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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 7 octobre 1998

• 0814

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)): Bonjour. Nous reprenons nos audiences publiques dans le cadre de nos consultations prébudgétaires pour le ministre des Finances. Aujourd'hui, comme vous le savez, c'est le troisième jour de notre voyage dans l'Est du pays.

Nos collègues de la Chambre des communes consultent aussi les Canadiens de l'Ouest. Ce processus durera environ quatre semaines pendant lesquelles nous tiendrons des audiences de consultations prébudgétaires pour donner aux Canadiens l'occasion de dire aux politiciens ce qui, d'après eux, devrait constituer nos priorités dans le prochain budget.

• 0815

Nous en profitons pour tenir en même temps des audiences sur l'avenir des institutions financières, soit le rapport du groupe de travail MacKay. Ces audiences s'ajouteront à celles que nous avons tenues à Ottawa en juin dernier. C'est la cinquième année consécutive, je crois, que nous consultons les Canadiens et, étant membre du Comité des finances depuis deux ans, je crois pouvoir dire que le succès de nos budgets, si on peut parler de succès... Le succès de nos budgets est essentiellement attribuable au fait que les Canadiens ont accepté certaines des mesures très dures qui ont été adoptées en 1995 à l'issue de consultations telles que celles-ci.

Notre rôle est de faire rapport au ministre des Finances afin que son prochain budget traduise bien les priorités et les valeurs des Canadiens. C'est pourquoi je tiens à vous souhaiter la bienvenue à tous, au nom de notre parti et du gouvernement. Ce processus m'apparaît extrêmement utile, puisqu'il nous permet de rester à l'écoute des Canadiens. J'invite donc chaque témoin à présenter son organisation et à faire un exposé de cinq à dix minutes; il y aura ensuite une période de questions.

Notre horaire est assez chargé aujourd'hui, et il nous faudra donc le respecter. Nos audiences se termineront à 18 heures. Je commence par présenter les témoins qui sont déjà ici. Si d'autres arrivent entre temps, je les présenterai aussi.

Nous accueillons M. Jim Sharpe, le président sortant de l'Association pour l'éducation permanente dans les universités du Canada; Joan Lay, de la Corporation canadienne des retraités concernés; Joan Jessome et Ian Johnson, analyste des politiques, du Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse; Mme Maureen MacDonald, députée provinciale; et Stella Lord, du Conseil consultatif sur la condition féminine de la Nouvelle-Écosse.

Habituellement, je choisis le premier intervenant au hasard. Peut-être qu'un volontaire voudrait briser la glace. Sinon, je désignerai quelqu'un.

Merci, Jim. Allez-y.

M. Jim Sharpe (président sortant, Association pour l'éducation permanente dans les universités du Canada): Merci, monsieur le président.

Je suis heureux de témoigner au nom de l'Association pour l'éducation permanente dans les universités du Canada. Notre association représente le domaine de l'éducation permanente dans les universités canadiennes de Terre-Neuve à Victoria. C'est la première fois que nous témoignons devant votre comité, et nous sommes ravis de pouvoir participer au processus budgétaire, car nous estimons que certains enjeux ont été négligés, un peu ou entièrement, dans les budgets précédents.

Nous parlerons plus particulièrement de l'investissement dans l'éducation. Nous nous intéressons non seulement à l'investissement dans les programmes permettant d'entrer sur le marché du travail, mais aussi à l'investissement dans le recyclage. Dans nos programmes à l'échelle du pays, nous constatons un déclin du nombre d'étudiants à temps partiel; compte tenu de tout ce qui se dit sur l'apprentissage à long terme et sur l'investissement dans l'éducation, c'est une tendance qui nous apparaît très inquiétante. En 1990, je crois que le nombre d'étudiants à temps partiel était à son plus haut; au cours des cinq dernières années, de 1992 à 1997, il a baissé jusqu'au niveau de 1980. Cette situation est attribuable à bien des facteurs. Le plus évident, c'est l'augmentation des frais de scolarité que les universités ont été forcées d'imposer en raison du peu d'appui qu'elles obtiennent des gouvernements provinciaux et du changement au financement des programmes établis dans le cadre du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

Mais j'aimerais d'abord vous parler des initiatives découlant du budget de l'an dernier qui, à mon avis, étaient positives, mais qui n'allaient pas assez loin pour permettre de régler ce problème très grave.

L'an dernier, on a apporté des modifications fiscales dont certaines ciblaient les subventions pour initiatives spéciales pour les étudiants à temps partiel dans le besoin. C'était là d'excellentes initiatives, mais pas suffisantes pour régler le problème.

• 0820

Les études à temps partiel comportent de nombreux avantages. Le plus évident, c'est que les étudiants à temps partiel travaillent; on maintient ainsi la main-d'oeuvre telle qu'elle existe; les travailleurs n'ont pas à abandonner leur emploi pour acquérir de nouvelles compétences. Ils combinent leurs études avec l'emploi, les responsabilités familiales et les responsabilités communautaires. Le coût est étalé sur une plus longue période. Le marché du travail en est moins perturbé. Les travailleurs n'ont pas à quitter leur emploi pendant un an ou jusqu'à trois ans; plutôt, ils améliorent leurs compétences tout en continuant à travailler. Ainsi, l'amélioration est constante. Cela traduit bien le concept de l'apprentissage à vie, puisque les études à temps partiel permettent d'améliorer les compétences et que cette amélioration se reflète de façon continue sur les fonctions qu'on occupe.

Malgré tous ces avantages, les grands programmes d'accès à l'éducation au Canada pénalisent les étudiants à temps partiel. Ainsi, le principal programme de ce genre, le Programme canadien de prêts aux étudiants, permet l'octroi d'un prêt pour étudiant à temps plein pour ceux qui assument 60 p. 100 de la charge d'un étudiant à temps plein. Environ la moitié des étudiants du pays sont donc admissibles à un prêt dont les intérêts seront payés par le gouvernement pendant leurs études. Si vous n'assumez pas 60 p. 100 de la charge d'un étudiant à temps plein—et il serait très difficile de le faire tout en travaillant à temps plein—, les intérêts du prêt qui vous sera accordé ne seront pas payés pendant vos études. De plus, vous devrez rembourser l'intérêt dès que vous aurez terminé vos études.

Ce programme n'étant pas très avantageux, on en fait une utilisation qui est loin d'être optimale. Dans une étude nationale, on a constaté que seulement 6 000 de ces prêts avaient été accordés pendant les 15 années d'existence de ce programme. C'est donc une façon très inefficace d'encourager les études à temps partiel.

Je veux donc surtout demander qu'on ne fasse pas de discrimination entre les étudiants à temps plein et les étudiants à temps partiel. Le ministère du Développement des ressources humaines a tenté de fusionner ces deux programmes—il y a maintenant une brochure qui décrit les deux programmes—, mais si les avantages du programme ne sont pas rehaussés au point où ils sont essentiellement les mêmes pour les deux catégories d'étudiants, le recours à ce programme n'augmentera pas.

J'aimerais donc dire au gouvernement du Canada, par l'entremise du comité des finances, que s'il estime que l'investissement dans l'éducation est important, il devrait investir là où son investissement aura le plus de répercussions, à savoir dans le programme à temps partiel.

Il y a aussi d'autres formes d'investissements, les bourses d'études étant l'une des plus importantes. On a récemment annoncé la création des bourses d'études du millénaire. On vient tout juste de déterminer comment ces bourses seront accordées, dans deux ans. Mais ces deux programmes se fondent sur le processus d'évaluation du programme de prêts aux étudiants. Ces programmes sont donc fondés sur les besoins, et la seule façon d'évaluer les besoins à l'heure actuelle, c'est de s'en remettre au programme de prêts aux étudiants. Par conséquent, si les étudiants à temps partiel ne présentent pas de demande de prêt dans le cadre du programme de prêts aux étudiants, ils ne pourront faire l'objet d'une évaluation aux fins des bourses du millénaire. Pour que les chances d'obtenir de l'aide de ces programmes soient égales, il faut s'assurer de répondre aux besoins particuliers des étudiants à temps partiel.

Par ailleurs, il faut créer les programmes qui sont nécessaires. À la suite de la réduction des subventions accordées par les gouvernements provinciaux aux universités et autres établissements d'enseignement supérieur, on a supprimé les programmes du soir et les programmes autres que les programmes de base dans les universités. Peut-être y a-t-il moins d'étudiants à temps partiel qu'autrefois parce qu'il y a moins de programmes qui leur sont offerts.

Les universités s'adaptent. Elles tiennent compte des inscriptions beaucoup plus que dans le passé. Elles s'intéressent beaucoup plus aux inscriptions. Mais il ne fait aucun doute que les questions financières ont une incidence sur les inscriptions.

Par conséquent, nous estimons qu'il est tout aussi nécessaire d'aider les étudiants que d'aider les établissements, par l'entremise des gouvernements provinciaux, en rétablissant les transferts pour l'enseignement supérieur; l'une des principales sources de ce financement pourrait être la caisse de l'assurance-emploi.

Je crois savoir qu'on a changé le nom du Régime d'assurance-chômage par assurance-emploi parce qu'on voulait en faire un régime plus actif. Plutôt que de se contenter de soutenir le revenu des sans emploi, on a voulu se doter d'un régime actif qui investirait dans l'éducation, afin que les travailleurs aient les compétences leur permetttant d'éviter le chômage le plus possible, ce qui sous-entend non seulement une formation lorsqu'ils sont sans emploi, mais aussi une formation continue.

• 0825

C'est la philosophie qui sous-tend ce changement. Toutefois, aucun véritable mécanisme n'a été mis en oeuvre pour permettre aux membres actifs de la main-d'oeuvre d'avoir accès au Régime d'assurance-emploi. On pourrait peut-être puiser à même les recettes fiscales générales pour créer d'autres programmes, ou prévoir un lien précis avec le Régime d'assurance-emploi. Je laisse aux fonctionnaires le soin de trouver la solution. Je sais qu'on est loin de s'entendre sur ce que serait le meilleur mécanisme, mais ce qui compte, c'est de faire cet investissement.

Pour ce qui est des autres mesures qui ont été adoptées l'an dernier, les incitatifs fiscaux sont très importants. On a prévu des incitatifs fiscaux pour la garde des enfants des étudiants à temps partiel, ainsi qu'un crédit d'impôt pour les étudiants à temps partiel. Autre mesure importante—bien qu'elle n'ait pas encore été mise en oeuvre, mais qu'elle le sera peut-être en 1999: l'utilisation d'un REER pour l'emploi.

Les incitatifs relatifs aux Régimes enregistrés d'épargne-études, eux, ne s'appliquent pas aux étudiants à temps partiel qui sont adultes. Ils ne s'appliquent qu'aux étudiants de moins de 21 ans. Encore une fois, pourquoi ne pas investir dans l'éducation des adultes au travail, des étudiants adultes.

La solution la plus simple serait de faire des cotisations à un REEE, un crédit d'impôt comme dans le cas des cotisations à un REER. Accordons la priorité à ceux qui épargnent en vue de faire des études plutôt que de les inciter à utiliser leurs REER, ce qui a une incidence à long terme sur leurs fonds de retraite. Si on permettait la création d'un fonds distinct, cela constituerait véritablement un incitatif fiscal à l'épargne-études.

Par ailleurs, en matière d'éducation permanente, il importe de développer l'infrastructure d'apprentissage. Il y a eu beaucoup d'activités dans l'enseignement commercial, dont une bonne part met l'accent sur l'usage d'Internet pour l'enseignement. Industrie Canada a beaucoup contribué à ces efforts grâce au Réseau scolaire canadien. On a aussi investi dans le programme «Didacticiens» qui aide les universités à donner leurs cours par l'entremise d'internet. Ce genre d'infrastructure est essentiel à toute société d'apprentissage car elle permet au pays entier d'avoir accès... Je crois que ça s'appelle le programme d'accès communautaire—il compte 10 000 sites et on entend l'étendre à toutes les écoles et universités pour en faire le fondement de l'infrastructure.

Ainsi, on érige une infrastructure d'apprentissage qui sera cruciale pour notre adaptation. Toutefois, on a fait très peu pour étendre cet accès à internet, aux employeurs, aux lieux de travail et aux centres d'apprentissage en milieu de travail. Je sais qu'Industrie Canada s'intéresse surtout aux employés fédéraux, mais il y a encore beaucoup à faire pour étendre cette infrastructure à tout le milieu du travail pour qu'elle serve ensuite à l'apprentissage en milieu de travail et à l'obtention de certificats et de diplômes.

L'autre principal élément, c'est d'encourager, par le régime fiscal, les entreprises à investir dans l'enseignement et la formation. On en a beaucoup parlé dans le passé, mais le dernier budget ne prévoyait aucune mesure précise à cet égard. Encore une fois, je laisse aux fonctionnaires le soin de concevoir ces mesures, mais j'estime qu'il faudrait examiner cette question afin qu'il y ait des investissements et un soutien et des crédits d'impôt pour les appuyer.

Pour ce qui est du soutien aux industries créatrices d'emplois, l'enseignement et la formation constituent l'un des plus importants secteurs de notre pays et il faut reconnaître leur importance pour notre investissement futur.

Merci beaucoup.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Sharpe.

Je cède maintenant la parole à Mme Joan Lay.

Mme Joan Lay (Corporation canadienne des retraités concernés): Merci, monsieur le président.

La Corporation canadienne des retraités concernés, section de la Nouvelle-Écosse, fait partie d'un organisme national entièrement bénévole qui ne compte aucun professionnel sauf les retraités qui en sont membres. Le contenu de notre mémoire découle des recherches qui ont été faites par nous et non par un professionnel, et vous constaterez peut-être que notre mémoire n'est pas aussi poli que d'autres. Cependant, nous ferons de notre mieux.

• 0830

Merci de nous avoir invités à témoigner devant votre comité à titre de représentants des personnes âgées de la Nouvelle-Écosse. Les aînés sont touchés par les politiques adoptées par le gouvernement, fédéral et provincial, et nous sommes heureux de pouvoir participer à ces consultations.

Actuellement, et depuis quelques années, bon nombre d'aînés assument le fardeau du chômage de leurs fils, filles et petits-enfants qui doivent souvent compter sur le seul revenu stable de la famille, la pension des aînés. Nous aimerions que cela change, et cela ne changera que si on met sur pied des programmes de création d'emplois qui servent véritablement à donner des emplois aux chômeurs de tous les âges.

En réponse aux questions qui nous ont été posées, nous aimerions faire les observations suivantes.

En réponse à la première question, à savoir quelles devraient être les priorités du gouvernement maintenant que le budget est équilibré... Les Canadiens ne sont pas encore certains que le budget soit équilibré, puisque Ottawa fait des déclarations contradictoires, qui laissent les gens ordinaires, surtout les personnes âgées, dans l'incertitude. Si le budget est équilibré, une des principales priorités serait d'augmenter les paiements de transfert aux provinces, surtout à notre province de la Nouvelle-Écosse. Les programmes sociaux qui visent les aînés ont été sabrés en raison des réductions des paiements de transfert, du moins, d'après ce qu'on nous dit. Puis, manifestement, il faut financer le système de soins de santé, l'éducation et les programmes d'aide aux personnes âgées. Tout cela est nécessaire pour le bien-être des aînés.

Les Canadiens de tout le pays ont indiqué au gouvernement que les programmes sociaux constituent leur priorité absolue. Par conséquent, le temps est venu de les écouter. Nous demandons que l'assurance-maladie et ses principes, ainsi que les autres programmes sociaux, fassent l'objet d'engagements concrets de votre part.

En réponse à la deuxième question, bien peu d'aînés à la retraite ont des informations sur les investissements stratégiques que le gouvernement voudrait faire. Cependant, voici quelques suggestions fondées sur les renseignements que nous avons pu tirer de l'autre budget:

Soutenir la croissance économique au taux actuel, 4 p. 100 par année après inflation, pendant encore quatre ans au moins en s'assurant que les taux d'intérêt restent faibles et en injectant des fonds dans les programmes fédéraux.

Dès la première année du budget, ramener les dépenses de programmes fédérales au niveau où elles étaient avant les compressions et, la deuxième année, augmenter les dépenses de 8 milliards de dollars.

Bloquer l'ensemble des taxes et des impôts fédéraux à leur niveau de 1996-1997 en 1999 et par la suite, tout en apportant des améliorations importantes au régime fiscal pour le rendre plus juste.

Le gouvernement devra pouvoir compter sur la collaboration active de la Banque du Canada afin de modifier la politique monétaire et permettre une augmentation de l'inflation allant de 1 p. 100 jusqu'à 2 à 4 p. 100 par année. Il faut en même temps instituer toute une gamme de réformes institutionnelles et réglementaires visant à protéger notre régime canadien de taux d'intérêt peu élevés et notre marché des pressions mondiales.

Il y a bien d'autres façons de changer le système, et cela n'est qu'un début. Pour profiter de la nouvelle ère qui s'annonce, les Canadiens doivent être convaincus que le gouvernement a leurs intérêts à coeur, et non pas ceux des sociétés multinationales. Cela pourrait se faire de deux façons: éviter l'adhésion à l'AMI et interdire les fusions de banques qui sont proposées. Les Canadiens ne pourront profiter des possibilités qui ne seront offertes qu'aux consortiums nationaux.

Si on investissait dans la création d'emplois acceptable du point de vue de l'environnement, on pourrait créer des centaines d'emplois pour les Canadiens. Il faut sauver les forêts et appuyer activement les initiatives en vue de recréer le secteur des pêches, et continuer à améliorer notre agriculture en augmentant les paiements de transfert et en consolidant les programmes de santé, d'éducation et autres. Le gouvernement s'assurera ainsi d'offrir une vaste gamme d'emplois aux Canadiens. Cela aidera certainement les personnes âgées.

• 0835

Je tiens aussi à dire que, bien que nous n'ayons pas de chiffres et de pourcentages précis, nous voulons nous abstenir de dire au gouvernement fédéral ou aux représentants de notre région exactement ce qu'ils doivent faire. Nous les avons élus précisément parce que nous croyons qu'ils feront ce qui est dans notre intérêt.

À l'heure actuelle, les aînés canadiens se trouvent dans un creux. Ils viennent après les personnes âgées qui se sont opposées au gouvernement d'Ottawa qui voulait modifier leurs pensions, et avant les babyboomers qui vieillissent. Nous, les aînés, sommes pris entre ces deux groupes. La présence en grand nombre des babyboomers se fait déjà sentir, et il ne fait aucun doute que cette tendance s'accentuera à mesure qu'ils vieillissent.

Vous constaterez que les aînés ne parlent pas beaucoup ces jours-ci. Ils se laissent porter par les événements. Toutefois, s'il le faut, ils sauront certainement faire entendre leur voix. Pour l'instant, nous sommes plus inquiets de voir nos fils, nos filles, nos petits-fils et nos petites-filles, incapables de trouver leur place au pays, et de voir que certains aînés doivent continuer de subvenir à leurs besoins.

Merci beaucoup de m'avoir écoutée.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame Lay.

Je cède maintenant la parole à Mme MacDonald qui sera suivie de Mme Lord.

Mme Maureen MacDonald (députée à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse (Halifax Needham, NPD)): Merci.

Premièrement, je tiens à dire comme il est bon d'être de nouveau ici. L'an dernier, j'ai comparu, mais à un autre titre. Je travaillais encore à l'École de travail social des Maritimes, comme professeur. Aujourd'hui, je suis porte-parole de l'opposition officielle de la Nouvelle-Écosse en matière de santé et présidente du Comité permanent de l'Assemblée législative sur les services communautaires. Nous avons mené des audiences publiques, dans toutes les régions de la Nouvelle-Écosse, concernant la réforme de l'aide sociale, et c'est dans le contexte des travaux des quatre ou cinq derniers mois que je m'adresse à vous aujourd'hui.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous représentez donc votre parti?

Mme Maureen MacDonald: En effet je représente ici mon parti. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de parler de ma comparution d'aujourd'hui avec le porte-parole de notre parti en matière de finances.

J'aimerais vous renvoyer à un article dont je vous remettrai copie. C'est la version définitive d'un article que j'ai rédigé sur l'incidence de la restructuration de l'État providence canadien sur la région de l'Atlantique. Je tente d'examiner ce qui s'est passé au cours, disons, des 15 dernières années en matière de politique fédérale dans ce domaine, et ce que ces changements ont eu pour conséquences pour la région de l'Atlantique.

En un sens, nous devons nous mettre l'accent sur le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Nous savons que les compressions au TCSPS ont été profondes et radicales et qu'elles ont eu une incidence considérable sur la région de l'Atlantique. Selon le Conseil économique des provinces de l'Atlantique, les dépenses nettes du gouvernement fédéral dans les quatre provinces de l'Atlantique—c'est-à-dire les dépenses moins les recettes—sont passées de 38 p. 100 à 19 p. 100 du PIB de 1980 à 1995.

Les programmes qui ont été les plus touchés dans cette région à la suite de cette réduction radicale de la présence fédérale sont ceux des soins de santé, de l'éducation, des services sociaux et, plus récemment, de l'assurance-chômage. En Nouvelle-Écosse seulement, le transfert fédéral pour la santé, l'éducation et les services sociaux aura été réduit de 800 millions de dollars d'ici 1999. Parallèlement, selon le Conseil national du bien-être, la pauvreté, par exemple, a augmenté dans cette région. On peut donc établir un lien entre le retrait des dépenses fédérales dans la région, la réduction du revenu personnel, familial et par foyer et l'augmentation de la pauvreté.

• 0840

Le taux de pauvreté de la Nouvelle-Écosse est de 18 p. 100, soit le troisième au pays; 168 000 personnes y vivent sous le seuil de la pauvreté. Ce taux a augmenté par rapport à 1990, année où la province, avec un taux de 13 p. 100, était au troisième rang des provinces les moins pauvres. Ces chiffres vous donnent une idée des tendances qu'on a constatées et vous indiquent pourquoi nous devons nous préoccuper des politiques du gouvernement fédéral et des effets qu'elles ont sur les habitants et les familles de notre région.

En ce qui a trait aux soins de santé, il ne fait aucun doute pour nous que les listes d'attente dans les urgences sont maintenant beaucoup plus longues, que notre province a beaucoup plus de mal à garder ses médecins car elle ne peut leur offrir une rémunération et des conditions de travail concurrentielles, qu'on a de plus en plus recours aux tickets modérateurs et que, de plus en plus, ce sont les membres de la famille, surtout les femmes, qui sont appelés à prendre soin des malades.

Par ailleurs, on se dirige de plus en plus vers un système de soins de santé à deux paliers, le premier pour ceux qui ont une assurance privée ou les moyens de recevoir des soins plus rapidement, et le second pour ceux qui comptent sur l'injection de deniers publics dans un système qui subit de nombreuses compressions et qui se retrouvent pris dans le processus bureaucratique. L'universalité et l'accessibilité de notre régime de soins de santé sont ainsi sérieusement érodées.

En ce qui a trait à la situation financière du gouvernement fédéral, il est clair pour nous que ce dernier est maintenant en mesure de rétablir le financement des soins de santé aux niveaux précédents. Nous exhortons les députés fédéraux à défendre cette cause car, comme l'a dit Mme Lay, l'assurance-maladie est fondamentale pour les Canadiens, pour notre identité et pour la santé des Canadiens.

Nous estimons aussi que le gouvernement fédéral est maintenant en mesure d'améliorer le système des soins de santé, et non pas de simplement y réinjecter des fonds; il devrait faire preuve d'initiative et améliorer le système de soins de santé et les programmes de promotion de la santé. Ainsi, dans la région de l'Atlantique, les programmes de promotion de la santé ont beaucoup aidé les organisations de femmes dans leurs initiatives de développement communautaire et de promotion de la santé. Les gens mêmes ont su mener des projets très novateurs dans ce domaine. Maintenant, cette section n'est plus en mesure de soutenir les projets pilotes novateurs. Elle ne compte plus essentiellement que deux programmes, un programme limité dans le domaine du VIH/sida et un autre en matière de pauvreté infantile. C'est donc une question que nous devrions examiner attentivement.

J'estime aussi que nous avons maintenant la capacité financière d'envisager un programme national de soins à domicile, ce qui réduirait la pression qui s'exerce sur les membres de la famille, souvent les femmes, qui doivent dispenser des soins, souvent des soins primaires, à des malades.

• 0845

Nous devons aussi examiner attentivement la possibilité de créer un programme national d'assurance-médicaments. Dans le cadre des audiences sur la réforme de l'aide sociale en Nouvelle-Écosse, nous avons entendu les témoignages de médecins généralistes de diverses localités. Ils nous ont parlé de patients qui sont trop pauvres pour payer les médicaments dont ils ont besoin pour lutter contre leur maladie ou prendre soin d'eux-mêmes chez eux. Parce qu'ils ne peuvent se payer ces médicaments, ils doivent se faire hospitaliser à répétition et même, dans certains cas, subir une opération. C'est une façon très peu prévoyante de s'occuper de la santé des gens. Si nous n'offrons pas le genre de programmes et de soutiens dont les gens ont besoin pour rester en santé, ils se retrouveront tôt ou tard quelque part au sein de système de soins de santé, et cela nous préoccupe grandement.

Un de mes collègues qui n'a pas pu venir aujourd'hui souhaiterait que je vous transmette notre opinion au sujet de la fusion des banques. Je vais vous lire ce qu'il a préparé car il tient à vous en faire part.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Nos séances d'aujourd'hui sont consacrées uniquement aux consultations prébudgétaires. C'est demain que nous parlerons de la fusion des banques. Si votre collègue est disponible demain, il pourra venir.

Mme Maureen MacDonald: En fait, il n'est pas disponible demain.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Alors, allez-y.

Mme Maureen MacDonald: Nous voulions que vous sachiez que nous sommes contre la fusion des banques et que nous ne pensons pas que le rapport du groupe de travail MacKay a fait une analyse satisfaisante des risques. Permettez-moi de déposer le texte que mon collègue a écrit et auquel vous pourrez réfléchir. Il a développé la question des risques sur le marché international. Je vais m'en tenir à cela.

Je pourrais peut-être ajouter quelque chose au sujet du fonds de l'assurance-emploi, de ce que l'on compte en faire, et de la nécessité d'améliorer et d'étendre la portée des prestations d'assurance-emploi. Les recherches effectuées et les données recueillies ont prouvé que, avant 1990, 75 p. 100 des membres de la population active étaient admissibles aux prestations d'assurance-emploi. Les modifications apportées en 1990 ont eu pour résultat de ramener ce pourcentage à 66 p. 100. Les modifications les plus récentes au régime d'assurance-emploi sont telles que 30 p. 100 des travailleurs sont admissibles à l'assurance, ce qui est plutôt aberrant. Comme conséquence immédiate, les travailleurs qui ne sont plus admissibles à l'assurance-emploi sont forcément plus ou moins tributaires des programmes d'assistance sociale. Puisqu'il existe un excédent dans le fonds d'assurance-emploi, il semble logique que l'on pourrait améliorer le régime et en étendre la portée.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup de vos suggestions.

Nous passons maintenant au Conseil consultatif sur la condition de la femme de la Nouvelle-Écosse. Allez-y, madame Lord.

Mme Stella Lord (attachée de recherche, Conseil consultatif sur la condition de la femme de la Nouvelle-Écosse): Merci. Je suis attachée de recherche et analyste de politique auprès du Conseil consultatif. Je n'ai rien à ajouter à ce que contient notre mémoire, si bien que je vais en rappeler les points saillants. Malheureusement, notre présidente, Patricia Doyle-Bedwell, n'a pas pu venir aujourd'hui à cause d'un rendez-vous pris préalablement car, il faut le dire, nous n'avons reçu qu'un court préavis de la tenue de ces audiences.

• 0850

Vous avez des exemplaires de notre mémoire sous les yeux. Le Conseil a pour principal souci que le gouvernement entreprenne de régler le déficit social, qui se creuse depuis quatre ou cinq ans, en particulier depuis les compressions effectuées au transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

Dans notre mémoire, nous dressons la liste des sept priorités auxquelles le gouvernement devrait s'atteler s'il souhaite combler le déficit social.

Tout d'abord, bien entendu, la réduction de la pauvreté. Les femmes sont celles qui sont les plus affligées par la pauvreté au Canada. Nous voudrions que le gouvernement fasse un effort pour ces femmes et les familles à faible revenu. La prestation nationale pour enfants, qui est une mesure progressiste, doit être étoffée. Il nous faut des programmes de sécurité sociale plus solides en règle générale, surtout le programme d'assurance-emploi, les prestations, en l'occurrence. Il faut restaurer le niveau des sommes transférées aux provinces au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux si nous voulons que les services sociaux soient maintenus.

Les femmes âgées à faible revenu sont également plus atteintes que les hommes âgés. Nous nous réjouissons que la prestation pour personnes âgées n'ait pas été retenue, car elle comportait des difficultés. Il faut toutefois reconnaître que cette prestation allait, dans une certaine mesure, aider les personnes âgées à faible revenu, mais pas autant que nous l'aurions souhaité. Nous pensons donc qu'il faut de nouveau se pencher sur le sort des personnes âgées à faible revenu, en particulier les femmes. Pour les femmes autochtones et leurs familles, il faut conserver les programmes d'équité en matière d'emploi et les autres programmes qui visent à leur permettre de toucher un revenu.

Deuxièmement, il est nécessaire de renforcer la durabilité économique pour les particuliers comme pour les collectivités. Bien des gens ont rappelé ici les conséquences de la réduction du déficit et celles des compressions, mais ils ont aussi rappelé la crise que subit le secteur des pêches dans la région de l'Atlantique. L'incidence de cette crise se fait sentir chez les femmes et leurs familles dans de nombreuses localités en Nouvelle-Écosse. Il faut se donner à une politique en matière de pêcheries qui favorise la durabilité des collectivités et l'équité pour les petites entreprises de pêche.

Le développement économique communautaire est un moyen que l'on a adopté, mais, à notre avis, les femmes n'ont pas obtenu leur juste part du financement offert par le gouvernement à ce titre. Les femmes ont de tout temps aidé à maintenir leurs collectivités, pour veiller à ce qu'elles survivent, et nous pensons qu'il serait bon que le gouvernement accorde plus de poids à la participation des femmes au développement économique communautaire lors de la mise en oeuvre des divers programmes et projets. Le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones doit également être pris en compte quant aux mesures qu'il recommande pour consolider les communautés autochtones.

Troisièmement, nous devons garantir des chances égales pour ce qui est de l'instruction. Ce principe a été quelque peu bafoué du fait que les étudiants assument désormais une dette élevée, et il faut veiller à ce que les femmes, qui sont de plus en plus nombreuses à poursuivre des études postsecondaires depuis 20 ou 30 ans, ne soient pas handicapées par cette situation. Il faut également s'occuper de l'éducation des Autochtones et veiller à ce qu'ils aient des chances égales de poursuivre des études postsecondaires.

Quatrièmement, il faut s'employer à créer de meilleures conditions pour favoriser l'égalité au travail. Nous nous inquiétons particulièrement de l'augmentation du nombre de travailleurs à faible revenu, et jusqu'à un certain point de l'érosion des normes de travail dans certains secteurs. Il faudrait que l'on s'occupe plus minutieusement des conditions et des normes de travail des travailleurs à faible revenu et nous pensons que le gouvernement fédéral devrait enchâsser une telle norme dans le Code canadien du travail.

• 0855

Nous pensons qu'il faudrait également prendre sérieusement conscience du fait qu'il existe un grand nombre d'études sur la combinaison travail/responsabilités familiales que doivent assumer les femmes et que très peu de mesures ont été prises jusqu'à présent. Nous pensons qu'il faut réfléchir davantage à d'éventuelles politiques progressistes en milieu de travail pour favoriser des conditions optimales pour les femmes.

Cinquièmement, et cela n'étonnera personne, il nous faut un programme national de garde d'enfants ou, à défaut, un programme permettant aux provinces de mieux s'occuper de la garde d'enfants, surtout dans le contexte des nouvelles réformes de l'assistance sociale qui visent à donner aux assistés sociaux, en l'occurrence les mères chefs de famille, les moyens de se faire embaucher. Il est impératif que les services de soutien qu'il sera nécessaire de fournir aux femmes pour qu'elles puissent vivre cette transition de l'aide sociale au marché du travail soient en place afin que cela ne constitue pas un bouleversement de leur propre vie et de celle de leurs enfants.

Il nous faut aider les provinces à rétablir la confiance dans le régime de soins de santé et le gouvernement fédéral doit faire respecter les dispositions de la Loi canadienne sur la santé et injecter des fonds dans le système.

En septième lieu, un autre élément concerne la pauvreté et certains autres sujets que nous avons abordés. Il faudrait que le régime fiscal soit plus équitable, en l'occurrence pour les familles à faible revenu et les petits salariés. Nous recommandons que l'on se renseigne sur les travaux du Caledon Institute of Social Policy. Ken Battle présente des arguments très musclés concernant le problème du non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation, qui entraîne une poussée vers le haut de sorte que les petits salariés paient maintenant plus d'impôt que par le passé.

Voilà essentiellement nos recommandations. Nous exhortons les membres du comité à lire notre mémoire et je répondrai volontiers à vos questions.

Le président: Merci beaucoup.

Je donne maintenant la parole à M. Johnson et à Mme Jessome.

Mme Joan Jessome (première vice-présidente, Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse): Bonjour. Je m'appelle Joan Jessome. Je suis la première vice-présidente de notre syndicat, qui représente les travailleurs du secteur public ici en Nouvelle-Écosse, c'est-à-dire environ 20 000 personnes. Il faut dire que 55 p. 100 des adhérents à notre syndicat sont des femmes, et avant de faire un exposé, je tiens à préciser qu'en tant que travailleuses, nous avons été touchées plus d'une fois étant donné que nous dispensons non seulement des services mais également des soins.

Ainsi, dans mon exposé, je vais essayer de faire ressortir les points saillants du mémoire que nous vous avons fait parvenir par télécopieur le 31 juillet 1998. Vous nous demandez notre avis sur quatre questions que nous avons réduites, quant à nous, à deux.

Quelle devrait être la priorité du gouvernement étant donné que désormais le budget est pour ainsi dire équilibré? C'était la première question. Quant aux trois autres questions, il s'agit essentiellement des stratégies et des politiques nécessaires pour bien mettre en oeuvre ces priorités, n'est-ce pas?

Ainsi donc, nous étions d'avis, et nous le sommes encore, que l'on peut à plus d'un titre contester qu'au niveau fédéral comme au niveau provincial, l'équilibre du budget ait été réalisé. Nos doutes sont confirmés étant donné ce qui s'est produit récemment dans les finances et les économies nationales de certains pays, car la valeur de notre dollar dégringole—du moins par rapport à celle du dollar américain—et l'on constate toujours au Canada des taux élevés de chômage, de sous-emploi et de pauvreté, en cette ère de prétendues croissance et prospérité économiques.

• 0900

Ainsi, nous disons que la priorité des priorités pour le gouvernement fédéral serait de réaliser le plein emploi grâce à un programme de création d'emplois. Pour nous, le plein emploi, ce n'est pas avoir trois emplois à temps partiel de 20 heures par semaine chacun. Le plein emploi c'est travailler à plein temps et jouir des avantages afférents à un emploi. Nous recommandons que l'on supprime la pauvreté et que l'on réalise une redistribution plus équitable des revenus. Il faut étayer nos programmes sociaux et nos services publics—non seulement les étayer mais les améliorer—en établissant un régime d'imposition équitable, et je doute que cela puisse être réalisé de mon vivant. En outre, il faut mettre un terme à l'inégalité économique et sociale et aux injustices entre hommes et femmes, entre les membres de divers groupes ethniques, raciaux et culturels dans nos collectivités. On pourrait commencer par les employés du gouvernement fédéral qui réclament la parité salariale. Nous recommandons de stopper la dégradation de l'environnement et que l'on s'adonne à une protection vigoureuse de l'environnement, afin de créer un ordre mondial plus juste, plus durable et plus pacifique.

Parallèlement à ces priorités, nous recommandons également que l'on fixe des objectifs très clairs et précis dans chaque cas, comme ce qui a été proposé dans le budget fédéral parallèle, de 1998 en vue de réduire le chômage et la pauvreté.

Nous exhortons en outre tous les paliers de gouvernement, y compris le gouvernement fédéral, à prendre pour étalon une mesure de progrès socio-économique plus appropriée que le produit intérieur brut, à savoir un indice de véritable progrès, que l'on pourrait appeler l'IVP, dont on se sert dans un projet pilote en Nouvelle-Écosse en collaboration avec Statistique Canada. En fait, il s'agit de mettre au point un indice composé faisant intervenir une vingtaine de repères environnementaux, sociaux et économiques d'ici l'an 2000.

À notre avis, le gouvernement fédéral devrait montrer l'exemple en s'adressant à cette gamme plus vaste de priorités, et pour commencer, il devrait renoncer à interjeter appel de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne en matière de parité salariale pour des milliers de femmes de la fonction publique fédérale. Pour reprendre le slogan de nos soeurs et de nos frères de l'Alliance de la fonction publique du Canada: cessez de niaiser, payez.

Maintenant, pour ce qui est des stratégies ou des politiques nécessaires à la mise en oeuvre et à l'atteinte de ces priorités, nous recommandons que le dividende budgétaire serve en totalité à restaurer les programmes publics importants et utiles dans lesquels les compressions budgétaires des années 90 ont fait tant de dégâts, et pour cela il faudrait constituer des fonds d'investissement sociaux nationaux pour la santé, l'éducation postsecondaire, le soutien du revenu, la garde d'enfants, le logement, la retraite et l'assurance-chômage.

Nous sommes très déçus que le budget de cette année contienne si peu de mesures au titre de la santé. Nous recommandons que le comité demande au gouvernement de Chrétien de réunir un sommet national sur les soins de santé, comme cela a été proposé par la Coalition canadienne de la santé le 18 juin, afin de préserver et de consolider notre système d'assurance-maladie.

Nous recommandons des changements clés pour contribuer au financement de ces initiatives de politique et ce sont: la part du fardeau fiscal qui incombe aux sociétés, surtout aux grandes multinationales, doit être augmentée grâce à l'imposition d'une taxe minimale pour les sociétés et à l'imposition d'une taxe sur le transfert des fortunes. Il faudra également prendre certaines mesures au niveau international pour endiguer l'investissement débridé qui se multiplie à une vitesse sans cesse plus grande, et pour cela il faudrait songer à une taxe comme la taxe Tobin sur les transactions financières internationales et à un régime fiscal mondial.

Le régime fiscal doit traiter de façon identique tous les revenus, quelle que soit leur source, qu'il s'agisse de dividendes ou de gains en capital, comme cela a été recommandé dès 1967 par la Commission royale d'enquête sur la fiscalité. La TPS, ou encore la taxe de vente harmonisée, telle que nous la connaissons en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve, et les tickets modérateurs qui touchent les gagne-petit de façon indue, doivent être réduits, voire supprimés.

L'utilisation éventuelle par le gouvernement de l'excédent du compte d'assurance-emploi pour toute autre chose que de venir en aide aux chômeurs est selon nous tout à fait inacceptable. Le Congrès du travail du Canada vient de recommander que l'on forme une commission d'assurance-emploi indépendante pour garantir que les cotisations des employeurs et des employés ne sont utilisées qu'à des fins d'aide aux chômeurs.

À notre avis, pour redonner espoir, pour aider tous les Canadiens à tirer parti de tous les débouchés qu'offre l'époque actuelle, il faut maintenir un secteur public solide et dynamique tout en l'étayant. En particulier, il faut que nous puissions compter sur un système d'éducation de première qualité abordable et responsable de la maternelle à l'université.

À l'ère de la mondialisation et des bouleversements, nous recommandons que le gouvernement fédéral réaffirme son rôle de chef de file et sa présence en élaborant et en mettant en oeuvre une stratégie nationale de formation à l'emploi, au lieu de délaisser ses responsabilités au profit des gouvernements provinciaux et territoriaux et du secteur privé à but lucratif.

Pour garantir la plus vaste gamme de débouchés d'emploi dans la nouvelle économie pour tous les Canadiens, nous recommandons que le gouvernement fédéral adhère sérieusement au principe du plein emploi, comme le recommande le budget parallèle fédéral de cette année. Ainsi le gouvernement fédéral pourrait songer à étayer les services publics, à créer un fonds national d'immobilisations, à adopter une loi sur l'investissement communautaire, à investir dans des infrastructures sociales, environnementales et physiques, à développer une stratégie nationale de l'emploi pour les jeunes et à réduire la durée de la semaine de travail.

Dans l'ensemble, nous devrons affronter un avenir très incertain, surtout quand on songe à ce qui s'est produit récemment dans d'autres pays. Toutefois, nous pensons que les gouvernements fédéraux peuvent encore jouer un rôle majeur dans des domaines prioritaires comme la création d'emplois, le plein emploi, la suppression de la pauvreté, de l'inégalité et de l'injustice, et la dégradation de l'environnement, en consolidant les services publics offerts par l'intermédiaire des programmes sociaux et en créant un régime fiscal plus juste. Nous pensons que le prochain budget fédéral sera l'occasion toute désignée pour le gouvernement de montrer qu'il adhère sincèrement à toute une gamme d'initiatives solides et de nouvelles orientations pour répondre aux véritables priorités des Canadiens. Il ne faut pas oublier que l'économie et les finances de l'État existent pour servir les gens et non l'inverse.

• 0905

Je pense être le porte-parole des gens que je représente. Je sais que si on équilibre le budget au détriment de la qualité de l'éducation, au détriment de l'emploi et d'un système de soins de santé acceptable, et au détriment des programmes sociaux, les membres que je représente choisiront de s'endetter, car même à ce prix, ils tiennent à laisser à leurs enfants un système de soins de santé acceptable, et de même pour ce qui est du système d'éducation et des services publics à fournir aux gens dans le besoin.

J'exhorte tous ceux qui sont ici présents et qui siègent aux assemblées fédérale et provinciales à chausser les chaussures des chômeurs pour une journée, à se mettre dans la peau de ceux qui n'ont rien à manger et qui n'ont pas où se loger. Mettez-vous à leur place une seule journée. Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci à tous, merci beaucoup.

Nous allons passer aux questions. C'est Wendy Lill qui va commencer, pour 10 minutes.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Je suis ravie de vous voir tous ici.

Tous vous avez soulevé les mêmes thèmes. Tous vous avez parlé des soins de santé et de l'éducation, des personnes âgées et des jeunes, de l'incapacité de ces derniers d'avoir accès à des programmes d'éducation, car ils n'en ont pas les moyens. Le tableau que l'on nous dépeint est saisissant et cela ne peut pas manquer de nous toucher.

Je voudrais aborder toute la question de la dette des étudiants et je vais demander plus particulièrement à Jim Sharpe— et Stella pourra aussi répondre puisqu'elle a soulevé la question à propos de l'accès des femmes à des programmes d'éducation—quelle est la situation que vous constatez dans le travail que vous faites à propos de la dette des étudiants? Quels obstacles réels les jeunes gens rencontrent-ils, ou les femmes en particulier, ou quiconque essaie de faire des études?

M. Jim Sharpe: Je m'occupe essentiellement d'étudiants adultes à temps plein, auxquels s'adressent un grand nombre de programmes mais qui ne sont pas nécessairement de grande utilité.

L'obstacle majeur vient de l'augmentation des frais de scolarité. Au cours des cinq dernières années, les frais de scolarité ont doublé. Par le passé, on pouvait avec un travail ou avec l'aide de sa famille faire des études, mais la barre est de plus en plus haute quand il s'agit d'études universitaires.

On pourrait donc songer à un appui quelconque pour le paiement des frais de scolarité ou encore à réduire ces frais, mais les universités doivent pouvoir exercer un certain contrôle, c'est évident, et elles doivent pouvoir imposer des frais de scolarité différents suivant les programmes offerts, ce qui fait grimper les coûts... mais ce qui a également pour résultat de morceler l'accès. Il faut donc faire quelque chose du côté de l'approbation des prêts et qu'il y ait des programmes fédéraux pour réduire la dette par la suite. Devant une dette énorme, les gens se disent que s'ils ne trouvent d'emploi, il faudra qu'ils déclarent faillite personnelle. De toute façon, ce n'est avant que sept ans se soient écoulés que la faillite pourra les débarrasser de leurs dettes.

Mme Wendy Lill: C'est 10 ans.

M. Jim Sharpe: Dix ans? D'accord.

Mme Wendy Lill: Stella?

Mme Stella Lord: Je voudrais attirer votre attention sur ce que nous disons à la page huit de notre mémoire et je vais vous le lire:

    L'éducation postsecondaire a également été un moyen important pour améliorer la sécurité économique des femmes.

En fait, pour les femmes, l'éducation postsecondaire est actuellement essentielle si elles veulent toucher un salaire comparable à celui des hommes dans notre société.

    Les femmes accordent encore plus de valeur à l'accès à l'éducation postsecondaire que les hommes car elles savent que sans elle, elles se trouveront dans une piètre situation économique. Un autre problème auquel les femmes font face en raison de la réduction du transfert canadien est celui de l'augmentation des frais de scolarité à l'université et de l'augmentation alarmante de la dette des étudiants qui fréquentent l'université. Les femmes sont particulièrement touchées car elles représentent une proportion élevée de la population estudiantine—actuellement 63 p. 100 au premier cycle dans la région de l'Atlantique.

    Selon une étude menée récemment par la Commission des études supérieures des provinces maritimes, la dette moyenne des étudiants (en dollars de 1996) a plus que doublé au cours des 15 dernières années, ce qui signifie qu'il y a 42 p. 100 de plus d'étudiants du premier cycle qui sont endettés. Dans le même rapport on signale que les frais de scolarité dans les Maritimes ont augmenté de 35 p. 100 entre 1991 et 1996. L'augmentation de la dette des étudiants est due essentiellement à l'augmentation des frais de scolarité. Le rapport démontre que ce sont les étudiants à faible revenu qui connaissent la plus grosse augmentation de leur dette car ils doivent absolument compter sur des prêts pour faire leurs études. Il n'y a guère de différence entre l'endettement des hommes et des femmes, mais il semble que les femmes aient plus de mal que les hommes à rembourser leur dette sans doute parce que leur salaire moyen à l'obtention de leur diplôme représente 83 p. 100 de celui des hommes et que cet écart de revenu ne fera que s'aggraver étant donné la perspective d'une vie de famille dont le travail n'est pas rémunéré.

• 0910

Mme Wendy Lill: Merci.

Maureen, pouvez-vous nous parler davantage de l'incidence de la TVH. Les gens de ma circonscription m'ont exposé leurs préoccupations et je pense que la clientèle des soupes populaires augmente à cause de l'impact de la taxe de vente harmonisée. Votre expérience des services sociaux et de santé vous permet-elle de quantifier l'impact que cette taxe à la consommation a pour les gens qui vivent dans notre province?

Mme Maureen MacDonald: Je ne pense pas pouvoir vous donner de chiffres. Si l'on faisait une recherche sur cet aspect-là, il faudrait que l'on puisse avoir accès aux renseignements du ministère des Finances. Nous avons toutefois des témoignages, en l'occurrence de la part de personnes âgées ou d'autres gens qui touchent des revenus fixes, qui nous permettent de conclure que la taxe harmonisée a des effets dévastateurs.

Je songe à ce qui a été fait ici en Nouvelle-Écosse. Je suis allée à l'Île-du-Prince-Edouard en fin de semaine et j'ai constaté que là-bas le litre d'essence se vend 12c. de moins qu'ici parce qu'on n'y a pas harmonisé la taxe de vente. Songez un peu à ce que cela représente pour les consommateurs ou pour les gens d'affaires d'ici, c'est-à-dire pour tous ceux qui voyagent.

Les gens parlent assurément des difficultés que représente cette taxe sur le mazout qui sert à chauffer leur maison. Le budget provincial de la Nouvelle-Écosse vient d'offrir un allégement minimal et c'est certainement un aspect qu'il faudra bien étudier pour trouver une solution. Ce sont les gens qui en ont le moins les moyens qui sont accablés par ces taxes sur les nécessités de la vie.

Mme Wendy Lill: Ian Johnson veut ajouter quelque chose.

M. Ian Johnson (analyste de politiques et attaché de recherche, Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse): Monsieur le président, permettez-moi d'ajouter également...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous semblez être très douée pour présider la réunion, Wendy. Poursuivez.

M. Ian Johnson: Monsieur le président, j'avais bien essayé pourtant d'attirer votre attention.

Nous prévoyons qu'il y aura une incidence majeure. Comme vous le savez, le gouvernement fédéral, dit-on, verse 229 millions de dollars pour mettre en oeuvre la taxe de vente harmonisée dans notre province et, si je ne m'abuse, dans les deux autres provinces. Une fois que cet argent aura été versé, quand il aura été dépensé, des difficultés vont surgir—car ce ne sera plus la TVH, mais la FDH, la fin des haricots. La somme versée a servi à consolider les finances provinciales cette année. Malgré tout, la province connaît des difficultés financières graves et nous pensons que la situation ne va que s'aggraver une fois cet argent dépensé.

Ainsi donc il faudra trouver une solution et c'est pourquoi je vous exhorte à étudier l'incidence que ce versement a représentée ou représentera—et inversement, les conséquences de sa disparition.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Wendy.

Mme Wendy Lill: Je voudrais poser une question à Joan Lay.

Je comprends que les adhérents de votre association s'inquiètent avant tout des jeunes. Je trouve remarquable que les personnes âgées continuent de s'intéresser à l'avenir, mais qu'en est-il de la vie quotidienne des adhérents de votre association actuellement? Quelles sont les inquiétudes des personnes âgées? Quelles rumeurs entendez-vous?

Mme Joan Lay: Vous parlez des inquiétudes actuelles? Je pense que Maureen en a signalé certaines. Le fait est qu'un grand nombre souffrent de la TVH.

• 0915

Ensuite, il y a la santé, dont nous entendons parler constamment. Les personnes âgées en milieu rural ont beaucoup de mal à se rendre dans les centres de soins car nous avons tout régionalisé et par conséquent une personne qui habite Isaacs Harbour doit se rendre à Antigonish à une certaine distance. Sans moyen de transport, comment fait-elle?

Voilà les préoccupations dont nous entendons parler dans la province, parce que tout se recoupe. Qu'il s'agisse de logement, de transport, de soins de santé, ou d'autre chose, tout se tient. Bien entendu, la conjoncture a également une incidence. À mon avis c'est un cercle vicieux.

Mme Wendy Lill: Je vois.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

La parole est maintenant à M. Paul Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Maureen, je voudrais reprendre les chiffres d'assurance-emploi que vous avez cités. C'est assez tragique. Avant 1990, 75 p. 100 de la population active était admissible à des prestations et vous avez dit que peu après ce pourcentage était passé à 66 p. 100 et qu'il était maintenant de 30 p. 100. Je ne comprends pas. Je pense que nous voulons tous comprendre.

Mme Maureen MacDonald: Ma source est un document de Dennis Guest qui a publié The Emergence of Social Security in Canada. M. Guest écrit depuis longtemps sur l'évolution de la sécurité sociale.

M. Paul Szabo: Mais qu'est-ce qui a changé?

Mme Maureen MacDonald: Ce sont les dispositions régissant la caisse d'assurance-emploi qui ont changé. Pour être admissible à l'assurance-emploi, il faut maintenant répondre à des critères différents. Il faut accumuler un plus grand nombre d'heures ou il faut ne pas avoir touché de prestations auparavant. On impose maintenant des pénalités à ceux que l'on considère être des usagers fréquents de l'assurance-emploi, si bien qu'ils perdent leur droit aux prestations...

M. Paul Szabo: Mais ils sont toujours admissibles.

Le vice-président (M. Nick Discepola): C'est exact. D'après M. Szabo, vous avez dit que seulement 76 p. 100 de la population active—et là je vous cite—était admissible, et maintenant le chiffre est tombé à 33 p. 100.

Mme Maureen MacDonald: C'est exact.

Le vice-président (M. Nick Discepola): À mon avis, 100 p. 100 de la population active est toujours admissible, même si les prestations et la période de prestations sont peut-être réduites.

Mme Maureen MacDonald: Il y a une différence entre la théorie et la réalité. Vous dites qu'en principe, toute la population active, à part les travailleurs autonomes, est couverte.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Pas forcément.

