MasterCard mais pas les deux, au contraire de ce qui se passe aux États-Unis. Dans une telle situation, si la Banque de Montréal, principale émettrice de cartes MasterCard devait disparaître, MasterCard risquerait de ne plus être une carte de crédit viable et il ne resterait plus qu'une seule carte de crédit importante au Canada. Je ne suis pas certain que nous sachions ce que devrait être la réaction du gouvernement à cet égard, dans le contexte de cette fusion, mais je crois que c'est une question qui mérite qu'on s'y arrête.

Le président: Merci, monsieur Curtis.

Monsieur Owens.

[Français]

M. Yvan Loubier: Permettez-moi d'apporter une petite précision avant que nous poursuivions notre débat. Vos propos sont fort intéressants, mais le sens de ma question est davantage le suivant. Croyez-vous que si on mettait en oeuvre les recommandations de M. MacKay et de son vice-président, M. Ducros, les entreprises étrangères de services financiers seraient suffisamment attirées ici pour venir s'y établir? Croyez-vous que la mise en oeuvre de ces recommandations contrebalancerait les effets d'une augmentation de la concentration dans le secteur bancaire?

Il y a des gens qui s'opposent avec virulence à la fusion des banques et qui rient de l'argument concernant cet attrait pour les services financiers étrangers, les banques étrangères ou tout autre segment de l'activité financière. Ils en rient pratiquement et se disent: «Regardez le passé; il est garant de l'avenir.» On a beau leur dire que si vous êtes moins présents, malgré une augmentation fulgurante de votre présence, c'est parce que la réglementation empêchait votre pénétration, mais les gens ne semblent pas convaincus. Que leur répondez-vous? Si on appliquait la déréglementation et l'ouverture des marchés, les banques et institutions financières étrangères verraient-elles le marché canadien d'un très bon oeil? Pourrait-on ainsi vraiment contrebalancer l'effet de la concentration?

• 1645

[Traduction]

M. David Willey: Excusez-moi de ne pas vous avoir répondu directement tout à l'heure, mais je crois mieux comprendre la question maintenant.

Elle appelle quelques remarques. La première est qu'il est manifeste que les recommandations du groupe de travail accroissent l'attrait du marché canadien pour les banques étrangères. Je parle là au nom de Capital One. Manifestement, ce marché est plus intéressant pour nous si nous pouvons y ouvrir des filiales, si nous pouvons offrir une aide financière et consentir des prêts transfrontaliers sans charge fiscale, etc. C'est une raison de plus pour une banque étrangère de s'installer au Canada.

Je vous ferai cependant observer que nous ne serions pas ici si nous n'y tenions pas vraiment beaucoup et si nous n'avions pas fait beaucoup d'efforts pour cela. Très franchement, l'effet global du rôle des associations commerciales, le contexte de la réglementation, celui du financement—il y a sept ou huit facteurs différents qui s'opposent à notre présence ici, et si nous n'avions pas fait preuve de beaucoup de persévérance, nous ne serions pas venus.

Mon point de vue est donc—et vous l'avez certainement pressenti dans les remarques que j'ai faites tout à l'heure—la situation actuelle est bien meilleure. Il est cependant tout aussi vrai qu'il y a deux ou trois ans, il y avait beaucoup plus de restrictions, mais nous avons persévéré pour pouvoir être ici. Il est clair que la situation est maintenant beaucoup plus attrayante pour nous et l'accroissement de nos activités nous intéresse donc plus.

M. Christopher Curtis: J'ajouterais cependant que beaucoup dépend des détails de la mise en oeuvre des recommandations du groupe de travail. L'expression «Ce sont les détails qui révèlent les problèmes» pourrait fort bien s'appliquer ici.

Voici deux exemples: le groupe de travail recommande que le gouvernement mette en oeuvre le régime d'ouverture de filiales proposé, et nous aussi. Un certain nombre d'aspects de ce régime n'ont pas encore été réglés ou du moins n'ont pas été abordés dans les déclarations publiques du gouvernement jusqu'à présent. Lorsque la loi sera présentée, il faudra la soumettre à une étude attentive afin de déterminer avec exactitude le degré de souplesse du processus d'entrée des banques étrangères.

L'autre exemple que je voudrais donner est celui des déclarations fracassantes que l'on trouve dans le rapport du groupe de travail lorsque celui-ci recommande de recourir le moins possible, ou pas du tout, à une réglementation prudentielle alors qu'on n'en a pas besoin. Je crois que M. Ehgoetz a cité ce passage qui nous a aussi beaucoup frappés, mais il s'adresse à un niveau très élevé. Pour savoir s'il est vraiment utile pour les banques étrangères, je crois qu'il faudra voir de quelle manière cette disposition sera appliquée en ce qui les concerne, en particulier pour les nouvelles sociétés entrant pour la première fois sur le marché.

Ce passage du rapport du groupe de travail suit immédiatement une description des recommandations présentées par le ministère des Finances l'an dernier et que M. Ehgoetz a également décrites et critiquées. Nous ne sommes pas non plus du tout satisfaits des propositions concernant ces options numéro un et numéro deux. Je n'entrerai pas dans le détail; je dirai simplement que le groupe de travail s'est abstenu de faire une recommandation spécifique au sujet de cette proposition du ministère des Finances. Il est possible de conclure d'après ce que le groupe de travail a déclaré à un haut niveau que ses membres n'apprécient guère ces propositions, mais il est impossible d'en être certain.

Voilà donc un autre exemple d'une situation dont l'évolution dépendra beaucoup de la voie que le gouvernement choisira pour mettre en oeuvre les propositions du groupe de travail, à supposer qu'il le fasse.

Le président: Merci.

M. Richard Owens: Tout d'abord, nous sommes manifestement heureux de pouvoir vous présenter nos mémoires en français. Nous espérons avoir réussi à en rendre le sens aussi clair dans l'autre langue officielle de notre pays.

En ce qui concerne la question des fusions, pour répondre à votre première question, comme M. Willey y a fait allusion, Norwest et Wells Fargo, deux des participants présents, sont actuellement en cours de fusion aux États-Unis. Étant donné la situation et notre foi dans l'efficacité du marché, comme en témoignent les remarques faites par nous aujourd'hui, il serait mal venu de notre part d'objecter à ces fusions.

• 1650

Ces fusions sont motivées par le marché. Ce genre de regroupement dans l'industrie des services financiers est un phénomène mondial, en tout cas dans tout l'Amérique du Nord, et manifestement le marché a jugé qu'il était logique.

Nous ne croyons pas que ce soit une bonne idée d'entraver le fonctionnement du marché. Il est probablement vrai que les banques nationales sont devenues excessivement grosses et concentrées, dans une certaine mesure à cause de ce que l'on pourrait appeler un régime réglementaire relativement protectionniste et à cause aussi de leur propre expertise, mais il ne serait probablement pas raisonnable d'essayer d'inverser maintenant cette tendance. Il est bien préférable de laisser ces établissements, s'ils le jugent approprié, devenir les grandes institutions de classe mondiale qu'elles considèrent comme la voie à suivre. Assurez-vous cependant que le marché est aussi largement ouvert que possible aux autres participants afin que ceux-ci puissent combler les lacunes qui pourraient apparaître. Loin de nous la pensée que l'on ne devrait pas discuter des conditions appropriées pour ces fusions et de la réglementation du processus. D'une façon générale, il est probablement préférable de laisser ces banques poursuivre ce qu'elles ont entrepris, en s'assurant toutefois que les banques étrangères et les autres participants nationaux concurrents pourront combler les lacunes éventuelles laissées par ces regroupements.

Cela m'amène tout naturellement à votre seconde question, qui est de savoir si cela se produira. Une fois que les lacunes repérées par le groupe de travail MacKay auront été comblées, le marché sera-t-il suffisamment attrayant pour stimuler cette concurrence?

Ce que nous avons pu constater au cours de ces 20 dernières années, c'est une ouverture graduelle des marchés aux banques étrangères. Le processus a été progressif. Il est décrit dans un article que j'ai récemment publié sur l'histoire de la réglementation des banques étrangères au Canada. Au fur et à mesure de cette libéralisation du marché, des établissements de tout type et de toute taille sont venus, au début comme banques de l'annexe II, seule possibilité qui leur était offerte en 1980. Plus récemment cependant, toute une gamme d'établissements de types, de tailles et de spécialités diverses ont fait leur apparition, comme c'est le cas de Wells Fargo, de Norwest et de Capital One. Nous avons donc pu constater que cette libéralisation graduelle réussissait à attirer de nouveaux établissements bancaires.

Vous avez aussi entendu dire aujourd'hui que certaines objections persistent. Nous croyons que des améliorations peuvent être apportées et qu'une plus grande libéralisation est possible. Au fur et à mesure que cela se produira, comme le décrivait M. Willey, le marché deviendra plus attrayant pour d'autres établissements, les nouveaux participants trouveront moins d'obstacles à leur entrée et le marché deviendra plus actif.

Les questions soulevées par M. MacKay dans le rapport du groupe de travail, les points que nous avons nous-mêmes soulevés aujourd'hui, certaines des questions soulevées par M. Kuhlman, en particulier au sujet de la formule unique de règlement pour les établissements étrangers, méritent tous d'être examinés. Je suis totalement d'accord avec M. Curtis lorsqu'il dit que c'est dans les détails que se cachent les problèmes. Il faudra que nous réglions tous ces détails. Il ne suffit pas simplement d'adopter un régime de filiales. Il faut que ce régime convienne compte tenu des coûts et de la structure des participants de l'industrie. Nous demandons donc instamment que l'on poursuive la consultation des représentants de l'industrie au cours de l'élaboration de la loi. Ce sera un processus constructif, et une fois la loi adoptée, il y aura une activité nouvelle sur ces marchés.

Le président: Monsieur Meir.

M. Gadi Meir: Je voudrais me faire l'écho des remarques de M. Willey. À cause du manque de clarté de la réglementation et de la procédure légale, il a été très difficile pour Wells Fargo, lorsque la société a voulu s'implanter ici, de parvenir à une entente avec le BSIF.

Sans la libéralisation mentionnée dans le rapport MacKay, je ne suis pas du tout sûr qu'un autre concurrent souhaiterait entrer sur ce marché. Je ne sais pas combien de temps encore nous pourrons continuer à fonctionner sans que les règlements ne soient modifiés dans l'esprit des suggestions faites dans mon exposé.

• 1655

Je crois que la fusion accroîtra les débouchés pour des intervenants tels que nous; elle me paraît nécessaire. Par exemple, dans certaines villes où il n'y a peut-être que deux filiales et où une entreprise traite avec une des deux banques, j'espère que vous faciliterez la tâche des prêteurs étrangers afin qu'ils puissent offrir d'autres formules de financement. Mais pour cela, il faudra que les règlements soient assouplis. Nous constatons effectivement un certain assouplissement et nous nous en réjouissons, mais nous voudrions effectivement voir les choses plus en détail. Nous recommandons également la consultation, car le rapport du groupe de travail n'offre pas suffisamment de détails pour nous mettre vraiment à l'aise.

Le président: Merci, monsieur Meir.

Monsieur Kuhlman.

M. Arkadi Kuhlman: Si vous me le permettez, je me contenterai d'une brève remarque afin de ne pas prolonger la discussion. Je voudrais vous présenter une idée simple au sujet des normes mondiales. Il nous a fallu plus de 14 mois pour obtenir notre permis au Canada. Il n'a fallu que deux mois pour l'obtenir en Espagne. Un tiers du capital a été suffisant pour assurer le fonctionnement de la même banque de détail en Espagne; il a fallu trois fois plus d'argent pour le faire au Canada. Si vous tenez vraiment à ce que les règles du jeu soient les mêmes dans le monde entier, la véritable question qui se pose est de savoir quel choix vous voulez faire.

Ce qu'il y a de curieux dans tout cela, c'est que je pense que nous devrions trouver une solution canadienne. Les grandes banques ont bien mal servi le Japon; elles n'ont pas mieux servi la Suisse. Je crois qu'au cours des prochaines semaines, nous allons découvrir que l'idée que «plus c'est grand, mieux c'est» n'aura pas plus de succès dans bien d'autres endroits. Nous avons là une occasion en or de trouver une solution canadienne.

Pour mes collègues des États-Unis, il est vrai que le regroupement des banques crée des lacunes qu'il faudra combler. C'est tout à fait normal. D'extraordinaires possibilités sont créées aux États-Unis par certains de ces regroupements, mais en fin de compte, il faut que le marché soit soumis à une réglementation. Comme je l'ai dit plus tôt à propos du contexte réglementaire, même si les recommandations du rapport MacKay sont appliquées, même si les problèmes qui se cachent dans les détails sont éliminés, il y a encore bien des injustices à réparer avant que nous puissions vraiment nous présenter comme un des membres les plus importants du G-7.

Il faut renforcer les pouvoirs du BSIF. Nous disons qu'il faut essayer de réglementer les conglomérats financiers internationaux. Pour y parvenir, il faudra mettre en place de solides mesures de soutien; il faudra certainement renforcer le personnel, le talent et les ressources dont nous disposons si nous voulons créer un milieu réglementaire plus souple. Qui va payer, qui va tout organiser, de quel délai parle-t-on? Comment va-t-on régler tout cela? Voilà autant de questions qui attendent une réponse.

Souvenez-vous de 1970, lorsqu'on a ouvert le marché hypothécaire aux banques. Celles-ci ont accaparé de 60 p. 100 de ce marché en l'espace de 18 mois. C'est un peu comme si votre fille ou votre fils vous demandait s'ils peuvent regarder la télévision et que vous leur répondiez, oui, mais pas avant d'avoir rangé votre chambre. Il vous répondra qu'il le fera quand l'émission sera terminée. Que pensez-vous qu'il va se passer ici si nous vous disons que vous pouvez regarder la télévision mais que vous devrez ranger votre chambre après? Nous ne le ferons pas.

Le président: Merci, monsieur Kuhlman.

Monsieur McKay.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais passer maintenant à un des problèmes cachés dont vous parliez. Ma question s'adresse à M. Meir. En tant que consommateur moyen, comment pourrais-je poursuivre Wells Fargo?

Une voix: En allant vous installer en Californie.

M. Gadi Meir: Ma réponse comprend deux parties. Premièrement, comme l'exigeait ou le suggérait le rapport MacKay, il y a un mécanisme de règlement des différends au Canada et vous pourriez attaquer Wells Fargo devant une cour canadienne des petites créances. Vous ne seriez pas obligé d'aller à San Francisco.

Ma seconde remarque a plus d'importance. Nous prêtons de l'argent au consommateur moyen. C'est lui qui a notre argent, et s'il y a un procès... Dans la pratique, permettez-moi de vous dire que cela arrive rarement et que dans 99 p. 100 des cas, c'est nous qui poursuivons le client.

M. John McKay: Mais vous êtes une banque virtuelle; vous n'avez aucune présence physique au Canada. Tout ce que vous envoyez au Canada c'est de l'argent, et les dispositions contractuelles que vous utilisez sont des dispositions californiennes. Dans la pratique, je n'ai absolument aucune possibilité de recours contre vous si vous commettez une erreur à propos d'un emprunt contracté par moi.

M. Gadi Meir: Les seuls points sur lesquels nous pourrions commettre une erreur, lorsqu'il s'agit d'un prêt, c'est sur l'intérêt et les commissions à acquitter. Je pense que c'est de cela que vous voulez parler.

M. John McKay: L'intérêt et les commissions. Il y a aussi les délais. Supposons que j'aie besoin de vous pour conclure une autre affaire et que j'ai des dommages-intérêts à payer parce que je n'ai pas pu respecter les exigences contractuelles. Dans un tel cas, je perds bien plus que le montant du prêt lui-même. Comment puis-je me retourner contre vous?

• 1700

M. Gadi Meir: Encore une fois, cela appelle deux réponses. Dans le cas de l'intérêt et des commissions, nous nous engagerons à respecter les lois canadiennes. Ce sont donc elles qui régiront le paiement de l'intérêt et des commissions.

M. John McKay: Mais vous avez dit que vous vouliez être régi par la loi californienne.

M. Gadi Meir: Précisons bien les choses. Le contrat, l'entente avec le client, qui régit le prêt, sera conforme à la loi californienne, mais nous respecterons toutes les lois canadiennes. En outre, comme je l'ai dit, nous fournirons un mécanisme de règlement des différends au Canada grâce auquel, si vous voulez intenter un procès, vous ne serez pas obligé de vous rendre en Californie, vous pourrez le faire devant un tribunal canadien.

Cependant, quand il s'agit de déterminer l'équité d'un contrat, d'en discuter les conditions, on examinera le contrat que constitue l'entente avec le client et qui est régi par la loi californienne. C'est ce qui se passe pour les...

M. John McKay: Pardonnez-moi, mais votre réponse me paraît un peu ambiguë. Ce que vous m'invitez à faire, c'est d'intenter un procès devant la Division générale de la cour de l'Ontario, mais aussi de respecter les dispositions du contrat, quelles qu'elles soient; or, ce contrat a en fait été rédigé conformément au droit américain.

M. Gadi Meir: C'est exact.

M. John McKay: Que puis-je faire pour recouvrer des dommages-intérêts auprès de vous?

M. Gadi Meir: N'oubliez pas que nous sommes Wells Fargo. Nous n'avons pas l'habitude de nous soustraire à un jugement.

M. John McKay: Mais vous avez déjà dit que vous n'aviez aucun avoir ici.

M. Gadi Meir: En effet.

Cependant, et je le répète, c'est la petite entreprise qui détient l'argent. Supposons qu'elle emprunte 50 000 $. La dette est alors de...

M. John McKay: Mais ce serait une piètre consolation pour moi, après avoir emprunté 50 000 $ et avoir encouru des dommages de 150 000 $ à cause des tenants et des aboutissants d'un procès.

M. Gadi Meir: Je vous remercie de votre question. Je vais y réfléchir et je consulterai nos avocats. Dans la pratique, je ne me souviens pas d'un seul cas de ce genre aux États-Unis.

M. Steve Wagner: Voici une précision qui vous aidera peut-être un peu. Comme la plupart des autres États américains, la Californie traiterait un jugement de l'Ontario selon les règles d'un engagement de courtoisie internationale réciproque, et il y a une foule d'avocats en Californie, en particulier, qui, ...

M. John McKay: Mais cela soumet le Canada tributaire à la réglementation californienne. Cela se ramène bien à cela, n'est-ce pas?

M. Steve Wagner: Non...

M. John McKay: Vous comparaissez devant le comité pour nous demander d'approuver la disposition du rapport MacKay en faveur de l'allégement de la réglementation. Pourtant, dès que nous soulevons la question des griefs d'un client, vous nous annoncez que nous serons assujettis à la réglementation prudentielle et aux autres dispositions de la loi californienne. C'est bien cela, n'est-ce pas?

M. Richard Owens: Excusez-moi d'intervenir, mais je tiens à vous signaler que la réglementation prudentielle à laquelle vous faites allusion est naturellement surtout destinée à protéger les fonds des déposants.

M. John McKay: Excusez-moi, oui. D'accord.

M. Richard Owens: Donc, M. Meir a raison dans la mesure où ce sont ces fonds qui courent un risque au Canada, et ce risque est réellement—Gadi, dites-moi si j'explique mal les choses—et avant tout couru par Wells Fargo. Pour réduire ce risque, on a adopté une structure qui permet d'utiliser un système relativement efficace et cohérent de prêts, et de prévoir les recettes.

Un des aspects de cette structure est qu'elle s'appuie sur les lois en vigueur à New York parce que notre société les connaît bien et que cela aide à atténuer le risque encouru. Cela risque-t-il de créer pour le consommateur canadien le genre de problèmes que vous décrivez? C'est en effet possible. En revanche, cela établit un cadre général qui permet à Wells Fargo d'offrir un produit novateur grâce auquel les consommateurs canadiens peuvent avoir accès à des fonds qu'ils ne trouveraient peut-être pas ailleurs, et cela, à moindre prix.

C'est aux consommateurs qu'il appartient de décider s'ils sont prêts à accepter les risques additionnels éventuels lorsqu'ils traitent avec un établissement étranger. Si j'étais l'un de ces consommateurs, je me dirais que ce sera peut-être un peu plus compliqué sur le plan administratif, mais qu'après tout, c'est l'argent du bailleur de fonds et que c'est lui qui assume le risque le plus important; je me laisserais donc sans doute tenter par cette formule.

Les consommateurs sont libres de choisir, mais je crois qu'à l'expérience, on constate qu'il est bien rare qu'il soit nécessaire de poursuivre des établissements bancaires en dommages-intérêts, en particulier lorsqu'il s'agit de prêts peu importants.

M. John McKay: Je crois que nous avons suffisamment poursuivi ce problème caché.

• 1705

Je voudrais maintenant m'attaquer à un autre de ces problèmes, celui de l'impôt. Comment Wells Fargo en particulier, mais aussi les autres établissements étrangers seront-ils imposés si vous recommandez l'élimination de la retenue fiscale? Comment le gouvernement canadien pourra-t-il recouvrer des impôts sur des activités basées au Canada, le cas échéant?

M. Gadi Meir: Eh bien, il ne le fera pas. Selon le droit contractuel, les contrats sont exécutés aux États-Unis. Nous sommes un fournisseur transfrontalier de services financiers et, pour le moment, nos contrats sont négociés aux États-Unis. Nous sommes donc imposés chez nous et nous payons également les impôts d'État.

Il y a une égalisation des règles du jeu en ce sens que notre charge fiscale aux États-Unis est très proche de celle qui existe au Canada. Je n'ai pas fait le calcul au dollar près, mais il y a très peu de différence. D'après nos calculs, la retenue fiscale augmente d'environ un à un et demi pour cent l'intérêt que nous devons percevoir.

M. John McKay: Je voudrais un autre éclaircissement. Pourquoi une retenue fiscale puisque nous ne pouvons pas vous imposer sur vos activités au Canada?

M. Gadi Meir: Pourquoi vous avez une retenue fiscale?

M. John McKay: Oui.

M. Gadi Meir: Vous voulez dire, comment cela fonctionne-t-il actuellement?

M. John McKay: Non, je voudrais un éclaircissement—je ne comprends pas bien. Si l'on considère que vos activités se déroulent sur le territoire américain, il est évident que le Canada ne peut pas vous atteindre...

M. Gadi Meir: La loi comprend une disposition spéciale voulant que les Canadiens qui empruntent de l'argent à l'étranger sont assujettis à une retenue fiscale de 10 p. 100 sur l'intérêt qu'ils paient à l'étranger. Pour le moment, nous avons une entente avec Revenu Canada aux termes de laquelle nous payons cette retenue au nom de nos clients et nous nous chargeons bénévolement de toutes les formalités administratives au nom de nos clients.

