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FINA Rapport du Comité

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Opinion dissidente du Bloc Québécois

Rapport du Comité permanent des finances

Le Bloc Québécois tient à se dissocier du rapport de la majorité libérale, car il tend à masquer certaines tragédies et réalités qui découlent directement des politiques mises de l'avant depuis le début de la décennie. Le Bloc Québécois constate de profondes divergences entre les recommandations du rapport et celles présentées par le Bloc Québécois. À notre avis, les recommandations de ce rapport font abstraction des réalités sociales et économiques des Québécois et des Canadiens ainsi que des responsabilités constitutionnelles des provinces.

Des recommandations fiscales intéressantes mais mal ciblées

Le Bloc Québécois constate que les recommandations du rapport majoritaire en matière d'allègement des impôts des particuliers cible les revenus plus élevés et ne corrigent que ponctuellement les injustices induites par l'indexation partielle du régime fiscal actuel.

Il est regrettable qu'il n'y ait aucune recommandation allant dans le sens du rétablissement de l'indexation complète du régime fiscal fédéral. L'indexation partielle1 de la fiscalité des particuliers aura permis au gouvernement fédéral de soutirer des sommes supplémentaires importantes au titre de l'impôt sur le revenu. Entre 1993 et 2001, on estime que le gouvernement fédéral aura perçu environ 17,6 milliards de dollars en impôts supplémentaires grâce à la non-indexation.

Le relèvement des seuils d'imposition de 15 % portera le seuil d'imposition de 29 590 $ à 34 029 $, soit le seuil qui aurait été en vigueur en 2002 si celui-ci avait été indexé depuis 1993. Ce serait une bonne nouvelle. Mais, après 2002, les seuils non indexés viendront à nouveau pénaliser les contribuables. Le problème persistera donc.

Pour le Bloc Québécois, l'élimination progressive de la surtaxe de 5 % et l'abaissement du taux d'inclusion des gains en capital de 75 % à 65 %, sont des recommandations qui ne soulageront que les contribuables les mieux nantis. Le Bloc Québécois estime que l'élimination des surtaxes de 3 % et de 5 % permettrait aux 61 000 contribuables ayant un revenu supérieur à 250 000 $ d'économiser en moyenne plus de 9 300 $ en impôt sur le revenu. Mais pour les contribuables dont le revenu se situe entre 30 000 et 70 000 $, les économies d'impôts ne seraient que de 200 $.

En ce qui concerne la fiscalité des entreprises, le Bloc Québécois constate que le rapport majoritaire reprend certaines des recommandations du Comité technique de la fiscalité des entreprises (rapport Mintz). Le Bloc Québécois rappelle que plusieurs des recommandations de ce comité technique sont controversées, y compris au sein de plusieurs associations patronales.

Le Bloc Québécois ne peut appuyer certaines de ces recommandations et en particulier celle à l'effet de rendre non déductibles dans le calcul de l'impôt fédéral, les impôts provinciaux sur le capital des sociétés, ce qui pénaliserait particulièrement les entreprises québécoises.

La santé et le respect des juridictions provinciales

Le Bloc Québécois constate que le rapport majoritaire laisse de côté toute la question des transferts sociaux aux provinces et des consensus concernant son rétablissement. Les coupures dans ces transferts ont pourtant provoqué d'importantes crises dans les services de soins de santé offerts par les provinces. Des coupures qui se traduisent par un manque à gagner annuel pour le Québec de 875 millions de dollars, uniquement pour la santé.

De plus, les consultations prébudgétaires menées par le Bloc Québécois ont révélé que les Québécois souhaitent majoritairement un réinvestissement important dans ces mêmes transferts. Par ailleurs, un récent sondage de La Presse affirmait que pour 54,4 % de Québécois, les transferts pour la santé, l'éducation supérieure et la sécurité du revenu devraient constituer les priorités du gouvernement fédéral.

Plutôt que l'augmentation des transferts sociaux aux provinces, le rapport majoritaire favorise l'empiètement de compétences provinciales en « exhortant » le gouvernement fédéral à poursuivre les initiatives annoncées dans le budget 1999 et lors du dernier discours du Trône. Le Bloc Québécois ne peut souscrire à de telles recommandations.