Mme Maureen MacDonald: La réalité c'est que les nouveaux critères d'admissibilité excluent de plus en plus de personnes qui sont dans la population active.

M. Paul Szabo: Je pense que nous n'allons pas résoudre cette question ici...

Mme Maureen MacDonald: J'en suis certaine.

M. Paul Szabo: ... mais je peux vous dire que d'autres vont entendre ce que vous avez dit et vont le répéter. Je pense qu'il faut souligner le fait qu'on joue un peu avec la terminologie ici.

Tout le monde est admissible. Il se peut que...

Mme Maureen MacDonald: Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Tout le monde n'est pas admissible.

M. Paul Szabo: Il y a une période d'attente de deux semaines qui s'applique à tous. On pourrait prétendre qu'à n'importe quel moment il n'y a pas 100 p. 100 des travailleurs qui sont admissibles aux prestations d'assurance-emploi, car personne ne touche de prestation avant une période d'attente de deux semaines. On pourrait avancer un argument de cette nature.

Je suppose que la source de ce renseignement sera claire dans les procès-verbaux. J'aimerais regarder ça, et si vous avez d'autres renseignements...

Mme Maureen MacDonald: En fait, il existe beaucoup de sources, mais il s'agit...

M. Paul Szabo: Je n'ai que très peu de temps.

M. Johnson aimerait ajouter quelque chose.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson.

M. Ian Johnson: Il y a également un document de fond publié par le Conseil du travail du Canada et écrit par Kevin Hayes, qui a fait beaucoup de recherche dans le domaine de l'assurance-chômage. À mon avis, la question n'est pas uniquement de savoir quel pourcentage de personnes sont admissibles aux prestations, mais plutôt quel pourcentage touchent ces prestations. C'est là où il y a eu un changement important.

M. Paul Szabo: Ce n'est pas ce qu'elle a dit.

M. Ian Johnson: Je ne parle pas pour elle.

On peut dire tout ce qu'on veut au sujet de l'admissibilité, mais le fait est que le pourcentage de chômeurs qui touchent vraiment les prestations est tombé considérablement. Et cela est dû aux modifications mises de l'avant par votre gouvernement depuis quelques années et aux coupures appliquées par les conservateurs avant.

À toute fin pratique, vous avez détruit le régime d'assurance-chômage qui existait auparavant. Il n'aide plus les gens comme il doit le faire et comme il était censé le faire au départ. C'est la raison pour laquelle nous appuyons la demande faite par le Congrès hier pour la création d'une commission indépendante, car il est évident que le gouvernement ne respecte plus ce que ce programme est censé faire.

Une voix: J'accepte cela.

• 0920

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Lord, s'il vous plaît.

Mme Stella Lord: J'aimerais dire que je pense qu'on joue un peu avec les mots. On peut être admissible à payer des cotisations sans forcément être admissible à recevoir des prestations.

Le fait est que le régime d'assurance-emploi a été modifié en ce qui concerne le droit aux prestations de ceux qui ont versé des cotisations. Qu'il s'agisse de droit aux prestations ou d'admissibilité, peu importe. Mais à la page 5 de notre mémoire, j'ai cité un rapport du ministère du Développement des ressources humaines qui dit que les prestations avaient diminué en Nouvelle-Écosse de 8,1 p. 100, et au Canada, de 11,5 p. 100 entre 1995-1996 et 1996-1997. Et c'était avant même que toutes les modifications du régime entrent en vigueur. Seulement 40 p. 100 des chômeurs au Canada touchent aujourd'hui des prestations d'assurance-emploi, par opposition à 60 p. 100 ou 65 p. 100, je pense, il y a cinq ans. Donc il faut dire ce qu'il en est.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Szabo, allez-y.

M. Paul Szabo: Je vais regarder les procès-verbaux.

Mme Stella Lord: Regardez les rapports de DRHC.

M. Paul Szabo: Non, ça va. J'ai demandé une précision, car si vous avez utilisé le mot «admissibilité» plutôt que «toucher les prestations»... Vous avez parlé de «toucher les prestations».

Il ne fait aucun doute que les prestations ont été modifiées pour tenir compte de certains facteurs, par exemple le nombre de fois qu'une personne a reçu des prestations, etc. Il y aura probablement un groupe de travail chargé d'examiner l'assurance-emploi, qui consultera les Canadiens pour savoir ce qu'ils veulent dans la loi. Je pense que ce sera la tribune qui convient.

Je veux passer à Stella. Dans votre mémoire et dans vos remarques, vous avez beaucoup parlé d'un régime national de garde d'enfants. Vous avez dit que vous vouliez une stratégie qui permettrait aux femmes de regagner la population active sans qu'il y ait d'incidence négative sur la vie de leurs enfants.

Une étude a été publiée l'été dernier par l'Université de la Caroline du Nord sur la mortalité infantile. D'après l'étude, la mortalité infantile était 29 p. 100 de moins dans le cas des parents qui avaient bénéficié de congés parentaux pendant la première année. L'Institut canadien de recherches avancées de même que plusieurs autres organismes appuient fortement l'idée selon laquelle il faut investir beaucoup dans les enfants, surtout pendant les trois premières années. Il paraît que les résultats sont tout à fait remarquables lorsque l'on consacre des fonds à la première année des enfants. Je pense que la plupart de ceux qui travaillent dans les services sociaux comprennent le développement neural et le développement des petits.

Cependant, l'étude de l'Université de la Caroline du Nord a également parlé des risques et d'autres facteurs. Par exemple, il y a toute la question des avantages de l'allaitement au sein. En juin dernier, la Société canadienne de pédiatrie a dit qu'elle appuie la ligne directrice de l'Organisation mondiale de la santé qui prévoit un minimum d'un an d'allaitement au sein.

L'étude fait allusion aux risques présentés par l'environnement et dit que si les soins sont offerts par un établissement ou par des tiers, les enfants sont exposés à beaucoup d'accident à cause de tous les déplacements qui sont faits. Les enfants sont également exposés à beaucoup de lieux publics et à beaucoup de personnes, surtout d'autres enfants, qui s'avèrent les plus importants porteurs de toutes sortes de maladies, de virus, etc.

Si on veut vraiment agir dans l'intérêt des enfants et leur permettre d'avoir de meilleurs résultats sur le plan physique, mental et social, et compte tenu du fait que les parents ayant des enfants d'âge préscolaire ont droit, depuis le dernier budget, à une déduction de 7 000 $ pour frais de garde, et pourtant un parent qui s'occupe lui-même de ses enfants, et donc fournit des soins plus sécuritaires... Seriez-vous d'accord pour donner aux parents qui s'occupent eux-mêmes de leurs enfants une déduction équivalente à celle qui est accordée aux parents qui paient quelqu'un d'autre pour le faire? Deuxièmement, seriez-vous d'accord pour suivre l'exemple de certains pays de l'Europe—les États-Unis étudient le modèle en ce moment également—qui consiste à donner une année de congé parental au père ou à la mère qui s'occupe de l'enfant pendant la première année. Je pense que cela nous permettrait de donner la priorité aux enfants. J'aimerais savoir dans quelle mesure vous pensez que la garde des enfants pourrait être faite par...

• 0925

En Ontario, le salaire moyen de quelqu'un qui travaille dans une garderie est de 18 000 $ par an. Je ne vois pas comment on peut attirer et garder des employés compétents avec un tel salaire. Je constate que vous avez fait du travail concernant le rapport, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Mme Stella Lord: Je m'en remets au conseil pour exprimer ses points de vue. Le conseil va discuter de cette question et déposera probablement un mémoire là-dessus.

Je pense qu'à vrai dire vos observations soutiennent les arguments en faveur d'un système renforcé de garde d'enfants et de meilleures politiques de garde d'enfants en milieu de travail. Je pense qu'on préférerait avoir de meilleurs congés parentaux et peut-être des avantages pour les femmes qui restent à la maison pour s'occuper de leurs enfants. Le fait que ce soit une étude faite en Caroline du Nord qui est citée m'inquiète, car je ne sais pas quelles sont les conditions de garde d'enfants là-bas. Le fait de ne pas avoir un bon système de garde d'enfants comporte des risques. Voilà ce qu'il faut retenir.

À mon avis, la question de l'allaitement au sein est liée à celle des congés parentaux à certains égards. Il faut peut-être avoir des emplois plus souples qui permettent aux femmes de s'absenter ou d'avoir accès à des services de garde en milieu de travail. Il y a beaucoup d'études qui ont été faites au Canada. Il y a d'excellents instituts de recherche qui ont étudié la question et qui ont conclu qu'il y a des avantages qui découlent d'un bon système de garde d'enfants.

M. Paul Szabo: J'ai une dernière question.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce qu'elle porte sur le même sujet? Je m'excuse auprès des collègues d'essayer d'accélérer ce premier tour, mais M. Brison doit assister à des funérailles à 11 heures à la base des forces armées à Greenwood.

M. Paul Szabo: Je serai bref.

Tout le monde a parlé des coupures des paiements de transfert. Je ne me souviens plus du chiffre, mais je crois qu'elles représentent plus de 10 milliards de dollars. Je pense que Maureen a parlé d'une réduction d'environ 800 millions de dollars. Que je sache, la Nouvelle-Écosse ne représente pas 10 p. 100 de la population, et donc je pense que sa proportion serait différente.

La question s'adresse à quiconque veut y répondre. Si le gouvernement devait augmenter le TCSPS, pensez-vous que le gouvernement provincial utiliserait vraiment l'argent aux fins voulues? Par exemple, les paiements de transfert ont été réduits de 1,2 milliard de dollars en Ontario. Le gouvernement a ensuite réduit les impôts de 4,3 milliards de dollars, et a blâmé le gouvernement fédéral de tous ses problèmes. Est-ce la meilleure façon de procéder, ou vaut-il mieux que le gouvernement fédéral cherche à imposer des conditions concernant l'utilisation des fonds? L'autre possibilité, c'est que le gouvernement fédéral mette en place lui-même certains programmes sans passer par les provinces. Je pense par exemple à un programme national de soins à domicile.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Jim Sharpe.

M. Jim Sharpe: J'aimerais d'abord parler de l'éducation. Je suis tout à fait pour le TCSPS, mais il faut qu'il y ait des normes nationales. Même avec le financement des programmes établis, il n'y avait pas de normes nationales. Il y en avait dans le domaine de la santé, et c'est toujours le cas. Les normes dans le domaine des services sociaux ont été réduites de beaucoup. Il faut regarder les normes d'accessibilité à l'enseignement postsecondaire au pays.

Le vice-président (M. Nick Discepola): M. Johnson.

M. Ian Johnson: Monsieur le président, je me suis associé à bien d'autres qui ont demandé un contre-budget qui éliminerait le TCSPS et qui augmenterait le financement de certains programmes établis. Il s'agirait de fonds d'investissement social, et ils viseraient les soins de santé, l'éducation et la garde d'enfants. Il y aurait des normes nationales dans tous ces domaines. L'un des problèmes du TCSPS, c'est qu'il n'y a plus vraiment de normes nationales, même dans le domaine des soins de santé, et certainement pas dans le domaine de l'assistance sociale. Donc je pense que nous serions favorables à ce genre d'initiative. Je pense que ce serait quelque chose d'assez simple à faire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Szabo.

• 0930

Mme Maureen MacDonald: Je voulais apporter une précision au sujet du chiffre de 800 millions de dollars. Il provient des ministères de la Santé et des Services communautaires ici en Nouvelle-Écosse. Il provient de ces ministères.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Il s'applique à une période de combien d'années?

Mme Maureen MacDonald: Jusqu'en 1999. Il s'agit de l'incidence de...

Le vice-président (M. Nick Discepola):

[Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Maureen MacDonald: Non, c'est exact.

M. Paul Szabo: C'est un chiffre annuel?

Mme Maureen MacDonald: Oui.

M. Paul Szabo: Il est assez élevé.

Mme Maureen MacDonald: Vous pourrez lire le mémoire, car il est assez difficile de résumer en cinq minutes tout ce que l'on a écrit.

Quoi qu'il en soit, je voudrais dire que si nous étions au pouvoir, nous nous engagerions certainement à restituer les crédits qui ont été supprimés. L'effet des suppressions sur les habitants de la région et sur les personnes dont nous nous occupons est absolument évident, et tout le monde veut récupérer ces crédits. Tout le monde souhaite avoir les mêmes soins de santé qu'autrefois et demande au gouvernement d'améliorer la santé, l'éducation et les services sociaux.

Je voudrais dire également que maintenant que vous êtes dans la région de l'Atlantique, il est important d'écouter le point de vue des gens qui y vivent. N'essayez pas d'imposer un point de vue ontarien dans notre région. Les gouvernements locaux ne font pas nécessairement les mêmes choix que ceux de l'Ontario. Ainsi, malgré les compressions fédérales aux effets dévastateurs, le ministère des Services sociaux a décidé de ne pas faire ce qu'a fait Mike Harris en Ontario, et il faut lui en rendre hommage. Malgré la diminution de ses ressources, le ministère des Services sociaux a maintenu les dépenses de programme, notamment parce qu'il a réussi à accéder aux paiements de péréquation.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne pense pas que M. Szabo ait voulu imposer ici les normes de l'Ontario. Il s'est servi des événements ontariens à titre d'exemple concret et direct. Je suppose, d'après votre intervention, que vous nous recommandez de négocier avec les provinces les conditions dont Paul a parlé. D'autres parlent de «normes nationales». Mais nous devons veiller à ce que tous les fonds versés aux provinces servent à la réalisation des objectifs convenus, et à rien d'autre.

Mme Maureen MacDonald: Certainement.

Le vice-président (Nick Discepola): Merci.

Monsieur Brison, s'il vous plaît.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président, merci à vous tous pour vos interventions de ce matin.

Nous parlons des perspectives du Canada central et des perspectives du Canada de l'Atlantique. Je réside en Nouvelle-Écosse, et je suis le seul membre permanent du Comité des finances qui représente le Canada de l'Atlantique. Je suis donc très heureux d'être ici, dans ma propre province, pour recueillir vos points de vue.

Malgré nos divergences d'opinion sur les moyens et les orientations que devraient prendre les programmes gouvernementaux à court terme, nous sommes tous d'accord sur le projet de société que nous visons à long terme. J'ai trouvé particulièrement intéressants les commentaires de Joan Lay sur les personnes âgées et sur les soins de santé. Ma circonscription a été durement frappée par les fermetures d'hôpitaux et par les événements survenus à Berwick, Wolfville et Windsor. Ce sont des situations dramatiques. J'ai deux parents âgés qui ont périodiquement besoin de soins. Nous habitons à la campagne et vous avez donc tout à fait raison de dire qu'il est important de bien desservir les communautés rurales.

Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne les soins de santé et l'augmentation du TCSPS pour aider les provinces, notamment celles de l'Atlantique, dont les ressources fiscales locales ne sont pas suffisantes, mais nous divergeons d'opinion—encore une fois, c'est une question de moyen—en ce qui concerne l'isolationnisme et la possibilité de garantir la croissance au Canada Atlantique en favorisant le commerce et la productivité avec le marché américain, notamment depuis l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange.

Je sais que pour le Conseil économique des provinces de l'Atlantique, l'accord de libre-échange est depuis plusieurs années le seul facteur de croissance économique dans la région. Il est difficile d'imaginer ce que serait la situation sans cet accord, car le Canada de l'Atlantique a également été pénalisé par la modification de la politique budgétaire. J'espère que tout n'est pas... vous savez, le libre-échange a véritablement profité au Canada de l'Atlantique. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

• 0935

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Lay, s'il vous plaît.

Mme Joan Lay: Le libre-échange a apporté de bonnes choses, mais il en a aussi apporté de mauvaises qui ont eu un effet économique préjudiciable pour les personnes âgées. Quant à nous, je ne suis pas certaine que nous soyons prêts à nous engager plus avant dans l'économie de marché mondiale.

Je m'inquiète aussi de voir les gens devenir des numéros. Les personnes qui sont âgées aujourd'hui n'ont jamais été des numéros. Ils ont toujours eu une identité et un nom. Aujourd'hui, elles sont un point sur un écran d'ordinateur. Les personnes âgées ont beaucoup de mal à l'accepter. Nous nous opposons donc formellement à un nouveau régime qui fait de l'individu un point minuscule.

M. Scott Brison: Ce n'est pas uniquement une question de mondialisation. Nous sommes dans une économie de transition qui laisse une place plus grande à la technologie de l'information.

Mme Joan Lay: Nous avons affaire à une combinaison de facteurs, mais encore une fois, au fur et à mesure des changements, la personne a de moins en moins d'importance.

Mme Maureen MacDonald: Puis-je répondre également?

M. Scott Brison: Certainement.

Mme Maureen MacDonald: Les travailleurs de Volvo, par exemple, auraient bien du mal à accepter votre point de vue quand vous dites que le libre-échange n'a pas eu d'effet négatif sur les habitants de la région. Voilà ce que je voudrais dire tout d'abord. Je peux vous indiquer un certain nombre d'industries qui proposaient des emplois sûrs et bien rémunérés, et qui sont en train de disparaître. Tout cela a une incidence dramatique sur nos ressources budgétaires et sur notre économie à long terme. D'après les dernières nouvelles, l'usine Volvo est transférée au Mexique.

De plus, je voudrais vous dire que j'ai travaillé dans une équipe de recherche de Dalhousie au début des années 90. Nous avons étudié l'effet du libre-échange sur l'économie de la Nouvelle-Écosse. À l'issue de nos recherches, nous avons rédigé un ouvrage intitulé «Vanishing Jobs: Canada's Changing Workplaces».

À l'époque, notre analyse indiquait que l'effet du libre-échange n'était ni très nettement négatif, ni très nettement positif. La région de l'Atlantique continuait d'évoluer comme elle l'avait toujours fait. Les industries de ressources continuaient d'exporter vers le marché américain. Les exportations constituaient une caractéristique importante de notre économie, et elles ont conservé à peu près la même part de l'activité économique qu'avant l'accord de libre-échange.

Le véritable problème ne consiste pas à chiffrer la valeur des exportations. Il faut tenir compte de ce qu'il advient des emplois. Le libre-échange n'a pas eu pour effet d'augmenter l'emploi dans la région. Au contraire, le chômage a beaucoup augmenté en Nouvelle-Écosse.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Puis-je intervenir un instant?

Mme Maureen MacDonald: C'est tout ce que je voulais dire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): C'est vous qui avez la parole, mais il est question ici de consultations prébudgétaires, et non pas de l'examen post mortem d'un accord de libre-échange en vigueur depuis des années.

M. Scott Brison: Certainement, mais je dois cependant vous dire, Maureen, que je ne suis absolument pas d'accord avec vous sur cette question. Le poids des preuves économiques suggère une toute autre réalité, à savoir que le libre-échange a été un facteur de création net d'emplois aussi bien dans le Canada de l'Atlantique que dans le reste du pays. Encore une fois, le Canada de l'Atlantique a subi une tendance à la baisse particulièrement marquée des engagements budgétaires au cours des dernières années. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de vos commentaires.

Paul a parlé d'interventions en faveur de la petite enfance. Aussi bien au niveau des provinces que du fédéral, il est particulièrement important de s'intéresser au programme Bon départ et à des interventions en faveur des tout-petits. À l'instar de nombreuses études réalisées, notamment auprès de quartiers défavorisés, les programmes de ce genre ont montré que chaque dollar investi en faveur d'un enfant de moins de trois ans, notamment dans des situations à risque élevé, rapporte à la société un rendement d'environ 7 $, je crois, à l'époque où l'enfant est devenu adulte, vers la fin de la vingtaine.

• 0940

La pauvreté en milieu rural aussi bien qu'urbain présente les mêmes indices et les mêmes caractéristiques démographiques en ce qui concerne les toxicomanies, la violence entre conjoints, le décrochage scolaire et les grossesses chez les adolescentes. Je considère que tous ces indicateurs sociaux négatifs sont les mêmes dans les secteurs ruraux défavorisés et dans les grands centres de la Nouvelle-Écosse.

J'aimerais beaucoup avoir votre opinion à ce sujet, car compte tenu de la nouvelle entente qui existe en Nouvelle-Écosse, je considère que ce sont des initiatives sur lesquelles tous les partis pourraient se mettre d'accord. On aurait ainsi, à l'intention des autorités fédérales, un exemple très intéressant d'effort conjoint de lutte à long terme contre la pauvreté dans les secteurs ruraux. J'aimerais avoir votre opinion sur les programmes d'intervention précoce et Bon départ.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qui veut répondre? Personne?

M. Scott Brison: Je suppose que nous sommes tous d'accord.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous pouvez donner votre point de vue personnel. Vous n'êtes pas là pour représenter uniquement votre association.

Mme Stella Lord: Curieusement, j'étais en train de lire un document sur le programme Bon départ au Nouveau-Brunswick...

M. Scott Brison: Oui, à Moncton, c'est très intéressant.

Mme Stella Lord: ... qui semble avoir remporté un franc succès; c'est très intéressant.

Je crois qu'une partie des crédits des prestations pour enfant est affectée à des programmes destinés aux parents. Je crains cependant qu'ils ne permettent pas de financer grand chose, sinon de très modestes programmes.

J'estime qu'il faudrait prêter plus d'attention à ces questions. En Nouvelle-Écosse, il faudrait se fonder sur les résultats de la recherche. Et si le gouvernement fédéral prend une initiative dans ce domaine, je suis certaine qu'elle sera la bienvenue.

Je sais que le programme CAP-C, concernant les centres de ressources pour les familles, donne d'excellents résultats et tout ce qui peut le mettre en valeur est souhaitable. Cependant, dans le contexte des compressions budgétaires au niveau provincial, je voudrais parler d'un centre de ressources pour les familles qui avaient autrefois un travailleur des services d'approche qui desservait les communautés noires de la Nouvelle-Écosse. Ce service a disparu parce qu'on a dû supprimer les programmes de ce genre pour financer d'autres programmes du ministère des Services sociaux, comme l'a dit Maureen.

Ce n'est qu'un exemple, mais il y en a d'autres. Je sais qu'il y a des centres pour familles monoparentales qui ont beaucoup de difficultés à préserver leurs services. Les gens se donnent bien du mal, notamment, pour faire des levées de fonds.

On remarque donc des lacunes dans les services, auxquels on pourrait remédier grâce à des fonds supplémentaires, et toute mesure en ce sens nous serait très précieuse.

M. Scott Brison: Je peux vous dire que c'est pour moi une question très importante, aussi bien au plan personnel que pour la collectivité où j'ai passé mon enfance. À Cheverie, dans le comté de Hants, nous étions 28 élèves en sixième année à l'école primaire locale. Sur ces 28 élèves, 8 seulement ont terminé leurs études secondaires. Cela ne veut pas dire qu'ils les aient terminées la même année que moi, mais ils ont terminé leurs études secondaires.

Dans le contexte actuel, caractérisé par un environnement de plus en plus nettement mondial où les industries à forte intensité de connaissance seront le moteur de la croissance de l'emploi, 20 des 28 élèves de ma classe en sixième année n'ont pas fait des études secondaires. Certains d'entre eux sont retournés à l'école par la suite, mais je considère que c'est là un coup important pour la société. Il est très difficile de reprendre ces études par la suite, et il faut pouvoir y consacrer beaucoup de temps. Voilà donc un problème à prendre en compte en Nouvelle-Écosse, en particulier dans les secteurs ruraux. Il nous faut une politique plus structurée à cet égard.

M. Jim Sharpe: Si vous me permettez d'intervenir à ce sujet, je crois qu'il est essentiel d'investir dans l'éducation.

M. Scott Brison: En particulier dans l'enseignement postsecondaire.

M. Jim Sharpe: Il y a des parents qui font des études, mais en plus de la question du financement des études, le principal problème est celui de l'accès aux études. Dans notre université, il y a de nombreux étudiants qui ont des enfants, il y a des mères célibataires et des assistés sociaux, qui étudient dans divers domaines. Ils représentent des modèles pour les autres. Mais ils n'obtiennent pas suffisamment de soutien. Les bourses d'études du Canada, d'un montant de 3 000 $, apportent une certaine assistance, mais il faudrait mettre en place des programmes beaucoup plus complets, qui accordent une plus grande valeur à l'éducation.

• 0945

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame MacDonald, voulez-vous ajouter quelque chose?

Mme Maureen MacDonald: Je crois que vous avez raison; la recherche indique que les programmes d'intervention précoce sont très importants en ce qui concerne les résultats obtenus ultérieurement par les enfants qui en bénéficient, mais je crois qu'il importe d'élaborer des programmes de ce genre dans le contexte d'un plan de développement rural. On ne peut pas prendre dans ce domaine de mesures fragmentaires en espérant qu'elles donnent des résultats. Il faut aussi des programmes de développement de l'économie rurale, de façon à assurer l'avenir, pour que les jeunes qui commencent à étudier aient une véritable motivation et se dirigent vers un but précis. Il me semble important d'inscrire les programmes de ce genre dans un contexte précis.

M. Scott Brison: Merci beaucoup.

Je sais que nous traversons une période très difficile, car une bonne partie des problèmes que courait actuellement le Canada atlantique résultent des modifications apportées par le fédéral aux programmes destinés à cette région; nous sommes également dans une économie de transition, ce qui pose toujours des problèmes, mais à mesure que nous nous orientons, à l'aube du XXIe siècle, vers une société à forte intensité de connaissances, il importe de prendre les bonnes décisions dès maintenant, notamment en matière d'éducation, de façon à positionner la Nouvelle-Écosse... Compte tenu de la qualité de vie qu'offre la région, et étant donné que la distance n'est plus un facteur déterminant du coût des télécommunications, l'Atlantique pourrait devenir l'une des régions les plus prospères du Canada d'ici 10 ou 15 ans, si nous prenons aujourd'hui les bonnes décisions.

Je voudrais poser une question concernant les services de santé et, de façon générale, le monde du bénévolat. L'un des meilleurs exposés qu'ait entendu le comité des finances de la Chambre des communes était celui du secteur du bénévolat, qui préconise un renforcement de l'engagement envers le secteur des bénévoles de la part des gouvernements provinciaux et fédéral, de façon à évaluer plus efficacement les besoins sociaux et à assurer des prestations de service, plus rentables aux nécessiteux.

Je pense par exemple aux soins de santé prodigués notamment à domicile par les infirmières de l'ordre de Victoria en Nouvelle-Écosse. Ma soeur en fait partie, c'est pourquoi j'y pense spontanément. Elle est à Kemptville.

J'aimerais avoir votre opinion sur la façon dont on pourrait faire appel au secteur du bénévolat pour identifier les besoins et pour y répondre plus efficacement.

Mme Joan Jessome: Vous parlez d'identification des besoins, est-ce que vous envisagez que des bénévoles se rendent dans les collectivités et qu'ils...?

M. Scott Brison: Centraide, par exemple, est un organisme très important dans l'ensemble du Canada et dans leur exposé, ses représentants ont dit qu'ils pouvaient identifier les besoins sociaux plus efficacement que les ministères, qu'ils bénéficiaient d'un fonctionnement moins bureaucratique et qu'ils pouvaient cibler plus directement les besoins.

Mme Joan Jessome: Nos régies de santé communautaire jouent ce rôle actuellement. Elles sont en contact avec la collectivité. Nos sept régies de santé communautaire sont capables d'identifier les besoins.

M. Scott Brison: J'ai pourtant des électeurs qui viennent me voir pour se plaindre des régies de santé communautaire, qui ne répondraient pas aux besoins de la collectivité et qui alourdiraient même l'élément bureaucratique des services de santé. Je pense donc que les avis sur les régies de santé communautaire sont partagés.

Mme Joan Jessome: Ils le sont également sur les régies régionales.

M. Scott Brison: Oui.

Mme Joan Jessome: Je crois que les bénévoles jouent un rôle très important dans la société, mais ils ne sauraient remplacer... Je pense à ces femmes bénévoles qui travaillent toute la journée. Ce sont des mères, des filles, des soeurs, des voisines, des amies—elles en ont déjà plein les bras. Si l'on compte encore sur elles pour identifier... Je pense que c'est déjà le cas; nous nous en remettons aux bénévoles.

En Nouvelle-Écosse, l'étude GPI dont j'ai parlé fait état de 80 millions d'heures de travail bénévole. C'est phénoménal. Cela représente 80 000 emplois. Les bénévoles sont extraordinaires, mais ils ne peuvent pas remplir les frigidaires, ni faire le ménage, ni reprendre des études à votre place. Ils ont un rôle à jouer, mais ils ne doivent pas remplacer la main-d'oeuvre active.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson, s'il vous plaît.

M. Ian Johnson: Oui, je voudrais simplement renchérir sur l'argument de Jean. Les responsables de l'étude GPI ont fait un travail extraordinaire en ce qui concerne le rôle des bénévoles et grâce aux données disponibles, ils ont réussi à montrer que le bénévolat représente 10 p. 100 du PIB provincial. En termes strictement économiques, c'est effectivement le plus gros intervenant dans l'économie locale. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement fédéral de prêter plus d'attention au rôle du GPI.

• 0950

Pour répondre à votre question, nous sommes résolument favorables au bénévolat. Le mouvement syndical se compose de bénévoles, comme de nombreux autres organismes représentés ici, mais nous pensons que les bénévoles et les organismes qui les représentent n'ont pas suffisamment d'appui. Mais de toute évidence, ils ont un rôle à jouer.

Mme Stella Lord: Puis-je me prononcer sur ce sujet?

Il est vrai que les organismes bénévoles sont bien placés pour évaluer les besoins dans les collectivités. Cependant, comme de nombreuses femmes qui travaillent en milieu communautaire, je m'inquiète de voir le gouvernement recourir de plus en plus aux bénévoles par mesure d'économie. Le problème, c'est que les organismes bénévoles dépendent souvent en partie des fonds gouvernementaux et ils ont déjà subi des compressions budgétaires. L'infrastructure bénévole travaille déjà à la limite de ses possibilités et je crains qu'on ne lui en demande encore davantage sans lui fournir les ressources nécessaires.

Je pense pourtant que les bénévoles sont mieux placés que le gouvernement, sous réserve qu'ils aient les ressources nécessaires.

Mme Joan Lay: Puis-je répondre également?

M. Scott Brison: Certainement.

Mme Joan Lay: En tant qu'ancienne bénévole—j'ai près de 45 ans d'expérience dans ce domaine—je sais combien d'efforts certaines personnes sont capables de consacrer au bénévolat. Malheureusement, les bénévoles commencent à lâcher prise. Le secteur du bénévolat est quelque peu différent de ce qu'on voudrait en faire aujourd'hui.

Ce sont des gens qui n'ont jamais touché d'argent. Ils n'ont jamais été rémunérés. Ce n'est pas dans ce but qu'ils sont bénévoles, mais parce qu'ils croient en la mission de l'organisme, quel qu'il soit, auquel ils se consacrent. Rares sont ceux qui touchent une rémunération. Ce sont des bénévoles de base, mais ils sont de moins en moins nombreux dans les organismes pour lesquels je travaille, et qui font uniquement appel à des bénévoles. Le bénévolat est en voie de disparition, et les organismes bénévoles également, je le crains.

J'aimerais que les gouvernements fédéral et provinciaux définissent le bénévolat, car il n'est plus ce qu'il était.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Brison.

M. Scott Brison: Merci beaucoup. Encore une fois, je vous prie de m'excuser de devoir partir, car je dois assister à des funérailles à Greenwood cet après-midi.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Scott, je vous prie de transmettre mes condoléances et celles de mes collègues aux membres de la famille. Je sais que le gouvernement est représenté officiellement, mais je vous demande de le faire au nom des membres du comité. Merci.

Nous allons maintenant passer à Mme Karen Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais remercier tous les intervenants de leurs exposés. J'aimerais tout d'abord revenir sur l'un des commentaires de Mme Jessome. Au début de son exposé, elle a dit que si le remboursement de la dette est à ce prix, il y a lieu d'y regarder à deux fois.

Je voudrais dire que le Canada est toujours très endetté, de même que toutes les provinces. La dette fédérale atteint près de 587 milliards de dollars. Le présent gouvernement a réussi à équilibrer son budget, c'est-à-dire que nous ne devons plus emprunter chaque année pour assurer le fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Nous avons jugulé le déficit, mais nous traînons toujours derrière nous une dette colossale.

La plupart, ou du moins la majorité des préoccupations soulevées ici ont déjà été formulées au caucus libéral, ainsi que dans la circonscription que je représente. C'est une circonscription du sud de l'Ontario, mais on trouve dans les environs une localité où les médecins sont en nombre insuffisant; vous voyez que les problèmes du système de santé dont vous parlez sont une préoccupation pancanadienne.

C'est précisément pour avoir un point de vue pancanadien que le comité des finances voyage dans tout le Canada. Il est très intéressant de vous entendre formuler des préoccupations locales, mais les solutions que nous devons trouver doivent être applicables à tous les Canadiens, qu'ils habitent un territoire ou une province. C'est là l'un des défis les plus passionnants qu'on doive relever lorsque l'on est au service du gouvernement fédéral.

• 0955

Plusieurs d'entre vous ont parlé du rétablissement du financement du TCSPS, en vous demandant si c'était la meilleure solution pour le gouvernement fédéral. Mme MacDonald, je crois, a parlé en particulier de l'assurance-médicaments et des soins à domicile. Ce sont des services auxquels le gouvernement s'est intéressé dans la perspective d'un financement accru du système des soins de santé. J'ai beaucoup étudié ces questions, et je m'intéresse en particulier à tout ce qui concerne la santé des femmes. À ma grande surprise, j'ai constaté que la recherche dans ce domaine fait défaut.

Je voudrais avoir votre opinion sur les décisions que devra prendre le comité des finances lorsqu'il voudra faire des recommandations au ministre des Finances et au gouvernement sur l'équilibre que nous essayons d'atteindre. S'il faut choisir entre le financement du TCSPS et le financement de programmes spécifiques comme l'assurance-médicaments ou les soins à domicile, quel devrait être le meilleur équilibre pour répondre aux besoins que vous constatez dans votre collectivité?

Comme le système de soins de santé constitue une préoccupation nationale aussi bien pour les gens de Colombie-Britannique, de l'Alberta, de Terre-Neuve ou de la Nouvelle-Écosse, nous entendons souvent dire qu'il faudrait définir des normes acceptables pour les soins de santé. Il faudrait pour cela investir des fonds considérables. Cet argent serait-il bien dépensé? Le gouvernement devrait-il s'intéresser immédiatement à cette question? Devrait-il envisager de définir des normes qui deviendraient le sixième principe de l'assurance-maladie?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qui veut répondre à cette question?

Mme Maureen MacDonald: Je veux bien.

Pour notre caucus, la priorité absolue est le rétablissement de la stabilité dans le système des soins de santé, qui a été totalement déstabilisé; c'est donc de toute évidence la première chose à faire.

En ce qui concerne les normes, nous en avons déjà. Nous avons la Loi canadienne sur la santé, qui énonce les cinq principes de l'assurance-maladie. Il suffit de les prendre très au sérieux et de les appliquer. Nous n'avons pas besoin de normes supplémentaires concernant les soins de santé. Nous en avons déjà.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je voudrais poser une question à ce sujet. S'agit-il uniquement d'un problème de financement? À Ottawa, on nous a dit qu'il fallait remettre 2,5 milliards de dollars dans le système. Quant au forum national sur la santé, il nous a recommandé de placer le plafonnement à environ 12,5 milliards de dollars. L'une des premières mesures de notre gouvernement après le rééquilibrage du budget a été de verser une rallonge d'un milliard de dollars.

Par exemple, je peux comparer la qualité des services des différentes provinces par rapport à celle dont je viens, à savoir le Québec. Le Québec a plus de lits par habitant que l'Ontario, dont la population est de 60 p. 100 plus nombreuse. Si l'on considère les facteurs de ce genre au niveau fédéral, il faut se demander si le problème consiste simplement à trouver les fonds nécessaires. Peut-être y aurait-il d'autres améliorations à apporter, notamment dans le fonctionnement du système.

Si je regarde du côté de l'Alberta, ou même de l'Ontario, dont a parlé M. Szabo, je vois que l'Ontario a décidé de réduire les taxes, alors que l'Alberta, a réduit de façon dramatique le budget des hôpitaux, et s'est retrouvée ensuite avec un excédent d'un milliard de dollars. Est-ce que c'est de la faute du gouvernement fédéral, ou s'agit-il simplement de gouvernements provinciaux qui décident de leur propre chef quelles seront leurs priorités pour la province?

Mme Maureen MacDonald: C'est évidemment le problème traditionnel que rencontre le fédéralisme de concertation dans notre pays, si je ne me trompe? Cela revient toujours à se poser la question de savoir qui va payer, et qui décide de ce qui va se passer. Il est impossible, à mon avis, pour le gouvernement fédéral d'avoir la haute main sur tout ce qui se passe au niveau provincial, mais il peut certainement fixer des normes nationales. En matière de santé nous avons par exemple la Loi canadienne sur la santé. Les principes sont énumérés, et ces principes devraient être appliqués pour tout le domaine de compétence fédérale dans les provinces. Ces principes sont là, servons-nous-en. Mais assurons-nous qu'il n'y ait pas de ticket modérateur ni de santé à deux vitesses.

Mais nous avons absolument besoin de liquidités. C'est ce dont nous ne pouvons pas nous passer, et à cet égard nous avons beaucoup perdu. Nous avons besoin de stabiliser le régime de soins de santé, et l'argent qui lui a été retiré doit y être réaffecté. Ensuite, il faut se tourner du côté des excédents, s'il y en a, et réinjecter de l'argent dans la santé. C'est ce que nous disons tout au long de notre intervention.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson, à vous.

M. Ian Johnson: Merci, monsieur le président.

Je voulais simplement ajouter qu'à mon avis pour certains d'entre nous c'est une question d'équilibre, si vous voulez. Le gouvernement fédéral n'est pas toujours le «coupable», si c'est le mot à utiliser. Le problème, cependant, est que vous avez lancé de façon unilatérale le programme du Transfert social canadien, lequel a fixé un cadre. À l'époque le mot à la mode c'était la souplesse. C'est ce que répétait sans arrêt M. Martin à l'époque où vous avez lancé ce programme, et malheureusement le cadre de l'action gouvernementale s'est révélée fort funeste, non pas simplement du point de vue de la réduction des fonds mis à la disposition des provinces, et Maureen a dit à quel point ça avait été mauvais, mais également du point de vue de toute la question des normes et de leur respect.

• 1000

Une des conséquences de cette décision, c'est précisément la réponse des provinces avec leurs projets d'union sociale, qui signifie un recul du fédéral dans l'application et la surveillance du respect des normes. Le gouvernement fédéral a donc déclenché une réaction en chaîne, qui ne consiste pas simplement en une réduction de fonds, mais l'affaiblissement des normes a été tel qu'on est maintenant en train de vous relancer. Vous le savez probablement mieux que moi-même, mais d'après ce que je vois de l'extérieur, il faudrait une interprétation conjointe de ce que sont les normes, avec une gestion et une surveillance également conjointes. Nous nous retrouvons donc véritablement face à une situation très problématique.

Sur la question de l'équilibre, je suis dans une certaine mesure en désaccord avec vous. Nous estimons qu'il y a des ressources disponibles—le budget fédéral parallèle l'a également montré—qui doivent permettre de restaurer les financements et de lancer de nouvelles initiatives, qu'il s'agisse de programmes nationaux de soins à domicile ou d'assurance-médicaments, et nous estimons qu'il est impossible de faire face à la situation actuelle en matière de santé sans progresser sur ces deux fronts. De fait, toute initiative nationale doit permettre de réaliser des économies d'échelle et une restructuration de l'ensemble de ce secteur qui permettront d'économiser tout en fournissant un meilleur service à la population.

J'ai vu moi-même, par exemple, lorsque le programme provincial d'assurance-médicaments a été adopté—je vivais à l'époque en Saskatchewan, qui a été l'une des pionnières dans ce domaine—cela s'est traduit immédiatement par de grosses économies dans la facture pharmaceutique de la province, dans un premier temps au moins. Je crois qu'il y a donc des avantages, et une des questions que le gouvernement n'a pas véritablement tirées au clair pour ce qui est du coût des médicaments c'est celle du projet de loi C-91 et de la protection des brevets, qui s'est traduite par un alourdissement de la facture pharmaceutique dans ce pays de plusieurs milliards de dollars, malheureusement.

Il y a donc certaines questions qui doivent être réglées à l'échelle nationale, aussi bien qu'à l'échelle provinciale. Mais nous estimons qu'il est temps de faire quelque chose aux deux niveaux. Vous avez parrainé les conférences nationales sur les soins à domicile, sur l'assurance-médicaments et les techniques de l'information. Ne perdons pas de temps. La Conférence nationale sur les soins à domicile, en particulier, a confirmé qu'il était temps d'avancer.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous sommes d'accord, mais nous avons besoin de la participation des provinces, exactement comme dans le cas des garderies, par exemple, et il faut insister auprès des provinces...

M. Ian Johnson: Certainement!

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Redman, s'il vous plaît.

Mme Karen Redman: Si on en a fini avec les réponses, il est peut-être préférable de passer à d'autres questions. Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Monsieur Pillitteri, est-ce que vous voulez poser la dernière question?

Monsieur Loubier, vous avez les écouteurs devant vous.

[Français]

Je vous souhaite la bienvenue à bord, monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci beaucoup, monsieur Discepola, et félicitations pour votre nomination comme président pour l'Est du Canada.

Le vice-président (M. Nick Discepola): J'ai été élu à l'unanimité.

M. Yvan Loubier: Je m'excuse de mon retard de ce matin. On ne contrôle pas les horaires des avions, du moins pas encore.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous voudriez contrôler les avions?

M. Yvan Loubier: Comme je le disais, je voudrais m'excuser de mon retard. À cause des horaires d'avion, je n'ai pas pu arriver plus tôt.

Vous parliez plus tôt du Transfert social canadien. M. Johnson parlait plus précisément des décisions prises par le fédéral dans le cadre des quatre derniers budgets et disait que M. Martin avait sabré de façon constante les budgets des services sociaux et particulièrement des services de santé.

Depuis 1994, les provinces connaissent un manque à gagner de l'ordre de 7 milliards de dollars. Il est impossible qu'on enlève 7 milliards de dollars comme ça du secteur de la santé en coupant dans les transferts fédéraux aux provinces sans qu'il y ait un impact. Il me semble que si on compare la situation d'il y a quatre ans et la situation actuelle—dans les provinces de l'Ouest, il y a même des roulottes qui s'installent à la frontière américaine pour prodiguer des soins aux Canadiens—, on voit bien qu'il y a une détérioration apparente.

Je pose ma question à tout le monde. Est-ce que la meilleure des solutions ne serait pas que le gouvernement fédéral rétablisse le Transfert social canadien au niveau de 1993 et remette la somme de 7 milliards qu'il a enlevée pour financer les services de santé un peu partout au Canada?

• 1005

Comme deuxième question, au mois d'août, lorsque les premiers ministres des provinces se sont réunis à Saskatoon et ont mis en place le projet d'union sociale, n'ont-ils pas trouvé là une réponse positive pour en arriver à rétablir une situation plus acceptable dans le secteur de la santé? On permettrait le maintien de la juridiction exclusive des provinces dans ces secteurs-là tout en exerçant une certaine surveillance sur les normes des soins qu'on donne dans chaque province.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qui souhaite répondre? Monsieur Johnson.

[Traduction]

M. Ian Johnson: Merci, monsieur le président. Je vais essayer de répondre à la question.

Dans notre mémoire j'essayais de rappeler qu'il faut d'abord restaurer le niveau de financement. Nous ne sommes pas convaincus, cependant, que le système actuel du Transfert canadien soit le bon. Nous nous y sommes même opposés. Nous préférerions voir créer un ensemble de fonds d'investissement social, comme le proposait le budget fédéral parallèle, avec une caisse pour la santé, qui fixerait de façon claire des normes nationales, à partir de quoi on pourrait assurer une surveillance.

Par ailleurs, et pour revenir à votre question, nous comprenons qu'il y a des différences dans notre pays, et je pense particulièrement à la province du Québec, avec des situations d'exception qui ne s'appliquent pas au reste du Canada. Il y a donc là effectivement une particularité, mais pour la plupart des autres provinces, nous estimons que la présence et le rôle de l'état fédéral sont quelque chose d'essentiel au bon fonctionnement du secteur de la santé.

L'initiative des ministres de la Santé, et des premiers ministres, comme nous la comprenons, se penchait, ou du moins c'était une tentative, sur cette question de ce qu'on appelle l'union sociale. Nous y voyons surtout un recul par rapport à ce qui était en place en matière de normes, presque partout au Canada. Même l'idée que le gouvernement fédéral, c'est-à-dire le pouvoir de dépense et d'initiatives de celui-ci, ne puisse agir sans l'accord de toutes les provinces, signifierait peut-être bien que nous n'aurions pas eu de régime de soins de santé si la règle avait prévalu à l'époque. Nous sommes donc très inquiets.

Différents groupes, y compris le nôtre, s'étaient inquiétés de voir que toutes les discussions se déroulaient sans que la population ne soit appelée à se prononcer. D'après ce que nous voyons, nous ne pouvons pas intervenir, peut-être que c'est un petit peu différent au Québec, mais ailleurs nous n'avons pas été invités à participer. C'est exactement ce qui nous inquiétait lorsque le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux a été lancé, et qu'il a été question de fixer de nouvelles normes, d'appliquer de nouvelles lignes directrices et de fixer de nouveaux objectifs. Tout c'est fait à portes closes, ce contre quoi nous nous élevons radicalement.

Mais je veux revenir à ce que vous avez dit. Nous pensons que le moment est venu—et la Coalition canadienne de la santé le demandait—d'organiser un sommet national sur la santé, avec la participation des chefs de gouvernement, mais également une espèce de sommet parallèle de la population, comme cela s'est fait à Halifax, afin de pouvoir repenser la question des soins de santé, et de se fixer de nouveaux objectifs. Je pense que c'est un événement important qu'il faudrait organiser dans un avenir proche. De fait, on avait même proposé que cela se fasse cet automne. Nous vous demandons donc d'y repenser, dans l'esprit de la proposition de la Coalition canadienne de la santé.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que vous proposez alors que l'on refasse le travail du Forum national sur la santé, qui a rédigé des rapports pendant 18 mois?

M. Ian Johnson: Non, ce n'est pas la même chose. Nous saluons le travail fait par le Forum national, et l'importance de sa contribution au débat; cela ne fait aucun doute. Mais ce qui ressort de la conférence nationale qui s'est déroulée à Ottawa au mois d'avril, et notamment comme l'a proposé Shirley Douglas, qui vous le savez est la fille de Tommy Douglas mais également une militante à part entière, c'est que nous sommes à un tournant où nous avons besoin de réaffirmer une idée nationale, et de redonner la parole à la population sur la question des soins de santé. Le Forum national a été un vecteur important de recherche et d'action politique, mais nous avons besoin, si vous voulez, de réaffirmer une volonté politique, et de s'orienter dans les directions que j'indiquais.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Et cela en organisant une grande table ronde.

M. Ian Johnson: Oui.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Quelqu'un d'autre veut-il répondre?

M. Jim Sharpe: Je vais répondre, non pas sur la santé, mais en établissant un parallèle avec l'éducation. Je voudrais parler aussi de normes nationales et de programmes nationaux en collaboration avec les provinces, pour m'opposer aux décisions unilatérales, je pense par exemple aux bourses du Millénaire, car il est certain que le secteur de l'enseignement se réjouit d'être soutenu et d'avoir de l'argent, mais là encore, on voudrait une toute nouvelle infrastructure ou pouvoir négocier celle qui existe déjà.

Il n'est pas suffisant, en effet, de fixer des normes nationales et le principe de l'accessibilité. En fait, on est en train de compliquer le mécanisme de financement du système éducatif en créant un nouveau programme de bourses, qui s'ajoute aux incitations fiscales et aux problèmes des prêts aux étudiants, alors qu'il vaudrait mieux envisager la question du point de vue de l'accessibilité. On ferait un calcul de budget pour l'éducation, et on verrait ce qui est nécessaire pour que les étudiants puissent avoir accès à l'université. Il s'agit surtout de traiter le problème à la source, plutôt que de saupoudrer de crédits après coup.

• 1010

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: M. Sharpe me donne l'occasion de revenir sur les propos de M. Johnson. Lorsqu'on regarde la Constitution canadienne, on voit qu'il est très clair que le secteur de la santé, comme le celui de l'éducation, est de compétence provinciale.

Par ailleurs, le projet d'union sociale proposé à la réunion de Saskatoon cet été ne disait pas qu'on devait refuser toute initiative fédérale. On disait que les provinces qui refuseraient cette initiative devraient faire la preuve qu'elles avaient mis en place des initiatives avec une portée similaire et auraient un droit de retrait, un opting out, avec pleine compensation. Ainsi, si certaines provinces décidaient de se prévaloir de leur légitimité et aussi de leur légalité, par l'entremise de la Constitution, et de mettre en place des programmes ou des sous-volets du programme de santé qui relèvent de leur compétence exclusive, elles pourraient le faire et bénéficier des transferts fédéraux à condition que la portée de leurs programmes soit équivalente.

Comment peut-on à la fois respecter la Constitution et la voix des premiers ministres de l'ensemble du Canada, qui ont été unanimes là-dessus, offrir des soins de santé qui ont de l'allure, bien qu'on ait subi les affres de réductions de 7 milliards de dollars depuis quatre ans, et demander au gouvernement fédéral de s'en mêler? Comme l'a mentionné M. Sharpe, les provinces canadiennes ont déjà mis en place des infrastructures et des spécialisations liées à leurs prérogatives en matière de santé, tel que prévu par la Constitution. Comment peut-on concilier ces choses-là?

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson.

M. Ian Johnson: Je vais essayer. Ce dont il est question d'abord, c'est que nous assistons à l'échec de l'initiative fédérale depuis quelque temps, et à un recul et un affaiblissement de ce qui nous semblait être le rôle de l'État fédéral. Voilà une première constatation.

Notre syndicat ne s'oppose pas au principe des initiatives provinciales. De fait, c'est de là qu'est venu le régime de soins de santé—de la Saskatchewan, c'était une initiative provinciale, qui n'avait d'abord pas l'appui fédéral. Nous sommes donc favorables à cette idée, mais nous allons un peu plus loin en disant que nous avons assisté à une détérioration du rôle du gouvernement fédéral, une non-utilisation de sa responsabilité, aussi bien sur le plan du financement que de la surveillance. Voilà ce que nous disons surtout. Nous tenons à le rappeler, mais nous pensons également que c'est un aspect essentiel du rôle fédéral, et notamment au regard, comme vous le disiez, des responsabilités des provinces fixées par la Constitution.

Nous estimons qu'il y a un recul de la part fédérale, il faudrait la reconstituer, tout en permettant—et ce serait peut-être un des aspects très positifs d'un programme national de soins de santé et d'assurance-médicaments—que l'on puisse appuyer des initiatives provinciales, et plus que cela n'a été le cas par le passé.

Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais je vous donne notre sentiment à propos de ce que nous constatons.

[Français]

M. Yvan Loubier: Comment pouvez-vous dire qu'on peut, par de telles initiatives, respecter la compétence des provinces et la Constitution canadienne, alors que vous venez de nous donner deux exemples de secteurs qui sont vraiment de leur compétence? Vous dites que le leadership du gouvernement fédéral s'est détérioré dans le secteur de la santé. Ce n'est pas le leadership qui s'est détérioré, mais les transferts, les sommes qui ont été réduites à tour de bras depuis quatre ans. La santé est passée dans la moulinette, tout comme l'éducation et l'aide sociale. Après ça, on s'étonne de voir qu'il y a une détérioration des soins de santé. Comme vous le mentionniez, messieurs Johnson et Sharpe, ce n'est peut-être pas seulement une question d'argent, mais disons que les réductions de l'ordre de 7 milliards de dollars en quatre ans dans le réseau de la santé n'on pas dû contribuer beaucoup à l'efficacité du réseau.