M. John McKay: S'agit-il de l'impôt payé par la Wells Fargo ou de celui des consommateurs?

M. Gadi Meir: En droit, il s'agit en réalité du consommateur, mais bien entendu, nous en tenons compte dans le calcul de nos prix et nous payons ensuite à la retenue au nom de nos clients afin de leur éviter de devoir faire des déclarations mensuelles ou trimestrielles.

M. John McKay: J'aurais une foule d'autres questions à poser.

Le président: Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.

Ce qui est clair en ce qui concerne les banques canadiennes, c'est que leurs résultats offrent un reflet fidèle de la stabilité et de la sécurité de l'économie de notre pays. Il est intéressant de voir qu'au Canada, les banques sont des banques nationales. Malgré de fréquentes comparaisons avec les États-Unis, il n'y a pas beaucoup de similarités car il y a là-bas très peu de banques qui peuvent prétendre être des établissements nationaux.

Monsieur Kuhlman, j'ai été très intéressé par la remarque que vous avez faite tout à l'heure lorsque vous avez dit que ce sont les consommateurs canadiens qui paient les améliorations technologiques et non les actionnaires. Je voudrais savoir comment vous procéderiez pour déterminer à qui appartiennent les dollars utilisés pour payer cette technologie. Si vous modifiez votre ratio de distribution des dividendes, ce serait manifestement les actionnaires qui paieraient. Vous n'en sauriez jamais rien. Cela dépend de la stratégie financière de l'organisme. Ce n'est peut-être pas une bonne idée pour les banques d'émettre de nouvelles actions. Ce n'est peut-être pas une bonne idée pour elles de faire financer directement une technologie par des tiers alors qu'elles ont les liquidités nécessaires pour réinvestir dans l'entreprise alors que ce serait probablement une bonne idée de le faire sur le plan commercial.

Très franchement, votre commentaire donnait l'impression qu'au Canada, les consommateurs se faisaient avoir. C'est une remarque qui me paraît injuste, une véritable insulte aux établissements bancaires canadiens, remarque totalement injustifiée alors même que nous essayons de déterminer si les services bancaires et le secteur des services financiers dans notre pays offrent des services acceptables aux Canadiens. Je souhaiterais que vous reveniez sur cette remarque que je considère injurieuse pour nos établissements bancaires.

M. Arkadi Kuhlman: Eh bien, merci. Il ne s'agit pas du tout d'une insulte. Je crois qu'il faut voir les choses sous un jour tout à fait différent. Je parle quotidiennement à des consommateurs et j'entends constamment parler de commissions, de taux d'intérêt et de tous les problèmes auxquels le Canadien moyen est confronté dans le domaine financier.

• 1710

Il me semble qu'au fil des années, le Canada a été bien servi par ses banques. Mais je crois que nous avons également constaté de nouveaux changements structurels dans beaucoup d'autres industries canadiennes qui, à mon avis, sont tout aussi importantes pour ce pays. Lorsqu'il s'agit d'une restructuration majeure, d'investir dans des technologies importantes ou de fermer des filiales, cela peut coûter un milliard de dollars et cela se répercute directement sur leur bilan. Vous restructurez. Vous construisez pour l'avenir. Vous préparez un meilleur produit. Vous oeuvrez pour créer un meilleur produit, pour offrir plus de valeur, de meilleurs prix. Cela se règle sur les marchés de capitaux non grâce à un mécanisme d'établissement des prix dont les consommateurs font les frais.

Au fur et à mesure que l'industrie progresse et devient plus compétitive et efficace, la question se pose toujours de savoir pourquoi cela doit se faire grâce au calcul des prix. Si vous examinez les rapports annuels des banques au cours de ces 30 dernières années, vous noterez un parallèle intéressant entre le montant du réinvestissement, le montant des profits réalisés à l'étranger et le montant des profits nationaux. Il me semble que c'est une façon assez logique d'aborder la question. Je ne suis pas certain que la solution consiste à jouer sur les prix payés par les consommateurs.

M. Paul Szabo: Dans la même veine, je voudrais poser une question à M. Meir. Dans votre mémoire, vous faites allusion à votre expérience canadienne, et vous donnez quelques exemples de la première série de demandes de prêts par des Canadiens. La première émanait d'une entreprise de nettoyage à sec de Stittsville, en Ontario, qui existait depuis 1989, dont les ventes s'élevaient à 400 000 $ et qui n'avait réussi à obtenir qu'un crédit de 8 000 $. Le second exemple était celui d'une compagnie de transport par camions légers de Nanaimo (C.-B.), qui existe depuis 1981, dont les ventes atteignaient 600 000 $ et dont la ligne de crédit n'était que de 7 500 $.

Si j'étais banquier et que vous me disiez, mon entreprise a 20 ans, mes ventes annuelles atteignent 400 000 $, et je voudrais que vous me prêtiez 75 000 $, ces renseignements ne seraient pas suffisants pour que je puisse prendre une décision, car même si votre société a 20 ans d'existence et que vos ventes annuelles atteignent 400 000 $, il serait aussi possible que vos dépenses annuelles soient de 500 000 $. Manifestement, dans un tel cas, je n'aurais pas augmenté votre marge de crédit.

La manière dont c'était présenté et dont je le présente moi-même, c'est que Wells Fargo qui n'investit rien dans l'infrastructure au Canada, n'investit rien pour employer des Canadiens et contribuer à la vie de notre société, et ne paie pas d'impôt sur le revenu pour alimenter l'économie canadienne, vient critiquer les banques canadiennes parce qu'elles ne veulent pas accorder de lignes de crédit importantes. Mais je peux vous garantir que si ces demandes étaient adressées à Wells Fargo, vous n'accorderiez pas non plus de crédit d'après l'information fournie.

Je crois qu'il est vraiment regrettable que les entreprises étrangères qui veulent ne choisir que ce qui leur convient dans le secteur financier tiennent le discours suivant: Nous voulons bien accepter les mêmes règles concurrentielles pendant un certain temps pour pouvoir nous offrir une part du gâteau, mais cela dit en passant, nous n'avons aucune intention de contribuer ou de participer pleinement à votre économie dans l'intérêt des Canadiens.

M. Gadi Meir: Je vous remercie vivement de cette question. Cela me permettra de vous expliquer ce que nous apportons au marché canadien. Premièrement, pour reprendre l'exemple que vous avez choisi, si une entreprise avait des ventes annuelles de 400 000 $ et des dépenses annuelles de 500 000 $, elle n'aurait pas pu continuer à fonctionner pendant 20 ans. Elle ne serait absolument pas rentable et elle aurait fait faillite au bout de deux ou trois ans. L'exemple que vous nous avez donné est donc...

M. Paul Szabo: Et si les dépenses atteignaient 401 000 $, par exemple.

M. Gadi Meir: Nos modèles statistiques et notre expérience dans le domaine des prêts montrent que le nombre d'années d'activité—il est intéressant que vous choisissiez cet exemple—est un des indicateurs essentiels de la capacité de remboursement d'une société. Alors que d'autres banques réclament littéralement des rames d'états financiers et utilisent un agent de prêt pour les examiner en détail, nos modèles statistiques montrent qu'il suffit de poser huit à dix questions clés sur le formulaire de demande pour se faire une idée assez précise de la capacité de remboursement du demandeur. D'autre part, le bureau de crédit peut vous fournir des indicateurs très importants.

• 1715

Notre formulaire de demande simplifié, qui est inclus ici, contient donc suffisamment d'informations pour qu'une décision puisse être prise.

Je voudrais revenir à certains des points évoqués. Contrairement à ce que vous disiez, nous n'essayons pas du tout de nous réserver ce qu'il y a de meilleur. C'est tout à fait le contraire. En fait, les sociétés qui ont déjà du crédit ou qui sont de bonnes clientes font déjà affaire avec la Banque de Montréal ou la CIBC, avec lesquelles elles entretiennent de bons rapports et qui leur font crédit. Nous parlons des clients qui sont constamment frustrés par l'attitude de leur banque et qui découvrent qu'il y a enfin une autre option possible. Moi aussi j'ai parlé à de nombreux clients; on nous téléphone tous les jours. Lorsque nous avons présenté notre produit et qu'on en a parlé, ces clients ont essayé de me retrouver dans le véritable labyrinthe de l'annuaire téléphonique de Wells Fargo. Ils m'ont raconté toutes ces histoires d'horreur dans lesquelles malgré le fait qu'ils avaient une entreprise prospère qui fonctionnait depuis x années, leur banquier refusait de les écouter.

Nous ne choisissons pas du tout les meilleurs morceaux. Notre appétit du risque est bien plus gros que cela. Il ne suffit pas de 50 ou de 100 points de base pour satisfaire cet appétit. Il en faut des centaines, et comme nos modèles statistiques sont fondés sur cette expérience, nous savons quand un client se trouve dans la catégorie des risques de perte de 250 à 300 points de base, et nous calculons notre prix en conséquence. Les banques canadiennes ne le font pas. Elles vous disent qu'elles sont prêtes à vous accorder une ligne de crédit à un taux préférentiel majoré de un ou deux, et si le risque que vous représentez est plus élevé, elles rejettent tout simplement votre demande. Nous, au contraire, nous sommes prêts à assumer le risque additionnel. Votre ligne de crédit sera donc au taux préférentiel majoré de 375, 475, 675 ou autre chose—c'est le barème que nous utilisons—mais nous ne refusons pas le prêt.

En ce qui concerne les impôts au Canada, nous payons la retenue fiscale. Cette retenue fiscale représente environ 100 à 150 points de base, ce qui équivaut à environ la moitié de notre marge. Donc, nous payons en fait un impôt assez important au Canada en ce moment.

Pour ce qui est de l'emploi au Canada, les conditions que nous décrivons sont exactement celles qui nous empêchent de fournir des emplois dans le télémarketing, la prospection par la poste, le marketing au Canada. Il nous est interdit d'avoir des activités auxiliaires au Canada, et c'est ce qui est traité dans le...

M. Paul Szabo: Monsieur le président, il convient de répondre clairement à cette question au sujet de l'impôt. Vous nous avez dit à deux reprises, je vous cite, que vous payez «un bon montant d'impôt». Vous ne payez pas cet impôt au gouvernement canadien.

M. Gadi Meir: Mais si. Je vous ferai parvenir une copie des chèques. Nous payons un impôt retenu à la source.

Je vais vous donner un petit exemple pour vous faire comprendre la situation. Si nous consentons à un prêt de 10 000 $ à 10 p. 100 d'intérêt, par exemple, le client aura payé au bout de l'année 1 500 $ en intérêt. Il doit alors à Revenu Canada 10 p. 100 de cette somme, soit 150 $, et c'est nous qui faisons ce paiement. Le client doit ce montant, mais nous avons passé en accord en vertu duquel Wells Fargo paie cette somme pour son compte. Sur un prêt à 10 p. 100, disons pour simplifier les choses que notre rendement sur le capital est d'environ 200 points de base, soit deux pour cent. Nous versons un pour cent, rien de moins, à Revenu Canada.

Je me ferai un plaisir de vous donner davantage d'explications un peu plus tard.

Le président: Nous aurons l'occasion de demander à M. Baillie, lorsqu'il viendra ce soir, quel est le pourcentage d'impôt que les banques paient ici au Canada et à l'étranger parce que cela pourrait en fait illustrer un certain nombre de propos qui ont été évoqués.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Une des choses que fait le groupe de travail MacKay... la compensation qui est prévue lorsqu'il s'agit de savoir si les fusions bancaires sont une bonne chose sur le plan financier pour le Canada. Il me semble que cette compensation, à la lecture du rapport, consiste à ouvrir notre marché aux banques étrangères, soit au groupe que vous représentez. Pourtant, après vous avoir entendu parler des services que vous offrez aux Canadiens, il m'apparaît que vous privilégiez en fait certains créneaux du marché.

Si vous me le permettez, j'adresserai tout d'abord ma question à M. Kuhlman. Vous êtes une banque virtuelle. ING est implantée au Canada. Comment pensez-vous pouvoir remplacer ou concurrencer sur tous les plans les six grands établissements banquiers canadiens, qui offrent effectivement des comptes-chèques et d'autres services qu'aucun d'entre vous ne me semble devoir dispenser?

Je sais que les banques canadiennes ont pratiquement abandonné le marché de la paie parce que cela n'est pas suffisamment rémunérateur, et j'extrapole pour l'avenir. Je me demande s'il n'y a pas d'autres services bancaires à coût élevé pour lesquels la population canadienne va devoir payer davantage ou dont elle devra se passer faute de concurrence, parce que l'on privilégie certains créneaux.

• 1720

Je ne peux m'empêcher de vous poser à nouveau la question, pourquoi ne pas offrir toute la gamme des services? Si vous êtes disposé à offrir ce type de services financiers à la population canadienne—et je crois que c'est M. Willey, ou M. Curtis, qui a déclaré tout à l'heure qu'il avait vraiment hâte d'entrer sur le marché canadien—si vous avez hâte de venir chez nous, pourquoi ne pas offrir toute la gamme des services et devenir un établissement bancaire en bonne et due forme?

M. Arkadi Kuhlman: Merci de m'avoir posé cette question.

Tout d'abord, voilà plus de 50 ans qu'ING est ici et nous ne sommes quand même pas des néophytes, si je puis m'exprimer ainsi.

Je pense que la spécialisation a sa place sur ce marché. Il y a de la place pour les sociétés financières spécialisées, les banques, les opérateurs qui n'offrent qu'un seul type de service. On a parlé je crois, sur le plan politique, d'écrémage, terme que je trouve bien malheureux.

ING Direct est une organisation qui s'adresse à la base à un large éventail de consommateurs. Nous avons des consommateurs dans toutes les provinces de ce pays. C'est d'ailleurs par notre intermédiaire que l'on touche la population de l'ensemble du pays.

Offrir toute la gamme des services n'est pas la solution. Cela reviendrait à rentrer dans le rang et à faire comme tout le monde. Rien de ce que l'on peut faire ici au Canada en 1998 ne va changer la réalité qui fait que l'ensemble de la gamme des services va évoluer—absolument rien.

Nous avons des cafés. Nous nous asseyons en fait avec les clients autour d'une table et nous leur parlons. Vous pouvez parler ici d'une gamme intégrale de services. Nous considérons plutôt qu'il s'agit là d'un lieu dans lequel des gens peuvent prendre un café et parler de banque. Les gens nous font savoir qu'ils n'ont aucun problème à communiquer par téléphone, par l'Internet, par courrier, et que tout semble très bien se passer pour ce qui est des produits qu'ils demandent.

Les banques étrangères, et c'est bien sûr le cas d'ING Direct, n'ont pas vocation à remplacer toutes les banques. Nous ne sommes pas venus ici tout changer. Nous voulons en fait rajouter un ingrédient utile à la formule globale.

Je vous renverrai la question en vous demandant pour quelle raison voilà plus de 35 ans que les banques étrangères se sont cassé les dents sur ce pays? Les banques étrangères n'ont jamais réussi à s'y implanter. À une ou deux exceptions près, toutes sont reparties au bout d'un certain temps. Est-ce là l'intérêt des consommateurs canadiens? Je n'en suis pas sûr. Tout le monde doit-il en faire autant? Je ne pense pas que ce soit nécessaire. Je considère toutefois que l'on se contente parfois d'analyses qui mènent à des conclusions un peu trop simplistes.

Mme Karen Redman: Est-ce que quelqu'un d'autre veut faire des commentaires sur cette question?

M. David Willey: Je voudrais rajouter certaines observations au sujet de l'ouverture de succursales.

En fait, Capital One est à bien des égards un établissement du XXIe siècle. Bien des fusions que l'on voit aujourd'hui apparaître sur le marché bancaire des États-Unis s'expliquent par le fait, je vous l'avoue bien franchement, qu'un établissement qui dispense l'intégralité de la gamme des services est un peu une chose du passé. Ce type de mécanisme aura toujours son rôle à jouer mais de plus en plus, comme le fait remarquer M. Kuhlman, les consommateurs veulent accéder directement aux produits bancaires, que ce soit par l'intermédiaire de l'Internet, du téléphone ou du courrier—et c'est exactement ce que fait Capital One. C'est donc une orientation différente, qui a ses avantages. Elle a aussi ses inconvénients, il faut le reconnaître, mais elle offre davantage de choix aux consommateurs, ce qui est un atout, à mon avis, quoi qu'on en pense.

J'aimerais aussi vous répondre au sujet des produits qui correspondent à un créneau sur le marché. Je pense qu'il y a deux façons d'envisager la chose. On peut partir de la solution qui consiste à offrir toute une gamme de produits différents aux consommateurs et, dans cette optique, on a le modèle bancaire traditionnel—les comptes-chèques et les comptes d'épargne, etc. L'autre façon de considérer le problème consiste cependant à faire en sorte qu'un produit donné soit mis à la disposition de tous les consommateurs, et c'est justement ce qu'a fait Capital One jusqu'à présent en concevant des produits s'adressant à tout le monde et en offrant un service ayant une certaine valeur pour différents consommateurs.

Dans certains cas, lorsqu'on s'adresse à des gens qui présentent peu de risques, cette valeur correspond à un coût inférieur du produit. Dans d'autres cas, lorsqu'on s'adresse à des gens qui sont rejetés par les banques traditionnelles—et je reprends les observations qui ont été faites de l'autre côté de la table—aux États-Unis, ainsi qu'au Canada, je pense, pendant très longtemps, les banques ont proposé un certain prix. Celui qui répondait aux critères d'obtention du crédit obtenait le produit. Pour celui qui n'y parvenait pas, il n'y avait pas de remède; le produit lui était refusé. Nous sommes toutefois en mesure d'offrir de nombreux produits à différentes catégories de personnes et à chaque individu, ce qui en fait un service que l'on dispense à ces consommateurs.

• 1725

Je pense donc que c'est cela en fait que nous essayons d'aborder. Pour l'avenir, nous rêvons d'autres possibilités, mais pour l'instant c'est ce que nous dispensons: toute une gamme de mécanismes de prêts s'adressant à un très large éventail de consommateurs.

Le président: D'autres choses à ajouter?

Monsieur Wagner.

M. Steve Wagner: Pour ce qui est de Trans Canada Credit/Norwest Financial, nous avons un réseau de distribution au moyen de succursales dans l'ensemble du Canada. Je pense que nous avons quelque 140 succursales dans les 10 provinces. C'est essentiellement de cette façon que nous opérons au Canada, aux États-Unis et dans d'autres régions du monde.

Nous nous adressons à un créneau particulier puisque nous offrons essentiellement des services de financement aux consommateurs. Je pense que nous nous sommes déjà présentés devant votre comité il y a deux ans en insistant sur le fait que nous ne voulions pas qu'on nous oblige à nous transformer en une banque de l'annexe II ou en un autre établissement financier réglementé par le gouvernement fédéral. Je vous répète que nous nous adressons à un créneau particulier. Nous ne voulons pas être l'alpha et l'oméga, nous nous en tenons à notre spécialité en essayant de la pratiquer de notre mieux.

Le président: Merci, madame Redman.

Nous allons suspendre la séance pendant une vingtaine ou une trentaine de minutes parce qu'il nous faut aller voter. Ne partez pas, cependant, parce que nous allons revenir vous poser d'autres questions qui appelleront d'autres bonnes réponses.

En revenant, nous donnerons la parole à M. Nystrom puis à M. Brison.

La séance est suspendue.

• 1727




• 1804

Le président: J'ouvre à nouveau la séance. La parole est à M. Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.

Laissez-moi vous dire tout d'abord, monsieur Meir, que rien de ce que vous nous avez dit ici aujourd'hui ne risque de constituer une trahison. Je pense que vous pouvez rentrer chez vous tranquillement après cette séance sans avoir à vous inquiéter.

Il est intéressant de constater à quel point vos établissements financiers ont fait sentir leur présence sur le marché. J'imagine que le facteur de la distance n'ayant plus aucun rôle à jouer sur le coût des télécommunications et le fait que les succursales ont de moins en moins d'importance vous permettent, d'une certaine manière, de vous implanter subrepticement sur ces différents créneaux. Cela ne se fait pas nécessairement à grand bruit. Ainsi, j'ai appris qu'ING avait multiplié par 10 sa clientèle, qui est passé de 10 000 à 100 000 personnes l'année dernière. C'est tout à fait surprenant.

• 1805

L'un des arguments qu'emploient les tenants des fusions des banques canadiennes, celles qui sont proposées, consiste à dire que la concurrence étrangère s'est accrue. Certains nous ont fait savoir qu'en réalité il n'en était rien. Il est intéressant de vous entendre dire que vous êtes en fait bien présents.

Pour ce qui est de la possibilité d'ouvrir des succursales au Canada, j'aimerais particulièrement savoir quel est votre sentiment face à la situation susceptible de se poser à l'avenir, notamment dans le cadre canadien, après la fusion des banques au Canada. Il paraît à peu près certain que certaines succursales feront double emploi, que ce soit entre la Banque de Montréal et la Banque Royale, ou entre CIBC et TD. Est-ce que certains de vos établissements auront intérêt à reprendre l'exploitation de certaines de ces succursales pour offrir leurs propres services? Est-ce que cela est susceptible de présenter un intérêt d'un point de vue commercial?

M. Gadi Meir: Je peux vous répondre très rapidement pour ce qui est de la Wells Fargo. Les succursales ne présentent pour nous aucun intérêt, et je pense que cela ressort à l'évidence de notre type d'exploitation. Pour ce qui est des éléments d'actif, si ces banques vendent des éléments d'actif ou s'en départissent, nous n'en avons pas encore parlé, mais il est probable que nous envisagerions la possibilité d'acheter un portefeuille que nous pourrions gérer à partir des États-Unis.

M. Steve Wagner: Quant au Norwest Banking Group, je ne vois pas très bien jusqu'à quel point nous serions intéressés.

M. Scott Brison: Il y a quelque chose qui me préoccupe. Nous voulons tous renforcer la concurrence sur le marché, et c'est la raison pour laquelle certains s'opposent aux fusions. Toutefois, si par exemple les succursales n'ont plus autant leur raison d'être dans la situation actuelle, en termes de viabilité des services bancaires ou autres services financiers au Canada, et à partir du moment où nous ouvrons nos frontières afin d'intensifier la concurrence tout en permettant par exemple au Canada que l'on procède aux fusions mais en imposant aux établissements financiers canadiens certaines garanties—ainsi on envisage à l'heure actuelle de faire en sorte qu'ils s'engagent à maintenir leurs succursales pendant plusieurs années, qu'ils donnent des garanties concernant l'emploi, etc.—cela reviendrait en fait à exposer nos établissements financiers nationaux à une concurrence indue tout en les menottant par la même occasion en les empêchant d'exercer librement leur concurrence.