Le Bloc Québécois recommande, comme le souhaitent les Québécois et en accord avec le consensus des ministres des Finances des provinces, que le gouvernement fédéral rétablisse les transferts sociaux aux provinces à leurs niveaux de 1994.

L'assurance-emploi

Le Bloc Québécois déplore que le rapport majoritaire ne contienne aucune recommandation visant à offrir un meilleur soutien et à élargir l'accessibilité au Régime d'assurance-emploi pour les travailleurs qui perdent leur emploi. À notre avis, le rapport de la majorité libérale, par son silence, endosse la pratique douteuse qui consiste à faire payer la prime à tout le monde pour ensuite priver 58 % des chômeurs des prestations auxquelles ils devraient avoir droit et ce, afin de récolter des surplus annuels mirobolants.

En attendant les mesures sociales

L'absence de recommandation en matière d'investissement social et l'insensibilité de ce rapport majoritaire face aux problèmes actuels et quotidiens auxquels sont confrontés des centaines de milliers de Québécois et de Canadiens est frappante et tout à fait inacceptable.

Les besoins en logements sociaux sont pourtant énormes. Juste au Québec, près de 518 700 personnes avaient besoin de logements sociaux en 1996, mais seulement 63 000 logements étaient disponibles. La situation continue par ailleurs de se détériorer. Depuis son désengagement de 1994, le gouvernement fédéral n'honore plus que les dépenses de fonctionnement des logements sociaux déjà construits. Il faudrait de façon urgente nous attaquer à la question des sans-abris. L'inertie du gouvernement à cet égard fait en sorte que plusieurs sont laissés à eux mêmes, sans résidence fixe. Et dans la seule région d'Ottawa - Hull, on apprenait récemment qu'en 18 mois, 47 d'entre eux étaient décédés.

Les infrastructures

Concernant la création d'un nouveau programme d'investissements en infrastructure, le Bloc Québécois est en désaccord avec le rapport majoritaire qui souhaite que le gouvernement fédéral assujettisse un éventuel programme et les investissements qu'il englobe aux critères du Pacte de productivité. Un pacte sorti de nulle part et qui n'a jamais fait l'objet de discussions ou de débats à la Chambre des communes.

Le Bloc Québécois considère que la mise en place d'un pacte de productivité représenterait un réel danger pour les politiques sociales, environnementales et même culturelles puisque, par définition, ces politiques ne tiennent pas compte de ce qui n'est pas « rentable » au sens strictement économique.

Le Bloc Québécois aurait souhaité que le rapport majoritaire tienne compte du consensus des premiers ministres des provinces qui ont convenu que les investissements dans les infrastructures devaient être basés sur les principes suivants :

  • Critères stratégiques concrets
  • Soumis à l'approbation des gouvernements provinciaux et territoriaux
  • Approche souple
  • Mécanismes de financement conforme aux cadres budgétaires actuels des provinces
  • Répartition équitable des fonds fédéraux entre les provinces

Le Bloc Québécois aurait souhaité enfin que le Comité des finances propose l'établissement d'une véritable politique de construction navale au Canada; un autre consensus pancanadien que la majorité libérale du Comité a préféré ignorer.

Des priorités québécoises clairement exprimées

Rappelons finalement que le Bloc Québécois, lors de la tenue de son propre exercice de consultations prébudgétaires à travers le Québec, a proposé les mesures suivantes à la population québécoise et a recueilli son assentiment :

Dès l'année 2000-2001

  • Baisse des impôts 6 milliards $
  • Restauration des transferts sociaux 3,7 milliards $
  • Retour à un véritable régime d'assurance-emploi 7 milliards $
  • Soutien à des projets structurants 3 milliards $
  • Réduction de la dette 3 milliards $

Lors de la comparution du Bloc Québécois devant le Comité, le 2 décembre dernier, le président du Comité a par ailleurs reconnu la valeur de ces propositions ainsi que le respect de l'équilibre budgétaire qui en résulterait pour les cinq prochaines années.

La majorité libérale n'y a toutefois répondu que bien partiellement. Il reste maintenant à espérer que le ministre des Finances respectera les choix et les priorités clairement exprimés par les Québécois.


1 Ou la non-indexation lorsque l'inflation est inférieure à 3 %.