Vous ne répondez pas à ma question. Il y a une zone grise dans votre interprétation. Je suis bien d'accord pour qu'il y ait des soins de santé équivalents d'est en ouest au Canada. La situation du Québec n'est pas plus particulière que celle de la Nouvelle-Écosse ou de l'Ouest. Nous avons aussi subi les affres des coupures fédérales. On aimerait bien avoir un répit. On aimerait bien que le gouvernement fédéral profite des immenses surplus dont il disposera le 31 mars—on parle de 12 à 15 milliards de dollars—pour accorder la priorité au secteur de la santé, mais dans le respect de la Constitution canadienne. En ne le faisant pas, il jette de l'huile sur le feu et on va encore être plongés dans des chicanes interminables pour savoir pourquoi le fédéral intervient dans un domaine de compétence provinciale. C'est la Constitution qui précise clairement que c'est de compétence provinciale. Le gouvernement fédéral devrait mettre l'argent là-dedans et s'assurer qu'on précise dans le projet d'union sociale de Saskatoon qu'il doit y avoir respect de la portée des programmes qu'il veut lui-même mettre en place avec l'appui de certaines provinces, mais sans plus.

• 1015

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne veux pas provoquer un débat constitutionnel non plus, mais je crois, monsieur Loubier, que vous interprétez la Constitution à votre façon.

Je conviens que l'administration de l'éducation et de la santé est uniquement de compétence provinciale. Par contre, rien dans la Constitution n'empêche le gouvernement fédéral d'y participer également.

De plus, monsieur Loubier, notre propre premier ministre du Québec a également dit qu'il était prêt à accepter que les nouveaux fonds de transfert soient assortis de conditions.

M. Yvan Loubier: Écoutez, monsieur le président...

Le vice-président (M. Nick Discepola):

[Note de la rédaction: Inaudible].

M. Yvan Loubier: Je viens essentiellement d'expliquer ce que vous venez de dire. Premièrement, gardez votre rôle de président si vous ne voulez pas déclencher de débat ici. C'est exactement ce que j'ai dit: le projet d'union sociale auquel on en est venu cet été disait que les provinces qui voulaient accepter une initiative fédérale dans le secteur de la santé pouvaient le faire. Par contre, relativement aux provinces qui rejetteraient cette initiative, le premier ministre du Québec a dit que si une telle initiative était déjà en place au Québec ou si le gouvernement du Québec voulait mettre en place un programme ayant une portée similaire, il accepterait cette condition, mais il s'attendrait à ce que le gouvernement fédéral lui verse de l'argent. Nous souhaitons donc un droit de retrait avec compensation.

Je vous rappelle, monsieur Discepola, que vous êtes le président et que vous devez faire preuve d'un minimum de souplesse. Écoutez quand je donne des explications et vous ne répéterez pas tout croche ce qu'on a dit.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Si c'est tout croche, comment se fait-il que vous acceptiez mon point de vue? J'ai aussi une idée de la façon dont la réunion doit se dérouler.

Monsieur Sharpe.

[Traduction]

M. Jim Sharpe: J'aimerais encore parler d'éducation. Je suis d'accord pour dire que le gouvernement fédéral doit financer les provinces, lesquelles doivent appliquer les directives. Mais je pense qu'il faut que cela s'accompagne aussi, dans le domaine de l'enseignement, d'un dispositif à l'échelle nationale.

En matière d'enseignement, l'accessibilité est quelque chose d'essentiel. En Nouvelle-Écosse, bien que nous soyons financés au prorata de la population pour ce qui est du Transfert canadien et du financement des programmes établis, beaucoup de nos étudiants viennent de l'extérieur de la province, c'est d'ailleurs la majorité, et pour ces étudiants nous n'obtenons aucun financement. Nous ne sommes financés que pour notre population.

Les universités de la Nouvelle-Écosse n'imposent pas des frais de scolarité différents aux étudiants des autres provinces. La province de Québec, qui n'héberge pas beaucoup d'étudiants des autres provinces... Mais là encore, j'approuve le fait que la province de Québec réglemente les frais de scolarité et les maintiennent à un niveau relativement bas, mais elle le fait en partie en imposant des frais de scolarité différents aux étudiants de l'extérieur de la province. Voilà donc des cas particuliers qui montrent qu'il n'y a pas d'effort national pour garantir le même accès à tous à l'enseignement supérieur.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Joan Lay, vous avez la parole.

Mme Joan Lay: Lorsque nous avons rencontré les personnes âgées du Québec, et cela au niveau national, nous avons constaté qu'elles avaient les mêmes problèmes que nous. C'est un problème de financement fédéral. Ces personnes aimeraient voir le gouvernement fédéral rétablir ces versements au niveau auquel ils étaient. Nous n'avons aucune divergence de vue sur la question de la santé, ni sur celle du financement. Ces personnes âgées du Québec aimeraient que le gouvernement fédéral prenne l'initiative sur le front des normes, c'est-à-dire que l'on maintienne les normes à niveau dans le secteur de la santé, et c'est une revendication de toutes les personnes âgées où qu'elles soient. Nous n'avons pas de problème de particularité à ce sujet. Voilà ce que nous constatons.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Pilliterri, s'il vous plaît.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'ai un certain nombre de remarques à faire, plutôt que de questions à poser, mais si vous voulez me donner vos impressions, allez-y. Je veux revenir à la raison de notre présence ici, à savoir la consultation prébudgétaire.

• 1020

J'aimerais d'abord, après coup, dire ce qui s'est passé. N'oublions pas que nous en étions à un déficit de 42 milliards de dollars en 1992-1993, et que le budget de 1997-1998 a été équilibré, en même temps qu'une réduction parallèle de la dette, et certains programmes qui avaient fait l'objet de réductions budgétaires ont été réactivés, notamment dans le secteur de l'assurance-santé, où l'on a réinjecté 1 milliard de dollars. D'après nous, les versements de transfert augmenteront pour l'exercice 1999-2000, comme cela s'est produit dans les budgets précédents, en remontant jusqu'au budget de 1995.

On semble oublier que lorsque l'on parle d'équilibrer ces budgets, cela ne se fait pas en l'espace d'un exercice. Si l'on parle de budgets équilibrés, il faut commencer là où effectivement nous avons équilibré le budget, en prenant ensuite les budgets successifs suivants.

Dans les exposés de ce matin on retrouve les conclusions de certaines études qui ont été faites... et, comme vous le savez, dans une certaine optique politique. Je ne veux pas dire que toutes ces études étaient mues par une ambition politique, mais je vois une espèce d'uniformité dans les exposés, qui me fait penser qu'il s'agit de quelque chose de politique.

À cet égard, je pense à l'alternative budgétaire. D'après les chiffres cités, il est clair que ce n'était pas le budget parallèle du Parti réformiste, qui est l'opposition officielle, comme vous le savez. Il était donc bien question d'une alternative budgétaire bien particulière, et je crois qu'il aurait fallu le dire très clairement. Ce n'était pas non plus une alternative budgétaire du Bloc, ni du Parti conservateur, il faudrait donc être prudent lorsque l'on présente cela comme l'alternative budgétaire définitive.

Est-ce que quelqu'un veut répondre? Pour revenir à cette alternative budgétaire, cela ferait reculer le gouvernement à la case départ. Je suis peut-être le plus ancien des députés présents, et j'ai parlé avec beaucoup d'économistes de cette question, je crois que cela nous ramènerait à un déficit de 30 à 50 milliards de dollars dès l'an prochain, si l'on adoptait certaines de ces recommandations.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson.

M. Ian Johnson: Ce que certains d'entre nous citent, si je ne me trompe, c'est l'alternative budgétaire fédérale qui a été présentée quatre ans de suite sous les auspices du Centre canadien de politiques alternatives et de Cohix du Manitoba. C'est de cela que nous parlons, je crois que les parlementaires connaissent cette alternative budgétaire, en tous les cas le mouvement communautaire et le mouvement syndiqué sont au courant. Je ne peux pas parler des autres alternatives, du Parti réformiste ou du Bloc, auxquelles vous auriez fait allusion, mais ceux d'entre nous qui sont issus des mouvements populaires connaissent bien cette alternative budgétaire fédérale présentée sous les auspices de ces deux entités.

À ce sujet, je dois dire que l'alternative budgétaire a été étudiée par des groupes d'économistes qui l'ont rédigée. Ça n'est donc pas une chose faite de façon rapide, c'est un processus annuel, où il y a des groupes de travail concernant les grands secteurs de l'action gouvernementale qui apportent chacun sa contribution. On travaille de façon très sérieuse sur différents scénarios et sur des modèles, voilà pourquoi nous citons ce budget, estimant qu'il y a plus à faire que ce que fait votre gouvernement pour améliorer les programmes des services qui nous paraissent importants, tout en traitant de la question du déficit et de la dette, que vous avez évoquée.

Si vous vous reportez à cette alternative budgétaire fédérale de l'année, elle énumère clairement les conditions d'une réduction du déficit et de la dette, pas de façon aussi impressionnante que ce que vous projetez, mais avec un progrès notoire. Il y est question aussi de ce dont parlait Stella, c'est-à-dire du déficit social. Ce n'est certainement pas une dimension du problème qu'il faille considérer de façon isolée.

Cette alternative expose également les raisons de notre position à ce sujet. Vous vous limitez si vous discutez du déficit et de la dette en termes purement budgétaires. Comme l'a dit notre premier vice-président, il est inutile d'avoir un budget équilibré si vous ne vous penchez pas sur les questions et problèmes de la vie quotidienne, les problèmes de toute une population. Rien ne doit se faire aux dépens des simples Canadiens.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame MacDonald.

• 1025

Mme Maureen MacDonald: Il faut bien se souvenir d'un certain nombre de choses. Ces problèmes de dette et de déficit ne sont pas nouveaux au Canada, vous le savez bien. Nous avons déjà eu des dettes et des déficits par le passé, et nous avons toujours réussi à nous en sortir par la croissance économique et la mise en place de stratégies économiques, plutôt que par une politique d'amputation et de réduction des budgets.

Il faut aussi revenir en arrière, et reprendre les rapports du vérificateur général des quelques dernières années. Je pense notamment à cette correspondance d'avril 1998 entre le vérificateur et le Conseil du Trésor, le vérificateur général indiquant qu'il y aurait plus de 2,5 milliards de dollars disponibles si de bonnes méthodes de comptabilité étaient utilisées. D'après cette correspondance du vérificateur général, le budget présenté pour cet exercice-là tendait à dissimuler cet excédent.

Il faut donc bien voir quelle est la réelle situation financière du pays, et reconnaître qu'il y a au budget de l'argent qui pourrait être réinvesti.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Sharpe, allez-y.

M. Jim Sharpe: Il ne s'agit pas simplement de déficits, mais également de qualité de la vie. J'ai parlé d'une baisse du nombre des étudiants à temps partiel. Si vous en cherchez les causes, vous verrez que les frais de scolarité en sont une.

Mais dans la sphère économique il se passe bien plus de choses que cela. Le déficit venait en partie des taux d'intérêt très élevés des années 90, qui étaient le fait d'une certaine situation financière et budgétaire où la Banque du Canada faisait de la lutte contre l'inflation, son objectif numéro un. Voilà pourquoi on a eu une augmentation très importante du chômage. Nous n'avons toujours pas retrouvé les niveaux précédents, et pourtant nous sommes probablement au sommet d'un cycle de l'emploi. La sécurité de l'emploi a beaucoup souffert, et tout le monde est touché.

Il a été question de créer un indice de la qualité de la vie. Une conférence importante est prévue pour la fin du mois à Ottawa, et l'on y discutera de cet indice. D'après ce que j'en ai entendu dire, les années 90 sont des années de recul de cet indice. Cela est dû en partie à la dégradation de l'environnement, à la baisse du revenu familial—deux aspects de la question qui sont mal connus—mais surtout à l'absence de sécurité de l'emploi et du revenu. Cela touche tous les secteurs de la vie publique.

Pour ce qui est des universités, il y a eu un progrès, d'une certaine manière, et une augmentation du nombre des étudiants à temps plein. Cependant, ça n'a pas suffi à créer cette culture de l'apprentissage dont on parle partout; il faut faire plus pour intégrer l'université et le monde du travail. Le gouvernement doit avoir une vision à beaucoup plus long terme, au lieu d'être préoccupé par ses budgets à court terme, s'il veut réfléchir à ce qu'est notre société et à la direction dans laquelle nous nous engageons.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Sharpe.

Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri: Monsieur le président, cette alternative budgétaire est faite de beaucoup de voeux pieux. On parle d'une croissance de 4 p. 100, par exemple. C'est rêver en couleur, puisque nous en sommes au Canada à 2,5 p. 100. Ça ferait une inflation de 2 à 4 p. 100. Si nous nous reportons à la situation de l'économie mondiale, et à la situation de l'Asie-Pacifique, on voit bien que beaucoup de pays sont aux prises avec une récession mondiale, et fort éloignés d'appliquer les principes de cette alternative budgétaire.

Si je regarde les chiffres, je vois que l'ensemble de la société et les gouvernements antérieurs ont fait pas mal de choses. Mais j'aimerais revenir à ce qu'a dit mon collègue Paul Szabo, qui parlait des enfants et de leur avenir. Je crois que nous leur avons déjà assez nui, et je ne veux pas accroître leur fardeau de demain, et je pense beaucoup à nos petits-enfants, en leur imposant de rembourser notre dette. Avec les recommandations de l'alternative budgétaire, c'est exactement ce que l'on imposerait aux générations futures. C'est notre génération qui a accumulé cette dette, et je ne veux certainement pas la transmettre à mes enfants ni à mes petits-enfants. Je crois que ce que nous leur laisserons à rembourser suffit comme cela.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce une observation, ou une question?

• 1030

M. Gary Pillitteri: C'était une remarque en passant, mais à propos de cette alternative budgétaire où l'on prévoit une croissance de 4 p. 100, avec une inflation de 2 à 4 p. 100, cela veut dire des taux d'intérêt de 12 à 14 p. 100. Je ne suis pas né d'hier. Voilà ce que signifie cette alternative budgétaire.

Mme Joan Lay: Puisque cette alternative est en cause, je vais faire quelques remarques, qui ne sont peut-être pas absolument justes.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne pense pas que ces observations vous visaient particulièrement, madame Lay.

Mme Joan Lay: Pardon?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous n'étiez pas visée par les observations du député.

Mme Joan Lay: C'est très bien. J'accepte les 2 et 4 p. 100.

Mais je voudrais dire que cette alternative budgétaire à laquelle j'ai emprunté les chiffres, avaient été présentés avant que l'on ne nous annonce subitement à la télévision, la semaine dernière, qu'il va peut-être y avoir une récession mondiale. Avant cela, tout ce que l'on entendait dire, c'est que tout allait le mieux du monde, que la reprise était là, etc., etc. Tout cela en dépit du fait que le Japon et les pays de l'est s'enfonçaient de plus en plus.

Vous ne pouvez donc pas nous attaquer sur ces chiffres hors contexte. Autrement dit, depuis qu'ils ont été calculés, un certain nombre de choses se sont passées. J'imagine même que ceux qui étudient cette alternative budgétaire, et qui suivent l'évolution mondiale, y ont apporté quelques modifications. Mais je n'ai pas leurs nouveaux chiffres pour le moment.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais le Canada n'a certainement pas eu de croissance de 4 p. 100 depuis des années. M. Johnson pourrait peut-être tirer cela au clair.

M. Ian Johnson: Excusez-moi, je n'ai pas d'exemplaire de ce budget, que vous devriez peut-être vous-même me lire. Mais je ne crois pas qu'on y projetait une croissance de 4 p. 100.

Mme Joan Lay: Entre 2 et 4 p. 100.

M. Ian Johnson: Il ne s'agit pas simplement de voeux pieux. Les économistes responsables de ce budget ont fait une recherche solide avec des prévisions étayées.

Le fait est que n'importe quel budget est toujours un ensemble de choix délibérés. Vous avez choisi de votre côté, avec le budget de cette année. Nous pensons qu'il y a une autre façon de répondre aux besoins de la population, et à l'état de nos finances publiques.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais je ne peux pas décider du taux de croissance que je souhaite. Si c'était possible, je demanderais du 8 p. 100.

M. Ian Johnson: Vous n'avez peut-être pas compris, monsieur le président.

M. Jim Sharpe: Huit pour cent de croissance ne suffirait peut-être pas à améliorer la qualité de la vie.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je comprends.

Madame Hill, allez-y.

Mme Wendy Hill: J'aimerais parler un petit peu de ce qui se passe ici.

Je suis un peu stupéfaite. C'est la première fois que je participe à des consultations prébudgétaires, mais j'imaginais que l'idée était de permettre à la base de s'exprimer sur ce qu'elle voit. En ce qui me concerne, nous ne sommes pas ici pour que les députés s'écoutent les uns les autres. Pour cela nous avons nos comités, et la Chambre des communes, et nous ne nous en privons pas. Nous ne sommes pas ici pour harceler la population, et la mettre au pied du mur lorsqu'elle s'exprime. Les opinions avancées ici sont une base très large d'information. Nous avons un député de l'assemblée législative provinciale, des présidents et vice-présidents de syndicats locaux, des personnes issues de l'université et des groupes de personnes âgées. Voilà donc des secteurs importants de la population qui sont représentés, et je n'aime pas beaucoup que nous leur donnions la parole juste ce qu'il faut pour pouvoir ensuite les descendre. Et supposer par ailleurs qu'il y a derrière tout cela une espèce de complot... on a émis l'idée selon laquelle les témoins se sont regroupés ici pour...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Si c'est votre impression, alors j'ai manqué à mon devoir de président.

Mme Wendy Lill: J'aimerais répondre à un commentaire qui a été fait. Le fait est que ces personnes ne mâchent pas leurs mots pour dénoncer les choix qui ont été faits. Ce sont de toute évidence des opinions que nous devrions tous entendre. Il est important que le Comité des finances entende ce genre de choses. Je me demandais simplement si nous ne devrions peut-être pas écouter davantage et parler moins.

C'est pourquoi j'aimerais poser une autre question. Je l'adresse à quiconque voudra bien y répondre, mais elle s'adresse certainement à Jim Sharpe.

En tant que porte-parole des personnes handicapées, je suis très préoccupé par la situation des personnes handicapées à cette époque de restrictions financières. Nous parlons d'accessibilité. Quelle est l'accessibilité prévue pour les étudiants handicapés à part le système d'éducation? Et n'hésitez pas à formuler tout autre commentaire que vous pourriez avoir concernant la situation des personnes handicapées pour ce qui est de l'aide fédérale qui existe à l'heure actuelle.

M. Jim Sharpe: Je dois dire qu'il y a eu certaines améliorations marginales à cet égard, du moins en ce qui concerne les subventions d'études du Canada offertes aux étudiants handicapés qui font des études à temps partiel. Je pense qu'il est trop tôt pour connaître avec précision les chiffres. Il y avait un nombre arbitraire de 25 000 subventions d'études du Canada pour les étudiants avec personnes à charge et étudiants handicapés. Tous ceux qui savent qu'il y a au Canada 1 million d'étudiants postsecondaires sauront que le nombre d'étudiants avec personnes à charge est probablement plus élevé, donc il y aura beaucoup de travail à faire pour déterminer la façon dont ils peuvent avoir accès à ce fonds.

• 1035

Il y a aussi la situation au niveau provincial. C'est une chose que d'aider ces étudiants mais une autre que d'offrir une aide réelle à long terme non seulement en matière d'éducation postsecondaire mais aussi en matière d'emploi pour les personnes handicapées. Je pense qu'il y a beaucoup plus de travail à faire à cet égard.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Lay.

Mme Joan Lay: En ce qui concerne les personnes handicapées, j'aimerais dire que certains de ces problèmes se sont posés pour les personnes âgées qui s'occupent de jeunes handicapés. Cela s'est produit partout au Canada. Nous avons entre autres constaté qu'il n'existe aucune politique fédérale ou provinciale pour aider ces personnes.

À l'heure actuelle, nous sommes en train d'envisager un projet qui nous permettra de consulter ces personnes afin de déterminer exactement le type de politique gouvernementale qui les aiderait à s'occuper de personnes handicapées, qu'elles soient jeunes ou vieilles. Il faut que quelqu'un s'en occupe et à la maison ce sont essentiellement des infirmières âgées qui s'en occupent.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous remercie.

[Français]

Monsieur Loubier, s'il vous plaît.

M. Yvan Loubier: J'espère que vous ne vous êtes pas sentie attaquée tout à l'heure. Il me semble qu'on a eu une discussion pas mal intéressante ce matin. Pour ma part, je ne vois pas cela comme une confrontation, non plus que M. Pillitteri, je pense. M. le président et moi, nous nous sommes peut-être confrontés, mais nous sommes de vieilles connaissances. Alors, je ne pense pas que cela l'ait offusqué.

Je trouve fort intéressant le débat qu'on fait ce matin. Un débat peut se faire quelquefois avec un peu de vigueur, et je pense que c'est tout à notre honneur qu'il y ait un peu de vigueur parce que c'est dans le choc des idées qu'on fait avancer les choses.

J'aimerais apporter une précision sur les chiffres. M. Pillitteri parlait de la croissance économique. C'est vrai que le taux de croissance économique a été révisé il y a deux ou trois semaines. On se dirige maintenant vers 2 ou 2,5 p. 100 de croissance du PIB. Par contre, les prévisions quant au surplus budgétaire pour le présent exercice financier demeurent de l'ordre de 12 à 15 milliards de dollars. On ne parle plus de déficit. On parle d'un surplus de 12 à 15 milliards de dollars, et c'est très conservateur.

J'ai vérifié auprès des prévisionnistes du Conference Board, du Mouvement Desjardins chez nous, de la Caisse de dépôt et même de l'Institut C.D. Howe, et tous parlent d'un surplus de l'ordre de 12 à 15 milliards de dollars, sauf quelques-uns qui peuvent être facilement identifiés à un parti, qui sont collés au gouvernement ou à d'autres partis.

Seulement pour les quatre premiers mois du présent exercice, c'est-à-dire avril, mai, juin et juillet, il y a eu des rentrées excédentaires de plus de 7 milliards de dollars dans les coffres du gouvernement. On parle du mois de juillet, qui a été un des pires mois. On parlait de la crise asiatique tout à l'heure, monsieur Pillitteri. Les mois de juillet et août ont été les deux pires mois au niveau des effets de la crise asiatique.

Ce que nous prévoyons, compte tenu du ralentissement, c'est qu'au lieu d'être à 22 milliards de dollars au mois de mars 1999, le surplus sera de 12 à 15 milliards de dollars. Cela reste cependant un surplus, et il y a encore des possibilités.

On parlait de la santé ou de l'éducation. Si on ramenait les sommes seulement au niveau de 1994, on aurait encore un surplus de 1 à 3 milliards de dollars dont on pourrait se servir comme coussin.

Vous avez mentionné le vérificateur général, madame MacDonald. Vous avez raison de le mentionner parce que chaque année, depuis trois ans, le vérificateur général dit que le gouvernement trafique les chiffres. Ce que vous retrouvez dans le budget n'a aucun sens. Dans le budget de mars dernier, on disait que le surplus pour l'année en cours était à zéro, que celui de l'année prochaine serait à zéro et que celui qu'on aura dans trois ans serait aussi à zéro. Cela n'a aucun sens. Comme je vous le disais, juste pour les quatre premiers mois du présent exercice, c'est 7 milliards de dollars.

• 1040

Si on voulait faire une projection bête, on multiplierait ce chiffre par trois et on dirait que le surplus sera de 21 milliards de dollars, mais on tient compte du ralentissement et on arrive tout de même à un chiffre de 12 à 15 milliards de dollars. Si on doit avoir une discussion ici, elle ne doit pas porter sur le déficit, mais sur l'utilisation du surplus. Le surplus serait beaucoup mieux utilisé dans les secteurs de la santé et de l'éducation qu'il ne l'est à l'heure actuelle, alors qu'on utilise tout ce qui entre de mois en mois pour rembourser une partie de la dette. Je pense que personne ici n'est contre le remboursement d'une partie de la dette, mais étant donné l'incertitude qu'on vit avec la crise asiatique et les besoins criants qu'il y a dans les secteurs de la santé et de l'éducation, il me semble qu'il faut dégager des priorités. Si vous disiez au gouvernement quelles sont vos priorités par rapport à l'utilisation du surplus, vous orienteriez le débat dans le bon sens, et ce débat se poursuivrait avec vigueur mais sans animosité.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Sharpe.

M. Jim Sharpe: Je tiens à vous remercier d'avoir réorienté le débat.

Je crois comprendre que c'était la question qui avait été posée au départ—à savoir quoi faire de l'excédent budgétaire. Je pense que nous devons le réinvestir dans les collectivités, en mettant l'accent sur les questions relatives à la qualité de vie. Il est également important d'avoir, non pas forcément des programmes nationaux, mais des normes ou des moyens nationaux de surveiller la santé et l'éducation. L'important est de déterminer quel sera l'impact sur les membres des collectivités, que ce soit dans les régions rurales, urbaines, les ghettos, et ainsi de suite.

Je pense également qu'une nouvelle initiative audacieuse s'impose, soit par le biais du fonds de l'assurance-emploi ou par un autre moyen. Prenez une partie du surplus et réinvestissez-le. De toute évidence, la santé et l'éducation sont des domaines importants où il faudrait réinvestir mais il faudrait aussi prévoir un type un peu plus général de réinvestissement dans un fonds destiné à appuyer le développement économique au niveau communautaire, que ce soit à titre expérimental ou sur une base nationale. Je pense que ce serait une mesure très audacieuse de la part du gouvernement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): N'avez-vous pas l'APECA?

M. Jim Sharpe: Oui, mais l'APECA a tendance à être assez politisée en ce qui concerne ceux qui reçoivent l'argent. Il existe des associations de développement régional qui ont un réseau axé sur le développement économique à l'échelle communautaire, mais des initiatives précédentes comme le fonds de développement des collectivités, qui était un fonds axé sur la collectivité, ont disparu. C'est pourquoi j'hésiterais à dire que nous avons réalisé des progrès pour ce qui est d'investir réellement dans les collectivités de la région atlantique du Canada.

[Français]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que d'autres personnes voudraient intervenir? Madame Lay?

[Traduction]

Mme Joan Lay: Je pourrais peut-être mentionner certains des investissements. Le programme que regrettent le plus les aînés c'est le Programme Nouveaux Horizons. Je pense que tous les groupes d'aînés partout au Canada vous l'ont probablement dit. Lorsque le gouvernement a investi dans les nouveaux programmes de santé—j'ai oublié leurs noms; j'ai tendance à oublier bien des choses maintenant...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous n'êtes pas la seule.

Mme Joan Lay: ... des programmes portant surtout sur la santé, et il n'y rien de mal à cela, mais cela a privé quand même les aînés de programmes communautaires qui leur étaient offerts partout au Canada. En ce qui concerne certains de ces programmes, ils continuent à les exécuter eux-mêmes. Ils réunissent eux-mêmes l'argent nécessaire pour conserver ces programmes, mais certains d'entre eux malheureusement avaient besoin de l'aide du Fonds Nouveaux Horizons.

Il y a de nombreuses nouvelles initiatives en cours que nous pourrions examiner dans la perspective des aînés, comme celle que j'ai mentionnée. Nous sommes obligés de trouver diverses sources de financement pour faire ces études que je considère importantes et qui ne sont pas faites. C'est donc à mon avis le genre d'initiatives auxquelles il faudrait consacrer une partie de cet argent, entre autres, comme des études sur les besoins des aînés.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Lord, s'il vous plaît.

Mme Stella Lord: En ce qui concerne les priorités, nous les avons indiquées dans notre mémoire. Ce mémoire a été rédigé en partant du principe qu'il y aurait un excédent.

En ce qui concerne la discussion que nous avons eue plus tôt à propos des initiatives fédérales en matière de santé et ainsi de suite, je pense que notre conseil est d'avis que nous devons réellement rétablir le financement des services provinciaux qui existent à l'heure actuelle avant d'envisager de nouvelles initiatives fédérales.

• 1045

Bien des gens autour de cette table ont parlé des compressions dans les services de santé, dans l'éducation et les services sociaux, subies par les provinces. C'est très bien d'envisager de nouveaux programmes comme le programme d'assurance-médicaments et le programme de soins à domicile, et il serait formidable d'avoir ce genre de programmes. Le fait est que les provinces ont déjà un programme de soins à domicile. Nous avons un programme de ce genre en Nouvelle-Écosse, qui permet de soigner les gens à domicile. Cela est attribuable en partie aux compressions budgétaires subies par les hôpitaux et ainsi de suite, mais les ressources de ces programmes sont vraiment utilisées au maximum et ne suffisent plus. Donc, avant d'envisager de nouveaux programmes, il faudrait venir en aide aux programmes provinciaux qui existent déjà.

J'aimerais revenir sur la nécessité de rétablir le financement à l'intention des provinces, parce que ne sont pas uniquement les provinces qui sont touchées. Les municipalités aussi sont touchées. Nous avons eu la fusion municipale dans ce domaine et c'est en partie à cause de questions de financement. Cette municipalité affiche maintenant un déficit de 83 millions de dollars—si je me souviens bien—par suite de cette mesure. On s'est donc déchargé de la dette sur les municipalités, puis sur les organisations communautaires en réduisant leur financement.

Certaines organisations communautaires n'existent plus parce qu'elles n'ont pas réussi à obtenir le financement nécessaire pour survivre. L'infrastructure communautaire a beaucoup souffert—et la plupart de ces problèmes relèvent réellement de la compétence provinciale. Ce sont des problèmes auxquels il faut s'attaquer en premier, après quoi on s'occupera des programmes de soins à domicile.

Évidemment, les soins à domicile sont une question qui intéresse les femmes. Ce sont les femmes qui assurent la plupart des soins à domicile, et l'expansion des soins à domicile sans ressources supplémentaires les touche directement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Johnson.

M. Ian Johnson: J'aurais une dernière observation sur ce que nous avons tâché de présenter plus tôt, monsieur le président, particulièrement dans notre mémoire de juillet. Il ne faut pas oublier que cette année marque le 50e anniversaire de la signature de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Nous considérons que l'étude effectuée entre autres par votre comité offre l'occasion de nous pencher sur nos orientations en matière de droits de la personne et sur la façon de répondre aux besoins.

Donc peut-être pour répondre à la question de M. Loubier, nous proposons que le gouvernement élargisse ses priorités. Il faut examiner le contexte plus général. C'est pourquoi nous avons également proposé d'utiliser comme outil le Genuine progress index ou indice de progrès réel. Nous pensons qu'il s'agit d'un moyen plus efficace d'évaluer les besoins et les répercussions des budgets et des programmes gouvernementaux. Dans ce contexte, comme je l'ai dit, nous devons clairement rétablir le financement de certains secteurs qui ont été touchés mais aussi peut-être envisager un certain nombre de nouvelles initiatives. Je pense que c'est ce que nous voulions proposer.

Nous ne nous opposons absolument pas à la tenue d'un débat. Nous nous réjouissons au contraire d'avoir l'occasion de pouvoir participer à la présente discussion.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous vous remercions. Je pense que c'était un débat très sain. Vous comprenez de toute évidence nos difficultés. Nous divergeons peut-être d'opinions à propos de la croissance en pourcentage et à propos du montant de l'excédent. Quoi qu'il en soit, nous avons pris des décisions très graves et difficiles depuis quatre ou cinq ans, à mon avis. Annuler certaines de ces décisions imposerait à nouveau de nouvelles conditions, de nouvelles contraintes et lierait les mains des gouvernements futurs.

Le débat porte sur les mesures à prendre dorénavant. Nous prévoyons un excédent. Nous pouvons débattre du montant qu'il représentera. Que faisons-nous avec cet excédent? Certains ont proposé ici que nous l'investissions dans des programmes de recyclage. D'autres ont proposé que nous accordions la priorité au domaine de la santé, par exemple. Le fait est que peu importe le montant que nous investissons dans ces secteurs, nous devons à tout prix nous assurer que nous disposons d'abord du montant d'argent en question. Certains ont exprimé des doutes quant à l'existence même d'un excédent possible. Si nous investissons 2, 3, 4 ou 5 millions de dollars dans de nouveaux postes de dépenses, il faudra que cet argent soit disponible chaque année. Autrement, nous risquons de nous retrouver dans une autre situation déficitaire.

Nous devons être très prudents dans nos hypothèses, et c'est la politique que notre gouvernement a toujours adoptée. Nous faisons des hypothèses prudentes en matière de croissance économique et des hypothèses encore plus rigoureuses en ce qui concerne les taux d'intérêt. De cette façon, nous conservons notre crédibilité à l'échelle internationale et surtout nous redonnerons confiance aux Canadiens.

Je tiens à vous remercier de votre participation. Il est important pour nous, politiques, de retourner dans les régions et les collectivités pour connaître le point de vue des gens au lieu de toujours rester dans notre soi-disant tour d'ivoire. Nous devons vous écouter et nous nous sommes engagés à le faire. Nous ferons rapport de toutes les recommandations que nous recueillerons d'un océan à l'autre, et en bout de ligne, le gouvernement et le ministre des Finances prendront leurs décisions. Nous espérons ainsi avoir une approche très équilibrée qui traduira les souhaits et les priorités des Canadiens. Je tiens donc à vous remercier encore une fois.

• 1050

Je tiens à rappeler à mes collègues que nous nous réunirons à 13 heures, heure de l'est, dans la même pièce.

• 1051




• 1210

Le vice-président (M. Nick Discepola): Bonjour, chers collègues, et bienvenue à nos témoins. Nous allons reprendre nos audiences sur les consultations prébudgétaires.

Nous avons un ordre du jour très chargé cet après-midi. C'est pourquoi j'aimerais commencer immédiatement en souhaitant la bienvenue à tous. Je vous présente Susan LeFort et Ian Tay Landry du Réseau anti-pauvreté. Je vous souhaite la bienvenue.

Nous accueillons également Margaret Tusz et Juan Telez du Atlantic Popular Education Network.

De la Fédération canadienne des étudiants et des étudiantes, section de la Nouvelle-Écosse, nous accueillons Jessica Squires et Penny McCall-Howard. Bienvenue à toutes les deux.

De la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse, nous accueillons Les Holloway, vice-président. Bienvenue à vous.

De la Nova Scotia School Boards Association, nous accueillons Mary Jess MacDonald et Margaret Forbes. Je vous souhaite la bienvenue à toutes les deux.

De l'Institut national du cancer du Canada, nous accueillons Gerry Johnston.

Bienvenue à tous.

Vous connaissez bien la formule. Chacun a une dizaine de minutes pour faire son exposé puis nous passons aux questions. Mme Forbes a une réunion très importante par la suite; c'est pourquoi elle a demandé de prendre la parole en premier et j'accède à son souhait si elle veut bien commencer.

Mme Marg Forbes (présidente, Nova Scotia School Boards Association): Merci beaucoup, monsieur le président, membres du comité et autres témoins. Je suppose que nous partageons tous la même opinion, du moins ceux d'entre nous qui présentons des mémoires.

Je m'appelle Marg Forbes et je suis présidente de la Nova Scotia School Boards Association. À ma gauche se trouve Mary Jess MacDonald, qui est la deuxième vice-présidente de notre association et dans l'auditoire se trouve M. Frank Barteaux qui est notre directeur exécutif.

Tout d'abord, je tiens à vous remercier de l'occasion que vous nous offrez de présenter nos vues au comité permanent des finances. Nous tâcherons d'être brefs. Nous avons des exemplaires de notre mémoire que le greffier est sans doute en train de distribuer.

En tant qu'organisme à but non lucratif qui dépend des cotisations des membres des sept commissions scolaires de la Nouvelle-Écosse, nous sommes tout à fait conscients du défi que représente l'utilisation prudente des ressources financières. Nous ne doutons pas qu'il doit être extrêmement difficile de préparer un budget pour tout un pays, qui répondra aux divers besoins des populations. Nous aimerions toutefois faire savoir au comité ce que notre association considère comme la grande priorité pour le Canada, qui doit ressortir à notre avis des délibérations sur le budget.

Depuis plusieurs années, la Nova Scotia School Boards Association et notre association mère, l'Association canadienne des commissions/conseils scolaires, sont de plus en plus préoccupés—je dirais même alarmés—par la hausse en flèche de la pauvreté chez les enfants dans notre pays.

Récemment, les Nations Unies ont publié leur rapport mondial sur le développement humain, qui a révélé une dichotomie troublante en ce qui concerne le Canada. Bien que le Canada soit connu comme le meilleur endroit au monde où vivre, il s'est classé au 10e rang pour ce qui est de la répartition de la richesse. S'appuyant sur les chiffres de 1995, le rapport a présenté certaines statistiques très alarmantes indiquant que pratiquement 12 p. 100 des Canadiens vivent effectivement dans la pauvreté.

Dix-sept pour cent des Canadiens sont des illettrés fonctionnels. Neuf pour cent mourront probablement avant l'âge de 60 ans. Et 1,3 p. 100 de la population active souffre de chômage à long terme. Le Conseil canadien du développement social, un groupe de pression qui s'occupe de questions relatives à la pauvreté, évalue à 20 p. 100 le nombre d'enfants canadiens qui vivent dans la pauvreté.

Des études ne cessent de prouver que, lorsque des enfants ont faim, ils ont de la difficulté à se concentrer et ont plus de difficulté à apprendre ou à régler des problèmes que leurs camarades de classe qui mangent des repas nutritifs. Cela signifie que pour bien des enfants, tout espoir futur de vie heureuse productive et réussie est extrêmement limité par les conditions financières dans lesquelles ils vivent.

En tant qu'organisation qui sert les intérêts des étudiants de la Nouvelle-Écosse, la Nova Scotia School Boards Association a toujours été convaincue que l'avenir de notre province et de notre pays dépend des jeunes d'aujourd'hui. Nous devons tous unir nos efforts pour enrayer le phénomène de la pauvreté chez les enfants afin que ces enfants aient les possibilités de succès qu'ils méritent et que le pays ait un avenir fructueux.

• 1215

L'automne dernier, une enquête nationale a permis de constater que pratiquement 70 p. 100 des Canadiens considèrent que la faim chez les enfants est un problème plus important que celui de l'unité nationale et du déficit. Nous pressons le gouvernement fédéral d'accorder la plus grande priorité aux questions qui touchent les enfants et les jeunes et de faire de l'élimination de la pauvreté chez les enfants l'objectif principal du budget fédéral de 1999. Nos recommandons une accélération de l'échéancier national en matière d'investissement dans les prestations pour enfants afin que l'on double le montant pour répondre aux besoins très urgents des enfants qui vivent dans la pauvreté; nous proposons un montant de 850 millions de dollars en 1999 et un autre montant de 1,850 millions en l'an 2000.

De plus, cet engagement devrait prévoir les ressources nécessaires pour mettre en oeuvre un plan d'action exhaustif en matière de recherche, de politique et de programme. Par exemple, je sors tout juste d'une réunion des présidents et surintendants des commissions et conseils scolaires de cette province; c'était une réunion organisée par le ministre de l'Éducation. L'une des commissions, qui ne savait pas que je comparaîtrais ici cet après-midi, avait demandé pourquoi notre organisation n'incitait pas, par exemple, le gouvernement fédéral à utiliser une certaine partie de l'excédent de l'assurance-emploi pour répondre plus rapidement aux besoins des enfants qui vivent dans la pauvreté, une situation qui est absolument critique dans notre pays.

En tant que membres de conseils scolaires, nous avons toujours su que notre responsabilité ne consiste pas nécessairement à répondre aux besoins des enfants jusqu'à l'âge de 5 ans, ou même avant la naissance, mais nous avons également reconnu que nous héritons de ce problème lorsque l'enfant commence l'école. Donc, notre association a fait un effort concerté, d'ailleurs en collaboration avec d'autres partenaires en éducation de la province et du pays, pour tâcher de faire porter la discussion sur ce problème général.

C'est pourquoi nous demandons humblement votre appui. Même si je ne pourrai pas entendre les autres exposés, j'aimerais en recevoir des copies au cours des prochains jours.

Nous tenons à vous remercier à nouveau de nous avoir offert l'occasion de présenter ce mémoire. Si vous avez des questions à ce sujet, nous nous ferons un plaisir d'essayer d'y répondre. Je vais également insister pour que Mary Jess réponde à une ou deux questions. C'est pourquoi j'espère que vous allez nous en poser.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup. C'est ce que nous allons probablement faire.

J'aimerais maintenant demander à M. Johnston, qui a lui aussi des contraintes de temps, je crois, de faire son exposé.

M. Gerry Johnston (scientifique pour le Tery Fox Cancer Research, Institution national du cancer du Canada): Merci beaucoup.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole devant le comité permanent. Je suis une sorte d'hybride, si je puis dire en ce sens que j'ai en fait été invité à comparaître au nom d'une organisation dont je fais partie, c'est-à-dire l'Institut national du cancer du Canada. Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le rôle de cette institution, il s'agit d'un organisme qui finance la recherche biomédicale de base sur le cancer. Il s'agit d'un organisme financé par le secteur privé.

Je suis un chercheur, et vous considérerez peut-être que je prêche pour ma paroisse. J'espère que mon exposé ne sera pas interprété de cette façon. Je pense avoir une optique plutôt nationale sur les questions de recherche biomédicale dans notre pays. En plus d'être chercheur, je suis également chef de département de la faculté de médecine de l'Université Dalhousie.

Mon intention était en fait de profiter de l'occasion pour renseigner le comité, ou du moins dialoguer avec le comité, à propos de l'état actuel de la recherche biomédicale au pays—c'est-à-dire de la recherche en général et de la façon dont elle est financée. Je considère que les activités de recherche, quelles qu'elles soient—même si je m'en tiendrai uniquement à la recherche biomédicale—étayent en fait une vaste gamme d'activités entre autres et non la moindre l'appui du système de santé et de notre système d'éducation. De plus en plus, la recherche est en train de devenir à mon avis un aimant pour les questions économiques également étant donné qu'un milieu scientifique solide, représente une véritable ressource pour les industries en pleine expansion—comme les industries pharmaceutiques et autres industries du genre.

Pour accorder au gouvernement le mérite qui lui revient, je tiens à signaler que les milieux scientifiques au Canada possèdent une réputation bien méritée à l'échelle internationale et que cela est attribuable en grande partie à l'aide à la recherche offerte par des institutions telles que le Conseil de recherches médicales du Canada, qui est un organisme financé par le gouvernement. Je tiens à préciser que, même si ce genre d'initiative a très bien fonctionné, elle n'est pas vraiment suffisante, et je crois que le gouvernement l'a reconnu.

La situation au Canada est inhabituelle en ce sens qu'au cours des dernières années les ressources mises à la disposition des milieux scientifiques ont diminué comparativement à d'autres pays industrialisés et même de nombreux pays en développement. Cette tendance s'est quelque peu inversée l'année dernière et le gouvernement est en train de prendre des initiatives pour tâcher d'accroître les ressources mises à la disposition de cette activité fondamentale de votre société, qui consiste à générer un nouveau savoir. Je vous exhorte à poursuivre et à accélérer ce genre de mesures.

• 1220

Comme je l'ai dit, je considère les milieux de la recherche scientifique comme un élément essentiel d'un grand nombre de choses que nous considérons d'une importance primordiale pour la société canadienne, c'est-à-dire notre système de soins de santé, la prestation de soins de santé de qualité et notre système d'éducation. Mais n'ayons pas peur des mots; cela peut aussi avoir un très grand impact économique.

Je suis conscient que la plupart d'entre vous ne savent pas nécessairement ce qui se passe dans un laboratoire de recherche, et je suppose que la faute nous en incombe parce que, en tant que chercheurs, nous ne vous avons pas suffisamment renseignés. Mais pour effectuer des travaux de recherche, il faut des chercheurs. Donc, on pourrait dire que 70 p. 100 des 100 000 $ destinés à financer la recherche servent à créer des emplois haut de gamme à forte intensité de connaissance, jugés intéressants dans toutes sortes de secteurs.

Il est donc avantageux sur le plan économique de soutenir cette activité au Canada, et c'est vraiment ce que je tiens à souligner. Je constate que l'entreprise industrielle au Canada risque d'être marginalisée. En tant que chef de département, j'ai des contacts avec des étudiants du 1er et du 2e cycles, et je m'inquiète de plus en plus de la diminution constante du soutien à la recherche. En général, cela a pour effet de démoraliser les nouveaux membres du corps enseignant et les nouveaux chercheurs qui débutent dans leur carrière. Ils constatent qu'il est de plus en plus difficile de mettre en valeur leur potentiel, et c'est pourquoi ils s'en vont à l'étranger.

Une autre tendance que j'observe, c'est qu'un nombre grandissant de jeunes, très brillants, décident de ne pas se lancer dans ce secteur parce que les perspectives d'avenir ne leur semblent pas aussi prometteuses qu'elles pourraient l'être. Ces jeunes vont parfois travailler dans d'autres secteurs, ce qui signifie au moins qu'ils sont encore au Canada, mais il arrive plus souvent qu'ils quittent le pays, et j'estime que c'est une tragédie. Nous devons être conscients de ces occasions ratées.

Selon moi, nous pouvons au Canada faire fond sur ce que nous avons déjà, c'est-à-dire des chercheurs et une infrastructure de recherche de haut calibre qui ont besoin de soutien. Ils peuvent contribuer à l'avancement de notre société à plusieurs égards. Ce n'est pas par hasard que nous disposons de soins de santé de grande qualité dans des secteurs où il s'effectue de la recherche de haut calibre, grâce à un financement adéquat parce que les médecins et les professionnels de la santé ne sont pas différents des autres—ils veulent être à l'avant-garde; ils veulent être là où la connaissance est générée, ou autrement dit au coeur de l'action.

Nous devons donc examiner le problème dans une perspective globale, et je me rends compte que d'une petite partie de cette perspective; mais je tiens à m'assurer que tout le monde comprend bien que les retombées de l'aide accordée au milieu de la recherche vont bien au-delà du simple soutien aux activités de recherche. Bien sûr, je pense que notre système scolaire dépend beaucoup du genre d'activités menées dans nos universités et des chercheurs qui y travaillent, et du fait qu'ils sont à l'avant-garde de leur discipline.

Comme je l'ai dit, je ne veux pas sous-estimer les retombées économiques découlant de la recherche. Notre milieu peut offrir des perspectives d'emploi et de formation incroyables et attirer le genre d'industries du savoir dont le Canada veut se doter pour l'avenir, car de toute évidence c'est la voie de l'avenir.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'exprimer mon point de vue.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci Pr Johnston.

J'aimerais demander à Suzan LeFort et à Ian Landry de présenter leur exposé.

M. Ian Tay Landry (Réseau anti-pauvreté): Je vous remercie de me permettre de prendre la parole devant cette assemblée.

Le Réseau anti-pauvreté réunit des personnes qui vivent ou qui ont vécu dans la pauvreté ainsi que des membres de la collectivité qui s'intéressent aux questions relatives à la pauvreté. Le budget préoccupe gravement le Réseau à de nombreux égards. Cependant, compte tenu du temps qui nous est accordé, nous avons choisi de mettre l'accent sur le Programme national de prestations fiscales pour enfants. Nous demandons que ce programme soit révisé.

Des transferts sont effectués d'un ordre de gouvernement à un autre, sans qu'aucun avantage réel n'en découle pour les gagne-petit et ceux qui touchent des prestations d'aide sociale, qui ne sont pas considérées comme un revenu. On exploite les enfants pour justifier et promouvoir ce genre de programme, qui répond à des objectifs administratifs et qui fournit un soutien direct uniquement à ceux qui font partie de la population active.

• 1225

Le programme national de prestations fiscales pour enfants est mal conçu lorsqu'il suppose l'appartenance à la population active. En fait, il fait une distinction entre les gagne-petit et les prestataires de l'aide sociale, ces derniers étant jugés comme étant moins méritants. Cette stigmatisation artificielle encourage la discrimination à l'égard des prestataires de l'aide sociale, ce qui contribue à détériorer encore davantage leur niveau de vie.

Mme Susan LeFort (Réseau anti-pauvreté): Les initiatives de lutte contre la pauvreté infantile suppose que les prestataires de l'aide sociale ne sont pas en mesure de prendre soin de leurs enfants et qu'on ne peut être sûr qu'ils vont utiliser ces fonds pour leurs enfants. Or, nous estimons que cette attitude est tout à fait choquante.

L'information sur la page Web et l'information diffusée à l'échelle nationale par le programme national de prestations fiscales pour enfants établit une distinction entre les gagne-petit et les bénéficiaires des programmes de soutien du revenu et d'aide sociale. On établit une distinction donc entre les pauvres méritants et ceux qui ne le sont pas, et c'est du dénigrement.

Cela nous préoccupe beaucoup, parce que nous avons exercé beaucoup de pressions auprès de l'administration locale et du gouvernement provincial au ministère des Services communautaires, et on nous a dit que le gouvernement fédéral avait interdit au gouvernement provincial de dépenser cet argent directement pour améliorer les programmes sociaux et bonifier les prestations d'aide sociale. Ils doivent l'enlever aux assistés sociaux. C'est ce qu'on m'a dit dans une lettre que j'ai reçue de Francene Cosman. Elle a dit que si les provinces voulaient obtenir cet argent, elles devaient enlever aux assistés sociaux un montant équivalent et le réinvestir.

Les bénéficiaires de l'aide sociale ont peu accès à ce fonds de réinvestissement. Tout le programme de prestations est censé soutenir les familles pauvres et renforcer l'unité familiale. Donc pourquoi un programme conçu pour aider les enfants pauvres met-il l'accent sur l'appartenance à la population active? C'est une erreur de conception.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je donne maintenant la parole à M. Juan Telez et à Margaret Tusz de l'Atlantic Popular Education Network.

Mme Margaret Tusz (Atlantic Popular Education Network): Les spécialistes en éducation populaire travaillent à titre d'animateurs et de conseillers auprès des particuliers et des collectivités, en se basant sur les besoins et les expériences des gens, pour améliorer leur compréhension de la société, et les aider à composer avec les différentes facettes de leur vie. Donc, notre travail consiste à renforcer les capacités de la collectivité. Cela comprend le développement des ressources humaines, la mise en valeur de l'identité culturelle et raciale, le développement économique, les questions relatives à la santé et à la sécurité, et l'habilitation des collectivités.

Notre travail s'effectue à l'échelle de toute la collectivité, sans égards au sexe, à la classe sociale et à la race, et il est fonction des besoins de l'ensemble de la collectivité. Nous estimons que le gouvernement est le moyen que se donne la société pour partager les ressources et les redistribuer équitablement de façon à répondre aux besoins fondamentaux de ses membres.

Il est décevant, et intolérable, de voir par exemple que des organismes de bienfaisance comme les banques alimentaires et les refuges s'acquittent de cette responsabilité collective à la place du gouvernement, avec pour seul financement celui que leur versent les rares philanthropes qui acceptent d'assumer cette responsabilité et de soutenir ces oeuvres.

Le gouvernement est responsable de la sécurité sociale, et cela comprend l'emploi, le logement et l'accès à l'enseignement et au développement. Le fait que plus de 5 p. 100 des clients des banques alimentaires dans la région d'Halifax aient un diplôme universitaire me force à remettre en question la décision du gouvernement de mettre l'accent sur les bourses d'étude, par exemple, sans instaurer d'autres programmes parallèles. Le gouvernement doit aider nos collectivités à développer leurs capacités pour aider tous les Canadiens à vivre dans la dignité. Le gouvernement doit améliorer la capacité de nos collectivités d'offrir à tous les Canadiens une vie bien remplie.

• 1230

M. Juan Telez (Atlantic Popular Education Network): Merci Margaret de m'avoir ouvert la voie, parce que je veux suggérer quelque chose que nous jugeons important.

Nous estimons qu'outre la dégradation de l'environnement, la désintégration des collectivités, sur les plans physique et spirituel, est un sujet de préoccupation critique. Notre Réseau propose que le gouvernement envisage de créer ou d'établir un fonds de renforcement des capacités communautaires.

Comme l'excédent de la caisse de l'assurance-emploi est le fruit des cotisations versées par les Canadiens, c'est-à-dire les employés, les employeurs et le gouvernement, il devrait servir à accroître la compétence des Canadiens par le renforcement des capacités des collectivités. Nous suggérons fortement qu'une partie de l'excédent de la caisse serve à créer ce fonds de renforcement des capacités.