Le fait d'accorder un traitement national étant fondé sur le principe de la réciprocité, je conçois que subsistent certaines politiques discriminatoires à l'encontre des banques étrangères au Canada. Savez-vous quels sont les obstacles qui s'opposent à l'entrée des banques canadiennes sur le marché des États-Unis? Grosso modo, sont-ils bien plus grands? Je me suis laissé dire qu'ils étaient éventuellement bien plus grands que même... Non?

M. Richard Owens: Non, c'est inexact.

C'est une question que nous avons examinée de très près il y a quelque temps. Elle a été abordée dans les interventions faites précédemment par Norwest devant votre comité. Norwest a d'ailleurs déposé devant le groupe de travail un avis détaillé rédigé par un cabinet d'avocats de New York qui compare les possibilités d'accès au marché des États-Unis à celles du marché canadien. Ces possibilités sont en fait plus étendues sur le marché des États-Unis et, à certains égards, s'appuient sur des principes plus rigoureux qu'au Canada; elles ont d'ailleurs servi de modèle pour certaines des recommandations que nous avons faites au sujet des modifications susceptibles d'être apportées au régime canadien.

• 1810

Je pense que cet avis s'appliquait au droit fédéral ainsi qu'à ceux de la Californie et de l'État de New York. On y précisait les exigences en tenant compte des équivalences au niveau de l'application entre les deux pays. Je ne me souviens plus aujourd'hui de tous les détails précis de cet avis, mais je vous en recommande la lecture. C'est une excellente source d'information sur le sujet et je me ferai un plaisir de vous en fournir une copie.

M. Christopher Curtis: Je tiens moi aussi à corroborer cette information. Je suis avocat aux États-Unis et je peux vous dire qu'il n'y a pas à suivre une procédure en vertu de l'article 521 aux États-Unis parce que ce n'est pas nécessaire. Il n'est pas interdit aux banques canadiennes, sous l'unique prétexte qu'elles sont étrangères, de se doter de filiales non bancaires aux États-Unis dans la mesure où ces filiales n'offrent pas des services bancaires, ce qui revient essentiellement à accepter des dépôts. De la même manière, les États-Unis ont un régime de succursales étrangères s'apparentant à celui qui est proposé à l'heure actuelle au Canada et dont peuvent profiter les banques canadiennes.

M. Scott Brison: J'ai été surpris d'apprendre que le BSIF insistait, par exemple, pour que vos centres d'appels et vos représentants opèrent en fait aux États-Unis. Nous avons ici un taux de chômage deux fois plus élevé qu'aux États-Unis. Je me suis demandé quelle pouvait bien en être la raison politique. C'est là un effet pervers. Une telle politique nous fait certainement perdre des emplois, ce qui semble absurde. Quelle en est la raison selon vous?

M. Gadi Meir: En effet, c'est une bonne question, et nous nous la sommes nous-mêmes posée.

Je ne voudrais pas faire porter le chapeau au BSIF. Tout d'abord, je pense qu'en fait c'est la loi qui n'était pas claire. En second lieu, nous ouvrions finalement une voie commerciale nouvelle.

Effectivement, nous offrions ce produit, nous dispensions l'intégralité de ce service à partir des États-Unis, de sorte que c'était une entreprise gérée de l'étranger. Aux termes des dispositions de la Loi sur les banques, nous ne voulions pas être considérés comme une entreprise de banque exploitée au Canada. Ainsi, nous évitions d'avoir à relever de l'article 521 ou de l'annexe II.

Le BSIF a déclaré que pour que tout soit parfaitement en ordre, nous devions absolument nous assurer que toutes les activités—à l'exception des souscriptions bancaires, de la commercialisation et de toutes les activités fondamentales—et même celles qui sont accessoires comme les envois postaux, soient exercées aux États-Unis, ce que nous avons accepté. Nous voulions absolument pénétrer sur ce marché, mettre en route notre programme et nous familiariser avec le crédit au Canada, de sorte que nous avons été d'accord.

La solution à laquelle arrive le rapport MacKay est très bonne. On nous dit dans ce rapport qu'il est ridicule d'affirmer que ce que nous faisons ne consiste pas à dispenser des services bancaires au Canada. Nous serons réputés dispenser des services bancaires au Canada, mais on va autoriser ces activités à condition que nous passions par une procédure d'agrément.

M. Scott Brison: Je sais que depuis l'achat de Barings par ING—cela fait maintenant deux ans, n'est-ce pas?—ce qui inquiète entre autres le Canada au sujet de la fusion des banques nationales, c'est qu'une faillite serait alors catastrophique. Ce serait déjà catastrophique aujourd'hui, et bien plus encore si nos banques étaient plus grosses.

J'imagine que vous allez me parler de la règle des 10 p. 100 et de son maintien dans votre réponse, mais en cas de faillite, estimez-vous qu'un opérateur étranger pourrait reprendre des éléments d'actif bancaires canadiens si on lui en donnait la possibilité?

M. Arkadi Kuhlman: Si l'on en juge par ce qui a déjà pu se passer, il est certain qu'à l'avenir nous aurons nombre de gros conglomérats, non seulement dans le secteur bancaire mais dans tous les domaines. D'ailleurs, 65 p. 100 de l'actif et des recettes de notre groupe correspondent en fait au secteur de l'assurance, et un autre tiers à celui de la gestion de patrimoine.

Je pense que ce qui se passe aujourd'hui au Japon et en Europe nous montre qu'en cas de faillite, la solution sera en partie de recourir à de plus gros regroupements. Si une grande banque canadienne devait faire faillite, je crois que l'on devrait probablement recourir à l'avenir à des solutions quasi gouvernementales, quasi concurrentielles, quasi...

• 1815

M. Scott Brison: Vous prétendez donc que si nous prenons les bonnes décisions politiques, la mondialisation pourrait en fait accroître la stabilité du secteur financier canadien, ou en a le potentiel.

M. Arkadi Kuhlman: Elle en a le potentiel, comme nous l'avons vu dans d'autres secteurs de l'économie. C'est ce qui s'est passé dans le secteur automobile, dans le secteur du transport aérien, etc.

M. Scott Brison: La fusion entre Norwest et Wells Fargo... Dans un secteur aiguillonné par le progrès technologique—et c'est le cas du secteur des banques et des services financiers—quelles sont les économies d'échelle? On avance généralement des arguments fondés sur les économies d'échelle dans les secteurs industriels. Quelles sont les économies d'échelle dans un secteur tel que le vôtre?

M. Gadi Meir: L'ensemble de notre programme au Canada est un parfait exemple d'économie d'échelle. Nous avons élaboré un programme aux États-Unis, conçu tous nos modèles de crédit et acquis toute notre compétence en matière de publipostage aux États-Unis. Nous disposons aujourd'hui de tous nos modèles et de ce savoir-faire et nous avons décidé d'étendre nos activités parce que cela ne nous coûte pas plus cher d'appliquer ces modèles au Canada. Nous avons décidé d'étendre nos activités à un autre marché susceptible d'avoir les mêmes performances et de se comporter de la même manière qu'aux États-Unis. Nous utilisons des modèles très semblables, avec quelques petites modifications. Notre savoir-faire est le même, ce qui constitue pour nous un grand avantage.

M. Scott Brison: Quels obstacles allez-vous devoir surmonter aux États-Unis pour tenir compte de l'intérêt public et d'autres choses de ce genre? Nous allons instaurer un mécanisme extrêmement rigoureux, une analyse d'impact sur le public des fusions en fonction du cadre de discussion posé par le groupe de travail MacKay. Quelle est la situation actuelle aux États-Unis comparativement à ce que propose le rapport MacKay?

M. Gadi Meir: Je ne connais pas suffisamment bien la procédure de fusion aux États-Unis, et je vais donc passer la main à Steve.

M. Steve Wagner: Je connais relativement bien le mécanisme d'acquisition aux États-Unis et la nécessité d'obtenir de manière générale une autorisation de la Banque de réserve fédérale en vertu de la Loi sur les sociétés de portefeuille bancaire.

Aux termes de la Loi sur les sociétés de portefeuille bancaire, le conseil des gouverneurs de la Banque de réserve fédérale—ou plus généralement une banque relevant de la réserve fédérale en vertu d'un pouvoir de délégation—doit tenir compte de plusieurs facteurs: dans quelle mesure les avantages attendus de l'acquisition sont supérieurs aux inconvénients qui peuvent y être associés, qu'il s'agisse d'une réduction de la concurrence ou d'une concentration des ressources... C'est en quelque sorte une analyse d'intérêt public, qui met généralement l'accent sur la nécessité de donner le feu vert aux transactions dans une économie de marché en l'absence de conséquences dommageables. En règle générale, si l'on a des inquiétudes au sujet de la concurrence ou d'autres préoccupations de ce genre, on peut par exemple exiger que les intéressés se départissent de certains éléments d'actif.

M. Scott Brison: Il y a une autre chose qui m'intéresse. M. Meir nous parlait des différences d'évaluation des clients potentiels comparativement à ce que font à l'heure actuelle les banques à charte canadiennes.

J'étais dans le privé avant de venir ici. Il est indéniable que les banques à charte canadiennes ont toutes les mêmes critères de prêt. Elles appliquent surtout des ratios et font de savants calculs comptables. Ce que vous semblez nous proposer s'apparente davantage à ce que les banques canadiennes qualifiaient de prêts personnalisés. Ce modèle revenait en quelque sorte à évaluer l'emprunteur compte tenu de son expérience passée et non pas comme aujourd'hui en fonction de certains ratios. Voilà qui me semble positif.

En ce qui nous concerne, nous voulons garantir au maximum les intérêts des consommateurs au Canada. Nous voulons par la même occasion nous assurer que le secteur actuel des services financiers au Canada bénéficie des moyens, non seulement d'exercer sa concurrence, mais aussi de réussir au niveau mondial, et voilà pourquoi nous cherchons à concilier tous ces facteurs.

• 1820

En ma qualité d'homme d'affaires, j'aurais aimé que vous soyez ici il y a quelques années, lorsqu'à 19 ans j'ai essayé pour la première fois de lancer mon entreprise, de constituer une société. Cela étant, je peux vous dire au nom de mon parti que nous souhaitons qu'il y ait au Canada davantage de concurrence et de meilleurs services. À mon avis, la seule façon d'y parvenir, c'est d'autoriser davantage de concurrence, tant de la part des sociétés étrangères que des nouvelles banques qui sont susceptibles d'apparaître à la suite des recommandations du rapport MacKay. Il serait toutefois naïf de notre part d'ouvrir davantage nos frontières tout en menottant par la même occasion nos établissements financiers canadiens en leur refusant la possibilité de fusionner, d'exercer leur concurrence et de protéger les emplois canadiens.

Je vous remercie.

Le président: Merci.

Monsieur Szabo, vous avez une question à poser?

M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.

Une grande partie des discussions que nous avons au sujet du rapport du groupe de travail MacKay semblent tourner autour de la question de la réglementation, et nombre d'entre vous ont mentionné la nécessité de réduire le fardeau de la réglementation. Par principe, je pense que c'est une bonne chose. Les entreprises devraient pouvoir s'autoréglementer.

Au Canada cependant, lorsqu'on en vient aux opérations en quelque sorte hybrides du secteur des services financiers, qui font appel à la fois à la banque et à l'assurance, compte tenu du fait que le groupe de travail propose que l'on englobe aussi le prêt-bail automobile, attendu que cela relève à la fois de la réglementation fédérale et provinciale, il m'apparaît très difficile de véritablement progresser sur la voie de la restructuration du secteur des services financiers sans nous pencher au départ sur notre cadre de réglementation.

J'aimerais donc profiter de vos lumières pour que vous nous fassiez l'analyse comparative des cadres de réglementation et que vous nous disiez quelle est selon vous la voie que le Canada devrait suivre en nous précisant éventuellement dans quelle mesure une réforme de la réglementation serait le prélude à une véritable restructuration ou à une ouverture à la concurrence dans l'ensemble de ce secteur.

M. Arkadi Kuhlman: Compte tenu des observations que j'ai faites, je pense que vous reprenez précisément notre position. Il est indéniable que la question du cadre réglementaire nous apparaît essentielle pour ce qui est d'améliorer son efficacité.

Il convient de renforcer le BSIF pour qu'il puisse exercer ses multiples fonctions, telles que celles qui consistent actuellement à surveiller les sociétés de portefeuilles, les sociétés transfrontières et les multinationales qui opèrent ici sous différentes formes.

Le BSIF n'a pas besoin d'être assisté. Il a besoin de crédits, d'un plus grand nombre de talents, de capacités de surveillance accrues, et c'est ce qui importe avant tout, parce qu'à partir du moment où nous nous ouvrons davantage à la concurrence, il nous faudra trouver essentiellement les moyens de fournir au BSIF les ressources nécessaires pour qu'il puisse s'acquitter de sa tâche.

Par ailleurs, compte tenu du fait que nous cherchons à jouer un rôle de leader au plan international dans le cadre du G-7, je ne vois pas comment nous pourrions y parvenir sans avoir au préalable renforcé ici notre base de connaissances et notre capacité de réglementation.

L'une des raisons de nos difficultés actuelles liées au fardeau de la réglementation vient du fait que nous continuons à enserrer tout le monde dans le même carcan. Je pense que l'on pourrait trouver des solutions s'appliquant à différents types d'organisations, à différents types de pratiques commerciales, si au départ on renforçait le BSIF. Je considère que c'est l'un des problèmes majeurs qu'il nous faut régler.

Ce qui nous intéresse, c'est que le BSIF puisse disposer des outils nécessaires. Je ne sais pas d'où vont provenir ces outils, qu'il s'agisse de financement ou de mandat, pour que l'on puisse essentiellement entreprendre cette tâche.

M. Richard Owens: J'ajouterai qu'à mon avis l'un des enjeux majeurs de la réglementation, c'est celui-là même dont nous discutons aujourd'hui, soit les critères d'entrée sur le marché des banques étrangères ou des établissements qualifiés de banques étrangères.

La définition donnée aux banques étrangères dans la Loi sur les banques est extrêmement large et elle fait relever de la réglementation fédérale tous les demandeurs qui veulent exercer leurs activités dans le domaine des services financiers au Canada en déterminant qui est autorisé à passer par cette porte et dans quelles conditions.

La question que nous posons aujourd'hui est tout à fait fondamentale sur le plan de la réglementation, la réforme revêtant une importance essentielle pour l'entrée sur le marché des banques étrangères et la plus grande disponibilité des services au Canada. Il s'agit là d'une compétence fédérale. Elle s'exerce principalement en vertu des dispositions pertinentes qui traitent des banques étrangères dans la Loi sur les banques, soit les articles 508 à 521.

• 1825

Voilà le principal obstacle et la principale porte à franchir. C'est donc là-dessus que nous devons avant tout nous pencher, et surtout du point de vue de l'accès sur le marché, qui est encore plus fondamental que le reste.

En second lieu, puisque nous sommes au Canada, il va sans dire que dans la mesure où nous parviendrons à harmoniser cette réglementation et faire en sorte que les provinces et le gouvernement fédéral arrivent à s'entendre sur une structure au sein de laquelle ils puissent véritablement collaborer, ce serait terriblement avantageux. Je sais que des efforts ont été faits en ce sens et je ne veux absolument pas les mésestimer.

Nous sommes aujourd'hui en présence d'aberrations en matière de compétence qui proviennent de notre histoire constitutionnelle et qui font que le gouvernement fédéral exerce son contrôle sur les banques sans que personne n'ait jamais précisé exactement en quoi consistent les services bancaires par opposition aux autres services financiers. On a aménagé en quelque sorte la compétence fédérale en matière d'assurance et de fiducie même s'il s'agit en fait d'une compétence provinciale, et l'on s'entend plus ou moins sur le fait que cela relève aujourd'hui du fédéral. Toutes les autres activités relèvent entièrement de la compétence provinciale. Il y a donc en fait une certaine confusion.

Les principes ne sont pas entièrement contradictoires, mais leur application peut obliger un même prêteur, Capital One ou Norwest, par exemple, à remplir 11 formules de divulgation différentes concernant le coût de l'emprunt en fonction de la juridiction compétente. Ce n'est dans l'intérêt de personne. C'est inefficace. Je propose donc que l'on se penche sur les détails, que l'on élague une à une les dispositions qui s'appliquent à l'accès sur le marché des banques étrangères, aux restrictions imposées aux banques étrangères en vertu de la Loi sur les banques. Si les responsables de notre réglementation poursuivent leur travail et réussissent éventuellement à éliminer certains chevauchements qui existent à l'échelle de notre pays, ils allégeront d'autant le fardeau imposé à ces établissements étrangers et nationaux.

Le président: Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.

De nombreuses questions ont déjà été posées, bien entendu. Toutefois, je vous écoute parler ici de concurrence et j'entends dire que la concurrence serait profitable aux consommateurs. D'après ce que j'entends, pourtant, davantage de déréglementation... À l'heure actuelle, vous facturez 300 points, 500 points, 800 points, c'est-à-dire trois pour cent, cinq pour cent, huit pour cent, de plus que le taux bancaire pour dispenser ces services. Toutefois, si on allait davantage dans le sens de la déréglementation, cela ne veut pas dire que vous vous contenteriez de moins des trois pour cent, cinq pour cent ou huit pour cent que vous facturez au consommateur canadien. Je ne vois donc pas pourquoi il faut en quelque sorte nous ouvrir davantage à la concurrence, parce que ce serait encore davantage «aux risques et périls du consommateur».

Par ailleurs, j'entends M. Kuhlman nous dire que depuis 35 ans les banques étrangères végètent dans notre pays; elles n'ont pas pu pénétrer sur le marché canadien pour la simple raison... Elles ont dû abandonner.

En fait, nous protégeons d'une certaine manière nos banques canadiennes. Personne ne peut en prendre le contrôle. Il y a eu des fusions et l'on ne peut prendre le contrôle de nos banques canadiennes. Je suis bien certain que la plupart d'entre vous aimeraient être dans la position de nos six banques nationales ici au Canada.

Est-ce davantage de concurrence que vous voulez apporter... Ou s'agit-il d'un service que les Canadiens n'arrivent peut-être pas à obtenir? L'accès au capital est de cinq, six ou dix pour cent plus élevé que le taux bancaire... Voulez-vous effectivement me dire par là que si l'on s'ouvre davantage à la concurrence, les taux d'intérêt vont baisser dans notre pays et les services s'améliorer? Aujourd'hui, j'entends dire que vous voulez davantage de transparence pour ce qui est des services offerts à la population canadienne. D'un autre côté, vous n'allez pas modifier les prix que vous pratiquez.

J'aimerais que vous nous donniez votre avis, monsieur Kuhlman. Si vous aviez la possibilité de devenir une banque canadienne comme celles qui existent aujourd'hui, vous en seriez très heureux, n'est-ce pas? Si vous appelez des changements, ne pensez-vous pas que les fusions... Ne pensez-vous pas qu'elles n'ont pas une taille suffisante et qu'il leur faut fusionner pour être compétitives à l'échelle mondiale?

• 1830

M. Arkadi Kuhlman: Je pense que vous avez tout à fait raison. En réalité, à mon avis, tout le monde aimerait être un peu mieux placé par rapport à la concurrence. Notre point de vue est en fait légèrement différent de celui des autres membres du groupe. Ce ne sont pas les possibilités d'accès sur le marché qui nous préoccupent; c'est l'égalité de traitement face à la concurrence.

En matière de taux, nous sommes une banque d'escompte qui s'adresse au grand public. Nous prêtons à huit pour cent. C'est trois quarts de plus que notre coût. Nous rémunérons les dépôts à 4,75 p. 100. Je ne connais aucune autre banque au Canada qui verse une telle rémunération. Donc, du point de vue des consommateurs, je pense que nous sommes tout à fait concurrentiels au niveau des prix sur le marché en fonction des services que nous dispensons.

Je considère que l'autre question renvoie strictement à l'équité. Nos actionnaires ont engagé des centaines de millions de dollars de capitaux pour entrer sur ce marché et essentiellement fournir un service. Que les Canadiens veuillent ou non que la concurrence puisse s'exercer ou encore qu'il y ait un degré limité de concurrence, je pense que c'est à eux de le décider. C'est le pouvoir politique qui doit se faire l'expression de notre volonté. Nous disons pour notre part qu'il convient simplement d'arrêter les règles de base et faire en sorte qu'elles soient équitables.

Ce qui me paraît quelque peu difficile à concevoir, c'est que les gens parlent constamment de l'arrivée des grosses et méchantes banques étrangères qui vont finir par nous étouffer si nous ne faisons pas quelque chose et si nous ne devenons pas plus gros. Je réponds à cela que l'arrivée des grosses et méchantes banques étrangères n'est pas à l'ordre du jour parce que nous avons finalement limité leur possibilité d'accès sur le marché. Nous avons en quelque sorte érigé une barrière et il nous appartient en tant que Canadiens de l'abattre ou de la laisser en place. Je considère toutefois qu'il nous faut le dire franchement.

Nos actionnaires n'y verraient absolument rien à redire à condition de savoir exactement quelles sont les règles. Il suffit de nous dire si le Canada est ouvert ou fermé, ou encore ouvert jusqu'à un certain point aux établissements étrangers. En tant que représentants des actionnaires étrangers, c'est finalement tout ce que nous voulons vraiment savoir.

Le président: Monsieur Epp.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Je viens de feuilleter le rapport de Wells Fargo et je suis surpris par votre succès. Aux États-Unis, il semble que vous ayez un actif de 100 milliards de dollars. Vous pourriez presque déposer un acompte sur l'achat du Canada. Je considère qu'un tel montant d'actif est la marque d'un véritable succès financier. Ce n'est pas que je vous conseille de faire cela; c'est simplement pour remettre les choses en place.

Nous avons un rapport qui nous dit que vous êtes les chefs de file aux États-Unis en ce qui concerne les prêts aux gens d'affaires—et particulièrement aux femmes, avec des engagements de 10 milliards de dollars en matière de prêts aux petites entreprises dirigées par des femmes. Je suis vraiment surpris que vous puissiez le faire sans avoir même à demander des états financiers à ces emprunteurs. Il me semble que c'est un bon modèle. Au lieu de vous autoriser à entrer sur notre marché, nous devrions peut-être inciter quelqu'un d'autre au Canada à lancer une telle entreprise et à commercialiser ce produit aux États-Unis, parce qu'il donne là-bas aussi de bons résultats.