Depuis deux ans, le renforcement des capacités des collectivités fait partie du mandat de DRHC. Selon ce qui a été observé dans les collectivités de la Nouvelle-Écosse, le ministère a déployé d'énormes efforts pour s'acquitter de son mandat, malgré des ressources financières insuffisantes, afin de répondre aux demandes des organismes communautaires. La création d'un fonds de renforcement des capacités permettrait de soutenir des initiatives communautaires, y compris des activités de formation et d'enseignement en développement communautaire, pour favoriser l'acquisition des compétences nécessaires dans le contexte de la mondialisation et d'une forte concurrence.

Nous soutenons également les initiatives communautaires destinées à améliorer l'économie locale et les ressources humaines; le leadership et le développement des compétences dans les collectivités; et le centre provincial de ressources en renforcement des capacités communautaires, afin que de nombreuses collectivités puissent avoir accès à l'information et partager leur réussite. Enfin, nous soutenons les initiatives communautaires qui mettent l'accent sur le développement de l'esprit d'entreprise et la mise en valeur de la main-d'oeuvre.

En Nouvelle-Écosse, le Fonds de renforcement des capacités communautaires pourrait appuyer les efforts des organismes de développement régional, le programme de formation en renforcement des capacités offert par différents établissements de la province, comme des collèges, des universités et des établissements privés, les nombreuses organisations communautaires de la province, ainsi que l'établissement d'un centre provincial de ressources en renforcement des capacités communautaires.

La Nouvelle-Écosse, et en fait toutes les provinces du Canada, devraient pouvoir déterminer les programmes et les initiatives nécessaires pour veiller à ce que les collectivités aient un meilleur accès aux ressources. Cette démarche s'impose si l'on veut délaisser le financement de projets à court terme en faveur d'un processus communautaire à long terme axé sur des objectifs holistiques, où les aspects économiques ne constituent qu'un élément des activités complexes de développement communautaire.

L'Atlantic Popular Education Network suggère que l'on crée un partenariat étroit entre DHRC et la division du DEC au ministère du Développement économique et du Tourisme de la Nouvelle-Écosse afin d'administrer ces fonds, en consultation avec les citoyens de la province s'intéressant au développement communautaire.

Depuis le début de la décennie, entre autres organismes, DHRC et la division du DEC du ministère du Développement économique ont joué un rôle clé en encourageant et en soutenant les initiatives de développement mises en oeuvre par des organismes communautaires. Ils méritent le soutien et les encouragements d'organisations comme la nôtre. Nous devrions permettre aux ressources gouvernementales et aux citoyens d'aider la Nouvelle-Écosse à se préparer à un avenir meilleur.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Telez.

J'aimerais maintenant accorder la parole à Jessica Squires et à Penny McCall-Howard, de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants.

Mme Jessica Squires (représentante des diplômés, Conseil national des étudiants diplômés, Fédération canadienne des étudiantes et étudiants): Merci. Je représente en quelque sorte deux groupes. Je vais faire un exposé au nom du Conseil national des étudiants diplômés, qui est le caucus des étudiants diplômés au sein de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants. Penny fera un exposé pour les sections de la Fédération qui représentent la Nouvelle-Écosse.

• 1235

Le Conseil national des étudiants diplômés de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants regroupe plus de 45 000 étudiants diplômés inscrits dans 22 établissements postsecondaires canadiens. En Nouvelle-Écosse, nous comptons des membres inscrits à l'Université Mount St. Vincent et au Nova Scotia College of Art and Design. Ces étudiants ont des intérêts en commun avec les étudiants diplômés du reste de la province ainsi qu'avec les autres étudiants de tout le Canada.

Les étudiants diplômés estiment qu'il faut prendre des mesures immédiates à l'égard de certaines priorités. Nous croyons comprendre que vous avez déjà entendu des représentants du Conseil national des étudiants diplômés à Ottawa ainsi qu'en Colombie-Britannique. Au cours de mon exposé, je mettrai l'accent sur des questions prioritaires pour les étudiants diplômés de la Nouvelle-Écosse, notamment certaines questions qui recouperont nécessairement d'autres priorités nationales.

Au sujet des paiements de transfert, les étudiants diplômés de la Nouvelle-Écosse sont d'avis que le comité et le ministre des Finances doivent reconnaître le besoin de prendre des mesures immédiates au titre des paiements de transfert aux provinces. Depuis 1995, des compressions de plusieurs de milliards de dollars ont été effectuées dans les programmes sociaux, de toute évidence pour réduire le déficit. Le déficit étant éliminé, notre intention est maintenant portée sur la dette. L'année dernière, on m'a demandé s'il fallait utiliser les soi-disant dividendes pour réduire les impôts ou améliorer les programmes. La réponse immédiate à cette question était, et demeure, que les dépenses sociales ont été comprimées pour réduire le déficit. Maintenant que le déficit n'existe plus, il est temps de rétablir le financement.

On reconnaît généralement que le déficit n'a pas résulté des dépenses sociales, mais plutôt de l'effet combiné de réductions d'impôt et de taux d'intérêt élevés. Il faut donc qu'il soit clair que les réductions d'impôt ne sont pas une bonne politique et qu'en plus, on a eu tort de faire des programmes sociaux des boucs émissaires; il faut maintenant se pencher sur la crise qui en a résulté. Il faut par conséquent immédiatement rétablir le financement des paiements de transfert.

Mais ce n'est pas la seule solution. Il faudrait sans doute reconnaître la situation unique de la Nouvelle-Écosse. L'an dernier, il y a eu en Nouvelle-Écosse 4 000 étudiants de plus en provenance des autres provinces que d'étudiants néo-écossais qui ont quitté la province. Ce déséquilibre crée un sous-financement de tout le système, puisque la formule de transfert est calculée en partie en fonction de la population de la province. La formule doit tenir compte du nombre d'étudiants inscrits et non de la population de la province.

Un troisième élément du problème apparaît alors clairement. Le gouvernement fédéral n'a aucune idée de la façon dont les paiements de transfert seront dépensés au niveau provincial. Le gouvernement fédéral doit immédiatement réaffecter l'emploi des fonds transférés à des programmes sociaux précis et négocier avec les provinces les méthodes grâce auxquelles on s'assurera que l'argent va bien là où il est censé aller.

Les compressions effectuées dans le financement ont nui les étudiants diplômés. Dans l'ensemble, ceux-ci paient des frais de scolarité plus élevés, sont plus endettés et ont davantage d'engagements financiers que les autres étudiants. En outre, la réduction du financement a eu pour effet de biaiser l'établissement des priorités au niveau des institutions en délaissant le financement des sciences sociales.

Au sujet du financement des conseils subventionnaires de la recherche, l'an dernier, on a fait bon accueil à l'injection d'argent dans les conseils subventionnaires, mais leur financement est encore en retard par rapport à d'autres pays développés et le financement des sciences sociales et des sciences humaines est toujours en retard sur celui des autres disciplines.

Le Conseil national des étudiants diplômés estime que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer en veillant sur la vitalité et le dynamisme de la recherche au Canada. Il a pour rôle, comme il se doit, de financer la recherche par l'intermédiaire des conseils subventionnaires.

Les conseils existent en partie pour veiller à ce que la recherche ne suive pas comme une girouette le vent capricieux du marché axé sur la rentabilité. Toute recherche est importante pour la vitalité du pays, et non seulement celle qui se traduit par des profits. Toutes les formes de recherche doivent être sur le même pied. Il est par conséquent nécessaire que le gouvernement fédéral joue un rôle important dans le soutien des domaines de recherche réputés moins rentables.

Nous nous sommes réjouis de voir que les fonds du budget fédéral de 1998 avaient été ramenés aux niveaux de 1994, mais votre comité ne doit pas considérer que c'est suffisant. C'est pourquoi les étudiants diplômés recommandent que tous les conseils subventionnaires retrouvent leur financement d'antan, et mieux encore, qu'on augmente les fonds dont ont vraiment besoin plus de 50 p. 100 des étudiants diplômés et du corps professoral en sciences humaines et sociales, dont le conseil subventionnaire, le Conseil de recherche en sciences humaines, n'a reçu que 12,27 p. 100 des fonds accordés l'an dernier à tous les conseils, avec encore moins cette année, soit 11,57 p. 100.

On ne saurait trop insister sur l'importance des sciences humaines. Il est important d'innover dans les domaines de l'éducation, des arts, de la culture, de l'économie, et de l'administration des affaires, par exemple. C'est indéniable. Dans l'ensemble, il faut augmenter le financement de tous les conseils, puisque c'est souvent uniquement grâce aux subventions qu'ils reçoivent des conseils que les étudiants diplômé peuvent continuer leurs études.

• 1240

Au sujet de la loi adoptée récemment qui interdit aux étudiants de faire faillite avant 10 ans après l'obtention de leur diplôme, je tiens à préciser qu'entre la création du Programme de prêts aux étudiants du Canada, en 1964, et mars 1996, des prêts de 12,1 milliards de dollars avaient été négociés par 2,7 milliards d'étudiants à temps plein. Les chiffres de 1995-1996 montrent que 88 p. 100 des prêts ont été remboursés depuis 1964 et que seulement 7 p. 100 des emprunteurs étudiants n'ont pas remboursé leurs prêts, et que nombre d'autres avaient d'autres difficultés de remboursement. Ainsi, en 1990-1991, 29 000 étudiants n'ont pas remboursé leurs prêts. En 1995-1996, 10 000 de ces mêmes étudiants avaient fini par rembourser leurs prêts au complet et 6 500 avaient recommencé leurs versements. Sur les 71 p. 100 qui ne remboursent pas leurs prêts, tous ne recherchent pas la protection accordée par la Loi sur la faillite.

D'après des chiffres récents d'Industrie Canada, il y a une augmentation des faillites, tant dans le secteur des prêts commerciaux que des prêts personnels. Selon une étude effectuée en 1998 pour Industrie Canada par Schwartz et Anderson, depuis 20 ans, le nombre de faillites personnelles a octuplé. Les raisons invoquées par les faillis n'ont toutefois pas changé. Les personnes cherchant la protection de la loi vivent des situations économiques très difficiles, ont de faibles revenus et peu de perspectives d'emploi. Les auteurs de l'étude concluent que les débiteurs actuels «ne semblent pas exploiter la législation sur la faillite pour s'exonérer de leurs dettes légitimes».

Le Programme canadien de prêts aux étudiants a été créé parce que les institutions financières refusaient de prêter de l'argent aux étudiants et parce que les étudiants moins nantis n'avaient donc plus les moyens d'étudier. Le projet de loi compromet ce principe. La faillite n'est pas une procédure amusante. Personne, pas même les étudiants, n'y a recours à la légère.

Nul n'a besoin de déclarer faillite s'il n'est pas endetté. Tant qu'on a la capacité financière de le faire, on rembourse le prêt, comme la loi l'exige. Les étudiants ont un fardeau de dettes parce que les programmes d'aide aux étudiants sont insuffisants, parce qu'il n'y a pas suffisamment de financement de la part du fédéral et des provinces, parce qu'il y a des frais d'usager pour l'éducation et parce qu'il n'y a pas suffisamment de subventions accordées en fonction du besoin des étudiants, de manière universelle, pour tout le pays. Toutes sortes de raisons empêchent les étudiants de rembourser leurs dettes: le chômage, les taux d'intérêt bancaire élevés et le manque d'intérêt manifesté par le fédéral et des provinces pour des programmes d'allégement de la dette.

On ne prend pas à la légère la décision de déclarer faillite. Cette procédure coûte au bas mot 1 600 $, prend au moins neuf mois et ne se fait pas dans la discrétion. Tous les créanciers de l'étudiant sont avisés de sa déclaration et de la possibilité de s'opposer à la libération du créancier. Pour déclarer faillite, une personne doit suivre une procédure longue et stressante et, comme je l'ai dit, cela lui coûtera environ 1 600 $.

Parmi les conséquences de la faillite, il y a un dossier de faillite conservé aux bureaux de crédit pendant environ six ans, et pour ceux qui déclarent plus d'une faillite, ce dossier est gardé en permanence. La question de la permanence de ce dossier est particulièrement importante pour les étudiants qui cherchent la protection de la Loi sur la faillite. Les conséquences d'une faillite comprennent aussi la difficulté d'obtenir une marge de crédit d'une institution financière.

Les députés et les sénateurs ont justifié l'interdiction de faillite de 10 ans en prétendant que la disponibilité de mesures d'allégement de la dette et la réduction des taux d'intérêt atténuaient les problèmes causés par les prêts étudiants. Pourtant, si le gouvernement avait pris des mesures adéquates pour aider les étudiants à rembourser leurs prêts étudiants ou à financer leur éducation, il n'aurait plus à imposer de restrictions sur les faillites. En outre, les nouveaux programmes de réduction de la dette et l'allégement des taux d'intérêt annoncés dans le budget de 1998 sont bien trop stricts et ne profiteront qu'à un petit nombre d'étudiants.

Dans sa configuration actuelle, le Programme d'allégement de la dette n'est offert aux débiteurs que cinq ans après qu'ils aient terminé leurs études. Quand on discute du moment où ce programme est offert, on voit qu'on n'a pas du tout tenu compte du fait que la plupart des problèmes de remboursement surviennent pendant les deux premières années après la fin des études.

Même s'il y a quatre fois plus de faillites personnelles que de faillites d'entreprise, les sommes en question sont beaucoup plus élevées pour les faillites commerciales que pour les prêts étudiants. En 1995, les faillites personnelles représentaient 3,6 milliards de dollars. Pour les sociétés, toutefois, il s'agissait de 5,3 milliards de dollars en dettes impayées. Sur les 3,6 milliards de dollars de dettes personnelles, seulement 70 millions de dollars, soit moins de 2 p. 100, se rapportaient à des dettes relatives à des prêts étudiants.

La faillite offre une protection financière pour les particuliers et les sociétés lorsque toutes les autres mesures et tous les autres moyens raisonnables de remboursement ont été épuisés. Si on refuse à un groupe l'accès à la protection contre la faillite, on enlève toute sa légitimité à l'ensemble des procédures de faillite. Les syndics de faillite, et même au bout du compte, les tribunaux, ont déjà la possibilité de refuser une déclaration de faillite, pour diverses raisons. Étant donné l'existence de ces mécanismes, l'interdiction de dix ans contre la libération des prêts étudiants est discriminatoire et renforce des stéréotypes erronés au sujet de la réputation des étudiants quant au remboursement de leurs prêts étudiants.

• 1245

Les modifications à la loi ont été apportées alors que rien ne prouve que les étudiants ont fait des déclarations fausses au sujet de leurs besoins financiers. Au lieu de cela, la nouvelle loi a dissuadé ceux qui ont besoin d'un prêt de commencer des études postsecondaires.

Quelques mots au sujet du fonds du millénaire. La Fédération canadienne des étudiantes et étudiants a décrié publiquement ce fonds, notamment parce qu'il sera administré par un conseil d'administration privé et que les bourses seront accordées en partie en fonction du mérite, plutôt qu'en fonction des besoins. En outre, pour les étudiants diplômés, les propositions actuelles ne prévoient pas que les étudiants diplômés auront droit à ces bourses, ce qui est un très grave problème.

Voici donc nos recommandations: que l'interdiction de 10 ans pour la libération des dettes de prêts étudiants soit révoquée. Que le fonds des bourses du millénaire soit administré par Développement des ressources humaines Canada et non par une fondation privée et qu'il soit transformé en un système de subventions en fonction des besoins auquel seront admissibles les étudiants diplômés; que le gouvernement fédéral porte les transferts de fonds aux niveaux de 1993, en tenant compte de l'augmentation démographique, de la population étudiante et de l'inflation; que les transferts de fonds fédéraux soient consacrés précisément à l'éducation postsecondaire et à d'autres programmes sociaux, sous forme d'un fonds réservé et contrôlé, inscrit dans une loi semblable à celle de la loi canadienne sur la santé; que le financement du Conseil de recherches en sciences humaines ou CRSH soit relevé à un niveau comparable à ceux des deux autres conseils subventionnaires, et que le financement de tous les conseils subventionnaires soit augmenté.

Merci beaucoup.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, Jessica.

Penny, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Penny McCall-Howard (Nova Scotia Component, Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants): Vous avez reçu notre mémoire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): En avons-nous copie?

Mme Penny McCall-Howard: Je crois que oui. Nous l'avons envoyée le 6 août.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous n'avons pas en mains votre mémoire, mais vous pourriez laisser une copie pour les députés, après la séance.

Mme Penny McCall-Howard: Je m'en excuse.

Je vais d'abord présenter mon organisme. L'élément provincial de la Nouvelle-Écosse de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants représente 7 500 étudiants de niveau postsecondaire fréquentant quatre établissements dans la province. Nous sommes inscrits à un large éventail de programmes et de disciplines et nous sommes des étudiants diplômés, professionnels, non diplômés, à temps complet, à temps partiel, avec expérience de travail et étrangers. Nos membres ont des origines variées et proviennent de milieux socio-économiques et familiaux différents. Nous appuyons et approuvons entièrement les opinions exprimées dans le mémoire national de la Fédération intitulé, «Réinvestir dans l'enseignement postsecondaire», qui vous avait été présenté plus tôt à Ottawa.

Il est particulièrement intéressant pour un étudiant de formuler maintenant des commentaires sur le processus budgétaire fédéral, parce que nous le faisons dans la foulée du dernier budget fédéral censé être le budget de l'éducation.

D'après l'analyse de ce budget de l'éducation faite par la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, on a fait des démarches très importantes en vue de privatiser dans l'effet le système d'éducation postsecondaire au Canada. J'aimerais réitérer les commentaires formulés par Marg Forbes, du Conseil scolaire, ainsi que par le réseau de lutte contre la pauvreté: Nous estimons que c'est là une façon de redistribuer les revenus de manière que les riches en reçoivent plus que les pauvres, qui en recevront de moins en moins, malgré qu'ils aient besoin de prêts et qu'ils cherchent une protection contre la faillite.

Mais revenons à la situation des étudiants en Nouvelle-Écosse. Les frais de scolarité de premier cycle et de deuxième cycle en Nouvelle-Écosse sont les plus élevés au pays. Pour le premier cycle, ils sont d'environ 3 900 $ et pour le deuxième cycle, d'environ 5 200 $.

En comparaison, le salaire minimum en Nouvelle-Écosse est l'un des plus bas au pays. De plus, le taux de chômage chez les jeunes dans la province est parmi les plus élevés. Enfin, les changements à la formule des paiements de transfert qui s'effectuent dans le cadre du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ont eu pour effet d'exacerber la crise de financement dans les établissements de la Nouvelle-Écosse, pour les raisons que vient de donner Jessica, notamment que le calcul est fondé sur la population et non sur le nombre d'étudiants, alors qu'il y a dans notre province un nombre élevé d'étudiants provenant de l'extérieur. Cela a donc accru encore davantage les frais d'études pour les particuliers, par un transfert du déficit public à l'endettement étudiant.

À l'origine, les transferts de fonds devaient servir à équilibrer la situation entre les provinces dites «nanties» et «moins bien nanties». Ce n'est plus le cas, certainement pas pour les étudiants de la Nouvelle-Écosse.

• 1250

Enfin, comme le TCSPS diminue la partie monétaire en offrant surtout des points d'impôt, les provinces moins bien nanties, telle la Nouvelle-Écosse, ont vu décroître encore plus leur capacité de financer adéquatement leurs programmes d'éducation, de soins de santé et d'aide sociale.

Les étudiants à travers le pays croient que le gouvernement fédéral n'a pas abordé le dilemme le plus urgent auquel ils sont confrontés. Les étudiants de la Nouvelle-Écosse se sont dits particulièrement déçus que le gouvernement ait qualifié son budget de 1998 de «budget de l'éducation», et espèrent que le budget fédéral de 1999 contiendra suffisamment de mesures s'attaquant à la dette étudiante et ses conséquences, soit la pauvreté étudiante.

Parlons un peu de l'augmentation du fardeau d'endettement étudiant. Le programme d'aide financière fédérale s'articule autour de prêts aux étudiants à faible revenu et d'octroi de crédits d'impôt aux étudiants et aux familles à revenu moyen supérieur et à revenu élevé.

La moitié des étudiants qui poursuivent des études postsecondaires doivent contracter un prêt dans le cadre du programme canadien de prêts aux étudiants pour avoir les moyens de payer leurs frais de scolarité, frais accessoires, livres, équipements et frais de subsistance. Dans les établissements de la Nouvelle-Écosse, par exemple au collègue universitaire au Cap-Breton, le taux de participation dépasse 90 p. 100, c'est-à-dire que neuf étudiants sur dix ont besoin d'un prêt étudiant pour financer leur éducation.

L'alourdissement du fardeau d'endettement a pour effet que de plus en plus d'étudiants quittent le collège et l'université avec des obligations qu'ils ne peuvent gérer, et ce avant même d'avoir commencé à chercher un emploi dans un contexte de rareté—Jessica vient de vous parler des conséquences pour les étudiants.

J'aimerais maintenant parler de la pauvreté étudiante. L'expérience des étudiants sur nos campus illustre bien comment la pauvreté augmente à un rythme inquiétant dans notre milieu. Les tendances à la mondialisation des dernières années ont engendré une course aux résultats financiers, parfois au dépens de programmes sociaux bâtis au fil de nombreuses années. Bon nombre de Canadiens auraient du mal à nommer une seule amélioration dans les programmes sociaux au cours des six dernières années. Ces mêmes gens pourraient cependant citer la longue liste des compressions qu'ont subi ces mêmes programmes. Il est intéressant de noter que la majorité des associations étudiantes canadiennes administrent maintenant des banques alimentaires.

Les coupures dans les paiements de transfert fédéraux et l'hésitation des gouvernements provinciaux à s'engager à mettre en place un système d'enseignement postsecondaire accessible et de haute qualité a préparé le terrain pour que les administrations universitaires partout au pays et dans la province refilent leur manque à gagner aux étudiants. Il n'est donc pas étonnant que les étudiants aient vu leurs dettes d'études s'accroître démesurément pendant qu'ils tentaient de survivre. Il est intéressant de noter que de plus en plus de diplômés du secondaire remettent en question la nécessité de poursuivre des études supérieures.

Par ailleurs, il existe de plus en plus d'étudiants adultes ou à temps partiel, dont plusieurs ont des responsabilités parentales, pour qui des dettes de 25 000 $ ou plus pourraient facilement rendre les études hors de portée. Il est important de signaler cela dans le contexte actuel, où l'on entend tous les jours aux nouvelles que nous entrons dans une nouvelle ère de l'information, dans laquelle tous auraient avantage à décrocher un diplôme universitaire ou collégial.

En retournant aux études, ces étudiants choisissent également de vivre dans la pauvreté pendant qu'ils obtiennent leur diplôme et, une fois diplômés, le marché les confronte à une longue lutte contre la pauvreté.

Les étudiants qui renoncent à un revenu pendant plusieurs années pendant qu'ils s'instruisent jouissaient auparavant d'un revenu moyen ou élevé, et s'attendent à retrouver une même qualité de vie après leurs études. Certaines données non scientifiques laissent cependant croire que ce modèle est nettement remis en question, puisque les diplômés tentent de sortir d'un endettement qui dépasse la moyenne nationale par habitant. De plus en plus d'emprunteurs étudiants ne peuvent se défaire des dettes auxquelles leurs études les ont enchainés.

Les étudiants à faible revenu poursuivent habituellement des études supérieures dans l'espoir de sortir du cycle de la pauvreté. Certains y parviennent; pour d'autres, la structure économique, politique et sociale à laquelle les confronte le système d'enseignement est pratiquement semblable à celle de l'extérieur, ce qui perpétue le cycle de la pauvreté.

Par exemple, je connais nombre d'étudiants qui doivent chaque semaine choisir entre l'achat de manuels scolaires ou l'épicerie. Si nous voulons vraiment que les gens s'instruisent, ce n'est pas nécessairement la meilleure façon de le faire.

De plus en plus d'étudiants refusent ou sont incapables d'assumer le fardeau d'endettement qu'il faut s'imposer pour entamer ou poursuivre des études. Les étudiants adultes ou hors normes sont particulièrement de ce nombre. Le régime actuel d'aide financière aux étudiants contribue très peu à prendre soin des étudiants qui ont des besoins d'étude particuliers et de ceux qui ont des responsabilités parentales ou qui appartiennent à des groupes historiquement défavorisés, ni à les protéger et à les soutenir. Il faudra sans doute plusieurs années avant que nous puissions constater l'ampleur des effets des coûts associés aux études sur les taux d'activité de la population active.

• 1255

De plus, l'étude de la Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes sur l'accessibilité des études postsecondaires dans les Maritimes, étude largement empirique publiée en 1997, soit l'automne dernier, soulève de vives inquiétudes sur l'aversion à l'endettement, ce qui révèle que ni la rémission de prêts ni l'augmentation de ceux-ci ne pourra régler la question du programme d'accessibilité.

Il est normal que les personnes pour qui un montant de 25 000 $ représente le revenu familial annuel soient découragées par la perspective d'encourir une telle dette; seules les bourses payables à l'avance peuvent régler adéquatement la question de l'aversion à l'endettement.

Les étudiants de la Nouvelle-Écosse connaissant de plus en plus le visage de la pauvreté. Ils n'ont qu'à regarder dans le miroir. Nous ne connaissons pas de statistiques démographiques précises sur le taux d'étudiants vivant dans la pauvreté. Cependant, l'analyse de données non scientifiques pointe clairement vers une augmentation et un élargissement de la pauvreté depuis le début des années 90.

Notre mémoire comporte une section sur le calcul du seuil de faible revenu. Les seuils sont calculés à partir des Enquêtes sur les dépenses familiales menées par Statistique Canada. La principale conclusion de cette partie de notre mémoire, c'est que le seuil de faible revenu, en tenant compte des frais de scolarité, laisse un manque à gagner de 13 173 $ par personne. Avec une contribution maximale du Programme canadien de prêts aux étudiants de 10 500 $, une personne indépendante se retrouve à 80 p. 100 du seuil de la pauvreté. Pour un ménage de deux personnes, on baisse à 67 p. 100 et pour une famille de trois personnes, à 57 p. 100, etc.

Ces chiffres sont tirés de ceux du gouvernement et les limites pour le Programme canadien de prêts aux étudiants sont fixées par un autre ministère du gouvernement; il faut en conclure qu'il y a une politique très réelle selon laquelle pendant leurs études, les étudiants doivent vivre dans la pauvreté.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Pourriez-vous résumer votre conclusion? Il nous reste encore un témoin.

Mme Penny McCall-Howard: Je continue: la pauvreté et la santé sont corollaires. La politique selon laquelle, en Nouvelle-Écosse, ceux qui bénéficient de prêt étudiant n'ont pas droit aux prestations sociales ne fait qu'exacerber le problème.

Au sujet de la nécessité des subventions, la dette étudiante est un obstacle à l'accessibilité et les niveaux d'aide financière étudiante sont synonymes de pauvreté pour les étudiants au Canada. La seule conclusion possible est que pour répondre aux besoins de tous les Canadiens, le Programme canadien de prêts aux étudiants soit remplacé par un système de subventions fondé sur les besoins. Le gouvernement fédéral doit agir immédiatement et remplacer le Programme canadien de prêts aux étudiants actuel par un système de subventions payables d'avance et fondé sur les besoins, qui soit exhaustif, qui émane du fédéral et qui soit géré par le gouvernement. Les niveaux d'aide financière étudiante ne sont pas adéquats et il ne s'agit pas non plus d'augmenter les ressources sous forme de prêts. L'augmentation des fardeaux d'endettement n'est pas la solution.

Un programme de subventions pancanadien destiné aux étudiants doit être axé sur l'élargissement des programmes de Bourses d'étude du Canada et de Bourses du millénaire existants. Les sommes devraient être octroyées sous forme de subventions, c'est-à-dire en fonction des besoins et non du mérite. Les étudiants diplômés devraient avoir droit aux bourses et le fonds devrait être entièrement géré par Développement des Ressources humaines Canada dans le cadre du système d'aide financière aux étudiants existant et non par un conseil d'administration privé.

Pour résumer nos recommandations au sujet de l'aide financière aux étudiants: il faut abolir la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire ou la remplacer par un système de subventions national fondé uniquement sur les besoins et géré par le gouvernement dans le cadre d'un système intégré d'aide financière aux étudiants.

Il faut abroger la règle interdisant pendant 10 ans que les prêts étudiants soient admissibles en cas de faillite. Il faut abroger la disposition permettant au Gouverneur en conseil de prendre des décisions sur l'admissibilité des étudiants au Programme canadien de prêts aux étudiants et faire en sorte que l'admissibilité d'une étudiante ou d'un étudiant à ce programme ne soit évaluée qu'en fonction de son revenu.

Il faut prévoir des modalités exhaustives visant à aider les étudiants qui éprouvent des difficultés à rembourser leurs prêts étudiants, notamment une réduction de dette au cours des deux premières années de remboursement. Il faut abolir le partage de risques entre le Programme canadien de prêts aux étudiants et les établissements de crédit et interdire à ces établissements d'imposer un taux préférentiel majoré de 5 p. 100 aux prêts étudiants.

• 1300

Il y a d'autres problèmes associés au sous-emploi actuel des jeunes et nous avons des recommandations à ce sujet. Il faut éliminer la mesure régressive calculant les revenus gagnés en cours d'études pour les étudiants qui travaillent—on ne vous accorde que 80 p. 100 des besoins évalués dans votre prêt et tout revenu que vous gagnez pour compenser, sera soustrait du prêt de l'année suivante. Il faut reconnaître que tous les paliers de gouvernement ont un rôle à jouer par des mesures directes et indirectes de création d'emplois. Il faut réinvestir dans l'emploi du secteur public et fixer des objectifs pour réduire le chômage et créer en consultation une norme exhaustive sur la création d'emplois.

Notre conclusion, en terminant, c'est qu'il est immédiatement nécessaire d'adopter des normes pancanadiennes pour freiner ce que nous jugeons être l'érosion du réseau d'enseignement postsecondaire public au Canada. Les graves compressions des paiements de transfert aux provinces ont contribué directement à alourdir d'une manière intolérable le fardeau de la dette des étudiants. Cet alourdissement du fardeau de la dette a en outre été exacerbé par les niveaux élevés de chômage chez les jeunes, et les étudiants sont particulièrement vulnérables aux problèmes humains que causes les compressions fédérales.

Le gouvernement fédéral doit prendre l'engagement d'établir des principes pancanadiens pour garantir cinq normes fondamentales: l'administration publique, l'accessibilité, des programmes complets, la transférabilité et la mobilité. Ces normes n'empiéteront pas les compétences provinciales mais garantiront que les services pour lesquels paient tous les Canadiens sont accessibles pour chacun d'entre eux.

Nos dernières recommandations pour la création de normes pancanadiennes: porter les paiements de transfert aux provinces aux niveaux de 1993-1994 ou plus et les assortir de conditions afin que les provinces consacrent cet argent à des programmes précis; abolir le Transfert social canadien et la pratique qui consiste à faire des transferts en bloc pour la remplacer par des paiements distincts et spécialement versés aux provinces pour les programmes sociaux, y compris l'enseignement postsecondaire; et négocier avec les provinces et les territoires afin d'établir des critères clairs et applicables pour l'acceptation des transferts, y compris toute disposition accordant un droit de retrait. Ces critères doivent figurer dans une loi semblable à la Loi canadienne sur la santé.

Des normes pancanadiennes d'administration publique, d'accessibilité, de programmes complets, de transférabilité et de mobilité doivent être établies pour le réseau de l'enseignement postsecondaire au Canada. Ces normes doivent garantir que chaque Canadien, quelle que soit son origine ou son lieu de résidence, ait accès à ces services et à ces protections, afin que nous puissions tous contribuer à la société canadienne.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup.

Le dernier et non le moindre, et je m'excuse pour le retard, M. Holloway de la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse.

M. Les Holloway (vice-président général, Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse): Vous n'avez pas besoin de vous excuser. J'ai trouvé cela très intéressant. En réalité, pendant que j'écoutais les deux intervenants précédents, je me disais qu'il devrait y avoir plus de jeunes ici, des gens moins âgés, et je m'inclus dans cela, aussi j'ai beaucoup apprécié la majeure partie de leurs présentations de même que quelques autres.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Ne laissez pas les cheveux gris...

M. Les Holloway: J'espère que je n'ai rien fait non plus pour détourner Paul de son jeu vidéo. Je sais que certaines des choses qui ont été dites l'ont détourné de son jeu. Je sais qu'on peut y revenir—le mien est comme cela aussi—vous pouvez quitter le vidéo et y revenir. Peu importe, ne vous en offusquez pas.

Je voudrais d'abord dire au nom de la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse que je suis heureux de pouvoir me présenter devant le Comité permanent des finances dans le cadre des consultations prébudgétaires.

Il est malheureux que nous ayons reçu l'invitation à comparaître devant le comité si tard. Je pense sincèrement qu'un processus de consultation c'est plus que de pouvoir se présenter devant un comité; c'est aussi de pouvoir être informé, de pouvoir comparaître et de pouvoir se présenter en le sachant un peu d'avance. Nous avons reçu l'avis le 24 septembre, ce n'est pas suffisant. Je voulais donc le mentionner, et c'est inscrit dans notre mémoire.

Je passerai brièvement en revue le mémoire et j'essaierai de ne pas faire trop de commentaires connexes, mais je ne le garantis pas.

Il semble assez probable que le budget fédéral de 1999-2000 présente un excédent financier. Ceci résultera des hypothèses volontairement conservatrices que le ministre des Finances a utilisées dans la planification financière, en combinaison avec une expansion économique et une augmentation des emplois, même si la plupart sont des emplois peu intéressants, à faible salaire, et qu'il n'y a pas assez d'emplois.

• 1305

Dans ce budget, le gouvernement sera en mesure d'affecter d'importantes nouvelles ressources aux secteurs prioritaires, et il devrait y avoir un débat public majeur sur ce que devraient être ces priorités. Nous croyons que les priorités les plus pressantes pour le gouvernement fédéral devraient être les suivantes: création d'emplois, plein emploi, éradication de la pauvreté et de l'inégalité, réaménagement des programmes sociaux et des services publics et équité en matière d'impôts. S'il veut s'attaquer à ces priorités, nous suggérons au gouvernement fédéral d'investir l'excédent dans les programmes publics qui font la promotion à long terme de nos objectifs sociaux et économiques et qui soutiennent l'élan en matière de création d'emplois.

Par le passé, la fédération a fait des représentations devant le présent comité et a soutenu que le gouvernement fédéral devrait établir des objectifs clairs en matière de création d'emplois, de même qu'en ce qui concerne les objectifs fixés par le ministre des Finances en ce qui a trait au déficit, à la dette et à l'inflation.

Au cours des dernières années, nous avons appuyé de tout coeur l'approche mise de l'avant dans l'Alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral. Document produit par le Centre canadien de politiques alternatives, l'Alternative budgétaire contient un engagement envers le plein emploi.

Il propose aussi un large éventail de politiques pour atteindre les objectifs en matière d'emploi, notamment de faibles taux d'intérêt, un accroissement de l'investissement public, des programmes de création d'emplois dans le secteur de l'environnement, ainsi que l'appui à une proportion plus grande d'investissements privés par l'entremise du soutien au développement économique communautaire, d'une banque d'investissement public, et d'autres initiatives. Ces propositions demeurent très pertinentes pour le budget à venir.

Sur le plan des emplois, une question importante pour la région de l'Atlantique est la nécessité d'une politique relative à la construction des navires. Les premiers ministres des quatre provinces de l'Atlantique ont rappelé au gouvernement qu'il était nécessaire de prendre des mesures sur cette question; le gouvernement fédéral n'a rien fait sur ce point. Lorsqu'ils se sont rencontrés plus tôt cette année, la conférence des premiers ministres du Canada a prêté son appui à la nécessité que le gouvernement fédéral agisse sur la question de la politique nationale relative à la construction de navires. Si on veut s'attaquer à la situation financière, la création d'emplois—de bonnes politiques économiques solides qui créent des emplois—est une façon d'y arriver.

Si vous lisez les journaux, vous voyez que le gouvernement provincial s'oriente déjà dans cette direction, mais, sans le soutien de gouvernement fédéral, il est impossible de développer cette politique pour lui donner l'ampleur dont ont besoin les provinces de l'Atlantique, la Colombie-Britannique, le Québec et certaines régions de l'Ontario. Lorsque nous parlons d'une politique relative à la construction, c'est un exemple de quelque chose qui peut être fait relativement à la création d'emplois.

Le taux de sous-emploi est deux fois plus élevé dans les provinces de l'Atlantique. Dans bien des régions du pays, le taux des jeunes sans emploi est toujours de 15,7 p. 100. Un bon nombre de travailleurs, en particulier les femmes, les minorités visibles, les personnes handicapées et les autochtones, sont encore incapables de trouver des emplois à plein temps, permanents et raisonnablement rémunérateurs.

Les niveaux de sous-emploi se traduisent par de hauts taux d'emplois à temps partiel, bien involontaires, et la croissance rapide du nombre de travailleurs autonomes à faible revenu demeure très élevée. Bref, la crise de l'emploi est encore une réalité très présente pour les personnes qui travaillent. Encore une fois, nous recommandons que le gouvernement fédéral prenne un engagement sérieux dans le sens du plein emploi.

En plus des objectifs de réduction du nombre de sans-emploi, il dit y avoir des objectifs d'éradication de la pauvreté et de l'inégalité au Canada. Nous pensons que l'une des mesures que devrait prendre le gouvernement fédéral en ce sens serait de retirer son appel au Tribunal canadien des droits de la personne concernant la décision relative à l'équité salariale et de verser aux milliers de femmes qui travaillent pour le gouvernement fédéral l'argent qui leur est dû.

Nous sommes très déçus du peu de mesures relatives aux soins de santé contenues dans le présent budget fédéral. Nous demandons instamment au comité de demander au gouvernement Chrétien de convoquer un sommet national sur les soins de santé, comme nous l'a proposé publiquement la Coalition canadienne pour la santé, le 17 juin.

Nous croyons qu'une autre priorité du prochain budget devrait être de restaurer et d'accroître les dépenses fédérales relatives aux soins de santé. Les coupures importantes réalisées dans les transferts du fédéral aux provinces ont provoqué des réductions destructrices de la part des gouvernements provinciaux dans le domaine des services de santé, notamment l'hospitalisation, et ont considérablement amoindri la possibilité pour le gouvernement fédéral de faire respecter des normes nationales comme le veut la Loi canadienne sur la santé. On prépare le terrain pour la privatisation et le démantèlement des régimes d'assurance-maladie. Il est impératif de mettre au rancart le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et de réintroduire un programme de transfert distinct pour les soins de santé de façon à maintenir le rôle du fédéral. De plus, les transferts de fonds pour les soins de santé doivent être augmentés de façon significative.

Le prochain budget doit aussi les jeter les bases d'un programme national de soins à domicile pour les personnes âgées. Un programme de ce genre devrait être conçu et financé conjointement avec les provinces, en utilisant les normes nationales jointes au financement fédéral. Le gouvernement a déjà pris un engagement de principe pour un tel programme, reconnaissant que les soins aux personnes âgées représenteront un défi important au cours des prochaines décennies en raison du vieillissement de la population. Si un programme public n'est pas mis en place, les coûts croissants des soins aux personnes âgées rejailliront sur les familles, particulièrement les femmes, et la qualité des soins ne sera pas garantie. Un programme national est aussi nécessaire pour réduire le coût total des soins de santé par la mise sur pied d'une alternative réelle aux soins institutionnels.

• 1310

Dans le secteur des soins de santé, une autre priorité consiste à restaurer le financement de la Direction générale de la protection de la santé.

Une autre priorité pour le gouvernement devrait être de s'occuper des questions relatives à l'assurance-emploi et au surplus de l'assurance-emploi. L'utilisation de l'excédent de 20 milliards de dollars de l'assurance-emploi, qui s'est accumulé au cours des cinq dernières années, pour payer le déficit a imposé un fardeau énorme à des centaines de milliers de travailleurs et à leurs familles. Et, comme si la perte d'un emploi n'était pas suffisante, en raison des récents changements apportés à l'assurance-emploi, près des deux tiers des personnes sans emploi n'obtiennent pas la protection pour laquelle ils ont payé. Il y a plus d'argent dans le surplus de l'assurance-emploi que ce qui est versé aux sans-emploi en prestations régulières.

Au cours de la présentation précédente, on a suggéré que le surplus de l'assurance-emploi pourrait être utilisé pour la pauvreté chez les enfants. À mon avis, d'où viennent les enfants pauvres? Ils viennent des familles pauvres, et il y a beaucoup de familles pauvres créées par le présent gouvernement libéral, et avant eux par le gouvernement conservateur, en raison des coupures énormes pratiquées dans le programme d'assurance-emploi.

On peut dire que la chose la plus sensée à faire dans tout ceci, c'est peut-être de restaurer le programme afin que l'on continue de verser des prestations appropriées en fonction des sommes d'argent payées par les employés et par les employeurs.

Mais en reconnaissance de la provenance des enfants pauvres... Je trouve toujours que c'est une conversation ahurissante. C'est comme si ces pauvres enfants flottaient quelque part et qu'ils n'étaient pas rattachés à des familles. C'est comme si nous n'avions qu'à nous occuper de la pauvreté des enfants au Canada, et cela n'a pas de sens, parce qu'ils viennent de familles pauvres et que ces familles pauvres ont été créées par de piètres politiques économiques et par des compressions comme celles du programme d'assurance-emploi.

La Fédération du travail s'oppose au projet du gouvernement fédéral d'utiliser l'argent de l'assurance-emploi pour réduire les impôts, pour l'appliquer à des programmes gouvernementaux ou pour diminuer le déficit fédéral. Ici encore, tel que proposé dans l'Alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral, le prochain budget devrait introduire des améliorations majeures au système d'assurance-emploi, le rebâtir en tant que programme efficace de sécurité du revenu pour les travailleurs qui se retrouvent involontairement sans emploi. Le soutien au revenu pour les cours suivis dans le cadre du programme d'assurance-emploi, réduit de près des deux tiers ou 700 millions de dollars sous le présent gouvernement, devrait être restauré et amélioré. La réduction des cotisations ne devrait pas être envisagée tant que le programme n'aura pas été reformulé.

La fédération croit toujours fermement que les travailleurs et les employeurs devraient continuer de collaborer étroitement à l'élaboration des orientations du programme d'assurance-emploi.

Alors que le gouvernement a amplement parlé de l'importance d'investir dans l'éducation et dans l'acquisition de compétences et qu'il a posé certains gestes pour soutenir l'éducation post-secondaire dans son dernier budget, les dépenses directes du gouvernement fédéral en matière de formation ont été éliminées, et les dépenses totales du gouvernement fédéral pour la formation dans le cadre du programme d'assurance-emploi ont été réduites de moitié.

Le transfert aux provinces de la plupart des grandes responsabilités en matière de formation est associé à un accroissement majeur de la privatisation et à une réduction significative des ressources pour les établissements d'enseignement public. Il est opportun que les provinces jouent un rôle important dans la conception et la prestation des programmes de formation, mais il est aussi important que le gouvernement fédéral continue d'accorder son soutien financier et qu'il établisse les grandes lignes de normes nationales. Le soutien du fédéral pour les programmes sectoriels de formation, conçus conjointement par les employeurs et les syndicats, est aussi important.

En ce qui a trait à l'éducation post-secondaire, l'augmentation écrasante des frais de scolarité, qui empêche un large accès aux gens qui travaillent, pourrait être freinée par une augmentation des transferts aux provinces, transferts effectués en vertu des conditions de la nouvelle législation qui fixerait des normes nationales. L'intérêt du gouvernement fédéral pour le rôle de l'éducation et des connaissances dans la construction d'une nouvelle économie doit se traduire par l'élaboration d'une stratégie claire en matière d'éducation et de formation dans le prochain budget, assortie de ressources réelles.

Pour contribuer au financement des initiatives que nous avons exposées ici, nous proposons des changements clés au régime fiscal. La part du fardeau fiscal payée par les sociétés, en particulier les grandes multinationales, doit être augmentée par le truchement de mesures comme un impôt minimum sur le revenu des sociétés et un impôt sur le transfert de la richesse. Les différents types de revenu, notamment les dividendes et les gains en capital, doivent être traités de la même façon par le régime fiscal, comme le recommandait la Commission royale d'enquête sur la fiscalité, dès 1967. Les taxes à la consommation, comme la TPS et les frais modérateurs dont le fardeau touche injustement les salariés à faible et à moyen revenu, doivent être réduites, sinon éliminées.

• 1315

Si je peux prendre une ou deux secondes concernant la question des impôts, nous entendons constamment parler du débat entourant la réduction des charges sociales. Au même moment, nous constatons une accélération des taxes à la consommation. La TPS est un exemple flagrant de cela. La forme de taxation la plus injuste que peut avoir un pays est la taxe à la consommation, car ceux qu'elle touche le plus, ce sont les petits salariés. Puis on dit qu'il n'y a pas de nouvelles taxes, pour utiliser un vieux cliché des amis de l'aile droite de quelqu'un qui est ici. Bien, il n'y a pas de nouvelles taxes, mais nous voyons constamment s'accroître les frais modérateurs, donc il y a en conséquence une augmentation des taxes. Ces taxes touchent dans une plus large mesure les familles à faible revenu.

Aussi, lorsque nous parlons de réduction d'impôt, peut-être que nous devrions parler de nous débarrasser des taxes injustes comme les taxes à la consommation, la TPS. Nous devons créer un régime fiscal plus équitable.

Pour conclure, la fédération attire à nouveau l'attention du comité sur les recommandations et les priorités de l'Alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral, qui représente un large consensus parmi un vaste éventail d'organisations populaires. Les priorités centrales du nouveau budget devraient être la création d'emplois, les soins de santé, l'éducation, l'amélioration des programmes de sécurité du revenu et la formation. Dans tous ces domaines, le gouvernement fédéral peut et doit jouer un véritable rôle de chef de file. Le surplus important que l'on connaît présentement doit être utilisé pour soutenir ce rôle de chef de file avec de nouveaux investissements majeurs.

Je vous remercie, c'était notre présentation.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Holloway.

Nous allons maintenant passer aux questions des membres. Je demanderais à M. Forseth du Parti réformiste de commencer s'il vous plaît.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Merci beaucoup.

Est-ce que Mme Margaret Forbes de la Nova Scotia School Boards Association est déjà partie?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Oui, elle devait partir.

M. Paul Forseth: Je poserai alors une question à Mme MacDonald.

À la dernière page de votre mémoire, il y a une phrase qui dit: «L'automne dernier, un sondage national a démontré que près de 70 p. 100 des Canadiens croient que la faim chez les enfants est plus importante que l'unité nationale et le déficit.» Je me demande si vous avez une référence indiquant quel était ce sondage. Si vous ne l'avez pas ici, peut-être que vous pouvez me la faire parvenir.

Mme Mary Jess MacDonald (deuxième vice-présidente, Nova Scotia School Boards Association): Non, je ne l'ai pas ici, mais je peux l'obtenir.

M. Paul Forseth: Oui, si vous pouviez nous fournir cette indication.

Il ressort de la principale recommandation de votre mémoire que vous aimez beaucoup le programme de prestations fiscales pour enfants. Vous êtes très positive et vous croyez que c'est bien, mais il y a toujours des injustices et des inconvénients à la mise en place d'un programme. Je me demande si vous êtes au courant de certains des problèmes découlant du programme de prestations pour enfants. Deuxièmement, savez-vous si une étude quelconque du type vérification de la valeur de l'efficacité du fonctionnement du programme de prestations pour enfants a été faite?

Mme Mary Jess MacDonald: En premier lieu, pour ce qui est du programme de prestations, nous croyons qu'il devrait être renforcé pour être plus affirmatif et plus dynamique dans sa façon de traiter le problème. Nous constatons qu'il ne touche pas les enfants dont les familles ne peuvent pas trouver de travail, et nous croyons qu'il s'agit là d'une lacune du programme. Pour ce qui est de vous fournir une référence, probablement que je pourrai vous la faire parvenir aussi.

M. Paul Forseth: L'autre partie de la question visait à savoir si, à votre connaissance, une étude avait été menée pour vérifier l'utilité réelle du programme de prestations pour enfants. Répond-il en bonne partie aux objectifs établis? Savez-vous s'il y a eu une étude de ce genre?

Mme Mary Jess MacDonald: Non, je ne sais pas.

M. Paul Forseth: Bien. Êtes-vous au courant de certaines des difficultés que vivent les familles qui se disputent la garde et la résidence principale au moment d'une séparation ou d'une dissolution, et de la façon dont la prestation est imbriquée dans cette situation particulière?

Mme Mary Jess MacDonald: Oui, nous avons eu des discussions à ce sujet, mais nous n'en parlons pas dans le mémoire.

M. Paul Forseth: D'accord, merci.

Mme Mary Jess MacDonald: Sur ce point, en référence au programme de prestations et à la stratégie de réinvestissement de la province, nous constatons que la plupart des gens, y compris nous-mêmes, ne comprennent pas vraiment. Ils ne savent pas en quoi consiste le réinvestissement, en particulier dans notre province.

• 1320

M. Paul Forseth: Très bien, merci beaucoup.

Je voulais revenir aux présentations des étudiants. Manifestement, la demande est claire, mais j'aimerais vous entendre dire quel devrait être, selon vous, le rôle de la responsabilité personnelle pour ce qui est de la participation aux frais de scolarité et aux frais de subsistance directement à partir d'un emploi. Historiquement, dans le contexte canadien, pour ce qui est du développement des universités au Canada—et nous avons de très vieilles universités—l'histoire a toujours été la même pour les étudiants depuis avant la Confédération pour ce qui est d'être en mesure d'obtenir des fonds pour aller à l'université. Au Canada, ce n'est pas un nouveau problème. Mais les gouvernements ont accordé de plus en plus de soutien aux étudiants, directement ou indirectement. Je me demande seulement ce que vous pensez de l'idée que les étudiants ont la responsabilité de fournir leurs propres ressources, qu'elles proviennent d'un emploi ou d'ailleurs.

Puis, en ce qui a trait plus directement à votre recommandation concernant les bourses ou une amélioration de la situation relative aux prêts, avez-vous considéré la question de la déclaration de revenus? Vous recommandez que l'on considère plutôt le besoin que le mérite pour l'octroi des bourses. La déclaration de revenus elle-même est utilisée comme un outil pour générer les critères relatifs au besoin. C'est aussi un outil pour le remboursement afin que le remboursement soit basé sur la capacité de payer, en particulier par le truchement de cet instrument qu'est le formulaire d'impôt.

Je vous laisse avec ces quelques points, et vous pouvez essayer d'y répondre.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Jessica Squires, aimeriez-vous répondre à ces questions?

Mme Jessica Squires: Oui.

Concernant votre première question au sujet de ce que nous pensons quant à la responsabilité de l'étudiant d'assurer une part du fardeau du coût de l'éducation, nous pensons la même chose que tout le monde au Canada. Le Canada doit être capable de financer le système d'éducation post-secondaire, et les étudiants veulent y contribuer, mais ils veulent le faire par l'entreprise du régime fiscal. Le régime fiscal existe pour financer les programmes sociaux, et cet aspect du coût de l'éducation serait de son domaine.

M. Paul Forseth: Pourriez-vous me donner quelques précisions? Qu'entendez-vous par régime fiscal? Voulez-vous dire que l'université devrait être gratuite?

Mme Jessica Squires: À long terme, c'est quelque chose que le pays devrait envisager. Je ne m'attends pas à ce que cela puisse arriver demain, ni même à court terme, mais il y a nombre d'exemples à l'échelle internationale de pays où l'éducation post-secondaire est gratuite et assortie de bourses. Dan l'OCDE, le Canada est unique pour n'avoir ni l'un ni l'autre, aussi je pense que c'est quelque chose que le pays doit examiner sérieusement.

Ce qui est clair à court terme, c'est que les étudiants paient un montant disproportionné du fardeau. L'augmentation des frais de scolarité a rendu le coût de l'éducation insoutenable, et les statistiques le confirment. À court terme, ce que le comité doit recommander au ministre des Finances, c'est que des mesures soient prises immédiatement pour diminuer les coûts de l'éducation par des bourses ou par d'autres moyens.

M. Paul Forseth: Je vais vous interrompre brièvement avant que vous répondiez à l'autre partie de la question. Avez-vous des données sur le pourcentage du coût annuel de l'éducation qui est fourni pour un étudiant universitaire, en moyenne? Que couvrent en réalité les frais de scolarité payés par les étudiants? Historiquement, c'est autour de 10 p. 100 ou 15 p. 100 du coût.

Mme Jessica Squires: Actuellement, la moyenne est d'environ 30 p. 100 ou 35 p. 100, et d'au moins 55 p. 100 ou 60 p. 100 dans certaines institutions post-secondaires. En Nouvelle-Écosse, il y a quelques institutions où les frais de scolarité constituent maintenant ce pourcentage des revenus des institutions. Les augmentations sont passées de la moyenne historique de 10 à 15 p. 100 à 35 p. 100.

M. Paul Forseth: D'accord, vous pouvez continuer et répondre à l'autre partie de la question.

Mme Jessica Squires: Très bien, l'autre question avait trait au fait de considérer la déclaration d'impôt sur le revenu comme une méthode permettant de déterminer le besoin. Il y a deux problèmes ici. Le premier, c'est que nous payons déjà une partie de notre éducation post-secondaire par le biais des taxes. Je ne vois pas l'intérêt de payer deux fois ou de partager cela. Je crois que nous devrions simplement utiliser le régime fiscal pour financer davantage notre système actuel d'éducation post-secondaire.

• 1325

Cette idée comporte un autre problème, c'est que pour le moment, le régime fiscal n'est pas aussi progressif qu'il devrait l'être. Actuellement, il fait peser un fardeau disproportionné sur certains secteurs de la société.

M. Paul Forseth: D'accord, c'était la première moitié. La deuxième partie de la question a trait à la dette. Lorsque la dette des étudiants envers le gouvernement est élevée, est-ce que la déclaration de revenus elle-même pourrait être utilisée comme une méthode de paiement strictement basée sur la capacité de payer, peut-être en faisant une répartition sur une période de douze ans ou quelque chose comme ça?

Mme Jessica Squires: L'essentiel est que nous n'avons pas besoin d'un nouveau mécanisme de remboursement des prêts. Il faut plutôt s'attaquer à la dette des étudiants elle-même. Comme Penny l'a indiqué dans son mémoire, certaines études ont été menées dans les provinces Maritimes,—l'une d'entre elles a été réalisée par la Commission de l'enseignement supérieur des provinces Maritimes—qui montrent que les étudiants qui proviennent de milieux à faible revenu manifestent une aversion pour les dettes, ce que l'on appelle parfois en anglais le sticker shock. Ils décident de ne pas poursuivre d'études postsecondaires justement parce qu'ils craignent de ne pas être capables de rembourser leurs prêts. Et lorsque les prêts sont aussi élevés qu'ils le sont maintenant, à 25 000 $—ou même à quelque chose comme 10 000 $ ou 15 000 $—le seul fait de penser à accumuler une telle dette a un effet sur l'accessibilité.

Je pense que la possibilité d'utiliser la déclaration de revenus pour rembourser le prêt n'est qu'un autre rafistolage. C'est seulement quelque chose qui va dans le sens de certaines des mesures qui ont été introduites, mais qui ne réglera pas le vrai problème, à savoir que l'accessibilité est réduite. Aussi, en raison du problème des paiements de transfert, la qualité diminue en raison de l'ampleur des réductions imposées aux provinces.

M. Paul Forseth: Je ne sais pas si votre collègue aurait des commentaires additionnels à faire.

Mme Penny McCall-Howard: Je me ferais à coup sûr l'écho de la nécessité des transferts des paiements pour ce qui est de renforcer la qualité, et il y a un exemple que j'aimerais donner. À l'Université Dalhousie, au cours des dix dernières années, il y a eu une augmentation de 15 p. 100 du nombre de facultés et une diminution de 15 p. 100 du nombre d'étudiants. De plus, comme je l'ai mentionné, il y a eu une augmentation manifeste de l'utilisation des banques alimentaires par les étudiants et de l'incapacité pour les étudiants de vraiment étudier lorsqu'ils sont à l'école. Si vous placez les étudiants dans une situation où ils n'ont plus les moyens d'aller à l'école alors qu'ils sont aux études—ce qui constitue le cercle vicieux dans lequel plusieurs étudiants se trouvent—investir de l'argent en éducation est une pure perte. Vous placez des gens dans une situation où ils ne peuvent tirer profit du peu qui leur est donné.

Quant à votre question concernant le remboursement d'impôt, il est sûr qu'il y a un danger à fonctionner ainsi. Je ne comprends pas très bien les détails de ce que vous proposez. Ce que je comprends, c'est qu'il s'agit d'un système par lequel les prêts seraient remboursés au moyen de crédits d'impôt, ce qui faciliterait le remboursement des prêts pour ceux qui ont des revenus plus élevés. Ils pourraient rembourser plus rapidement car ils paieraient davantage d'impôts. Par ailleurs, ceux qui avaient les dettes les plus importantes et qui avaient le plus de difficulté à rembourser leurs prêts seraient encore plus pénalisés par une système comme celui-là.

Encore une fois, comme je n'ai pas les détails de ce que vous proposez devant moi, c'est un peu difficile de commenter. Ce serait ce que je vérifierais d'abord pour voir ce quÂil en est.

M. Paul Forseth: La proposition était directement à l'opposé de cela. Elle avait pour but de manifester une certaine compassion envers ceux dont les revenus sont limités, plutôt que pour ceux qui gagnent facilement leur vie et qui sont capables de bénéficier de crédits. C'est un système fonctionnant dans l'autre sens. Mais je vous remercie de vos commentaires.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Forseth.

Madame Redman, s'il vous plaît.

Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

J'aimerais poser une question au Dr Johnston. Je comprends que vous devez filer bientôt, aussi je vous poserai une question avant que vous ne partiez.

Il y a deux universités dans ma circonscription dans le sud de l'Ontario. Celles-ci se sont lancées à bras ouverts dans la R-D. Elles étaient vraiment satisfaites.

Je me concentre sur l'avant-dernier paragraphe de votre mémoire, qui parle de ne pas utiliser l'argent du gouvernement pour servir de levier à l'argent privé. La question que j'aimerais vous poser est celle-ci: si nous ne faisons pas cela, et si nous avons le courage de faire l'investissement, comment pouvons-nous déterminer quel est l'équilibre approprié? Quel est-il si, selon vous, vous avez déjà déterminé cela?

Dr Gerry Johnston: Parlez-vous de la question de savoir ce que devrait être l'amalgame privé-public?

Mme Karen Redman: Oui.

Dr Gerry Johnston: C'est une question difficile. Quelqu'un ici—je ne sais pas si c'était Jessica ou Penny—a dit que nous ne devions pas mener de recherches fondées sur sa rentabilité. C'est quelque chose qu'il faut absolument garder à l'esprit. La recherche en tant qu'activité vous donne souvent des réponses dont les directions sont très inattendues, aussi si vous pouvez prédire où vous devriez placer votre argent ou dans quel secteur vous devriez orienter vos efforts, ce serait vraisemblablement que vous connaîtriez déjà la réponse, vous ne faites pas vraiment avancer les choses.

• 1330

Je me demande comment répondre à cette question. Ma préoccupation, c'est que bon nombre de programmes... Par exemple, le Conseil de recherches médicales du Canada s'efforce, par l'entremise de Henry Friesen, d'accroître le bassin de ressources dont il dispose déjà grâce à l'endettement externe et au partenariat. Je dois admettre que je commence à réagir à ces termes plutôt négativement. Je pense que c'est une façon peu judicieuse de faire les choses. D'abord, cela se fait au détriment de certaines régions du pays, comme celle-ci. Dans le même ordre d'idées, le programme d'aide à l'innovation de la Fondation canadienne, qui dispose de fonds importants et qui a une raison d'être louable assortie de justes motifs, exige en pratique que 60 p. 100 de l'argent donné provienne d'autres sources.

Donc, si vous faites partie d'une grande institution qui dispose de fonds importants et qui a déjà des relations dans le secteur privé, vous êtes correct, peut-être. Mais si vous voulez vraiment vous assurer que vous avez une structure nationale pour ce genre d'activités universitaires... Je prends l'exemple ici de la Nouvelle-Écosse qui n'a pas beaucoup de ressources, nous sommes alors relativement désavantagés lorsqu'il est question de tirer parti de ce genre de ces programmes de partenariat.

Je pense que le gouvernement doit vraiment—je ne peux vous donner l'amalgame exact; vous allez devoir composer avec un large éventail d'opinions—examiner la façon dont il peut offrir la base ou la plate-forme qui, en retour, soutiendra ce genre de relations entre l'industrie, l'université et les instituts de recherche.

Bien franchement, les chercheurs—et je dis cela surtout pour ceux du domaine des sciences plutôt que pour ceux du domaine des sciences sociales et des sciences humaines—excellent à établir des maillages avec des entreprises privées et ainsi de suite, une fois qu'ils disposent de ressources suffisantes pour faire avancer l'initiative. En fait, il y a bien peu d'endroits où vous pouvez obtenir des rendements de 100 p. 100 ou de 200 p. 100 sur votre argent, et certainement que les efforts des universitaires, en particulier dans le milieu de la recherche biomédicale, en sont un exemple.

Certaines universités réussissent très bien, mais elles réussissent très bien parce qu'elles disposent déjà d'un ensemble de ressources pour commencer le processus. C'est bien, mais je pense que nous devons considérer cette question d'un point de vue national. Je pense que quelqu'un ici a fait remarquer que le rôle du gouvernement c'est vraiment de soutenir les besoins de la société—les filets de sécurité sociale et d'autres choses du genre. Je ne veux pas donner l'impression que je suis borné, mais les bourses d'étude qui existent présentement sont sûrement un exemple de ce qui doit être soutenu par le gouvernement.

Cette mesure a des retombées de toutes sortes, mais je prendrais plutôt en considération le fait qu'en tant que société, nous devons procéder ainsi pour que notre société avance et soit en mesure de se développer.

Mme Karen Redman: Je me demande si vous êtes d'accord avec l'un des arguments qui a été mis de l'avant. Le secteur de la R-D a fait du très bon travail l'an dernier en nous disant que ce n'était pas un secteur qui saignait, mais qui souffrait d'hémorragie, et que nous devions être attentifs. Je pense que le dernier budget a démontré que nous les avions écoutés.

Nous entendons aussi beaucoup parler de l'exode des cerveaux et du fait que nous ne pouvons probablement pas concurrencer les grandes institutions américaines et les salaires qu'elles offrent. Une partie du facteur d'attraction vers les États-Unis est aussi le milieu dans lequel ils évoluent, et c'est quelque chose qu'il ne faut pas négliger en tant que nation.

Dr Gerry Johnston: Absolument

Je parle de la communauté biomédicale, car je la connais bien. Ce qui fait que c'est peut-être à Toronto ou à Montréal que les soins de santé sont à la fine pointe n'est pas une coïncidence. Ce n'est pas parce que les gens veulent vraiment vivre dans le centre-ville de Toronto; c'est parce que c'est là que se trouve la plus importante communauté de soutien—les gens qui produisent le savoir et qui ont accès au savoir qui fait partie intégrante de ce milieu. De la même façon, c'est probablement parce que les petites villes ne peuvent pas compter sur une communauté pour soutenir les activités de recherche que la prestation des soins de santé n'est pas autant à la fine pointe, et que les gens vont ailleurs.

• 1335

L'exode des cerveaux est un réel problème, mais je ne suis pas d'accord avec vous et je pense que nous pouvons, en tant que pays, concurrencer les institutions américaines. En fait, dans les secteurs où nous disposons des ressources, nous nous en tirons très bien. Nous disposons de cerveaux et de ressources qu'il ne faut pas sous-estimer. Notre pays possède des ressources...

Mme Karen Redman: Quand je parle de concurrencer, je parle du plan financier, c'est-à-dire de pouvoir offrir les mêmes salaires.

Dr Gerry Johnston: Je ne pense pas que ce soit un problème. Si je faisais partie de ce milieu pour l'argent, je ne serais pas ici, parce qu'il n'y a pas d'argent dans la recherche. Nous faisons cela parce que nous aimons cela. Je suis passionné par ce que je fais et je continuerai de le faire quoi qu'il arrive, en dépit du manque de ressources.

Nous devons reconnaître qu'en tant que pays, à un certain point nous allons tomber en deçà d'une masse critique d'activités. Si cela se produit, nous aurons de gros problèmes, parce qu'il est facile de démanteler ce genre d'activités—on peut le faire en une année. Mais reconstruire tout cela prendra un temps incroyable. Alors, nous nous retrouverons en concurrence avec des ressources que nous sommes tout simplement incapables d'égaler. Il en va de même pour les étudiants et le processus éducatif, et la capacité pour les étudiants de fonctionner une fois qu'il sont passés dans le processus éducatif. C'est quelque chose que nous devons vraiment surveiller en tant que pays, parce que je pense que nous nous dirigeons vers la limite et il y a suffisamment de gens en politique qui reconnaissent qu'il faut mettre en pratique ce que l'on dit.

Mme Karen Redman: Hier à St. John, quelqu'un qui parlait du domaine médical a aussi parlé de la recherche virtuelle en médecine. Je me demande si vous pensez que les grands pas que nous faisons sur le plan technologique aident vraiment la recherche en général.

Dr Gerry Johnston: Je ne suis pas certain de bien savoir ce que cela veut dire—recherche virtuelle.

Mme Karen Redman: Je crois qu'il s'agit d'une équipe dont les membres travaillent dans des lieux différents et qui se transmettent des données.

Dr Gerry Johnston: On pourrait aller trop loin avec cela. Évidemment, cela permet d'élargir la base de ressources, mais rien ne remplace les interactions et les sentiments qui unissent une communauté qui est active. Nous ne pouvons qu'aller trop loin avec des entreprises virtuelles de toutes sortes. Je pense qu'il faut reconnaître que la recherche—la génération du savoir et toutes les choses du genre—relève grandement de la culture. Ce n'est pas uniquement une question de technologie. Les progrès technologiques peuvent être utiles, mais rien ne remplace une masse critique vivante au sein d'une communauté dans un endroit donné.

Mme Karen Redman: Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Il vous reste deux minutes, si vous voulez continuer.

Mme Karen Redman: J'ai l'impression d'avoir le vent dans le dos.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Non, non. Continuez. Vous avez encore du temps.

Mme Karen Redman: Merci.

Mme LeFort, je serais très intéressée à voir la lettre. Mon interprétation de ce que vous avez dit à propos de la prestation fiscale pour enfants était que les provinces étaient obligées de retirer ce financement.

Mme Susan LeFort: Oui. C'est exactement ce qui nous a été dit dans une lettre provenant de la ministre des Services communautaires. Elle disait que si nous voulions recevoir cet argent, nous devions signer une entente à l'effet de l'enlever des poches—elle n'a pas dit les poches—mais de le retirer aux assistés sociaux.

Mme Karen Redman: Était-il question quelque part dans cette conversation de réaffecter ces fonds pour des services au même groupe de gens?

Mme Susan LeFort: On y disait que l'argent devait être réinvesti dans des programmes sociaux. Il n'y a qu'un petit programme de prestations en Nouvelle-Écosse, mais ce n'est qu'une fraction de l'argent et il n'y a aucune indication sur l'utilisation qui doit être faite des fonds restants. En fait, l'idée en soi de demander aux familles pauvres de payer pour des programmes sociaux est vraiment une demande scandaleuse de la part du gouvernement fédéral, si c'est vraiment cela.

Mme Karen Redman: Je serais vraiment très intéressée de voir cette lettre. J'avais compris que les provinces avaient cette possibilité mais qu'elles n'y étaient pas obligées, aussi si vous pouviez me faire parvenir cette lettre, je trouverais cela très édifiant.

Mme Susan LeFort: Je vous la ferai parvenir.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci. Faites parvenir votre lettre au greffier du Comité des finances de la Chambre.

Mme Susan LeFort: Très bien.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Monsieur Loubier.

• 1340

[Français]

M. Yvan Loubier: Madame LeFort, je vais vous faire la même demande que Mme Redman. J'aimerais aussi avoir une copie de la lettre, parce qu'il m'apparaît un peu curieux qu'on vous ait dit que la politique fédérale obligeait le gouvernement de la Nouvelle-Écosse à se retirer. Je n'ai jamais vu de disposition de cette nature, et cela m'intéresse.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Pouvez-vous envoyer la lettre à la greffière, qui se chargera de la transmettre à tous les députés?

M. Yvan Loubier: C'est la première fois qu'on entend cela. J'ai été abasourdi quand je vous ai entendu dire cela.

[Traduction]

Mme Susan LeFort: Merci beaucoup. Demain, j'ai une réunion avec la ministre des Services communautaires, je suis donc très contente d'avoir obtenu cette information.

[Français]

M. Yvan Loubier: Ça nous fera plaisir, madame LeFort.

J'aimerais revenir aux propos de M. Holloway, qui disait qu'en 1999-2000, il y aura probablement des excédents budgétaires. Dès cette année, pour les quatre premiers mois de l'exercice 1998-1999, il y a dans les coffres du gouvernement fédéral des excédents budgétaires qui dépassent les 7 milliards de dollars. Alors, déjà, cette année, vous avez des excédents budgétaires. Le problème, et ce n'est ni votre faute ni celle des intervenants autour de la table, c'est que le ministre Martin nous a donné, au cours des quatre dernières années, des chiffres tronqués et même trafiqués sur les réalités des recettes et des dépenses.

D'ailleurs, si vous regardez le budget qu'il a présenté au mois de mars dernier, vous verrez que ça n'a aucun sens. On dit que cette année, 1998-1999, il y aura un excédent de zéro, en 1999-2000, un excédent de zéro et en 2000-2001, un excédent de zéro. N'importe quelle personne le moindrement sensée ouvre ce livre et se dit que ça n'a pas de fichu bon sens. Ces chiffres sont pour les quatre premiers mois, et ce sont des chiffres du ministère des Finances et non les nôtres: pendant les quatre premiers mois, un excédent budgétaire de 7 milliards de dollars est entré dans les coffres du gouvernement fédéral.

Donc, s'il y a des priorités à définir à partir de vos revendications, cela doit se faire en fonction d'un surplus qui, bien que conservateur étant donné le ralentissement économique qu'on peut observer en raison de la crise asiatique, pourrait être de l'ordre de 12 à 15 milliards de dollars au 31 mars 1999.

Cela étant dit, j'aurais aimé parler à Mme Forbes, mais Mme MacDonald est là pour répondre. Étant donné qu'il y aura des surplus et que des coupures ont été effectuées année après année dans les transferts aux provinces qui servent à financer la santé, l'aide sociale et l'enseignement supérieur, est-ce que ces programmes ne devraient pas être la première des priorités? Là je rejoins M. Holloway, Mme Squires et Mme McCall. La première priorité ne devrait-elle pas être de prendre cet argent et de le remettre dans les programmes existants plutôt que d'essayer de multiplier les initiatives ou de s'attaquer directement à la pauvreté des enfants? Comme M. Holloway l'a dit, s'il y a des enfants qui sont pauvres, c'est parce qu'il y a des parents qui ont été appauvris au cours des quatre ou cinq dernières années.

[Traduction]

Mme Mary Jess MacDonald: C'est vrai. Nous reconnaissons cela. En fait, selon les recherches que nous avons effectuées, depuis 1989 le nombre des familles qui ont un emploi à temps plein est passé de 82 p. 100 à 77 p. 100, et nous croyons que c'est un facteur. Nous constatons que cette hausse continue par le nombre d'enfants que nous servons dans les écoles. Nous sommes très préoccupés par les problèmes qui en découlent, comme la nourriture et l'utilisation des banques alimentaires, qui va toujours en croissant. Nous sommes aussi préoccupés par la question de l'alimentation des enfants d'un an à cinq ans, avant qu'ils ne viennent à l'école où nous pouvons détecter directement le problème. Nous pensons qu'il devrait y avoir davantage de soutien pour combler ces besoins.

• 1345

L'une des choses que nous constatons régulièrement, c'est le besoin d'une approche globale du problème par l'entremise des services de santé, des services communautaires, des services sociaux et de l'éducation. Ils devraient être jumelés plutôt que ce soit chacun qui obtienne du financement ou qui envisage le problème de façon différente chacun dans son coin. Il faut qu'il y ait une approche globale. S'il y avait plus d'emplois à temps plein que d'emplois à temps partiel, cela aiderait à résoudre le problème.

C'est très intéressant d'entendre le point de vue des étudiants, et je suis très proche de ce problème. Vous sortez de l'école et vous êtes criblé de dettes. Puis, vous avez un premier enfant, et vous avez toujours cette dette. Il faut parfois deux ou trois ans pour trouver un emploi et bien des problèmes surviennent qui ajoutent au problème dont nous parlons ici.

Je ne sais pas si j'ai répondu complètement à votre question, mais je suis d'accord avec ce que j'entends autour de cette table. C'est un problème de premier plan dans le système scolaire, ainsi que la façon dont nous l'abordons.

Certains des programmes qui ont été mis en place ont été utiles. Nous croyons que sans ces programmes le problème aurait pris encore plus d'ampleur. Comme je l'ai fait remarquer, nous croyons que le crédit d'impôt pour enfants devrait être accéléré et qu'il devrait venir en aide aux gens qui ne trouvent pas de travail.

[Français]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame MacDonald.

Monsieur Holloway, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

M. Les Holloway: J'aimerais faire quelques brefs commentaires.

D'abord le mouvement ouvrier déclare qu'il n'est pas d'accord. Les programmes sociaux n'ont jamais été un problème dans ce pays en ce qui a trait au déficit; ce sont des politiques économiques faibles et des politiques commerciales faibles qui constituent un problème. Des politiques commerciales qui n'ont pas reconnu les droits de la personne ou certaines normes sociales au moment de conclure des accords commerciaux avec d'autres pays ont exposé notre pays à une concurrence déloyale; le problème est là. Pour la petite histoire, je voulais que cela soit clair quant à la position de notre fédération.

Je suis d'accord avec la plupart des commentaires faits par M. Loubier, mais ce dont nous parlons maintenant est vraiment triste. Le Canada en tant que pays est devenu un grand pays parce qu'il avait une conscience sociale, et maintenant nous devons passer par-dessus les gens. Même à Halifax en Nouvelle-Écosse, lorsque vous descendez Spring Garden Road, des gens mendient pour être capables de se nourrir. Les banques alimentaires surgissent un peu partout, et selon ce que les étudiants ont dit aujourd'hui, il y a des banques alimentaires dans les universités. Il faut vraiment nous demander où nous nous en allons.

Notre position, maintenant qu'il y a un excédent, c'est que tous les programmes sociaux—même si les raisons qui ont présidé aux réductions des programmes sociaux n'étaient pas des raisons légitimes—devraient retrouver le niveau de financement antérieur et même être améliorés.

Il y a un autre point dont je voulais parler, et je trouve cette question étonnante. Je me souviens que lorsque le gouvernement conservateur a sabré dans les programmes d'assurance-emploi, Lloyd Axworthy agissait comme critique à la Chambre des communes et qu'il a condamné le gouvernement conservateur pour les compressions effectuées dans le programme d'assurance-emploi. On peut voir cela dans les archives de Radio-Canada, pour ceux qui ont la mémoire courte, et il y a beaucoup de libéraux qui ont la mémoire très courte. Ainsi Lloyd Axworthy a ensuite défendu les compressions les plus importantes de l'histoire du programme de l'assurance-emploi.

Tout ce que je peux dire, c'est qu'outre mes fonctions de vice-président de la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse, je représente les travailleurs de chantier naval. Il y a une pénurie d'emplois pour ces travailleurs, parce que le gouvernement fédéral ne prend pas l'initiative de mettre en place une politique qui nous place sur un pied d'égalité avec le monde international avec lequel nous sommes en concurrence. Mais au lieu de prendre des mesures progressives pour nous aider à composer avec ce problème et de mettre en place une politique qui assurerait l'égalité, ils réduisent les prestations des travailleurs qui sont touchés par leur absence de politique. Je me dis que si ce n'est pas ce que l'on appelle mettre la charrue avant les boeufs, je ne sais pas ce que c'est.

• 1350

J'arrête ici mes commentaires. Je ne sais pas si quelqu'un d'autre veut...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

[Français]

Vous avez deux minutes, monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier: J'ai deux remarques à faire à M. Holloway. Premièrement, vous avez parlé de la TPS. Je suis surpris que vous parliez de «scraper» la TPS, parce que lorsque MM. Chrétien et surtout Martin se lèvent en Chambre, ils nous disent qu'ils ont donné l'année dernière aux trois provinces Maritimes 961 millions de dollars pour l'harmonisation de la TPS avec les taxes provinciales et que tout le monde est content en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve. J'aimerais donc que vous commentiez cette affaire.

Deuxièmement, au sujet de la politique des chantiers navals, je vous appuie à 100 p. 100 là-dessus, et le Québec sera derrière la Nouvelle-Écosse parce nous réclamons aussi du gouvernement fédéral une véritable politique de construction dans les chantiers navals. Je trouve que ça n'a pas de sens. On est à peu près le seul pays industrialisé au monde à ne pas avoir de politique de construction navale, et c'est un peu décevant. Donc, nous serons derrière vous.

J'ai une dernière petite remarque à faire. Vous avez parlé de la politique d'assurance-chômage. Au nom de mes collègues, j'aimerais vous remercier d'avoir fait la job à Doug Young dans les Maritimes. Ça a été une bonne affaire pour tout le monde.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Holloway, avez-vous des commentaires sur les remarques qui viennent d'être faites?

M. Les Holloway: Oui. Je suis allé à Québec il y a quelques semaines seulement.

Le document de politique que nous avons présenté au gouvernement fédéral, sur lequel ils doivent nous répondre, ne présente pas des coûts si élevés que cela.

En fait, Russell MacLellan, qui vient du gouvernement libéral, qui est le premier ministre de la province, vient d'annoncer une politique garantissant des prêts pour la construction de navires. Cet argent ne va pas au chantier naval; il va à l'acheteur du navire. C'est le même programme vers lequel nous aimerions nous orienter, comme il en existe un aux États-Unis en vertu du titre XI, qui sert à garantir 87,5 p. 100 du coût d'un navire, et qui s'étale sur une période de 25 ans.

Nous venons juste d'en adopter un d'une durée de 15 ans. Donc, ce n'est pas aussi rentable, mais il n'y a aucun coût, et c'est en réalité un collègue du présent gouvernement qui dit avec insistance qu'il n'en coûte rien.

En somme, cette demande est faite non seulement par notre fédération et le mouvement ouvrier; c'est aussi une demande formulée par l'Association des constructeurs de navires du Canada. Leur position est la même. Il faut faire quelque chose dans ce dossier.

Avant de laisser le sujet de la construction de navires, j'aimerais faire un bref commentaire sur la TPS et la TVH, la BST comme on l'appelle en anglais. Nous avons rencontré nos collègues à Québec sur le chantier de la Davie, qui vit présentement—et je ne sais pas ce quÂil en est maintenant—un problème financier énorme, où l'entreprise a fait faillite. Nous espérons qu'ils existent toujours. Nous ne voulons pas voir un autre chantier naval fermer dans ce pays. Mais encore une fois, cette situation résulte complètement et directement du manque d'initiative et de vision de la part du gouvernement fédéral et du gouvernement fédéral précédent.

Pour ce qui est de la TPS—la BST comme nous l'appelons en anglais—vous ne serez pas surpris, mais aucun des sondages qui ont été menés ici n'est favorable à cette initiative, parce qu'elle a entraîné l'augmentation du prix d'une foule de biens nécessaires, du mazout et de bien d'autres. C'est encore une fois une taxe à la consommation, la forme la plus inéquitable de taxation qui soit. Il n'y donc pas beaucoup de gens favorables à cette taxe dans les provinces Maritimes.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Holloway.

[Français]

Merci, monsieur Loubier.

[Traduction]

Je demande à M. Szabo de poser ses questions, s'il vous plaît.

M. Paul Szabo: Merci.

Je veux remercier les étudiants de leur prise de position. Je pense que c'est clair, et en fait il y avait quelques points intéressants. Je vous parlerai plus tard d'un moyen qui pourrait peut-être servir à améliorer la question des statistiques, parce que la force de l'argument ne doit pas être amoindrie par une certaine confusion dans les chiffres.

Je veux vous demander ce que signifie pour vous le besoin et la définition du besoin. Je pense que c'est très important pour le comité de vous entendre sur ce point.

• 1355

Le taux de d'abandon scolaire au Canada est en moyenne de 30 p. 100. C'est un peu plus dans certaines provinces, et un peu moins dans d'autres. Mais il y a un nombre effarant d'étudiants qui ne terminent pas leur cours secondaire, qui n'auront aucune chance d'aller à l'université.

Le fonds pour les bourses du millénaire est un petit programme, assez petit. En fait, je pense que le chiffre utilisé par la plupart des groupes d'étudiants pour quantifier ceux qui auront la chance d'en bénéficier est de 6 p. 100 ou 7 p. 100.

Pour ma part, j'espère qu'aucun étudiant universitaire n'en bénéficiera. J'espère que tous les fonds iront aux étudiants qui n'ont pas la chance d'aller à l'université du tout.

Aussi, pour ces jeunes qui n'ont même pas les moyens d'entrer dans le jeu des bourses et de l'éducation, ceux qui n'ont pas les moyens de se payer un logement et des livres et tout ce qui s'en suit, je me demande quelle est selon vous la portée des bourses du millénaire et s'il ne serait pas nécessaire d'inclure ceux qui autrement n'auront pas la possibilité d'aller à l'université.

Mme Jessica Squires: Parlez-vous des étudiants qui fréquentent les collèges communautaires?

M. Paul Szabo: Je parle ce ceux qui veulent aller à l'université, mais qui n'en ont pas les moyens.

Mme Jessica Squires: Bien. Alors vous parlez des collèges communautaires...

M. Paul Szabo: Non, je dis qu'ils ne vont pas à l'école; ils ne poursuivent pas leurs études.

Mme Jessica Squires: Est-ce que vous êtes en train de me demander si l'argent qui est alloué au fonds des bourses du millénaire devrait être affecté à autre chose?

M. Paul Szabo: Aux étudiants qui aimeraient aller à l'université.

Mme Jessica Squires: Aux étudiants qui aimeraient aller à l'université.

Pour présenter ces remarques, l'évaluation du besoin pour le moment dans le programme d'aide aux étudiants est très rigide et ne tient pas compte de certains aspects des ressources ou du manque de ressources de la part des étudiants qui font une demande d'aide. Par exemple, selon la fédération, l'évaluation des contributions parentales est trop élevée à l'heure actuelle.

De plus, l'évaluation du besoin ne tient pas compte de façon efficace de certaines choses, comme les dépenses additionnelles découlant d'un handicap...

M. Paul Szabo: La question que je pose est la suivante: «pensez-vous que le plein montant du fonds des bourses du millénaire devrait être versé aux étudiants universitaires, ou qu'il pourrait être offert à ceux qui ne vont pas à l'université, mais qui aimeraient y aller?»

Mme Jessica Squires: Je pense que l'aide aux étudiants devrait être disponible pour quiconque veut aller à l'université ou au collège—c'est la réponse à votre question—et ceci inclut les étudiants diplômés, les étudiants des collèges et les nouveaux diplômés.

M. Paul Szabo: Je vous demande cela parce que selon les statistiques, le taux de sans emploi pour les diplômés universitaires de moins de 25 ans est de 6,5 p. 100 comparativement à la moyenne nationale de 8,3 p. 100; pour les collèges communautaires et l'équivalent, il est de 10 p. 100; pour les diplômés des écoles secondaires, 14 p. 100; et pour les décrocheurs, le taux de sans-emploi dépasse 20 p. 100.

Aussi lorsque nous nous référons à tous ces gens qui ont parlé du problème de la pauvreté et des besoins en matière de services sociaux et de préparation à l'emploi et d'autres sujets du genre, si vous n'avez pas atteint un certain degré de scolarité, les chances sont bien minimes.

En outre, je pense qu'il y a deux façons d'aborder le problème: faire quelque chose quand le problème est déjà la—donner de l'argent pour tenter de faire mieux; ou prévenir. Il doit y avoir un équilibre. Je crois que vous apportez l'équilibre parce que vous dites qu'il ne faut pas oublier qu'un bon départ dans la vie, comme par exemple dans le cas du développement de la petite enfance, veut dire qu'il faut pouvoir s'instruire pour y arriver, mais vous avez besoin d'aide pour le faire.

J'appuie cela sans réserve. La fonds pour les bourses du millénaire s'est attiré un nombre incalculable de critiques de la part de l'opposition, parce qu'il s'agit d'un domaine de compétence provinciale—ne vous mêlez pas de cela, et tout le reste. Je pense que le gouvernement fédéral, à bien des égards, essaie de trouver des façons de donner de l'argent aux gens sans avoir à donner cet argent aux provinces et à leur dire de le faire. Nous travaillerons ensemble sur ceci.

Mais c'est un début et je pense que nous devons continuer de demander davantage de fonds pour les jeunes qui veulent atteindre leur plein potentiel. Je pense que c'est ce que nous essayons de faire en fin de compte.

• 1400

Il y a toutes sortes de discussions à propos de la dette, mais vous savez, la dette moyenne d'un étudiant représente le coût moyen d'une nouvelle automobile. Une auto dure environ six ans, et l'éducation c'est pour le reste de la vie, c'est donc un investissement fantastique.

Mme Jessica Squires: Oui, c'est un bon investissement si vous considérez ce montant comme celui des dettes que vous pourriez avoir après avoir fait des études.

M. Paul Szabo: Mais, si 95 p. 100 des étudiants remboursent leur prêt, ce n'est pas...

Mme Jessica Squires: Mais ce sont des gens qui peuvent déjà aller à l'université. Je pense qu'ici nous sommes sur la même longueur d'onde. Ce qu'il faut faire, c'est d'accorder de l'aide aux étudiants au début de leurs études collégiales ou universitaires.

M. Paul Szabo: Je pense que je suis d'accord.

Mme Jessica Squires: Généralement...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Aviez-vous quelque chose à ajouter Susan?

M. Paul Szabo: Je vais en fait vous poser une question.

Mme Susan LeFort: J'aimerais répondre pour appuyer Jessica.

Le portrait des étudiants universitaires est en train de changer. Il y a beaucoup de gens qui retournent étudier en raison de la nouvelle technologie et de la formation. En raison des changements apportés à nos programmes sociaux et à notre ministère des Services sociaux, tout le monde est poussé vers l'employabilité.

Les gens doivent aller à l'école, doivent aller à l'université, doivent s'instruire et obtenir une formation. Ces étudiants sont des apprenants adultes, et en particulier des apprenants adultes qui reçoivent de l'aide sociale ou des avantages pour obligations familiales. Ils reçoivent une fraction du prêt étudiant et ils continuent de vivre dans la pauvreté. Ils ont déjà des dettes avant d'entrer à l'université. Leurs chances d'obtenir un meilleur emploi passent par l'université, oui; mais elles ne sont pas augmentées entièrement. Ils doivent affronter cette barrière majeure que constitue la pauvreté, c'est-à-dire venir à l'école alors qu'on a des enfants et que l'on fait face à des coûts qu'un étudiant traditionnel n'a pas à affronter.

M. Paul Szabo: Je ne suis pas en désaccord avec vous.

J'aimerais vous poser une question à propos de la prestation fiscale pour enfants. Bon nombre des groupes qui se sont présentés devant nous nous ont dit que nous devrions l'augmenter. Il y a toutes sortes de moyens de continuer de contribuer dans la phase initiale. Ce qui m'inquiète, c'est si que nous continuons de donner de l'argent aux gens qui ont de faibles revenus, ce montant peut éventuellement atteindre une somme telle que l'on se rapproche d'un revenu annuel garanti. Ce que je crains, c'est que si vous évaluez l'aspect économique, vous découvrirez probablement que si vous mettez ensemble toutes les prestations versées par les différents niveaux de gouvernement, vous serez peut-être tout près de donner à chacun un salaire annuel de 25 000 $. On pourrait alors dire tout simplement, voici, et il n'y a plus de prestations sociales. Cependant, en plus de l'effet de dissuasion pour ceux qui travaillent, le problème, c'est qu'il y aurait une foule d'organismes, de groupes ainsi que des groupes de revendication qui emploient des millions de personnes qui seraient mis au rancart. Voici l'équilibre.

J'aimerais avoir votre opinion, à savoir s'il y a un point où nous pouvons aider concernant des aspects qui ne touchent pas la question politique de la pauvreté des enfants, mais le terme réel de la pauvreté familiale. Comment traitons-nous ce problème sans continuer de tout simplement progresser vers un revenu annuel garanti?

Mme Susan LeFort: Je pense que nous devons examiner pour quelles raisons les gens sont pauvres: il n'y pas suffisamment d'emplois et les gens sont sous-employés. Nous avons besoin de créer des emplois; cependant, nous ne pouvons pas stigmatiser les gens simplement parce qu'ils vivent de l'aide sociale. Si nous faisons cela, nous nous de mauvaises surprises à long terme. Nous allons finir par verser plus d'argent pour les soins de santé de notre population en créant une situation par laquelle il y a une classe méritante par rapport à une classe non méritante.

La création d'emplois devrait être notre priorité, conjointement avec tout ce qui soutient la création d'emplois, comme de favoriser les moyens de transport et de mettre sur pied des stratégies efficaces pour aider les gens à se sortir de la pauvreté. Il ne suffit pas de leur donner de l'argent, c'est vrai. Nous avons besoin de programmes efficaces, non pas de création artificielle de travail. Il ne s'agit pas de soutenir les activités prioritaires du ministère, mais de soutenir notre humanité et de soutenir notre population. Voilà ce qui est vital.

Si la population est en santé, éduquée et bien nourrie, c'est le gage d'une main-d'oeuvre solide, et d'une population qui peut soumettre de nouvelles idées. Lorsque vous êtes affamé et que vous avez l'impression d'être moins méritant qu'un autre, vous ne pouvez pas contribuer à trouver de nouvelles idées pour les entreprises et vous n'êtes pas un membre actif de la société.

• 1405

Nous devons faire quelque chose pour renforcer notre population, pour fortifier notre humanité. C'est ce sur quoi nos programmes sociaux devraient mettre l'accent.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Landry, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Ian Tay Landry: Oui, il ne s'agit pas seulement de créer des emplois, mais de créer des emplois viables qui fournissent aux familles un salaire décent. Je suis d'accord avec les statistiques que vous avez données concernant le taux de sans emploi plus faible chez les diplômés universitaires maintenant qu'auparavant. Mais, lorsque vous décomposez ces chiffres, vous vous rendez compte qu'une bonne partie des emplois sont des emplois à temps partiel, pas des emplois à temps plein, et des emplois à faibles revenus. Oui, actuellement il y a plus de diplômés universitaires qui travaillent, mais ils travaillent dans des emplois de niveau inférieur et ne gagnent pas des salaires décents. Je le répète, la création d'emplois doit contribuer à aider les gens, non pas les entreprises.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Tusz.

Mme Margaret Tusz: Je veux seulement établir un lien avec ce qui a été dit au sujet de la capacité pour la collectivité de tabler sur la qualité de l'emploi que nous recherchons tous. Nous ne voulons pas donner 70 millions de dollars à Irving ou à d'autres sociétés multinationales du même genre. Même si les Irving sont d'ici, à partir du moment où ils sortent du Canada l'argent que nous voulons imposer, je ne les considère pas comme des Canadiens.

Nous voulons créer des emplois dans les collectivités, de façon à ce que les gens qui y travaillent puissent conserver dans les collectivités l'argent et créer ainsi un style de vie sain qui profite à tous. Si nous nous contentons de créer des emplois dans le secteur des services, des emplois dans le domaine des jeux d'argent, ou que nous essayons d'obtenir ce genre d'emplois pour lesquels on peut vendre son âme au diable, les McEmplois ou les emplois Post-it, ou peu importe comment les gens les appellent, ces emplois ne feront pas vivre une famille. Ce n'est pas avec ce genre d'emplois que l'on crée au sein d'une collectivité la capacité de se rassemblent. C'est l'intégration des services sociaux au développement économique de la collectivité et à la santé qui doit faire en sorte que, comme l'a dit Suzanne, nous n'en arrivions pas à faire une croix sur tout un groupe de notre société. Si nous faisons cela, dans dix ans, ce groupe finira en prison, ce qui créera de plus en plus de problèmes.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame MacDonald, s'il vous plaît.

Mme Mary Jess MacDonald: Je veux seulement ajouter que dans le système scolaire, nous pensons que l'éducation est très importante pour améliorer la situation sociale de chacun et, par le fait même, la situation générale au pays. Ce qui arrive dans les écoles, c'est que les résultats sont faibles parce que les étudiants ont faim, qu'ils ont l'impression de ne pas être habillés convenablement, ou qu'ils ne peuvent pas prendre part aux activités. Nous constatons que ces étudiants participent beaucoup moins aux activités parascolaires. Quelqu'un a fait allusion au décrochage à l'école secondaire. Je pense que c'est directement relié, aussi je ne voulais qu'ajouter ce commentaire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame MacDonald.

Penny, c'est votre tour, puis nous aurons une brève intervention de la part de M. Telez.

Mme Penny McCall-Howard: Brièvement, concernant les questions de M. Szabo à propos des bourses du millénaire, je pense que nous sommes d'accord sur la nécessité d'accorder des bourses qui permettent aux étudiants d'avoir accès à l'éducation. C'est pourquoi nous, de même que l'Association des universités et collèges du Canada et l'Association canadienne des professeurs d'université, préconisons l'admission fondée sur le dossier scolaire, etc. comme le seul critère au mérite pour les bourses du millénaire.

Il y a aussi un problème structurel quant à l'ensemble de ce fonds, en ce sens qu'il n'est pas administré par le programme d'aide aux étudiants. On crée un autre niveau de bureaucratie auquel les étudiants doivent s'adresser, et l'évaluation des besoins ne fait pas partie du programme. Il s'agit d'une anomalie grave que nous constatons dans ce fonds.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Paul, vous suscitez une grande participation ici.

Monsieur Howard et monsieur Telez, si vos interventions sont brèves, nous pourrons avancer.

M. Juan Telez: Je suis d'accord avec un certain nombre des commentaires qui ont été faits autour de cette table: les problèmes relatifs à la pauvreté, les problèmes relatifs à la distribution des ressources, les problèmes relatifs à la fiscalité, et ainsi de suite. Nous pouvons continuer de nous plaindre et de hurler contre les conditions de vie et les conditions d'anxiété dans lesquelles nous vivons, mais je vous encourage à voir les choses autrement. Nous devons regarder du côté de nos actifs et de nos capacités; la façon dont nous pouvons améliorer nos collectivités, nos espoirs, nos gens; et comment nous pouvons organiser nos ressources de façon à ce que nous puissions modifier cette réalité. Je ne pense pas que ce soit impossible à réaliser.

• 1410

Peut-être que ce que nous devons faire, comme nous l'avons proposé, c'est d'affecter des fonds pour permettre la création d'une réserve pour les collectivités afin que chaque province puisse aider les collectivités, les bénévoles et les personnes préoccupées par l'amélioration des conditions de vie dans la collectivité, et que celles-ci s'occupent d'investir cet argent.

Selon moi, ce qu'il importe de reconnaître, c'est qu'en raison du processus de réduction des effectifs qui nous touche depuis une dizaine d'années et en raison du processus de décentralisation, il y a émergence de ce qu'on appelle le troisième secteur, c'est-à-dire le bénévolat. Nous connaissons son importance, sa pertinence et sa contribution, mais je n'ai entendu personne autour de la table reconnaître le rôle important que jouent les bénévoles dans les organisations non gouvernementales et les organismes, ainsi que les bénévoles qui se consacrent à l'amélioration de leur collectivité.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Ils ont été reconnus ce matin, hier, et même avant hier.

M. Juan Telez: Je voulais dire autour de la table.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Peut-être seulement autour de cette moitié de la table.

M. Juan Telez: Je n'étais pas ici ce matin, ni hier, je fais donc allusion uniquement aux discussions qui ont eu lieu ici.

Dans le Globe and Mail, il y a un article de Silver Donald Cameron portant sur l'expérience de l'Isle Madame. Pour moi, c'est l'un des plus merveilleux exemples d'une collectivité qui se rassemble pour trouver une solution d'avenir après avoir été dévastée et avoir fait face à une crise terrible. Si les collectivités, en particulier les collectivités rurales, peuvent maintenant avoir accès à des ressources financières, elles peuvent construire leur avenir et prendre leur destinée en main.

J'aimerais vous inviter à jeter un coup d'oeil sur ce que nous proposons dans notre mémoire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Telez.

Monsieur Holloway, très brièvement.

M. Les Holloway: Je veux seulement mentionner que dans les provinces Maritimes, par exemple, nous avons fait face à la fermeture d'une autre usine importante, celle de Volvo. Ces travailleurs gagnaient 22 $ l'heure. Si vous faites quelques calculs et que vous considérez la diminution de l'assiette fiscale découlant de cette fermeture, vous verrez qu'il faut sept ou huit des présents emplois qui consistent à faire des téléphones dans un centre d'appels pour créer la même assiette fiscale. Le revenu disponible est perdu, manifestement, alors la perte pour l'économie locale est substantielle.

L'autre chose sur laquelle je ne suis pas d'accord, c'est l'attribution de subventions généreuses à des sociétés, en particulier celles qui disposent de beaucoup d'argent. On a mentionné un chiffre de 70 millions de dollars. Je suis d'accord pour dire que les Irving n'ont pas besoin de cet argent. Je ne sais pas si c'était en relation avec cela, mais il me semble qu'il est important au moins de mentionner qu'une entente a été conclue afin de leur donner une garantie de prêt.

Pour vous donner l'envers de la médaille, je pense que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a fait preuve d'un grand sens des responsabilités avec Secunda Marine, qui exploite une flotte de navires au large de nos côtes. Il n'y a pas si longtemps, ils ont construit deux navires au Mississipi en vertu du titre XI. Ils ont obtenu le même genre d'entente, mais seulement pour 25 ans. Ils ont introduit ces navires en franchise de droits, et ils assurent présentement le service de notre zone extracôtière.

Il y a un dernier point dont j'aimerais parler à propos des navires, puis j'arrêterai. Notre ministre fédéral des finances, Paul Martin, prêche par l'exemple avec son entreprise, CSL. Son entreprise construit des navires en Chine—toute une affaire pour les Canadiens—et navigue sous tous les pavillons qui lui permettent d'éviter d'avoir à respecter certaines normes de sécurité et de qualité du travail pour ceux qui travaillent sur ces navires. C'est un bon exemple de quelqu'un qui a fait campagne sur la promesse d'emplois quant il a été élu la première fois.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je n'irai pas dans ce sens.

Madame Lill, s'il vous plaît.

• 1415

Mme Wendy Lill: J'aimerais simplement aborder toute la question de la création de capacités communautaires, car je crois que c'est une excellente idée. J'aimerais entendre les critiques qui vous seront formulées à ce sujet. Nous avons eu de nombreux fonds de développement communautaire—je crois que l'APECA a déjà été mentionnée—et il y a beaucoup de cynisme autour du développement communautaire. On lui a fait un très mauvais nom. La question est de savoir comment votre modèle serait différent des nombreux fonds qui ont déjà été créés et qui existent actuellement.

Mme Margaret Tusz: Une capacité communautaire ne se limite pas qu'à l'aspect économique. À l'heure actuelle, je crois qu'il se fait beaucoup de choses en matière de développement communautaire et économique, mais elles ne sont pas liées aux principales préoccupations de la communauté.

À mon avis, la façon dont les choses se passent de nos jours, c'est que certaines personnes tentent de s'approprier ces fonds. Ce sont généralement des personnes au moins de la classe moyenne, relativement éduquées, et elles essaient d'utiliser ces fonds pour démarrer des entreprises. Les gens qui doivent vraiment se battre sont exclus. Tout d'abord, elles n'ont pas les compétences ne serait-ce que pour penser à un plan d'affaire ou autre chose du genre, alors il n'y a qu'un nombre limité de personnes qui ont accès à ces fonds.

Comme je l'ai dit, ils ne servent qu'au développement économique. Les questions dont la portée est plus large—par exemple, à savoir si nous avons besoin d'une autre friterie mobile dans la ville, ou peu importe—n'entrent pas nécessairement en ligne de compte lorsque ces fonds sont en jeu. Ils sont très individuels. S'il s'agit d'une capacité communautaire, la communauté est impliquée.

Nous voyons couramment des communautés se réunir. Par exemple, il y a la question du gaz de l'île de Sable et de ses effets sur l'environnement. Des communautés se réunissent et disent qu'il pourrait y avoir d'importantes retombées économiques, mais elles veulent également examiner toutes ces autres questions avant de décider si elles y accorderont leur appui.

Les communautés doivent s'unir pour examiner les grandes questions avec toutes ces choses. Nous devons augmenter la capacité des communautés d'examiner ces choses, afin que nous n'ayons pas des gens se présentent et imposent des choses qui pourraient laisser des étangs de goudron qui ont des effets à long terme sur la santé ou autre chose du genre dans notre communauté.

Pour que les gens puissent faire cela, ils doivent aussi avoir beaucoup de compétences. Nous ne savons pas comment faire cela. Il nous faut apprendre à le faire en communauté. Il nous faut apprendre à nous unir et à parler de ces questions afin de bien les comprendre. Nous avons besoin de meneurs dans la communauté. De nombreuses communautés n'ont pas de meneur naturel. Ils ont l'habitude d'être employés, mais ils n'ont pas l'habitude de s'exprimer. Par exemple, nous ne les retrouverions pas autour de cette table. Ce serait très intimidant pour la plupart des gens dans une communauté. Il y a toutes sortes de projets de formation de meneurs que nous devons réaliser pour les communautés et qui ont été marginalisés en raison des conditions économiques et d'autres choses.

Aimeriez-vous ajouter quelque chose, Juan?

M. Juan Telez: Je voudrais simplement ajouter quelques commentaires sur la question.

Au cours de la dernière année, les gens ont participé à des programmes de formation pour le développement économique de la communauté. Grâce à ces programmes de formation, un certain nombre de projets de développement ont été réalisés par la communauté.

La réalité, c'est que lorsque les dirigeants de la communauté proposent des idées, créent de l'espoir et proposent des solutions, il n'y a pas moyen d'obtenir du financement pour mener ces projets à bien. Nous avons écrit à DRHC. Malgré toute sa bonne volonté, il était évident que ce ministère ne pouvait trouver d'argent dans son compte. Ainsi, lorsqu'un groupe communautaire arrive à trouver des ressources financières, deux ou trois années se sont écoulées. Les gens de la communauté deviennent terriblement découragés parce qu'ils ne peuvent trouver les ressources financières.

Par exemple, les communautés rurales avisées de Tatamagouche, dans la région du nord, fournissent un exemple d'une des plus merveilleuses expériences de développement communautaire utilisant la technologie de l'information et la haute technologie. Pour établir les communautés rurales avisées de Tatamagouche, il a fallu trois ans de démarches auprès des gouvernements provincial et fédéral, et ainsi de suite.

Les initiatives de ce genre créent de l'emploi. Elles connaissent beaucoup de succès à long terme, et nous y voyons un signe positif. Ce que nous suggérons, c'est que si le gouvernement fédéral pouvait financer la création d'un fonds consacré spécifiquement à la création de capacités communautaires, de nombreux dirigeants de communautés seraient davantage en mesure de bâtir leur communauté comme ils l'entendent.

• 1420

Mme Wendy Lill: Je crois que je comprends ce que vous voulez dire, mais ce qui me préoccupe, c'est que depuis de nombreuses années nous voyons qu'on injecte de l'argent dans des communautés. L'argent est dépensé, bien sûr. Quelque chose a été fait et nous passons tous à autre chose, mais on n'a pas formé de chef de file dans la communauté. La question est de savoir, au point où nous en sommes présentement, alors que nos infrastructures se sont désintégrées dans toute la communauté en ce qui touche les services sociaux, la santé et l'éducation, en raison des restrictions—c'est un point de départ très fragile à bien des égards—où trouverons-nous cet argent? Où faut-il mettre l'argent, dès maintenant, pour essayer de démarrer ce processus?