Ce n'est pas vraiment une question. C'est juste un commentaire.

Le président: Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: J'aimerais aussi faire une observation. Plus tôt, M. Pillitteri demandait pourquoi le marché canadien devait s'ouvrir aux banques étrangères. À mon humble avis, il y a trois bonnes raisons. Si on m'avait laissé comparaître ce matin, j'aurais pu en traiter aussi. La première raison, c'est que c'est toujours bon de s'ouvrir au monde; c'est un principe élémentaire. La deuxième, c'est que depuis une dizaine d'années, lors de toutes les négociations commerciales qu'il y a eu, soit dans le cadre du GATT, qui est devenu l'OMC, soit dans le cadre de l'Accord de libre-échange nord-américain, il y a eu une ouverture progressive; des clauses ont été adoptées par les pays membres pour ouvrir le marché des services financiers. La troisième, c'est qu'on ne peut pas avoir le beurre et l'assiette au beurre en même temps. Les banques canadiennes...

[Traduction]

M. Gary Pillitteri: Pas dans le cas des caisses populaires au Québec.

[Français]

M. Yvan Loubier: À l'heure actuelle, monsieur Pillitteri, les banques canadiennes vont chercher plus de 40 p. 100 de leurs revenus à l'étranger. Les banques canadiennes ont une soixantaine de filiales à l'étranger. Certaines d'elles vont même chercher plus de 50 p. 100 de leurs revenus à l'étranger. Alors que les autres pays ouvrent leur marché et que nous allons faire des profits chez eux sur le plan international, comment pouvons-nous continuer à fermer le marché canadien aux banques étrangères? Ça ne résiste pas à l'analyse objective et ça ne résistera pas non plus, au cours des sept ou huit prochaines années, aux rondes successives de négociations commerciales.

• 1835

C'est ce que je voulais ajouter, monsieur le président. Ce n'était pas une question, mais seulement une remarque par rapport à la question de M. Pillitteri.

[Traduction]

M. Gary Pillitteri: Monsieur le président, il me faut répondre à la question posée par M. Loubier.

Il n'était pas question pour moi de préconiser une fermeture du marché canadien, la fermeture de nos frontières aux établissements qui viennent au Canada. Il y a une ouverture à la concurrence, je voudrais que ce soit clair. Si les taux d'intérêt avaient baissé davantage au Canada...

Vous le savez, monsieur Loubier, je suis aussi un agriculteur et laissez-moi vous dire une chose. On parle de ceux qui écrèment le marché. On a tellement écrémé le marché dans certains secteurs, surtout dans notre pays, qu'il ne reste plus rien pour le consommateur canadien. Je voulais simplement faire remarquer que ce qui s'est passé par exemple dans l'agriculture pourrait très bien survenir dans d'autres secteurs d'activités lorsque des intervenants extérieurs viennent écrémer le marché. Il pourrait très bien ne plus rien rester au consommateur canadien. Voilà ce que je voulais dire, il ne s'agissait pas de s'opposer à l'ouverture du marché.

Oui, sans aucun doute, il faut s'ouvrir sur l'extérieur. Même l'année dernière; vous étiez tout à fait disposés à ce que l'on ouvre le marché en faveur des succursales lorsque le gouvernement s'est montré prêt à adopter une loi en ce sens. Vous savez que le gouvernement va déposer un projet de loi à cet effet et il ne faut donc pas dire que nous voulons que le marché reste fermé. Il s'agit de l'ouvrir davantage.

Le président: Merci, monsieur Pillitteri.

J'ai une question qui a trait à l'avenir du secteur des services financiers. Bien entendu, lorsqu'on parle d'avenir et du groupe de travail MacKay, je me demande souvent de quel avenir il s'agit. S'agit-il de mon avenir? De celui de mes enfants? Je pense que le secteur des banques ou des services financiers que vont connaître mes enfants sera très différent de celui auquel nous sommes habitués.

Pourriez-vous préciser clairement au comité quelles sont les caractéristiques qu'à votre avis prendra à l'avenir le secteur des services financiers ici au Canada. Je sais bien entendu que la mondialisation de votre secteur s'accentuera énormément au cours des 10 à 20 prochaines années. J'aimerais que vous nous donniez une idée, en tant que spécialiste du domaine, de la façon dont les banques étrangères vont s'insérer dans le nouveau secteur canadien des services financiers.

Monsieur Wagner?

M. Steve Wagner: Là encore, en ce qui concerne Norwest, nous visons traditionnellement certains créneaux. Nous avons surtout cherché au cours de ces dernières années à éviter que l'on qualifie nos activités canadiennes d'activités bancaires. De manière générale, voilà 100 ans que notre organisation obtient d'excellents résultats dans le domaine des crédits au consommateur. Nous sommes très concurrentiels dans ce domaine, nous avons eu du succès et nous avons assisté à de nombreux regroupements. Tel que nous voyons l'avenir sur le marché canadien—c'est du moins notre voeu—il s'agira pour nous de pouvoir exercer notre concurrence et essentiellement de fournir les services que nous avons l'habitude de fournir.

Cela ne répond probablement à la question plus large que vous posez, mais je pense que c'est la meilleure réponse que je puis vous donner à notre niveau.

M. Richard Owens: Oui, c'est une grosse question. Nous pourrions passer beaucoup de temps à essayer d'y répondre mais, l'avenir étant ce qu'il est, il est probable que nous n'y parviendrons jamais complètement.

J'aimerais ajouter deux observations à ce qu'a déclaré Steve. La première revient à dire tout d'abord qu'il faut voir que le Canada est un bon marché. C'est un marché riche. Les établissements étrangers continueront à venir ici offrir des services traditionnels parce que le marché l'exige d'un point de vue de la répartition des risques, pour qu'il y ait suffisamment d'établissements qui accordent des prêts dont ont besoin les entreprises et qui desservent leurs marchés financiers traditionnels.

Je pense que vous allez voir les établissements financiers jouer un rôle de plus en plus agressif et déterminant pour pousser les marchés à évoluer et innover sur ce marché—nous en avons déjà vu quelques exemples aujourd'hui. C'est en partie l'héritage de l'évolution du marché des services financiers au Canada qui a été en quelque sorte, je ne dirais pas immunisé, mais protégé jusqu'à présent contre la concurrence étrangère.

• 1840

Il a donc été difficile pour les établissements étrangers, comme nous l'a expliqué M. Kuhlman, de s'établir de manière traditionnelle sur le marché canadien depuis 1980. Il est très difficile de se doter de toute la gamme des services ou d'établir des services à la clientèle traditionnels au Canada parce que ces établissements n'ont pas l'expérience nécessaire pour asseoir de cette manière de nouvelles entreprises et ils doivent faire face à ces énormes réseaux de succursales des banques canadiennes actuelles, qui sont très difficiles à concurrencer.

Ce sont donc les nouveaux créneaux et les possibilités offertes par les nouvelles technologies pour délivrer les services financiers qui créent des débouchés à des établissements comme ING Direct afin, comme je l'ai dit, d'apporter des innovations sur le marché. J'ai d'ailleurs bien l'impression que dans les 10 prochaines années la situation aura tellement changé que l'on n'aura plus le même type de croissance. Il n'y aura plus là des secteurs novateurs, des créneaux sur lesquels ces établissements pourront fonder leur croissance.

La Banque de Hongkong a réussi à se doter d'un bon réseau de succursales en tant que banque étrangère. Citibank n'y est pas parvenue; elle dispose de quelques succursales. Presque personne d'autre n'a vraiment cherché à y parvenir. L'expérience de Norwest a été quelque peu différente, cette dernière ayant eu la possibilité de se doter de succursales dans son propre créneau, ce qui a été là aussi le cas des assureurs, qui ont pu recourir à des intermédiaires canadiens leur permettant de dispenser plus largement leurs services, à l'image des fonds communs de placement.

Le président: La spécialisation va-t-elle ainsi s'accroître?

M. Richard Owens: Sans aucun doute. Je pense que cela est dû aux possibilités offertes par les nouvelles technologies. Les produits peuvent être ainsi affinés en fonction de données auxquelles personne n'avait accès auparavant. D'ailleurs, à mesure que progressera l'utilisation des techniques d'information dans les entreprises et que l'on exploitera davantage les données correspondantes, ces produits deviendront encore plus ciblés sur certaines catégories, plus efficaces et plus rentables pour certains secteurs précis du marché.

Le président: Voilà une semaine et demie que nous débattons véritablement de la question et que nous écoutons les témoins qui se présentent devant notre comité, mais il y a une chose qui devient très claire dans notre esprit, c'est que l'on assiste nécessairement à un véritable bouleversement, car on entend des gens qui sont tout à fait en faveur d'une gamme complète de services traditionnels alors que d'autres sont motivés avant tout par le progrès technique.

Cela me rappelle la comparaison que m'a faite quelqu'un avec l'industrie de l'automobile qui, si elle avait progressé et réduit ses prix aussi rapidement que dans le secteur de l'informatique, nous ferait payer deux dollars une Lexus capable de voyager à la vitesse du son avec quelques gouttes d'essence. Voilà qui nous donne une idée de la vitesse du changement.

J'aimerais que vous me disiez quel est à votre avis le rôle que va jouer la technologie à l'avenir, notamment en ce qui concerne les banques étrangères, les établissements étrangers présents sur le marché de l'ensemble du Canada.

M. Arkadi Kuhlman: Je vais tout d'abord essayer de faire quelques rapides observations même si je suis d'accord pour dire qu'il est bien difficile d'embrasser l'ensemble du problème. Vous avez fait quelques remarques intéressantes en exposant la question—le fait que nous sommes en plein bouleversement. Je pense bien comprendre l'enjeu et les possibilités ainsi que les risques que cela implique.

Comme je l'ai indiqué, la technologie est en quelque sorte un moyen insidieux de franchir les frontières. C'est ainsi que nous avons accès par l'intermédiaire de notre actionnaire à une technologie en matière de carte à mémoire qui est probablement l'une des meilleures au monde. Elle est expérimentée dans un certain nombre de pays. Un certain nombre d'expériences ont été tentées dans notre pays avec les cartes à mémoire par les grosses banques actuelles, avec des succès divers. Nous avons aujourd'hui découvert une application qui pourrait effectivement donner d'excellents résultats.

• 1845

Je pense que ce genre de tâtonnement expérimenté au Canada est positif, parce qu'il a de nombreuses retombées. Des discussions sont en cours à l'heure actuelle avec Bell, de sorte qu'il y a des alliances stratégiques. Notre alliance stratégique avec Canadian Tire porte presque uniquement sur la technologie et l'infrastructure que cette société, en notre compagnie et celle d'un autre spécialiste technique, est en train de mettre en place.

L'expérience de ces 30 dernières années m'a enseigné un certain nombre de choses. L'une d'entre elles, c'est que dans notre secteur canadien de la banque, nous avons toujours eu une mauvaise appréciation de la courbe du progrès technologique. Nous nous sommes trompés sur les guichets automatiques, dont la courbe de progrès s'est révélée bien plus prononcée que nous le pensions et nous sommes partis trop tard. Nous nous sommes trompés sur la courbe des cartes de débit, plus prononcée que nous le pensions. Nous avons mal apprécié la courbe des cartes à mémoire, et le mot de la fin n'est pas encore dit dans ce secteur. Nous sommes évidemment passés à côté de la courbe s'appliquant aux transactions bancaires par téléphone, à l'EDI et au commerce informatique.

Je juge qu'il est en fait important que tout en conservant ce juste milieu, le Canada continue à expérimenter et à avancer sur tous ces fronts. Nombre de nos services bancaires de base ont été «uniformisés», comme cela s'est passé pour d'autres services. À une époque donnée, il était logique d'avoir 23 ou 30 comptes d'épargne différents. Je pense que l'on en est maintenant rendu à un seul. Voyez ce qui se passe dans les grands services de courtage, qui peuvent désormais dispenser des services de courtage traditionnels.

Au moment même où nous nous parlons, nous assistons à une explosion des intermédiaires en matière de planification et de services financiers, une distinction nette apparaissant sur le marché entre les services classiques dispensés par les succursales et ceux qu'offrent aujourd'hui les planificateurs financiers. Ces services sont essentiellement centralisés par les planificateurs financiers, qui s'adressent à un certain nombre de fournisseurs.

Le mécanisme d'intermédiaires qui existe aux États-Unis arrive au Canada, et je crois que c'est positif parce que cela oblige les intervenants à préciser où est leur domaine de compétence, où doivent aller leurs ressources et quelles sont les possibilités qui s'offrent à eux. Doivent-ils agir en tant que distributeurs, concepteurs, divulgateurs ou fournisseurs de services en bout de chaîne? Je considère qu'il est très important que le Canada conserve un environnement très structuré et positif dans lequel pourront s'exercer toutes ces initiatives.

Si vous me le permettez, je dirai que l'on peut faire plus. Je considère que l'on peut s'investir davantage. Ce n'est pas une critique du passé; c'est essentiellement un projet pour l'avenir.

Le président: Chaque fois qu'il y a une évolution ou une révolution, qu'il s'agisse de la transition entre une société agricole et une société industrielle ou, comme c'est le cas aujourd'hui, lorsqu'on entre dans l'ère de l'information, il y aura toujours des victimes. On entend souvent dire qu'il y a aujourd'hui une polarisation des classes en fonction des connaissances techniques.

Je pense aussi que les entreprises canadiennes, qu'il s'agisse des banques étrangères ou des banques nationales, ont une responsabilité sociale, qui va au-delà de leur responsabilité économique, leur imposant de s'assurer que toutes les personnes qui sont essentiellement tributaires de la fourniture d'une gamme complète de services et d'une économie que l'on peut qualifier de traditionnelle, bénéficient elles aussi d'une possibilité d'accès aux services dont elles ont besoin pour vivre au quotidien.

Quel sera selon vous le rôle des établissements financiers lorsqu'on abordera cette nouvelle ère?

Monsieur Wagner.

M. Steve Wagner: Je pense que l'on fera moins la distinction entre les différents établissements financiers que par le passé, lorsque l'on pouvait considérer qu'une banque avait un certain rôle à jouer et une société d'assurances un autre type de rôle. La nature et la gestion des différents types de produits financiers évoluant, on va s'apercevoir que les banques vont s'intéresser davantage aux produits liés à l'assurance, les sociétés d'assurances s'intéressant davantage aux produits se rapportant au courtage.

Pour ce qui est donc des produits financiers qui seront fournis, on assistera donc d'une part à une plus grande spécialisation débordant des limites traditionnelles entre établissements alors que, d'autre part, on pourrait très bien assister à une fusion ou à un regroupement accru des services financiers donnant naissance à quelque chose qui s'apparente davantage à un supermarché des services financiers.

• 1850

Je pense qu'en dernière analyse on aura finalement ce que veut le consommateur, parce que je crois que c'est le consommateur qui en fin de compte va déterminer de quelle façon ces produits vont être conçus et distribués.

Le président: D'un point de vue historique, toutes les grandes évolutions ont entraîné par ailleurs une progression globale des emplois créés. Pensez-vous que l'entrée dans l'ère de l'information va effectivement créer davantage d'emplois pour les gens de votre secteur?

Monsieur Kuhlman.

M. Arkadi Kuhlman: Je crois que c'est le cas, mais selon certaines modalités qui ne sont pas évidentes. Ainsi, on consacre des sommes importantes à la technologie et à la commercialisation. Comparativement à la répartition traditionnelle des dépenses, les pourcentages ont complètement changé. Ainsi, nous consacrons aujourd'hui davantage d'argent à la commercialisation. Traditionnellement, ce poste représentait environ cinq pour cent de nos dépenses alors qu'il s'élève aujourd'hui à environ 33 p. 100. Ces montants d'argent sont affectés à la publicité et vont aux gens qui conçoivent la publicité, les artistes graphiques, les installateurs d'affiches, les patrons de presse, etc. Je pense donc que c'est tout un ensemble de choses et que l'orientation a tout à fait changé.

En second lieu, je pense que rien n'a véritablement changé sur le plan de la responsabilité sociale. Nous avons affecté l'année dernière environ 8,5 p. 100 de nos dépenses à des causes liées aux hôpitaux. Nous aidons les universités. Nous contribuons à la recherche médiale. Nous avons consacré d'importantes sommes à des projets zoologiques sur la faune. Je pense que c'est là faire montre de responsabilité sociale en tant qu'entreprise. Je considère que nous sommes en droit d'attendre la même chose de tous les intervenants financiers, qu'ils soient nationaux ou étrangers, et nous sommes confiants que tout cela se réalisera.

Sur un plan plus général, il est intéressant de voir que les clients... Il nous faut penser aussi que notre meilleur moyen d'accès est le téléphone. Tous les Canadiens en ont un, sans oublier, comme me le rappelait il y a quelque temps un membre de ce comité, les 415 000 téléphones à cadran qui subsistent. On se pose la question de savoir si les consommateurs ont effectivement une possibilité d'accès. Effectivement, grâce à la télévision et au téléphone, les moyens d'accès existent. Les Canadiens, qui habitent dans l'un des plus grands pays du monde, avec les meilleures possibilités d'accès, ont la possibilité d'accéder aux services. Nombre de nos clients nous disent que le Canada est désormais en marche. Des opérations qui jusque-là étaient très complexes, faire un dépôt, un retrait ou un virement, par exemple, peuvent être effectuées aujourd'hui bien plus efficacement tout en ménageant les possibilités d'accès et tout ce dont le consommateur a besoin.

Je suis donc très confiant pour l'avenir et je pense que la population canadienne sera très bien servie par des moyens divers.

Le président: J'ai une dernière question à vous poser au sujet des fusions. Je ne vous parle pas des deux fusions qui sont proposées, mais plutôt de la fusion en tant que pratique commerciale légitime. Dans son rapport, M. MacKay nous expose longuement, et je dirais même que c'est l'un des éléments fondamentaux de son rapport, sa volonté de mettre en place un secteur des services financiers caractérisé par l'esprit d'entreprise.

Êtes-vous d'accord pour dire que les fusions sont en soi une condition importante de l'apparition d'un meilleur esprit d'entreprise dans le secteur des services financiers.

Monsieur Wagner.

M. Steve Wagner: Je le pense. J'ai l'impression que ces dernières années, les acquisitions les plus récentes ont été le fait de petites organisations qui, je le répète, occupaient certains créneaux bien précis. Ce sont des gens ayant la volonté d'entreprendre qui ont créé ces services financiers ou des entreprises de ce genre, jusqu'à ce qu'une société comme la nôtre intervienne et paie une prime assez élevée pour acquérir cette entreprise, injecter davantage de capitaux dans celle-ci et la faire progresser. Je considère que pour la plupart des entrepreneurs, il s'agit là d'une assez belle carotte présentée sur un bâton.

Le président: D'autre chose à ajouter? Monsieur Kuhlman.

M. Arkadi Kuhlman: Nous sommes bien évidemment en faveur des fusions en général; elles ont leur place dans l'ensemble du système. Je considère cependant que c'est la nature de la fusion qui importe. Il est bien évident que l'on voit dans le monde entier des fusions qui donnent de bons résultats et d'autres qui échouent. Je crois que cela tient à leur nature, aux résultats que l'on peut en attendre et à la façon dont elles sont exécutées. Selon la vieille formule, si vous mettez ensemble deux éléphants, vous n'obtenez qu'un éléphant encore plus gros.

• 1855

C'est là à mon avis l'élément caché qu'il convient de considérer; quelle croissance va être obtenue, comment vont être redistribués les éléments d'actif et dans quelle mesure les organisations vont évoluer pour finalement mieux fonctionner, que ce soit au niveau de l'efficacité, de la productivité ou du rendement.

Je considère que les dossiers de fusion doivent être évalués en fonction de l'intérêt public compte tenu de leur nature et de leur finalité. Je pense qu'il faut faire preuve d'un esprit d'ouverture vis-à-vis des fusions. La question est de savoir ce qu'elles vont permettre effectivement de réaliser et comment elles vont se dérouler.

Le président: Merci. Au nom de notre comité, je ne veux pas manquer ici l'occasion de remercier sincèrement votre groupe pour son excellente intervention.

Monsieur Desrochers.

[Français]

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): J'aimerais faire appel au Règlement et déposer deux motions. Puisque les motions ne visent pas nos invités, vous pouvez leur dire de se retirer. J'ai des choses à discuter avec vous, monsieur le président.

M. Yvan Loubier: Il les as remerciés?

M. Odina Desrochers: Oui.

[Traduction]

Le président: Je remercie encore une fois sincèrement le groupe de témoins et je les félicite pour la qualité de leur intervention. Merci.

[Français]

M. Odina Desrochers: Monsieur le président, j'aimerais déposer des motions compte tenu du fait qu'on a refusé que mon collègue comparaisse ce matin devant le comité concernant le rapport MacKay. Ma motion se lit comme suit:

    Que le Comité des finances autorise le député de Saint-Hyacinthe—Bagot, M. Yvan Loubier, à comparaître devant le comité sur le rapport MacKay, au nom de son parti.

Ma deuxième motion, monsieur le président, se lit comme suit:

    Que le Comité des finances confirme la date du 30 octobre, à 9 h 00, la comparution du chef du Bloc québécois, M. Gilles Duceppe au comité afin qu'il puisse déposer son rapport sur les consultations prébudgétaires que lui et ses collègues ont réalisé au cours de l'été.

[Traduction]

Le président: Qui veut débattre de la question?

(Motions adoptées)

[Français]

M. Yvan Loubier: La question est réglée, monsieur le président. C'est aussi simple que ça. Je vous remercie infiniment.

[Traduction]

Le président: Nous allons faire une suspension de séance de cinq minutes et nous reviendrons ensuite.

• 1858




• 1917

Le président: J'ouvre à nouveau la séance et je souhaite la bienvenue à M. A. Charles Baillie, président du conseil et chef de la direction de la Banque Toronto Dominion, ainsi qu'à Robert P. Kelly, son vice-président.

Vous disposez de quelque 10 ou 15 minutes pour présenter votre exposé. Nous passerons ensuite aux questions.

M. A. Charles Baillie (président du conseil et chef de la direction, Banque Toronto Dominion): Merci. Nous sommes heureux d'être ici et de participer au débat concernant l'avenir du secteur financier et l'avenir du Canada.

J'aimerais profiter de l'occasion pour parler de cet avenir aujourd'hui, car selon moi, beaucoup d'attention a été portée aux différentes négociations, aux différentes banques, aux différentes personnalités des banquiers concernés, ainsi qu'à l'incidence à court terme des principaux changements de notre système financier. Mais trop peu d'attention a été portée à une question beaucoup plus importante et plus vaste: où le gouvernement devrait-il amener le secteur financier de notre pays? Quelle est la vision? C'est là une question vitale, car les décisions prises par cette commission et ce Parlement auront des répercussions importantes, non seulement sur quelques banques, mais sur le secteur financier en général et sur l'avenir de notre pays.

Le rapport MacKay présentait une analyse adéquate des forces qui influent sur notre secteur à l'échelle mondiale. Le rapport formulait également des recommandations qui transformeraient notre secteur. Nous, à la banque TD, partageons l'opinion présentée par l'Association des banquiers canadiens à l'effet que le rapport MacKay adopte une approche équilibrée, sans réels gagnants ni perdants, et que les recommandations doivent être jugées dans leur ensemble, de façon à garantir des règles du jeu équitables ainsi qu'une concurrence juste et intégrale. Le défi sera de taille, car certains groupes préféreront certains points, certains en favorisant d'autres, chacun sera tenté de faire sa propre sélection. Mais cela romprait l'équilibre pour finalement nuire aux consommateurs et au secteur financier.

Le groupe de travail MacKay a demandé l'apport de changements et a recommandé des changements précis dans le secteur, en stipulant que le statu quo n'était plus une option viable. Mais le rapport MacKay ne prétendait pas définir la vision que pourrait ou devrait adopter le secteur canadien. Cette occasion vous est offerte à vous, nos législateurs, les représentants élus chargés de servir et de promouvoir l'intérêt national. C'est à vous d'exprimer cette vision. C'est une chance historique aux conséquences notables.

Comme on le sait, les recommandations du rapport MacKay métamorphoseraient notre secteur. Mais de quelle façon? Quel genre de secteur est souhaitable au Canada?

Une vision possible du Canada est celle où nous sommes présents à la table des négociations à titre de principal centre financier en Amérique du Nord, contrôlé par des Canadiens avec un siège social au Canada et ayant un certain poids sur les affaires financières mondiales. L'autre possibilité est de quitter notre piédestal et de perdre graduellement notre influence sur les affaires financières et par le fait même, sur les affaires mondiales. Le Canada demeurera peut-être un marché financier sain d'un point de vue national, mais il ne constituera pas une force financière mondiale.

• 1920

Ces deux visions sont à l'extrémité des deux voies fondamentales que peut suivre le gouvernement. La première, qui autorise les grandes institutions à s'acheter entre elles, permettrait la fusion de grandes banques canadiennes ainsi que de grandes sociétés d'assurances canadiennes, de grandes sociétés de fonds mutuels canadiennes et de grands gestionnaires de placement canadiens, ce qui offrirait au Canada quelque six ou huit très puissantes institutions financières de classe mondiale, détenues par des Canadiens, avec un siège social au Canada. Quand je dis «de classe mondiale», c'est en tenant compte du marché mondial en rapide évolution, ponctué par les tendances évoquées par le groupe de travail MacKay, les notions de regroupement et de rationalisation, vu les fusions de taille aux États-Unis et dans d'autres centres financiers mondiaux.

Parallèlement à cet ensemble d'institutions financières canadiennes d'envergure, il existerait une quantité d'autres prestataires de services financiers vigoureux, notamment de grandes institutions de service traditionnel détenues par des étrangers de même qu'un éventail d'entreprises financières étrangères et canadiennes, certaines imposantes, d'autres plus petites, certaines offrant des services traditionnels, d'autres des services spécialisés. Ainsi constitué, le Canada aurait sa place à la table internationale à titre de centre financier prospère. En même temps, notre marché national serait bien servi et les consommateurs canadiens auraient le choix parmi une vaste sélection de prestataires.

L'autre voie consiste à rejeter les fusions, donc à interdire aux grandes institutions de s'acheter entre elles, ce qui revient à dire que nos institutions sont assez grosses pour le Canada et à s'opposer à une concurrence efficace dans les marchés mondiaux. Les parts de marché national des institutions financières canadiennes s'affaibliraient, devant laisser de la place à des concurrents étrangers beaucoup plus imposants. Ce choix est valable si votre vision du Canada fait fi de l'excellence. Ce choix ne serait pas catastrophique. Aucune crise n'en découlerait. Le déclin de notre influence en tant qu'institution et de la position du Canada comme centre financier mondial serait progressif.

Nos grandes banques et sociétés d'assurances et de fonds mutuels sont assez fortes pour poursuivre leurs activités de façon rentable et pour élaborer des stratégies visant l'exploitation d'activités moins diversifiées afin de livrer des rendements acceptables aux actionnaires. Mais qu'est-ce que cela signifie à long terme? À coup sûr, les regroupements se poursuivant à l'étranger, et il ne faut pas se leurrer, les fusions bancaires sont un phénomène mondial, nous perdrions peu à peu notre place à la table. Dans certains secteurs et dans certaines activités, nous ne serions tout simplement plus concurrentiels.

Les regroupements étrangers éloigneraient progressivement nos grandes institutions du premier rang. D'autres pays et d'autres régions rêvent de prendre notre place. D'autres pays et d'autres villes reconnaissent la valeur de posséder un grand centre financier, et s'ils n'ont pas encore procédé à des fusions, ils les encouragent fortement. C'est notamment le cas de la France, des Pays-Bas et de Singapour. Charlotte, en Caroline du Nord, à force d'encourager ses banques à fusionner et à faire des acquisitions est devenue le deuxième centre financier des États-Unis.

Dans un contexte de marchés mondiaux en évolution, il est évident que les stratégies suivies par la banque TD en tant qu'importante institution canadienne de services financiers traditionnels doivent être consolidées et appuyées par une envergure et une échelle plus imposantes. C'est essentiel si nous voulons conserver nos investissements passifs liés à la technologie et aux nouvelles activités nécessaires à une croissance à long terme et si nous voulons maintenir les avantages en termes d'emploi, de rendements économiques, de progrès et d'influence qu'apportera cette croissance.

Je ne parle pas seulement de la banque TD, il ne s'agit pas seulement de notre projet de fusion avec la CIBC. Je parle du Canada. Avoir une place à la table en tant que membre du G-7 au cours des 10 dernières années a été avantageux pour le Canada. Cela s'est révélé positif pour nos secteurs d'activité, pour notre présence dans le monde, pour notre influence et pour notre économie. Tout a commencé avec la vision de Wilfrid Laurier pour qui le XXe siècle serait le siècle du Canada. Malgré notre population restreinte, nous avons eu assez d'institutions canadiennes de classe mondiale pour rester à la table. Mais qu'en est-il du XXIe siècle, avec les nouvelles tendances qui bouleversent le monde actuellement?

• 1925

Au fur et à mesure qu'elles s'éloigneront du premier rang, certaines institutions abandonneront les activités où elles ne seront plus concurrentielles; elles n'auront pas le choix, car elles devront donner un rendement acceptable à leurs actionnaires: c'est absolument essentiel étant donné que nous travaillons dans une économie de marché et que nous appartenons à nos actionnaires. Nous devons servir leurs intérêts. Dans le cas des banques, un Canadien sur deux est un actionnaire. L'intérêt public est considérable et nous l'avons peut-être oublié au cours de ce débat.

La banque TD a déjà abandonné deux activités ces quelques dernières années: les activités de garde et de paie. Ce sont des activités internationales qui, pour être viables, nécessitent des volumes considérables ainsi que de gros investissements dans la technologie pour être concurrentiels. Nous ne pouvions vraiment pas justifier des investissements d'une telle envergure, qui auraient nui à nos autres activités.

Les dépenses en matière de technologie sont essentielles pour pouvoir aller de pair avec les nouveaux concurrents, c'est-à-dire les nouveaux géants mondiaux dans notre secteur et dans d'autres secteurs. Rien que les chiffres sont éloquents. Il fut un temps où la banque TD et la NationsBank dépensaient pratiquement le même montant pour la technologie mais, depuis lors, Nations a fusionné plusieurs fois. À l'issue de sa fusion avec la Bank of America, Nations a affecté l'année dernière 3,8 milliards de dollars canadiens à la technologie. Nous y avons consacré 500 millions de dollars. Il fut un temps où nous dépensions à peu près le même montant que la MBNA pour ce qui est de la technologie liée aux cartes de crédit. L'année dernière, la MBNA y a consacré l'équivalent de 150 millions de dollars canadiens alors que nous dépensions 6,5 millions de dollars.

Il n'y avait pas de décalage, alors qu'il y a maintenant un véritable fossé. Ce fossé s'agrandit. Enfin, je vous le répète, les conséquences sont effectives. Nous avons effectivement abandonné les activités de garde et de paie.

Un autre exemple: la banque TD détient un dossier enviable au chapitre de sa position de chef de file de prises fermes. Nous nous classons deuxième aux États-Unis pour les acquisitions par emprunt et septième pour tous les prêts. Aucune autre banque non américaine ne se situe parmi les 10 premières. Au dernier trimestre, la Nations Bank s'est engagée dans deux prêts de presque 4 milliards de dollars chaque. Pour notre taille, nous ne pourrions engager qu'environ la moitié de ce montant, et pour un seul prêt. Le fait est que plus nos clients fusionnent, plus ils voudront des prêts considérables. Les banques plus importantes sont mieux placées pour leur procurer ces prêts.

Supposer que les banques n'ont pas besoin, ou plutôt ne se doivent pas, de croître au même titre que leurs clients est dénué de bon sens. Combien de temps pourrons-nous livrer concurrence à ces géants dans tous les domaines? Combien de temps pourrons-nous continuer d'offrir aux consommateurs des services traditionnels avec les produits des services de pointe? Combien de temps pourrons-nous éviter de restreindre davantage nos activités?

À la lumière des conséquences d'un marché mondial turbulent, notre vision, à la banque TD, est d'associer nos forces à celles d'un concurrent important pour nous assurer de créer une institution canadienne qui sera longtemps en place et réussir à croître et à prospérer dans le nouvel environnement, à conserver les avantages liés aux emplois, aux impôts et taxes et aux investissements au Canada, à procurer un grand choix de produits et de services concurrentiels aux consommateurs, et à générer de bons rendements pour nos actionnaires.

La possession canadienne d'établissements mondiaux signifie en bout de ligne le maintien de plus d'emplois au Canada. À titre de centre financier solide, nous avons l'occasion de maintenir et de consolider un bassin de talents mondiaux. Mais si nous sommes retenus et que les géants du sud arrivent à pénétrer nos marchés tout en gardant pratiquement tous les emplois pour eux, renforçant ainsi la position de New York et de Charlotte, mais sans rien ajouter ici, qu'adviendra-t-il de nous?

• 1930

Le succès dans le marché actuel n'est pas garanti, l'évolution est trop rapide. Mais nous pouvons suivre l'une ou l'autre voie, toutes deux étant différentes. Si nous acceptons la vision du Canada comme pays avec un ensemble de grandes institutions canadiennes solidifiant sa position, nous pouvons trouver le moyen de faire face et de répondre aux inquiétudes soulevées par les fusions dans notre marché national, c'est-à-dire l'incidence sur nos clients, l'incidence sur les emplois, l'incidence sur les collectivités rurales et l'incidence sur les petites entreprises. Ce sont des questions non négligeables, en fait ce sont des questions que doivent envisager les banques canadiennes, avec ou sans fusions.

Nous savons que ces inquiétudes doivent être prises en considération. Nous nous sommes engagés à y travailler avec vous et d'autres intéressés, parce que l'intérêt public comprend nos clients, nos actionnaires et nos employés. Nous voulons trouver avec vous les meilleures façons de protéger ces intérêts par le processus de fusion, pour qu'il soit possible de servir adéquatement l'intérêt national à long terme.

Les fusions changeraient-elles notre environnement? Oui. Présenteraient-elles des défis? Oui. Serait-il possible de garantir la concurrence et la protection de la clientèle? Oui. Il faut étudier tous ces aspects et les régler. C'est ce que nous voulons faire.

Nous voulons travailler avec vous et avec nos autres intéressés pour assurer que tout fonctionne pour tout le monde. Cela peut, et cela doit faire partie d'une vision d'un système financier prospère, ancré par un grand contingent d'importantes institutions canadiennes, pour assurer notre présence à la table au XXIe siècle. Nous pouvons oser ou nous pouvons nous contenter d'une nation avec une influence déclinante, les décisions financières importantes étant prises ailleurs.

Selon moi, c'est la plus grande question à laquelle nous devrons nous attacher pour l'intérêt national à long terme. Je vous demande de nous donner la chance de réussir à l'aube du prochain siècle, en tant qu'institution, en tant que secteur d'activité et en tant que nation.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Baillie.

Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Harris.

M. Dick Harris: Monsieur Baillie, merci pour votre exposé.

Vous savez certainement que parmi toutes les questions abordées par le groupe de travail MacKay, c'est probablement celle des fusions dont on parle le plus dans le pays et, comme c'est le principal sujet traité dans votre rapport, il serait peut-être bon que nous vous interrogions sur ce sujet.

Lorsqu'il est venu témoigner au nom de la Banque de Montréal, M. Barrett nous a expliqué qu'en cas de refus des fusions, la solution de rechange pour la Banque de Montréal serait probablement de se dégager des secteurs à faible rentabilité. Les secteurs dans lesquels la banque perd de l'argent ne doivent pas être très nombreux, j'imagine, mais il y a des secteurs de faible rentabilité. La banque se replierait sur les secteurs les plus rentables. En conséquence, nous a-t-il averti, il est probable que les services actuellement mis à la disposition du public canadien diminueraient. Cette solution de repli serait-elle aussi la vôtre au cas où les fusions ne seraient pas entérinées?

M. A. Charles Baillie: Eh bien, je crois que c'est inévitable. Il n'y a pas très longtemps encore, j'espérais que nous serions en mesure d'exercer notre concurrence comme avant et de continuer à jouer utilement notre rôle de banque et à offrir un niveau de service que nous considérons, malgré ses failles, comme étant le meilleur service bancaire offert au public dans le monde. Je sais que tout le monde ne s'accorde pas à dire que les banques sont merveilleuses, mais nous en sommes pour notre part persuadés.

Aujourd'hui, cependant, l'évolution est si rapide et le poids de la technologie dans les nouveaux services bancaires est si grand que le fossé dont je vous ai parlé s'est creusé, et alors que nous investissions jusqu'à présent autant que Nations, cette dernière dépense actuellement 3,3 milliards de dollars de plus que nous par an.

• 1935

À mon avis, il va s'ensuivre nécessairement que les gros établissements vont se servir de cette technologie pour dispenser une gamme étendue de services et s'organiser de manière différente afin d'offrir une gamme élargie de produits dans tel ou tel domaine particulier, qu'il nous faudra abandonner progressivement. Nous avons dû effectivement abandonner les activités de garde parce que nous n'avions pas les moyens de faire les investissements nécessaires en matière de technologie, et il en a été de même pour les activités de paie.

Je ne sais pas quel va être le prochain secteur. Ce pourrait être celui des cartes, parce que c'est là que les investissements sont les plus élevés. J'espère que ça ne touchera pas les cartes, car c'est un secteur très profitable pour l'instant.

Si nous ne nous rapprochons pas de la taille des concurrents qui se présentent sur notre marché, je pense qu'inévitablement, avec le temps, nous devrons progressivement limiter nos ambitions.

M. Dick Harris: Merci.

Parlons de la volonté des banques de se placer sur le marché de l'assurance en s'adressant à la clientèle par l'intermédiaire de leurs succursales. L'industrie de l'assurance soutient, et avec d'excellents arguments, je pense, que ce secteur est déjà bien desservi par ceux qui l'occupent actuellement et qu'il y a déjà une forte concurrence exercée par des entreprises très dynamiques dans le secteur de l'assurance.

Quelles sont selon vous les conditions qui existent actuellement dans le secteur de l'assurance et qui justifient que des opérateurs d'une telle envergure que les banques interviennent dans le secteur de l'assurance?

M. A. Charles Baillie: Laissez-moi vous dire tout de suite avant de vous répondre que dans une certaine mesure, il ne vous faut pas vous en tenir à ce que disent les opérateurs du secteur, à ce que je dis moi-même ou à ce que disent les sociétés d'assurances, et qu'il vous faut surtout vous pencher sur les intérêts du consommateur. Je considère que plus le consommateur aura le choix, mieux ce sera. Il est préférable qu'il ait un maximum d'options en matière d'assurance et qu'il puisse s'adresser à un maximum de guichets.

En consultant certaines études du groupe MacKay, j'ai constaté qu'il y avait environ 17 p. 100 de Canadiens qui n'avaient pas d'assurance—ce chiffre n'est peut-être pas exact à la virgule près, mais il est assez proche de la réalité. Environ 50 p. 100 des Canadiens n'ont pas été démarchés l'année dernière par les assurances. Je considère donc qu'il est justifié que les banques s'intéressent à ce secteur.

L'assurance marche bien actuellement dans notre pays; nous sommes bien servis. Je considère simplement que plus on a le choix, mieux c'est.

M. Dick Harris: Merci. La parole est à M. Epp.

Merci, monsieur Baillie.

M. Ken Epp: Sur le même sujet, si l'on vous refuse le droit de faire de l'assurance, quelles en seront les conséquences sur vos activités?

M. A. Charles Baillie: C'est un coût d'opportunité, en quelque sorte.

On nous reproche de fermer des succursales, mais il fut un temps où nous dispensions tous nos services par l'intermédiaire des succursales. C'est alors que nous avons mis en place les guichets automatiques, puis les services bancaires par téléphone, les cartes de débit, les opérations bancaires sur ordinateur personnel à domicile, en attendant les cartes à mémoire.

Quatre-vingt pour cent de nos transactions bancaires se font à l'extérieur de nos succursales. Notre banque a donc tout intérêt à faire passer davantage de produits par l'intermédiaire de nos succursales pour pouvoir justifier leur ouverture. Il ne s'agit pas simplement de nos propres produits; nous avons aussi tout intérêt à commercialiser les produits des tiers par l'intermédiaire de notre réseau. L'un de ces produits, qui nous aiderait à absorber nos frais généraux, serait l'assurance.

M. Ken Epp: Très bien. J'imagine que le même raisonnement s'applique à votre volonté d'entrer sur le marché du crédit-bail automobile. D'après ce que j'ai pu observer, il m'apparaît cependant que ce sont toujours les banques qui finissent par apporter le financement, que l'automobile soit achetée ou louée par le client.

D'où provient actuellement l'argent lorsqu'une personne prend un crédit-bail sur une automobile? Invariablement, il y aurait une transaction avec la banque, ou du moins dans la moitié des cas et même davantage, j'imagine. S'il s'agit d'un achat, je dirais que près de 80 p. 100 ou même 90 p. 100 de ceux qui font l'objet d'un crédit sont financés par les banques. Qu'avez-vous à gagner en pénétrant sur ce marché?

• 1940

M. A. Charles Baillie: Là encore, j'en reviens au consommateur et à la question de savoir si celui-ci va profiter ou non de notre service de crédit-bail. Le groupe de travail MacKay a constaté que l'écart de taux en matière de crédit-bail était de 1,2 p. 100 supérieur au Canada qu'aux États-Unis, et a attribué cette différence au fait que les banques pouvaient faire du crédit-bail aux États-Unis, accentuant ainsi la concurrence et permettant aux consommateurs d'obtenir de meilleurs prix.

Vous avez peut-être raison en ce sens que les constructeurs automobiles empruntent aux banques, ce qui fait que lorsqu'ils financent des crédits-bails automobiles, une partie de l'argent provient des banques, mais il ne faut pas oublier qu'ils s'adressent aussi directement au marché des obligations et passent directement par les effets de commerce. Nous faisions beaucoup de financement automobile, mais l'on est passé en grande partie dans ce secteur des emprunts au crédit-bail, cette dernière opération nous étant interdite.

Là encore, je crois qu'il nous faut revenir au consommateur et à ses intérêts, et je considère que l'écart bien supérieur des taux au Canada signifie qu'il y a place pour davantage de concurrence.

M. Ken Epp: Bon, au cas où l'on autoriserait toutes ces opérations et où vous pourriez faire de l'assurance et du crédit-bail automobile, et vous lancer dans d'autres activités auxquelles vous allez certainement penser ensuite—vous allez probablement vouloir louer du matériel professionnel aux entreprises et l'on peut se demander où tout cela va se terminer—êtes-vous alors en faveur d'une ouverture du système des paiements? Les sociétés d'assurances, par exemple, pourraient ainsi vous concurrencer sur un pied d'égalité lorsqu'elles vendent de l'assurance. À l'heure actuelle, elles encourent des frais considérables puisqu'il leur faut en fait faire toutes les opérations par l'intermédiaire des banques, qui seraient alors leurs concurrents.

M. A. Charles Baillie: Nous sommes en faveur de l'ouverture du système de paiement. Nous considérons que plus il y a de concurrence, mieux c'est. Dans ma prime jeunesse, j'ai travaillé à New York pour le compte de notre banque, et j'en suis revenu avec la conclusion que quelles que soient nos activités, plus il y avait de concurrence, mieux c'était, parce que cela nous tient éveillés et nous oblige à nous améliorer.

Les sociétés d'assurances ont toujours la possibilité de participer au système des paiements par l'intermédiaire d'une société de fiducie leur servant de filiale. Il s'agira de savoir s'il est moins cher pour le client de s'adresser directement à elle ou de passer par une banque, et tout dépendra des volumes. Toutefois, je ne pense pas qu'au moment où nous nous parlons il y ait une banque qui s'oppose à l'ouverture du système des paiements.

Au sujet de ce système de paiements, nous disons simplement qu'il faut bien s'assurer que l'on exerce sur celui-ci un bon contrôle au moyen de la réglementation, parce que le danger serait de laisser entrer n'importe qui. Si les autres participants du système de paiements s'inquiétaient de la solvabilité du nouveau participant, on pourrait se retrouver avec des délais d'attente de trois ou quatre jours entre le moment où le client dépose un chèque sur son compte et le moment où celui-ci lui est crédité, comme cela s'est passé aux États-Unis. Ce qui est merveilleux dans notre système actuel, c'est que l'on peut faire aujourd'hui un dépôt à Halifax et obtenir le crédit correspondant le même jour à Vancouver.

Il n'y a cependant aucun inconvénient à laisser entrer sur ce marché les sociétés d'assurances, par exemple; elles sont solvables et il n'y a donc pas de problème. Je prenais simplement un cas extrême.

M. Ken Epp: Oui. Vous avez mentionné en passant que vous pourriez très bien abandonner le marché des cartes de crédit. J'ai du mal à y croire.