Je ne sais pas. Peut-être que je ne fais que prêcher là, Paul.

M. Juan Telez: J'aimerais répondre à cela. Depuis quatre ans j'observe l'agence intermédiaire qui avait l'autorité au départ en matière de développement. Il y a quatorze ARD dans la région, et je crois que la participation communautaire par le biais de ces ARD est très significative. Sur le plan provincial, il y a un large secteur bénévole qui participe au développement régional, par exemple.

J'aimerais également mentionner quelque chose à propos de votre suggestion. Nous aimerions qu'il s'en fasse davantage entre le gouvernement fédéral et DRHC et la division du DEC du gouvernement provincial. Selon l'avis ou sous la direction des citoyens qui ont le sens de la communauté, ce financement devrait également être permis.

Mme Margaret Tusz: En outre, j'aimerais ajouter que dans toute communauté, il y a beaucoup de gens qui font du bénévolat, mais il n'y a aucune aide pour les gens qui font du bénévolat. C'est un véritable luxe de pouvoir faire quelque chose sans être payé de nos jours, parce que la plupart des gens ont besoin des dollars. Nous devrons appuyer ce genre de travail si nous voulons avoir quoi que ce soit, qu'il s'agisse de prendre soin de personnes âgées ou d'administrer une banque alimentaire, d'être brigadier ou quoi que ce soit d'autre, de faire n'importe quoi.

Il nous faut reconnaître que le travail des bénévoles a de la valeur, et c'est là quelque chose que les gens peuvent faire avec des lois fiscales au niveau fédéral. Nous pouvons faire davantage d'efforts pour montrer que nous valorisons le développement communautaire plutôt que les sociétés multinationales qui viennent saupoudrer quelques emplois ici et là. Il y a toutes sortes de choses qu'on peut faire autour de politiques qui refléteront les valeurs communautaires.

Mme Wendy Lill: J'aimerais poser quelques question à Susan et à Ian.

Quel est l'impact de la fusion proposée des banques sur une communauté de gens qui ont très peu d'argent dans ce pays?

M. Ian Tay Landry: Il sera assez grave. Actuellement, même avant la fusion, nous avons un grand nombre de banques qui ferment. Elles ferment à peu près toutes ou réduisent les services dans les régions à faible revenu.

Je vous donnerai l'exemple de la rue Gottingen et du secteur de Spryfield à Halifax. Il y a deux ans nous avions trois banques dans le secteur de Spryfield, mais maintenant nous avons ce que nous appelons une demi-banque. Il n'y a pas de service au guichet, sauf pour les personnes âgées six heures par semaine. Ce qui se passe là-bas en raison de cela, c'est que les gens qui doivent encaisser un chèque doivent faire cinq kilomètres pour se rendre dans la ville parce qu'il n'y a pas de service au guichet—autrement ils devront payer des frais bancaires, qui peuvent atteindre 5 $ ou 10 $ par mois. Pour une famille de trois personnes, c'est à peu près l'équivalent d'un repas.

Les banques admettent que la raison pour laquelle elles ferment leurs succursales, c'est parce qu'elles ne font pas suffisamment de profits dans ces régions. Or, les fermetures produisent leurs effets sur les personnes à faible revenu.

Mme Susan LeFort: J'étais à une réunion sur la fermeture des banques à Spryfield. Un homme du nom de Rick Johnson s'est levé et a pris la parole. Il a dit que lorsqu'on a beaucoup de ces guichets automatiques, on ne peut rien avoir de moins que 20 $, et dans certains cas on ne peut avoir 5 $ ou moins. Si on ne peut retirer 4,95 $ de son compte de banque, c'est du lait, c'est du pain, c'est de la nourriture pour nourrir votre famille. C'est essentiel. Devoir ensuite dépenser cet argent pour le transport ou prendre toute une journée si vous n'avez pas l'argent, si vous n'avez même pas ces 4,95 $, pour descendre Herring Cove Road en entier pour vous rendre à la banque, qui a peut-être un guichet ou le service au guichet, c'est vraiment gravement désavantagé les gens qui vivent dans la pauvreté.

• 1425

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

J'informe les collègues que les audiences de demain porteront uniquement sur le groupe de travail MacKay et que les audiences d'aujourd'hui sont prévues pour une consultation préalable. Je vous invite donc à poser ce genre de questions demain également. Vous pourriez faire un meilleur usage de votre temps aujourd'hui, par contre, en vous concentrant sur...

Mme Wendy Lill: Très bien, merci.

C'était très utile d'entendre ce qu'ils avaient à dire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous avez encore quelques minutes.

Mme Wendy Lill: Je vous demanderais, Les, de traiter de la stratégie fondamentale de restructuration qu'on voit actuellement au niveau fédéral, et en matière de compression, du modèle proposé de prestation de services et de la privatisation de nombreuses tâches de la fonction publique. J'aimerais avoir votre opinion sur la sagesse de ces mesures, savoir si vous trouvez en fait que cela crée un environnement de travail plus efficace. Je suis curieuse de connaître votre point de vue.

M. Les Holloway: Pour vous donner une réponse brève, je dirais non, ce n'est pas le cas.

Je ne suis pas du secteur public, mais j'ai eu de nombreuses discussions avec eux. Vous parlez du passage du secteur public au secteur privé et de cette mentalité de privatisation, qui est en somme un recours aux bas salaires, sans avantages, prétendument pour faire des économies, du pelletage par le gouvernement fédéral dans la cour des gouvernements provinciaux, et du provincial au municipal, qui effectuent les véritables compressions au nom du fédéral, qui sabre les paiements.

L'autre principal problème était le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (TCSPS), qui en fait crée une enveloppe concurrentielle pour ce qu'une province doit avoir, contre ce qu'exigent les réalités dans d'autres enveloppes, qu'il s'agisse de concurrence entre l'éducation et les soins de santé, et tout ça. C'était là une importante préoccupation que nous avions lorsqu'ils sont passés au TCSPS, et bien entendu l'abandon des normes nationales.

C'est un méli-mélo de mesures, toutes appliquées au nom de la prétendue réduction du déficit, mais toutes appliquées sur le dos des gens qui peuvent le moins se le permettre.

Mme Wendy Lill: Très bien.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Holloway, et merci, madame Lill.

J'aimerais maintenant me tourner vers M. Pillitteri. Aujourd'hui M. Pillitteri a agi en quelque sorte à titre de quatrième frappeur, mais il ne faut pas vous laisser intimider; il est souvent retiré.

M. Gary Pillitteri: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, j'aimerais faire un commentaire à l'intention de M. Holloway et de M. Loubier. Le nom de M. Martin a été mentionné une fois ici, relativement au fait que le ministre des Finances faisait construire des navires ailleurs. J'aimerais fournir quelques renseignements qui me viennent à l'esprit.

Je n'ai pas besoin d'habiter à Halifax pour en connaître un peu sur les chantiers maritimes. J'en ai un dans ma cour arrière, les cales sèches de Port Weller. J'ai grandi là, et j'y ai presque toujours habité.

Il fut un temps où il y avait beaucoup plus de cales sèches dans la voie maritime du Saint-Laurent. En fait, il y avait Thunder Bay, un chantier maritime, Collingwood, un chantier maritime, et bien sûr les cales sèches de Port Weller. À une certaine époque ils étaient tous prospères en raison des subventions des gouvernements fédéral et provincial. Mais le gouvernement a commencé à réduire ces subventions. Et le chantier Davie en est un qui bénéficiait également des subventions provinciales. Le seul qui reste dans les Grands Lacs, c'est celui de Port Weller.

Si j'ai bien compris, M. Martin a une participation majoritaire dans les cales sèches de Port Weller. Et bien entendu si quelque subvention avait été disponible, M. Loubier aurait été le premier à demander d'avoir des subventions pour sa propre industrie.

Mais permettez-moi aussi de dire qu'une grande partie du travail effectué à Port Weller actuellement consiste uniquement en réparations et en réfections, par exemple le cas des autodéchargeurs, dont les travaux ont été faits dans les cales sèches de Port Weller. Je crois savoir qu'il n'y a pas de navire de haute mer, et la plupart des navires qui ont été construits l'ont été dans les Grands Lacs.

• 1430

Si vous regardez la marchandise qui transite dans les Grands Lacs et la voie maritime du Saint-Laurent, le volume a diminué de quelque 40 à 50 p. 100 au cours des dix dernières années. Il y a beaucoup de navires à quai qui ne travaillent même pas. Ils ne sont même pas utilisés à pleine capacité. Alors si nous disons que c'est ce qu'il fait, je ne crois pas que ce soit contraire à ce qui a été dit ici.

Vous aurez la chance de répondre à cela, mais ce n'est pas ma question. Ma question est ouverte, et elle porte sur une conférence de presse que j'ai vue il y a quelques jours à Ottawa. Quatre partis d'oppositions—je n'ai pas besoin de les nommer—se sont réunis, et leur position était que les fonds de l'assurance-emploi appartiennent aux employés et aux employeurs. De nombreuses présentations ont été faites ici aujourd'hui, mais on n'a pas vraiment répondu à cela.

Permettez-moi de soulever un autre point: toutes les taxes comporte une certaine forme de ce que vous appelez la redistribution de la richesse, je veux dire l'impôt des entreprises, l'impôt sur le revenu et la TPS. Et si nous voulons appeler ça une taxe aussi, alors il en va de même de l'assurance-emploi. Certaines personnes appellent cela une taxe et d'autres appellent cela une prime. Appelons cela tout simplement une taxe et redistribuons de la richesse.

Si l'excédent de l'assurance-emploi appartient aux travailleurs et aux employeurs, il n'y aura pas d'excédent. D'un autre côté, nous pourrions mieux utiliser cet argent en l'affectant à des choses que vos témoins ont mentionnées ici aujourd'hui—à l'amélioration du système de santé, du système d'éducation, à la création d'emplois, toutes ces choses qui ont des besoins.

Aimeriez-vous plutôt retourner ce fonds de l'assurance-emploi aux employés et aux employeurs, seulement à ceux qui travaillent et qui y contribuent—car l'employeur paie 60 p. 100 et l'employé paie 40 p. 100—ou aimeriez-vous qu'il soit utilisé? Je n'ai pas vu cela ici, mais c'est la question à laquelle je voudrais qu'on réponde. Voudriez-vous que l'argent permette d'augmenter l'exemption personnelle, celle du contribuable et de la famille, afin que chaque Canadien puisse en profiter? Ou préféreriez-vous qu'il retourne directement aux cotisants? Les quatre partis se sont réunis et ont dit de ne pas y toucher. Puisqu'il n'y aurait alors aucun excédent, nous ne traiterions pas d'autres questions.

Merci, monsieur de président.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Pillitteri.

Monsieur Holloway, s'il vous plaît.

M. Les Holloway: J'aimerais d'abord commenter brièvement l'intervention de mon ami au sujet de l'assurance-chômage.

Prendre cet argent revient à le voler. L'argent a été payé par des employeurs et des travailleurs pour fournir un programme de supplément de revenu lorsqu'un travailleur perd son emploi.

M. Gary Pillitteri: Non, ce n'est pas un supplément de revenu.

M. Les Holloway: Eh bien, appelez-le une assurance-revenu ou peu importe ce que vous voulez en faire.

Votre jeu vidéo doit devenir ennuyeux.

M. Paul Szabo: Les travailleurs de la construction en retirent 4 $ pour chaque dollar qu'ils y mettent.

M. Les Holloway: De toute façon, c'est un fonds qui a été créé par le gouvernement pour permettre aux travailleurs qui perdraient leur emploi d'avoir un revenu. Il n'y avait pas de mandat pour le dernier gouvernement libéral—et vous semblez être libéral, donc je supposerai que vous l'êtes peut-être—lors de leur premier mandat de quatre ans, qui les autorisait à toucher au programme d'assurance-chômage. En fait je vous ai dit...

M. Gary Pillitteri: À titre d'information, ça va au trésor depuis 1986. C'était un fait connu.

M. Les Holloway: Soit dit en passant, il se trouve que votre parti a critiqué le gouvernement conservateur pour cela. De prendre ensuite le pouvoir et se contenter d'accélérer le processus est une chose hypocrite en soi.

De toute façon, j'aimerais vous renseigner quelque peu sur la construction navale à partir de la perspective et de la compréhension que j'en ai. Vous en parlez comme si l'industrie était à l'agonie. Vous serez intéressé d'apprendre que plus de 75 p. 100 des biens transportés dans le monde le sont par navire.

M. Gary Pillitteri: Je ne parlais que de la voie maritime du Saint-Laurent et des Grands Lacs.

M. Les Holloway: Une seconde, laissez-moi finir. Je me suis mordu la lèvre à quelques reprises lorsque vous parliez.

• 1435

Vous avez dit que Port Weller était un chantier de service, un chantier de réparation. Je suis heureux que vous ayez dit que c'était un chantier de réparation. C'est difficile d'entrer ses navires pour les faire entretenir et repeindre. Ce n'est pas très rentable, donc vous avez besoin d'une installation dans les Grands Lacs pour prendre soin des cargos hors mer, je suis d'accord. Mais vous n'avez pas nié, et je ne crois pas que vous le faites, que Paul Martin a construit trois navires. Je crois qu'il en reste un à livrer à ce grand pays qu'est la Chine.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vais intervenir ici et mettre un terme à cette question.

Les actifs de M. Martin sont dans une fiducie sans droit de regard, et c'est la société et ses négociants qui prennent ces décisions, et non M. Martin. Insinuer que M. Martin joue un rôle direct dans chaque décision de sa société n'a aucun fondement.

M. Les Holloway: Je n'étais pas là pour entendre la conversation téléphonique, je suppose.

Je crois que dans la direction qu'adopterait le conseil pour prendre soin de Canada Steamship Lines Inc. ils comprendraient très bien où se trouve le ministre des Finances.

L'autre chose que j'aimerais ajouter, c'est qu'il n'est pas surprenant que nous n'ayons pas de politique sur la construction navale. Port Weller ne construit pas de navire; il les répare.

Je terminerai sur ce commentaire, sans trop vouloir susciter d'affrontements. Mon ami, alors que je parlais il y a un moment, regardait son collègue et faisait cela pendant que je parlais de la politique sur la construction navale. Ce n'est évidemment pas cela, parce tout son argument était qu'il n'y avait tout simplement pas assez de travail parce qu'il n'y a pas assez de navires, et ce n'est pas le cas. Il y a beaucoup de navires en construction pour le Canada, la plupart en dehors du pays actuellement, grâce à l'inaction de votre gouvernement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Pillitteri, s'il vous plaît.

M. Gary Pillitteri: Alors les navires que j'ai vu construire à Port Weller... Ce n'était pas mes yeux qui les regardaient.

M. Les Holloway: Il y avait des navires en construction. Y en a-t-il actuellement? Y a-t-il des navires-citernes ou des porte-conteneurs?

M. Gary Pillitteri: Je viens de vous entendre dire qu'aucun n'était en construction.

La réponse que je voulais, c'était de savoir quoi faire de l'excédent de l'assurance-emploi, parce que c'est le seul endroit où il y a un excédent. Doit-il retourner aux employeurs et aux employés ou être affecté à des programmes sociaux? En outre, l'augmentation des déductions d'impôt pour les particuliers et les familles profiteraient à chaque Canadien.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Avez-vous une question, Jessica?

Mme Jessica Squires: Si je ne m'abuse, je n'ai pas les chiffres devant moi, la prétendue réforme du programme de l'assurance-chômage il y a plusieurs années a mené dans une certaine mesure à l'excédent actuel du fonds de l'assurance-emploi. Je soumets qu'il y a une troisième option. L'argent du fonds de l'assurance-emploi ne devrait pas seulement être utilisé pour envoyer des chèques aux employeurs et aux employés, et il ne devrait pas non plus être affecté à des programmes sociaux. Le fonds de l'assurance-emploi est actuellement utilisé comme une double taxe imposée aux employeurs et aux employés, et l'assurance-emploi doit être réformée afin que les sans-emploi, qui n'ont pas accès au fonds présentement, puissent y avoir accès.

Cette question est importante pour les étudiants, parce que le chômage chez les jeunes est à un niveau record, et ce depuis plusieurs années.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, Jessica.

M. Gary Pillitteri: C'est une discussion que nous pourrions peut-être avoir une autre fois, mais nous traitons du budget de cette année.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais elle vous a donné une réponse, et je crois que c'est ce genre de réponse que nous aimerions entendre. Elle vous a donné une réponse concrète et a dit que vous devriez en prendre une partie et l'investir dans des programmes sociaux, etc.

Monsieur Landry, s'il vous plaît.

M. Paul Forseth: Nous devrions étendre les prestations du programme.

M. Ian Tay Landry: J'aimerais faire écho aux commentaires de Jessica selon lesquels le fonds devrait retourner à l'assurance-emploi. Il devrait être utilisé pour aider les gens qui autrement ne sont pas éligibles en raison des compressions récentes. Je suis plutôt offusqué par cette attitude qui consiste à diviser pour régner dans cette question—entre tenter d'aider les travailleurs ou aider les moins méritants qui ne reçoivent aucune prestation.

• 1440

Le vice-président (M. Nick Discepola): Si nous examinons certaines des recommandations faites autour de la table, par contre, le fait est qu'il y a un excédent global d'environ 7 milliards de dollars généré par le fonds de l'assurance-emploi. Certains recommandent que nous éliminions complètement la TPS. Ce serait, encore, un autre 18 milliards de recettes en moins. Si nous payons ensuite tout l'argent qui est dû aux employés de la fonction publique en vertu de l'équité salariale, c'est probablement un autre 5 à 7 milliards. Si vous additionnez ces chiffres, il ne reste rien qui nous permettrait de régler certaines des questions prioritaires.

Le choix que nous avons à titre de membres du comité, c'est d'entendre vos points de vue et d'essayer d'en dégager ce que nos priorités devraient être. Si tout le monde dit que l'argent devrait retourner aux employeurs et aux employés, alors nous avons environ 5 milliards de moins à notre disposition parce que c'est le souhait des Canadiens.

Nous essayons de régler les problèmes de pauvreté chez les enfants, par exemple, ou le perfectionnement professionnel et autres problèmes. C'est là le genre de priorités dont nous voulons entendre parler; nous voulons savoir quelles priorités, à votre avis, devraient guider le gouvernement dans le prochain budget.

Margaret.

Mme Margaret Tusz: Si vous utilisez cet argent pour des programmes sociaux et des choses du genre, qui sont normalement financés à même nos impôts, alors l'assurance-emploi n'est au fond qu'une autre taxe à laquelle nous donnons un nom différent.

Je suis totalement en faveur de refaire notre filet de sécurité sociale de toutes les façons possibles; cependant, si vous utilisez ces fonds, j'en déduis que vous avez là un excédent en raison des règles sévères que nous avons pour déterminer qui a droit aux prestations d'assurance.

Je vous soumets qu'il y a moyen d'ouvrir le filet de sécurité pour les gens qui perdent leur emploi, tout en consacrant de l'argent pour aider les gens qui sont aux prises avec des problèmes d'ordre économique ou social ou autre. Mais main dans la main, si en fait nous faisons de l'argent là-dessus—et j'ignorais que c'était censé être une entreprise lucrative, je pensais que c'était censé être en équilibre, de manière à ce qu'il y ait assez d'argent dans la cagnotte pour aider les gens qui ont perdu leur emploi—alors de toute évidence nous en prélevons trop, et peut-être que nous devrions changer les règles afin que les gens puissent en profiter davantage. Nous voyons beaucoup de gens dans les banques alimentaires qui ne sont pas éligibles à l'assurance-emploi—ils n'y ont peut-être pas contribué assez longtemps, je ne sais trop. Je dirais qu'une grande part de l'excédent est attribuable à cela.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Monsieur Holloway.

M. Les Holloway: C'est exactement ce que j'allais dire.

M. Juan Telez: Puis-je ajouter à ce commentaire?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Non. Madame LeFort a la parole, s'il vous plaît.

Mme Susan LeFort: Je n'ai qu'une brève question. Je voudrais savoir combien d'argent est consacré aux programmes sociaux au niveau fédéral. Quel pourcentage du budget fédéral est consacré aux programmes sociaux?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Cela dépend de ce dont vous tenez compte. Il y a un moment, le chiffre était d'environ 39 milliards.

Mme Susan LeFort: Qu'est-ce que ça représente en pourcentage de l'ensemble du budget fédéral?

Le vice-président (M. Nick Discepola): En incluant le paiement de la dette? Si vous prenez les paiements de l'intérêt de la dette...

Mme Susan LeFort: Je parle de programmes sociaux, alors je parle d'éducation...

Le vice-président (M. Nick Discepola): D'accord, mais en pourcentage de quel budget? Incluez-vous les quelque 40 milliards de dollars en paiement d'intérêts, ou les excluez-vous?

Mme Susan LeFort: Je ne parle que du budget fédéral.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Le chiffre était d'environ 39 milliards. Qu'est-il maintenant?

C'est une question très difficile à résoudre. Si nous prenons les prestations aux personnes âgées, par exemple, c'est 22,9 milliards. Si nous prenons les programmes d'assurance-emploi, c'est 12,6 milliards. Nous parlons donc d'environ 35 milliards que nous versons.

M. Yvan Loubier: Pas les cotisations à l'assurance-chômage. Le gouvernement fédéral ne paie pas pour cela.

Mme Susan LeFort: Mais quel est le pourcentage?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Voulez-vous inclure les paiements de péréquation aux provinces?

M. Ian Tay Landry: Ils font partie de nos dépenses.

Mme Margaret Dusz: L'ensemble du budget.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vais expliquer la réponse, puisque c'est enregistré: c'est environ 34,7 milliards de dépenses en programmes sur un total de 105 milliards consacrés aux programmes, environ.

Mme Susan LeFort: Ce qui revient à quel pourcentage?

Le vice-président (M. Nick Discepola): C'est environ 33 p. 100 ou quelque chose comme ça.

• 1445

Je n'ai pas été aux finances depuis deux ans, mais les chiffres n'ont pas changé tant que ça depuis mes deux premières années, il y a environ quatre ans.

Je crois que monsieur Holloway a la parole.

M. Les Holloway: Non, j'avais quelques commentaires, mais les commentaires ont...

M. Juan Telez: Je voulais simplement répondre à votre question sur ce qu'il faut faire de cela.

Le fait est qu'il y aura un excédent. Nous savons qu'à la fin de l'année il pourrait être de 20 milliards ou de 27 milliards, ou qu'importe.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Même M. Loubier a revu son estimation.

M. Yvan Loubier: Ce sera entre 12 et 15 milliards.

M. Juan Telez: Eh bien, ma réponse à votre question, c'est qu'au lieu de rembourser cet argent, pourquoi n'en consacrerions-nous pas une partie aux groupes communautaires qui sont en mesure de mettre sur pied des entreprises communautaires ou des programmes de formation afin qu'ils puissent augmenter la main-d'oeuvre, les ressources humaines?

Je crois que l'expérience de l'association pour le développement des ressources humaines ici à Halifax est un bon exemple pour votre question. Ce qu'ils ont fait, en somme, c'est qu'ils ont obtenu des fonds d'aide sociale de la municipalité. Ils ont créé une entreprise et employé des gens que bénéficiaient du programme d'aide sociale. Ils ont fourni de l'emploi à long terme, avec tous les avantages qui s'y rattachent.

L'autre solution serait de redonner cet argent aux gens qui bénéficiaient du programme d'aide sociale.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Telez.

Il nous reste quelques minutes, et je voudrais avoir deux autres questions.

[Français]

Nous aurons donc une question de la part de M. Loubier et une dernière de la part de M. Szabo. J'aimerais que ce soit de brèves questions et de brèves réponses.

M. Yvan Loubier: J'aimerais apporter une précision par rapport à ce que M. Pillitteri a dit tout à l'heure. Si le ministre des Finances présentait une politique de construction navale au Canada, on serait les premiers à l'appuyer. Je vous dis tout de suite au nom de mon parti qu'on serait les premiers à l'appuyer. Si le ministre des Finances hésite à élaborer une politique navale parce qu'il a peur d'être en conflit d'intérêts, qu'il ne craigne rien. Comme il n'a pas d'actions de compagnies des Maritimes ou de la MIL Davie au Québec, il n'y a pas de problème.

Deuxièmement, pour ce qui est de l'assurance-emploi, la question n'est pas de savoir si on peut utiliser ces fonds-là ou non, car ces fonds-là n'appartiennent pas au gouvernement fédéral. Par contre, comme le disait un témoin, à l'heure actuelle, il n'y a que 42 p. 100 des gens qui tombent en chômage qui ont droit aux prestations, même si 100 p. 100 des gens paient aujourd'hui. Des plus jeunes aux plus vieux, tout le monde paie. Mais, selon les chiffres du ministère du Développement des ressources humaines, il n'y a que 42 p. 100 des gens qui tombent en chômage qui en bénéficient.

Ceux qui ne bénéficient pas des prestations vont à l'aide sociale, mais étant donné les coupures des transferts fédéraux aux provinces pour financer l'aide sociale, les critères se resserrent là aussi. Par conséquent, certains se retrouvent totalement exclus. Donc, de quelle façon doit-on intervenir avec les surplus de la caisse d'assurance-emploi? Premièrement, en augmentant le montant des transferts et en redonnant l'accès aux prestations d'assurance-emploi à ceux qui l'ont perdu, surtout depuis les deux dernières années et, deuxièmement, en abaissant les cotisations. Avec un surplus de 7 milliards de dollars comme celui de cette année, on peut faire les deux.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Posez votre question, s'il vous plaît.

M. Yvan Loubier: Seriez-vous d'accord que 3 des 7 milliards de dollars du surplus de la caisse de l'assurance-emploi servent à augmenter les transferts et à élargir l'accessibilité de l'assurance-emploi et que l'autre partie, c'est-à-dire les 3 autres milliards, serve à réduire les taux de cotisation? Il ne faut pas oublier que lorsqu'on parle de l'augmentation de la pauvreté, on parle de personnes à revenu moyen qui s'appauvrissent tranquillement parce qu'elles payent des taxes directes et indirectes de plus en plus élevées. Il est possible, avec un surplus de 7 milliards de dollars, de prendre 3 milliards de dollars pour abaisser les taux et 3 autres milliards pour rehausser les prestations. Il va toujours rester un coussin de 1 milliard de dollars.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous auriez dû voter libéral parce que cela faisait partie de notre programme électoral.

M. Yvan Loubier: Oui, mais respectez-le, votre programme. Vous dites des choses en campagne électorale et vous faites le contraire une fois élus.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qui veut répondre à la question?

[Traduction]

Personne? J'en déduis que tout le monde est d'accord, et que vous voterez tous libéral.

Penny.

• 1450

Mme Penny McCall-Howard: Peut-être.

À mes yeux, l'un des éléments les plus importants du programme de l'assurance-emploi est que les personnes qui y contribuent et celles qui en sont les bénéficiaires éventuels ne constituent pas un groupe isolé. Ces personnes appartiennent à tous les groupes que nous représentons ici—des étudiants, des femmes, des travailleurs, des membres des communautés, des gens de toute race, de toute provenance.

On crée une fausse dichotomie quant on prétend qu'il faudrait investir une partie de l'excédent dans des domaines précis comme l'éducation ou les programmes sociaux. De ce côté-ci de la table, comme l'a dit M. Landry, cela n'a tout l'air d'une stratégie du «diviser pour régner». En réalité, comme vous l'avez dit, les enfants pauvres sont souvent le produit de familles pauvres. Si les familles reçoivent des prestations d'assurance-emploi, peut-être faudra-t-il moins investir dans un programme d'aide aux étudiants. Les liens sont tricotés serrés dans ce domaine.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Madame LeFort, s'il vous plaît.

Mme Susan LeFort: Je crois que nous oublions que les gens qui reçoivent des prestations d'aide sociale sont aussi des travailleurs. Il se trouve qu'ils sont sans emploi, et qu'ils ont besoin de l'aide sociale. Ils ne reçoivent rien du système d'AE, alors l'investissement de cet argent dans ces programmes sociaux leur permettrait d'en bénéficier, parce qu'ils n'y ont pas accès autrement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Vous voyez ce qu'il advient quand on ouvre une deuxième série de questions? C'est comme si on se fourrait dans un guêpier.

Monsieur Pillitteri, soyez très bref.

M. Gary Pillitteri: C'est très court, mais il a eu le droit de faire des commentaires, monsieur le vice-président.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne veux pas discuter avec vous. Soyez bref.

M. Gary Pillitteri: L'AE est un impôt. J'ai été un employeur, et je le suis encore. Je paie 60 p. 100 de ce dollar. C'est 60 p. 100 contre 40 p. 100, mais je ne suis jamais admissible. Les travailleurs ne sont pas les seuls à subir les conséquences. Je ne suis pas admissible à titre d'employeur. Toute société ou tout individu qui embauche d'autres personnes n'est pas admissible. C'est donc un impôt.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Pillitteri.

Monsieur Szabo, s'il vous plaît.

M. Paul Szabo: Il y aura probablement des consultations pancanadiennes sur l'AE. Plus j'entends les commentaires, monsieur le vice-président, plus je m'aperçois que nous aurions dû clarifier un point dès le début: il n'existe pas de compte où l'on verse l'excédent de l'AE, aucun compte en banque où l'on aurait déposé l'argent en attendant de décider quoi en faire. Le gouvernement du Canada a un seul compte en banque, que l'on appelle le Trésor. Depuis 1986, on y a versé entre autres les primes d'AE qui ont été perçues, en soustrayant les demandes réglées et autres éléments.

La soi-disant caisse de l'AE est le fruit d'une analyse. Ce n'est pas un fonds au sens commun, que l'on peut investir où bon nous semble. Il faut garder à l'esprit cet élément très important. Il n'y a pas de liquidités en circulation. Quand le gouvernement fait état des excédents et des déficits à la fin d'un exercice, il englobe tous les postes, y compris l'analyse de la caisse de l'AE.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Était-ce une présentation, ou avez-vous une question?

M. Paul Szabo: Non. J'ai une question.

Dans l'analyse courante du programme de l'AE, bien que les entrées d'argent soient supérieures aux sorties (soit l'argent consacré au règlement des demandes, à l'administration, à la formation, etc.), la situation peut toujours changer. En fait, on estime que les sorties pourraient équivaloir à 12 ou 13 milliards de dollars si une récession frappait et si le taux de chômage augmentait. Ces sommes équivalent à l'écart négatif entre les entrées et les sorties en une année. Il faut donc prévoir des réserves.

J'aimerais que tous répondent à la question suivante: si vous comprenez réellement la position de trésorerie, ainsi que les opérations et les rapports que doit faire le gouvernement, seriez-vous en faveur de la proposition suivante du Conseil national des chefs d'entreprises (déposée hier devant nos homologues qui tiennent des audiences dans l'Ouest): il faudrait réduire graduellement les primes d'AE chaque année, très progressivement. Le solde se traduirait par un bénéfice pour les Canadiens, car ils pourraient faire des économies d'impôt.

• 1455

J'aimerais beaucoup recevoir les commentaires brefs de chacun des groupes sur cette question. Préféreraient-ils des réductions d'impôt ou...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, Paul. Laissons la chance à chacun de répondre, s'il vous plaît.

Margaret, Jessica, puis monsieur Holloway.

Mme Margaret Tusz: Je préférerais que l'AE soit restructuré de sorte que les travailleurs puissent y avoir accès. Élargissons les critères d'admissibilité afin que les prestations soient accessibles au plus grand nombre.

Mme Jessica Squires: Je suis d'accord. J'ajouterai qu'il est nécessaire de prévoir des réserves, bien entendu, pour tenir compte de l'ensemble des facteurs d'une crise économique. La caisse de l'AE fonctionne ainsi depuis longtemps. Cependant, l'excédent actuel est plus élevé que nécessaire. Tout dépend de qui fait l'estimé et quel niveau de réserve est jugé nécessaire. Je ne suis certes pas d'avis qu'il faille permettre des réductions d'impôt, et encore moins des réductions des cotisations de l'employeur.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Holloway, s'il vous plaît.

M. Les Holloway: Je suis d'accord avec cela. Je crois que ce que Paul essayait de dire, si j'ai bien compris, c'est que l'argent a déjà été dépensé.

M. Paul Szabo: C'est exact.

M. Les Holloway: S'il a déjà été dépensé, alors cet exercice est tout simplement du transfert d'argent entre des enveloppes. Dans ce cas, nous sommes certainement d'accord avec les interlocutrices qui m'ont précédé.

J'aimerais élaborer un peu sur un thème abordé: le retour aux niveaux de prestations qui prévalaient avant les restrictions. Il faudrait élargir l'admissibilité. Les syndicalistes se sont toujours battus pour que les travailleurs à temps partiel aient droit à l'AE. Ce sont les employeurs qui s'y opposent, pas les syndicats. Nous demandons que le programme soit élargi avant que l'on fasse quoi que ce soit d'autre avec les excédents.

Enfin, pour revenir sur un commentaire de Margaret, il faut comprendre que l'excédent résulte principalement des compressions massives de l'AE. On ne peut certes pas invoquer la création d'emplois. L'accès est encore plus restreint, de plus en plus et, si un travailleur réussit à être admissible, les prestations sont négligeables.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Holloway.

Voici, pour répondre clairement à la question de Susan, des chiffres obtenus après vérification:

Pour ce qui est des prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti, on parle de 22,9 milliards de dollars. Pour les prestations d'assurance-emploi, c'est 12,6 milliards de dollars. Ce sont des transferts d'argent aux individus. Le TCSPC, distribué aux provinces, équivaut à 26 milliards de dollars, et les paiements de péréquation, aussi pour les provinces, s'élèvent à 8,5 milliards de dollars. Les dépenses pour les programmes sociaux totalisent 69,5 milliards, sur un budget total de 104,5 milliards, sans les paiements des intérêts sur la dette.

[Français]

M. Yvan Loubier: Monsieur le président, pour les fins de la compilation, vous n'avez pas à inclure les prestations d'assurance-emploi parce que le fédéral ne paie pas un cent là-dedans. C'est tout simplement prendre l'argent d'une main et le distribuer à l'autre.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Elle peut invoquer tous les points qu'elle veut. C'est l'essence des discussions en politique. Nous ne sommes jamais d'accord. Comme vous le voyez, la décision la plus difficile de ce comité est de démêler les différentes interprétations de chacun sur certaines questions.

Je vous remercie personnellement d'avoir pris le temps de nous faire part de vos points de vue. Le défi est grand, car nous devons tenir compte de tous les points de vue entendus dans le pays dans notre rapport, de sorte que M. Martin et le gouvernement, indirectement, puissent les refléter dans le prochain budget. Pour ma part, je suis content d'être libéral parce que nos budgets sont toujours équilibrés, et non extrémistes.

Nous prendrons une pause de cinq minutes en attendant nos prochains témoins.

• 1459




• 1512

Le vice-président (M. Nick Discepola): Chers collègues, il y a eu un malentendu.

[Français]

M. Boudreau a fait trois heures de route pour venir témoigner au sujet de la fusion des banques, croyant que ce sujet était à l'ordre du jour aujourd'hui. Malheureusement, nous avions prévu débattre de ce sujet demain seulement. Si vous me le permettez, j'accorderai les 30 prochaines minutes à M. Boudreau parce qu'il devra encore faire trois heures de route pour rentrer chez lui ce soir. Je sais que nous ne modifions habituellement pas notre ordre du jour ainsi, mais avec votre collaboration, j'aimerais que nous puissions accommoder notre témoin qui s'est déplacé pour venir nous rencontrer. De plus, ce qui est plutôt rare, il a préparé sa présentation en français. Avec votre permission, s'il vous n'y voyez pas d'objection, je lui céderai la parole.

[Traduction]

Christine, faut-il adopter une motion visant le changement du cadre de référence, ou poursuivons-nous immédiatement? D'accord. Merci.

[Français]

Est-ce qu'il y a des objections?

[Traduction]

M. Paul Forseth: C'est adopté.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup de votre collaboration.

[Français]

Monsieur Boudreau, comme le veut la tradition, nous vous accordons 10 minutes pour votre allocution, après quoi les députés vous poseront des question pendant 15 à 20 minutes. Je vous remercie d'être venu témoigner et vous souhaite la bienvenue. Nous nous excusons du malentendu qui s'est produit.

M. Gérald C. Boudreau (témoigne à titre personnel): Monsieur le président, merci beaucoup de m'accueillir de cette façon.

Mesdames et messieurs, le but de cette communication d'aujourd'hui est de partager avec vous mes idées sur les projets de fusionnement des banques au Canada. D'abord, permettez-moi de préciser que je me présente devant vous en qualité de laïque et de client fidèle de la Banque Royale du Canada plutôt qu'en tant que spécialiste en matière économique et financière.

En second lieu, j'aimerais partager avec vous quelques constatations que je fais dans le monde de l'économie et des finances. La première est la mondialisation du marché et des finances. Les frontières des pays deviennent de moins en moins importantes lorsqu'on considère, par exemple, le libre-échange de l'Amérique du Nord, le marché commun européen et sans doute d'autres que je ne connais pas pour le moment.

Le gouvernement du Canada a tenté à plusieurs reprises de convaincre la population canadienne que nous devions être compétitifs et ouvrir le marché nord-américain au-delà des frontières canadiennes. Je suppose que c'est une raison semblable qui a motivé les pays européens à en faire autant. Une conclusion plausible, me semble-t-il, c'est que notre marché canadien était trop restreint et devait englober, pour évoluer et se développer, un marché beaucoup plus large et important.

• 1515

Une autre constatation, c'est l'effet que les marchés financiers de pays situés à l'autre bout du globe ont sur les marchés nord-américains, particulièrement sur le marché canadien, sans parler de l'effet considérable que le dollar américain a sur l'économie canadienne. Que ce soit les problèmes bancaires du Japon, par exemple, ou la valeur du rouble en Russie, le marché canadien est à la merci des aléas monétaires de ces juridictions sur lesquelles nous avons très peu de contrôle, sinon aucun.

Aussi, on constate que des magasins à grande surface comme Wal-Mart et des compagnies de communication comme AT&T et Sprint sont autorisés à faire affaire sur notre territoire canadien. La présence de ces géants des affaires force les compagnies canadiennes à concurrencer celles de l'étranger. Si elles n'en sont pas capables, elles disparaissent. Cependant, quand on fait concurrence à ces grandes compagnies étrangères, c'est le consommateur qui en sort gagnant, précisément en raison de cette concurrence souvent impitoyable.

Finalement, en remontant aux origines de notre pays même, on voit qu'un des principaux facteurs qui ont contribué à la formation de la Confédération canadienne en 1867 a été le facteur économique. Lors d'un débat sur l'union en 1865, le ministre des Finances du Canada-uni, Alexander T. Galt, s'exprimait en ces termes, et je cite:

    Un des avantages les plus grands et les plus immédiats qui devraient naître de cette union sera le renversement des tarifs prohibitifs et l'ouverture du marché de chacune des colonies aux produits de l'industrie de toutes les autres.

Ici encore, l'ouverture à une plus grande échelle et à une plus grande compétitivité semble être le mot d'ordre. Vu toutes ces constatations, il me semble qu'il existe un certain rapport entre celles-ci et le scénario auquel font face les banques canadiennes. Si les banques canadiennes prétendent résister à la concurrence accrue des grandes banques étrangères, surtout de nos voisins du Sud, il faut que les banques canadiennes soient plus grandes et plus puissantes pour faire concurrence à celles-là. Il faut, à mon avis, invoquer le même principe qui a été utilisé pour ouvrir et étendre le marché libre à l'Amérique du Nord. Autrement, les banques canadiennes, trop modestes sur le marché mondial, vont subir le même sort que certaines compagnies canadiennes qui n'ont pas su concurrencer sur un pied d'égalité les multinationales qui se sont répandues sur le territoire canadien.

Pour jouer le même jeu ou pour combattre à égalité, il faut avoir des équipes du même calibre. Reléguons les histoires bibliques de David et Goliath au domaine où elles appartiennent. Les banques canadiennes, prises individuellement et dans leur état actuel, ne réussiront pas à se mesurer aux mégabanques des autres pays, et si les banques canadiennes ne sont pas à la hauteur de la concurrence internationale, il me semble certain que ce sont les intérêts bancaires étrangers qui vont prévaloir et prédominer. Par conséquent, les banques canadiennes risquent de se faire engloutir.

Cela ne veut cependant pas dire que les banques canadiennes doivent abandonner leur responsabilité envers leur clientèle. Au contraire, qu'elles soient fusionnées ou non, les banques canadiennes doivent poursuivre leur mission de bien servir leur clientèle, comme le fait d'ailleurs la Banque Royale du Canada, en particulier ma propre succursale à Pointe-de-l'Église. Nos législateurs doivent voir à cela. Avec une bonne loi et de bons règlements, je suis certain que les banques canadiennes peuvent devenir plus grandes et plus compétitives sur le marché international tout en maintenant un bon service à leur clientèle. De toute façon, le service à la clientèle va nécessairement devenir avec les années de plus en plus automatisé et informatisé. Personnellement, je préfère de beaucoup être servi par une banque canadienne géante plutôt que par une banque géante étrangère, ce qui pourrait devenir le cas si les banques canadiennes ne réussissent pas à demeurer compétitives devant l'assaut des mégabanques étrangères et se font absorber par celles-ci.

• 1520

En guise de conclusion, je constate qu'il y a une certaine vogue de fusionnement. Les gouvernements de notre beau grand pays ne cessent de nous convaincre qu'il faut consolider les différents services et organismes de notre société. Pensons par exemple au fusionnement des municipalités pour former des mégamunicipalités urbaines, au fusionnement des conseils scolaires pour en réduire le nombre et en faire de très grands et au fusionnement des services de santé centrés dans des agglomérations beaucoup plus grandes. Peut-on nous dire honnêtement que tout ce remaniement organisationnel imposé par les législateurs est destiné à offrir un meilleur service à la clientèle? Je me permets d'en douter et de conclure que c'est plutôt pour des raisons de compétitivité et d'économie. Pourquoi donc en serait-il différent pour les banques canadiennes qui opèrent en grande partie dans la même société?

Nous, les Canadiens, ne sommes pas moins ingénieux que les autres. J'ose même me convaincre que nous sommes plus astucieux. Si les législateurs accordent aux banques canadiennes les outils nécessaires et les moyens de concurrencer, je demeure persuadé que celles-ci pourront survivre et réussir vaillamment sur le marché international.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Boudreau.

Je vais céder immédiatement la parole à M. Forseth.

[Traduction]

Nous prendrons 15 ou 20 minutes pour poser des questions à M. Boudreau. Chacun aura son tour si nous collaborons.

M. Paul Forseth: Merci.

Vous recommandez donc que l'on aille de l'avant avec les fusions proposées?

[Français]

M. Gérald Boudreau: Oui.

[Traduction]

M. Paul Forseth: Il s'agit certes de la position du gouvernement. Notre parti, au contraire, estime que, si nous étudions le dossier des fusions, il faudrait à tout le moins discuter de l'ensemble des règles. Il faut parler non seulement des fusions d'institutions, mais de tous les types de fusion. De ce que les banques ont le droit de faire et peut-être de la reformulation des règles.

C'est pourquoi les assureurs sont visés—location d'automobiles et problèmes technologiques, employés de banques, etc., et toute la question de la puissance des banques. Avez-vous établi les conditions qui devraient être respectées si on donne le feu vert aux fusions?

[Français]

M. Gérald Boudreau: Je n'ai pas de conditions particulières, sauf que je suis d'accord avec vous qu'en ouvrant cette question du fusionnement, on ouvre bien d'autres affaires. Il faudra des règlements et une loi pour contrôler les services que l'on va offrir à partir de ces banques géantes. Je dois répéter je ne suis qu'un client et non un expert dans le domaine, mais je constate quand même que les grandes banques qui font déjà des affaires sur le territoire canadien ou qui se proposent de le faire ont plusieurs services qu'elles peuvent offrir à leurs clients.

Je suis d'avis que si on ne permet pas aux banques canadiennes de concurrencer ces banques sur un pied d'égalité, ce sont les banques canadiennes qui vont finir par se faire engloutir. Il faudra qu'elles s'étendent, oui. Il faudra que les législateurs contrôlent ce genre de fusionnement, mais il me semble que cela devient nécessaire aujourd'hui.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Comprenez-vous que, à cause des règles, les banques sont très bien protégées? Vous pouvez peut-être nous dire ce qui, de votre point de vue de consommateur, changera dans les faits. Quel effet aura sur les services bancaires la fusion de la Banque Royale? Outre les projections quant à la puissance planétaire, quel changement considérez-vous comme étant un avantage pour vous?

• 1525

[Français]

M. Gérald Boudreau: Je préfère faire affaire avec une banque qui a des intérêts canadiens plutôt qu'avec une banque étrangère. Je ne voudrais pas voir, que ce soit à court ou long terme, disparaître les services des banques canadiennes que nous avons présentement, qu'elles soient fusionnées ou non. Je ne veux pas voir les banques étrangères s'établir sur notre territoire sans que les banques canadiennes aient eu la chance de concurrencer ces banques-là. À mon avis, elles ne sont présentement pas en mesure de le faire.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Monsieur Pillitteri, s'il vous plaît.

M. Gary Pillitteri: Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Boudreau, le Comité des finances a déjà entendu à Ottawa trois présidents de banques. J'ai participé aux travaux d'un autre comité, le groupe de travail libéral sur les fusions des banques; et maintenant, nous avons formé le groupe de travail MacKay.

Les présidents des grandes banques ont tous admis que leur institution est plus avancée sur le plan technologique que quiconque dans le monde—il faut entendre, que nos voisins du sud de la frontière, leurs vrais concurrents. Ils n'ont pas dit qu'ils avaient atteint une taille suffisante. Ils les ont vendues, comme on dit, pour une bouchée de pain. Ils confient la responsabilité de la paye à nos voisins du sud. Toutefois, la règle du 10 p. 100 existe toujours et elle n'est pas prête d'être changée. Personne ne peut posséder plus que 10 p. 100 de nos 6 banques à charte.

D'autres banques sont venues témoigner—les compétiteurs, comme ils les appellent—, dont Wells Fargo, Capital One Bank, et Capital Investment Component. La liste est longue. Ces banques ne sont pas prêtes à venir s'installer au Canada et à fonctionner comme des institutions de dépôt—à devenir les institutions de dépôt des institutions régies par l'assurance-dépôts.

Deux ou trois des présidents nous ont dit qu'ils n'avaient jamais rencontré de défi si grand qu'ils aient dû renoncer. Une fois que vous avez entendu toutes ces raisons—et le gouvernement canadien a accordé ces six franchises—et compte tenu de la protection dont elles bénéficient, pourquoi doivent-elles devenir plus grandes?

Nous ne sommes pas prêts de changer les règles... Nous allons les abroger. Pour ce qui est de l'ouverture à la concurrence, les sociétés d'assurances ont le droit depuis 1992 d'ouvrir des succursales bancaires, mais elles n'en ont pas profité. Alors comment peut-on invoquer que la croissance permettra d'offrir un meilleur service à la clientèle?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Pillitteri.

[Français]

Monsieur Boudreau, est-ce que vous aimeriez intervenir?

M. Gérald Boudreau: Vous entrez dans un domaine plutôt technique.

[Traduction]

Ce sont des considérations plutôt techniques, et je ne suis pas sûr de vouloir m'aventurer sur ce terrain, parce que je n'ai pas les qualifications requises.

[Français]

J'aimerais revenir sur les constatations que j'ai faites. Si les fusions ne sont pas bonnes et se font au détriment de la clientèle, pour quelles raisons a-t-on élargi le libre-échange à toute l'Amérique du Nord? Est-ce que le Canada ne pouvait pas se suffire à lui-même sur ce plan-là? Pourquoi avoir étendu le libre-échange? Pourquoi fusionner des municipalités, comme la grande municipalité de Toronto et bien d'autres? C'est ce que je ne comprends pas.

On semble vouloir nous dire que dans certains domaines, être plus grand, c'est mieux; on fonctionne mieux, on économise, on a plus de compétitivité et tout. Mais ici, on veut garder nos banques comme elles sont.

• 1530

Pourquoi les banques des autres pays se fusionnent-elles? Pourquoi les grands manufacturiers d'automobiles se fusionnent-ils? Il doit y avoir un avantage quelconque.

[Traduction]

M. Gary Pillitteri: Elles ne sont pas dans un environnement protégé. Les autres banques qui souhaitent s'installer au Canada ne veulent pas faire la même chose que nos banques. C'est très différent si des entreprises veulent se lier pour améliorer les choses. Toutefois, ces banques sont assez grosses pour être concurrentielles à l'échelle internationale.

Nos institutions bancaires sont parmi les plus concentrées du monde—seules celles de la Hollande, je crois, sont plus grandes—, et elles offrent un excellent service au Canada si on compare avec celui offert aux États-Unis, en Europe ou ailleurs. Je ne vois pas pourquoi il faudrait changer la qualité de ce service—elles pourraient continuer de la même façon. Les banques, telles que Wells Fargo, qui veulent venir ici n'ont aucune racine dans ce pays. On ne les force pas; elles n'ont aucune raison de se fusionner. Aucune raison valide n'a été émise jusqu'à maintenant.

[Français]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que vous avez des commentaires, monsieur Boudreau?

D'accord.

Monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier: Monsieur Boudreau, bonjour. J'ai bien aimé votre présentation. Vous avez mis le doigt sur une réalité qui évolue. Vous parlez constamment d'évolution et d'ouverture des marchés. Ce que bien des gens ne comprennent pas à l'heure actuelle, c'est que dans un avenir rapproché, dans sept, huit ou dix ans au plus, les activités bancaires du passé, même celles d'aujourd'hui, et l'ensemble des activités du secteur financier ne ressembleront pas du tout à celles d'aujourd'hui. Elles vont changer complètement et évoluer encore plus vite qu'elles n'ont évolué jusqu'à présent.

Même si des futuristes nous laissaient présager ce fait il y a une dizaine d'années, personne ne croyait qu'on aurait chez nous un micro-ordinateur qui nous permettrait d'effectuer des paiements de nos comptes et de faire des transferts d'argent d'un compte à l'autre. Pourtant, c'est aujourd'hui une réalité. La monnaie de plastique est elle aussi devenue une grande réalité depuis une douzaine d'années. Personne ne s'imaginait auparavant qu'on se retrouverait là. Alors, comment peut-on imaginer que dans sept ou huit ans, le secteur financier sera pareil à ce qu'il est aujourd'hui? Ce n'est pas possible.

Comme vous l'avez mentionné, s'il y a tant de fabricants d'automobiles, de compagnies d'assurances, d'institutions dans le secteur du crédit-bail—ici on parle de GM—qui ont éprouvé le besoin de se fusionner, cela doit être payant quelque part. J'écoutais l'autre jour le représentant de la Banque Royale qui disait que sa banque et la Banque de Montréal déboursent actuellement des coûts d'entretien de 1,4 milliard de dollars par année pour leur réseau électronique et que leurs deux réseaux sont identiques. En se mettant ensemble, ils pourraient probablement économiser là-dessus. C'était là ma remarque.

Je passe maintenant à ma question. On a parlé de banques qui se fusionnent et de l'entrée de banques étrangères ou d'autres entreprises de services financiers avant que nos propres banques soient en mesure de les concurrencer. Mais sommes-nous assurés que nous sommes les seuls à décider là-dedans? Vous avez mentionné qu'en raison de l'Accord de libre-échange nord-américain et des accords du GATT et de l'OMC, il y a d'autres partenaires commerciaux qui mettent des choses sur la table, et la négociation va faire en sorte qu'à un moment donné, le marché sera plus ouvert qu'il l'est aujourd'hui.

Dans ces circonstances, et étant donné que des banques canadiennes vont chercher à peu près 40 p. 100 de leurs revenus à l'étranger, est-ce que vous ne pensez pas que l'ouverture des marchés va arriver plus vite qu'on le pense? Il serait difficile pour le Canada de dire: «Attendez, on va se préparer pendant les 10 prochaines années pour que nos banques soient vraiment concurrentielles», puisque déjà nos propres banques vont puiser 40 p. 100 de leurs revenus à l'étranger. Elles n'ont pas demandé à leurs concurrents étrangers une période de transition.