M. A. Charles Baillie: Non, excusez-moi. J'ai dit que nous avions abandonné deux secteurs dans lesquels nous n'étions plus compétitifs. J'ai dit ensuite que la MBNA, qui se spécialise dans les cartes de crédit, avait investi 150 millions de dollars dans la technologie des cartes de crédit l'année dernière. Nous avons investi 6,5 millions de dollars alors que Bank One et Capital One arrivent elles aussi sur notre marché.

Je partais simplement de l'hypothèse qu'il pourrait bien s'agir du prochain secteur dans lequel nous ne serions plus concurrentiels. C'est une hypothèse, mais si leurs investissements leur permettent d'élaborer des cartes mieux adaptées et s'ils parviennent à concevoir un produit répondant davantage à vos besoins et plus pratique que le nôtre, il se peut qu'il nous faille envisager cette possibilité à long terme.

Ai-je vraiment dit que c'est ce qui nous attendait ensuite? J'ai dit que j'espérais que ce ne soit pas les cartes de crédit, parce que pour l'instant, c'est un secteur très profitable. Je n'ai jamais voulu laisser entendre que nous allions abandonner le secteur des cartes de crédit.

M. Ken Epp: Merci pour cette précision parce que, si j'en crois du moins mon expérience ainsi que les commentaires qu'ont pu me faire parvenir les gens de ma circonscription, s'il y a un secteur dans lequel les banques gagnent de l'argent, c'est bien celui des cartes de crédit.

M. A. Charles Baillie: C'est une activité très profitable. Elle ne l'est pas autant pour nous pour les détaillants.

M. Ken Epp: Non?

M. A. Charles Baillie: Non. Les détaillants facturent des taux d'intérêt tellement élevés.

• 1945

M. Ken Epp: Je suis sûr que vous êtes trop modeste concernant les avantages que vous en retirez.

M. A. Charles Baillie: Non, nos taux sont bien inférieurs à ceux des détaillants.

M. Ken Epp: Je ne l'ignore pas.

La seule remarque que je pourrais faire au sujet de votre situation, c'est que si vous fusionnez avec une autre banque, vous allez devenir le plus gros établissement financier au Canada. Ne pensez-vous pas que vous allez acquérir une telle envergure et une telle puissance que vous allez pouvoir exercer votre concurrence dans le monde entier à un point tel que vous finirez par être le seul établissement financier au Canada? Allez-vous réussir à absorber tous les autres?

M. A. Charles Baillie: Selon la plupart des critères de mesure que l'on peut utiliser, nous ne serons pas les plus gros si les deux demandes de fusions sont autorisées; l'autre aura une taille supérieure. Je pense d'ailleurs que ce sera une très forte concurrence pour nous. Vous pourrez voir à mon avis, et c'est ce que j'entrevois actuellement, que les opérateurs dont je vous ai parlé—qu'il s'agisse de MBNA, de Capital One ou de Bank One dans le secteur des cartes de crédit, de Countrywide dans celui des hypothèques, de Scudder, Templeton ou Fidelity dans celui des fonds communs de placement, d'ING ou de Citizens dans celui de la banque informatique, de Wells Fargo pour les petites entreprises, ou de Heller, Associates, Finova ou Norwest pour ce qui est des crédits au consommateur et aux entreprises—s'ils ne nous ont pas encore fait trop mal, sont bien présents aujourd'hui alors qu'ils étaient pratiquement inexistants il y a cinq ans. Chacun d'entre eux, pratiquement, est bien plus gros que nous dans sa spécialité. Progressivement, ils vont s'attaquer à nos meilleurs clients et devenir des concurrents très sérieux. Je pense que nous allons avoir de nombreux concurrents, vous n'avez pas à vous inquiéter au sujet d'une seule banque.

M. Ken Epp: Vous parlez de concurrence, mais l'un des sujets de préoccupation est celui de l'existence et de la disponibilité de bons services de banque et de crédit à l'intention des petites entreprises. Je pense que les banques canadiennes ont bien mal servi les petites entreprises. D'après ce que j'ai lu, elles affirment d'ailleurs que chaque fois qu'elles consentent un prêt de moins de 150 000 $, elles perdent de l'argent. Je ne sais pas si c'est vrai, mais il faut alors rédiger 15 pages de documents et engager 20 personnes pour tout vérifier. Vos frais généraux sont très élevés pour tous ces prêts que vous consentez. De son côté, la personne qui a besoin du prêt ne parvient pas à l'obtenir. La situation n'est pas très bonne. Qu'avez-vous prévu pour l'améliorer?

M. A. Charles Baillie: Je ne peux parler qu'au nom de ma propre banque.

À l'échelle mondiale, les prêts aux petites entreprises sont une source de difficulté dans tous les pays. Nombre de demandes de prêts des petites entreprises sont justifiées et il est logique de leur prêter de l'argent. D'autres—et cela tient à la mentalité de l'entrepreneur—sont si confiantes et jugent leur idée tellement bonne qu'elles considèrent qu'on doit leur prêter de l'argent les yeux fermés.

Nous avons beaucoup progressé pour faire baisser le coût d'administration des petits prêts—de tous les prêts, d'ailleurs, mais surtout des petits prêts—car c'est là qu'il nous paraît indispensable de faire baisser les coûts. Nous avons regroupé le secteur des petites entreprises au sein d'une division spéciale de la banque, avec un haut responsable à sa tête, et Bob Kelly et moi-même—Bob est responsable des services bancaires au détail—nous avons cherché à augmenter notre part de marché. Nous avons fait un excellent travail ces deux dernières années en faisant augmenter notre part de marché tant au niveau du nombre de prêts en cours que du nombre de clients dans le secteur des petites entreprises.

Selon l'enquête Thompson Lightstone qui a été publiée récemment, 93 p. 100 des prêts qui nous sont demandés par les petites entreprises sont acceptés; nous arrivons en tête pour ce qui est de la satisfaction des clients vis-à-vis de nos directeurs des relations avec la clientèle; et nous arrivons en tête lorsqu'on demande au client: «Êtes-vous disposé à recommander notre banque à un ami qui a une petite entreprise?»

C'est une entreprise qui nous tient à coeur et nous faisons... Nous avons mis au point un système de prêt aux petites entreprises sur une carte de crédit, avec un plafond de 50 000 $, sans que l'on ait à passer comme avant par toute la procédure des demandes. Nous avons une formule de découverts bancaires. Nous avons un plan de services aux entreprises. C'est un domaine qui nous tient particulièrement à coeur et je pense que vous n'avez pas fini de voir des progrès. Vous n'avez pas besoin de nous taper sur les doigts; nous le faisons parce que nous avons jugé que le secteur des petites entreprises était profitable pour les banques.

M. Ken Epp: Vous vous améliorez donc dans ce domaine, que vous fusionniez ou non?

M. A. Charles Baillie: Oui.

M. Ken Epp: Monsieur le président, je laisse maintenant la parole aux autres membres du comité. Vous aurez peut-être le temps de me redonner la parole plus tard.

Le président: Merci, monsieur Epp.

Monsieur Pillitteri.

• 1950

M. Gary Pillitteri: Merci, monsieur le président.

Monsieur Baillie, je suis heureux de vous revoir.

Je crois qu'il y a quelques mois, c'était en été, vous vous êtes présenté devant un autre groupe de travail pour répondre à de nombreuses questions. On vous a demandé entre autres si vous aviez besoin d'acquérir une plus grande envergure pour vous doter de la technologie nécessaire. Vous aviez répondu, si je me souviens bien, que nous étions très en avance par rapport aux autres pays, et notamment par rapport aux États-Unis, et que notre technologie était bien supérieure. Comme vous venez de le dire, je peux me présenter dans n'importe quelle banque, faire un dépôt à St. John's, celui-ci étant viré dans la journée à Vancouver. Nous savons qu'il y a des grands établissements aux États-Unis qui demandent jusqu'à une semaine pour autoriser le versement d'un chèque. Je comprends bien.

Je comprends aussi les problèmes posés par la taille. Vous avez dû renoncer à vos activités de paie parce que les concurrents pouvaient faire mieux; ils pouvaient écrémer le marché dans de meilleures conditions. Bien évidemment, toutes les banques canadiennes ont abandonné leurs activités de paie essentiellement entre les mains d'une seule entreprise des États-Unis.

Vous avez parlé dans votre exposé de la garde. Vous n'exercez plus d'activités de garde. Pourtant, un autre établissement canadien les conserve parce qu'il dispose des compétences nécessaires. On peut bien en parler, il s'agit de la Banque Royale, qui le fait parce qu'elle a acheté une société de fiducie disposant de cette compétence. C'est bien ça?

M. A. Charles Baillie: Oui. Sans vouloir parler au nom de la Banque Royale, je crois que si vous lui posiez la question, elle vous répondra qu'elle craint qu'avec le temps elle n'ait pas une taille suffisante pour conserver ses activités de garde parce que c'est devenu une activité internationale qui exige d'énormes investissements en technologie.

M. Robert P. Kelly (vice-président, Banque Toronto Dominion): Il faut voir aussi qu'elle était déjà la plus grosse.

M. Gary Pillitteri: D'un autre côté, si vous fusionnez, vous n'allez pas pour autant récupérer vos activités de paie. Elles resteront là où elles sont.

M. A. Charles Baillie: Non, il faut être réaliste. Je ne pense pas que l'on puisse prétendre qu'en fusionnant on va récupérer ces deux types d'activités. C'est elles qui étaient appelées à disparaître en premier.

Ce qui m'inquiète, c'est l'ampleur du fossé en matière d'investissement technologique. Inévitablement, il y aura d'autres secteurs—je ne peux pas préciser exactement lesquels pour l'instant—que nous devrons progressivement abandonner en raison de notre retard technologique par rapport à la concurrence.

M. Gary Pillitteri: De même, toujours au sujet de la garde, on s'aperçoit que votre taille n'est pas suffisante. Les banques canadiennes ont donc la technologie nécessaire mais n'ont pas l'envergure suffisante, même si elles devaient fusionner, pour exercer des activités dans les secteurs de la paie ou de la garde.

Vous avez déclaré par ailleurs que vous n'interveniez pas dans le secteur des cartes de crédit parce que notre population n'était pas suffisante. Wells Fargo, Capital One et d'autres établissements viennent au Canada pour servir ces marchés. N'auriez-vous pas pu faire la même chose par l'intermédiaire d'une filiale? Vous êtes-vous contenté de réagir plutôt que d'innover dans ce secteur, n'intervenant qu'à partir du moment où vous vous êtes aperçus qu'ils entraient sur le marché et qu'il vous fallait agir rapidement?

M. A. Charles Baillie: Étant donné la population qui se trouve sur le territoire des États-Unis, ces entreprises peuvent se permettre d'investir énormément dans la technologie et de répartir ce coût sur une large base de clients. Que nous ayons réagi ou non il y a cinq ans, il y a deux ans ou cette année, il n'en reste pas moins qu'ils investissent 150 millions de dollars alors que nous n'investissons que 6,5 millions de dollars. Si nous doublions cette somme, nous ne serions encore qu'à 13 millions de dollars. La tâche est donc ardue.

• 1955

M. Gary Pillitteri: À la suite de votre exposé, M. Baillie, M. Epp vous a posé une question concernant les prêts-bails automobile et l'assurance. Les sociétés d'assurances ayant la possibilité de se doter d'une filiale pour exercer leurs activités sur le réseau des paiements, elles peuvent concurrencer les banques. En contrepartie, vous pourriez vendre de l'assurance dans vos succursales. N'y a-t-il pas là inégalité de traitement?

Les banques ont un réseau de paiements en place. Il n'est pas nécessaire de l'ouvrir à d'autres intervenants, il l'est déjà depuis 1992. N'êtes-vous pas traité sur un pied d'égalité par rapport aux sociétés d'assurances à partir du moment où vous pouvez vendre de l'assurance par l'intermédiaire d'une filiale, mais non dans votre réseau de succursales, la société d'assurances pouvant ouvrir une banque, mais non exercer des activités bancaires dans ses guichets?

M. A. Charles Baillie: Sans se servir de ses succursales?

M. Gary Pillitteri: Effectivement. C'est la même chose.

M. A. Charles Baillie: Pour ce qui est des dépôts.

M. Gary Pillitteri: J'ai une autre question concernant le crédit-bail automobile. Vous nous avez dit qu'aux États-Unis, les banques pouvaient faire du crédit-bail automobile et que le coût était inférieur d'environ 1,5 p. 100 à celui du Canada. Ce coût n'est-il pas aussi inférieur parce qu'il s'agit d'un plus gros marché? D'ailleurs, non seulement ce marché est plus vaste, c'est évident, mais en outre les banques n'y exercent pas leurs activités à plein temps; elles s'y intéressent ou s'en désintéressent en fonction du rendement de l'argent sur le marché. Elles ne s'impliquent pas entièrement dans le secteur du prêt-bail automobile contrairement à ce que vous voulez faire ici au Canada.

M. A. Charles Baillie: Disons que les banques américaines sont libres d'exercer leurs activités dans le secteur du prêt-bail automobile et que les taux sont inférieurs de 1,2 p. 100 aux États-Unis. Je dis simplement qu'à première vue le consommateur est bien mieux servi lorsque les banques interviennent dans ce secteur. Le financement devient bien moins onéreux.

Ce qui me paraît étrange, c'est que cette façon de faire ne soulève aucune objection aux États-Unis, alors que c'est là que se trouve le siège et la propriété des constructeurs automobiles alors qu'on aurait pu penser qu'au Canada notre meilleure carte à jouer était celle du prêt-bail automobile puisque l'on peut voir dans le rapport du groupe de travail MacKay que 80 p. 100 des prêts-bails dans le secteur de l'automobile sont consentis par les trois gros constructeurs, qui ne sont pas canadiens.

M. Gary Pillitteri: Nous avons reçu aujourd'hui les concessionnaires automobiles, et ce n'est pas la réponse qu'ils nous ont donnée. Les choses ne se passent pas ainsi. Ils ont déclaré bien entendu qu'ils sous-traitaient une partie des prêts-bails automobile, mais qu'ils s'en chargeaient eux-mêmes dans bien des cas.

J'ai une dernière question à vous poser.

M. Robert Kelly: Pour revenir sur le fait que 80 p. 100 des prêts-bails automobile sont consentis par les trois grands constructeurs et que cet argent va directement aux États-Unis. N'oublions pas non plus que nos frais financiers au Canada s'élèvent à moins de la moitié de ceux des États-Unis et que nos marges sont bien plus faibles que celles des États-Unis. Il est donc assez paradoxal que les prêts-bails soient plus onéreux dans notre pays qu'aux États-Unis. Il est bon d'augmenter la concurrence. Nous ferons un excellent travail de transparence et nous faciliterons de beaucoup les possibilités d'accès des Canadiens aux prêts-bails automobile. Je suis sûr que les coûts diminueront eux aussi.

M. Gary Pillitteri: Il y a ici ce devoir de transparence pour les banques en matière de prêts-bails automobile. Ce n'est pas le cas aux États-Unis. Soyons clairs sur ce point. Il y a ici ce devoir de transparence en matière de prêt-bail automobile lorsqu'on se présente dans l'établissement, mais les banques aux États-Unis n'ont pas la même obligation de transparence qu'au Canada.

M. Robert Kelly: Si je consulte la section automobile dans le Toronto Star de la fin de semaine, je vois très rarement le prix du véhicule ou le taux d'intérêt. On me donne le coût mensuel.

M. Gary Pillitteri: J'ai une dernière question à vous poser, M. Baillie. Lors de votre comparution devant l'autre comité, vous avez déclaré qu'il n'était pas possible de conserver le statu quo et qu'il nous fallait faire quelque chose. L'autre banque, qui devait fusionner avec vous... Je me souviens que mon collègue vous a posé une question, et je me souviens que certaines de mes questions étaient directes. Je vous ai dit que j'étais un petit entrepreneur ayant un projet et qui voulait bâtir sa propre entreprise. J'ai dû m'adresser à trois établissements de prêts avant de pouvoir finalement mettre sur pied mon entreprise. Si vous n'aviez été que trois dans ce pays, je n'aurais probablement pas pu y parvenir, parce que je ne sais pas à quel point la concurrence... Vous dites que vous avez besoin d'acquérir une plus grande taille pour être plus compétitifs. D'un autre côté, je ne pense pas que j'aurais pu parvenir à mes fins s'il n'y avait eu que trois établissements de prêts.

• 2000

Laissez-moi vous poser à nouveau la question suivante. Chaque fois que je me présentais à la banque, il me fallait déposer un projet d'entreprise. Si les responsables n'aimaient pas mon premier projet d'entreprise, je devais en rapporter un autre. Vous bénéficiez d'une licence accordée par le gouvernement du Canada au nom du Parlement, qui vous permet d'exploiter votre entreprise. Vous nous dites que vous êtes responsable d'un côté envers vos actionnaires mais, de l'autre, vous êtes aussi responsable envers le gouvernement du Canada, qui vous a accordé une licence d'exploitation.

Pouvez-vous nous présenter votre projet d'entreprise, complet et détaillé, au sujet des fusions?

M. A. Charles Baillie: Je crois comprendre que ce projet d'entreprise sera présenté au moment de l'étude d'impact sur le public. Il nous est difficile à l'heure actuelle de présenter un projet d'entreprise tant que nous ne savons pas ce qui va être jugé acceptable par le Bureau de la concurrence, qui va certainement autoriser certaines choses et en refuser d'autres. Une fois que ce cadre aura été fixé et que nous pourrons collaborer avec notre nouvel associé, nous serons en mesure de concevoir un projet d'entreprise et de le présenter. J'ai la conviction que les conclusions du Bureau de la concurrence seront connues au moment où l'on procédera à l'étude d'impact sur le public. C'est alors que nous présenterons ce projet.

M. Gary Pillitteri: Vous voyez, M. Baillie, nous servons tous deux le même client, c'est-à-dire le contribuable. Pour vous c'est le contribuable et pour moi—c'est aussi mon client, en l'occurrence l'électeur.

M. A. Charles Baillie: Oui.

M. Gary Pillitteri: Merci.

Le président: Pour revenir rapidement sur la question de la procédure, j'aimerais savoir si M. Baillie est effectivement d'accord avec le mécanisme d'examen des fusions tel qu'il est précisé par MacKay et avec certaines questions posées au sujet des retombées régionales, de la concurrence internationale, de l'emploi, etc.

Je relève aussi les commentaires que vous venez de faire en ce qui a trait aux critères relatifs à l'intérêt public qui seront arrêtés une fois que le Bureau de la concurrence aura remis sont rapport. Si nous étudions pour notre part cette question, c'est parce qu'il nous faut nous aussi donner notre avis au ministre des Finances en ce qui a trait à ces critères relatifs à l'intérêt public. Nous pouvons retirer certaines choses et en ajouter d'autres. Est-il possible que vous ayez déjà fait ce travail? Vous avez probablement déjà effectué les études coûts-bénéfices pour le consommateur individuel, calculé les impacts régionaux, etc. Donc, en fin de compte, votre dossier est déjà bouclé. C'est bien ça?

M. A. Charles Baillie: Nous avons examiné rapidement quel pourrait être le résultat final et ce qu'il adviendrait si nous prenions la décision. Ce que nous ne savons pas encore, c'est ce que le Bureau de la concurrence va exiger, ce que votre comité et le comité sénatorial vont exiger, ce que le ministère des Finances va exiger. Il est donc très difficile de se prononcer.

Nous avons examiné différents facteurs—en supposant que vous nous demandiez de faire telle ou telle chose, quel en serait le coût, ce que nous pourrions assumer, etc. Ainsi, si on nous demandait de nous séparer d'un nombre x de succursales dans le sud-ouest de l'Ontario, ce ne serait pas du tout la même chose que si nous ne devions pas nous en départir.

Si vous nous posez une question sur un point précis, nous pourrions vous en donner les conséquences, mais nous n'avons pas encore connaissance, ou encore une idée précise, des conditions sous lesquelles nous serons autorisés à fusionner.

Le président: Et vous estimez que le Bureau de la concurrence va vous fournir cette information?

M. A. Charles Baillie: Au minimum, il va nous préciser un certain nombre de conditions qui s'opposent à la concurrence et auquel il nous faudra remédier.

Le président: Bien.

Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci, monsieur le président.

Vous avez indiqué que le rapport MacKay devait être considéré dans sa globalité. Je m'intéresse à l'échéancier. Dans son rapport, M. MacKay nous dit qu'il ne nous faut pas attendre jusqu'en l'an 2002 pour régler cette question. Quel est, à votre avis, le plus court délai d'exécution de cette opération? Y a-t-il des éléments qui vous paraissent faciles à mettre en place et dont vous vous chargeriez en premier, le reste suivant par la suite, ou s'agit-il d'un projet s'apparentant à un château de cartes, tout devant se tenir en même temps?

• 2005

M. A. Charles Baillie: J'ai peur que si nous attendons que le château de cartes soit en place, nous en ayons encore pour une vingtaine d'années. Je pense donc qu'il nous faut faire de notre mieux le plus tôt possible. Je suis tout à fait d'accord avec l'observation qui a été faite et je voulais simplement dire au président dans ma réponse que plus on retarde, plus on court des risques. De notre point de vue, plus vite ce problème sera réglé, mieux ce sera.

Je sais que c'est à nous de composer avec les retards et de nous en accommoder, mais plus on attend, plus on perd du temps pour examiner les autres possibilités qui s'offrent à nous et pour faire les investissements que nous ferions autrement. Nous sommes distraits par l'opération de fusion et notre direction ainsi que nombre de nos employés y consacrent beaucoup de temps dont ils pourraient tirer profit pour essayer de faire progresser l'entreprise.

Il y a peut-être des choses dans ce document que vous voulez examiner et que vous ne voulez pas faire appliquer, par exemple. En l'examinant dans sa globalité, je constate qu'il s'est efforcé de concilier avec soin les différents intérêts afin de respecter ceux du consommateur et qu'entre les différents établissements il cherche à mon avis à faire en sorte qu'il n'y ait ni gagnants ni perdants.

Je ne pense pas qu'il soit utile que les entreprises de notre secteur négocient pour obtenir certains avantages en les refusant au secteur de l'assurance, ce dernier faisant de même de son côté, et que d'autres groupes... C'est tout ce que je voulais dire par là.

Mme Carolyn Bennett: Si chacun choisissait ce qui lui plaît dans ce document, l'équilibre serait rompu et l'on finirait par avoir des gagnants et des perdants?

M. A. Charles Baillie: Oui. Il m'apparaît que c'est ce qu'a voulu faire le groupe de travail.

Mme Carolyn Bennett: Nous avons évidemment été très impressionnés par l'intervention des représentants du secteur du prêt-bail automobile un peu plus tôt aujourd'hui. L'un des arguments qui m'a paru intéressant, c'est celui qui concerne le fait que les banques finiraient en fait par être propriétaires de ces véhicules. On nous a fait entrevoir que le titre de propriété vous appartiendrait et qu'au bout de trois ans vous seriez amené effectivement à vendre tous ces véhicules. Est-ce que cela signifie que vous vous retrouveriez finalement sur le marché des véhicules d'occasion?

M. A. Charles Baillie: Nous n'avons aucunement l'intention de nous lancer dans ce marché. Nous signerions des prêts-bails prévoyant un service intégral, c'est-à-dire un remboursement intégral du véhicule. Nous voulons nous lancer dans un certain nombre d'entreprises, et vous y avez fait allusion, mais nous n'avons vraiment pas l'intention de nous lancer dans les voitures d'occasion.

Je suis étonné que vous soyez impressionnée par ce que vous ont dit les responsables du secteur du prêt-bail, parce que lorsqu'on examine la question, les 80 p. 100 qui sont pris en charge par les constructeurs automobiles, selon le groupe de travail MacKay, vont de toute évidence à des sociétés qui ne sont pas canadiennes. Les propriétaires et les sièges sociaux sont à l'étranger. Je pense ensuite que sur le reste, environ 10 p. 100 est pris en charge par des sociétés de financement et autres qui là encore ne sont pas des sociétés canadiennes. Il reste donc au maximum 10 p. 100 dont se chargent les concessionnaires, qui sont canadiens et qui dépensent leur argent et paient leurs impôts ici.

Mme Carolyn Bennett: Le problème vient je pense du fait qu'étant donné que les constructeurs automobiles ont effectivement leur siège à l'étranger, on peut se demander si les banques seraient en mesure de prêter au-dessous du taux privilégié sur certains modèles de véhicules dont la vente stagne. Ce sont les concessionnaires qui nous ont dit qu'il leur paraissait bon d'avoir en fait la possibilité de pratiquer des rabais sur certains modèles de véhicules qui ne se vendent pas très bien. J'imagine que vous ne pourriez pas en faire autant.

M. A. Charles Baillie: Oh, ils pourraient toujours le faire. Je dis simplement qu'il ressort de l'étude que l'écart est aux États-Unis inférieur de 1,2 p. 100 à celui du Canada. Comme l'a indiqué Bob Kelly, nos frais financiers sont plus faibles ici, nos écarts de taux sont inférieurs et l'on pourrait penser que l'écart le soit aussi dans ce secteur. C'est le contraire qui est vrai.

Il y a bien d'autres points délicats sur lesquels nous aimerions vous convaincre, mais nous estimons que dans le secteur du prêt-bail automobile, c'est la possibilité de choix qui profite aux consommateurs, ce dernier devant bénéficier de taux inférieurs. Pourquoi, à conditions égales, ne pas appuyer les établissements canadiens par rapport aux établissements étrangers?

M. Robert Kelly: Le groupe d'étude a par ailleurs indiqué clairement que les conséquences éventuelles seront ressenties par les sociétés de financement des constructeurs automobiles et non pas par les concessionnaires parce que cette activité est avant tout prise en charge par les sociétés de financement des constructeurs automobiles.

Mme Carolyn Bennett: Ce n'est pourtant pas ce que les concessionnaires nous ont dit. À leur avis, les crédits étaient déjà en grande partie apportés par les banques, qui financent les prêts et d'autres choses de ce genre.

M. A. Charles Baillie: Ils obtiennent une grande partie de leur financement sans s'adresser aux banques. Nous en faisons un peu, mais bien souvent ils ont recours aux effets de commerce et au marché des obligations.

Mme Carolyn Bennett: Très bien.

Le président: Merci, madame Bennett.

Monsieur Szabo.

• 2010

M. Paul Szabo: Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Baillie, je dois admettre que votre enthousiasme est quelque peu communicatif et je vous félicite de votre intervention constructive et positive au sujet de votre vision au nom de la Banque TD.

Je ne crois pas que vous serez très surpris d'apprendre que chacun de nous a été approché par les parties représentant tous les aspects des arguments présentés. Certaines des hypothèses les plus intéressantes se rapportent au projet de fusion de la TD et de la CIBC, dans la mesure où le débat a commencé avec le premier projet à voir le jour, soit la fusion de la Banque Royale et de la Banque de Montréal. Cela a été un événement très particulier. Il n'a pas été soudain, mais stratégiquement, ce fut probablement une bonne chose du point de vue des banques, parce que soudainement toute l'attention portait sur elles. Dans un cas, on est même allé jusqu'à laisser entendre que le projet de fusion CIBC-TD était une mesure défensive plutôt qu'une mesure offensive. Manifestement, il est impossible de faire du sur place quand quelqu'un d'autre s'apprête à bouger.

Vous savez que le groupe de travail n'est plus qu'une question de temps. Vous savez aussi que même selon des calculs élémentaires, la position combinée du marché des deux entités fusionnées ne respecterait probablement pas au moins un des critères du Bureau de la concurrence qui, à ce moment, dirait que le projet ne peut aller de l'avant, que vous devriez plutôt proposer un autre projet et qui vous indiquerait les lacunes.

Le cynisme de la chose est plutôt intéressant. Je crois aussi que les questions soulevées par le groupe de travail MacKay sont essentielles, parce qu'il n'est pas question de demain, mais bien du long terme. Il est temps de s'atteler à la tâche.

Toutefois, j'aurais tort de distribuer des félicitations sans poser quelques questions difficiles. Voyons comment la Banque Toronto-Dominion y répondra.

Dans un article publié dans le Globe and Mail le 15 septembre 1998, Matthew Barrett fait référence aux observations du chef de la direction de Scotiabank, M. Godsoe. Celui-ci disait essentiellement que si nous dépassons la part de marché dans un marché en particulier, il faut désinvestir. Une telle mesure serait une occasion en or pour les entreprises qui ne veulent pas fusionner de s'approprier une part de marché, ce qui est bien pour les actionnaires. Toutefois, comme M. Godsoe est PDG et qu'il doit rendre des comptes à ses actionnaires, il devrait parler en faveur des fusions, sinon il devrait se taire.

J'aimerais avoir votre réaction à la position de M. Godsoe, compte tenu qu'il n'a rien à faire du conseil de M. Barrett de se taire. Ses propos vont plutôt à l'encontre des fusions, d'une manière constructive selon moi, tout comme vous êtes favorable aux fusions, d'une manière toute aussi constructive. Croyez-vous, en tant que PDG de la Toronto-Dominion, que vous vous devez à vos actionnaires? Ou êtes-vous disposé à admettre, peut-être, que l'intérêt public dont il est question dans le rapport du groupe de travail s'applique à tous sauf aux actionnaires?

M. A. Charles Baillie: J'aimerais d'abord préciser que M. Peter Godsoe a le droit de s'exprimer comme il le veut. Bien sûr, il devrait dire ce qu'il a à dire. Je ne voudrais pas nuire à quelque partie du débat que ce soit.

Mes patrons sont mes actionnaires et, par conséquent, je dois leur rendre des comptes. C'est aussi le cas de vos électeurs, à la différence que mon secteur est beaucoup plus large. Nous ne serons pas capables de bien traiter nos actionnaires si nous ne traitons pas bien les gens de notre secteur, c'est-à-dire, nos clients, nos employés et le public.

Il y aura différents points de vue à ce sujet et je crois que nous les connaîtrons. Je ne veux pas être centrer sur Toronto, mais je crois qu'il est bon que le Canada compte un grand centre financier. Je souhaite vivement que ce soit Toronto, et je crois que la façon d'y arriver est d'autoriser les fusions de sorte qu'il y ait deux banques suffisamment solides pour résister à une prise de contrôle, à moins que nous les gérions très mal, et qu'elles soient assez grosses pour que nous ayons tout lieu de croire qu'elles demeureront à Toronto. Cela confirmerait le fait que Toronto est une ville de sièges sociaux.

• 2015

Je suis sûr que vous avez tous consulté les données statistiques, mais je tiens à vous signaler que 60 p. 100 des revenus de notre industrie proviennent du Canada, que 84 p. 100 de nos emplois sont au Canada et que 90 p. 100 de nos impôts sont versés dans ce pays.

Certains croient que même si vous n'autorisez pas les fusions, Toronto pourra demeurer un centre financier d'importance. Cela est un point de vue valable, mais je crois qu'il en va bien autrement. Je ne veux surtout pas dénigrer le point de vue de quelqu'un d'autre.

M. Paul Szabo: Le comité des finances a traité de la question des ventes liées. Je crois comprendre que les banques ne sont pas favorables à une telle pratique. Par ailleurs, il y a de nombreuses preuves qui indiquent qu'une telle pratique a eu cours dans le passé. Cela veut-il dire que les banques ne peuvent se discipliner d'elles-mêmes ou appliquer les règles au niveau de la succursale et que, par conséquent, nous ne pouvons pas vraiment nous fier aux banques?

M. A. Charles Baillie: J'ai consulté les résultats de la recherche. Je crois que le groupe de travail MacKay a précisé que 16 p. 100 des gens avaient été placés dans une situation difficile en ce qui a trait aux ventes liées. Mais cela n'était pas le fait des banques, mais bien des institutions financières.

Nous croyons que nous faisons un très bon travail. Nous établissons une distinction entre les ventes liées et l'interdistribution, parce que nous aimons faire de l'interdistribution. Nous avons cherché à mettre les choses très claires en disant que les ventes liées ne sont pas acceptables.

M. Bob Kelly a vérifié le nombre de plaintes que nous recevons au sujet des ventes liées. Pourquoi ne parleriez-vous pas de cet aspect, Bob?

M. Robert Kelly: Au cours des 18 derniers mois, nous avons reçu quatre plaintes concernant des ventes liées. Notre personnel sait très bien que cette pratique n'est pas autorisée et qu'elle constitue un abus de nos procédures en matière de conduite de nos ressources humaines et que ceux qui s'y adonneront auront des problèmes. Aujourd'hui, j'ai également consulté les gens de ressources humaines, et ils savent très bien à quoi s'en tenir. Compte tenu que nous n'avons reçu que quatre plaintes de nos quatre millions de clients, j'estime que nous faisons un assez bon travail.

M. A. Charles Baillie: J'aimerais que nous parvenions à le faire sur une base d'autoréglementation. Il n'est pas nécessaire que ce soit sur une base individuelle par les banques; cela pourrait se faire par l'ensemble de l'industrie. De fait, nous préférerions que l'approche dépasse l'industrie et englobe toutes les institutions financières. Nous estimons que la loi irait trop loin. Par contre, s'il doit y avoir une loi, nous aimerions que toutes les institutions financières y soient soumises, parce que nous estimons que nous faisons de grands efforts et que la recherche a porté sur l'ensemble des institutions financières.

M. Paul Szabo: Cela est utile.

M. A. Charles Baillie: Nous n'avons pas la prétention d'être parfaits, loin de là.

M. Paul Szabo: C'est faire preuve d'humilité.

Dans votre déclaration, monsieur Baillie, vous abordez vos dépenses pour la technologie. Je ne veux pas vous critiquer personnellement, mais le fait que la Banque Toronto-Dominion ait dépensé 500 millions de dollars et qu'une banque américaine ait dépensé sept fois plus ne signifie pas nécessairement que vous avez un niveau plus élevé d'expertise technologique ou d'installations. Cela pourrait signifier que vous avez un peu plus d'un même article, c'est-à-dire 100 ordinateurs personnels au lieu de dix. Le fait d'avoir un ordinateur personnel ne vous donne pas de supériorité technologique quant à votre aptitude à offrir un service ou un produit.

Quelle est la situation réelle du point de vue de l'avance technologique? Ma question s'adresse peut-être à ceux et celles qui s'adonnent à la R-D, à la véritable recherche fondamentale sur les technologies qui se rattachent à votre vision des services financiers de l'avenir.

M. A. Charles Baillie: Je n'ai pas abordé cette question, mais une des choses intéressantes—et ce sont des données brutes—est qu'environ 75 p. 100 de nos dépenses pour la technologie sont axées sur la maintenance et que 25 p. 100 iraient à l'acquisition de nouveaux systèmes et ainsi de suite. En cas de fusion, nous pourrions abaisser à 60 p. 100 ce que nous dépensons pour la maintenance ou peut-être même à 50 p. 100. Le cas échéant, nous n'aurions pas seulement plus d'argent à dépenser, nous en aurions plus à consacrer à des aspects qui ne sont pas liés à la maintenance, ce qui, nous l'espérons, nous permettrait de lancer de nouveaux produits.

• 2020

M. Paul Szabo: Le dernier point monsieur Baillie, et je crois que c'est le plus important pour moi, porte sur la notion de concurrence. Vous me donnez des signaux mixtes et j'aimerais que vous m'aidiez à y voir plus clair.

Vous avez dit que plus la concurrence est vive, mieux cela vaut parce qu'elle vous permet de rester en alerte. Mais vous avez donné aussi des exemples où vous avez dû vous retirer de certaines entreprises parce que vous ne pouviez être concurrentiel. J'aimerais savoir si cela signifie que les banques maintiendront leurs activités uniquement si elles obtiennent l'autorisation de se lancer dans certaines entreprises, qu'elles tenteront leur chance et que, si elles ne peuvent obtenir le rendement voulu, elles se retireront pour concentrer leurs énergies ailleurs. Ou dites-vous plutôt que telle et telle activités n'étaient pas compatibles avec votre conception des banques, c'est-à-dire les véritables activités auxquelles vous vous livrez, et que vous avez apporté certains correctifs?

Il semble y avoir contradiction. Peut-être que même nos grandes banques ne craignent pas de concurrencer quiconque se présenterait parce qu'elles savent qu'elles peuvent maintenir une longueur d'avance et tenir tête à tout concurrent si elles doivent le faire. Par contre, l'exemple que vous avez donné d'activités que vous avez dû abandonner parce que vous ne pouviez concurrencer, toujours selon vos explications, n'est pas compatible avec l'ouverture à une plus grande concurrence. Qu'en est-il exactement?

Êtes-vous tout simplement prétentieux de dire que vous pouvez tenir tête à tout le monde, ou qu'au plan stratégique vous vous lancerez dans le plus grand nombre possible d'activités et, à long terme, vous ne conserverez que celles qui rapportent le plus à vos actionnaires?

M. A. Charles Baillie: Si vous m'ouvriez la porte d'un monde idéal, il y aurait un monopole où la concurrence ne serait pas trop vive, et cela me permettrait de très bien m'en tirer.

Je dis tout simplement que pour le pays il est préférable d'avoir beaucoup de concurrence, et je crois que la concurrence tient chacun des intervenants sur le qui-vive. Certains ne réussiront pas très bien dans certains domaines, et d'autres réussiront moins bien dans d'autres domaines.

À une époque, le service de la paie constituait pour nous une activité intéressante, mais malheureusement, tout est devenu tellement axé sur les systèmes et sur la technologie qu'il faut dépenser des sommes considérables et que les entreprises de service de la paie qui comptent un très grand nombre de clients peuvent avoir le dessus sur nous très facilement. Et c'est pourquoi nous ne pouvons pas être dans ce domaine.

Ce qui me préoccupe c'est qu'il y en aura davantage avec le temps puisque MBNA, par exemple, dépensera beaucoup pour la technologie des cartes ou que Countrywide dépensera beaucoup pour la technologie des hypothèques et une variété de produits, et ainsi de suite, qui rendront toute concurrence difficile. Nous ne nous avancerons pas à la légère dans de nouvelles activités. Nous étudierons attentivement le marché qui nous intéresse et nous nous y engagerons si nous croyons qu'il est possible de bien faire.

Il est possible que nous commettions une erreur et que dix ans plus tard nous en venions à la conclusion que nous n'avions pas prévu certaines tendances et qu'il nous faut retirer de telles activités. Chose certaine, nous ne chercherons pas à faire des expériences par plaisir. Je ne fais pas bon accueil à la concurrence parce que je crois que nous pouvons la dominer. Je crois que dans plusieurs cas, les concurrents se tireront très bien d'affaire par rapport à nous à cause de l'ampleur de leurs activités.

Bob, je crois que vous voulez ajouter quelque chose à ce sujet.

M. Robert Kelly: Je crois que GreenLine, notre société de courtage réduit, est un très bon exemple d'échelle et d'activité où nous avons fait preuve d'innovation. Il n'y avait pas de courtier à escompte au Canada. L'industrie n'existait tout simplement pas au Canada. En 1984, cette industrie a pris naissance grâce à la Banque Toronto-Dominion et à GreenLine. Aujourd'hui, l'entreprise est un joueur très important au pays et il y a deux ans, elle a fait des acquisitions aux États-Unis. Aujourd'hui, nous sommes le deuxième fournisseur ou courtier en escompte en importance au monde, derrière Charles Schwab and Company.

Nous ne craignons pas de nous lancer dans de nouvelles activités et de nous concentrer sur les entreprises que nous sommes convaincus de pouvoir concurrencer, y compris sur la scène mondiale. Nous avons fait des acquisitions en Australie et nous avons ouvert des bureaux à Hong Kong. Nous avons fait des acquisitions au Royaume-Uni aussi. Je vous dis bien franchement que les acquisitions faites aux États-Unis nous permettent d'ajouter plusieurs services bancaires à nos activités de courtage réduit. Nous comptons aujourd'hui des dizaines de milliers de détenteurs de cartes de crédit aux États-Unis. Un résident du Texas ou de la Floride qui a des questions au sujet de sa carte de crédit peut téléphoner pour obtenir des renseignements, et le téléphone sonnera au Canada.

• 2025

Il y a donc des emplois canadiens pour desservir le marché américain. Je vous dirai aussi que l'un de nos objectifs est de prendre beaucoup plus d'importance sur le marché de détail aux États-Unis. Pour cela, nous devons faire des acquisitions. Nous devons prendre beaucoup plus d'importance avant de songer à d'autres acquisitions.

M. Paul Szabo: Monsieur Baillie, je vous remercie beaucoup de votre intervention. Je sais qu'au fur et à mesure du débat sur ce dossier, nous aurons d'autres occasions d'échanger avec vous.

Le président: Merci, monsieur Szabo.

Madame Redman.

Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

Monsieur Baillie, j'aimerais laisser la question des fusions de côté parce que le groupe de travail MacKay aborde plusieurs autres aspects très pertinents concernant le secteur financier.

Indépendamment de la question des fusions, est-ce que la Banque Toronto-Dominion serait une meilleure banque à la lumière des recommandations faites par le groupe de travail MacKay? Le fardeau réglementaire serait-il plus lourd si ces recommandations étaient adoptées?

M. A. Charles Baillie: Nous appuyons la plupart des recommandations du groupe de travail MacKay. Par contre, je crois qu'il y a plus d'une recommandation qui, si on interprétait la réglementation à la lettre, pourrait contribuer à augmenter les coûts de notre industrie.

Le groupe de travail MacKay dit que nous voulons appliquer la réglementation uniquement si elle est avantageuse du point de vue des coûts. Tout le monde ne lit pas le rapport en entier. Il y a un risque que l'aspect réglementaire se traduise par une forte augmentation des coûts, des coûts que les compétiteurs dans des domaines très particuliers n'auraient pas à affronter.

L'autre chose qui me préoccupe un peu est que l'on souhaite faciliter la création de nouvelles banques. J'aime bien le principe d'une concurrence accrue, mais je me souviens très bien aussi du sort de la Norbanque et de la Banque Commerciale du Canada. Notre banque a dû débourser un bon montant d'argent pour le premier sauvetage de ces institutions, qui n'a rien donné. Bien que la concurrence qui nous vient de l'extérieur soit généralement bien financée et qu'il n'y ait pas à se préoccuper de la solvabilité de l'institution, j'espère seulement que nous nous assurerons que tout nouveau concurrent dispose d'un financement approprié qui ne nous obligera pas à répéter la même expérience.

Mme Karen Redman: Plus tôt aujourd'hui nous avons accueilli des représentants de banques étrangères qui nous ont parlé de leurs impressions au sujet du groupe de travail MacKay. Vous avez parlé d'abandonner les activités de paie et garde parce que cela est une bonne décision d'affaire pour la TD.

Une des questions qui me gêne est de savoir si, en tant que Canadiens, nous devons nous préoccuper du fait que nous sommes en train de nous déposséder puisque le secteur financier s'intéresse de plus en plus aux activités qui sont avantageuses pour l'entreprise, pour ses actionnaires et pour ses clients? Prenez le cas de Citicorp et, comme vous l'avez déjà mentionné, des cartes bancaires. En tant que Canadiens, devrions-nous nous inquiéter du fait qu'il s'agit d'un service qui nous est peut-être offert à partir d'un point situé à l'extérieur de nos frontières nationales?

M. A. Charles Baillie: Ma crainte, si nous maintenons le statu quo, est que les institutions financières étrangères, qu'il s'agisse d'entreprises qui s'intéressent aux cartes de crédit, aux hypothèques ou aux fonds mutuels, viendront au Canada si les produits offerts rapportent une marge suffisamment élevée et si les produits sont attrayants pour eux. Ces entreprises ne voudront pas nous livrer concurrence dans certains des domaines où vous craignez que nous ne continuerons pas d'offrir des services. Si, au fil du temps, nous perdons les secteurs d'activité à rendement élevé, c'est parce que nous sommes moins solides et moins aptes à continuer de réinvestir dans des activités qui, traditionnellement, font partie du secteur bancaire canadien.

Nous ne tirons plus que le tiers de nos profits du réseau des succursales bancaires.

M. Robert Kelly: Pour l'ensemble de la banque, le tiers des profits provient des succursales établies au pays, y compris les cartes de crédit et les autres opérations de détail. Pour la plupart des gens, les succursales de la Banque TD au pays génèrent l'ensemble des profits. De fait, ces succursales ne génèrent que le tiers des profits de la banque, et il importe d'en prendre conscience. Bien entendu, c'est aussi ce tiers des profits qui est le plus visé par le Bureau de la concurrence et par la politique gouvernementale.

• 2030

Mme Karen Redman: Une autre question m'est venue lorsque nous parlions aux banquiers de l'étranger. Comme la Banque TD s'interroge sur la pertinence d'une fusion et qu'elle cherche à devenir un intervenant sur la scène internationale, envisagerez-vous d'offrir un service complet comme celui que les Canadiens reçoivent du secteur des banques ou envisagerez-vous d'occuper un créneau de marché sur un front global?