M. Gérald Boudreau: Oui, je suis d'accord avec vous. Je pense que le moment est venu d'envisager sérieusement d'avoir des joueurs de qualité égale pour pouvoir concurrencer sur ce marché. Le marché ne se limite pas à l'Amérique du Nord. C'est un marché mondial. En tout cas, c'est ce que je constate aujourd'hui. Que ce soit le rouble en Russie, les problèmes bancaires du Japon, en Asie ou dans n'importe quel autre pays, tous ont une influence sur notre économie aujourd'hui. Ce n'est plus une question d'Amérique du Nord; c'est plutôt mondial. C'est la mondialisation des marchés, de l'économie, de l'échange, de tout.

• 1535

M. Yvan Loubier: Si vous n'étiez pas client de la Banque Royale mais plutôt d'une autre banque ou institution financière qui n'a pas de projet de fusion, souhaiteriez-vous que le rapport MacKay contienne d'autres recommandations pour appuyer ceux qui ne veulent pas se fusionner ou des mesures qu'ils pourraient prendre, telles des alliances stratégiques? Est-ce que vous seriez de ceux qui souhaiteraient qu'en même temps qu'on accepte les fusions, on offre à ceux qui ne veulent pas se fusionner tous les outils compétitifs nécessaires pour créer des consortiums ou des alliances stratégiques afin de se renforcer eux-mêmes?

M. Gérald Boudreau: Peu importe que je sois client de la Banque Royale ou d'une autre banque, je suis en faveur du fusionnement. Il se trouve que je vis à la campagne et que c'est la Banque Royale qui a une succursale à cet endroit. Si je faisais affaire avec la Banque de Nouvelle-Écosse, par exemple, je pense que j'aurais les mêmes idées concernant le fusionnement.

M. Yvan Loubier: Comme consommateur, une plus grande concentration ne vous fait pas peur?

M. Gérald Boudreau: Non.

M. Yvan Loubier: Ne craignez-vous pas une hausse du prix des services ou de l'accès à ces services-là?

M. Gérald Boudreau: Je pense que d'une certaine façon, le prix des services sera contrôlé par la concurrence, mais aussi par certains règlements que le législateur ou les banques elles-mêmes mettront en place. Ce ne sont pas toutes les banques qui veulent se fusionner à ce moment-ci. Il y a quatre banques qui se sont montrées intéressées à se fusionner avec une autre banque, mais à mon avis, les autres banques vont suivre un jour.

M. Yvan Loubier: Lorsque la Banque Royale vous dit qu'elle ne fermera pas sa succursale dans votre village, cela vous convient?

M. Gérald Boudreau: Monsieur, on a parlé tout à l'heure de la technologie. Moi, je fais pratiquement toutes mes transactions bancaires à l'ordinateur.

M. Yvan Loubier: Le fait de ne pas avoir de contact humain avec...

M. Gérald Boudreau: Le contact humain, on peut l'avoir d'autres façons. Pour émettre un chèque ou effectuer un paiement, je n'ai pas besoin de contact humain. Cela se fait à l'ordinateur, et je suis certain que vous le faites pratiquement tous.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Loubier.

Madame Redman, s'il vous plaît.

[Traduction]

Mme Karen Redman: Merci.

J'ai vraiment apprécié votre présentation, que vous nous parliez du ministre des Finances, Alexander Galt. Vous nous démontrez qu'il existe malgré tout de la permanence dans ce monde de changement.

Le groupe de travail MacKay a examiné un ensemble de questions, dont l'une était la pertinence de permettre la fusion des banques, sur laquelle vous vous êtes concentré. Vous dites que ce ne sont pas toutes les banques qui veulent fusionner. Deux propositions de fusion ont été déposées, alors que d'autres institutions, la Banque de Nouvelle-Écosse par exemple, estiment que la fusion ne constituerait pas une bonne décision financière.

Vous avez mentionné que, de population privilégiant les dépôts dans des comptes en banque, nous sommes devenus des acheteurs d'actions et d'obligations offertes dans le marché des valeurs mobilières. Nous sommes friands de REER et de toutes sortes d'autres produits d'investissement. Vous vous présentez ici à titre de consommateur; si vous examinez le modèle que vous avez suivi jusqu'à maintenant pour économiser et pour investir, ne faudrait-il pas examiner l'ensemble des services financiers plutôt que les fusions des banques de façon isolée?

Dr Gerald Boudreau: J'ai compris que c'est ce qui arriverait. Il ne s'agit pas seulement de fusions des banques, mais de tout le domaine bancaire au Canada. Je n'ai pas lu le rapport MacKay. Peut-être aurais-je dû.

Mme Karen Redman: Vous êtes pardonné.

Dr Gerald Boudreau: Je comprends que l'on examinera l'ensemble de la question, et que l'un des aspects sera la fusion des banques.

Mme Karen Redman: M. Loubier a abordé en partie une question que je voulais poser, à savoir la disposition des consommateurs à faire d'autres concessions?

Je représente la circonscription de Kitchener, où se trouvent sept sièges sociaux de société d'assurances. Les vendeurs d'assurances... Nous avons entendu de la part des agences de location d'automobiles d'autres suggestions à l'intention du groupe de travail MacKay qui visent à renforcer les coopératives de crédit et à permettre beaucoup plus de fusions, comme celles que demandent les institutions financières. On a d'abord cru qu'il s'agissait de cas isolés, mais avec le recul, toutes semblent très semblables.

• 1540

Je me demande si, en tant que consommateur, vous croyez que c'est une bonne chose pour les Canadiens.

Dr Gerald Boudreau: Je crois que c'est très bien. On nous a si souvent dit au cours des dernières années que la concurrence était à l'avantage du consommateur. Si elle est si avantageuse, alors donnons le feu vert à la compétition. Si les sociétés d'assurances s'inquiètent d'avoir à partager leur marché avec les banques, elles devraient faire en sorte d'être encore plus concurrentielles.

La concurrence dans la plupart des cas a été favorable aux consommateurs. C'est ce qu'on a entendu si souvent, surtout depuis le débat qui a entouré l'accord de libre-échange. C'est ce que nous entendons constamment. Le consommateur devrait donc sortir gagnant d'une plus forte concurrence.

[Français]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Dans ce qu'on propose, il y aurait moins de concurrence parce qu'au lieu d'avoir à choisir entre six institutions, les consommateurs n'auraient à choisir qu'entre trois ou même deux institutions.

M. Gérald Boudreau: Il y aura peut-être moins de concurrence sur le territoire canadien, mais il y en aura davantage sur le marché international.

Le vice-président (M. Nick Discepola): De quelle manière?

M. Gérald Boudreau: Les banques fusionnées seront mieux placées pour faire concurrence aux autres grandes banques du monde.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Comme vous et les banques l'évoquent, faut-il croire qu'une banque doit être plus grande pour concurrencer les autres? Nonobstant d'autres facteurs tels que la concentration des marchés, même si votre banque et la Banque de Montréal se fusionnaient, ne seraient-elles pas quand même une petite banque à l'échelle mondiale? Je me demande vraiment si les banques doivent se fusionner pour bien concurrencer.

Comme en témoignait le président de la Banque de Nouvelle-Écosse et comme le soulevait Mme Redman, cette banque est en mesure de bien concurrencer, même si elle est petite à l'échelle mondiale. Alors, je ne suis pas convaincu que the bigger, the better.

M. Gérald Boudreau: Il faudrait peut-être parler aux législateurs qui adoptent des lois pour fusionner les différents services dans notre communauté. Pourquoi une plus grande agglomération de municipalités est-elle meilleure qu'une plus petite? Pourquoi un plus grand conseil scolaire est-il meilleur qu'un plus petit?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Parce qu'on économise de l'argent. Si les banques réalisent des économies, je ne suis pas persuadé que les consommateurs seront mieux traités.

Les banques ont un statut juridique privilégié. D'abord, elles peuvent emprunter de l'argent. Elles acceptent des dépôts pour lesquels elles déboursent des intérêts d'environ 3 p. 100 et elles consentent des prêts pour lesquels elles exigent 7 ou 8 p. 100. Les autres institutions financières ne sont pas habilitées à faire la même chose.

Quand on parle de les mettre sur un pied d'égalité, c'est un facteur qu'on ne peut pas vraiment aborder comme législateurs, à moins qu'on accorde les mêmes privilèges aux autres institutions financières, soit d'accepter des dépôts, etc., ce qu'elles ne sont pas prêtes à faire. Alors, vous comprendrez notre dilemme.

Vous avez également un droit privilégié puisque les dépôts sont protégés. Je crois qu'indirectement, si les banques se fusionnaient, si jamais il se produisait une crise économique comme celle qu'on a connue en Asie, ce sont les contribuables qui viendraient au secours de ces grandes institutions.

Nous devons nous pencher sur tous ces aspects. Ce n'est pas aussi simple que de dire qu'on va permettre toutes les autres fusions à cause de la mondialisation, mais qu'on traitera les banques de façon différente. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Gérald Boudreau: Non, je ne pense pas que les banques soient nécessairement différentes sur ce plan-là. À mon avis, tôt ou tard, les banques qui ne se proposent pas de se fusionner maintenant se retrouveront exactement dans la même position que les banques qui se proposent de se fusionner maintenant. Elles ne pourront pas survivre à moins de se mettre en position concurrentielle.

• 1545

M. Yvan Loubier: Il y a autre chose que des fusions. Bien qu'on puisse se fusionner pour grossir, on peut aussi créer des alliances stratégiques entre de petites banques, des compagnies d'assurances ou des compagnies d'administration de fonds communs et former un consortium, ce qui est aussi valable qu'une fusion. Dans le rapport MacKay, on propose ce genre de choses et cela devient intéressant pour tout le monde.

M. Gérald Boudreau: Je suppose que oui.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci infiniment, monsieur Boudreau. Merci aussi à tous nos autres témoins et aux collègues.

[Traduction]

Merci d'avoir été patients et d'avoir laissé la chance à M. Boudreau de livrer son témoignage.

[Français]

Nous sommes conscients que vous devez faire trois heures de route. Nous avons grandement apprécié que vous soyez venu témoigner. Bon retour chez vous.

M. Gérald Boudreau: Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Le comité doit maintenant revenir à l'ordre du jour, conformément au paragraphe 108(2) et à l'article 83.1 du Règlement. Le comité reprend ses consultations prébudgétaires.

Des témoins attendent. Une fois encore, j'aimerais vous remercier de votre collaboration et de votre compréhension. Nous entendrons M. Paul Black, de la Acadia Students' Union; M. Breckenridge, de l'Université Dalhousie, et M. Wilde, à titre individuel. M. Doig et M. Schmid représenteront pour leur part la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce.

Bienvenue, et merci encore. Nous commencerons avec M. Black.

M. Paul Black (vice-président (professeur), Acadia Students' Union): J'aimerais remercier les membres du comité de me donner le privilège de témoigner ici encore une fois.

Beaucoup d'encre a coulé autour des dépenses consacrées à l'éducation dans le budget fédéral 1998; on l'a d'ailleurs surnommé le budget de l'éducation. Il ne faut pas s'arrêter là: il est primordial de continuer d'investir intelligemment dans le secteur de l'enseignement post-secondaire. L'éducation entraîne des dépenses constantes, et aucun gouvernement de grand pays industrialisé ne peut se permettre d'ignorer ou de sous-estimer la valeur d'un tel investissement. Tous les budgets doivent être des budgets de l'éducation.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Veuillez m'excuser, monsieur Black: seriez-vous assez aimable de ralentir le débit? Les interprètes doivent traduire, et ils ont un peu de difficulté.

M. Paul Black: Bien sûr.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous avons amplement de temps.

M. Paul Black: Merci.

Il est notoire que des études post-secondaires sont essentielles pour atteindre un niveau de vie minimal. Il est plus important que jamais que nous donnions à tous les Canadiens des chances égales d'accès aux niveaux supérieurs de l'enseignement post-secondaire.

Les réductions du financement du programme de transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ont eu des conséquences immenses sur les programmes. Les établissements post-secondaires de la Nouvelle-Écosse, qui déjà recevaient le plus bas taux par habitant de soutien aux étudiants dans le pays, ont connu des baisses de 20 p. 100 des inscriptions. Au cours des 5 dernières années, les droits de scolarité ont augmenté de 50 p. 100 dans la plupart des établissements. La dette moyenne d'un étudiant après l'obtention du diplôme a plus que triplé dans les 4 dernières années, et devrait éventuellement augmenter d'un autre 75 p. 100 dans les 7 prochaines années.

Le coût moyen pour une année d'études post-secondaires est de 8 101 $ en Saskatchewan; c'est le coût le plus bas au Canada. On prévoit que, d'ici 2016, le coût moyen d'une année d'études post-secondaires au Canada sera de 27 000 $ au moins. On a procédé à la réduction des effectifs, à des restructurations et à des réductions dans les programmes. Le nombre d'étudiants par classe a monté en flèche et le nombre de professeurs supplémentaires a baissé proportionnellement.

Les Canadiens qui ont encore les moyens financiers de faire des études post-secondaires se demandent si, en raison de la baisse de la qualité, cela vaut encore la peine de s'endetter. Afin d'éviter le fardeau financier associé à l'enseignement post-secondaire, nombreux sont les étudiants qui travaillent pour payer les coûts élevés. Dans les provinces atlantiques, 62 p. 100 des étudiants ayant obtenu leur diplôme en 1996 avaient travaillé durant l'été et durant l'année scolaire pour financer leur éducation post-secondaire. En tant qu'étudiant, je peux vous assurer que cela représente une perte sèche pour les heures consacrées aux travaux et à l'étude.

Ployant sous des dettes élevées et faisant des semaines de travail parfois plus longues que celles de nombreux travailleurs à temps plein, les étudiants sont souvent sans ressources. Ce gouvernement a la responsabilité de les soutenir et de leur faciliter les choses. La santé de la nation est en jeu.

Après ce préambule, je vais répondre aux questions qui m'ont été posées dans la lettre du 28 mai. Elle provenait à cette date de M. Bevilacqua, qui a été remplacé par M. Discepola.

Le budget étant désormais équilibré, quel message aimeriez-vous transmettre au gouvernement relativement aux priorités à considérer pour la distribution des dividendes budgétaires? Le message principal que je veux transmettre au gouvernement serait d'investir avant tout dans la ressource la plus abondante et la plus importante: la population.

• 1550

Comme l'a fait remarquer le premier ministre dans son bulletin de mars-avril 1998, le fossé s'agrandit quant aux possibilités d'emploi pour ceux qui ont un diplôme d'études secondaires et ceux qui ont suivi des études de plus haut niveau.

Les possibilités d'emploi ont augmenté très parcimonieusement pour ceux qui ont fait des études post-secondaires, alors que les possibilités ont diminué de façon exponentielle pour ceux qui ont fait des études secondaires. La déréglementation des droits d'inscription dans les provinces comme l'Ontario a fait grimper d'un cran les obstacles empêchant l'accès à l'enseignement post-secondaire pour les défavorisés.

Une telle situation force les étudiants ayant des difficultés financières à se trouver du travail plutôt qu'à poursuivre leurs études. Malheureusement, je le répète, les possibilités d'emploi sont minimes si on nÂa pas fait d'études postsecondaires.

On ne peut considérer que le fonds des bourses du millénaire du Canada remédie à ce problème. Bien qu'il profitera à 100 000 étudiants en moyenne, qui recevront jusqu'à 3 000 $ par année, il y a actuellement plus de 1,8 million d'étudiants au pays qui font des études postsecondaires. Une petite minorité de ces étudiants bénéficieront de ce fonds, qui leur permettra de payer une partie des coûts exorbitants des études.

Ces raisons devraient inciter le gouvernement à continuer d'investir dans la population. Autrement, les possibilités continueront de diminuer.

Sans une population éduquée, ce pays encourt un très grand risque d'atrophie financière, parce qu'il devra soutenir de plus en plus de personnes qui n'ont pas de diplôme post-secondaire par des programmes sociaux tels que l'assurance-emploi. L'investissement que pourrait faire le gouvernement dans l'éducation post-secondaire aujourd'hui est ridicule si on le compare au prodigieux fardeau social qui le menace. Parmi les autres priorités pouvant apparaître au bloc-notes du gouvernement, très peu auront autant de conséquences que l'enseignement post-secondaire.

Je suggère donc les investissements stratégiques et les changements suivants au régime fiscal afin d'affronter la nouvelle situation économique.

Un fonds de bourses du millénaire accordé en fonction des besoins financiers représente un pas dans la bonne direction. Cependant, ce fonds aidera 100 000 étudiants chaque année: il en exclut 1,7 million.

Des bourses d'entretien, des bourses d'études, des subventions, un programme d'aide—peu importe le terme choisi—devraient s'adresser particulièrement à des étudiants qui traditionnellement n'ont pas accès aux études post-secondaires. Cette mesure viserait l'assouplissement de l'accessibilité, et constituerait un investissement stratégique de grande valeur.

Une anomalie déconcertante entache le Programme canadien de prêts aux étudiants: le gouvernement paie les intérêts sur les prêts accordés aux étudiants à temps plein, jusqu'à concurrence de six mois après l'obtention du diplôme. Les étudiants à temps partiel, par contre, doivent payer des intérêts sur les prêts du gouvernement pendant leurs études.

De nombreux étudiants à temps partiel se trouvent dans des conditions particulières: ce sont souvent des chefs de famille monoparentale, des handicapés, ou encore ils sont très pauvres et ne peuvent se permettre d'étudier à temps plein. Le traitement différent que leur réserve le gouvernement découle de la supposition que, s'ils étudient à temps partiel, c'est parce qu'ils travaillent en même temps. Il faut voir la dichotomie dans le régime d'aide et éliminer cet obstacle supplémentaire à l'accès à l'enseignement post-secondaire.

Je suggère à cet égard que le gouvernement paie les intérêts pour les prêts accordés aux étudiants qui suivent 20 p. 100 des cours constituant une charge normale, jusqu'à concurrence de 6 mois après l'obtention du diplôme.

Le 1er janvier 1997, Revenu Canada a stipulé que les primes d'assurance-emploi seraient perçues dès le premier dollar gagné. Auparavant, la plupart des emplois sur les campus, la plupart du temps des charges de cours, n'étaient pas imposables. Mais depuis, 0,27 $ de chaque dollar gagné par un étudiant est remis au gouvernement. C'est une situation inacceptable parce que très peu d'étudiants sont admissibles à l'assurance-emploi.

Les fonctionnaires ont décidé que les étudiants pouvaient récupérer cet argent en retour d'impôt s'ils ont gagné moins de 2 000 $ dans l'année. On oublie que la plupart des étudiants, sinon la totalité, doivent gagner plus de 2 000 $ par année s'ils veulent faire des études.

Étant donné que, malgré la montée vertigineuse des coûts de l'éducation, les modalités du Programme canadien de prêts aux étudiants restent inchangées, les étudiants doivent trouver l'argent quelque part.

Ces changements ont certes eu des effets négatifs directs pour les étudiants, et d'autres effets plus diffus. Par exemple, les employés contribuent au fonds de l'AE, et l'employeur aussi est mis à contribution. Pour chaque 0,27 $ versé par les étudiants, l'employeur, soit l'université, verse 0,378 $ supplémentaires. C'est une nouvelle dépense pour les universités, qui se battent déjà avec des budgets étriqués.

L'excédent estimé de 5 milliards de dollars dans la caisse de l'AE, pour cette année seulement, remet en question le bien-fondé de prélever des impôts auprès de personnes qui sont très peu susceptibles de recevoir des prestations en cas de besoin.

Le Canada doit se rendre compte qu'il a ainsi encore ébranlé la situation financière précaire des étudiants, et prendre des mesures afin d'exempter les étudiants occupant des emplois sur les campus de payer des primes d'AE. Ce serait là un investissement stratégique dans la jeunesse canadienne.

Comment pouvons-nous préparer les Canadiens à profiter des nouvelles possibilités économiques? Nous pouvons faire en sorte que tous les Canadiens aient des chances égales de tirer profit de cette nouvelle ère, en mettant en place un système d'éducation financé par le gouvernement, accessible, normalisé et de haute qualité. Afin de faire en sorte que les Canadiens soient à tout le moins préparés à profiter des possibilités offertes au pays, il faut favoriser l'accès complet à l'éducation, de la maternelle aux niveaux supérieurs de l'enseignement post-secondaire, pour tous les citoyens.

• 1555

Le meilleur moyen pour le gouvernement de favoriser les meilleures possibilités d'emplois pour les étudiants dans la nouvelle économie est de leur fournir des emplois. En effet, ils ont besoin d'expérience pour se trouver un emploi, et ils doivent travailler pour acquérir de l'expérience. Ce cercle vicieux est devenu une difficulté de taille, sur les plans social et économique.

Le chômage chez les jeunes stagne à 20 p. 100 dans les Maritimes depuis plusieurs années. Après l'obtention du diplôme, il faut en moyenne trois ans à un étudiant pour se trouver du travail dans son domaine d'études. L'enseignement post-secondaire, jadis le lieu privilégié de la poursuite de la vérité et de la connaissance, est désormais un lieu de préparation au monde du travail. Cela n'est pas nécessairement aussi clair pour tous les professeurs, mais c'est un fait indéniable qu'il faut traiter comme tel.

Les étudiants veulent acquérir de l'expérience de travail pour diverses raisons: ils veulent financer leurs études; ils veulent acquérir l'expérience pratique qui leur permettra de se trouver du travail après leur diplôme; ils veulent développer d'importantes aptitudes générales. Toutes ces raisons sont valides, et il faudrait encourager les étudiants.

Je fais les propositions suivantes afin d'atteindre ces objectifs:

—Maintenir le programme Nova Scotia Links, et l'implanter dans toutes les régions du pays.

—Combiner dans un seul ministère fédéral tous les programmes de stage, et investir les économies réalisées dans la création de nouveaux postes de stagiaires.

—Créer dans chaque région du pays des académies d'instruction et de suivi des stages interdisciplinaires.

En conclusion, j'aimerais exprimer de nouveau ma gratitude envers les membres du Comité permanent des finances qui m'ont consacré leur temps et leur attention. Il n'est pas facile d'établir les priorités financières d'une nation et de faire en sorte qu'elles transpercent dans le budget fédéral. Cependant, je considère qu'il est de toute première importance que tous les citoyens du pays reçoivent un traitement égal. L'égalité dans les possibilités offertes doit rester le principal cheval de bataille des députés.

Le système d'enseignement post-secondaire au Canada doit être accessible à tous les citoyens, un but qui n'est possible que si des fonds y sont injectés, autant par le fédéral que par les provinces.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Black.

J'aimerais maintenant céder la parole au représentant de la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce, soit M. Doig ou M. Schmid.

M. Peter Doig (président, groupe de travail sur les finances fédérales, Metropolitan Halifax Chamber of Commerce): Soyez les bienvenus à Halifax. Le temps est frais mais clair; j'espère que vous aurez l'occasion d'en profiter un peu durant votre court séjour.

Monsieur le président, si vous le permettez, nous allons faire une présentation d'équipe. Je présenterai des remarques générales sur notre organisme, et M. Schmid, mon collègue, vous fera part de commentaires plus étayés en réponse aux questions posées dans la lettre de M. Bevilacqua, expédiée plus tôt cette année.

La Metropolitan Halifax Chamber of Commerce a été constituée en 1995; elle est issue de la fusion du Halifax Board of Trade, du Bedford Board of Trade, de la Sackville Chamber of Commerce, ainsi que de la Dartmouth Chamber of Commerce. Émanant du Halifax Board of Trade, constitué en 1750, la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce représente la plus ancienne chambre de commerce en Amérique du Nord.

Porte-parole de la communauté des affaires de Halifax, la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce comprend 1 500 sociétés membres, qui emploient quelque 50 000 personnes dans la région de Halifax. Nos membres sont très représentatifs de la communauté diversifiée d'entreprises de la zone métropolitaine de Halifax. Parmi les membres, 78 p. 100 sont des petites et moyennes entreprises employant moins de 25 employés.

Notre mandat exprime très bien notre rôle au sein de la communauté. Chef de file du monde des affaires et promoteur des principes du partenariat, la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce vise la prospérité économique durable de ses membres et de la communauté.

Parmi les démarches récentes de la Chambre, citons le soutien très actif aux autorités de l'aéroport international de Halifax lors des négociations pour la privatisation de l'aéroport, ainsi que le soutien à la Société du port de Halifax, qui a déposé une soumission pour le projet post-Panamax, une occasion unique qui permettra au Canada de tirer profit des extraordinaires possibilités de développement sur les quais de l'Atlantique. Et je sais que le sujet a abondamment été débattu avec les fonctionnaires du fédéral.

Les positions que nous défendrons aujourd'hui sont le fruit de longues consultations auprès de nos membres, qui ont pris la forme de sondages, de travail en comités et de réunions avec les parties intéressées. Le comité de membres volontaires du groupe de travail sur les finances fédérales est présidé par mon collègue, Michael Schmid, à qui je cède immédiatement la parole.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

M. Michael A. Schmid (président, groupe de travail sur les finances fédérales, Metropolitan Halifax Chamber of Commerce): Bon après-midi.

J'aimerais vous remercier à mon tour de nous donner l'occasion de témoigner durant ces consultations prébudgétaires. Je vous ferai part des points de vue et des préoccupations de la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce, à l'instar des autres organismes publics que vous avez entendus partout au pays.

Des copies de notre mémoire vous ont été remises plus tôt. Nous avons des copies supplémentaires si quelqu'un n'en a pas.

Notre mémoire traite de plusieurs questions, mais je m'attarderai aujourd'hui sur un message très clair de nos membres: il faut à tout prix privilégier la réduction de la dette. Les membres de la Metropolitan Halifax Chamber of Commerce nous ont indiqué dans une large mesure qu'il était encore trop tôt pour que le gouvernement délaisse la stratégie de prudence sur les plans de la fiscalité et de la responsabilité financière. Nos avons équilibré notre budget. Il nous reste à faire du ménage.

• 1600

Les membres estiment que la croissance dans les secteurs prioritaires de la santé et de l'éducation, ainsi que les investissements dans les infrastructures, si on ne change pas les méthodes traditionnelles de prestation des services, ne favorisent pas la réduction de la dette. Or, la stratégie fiscale de tout gouvernement fédéral doit toujours viser la réduction de la dette. Nous croyons que des méthodes innovatrices de prestation, la réduction des investissements du gouvernement, ainsi que des incitatifs accrus à la consommation permettraient de régler des problèmes prioritaires à court terme, alors que les économies résultant de la réduction des frais de service de la dette publique et la restructuration du gouvernement seront certainement des atouts à long terme.

Comme nous l'avons signalé, nos membres accordent une importance prioritaire à la mise en oeuvre d'une stratégie comportant un engagement ferme à l'égard de la réduction de la dette. La stratégie prévoirait des sommes précises plutôt que des sommes éventuelles pour la réduction de la dette, ainsi que des objectifs précis de réduction. Nous reconnaissons que, dans le discours du budget de 1998, le gouvernement a annoncé une diminution du rapport entre la dette et le PIB, mais nous estimons que les objectifs n'étaient pas suffisamment précis et ambitieux. Si le gouvernement adoptait une stratégie plus vigoureuse de réduction de la dette, nos membres seraient moins inquiets par rapport à l'avenir. Une telle stratégie réduirait les frais de service de la dette publique, et ferait en sorte que l'on disposerait de sommes plus importantes pour la réduction des impôts et de la dette, l'éducation, la santé et les investissements dans les infrastructures.

Avec un allégement de la dette, une augmentation des dépenses de consommation et une main-d'oeuvre saine et compétente, le Canada pourrait tirer parti des nouvelles possibilités de développement économique. Pour nous assurer d'avoir accès à ces possibilités, nous devons continuer de développer et d'entretenir nos infrastructures nationales de communication et de transport.

Pour ce qui est de l'usage secondaire des excédents, par ordre de priorité, nos membres ont indiqué les réductions des impôts imputés aux individus avant ceux des entreprises, des investissements dans la santé et l'éducation, ainsi que dans les infrastructures. Ces investissements seraient des facteurs de croissance économique continue, et nous permettraient de réduire la dette nationale. Nous disposerons ainsi d'une marge de manoeuvre financière qui sera plus que nécessaire dans le deuxième millénaire.

Les Canadiens ont une deuxième chance. Il revient au gouvernement de jouer un rôle de chef de file et de ne pas miser sur des mesures qui plaisent au plus grand nombre au détriment de mesures censées sur le plan économique. Nous devons travailler ensemble pour que le pays soit prêt à affronter les bouleversements qui seront inévitables dans la nouvelle économie mondiale.

Avant de terminer, je vous ferai part d'un ajout que nous avons fait au mémoire original. Il touche les discussions récentes autour des surplus de la caisse de l'AE. Au cours des deux dernières années, la Chambre a soutenu que ces surplus devraient être plafonnés et les primes d'AE réduites, afin de favoriser la création d'emplois. C'est encore notre position.

L'actuaire responsable de la caisse de l'AE estime qu'un surplus de 10 et 15 milliards de dollars suffirait en cas de grave récession; il faudrait maintenir le surplus à ce niveau. Nous nous inquiétons grandement quand nous entendons des groupes qui suggèrent de transférer l'excédent de la caisse de l'AE dans le Trésor, et d'utiliser cet argent pour augmenter les investissements dans divers programmes. Nos membres nous ont signifié que le gouvernement devait accorder la priorité à la réduction de la dette et aux réductions d'impôt. Ils ne sont pas en faveur de l'augmentation des investissements dans les programmes à cette période-ci.

La caisse de l'AE appartient aux employés et aux employeurs qui y ont contribué pour donner une police d'assurance aux travailleurs en transition. Le gouvernement ne devrait pas assimiler ce fonds à des recettes générales. Si la caisse de l'AE était en déficit, le gouvernement augmenterait les primes exigées des employeurs et des employés afin de compenser les pertes réelles ou estimées. La réduction aurait des avantages réels et immédiats pour les petites et moyennes entreprises du Canada. Il est naturel que les entreprises et leurs employés, qui sont à l'origine de l'excédent de l'AE, bénéficient de réductions des primes. En remettant l'argent aux consommateurs qui travaillent et aux petits entrepreneurs, le gouvernement contribuerait à la consolidation de deux facteurs clé de la croissance économique. Seule la croissance économique durable nous permettra de diminuer les impôts et de satisfaire à long terme aux besoins des Canadiens dans les domaines de la santé, de l'éducation et des infrastructures.

J'aimerais répéter mes remerciements au comité et aux autres qui ont pris le temps d'entendre nos propositions.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Monsieur Breckenridge, voulez-vous continuer?

M. W. Carl Breckenridge (vice-doyen, Recherche et planification, Services de recherche médicale, Université Dalhousie): Je veux tout d'abord remercier le Comité permanent des finances de la Chambre des Communes de me donner l'occasion de faire cette présentation.

À titre de vice-doyen à la recherche et à la planification à la Faculté de médecine de lÂUniversité Dalhousie, je viens ici pour vous encourager à soutenir ou du moins à recommander fortement le financement de la recherche dans le domaine de la santé. Je vous ai remis un mémoire assez complet, auquel vous pourrez vous reporter. Je ferai référence à quelques tableaux au cours de ma présentation.

En particulier, je voudrais vous inciter à faire des recommandations en faveur du projet des instituts canadiens de recherche médicale, qui est actuellement mis au point par un groupe de travail formé des parties intéressées par la recherche en ce domaine. Ce projet vise à combler des besoins criants dans les mesures de financement de la recherche dans le domaine de la santé et biomédical, ainsi que dans le domaine de la recherche fondamentale. La recherche est un élément indispensable pour améliorer les soins de santé, mais aussi pour favoriser l'innovation et la richesse, ainsi que la création d'emplois.

• 1605

Dans mon mémoire, à la page 3, je présente un concept plutôt simple. Certains le qualifieront de simpliste. Je vous demande de considérer l'arbre de l'innovation comme étant un moyen simple de comprendre l'importance de la recherche fondamentale dans le processus global de croissance et de création d'emplois.

Les chercheurs qui explorent des domaines fondamentaux, qui sont pour moi les racines de l'arbre, trouvent de nouvelles idées et de nouveaux concepts. La population en général connaît très peu le domaine de la recherche fondamentale, de la même façon qu'on connaît très peu la grosseur des racines d'un arbre. Le sol, ou l'élément nourricier, où est planté l'arbre de l'innovation sont le Conseil de recherches médicales du Canada, le CRSNG, les groupes bénévoles, ainsi que le secteur privé, qui financent la recherche fondamentale. Le tronc est constitué de l'infrastructure des laboratoires, des universités, ainsi que de l'équipement nécessaire à la recherche. Les branches et les feuilles sont le résultat de la recherche, des contrats supplémentaires, des essais cliniques visant l'application des découvertes de la recherche fondamentale afin de créer de nouveaux produits et des nouvelles méthodes de diagnostic et de traitement des maladies. Enfin, les fruits de l'arbre sont les nouvelles idées et les inventions, les nouveaux produits, ainsi que les emplois créés par ces inventions et ces traitements. En l'absence de financement ou d'infrastructure de la science fondamentale, il y aura moins d'innovations, de croissance ou de création d'emplois.

Il ne faut pas couper cet arbre pour en faire du bois de sciage expédié à l'étranger.

J'aimerais signaler les bonnes et les mauvaises nouvelles pour ce qui est du financement de la recherche. La bonne, c'est que le financement du Conseil national de recherches médicales et celui du CRSNG ont retrouvé les niveaux antérieurs, ce qui fait disparaître le spectre de nouvelles réductions dans les bourses de recherches.

Un programme de partenariat avec le CRM a été créé à Dalhousie. Des liens de partenariat sont établis avec le gouvernement et le secteur privé afin de créer de nouveaux programmes de recherches dans la faculté.

On examine actuellement le niveau de financement qui pourrait être accordé à la fondation canadienne d'innovation; de telles subventions seraient d'un grand bénéfice pour l'infrastructure des laboratoires de recherches dans les universités, les instituts de recherches; elles permettraient en outre l'achat d'équipement. Récemment, on a annoncé que lÂUniversité Dalhousie recevrait des subventions pour quatre des six postes de professeur qu'elle veut créer.

Le gouvernement provincial a adopté une loi et on nous a promis de mettre sur pied une fondation pour la recherche en sciences de la santé en Nouvelle-Écosse.

La Clinical Trials Atlantic Corporation, un organisme à but non lucratif créé par des facultés de médecine des provinces maritimes, a connu un réel succès. En 1997, il a attribué 15 millions de dollars pour la recherche dans le domaine des essais cliniques dans les Maritimes, soit 3 ou 4 millions de plus qu'au cours des 3 ou 4 dernières années. Cette initiative a permis de créer dans la région de nombreux emplois spécialisés de coordination de la recherche en sciences infirmières et dans d'autres domaines de recherche.

Enfin, l'industrie de la biotechnologie en Nouvelle-Écosse connaît une croissance rapide: 52 entreprises en été créées, dont 8 au cours de la dernière année. Elles permettent la croissance et donnent des emplois spécialisés aux diplômés universitaires, et une collaboration accrue avec les chercheurs. De nombreux problèmes persistent toutefois. Beaucoup de chercheurs ont encore de la difficulté à obtenir des subventions auprès des organismes subventionnaires, surtout les jeunes professeurs qui sont moins concurrentiels que les chercheurs ayant déjà connu du succès.

Si vous passez maintenant à la page 8 du mémoire, vous verrez les taux de réponses positives aux nouvelles demandes auprès du Conseil de recherches médicales, par rapport aux demandes renouvelées. Le tableau démontre que les nouveaux professeurs, les jeunes scientifiques, ont énormément de difficulté à recevoir des bourses du Conseil, parce qu'ils sont moins concurrentiels que les chercheurs aguerris, bien établis. Vous constaterez d'ailleurs, comme il apparaît au bas de la page, que même les chercheurs chevronnés ne trouvent pas facilement du financement.

M. Paul Forseth: De quel tableau parlez-vous?

M. Carl Breckenridge: Celui-ci, à la page 8.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Certains l'ont trouvé, mais d'autres auraient besoin de numéros.

M. Carl Breckenridge: Les jeunes scientifiques représentent la sève pour l'avenir de la recherche. Beaucoup de chercheurs ne trouvent pas le financement nécessaire pour rester compétitifs par rapport aux chercheurs américains et d'ailleurs. Nous continuons de perdre de jeunes scientifiques prometteurs au profit des laboratoires américains qui les ont recrutés à grands frais. Cela est dû surtout à l'absence de ressources. Je signale toutefois que ce n'est pas à mes yeux un problème aigu dans notre communauté, mais nous perdons bel et bien de bons chercheurs.

• 1610

Au contraire de ce qui se passait voilà 20 ans, plusieurs de nos jeunes érudits talentueux ne s'aventurent pas dans les domaines de la recherche et de l'innovation parce qu'ils n'y voient pas d'avenir, en raison du manque de financement. Par ailleurs, la communauté des chercheurs connaîtra un exode massif de scientifiques chevronnés au cours des dix prochaines années, parce que l'heure de la retraite aura sonné pour les babyboomers. Ces deux tendances auront des incidences très négatives sur notre économie à long terme. Je crois qu'il faut planifier à long terme afin de réserver à nos étoiles de la recherche un avenir fécond.

Voici donc mes recommandations quant à l'utilisation des dividendes budgétaires résultat de l'équilibre des comptes du budget:

Premièrement, l'excédent fiscal devrait être distribué entre la réduction de la dette, la réduction des impôts et le financement de nouveaux projets circonscrits.

Pour ce qui est de nouveaux projets dans mon domaine d'intérêt, je recommande fortement que le gouvernement fédéral consacre 1 p. 100 du budget de la santé à la recherche dans les domaines des soins et des sciences de la santé. Des parties intéressées travaillent actuellement à l'élaboration d'une proposition visant la mise sur pied d'instituts canadiens de recherches dans le domaine des sciences de la santé, qui sera soumise au ministre de la Santé à la fin d'octobre. Il s'agit d'une initiative très importante qui, si elle reçoit 1 p. 100 du budget de la santé, résoudra bien des difficultés de financement qui pèsent actuellement sur la communauté des chercheurs du domaine de la santé. Nos grands chercheurs pourront être plus compétitifs dans l'arène internationale, et seront encore plus innovateurs.

Il faut en outre créer des mesures stables de financement de la recherche, et faire des projections à long terme en ce domaine. Des changements soudains, à court terme, peuvent avoir des incidences percutantes et parfois aléatoires sur le financement de certains projets de recherches. Les conseils subventionnaires accordent des subventions s'étalant sur trois à cinq ans. Les changements à court terme ont toujours des effets percutants dans tous les concours.

La communauté des chercheurs connaît des changements impressionnants sur les plans du transfert technologique et de la commercialisation des résultats de la recherche. Cependant, il est toujours aussi difficile de trouver du financement pour commercialiser des idées, pour diverses raisons. Par exemple, il y a pénurie de ressources pour les projets qui en sont aux premières étapes de la commercialisation: malgré l'abondance de sociétés d'investissement en capital de risque, très peu d'entre elles sont prêtes à financer des projets encore jeunes, dont les risques sont encore trop élevés à leurs yeux. Cependant, les organismes qui donnent des bourses et du soutien—les CRM—considèrent souvent que la recherche est du domaine des sociétés d'investissement en capital de risque. Il faut accorder plus d'attention à ce domaine, en créant des mesures de financement mixtes (bourses et soutien des entreprises), ou en modifiant les mesures fiscales ou les incidences.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Breckenridge.

Il reste un dernier témoin, soit M. Wilde. Merci d'avoir été si patients.

M. Peter Wilde (témoigne à titre personnel): Merci de m'avoir invité à témoigner devant vous.

Je suis comptable agréé dans une petite entreprise publique. J'ai la chance d'habiter au Canada, en Nouvelle-Écosse, depuis bientôt 25 ans. Je traite principalement avec des petits entrepreneurs et des entrepreneurs à domicile. Certains obtiennent beaucoup de succès, d'autres moins. Nos clients ont de la difficulté à se maintenir à flot, et nous les voyons passer à travers tous les cycles.

On me voit aussi comme un militant de l'action communautaire. Je suis engagé dans divers mouvements communautaires, et j'offre du soutien aux établissements secondaires. Notre bureau collabore au programme coopératif, rassemblant des étudiants de lÂUniversité Dalhousie et de la Mount Saint Vincent University.

Je crois que l'élimination du déficit est l'une des plus grandes réussites du gouvernement canadien. Les Canadiens en tireront d'importants avantages à long terme. Il serait vraiment insensé de laisser la situation se détériorer en relâchant trop tôt les rennes et en dilapidant des excédents anticipés.

Pour ce qui est des dividendes budgétaires, à mon avis et de l'avis de beaucoup de gens que j'ai interrogés—des clients et d'autres—, il faut accorder la priorité à la réduction de la dette fédérale. Il ne faut pas perdre de vue que le tiers de tous les impôts recueillis servent à payer les intérêts de la dette. Personne n'y gagne au change. Heureusement pour le Canada, en raison des taux d'intérêt peu élevés, les frais de la dette ont été assez bas. Si les taux d'intérêt augmentaient de 1 p. 100, on estime que les frais de la dette fédérale seraient haussés de 6 milliards de dollars par année.

Je suggère que le gouvernement continue de faire des pronostics pessimistes quant aux taux d'intérêt, et qu'il utilise d'éventuelles économies pour réduire la dette. La réduction de la dette est le seul moyen efficace pour réduire les frais d'intérêts, et d'utiliser les impôts au plus grand avantage des Canadiens.

• 1615

Cependant, la réduction de la dette n'est pas tout. Il faut se souvenir que l'élimination du déficit a été rendue possible grâce à des augmentations considérables des impôts. Ces augmentations ont érodé sensiblement le niveau de vie des Canadiens ordinaires. En fait, pour chaque dollar de réduction des dépenses depuis 1993, le gouvernement a perçu 3 $ en impôts supplémentaires. Il faut donc remercier les contribuables pour l'élimination du déficit, plus que la réduction des dépenses.

Il faut faire quelque chose, pour que les Canadiens puissent espérer une amélioration pour l'an prochain.

L'augmentation la plus insidieuse de l'impôt personnel a été le non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation. Des personnes beaucoup plus compétentes que moi en cette matière ont expliqué les incidences très fâcheuses de cette réalité sur le quotidien des gens. À ce sujet, j'ai joint un article du Globe and Mail intitulé «Inflating Canadians into Higher Taxes».

Je suggère que le gouvernement remette en vigueur l'indexation des exemptions personnelles, qu'il redonne une portion intéressante des montants déduits au cours des deux ou trois dernières années, et qu'il augmente éventuellement le niveau de revenu assorti d'un taux marginal d'imposition de 26 p. 100, de 1 000 $ par exemple.

Un autre élément est inadmissible à mes yeux et pour d'autres: pourquoi les Canadiens vivant sous le seuil de la pauvreté continuent-ils de payer des impôts? Je considère, et je ne suis pas le seul ici, que c'est inacceptable. Il faut retirer ce fardeau fiscal pour les Canadiens qui vivent sous le seuil de la pauvreté.

Les mesures que j'ai proposées auront à mon avis des incidences positives pour les Canadiens—pour le moral des contribuables—, sans que les revenus du gouvernement ne soient trop diminués.

Je présente un autre article, intitulé «Tax Cuts Fuel the Irish Miracle». Apparemment, selon le journaliste, les Irlandais ont accompli beaucoup en réduisant les impôts.

J'aimerais ajouter un élément à la proposition originale soumise au comité relativement à la caisse de l'assurance-emploi. Les employeurs et les cotisants au fonds se font dire et redire par le gouvernement qu'il s'agit d'une fiducie. Cet argent est mis de côté au cas où les temps seraient plus sombres, pour aider les gens qui, en raison des ratés de l'économie, perdent leur emploi. Il est triste de penser que seulement 40 p. 100 de ceux qui sont actuellement sans emploi reçoivent des prestations d'assurance-emploi. Il est clair qu'un système qui verse des prestations à un si petit nombre de chômeurs est bancal.

Il serait immoral que le gouvernement verse dans le Trésor public l'excédent de la caisse de l'AE. Cet argent doit être investi à l'instar des contributions au Régime de pensions du Canada. Nous pourrons peut-être ainsi réduire de façon marquée les coûts que représente pour l'économie le fardeau de l'assurance-emploi. C'est un véritable éteignoir de la création d'emplois.

La plupart de mes clients qui embauchent du personnel aimeraient leur verser un meilleur salaire. Ils en sont incapables en raison des primes exigées de l'employeur pour l'AE et le RPC. Quelque 15 p. 100 des revenus d'un individu sont versés au Régime de pensions et au régime de l'AE. C'est beaucoup trop. Des cotisations de 10 p. 100 sont encore trop élevées, et cela ne comprend même pas les impôts. L'économie canadienne recevrait un grand coup de fouet si les primes d'AE étaient réduites de façon significative, autant pour les petits employeurs que pour les employés, en 1999.

C'est bien de parler de réduction de la dette et des impôts, mais ce n'est pas tout. Il faut améliorer les programmes sociaux. Notre pays doit faire tout en son possible pour restaurer rapidement les subventions qui ont été retirées aux programmes sociaux. Le gouvernement a par ailleurs la responsabilité de mieux gérer les dépenses des programmes sociaux, surtout dans les domaines de l'éducation et de la santé.

• 1620

Des études ont démontré que le Canada consacre des sommes relativement élevées par étudiant, mais nos étudiants ne sont pas aussi favorisés que ceux d'autres pays qui pourtant dépensent moins d'argent par habitant pour l'éducation. Selon mon expérience personnelle du monde de l'éducation, les fonds ne sont ni bien gérés ni bien répartis, du moins dans les écoles primaires et secondaires. On obtiendrait beaucoup plus pour notre argent si les fonds étaient mieux gérés.

Il faut donc élaborer une approche équilibrée de distribution des dividendes budgétaires. Les avantages futurs seront alloués en gardant à l'esprit que les augmentations d'impôt et les réductions des dépenses ont été à la source de l'élimination du déficit, de sorte que les Canadiens sentent que leurs sacrifices ont été bénéfiques pour eux.

Sur le plan des défis et des possibilités, la marche est haute, surtout dans le secteur des pêches et des ressources naturelles. Les gens ont peur du changement, et quand des conditions sont en place depuis des années, il est difficile pour un expert de repartir à zéro parce que des emplois ont disparu, de redevenir un novice sans expérience. Le défi est de taille, et il faut trouver des moyens de recycler ces travailleurs de grande valeur et de les remettre au travail.

Il faut tirer des leçons du passé. Il ne suffit pas de sortir de l'argent pour régler un problème. Cela a été démontré voilà des années maintenant. En fait, cette manie qu'a eue le Canada de régler les problèmes à coups d'argent a grandement contribué à l'augmentation de la dette et au déficit, une situation que nous commençons à peine à redresser.

Le Canada doit encourager les gens à voir leur avenir de façon positive, et à chercher des méthodes novatrices pour appliquer leurs connaissances. Il faut favoriser les entreprises fondées sur la connaissance, qui seront les locomotives de l'économie vers le prochain millénaire. Le Canada occupe une position idéale pour devenir le lien entre les principaux blocs commerciaux du monde—la CEE, les pays de l'ALÉNA et les pays côtiers du Pacifique—; avec une technologie moderne de communications et un réseau de transport impeccable, il pourra jouer un rôle clé dans le commerce mondial. Notre réputation de pays solide, fiable, est sans égale. Il n'y a aucune raison pour que nos gens d'affaires ne puissent suivre l'exemple des casques bleus dans le monde. Notre système d'éducation, avec quelques améliorations, pourrait être parmi les meilleurs. Le climat social est stable, le taux de criminalité peu élevé, et notre qualité de vie est reconnue l'une des meilleures au monde.

Je crois tout simplement que nous manquons de leaders. Nous manquons de confiance en nous pour réaliser ce que nous sommes capables de faire, individuellement et collectivement. Il faut s'ouvrir aux possibilités qui attendent d'être développées. Le gouvernement peut y arriver s'il contribue à développer et à encourager la confiance en soi dont les Canadiens ont besoin pour aller de l'avant et prendre la place qui leur revient de bâtisseurs d'avenir.

Merci encore de m'avoir accueilli et de m'avoir écouté. Je suis très content.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne vous considère pas comme un activiste, mais plutôt comme un visionnaire. Merci beaucoup.

Mme Wendy Lill: Je voudrais ajouter que je devrai partir dans cinq minutes au plus.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Alors, avec l'assentiment de Paul, qui a cédé sa place, et la collaboration des autres, je vous donne la parole en premier.

Mme Wendy Lill: Merci.

J'aimerais vous remercier tous d'être venus témoigner. C'était très intéressant.

J'aimerais demander à Peter et à Michael d'élaborer sur les inquiétudes des petites entreprises par rapport à l'AE et au RCP. Ces deux secteurs sont de véritables puits sans fonds pour l'économie, comme vous dites. Je voudrais savoir ce qui pourrait être fait selon vous. Vous demandez que l'on fasse des réductions dans ces régimes, mais comment pensez-vous que cet argent...?

M. Michael Schmid: Notre organisme a toujours été en faveur des réductions aux cotisations d'AE. Ce sont des éteignoirs d'emplois. On pourrait parler longtemps de la création d'emplois, etc., mais nous croyons que, comme l'a mentionné Peter, que les réductions des cotisations permettraient de créer de l'emploi. En effet, chaque dollar en moins versé en cotisation pourrait être consacré à un nouveau salaire. Et ce sont de vrais emplois, des emplois correspondant à la demande des marchés. Les employeurs pourraient dire: «J'ai besoin de cet employé, et je vais l'embaucher.» Le taux de chômage est élevé dans notre région, et il faut mettre en oeuvre des mesures qui permettront de l'abaisser. Les emplois créés en raison de la demande du marché sont autosuffisants, ce qui n'est pas toujours le cas pour les programmes de création d'emplois.

• 1625

M. Peter Wilde: Pour ce qui est des retenues salariales ou des cotisations à l'AE, les cotisations exigées des employeurs pour l'AE et le RPC excèdent 10 p. 100 des salaires versés. Ce sont des régimes essentiels, nous sommes tout à fait d'accord; toutefois, la mauvaise gestion qu'a faite le gouvernement du Régime de pensions du Canada a occasionné des augmentations faramineuses. Avant longtemps, tous consacreront plus de 10 p. 100 de leur salaire au Régime de pensions du Canada, additionnés de 3 ou 4 p. 100 au régime de l'AE.

Notre petite firme embauche huit personnes. Nous aimerions en engager une neuvième, mais les cotisations de l'employeur à ces programmes nous en empêchent. Beaucoup de petits entrepreneurs, je crois, verraient d'un bon «il... Par exemple, le gouvernement en a sauvé plusieurs au cours de la dernière année au moyen des modalités de renonciation de l'employeur à l'AE. Cela a probablement permis la création de nouveaux emplois. Il faudrait peut-être aller plus loin que 25 p. 100; jusqu'à 100 p. 100 serait le mieux. La première mesure valait encore mieux que celle qui était en vigueur.

Mme Wendy Lill: J'ai parlé à beaucoup de petits entrepreneurs qui considèrent que les programmes gouvernementaux d'emplois subventionnés, d'aide, ceux de DRHC, n'en valent pas la peine. Ils ne font pas appel à ces programmes parce qu'il y a trop de paperasse, trop de détails. J'aimerais avoir votre avis à cet effet, parce que DRHC essaie d'aider les petites entreprises. Quel est le problème. Pourquoi ces mesures sont-elles inutiles pour vous?

M. Peter Wilde: Voulez-vous parler en premier?

M. Michael Schmid: J'ai examiné l'un de ces programmes récemment, et la paperasserie a diminué. Je suis aussi un petit entrepreneur, et j'ai fait une demande à un tel programme quand j'ai commencé. Le nombre de papiers à remplir était invraisemblable. Le programme devait en principe s'étendre sur 52 semaines, puis on m'a annoncé qu'il était réduit à 12 semaines.

Il semble qu'ils essaient actuellement de rationaliser la bureaucratie, mais il en reste encore beaucoup. Il faut remplir beaucoup de documents liés à des propositions et à des programmes de formation, des projections, etc. C'est pour cela je crois que les gens...

Je n'en vois pas beaucoup, Peter. Je ne sais pas pour vous, mais je reste persuadé que la somme de papiers à remplir est faramineuse par rapport au montant reçu.

M. Peter Wilde: Je suis du même avis. Si l'emploi est justifié, vous n'avez pas besoin d'une subvention.

Une partie du problème, selon moi, est d'ordre psychologique. Quand l'employé sait que le poste est subventionné, il peut développer une mauvaise attitude. Il peut se dire que, comme le gouvernement paie son salaire, il n'est pas nécessaire de travailler si fort pour l'employeur. Je ne sais pas comment régler ce genre de problème.

J'ai participé au Nova Scotia Links program pendant une certaine période; je me suis retiré parce que, selon moi, on n'utilisait pas l'argent à bon escient.

Les cabinets de CA n'ont pas besoin de subventions pour engager des étudiants à temps partiel. J'en ai l'expérience parce que j'en engage moi-même. Il faut resserrer la gestion de ces programmes, pour que l'argent soit distribué là où il est vraiment utile.

Mme Wendy Lill: Monsieur Breckenridge, un témoin représentant une université nous a dit plus tôt...

M. Carl Breckenridge: Monsieur Johnson.

Mme Wendy Lill: Il nous a fait des commentaires très intéressants au sujet de la recherche dans le domaine de la santé. J'aimerais savoir, pour ce qui est du problème global de... Vous nous avez dit que le problème n'était pas aussi grave pour Dalhousie qu'il ne l'est ailleurs. S'agit-il de différents...

M. Carl Breckenridge: Vous parlez de l'exode des cerveaux, ou de la perte...

Mme Wendy Lill: Oui, de l'exode des cerveaux, mais aussi des subventions à la recherche. Les gros joueurs obtiennent de l'argent, mais les plus petits n'en ont pas. Les chercheurs débutants sont ignorés, et toute une nouvelle génération a de la difficulté à entrer dans le jeu. N'est-ce pas?

M. Carl Breckenridge: Je ne voudrais pas que vous pensiez que Dalhousie n'a pas ce problème.

Mme Wendy Lill: C'est un peu ce que vous avez dit.

M. Carl Breckenridge: Eh bien, le greffier à qui j'ai parlé pour proposer de venir témoigner m'a demandé si j'avais des bonnes nouvelles. J'ai donc senti le besoin de vous donner de bonnes nouvelles. Nous avons connu des réussites, mais de nombreux problèmes subsistent. Nous sommes moins concurrentiels que d'autres universités de plus grande taille, qui bénéficient de sources de financement plus diversifiées. La plupart des provinces se sont dotées de fondations de recherches provinciales. Ce n'est pas le cas de la Nouvelle-Écosse. On nous l'a promis, mais ce n'est pas encore fait.

• 1630

Nos chercheurs d'expérience réussissent encore assez bien. Nous sommes à la limite, si le financement continue. Si vous examinez certains des tableaux que je vous ai remis, nous maintenons nos fonds de recherche, mais c'est en dollars réels, non pas en dollars constants. Donc, ce qui arrive, c'est que de moins en moins de chercheurs sont subventionnés. La valeur totale en dollars semble la même. Ainsi, nos chercheurs les plus concurrentiels survivent, mais les jeunes chercheurs passent un moment difficile.

Mme Wendy Lill: Je ne peux m'empêcher de vous poser une question qui préoccupe beaucoup notre parti, et il s'agit de l'interférence des entreprises pharmaceutiques privées dans le processus de recherche. Apparemment, nous transférons une partie des dollars affectés à la recherche dans les universités. Qu'en est-il exactement? Est-ce que vos recherches sont réellement compromises par des gens qui vont en réalité faire des profits sur les médicaments ou peu importe sur quoi portent les recherches.

M. Carl Breckenridge: Je pense que les universités doivent travailler avec l'industrie pharmaceutique. Je crois que cela peut se faire de façon assez efficace dans la mesure où les contrôles appropriés et les conditions appropriées sont inscrits dans les contrats pour garantir la liberté universitaire relativement à la présentation des données et à la propriété intellectuelle de ces données.

Je ne pense pas que nous puissions arrêter l'interaction. C'est important pour le développement des essais cliniques. Je pense que tout ce que nous avons à faire c'est d'être vigilants sur la façon dont fonctionne cette interaction.

Mme Wendy Lill: Monsieur Black, nous avons la Canadian Federation of Students et certains de vos étudiants diplômés ici et ils ont parlé de sujets très critiques en ce qui a trait au financement des étudiants. Je n'ai pas de question pour vous pour le moment.

Je vais partir maintenant. Merci beaucoup.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci. N'oubliez pas, demain matin à neuf heures.

Monsieur Szabo, voulez-vous continuer?

M. Paul Szabo: Je voulais parler de fiscalité avec M. Wilde.

Vous avez affirmé que l'équilibre budgétaire s'était fait sur le dos des contribuables, non pas par les recettes fiscales. C'était plutôt intéressant. Vous n'avez pas parlé de la provenance de ces recettes. Pourriez-vous expliquer d'où proviennent ces recettes additionnelles pour le gouvernement au cours de la dernière année?

M. Peter Wilde: Selon moi, la majeure partie des recettes additionnelles proviennent des augmentations de l'impôt des particuliers. Le gouvernement dit qu'il n'y a pas eu d'augmentation des impôts, mais il y en a eu.

M. Paul Szabo: Il y en a eu.

M. Peter Wilde: Oui.

M. Paul Szabo: Comme?

M. Peter Wilde: En partie par le non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation, en partie à cause des surtaxes, même si les surtaxes ne sont pas aussi importantes qu'elles l'ont déjà été. Le revenu augmente.

J'ai effectué l'analyse statistique de l'un de mes clients et j'ai considéré son revenu en 1990 et combien d'impôt il avait payé et j'ai pris le même revenu en 1996 et combien d'impôt il avait payé. La différence pour un revenu d'environ 60 000 $ était d'environ 1 000 $ de plus.

M. Paul Szabo: Oui. Pensez-vous que cela a quelque chose à voir avec le fait qu'il y a vraiment plus de gens qui travaillent?

M. Peter Wilde: Je pense qu'il est probable que ce soit vrai.

M. Paul Szabo: Et, bien entendu, un revenu plus élevé suppose plus d'impôt.

M. Peter Wilde: Bien entendu, cela a un certain sens ici en Nouvelle-Écosse.

M. Paul Szabo: J'étais curieux, parce que vous n'avez pas mentionné le fait que nous connaissons actuellement une assez bonne période de croissance au Canada depuis quelques années et que le nombre de gens sans emploi diminue de façon significative.

M. Peter Wilde: Sûrement.

M. Paul Szabo: Avez-vous, seulement pour un particulier...? Vous êtes un comptable agréé, alors vous devez savoir cela. Quelle était la valeur du non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation pour un particulier l'an dernier, pour une année? Quel en était le coût?

M. Peter Wilde: Prenons seulement l'exemption personnelle de base, qui est de 6 456 $.

M. Paul Szabo: Oui.

M. Peter Wilde: Et qui est inchangée depuis quand—1994?

M. Paul Szabo: Prenons l'an dernier, une année complète. L'inflation était d'environ 1 p. 100.

M. Peter Wilde: Oui.

• 1635

M. Paul Szabo: Donc, en l'absence d'une augmentation de l'indexation du crédit d'impôt non remboursable, la valeur dont il aurait dû être augmenté est de 64 $, et le crédit est de 17 p. 100. Donc, si vous estimez le taux d'impôt provincial à 50 p. 100, c'est environ 25 p. 100—ce qui représente 16 $ pour un particulier.

M. Peter Wilde: Oui.

M. Paul Szabo: Vous êtes d'accord avec cela.

M. Peter Wilde: Mais ce n'est que le 16 $ sur le 6 456 $ d'exemption personnelle. Vous pouvez ajouter 12 $ de plus à ce crédit pour les exemptions personnelles pour ceux qui ont la chance de ne pas avoir...

M. Paul Szabo: Mais pour une personne seule...

M. Peter Wilde: Si une personne qui gagne 30 000 $ par année obtient une augmentation de 10 p. 100, son taux d'imposition sur cette augmentation ne sera plus au faible taux de 27 p. 100; il sera plutôt dans la moyenne, soit 43 p. 100.

M. Paul Szabo: Il s'agit du taux marginal d'imposition.

M. Peter Wilde: Oui. Il paiera 43c. de plus en impôt pour chaque dollar d'augmentation, et son coût de la vie ira dans le même sens.

M. Paul Szabo: Je comprends cela. Je remarque que vous avez inclus cet article du Globe and Mail sur le sujet. Il fait allusion à ces gens qui passent d'un bas taux d'imposition à un taux moyen, ou d'un taux moyen à un taux élevé. Mais cela n'avait trait qu'au...

M. Peter Wilde: Cela concerne seulement les salaires supplémentaires.

M. Paul Szabo: ... taux réel d'imposition pour quelqu'un qui obtient une augmentation de salaire de 1 000 $ qui fait passer son revenu de 29 000 $ à 30 000 $. Il pourrait se situer au taux d'imposition de 26 p. 100 pour le dernier dollar gagné, mais le taux d'imposition réel n'est que de 17,1 p. 100. On joue avec les chiffres. C'est plutôt intéressant.

Je voulais demander quelque chose à la chambre de commerce. Il m'a semblé assez intéressant que vous soyez en désaccord avec Thomas d'Aquino en ce qui a trait à la disposition des fonds de l'assurance-emploi. Nous allons avoir des discussions sur ce sujet. Je pense qu'il serait vraiment intéressant si vous nous faisiez partager votre opinion à savoir si le système d'assurance-emploi doit être réformé. Vous connaissez tous les exemples—par exemple, l'industrie de la construction. Ici, les syndicats y font constamment allusion comme à un supplément de revenu. Ce n'est pas un fonds d'assurance; c'est: «Je travaille tellement et je vais obtenir l'assurance-emploi».

Dans l'industrie de la construction, ce sont 4 $ qui sont payés pour chaque dollar cotisé—je pense pour les pêcheries, l'industrie forestière, le travail saisonnier, etc. On arrive à un point où tous les travailleurs, l'ensemble de la main-d'oeuvre, subventionnent un choix de style de vie. Pensez-vous qu'il viendra un moment où les mécanismes de l'assurance-emploi devront être repensés en fonction de ce à quoi ce programme doit vraiment servir, ou suggérez-vous plutôt que nous devons continuer ainsi et maintenir une réserve raisonnable, peu importe le montant—quelqu'un a parlé de 12 milliards de dollars comme d'une réserve raisonnable à maintenir—et simplement ajuster les primes à un niveau qui ne ferait que soutenir cette réserve en cas de jours sombres, la récession alors que le nombre de travailleurs sans emploi atteint un plafond?

M. Michael Schmid: Nous avons examiné cette question de façon précise lors de la discussion concernant l'excédent et ce qu'il faut en faire. Nous savons que les opinions diffèrent sur ce sujet, et nous avons considéré notre position, et nous croyons qu'elle est défendable. Je pense que nous n'avons pas vraiment considéré...

M. Peter Doig: Peut-être que je devrais ajouter que ce dont M. Martin, M. D'Aquino et moi-même parlions est une solution à court terme dans le contexte d'un surplus parce que les primes payées ont peut-être été plus élevées qu'elles ne devaient l'être au cours des dernières années. Personne ne parle de solutions à long terme pour le moment. Il s'agit d'une discussion pour savoir si le système d'assurance-emploi est le système approprié pour fournir aux gens des suppléments de revenu dans tout le pays.

Cette discussion aura-t-elle lieu? Plus nous sommes en désaccord sur l'avenir du système d'assurance-emploi, plus on peut penser que c'est peut-être la voie à prendre. Mais je pense que tout ce dont nous parlons maintenant est du domaine des solutions à court terme. Beaucoup de groupes d'entreprises—et je placerais le Conseil canadien des chefs d'entreprise et le nôtre dans le même bateau—ne sont pas d'accord avec M. Martin pour que ces fonds soient rendus disponibles, et il faudrait légiférer pour les rendre disponibles, sur une base à long terme pour des dépenses de programmes.

• 1640

M. d'Aquino et son groupe suggèrent qu'il faudrait diviser ces fonds excédentaires et les consacrer à la réduction de la dette et à la diminution des impôts personnels. Nous ne partageons pas l'avais de M. d'Aquino sur ce sujet, et il en va de même pour la plupart des groupes d'entreprises au pays. De façon à protéger l'intégrité du système d'assurance-emploi, nous pensons que le surplus devrait servir à réduire les primes des gens qui ont contribué au surplus.

M. Paul Szabo: Il n'y aurait pas de réserve.

M. Peter Doig: Il y aurait une réserve. Vous pourriez compter sur ce qu'un actuaire pourrait déterminer comme une réserve adéquate. Je pense que l'actuaire du gouvernement a dit que ce serait quelque part entre 10 milliards et 15 milliards de dollars. Nous avons parlé de 12 milliards. Une fois cette réserve établie, alors vous allez de l'avant en fonction d'un point d'équilibre.

M. Paul Szabo: Si vous êtes d'accord pour qu'il y ait une réserve de disons 12 milliards de dollars, alors en vertu du scénario actuel, nous n'y sommes pas encore.

M. Peter Doig: Je crois que nous y sommes.

M. Michael Schmid: Je pense que le surplus auquel vous faites allusion est le surplus en excédent de la réserve estimée.

M. Peter Doig: Nous parlons d'un surplus qui atteindrait 20 milliards de dollars d'ici la fin de l'année, en plus...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Si nous devons constituer une autre réserve de 13 milliards de dollars, nous devons laisser le surplus s'accumuler encore quelques années.

M. Peter Doig: Je pense que oui. Je pense qu'une partie du surplus a été emprunté au gouvernement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Non. Il fait partie des fonds généraux depuis 1986, à la demande du vérificateur général.

M. Peter Doig: S'il n'y a pas d'excédent, alors quel est le problème?

M. Paul Szabo: Nous n'essayons pas de voir s'il y a un problème. Ce n'est qu'une analyse.

M. Peter Doig: Je suis d'accord. Peut-être qu'une partie du problème, c'est qu'il n'y a pas de fonds; ce n'est que de l'argent théorique.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Chaque année, le fonds d'assurance-emploi produit en gros 5 à 6 milliards de dollars versés au surplus général.

M. Peter Doig: C'est exact.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Donc, il y a un surplus de produit.

M. Peter Doig: Exactement. Je pense que la sagesse traditionnelle est qu'une prime de l'ordre de 1,80 $ à 1,85 $ par 100 $ d'évaluation est ce dont nous avons besoin pour atteindre le seuil de rentabilité, sans verser de contributions excédentaires pour les dépenses de programmes de M. Martin. Nous pensons que ce qui est approprié, c'est de réduire les primes à un niveau suffisant pour financer le programme pour lequel elles sont prévues. Si le gouvernement veut augmenter les impôts pour les dépenses de programmes, alors il doit en prendre la responsabilité, s'il pense que c'est ce qu'il faut faire. Mais je ne pense pas que ce soit la chose à faire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que vos membres demandent un remboursement de 60 p. 100?

M. Peter Doig: Que voulez-vous dire?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que vos membres demandent 60 p. 100 de ce remboursement?

M. Paul Szabo: L'entreprise paie 60 p. 100 de la prime.

M. Peter Doig: Ce que nos membres disent, c'est que les primes doivent être réduites de l'équivalent de leur part. Si vous dites que c'est 60 p. 100, c'est bien. Ce que nous disons, c'est qu'à l'avenir les primes devraient refléter le coût réel du programme et ne pas être utilisées pour financer les dépenses de programmes qui ne font pas partie du système d'assurance-emploi.

M. Michael Schmid: Je pense que tout le monde est d'accord pour dire qu'il serait juste de retourner cet argent à ceux qui ont contribué à ce fonds.

M. Szabo a parlé de réforme. Peut-être que la première réforme devrait être de ne plus placer le surplus dans les recettes générales.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, Paul.

[Français]

Monsieur Loubier, à vous la parole.

M. Yvan Loubier: J'aimerais faire un commentaire et poser deux questions, monsieur le président.

À l'heure actuelle, l'excédent accumulé de la caisse depuis quatre ans a atteint 19 milliards de dollars. C'est sûr que c'est une écriture, parce que Paul Martin a utilisé cette somme pour justement rembourser une partie de la dette. En 15 mois, il a remboursé 20 milliards de dollars de la dette, ce qui, soit dit en passant, peut faire plaisir à M. Wilde. Mais c'est comme si le gouvernement fédéral ou Paul Martin avait emprunté cette somme aux cotisants.

D'ailleurs, l'actuaire en chef, celui qui gère la caisse d'assurance-emploi, disait pas plus tard que la semaine dernière qu'on pouvait abaisser jusqu'à 80 ¢ le taux de cotisation sans mettre en péril la caisse d'assurance-emploi pour l'avenir. Ce ne sont pas les propos de quelqu'un qui ne s'y connaît pas; c'est l'actuaire, celui qui gère.

Je me réjouis que vous n'adoptiez pas la position de Thomas d'Aquino, un membre en règle du Parti libéral, soit dit en passant, qui représente 125 grandes compagnies au Canada qui, toutes proportions gardées, cotisent moins à la caisse d'assurance-emploi que les PME canadiennes. Il est tout à fait invraisemblable et indécent qu'il vienne nous dire qu'on doit utiliser ces cotisations-là, plus celles des travailleurs, pour réduire les impôts de façon généralisée.

• 1645

Dans le système qui prévaut à l'heure actuelle, ce sont les travailleurs ou les salariés à revenu moyen et les PME qui contribuent le plus à la caisse d'assurance-emploi. Il est indécent qu'un représentant de 125 grosses compagnies canadiennes vienne dire aux PME: «Vous allez nous subventionner par une baisse d'impôt généralisée.» Il vient dire aux salariés moyens: «Là, vous allez financer une baisse d'impôt pour tout le monde, y compris pour les riches, alors que les riches n'y ont pas contribué.» C'est doublement inéquitable et doublement indécent de sa part de proposer une telle affaire.

De plus, je suis content que les chambres de commerce et la Fédération canadienne des entreprises indépendantes aient réagi en disant: «Nous, on veut une baisse des cotisations ainsi qu'une augmentation de l'accessibilité du régime.» Cent pour cent des travailleurs y cotisent, mais seulement 42 p. 100 des chômeurs retirent des prestations. Cela n'a aucun sens.

Ma première question porte sur la structure fiscale et s'adresse à M. Wilde, l'expert-comptable activiste, comme il se nomme lui-même. D'ailleurs, je crois qu'il s'agit de votre troisième année de comparution au Comité des finances. Chaque fois que je suis venu dans les Maritimes, on a pu échanger ensemble.

L'an passé, l'OCDE suggérait au Canada de remettre en place la pleine indexation des tables d'impôt. On disait que depuis 10 ans, à cause de l'indexation partielle des tables d'impôt, 1,4 million de Canadiens à faible revenu qui ne payaient pas d'impôt auparavant s'étaient mis à payer de l'impôt à cause de l'absence totale d'indexation. Il y a 1,9 million de personnes qui sont passées d'un taux marginal de 17 p. 100 à un taux marginal de 26 p. 100.

J'aimerais que vous commentiez cette analyse de l'OCDE, qui rejoint un peu celle que vous avez faite plus tôt et selon laquelle ce sont les salariés à faible et moyen revenu qui ont contribué le plus aux augmentations d'impôt depuis quatre ou cinq ans.

Ma prochaine question s'adressera à l'ensemble des témoins.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qui veut répondre à cette question?

[Traduction]

Monsieur Wilde peut-être, ou Monsieur Doig, celui de vous deux qui est le plus à l'aise sur ce point.

M. Peter Wilde: Je pense que M. Loubier ne fait que renforcer certaines des choses que j'ai dites. Je suis certain que l'OCDE en sait beaucoup plus que moi sur le sujet. Selon moi, c'est une mauvaise chose, en particulier pour les Canadiens à faible revenu, dont le revenu se situe sous le seuil de la pauvreté, de payer autant de taxes qu'ils en paient.

J'ai lu un article récemment qui disait que 10 p. 100 des Canadiens qui gagnent 60 000 $ par année ou plus paient 23 p. 100 du total du fardeau fiscal. Il y a aussi un nombre assez grand de Canadiens qui vivent sous le seuil de la pauvreté, et ils paient quelque chose comme 1,3 p. 100 du total du fardeau fiscal.

Il s'agit quant à moi d'un domaine auquel il faut s'attaquer. Je suis certain que ceux d'entre nous qui sont assez chanceux pour se situer en quelque sorte dans les revenus moyens, ou même ceux qui réussissent très bien et qui gagnent 60 000 $ ou plus, seraient d'accord pour payer quelques dollars de plus pour que les gens qui vivent sous le seuil de la pauvreté ne paient pas de taxes.

Voici quelque chose qui renforce la question que M. Szabo a posée: il y a des gens à qui nous faisons très mal. Donc, 64 $, ce n'est pas beaucoup d'argent. Et 16 $, ce n'est pas beaucoup d'argent, mais ce l'est si vous n'avez pas d'argent du tout.

[Français]

M. Yvan Loubier: Effectivement.

Mon autre question porte sur de la dette. Vous accordez une importance assez particulière au remboursement rapide de la dette. D'ailleurs, la Chambre de commerce a aussi soulevé cette question.

Sans être contre un remboursement de la dette, ne croyez-vous pas qu'à cause de la crise asiatique et de ses répercussions sur l'ensemble de l'économie mondiale et à cause de la volatilité du dollar canadien, qui en prend un coup au niveau de sa valeur, on devrait agir de façon très prudente face au remboursement de la dette? Par définition, quand vous remboursez la dette, vous inondez le marché monétaire de dollars canadiens et contribuez ainsi à abaisser la valeur du dollar canadien, alors qu'il est déjà sous pression à la suite de la crise asiatique et des mouvements de spéculation.

Ma question s'adresse à M. Schmid, à M. Doig ou à M. Wilde.

• 1650

[Traduction]

M. Michael Schmid: Je n'ai qu'un commentaire à faire sur cela. Nous abordons le sujet dans notre mémoire.

De toute évidence, le dollar canadien a connu certaines baisses et certains problèmes au cours des derniers mois, mais je crois que si nous abaissions notre dette, nous serions considérés comme un emprunteur de plus grande qualité. Et, à ce titre, si nous libérions plus de dollars peut-être que les gens seraient préparés à les utiliser, parce que nous constituerions un meilleur risque que nous l'aurions fait auparavant.

M. Peter Doig: Il est évident que personne ne va suggérer que le gouvernement, lorsqu'il envisage la réduction de la dette et l'établissement d'objectifs de réduction de la dette encore plus concrets, agisse de façon imprudente.

Il ne faut pas perdre de vue la conjoncture mondiale et les répercussions que tout amortissement de la dette ou tout programme de réduction de la dette peuvent avoir sur le dollar, mais je ne crois pas que nous devons utiliser cela comme une excuse pour ne rien faire. Cela signifie seulement qu'il nous faut peut-être être un peu plus prudents que nous l'avons été il y a six mois en allant de l'avant.

[Français]

M. Yvan Loubier: Mais sans rester inactif, M. Doig, on peut regarder la structure de la dette fédérale, dont environ 25 p. 100 est aux mains d'étrangers, dont la moitié sont des Américains. Si vous remboursez une partie des titres canadiens à ces étrangers-là, leur premier réflexe, quand ils recevront leurs dollars canadiens, sera de les échanger pour des dollars américains. En faisant ça, ils vont délester des dollars canadiens sur le marché. Et, par définition, plus il y a de dollars canadiens sur le marché, plus la pression se fait à la baisse sur ce dollar.

De mémoire, 26 p. 100 des détenteurs de titres de dette sont des fonds de pension et des fonds d'assurance. Si vous rachetez ces titres de dette aux fonds d'assurance ou aux fonds de pensions, à quel premier réflexe peut-on s'attendre de ces fonds dans le contexte actuel de turbulence? On prendra encore ces dollars canadiens et on ira vers des valeurs refuge. Et la valeur refuge, depuis deux mois, c'est le dollar américain. Donc, ils prendront des dollars canadiens pour acheter des dollars américains. Encore une fois, des milliards de dollars canadiens seront déversés sur le marché, ce qui se traduira par une pression à la baisse.

Quant à l'autre portion des détenteurs, ce sont des banques à charte qui représentent 21 p. 100 des détenteurs de titres de dette canadiens. Le même phénomène se produit encore une fois au niveau de ces banques. Au cours du dernier mois, la Banque Royale devait se défendre d'avoir pris des dollars canadiens pour acheter des dollars américains, déversant ainsi des dollars canadiens sur le marché.

Comme le mentionnaient M. Martin—et cela figure dans les chiffres du ministère des Finances publiés à ce jour—et même le premier ministre Chrétien cet été—, au cours des 15 derniers mois, 20 milliards de dollars ont été dépensés pour le rachat de titres de dette canadiens sur le marché. Au cours de cette même période, le ministre des Finances demandait à la Banque du Canada d'agir en son nom pour racheter ces titres de dette et de prendre des devises américaines qu'elle avait engrangées chez elle pour racheter les dollars canadiens sur le marché pour en soutenir la valeur, laquelle était fortement ébranlée par les marchés asiatiques.

Donc, il y a une contradiction: la main droite savait ce que la main gauche faisait, mais la main droite et la main gauche ont tout de même fait deux gestes contraires.

C'est pourquoi, dans ce contexte, je me demandais s'il ne vaudrait pas mieux y aller de façon parcimonieuse dans le remboursement de la dette et utiliser les surplus qui se sont accumulés de mois en mois jusqu'à ce jour—et on parle d'un surplus de sept milliards au cours quatre premier mois—pour stimuler davantage l'économie. La baisse des cotisations à l'assurance-chômage pourrait être une bonne façon de permettre aux employeurs d'engager un neuvième travailleur, comme disait M. Wilde tout à l'heure, et peut-être de donner un coup de pouce à la croissance économique qui en mange un coup depuis les quatre derniers mois.

J'aimerais que vous commentiez ce point de vue.

[Traduction]

M. Peter Doig: Certes, encore une fois, votre point est très bien présenté. Il nous faut être très prudent pour ne pas perturber la position fragile dans laquelle se trouve le dollar actuellement. Mais je pense que peu importe ce que nous faisons, nous devons le faire à long terme.

À court terme, oui, c'est probablement prudent d'être payé mensuellement, mais ce que nous suggérons, c'est que vous gardiez un oeil sur le long terme en ayant un objectif à l'esprit. Autrement, vous avancez dans une route et vous ne savez pas où en est la fin. Selon moi, c'est plus inquiétant que la possibilité de se débarrasser de quelques dollars supplémentaires sur le marché américain, ce qui n'aura pas de conséquences énormes, bien que je ne sois pas un économiste, alors je ne vais pas essayer de deviner ce que seraient les résultats. Mais si vous optez uniquement pour des solutions à court terme et que vous ne regardez pas plus loin, alors tout ce que vous faites, c'est de mettre à risque une remontée de la valeur du dollar.

• 1655

Je pense que vos commentaires font ressortir le fait qu'il existe un manque de confiance envers l'économie canadienne, ce qui entraîne une poussée. Bien sûr, plusieurs facteurs externes contribuent à cette situation, mais je ne peux tout simplement pas croire que tout est dû à la crise asiatique ou à l'ours russe, ou à ce qui est au goût du jour pour ce qui est trouver des responsables à la crise financière mondiale. Si les banques à charte vendent des dollars canadiens et achètent des dollars américains, cela signifie qu'elles ne font pas confiance à la valeur du dollar canadien. Si d'autres institutions financières font la même chose, c'est le message qui est envoyé, et je pense que c'est le message que le gouvernement doit recevoir.

[Français]

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Loubier. Je demanderais à Mme Redman de poursuivre.

[Traduction]

Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président. J'aimerais poser deux questions, si c'est possible.

Monsieur Black, j'ai beaucoup apprécié votre présentation et vos exemples concrets. L'une des choses que nous avons entendues l'an dernier et que nous entendons encore maintes et maintes fois, c'est le fait que la dette des étudiants au Canada est trop élevée selon l'évaluation qu'en font certaines personnes, et on l'évalue à environ 25 000 $ pour un diplôme de premier cycle. Vous avez soulevé quelques points intéressants concernant le régime fiscal et l'octroi de bourses. Vous êtes-vous déjà arrêté à réfléchir à ce que serait un niveau approprié de dette pour les étudiants?

M. Paul Black: Donc, vous me demandez de vous dire quelle devrait être selon moi la dette d'un étudiant qui sort de l'université?

Mme Karen Redman: En somme, ma première question est de savoir si vous croyez que 25 000 $ est trop élevé. Et, si la réponse est oui, alors comment déterminons-nous ce qui est approprié.

M. Paul Black: Je pense que les universités ont adopté bon nombre de mesures visant à établir des paliers dans le système selon le diplôme que vous obtenez en relation avec l'espérance de revenu et de ce qui serait une dette acceptable selon le cas. D'une certaine façon, cela m'effraie, en ce sens que des frais de scolarité différents sont liés à des niveaux d'endettement différents. Par exemple, parce que l'Université Western Ontario a augmenté ses frais de scolarité de 100 p. 100 et de 200 p. 100 au cours de la dernière année, les étudiants en dentisterie et en médecine sortiront avec des dettes énormes de l'ordre de 100 000 $ et de 200 000 $, comme nous l'avons dit sur les ondes de CBC à l'émission de Rex Murphy Cross Country Checkup, dimanche. Pour eux, il semble que ce soit une dette raisonnable.

Je pense que nous pouvons avoir une vision d'ensemble et voir les signaux d'alarme que nous montrent les taux d'impayés. Si le taux d'impayés continue d'être élevé dans le cadre d'un système qui évalue bien les besoins éducatifs, et qui donne aux étudiants le montant dont ils auront besoin pour survivre chaque année pour couvrir les coûts encourus, alors ils vont se sortir de leurs études, si nous continuons d'avoir un taux d'impayés qui se situe quelque part au-dessus des 15 à 20 p. 100 ou de la moyenne des taux d'impayés pour des prêts personnels, je dirais que toute dette qui dépasse ce niveau est manifestement trop élevée, et que les gens ne peuvent pas remplir leurs engagements. Ou encore, les gens ne sont tout simplement pas au courant des programmes gouvernementaux qui existent pour eux, comme la réduction des dettes, l'exemption d'intérêts et certains autres programmes mis de l'avant dans le budget fédéral de 1998. Mais si les étudiants utilisent ces programmes et ne sont toujours pas capables de respecter leurs engagements ou ne sont toujours pas en mesure de rembourser leurs prêts, alors...

Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il n'y a pas de chiffre magique que je peux vous donner immédiatement. Une façon d'envisager la question, c'est d'associer le diplôme au revenu prévisible, mais d'une certaine façon, il n'est pas possible de prédire un marché qui... Si le marché est inondé d'avocats et que le revenu prévisible d'un étudiant en droit est de 250 000 $, par exemple, vous ne pouvez pas dire que sa dette doit être de 100 000 $ parce qu'il n'y aura peut-être pas de clients pour lui. Je ne suis donc pas favorable aux dettes qui varient en fonction des programmes.

Mme Karen Redman: Nous vivons présentement la déréglementation en Ontario, et c'est un énorme problème. Il y a deux universités voisines de ma circonscription, et je sais que c'est un sujet extrêmement controversé.

• 1700

Votre exemple des avocats est très pertinent. Mon mari et moi avons cette discussion sans arrêt. Je pense que nous sommes en train de créer la prochaine génération par l'éducation post-secondaire. Ma fille fait des études classiques. Il est un peu plus difficile d'envisager les ratios d'endettement et la bonne chose à faire lorsque vous ne comparez pas avec une faculté conduisant à une profession libérale.

Je ne vous entends pas dire que l'éducation devrait être gratuite. Je trouve cela intéressant. Encore une fois, pour ma part, je ne pense pas que l'éducation doive être gratuite; au contraire, il doit y avoir un certain investissement de la part des participants.

M. Paul Black: Vous prônez une participation en retour. Sur ce point, je suis d'accord avec vous. Je n'ai pas l'intention de fixer une échelle en fonction de laquelle les étudiants devraient payer pour obtenir un diplôme, mais je serais assez d'accord avec le fait que vous deviez faire un certain investissement dans votre éducation avant de recevoir votre diplôme.

Tenez, prenez cet exemple. Dans votre circonscription en particulier, spécialement à l'Université de Waterloo, il existe un grand nombre de programmes coopératifs. Waterloo est ce que l'on appelle le «royaume des programmes d'enseignement coopératifs». À mon avis, c'est vraiment le meilleur moyen de préserver l'intégrité des universités. Vous donnez ainsi aux étudiants la possibilité de trouver un stage dans leur domaine d'études, ce qui leur permet d'acquérir une certaine expérience, et leur donne la possibilité de faire un peu d'argent tout en étudiant. À mon avis, l'une des meilleures choses que le gouvernement pourrait faire serait de participer au financement de ces centres coopératifs dans toutes les universités ou encore d'octroyer une contribution financière par l'entremise des paiements de transfert à cet égard.

Mme Karen Redman: Merci beaucoup.

Ma prochaine question, s'il me reste du temps, s'adresse à M. Wilde. J'ai vraiment beaucoup aimé la fin de votre présentation, même si cela sonnait un peu comme dans Star Trek lorsque vous avez parlé d'explorer des territoires encore vierges.

M. Peter Wilde: Les Canadiens n'ont pas suffisamment confiance en eux-mêmes.

Mme Karen Redman: Je tiens à revenir sur ce point, parce que je le trouve très inspirant et que ça me plaît vraiment. J'aimerais vous dire que ce gouvernement s'est montré très audacieux dans la façon dont il a réorganisé le Régime de pensions du Canada. La raison pour laquelle nous atteindrons tôt ou tard les 9,9 p. 100 est pour garantir aux Canadiens d'aujourd'hui, aux babyboomers et aux post-babyboomers qu'ils auront eux aussi droit à une pension de retraite. C'était mon commentaire.

Maintenant, voici ma question. Je ne devrais pas mêler toute ma famille à cette conversation. Mon mari possède une petite entreprise, et j'ai parlé à d'autres hommes d'affaires. Je dois vous dire que je rejette l'idée selon laquelle les cotisations, qu'il s'agisse de celles du RPC ou de l'AE, sont véritablement le facteur qui décide les petites entreprises à engager ou non de nouveaux employés. Vous pouvez engager du personnel à temps partiel, ou encore vous pouvez payer vos employés actuels un peu moins en raison de vos charges sociales, mais je ne suis pas convaincue qu'il existe un rapport direct entre la réduction des cotisations et la création d'emplois.

La réalité est la suivante, les petites entreprises ne devraient pas engager de nouveau personnel. Je pense que le représentant de la Chambre de commerce a parlé des vrais emplois. S'il s'agit d'un vrai emploi, dans ce cas une raison économique devrait justifier l'embauche de cette personne.

Donc, il me semble que je me débats encore avec cette question. C'est de toute évidence un principe dans lequel vous croyez: il se trouve dans votre mémoire.

M. Peter Wilde: Il arrive fréquemment qu'une personne propriétaire d'une petite entreprise travaille presqu'autant d'heures qu'un député. Il est évident que ces gens préféreraient de beaucoup travailler moins. Ils aimeraient engager une autre personne pour les aider, mais le plus souvent, ils hésitent à prendre cet engagement lorsqu'ils additionnent les coûts inhérents à l'embauche d'une autre personne, parce que c'est très difficile pour eux de les justifier.

Les petites entreprises, particulièrement, sont un secteur dans lequel vous ne savez jamais vraiment ce qui va se produire d'un mois à l'autre. Embaucher une personne est un engagement sérieux. Vous n'engagez pas quelqu'un pour le garder juste un mois et puis le laisser repartir; parce que le personnel doit travailler au moins trois mois pour apprendre à faire le travail.

C'est toujours comme ça. C'est un facteur contributif. Engager une autre personne ou non n'est pas le seul facteur qui joue dans la décision. Simplement, cela ajoute à la difficulté de prendre cet engagement d'embaucher une autre personne.

Mme Karen Redman: Je ne sais pas si les représentants de la Chambre de commerce aimeraient faire des commentaires à ce sujet.

M. Michael Schmid: Je peux faire un commentaire à titre de représentant de la Chambre de commerce et aussi à titre de représentant des petites entreprises. Vous faites allusion, sans doute, au montant de 2 500 $ par employé. Donc, si vous engagez cinq employés, cela représente 12 500 $. C'est beaucoup d'argent. Pour l'embauche de dix employés, nous arrivons à 25 000 $. C'est facilement le salaire d'un autre employé à temps plein.

Donc, dans les très petites entreprises, c'est-à-dire celles à un ou deux employés, le 2 500 $ additionnel ne servira pas à créer un emploi, même s'il le pourrait bien dans dix très petites entreprises. Mais lorsque vous parlez d'une petite entreprise de 30 employés ou moins, à raison de 2 500 $ par employé, vous obtenez une somme d'argent assez rondelette.

• 1705

Mme Karen Redman: Je ne voulais pas insinuer que c'est un montant négligeable, mais si l'entreprise peut justifier le salaire d'un autre employé, il me semble que c'est cela qui devrait être le facteur déterminant, et non pas si vous pouvez assumer les charges sociales.

M. Peter Wilde: Il est parfois moins onéreux, cependant, de payer les employés existants en temps supplémentaire, parce qu'à ce moment là il n'y a pas de cotisations additionnelles, plutôt que d'engager une nouvelle personne et d'avoir à verser des cotisations additionnelles.

M. Michael Schmid: Habituellement, je commence à travailler vers six heures du matin et parfois, je poursuis jusqu'à une heure avancée.

Mme Karen Redman: Donc, vous avez plus ou moins l'horaire des parlementaires. Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame Redman. Maintenant je vais passer à M. Forseth.

M. Paul Forseth: Je vous remercie beaucoup.

Monsieur Breckenridge, vous vous êtes porté à la défense du soutien continu. Je me demandais seulement si vous pourriez nous dire quelle est la situation au Canada par rapport aux États-Unis, à l'Union européenne et à la Grande-Bretagne en ce qui concerne nos coefficients de capitalisation et de soutien. Nous trouvons-nous vers le milieu de peloton? Dites-nous quelle est notre situation?

M. Carl Breckenridge: Non, pas du tout, nous nous trouvons dans les dernières positions pour ce qui est du financement par habitant pour la recherche. Je suis sûr que vous entendrez parler de ce sujet en d'autres occasions, probablement que l'on vous présentera des graphiques, mais malheureusement je n'en ai pas apporté avec moi aujourd'hui. Pour ce qui est du Conseil des recherches médicales, il me semble que le financement tourne autour de dix dollars par habitant pour la recherche en matière de santé au Canada. Cela correspond à environ 70 $ par habitant au NIH, donc à environ sept fois la somme que nous consacrons, et ils sont probablement en train d'envisager de doubler le budget du NIH dans les années à venir.

Ils ont découvert que le moteur du milieu de la biotechnologie et des innovations connexes est la recherche fondamentale, et le gouvernement des États-Unis a, de toute évidence, décidé de subventionner le NIH afin de produire une recherche fondamentale qui pourra déboucher sur des développements en matière de biotechnologie. Donc, ils nous devancent de plusieurs longueurs. Le budget du CRM à l'heure actuelle est d'environ 250 millions de dollars. L'initiative des instituts canadiens de recherches en matière de santé, dont je suis sûr que vous entendrez parler dans les quelques mois à venir, propose que ce budget soit augmenté à 750 millions de dollars. Cette augmentation nous rapprocherait environ à mi-chemin du financement du NIH dans ce secteur.

M. Paul Forseth: Merci.

Un grand nombre des témoignages que nous avons entendus aujourd'hui affirmaient que les cotisations se situaient actuellement à des niveaux acceptables, mais que les prestations devraient être accordées à une plus vaste clientèle ou à un plus grand nombre de travailleurs et que les programmes rattachés devraient être enrichis à l'aide de cours de formation entièrement subventionnés, et ainsi de suite. C'est l'option qui revient le plus souvent, c'est-à-dire donner la possibilité à un plus grand nombre de personnes de se qualifier et leur verser davantage de prestations. Maintenant, vous n'avez pas recommandé cette avenue, aussi j'aimerais vous entendre nous dire ce qui cloche avec cette option en particulier. Quels sont, à votre avis, les dangers et les problèmes de cette approche et pourquoi n'est-elle pas un bon choix?

M. Michael Schmid: Vous avez fait un commentaire un peu plus tôt concernant les vrais emplois. Je pense que M. Loubier a déclaré que ceux qui devaient soutenir tout le poids des cotisations à l'assurance-emploi étaient les Canadiens de la classe ouvrière et les petites entreprises. Si vous remboursez cet argent aux Canadiens de cette catégorie et aux petites entreprises, qui ne sont pas de grands épargnants dans l'économie, ils vont tout simplement le dépenser. Il est à espérer que cet argent sera dépensé en vue de créer davantage d'emplois, que ce soit par l'entremise d'investissements dans l'entreprise, dans la création d'emplois ou par l'embauche de nouveaux employés.

En augmentant les prestations versées, vous n'êtes pas certain de créer vraiment rien de durable. Encore une fois, il s'agit d'une mesure à court terme. Bien sûr, cela contribuera à alléger un peu le fardeau à court terme. Je compatis avec les 58 p. 100 qui ne reçoivent pas de prestations. Mais d'un point de vue économique, cela n'aura aucun effet à long terme. Il s'agira seulement d'une mesure temporaire à court terme, et ensuite l'argent s'envolera en fumée.

M. Paul Forseth: Auriez-vous autre chose à ajouter?

M. Peter Wilde: Pour ma part, je serais plutôt en faveur d'utiliser une partie de cet excédent «déjà dépensé» afin d'améliorer les compétences individuelles. Il faudra accorder davantage d'attention à la formation des gens pour des postes qui sont déjà disponibles plutôt que de leur demander ce qu'ils aimeraient faire.

• 1710

M. Paul Forseth: Comme vous le savez l'assurance-chômage a fait l'objet de plus d'études que tout autre programme du gouvernement. Combien d'étudiants n'ont-ils pas rédigé leur thèse de maîtrise ou de doctorat...? Traditionnellement, au gouvernement, il y a des étagères remplies d'analyses de toutes les permutations possibles. L'une de ces permutations suggérées consistait à en faire un véritable programme d'assurance dans lequel on introduirait une tarification personnalisée, «plus vous faites de réclamations, et moins vous obtenez en retour», des modifications aux cotisations—vous savez, ce genre de choses—afin que ce programme devienne véritablement un programme d'assurance. Il faudrait en retirer tout ce qui a trait à la formation et réaffecter ce volet aux institutions d'enseignement. Il deviendrait un programme d'assurance très spécialisé qui servirait uniquement à verser des prestations et qui serait très facile à administrer. On éliminerait ainsi tous les problèmes, notamment celui de déterminer l'admissibilité d'une personne au programme ou non, si elle se qualifie pour tel ou tel programme de formation—tout ce fatras administratif afin de trier les programmes et les prestataires.

Avez-vous pris connaissance de ces possibilités, et avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

M. Peter Doig: Je pense que la préoccupation la plus évidente, s'il fallait administrer l'assurance-emploi comme un strict programme d'assurance, tiendrait au fait qu'il est très difficile parfois de déterminer comment, par exemple, les emplois saisonniers pourraient être intégrés dans ce programme, comme dans l'industrie de la construction. Je suis sûr que cela peut être fait et probablement que dans votre pile de mémoires de doctorat, quelqu'un a déjà trouvé le moyen de le faire efficacement. Toutefois je ne comprends pas...

M. Paul Forseth: Je pense qu'ils le font déjà dans le Maine, où, effectivement, des groupes d'employés et d'employeurs se sont associés et administrent un programme semblable.

M. Peter Doig: Je pense que la question que cela soulève est la suivante, que voulons-nous réellement faire du programme d'AE? Essayons-nous simplement d'offrir un revenu acceptable à des personnes qui se trouvent entre deux emplois? Ou essayons-nous de fournir un certain type de programme de transition à toutes les personnes qui ont quitté un emploi dans une industrie désuète? Ou essayons-nous simplement d'établir un modèle de répartition de la richesse et de faire en sorte que tous et chacun dans la société disposent d'un moyen de subsistance de base en l'absence d'un emploi rémunéré? Il me semble que c'est là véritablement la question que nous devons nous poser comme pays alors que nous commençons à jongler avec des concepts tels que la tarification personnalisée et ce genre de choses. Je pense que nous devons vraiment nous arrêter et réfléchir afin de déterminer ce que nous voulons réellement accomplir avec l'assurance-emploi, avec l'aide sociale et toutes les autres formes d'aide.

M. Paul Forseth: Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Black.

M. Paul Black: Si les cotisations d'assurance-emploi sont pour rester au même niveau, je ferais la suggestion suivante que le chômage chez les jeunes, qui se situe à 20 p. 100 dans les Maritimes et qui est véritablement... Qu'un montant proportionnel aux cotisations des jeunes et des étudiants d'université, qui sont dans une large mesure inadmissibles au programme, soit versé dans des programmes d'emploi pour les jeunes et, par conséquent, qu'il serve à réduire le risque pour l'assurance. Une bonne compagnie d'assurance consacrera une certaine partie de ses recettes à la réduction du risque pour ses clients de sorte qu'elle aura moins de prestations d'assurance à verser. À mon avis, il s'agit d'une politique très avisée pour le gouvernement qui devrait agir de la sorte, particulièrement en ce qui concerne l'emploi des jeunes.

M. Paul Forseth: Une sorte de programme de prévention.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce que quelqu'un a quelque chose à ajouter? Monsieur Wilde.

M. Peter Wilde: Un seul commentaire. Ce qui me frappe depuis que je vis au Canada, c'est que les entreprises et les employeurs canadiens ne semblent pas consacrer suffisamment de ressources à la formation de leurs employés et à leur propre avenir. Ils ont été très heureux pendant de nombreuses années d'importer des compétences des autres parties du monde. Il se pourrait très bien, si l'on trouvait le moyen de forcer la main des employeurs, ou du moins de les encourager à offrir davantage de formation pour l'avenir dans leurs propres entreprises, qu'une partie des problèmes de chômage chez les jeunes puisse du moins être atténuée.

M. Paul Forseth: Vos groupes auraient ainsi l'occasion d'effectuer une analyse comparative des diverses mesures d'incitation qui pourraient être établies à cet égard, et pourraient expliquer pourquoi nous ne réussissons pas aussi bien ici—s'agit-il du panorama d'ensemble ou de la forme du panorama—avant de faire des choix sur le plan économique. Peut-être que le système n'est pas aussi concurrentiel.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Juste un complément d'information, monsieur Wilde, sur la question de l'indexation. Le rapport du Comité des finances de l'année dernière recommandait d'aller un peu plus loin et demandait au gouvernement de réintroduire l'indexation. Mais il y avait à cela une condition: lorsque la situation budgétaire le permettrait. Donc, cette recommandation a déjà été faite l'année dernière. Peut-être le moment est-il venu, peut-être pas, mais cela fait partie du débat en cours.

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M. Peter Wilde: C'est très bien de rafraîchir la mémoire du gouvernement sur ce qu'il devrait faire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): J'aimerais conclure en vous posant une question. Vous représentez une communauté d'affaires qui me tient beaucoup à coeur, c'est-à-dire les petites et moyennes entreprises, étant donné que je suis moi-même entré dans ce domaine à l'âge tendre de 26 ans avec toute l'âpreté dont j'étais capable.

Est-ce que j'ai bien entendu et est-ce que votre clientèle d'affaires demande que tout excédent éventuel de l'assurance-emploi leur soit remboursé en priorité?

M. Peter Wilde: Non. Tout le monde accepte le fait que cet argent est parti pour de bon. Ce serait une bonne chose par contre de ne pas l'accumuler. L'assurance-emploi ne devrait pas être une forme d'impôt.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais si nous adoptons cette analyse, afin de ne pas continuer à l'accumuler, nous devrions réduire les taux de cotisation à l'assurance-emploi.

M. Peter Wilde: Oui, monsieur.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Et traditionnellement, cette réduction est d'environ 0,60 $. Nous sommes passés de 2,70 $ à 2,10 $. Êtes-vous entrain de nous dire que nous devrions maintenir la souplesse du système en apportant une réduction, comme nous l'avons déjà fait il y a trois ou quatre ans, peut-être de dix dixièmes, graduellement, au cours des années qui viennent, ou encore...

M. Peter Wilde: Oui. Vous n'êtes pas forcé de leur donner tout ce qu'ils veulent, mais donnez-leur quelque chose.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je suis d'accord avec vous, et je suis aussi d'accord avec M. Forseth.

Mais il me semble que la position de la Chambre est incohérente avec vos revendications selon lesquelles cet argent devrait revenir aux personnes qui ont cotisé pour créer l'excédent. Pour répondre à M. Forseth, vous avez dit quelque chose qui à mon avis... Et je vais vous donner la possibilité de rectifier. De toute évidence, les cotisations à cet excédent sont le résultat des taux de cotisation et aussi des cotisations des employeurs, un fort pourcentage de cet excédent découle aussi du fait qu'un moins grand nombre de personnes ont reçu des prestations inférieures en raison des coupures.

Donc, lorsque M. Forseth et d'autres personnes apportent l'argument selon lequel nous devrions élargir la couverture, pourquoi votre groupe est-il contre? Est-ce que je vous ai mal compris? Il m'a semblé que vous étiez contre cette idée.

M. Michael Schmid: Je ne pense pas que nous soyons vraiment contre. Ce que nous avons dit, c'est que nous pensions que l'économie en bénéficierait davantage si cet argent était utilisé pour créer des emplois générés par le marché plutôt que pour servir de soutien temporaire à plus de personnes. C'était notre préoccupation.

M. Peter Doig: Je pense que l'autre point important ici est que nous affirmons que l'intégrité du système d'AE devrait être préservée. À notre avis, cet argent devrait être remboursé au moyen des futures cotisations qui seraient réduites jusqu'au seuil de rentabilité.

Le ministre des Finances n'a pas déclaré que l'argent devrait rester au sein du régime de l'assurance-emploi, il a plutôt dit qu'il voudrait pouvoir puiser dans ces sommes et les utiliser pour d'autres priorités. Nous pensons que cette approche est erronée. L'argent devrait rester dans le régime d'AE. Selon nous, l'excédent devrait se traduire par des réductions des cotisations.

M. Forseth et d'autres personnes suggèrent que l'on devrait répartir l'excédent entre l'augmentation des prestations, l'élargissement des critères d'admissibilité et peut-être, la diminution des taux de cotisation. Ce sont des variations sur le même thème.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Forseth, vous avez le dernier mot.

M. Paul Forseth: Ce n'est pas que je recommande cette approche, mais je vous ai posé la question parce qu'un grand nombre des témoignages que nous avons entendus l'avaient déjà abordée, et aussi je voulais vous donner la possibilité peut-être d'en finir avec cette proposition bidon. Je suis probablement d'accord avec vous sur le fait que l'intégrité du système devrait être maintenue et que l'effort devrait surtout porter sur la réduction des cotisations. C'est mon point de vue.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, chers collègues. Et merci à tous les témoins, et particulièrement d'avoir fait preuve de compréhension au tout début. Nous apprécions cela. Nous apprécions également votre contribution à cette tâche très difficile que nous avons entreprise, et qui consiste vraiment à rapporter ce que nous avons découvert et ce que nous avons entendu d'un littoral à l'autre. Vous pouvez être assurés que vos commentaires et vos opinions se retrouveront dans le rapport que nous transmettrons au ministre, autant que possible en décembre, de sorte qu'il puisse prendre connaissance du plus grand nombre possible de vos commentaires et que ceux-ci puissent se retrouver dans le budget en février. Donc, vous collaborez à un exercice extrêmement utile, et je tiens à vous en remercier une fois de plus.

Chers collègues, nous reprendrons demain matin à neuf heures les audiences sur les institutions financières.

La séance est levée.