M. A. Charles Baillie: Je ne crois pas que nous offririons un service bancaire de détail à grande échelle à l'extérieur du Canada parce que, selon nous, il serait très difficile de s'implanter et d'obtenir une masse critique suffisante avec un nombre approprié de succursales. Il serait beaucoup trop long de développer un réseau de ce genre.

Nous prévoyons cependant faire concurrence à une banque électronique aux États-Unis et offrir toutes sortes de services comparables à ceux d'ING. Nous offrons déjà des cartes de crédit, des hypothèques, des prêts de transformation de l'avoir propre foncier et le paiement de factures aux clients de Waterhouse National Bank. Nous avons commencé par les clients du service de courtier à escompte Waterhouse aux États-Unis. Nous offrons ce service aux Canadiens qui en ont besoin aux États-Unis, par exemple parce qu'ils vivent cinq mois par année en Floride. Vous voyez ce dont je parle.

Nous occuperons des créneaux un peu partout au monde. M. Bob Kelly a parlé du courtage réduit. Mon rêve est que dans cinq ans il soit beaucoup plus facile et beaucoup moins coûteux pour vous que pour quiconque de faire des opérations commerciales à l'échelle mondiale.

Nous avons été très chanceux d'entrer si tôt dans le secteur du courtage réduit. Selon moi, les banques du monde ont cru qu'il ne s'agissait pas d'une activité bancaire à cause du cas de Bank of America. Cette banque avait d'abord acheté Charles Schwab, mais les choses ont mal tourné et elle a dû s'en départir. Automatiquement, les gens se sont imaginés que ce n'était pas une activité bancaire.

Selon nous, il s'agit d'une activité bancaire tout à fait légitime. D'une certaine manière, c'est la façon dont fonctionneront les banques dans le futur. Vous pourrez tirer un chèque de votre compte de courtage réduit GreenLine, emprunter de GreenLine et y déposer. Au fur et à mesure où nous étendrons nos activités de courtage réduit à l'échelle mondiale, nous y ajouterons—si tout fonctionne bien aux États-Unis—des activités bancaires électroniques en Australie, au Royaume-Uni, au Japon et à Hong Kong. Nous y ajoutons des éléments comme le fonds du marché monétaire et le fonds indiciel. Ainsi, il y aura un fonds indiciel pour chacun des pays dans lesquels nous nous établirons. Si, pour une raison quelconque, vous voulez être présent sur le marché d'Australie, l'approche la plus simple pourrait être de participer à notre fonds indiciel australien.

Actuellement, nous vendons de l'assurance par l'entremise de courtiers à escompte au Canada, à titre expérimental. C'est un créneau où nous nous sommes établis tôt. C'est une activité commerciale à masse critique et une activité qui exige une certaine expérience, et nous avons une longueur d'avance. J'espère qu'il y a des gens dans d'autres pays qui témoignent devant un comité parlementaire et qui se disent préoccupés par l'arrivée des Canadiens et qui craignent que les Canadiens auront une emprise sur ce marché parce que leurs institutions sont beaucoup plus importantes et qu'elles peuvent dépenser davantage. Mais ce n'est peut-être pas le cas.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Epp.

M. Ken Epp: Merci.

Ma question n'a pas encore été posée, et je m'en étonne. Un de vos concurrents qui a témoigné devant notre comité a dit que si les fusions allaient de l'avant, il était prêt à prendre l'engagement de ne pas faire de mises à pied, qu'il aurait recours à l'attrition naturelle et au recyclage pour réduire le nombre d'employés, et que, le cas échéant, il n'y aurait pas de fermetures de banque dans les petites collectivités du pays. Ce concurrent nous a dit que si son entreprise et celle avec laquelle il envisageait de fusionner comptaient chacune une succursale dans une collectivité, on pourrait en fermer une, mais qu'il n'y aurait pas de retrait complet de la succursale de la petite collectivité. Êtes-vous disposé à prendre le même engagement, ou avez-vous une opinion complètement différente sur la question?

M. A. Charles Baillie: Je crois qu'il est très difficile de dire qu'il n'y aura pas de mise à pied. Les deux banques visées par le projet de fusion comptent 74 000 équivalents temps plein. Le taux d'attrition naturelle est d'environ 8 000 personnes par année. Nous croyons donc être en mesure de gérer la réduction du nombre d'emplois par l'attrition et nous devrions y parvenir assez facilement. Par contre, il y a des cas où il est impossible de recycler les gens, et ainsi de suite.

• 2035

Il n'y a pas beaucoup de précédent et on cite parfois des chiffres qui font peur. Je suis revenu sur les détails de la fusion de la Banque de Toronto et la Banque Dominion. Il faut admettre que c'était en 1955 et que le monde est fort différent de ce qu'il était à cette époque. Au cours de chacune des années qui ont suivi la fusion, nous avons ajouté des employés. Je me suis contenté d'examiner les données pour une décennie, mais on constatait une augmentation à chaque année. Comme je l'ai dit, le monde est sans doute différent, mais c'est un élément à considérer.

Je suis pourtant fermement convaincu que s'il y a fusion, il y aura davantage d'emplois d'ici cinq ans au sein de la banque nouvellement créée qu'il n'y en aurait si nous demeurions des entités individuelles.

Nous avons dit qu'il n'y aurait pas de réduction de services dans les collectivités rurales où la CIBC ou la Banque TD sont la seule présence. Nous en avons pris l'engagement.

Nous n'avons pas trop insisté sur ces aspects, du moins pas autant que les autres banques dont vous parlez, parce que nous voulions savoir. Nous connaissons les domaines de préoccupation en général. Ce sont les frais de service, les pertes d'emploi dans les succursales, le service en milieu rural, le caractère confidentiel des renseignements, les ventes liées, etc. Nous pensons être en mesure de faire face à tous ces éléments et d'apaiser les craintes, mais nous pensons qu'il est irresponsable d'offrir une solution avant que votre comité ou le Bureau de la concurrence nous dise où sont les problèmes. Nous sommes très souples et nous sommes tout à fait disposés à travailler en collaboration avec vous et avec le Bureau de la concurrence sur cette question.

Quant à la question des emplois, nous estimons être un employeur modèle. Les budgets de formation pour les deux entités se sont élevés à 80 millions de dollars l'an dernier. Nous croyons donc être capables de faire un excellent travail de recyclage et nous estimons être axés sur une croissance des affaires.

M. Ken Epp: Merci. C'était là ma seule question.

Le président: J'ai une question concernant le ton du débat sur la pertinence de la fusion et, de façon plus générale, sur les changements que les personnes proposent à la suite du rapport MacKay.

Des banquiers viennent dire qu'il n'y a pas de problème avec le processus d'examen de la fusion, qu'il n'y a pas de problème concernant la responsabilité face à la collectivité, les ventes liées, un code législatif de protection de la vie privée, la désignation d'un ombudsman fédéral ou l'adoption d'une loi forçant le réinvestissement dans la collectivité, et ainsi de suite. Pourquoi accepteriez-vous tout cela? Pourquoi accepteriez-vous toute cette réglementation?

M. A. Charles Baillie: Eh bien, peut-être n'aurons-nous pas le choix.

Le président: Mais c'est exactement là où je veux en venir. Ce n'est pas une question de choix. Dans le cadre du débat, qu'il s'agisse d'une banque ou d'une compagnie d'assurances, vous devez proposer une vision pour l'avenir.

Des représentants de l'industrie de l'assurance et de la location d'automobiles sont venus nous dire qu'ils cherchaient surtout à protéger leur territoire. Cela est équitable, mais le débat doit s'élever au-delà de ces considérations.

Je sais qu'à plusieurs égards, les quatre banques qui ont des projets de fusion doivent s'entendre sur à peu près tout ce que les députés leur proposeront, mais c'est cette partie du débat que je n'aime pas. J'aimerais que M. Baillie, qui représente la Banque Toronto-Dominion, nous dise que toute cette réglementation n'est pas bonne pour les affaires. J'aimerais qu'on me dise exactement ce qu'il faut pour l'avenir du secteur des services financiers. J'ai l'impression que vous êtes d'accord avec tout. Comment pouvez-vous être d'accord avec tout ce qui vous est proposé?

Monsieur Baillie, ai-je raison? Tout me semble surréaliste.

M. A. Charles Baillie: Nous parlions plus tôt de la crainte d'une réglementation trop lourde. Cela m'inquiète, parce qu'il semble y en avoir beaucoup dans le document. Et je crains aussi les précédents établis par la Norbanque et la Banque Commerciale Canadienne. Ce sont là les véritables objections.

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Ma plus grande crainte face à tout ce processus est que nous serons obligés de retarder presqu'à l'infini plutôt que de prendre une décision. Il serait beaucoup mieux pour nous que l'on décide de ne pas autoriser les fusions, de le savoir maintenant plutôt que plus tard, parce que comme je l'ai dit plus tôt, cette incertitude dérange nos gens. Cela nous dérange, mais cela dérange aussi le pays. Plus le processus pourra être réglé rapidement, mieux cela vaudra pour tout le monde.

Le président: Je suis d'accord avec cela. Ce qui doit arriver devrait se produire et tous devraient savoir où ils en sont.

Vous êtes dans l'industrie des banques et il est normal que les gens disent que les fusions entraîneront des pertes d'emploi ou qu'il y aura attrition des emplois... Écoutez, si vous fusionnez, il doit y avoir une raison. Il faut notamment, que ce soit pour réaliser des économies. Peut-être qu'il y aura une consolidation qui entraînera des pertes d'emploi et la fermeture de certaines succursales. Mais c'est une réalité de la vie et c'est une réalité du monde des affaires.

Je vous dirai bien franchement que j'ai l'impression que les gens d'affaires deviennent des politiciens et que les politiciens deviennent des gens d'affaires. C'est là où se situe le problème. Je n'ai jamais vu des banquiers se présenter devant un comité et manifester leur accord à chacune des propositions. Si j'étais banquier, je ne serais pas d'accord avec toute les propositions réglementaires que contient le rapport MacKay. On en est presqu'au point où la réglementation et la conduite des affaires sont intimement liées.

Je me demande alors pourquoi vous ne parlez pas au nom de votre entreprise pour nous dire que c'est une bonne décision d'affaires, pour telle et telle raisons.

M. A. Charles Baillie: Pour ce qui est des pertes d'emploi, je vous ai dit plus tôt qu'il serait malhonnête d'affirmer qu'il n'y aura pas moins d'emplois, mais que compte tenu du taux d'attrition naturelle, je crois que nous pouvons y arriver avec un minimum de conséquences. Un taux d'attrition naturelle de 8 000 employés par année est assez important pour un total de 74 000 employés.

Une des choses qui me préoccupe au sujet du pays, et que je devrais probablement exprimer, est qu'en principe je ne crois pas qu'il serait bon que nous soyons autorisés à fusionner si on doit nous imposer de nombreuses restrictions qui nous rendraient non concurrentiels et non productifs. Cela pourrait être bon dans le cas d'une fusion en particulier, mais si nous commençons à penser en ces termes en tant que pays, il devient très difficile de concurrencer les États-Unis. Nous parlons continuellement de la valeur d'être concurrentiel, d'être productif et de la crainte d'avoir perdu un peu de productivité par rapport aux États-Unis.

J'aurais dû parler de cela plus tôt. C'est une des réserves que j'ai face aux propositions.

Nous croyons que les fusions sont une bonne chose et que le projet est suffisamment valable pour que nous acceptions un certain nombre de compromis pour y parvenir, mais ce serait honteux si nous commencions à penser, en tant que pays, en terme de conditions non productives.

M. Robert Kelly: Puis-je ajouter un mot sur le sujet? Il est très important de se rappeler que nous faisons partie d'une union économique plus large qui s'appelle maintenant l'Amérique du Nord. Dans la province où nous sommes actuellement, c'est-à-dire l'Ontario, 45 p. 100 du PIB sont exportés, dans une proportion de 90 p. 100 vers les États-Unis. Nous fonctionnons maintenant dans une économie nord-américaine. Cela est manifeste. M. Charles Baillie a mentionné la liste de tous les nouveaux concurrents américains qui viennent au Canada, et nous faisons de même de l'autre côté de la frontière pour concurrencer les Américains.

Nous sommes maintenant dans un marché économique beaucoup plus large. Nous sommes très fiers de notre système bancaire au Canada, de son efficacité, de ses faibles coûts, de la façon dont nous offrons des services d'établissement des prix à l'échelle nationale et des services nationaux dans des milliers de collectivités du pays. Nous réclamons le droit de faire la même chose aux États-Unis et de concurrencer sur un pied d'égalité.

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Nous sommes également fiers d'être l'un des grands centres financiers d'Amérique du Nord, et nous voulons qu'il en reste ainsi. Si on ne nous laisse pas aller de l'avant et développer notre entreprise, nous risquons de perdre ces avantages. Le but d'une fusion n'est pas de réduire la taille de l'entreprise, mais bien de l'accroître. C'est pourquoi nous sommes tous convaincus que la fusion se traduira éventuellement par un plus grand nombre d'emplois au Canada que de pertes d'emploi à court terme.

Le président: Quelle est l'importance pour le Canada de développer un contexte entrepreneurial pour le secteur des services financiers? Et croyez-vous qu'un projet de fusion—et je ne parle pas ici du vôtre—entre les banques A et B et C et D pourrait s'avérer utile?

M. A. Charles Baillie: Il est incroyablement important pour le Canada d'avoir un meilleur esprit d'entreprise, non seulement pour le secteur financier mais aussi pour l'ensemble de l'industrie.

Pendant de nombreuses années, notre économie a été dominée par des compagnies étrangères. J'ai constaté, pendant que je grimpais les échelons à la banque, que les véritables décisions se prenaient au siège social et que c'est là que vous preniez de l'expérience. Je ne crois pas que nous ayons formé autant de gens que nous aurions pu le faire. Les Américains ont fait beaucoup mieux que nous. Chez nous, si une personne vraiment compétente parvenait à lancer sa propre entreprise, aux États-Unis, il pouvait y en avoir trois ou quatre à faire la même chose.

Quant aux retombées commerciales de notre démarche de fusion, je crois qu'on pourrait aborder la question de l'un ou l'autre des points de vue. Je crois que notre fusion donnera une institution plus grosse, plus solide qui sera en mesure de consentir des prêts beaucoup plus spécialisés.

Prenons une ville comme Peterborough, par exemple. La taille de cette ville ne permettrait pas à la CIBC ou à la Banque TD d'installer ce que nous appelons un centre bancaire commercial avec un certain nombre d'entreprises commerciales de taille intermédiaire comptant du personnel bien formé. En combinant les deux établissements, nous serions capables d'établir un centre bancaire commercial complet à Peterborough ou à Chatham ou dans des villes semblables. Ainsi, nous serions en meilleure posture pour appuyer les activités commerciales ou les gens qui cherchent à faire prospérer leurs entreprises.

Nous avons mis sur pied ce que l'on appelle SCC Canada. Nous faisons des prêts subordonnés avec des droits de rachat de 500 000 à cinq millions de dollars. Nous avons déjà fait environ 29 prêts. Aux dernières nouvelles, ils avaient contribué à la création de 750 emplois. S'il y a fusion, nous injecterons davantage de capitaux dans ce genre de services.

Avez-vous quelque chose à rajouter sur la question, Bob?

M. Robert Kelly: Je crois que nous sommes très axés sur les entrepreneurs du pays et que nous devons continuer de les encourager parce que les entrepreneurs d'aujourd'hui deviendront les grandes entreprises de demain et que ce sont les personnes qui créent les emplois.

Je dois dire que M. Charlie Baillie m'a véritablement incité à considérer le côté de la petite entreprise et que tous deux nous avons fait la même chose avec nos gens localement. Plus tôt, M. Epp a mentionné que nos documents de demande étaient beaucoup trop longs; ils pouvaient compter dix pages ou même autant de pages qu'un annuaire téléphonique. Aujourd'hui, notre formulaire de demande de prêt ne compte plus qu'une page et il est possible de le soumettre par Internet, par télécopieur ou de le remplir dans une succursale locale.

M. A. Charles Baillie: De plus, 80 p. 100 des prêts aux petites entreprises pourraient se régler en 24 heures.

M. Robert Kelly: C'est vrai, et nous avons approuvé plus de 90 p. 100 de ces demandes de prêt au cours des 12 derniers mois. Par conséquent, nous aidons le Canada à croître.

Le président: J'ai une dernière question pour vous, monsieur Baillie. Je ne veux pas vous laisser sous l'impression que je n'ai rien à faire de la concentration des entreprises. Je crois qu'en tant que banquier et membre d'institutions financières, vous apportez beaucoup à l'économie canadienne et que plusieurs personnes dépendent de cet apport. Quand vous mettez fin à la ligne de crédit d'une entreprise, vous la menez au bord de la faillite. Il est facile de détruire des gens—leur vie, sans compter leurs entreprises—si on leur refuse la possibilité d'agir.

Cela étant dit, si vous deviez respecter le critère du seuil de concentration précisé par le Bureau de la concurrence, et c'est là un argument que j'entends souvent quand il est question de deux grandes banques qui tout d'un coup, les personnes opposées aux fusions diraient quand même que cela réduirait leurs choix, la concurrence, et ainsi de suite.

• 2050

Supposons que vous représentez une banque indépendante de ces deux grandes banques qui veulent fusionner, et que vous constatez que ces deux banques n'offrent pas un bon service, qu'elles n'offrent pas de bons prix, qu'elles n'offrent pas des services que les gens recherchent quand ils vont à la banque ou chez d'autres institutions qui peuvent fournir un bon service et de bons produits. Supposons que vous êtes le président de cette banque indépendante. Ne commenceriez-vous pas à offrir un meilleur service et des prix plus bas et probablement à connaître une expansion à cause de cela? C'est ce qui attend les gens qui ne sont pas concurrentiels... Vous voyez ce que je veux dire?

M. A. Charles Baillie: Si je croyais que tel serait le résultat, je l'interpréterais comme une occasion en or à titre de président de cette banque. Nous ne fusionnons pas pour offrir un service de moindre qualité ni pour réduire les choix. Nous fusionnons pour offrir un meilleur service à notre clientèle, et la petite entreprise est un de ces clients. La fusion donnera des gains de productivité, et nous refilerons une partie de ces gains à nos clients. Il en résultera que le consommateur individuel et la petite entreprise verront une diminution de frais de service.

Le président: Tel n'est pas le message qui circule parmi les Canadiens. Les Canadiens s'imaginent qu'une fusion se traduira par un choix moindre puisque les institutions nouvelles ne seront pas aussi concurrentielles. Les Canadiens sont inquiets au sujet de la petite entreprise, du Canada rural, ils se préoccupent de pain et de beurre, et ils craignent la fermeture de toutes les succursales. L'image qu'ils se font de l'avenir est loin d'être rose contrairement à ce que vous nous avez décrit ce soir. Ce n'est tout simplement pas la même réalité.

M. A. Charles Baillie: Nous fusionnons pour nous améliorer. Il n'y aurait pas de fusion si nous ne voulions pas nous améliorer. Quand je dis nous améliorer, je dis devenir plus efficace afin que nous puissions refiler des économies à nos clients et que nous puissions offrir davantage de comptes au pays plutôt que de voir ces comptes passer chez Norwest, Finova et les autres. Nous voulons vraiment être en mesure de livrer concurrence.

La question qui me préoccupe est de savoir si nous pouvons amorcer la réduction des frais ou si quelqu'un d'autre le fera d'abord et que nous devrons chercher à suivre. Tout naturellement, je préférerais être en position de force de manière à pouvoir amorcer le mouvement à la baisse des frais. Et ces frais baisseront. Les entreprises suffisamment solides qui se présenteront dans des créneaux choisis finiront par abaisser les tarifs et les frais, et nous voulons être en mesure d'en faire autant ou de prendre l'initiative.

Le président: Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri: Merci, monsieur le président.

Je tiens à confirmer les observations de M. Kelly au sujet des banques canadiennes, c'est-à-dire que les consommateurs canadiens sont bien desservis par les institutions canadiennes. J'en suis fermement convaincu, puisque je vis cette situation comme bien d'autres Canadiens. Nous ne prenons pas toujours le temps de le dire. Peut-être que certains Canadiens n'ont pas voyagé à l'extérieur du Canada. J'ai beaucoup voyagé et j'ai parfois pu constater ce qu'est la concurrence. Si la concurrence vient au Canada, je regrette, mais je n'en veux pas pour la bonne et simple raison que ces entreprises concurrentes n'offrent pas autant de services qu'une banque.

J'ai une dernière question. Ce n'est pas un artifice, et je peux l'utiliser en Chambre. Mon crédit est excellent. Pourquoi dois-je payer 16,5 p. 100 sur ce crédit? Aujourd'hui, avant que vous n'arriviez, ceux qui étaient assis de ce côté de la table, les concurrents—Wells Fargo, First Union, Capital One—et qui offrent tous des cartes de crédit m'ont offert à moi et à toutes les personnes présentes à cette table un produit moins coûteux. Bien sûr, je suis Canadien et je ne veux pas de cela... Et pourtant, quand vous parlez de leurs prêts, de leur spécialité et ainsi de suite, ils se situent à trois pour cent, cinq pour cent, huit pour cent plus élevés que vous l'êtes. J'aimerais que vous commentiez cette observation.

M. Robert Kelly: Nous offrons une carte de crédit à faible intérêt, de sorte que vous pouvez avoir un meilleur taux avec notre banque qu'avec la vôtre.

M. A. Charles Baillie: Je ne suis pas sûr que ce soit neuf ou dix pour cent.

M. Robert Kelly: Vous avez donc une solution de rechange à très faible coût. Je crois que ces institutions financières ou compagnies de carte offrent toutes un faible taux de lancement, ce qui est une pratique courante aux États-Unis. Après une période de trois ou six mois, les taux habituels s'appliquent.

M. Gary Pillitteri: Je vois. Ainsi, ces taux de lancement ne sont pas les taux qui demeurent en vigueur pour une longue période de temps.

M. Robert Kelly: C'est exact.

M. Gary Pillitteri: Je tenais à dire que les Canadiens ne sont pas au courant des services que vous offrez. Parfois, ils parlent des frais de service et des taux d'intérêt. Nous sommes bien servis et je ne suis pas sûr que cela soit maintenu dans le futur. Si nous sommes si bien servis, pourquoi voulez-vous changer?

• 2055

M. A. Charles Baillie: Nous voulons être en mesure de continuer à bien vous servir. Pour y parvenir, nous devons investir.

Le président: Merci, monsieur Pillitteri.

Messieurs Baillie et Kelly, au nom du comité, je vous remercie beaucoup de votre excellent exposé. Il nous a beaucoup aidé à examiner le rapport du groupe de travail MacKay.

La séance est levée.